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Les linguistiques discursives Les linguistiques discursives regroupent la linguistique textuelle, l’analyse du discours et la sémantique des textes. Elles se basent toutes sur la prise en considération de la dimension transphrastique des énoncés. I. La linguistique textuelle 1. Définition et situation de la linguistique textuelle Il faut savoir que la linguistique européenne s’est longtemps basé sur le postulat saussurien du primat de la langue qui a eu jusqu’aux années 70 comme répercussion l’écartement des textes et des discours, c’est-à-dire les unités supérieures à la phrase. Toutefois, un phénomène américain est apparue au début des années 50 avec Harris qui a soulevé les problèmes du transphrastique et du rapport entre culture et langue (voir à ce propos les travaux de Pike). Ce n’est qu’au début des années 70 que ces travaux vont se propager en France. D’ailleurs ce sont les domaines de la sémiotique et de l’analyse du discours qui vont centrer leurs études sur le domaine de la parole. Néanmoins, les véritables tentatives de réflexion sur le texte sont assez rares, et proviennent souvent de la philosophie. C’est grâce aux nombreux travaux de Jean-Michel Adam que nous avons abouti, en linguistique, à l’élaboration théorique la plus complète sur la notion de texte. Nombreux sont les héritages qui constituent la base de la linguistique textuelle : a. Les hypothèses structuralistes contiennent, selon P. Ricoeur, l’idée que les unités supérieures à la phrase sont organisées comme les phrases. b. La sémiotique littéraire, incarnée en France par A.-M. Houdebine, J. Kristeva, R. Barthes, G. Genette, A.-J. Greimas et l’école de Paris, compose un objet dont les dimensions dépassent le cadre de la phrase. En effet, il s’agit du texte. c. La sémiologie incarnée par exemple par Grize et Borel conduise aussi l’analyse vers la dimension textuelle des productions verbales. d. La linguistique textuelle reprend à son compte les acquis de la rhétorique antique, classique et « nouvelle » (nouvelle rhétorique de Perelman) en les intégrant dans des démarches nouvelles.Les domaines de recherche qui se fondent sur les productions orales comme la sociolinguistique de Labov (qui se base sur le récit oral) et la sociologie de Goffmann (qui travaille sur la conversation). 1
e. Texte et discours sont deux concepts clés, étroitement liés, dans la linguistique textuelle. En effet, Halliday et Hasan identifie le discours comme une unité sémantique et non grammaticale. Quant au rapport existant entre texte et discours, Adam propose une équation mathématique qui résume parfaitement cette relation. Texte = Discours - conditions de production On peut dire que l’objet discours intègre le contexte, c’est-à-dire les conditions extralinguistiques de sa production, alors que le texte les écarte. 2. Les grandes notions de la linguistique textuelle a) La cohésion La cohésion est un concept proposé par Halliday et Hasan en 1976. Ils désignent la « cohésion transphrastique » comme un ensemble de phénomènes langagiers, repérables par des caractéristiques particulières, qui donnent la possibilité aux phrases d’être liées pour former un tout : un texte. (revoir le cours du premier semestre). b) La cohérence La cohérence concerne l’organisation des représentations qui configurent l’univers mis en place par le texte. Elle est de l’ordre extralinguistique avec une dimension cognitive. D’ailleurs, elle s’articule sur la compétence encyclopédique des sujets, qui peuvent alors juger de la conformité des données de l’univers textuel avec les données prélinguistiques qui constituent leurs croyances et leurs savoirs sur le monde. c) La notion de progression thématique Elle est construite sur le couple thème/rhème que nous avions déjà abordé auparavant. Il existe une dynamique du texte que l’on peut décrire en termes de progression. Selon les travaux de Danes (1974) et Adam (1990), il existe trois types de progression : La progression à thème constant, La progression à thème linéaire, La progression à thème divisé ou éclaté :
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II. L’analyse du discours Un courant apparait à la fin des années 60 qui aura pour objet le discours. Ce dernier deviendra un champ disciplinaire autonome. En effet, si les travaux des analystes du discours apparaissent à priori éparpillés, « [ils] partent néanmoins du principe que les énoncés ne se présentent pas comme des phrases ou des suites de phrases mais comme des textes. Or le texte est un mode d’organisation spécifique qu’il faut étudier comme tel en le rapportant aux conditions dans lesquelles il est produit. Considérer la structuration d’un texte en le rapportant à ses conditions de production, c’est l’envisager comme discours »
(Gravitz, 1990 : 354). »
D’ailleurs le Dictionnaire d’analyse du discours de Maingueneau et Charaudeau (2002) confirme désormais l’existence bien ancrée de ce champ disciplinaire. Il faut savoir qu’au début le terme d’analyse du discours était la traduction de discourse analysis, expression forgée par Harris et qui signifiait l’étude de la dimension transphrastique, qui équivaut à la linguistique textuelle. L’analyse du discours désormais (AD) correspond chez les Anglo-saxons à l’analyse conversationnelle, c.à.d. l’étude des échanges verbaux oraux ou écrits, avec le postulat que tout discours est fondamentalement interactif. Chez l’École française, on définit l’AD comme la discipline qui étudie les productions verbales au sein de leurs conditions sociales de production. En d’autres termes, elle s’intéresse aux conditions de production d’un texte et aux marques que celles-ci laissent transparaître dans l’énoncé. Notons que l’AD a contribué à un renouvellement profond des approches linguistiques dans la mesure où la perspective discursive est quasiment absente de la définition saussurienne de la science du langage. En effet, les études étaient centrées sur la langue et non la parole. Il faut savoir également que les objectifs de l’AD ont beaucoup évolués à travers le temps. En effet, à ses débuts, l’AD était longtemps perçue comme l’étude linguistique des conditions de production d’un énoncé. Toutefois, elle n’étudie pas tous les énoncés. Elle va se baser sur des énoncés produits dans le cadre d’institutions où sont concentrés des enjeux historiques, politiques, sociaux etc. En effet, pour les analystes de ce type de discours, le sujet de l’énonciation est inscrit dans des stratégies de dialogue, 3
d’interlocution, dans des positions sociales et des contextes historiques. Cette définition s’appuie sur le concept de formation discursive, développé par le philosophe Michel Foucault. La formation discursive signifie pour l’École française d’analyse du discours ce que l’on peut ou doit dire, dans la mesure où le contenu du message est contraint tant par la forme du discours comme (l’exposé, sermon, pamphlet, etc.) que par la position du sujet, ou encore par le contexte. La première génération d’analyse du discours des années 60-70 va consacrer ses recherches tout d’abord sur l’élaboration de classifications. Ensuite, elle va construire l’objet d’étude en croisant ces classifications et en les situant dans l’espace, le temps et en les associant à des conditions de productions particulières par exemple on peut étudier le discours politique polémique à telle époque à tel endroit, etc. Quant à la seconde génération, elle est influencée par le développement des théories de l’énonciation et de la pragmatique. C’est pourquoi elle insistera beaucoup sur la présence implicite ou polémique d’une autre voix dans le discours, d’un Autre. En somme, ce sont les marques de cette présence, de cette hétérogénéité qui seront étudiées. III. La sémantique des textes Selon les termes de François Rastier : « Le texte est le véritable objet de la linguistique » (1989). Longtemps, il défendra la dimension symbolique du langage. Il faut savoir que les sciences du langage ont été beaucoup influencé par les sciences de la nature du fait que ces derniers procèdent sur le mode de la « simplification causale ». D’ailleurs, le langage était conçu comme « l’empreinte de la pensée ». C’est ainsi que Rastier va proposer une définition du texte qui renferme les prémisses du nouveau cadre théorique : « Un texte est une suite linguistique empirique attestée, produite dans une pratique sociale déterminée, et fixée sur un support quelconque » (ibid. :21).
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