Les 50 Ans du Syndicat de la Rédaction du Soleil 2894481896, 9782894481899 [PDF]


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French Pages 138 Year 2005

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Table of contents :
Pourquoi et comment raconter l'histoire d'un syndicat......Page 7
Chapitre 1: De la fondation à l'affirmation, 1950-1966......Page 23
Chapitre 2: Un syndicat de combat, 1967-1980......Page 69
Chapitre 3: Une apparente accalmie, 1980-2000......Page 113
Bibliographie......Page 131
table des matières......Page 137
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Les 50 Ans du Syndicat de la Rédaction du Soleil
 2894481896, 9782894481899 [PDF]

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les 50 ans du syndicat de la rédaction du soleil

Louise Fradet

les 50 ans du syndicat de la rédaction du soleil 1950-2000 Un combat pour la profession

septentrion

Les éditions du Septentrion remercient le Conseil des Arts du Canada et la Société de développement des entreprises culturelles du Québec (SODEC) pour le soutien accordé à leur programme d’édition, ainsi que le gouvernement du Québec pour son Programme de crédit d’impôt pour l’édition de livres. Nous reconnaissons également l’aide financière du gouvernement du Canada par l’entremise du Programme d’aide au développement de l’industrie de l’édition (PADIÉ) pour nos activités d’édition.

Photos de la couverture : La nouvelle salle de rédaction du Soleil, source : Archives Le Soleil. L’édifice du Soleil de la rue Saint-Vallier, le véritable alma mater des journalistes, d’où ils ont été déracinés en décembre 1994 par l’éditeur de l’époque, Gilbert Lacasse, source : Archives Le Soleil Révision : Solange Deschènes Mise en pages et couverture : Folio infographie

Si vous désirez être tenu au courant des publications des ÉDITIONS DU SEPTENTRION vous pouvez nous écrire au 1300, av. Maguire, Sillery (Québec) G1T 1Z3 ou par télécopieur (418) 527-4978 ou consultez notre catalogue sur Internet : www.septentrion.qc.ca © Les éditions du Septentrion, 2001 1300, av. Maguire Sillery (Québec) G1T 1Z3

Diffusion au Canada : Diffusion Dimedia 539, boul. Lebeau Saint-Laurent (Québec) H4N 1S2

Dépôt légal – 2e trimestre 2001 Bibliothèque nationale du Québec ISBN 2-89448-189-6

Ventes en Europe : Librairie du Québec 30, rue Gay-Lussac 75005 Paris

pourquoi et comment raconter l’histoire d’un syndicat ?

L

es anniversaires sont occasions de célébration, mais aussi de réflexion. À l’occasion de son cinquantième anniversaire, le Syndicat de la rédaction du Soleil pose un geste de commémoration. Raconter son histoire, c’est rappeler les événements, tenter de leur donner un sens, faire un bilan, mesurer le chemin parcouru. Commémorer, c’est vouloir poursuivre l’œuvre entreprise. C’est aussi un hommage aux générations de journalistes qui ont fait le syndicat, souvent dans l’ombre, parfois dans la controverse, mais toujours à la poursuite d’idéaux. De par sa nature même, le syndicalisme est engagé. Un syndicat se veut un organisme de combat, tout au moins de défense des droits de ses membres. L’histoire d’un mouvement syndical peut-elle donc ne pas être engagée ? Cette histoire peut certes se réaliser à coups de statistiques et de tableaux graphiques, mais elle risquerait de passer à côté de l’âpreté des luttes et ne pas refléter les difficultés et craintes vécues ou ressenties par les dirigeants ou les membres du syndicat. À notre ère informatisée et

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virtuelle, les conditions actuelles du journalisme peuvent trop aisément nous faire oublier les difficultés de la longue marche des journalistes du Soleil depuis la fondation du journal. On ne peut raconter sans aucune émotion des luttes pour des meilleures conditions de travail, une meilleure qualité de vie et le perfectionnement du journalisme. Dans notre société néolibérale du tournant du e xxi siècle, le syndicalisme n’a pas bonne presse et est critiqué plus souvent qu’à son tour. Cependant, le syndicalisme est de plus en plus l’objet d’études scientifiques. Le syndicalisme est un phénomène que l’on ne peut négliger : il a affecté et continue d’affecter l’économie, la société, la politique. Reconnaissons-le d’emblée, il y a syndicalisme et syndicalisme. Le syndicalisme a changé avec le temps. Au Soleil comme ailleurs, il a connu des mutations, comme ce fut aussi le cas de la gestion des entreprises. Le syndicalisme doit s’adapter, sinon il prône des discours dépassés et défend des positions qui indiffèrent ses membres car ils ne s’y reconnaissent plus. Il a existé et il existe encore diverses formes de syndicalismes. L’activité syndicale est complexe et multiforme. Le syndicalisme s’adapte aux combats à mener. D’une entreprise à l’autre, d’un métier à l’autre, d’une profession à l’autre, les priorités syndicales sont diverses. Dans le milieu de la presse, comme dans beaucoup d’autres, on est passé, au cours des 50 dernières années, d’un syndicalisme de combat à un syndicalisme davantage corporatif. Ce qui ne veut point dire que l’on n’y mène plus de luttes et que l’on ne vise plus d’idéaux.

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La syndicalisation au Soleil : de l’imprimerie à la salle de rédaction À Québec, en 1880, est fondé le journal L’Électeur. Son objectif est de défendre les principes du parti libéral face aux journaux associés au Parti conservateur, Le Courrier du Canada et L’Événement. Le Parti libéral est alors vu comme un parti radical et doit affronter les réprimandes et les attaques d’une bonne partie des élites et du clergé catholique. Condamné par l’Église en 1896, le journal L’Électeur devient Le Soleil, conservant toutefois même directeur et même personnel. Le journal a été forcé de changer de nom afin de contourner l’interdiction de l’Église et de conserver ses abonnés. L’entreprise occupe alors d’étroits locaux dans une maison de la côte de la Montagne. Dès la fondation du journal, une partie du personnel est déjà syndiquée. En effet, comme alors dans toutes les autres entreprises de presse d’Amérique, les typographes font partie d’une union ouvrière. Ce sont eux qui sont aux origines de la syndicalisation dans les imprimeries. Comme dans plusieurs types d’entreprises, l’acte de s’unir ou de se syndiquer a d’abord été l’affaire des travailleurs ou des ouvriers qualifiés, c’est-à-dire qui exercent des métiers requérant l’apprentissage de techniques ou l’usage d’outils et de machines. Le journalisme est alors vu comme une profession sans qualifications, ne requérant pas d’apprentissage ou de formation particulière. À Québec, jusqu’aux premières décennies du xxe siècle, on ne parle pas de syndicats, mais plutôt d’unions. C’est en France que l’on retrouve la lointaine racine du mot syndicat. À l’origine du mot, il y a syndic.

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Ce dernier était un conseiller ou un avocat qui représentait les intérêts d’un client dans une action en justice. Du concept de défense des intérêts, le mot syndic donnera naissance au mot syndicat. C’est en 1839 que l’on voit apparaître en France le mot syndicat au sens d’union ou d’association ouvrières. On associe généralement la naissance du syndicalisme à la Révolution industrielle que connut l’Europe occidentale, plus particulièrement l’Angleterre, à compter de la fin du xviiie siècle. Les premières unions d’ouvriers expriment leur désarroi face à des entrepreneurs de plus en plus puissants qui mécanisent la production. Le syndicalisme est d’abord une solidarité protectrice. Dans des entreprises de plus en plus grandes, le syndicalisme se distingue et succède ainsi au compagnonnage et à l’apprentissage des boutiques d’artisans. Au xixe siècle, Québec est une ville britannique. Jusqu’en 1871, ville de garnison, elle est, avec sa citadelle, le pivot de la défense de l’empire britannique en Amérique. Son port accueille les marchandises et immigrants britanniques. C’est aussi d’Angleterre que le syndicalisme parviendra à Québec dans la première moitié du xixe siècle. Et le premier syndicat y sera constitué dans une entreprise de presse par les typographes. La Quebec Gazette, propriété de la famille Neilson, est le grand journal de Québec, capitale du Bas-Canada. Selon la tradition, reprise par beaucoup d’historiens, c’est en 1827 que les typographes de Québec forment leur union, la toute première au Canada. À Toronto, les typographes se syndiquèrent en 1832 et ceux de Montréal en firent autant en 1833. Ce que nous savons cependant avec certitude

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pour Québec, c’est que l’activité du syndicat des typographes est bel et bien confirmée à compter de 1836. Ce syndicat de Québec, que l’on appellera à compter de 1855 l’Union canadienne des typographes, comprenait à l’origine des membres francophones et anglophones des imprimeries de Québec, qui était alors la principale ville de l’imprimerie au Canada. L’augmentation des salaires constitue l’une des premières revendications. Ce fut d’ailleurs en ces termes qu’en 1839 les typographes de Québec débutèrent la supplique qu’ils remirent aux propriétaires d’imprimeries : Vous maîtres imprimeurs, vous avez vous aussi, des responsabilités de chefs de famille. Vous n’êtes pas sans ignorer la cherté de la nourriture, du bois de chauffage, du logement, de l’habillement, de toutes les nécessités de la vie. La cherté du coût de la vie à Québec a contraint depuis longtemps nos femmes à grappiller sou par sou, à économiser sur tout.

Pourquoi à Québec et au Canada le syndicalisme fitil son entrée dans les entreprises de presse ? On trouve des éléments de réponse dans ce préambule de la York Typographical Society, fondée à Toronto en 1832 : En raison des multiples innovations apportées aux usages depuis longtemps définis par les professeurs de l’art de l’imprimerie, mais en raison aussi d’innovations hautement préjudiciables à leurs intérêts, les compagnons typographes de York jugent utile de se constituer en un organisme de même nature que les associations formées dans d’autres parties du monde afin de préserver l’honorabilité et la respectabilité qui sont celles de la profession.

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Il y avait dans les imprimeries une longue tradition de liberté. Les typographes possédaient des connaissances, des expertises et trucs de métiers qu’ils se transmettaient durant un long apprentissage. Les propriétaires ne pouvaient remplacer facilement de bons typographes et tenaient à les garder à leur emploi. Le syndicalisme permettait aux typographes de négocier la vente de leurs connaissances et de leur force de travail. La rareté relative des typographes qualifiés, leur qualification et le poids de fortes traditions artisanales leur permettaient de se regrouper sans trop de craintes de représailles. Alors que les employés de la rédaction demeuraient isolés, l’Union des typographes organisait des activités sociales et voyait à l’éducation de ses membres. Elle avait sa salle de lecture. Elle se fit sculpter en 1883 une statue de Gutemberg, l’inventeur de l’imprimerie, afin d’orner son char allégorique lors des défilés de la Saint-Jean-Baptiste. Le combat des typographes devint une affaire nordaméricaine. Les grandes villes des États-Unis comptaient de puissantes entreprises de presse où les syndicats n’en étaient pas moins puissants. Il parut normal que les travailleurs de ces imprimeries, qui avaient les mêmes préoccupations, voulurent partager leurs expériences et s’unir. Au lendemain de la Guerre civile, on assista en 1869 à un regroupement des syndicats de typographes des États-Unis et du Canada. Une grande association fut formée : l’International Typographical Union of North America. Trois ans plus tard, en 1872, les typographes de Québec s’y affilièrent. Le syndicalisme se faisait souvent reconnaître à coups d’affrontements. Le syndicalisme exista longtemps avant

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que l’État et l’Église le reconnaissent. Dans l’avancement et les gains apportés par le syndicalisme aux travailleurs, les typographes jouèrent un rôle important. C’est une longue grève des typographes de Toronto en 1872 qui poussa le gouvernement fédéral de John A. Macdonald à adopter l’Acte des associations ouvrières. Celui-ci stipulait que le fait d’être membre d’une association ouvrière ne pouvait plus être considéré comme un crime. Mais le gouvernement recula en 1889 en adoptant l’Acte visant à prévenir et à supprimer les coalitions formées pour gêner le commerce. Cette loi rendait de nouveau illégales les associations ouvrières. Onze ans plus tard, en 1900, le gouvernement de Wilfrid Laurier légalisa définitivement les syndicats. La confessionnalisation du combat des typographes se fit au début du xxe siècle, En 1891, l’encyclique Rerum novarum du pape Léon XIII avait ébranlé plus d’un catholique de Québec par son avant-gardisme. Le geste du pape constituait une reconnaissance officielle du droit des travailleurs de s’associer pour défendre leurs droits. Ce nouveau souci de l’Église pour les travailleurs allait donner naissance à Québec à des mouvements d’action catholique et à la création du journal L’Action catholique en 1907. Ce journal deviendra le principal concurrent du Soleil. C’est en 1916 qu’un premier syndicat catholique de typographes voit le jour à Québec. Une grève menée par l’union internationale à laquelle appartenaient les typographes de L’Action catholique avait poussé l’Église à donner son aval à la création d’un syndicat catholique. La présence d’un aumônier lui permettait de surveiller les activités du syndicat.

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En 1921, les syndicats catholiques s’unissent pour fonder la Confédération des travailleurs catholiques du Canada (la CTCC) et son siège social est établi à Québec. Pour regrouper les travailleurs par syndicat de métier, et ainsi renforcer leurs pouvoirs de négociations, la CTCC crée des fédérations de métier afin de coordonner leurs activités et objectifs. C’est ainsi qu’est formée, en 1926, la Fédération catholique des métiers de l’imprimerie du Canada. En 1943, elle devient la Fédération des métiers de l’imprimerie du Canada. Au cours des années 1950, la CTCC perd peu à peu son caractère confessionnel. En 1960, elle devient la Confédération des syndicats nationaux (CSN). La même année voit le jour la Fédération canadienne de l’imprimerie et de l’information. Mais les syndicats des ouvriers d’imprimerie et les syndicats de journalistes n’y feront pas bon ménage. En 1970, cette fédération est dissoute. En 1972, est constituée la Fédération nationale des communications (FNC) de la CSN. Lors du congrès de fondation, quelques journalistes et un cadre sont présents en tant que représentants du Soleil. Cette nouvelle fédération, qui poursuit encore ses activités de nos jours, réunit des employés de médias écrits et de médias électroniques. La création de cette fondation révèle que désormais ce sont les journalistes qui constituent la composante principale des entreprises de presse. François Demers souligne : « La création de la FNC en 1972 marque la réussite collective des journalistes en tant que corps de métier dont l’importance n’a cessé de croître tout au long du xxe siècle. Maurice Amram, qui fut président de la FNC, déclarait en 1989 que cette fédération s’occupait davantage que de revendications financières :

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Il suffit pourtant de lire les documents des diverses instances de la FNC depuis 16 ans, de même que les conventions collectives de nos membres journalistes, pour constater que la préoccupation d’une presse libre et démocratique est au cœur de notre vie syndicale depuis notre naissance en 1972.

Le journalisme au Soleil avant la syndicalisation des journalistes De la création du premier journal à Québec, la Quebec Gazette, en 1764, et jusqu’aux premières décennies du xxe siècle, un journal ne pouvait subsister que par les revenus de la publicité et des abonnements. Une entreprise de presse était d’abord une imprimerie où l’on réalisait divers travaux d’impression et ce que l’on appelait les « travaux de ville » (formulaires, cartons d’invitation, etc.). Ce fut aussi le cas au Soleil jusqu’à l’époque de la Première Guerre mondiale. Dans son édifice de la côte de la Montagne, les ateliers d’imprimerie occupaient un espace important. Certes, le journal Le Soleil était un influent organe de combat du Parti libéral, mais Le Soleil était d’abord et avant tout une entreprise commerciale. L’entreprise imprima des livres et son atelier de reliure fut réputé. Le journal, ne l’oublions pas, était un véhicule publicitaire de l’imprimerie. Dans cette entreprise, où l’on brassait des idées, mais où l’aspect commercial primait, le typographe était roi. Il pouvait passer toute sa vie au service de l’entreprise. Le journaliste était de passage. Mais une entreprise de presse n’est pas une industrie comme une autre. Le produit de cette imprimerie est une

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œuvre intellectuelle et idéologique. Cette œuvre se renouvelle chaque jour. Cette œuvre fut aussi longtemps anonyme. Le lecteur ne connaissait pas plus les noms des rédacteurs que ceux des typographes. Le contenu du journal avait plus d’importance que les producteurs de ce contenu. Seul le nom du directeur du Soleil était connu. Il portait la responsabilité de tout le contenu et des idées défendues. Ce fut longtemps un Soleil « sans journalistes ». C’était l’époque des rédacteurs et reporters anonymes. Les auteurs des textes n’étaient pas identifiés. C’était des métiers de l’ombre. Le contenu du journal était réalisé par des gens interchangeables. À la fondation du Soleil, le journalisme est une activité sédentaire. On écrivait autant avec un ciseau qu’avec une plume. Le rédacteur se contentait souvent de paraphraser ou de retranscrire des textes parus dans des journaux d’autres villes ou d’autres pays. Le rédacteur attendait que la nouvelle vienne à lui. Mais, rapidement, dès le tournant du xxe siècle, on assiste au Soleil à des mutations du journalisme. Dorénavant, il est décidé d’aller vers la nouvelle au lieu de l’attendre. C’est l’apparition au Soleil des premiers reporters, à la façon américaine, qui se déplacent pour recueillir des informations. Ceux-ci parcourent la ville à l’affût d’accidents et de crimes. Ces nouvelles « sensationnelles » irritent l’Église catholique et les journaux traditionalistes de Québec. Il est défendu aux élèves du Séminaire de lire Le Soleil. Nous savons qu’en 1906 Le Soleil emploie 10 journalistes, dont quatre reporters. On les appelle alors des rapporteurs ou des nouvellistes. Cependant, ces derniers, comme d’ailleurs les rédacteurs et les éditeurs,

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revendiquent tous le titre de journaliste. Lors du recensement fédéral de 1891, 182 personnes au Québec se disent journalistes. À celui de 1911, on comptera 343 journalistes au Québec. Les femmes sont exclues du journalisme partisan car elles ne peuvent voter. La plupart des gens de la presse proviennent alors du milieu du droit. Il n’y a pas d’école de journalisme. Le métier s’apprend sur le tas. Pour de nombreux rédacteurs de journaux politiques partisans, le journalisme n’est qu’une autre façon de faire de la politique. Ils ont souvent des ambitions de se lancer eux-mêmes en politique, ou bien attendent de se voir un jour ouvrir une porte pour entrer dans la fonction publique ou, comme on dit alors, le service civil. Le journalisme apparaît donc comme une étape transitoire ou un tremplin vers une situation meilleure. Les premières femmes journalistes au Soleil sont, comme dans les autres journaux, confinées aux pages féminines. Les gens de la salle de rédaction du Soleil ne sont pas alors toujours bien vus ou considérés. Le journalisme est souvent vu comme un refuge pour des intellectuels ou des avocats, un peu bohèmes, qui n’ont pu trouver d’autres lieux pour exercer leurs talents. L’un des plus populaires chroniqueurs de l’époque, Arthur Buies, qui résida longtemps à Québec et collabora au Soleil, affirmait que le journalisme « n’est guère autre chose chez nous que le pisaller des avortons de l’intelligence et des fruits secs de toute nature ». Le journalisme était une occupation où l’on entrait et sortait, mais aussi où l’on allait d’un journal à l’autre, à la recherche de meilleures conditions. Les rédacteurs et rapporteurs gagnent difficilement leur vie. Ils

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gagnent souvent moins que les typographes. On ne peut remplacer un bon typographe, on peut toujours trouver des personnes prêtes à vouloir se débattre avec leurs plumes. Au cours de la première moitié du xxe siècle, la valorisation graduelle du journalisme en France et aux ÉtatsUnis, où plusieurs journalistes deviennent des hommes de lettres réputés ou des intellectuels considérés, a ses répercussions à Québec. Au Soleil, les journalistes prennent peu à peu conscience de leur rôle social. Ils prennent conscience de leur propre existence. Ils veulent faire carrière dans le journalisme. Les journalistes s’associent Bien avant de se syndiquer eux-mêmes, les journalistes furent des propagandistes du syndicalisme. À partir des années 1880 voit le jour au Québec une importante presse ouvrière. À Québec paraît Le Travail qui met en valeur le rôle des unions ouvrières. À sa fondation, Le Soleil ouvre ses colonnes aux nouvelles ouvrières et syndicales. Au début du xxe siècle, les conflits ouvriers dans l’industrie de la chaussure à Québec sont l’objet de reportages. Les conditions difficiles du travail des ouvriers sont décrites. Il n’y a pas de doute que la majorité des journalistes sont bien conscients des nécessités de la syndicalisation. Pourtant, ils ont d’abord l’impression que le syndicalisme n’est pas fait pour eux. Le journalisme n’était point vu comme une carrière à long terme et paraissait demander moins de protection.

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Les journalistes cherchent néanmoins à se regrouper. En 1897, une première association de journalistes est fondée à Québec : la Presse associée de Québec. Ce n’est pas un syndicat, ni une corporation, mais plutôt un club social. Des conférences sont organisées. On accueille à Québec des groupes de journalistes du Canada et des États-Unis. On fraternise. Mais, toutefois, dans les réunions régulières, on y discute des difficultés du journalisme et des améliorations ou des solutions à apporter. En 1903, un groupe de journalistes montréalais fonde l’Association des journalistes canadiens-français. Elle se propose de « relever le niveau moral et matériel du journalisme canadien-français », mais disparaît en 1906. En 1920, est créée l’Union des journalistes de Montréal. L’équivalent n’existe pas à Québec. Le courage de la syndicalisation Dans la première moitié du xxe siècle, les journalistes du Soleil étaient soumis à de nombreuses contraintes, et en cela n’étaient guère différents des autres journaux. Ils étaient soumis aux positions politiques et aux impératifs économiques de l’entreprise. La précarité et l’isolement de leur profession les rendaient vulnérables. Les patrons de presse, forcés d’accepter les unions de typographes, étaient opposés à la syndicalisation des journalistes. La syndicalisation est vue comme un phénomène réservé aux travailleurs manuels. La position de la direction de La Presse est révélatrice à ce sujet quand, en 1928, elle soutient que « les journalistes sont des intellectuels et que leur travail ne peut se mesurer de la même façon que le travail manuel ;

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que l’établissement d’une échelle de salaire amènerait la déchéance du journalisme ». À Montréal, des journalistes anglophones parlent en 1900 d’une association de type syndical. Il faut attendre toutefois en 1919 pour assister à la naissance du premier syndicat de journalistes à Montréal, et qui est aussi le premier au Québec. Il s’agit de la Newswriters’ Union of Montreal. Du côté du Canada français, un premier syndicat est fondé en 1922 au journal Le Droit d’Ottawa, propriété des Oblats de Marie-Immaculée. Il disparaît en 1929. À Montréal, en 1929, une tentative de syndicalisation des journalistes du plus grand quotidien canadienfrançais, La Presse, échoue. La répression patronale y fait reculer les journalistes et retarde de plusieurs années la syndicalisation des journalistes francophones du Québec. C’est finalement l’Église catholique qui donnera le coup de pouce nécessaire à la syndicalisation des journalistes. En effet, en 1936, lors d’une session des Semaines sociales du Canada, l’Église prêche en faveur de l’association des gens pratiquant une profession. Le Québec vit alors à l’heure de la Grande Crise et les conditions de travail des intellectuels sont alors souvent pitoyables. En cette même année 1936, au journal L’Action catholique de Québec, publié sous la direction de l’archevêché, est mis sur pied le Syndicat des journalistes de L’Action catholique. Ce dernier journal, bénéficiant de fonds et d’appuis importants, était vu par les dirigeants et journalistes du Soleil comme un concurrent déloyal. En chaire, les curés faisaient la promotion de L’Action catholique. Il faudra attendre quatorze ans, jusqu’en 1950, avant que les journalistes travaillant pour les journaux « laïcs » de Québec,

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propriétés d’intérêts privés, Le Soleil et L’Événement, se syndiquent à leur tour. Le nom de leur association, le Syndicat des journalistes de Québec, s’inspire de celui du Syndicat des journalistes de Montréal fondé quelques années auparavant, en 1944. Jean-Marie Lebel

Chapitre 1

de la fondation à l’affirmation 1950-1966

L

es années 1950-1964 marquent les débuts du Syndicat des journalistes de Québec (SJQ). Ces années couvrent deux périodes : le régime Duplessis et la Révolution tranquille. Durant les efforts entrepris pour mettre en place un syndicat des journalistes dans la capitale, le gouvernement de l’Union nationale de Maurice Duplessis est au pouvoir au Québec. Ses relations avec les syndicats se caractérisent par une attitude antisyndicale. Cette opposition se manifeste, entre autres, par une législation défavorable au mouvement syndical qui est représenté par la Confédération des travailleurs catholiques du Canada (CTCC) et les unions internationales proches des grandes centrales américaines. Différentes lois votées lors de cette période vont dans ce sens, dont la Loi du cadenas pour contrer le communisme en 1937 et le projet de loi 5 en 1949 qui interdit l’atelier fermé1. Outre le cadre législatif, l’antisyndicalisme 1. L’opposition suscitée par la loi 5 force le gouvernement à retirer son projet.

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du gouvernement Duplessis se répercute également dans certains conflits. Le plus connu est celui de la grève de l’amiante de 1949 où le gouvernement utilise la force policière pour mater les grévistes. Bien que l’arrivée au pouvoir des libéraux de Jean Lesage en 1960 assainisse les relations entre le monde syndical et le gouvernement provincial, des conflits éclatent dans différents secteurs. Le monde de la presse n’échappe pas à ce constat2. En 1949, Oscar Gilbert achète Le Soleil.3. Les relations entre le gouvernement de l’Union nationale et la presse connaissent également des soubresauts4. Le Soleil perd plusieurs contrats gouvernementaux5. Bien que des grèves éclatent dans plusieurs quotidiens durant les années 1950 et 1960, Le Soleil ne connaît pas de conflits graves. Jacques Rouillard, Histoire du syndicalisme au Québec, des origines à nos jours, Montréal, Boréal, 1989, p. 260. 2. Sur l’histoire de la presse au Québec, voir Pierre Godin, La lutte pour l’information, Histoire de la presse écrite au Québec, Le Jour, Montréal, 1981. Sur le syndicalisme chez les journalistes, voir Esther Déom, 40 ans de syndicalisme chez les journalistes québécois, Montréal, Agence D’Arc inc., 1989. 3. Sur l’histoire du journal Le Soleil, voir Louis-Guy Lemieux, Le Roman du Soleil, Un journal dans son siècle, Septentrion, 1997. 4. Les relations entre Maurice Duplessis et le journal Le Devoir durant les années 1950 sont particulèment épiques. Plusieurs journalistes de ce quotidien contestaient le régime duplessiste. 5. Le Soleil, d’obédience libérale, a eu par le passé des contrats d’impression avec le gouvernement du Québec. L’arrivée de Maurice Duplessis au pouvoir en 1936 met fin à cette pratique. Le premier ministre donne ses contrats au Devoir et à L’Action catholique. Alfred Hardy, Patronage et patroneux, Montréal, Les Éditions de l’homme, 1979, p. 19-20.

De la fondation à l’affirmation

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L’absence d’arrêts de travail ne signifie toutefois pas que les relations entre l’entreprise et ses journalistes sont au beau fixe. Plusieurs démarches, qui se sont révélées infructueuses, ont eu lieu avant la fondation officielle du Syndicat des journalistes de Québec en 1950. Bien que certaines sources d’information laissent entendre que le SJQ a vu le jour à la suite des pressions du Syndicat des journalistes de Montréal (SJM), la mise sur pied d’une organisation syndicale à Québec résulte des efforts entrepris par des journalistes travaillant dans la capitale6. Sans leur initiative, la syndicalisation se serait probablement échelonnée sur une plus longue période en raison de la résistance du Soleil ltée. Après l’étape de la syndicalisation, le SJQ vit une période difficile durant les années 1950. Par la suite, durant les années 1960, il élargit ses horizons. Nous verrons de quelle façon a évolué le syndicat durant cette période. Comme le SJQ ne possède aucune documentation portant sur ces années, les informations recueillies pour reconstituer cette partie de l’histoire du syndicat proviennent principalement des archives du ministère du Travail du Québec, de documents personnels et d’articles de journaux. Le recours à des entrevues jette également un éclairage important sur l’évolution du syndicat. 6. Les pressions exercées par le SJM pour la syndicalisation des journalistes de la province s’expliquent par l’exode de certains journalistes vers la métropole afin d’offrir leurs services à bon marché aux journaux de Montréal. André Dulude, « Politiques comparées des syndicats de journalistes de quelques quotidiens du Québec et du Canada anglais », mémoire de maîtrise, École de relations industrielles, Université de Montréal, 1978, p. 152.

26 les 50 ans du syndicat de la rédaction du soleil

Des débuts difficiles Les bases du premier syndicat de la presse écrite à Québec relèvent de l’intervention de journalistes de L’Action catholique qui, à l’époque, avait un tirage supérieur à celui du Soleil. En 1936, le syndicat signe une première convention collective avec l’entreprise. Ce contrat de travail stipule qu’après trois années de service le salaire maximal s’élèvera à 25 $ par semaine. Par la suite, les activités de ce syndicat s’effectuent de manière sporadique jusqu’au début de la Deuxième Guerre. Les réunions se tiennent au Club des journalistes, place George-V, le samedi midi. Devant l’impossibilité d’améliorer leurs conditions de travail, l’intérêt des journalistes pour le syndicalisme commence à diminuer. En juillet 1944, les journalistes de L’Action catholique s’affilient au Syndicat catholique des imprimeurs et relieurs appartenant à la Fédération des métiers de l’imprimerie du Canada7. Cette fédération fait partie de la CTCC8. Ce n’est que deux ans plus tard, soit le 28 février 1946, que le syndicat signe une autre convention collective. André Roy préside alors la section des journalistes du Syndicat catholique des imprimeurs et relieurs. Quant aux salaires, la convention prévoit un minimun de 20 $ et un maximum de 40 $ par semaine. La clause de la sécurité syndicale spécifie que : 7. Le Journaliste canadien-français, organe mensuel de l’Union canadienne des journalistes de langue française (UCJF), vol. 1, no 6, octobre 1955, p. 13. 8. En 1946, la CTCC comprend 62 960 membres, c’est-à-dire 24,2 % de l’ensemble de l’effectif syndical au Québec. Jacques Rouillard, Histoire de la CSN 1921-1981, Montréal, Boréal Express, 1981, p. 112.

De la fondation à l’affirmation

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Les salariés actuellement au service de l’employeur, mais qui ne font pas partie du syndicat, peuvent ou non y adhérer. Les salariés actuellement sous contrat qui sont membres du syndicat devront le demeurer comme condition d’emploi. Cependant, si pour des raisons personnelles, un ou plusieurs membres quittent le syndicat et si l’employeur ne croit pas devoir se dispenser de leurs services à cause de leur compétence ou de leurs qualifications, leur cas sera soumis au comité de compétence dont la décision sera finale9.

Pendant ce temps, au Soleil et à L’Événement-Journal, des journalistes essaient de se syndiquer. Les bas salaires favorisent le système des enveloppes où des organismes offrent de l’argent à certains journalistes en échange de leur collaboration. La reconnaissance sur le plan professionnel s’avère presque inexistante. La plupart des journalistes ne signent pas leurs articles. De plus, les femmes travaillant comme journalistes gagnent un salaire moins élevé que celui de leurs collègues masculins. Elles travaillent principalement aux pages féminines10. Les femmes qui se marient doivent quitter le journal11.

9. ANQ-Q, Fonds ministère du Travail (E24), conventions collectives, convention signée le 28 février 1946 entre L’Action sociale catholique et le Syndicat catholique des imprimeurs et relieurs inc. (section des journalistes), dossier S 445. 1945-46. 10. Cercle des femmes journalistes, Vingt-cinq à la une, Biographies, Le Cercle des femmes journalistes. Montréal, La Presse, 1976, p. 26. 11. Entrevue avec Monique Duval, 27 avril 2000.

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Selon l’ancienne journaliste Françoise Côté, qui a travaillé plusieurs années à L’Événement-Journal, il y a eu trois ou quatre tentatives pour fonder le syndicat12. La moitié des journalistes doivent signer leur carte pour obtenir le certificat d’accréditation. En effet, la nouvelle loi des relations ouvrières votée sous le gouvernement libéral de Godbout en 1944 stipule que la reconnaissance officielle des syndicats implique l’adhésion de 50 % de l’effectif de l’entreprise13. Voici comment Françoise Côté raconte cette campagne de recrutement en 1949 : Le défi était de savoir comment contourner les anciens obstacles qui avaient tout bloqué. Nous étions un petit groupe de quatre ou cinq, peut-être six. On avait opté pour deux stratégies : la surprise et la discipline. La surprise, il ne fallait pas que les patrons sachent d’avance, il fallait si possible se rendre jusqu’à la certification avant qu’ils ne réalisent ce qui se passait. On expliquait ça aux gens. Il n’y a qu’une façon d’y arriver, c’est d’être discipliné. Sur le terrain du Soleil, dans la bâtisse, aux alentours, dans le stationnement, personne ne parle de syndicalisme. Ça n’existe pas. On était une petite équipe. On va vous donner rendez-vous quelque part et, si vous voulez signer la carte, vous la signerez. Alors les hommes, Gérard Morin et d’autres, se donnaient 12. Entrevue avec Françoise Côté, 3 mai 2000. Mme Côté a couvert plusieurs secteurs, dont l’Université Laval, la Défense nationale. 13. Au départ, cette loi prévoyait l’adhésion de 60 % de l’effectif, Jacques Rouillard, Histoire du syndicalisme, p. 251.

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Françoise Côté a été secrétaire fondatrice du Syndicat des journalistes du Soleil et de L’Événement-Journal. Elle est née le 26 mars 1921. En 1941, la guerre la force à abandonner ses études universitaires. La même année, elle débute dans le journalisme à L’Événement. Elle a été la première femme journaliste francophone affectée au reportage général plutôt qu’aux pages féminines. Congédiée de L’Événement en 1951 à cause de son rôle dans la fondation du Syndicat de la rédaction du Soleil, elle poursuivra sa carrière au Droit, puis à La Patrie, où elle deviendra la première correspondante parlementaire d’expression française à Ottawa. Elle poursuivra sa carrière au Petit Journal et à la Presse canadienne. En 1963, elle abandonnera provisoirement le journalisme pour devenir attachée de presse à la Commission royale d’enquête sur le bilinguisme et le biculturalisme. Puis elle travaillera successivement à La Presse et à Radio-Canada avant de devenir pigiste pour une kyrielle de publications. Une pionnière dans tous les sens du terme. Source : Champlain Marcil

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rendez-vous à la taverne. C’est une taverne qui avait une drôle de réputation parce qu’il y avait des procommunistes qui y allaient souvent. Ceux qui n’allaient pas à la taverne, je leur donnais rendezvous sur la terrasse Dufferin.

Toutefois, les tentatives de ces journalistes sont mises à rude épreuve. D’abord la réaction du Soleil ne se fait pas attendre. Françoise Côté raconte qu’il y a eu une convocation des deux salles de rédaction pour entendre le rédacteur en chef de L’Événement. Celui-ci leur sert le discours habituel sur le fait que l’entreprise constitue une grande famille et que les journalistes possédant une carte de membre du syndicat pouvaient la déchirer. Lors de cette convocation, aucune réaction ne se fait sentir dans la salle. Par la suite, tout le monde est retourné au travail. Outre l’opposition de l’entreprise, les problèmes de syndicalisation relèvent également du contexte de l’époque. La « Loi du cadenas » constitue un obstacle considérable à la réussite des journalistes. Adoptée par le gouvernement Duplessis en 1937, cette loi permet au gouvernement de forcer la fermeture de lieux soupçonnés de propagande communiste et, par le fait même, de freiner toute tentative de syndicalisation. Dans un article, le rédacteur en chef de L’Action catholique, le Dr LouisPhilippe Roy, rapporte la présence de communistes au Soleil et menace de les dénoncer dans une chronique à venir. À la suite de cet événement, Françoise Côté rencontre un policier de la Gendarmerie royale du Canada (GRC). Puisqu’il n’avait aucun pouvoir, elle communique avec l’inspecteur en chef de la police municipale. Celui-ci signifie au Dr Roy que la police possède une liste de per-

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Le 28 juin 1950, les journalistes obtiennent leur certificat de reconnaissance syndicale de la Commission des relations ouvrières du Québec. Selon Françoise Côté, des journalistes comme Henri Dutil au Soleil, Maurice Bernier à L’Événement et Joseph Voisard à la chronique religieuse (à droite sur la photo) ont donné une crédibilité à la marche vers la syndicalisation en étant parmi les premiers à signer leur carte de membre du syndicat. Au centre de la photo, Fernando Lemieux donnera une tournure dramatique à la grève de 1977 en se suicidant. Déjà malade, mais malgré tout présent tous les jours sur la ligne de piquetage, il ne pourra supporter le stress des 10 mois de grève. Il se pendra chez lui avec le cordon de sa robe de chambre. Source : Archives Le Soleil, 1969

sonnes soupçonnées d’être communistes. Or, aucune d’entre elles ne travaille au Soleil 14. Quelque temps après, soit le 28 juin 1950, les journalistes obtiennent leur certificat de reconnaissance syndicale de la Commission des relations ouvrières de la province de Québec. Selon Françoise Côté, des journalistes comme Henri Dutil au Soleil, 14. Entrevue avec Françoise Côté.

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La salle de rédaction de L’Événement-Journal en 1950, année de la fondation du syndicat. Les journalistes du Soleil partagent les mêmes vastes locaux de la rue Saint-Vallier. Selon Françoise Côté, il y a eu trois ou quatre tentatives pour fonder le SJQ. Elle raconte : « Nous étions un petit groupe de quatre ou cinq, peut-être six. Nous avons opté pour deux stratégies : la surprise et la discipline. Il fallait se rendre jusqu’à la certification sans que les patrons ne réalisent ce qui se passait. C’était le silence. Personne ne parlait de syndicalisme dans la salle de rédaction. Il nous fallait la signature de 50 % des journalistes. Les hommes se donnaient rendez-vous à la taverne. Moi, je rencontrais mes gens sur la terrasse Dufferin. » Source : Archives Françoise Côté, 1950

Maurice Bernier à L’Événement, Jos Voisard à la chronique religieuse et Jos Hardy aux faits divers ont donné une crédibilité à la démarche. Le SJQ regroupe alors 90 % des journalistes des trois journaux15. En février 1951, le SJQ représente 75 jour15. François Demers (dir.), Communication et syndicalisme, des imprimeurs aux journalistes, Montréal, Méridien, 1989, p. 36.

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nalistes, dont 53 au Soleil-L’Événement et 22 à L’Action catholique16. Bien que le syndicat demande son affiliation à la Fédération des métiers de l’imprimerie le 8 juillet, celle-ci ne sera acceptée que le 21 décembre 195017. Le nouveau syndicat constitue donc une organisation autonome affiliée à la Fédération des métiers de l’imprimerie (FMIC). Cette fédération, regroupant principalement le personnel de l’industrie de l’imprimerie, a élargi ses bases et incorporé les syndicats de journalistes dès le milieu des années 194018. Les membres du premier bureau de direction du SJQ sont André Roy, président ; 1er vice-président, Antoine Desroches ; 2e vice-présidente, Françoise Côté ; secrétaire, Gérard Morin ; trésorier, Bernard Houde19. Dès les débuts de son existence, les relations entre le nouveau syndicat et la direction du Soleil s’établissent sur des bases conflictuelles, notamment lorsqu’il s’agit de la négociation du premier contrat de travail. Le SJQ soumet un projet de convention collective qui oblige des réunions entre les deux parties les 27 juillet et les 12, 24 et 25 août 1950. Bien que la direction et le syndicat finissent par

16. ANQ-Q, Fonds ministère du Travail (E24), conciliation et arbitrage, dossier G-150, 1950-51. 17. François Demers, p. 36. 18. Jacques Rouillard, Histoire de la CSN, p. 127. 19. Le Journaliste canadien-français, organe mensuel de l’Union canadienne des journalistes de langue française (UCJF), vol. 1, no 6, octobre 1955, p. 13. André Roy est aussi secrétaire général de la CTCC de 1946 à 1948 et vice-président de la CTCC de 1949 à 1955.

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Françoise Côté a payé cher son militantisme de la première heure. Elle mériterait une statue. Elle sera congédiée au lendemain de la signature de la convention collective, en 1951. Elle résume les faits : « Le gérant de la rédaction, Irénée Masson, me convoque et me dit : « Vous avez négocié de belles augmentations de salaire. Pour les payer, il faut couper dans le personnel. Vous n’êtes pas mariée. Vous n’avez pas d’enfant, pas de responsabilité de famille. Vous êtes remerciée... » Le jeune syndicat tente de la sauver en déposant un grief. L’audition traîne pendant plus d’une année. L’arbitre syndical est nul autre que Gérard Picard, le président de la CTCC. Il décide finalement de ne pas intervenir dans le cas de Françoise Côté. Elle a payé triplement. Elle avait le défaut d’être à la fois femme, célibataire et syndicaliste. Source : Archives Françoise Côté

s’entendre sur différentes clauses, telles que la reconnaissance du syndicat, les heures de travail des correcteurs d’épreuves, la caisse de retraite et les congés de maladie, les frais de repas et de taxis, le comité de griefs et l’arbitrage, d’autres articles constituent de sérieux points de litige.

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Dans une lettre adressée à la Commission des relations ouvrières, l’agent négociateur du syndicat rapporte : qu’il a été absolument impossible d’en venir à une entente sur les clauses suivantes : 1) retenue syndicale rejetée totalement par l’employeur (il s’agit de la retenue syndicale volontaire et révocable) ; 2) fixation de l’échelle de salaires, refus absolu d’accepter le principe de salaire égal pour le personnel féminin accomplissant un travail comparable à celui du personnel masculin et aussi quelques cas particuliers afférents à l’échelle de salaires ; 3) vacances ; 4) publication les jours de congé civique ; 5) durée de la convention20.

Finalement, la première convention collective du SJQ avec Le Soleil est signée le 23 octobre 1950, et couvre une période de deux mois, soit du 23 octobre au 31 décembre 195021. Bien que la représentation syndicale négocie à la fois pour L’Action catholique et Le Soleil, il existe des conventions collectives indépendantes pour chacune. Le renouvellement des contrats de travail des deux entreprises expire le 31 décembre 1950. Bien que celui du Soleil soit de courte durée, il permet d’obtenir les mêmes conditions que celles qui sont accordées à L’Action catholique. Toutefois, les points de litige soulevés précédemment 20. ANQ-Q, Fonds ministère du Travail (E24), conciliation et arbitrage, dossier G-150, 1950-51. 21. ANQ-Q, Fonds ministère du Travail (E24), conventions collectives, convention collective signée le 23 octobre pour la période du 23 octobre 1950 au 31 décembre 1950 entre le Syndicat des journalistes de Québec et Le Soleil limitée, dossier GA 230, 1946-51.

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Françoise Côté photographiée à l’hôtel de ville de Québec durant la guerre 1939-1945. Elle est accompagnée de Charlotte Savary, auteure de plusieurs radio-romans à Radio-Canada. Françoise Côté a reçu le prix Judith-Jasmin en 1985 pour son article sur le premier Canadien de l’espace, Marc Garneau, publié dans le magazine L’Actualité. Source : Roger Bédard, Photographie commerciale

représenteront de sérieux problèmes dans les mois qui suivront. La convention collective, signée en 1950, ne contient aucune clause discriminatoire envers les femmes. On présume que la parité de salaires pour les journalistes masculins et féminins est obtenue à ce moment-là. Mais Le Soleil remettra en question le principe « À travail égal, salaire égal ». Durant cette période, les nouveaux journalistes ne sont pas membres d’office du syndicat. L’atelier fermé et la formule Rand ne sont pas appliqués. Comme l’indique la convention de 1950, « rien dans la présente convention ne

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veut dire qu’elle établit un atelier fermé. Il est entendu et compris qu’il sera loisible à l’employeur de maintenir en fonction tout employé qui ne veut pas faire partie du syndicat. D’autre part, dans les cas d’engagement, de promotion ou de réduction de personnel, à expérience, compétence et années de service égales, l’employeur donnera la préférence aux membres du syndicat ». Par ailleurs, une clause de cette convention permet le recours à l’arbitrage. Le syndicat l’utilisera abondamment par la suite. L’article 13 stipule : « Toute difficulté qui n’aura pu être réglée entre le comité des griefs et l’employeur devra être soumise promptement à l’arbitrage, en suivant les procédures prévues à la Loi des différends ouvriers de Québec (ch. 167, S.R.Q. 1941). La décision du tribunal d’arbitrage, majoritaire ou unanime, sera finale et liera les parties qui acceptent d’avance ses décisions conformément à l’article 26 de la Loi des différends ouvriers ». L’application de la convention collective représente le principal point de mésentente entre le SJQ et la direction du Soleil à la fin de l’année 1950. Durant les mois de novembre et de décembre, le syndicat demande l’intervention d’un conciliateur afin de régler des problèmes touchant les salaires. Pour le SJQ, l’entreprise a dérogé à la convention collective. Des griefs seront déposés au ministère du Travail. Dans un premier temps, les griefs sont traités par un conciliateur. Par la suite, lorsqu’il y mésentente, les deux parties vont en arbitrage. L’application de la convention collective ne constitue pas le seul point d’achoppement entre les deux parties. Lorsque les négociations échouent, les deux parties peuvent avoir recours à la conciliation, puis à l’arbitrage lorsque cette étape est un échec.

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Henri Dutil détient le record de longévité au Soleil comme chroniqueur Parlementaire : 30 ans ! La direction lui fera payer cher son empressement à signer sa carte de membre du syndicat. Il sera retiré de la couverture du Parlement et affecté aux « chiens écrasés ». Une intervention personnelle du premier ministre Maurice Duplessis lui permettra de réintégrer son ancien poste. Source : Archives Françoise Côté

Malgré les griefs déposés au ministère du Travail, le SJQ présente au mois de décembre 1950 un projet de convention collective pour remplacer celle qui arrive à échéance. Puisqu’il est impossible d’en venir à une entente, le SJQ présente une requête de conciliation. Les deux étapes, celle de la conciliation et de l’arbitrage, relèvent du gouvernement provincial. « Le syndicat soumet enfin que les employeurs refusent de considérer toute modification aux conventions qui existaient antérieurement, sauf en ce

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qui touche les salaires et les vacances, ce qui oblige à reconsidérer les projets de contrat dans leur intégralité22 ». De plus, l’écart entre les salaires et les vacances est trop grand entre les deux parties pour en venir à une entente. Après quelques séances avec le conciliateur, un accord intervient sur tous les points, à l’exception des échelles de salaires. Après le règlement de ce problème, une nouvelle convention est signée le 13 avril pour une période s’étendant du 1er janvier au 31 décembre 1951. Durant cette négociation, le syndicat dépose des griefs contre Le Soleil. L’un d’eux concerne le non-respect par l’employeur de la clause XI sur les congés fériés. En effet, les journalistes ayant travaillé le 2 janvier 1951 n’ont pas retiré le supplément de salaire de un sixième d’une semaine. Le gérant général du Soleil, A.-F. Mercier, rétorque que le contrat de travail est expiré. Or, selon la Loi des relations ouvrières du Québec, durant les négociations d’une nouvelle convention, les conditions de travail continuent de s’appliquer. À la demande du conciliateur, le SJQ retire son grief pour faciliter les négociations en vue de la signature du nouveau contrat de travail et, dès lors, la compagnie accepte la nouvelle échelle de salaires23. Mais la signature de la deuxième convention collective entraîne des problèmes pour les personnes qui se sont investies dans la cause syndicale. 22. ANQ-Q, Fonds ministère du Travail, conciliation et arbitrage, lettre du SJQ adressée à la Commission des relations ouvrières, 2 février 1951, dossier G-150, 1950-51. 23. ANQ-Q, Fonds ministère du Travail (E24), conciliation et arbitrage, lettre du SJQ adressée à la Commission des relations ouvrières, 22 février 1951, dossier G-150, 1950-51.

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Françoise Côté raconte qu’il y a eu de la répression de la part de la direction lors de cette période. Henri Dutil, alors chroniqueur parlementaire, est affecté à la section des faits divers. Une intervention personnelle du premier ministre Duplessis permettra la réintégration de son ancien poste. Gérard Morin, qui a fait partie du comité de négociation, doit durant quelques semaines terminer son travail à minuit et demi, alors que le dernier autobus est à minuit24. Et Françoise Côté quittera Le Soleil en 1951 à la suite de son congédiement. Elle nous confie : « Au lendemain de la signature de la deuxième convention collective, M. Irénée Masson me convoque et me dit : Vous avez négocié de belles augmentations de salaires. Pour les payer, il faut couper dans le personnel. Vous n’êtes pas mariée, vous n’avez pas d’enfants, de responsabilités de famille, vous êtes remerciée. Ça été un choc ». On tente, dans un premier temps, de régler ces griefs par voie de conciliation. Cette étape échoue et encore une fois les parties se retrouvent en arbitrage. Après la signature de la convention collective du 13 avril 1951, le syndicat écrit au ministre du Travail, Antonio Barrette, concernant des problèmes de relations de travail qui n’ont pu être réglés entre le comité des griefs et l’employeur. Ces griefs, touchant principalement L’Événement-Journal, concernent le supplément de salaire sur les congés, une réclamation de semaines de vacances payées à des journalistes, dont Gérard Morin, secrétaire du SJQ, le remboursement de frais de transport pour les correcteurs d’épreuves et le congédiement de Françoise Côté. 24. Entrevue avec Françoise Côté le 3 mai 2000.

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L’assemblée générale du SJQ, tenue le 19 mai 1951, décide de soumettre ces griefs à l’arbitrage. Au début de l’année 1952, les griefs en arbitrage ne seront toujours pas réglés. Gérard Picard, président de la CTCC, est au départ l’arbitre syndical dans ce litige. Le syndicat ne gagne que l’un des griefs et le tribunal décide de ne pas intervenir dans le cas de Françoise Côté25. Entre-temps, la convention collective de 1951 est remise en question. La durée des procédures concernant son renouvellement est exceptionnelle26. En novembre 1951, les deux parties dénoncent ce contrat de travail. Le conciliateur résume ces relations de cette façon : Les griefs survenus l’an dernier et présentement en arbitrage, ainsi que la tournure prise par cet arbitrage, ont gâché les relations entre les parties. Il appert que le gérant a été blâmé par le bureau de la direction pour avoir négocié seul, sans l’aide d’un procureur, la convention qui a servi de base au syndicat pour soulever les griefs. Cette année, Me Galipeault a donc été chargé de négocier la prochaine convention. Or, l’offre faite par Me Galipeault représente, sur plusieurs points, un recul sur les avantages accordés aux employés l’an dernier. Elle veut refaire tout le 25. ANQ-Q, Fonds ministère du Travail (E24), conciliation et arbitrage, dossier G-98, 1951-52. 26. ANQ-Q, Fonds ministère du Travail (E24), conventions collectives, convention collective signée le 13 avril 1951 pour la période du 1er janvier 1951 au 31 décembre 1951 entre le Syndicat des journalistes de Québec et Le Soleil limitée, dossier GA 230, 1946-51.

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texte de la convention, abolir l’échelle de salaires pour la remplacer par le paiement au mérite, au gré de l’employeur, ramener la deuxième semaine de vacances après 10 ans, au lieu d’après cinq ans, enfin limiter le droit de grief du syndicat27.

Après l’échec des étapes de la négociation et de la conciliation, les parties patronale et syndicale vont en arbitrage afin de régler le cas du renouvellement du contrat de travail. Trois arbitres s’occupent de cette cause : Lucien Lortie, président du tribunal, le colonel Henri Gagnon, directeur général au journal Le Soleil ltée, Roger Thibodeau, avocat pour la partie syndicale. Le contentieux porte sur la convention collective elle-même qui expire le 31 décembre 1951 : « C’est donc la convention collective dans son entier qui a été dénoncée et c’est une convention collective complètement nouvelle que chacune des parties demande28. » Durant cette séance d’arbitrage, les parties syndicale et patronale présentent leur propre projet. Celui présenté par l’employeur contient une échelle des salaires basée, entre autres, sur une discrimination salariale envers les femmes. Par exemple, dans ce projet, les hommes pourront recevoir 35 $ par semaine à leur première année, alors que les femmes retireront 25 $. De plus, l’échelle des salaires dans son entier représente un sérieux point de discorde. Outre les considérations salariales, le litige porte sur la sécurité syndicale, l’ancienneté, la préférence syndicale et la retenue syndicale. 27. ANQ-Q, Fonds ministère du Travail (E24), conciliation et arbitrage, dossier G-98, 1951-52. 28. Ibid., Rapport du tribunal d’arbitrage.

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Le rapport du tribunal d’arbitrage ne sera présenté qu’au début de l’année 195329. Bien que, dans cette sentence, le tribunal recommande une majoration sur le plan salarial, d’autres points demeurent défavorables au syndicat. L’arbitre syndical manifeste sa dissidence notamment concernant la sécurité syndicale, la préférence syndicale, l’ancienneté, la retenue syndicale. Quant à l’arbitre patronal, il exprime sa dissidence sur les salaires. Après le dépôt de la sentence arbitrale, les négociations reprennent entre les deux parties et une nouvelle convention est signée en juin 195330. Cependant, à la suite de l’assemblée générale du 17 octobre 1953, le syndicat remet en question ce contrat de travail et présente un nouveau projet. La raison de cette dénonciation porte sur les salaires. A.-F. Mercier, gérant général du Soleil, répond qu’il n’est aucunement question de renégocier une nouvelle convention. « […] nous sommes disposés à accepter le renouvellement automatique de la convention existante, tel que vous l’avez fait avec L’Action catholique ». Devant le refus de la partie patronale, le SJQ entreprend des démarches au ministère du Travail en vue d’une conciliation. La durée de la procédure va au-delà d’une démarche habituelle. Le conciliateur, Roger Leclerc, en attribue la faute au syndicat. Dans son rapport, il stipule : « Il est à noter que si cette conciliation a duré plus que son temps normal, la faute en revient exclusivement au syndicat qui ne voulut

29. ANQ-Q, Fonds ministère du Travail (E24), conciliation et arbitrage, 24 janvier 1953, G-98, 1951-52. 30. Esther Déom, Quarante ans de syndicalisme [...], p. 46.

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Une vue de la salle de rédaction du Soleil en 1958. Le Syndicat des journalistes de Québec n’a que huit ans. Les journalistes gagnent en moyenne 50 $ par semaine. Deux ans plus tard, la Confédération des travailleurs catholiques du Canada (CTCC) devient la Confédération des syndicats nationaux (CSN). La même année 1960, la Fédération canadienne de l’imprimerie et de l’information voit le jour. Mais les syndicats des ouvriers d’imprimerie et les syndicats de journalistes ne feront jamais bon ménage. Source : Archives Le Soleil

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pas prendre position avant la fin de l’an 1954 ». Le syndicat accepte la décision du conciliateur en faveur du Soleil, c’est-à-dire le renouvellement de la convention collective majoré de 5 $ par semaine31. Les imbroglios du SJQ avec la direction du Soleil durant cette période n’empêchent toutefois pas le syndicat de s’engager hors des cadres qui régissent les relations de travail. Au congrès de la Fédération des métiers de l’imprimerie (FMIC) en juin 1953, à l’instar des autres syndicats de journalistes, le SJQ demande la mise en place de structures « pour consolider l’organisation de l’ensemble des journalistes de la province32 ». Ces pressions donnent naissance à l’Union canadienne des journalistes de langue française (UCJF) en 1954. En retour, l’UCJLF défend le syndicat en 1954 lorsque Le Soleil ltée refuse de négocier avec les représentants syndicaux33. Cette situation reflète les tensions entre le SJQ et l’entreprise. Après de multiples recours à des mesures interpellant l’intervention gouvernementale, le SJQ semble vivre par la suite quelques années d’accalmie. Aucun grief n’est porté en arbitrage de 1958 à 1962. Le Soleil ne vit aucun arrêt de travail comme c’est le cas pour les journalistes du Devoir en 1955, du Nouvelliste en 1957 et de La Presse en 1958. Michel Alloucherie, qui était déjà journaliste au Soleil, dira de cette période : « Le syndicat, à cette époque31. ANQ-Q, Fonds ministère du Travail (E24), conciliation et arbitrage, dossier G-220, 1953-54. 32. François Demers, Communication et syndicalisme, des imprimeurs aux journalistes, Montréal, Méridien, 1989, p. 85. 33. Ibid., p. 86.

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là, était pratiquement un club social34 ». Avec les débuts de la Révolution tranquille, le SJQ vivra une période d’affirmation. Vers un plus grand professionnalisme Au début des années 1960, dans la foulée de la Révolution tranquille, le travail des journalistes se transforme. « Les années 1958-1965 sont des années de vaches grasses pour les journalistes québécois. Il n’est pas exagéré de parler d’un âge d’or. À la disette de nouvelles des années duplessistes correspond, pendant quelque temps, une surabondance — certains diront un excès — d’information. Le journalisme devient agressif, fureteur, iconoclaste35. » D’autre part, le milieu syndical connaît des changements et la Confédération des travailleurs catholiques du Canada (CTCC) se déconfessionnalise officiellement en 1960 en adoptant le nom de la Confédération des syndicats nationaux (CSN). Par ailleurs, la Fédération des métiers de l’imprimerie du Canada (FMIC) devient la Fédération canadienne de l’imprimerie et de l’information (FCII), donnant ainsi une plus grande représentation aux journalistes. Durant ces années, les activités du SJQ se diversifient. L’arrivée de jeunes journalistes insuffle un vent nouveau. La question salariale ne constitue plus uniquement la seule préoccupation du syndicat. Outre les revendications traditionnelles touchant, entre autres, les salaires, celles portant 34. Entrevue avec Michel Alloucherie, 18 avril 2000. 35. Pierre Godin, La lutte pour l’information, p. 107.

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Clément Trudel a occupé le mandat le plus long à la présidence du Syndicat des journalistes de Québec (SJQ), soit de 1962 à 1966. Michel Alloucherie dira de cette période : « À cette époque-là, on est passé d’un stade plus artisanal à un stade professionnel. Les conventions collectives ont épaissi. Énormément de progrès ont été faits. » Source : Archives Le Devoir

sur l’aspect professionnel du travail de journaliste retiennent de plus en plus l’attention. Raymond Gagné, Benoît Massicotte et Jacques Revelin président respectivement les destinées du SJQ. L’une des composantes du SJQ, L’Action catholique, change de nom en 1962 pour devenir L’ActionQuébec. Durant ces années, Clément Trudel, journaliste au Soleil, occupe le mandat le plus long à la présidence du SJQ, soit de 1962 à 1966. Michel Alloucherie dira de cette période : « À cette époque-là, on est passé d’un stade plus artisanal à un stade professionnel. Les conventions collectives ont épaissi. Il y a énormément de progrès qui ont

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été faits ». La structure du SJQ, c’est-à-dire l’exécutif et les assemblées générales, intègre les journalistes des trois journaux. Et de manière implicite, lorsque le président du syndicat provient du Soleil, il doit y avoir un vice-président de L’Action36. Comme la partie patronale pouvait avoir vent des stratégies syndicales, la prudence est alors de mise. « Notre point de vue qui servait à bâtir une stratégie aurait pu être éventé. Il y avait des oreilles patronales, des informateurs à l’intérieur de l’exécutif syndical », mentionne Clément Trudel. Concernant les réunions de l’exécutif, Michel Alloucherie, alors vice-président du syndicat au début des années 1960, raconte : « On faisait des réunions presque bidon avec l’espion. De vraies réunions avaient lieu par la suite. » Bien que l’épisode du « Samedi de la matraque » retienne particulièrement l’attention, le SJQ agit également sur d’autres fronts. Le syndicat fait des gains significatifs. « Il y avait un côté paternaliste qu’on ne pouvait plus accepter. Ça allait dans l’esprit de la Révolution tranquille », mentionne Clément Trudel. Des activités à l’extérieur du cadre des relations de travail occupent le syndicat avec la mise sur pied d’une organisation affiliée à la FCII. Il s’agit de l’Alliance canadienne des syndicats de journalistes (ACSJ) qui est fondée à la fin de l’année 196337. La fondation de l’ACSJ fait suite à l’insatisfaction des journalistes concernant l’Union canadienne des journalistes de langue française38. Ce mécon36. Entrevue avec Clément Trudel, 2 mai 2000. 37. Archives de Clément Trudel, « Structures de l’ACSJ ». 38. François Demers, p. 55.

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tentement résulte de l’adoption par l’UCJLF du principe de l’adhésion sur une base individuelle et non plus sur une base syndicale. Le but du nouvel organisme est d’assurer la liaison et l’entraide entre les syndicats de journalistes. Par ailleurs, le syndicat est également actif concernant la mise sur pied de cours universitaires en journalisme. Au congrès de l’UCJLF, l’Université Laval annonce qu’elle ouvrira une faculté de journalisme à l’automne. Le congrès s’objecte. Par la suite, à l’initiative du Syndicat des journalistes, un sondage est effectué concernant l’intérêt d’avoir des cours39. En 1964, à l’Extension de l’enseignement universitaire, des cours de journalisme sont offerts40. On mentionne dans le dépliant pour l’année 1965-1966 : « Pour répondre à une demande pressante du Syndicat des journalistes de Québec, l’Extension de l’enseignement universitaire organise, pour la première fois cette année, une série de cours à l’intention de toute personne intéressée à l’étude du journalisme ». Outre ses activités externes, le syndicat doit faire face à de nombreux problèmes d’ordre interne concernant certains de ses membres. Durant l’année 1963, le SJQ dénonce les conditions de travail des correcteurs d’épreuves. Le syndicat fait la démonstration que les 12 ou 15 correcteurs sont exposés à des vapeurs de plomb dans leur milieu de travail. Il s’ensuit alors une série de correspondances entre le syndicat et le ministère de la Santé sur cette question. L’inspecteur du ministère force alors la direction à faire des réparations. 39. Entrevue avec Clément Trudel. 40. Archives de Clément Trudel, cours sur le journalisme, dépliant de 1965 à 1966.

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Les relations de travail font l’objet de plusieurs griefs durant cette période, dont la syndicalisation des journalistes du Saguenay–Lac-Saint-Jean. Jusqu’au début des années 1950, Le Soleil est distribué dans son édition originale dans la région du Saguenay–Lac-Saint-Jean41. Par la suite, des nouvelles d’intérêt local s’ajoutent à l’édition courante. Or, les journalistes travaillant dans cette région ne sont pas syndiqués. Clément Trudel et le vice-président Jacques Jobin, de L’Action catholique, vont à Chicoutimi pour syndiquer ces journalistes. Sur les 16 candidats potentiels, 14 avaient déjà signé leur carte d’adhésion. Le SJQ étend donc son autorité sur ce secteur. La convention collective signée le 21 juin 1965 pour la période de 1964 à 1967 mentionne : « Le Soleil Ltée reconnaît le Syndicat des journalistes de Québec Inc. comme représentant de tous ses salariés, journalistes de la région Chicoutimi-LacSaint-Jean, à l’exception de ceux exclus par la loi ». Toutefois, après la syndicalisation, le SJQ doit régler le problème de l’écart salarial entre les deux groupes. Les journalistes de cette région gagnent moins que leurs collègues de Québec. Le contrat de travail de 1964 à 1967 stipule que : Les salaires précités sont ceux offerts par l’employeur au syndicat et que le syndicat ne peut accepter parce qu’ils représentent un décalage de 10 $ entre ceux-ci et ceux contenus dans la convention collective de travail, du même jour, entre les mêmes parties, 41. Archives de M. Clément Trudel, Rapport du comité d’arbitrage et sentence, Le Soleil limitée vs Le Syndicat des journalistes de Québec inc. (section Chicoutimi–Lac-Saint-Jean), p. 1-2.

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concernant les journalistes de Québec, le syndicat soutenant que les journalistes de la région Chicoutimi-Lac-Saint-Jean ont droit à la parité de salaires avec ceux de Québec.

Cette même convention collective précise que les parties iront en arbitrage sur ce litige. À la suite du rapport du comité d’arbitrage où le juge s’est prononcé en faveur de l’employeur, l’arbitre syndical produit un rapport exprimant sa dissidence42. Le syndicat finit par faire reconnaître le principe de la parité puisque, dans le contrat de travail suivant, celui signé le 26 avril 1968 pour la période du 14 décembre 1967 au 14 décembre 1970, la parité de conditions de travail est reconnue : « Le principe de l’échelle des salaires des journalistes de la rédaction de Québec s’applique aux journalistes de la section du Saguenay-LacSaint-Jean… » Deux autres griefs importants vont jusqu’en arbitrage durant ces années. Il s’agit de l’affaire Paule-France Dufaux et du cas Clément Trudel. Le président du syndicat, Clément Trudel, écrit un article pour le mensuel Maclean’s. Cet article, intitulé « Un député étouffe un hebdo », dénonce les machinations politiques d’un député qui avait réussi à bâillonner l’hebdomadaire Le Nordet 43. Il s’agissait 42. Archives de Clément Trudel, Rapport du comité d’arbitrage et sentence, Le Soleil limitée vs Le Syndicat des journalistes de Québec inc. (section Chicoutimi–Lac-Saint-Jean). Différend survenu entre Le Soleil limitée et le Syndicat des journalistes de Québec inc. 43. « Un député étouffe un hebdo », Maclean’s, octobre 1963, p. 25-27.

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là d’une atteinte à la liberté de la presse44. M. Trudel recueille les renseignements en juillet 1963, alors qu’il est en congé sans solde. En octobre, la direction l’avise qu’il est suspendu durant une semaine sans solde pour avoir collaboré, et ce sans autorisation, avec le magazine Maclean’s. Bien que la convention collective ne contienne à ce moment-là aucune disposition concernant le service d’exclusivité, l’article de M. Trudel contrevient à un règlement de régie interne voulant que les journalistes n’écrivent que pour le journal45. Le syndicat dépose un grief qui se retrouve au conseil d’arbitrage tel que stipulé dans la convention collective. Le syndicat perd sa cause et la suspension est maintenue. M. Trudel raconte à ce propos : « Je n’ai pas gagné, mais c’est une défaite pour un bien et cela a galvanisé un peu les autres. » La convention collective de 1964-1967 comprendra une clause concernant les activités extérieures par la suite. L’article 22 spécifie que les journalistes ne peuvent collaborer à un quotidien ou hebdomadaire et « accepter ou conserver une collaboration régulière à un périodique au Canada ». L’autre grief en arbitrage concerne la journaliste PauleFrance Dufaux. Cette dernière s’occupe depuis quelques années de la critique artistique et théâtrale dans l’édition du samedi des quotidiens Le Soleil et L’Événement-Journal. À la suite d’un article sur les Grands Ballets canadiens,

44. J.-Claude Paquet, « Le Soleil et la liberté de la presse », Cité libre, XVe année, no 63, janvier 1964, p. 26. 45. ANQ-Q, Fonds ministère du Travail (E24), conciliation et arbitrage, dossier G-426, 1963-64, p. 4.

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Au début des années 1960, Paule-France Dufaux (à droite) écrit un article sur les Grands Ballets canadiens en spectacle au Palais Montcalm. Elle s’en prend au mauvais état de la scène de la salle municipale. La direction du Palais Montcalm et le maire Gilles Lamontagne se sentent insultés. Ils font des pressions sur Le Soleil. Paule-France Dufaux est congédiée. Le syndicat dépose un grief. Un arbitre lui donnera raison une année plus tard. Elle retrouvera son poste avec plein salaire rétroactif. Source : Archives Le Soleil, 1969

elle est congédiée par la direction46. Dans cet article, PauleFrance Dufaux s’en prend à la direction du Palais Montcalm. Elle décrit les chutes des danseurs et en attribue la cause au matériau de la scène. On lui reproche de « vouloir détruire les institutions locales ». Sa critique suscite de nombreux remous au conseil de ville. Dans la correspondance échangée entre Mme Dufaux et le syndicat, elle explique : 46. Paule-France Dufaux, « Les Grands Ballets canadiens », Ambiance de répétitions... Dommage ! » Le Soleil, 28 octobre 1963, p. 20.

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Dans mon papier de critique, je n’ai fait que rapporter ce qui était et ce que des centaines de spectateurs ont vu. De plus, ma critique, remise par mes soins au pupitre, n’a donc pas paru sans vérification. D’autre part, dans l’article écrit à la suite de l’intervention de l’échevin Gilles Lamontagne et paru sous le titre « Afin que nul ne se méprenne », je n’ai visé qu’un seul but : informer tant les administrateurs du théâtre ainsi que le public en général de l’importance pour notre théâtre municipal de posséder une scène capable de recevoir petites et grandes tournées et ainsi d’éviter à l’avenir les incidents regrettables qui ponctuent chaque fois les spectacles présentés en ce lieu47.

L’Union canadienne des journalistes de langue française (UCJLF) et l’Alliance canadienne des journalistes de langue française (ACJF) protestent auprès de la direction48. Le syndicat dépose un grief. Toutefois, le fond du grief repose sur une omission que la journaliste aurait faite dans la présentation d’un article. C’est par la suite qu’elle est congédiée. Le rapport de l’arbitrage mentionne : « Le tribunal, à sa majorité, l’arbitre patronal étant dissident, déclare le grief de mademoiselle Paule-France Dufaux en partie bien fondé, casse et annule son congédiement à toutes fins que de droit49 ». 47. Archives de Clément Trudel. 48. J.-Claude Paquet, « Le Soleil et la liberté de la presse », Cité libre, XVe année, no 63, janvier 1964, p. 26-27. 49. ANQ-Q, Fonds ministère du Travail (E24), conciliation et arbitrage, dossier G-426, 1963-64, p. 15.

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L’article controversé qui a valu à Paule-France Dufaux d’être congédiée. Source : Archives Le Soleil

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Bien que certains conflits se règlent en arbitrage, celui qui attire le plus l’attention est l’épisode du « Samedi de la matraque » puisqu’il se transporte sur la place publique et prend une dimension nationale. On assiste au Québec, au début des années 1960, à un foisonnement d’idées qui se traduit, entre autres, par la montée du nationalisme. Fondé en 1960, le Rassemblement pour l’indépendance nationale (RIN) se transforme en parti politique en 196350. La visite de la reine, prévue pour le samedi 10 octobre 1964, suscite de nombreuses protestations au sein du mouvement nationaliste. Malgré un dispositif de sécurité extraordinaire, la violence éclate dans les rues de Québec et des policiers s’en prennent à une manifestation indépendantiste. À la une du Soleil le lundi 12 octobre, une sous-manchette, qui fait référence aux événements, titre Le Samedi de la matraque. Cette métaphore, inventée par un jeune pupitreur, Martial Dassylva, marquera la mémoire collective51. Sur la même page, un article fait état des mesures de sécurité prises par les membres de la Gendarmerie royale du Canada : « La RCMP ne badinait pas, Des ordres bien précis ». Ce texte est traduit de l’anglais. Il démontre de quelle façon la police s’était préparée pour cet événement. « La sécurité du couple royal, ainsi que celle du gouverneur général et du premier ministre, sont de la plus haute 50. Paul-André Linteau, René Durocher, Jean-Claude Robert et François Ricard, Histoire du Québec contemporain, tome 2, Le Québec depuis 1930. Montréal, Boréal compact, 1989, p. 709-710. 51. Louis-Guy Lemieux, Le roman du Soleil, un journal dans son siècle, Québec, Septentrion, p. 207.

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Le Samedi de la matraque est une métaphore inventée par un jeune pupitreur, Martial Dassylva. Elle marquera la mémoire collective. Source : Archives Le Soleil

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importance. C’est pourquoi une action prompte et décisive est exigée dans le cas d’une attaque ou d’un effort pour ralentir la marche du cortège ou pour ennuyer les gens formant le cortège royal. » Michel Alloucherie explique que le frère d’un journaliste, policier de son état, avait subtilisé cette lettre circulaire de la poche d’un agent de la GRC. Il s’agissait des instructions données aux policiers en vue de la visite de la reine. Or, la couverture des journalistes du Soleil de ces événements entraîne des remous jusque dans la salle de rédaction. La direction du quotidien réagit vivement à ces événements. Le 22 octobre, le gérant de la rédaction réunit les cadres et les sous-cadres et émet des directives bien précises quant à l’idéologie à suivre dans le traitement de l’information. Comment ces directives se sont-elles retrouvées dans les journaux ? Michel Alloucherie, sous-cadre à ce moment-là, raconte que, lorsque le gérant de la rédaction adresse ces directives, elles ne sont pas écrites. Il rapporte les paroles de son chef de pupitre, Georges-Henri Duberger, qui demande de mettre ces directives par écrit : « M. de La Durantaye, ce que vous nous avez dit nous a beaucoup impressionnés. Pour qu’on puisse mieux l’apprécier, auriez-vous l’amabilité de mettre tout cela par écrit. » Clément Trudel ajoute comment par la suite ces directives sont publiées dans les journaux, dont le journal Le Devoir : « Jean-V. Dufresne, qui est au Devoir à l’époque, on l’appelle et on lui dit, on est mal pris. On a des directives bâillon. Il dit : envoie-nous ça. Il reçoit les directives et il les montre tout de suite à Claude Ryan pour qu’il commente. Quand la direction du Devoir s’est informée de l’authenticité du document, Gabriel Gilbert, au nom du

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Soleil, répond : oui, c’est notre document et on n’en a pas honte. C’est là que ça c’est retrouvé en rez-de-chaussée de la Une. » Les instructions ne laissent aucun choix, à savoir accepter ces directives ou démissionner. Voici le texte intégral de la directive de Jean-Charles de La Durantaye, gérant de la rédaction : Au chef de pupitre et ses adjoints et aux responsables des pages Mademoiselle, messieurs, Je vous demande d’accorder votre meilleure attention à ce que je vais vous dire. Les remarques que je vais vous faire sont extrêmement sérieuses et il est impératif, je le dis dès maintenant, que chacun de nous les accepte ou donne immédiatement sa démission. Ceux qui sont réunis ici assument la responsabilité de tout ce qui est publié dans les pages de nouvelles du Soleil et de L’Événement. En d’autres termes, à titre de chefs de pages, d’adjoints au pupitre ou de chef de pupitre, vous êtes tenus responsables des textes, des titres et des mises en page, les chefs de pages ayant la responsabilité de soumettre les cas difficiles aux adjoints et les adjoints au chef de pupitre, comme le chef de pupitre a la responsabilité de soumettre les cas douteux au gérant de la rédaction. C’est à ces titres divers que nous sommes ici et c’est parce que vous avez cette responsabilité que je vous dis : nous n’avons pas à être fiers des journaux que nous avons faits à l’occasion de la visite de la reine.

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Chaque fois que nous avons mis en vedette les mesures de sécurité extraordinaires prises par la police, chaque fois que nous avons donné les honneurs de la première page ou des titres ronflants aux déclarations des indépendantistes, séparatistes ou individus et groupements cherchant à créer un climat de mécontentement au sein de la population, nous avons contribué à ce qui s’est produit. Nous devons encaisser les reproches qui ont été faits à la presse en général par les autorités et nous considérer coupables. Nous devons considérer que nous avons fait du jaunisme et du sensationnalisme dans ces circonstances. Je précise que quand nous donnons à M. Guy Pouliot (du RIN) les honneurs de la page trois sur deux colonnes (lundi 12 octobre) alors que les discours de la reine et de Lesage sont relégués à l’intérieur, nous ne respectons pas l’échelle des valeurs et nous faisons du jaunisme et du sensationnalisme. Quand nous donnons un trois colonnes à Pierre Bourgault (Soleil, 19 octobre) qui dénonce le rapport Wagner avant qu’il ne soit publié, nous ne faisons pas un journal sérieux. Quand l’un de nos journalistes les plus expérimentés écrit aujourd’hui même que des témoins auraient entendu des paroles grossières et provocantes de la part des agents municipaux, que des policiers provinciaux ont été scandalisés de la conduite des policiers municipaux, je dis que publier pareil texte serait une erreur grossière, parce que nous contribuons ainsi à maintenir le climat d’antipathie contre la police municipale, que nous avons contribué à créer en prenant pour acquis ce qu’aucune enquête officielle n’a démontré. Nous avons donc pataugé de royale façon ces dernières semaines en faisant le jeu à 100 pour 100 du

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séparatisme, de l’indépendantisme, de l’extrémisme et des révolutionnaires de salon. Nous nous sommes foutés de la ligne de pensée de la maison. Quelle est cette ligne de pensée de la maison ? La voici et elle n’est pas différente de ce qu’elle était hier, de ce qu’elle était avant la visite royale. Nos journaux ne sont ni séparatistes, ni indépendantistes, ni révolutionnaires. Ils considèrent que non seulement nous ne devons pas favoriser les mouvements tels le RIN, le FLQ et autres de même acabit, mais que nous devons donner de l’importance à ce qui peut les discréditer dans l’opinion publique. Nos journaux sont partisans de la bonne entente entre les deux principaux groupes ethniques qui composent ce pays et ils considèrent que tout ce qui peut nuire à cette bonne entente ne doit pas prendre la vedette dans nos pages. Nos journaux veulent le respect de l’autorité établie et favorisent l’entreprise privée. Ils considèrent donc que toute attaque contre cette autorité, que toute nouvelle susceptible de discréditer cette autorité représentée par un groupe ou un individu, tout ce qui peut servir de propagande aux socialisants, ne peut être publié qu’après mûre réflexion. Bref, nos journaux veulent être des journaux sérieux, modérés, voulant rendre service à notre région, à notre province, à notre pays. Nous avions jusqu’à maintenant la réputation de publier des journaux sérieux. Nous avons perdu beaucoup de plumes au cours des dernières semaines. Si notre police municipale a perdu la tête et matraqué la foule, nous avons également perdu la tête et matraqué nos journaux.

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Il faut maintenant se racheter. Je demande à chacun de vous de bien écouter ce qui suit. Toute déclaration des chefs séparatistes, indépendantistes, ou acolytes, toute déclaration des mouvements nationalistes ou autres, de quelque personne prêchant la violence doit être bannie de nos journaux. Toute protestation contre l’autorité établie par des individus ou des personnes qui ne sont pas en autorité, des groupes qui ne sont pas représentatifs de l’autorité et de l’intérêt public ne doit trouver place dans nos pages de nouvelles (ex. René Chaloult dénonce l’archevêque de Québec). Il faudra user de beaucoup de discernement dans le traitement des protestations venant de certains groupes qui, sans avoir officiellement d’appartenance aux mouvements séparatistes, ne peuvent être considérés comme appartenant à l’élément modéré. Exemple : l’Association des étudiants de Laval. Bref, à moins que les commentaires ne viennent d’organismes qui ont habituellement leur mot à dire dans le règlement des affaires publiques (conseils municipaux, chambres de commerce, ligues de citoyens), ces commentaires ne doivent faire l’objet que d’une nouvelle, un paragraphe ou deux, à l’intérieur du journal. Voilà la ligne de conduite qu’il faut suivre. Ce qui précède est, il me semble, suffisamment clair, suffisamment précis pour ne pas donner lieu à des « je ne savais pas » ou des « je n’avais pas compris ». Ces instructions, vous aurez la responsabilité de les faire appliquer. Encore là, il ne doit pas y avoir

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d’équivoque. Les chefs de pages seront tenus responsables des textes et des titres et des mises en page qu’ils auront faits, les chefs de pupitre et leurs adjoints seront responsables des décisions qu’ils auront prises. Ceux qui ne sont pas capables d’assumer ces responsabilités, ceux parmi nous dont la conception du journalisme ou des idéologies n’admet pas cette façon de penser, doivent démissionner immédiatement. Ceux qui ne trouvent pas ces propos suffisamment clairs sont priés de venir me voir individuellement. Jean-Charles de La Durantaye52

Ces directives donneront lieu par la suite à de nombreuses réactions. Dans un premier temps, le gérant général et vice-président du journal Le Soleil, A.-F. Mercier, endosse ces directives. Le syndicat, qui regroupe alors 104 journalistes des salles de rédaction du Soleil, de L’Événement et de L’Action, réplique en faisant une mise en demeure à la direction. Lors de l’assemblée générale du 25 octobre, les journalistes du Soleil et de L’Événement décident de prendre des mesures allant à l’encontre de cette directive. « Le Syndicat des journalistes de Québec Inc. a fait savoir, hier, 52. « La direction du Soleil impose le silence à ses journalises », Le Devoir, 31 octobre 1961, p. 1 et 19. Bien que les journalistes du journal La Presse soient en grève durant ces événements, le journal des grévistes de ce quotidien, La Presse libre, publie la déclaration du 22 octobre du gérant de la rédaction. « Le Soleil muselle ses journalistes (« même si la police de Québec a perdu la tête ») et s’engage à défendre l’autorité établie et à discréditer les séparatistes », le 31 octobre 1964, p. 1. Ce journal est trihebdomadaire, publié du 28 septembre 1964 au 11 décembre 1964.

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à l’occasion d’une conférence de presse, que la direction des deux quotidiens Le Soleil et L’Evénement avait été mise en demeure de publier une rétractation complète et publique des accusations libelleuses lancées et publiées par l’entreprise. » De plus, le syndicat réclame 100 000 $ pour « l’honneur et la dignité des journalistes visés53 ». Rappelons qu’il y un conflit à La Presse. Le cœur du problème entre les journalistes et la direction réside dans la tentative de cette dernière pour introduire une clause idéologique qui « prévoit le renvoi du journaliste en conflit avec l’orientation idéologique du journal, moyennant une prime de licenciement54 ». Dans l’exposé de grief du SJQ, on fait référence à cette clause : Le Soleil et L’Événement ont toujours été décrits par leurs propriétaires comme des journaux de stricte information. Il est maintenant question, dans le document signé par M. Jean-Charles de La Durantaye, d’une « idéologie » inconnue jusqu’à maintenant et que l’on veut imposer aux journalistes sous peine de démission. Jamais le syndicat n’acceptera de se plier à des ultimatums qui ne se situent pas dans la ligne des engagements déjà pris au nom de tous les journalistes par la signature du contrat collectif55.

Le vice-président et administrateur général du Soleil, M. Mercier, a alors l’intention de ne pas se plier à la mise

53. Le Soleil, 4 novembre 1964, p. 4. 54. Pierre Godin, La lutte pour l’information, p. 129-130. 55. Archives de Clément Trudel, Exposé du grief, 3 novembre 1964, p. 2.

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en demeure du syndicat56. Bien qu’il endosse les directives, ce dernier n’est toutefois pas d’accord avec certains termes utilisés57. Ces directives sont dénoncées par plusieurs personnalités, dont le ministre Claude Wagner58. La Confédération des syndicats nationaux (CSN) donne son appui au Syndicat des journalistes59. « La CSN remercie les honorables Gérard D. Levesque, Wagner et Laporte pour l’appui qu’ils ont accordé aux journalistes du Soleil et de L’Événement et elle espère que leurs interventions déclencheront un mouvement général de protestation contre les vexations dont ces derniers sont victimes60. » Il y a par la suite plusieurs changements au Soleil. La direction congédie le gérant de la rédaction, Jean-Charles de La Durantaye, et le directeur de l’information, JeanPaul Quinty61. Le colonel Gilbert laissera la direction du journal à ses fils, Gabriel et Guy62. Bien que les démarches entreprises par le syndicat contre la direction aient été entamées, le SJQ laisse tomber 56. « Le Soleil ne se rétractera pas », Le Soleil, 5 novembre 1964, p. 3. 57. « Le Soleil et L’Événement, Mercier : certains termes des directives ont dépassé la pensée de la direction », Le Devoir, 5 novembre, p. 1. 58. Gérald LeBlanc, « Le vécu de la concentration, La petite histoire du Montréal-Matin, du Soleil et du Journal du Nord-Ouest », Du côté des journalistes, Études sur l’industrie des quodidiens, Commission royale sur les quotidiens, vol. 2. Ottawa, 1981, p. 127. 59. « La CSN mettra tout en œuvre pour permettre aux journalistes du Soleil de rester libres », Le Devoir, 7 novembre 1964, p. 1. 60. Ibid., p. 12. 61. Louis-Guy Lemieux, p. 208-209. 62. Gérald LeBlanc, p. 127.

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les poursuites lors de la signature de la convention collective le 21 juin 1965 pour les années 1964-1967. Le contrat de travail de 1964 renferme des nouveautés par rapport à la convention précédente. Outre la mise sur pied d’un comité conjoint, l’article 21 contient plusieurs points touchant l’aspect professionnel du travail de journaliste, dont la non-obligation d’écrire un texte publicitaire et la non-modification d’un article signé sans l’acceptation de l’auteur. Pour la première fois, l’employeur s’engage « à retenir chaque mois, sans frais et à même le salaire de chacun de ses employés, la cotisation syndicale mensuelle ; et ce, après avoir été autorisé par écrit selon la formule dite de retenue syndicale annexée à la présente convention ». Une loi provinciale avait été votée en 1963 concernant l’obligation de prélever sur autorisation volontaire des cotisations syndicales63. Précisons qu’il ne s’agit pas ici de l’application intégrale de la formule Rand, puisque cette dernière oblige une retenue à la source des cotisations syndicales de tout le personnel membre ou non du syndicat64. Alors que la convention précédente établit que « tout nouveau salarié sans expérience pourra adhérer au syndicat à l’expiration d’un délai de trois (3) mois », le présent contrat de travail indique : « Tout nouveau salarié, avec ou sans expérience, est tenu de faire partie du SJQ du jour où il devient un employé permanent, conformément 63. Jacques Rouillard, Histoire du syndicalisme au Québec, p. 298. 64. Rand fait référence au nom du juge qui a tranché dans le conflit des travailleurs de Ford en Ontario en 1945. Le juge Ivan Rand, refusant l’atelier, impose une formule qui oblige l’employeur à retenir une cotisation syndicale.

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à l’article 5 de la présente convention. » Plus d’un an après la signature de cette convention collective, Clément Trudel quitte Le Soleil. *** Bien qu’aucune grève ne vienne perturber les relations de travail de 1950 à 1966, plusieurs événements marquent l’histoire du SJQ durant cette période. La fondation du syndicat en 1950 constitue le début de cette histoire. Après plusieurs tentatives infructueuses, les journalistes de la capitale réussissent à mettre sur pied un syndicat qui regroupe Le Soleil-L’Événement et L’Action catholique. Le SJQ s’engage par la suite sur une voie parsemée d’embûches. Plusieurs causes sont portées en conciliation et en arbitrage. Outre les nombreux griefs, le renouvellement de conventions collectives fait l’objet de nombreux litiges entre la direction du Soleil et ses journalistes. Durant cette période, les salaires constituent la principale préoccupation du syndicat. Il est peu question de clauses professionnelles. Selon les informations disponibles, ce n’est qu’au début des années 1960 que le SJQ s’occupe davantage de ces questions. Les griefs portés en arbitrage touchent l’aspect professionnel du travail de journaliste. Le SJQ élargit également ses horizons avec la syndicalisation des journalistes du Saguenay–Lac-Saint-Jean. Puis l’épisode du « Samedi de la matraque » vient marquer la fin d’une période et confirmer le début d’une autre où le SJQ devient de plus en plus revendicateur. Comme le mentionne Gérald LeBlanc : « La montée du syndicat et l’arrivée massive des jeunes universitaires instruits devaient coïncider avec le

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début du règne des frères Gilbert. À compter du “Samedi de la matraque” de 1964, le syndicat devint une force revendicatrice de plus en plus gourmande65 ».

65. Gérald LeBlanc, p. 128.

Chapitre 2

un syndicat de combat 1967-1980

F

avorisé par la conjoncture socio-économique, le Syndicat des journalistes de Québec devient de plus en plus revendicateur à la fin des années 1960 et durant les années 1970. Ce militantisme correspond au radicalisme idéologique de la CSN qui privilégie un syndicalisme de combat et qui axe son discours sur la lutte des classes1. Ce radicalisme provoque une scission au sein de la centrale et amène la formation, en 1972, de la Centrale des syndicats démocratiques (CSD). Par ailleurs, au début des années 1970, lorsque le gouvernement libéral de Robert Bourassa est au pouvoir, on assiste à la formation de fronts communs intersyndicaux dans les secteurs publics. L’arrivée du Parti québécois au pouvoir en 1976 permet quelques modifications dans les relations de travail. D’une part, l’emploi de scabs lors d’une grève devient illégal et la 1. Jean-François Cardin, « La CSN et le syndicalisme de combat », La CSN, 75 ans d’action syndicale et sociale, Montréal, PUQ, 1998, p. 36.

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formule Rand devient obligatoire pour les syndicats accrédités2. Parallèlement, plusieurs changements interviennent au sein de la presse écrite. Des journaux tels que QuébecPresse tentent l’expérience de l’autogestion, alors que Le Jour adopte une formule de société de rédacteurs3. Dans la capitale, on voit apparaître, en 1967, un nouveau journal du groupe Quebecor, Le Journal de Québec. Ce quotidien devient un sérieux concurrent pour Le Soleil 4. D’autre part, L’Événement-Journal disparaît le 3 mars 1967 et L’Action-Québec change de nom pour devenir À Propos en 1971. Au Soleil, la détérioration des relations de travail entre la direction et les journalistes vient perturber la vie de l’entreprise. Après l’épisode du « Samedi de la matraque », le SJQ devient plus militant, plus combatif. La tendance qui se dégage, tant dans ses actions que dans son idéologie, l’identifie davantage à un syndicat de combat. Comme le définit le spécialiste du syndicalisme Jean-Marc Piotte : « […] le syndicalisme de combat cherchera, compte tenu du rapport de forces, à obtenir les meilleurs, les plus grands bénéfices marginaux et la plus grande sécurité d’emploi. Mais, de plus, il se battra pour gruger les pouvoirs exorbitants de l’entrepreneur, ce qu’on appelle habituellement les droits de gérance, il luttera pour exercer un contrôle sur ses conditions de travail5[...] » Outre les 2. Jacques Rouillard, Histoire du syndicalisme au Québec, p. 424. 3. Pierre Godin, La lutte pour l’information, p. 171. 4. Ibid., p. 162-163. 5. Jean-Marc Piotte, Du combat au partenariat, interventions critiques sur le syndicalisme québécois, Édition Nota bene, 1998, p. 23.

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moyens habituels de relations de travail tels que le mécanisme de griefs, les négociations, le SJQ utilisera davantage la grève comme moyen de pressions. Bref, le Syndicat des journalistes de Québec commence une période beaucoup plus virulente que par le passé. La grève de 1977 constitue le point culminant de ce type de militantisme. Dans ce contexte, plusieurs similitudes peuvent être établies entre le militantisme de ce syndicat et celui des secteurs public et parapublic. Concernant sa structure interne, le syndicat se divise en plusieurs sections. Comme il est spécifié dans la constitution du syndicat de 1969, « la présente constitution reconnaît l’existence d’unités ou secteurs distincts, à savoir : Le Soleil Québec, Le Soleil Saguenay, Le Soleil Province, Le Soleil correcteurs et L’Action ». Chaque section est autonome quant à son organisation qui comprend un exécutif et des assemblées générales indépendantes. En principe, l’exécutif, qui est élu chaque année, se compose d’un président, de deux vice-présidents, d’un secrétaire, d’un trésorier, de représentants des correcteurs et des journalistes régionaux6. Outre les journalistes du Soleil, seule L’Action catholique signe des conventions collectives indépendantes. Deux périodes ponctuent l’histoire du SJQ durant ces années. La première correspond à une augmentation des conflits et à la fin du règne des Gilbert au Soleil. La seconde concerne les relations entre une nouvelle direction

6. Archives du SJQ, Constitution et règlements du Syndicat des journalistes de Québec inc., 13 mai 1969.

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et le SJQ. Les tensions qui en résultent aboutiront à la grève de 1977. Une période d’agitation L’événement qu’il est convenu d’appeler l’affaire Baribocraft constitue dans l’histoire du SJQ un cas de censure de la part de la direction. Il fait ressortir le problème de l’autonomie professionnelle des journalistes puisqu’il touche directement la propriété des textes. Le 7 décembre 1967, le journaliste Michel Samson publie le premier article d’un reportage sur une grève qui sévit à l’usine de la compagnie Baribocraft de Lévis. Mentionnons qu’une note de la rédaction au début de l’article prévient que seule la partie syndicale a été consultée et que le directeur général de Baribocraft a refusé de rencontrer le journaliste7. Dans ce reportage, Michel Samson décrit les conditions de travail des 210 hommes et femmes qui travaillent à l’usine. Pour la publication du deuxième article, Guy Gilbert, directeur général adjoint du journal, insiste pour que la photo du propriétaire de Baribocraft, M. Hervé Baribeau, soit enlevée. Devant le refus du rédacteur en chef, Mario Cardinal, Guy Gilbert va aux presses et fait supprimer la photo. L’article sur Bariboraft paraît le 8 décembre avec un carré vide dans l’article8. 7. « Le conflit chez Baribocraft, Un second Ayers », Le Soleil, 7 décembre 1967, p. 12. 8. Michel Samson, « Baribeau veut-il affamer les travailleurs », Le Soleil, 8 décembre 1968, p. 30.

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Le 7 décembre 1967, Michel Samson publie le premier de deux articles sur la grève à Baribocraft, à Lévis. Le directeur général adjoint, Guy Gilbert, intervient à la rédaction pour exiger le retrait de la photo du propriétaire de Baribo, Hervé Baribeau. Le rédacteur en chef, Mario Cardinal, refuse. Guy Gilbert descend lui-même aux presses et fait supprimer la photo. L’article va paraître le 8 décembre avec un carré vide. Source : Archives Le Soleil

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Dès vendredi, les quatre dirigeants de la salle de rédaction, MM. Mario Cardinal, directeur du Service de la rédaction ; Florian Sauvageau, directeur de l’information, Guy Rondeau, chef des nouvelles locales, et Léonce Gaudreault, chef du pupitre, ont fait parvenir une lettre au président du Soleil, dans laquelle ils demandaient que soit définie l’autorité absolue des dirigeants de la salle de rédaction en matière d’information, faute de quoi, ils ne croyaient plus devoir remplir leurs fonctions9.

Cette journée-là, l’exécutif syndical est convoqué d’urgence10. Lors de cette réunion, le syndicat donne son appui moral aux quatre signataires de la lettre. Malgré la confirmation du président du Soleil, M. Gabriel Gilbert, sur la pleine autorité du directeur du Service de la rédaction en matière d’information, le président du syndicat, M. André Dionne, exige que ce principe soit intégré dans la prochaine convention collective. À la réunion de l’exécutif du 11 décembre, il est question de la « clause de liberté d’information ». L’exécutif adopte la résolution suivante : « Que les journalistes syndiqués détenteurs de postes à prime, au nombre d’une vingtaine, remettent en bloc leur démission pour faciliter la négociation de la clause. Dix-neuf membres du pupitre quittent donc leur poste dans la nuit du lundi au mardi et réintègrent la salle 9. Christian Coutlée, « Conseil d’arbitrage au niveau de l’information, Accord de principe entre le journal Le Soleil et le Syndicat des journalistes », Le Soleil, 13 décembre 1967, p. 5. 10. Archives du SJQ inc., Assemblée de l’exécutif du Syndicat des journalistes de Québec inc., 8 décembre 1967.

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à titre de reporters. Le syndicat s’oppose à ce qu’ils reprennent leurs fonctions jusqu’à ce que l’on commence à négocier le projet d’article. Durant la journée du 12 décembre, six réunions de l’exécutif ont lieu et une assemblée générale est convoquée. Concernant le règlement des « griefs de l’information », les frères Gilbert acceptent la mise sur pied d’un conseil d’arbitrage. Le syndicat obtient cette confirmation le 12 décembre durant une rencontre entre les deux comités de négociation. Les cadres reprennent leur travail cette journée-là11. À la suite de cette entente, la partie syndicale peut déposer un grief sur une question d’information. C’est principalement à partir de cet événement que les prochaines conventions collectives comprendront des clauses sur l’indépendance professionnelle des journalistes12. Bien que la convention collective, signée le 26 avril 1968 pour les années 1967-1970, comprenne plusieurs améliorations concernant les conditions de travail, elle introduit une nouvelle clause sur l’indépendance professionnelle qui est l’article 12 où « Le Soleil reconnaît l’indépendance professionnelle des journalistes ». Parmi les nouveautés, on retrouve, entre autres, la mise sur pied d’un conseil de rédaction paritaire, la participation syndicale à l’embauche, de même que la possibilité d’obtenir un congé sans solde13. 11. travail », 12. 13. p. 142.

« Les 19 démissionnaires du pupitre au Soleil retournent au Le Devoir, 13 décembre 1967, p. 11. Gérald LeBlanc, p. 127. Esther Déom, Quarante ans de syndicalisme au Québec,

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Durant l’année 1968, on assiste à des changements dans les organismes de journalistes. L’Union canadienne des journalistes de langue française (UCJLF) et l’Alliance canadienne des journalistes de langue française (ACJF) cessent toute activité. En 1969, une nouvelle association professionnelle voit le jour : la Fédération professionnelle des journalistes du Québec (FPJQ). À la différence de l’ancienne association, l’UCJLF, l’adhésion des membres de la FPJQ se fait par regroupement comme les syndicats, cercles de presse régionaux14. Elle s’occupe de problèmes qui ne relèvent pas de l’action syndicale, mais de questions reliées à l’éthique de la profession et, durant ces années, aux conséquences de la concentration de la presse. La Crise d’octobre constitue un événement qui interpellera le nouvel organisme. Le rôle des médias durant la Crise d’octobre est important et les journalistes du Soleil n’échappent pas à ce constat. Durant ces événements, les médias font l’objet de vives critiques au sujet du traitement de l’information. Les journalistes sont accusés d’être responsables de la crise15. Comme le mentionne le spécialiste de l’information Bernard Dagenais : « D’abord, les mesures de guerre ont entraîné dans plusieurs médias des restrictions dans la circulation de l’information qui empêchent dorénavant la

14. Lysiane Gagnon, « Journaliste et syndiqué : le perpétuel dilemme », Dans les coulisses de l’information. Les journalistes (dir. Florian Sauvageau, Gilles Lesage et Jean de Bonville), Montréal, Québec/Amérique, 1980, p. 54. 15. Bernard Dagenais, La Crise d’octobre et les médias : le miroir à dix faces, VLB éditeur, 1990, p. 151.

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publication des textes du FLQ. Et des sanctions ont parfois été prises16 ». De plus, la mort de Pierre Laporte, le 17 octobre, vient envenimer ces relations. À la différence des autres journaux, la direction du Devoir est la seule à s’opposer à la Loi des mesures de guerre dans ses éditoriaux. Au Soleil, les prises de position de la direction envers certains événements provoquent une réaction de plusieurs journalistes qui, de façon spontanée, posent un geste qui ne relève pas d’une décision de l’assemblée générale. En effet, une quarantaine de journalistes du Soleil se dissocient de la prise de position éditoriale de leur direction en adressant une lettre au rédacteur en chef. Cette lettre est reproduite dans le quotidien Le Devoir et l’hebdomadaire Québec-Presse : Plusieurs voix se sont fait entendre sur les événements regrettables qui bouleversent actuellement la société québécoise. La majorité des prises de position étaient empreintes d’une démagogie outrageante allant des appels à la répression aux professions de foi en l’unité canadienne. La dépouille de M. Pierre Laporte a été subornée ces derniers jours à des causes qui trouvaient là un support tragique. Nous considérons que l’attitude qui s’impose dans les circonstances est au contraire une attitude de réflexion non seulement sur les événements euxmêmes, mais sur les causes et les prolongements d’une situation beaucoup plus complexe que ne 16. Idem.

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voudraient le laisser croire ces commentaires qui tiennent plus de l’inflation verbale que de la sincérité. Nous ne pouvons tolérer les éditoriaux de M. Gilles Boyer, dont celui du lundi 19 octobre : « La folie devenue furieuse » et les caricatures de M. Raoul Hunter des 14, 20 et 21 octobre (particulièrement celle du 20) qui sont à leur manière autant d’incitations à la violence. Nous réprouvons cette attitude irréfléchie alors que nous avons un si grand besoin d’intelligence. Nous le faisons non seulement à titre de citoyens, mais également à celui de journalistes conscients que la liberté d’informer est une responsabilité autant qu’un droit17.

À la suite de cette publication, le président et éditeur, M. Gabriel Gilbert, appuie son éditorialiste et son caricaturiste. Par ailleurs, 203 employés du Soleil décident de soutenir la politique éditoriale de la direction18. Cet incident démontre, entre autres, les différences de vue entre le SJQ et les autres syndicats de l’entreprise. Durant ces événements, des élus critiquent le travail des journalistes. Le député des Îles-de-la-Madeleine et « whip en chef » du Parti libéral, M. Louis-Philippe Lacroix, s’en prend verbalement aux journalistes. Il accuse ceux-ci d’être responsables de la mort de Pierre Laporte. Le 17. « La crise, Quelque 40 journalistes du Soleil réprouvent la position éditoriale », Le Devoir, 24 octobre 1970, p. 4. 18. Dagenais, p. 153.

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journaliste Benoît Lavoie écrivait le 28 octobre 1970 : « Le député a renchéri en qualifiant ces journalistes de ratés à tous les titres, en les accusant d’un manque d’objectivité flagrant, de séparatistes toujours prêts à cautionner René Lévesque et, principalement, en expliquant qu’ils collaboraient avec les agitateurs de toutes sortes, entravaient le travail policier plutôt que de collaborer avec le gouvernement et l’ordre établi19 ». Les propos tenus à l’endroit des journalistes suscitent de nombreuses réactions dont celle de la principale concernée, la Tribune de la presse du Parlement : « La Tribune de la presse du Parlement, à Québec, a prié, hier soir, M. Robert Bourassa de demander aux autorités compétentes d’assurer, par la présence physique de policier, la protection des enfants et des épouses des journalistes qui en feront la demande20 ». De plus, elle demande à la FPJQ de s’occuper du dossier afin d’en saisir les conséquences sur la profession de journaliste. Le 29 octobre, Le Soleil publie une lettre du directeur de la rédaction. Il s’agit d’une lettre envoyée le 23 octobre dans laquelle la direction donne son appui à ses journalistes concernant le traitement de l’information dans l’affaire Cross-Laporte21.

19. Benoît Lavoie, « Lacroix tient les journalistes responsables du sort de Laporte », Le Soleil, 28 octobre 1970, p. 1. 20. Normand Girard, « La Tribune de la presse exige la protection de ses membres et celle de leurs dépendants », Le Soleil, 28 octobre 1970, p. 1. 21. Bernard Dagenais, La Crise d’octobre et les médias : le miroir à dix faces, VLB éditeur, 1990, p. 153.

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Le SJQ, alors sous la présidence de François Demers, tient une assemblée générale à la suite des propos contre les journalistes : À la suite d’une demande expresse formulée par plus de vingt membres en règle du SJQ, et conformément à la constitution du SJQ, il a été convoqué une assemblée générale spéciale pour étudier le problème causé par la violence verbale, à laquelle s’adonnent certains élus du peuple et d’autres citoyens du Québec et du Canada, et pour étudier la possibilité de poser un geste public contre cette façon de procéder dangereuse pour la sécurité des journalistes et des membres de leur famille, ainsi que pour la liberté de la presse et le droit du public à l’information22.

De plus, le SJQ demande à la Fédération professionnelle des journalistes « qu’elle constitue un dossier complet entourant les entraves qu’auraient pu subir les membres de la profession dans l’exercice de leur travail ». À la suite de ces pressions, la FPJQ demande la reconstitution du comité parlementaire spécial sur la liberté de la presse. Le premier ministre Robert Bourassa affirme quelques jours plus tard que la commission sur la liberté de presse allait être convoquée au mois de février23.

22. Archives du SJQ inc., procès-verbal de l’assemblée générale spéciale du SJQ, le jeudi 29 octobre 1970. « Le SJQ veut intenter des poursuites contre Lacroix », Le Soleil, 30 octobre 1970, p. 3. 23. Dagenais, p. 168-169.

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En raison des changements d’accréditation qu’il y a eus à la fin des années 1960 concernant les journalistes du Saguenay–Lac-Saint-Jean, du Bas-du-Fleuve, de la CôteNord et autres territoires régionaux, en 1969, le syndicat obtient une nouvelle accréditation. Le 18 février 1971, le certificat d’accréditation du SJQ du 28 juin 1950 est modifié pour inclure les journalistes travaillant en région et se lit comme suit : Tous les employés de la rédaction du journal, salariés au sens du Code du travail, y compris les courriéristes parlementaires, à l’exception du rédacteur en chef, du gérant de la rédaction, des chefs de l’information, des correspondants de l’extérieur et des messagers de ladite rédaction, et tous les journalistes salariés au sens du Code du travail de la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean, de même que ceux de la région du Bas-du-Fleuve, Côte-Nord et autres territoires régionaux non déjà couverts par une accréditation.

Durant la même année, des journalistes projettent de mettre sur pied une nouvelle fédération au sein de la CSN, qui soit plus représentative de leurs conditions. Dès 1971, des membres du SJQ assistent à une réunion à Montréal en vue de la création d’une fédération des communications autonome au sein de la CSN. Dans un procèsverbal de l’exécutif, alors que Georges Angers est président du syndicat, le SJQ adhère aux buts de la FNC qui est : 1- d’établir entre les syndicats adhérents une solidarité effective qui leur permette de se prêter un

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mutuel appui dans l’étude et la défense des intérêts économiques, sociaux et professionnels de leurs membres ; 2- de hâter la réalisation de ces objectifs par une action constante auprès des pouvoirs publics, des syndicats patronaux, des corps intermédiaires, etc. ; 3- de favoriser, dans la plus large mesure, la diffusion du syndicalisme parmi les employés des médias écrits, parlés et audiovisuels ; 4- de rendre, dans le cadre des statuts, aux syndicats fédérés, tous les services tant généraux que particuliers, dont les circonstances démontrent l’utilité24.

La Fédération nationale des communications (FNC) voit le jour durant son congrès de fondation à Montréal les 17, 18 et 19 novembre 197225. André Dionne, Claude Vaillancourt, Georges Angers, Jean-Paul Gagné, Jean Giroux, François Linteau, Roch Desgagnés, Nelson Labrie et Réjean Lacombe participent à ce congrès26. Cette fédération remplace la Fédération canadienne de l’imprimerie et de l’information (FCII). La FNC regroupe les syndicats des journaux, de la radio, de la télévision et du cinéma. Dès le départ, elle affiche ses couleurs. « La FNC se revendique dès le début et encore au congrès de 1979 du syndicalisme de masse, de classe et de combat27. » L’adhé24. Archives du SJQ inc., procès-verbal de l’exécutif, 11 décembre 1972. 25. François Demers, p. 70. 26. Ibid., p. 138-139. 27. Ibid., p. 125.

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sion du SJQ à cette nouvelle fédération aura des répercussions sur sa participation à la FPJQ. Michel Alloucherie, qui est cadre au Soleil et viceprésident de la FPJQ à ses débuts, mentionne qu’il y a toujours eu des résistances de la part du Syndicat des journalistes de Québec concernant la FPJQ. L’opposition entre les villes de Québec et Montréal pourrait être un facteur d’explication. Mais pour Jean Garon, journaliste à l’époque, cette résistance se situe davantage dans l’opposition de deux philosophies28. Durant cette période, le statut du journaliste tourne autour de deux pôles, à la fois complémentaires et opposés. Cela soulève toute la question de l’identification, à savoir celle du travailleur de l’information ou du professionnel de l’information. Cette dualité, voire cette dichotomie, se reflète par l’appartenance à deux structures dont l’une syndicale, en l’occurrence la FNC, et l’autre professionnelle, la Fédération professionnelle des journalistes du Québec29. Le syndicat quitte définitivement la FPJQ en avril 1973 et ne réintégrera l’organisme que 22 ans plus tard30. Les raisons invoquées pour expliquer ce retrait sont reliées principalement à la création de la FNC. Selon certains membres, « […] la nouvelle fédération de syndicats pouvant avantageusement se charger de l’aspect 28. Entrevue avec Jean Garon, 3 mai 2000. 29. Clément Trudel, « Structure syndicale ? Structure professionnelle ? Les journalistes cherchent à faire l’équilibre », Le Devoir, 12 avril 1973, p. 12. 30. Archives du SJQ inc., procès-verbal de l’assemblée générale annuelle, 7 avril 1973.

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professionnel de ses membres d’autant plus facilement que ces questions trouvent souvent leur prolongement dans des articles de conventions collectives31 ». L’autre problème qui se pose pour le SJQ à ce momentlà concerne les changements technologiques. En effet, Le Soleil modernise son équipement, ce qui représente une source de conflit entre la direction et le SJQ. Le syndicat reproche à la direction d’avoir introduit rapidement ces changements, et ce, sans consultation. Le 27 juin 1972, un comité est mis sur pied afin de « faire l’inventaire de ces changements technologiques et leurs répercussions sur le fonctionnement de la salle de rédaction32 ». Le rapport produit à cette fin n’est utilisé qu’en partie par la direction. Les nouveaux appareils provoquent la dispari-tion des correcteurs d’épreuves33. Après 1972, les termi-naux à écran de visualisation (TEV) se généralisent34. L’investissement dans les nouveaux procédés nécessite une somme de plus de 2 millions de dollars35. Voici comment le journaliste Léonce Gaudreault décrit le nouveau processus : 31. « Le Syndicat des journalistes de Québec se retire de la Fédération professionnelle des journalistes », Le Soleil, 9 avril 1973, p. 24. Archives du SJQ, dossier FPJQ, 1995. 32. Archives du SJQ inc., « Extrait du rapport de Gilles Boivin et Michel Alloucherie sur les changements technologiques ». 33. « Congédiements au Soleil, Le Devoir, 10 novembre 1972, p. 3. 34. James Thwaites, « Québec : un nouvel ordre du journalisme », Les relations de travail dans l’industrie des quotidiens, Études sur l’industrie des quotidiens, Commission royale sur les quotidiens, vol. 5, Ottawa, 1981, p. 165. 35. Archives du SJQ inc., Communiqué de la direction, M. Gabriel Gilbert au personnel du journal. Le 7 mai 1973.

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Quand, en septembre 1973, Paul Desmarais annonce qu’il veut acheter le journal de la famille Gilbert, tous les syndicats CSN des journaux contrôlés par Power Corp répondent à l’appel du SJQ et montent aux barricades contre la concentration de la presse. Fin août, l’Association coopérative d’information du Québec (ACIQ) voit le jour. Son but : acheter Le Soleil et en faire un journal de gauche. Deux journalistes, Gilles Boivin (à gauche) et Jean-Claude Picard, prennent la tête de ce qu’on appelle dans le milieu la Coop-Soleil. Jean-Claude Picard racontera plus tard que la décision de créer la coop avait été prise devant un plat de « beans » dans la cuisine de Pauline Marois et de son mari, Claude Blanchet. Tous les autres syndicats de la boîte s’opposent à la coop. Leur pétition maison recueille 342 signatures. L’ACIQ sera démantelée quelques mois plus tard, le 9 février 1974. Source : Archives Le Soleil

Au lieu de passer par le long processus de composition au plomb, les textes des journalistes, retranscrits au Centre de transcription, sur des machines à écrire électriques, sont lus par des lecteurs optiques qui transforment les textes en rubans perforés (codés) devant par la suite être digérés par les machines-

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ordinateurs (Linotron). De cette dernière opération ressort un papier photographique servant à la mise en page. Les pages ainsi préparées, le processus pourrait enfin se poursuivre jusqu’à l’impression même du journal par le processus photographique, mais du fait que Le Soleil continue à utiliser ses presses (rotatives), ce produit photographique doit être transformé sur plaques en relief (letterflex)36.

Les changements technologiques constituent un point d’achoppement entre les parties patronale et syndicale en mai 1973. Ce conflit mènera à la première fermeture de l’histoire du journal. L’assemblée générale, tenue par le SJQ le 3 mai 1973, porte sur le problème des changements technologiques. Le syndicat exige « que le centre de transcription et tous les employés qui y travaillent soient sous la juridiction de la salle de rédaction, que les fonctions d’édition soient prolongées à l’atelier, que des modalités de correction soient assurées par la rédaction37 ». À la suite de l’échec des négociations avec les représentants patronaux, 19 sous-cadres syndiqués démissionnent. Le 6 mai, le téléjournal annonce le lock-out. Le journal n’est pas publié. Divers comités sont mis sur pied en fonction d’une longue lutte : information, téléphone, secours, organisation syndicale. Après la troisième journée de lock-out, Le Soleil demeure toujours fermé à clef, privant ainsi 36. Léonce Gaudreault, « L’électronique, source de conflits », Le Soleil, 12 mai 1973, p. 29. 37. Archives du SJQ inc., procès-verbal de l’assemblée générale spéciale du Syndicat des journalistes de Québec inc., tenue le jeudi 3 mai 1973, à la CSN, Québec.

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160 000 abonnés de leur quotidien38. Le 9 mai, il y a une rencontre entre la partie patronale et le comité de négociation39. Un règlement intervient le 10 mai40. Selon l’entente intervenue entre les parties patronale et syndicale, « Le Soleil réaffirme qu’il est tout à fait normal que les textes des journalistes soient respectés intégralement tout au long du processus de production et que la Rédaction conserve pleine juridiction sur le contenu de ces textes jusque dans les colonnes du journal41 ». L’une des conséquences de cet événement est la disparition de la section 173 de l’Union internationale des clicheurs et galvanotypeurs de Québec et une réaffectation de ses membres. De plus, les conventions collectives introduiront par la suite des clauses concernant les changements technologiques42. Dans le contrat de travail signé le 4 septembre 1974 pour les années 1973-1976, l’article 22.01 spécifie à cet égard : « L’employeur avertit le syndicat au moins six (6) mois à l’avance de tout changement technologique susceptible de modifier de façon significative les conditions de travail des employés ».

38. Rhéal Bercier, « Le Soleil de Québec est fermé à clef... », La Presse, 9 mai 1973, E1. 39. Archives du SJQ inc., document « Le point sur le lock-out ». 40. Archives du SJQ inc., procès-verbal de l’assemblée générale spéciale du Syndicat des journalistes de Québec inc., tenue le jeudi 10 mai 1973. 41. Archives du SJQ inc., dossier Lock-Out, entente intervenue le 10 mai 1973 entre Le Soleil limitée et le Syndicat des journalistes de Québec inc. 42. James Thwaites, p. 165.

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Le syndicat s’engage également dans d’autres causes. Il est, entre autres, question d’aider les employés de soutien de la rédaction du Soleil pour la formation d’un syndicat43. De plus, on assiste à la fermeture de l’édition du Saguenay–Lac-Saint-Jean. Des journalistes sont transférés à Québec et d’autres se joignent au Progrès du Saguenay et au Nouveau Quotidien du Saguenay–Lac-Saint-Jean. Le SJQ conteste « la décision de la partie patronale de ne pas transférer la convention collective du SJQ au Progrès du Saguenay et au Nouveau Quotidien du Saguenay–LacSaint-Jean44 ». Après l’épisode du lock-out de mai 1973, des rumeurs de vente se font de plus en plus persistantes. Ces rumeurs s’avèrent exactes. Les frères Gilbert décident de vendre le journal. « Malgré une situation de quasi-monopole et un tirage de 160 000 exemplaires, Le Soleil ne rapportait plus de dividendes aux membres de la famille Gilbert. Les investissements massifs dans les changements techniques avaient réduit la marge de manœuvre des frères Gilbert. L’incapacité de Gabriel Gilbert à satisfaire les journalistes, de plus en plus revendicateurs et de plus en plus dispendieux, fera déborder la coupe45 », écrit le journaliste Gérald LeBlanc. Le SJQ s’inquiète de cette vente. À l’assemblée générale du 27 août 1973, un comité spécial syndical est formé à cet effet. Le mandat de ce comité est « la mise sur pied 43. Archives du SJQ inc., procès-verbal de l’exécutif, 9 avril 1973. 44. Archives du SJQ inc., procès-verbaux des exécutifs des 23 et 27 août 1973. 45. Gérald LeBlanc, Du côté des journalistes, p. 128.

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La famille Gilbert vend Le Soleil à UniMédia en 1973. De gauche à droite, Jacques G. Francœur, le patron d’UniMédia, son bras droit, Jean-Guy Faucher, Guy Gilbert et Gabriel Gilbert. Source : Archives Michel Alloucherie

d’un dossier sur le problème de la concentration des entreprises de presse pouvant être soumis à une commission parlementaire sur la liberté de la presse, mise en branle d’une campagne de sensibilisation et d’information auprès des organismes régionaux et provinciaux dans le but d’empêcher la vente du Soleil à un consortium, étude des solutions possibles aux problèmes soulevés par la volonté de vendre des propriétaires actuels du Soleil ». Les membres de ce comité sont Bernard Cleary, Jean-Claude Picard, Gilles Boivin, Claude Vaillancourt, Jean Garon, Georges Angers et André Dionne46. Par la suite, des journalistes 46. Archives du SJQ inc., procès-verbal de l’assemblée générale du 27 août 1973.

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mettent sur pied une coopérative pour acheter le journal : l’Association coopérative d’information du Québec (ACIQ) « pour leur permettre de se porter acquéreur et de gérer, dans l’intérêt de la collectivité québécoise, son principal médium d’information47 ». Cette coopérative est dirigée par les journalistes Jean-Claude Picard et Gilles Boivin. Toutefois, les autres syndicats du Soleil s’opposent à cette action en faisant circuler une pétition qui recueille 342 noms48. L’ACIQ n’existera plus quelques mois plus tard. Le conglomérat Power Corporation de Paul Desmarais, qui contrôle déjà La Presse, le Montréal-Matin, Le Nouvelliste, La Tribune et La Voix de l’Est, tente d’acheter Le Soleil. Le gouvernement libéral de Robert Bourassa intervient en vue de contrer cette vente qui se situe dans un mouvement de concentration de la presse. Jacques Francœur d’UniMédia achète Le Soleil en janvier 1974. C’est la fin de l’entreprise familiale et les prochaines conventions collectives seront désormais négociées avec le nouveau propriétaire. Vers une grève attendue (1977-1978) Pendant qu’il négocie avec la famille Gilbert pour acquérir Le Soleil, Jacques Francœur demande à Claude Beauchamp s’il est intéressé à travailler au quotidien de Québec. Celui-ci a déjà travaillé à La Presse et occupé le 47. Archives SJQ inc., communiqué de presse, l’ACIQ : une solution concrète et réaliste à la vente du Soleil, p. 2. 48. Louis-Guy Lemieux, p. 257-258.

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poste de président de la FPJQ. C’est par l’entremise de la fédération qu’il avait déjà eu des contacts avec le Syndicat des journalistes de Québec. L’adhésion du SJQ à la FPJQ avait été difficile à obtenir49. Après la désaffiliation du SJQ de la FPJQ le 7 avril 1973, M. Beauchamp, alors président de la fédération, avait demandé à rencontrer l’exécutif concernant cette séparation50. Claude Beauchamp obtient carte blanche de Jacques Francœur. Il voulait occuper son nouveau poste après le règlement du contrat de travail afin de repartir sur de nouvelles bases. Bien que le syndicat et la direction soient en pleine période de négociation, il s’installe dans la capitale en avril 1974 à titre de rédacteur en chef et d’éditeur adjoint. Il raconte : « Le gros problème du Soleil, c’était la salle de rédaction d’après M. Francœur. Le journal fonctionnait bien partout, sauf à la salle de rédaction où la direction de l’entreprise avait perdu totalement le contrôle. » Son mandat consiste alors à redresser la situation pour que l’entreprise puisse reprendre le contrôle de la salle de la rédaction. À 8 heures du soir, le 26 août, le syndicat déclenche une grève à cause de la négociation. Les journalistes retournent au travail le lendemain et, en septembre, signent un nouveau contrat de travail51. Pour

49. Entrevue avec Claude Beauchamp, 17 mai 2000. 50. Archives du SJQ inc., procès-verbal de l’exécutif, 9 avril 1973. 51. La convention collective signée le 4 septembre 1974 pour la période du 15 décembre 1973 au 14 décembre 1976 comprend plusieurs nouveautés. On obtient un réduction de la semaine de travail qui passe de 35 ou 33 heures à 32. La sécurité d’emploi favorise les

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Claude Beauchamp, cet épisode n’est que partie remise. Dès cet instant, il s’attend à avoir une autre grève : « C’est une question psychologique. C’est sûr et certain qu’à la prochaine négociation pour le renouvellement du contrat de travail, on va avoir une grève. » Pour asseoir ses appuis, Claude Beauchamp s’entoure d’une équipe qui n’a jamais travaillé au Soleil. Il confie les postes de directeur de l’information, de la page éditoriale et de columnist à des gens de l’extérieur. Cela est mal perçu par certains journalistes52. Claude Masson devient le directeur de l’information. La stratégie de Claude Beauchamp repose sur plusieurs éléments. Outre l’objectif d’améliorer le journal, le nouveau rédacteur en chef veut reprendre le contrôle sur le plan financier. Pour lui, le temps supplémentaire constitue un problème crucial. Il se payait entre 30 % et 35 % de la masse salariale en temps supplémentaire. Deux mois après son arrivée, le temps supplémentaire est réduit à 10 % ou 11 %. Des journalistes voient alors leur salaire chuter. Le règlement des griefs pose également un problème. Claude Beauchamp mentionne qu’à son arrivée plusieurs griefs avaient été accumulés. De 1969 à 1984, dix griefs se sont retrouvés devant un arbitre. Selon Esther Déom, qui a étudié les conventions collectives et les griefs de plusieurs journaux, c’est au Soleil que l’on retrouve le nombre le plus promotions, protège les victimes temporaires ou permanentes de licenciement. Comme nous l’avons mentionné précédemment, c’est la première fois qu’un contrat de travail contient une clause de protection contre les changements technologiques. James Thwaites, p. 167. 52. Gérald LeBlanc, Du côté des journalistes, p. 133.

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Les journalistes et employés de soutien du Soleil, réunis autour de la même table de négociations, ont tenu deux assemblées générales les 25 et 26 août 1974. L’une pour déclencher un arrêt de travail et l’autre pour voter le retour au travail après une grève de 12 heures. Au cœur du conflit, le plancher d’emploi et la sécurité d’emploi. Au premier rang, on reconnaît Guy Benjamin, Andrée Roy, Alain Bouchard et Monique DeslauriersPayeur. Au deuxième rang, André-A. Bellemare, Guy Dubé, Louis-Guy Lemieux. Dans le désordre, Gemma Labrecque, Louise Picard, Fernando Lemieux, Jacques Quirion, Florent Plante, Gilbert Athot, Pierre Racine, Guy Ouellet, Claude Daigneault, Paule Turgeon, Jacques-Yvan Ruel, Paule-France Dufaux, Léonce Gaudreault, Claude Vaillancourt, Raymond Brançon, Paul Roux, Anne-Marie Voisard, Ernest Fontaine, Pierre Belleau, Jacques Samson, Benoît Routhier, Benoît Lavoie, Martine Corrivault, Marc Saint-Pierre, Jacques Dallaire, Fortunat Marcoux, Marcel Rioux, Christine Jones, Aline Couture, Nicole Campeau, Vianney Duchesne, Donald Doyle, Georges Angers, Jean-Albert Girard, Marcelle Bérubé, Jean-Claude Picard, Jacques Dumais, Ovila Huot, Serge Turgeon, Yves Duberger, Jean Royer, René Beaudin, Monique Bernier. Source : Archives Le Soleil

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C’est par un vote de 78 % que le Syndicat des journalistes de Québec décide de rentrer au travail le lundi 26 août 1974, mettant ainsi fin à une grève de 12 heures au Soleil. Abandonnant la bataille syndicale engagée sur le principe du plancher d’emploi, les journalistes ont plutôt accepté la dernière proposition patronale garantissant la sécurité d’emploi aux 107 journalistes et correcteurs d’épreuves, ainsi qu’aux 40 employés de soutien attachés à la rédaction. Les cinq membres de l’exécutif sont André Dionne, président, au centre, flanqué, à sa droite, de Gilles Boivin et Marcel Collard, à sa gauche, de Michel Samson et Vincent Cliche. (Extrait d’une nouvelle signée Hélène Archambault, de la Presse canadienne, publiée dans l’édition du Soleil du mardi 27 août 1974.) Source : Archives Le Soleil

élevé de griefs durant ces années. Six de ces griefs touchent des clauses professionnelles53. Bien que plusieurs griefs ne relèvent pas de la période Beauchamp, l’un d’entre eux se rend en Cour d’appel sous 53. Esther Déom, 40 ans de syndicalisme chez les journalistes québécois, p. 162.

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Au cours de la grève de 1977, le rédacteur en chef, Claude Beauchamp, et le président-directeur général du Soleil, Paul Audet, avaient des vues différentes sur la façon de régler le conflit. Paul Audet a commencé sa carrière comme reporter à L’Événement en 1942. Il avait 19 ans. Le 1er octobre 1974, il est nommé président-directeur général. Il quitte en 1987 après 46 ans au Soleil. Source : Archives Le Soleil

son mandat. Une journaliste, Anne-Marie Voisard, écrit un texte de présentation d’une enquête dans lequel elle fait des mises en garde concernant la méthode utilisée. Le Soleil lui demande de faire des corrections, jugeant son texte trop critique. Après le refus de la journaliste, le directeur de l’information rédige le texte qui précédera l’enquête. Cela remet « en cause le libre exercice de la profession de journaliste, la liberté d’opinion et d’expression, ainsi que le droit du public à une information

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complète54 ». Le premier grief porte sur le non-respect de ces principes. De plus, l’employeur adresse une lettre de réprimande à la journaliste, ce que le syndicat conteste. Il s’agit du deuxième grief. Dans sa décision, l’arbitre Claude Morin estime que, bien qu’il n’y ait pas d’atteinte à la liberté d’expression, Le Soleil aurait dû publier le texte de la journaliste. De plus, il demande que la lettre de réprimande soit retirée. Cette cause se rend par la suite jusqu’en Cour d’appel. Celle-ci mentionne qu’il y a eu un excès d’autorité de la part de l’arbitre concernant le premier grief, mais qu’il avait toute la compétence voulue concernant la décision sur la lettre de réprimande. Cette décision de la Cour d’appel va jusqu’en Cour suprême qui refuse d’entendre la cause quelques mois plus tard55. Outre les tensions créées par ces procédures, des changements interviennent également dans le contenu du journal. Claude Beauchamp mentionne que les articles étaient trop longs et analytiques et pas assez factuels. Des journalistes acceptent mal toutes ces transformations. Le climat se détériore et c’est l’impasse. En 1976, le président Jean Garon est libéré durant une année par le syndicat pour travailler à temps plein à la préparation du prochain contrat de travail. Cette décision est prise en assemblée générale56. Outre la première séance de négociation du 15 décembre 1976 avec le dépôt du projet de convention du syndicat, vingt séances auront lieu par la suite jusqu’au 16 juin 1977. Le syndicat demande 54. Ibid., p. 163. 55. Ibid., p. 164. 56. Entrevue avec Jean Garon, 3 mai 2000.

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Un grief déposé par Anne-Marie Voisard au milieu des années 1970 se rend jusqu’en Cour suprême. L’affaire a trait à la substitution, à la une, d’un texte de la journaliste par un texte du directeur de l’information d’alors, Claude Masson. Anne-Marie obtient gain de cause devant l’arbitre Claude Morin qui lui donne raison sur toute la ligne et exige même la publication de l’article supprimé par Claude Masson. Le Soleil porte le litige en Cour supérieure. Il perd encore une fois. Il va en appel. Cette fois, il gagne. Le syndicat porte à son tour le jugement en Cour suprême. Ce sera finalement le droit de gérance qui l’emportera. « L’affaire JeanDominique Brunel a son point de départ en septembre 1975, rappelle Anne-Marie Voisard. Il s’agissait d’une enquête sur la jeunesse québécoise effectuée par un Français beau parleur et subventionnée en partie par Le Soleil. Le texte principal que j’avais écrit et signé fut remplacé, in extremis, par un autre papier, non signé, rédigé celui-là par Claude Masson. Mon texte indiquait les limites de l’enquête. Il devenait une sorte de mise en garde aux lecteurs. L’article patronal, qu’on lui a substitué, ne voyait que du beau, du bien, du bon. À nos yeux, il devenait trompeur. » Sur la photo, on voit Anne-Marie Voisard à sa machine à écrire. Son voisin de bureau est notre ancien collègue Damien Gagnon. En 1980, Anne-Marie a reçu le prix Judith-Jasmin pour sa série intitulée « Alcool et travail ». Source : Archives Le Soleil

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alors la nomination d’un conciliateur. Comme l’exprime le président du syndicat dans une lettre adressée au ministre du Travail, « les sujets qui demeurent en litige sont les suivants : droits et obligations du syndicat ; droits et obligations de l’employeur ; recrutement des employés ; mouvement des employés ; ancienneté ; sécurité d’emploi ; conditions du travail professionnel ; congés et régimes d’avantages sociaux ; heures de travail ; rémunération ; primes et dépenses ; griefs ; arbitrage ; comité conjoint ; portée et durée de la convention ; de même que le préambule et les annexes57 ». Comme on peut le constater, les deux parties sont loin d’une entente. Jean Garon mentionne que la question salariale ne constituait pas le cœur du litige. Après sept ans d’expérience, les journalistes retirent un salaire de 335 $ et ce, pour une semaine de 32 heures échelonnée sur quatre jours. Le bras de fer entre les deux parties concerne principalement les clauses professionnelles touchant le contenu du journal. À ce titre, la direction accuse le syndicat de vouloir imposer l’autogestion58. Lors de l’assemblée générale du 25 août 1977, sous la gouverne du président d’élections, Guy Marsolais de la FNC, 82 journalistes se prononcent en faveur de la grève et 14 s’y opposent, soit 85 % pour un débrayage59. Après avoir rejeté les dernières offres patronales du 28, les 108 57. Archives du SJQ inc., correspondance 29 juin 1977. 58. Claude Gravel, « Le Soleil en grève, Francœur : nous ne ferons aucun effort pour publier le journal », La Presse, 30 août 1977, p. C16. 59. Archives du SJQ inc., procès-verbal de l’assemblée générale du 25 août 1977.

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Au début de la grève de 1977, déclenchée le 30 août à minuit, les journalistes vivent des moments d’euphorie. D’autant plus qu’ils ne sont pas isolés. Cinq semaines après Le Soleil, le 6 octobre, les quotidiens La Presse et Montréal Matin ferment à leur tour, paralysés par l’arrêt de travail de leurs syndicats CSN et FTQ. Au Soleil, la grève était prévisible. Dès 1973, la famille Gilbert mettait en vente son entreprise parce qu’elle se sentait incapable d’affronter financièrement un arrêt de travail prolongé. Dans le désordre, sur la photo, on reconnaît Fernando Lemieux, Benoît Routhier, Régis Tremblay, Jean Martel, Myriam Paquet, Marc Saint-Pierre, Pierre Champagne, Richard Côté, Martine Corrivault, Alain Bouchard, André Paradis, Monique Duval, Raymond Giroux, Tom Fréchette, Jacques Quirion, Yves Bernier, Louis-Jules Devault, Robert Dion, Micheline Drouin. Source : Le Syndicat des journalistes de Québec

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journalistes du Soleil et les 32 employés de soutien de la rédaction déclenchent une grève légale le 30 août à minuit. Cette grève affecte 600 syndiqués de la production et des bureaux. Le propriétaire du journal, Jacques Francœur, mentionne que Le Soleil ne sera pas publié durant ce conflit. Claude Beauchamp s’attend à ce que la grève dure sept mois. À ce propos, Jean Garon raconte qu’au sortir de l’assemblée générale où le vote de grève est pris Claude Beauchamp lui aurait dit : « On va se revoir en mars ». L’organisation de la grève se met en branle. Outre le comité de négociations (Jean Garon, Ghislaine Rheault, Vincent Cliche, Benoît Routhier), nous retrouvons une direction de grève (Guy Marsolais, Marc Lestage, adjoint). Différents comités se greffent à cette structure. Le comité des finances (Marc Lestage, Jean-Paul Gagné, Léonce Gaudreault) s’occupe des prestations de grève et de la collecte de fonds. Le comité d’information (Pierre Boulet, René Beaudin) voit à la liaison avec différentes instances telles que les membres du SJQ, les autres employés du Soleil, les syndicats de la FNC et le Conseil central de Québec. Au sein de ce comité, des membres font les contacts avec les médias des différentes villes et en région (Micheline Paradis, Gilles Boivin, Georges Angers, Réal Laberge). Finalement, le comité d’organisation s’occupe des tâches qui concernent l’équipement, le local, le piquetage et les loisirs (Alain Bouchard, Jacques Dallaire, Marcel Collard, Martine Corrivault, Andrée Roy, André Forgues, Ginny Armstrong)60. 60. Archives du SJQ inc., documents 1977-8. Entretien avec Marc Lestage, 26 juin 2000.

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Le piquet de grève par un petit matin frileux de novembre 1977. Trois piqueteurs tiennent le fort : Tom Fréchette, Gisèle Lafrance et Micha, son petit chien. Dans Le Devoir, Bernard Descôteaux, alors correspondant à Québec, écrit : « Personne au Soleil, patron ou syndicat, ne nie que pour la santé même du journal, il fallait en venir à un tel affrontement. Il fallait vider l’abcès... » Bernard Descôteaux note que le conflit a des racines profondes. Le Syndicat des journalistes a la réputation dans le milieu d’être le plus militant de tous les syndicats de journalistes au Québec. En dix ans, il a obtenu la tête de cinq directeurs de la rédaction. Le nœud du problème tourne autour de la gestion de la salle de rédaction, selon Descôteaux. Le Syndicat des journalistes réclame la cogestion. Le patron accuse le syndicat de vouloir autogérer la rédaction. Source : Archives Le Soleil, 1977

Durant cette période, d’autres journalistes sont en grève, dont ceux de La Presse et du Montréal-Matin. « Durant le conflit, les journalistes du Soleil tiennent quantité d’assemblées, ouvertes aux autres médias. Contrairement à leurs collègues de La Presse qui arpentent le

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trottoir, eux aussi, au même moment, les journalistes du Soleil n’imposent pas à leurs collègues des autres journaux un black-out total des informations relatives au litige. Même en grève, ils n’oublient pas que la fonction première d’un journaliste est d’informer61. » Les deux parties étaient prêtes pour cette grève. La partie patronale avait pris une assurance-grève et le syndicat avait amassé des fonds pour le paiement de prestations de grève62. Deux sources de financement permettent l’attribution de ces allocations, soit le Fonds de défense de la CSN et celui du SJQ63. Ce fonds, amassé en neuf mois, permet le versement d’une allocation hebdomadaire minimale de 100 $ pour les grévistes et une somme additionnelle pour chaque enfant ou conjoint à charge. Pour avoir droit à ces prestations, tous les membres doivent s’inscrire au piquetage ou occuper une autre fonction au sein d’un comité64. L’horaire du piquetage est de quatre jours par semaine. Le syndicat tient tous les mercredis une assemblée générale. Ces assemblées ont lieu dans un local des arts graphiques. Il s’agit d’un syndicat international avec lequel le SJQ a les meilleures relations. Ce local est situé dans un édifice à la pointe des rues Arago et Saint-Vallier.

61 Pierre Godin, La lutte pour l’information, p. 220. 62. Gaétan Fontaine, « Au Soleil, c’est l’affrontement et la grève ! » Le Journal de Québec, 30 août 1977, p. 2. 63. Archives du SJQ inc., procès-verbal de l’assemblée générale du 25 août 1977. 64. Archives du SJQ inc., procès-verbal de l’assemblée générale du 15 septembre 1977.

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Au début de septembre 1977, la direction du Soleil décide de publier le cahier publicitaire Le Courrier du consommateur. La publication de cette circulaire donne lieu à de vives réactions de la part des journalistes. Pour empêcher la publication de ce cahier durant la deuxième semaine, des grévistes dressent des lignes de piquetage dans le parc Colbert, là où s’effectue la distribution de la circulaire. Les agents de publicité du Soleil rebroussent chemin. La Sûreté municipale de Sainte-Foy intervient contre six grévistes, dont deux femmes qui tentaient de bloquer la distribution du catalogue publicitaire65. Aucun acte de violence n’est posé66. La publication du Courrier du consommateur est alors interrompue. Parmi les autres gestes posés par le Syndicat des journalistes, des grévistes dressent une ligne de piquetage pour appuyer le personnel de CJRP en grève. Une première tentative de négociation depuis le 28 août échoue le 22 septembre sans la présence du conciliateur. Pour l’exécutif, la partie patronale n’a présenté aucune nouvelle offre. D’autre part, la direction accuse les journalistes de n’apporter aucune modification à leurs demandes initiales67. Le 25 octobre, les membres du syndicat reçoivent une lettre de la direction où il est question des avantages des nouvelles offres. Il y a une reprise des 65. Martine Corrivault, « Le Soleil six mois après : une grève créatrice », Le Devoir, 17 mars 1978, p. 5. 66. « Le Soleil : La police était au rendez-vous », Le Journal de Québec, 16 septembre 1977, p. 7. 67. Bernard Descôteaux, « Le conflit au quotidien Le Soleil, La reprise des négociations échoue », Le Devoir, 23 septembre 1977, p. 15.

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négociations le 31 octobre. Le 18 novembre, le syndicat rompt les discussions. Les négociations ne reprendront « que lorsque le porte-parole patronal aura fait la preuve qu’il détient de l’employeur un véritable mandat de négociations68 ». Une semaine plus tard, le propriétaire du Soleil, Jacques Francœur, envoie une lettre à chaque journaliste en grève. Il mentionne que le comité patronal de négociation possède un mandat clair de sa part. Le syndicat désapprouve alors cette manière de procéder et dénonce les moyens par lesquels l’employeur prend contact avec les membres. Pour le syndicat, ces moyens ne relèvent pas du « mécanisme normal de reprise des négociations69 ». Outre les négociations, les grévistes demeurent très actifs. Durant le conflit, des piquets de grève sont organisés. Sur les lignes de piquetage, plusieurs projets se dessinent dont le bulletin d’information du SJQ, Entre les lignes. Ce titre réfère effectivement aux lignes de piquetage70. De plus, on projette de publier une brochure qui se veut une réflexion sur la profession de journaliste dans différents secteurs. Le lancement officiel de l’ouvrage collectif Écris et tais-toi a lieu le 24 octobre. À la fin de l’année, une seconde « création collective » est envisagée. Québec demain regroupe davantage des dossiers d’information, d’analyse et des textes de fiction touchant diffé68. Archives du SJQ, procès-verbal de l’assemblée générale du 18 novembre 1977. 69. « Le comité patronal du Soleil a un mandat clair, dit Francœur », Le Devoir, 26 novembre 1977, p. 8. 70. Entrevue téléphonique avec Marc Lestage, 26 juin 2000.

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rents sujets tels que la politique, l’économie. Cet ouvrage sera publié en 1978. D’autres activités sont également entreprises par le SJQ. Au mois de décembre, des membres du SJQ et du Syndicat des employés du personnel de soutien de la rédaction vont au Saguenay. Voici comment le secrétaire du SJQ, Jacques Dallaire, fait le bilan de la manifestation au Saguenay : Sous un froid sibérien (-33 °C), près d’une cinquantaine de braves du SJQ, de même que des membres du Syndicat des employés du personnel de soutien de la rédaction se sont rendus en expédition au Saguenay, dans le but de perturber les opérations du Quotidien à Chicoutimi. Mis à part le fait qu’un membre du SJQ a failli y laisser un pouce lors d’une altercation avec une tigresse déchaînée, qu’un policier de Chicoutimi ait incité un employé du Quotidien à enfoncer la ligne de piquetage à l’aide de sa voiture et que nos collègues de l’endroit aient oublié de se lever pour venir appuyer les manifestants, tout s’est bien déroulé71 !

À l’hiver 1978, la CSN fait des pressions sur le SJQ afin d’en venir à un règlement. On aimerait que le syndicat assouplisse ses positions. Il n’est pas question pour le SJQ d’acquiescer à ces demandes. Par ailleurs, les syndicats bénéficient d’une relative autonomie au sein de la centrale. 71. Archives du SJQ, procès-verbal de l’assemblée générale du 14 décembre 1977.

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En novembre de la dramatique année 1977, les journalistes en grève publient une revue de combat : Écris et tais-toi. Il s’agit de se financer et de ne pas perdre la main. Il s’agit aussi de « jeter un éclairage cru sur le métier ». La publication, appuyée par tout le mouvement syndical, rapporte 80 000 $ au fonds de grève. Cinq mois plus tard, un deuxième numéro, intitulé Québec demain, est publié. Le ton oscille entre le pessimisme total et l’humour noir. Source : Syndicat des journalistes de Québec

Jusqu’à la fin de février 1978, les deux parties demeurent sur leurs positions. Aucune rencontre n’a eu lieu depuis le mois de novembre. Les négociations se déroulent par la suite par l’entremise de Raymond Lebœuf, un conciliateur nommé par le gouvernement. Après les contrepropositions effectuées de part et d’autre, le syndicat et l’employeur se rencontrent le 17 mars pour discuter d’une proposition globale de l’entreprise. Le lendemain, l’assemblée générale refuse de se prononcer sur cette offre qui

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renfermerait peu de changements72. Le 28 mars, le syndicat dépose des contre-propositions qui sont refusées par l’employeur. Me Jean Beauvais, le négociateur patronal, mentionne : « Loin de présenter un document susceptible de rapprocher les parties, le Syndicat des journalistes a soumis à la direction du journal des demandes nouvelles et accrues73. » Selon le négociateur patronal, ces demandes visent à augmenter le contrôle du syndicat sur la gestion et le contenu du journal. Par ailleurs, les journalistes font connaître le contenu de leurs contre-propositions par une missive aux 40 cadres du journal et à M. Jacques Francœur. L’Union typographique de Québec, qui regroupe 350 typographes, blâme les journalistes concernant l’avenir du Soleil. Dans une lettre que ce syndicat fait parvenir à chacun des grévistes, il les invite à contester leurs dirigeants syndicaux74. Raymond Lebœuf voit son rôle changé : de conciliateur il devient médiateur spécial. Alors que Le Soleil accepte le rapport qu’il remet le 24 avril, 77 % des journalistes rejettent les propositions du médiateur lors de l’assemblée générale du 26 avril75. Les raisons de ce rejet sont reliées à des clauses professionnelles. Le médiateur note dans son rapport : « De nouvelles et nombreuses con72. « L’offre du Soleil jugée insuffisante », Le Devoir, 20 mars 1978, p. 8 73. « Le Soleil déçu par les demandes du syndicat », Le Devoir, 30 mars 1978, p. 9. 74. « SJQ : Le Soleil se livre à une odieuse opération de chantage », Le Devoir, 1er avril 1978, p. 30. 75. Bernard Descôteaux, « Les journalistes du Soleil rejettent le rapport de médiation », Le Devoir, 27 avril 1978, p. 3.

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traintes pour la partie patronale, notamment au chapitre de la définition des postes, des pouvoirs accrus concédés au comité conjoint et des restrictions sur les mutations76 ». C’est l’impasse. Le 8 mai 1978, le SJQ et le Syndicat des employés du personnel de soutien de la rédaction demandent au premier ministre Lévesque la convocation de la Commission parlementaire permanente des communications. « Cette demande des syndicats en grève depuis le 30 août fait suite à l’annonce par le président du conseil d’administration du Soleil, M. Jacques Francœur, de la fermeture indéfinie du Soleil et de la mise à pied de ses cadres77. » Le 17 mai, une commission parlementaire entend les deux parties. C’est la première fois depuis le conflit de la United Aircraft qu’une commission parlementaire étudie un conflit dans le secteur privé78. L’opposition est plus favorable aux journalistes que le gouvernement. Jean Garon dira qu’il s’agit là de l’un des moments les plus difficiles de la grève79. Le Soleil accepte de reprendre les négociations par la suite et un accord est signé le 22 juin 1978. Après plus de dix mois de grève, les journalistes acceptent le 3 juillet le protocole de retour au travail.

76. « Nouvel espoir de règlement, Le Soleil accepte en bloc la proposition du médiateur », Le Devoir, 26 avril 1978, p. 3. 77. Archives de la Fédération nationale des communications (FNC), 8 mai 1978. Boîte 10, 14-09-052 A14-23-004. Dossier Syndicat des journalistes de Québec 14-11-04. Copie du télégramme. 78. Bernard Descôteaux, « Les journalistes du Soleil veulent recourir à un conseil de médiation », Le Devoir, 17 mai 1978, p. 2. 79. Entrevue avec Jean Garon.

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Deux syndicats du Soleil ont mené le même combat lors de la grève de 1977-1978. Les membres du Syndicat des journalistes de Québec et du Syndicat des employés du personnel de soutien de la rédaction ont piqueté ensemble pendant dix longs mois. Les « soutiens » ont d’ailleurs été le seul syndicat de la boîte à respecter la ligne de piquetage de leurs collègues journalistes. En 1996, sous la présidence de Jean-Didier Fessou, les deux syndicats fusionneront pour former le Syndicat de la rédaction du Soleil (SRS). À l’avant-plan sur la photo, on reconnaît Jean-Claude Rivard, Pierre Racine, Réjean Lacombe, Marcelle Bérubé, Pierre Champagne, Jocelyn Émond, Anne-Marie Voisard, Sylvie Filion, Thierno Diallo, André Forgues, Paul-André Bédard, Guy Dubé, Fortunat Marcoux, Marc-André Bilodeau, Serge Turgeon.

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C’est sous la présidence de Jean Garon que le Syndicat des journalistes de Québec (SJQ) déclenche la grève le 30 août 1977 à minuit. Une grève qui durera dix longs mois. L’année 1980 marquera son départ du Soleil ainsi que celui du rédacteur en chef Claude Beauchamp. Source : Archives Le Soleil, 1970

Bien qu’il n’y ait pas de gains spectaculaires pour le syndicat, certaines choses sont préservées. Le syndicat obtient le « grief ouvert » qui prévoit l’application d’une procédure de grief sur toute condition de travail, l’interdiction à l’employeur de céder des textes d’information à d’autres quotidiens, à l’exception des chroniques habituelles. Concernant les salaires, les journalistes obtiennent la parité avec leurs collègues de La Presse lors de la dernière année de la convention80. 80. François Barbeau, « Le Soleil pourrait paraître samedi », Le Devoir, 4 juillet 1978, p. 6.

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En tout, le syndicat aura versé plus de 400 000 $ à ses membres. Cet argent provenait en grande partie des allocations versées par la CSN et des revenus des deux publications Écris et tais-toi et Québec demain. Par ailleurs, le syndicat avait également emprunté 150 000 $ à la Caisse populaire des travailleurs de Québec81. Jean Garon et Claude Beauchamp quittent Le Soleil en 1980 et Claude Masson devient rédacteur en chef. *** Une grande partie du syndicalisme de la fin des années 1960 et des années 1970 privilégie davantage l’affrontement dans les relations de travail. Le SJQ s’inscrit dans ce courant, où la tendance dominante le rend plus revendicateur que par les années antérieures. Dans ce contexte, les revendications portent principalement sur l’aspect professionnel du travail de journaliste. Dans un premier temps, les journalistes s’identifient davantage à la Fédération nationale des communications (FNC) qu’à la Fédération professionnelle des journalistes du Québec (FPJQ). Le retrait du syndicat de la FPJQ reflète ce sentiment d’appartenance. Dans son optique, la FNC constitue l’organisme le plus susceptible de régler les problèmes reliés au journalisme. Outre cette identification, l’histoire du SJQ durant cette période est marquée par plusieurs conflits qui se concrétisent, entre autres, par des arrêts de travail. L’affrontement entre le syndicat et la direction lors de « l’affaire Baribocraft » en 1967 permet l’insertion d’une 81. Archives du SJQ inc., correspondance, 1er juin 1978.

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clause sur l’autonomie professionnelle des journalistes. Durant la Crise d’octobre, l’ensemble des journalistes du Québec, dont le SJQ, se mobilisent contre des attaques véhiculées de toutes parts. Une partie des journalistes du SJQ prennent même position contre la politique éditoriale de la direction du Soleil. Quelques années plus tard, Le Soleil vit la première fermeture de son histoire lorsque l’entreprise décrète en 1973 un lock-out à la suite des pressions exercées concernant les changements technologiques. La vente du Soleil et le changement de propriétaire qui s’ensuit en 1974 contribuent à instaurer un climat de tension qui trouvera son aboutissement dans la plus longue grève de l’histoire du journal, celle de 19771978. Cette grève constitue un point tournant car, après cet épisode, les relations de travail ne seront plus les mêmes.

Chapitre 3

une apparente accalmie 1980-2000

A

u sortir de la grève de 1977-1978, le SJQ doit relever des défis qui s’inscrivent dans un contexte qui ne favorise pas les grandes manifestations. Peu de grands conflits marquent cette période, à l’exception de la grève de 1992. Au début des années 1980, une crise économique affecte le monde occidental et le Québec est frappé de plein fouet. Il s’agit de la plus grave crise depuis celle des années 19301. Le gouvernement du Parti québécois impose des décrets à ses employés du secteur public. On assiste à des diminutions de salaire allant de 12 % à 20 %. Par ailleurs, les problèmes économiques amènent des syndicats à envisager d’autres solutions que les affrontements dans leurs relations de travail et certains se tournent vers la concertation, voire le partenariat. La précarisation 1. Paul-André Linteau, René Durocher, Jean-Claude Robert, François Ricard, Histoire du Québec contemporain, Le Québec depuis 1930, tome 2, Montréal, Boréal Compact, 1989, p. 178.

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Le propriétaire du Soleil, Jacques G. Francœur, aimait se dire journaliste malgré sa présence à la tête d’UniMédia. Il adorait parler boulot avec les journalistes. La photo a été prise en 1979 dans la salle de rédaction du Soleil. Source : Archives Le Soleil, 1979

de l’emploi est présente dans plusieurs secteurs. Dans les entreprises de presse, les journalistes permanents doivent composer de plus en plus avec les surnuméraires, les collaborateurs et les pigistes. Au Soleil, le personnel passe de 110 journalistes à la fin des années 1970 à 75 dans les années 1990. Durant les années 1980, les relations entre Le Soleil et le Syndicat des journalistes s’effectuent sous le signe de la tranquillité. La grève de 1977-1978 a laissé des traces. Sous une apparente accalmie, le SJQ vit deux conceptions

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du syndicalisme. Ces visions, qui se côtoient et parfois s’opposent, veulent agir dans le meilleur intérêt des membres. Bien que les buts s’apparentent, les moyens utilisés peuvent parfois varier. Une partie est prête à aller jusqu’à l’affrontement dans certains cas, lorsque le besoin se fait sentir. L’autre rejette la grève comme solution aux conflits. Sur le plan structurel, des changements sont intervenus au sein du syndicat. S’il existait des sections indépendantes les années précédentes, la situation n’est plus la même durant les années 1980 et 1990. La disparition de L’Action et de la section des journalistes du Saguenay–LacSaint-Jean suscite la centralisation des activités du SJQ. La nouvelle constitution ne fait état d’aucune unité distincte. Le calme après la tempête Durant la grève de 1977-1978, les pertes encourues par Le Soleil profitent au Journal de Québec qui recueille plus de 50 000 lecteurs2. Aucun autre gros conflit de travail n’envenime les relations de travail à court terme. Toutefois, on assiste à certains changements. Sous la présidence de Georges Angers de 1980 à 1984, deux conventions collectives sont négociées. Bien qu’aucun conflit n’ait lieu, le contexte de la crise économique est défavorable à l’entreprise. L’employeur propose de modifier des conditions de travail. Il est question d’un gel de l’effectif, d’un non-remplacement systématique des journalistes en cas de départ et d’une réduction du temps 2. Caroline Montpetit, « 75 % des journalistes reconduisent le vote de grève au Soleil », Le Devoir, 23 octobre 1992, p. A4.

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Monique Giguère (au centre) a été la première femme présidente du Syndicat des journalistes de Québec (SJQ). « Tout un défi à relever », dirat-elle. Élue en 1984, elle démissionne en 1987 après avoir réussi à imposer le projet syndical d’aménagement de la salle de rédaction et fait adopter les premiers amendements au régime de retraite. Sur la photo où les appareils ATEX cohabitent avec les vieilles machines à écrire, on reconnaît Denis Angers, Roger Bellefeuille, Jean-Charles Grenier, Louise Picard, Jean-Pierre Lemieux, Ernest fontaine, Pierre Belleau, Jacques Deschênes. Monique Giguère sera réélue présidente du Syndicat de la rédaction du Soleil en 1998. Source : Archives de Monique Giguère, 1985

supplémentaire3. L’assemblée générale du 3 novembre 1982 porte sur ces problèmes. Le préambule de la résolution adoptée se lit comme suit : « Considérant que l’employeur a annoncé son intention de modifier les 3. Archives de la Fédération nationale des communications (FNC), 2 mai 1978. Boîte 10, 14-09-052 A14-23-004. Dossier Syndicat des journalistes de Québec 14-11-04. Rapport du président Georges Angers : Analyse des coupures annoncées au comité conjoint du 27 octobre 1982.

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conditions de travail des membres du SJQ en invoquant le contexte économique », l’assemblée adopte donc la résolution « d’empêcher toute modification à la convention collective de travail ». Après la présidence de Georges Angers, pour la première fois dans l’histoire du SJQ, une femme devient présidente du Syndicat des journalistes de Québec en 19844. Monique Giguère, journaliste au Soleil depuis 1967, occupe cette fonction. Plusieurs femmes du SJQ ont auparavant tenu des réunions pour se préparer à accéder à des positions stratégiques au sein du syndicat. Mais peu d’entre elles se disent prêtes à faire le saut. Les responsabilités familiales représentent pour certaines une entrave à cette accession comme c’est souvent le cas pour les femmes des autres syndicats. Les activités syndicales empiètent souvent sur les soirs de semaine et sur les fins de semaine5. « C’était une décision difficile, un pas important à franchir », dira Monique Giguère6. À l’instar des autres journaux, les femmes constituent une minorité dans la salle de rédaction du Soleil. En 1977, sur un total de 108 journalistes, il y avait 15 permanentes7. Bien que les femmes représentent 40,9 % des membres de la Fédération nationale des communications (FNC) en 1986, la

4. À La Presse en 1964, une femme présidait le Syndicat des journalistes. 5. Le Collectif Clio, L’histoire des femmes au Québec depuis quatre siècles, Montréal, Le Jour, 1992, p. 600. 6. Entrevue avec Monique Giguère et Andrée Roy, 19 juin 2000. 7. Nicole Beaulieu, « La course au scoop », Écris et tais-toi, édité par le Syndicat des journalistes de Québec, 1977, p. 91.

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Trois membres de l’équipe de la section « Économie » en 1985, Pierre Martel, Jean-Charles Grenier et Hélène Baril. Source : Archives Monique Giguère, 1985

situation demeure la même qu’en 1977 au quotidien de la capitale. Durant cette période, leur présence dans la structure syndicale devient toutefois plus importante. L’exécutif comprend sept personnes, dont trois femmes qui agissent à titre de présidente, de vice-présidente (Hélène Baril) et de trésorière (Andrée Roy)8. « Tout était nouveau, tout était à bâtir, à commencer par notre crédibilité comme femmes », dira encore Monique Giguère. Durant les années 1980, la CSN fait des pressions auprès de ses syndicats pour que des comités de condition féminine soient formés. Différents thèmes sont alors 8. Archives du SJQ inc., dossier FNC.

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traités dont le harcèlement sexuel, les programmes d’accès à l’égalité et de meilleures conditions pour les travailleuses enceintes9. Des femmes du SJQ refusent la formation de ce type de comité. Pour la journaliste Andrée Roy, la raison de ce refus réside dans la ghetthoïsation des problèmes spécifiquement féminins. Pour elle, ces problèmes doivent être discutés en assemblée générale et concernent tous les membres10. Par ailleurs, les articles des conventions collectives sur les changements technologiques comprennent des mesures concernant le travail des femmes enceintes devant un écran cathodique. Celles-ci peuvent être affectées à d’autres tâches11. Sous le mandat de Monique Giguère, de 1984 à 1988, on assiste aux premiers amendements au régime de retraite à la suite d’une entente intersyndicale. Outre le SJQ, ce comité est composé des représentants (conseillers en publicité), des employés de bureau, des employés du personnel de soutien de la rédaction, de l’imprimerie et des communications, des communications graphiques et des travailleurs de l’entretien. Concernant les changements technologiques, le SJQ réussit en négociation à faire accepter les plans du syndicat concernant l’aménagement de la salle de rédaction et obtient un ordinateur pour chaque membre alors qu’auparavant plusieurs personnes utilisaient le même appareil12. Par ailleurs, depuis la con9. Le Collectif Clio, p. 601. 10. Entrevue avec Andrée Roy, 14 juin 2000. 11. Archives du SJQ inc., convention signée le 9 juillet 1984 pour 1984-86. 12. Entrevue avec Monique Giguère, 19 juin 2000.

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La deuxième grève de l’histoire du Soleil aura lieu en 1992 sous la présidence de Pierre Pelchat. Lors de l’assemblée générale du 15 octobre, les journalistes votent la grève par 48 voix contre 41. Le vote sera renversé le 23 décembre. Le résultat une fois encore est serré : 52 pour le retour au travail, 46 contre. Ce résultat provoque la démission en bloc de l’exécutif et du comité de négociations. Source : Archives Le Soleil

vention collective de 1973-1976, des comités paritaires sont prévus sur les changements technologiques. En 1987, Le Soleil est à vendre. Plusieurs groupes s’intéressent à l’achat du journal dont Paul Desmarais et Power Corporation, le groupe Lavalin et Cogéco. Encore là, le gouvernement québécois intervient dans cette transaction. Le motif de cette intervention est relié à la concentration de la presse. Finalement, Conrad Black et son

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groupe Hollinger acquièrent UniMédia dont fait partie Le Soleil13. Comme lors de la transaction de 1974, le SJQ s’inquiète de cette vente. Le nouveau propriétaire, par la voix de Peter White, fait savoir qu’il veut faire du Soleil un nouveau Washington Post à Québec. Pour Pierre Pelchat, président du syndicat en 1988, le principal changement a été l’arrivée de Robert Normand comme président et éditeur du journal. Les relations de travail sont devenues par la suite plus difficiles. Concernant les négociations qui ont duré près de 26 mois avant la grève de 1992, Pierre Pelchat mentionne : « Il n’y a pas eu de négociations. Cela a été une guerre d’usure que le patron a entreprise14 ». Au début des années 1990, plusieurs tentatives de négociations échouent. Il y a même une rencontre entre des représentants du syndicat et Conrad Black à l’assemblée annuelle de Hollinger à Toronto. Durant la même période, le syndicat dépose un grief d’information à propos de la suppression d’un paragraphe effectuée par le pupitre dans un article d’un chroniqueur. Le nom de Robert Normand fait partie de cette coupure15. Il y a des signes de tension au sein du SJQ. On demande à l’ancienne présidente, Monique Giguère, élue par l’assemblée générale au comité de préparation du projet de convention de démissionner. Elle refuse. À l’assemblée générale du 20 juin 1990, son élection est 13. Louis-Guy Lemieux, Le Roman du Soleil, un journal dans son siècle, Septentrion, 1997, p. 259. 14. Entrevue avec Pierre Pelchat, 28 avril 2000. 15. Pierre Pelchat, Entre les lignes, Bulletin d’information du SJQ, 6 avril 1989.

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annulée par un vote de 33 voix contre 2916. Pour elle, il s’agit d’« un geste odieux et antisyndical ». La grève de 1992 En 1992, les négociations ne donnent toujours pas de résultats. Durant cette année, le SJQ vivra la deuxième grande grève de son histoire. Cette grève est déclenchée après dix-huit mois de conciliation avec l’employeur, Le Soleil. Lors de l’assemblée générale du 15 octobre 1992, les journalistes votent pour une grève illimitée. Le résultat est serré, soit 48 voix en faveur et 41 contre. Durant cette assemblée, on demande une reprise du vote. Une semaine plus tard, à l’assemblée générale du 22 octobre, des membres du SJQ demandent la démission du comité de négociation. À la suite d’un vote secret, 33 journalistes se prononcent en faveur et 59 s’y opposent. Le comité de négociation demeure donc en place et s’adjoint deux nouveaux membres. Une autre assemblée générale spéciale a lieu immédiatement après celle-ci à la suite d’un avis de motion pour reconsidérer le vote de grève pris le 15 octobre. Cette assemblée porte donc exclusivement sur cette question. Cette fois, le nouveau vote donne lieu à un mandat de grève beaucoup plus fort que celui de la semaine précédente. Dans une proportion de 75 %, les journalistes se prononcent en faveur de la grève17. Com16. Archives du SJQ inc., procès-verbal de l’assemblée générale du 20 juin 1990. 17. Archives du SJQ inc., procès-verbaux des assemblées générales des 15 et 22 octobre.

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ment expliquer ce revirement entre les deux assemblées à une semaine d’intervalle ? Andrée Roy avance qu’à partir du moment où un mandat de grève est exercé il n’y a plus de convention collective, créant ainsi un vide juridique. Comme le spécifie la convention collective : « La convention demeure en vigueur pendant que les parties discutent de son renouvellement conformément aux dispositions du Code du travail ». Dans cette situation, il valait mieux donner un mandat de grève plus fort qui pouvait servir d’outil en vue des négociations. L’autonomie professionnelle et la question des collaborateurs en région représentent les principaux enjeux de ce conflit. La direction demande plus de latitude concernant les affectations, ce qui signifie le pouvoir de désigner un journaliste lorsque personne ne postule à un poste. Les journalistes ne veulent pas être affectés à d’autres tâches que leur spécialisation. D’autre part, le litige s’enlise sur le recours de l’entreprise à des collaborateurs non syndiqués principalement dans les régions. En effet, les collaborateurs en région et les pigistes ne sont plus représentés par le syndicat depuis la convention collective de 1988-1990. Pour le syndicat, cette situation permettrait à la direction d’exercer un plus grand contrôle de l’information puisque ces derniers ont un statut précaire18. À l’instar de la grève de 1977, on attribue l’origine du conflit au climat de travail institué par la direction. Pour l’ancien président du syndicat, Pierre Pelchat, cette grève 18. Pierre Cayouette, « 96 grévistes sans appui. Croisade pour l’autonomie professionnelle », Le Devoir, 12 décembre 1992, p. 4.

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est le résultat du climat de tension qui régnait dans la salle de rédaction sous le régime de Robert Normand, alors président et éditeur. Après avoir voté la grève, le SJQ s’organise. Toutes les semaines, la représentation syndicale tient des réunions d’information. Les journalistes reçoivent des allocations de grève de 400 $ par semaine. En retour, ils doivent effectuer 16 heures de piquetage. À la différence de la grève de 1977-1978, Le Soleil continue à être publié avec la participation des cadres de la rédaction. Pendant ce temps, le SJQ fait une plainte au Conseil de presse de Québec. Il accuse l’entreprise d’utiliser des scabs pour faire fonctionner le journal. Le ministère du Travail donne suite à cette demande d’enquête. Bien que le journal soit publié durant cette grève, Le Soleil ne traite aucunement du conflit dans ses pages d’information. C’est à travers les pages publicitaires que la direction envoie des messages aux grévistes. À défaut de ne pouvoir publier dans le journal, le SJQ paie pour de la publicité dans Le Devoir et le journal Voir. Par ailleurs, un sondage commandé par Le Soleil révèle que 73 % des lecteurs pensent que le quotidien publié par les cadres est « comparable ou meilleur » qu’avant le conflit. Ce sondage est utilisé par la direction comme publicité dans les pages du journal. Gilles Boivin, responsable des relations publiques pour le syndicat, rétorque que « si 73 % des lecteurs réguliers sont satisfaits du contenu, cela signifie également que les 27 % restants sont insatisfaits, ce qui constitue un dur coup pour un quotidien en période de grève19 ». 19. Cité dans Caroline Montpetit, « Le ton monte dans le conflit du Soleil », Le Devoir, 3 novembre 1992, p. A1.

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Au début du mois de novembre, une première séance de conciliation a lieu depuis le déclenchement de la grève. La réunion d’information du 19 novembre donne lieu à la manifestation de plusieurs dissensions au sein du SJQ. La scission se fait de plus en plus évidente chez les journalistes : « Pendant que les officiers syndicaux misent sur le temps et trouvent encourageante la reprise des pourparlers avec l’employeur, l’exaspération gagne de plus en plus les journalistes de toutes tendances. La fermeture du quotidien est même évoquée par certains scribes tandis que d’autres appellent à une accentuation des moyens de pression20 ». À la fin du mois de novembre, la conciliation ne donne aucun résultat entre les deux parties. Par la suite, il y a une rencontre entre Gérald Larose, de la CSN, et Pierre DesMarais II, président du groupe UniMédia. Comme l’exprime un journaliste de La Presse : « Il est relativement rare de retrouver à la même table de négociations, dans un conflit local, des représentants de la direction de la centrale syndicale et d’une grande entreprise21 ». Les négociations en comité restreint entre la CSN et le groupe UniMédia pour régler le conflit au Soleil échouent le 6 décembre après 72 heures de négociations22.

20. Robert Pelletier, « Après un mois de grève au Soleil, l’exaspération gagne les journalistes », Journal de Québec, 20 novembre 1992, p. 15. 21. François Berger, « Gérald Larose et Pierre Desmarais se mêlent de la grève au Soleil », La Presse, 2 décembre 1992. 22. Jean-Paul Soulié, « Au Soleil, le comité restreint aurait échoué », Le Devoir, 8 décembre 1992, p. A8.

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Bien que, durant la grève, le SJQ obtienne des appuis, d’autres s’opposent à leurs actions, notamment les autres syndicats de l’entreprise. Outre le soutien de la centrale syndicale (CSN), la Fédération professionnelle des journalistes (FPJQ) appuie les grévistes du Soleil. À l’exception de la plupart des employés du personnel de soutien de la rédaction, les cinq autres syndicats, dont trois affiliés à la CSN, franchissent les lignes de piquetage. Les autres syndicats affiliés à la FNC, dont celui des employés de bureau, franchissent les lignes de piquetage des journalistes23. Cette situation embarrasse le président de la CSN, Gérald Larose. Malgré l’appel à la solidarité, les 200 syndiqués affiliés à la CSN ont majoritairement pris la décision de continuer leur travail24. Le 20 décembre, la direction présente de nouvelles offres. Jean Ferron, directeur des communications au Soleil, signale à ce propos : « Ces offres ont été déposées afin de mettre fin au conflit rapidement. Elles ne représentent pas une nouvelle base de négociations. Elles sont à prendre ou à laisser25 ». Dans cette offre, Le Soleil propose que la masse salariale pourra atteindre 5 %. Le comité exécutif a l’intention de recommander le rejet de ces offres. La pierre d’achoppement concerne la désignation, c’est23. Michel Auger, « Le conflit au Soleil », La Dépêche, Fédération nationale des communications (CSN), janvier-février 1993, vol. 12, no 1, p. 20. 24. Pierre Cayouette, « 96 grévistes sans appui, Croisade pour l’autonomie professionnelle », Le Devoir, 12 décembre 1992, p. 4. 25. Cité dans Yves Leclerc, « Les offres du Soleil à prendre ou à laisser », Journal de Québec, 23 décembre 1992, p. 22.

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à-dire l’imposition d’un poste à une personne syndiquée et les quotas de collaboration extérieure26. Entre-temps, des membres du SJQ obtiennent la tenue d’une assemblée générale, car il n’y en a pas eu durant la grève. Ceux et celles « qui ne voulaient plus de la grève comme solution ont tout fait durant ces neuf semaines-là pour faire reconvoquer une assemblée générale où ils pourraient voter27 ». La constitution du SJQ prévoit à cet effet que : « […] le secrétaire sera tenu de convoquer une assemblée générale spéciale des membres sur réquisition à cette fin, par écrit, signée par au moins vingt (20) membres en règle, dans les sept (7) jours suivant la réception d’une telle demande écrite qui devra spécifier le but et les objets d’une telle assemblée spéciale. À défaut par le secrétaire de convoquer telle assemblée dans le délai stipulé, celle-ci pourra être convoquée par les signataires eux-mêmes de la demande écrite28 ». Cette procédure est utilisée par un groupe de journalistes pour forcer la tenue de l’assemblée du 23 décembre. À l’assemblée du 23 décembre qui a lieu à l’édifice de la CSN, les journalistes se prononcent sur les dernières offres patronales. Le résultat est serré : 52 en faveur et 46 contre, soit 53,06 %. Ce résultat provoque la démission en bloc de l’exécutif et du comité de négociations qui quittent la salle. L’assemblée élit un nouvel exécutif et un nouveau comité de négociations pour discuter du protocole de 26. Caroline Montpetit, « Les grévistes du Soleil voteront sur les offres », Le Devoir, 22 décembre 1992. 27. Entrevue avec Andrée Roy. 28. Archives du SJQ, Constitution et règlements.

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retour au travail. La nouvelle présidente est Andrée Roy. Elle occupera la présidence jusqu’en 1994. L’argument ayant eu le plus de poids pour expliquer ce résultat, comme l’indique le nouveau vice-président à l’information, M. André-A. Bellemare, est « celui où les gens n’étaient pas prêts à continuer la grève encore longtemps29 ». Le syndicat préserve des acquis de la dernière convention qui a été signée en 1988. Ces acquis concernent le plancher et la sécurité d’emploi30. De nouveaux dossiers Durant les années 1990, Le Soleil connaît de nombreuses transformations. En 1994, Le Soleil subit une réduction de l’effectif au sein de l’entreprise. Plusieurs typographes prennent leur retraite31. En 1995, Le Soleil déménage sur le chemin Saint-Louis et le nouveau local du syndicat se retrouve sur le boulevard René-Lévesque. Sous le mandat de Didier Fessou, deux événements importants se produisent. Le syndicat réintègre, à la demande de quelques journalistes, notamment les jeunes, la Fédération professionnelle des journalistes (FPJQ) 22 ans après sa désaffiliation en 1973. L’assemblée générale du 8 novembre 1995 entérine cette décision32. Par ailleurs, le 7 juin 1996, une requête est déposée au Commissaire général du travail en vue d’une fusion du Syndicat des 29. « Le conflit au Soleil, Les journalistes disent oui dans la division », Journal de Québec, 24 décembre, p. 7. 30. Idem. 31. Louis-Guy Lemieux, Le Roman du Soleil, p. 235. 32. Archives du SJQ inc., correspondance, 25 septembre 1995.

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journalistes de Québec et celui des employés du personnel de soutien de la rédaction Certaines tentatives de fusion entre différents syndicats par le passé avaient été encouragées par l’entreprise. Le 27 septembre, le certificat d’accréditation du nouveau syndicat, le Syndicat de la rédaction du Soleil, concerne : Tous les employés de la rédaction du journal, salariés au sens du Code du travail, y compris les courriéristes parlementaires, à l’exception du rédacteur en chef, du gérant de la rédaction, des chefs de l’information, des correspondants de l’extérieur, ainsi que tous les journalistes salariés au sens du Code du travail de la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean, de même que ceux de la région du Bas-du-Fleuve, Côte-Nord et autres territoires régionaux non déjà couverts par une accréditation, le caricaturiste-éditorialiste et tous les salariés du personnel de soutien de la rédaction, représentant les salariés du secrétariat, les messagers, les téléphonistes, les salariés du centre de documentation, sauf les préposés aux machines et au centre de transcription33.

Durant le mandat d’Yves Therrien de 1997 à 1998, il y a une reprise des discussions avec les autres syndicats de l’entreprise. Monique Giguère, de nouveau présidente en 1998, reprend le dossier du régime de retraite, mais aucune entente intersyndicale n’intervient à ce sujet. Le Syndicat de la rédaction du Soleil décide de faire cavalier 33. Archives du SJQ inc., dossier fusion.

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seul et signe un nouveau contrat de travail le 22 juin 2000. Les employés de bureau se rallient le 20 septembre et les représentants le 23 novembre 2000. *** Les années 1980 et 1990 ne sont guère propices à un syndicalisme de revendication. Dans cette optique, le SJQ n’a vécu qu’un arrêt de travail. On assiste toutefois à certaines nouveautés. En 1984, une première femme préside les destinées du SJQ. Certains dossiers attirent de plus en plus l’attention, dont les changements technologiques et le régime de retraite. La grève de 1992 fait ressortir d’autres problèmes reliés cette fois à l’autonomie professionnelle des journalistes. Bien que ne faisant pas l’unanimité, cette grève démontre les changements intervenus dans les relations entre les journalistes et l’entreprise. Le rapport de force est davantage du côté du Soleil. Par la suite, le SJQ réintègre la FPJQ et change de nom lors d’une fusion avec le Syndicat des employés du personnel de soutien de la rédaction. Il devient le Syndicat de la rédaction du Soleil. La signature de la première convention collective du nouveau millénaire a lieu le 22 juin 2000 pour la période du 1er janvier 2000 au 31 décembre 2003, soit presque 50 ans après que le SJQ eut obtenu son certificat d’accréditation, le 28 juin 1950.

bibliographie

Sources Entrevues Michel Alloucherie Monique Duval Françoise Côté Clément Trudel Jean Garon Claude Beauchamp Monique Giguère Andrée Roy Pierre Pelchat

Journaux, périodiques et brochures Maclean’s Cité Libre Le Soleil Le Devoir La Presse Le Journal de Québec Écris et tais-toi Entre les lignes, Bulletin d’information du SJQ Québec demain

132 les 50 ans du syndicat de la rédaction du soleil La Dépêche, Fédération nationale des communications (CSN). L’Imprimeur, organe mensuel des ouvriers syndiqués de l’imprimerie, février et novembre 1956. Le Journaliste canadien-français, organe mensuel de l’Union canadienne des journalistes de langue française (UCJF).

Archives du Syndicat des journalistes de Québec Constitution et règlements du Syndicat des journalistes de Québec inc., 13 mai 1969. Procès-verbal de l’exécutif du Syndicat des journalistes de Québec inc., 8 décembre 1967. Procès-verbal de l’assemblée générale spéciale du SJQ, le jeudi 29 octobre 1970. Procès-verbal de l’exécutif, 11 décembre 1972. Procès-verbal de l’assemblée générale annuelle, 7 avril 1973. Rapport de Gilles Boivin et Michel Alloucherie sur les changements technologiques. Communiqué de la direction, M. Gabriel Gilbert au personnel du journal, le 7 mai 1973. Procès-verbaux des assemblées générales spéciales du Syndicat des journalistes de Québec inc., tenues les 3 et 10 mai 1973. Dossier Lock-Out, entente intervenue le 10 mai 1973 entre Le Soleil limitée et le Syndicat des journalistes de Québec inc. Procès-verbal de l’exécutif, 9 avril 1973. Procès-verbaux des exécutifs des 23 et 27 août 1973. Procès-verbal de l’assemblée générale du 27 août 1973. Communiqué de presse, l’ACIQ : une solution concrète et réaliste à la vente du Soleil. Procès-verbal de l’assemblée générale du 25 août 1977. Procès-verbal de l’assemblée générale du 15 septembre 1977.

Bibliographie

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Archives nationales du Québec, Fonds ministère du Travail (E24) Conciliation et arbitrage, dossier G-150, 1950-51 ; dossier G-98, 1951-52 ; dossier G-220, 1953-54 ; dossier G-426, 1963-64. Conventions collectives, dossier S-445, 1945-46 ; dossier GA-230, 1946-51.

Archives personnelles de M. Clément Trudel Structures de l’ACSJ. Cours sur le journalisme, dépliant de 1965 à 1966. Rapport du comité d’arbitrage et sentence, Le Soleil limitée vs Le Syndicat des journalistes de Québec inc. (section Chicoutimi– Lac-Saint-Jean). Exposé du grief, 3 novembre 1964.

Archives de la Fédération nationale des communications (FNC) Boîte 10, 14-09-052 A14-23-004. Dossier Syndicat des journalistes de Québec 14-11-04. Copie du télégramme sur la Commission parlementaire, 8 mai 1978.

134 les 50 ans du syndicat de la rédaction du soleil Boîte 10, 14-09-052 A14-23-004. Dossier Syndicat des journalistes de Québec 14-11-04. Rapport du président Georges Angers : Analyse des coupures annoncées au comité conjoint du 27 octobre 1982.

Ouvrages généraux Le Collectif Clio, L’histoire des femmes au Québec depuis quatre siècles, Montréal, Le Jour, 1992. Linteau, Paul-André, René Durocher, Jean-Claude Robert et François Ricard. Histoire du Québec contemporain, Le Québec depuis 1930, tome 2, Montréal, Boréal Compact, 1989.

Études Cardin, Jean-François, « La CSN et le syndicalisme de combat », La CSN, 75 ans d’action syndicale et sociale, Montréal, PUQ, 1998. Cercle des femmes journalistes, Vingt-cinq à la une, Biographies, Le Cercle des femmes journalistes. Montréal, La Presse, 1976. Dagenais, Bernard, La Crise d’octobre et les médias : le miroir à dix faces, VLB éditeur, 1990. Demers, François (dir.), Communication et syndicalisme, des imprimeurs aux journalistes, Montréal, Méridien, 1989. Déom, Esther, 40 ans de syndicalisme chez les journalistes québécois, Montréal, Agence D’Arc inc., 1989. Dulude, André, « Politiques comparées des syndicats de journalistes de quelques quotidiens du Québec et du Canada anglais », Mémoire de maîtrise, École de relations industrielles, Université de Montréal, 1978. Godin, Pierre, La lutte pour l’information. Histoire de la presse écrite au Québec, Le Jour, Montréal, 1981. Hardy, Alfred, Patronage et patroneux, Montréal, Les Éditions de l’Homme, 1979.

Bibliographie

135

LeBlanc, Gérald, « Le vécu de la concentration, La petite histoire du Montréal-Matin, du Soleil et du Journal du Nord-Ouest », Du côté des journalistes, Études sur l’industrie des quotidiens, Commission royale sur les quotidiens, vol. 2. Ottawa, 1981, p. 117-139. Lemieux, Louis-Guy, Le Roman du Soleil. Un journal dans son siècle, Septentrion, 1997. Lysiane Gagnon, « Journaliste et syndiqué : le perpétuel dilemme », Dans les coulisses de l’information. Les journalistes (dir. Florian Sauvageau, Gilles Lesage et Jean de Bonville), Montréal, Québec/Amérique, 1980. Piotte, Jean-Marc, Du combat au partenariat, interventions critiques sur le syndicalisme québécois, Édition Nota bene, 1998. Rouillard, Jacques. Histoire de la CSN 1921-1981, Montréal, Boréal Express, 1981. Rouillard, Jacques, Histoire du syndicalisme au Québec, des origines à nos jours, Montréal, Boréal, 1989. Thwaites, James, « Québec : un nouvel ordre du journalisme », Les relations de travail dans l’industrie des quotidiens, Études sur l’industrie des quotidiens, Commission royale sur les quotidiens, vol. 5, Ottawa, 1981, p. 161-182. Présidence du syndicat des journalistes du Soleil André Roy : 1951-1954 (L’Action catholique) Gérard Fecteau : 1954-1955 (L’Action catholique) Rosaire Tremblay : 1956-1957 (?) (L’Action catholique) Raymond Gagné : 1960 Benoît Massicotte : 1960 Jacques Revelin : 1961 (L’Action catholique) Clément Trudel : 1962-1966 André Dionne : 1967-1969 ( ?) Maréchal Francoeur : 1970 André Fortin : 1970 François Demers : 1970-1971

136 les 50 ans du syndicat de la rédaction du soleil Georges Angers : 1971-1973 André Dionne : 1973-1974 Jean Garon : 1974-1980 Georges Angers 1980-1984 Monique Giguère : 1984-1987 Pierre Pelchat : 1988-1992 Andrée Roy : 1992-1994 Didier Fessou : 1995-1997 Therrien, Yves : 1997-1999 Giguère, Monique : 1999

table des matières

Pourquoi et comment raconter l’histoire d’un syndicat ?

7

Chapitre 1

de la fondation à l’affirmation

23

Chapitre 2

un syndicat de combat

69

Chapitre 3

une apparente accalmie

113

Bibliographie

131

composé en adobe garamond 11,5 selon une maquette réalisée par josée lalancette et achevé d’imprimer en avril 2001 sur les presses de agmv-marquis à cap-saint-ignace pour le compte de denis vaugeois éditeur à l’enseigne du septentrion