Travail de Gestion Des Risques-2 [PDF]

  • Author / Uploaded
  • Gui
  • 0 0 0
  • Gefällt Ihnen dieses papier und der download? Sie können Ihre eigene PDF-Datei in wenigen Minuten kostenlos online veröffentlichen! Anmelden
Datei wird geladen, bitte warten...
Zitiervorschau

     

TRAVAIL INDIVIDUEL 
La Gestion des risques dans les Institutions Financières Islamiques

Professeur Pierre Saint-Laurent Gestion des risques (3-202-02)

Par
 Guillaume POLET Matricule: 11210720

Travail Individuel de Gestion des Risques POLET Guillaume

Table des Matières Introduction  .....................................................................................................................  3   Le système financier islamique (Principes et Produits)  ...................................................  2   Principes   ...................................................................................................................................  2   L’interdiction du prêt à intérêt (riba)  .............................................................................................  2   L’interdiction du risque excessif (gharar)  ......................................................................................  2   L’adossement à des actifs réels  ......................................................................................................  2   Le Partage des pertes et des profits (3P)  ........................................................................................  2   L’interdiction de vendre ce que l’on ne possède pas  .....................................................................  3   L’interdiction des activités illicites  ................................................................................................  3   Les principaux produits financiers islamiques  .........................................................................  3   Les contrats de partenariats respectant les principes des 3P  ..........................................................  3   Produits avec cout+marge  .............................................................................................................  4   Contrat à terme islamique  ..............................................................................................................  5   Processus de gestion des risques  .......................................................................................  5   Identification des Risques  .........................................................................................................  6   Risque commercial translaté  ..........................................................................................................  6   Risque de crédit  .............................................................................................................................  6   Risque de marché  ..........................................................................................................................  7   Risques liés au stock  ......................................................................................................................  8   Risque de liquidité  .........................................................................................................................  8   Risques opérationnels  ....................................................................................................................  8   L’enchevêtrement des risques  ........................................................................................................  9   Risque de concentration  ...............................................................................................................  10   Risque de réputation du secteur  ...................................................................................................  10   Outils pour la gestion des risques   ...........................................................................................  10   Les différentes approches pour gérer les expositions aux risques  ..........................................  11   Gestion du risque commercial translaté  .......................................................................................  11   Gestion du risque de crédit  ..........................................................................................................  12   Gestion du Risque opérationnel  ...................................................................................................  13   Gestion du Risque de marché  ......................................................................................................  13   Gestion du risque de liquidité  ......................................................................................................  14   Gestion de la réputation  ...............................................................................................................  15   Conclusion  ......................................................................................................................  15   Bibliographie  ..................................................................................................................  16   Webographie  ..................................................................................................................  17  

 

2  

Travail Individuel de Gestion des Risques POLET Guillaume

Introduction A l’heure actuelle, alors que la finance conventionnelle peine à trouver des solutions durables face à la crise, un secteur méconnu il y a encore quelques années, connaît une forte progression, celui de la finance islamique. En effet, ces dernières années ce secteur connait un taux de croissances à 2 chiffres notamment une croissance annuelle nette de 16% des actifs financiers islamiques pour la période de 2006 à 2012.1 Le terme finance islamique couvre l’ensemble des produits financiers qui respectent les principes de la Charia. Ces produits supposent donc l’interdiction du Riba (l’intérêt), le Gharar et Maysir (interdiction de l’incertitude des ventes et de la spéculation), le Zakat (impôt religieux annuel, le haram (l’interdiction d’investir dans des activités illicites comme les alcooliers, l’industrie pornographique ou encore les jeux de hasard) et enfin le respect du principe de partage des pertes et des profits (3P). De par les principes sur lesquelles elle se fonde, bon nombres d’observateurs, de professeurs et d’investisseurs perçoivent dans ce type de finance, une solution socialement responsable et éthique comparée à la finance conventionnelle. Durant le 20ème siècle mais également plus récemment avec la crise des subprimes, les crises financières se sont mutées en crises économiques ayant un impact important sur l’économie réelle. Ces différentes crises ont placé le risque au centre de l’attention amenant ainsi un développement accru du domaine de la gestion des risques. La gestion des risques, désormais indispensable, bénéficie depuis 1988 d’un cadre légal définit par les différentes conventions de Bâle, permettant ainsi la supervision du processus de gestion des risques au sein des institutions financières. Les institutions financières islamiques (IFI), à l’instar de leurs consœurs conventionnelles, n’échappe pas à la nécessité de la mise en place d’une gestion des risques accrue. En effet les banques islamiques sont avant tout, comme les banques conventionnelles, des intermédiaires visant à traiter et transformer les risques. Non seulement le secteur islamique se trouve confronté aux mêmes risques que les banques conventionnelles, mais en plus de cela ce secteur est sujet à des risques qui lui sont spécifiques. Ceux-ci sont principalement dus aux spécificités des produits islamiques mais également au fait que les banques islamiques, encore jeunes, sont surtout présentes dans des pays émergents où les pratiques en matières de transparence de l’information et de gestion des risques sont encore trop peu développés. Au travers de ce travail nous analyserons les Institutions Financières Islamiques sous l’angle de la gestion des risques. Nous analyserons donc successivement les types de risques auxquels sont exposées les IFI, les outils et enfin les moyens mis en place pour contrôler les différents risques.

                                                                                                            1  Source:http://www.iinanews.com/page/public/report.aspx?id=10356#.VlTVDkJGSyE,   Récupéré  le  20  Novembre    

3  

Le système financier islamique (Principes et Produits)  

Principes Pour pouvoir mieux saisir les risques auxquels sont exposées les IFI, il est important de présenter les différents principes de la finance islamique mais aussi les produits spécifiques des IFI. Comme dit ci-dessus, la genèse de la finance islamique se trouve dans les textes religieux de la Charia. De ces textes découlent des principes auxquels les IFI et les produits financiers sont soumis. En voici les principaux. L’interdiction du prêt à intérêt (riba) Ce premier principe recouvre à la fois l’interdiction de faire payer un intérêt sur un prêt quelconque mais aussi l’usure. De par les textes religieux le prêt ne doit générer aucun rendement. Cette interdiction vaut tant pour l’intérêt contractuel sur le prêt que pour toute autre forme d’intérêt de retard ou d’intérêts déguisés en pénalités et commissions. L’interdiction du risque excessif (gharar) Selon le professeur Mustafa Al-Zarqua, le gharar « est la vente d’objets probables dont l’existence ou les caractéristiques ne sont pas certaines en raison de leur nature risquée à l’instar des jeux de hasard « les transactions comportant donc une part d’incertitude (voire de hasard) excessive, sur les caractéristiques du bien échangé sont interdites. Le terme caractéristique couvre, la taille, le prix, la livraison, les échéances ou encore le montant du remboursement. » (Mahmout

A. EL-GAMAL, 14) Cela amène transparence, clarté et les parties à être en parfaites connaissance de la valeur des biens échangés L’adossement à des actifs réels De ce principe découle que les transactions financières doivent se faire sur des actifs tangibles et échangeables. Combiné au principe décrit ci dessus, cela a comme conséquence que les produits dérivés (futures, forwards, options) sont prohibés Pourtant la situation est plus nuancée dans la pratique, puisqu’a à des fins de gestion de risque certaines IFI utilisent des produits dérivés tels que les SWAP de profit, forwards de commodités ou encore les Forex Swaps à partir des contrats Salam (cfr. Supra) (Karim CHERIF, 46) Le Partage des pertes et des profits (3P) Ce principe des 3P est défini comme étant « un mécanisme financier qui lie le capital financier à l'industrie et au commerce sans utiliser un intérêt ». (KHAN (1984) Ce mécanisme financier permet de procéder à des transactions commerciales sans faire usage de l’intérêt et donc rester dans le respect des principes de la Charia. Le risque est donc partagé entre l’investisseur (IFI) et l’entrepreneur (Karim CHERIF,18) Ce principe est utilisé dans plusieurs techniques de financements dont les principales sont le Mudarabah (cfr supra) et le Musharaka. Dans le cadre d’un Mudarabah, la banque finance un projet dans son entièreté alors que l’entrepreneur via son travail (investit son capital humain) tente de rendre ce projet profitable. Dans le cas où le projet est un succès, les profits sont

Travail Individuel de Gestion des Risques POLET Guillaume

partagés entre la banque, les déposants (ceux grâce à qui la banque est capable de financer ce projet) et l’entrepreneur. Dans le cas contraire, les pertes sont entièrement subies par celui qui finance (Banque+déposants). Le Musharaka est un technique de financement similaire mais dans laquelle, les profits mais aussi les pertes sont partagées tant par celui qui finance que le financé. A ce stade, on observe d’hors et déjà que les conséquences de ce principe des 3P amène un risque supérieur puisque le revenue de la banque, dans le cas d’un instrument de financement dépend donc uniquement du rendement et de la viabilité du projet. De plus le rendement ne peut-être fixé à l’avance comme c’est le cas dans les banques conventionnelles avec les prêts comportant un intérêt. L’interdiction de vendre ce que l’on ne possède pas  

Pour pouvoir jouir du profit gagné soit par une vente soit par la détention d’un actif ou d’un bien, il faut en être le propriétaire. Cela est du au fait que c’est la détention d l’actif rend le propriétaire soumis au risque et donc ce risque doit être rémunéré. Donc de cela, on ne peut pas vendre un bien qu’on ne possède pas car on ne supporte pas le risque lié à sa détention (la seule exception à cette règle sont les contrats Salam et Istina), ni vendre des actifs avant de les détenir L’interdiction des activités illicites La finance islamique, proscrit tout investissement dans des produits ou activités considérés par la Charia comme illicites (alcool, industrie pornographique, armement, tabac, …).

Les principaux produits financiers islamiques Il existe bien évidemment bien plus d’instruments financiers que ceux décrits ci-dessous, mais dans un souci de clarté seuls les principaux sont décrits ci-après. Les contrats de partenariats respectant les principes des 3P Mudarabah Un contrat Mudarabah est un contrat conclu entre 2 parties dans lequel la banque (rabb al mal) fournit le capital nécessaire à un projet à une autre partie (un entrepreneur, le moudarib). Précisons toutefois que le capital engagé par la banque provient des dépôts des déposants Le Moudarib lui en contrepartie amène son savoir-faire, et son engagement pour mener le projet à bien. Chacune des 2 parties perçoit le profit généré par le projet selon un ratio préétabli (en général ce ratio varie entre 40-55% pour la banque). Alors que les pertes, elles, sont entièrement supportées par la partie qui fournit le capital sauf dans le cas où celui qui reçoit le capital a mal exécuté ou a fait preuve de négligence vis à vis du contrat. On considère dans ce cas que la perte pour celui qui utilise le capital est en quelque sorte un coût d’opportunité du capital humain (son travail) investit à générer un surplus de revenu. Mousharaka Dans ce contrat, le capital fournit pour le financement du projet provient d’une part de la banque (via ses déposants) et/ou de plusieurs autres partenaires. Dans ce cas ci les profits ET les pertes sont partagés au prorata de l’apport de chacun. Ce contrat correspond en fait à une participation par la banque dans l’actionnariat d’une société. Il existe une variante au Mousharaka, le diminishing Mousharaka dans lequel l’entrepreneur peut racheter les parts de l’entreprise possédées par la banque. Une différence non négligeable avec le contrat

 

3  

Travail Individuel de Gestion des Risques POLET Guillaume

Mudarabah est que toutes les parties au contrat peuvent à la manière d’un financement par venture, intervenir dans la gestion du projet. Ce qui en terme de gestion des risques, a certaines conséquences. Produits avec cout+marge Mourabaha Le Mourabaha est un contrat d'achat et de revente dans lequel la banque achète à un fournisseur un bien corporel à la demande de son client, pour lui revendre ensuite. Le prix de revente est fondé sur le coût plus une marge bénéficiaire (El Qorchi, 2005). On peut donc considérer qu’il y a 2 contrats, d’une part entre la banque et celui qui fournit le bien demandé par le client et d’autre part entre la banque et le client qui demande le bien. Le montant de la marge est convenu entre les 2 parties et le montant du coût est connu lorsque le contrat est initié. Ce mécanisme permet donc à un investisseur d’acquérir un bien sans pour autant contracter un prêt avec intérêt ce qui permet de respecter le principe d’interdiction du riba. Une caractéristique importante du Mourabaha qui découle du principe que l’on ne peut vendre ce que l’on ne possède pas et qui le différencie d’un prêt d’argent conventionnel est que la banque doit posséder le bien. Elle est donc à un moment donné de l’opération, propriétaire du bien. Cette caractéristique aura bien évidemment des conséquences quand à la gestion du risque en rapport avec ce type de produits surtout concernant la détention de l’actif en question. Notons que grâce à la flexibilité et l’adaptabilité de ce mécanisme, le Mourabaha est un des produits islamiques les plus utilisés. Cette technique de financement permet de générer des montages financiers plus sophistiqués dans de nombreuses activités commerciales. Les IFI participent ainsi intensément à de nombreuses transactions commerciales.

Figure 1 : Principe de fonctionnement d’un Mourabaha Source : http://www.les-investissements.fr/investissements/isr/La-finance-islamique-definition-activites-etinstruments-article-1262.php

Contrat de location/leasing (Ijara) “C’est un contrat de location. Un bien est acquis par la banque auprès d’un fournisseur. La banque le loue à l’entrepreneur et le coût de location plus la marge sont échelonnés sur toute la période du bail. “ (Karim CHERIF, 36)

Figure 2: Principe de fonctionnement d’un Ijara

 

4  

Travail Individuel de Gestion des Risques POLET Guillaume Source : http://www.les-investissements.fr/investissements/isr/La-finance-islamique-definition-activites-etinstruments-article-1262.php

Contrat à terme islamique Bien que les dérivés soient proscrit (cf. infra) il existe quelques exceptions qui permettent de faciliter certaines affaires commerciales via des contrats de Salam et d’Istina. Au vu du caractère exceptionnel de ces 2 types de contrats, de nombreuses conditions doivent être satisfaites. Cela laisse donc peu de place à la flexibilité comme cela peut-être le cas avec les contrats de participations. Salam Le Salam peut être définit comme « une vente à terme, c'est-à-dire une opération où le paiement se fait au comptant alors que la livraison se fait dans le future” (Wadi MZID,7) « L'acheteur paie comptant le prix négocié à l'initiation du contrat. Le vendeur livre le bien à terme. Cependant, le vendeur signe une promesse de livraison à l'acheteur en précisant les modalités de la vente (nature de marchandises, quantités, prix, délais et modalités de livraison ou de vente. »(Moussa DIOP, 36 ) Istina Le contrat d’Istina se différencie du Salam par sa plus grande flexibilité car il n’y pas d’exigence du paiement total de l‘initiation du contrat. Il peut être payé graduellement. De plus ce contrat peut porter sur un contrat non achevé

RÉPARTITION  DES  ACTIFS  ISLAMIQUES  SELON  LE  TYPE  DE  PRODUIT

Istina 2% Ijara 9%

Divers 13%

Instruments   Participatifs 17%

Murabaha 59%

Figure3 : Répartition des actifs islamiques selon le type de produit Source : http://www.les-investissements.fr/investissements/isr/La-finance-islamique-definition-activites-etinstruments-article-1262.php

Afin de bien comprendre l’importance des risques que chacun des produits présentés ci-dessus présente, il est intéressant de voir la répartition des actifs islamiques en moyenne selon le type de produit. On remarque de suite que les Mourabaha et les Instruments participatifs sont les instruments les plus largement utilisés au sein des IFI et doivent donc requérir une attention toute particulière en matière de gestion des risques.

Processus de gestion des risques Intéressons-nous maintenant à la gestion des risques à proprement parler. Le processus de gestion des risques est u processus qui revêt une importance capitale et qui se retrouve intégré

 

5  

Travail Individuel de Gestion des Risques POLET Guillaume

au cœur des activités financières tant au niveau des banques conventionnelles que des banques islamiques. Dans un premier temps nous identifierons les différents risques auxquels les IFI sont exposées, ensuite les outils utilisés pour mesurer ces risques et enfin les mesures prises par les IFI pour contrôler les risques les plus importants Un élément à prendre en considération est que de par son jeune âge, le secteur de la finance islamique ne dispose pas encore d’un cadre réglementaire propre à lui même tel que pour banques conventionnelles avec les accords de Bâle. En effet, les accords de Bâle visent à superviser et à doter les institutions financières d’outils pour la supervision des risques. Les banques islamiques doivent donc adapter les outils de supervisions et les réglementations fournies par les accords de Bâle à leurs spécificités. Enfin, même si de nombreux risques sont communs aux 2 consœurs, des différences émanent des spécificités des mécanismes de financement propres à la finance islamique découlant des principes dans le section ci-dessus.

Identification des Risques   Risque commercial translaté Selon Moody’s ce risque se définit comme » le risque qu’une insuffisance de rendement des actifs de la banque islamique ne se translate en crise de liquidité, conséquence de l’insatisfaction des déposants ».2( Anouar ASSOUNE) Ce risque trouve sa source dans la concurrence que les IFI ont avec les banques conventionnelles mais est également une conséquence directe du principe de partage et de profits. Ce principe a amené à la création d’un compte au passif, le PSIA (Profit Sharing Investment Account). Ce compte sert à rémunérer les déposants selon le principe du partage de profits et des pertes puisque l’institution est capable de rentrer dans des mécanismes de financement tels que le Moudarabah et Mousharaka grâce à l’argent des déposants. Ce compte contient également les marges réalisées sur les instruments tels que Mourabaha ou encore Salam, Istina, … Enfin venons en au risque commercial translaté à proprement parlé. Il est possible que les rendements du compte de Passif PSIA soient insuffisant comparativement à celui des banques conventionnelles. Ce qui pourrait amener les déposants/clients à retirer leurs dépôts, leur fonds au profit des banques conventionnelles proposant un meilleur rendement. Ceci amène évidemment un risque de liquidité très important Pour pallier à ce risque, les IFI adaptent les rendements des comptes PSIA à un taux de référence qui généralement est le taux LIBOR 6 mois. Ceci leur permet de diminuer le risque commercial translaté en restant compétitive vis à vis de leurs homologues conventionnelles mais cela amène un autre risque, celui d’un risque de taux qui sera discuté au point 3.2) Le rendement des instruments de participation (appliquant le principe des 3P)et donc de surcroit le rendement du compte PSIA est très difficilement estimable puisqu’il n’est connu que ex-post lorsque le projet a généré ou non des profits. Les estimations de rendement sont évidemment d’une importance capitale pour la banque. Risque de crédit Le risque de crédit, ou risque de contrepartie se définit comme « le risque qu'un emprunteur ne rembourse pas tout ou partie de son crédit aux échéances prévues par le contrat signé entre lui                                                                                                               Anouar ASSOUNE, Présentation sur la gestion des risques en finance islamique, Moody’s Investors service, Paris , Novembre 2008

2

 

6  

Travail Individuel de Gestion des Risques POLET Guillaume

et l'organisme préteur” (WIKIPEDIA)3. Ce risque représente la quintessence de l’existence d’une banque. En effet, le principe de base d’une banque c’est d’accepter des dépôts de ses clients à partir desquels elle peut accorder des crédits soit à des entreprises soit à des particuliers. Les activités liées au crédit représentent en générale la part la plus importante d’une banque mais en sont également le principal risque puisqu’elle peuvent mener à l’insolvabilité de celle ci comme l’a démontré la récente crise des subprimes en 2007. Néanmoins dans une banque islamique, le risqué de crédit peut être supérieur comparativement aux banques conventionnelles. La source de ce surplus de risque émane des spécificités des produits financiers que la banque islamique offre notamment, les produits respectant le principe des 3P. Prenons l’exemple d’un contrat Mudaraba (cfr. infra) Pour l’IFI (elle fournit le capital) le rendement dépend de nombreux facteurs dont, l’engagement en terme de capital humain par l’entrepreneur mais aussi de facteurs exogènes au projet qui pourraient influencer la réussite de celui-ci. L’entrepreneur pourrait également masquer des mauvais résultats voire même faire preuve d’ingérence (risque d’aléa moral et d’asymétrie d’information). On comprend aisément que ce type de contrat nécessite la mise en place de conditions restrictives et d’un suivi important au vu de l’incertitude importante entourant la rentabilité pour la banque. En effet, comparativement à un prêt classique dans lequel le rendement peut être fixé grâce aux taux d’intérêt (il existe toujours un risque de crédit mais il est moindre). De plus la banque n’a aucun droit de gestion sur le projet. C’est pourquoi ces contrats ne représentent pas la majeure partie des actifs bancaires et sont réalisés avec des professionnels spécialisés sur un horizon de court-terme. Les contrats Mousharaka quant à eux connaissent un plus large succès grâce à leur mécanisme un peu plus avantageux pour la partie fournissant le capital. Risque de marché Le risque de marché se définit comme « l’impact que peuvent avoir des changements de valeurs des variables de marché sur la valeur des positions prises par l’institution. Il se subdivise en risque de taux, risque de change risque de variation de prix » (Esch et al, 29). Dans le cas des banques conventionnelles le risque de variation de prix (volatilité) est facilement compréhensible comme une variation du prix de l’action par exemple. Le risque de taux d’intérêt est évidemment un risque important dans les banques conventionnelles, puisque l’intérêt perçu sur les prêts constitue l’une des bases de leurs revenus. Qu’en est-il des IFI ? Pour répondre à cela, nous nous concentrerons sur le risque de taux d’intérêt et le risque de variation de prix. Un des grands principes de la finance islamique réside dans l’interdiction de l’intérêt quel est alors le risque pour une banque islamique par rapport à des variations du taux d’intérêt ? Cela vient du risque commercial translaté décrit ci-dessus. En effet en ajustant le taux de rendements des PSIA pour leurs dépositaires au taux LIBOR (voir un autre taux de référence), les IFI s’exposent aux évolutions du taux choisi comme référence pour ajuster le rendement des PSIA et donc en l’occurrence aux évolutions du taux LIBOR. (Source: BID, 2002,146). Un autre risque directement lié aux évolutions du taux de référence est le risque de marge. En effet, imaginons que le taux de référence, les IFI s’ajustant à ce taux, augmente, donc la part de profit du comptes PSIA distribuée aux déposants or les marges déjà réalisées sur les produits comme le Mourabaha ou encore le Salam, elles restent inchangées, le résultat net pour la                                                                                                             3  WIKIPEDIA, Récupéré le 18 Novembre de : https://fr.wikipedia.org/wiki/Risque_de_crédit  

7  

Travail Individuel de Gestion des Risques POLET Guillaume

banque est donc une diminution tout autre chose égale par ailleurs. (Sundararajan, V., and Errico L.,12). Intéressons-nous maintenant au risque de variation de prix. Comme on l’a vu avec avec les contrats Mourabaha et selon le principe selon lesquels on ne peut vendre ce que l’on ne possède pas, les banques islamiques doivent être propriétaires du bien corporel. Elles peuvent être contraintes à stocker des biens corporels, des marchandises à la demande de leurs clients ou pour des ventes futures (Salam) . Ce stock de biens corporels ou de marchandises peut évidemment subir une dévalorisation, ce qui est dommageable pour la banque puisqu’elle doit revendre l’actif. Cette spécificité amène donc à une grande sensibilité par rapport aux variations de prix. Risques liés au stock Ce risque est directement lié aux particularités des contrats Mourabaha et Ijara. En effet comme dit précédemment, ces mécanismes de financement impliquent la formation d’une sorte de stockage par la banque car elle doit en être propriétaire. Ce stock s’accompagne de différents risques notamment des risques liés à sa gestion, mais éga même des risques de pertes des produits stockés. Un autre risque directement lié à l’achat du bien par la banque est le risque d’abandons des opérations de financement. En effet lorsque le client décide de rompre l’opération de financement alors que le bien a déjà été acheté par la banque (dans un contrat de Mourabaha par exemple) la banque doit alors trouver un repreneur avec le risque de revendre le bien en question à un moindre prix Risque de liquidité Le risque de liquidité est l’un des enjeux majeurs des banques islamiques. En effet il existe un différentiel important entre les flux entrants et sortants de liquidités dans les dans les institutions financières islamiques. Pourquoi donc ? Etant en pleine phase de croissance, les banques islamiques tentent d produire des rendements élevés en investissant dans de produits financiers de long termes alors que ses flux entrants (les dépôts) sont en grande partie à court ou à moyen terme. Ceci crée donc un déficit de liquidité. Alors que les institutions conventionnelles parviennent à gérer ce risque de liquidité via le marché interbancaire, via l’emprunt ou le prêt (selon ses besoins) le secteur islamique ne dispose pas d’un tel marché qui lui permettrait de se refinancer. De plus alors que les banques conventionnelles disposent de marchés secondaires permettant la liquidations d’actifs la finance islamique ne dispose pas de tels marchés. En effet les principaux instruments de financement tels que le Mousharaka et Mourabaha étant très peu liquide, l’émergence de marchés secondaires semble difficile. Ces instruments sont trop spécifiques que pour pouvoir être rendus facilement négociables. Risques opérationnels “Le régulateur du dispositif Bâle II définit le risque opérationnel comme celui de pertes directes ou indirectes dues à une inadéquation ou à une défaillance des procédures, du personnel et des systèmes internes. Cette définition inclut le risque juridique; toutefois, le risque de réputation (risque de perte résultant d'une atteinte à la réputation de l'institution bancaire) et le risque stratégique (risque de perte résultant d'une mauvaise décision stratégique) n'y sont pas inclus. Cette définition recouvre notamment les erreurs humaines, les fraudes et malveillances, les défaillances des systèmes

 

8  

Travail Individuel de Gestion des Risques POLET Guillaume d'information, les problèmes liés à la gestion du personnel, les litiges commerciaux, les accidents, incendies, inondations.” (Source :WIKIPEDIA)4

A la lumière de cette définition on peut identifier des nombreux risques opérationnels encourus par les IFI. En effet selon Moody’s5 les IFI manquent cruellement de flexibilité opérationnelle dus à leurs procédures administratives très lourdes et un manque important de standardisation des instruments de financements et normes comptables. De plus il y’a un nombre important de transactions/contrats d’achat/vente (dues aux contrats tels que Mourabaha et Ijara) Cela combiné à des procédures administratives lourdes peut retarder de manière assez importante le temps de réaction des IFI face à une situation problématique. Or ce type d’élément peut constituer un avantage compétitif non négligeable dans un environnement concurrentiel comme celui des institutions financières et amène donc à un risque d’affaire ! Enfin le secteur des IFI étant un secteur encore jeune et en pleine croissance, les IFI manquent de spécialistes ayant l’expérience et le background académique suffisants dans le domaine de la finance islamique ou encore le manque d’outils informatiques ne font qu’augmenter ce risque opérationnel. Selon une enquête menée par Moody’s6 auprès des PDG des IFI, c’est une des faiblesses majeures de la finance islamique. Le rôle du banquier au sein d’une IFI diffère de celui d’un banquier au sein d’une Institution conventionnelle. En effet comme nous l’avons vu dans certains types de contrats de participation (comme le Mousharaka) le banquier doit s’impliquer dans la gestion du projet. Cet aspect amène aussi à une pénurie de personnes réellement qualifiées pour travailler au sein des IFI. Les IFI sont également généralement situées dans des pays où la situation politique est instable ce qui représente une source de risque non négligeable. Enfin un risque de non conformité à la Charia (et donc de rendre le contrat et les profits y résultant illicites) existe puisque « en l'absence de formalisation de ces contrats pour les différents instruments financiers, les banques islamiques continuent de les concevoir en fonction de leur appréhension de la Charia, des lois nationales, de leurs besoins et leur intérêt. Ce manque d'uniformisation des contrats et l'absence de cadre juridique destiné à résoudre les problèmes liés à l'exécution de ces contrats pour toutes les parties concernées font augmenter les risques d'ordre juridique » (Moussa DIOP,49)

Il peut exister des risques en matière de gouvernance d’entreprise puisqu’au sein des IFI, le rapport est dualiste au niveau de la direction. D’une part il y a un conseil d’administration qui a pour vocation de maximiser la valeur pour les actionnaires et d’autre part un conseil de la Charia qui contrôle le respect des principes de la Charia pour tous les stratégies, actes, que la banque entreprend. L’enchevêtrement des risques Les instruments financiers islamiques tels que décrits ci dessus, concentrent différentes catégories de risques d’une telle manière qu’il est compliqué de distinguer les différentes catégories de risque auxquels l’instrument est exposé. De plus les normes comptables islamiques sont telles qu’il est difficile via leur seule utilisation d’identifier les différentes classes de risques auxquels les produits financiers sont exposés.

                                                                                                              WIKIPEDIA, Récupéré le 18 Novembre de : https://fr.wikipedia.org/wiki/Risque_opérationnel_(établissement_financier) 5   Anouar ASSOUNE, Présentation sur la gestion des risques en finance islamique, Moody’s Investors service, Paris (Novembre 2008) 6   Anouar ASSOUNE, Présentation sur la gestion des risques en finance islamique, Moody’s Investors service, Paris (Novembre 2008) 4

 

9  

Travail Individuel de Gestion des Risques POLET Guillaume

Risque de concentration Le principe prohibant l’investissement dans les activités considérées comme illicite par la Charia et de manière générale les limites en matière d’investissement diminuent les possibilités de diversification d’une IFI pour l’allocation de ses actifs. Cela a pour risque de circonscrire les possibilités d’investissement à une zone géographique particulière ou même un d’industrie ce qui pourrait le cas échéant augmenter le risque systémique puisque les actifs au sein de industries/secteurs de même type ont une probabilité importante d’être corrélés entre eux. Risque de réputation du secteur Ce risque est très certainement le plus difficile à identifier et surtout à quantifier mais est également très important tant les conséquences de ce risque sont importantes. L’image de l’Islam en général est souvent biaisée en Occident et ne facilite pas la tâche des IFI pour s’intégrer au sein des systèmes conventionnels. De plus de par son manque d’harmonisation et de cadre légal solide mais également son jeun âge, le secteur des IFI manque parfois de crédibilité au yeux des Institutions conventionnelles. Au vu des risques analysés ci-dessus on peut dresser la matrice des risques en fonction de l’intensité de leurs conséquences et de leur fréquence. Dans la partie suivante nous analyserons les techniques de gestion pour les risque les plus importants.

Figure 4 : Matrice des risques

Outils pour la gestion des risques Comme dit précédemment, alors que les banques conventionnelles bénéficient d’un cadre pour leur gestion des risques grâce Comité de Supervision Bancaire de Bâle (CSBB) qui a mis en place un ensemble de normes, de recommandations pour la gestion des risques financiers au sein des Institutions Financières, le secteur des IFI ne bénéfice pas d’un outil aussi puissant que celui ci. Néanmoins, l’Islamic Financial Service Board (organisation internationale située en Malaisie dont le rôle est comparable à celui du CSBB) a émis des standards à destination des IFI en 2009 concernant la gestion. Ces normes émises par l’IFSB sont largement inspirées de celles du Comité de Bâle. (Source : Mohammed Amine ATMANI & Abdelilah EL ATTAR , 32) L’IFSB étant une organisation relativement jeune, elle ne dispose pas d’une profondeur de donnée suffisante qui pourrait lui permettre de produire des modèles stables et solides concernant les actifs à risques. Elle utilise donc les méthodes mises en place par le comité de Bâle concernant les méthodes de calculs pour de nombreux ratios. Prenons par exemple le ratio de solvabilité adapté par l’IFSB pour les IFI. Dans ce ratio le numérateur est exactement le même que pour le ratio conventionnel mais la modification se fait au niveau du dénominateur. En effet sachant qu’en ce qui concerne le compte PSIA (cf. infra) la banque ne supporte que les risques opérationnels (RO), on peut enlever les Risques de Crédit (RC) et de Marché (RM) relatifs à ce compte puisque ceux ci sont subis par les déposants qui investissent dans ce types  

10  

Travail Individuel de Gestion des Risques POLET Guillaume

de comptes. Le dénominateur est donc plus petit et le ratio donc plus avantageux pour les banques islamiques.

Figure 5 : Formule du ratio de solvabilité adapté pour les IFI Source : Mohammed Amine ATMANI & Abdelilah EL ATTAR , L’impact des accords de Bâle III sur les Banques Islamiques , Dossiers de Recherches en Economie et Gestion, Dossier Spécial, 24p, 2013

On peut déjà Remarque via le graphique dessus que les banques islamiques possèdent des ratios de solvabilité largement au dessus des exigences de Bâle (8%) sans vraiment de réelle adaptation de leur part par rapport aux exigences de Bâle. Les fonds propres des IFI sont tout simplement d’une très grande qualité.

Figure 6 : Graphique de la moyenne du ratio de solvabilité des banques islamiques par pays Source : Mohammed Amine ATMANI & Abdelilah EL ATTAR , L’impact des accords de Bâle III sur les Banques Islamiques , Dossiers de Recherches en Economie et Gestion, Dossier Spécial, 24p, 2013

Les outils de mesure de risque tels que la VaR, le RAROC ou encore « stress testing » sont fortement utilisés au sein des IFI dans leurs processus de gestion des risques. La VaR historique est néanmoins difficile à mettre en œuvre tant il y a un manque de profondeur dans les données historiques. Malgré, l’adaptation par l’IFSB des accords de Bâle, leur application reste compliquée tant les services et produits offerts par les IFI diffèrent des banques conventionnelles de plus les IFI ne sont pas obligées de suivre ces normes. Il reste donc beaucoup de progrès à faire pour fournir un outil à la supervision des risques financiers permettant une harmonisation au sein du secteur des IFI.

Les différentes approches pour gérer les expositions aux risques   Gestion du risque commercial translaté Au niveau du risque commercial translaté, il faut surtout s’attarder à la gestion de ces conséquences de ce risque qui amène un risque de marché. Puisque en adoptant un taux de

 

11  

Travail Individuel de Gestion des Risques POLET Guillaume

référence pour leur rendement les IFI se protègent déjà contre le risque commercial translaté mais cette couverture amène d’autres risques comme nous l’avons vu ci haut. Gestion du risque de crédit Etant à la base de son activité, une IFI se doit de gérer le risque de crédit. Outre les différentes recommandations en matière de capital directement inspirées de Bâle III, les IFI ont d’autres approches quand à la gestion du risque de crédit. Afin de standardiser la gestion du risque de crédit l’IFSB a émis de nombreuses normes pour les IFI. Nous n’irons pas dans le détail ici de ces normes tant, il serait impossible d’en dresser un portrait ne serait-ce que bref. Notons simplement par exemple que pour les Certaines techniques utilisées pour gérer le risque de crédit au sein des banques conventionnelles ont été adoptées et adaptées pour les IFI. Le nantissement Le nantissement est “une garantie, une sûreté réelle mobilière portant sur un bien incorporel (des parts sociales, un fonds de commerce par exemple). Il s'agit donc d'une garantie pour le créancier qui obtient un droit sur un bien de son débiteur.” 7Excepté pour les certains types de gages portant sur des produits périssables ou encore sur des produits financiers avec intérêts, la technique de nantissement est autorisée par la Charia pour gérer le risque de crédit. Néanmoins un problème important subsiste. Les actifs pouvant être utilisés comme garanties sont peu nombreux et peu liquides. De plus bon nombres d’actifs qui seraient compatibles à la Charia ne le sont pas selon d’autres normes internationales. Le rating interne Le rating interne, lorsqu’il est mis en œuvre au seins d’une institution financière permet à celleci juger de la qualité de sa contrepartie à savoir l’emprunteur. Cela lui permet d’allouer ses fonds en fonction de la qualité de l’emprunteur. Les IFI ont intégré le système de rating qui a été mis en place par les accords de Bâle. Le principe est le même c’est à dire évaluer la perte potentielle en cas défaut en fonction de différents paramètres, mais le système et l’implémentation au sein des IFI est encore perfectible. Mudharaba basé sur le crédit Dans ce cas-ci plutôt que de fournir le capital en amont du projet la banque ne fournit le capital qu’après la conclusion de la transaction. Pour permettre au Moudarib (l’emprunteur) d’opérer des transactions avec d’autres parties au projet ou à un achat en particulier, la banque signe le contrat de Mudharaba au préalable. Le Moudarib présente ensuite les résultats de l’opérations (reçus et factures à l’appui). La banque partage ensuite les gains avec le Moudarib, le risque de crédit est donc bien diminué dans ce cas-ci. Ce mécanisme ressemble aux lettre de crédit utilisées dans les banques conventionnelles pour de la gestion de crédit hors bilan. (Source : Mohamed Ali M’rad, 36) Exemple « 1. Le client (Mudharib) achète du matériel avec un crédit court terme avec le droit de se rétracter sous 48h. 2. Le client vend le bien à un acheteur (avec profit). 3. Le client présente ensuite à la banque les reçus et factures d’achat et de vente 4. La banque règle le vendeur initial et reçoit le montant du par l’acheteur final 5. La banque règle à son client la participation au bénéfice qui lui est due « (Mohamed Ali

M’rad, 36)                                                                                                             7  Source:  https://fr.wikipedia.org/wiki/Nantissement,  récupéré  le  19  Novembre    

12  

Travail Individuel de Gestion des Risques POLET Guillaume

Gestion du Risque opérationnel Une des premières sources des risques opérationnels est le manque d’harmonisation au niveaux des normes au sein des IFI. Alors que les banques conventionnelles disposent des normes IFRS (en matière comptable) permettant la comparaison entre Institutions de pays différents, la compréhension et une meilleure transparence de l’information, les IFI dispose d’un autre système. Il est impossible au vu des différences structurelles qui existent entre institutions conventionnelles et islamiques d’utiliser les normes comptables IFRS au sein des IFI. C’est pourquoi l’Accounting and Auditing Organisation for Islamic Financial Institutions (AAOIFI), a depuis 1990 développé de nombreuses normes comptables visant à l’harmonisation des standards comptables pour toutes les IFI. Elle est également active dans l’établissement de normes concernant la gouvernance d’entreprise et la conformité avec les principes chariatiques. Même si de manière générale, bon nombres des normes sont semblables aux IFRS, il subsiste de nombreuses différences. Puisque dans certaines situations les IFRS ne répondent pas aux exigences que peuvent avoir les IFI ou sont incompatibles avec la Charia mais aussi pour les produits spécifiques aux IFI. Bien que les normes soient bien développées il semble encore y avoir un manque de consensus total au sein des différentes IFI mais également certains conflits avec les normes IFRS ne permettant ainsi pas une harmonisation complète tant au sein du secteur des IFI qu’avec les Institutions conventionnelles. E ce qui concerne les sources de risque opérationnel plutôt au niveau du capital humain (manque de personnes spécialisées,…), les IFI doivent mettre l’accent sur les formations, non seulement dans les pays à majorité musulmane mais également au sein des pays occidentaux où les banques conventionnelles ont une large majorité. Dans ce sens, la Louvain School of Management (Belgique) a développé en collaboration avec d’autres universités, un certificat en finance islamique8 à destination de professionnels de la finance. Selon le rapport de Moody’s la finance islamique étant en plein dans sa phase de croissance, le marché du travail et des ressources humaines connaît une tension sans précédent et c’est donc sur la capacité des IFI à gérer ce genre de tension que l’on pourra évaluer si la finance islamique peut confirmer tout son potentiel de croissance dans les années à venir. Gestion du Risque de marché Comme dit ci-dessus le risque de marché concentre 3 types de risques ; les risques liés aux variations du taux d’intérêts, aux variations des prix mais également au risqué de marge. Les restrictions de la Charia concernant les produits dérivés rendent difficiles la couverture des risques de marché. En effet, les banques conventionnelles utilisent les SWAPS pour se couvrir contre certains risques. Intéressons-nous à la gestion de la variation du prix dans le cas d’un contrat Salam. Il existe un instrument, le “value-based” Salam pour lesquels “la quantité́ est ajustée à la date d’échéance pour tenir compte de l’évolution du prix. On détermine alors la valeur et non la quantité́ qui elle est déterminée à l’échéance en divisant la valeur négociée par le prix de l’actif à l’échéance “ (Mohamed Ali M’rad, 46 ). Ainsi les 2 parties du contrat sont protégées contre les variations des prix du marché. La titrisation , « processus consistant à transformer un actif privé non-liquide en un titre publique facilement transigeable dans un marché secondaire liquide »(Définition du Cours 7 de gestion des Institutions Financières donné par Jean ROY), bien que dans un premier temps interdite car non conforme aux principes de la Charia, connaît une certain attrait au sein de académiques. Il est donc possible de titriser un portefeuille contenant au moins 51% d’actifs                                                                                                             8  http://www.uclouvain.be/islamic-­‐finance    

13  

Travail Individuel de Gestion des Risques POLET Guillaume

tangibles et au plus 49% de produits de dette. Cependant au vu des marchés secondaires quasi inexistants et de la faible liquidité des produits islamiques, cette titrisation ne couvre qu’une partie du risque. Gestion du risque de liquidité Comme dit précédemment le risque de liquidité est un enjeux majeurs pour les IFI et un des risques les plus importants. Alors que le secteur conventionnel dispose d’un marché interbancaire fortement développé et de marchés secondaire permettant une gestion dynamique de leur bilan, les IFI ne dispose pas de telles structures. Néanmoins certaines innovations ont été faite pour tenter de gérer la liquidité. En effet le banque Centrale du Bahrein a créer un instrument, l’Islamic Sukuk Liquidity Instrument. Cet instrument va permettre une amélioration de la gestion de la liquidité sur le court-terme via le marché des Sukuks (obligation islamique). L’objectif étant de stimuler la liquidité et la profondeur de ce marché . « Selon cet instrument, “les banques islamiques de détail qui souhaitent déposer leur excèdent de liquidité auprès de la banque centrale, concluent un mandat en vertu duquel la banque centrale est nommé en tant que mandataire d’investissement pour le placement de la liquidité pour le compte du client, et la banque investit ces fonds dans un portefeuille d'investissement alloué à l'avance pour soutenir cet outil et qui contient des Sukuks islamiques.” (SOURCE: IINA , 21059).

Ces dernières années le marché des Sukuks a fortement augmenté et l’émission de Sukuks a fortement grimpé comme le montre ce graphique. De plus le marché des Sukuks s’internationalise, ce qui pourrait permettre de diversifier l’allocation d’actifs des IFI et ainsi diminuer le risque de concentration.) Tout laisse à penser, selon Mohieddine Kronfol10, que au vu des avantages que possèdent les Sukuks (comme une duration plus faibles) par rapport aux obligations conventionnelles, ce marché a encore une gros potentiel de croissance notamment au niveau d’investisseurs conventionnels.

Figure 7 : Emission mondiale de Sukuks en 2013 Source : Mohieddine (Dino) Kronfol (2014), Les sukuks une classe d’actifs qui se démocratisent, Beyond Bulls and Bears, Récupéré le 21 Novembre de : http://global.beyondbullsandbears.com/fr/2014/09/30/les-sukuk-une-classe-dactifs-qui-sedemocratise/

                                                                                                            9  IINA (2015), Le Bahreïn lance un nouveau service pour les banques islamiques de detail, Récupéré le 29 Novembre de : http://iinanews.org/page/public/news_details.aspx?id=82846&NL=True# 10  Mohieddine (Dino) Kronfol (2014), Les sukuks une classe d’actifs qui se démocratisent, Beyond Bulls and Bears, Récupéré le 21 Novembre de : http://global.beyondbullsandbears.com/fr/2014/09/30/les-sukuk-une-classe-dactifs-qui-sedemocratise/    

14  

Travail Individuel de Gestion des Risques POLET Guillaume

Plus tôt cette année (fin Mars 2015) la banque du Maroc a annoncé la création d’un marché interbancaire pour les IFI participatives. “Selon le spécialiste de la finance islamique Anouar Hassoune, le recours combiné de la titrisation et des produits dérivés offre aux banques islamiques de réelles perspectives de réduction de leurs expositions au risque, leur permettant par voie de conséquence d’améliorer leur capacité de répondre en temps et en heure à leurs échéances.” (Source :

https://ribh.wordpress.com/2015/03/29/finance-islamique-le-maroc-aura-son-marcheinterbancaire-participatif/, récupéré le 28 Novembre) Mais comme on l’a vu les produits dérivés conformes à la Charia sont peu nombreux, il faudrait donc des améliorations dans l’ingénierie financière islamique afin de pouvoir optimiser cette opportunité de l’ouverture d’un marché interbancaire. Gestion de la réputation C’est certainement le risque le plus difficile à gérer tant les sources peuvent être nombreuses et surtout exogène à l’IFI mais aussi tant il est difficile à mesurer. L’instabilité politique qui réside dans les pays du Moyen Orient peut avoir une influence négative sur l’image et la crédibilité des IFI, les IFI peuvent néanmoins difficilement gérer ce risque géopolitique. Selon Moody’s les IFI ne peuvent se protéger qu’en « favorisant un degré élevé d’intégrité et de déontologie, décliné jusqu’au niveau le plus individuel. » (Source :Anouar ASSOUNE, 22 ). Cela peut se faire via la réglementation mais aussi via « La Soft Law » c’est à dire la mise en œuvre d’outils pédagogiques et de formations au sein des IFI mais aussi privilégier une transparence de l’information et la communication externe. (Source : Anouar ASSOUNE, 25) Cela peut se faire via des codes d’éthique, de conduite, ...

Conclusion A première vue le secteur des IFI semble être un secteur moins risqué que celui de ses homologues conventionnelles. En effet, même si le secteur apparaît être intrinsèquement moins risqué (dû à un caractère moins libéral et plus contrôlé) que le secteur des Institutions financières conventionnelles la relation complexe entre finance et textes religieux amène de nombreux autres types de risques. Même si la gestion des risques est un sujet déjà pas mal développé au sein du secteur des IFI, il reste de nombreux progrès à réaliser et de nouveaux horizons à ouvrir notamment en matière d’harmonisation au sein du secteur des IFI mais aussi avec les établissements conventionnels. Il y a une nécessité d’un cadre commun et bénéficiant d’un consensus total et international. Les régulateurs ont donc un rôle à jouer important au sein des IFI Au niveau de la couverture de certains risques, l’absence de certains produits dérivés complique la tâche, le secteur de l’ingénierie financière islamique (plutôt au niveau de l’innovation) a donc certainement de très belles perspectives de croissances. Beaucoup de risques (surtout au niveau opérationnel) dépendent aussi de l’aspect humains et des choix qui peuvent être faits tant au niveaux des ressources humaines que dans l’interprétation et la conformité aux textes religieux. Le secteur des IFI est à un point crucial dans sa phase de croissance et doit encore parfaire ses processus de gestion des risques pour pouvoir confirmer son potentiel de croissance et croître au delà du monde musulman

 

15  

Travail Individuel de Gestion des Risques POLET Guillaume

Bibliographie Moussa DIOP (2013), L'analyse des produits financiers islamiques et la gestion des risques. Cas de la Moucharaka et de la Mourabaha, Université Cheikh Anta Diop de Dakar - Master 2 monnaie finance et banque Mohamed Ali M’rad, Présentation sur les risques de marché en finance islamiques, Bridgers One , disponible à l’adresse: https://ribh.files.wordpress.com/2007/08/les-risques-de-marcheen-finance-islamique-mohamed-ali-mrad.pdf Mohamed Ali M’rad, Présentation sur les risques de marché en finance islamiques, Bridgers One, Paris le 28 Janvier 2010 V. SUNDARARAJAN et L. ERRICO, «Islamic Financial Institutions and Productsin the Global Financial System: Key Issues in Risk Management and Chalenges Ahead». IMF Working Paper WP/O2/192, Washington, DC: International Monetary Fund. 2002. ISLAMIC FINANCIAL SERVICES BOARD (IFSB). Capital adequacy standard for institutions (other than insurance institutions) offering only islamic financial services. IFSB Technical note, Kuala Lumpur, IFSB. Décembre 2005. ISLAMIC FINANCIAL SERVICES BOARD (IFSB). «Technical note on issues in strengthening liquidity management of institutions offering islamic financial services: the development of islamic money markets». IFSB Technical note, Kuala Lumpur, IFSB. 2008. Karim CHERIF , Analyse des produits financiers islamiques . Travail de Bachelor en vu de l'obtention du Bachelor HES. Genève, le Jeudi 2 Octobre 2008. BANQUE ISLAMQUE DE DEVELOPPEMENT (BID). INSTITUT ISLAMIQUE DERECHERCHE ET DE FOMATION (IIRF). « La gestion des risques : l'analyse de certains aspects liés à l'industrie de la finance islamique ». Jeddah.2002. BANQUE ISLAMQUE DE DEVELOPPEMENT (BID). INSTITUT ISLAMIQUE DERECHERCHE ET DE FOMATION (IIRF). « Réglementation et Contrôle des banques islamiques ». Jeddah, 2000. BANQUE ISLAMQUE DE DEVELOPPEMENT (BID). INSTITUT ISLAMIQUE DERECHERCHE ET DE FOMATION (IIRF). « Introduction aux techniques islamiques de financement ». 1998. Anouar ASSOUNE, Présentation sur la gestion des risques en finance islamique, Moody’s Investors service, Paris , Novembre 2008 Mohammed Amine ATMANI & Abdelilah EL ATTAR , L’impact des accords de Bâle III sur les Banques Islamiques , Dossiers de Recherches en Economie et Gestion, Dossier Spécial, 24p, 2013 Mohammed Amine ATMANI & Abdelilah EL ATTAR , La gestion des risques des produits financiers islamiques : essai de modélisation , Dossiers de Recherches en Economie et Gestion : Numéro 4, Vol 2: September 2015  

16  

Travail Individuel de Gestion des Risques POLET Guillaume

ESCH, L., KIEFFER R. et LÓPEZ T. « Asset & risk management: la finance orientée "risques" ». Comptabilité, contrôle et finance. Bruxelles: De Boeck, 2003.

KHAN, R.S. A Economic Analysis of a PLS model for the Financial Sector, “Pakistan Journal of Applied Economics”, 1984, vol. III, n°2 Mahmoud A. EL-GAMAL, La Banque et la Finance islamique, Collection : le Point sur…Economie Musulmane, Bruxelles: De Boeck, 2012.

Webographie Institut Numérique (2013), La gestion des risques en finance islamique, Institut Numérique, Récupéré le 21 Novembre de : http://www.institut-numerique.org/i3-la-gestion-des-risquesen-finance-islamique-5266b92598ac1 Institut Numérique (2013), Le Risque de Liquidité, Institut Numérique, Récupéré le 22 Novembre de http://www.institut-numerique.org/iii3-le-risque-de-liquidite-5266b92603624 Clémence DENAVIT (2014), La finance islamique: un secteur en pleine croissance, RFI Les Voix du Monde, Récupéré le 4 Novembre de : http://www.rfi.fr/emission/20141030-financeislamique-secteur-pleine-croissance WIKIPEDIA, Récupéré le 18 Novembre de : https://fr.wikipedia.org/wiki/Risque_de_crédit WIKIPEDIA, Récupéré le 18 Novembre https://fr.wikipedia.org/wiki/Risque_opérationnel_(établissement_financier)

de

:

WIKIPEDIA, Récupéré le 17 https://en.wikipedia.org/wiki/Islamic_banking_and_finance

de

:

Novembre

WIKIPEDIA, Récupéré le 21 Novembre de : https://fr.wikipedia.org/wiki/Risque_opérationnel_(établissement_financier)#D.C3.A9finition _du_risque_op.C3.A9rationnel WIKIPEDIA, Récupéré le 21 Novembre https://fr.wikipedia.org/wiki/Risque_opérationnel_(établissement_financier)

de

:

WIKIPEDIA, Récupéré le 25 Novembre de : https://fr.wikipedia.org/wiki/Nantissement Forum Iscaeiste, (2105), Finance islamique : Le Maroc aura son marché interbancaire participative, Forum Iscaeiste:Bienvenue à tous les lauréats de l’ISCAE, Récupéré le 26 Novembre de : http://forum-iscaeiste.com/?p=526

 

17  

Travail Individuel de Gestion des Risques POLET Guillaume

Christine LEJOUX (2014), La finance Islamique ne connait pas la crise, la Tribune (FR), Récupéré le 12 Novembre de: http://www.latribune.fr/entreprisesfinance/20140106trib000808026/la-finance-islamique-ne-connait-pas-la-crise.html Maroc-compta.com, Produits de la Banque Islamique, Entreprendre.ma Source d’informations économiques, Récupéré le 21 Novembre de: http://www.entreprendre.ma/Produits-de-labanque-islamique_a359.html FinancialIslam.com, Récupéré http://fr.financialislam.com/mourabaha.html

le

12

Novembre

de

Economie.Gouv, 2015, Cedef centre de documentation en Economie et Finance, Récupéré le 21 Novembre de : http://www.economie.gouv.fr/cedef/finance-islamique ‫ﻖ ﺍا ﻟﻤ ﻜ ﺮ ﻣﺔ ﻣ ﻜﺔ ﺑ ﺘ ﻮﻗ ﻴﯿﺖ‬ ‫ ﺍا ﻟﻤﻮ ﺍا ﻓ‬2015 Taux de croissance des actifs de la finance islamique, IINANEWS, Récupéré le 12 Novembre: http://www.iinanews.com/page/public/report.aspx?id=10356#.VlTVDkJGSyE IINA (2015), Le Bahreïn lance un nouveau service pour les banques islamiques de detail, Récupéré le 29 Novembre de : http://iinanews.org/page/public/news_details.aspx?id=82846&NL=True# Krassimira GECHEVA & Guillaume GILKES, (2008), La finance islamique: définition, activités et instruments, les investissements.fr, Récupéré le 21 Novembre de : http://www.lesinvestissements.fr/investissements/isr/La-finance-islamique-definition-activites-etinstruments-article-1262.php Mohieddine (Dino) KRONFOL (2014), Les sukuks une classe d’actifs qui se démocratisent, Beyond Bulls and Bears, Récupéré le 21 Novembre de : http://global.beyondbullsandbears.com/fr/2014/09/30/les-sukuk-une-classe-dactifs-qui-sedemocratise/ Wadi MZID, La Finance islamique: Principes fondamentaux et apports potentiels dans le financement de la croissance et du développement , Economic Agendas of Islamic Actors, Récupéré le 23 Novembre de: http://www.iemed.org/dossiers/dossiersiemed/desenvolupament-socioeconomic/economic-agendas-of-islamicactors/Wadi%20Mzid_IslamicFinance_FR.pdf

 

18