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UE 19 FGSM 3
Année universitaire 2019-2020
Cancérologie Sommaire
p. 1
Préambule
p. 2
Physiologie des cancers M. RIVOIRE
p. 3
Histoire naturelle des cancers Oncogenèse
J.-Y. BLAY
p. 13
Oncogénétique
J.-Y. BLAY
p. 25
M. RIVOIRE J.-Y. BLAY F. PILLEUL I. RAY-COQUARD
p. 37
Clinique et diagnostic du cancer Le pathologiste et le cancer Sécrétions ectopiques et marqueurs biologiques Imagerie en oncologie Diagnostic des cancers
A. DUPRE A. DUPRE A. DUPRE P. BACHMAN
M. RIVOIRE M. RIVOIRE A. COUILLET M.-P. STEINEUR
M. RIVOIRE G. CHVETZOFF S. NEGRIER L. CLAUDE
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Lu
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p. 89 p. 97 p. 105
p. 117 p. 123 p. 127 p. 131
Traitements des cancers Chirurgie des cancers Douleur en cancérologie Traitements médicaux et cancers Radiothérapie et curiethérapie
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p. 77
Cancer en pratique médicale Réunion de concertation pluridisciplinaire Information du patient - Annonce Soin de support et psycho-oncologie Hospitalisation à domicile et prise en charge sociale
Fiché
p. 47 p. 57 p. 63
Epidémiologie et facteurs de risque Epidémiologie et facteurs de risque des cancers Facteurs de risque et prévention du cancer Dépistage et prévention des cancers Nutrition et cancer
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p. 135 p. 143 p. 151 p. 161
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Ressources complémentaires (module Claroline IPE² - FGSM – UE 19)
Diapositives des enseignants (attention, elles n’y sont pas toutes ; cf le module de la scolarité) Fiches de Connaissances Essentielles (FCE) : réalisées par des étudiants de votre promotion, elles seront disponibles au cours du semestre : vos responsables Ronéos vous tiendront informés. Ronéo de cours des années précédentes absents du programme cette année
Préambule Le polycopié d’oncologie a été réalisé par une équipe d’étudiants des promotions précédentes. Il est basé sur les enseignements (cours magistraux et enseignements dirigés) dispensés pendant l’année universitaire 2018-2019. Ce document est le fruit d’une collaboration étroite entre enseignants et étudiants. Dans la mesure du possible, chacun des cours a été rédigé par un binôme d’étudiants, relu plusieurs fois, et enfin corrigé et validé par l’enseignant. A compter de la rentrée 2015, ce polycopié remplace totalement le système de ronéo pour l’UE 19. Dans un souci d’amélioration des ressources pédagogiques, des étudiants volontaires « veilleurs » seront présents à chaque cours, afin de vérifier que le polycopié reflète bien l’enseignement dispensé en amphithéâtre. En cas de changement de programme ou de modification majeure du cours, vous serez informé via les actualités de la Ronéo. Le polycopié vous offre la possibilité d’organiser votre travail personnel librement. Vous pouvez également travailler les cours en amont des Cours Magistraux pour poser toutes vos questions aux enseignants ! L’organisation du polycopié a été revue pour se rapprocher d’un enseignement par thématique quand c’était possible. Néanmoins, à cause du grand nombre de cours à ronéiser de novo, cette organisation n’est pas encore optimale pour cette année.
Equipe 2018-2019 Ronéistes UE19 : Coraline TELLIER (reponsable), Alison COLLOMBAR, Lou THIZY, Lucie PEYRAL, Julia BERROD, Melvyn SALMON Co-responsables ronéos : Anaïs AOUIFI, Guillaume CRUSSY-ALLEYSSON Vice-Présidents de l’ACLE, en charge du pôle IPE²: Anas MAHMOUDI et Félix BOIVIN Vice-Président de l’ACLE, en charge des polycopiés FGSM du pôle IPE² pour l’année 2019-20 : Léa NOWAKOWSKI Vice-Présidents de l’ACLE, en charge du pôle IPE² pour l’année 2019-20 : Pierre NANETTE et Léa NOWAKOWSKI Co-responsables ronéos pour l’année 2019-20 : Sophie CAVEGLIA, Jean-Côme BOIVIN
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UE 19 – Physiologie des cancers – M. RIVOIRE
Histoire naturelle des cancers Objectifs du cours Ce cours est en relation avec plusieurs objectifs de l’ECN (Items 138 et 139) : Décrire l’histoire naturelle du cancer et expliquer les bases des classifications qui ont une incidence pronostique.
Comprendre l’évolution naturelle du cancer Distinguer cancer localisé et cancer diffus, tant sur le plan pronostique que thérapeutique +++ Ce point est très important car le pronostic et les traitements seront très différents : un cancer localisé a plus de chances de guérison et sera traité par chirurgie seule tandis qu’un cancer diffus nécessite une chimiothérapie. Comprendre la notion de différenciation cancéreuse et la répercussion sur le pronostic Connaître l’importance de l’invasion tumorale et des implications thérapeutiques +++ Comprendre l’importance de la vascularisation tumorale Connaître les voies principales de diffusion des cancers Connaître les lieux préférentiels des métastases des cancers
L’histoire naturelle des cancers répond à la question : que se passe-t-il entre le moment où la première cellule subit une anomalie et le décès du patient ? Comment passe-t-on d’une anomalie génétique à un dérèglement généralisé ? Les objectifs de la cancérologie générale sont :
Faire le lien entre la biologie et la clinique pour : o Comprendre les mécanismes biologiques sous-jacents à la maladie cancéreuse o Progresser dans la compréhension des maladies (l’évolution des connaissances dans le domaine de la cancérologie est très rapide) o Progresser dans la recherche de traitements efficaces
Comprendre la physiologie du cancer pour : o Mieux retenir les signes cliniques des cancers o Mieux intégrer les différentes phases de son développement o Proposer une stratégie thérapeutique adaptée au stade de la maladie (au patient) : on ne propose pas la même stratégie thérapeutique à un patient en stade terminal qu’à un patient diagnostiqué précocement.
Il y a différents niveaux d’études en cancérologie. Si on suit la chronologie de la prise en charge des cancers : 1. Le cancer « maladie » (le patient, la clinique, les symptômes). 2. Le cancer « anatomopathologie » (microscopie, apporte des éléments objectifs ainsi que la preuve du cancer) A partir du début du XXème siècle, on commence à faire une description microscopique de la maladie. 3. Le cancer « dérèglement génétique » (ADN) Deuxième moitié du XXème siècle 4. Le cancer « régulation de la cellule et environnement cellulaire » (récepteurs de surface, régulation intracytoplasmique, micro-vascularisation, immunité ++…), depuis 10-20 ans. En tant que médecin, on doit appréhender les niveaux d’étude dans le sens contraire du sens historique. Ce sont les connaissances biologiques qui permettent de comprendre les caractéristiques anatomo-pathologiques et ainsi de mieux appréhender la maladie et son traitement.
I) Généralités Les cellules du corps humain sont hiérarchisées : nos cellules souches peuvent donner soit de nouvelles cellules souches (autorenouvèlement), soit des cellules différenciées qui seront spécialisées (cérébrales, hépatiques, etc.). Nos cellules entrent en apoptose après 100 à 120 divisons environ. FGSM3 Lyon Est
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UE 19 – Physiologie des cancers – M. RIVOIRE Toutes nos cellules somatiques sont soumises à un contrôle général qui permet l’homéostasie. La cellule cancéreuse a un phénotype particulier, regroupant trois caractéristiques indissociables/indispensables ♥ (Si on bloque seulement l’une de ces caractéristiques, on arrête le cancer) :
la capacité de prolifération (elle se divise sans aucun contrôle) la capacité d’invasion (elle ne respecte plus l’entourage et perd ses relations sociales) la capacité d’angiogenèse (elle développe une circulation à son profit pour récupérer de l’oxygène et des nutriments, et pour se déplacer). La formation d’une métastase est une capacité dépendante de la capacité d’angiogenèse.
Du point de vue biologique (génotypique), il y a une accumulation d’altérations dans le génome. En fait, la probabilité qu’une telle série de mutations survienne dans la même cellule est quasiment nulle. Mais une mutation appelle une autre mutation. Une fois que la première mutation a eu lieu, elle facilite les chances qu’une deuxième mutation ait lieu dans la même cellule, et il y a alors un phénomène d’emballement : c’est l’instabilité génétique. Il est difficile de dire au patient depuis combien d’années la maladie cancéreuse se développe. L’estimation qu’on leur donne est plutôt destinée à les déculpabiliser lorsqu’ils cherchent une explication au développement de leur cancer. En moyenne, le développement d’un cancer se fait sur 10 ans voire plus.
1) Épidémiologie Le cancer en France est un problème de santé publique : Attention les chiffres sont à connaître /!\ En 2012, 355 000 nouveaux cas (dont 56% d’hommes) En 2012, 150 000 décès dus au cancer (dont 57% d’hommes) Il y a donc plus d’hommes atteints car ils ont globalement des habitudes de vie plus à risque de générer un cancer que celles des femmes (tabac, alcool), mais cette différence tend à s’équilibrer. Les données de l’Institut National de Veille Sanitaire (INVS) montrent que le nombre de nouveaux cas de cancer a augmenté de 109% entre 1980 (170 000 cas estimés) et 2012 (355 000 cas estimés). Le nombre de décès a, quant à lui, augmenté de 15% au cours de la même période (129 000 et 148 000 respectivement). On peut décomposer les 107,6 % d’augmentation du nombre de cas chez l’homme en : 30,8% dus à l’augmentation de la population, 33,7% dus au vieillissement de la population : plus on vieillit plus on est exposé au risque de développer un cancer Ex : les hommes vivent plus vieux donc plus de cancers de la prostate sont diagnostiqués. /!\ Tous les hommes âgés font des cellules prostatiques cancéreuses mais n’en meurent pas forcément. 43,1% dus aux changements des taux d’incidence spécifiques par âge, c’est-à-dire au risque de cancer luimême. (Exemples : augmentation du nombre de cancers du poumon chez la femme, et du nombre de cancer du pancréas).
L’augmentation du nombre de cancers diagnostiqués est majoritairement due à des modifications de la structure démographique de la population.
2) Classification anatomopathologique des cancers ♥ Il existe deux grands types de cancers : les hémopathies malignes et les tumeurs solides. Dans ce cours, on s’intéresse aux tumeurs solides :
Les tumeurs épithéliales sont appelées des carcinomes et représentent 90% des tumeurs. Il faut donc y penser en premier en pratique clinique. On distingue plusieurs types de carcinomes en fonction de la structure de l’épithélium atteint : o Épithélium malpighien : carcinome épidermoïde, o Épithélium glandulaire : adénocarcinome (colon, glande mammaire, estomac, pancréas), o Épithélium urothélial/jonctionnel : carcinome paramalpighien (cavités excrétrices, vessie).
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Les tumeurs conjonctives sont appelées des sarcomes (tout tissu de soutien peut donner un sarcome) o Osseuses : ostéosarcome, o Cartilagineuses : chondrosarcome, o Des parties molles : liposarcome (graisse), léïomyosarcome (muscle lisse) : sa forme bénigne est le fibrome utérin = léïomyome, rhabdomyosarcome (muscle strié). Les tumeurs neurectoblastiques o Mélaniques : mélanome malin (cutané principalement) o Nerveuses : cérébrales, méningées… Les tumeurs germinales (tumeurs rares, très chimiosensibles) o Séminomateuses (elles sont plus différenciées que les tumeurs non séminomateuses) o Non séminomateuses : elles produisent des marqueurs spécifiques HCG, AFP, LDH. Exception : Chez l’homme, le cancer du testicule peut être diagnostiqué seulement à partir des résultats biologiques (augmentation très forte du taux d’hCG), sans avoir recours à un prélèvement pour examen anatomopathologie. En effet on dispose de 3 marqueurs biologiques qui permettent d’avoir une spécificité et une sensibilité importante : les LDH, l’αFP et les βhCG. Ce cancer a un très bon pronostic du fait d’une grande chimiosensiblité qui permet un taux guérison de 95% des cas quel que soit le niveau de gravité initial. Les tumeurs embryonnaires, responsables des cancers pédiatriques, sont souvent dues à une anomalie génétique : hépatoblastome, néphroblastome, neuroblastome.
II) Histoire naturelle du cancer Il y a une accumulation d’anomalies génétiques au cours de la vie d’un individu. Elles ne donnent pas pour autant des cancers. Cependant, certaines anomalies génétiques vont être responsables de cancérisation qui, tardivement, se traduira par des signes cliniques. En s’exposant à un facteur de risque aujourd’hui, on peut créer un cancer qui ne sera diagnostiqué qu’à très long terme (parfois des dizaines d’années). La phase clinique est ainsi courte par rapport à la durée totale de l’histoire de la maladie. Les actions (dépistage, diagnostic, soins palliatifs) sont dépendantes du stade de la maladie : on ne peut faire de la prévention que quand il n’y pas encore de cellule cancéreuse. Le diagnostic se fait à partir du moment où il y a une prolifération cellulaire anormale. En fin de vie, les traitements chirurgicaux ou les chimiothérapies n’ont le plus souvent aucun sens, il convient alors mieux de mettre en place un accompagnement. (Ci-contre : traitement local = chirurgie ou radiothérapie ; traitement général = chimiothérapie)
Dans tous les cas, la perspective de guérison est limitée dès que le cancer n’est plus localisé mais diffus.
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UE 19 – Physiologie des cancers – M. RIVOIRE 1) Etape 1 : Initiation tumorale Le premier phénomène de la transformation cancéreuse est une mutation de l’ADN. Le plus souvent, ce n’est pas grave car une mutation a neuf chances sur dix de survenir sur un gène non parlant, donc de n’avoir aucune conséquence pour la cellule. Les mutations qui surviennent sont très généralement sans conséquences, car il existe également de nombreux systèmes qui contrôlent le génome cellulaire et le réparent. En fait, de nombreux évènements aléatoires sont nécessaires pour obtenir une cellule cancéreuse. On considère qu’il faut en moyenne 7 mutations (favorisées par l’instabilité génétique) pour former une cellule cancéreuse. Elles peuvent toucher différentes phases de la régulation cellulaire ou différents sièges génétiques : La réparation de l’ADN : en temps normal, si une mutation survient, le phénomène de réparation intervient et répare cette mutation, qui n’aura donc pas de conséquences même si elle est située sur un gène important. Atteinte des proto-oncogènes : ces gènes sont des régulateurs positifs de la mitose de la cellule. Une mutation activatrice d’un allèle favorise donc la cancérogenèse. Atteinte des gènes suppresseurs de tumeur : ce sont des régulateurs négatifs de la mitose. La mutation inactivatrice des deux allèles favorise de même la cancérogenèse. On ne peut pas perdre deux copies du même gène de manière aléatoire, cela arrive lors des cancers héréditaires, où l’une des deux copies mutées a été transmise par un parent. Il suffit donc d’une mutation pour que les deux copies soient inactives. (Ex. : rétinoblastome, syndrome de Lynch, cancer du sein avec mutation BRCA1). Atteinte des gènes régulateurs (p53, Rb…) Atteinte du système d’apoptose (suicide cellulaire pour les cellules trop vieilles ou anormales) L’initiation tumorale est un phénomène ancien, survenu souvent des dizaines d’années avant la découverte du cancer. Elle aboutit à la formation d’une cellule initiée. Le phénomène d’initiation se produit pour chacune des caractéristiques phénotypiques de la cellule cancéreuse : (♥) Indépendance aux facteurs de croissance de la cellule Accroissement du nombre de mitoses Perte des inhibitions de contact Modifications membranaires Destruction des cellules de voisinage Pouvoir métastatique. Les facteurs d’initiation tumorale sont nombreux : Facteurs chimiques comme le benzopyrène, les hydrocarbures polycycliques (par exemple à Lyon, un cancer rare du foie, l’angiosarcome, a été diagnostiqué chez des hommes qui travaillaient sur des cuves d’hydrocarbures polycycliques) Les virus, comme les virus de l’hépatite B ou C, VIH, le virus HPV (responsable de cancers du col de l’utérus, ORL et de l’anus) Les rayonnements, ionisants ou UV Pas abordé : Les cancers professionnels ne sont pas rares ! Les métiers exposés sont par exemple désamianteur (♥), radiologue à l’époque où la prévention n’était pas organisée (rayons X), entretien des routes (goudron), agriculteurs et pêcheurs (soleil, pesticides), et tous les métiers de la santé (transmission des hépatites virales…). Cela est important à prendre en compte car la prise en charge sociale d’un cancer n’est pas du tout la même s’il est lié à une exposition professionnelle (compensation financière, etc.). La première étape d’initiation tumorale consiste en une série de mutations aléatoires et aboutit à la production d’une cellule initiée.
2) Etape 2 : Promotion L’étape de promotion correspond à une exposition prolongée, répétée ou continue à une substance (un promoteur) qui entretient et stabilise la lésion initiée. C’est un phénomène d’emballement : on observe une augmentation du nombre de divisions cellulaires, une augmentation du risque de mutations et une augmentation de la transmission des mutations.
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UE 19 – Physiologie des cancers – M. RIVOIRE Les principaux agents promoteurs sont la nutrition, l’alcool, les infections (plaie chronique), l’âge et les hormones (cancers hormono-dépendants : sein, prostate, corps de la thyroïde sont importants et à retenir ++) Durant les phases d’initiation et de promotion, on ne peut pas encore dépister le cancer mais on peut agir en faisant de la prévention : diminution de l’exposition aux facteurs de risque, agents carcinogènes et promoteurs (tabac, alcool, soleil…).
3) Etape 3 : Prolifération incontrôlée
La prolifération incontrôlée aboutit à l’autonomie des cellules cancéreuses. En théorie, un cancer devrait être un clone car il devrait y avoir reproduction de la même cellule cancéreuse depuis le début. Au cours de sa prolifération, une cellule acquiert de nouvelles anomalies. Les mutations sont aléatoires d’une personne à l’autre et n’interviennent pas toujours dans le même ordre. La population de cellules cancéreuses est donc hétérogène : on parle d’hétérogénéité tumorale. Cette hétérogénéité survient à deux niveaux. Les sous-clones qui apparaissent au cours du temps possèdent des caractéristiques génétiques différentes. On distingue aussi une hétérogénéité entre les cellules à un temps donné : certaines cellules possèdent des caractéristiques souches, et sont capables de reformer l’intégralité de la tumeur. L’hétérogénéité tumorale permet d’expliquer la nécessité dans certains cas d’utiliser plusieurs traitements pour un même cancer.
4) Etape 4 : Invasion tumorale ♥ A ce stade, la tumeur devient visible au microscope. L’invasion est une caractéristique phénotypique majeure car elle permet de différencier le caractère bénin ou malin d’une tumeur. NB : Une tumeur bénigne n’est jamais invasive. Une tumeur maligne deviendra tôt ou tard invasive. a. Aspects histologiques ++
Phase pré-invasive, cancer in situ : la membrane basale est respectée. A ce stade, la maladie est locale et la chirurgie est certaine d’éliminer le cancer. Mais la maladie est rarement diagnostiquée à ce stade car il est très initial. /!\ Le sarcome in situ n’existe pas puisqu’on le trouve dans le tissu conjonctif. Phase invasive : le phénotype « invasion » a été acquis. La membrane basale est donc rompue et franchie, la maladie peut être générale. Il y a également formation d’une stroma-réaction : les fibroblastes sains créent l’architecture de la tumeur. En effet, une tumeur ne sera jamais constituée uniquement de cellules cancéreuses, elle serait trop anarchique et ne pourrait pas se développer.
La membrane basale est un élément fondamental. Elle constitue le premier rempart contre l’invasion. La basale est constituée de laminine, de collagène IV, de fibronectine, d’héparane sulfate et de protéoglycanes. Elle a des rôles de morphogenèse, de différenciation, d’architecture tissulaire et d’adhérence cellulaire. FGSM3 Lyon Est
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UE 19 – Physiologie des cancers – M. RIVOIRE b. Mécanismes (vu rapidement)
Diminution des cadhérines : les cadhérines ont un rôle de reconnaissance et d’adhésion intercellulaire, de morphogenèse, de maintien de l’intégrité tissulaire. Si les cadhérines sont réprimées, les cellules deviennent mobiles les unes par rapport aux autres, ce qui favorise l’invasion. Diminution des intégrines : les intégrines sont des récepteurs pour les molécules du tissu interstitiel. Elles ont un rôle dans l’alignement épithélial, la polarité cellulaire, et sont des récepteurs à la fibronectine. Si les intégrines sont réprimées, la cellule devient plus mobile et ne reconnait plus son récepteur au tissu interstitiel, ce qui favorise l’invasion tumorale. Les collagénases et enzymes protéolytiques (métalloprotéinases) : elles détruisent le collagène IV de la membrane basale. Les inhibiteurs des métallo-protéinases sont donc un frein à l’invasion : l’inhibition de leur synthèse donne du pouvoir invasif. Cela ouvre la porte à de nouveaux traitements : si on bloque les métallo-protéases, pourrait-on bloquer l’invasion ? La stromélysine : elle est sécrétée par les fibroblastes de la stroma-réaction et permet de « faire de la place » pour permettre le développement de la stroma-réaction.
Application pratique en clinique : (Photos : col utérin) Le dépistage du cancer du col de l’utérus se fait par frottis. On cherche des cellules suspectes. Si elles sont présentes, on fait un examen du col (colposcopie), à la recherche d’une anomalie à la jonction des muqueuses glandulaire et malpighienne, qui peut correspondre à un cancer au stade in situ (donc non invasif). Le cancer dépisté à ce stade précoce peut être traité de manière conservatrice (retrait de la lésion et non une hystérectomie). Quand on résèque un cancer in situ, on enlève obligatoirement la lame basale pour être sûr d’avoir enlevé tout le tissu touché et confirmer que le cancer est bien « in situ ». Coupe histologique d’une tumeur du colon L’examen anatomopathologique montre un cancer invasif dont les cellules ont traversé la basale.
5) Etape 5 : Angiogenèse ♥ L’angiogenèse est un phénomène physiologique détourné par les cellules cancéreuses afin de développer leurs propres vaisseaux sanguins. a. Dépendance des tumeurs à l’angiogenèse Si les tumeurs ne développent pas d’angiogenèse, elles ne peuvent plus progresser. L’angiogenèse permet : Le développement local et la croissance tumorale grâce à l’apport de nutriments et d’O2. La migration de cellules par le sang et donc la formation de métastases : l’angiogenèse intervient avant la métastasogénèse. Toute tumeur qui donne des métastases est angiogénique, mais le contraire est faux. Le début de l’angiogenèse, et donc le caractère invasif ou non, dépend de la taille de la tumeur. /!\ Attention bien retenir l’indice de Breslow, essentiel pour déterminer le pronostic du mélanome.
Exemple du mélanome : le facteur de risque est l’épaisseur de la tumeur, c’est l’indice de Breslow. Un mélanome de moins de 0.76 mm n’a pas encore développé d’angiogenèse et a donc de fortes chances d’être au stade local.
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Pour le cancer du col utérin : l’épaisseur limite est de 3 mm. Même si le cancer est invasif, on peut conserver l’utérus si la tumeur mesure moins de 3 mm car le risque métastatique est quasi inexistant : les cellules n’ont pas eu le temps de développer l’angiogenèse. b. Phénotype angiogénique
Phase avasculaire : La tumeur primitive n’a pas encore développé d’angiogenèse. Elle arrive à un nombre de cellules trop important, elle n’a plus assez d’O2 et de nutriments. Ce sont des tumeurs qui ne bougent pas, qui sont à l’équilibre car il y a autant de cellules qui meurent que de cellules qui se créent. Leur temps de doublement (cf. III) est très long et la détection de ces cancers est difficile. Pour les métastases : durant la phase avasculaire, les métastases n’ont pas de pouvoir angiogénique mais il peut quand même y avoir des cellules circulantes. Ces cellules peuvent se fixer à un endroit, et mettre des années à développer leur angiogenèse : la métastase existe mais ne bouge pas, c’est une métastase dormante. Il peut donc y avoir une récidive très tardive après la guérison clinique, lorsque la métastase se réveille et met en place son angiogenèse. Cela peut se voir surtout pour les cancers du rein et les mélanomes. Phase vasculaire : La tumeur primitive ou les métastases produisent leurs propres vaisseaux, c’est la néovascularisation. Elles ont un bon apport en nutriments, en O2, et éliminent leurs déchets. La tumeur augmente beaucoup de taille et des métastases peuvent se former. c. Médiateurs de l’angiogenèse L’angiogenèse résulte d’une stimulation réciproque (+++) entre les cellules endothéliales et les cellules cancéreuses. Les médiateurs de l’angiogenèse sont nombreux :
L’hypoxie centro-tumorale: l’hypoxie de la tumeur stimule la perméabilité des cellules endothéliales ce qui permet la fuite des cellules cancéreuses et un apport de nutriments plus rapide. VEGF : sécrété par la tumeur, il stimule la multiplication des cellules endothéliales et le chimiotactisme.
Le Bevacizumab est un anti-VEGF injecté en IV (car c’est une Ig, donc une grosse molécule). Comme tous les autres « -zu/mab » c’est un « humanisé/anticorps monoclonal (Ig) ». L’imatinib est un anticancéreux qui se prend par voie orale (c’est une petite molécule, inhibiteur de la tyrosine kinase).
ßFGF : stimulation des cellules endothéliales et des cellules du stroma (donc de la stroma-réaction). d. Apparition des symptômes ♥ Le maître symptôme du cancer est l’hémorragie. Toute présence anormale de sang (expectorations, selles..) est un cancer jusqu’à preuve du contraire.
A partir du moment où une tumeur a réalisé de l’angiogenèse, elle est susceptible de saigner, car l’architecture de ces vaisseaux est plus fragile que celle des vaisseaux normaux. Les premiers signes cliniques des cancers apparaissent alors sous forme de saignements (application clinique : en cas de rectorragies, toujours faire un toucher rectal et une coloscopie). D’autres symptômes apparaissent, tels que la douleur, des œdèmes locaux, etc. Application diagnostique et thérapeutique : les antiangiogéniques sont souvent utilisés aujourd’hui.
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Jusqu’à preuve du contraire, l’hémoptysie signe un cancer du poumon et non une grippe. Jusqu’à preuve du contraire, des rectorragies signent un cancer du rectum et non des hémorroïdes. Jusqu’à preuve du contraire, une hématémèse signe un cancer de l’estomac et non une hernie hiatale. Jusqu’à preuve du contraire, une hématurie signe un cancer de la vessie et non une infection urinaire. o C’est bon, vous avez pigé le truc ? Le message à retenir : il faut d’abord éliminer la cause la plus grave avant de penser à la cause la plus fréquente !
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UE 19 – Physiologie des cancers – M. RIVOIRE 6) Etapes 6 et 7 : Les métastases ♥ Inefficacité du processus métastatique : le processus métastatique est très complexe et peu performant. C’est ainsi que l’intervention chirurgicale, malgré la libération de cellules cancéreuses qu’elle entraîne, est peu à même de favoriser la formation de métastases. a. La cascade métastatique, un processus complexe Il y a 5 étapes indispensables : 1. Libération cellulaire et invasion vasculaire 2. Transport et survie dans la circulation (il faut éviter les macrophages, les lymphocytes, etc.) 3. Formation d’agrégats et arrêt dans une nouvelle localisation (une cellule ne peut pas arriver toute seule, nécessité de former des groupes) 4. Extravasation dans le parenchyme de voisinage 5. Développement d’une nouvelle tumeur (ré acquisition des phénotypes) b. Étape 6 : Métastases ganglionnaires Genèse : on a une tumeur invasive, angiogénique et métastasogénique. Pour les cellules, la voie la plus fréquente de migration est la voie lymphatique. Les vaisseaux lymphatiques rejoignent ensuite les relais ganglionnaires. Pour le sein par exemple, le 1er relais ganglionnaire est le relais axillaire. o Au niveau de ce premier relais, la cellule peut soit être arrêtée et coloniser le ganglion, soit continuer son chemin, soit se développer puis partir. La lymphe rejoint le système veineux par le canal thoracique, donc la cellule peut rejoindre la circulation veineuse et peut aller dans tous les organes (poumons, cœur, foie…). L’augmentation pathologique du ganglion susclavier gauche (ganglion de Troisier) est un signe de gravité en cancérologie. Devenir des cellules cancéreuses au niveau du ganglion : le relais ganglionnaire est un système de défense : la cellule anormale doit normalement être détruite. Si elle échappe à ce contrôle, elle a beaucoup de possibilités : aller vers les ganglions suivants, envahir le ganglion, éventuellement rebrousser chemin pour envahir en amont, envahir la capsule du ganglion. o Si la cellule cancéreuse se multiplie et obstrue le ganglion, la lymphe ne se draine plus et cela crée un phénomène inflammatoire majeur appelé lymphangite carcinomateuse, parfois observé en cas de cancer du sein (se traduit par un aspect très inflammatoire du sein comme en cas d’infection (abces), en peau d’orange). En chirurgie, il faut faire attention à ne pas enlever tous les ganglions, qu’il reste toujours une petite voie de drainage pour la lymphe (cf. cours sur la chirurgie des cancers : curage du ganglion sentinelle). L’étape ganglionnaire n’est pas obligatoire. Dans les cancers du sein, 25% sont métastatiques sans qu’il n’y ait aucun ganglion envahi. En général, on se sert du critère « ganglions envahis » pour décider du traitement : s’ils sont envahis, une chimiothérapie adjuvante est prescrite en plus de la chirurgie. Mais attention, cela ne marche pas pour tous les cancers du sein, qui peuvent être parfois métastatiques alors que les ganglions sont sains. On est obligé de chercher d’autres facteurs pronostiques que l’envahissement ganglionnaire, pour savoir si on met en place une chimiothérapie. c. Étape 7 : Métastases viscérales Elles définissent le degré de malignité maximale d’une tumeur. En effet, les métastases viscérales expliquent le décès de la plupart des patients atteints d’un cancer. Ce sont elles qui posent le plus de problèmes de traitement, et on met en œuvre beaucoup de moyens pour des résultats souvent minimes. Il existe différentes voies de progression métastatique, qui peuvent se combiner : Les plans tissulaires (mélanome et sarcome sur le trajet de l’aponévrose)
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Les espaces et cavités (estomac péritoine ; poumon plèvre ; méninges en cas de tumeur au cerveau on peut avoir une méningite carcinomateuse) Les voies lymphatiques (cancer du sein, colon) Les vaisseaux sanguins (le cancer du côlon donne souvent des métastases dans le foie, le cancer du rectum donne des métastases pulmonaires fréquentes, cela est en rapport avec une différence de vascularisation veineuse par rapport au cancer du colon)
Les cibles préférentielles métastatiques dépendent de plusieurs critères : Le site métastatique est fonction de la tumeur primitive ; Certains sites sont prédominants, de par leur taille et leur vascularisation importantes : les poumons, le foie, les ganglions, le cerveau ; Le « Soil and Seed » (concept défini par Paget en 1889) ou /?\ Exemple : le mélanome de la théorie du sol et de la graine. Certaines cellules cancéreuses choroïde donne des métastases ne donnent des métastases que dans certains organes uniquement dans le foie, ces métastases spécifiques avec qui elles ont une affinité particulière (comme ont la caractéristique d’être très noires. une graine qui ne peut pousser que sur certains sols avec des Au contraire, le mélanome de la peau caractéristiques propres à la graine). peut donner des métastases n’importe Considération anatomique ou « Organ preference » : le où. cancer du côlon donnera des métastases hépatiques à cause de son drainage veineux (veines mésentériques, puis système porte qui arrive au foie).
Exemples de lieux fréquents de métastases pour différents cancers (à retenir +++)
• Cancer du rein : poumons, os, surrénale • Cancer de prostate : os • Mélanome cutané : foie, cerveau, intestin, poumons mais aussi partout • Mélanome de la choroïde : foie • Cancer du sein : os, poumons, foie • Cancer du côlon : foie, poumons • Cancer du poumon : cerveau, foie, os • Cancer du rectum : foie • Cancer de la thyroïde : os
/?\ NB : On ne trouve presque jamais de métastases dans le cœur. Ces dernières proviennent le plus souvent de mélanomes.
NB2 : métastases osseuses : PPRST prostate poumon rein sein thyroide
Dans la plupart des cancers, la diffusion est mixte : lymphatique et sanguine. L’organe concerné filtre puis les sites métastatiques sont spécifiques de la tumeur. Les cancers du rein, de la prostate, du sein et de la thyroïde ils sont à retenir absolument car ce sont ceux qui donnent le plus de métastases osseuses. A l’avenir, le pronostic des métastases se fera via une simple prise de sang. On s’est rendu compte que certaines cellules cancéreuses sont présentes dans la circulation sanguine et que l’on pouvait les doser. On nomme ces cellules les CTC pour Cellules Tumorales Circulantes. Le dosage des CTC peut aider à prédire le niveau d’agressivité des métastases à distance. On peut également analyser l’ADN tumoral circulant et ainsi mieux traiter les patients en fonction du génotype cancéreux.
Radio et scanner de métastases du poumon en « lâcher de ballons »
III) Evaluation clinique de la prolifération tumorale Pour déterminer si la tumeur est progressive, le paramètre le plus important est le temps de doublement (TD). C’est le temps qu’il faut à une tumeur pour doubler son nombre de cellules, et donc devenir deux fois plus grosse. Plus il est court, plus la tumeur se développe rapidement. Il est variable pour chaque type de tumeur. Plus la tumeur se développe vite, plus elle a de cellules en mitose, donc plus elle sera sensible aux chimiothérapies. Le TD permet aussi d’évaluer la sensibilité d’une tumeur à un traitement : si la tumeur diminue ou est stable, le traitement est efficace. Enfin, le TD est un important critère pronostic. Une tumeur avec un temps de doublement très court est de moins bon pronostic que les tumeurs avec un TD long. FGSM3 Lyon Est
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UE 19 – Physiologie des cancers – M. RIVOIRE La prolifération tumorale en chiffres :
Le seuil de détection d’une tumeur correspond à 1 mm3 de volume = 109 cellules cancéreuses = 1 g = 30 temps de doublement environ (TD variable d’une tumeur à l’autre) Une petite tumeur correspond à 1010 cellules = 10 g = +3 TD Le décès du patient survient entre 1011 et 1012 cellules cancéreuses = 100 g à 1 kg, +3 à +10 TD Il y a en moyenne 10 temps de doublement entre le diagnostic et le décès du patient. En cancérologie, il nous manque beaucoup d’éléments : les 30 premiers TD ne nous sont pas accessibles, on ne sait pas si durant la phase cachée il y avait déjà des métastases par exemple. La clinique concerne seulement les 10 derniers TD.
Quelques exemples de TD en fonction du type de tumeur : le cancer du testicule est très grave (TD très court) mais cela veut aussi dire qu’il y a beaucoup de cellules en mitose et donc qu’il est très sensible à la chimiothérapie : 95% des cancers du testicule sont guéris, en grande partie grâce à la chimiothérapie.
Nombre de cellules
A gauche : croissance exponentielle, le TD est constant, la fraction de cellules tuées est constante A droite : croissance gompertzienne, le TD diminue quand la taille tumorale augmente. Ce modèle est plus proche de la réalité.
La croissance tumorale se fait sur un modèle Gompertzien.
A retenir
Le cancer résulte d’une succession d’altérations génétiques C’est un processus multi-étapes (initiation, promotion, prolifération…) Les principales caractéristiques des cellules cancéreuses sont la prolifération incontrôlée, l’invasion et l’angiogenèse Différentes voies de progression métastatique : o Plans tissulaires (mélanome, sarcome,…) o Espaces et cavités (péritoine, plèvre, méninges,…) o Lymphatiques (sein, colon,…) +++ o Vaisseaux sanguins (colon, rectum,…) La croissance tumorale est un processus indolent Seuil de détection 109 cellules cancéreuses, 1 mm3, 1 g Le temps de doublement tumoral permet de définir l’agressivité d’une tumeur Les cancers sont diagnostiqués tardivement (30 TD), décès (40 TD) La croissance tumorale se fait sur un modèle Gompertzien
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Oncogenèse Objectifs du cours : Comprendre ce qu’est un oncogène Comprendre ce qu’est un gène suppresseur de tumeur Comprendre les mécanismes généraux de l’oncogenèse multi-étape Comprendre l’utilité de la caractérisation des anomalies moléculaires et son impact thérapeutique. Il est important pour comprendre ce cours de bien maitriser les notions antérieures de biologie cellulaire et de biologie moléculaire (cf. cours PACES).
I) Caractéristiques de la cellule tumorale 1) Oncogenèse et cellule tumorale L’oncogenèse est le développement d’une tumeur et, d’une manière générale, regroupe les différents processus biologiques aboutissant à la transformation d’une cellule normale en une cellule tumorale et, à terme, en une tumeur maligne. Pour les tumeurs épithéliales, on sait distinguer, les cancers in situ (où les cellules tumorales ne franchissent pas la membrane basale de l’épithélium) et les cancers invasifs (ou les cellules tumorales franchissent la membrane basale de l’épithélium) ; le critère distinctif, essentiel pour les tumeurs des épithéliums, est donc le franchissement de la membrane basale de l’épithélium. Exemple : Pour le cancer du col de l’utérus, si le cancer est in site, le risque de métastase est de 0 alors que lorsqu’il franchit la membrane basale, le risque augmente largement.
/!\ Attention à l’utilisation des termes : tumeur ne signifie pas cancer. La tumeur est un terme générique pour des productions pathologiques constituées par un tissu néoformé, et distinct d’un processus inflammatoire. Il existe deux types de tumeurs : les tumeurs bénignes, et les tumeurs malignes qui sont en fait les cancers. NB : 85 à 90% des cancers humains sont des carcinomes (cancer des épithéliums). La définition est plus complexe quand on s’intéresse aux tumeurs des cellules non-épithéliales, mais le principe reste le même.
De la même façon, il existe un continuum entre la cellule normale et la cellule tumorale, d’un point de vue cytologique et d’un point de vue histologique. Les cellules dysplasiques par exemple ne définissent pas encore un état cancéreux (elles ne dérivent d’ailleurs pas toutes vers la tumeur maligne). Dans un cancer in situ, les cellules ont la même allure cytologique que dans un cancer invasif (même hétérogénéité de taille, de noyaux, même configuration architecturale…) : la différence tient au franchissement de la membrane basale par le carcinome.
2) Qu’est-ce que le cancer ? Le processus d’oncogenèse, et de progression tumorale est long et s’opère en règle générale sur plusieurs années. Il fait intervenir plusieurs étapes, qu’on a aujourd’hui bien conceptualisées : 1) Tout d’abord, on observe un état de dysplasie : des modifications dans la taille des cellules et de leur noyau (avec par exemple une augmentation du rapport nucléo-cytoplasmique), et un certain nombre d’anomalies qui progressent peu à peu en nombre et en fréquence. Le massif cellulaire s’organise en tumeur bénigne, qu’on appelle adénome (tumeur bénigne des épithéliums sécrétants).
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UE 19 – Physiologie des cancers – J.-Y. BLAY 2) Puis les anomalies cellulaires s’accumulent, se majorent (en lien avec l’accumulation des anomalies moléculaires), et on atteint le stade du carcinome in situ, puis du carcinome invasif lorsque le massif franchit la membrane basale. /!\ Tout cancer in situ n’évolue pas obligatoirement en cancer invasif. 3) Le cancer devient détectable par nos techniques actuelles (imagerie essentiellement) à partir de 1012 cellules environ, soit 1 cm3 de diamètre. Ces étapes, d’une cellule normale à une tumeur bénigne, prennent environ une dizaine d’années (cela peut varier en fonction des cancers) et résultent d’une perte de l’équilibre entre les cellules en division et les cellules en apoptose : pour conserver l’homéostasie tissulaire à l’âge adulte, les cellules en division et les cellules en apoptose doivent normalement être en quantité sensiblement équivalentes ; dans un cancer, on aura un nombre de cellules en division qui sera supérieur au nombre de cellules en apoptose, ce qui induira la progression tumorale, une augmentation du volume de la tumeur. La division cellulaire est incontrôlée, c’est une des caractéristiques des tumeurs cancéreuses.
3) La cellule tumorale ♥♥ Les caractéristiques de la cellule tumorale sont :
L’autosuffisance en facteur de croissance La résistance aux signaux antiprolifératifs (= perte des mécanismes de rétrocontrôles qui répriment l’entrer dans le cycle cellulaire). La capacité à envahir les tissus voisins, puis à distance de leur tissu originel par les voies sanguines et lymphatiques (métastases notamment) : c’est la seule caractéristique « caractéristique ». L’« immortalité », qui désigne sa capacité à se répliquer de façon illimitée NB : le terme « immortalité » est en réalité assez impropre puisque les cellules ne sont immortelles que si on continue à les cultiver dans de bonnes conditions. Ceci contraste avec la « crise de croissance » inévitable, que présentent les cellules normales mises en culture dans les mêmes conditions, qui s’arrêtent de se diviser après une vingtaine de divisions ! La capacité de la cellule à susciter l’angiogenèse : quand la tumeur dépasse un certain stade, la vascularisation initiale devient insuffisante pour la taille de la tumeur, qui doit donc créer de nouveaux vaisseaux sanguins. C’est la néoangiogenèse. La capacité à échapper aux signaux normaux de l’apoptose
Certaines de ces caractéristiques des cellules cancéreuses ne sont pas toujours adoptées par toutes les tumeurs. Par exemple, certaines tumeurs ne donneront jamais de métastases ailleurs mais n’en tueront pas moins le patient affecté (ex : gliome) NB : Une caractéristique fonctionnelle des cellules tumorales à retenir est également leur capacité à se déplacer de leur tissu originel vers des tissus où elles ne sont pas supposées être. L’oncogenèse est un processus multifactoriel, multi-étape, causée par des altérations structurales ou d’expression de plusieurs gènes : gène unique muté ne suffit le plus souvent pas pour accomplir toutes ces modifications dans les fonctions cellulaires. Le développement de la cellule tumorale fait intervenir des freins de la multiplication cellulaire ou de la survie (gènes suppresseurs de tumeur), des accélérateurs de la division ou de la survie (oncogènes) ainsi que des systèmes d’entretien de l’intégrité du génome (gènes de réparation de l’ADN), le tout dans un contexte cellulaire et tissulaire environnant (système immunitaire, cellule de la matrice extracellulaire, cellules endothéliales et composant la structure des vaisseaux sanguins (cellules endothéliales, cellules musculaires lisses spécifiques et cellules péricytaires, toutes permettant l’angiogenèse) qui peut soit contribuer à contrôler la tumeur, soit au contraire l’aider à se développer. NB : Ne jamais oublier qu’une tumeur maligne ne se limite pas aux cellules qui la constituent. C’est en réalité des cellules tumorales + l’environnement cellulaire, appelé stroma tumoral, qui va contribuer à la progression tumorale. Cependant, l’environnement de la cellule tumorale n’est pas tumoral en lui-même. FGSM3 Lyon Est
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II) La carcinogenèse : un processus multi-étapes 1) Les proto-oncogènes (les accélérateurs) a. Définition du proto-oncogène Un proto-oncogène est un gène cellulaire (noté c-onc), susceptible de devenir, par suite d’une modification qualitative ou quantitative, un gène transformant, c’est-à-dire un gène capable de conférer expérimentalement le phénotype cancéreux à une cellule normale eucaryote (c’est ce qu’on appelle la transformation). Ces gènes ont pour but d’induire un effet positif dans la cellule (signal de prolifération, de survie…). NB : c-onc (gène normal) ≠ v-onc (oncogène présent dans un génome viral, souvent rétroviral) ≠ onc (oncogène). On note par exemple c-src le proto-oncogène Src dans sa version normale (car il s’agit d’un oncogène Cellulaire) ; src l’oncogène muté ; et V-src l’oncogène porté par certains rétrovirus. Ils ont un effet dominant, c’est-à-dire que l’altération d’un seul allèle est suffisante pour donner le phénotype. On en a identifié formellement 150 chez l’Homme, mais ce chiffre ne cesse d’augmenter avec les progrès de l’analyse génomique des cancers. Il existe plusieurs grands groupes d’oncogènes qui codent par exemple pour : Des facteurs de croissance Des récepteurs aux facteurs de croissance (récepteur tyrosine kinase, à protéine G, récepteur à l’EGF…) Des enzymes de transduction du signal intracellulaire (PI3K, Akt, mTOR, RAS…) Des facteurs de transcription qui vont moduler l’expression d’un certain nombre de gènes. Mais cette liste est non-exhaustive : on découvre régulièrement de nouveaux oncogènes appartenant à d’autres catégories, par exemple récemment des gènes du cycle de Krebs (isocitrate déshydrogénase), ou de la phosphorylation oxydative (succinate déshydrogénase). b. La transformation du proto-oncogène en oncogène Pourquoi ces gènes physiologiques se transforment-ils en accélérateurs ? Il existe plusieurs mécanismes qui altèrent leurs fonctions physiologiques et les transforment en oncogènes : L’amplification (augmentation du nombre de copies du gène) : par exemple pour ERB2 (aussi appelé HER2) dans certains cancers du sein, ce qui conduit à une augmentation du nombre des protéines codée par ce gène sur chaque cellule. La translocation (réciproque, équilibrée le plus souvent) : cela modifie la fonction du gène (BCR ABL), ou induit une surexpression (gènes des Ig+ un oncogène (MYC) dans certains lymphomes, par exemple lymphome de Burkitt). Les mutations activatrices : une mutation ponctuelle sur un seul codon peut induire l’activation permanente de la protéine codée par le gène en question. Par exemple une mutation ponctuelle à certains sites clés des récepteurs tyrosine kinase les active constitutionnellement, et les rend transmetteurs de messages même sans leur ligand. Les oncogènes viraux (qui proviennent de rétrovirus -ARN- ou de virus à ADN type HPV) : par exemple le virus HPV contient des oncogènes (E6, E7) qui vont être exprimés dans les cellules infectées par ce virus, et être responsables de l’initiation des cancers du col de l’utérus (en bloquant notamment des GST p53 et Rb). Par variation épigénétique : la dérégulation de la méthylation de protéines histones, ou la mutation de protéines présentes dans des complexes de régulation de la transcription, va entrainer des troubles de la régulation de certains autres gènes et contribuer à la progression tumorale. c. Exemples de proto-oncogènes Les oncogènes sont présents à toutes les étapes de la signalisation intracellulaire. Par exemple, le gène HER2/neu/erbB2 code pour la protéine HER2, qui est un récepteur tyrosine kinase. Ce gène est amplifié dans 15% à 25% des cancers du sein, ce qu’on peut démontrer par technique moléculaire Fish : en rouge (allez voir la diapo sur claroline) on voit les copies du gène ; s’il y a une amplification, le pronostic du cancer est mauvais. FGSM3 Lyon Est
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Autre exemple : le gène KRAS, carrefour de voies de signalisation importantes, est muté dans 90% des cancers du pancréas, 20% des cancers du sein et 35% des cancers colorectaux. Le fait qu’il soit muté et activé dans une très grande variété de tumeurs montre son importance. Hélas, il est très difficile à exploiter sur le plan thérapeutique pour l’instant.
A bien comprendre : avant, on traitait la tumeur en fonction uniquement du type cellulaire et de l’organe d’origine (et c’est ce qu’on va sûrement apprendre pour l’ECN). Dès à présent, sur certains cancers, et dans le futur sur la majorité des cancers, les anomalies moléculaires vont guider le traitement sur un nombre croissant de cancers, c’est déjà le cas, vous l’apprendrez, pour 15-25% des cancers au moins.
Un dernier exemple (assez rare) : la translocation t(9;22) du chromosome Philadelphie dans la leucémie myéloïde chronique. C’est une maladie particulière causée par le produit d’un gène de la translocation. La translocation fusionne en fait deux gènes, le gène BCR et le gène ABL (un récepteur tyrosine kinase intracytosolique). La protéine de fusion résultante est suffisante pour transformer une cellule normale en une cellule ayant acquis les propriétés tumorales.
2) Les gènes suppresseurs de tumeur (les freins) a. Définition d’un gène suppresseur de tumeur Ce sont des gènes qui sont aptes à inhiber la croissance cellulaire quand ils sont introduits dans une cellule tumorale par transfection. Ils ont cette fois-ci un effet récessif, c’est-à-dire que chacun des deux allèles doit être inactivé, par les mécanismes vus ci-dessous, pour faire disparaître la fonction de la protéine codée par ce gène. b. Mécanisme des syndromes de prédisposition aux cancers C’est le mécanisme fondamental dans les syndromes de prédisposition génétique au cancer. Qu’une même cellule subisse une mutation sur chacun des deux allèles d’un même gène est un phénomène très rare. Mais si un individu porte constitutionnellement une mutation d’un des deux allèles de ce gène (mutation germinale) dans toutes ses cellules (une mutation somatique transmise par un de ses parents), il aura plus de chance de développer un cancer (il ne restera plus qu’une mutation à accomplir). C’est ce qu’on appelle un syndrome de prédisposition au cancer : les cancers surviendront beaucoup plus précocement en âge et plus fréquemment que dans la population générale. On a identifié à l’heure actuelle environ 40 gènes suppresseurs de tumeur chez l’Homme, mais ce chiffre est probablement très sous-estimé, et ne cesse d’évoluer avec les progrès de la génomique. Le mécanisme est un mécanisme d’inactivation du gène qui peut se faire sous différentes formes : Par délétion Par mutation inactivatrice sur des zones codantes d’un récepteur clé de la protéine Par translocation Par un mécanisme épigénétique : par exemple en méthylant le gène sur certaines régions (notamment les promoteurs et les enhancers), ce qui va modifier ses lieux d’expression. A noter que les mécanismes d’inactivation peuvent évidemment être différents pour les deux allèles ! Perte complète d’un gène d’un côté et mutation inactivatrice de l’autre par exemple. Exemples : p53, impliquée dans une très grande variété de processus cellulaires (entrée dans le cycle cellulaire, régule l’apoptose) Pten, protéine impliquée dans le contrôle des voies de signalisation APC, protéine qui contrôle les relations entre les cellules (muté dans les cancers du côlon) Rb, qui a un rôle dans la régulation transcriptionnelle (= gène canonique qui nous a permis de comprendre le rôle de ces gènes suppresseurs de tumeurs). L’oncogène E7 d’HPV va bloquer Rb dans les cancers du col.
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UE 19 – Physiologie des cancers – J.-Y. BLAY p53 est l’exemple le plus marquant. Les fréquences de mutation sont variables selon les cancers, mais sa mutation est présente dans presque tous les types de cancers humains. Dans le cas du cancer du col de l’utérus, un des oncogènes viraux (E6) du virus HPV va bloquer la fonction de la protéine : p53 sera donc inactivée sans être nécessairement mutée. p53 est en quelque sorte le gardien du génome. En résumé, il faut bien retenir qu’une des différences principales entre oncogènes et gènes suppresseurs de tumeur est le caractère dominant des oncogènes, et le caractère récessif des gènes suppresseurs de tumeur.
3) Les gènes de réparation de l’ADN (les systèmes d’entretien) Ils subissent des altérations génomiques fréquemment retrouvées. MMR (mésappariements = Mismatch Repair genes) : répare les erreurs de l’ADN polymérase comme hMSH2, hMLH1, hPMS1, hPMS2, hMSH6. NER (excision de nucléotides) : répare les anomalies causées par les radiations ionisantes et les UV (responsable de cancers familiaux survenant précocement) comme Xeroderma Pigmentosum. Réparation par recombinaison homologue : comme BRCA1 et BRCA2, dont l’altération est fréquemment responsable de cancers du sein familiaux. Ils sont des suppresseurs de tumeur ; leur absence entraine des mutations dans tout le génome. Les mutations des gènes de réparation de l’ADN entrainent des mutations multiples dans les cellules tumorales.
4) Résistance à l’apoptose La cellule tumorale doit résister aux mécanismes physiologiques de contrôle de la masse cellulaire. L’apoptose est une mort cellulaire activée, programmée induite par un système cellulaire complexe faisant intervenir des signaux extracellulaires (récepteur de mort, voie extrinsèque), et des signaux intracellulaires (d’origine mitochondriale, voie intrinsèque). Ces signaux vont activer les caspases qui vont opérer la mort cellulaire. Elle fait intervenir des voies cellulaires complexes et d’autres voies externes à la cellule. Plusieurs mécanismes sont impliqués dans la résistance à l’apoptose : Perte de gènes inducteurs de l’apoptose (par exemple perte du gène DCC dans les cancers du côlon) Acquisition ou surexpression de gènes qui protègent de l’apoptose : notamment la famille BCL2 ou les voies de signalisation extrinsèque par les récepteurs de mort et intrinsèque par voie mitochondriale qui peuvent être activées à différents niveaux. En résumé, pour aboutir à une cellule tumorale, il n’y a jamais une seule altération. C’est toujours une somme d’anomalies, une accumulation de phénomènes, qui est mise en jeu.
III) L’environnement tumoral L’environnement n’est pas innocent dans la carcinogenèse contrairement à ce que l’on pourrait croire, même si les cellules qui le composent ne présentent pas d’anomalies génétiques. Le système immunitaire notamment intervient, certes pour empêcher le développement de la tumeur, aux premières étapes de leur développement, puis la phase de contrôle, et d’équilibre s’achève, et le stroma immunologique tumoral peut alors être immunosuppressif (avec des lymphocytes T régulateurs, et des macrophages de type M2) et contribuer très largement à la croissance tumorale. Il agit notamment par la néoangiogenèse, le soutien de la matrice extracellulaire (MEC), la MEC elle-même ainsi que le système immunitaire, présent partout dans notre organisme.
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UE 19 – Physiologie des cancers – J.-Y. BLAY 1) La néo-angiogenèse a. Définition La néo-angiogenèse est la formation de néo vaisseaux sanguins à partir de vaisseaux préexistants. En dessous d’un volume de cellules tumorales d’environ 1-2mm3, un équilibre se fait entre les cellules tumorales qui meurent et celles qui sont capables de se diviser sans cette néoangiogenèse car plus il y a de cellules, plus le besoin en nutriments est important. Ce phénomène apparaît physiologiquement dans le développement embryologique humain, ainsi que pendant la cicatrisation. On le voit également de manière pathologique associé au processus tumoral. C’est un processus complexe faisant intervenir de nombreux paramètres, et c’est également la cible de nombreux médicaments ciblant les facteurs de croissance. b. Les étapes de la néo-angiogenèse Au-delà d’1-2 mm3 de diamètre, la diffusion passive n’est plus suffisante pour apporter les nutriments et l’oxygène à toutes les cellules de la tumeur : les cellules entrent en hypoxie. Il y a donc nécessité pour le développement de la tumeur de fabriquer de nouveaux vaisseaux sanguins.
On parle ainsi d’une phase de dormance (estimée à 1 à 2 millions de cellules), qui peut durer des années, phase pré-vasculaire équilibrée, où le taux de réplication cellulaire est compensé par un fort taux de mort cellulaire. Puis on assiste à une phase de switch/commutation (vers le phénotype angiogénique), qui va modifier les équilibres et entraîner la croissance tumorale. Les mécanismes précis impliqués dans la mise en route de cette phase ne sont pas très bien compris à l’échelle d’une tumeur individuelle mais on sait qu’elle va être la cause de la dissémination des métastases dans les autres organes.
Un exemple est présenté d’un cancer opéré et en rémission en 1990, qui rechute avec une évolution rapide en 2010 : ce cas est incompatible avec une vitesse d’évolution lente sur 20 ans. La capacité d’angiogenèse est acquise de manière stochastique et qui peut être acquise très tardivement par les cellules tumorales dormantes qui restent dans la tumeur.
Ce phénomène angiogénique peut être acquis par la tumeur primaire et, après dissémination, sur les sites métastatiques. C’est un processus complexe et multi-étape. Étapes du switch angiogénique : les principes généraux Pour commencer, la cellule tumorale ou les cellules environnantes vont produire des facteurs angiogéniques (type VEGF) à cause de l’hypoxie, ce qui va activer les cellules endothéliales normales (intactes au niveau génétique) par diffusion et augmenter la perméabilité des vaisseaux pour permettre la migration de protéines plasmatiques, support des cellules endothéliales. Ces protéines vont permettre l’envahissement du stroma par les cellules endothéliales qui auront dégradé la membrane basale. Les néovaisseaux s’établissent, puis vient ensuite leur stabilisation, avec notamment le recrutement de cellules musculaires lisses et de péricytes. Cette néovascularisation est imparfaite, mais suffisante pour le développement tumoral. c. Les facteurs angiogéniques Les facteurs angiogéniques sont indispensables pour la survie, la mobilité, et l’activation des cellules endothéliales. C’est un processus étroitement régulé. Cependant, on sait qu’il y a de multiples inhibiteurs, provenant le plus souvent de la MEC, (protéines de la matrice, interleukines…) ; et également de multiples molécules de stimulation de la fabrication de ces néo vaisseaux (VEGFs, angiopoiétines, PDGFs, FGFs, …), parmi lesquels le VEGF joue un très grand rôle (si l’on inactive un gène du VEGF, on bloque le développement embryonnaire à un stade très précoce chez la plupart des mammifères). On a constaté que plus la tumeur croissait, plus les facteurs de croissance des cellules endothéliales et des vaisseaux étaient produits. C’est donc un processus qui accompagne toute la dérégulation de la cellule tumorale.
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UE 19 – Physiologie des cancers – J.-Y. BLAY La production de ces facteurs par les cellules tumorale est contrôlée par des molécules qui détectent l’hypoxie, le stress oxydatif : par exemple, le facteur HIF-1 induit la production de VEGF lorsqu’il détecte l’hypoxie d’une cellule. VEGF est donc un carrefour puisqu’il est induit par des processus biologiques (hypoxie), la perte de gènes suppresseurs de tumeurs et par des oncogènes. La néoangiogénèse est mise en œuvre dans la tumeur primaire et dans les métastases, pour leur croissance. A noter que la néoangiogénèse favorise donc la dissémination métastatique.
2) Les cellules résidentes du tissu conjonctif et de la MEC Les cellules résidentes du tissu conjonctif sont situées sous la membrane basale : il s’agit des cellules fibroblastiques, des macrophages, etc. Elles sont nécessaires à l’homéostasie tissulaire. On a expliqué plus haut que les carcinomes avaient la propriété de rompre la membrane basale (à partir du stade de carcinome invasif) et de s’introduire dans le tissu. Pour la traverser, elles produisent, ou induisent la production des protéases (de la famille des métalloprotéases et des sérine-protéases).
3) Le système immunitaire a. Le paradoxe du système immunitaire Le système immunitaire est soumis à un grand paradoxe : épidémiologiquement, il est évident que les personnes possédant un système immunitaire diminué (VIH, patient immunodéprimé, etc.) ont un risque augmenté de développer certains cancers. On pourrait donc penser que le système immunitaire est très probablement une arme contre le cancer. Cependant, au-delà d’un certain seuil, si la masse tumorale a pu se développer, c’est bien que le système immunitaire est inopérant. Nous pouvons distinguer 3 périodes : La première période correspond à l’immunosurveillance du cancer dans laquelle les cellules du système immunitaire sont capables de repérer, détruire, contrôler la prolifération cellulaire tumorale. Cette étape est suivi par une phase d’équilibre dans lesquelles les cellules tumorales sont capables de s’adapter. Enfin, c’est l’étape d’échappement. Le système est débordé, les cellules cytotoxiques ne parviennent plus à tuer les cellules tumorales voire même facilitent leur développement. On parle d’édition immunologique : les cellules tumorales vont parfois utiliser le système immunitaire à leur profit, en éliminant les clones T qui leur sont nuisibles et en gardant des clones T anergiques ou dysfonctionnels. Les atteintes du système immunitaire sont à la fois qualitatives et quantitatives : il va perdre un certain nombre d’effecteurs, avec baisse numérique des lymphocytes circulants (lymphopénie), et expansion des cellules immunosuppressives (lymphocytes T reg, macrophages M2…). Ceci dépend cependant du modèle de cancer considéré : dans certains cancers, la présence d’infiltrats lymphocytaires est associée à un mauvais pronostic (adénocarcinomes du sein) ; dans d’autres, ils sont plutôt associés à un bon pronostic (adénocarcinomes du colon…), reflétant la nature et la fonction des lymphocytes infiltrants, et indirectement la nature des mutations des cellules tumorales.
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UE 19 – Physiologie des cancers – J.-Y. BLAY b. Effets de l’immunothérapie face au cancer La plus grosse révolution en cancérologie de ces dernières années porte d’ailleurs sur la découverte du rôle des « check points » immunologiques (couple PD1-récepteur /PDL1-ligand, CTLA-4) dans la croissance tumorale. Les anticorps anti-PD1 produisent, dans les essais cliniques réalisés, un effet positif et souvent durable chez 20 à 40% des cancers étudiés (mélanomes, cancer du rein, du poumon, de la vessie). Ils bloquent les cellules qui freinent le système immunitaire. Ainsi les cellules tumorales seront détruites par le système immunitaire que l’on a pu réactiver. Il s’agit donc d’une thérapeutique à très large spectre et donc très prometteuse, bien qu’elle en soit pour l’instant à ses débuts. Malheureusement, ce n’est pas aussi simple que ça. Le deuxième article de Hanahan et Weinberg montre l’identification de deux caractéristiques des cellules tumorales supplémentaires Les altérations des voies énergétiques, et notamment certaines enzymes du cycle de Krebs qui peuvent se comporter comme des oncogènes en dérégulant le métabolisme cellulaire (glycolyse anaérobie) L’échappement au système immunitaire. Ils identifient aussi deux caractéristiques qui favorisent le développement tumoral : l’inflammation associée au cancer (les anomalies génétiques suscitent souvent une réaction inflammatoire, qui est un paramètre pronostique du cancer) et l’instabilité génomique de la cellule.
IV) Caractérisation moléculaire de la cellule tumorale : approche de la complexité 1) Ordre des mutations On a vu que l’oncogenèse est multi-étape et nécessite l’acquisition de 6 types de compétences différentes (selon Hanahan et Weinberg) qui sont la conséquence des mutations des gènes suppresseurs de tumeurs et d’oncogènes. Dans l’espèce humaine, les probabilités sont très différentes de celles des modèles murins, par notre capacité à réparer les mutations notamment. Les étapes moléculaires de la carcinogenèse sont particulièrement bien étudiées dans le cancer du côlon, un des cancers les plus fréquents dans notre espèce puisqu’il touche 1 personne sur 20. L’histologie de la dédifférenciation de l’épithélium normal en tumeur a été finement couplée à des analyses moléculaires. L’acquisition de propriétés biologiques particulières ne se fait pas au hasard, mais dans un contexte génétique particulier. C’est l’acquisition séquentielle de mutations d’APC, Ras, p53, SMAD4, associées à une instabilité génomique causée par une première mutation, qui permet par la suite l’acquisition d’anomalies supplémentaires. Selon la première mutation observée, le cancer aura donc une étiologie différente, et devrait donc probablement être traité différemment. L’ordre des mutations d’une cellule au devenir tumoral peut complètement changer.
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2) Traiter les cancers en fonction de leur génotype Le séquençage du génome des cancers est favorisé par l’émergence d’outils de caractérisation génétique de l’individu normal, mis à disposition du cancer et des cellules tumorales. On peut donner comme exemple de la vitesse d’évolution la comparaison d’une étude américaine de 2006 (séquençage de 22 cancers du côlon et du sein) qui montrait qu’il existait bien plus de gènes impliqués que ce qui était attendu et l’article de Davoli et al.
NB : Développement rapide et ultra-récent des techniques d’analyse du génome actuelles puisque le 1er séquençage a coûté 1 à 2 milliards d’euros, alors qu’il coûterait actuellement 2000 euros environ (allez voir sur internet si ça vous intéresse de vous faire génotyper ;)) Avec toujours les questions éthiques : a-t-on envie de savoir ce qu’il va nous arriver ?
Les travaux actuels portant sur un plus grand nombre de cancers (qui a cette fois séquencé plus de 8000 tumeurs !) ont montré qu’un petit nombre de tumeurs possédait une unique mutation responsable de la carcinogenèse (driver fort) mais que la plupart étaient le résultat de multiples mutations d’oncogènes ou de suppresseurs de tumeurs faibles (entre 14 et 20 gènes) dont la contribution individuelle reste faible, mais dont la combinaison permet la transformation et l’acquisition du phénotype transformé. Les modèles avec des drivers forts ne sont en fait pas les plus fréquents. Ce qui apparaissait jusqu’alors comme un chaos génomique tumoral sur le caryotype ou la CGH se révèle en fait être le résultat d’une sélection des mutations en faveur de la carcinogenèse.
3) Problèmes thérapeutiques rencontrés En réalité, une masse tumorale de 1012 cellules (estimation là encore approximative du nombre de cellules en maladie métastatique) comprend des cellules qui n’ont pas toutes les mêmes mutations. Une tumeur est en réalité hétérogène, et seulement une partie des mutations sont partagées entre toutes les cellules d’une même tumeur. Aujourd’hui, quand on séquence une tumeur, il faut regarder quelles sont les mutations, mais aussi leur « profondeur », c’est-à-dire quelle proportion de cellules les expriment dans la tumeur. Ainsi au sein d’un même cancer chez une personne, les voies de signalisation activées sont les mêmes, mais leurs mécanismes d’activation peuvent être très différents entre le métastases et parfois au sein même d’une même métastase. Le problème qui se pose alors en thérapeutique est celui de la sélection clonale de clones résistants. Si on a une tumeur avec une majorité de cellules A, on va donner au patient un traitement anti-A qui va détruire les cellules A. Mais cette élimination des cellules A va en fait être en faveur du développement des cellules B, résistantes au traitement anti-B, qui étaient au départ minoritaire dans la tumeur, mais qui prolifèrent suite au traitement. On n’aura donc à l’échelle macroscopique peu d’effet sur la tumeur à terme. La progression tumorale est en fait un phénomène dynamique : une tumeur suit une voie préférentielle, mais en voulant aller à l’encontre de cette voie préférentielle, on ne fait que l’orienter vers une autre voie, par une logique Darwinienne. FGSM3 Lyon Est
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4) Autres difficultés d’application au patient Globalement, pour étudier une cellule tumorale, on a plusieurs outils qui appartiennent à la biologie moléculaire de base (cf. cours PACES) pour mesurer les altérations structurales de base de l’ADN, les variations d’expression des gènes (ARNm = transcriptome), voire les variations d’expression protéique (protéome). Ces techniques sont apparues très récemment et se modernisent rapidement. On se heurte alors à une difficulté supplémentaire : l’application pratique en clinique prend du temps, notamment pour obtenir un suivi minimal des patients de plusieurs années. Or, pendant ces années, les techniques évoluent considérablement. Il y a 10 ans, on a construit le protocole Mindact obtenu sur des analyses de profil d’expression dont la technologie date de 2004. On a lancé une grande étude sur 8000 patients, dont les résultats viennent il y a quelque mois d’être publiés dans le NEJM. Le problème est que pendant ces 10 années, les techniques ont fondamentalement changé, et on a donc une classification moléculaire des cancers qui a dans cet intervalle beaucoup évolué : l’étude est du coup moins informative que prévu. Il existe un découplage entre le progrès rapide des technologies de caractérisation moléculaire et la nécessaire lenteur requise pour le suivi des patients. NB : A l’avenir, il faudra trouver des stratégies pour accélérer ce transfert.
Même si pour l’ECN nous allons sûrement continuer d’apprendre à traiter séparément les cancers du sein, du colon, de l’estomac, etc., on sait qu’il existe une très grande variété de cancers, et qu’on pourra sûrement adapter le traitement à l’anomalie moléculaire rencontrée. Quelques cibles pour lesquelles on a une approche thérapeutique potentielle : amplification de HER2 dans le cancer du sein, mutation de Bcr Abl dans le Leucémie Myéloïde Chronique (LMC), mutation du KIT dans les GIST. Aujourd’hui, on a toujours besoin de comprendre quelle est l’interaction génétique de la cellule tumorale principale et le type histologique. Mais les analyses à haut débits qui se popularisent aboutissent à des programmes très ambitieux comme le plan France Médecine Génomique 20-25 a pour objectif de proposer, en routine, aux patients atteints de cancer, gratuitement, le séquençage du génome du cancer avec notamment la Plateforme lyonnaise AURGEN qui aura pour objectif de séquencer 18000 tumeurs par an.
5) Comment repérer les mutations partagées par tous les clones tumoraux ? La classification basée sur les organes est en train d’être dépassé par la classification moléculaire et on a une fragmentation des maladies cancéreuses en une myriade de maladies classées à la fois sur le plan histologique mais aussi sur les caractéristiques moléculaires. Le profil des altérations génétiques de la cellule tumoral va permettre de nous guider dans une décision thérapeutique. Remarque : Si vous voulez faire de la recherche, songez à la bio-informatique parce que les besoins à l’avenir sont et seront importants dans cette discipline !
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V) Exemple des tumeurs stromales gastro-intestinales (GIST) L’exemple du GIST traduit le problème de sélection clonale. Ce sont les tumeurs stromales gastrointestinales, cellules de Cajal « pace maker » de la motricité du tube digestif, qui sont relativement rares (600 nouveaux cas par an en France) et qui présentent une résistance à tous les traitements chimiothérapiques. Il a en fait été découvert que les GIST étaient liées le plus souvent (80%) à des mutations activatrices du gène KIT (récepteur de facteur de croissance) dans l’exon 9 ou dans l’exon 11, plus rarement dans d’autres exons. Le problème est qu’il s’agit de la première mutation, donc même certaines cellules non cancéreuses peuvent présenter la mutation puisque 25% de la population a cette mutation dans les cellules de Cajal de l’estomac (microGIST)- dans des séries autopsiques, tandis que le cancer ne touche que 1/100 000 personnes. Il existe plusieurs types moléculaires de GIST avec des mutations différentes sur ce même gène mais également sur un gène proche PDGFRA, ou sur des gènes différents, donc le diagnostic moléculaire était très utile pour pouvoir lancer un traitement adapté. Le modèle était parfait : on donnait le traitement adapté au type moléculaire de la tumeur au patient. Malheureusement, quand les patients étaient exposés pendant plusieurs années aux médicaments, ils développaient des clones résistants, avec de nouvelles mutations de KIT dans des sous-clones de la maladie, qui pouvaient tuer le patient, devenu résistant à Imatinib. Des traitements de deuxième intention sont désormais disponibles mais ce sera sans doute une longue course pour le développement de nouveaux inhibiteurs. De manière frappante, environ 20% des patients traités ne développement jamais de résistance et vivent pour certains depuis 2000 avec une maladie métastatique contrôlée. Le cancer métastatique est devenu pour eux une maladie chronique pour laquelle ils prennent leur médicament tous les jours. On ne retrouve pas beaucoup de mutation de KIT dans d’autres cancers. Mais les mutations du gène B-raf sont présentes dans beaucoup de cancers différents. Cela pose la question : est-ce que chaque fois qu’on va avoir une mutation de B-raf on va avoir une sensibilité aux inhibiteurs de B-raf. Dans les faits ce n’est pas le cas, certaines tumeurs répondent mieux que d’autres. On ne sait pas encore prédire lesquelles vont bien répondre aux inhibiteurs Il faudra donc à l’avenir trouver une solution pour prendre en compte tous les clones présents dans une tumeur. Peut-être faudra-t-il faire des analyses moléculaires sur l’ADN tumoral circulant dans le sang du patient, afin d’avoir une vision globale du cancer et un panorama des différentes mutations observées. Dans tous les cas, il est très probable qu’on assiste à une fragmentation de la cancérologie au cours de notre exercice futur. La cancéro est une spécialité d’avenir ;)
Conclusion Le cancer est une maladie des gènes : D’abord liée à des proto-oncogènes et à des gènes suppresseurs de tumeurs Mais qui nécessite aussi l’activation de fonctions cellulaires spécifiques : l’apoptose, l’autocrinie, l’indépendance aux signaux, la réplication sans limite, l’angiogenèse et l’invasion. Il faut toujours considérer la cellule dans son environnement. On utilise de plus en plus la caractérisation moléculaire des cellules tumorales pour classer les maladies et choisir les traitements : c’est l’essor de la médecine personnalisée.
Mots en anglais
Oncogene Tumor suppressor gene Gene sequencing Comparative genomic hybridization (CGH) Expression profiling Targeted treatment of cancer
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Oncogénétique Ce cours se base sur les principes énoncés dans le cours d’oncogenèse. Ce cours vise à comprendre les implications cliniques dans les grands syndromes de la carcinogenèse. Vous aurez notamment besoin pour comprendre ce cours des notions antérieures en biologie cellulaire et moléculaire (de la PACES par exemple) et de notions de génétique humaine. Objectifs : Comprendre les mécanismes biologiques des principales prédispositions génétiques au cancer Connaître les principaux syndromes de prédisposition génétique au cancer Connaître l’organisation d’une consultation d’oncologie génétique Le cancer est une maladie des gènes de la cellule tumorale. Le cancer est une maladie multifactorielle. Dans 10% des cas (ce chiffre varie en fonction des cancers), on retrouve une composante héréditaire, et donc une contribution de la génétique constitutionnelle de l’individu dans son risque individuel de développer un cancer Les 90% de cancers restants sont considérés comme sporadiques : ils peuvent cependant être influencés par des facteurs génétiques mais de façon moins évidente. On notera de nombreuses interactions avec les facteurs environnementaux (tabac +++, alcool ++, chimiques, physiques, viraux, alimentation, UV…), variable selon les types de cancers.
I) Introduction 1) Définitions Ce cours d’oncogénétique permet de faire le lien entre la biologie et la clinique. Nous définissons au préalable quelques termes nécessaires à une bonne compréhension :
Génotype : C’est l’ensemble des déterminants génétiques portés par une cellule.
Phénotype : C’est l’ensemble des caractéristiques observables d’un individu qui dépend de l’interaction avec le milieu dans lequel il vit.
Mutation germinale : c’est une mutation qui survient dans une cellule germinale, il s’agit d’une cellule sexuelle portant le matériel génétique transmis à la descendance (100% des cellules de l’individu portent la mutation).
Mutation somatique : C’est une mutation qui survient dans une seule cellule somatique, donc une cellule qui n’est pas destinée à la reproduction.
Mutation constitutionnelle : C’est une mutation présente dans le génome, qui sera potentiellement transmise à la descendance
Mutation de novo, néo-mutation : C’est une mutation qui survient dans un gamète parental en aval de la formation de l’embryon.
Rappel : Lorsqu’une mutation est présente ou survient avant la fécondation (soit nouvellement apparue, soit transmise de génération en génération), ou survient lors des premières divisions du zygote (donc nouvellement apparue), on parle de « mutation constitutionnelle ». Une mutation constitutionnelle sera présente dans toutes les cellules somatiques de l’individu, et également dans ses cellules germinales, donc transmissible à la descendance. Toute mutation nouvellement apparue est aussi appelée mutation « de novo » ou « néomutation ». Certaines mutations surviennent lors de la méiose dans une cellule germinale, au niveau d’un gamète parental, et sont appelées « mutations germinales ». Les mutations germinales seront donc forcément présentes de façon « constitutionnelle » chez l’individu issu de ce gamète, qui sera donc porteur d’une mutation « de novo » ou « néomutation », non présente dans les cellules somatiques du parent qui lui a transmis cette mutation. Les mutations constitutionnelles pathogènes, « de novo » ou transmises de génération en génération, sont à l’origine des maladies génétiques monogéniques et des maladies génétiques chromosomiques. FGSM3 Lyon Est
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Cas sporadiques : Un cancer sporadique correspond à la situation la plus courante, que l’on voit. C’est un cas issu d’un évènement de novo, survenu sur une cellule somatique, ou aux étapes précoces de l’embryogenèse, mais non héritée des parents. Dans ce dernier cas, cette mutation/un évènement pourra être transmise à la descendance, mais le plus souvent, lorsque la mutation survient dans une cellule somatique, elle n’est bien sûr pas transmissible.
Une prédisposition héréditaire au cancer suppose un lien familial et génétique commun entre des cancers d’une même famille. Les formes familiales de prédisposition au cancer sont définies génétiquement, on peut donc suivre leur propagation dans la famille selon une génétique mendélienne. Les formes familiales sont des formes à prédisposition autosomique dominante.
Les formes de susceptibilité sont, elles, en partie le résultat de la présence dans le génome de variants polymorphiques de gènes, associés à un risque accru de développer un cancer avec une pénétrance faible, en combinaison avec l’environnement, du mode de vie, de l’exposition à des facteurs de risques communs, et la transmission qui en résulte est donc non mendélienne.
Gènes de forte pénétrance / faible pénétrance : C’est la potentialité d’un allèle de donner un phénotype. C’est la probabilité de présenter la maladie lorsqu’on porte la mutation.
Concept de pénétrance : Dans certaines maladies, les individus porteurs de la mutation peuvent ne présenter aucun signe de l'affection ; on parle alors de pénétrance incomplète du gène morbide. Dans ce cas, un sujet apparemment sain peut être porteur du gène muté et transmettre la maladie à sa descendance. La pénétrance d'un allèle morbide est définie par le rapport suivant : nombre d'hétérozygotes malades / nombre total d'hétérozygotes. La pénétrance d'un gène peut aussi varier en fonction d'autres paramètres : l'âge (par ex : la pénétrance du gène responsable de la chorée de Huntington est de 0 à la naissance, de 50% vers 40 ans et de 100% vers 70 ans) ou le sexe. Issu de Collège National des Enseignants et Praticiens de Génétique Médicale : Hérédité monogénique
2) Gènes associés à la formation de tumeurs On décrit au cours de la tumorigenèse l’importance de certains gènes. Ce sont les oncogènes, les gènes suppresseurs de tumeur et les gènes de réparation de l’ADN (qui peuvent pour certains être considérés comme des gènes suppresseurs de tumeur).
Les proto-oncogènes sont des gènes physiologiques de la cellule. Leur version mutée/altérée/surexprimée contribue à l’oncogenèse. La mutation d’un seul allèle suffit. Il s’agit d’un gain de fonction d’un des deux gènes.
Les gènes suppresseurs de tumeur permettent de limiter la formation de cellules cancéreuses (= p53). La mutation des 2 allèles du gène est nécessaire au développement d’un phénotype tumoral. Il s’agit d’une perte de fonction des deux allèles du gène. Il en est de même pour les gènes de réparation de l’ADN.
On peut résumer les différentes définitions données sur le schéma à droite. Vous noterez la différence faite entre les tumeurs sporadiques et les tumeurs issues d’une prédisposition héréditaire. La tumeur sporadique se développe à partir d’une première mutation somatique, ou mutation de novo, et requiert une deuxième mutation. L’acquisition de ces deux évènements est un processus rare, qui requiert une longue période. C’est donc beaucoup plus long que pour une tumeur se développant dans un contexte de prédisposition héréditaire, où une première mutation germinale est déjà présente dans toutes les cellules de l’individu, et où la perte du second allèle sera suffisante pour permettre l’initiation du processus de transformation et sera acquise avec un délai plus court. Ceci explique le plus jeune âge de diagnostic des cancers survenant dans un syndrome de prédisposition génétique. FGSM3 Lyon Est
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UE 19 – Physiologie des cancers – J.-Y. BLAY Lorsqu’une famille a une mutation du gène rb qui est une mutation constitutionnelle, les enfants vont avoir quasiment 90% de risques de développer ce cancer rare de l’œil (le rétinoblastome) avant l’âge de 5 ans. S’il n’y a pas de prédisposition familiale connue, les risques de développer cette tumeur sont mineurs (10 cas par an environ chez des enfants de moins de 5 ans en France).
3) Gènes de prédisposition héréditaire Dans un contexte de prédisposition héréditaire, la première mutation est présente dans toutes les cellules de l’individu. Les mutations qui surviendront par la suite seront des évènements somatiques. Dans un contexte héréditaire, on peut parler de permissivité de la cellule. Dans le cas d’une tumeur sporadique, deux mutations, une sur chacun des allèles, sont nécessaires à l’initiation de l’oncogenèse et au développement d’un phénotype cancéreux. Les cancers d’origine héréditaire surviennent donc plus précocement. Par exemple, les cas de cancer du sein causés par une mutation du gène BRCA1 surviennent entre 30 et 40 ans, alors que l’âge moyen d’apparition du cancer du sein en France est de 60 ans. Remarque : la prédisposition héréditaire concerne principalement des gènes suppresseurs de tumeurs plutôt que des oncogènes (CDK4 qui peut être muté dans les mélanomes) Les syndromes de prédisposition importants sont : Le syndrome sein/ovaire causé par une mutation constitutionnelle du gène BRCA1 ou du gène BRCA2 Le syndrome de Li-Fraumeni causé par une mutation du gène P53 (risque de cancer du sein et de l’ovaire) Les cancers du côlon associés à une mutation du gène APC : la polypose adénomateuse familiale (PAF) Les cancers du côlon sur syndrome HNPCC (hereditary non polyposis colon cancer) avec la participation des gènes Mismatch Repair Genes (MMR) MLH1 et MSH2 et autres (gènes de réparation des mésappariements) On distingue plusieurs types de mutations à l’origine de ces syndromes de prédisposition, que nous reverrons dans le cas des syndromes. Dans quel cas suspecte-t-on un cancer de type héréditaire ?
Agrégation de cas de cancer (de même type ou de types différents suivant les syndromes) dans la même branche familiale (transmission Autosomique Dominante) Age précoce au diagnostic Tumeurs primitives multiples chez un même individu Lésions bilatérales / multifocales Sur certaines caractéristiques histologiques (cancer médullaire de la thyroïde)
4) Prédisposition/ susceptibilité On distingue les syndromes de susceptibilité et les syndromes de prédisposition. Prédisposition : Il y a transmission d’une mutation délétère d’un gène suppresseur de tumeur ou d’un oncogène, responsable d’une prédisposition forte (quasi 100%) de l’apparition des cancers Susceptibilité : La transmission n’est pas mendélienne. Elle est opérée par des variants polymorphiques : des gènes dont la fonction est altérée, parfois des combinaisons de plusieurs variants polymorphiques de différents gènes ; la transmission est non mendélienne et donc l’histoire familiale moins caractéristique. La fréquence dans la population générale est plus élevée mais la pénétrance plus faible.
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UE 19 – Physiologie des cancers – J.-Y. BLAY Les caractéristiques des syndromes de susceptibilité et de prédisposition sont résumées dans le tableau cidessous : Prédisposition Susceptibilité Gènes Mutations délétères Variants polymorphiques Transmission Autosomique dominante (AD) Non mendélienne Histoire familiale Forte Faible, Tumeurs primitives multiples Pénétrance Forte Faible Fréquence Faible Forte La fréquence est celle de la population générale. On retrouve les caractéristiques de chaque syndrome au niveau des arbres généalogiques de familles atteintes de cancer. Dans le cas des syndromes de prédisposition, on observe des cancers survenant à un jeune âge, parfois différents en fonction des syndromes (par exemple sein, ovaire pour BRCA1 ou BRCA2), sur plusieurs générations (arbre généalogique de gauche). Dans le cas des syndromes de susceptibilité, on remarque des cancers différents, plus tardifs, chez des sujets âgés (arbre généalogique de droite). Ici, le syndrome de susceptibilité peut être discuté, et l’association en fait due dû à un facteur de risque tabagique sur plusieurs générations.
II) Consultation d’oncogénétique 1) Législation (ECN+++) La pratique des consultations et des tests d’oncogénétique est encadrée par les Lois de Bioéthique (n°94-654 du 29 juillet 1994 puis n°2004-800 du 6 aout 2004) et leurs décrets d’application (Décrets n°2000570 du 23 juin 2000 puis n°2008-321 du 4 avril 2008). Les consultations d’oncogénétique sont étroitement encadrées par la loi. Il y a une obligation d’information sur les caractéristiques de la maladie recherchée, sur les moyens de la détecter, sur la fiabilité des analyses, sur les possibilités de prévention et de traitement. Il est obligatoire de recueillir le consentement libre et éclairé du patient. Un patient peut décider de ne pas vouloir savoir, et cette situation doit bien sûr être respectée. La confidentialité des résultats est également essentielle pour les patients.
/?\ Cela peut avoir des conséquences sociale et professionnelle importantes à propos des prêts bancaires, des assurances. Une susceptibilité à une maladie (pas que cancéreuse d’ailleurs) pourrait à terme modifier la capacité d’emprunt bancaire par exemple.
Ex : Une patiente ayant la mutation du gène p53 demande à son médecin de ne plus mentionner dans ses dossiers sa mutation, pour ne pas être stigmatisée par ce statut.
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UE 19 – Physiologie des cancers – J.-Y. BLAY 2) Evaluation initiale Une étude de l’histoire familiale du cancer est réalisée à travers la constitution de l’arbre généalogique qui inclut : Les causes de décès et maladies des membres de la famille L’âge au moment du/des diagnostics Les dates et lieux de prise en charge afin de récupérer les comptes rendus anatomopathologiques. Il est nécessaire de disposer des éléments factuels pour décrire les possibilités d’infirmer ou de confirmer le caractère génétique : les techniques de génétique moléculaire sur le sang ou la tumeur, l’immunohistochimie sur la tumeur… Ces marqueurs permettent d’obtenir des informations objectives sur la pathologie du patient et d’apprécier les risques qu’il a de développer un cancer en fonction de l’histoire naturelle des autres cancers de sa famille. Cette étude permettra donc de définir : Le risque de cancer chez la personne qui consulte Les dispositions à prendre en matière de dépistage ou de prévention / stratégies adaptées en fonction du risque. Nous décrirons les dispositions à prendre pour certains syndromes en troisième partie. L’indication de prise en charge doit être validée en comité multidisciplinaire d’oncologie génétique. Le prélèvement des personnes atteintes a été réalisé après information au cours d’une consultation et est obligatoirement soumis au recueil du consentement écrit de participation. Les réponses sont soumises à un délai de plusieurs mois. Les résultats sont remis à la personne concernée au cours d’une nouvelle consultation obligatoire. Dans le cas de résultat significatif (c’est-à-dire l’identification d’une mutation), le test est prédictif pour les apparentés. On met en place une surveillance et une prévention des personnes prédisposées. Par exemple, dans le cas d’une mutation du gène BRCA1 avec un cancer du sein à 30 ans, peut-on proposer une mastectomie préventive controlatérale et une ovariectomie ? Si le résultat n’est pas concluant (c’est-à-dire pas de mutation détectée), cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas de prédisposition au cancer (une autre mutation, inconnue, peut être en cause). On suit donc quand même les patients avec une histoire familiale lourde lorsque que le gène de prédisposition n’est pas identifié, en réalisant des examens de dépistage, les indications de prise en charge étant quand même beaucoup moins lourdes. On informe les cas-index qui devront transmettre l’information à leurs apparentés.
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UE 19 – Physiologie des cancers – J.-Y. BLAY 3) Tests prédictifs L’oncogénétique suit une progression logique. Lors du typage, s’il y a identification d’une mutation connue et prédisposant au cancer, une prise en charge peut être envisagée. La mutation connue est une condition préalable obligatoire. De même, les recherches ne portent que sur les gènes pour lesquels on a une certitude scientifique d’une contribution à une prédisposition génétique. La suspicion d’un HNPCC (que l’on décrira en partie suivante) fait rechercher les gènes associés et seulement ceux-là. Le test est toujours réalisé sur 2 prélèvements indépendants concordants, les conséquences d’une éventuelle erreur étant trop lourdes. En effet, dans le cas d’un résultat positif, la prise en charge est très lourde : prévention primaire et secondaire adaptée à chaque type de prédisposition. Synthèse : La consultation d’oncogénétique pour un test prédictif peut donc se résumer en trois temps :
1° Conseil génétique : o Expliquer le test et ses résultats possibles o Informer des risques de cancer liés à la mutation o Décrire les options de prévention et leurs limites o Proposer un soutien psychologique
2° Délai de réflexion obligatoire (1 mois)
3° Nouvelle consultation pour la remise des résultats o Résultat négatif : le risque est celui de la population générale o Résultat positif : mise en place d’une prise en charge adaptée à chaque type de prédisposition
III) Grands syndromes de prédisposition au cancer 1) Cancer du côlon a. Epidémiologie Le cancer colorectal est le 3ème cancer en incidence ; et le 2ème cancer en mortalité. Il touche 1/20 personnes. C’est un cancer retrouvé dans les deux sexes. b. Les facteurs de risque du cancer colorectal ♥
Age > 50 ans (accumulation d’erreurs génétiques non réparées) Les antécédents personnels de cancers colorectaux ou de polypes adénomateux sont particulièrement importants. Les antécédents familiaux : plus on retrouve d’apparentés au 1er degré, plus le risque augmente. L’âge du diagnostic est également important, le risque sera différent entre un cancer du côlon chez son père à 90 ans et un cancer du côlon à 30 ans. On retrouve d’ailleurs deux syndromes de prédisposition génétique : PAF et HNPCC Maladies inflammatoires chroniques : RCH (recto-colite hémorragique) et Crohn. Facteurs environnementaux : alimentation, sédentarité, surpoids, alcool, tabac…
Ce graphique représente le risque cumulé de cancer colorectal à 70 ans en fonction des différentes caractéristiques : on remarque le fort risque cumulé de cancer en cas de polypes adénomateux familiaux (PAF).
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On retrouve plusieurs types de prédisposition dont la répartition en fréquence est résumée dans le graphique cicontre : Nous présenterons les syndromes majeurs de cancers familiaux : PAF et HNPCC (très importants).
c. PAF : Polypose Adénomateuse Familiale (et Sd de Gardner)
Le schéma ci-dessus représente l’oncogenèse du cancer du côlon, de la dysplasie au carcinome, mentionnant les différentes mutations qui apparaissent au cours du développement tumoral. La PAF est caractérisée par la mutation constitutionnelle (perte) du gène APC, gène de la signalisation cellulaire dont la perte entraîne l’apparition précoce d’un grand nombre de polypes adénomateux (plusieurs centaines). On considère généralement que la mutation de ce gène est la mutation initiale du processus oncogène de la muqueuse du côlon et du rectum. Les polypes adénomateux sont des tumeurs bénignes. On retrouve dans tous les cas plusieurs caractéristiques cliniques communes : plusieurs centaines de polypes adénomateux colorectaux entre l’âge de 20 et 30 ans. On observe des manifestations extra-coliques : Rétinite pigmentaire, Polypes gastriques glandulo-kystiques Adénomes duodénaux et de la partie proximale de l’iléon Tumeurs desmoïdes et fibromateuses Tumeurs osseuses Hépatoblastome Plus rarement : Tumeurs cérébrales, Cancers thyroïdiens papillaires multifocaux avant 35 ans, Cancer du pancréas Quelle prise en charge ? Lorsque l’on détecte la présence d’une mutation du gène APC chez un cas-index (90%), on recherche systématiquement la mutation chez les apparentés au 1er degré. Si la mutation est absente, on ne réalise pas de surveillance particulière. Si la mutation est présente, la prise en charge est expliquée ci-dessous. FGSM3 Lyon Est
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UE 19 – Physiologie des cancers – J.-Y. BLAY Dans 10% des cas, on ne détecte pas de mutation du gène APC. On réalise une surveillance annuelle par rectosigmoïdoscopie des apparentés au 1er degré à partir de 10-12 ans jusqu’à 40 ans. Dans le cas où la mutation est présente, on réalise donc un dépistage systématique et une chirurgie prophylactique. Le risque étant de 95% à 70 ans, on propose des solutions assez extrêmes. Ces chirurgies visent à enlever le rectum et le colon. Cette prise en charge est extrêmement particulière, lourde et spécifique. Voici un résumé de la prise en charge en cas de mutation du gène APC :
d. Le syndrome HNPCC Le syndrome HNPCC (Hereditary Non Polyposis Colorectal Cancer) ou Syndrome de Lynch représente la majorité des syndromes de prédisposition héréditaire du cancer du côlon. Il est surtout localisé dans le colon droit. Tous les gènes du HNPCC ne sont pas identifiés. NB : Le syndrome de Lynch n’est pas associé à des polypes ! Le HNPCC est caractérisé par la mutation constitutionnelle délétère de gènes impliqués dans la réparation des mésappariements de l’ADN consécutifs à des erreurs de la réplication : gènes MMR (Mismatch Repair). Il y a donc une certaine hétérogénéité génétique avec de différentes mutations dans plusieurs gènes. MSH2 +++ (40-60%) MLH1 ++ (30%) MSH6 PMS2 MLH3, MSH3, PMS1, …. Une mutation dans ces gènes n’est retrouvée que dans 70% des cas de HNPCC. D’autres gènes, non identifiés encore, sont donc probablement impliqués. Quelles sont les caractéristiques cliniques de ce syndrome ? Ce cancer survient à un âge moyen de 44 ans, généralement au niveau du côlon proximal, ou côlon droit. Le tissu tumoral est généralement indifférencié, mucineux et inflammatoire. Le spectre des cancers observés dans ce syndrome peut être étroit (côlon, rectum 50%, endomètre 36%, intestin grêle) ou élargi (ovaire, estomac, voies biliaires, tumeurs cutanées, tumeurs cérébrales). Cette présentation clinique est moins lourde que les PAF.
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UE 19 – Physiologie des cancers – J.-Y. BLAY On identifie les patients sur les critères d’Amsterdam : Nombre de cancers familiaux : au moins 3 cas de cancer colorectal, endomètre, voies urinaires ou intestin grêle (spectre étroit) Parenté : chez des apparentés du 1er degré entre eux ou sur 2 générations Age : un cas avant 50 ans Ces critères stricts permettent d’identifier les patients, mais pas tous. Dans quels cas réalise-t-on une analyse des gènes MMR ? Les indications d’une analyse des gènes MMR se basent : Soit sur des critères familiaux, sur les critères d’Amsterdam élargis Soit sur des critères tumoraux : o Altération des gènes MMR = Instabilité génétique = phénotype tumoral MSI (instabilité des microsatellites) o CMSI est observé par ailleurs dans 15% des cas sporadiques o Etude de l’expression tumorale des protéines MMR par IHC On retrouve une mutation dans 70% des familles avec critères d’Amsterdam et 30-40% dans d’autres situations. Attention cependant, l’absence de mutation détectée ne signifie pas l’absence de prédisposition héréditaire au cancer. Quelle est la prise en charge familiale ?
Présence d’une mutation des gènes MMR chez un cas index = recherche de la mutation chez les apparentés au premier degré o Si mutation absente : pas de surveillance. Dépistage à partir de 50 ans comme dans la population générale o Si mutation présente : cf. infra Absence de mutation des gènes MMR détectée chez un cas index : surveillance adaptée en fonction du risque de cancer
Quelle est la prise en charge en cas de prédisposition ?
Dépistage par coloscopie totale (coloration indigo carmin) : o A partir de 20/25 ans o Tous les 2 ans o Pas de chirurgie prophylactique recommandée
Dépistage par échographie endovaginale et curetage : o A partir de 30 ans o Tous les ans
Autres : pas de consensus o FOGD (fibroscopie œsogastroduodénale) avec la 1ère coloscopie o Echographie / Cytologie urinaire annuelles à partir de 30 ans.
2) Cancer du sein et de l’ovaire a. Epidémiologie
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UE 19 – Physiologie des cancers – J.-Y. BLAY Le cancer du sein touche environ 1 femme sur 8. Il s’agit du premier cancer chez la femme. L’incidence et la mortalité sont assez découplées : on traite aujourd’hui assez bien le cancer du sein. Le cancer de l’ovaire reste néanmoins assez redoutable, car il est généralement diagnostiqué très tardivement. b. Les facteurs de risque du cancer du sein ♥
Age > 40 ans Antécédents personnels de cancer du sein 12% de risques Antécédents familiaux de cancer du sein : o En fonction du nombre d’apparentés au 1er degré atteints et/ou âge au diagnostic. 3% des cancers du sein sont diagnostiqués chez les hommes. o Prédispositions génétiques : BRCA1 et BRCA2 Facteurs hormonaux (terrain « hyperœstrogénie ») : o Puberté précoce, ménopause tardive o Nulliparité, 1ère grossesse tardive, absence d’allaitement o Cycles anovulatoires o Obésité, TSH Autres : niveau socio-économique (plutôt élevé), tabagisme, alcool c. Les facteurs de risque du cancer de l’ovaire
Age > 50 ans Antécédents personnels ou familiaux de cancer du sein, ovaire, endomètre, côlon Prédispositions génétiques : Syndrome sein-ovaire (BRCA1/2) NB : On parle de forme o HNPCC héréditaire lorsqu’on a identifié o Li-Fraumeni la mutation d’un gène o Formes familiales de cancer du sein ou de l’ovaire responsable du risque accru Facteurs hormonaux : cancer, et de forme familiale o Nulliparité, infertilité lorsqu’on compte plusieurs cas o 1ère grossesse tardive dans une famille mais qu’aucune o Action protectrice des facteurs diminuant l’ovulation mutation n’a été identifiée. (contraception orale, allaitement, multiparité…)
Les formes héréditaires représentent une minorité des cancers du sein et de l’ovaire. La majorité des formes est sporadique, comme pour le cas du cancer du côlon. d. Syndrome sein/ ovaire : BRCA1/BRCA2 On retrouve une mutation constitutionnelle délétère de BRCA1 et 2 qui sont 2 gènes suppresseurs de tumeur intervenant dans les processus de réparation de l’ADN. Ils représentent seulement 1 à 3 % des cancers du sein. Le risque de développer des tumeurs dans d’autres organes est plus faible (RR environ égal à 2). Les tableaux ci-contre résument les risques de développer un cancer lors de la présence d’un des gènes BRCA1/2 muté.
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UE 19 – Physiologie des cancers – J.-Y. BLAY Dans quel cas recherche-t-on des mutations BRCA1/BRCA2 ? On réalise une recherche de mutation lorsqu’on retrouve dans une famille : 3 cas de cancer du sein ou de l’ovaire chez des apparentés de 1er ou 2nd degré dans la même branche parentale Un cas de cancer du sein ou de l’ovaire associé chez un apparenté de 1er degré à : o Cancer du sein avant 40 ans o Cancer du sein chez l’homme o Cancer du sein bilatéral avant 65 ans o Cancer de l’ovaire On retrouve une mutation de BRCA1 ou BRCA2 chez 15 à 20% des familles testées. De même que pour les syndromes HNPCC et PAF, l’absence de mutation ne signifie pas d’absence de prédisposition au cancer ! BRCA2 est aussi retrouvé muté dans le cancer de la prostate. Quelle est la prise en charge ? Si l’on retrouve une mutation des gènes BRCA1 ou BRCA2 chez un cas index, on recherche également la mutation chez les apparentés au 1er degré : Si la mutation est absente : pas de surveillance particulière (surveillance identique à la population générale) Si la mutation est présente : rythme de surveillance rapprochée + indication de chirurgies prophylactiques En cas d’absence de mutation des gènes BRCA1 ou BRCA2 détectée chez un cas index, le risque de cancer est tout de même élevé (on n’a simplement pas trouvé le gène en cause), le rythme de surveillance sera donc adapté au risque accru de cancer (cf infra). En cas de prédisposition, la prise en charge choisie se décide en réunion de concertation pluridisciplinaire (RCP). Cancer du sein
Cancer de l’ovaire
Examen clinique 2 fois/an à partir de 20-25 ans Mammographie + échographie annuelle à partir de 30 ans IRM mammaire + échographie annuelle Mastectomie totale prophylactique +/reconstruction immédiate o RCP o Jamais avant 30 ans o Information complète de la patiente sur les avantages, risques et alternatives possibles o Consultation psychologue
Echographie annuelle à partir de 30 ans : faible efficacité Annexectomie bilatérale prophylactique (ovaires + trompes) : o RCP o Recommandée après 40 ans, non justifiée avant 35 ans (choix de la patiente) o Information complète de la patiente sur les avantages, risques et alternatives possibles o Consultation psychologue
Mots en anglais • Genetic predisposition to cancer • Genetic susceptibility to cancer • Tumor suppressor gene
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Le pathologiste et le cancer Une femme de 45 ans est atteinte d’un cancer du sein. On lui a donné les éléments du diagnostic, on a dit qu’elle aurait un traitement chirurgical qui conserverait le sein et des rayons sur le sein, qu’elle aurait un traitement médical pour diminuer le risque de métastase. Elle vous demande : « Docteur, c’est quoi une métastase ? ». Il est important de lui expliquer, avec un vocabulaire vulgarisé et adapté à sa compréhension, afin que cette notion ait une vraie signification pour elle.
Le diagnostic d’une tumeur maligne (= cancer, désigner une tumeur bénigne comme cancer est un abus de langage) repose en totalité sur son aspect histologique. ♥ C’est le travail du pathologiste (ou anatomopathologiste). En effet, l’étude anatomopathologique permet de préciser le type de tumeur et d’adapter le traitement. Il n’existe pas un cancer mais des cancers que nous détaillerons au second semestre (cf. cours d’anatomopathologie en UE 5). La prise en charge thérapeutique du patient par l’oncologue dépend du type de tumeur, et pas seulement de sa localisation. Objectifs : • Comprendre le rôle du pathologiste dans la prise en charge d’un patient • Connaître le processus de l’examen anatomopathologique • Connaître les outils à la disposition du pathologiste • Connaître les éléments diagnostiques, pronostiques et prédictifs apportés par l’examen anatomopathologique • Connaître leur mode de formulation Quand on a commencé à classer les tumeurs, on les distinguait sur le plan macroscopique : Tumeur bénigne : Cancer : o Bien limitée par une capsule o Mal limité o Reproduit l’aspect du tissu d’origine o Bouleverse l’aspect du tissu d’origine o Aucun envahissement local (ganglions o Peau déformée en périphérie normaux) o Envahit localement o Ne métastase pas o Peut donner des métastases à distance Ces critères sont importants mais ne suffisent parfois pas, c’est là qu’intervient l’anatomopathologie.
I) Les rôles du pathologiste 1) Diagnostic ♥ /!\ Le pathologiste apporte la preuve du cancer Lui seul a les éléments en main pour poser un diagnostic sûr et précis Il permet de distinguer une lésion cancéreuse/ précancéreuse/bénigne/… Ses rôles sont d’identifier, nommer et classer le cancer. Dans un compte rendu, l’anatomopathologiste donne une classification précise du tissu tumoral répondant aux normes internationales. Mais il précise aussi le stade d’évolution du cancer via le bilan d’extension. Il permet donc d’effectuer un pronostic (importance sociale : le patient pourra-t-il travailler dans 6 mois, ou sera-t-il en palliatif ?). L’évaluation complète de la tumeur permettra de même au pathologiste d’apporter des éléments d’orientation concernant la prise en charge thérapeutique (rôle dans la RCP).
2) Dépistage et prévention Si la lésion dépistée est précoce, les cellules tumorales n’ont pas envahi les tissus environnants (comme c’est le cas dans les lésions dysplasiques ou le Carcinome In Situ n’ayant pas traversé la lame basale). La prise en charge thérapeutique consistera alors seulement à réaliser une résection de la lésion, avec des marges certes, mais permettant d’assurer dans presque tous les cas la guérison de la patiente.
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/?\ Exemple du cancer du col de l’utérus : Le dépistage organisé par frottis permet de détecter la présence d’HPV et les lésions précoces associées.
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UE 19 – Clinique & diagnostic du cancer – M. RIVOIRE 3) Autres rôles Le pathologiste se situe au cœur des réseaux d’échanges d’information sur le cancer/les tumeurs des patients. Il pourra donc être impliqué dans les processus d’études épidémiologiques en santé publique (Combien de tumeurs trouve-t-on à Lyon ?), de recherche clinique (La nouvelle molécule B marche-t-elle sur le cancer de madame X ?) ou même fondamentale (Existe-t-il une hétérogénéité génomique entre les différents cancers que l’on classe actuellement dans telle catégorie ? Les tumeurs du sein de tel type partagent-elles telle caractéristique génétique ?). Il joue un rôle dans la recherche translationnelle ou de transfert en participant à la validation sur les tumeurs humaines des résultats obtenus par la recherche fondamentale, au bénéfice des patients.
II) Les types de prélèvements 1) Processus de l’examen anatomo-pathologique Ce processus a forcément un délai. A partir de la réception du prélèvement, plusieurs étapes Il est nécessaire de faire un techniques sont nécessaires à l’obtention des bon prélèvement !! coupes histologiques. La lecture et l’interprétation sont exclusivement réalisées par des pathologistes (y compris les internes qui, au cours de leur 5ème année d’internat, développent les compétences nécessaires à la lecture de la totalité des examens) : c’est très individu-dépendant (y en a des doués, d’autres moins…) La production d’un compte rendu est obligatoire et a une valeur juridique. On parle de compte rendu « juridiquement opposable ». L’oncologue utilisera les différents éléments du compte rendu pour adapter le traitement. Le choix de ce traitement se fait obligatoirement en RCP (Réunion de Concertation Pluridisciplinaire). Cette réunion est constituée au minimum d’un oncologue médical, d’un chirurgien et d’un radiothérapeute.
2) Les prélèvements a. Pièces opératoires Tout prélèvement réalisé au bloc opératoire doit être envoyé au service de pathologie, y compris les tissus non tumoraux.
Etape macroscopique : o Description de la tumeur (taille, extension locale) o Recherche de ganglions satellites o Etat des marges de résection (recherche de cellules tumorales au niveau de la marge)
Pièce opératoire de côlon avec tumeur entourée sur l’image.
Les prélèvements seront réalisés dans des parties ciblées. On va prélever dans la partie la plus infiltrante pour connaître l’infiltration de la tumeur. On prélève également les ganglions satellites. En effet, l’invasion des ganglions satellites fait partie de la caractérisation de la tumeur, et va conditionner la chimiothérapie postopératoire.
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UE 19 – Clinique & diagnostic du cancer – M. RIVOIRE Pour chaque organe, il y a un nombre minimum de ganglions à trouver sur les pièces opératoires pour caractériser le N de la classification TNM (cf. plus loin). Ce nombre est variable en fonction de l’organe (12 pour le côlon, 10 pour le pancréas, 16 pour l’œsophage, …).
Étape microscopique : o Prélèvement d’une partie de tumeur fraîche ainsi que d’une partie de tissu sain pour la cryoconservation dans l’azote liquide la plupart du temps en vue d’études futures (diagnostiques, de recherche, …). Cette étude est soumise à la signature d’un consentement éclairé de la part du patient. Cette tumeur sera conservée dans un but de recherche diagnostique et/ou de recherche fondamentale. On constitue ce que l’on appelle des tumorothèques, financées par l’INCA (Institut National du Cancer). o Fixation de la pièce tumorale. Le liquide fixateur (paraformaldéhyde = formol) permet notamment la conservation de l’ADN (c’est une obligation). Ceci permet l’étude de la tumeur et des analyses ultérieures pour un traitement ciblé, de la recherche, … b. Biopsies
Ce sont des éléments de petite taille (quelques mm généralement). Leur taille permet une étude plus simple et donc plus rapide. En effet, leur fixation sera généralement beaucoup plus aisée. Elles peuvent suffire pour réaliser un diagnostic de cancer. c.
Résections
endoscopiques
(Non évoqué cette année)
Les résections endoscopiques permettent de réséquer des cancers superficiels du tube digestif par exemple et évitent au patient une chirurgie. d. Etalements cytologiques C’est un des prélèvements les plus simples à réaliser, il est majoritairement utilisé pour les dépistages, et jamais pour le diagnostic. Suite à l’étalement en service (examen ostéomédullaire par exemple), la lame parvient au service d’anatomopathologie et permet un délai de réponse rapide. Par exemple, le frottis cervico-utérin est un examen simple, efficace et indolore, soumis à un dépistage national (comme actuellement le cancer colorectal et le cancer du sein).
3) Délais Le diagnostic en anatomopathologie prend du temps : il faut fixer, prélever, révéler et lire les coupes. Une demande d’examen prendra donc nécessairement du temps. Nous avons vu quel était le rôle du pathologiste dans la prise en charge des tumeurs, et les différents types de prélèvement qu’il peut /?\ Officiellement, le délai pour être amené à étudier. L’étude de ces prélèvements pourra être réalisée l’analyse d’une pièce opératoire est de plusieurs façons. Nous allons étudier les différentes méthodes dont de 48h minimum, on compte 24h dispose le pathologiste pour étudier les tissus et les différentes pièces pour une biopsie et quelques heures qui peuvent lui être envoyées. Il est à noter que l’anatomopathologie pour la cytologie. En réalité, ces peut et doit utiliser toutes les techniques à sa disposition pour réaliser délais sont souvent plus longs, à juste titre. son diagnostic. Il y a aussi un délai de réponse pour permettre la lecture et l’interprétation de la pièce par le pathologiste, mais également la rédaction et la validation du compte rendu.
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III) Les outils du pathologiste 1) La morphologie conventionnelle - Les colorations a. Réalisation Il y a très peu d’automatisation dans le travail du pathologiste. Le prélèvement est déshydraté puis inclus en paraffine. Le bloc de paraffine sera découpé au microtome (2 à 5 µm par ruban) par le technicien. Les rubans de paraffine sont ensuite étalés sur lame. Les éléments de diagnostic sont conservés très longtemps au laboratoire. Par exemple, les lames sont conservées 10 ans au sein du laboratoire. La conservation est dépendante de la capacité de stockage dans certains services, qui doivent respecter tout de même les contraintes légales. b. Coloration La coloration habituelle est celle à l’hématoxyline, éosine, safran (HES). Le safran en est le composant le plus cher, il est ainsi parfois retiré des colorations, notamment dans certains pays anglo-saxons. Il faut comprendre que la lecture de la lame est essentiellement morphologique ! Le diagnostic anatomopathologique est donc parfois très difficile pour déterminer le type de tumeur. Conséquences : Les délais minimum requis sont liés à la fixation. Le PAF (paraformaldéhyde) met du temps à pénétrer dans les tissus. D’une manière générale, les contraintes techniques sont liées au type de prélèvement.
/?\ Rappel sur les colorations en histologie : Hématoxyline : L’hématoxyline est un colorant basique qui donne une couleur bleu ou bleu-violet aux substances acides des cellules et tissus. Ainsi, la chromatine des noyaux se colore en bleu foncé par l’hématoxyline. De même, le cytoplasme est coloré plus ou moins intensément en bleu du fait des ribosomes qui contiennent de l’acide ribonucléique. Les substances ou structures qui se colorent en bleu par l’hématoxyline sont dites basophiles. Eosine : L’éosine est un colorant acide qui se lie aux protéines basiques et leur donne une couleur rouge ou rosée. Ainsi, les mitochondries du cytoplasme colorées par l’éosine, sont acidophiles. Safran : Le safran colore les fibres conjonctives en jaune-orangé. L’investigation ne se limite néanmoins pas à ces trois colorations. Dans certains cas, il peut être réalisé (en auto prescription) d’autres colorations, pour obtenir plus d’informations ou d’autres types d’informations sur le tissu envoyé au service. Par exemple, la coloration au bleu Alcian permet de mettre en évidence les mucopolysaccharides acides.
c. Examens particuliers : examens extemporanés C’est un examen réalisé en peropératoire, pendant l’anesthésie du patient. Le résultat doit être rendu en 15 à 20 min. Par exemple, cela peut être réalisé pour le diagnostic de nodules du péritoine, de l’invasion du ganglion sentinelle dans la chirurgie du cancer du sein, etc. Cet examen est généralement réalisé au service d’anatomopathologie quand il est proche, il arrive cependant que le pathologiste se déplace au laboratoire. Il se décompose en 3 temps : Congélation Coupe rapide Coloration instantanée Le but de cet examen est d’orienter le geste du chirurgien pendant l’intervention. Il n’a néanmoins aucune valeur juridique, reste un examen de mauvaise qualité et devra être reconduit a posteriori pour reconfirmer les résultats. ♥ La coupe ne pourra pas être réutilisée, ainsi il est malheureusement possible de détruire la seule preuve présente. /!\ On ne prend donc jamais de décision majeure sur la seule base de l’examen extemporané !
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UE 19 – Clinique & diagnostic du cancer – M. RIVOIRE d. Techniques rapides Certaines pathologies sont des urgences diagnostiques et thérapeutiques (rejet de greffe, hépatite alcoolique aiguë, sepsis, …). Les résultats doivent être rendus dans la journée en utilisant des techniques accélérées. Cela demande une organisation que tous les hôpitaux ne peuvent pas fournir Quand la lecture morphologique ne suffit pas, l’anatomopathologiste peut utiliser des techniques complémentaires : IHC, FISH, biologie moléculaire.
2) L’immunohistochimie (IHC) Objectifs : Détecter une protéine donnée (ou un peptide) dans une préparation cellulaire ou tissulaire. Principe : Utilisation d’un anticorps spécifique Révélation du complexe antigène-anticorps par un système permettant sa visualisation par un outil microscopique /?\ Rappel sur l’IHC : Cette technique permet de révéler UNE protéine spécifiquement dans un tissu. Nous appellerons notre protéine la « protéine C » dans notre exemple. Dans un premier temps, on fixe les protéines dans le tissu. Cette étape est réalisée par le PAF (paraformaldéhyde). Cet agent chimique alkylant permet de former des ponts (liaisons covalentes) entre les protéines. Les protéines sont donc fixées entre elles et au tissu. Si on cherche à révéler une protéine particulière (par exemple C), on peut donc être sûr qu’elle restera sur le lieu de présence dans la cellule vivante. Dans un second temps, on réalise un ciblage spécifique par un anticorps (appelé anticorps primaire) réalisé en laboratoire. Cet anticorps possède un site de liaison spécifique (paratope) de la protéine qui nous intéresse. L’anticorps primaire reconnait donc C et uniquement C. Dans un troisième temps, on applique un second anticorps, appelé anticorps secondaire, qui est lié à un système de révélation. Cet anticorps secondaire se fixe spécifiquement au premier anticorps. Enfin, le système de révélation porté par l’anticorps secondaire permet de révéler spécifiquement l’anticorps secondaire, donc l’anticorps primaire, donc la protéine C. En résumé, la protéine C est reconnue par un premier Ac, qui est lié à un deuxième, qui permet la révélation.
L’idée est de mettre en évidence une protéine particulière pour classer au mieux la tumeur. Divers types de marqueurs sont utilisés, par exemple : CgA (chromogranine A) : marqueur des tumeurs endocrines Ki67 : marqueur de prolifération cellulaire
Applications ♥ Diagnostic : identifier et classer une tumeur en déterminant sa nature Pronostic : identifier des facteurs pronostiques (ex. : marqueurs de prolifération comme Ki67) Prédiction : identifier des marqueurs de réponse à un traitement (ex. : récepteurs hormonaux et HER2 dans le cancer du sein, thérapies ciblées +++, chimiothérapies conventionnelles qui cherchent les enzymes activant ou non les chimiothérapies)
On peut ainsi étudier des marqueurs de réponse au traitement, des facteurs pronostiques. L’IHC est majoritairement autoprescrite par le pathologiste pour pouvoir compléter correctement le CR. C’est une technique qualitative (présence/absence), à la limite semi-quantitative (plus ou moins présente), mais elle ne permet pas de quantifier précisément. Pour cela, on utilise la FISH. FGSM3 Lyon Est
/?\ Information sur le récepteur HER2 dans le cancer du sein : L’expression de ce marqueur a une pertinence pronostique et clinique. La révélation de ce marqueur a donc un intérêt dans le cadre de la prise en charge du patient. Il conditionne pour partie le traitement. En effet, l’expression de ce marqueur signifie que la tumeur est sensible à un signal hormonal spécifique. Les tumeurs exprimant ce marqueur seront ainsi traitées par une immunothérapie (qui est une thérapie ciblée) particulière, par Herceptin (=Traztuzumab, bloque HER 2).
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UE 19 – Clinique & diagnostic du cancer – M. RIVOIRE 3) La cytogénétique moléculaire in situ (FISH) C’est une technique qui permet de mettre en évidence une amplification chromosomique sans extraire l’ADN de la cellule. Elle complète certaines études IHC. Pour reprendre l’exemple précédent, sur une IHC, les patientes 0 et 1 ne présentent pas HER2 dans leur tissu tumoral, ou en très faible quantité. La patiente 3 présente un fort taux de HER2. L’IHC ne permet pas de conclure sur la présence ou non d’HER2 dans le tissu tumoral de la patiente 2. Or, la présence d’HER2 permet de traiter la patiente avec une thérapie ciblée qui améliorera sa prise en charge. En effet, si la tumeur de la patiente exprime HER2, elle sera probablement répondante au traitement par Herceptin. Plus que cela, le traitement par Herceptin est légalement soumis à la présence de HER2. Il est alors du devoir du pathologiste de confirmer ou d’infirmer la présence de la protéine dans le tissu. Il réalise pour cela une FISH, comme on peut le voir dans la seconde ligne d’images. Dans le cas « Non-amplified », le marqueur HER2 n’est pas transcrit, alors qu’il l’est dans le cas « Amplified ». La patiente présentant l’amplification d’HER2 sera donc traitée par Herceptin tandis que l’autre ne bénéficiera pas du traitement, car sa tumeur n’y répondrait pas.
/?\ Cette technique est présentée sur un exemple particulier, mais de nombreux autres marqueurs sont recherchés dans le cadre de tumeurs, notamment les facteurs pronostiques dans les cancers pédiatriques.
Applications ♥ Diagnostic : identifier et classer une tumeur en mettant en évidence une anomalie moléculaire caractéristique (ex. : liposarcomes : MDM2+ et lipome : MDM2- , lymphomes, etc.) Prédiction : identifier des marqueurs de réponse à un traitement (HER2 dans le cancer du sein, ALK/EML4 dans le cancer du poumon)
4) Biologie moléculaire appliquée aux tissus Elle est réalisée par des biologistes moléculaires sur des plateformes qui peuvent être intégrées dans les services de pathologie. La sélection du tissu est réalisée par un pathologiste (étape pré analytique), et la partie analytique est réalisée par le biologiste moléculaire. On extrait l’ADN, puis on le manipule (par PCR notamment) pour rechercher une anomalie donnée.
Applications ♥ Diagnostic : identifier et classer une tumeur en mettant en évidence une anomalie moléculaire caractéristique (sarcomes, lymphomes, qui sont très difficiles à caractériser) Prédiction : identifier des marqueurs de réponse à un traitement (ex. : dans le cancer du côlon, la présence de K-ras permet de dire que la tumeur ne répondra pas au traitement par Erbitux / EGFR dans le cancer du poumon)
Nous avons donc vu que l’anatomopathologiste, à partir de pièces opératoires, réalise diverses techniques permettant la révélation de nombreux marqueurs pronostiques, thérapeutiques, de suivi, d’identification … Une fois la révélation réalisée et le prélèvement préparé, il faut lire et interpréter les résultats.
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IV) La démarche diagnostique du pathologiste Un compte-rendu est réalisé pour chaque pièce ou lame lue par un pathologiste. Il est alors de son rôle de caractériser la malignité du tissu, d’identifier le type de tumeur, d’évaluer le pronostic et d’apporter des informations susceptibles de guider le traitement.
1) Affirmer le cancer Il existe 4 cas de figure. Dans la plupart des cas (80% à peu près), le pathologiste est capable d’identifier la tumeur. a. Reconnaissance d’une tumeur maligne et identification
Caractériser la malignité : Certaines caractéristiques (revues extensivement au second semestre) permettent de caractériser la malignité du tissu : invasion de l’organe, formes atypiques des noyaux, etc. La lame basale permet de faire la distinction entre les tumeurs dysplasiques et néoplasiques (cf. Histoire naturelle des cancers) Identifier la tumeur : Toutes les tumeurs ont un nom précis, qui dépend du tissu d’origine, et de son type histologique. Succinctement, on distingue plusieurs origines aux tissus tumoraux : o Cellules épithéliales : carcinome (90% des cancers en clinique) o Cellules mésenchymateuses : sarcome o Cellules du tissu lymphoïde : lymphome
/!\ On ne parle donc pas de cancer, mais de tumeurs malignes issues d’un tissu histologique particulier. Dans chaque organe coexistent plusieurs types histologiques donnant chacun des tumeurs correspondant à une histoire physiopathologique, et donc à un pronostic et une thérapeutique différente. On peut voir ici 4 types de cancers du côlon. En fonction du type déterminé par l’anatomopathologiste, des thérapeutiques différentes seront appliquées. A partir du type histologique, on peut spécifier le diagnostic avec d’autres marqueurs, comme nous l’avons vu précédemment.
b. Reconnaissance d’une tumeur maligne mais identification difficile Dans certains cas, il est possible de reconnaitre une tumeur maligne, mais il est compliqué de l’identifier. La classification précise des tumeurs repose sur la morphologie, l’IHC et/ou les caractères cytogénétiques et moléculaires. Grâce aux techniques complémentaires, il est donc possible d’orienter/réorienter le diagnostic. On peut mettre en évidence des protéines spécifiquement associées à certains types cellulaires. Il existe ainsi un très grand nombre de marqueurs épithéliaux, conjonctifs, lymphoïdes, mélaniques, etc. /?\Exemple : Les caractéristiques du tissu présenté dans les 2 images de coloration en morphologie conventionnelle (en haut) nous orientent vers un sarcome. Il sera pris en charge par de la chimiothérapie. Mais la présence de quelques anomalies inhabituelles a dans ce cas fait douter l’examinateur de la lame. La révélation des cytokératines et de l’EMA a permis de mettre en évidence que ce tissu tumoral était en fait un carcinome (traité par une chirurgie extensive). Il s’agit en réalité d’un carcinome sarcomatoïde, c’est-à-dire d’un carcinome prenant l’aspect d’un sarcome ! FGSM3 Lyon Est
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UE 19 – Clinique & diagnostic du cancer – M. RIVOIRE c. Reconnaissance d’une tumeur mais difficile de préciser : degré de malignité On peut en général facilement affirmer si une tumeur est maligne ou non. Une exception fréquemment rencontrée concerne les tumeurs endocrines ou neuroendocrines (qui sont, elles, relativement peu fréquentes). Lorsqu’on observe un tissu peu différencié (image du haut), on peut être quasiment sûr que la tumeur endocrine en question possède un haut degré de malignité. On observe sur l’image du bas un tissu cytologiquement très organisé, avec des noyaux de petite tailleCe sont des caractéristiques de tissu bien différencié. Nous sommes néanmoins en présence d’une tumeur endocrine, pour laquelle l’aspect morphologique n’est pas prédictif du degré de malignité. Il faut réaliser d’autres marquages pour en étudier la gravité. Les tumeurs endocrines bien différenciées peuvent néanmoins avoir déjà donné plusieurs métastases. On pourra par exemple utiliser le Ki67 (rappel : pour évaluer le taux de prolifération de la tumeur et préciser son « agressivité ». On fait un comptage au pourcentage sur 2000 cellules. Une tumeur avec un grand nombre de cellules positives (>10 %, image de droite) suggère une forte prolifération cellulaire. Si l’on trouve un taux inférieur à 2% (image de gauche), la tumeur est considérée comme peu agressive. marqueur de prolifération)
d. C’est une lésion mais difficile de dire si c’est une tumeur Il n’est pas toujours possible de déterminer directement si un tissu est tumoral ou non. Sur le tissu ci-contre par exemple, il est compliqué de déterminer si nous avons affaire à une hyperplasie ou à un lymphome. Plusieurs analyses sont alors réalisées : Analyse morphologique (Jean-Eude l’anapath : ben c’est des lymphocytes) Étude IHC (ouais, toujours des lymphocytes) Seul critère formel : analyse moléculaire démontrant la monoclonalité (ah, c’est les mêmes lymphocytes en fait, du coup lymphome) Si plusieurs clones sont présents, on pourra parler d’hyperplasie. Si l’on observe une monoclonalité, cela indiquera une prolifération tumorale et donc un lymphome.
2) Évaluer le pronostic a. Informations utiles Le pathologiste fournit, en plus du diagnostic pur, diverses informations qui sont des critères histopronostiques : Concernant la tumeur : o Sa taille, sur pièce fraîche (grande réduction de la taille de la pièce opératoire pendant la fixation) o Le degré de différenciation : une tumeur très indifférenciée est souvent très agressive et invasive o Le degré de prolifération (mitoses : Ki67) Concernant l’extension locale : o Invasion des tissus péri-tumoraux o Angio-invasion, engainement péri nerveux Concernant l’extension à distance : o Statut ganglionnaire (analyse des ganglions locorégionaux et des ganglions à distance) o Métastases à distance FGSM3 Lyon Est
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UE 19 – Clinique & diagnostic du cancer – M. RIVOIRE Concernant l’état des marges de résection : Résection complète ou incomplète (R0, R1, R2) o R0 : les marges sont saines o R1 : il reste des cellules tumorales dans la marge de résection o R2 : information donnée par le chirurgien, qui n’a pas pu prendre de marges chirurgicales suffisantes. Il reste macroscopiquement de la tumeur dans les bords de la résection chirurgicale. Les différentes caractéristiques de la tumeur permettent de la classer selon une classification internationale standardisée : la classification TNM. ♥ b. Classification TNM : une classification internationale basée sur l’organe On distingue dans le TNM : pTNM (pathologie, pour les anatomopathologistes), cTNM (clinique), uTNM (ultrasons), iTNM (imagerie), yTNM (après traitement neo-adjuvant). L’écho-endoscopie est un assez bon moyen d’explorer les couches histologiques), etc. Classification pTNM du TD : T : caractéristiques de la tumeur. De T1 à T4. T4 : la tumeur dépasse l’organe et envahit les organes proches. o o o
Tis : 0% de risque d’atteinte ganglionnaire (in situ) T1 : 20% de risque d’atteinte ganglionnaire T4 : 70-80% de risque d’atteinte ganglionnaire (Chiffres du cancer du côlon)
N : état des ganglions lymphatiques M : présence de métastases à distance
C’est pour pouvoir évaluer les différentes caractéristiques du TNM (et notamment du T) qu’on ira toujours prélever les zones les plus infiltrantes de la tumeur. Attention, c’est une classification pronostique, adaptée à chaque site anatomique. L’anatomopathologie donne le pTNM, qui conditionne directement la thérapie qui sera mise en œuvre par la RCP. c. Perspectives Le pronostic des cancers est étudié par toutes les techniques complémentaires, notamment la biologie moléculaire et l’immunohistochimie.
Caractéristiques biologiques de la tumeur : index de prolifération (tumeurs endocrines) (Ki67) Caractéristiques moléculaires de la tumeur : o Données des analyses moléculaires à grande échelle o Profils moléculaires (cancer du sein, tumeurs pédiatriques, …) Caractéristiques de la réponse à la tumeur (réponse immunitaire et cancer du côlon)
3) Guider le traitement A partir de l’étude conventionnelle de l’anatomopathologie, la RCP choisira une thérapeutique spécifique. Mais l’anatomopathologie permet aussi d’orienter le traitement en fonction des caractéristiques génétiques/protéiques de la tumeur. a. L’analyse conventionnelle
Dans l’adénocarcinome du côlon, la présence de ganglions envahis (N+) à l’examen de la pièce opératoire pose une indication de chimiothérapie. Si, par contre, les ganglions ne sont pas envahis (N0), il n’a aura pas d’autre traitement que le traitement chirurgical. Critère pour une chimiothérapie conventionnelle : le traitement par Temodal est efficace seulement si l’enzyme de réparation de l’ADN appelée MGMT est inactive. L’étude de l’enzyme en IHC ou en biologie moléculaire permettra donc d’indiquer ce traitement ou non.
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UE 19 – Clinique & diagnostic du cancer – M. RIVOIRE b. Critères spécifiques pour les thérapies ciblées
IHC et/ou FISH : HER2+ dans le cancer du sein : Herceptin ♥ Biologie moléculaire : o KIT/PDGFRA dans les tumeurs stromales gastro-intestinales (GIST) : selon le type de mutation de KIT, on aura différents dosages de Glivec ou Imatinib o K-rasdans le cancer du côlon : inhibiteurs de l’EGFR o EGF-R dans le cancer du poumon : inhibiteurs de l’EGFR
4) Compte rendu et qualité Le compte rendu est le document présentant la synthèse des informations sur l’intégralité des études réalisées. Les informations essentielles reposent dans la classification TNM. Contenu du CR : Diagnostic o Arguments morphologiques o Arguments IHC et moléculaires, le cas échéant (informations techniques) Pronostic o Facteurs histo-pronostiques : taille, extension locale, envahissement ganglionnaire, état des marges de résection, angio-invasion, etc. o pTNM o Autres facteurs : données moléculaires, facteurs prédictifs, etc. Informations complémentaires Pour plus de qualité, on cherche à standardiser les CR. Les procédures techniques subissent de nombreux contrôles de qualité (organisme national) et les laboratoires sont accrédités pour pratiquer telle ou telle technique. Il existe également des réseaux de doubles lectures de pathologistes organisés pour le diagnostic des tumeurs rares (financés par l’INCA) afin de revoir et de s’assurer que le diagnostic est le bon.
5) Prévention L’anatomopathologie n’intervient pas seulement dans le cadre de l’étude de lésions cancéreuses. On peut rappeler qu’il est parfois possible d’identifier les lésions « précancéreuses », pour le cancer du col utérin ou les « polypes » du côlon entre autres. L’étude anatomopathologique permettra de même d’évaluer la qualité de leur traitement, et de déterminer le mode de surveillance en fonction de R0, R1, R2.
V) Les nouvelles responsabilités du pathologiste Les services d’anatomopathologie sont au cœur de différentes actions. Ils possèdent des banques de tissus tumoraux (tumorothèques) à visée sanitaire et de recherche. La conservation des tumeurs dans les services permet la collection de données épidémiologiques. De même, l’étude des tumeurs et leur conservation par l’anatomopathologie permet leur accessibilité à la recherche translationnelle mais aussi fondamentale. Aujourd’hui, c’est un vrai problème car tous les hôpitaux n’ont pas les moyens financiers d’avoir des banques de prélèvements.
A retenir Le rôle du pathologiste dans la prise en charge du cancer est fondamental Il apporte la preuve du cancer Il contribue à l’évaluation du cancer et au choix des orientations thérapeutiques Il guide les traitements ciblés Pour remplir son rôle, le pathologiste dispose d’outils techniques diversifiés et en évolution rapide.
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Sécrétions ectopiques et marqueurs biologiques Objectifs : Comprendre les mécanismes biologiques des syndromes paranéoplasiques Connaître les principaux syndromes paranéoplasiques Connaître les principaux marqueurs tumoraux Connaître leurs utilités et leurs limites
I) Syndromes paranéoplasiques 1) Définition Les syndromes paranéoplasiques sont des signes ou symptômes secondaires à l’existence d’un cancer, à distance de la tumeur ou de ses métastases. ♥ Par définition, ces symptômes ne peuvent être dus à un effet direct de la tumeur ou de ses métastases (donc différent du syndrome tumoral). Exemples : Lorsqu’une tumeur rénale entraîne une compression sur les voies excrétrices, il ne s’agit pas d’un syndrome paranéoplasique, mais d’un syndrome de compression tumorale. Le syndrome inflammatoire paranéoplasique (fièvre, amaigrissement et syndrome inflammatoire classique) est un syndrome paranéoplasique courant, mais très peu spécifique, par production de facteurs pro-inflammatoires.
Les syndromes paranéoplasiques ne se développent que chez 10% des patients. Les cancers bronchiques sont de gros pourvoyeurs de syndromes paranéoplasiques ♥ (20% des cas). C’est également le cas des thymomes. Leur intérêt est majeur : o Premier signe de la maladie (il peut parfois précéder de plusieurs mois le diagnostic du cancer) o Peut mimer une maladie métastatique et donc modifier une attitude éventuelle curative. o Marqueur évolutif après traitement (permet un suivi et la détection d’une éventuelle rechute). o Symptômes parfois particulièrement gênants (traitement spécifique) qui peuvent mettre en jeu le pronostic vital et même entraîner le décès du patient alors qu’il est guéri de son cancer. C’est un diagnostic d’élimination : on ne peut poser le diagnostic de syndrome paranéoplasique qu’après avoir éliminé les autres causes plus fréquentes. o Un envahissement direct par la tumeur primaire ou ses métastases ? o Une obstruction causée par une tumeur ou un produit de tumeur ? o Des anomalies vasculaires ? Des troubles hydroélectriques ? Un syndrome infectieux ? o Des effets secondaires des traitements (chimiothérapie, radiothérapie, antibiothérapie, immunothérapie…) ?
2) Physiopathologie Il existe différents mécanismes : Production par la tumeur de protéines biologiquement actives (protéines physiologiques sécrétées en excès, ou qui miment d’autres protéines) comprenant : hormones et leurs précurseurs, facteurs de croissance, cytokines pro inflammatoires (IL6 qui donnent de la température), prostaglandines, protéines oncofœtales, immunoglobulines, enzymes. Production de complexes immuns responsables de manifestations d’auto-immunité. Les syndromes paranéoplasiques sont plutôt associés à un meilleur pronostic que les cancers sans syndromes paranéoplasiques (par exemple dans le cas du cancer du poumon). En effet cela signifie que le système immunitaire a été capable de se mettre en marche et de poursuivre son action. Inactivation d’une hormone active par production d’un équivalent biologiquement inactif ou par production d’un récepteur anormal. Relargage d’enzymes dans la circulation normalement absentes. Inconnu (le plus souvent) FGSM3 Lyon Est
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II) Manifestations paranéoplasiques 1) Syndromes endocriniens a. SIADH (Syndrome de Schwartz-Bartter) Le syndrome de Sécrétion Inappropriée d’ADH est un syndrome classique. Il est dû à une production anormale d’ADH ou de substance ADH-like par la tumeur. Il n’est symptomatique que chez 3 à 15% des patients. Causes tumorales : CBPC (cancer bronchique à petites cellules) majoritaire, cancers pharyngés, cancers pancréatiques, thymomes et lymphomes (LMH ou LMNH). Physiopathologie : La liaison de l’ADH à ses récepteurs au niveau du tube collecteur et de la branche ascendante provoque un excès d’eau réabsorbée et de sodium excrété ainsi qu’un accroissement du volume intravasculaire ET une diminution de la réabsorption du sodium, donc une hyponatrémie. Signes cliniques : Ils sont causés par l’hyponatrémie et sont essentiellement neurologiques +++ (les patients arrivent avec une suspicion de métastases cérébrales ou de méningite carcinomateuse : si l’IRM est négative et que la natrémie est inférieure à 120, on peut vite faire le diagnostic) : anorexie, fatigue, céphalées, confusion, délirium, stupeur, coma et crises comitiales. Critères diagnostiques du SIADH : o Hyponatrémie hypotonique. o Hypertonie urinaire en regard de l’hypotonie plasmatique, liée à l’excrétion importante de sodium. o Absence d’hypovolémie, absence d’œdèmes (Attention : des œdèmes peuvent être causés par des pathologies associées, le syndrome paranéoplasique est rarement « pur »). o Maintien d’une excrétion sodée adaptée aux apports et à l’euvolémie. o Fonction rénale normale. o Absence de dysendocrinopathie thyroïdienne ou surrénalienne. Diagnostic étiologique de l’hyponatrémie :
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UE 19 – Clinique & diagnostic du cancer – J.-Y. BLAY Autres étiologies du SIADH : o Affections du SNC (hypophysectomie, TC, tumeur, hydrocéphalie, infections, AVC,…). o Affections pulmonaires non néoplasiques (pneumopathies, tuberculose, abcès pulmonaires). o Médicaments ou toxiques (AINS, AD tricycliques, IRS, CDDP, Cyclo, Ifo, thiazidiques, ecstasy, opiacés (morphine fréquemment utilisée chez les patients atteints de cancer),…). o Autres : périodes péri-opératoires, SIDA, déficit en K. Traitement : Il est principalement étiologique et dépend du caractère aigu ou chronique de l’hyponatrémie. Le patient est mis en restriction hydrique (< 250 mL d’eau par jour) et on lui administre éventuellement des antagonistes des récepteurs de l’ADH (mais ils sont très peu utilisés car peu efficaces). b. Syndrome de Cushing paranéoplasique Rappel : Maladie de Cushing = la tumeur hypophysaire ou surrénalienne bénigne produit du cortisol Syndrome de Cushing: c’est autre chose qu’une tumeur centrale ou périphérique 10 à 15% des syndromes de Cushing ACTH-dépendants sont d’origine paranéoplasique avec une production ectopique de POMC-ACTH dans 12% des syndromes de Cushing et une production ectopique de CRH dans moins de 1% des cas. Il provoque un hypercorticisme. Causes tumorales : cancers bronchiques (50%) avec CBPC ou tumeurs carcinoïdes, cancers thymiques (15%), cancers pancréatiques (15%), tumeurs neuroendocriniennes, carcinome médullaire de la thyroïde… Signes cliniques : Ce sont des signes que l’on observe parfois chez des patients sous corticothérapie au long cours : HTA, amyotrophie, asthénie, troubles psychiques, OMI, mélanodermie, obésité tronculaire, vergetures, hyperexcitabilité, œdème des membres inférieurs. Signes biologiques : Hypokaliémie, alcalose métabolique, hyperglycémie (diabète), élévation du cortisol plasmatique et urinaire et de l’ACTH. Le test de freinage à la dexaméthasone est habituellement négatif. Complications : Les infections opportunistes (souvent fongiques) sont une complication majeure, même hors période d’aplasie et sont une cause de mortalité précoce. Pronostic : Quand un syndrome de Cushing paranéoplasique apparaît, il est un facteur indépendant de mauvais pronostic. Traitement : Chimiothérapie (inhibiteurs de la sécrétion d’ACTH). c. Hypercalcémie paranéoplasique non métastatique C’est un syndrome très fréquent. Elle est due à une production de PTH-related peptide (PTH-rp), à une production excessive de calcitriol (précurseur de la vitamine D) ou à la sécrétion ectopique de PTH. Cette hypercalcémie n’est pas due à des métastases osseuses (mais c’est un diagnostic différentiel++). Causes tumorales : Cancer du poumon non à petites cellules (CBNPC), cancer du rein, myélome multiple (attention aux lésions osseuses, il est difficile de faire la part des choses), lymphomes, tumeurs de la tête et du cou, œsophage, ovaire, utérus et cancer du sein. Le traitement est étiologique. On a une hypercalcémie et une hypercalciurie, le phosphore va être normal ou abaissé, la PTH sera basse et le PTH-rp est élevé, le calcitriol peut être augmenté si c’est dû à une production excessive. FGSM3 Lyon Est
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UE 19 – Clinique & diagnostic du cancer – J.-Y. BLAY d. Hypoglycémie paranéoplasique Elle est due à la présence en excès d’une forme d’IGF-II (Insulin Growth Factor), une hypersécrétion d’IGF-I ou une production ectopique d’insuline. Causes tumorales : cancer du pancréas endocrine (insulinome), tumeurs d’origine mésenchymateuse (sarcomes), tumeurs épithéliales et hémopathies. e. Autres Gynécomastie et plus rarement : hyperthyroïdie, hypersécrétion de calcitonine, acromégalie, hypoglycémie,…
2) Syndromes paranéoplasiques neurologiques Ils sont très rares (1/10 000). L’incidence et l’âge de survenue dépendent du type de syndrome et du cancer associé. Les syndromes paranéoplasiques représenteraient 10% des complications neurologiques non métastatiques des cancers. Une myasthénie paranéoplasique survient chez 10 à 20 % des patients ayant un thymome (recherche de thymome par scanner lors de myasthénies). Environ 1 à 3% des patients ayant un cancer du poumon à petites cellules (CPPC) développent un syndrome de Lambert Eaton (LEMS).
Syndromes myasthéniformes (les plus fréquents)
LEMS est un syndrome myasthéniforme lié à l’hypersécrétion d’un anticorps anti VGCC qui va agir sur les canaux calciques de la jonction neuromusculaire en présynaptique et empêcher le relargage de l’acétylcholine, ce qui entraîne une faiblesse musculaire (rare mais souvent fatal). Dans le cas de la myasthénie, il y a une production d’anticorps dirigés contre les récepteurs cholinergiques en post synaptique. Les deux se différencient par EMG.
Atteinte de la jonction neuromusculaire o Syndrome myasthénique (Lambert Eaton) surtout dans les cancers du poumon à petites cellules. o Myasthénie (thymome).
Atteinte du SNC o Dégénérescence cérébelleuse subaigüe. o Démence.
Atteinte de nerfs périphériques : Neuropathie sensitive ou sensitivomotrice (surtout dans les cancers du poumon).
Atteinte de la moelle o Pseudo Sclérose Latérale Amyotrophique (SLA). o Myopathie nécrosante. o Neuropathie motrice subaigüe.
Étiologies : Le CBPC est le plus fréquent, il est à l’origine de 2/3 des syndromes paranéoplasiques. Les cancers responsables des syndromes paranéoplasiques (SPN) sont variables en fonction du type de syndrome paranéoplasique et du type d’anticorps onconeuronal présent. L’hypothèse physiopathologique est qu’il s’agit d’une pathologie auto-immune satellite de l’immunité anti-tumorale. Cette auto-immunité serait en rapport avec l’expression ectopique par la tumeur d’antigènes normalement exprimés par le système nerveux (antigène commun entre la tumeur et le SNC).
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UE 19 – Clinique & diagnostic du cancer – J.-Y. BLAY Conduite à tenir : La présence d’un anticorps onconeuronal permet d’affirmer le caractère SPN et guide la recherche de la tumeur sous-jacente. Si SPN + anticorps onconeuronal et bilan radiologique standard normal, on fait un PET scan au 18FDG. L’absence d’anticorps onconeuronal n’élimine pas le diagnostic (1/3 des cas). Le traitement du cancer sous-jacent est le traitement étiologique.
3) Syndromes paranéoplasiques vasculaires Ils sont très fréquents. Signes en faveur d’une thrombophlébite paranéoplasique : Survenue après 50 ans. Absence de facteurs déclenchants. Atteinte de plusieurs territoires veineux et/ou artériels. Atteinte de territoires inhabituels : membre supérieur, thorax,… Thromboses récidivantes. Signes biologiques de coagulopathie de consommation. Absence d’anomalies pro coagulantes connues. L’association avec des anticorps antiphospholipides est fréquente. Récidives lors du passage aux AVK.
4) Syndromes paranéoplasiques cutanés Formes très caractéristiques. On distingue en général les formes en fonction de leur spécificité d’association avec un cancer : Forme « obligatoire » : ces signes cutanés sont pathognomiques d’un cancer (bronchique, gastrique ou sphère ORL +++). Formes « facultatives ». Formes « exceptionnelles ». Il est rare qu’on puisse reconnaître les mécanismes. L’acrokératose et l’acanthosis nigricans sont les plus classiques.
5) Syndromes paranéoplasiques rhumatologiques
Hippocratisme digital et ostéoarthopathie pneumique hypertrophiante (de Pierre Marie) +++ Fasciite palmaire Polyarthrite. Pseudopolyarthrite Rhizomélique / Horton. Connectives : sclérodermie, dermatopolymyosite. Ces syndromes sont souvent associés à des cancers pulmonaires.
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UE 19 – Clinique & diagnostic du cancer – J.-Y. BLAY 6) Syndromes paranéoplasiques hématologiques
Polyglobulie : Adénocarcinome à cellules claires du rein par sécrétion d’EPO, carcinomes hépatocellulaires, hémangioblastomes cérébelleux. Anémie : La plupart du temps aisée à expliquer (infiltration médullaire, chimio/radiothérapies, saignements). Souvent présente lors de syndromes paranéoplasiques inflammatoires anémie inflammatoire, liée au syndrome inflammatoire paranéoplasique. Neutrophilie : À différencier d’une leucémie myéloïde chronique (LMC), d’une infection,…. Eosinophilie, basophilie, thrombocytose (elle peut atteindre chez certains patients plus de 180 fois la normale).
7) Syndromes paranéoplasiques gastro-intestinaux
Gastrinome : production en excès de gastrine responsable d’ulcères récidivants multiples (syndrome de Zollinger Ellison). Tumeurs carcinoïdes : flush, diarrhée.
8) Syndromes paranéoplasiques rénaux
Glomérulonéphrite extra membraneuse. Glomérulonéphrite à lésions glomérulaires primitives.
III) Traitement
♥
Le traitement est surtout étiologique . Les SPN peuvent parfois permettre un diagnostic précoce du cancer et donc la mise en place rapide d’un traitement à une phase précoce avec un meilleur pronostic. Ce n’est pas toujours le cas. Le traitement consiste essentiellement à traiter la tumeur (traitement étiologique) permettant en cas de succès une disparition des symptômes (ceci n’est pas systématique). Exemple : Dans le cas du syndrome de Lambert Eaton ou de la myasthénie, certains patients, bien que guéris de leur thymome, auront tout au long de leur vie restante des symptômes gênants nécessitant des traitements parfois compliqués comme des échanges plasmatiques réguliers et passent plus de la moitié de ces années en salle de réanimation, voire parfois en meurent alors que leur cancer est guéri ! Seul le traitement efficace de la tumeur peut permettre d’envisager une guérison du syndrome paranéoplasique, cependant il faut toujours penser aux traitements symptomatiques en cas de non contrôle de la tumeur ou de ses métastases.
IV) Marqueurs biologiques des cancers 1) Marqueurs biologiques sériques Ce sont des protéines, glycosylées ou non, détectables dans le sérum par immunoanalyse, lors de la présence d’un cancer et dont la concentration suit l’évolution de la maladie. Ce sont le plus souvent des « marqueurs médiocres », peu spécifiques et peu sensibles, car le marqueur idéal est : Sensible et spécifique. VPP et VPN élevées. Détecté à des concentrations faibles. Reproductible. Proportionnel à la masse tumorale. Peu onéreux. Mais cela n’existe que rarement en pratique. Certains sont très intéressants, mais la plupart sont imparfaits.
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UE 19 – Clinique & diagnostic du cancer – J.-Y. BLAY a. Principaux marqueurs biologiques
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Protéines oncofœtales (produites au cours de l’embryogenèse et des premières étapes de la vie mais normalement absentes ou en plus faible quantité à l’âge adulte) : o Antigène carcinome embryonnaire (ACE) Cancer épithélial o α-fœtoprotéine (AFP) foie, testicule. Hormones : o Hormone chorionique gonadotrope (hCG) qui est un rare marqueur idéal testicule, choriocarcinome. o Hormones ectopiques (ACTH, TSH,…). Enzymes intracellulaires produites en excès et relarguées par les cellules tumorales ou lors de la mort de ces cellules tumorales o Phosphatase alcaline (PAL) foie, os. o Lactico-déhydrogénase (LDH) tout type de cancers. o Neurone Specific Enolase (NSE) cancers épithéliaux (poumons,…). Immunoglobulines Antigènes associés aux tumeurs (presque idéaux, présents à la surface des tumeurs) : o Prostatic Specific Antigen (PSA) spécifique de la prostate, mais pas du cancer. o Ca 125 ovaire. o Ca 15-3 sein. o Ca 19-9 pancréas et tube digestif. o SCC col épidermoïde et parfois poumons. b. Utilisation clinique des marqueurs biologiques
Dépistage : AUCUN INTÉRÊT DEMONTRE POUR LA SURVIE ! Diagnostic : Intérêt limité, modéré car le diagnostic se fait par biopsie et anatomo-cytopathologie. Mais on peut le doser pour le bilan initial (non reproductible d’un patient à l’autre).
En cas de cancer : o Bilan initial. o Détection précoce de récidives +++.
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o Évaluation de la réponse au traitement +++.
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Une diminution est observée lors d’un traitement ou d’une rémission. Une augmentation est observée lors d’une rechute.
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UE 19 – Clinique & diagnostic du cancer – J.-Y. BLAY c. Marqueurs à valeur de dépistage Le but du dépistage, comme dans le cas du sein, du côlon et du col l’utérus, est de diminuer la mortalité. Ceci n’est pas prouvé dans le cas du cancer de la prostate. On a seulement prouvé que le dépistage permettait un diagnostic précoce (toucher rectal et dosage du PSA), mais pour beaucoup, ces tumeurs n’entraineraient pas le décès du patient (qui se verrait en revanche proposer un traitement avec des effets secondaires). Le diagnostic du cancer se fait par des biopsies de prostate.
Le PSA est une protéine spécifique de la prostate mais non spécifique du cancer. Il s’élève : Si la prostate augmente de volume (avec l’âge notamment) ; En cas d’infection (prostatite) ; En cas de tumeur bénigne (Adénome) En cas de cancer.
Il s’agit donc d’un marqueur peu spécifique du cancer, comme l’ont montré deux grandes études. Avec ce dépistage, on a donc un sur-traitement avec des prostatectomies qui auraient pu être évitées ainsi que les complications de cette chirurgie (urinaire,…). Ce dépistage n’est pas inutile, mais imparfait, car il entraîne un traitement mutilant, cher et inutile dans de nombreux cas. Au contraire les dépistages du cancer du col de l’utérus, du sein avec les mammographies et du colon améliorent la survie des patients qui sont screenés. d. Marqueurs contributifs à valeur diagnostique Ce sont de bons marqueurs diagnostiques, mais aucun marqueur à lui seul ne peut permettre un diagnostic. e. Problèmes posés par les marqueurs pour le diagnostic
Souvent absents alors qu’une tumeur évolue (sensibilité médiocre) ; Peuvent être élevés par une cause non tumorale (spécificité médiocre) ; NON SPÉCIFIQUE / NON SENSIBLE. Il faut une biopsie et un examen histologique.
Cas particulier : Femme de 24 ans ayant eu une grossesse normale 6 mois auparavant, hCG = 850 000 mUI/mL (NHCV). C’est surtout dû à la chronicité de l’atteinte hépatique qui induit une évolution cancéreuse des cellules. o L’association de l’exposition au virus avec une alimentation riche en aflatoxine (comme dans certains pays africains) augmente très fortement le risque d’hépatocarcinome. La vaccination des populations africaines contre HBV permet de diminuer grandement l’incidence de l’hépatocarcinome (programme du CIRC (centre international de recherche sur le cancer) en Gambie).
Le papillomavirus : les souches 16 et 18 sont responsables de 70% des cancers du col de l’utérus. Cela montre bien l’importance du vaccin en prévention et en complément du frottis en dépistage.
Le virus d’Epstein Barr (EBV) : c’est un facteur inducteur de 2 cancers rares en France mais assez importants au Maghreb : le lymphome de Burkitt et le cancer du rhinopharynx.
Le virus HTLV-1 de la famille des rétrovirus, responsable du lymphome à cellule T.
La bactérie Hélicobacter Pylori (agent de l’ulcère gastrique en cas de portage à l’âge adulte) entraîne des gastrites chroniques qui risquent d’évoluer en cancer de l’estomac. C’est pourquoi on recherche systématiquement H. Pylori en cas de symptomatologie évocatrice d’ulcère ou gastrite, et on traite les patients qui le portent par antibiotiques (macrolides). On peut aussi retrouver des cancers à la jonction oeso-gastrique à cause des reflux qui entrainent une modification de la muqueuse, l’endobrachyoesophage. d. Facteurs de la vie reproductive
De manière générale, l'exposition aux œstrogènes augmente le risque de cancer. (Plus la durée d’exposition est longue, plus on augmente les risques, c’est la durée de la vie sexuée qui compte)
La puberté précoce augmente le risque de cancer du sein, de l'endomètre, et peut-être de l'ovaire. La nulliparité augmente le risque de cancer du sein, de l'endomètre et de l'ovaire. Une première grossesse tardive après 35 ans augmente le risque de cancer du sein, par sensibilité plus importante aux carcinogènes des cellules mammaires, qui n’acquièrent leur différenciation terminale qu’après la première grossesse. Une ménopause tardive augmente le risque de cancer du sein et de l'endomètre.
C’est important de connaître ces FdR en santé publique mais à l’échelle individuelle, cela a peu d’impact. e. Exposition solaire Les UVB sont des agents carcinogènes initiateurs (UVA le sont aussi mais dans une moindre mesure car ils pénètrent moins profondément). Aussi, une exposition trop intense et trop répétée dans l'enfance (coups de soleil), augmente le risque de mélanome. FGSM3 Lyon Est
Épidémiologie et facteurs de risques des cancers
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UE 19 – Epidémiologie et facteurs de risque – A. DUPRE L’exposition solaire globale au cours de la vie augmente le risque de cancer de la peau (à type de carcinomes baso-cellulaires). Cela est d'autant plus vrai que la peau est claire et bronze mal. Une seule séance d’UV augmenterait le risque de cancer. f. Exposition professionnelle L’amiante, par exemple, peut donner un mésothéliome pleural ou péritonéal. Il est important de connaître ces expositions professionnelles (peu fréquentes mais classiques) : Pour mettre en place des mesures de protection des travailleurs Pour indemniser les travailleurs exposés (ou leur famille) Pour avoir une orientation diagnostique quand on rencontre un patient ayant été exposé au cours de sa vie professionnelle. g. Agents médicamenteux (les exemples sont donnés à titre indicatif) Les traitements hormonaux :
La pilule est neutre sur les cancers du sein après 50 ans, mais augmente le risque de cancer du sein avant 50 ans. C’est un carcinogène promoteur qui ne ferait « que » accélérer l’apparition de la tumeur. D’autre part, la pilule diminue le risque de cancer de l'ovaire (qui est de très mauvais pronostic). Donc globalement la pilule est plutôt positive (balance bénéfice-risque favorable quant au risque de cancer chez la femme). Traitement hormonal substitutif de la ménopause (THSM) : dans sa version combinée (œstrogènes et progestérone), il augmente modérément le risque de cancer du sein. Mais dans sa version œstrogène seule, il augmente considérablement celui de l'endomètre. C’est pourquoi on n’utilise plus la version œstrogène seul et on limite le temps de prescription de la formule combinée (5 ans maximum). Le distilbène : C'était une molécule donnée aux femmes enceintes dans le but de prévenir des fausses couches. Cependant, il augmentait le risque de cancer du vagin chez la fille. Il n’est donc plus prescrit dans cette indication.
Les traitements anticancéreux peuvent être des facteurs de risque d'autres cancers : Les chimiothérapies contenant des alkylants augmentent le risque de leucémies aiguës dites secondaires. Aussi, évite-t-on désormais de les prescrire. Les radiothérapies médiastinales utilisées dans les maladies de Hodgkin (il y a 20 ans) peuvent secondairement provoquer des cancers du sein. Aujourd’hui, les taux d’irradiation ont diminué et ne devraient plus provoquer de cancer… souvenez-vous pour autant toujours du rapport bénéfice-risque particulier pour la plupart des traitements utilisés en oncologie Le Tamoxifène : il diminue et prévient le cancer du sein par effet anti-œstrogène, mais augmente le risque de cancer de l'endomètre par effet inverse, pro-œstrogène. On l’utilise donc en adjuvant dans le traitement du cancer du sein, mais on ne peut pas l’utiliser dans la prévention de ce cancer (balance bénéfice-risque favorable en traitement du cancer du sein mais jugée défavorable en prévention du cancer du sein chez des femmes indemnes). h. Hérédité Il peut y avoir une anomalie génétique constitutionnelle à transmission autosomique dominante touchant, par exemple, un des gènes suppresseurs de tumeur. Bien que ce soit rare, les personnes possédant ce gène à risque sont des personnes à très haut risque de cancer et qui vont généralement les déclarer bien avant l'âge moyen observé en population générale. Cette hérédité est d'autant plus suspectée qu'il existe une répétition des cas d’un même cancer sur plusieurs générations successives d'une même famille.
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UE 19 – Epidémiologie et facteurs de risque – A. DUPRE On trouve ce genre de situation pour : (il s’agit d’exemples, de nombreux autres gènes sont impliqués en oncogenèse, cf le cours d’oncogénétique). Le cancer du sein. Si le gène BRCA1 ou BRCA2 est muté, il existe un risque majoré de cancer du sein après 30 ans, et, un risque majoré de cancer de l'ovaire après 40 ans. Le cancer du côlon. Ce sont les gènes hMLH1, hMSH2 et hMSH6 qui peuvent être responsables, lors de mutations, de cancer du côlon avant 50 ans et de cancer de l'endomètre. On parle de syndrome de Lynch ou syndrome HNPCC (Human Non Polypomatous Colo-Rectal Cancer).
Le mélanome peut survenir plus facilement lors de mutation du gène p16. /!\Dans les familles connues pour avoir une mutation de p16, même les sujets n’ayant pas l’allèle muté sont plus à risque de développer un mélanome.
Lorsque l’on est face à ce genre de situation, on propose une consultation d’oncogénétique qui conduit à une prise en charge préventive spécifique. i. Alimentation (cf. cours sur la nutrition en cancérologie) On parle de plus en plus du rôle de l'alimentation dans la survenue de cancer et on suppose très fortement qu'il existe un lien, mais sans pour autant réussir à le prouver ou à le caractériser. En effet, beaucoup d'études observationnelles (notamment cas-témoins) ont été réalisées et ont montré des relations significatives entre le mode de vie alimentaire et la survenue de cancer, sans pour autant que cette relation n'ait été retrouvée lors d'études interventionnelles (comme par exemple les essais randomisés de supplémentation vitaminiques dont les résultats sont négatifs). Il existe tout de même des facteurs de risque reconnus et liés à l'alimentation, tels que : Une alimentation trop riche en graisses animales saturées : elle entraîne une obésité qui augmente le risque de cancer du sein et de l’endomètre (car conversion de différentes hormones en œstrogènes par le tissu adipeux). De plus, ce type d’alimentation augmente la sécrétion de sels biliaires qui sont des carcinogènes pour la paroi colique : d’où une augmentation du risque de cancer du côlon. Une alimentation pauvre en fibres, en fruits et en légumes frais serait liée à une augmentation des risques de cancers colorectaux et NB : C'est la carence en des VADS. Les fibres permettraient d'inactiver les sels biliaires, et antioxydants qui augmente le donc leur manque augmenterait la quantité du carcinogène (cancer risque de cancer. Un apport du côlon). D’autre part, les fruits et légumes frais étant sources supplémentaire chez une d'antioxydants, leur manque augmenterait la concentration de personne non carencée n'aura aucun effet de prévention radicaux libres, non neutralisés. (voire un effet contraire). La présence de nitrosamines (trouvés sur les plats fumés ou conservés par salaison) augmente le risque de cancer de l'estomac. Ce cancer est en très nette diminution depuis les années 50 notamment grâce au réfrigérateur et au passage à un mode de conservation des aliments par le froid. j. Rayonnements ionisants Les agents ionisants sont des agents initiateurs, à fortes doses. Ils restent cependant une cause mineure. Les survivants des bombes atomiques après la guerre avaient plus de risque de développer des leucémies aiguës. De plus, chez les jeunes survivantes (< 40ans), il existait un risque accru de cancer du sein. Chez les enfants irradiés par Tchernobyl c’est le cancer de la thyroïde qui a vu son incidence augmenter fortement. Les mineurs d'uranium de Silésie sont quant à eux plus à risque de cancers pulmonaires. Ces différents effets ont été étudiés pour de fortes doses de rayonnements. Il est capital de s’y intéresser pour évaluer les risques de l’irradiation médicale (scanner++). On connaît par contre peu l’impact des rayonnements électromagnétiques sur le processus de carcinogenèse. L’impact des téléphones portables, des antennes… Ce sont des expositions à des rayonnements faibles mais répétés et prolongés. Comme ces rayonnements peuvent provoquer un échauffement tissulaire, il n’est pas à exclure qu’ils entraînent des modifications cellulaires. On dispose pour l’instant de très peu d’informations. FGSM3 Lyon Est
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UE 19 – Epidémiologie et facteurs de risque – A. DUPRE k. Obésité – Surpoids L'obésité et le surpoids sont des facteurs de risque de la survenue de cancers de l'œsophage (favorisé par le reflux mais également par la métaplasie d’un épithélium épidermoïde en un épithélium glandulaire), du colonrectum, du rein, de l'endomètre et du sein chez la femme ménopausée (car il existe une conversion périphérique des androgènes surrénaliens par les aromatases du tissu adipeux. Ainsi, la concentration en œstrone et œstradiol est plus élevée chez les femmes ménopausées en surpoids). Cependant, le risque relatif est inférieur à 2, ce qui est considéré comme faible. (On considère qu’un facteur aura un impact en prévention si son RR est > 4. Par exemple, le tabac a un RR à 30 ou plus). l. Inactivité physique La sédentarité est un facteur de risque du cancer du sein et du côlon, par deux mécanismes : Indirectement par le surpoids Directement car l’activité physique diminue le taux de facteur de croissance (comme l’Insuline Growth Factor IGF ou le taux de récepteur à IGF par exemple).
3) Synthèse a. Les causes avérées ♥
Le tabac et l'alcool, qui sont des facteurs évitables (sur lesquels on a une influence), sont à l'origine d'environ 1/4 des décès par cancer dans la population française. L'excès de poids et l'insuffisance d'exercice physique expliquent (sur les estimations de 2000) 2% des cancers chez l'homme et 5% chez la femme. Cependant, on prévoit que les cohortes plus jeunes nées après 1950 ont tendance à moins faire d'exercice, et donc le risque de cancer va probablement être plus important dans les années à venir. Les expositions professionnelles sont responsables de 4% des cancers chez l'homme avec une tendance à la diminution. Les traitements hormonaux de la ménopause sont à l’origine de 2% des décès par cancers (du sein essentiellement). L’exposition aux rayons solaires serait à l’origine de 1% des décès par cancers. La pollution de l’air, de l’eau et des aliments n’a qu’un impact faible (0,5%) sur les cancers. Cela augmenterait à 0,8% si les tendances d’augmentation des particules fines dans l’air se confirmaient (problème des moteurs diesel en zones urbaines). b. Le rôle de l’alimentation : incompris mais certain ♥
On sait que l’alimentation joue un rôle dans le développement des cancers, cependant on est incapable d’être très précis (certains effets bénéfiques ou délétères de certains aliments ont pu être mis en évidence dans des études cas-témoins, sans pour autant qu'ils ne soient retrouvés dans les études de prévention. Cela explique que les recommandations soient actuellement peu précises et surtout davantage orientées sur le bénéfice cardiovasculaire que sur la prévention du cancer.) Cependant on sait que : La richesse en calories de l'alimentation augmente le risque de cancer dans les modèles animaux, et cela mérite des investigations plus approfondies chez l'homme, car on s'aperçoit que cela expliquerait des différences d'incidence de cancers, notamment colorectaux, entre pays. La consommation de viande rouge et de charcuterie à l’âge adulte augmente modérément le risque de cancers colorectaux (RR 1,3). Le rôle préventif des facteurs nutritionnels (fruits et légumes, teneur en fibre, agents oxydants) n'a pas été confirmé, ni dans les études cohortes, ni dans les essais de prévention. Ils ne seraient bénéfiques que chez les personnes carencées. Le problème majeur de ces études est qu'elles ne s'intéressent qu'à l'alimentation à l'âge adulte. Or, on suppose que c'est ce que l'on mange pendant l'enfance ou l'adolescence qui peut avoir un rôle sur la survenue de cancer. FGSM3 Lyon Est
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UE 19 – Epidémiologie et facteurs de risque – A. DUPRE c. Les facteurs de risque suspectés Certaines relations de causalité, bien que fortement suspectées, n'ont pas encore pu être démontrées et sont encore en étude. Par exemple : Les personnes habitant près de sources polluantes (industrie, déchetterie, incinérateur, pesticides). L'exposition à la dioxine. Les rayonnements non ionisants (l'exposition résidentielle au radon, comme en Bretagne). Les ondes électromagnétiques (OEM). Les études les mieux menées, les plus informatives, ne montrent pas d'augmentation du risque de tumeur cérébrale chez l’adulte. Cependant, elles ont été classées comme carcinogènes par l’OMS, par principe de précaution, afin d'essayer de limiter l'exposition dans la petite enfance dont on suppose qu'elle pourrait être un facteur de risque de certains cancers. On suppose que les doses sont trop faibles pour avoir un effet sur l'homme bien que la plupart soit reconnue sur modèle cellulaire. d. Causes inconnues 1 cancer sur 2 n’est pas expliqué par un facteur de risque scientifiquement établi. Chez les non-fumeurs, c’est 85% des cancers qui restent non expliqués. Le seul facteur de risque dont on est certains face à ces cas-là, est le vieillissement cellulaire donc l’âge. Toutefois, on suppose qu'il y a un impact très longtemps sous-estimé de certains facteurs comme : Les infections (virales et bactériennes), qui entraînent un état d'inflammation, dont les conséquences pourraient être une augmentation de risque de cancer. Les états d'inflammation chronique dus au surpoids ou à d’autres pathologies. Le rôle de l'alimentation (notamment chez l’enfant). L'effet carcinogène peut-être plus important pendant de l'enfance (notamment avec les carcinogènes initiateurs). Il se peut donc que l'on n’ait pas étudié dans les études épidémiologiques les bonnes périodes d'exposition (études en cours sur les expositions dans l’enfance). On sait aussi qu'il existe des facteurs épigénétiques ou génétiques. Les polymorphismes du génome auraient différentes conséquences dans la détoxification de carcinogènes et donc auraient un impact dans la survenue du risque. e. Quantification du risque de cancer C'est par volonté de hiérarchisation des facteurs de risque que l'on quantifie le risque. On a ici deux exemples, un en 1985 sous forme de diagramme et un tableau fait en 2007 sur les risques estimés. De manière générale, le tabac et alcool dominent largement dans les deux représentations. En 1985 : On estimait que 35% des cancers étaient dus à la nutrition. Cette estimation tenait compte des études écologiques, c'est-à-dire que l'on a comparé entre eux des pays dont l'alimentation différait. Sous-estimation de nombreux facteurs de risques. En 2000 : La nutrition n'a pas été étudiée, par manque de données suffisamment précises. Le tableau montre les incidences des cancers en fonction de l'exposition subie en 1980. Puis, a été réalisée une part attribuable, c'est-à-dire combien de cancers sont expliqués par tel ou tel FdR. (Cela montre la hiérarchisation des facteurs de risque et la part prédominante des facteurs de risque « évitables » : tabac et alcool) FGSM3 Lyon Est
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Facteurs de risque et prévention des cancers Ce cours s’inscrit dans la continuité du premier cours d’oncologie sur l’épidémiologie et les facteurs de risque des cancers.
FdR Facteurs de risque - FdP Facteurs de protection - ACTD Antécédents
I) Cancer du sein 1) Épidémiologie Le cancer du sein est une pathologie plurifactorielle, dont le développement est complexe et lié à de nombreux facteurs environnementaux interagissant avec un fond génétique particulier. L'étiologie de ce cancer n'est que partiellement connue, mais on sait déjà que les facteurs hormonaux (hormones stéroïdes) y ont un rôle clé. Il existe peu de FdR (ou alors ils sont rares) de haut risque, hormis l'âge. Les FdR les plus fréquents ne modifient que peu le risque de cancer du sein au niveau individuel. C'est aujourd'hui un problème majeur de santé publique. La prévalence mondiale de femmes confrontées au diagnostic de cancer du sein (encore en traitement ou en rémission) est de 4,4 millions en 2008. En France, il y a environ 49 000 nouveaux cas par an et presque 12 000 décès, selon les dernières estimations (2012). Les taux les plus élevés de cancer du sein sont présents dans les pays industrialisés (RR = 5 par rapport aux pays en voie de développement). Mais il touche aussi, et est en augmentation dans les pays en développement. Le cancer du sein est au 2ème rang de l'ensemble des cancers dans la population (après celui de la prostate). Et c'est le 1er cancer féminin (31,4 % des cas de cancer chez la femme). C’est la première cause de mortalité féminine par cancer. C'est une cause majeure de mortalité prématurée (13% des décès avant 65 ans et 1ère cause de décès chez les femmes entre 45 et 64 ans). Les évolutions sont divergentes entre l'incidence et la mortalité. L'incidence augmente alors que la mortalité diminue. La diminution de la mortalité est due à l'amélioration des thérapeutiques et au dépistage précoce par mammographie, qui permet de prendre en charge beaucoup plus tôt des cancers, avant qu'ils ne soient trop agressifs. L'incidence augmente en partie à cause d’une modification des expositions aux FdR et en partie à cause du dépistage qui peut entraîner un sur-diagnostic (on dépiste des cancers du sein qui n'auraient jamais eu de conséquences cliniques, on considère qu’un cancer du sein sur 10 est dû au sur-diagnostic) mais aussi parce que sa mise en place entraîne une augmentation transitoire de l’incidence en raison d’un diagnostic qui devient plus précoce (c’est l’effet recherché). La tendance récente est tout de même à la baisse de l'incidence de – 1,5 % entre 2005 et 2012 (c’est ce qu’on observe à chaque fois que l’on met en place un plan de dépistage : une augmentation de l’incidence les premières années, puis une stabilisation voire une diminution de l’incidence ensuite).
2) Facteurs de risque et de protection établis a. Risques liés à l'âge : Le risque de développer un cancer du sein (taux d’incidence) et le risque de décéder d’un cancer du sein (taux de mortalité) augmentent avec l'âge (cf. courbe de gauche page 2). C’est pour cela qu’on propose un dépistage systématique à partir de 50 ans. Le risque dépend aussi de l'année de naissance : les cohortes les plus récentes ont un risque cumulé plus important de développer un cancer du sein mais n’ont pas plus de risque d’en mourir (mortalité stable voire en diminution). Ceci est dû au fait que les cancers diagnostiqués sont de meilleur pronostic car détectés plus tôt, et que les thérapeutiques sont plus efficaces.
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UE19 – Epidémiologie et facteurs de risque –A. DUPRE Si on s'intéresse au risque cumulé de cancer à 74 ans (courbe de droite), on remarque que les cohortes nées en 1910 ont un risque de 5% (1 femme sur 20) alors que celles nées en 1950 ont un risque de 12% (1 femme sur 8). Incidence : courbe du haut Mortalité : courbe du bas
b. Effet carcinogène des œstrogènes : Ils ont un effet majoritairement indirect car ils stimulent la division du tissu mammaire, ce qui augmente le risque d'erreur de réplication. Il existe aussi un effet direct par l’effet génotoxique d’un des métabolites des œstrogènes. Les œstrogènes ont un effet carcinogène promoteur (donc l’augmentation du risque s’arrête rapidement après l’arrêt de l’exposition).
L’obésité de la femme ménopausée est donc un FdR important, car les stéroïdes surrénaliens sont transformés par l’aromatase du tissu adipeux en œstrogènes. Les facteurs qui diminuent le nombre de cycles ovariens sont des facteurs protecteurs.
La première grossesse menée à terme entraîne une différenciation terminale de l'épithélium mammaire. Les cellules seront donc moins sensibles aux carcinogènes et auront une réparation plus efficace (car une réplication plus ralentie). Donc, plus la femme est jeune lors de sa première grossesse, mieux elle est protégée contre le cancer du sein. A l’opposé, une première grossesse tardive est un FdR de cancer du sein.
Facteurs de la vie reproductive FDR (augmentation du risque) → augmentation de l’imprégnation œstrogénique Age < 12 ans lors des premières règles Nulliparité Age > 35 ans lors de la première grossesse Age > 55 ans lors de la ménopause Taux élevés d’œstradiol sérique IMC > 30 en post ménopausique
FDP (diminution du risque) → diminution de l’imprégnation œstrogénique 5 grossesses (ou plus) menées à terme Allaitement pendant 12 mois au moins Ovariectomie avant 40 ans Activité physique régulière (en diminuant l’insulinorésistance des tissus, ce qui diminue la sécrétion des facteurs de croissance)
Tous ces facteurs ont un risque relatif inférieur à 2 : ils ont donc un faible impact au niveau individuel. Toutefois, on considère que la sédentarité et la surcharge pondérale de la femme ménopausée pourraient expliquer jusqu’à 1 cancer du sein sur 4. Cela justifie donc des conseils de prévention (cf. cours nutrition). On remarque également que tous les facteurs protecteurs (mis à part l’activité physique) sont très peu fréquents dans la population française, et difficiles à encourager. c. Histoire personnelle de pathologie mammaire :
Risque faible (équivalent aux femmes sans hyperplasie) : Hyperplasie proliférative sans atypie cellulaire. Risque modéré : Hyperplasie proliférative avec des cellules atypiques. Risque élevé : o Hyperplasie proliférative avec des cellules atypiques et ATCD familiaux de cancer du sein. o ATCD personnel de cancer du sein, invasif ou canalaire in-situ. o ATCD personnel de cancer lobulaire in-situ. On doit tenir compte des ATCD de lésions bénignes du sein (hyperplasie avec atypie) car d’une part ce sont des lésions précancéreuses qui peuvent éventuellement évoluer en lésions cancéreuses, et d’autre part car ce sont des marqueurs de patientes à risque.
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UE19 – Epidémiologie et facteurs de risque –A. DUPRE La surveillance spécifique n'a lieu que s'il y a un risque modéré ou élevé et doit se faire par une mammographie annuelle pendant 10 ans, puis au rythme normal biennal. (Recommandations HAS Mai 2014) Histoire familiale : le risque est lié au degré de parenté, au nombre d'apparentés atteints et à l'âge au diagnostic. Surveillance habituelle : Le risque relatif est < 2. o 1 apparenté au troisième ou deuxième degré. o 1 apparenté au premier degré mais dont le diagnostic a été posé après 50 ans. Surveillance spécifique : Le RR va de 5 à 14. o 1 apparenté au premier degré, dont le diagnostic est posé avant 50 ans. o 2 apparentés (ou plus) au premier degré. Dans ces 2 derniers cas, on doit proposer une consultation d’oncogénétique lors de laquelle il sera décidé si une recherche de mutation de BRCA1-2 est nécessaire ou non. d. Facteurs héréditaires (consultation d’oncogénétique indispensable) : Environ 5 à 10% des cancers du sein surviennent dans un contexte de prédisposition génétique. C'est une transmission autosomique dominante. La probabilité d'un contexte génétique est d'autant plus élevée que l'âge au diagnostic est jeune. Il est en effet très rare d'avoir un cancer avant 30 ans en dehors de ces contextes génétiques. Deux gènes sont régulièrement retrouvés mutés dans ces contextes de cancers familiaux : BRCA1 et BRCA2. On peut aussi en trouver d'autres moins fréquents comme p53 et pTen (gènes atteints dans plusieurs cancers). Si on a connaissance d’une prédisposition chez une patiente, on doit mettre en place un suivi spécialisé avec IRM mammaires annuelles à partir de 30 ans et suivi des ovaires ; on doit également discuter d’une prise en charge chirurgicale préventive. On classe les femmes selon leur niveau de risque. Celles qui sont exposées à des FdR faibles seront soumises au dépistage classique. Celles qui sont exposées à des FdR modérés ou élevés feront l’objet de surveillances plus spécifiques.
Les FdR faibles sont fréquents et ne sont pas utiles en prévention individuelle. Par contre, ils expliquent une part non négligeable des cancers du sein. Ils regroupent essentiellement les facteurs de la vie reproductive.
Les FdR élevés ou modérés sont moins fréquents (impact faible en population) mais ont un important impact sur le risque au niveau individuel. En mai 2014, la HAS a émis des recommandations pour la surveillance spécifique des femmes ayant un haut risque (mammographie et/ou IRM mammaire annuelle pendant 10 ans puis dépistage classique tous les 2 ans).
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UE19 – Epidémiologie et facteurs de risque –A. DUPRE 3) Facteurs de risque reconnus mais controversés a. La contraception orale La contraception orale est un FdR de cancer du sein avant 50 ans (avant la ménopause). Le risque relatif est de 1,25 pendant la période d'utilisation et les 10 années suivant l'arrêt du traitement, c’est un effet promoteur qui disparaît rapidement. On note cependant que les cancers du sein diagnostiqués chez les femmes sous pilule sont de bon pronostic, car dépistés tôt du fait de la régulière consultation d'un médecin. La pilule est classée carcinogène par le CIRC, mais avec la précision de la modeste augmentation du risque de cancer du sein, et surtout de la balance B/R globale favorable qui ne permet pas de remettre en cause son /?\ Remarque : La densité nodulaire > 75% utilisation. En effet, bien que carcinogène pour le tissu mammaire, la à la mammographie ne fait pas partie des pilule prévient le cancer de l'ovaire (en diminuant par 2 le RR) critères retenus par la HAS pour proposer (beaucoup plus grave mais beaucoup plus rare) en mettant ce dernier une surveillance spécifique car la au repos ainsi que le cancer de l’endomètre. classification entre haute densité et faible Ainsi, la pilule peut être prescrite même en cas d’ATCD de cancer du sein. (On reste cependant prudent chez les femmes jeunes porteuses de la mutation BRCA1/BRCA2, ainsi que chez les jeunes filles de moins de 15 ans).
densité n’est pas standardisée et, d’autre part, parce qu’il y aurait beaucoup trop de femmes classées dans le groupe « haut risque » avec ce critère.
b. Le Traitement Hormonal Substitutif à la Ménopause (THSM) C'est un effet promoteur qui augmente modérément le risque pendant les périodes d'utilisation (uniquement si utilisation pendant plus de 5 ans). Il semblerait qu'il y ait des risques différents selon le type de traitement et que les protocoles français (œstrogènes transdermiques couplés à la progestérone naturelle micronisée) aient un RR = 1 (donc pas d'augmentation du risque, au final). Actuellement, il n'y a pas de recommandation pour empêcher la prescription, mais il en existe pour limiter les prescriptions (plus de prescriptions en systématique : on n’utilise ce médicament que chez les femmes symptomatiques) et surtout leur durée (< 10 ans avec réévaluation à 5 ans). Ce médicament peut être utilisé même dans les cas d’ATCD de cancer du sein.
4) Facteurs de risque controversés Les résultats sont discordants en ce qui concerne l’alimentation. Il existe probablement une augmentation du risque par la consommation de graisses saturées ou une diminution du risque grâce aux légumes verts. Il y a aussi un potentiel rôle protecteur des phyto-œstrogènes ou de certaines vitamines. Cependant, on est sûr d’une chose : l'alcool en forte dose est un FdR reconnu. En effet, il augmente les taux sériques d'œstrogènes et est un co-carcinogène dans la mesure où il augmente la perméabilité membranaire des cellules aux carcinogènes.
5) Parts attribuables à chaque FdR FdR Surpoids/Obésité Inactivité physique THSM
Part attribuable 5,6 % 10,1 % 18,8 %
Contraception orale
7,8 %
Changement des facteurs reproductifs (diminution nombre d’enfants, retard de 1ère grossesse) Alcool
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Évolution Augmentation Augmentation Grosse diminution (car changement des pratiques) Stabilisation (ou légère diminution grâce aux pilules micro-dosées)
6,7 %
Augmentation
9,4 %
Augmentation
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UE19 – Epidémiologie et facteurs de risque –A. DUPRE 6) Facteurs associés à l’augmentation d’incidence Facteurs associés à une augmentation de l'incidence du cancer du sein autres que le vieillissement : Le dépistage par mammographie. Il a donné une petite part de sur-diagnostic. Les FdR individuels, tels que le surpoids, les traitements hormonaux. Le changement de mode de vie (alcool et sédentarité). Les facteurs de la vie reproductive. On sait que le nombre d'enfants par femme diminue et que l'âge du premier enfant est plus tardif. Ce sont des changements sociétaux.
II) Cancer colorectal 1) Physiopathologie Le développement d'un cancer du côlon se fait souvent par un processus séquentiel connu associant des mutations génétiques et effets phénotypiques. C'est un processus long qui nécessite une douzaine d'années. Mutation de l'oncogène Ras
Perte du gène APC (suppresseur de tumeur)
→ Prolifération aboutissant à la formation de grands polypes (> 1 cm)
→ formation de petits polypes bénins
Mutation de p53 (suppresseur de tumeur) → L'adénocarcinome du colon devient invasif
2) Épidémiologie Dans le monde, c'est le 2ème cancer le plus fréquent chez les femmes, et le 3ème chez les hommes avec plus d'un million de personnes touchées. Plus de la moitié (60%) des cas se trouvent dans les pays développés et le taux d'incidence dans ces pays peut être dix fois plus élevé qu'en Afrique, par exemple. C'est un cancer plus fréquent chez les hommes : sex-ratio de 1,4. On se demande si l’imprégnation œstroprogestative ne serait pas un facteur protecteur. Ce cancer entraîne plus de 600 000 décès dans le monde. Il est la 4ème cause de mortalité par cancer. L'âge médian au diagnostic est de 72 ans (Hommes) et 75 ans (Femmes). Moins de 5% sont diagnostiqués avant 50 ans et en général, lorsque c'est le cas, on se pose la question de l'hérédité (Syndrome de Lynch). On remarque une évolution dissociée entre incidence et mortalité (le premier augmente quand le second diminue). Cependant, on voit une tendance récente (2005-2012) à la baisse de l'incidence. La baisse de la mortalité est due à un bon système de diagnostic par coloscopie qui permet des diagnostics plus précoces et à une avancée des thérapeutiques (ce n’est pas un effet du dépistage qui a été lancé trop récemment pour avoir des effets et qui est trop peu suivi par la population).
3) Facteurs de risque
Âge et sexe masculin ATCD personnels de cancers colorectaux ATCD personnels de polypes adénomateux bénins : car d'une part, ce sont les lésions précurseurs des cancers colorectaux (CCR) et, d'autre part, car leur fréquence augmente avec l'âge. On estime qu'après 65 ans, ils touchent 1/3 des hommes et ¼ des femmes. Se pose donc la question de savoir si l'on doit aller rechercher ces polypes dans la population générale.
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UE19 – Epidémiologie et facteurs de risque –A. DUPRE Le risque de transformation d'un polype en cancer augmente avec l'âge, avec la taille du polype, avec l'état de dysplasie (grade de sévérité) de celui-ci et l'existence d'une composante villeuse. Lorsqu'il y a un ATCD de polype, des coloscopies de contrôle sont réalisées.
Maladie Inflammatoire Chronique de l'Intestin (Recto-colite hémorragique (RCH), Maladie de Crohn). Les MICI étendues prédisposent au cancer, après 15 ans d'évolution. Elles expliquent environ 1% des cancers colorectaux. ATCD familiaux : le risque est d'autant plus élevé que le lien de parenté est proche, que le nombre d’apparentés touchés est élevé et que l'âge de diagnostic est jeune. Une part est liée au risque héréditaire, et l’autre part aux risques familiaux classiques. o
Risque faible : o 1 apparenté au 1er degré o Diagnostic > 60 ans
o
Risque élevé : o 2 apparentés au 1er degré o Diagnostic < 45 ans
Prédispositions héréditaires : Syndrome de Lynch (HNPCC) expose à un risque cumulé d'au moins 60%. Ce sont des patients surveillés par coloscopie tous les 2 ans. Polypose adénomateuse familiale (PAF) : maladie générale du côlon s'installant dans l'enfance. Elle est due à une mutation constitutionnelle du gène APC. Ce sont des enfants dont le côlon se tapisse de petits polypes qui, si on ne fait rien, donneront une évolution cancéreuse obligatoire avant 30 ans. La prévention ne se fait que par chirurgie : on retire le côlon et parfois le rectum avant 20 ans. Alimentation et style de vie : Aujourd’hui on sait que :
La viande rouge est un FdR car les graisses saturées augmentent la sécrétion de sels biliaires qui sont de probables carcinogènes pour le colon. La charcuterie est un FdR. Un IMC élevé est un FdR car il provoque une insulino-résistance ce qui entraîne une augmentation des facteurs de croissance. Une grande taille à l’âge adulte est un FdR, on ne sait pas pourquoi (peut-être à cause d’une plus grande production de facteurs de croissance dans l’enfance). L'alcool est un FdR.
4) Facteurs de protection
L’activité physique est un FdP en diminuant l’insulino-résistance. La consommation de fibres, de lait, de calcium, d’ail sont de probables FdP.
III) Cancers liés au tabac 1) Épidémiologie Chez l'homme, l'incidence et la mortalité du cancer du poumon sont à la baisse. Chez la femme, l'incidence et la
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mortalité du cancer du poumon sont à la hausse. Cette différence est due aux dates de début de consommation du tabac. En effet, les hommes ont commencé le tabac dès les années 1900, tandis que les femmes n'ont commencé que 50 ans plus tard. Depuis les années 1990, on voit une diminution de la consommation chez les hommes. Il y a une augmentation de 4,2% de la mortalité lié au cancer du poumon chez la femme.
Courbes d’incidence (haut) et de mortalité (bas) chez l’homme (à droite) et Le nombre de décès attribuables au tabac en France est chez la femme (à gauche) de 1980 à 2005. d'environ 66 000, dont plus de la moitié sont la conséquence de cancers. FGSM3 Lyon Est
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UE19 – Epidémiologie et facteurs de risque –A. DUPRE 2) Localisations des cancers liés au tabac On retrouve les cancers des poumons, de l'oropharynx, du larynx, de l'œsophage, des lèvres, et de la bouche qui sont les organes directement au contact des agents carcinogènes du tabac. Les cancers du foie, de la vessie et des reins peuvent être dus aux métabolites filtrés. Le tabac serait aussi un facteur de risque pour les cancers du pancréas sans que l'on ne sache très bien pourquoi et récemment (depuis 1999), celui du col de l'utérus. /?\ Les cancers des VADS sont essentiellement favorisés par l’association tabac/alcool, car l’alcool potentialise l’action carcinogène du tabac en augmentant la perméabilité membranaire des cellules aux agents carcinogènes. La consommation d’alcool étant en diminution en France, cela explique la diminution de ces cancers malgré la persistance du tabac.
Le tabagisme est responsable de la majorité des cancers du poumon : 85% chez l'homme, 70% chez la femme (donc si tout le monde arrêtait de fumer, on n’aurait presque plus de cancer du poumon dans 30 ans). Même un tabagisme limité augmente considérablement le risque de cancer bronchique, et le taux de survie à 5 ans avec traitement de ces cancers est très faible.
3) Facteurs de risque La durée du tabagisme est un facteur plus important dans la détermination du risque que la quantité fumée. On a longtemps quantifié le tabac en paquets-année, mais ce qui importe le plus, c'est la durée d'exposition. C'est l'exposition chronique au carcinogène initiateur qui est mauvaise. Par exemple : fumer 20 cigarettes par jour, pendant 10 ans (1*10 = 10 paquet-année) est moins mauvais que de fumer 10 cigarettes par jour pendant 20 ans (0,5*20 = 10 paquet-année). L’incidence annuelle du cancer du poumon est approximativement proportionnelle à la durée du tabagisme en année à la puissance 4 ou 5 et au nombre de cigarette par jour à la puissance 1 ou 2. Le tabagisme passif (1/3 des non-fumeurs sont concernés) est la 7ème cause de décès par cancer dans le monde (600 000 décès par an = 1% de la mortalité mondiale). Ce sont les enfants qui sont les plus concernés (40%) : on s’en rend compte car ils développent souvent de l’asthme. Il agit aussi rapidement sur les cardiopathies ischémiques. De plus, on doit en tenir compte car ce sont souvent les enfants qui sont les plus exposés. De plus, le fait de fumer devant les enfants augmente la probabilité de tabagisme chez eux plus tard. Le tabagisme féminin est en hausse avec 40% des femmes en âge de procréer qui fument et 22% des femmes enceintes fument au moins 1cg/j alors que la cigarette est très nocive pour le développement cérébral du fœtus.
En moyenne, les fumeurs meurent 10 ans avant les non-fumeurs. Mais l'arrêt du tabac avant 30 ans permet de rattraper la courbe des non-fumeurs et donc un gain de vie de 10 ans. L'arrêt vers 40 ans permet un gain de vie de 9 ans, et l'arrêt vers 50 ans permet un gain de vie de 6 ans (cf. courbes de survie selon l’âge). On peut penser que les 2/3 des fumeurs réguliers mourront à cause de leur tabac.
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IV) Cancer du col de l’utérus 1) Épidémiologie En France, il se situe au 10ème rang des cancers de la femme et au 15ème rang des décès. C'est un cancer peu fréquent en occident, car son incidence et sa mortalité ont beaucoup diminué grâce : Au début des frottis de surveillance dans les années 60 : donc les états précancéreux ont été pris en charge beaucoup plus efficacement et rapidement (mesure de prévention secondaire). Une amélioration de l'état sanitaire de la population entraînant une diminution de la prévalence du virus HPV. Cela a beau être un cancer peu fréquent, il n'en demeure pas moins qu'il ne devrait même plus exister si toutes les femmes faisaient régulièrement leur frottis. Le risque selon l'âge : on voit un pic de fréquence chez les femmes jeunes (40 ans), et un second chez les femmes plus âgées, car il y a un relâchement du suivi gynécologique.
2) Physiopathologie La présence chronique du virus HPV est responsable de quasiment tous les cancers du col (99,7 %). Ce cancer est donc une maladie infectieuse à évolution lente. L'ensemble de ses souches peuvent donner un cancer du col de l'utérus, mais 18 d'entre elles (sur les 45) ont un tropisme génital à haut risque oncogénique. On distingue 2 souches impliquées dans 70% des cancers : la 16 et la 18. Ce sont d'ailleurs contre elles que le vaccin est ciblé. La contamination se fait lors des premiers rapports sexuels. Cependant, c'est un virus que l'on élimine spontanément. La prévalence chronique ne concerne que 10% à 20% des personnes, mais ce sont elles qui vont être à risque du cancer du col. L'infection chronique va entrainer des lésions histologiques précancéreuses : néoplasie cervicale intraépithéliale de différents grades (1 à 3) avec un état ultime qu'est le cancer du col. Le frottis va permettre la détection des états précancéreux et la mise en place d'un traitement (conisation ou laser). Le risque évolutif des lésions dépend de son grade et de la présence du virus (on fait une PCR pour vérifier). S’il s’agit d’un grade 2 ou 3, on traite. S’il s’agit d’un grade 1, on recherche HPV et on ne traite que si HPV positif et âge > 30 ans.
A retenir ♥ FdR établis Cancer du sein
Cancer du côlon
Cancer du poumon Cancer du col de l’utérus
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FdP
Age Les facteurs qui diminuent le nombre Œstrogènes : tout ce qui augmente le de cycles ovariens : nombre de cycles ovariens o Grossesses multiples Obésité post-ménopause o Allaitement Inactivité physique o Ovariectomie avant 40 ans ATCD familiaux et perso. de pathologie Activité physique régulière mammaire Alcool Age, Sexe masculin ATCD perso. et familiaux Activité physique régulière Viande rouge, charcuterie, alcool Obésité/grande taille adulte/ inactivité physique
Tabac
Présence chronique du virus HPV
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Dépistage et prévention des cancers Objectifs : Connaître les stratégies de prévention, de dépistage, de diagnostic des principales tumeurs bénignes et malignes.
I) Prévention primaire et secondaire : principes 1) Définitions et objectifs ♥ La prévention est l’ensemble des mesures (individuelles et collectives) visant à éviter ou à réduire le nombre et la gravité des maladies. Prévention primaire : réduire les causes et les facteurs de risque des maladies (ex : vaccination). Le but est de diminuer la fréquence des nouveaux cas (l’incidence). Prévention secondaire : réduire la durée et l’évolution des maladies. Le but est de diminuer le nombre de sujets malades (prévalence). Elle comprend le dépistage et les traitements précoces de la maladie. Prévention tertiaire : diminuer les complications et les rechutes ou les conséquences (incapacités, handicaps) des maladies ou des accidents. Le dépistage est une action de prévention secondaire. DGC Diagnostic clinique
2) Prévention du cancer a. Tabac
Restriction de ventes aux mineurs Interdiction de fumer dans les lieux publics Aide au sevrage tabagique +++ qui sera de plus en plus pris en charge par la sécurité sociale. b. Alimentation et alcool
La consommation d’alcool est déconseillée, quel que soit le type de boisson alcoolisée (vin, bière, spiritueux…). En cas de consommation d’alcool, afin de réduire le risque de cancers, limiter la consommation autant que possible, tant en termes de quantités consommées que de fréquence de consommation. En cas de difficulté, envisager un accompagnement et éventuellement une prise en charge. Les enfants et les femmes enceintes ne doivent pas consommer de boissons alcoolisées. c. Surpoids / obésité et activité physique
Maintenir un poids normal (IMC entre 18,5 et 25 kg/m2). Pour prévenir le surpoids et l’obésité : - Pratiquer au moins 5 jours par semaine au moins 30 minutes d’activité physique d’intensité modérée comparable à la marche rapide ou pratiquer 3 jours par semaine 20 minutes d’activité physique d’intensité élevée comparable au jogging, et limiter les activités sédentaires (ordinateur, télévision…). - Consommer peu d’aliments à forte densité énergétique et privilégier les aliments à faible densité énergétique tels que les fruits et légumes.
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Surveiller le poids de façon régulière (une fois par mois). Pour les sujets présentant un surpoids (IMC > 25 kg/ m2), une obésité (IMC >30 kg/ m2) ou une prise de poids rapide et importante à l’âge adulte, un accompagnement et éventuellement une prise en charge sont à envisager. Voir cours « nutrition et cancer » pour plus de détail sur la nutrition. d. Vaccination HPV Cette vaccination se fait en prévention du cancer du col de l’utérus, par une transsudation des anticorps sériques dans les muqueuses utérines, ce qui crée une barrière contre le virus HPV. Il existe 2 vaccins : Gardasil contre les génotypes 6, 11, 16 et 18 et Cervarix contre 16 et 18. Schéma vaccinal : il y a 3 injections à 0-2-6 mois ou 0-1-6 mois en intramusculaire. L’efficacité a été montrée dans les essais de phase III avec un recul de 5 ans. Il existe des effets secondaires locaux (rougeurs, démangeaisons, douleurs) dans environ 1% des cas et de la fièvre, allergie dans moins d’1% des cas. C’est le premier vaccin indiqué contre le développement d’un cancer. Il y a 100% d’efficacité sur le cancer du col associé aux types HPV 16 et 18, qui sont responsables de 70% des cancers du col. Recommandations de vaccination de 2013 : Jeunes filles de 11 à 14 ans Entre 15 et 19 ans révolus en rattrapage, sans connaissance préalable de l’entrée dans la vie sexuelle car trop compliqué à savoir. Cette vaccination ne dispense pas du dépistage par frottis du col de l’utérus car il y a d’autres génotypes qui peuvent donner un cancer.
II) États des lieux du dépistage des cancers 1) Définitions et objectifs du dépistage Selon l’OMS : le dépistage consiste à identifier présomptivement à l’aide de tests, susceptibles d’une application rapide, les sujets atteints d’une maladie, passée jusque-là inaperçue. L’idée est de détecter la maladie au stade préclinique. Les tests de dépistage doivent permettre de faire le partage entre les personnes apparemment en bonne santé mais qui ont probablement la maladie et celles qui ne l’ont probablement pas. Ils n’ont pas pour objet de poser un diagnostic : les personnes pour lesquelles le résultat est positif ou douteux doivent être soumises à une vérification du diagnostic et, si besoin, à un traitement. Les personnes ayant un résultat négatif ne subiront pas d’autres examens. Le dépistage est une démarche particulière, différente de la démarche diagnostique classique car il concerne une population en bonne santé. Il permet de détecter à un stade précoce infra-clinique une maladie ou une anomalie pour permettre une thérapeutique précoce, de façon à améliorer le pronostic et l’état de santé des individus et de la population. On peut évaluer un test par ses qualités : sa sensibilité et sa spécificité. Le test idéal serait parfaitement sensible et spécifique : mais cela n’existe pas, on doit donc faire des compromis. En pratique de dépistage, on privilégiera la sensibilité car on considère que les faux négatifs sont plus graves que les faux positifs. Le dépistage a des inconvénients : il peut entraîner des explorations invasives chez des personnes qui n’avaient pas de maladie, il peut également entraîner du stress. Ce n’est pas parce qu’un test permet de détecter une maladie avant les signes cliniques qu’on va le mettre en place le bénéfice du dépistage doit être démontré en population. Pour cela, il faut que ce dépistage permette de diminuer la mortalité spécifique (et non la mortalité globale, car les personnes pendant leur traitement peuvent mourir d’une autre cause).
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UE19 – Epidémiologie et facteurs de risque – A. DUPRE 2) La situation actuelle en France a. Dépistages recommandés ♥ Le dépistage recommandé va concerner 3 types de cancer : sein, colon et col de l’utérus. Dépistages organisés : à l’initiative des autorités de santé, invitations systématiques. Pour le cancer du sein, c’est une mammographie tous les 2 ans chez les femmes de 50 à 74 ans. 2 incidences sont réalisées et une double lecture est appliquée si la première lecture donne un résultat négatif. Il est pris en charge à 100% par la sécurité sociale (Plan cancer 2007). Pour le cancer du côlon, un test immunologique remplace le test Hémocult (recherche de sang occulte dans les selles tous les 2 ans, chez les hommes et les femmes de 50 à 74 ans), dont les résultats sont lus dans un centre de lecture centralisé. Il est pris en charge à 100% (Plan cancer 2007). Attention, s’il existe des FdR (antécédents familiaux) on ne fait plus le test Hémocult, mais une surveillance par coloscopie tous les 5 ans. Dépistages « opportunistes » : à l’initiative du médecin, sur prescription. Pour le cancer du col de l’utérus : frottis cervico-utérin à partir des premiers rapports (mais maintenant on conseille seulement à partir de 25 ans, pour éviter les faux positifs) jusqu’à 65 ans, tous les 3 ans, après plusieurs frottis normaux à 1 an d’intervalle. Grâce au Plan cancer 2007, une invitation est envoyée aux femmes n’ayant pas eu de frottis depuis 3/5 ans. Le test HPV est pris en charge à 100% lorsque le frottis est incertain. b. Dépistage non recommandé♥ Dépistage « opportuniste » dans le cadre du cancer de la prostate : dosage du PSA sérique, chez les hommes de 50/55 ans à 69 ans, tous les ans ou 3 ans selon le taux. Ce dépistage n’est pas recommandé mais il est beaucoup pratiqué car facilement réalisable. Il faut expliquer au patient la balance bénéfice-risque. C’est une source de débats et de controverses. Il n’est recommandé par les autorités de santé dans aucun pays du monde. Les résultats sur la survie des patients soumis à ce type de dépistage sont contradictoires. Il semble qu’il ait peu d’impact, à part un sur-diagnostic d’environ 1 patient sur 2. Le dépistage du cancer du poumon n’est pas encore recommandé (en réflexion au niveau de la HAS) : une étude a été menée sur des gros fumeurs (30 PA) actuels ou ayant arrêté depuis moins de 15 ans, testant un scanner thoracique spiralé basse dose. Elle a montré une baisse de la mortalité de 20% mais un taux important de faux positifs (nodules bénins).
III) Principes du dépistage du cancer et balance bénéfice-risque 1) Les prérequis Pour qu’un test de dépistage soit recommandé, il faut : Que le test existe. Qu’il serve à détecter une maladie ayant un impact en santé publique (grave et/ou fréquente). Qu’il détecte la maladie à un stade infra-clinique : il faut donc que la période avant le stade clinique soit suffisamment longue. Qu’il permette un diagnostic et des traitements précoces. Qu’il serve à améliorer le pronostic et l’état de santé des individus et de la population. A l’échelle individuelle, il est possible qu’il n’y ait pas d’avantage, mais à l’échelle de la population, cela a un avantage. L’objectif recherché en cancérologie est de réduire le risque de décès, la mortalité par cancer au niveau individuel et au niveau collectif (objectif de santé publique +++). Il faut donc prouver l’effet bénéfique par un essai contrôlé et randomisé +++: dans un groupe on fait le dépistage et dans l’autre non. On regarde le nombre de décès lié au cancer dans les deux groupes. Si on a significativement moins de décès dans le groupe dépisté, on montre un bénéfice.
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UE19 – Epidémiologie et facteurs de risque – A. DUPRE Pour prouver l’efficacité d’un test de dépistage, il faut montrer qu’il permet de retarder ou d’éviter des décès par rapport au groupe contrôle. Pour qu’un test soit validé, il faut prouver que la balance bénéfice/ risque du dépistage est favorable (plus d’avantages que d’inconvénients).
Il faut quantifier les effets néfastes :
Faux négatifs (tests négatifs/maladie présente) : sujets rassurés à tort. Il ne faut donc pas faire de dépistage chez un patient asymptomatique. Faux positifs (tests positifs/maladie absente) : anxiété, examens inutiles. Allongement inutile de la durée de la maladie : si le pronostic n’est pas modifié (avance au diagnostic inutile), le fait de la prendre en charge plus tôt ne va pas changer le pronostic. Sur-diagnostic : détection de lésions qui n’auraient pas évolué cliniquement.
Un test de dépistage doit être accepté par la population. S’il est trop contraignant, ça ne marchera par car il n’y aura pas d’adhésion de la population à ces tests de dépistages.
2) Inconvénients du dépistage des cancers a. L’absence de bénéfice « Dépister n’est pas seulement détecter ». Disposer d’un test de détection du cancer ne justifie pas en soi son utilisation, il faut démontrer le bénéfice : diminution du risque de décès (mortalité). La détection précoce d’un cancer peut ne rien changer à son évolution (décès non retardés) : dans ce cas on ne tire aucun bénéfice de l’utilisation du test. Le seul effet est de connaître plus tôt le diagnostic de maladie grave. b. Les erreurs du test « Dépister est une pratique médicale imparfaite » : un test de dépistage peut se tromper. Quel que soit le test utilisé, on aura toujours des faux positifs (que l’on identifiera rapidement grâce aux examens complémentaires à visée diagnostique) et des faux négatifs (qui passent entre les mailles du filet et risquent de déclarer un cancer de l’intervalle → cancer non dépisté qui survient cliniquement après un dépistage négatif et avant la date du dépistage suivant). c. Le sur-diagnostic Certains cancers commencent leur évolution et puis s’arrêtent ou ont un développement extrêmement long. Le cancer ne se développe jamais suffisamment pour conduire à des signes cliniques et au diagnostic. Le test de dépistage détecte ces cancers qui n’auraient pas été diagnostiqués en l’absence de dépistage. Il annonce une maladie grave que le patient aurait ignoré toute sa vie. Le traitement alors mis en place est inutile avec parfois des effets secondaires. Il y a un coût humain : préjudice émotionnel et physique, et un coût financier. C’est en partie pour ça que le dépistage du cancer de la prostate par le PSA n’est pas recommandé. Exemple : Cancer de la prostate et dosage du PSA : Un homme sur 4 a un cancer microscopique à 50 ans et près de 100% à 90 ans. Seule une minorité de ces cancers seront évolutifs. Le dépistage va révéler un cancer de la prostate chez presque tous les hommes. Les risques liés à la chirurgie ou à la radiothérapie peuvent être sérieux (impuissance, incontinence urinaire, …).
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UE19 – Epidémiologie et facteurs de risque – A. DUPRE 3) Les biais dans l’évaluation du dépistage a. Efficacité non prouvée Certains indicateurs ne sont pas validés pour évaluer l’effet du dépistage : Observer plus de cancers de stades moins avancés (c’est normal, c’est le but du dépistage). Observer une durée de vie plus longue des cas dépistés (c’est normal, on pose le diagnostic avant donc la survie après diagnostic est nécessairement augmentée). La seule preuve de l’efficacité d’un dépistage est l’essai randomisé en population (randomisation pour attribution ou non du test de dépistage) et comparaison de la mortalité des deux groupes. Il permet d’éliminer les erreurs de mesure de l’efficacité : biais d’avance au diagnostic, biais de sélection des tumeurs de meilleur pronostic, sur-diagnostic.
Tout dépistage n’ayant pas montré dans un essai randomisé une baisse de la mortalité spécifique ne peut être considéré comme efficace. C’est un critère de plus en plus difficile à obtenir en raison de la diffusion des innovations technologiques. b. Temps d’avance au diagnostic (« lead time ») On a ici un dépistage qui montre un allongement du temps de survie. Pourtant, il n’est pas efficace (pas d’amélioration du pronostic, date de décès inchangée). Le temps entre la date du dépistage et la date à laquelle le cancer se serait manifesté cliniquement est l’avance au diagnostic ou lead time. C’est pour cela que le critère d’efficacité du dépistage est l’âge au décès donc la mortalité et non la durée de vie. c. Temps de séjour dans la phase préclinique ou durée d’évolution (« lenght time ») Les tumeurs à évolution plus lente (généralement de meilleur pronostic) restent plus longtemps en phase préclinique. Elles ont donc une probabilité plus élevée d’être détectées par un test de dépistage comparées aux tumeurs à développement rapide. Le dépistage sélectionne donc préférentiellement des cancers dont la survie est longue : biais de sélection des malades de meilleur pronostic. d. Le sur-diagnostic ++++ Le dépistage peut révéler des lésions tumorales qui n’auraient jamais évolué. Ces lésions non diagnostiquées en l’absence de dépistage ont une meilleure survie, il y a donc sélection de cancers de bon pronostic.
IV) Conséquence pour la pratique médicale 1) Dépistage du cancer de la prostate Le dépistage n’est pas recommandé par les experts de santé publique, mais conseillé par les sociétés savantes d’urologie. Cette divergence est notamment liée au coût du dépistage par mesure du PSA et de la perspective des autorités de santé qui se bases sur de grandes études qui ne montrent pas un bénéfice avéré du dépistage à l’échelle de la population. La balance bénéfice/risque est peu/pas favorable : avantage non clairement démontré et un inconvénient majeur : le sur-diagnostic. Plus d’un cancer sur deux détecté par le dépistage n’aurait pas émergé. Depuis la mise en place du dépistage dans les années 1980, on a vu une augmentation très importante et régulière de l’incidence. On n’a pas vu ça pour les autres cancers. L’attitude proposée est « wait and see » : on détecte un cancer mais on ne le traite pas, on fait une surveillance active des patients. C’est un nouveau paradigme : on n’avait jamais fait ça pour le cancer, on veut toujours l’enlever. Est-ce acceptable au niveau éthique ? Est-ce accepté par les médecins et les patients ?
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UE19 – Epidémiologie et facteurs de risque – A. DUPRE 2) Gérer le paradoxe du dépistage du cancer L’intérêt majeur est collectif : impact de santé publique par réduction de la mortalité à l’échelle d’une population. Le bénéfice individuel est toujours minime : La prévalence est faible (risque individuel peu élevé). Pour le cancer du sein entre 50 et 69 ans, le risque cumulé est de 0,3%/an environ, soit 1 femme/350. Certains cancers détectés n’auront pas un pronostic amélioré (le dépistage n’aura rien changé). Les inconvénients inhérents à la procédure de dépistage sont fréquents : faux négatifs, faux positifs et surdiagnostic. Communiquer sur le dépistage est parfois difficile ! Exemple du dépistage du cancer du sein : Sur 1000 femmes de plus de 50 ans ayant une mammographie tous les 2 ans pendant 10 ans : 32 femmes développeront un cancer du sein. 29 pourront être dépistées et recevront un traitement plus limité (vrai positif). 4 décès sur 12 seront évités (bénéfice du dépistage). 200 femmes subiront des examens complémentaires inutiles dont 40 une biopsie chirurgicale (faux positifs). 25 femmes auront un diagnostic connu 3 ans plus tôt sans modification du pronostic. 3 femmes seront rassurées à tort (faux négatifs). 1/250 a un bénéfice réel (décès évité). 1/40 au plus a un bénéfice potentiel. 1/23 a un inconvénient notable. Pourtant l’impact de santé publique est important : réduction de 30% du nombre de décès par cancer du sein. Si on donnait ces chiffres-là aux patients, beaucoup le refuseraient mais ce dépistage est enfaite efficace sur la population générale.
3) Rôle du médecin a. Identifier les groupes à hauts risques de cancer
Le médecin doit identifier les personnes à hauts risques de cancer ne relevant pas du dépistage organisé. Exemple pour le cancer colorectal : Le test de gaïac qui détectait l’hémoglobine (il détectait aussi l’hémoglobine animale consommée) a été remplacé par un test immunologique, plus spécifique.
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UE19 – Epidémiologie et facteurs de risque – A. DUPRE b. Information individualisée, gestion des inconvénients Le médecin doit : Identifier les groupes à hauts risques de cancer justifiant des protocoles de surveillance spécifiques. Relayer, expliquer, préciser les informations reçues. Expliquer la notion de balance bénéfice/risque. Pour : Permettre une adhésion « éclairée » au dépistage. Convaincre en évitant les attentes trop fortes (le dépistage n’est pas une prévention, ce n’est pas parce qu’on fait le test qu’on n’aura pas de cancer). Induire un comportement adapté vis-à-vis du résultat du test. Expliquer le sur-diagnostic et ses conséquences. c. Acteur de la décision partagée Ce qu’il faut dire aux patients : Dépister c’est améliorer le pronostic d’un cancer qui pourrait survenir : cette approche est validée pour certains cancers, pas pour d’autres cancers. Le dépistage est utile même s’il s’agit d’une procédure imparfaite. Un test positif ne signifie pas toujours « cancer » mais demande confirmation par d’autres examens. Il faut consulter en cas de symptômes même après un test négatif, même s’il est récent. Dans certains cas, on peut proposer de ne pas traiter un cancer détecté. d. Acteur de promotion de santé Objectif de santé publique : améliorer la santé de la population (réduire la mortalité par cancer). Cout financier : financement de la gestion et du pilotage du dépistage. La participation élevée au dépistage organisé est la condition nécessaire à l’atteinte des objectifs et l’optimisation des coûts. Le rôle du médecin est important pour promouvoir le dépistage. Cette pratique de prévention fait partie de l’exercice médical. Il y a une nécessité de concilier l’enjeu de santé publique avec l’approche individuelle de prise en charge des patients.
4) Dépistage du cancer du sein On détecte 6-7 cancers pour 1000 femmes dépistées. Il faudrait une participation de 70% des femmes. Inconvénients possibles : Une inquiétude Une douleur Des examens en plus/Peut-être une biopsie
Des frais supplémentaires Risque rayons X Un cancer non vu
Avantages : En cas de cancer, diminuer le risque de décès de 40 à 26 %. En cas de cancer, conserver son sein. En cas de cancer, éviter une chimiothérapie. Augmenter les chances de trouver un cancer de petite taille grâce à la double lecture (qui détecte 15-20% des cancers). Ne pas avancer les frais de la mammographie.
5) Dépistage du cancer colorectal a. Les caractéristiques du nouveau test Test Hémocult : En population à risque moyen, le test est positif dans 2 à 3 % des cas. Sa sensibilité est de 50%, soit le diagnostic d’un cancer sur 2. C’est un test de sélection de la population. Sa spécificité est de 98%, soit une positivité erronée dans 2% des cas, ce qui permet de limiter les coloscopies inutiles. FGSM3 Lyon Est
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UE19 – Epidémiologie et facteurs de risque – A. DUPRE Sa valeur prédictive positive est élevée : si le test est positif : 1 coloscopie sur 10 découvre un cancer et 3 à 4 coloscopies sur 10 découvrent un adénome. Le nouveau test immunologique est plus simple (un seul prélèvement de selles contre 6 anciennement), plus performant (meilleure sensibilité), plus fiable (lecture automatisée), disponible (depuis début 2015) et toujours gratuit (pris en charge à 100% par l’assurance maladie et le patient n’a pas à avancer les frais). Le but étant que plus de 5% de la population concernée fasse le test (contrairement à ce qui était le cas pour Hémocult). b. Informer sur la conduite à tenir selon le résultat Si le test est négatif (97 à 98% des cas) cela signifie qu’aucun saignement n‘a été détecté mais une lésion ne saigne pas tout le temps. Il est très important de refaire le test 2 ans plus tard (les lésions évoluent lentement) et de surveiller les signes d’alerte dans l’intervalle (en présence de symptômes, coloscopie). Si le test est positif (2 à 3% des cas) cela signifie que du sang a été détecté dans les selles. Il faudra donc pratiquer une coloscopie, pour en déterminer l’origine : Dans 6 cas sur 10 : rien. Dans 3 cas sur 10 : adénome (qui pourra être retiré durant la coloscopie, évitant ainsi qu’il ne se transforme en cancer). Dans 1 cas sur 10 : cancer (qu’on soignera d’autant mieux qu’il est détecté à temps). L’avantage du dépistage précoce, c’est que souvent les patients sont en forme et donc les traitements seront plus efficaces, il y aura moins de complications en cas de chirurgie et la récupération sera plus rapide. c. Les risques de la coloscopie Les principales complications sont la perforation (1/10 000) et les complications liées à l’anesthésie. En population dépistée, il existe un risque de perforation de 2,5/1 000 000 tests. La mortalité est nulle lors des campagnes de dépistage organisé. d. En conclusion de la consultation Le cancer colorectal est fréquent et grave. Le dépistage est un bon moyen d’éviter des cancers colorectaux en détectant et en retirant les lésions précancéreuses ou de soigner très bien des cancers débutants. Environ 3 000 décès sont évitables chaque année. Le test est simple, sans danger, à faire tranquillement chez soi. Il est peu onéreux, son coût et sa lecture sont pris en charge à 100% par l’Assurance Maladie.
6) Médecin : acteur de promotion de santé Exemple : Si distribution du test Hemoccult par le médecin généraliste 86 %sont réalisé Si la distribution se fait par envoi postal ou en officine moins de 30% des test sont réalisés (dérisoire). Le rôle du médecin dans la pratique du dépistage est essentiel mais particulière. Il y a une nécessité de concilier l’enjeu de santé publique avec l’approche individuelle de prise en charge des patients. Cette pratique de prévention fait partie de l’exercice médical
A retenir Dépistage du cancer :
Approche de prévention intéressante : éviter le décès par cancer. Inconvénients potentiels : faux négatifs, faux positifs, sur-diagnostic, sur-traitements. Rôle du médecin essentiel pour informer, expliquer le bénéfice-risque, promouvoir les dépistages organisés. Enjeux de santé publique. Pour le futur : enjeux de la surveillance active ? Stratégie de « see and wait »
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Dépistage et prévention des cancers
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Nutrition et cancer I) La nutrition 1) Définition La nutrition est l’ensemble des processus par lesquels les êtres vivants transforment les aliments pour construire et maintenir leur structure et pout assurer leur fonctionnement : L’étude de la relation nutritioncancer concerne donc non seulement ce que l’on ingère (aliments, boissons, toxiques) , la façon dont on transforme ce que l’on mange, mais aussi notre composition corporelle, résultante de notre histoire et de notre comportement (activité physique, sédentarité, croissance, aléas pathologiques…). Cette étude ne se limite pas seulement à l’alimentation ! NB : Des éléments nutritifs protecteurs peuvent devenir nocifs en trop grande quantité : Un antioxydant à forte dose devient pro-oxydant. Notre « nutrition » a une influence sur le risque de développer et sur l’évolution de la maladie cancéreuse. Pour les facteurs de risques nutritionnels de cancer, cette influence, favorable ou défavorable, n’est pas très différente de celle concernant d’autres affections chroniques comme le diabète, les maladies métaboliques ou cardiovasculaires… Les facteurs de nutrition associés au risque ou à l’évolution des cancers sont : L’alimentation et les boissons : seuls ou en tant que vecteurs. Les relations entre notre organisme et ce que l’on mange peuvent être multiples : ce sont des sources d’énergie, des nutriments indispensables à la constitution ou au maintien de notre structure, des facteurs protecteurs (antioxydants par exemple), des vecteurs d’agents carcinogènes éventuels (par exemple des virus ou champignons, des toxiques issus de l’environnement ou du mode de préparation des aliments…). Nos fonctions physiologiques ou pathologiques : l’activité physique en grande partie, mais aussi l’inflammation, la croissance (dont la croissance tumorale qui est une croissance anormale), la réparation tissulaire… La composition corporelle : le fonctionnement et la structure des cellules sont influencés par leur environnement qui interfère avec elles et peut les transformer, modifier leur fonction. Par exemple, une adiposité anormale (excès d’adiposité abdominale) a une influence non négligeable. o Pour un individu d’une taille donnée, on le classe en fonction de sa corpulence. Pour un individu avant 70 ans ayant un IMC (poids/taille² en m²) compris en 18,5 et 25, on le considère en corpulence normale, au-dessus de 25 en surpoids et au-dessus de 30, en obésité. Si son IMC est inférieur à 18,5 on le considère comme maigre voire dénutri car en cas de pathologie ou traumatisme, en dessous de cette valeur de 18,5 le pronostic est plus défavorable. Un patient qui entre à l’hôpital avec un IMC de 18,5 aura peu de réserve énergétique, donc peu d’énergie mobilisable pour se réparer, lutter contre la maladie, etc. Après 70 ans, l’IMC classant un individu hospitalisé comme dénutri n’est plus de 18,5 mais de 21, et plus on s’avance en âge, plus l’IMC associé à un meilleur pronostic s’élève. o La composition corporelle est donc un enjeu très important. Cela dit, attention car l’IMC est un indicateur imparfait : par exemple, pour un IMC de 25, on verra des patients très sportifs et ayant une très grande masse musculaire, alors que d’autres auront plus de graisse abdominale. Malgré leur IMC équivalent, ces deux patients n’ont pas du tout la même composition corporelle, et vont présenter des risques de cancer ou d’évolution plus défavorable différents ! L’inflammation associée à un excès d’adiposité abdominale est un des facteurs impliqués.
2) Lien entre nutrition et cancer Le cancer a longtemps été considéré comme une maladie génétique, car il provient d’un déséquilibre entre les gènes promoteurs de la division cellulaire anormale et les gènes qui sont répresseurs de cette division. Il existe deux types de gènes impliqués dans le cancer : ceux favorisant la division anarchique de la cellule, dits oncogènes et ceux l’inhibant, appelés anti-oncogènes. A l’état normal, il existe un équilibre entre les oncogènes et les anti-oncogènes. Ce déséquilibre induit une prolifération anormale à l’origine du processus cancéreux si la tolérance de l’organisme le permet. FGSM3 Lyon Est
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UE 19 – Epidémiologie et facteurs de risque – P. BACHMANN Certains cancers sont liés à des agressions extérieures qui « endommagent » notre ADN (génome) en créant une mutation, qui peut par la suite être transmise à la descendance et être à l’origine d’un risque accru de cancer (il faut toujours plusieurs de ces modifications pour cela et un déséquilibre entre oncogènes et antioncogènes). Mais il n'y a pas que le matériel génétique en lui-même qui peut transmettre un risque à la descendance et influencer le développement d'un cancer : le matériel génétique est supporté dans les chromosomes par d'autres protéines de la chromatine, dont certaines peuvent être modifiées par l’environnement (par phosphorylation, méthylation…). Ces modifications entrainent des changements de l’expression des gènes, et peuvent également être transmises à la descendance par conservation au cours du cycle cellulaire. On appelle ces informations l’épigénome. Les histones peuvent par exemple être méthylées et être transmises à la descendance, modifiant ainsi l'expression des gènes associés. Les agressions à l’origine de ces modifications peuvent provenir de l’alimentation, mais pas seulement : on peut aussi être confronté à des facteurs externes (radiation) ou internes (inflammation). Ces agressions s’attaquent donc soit à l’appareil nucléique, soit aux protéines de support (histones). Les facteurs nutritionnels peuvent aussi agir sur tous les stades de la multiplication cellulaire (cf. schéma)
II) Les méthodes d’étude de la relation entre nutrition et cancer 1) Les études d’épidémiologie descriptive Les premières études portaient notamment sur l’incidence des tumeurs. On avait constaté une tendance dans les pays industrialisés à une augmentation du risque de cancer. Cette augmentation était en partie due au vieillissement de la population (parce que plus on est âgé, plus on a de risque de développer un cancer), mais cela n’expliquait que la moitié de cette augmentation. Le dépistage plus large est un autre facteur d’augmentation de l’incidence des cancers. Les facteurs nutritionnels liés à cette augmentation d’incidence ont été évoqué très tôt (augmentation des apports énergétiques, des lipides et en particulier des graisses saturées…). On a mis en évidence d’autres facteurs de risque (diminution de l’activité physique par exemple), qui sont également associés à la survenue de maladies chroniques, dont les cancers. Notre matériel génétique ne s’est que très peu modifié depuis que l’homme existe mais notre comportement nutritionnel et de vie s’est radicalement transformé. La révolution agricole il y a plusieurs milliers d’années n’a que peu modifié les caractéristiques de notre alimentation, essentiellement d’origine végétale, en termes de qualité. Par contre, la révolution industrielle (années 1830-1850) a fondamentalement modifié les habitudes alimentaires des populations avec la nécessité de fournir une alimentation plus riche en produits d’origine animale puis une qualité différente de ces produits alimentaires industriels (nécessité de production, de conservation. Associées à une abondance alimentaire, à une réduction des besoins nutritionnels liés à la réduction de l’activité physique, ces changements ont conduit à une modification du phénotype général (augmentation de la prévalence du surpoids et de l’obésité). Parmi les études épidémiologiques descriptives on trouve les études de corrélation : l’augmentation de la consommation de certains types d’aliments est corrélée à l’augmentation du risque de certains cancers. Malheureusement, l’épidémiologie descriptive de ce type ne fait que donner des pistes pour poser des hypothèses. Elle est souvent source de grands titres chocs dans les journaux, mais elle n’offre aucune preuve scientifique. Exemple : Une étude récente d’épidémiologie descriptive a montré qu’il existait une très bonne corrélation entre la consommation de chocolat et le fait d’avoir un prix Nobel : ceux qui mangent du chocolat auraient, selon cet article, plus de chance d’obtenir un prix Nobel que ceux qui n’en consomment pas (Messerli NEJM 2013). Mais en réalité, cette étude est biaisée (sans blague !) : il existe des facteurs de confusion évidents. En Chine, on consomme peu de chocolat certes, mais le niveau d’études est inférieur par rapport à celui des Suisses, et ces deux évènements (prix Nobel et consommation par habitant de chocolat) sont sans aucun rapport ! FGSM3 Lyon Est
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UE 19 – Epidémiologie et facteurs de risque – P. BACHMANN 2) Les études d’épidémiologie analytique a) Les études cas-témoins Le début de l’épidémiologie analytique marque une grande avancée. A partir des années 80 environ, on dispose déjà de nombreuses études cas-témoins. Il s’agit de comparer des patients atteints d’une maladie à des sujets indemnes appareillés (même âge, origine ethnique, …) : la comparaison porte sur leur comportement en amont de leur maladie : leurs habitudes et consommations alimentaires, l’activité qu’ils ont eue (d’où la difficulté d’obtention de données fiables sur des recueils remontant à plusieurs dizaines d’années). On compare ensuite ces données à celles concernant des appareillées indemnes de la maladie, et on cherche les différences. Pour le cancer du côlon, les malades avaient manifestement un régime plus riche en viande que les témoins. Il existe cependant des biais :
Biais d’anamnèse : En réalité, les gens ne se souviennent pas très précisément de ce qu’ils ont mangé. Biais de confusion : La composition de certains aliments s’est parfois modifiée dans le temps (industrialisation). Il est également difficile d’interroger les patients sur tous les comportements et un facteur alimentaire peut refléter un autre comportement alimentaire particulier. Par exemple, les sujets consommant régulièrement un ou deux verres de vin rouge en France ont une alimentation très différente de ceux consommant d’autres boissons alcoolisées, ou ayant des consommations plus élevées. D’autre part, pendant de nombreuses années on ne s’est que peu intéressé à l’activité physique, et on s’est aperçu secondairement de son rôle primordial. Par exemple, il était plus facile d’obtenir des données anthropométriques (poids, taille) et le rôle de l’obésité apparaissait au premier plan, alors que l’obésité est le plus souvent une des conséquences du manque d’activité physique. Biais de sélection, surtout à propos du groupe de témoins : Les deux groupes doivent pouvoir être comparables, et il est difficile de s’en assurer. b) Les études de cohorte ++
Dans les années 80 sont constituées de grandes études de cohorte, qui correspondent au suivi de personnes soit en bonne santé (études des facteurs de risque d’une maladie), soit atteintes ou guéries d’un cancer. L’analyse globale de ces études est en grande partie la source des recommandations actuelles. Pour les cohortes de sujets sains, on attend en fait qu’ils développent une maladie, et pendant ce temps de suivi, on réalise un grand nombre d’analyses sur leur alimentation, notamment à l’aide de questionnaires de mesure, d’analyses biologiques… Les données sont donc beaucoup plus fiables que dans les études cas-témoins. On utilise ces données pour les classer en fonction de leur exposition aux facteurs de risque étudiés (groupe des exposés et groupe des non-exposés). Cependant, ces études présentent encore des inconvénients : Le résultat dépend là-encore des hypothèses avancées : si on se limite à certains facteurs de risque, on peut en occulter d’autres qui jouent pourtant un rôle primordial. Biais de sélection : il faut avoir un échantillon représentatif de la population.
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Exemples : Une des premières études de cohorte sur l’alimentation et le cancer est celle de la cohorte MGEN : elle était composée de femmes enseignantes ou travaillant dans l’éducation nationale, c’est-à-dire possédant toutes probablement un niveau de culture et de revenus particuliers, éloignés de ceux de la population française moyenne. Il est donc difficile de tirer des conclusions extrapolables à la population française à cause de biais de sélection. L’étude de cohorte Nutrinet : il s’agit de remplir régulièrement de courts questionnaires sur internet, donc on a un biais de sélection. Les personnes qui s’inscrivent sont des personnes ayant régulièrement accès à internet et qui ont le temps de remplir des questionnaires régulièrement, ce qui ne correspond pas à la totalité de la population française.
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UE 19 – Epidémiologie et facteurs de risque – P. BACHMANN D’autre part, les délais sont assez longs pour obtenir des résultats : dans la cohorte de la MGEN, on a obtenu en une dizaine d’années un nombre suffisant (qq centaines ou milliers) de cancers du sein. Un tel effectif (sur une cohorte de 50 000 femmes) permet d’obtenir des résultats fiables. Pour les cancers rares (thyroïde, sarcomes), le nombre de cas sera très faible les premières années et insuffisant pour pouvoir en déduire quelque chose sur le plan statistique. Il faut donc des cohortes très grandes et on aura donc peu de données. En Europe, la cohorte EPIC rassemble l’ensemble des grandes cohortes de divers pays européens et donne des résultats plus solides pour la population européenne.
3) Les essais randomisés Ils représentent les études les plus fiables en médecine (Gold standard), cependant :
Ils sont difficiles à réaliser en expérimentation nutritionnelle. De plus, cela coûte très cher ! Il existe également un biais de confusion, car en incitant les gens à modifier leur comportement alimentaire sur certains points (par exemple, en augmentant la quantité de fruits et légumes), on agit également sur d’autres (en conséquence, les gens vont manger moins de viande et donc de graisses animales). De la même façon, il peut exister un biais de sélection et une mauvaise observance de l’intervention : il est très difficile de changer radicalement et sur une longue période le comportement alimentaire du groupe intervention, et on est toujours face au risque que le groupe contrôle modifie également son alimentation, parfois de manière identique au groupe intervention.
Exemple : Dans l’étude Women’s Health Initiative, il a été montré que la diminution de moitié de l’apport énergétique en graisses par l’alimentation (en augmentant la proportion de fruits et légumes et de céréales) pourrait diminuer le risque de cancer chez la femme ménopausée. L’objectif était de réduire de 35% en moyenne à 20% l’apport énergétique en graisses (15% de cible). On a comparé les deux groupes, et les courbes de cancer du sein s’éloignent avec à 10 ans de suivi une différence non significative mais constante de près de 10%. Mais le résultat n’était pas encore significatif, cela donnait juste une tendance.
4) Les Méta-analyses Les méta-analyses (de bonne qualité) ont un niveau de preuve maximum et vont permettre d’étudier la qualité des études. Ex : Méta-analyse des essais randomisés sur la supplémentation en antioxydants. Elle a montré qu’on augmentait le risque de cancer, particulièrement avec le bêta-carotène et les vitamines A et E. Toutes les études n’étaient pas significatives, mais en regroupant toutes les études, on peut trouver une tendance ou un effet significatif lié au plus grand nombre de cas analysés. A retenir ♥ :
1) En première intention, on réalise des méta-analyses d’essais randomisés bien conduits. 2) Si ce n’est pas possible, on peut faire des méta-analyses d’études de cohorte. 3) Enfin, en dernier recours, on pourra réaliser des méta-analyses d’études cas-témoins.
5) Etude des mécanismes d’action Avant l’étude d’intervention, il est important de déterminer le mécanisme d’action. Celui-ci est obtenu en laboratoire, ou chez l’animal, plus rarement dans des essais cliniques. Les mécanismes de ces facteurs peuvent être communs à toutes les localisations : par exemple, l’acétaldéhyde est un puissant oxydant et un producteur de radicaux libres (source d’agression de l’ADN et du matériel nucléaire). D’autre part, la consommation importante d’alcool est souvent associée à des déficits nutritionnels en facteurs protecteurs (folates, vitamines A et E…). Les mécanismes peuvent aussi différer selon la localisation. La consommation d’alcool entraîne : Augmentation de la perméabilité muqueuse, ceci augmentant le risque d’autres carcinogènes (cancer des VADS). Cet effet explique en grande partie la potentialisation du tabac par l’alcool. Augmentation du taux de stéroïdes (cancer du sein) par transformation d’hormones dans les tissus graisseux : androgènes en œstrogènes. Développement de pathologies à risque : on peut notamment penser aux cirrhoses, aux stéatoses hépatiques ou aux hépatites alcooliques qui augmentent le risque d’hépatocarcinome. FGSM3 Lyon Est
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UE 19 – Epidémiologie et facteurs de risque – P. BACHMANN Cependant, chaque individu peut réagir de manière différente à un même facteur de risque. Ceci est dû en grande partie à des facteurs génétiques : certains patients vont par exemple moins bien éliminer les toxines, ce qui va potentialiser leurs effets chez eux. Dans l’organisme, l’alcool est métabolisé en acétaldéhyde par l’alcool déshydrogénase (ADH), puis en acétate par l’aldéhyde déshydrogénase (ALDH). Ces deux enzymes font l’objet de polymorphismes génétiques se traduisant par des activités enzymatiques augmentées ou diminuées et modifiant la capacité des individus à consommer des boissons alcoolisées. Les données scientifiques actuellement disponibles montrent que certains polymorphismes des gènes ADH1B et ALDH2 exposent les consommateurs d’alcool à un risque majoré de développer un cancer des voies aérodigestives supérieures. Ces variations peuvent être la source de facteurs confondants, il faut donc penser à les prendre en compte.
III) Etablissement de recommandations en santé publique 1) Classification La classification des différents agents cancérogènes est réalisée en fonction des données d’exposition, des études sur le cancer chez l’Homme, des études de cancérogenèse expérimentale, des mécanismes d’action et du niveau de preuve du lien de causalité. Classification
Facteur
Origine alimentaire
Cancérogènes pour l’Homme (Groupe 1)
Helicobacter pylori
Bactérie transmise en partie par l’eau et les aliments souillés
Aflatoxines
Toxines produites par des moisissures poussant sur les denrées alimentaires
Arsenic
Contaminant de l’eau de boisson
Boissons alcoolisées Ethanol (dans boissons alcoolisées) Acétaldéhyde (dans boissons alcoolisées)
Boissons de consommation courante
Poisson salé
Poisson salé façon chinoise
2-Amino-3-methylimidazo[4,5-f]-quinoline (IQ)
Composé culinaires
Nitrate et nitrite ingérés
Produit issu de l’activité agricole (nitrate), agent de conservation en salaison (sels nitrités)
Probablement cancérogènes pour l’Homme (Groupe 2A)
néoformé
provenant
des
traitements
De ce fait, il existe assez peu d’agents présents dans le groupe 1 ♥ (agents cancérigènes à risque absolu) : H. pylori (ce n’est pas un facteur nutritionnel pur, mais il dépend de notre mode d’alimentation), les aflatoxines (agents contaminants des céréales), l’arsenic, les boissons alcoolisées et certains modes de préparation (dont la salaison). On peut ainsi voir que les « facteurs nutritionnels » cancérigènes ne sont pas que des aliments proprement dit, mais peuvent aussi être des contaminants, ou des modes de préparation alimentaire.
2) Etablir les recommandations officielles a) Classification des recommandations Avant d’être divulguées au grand public, les recommandations s’établissent sur un faisceau d’arguments, et ce dans une démarche d’expertise scientifique collective évaluant l’ensemble des données disponibles selon une méthodologie rigoureuse précisant le niveau de preuve. Une seule étude ne suffit pas, et encore moins l’avis d’un seul expert !
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UE 19 – Epidémiologie et facteurs de risque – P. BACHMANN Le WCRF (World Cancer Research Found), associé à l’AICR (Association for International Cancer Research), a étudié à deux reprises l’ensemble des données publiées avec un bon niveau de preuve, ce qui a permis d’établir des rapports (1997 et 2007). Ils ont mis 6 ans à les obtenir, avec la collaboration de plus de 200 scientifiques. Ils ont réalisé une revue systématique des articles publiés, en réalisant une évaluation indépendante et en évaluant les niveaux de preuve. Plus récemment vient de paraitre sur le WEB le 3éme rapport téléchargeable et avec des outils pratiques de consultation (https://www.wcrf.org/dietandcancer/interactive-cancer-risk-matrix) Depuis, ils mettent à jour régulièrement les données mondiales permettant d'établir des recommandations (Continuous Update Project du WCRF) et ont classé les facteurs en différents niveaux : Convaincant : si toutes les études vont dans ce sens, c’est alors une certitude ; Probable : si on a beaucoup d’arguments. Certaines études peuvent donner des arguments contraires o C’est uniquement à partir de ces deux premiers niveaux de preuve que l’on peut établir des recommandations.
Limité : on a quelques données, mais elles restent discordantes, notamment en fonction des populations ; Effet substantiel ou peu probable.
Ces rapports sont téléchargeables sur le site internet du WCRF CUP. Les recommandations s’appliquent principalement en prévention primaire (pour limiter le risque de développer un cancer chez les personnes saines), mais également en prévention tertiaire (pour limiter le risque de récidive, ou limiter le risque de développer un deuxième cancer). Bien se représenter qu’1/4 sujet de la population française aura un cancer. Par exemple, pour le cancer du sein, il touche environ 1 femme sur 10 ! b) Augmentation du risque : prévention primaire
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UE 19 – Epidémiologie et facteurs de risque – P. BACHMANN A retenir ♥ : Les principaux facteurs qui sont associés de manière convaincante à un risque accru de certains cancers (sein, colon, poumon) : boissons alcoolisées, surpoids et obésité, viandes rouges et charcuteries, sels et aliments salés, compléments alimentaires à base de bêta-carotène. On note cependant que ces facteurs peuvent avoir des niveaux de preuve variables en fonction des différentes localisations de cancer. On constate que la supplémentation en bêta-carotène augmente le risque de cancer du poumon, surtout si la personne est à risque (fumeur) ou exposée à des toxiques (amiante). Bien retenir que la supplémentation par complément alimentaire a un effet globalement néfaste sur le risque de cancer. Supplémenter est facile, modifier le comportement alimentaire bien plus difficile, mais c’est la seule chose qui peut être bénéfique de façon certaine pour le patient. En France, l’étude SUVIMAX initiée en 1994 (Pr C. Hercberg) a comparé une supplémentation d’un cocktail d’antioxydants (vitamines, oligoéléments) à des doses supra physiologiques (proche des doses recommandées pour la population française) contrairement à d’autres études de supplémentation en un antioxydant à forte dose. Les premiers résultats ont été publiés en 2004 (Hercberg C. et al., Arch Int Med, 2004) : on observe une réduction de la mortalité et du risque de cancer chez l’homme et a priori pas d’effet chez la femme. On suppose que cette différence est due au fait que les femmes ont globalement une alimentation plus équilibrée, avec un statut initial en antioxydants meilleur, et donc la supplémentation ciblée a moins d’effet chez elles. Cela dit, après 10,5 ans de suivi, il n’y avait plus de différence de mortalité, mais le risque de mélanome semblait augmenté chez la femme et peut-être également le cancer de la prostate chez l’homme. c) Réduction du risque : prévention primaire
A retenir ♥ : Les principaux facteurs qui sont associés de manière convaincante à la réduction du risque sont : l’allaitement, l’activité physique, la consommation de fibres, la consommation de fruits et légumes.
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UE 19 – Epidémiologie et facteurs de risque – P. BACHMANN 3) Adapter les recommandations au niveau national Pour établir des recommandations nationales, les experts se fondent tout d’abord sur ces facteurs de risque et leur niveau de preuve, mais également sur les études nationales d’exposition, c’est-à-dire de consommation alimentaire ou les rapports sur les comportements (baromètres santé, étude individuelle de consommation alimentaire…). Exemple : Certes le maté (boisson type décoction végétale préparée très chaude dans un récipient spécial en métal) est très cancérigène, mais comme une proportion anecdotique de la population française en consomme, contrairement aux habitants d’Amérique latine, il n’y a pas d’intérêt à souligner ce facteur de prévention en France, contrairement à l’alcool.
/!\ Attention à notre langage devant les patients : ces recommandations préconisent une alimentation qui a des chances de provoquer une meilleure santé, et non une alimentation anticancer !
Actuellement, les recommandations françaises sont régulièrement diffusées par l’institut national contre le cancer (INCA). La brochure est à lire et télécharger sur le site e-cancer.fr/diffusion. Il est préférable de limiter le nombre de recommandations pour mieux les appliquer.
IV) Les recommandations actuelles en France 1) Facteurs protecteurs a) L’activité physique L’activité physique correspond à un mouvement secondaire à une contraction musculaire accroissant la dépense énergétique. L’activité physique diminue de manière convaincante le risque de cancer du côlon-rectum, et de manière probable le risque de cancer du sein et de l’endomètre. Exposition : L’activité physique (AP) moyenne des français a fortement diminué par rapport à celle de nos ancêtres : il y a 2 siècles, elle était d’environ 8h par jour pour une AP modérée à intense. Aujourd’hui, elle est descendue à moins d’1h par jour en moyenne. On estime qu’environ 21 à 37% de la population est exposée au manque d’activité physique, c’est à dire moins de 30 minutes d’activité modérée au moins 5 jours par semaine. L’insuffisance d’activité physique est considérée comme la 4ème cause de mortalité dans le monde. Mécanismes : L’inactivité physique est associée à une augmentation de la graisse abdominale, ce qui entraine une insulinorésistance et une augmentation des médiateurs de la prolifération cellulaire (augmentation de la leptine, facteur de prolifération cellulaire et favorisant la néovascularisation, et baisse des taux d’adiponectine…) et de l’inflammation, ce qui favorise le développement tumoral. Elle augmente également le risque de maladies cardiovasculaires et le risque de maladies métaboliques. L’activité physique diminue donc le risque de surpoids et d’obésité. Recommandations en prévention primaire ♥ : Limiter les activités sédentaires (notamment liées aux écrans) Chez l’adulte, pratiquer au moins 5 jours par semaine au moins 30 minutes d’activité physique d’intensité modérée (c’est-à-dire de la marche un peu rapide, à la limite de l’essoufflement) ou pratiquer 3 jours par semaine 20 minutes d’activité physique d’intensité élevée comparable au jogging. Chez l’enfant et l’adolescent, pratiquer un minimum de 60 minutes par jour d’activité physique d’intensité modérée à élevée sous forme de jeux, d’activités de la vie quotidienne ou de sport. Ceci est également vrai en prévention tertiaire.
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UE 19 – Epidémiologie et facteurs de risque – P. BACHMANN Il vaut mieux avoir une activité régulière quelle qu’elle soit : passer l’aspirateur est par exemple considéré comme une activité modérée. Une part non négligeable de l’activité physique est liée à l’activité professionnelle (bien penser à la prendre en compte). Il faut donc faire attention aux arrêts de travail que l’on prescrit : si un patient vient d’apprendre qu’il a un cancer et qu’il interrompt son activité physique professionnelle, on induit un changement de comportement majeur avec parfois une réduction du niveau d’activité physique ! Souvent, le patient va augmenter son temps passé devant l’écran en particulier l’ordinateur (et en plus aller chercher des informations sur sa maladie ce qui ne va pas l’aider à aller mieux !), ce qui risque d’altérer ses capacités fonctionnelles, induisant une réduction de la masse et de la fonction musculaire, avec des conséquences sur l’évolution de sa maladie et son risque de complications. Il faut donc que nous adoptions un discours mobilisateur, chez les gens bien portants comme chez les malades. Pour mémoire, 60% des femmes traitées pour un cancer du sein vont prendre du poids. Et ceci aggrave le pronostic de la maladie. La réduction d’activité physique est probablement un facteur important de cette prise de poids ! b) Fruits et légumes Cela ne concerne que les légumes et non les féculents (pomme de terre et légumes secs). La consommation de fruits et légumes diminue de manière probable le risque de cancer des VADS et de l’œsophage et estomac, et le cancer des poumons pour les fruits seuls. Mécanismes : Ce sont des agents protecteurs, notamment en raison de leur faible densité énergétique. Ils évitent le surpoids et l’obésité. De plus, ils contiennent de très nombreux antioxydants et vitamines variés nécessaires à la protection de notre matériel génétique. Exposition : On estime que 57% de la population a une consommation insuffisante de fruits et légumes et 35% de la population sont même de faibles consommateurs (< 3,5 portions par jour) ! Recommandations ♥ : Consommer chaque jour au moins 5 fruits et légumes variés (quelle que soit la forme : crus, cuits, frais, en conserve ou surgelés) pour atteindre au minimum 400 g par jour. Ce qui compte, c’est bien la diversité, le bénéfice est nettement supérieur si on varie nos fruits et légumes. Consommer aussi chaque jour d’autres aliments contenant des fibres tels que les aliments céréaliers peu transformés et les légumes secs. Satisfaire les besoins nutritionnels par une alimentation équilibrée et diversifiée sans recourir aux compléments alimentaires. c) Allaitement (Cette partie n’a pas été détaillée)
2) Facteurs associés à un risque accru a) Boissons alcoolisées La consommation d’alcool augmente de façon convaincante le risque de cancer de la bouche, du pharynx, du larynx, de l’œsophage, du côlon-rectum chez l’homme, du sein et de façon probable le cancer du foie et du côlon-rectum chez la femme. Pour les mécanismes, voir la partie II)4). Exposition : On mesure l’exposition en faisant une moyenne par semaine : ainsi, on considère qu’on a un risque équivalent pour les cancers en buvant 1 verre par jour (1 dose = 10 g), ou en buvant 7 verres le samedi soir. Le risque de cancer augmente de manière significative dès une consommation moyenne d’un verre par jour. On considère une dose (10 g) équivalente à un verre ballon de vin (10 cL à 12°), un demi de bière (25 cL), un verre d’alcool fort (3 cL). Recommandations ♥ : La consommation d’alcool est déconseillée, quel que soit le type de boisson alcoolisée (vin, bière, spiritueux…). Ne pas inciter les personnes abstinentes à une consommation d’alcool régulière, même modérée, car toute consommation d’alcool régulière est à risque. FGSM3 Lyon Est
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En cas de consommation d’alcool, afin de réduire le risque de cancers, limiter la consommation autant que possible, tant en termes de quantités consommées que de fréquence de consommation. En cas de difficulté, envisager un accompagnement et éventuellement une prise en charge. Les enfants et les femmes enceintes ne doivent pas consommer de boissons alcoolisées.
A 2 doses par jour, on augmente le risque de cancer du sein de 10% par rapport à 1 dose par jour et le risque de cancer des VADS de 168%. Donc chaque verre compte ! De plus, les conséquences d’une consommation sont difficilement réversibles puisque l’arrêt réduit le risque de cancer des VADS seulement après 10 ans, et le risque se rapproche d’une population abstinente après seulement 20 ans ! b) Surpoids et obésité L’obésité et le surpoids augmentent de manière convaincante le risque de cancer de l’œsophage, de l’endomètre, du rein, du côlon-rectum, du pancréas et du sein (en post-ménopause), et de manière probable le risque de cancer de la vésicule biliaire, foie, ovaire, prostate, hémopathies malignes. Exposition : Elle se mesure en grande partie par l'IMC. D'autres indicateurs relèvent de mécanismes associés à un excès d'apport énergétique et parfois à un manque d'activité physique : tour de taille (> 102 cm chez l’homme et > 88 cm chez la femme), prise de poids à l’âge adulte, taille à l’âge adulte… On considère qu’environ 39% des hommes et 26% des femmes sont concernés par le surpoids. Pour l’obésité, environ 16% des femmes et 14% des hommes en sont atteints. Mécanisme : Cette augmentation de risque est liée à la mise en place d’une insulinorésistance, à une production de facteurs de croissance et de cytokines, à l’induction de l’aromatase et l'excès œstrogènes libres, etc. Recommandations ♥ : Maintenir un poids normal (IMC entre 18,5 et 25 kg/m²). Pour prévenir le surpoids et l’obésité : o Pratiquer au moins 5 jours par semaine au moins 30 minutes d’activité physique d’intensité modérée comparable à la marche rapide ou pratiquer 3 jours par semaine 20 minutes d’activité physique d’intensité élevée comparable au jogging, et limiter les activités sédentaires (ordinateur, télévision…). o Consommer peu d’aliments à forte densité énergétique et privilégier les aliments à faible densité énergétique tels que les fruits et légumes. o Surveiller le poids de façon régulière (une fois par mois). o Pour les sujets présentant un surpoids (IMC > 25 kg/m²), une obésité (IMC > 30 kg/m²) ou une prise de poids rapide et importante à l’âge adulte, un accompagnement et éventuellement une prise en charge sont à envisager. c) Viande rouge et charcuterie L’augmentation de risque concerne surtout le cancer du côlon-rectum pour lequel le lien est convaincant. On suppose qu’il y a également un risque lié à d’autres localisations, mais celles-ci n’ont pas encore été démontrées. Exposition : Concerne environ 25% de la population qui consomme plus de 500 g de viande rouge par semaine, et/ou plus de 50 g de charcuterie par jour. Mécanismes : Divers facteurs sont impliqués dont l’augmentation de fer héminique, la formation de composés Nnitrosés et aux amines hétérocycliques (lors de cuisson à forte température). Il est également associé à la forte densité énergétique de ces produits (favorisant la surcharge pondérale). Recommandations ♥ : Limiter la consommation de viandes rouges à moins de 500 g par semaine. Pour compléter les apports en protéines, il est conseillé d’alterner avec des viandes blanches, du poisson, des œufs et des légumineuses. Limiter la consommation de charcuteries, en particulier celles très grasses et/ou très salées. FGSM3 Lyon Est
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En cas de consommation de charcuteries, afin de diminuer le risque de cancers, réduire autant que possible la taille des portions et la fréquence de consommation. d) Sel et aliments salés
L’augmentation de risque est jugée probable pour le cancer de l’estomac (et évidemment le risque cardiovasculaire !). Exposition : Environ 2/3 des hommes et ¼ des femmes consomment plus de 8 g par jour, et ¼ des hommes consomment plus de 12 g par jour. Les aliments particulièrement salés sont le pain, les biscottes, les charcuteries, les plats composés, les fromages, les soupes, les pizzas, les quiches, les sandwichs… Mécanismes : Le sel agit par altération de la muqueuse gastrique, par la colonisation plus fréquente par l’Helicobacter Pylori et par la synergie avec les composés N-nitrosés. Recommandations ♥ : Limiter la consommation de sel en réduisant la consommation d’aliments transformés salés (charcuteries, fromages…) et l’ajout de sel pendant la cuisson ou dans l’assiette. On peut également agir en limitant de façon légale la quantité de sel dans certains aliments en vente, comme dans le pain par exemple. Cependant, pour d’autres types d’aliments, la manœuvre est plus compliquée car le sel agit comme un conservateur (par exemple dans les charcuteries) et est également un rehausseur de goût. e) Compléments alimentaires à base de bêta-carotène L’augmentation du risque est convaincante pour le cancer du poumon chez les personnes exposées à des facteurs de risque (comme le tabac ou l’amiante). Exposition : Concerne environ 27% des femmes qui consomment des compléments alimentaires, ce qui leur apporte une quantité bien supérieure à leurs AJR. Mécanismes : Le bêta-carotène activerait l’effet pro-cancérigène du tabac, avec un effet pro-oxydant. La consommation d’aliments contenant du bêta-carotène diminue le risque de cancer de l’œsophage de manière probable, la supplémentation à forte dose l’augmente. Recommandations ♥ : Ne pas consommer de compléments alimentaires à base de bêta-carotène. Sauf cas particuliers de déficiences et sous le contrôle d’un médecin, la consommation de compléments alimentaires n’est pas recommandée. Il est conseillé de satisfaire les besoins nutritionnels par une alimentation équilibrée et diversifiée sans recourir aux compléments alimentaires. Si la consommation d’aliments contenant du bêta-carotène diminue de manière probable le risque de cancer de l’œsophage, la supplémentation en bêta-carotène à forte dose ne diminue pas le risque de cancers et peut augmenter ce risque dans certains cas.
3) A propos de la prévention tertiaire Concernant le risque de rechute et le risque de second cancer, il y a peu d’études épidémiologiques disponibles. Des études randomisées existent et des études de cohorte sont débutées. Cependant, certains facteurs ont une association suggérée : Notamment les boissons alcoolisées après un cancer des VADS sont associées à une augmentation du risque de seconds cancers (des VADS ou d’autres localisations). De même, l’obésité après un cancer du sein est associée à une augmentation du risque de seconds cancers (du sein et de l’endomètre, mais aussi pour toutes les localisations) Il faut également éviter les compléments alimentaires riches en antioxydants. L’activité physique paraît être un facteur protecteur en particulier dans le cancer du sein et du colon.
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UE 19 – Epidémiologie et facteurs de risque – P. BACHMANN La réalisation d’essais randomisés est difficile est couteuse dans ce cas mais les nombreuses études cliniques sur l’activité physique, en particulier dans le cancer du sein et du colon, objectivent une modification favorable des facteurs de risque, à la fois anthropométriques (excès de poids, tour de taille) et biologiques (amélioration de l’insulinorésistance, des taux hormonaux, de l’inflammation).
Conclusion L’ensemble de ces facteurs convaincants de protection et de risque du cancer sont regroupés en 3 grandes catégories : Réduire la consommation de boissons alcoolisées Avoir une alimentation équilibrée, préférentiellement à base d’aliments d’origine végétale (diminuer la consommation de viandes rouges et charcuteries, de sel et aliments salés, augmenter la consommation de fruits et légumes, limiter le surpoids et l’obésité), et éviter la consommation de compléments alimentaires à base de bêta-carotène Pratiquer une activité physique régulière. On considère qu’environ 1/3 des cancers sont évitables par l’observation au long cours de telles recommandations.
Sur ce schéma, la bande grise (la plus à gauche) représente la proportion non modifiable de l’incidence de cancers dans l’hypothèse d’une modification au long cours de ces facteurs nutritionnels. Cela signifie donc que les deux autres bandes représentent des cancers évitables en tenant compte des recommandations nutritionnelles liées au cancer. (Vous pouvez aller voir ce schéma sur claroline pour mieux visualiser les couleurs) Si ce sujet vous intéresse, vous pouvez vous inscrire sur le site du réseau NACRE, pour recevoir les alertes sur les nouveaux rapports liés à la nutrition ou consulter. http://www.wcrf.org/int/research-we-fund/continuous-update-project-cup (Rapport 1997-2007 et CUP agence internationale de recherche contre le cancer) http://www6.inra.fr/nacre (Inscription gratuite, alerte de rapport, recommandations…) http://www.e-cancer.fr/prevention (Rapport français en cours de réévaluation) FGSM3 Lyon Est
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Réunion de concertation pluridisciplinaire (RCP) Objectifs : • Comprendre l’évolution spontanée habituelle d’un cancer localisé • Comprendre l’évolution spontanée habituelle d’un cancer métastasé • Intégrer les principes généraux de la pluridisciplinarité • Expliquer les raisons poussant les thérapeutes à associer leurs moyens • Expliquer la notion d’Unité de Concertation Pluridisciplinaire • Expliquer la notion de Réseau de soins • Expliquer les éléments pluridisciplinaires d’un protocole thérapeutique • Comprendre les modalités pluridisciplinaires d’un traitement en cancérologie
• Comprendre la nécessité du partage du dossier médical • Comprendre la nécessité d’un langage commun en cancérologie • Expliquer les avantages pour le malade de la pluridisciplinarité • Expliquer les avantages pour le médecin de la pluridisciplinarité • Comprendre la nécessité de la publication des résultats thérapeutiques • À partir d’un exemple de protocole, expliquer la pluridisciplinarité au quotidien • Indiquer les principales sources de protocoles thérapeutiques pluridisciplinaires
I) Prise en charge d’un cancer localisé 1) Traitements Le traitement est presque toujours la chirurgie radical (exérèse à visée curative + curage) qui peut être complétée par de la radiothérapie et par une chimiothérapie adjuvante en cas d’atteinte ganglionnaire. Dès qu’il y a un ganglion atteint, le risque que des cellules se soient disséminées existe. Il faut discuter de la mise en place d’une chimiothérapie adjuvante.
2) Notion de maladie infra clinique Le cancer est dit infra-clinique si le patient n’a aucun symptôme clinique. Ce cancer peut déjà être invasif et les ganglions envahis, il faut alors discuter de la mise en place d’un traitement adjuvant.
3) Notion de traitement adjuvant Le traitement adjuvant (chimiothérapie en général) est basé sur le risque d’évolution vers les métastases. Il est donc utilisé pour prévenir l’évolution et le développement de métastases. L’élément décideur de la mise en place de ce traitement est le ganglion envahi.
4) Surveillance La surveillance est surtout utile pour améliorer la qualité de vie ou prolonger la survie mais est une source de stress régulier pour le patient.
5) Guérison Le médecin ne peut pas être complétement sûr de la guérison d’un cancer, mais il peut dire à un patient qu’il est probablement guéri s’il le pense, même si le risque de se tromper existe.
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II) Prise en charge d’un cancer métastatique 1) Traitement Les traitements sont différents de ceux du cancer localisé : chimiothérapie, hormonothérapie, thérapies ciblées. On retrouve également la radiothérapie et la chirurgie.
2) Notion de sensibilité au traitement Il existe des tumeurs chimio-sensible, radiosensible et hormono-sensible. La tumeur du testicule (tumeur germinale) est l’exemple d’une tumeur chimio sensible, les patients en guérissent quasiment toujours.
3) Traitements palliatifs Quand le cancer ne peut être guéri (métastase ou récidive non-opérable), l’équipe médicale met en place un traitement palliatif visant à améliorer la qualité de vie du patient. C’est un traitement symptomatique (chirurgical, traitement de la douleur…). Pour faire comprendre cela au patient on peut utiliser l’exemple de l’hypertension artérielle : quand on la traite on n’en a plus mais dès qu’on arrête le traitement, l’HTA réapparaît.
III) Principes généraux de la pluridisciplinarité Un médecin ne peut pas tout savoir, il a besoin de l’avis d’autres spécialistes d’où la nécessité de réunions pluridisciplinaires. La pluridisciplinarité est importante dans la prise en charge (PEC) du cancer. Ses principes généraux sont : • Interdépendances des soignants : tout le monde, quel que soit son statut, a sa place et sa responsabilité dans la prise en charge des patients. • Discussion pluridisciplinaire : elle doit réunir au moins trois spécialistes : un radiothérapeute, un chimiothérapeute et un chirurgien au minimum. Il y a souvent également un radiologue, un anatomopathologiste, une infirmière d’annonce… pour avoir une prise en charge la plus globale possible. • Avant toute action : Tous les nouveaux cas (standards ou non...) doivent être traités : on n’a pas le droit de faire d’erreur sur un cas facile ! La cancérologie n’est pas une urgence, le cancer est présent depuis plusieurs années. Donc on ne traite/opère pas en urgence, on réfléchit avant. • Un problème, plusieurs solutions. Il est important d’en discuter et d’oublier son amour propre. • Adapter la réponse aux particularités et aux attentes du patient. Il y a dans le groupe de professionnels quelqu’un qui représente le patient, qui le connaît bien, qui défend ses particularités. • Réseau régional de cancérologie : le but est de coordonner les soins et de définir des protocoles de traitements régionaux (il existe des variations de PEC entre les régions en fonction des équipements matériels des établissements). Il faut avoir une uniformité dans les décisions. La médecine factuelle se définit comme l'utilisation consciencieuse et judicieuse des meilleures données actuelles de la recherche clinique dans la prise en charge personnalisée de chaque patient : • Pertinence : est-ce qu’on a une preuve scientifique montrant que le traitement qu’on veut utiliser est bon ? • Expérience : savoir quelles sont les meilleures données actuelles de la recherche • Préférence : le patient veut une PEC adaptée à son cas particulier A partir de l’analyse du contexte clinique, le médecin pose des questions et pour y répondre, il s’appuie sur les données de la recherche. Le patient reçoit ensuite une information intelligible, compréhensible, ce qui lui permettra d’énoncer ses préférences. La décision se trouve au centre de tout ça. Le patient a le droit de refuser ce qui lui est proposé. A l’heure actuelle l’âge n’est plus un paramètre qui exclut d’emblée la prise en charge chirurgicale ou tout autre traitement cancérologique (oncogériatrie). FGSM3 Lyon Est
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IV) Les outils de la pluridisciplinarité Les abords scientifiques du traitement : • • • • • • •
Classification des cancers (TNM). Il faut savoir précisément de quoi on parle. Dossier médical unique (toutes les infos du patient dans un seul et même dossier pour tous les services) : le dossier n’appartient pas au médecin mais au patient. Collaboration, mise en commun (par l’informatisation, aujourd’hui pb lié à la confidentialité) : pour faciliter l’accessibilité des données. Organisation du traitement : protocoles standards, options, référentiels (ex du cancer du sein : mammectomie ou tumorectomie + radiothérapie) Organisation du suivi : Complications, Survie, Survie sans récidive Prise en compte de tous les aspects : information psycho-oncologie, soins de support, bonne prise en charge sociale, PEC de la douleur assurée ou non, s’il y a plusieurs traitements possibles … Recherche clinique : quand on n’a pas de traitement connu, le patient peut participer à des essais cliniques. C’est un critère de qualité pour les services et profitable pour les patients. (Les patients inclus vivent en général plus longtemps car dans les essais tout est cadré) A Léon Berard, 15/20 % des patients participent à des essais thérapeutiques.
V) Pour bien traiter une maladie, il faut bien la connaître • • • • • •
L’Histoire naturelle (sein, côlon, mélanome...) : chaque cancer est différent. Les examens nécessaires et suffisants. Ex : scintigraphie osseuse pour le cancer du sein mais pas le cancer du colon La définition des stades, ex : TNM Les facteurs pronostics (sein, côlon, mélanome...) Les traitements efficaces (avis des différents spécialistes) Le meilleur suivi, notamment après le traitement (on pense que c’est bien pour le patient, mais c’est aussi une source d’angoisse pour lui et son entourage).
VI) Réalisation pluridisciplinaire du traitement • • • • •
Le traitement doit être adapté à chacune des étapes et avec le bon interlocuteur (radiothérapeute, chirurgien) Les compétences nécessaires doivent être présentes. Il faut savoir passer la main ! ET avant qu’il ne soit trop tard. Il faut former les gens suffisamment pour qu’ils sachent jusqu’où ils sont capables ou non d’aller. C’est un problème majeur en chirurgie. Notion de compétence du médecin Notion de compétence de la structure : une bonne structure aura de bons médecins et plus l’hôpital aura une grande activité dans un domaine, meilleurs seront ses résultats.
Les anglais ont un hôpital « référent », le plus proche de chez eux, duquel ils dépendent s’ils ont besoin de soins hospitaliers. Seulement, les hôpitaux anglais sont très hétérogènes. Cela peut être à l’origine d’une inégalité sociale. On mesure ici la survie globale en fonction de volume du chirurgien et du volume de l’hôpital, c’est-à-dire du nombre de cas. De même, il existe une grande variabilité en fonction du chirurgien sur la conservation sphinctérienne ou non.
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VII) Les référentiels Un référentiel de pratique doit définir clairement les interventions sur la santé qui sont appropriées, celles qui ne le sont pas, et celles pour lesquelles il existe une équivoque. Il est important de le respecter ++. En fonction des maladies, il existe des : • Standards de traitements : c’est à dire que ce sont des absolus, obligatoires à respecter : des méthodes pour lesquelles les résultats sont connus et considérés comme bénéfiques, inappropriés ou nuisibles à l’unanimité. Ce sont l’équivalent d’indications ou de contre-indications absolues. (Ex. radiothérapie préopératoire pour le cancer du rectum). • Options : en cas de deux traitements équivalents : méthodes pour lesquelles les résultats sont connus et considérés comme bénéfiques, inappropriés ou nuisibles par la majorité. Ce sont les équivalents d’indications ou de contre-indications relatives. • Recommandations : quand il n’y a pas de preuve : jugements et choix effectués par la communauté des médecins à partir des différentes méthodes évaluées. Leur but est de classer les différentes méthodes utilisées en fonction du niveau de preuve. Exemples de référentiel : •
• • •
Oncolor (Réseau de cancérologie de Loraine). Il s’agit d’un référentiel très strict des Sarcomes des tissus mous. Une étude franco italienne a été menée pour voir si la PEC conforme au référentiel (imagerie pré opératoire ? preuve anatomopathologique ?) était respectée, et voir si cela avait un impact sur la convalescence. On obtient deux populations : une population qui respecte la PEC du référentiel, l’autre dans laquelle au moins un des critères n’est pas respecté. Il est constaté plus de décès et plus de récidives locales dans la population pour laquelle n’avait pas été respectée la PEC. Le Thésaurus cancérologie de la SNFGE cancérologie digestive Le National Comprehensive Cancer Network (NCCN) Réseau Espace Santé (Réseau de cancérologie Rhône alpes)
VIII) La Réunion de Concertation Pluridisciplinaire • • • • • • • • • • •
Une réunion hebdomadaire (dans les établissements spécialisés en cancérologie il y en a 3 à 5 par jour, car il y a une réunion pour chaque organe, spécialité etc…) En présence de tous les spécialistes (rappel au moins 3 : chirurgien, radiothérapeute, chimiothérapeute mais il y a souvent un anatomopathologiste, des spécialistes d’organes…) Tous les dossiers doivent y être discutés (standard ou non...) A tous les stades de la prise en charge (initiale à métastatique) Une fiche standardisée de présentation du dossier Bien individualiser la question posée Donner la réponse en fonction d’un référentiel (conforme ou non au référentiel) Enregistrer la réponse (formalisation). La traçabilité est indispensable. Définir la stratégie thérapeutique (avec possibles rediscussions) Informer les médecins correspondants (médecin traitant) et le patient Evaluer la RCP (comment l’améliorer…)
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IX) Avantages de la pluridisciplinarité 1) Pour le malade atteint de cancer • • • •
Certitude d’obtenir le meilleur traitement sans querelles d’écoles… Certitude d’avoir toujours LA personne compétente Renforce la confiance dans l’équipe Tout en gardant un médecin responsable.
2) Pour le médecin • • • • •
Collaboration effective entre spécialistes Discussion des dossiers difficiles Lutte contre l’isolement Lutte contre le burn-out par le partage des angoisses et des difficultés Possibilité de prendre en charge a plusieurs un patient difficile
A retenir Le traitement des cancers est multimodal, il fait appel à différents types de traitements locaux ou systémiques qui peuvent être utilisés de manière concomitante ou séquentielle. Il est donc nécessaire de discuter et d’établir la prise en charge du patient au cours d’une réunion de concertation pluridisciplinaire (RCP) constituée d’un minimum de 3 spécialistes : un oncologue, un radiothérapeute, et un chirurgien.
Multidisciplinary approach of cancer patients • • • • • • •
Localized cancer, local relapse Metastatic cancer, metastatic relapse Multidisciplinary patient care Common medical record, regular follow-up Metaphorically speaking, in daily medical practice, we only have a few cartridges available for killing cancer. We therefore need to be very careful not to waste our ammunition. Experienced physicians
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Carers interdependency Regional oncology network Weekly Multidisciplinary meeting Social worker There is no point in talking in terms of medical ethics if there is no scientific treatment and if all the necessary measures are not taken to benefit from scientific progress. Experimental protocol, experimental trial
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L’information du patient, l’annonce
Il faut avoir du tact, être en confiance et ne pas avoir un discours trop technique.
I) Aspects médico-légaux 1) Le droit à l’information du patient Extrait du Code de Santé publique : Art. L. 1111-2 al 1 « Toute personne a le droit d'être informée sur son état de santé. Cette information porte sur les différentes investigations, traitements ou actions de prévention qui sont proposés, leur utilité, leur urgence éventuelle, leurs conséquences, les risques fréquents ou graves normalement prévisibles qu'ils comportent ainsi que sur les autres solutions possibles et sur les conséquences prévisibles en cas de refus. » Nul n’est censé ignorer la loi. Ce texte de loi reprend tout ce qui a été vu à propos de la prise en charge du patient. Il permet au patient de pouvoir participer aux décisions thérapeutiques.
2) L’obligation des médecins (code de santé publique) Le médecin en charge du patient est « celui qui est légalement ou contractuellement tenu d’une obligation particulière [et qui] doit rapporter la preuve de l’exécution de cette obligation. » C’est au médecin de prouver qu’il a bien informé le patient. Exemple : courrier au médecin traitant, discussion de RCP, délai de réflexion entre la consultation et la prise en charge… A propos de tous les médecins prenant en charge le patient : « chaque médecin informe le patient de l’ensemble des éléments relevant de sa discipline, en situant ces derniers dans la démarche générale de soins. Il ne doit pas supposer que d’autres ont déjà donné l’information au patient». ANAES, mars 2000 (Pluridisciplinarité)
3) Code de déontologie Le médecin doit à son patient une information loyale, claire et appropriée (à la personnalité du malade et aux enjeux de la situation).
4) Plan Cancer (dispositif d’annonce) Tout patient atteint de cancer doit pouvoir bénéficier, au début de sa maladie et/ou en cas de récidive, d’un dispositif d’annonce organisé, qui doit être mis en place dans tous les établissements traitant des patients atteints de cancer. FGSM3 Lyon Est
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II) La communication 1) Guide de Buckmann en 6 étapes « Before you tell, ask » Le Pr. Insiste bien sur l’importance, avant tout, de demander au patient ce qu’il sait, afin dévaluer ses connaissances sur sa maladie, et ainsi adapter son discours. C’est un exemple d’annonce en 6 recommandations : 1. Il faut se préparer au contexte. On ne peut pas annoncer une nouvelle aussi importante en faisant d’autres choses en même temps, en étant mal installé. Il faut connaitre le dossier et essayer d’être homogène : c’est le respect des autres. Il faut être un professionnel qui y croit. 2. On commence par des questions ouvertes : d’où vient le patient, que sait-il, qu’a-t-il compris ? Ne pas imaginer que le patient sait tout. Il s’agit alors d’ÉCOUTER. 3. Etre neutre, utiliser les mots du patient, être objectif : le problème n’est ni gros, ni petit, ni dramatique Il faut donc INFORMER, EXPLIQUER. 4. Etape émotionnelle. Elle s’exprime de manière très différente en fonction des personnes. Les patients peuvent faire preuve d’agressivité, mais c’est vis-à-vis de ce qui arrive et non vis-à-vis du médecin. Il faut légitimer les réactions du patient. 5. Après l’émotion et les explications, il faut demander au patient ce qu’il a compris, voire réexpliquer. Il y a souvent des surprises, les patients n’écoutent pas ou interprètent d’une certaine manière du fait de leur état émotionnel. Le médecin doit s’intéresser à toutes les questions mais il n’est pas obligatoire de répondre à tout (« est ce que je vais mourir ? »). Il faut à ce moment QUESTIONER le patient. 6. Il faut expliquer qu’il y a une solution aux problèmes et leur proposer des stratégies thérapeutiques, indiquer que la vie continue. Il faut terminer sur une note optimiste +++.
2) Conseils pour une meilleure communication • • • • •
Aspects émotionnels : Montrer votre disponibilité Souligner les aspects positifs Manifester votre implication personnelle Les problèmes du patient : Ne pas approfondir immédiatement le premier problème évoqué (« est-ce que je vais guérir ? ») Hiérarchiser les enjeux actuels, clarifier les attentes (ex. cancer du rectum : l’enjeu des patients est de ne pas avoir de stomie mais en réalité le premier enjeu est la guérison)
III) La procédure d’annonce depuis 2002-2003 En 1998, la ligue nationale contre le cancer réunit les états généraux des malades (réunion de patients qui ont eu un cancer). A partir de ces réunions, la décision d’améliorer l’annonce du diagnostic de cancer a été prise. La procédure d’annonce est maintenant encadrée par le Plan Cancer (depuis 2000). Le médecin ne doit jamais faire une annonce : • Par téléphone (mais pendant un RDV) • En fin de semaine • En vitesse
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UE 19 – Cancer en pratique médicale – M. RIVOIRE Il existe maintenant des infirmières d’annonce qui discutent avec les patients, répondent aux questions qu’ils n’osent pas poser aux médecins, essaient de dédramatiser la situation, etc.
1) Les temps pour l’annonce
Consultation d’annonce proprement dite : rendez-vous avec le médecin qui fait l’annonce Consultation paramédicale, reformulation (infirmière, secrétaire, personnel formé) Consultation de présentation du plan personnalisé de soins (PPS), souvent après la RCP, important car les patients ont besoin d’échéances précises : o Proposition thérapeutique o Différents bilans prévus o Noms et coordonnées du Médecin Responsable o Coordonnées des associations de patients Temps des soins de support (diététiciens, psychologues, etc.) Temps de relation avec le médecin traitant
2) Concept de l’annonce L’annonce est un évènement défini et limité dans le temps +++. L’annonce n’est pas forcément faite au début de la prise en charge, elle peut intervenir après une intervention chirurgicale diagnostic. L’annonce du diagnostic doit être basée sur des données chirurgicales (CROp), des données anatomo-pathologiques, une concertation pluridisciplinaire. Le patient doit savoir que toutes ces procédures sont obligatoires. Il faut évaluer l’état d’information du patient et l’informer en conséquence. La loi stipule que l’information délivrée au patient doit être claire (le patient doit comprendre tout ce qui lui est dit), loyale (adapter la communication en fonction de niveau du patient) et appropriée (liée à l’état du patient). Le médecin doit reprendre les éléments diagnostiques devant le patient et faire une approche descriptive de la prise en charge. La procédure chirurgicale doit être expliquée ainsi que ce qu’il peut en être attendu (diagnostic, traitement palliatif ou curatif, etc.).
3) Dispositif d’annonce Il est indispensable de pouvoir tracer l’information, de prouver qu’un document explicatif a été remis au patient. Il faut un relai par un tiers, c’est-à-dire qu’il faut demander à une autre personne (soignant, psychologue) de compléter l’information. Il est important pour le patient d’être accompagné en consultation pour avoir une personne de confiance qui en cas de problème pourra prendre une décision. L’information se porte à plusieurs.
Le contenu de la consultation : Compréhension du malade Le malade exprime son « état d’âme » Un grand besoin d’écoute et de partage
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Actuellement, il existe deux types de prise en charge qui s’opposent, celle dite « traditionnelle » et celle dite « centrée sur le patient ». On tend à adopter cette dernière, qui se veut à l’écoute du patient qui participe à sa prise en charge thérapeutique. Cette nouvelle prise en charge considère le patient dans sa globalité en tant qu’entité à part entière.
A retenir
L’information est un droit du patient (code de santé publique). Si le patient demande son dossier on doit lui donner. Elle doit être dispensée par tout médecin. Elle doit être claire, loyale et appropriée (code de déontologie). L’annonce est un temps fondamental de la prise en charge des patients. Elle doit être menée avec professionnalisme (savoir-faire et savoir-être). L’organisation du dispositif d’annonce a été définie par le Plan Cancer 1 (mesure 40). Il existe différents temps à la consultation d’annonce.
En Anglais: Announcing diagnosis
Diagnosis announcement consultation 50% survival rate The patient flees from the truth The patient avoids asking some questions The truth for the patient is not the whole truth and nothing but the truth Ambivalence in the patient’s vision of the ‘truth’ Adaptation difficulties Information given to patients should be clear and, at the same time with a hint of hope To encourage the patient to accept the appropriate treatment Explore what the patient has understood about his illness
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Soin de support et psycho-oncologie I) Soins de Support - Définition Les soins de support correspondent à l’ensemble des soins dont la cible est la qualité de vie, la tolérance au traitement, l’adaptation à la situation. Il s’agit de la globalité du soin autour de l’axe de discipline qu’est la cancérologie. Ils prennent en compte à la fois le patient et son entourage. Ils se distinguent des soins spécifiques du cancer (chirurgie, chimiothérapie, radiothérapie). On dit supportive care en anglais. Selon la DHOS (Direction Générale de l’Offre des Soins) ce sont « l’ensemble des soins et soutiens nécessaires aux personnes malades tout au long de la maladie conjointement aux traitements spécifiques oncologiques s’il y en a. » D’après une circulaire de 2005, les objectifs des soins de support sont de diminuer les effets secondaires des traitements et des effets de la maladie et d’assurer une meilleure qualité de vie aux patients ainsi qu’à leurs proches ; que ce soit sur les plans physiques, psychologique et social ; en prenant en compte la diversité de leurs besoins. Les soins de support sont devenus une priorité dans le cadre du Plan Cancer (tous les 5 ans, le gouvernement détermine les priorités liées à l’oncologie). Ils s’intègrent dans une approche globale de la personne malade. C’est une prise en charge biopsychosociale. Il s’agit d’une coordination des compétences qui sont au service du patient. Il faut faire travailler des professionnels de différentes spécialités, de différents statuts (prise en charge de la douleur, les soins palliatifs, les kinésithérapeutes, les psycho-oncologue…), on parle de pluridisciplinarité.
II) Psycho-oncologie- Définition La discipline comporte 2 axes majeurs : Tout d’abord la prise en charge des réactions psychologiques et sociales des personnes confrontées au cancer. Ensuite comprendre les facteurs psycho-sociaux influençant l’apparition, la récurrence du cancer ou encore la survie des patients. Les Champs d’actions possibles de la psycho-oncologie : La psychologie médicale : o Travail sur la relation médecin/malade. o Comprendre la représentation et l’adaptation à la maladie propre à chaque patient. o Légitimer la souffrance psychique dans le contexte de cancer. o Perspective institutionnelle.
La psychiatrie de liaison : o Nécessité d’adapter les soins pour les patients souffrant de troubles psychiatriques. o Prévenir et accompagner les décompensations psychiatriques
1) Travail d’élaboration psychique Le cancer n’est pas une maladie comme les autres et nécessite une approche particulière.
Il a y a un travail d’élaboration autour du traumatisme que représente le cancer. Le cancer bouleverse la vie des patients qui doivent apprendre à composer avec. C’est aussi l’occasion de travailler sur des traumatismes anciens qui n’ont pu être mentalisées jusque-là. En effet certains traumatismes ressurgissent au moment de la prise en charge du cancer. Il faut accompagner et observer le patient qui négocie la situation de souffrance dans laquelle il se trouve. Les patients ont besoin d’une écoute bienveillante et d’un espace où mettre en œuvre ce travail d’adaptation à la maladie. Il est nécessaire de mettre en place un accompagnement psychologique pour les fins de vie mais aussi pour tout le processus de réhabilitation.
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UE 19 – Cancer en pratique médicale – A. COUILLET 2) Le traumatisme de l’annonce C’est tout d’abord une confrontation à l’impensable, à sa propre mort. (Freud : on sait tous que l’on va mourir mais on fait comme si cela n’allait pas nous arriver, on ne veut pas y penser). Le cancer fait effraction dans la vie du sujet qui provoque un bouleversement identitaire et des angoisses de mort. Certaines personnes vont être bloqués par l’annonce, se braquer et développer un état de déni de la maladie qui peut aller jusqu’au refus de soins et de traitement. Il faut donc les aider à dépasser ce stade. De plus, l’annonce peut faire écho à un traumatisme antérieur qui se réveille à ce moment précis. (Viol chez les femmes). La préparation de la consultation d’annonce est donc primordiale. (Généralement elle dure au moins 40 min, il faut prendre le temps nécessaire avec chaque patient).
3) Donner du sens à la maladie Les patients se sentent complètement impuissant face à l’annonce de la maladie. Il faut donc réduire ce sentiment. Face à cette impuissance les patients essayent légitimement de trouver un sens à ce qui leur arrivent (pourquoi moi ?). Il y a un sentiment d’injustice. Ils composent avec leurs croyances et les représentations individuelles et collections de la maladie. On assiste souvent à un sentiment de culpabilité et d’attribution interne (« je suis responsable ») de la maladie ou externe (« c’est le stress causé par ma mère »). Exemple d’une dame ayant un cancer du col de l’utérus et qui s’est convaincue que c’était de sa faute car elle avait fait une IVG quelques années auparavant (sensation de punition). Dans un cas comme celui-ci il faut rassurer le patient en lui disant qu’il est normal de vouloir chercher un sens à la maladie. Il est donc important de comprendre quel sens le patient met derrière sa maladie car sa théorie est en générale bien loin de la théorie médicale !
4) Faire face à la maladie
Le patient met en place un processus d’adaptation = principe de résilience.
L’adaptation est dynamique et plurifactorielle. Le but est de préserver au mieux l’intégrité physique et psychologique du sujet. L’adaptation est fonction des ressources du sujet. On parle de stratégie d’ajustement : coping. Cela correspond aux mécanismes de défense que le patient va mettre en place. (Exemple : déni, déplacement des angoisses sur quelques chose de plus supportable.)
5) Atteinte de l’image du corps L’image du corps est la perception, représentation que l’on se fait de soi et est différent du simple schéma corporel. Notre vision est très subjective. Certaines parties du corps ont une signification symbolique (par exemple testicule et masculinité). Certaines déformations du corps sont vécues comme de véritables traumatismes. Ex une grosse tumeur au niveau du sein ou la perte de cheveux suite à une chimiothérapie sont vécues comme une atteinte à la féminité. La blessure organique renvoie à une blessure narcissique (atteinte du moi et de l’égo).
6) La reconstruction A l’heure actuelle près de 50% des cancers sont guérissables. Mais même une fois le cancer « guérit », une longue période de reconstruction psychologique est nécessaire.
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UE 19 – Cancer en pratique médicale – A. COUILLET En effet, après un cancer il a y reprise du travail (92% des femmes reprennent leur activité professionnelle après leur cancer du sein) et il faut faire face aux regards des autres. Que raconter à ses collègues ? Comment expliquer ce que l’on a vécu ? Il y a la peur de la stigmatisation. Les proches également ne savent pas toujours comment se positionner. Il persiste des symptômes résiduels, on ne retourne jamais à l’état antérieur de la maladie : asthénie, troubles cognitifs (des neuropsychologues peuvent aider à des entraînement cognitifs) , douleurs chroniques, cicatrices dues à la chirurgie, dysfonctionnements hormonaux (dues aux hormonothérapies) qui peuvent engendrer une stérilité, crainte de la rechute… Il n’est pas rare d’observer un effondrement psychologique après l’arrêt des traitements, même si la personne s’est montrée très combative pendant la durée des soins. Les patients s’habituent à leurs traitements quotidiens, aux rendez-vous réguliers à l’hôpital…et l’arrêt des soins peut être vécu comme un abandon. Il y a également la difficulté d’ordre professionnel il est compliqué de mettre sur un CV que l’on a eu un cancer pour expliquer la période sans travail. C’est aussi un frein financier pour obtenir des prêts. Nouvelle loi (c’est le droit à l’oubli) avec non obligation de déclarer un cancer qui date de plus de 5 ans pour une demande d’assurance.
III) Troubles psychiatriques 1) Troubles de l’adaptation L’augmentation du stress chez les personnes atteintes de troubles psychiatriques peut provoquer un débordement de leurs ressources qui impacte fortement la prise en charge en oncologie :
Symptômes anxieux
Syndromes anxio-dépressifs
Effondrement dépressif
Il faut faire une évaluation complète : premier épisode ou atcd, nombre de symptômes, intensité, permanence du trouble, caractère inhabituel, conséquences relationnelles, durée…
2) La confusion mentale Les patients ont une atteinte organique à masque psychiatrique. C’est-à-dire une manifestation de symptômes psychiatriques due à un dérèglement somatique (exemple troubles ioniques). Elle se manifeste chez des patients n’ayant pas forcement d’antécédent psychiatriques. La confusion mentale est plus fréquente chez les personnes âgées en post opératoire. L’installation est brutale, rapide et transitoire. Quelques exemples de symptômes : Troubles de la vigilance Troubles cognitifs (désorientation temporo spatiale) Symptomatologie polymorphe
Agitation psychomotrice Délire de persécution Hallucinations
Il faut rechercher l’étiologie (trouble métabolique, corticoïdes…) qui est souvent plurifactorielle. Il est important d’expliquer à l’entourage que le patient n’est pas atteint de vrais troubles psychiatriques. On peut envisager des traitements à court terme pour calmer le patient si nécessaire.
3) Décompensation de pathologies psychiatriques La décompensation concerne les patients souffrants de pathologies psychiatriques lourdes moins suivis sur le plan somatique. Par exemple les traitements oncologiques à base de corticoïdes peuvent décompenser (augmenter) la pathologie psychiatrique. Il y a une double crainte, de la part des patients qui ont une mauvaise image des hôpitaux mais aussi une crainte de la maladie mentale chez les soignants. Il faut donc bien connaître les caractéristiques de ces maladies pour : Adapter les soins aux patients Aider les soignants à soigner Comprendre les réactions possibles Eviter les contre attitudes FGSM3 Lyon Est
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UE 19 – Cancer en pratique médicale – A. COUILLET Exemples de pathologies : (les pathologies psychiatriques sont référencées dans le DSM V)
Troubles de la personnalité : organisation rigide de la personnalité (patient Border Line). On peut avoir des troubles obsessionnels qui complexifient la mise en place du traitement. Ces patients ont besoin de tout contrôler et il faut passer du temps à leur expliquer l’organisation de leur traitement. Troubles psychotiques chroniques : schizophrénie, trouble bipolaire. Par exemple il sera difficile de poser une chimiothérapie à un patient schizophrène qui ne supportent pas le contact et peut le rendre agressif.
Certains patients peuvent développer un syndrome dépressif suite à l’annonce de la maladie. Ils présentent des crises d’angoisses, une perte de contrôle avec l’impression de devenir fou, troubles du sommeil… (il faut au moins 15 jours de symptôme pour déclarer la dépression). Il est important de recevoir également l’entourage pour avoir leur point de vue lors de l’interrogatoire.
3) Les résistances à voir le psy Voir un psy est souvent vécue comme un signe de faiblesse. « Je n’ai pas besoin, je suis fort », « je ne suis pas fou ». Il faut du courage pour oser demander de l’aide. Pourtant le psychiatre ne voit pas que des gens fous ! En France 1/3 de la population à recours à un moment donné une consultation psy. De plus les patients craignent d’être confronté à leurs angoisses. Il y a aussi une appréhension de se voir prescrire des psychotropes (antidépresseurs, benzodiazépines). Il faut effectivement être prudent sur la prescription des psychotropes (problème de dépendance) mais sur une courte durée ils peuvent être utiles pour les patients. Il faut donc travailler sur l’image du psychiatre et aborder directement les patients. Questionner et demander au patient « qu’est-ce qui vous gêne » suffit souvent à vaincre la résistance.
4) Relation médecin malade : Nécessite une relation de confiance réciproque pour la remise d’informations et la prise de décisions médicales. Elle se fonde sur un modèle de « décision partagée ». Pour finir, elle nécessite un accompagnement par le psycho-oncologue qui est possible lors des consultations d’annonces ou pour des prises de décisions complexes.
Quelques exemples de cas :
Madame F, 80 ans, en rémission de son cancer du sein apprend qu’elle souffre de dépression. Elle a pourtant été battante pendant toute la durée du traitement mais elle fait un contre coup de la fin des soins. Découverte d’un trouble du spectre de la bipolarité au cours de la prise en charge d’un myélome. Ce monsieur n’avait jamais vu de psychiatre auparavant et ses épisodes maniaco-dépressifs n’ont pas été diagnostiqué comme tel. Décompensation maniaque dans les suites d’une chirurgie certainement due à l’anesthésie générale.
Références • • • •
S Dolbeault, S Dauchy, A Brédart, SM Consoli. La psycho-oncologie. John Libbey Eurotext Paris 2007 D Razavi, N Delvaux. Précis de psycho-oncologie de l’adulte. Masson 2008 http://www.e-cancer.fr/ http://www.afsos.org/les-soins-de-support/mieux-vivre-cancer/
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Hospitalisation à domicile et prise en charge sociale Ce que le médecin généraliste doit savoir en oncologie
Introduction Tout médecin devrait savoir comment s’organisent les soins à domicile, il y a des enjeux économiques et de société. Les patients sont plus souvent pris en charge en ambulatoire, en parallèle d’hospitalisations qui sont techniques et spécifiques. Les soins sont alors de plus en plus gérés à domicile. Il y a plus de 300 HAD en France. Elles ont toutes une organisation assez spécifique avec des modalités de fonctionnement variables. Les objectifs principaux restent les mêmes : Éviter les allers-retours à l’hôpital, ce qui permet de soulager les patients avec des parcours de soins complexes. Réserver les hospitalisations pour des cas graves ou spécifiques. On ne peut pas accueillir tout le monde à cause du manque de lits à l’hôpital. On ne peut évidemment pas tout faire à domicile : la poly-chimiothérapie ou les chimiothérapies à conduire sur plusieurs jours ne peuvent être suivies qu’à l’hôpital. De même, les soins nécessitants une équipe infirmière 24/24h ne sont pas possibles non plus.
I) Historique Les prémices de la prise en charge à domicile des soins en cancérologie concernent la chimiothérapie. L’externalisation des soins en cancérologie vient des États-Unis dans les années 1990. Une étude avait été faite pour recueillir l’avis des patients sur la nécessité de faire la chimiothérapie à l'hôpital (Trouvaient-ils leur compte ? Avaient-ils envie de venir toutes les semaines à l'hôpital ? ...). Finalement, 50% des patient étaient pour et 50% étaient contre la chimiothérapie à l’hôpital. La chimiothérapie à domicile est alors devenue courante en France et elle évolue dans un cadre très structuré. Le Département de Coordination des Soins Externes et des Interfaces (DCSEI) du Centre Léon Bérard gère les SAD (Soins à domicile) et HAD (Hospitalisation à domicile) depuis plus de 20 ans. En 1995, il a été demandé une “Externalisation des patients” pour des raisons de fermeture de lits. En effet, on tend vers une médecine ambulatoire où on réserve les lits à des cas plus ciblés. Aujourd'hui, 160 patients de l’hôpital sont en HAD et 460 patients disposent des soins à domicile. Lorsque le projet a été mis en place, le début de la prise en charge a comporté des soins qui n’étaient pas très techniques (hydratation) : on parlait plus de “soins à domicile” que “d’hospitalisation à domicile”. Puis le besoin d’externalisation des patients s’est fait de plus en plus ressentir et on a commencé à faire des soins plus techniques comme des chimiothérapies, des antibiothérapies, et même des ponctions de pleurex (drain thoracique en place) pour des pleurésies récidivantes (les ponctions pleurales ne sont pas réalisées à domicile car nécessitent une radio de contrôle) … En parallèle des soins techniques il y a tout un accompagnement de structure avec un passage des infirmiers du SSIAD (Service de Soin Infirmier À Domicile) 2 à 3 fois par jour, une mise à disposition de matériel médical, d’aides psychologiques…
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II) Hospitalisation à domicile (HAD) 1) Types de prise en charge La prise en charge est très large : des soins de base jusqu’aux gestes les plus techniques. Profil des patients pris en charge en HAD: 20% en chimiothérapie 30% en soins de support intercurrents (pansements, pleurx= drainage pleural ) 50% en soins palliatifs Chimiothérapie La chimiothérapie à domicile est une pratique devenue courante en oncologie, mais elle nécessite une articulation continue du soin pour que tout se passe bien.
Étapes de la chimiothérapie à domicile : Validation de la chimiothérapie par l’oncologue Fabrication et conditionnement à la pharmacie Envoi au domicile de manière sécurisée Évaluation clinique et biologique (leucocytes, plaquettes…) du patient) effectuée par le médecin traitant lorsque cela est possible Le médecin traitant est en lien avec le centre de soins et donne le feu vert pour démarrer la chimiothérapie Pose de la perfusion pour administrer la chimiothérapie par l’infirmière. Stockage des déchets de façon spécifique à part des autres déchets, et création d’un réseau de récupération des déchets particulier Suivi de dispositif spécifique On effectue aussi de plus en plus à domicile la prise en charge de plaies complexes en chirurgie vasculaire. Notamment la VAC-thérapy (Vacuum Assisted Closure) : pour que ces plaies cicatrisent il faut mettre en place un appareillage technique qui délivre une pression négative continue au niveau de la plaie afin de faciliter la cicatrisation (cette technique n’est pas seulement utlisée en chirurgie vasculaire).
Soins palliatifs Gérer un soin palliatif à domicile, en particulier dans les cas de cancers métastatiques, est assez courant. On suit les patients de manière chronique : le suivi est personnalisé et adapté.
o o o
On va prendre en charge : la douleur les symptômes liés au cancer, la dénutrition avec des alimentations parentérale pour éviter au patient de perdre trop de poids et lui éviter une fragilité liée aux traitement lourds.
/!\ L’alimentation parentérale favorise le risque d’infections, elle nécessite donc un suivi médical avancé et un suivi clinique rapproché. Prise en charge antalgique complexe Les traitements antalgiques sont aussi beaucoup gérés à domicile. Ce sont surtout des traitements continus comme des pompes de morphine.
Traitements continus (antibiothérapie)
L’antibiothérapie se déroule très bien à domicile. Par exemple sur une thrombose septique ou une voie centrale infectée on va faire une antibiothérapie qui dure 6 semaines : on ne va pas garder le patient aussi longtemps à l’hôpital ! Les patients en chimiothérapie sont en aplasie. Auparavant, une aplasie fébrile nécessitait une hospitalisation le temps d’effectuer les prélèvements et de faire l’antibiothérapie. Aujourd’hui, les gens qui arrivent avec une aplasie fébrile repartent pour la majorité du temps chez eux avec un traitement adapté. FGSM3 Lyon Est
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UE 19 – Cancer en pratique médicale – M-P. STEINEUR Le score de MASCC (Multinational Association of Supportive Care in Cancer) discrimine les patients à faible risque de complication en cas de survenue d’une neutropénie fébrile dans un contexte néoplasique. Il est utilisé pour identifier les patients qui pourront être traités chez eux, ou bien à l’hôpital s’il y a présence de signes de gravité. NB: Il y a moins de chance d’être en contact avec des bactéries chez soi plutôt qu’à l’hôpital !
2) Organisation a) Générale L’HAD est une organisation très spécialisée, libérale et régionale : le domaine d’action est donc très large. La mise en place d’une HAD peut être très rapide (à peine quelques heures). Une HAD peut aussi s’enlever très vite : par exemple, à la fin d’une antibiothérapie, on rebascule vite sur un mode de suivi standard à l’hôpital Ce n’est pas le patient qui va dans un service mais le service qui va au patient. L’HAD a toujours besoin d’être en lien direct 24/24h avec l’hôpital ou le centre qui suit le patient. Les infirmières doivent pouvoir se déplacer au domicile du patient de jour comme de nuit. Il y a une réactivité du soin qui est extrêmement rapide.
Une équipe logistique est formée pour coordonner les soins, elle est composée : Des infirmières qui chaque jour suivent les réactualisations des soins, les modifications... De médecins Du médecin traitant quand c’est possible car celui-ci a une meilleure connaissance de son patient. Malheureusement, ce n’est pas le cas partout parce qu’il y un certain nombre de médecins qui ne sont pas encore formés aux soins palliatifs. Des assistantes sociales
L’organisation sociale est un réel souci : en effet un suivi social est très important pour les patients âgés, les patients très peu entourés, ou de moins en moins autonomes. L’aide d’assistantes sociales est précieuse, elles gèrent la mise en place et suivent le dossier des patients. La famille joue aussi un grand rôle : il est exceptionnel qu’une personne bénéficiant de l’HAD vive seule. NB: La tarification à l’activité pose des problèmes économiques (pas développé dans ce cours) b) UGEI (Unité de Gestion des Entrées Imprévues) A Léon Bérard, une UGEI (Unité de Gestion des Entrées Imprévues) ou unité post urgences reçoit les urgences des patients hospitalisés à domicile. Cette unité permet de gérer les problèmes aigus qui ne pourront pas être pris en charge à la maison. Au Centre Léon Bérard 25 à 30 patients par jour y sont reçus et 84% d’entre eux rentrent à leur domicile dans la journée. Dans cette unité, lorsqu’elle est nécessaire, la durée d’hospitalisation est brève (3-4 jours) en comparaison à une hospitalisation standard. On hospitalise les patients le temps qu’ils aillent mieux lorsque le retour n’est pas possible dans la journée (environ 16% des patients).
3) Échecs de l’HAD En oncologie, la durée moyenne d’une HAD est d’environ 1 mois avec une grande disparité. Certaines personnes en bénéficient plusieurs mois tandis que certains patients vont l’avoir seulement 2 jours souvent à cause d’un échec, ils doivent alors retourner à l’hôpital. Échecs de l’HAD :
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Urgence médicale vraie : l’HAD n’est pas adaptée et le patient doit être hospitalisé pour recevoir des soins techniques Urgence médicale vécue Contrôle de symptômes Projet thérapeutique insuffisamment élaboré Intolérance psychologique : la peur de ne pas avoir une équipe à disposition 24/24h autour de soi peut être une angoisse chez certaines personnes
L’HAD nécessite une quantité importante de matériel médical à la maison et cela peut faire peur. Les personnes vivant avec une famille nombreuse dans des petits appartements peuvent vite être “envahis” par le matériel et l’HAD peut devenir compliquée. De plus, certains patients ne se voient pas rester à domicile lorsqu’ils deviendront trop dépendants ou lorsqu’ils seront en fin de vie afin d’éviter à leur famille de les voir ainsi. Il faut anticiper ce problème avec toute l'équipe de soins pour rediriger ces patients vers les unités de soins palliatifs au moment adéquat.
4) Perspectives a) La transfusion à domicile Les transfusions à domicile ont disparu à Lyon en 1989. En effet, il fallait une présence médicale assurée par des médecins venant des centres de transfusion à domicile le temps de transfuser le patient. Aujourd’hui il y a de nouveau réflexion autour de ce sujet, la transfusion étant un traitement de base en hématologie et en cancérologie. Les caisses de sécurité sociales ont envie de relancer la mise en place de ce soin en HAD. b) Une maison de répit ouverte en septembre 2018 Un autre problème a été soulevé, il faudrait la possibilité d’une prise en charge de “répit” pour que la famille puisse souffler quand les soins du patient sont très lourds. Début septembre a été ouvert à Écully une “Alternative à l’HAD”, les gens en HAD ont un potentiel de jours de répit sur l’année qu’ils organisent comme ils le souhaitent. Les patients ont alors la possibilité d’être acteurs dans leur parcours de soin en organisant ces périodes en fonction de leur vie de famille. c) Vers une HAD séquentielle Aujourd’hui, avec l’évolution des chimiothérapies et des traitements en ambulatoire, on évolue vers des HAD séquentielles : par exemple, les patients seront en HAD 4 jours tous les 15 jours. /!\ Il peut être difficile pour les patients de savoir s’ils sont en période d’HAD ou pas. NB : La chimiothérapie à domicile a tendance à s’étendre à l’heure actuelle à la suite de l’avancé scientifique et à la découverte de traitements spécifiques. En effet l’association de la chimiothérapie et des nouveaux traitements prometteurs sera moins contraignante et sera sans doute plus facile à mettre en place à domicile.
Conclusion
Continuité des soins Coordination spécialisée quel que soit le mode de prise en charge Réorganisation de l’hôpital Alternative à l’hospitalisation Impact économique majeur Chimiothérapie à domicile
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Chirurgie des cancers Ce cours porte sur le traitement des tumeurs solides pour lesquels la chirurgie est envisageable. Pour les tumeurs hématopoïétiques les traitements seront seulement médicamenteux (chimiothérapie et radiothérapie). /!\ Des images supplémentaires sont disponibles sur le diaporama de l’enseignant. Objectifs : Connaître les principes de discussion pluridisciplinaire préopératoire Comprendre l’importance de la connaissance préopératoire de l’histologie Comprendre l’importance de la préparation préopératoire du patient Décrire ce que doit comprendre un compterendu opératoire en cancérologie Décrire les principes généraux de la biopsie chirurgicale de diagnostic Expliquer les principes de la chirurgie radicale Comprendre l’intérêt et les buts du curage ganglionnaire Expliquer les principes de la chirurgie limitée
Expliquer les principes de la chirurgie de réduction tumorale Expliquer l’intérêt de la chirurgie d’évaluation Comprendre les principes de la chirurgie curatrice des métastases Comprendre les principes de la chirurgie des récidives Comprendre les principes de la chirurgie palliative (métastases osseuses, dérivations, propreté) Expliquer l’intérêt de la chirurgie de reconstruction Expliquer l’intérêt de la chirurgie à visée hormonale Expliquer l’intérêt de la chirurgie de la douleur
Ce cours s’inscrit dans le cadre de l’item 291 de l’ECN : « Traitement des cancers : chirurgie, radiothérapie, chimiothérapie, hormonothérapie. La décision thérapeutique multidisciplinaire et l’information du malade »
Introduction Quand on est traité en France, la survie à 5 ans sans récidive approche les 60% chez les femmes et les 50% chez les hommes. Ce n’est pas synonyme de guérison, puisqu’on peut avoir une récidive après 5 ans.
La « guérison » est due à : 60% chirurgie seule (elle est indiquée pour les cancers localisés et donc sans extension). 25% radiothérapie seule ± chirurgie. (Radio préopératoire /?\ Avant les années 1980, les patients pour réduire la taille de la tumeur) atteints du cancer du testicule 10% chimiothérapie ± chirurgie ± radiothérapie. mourraient dans les 6 mois. A partir des 5% chimiothérapie seule : le cancer du testicule (tumeur années 1980-1990, avec le germinale) est le seul cancer solide qui guérit presque développement du « platine » tout le toujours par la chimiothérapie seule. Les hémopathies se monde guérit. traitent également par chimiothérapie seule mais ce ne sont pas des tumeurs solides.
La chirurgie nécessite une expertise technique mais également une évaluation individuelle et globale (techniques, résultats). Dans les pays à haut niveau social, comme les pays anglo-saxons, les gens veulent des résultats. C’est bien de se faire opérer par un chirurgien, mais quels sont ses résultats à 5 ans ? En France, l’évaluation et la publication des résultats de l’équipe, de l’hôpital, etc., commence à se développer.
I) Généralités Connaître l’histoire naturelle du cancer est essentiel pour comprendre la chirurgie des cancers, et de manière générale leur traitement. A une maladie donnée et à un stade donné, on aura un type de traitement qui ne sera pas valable pour un autre stade.
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La chirurgie des cancers
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UE 19 – Traitement des cancers – M. RIVOIRE 1) Place de la chirurgie dans le traitement du cancer La chirurgie des cancers est utilisée dans plusieurs buts : Diagnostique (rare aujourd’hui car il existe d’autres moyens diagnostiques moins invasifs, comme la biopsie sous guidage radiologique) /?\ Exemple du cancer du rectum : Pronostique (exemple : curage ganglionnaire). Ce qui inquiète principalement les patients atteints Thérapeutique (curatif, palliatif, …) +++ de ce cancer, c’est la peur d’avoir un anus artificiel (colostomie, poche). L’objectif du médecin (guérir, Les objectifs en sont : qui est le premier objectif si possible) peut donc ne Assurer la guérison. pas être en phase avec celui du patient (image Augmenter la durée de vie (quantité de vie) corporelle) et il faut donc essayer de présenter au Préserver la qualité de vie : o Fonctionnelle (ex. douleur, handicap patient les priorités dans le bon ordre. En d’autres termes, à quoi bon conserver son anus et éviter la suite à la chirurgie) « poche » si cela conduit à une récidive et au décès. o Image corporelle
2) Intégration dans une stratégie pluridisciplinaire Le traitement s’inclue forcément dans un plan thérapeutique : adopter la meilleure attitude face à la maladie. Il faut envisager toutes les possibilités : peut-on faire mieux d’une autre manière ? Peut-on faire aussi bien à moindre coût pour le patient ? Il faut comparer les différentes thérapeutiques possibles (chirurgie, chimiothérapie, radiothérapie) : c’est là toute l’importance de la pluridisciplinarité en cancérologie. Ceci doit être fait a priori et non pas le lendemain de l’intervention. Ex : Une patiente est opérée alors que le diagnostic n’a pas été déterminé. Au cours de l’opération, on lui retire le rectum et les organes génitaux internes (utérus et annexes) en la traitant pour un cancer du rectum, or il s’agissait d’un cancer de l’ovaire pour lequel le traitement n’est pas adapté. Ces choix, ces décisions, doivent être validés dans une Réunion de Concertation Pluridisciplinaire (RCP). Il est possible d’être en opposition les uns par rapport aux autres. Il faut également connaître au préalable l’anatomopathologie. On définit alors un protocole chirurgical précis qui doit être respecté. Si on n’a pas de diagnostic, on peut faire des hypothèses qu’il faut expliquer au patient. /!\ On n’opère jamais sans avoir la preuve de la présence du cancer : examen anatomopathologique nécessaire. La RCP est une instance de décision obligatoire, inscrite dans le plan cancer ! Il y a trois décisions qui peuvent être prises à l’issue de la RCP : Protocoles standards (référentiel) : pour les cancers communs (ex. sein, côlon) Exemple de référentiel – ONCOLOR : il s’agit du référentiel présenté dans la diapo pour l’exemple du cancer du poumon. Il est très généraliste et très didactique. Il existe de nombreux autres référentiels. Essais thérapeutiques : le taux d’inclusion en France est de 10% (pour les établissements spécialisés dans le cancer, on a un taux d’inclusion de 15 à 20%). Cela peut amener un gain en termes de prise en charge grâce à un respect très strict des organisations. Protocoles personnalisés : ils sont mis au point en discutant avec le patient lorsque l’on ne peut pas proposer un protocole standard ou l’inclure dans un essai thérapeutique.
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UE 19 – Traitement des cancers – M. RIVOIRE 3) Planification de l’acte chirurgical Il faut un chirurgien spécialisé en cancérologie faisant partie d’une équipe pluridisciplinaire et avec une bonne connaissance des atouts et des limites de la chirurgie. Il faut également une préparation du patient, par l’information et la préparation physique, et de l’équipe, au geste chirurgical. Cette équipe doit aussi pouvoir gérer les suites post-opératoires (les complications, le retour à domicile, le retour à la vie professionnelle) car le risque de décès est surtout dû aux suites post-opératoires et aux complications (embolie pulmonaire, IDM…) ainsi qu’à la prise en charge de celles-ci. Aux Etats-Unis, ils s’intéressent à la mortalité opératoire (depuis les années 2000). Quelle est la mortalité en fonction du nombre d’interventions/an de l’hôpital ? On note que plus le geste chirurgical est difficile à réaliser, plus on observe des disparités en termes de mortalité entre les hôpitaux qui effectuent souvent ce geste, et donc capables de faire face aux complications, et ceux qui l'effectuent plus rarement. Pour les interventions lourdes comme les œsophagectomies et les pancréatectomies on a 1/5 de risque de décéder contre 1/10. Ceci entraîne une centralisation des actes médicaux aux Etats-Unis. Les grosses structures, bien organisées et avec un nombre majeur d’interventions présentent une mortalité plus faible (polyfactorielle).
4) Le compte-rendu opératoire
Il s’agit d’un document essentiel du dossier de cancérologie qui contient : Identification du patient. Arguments de l’indication opératoire et définition des objectifs de l’intervention. Particularités pathologiques associées. Constatation diagnostiques peropératoires, description détaillée des lésions observées (taille, localisation, structures de voisinage, ganglions de proximité, …). Description du geste réalisé et des gestes associés. Particularité du geste opératoire (ses limites, …). Bilan des lésions résiduelles. Appréciation objective sur la qualité de l’intervention (R0, R1, R2) : c’est une obligation.
(Points rouges) (Contour du cercle « cancer »)
Dès que possible, il faut qu’on s’entraîne à lire ces comptes-rendus.
5) Préparation de l’étude anatomopathologique Il s’agit également d’une étape importante de la prise en charge chirurgicale du patient. Il doit préciser: Identification du patient. Données concernant le geste chirurgical. Degré d’urgence. Recueil dans des containers adaptés (ne pas étiqueter le couvercle mais bien le flacon). Pièces bien orientées : càd Ht, Bs, D et G (au cas où il y a des marges envahies de lésions microscopiques, il faut pouvoir les retrouver au niveau du site opératoire) et non fragmentées (une pièce fragmentée est directement considérée R2). Pièce fraiche transmise immédiatement ou dans du formol, sous peine de dégradation des protéines qui ne seront plus identifiables. Demandes de techniques spéciales (biologie moléculaire, banque tissulaire après cryoconservation pour des études ultérieures, …) Notion de prise en charge personnalisée +++. Les prélèvements sont de plus en plus centralisés également dans des Centres de Ressources Biologiques (CRB). FGSM3 Lyon Est
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II) Chirurgies dans la prise en charge des cancers 1) Chirurgie préventive Le but est qu’il y ait le moins de cancers possibles. On opère des états « précancéreux » dans un cadre de prévention secondaire. Le traitement à ce stade doit être limité (socialement acceptable), non-mutilant et efficace à 100%. /?\ La mastectomie est une chirurgie préventive pour les Indications : femmes ayant une mutation BRCA1 et BRCA2 causant une Carcinome In situ. prédisposition génétique au cancer du sein. Cependant cette Cancer Intra-Canalaire (CIC) du sein chirurgie est MUTILANTE. (raison des mammographies régulières). Néoplasie Intra-Cervicale (CIN) du col utérin : conisation préventive. Polypose du côlon. Leucoplasie de la bouche : il peut être traité par laser sur les cordes vocales par exemple sachant que dans ce cas, on n’aura pas de prélèvements anatomopathologiques.
2) Chirurgie de diagnostic = biopsie Elle permet d’affirmer la malignité et préciser le type histologique. Si on ne fait pas correctement une biopsie, ne faisant pas un prélèvement au bon endroit, on peut conclure à tort à l’absence de cancer ce qui est préjudiciable à la prise en charge du patient, d’où l’existence de règles très strictes. Cela engage la responsabilité du chirurgien vis-à-vis de toute l’évolution ultérieure de la maladie. Aujourd’hui la plupart des biopsies sont endoscopiques ou radiologiques. Ne pas oublier que la biopsie est un échantillonnage, donc si elle revient négative ce n’est pas pour autant qu’on puisse exclure le cancer +++. a. Recommandations OMS Le prélèvement doit être suffisant et représentatif sans être trop agressif. Il doit toujours se faire à la périphérie de la tumeur, à la zone de jonction tissu sain - tissu pathologique car le centre de la cellule est souvent nécrotique avec des cellules hypoxiques. Elle se fait par abord direct avec un traumatisme minime et une bonne hémostase. On peut également faire un contrôle extemporané, c’est-à-dire pendant l’opération, mais pas pour un diagnostic, qui nécessite 24h à 5j. Ce contrôle permet de déterminer si le prélèvement est exploitable. b. Objectifs Elle permet de réaliser les études anatomopathologiques nécessaires à une bonne classification tumorale : Différenciation tumorale. Grade histologique (exemple : grading SBR (1 à 3) pour le cancer du sein). Mise en évidence de récepteurs hormonaux (récepteurs aux œstrogènes, progestérone (sein) ou androgènes (prostate)). Présence d’emboles lymphatiques ou veineux. Etude de la vascularisation. Importance de la stroma-réaction. Mise en évidence de facteurs de croissance (récepteurs) par immunohistochimie (récepteur HER2 pour le cancer du sein). Etude des oncogènes par hybridation in situ, etc.
On peut également réaliser une laparoscopie (=coelioscopie), ou une laparotomie exploratrice
Exemple : une jeune étudiante de 20 ans se plaint de douleur dans la cuisse après un jogging. Elle consulte son médecin et un chirurgien qui diagnostiquent un hématome. Le chirurgien opère ! Seulement un hématome spontané de la cuisse sans choc violent, ça n’existe pas. Il s’agissait d’un sarcome. La patiente perd son nerf sciatique et donc la fonctionnalité de sa jambe. Une biopsie préalable aurait été souhaitable et aurait évité une intervention inappropriée.
CONCLUSION : Toujours évoquer la possibilité d’une lésion cancéreuse avant l’intervention chirurgicale ! FGSM3 Lyon Est
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UE 19 – Traitement des cancers – M. RIVOIRE 3) Chirurgie radicale d’exérèse à visée curative Le but de cette chirurgie est la guérison. On opère les zones à risque : tumeurs + ganglions. On se pose la question de la conservation de l’organe, de la fonction et de l’image corporelle. Il faut évaluer l’efficacité des autres thérapeutiques. A l’issue de cette chirurgie, on pourra faire une classification pTNM. a. Concept d’exérèse large monobloc (années 50-60) Définition : Enlever en un seul bloc la tumeur, l’organe et les relais ganglionnaires principaux. (« Au-delà de ce que l’on voit et au-delà de ce que l’on palpe ») Il faut se baser sur des critères anatomiques précis. On va discuter des marges de sécurité éprouvées pour ne pas laisser de cancer. On vérifie l’éventuelle présence de zones précancéreuses ainsi que l’intégrité des limites de l’exérèse. Les inconvénients de l’exérèse large monobloc sont qu’elle est inefficace contre un stade de cancer métastatique et que, étant une chirurgie lourde, elle fragilise le système immunitaire, ce qui peut favoriser le développement tumoral.
b. Rôle du curage ganglionnaire On fait un curage des ganglions du groupe anatomique représentatif du risque ganglionnaire. Par exemple, pour le cancer du sein, on cure les ganglions axillaires, mammaires internes et sus-claviculaires. Du moins sélectif au plus sélectif, et du plus agressif au moins agressif, on peut faire : Curage de nécessité : rare aujourd’hui, on le fait sur des ganglions énormes et nombreux, on le voit peu car on fait des diagnostics précoces, on voit rarement des tumeurs du sein avec une adénopathie axillaire d’une telle ampleur. Exérèse monobloc (T+N) : sein et ganglions axillaires. Curage de principe limité : sein et quelques ganglions axillaires pour limiter le risque de lymphœdème du bras. Curage sélectif : ganglion sentinelle (+), on injecte un traceur autour de la tumeur pour évaluer son extension. On effectue de plus en plus ce curage car il est plus spécifique et permet d’obtenir de meilleures analyses. En effet, l’anatomopathologiste passe plus de temps sur un nombre réduit de Augmentation Diminution spécificité agressivité ganglions. c. La chirurgie limitée Le problème du cancer est surtout le risque de dissémination métastatique. La récidive locale peut être évitée par un geste adapté : ce n’est pas en enlevant plus large qu’on fera mieux. La chirurgie limitée est la conception conservatrice de la chirurgie d’exérèse à visée curative. Pourquoi enlever tout le sein si on a le même résultat en enlevant juste la tumeur ? Aujourd'hui, on fait des diagnostics précoces, on connait le mode de dissémination locorégionale et on a l’évolution des traitements associés (chimiothérapie et radiothérapie). FGSM3 Lyon Est
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UE 19 – Traitement des cancers – M. RIVOIRE Si on fait une tumorectomie simple ou large, il faut associer une radiothérapie en plus. Pour la mastectomie totale, la radiothérapie n’est pas nécessaire mais il n’y a plus de sein. Les préférences des patientes varient selon des « modes ». Aujourd’hui, 70% des patientes veulent garder leur sein. Mais au cours de l’année 1996, la tendance s’est inversée aux Etats-Unis pour faire comme la femme de l’ancien président américain Ronald REAGAN. Finalement, les deux traitements ont un résultat identique, c’est une question de sensibilité individuelle et de décision partagée. /!\♥ : cTNM (clinique) pTNM (anatomopathologie) ypTNM (anatomopath. après ttt adjuvant) T= tumeur N=nodes (ganglions) M=métastases Ce schéma est à retenir car il représente la prise en charge de nombreux cancers. La chirurgie a un intérêt différent selon la présence de métastases (palliative) ou non (curative). /!\ En cancérologie l’urgence n’est pas d’opérer mais de faire un bilan complet de la situation !
4) Chirurgie de réduction tumorale C’est une chirurgie rare. On diminue la masse tumorale pour faciliter l’action de la chimiothérapie et/ou de la radiothérapie. Cette chirurgie R2 est utilisée pour les tumeurs chimiosensibles, radiosensibles ou sécrétantes (comme les tumeurs endocrines qui secrètent beaucoup d’hormones : le problème majeur sont les hormones, pas la tumeur elle-même).
5) Chirurgie des masses résiduelles ou chirurgie d’évaluation Après avoir fait de la chimiothérapie ou de la radiothérapie efficace, on veut savoir ce qu’il reste : Résidus tumoraux (col utérin, …). Nécrose ou fibrose (métastases de tumeurs germinales). Tumeur mature (tératome). Pour cela on enlève ce qu’il reste, on l’analyse (anatomopathologie) et on va pouvoir gérer les phases ultérieures du traitement.
Exemple : Jeune homme de 20 ans avec un cancer au testicule. Il reçoit un traitement très efficace (chimiothérapie BEP (= bléomycine + étoposide + cisplatine) avec trois cures) mais également très toxique et on veut savoir s’il faut prolonger le traitement. Le taux de mortalité de ce traitement est de 1%. Après quatre cures on ne pourra plus jamais en faire à cause d’une toxicité pulmonaire. On vérifie par imagerie et s’il reste quelque chose on fait de la chirurgie. Si c’est de la nécrose alors tout va bien, on va juste surveiller le patient pendant deux ans. On peut également avoir une stratégie identique dans les cancers ORL.
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UE 19 – Traitement des cancers – M. RIVOIRE 6) Chirurgie des métastases Ce n’est pas parce que on a des métastases qu’on ne peut pas guérir. On tient compte : Des lésions uniques ou multiples Des objectifs Unité anatomique fonctionnelle ou non Curatif (foie, cerveau) Intervalle de temps, vitesse de doublement Palliatif (menace fonctionnelle ou vitale) On évalue les chances de succès sur : La tumeur primitive a été traitée. Intervalle libre suffisamment long entre le traitement de la tumeur primitive et la métastase. Métastase unique. Acte chirurgical facile à réaliser. /!\ : Une métastase peut être plus grosse que la tumeur primitive. Exemples : Exérèse : foie (50% de survie à 5 ans), peau, cerveau, poumon, surrénale. Décompression : laminectomie (ablation des lames des vertèbres lorsqu’une métastase osseuse sur une vertèbre augmente le risque de compression de la moelle épinière avec un risque de paraplégie ; la laminectomie consiste à retirer les arcs vertébraux afin d’ouvrir le canal médullaire en arrière), compression VCI. On évite la survenue de complications graves. Prévention de la fracture : os.
7) Chirurgie des récidives ou de rattrapage
Poursuite évolutive malgré un traitement médical à visée curative, par exemple dans les traitements des cancers : anus, sein, tumeurs ORL, col utérin. Récidive locorégionale sans évolution métastasique : sein, sarcome des membres.
Exemple : une patiente a eu un cancer du sein qui a été traité par mastectomie gauche totale. Après une récidive, le chirurgien doit reprendre la mastectomie en enlevant un lambeau de peau important. Pour le combler, il doit prendre un lambeau au niveau du muscle grand dorsal homolatéral.
8) Chirurgie reconstructrice a. Reconstruction immédiate Le but est d’élargir l’exérèse et de réduire les séquelles sans nuire au résultat carcinologique. Parfois, on a une nécessité vitale (reconstruction de paroi, appareil digestif, appareil urinaire). On a deux cas de figure : Une altération majeure (sein, maxillaire, plancher de bouche reconstruction de mandibule à partir de la fibula, vessie, muscle, anus). Esthétique (nez). b. Reconstruction différée Les séquelles fonctionnelles ou esthétiques : Maxillaire inférieur : lambeau, orthèse. Sein : prothèse, lambeau. Œil : prothèse.
9) Chirurgie palliative Le but est de soulager et de maintenir la qualité de vie. : Chirurgie des métastases osseuses : prévenir la fracture, éviter l’état grabataire, prévenir la paralysie. Chirurgie de dérivation (ou radiologie, endoscopie) : trachéostomie, colostomie, dérivations urinaires… Chirurgie de propreté : mastectomie, résection intestinale, …
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UE 19 – Traitement des cancers – M. RIVOIRE /!\ : Ne pas confondre colostomie (anus artificiel) avec jéjunostomie d’alimentation qui permet de nourrir les patients ayant subi une œsophagectomie.
10) Chirurgie des complications et des séquelles (abordé rapidement)
Chimiothérapie : extravasation + nécrose sur site d’accès vasculaire. Radiothérapie : grêle radique, vessie radique, radionécrose (paroi thoracique, peau).
11) Chirurgie à visée hormonale (abordé rapidement) Le but est de supprimer une sécrétion hormonale connue pour favoriser la croissance du cancer. Cancer du sein : ovariectomie chirurgicale bilatérale ou médicamenteuse ++. Cancer de la prostate : pulpectomie bilatérale (on laisse l’albuginée).
12) Chirurgie (anesthésie) de la douleur (abordé rapidement) Il s’agit de situations particulières et exceptionnelles, quand les antalgiques habituels n’ont plus d’effets. Neurostimulation transcutanée. Analgésie médullaire. Blocs régionaux. Neurochirurgie d’interruption : cordotomie, section des racines postérieures.
A retenir 1. 2. 3. 4. 5. 6. 7. 8. 9. 10. 11.
La chirurgie est le traitement principal des tumeurs solides. Diagnostiquer, évaluer, traiter Objectifs du traitement d’un cancer : guérison, quantité et qualité de vie Nécessaire association de la chirurgie des cancers avec les autres modalités (chimiothérapie et radiothérapie) = pluridisciplinarité L’analyse des marges de résection permet de définir la qualité de la chirurgie (R0, R1, R2) Bonne collaboration nécessaire entre le chirurgien et l’anatomopathologiste Le compte-rendu opératoire et le compte-rendu anatomopathologique sont les 2 pièces médicolégales majeures pour la prise en charge ultérieures. Classification selon le pTNM à l’issue de la chirurgie Nombreux aspects de la chirurgie La plupart des chirurgies sont réalisées à visée curative. La chirurgie radicale curative traite la tumeur primitive et ses relais ganglionnaires.
Termes en anglais : Surgical for cancer
Pre-surgical multidisciplinary discussion Therapeutic protocol Patient’s cancer file Completeness of surgery Surgical specimens Large “en bloc” resection Lymph node dissection, lymphadenectomy Mastectomy, lumpectomy
Reference du professeur : Référentiel ONCOLOR : www.oncolor.org Institut National du Cancer (INCA) Réseau Espace Santé Rhône Alpes NCCN nord-américain …
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La douleur en cancérologie Objectifs : Connaître les fondements anatomiques et les différents aspects constitutifs de la douleur Avoir une première approche des principes d’évaluation et de prise en charge de la douleur en cancérologie
Introduction Définition internationale de la douleur : Sensation physique et émotionnelle désagréable en rapport avec une lésion tissulaire réelle ou potentielle ou décrite en des termes évoquant une telle lésion. Il y a plusieurs notions à retenir de cette définition. Un patient qui dit avoir mal, a mal. La première chose à faire est de croire à la plainte du patient. La question de savoir si le patient simule sa douleur n’est pas pertinente. On a toujours tendance à mettre en doute et à sous-estimer la douleur de l’autre. « La douleur de l’autre, ça ne fait pas mal ». Il n’existe pas d’examen (d’imagerie) qui met en évidence la douleur. Nous sommes donc obligés d’écouter et de croire le patient. Dire aux gens que ça ne fait pas mal ne va pas les soulager ! Pour autant, il faut une analyse précise et une évaluation fine de la douleur. La douleur est toujours une sensation incarnée, dans le corps, physique et émotionnelle. On ne peut pas dissocier le physique du psychique. La douleur est désagréable et en lien avec une lésion réelle ou potentielle. On doit commencer par soulager le patient avant de faire le diagnostic. L’idée de garder la douleur pour conduire l’examen clinique est dépassée. Il est bien plus aisé d’examiner un patient soulagé qu’un patient douloureux. Enfin, ce n’est pas parce que l’on ne trouve pas d’explication rationnelle à une souffrance que l’on doit conclure que celle-ci n’existe pas, « qu’elle est dans la tête ». Par exemple, un patient se plaint de lombalgie, on l’envoie à l’IRM mais celle-ci ne met en évidence aucune lésion suspecte. On aura montré qu’il n’y a pas d’anomalie, mais aucunement démontré que le patient n’a pas mal.
I) Fondements anatomiques et composantes 1) Fondements anatomiques La douleur est transmise par des récepteurs périphériques mono et multimodaux (= transportent plusieurs types de sensation : chaleur, douleur etc.) : leurs terminaisons sont libres. Il existe des fibres Aδ peu myéliniques et des fibres C amyéliniques. Si on se pique le doigt, on ressent : En premier, la sensation de piqûre provenant des récepteurs sensitifs ; Puis les fibres Aδ transmettent un signal douloureux intense et de localisation précise ; Enfin les fibres C transmettent un signal plus sourd et plus diffus.
/?\ Mécanisme de gate control : en stimulant les mécanorécepteurs, on arrive à atténuer le message douloureux. Par exemple, si on se tape le doigt avec un marteau, le fait de frotter le doigt va soulager un peu la douleur. Les fibres de la sensibilité transmettent leur message plus vite que les fibres Aδ et C jusqu’à la corne postérieure et empêchent le passage du message douloureux qui arrive plus lentement.
Ces fibres sensitives font leur premier relai dans la corne postérieure de la moelle. Ce premier relai est un lieu de contrôle physiologique de la douleur : on peut à la fois atténuer ou amplifier la douleur. En réalité, en situation normale, il existe un équilibre entre signaux de douleur et signaux « anti-douleur ». La douleur résulte d’un déséquilibre entre ces signaux antagonistes. C’est aussi le lieu d’action de médicaments comme les morphiniques, les antidépresseurs et les antiépileptiques qui génèrent des signaux d’absence de douleur.
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UE 19– Traitement des cancers – G. CHVETZOFF Les relais médullaires croisent et rejoignent le faisceau spinothalamique controlatéral. Au passage, quelques fibres se projettent sur le mésencéphale, en particulier sur le centre neurovégétatif. Le deuxième relai se fait dans le thalamus. À partir de là, on trouve de nombreuses projections corticales sur les aires de la sensibilité, mais aussi sur les aires motrices, frontales, sur l’hippocampe (mémoire), l’insula, etc. La douleur peut ainsi interférer avec le système endocrinien, la mémoire, les émotions, la cognition, la sensibilité, la motricité, etc. Il existe une convergence entre les neurones de différentes zones du corps, ce qui explique les douleurs projetées (exemple : infarctus du myocarde et douleur dans le bras gauche). À partir du cortex, on retrouve des voies descendantes grâce auxquelles le cortex aura des contrôles sur la douleur à chaque niveau médullaire. Par exemple, un état d’inquiétude à propos de la douleur aura un effet d’amplification sur celle-ci. À l’inverse, l’hypnose (qui est une forme de détournement de l’attention) est un moyen de contrôle cortical favorable sur le message de la douleur. La motricité est également capable de contrôler la douleur : en créant de la motricité dans un membre (même amputé), on peut soulager la douleur. Il y a d’autres voies descendantes qui passent notamment par les récepteurs sérotoninergiques, expliquant l’efficacité des antidépresseurs dans le traitement de la douleur.
/?\ Chez un patient ayant perdu un membre, avec un miroir on fait apparaitre le membre manquant à partir du membre réel restant et on demande au patient de se concentrer sur le membre amputé et de le faire bouger. On va ainsi créer de l’activité dans la zone corticale, ce qui va améliorer la perception de la douleur. Autre exemple : rester assis longtemps devrait faire mal aux fesses car les terminaisons libres sont stimulées en permanence. Il y a un contrôle supérieur (contrôle inhibiteur diffus) venant du tronc cérébral qui permet d’enlever le bruit de fond. C’est seulement au bout d’un certain temps, quand la douleur devient suffisamment importante, qu’elle sera perçue.
2) Les 4 composantes ♥ D’un point de vue clinique, on distingue quatre composantes de la douleur :
Sensitivo-discriminative (ou sensori-discriminative) : c’est la partie qui permet de localiser la douleur, de caractériser son type (torsion, brûlure, décharge électrique, etc.), son intensité, son évolution dans le temps, etc.
Affectivo-émotionnelle : donne la tonalité, son caractère désagréable, insupportable, déprimant, anxiogène. Elle peut être affectée par le contexte. La tolérance a la douleur est variable d’un individu à l’autre.
Cognitive : correspond à l’interprétation de la douleur par le patient. Chacun a son monde dans lequel il intègre sa douleur (par rapport à ses expériences, son histoire, l’histoire de sa famille), qui n’est pas forcément le monde du médecin. Cette composante interfère avec la façon dont le patient parle de sa douleur. En sport, elle ne sera pas acceptée de la même façon si l’on gagne ou si l’on perd un combat, une course, un match, etc.
Comportementale : correspond à la manifestation physique observable et verbale de la douleur (à la limitation des activités quotidiennes, au retentissement sur l’appétit, le sommeil, la sexualité, à la façon de prendre les médicaments). Elle est extrêmement variable et ne préjuge pas de l’intensité de la douleur. Le patient peut sembler calme et avoir très mal, ou inversement. Il y a une influence de la culture sur l’expression de la douleur.
Il y a un modèle comportemental dominant dans notre société dans lequel on doit se comporter de manière stoïque face à la douleur et ne rien laisser paraître. La conséquence directe est que les personnes qui ont tendance à trop exprimer leur douleur sont cataloguées comme « syndrome méditerranéen », par exemple. Or, il ne faut jamais juger les patients sur leur façon d’exprimer la douleur et se souvenir que le comportement. En effet, la douleur s’inscrit aussi dans un modèle culturel, sans supériorité de certains de ces modèles sur d’autres. FGSM3 Lyon Est
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UE 19– Traitement des cancers – G. CHVETZOFF Une étude américaine a montré que les patients les plus bruyants, qui sortent du modèle dominant, recevaient moins d’antalgiques de la part de leur médecin. Chez l’enfant, une douleur aiguë aura une manifestation bruyante (cris, pleurs) alors qu’une douleur chronique rendra un enfant calme, trop calme, figé. On peut parfois entendre dans les services : « Oh, il n’a pas le faciès douloureux » en parlant d’un patient, or cette expression n’a pas de sens ! Il faut donc se méfier du comportement d’un patient qui ne traduit pas forcément l’intensité de sa douleur. Le rôle du médecin est donc de décrypter la douleur du patient, d’identifier la composante comportementale et de s’en méfier, sans donner un jugement de valeur. Ce n’est pas toujours facile, on a le droit d’être agacé par un patient mais il faut toujours rester objectif.
3) Douleur aiguë et douleur chronique ♥ On distingue la douleur aiguë et la douleur chronique. La douleur aiguë, c’est la douleur symptôme : Elle se développe sur un support physio-pathologique. Elle a valeur d’alarme. Elle est sensible à un traitement médical simple bien conduit. La douleur chronique, c’est la douleur syndrome : Elle dure plus de 6 mois malgré un traitement bien conduit. Elle s’organise en maladie autonome (douleurs musculo-squelettiques, céphalées, etc.). Elle s’inscrit dans un contexte psychologique et social. Elle nécessite une prise en charge multidisciplinaire (médecin, kiné, infirmière, psychologue, etc.). En cancérologie, on se retrouve souvent avec des « douleurs aiguës qui durent ».
4) Nociception et neuropathie♥ Il faut également dissocier douleur nociceptive et douleur neuropathique. La douleur nociceptive : Elle est provoquée par un excès de stimulation des nocicepteurs. Elle est transmise par un système nerveux normal. Cliniquement, elle est retrouvée dans les douleurs mécaniques, inflammatoires, sans déficit neurologique associé, au site de la lésion. Elle est sensible aux traitements paliers de l’OMS. C’est la majorité des douleurs aiguës. En cancérologie, elle représente 2/3 des douleurs. Les cancers pancréatiques, osseux et ORL sont les cancers les plus grands pourvoyeurs de douleur. La douleur neuropathique : Elle est liée à l’altération du système nerveux à quelque niveau que ce soit (compression, section, problème de contrôle descendant, etc.). Cliniquement, elle se traduit par des brûlures, décharges électriques, allodynie (= douleur déclenchée par un contact normalement non douloureux), abolition de réflexes, troubles de la sensibilité ; déficit neurologique associé à un territoire, zona, polynévrite. Elle est peu sensible aux morphiniques, elle se traite par anticonvulsivants, antidépresseurs, anesthésiques locaux etc. C’est la douleur qui se chronicise, d’où l’importance de bien la repérer.
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UE 19– Traitement des cancers – G. CHVETZOFF 5) La souffrance psychologique En cancérologie, on retrouve fréquemment une crise existentielle au moment de la prise de conscience du pronostic qui ne se fait pas forcément au moment de l’annonce. À ce moment-là, la douleur vient se cristalliser sur un terrain déjà douloureux. À cela s’ajoutent colère, peur, dépression, anxiété mais on retrouve bien une douleur physique ressentie. C’est le concept de « total pain ».
6) Epidémiologie en cancérologie
On compte 400 000 nouveaux cas de cancers par an en France. 80% des patients hospitalisés en urgence ont mal. 75% des personnes en stade avancé ont mal (la douleur reste soulageable la plupart du temps). 30 à 45 % des personnes en stade précoce ont mal. 50% des patients auront mal à un moment ou à un autre.
7) Etiologie des douleurs en cancérologie La douleur peut être liée à la maladie en elle-même : tumeur initiale, évolution locale, métastases (surtout osseuses), surinfection. Elle peut être liée aux traitements : chirurgie, radiothérapie, chimiothérapie, soins de support, gestes diagnostiques ou de soins. Enfin, d’autres douleurs indépendantes du cancer peuvent s’ajouter.
II) Principes d’évaluation et prise en charge 1) Conduire l’évaluation d’une douleur À chaque fois que cela est possible, c’est le patient lui-même qui doit évaluer sa douleur. Il faut rechercher les éléments suivants : Auto-évaluation Historique de la maladie et de la douleur. Comment est-elle arrivée ? Depuis quand ? Topographie (schéma corporel) : Où ? Description : décrire la douleur (Echelle DN4). Intensité : échelle visuelle analogique (EVA), échelle numérique (EN), échelle verbale simple. Facteurs favorisants, facteurs calmants (chaud, froid, mouvement, position, etc.). Traitements entrepris, comment, quels effets ? (Les patients confondent souvent inefficacité et effets indésirables). Retentissement psycho-social, interprétations, etc. Si le patient avait déjà un traitement pour des douleurs : demander si c’est la même douleur que d’habitude.
2) Echelles d’évaluation a) Echelle visuelle analogique (EVA) C’est une sorte de « thermomètre » de la douleur. Elle possède deux faces, une graduée pour le médecin et une non graduée pour le patient. Le résultat est lu en millimètres (0 à 100). Elle est intéressante lorsque l’on répète les mesures. b) Echelle numérique (EN) On demande au patient de côter l’intensité de sa douleur entre 0 pour aucune douleur et 10 pour une douleur maximale inimaginable. EN et EVA ne sont pas superposables.
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UE 19– Traitement des cancers – G. CHVETZOFF c) Echelle DN4 C’est un questionnaire en 10 items, répartis en 4 questions. Lorsque le patient répond « oui » à au moins 4 items, il y a une très forte probabilité que ce soit une douleur neuropathique. Elle est très facile à utiliser (voir diaporama pour trouver le questionnaire entier). d) Autres échelles plus complexes
Questionnaire de Saint-Antoine (plus approfondi) Échelle d’anxiété et de dépression Échelle de qualité de vie Sujets âgés non communicants : Doloplus 2, ECPA, algoplus Enfants : DEGR
L’échelle algoplus étudie le comportement d’une personne âgée non communicante. Elle doit être mesurée par deux soignants qui connaissent bien le patient. Elle s’intéresse au visage, au regard, aux plaintes orales, au corps et au comportement (cf. diapo).
3) Traitements médicamenteux ♥ a) Douleurs nociceptive On les traite par les paliers de l’OMS. Palier 1 : antalgiques non opioïdes (paracétamol et AINS) ; Palier 2 : antalgiques opioïdes faibles (tramadol, codéine, opium) ; Palier 3 : opioïdes forts (morphine, oxycodone, fentanyl, hydromorphone). En réalité, la différence entre le palier 2 et le palier 3 n’est pas la nature de l’antalgique mais plutôt la dose. On considère qu’à partir d’une dose journalière équivalente à 60 mg de morphine orale, on est en palier 3. Il n’est pas logique d’associer ces deux types d’antalgiques. On peut associer pallier 1+3 ou pallier 1+2. À partir du palier 2, il faut être vigilant aux effets secondaires comme la constipation. b) Douleurs neuropathiques On s’oriente en première intention vers les antiépileptiques : gabapentine et prégabaline. En deuxième intention, on utilisera les antidépresseurs tricycliques ou mixtes. Enfin, on peut utiliser des anesthésiques locaux à placer sur la zone douloureuse. c) Douleurs provoquées Il s’agit ici des douleurs liées aux soins. Il est important de les anticiper et de les prévenir. On pourra utiliser des anesthésiques locaux, du MEOPA, une prémédication antalgique ou encore l’hypnose (qui fonctionne très bien).
4) Traitements spécifiques en cancérologie Le premier traitement de la douleur reste le traitement du cancer. La chirurgie, la radiothérapie, la chimiothérapie ou l’hormonothérapie peuvent par exemple réduire la taille de métastases à l’origine de compressions douloureuses. D’autres techniques se sont développées, ce sont des traitements locorégionaux à visée antalgique. En radiologie interventionnelle, on peut faire : cimentoplastie (= mettre du ciment dans une vertèbre qui s’est tassée pour la solidifier), radiofréquence, alcoolisation (attention on ne parle pas d’alcoolisme pour oublier la douleur. Mais d’une thérapie visant à détruire les centres neuronaux provoquant la douleur avec de l’alcool. Exemple du cancer du pancréas, où l’on va détruire le plexus solaire qui devient douloureux avec de l’alcool), cryothérapie. Quand tout cela ne marche pas, on emploie des techniques d’anesthésie, comme l’analgésie périmédullaire (on met le médicament directement dans le liquide céphalo rachidien).
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UE 19– Traitement des cancers – G. CHVETZOFF 5) Traitements non médicamenteux Ils sont employés en particulier (mais pas uniquement) dans la prise en charge des séquelles. Le retour à un état antérieur à la maladie est impossible. Le patient doit apprendre à vivre avec les changements causés par le cancer. Il y a la mise en place de psychothérapie de soutien. Les techniques de relaxation, de sophrologie, d’hypnose connaissent un regain d’intérêt. La kinésithérapie, l’appareillage ou encore l’ostéopathie peuvent se montrer utiles. Une activité physique adaptée est importante pour le reconditionnement musculaire, l’arrêt des activités quotidiennes au cours du traitement entrainant une fonte musculaire importante. D’autres techniques comme l’acupuncture ou l’auriculothérapie sont utilisées. Ces traitements doivent rester en lien avec les équipes médicales. Il faut se méfier des traitements de fortune qui conduisent à l’arrêt du traitement habituel.
6) Clefs pour l’utilisation de la morphine ♥ Notion très importante !!! La morphine est le traitement de référence pour les douleurs sévères. On y recourt : En cas de douleurs cancéreuses aiguës ou chroniques En cas de douleurs aiguës non cancéreuses de type infarctus, colique néphrétique Généralement quand les paliers 1 et 2 ont échoué. On peut les employer assez facilement dans un contexte aigu et dans les douleurs cancéreuses. L’utilisation de la morphine en traitement de la douleur chronique non cancéreuse doit se faire avec précaution à cause des effets secondaires importants (on craint l’escalade des doses à long terme). L’administration se fait par voie orale de préférence (même à l’hôpital). On prescrira un traitement de fond accompagné d’interdoses.
Traitement de fond : On emploie une forme à libération prolongée, à heure fixe toutes les 12h. On débute à 60 mg/j. La dose sera augmentée si nécessaire.
Interdoses de secours : On emploie une forme à libération immédiate. Elle sera disponible à la demande en cas de douleur ou en prévention d’un soin douloureux. La dose correspond à 1/6 à 1/10 de la dose journalière par intervalles minimum d’une heure, sans dépasser 4 /!\ L’intervalle n’est pas de 4h doses en 4 heures. Le pic plasmatique est atteint au bout de 30 à 45 comme on peut nous le dire dans minutes, donc si le soulagement n’est pas arrivé au bout d’une heure, on a certains services. 4h, c’est la demi-vie de la morphine le droit de redonner une interdose. Réajustement du traitement : On réajustera le traitement au bout de 48-72h. Si le patient prend plus de 4 interdoses par jour, alors on recalculera la dose de fond : on prend tout ce que le patient a consommé (fond + interdoses) et on le répartit matin et soir. Exemple : un patient prend 30 mg matin et soir. Il a également pris 6 interdoses de 10 mg par jour. On va réajuster sa dose de fond en lui donnant 60 mg matin et soir et on réajuste également l’interdose en fonction. On n’a pas doublé la dose de morphine, on l’a simplement répartie. Il n’y a pas de dose maximale, on ajuste la dose en fonction du soulagement obtenu, des effets indésirables retrouvés. La prescription se fait sur ordonnance sécurisée pour 28 jours maximum. FGSM3 Lyon Est
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UE 19– Traitement des cancers – G. CHVETZOFF Les principaux effets secondaires retrouvés sont : constipation, nausées, vomissement, somnolence (principalement au début du traitement, mais il peut être normal que le patient somnole car il récupère), hallucination et prurit (en particulier chez les enfants). Il faut systématiquement prescrire un laxatif pour prévenir la constipation même s’il n’y en a pas. Les autres effets indésirables seront traités si besoin. Il faut être prudent en cas d’insuffisance rénale, car un surdosage est possible. La morphine peut aggraver l’insuffisance respiratoire chronique, la BPCO ou l’apnée du sommeil. En revanche, une tachypnée est une indication à la morphine : le ralentissement de la fréquence respiratoire va améliorer la ventilation du patient. On se méfiera des insuffisances hépatiques très sévères et surtout des co-médications. Attention ce sont des mesures de prudence et non des contre-indications. Il ne faut en aucun cas arrêter brutalement un traitement de morphine sous peine de provoquer un syndrome de sevrage (sueurs, crampes abdominales, etc.). L’arrêt progressif est très bien toléré et les syndromes de dépendance à la morphine sont rares. Le principal danger est le surdosage important, entraînant une dépression respiratoire (FR < 8/min). Le traitement d’urgence est la naloxone. Ce problème reste rare et est surtout lié aux surdosages volontaires.
À retenir
La douleur est subjective, mais ça ne veut pas dire irréelle Quatre composantes : sensitivo-discriminative, affectivo-émotionnelle, cognitive et comportementale La douleur aiguë est un symptôme La douleur chronique devient une maladie en elle-même et requiert une prise en charge pluridisciplinaire Une évaluation rigoureuse est le 1er temps indispensable à toute prise en charge de la douleur L’auto-évaluation est privilégiée chaque fois que possible, notamment avec une EVA, une EN ou une échelle verbale La douleur en cancérologie peut être liée au cancer (ou à ses métastases) ou induite par les gestes et traitements Le traitement médicamenteux des douleurs nociceptives repose sur les paliers de l’OMS Le traitement médicamenteux des douleurs neuropathiques repose sur les antiépileptiques et les antidépresseurs Ne pas négliger la prise en charge non médicamenteuse
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UE 19– Traitement des cancers – G. CHVETZOFF Schéma bilan de la douleur :
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Traitements médicaux des cancers Objectifs : Comprendre et connaitre le rôle des traitements médicaux du cancer selon leurs indications et vis-à-vis des autres modalités de prise en charge. Comprendre les principaux modes d’action des différentes catégories de traitements et pouvoir justifier aussi les indications d’un certain nombre d’entre eux. Connaitre les principaux effets secondaires des chimiothérapies notamment les plus à risque (toxicité pour les patients). Le traitement du cancer nécessite une compréhension de la maladie cancéreuse dans sa totalité. Il existe trois types de traitements du cancer : chirurgie, radiothérapie et médical. Parmi ce dernier on distingue chimiothérapie, hormonothérapie et thérapies ciblées ainsi que depuis peu, immunothérapie.
I) Masse tumorale et effets thérapeutiques Le cancer est une maladie d’origine génétique. Avec le temps, une cellule accumule des anomalies génétiques qui aboutissent à une prolifération incontrôlée. Le cancer devient alors détectable à partir d’une certaine masse cellulaire qui correspond au seuil de détection (dépistage), arbitrairement fixé à 1 g soit 109 cellules (dépend du type de cancer). Actuellement, nous ne sommes pas en mesure de dépister avec fiabilité des cancers en-dessous de ce seuil. Pour information : 109 cellules tumorales (1 g) : seuil de dépistage 1010 cellules tumorales (10 g) : seuil de détection clinique 1012 cellules tumorales (1 kg) : décès Évidemment, selon la localisation de la tumeur, le décès peut survenir plus ou moins précocement. Le cancer du cerveau ne métastase pas (ou très rarement), c’est le seul cas ou la mort est dû à la tumeur primitive. Généralement elle est causée par les métastases. Dans la majorité des cas, les cancers ne sont pas dépistés précocement mais détectés par l’apparition de signes cliniques (10 g). Une fois le diagnostic posé, on met en place un traitement qui a pour but d’éliminer le plus grand nombre possible des cellules tumorales, avec deux possibilités : Guérison : toutes les cellules cancéreuses sont éliminées Maladie résiduelle : il reste un certain nombre de cellules en dessous du seuil de détection pour un temps donné, c’est la rémission. Puis les cellules qui ont résisté proliféreront jusqu’à ce qu’elles soient à nouveau détectées, c’est la récidive (peut avoir lieu des années après). Il est impossible de savoir si le traitement a éliminé toutes les cellules cancéreuses ou uniquement une partie, seul le temps peut déterminer s’il s’agit d’une rémission ou d’une guérison. Les traitements doivent être maximalistes en termes d’effets dès la première prise en charge afin d’éviter le plus possible la persistance de cellules résistantes (ou métastases) responsables de récidives. Les tumeurs métastatiques ne se guérissent pas (sauf exceptions comme le cancer du testicule) mais donnent une « rémission clinique ». Ex. : tumeur du sein de 1 cm : 90% de guérison et 10% de rechute.
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UE 19 – Traitements des cancers –S. NEGRIER Heureusement, la majorité des cancers sont détectés au stade non-métastatique (ex : cancer du sein), c’est-à-dire alors que la tumeur est isolée dans un organe. Cependant, il y a alors moins de 15% de risque de récidive locale isolée contre plus de 85% de risque de métastases à distance (ex : cancer du poumon). Les métastases se localisent préférentiellement dans des organes filtres (possédant de très petits capillaires) : poumon, foie, MO, os. Les quatre types de produits disponibles sont ♥ : Chimiothérapie (IV ++, parfois PO) : Classe historiquement la plus utilisée et la plus ancienne. Il s’agit d’agents cytotoxiques qui visent l’ADN au sens large et les cellules en prolifération. La chimiothérapie vise toutes les cellules en division sans faire de distinction entre les cellules saines et les cellules cancéreuses, d’où la présence d’importants effets secondaires. L’effet thérapeutique reste néanmoins positif, la prolifération des cellules cancéreuses étant plus importante, elles sont plus sensibles à la chimiothérapie. Son utilisation tend néanmoins à diminuer d’ici une dizaine d’années.
Hormonothérapie (PO, ou IM/SC) : Concerne essentiellement les cancers du sein et de la prostate dont la croissance est hormonodépendante. L’objectif est de bloquer l’action des hormones sur le développement du cancer. À l’instar de la chimiothérapie, elle ne cible pas uniquement les cellules cancéreuses.
Les produits (=thérapie) ciblés : Ils agissent sur un mécanisme spécifique de la croissance tumorale et représentent la nouvelle génération de produits en développement.
L’immunothérapie : Il s’agit de la dernière classe d’agents développés, rendant les cellules tumorales accessibles aux attaques du système immunitaire. A l’inverse des produits ciblés, il s’agit d’un mécanisme transversal qui pourrait s’appliquer à un grand nombre de cancers.
II) Chimiothérapie anticancéreuse Si le mécanisme d’action de la chimiothérapie est toujours le même, tous les cancers ne sont pas aussi sensibles. En effet, la sensibilité aux agents cytotoxiques varie en fonction de l’origine tissulaire de la tumeur. Les cancers les plus chimiosensibles (mais aussi les plus rares) sont : Les cancers du sang et de la moelle osseuse (leucémies, lymphomes sont guéris dans 70% des cas uniquement par chimiothérapie) ♥ Les cancers des tissus germinaux (ovaires et testicules) et des résidus de tissus embryonnaires (cancers fréquents chez l’enfant). Plus de 70% des tumeurs solides de l’enfant sont guéries par la chimiothérapie. Pour le testicule, on guérit 90% des cancers localisés ou métastatiques par cisplatine. Dans ces deux cas, la chimiothérapie est curative. Les cancers des tissus épithéliaux (glandulaire ou kératinisant) représentent entre 80 et 90% des cancers de la population générale mais ne peuvent être guéris uniquement par chimiothérapie, du fait de leur sensibilité intermédiaire à celle-ci. Il faut généralement y associer une chirurgie et/ou une radiothérapie. ♥ Enfin, les cancers des tissus mésenchymateux, neuroectodermique (surrénales, cellules d’origine nerveuse disséminées) et nerveux sont les moins sensibles à la chimiothérapie, du fait de leur faible prolifération cellulaire.
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UE 19 – Traitements des cancers –S. NEGRIER 1) Mécanismes d’action des cytotoxiques Il s’agit de médicaments antinéoplasiques car ils stoppent la multiplication cellulaire. Les cellules sont insensibles en G0 (cellule au repos). Suivant sa catégorie, un agent agit à un moment déterminé du cycle cellulaire. Retenir qu’il y a 4 types de cytotoxique liés chacun à un mécanisme d’action différent : Les agents intercalants : bloquent la compaction de l’ADN en prophase. L’agent chef de file est l’Adriamycine (anthracyclines) Les poisons du fuseau : bloquent le fuseau mitotique utile à la migration des chromosomes en mitose. L’agent chef de file est le Paclitaxol (Taxol). Les anti-métabolites : l’incorporation de ces analogues de bases azotées bloque la réplication de l’ADN. L’agent chef de file est le Méthotréxate. Les agents alkylants : altération des bases azotées naturelles perturbant la réplication de l’ADN par coupure et cassure. Le chef de file est le Cisplatine. Ils agissent en début G1 ou en mitose.
Rappel : G1 : phase stationnaire, chromosomes simples S : réplication de l’ADN G2 : phase stationnaire, chromosomes doubles M : mitose
Il faut surtout retenir qu’en pratique, lors de la réalisation de chimiothérapie, on combine différentes molécules pour atteindre plusieurs cellules à différents stades du cycle, augmentant ainsi l’efficacité du traitement.
2) Toxicité de la chimiothérapie Tous les médicaments de chimiothérapie sont toxiques. En effet, il y a peu de différences entre les cellules cancéreuses et les cellules saines, d’où la difficulté de trouver un traitement actif sans toxicité. Presque toutes les drogues agissent préférentiellement sur les cellules en division, d’où la plupart des effets toxiques généralement rencontrés : Signes digestifs (cisplatine++) : vomissements, diarrhées/constipation (renouvellement rapide des entérocytes et centre vomitif cérébral) Leucopénie (PNN ++) et risque d’infection Stomatite (ulcérations buccales : aphtes) Alopécie (renouvellement des bulbes capillaires) –> Survient à deux-trois semaines après le traitement, de manière brutale, et est la plupart du temps résolutif De nombreux produits agissent aussi directement au niveau cérébral et causent principalement nausées et vomissements par action sur le centre du vomissement (situé dans le plancher du 4ème ventricule). L’amélioration des traitements antiémétiques (famille de Setron, ou corticothérapie) a permis de minimiser ces effets secondaires, sans toutefois les supprimer.
3) Cytotoxiques à toxicité particulière a. Dose Cumulative Limite (DCL) À partir d’une certaine quantité de traitement reçu, on sait qu’il existe un risque accru de toxicité viscérale. L’apparition de l’effet toxique peut arriver au cours du traitement ou de manière différée. On définit une dose cumulative limite pour réduire les risques toxiques. Une fois cette dose administrée, le patient ne pourra plus jamais recevoir ce traitement : il faudra choisir un nouveau traitement. ♥ Car les risques encourus perdurent toute la vie.
Adriamycine DCL = 450 mg/m² car anthracyclines : toxicité cardiaque (donne une IC) Cisplatine pas de DCL systématisée car variable selon les personnes, toxicité rénale (donne une IR)
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Bléomycine DCL = 300 mg car poisons du fuseau : toxicité pulmonaire sévère (fibrose pulmonaire, insuffisance respiratoire menant au décès tardif) Taxols neuropathies périphériques
b. Toxicité hématologique : définitions (important !) La chimiothérapie bloque notamment la prolifération cellulaire de précurseurs des lignées hématopoïétiques, d’où une toxicité hématologique :
Leucopénie : chute des globules blancs à distance de la chimiothérapie (+/- J7) (transfusion de GB inefficace) Neutropénie : la baisse des PNN augmente considérablement le risque d’infection. Les PNN jouent un rôle majeur dans la défense bactérienne. Risque majeur d’infection si PNN < 500/mm3 (norme à 2000): on parle alors d’aplasie. Thrombopénie grade IV < 20 000/mm3, risque hémorragique sévère. On transfuse des plaquettes si on a moins de 20 M/mm3 ou si on a moins de 60 M/mm3 avec des signes hémorragiques associés ou des métastases cérébrales. Anémie, notamment lors du stade métastatique.
La complication principale à redouter est la neutropénie fébrile ou aplasie fébrile. ♥ En effet, la fièvre signe une infection non collectée (=pas d’abcès retrouvé) que l’organisme ne peut plus combattre. Il y a alors un risque de dissémination des bactéries dans l’organisme, soit une bactériémie pouvant conduire au choc septique qui peut être fatal. Les 2 portes d’entrée sont la peau (Staphylocoque par exemple, lors de la pose d’une VVC) et le tube digestif (bactéries commensales). En cas d’aplasie non fébrile, on surveille la température et la NFP du patient et on le renvoie chez lui afin d’éviter au maximum une infection nosocomiale. En cas d’aplasie fébrile, on met rapidement en place un traitement antibiotique à large spectre après des prélèvement systématiques à visée bactériologique en gardant le patient le moins longtemps possible à l’hôpital. Une hospitalisation n’est recommandée que si l’on observe des signes de gravité évoquant un choc septique (hypotension artérielle). Ces évènements arrivent entre 2 chimiothérapies : il faut bien éduquer le patient pour qu’il surveille sa température régulièrement.
Toujours faire une NFS avant une chimiothérapie !
4) Traitement adjuvant (cancer isolé) De nombreux patients atteints de cancers (sein, côlon, prostate,…) ne présentent pas, au diagnostic, de signes de métastase à distance. Cependant, des métastases peuvent se développer plusieurs mois voire plusieurs années après l’intervention chirurgicale (+/- radiothérapie) à partir de micro-métastases présentes au moment de la chirurgie. La chimiothérapie (ou le traitement hormonal du cancer) utilisée en adjuvant, c'est-àdire en complément suite à un traitement local, peut éliminer d’éventuelles micro-métastases et accroître les chances de guérison. ♥ Une méta-analyse de la survie de patientes atteintes de cancer du sein traitées par chimiothérapie adjuvante versus chirurgie unique montre une survie à 10 ans significativement augmentée. On remarque aussi que, quelle que soit la prise en charge thérapeutique, la survie des femmes présentant des ganglions envahis est inférieure à la survie des femmes ne présentant pas de ganglions envahis.
5) Traitement néo-adjuvant (cancer isolé) Le traitement médical (chimiothérapie) est dans ce cas réalisé avant le traitement local de la tumeur. ♥ L’objectif n’est pas d’augmenter le taux de guérison mais de réduire la masse tumorale afin de permettre un geste chirurgical plus simple et d’avoir la possibilité d’un traitement plus conservateur (ostéosarcomes ou cancers du sein de plus de 2 cm : réduire la tumeur et permettre une tumorectomie plutôt que la mastectomie).
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UE 19 – Traitements des cancers –S. NEGRIER 6) Traitement palliatif La chimiothérapie seule peut permettre la guérison des tumeurs métastatiques de certains types de cancers uniquement (cancers disséminés ++) : Leucémie aiguë de l’enfant (80% de guérison) Tumeurs pédiatriques variées (70% de guérison) Lymphome de Hodgkin (70% de guérison) et autres lymphomes. Cancer du testicule et autres tumeurs germinales (90% de guérison, le cisplatine est le médicament de choix) La double immunothérapie semble pouvoir guérir un faible pourcentage de patients atteints de mélanomes métastatiques. Malheureusement, ces cancers ne sont pas majoritaires et après dissémination métastatique, la plupart des tumeurs solides ne peuvent plus être guéries par chimiothérapie ou traitement hormonal seul. L’intérêt du traitement n’est alors plus curatif mais uniquement palliatif, c'est-à-dire qu’il vise à permettre l’accroissement de la durée et/ou l’amélioration de la qualité de vie mais il ne correspond pas non plus à des soins palliatifs. On cherche à retarder le plus longtemps possible le développement du cancer, tout en sachant qu’on ne pourra plus le guérir. Dans le cadre d’un traitement palliatif, il est important de trouver l’équilibre entre l’effet bénéfique des médicaments (réduction de la tumeur et soulagement des symptômes) et l’effet négatif des médicaments (toxicité). On peut donc diminuer les doses, espacer les prises pour favoriser la qualité de vie et diminuer le risque de complications sévères, ce qui est moins faisable avec un traitement à visé curative et correspond plutôt à une perte de chance pour le patient. NB : Attention à ne pas confondre traitements palliatifs et soins palliatifs ! Les patients sensibles initialement au traitement peuvent développer ensuite une résistance aux drogues. Une sensibilité à des médicaments différents (ou agents hormonaux) est encore possible, mais la probabilité de réponse est plus faible qu’en première intention.
7) Chimiorésistance Quel que soit le médicament utilisé, le problème majeur est le développement de résistances acquises des cellules à la chimiothérapie. ♥ Les cellules cancéreuses ont une capacité d’adaptation supérieure aux cellules saines. Cette chimiorésistance peut être due à plusieurs facteurs :
Altérations génétiques (mutations) au niveau des cellules cancéreuses conduisant au développement du phénotype de résistance à la drogue. Modifications transitoires des propriétés des cellules cancéreuses. Concentration insuffisante du médicament= région d’hypoxie au niveau des cellules cancéreuses pour permettre leur élimination (particulièrement dans les régions peu irriguées par les vaisseaux sanguins tumoraux). Prolifération de cellules tumorales résiduelles entre deux cycles de traitement.
Exemple : On utilise le CA-125 comme marqueur pour suivre l’évolution du cancer ovarien. Après chirurgie, on a une diminution nette de la concentration du marqueur, puis on a une alternance de phases de rémission clinique de plus en plus courtes et de récidives de plus en plus sévères. Après chaque rechute, on change de médicament pour lutter contre la résistance. Finalement, le cancer échappe complètement au contrôle des oncologues. On pourrait penser qu’en combinant tous les médicaments dès la première chimiothérapie, on parviendrait à éliminer toutes les cellules et guérir la maladie mais en réalité il n’en est rien. On obtient une meilleure survie en utilisant ces différents traitements successivement. On observe une perte d’efficacité des traitements utilisés avec un temps de rechute de plus en plus court. FGSM3 Lyon Est
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III) Hormonothérapie Il existe deux grands types de cancers hormonodépendants : sein et prostate. ♥ Pour le sein, la croissance du tissu sain, et plus fortement du tissu cancéreux, est stimulée essentiellement par les œstrogènes. Pour la prostate, la croissance cellulaire est stimulée par les androgènes. On peut parler de manière assez abusive de « traitement hormonal » du cancer mais en réalité, le principe de l’hormonothérapie est d’administrer une anti-hormone pour inhiber la stimulation de la croissance des cellules. Dans le cancer du sein les traitements hormonothérapeutiques permettent de réduire la tumeur dans 50% des cas. Dans le cancer de la prostate, ce chiffre atteint 80%. Comme la chimiothérapie, l’hormonothérapie peut s’utiliser aussi bien en adjuvant de la chirurgie ou de la radiothérapie que dans les cancers avancés au stade métastatique.
1) Récepteurs hormonaux Les hormones stéroïdes se fixent sur des récepteurs spécifiques de la cellule. L’activation de ces récepteurs régule la prolifération ainsi que d’autres mécanismes de la cellule. Ces mécanismes d’action sont surexploités par la cellule cancéreuse pour croître.
2) Hormonothérapie des cancers du sein Il existe plusieurs stratégies d’hormonothérapie. Le Tamoxifène, qui est l’anti-hormone la plus ancienne dans le traitement du cancer du sein, est un antagoniste des récepteurs aux œstrogènes. Sa fixation sur les récepteurs aux œstrogènes fortement exprimés par les cellules tumorales mammaires empêche l’œstrogène de stimuler leur croissance. L’efficacité est liée à la surexpression des récepteurs hormonaux des cellules tumorales par rapport aux cellules saines ♥ (notion d’index thérapeutique). Certaines maladies (ex : ostéoporose) sont aggravées à la ménopause. Une autre stratégie consiste à employer des inhibiteurs de l’aromatase (Anastrozole, Letrozole) afin de bloquer totalement la synthèse des œstrogènes. 99% des œstrogènes sont fabriqués au niveau des ovaires et une petite partie est produite au niveau du tissu adipeux (d’où l’augmentation des rechutes du cancer du sein avec l’obésité) à partir des corticoïdes surrénaliens. Cette stratégie agit sur ces deux mécanismes et l’effet est donc plus important (mais attention au risque de majoration d’une ostéoporose ou d’un cancer de l’endomètre !) Lorsqu’on réalise une biopsie, l’étude des récepteurs hormonaux doit figurer sur le compte-rendu anatomo-pathologique. ♥ L’efficacité de l’hormonothérapie dépend de la présence ou non de récepteurs aux œstrogènes (ER) et des récepteurs à la progestérone (PR). Un tissu cancéreux qui exprime des récepteurs aux deux types d’hormones a 70% de chances d’être sensible à l’hormonothérapie. Un tissu qui n’exprime aucun des deux récepteurs ne répondra très probablement pas à l’hormonothérapie. Dans ce cas, on n’en fera pas. Une méta-analyse de la survie de patientes atteintes de cancer du sein traitées par chirurgie avec hormonothérapie versus chirurgie seule montre une survie à 5 ans significativement supérieure pour les patientes ayant reçu une hormonothérapie adjuvante.
3) Hormonothérapie des cancers de la prostate Le principe est globalement le même qu’avec le cancer du sein. Étant donné que 95% des cancers de la prostate expriment des récepteurs aux androgènes, on ne procède pas à l’étude de récepteurs hormonaux. On traite d’emblée par un traitement anti-hormonal. ♥ Les androgènes sont produits d’une part par le testicule sous forme de testostérone et d’autre part par la glande surrénale sous forme de DHEA. La testostérone est convertie par la 5 α-réductase prostatique en DHT qui est l’hormone localement active. En amont, la production de testostérone est stimulée par l’axe hypothalamo-hypophysaire qui sécrète de la LH-RH et la LH. FGSM3 Lyon Est
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UE 19 – Traitements des cancers –S. NEGRIER Aujourd’hui on préfère bloquer les récepteurs à la LH-RH ou à la LH et utiliser des inhibiteurs de l’aromatase afin d’arrêter la production surrénalienne et testiculaire des androgènes. Une étude randomisée de patients traités par radiothérapie associée à une hormonothérapie contre radiothérapie seule montre une survie moyenne de 6 ans contre 3 ans pour le groupe témoin. On ne fait pas de chimiothérapie adjuvante.
IV) Les traitements ciblés 1) Oncogenèse Ce sont des traitements surtout utilisés en phase de cancers métastasés. a. 6 mécanismes fondamentaux Il existe 6 grands mécanismes fondamentaux de l’oncogenèse, conséquences directes de l’instabilité génétique : Autosuffisance en signaux de croissance Insensibilité aux signaux anti-prolifératifs Invasion tissulaire et métastases Potentiel illimité de réplication Néo-angiogenèse Perte des capacités apoptotiques b. Facteurs de croissance tumoraux Une thérapie ciblée est un traitement actif sur une cible biologique identifiée et impliquée dans la cancérogenèse (facteurs de croissance et leurs récepteurs, gènes impliqués dans la néo-angiogenèse, dans la capacité d’invasion tissulaire et métastatique ou dans la réparation/réplication de l’ADN), avec un effet spécifique épargnant les cellules normales ( moins de toxicité). Il peut être utilisé seul ou en association avec d’autres traitements (chimiothérapie, radiothérapie). Les cellules tumorales utilisent des « facteurs de croissance » physiologiques en modifiant leur fonctionnement pour leur donner un avantage : augmentation de la prolifération et de la survie cellulaire (par blocage de la voie de l’apoptose). Contrairement aux cellules saines, les cellules cancéreuses utilisent à outrance ces facteurs de croissance et sur-expriment les récepteurs de ces facteurs. Certaines cellules deviennent autosuffisantes : elles produisent elles-mêmes leurs propres facteurs de croissance. Les thérapeutiques ciblées visent à empêcher l’action de ces facteurs de croissance par 2 voies principales :
Blocage du récepteur cellulaire, ou du facteur de croissance lui-même parfois Blocage de la transduction du signal
2) Les anti-récepteurs Her2/Neu (Trastuzumab) ♥ On a mis en évidence que dans 15% des cancers du sein, il existait une surexpression des récepteurs Her2/Neu. Il s’agit d’un récepteur transmembranaire. La fixation d’un facteur de croissance sur son domaine FGSM3 Lyon Est
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UE 19 – Traitements des cancers –S. NEGRIER extracellulaire provoque une cascade de signalisation aboutissant à l’activation de gènes nécessaires à la prolifération cellulaire. On le retrouve le plus souvent chez des femmes jeunes, non ménopausées. Cette surexpression permet alors aux cellules cancéreuses de se multiplier d’avantage et bien plus rapidement que des cellules saines. Le traitement par Herceptin consiste à bloquer les récepteurs Her2/Neu sur les cellules du cancer mammaire par un anticorps monoclonal, empêchant alors la fixation du ligand naturel et bloquant ainsi les signaux intracellulaires stimulant la prolifération. Cette stratégie thérapeutique est indiquée dans le traitement adjuvant ou métastatique du cancer du sein Her2/Neu positif. Lorsqu’on réalise une biopsie de tissu mammaire, l’étude des récepteurs Her2 doit figurer sur le compte-rendu anatomo-pathologique. Cette recherche est réalisée le plus souvent par immunohistochimie voire hybridation in situ en cas de doute. La mise en place du traitement par Herceptin est éligible à partir du score 2+ en IHC. Ce traitement dure 6 mois. Les patientes ayant une tumeur Her2+ ont une survie globale moins longue que celles présentant une tumeur Her2-, il s’agit donc d’un facteur de mauvais pronostic, mais avec l’ajout d’un traitement par Herceptin, la survie moyenne passe de 18 à 27 mois. En effet, les cancers du sein Her2+ touchent généralement les femmes plus jeunes et sont responsables de tumeurs de haut grade, le plus souvent sans surexpression de récepteur hormonal. On observe également plus de rechutes, de métastases et de décès que dans les cancers du sein Her2-
3) Les anti-récepteurs EGFR (Cetuximab et Erlatinib) Le récepteur EGFR (Epidermal Growth Factor) est une protéine monomérique transmembranaire qui transduit le signal consécutif à sa liaison au facteur de croissance épidermique. Il s’agit d’une protéine à activité tyrosine kinase intrinsèque. Le récepteur EGFR est exprimé dans de très nombreuses tumeurs solides épithéliales, c’est le cas de : 60 à 80% des cancers colorectaux 14 à 91% des cancers du sein 95 à 100% des cancers de la tête et du cou 35 à 70% des cancers de l’ovaire 40 à 80% des cancers du poumon (CPNPC) 50 à 90% des cancers du rein L’expression de ces récepteurs spécifiques permet d’envisager un traitement ciblé en complément d’un traitement plus classique. Actuellement, il existe deux grandes classes d’inhibiteurs du récepteur EGFR : Les anticorps anti-récepteur : ils empêchent la fixation naturelle du facteur de croissance épidermique sur son récepteur, aucun signal intracellulaire ne peut alors être envoyé (toujours IV car trop grosses molécules) Des petites molécules inhibitrices des tyrosines kinases dépendantes du récepteur : après fixation du facteur de croissance épidermique sur le domaine extracellulaire de son récepteur, l’action des tyrosines kinases est stoppée par ces petites molécules inhibitrices, bloquant totalement la cascade de signalisation intracellulaire. Elles peuvent être données en PO. L’erlatinib est indiqué chez les adultes dans le traitement du cancer bronchique non à petites cellules (CBNPC) localement avancé ou métastatique avec mutations activatrices de l’EGFR. Lorsque l’utilisation d’erlatinib est envisagée en tant que traitement ciblé, il est important que la mutation de l’EGFR à partir du tissu tumoral soit recherchée pour tous les patients. L’Erlatinib est un inhibiteur sélectif de l’EGFR – TK qui bloque l’activité des tyrosines kinases, empêchant toute transduction du signal malgré la fixation du ligand sur le récepteur EGFR. Cette action permet donc de diminuer la prolifération cellulaire, l’angiogenèse et par conséquent la formation de métastases. FGSM3 Lyon Est
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UE 19 – Traitements des cancers –S. NEGRIER Le Cetuximab est indiqué dans le traitement des patients présentant un cancer colorectal métastatique avec gène RAS de type sauvage exprimant le récepteur du facteur de croissance épidermique (EGFR). La détermination du statut mutationnel des gènes RAS de type sauvage est désormais impérative avant d’instaurer un traitement par Cétuximab. Ce traitement est donc contre-indiqué pour tous les patients atteints d’un CCRm avec RAS muté (exons 2, 3 et 4 des gènes KRAS et NRAS). Il s’agit d’un anticorps monoclonal anti-EGFR, le blocage du récepteur inhibe son activité : aucun signal de transduction n’est envoyé, diminuant entre autres la prolifération et la survie des cellules cancéreuses. Certaines thérapeutiques ciblées nécessitent l’analyse de la présence d’un récepteur spécifique à la surface des cellules tumorales et de plus en plus souvent son séquençage. En effet on sait que selon l’existence de mutations ou non dans des régions précises et connues du gène du récepteur, le traitement sera efficace ou non (loi du tout ou rien). Il y a actuellement beaucoup de travaux qui portent sur le séquençage des tumeurs, ce qui permet de sélectionner un médicament pour 30% des tumeurs. Les laboratoires qui produisent les traitements ciblés se trouvent confrontés à des problèmes de rentabilité des investissements faits en recherche et en développement : en identifiant précisément le déterminant de l’activité d’un produit, on ne peut que réduire le nombre de patients éligibles au traitement … donc ça fait rentrer moins d’argent pour des molécules qui sont chères à produire. Exemples : La mutation du gène Braf au niveau de l’exon V600 permet un traitement spécifique par une molécule ciblant ce gène muté (Vemurafenib, Dabrafenib) dans le mélanome métastatique. A l’inverse, la présence d’une mutation sur les gènes Kras ou Nras dans les cancers colorectaux empêche l’activité des molécules anti-EGFR (Cetuximab) en phase métastatique.
4) Les anti-angiogéniques (Sutent®) Une des particularités des cellules cancéreuses réside dans leur capacité à induire la néo-angiogenèse. En créant de nouveaux vaisseaux sanguins, elles bénéficient alors de plus d’oxygène et de nutriments indispensables à leur croissance. C’est donc une cible intéressante dans la stratégie de lutte contre le cancer, car il s’agit d’un véritable support à la croissance tumorale et au processus métastatique mais il fonctionne principalement sur les tumeurs assez développées pour être passées au stade néo-angiogenèse. L’angiogenèse est régulée par un équilibre complexe entre divers facteurs naturels pro- et anti- angiogéniques, parmi lesquels le facteur de croissance vasculaire endothélial (VEGF) apparaît comme un élément clé de la vasculogenèse et de l’angiogenèse durant la vie embryonnaire. Les cancers dits « angiogéniques » sont caractérisés par une forte densité tumorale de microvaisseaux et des taux élevés de VEGF. Bien évidemment, il existe d’autres facteurs angiogéniques (FDGF, angiopoïétine, etc.) Sutent est indiqué, entre autres, dans le traitement des cancers du rein avancés/métastatiques (MRCC) chez l'adulte. Il inhibe plusieurs récepteurs à tyrosine kinase impliqués dans la croissance tumorale, la néoangiogenèse pathologique et la progression métastatique du cancer. En interférant avec l’activité des TK, il bloque les signaux intracellulaires destinés à activer les gènes pro-angiogéniques. FGSM3 Lyon Est
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UE 19 – Traitements des cancers –S. NEGRIER 5) Les effets secondaires Les effets secondaires des traitements ciblés sont différents de ceux de la chimiothérapie. Ils sont généralement de faible gravité (lésions cutanéomuqueuses par exemple : œdème palpébral, aphtes,…) mais gênants. Il y a un donc impact sur la qualité de vie. Les traitements sont longs et les effets secondaires durables. Ils reflètent le métabolisme du patient pour un patient donné, on peut donc adapter le traitement en fonction.
V) Immunothérapie Elle a un développement très rapide et représente la dernière génération de traitement médical dans l’arsenal thérapeutique du cancer. Il y a de grandes chances que cela fonctionne bien dans les tumeurs isolées (adjuvants). Cela a été développé grâce à une meilleure connaissance des marqueurs tumoraux. Actuellement, Il y a 2 types de produits qui sont des inhibiteurs des points de contrôle du système immunitaire : inhibiteurs d’immune check points : anticorps anti CTLA4 ou anticorps anti PD1/PDL1. Pour qu’il y ait une réponse immunitaire, il y a une interaction avec les complexes d’histocompatibilité (NHC), le récepteur des cellules T qui déclenche la réaction et un certain nombre d’autres signaux (Rc de co-stimulation) que sont CTLA4 ou PD1, PDL1. On a donc développé des anticorps qui vont bloquer ces récepteurs spécifiquement. Les nouvelles molécules de l’immunothérapie désactivent une des protections de la cellule tumorale : on obtient des réactions du système immunitaire contre les tumeurs. On est capable d’associer deux molécules qui agissent sur deux récepteurs différents : cela a permis d’augmenter considérablement le taux de survie (x2), même chez les patients métastasés, moyennant des effets secondaires importants. Contrairement aux thérapeutiques ciblées, les effets sont durables. Ex. : dans le mélanome métastatique, la survie est augmentée si on utilise l’Ac anti PD1 Nivolumab, avec aucun effet secondaire dans 75% des cas. Aujourd’hui, ces traitements sont ou vont être approuvés pour le traitement du mélanome métastatique, du cancer bronchique en phase avancée et du cancer du rein métastatique. Des résultats prometteurs ont été observés dans les cancers ORL, du foie, de l’ovaire, etc. Pour le cancer bronchique, il y a un gain de survie chez 2/3 des patients. Cela fonctionne le mieux dans les cancers du fumeur, qui sont connus pour être les plus agressifs. Elles ont un fort taux de mutations et sont donc capables de produire de nouveaux antigènes, plus facilement reconnus par le système immunitaire. On utilise ces médicaments après une 1ère chimiothérapie ou on peut les utiliser seuls. Il faut également apprendre à gérer les effets secondaires auto-immuns. Les organes les plus touchés sont la thyroïde, la peau, poumon, colon-rectum et le foie. D’autres sont également touchés mais plus rarement. On notera la grande efficacité du Nivolumab mais aussi sa grande toxicité dans le CBNC par exemple, avec apparition de diabète insulino-dépendant et d’hypophysite auto-immune nécessitant l’arrêt du traitement.
Conclusion En conclusion, les traitements médicaux du cancer évoluent : De la chimiothérapie, hormonothérapie aux thérapies ciblées et à l’immunothérapie de plus en plus efficaces, leur importance dans la prise en charge des cancers et leurs indications augmentent.
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Radiothérapie externe et curiethérapie Principes généraux
I) Généralités Actuellement, il y a à peu près 385 000 nouveaux cas de cancer par an en France (2015), et 2/3 des patients seront traités à un moment ou à un autre de leur trajectoire par radiothérapie, que ce soit à visée curative ou palliative.
1) Aspects physiques Il existe deux grandes classes de radiothérapie :
La radiothérapie externe (RTE) : la source d’irradiation est située à l’extérieur du patient, un accélérateur projette le rayonnement. La majorité des patients sera traitée de cette manière-là. La curiethérapie : la source d’irradiation est située directement au contact de la tumeur. Ce sont des sources scellées (=solides) ou non scellées (=liquides) radioactives placées directement au contact de la tumeur (ex : fils d’iridium, grains dans la prostate, iode marqué pour la thyroïde…)
La RTE est délivrée par un accélérateur linéaire. Le rayonnement consiste en un faisceau de photons dirigés vers la tumeur du patient, les photons étant produits par une accélération d’électrons dans l’accélérateur. Celuici est muni de collimateurs multi-lames qui permettent de donner au faisceau la forme souhaitée, correspondant à la forme de la tumeur. L’accélérateur est capable de tourner autour du patient, offrant la possibilité de varier les incidences pour un meilleur ajustement du rayonnement à la forme de la tumeur, tout en minimisant les lésions des organes voisins. On trouve différents types d’irradiations : 95% sont délivrées avec des photons : ils sont utilisés la plupart du temps et pour les tumeurs profondes car ils sont pénétrants. 5% sont délivrées par des protons : ils ne sont utilisés que dans des centres très spécialisés (Orsay et Nice). L’efficacité est la même que celle des photons, tout en limitant mieux les dommages occasionnés aux tissus biologiques environnant la tumeur. Cependant, ils sont extrêmement difficiles et chers à produire, c’est pourquoi on les réserve en priorité aux enfants et à des cas où le bénéfice thérapeutique est montré. Anecdotiquement, on peut utiliser des électrons pour les tumeurs superficielles car ils sont peu pénétrants, mais ils sont très peu employés en pratique. Il est possible de faire varier l’énergie du rayonnement pour faire varier la profondeur du dépôt d’énergie.
La plupart des irradiations se font par photons.
2) Action biologique Quelle que soit la nature du faisceau, il dépose beaucoup d’énergie, ce qui entraîne une ionisation, une excitation moléculaire. Les molécules excitées vont interagir avec les molécules voisines, ce qui va donner lieu à une phase chimique. L’irradiation a principalement un effet sur l’ADN. Le faisceau, qu’il soit orienté vers une cellule tumorale ou une cellule saine, va engendrer des cassures simple brin, des cassures double brin (dans une moindre proportion) et des altérations de bases. La mort cellulaire principale par irradiation est la mort mitotique : la division des cellules en mitose est empêchée. Ceci explique la toxicité de la radiothérapie : les cellules saines en division sur le trajet du faisceau seront également concernées par la mort mitotique.
La principale cible de la radiothérapie en termes d’efficacité est l’ADN pour engendrer la mort mitotique.
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UE 19 – Traitements des cancers – L. CLAUDE Les lésions de l’ADN sont :
Soit des lésions létales d’emblée, notamment les lésions double brins Soit des lésions sublétales, plus fréquentes. Si elles sont réparées, la cellule survit mais peut éventuellement garder une mutation (cancer radio-induit). Si elles ne sont pas réparées et qu’elles s’accumulent, elles conduiront à la mort cellulaire. Il faut attendre plusieurs divisions cellulaires (accumulation de lésions sublétales) avant d’observer la mort mitotique : l’effet n’est donc pas immédiat.
La radiothérapie est efficace sur des cellules en division, donc principalement en phase G2 ou en phase M du cycle cellulaire et principalement sur les cellules à division rapide. Actuellement, on considère que l’effet létal pourrait être lié aux MLDS (« Multiple Localized Damaged Sites »), c’est-à-dire à la concentration dans un volume réduit de plusieurs lésions, excédant les possibilités de réparation de l’ADN. Tissu tumoral
Tissu sain
% de cellules en division
Important
Faible
Capacités de réparation de l’ADN
Moins bonnes
Plus performantes
Délai de réparation
Long
Court
Le faisceau a les mêmes effets sur les cellules normales qu’il traverse pour atteindre les cellules tumorales, notamment si elles se divisent vite (cellules des muqueuses notamment). L’intérêt de la radiothérapie est qu’elle joue sur l’effet différentiel, c’est-à-dire la capacité des cellules saines à mieux se réparer et globalement à moins se diviser que les cellules cancéreuses. Pour une même dose d’irradiation, les dommages seront plus conséquents dans une cellule tumorale que dans une cellule saine. On fera donc de manière générale une dose par jour pour laisser le temps aux cellules saines de récupérer.
II) Radiothérapie externe (RTE) 1) Indications La RTE est un traitement locorégional à visée curative ou palliative. a. Visée curative (60 – 70%) L’objectif est de détruire de manière définitive la totalité des cellules tumorales dans un objectif de guérison, en évitant toute récidive locale. On distingue plusieurs situations :
RTE exclusive : Le traitement local consiste uniquement en la RTE, le patient n’est pas opéré. Elle peut être accompagnée d’une chimiothérapie. On a recours à ce mode de traitement quand la chirurgie serait trop délabrante, que le patient a une contre-indication opératoire, ou que la chirurgie n’est pas nécessaire. Exemples : maladie de Hodgkin, petite tumeur ORL... RTE néo-adjuvante : Le patient subit une irradiation avant l’opération chirurgicale. Cela permet une réduction et une stérilisation tumorale optimale. Exemples : cancer du col de l’utérus ou cancer du rectum (pour conserver le sphincter et éviter la stomie). RTE adjuvante : Le patient subit une irradiation après l’opération chirurgicale pour un meilleur contrôle locorégional par stérilisation de la maladie infraclinique résiduelle. Exemple : tumorectomie mammaire suivie d’une irradiation du sein pour pouvoir conserver celui-ci, cancer ORL, de l’endomètre, du poumon… pour éviter les récidives. b. Visée palliative (30 – 40%)
L’objectif ici est de freiner l’évolution de la maladie et de soulager les symptômes (douleur/saignements ++) en évitant au maximum la toxicité. L’idée est de soulager rapidement avec le moins de séances possibles. La RTE à visée palliative n’est pas rare, elle concerne 1/3 des patients adressés dans ces services :
Les tumeurs très évoluées localement (inopérables) ou métastatiques qui sont douloureuses ou hémorragiques (vessie, ORL). Les métastases : cérébrales, méningites carcinomateuses, osseuses, compressives (type compression médullaire non opérable = traitement en urgence 3 mois).
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