Le guide du developpement durable en entreprise 2212543115, 9782212543117 [PDF]


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Table of contents :
Sommaire......Page 6
Introduction......Page 10
Définition officielle......Page 14
Pour y voir encore plus clair…......Page 17
Définition plus pratique…......Page 20
Le patron d’abord......Page 21
Très polluantes ou peu polluantes......Page 23
Chapitre 2 - Développement durable, pourquoi votre entreprise doit-elle s’engager ?......Page 26
Pouvoir continuer à créer de la valeur dans de bonnes conditions......Page 27
Lois et règlements: ça bouge vite… et à tous les échelons......Page 28
Votre secteur professionnel aussi réglemente «durablement »…......Page 33
Faire face aux pressions directes ou indirectes de vos clients grand public......Page 36
De plus en plus de consommateurs éco-responsables......Page 39
Vos «gros» ou «grands» clients…......Page 41
La pression montante des investisseurs......Page 42
Les agences de notation sociale vous observent…......Page 46
… et les indicateurs développement durable se multiplient......Page 49
Le poids et l’action grandissante des ONG…......Page 51
Les actions encore balbutiantes des associations de consommateurs…......Page 56
N’oublions pas les médias…......Page 57
Quels sont les médias les plus sensibles au développement durable?......Page 58
Les collectivités territoriales s’intéressent aux entreprises......Page 62
Vos concurrents s’intéressent à vous aussi......Page 65
Et les partis politiques dans tout cela?......Page 66
Les syndicats ont encore du chemin à faire, mais ils ont pris la bonne route......Page 68
Les salariés, eux, sont un peu plus en avance......Page 72
Améliorer son efficacité économique et financière avec le développement durable......Page 74
Risques financiers et risques d’image......Page 94
Convaincre actionnaires et financiers du bien-fondé de votre démarche......Page 98
Chapitre 3 - Comment construire une stratégie et un plan d’action ad hoc ?......Page 100
Bien connaître l’existant......Page 101
Écrire le draft stratégique......Page 103
Construire le plan d’action......Page 105
Savoir dégager des priorités......Page 106
Quel budget prévoir? Quelle organisation mettre en place?......Page 107
Instaurer des liens réguliers avec vos contributeurs développement durable......Page 110
Économies d’énergie et de ressources: électricité, carburant, eau, papier…......Page 112
L’éclairage......Page 114
Produire sa propre électricité......Page 115
Le chauffage......Page 118
Les équipements bureautiques......Page 120
La climatisation......Page 121
Le carburant......Page 122
Réduire sa consommation d’eau......Page 125
Maîtriser sa consommation de papier......Page 128
Quels critères pour l’achat responsable du papier?......Page 130
Faire d’un déchet une matière utile et d’un coût, un bénéfice......Page 131
Ce qu’impose la réglementation (Code de l’environnement)......Page 132
Organiser le tri......Page 133
Vendre ses déchets......Page 134
Mise en place de la démarche de gestion des déchets......Page 137
Adresses utiles......Page 141
Les transports et les PDE......Page 142
Les systèmes de compensation carbone......Page 143
Le Plan de déplacements d’entreprise (PDE)......Page 144
Les étapes de la mise en place d’un PDE......Page 147
La marche et le vélo, des modes alternatifs… qui préservent la santé......Page 151
Mais aussi: le bilan carbone, l’éco-conception et la préservation de la biodiversité…......Page 156
Comment réaliser son bilan carbone?......Page 157
Green it! L’éco-conception......Page 159
Quelques pistes pour se lancer dans l’éco-conception......Page 161
La biodiversité, un atout pour vos sites d’entreprise......Page 163
Biodiversité et entreprise: par quoi commencer?......Page 166
Le volet social et sociétal......Page 169
Santé......Page 171
Le stress......Page 172
Les cancers......Page 175
N’hésitez pas à abuser du bio pour vos employés......Page 176
Les solutions passent par la prévention… et l’application du principe de précaution......Page 177
Pour agir efficacement, respecter d’abord la réglementation......Page 179
La vie dans l’entreprise – la lutte contre toutes les discriminations......Page 181
Mécénat de compétences: soutenir l’engagement citoyen des salariés......Page 191
Commercer équitablement…......Page 193
Action en faveur des populations défavorisées......Page 194
Qu’entend-on exactement par «achats responsables»?......Page 197
Le commerce équitable, le summum de l’achat responsable?......Page 203
Quel rôle pour l’acheteur responsable?......Page 204
Et la gouvernance…......Page 205
La relation donneur d’ordres - sous-traitants......Page 207
Points d’appuis utiles......Page 210
Chapitre 5 - Les principaux leviers de réussite......Page 214
Sensibiliser tous les acteurs de l’entreprise......Page 215
Mettre en place un outil de reporting dédié au développement durable......Page 220
Comment construire cet outil de reporting?......Page 221
Le périmètre de chaque indicateur......Page 224
Collecte et consolidation des indicateurs......Page 225
Fiabilité des indicateurs......Page 226
Vérifications internes et externes et contrôles......Page 228
Le baromètre interne développement durable......Page 230
Sur quoi poser les questions et quels types de questionnement?......Page 231
Passer tous les projets significatifs au tamis du développement durable......Page 233
Comment impliquer les managers?......Page 236
Offrir et acheter des produits et des services responsables......Page 237
Les offres et les produits responsables......Page 238
Acheter de façon responsable......Page 240
Chapitre 6 - Le poste de directeur (ou responsable) du développement durable......Page 246
Prouver que le développement durable crée de la valeur......Page 247
Plus généraliste que technicien......Page 248
Les principales qualités requises......Page 250
À qui rattacher le directeur du développement durable?......Page 252
Quel salaire?......Page 253
Les entreprises doivent apprendre d’autres façons de calculer......Page 254
Les fonds structurels......Page 256
L’objectif «Coopération territoriale européenne»......Page 257
Le Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader)......Page 258
Le septième Programme-cadre de recherche et développement technologique (PCRD)......Page 259
L’Ademe......Page 260
Le système d’échange des permis d’émissions de gaz à effet de serre......Page 262
Les projets domestiques......Page 263
Les certificats d’économies d’énergie (CEE)......Page 264
Les mécanismes de développement propre (MDP)......Page 265
Les contrats de projet 2007-2013 dans les Régions......Page 266
D’autres moyens de financement......Page 267
Annexe 1 - Déclaration de Rio sur l’environnement et le développement......Page 270
Droits de l’homme......Page 278
Lutte contre la corruption (depuis le 24 juin 2004)......Page 279
Annexe 3 - Les rendez-vous du développement durable en France......Page 280
www.comite21.org......Page 284
www.orse.org......Page 285
www.oree.org......Page 286
www.imsentreprendre.com......Page 287
www.passages-forum.fr......Page 288
Le Pacte mondial (ou Global Compact)......Page 289
www.csreurope.org......Page 291
www.iddri.org......Page 292
www.wbcsd.org......Page 294
Les cercles ou les clubs de directeurs du développement durable......Page 296
Les commissions développement durable des syndicats professionnels......Page 297
Remerciements......Page 298
Index......Page 300
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Le guide du developpement durable en entreprise
 2212543115, 9782212543117 [PDF]

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Zitiervorschau

Patrick Widloecher Isabelle Querne

Le guide du développement durable en entreprise

Stratégie Actions Indicateurs Leviers de réussite Aides et financements

Le guide du développement durable en entreprise

Éditions d’Organisation Groupe Eyrolles 61, bd Saint-Germain 75240 Paris cedex 05 www.editions-organisation.com www.editions-eyrolles.com

Les Echos Editions Groupe Les Echos 16, rue du Quatre-Septembre 75112 Paris cedex 02 www.lesechos-editions.fr

Le Code de la propriété intellectuelle du 1er juillet 1992 interdit en effet expressément la photocopie à usage collectif sans autorisation des ayants droit. Or, cette pratique s’est généralisée notamment dans l’enseignement provoquant une baisse brutale des achats de livres, au point que la possibilité même pour les auteurs de créer des œuvres nouvelles et de les faire éditer correctement est aujourd’hui menacée. En application de la loi du 11 mars 1957, il est interdit de reproduire intégralement ou partiellement le présent ouvrage, sur quelque support que ce soit, sans autorisation de l’Éditeur ou du Centre français d’exploitation du droit de copie, 20, rue des Grands-Augustins, 75006 Paris.

© Groupe Eyrolles, 2009 © Les Echos Editions, 2009 ISBN : 978-2-212-54311-7

Patrick W IDLOECHER et Isabelle Q UERNE

Le guide du développement durable en entreprise

À Dorothée Briaumont, François Fatoux, Nadia Loury, H. Émile Malet, Pierre Radanne et Claire Tutenuit, qui, avec beaucoup d’autres, se dépensent chaque jour sans compter, dans les associations qu’ils animent, pour que le développement durable vive et se développe dans les entreprises

À Lorraine À Vincent

Sommaire

Introduction

....................................................................................................................................

9

Chapitre 1 Que veut dire « développement durable » ?

.................................................. 13 Définition officielle ............................................................................................................. 13 Pour y voir encore plus clair… ...................................................................................... 16 Définition plus pratique… .............................................................................................. 19 Le patron d’abord ............................................................................................................ 20 Très polluantes ou peu polluantes ............................................................................... 22

© Groupe Eyrolles – © Les Echos Editions

Chapitre 2 Développement durable, pourquoi votre entreprise doit-elle s’engager ? ............................................................................................................ 25 Pouvoir continuer à créer de la valeur dans de bonnes conditions .............. 26 S’adapter au contexte, qui pèse de plus en plus sur les entreprises .............. 27 Lois et règlements : ça bouge vite… et à tous les échelons .................................. 27 Votre secteur professionnel aussi réglemente « durablement »… ..................... 32 Des parties prenantes à l’externe de plus en plus exigeantes .............................. 35 Faire face aux pressions directes ou indirectes de vos clients grand public .. 35 De plus en plus de consommateurs éco-responsables ....................................... 38 Vos « gros » ou « grands » clients… ....................................................................... 40 La pression montante des investisseurs ................................................................. 41 Les agences de notation sociale vous observent… ............................................. 45 … et les indicateurs développement durable se multiplient ............................ 48 Le poids et l’action grandissante des ONG… .................................................... 50 Les actions encore balbutiantes des associations de consommateurs… ........ 55 N’oublions pas les médias… ........................................................................................ 56 Quels sont les médias les plus sensibles au développement durable ? ........... 57 Les collectivités territoriales s’intéressent aux entreprises .................................... 61 Vos concurrents s’intéressent à vous aussi ................................................................. 64 Et les partis politiques dans tout cela ? ..................................................................... 65 Les pressions viennent aussi de l’interne ................................................................... 67 Les syndicats ont encore du chemin à faire, mais ils ont pris la bonne route ............................................................................................................. 67 Les salariés, eux, sont un peu plus en avance ...................................................... 71

6

Le guide du développement durable en entreprise

Améliorer son efficacité économique et financière avec le développement durable ...................................................................................... 73 Risques financiers et risques d’image ......................................................................... 93 Convaincre actionnaires et financiers du bien-fondé de votre démarche ..... 97

Chapitre 3 Comment construire une stratégie et un plan d’action ad hoc ?

99 100 102 104 105 106

....

Bien connaître l’existant ................................................................................................ Écrire le draft stratégique .............................................................................................. Construire le plan d’action ........................................................................................... Savoir dégager des priorités ....................................................................................... Quel budget prévoir ? Quelle organisation mettre en place ? ........................ Instaurer des liens réguliers avec vos contributeurs développement durable ..................................................................................................

109

............................................................. 111 Le volet environnemental .............................................................................................. 111 Économies d’énergie et de ressources : électricité, carburant, eau, papier… ........................................................................................................................... 111 L’éclairage ................................................................................................................. 113 Produire sa propre électricité ........................................................................... 114 Le chauffage .............................................................................................................. 117 Les équipements bureautiques ............................................................................. 119 La climatisation ....................................................................................................... 120 Le carburant ............................................................................................................. 121 Réduire sa consommation d’eau .......................................................................... 124 Maîtriser sa consommation de papier ................................................................ 127 Quels critères pour l’achat responsable du papier ? ...................................... 129 Tri des déchets, recyclage ...................................................................................... 130 Faire d’un déchet une matière utile et d’un coût, un bénéfice ................... 130 Ce qu’impose la réglementation (Code de l’environnement) ...................... 131 Organiser le tri .................................................................................................. 132 Réduire la toxicité ............................................................................................. 133 Vendre ses déchets .............................................................................................. 133 Mise en place de la démarche de gestion des déchets .................................... 136 Adresses utiles ..................................................................................................... 140 Les transports et les PDE ...................................................................................... 141 Les systèmes de compensation carbone ............................................................ 142 Le Plan de déplacements d’entreprise (PDE) ................................................ 143 La marche et le vélo, des modes alternatifs… qui préservent la santé ...... 150

Mais aussi : le bilan carbone, l’éco-conception et la préservation de la biodiversité… ................................................................................................. 155 Comment réaliser son bilan carbone ? ........................................................... 156

© Groupe Eyrolles – © Les Echos Editions

Chapitre 4 Les principales actions à entreprendre

7

Sommaire

Green it ! L’éco-conception .............................................................................. 158 Quelques pistes pour se lancer dans l’éco-conception ................................... 160 La biodiversité, un atout pour vos sites d’entreprise .................................... 162

Le volet social et sociétal ................................................................................................ 168 Santé .................................................................................................................................. 170 Des pathologies en hausse ..................................................................................... 171 Les troubles musculo-squelettiques (TMS) .................................................... 171 Le stress ............................................................................................................... 171 Les cancers .......................................................................................................... 174 N’hésitez pas à abuser du bio pour vos employés ........................................... 175 Les solutions passent par la prévention… et l’application du principe de précaution ............................................................................................................ 176 Pour agir efficacement, respecter d’abord la réglementation ....................... 178

La vie dans l’entreprise – la lutte contre toutes les discriminations ............. 180 Mécénat de compétences : soutenir l’engagement citoyen des salariés ...... 190 Commercer équitablement… .............................................................................. 192 Action en faveur des populations défavorisées ................................................. 193 Les achats responsables .......................................................................................... 196 Qu’entend-on exactement par « achats responsables » ? .............................. 196 Le commerce équitable, le summum de l’achat responsable ? ..................... 202 Quel rôle pour l’acheteur responsable ? .......................................................... 203 Et la gouvernance… ......................................................................................... 204 La relation donneur d’ordres - sous-traitants ............................................... 206

Chapitre 5 Les principaux leviers de réussite

Vérifications internes et externes et contrôles .......................................................

213 214 219 219 220 223 224 225 227

Comment mesurer les évolutions de l’état d’esprit des managers et du personnel ? ...................................................................................................... Le baromètre interne développement durable ............................................... Sur quoi poser les questions et quels types de questionnement ? ................. Passer tous les projets significatifs au tamis du développement durable .... Comment impliquer les managers ? ............................................................... Offrir et acheter des produits et des services responsables ............................ Les offres et les produits responsables .............................................................. Acheter de façon responsable ............................................................................

229 229 230 232 235 236 237 239

...........................................................................

© Groupe Eyrolles – © Les Echos Editions

Sensibiliser tous les acteurs de l’entreprise ........................................................... Mesurer l’impact de vos actions développement durable .............................. Mettre en place un outil de reporting dédié au développement durable .... Comment construire cet outil de reporting ? ................................................... Le périmètre de chaque indicateur ................................................................. Collecte et consolidation des indicateurs ........................................................ Fiabilité des indicateurs ...................................................................................

8

Le guide du développement durable en entreprise

Chapitre 6 Le poste de directeur (ou responsable) du développement durable ........................................................................................................................................ 245 Prouver que le développement durable crée de la valeur ............................... Plus généraliste que technicien ................................................................................... Les principales qualités requises ................................................................................. À qui rattacher le directeur du développement durable ? .............................. Quel salaire ? ........................................................................................................................

246 247 249 251 252

Chapitre 7 Où trouver les aides et les financements ?

Annexe 1 – Déclaration de Rio sur l’environnement et le développement ........................................................................................................ 269 Annexe 2 – Les 10 principes du Pacte mondial des Nations unies ............................................................................................................... 277 Annexe 3 – Les rendez-vous du développement durable en France ................................................................................................................................... 279 Annexe 4 – Les lieux où échanger les bonnes pratiques ................... 283 Remerciements Index

.......................................................................................................................

297

..............................................................................................................................................

299

© Groupe Eyrolles – © Les Echos Editions

..................................................... 253 Les entreprises doivent apprendre d’autres façons de calculer .................... 253 Les subventions de l’Union européenne ................................................................ 255 Les fonds structurels ...................................................................................................... 255 L’objectif « Convergence » .................................................................................... 256 L’objectif « Compétitivité régionale et emploi » ............................................. 256 L’objectif « Coopération territoriale européenne » ........................................ 256 Le Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader) ............. 257 Le Programme-cadre pour l’innovation et la compétitivité (PIC) .............. 258 Le septième Programme-cadre de recherche et développement technologique (PCRD) ................................................................................................ 258 Les financements et les aides en France ................................................................. 259 L’Ademe ........................................................................................................................... 259 Le système d’échange des permis d’émissions de gaz à effet de serre ............. 261 Les projets domestiques ......................................................................................... 262 Les certificats d’économies d’énergie (CEE) .................................................... 263 Les mécanismes de développement propre (MDP) .......................................... 264 Les contrats de projet 2007-2013 dans les Régions ......................................... 265 Handicapés : la prime initiative emploi (PIE) .................................................... 266 D’autres moyens de financement .............................................................................. 266

Introduction

© Groupe Eyrolles – © Les Echos Editions

La quasi-totalité des entreprises du CAC 40 et les majors du secteur public se sont aujourd’hui dotées d’une stratégie de développement durable dont elles déclinent chaque année un plan d’action ad hoc. Dans le même temps, environ 400 entreprises françaises ont adhéré au Pacte mondial (ou Global Compact) des Nations unies, qui propose dix engagements pour le développement durable. Mais les autres entreprises ? Que font-elles ? On pense notamment aux dizaines de milliers de PME et de PMI, voire aux TPE ? De plus en plus souvent, des premières, grandes donneuses d’ordres, elles reçoivent appels d’offres ou mises en concurrence qui, à leur surprise souvent, exigent qu’elles soient engagées dans une démarche de développement durable, et demandent à connaître leurs principales orientations et leurs résultats en la matière. Pour remporter le marché, il leur faut alors répondre, et si possible de façon positive, sur leur niveau de responsabilité sociale à travers ses principales composantes, qu’elles soient environnementale, sociale, sociétale ou économique. Ainsi, aux deux critères habituels de prix et de qualité pour départager les entreprises candidates, de plus en plus souvent, les grands donneurs d’ordres en ajoutent un troisième, celui du niveau d’engagement dans le développement durable du candidat fournisseur ou sous-traitant. L’objectif de cet ouvrage n’est pas d’apprendre aux grandes entreprises comment construire puis mettre en œuvre une politique de développement durable qu’elles pratiquent déjà au quotidien, depuis quelques années – même si quelques-unes d’entre elles disposent encore de

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Le guide du développement durable en entreprise

marges de progrès certaines… –, mais plutôt d’expliquer aux PMI, PME et TPE pourquoi elles se doivent aujourd’hui de s’engager sans tarder dans une telle démarche, si possible structurée. Nous tenterons de montrer à ces entreprises que cela devient chaque jour, un peu plus, un critère déterminant – et parfois discriminant – pour la bonne santé de leurs affaires. Cela va leur permettre non seulement d’attirer plus facilement de nouveaux investisseurs tout en conservant les anciens, mais aussi de démarcher de nouveaux clients – tout en fidélisant leur clientèle habituelle. De plus, un bon niveau de responsabilité sociale va les aider à les rendre plus attractives aux yeux de celles et ceux qui cherchent un emploi. Dans un pays comme la France, la valeur éthique globale des entreprises prend, au fil des années, de plus en plus d’importance pour les parties prenantes de l’entreprise, c’est-à-dire pour les acteurs qui l’entourent et l’observent. Respect de l’environnement, respect du client, respect de son personnel, respect des territoires sur lesquels on développe ses activités, respect des règles de bonne gouvernance, le développement durable et l’éthique sont devenus pour le monde de l’entreprise un véritable enjeu économique et financier. De survie parfois pour certaines.

Notre ambition, dans ces pages, n’est pas de remplir, avec force données, graphiques, dessins techniques ou textes juridiques, la tête des dirigeants soucieux de démarrer une politique de développement durable au sein de leur entreprise ou celle de leurs responsables développement durable fraîchement « arrivés aux affaires ». Mais plutôt de leur proposer, à partir d’expériences vécues, quelques clés efficaces qui leur permettent d’ouvrir les bonnes portes dès le départ et de démarrer le mieux possible un processus de développement durable,

© Groupe Eyrolles – © Les Echos Editions

Dans un premier temps, nous expliquerons aussi comment on peut démarrer une démarche de développement durable puis, dans un deuxième temps, comment la réussir. Où trouver des aides, des sources de financement, comment choisir son ou ses responsables développement durable. Où les positionner dans l’organigramme de l’entreprise, etc.

Introduction

11

en le plaçant d’entrée de jeu sur les bons rails. Ensuite, une fois la machine lancée, leur intelligence, leur bon sens, leur pragmatisme, leur solidarité avec les générations à venir, mais aussi les pressions externes, voire internes, leur suffiront pour bien tenir le cap. N’oublions jamais, en effet, que le développement durable dans l’entreprise, c’est moins un changement technique qu’un changement de comportement. Une façon au fond de réinventer ses modes de fonctionnement, notamment lors de l’élaboration des projets ou de ce qui préside aux prises de décisions. Le développement durable permet aussi de rester toujours en éveil pour mieux anticiper les risques et les enjeux à venir. Attention, réussir sa démarche de développement durable se garantit à travers deux principes que l’on se doit de garder toujours à l’esprit. D’abord, le rôle de l’entreprise, ce n’est pas de se poser en sauveur pour régler tous les maux de la planète. Sa raison d’être, ça reste bien de créer de la valeur. Et tant mieux si elle arrive à le faire de façon responsable. Ensuite, toujours considérer le développement durable comme étant avant tout un levier de performance pour son entreprise, à savoir un moyen efficace d’améliorer ses résultats économiques et financiers, de garantir son unité, de motiver son personnel et d’assurer sa pérennité.

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La réussite de la mise en œuvre d’une politique de développement durable, qui doit être synonyme de nouvelle source d’énergie pour la croissance de votre entreprise, tient aussi au fait de toujours savoir garder cette ligne de conduite. Bonne lecture !

Chapitre 1

Que veut dire « développement durable » ?

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Définition officielle L’expression est dans tous les discours sinon dans toutes les pratiques : la notion de développement durable s’est répandue dans les différentes couches de la société. Connue d’une minorité de la population en 2002 (33 % seulement en avaient entendu parler1), l’expression est désormais plus ou moins familière à chacun. En témoigne un sondage de la Sofres réalisé début 2008 qui indique que 84 % des Français déclarent que, pour eux, « le développement durable évoque avant tout la préservation de l’avenir, des générations futures ». Ils sont aussi 79 % à faire rimer développement durable avec « préservation de l’environnement, des ressources naturelles ». 18 % parlent de « préservation d’un équilibre social » et 13 % d’un « développement économique et commercial 2 ». Il reste 2 % pour qui le développement durable n’évoque rien… 1. Sondage Ifop pour Les Échos. 2. 97 % des Français déclarent avoir déjà entendu parler de l’expression « développement durable ». Sondage réalisé par Ipsos en novembre et décembre 2008 pour le compte du Journal du dimanche.

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Le guide du développement durable en entreprise

La notion de développement durable apparaît en 1972, quand des chercheurs du MIT1 font émerger, à la Conférence des Nations unies sur l’environnement à Stockholm, la notion d’éco-développement. Celle-ci sera officialisée en avril 1987, dans le rapport2 de la Commission mondiale pour l’environnement et le développement, avec la définition du concept de développement durable : « Un développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures de répondre aux leurs. » Ce n’est toutefois qu’au Sommet de Rio, en 1992, que fut adopté un plan mondial en faveur du développement durable avec la Déclaration sur les droits et les responsabilités des États (voir en annexe).

Mais qui pense durable a les yeux tournés vers l’avenir. Or, c’est dès aujourd’hui que se tisse cet avenir et qu’il faut prendre en compte les conséquences de la détérioration de notre environnement (perte de qualité des sols, désertification, raréfaction de l’eau potable, recul de la biodiversité…) et les premières alertes, plus ou moins visibles selon les régions, du réchauffement climatique (sécheresses et incendies, inondations, tempêtes…). Une action précoce sera infiniment moins coûteuse, à tous les niveaux (que l’on considère l’économie, la société ou l’environnement, les trois composantes du développement durable) que le laisser-faire, comme l’a avancé Nicholas Stern, ancien économiste en chef de la Banque mondiale, dans son rapport 1. Massachusetts Institute of Technology. 2. Our Common Future, plus connu sous le nom de Rapport Brundtland, dans lequel figuraient les recommandations qui ont conduit à la tenue du Sommet de la Terre de Rio ou Conférence des Nations unies sur l’environnement et le développement (Cnued) en 1992. Norvégienne, Gro Harlem Brutland a été ministre de l’Environnement de 1974 à 1979, et trois fois Premier ministre, entre 1981 et 1996. Elle avait été nommée par Javier Pérez de Cuéllar, alors secrétaire général des Nations unies, à la tête de la Commission mondiale pour l’environnement et le développement en 1983.

© Groupe Eyrolles – © Les Echos Editions

L’expression « développement durable » est la traduction la plus courante (et celle utilisée dans la première traduction en français du Rapport Brundtland) de sustainable development. Elle introduit de façon plus explicite la notion de durabilité que la traduction littérale, « développement soutenable », de l’expression anglaise.

Que veut dire « développement durable » ?

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Les Aspects économiques du réchauffement climatique. Nicholas Stern a en effet déterminé qu’il faudrait consacrer 200 milliards de livres chaque année (soit 1 % du PIB mondial) pour stabiliser le taux de CO2 atmosphérique à un niveau maximal de 550 ppm1. De plus, cette somme devrait s’accroître à mesure qu’augmente le PIB mondial, pour être possiblement multipliée par trois ou quatre d’ici à 2050…

© Groupe Eyrolles – © Les Echos Editions

La notion de développement est aussi à considérer. Elle recouvre un champ plus large que la croissance (augmentation des richesses) : elle induit une idée de transformation (de progrès ?), plus à même d’assurer, sur le long terme, l’établissement d’une société propice aux activités économiques. Ainsi, les pays producteurs de pétrole ont vu leur richesse augmenter avec la hausse sans précédent du prix du baril, sans pour cela connaître un réel développement (accès à l’eau potable, à une alimentation équilibrée, à l’éducation, aux soins médicaux, à la démocratie, etc.). En Afrique, qui fournit environ 11 % de la production pétrolière et détient quelque 9,4 % des réserves mondiales, « l’argent du pétrole s’évapore dans la savane [et] ne conduit pas au développement économique », observe Jean-Marie Chevalier2, professeur à l’université Paris-Dauphine et directeur au Cambridge Energy Research Associates. Il constate également que, sur ce continent, les indicateurs de développement des pays producteurs ne sont pas meilleurs que ceux des pays importateurs. Le Nigeria, par exemple, n’utilise qu’une infime part de la manne pétrolière pour améliorer le sort de ses millions de pauvres, et, de leur côté, « les Tchadiens ne comprennent par pourquoi le pétrole augmente, mais pas leur niveau de vie », expliquait Géraud Magrin, docteur en géographie au Cirad (Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement), lors d’un colloque à Paris de l’AFD (Agence française de développement). De plus, il est facile d’observer que, depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, des pays 1. Parties par million. À l’ère préindustrielle, la concentration atmosphérique de CO2 était de 280 ppm. 2. http://www.algerie-dz.com/forums/showthread.php?t=22235.

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Le guide du développement durable en entreprise

dépourvus de ressources minières, comme le Japon, la Corée du Sud, etc., se sont plus développés que ceux disposant d’abondantes ressources de matières premières.

Pour y voir encore plus clair… Le développement durable a trouvé de nombreuses appellations dérivées : développement responsable, RSE ou responsabilité sociale, voire sociétale, des entreprises. Qu’est-ce, au fond, que la RSE ? C’est « l’intégration volontaire par les entreprises de préoccupations sociales et environnementales à leurs activités commerciales et leurs relations avec leurs parties prenantes », indique le Livre vert Promouvoir un cadre européen pour la responsabilité sociale des entreprises, publié en 2001 par la Commission européenne1.

Elle implique aussi le respect des règles de bonne gouvernance de l’entreprise : fonctionnement du conseil d’administration, dialogue social, éthique et déontologie… On a également beaucoup parlé du Plan Climat : il s’agit du plan d’action adopté par le gouvernement en 2004 pour définir la contribution de la France à la lutte contre le changement climatique, en respectant l’objectif du Protocole de Kyoto, voire en le dépassant. 1. http://ec.europa.eu/enterprise/csr/index_fr.htm.

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Cette définition montre que si l’expression en anglais mentionne la seule responsabilité sociale, la RSE couvre aussi les aspects environnementaux et qu’elle implique pour l’entreprise d’intégrer les préoccupations socio-environnementales dans sa stratégie et dans ses opérations commerciales. La RSE, qui relève essentiellement d’une démarche volontaire, met en jeu la manière dont les entreprises interagissent avec leurs différentes parties prenantes, les stakeholders, tant internes (employés, syndicats, CHSCT, comité d’entreprise, conseil d’administration…) qu’externes (clients, voisinage, associations, organisations non gouvernementales, collectivités locales, pouvoirs publics…).

Que veut dire « développement durable » ?

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Il comporte des mesures dans tous les secteurs de l’économie et de la vie quotidienne des Français en vue d’économiser quelque 54 millions de tonnes d’équivalent CO2 par an à l’horizon 2010. Une actualisation du Plan Climat a été présentée lors du comité interministériel pour le développement durable (CIDD) de novembre 2006, et devait être complétée et renforcée par les premières mesures et les chantiers opérationnels du Grenelle de l’environnement afin d’atteindre l’objectif d’une réduction de 20 % des émissions européennes d’ici à 2020 et d’une division par 4 de ses émissions d’ici à 2050. Le Plan Climat concerne donc essentiellement le volet environnemental du développement durable. Des Plans Climat territoriaux ont été proposés aux collectivités locales, et l’Ademe (Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie) a publié à destination de celles-ci un Guide Plan Climat territorial pour les accompagner dans leurs démarches. La Ville de Paris s’est par exemple dotée d’un Plan Climat.

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Mais des entreprises se sont également lancées dans le mouvement, à l’instar d’Ikos Sol Meix (entreprise spécialisée dans la gestion des sols pollués avec une expertise unique dans le domaine des travaux de dépollution et de traitement biologique de ces sols par des hydrocarbures), qui s’est engagée dans un Plan Climat en trois étapes afin de mesurer et réduire son empreinte carbone : • réalisation d’un bilan carbone (homologué par l’Ademe), pour mesurer les émissions de GES1 de l’ensemble de ses activités (énergie utilisée dans le process de dépollution, émissions liées à la dégradation biologique des polluants, fabrication du compost, déplacement des collaborateurs, transport des terres des sites pollués vers les centres de traitement puis vers les centres d’enfouis-sement) ; • définition d’objectifs de réduction à la source, une fois les grands postes d’émission connus et quantifiés ; 1. Gaz à effet de serre.

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• compensation des émissions inévitables du transport des terres depuis les sites pollués de ses clients jusqu’aux centres de traitement. Cette compensation (dont le coût sera systématiquement intégré aux devis) sera réalisée par le biais de CER (Certified Emission Reduction) issue d’un projet MDP (mécanisme de développement propre) officiellement reconnu dans le cadre du Protocole de Kyoto et proposé, par exemple, par Climat Mundi. Certaines expressions utilisées pour désigner plus ou moins explicitement le développement durable n’ont pas été traduites et sont employées telles quelles, à l’instar de la triple bottom line, allusion au résultat net d’une société (bottom line), résultat « triplé » si l’on tient compte de la performance sociétale et de la performance environnementale de celle-ci. On parle encore de la règle des 3P pour People, Profit, Planet (ou 4 P selon les auteurs, certains ajoutant les partners, que les premiers intègrent dans les people). Notons que le volet « social », ou « sociétal », ou encore « people », ne fait pas seulement référence au social au sens « relations humaines », comme on l’entend souvent dans l’entreprise, mais à tout l’environnement humain dans lequel celle-ci opère. Il englobe les salariés, mais aussi les riverains, la collectivité dans laquelle est implantée l’entreprise, les fournisseurs (proches ou lointains), les clients et, bien sûr, les actionnaires et investisseurs.

Tous ceux qui jusqu’ici travaillaient pour le seul profit auront peutêtre un mouvement de recul : si le travail doit désormais être consacré à trois objectifs, alors sûrement le résultat de chacun, et donc l’objectif initial, le profit, sera partagé ? Rien n’est moins vrai. Car il existe entre ces trois objectifs une véritable synergie, qu’il faut mettre en action. En interne, le développement durable est un formidable outil de consensus, un excellent moyen de motiver les équipes. En externe, il donne à l’entreprise responsable un avantage en termes d’image, et ce qui préserve la planète

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L’expression « 3P », la plus imagée, résume finalement ce que comprennent toutes les autres : travailler pour les gens, pour faire du profit, tout en préservant la planète.

Que veut dire « développement durable » ?

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– économies d’énergies, de matières premières, recyclage… –permet très souvent aussi de diminuer certaines charges de façon significative. Mais ce n’est pas tout. Les investisseurs, échaudés par quelques krachs retentissants (Union Carbide à Bhopal1, Enron2 ou Parmalat3…), sont aujourd’hui de plus en plus attentifs au niveau de responsabilité sociale et environnementale et donc aux politiques de développement durable que les entreprises ont, ou non, engagées. On le voit, le développement durable doit donc aussi se comprendre, indiscutablement, comme un levier de performance pour l’entreprise.

Définition plus pratique…

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Et le développement durable au quotidien dans une entreprise, c’est quoi au juste dans les faits ? Bien sûr, une bonne stratégie de développement durable encouragera à développer des actions dans ses trois domaines : l’environnement, le social-sociétal et l’économique. Et si possible de façon transverse. Mais bien avant de mettre en œuvre ces actions indispensables à l’obtention de résultats tangibles, il faut surtout comprendre que le développement durable au sein de 1. L’usine de production de pesticides de la filiale indienne d’Union Carbide, l’un des premiers groupes chimiques américains, fut le siège, dans la nuit du 3 décembre 1984, d’une des plus grandes catastrophes industrielles de l’histoire, tuant entre 16 000 et 30 000 personnes. 2. Une des plus grandes entreprises américaines par sa capitalisation boursière, Enron, qui opérait dans le domaine de l’énergie, avait maquillé en bénéfices les pertes occasionnées par ses opérations spéculatives sur le marché de l’électricité. Sa mise en faillite, en décembre 2002, entraîna celle d’Arthur Andersen, qui auditait les comptes du groupe, ainsi que le licenciement de quelque 5 000 salariés et la ruine de centaines de milliers de petits épargnants qui avaient confié leurs fonds de pension à Enron. 3. Entreprise italienne fondée par Calisto Tanzi et cotée en Bourse, Parmalat, spécialisée dans les produits laitiers, a été l’objet fin 2003 de ce qui fut sans doute le plus grand scandale financier connu en Europe, avec la révélation d’un trou de 14 milliards d’euros dans les comptes de l’entreprise, entraînant pour quelque 135 000 épargnants la perte de leurs économies. Son fondateur, son ex-directeur financier, d’anciens membres du conseil d’administration, ainsi que des commissaires aux comptes et d’autres responsables financiers ont été accusés de « banqueroute frauduleuse, faux bilans, associations de malfaiteurs et fausses communications ».

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l’entreprise sera moins un changement technique qu’un changement de comportement. On pourrait même parler ici de changement culturel. Cela signifie quoi concrètement ? Exemple : je suis manager, je construis un projet, j’élabore une décision. Eh bien, dans le même temps précisément où j’effectue cette action, j’évalue ses éventuelles conséquences négatives sur l’environnement, le social-sociétal et l’économique et je modifie, si besoin est, mon projet ou ma décision, afin de réduire, voire d’éliminer, cet impact négatif sur l’un, les deux ou les trois piliers du développement durable. On est donc bien là dans une logique de posture et non pas dans une quelconque activité à caractère technique. Bien sûr, pour impacter moins négativement l’environnement, par exemple, je serai sans doute amené à faire au final des choix techniques. Mais, ce sera seulement dans un deuxième temps. La même démarche vaut aussi pour l’employé dans les gestes qu’il effectue dans le cadre de ses tâches quotidiennes. Avec le développement durable, on réinvente d’une certaine façon les modes de fonctionnement de l’entreprise, la manière dont on élabore les projets, dont on prend les décisions, dont on effectue ses gestes, y compris les plus simples (je sors des toilettes : j’éteins la lumière).

Le patron d’abord Tout changement de comportement, tout changement culturel, pour qu’il soit réussi, nécessite impérativement de mener en amont des actions de sensibilisation des personnes ou des équipes concernées. En clair, des actions d’information, de communication et de formation au développement durable, à la responsabilité sociale d’entreprise. On devine facilement ici l’importance de l’implication

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Certaines grandes entreprises ont déjà poussé assez loin cette logique de nouveau comportement, de nouvelle approche. Ainsi, à la SNCF ou chez EDF, par exemple, chaque projet important est passé au tamis d’une grille d’analyse développement durable et retravaillé si nécessaire.

Que veut dire « développement durable » ?

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des managers dans ces indispensables actions de sensibilisation. À commencer par le premier d’entre eux au sein de l’entreprise, à savoir son principal dirigeant. En cela, le développement durable est un peu comme la communication institutionnelle (ou d’image) : si le patron n’adhère pas à la signature de marque de son entreprise, il y a grand risque que la communication ne soit pas relayée au quotidien. Pour le développement durable, c’est la même chose : si le patron lui-même n’est pas convaincu, s’il n’adhère pas à l’idée que le développement durable sera un levier de performance pour son entreprise, c’est très mal parti, c’est même quasiment injouable.

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D’ailleurs, il est intéressant de noter que les patrons qui, en 2002, ont participé au livre-manifeste Développement durable : 21 patrons s’engagent1 correspondent pour l’essentiel aux entreprises qui auront le plus et le mieux intégré le développement durable à leur stratégie. Citons, par exemple, Bertrand Collomb (ancien patron de Lafarge), Gérard Mestrallet (GDF-Suez), Pierre Richard (Dexia, « la banque du développement durable ») ou Jean-Paul Bailly (RATP puis, depuis octobre 2002, La Poste). Dans la récente réédition de ce même livre-manifeste, intitulé cette fois Développement durable : 5 ans après, la métamorphose2, on peut relever, parmi les nouveaux interviewés, Jean-Pierre Clamadieu (président de Rhodia mais aussi de la commission Développement durable du Medef ), Pierre Graff (Aéroports de Paris), Xavier Huillard (Vinci) ou Philippe Houzé (Monoprix). Tous des patrons clairement et publiquement engagés pour le développement durable et dont les entreprises, certes parmi de nombreuses autres, ont adopté des politiques ad hoc réussies. Tout cela montre que, quitte à commencer des actions de sensibilisation des managers au développement durable, il 1. Développement durable : 21 patrons s’engagent par Pierre Delaporte et Teddy Follenfant, Le Cherche Midi, 2002. 2. Développement durable : 5 ans après, la métamorphose par Teddy Follenfant et Claire Tutenuit, Le Cherche Midi, 2007.

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vaut mieux commencer par la tête et sensibiliser ou former d’abord le patron et les membres du comité de direction et ainsi de suite, en allant de la tête vers la base, et non l’inverse. La bataille politique, au sens profond du terme, qui sera à mener en direction des managers devra, avant tout, être de convictions afin de leur faire comprendre que le développement durable n’est pas pour eux une action à faire en plus – dans une journée de travail déjà bien remplie ! –, mais qu’il s’agit là d’un excellent moyen pour atteindre plus vite et dans de meilleures conditions leurs objectifs professionnels, y compris commerciaux.

Très polluantes ou peu polluantes • les très polluantes, dans lesquelles le développement durable sera abordé de façon plutôt défensive. Il s’agira d’abord pour ces entreprises d’internaliser les externalités négatives qu’elles ont pu générer du fait de la nature de leurs activités. Poussées par les problématiques environnementales, elles sont, en général, depuis plus longtemps que les autres engagées dans des processus de développement durable. Ainsi, EDF, Areva et consorts ont été poussées par les luttes anti-nucléaires des années 1960-1970. Encore que l’exemple de Rhodia (secteur de la chimie), qui a pu redresser il y a quelque temps ses comptes et son cours de Bourse en grande partie grâce à la réduction des émissions de gaz à effet de serre de certaines de ses usines à l’étranger, montre que l’on peut polluer et avoir aussi une démarche offensive… et payante en retour ; • les peu polluantes. Celles-ci peuvent aborder le développement durable de façon plutôt offensive et en faire ainsi, dans la pratique et d’entrée de jeu, moins un coût qu’un investissement. C’est le cas notamment des entreprises de services.

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Reste, grosso modo, deux grands types d’entreprises :

Que veut dire « développement durable » ?

En résumé

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Pour résumer en quelques mots ce qu’est concrètement, au quotidien, le développement durable dans l’entreprise, on pourrait dire que c’est avant tout une démarche éthique à travers le respect de l’environnement, le respect de ses collaborateurs, le respect de ses clients et de ses fournisseurs, le respect de la société qui vous entoure et des territoires sur lesquels vous développez vos activités et, enfin, le respect des règles de bonne gouvernance. Avec comme objectif in fine de s’appuyer sur son bon niveau de responsabilité sociale pour améliorer ses résultats économiques et financiers, le tout en se donnant de meilleures garanties pour assurer la pérennité de son entreprise et en continuant de préserver la planète. Voilà qui implique, bien sûr, de développer des actions concrètes adéquates. Ce seront des actions simples, partagées et de bon sens. Pour les réussir, le management sera appelé à jouer un rôle clé dans ce qui est, d’abord, un changement culturel au sein de l’entreprise.

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Chapitre 2

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Développement durable, pourquoi votre entreprise doit-elle s’engager ?

Avant tout, il semble utile, ici, de rappeler que, dans quelque système économique que ce soit, la raison d’être d’une entreprise, c’est de créer de la valeur… et non de régler tous les maux de la planète. Cependant, ce qui se fait dans l’entreprise a évidemment un impact, plus ou moins fort, selon la nature de ses activités, sur l’environnement et sur la société. Si, pour organiser la protection de la planète, il existe au sein de la société d’autres acteurs, prépondérants et sans aucun doute plus légitimes (les politiques, les syndicats, les responsables associatifs, les collectivités territoriales, les citoyens, etc., sans oublier les lois et règlements, des structures internationales comme les Nations unies, l’OMC, le BIT – la liste serait longue), les entreprises ne doivent pas moins y contribuer. Nous prenons ici le parti de dégager trois raisons majeures qui vont motiver une entreprise à soutenir son engagement dans une politique de développement durable : • pouvoir continuer à créer de la valeur dans de bonnes conditions. La protection de l’entreprise à travers la protection de la planète ; la pérennité de la première dépend de la pérennité de la seconde ;

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• s’adapter au contexte, qui pèse de plus en plus sur les entreprises. Qu’il soit réglementaire ou qu’il mette en action des groupes de pression en direction de l’entreprise, le contexte évolue de plus en plus vite ; • améliorer son efficacité économique et financière. Dans le monde des affaires, l’idée est de plus en plus répandue que le développement durable est un vrai levier de performance pour l’entreprise. À condition, bien sûr, de dépasser très rapidement la posture de greenwashing (littéralement un « verdissement », soit un « blanchiment écologique » qui n’agirait que sur l’image de l’entreprise) et de pratiquer le développement durable de façon intelligente, convaincue et organisée.

Les entreprises ne pourront pas faire correctement leur travail et créer de la valeur sur une planète dégradée par les conséquences négatives du changement climatique, de la fracture économique et sociale entre le Nord et le Sud, voire entre certains quartiers de zones urbaines et le reste de la population. Même si certaines entreprises, par la nature de leurs activités, peuvent, un temps, se nourrir de la crise et de son approfondissement, si la température de la Terre continue d’augmenter au rythme actuel – les prévisions les plus pessimistes sont aujourd’hui déjà dépassées –, à la fin de ce siècle, nos sociétés humaines seront dans de graves difficultés. Comme le répète souvent avec humour, lors de ses conférences, le célèbre botaniste-écologiste Jean-Marie Pelt, aujourd’hui président de l’Institut européen de l’écologie, « certains insectes peuvent continuer à vivre avec une température de 90 °C… Malheureusement, ce ne pourra pas être le cas pour l’espèce humaine ». Dans ce contexte, on comprend que les entreprises responsables, pour garantir leur pérennité, auront tout intérêt à participer activement, et dès maintenant, aux actions locales, nationales, voire internationales, pour qu’il continue à faire bon vivre sur

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Pouvoir continuer à créer de la valeur dans de bonnes conditions

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la planète. Certes, selon que l’entreprise est très polluante ou pas, cet investissement dans l’action pourra avoir des allures diverses et des enjeux à court et moyen terme très différents.

S’adapter au contexte, qui pèse de plus en plus sur les entreprises La seconde raison pour une entreprise de s’engager dans le développement durable, c’est l’évolution rapide du contexte dans lequel elle opère, que ce soit l’évolution des lois et règlements, du comportement des consommateurs, de celui des médias, du politique, des collectivités territoriales, des organisations syndicales en passant par l’irruption sur le devant de la scène des ONG (organisations non gouvernementales) et l’impact des agences de notation sociale.

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Lois et règlements : ça bouge vite… et à tous les échelons Depuis quelques années, la pression réglementaire liée aux composantes du développement durable est de plus en plus forte. On assiste, à tous les niveaux, à une accélération des « machines » à réglementer. Sans doute cette situation est-elle liée à l’approfondissement rapide de la crise que connaît la planète et à l’élévation non moins rapide du niveau de conscience de ses habitants au regard des problématiques environnementales et sociales. Certains pays européens, on pense notamment à ceux du nord de l’Europe (Pays-Bas, Suède, Danemark, Finlande, Grande-Bretagne, Allemagne, etc.), auxquels on peut ajouter des pays comme la Suisse ou l’Autriche, sont historiquement et culturellement inscrits dans des logiques de solidarité sociale et de protection de l’environnement. Dans ces domaines, ces pays (sauf la Suisse qui n’appartient pas à l’Union européenne) jouent, au niveau de la Commission et du Parlement européens, un rôle d’accélérateur. Ainsi, ces dernières années, on n’a jamais autant émis de directives pour l’environnement – notamment dans les domaines du transport et de l’habitat, à travers la réduction des émissions de CO2 – ou pour le social.

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Ainsi, pour l’efficacité énergétique, Bruxelles souhaite que l’on ne dépasse pas pour les bâtiments de type administratif ou de services 50 kWh au m2 par an en 2012 – c’est demain ! –, alors qu’actuellement, en France, la plupart des bâtiments de ce type dépassent les 250, voire 300 kWh au m2 par an1… Et pour 2020, la loi Grenelle II indique que tous les bâtiments neufs construits en France devront être à énergie positive, c’est-à-dire qu’ils devront produire plus d’énergie qu’ils n’en consommeront. Pour les voitures, la mesure de 130 grammes de CO2 émis au maximum par kilomètre à l’horizon 2012 (contre 158 grammes aujourd’hui, soit - 18 % ) vient à peine d’être actée, le 1er décembre 2008, par la Commission, le Conseil et le Parlement européens, que Bruxelles envisage déjà un nouvel objectif de 95 grammes pour 2020… Quant à la commission 1. Le Parlement français a adopté une mesure qui prévoit la possibilité de moduler ce seuil de 50 kWh pour les énergies présentant un bilan avantageux en termes d’émissions de gaz à effet de serre, à savoir l’électricité, en France essentiellement de source nucléaire, peu émettrice de CO2…

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Dès 1987, l’Acte unique a ajouté la politique de l’environnement aux politiques communautaires existantes et, cinq ans plus tard, le fameux traité de Maastricht l’a inscrite parmi les priorités de l’Europe. En 1997, le traité d’Amsterdam a introduit le principe du développement durable avant que celui de Lisbonne, en décembre 2007, n’assigne pour l’Europe un niveau élevé de protection et d’amélioration de la qualité de l’environnement. Cet intérêt de l’Europe pour l’environnement, qui s’exprime avec force depuis plus de vingt ans, permet d’expliquer pourquoi, aujourd’hui, le droit communautaire de l’environnement est à l’origine de plus de 80 % du droit appliqué dans les États membres de l’Union européenne. À la demande de la Commission européenne, le Conseil d’État français a même dû organiser pour les juges une formation au droit de l’environnement avec, à son programme, des sujets comme la sécurité des installations industrielles, le traitement des déchets toxiques ou la protection de la nature… Ces réglementations internationales sont incontournables et forcément applicables dans notre pays au même titre que les règlements économiques internationaux.

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Environnement de l’Europarlement, elle propose en sus de lourdes pénalités : 5 euros au premier gramme dépassé et par véhicule construit dès 2012, 15 euros pour le deuxième, 25 euros pour le troisième et 95 euros à partir du quatrième gramme. Autre secteur où la réglementation européenne s’active depuis quelques années : le domaine du social, notamment avec des évolutions fortes en ce qui concerne le handicap, la lutte contre les discriminations et pour l’égalité des chances, principalement pour cette dernière à travers l’égalité professionnelle hommes-femmes. Ces directives, lorsqu’elles sont adoptées, sont ensuite transcrites dans les droits de chaque pays. Ce qui prend un peu de temps, généralement une bonne année, voire plus pour les pays qui « traînent un peu les pieds » ou ont du mal à se mettre d’accord en interne. Mais, au bout du compte, en tant qu’entreprise, vous devrez vous conformer à ces règlements nouveaux. Dans cette optique, deux attitudes sont adoptées :

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• soit vous attendez le dernier moment, et, le plus souvent, quand vous devez appliquer la nouvelle réglementation, vous n’avez ni le temps ni les moyens de vous mettre rapidement en conformité. Vous vous retrouvez alors le dos au mur et cela vous coûte cher en image, sans oublier les inévitables pénalités à la clé ; • soit vous gardez toujours un œil sur ce qui se passe à la Commission de Bruxelles et au Parlement de Strasbourg, et vous pouvez alors anticiper au mieux ces évolutions réglementaires. En général, se mettre en conformité dans les temps vous coûtera au final moins cher et, au passage, vous fera bien voir des pouvoirs publics nationaux, ce qui n’est pas à négliger. D’une pierre deux coups, en quelque sorte. Au niveau national, outre la transcription en droit français des décisions européennes, la loi NRE (nouvelles régulations économiques), votée par le Parlement français le 15 mai 2001, a changé plus profondément la donne qu’on ne l’a cru au départ, c’est-à-dire concrètement à la publication des décrets d’application en février 2002. En effet, la simple obligation pour les entreprises cotées de devoir publier chaque année un rapport d’informations sur leurs actions et

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Les parlementaires français ne sont pas en reste vis-à-vis de leurs collègues européens. Ils légifèrent régulièrement sur des sujets portant sur la thématique du développement durable et surtout sur l’environnement. Tout le monde se rappelle la Charte de l’environnement que le président de la République de l’époque, Jacques Chirac, souhaitait voir adosser à la Constitution, avec au centre des débats le fameux principe de précaution. Finalement, il aura fallu aller jusqu’au Congrès à Versailles (réunion extraordinaire des députés et des sénateurs), pour que, le 28 février 2005, le projet aboutisse avec l’appui de 95 % des parlementaires qui se sont exprimés par leurs votes. En annulant un décret relatif à l’urbanisme autour du lac d’Annecy (Haute-Savoie), le Conseil d’État aura pour la première fois consacré dans les faits la valeur juridique de cette charte. Plus près de nous, l’adoption, le 25 juin 2008, par le Parlement du projet de loi sur la responsabilité environnementale (LRE) a introduit le principe du pollueur-payeur dans le droit français et la reconnaissance du fait que la biodiversité a un prix puisqu’elle rend des services à la collectivité. Le texte de cette loi prévoit que les entreprises devront réparer les dommages causés à la nature et constatés

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résultats en matière de développement durable (art. 116 de la loi) a dopé beaucoup d’entreprises, peu préoccupées jusque-là de développer ce type d’action. Cette mesure pourrait être étendue prochainement en France à toutes les catégories d’entreprises. Transmise dans un premier temps aux directions de la communication, cette obligation de publier tous les ans un document d’informations sur le développement durable a d’abord été comprise comme la simple réalisation d’un complément au rapport annuel d’activités existant. Bien vite, cependant, cette obligation de s’autodiagnostiquer a permis d’identifier les manques en matière de développement durable et, de fait, a entraîné pour les entreprises concernées la nécessité de mieux s’organiser, voire de s’organiser tout court. Ne serait-ce que pour combler les vides en développant les actions de développement durable ad hoc. Évidemment, la multiplication des directions du développement durable dans le paysage des entreprises françaises date concrètement de la mise en pratique de cette loi NRE.

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dans les cas de pollution des sols, d’atteinte à la qualité des eaux ou à la survie des espèces et des habitats protégés. Il introduit également une obligation de prévention pour les exploitants dont les activités sont susceptibles de générer des pollutions graves. Responsables d’entreprise, nous vous invitons à regarder de plus près ces lois NRE et LRE pour voir notamment en quoi elles peuvent impacter votre entreprise aujourd’hui… ou demain.

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Il convient également de rester particulièrement attentif aux évolutions – importantes ces dernières années – du Code du travail, pilier social du développement durable. Ainsi, par exemple, le nouveau Code du travail, dans son article L. 2323-57, prévoit que le rapport que les entreprises doivent écrire, chaque année, sur la situation comparée des conditions générales d’emploi et de formation des femmes et des hommes dans l’entreprise fasse l’objet d’une présentation annuelle au comité d’entreprise ou aux délégués du personnel. Au niveau local, les collectivités territoriales, elles aussi, font évoluer leurs réglementations. Elles mettent notamment en place des Agendas 21, sortes de plans d’action de développement durable locaux ou, parfois, pour ne parler que du pilier environnemental, des Plans Climat. Lutte contre le changement climatique, préservation de la biodiversité, lutte contre les exclusions, etc. : plus de 350 collectivités locales sont aujourd’hui engagées dans cette voie. De plus en plus de municipalités ont ainsi recours, par exemple, aux Plans de déplacements urbains (PDU), dont un des principaux objectifs est la restriction de circulation en centre-ville. Dans ce cadre, elles souhaitent réglementer fortement, voire – pour certaines d’entre elles, comme La Rochelle – interdire l’entrée des véhicules thermiques (à essence ou au diesel) en centre-ville. Pour les entreprises dont l’activité nécessite qu’elles soient très présentes au sein de ces centres urbains, par exemple pour les livraisons, cela mérite d’être anticipé. D’autant que la plupart des Agendas 21 ou Plans Climat qui figuraient dans les programmes de beaucoup de candidats, de droite comme de gauche, aux dernières municipales de 2008, ont été adoptés dans la foulée pour être appliqués concrètement aux alentours de 2010. Échéance très proche, certes, mais qui laisse tout de même un peu de

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temps aux entreprises pour s’y préparer. Pour rester dans le domaine des transports et de la circulation, un autre sujet pointe à l’horizon pour les zones urbaines : les péages à l’entrée des villes. S’ils sont déjà en vigueur dans certaines grandes cités européennes (Londres, Stockholm, Milan, etc.), on commence depuis quelques mois à y réfléchir en France… Toutes ces évolutions interpellent l’entreprise qui doit se poser la question de son interaction avec la politique des collectivités locales.

Plus près encore de votre entreprise, le secteur professionnel au sein duquel elle développe ses activités. Lui aussi, il réglemente « durablement », et à sa façon. Ainsi, par exemple, la loi de régulation des activités postales récemment adoptée par le Parlement français – en vue de l’ouverture totale de ce marché en 2011 – stipule, en son article L. 3.2, que les opérateurs postaux se doivent de respecter des objectifs de préservation de l’environnement. Quand on sait que le courrier physique, principale activité de ces opérateurs, repose en bonne partie sur l’utilisation de papier et de moyens de transports, on imagine ce qu’ils vont devoir mettre en œuvre pour impacter le moins négativement possible l’environnement. Ce qui explique au passage pourquoi La Poste, opérateur historique en France, s’est lancée depuis quelques années dans une politique de véhicules propres, notamment électriques, mais aussi de papier responsable. Le papier que l’on consomme, estime l’opérateur postal, ne joue pas contre la forêt si au sein de celle-ci, lorsque l’on coupe un arbre, on en replante un autre dans la foulée ou, du moins, on laisse le temps aux nouvelles pousses de se développer. Cette attitude est développée depuis longtemps par les exploitations forestières et souvent familiales des pays nord-européens et du Canada, pour ne citer que les plus exemplaires. A contrario, on continue à ne replanter que peu, voire pas du tout, d’arbres dans les forêts surexploitées d’Amazonie (le premier massif forestier mondial), du Congo (22 millions d’hectares et deuxième

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Votre secteur professionnel aussi réglemente « durablement »…

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« poumon de la planète ») ou d’Indonésie (massifs forestiers géants et gros captateurs de CO2). Encore que le VIe Forum mondial du développement durable, qui s’est tenu du 27 au 30 octobre 2008 à Brazzaville (Congo), en présence d’une dizaine de chefs d’État africains, laisse augurer, à travers ses conclusions et engagements, des développements plus positifs, notamment en faveur d’une gestion plus durable des forêts de cette zone de l’Afrique subsaharienne. Il est vrai aussi que les donneurs d’ordres des pays développés, gros consommateurs de bois (ameublement, construction de maisons, etc.), vérifient de plus en plus s’il provient bien de forêts gérées durablement. La Commission européenne elle-même a décidé, le 17 octobre 2008, d’en finir avec le bois ou les produits dérivés importés illégalement en Europe (19 % environ du total) à travers un projet de règlement visant à contraindre les négociants à démontrer que la marchandise importée provient bien d’une récolte en conformité avec la loi du pays où elle a été réalisée. L’objectif de l’Europe est bien de lutter contre la déforestation en portant un coup à l’exploitation illégale des forêts. Votre entreprise, à travers ses achats de bois ou de dérivés du bois, se doit de soutenir activement l’initiative de la Commission européenne. Les marchés publics contribuent activement aux évolutions réglementaires en faveur du développement durable puisque aujourd’hui les pouvoirs publics sont en droit d’exiger que les donneurs d’ordres de ce secteur intègrent au sein de leurs appels d’offres des critères environnementaux et sociaux, qui apparaissent le plus souvent sous forme de questionnaires à remplir : que faites-vous pour diminuer vos émissions de gaz à effet de serre ? Quel pourcentage de travailleurs handicapés comptez-vous dans vos effectifs ? Le papier que vous nous proposez d’utiliser est-il issu de forêts gérées durablement ? Les questions peuvent être nombreuses… Enfin, certains secteurs professionnels regroupent leurs adhérents pour unifier, autant que faire se peut, leurs démarches développement durable. C’est le cas, par exemple, du secteur postal, dont plus de 190 opérateurs à travers le monde, réunis sous la bannière de l’Union postale universelle (UPU), une direction générale des Nations unies et de son

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groupe de projet « Développement durable », ont adopté en 2007 une démarche développement durable commune, qu’ils opèrent dans des pays développés ou en voie de développement. Cette démarche est assortie d’un plan de 20 actions prioritaires, tant dans les domaines de l’environnement que du social ou du sociétal1. Elle a notamment été déclinée dans un premier temps au niveau des 48 opérateurs postaux européens réunis au sein de l’association PostEurop, qui a ainsi décidé, en juin 2007, de s’engager collectivement à baisser de 10 % d’ici à 2012 le volume des émissions de CO2 produites par les transports utilisés pour acheminer et distribuer courrier et colis à travers l’Europe. Il est intéressant de noter que certains de ces opérateurs sont en concurrence frontale sur le terrain. Cela ne les a pas pour autant empêchés, au nom de l’intérêt général et de l’avenir de la planète, de s’associer, de partager leurs savoir-faire, pour réduire l’impact environnemental des opérations postales. Ils se sont aussi rassemblés au sein d’un groupe de travail appelé « Alternative Fuel Vehicle and Security », dans lequel chacun a pu faire part de ses connaissances et avancées en matière de véhicules propres. Un travail qui devrait déboucher fin 2009 sur l’élaboration d’un cahier des charges commun pour la construction d’un véhicule utilitaire électrique, type Kangoo ou Berlingo, donc avec zéro émission de CO2 en utilisation, pour la distribution du courrier.

Que ce soit à Bruxelles, à Paris ou dans votre collectivité locale, ayez toujours un œil sur les « émetteurs » de réglementations (Communauté européenne, Parlement français, fédérations professionnelles, collectivités locales…) pour mieux anticiper les évolutions et être prêts, le moment venu, à s’adapter. Et pourquoi ne pas prendre ainsi au passage un avantage concurrentiel sur vos concurrents moins bien informés ? Ce faisant, vous éviterez le plus et le mieux possible taxes et pénalités qui accompagnent généralement les nouvelles dispositions quand on ne les exécute pas ou mal.

1. Voir sur www.upu.int, rubrique « Développement durable ».

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En résumé

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Des parties prenantes à l’externe de plus en plus exigeantes Faire face aux pressions directes ou indirectes de vos clients grand public

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On assiste, depuis quelques années seulement, à une accélération rapide de la prise de conscience des Français sur les conséquences négatives que pourraient avoir sur leur vie de tous les jours le changement climatique ou la fracture économique et sociale entre le Nord et le Sud, voire entre certains quartiers de zones urbaines et le reste de la population. Selon les résultats de l’Eurobaromètre 20081, 62 % des Européens (mais 71 % des Français) considèrent le changement climatique comme le problème le plus sérieux pour la planète. C’est le deuxième thème de préoccupation, juste derrière la pauvreté et le manque d’eau potable et de nourriture. Les phénomènes accélérateurs ont été, en ce qui concerne le changement climatique, la tempête de décembre 1999 qui a ravagé une grande partie de notre pays, la canicule de l’été 20032, voire la catastrophe provoquée par l’ouragan Katrina à la Nouvelle-Orléans à la fin 2007 et largement médiatisée en France. Quant à la fracture économique et sociale, les émeutes dans les banlieues à l’automne 2005 ou l’action en 2008 des sans-papiers salariés, qui paient des impôts et cotisent à la Sécurité sociale, pour obtenir des papiers d’identité, ont fait prendre conscience, à la fois, de la gravité des problèmes, mais aussi de ses conséquences sur la vie au quotidien dans les zones concernées. L’action hyper-médiatisée de l’association des Don Quichotte au profit des sans-abri à Paris a aussi marqué les esprits. Aujourd’hui, et selon un sondage Ipsos3, 85 % des Français redoutent que leurs enfants connaissent un jour une 1. Enquête réalisée entre mars et mai 2008 auprès de 30 000 Européens des 27 États de l’Union européenne et publiée par la Commission européenne. 2. On se rappelle qu’après coup on avait enregistré 15 000 décès supplémentaires par rapport à une même période les années précédentes. 3. Sondage réalisé pour le Secours populaire, les 22 et 23 août 2008, auprès d’un échantillon de 1 002 Français représentatifs de la population française.

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« situation de pauvreté »… Ils n’étaient « que 80 % » un an plus tôt. Pour 55 % d’entre eux (contre 47 % l’an passé), les risques en sont aujourd’hui « beaucoup plus élevés ». Dans les catégories populaires, l’écart d’une année sur l’autre sur cette question est encore beaucoup plus important : + 14 %. Déjà, en novembre 2007, un sondage BVA, réalisé pour l’association Emmaüs, indiquait que 47 % des Français pensaient qu’un jour ils pourraient devenir des sans-abri… Toutes ces enquêtes ont été réalisées avant l’historique crise financière d’octobre 2008 et les conséquences économiques que l’on connaît. Les agitations sporadiques mais continuelles depuis plusieurs années autour de la question des OGM, largement médiatisées également, complètent « utilement » le tableau.

Tout cela montre qu’une entreprise qui développe des actions s’intégrant clairement dans la lutte contre le changement climatique ou dans celle visant à résorber la fracture économique et sociale, et le fait ensuite intelligemment savoir à ses clients et prospects, va nourrir positivement auprès d’eux sa marque. Cela va renforcer la confiance de ces clients et prospects en elle. L’entreprise leur procure en effet un double bénéfice, individuel dans leur relation directe avec elle et collectif à travers le respect de l’environnement. Et plus de confiance, à condition, bien entendu, d’offrir des produits ou des services qui rencontrent la demande et les besoins, c’est à terme plus de business, plus de chiffre d’affaires et plus de résultats.

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Bref, pas étonnant qu’aujourd’hui les Français placent la protection de l’environnement à un très haut niveau dans la hiérarchie de leurs inquiétudes, tout comme les questions de sécurité personnelle qui englobent souvent les problématiques de la fracture économique et sociale. Or, toutes les enquêtes le montrent, dans le même temps, les entreprises et les industriels sont aussi les plus critiquées par les citoyens quand on parle de lutte contre le changement climatique ou contre la pauvreté. Toujours selon l’Eurobaromètre 2008, 87 % des Français (76 % des Européens) pensent que les entreprises n’en font pas assez…

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Une mésaventure du pétrolier Shell

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Vous pouvez aussi vous prendre les pieds dans le tapis avec une communication politiquement incorrecte au regard de votre réalité environnementale ou sociale. Ainsi, comme le rapporte le quotidien anglais The Independent, dans sa livraison du 13 août 2008, Shell a été blâmé pour avoir tenu un discours de greenwashing dans une publicité publiée le 1er février 2008 dans le Financial Times. « Nous investissons nos bénéfices d’aujourd’hui dans la recherche des solutions pour demain. Un monde en croissance a besoin de plus d’énergie, mais en même temps nous devons trouver de nouvelles façons de gérer nos émissions de carbone pour limiter le changement climatique. L’investissement continu dans la technologie est pour nous un moyen décisif pour répondre à ce défi et continuer à assurer un avenir profitable et soutenable », affirmait cette publicité. Shell indiquait en outre « utiliser son expertise technique pour résoudre les difficultés présentées par les immenses gisements canadiens de sables bitumineux ». Manque de chance, le WWF passait par là. L’ONG a immédiatement protesté devant l’Advertising Standards Authority (ASA) faisant valoir que « l’extraction de bitume de mauvaise qualité à partir du sable est totalement inefficace et détruit d’immenses parties de forêt vierge ». Au final, l’ASA a jugé que Shell n’aurait pas dû utiliser le terme « soutenable » pour parler de son projet controversé sur les sables bitumineux ni pour parler de celui de construire la plus grosse raffinerie de pétrole d’Amérique du Nord, sachant que chacun de ces deux projets conduirait à émettre plus d’émissions de gaz à effet de serre. Afin d’assurer le public de son respect de l’environnement, le géant anglo-néerlandais Shell a trompé celui-ci sur les caractéristiques écologiques d’un projet extrêmement polluant au Canada. L’ASA a interdit au pétrolier toute nouvelle publication de cette publicité mensongère. Et David Norman, le directeur des campagnes au WWF, de conclure : « La décision de l’ASA de soutenir la plainte du WWF envoie un signal fort au monde des affaires et aux industriels signifiant que le greenwashing est inacceptable. » Et Libération du 14 août 2008 de titrer avec humour : « Shell pris la main dans le sable »… La morale de cette histoire, c’est qu’avant toute publication d’une communication mettant •••

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••• en scène le développement durable, il vaut mieux tourner sept fois sa plume dans son encre… Car, en cas de faute, le boomerang vous revient dans la figure à grande vitesse !

De plus en plus de consommateurs éco-responsables

Une enquête de TNS-Sofres effectuée en février 2008 pour l’Ania (Association nationale des industries alimentaires) montrait que 66 % des Français choisiraient un produit alimentaire plus cher que ses concurrents « s’il présentait des garanties écologiques1 », 61 % « s’il était issu du commerce équitable » et 54 % « si son fabricant soutenait une cause humanitaire ». En matière d’énergie verte, 44 % des Européens se déclarent prêts à payer entre 1 et plus de 30 % plus cher, selon l’Eurobaromètre déjà cité. En France, ils sont, selon cette même étude, 42 % à se déclarer d’accord pour payer un peu plus cher de l’énergie produite à partir de sources qui émettent moins de gaz à effet de serre, 38 % ne sont pas prêts et 20 % ne savent pas. Bien entendu, il ne s’agit que d’intentions et la réalité est sans doute inférieure, surtout en période de crise du pouvoir d’achat. Néanmoins, la tendance est assez élevée pour qu’au final il reste un socle non négligeable de consommateurs éco-responsables. Alain Renaudin, 1. 76 % « plutôt d’accord » avec « je privilégie les produits respectueux de l’environnement même s’ils coûtent un peu plus cher ». Sondage réalisé par l’Ifop les 12 et 13 février 2009.

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Enfin, cette montée de la prise de conscience du grand public sur l’importance de lutter contre le changement climatique et la fracture économique et sociale n’est pas sans lien avec la demande grandissante sur le marché de produits éthiques, solidaires ou respectant l’environnement. Même les hard-discounters proposent aujourd’hui des produits « verts »… Avec votre mètre à ruban, mesurez de temps en temps l’agrandissement de la longueur des rayons qui proposent ce type de produits dans votre supermarché. C’est le meilleur des baromètres pour mesurer les variations d’intensité de cette demande nouvelle.

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ex-directeur général adjoint de l’Ifop, qui publie chaque année un baromètre sur les Français et le développement durable, analysait : « Pour une grande majorité des Français, les produits issus du développement durable restent plus chers que leurs équivalents standards et ils ne sont pas toujours prêts à en payer le prix. Cela étant, les incitations fiscales leur ont fait prendre conscience que l’écologie pouvait à long terme être synonyme d’économies. Il y a donc pour les industriels qui sauront trouver un bon positionnement prix une réelle opportunité de prise de marché. » Une opportunité d’autant plus grande, comme l’écrit La Tribune du 18 octobre 2008, que la crise financière se double d’une véritable remise en question des modèles de consommation. « Les produits issus d’une démarche de développement durable sont effectivement plus chers. Si les consommateurs arbitrent en fonction du seul critère prix, on peut craindre que ces produits n’en pâtissent. Mais, derrière cette crise, il y a une profonde remise en question des modèles et notamment celui de l’hyperconsommation. L’approche qualitative fait son chemin et nous constatons notamment que nos ventes de produits bio ou issus du commerce équitable continuent à progresser. Nous gardons ce cap sur l’ensemble de notre offre – conventionnelle et développement durable – pour apporter aux clients la variété des choix au bon rapport qualité/ prix », précise Hubert Hémard, le directeur du marketing et du développement durable de Monoprix. Confirmation d’Élisabeth PastoreReiss, la très militante et efficace fondatrice d’Ethicity, agence de conseil en stratégie pour le développement durable, et grande spécialiste du marketing responsable : « Malgré ou grâce à la crise, les consommateurs deviennent de plus en plus sensibles aux coûts d’usage. Ils achètent des produits “verts” parce qu’ils y trouvent, pour une raison ou une autre, un retour sur investissement. Pour les marques, passer du produit à l’usage constitue une vraie rupture à travers laquelle elles vont pouvoir exprimer leur différence, mais, là encore, pas question d’en faire supporter le prix au seul consommateur. » Et Pierre Siquier, le « Monsieur développement durable » de l’AACC (Association des agences-conseils en communication), de signaler dans le même article que, « en cette période de crise, les industriels disposent d’une chance historique de conduire les changements qui s’imposent, de repenser la conception des produits, de leur cycle de vie et de leur communication ».

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Le succès, ces douze derniers mois, du bonus écologique dans le domaine de l’automobile, qui a bouleversé l’offre des constructeurs, témoigne de façon spectaculaire de ces évolutions du comportement des consommateurs. Toutes ces postures, vous en conviendrez, alertent sur des évolutions de comportement. Elles méritent de votre part, au minimum, que vous engagiez une réflexion et une petite étude avec votre service marketing pour mieux répondre aux consommateurs tout en dégageant des points qui vous différencient de votre concurrence. Cela aussi, le développement durable vous le permet.

Si vous en avez dans votre portefeuille, ils ne sont pas en reste par rapport aux clients grand public. Mais, vis-à-vis d’eux, l’efficacité de votre message « développement durable » ne sera pas tout à fait basée sur les mêmes raisonnements et les mêmes logiques. Avec les grands clients, on s’éloigne même assez rapidement de l’émotionnel pour arriver au concret. En l’occurrence, il s’agit moins de leur raconter une histoire qui va bien que de leur donner les bons résultats des actions que votre entreprise décline en matière de développement durable. Certains de vos grands clients, avant de passer un marché avec vous, vont parfois vous questionner sur ce que vous faites concrètement en matière de développement durable : mettez-vous en place des actions pour diminuer vos émissions de gaz à effet de serre ? Quel est le pourcentage de vos collaborateurs qui sont en situation de handicap ? Que mettez-vous en place pour réduire les inégalités professionnelles entre les femmes et les hommes ? Etc. On a même vu des entreprises demander à celles qui ont répondu à leurs appels d’offres de remplir des dossiers développement durable comportant plus de 100 questions ! Certaines souhaiteront même par la suite, lors de la signature du contrat commercial, contractualiser quelquesuns de vos engagements développement durable. Les patrons de ces entreprises seraient-ils devenus écolos, humanitaires ou philanthropes ? C’est sans doute une conviction pour certains, mais la grande majorité d’entre eux agissent surtout sous la pression des

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Vos « gros » ou « grands » clients…

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investisseurs et pour protéger leur business. Pourquoi ? Parce qu’en vous obligeant à évoluer vers le développement durable, ils intègrent l’idée que vous êtes de fait un élément de leur chaîne de valeur et que vous pouvez ainsi, par votre engagement, impacter, positivement ou négativement, la cohérence de leur propre démarche.

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La pression montante des investisseurs Il y a quelques années seulement, les investisseurs, avant de placer leur argent dans le capital d’une entreprise, vérifiaient sa solidité financière à travers notamment les notes (AAA+, B-, etc.) décernées par les agences de notation financière ad hoc. Mais, quelques scandales et krachs plus tard – on se rappelle tous de ceux d’Union Carbide, d’Enron, de Parmalat et autres Arthur Andersen, pour ne citer que les plus médiatisés –, les investisseurs qui avaient tout perdu et, derrière eux, leurs clients ont décidé qu’à l’avenir on ne les y prendrait plus. Ils se sont alors attelés à redynamiser ce que l’on appelle aujourd’hui les « agences de notation sociale » (ou « extra-financière »). Celles-ci existaient principalement aux États-Unis, où elles vérifiaient pour des congrégations religieuses que leur argent était bien placé dans des entreprises qui ne fabriquaient pas d’armes, ne vendaient pas de l’alcool, du tabac, voire n’employaient pas des enfants pour leurs activités. C’est ainsi que, depuis une dizaine d’années, en parallèle de la notation financière, on évalue aussi les entreprises sur leur niveau de responsabilité sociale afin que les investisseurs soient assurés que leurs placements actifs ne soient pas investis dans des entreprises qui sont « des poubelles environnementales », « des bombes à retardement sociales » ou qui ne respectent pas les règles élémentaires de bonne gouvernance. Respecter l’environnement, ses clients, son personnel, les territoires sur lesquels l’entreprise développe ses activités, les règles de bonne gouvernance, tout cela va donc compter de plus en plus, aux côtés de la bonne santé financière des entreprises visées, pour déterminer les investisseurs à y placer leur argent. L’éthique au niveau de la finance ? Pas encore, mais c’est la petite bête qui monte, qui monte… et devient de plus en plus un élément positivement discriminant.

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Mais, allez-vous dire, en quoi, moi, fournisseur de mon client, puisje impacter sa notation sociale ? Justement pour éviter les opérations de camouflage, cas de l’entreprise X qui garde en son sein les actions socialement responsables et sous-traite tout ce qui pose problème en faisont fabriquer, par exemple, ses produits chez un sous-traitant qui exploite des enfants dans des pays du tiers-monde ou des salariés sans droits. On va alors englober dans la notation sociale de l’entreprise tout ce qu’elle sous-traite. Prenons, par exemple, une société comme Yves Rocher, qui prospecte par courrier commercial puis vend ses produits de soins et de beauté par correspondance en utilisant des services de colis. Le choix de l’opérateur postal chargé de l’acheminement et de la distribution de ses courriers et de ses colis va avoir un vrai impact, positif s’il s’agit d’un sous-traitant postal qui dispose d’un bon niveau de responsabilité sociale ou négatif dans le cas contraire. Les émissions de CO2 des transports des sous-traitants postaux d’Yves Rocher nécessaires à l’acheminement et à la distribution de ses produits vont être comptabilisées dans son bilan carbone. L’opérateur postal choisi par Yves Rocher devient ainsi l’un des contributeurs de son bilan carbone et potentiellement une source d’amélioration pour ce bilan et donc de création de valeur pour lui. Pour se concilier les investisseurs, les donneurs d’ordres préféreront donc choisir, à prix et à qualité proches, ceux qui impacteront le moins négativement leur notation sociale. Ainsi, 1. La Tribune, édition du 16 juin 2008.

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Aujourd’hui, différentes études indiquent qu’environ 45 % des investisseurs institutionnels français croient en une création de valeur ajoutée, née de la prise de responsabilité de la part des entreprises. Yves Dublin, consultant au pôle IBC de Valtech Axelboss, déclare à ce sujet : « Ce constat repose sur la conviction qu’une prise en compte des critères extra-financiers permet d’avoir une vision globale des risques supportés par les entreprises et peut donc avoir une influence significative sur leur performance à moyen et à long terme. Ils sont convaincus que, dans le futur, les critères extra-financiers seront considérés davantage dans les décisions de placement par les gestionnaires de fonds1. »

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pour les opérateurs postaux qui répondent à un appel d’offres de la société Yves Rocher, le niveau de responsabilité sociale va devenir un atout concurrentiel décisif. Cette démonstration est, bien entendu, valable pour tous les secteurs d’activités même si la nature de ces activités a des impacts négatifs plus ou moins lourds. Tous les directeurs et responsables de développement durable d’entreprises qui ont dans leurs portefeuilles de gros clients vous le diront : ils sont de plus en plus souvent interrogés sur le niveau de responsabilité sociale de leurs entreprises respectives. Soit directement par les investisseurs eux-mêmes, soit par les agences de notation sociale. Pour certaines entreprises, notamment celles cotées, les questionnaires sont si nombreux – plusieurs par semaine – que des consultants externes en viennent à proposer de leur vendre des logiciels permettant de les traiter plus rapidement. Ils peuvent aussi offrir un service de sous-traitance pour répondre à leur place ! Parmi les donneurs d’ordres qui envoient le plus de questionnaires et aussi les plus fournis, on trouve, à ce jour, et sans surprise, les banques et les compagnies d’assurances…

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L’exemple de CalPERS, un fonds de pension californien Autre exemple instructif, celui de CalPERS, un des principaux fonds de pension américains, qui place environ 220 milliards de dollars au profit de ses clients, les fonctionnaires de l’État de Californie, pour leurs retraites. CalPERS a notamment placé beaucoup d’argent dans le capital d’un géant de l’automobile américain. Soucieux du fait que l’industriel en question continuait à fabriquer des véhicules gros consommateurs d’essence et donc très émissifs en gaz à effet de serre, et qu’ainsi il perdait régulièrement des parts de marché auprès d’un public américain de plus en plus conscient et soucieux de la question environnementale, le vice-président de CalPERS, Winston J. Hickox, l’ancien secrétaire de l’Agence pour la protection de l’environnement en Californie (5 000 employés et 1 milliard de dollars de budget), s’est commis d’un courrier recommandé au patron du constructeur automobile en question, l’enjoignant d’opérer dans les meilleurs délais un virage industriel vers la fabrication de véhicules plus propres et •••

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••• moins polluants, mieux adaptés aux problématiques de l’effet de serre et à l’évolution des souhaits des Américains en matière d’automobile. Utilisant son pouvoir en tant qu’actionnaire, CalPERS menaçait dans la même lettre de retirer les quelques dizaines de pour cent qu’il détenait dans le capital du constructeur automobile. Quelques mois plus tard, ce dernier annonçait par voie de presse qu’il se lançait dans le développement de nouveaux véhicules propres… Même fermeté avec la gestion des 12 milliards de dollars d’investissements de CalPERS dans l’immobilier : « Nous demandons à nos gestionnaires des entreprises d’immobilier dans lesquelles on a investi de réduire rapidement de 20 % les consommations d’énergie, les déchets, etc. À eux de se débrouiller », conclut Winston J. Hickox1.

Dans un même ordre d’idées, Agrica, groupe de prévoyance et de retraite créé il y a dix ans pour couvrir les personnels du secteur agricole et qui compte aujourd’hui 156 000 entreprises adhérentes, a décidé en 2006 de s’engager fermement dans une démarche de développement durable. Cette orientation se traduit notamment par 1. Conversation de l’auteur avec l’intéressé, le 15 novembre 2006 à San Francisco (USA).

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À noter que le même fonds CalPERS regarde aussi, comme beaucoup d’autres fonds, l’évolution des salaires des dirigeants des entreprises dans lesquelles il a investi, et les compare avec celle… des résultats. CalPERS est également attentif à l’indépendance des administrateurs vis-à-vis des managers de l’entreprise. Écoutons encore Winston J. Hickox : « Nous considérons les administrateurs comme nos représentants dans l’entreprise. Ils doivent d’abord nous obéir à nous, les actionnaires et pas à la direction de l’entreprise »… Intéressant aussi de savoir que, dans un pays comme les États-Unis, les fonds de pension, les mutuelles et les fonds de banques, qui sont regroupés dans un Conseil des investisseurs institutionnels, possèdent aujourd’hui 50 % du volume des actions en Bourse aux États-Unis. De futurs regroupements supplémentaires pourraient prochainement porter cette part à 80 %. Et augmenter d’autant leur pouvoir de pression.

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une nouvelle politique en matière de choix de ses investissements en actions. Ces derniers représentent environ un quart du total de ses 5,7 milliards d’euros d’investissements. Dorénavant, rapporte le quotidien La Tribune du 27 août 2008, « le choix des investissements en actions d’Agrica s’effectuera sur la base d’une sélection d’entreprises effectuée par l’agence de notation extra-financière Vigeo, en vertu des critères choisis par Agrica. Les valeurs véhiculées par la RSE sont proches de nos valeurs traditionnelles de groupe paritaire de protection sociale », observe Hervé Bachellerie, le directeur général adjoint, qui compte bien en faire un avantage concurrentiel. « L’image et les valeurs d’une entreprise pèseront de plus en plus dans le choix des consommateurs », prédit-il… Enfin, on remarque que même les États s’y mettent. En témoigne le retrait annoncé le 19 septembre 2008 du fonds souverain norvégien du groupe minier anglo-australien Rio Tinto. Motif : les risques que fait peser l’entreprise sur l’environnement. Le gouvernement norvégien a en effet appris que l’exploitation d’une mine par cette société en Indonésie rejetait des produits toxiques dans une rivière voisine et que rien n’indiquait que celle-ci allait changer de comportement. La participation de ce fonds souverain s’élevait fin 2007 à 650 millions d’euros ! À noter qu’une bonne trentaine d’entreprises figurent sur la liste noire des exclus du fonds norvégien, et non des moindres, puisque l’on y trouve des sociétés comme Boeing ou Wal-Mart, le leader de la distribution aux États-Unis.

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Les agences de notation sociale vous observent… Les agences de notation sociale ou extra-financière vous surveillent, vous auscultent, vous contrôlent, à la demande des investisseurs ou de leurs conseils. Mais elles peuvent aussi le faire à votre propre demande. Dans ce cas, il s’agira d’une notation dite « sollicitée ». Une façon pour vous de mesurer où votre entreprise en est en ce qui concerne son niveau de responsabilité sociale. Une notation sociale sollicitée peut aussi vous permettre de crédibiliser vos informations développement durable voire de mieux formaliser vos objectifs et vos actions. Cette notation s’effectue à partir de documents officiels de

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l’entreprise, de questionnaires personnalisés, d’entretiens en interne et de sources indépendantes de l’entreprise (articles de presse, par exemple). Les résultats de la notation sociale que vous avez sollicitée pour votre entreprise, vous en êtes maîtres : vous pouvez soit les communiquer à l’externe, soit les garder pour vous. En la matière, vous êtes les seuls décideurs.

Parmi les autres agences de notation sociale les plus connues, on trouve le français BMJ-Ratings, le britannique Eiris, qui sert, avec ses données, le célèbre indice FTSE4Good, l’un des deux premiers indices boursiers mondiaux dans le domaine, Oekom en Allemagne, Triodos aux Pays-Bas, Avanzi en Italie, Ges Investment Services dans les pays nordiques et en Pologne.

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L’agence majeure en France, voire en Europe, est, depuis sa fusion avec le belge Éthibel en 2005, Vigeo. Elle dispose à sa tête, avec Nicole Notat, ancienne secrétaire confédérale de la CFDT, d’une personnalité emblématique du monde social, très appréciée pour sa connaissance du monde de l’entreprise et son esprit d’équité. Celleci fait souvent remarquer, notamment dans le numéro d’Enjeux-les Échos d’octobre 2008, que « l’audit en responsabilité sociale n’est pas une activité réglementée et récurrente, à l’image de celle d’un commissaire aux comptes. Mais, on sait que cette démarche se met en place, souvent à partir des besoins des entreprises de rendre compte de leur performance environnementale, sociale et de gouvernance ». Mais si Nicole Notat n’est pas dupe et sait que les entreprises n’agissent pas dans le développement durable par philanthropie, elle note « qu’entre l’affirmation d’une volonté et les résultats concrets, il y a un gouffre. C’est là que l’agence de notation sociale intervient, en mesurant le chemin de l’intention à l’acte ». En matière de développement durable, « le risque zéro n’existe pas, continue-t-elle, c’est pourquoi les actions les plus intéressantes viennent des entreprises qui s’interrogent en permanence pour réduire ce risque ».

Développement durable, pourquoi votre entreprise doit-elle s’engager ?

Comment travaille une agence de notation sociale comme Vigeo ? Vigeo met à la disposition des entreprises, mais aussi des collectivités locales, des outils d’aide au pilotage stratégique, à savoir pour les entreprises des audits RSE, des benchmarks sectoriels et thématiques, et, pour les investisseurs et les gestionnaires d’actifs, des outils d’aide à la décision d’investissement. Pour ces derniers, Vigeo propose des analyses ISR (investissement socialement responsable) et des classements de la performance environnementale, sociale et de gouvernance des entreprises cotées, des études par secteurs et par critères de responsabilité sociale, mais aussi des classements de pays et de collectivités territoriales en matière de protection de l’environnement, de protection sociale et de solidarités, d’état de droit et de gouvernance.

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Le référentiel d’analyse de Vigeo utilise des critères rassemblant des objectifs de RSE de portée universelle. Ceux-ci sont opposables à l’entreprise ou à la collectivité locale analysée et à ses parties prenantes. Pour ses analyses, Vigeo travaille sur des informations multisources collectées auprès de l’entreprise ou de la collectivité locale analysée et de ses parties prenantes. D’autres informations sont issues de la base documentaire de Vigeo. L’agence de notation sociale procède concrètement à une série d’entretiens (dirigeants, membres du conseil d’administration, managers, employés, ouvriers, représentants du personnel…), ainsi qu’à une revue approfondie de la documentation et des notes internes de l’entreprise. Par exemple, pour effectuer un audit de diversité chez Vinci, Vigeo a procédé à 700 entretiens et analysé plus de 1 000 documents. Pour chaque point analysé, Vigeo utilise trois spectres d’appréciation : les orientations définies (la politique DD de l’entreprise), le déploiement (les processus et les moyens associés), les résultats obtenus, avec pour chacun d’eux une appréciation à quatre niveaux en partant du plus mauvais (« non tangible », « amorcé », « probant », « avancé »). Pour chacune de ses analyses, Vigeo informe l’audité de ses points forts en matière de développement durable, de ses points d’amélioration, et signale les bonnes pratiques identifiées.

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… et les indicateurs développement durable se multiplient Pour évaluer la démarche de développement durable des entreprises, il existe aussi de nombreux autres moyens : les classements (AccountAbility, SustainAbility, Innovest…), les classements à l’intérieur des secteurs d’activités comme celui d’IPC (International Postal Corporation), qui note et classe les opérateurs postaux du monde entier sur leurs engagements et actions dans la lutte contre le changement climatique, les normes (AA 1000, SA 8000, ISO 14001, SD 26 000, etc.).

Justement, n’oublions pas en matière d’évaluation des politiques de développement durable, puisque Élisabeth Laville y fait référence, les indices boursiers comme le FTSE4Good Global Index (Financial Times Stock Exchange For Good créé en 2001), le DJSI World (Dow Jones Sustainability Index World créé en 1999), ou l’ASPI Eurozone, etc. La participation à ces indices de durabilité est un facteur valorisant pour le monde financier. Pour Yves Dublin, déjà cité, « le fait d’appartenir à plusieurs d’entre eux est un atout important pour les entreprises, car cela rassure le monde des investisseurs en conférant une visibilité à leur stratégie de développement durable. Par ce biais, 1. In Infos 21, édition du 30 septembre 2008, newsletter du Comité 21.

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Élisabeth Laville, fondatrice et directrice d’Utopies, notait que « si ces initiatives sont multiples, elles n’en ont pas moins des objectifs différents. Les classements et les indices boursiers permettent d’évaluer la démarche d’une entreprise dans son ensemble et sanctionnent sa capacité à formaliser des règles et à les communiquer. Les systèmes de certification, eux, apportent des garanties sur le bon fonctionnement des processus internes d’une entreprise ou d’un site, pour un thème donné : le management environnemental pour l’ISO 14001, le respect des droits de l’homme pour le SA 8000, la prise en compte des parties prenantes pour l’AA 1000. Au final, si tout cela peut ressembler à une jungle de standards […], on constate que les critères d’évaluation convergent généralement vers une même définition du champ de responsabilité des entreprises1 ».

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continue ce consultant, la responsabilité sociale crée un réel avantage compétitif, poussant les entreprises ne figurant pas encore dans la liste de ces indices à suivre le mouvement en prenant davantage en compte les valeurs humaines et écologiques afin de se montrer plus transparentes et créer une valeur ajoutée durable […]. Certes, cela ne signifie pas que les indices de durabilité sont les seules références utilisées par les gestionnaires de fonds. Néanmoins, il ne faut pas négliger le rôle qu’ils pourront jouer à l’avenir dans les choix d’investissements ». Pour ces raisons, il peut arriver parfois que l’entreprise ne vise que le maintien dans l’index…

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La Halde incite aussi votre entreprise à changer de comportement La Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité (Halde), présidée par Louis Schweitzer1, prend chaque jour plus d’importance à travers les actions qu’elle développe, notamment dans le monde de l’entreprise. Ainsi cet exemple récent rapporté par le mensuel Enjeux-Les Échos d’octobre 2008 : au Crédit Agricole, la Halde, saisie par un jeune pacsé s’estimant discriminé par rapport à ses collègues mariés, a obtenu de l’établissement bancaire qu’il supprime les inégalités de traitement entre pacsés et mariés. Du coup, le salarié en question a pu bénéficier du même nombre de jours de congés payés prévus pour un mariage et de la même prime que ses collègues mariés. Au même moment, le Crédit Agricole, mais ça a dû arriver à bien d’autres entreprises, était épinglé par la Halde pour discrimination à l’embauche envers les seniors… Et le mensuel économique d’expliquer « qu’outre les recommandations et les opérations de testing, la Halde, créée en 2005 pour veiller à l’application du droit des discriminations , dispose dans sa panoplie de larges pouvoirs d’instruction, amendes, procès ou publication du nom de l’employeur réprimandé au Journal officiel ». Ne vous laissez donc pas prendre au piège pour risquer ensuite de ternir la réputation de votre entreprise. Anticipez et mettez-vous en règle, le plus tôt sera le mieux. Pour cela, et c’est son autre facette, « la Halde pourra vous aider par le biais d’une ••• 1. Directeur de cabinet de Laurent Fabius au ministère du Budget, puis de l’Industrie et à Matignon de 1981 à 1986, et, de 1992 à 2005, président du groupe Renault.

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••• douzaine de ses employés, chargés de proposer aux entreprises des outils de prévention des discriminations, sous la forme notamment de guides recensant les bonnes pratiques et rappelant ce que prévoit la loi », rapporte Enjeux-Les Échos.

Le poids et l’action grandissante des ONG…

Les Français ont confiance dans les ONG Une étude du cabinet First&42nd et de l’institut TMO effectuée en septembre 2005 confirme que les ONG et les associations apparaissent comme des acteurs essentiels de l’espace public compte tenu de leur notoriété très élevée et des taux de confiance que leur accordent les Français. Si Greenpeace, la Croix-Rouge, Médecins sans frontières, le Secours catholique, les Restos du cœur, le Secours populaire, Amnesty International, SOS Racisme et la Ligue •••

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Les ONG (organisations non gouvernementales) ont fait irruption dans le développement durable ces dernières années. L’accès massif des Français à Internet (environ les deux tiers sont aujourd’hui des internautes) permet assurément un essaimage rapide de leurs idées, mêmes complexes, et peut servir à mobiliser et motiver plus vite et mieux autour d’une cause donnée. L’histoire récente montre qu’une des forces majeures des groupes de pression relève de leur capacité à exploiter les instruments Internet. Tout cela a sans conteste favorisé l’émergence des ONG, le point d’orgue ayant été atteint courant 2008 avec leur participation massive et active aux échanges du Grenelle de l’environnement dont beaucoup se sont passés sur Internet. Les ONG auront ainsi volé un temps la vedette aux parlementaires et aux services de l’État, entre autres. C’était sans doute la première fois dans l’histoire que le gouvernement dialoguait et construisait directement avec ce type d’organisations. Il y a même des voix qui s’élèvent aujourd’hui pour proposer d’aller encore plus loin, les ONG auraient toute leur place autour des tables des conseils d’administration des entreprises aux côtés (ou entre) des représentants des organisations syndicales et ceux des associations de consommateurs.

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••• des droits de l’homme sont connus par plus de 80 % des Français, de très nombreuses autres ONG et associations ont des taux de notoriété supérieurs à 50 %. « Ces ONG et associations dessinent un nouvel univers institutionnel dont la présence dans l’espace public apparaît prégnante », commentent les auteurs de l’étude. Par ailleurs, le taux de personnes ayant confiance dans les ONG dépasse 50 % quel que soit le champ de leur activité. Les auteurs font cependant remarquer que « face aux ONG traitant des questions d’environnement et de la protection de la nature, le cumul des attitudes “vigilance et défiance” atteint 41 %, résultat sans doute lié à certaines actions controversées par l’opinion et à des perceptions contrastées des réponses aux enjeux écologiques ». Mais, depuis cette étude, le niveau de conscience des Français s’est encore beaucoup élevé et la tenue du Grenelle de l’environnement a mis encore plus en avant ces ONG. À noter aussi que 53 % des Français interrogés ont déclaré avoir fait un don à une ONG ou à une association, ce qui légitime l’action de ces nouveaux acteurs.

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Question intéressante aussi, celle posée sur la confiance des Français dans les différents émetteurs d’information sur l’environnement et la protection de la nature : 45 % font confiance aux ONG et associations, 31 % aux médias, mais seulement 3 % aux politiques, aux syndicats et… aux entreprises. S’adosser à une ONG ou à une association est sans doute pour une entreprise une bonne façon de donner plus de crédibilité à ses propos sur le sujet. En conclusion de cette étude qui mériterait d’être refaite trois ans après, les auteurs expliquent la confiance des Français dans les ONG par le fait que celles-ci interviennent généralement dans une actualité qui a un contenu émotionnel fort : « De par leur mode de présence médiatique et événementielle, les ONG et les associations sont des acteurs de la modernité en face desquelles les politiques et les syndicats restent dans des univers de discours ayant moins de portée affective car faisant appel à des registres d’analyse plus rationnels. » Et les auteurs de conclure : « Les entreprises et notamment les multinationales ne sont pas crédibles dès qu’il s’agit d’intérêt collectif. Pire, une large majorité de l’opinion se déclare en accord avec les campagnes des ONG contre les multinationales, lesquelles sont perçues comme étant au cœur des dégâts sociaux et environnementaux de la mondialisation. » Bref, pour les entreprises, notamment les grandes, il reste du pain sur la planche…

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Selon l’Orse (Organisation pour la responsabilité sociétale des entreprises), qui publie régulièrement des informations sur ces partenariats et notamment un excellent guide pratique Partenariats stratégiques ONG-Entreprises, l’ouverture des entreprises aux ONG ne doit pas être vue uniquement sous l’angle d’une réduction des risques sociaux et environnementaux ou d’une amélioration de l’image de l’entreprise, mais comme une opportunité d’inscrire durablement l’activité de l’entreprise, la fameuse licence to operate, le « permis d’exploiter ». « Le partenariat, explique l’Orse, est l’occasion pour les entreprises d’inventer un avenir crédible et acceptable par leurs différentes parties prenantes. » Et de prévenir : « Les démarches de partenariat

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Pour l’instant, les ONG, enfin certaines – on pense ici au WWF (World Wild Fund/ le panda), à Care, à Amnesty International, la FIDH, Planète Urgence, l’Adie de Maria Nowak, notamment –, travaillent déjà de concert avec les entreprises en les accompagnant dans des actions de protection de l’environnement, de développement économique des populations pauvres dans les zones urbaines, de solidarité avec les pays en développement ou de défense des droits de l’homme. La mise en place de partenariats entreprisesONG a permis à ces deux mondes très différents de se rapprocher en collaborant sur des sujets précis. De ces partenariats, les entreprises attendent généralement une amélioration de leur image, de leur crédibilité sur le développement durable, et une expertise et un savoir-faire sur des sujets qu’elles n’ont pas eu vraiment l’occasion de creuser. Les partenariats les plus emblématiques sont, par exemple, ceux : du cimentier Lafarge avec le WWF qui l’aide dans sa réduction contrôlée de ses émissions de gaz à effet de serre, ce qui peut provoquer des remises en cause salutaires débouchant sur des solutions innovantes ; de Sanofi-Aventis avec Care pour l’accès aux soins des plus démunis ; du métier du « Courrier » du groupe La Poste avec, encore, le WWF pour sa démarche « papier responsable » ; de Carrefour avec la Fédération internationale des droits de l’homme, dans l’élaboration d’une charte obligeant les fournisseurs du grand distributeur français à éliminer le travail des enfants de moins de 14 ans, à organiser des conditions de travail décentes, à respecter l’égalité des chances des employés, etc.

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ne peuvent se décréter et demandent du temps, des convictions et un engagement important de part et d’autre, d’autant qu’elles obligent souvent à repenser les systèmes de management du côté des entreprises. » Mais certaines ONG, par exemple Les Amis de la Terre, ont investi de façon très critique leur relation avec les entreprises. Cette ONG a notamment choisi de surveiller le secteur bancaire avec la plus grande attention tout au long de l’année. Outre des communiqués de presse réguliers pour dénoncer le soutien financier de telle banque à tel ou tel investissement qui lui semble nocif pour l’environnement, Les Amis de la Terre publient chaque année un bilan instructif des comportements des banques de la place. Les Amis de la Terre viennent d’inscrire un nouveau secteur d’activités à leur registre en publiant un rapport qui analyse les mesures prises en matière d’environnement par les grandes entreprises installées à Paris ou en petite couronne à la lumière du Plan de protection de l’atmosphère adopté par la région en 2006. Ces entreprises sont ainsi classées à partir d’une grille de critères qui vont du nombre de places de parking à la disposition du personnel à la promotion du covoiturage.

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L’erreur, pour les directeurs ou responsables développement durable, serait de négliger ou de balayer d’un revers de la main les actions ou propositions des ONG. Encore plus quand elles s’inscrivent dans une démarche critique à l’égard de votre entreprise. Certaines ONG sont très tenaces et il vaut mieux les avoir avec soi que contre. Il est préférable de s’appuyer sur leurs conseils et leur aide pour améliorer son score responsabilité sociale que d’entamer une guerre. « Hey, City, not with our money ! » Tout le monde aux États-Unis connaît Rainforest Alliance, l’ONG la plus redoutée de Wall Street. Elle a, entre autres faits d’armes, fait mettre un genou à terre à la très puissante Citybank, qu’elle accusait de financer des projets industriels qui auraient nécessité de raser des forêts primaires. Les dirigeants de City se sont gaussés d’abord de la campagne de communication et de mobilisation menée par Rainforest Alliance dans la presse quotidienne américaine à grands renforts de pleines pages de publicité. On pouvait •••

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••• y voir en visuel une paire de ciseaux en train de couper en deux une carte bancaire de Citybank avec en accroche : « Cut quickly City1 ! » Et en signature : « Hey, City, not with our money2 ! » Quand les banquiers en question ont vu revenir par courrier des milliers de cartes bancaires coupées en deux, ils ont fait marche arrière. Aujourd’hui, Citybank est devenu un des principaux partenaires de Rainforest Alliance, qui lutte pour la préservation des forêts… Pour « remercier » City d’avoir changé de cap, Rainforest Alliance a de nouveau utilisé la publicité dans la presse avec comme texte : « Thank you Citybank for an environmental policy. That helps protect our most valuable asset3 »…

D’ailleurs, remarque Michel Doucin, auteur d’un remarquable ouvrage intitulé Les ONG : le contre-pouvoir ?4, « le point de départ d’un partenariat direct d’une ONG avec une entreprise, c’est souvent une rugueuse relation de contestation des activités de la firme ». Et de citer le groupe McDonald’s qui, en 1990, après une intense campagne de dénonciation ponctuée par la réception de milliers de lettres 1. « Coupez vite la City ! » 2. « Eh, City, pas avec notre argent ! » 3. « Merci Citybank pour votre politique environnementale. Elle aide à préserver notre capital le plus précieux. » 4. Éditions Toogezer, 2007.

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Autre célèbre campagne menée par Rainforest Alliance, celle contre Yellow Pages, les annuaires pages jaunes aux États-Unis. Yellow Pages était alors accusé d’utiliser, pour imprimer chaque année ses dizaines de millions d’annuaires, du papier issu de bois provenant de forêts préservées. Le logo de cette société d’annuaires numéro un outre-Atlantique, ce sont deux doigts en « V » renversé qui marchent. Ce logo a été pour l’occasion transformé par l’ONG dans un visuel inspiré de films d’horreur. On voyait ainsi sur la publicité une tronçonneuse qui coupait la forêt et ses animaux. Aux États-Unis, avec Rainforest Alliance, il ne fait pas bon pour les entreprises d’empiéter sur les forêts primaires ou préservées pour développer leurs activités…

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de protestation de jeunes consommateurs, a noué un partenariat avec l’ONG Environmental Defense pour faire savoir que ses emballages étaient désormais recyclables… Les actions encore balbutiantes des associations de consommateurs…

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Pour l’instant, faute d’un esprit activiste développé en France, les associations de consommateurs ne semblent pas, globalement, pouvoir peser d’un poids suffisant pour exercer les pressions en direction des entreprises en ce qui concerne le développement durable. Selon un sondage de l’Ifop1 pour Les Échos, les Français les estiment cependant les plus aptes à « relever les défis du développement durable et de la protection de l’environnement » : 88 % leur font tout à fait et plutôt confiance contre 71 % pour les collectivités locales et les ONG, 70 % pour les PME, 68 % pour les institutions internationales type ONU… et, seulement 58 % pour l’Europe – mal payée de ses réels efforts –, 45 % pour les syndicats, 43 % pour l’État et le gouvernement, 36 % pour les grandes entreprises et 30 % pour les partis politiques, bons derniers. Seule, peut-être, l’UFC, l’Union fédérale des consommateurs, qui édite, entre autres, le magazine Que Choisir, a pu préempter avec quelque influence le terrain du développement durable et plus particulièrement celui de la protection de l’environnement à travers ses évaluations et notations de produits et de services. On notera ainsi une tribune intitulée « L’Europe doit réduire plus vite les émissions de CO2 des automobiles », publiée dans Les Échos du 13 octobre 2008, et cosignée UFC-Que Choisir, Greenpeace France et… la CGT2. Tiens, tiens… Dans cette tribune, les trois organisations observent que les constructeurs automobiles « usent et trop souvent abusent des arguments écologiques pour nous faire croire que le climat est 1. Effectué sur un échantillon représentatif de 1 005 personnes interrogées par téléphone à leur domicile les 1er et 2 mars 2007. 2. Alain Bazot pour l’UFC-Que Choisir, Pascal Husting pour Greenpeace et Jean-Christophe Le Duigou pour la CGT.

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au cœur de leurs stratégies. Mais, ni les publicités, ni les quelques efforts prétendument consentis par eux ne vont sauver le climat ». Et le trio exhorte « les représentants des consommateurs, des salariés et des écologistes à interpeller le président de la République, le gouvernement français et les parlementaires à défendre des objectifs ambitieux et contraignants en matière de lutte contre les changements climatiques dans le secteur industriel de l’automobile […]. Quant aux constructeurs automobiles, au-delà de leurs campagnes de publicité, ils doivent prendre aujourd’hui leur part de responsabilité dans l’effort collectif qu’il faut engager d’urgence face à ce qui constitue aujourd’hui le premier défi global de l’humanité ». C’est ce qu’on appelle un avertissement sans frais. Et il est donné par un « attelage » a priori surprenant qui laisse augurer de nouvelles formes d’actions dans notre pays. Ce qui n’est pas le moindre enseignement de cette tribune inédite qui, finalement, permet à une association de consommateurs de faire irruption, et comment, sur la scène du développement durable et pas du moindre de ses dossiers.

Il suffit de lire chaque semaine les synthèses du développement durable dans la presse pour voir que les médias français ouvrent de plus en plus largement leurs colonnes, leurs antennes ou leurs écrans au développement durable. Même si c’est le pilier environnemental qui domine encore en nombre de sujets traités, les médias peuvent mettre en valeur vos actions développement durable, au plus grand bénéfice de votre image. Une information positive nourrira votre marque auprès de ceux pour qui la protection de l’environnement ou la lutte contre la fracture sociale sont des priorités. Et, on l’a vu, ces personnes-là sont chaque année plus nombreuses. Les médias peuvent aussi écrire des articles qui mettent en cause votre entreprise à partir de faits négatifs, même succincts. De toutes les façons, il convient d’entretenir avec la presse des rapports de franchise. Même si l’on ne fait pas très bien telle ou telle chose, le principal, c’est d’abord d’en avoir conscience puis de prendre le plus rapidement possible les bonnes décisions qui feront avancer le dossier dans le

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N’oublions pas les médias…

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bon sens. Dans le développement durable, ce qui compte le plus, ce n’est pas la photographie de l’état de votre entreprise à un moment donné, mais plutôt le mouvement que vous lui imprimez. Une entreprise qui pollue peut être bien vue par les médias si elle montre qu’elle fait des efforts pour être meilleure. A contrario, une entreprise peu polluante, mais qui ne fait rien du tout, pourra se faire sérieusement épingler. Alors, n’oubliez pas de montrer aux médias que votre entreprise est bien dans une démarche de progrès, même si tout n’est pas encore parfait.

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Quels sont les médias les plus sensibles au développement durable ? Pour la presse quotidienne nationale, la palme des plus actifs revient sans conteste au journal Les Échos qui suit quotidiennement tout ce qui touche au développement durable à travers ses trois piliers, environnemental, social et économique. Si Les Échos ne disposent pas, comme d’autres quotidiens, d’une rubrique entièrement dédiée au développement durable, ce dernier irrigue toutes les rubriques du journal. Une façon de faire qui est bien dans l’esprit transverse qui sied au développement durable. On trouve ensuite des quotidiens comme Libération avec sa page quotidienne « Éco-terre », dédiée principalement à l’environnement, La Tribune (une page quotidienne « Green Business »), Le Figaro avec sa « Page verte » hebdomadaire chaque lundi, plutôt axée « consommation » et complétée par un site Internet14, où l’on retrouve toute l’actualité développement durable et environnement, ou encore La Croix. Quant au journal Le Monde, s’il s’y est mis plus tardivement, il publie, depuis le 25 septembre 2008, une ou deux pages quotidiennes intitulées « Planète », sur la partie environnementale du développement durable avec de nombreux sujets d’ordre humanitaire ou concernant les pays en développement.

1. www.lefigaro.fr/vert.

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Attention à ne pas négliger la presse quotidienne régionale et les hebdomadaires locaux, très lus dans nos provinces. Les journalistes qui y traitent les sujets développement durable sont souvent de jeunes pigistes ou journalistes, plutôt « fougueux » sur la question. Ils mettront facilement en exergue une bonne pratique, mais, dans le cas contraire, sauront déclencher un feu nourri. Et c’est encore plus vrai dans les pages locales où leur démarche souvent « militante » trouve un terreau favorable pour s’épanouir. En province, le quotidien Corse-Matin et son supplément hebdomadaire La Corse, votre hebdo traitent quotidiennement des questions environnementales sur l’île de Beauté, très sensible à cette problématique. Mais d’autres quotidiens régionaux ne sont pas en reste : Ouest-France ou encore les éditions départementales du Parisien en Ile-de-France, par exemple.

À côté de ces supports imprimés, on trouve une multitude de newsletters sur Internet ou de sites d’informations dédiés au développement durable (www.novethic.fr, de la filiale de la Caisse des dépôts et consignations et qui s’intitule « le média expert du développement durable », Environnement & Stratégie, Le Journal du développement durable, Environnement-online, [email protected], etc.) auxquels on peut encore ajouter les différentes newsletters sur Internet des associations spécialisées : Infos 21 du Comité 21, lettres d’infos d’Orée, d’EPE, de l’Orse, d’IMS-Entreprendre pour la Cité, de 4D, etc. Il y a aussi certaines entreprises comme Total ou Areva

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Côté magazines, nombreux sont les titres à aborder les thématiques du développement durable, par exemple les magazines sur la science (Science et Vie, Science et Avenir, etc.). Certains titres sont spécialisés dans le domaine de l’environnement (Environnement Magazine, Vertitude, Valeurs vertes, etc.), voire très spécialisés (Systèmes solaires, La Maison écologique, AutoBio, Environnement & Technique, etc.). Mais, il existe également aujourd’hui une kyrielle de titres généralistes consacrés exclusivement au développement durable (Ekwo, Le Nouveau Consommateur, Développement durable, etc.), et même depuis quelque temps des gratuits d’information générale sur le développement durable diffusés à plusieurs centaines de milliers d’exemplaires (Togezer, Néoplanète, Planète durable, etc.).

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qui publient régulièrement des magazines sur le développement durable à destination de leurs clients et du grand public. Enfin, notons parmi les curiosités, www.salamandre.net, la revue des curieux de la nature, qui existe depuis 1983 (!) et compte 27 000 abonnés payants. Ce journal présente la particularité de ne pas être vendu en kiosque pour éviter le gaspillage papier des invendus et de paraître sans publicité. Depuis dix ans, son rejeton, La Petite Salamandre, destiné aux enfants de 6 à 12 ans, paraît, lui, imprimé sur du papier recyclé et est emballé dans un film végétal biodégradable, tout comme les encres utilisées. Cette revue compte 13 000 abonnés payants… Côté audiovisuel, il n’existe quasiment plus une radio ou une chaîne de télé sans émission sur le développement durable ou la protection de la planète. TF1 pousse l’exercice jusqu’à passer presque quotidiennement une info sur ces thématiques à chacun de ses journaux télévisés de 20 heures et dans la météo d’Évelyne Dhéliat. Sans compter ses chaînes filleules, LCI, avec l’émission hebdomadaire Terre-Mère (infos + débat) présentée par Jean-Louis Caffier, et Ushuaïa TV, chaîne du câble et du satellite, avec son émission quotidienne d’un petit quart d’heure, Passage au vert. Thalassa sur France 3 n’est pas répertoriée comme une émission sur le développement durable, mais la façon dont y sont traités la plupart des sujets y ramène souvent. C’est un peu le même cas d’ailleurs avec l’excellent magazine Ushuaïa sur TF1 encore, de Nicolas Hulot que l’on ne présente plus. À noter aussi, côté télés, le magazine Globalmag, une semaine sur la terre, animé depuis janvier 2009 par Émilie Aubry (exLCP), chaque vendredi à 19 heures sur Arte. Et sur Gulli, la chaîne pour enfants de la TNT, les deux nouvelles émissions, Un geste quotidien pour ma planète et Il était une fois la Terre, diffusent « des idées simples à mettre en application, utiles et valorisantes pour les enfants », précise dans les magazines de programmes Emmanuelle Guilbert, directrice des activités télé chez Lagardère Active. Côté radios, on pense tout de suite à CO2 mon amour de Denis Cheissoux, les samedis après-midi sur France Inter, à Équateur de Teddy Follenfant, un militant de la première heure du développement

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durable, sur RCF (Radio chrétienne de France), à la chronique quotidienne du développement durable chaque matin sur Europe1, peu après les infos de 7 heures ou encore à l’émission Green Business sur BFM le week-end. Les responsables développement durable des entreprises qui ont des choses intéressantes à raconter sont régulièrement invités ou les actions de leurs entreprises mises en situation dans ces émissions. Pourquoi pas vous ? Enfin, parmi les innovations du secteur de l’audiovisuel, on aura apprécié l’émission Report-Terre, un douze fois « 52 minutes » sur France 5, diffusé au cours du dernier trimestre 2008. La chaîne publique avait confié à une dizaine de jeunes la mission de sillonner l’Europe en quête des meilleures initiatives en matière d’écologie. Accompagnés d’un cameraman professionnel et encadrés par « l’écoconsultante » Laure Mine et Monica Fossati, la sémillante fondatrice du magazine Ekwo, nos jeunes reporters souhaitaient provoquer une prise de conscience chez les téléspectateurs en faveur de l’urgence environnementale, tout en sortant des déclarations catastrophistes. Ambition réussie. Forte de ce succès, France 5 a démarré en janvier 2009 une nouvelle série inédite d’envergure : J’ai vu changer la Terre.

Du côté des agences de presse, si l’AFP, Reuters ou Bloomberg informent régulièrement leurs abonnés sur le développement durable, on signalera l’agence spécialisée AEF (www.aef.info), fondée en 1998 par un ancien journaliste d’Europe1, Marc Guiraud. Cette jeune agence vient d’étendre son périmètre (éducation, emploi, formation, RH) au développement durable. Baptisé AEDD, ce fil d’informations est alimenté par cinq journalistes et espère bien séduire le tiers du millier des clients de cette agence. Voilà toute une panoplie de types de médias qui mettent tous en exergue le développement durable, quelle que soit sa forme. Autant

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Côté pratique, pour s’y retrouver, citons le site www.ecoloinfo.com sur Internet qui vous informe en avant-première de tous les programmes radio et TV qui parlent de développement durable. Une fois sur ce site, il vous suffit de cliquer sur « Informer-partager » dans la rubrique « Ondes vertes ».

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d’occasions de mettre en valeur ce que votre entreprise fait de bien en la matière. Mais aussi autant d’occasions de se faire épingler en cas de comportement critiquable comme cela a pu être le cas, par exemple, de Total, lors du naufrage de l’Erika, ou de Nike, quand le bruit s’est répandu que la firme américaine faisait fabriquer certains de ses équipements sportifs par des enfants dans le Sud-Est asiatique. L’équipementier américain aurait disparu du paysage s’il n’avait rapidement entrepris un virage à 180 degrés… Parfois, les médias sont bien cruels avec les entreprises qui sont soupçonnées d’avoir dépassé le trait. Pour clore ce volet « médias », n’oublions pas les synthèses de presse hebdomadaires spécialisées sur le développement durable. À notre connaissance, il en existe deux sur le marché : celle de TNS-Sofres, qui présente de courts résumés très bien faits, et donc intéressera tous ceux qui n’ont pas trop de temps à consacrer à la lecture, et celle d’Hebdo DD, réalisée par la coauteur de ce livre, plus approfondie, donc destinée à ceux qui ont un peu plus de temps pour en savoir plus. Le choix entre l’une et l’autre est d’abord affaire… de temps.

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Les collectivités territoriales s’intéressent aux entreprises De plus en plus de mairies, de communautés urbaines, de communautés de communes, de conseils généraux, de conseils régionaux se dotent d’un Agenda 21, sorte de plan d’action de développement durable au niveau local, voire de Plans Climat pour lutter contre le changement climatique, comme c’est le cas à Paris. Aujourd’hui, près de 400 Agendas 21 territoriaux ont été lancés. Par ailleurs, 135 grandes villes d’Europe, membres du réseau Eurocities, se sont engagées, le 27 octobre 2008 à Lyon, à mener des politiques de lutte contre le changement climatique en développant des villes plus économes en espace et en énergie et en étoffant leur offre de transports en commun. Plus récemment encore, les 29 et 30 octobre 2008 à Saint-Malo, 98 régions du monde représentant 59 pays se sont engagées en faveur de la réduction des émissions de gaz à effet de serre et de l’atténuation des effets du changement climatique. Ces régions

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En effet, par essence, votre entreprise développe ses activités sur le territoire d’une ou de plusieurs communes, voire départements ou régions. Si ceux-ci se sont engagés dans des actions de développement durable, type Plans de déplacements d’entreprise pour vos personnels ou construction d’un éco-quartier1, vous ne pourrez pas rester longtemps sourd à leurs appels. Surtout si votre collectivité locale compte moins sur le volontarisme des acteurs que sur l’obligation de faire. On vous voit mal, par exemple, avec votre entreprise, résister et jouer le village gaulois en plein milieu d’un quartier écoresponsable. Le mieux est même d’anticiper les évolutions locales en proposant de participer à la réflexion de la collectivité en question et en lui apportant vos idées, vos bonnes pratiques. Ainsi, La Poste s’est dotée en 2008 d’un réseau de 21 directeurs de développement durable en régions dont l’essentiel du travail est de jouer un rôle d’interface entre la collectivité territoriale et leur entreprise. Et notamment d’identifier les actions communes possibles, c’est-à-dire de voir comment les différents métiers de La Poste pourraient, par des actions gagnant-gagnant, répondre positivement aux défis de développement durable que se sont donnés les collectivités territoriales. Suez-GDF, EDF, voire d’autres entreprises, se sont aussi bien organisées ou envisagent de le faire, pour mieux répondre à la demande de développement durable des collectivités territoriales. 1. L’éco-quartier se caractérise notamment par une place de la voiture limitée, une économie de l’espace, une mixité sociale, des fonctions d’économies d’énergie, une maîtrise des émissions de CO2, etc.

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prévoient également de développer des partenariats Nord-Sud et Sud-Sud afin de permettre aux régions les plus défavorisées d’élaborer et de mettre en œuvre des Plans Climat. Pour Jean-Yves Le Drian, président de la Région Bretagne, « il ne s’agit pas de se substituer aux États dont l’engagement reste déterminant, mais de faire valoir la spécificité de l’apport des collectivités locales ». Ainsi, ça bouge bien pour le développement durable du côté des collectivités territoriales et vous devez en tenir compte.

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Le bilan carbone, nouvel argument d’implantation pour les métropoles Les Échos du 1er décembre 2008 nous apprennent qu’en matière de benchmarking entre métropoles, il faudra désormais compter avec l’empreinte carbone. En effet, grande première en Europe, la métropole lilloise a demandé au consultant Ernst & Young d’étudier le niveau de tonnes de CO2 émis par une entreprise tertiaire lambda dotée d’un siège de 200 personnes et qui posséderait 5 filiales de 20 emplois dans de grands bassins d’emploi concurrents du nord de l’Europe comme Paris, Lille, Londres, Amsterdam, Cologne et Bruxelles. Pour comparer ces métropoles, l’étude se base sur les émissions de CO2 que produirait cette entreprise : combustibles, électricité, transports, services (gardiennage, frais postaux, prestations de services), fin de vie des déchets…, le tout pour établir un « classement vert ».

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Le résultat final de cette étude montre une confortable avance (de 15 à 40 % selon les scénarios) de la métropole lilloise sur ses concurrentes européennes. Un positionnement qu’elle doit notamment à son exceptionnelle desserte en TGV qui non seulement évite le recours à l’avion, mais est très favorable aux déplacements des salariés. De plus, compte tenu du niveau de concentration urbaine de la métropole lilloise les distances domicile-travail sont plus faibles qu’ailleurs. Par rapport à ses concurrentes étrangères, elle bénéficie aussi, comme Paris, du poids de l’électricité d’origine nucléaire en France. « Au moment où les entreprises montrent une sensibilité de plus en plus grande sur les questions environnementales, c’est un avantage phénoménal de compétitivité », commente Luc Doublet, le président de l’Association pour la promotion internationale de la métropole lilloise, qui souhaite s’appuyer sur ces résultats pour attirer de nouvelles entreprises.

La co-construction d’un projet avec la collectivité territoriale, la mise en commun des expériences et connaissances de chacune des deux parties ne peut que renforcer vos liens avec cette collectivité. Si, en plus, vous faites partie des pionniers locaux du développement durable, on ne l’oubliera pas le jour où vous aurez un problème local à résoudre, la collectivité territoriale, commune, communauté de communes, communauté urbaine, département ou Région se fera un plaisir de vous renvoyer l’ascenseur en souvenir de votre « bon

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comportement ». Aider une collectivité locale à réussir son Agenda 21 ou son Plan Climat à travers l’action de votre entreprise et de votre personnel ne peut être que positif. Et n’oubliez jamais que vos collaborateurs sont aussi des citoyens qui habitent la commune, le département et la Région. Eux aussi vous sauront gré d’améliorer par votre action leur quotidien. Vous renforcerez aussi positivement leurs liens avec votre entreprise.

Si vous faites des travaux de rénovation qui font du bruit et perturbent la circulation dans les quartiers autour de votre entreprise, n’hésitez pas à en informer les habitants en expliquant les raisons de votre action, sa durée, etc. ; vous pouvez aussi les inviter à fêter ensemble la fin des travaux. Après cela, ils ne pourront avoir qu’une idée différente et sans doute plus positive de votre entreprise et de ses activités.

Vos concurrents s’intéressent à vous aussi Indirectement, ils peuvent aussi « mettre la pression » sur votre entreprise. Notamment, s’ils développent eux-mêmes une politique ambitieuse en matière de développement durable, s’ils mettent en place des actions adaptées et le font savoir à leurs clients et prospects. Ils peuvent aussi tenter de vous déstabiliser en mettant en avant (ou le

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Vos riverains méritent également toute votre attention. Ils habitent ou travaillent le long de parcours ou dans des lieux que votre entreprise peut impacter : soit à travers les déplacements de vos collaborateurs pour venir à leur travail ou ceux effectués dans le cadre de leur travail ; soit par la livraison de matières premières ou de marchandises diverses venant de l’extérieur et aussi, le cas échéant, pour acheminer vos produits finis ; soit par le bruit, les fumées et autres désagréments que produit votre activité. Tout cela crée des nuisances plus ou moins acceptables. Les intéresser de temps en temps, par une information ou une journée portes ouvertes, à ce que fait votre entreprise, de qui elle est composée, et quel est son avenir à moyen terme, son impact économique sur le local (emplois, activités de sous-traitance, etc.) peut rapprocher les riverains de votre entreprise et les rendre moins agressifs le cas échéant.

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faisant faire par d’autres) vos points faibles en développement durable. Il vous faut donc, comme dans le marketing et la vente notamment, exercer une veille régulière sur ce qu’entreprennent – ou pas – vos concurrents. La lecture régulière de la presse et quelques navigations utiles sur Internet peuvent déjà constituer une base intéressante. Mais, comme au football, la meilleure défense étant encore l’attaque, le mieux est d’être offensif et d’anticiper les actions de « l’adversaire ». D’autant, on le verra plus loin, que le développement durable devient de plus en plus un avantage concurrentiel dans le domaine des affaires, voire dans celui du recrutement.

Et les partis politiques dans tout cela ?

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Hormis quelques petits partis spécifiquement dédiés à la cause écologique, les grands partis de gouvernement sont longtemps restés sur le bord du chemin du développement durable. Non pas que la notion de durabilité leur soit étrangère puisque, de gauche comme de droite, une fois élus à la tête de leur parti ou à une fonction élective, tous auront le souci de durer le plus longtemps… Mais, visiblement, cette durabilité ne leur a pas pour autant ouvert de nouveaux champs d’action. Posez-vous la question de savoir qui, au sein de tel au tel parti politique, est responsable du développement durable. Poser la question, c’est ne pas savoir y répondre même si vous êtes un observateur avisé de la chose politique. Depuis quelques mois, on sent chez les partis de gouvernement (UMP, Modem, PS, PCF…) comme un frémissement… Les élections présidentielles du printemps 2007 sont passées par là. Chacun se souvient, dans la première partie de la campagne, de l’irruption de Nicolas Hulot, une des trois personnes préférées des Français selon le baromètre mensuel du Journal du dimanche. L’écologiste audiovisuel aura réussi le tour de force d’amener tous les candidats (sauf un) à s’engager pour la planète : 800 000 Français devaient finalement signer, avec eux et avant le premier tour, son fameux « Pacte écologique ». Évidemment, une telle mobilisation, ça laisse des traces. L’idée du Grenelle de l’environnement aura assurément germé durant ces mois de précampagne dans la tête du futur vainqueur du

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Le développement durable, par son pilier environnemental, est donc bien entré en politique en ces années 2007 et 2008. Et chaque parti a maintenant son responsable développement durable, en fait plutôt axé sur le pilier environnement. Mais c’est un début. Le Parti socialiste dispose même d’un courant ad hoc, « Socialisme et écologie », créé en 2008 et qui a déposé une motion au congrès du PS à Reims. François Bayrou s’est adjoint pendant la campagne présidentielle les conseils de Jean-Marc Jancovici, ingénieur spécialiste dans le domaine du climat et de l’énergie. Etc. Souhaitons que cela dure et se développe. Car c’est bon pour notre pays, ses habitants et ses entreprises que le développement durable intéresse enfin le monde politique et soit traité par lui de façon constructive et prospective. Que le soufflé du Grenelle ne retombe pas serait sans doute aussi une bonne chose pour la planète. Mais cela ne peut pas être un objectif d’action pour les entreprises, sauf peut-être pour celles dont les activités se nourrissent directement de la demande environnementale et développement durable. Les politiques sont aussi parfois des élus qui

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scrutin, qui rebondira – une fois élu à la présidence de la République – sur la prise de conscience par les Français que plus rien ne pourra être comme avant. On ne va pas disserter ici sur le Grenelle, simple opération de communication ou véritable engagement du gouvernement, d’autant qu’au moment où ce livre est écrit, les lois du Grenelle ne sont pas encore pour l’essentiel passées au Parlement et que la crise financière fait rage, climat peu favorable à ouvrir les vannes budgétaires. Néanmoins, et personne ne pourra le nier, le Grenelle a fait se rencontrer et discuter ensemble des gens qui s’ignoraient encore quelques jours auparavant : politiques, ONG, syndicats de salariés, syndicats patronaux, chercheurs et scientifiques, hommes du monde de l’éducation, des médias et de la publicité, etc. Tous les participants ont estimé après coup que ces rencontres et discussions avaient été des plus enrichissantes. On notera aussi avec satisfaction le vote massif à l’Assemblée nationale en faveur de la loi dite « Grenelle I » à quelques députés près, l’opposition socialiste ayant rejoint, une fois n’est pas coutume, les votes positifs des parlementaires de la majorité.

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élaborent et votent les lois. S’ils ne sont pas encore dans une démarche de pression à l’égard des entreprises pour qu’elles s’engagent dans le développement durable, ils peuvent les aider ou les pousser en légiférant. Ils l’ont d’ailleurs déjà fait en 2002 avec la fameuse loi NRE (nouvelles régulations économiques) qui a stimulé la mise en œuvre du développement durable dans les grandes entreprises. Les politiques peuvent aussi vous citer publiquement pour une action que votre entreprise a réalisée, comme Jean-Paul Bailly, le président de La Poste, félicité nommément le 9 octobre 2008 en plein Mondial de l’automobile à Paris par le président de la République luimême, dans son discours, « pour avoir pris la décision d’acquérir 10 000 véhicules dé-carbonés d’ici à 2012 ». Et a contrario, Nicolas Sarkozy de titiller dans la phrase suivante le président d’EDF, Pierre Gadonneix, présent au moment du discours : « Je n’ose imaginer qu’EDF, qui produira et distribuera le “carburant”, puisse être en reste »…

Les pressions viennent aussi de l’interne

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Les syndicats ont encore du chemin à faire, mais ils ont pris la bonne route Sur la question du développement durable, les syndicats peuvent se répartir en deux catégories. La première, la plus motivée sur le sujet depuis quelques années, s’articule autour de la CFDT, à laquelle on peut adjoindre le syndicat Sud. Ce dernier, de création plus récente, est le fruit d’une scission au sein de la CFDT au début des années 1990. Aujourd’hui très distincts, ces deux syndicats véhiculent cependant une approche voisine quant à l’importance qu’ils donnent à la question environnementale, fruit de l’héritage commun de l’histoire de l’ancienne CFDT, issue elle-même de la CFTC. En effet, si la CFDT a vu le jour en 1964 et, de fait, n’aura pas connu l’engagement productiviste des « Trente Glorieuses » de l’aprèsSeconde Guerre mondiale, elle aura participé à la fin des années 1960 aux luttes médiatisées, parfois violentes, contre les centrales nucléaires.

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Aujourd’hui, la CGT et, à un degré moindre, FO ne font pas que s’intéresser aux débats sur le développement durable. Après l’avoir analysé dans un premier temps comme pouvant être une nouvelle astuce du patronat pour exploiter encore un peu plus le monde du travail, ils se sont progressivement rendu compte qu’il s’agissait d’abord de traiter d’un vrai – gros – problème de société. Ils ont compris aussi que l’existence des entreprises et de leurs emplois dépendait de la bonne santé de la planète. Ces deux syndicats ont finalement intégré ces toutes dernières années l’idée que lutter contre le changement climatique, ça crée aussi de l’activité économique et des emplois.

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Ainsi, la CFDT a très tôt, et depuis près de quarante ans maintenant, porté de l’intérêt au dossier de la protection de l’environnement. Donc, pas de quoi être surpris si cette centrale syndicale puis Sud ont été les premiers à intégrer cette question dans leurs démarches. Il n’en est pas de même pour la CGT et FO, qui, à la Libération et avant de se séparer en 1947, formaient un seul et même syndicat. À l’époque, ces deux organisations ont œuvré toutes les deux au formidable travail de reconstruction et de remise en route de « l’usine France ». Ces deux syndicats se sont développés sur fond de productivisme industriel et plutôt au sein de grosses unités de production. Cette nécessité du produire à marche forcée à un moment clé de notre histoire et sa logique ont perduré dans leur esprit et leur culture. La lutte pour la protection de l’environnement a longtemps été perçue par eux comme une dérive du capital pour diminuer la production, donc la croissance, donc le niveau de consommation. De plus, les acteurs de la défense de l’écologie d’alors ont pu renchérir en termes de décroissance et de retour en arrière. De même, certains politiques (la « croissance zéro » prônée à la fin des années 1960 par le Club de Rome, par exemple) faisaient souvent dire à nos deux syndicats qu’il n’était pas question pour les salariés d’en revenir « à la chandelle et à la lampe à huile ».

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Oui, le développement durable crée de l’activité et des emplois Un rapport d’octobre 2008 intitulé Travail décent pour un développement durable1 prévoit, d’ici à 2020, un doublement du marché mondial des produits et services écologiques. Mieux, d’ici à 2030, indique ce rapport, ce sont environ 20 millions d’emplois supplémentaires qui devraient être générés rien que dans le secteur des énergies renouvelables. Une autre étude, publiée cette fois par l’Ademe durant l’été 2008, estime quant à elle à 33 milliards d’euros et 220 000 emplois le marché français de la maîtrise de l’énergie et des énergies renouvelables en 2007 et prévoit un doublement des emplois et de ce marché d’ici à 2012 à travers les deux postes majeurs que sont l’amélioration énergétique du secteur résidentiel et les énergies renouvelables. Si cette hypothèse se vérifie, et selon l’Assemblée des chambres françaises de commerce et d’industrie (ACFCI), les PME s’octroieraient 60 % du marché français de ce qu’elle nomme les « éco-activités ».

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Plus récemment, le 6 novembre 2008, une étude d’impact du Grenelle de l’environnement sur les activités économiques était rendue publique par le gouvernement. Elle indiquait que, si les engagements pris par le Grenelle étaient bien tenus, à l’horizon 2020, les investissements se monteraient à 440 milliards d’euros et 535 000 emplois seraient créés ou maintenus. Enfin, écoutons les propos d’Achim Steiner, le directeur exécutif du PNUE, tenus à Genève et rapportés par Le Monde du 4 décembre 2008 : « La crise financière qui ébranle la planète est une occasion unique pour réorienter l’économie mondiale vers un modèle “vert”. La lutte contre le changement climatique et l’érosion de la biodiversité doit devenir le pilier des politiques de relance économique mises en œuvre dans tous les grands pays pour stimuler la croissance. » Bien entendu, tout sera parfait si… l’on dispose des formations – et des formateurs – ad hoc pour les professionnels, notamment des filières du bâtiment et plus particulièrement dans le domaine des ••• 1. Publié par le Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE) et le Bureau international du travail (BIT).

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••• énergies renouvelables. Selon les résultats d’une enquête effectuée par la journaliste Sophie Fabrégat1, il faudrait 10 000 enseignants de plus pour former assez de professionnels d’ici à 2020.

L’entreprise se doit donc d’intégrer ce regain d’intérêt des principales organisations syndicales en les faisant, entre autres, participer aux réflexions sur l’élaboration de la stratégie ou du plan d’action développement durable, voire en signant avec elles des accords. Certaines entreprises disposant de filiales à l’étranger ont même été jusqu’à signer avec les partenaires sociaux des accords « monde ». Certes, il y aura encore des désaccords sur les moyens et/ou les priorités définies en la matière par la direction de l’entreprise. Mais, on a le droit de penser aujourd’hui que l’on peut par un dialogue approprié se mettre d’accord avec les partenaires sociaux sur les principaux objectifs d’une politique sur cette thématique, laquelle équivaut à « se donner les moyens de garantir la pérennité de son entreprise et, à travers elle, la pérennité des emplois ». À La Poste, par exemple, les organisations syndicales ont été régulièrement consultées sur la stratégie et le plan d’action développement durable, associées à des réflexions de fond au sein d’un comité qualité et développement durable rattaché depuis 2008 au conseil d’administration de l’entreprise. Pour la 1. Enquête publiée début décembre 2008 et disponible sur le site www.actu-environnement.com.

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Aujourd’hui, les organisations syndicales souhaitent être un peu plus actrices de la réflexion sur le développement durable. Certaines, la CFDT ou la CGT notamment, sont même entrées dans les structures de direction de certaines associations spécialisées dans le développement durable, comme l’Orse, voire frappent à la porte d’autres, par exemple celle du Comité 21. Et toutes se sont maintenant dotées au plus haut niveau d’un responsable « développement durable ». Témoin de cet engagement, la première Journée mondiale pour la défense du travail décent, qui a réuni, le 7 octobre 2008, 110 syndicats provenant des cinq continents.

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première fois dans le rapport annuel « Développement durable » 2007, la parole a été donnée, en tant que partie prenante, à un représentant du personnel siégeant au conseil d’administration. Il a pu ainsi faire connaître son point de vue sur la façon dont le développement durable était mis en œuvre au sein de La Poste. Les salariés, eux, sont un peu plus en avance

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Les salariés d’une entreprise ne sont pas schizophrènes et leur engagement citoyen ne s’arrête pas devant la porte de leur entreprise. Si, par exemple, ils ont conscience que trier les déchets, c’est bon pour la planète, et qu’ils le font chez eux en tant que citoyens, ils ne vont pas comprendre que dans leur entreprise on leur demande de tout mettre dans la même poubelle sans trier quoi que ce soit. Ne pas leur permettre de pouvoir continuer dans le cadre de leur travail les gestes éco-citoyens qu’ils ont adoptés dans leur vie personnelle risque de développer chez eux une distanciation avec votre entreprise, voire du mécontentement ou de l’aigreur. Idem si votre entreprise s’éloigne de l’éthique. Votre personnel peut aussi vous le reprocher directement ou développer des comportements qui seront synonymes de reproches. Ainsi, par exemple, des salariés de la Société Générale échaudés par la crise et l’affaire Kerviel, du nom de ce jeune trader qui a fait perdre près de 5 milliards d’euros à cette banque en 2008. Après les faits incriminés, une augmentation de capital qui leur était réservée n’aura intéressé qu’un salarié sur deux de la Société Générale, soit beaucoup moins que les fois précédentes, alors que l’action leur était pourtant proposée à un prix inférieur de près de 20 % au cours de l’époque. Du coup, la part des salariés qui constituent collectivement le premier actionnaire dans le capital de la Société Générale et, selon elle, sa grande force, est passée de 8,5 % en 2005 à guère plus de 7 % l’année dernière. A contrario, si vous développez une éthique digne de ce nom et si vous proposez à vos salariés de s’investir dans des actions de développement durable au regard de leurs niveaux de motivation, vous allez les rendre heureux et fiers d’appartenir à votre

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entreprise. Et ces gens-là sont, en règle quasi générale, parmi les plus efficaces dans leur travail, donc les plus rentables économiquement et financièrement pour votre entreprise. Sachant que l’intérêt des Français, et parmi eux vos salariés, pour tout ce qui touche au développement durable augmente régulièrement, vous avez tout intérêt à ce que votre « offre » corresponde à leur « attente ». Le développement durable étant aussi facteur d’innovations, vous aurez tout à gagner à aider vos collaborateurs à en devenir d’ardents acteurs. La plupart des sondages réalisés en interne dans les entreprises montrent que, quand on leur demande à quelles actions de développement durable ils voudraient bien participer, sur les dix premières actions qu’ils citent, on en trouve en général cinq ou six qui, mises en œuvre, permettraient à l’entreprise de réaliser des économies dans les domaines de l’énergie, du papier, des carburants et des transports… donc de réduire vos charges. Alors, pourquoi vous en priver ?

Grands clients, consommateurs, investisseurs, médias, agences de notation, ONG, collectivités territoriales et, de plus en plus, le monde politique, tous, à leur façon et avec leurs moyens, mettent directement ou indirectement la pression sur votre entreprise en matière de responsabilité sociale. Ces pressions ont le plus souvent un caractère positif, car elles vont agir comme des déclencheurs et vous faire avancer plus vite dans la bonne direction du développement durable. À condition de bien les identifier, si possible de les anticiper, et, au final, de les « négocier » avec habileté. D’un problème au départ, tout l’art est de savoir ensuite en faire un avantage… N’oubliez pas non plus l’interne : votre personnel n’est pas schizophrène. S’il a adopté des comportements éco-citoyens dans sa vie personnelle, il voudra pouvoir les continuer dans le cadre de son travail. Répondre positivement à cette aspiration est aussi un bon moyen de la fixer à l’esprit et à la culture de votre entreprise. Quant aux syndicats, ils arrivent eux aussi sur le sujet…

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En résumé

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Améliorer son efficacité économique et financière avec le développement durable Comme nous l’avons déjà écrit plus haut, si les informations qui suivent peuvent être communes à toute sorte d’entreprise, la nature de son activité pourra être un accélérateur ou un ralentisseur. Ainsi, une entreprise qui vit directement du développement durable ne sera pas impactée avec la même force qu’une entreprise de services, qui n’a, a priori, pas de business en lien direct avec le développement durable – ce dernier n’étant qu’une façon pour elle d’appréhender ses modes de fonctionnement –, ou encore avec une entreprise dont les activités sont très polluantes. Nous voyons plusieurs raisons, offensives ou défensives, qui montrent que le développement durable doit être compris comme étant un levier de performance pour l’entreprise, un moyen d’améliorer son efficacité économique et financière.

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La première de ces raisons, c’est que le développement durable est facteur de réduction des coûts. En minimisant l’utilisation de ressources naturelles, l’optimisation du processus de production ou d’exploitation permet de réduire les coûts dans un contexte de croissance durable du prix des matières premières. Ainsi, quand une entreprise, pour lutter contre le changement climatique, veut réduire les émissions de CO2 de ses moyens de transports, il n’y a d’autre alternative pour elle que de baisser ses consommations de carburant. C’est même homothétique. Et qui baisse le volume de ses consommations de carburant baisse le poids de ses charges. On peut faire la même démonstration avec les économies d’énergie et d’eau. Selon le Livre vert sur l’efficacité énergétique publié par la Commission européenne en 2005, « l’Union européenne pourrait économiser au moins 20 % de sa consommation d’énergie actuelle avec un bon rapport coût-efficacité, équivalent à 60 milliards d’euros par année ». Le baril de pétrole brut était aux alentours de 40 dollars l’unité en janvier 2009. Avec un baril à plus de 100 dollars, l’économie sur les importations d’énergie avoisine les 220 milliards d’euros selon l’institut allemand Wuppertal, information rapportée dans Le Monde daté du

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Le développement durable permet aussi d’échapper à certaines taxes forts coûteuses : • en embauchant un pourcentage suffisant de personnes handicapées (6 % des effectifs pour toutes les entreprises de plus de 20 salariés) ; • en intégrant les équivalents de tâches achetées au secteur adapté et protégé, les ex-centres d’aide au travail (CAT), appelés aujourd’hui Esat (établissement et service d’aide par le travail), qui emploient des salariés handicapés ; • en mettant en place un plan de maintien dans l’emploi pour les seniors. Si vous ne concluez pas d’accord sur ce thème dans votre entreprise et n’engagez pas de plan en leur faveur, la pénalité à laquelle sera soumise votre entreprise équivaudra, à compter du 1er janvier 2010, à 1 % du total des rémunérations brutes qu’elle verse au personnel. Faites vos calculs… On peut aussi prendre l’exemple de l’immobilier. Lorsque vous construisez un nouveau bâtiment aujourd’hui, vous avez tout intérêt à intégrer le plus possible de critères de haute qualité environnementale. Il en existe 14 au total, mais en appliquer 7 ou 8 fait bien avancer les choses. Votre surplus d’investissement du départ sera en effet très vite rentabilisé au regard de la hausse du coût des énergies. Prendre aujourd’hui le risque de construire ou d’acheter un bâtiment mal

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15 octobre 2008 par l’excellent journaliste sciences-environnement Hervé Kempf. Une masse d’économies à laquelle pourrait sans doute contribuer votre entreprise. Et puis, réduire ses consommations d’énergie fossile est un moyen indirect d’atteindre les 20 % d’énergies renouvelables requis par la Commission européenne. Et Hervé Kempf de prédire dans ce même journal : « Les grandes compagnies de pétrole, de gaz, de nucléaire, et de vent se battent pour obtenir une part sur le marché, ce qui entraîne nécessairement une pression à l’augmentation de la consommation d’énergie. L’avenir sera au contraire de privilégier les actions sur la demande, dans le sens d’une sobriété permettant d’obtenir les mêmes satisfactions et à moindre coût. » Votre entreprise s’honorerait et, au passage, gagnerait des sous à soutenir concrètement cette vision avec… énergie.

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isolé et utilisant des systèmes très consommateurs en énergies pour faire quelques économies au départ vous mettra à moyen terme dans une situation difficile : vous allez devoir sans doute payer des pénalités, dépenser plus de charges et, coup de pied de l’âne, votre bâtiment perdra de sa valeur sur le marché. En fait, en agissant ainsi, vous grevez par avance la valeur du capital immobilier de votre entreprise. Au contraire, en faisant construire « propre » ou en achetant « propre », vous vous préparez une belle réduction de vos coûts. Le baril de pétrole brut, qui sert de référence pour tous les prix des énergies, électricité comprise, était à environ 40 dollars en janvier 2007, 100 dollars un an après, puis presque 150 dollars courant 2008 avant de faire une pause aux alentours de 40 dollars à la fin de la même année. Mais à combien sera-t-il dans cinq ans ? dans dix ans ? Pensez-y et anticipez le renchérissement inéluctable des coûts des énergies dans vos projets de constructions ou d’achats de bâtiments, voire le lieu d’implantation qui peut ne pas être neutre en termes de transports de vos marchandises ou de votre personnel. Le développement durable peut aussi être facteur de recettes nouvelles. Par exemple, si, au lieu de payer une entreprise pour venir vous débarrasser de votre papier, de vos cartons et autres palettes en bois, vous proposez à une entreprise spécialisée dans la récupération des déchets de vous les racheter au prix du marché, ce n’est pas la même chose dans vos comptes d’entreprise. Vous pouvez aussi rebondir sur les nouveaux comportements des consommateurs comme l’a fait la poste japonaise, qui a construit un business autour de ce que l’on appelle la reverse logistic, c’est-à-dire le retour chez le producteur d’appareils électriques ou électroniques usagés. Ainsi, Japan Post a conclu un accord en amont avec les fabricants d’ordinateurs qui sont, comme en Europe, obligés de récupérer chez leurs clients les matériels qu’ils leur ont vendus quand ils sont en fin de vie. Quand il rentre chez lui avec son nouvel appareil, le consommateur nippon réutilise le carton d’emballage pour y placer le vieux micro-ordinateur dont il veut se débarrasser. Puis, il appelle les services appropriés de la poste japonaise sur un numéro Vert. La poste en

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question passe ensuite chez lui récupérer le carton contenant le vieux micro puis, contre rémunération du fabricant, l’achemine vers un centre de retraitement des déchets électriques et électroniques. L’égalité hommes-femmes produit des gains nouveaux

On a également oublié que plus il y a de la mixité dans les structures de direction, meilleurs sont les résultats de l’entreprise. En effet, la plupart des femmes ayant un deuxième « travail » à la maison (les hommes descendent un peu plus les poubelles, mais ça ne va généralement pas beaucoup plus loin), eh bien, elles ont moins de temps que les hommes à consacrer à leur travail salarié. Du coup, elles ont un rapport au temps complètement différent. Ce qui les entraîne à prendre des décisions de façon plus pragmatique que les hommes et surtout à rechercher plus vite qu’eux le consensus, très souvent clé de réussite. D’autant plus si l’entreprise est grande et que chaque projet imaginé provoque l’arrivée d’une quinzaine de collègues d’autres directions… Tous ceux qui travaillent dans les grandes entreprises connaissent cela. Conséquence d’une bonne mixité dans les structures de direction qui permet la confrontation des cultures et des façons de faire : des résultats économiques et financiers nettement supérieurs (de 10 à •••

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Prenons un autre exemple dans le domaine du social, cette fois, pour montrer que le développement durable peut dégager des ressources financières nouvelles. Le sujet de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes est maintenant largement abordé dans les entreprises, mais, le plus souvent, sous un angle plutôt humaniste. Si l’on va jusqu’à signer des accords avec les partenaires sociaux pour réaffirmer le principe de l’égalité hommes-femmes, la percée des femmes sur les postes à responsabilités se calcule à quelques dixièmes de points gagnés chaque année. À ce rythme-là, il faudra dans certaines entreprises plus de cent ans pour rétablir l’équilibre… Qu’est-ce que l’on a oublié de faire pour que cela aille plus vite ? Premièrement, de mettre en place des actions concrètes et de bon sens pour favoriser l’équilibre. Par exemple, soulager, par la mise en place dans l’entreprise d’une conciergerie, la part encore prépondérante des femmes aux tâches familiales, arrêter de fixer des réunions de travail en fin de journée ou de convoquer des séminaires de travail à 8 heures du matin au diable vauvert.

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••• 15 % !) à ceux des entreprises où les hommes dominent tout. Une étude du cabinet de consulting McKinsey1 démontre qu’à partir d’au moins trois femmes sur dix dans les fonctions de direction, l’écart devient sensible en termes d’efficacité d’organisation avec les entreprises où elles sont absentes de ces fonctions2. Idem sur le plan financier : à partir d’au moins deux femmes présentes au sein du comité exécutif et du conseil d’administration, ces sociétés ont en moyenne une performance supérieure à leur indice de référence en matière de rentabilité des fonds propres (11,4 % contre 10,3 en moyenne), de résultat opérationnel (11,1 % vs 5,8) ou de croissance du cours de Bourse (64 % de 2005 à 2007 vs 47).

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Dans le même article, Laurence Boisseau rappelle que « ces chiffres implacables sont corroborés par ceux de l’organisme américain Catalyst qui a constaté un écart de rendement de l’action de 34 % en 2004 entre les sociétés qui ont le plus de femmes au conseil d’administration et celles qui sont le moins féminisés ». Suite à ces analyses, des gérants de portefeuille se sont engouffrés dans la brèche en proposant des produits financiers ad hoc. Les sociétés qui intègrent ces fonds répondent à une double contrainte : un score de mixité et une note financière. Un de ces premiers fonds, Amazone Euro Fund, a surperformé son indice de référence, le MSCI, de 180 points de base… On pourra lire des démonstrations encore plus convaincantes dans le livre d’Avivah WittenbergGox et Alison Maitland Womenomics – La croissance dépend aussi des femmes3. Plus près de nous, lors de la crise financière de l’automne 2008, une étude de l’Observatoire de la féminisation des entreprises du Ceram Business School, effectuée auprès des entreprises du CAC 40, a montré que plus l’encadrement d’une de ces entreprises était féminin et moins son cours de Bourse avait chuté. Hermès ou LVMH, où plus de la moitié de l’encadrement est féminin, ont moins souffert qu’EADS, Saint-Gobain ou ArcelorMittal, où l’encadrement féminin est inférieur à 15 %. Idem dans le secteur bancaire où BNP ••• 1. Étude menée en octobre 2007 auprès d’une centaine d’entreprises cotées et rapportée par La Tribune du 7 mars 2008. 2. Neuf critères avaient été retenus : leadership, vision, environnement de travail, responsabilité, coordination et contrôle, compétences, motivation, innovation et ouverture sur l’extérieur. 3. Éditions Eyrolles, avril 2008.

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••• Paribas (près de 40 % d’encadrement féminin) a moins chuté que Dexia (28 %) ou le Crédit Agricole (16 % seulement) : recul de 19,34 % contre - 50,41 % pour la dernière.

On semble avoir bien intégré cette donne en Norvège si l’on s’en réfère aux paroles « édifiantes », au bon sens du terme, prononcées par Margot Wallström, la vice-présidente de la Commission européenne, lors de la quatrième édition du Women’s Forum qui s’est tenue à Deauville en octobre 2008. « En Norvège, les entreprises cotées sont obligées de par la loi d’afficher au moins 40 % de femmes dans leur comité de direction. Cela a amené les femmes à demander des formations. Puis les hommes, de peur de perdre pied, en ont fait autant, et, finalement, les entreprises ont tellement gagné en créativité que les entreprises non cotées veulent désormais elles aussi avoir davantage de femmes à la direction2»… Le poète Louis Aragon écrivait en son temps : « La femme est l’avenir de l’homme. » Peut-être bien qu’elle est maintenant aussi l’avenir de l’entreprise… D’ici à 2015, près de 40 % des cadres dirigeants partiront en retraite. Une belle opportunité pour les entreprises de donner toute leur place aux femmes dans les postes à hautes responsabilités.

On pourrait multiplier les exemples qui témoignent que le développement durable peut apporter à l’entreprise qui le pratique des recettes nouvelles. 1. Édition du 23 octobre 2008. 2. Les Échos, édition des 17-18 octobre 2008.

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Christine de Kerdellant, dans L’Express1, avance une explication : « Si lors des krachs, les stratégies féminines (“conservatrices et prudentes”) sont récompensées, les stratégies masculines (“audacieuses et risquées”) sont-elles préférées dans les phases de croissance ? Une seule certitude s’impose : l’uniformité conduit généralement à une plus grande prise de risque que la diversité. Alors vive la mixité ! » Nous sommes d’accord, l’expérience prouve que c’est bien de la confrontation des cultures et des façons de faire que naissent les meilleures solutions.

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Le développement durable est aussi un facteur d’innovation. Pour en tirer la substantifique moelle au profit de votre entreprise, il va vous falloir inventer de nouvelles organisations, de nouvelles façons de travailler, mettre en place des moyens matériels et humains différents, prendre les décisions différemment, tout comme construire les projets. Le développement durable, ça oblige rapidement à se remettre en cause et à réinventer les façons de fonctionner de son entreprise. On ne calcule plus de la même manière selon qu’on anticipe ou pas le moyen et le long terme, que l’on prend ou pas en compte le cycle de vie d’un produit (« du berceau à la tombe »), etc. Ainsi, par exemple, Schneider Electric développe avec ses clients des actions où il se rémunère uniquement sur les économies d’énergie réalisées qu’il partage avec eux ; le groupe d’assurances Generali a développé un autodiagnostic environnemental afin de capter une clientèle nouvelle à qui il propose une réduction du montant de sa prime d’assurance si le client obtient une « bonne note » environnementale ; le marchand de glaces Häagen-Dazs s’est lancé dans la protection des abeilles parce qu’elles sont les fournisseuses de leur composant principal, le miel.

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La Poste poussée à innover dans ses transports pour polluer moins La Poste ambitionne de réduire de 15 % les émissions de CO2 produites par ses moyens de transport pour acheminer et distribuer six jours sur sept sur tout le pays les lettres et les colis. Que fait-elle pour atteindre cet objectif ambitieux ? Elle a tout d’abord engagé un partenariat avec la Société de véhicules électriques (SVE) du groupe Dassault pour co-inventer un véhicule utilitaire de nouvelle génération. Signé en octobre 2004, cet accord s’est concrétisé un an après exactement avec la mise en service d’un, puis de huit prototypes de véhicules électriques Kangoo-Cleanova. Après les avoir testés pendant un an et demi à la satisfaction générale, La Poste a lancé en 2007 un appel d’offres pour 500 de ces véhicules à livrer en 2009. Cette phase d’expérimentation grandeur nature sera suivie d’une commande de 10 000, soit le cinquième de son parc actuel, à livrer d’ici à fin 2012. Rappelons que les véhicules mus par l’électricité émettent zéro gramme de CO2 au kilomètre… •••

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••• En attendant ces véhicules propres, La Poste a décidé de former tous ses conducteurs, d’ici à fin 2009, à l’éco-conduite. Une formation déjà testée auprès de plusieurs milliers de postiers et qui a permis à ces derniers de réduire en moyenne de 7 % leurs consommations de carburant, donc d’émissions de CO2. La division du courrier, dans le même temps, a testé des camions comportant à mi-hauteur un pont supplémentaire qui va lui permettre d’y charger plus de lettres et de réduire substantiellement, lorsque cette innovation sera généralisée, le nombre de camions sur les routes. Du côté de la direction des colis, le chargement automatisé en vrac – plutôt que par conteneurs – a permis de transporter trois fois plus de colis par camion et de mettre (ce n’est malheureusement pas homothétique, mais quand même) deux fois moins de camions sur les routes. Une meilleure organisation des trajets des véhicules de La Poste lui a permis d’économiser sensiblement les kilomètres parcourus (moins 400 000 kilomètres par an intra-muros dans Paris, par exemple). L’avion étant très émetteur de gaz à effet de serre, La Poste a vendu en 2008 sa flotte aérienne, qui comprenait une vingtaine d’appareils (Airbus, Boeing, Fokker, etc.), et la remplace progressivement par des TGV postaux ; les trois premiers roulent déjà sur la ligne Paris-Lyon-Marseille. Enfin, pour le transport des colis où les TGV ne passeront jamais – par exemple, entre le continent et la Corse –, La Poste étudie des projets de dirigeables gros-porteurs de nouvelle génération. Gonflés à l’hélium dans une enveloppe souple recouverte elle-même d’une enveloppe en dur cette fois, ils seront capables d’emporter 250 tonnes de fret à une vitesse de croisière de 180 km/h et de voler dans les mêmes conditions météo que les avions aujourd’hui grâce à un système de ballast à eau. De plus, ils n’auront pas besoin de zones aéroportuaires pour atterrir et décoller, ce qui supprimera au passage des ruptures de charges. Gains espérés par rapport à l’avion : dix fois moins de gaz à effet de serre et aussi beaucoup moins de bruit. Les transports de La Poste s’effectuant le plus souvent la nuit, les riverains des aéroports en seront les premiers gagnants. Que de changements ! En fait, c’est toute la politique de transports de La Poste qui s’est trouvée remise en question par les nécessités du développement durable.

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On voit à travers cet exemple de La Poste, pris au sein d’une entreprise en mutation et soucieuse de son niveau de responsabilité sociale, combien le développement durable peut pousser à se remettre en cause pour trouver par l’innovation, technique ou organisationnelle, les réponses adéquates. À chaque entreprise de trouver ses propres réponses. On le constate chaque jour, le développement durable devient un atout concurrentiel pour le business et pour le recrutement. Dans le domaine des affaires, les donneurs d’ordres, lors des appels d’offres qu’ils passent, intègrent de plus en plus, dans leur processus de sélection d’un prestataire ou d’un sous-traitant, le niveau de responsabilité sociale de celui-ci. Aux côtés des critères classiques et historiques de prix et de qualité apparaît un troisième critère, qui peut jouer un rôle discriminant : le niveau de RSE de l’entreprise qui postule. De plus en plus de marchés se gagnent aujourd’hui sur cette différence. Il en est de même si votre entreprise est en recherche de capitaux : l’investisseur préférera placer son argent dans une entreprise socialement responsable car plus efficace économiquement et plus pérenne. Certains gros donneurs d’ordres comme Vinci ou Schneider Electric se fixent chaque année des objectifs de pourcentage – à deux chiffres – de montants d’achats passés avec des entreprises qui ont adhéré au Pacte mondial des Nations unies. Disposer d’un bon niveau de responsabilité sociale a permis aussi à certaines entreprises de redresser la barre, y compris dans des secteurs d’activités a priori difficiles. Interrogés pendant l’été 2008 par l’agence d’études Limelight, les patrons du CAC 40 confirment par leurs réponses qu’ils ont le sentiment que les entreprises qui ont adopté une démarche de développement durable ont plus de chances de durer que les autres…

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Armor-Lux préserve son expertise et se refait une santé avec le développement durable Dans le textile, secteur ô combien sinistré dans notre pays, la société bretonne Armor-Lux a pu relancer ses activités sur la base d’une appropriation forte du développement durable. Reprise en 1993 par deux anciens cadres de Bolloré, les dynamiques et sympathiques Jean-Guy Le Floc’h et Michel Gueguen, la firme, célèbre pour ses pulls aux rayures marines, était à la peine face à la concurrence grandissante et sévère des pays en développement, Chine en tête. En France, à cette époque, les usines textiles fermaient les unes après les autres. Nos deux compères ont compris après quelques années d’exploitation qu’ils devaient changer la posture de leur entreprise s’ils voulaient qu’elle survive. En plaçant au centre de sa stratégie commerciale l’éthique et le développement durable, Armor-Lux a rapidement conquis de nouveaux grands clients à mesure que ceux-ci s’engageaient également dans ces stratégies. Un accord a été signé avec l’ONG Max Havelaar par lequel Armor-Lux s’engage à utiliser du coton équitable et labellisé par elle. Dans le même temps, la société bretonne s’est liée avec un cabinet indépendant qui vérifie régulièrement que les quinze usines avec lesquelles elle travaille, en France et dans des pays en développement (Maroc, Tunisie, Roumanie, etc.), respectent les règles d’éthique et s’inscrivent bien dans celles de l’Organisation internationale du travail (OIT). Cette façon de faire a permis à Armor-Lux de rencontrer en 2004 les aspirations de La Poste en matière de responsabilité sociale et de décrocher un gros contrat d’habillement en vêtements utilisant du coton équitable provenant du Mali pour ses 100 000 facteurs et factrices. Cette pratique de La Poste devait être reprise par la SNCF, Aéroports de Paris, le conseil régional de Bretagne pour ses personnels scolaires, le ministère de l’Intérieur pour ses policiers en tenue, Casino ou Leroy-Merlin pour ne citer que les donneurs d’ordres les plus emblématiques. Résultats pour l’entreprise bretonne : un emploi maintenu en Bretagne et dans l’Aube, et une situation économique et financière redressée alors que ses concurrents français continuent de s’étioler ou de disparaître. Plus encore, des soustraitants au Maghreb ont été pérennisés malgré la disparition en 2005 des quotas imposés à la Chine, tout simplement parce qu’ils respectent un certain nombre de critères de développement durable. •••

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••• Armor-Lux est signataire du Pacte mondial des Nations unies depuis janvier 2004 et engagée dans un Agenda 21. Membre depuis 2005 de l’Orse, Armor-Lux participe régulièrement aux groupes de travail organisés sur les thèmes de l’ancrage territorial ou des achats responsables.

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L’exemple d’Armor-Lux prouve par des résultats concrets que la responsabilité sociale peut être un atout concurrentiel très positivement discriminant dans le domaine des affaires. Côté recrutement, c’est un peu la même logique. Les jeunes qui sortent maintenant des écoles et sont à la recherche d’un travail sont, dans un pays comme la France, de moins en moins en concurrence, en raison des très nombreux départs à la retraite de la génération du baby-boom. Et cela va encore s’accentuer dans les années qui viennent. Du coup, certaines professions ont déjà du mal à recruter : le BTP, l’informatique, le secteur bancaire, etc. Les jeunes chercheurs d’emploi voyant diminuer la concurrence, pourquoi choisiront-ils une entreprise plutôt qu’une autre ? Si le montant de la rémunération demeure – il ne faut pas se voiler la face – un élément fort, les perspectives de faire carrière au sein d’une même entreprise sont de moins en moins déterminantes, pour la simple raison que les emplois sont de moins en moins pérennisés. Reste donc le niveau de responsabilité sociale de l’entreprise : celles qui respectent l’environnement, leur personnel, leurs clients, les règles de bonne gouvernance et les territoires sur lesquels elles développent leurs activités deviennent, avec ces atouts, plus attractives auprès des nouvelles générations. La diminution du temps de travail avec les 35 heures et les ARTT s’est faite en faveur des temps de loisirs et de la vie en famille. Le rapport des salariés avec leur entreprise – où ils passent maintenant moins d’un tiers de leur temps de vie en période d’activité – s’est de fait distendu. Encore plus avec les restructurations, les délocalisations, et toute la partie négative des conséquences de la mondialisation. La qualité de vie au travail et l’éthique de l’entreprise prennent alors de

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Enfin, à l’aune de la montée irrésistible des préoccupations des Français sur les composantes du développement durable et principalement dans le domaine de la protection de l’environnement (encore que l’éthique des affaires fasse un retour tonitruant ces dernières années dans l’échelle de leurs inquiétudes), le développement durable est devenu un instrument de motivation du personnel. C’est encore plus vrai dans les administrations et les entreprises de services publics, que ces dernières soient publiques (La Poste, SNCF…) ou privées (EDF, Gaz de France-Suez…). Leurs valeurs historiques sont en effet proches de celles du développement durable, à travers notamment des notions communes aux deux parties comme l’intérêt général, la prévalence du long terme sur le court terme ou la solidarité. Les personnels de ces secteurs baignent dans une culture de la solidarité. Tout le monde se rappelle que, lors de la tempête de décembre 1999, des agents EDF sont même sortis de leur retraite pour venir donner un coup de main aux actifs afin de réparer le réseau d’électricité. De même, le rôle de vigie joué par les facteurs auprès des personnes âgées pendant les périodes de forte canicule, ou la façon dont les bureaux de poste ont facilité, en 2000, la mise en service dans notre pays de l’euro en ne discriminant personne pour la distribution des premières pièces, y compris en servant les clients des services financiers concurrents… Tout cela montre que, dans ces entreprises, le terreau est très favorable au développement des pratiques éco-citoyennes. À condition bien sûr, car rien n’est automatique entre conscience et action, de proposer aux collaborateurs de s’investir dans des actions claires et concrètes au sein de l’entreprise. Pour les autres entreprises, c’est aussi possible, même s’il faudra sans doute s’investir un peu plus dans les nécessaires actions de sensibilisation qui prévalent à la mise en place d’une politique de développement durable. En développant en amont les actions de sensibilisation adéquates, puis en proposant à vos personnels de s’inscrire dans des initiatives

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plus en plus d’importance. Elles grignotent régulièrement les autres déterminants : moyennement sur le salaire mais beaucoup sur la perspective de carrière qu’offre l’entreprise visée.

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de développement durable au sein de l’entreprise, vous irez simplement à la rencontre de leurs souhaits grandissants et impacterez positivement leur niveau de motivation. On a en effet plus envie de travailler dans une entreprise dont on est fier, qui répond positivement à ses aspirations que dans une entreprise qui n’assume pas sa responsabilité sociale. Dans le premier cas, on capitalise les motivations du personnel au profit conjoint de la planète et de l’entreprise et on resserre les liens, avec comme corollaire un personnel plus efficace dans son travail. Dans le second cas, on distend les liens du personnel avec son entreprise et on fabrique du désenchantement, qui n’a jamais été un bon carburant pour la marche des activités.

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Du côté des partenaires sociaux, même s’il ne s’agit pas d’une réconciliation entre le capital et le travail, il peut s’agir, au moins sur les objectifs finaux du développement durable, de réconcilier l’environnement, l’économie et le social, trois univers qui se sont longtemps ignorés. Se mettre d’accord sur les objectifs n’évitera pas, bien sûr, les divergences de vue et les débats nécessaires sur les façons de les atteindre, sur les priorités qui devront être dégagées et les moyens pour les mettre en œuvre. Il y aura toujours nécessité d’effectuer des arbitrages, des choix. Le sujet du développement durable est un bon moyen de faire coexister, au sein de l’entreprise, toutes les parties prenantes internes de manière responsable dans une synergie créatrice de valeur. Voire aider ainsi certaines organisations syndicales ou sections syndicales, d’habitude placées dans des postures d’opposition systématique à la direction, à admettre que l’on peut parfois aussi se rassembler autour d’objectifs communs visant à préserver la pérennité de l’entreprise et de ses emplois. Le développement durable s’inscrit indubitablement dans une logique d’amélioration des conditions de vie au travail, qu’on en juge : diminution des emplois précaires, égalité professionnelle femmeshommes, sécurité et diminution des accidents du travail, non-discrimination, etc. C’est une démarche que ne peuvent réprouver les partenaires sociaux de l’entreprise dont la justification de l’existence est bâtie sur leur capacité à défendre les intérêts moraux et matériels des salariés.

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Le développement durable est facteur de rapprochement avec les territoires. L’exemple type qui confirme cette affirmation est celui des PDE, ou Plans de déplacements d’entreprise. La collectivité locale (commune, communauté de communes, communauté urbaine…) prend en charge une partie du prix de l’abonnement annuel aux transports en commun locaux et, en contrepartie, l’entreprise prend en charge une part équivalente et s’engage à ce que x % de ses collaborateurs abandonnent leur voiture pour venir travailler au profit d’un mode « doux » (transport en commun, vélo, etc.). Chaque fois qu’une entreprise s’est lancée dans un partenariat de ce type, ça a marché. Le personnel, qui a abandonné sa voiture particulière pour venir travailler, est moins stressé et, au prix où sont les carburants, il fait des économies substantielles. L’entreprise, de son côté, récupère les mètres carrés des places de parking abandonnées par le personnel qui a choisi un autre mode de déplacement que la voiture. L’entreprise aura aussi participé à la baisse des embouteillages et des émissions de gaz à effet de serre sur le territoire de la collectivité locale avec qui elle s’est « associée ». Et, cerise sur le gâteau, cette action participera d’une meilleure rentabilisation de la société de transports en commun dont la collectivité locale est en général… actionnaire.

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Même si les partenaires sociaux peuvent parfois émettre des doutes sur la sincérité d’une entreprise qui se lance dans le développement durable, même s’ils vont « s’amuser », surtout au départ, de quelques contradictions relevées ici ou là sur le terrain avec les volontés affichées par la direction, ne laissez pas les organisations syndicales de votre entreprise sur le bas-côté de la route du développement durable. Cherchez, au-delà d’autres problématiques, à les associer le plus en amont possible à l’élaboration des stratégies et des plans d’actions développement durable. Cela mériterait sans doute un livre à soi tout seul, mais des syndicats forts et participatifs de façon constructive, ça donne aussi des directions plus intelligentes. L’important, c’est que chacun joue tout son rôle et rien que le sien, à travers des opérations gagnant-gagnant. Le développement durable est assurément un bon terrain d’expérimentation pour ce type de fonctionnement, courant dans les pays d’Europe du Nord, mais beaucoup moins dans les pays latins, comme la France.

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Après un tel succès, il est garanti que, lorsque vous aurez affaire aux services de cette collectivité locale pour tout autre chose que le PDE, vous serez mieux accueillis et elle se pliera probablement en quatre pour bien vous servir, vous qui aurez participé efficacement à la réussite de son Agenda 21 ou de son Plan Climat. Autre exemple instructif, celui des facteurs et factrices de la région Corse. Sur la base du volontariat, 350 parmi les 500 qui composent les effectifs locaux ont décidé, il y a quelques années, d’assurer – eux qui parcourent chaque jour 15 000 km au plus profond du territoire de l’île de Beauté – un rôle de vigie pour dissuader les mises à feu dans le maquis qui déclenchent des incendies ravageurs et, surtout, impactent négativement les ressources économiques de la Corse. Or, le tourisme est la principale activité économique de l’île et quand le territoire souffre, La Poste, qui se nourrit exclusivement de l’activité économique des territoires, souffre aussi économiquement. Là encore, nous sommes dans une action gagnant-gagnant pour l’entreprise et pour le territoire.

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Enfin, quand, dans les quartiers sensibles des zones urbaines, BNP Paribas lance des opérations de recrutement, de micro-crédit et de soutien scolaire en direction des populations défavorisées, ou subventionne des associations, pas de doute, elle noue au passage des liens forts avec les acteurs locaux du territoire dont elle saura tirer profit par la suite. Fini le temps où l’entreprise courait avec des œillères et ne regardait pas ce qui se passait autour d’elle. Ainsi de Metaleurop Nord, qui n’a pas tenu compte de son environnement dans ses décisions et façons de faire : son usine classée « Seveso », spécialisée dans la production de plomb recyclé et le raffinage du zinc, a quitté précipitamment en janvier 2003 les villes de Noyelles-Godault et de Courcelles-lès-Lens dans le Pas-de-Calais et laissé 830 salariés sur le carreau – personnel licencié sans préavis ni plan social ! –, des locaux désaffectés, des terrains pollués, une subvention des collectivités territoriales pour l’installation non remboursée… Un comportement qui a été le point d’orgue de ce qu’il ne faut pas, plus faire, plus accepter. Pouvoirs politiques, pouvoirs locaux, syndicats, associations, habitants,

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médias, etc., tous ont rejeté unanimement la façon de procéder de cet industriel qui était encore en 1990 le premier employeur du bassin d’emplois local. Clin d’œil de l’histoire : le site Metaleurop a depuis été reconverti… en centre de valorisation des déchets. Aujourd’hui, l’entreprise a besoin de renforcer ses liens avec le territoire et réciproquement. Les deux doivent réfléchir et travailler ensemble à la meilleure harmonisation possible. Surtout si la nature des activités de l’entreprise est susceptible d’avoir des impacts négatifs sur le territoire. Plutôt que de cacher les choses, il vaut assurément mieux jouer cartes sur table. À chaque problème correspond une solution. Il est plus facile de trouver la bonne à plusieurs que chacun tout seul dans son coin. Réfléchissez-y…

Les risques environnementaux sont, bien entendu, élevés si votre activité est très polluante ou utilise des produits susceptibles de provoquer des pollutions dangereuses. Aux réglementations déjà contraignantes est venu s’ajouter récemment le règlement européen Reach (Registration, Evaluation and Autorisation of Chemicals), qui affiche une approche intégrée de l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement des entreprises concernées (4 409 entités juridiques se sont préenregistrées en France) afin de prévenir les risques de pollution chimique de plus de 30 000 substances ! Un texte qui fait peser la charge de la preuve sur l’entreprise… Si, pour certaines substances, les services de l’État pourront valider le plan de contrôle du risque, pour le reste, c’est à l’entreprise de prendre seule la responsabilité de mise sur le marché de ses produits et de les contrôler en amont.

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Enfin, vos actions de développement durable vont vous permettre d’anticiper les risques, qu’ils soient environnementaux, financiers, juridiques ou d’image. Bien entendu, la nature de vos activités vous mettra beaucoup, assez ou peu en risque. Dans les entreprises en situation de risques importants, c’est parfois un risk manager qui fait quasiment office de responsable développement durable. En tout cas, dans ce type d’entreprises, très souvent la stratégie de développement durable et son plan d’action afférent sont construits à partir de la cartographie des risques.

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Autre réglementation européenne, la directive de responsabilité environnementale qui définit les principes du pollueur-payeur et répertorie les activités de nature polluante. Enfin, plus près peut-être de votre quotidien, si votre entreprise n’est pas référencée comme étant de nature polluante, le système des ICPE, les installations classées pour la protection de l’environnement. Les ICPE, encore trop souvent ignorées par les responsables d’entreprise

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Héritage d’une législation de 1997, il y a aujourd’hui près de 500 000 installations classées pour la protection de l’environnement en France (ICPE). Sans le savoir, peut-être, votre établissement ou votre usine sont classés comme tels bien que ne présentant pas a priori d’activités polluantes. Mais peut-être avez-vous une cuve de fuel pour le chauffage de votre unité qui se trouve juste audessus d’une nappe phréatique ? Ou peut-être utilisez-vous des onduleurs, des appareils électriques à charge (véhicules, charriots, etc.) ? Dans bien des cas, une simple déclaration à la préfecture suffit (renseignez-vous auprès d’elle ou de la Drire). Mais si vous dépassez un certain seuil, par exemple plus de 120 m3 de gaz liquéfié stockés dans un réservoir, ou utilisez une imprimante offset à rotatives à séchage thermique, il vous faudra demander une autorisation au préfet. L’oubli de ces formalités est fréquent lors de changements de responsables à la tête de l’entreprise ou d’une de ses unités. Un nonrespect de cette loi entraîne au minimum pour votre responsable d’unité une peine de prison de deux mois à un an et une amende de 300 à 76 000 euros à payer par lui et non pas par l’entreprise. Les 20 000 à 30 000 visites d’inspection réalisées chaque année génèrent des milliers de procès-verbaux et des centaines de suspensions ou de fermetures de sites. Il est donc impératif de bien se renseigner. Pour plus d’informations sur la loi ICPE et les nomenclatures : http://aida.ineris.fr/sommaires_textes/sommaire_ thematique/index.htm

Il y a quelques années seulement, les Drire (directions régionales de l’industrie, de la recherche et de l’environnement) ne saisissaient presque jamais les parquets. « Depuis, affirme Yamina Zerrouk,

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Attention, fait remarquer dans la même publication Sylvain Niel, avocat spécialisé en droit social du cabinet Fidal, « la délégation de pouvoir que vous faites signer à vos cadres, ça ne suffit en aucun cas à affranchir vos directions et votre entreprise de leurs responsabilités. Le juge va systématiquement chercher à déterminer dans quelle mesure les cadres ont une réelle autonomie dans leurs prises de décisions. En effet, les entreprises les plus promptes à multiplier les délégations de pouvoir sont paradoxalement souvent très centralisées. On y trouve des contrôles très poussés. Les cadres ne sont dans les faits pas autonomes dans leurs choix. La délégation de pouvoir n’est alors qu’une façade facile à déterminer par le juge. Vous n’avez donc aucun intérêt à bâtir un rempart de délégation. L’enjeu est de mettre à plat un organigramme qui reflète une réelle délégation des pouvoirs. Il vous suffit, en tant qu’employeur, de notifier par courrier à votre cadre les pouvoirs qui lui sont délégués pour que la responsabilité devienne effective. Une signature n’est même pas nécessaire ». 1. Interview publiée dans l’excellente Lettre de l’économie responsable de décembre 2006.

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avocate associée, spécialisée en droit de l’environnement du cabinet Sekri Valentin Zerrouk, les PV d’infraction dressés par les agents assermentés de cette administration sont depuis systématiquement transmis aux procureurs de la République qui engagent alors des poursuites. Ils poursuivent désormais à la fois la personne morale que représente la société et, de plus en plus, les cadres considérés comme potentiellement responsables. Les procureurs se sont en effet rendu compte que certaines entreprises se contentaient de payer les amendes comme personne morale. Poursuivre les cadres est devenu un moyen supplémentaire de responsabiliser les entreprises. Si les directeurs de sites commencent à prendre conscience des risques qu’ils encourent du point de vue de leur responsabilité pénale, beaucoup encore ne comprennent pas pourquoi ils sont convoqués par les juges. Il suffit, par exemple, en matière de sécurité, que des salariés aient été exposés à une matière dangereuse comme l’amiante par exemple pour qu’un responsable puisse être accusé de mise en danger de la vie d’autrui1. »

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Autre chose intéressante, et souvent méconnue des intéressés, c’est que le cadre bénéficiant d’une délégation de pouvoir peut non seulement être poursuivi par le juge, mais aussi par son employeur qui pourrait prononcer des sanctions disciplinaires à son égard avec un risque de licenciement lorsque l’infraction résulte d’une faute de sa part. « Dans ce cas, précise Yamina Zerrouk, il n’aura pas la possibilité de négocier une quelconque indemnisation correspondant à l’amende que le juge lui demande de régler en nom propre. Ce cadre pourrait en revanche négocier une compensation avec son employeur lorsqu’il s’avère qu’il n’avait pas tous les moyens de ses responsabilités. La délégation de pouvoirs est alors considérée comme imparfaite. »

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La loi NRE (« nouvelles réglementations économiques ») oblige depuis 2002 les entreprises cotées à publier, au-delà de leurs habituels rapports annuels d’activités, un rapport de développement durable, qui peut éventuellement être traité au sein même du rapport d’activités, dans une partie ou un encart spécifique. Les informations ainsi transmises engagent la responsabilité de l’entreprise au même titre que les informations financières. Il faut le reconnaître, c’est vraiment à partir de cette loi NRE que la plupart des entreprises concernées se sont mises à se poser les bonnes questions. Même si, dans un premier temps, ce rapport a été, pour beaucoup d’entreprises, confié… au directeur de la communication, parfois même au responsable de la communication financière, petit à petit les entreprises se sont convaincues de la nécessité de mettre en place une structure ad hoc. Si votre entreprise n’est pas cotée et donc non soumise pour l’instant à cette loi NRE, rien ne vous empêche de faire comme si. De nombreuses entreprises du service public, par essence non soumises à la loi NRE, ont ainsi fait et ne l’ont pas regretté. Cette démarche leur a en effet permis de faire un recensement des actions déjà menées et qui pouvaient se ranger sous la bannière du développement durable. Elles ont ainsi pu réfléchir posément à la question et prendre les bonnes décisions en termes d’organisation, de stratégie et d’actions afin de ne pas se retrouver dépassées par des entreprises cotées avec

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lesquelles elles sont de plus en plus en concurrence sur le marché. Le développement durable est ainsi devenu un véritable atout concurrentiel pour le business et le recrutement de nouveaux personnels.

Pour la France, sont ainsi concernées des sociétés comme France Télécom ou nos principales banques. Ce système de délation passe mal dans notre culture, même s’il existe depuis longtemps dans le code français de procédure pénale un article 40 qui va dans ce sens. En effet, il demande à « toute autorité constituée, tout officier public ou fonctionnaire qui, dans l’exercice de ses fonctions, acquiert la connaissance d’un crime ou d’un délit d’être tenu d’en donner avis sans délai au procureur de la République et de transmettre à ce magistrat tous les renseignements, procès-verbaux et actes qui y sont relatifs »… Si, aujourd’hui en France, et selon le cabinet d’audit et de conseil Grant Thornton, seules 23 % des PME disposent de collaborateurs spécialisés dans la prévention de la fraude (contre 45 % en moyenne dans le monde), elles sont en revanche 49 % à avoir mis en place un tel système.

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En poussant plus loin la recherche de risques juridiques, on pense à la loi américaine Sarbanes-Oxley du 31 juillet 2002 qui concerne la comptabilité des sociétés cotées et la protection des investisseurs. Elle impose une organisation chargée du contrôle des plans économiques en termes de risques et implique une grande transparence dans la direction et la marche des affaires. Cela ressort tant des organes de direction de l’entreprise, comme le conseil d’administration ou le comité d’audit, que des personnels de ces entreprises qui ont un devoir d’alerte, le whistleblowing. Ceux-ci doivent dénoncer, par le biais d’un système organisé et indépendant, les comportements frauduleux et les agissements ou faits qui selon eux sont de nature à entacher le fonctionnement de l’entreprise. Si cette loi s’applique à toutes les entreprises américaines cotées sur le territoire américain ou européen, elle s’applique aussi depuis 2006 aux entreprises européennes qui ont des filiales aux États-Unis.

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Risques financiers et risques d’image

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Certaines façons de faire contraires à une responsabilité sociale de bon aloi peuvent entraîner une entreprise, et non des moindres, par le fond et plus rapidement qu’on ne le pense. Des sociétés ont ainsi failli disparaître en quelques semaines quand l’opinion publique a appris par exemple qu’elles faisaient fabriquer certains de leurs produits par des enfants dans le Sud-Est asiatique ou qu’elles commercialisaient des denrées interdites par les services sanitaires. Sans aller jusqu’à mettre en cause son existence, votre entreprise peut aussi être fortement pénalisée financièrement si elle n’applique pas correctement les lois et règlements, mais aussi si elle n’adopte pas un comportement en phase avec les valeurs éthiques. On l’a vu un peu plus haut avec le non-respect des lois et des règles environnementales. En 2007, pour éviter aux entreprises de faire des faux pas dans leur communication, l’Union des annonceurs (UDA) a signé, avec une quarantaine d’entreprises, la charte des annonceurs pour une communication responsable. Un outil « anti-greenwashing1» qui oblige les signataires à inscrire l’ensemble de leurs prises de parole externes dans le cadre de leurs codes de communication responsable. À noter aussi, sous l’impulsion de l’agence de communication Havas Media et principalement d’Alice Audouin, sa directrice du développement durable, et du cabinet PricewaterhouseCoopers, la création d’un outil de mesure, baptisé « ÉcoPublicité », permettant, cette fois, d’évaluer l’impact environnemental d’une campagne de publicité selon que l’on utilise tel ou tel média, que l’on émet telle ou telle quantité de CO2 pour la réaliser, etc. Idem en cas de non-respect des règles dans le domaine social. Ne pas disposer dans son entreprise du pourcentage minimum de 6 % de travailleurs handicapés (ou équivalents en produits ou services achetés 1. Littéralement, « anti-verdissement » de sa communication, alors que rien de concret dans l’action de l’entreprise en question ne l’autorise.

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au secteur adapté et protégé) requis par la loi vous vaudra des pénalités financières tout comme le fait, maintenant, de ne pas avoir entrepris un plan d’action en faveur de l’emploi des seniors.

En termes de risques d’image, tout va très vite. Si la quasi-totalité des gens sondés ici ou là pensent généralement que le développement durable va améliorer l’image de l’entreprise concernée, l’inverse est aussi vrai. Une entreprise qui ne respecte pas une certaine forme d’éthique, vis-à-vis de ses clients, de son personnel, des territoires sur lesquels elle développe ses activités, et des règles de bonne gouvernance, va vite voir son image se ternir. Rappelez-vous les problèmes rencontrés par Numericable dans les années 2005-2006 avec ses abonnés qui s’étaient sentis abandonnés ou méprisés par les services après-vente de cette société : pétitions, manifestations, procès, création d’un site Internet « Misericable, le portail non officiel des abonnés de Numericable » de l’association Les Déçus du câble, etc., la société audiovisuelle en question avait dû rapidement revoir sa copie

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Même type de danger encore dans un avenir proche pour les entreprises qui n’auront pas appliqué l’égalité salariale entre les hommes et les femmes. Depuis la promulgation de la loi sur l’égalité salariale conçue en 2006 par Nicole Ameline, alors ministre de la Parité, l’écart entre les fiches de paie reste, à compétences égales, stable à 11 % en faveur de la gent masculine. Une non-réduction de l’écart qui irrite au plus haut point les pouvoirs publics, lesquels ont donc décidé de passer à la vitesse supérieure et de rédiger au cours du premier semestre 2009 un projet de loi qui sera voté par le Parlement avant le 1er janvier 2010. Cette loi proposera des sanctions financières à appliquer aux entreprises retardataires. Nous voilà prévenus. Là aussi, l’anticipation doit être de mise. Si votre entreprise est à la traîne en la matière, n’attendez pas la promulgation des décrets pour agir. Il sera alors trop tard et votre entreprise devra régler de lourdes pénalités. Quand on connaît le montant de celles prévues pour l’absence de plan d’action pour l’emploi des seniors, on imagine aisément qu’elles ne seront pas moins importantes.

Développement durable, pourquoi votre entreprise doit-elle s’engager ?

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sous peine tout simplement de disparaître. Aujourd’hui, les choses semblent revenues à peu près dans l’ordre. Mais, du côté de la direction de l’entreprise, on a dû sentir le vent du boulet.

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Plus récemment, à l’automne dernier, et en pleine crise financière mondiale, la Caisse d’épargne de l’Écureuil fait paraître dans toute la presse française une publicité vantant ses mérites suite à l’obtention de la « Corbeille d’or 2008 – Mieux vivre votre argent » qui récompense les meilleures initiatives de l’année dans le monde de la banque en termes de placements financiers. La publicité était accompagnée de ce commentaire : « En recherchant depuis toujours à vous aider à épargner plutôt qu’à spéculer, notre gestion s’applique en permanence à la rigueur et à la prudence »… Quelques jours plus tard, et alors que le gouvernement venait d’accorder plus de 300 milliards d’euros aux banques touchées par la crise, éclatait le scandale de l’Écureuil : 700 millions d’euros de perte suite à un coup de poker malheureux de trois traders qui avaient joué sur une remontée des cours après la journée noire du 6 octobre 2008 où la chute enregistrée avait été de 9 %. Or, malheureusement pour eux, point de remontée les jours suivants, puisque, cette fois, c’est de 15 % supplémentaires que les cours chutaient. Nos trois traders qui, en dehors de toute « rigueur et prudence » compte tenu du contexte, avaient misé sur des produits dérivés en espérant des gains mirobolants mettaient fâcheusement la Caisse d’épargne de l’Écureuil à la « une » de tous les médias avec les conséquences que l’on devine en termes d’image. Pour ne pas avoir respecté un minimum d’éthique dans leur façon de choisir leurs investissements, les trois traders auront fait plonger la confiance en leur banque et avec elle les trois principaux dirigeants1 de L’Écureuil, acculés à la démission. Grâce à Internet, les réactions suite à un défaut d’image sont souvent très rapides compte tenu de la rapidité avec laquelle circule l’information. On a ainsi vu, en 1995, la société Shell accusée – à tort, on 1. Charles Milhaud (président), Nicolas Mérindol (directeur général) et Julien Carmona (directeur des finances et de la stratégie).

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le découvrira par la suite – par l’ONG Greenpeace d’avoir coulé volontairement en mer du Nord une de ses plates-formes pétrolières « accompagnée » de 5 000 tonnes d’hydrocarbures et de 130 tonnes de produits chimiques. Dès l’information connue, les opérations de boycott auprès des consommateurs des stations-service Shell s’organisaient et battaient rapidement leur plein, notamment en Allemagne et aux Pays-Bas, où la culture du boycott commercial est beaucoup plus avancée que dans notre pays. Certes, la compagnie hollandaise voyait quelque temps plus tard son innocence reconnue, sa plate-forme ayant en fait été entièrement vidée quatre ans plus tôt dans un pétrolier de la firme. Mais un grand mal avait été fait et il s’en sera fallu de peu que la firme au coquillage ne morde la poussière en Allemagne et aux Pays-Bas.

Notons également que l’ARPP (Autorité de régulation professionnelle de la publicité) – anciennement BVP (Bureau de vérification de la publicité) – a édicté un certain nombre de règles précises en ce qui concerne les communications publicitaires, y compris celles qui mettent en scène d’une façon ou d’une autre le développement durable. Sur son site1, on apprend que son objectif est de mener une action en faveur d’une publicité loyale, véridique et saine, dans l’intérêt des consommateurs, du public et des professionnels de la publicité. L’ARPP est notamment associée au Conseil de l’éthique publicitaire et au Jury de déontologie publicitaire… 1. www.arrpp-pub.org.

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Il n’est donc pas surprenant qu’aujourd’hui de nombreuses entreprises aient intégré ces risques d’image dans leurs cartographies des risques. On lira à ce sujet l’intéressant guide publié par l’IFA (Institut français des administrateurs), présidé par Daniel Lebègue, également président de la section française de Transparency International et de l’Iddri (Institut du développement durable et des relations internationales, voir page 289). Cet homme a fait des questions de gouvernance son cheval de bataille depuis son départ de la Caisse des dépôts et consignations, qu’il a dirigée de 1998 à 2002.

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Convaincre actionnaires et financiers du bien-fondé de votre démarche

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Selon le bon principe qui veut que l’on n’attrape pas les mouches avec du vinaigre, le mieux, avec les actionnaires et les financiers, est de jouer cartes sur table en leur démontrant en quoi votre politique de développement durable non seulement va permettre de renforcer l’efficacité économique et financière de l’entreprise, mais aussi constitue moins un coût qu’un investissement. Les résultats d’une enquête effectuée par une agence de notation sociale ne peuvent qu’appuyer votre propos. Rapport annuel dédié entièrement au développement durable ou plaquette, road show devant les analystes financiers, newsletters, toutes les bonnes solutions existent pour « évangéliser » vos investisseurs et vos financiers. Sur ce sujet, Jean-Louis Borloo, l’actuel ministre de l’Écologie, de l’Énergie, du Développement durable et le l’Aménagement du territoire ouvre une piste intéressante à travers ce qu’il appelle « mes trois certitudes ». Elles sont rapportées par Le Monde du 4 décembre 2008 : « La certitude que notre modèle de croissance actuel, fondé sur l’illusion de ressources illimitées, n’est pas viable sur le long terme. La certitude qu’une économie qui consomme globalement moins d’énergie est une économie qui dépense moins d’argent et qui est donc plus compétitive. La certitude enfin que la sobriété en carbone, l’efficacité énergétique et la qualité de vie, sont les trois avantages compétitifs clés de la bataille économique de demain. » Transposez directement ces propos à votre entreprise et vous verrez que, 99 fois sur 100, ça marche et que, comme le dit le ministre, « le développement durable est le fondement même de la compétitivité de demain ! » Bien entendu, on le lira plus loin, la crédibilité de votre discours va dépendre en grande partie de votre capacité à savoir mesurer l’impact de vos actions développement durable et surtout la durée des retours de vos investissements en la matière. Cela commence par apprendre à calculer différemment de ce qu’on a appris à l’école et que l’on fait depuis son entrée dans le business. À savoir, en période de grave crise écologique et sociale, de hausse des matières premières et des énergies, comparer ce qui est comparable grâce aux principes,

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par exemple, du « coût économique global » (voir page 254) ou de « l’analyse du cycle de vie » (voir page 159). Ou faire les bons choix, ceux qui garantissent l’avenir de votre entreprise ; par exemple, privilégier l’innovation et la recherche sur le profit immédiat ou savoir surmonter la contradiction entre annualité budgétaire et développement durable, qui s’apprécie le plus souvent sur une période qui va au-delà de l’année civile. Et puis, à travers le développement durable, comme son nom l’indique, c’est la pérennité de votre entreprise que vous renforcez. Toutes les études bâties autour de cette problématique montrent qu’une entreprise qui se développe de façon responsable a beaucoup plus de chances qu’une autre d’amplifier ses activités, de faire de bons résultats et de vivre plus longtemps. Tout ce qu’aiment au fond les investisseurs et les actionnaires. En résumé

Afficher un bon niveau de responsabilité sociale et le faire savoir intelligemment vous permet d’attirer plus aisément les investisseurs, favorise la fidélité de vos anciens clients et en fait venir de nouveaux. À tous ces titres, le développement durable, appliqué à l’ensemble des activités de l’entreprise, et porté de façon convaincue par l’ensemble de ses composantes, président en tête, devient un véritable levier de performance. Il permet d’atteindre plus vite et dans de meilleures conditions vos objectifs d’entreprise et, assurément, d’améliorer vos résultats économiques et financiers. Alors, pourquoi vous en priver ?

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Facteur de réduction des coûts et générateur parfois de recettes nouvelles, facteur d’innovation, de rapprochement avec les territoires, de motivation du personnel et de consensus en interne, le développement durable devient chaque jour de plus en plus un atout concurrentiel tant pour vos affaires que pour vos opérations de recrutement. C’est aussi un moyen efficace pour votre entreprise d’anticiper les risques, qu’ils soient financiers (et boursiers si votre entreprise est cotée), juridiques, environnementaux ou d’image.

Chapitre 3

Comment construire une stratégie et un plan d’action ad hoc ?

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On l’a vu précédemment, la première condition, quand on veut lancer dans son entreprise le développement durable de façon organisée, c’est d’être (ou d’avoir à sa tête) un patron déjà convaincu. La deuxième condition, c’est de désigner rapidement un collaborateur qui en sera chargé, si possible à plein temps (voir le chapitre 6, page 245). Le mieux est ensuite de lui donner le plus de poids et de transversalité possible en le rattachant directement au président ou au directeur général de l’entreprise. Peu importe son métier d’origine, mais il est préférable qu’il soit issu de l’interne car le développement durable est, en quelque sorte, une façon de réinventer les modes de fonctionnement de l’entreprise ; bien connaître cette dernière, son organisation, sa culture, sera un atout extrêmement important dans la réussite du déploiement de la nouvelle politique. S’agissant d’abord d’un changement de comportement, les collaborateurs issus de la communication, de la qualité ou des ressources humaines auront un réel avantage puisque les actions de sensibilisation, auxquelles ils sont déjà habitués de par leurs fonctions, sont le préalable à toute évolution en interne en faveur du développement durable. Mais, quelqu’un de convaincu et de déterminé pourra aussi faire l’affaire, qu’il vienne des fonctions précédemment citées, des finances, de l’audit, du marketing…

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La bonne personne choisie, que peut-elle faire pour commencer, sachant que le plus difficile ne sera pas de trouver les bonnes réponses, mais d’abord de se poser les bonnes questions ? Commencer par regarder ce qui a déjà été fait ailleurs. Au contraire de l’école où, quand vous copiez, on vous met zéro, dans le développement durable, on est encouragé à copier sur les autres, surtout sur ce qu’ils ont réussi. Pas la peine de réinventer le fil à couper le beurre ou de se lancer dans des actions qui ont déjà largement échoué chez les autres. Aujourd’hui, l’information sur le développement durable est abondante : livres spécialisés, articles de presse, sites Internet dédiés, rapports annuels d’entreprises déjà engagées dans la démarche, etc.

En général, on n’a pas attendu la nomination d’un directeur ou d’un responsable du développement durable pour engager des actions qui s’y rapportent. La chose nouvelle, c’est que l’existence d’un directeur ou d’un responsable développement durable va permettre de passer d’une démarche empirique – comme M. Jourdain, qui faisait de la prose sans le savoir… – à une démarche organisée, donc nécessairement plus efficace, mais aussi plus structurante au regard de la stratégie générale de l’entreprise. Pour faire le point de ce qui se fait déjà au sein de celle-ci, le mieux est encore de lancer un audit de développement durable que l’on confiera soit à sa structure d’audit interne, soit à un cabinet de consulting spécialisé sur ce type de problématique. Dès que la nomination de son directeur ou de son responsable développement durable sera connue à l’externe, l’entreprise sera sollicitée par de nombreux consultants. Pour vous donner de l’inspiration, rien ne vaut un petit coup d’œil jeté sur la cartographie des risques, si elle existe, sur la liste des principaux enjeux et s’interroger sur quelles peuvent être les parties prenantes externes et internes les plus importantes. Avant de commencer à écrire quoi que ce soit, il est aussi très fructueux d’avoir des échanges sur le sujet avec différentes parties, tant en interne qu’à l’externe. D’abord, avec les principaux responsables

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Bien connaître l’existant

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de l’entreprise, pour les tester de façon informelle : le développement durable, c’est quoi pour vous ? Et pour l’entreprise, vous voyez ça comment ? Il est également intéressant de rencontrer des responsables d’agences de notation extra-financière. Les écouter vous expliquer comment ils travaillent pour noter les entreprises, quels sont les points qui les intéressent le plus et ceux qui les intéressent moins, c’est déjà en creux pouvoir imaginer comment s’organiser et comment déterminer et dégager des priorités. Bien entendu, il vous faut aussi écouter et dialoguer avec les parties prenantes qui vous concernent de façon à savoir jusqu’où vous pourrez les emmener avec leur assentiment, voire leur appui. En interne, les partenaires sociaux, par exemple, s’intéressent de plus en plus au développement durable, car ils ont compris qu’à travers une démarche de responsabilité sociale on se donnait de meilleures garanties pour la pérennité de l’entreprise, et donc pour celle de ses emplois… De plus, en sondant les parties prenantes, on se donne aussi les moyens de détecter leurs attentes fortes en la matière. Certaines ont peut-être déjà initié des réflexions sur le sujet.

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Les syndicats professionnels peuvent aussi être de bon conseil, cela dépend toutefois des secteurs d’activités, de même que des représentants de consommateurs. Même si, on peut le regretter, ces derniers n’ont pas en France l’audience et le poids qu’ils mériteraient au sein d’une société développée et fortement consommatrice. Si votre entreprise a un impact important sur la vie sociale, sociétale et l’environnement du lieu où elle se trouve, rencontrer les élus locaux peut s’avérer utile. Regarder ce qui s’est écrit ou dit sur votre secteur d’activités en matière de développement durable vous aidera à identifier les sujets les plus souvent cités, voire ceux sur lesquels se portent d’éventuelles critiques. En tout cas, cette recherche peut vous aider lorsqu’il s’agira de définir des priorités pour votre entreprise. Voilà qui va vous prendre peut-être quelques petites semaines. Cela dépend en fait de la taille de votre entreprise et/ou de la nature de ses

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activités. Mieux vaut aussi intégrer en amont tous les acteurs qui comptent ou sont susceptibles de compter dans votre démarche et qui, par la suite, pourront interférer, positivement ou négativement, dans la réussite, ou l’échec, de votre politique de développement durable.

Au fil de vos rencontres, vous avez noté, dans un cahier ou sur votre micro-ordinateur, toutes les informations intéressantes et utiles et vous connaissez plutôt bien votre entreprise. Vous êtes donc maintenant prêt à écrire un premier draft sur ce que pourrait être une stratégie de développement durable pour elle. Que devez-vous y raconter ? D’abord l’existant, c’est-à-dire d’où part votre entreprise (bilan des actions déjà développées et qui ont le droit de s’inscrire sous la bannière du développement durable), expliquer en quoi cela reste insuffisant au regard des enjeux d’aujourd’hui et, encore mieux, de demain. Quels sont les risques à ne rien faire et pourquoi mettre en place une démarche développement durable dans son entreprise ? Quels sont les enjeux majeurs de la réussite de cette démarche ? Quel est son contexte ? son évolution et les pressions externes (lois, règlements, poids des parties prenantes, investisseurs, clients, ONG, etc.) ? Ensuite, quelles sont les pistes à emprunter pour élever sensiblement et le plus rapidement possible son niveau de responsabilité sociale ? Quels sont les principaux objectifs chiffrés (exemples : pourcentage de baisse des émissions de CO2, pourcentage de femmes dans les postes de direction…) ? Ce que tout cela peut rapporter à votre entreprise en termes d’image, de réduction des risques, d’efficacité économique et financière, de consensus interne et de culture d’entreprise, etc. Comment organiser, dans les grandes lignes, le développement durable au sein de votre entreprise ? Etc. Une fois ce petit texte écrit – un ou deux feuillets maximum, plus c’est court et plus c’est fort politiquement –, demandez à chaque secteur important de votre entreprise de vous désigner en son sein un correspondant développement durable. Ce ne devra pas être

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Écrire le draft stratégique

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automatiquement le plus élevé dans la hiérarchie ou le mieux placé auprès du chef, mais assurément ce doit être le plus motivé sur la question. Vous en aurez cinq ou dix, ou un peu plus, selon la taille et la diversité de l’entreprise. À chacun, vous confiez votre draft stratégique et vous leur donnez rendez-vous collectivement dix à quinze jours plus tard, le temps notamment qu’ils aient pu avoir, si besoin, un échange en interne dans leurs structures respectives. À cette future réunion de brainstorming d’une demi-journée ou d’une journée, un « comité de lecture » amendera votre draft, ouvrira des pistes supplémentaires, proposera des suppressions, bref enrichira votre draft d’origine. N’oubliez pas d’en discuter avec les organisations syndicales voire avec les représentants des associations de consommateurs si vous en avez et, pourquoi pas, avec quelques parties prenantes externes que vous aurez identifiées lors de votre premier tour de piste. L’intérêt est de disposer, à la fin des échanges, d’un draft co-construit et partagé qui pourra ensuite être soumis à l’avis et à l’approbation de la structure de direction de l’entreprise, puis à celle de son conseil d’administration ou de son conseil de surveillance. Une fois ce draft enrichi et adopté par toutes les parties, vous disposez enfin d’une stratégie de développement durable pour votre entreprise. Mais pas encore d’un plan d’action qui, lui, reste à construire. Il vous reste aussi à positionner cette stratégie. Le nec plus ultra est de l’intégrer à la stratégie générale de l’entreprise – comme c’est le cas avec « Excellence » chez ST Microelectronics, avec « Performance et Responsabilité » chez Michelin ou avec « Performance et Confiance 2008-2012 » à La Poste –, le développement durable ou responsable devenant le fil conducteur de la stratégie générale. On trouve aussi les ways qui avancent en parallèle des stratégies générales d’entreprises : « Areva Way », « Danone Way » ou « Rhodia Way » pour ne parler que des plus emblématiques. Notons aussi, au passage, les très belles appellations des stratégies développement durable de Coca-Cola, « Live Positively » ou du transporteur de la SNCF, Geodis, « Blue Attitude »…

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Construire le plan d’action Pour le construire, vous convoquez à nouveau vos « lecteurs » responsables du début à un séminaire d’une journée, au cours duquel vous essaierez collectivement de décliner au mieux cette stratégie en plan d’action. En n’oubliant pas que le développement durable, ce n’est pas que l’environnement, mais aussi le social-sociétal, l’économie et la gouvernance.

Pour ne pas noyer l’essentiel dans la masse, le mieux est encore, une fois la première liste établie, de ne rien rejeter a priori. Il est préférable de se construire une grille d’évaluation qui prenne en compte les spécificités de votre entreprise et/ou de son secteur d’activités et sa politique générale, le développement durable devant s’inscrire dans celle-ci. Mieux encore, celui-ci deviendra le fil rouge (le fil vert ?) de la stratégie globale de votre entreprise. Certes, c’est rarement possible dès le début, mais cela peut rester un objectif à mettre en pratique à moyen terme lorsque aura été intégré le fait que le développement durable est bien un levier de performance. L’idéal, pour les entreprises qui disposent d’un conseil d’administration, c’est de lui rattacher, une fois la démarche bien enclenchée, un comité spécialisé en charge du développement durable comme il peut exister par ailleurs un comité des investissements ou des rémunérations. C’est une bonne façon de souligner l’importance du sujet en interne et d’y intéresser les membres du conseil. Composé d’une sélection tripartite de membres du conseil d’administration et en présence du directeur (ou responsable) du développement durable, il

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Comme vos participants au séminaire sont motivés et pleins d’idées, votre plan d’action va rapidement ressembler à une longue, et parfois interminable, liste d’actions, dont au premier coup d’œil vous saurez qu’il ne sera pas possible de les mettre toutes en œuvre simultanément, que ce soit pour des questions humaines, financières ou de temps. Il va donc falloir dégager des priorités que l’on traduira, pourquoi pas, en engagements développement durable. Dans cette optique, en retenir dix ou douze maximum sera un gage d’efficacité. Car, c’est bien connu, qui trop embrasse, mal étreint…

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se réunit trois ou quatre fois par an pour faire le point sur les grands projets développement durable engagés et que l’on souhaiterait voir engagés par l’entreprise, et préparer le passage de sujets ad hoc au conseil d’administration. À ce jour, quatre entreprises du CAC 40 en bénéficient : Danone, GDF-Suez, Renault et Veolia Environnement. Et parmi les entreprises publiques, seul le groupe La Poste a pris la décision en 2008 de réunir dans un comité spécialisé de son conseil d’administration le développement durable et la qualité.

Savoir dégager des priorités Ici, la façon de faire du groupe La Poste est intéressante parce qu’elle peut facilement être reprise, au moins dans la démarche. En juin 2003, après avoir adopté une première stratégie de développement durable, les représentants de son comité, composé des responsables de la direction développement durable du groupe et des correspondants des principales composantes de l’entreprise (directions de métiers, directions fonctionnelles), ont priorisé une douzaine d’actions à travers une liste initiale qui, au départ, en comportait exactement 115. Au cours d’un séminaire résidentiel d’une journée et sur une proposition de la consultante du cabinet Ernst & Young, les participants ont noté chacune de ces 115 actions développement durable de 1 à 10 à travers cinq critères affublés chacun d’un coefficient différent, établi en fonction de son importance stratégique aux yeux de La Poste :

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• critère n° 1 (coefficient 5) : mise en œuvre, cette action aura-t-elle un intérêt économique pour l’entreprise ? • critère n° 2 (coefficient 4) : existe-t-il actuellement une pression réglementaire ou à venir prochainement sur cette action ? • critère n° 3 (coefficient 3) : cette action peut-elle rencontrer l’empathie du personnel ? • critère n° 4 (coefficient 2) : existe-t-il un risque pour l’image de l’entreprise si l’on ne réalise pas cette action ? • critère n° 5 (coefficient 1) : cette action a-t-elle de la visibilité en interne et en externe ?

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Cette démarche n’a, bien sûr, pas la prétention d’être scientifique, mais elle permet d’éclairer bien des points et, au moins, d’effectuer un tri positif. Il faut simplement construire cette grille en tenant compte de l’entreprise dans laquelle on est, de la nature de ses activités, de ses objectifs, de sa culture, de son image. Ainsi, pour La Poste, le fait d’avoir d’entrée de jeu positionné le développement durable comme un moyen pour améliorer son efficacité économique explique le coefficient 5, le plus important, accordé au premier critère. Le poids de son personnel, environ 280 000 collaborateurs, qui pèse lourdement dans la réussite de ses projets ou actions quels qu’ils soient, amène aussi un coefficient 3, important, accolé au troisième critère : cette action peut-elle rencontrer l’empathie du personnel ? Évidemment, quand on est une entreprise de main-d’œuvre, comme c’est le cas de La Poste, demander au personnel de mettre en œuvre et de réussir des actions avec lesquelles il ne serait pas d’accord est, l’histoire de cette entreprise le prouve, d’emblée voué à l’échec.

Quel budget prévoir ? Quelle organisation mettre en place ? Vous disposez maintenant d’une stratégie développement durable, d’un plan d’action ad hoc et d’une dizaine d’engagements prioritaires. Il vous faut encore un minimum d’organisation et de budget pour mettre en œuvre le tout avec succès.

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Une fois obtenue votre liste réduite d’actions, il se peut qu’il y ait un déséquilibre entre le nombre des actions à caractère environnemental et celles à caractère social-sociétal ou économique. Il suffit alors de prendre les trois ou quatre premières de chaque « catégorie » dans l’ordre du classement pour avoir des engagements équilibrés au regard des trois piliers du développement durable. Mais la répartition peut aussi et sans préjudice être un peu déséquilibrée, au profit des actions environnementales, par exemple, si votre entreprise développe des activités de nature très polluante.

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Réglons tout de suite la question du budget : les structures de développement durable n’en ont pas besoin de beaucoup vu qu’elles n’ont quasiment pas de rôle opérationnel à jouer, sauf peut-être dans les petites entreprises. Le rôle majeur des directions de développement durable ou assimilées sera d’abord d’effectuer une veille environnementale, sociale, réglementaire, à Paris, à Bruxelles et auprès de vos principaux concurrents, de procéder à quelques benchmarks avec notamment vos principaux concurrents, d’animer et de coordonner les acteurs du développement durable de l’entreprise, de contrôler le déploiement de la stratégie adoptée à travers un outil de reporting, de sensibiliser le personnel en s’appuyant sur les structures de communication et de formation de l’entreprise, de valoriser à l’extérieur, avec l’aide de la direction de la communication, ce qui se fait de bien en matière de développement durable au sein de l’entreprise (rapport annuel dédié, site Internet, relations presse, colloques et expositions, etc.). Pour les grosses entreprises type CAC 40 ou les majors du secteur public, entre 1 et 1,5 million d’euros par an sont en général suffisants, surtout si les structures de communication et de formation de l’entreprise font bien leur boulot d’accompagnement et de soutien. Dans les PME et les PMI, quelques dizaines de milliers d’euros permettront de bien enclencher le processus de développement durable et de le poursuivre avec de bonnes chances de réussite. Bien entendu, il y a toujours des exceptions à la règle, notamment les entreprises extrêmement polluantes qui ont une approche logiquement défensive du développement durable mais vitale pour le présent et l’avenir de leur business. Elles devront souvent y consacrer des moyens beaucoup plus importants. Il y a aussi les directions ou structures de développement durable qui, en amont des développements opérationnels, sont chargées par l’entreprise de s’investir dans des opérations de R&D pour faire émerger des innovations. Là aussi, ce type de direction sera doté de budgets plus importants. Une fois la question du budget réglée, reste à se doter d’un réseau développement durable au sein de l’entreprise. Le mieux est d’avoir, dans chaque entité importante, un correspondant chargé

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du développement durable pour son secteur. En général, ils sont désignés par leur hiérarchie. Mais, chez Monoprix, l’exception qui confirme la règle, ils sont recrutés sur la base du volontariat. Chez Nature et Découvertes, il existe aussi un « Réseau vert » composé de salariés volontaires. Pourquoi pas ?

On peut, par exemple, consacrer la matinée à un point d’actualité du directeur ou responsable du développement durable et à des interventions externes ou internes sur des sujets et des thématiques qui pourront être partagés par tous. L’après-midi, on procédera à un tour de table au cours duquel les représentants des différentes entités feront un point sur les actions et les résultats développement durable de leurs secteurs respectifs. Si l’entreprise couvre l’ensemble du territoire national, et selon la nature de ses activités, peu ou prou dépendantes ou en forte adéquation avec les territoires, des correspondants régionaux peuvent être installés en sus de la matrice opérationnelle et fonctionnelle. Leur principale tâche sera alors de faire le lien entre les collectivités locales, notamment celles qui ont développé des Agendas 21 ou des Plans Climat, et l’entreprise, dans le but de pouvoir co-construire, dans l’intérêt des deux parties, des actions de développement durable.

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Si l’on veut une application coordonnée de la stratégie et de son plan d’action, il est presque indispensable non seulement de réunir ces correspondants au sein d’un comité quatre ou cinq fois par an sur une journée, mais également d’organiser un séminaire de deux jours à la rentrée d’automne pour faire un premier bilan de l’exercice en cours. Enfin, préparer le plan d’action de l’année suivante est presque une nécessité. De plus, cela permet de prévoir à temps les moyens budgétaires et leur répartition. Ces réunions sont aussi l’occasion d’échanges fructueux à travers des partages d’expériences, y compris en invitant à s’exprimer des représentants développement durable venant d’autres entreprises ou des ONG.

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Instaurer des liens réguliers avec vos contributeurs développement durable Créer en plus un lien régulier entre tous les contributeurs au sein de l’entreprise, qu’ils soient à temps plein ou partagé, est très utile. Ainsi, par exemple, la direction du développement durable du groupe La Poste publie chaque semaine une « Lettre du développement durable ». Elle est envoyée en push par e-mail aux acteurs du réseau développement durable et aux principaux responsables de l’entreprise. Elle est également accessible par tous sur l’intranet du groupe. Cette lettre d’informations et de partage d’expériences comprend, dans un but pédagogique surtout, une synthèse de ce qui s’est écrit dans la presse durant la semaine sur le développement durable.

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Lue régulièrement par plusieurs milliers de lecteurs au sein de La Poste, cette newsletter, qui nécessite peu de moyens, est aussi un formidable outil d’ouverture et de sensibilisation des collaborateurs au développement durable et à ses trois piliers. Elle agit enfin comme une véritable agence de presse interne dédiée au développement durable. Chaque article est une idée de sujet pour les autres organes de presse internes, qu’ils soient imprimés ou électroniques. Assurément, une bonne idée à reprendre. Enfin, la publication chaque année d’un rapport annuel dédié au développement durable ou d’un encart dédié au sein du rapport d’activités de l’entreprise est un bon exercice d’introspection sur ce qui a ou n’a pas marché l’année précédente. En ce sens, la publication d’indicateurs et de leurs évolutions n’a pas de pareil pour mettre le doigt là où ça fait mal, mais aussi où ça fait du bien pour l’entreprise. Rien de tel pour motiver l’ensemble des acteurs de celle-ci. Ce rapport ou encart, également outil de communication interne, est par ailleurs un bon moyen de valoriser à l’externe, notamment auprès de vos parties prenantes, vos réalisations et succès en matière de développement durable. Bien diffusé, il sera souvent à l’origine de futurs articles de presse ou d’invitations à en dire plus lors de

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Le guide du développement durable en entreprise

colloques, de débats ou d’expositions, toutes initiatives à même de rejaillir positivement sur l’image de l’entreprise et susceptibles de nourrir positivement sa marque. Aujourd’hui, la tendance est à la fusion du rapport de développement durable avec le rapport annuel d’activités, même si, au début, on conseillera plutôt d’éditer deux rapports distincts. Cela permet de bien marquer le coup et de tendre à l’exhaustivité. À noter aussi, la façon de faire de la société Michelin, qui publie une version allégée de son rapport dédié une année sur deux, et celle de quelques entreprises pionnières qui, dans un louable souci d’économiser du papier, ont complètement supprimé la version imprimée de leur rapport de développement durable, accessible essentiellement sur leur site Internet ou sur CD. Mais tout cela nous paraît encore un peu risqué, l’imprimé étant toujours plébiscité, au moins par les seniors… qui composent encore en très grande partie les effectifs des dirigeants et cadres dirigeants d’entreprises.

Construire une stratégie de développement durable bien adaptée à son entreprise nécessite d’abord de bien en connaître la culture, l’environnement, le fonctionnement et les hommes. Puis il s’agira de remplir cette tâche de façon partagée à l’interne, sans oublier de « sonder » les parties prenantes externes. Ensuite, le plus difficile ne sera pas de dresser la longue liste des actions à entreprendre, mais plutôt de savoir en dégager intelligemment les priorités. Enfin, on se donnera les meilleures chances de réussir en disposant d’une équipe dédiée, petite mais très motivée et qui saura tisser des liens réguliers avec tous les contributeurs développement durable de l’entreprise, les gérer et les animer.

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En résumé

Chapitre 4

Les principales actions à entreprendre

Le volet environnemental Économies d’énergie et de ressources : électricité, carburant, eau, papier…

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Alors qu’il est désormais tenu pour certain que l’ère du pétrole bon marché et celle de l’énergie sans compter sont du domaine du passé – à moins qu’un bond technologique nous permette soudain de retrouver cette éphémère abondance –, les économies d’énergie sont, dans la plupart des cas, le secteur qui vous apportera, et souvent à court terme, le plus de satisfactions : satisfaction de participer à la préservation de la planète, satisfaction de réduire sensiblement vos charges… « Des programmes d’efficacité énergétique pourraient faire économiser aux entreprises britanniques 2,5 milliards de livres », titrait le quotidien britannique The Guardian1 en juillet 2008, rapportant les résultats d’une étude de chercheurs qui travaillent pour le Carbon Trust2. Ainsi, la mise en place de programmes d’efficacité 1. Édition du 22 juillet, p. 25. 2. Le Carbon Trust est un organisme privé britannique qui accompagne les entreprises et le secteur public afin de réduire leurs émissions de CO2 et de réaliser leur transition vers des technologies à faibles émissions de GES. Source : http://www.ambascience.co.uk/ Le-Carbon-Trust-met-au-point-une.html.

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énergétique, dans le contexte actuel de hausse des coûts du pétrole et du gaz, pourrait faire économiser quelque 2,5 milliards de livres aux sociétés britanniques au cours des douze mois qui viennent, et réduire en même temps de quelque 22 millions de tonnes leurs émissions de CO2. On peut penser qu’en ce domaine, ce qui est vrai de l’autre côté de la Manche a toutes les raisons de l’être de ce côté.

Les réalisations, en matière d’économie d’énergie, vont du plus simple – comme substituer aux ampoules à incandescence, qui éclairent encore certains lieux de travail, des ampoules « faible consommation » ou mener des actions d’information-sensibilisation en direction de vos collaborateurs pour éteindre ordinateurs, imprimantes, photocopieurs, et éventuellement baisser le chauffage… avant de quitter ateliers et bureaux – au plus « lourd », faisant intervenir, par exemple, des sociétés de services en efficacité énergétique et environnementale, telles qu’en développent les grands groupes énergétiques, EDF avec Dalkia (filiale de Veolia Environnement et d’EDF), ou Suez avec sa filiale Elyo, etc., ou encore les grands équipementiers, comme Schneider Electric, General Electric, etc. Les experts, qui maîtrisent les systèmes et équipements énergétiques du bâtiment et de l’industrie, réalisent des audits détaillés, et peuvent proposer des solutions innovantes dans le cadre de contrats de performance énergétique. Le plus souvent, ces sociétés se rémunèrent en pourcentage sur la baisse de vos consommations d’énergies conséquentes de leurs analyses et de leurs propositions d’actions. 1. Mener à bien un projet d’efficacité énergétique dans l’industrie ; Mener à bien un projet d’efficacité énergétique dans les bâtiments et les collectivités locales (guide de bonnes pratiques à l’intention des propriétaires, occupants et exploitants de bâtiments industriels et tertiaires) et Le Rôle de la mesure dans un projet d’efficacité énergétique.

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En France, le Gimélec, Groupement des industries de l’équipement électrique, du contrôle-commande et des services associés, a publié trois guides1 de bonnes pratiques en matière d’efficacité énergétique qui peuvent être téléchargés gratuitement depuis son site http:// www.gimelec.fr.

Les principales actions à entreprendre

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L’éclairage

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Mais revenons au plus élémentaire : l’éclairage, sans doute, dont le coût représente, selon les cas, quelque 15 % de la facture d’électricité d’un site, est un poste de dépense sur lequel il est facile d’agir et de réduire rapidement les charges. Suggestions : • adapter la qualité de l’éclairage de façon à apporter les meilleures conditions de confort et de sécurité permet souvent de limiter aussi la consommation électrique ; • le choix des lampes est bien sûr primordial : le ministère du Développement durable, qui a remplacé plus de mille ampoules à incandescence par des ampoules fluo compactes dont la consommation est jusqu’à cinq fois inférieure, a certainement réalisé rapidement une belle économie… • le remplacement d’un système ordinaire à ballasts magnétiques par un système à ballasts électroniques permet d’allonger la durée de vie des tubes fluorescents et de réduire les pertes d’énergie liées aux ballasts ; • le « relamping », qui consiste à remplacer à date fixe l’ensemble des lampes, améliore le confort visuel en préservant l’homogénéité de l’éclairage, réduit le nombre d’interventions de dépannage ainsi que le temps de remplacement des consommables d’éclairage. Il permet aussi de meilleures conditions d’achat lorsque des quantités importantes sont en jeu et un suivi plus facile du recyclage, obligatoire depuis 1998 (veiller à ce qu’une clause dans le contrat du prestataire charge celui-ci de l’enlèvement des lampes usagées) ; • certains équipements permettent aussi de moduler l’éclairage en fonction de la luminosité ambiante ; • les détecteurs de présence, qu’on installe à la place des interrupteurs ordinaires, font la commutation dès qu’un mouvement est détecté et permettent d’éviter qu’une lampe reste allumée dans un lieu où il n’y a plus personne, ou au contraire d’allumer automatiquement une lampe lorsque quelqu’un arrive ;

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• les minuteries permettent, de leur côté, d’interrompre la commutation électrique après un laps de temps préalablement fixé, de trente secondes à dix minutes, et sont particulièrement intéressantes dans les sanitaires et les lieux de circulation ; • l’extinction des lumières inutilisées s’impose : elle passe par la sensibilisation des collaborateurs (pose d’autocollants1 près des interrupteurs, informations dans la (les) publication(s) interne(s) de l’entreprise ou sur l’intranet…) ou encore, pour s’assurer que l’ensemble des locaux seront éteints après la journée de travail, par l’intégration d’une clause dans le cahier des charges de la société de nettoyage stipulant que la personne qui fait le ménage éteint les lumières en quittant les lieux… • la mise en place d’un système d’extinction centralisée permettant d’éteindre de façon périodique préalablement programmée tout ou parties d’un site est une solution technique très efficace et dont le retour sur investissement est rapide ; • plus technique encore et également très efficace et de retour rapide sur investissement, le système GTB (gestion technique de bâtiment), qui permet de piloter l’ensemble des installations techniques : éclairage de toutes les zones mais aussi chauffage et climatisation (pour les bâtiments en rénovation ou en construction).

De plus en plus d’entreprises considèrent aujourd’hui la faisabilité de produire leur propre électricité. Ikea, par exemple, s’est engagé à utiliser 60 % d’énergie renouvelable puis de tendre vers les 100 %. La technologie la plus largement utilisée dans ce contexte de production annexe est le photovoltaïque : cette énergie solaire permet de produire de l’électricité par transformation d’une partie du rayonnement solaire au moyen d’une cellule. Des panneaux de cellules photovoltaïques peuvent constituer une installation solaire chez un particulier ou dans une centrale solaire photovoltaïque. L’électricité 1. L’Ademe édite ce type de documents.

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Produire sa propre électricité

Les principales actions à entreprendre

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produite peut alimenter un besoin sur place (en association avec un moyen de stockage) ou être injectée, après transformation en courant alternatif, dans le réseau de distribution électrique (le stockage n’est alors pas nécessaire). En France, EDF est ainsi tenu de payer 0,55 euro le kilowattheure d’origine solaire lorsque les panneaux sont intégrés au bâtiment, et 0,30 euro pour les configurations classiques. La solution photovoltaïque connaît un vif succès en Californie, où les besoins en électricité sont tels que le réseau de distribution est en permanence au bord de la saturation. Le gouvernement a d’ailleurs lancé un programme « Initiative solaire » pour équiper un million de toits avec l’objectif de produire 5 % de la consommation en électricité de l’État. Google a ainsi installé sur son site un véritable complexe de production d’énergie solaire (1,6 mégawatt) ; Microsoft a également installé quelque 2 000 panneaux solaires sur les toits de son site californien et le Moscone Center, le plus grand centre de conférences de San Francisco, s’est équipé en 2005 d’une puissance en énergie photovoltaïque presque équivalente à celle de Google. De son côté, le distributeur Wal-Mart s’apprête également à équiper ses magasins de centrales solaires dans cinq États américains.

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En France, la société Urbasolar1, qui installe des toitures solaires étanches Solar Roof pour les industriels et les collectivités (une couverture solaire qui se présente sous la forme d’une membrane se déroulant comme un tapis), connaît un tel succès – 200 000 mètres carrés déjà installés – qu’elle s’apprête à implanter une unité de production à Montpellier. Imérys Toiture, leader français du secteur, propose, quant à lui, des tuiles photovoltaïques. De son côté, la société d’ingénierie avignonnaise GSE2 ambitionne de couvrir de panneaux solaires les toits des bâtiments qu’elle construit afin d’en faire des producteurs d’énergie : « Quand on construit 1. Poste Immo, filiale de La Poste, a créé, en février 2009, une joint venture avec cette société et Capenergie pour équiper la plate-forme courrier de Montpellier d’une centrale solaire de 14 000 m2. 2. Le Figaro, édition du 22 avril 2008.

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1,4 million de mètres carrés de bâtiments, c’est 1,4 million de mètres carrés de surfaces qui coûtent en entretien et en consommation d’énergie. On a voulu inverser le problème. Pourquoi ne pas utiliser ces surfaces pour les couvrir de panneaux solaires et produire de l’énergie ? » explique Jean-Pierre Hugues, président fondateur de GSE, qui vient de mettre en chantier 22 000 mètres carrés de bâtiments aux toits équipés de panneaux solaires, lesquels « produiront l’équivalent d’une ou deux grandes éoliennes ». En Europe, c’est sans doute le site espagnol du constructeur automobile General Motors1 (GM) à Figueruelas, près de Saragosse, qui détiendra (pour un temps…) la palme de la production électrique locale, avec une surface de 183 000 m2 (en cours d’installation, par Veolia Environnement et Clairvoyant Energy), une capacité installée de 10 mégawatts qui produira 15,1 millions de kilowattheures par an. À la clé, une réduction annuelle de 6 700 tonnes d’émissions de CO2…

Pourquoi pas des éoliennes ? Sans doute pour des raisons pratiques, du moins en ce qui concerne la production d’électricité par les entreprises (dont ce n’est pas l’activité de base) : les éoliennes occupent aujourd’hui de l’espace au sol, et leur implantation suscite toutes sortes d’oppositions (bruit, esthétique…). Il n’est pas impossible cependant de voir se développer des appareils relativement discrets. Les Échos2 rapportent que, échaudé par la gigantesque panne qui avait plongé dans l’obscurité tout le nord-est des États-Unis et une 1. Les Échos, édition du 9 juillet 2008. 2. Édition du 21 août 2008.

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Deux possibilités s’offrent à vous en matière d’énergie solaire : • soit vous portez la charge de l’investissement nécessaire à l’installation des panneaux solaires et vous revendez à EDF l’électricité produite ou au choix le surplus de votre propre consommation ; • soit l’investissement est pris en charge par une société extérieure qui profitera alors directement du produit de la part d’électricité fabriquée et non consommée par votre entreprise.

Les principales actions à entreprendre

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partie du Canada, le 14 août 2003, Michael Bloomberg, le maire de New York, entend, dans le cadre d’un programme d’énergies renouvelables, installer des éoliennes sur les gratte-ciel et les ponts de sa ville, ainsi qu’en mer. La panne d’électricité qui a plongé dans l’obscurité, début novembre 2008, les Alpes-Maritimes et le Var, après que de violents orages eurent coupé la ligne à très haute tension qui alimente la région, pourrait bien inciter les entreprises de ces départements à trouver dans ces productions locales et non polluantes les moyens d’échapper à l’avenir à de tels incidents. Le chauffage Comme l’éclairage, le chauffage est un élément déterminant du confort des collaborateurs et peut être une source significative de réduction des charges. Il met cependant en jeu des dispositifs plus lourds.

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Cela n’empêche pas toutefois des gestes élémentaires comme régler les thermostats – entre 19 et 20 °C – et sensibiliser les équipes, en particulier celles qui travaillent dans des locaux où des portes sont constamment ouvertes et laissent entrer l’air froid du dehors (magasins, entrepôts…). L’isolation doit, bien sûr, être la plus efficace possible : les « passoires thermiques » sont devenues de véritables gouffres à finances et les promoteurs qui construisent des immeubles de bureaux savent aujourd’hui l’importance de proposer des locaux dont les frais de maintenance sont calculés au plus juste. Optimiser le rendement des chaudières fonctionnant au gaz ou au fioul ou, mieux encore, selon les régions, mettre en place des installations fonctionnant au bois-énergie ou utilisant la géothermie, ou encore l’énergie solaire, implique parfois de recourir à des sociétés de services spécialisées, mais constitue des solutions qui, à long terme, permettent des économies significatives.

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Le guide du développement durable en entreprise

L’école d’ingénieurs Supélec et Césal (l’association qui gère le campus de Gif-sur-Yvette, dans l’Essonne) a ainsi signé un contrat de performance énergétique1 avec Schneider Electric France et EDF pour la modernisation du système de chauffage et l’optimisation de l’éclairage extérieur. Dans le cadre de ces travaux, l’engagement de résultat comprend que les économies financent l’investissement (environ 700 000 euros pour les études, l’ingénierie, les matériels et les travaux qui devaient être réalisés courant 2008) : « Comme le veut le principe du contrat de performance énergétique, le groupement s’engage sur les résultats. Les travaux déboucheront sur une économie de plus de 15 % sur la facture énergétique et une réduction d’environ 100 tonnes par an des émissions de CO2 », explique le responsable de cette opération chez Schneider Electric. Le groupement composé par cette société avec EDF assurera un suivi et un reporting des performances, ainsi qu’une assistance au personnel d’exploitation de Supélec pendant dix ans.

D’une part, cette chaufferie permettra de remplacer plus de 92 % du gaz (énergie fossile et polluante) par du bois (énergie renouvelable), évitant ainsi l’émission de quelque 9 000 tonnes de CO2 par an. D’autre part, cela contribuera à la valorisation de la forêt du Livradois-Forez (dont seulement 40 % de la production annuelle de bois était jusqu’alors exploitée) en développant la filière bois-énergie, participant ainsi à la redynamisation du territoire. La chaufferie consomme en effet quelque 20 000 tonnes de déchets-bois par an, qui, à terme, seront acheminés par rail2 (la fabrique est située en bordure de voie ferrée et quatre scieries sont à proximité de cette 1. Source : http://www.schneider-electric.fr rubrique « Solutions transverses », « Efficacité énergétique ». 2. http://www.auvergne.pref.gouv.fr/pdf/PER_description_projet.pdf.

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La papeterie de Giroux, exploitante à Olliergues (Puy-de-Dôme) d’une fabrique de papier pour carton ondulé dont le processus de fabrication nécessite de la vapeur produite auparavant issue du gaz naturel, a de son côté fait appel à Elyo, qui a conçu une chaufferie vapeur de 7 mégawatts fonctionnant au bois-énergie.

Les principales actions à entreprendre

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voie) grâce à la construction à Arlanc d’un quai de chargement qui permettra aux scieries locales (opérant dans un rayon de 30 kilomètres autour de la papeterie) de charger les wagons. Pour ces scieries, l’élimination des déchets de bois, dont le volume est de vingt à trente fois celui nécessaire aux besoins de la papeterie, représentait un problème qui a trouvé sa solution avec le développement de la filière bois-énergie dans la région. Pour la papeterie, le coût de la vapeur a été réduit et surtout, dans un contexte d’augmentation du prix continue des combustibles fossiles, est devenu prévisible sur le long terme. L’investissement, de l’ordre de 3,5 millions d’euros, a bénéficié d’aides de l’Ademe, du conseil régional d’Auvergne (Fonds européen de développement régional) et du conseil général du Puy-de-Dôme, dans le cadre du Plan Bois. Ce dernier exemple, qui s’inscrit dans le cadre plus général d’un projet de développement rural, illustre aussi l’importance des implications sociétales qu’un projet bien conçu peut avoir au-delà de l’économie d’énergie.

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Les équipements bureautiques Le secteur de l’informatique représente 2 % des émissions de carbone dans le monde : autant que le transport aérien. Même si, en l’occurrence, les grands centres de données où opèrent des milliers de processeurs sont bien plus consommateurs d’électricité et émetteurs de CO2 que les ordinateurs de bureau, ceux-ci n’en représentent pas moins un poste d’économies potentielles. On a calculé qu’un seul ordinateur et son écran allumés pendant tous les weekends coûtent quelque 45 euros par an… Et même en mode veille, la consommation n’est pas négligeable ; les ordinateurs (et leurs écrans, mais aussi : imprimantes, photocopieurs…) doivent donc être éteints dès qu’ils ne sont pas utilisés. La mise en œuvre, en ce domaine, est essentiellement entre les mains des utilisateurs. Sensibilisation, information… sont donc encore de rigueur.

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Le guide du développement durable en entreprise

Le choix du matériel peut aussi contribuer à faire la différence. Le programme « Energy Star » de la Communauté européenne1 met à la disposition des utilisateurs sa base de données permettant de choisir les modèles (labellisés Energy Star) les plus efficaces en termes de rendement énergétique. On peut aussi choisir les appareils porteurs de l’écolabel européen. La climatisation Elle est gourmande en énergie, mais peut difficilement être évitée, au risque de voir la productivité tomber à un niveau incompatible avec la survie de l’entreprise à chaque canicule… et on nous en promet de plus en plus dans les années à venir. À savoir : • un ventilateur est plus fiable et consomme vingt fois moins d’électricité (environ 23 kWh, 1,80 euro par an) qu’un climatiseur individuel (compter 450 kWh minimum, de l’ordre de 36 euros par an) ; • les stores et volets extérieurs empêchent mieux les rayons du soleil de pénétrer à l’intérieur des locaux et sont plus efficaces que les rideaux et stores intérieurs.

• l’installation, lors de la construction d’un bâtiment ou à l’occasion de travaux de terrassement, d’un puits provençal (ou canadien) qui fait passer l’air du dehors dans des tuyaux enterrés à 1 ou 2 mètres de profondeur dans le sol, plus froid que l’air extérieur, avant que ce dernier pénètre dans les locaux. En hiver, la température du sol est au contraire plus chaude que l’air extérieur

1. http://www.eu-energystar.org/fr/.

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Il existe aussi des installations permettant d’éviter la climatisation classique qui, outre sa consommation électrique, utilise des fluides frigorigènes à fort effet de serre :

Les principales actions à entreprendre

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et permet de le préchauffer avant son entrée dans les locaux. Une telle installation limite la perte énergétique entraînée par la ventilation des locaux ; • la climatisation solaire met en jeu des capteurs solaires et fournit plus de froid quand il fait le plus chaud (quand le soleil est le plus disponible), sans utiliser de fluides frigorigènes : compter environ 120 m2 de capteurs solaires pour 1 000 m2 de surface à climatiser ; • la toiture végétalisée, très utilisée dans certains pays (Suisse, Allemagne, Canada…), se développe en France. Constituée d’un système d’étanchéité recouvert d’un substrat drainant qui accueille un tapis de plantes précultivées (sédum, vivaces, graminées…), elle peut être installée sur diverses structures (béton, acier, bois…), offre une surface qui change d’aspect en fonction des saisons, et améliore à la fois le confort thermique et acoustique tout en contribuant à diminuer la pollution atmosphérique. La toiture végétalisée régule aussi de façon efficace les écoulements des précipitations, en retenant une partie des eaux de pluie, et contribue à limiter les risques d’inondation en évitant la saturation des réseaux. Elle peut même réduire l’engorgement des réseaux d’assainissement lors d’orages après une période de sécheresse.

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Le carburant Directement lié à l’augmentation du prix du pétrole, un poste de dépense a occupé le devant de la scène ces toutes dernières années : celui du carburant et des transports. La question est devenue si sensible qu’elle a sans doute été examinée sous tous ses aspects : de la plus ou moins grande sobriété des moteurs au nombre de kilomètres parcourus en passant par le poids des produits transportés et de leurs emballages, ou le mode de conduite des chauffeurs. On a vu renaître un intérêt soudain pour la voiture électrique, dont l’idée même était restée si longtemps informulable. Après un démarrage difficile, la Prius hybride de Toyota a connu un franc succès audelà des frontières californiennes, et tous les constructeurs se préparent aujourd’hui à mettre sur le marché au moins un véhicule de ce

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Le guide du développement durable en entreprise

type. On affiche désormais en France les émissions de CO2 au kilomètre des voitures neuves mises sur le marché et le montant de la TVS1 (taxe sur les véhicules de société) prend maintenant en compte ce taux d’émission de CO2 : quelque 440 euros pour un véhicule émettant 110 g de CO2 au km, 2 700 euros pour 180 g/km et 4 750 euros pour 250 g/km…), conduisant les entreprises à orienter leur choix vers les voitures les moins gourmandes. Résultat, près de la moitié du parc des flottes d’entreprise émet aujourd’hui moins de 140 g de CO2/km contre 15 % il y a sept ans.

1. Le barème, en fonction des émissions de CO2 (figurant sur la carte grise), est de 2 euros par gramme pour les véhicules émettant au maximum 100 g de CO2 au kilomètre, de 4 euros pour un taux supérieur à 100 et inférieur ou égal à 120 g/km, de 5 euros pour un taux supérieur à 120 et inférieur ou égal à 140 g/km, 10 euros par gramme entre 141 et 160 g/km, 15 euros entre 161 et 200 g, 17 entre 201 et 250 g/km et enfin 19 euros par g pour des émissions de 251 g de CO2 par kilomètre… 2. Réalisée auprès de 250 décideurs en informatique et en télécommunications d’Amérique du Nord par la division Enterprise Mobility de Motorola (qui fabrique, entre autres, des GPS) pour évaluer les bénéfices des applications GPS dans le domaine du fret, de la fabrication, des transports et du stockage. 3. http://www.01net.com/editorial/387653/pour-motorola-le-gps-fait-faire-de-grosseseconomies-aux-entreprises/.

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Des entreprises dont l’activité implique une large part de transport, comme La Poste, ont systématiquement fait suivre une formation à la conduite douce à leurs collaborateurs fréquemment au volant : une conduite « apaisée » génère de 5 à 10 % d’économie de carburant. D’autres entreprises ont optimisé leurs parcours de livraison. D’autres se sont penchées plus particulièrement sur le mode de remplissage des cargaisons et sur le poids des denrées transportées, réduisant au maximum le poids des emballages. Dans le même temps, les véhicules ont dans leur grand nombre été équipés de GPS : une étude2 publiée dans le magazine 01.Net3 montre que les entreprises nord-américaines ayant misé sur cette technologie gagneraient 372 kilomètres par semaine dans leurs déplacements, qu’il s’agisse de livraisons, de service client ou de fret. Cette même technologie permettrait de plus un gain de temps de travail des employés de l’ordre de cinquante-quatre minutes par personne… Si les chiffres annoncés

Les principales actions à entreprendre

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par Motorola sont très importants – et difficilement vérifiables puisque l’équipementier n’a donné les détails ni de son étude ni de ses méthodes de calcul, les économies liées à l’usage du GPS n’en sont pas moins réelles, assure l’auteur de l’article.

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Les 10 commandements de l’éco-conduite1 1.

Vérifier l’état de son véhicule. Mal entretenu, il peut entraîner une surconsommation de 20 %.

2.

Vérifier la pression des pneus. À la bonne pression, 3 à 5 % d’économie de carburant. Une différence de 1 bar, c’est 4 à 6 % de carburant consommé en plus.

3.

Supprimer charges inutiles ou accessoires gênant l’écoulement de l’air sur la carrosserie. 100 kg en plus, c’est 5 % de surconsommation.

4.

Ne jamais faire chauffer son moteur avant de prendre la route. Couper le contact en cas d’arrêt de plus de trente secondes.

5.

Ne pas abuser de la climatisation : 10 % de consommation de carburant en plus sur route, 25 % en ville.

6.

Démarrer franchement mais sans accélérer à fond.

7.

Optimiser le passage des vitesses : passer le rapport supérieur autour de 2 500 à 3 000 tr/mn sur un moteur à essence, 2 000-2 500 pour un diesel.

8.

Maintenir une vitesse régulière sans à-coups au-dessus de 40 km/h. Respecter les limitations de vitesse. 10 km/h de plus, c’est au moins 1 litre de plus aux 100 km.

9.

Anticiper pour éviter les accélérations et les freinages, très consommateurs.

10. Suivre une formation à l’éco-conduite pour acquérir les bons réflexes. Le retour sur investissement : 8 à 10 % en moyenne. Et plus, si vous êtes un conducteur nerveux. Prévoir des piqûres de rappel.

1. Établis par l’Observatoire du véhicule d’entreprise (OVE).

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Le guide du développement durable en entreprise

Réduire sa consommation d’eau Le coût de l’eau n’a pas suivi la même courbe ascensionnelle que celui de l’énergie ; de ce fait, cette ressource n’a pas fait l’objet d’une attention aussi générale. Pourtant, quelques années de sécheresse, même en France, où l’eau est encore largement considérée comme de bonne qualité, abondante et disponible (il n’y a qu’à tourner le robinet…), ont remis en question ces certitudes ; de nombreuses alertes et limitations de son usage ont été prononcées (sinon entendues de la population). La canicule de 20031 a agi auprès de nombreux dirigeants comme un coup de semonce. Non, après tout, l’eau n’est pas si abondante, si facilement disponible, sa bonne qualité coûte très cher et, surtout, ce n’est pas une ressource inépuisable. Ainsi, l’International Water Management Institute2 estime que l’humanité est plus menacée par une crise de l’eau que par une crise alimentaire… Pour les entreprises, un certain nombre de dispositifs, faciles à installer et relativement peu coûteux, permettent d’économiser l’eau et de réduire les charges avec un rapide retour sur investissement :

• l’économiseur d’eau, installé sur un robinet, peut réduire la consommation de moitié, sans altérer le confort pour l’utilisateur. Il réduit aussi la consommation d’énergie puisque moins 1. On se souvient qu’elle a failli mettre à l’arrêt de nombreuses centrales thermiques et nucléaires qu’il devenait difficile de refroidir suffisamment (rendant incertain notre approvisionnement en électricité !) tandis que nombre de centrales hydrauliques tournaient au ralenti à cause du manque d’eau. 2. Article de The Economist du 20 septembre 2008 et site de l’IWMI : www.iwmi.cgiar.org.

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• la détection des fuites, facile à réaliser à partir du compteur d’eau : tous robinets fermés et toutes consommations arrêtées pendant une heure, le compteur d’eau doit afficher le même chiffre au début et à la fin de l’expérience, sinon, c’est qu’il y a une fuite sur le réseau. Un robinet qui « goutte » peut augmenter la consommation de 18 %, un filet d’eau de 60 % et une chasse d’eau qui fuit peut doubler sa consommation ;

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Les principales actions à entreprendre

d’eau chaude est consommée. Son retour sur investissement, rapide, est inférieur à une année ; • les éco-plaquettes placées dans les chasses d’eau des toilettes permettent d’économiser de 30 à 40 % de l’eau (trois à quatre litres) des réservoirs tout en optimisant la pression d’évacuation ; • on peut aussi installer des chasses d’eau à double commande, à la place des systèmes ordinaires : ces dispositifs permettent d’économiser environ 40 % de la consommation des sanitaires… à condition cependant que les utilisateurs sachent s’en servir (information nécessaire !) ; • enfin, et tout simplement, on peut sensibiliser les collaborateurs à signaler les fuites dès qu’ils s’en aperçoivent. Des actions plus spécifiques seront bien entendu entreprises en fonction de l’activité de l’entreprise. À noter, pour ceux qui aiment la nouveauté, les jardins filtrants en situation à l’usine Coca-Cola de Grigny dans l’Essonne ou à Honfleur dans le Calvados.

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Qu’est-ce qu’une rhizosphère ? La Papeterie du Doubs (filiale du groupe Otor), installée au bord du Doubs à Novillars, a mis en place dès 2002 une station d’épuration par rhizosphère1 (zone d’activité microbienne autour des racines des végétaux, dans le sol) pour réduire la pollution par les fibres de papier et par l’amidon d’une importante quantité d’eau générée par la fabrication de papier recyclé à partir de papier usagé. Une première phase de décantation permet de séparer les boues primaires et une grande partie de l’eau, clarifiée, peut être réutilisée telle quelle dans la chaîne de production. Le reste est dirigé dans un vaste bassin de lagunage, où cinquante aérateurs favorisent la production de bactéries aérobies qui consomment l’amidon dissout. Cette seconde phase dure trois semaines, à la suite desquelles le mélange rejoint un deuxième puis un troisième bassin de décantation d’où l’eau épurée qui en ressort respecte les normes de rejet autorisées. Mais, depuis 2002, une rhizosphère a ••• 1. http://www.otor.com/le-groupe/developpement-durable/otor-et-environnement/papeterie-du-doubs-.htm, et article des Échos des 2 et 3 décembre 2005.

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•••

La question de l’eau, qui n’a pas posé de difficulté notoire dans les sociétés occidentales – elle peut être source de graves conflits comme dans certaines régions où elle est plus rare, en Afrique subsaharienne ou au Moyen-Orient –, devient particulièrement sensible à mesure que la population prend conscience qu’elle pourrait également devenir rare chez eux. Aux États-Unis, par exemple, « l’eau pourrait bien être le talon d’Achille » de l’éthanol, soulignait une étude2 de l’Institut pour la politique agricole et commerciale de Minneapolis. Si l’éthanol consomme à peu près autant d’énergie qu’il en produit, l’un des inconvénients les plus importants et les moins connus de sa production est son énorme gaspillage d’eau. Une usine qui produit 50 millions de gallons d’éthanol par an consomme environ 500 gallons d’eau par minute, prélevant ainsi un lourd tribut sur les aquifères dans certaines régions de culture du maïs, comme la Floride, qui a souffert en 2007-2008 d’une longue sécheresse. Aussi des projets de construction d’unités de production d’éthanol sont-ils contestés 1. Centre d’aide par le travail. 2. Rapportée par The Economist du 1er mars 2008.

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été ajoutée à ce circuit d’épuration afin d’améliorer encore la qualité de l’eau rejetée par le circuit préexistant. Cette eau est déversée en jets dans quatre bassins dont les fonds sont recouverts d’une épaisse couche de gravillons et plantés de roseaux qui forment un filtre naturel à travers lequel l’eau s’écoule ensuite vers un chenal tapissé de galets et de graviers et planté de diverses plantes, joncs, roseaux…, constituant un jardin d’eau entretenu par le CAT1 de Novillars. La faune et la flore s’épanouissent : la Papeterie du Doubs est la première usine en France à être labellisée par la Ligue de protection des oiseaux. Mais cette réalisation innovante, accompagnée par la fédération Doubs Nature Environnement, est bénéfique à l’entreprise à plusieurs niveaux : meilleure image, ancrage de la papeterie dans le tissu local par l’amélioration du paysage et l’emploi d’un CAT, amélioration des relations avec les riverains et avec les associations locales de défense de l’environnement, satisfaction des salariés, fiers de travailler dans une usine propre…

Les principales actions à entreprendre

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dans de nombreux États où le maïs est cultivé : Floride, mais aussi Missouri, Minnesota, Iowa, Nebraska, Kansas, Illinois… D’autant que la demande en maïs est telle que de plus en plus de terres sont mises en culture dans les zones les plus sèches des États des Grandes Plaines, à l’ouest de la région traditionnelle de culture de cette céréale (corn belt) où l’irrigation est nécessaire, accroissant encore la consommation d’eau. Maîtriser sa consommation de papier En France, la consommation moyenne de papiers et cartons est de 179,2 kg par habitant et par an, indique le site de l’industrie papetière française, qui précise que depuis plus de dix ans cette consommation s’accroît dans le monde d’environ 3,3 % chaque année.

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Si la France n’est pas le plus gros consommateur, nul ne doute qu’il y a tout de même là une marge indiscutable d’économie, avec, en amont, une économie de matières premières (en particulier le bois, qui fournit la cellulose), d’eau (100 à 200 litres d’eau sont nécessaires pour fabriquer un kilogramme de papier) et d’énergie (il faut entre 700 et 1 200 kWh pour fabriquer une tonne de papier) et, en aval, une réduction notable des déchets de bureaux, puisque, tôt ou tard, le papier utilisé finit à la corbeille. Par ailleurs, la fabrication de papier est particulièrement polluante : l’eau rejetée à la fin des processus de fabrication est chargée de produits chimiques toxiques pour l’environnement, et ces processus de fabrication rejettent également dans l’atmosphère des composés soufrés, des oxydes d’azote, des composés organiques volatils, des particules… Sequovia1, le « portail des entreprises écoresponsables », souligne que les entreprises françaises dépensent plus de 400 millions d’euros

1. http://www.sequovia.com/.

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Les achats de papier – qui concernent toutes les entreprises – seront un des premiers éléments à considérer dans le cadre des achats responsables. Si l’industrie du papier, l’une des plus polluantes, a fait des progrès considérables, certains producteurs sont plus volontaires et plus efficaces que d’autres en termes de protection de l’environnement : éviter le gaspillage est une chose, choisir son fournisseur en est une autre. L’une est complémentaire de l’autre, et l’image de votre entreprise sera également préservée. Se souvenir que le consommateur qui reçoit une belle publicité sur un épais papier glacé apprécie peut-être le produit qui est vanté par celle-ci, mais peut aussi être soucieux de l’environnement… De plus, les associations veillent : ainsi, Deutsche Post (la poste allemande), attaquée en 2003 par Greenpeace parce qu’elle vendait des ramettes de papier de la

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par an en impressions inutiles et propose un plan d’action en trois étapes pour une consommation contrôlée et responsable du papier : 1. réduire la consommation globale : – en programmant les imprimantes pour que l’impression soit automatiquement recto verso, – en insérant à la fin de tous les courriers électroniques de l’entreprise le message de sensibilisation : « Agissons pour l’environnement ; n’imprimez ce message que si vous en avez l’utilité », qui peut être personnalisé au nom de votre entreprise, – en suivant et en affichant la consommation annuelle de papier par poste de travail, – en récupérant le papier imprimé sur une face pour l’utiliser côté vierge pour les brouillons… – en utilisant, quand c’est possible, des logiciels qui permettent d’imprimer plusieurs pages sur une seule ; 2. utiliser systématiquement du papier recyclé, qui permet de réduire la quantité de papier incinéré ou mis en décharge ainsi que de ralentir la déforestation ; faites-le savoir en indiquant en fin de document : « Imprimé sur du papier recyclé. » On trouve aujourd’hui du papier recyclé de très bonne qualité ; 3. installer des bacs de récupération de papier et de cartons, et motiver les collaborateurs pour qu’ils les utilisent.

Les principales actions à entreprendre

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société Herlitz, partenaire du producteur finlandais Stora Enso, qui exploitait alors des forêts anciennes de Finlande, mettant en danger la biodiversité de celles-ci, a décidé de cesser la commercialisation de tout papier de Stora Enso tant que celui-ci poursuivrait son exploitation de la forêt finlandaise… Quels critères pour l’achat responsable du papier ?

1. Le papier recyclé : sa fabrication demande significativement moins d’énergie que celle du papier vierge, et aussi moins de produits chimiques (corollaire : des eaux usées moins polluées). Ne pas confondre papier recyclé (issu du recyclage) avec papier recyclable, tout papier étant recyclable. 2. L’écolabel : français (NF Environnement) ou européen (écolabel européen, en « fleur »), il garantit l’achat d’un produit respectueux de l’environnement par la rigueur des critères examinés concernant les rejets toxiques (et eutrophisants1 dans l’eau), l’énergie consommée, la gestion des forêts, etc.

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3. Le papier issu de forêts gérées durablement (le bois exploité est remplacé par de nouvelles plantations) et non de forêts vierges, anciennes, est labellisé PEFC2 ou FSC3. 4. Le papier sans chlore (dont l’utilisation génère des dioxines, polluants organiques persistants), blanchi à l’eau oxygénée, est préférable. Mais cet élément est de moins en moins utilisé et la mention TCF (Total Chlorine Free) garantit un blanchiment sans chlore. 1. Les rejets eutrophisants favorisent le développement des algues qui absorbent l’oxygène nécessaire à la faune. 2. Programme for the Endorsement of Forest Certification schemes (ou « Programme de reconnaissance des certifications forestières »), créé par des forestiers européens comme alternative au FSC, plus adapté aux forêts tropicales. 3. Forest Stewardship Council.

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5. Enfin, la lecture des informations données par le fournisseur renseigne sur l’importance qu’il accorde à ses impacts environnementaux ; il n’est pas inutile de lui demander des compléments d’information sur son implication dans une démarche de développement durable. Tous ces choix et ces actions impliquent l’adhésion des collaborateurs. Si la mise en place d’une politique de développement durable exige une conviction forte de la part du dirigeant, celle-ci ne peut être l’œuvre d’un seul homme : la pratique quotidienne s’exerce à tous les niveaux de l’entreprise – personnel en charge du nettoyage inclus… Tri des déchets, recyclage Faire d’un déchet une matière utile et d’un coût, un bénéfice

Contrôler, réduire, trier, valoriser, éliminer. Tout déchet résulte de l’utilisation d’une ressource… et moins on en produit, mieux c’est. Mais toute activité produit des déchets, plus ou moins dangereux, et en plus ou moins grande quantité. La façon dont chaque entreprise les gère est particulièrement surveillée et réglementée. Contrôler sa production de déchets permet de répondre à une attente du consommateur. Pressé lui-même, par les pouvoirs publics et en particulier les élus locaux, de réduire le volume de ses poubelles, dont la collecte et le traitement sont toujours plus coûteux, le consommateur admettrait mal que l’entreprise ne soit pas soumise aux mêmes

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Les déchets sont encore souvent considérés comme une charge puisque les entreprises doivent généralement payer pour s’en débarrasser. Les choses sont cependant en train de changer et l’idée progresse que le déchet résultant d’une activité peut être la matière première sur laquelle une autre activité se développera : remis à disposition de l’industrie, déchets de production et produits en fin de vie peuvent contribuer à réguler et alléger le recours aux ressources primaires dans une démarche de développement durable.

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obligations. De plus, il est bien placé également pour comprendre les nouvelles exigences en la matière au sein de l’entreprise où il exerce son activité professionnelle. Contrôler sa production de déchets permet non seulement de limiter ses impacts sur l’environnement – moins de matières premières consommées, éventuellement moins de poids à transporter (cas, par exemple, des emballages) –, mais aussi de réduire ses coûts – moins de matière première à acheter, à transporter, c’est moins de carburant dépensé, moins de volumes à gérer, c’est moins de manutention à payer. Contrôler sa production de déchets permet enfin d’opérer en conformité avec la réglementation, d’autant plus contraignante que, partout dans le monde, la question se pose comme un problème grandissant : « Le tas de déchets sur lequel le monde est assis croît à vue d’œil », écrivait déjà Laurent Chemineau dans La Tribune1 en mai 2006… L’image est parlante et rien ne permet de penser que ce tas aurait significativement décru, car, si le recyclage des déchets progresse, leur production progresse tout autant.

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Ce qu’impose la réglementation (Code de l’environnement)

La réglementation impose à « toute personne qui produit ou détient des déchets dans des conditions de nature à produire des effets nocifs sur le sol, la flore et la faune, à dégrader les sites ou les paysages, à polluer l’air ou les eaux, à engendrer des bruits et des odeurs et, d’une façon générale, à porter atteinte à la santé de l’homme et à l’environnement » d’en assurer ou d’en faire assurer l’élimination « dans des conditions propres à éviter de porter atteinte à l’environnement ou la santé humaine » (art. L. 541-2 du Code de l’environnement). De plus, « les entreprises qui produisent, importent, exportent, éliminent ou qui transportent, se livrent à des opérations de courtage ou de négoce des déchets appartenant aux catégories définies par décret comme pouvant, soit en l’état, soit lors de leur élimination, causer des nuisances 1. La Tribune, édition du 30 mai 2006.

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telles que celles qui sont mentionnées à l’article L. 541-2 sont tenues de fournir à l’administration toutes informations concernant l’origine, la nature, les caractéristiques, les quantités, la destination et les modalités d’élimination des déchets qu’elles produisent, remettent à un tiers ou prennent en charge » (art. L. 541-7 du Code de l’environnement). Enfin, « les entreprises doivent justifier, à la demande de l’administration, que les déchets engendrés par les produits qu’elles fabriquent, importent ou exportent peuvent être éliminés conformément à la réglementation. L’administration peut leur réclamer toutes informations utiles sur les modes d’élimination et les conséquences de leur mise en œuvre » (art. L. 541-9 du Code de l’environnement). Il convient par conséquent de s’assurer que l’activité des prestataires de services intervenant dans le transport (ou le négoce, le courtage, l’élimination…) des déchets soit déclarée auprès de la préfecture (déchets non dangereux) et autorisée dans le cas de déchets dangereux devant faire l’objet d’un traitement spécifique et adapté. De plus en plus, des filières spécifiques sont mises en place pour différentes familles de déchets : huiles, pneus, piles, D3E (déchets d’équipements électriques et électroniques), ampoules basse consommation… Et il est bien sûr interdit de mettre en décharge des produits qui peuvent être recyclés. Rappelons enfin que les collectivités locales ne sont pas tenues de se charger de la collecte et de l’élimination des déchets des entreprises, commerces et artisans.

À mesure que des filières spécifiques se mettent en place, il devient donc nécessaire de mettre à la disposition des collaborateurs des collecteurs adéquats : plus question de jeter pêle-mêle piles, cartouches, papiers et canettes dans une même corbeille. En fonction de l’activité, il faudra investir dans de petits bacs de stockage ou dans de grands conteneurs, et que chacun puisse clairement comprendre où se débarrasser d’une chose ou d’une autre. Il peut être nécessaire, en fonction des volumes à traiter, de mettre un certain nombre de petits collecteurs (inutile de descendre trois étages pour se débarrasser

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Organiser le tri

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d’une pile ou d’une cartouche…), en prenant soin que le personnel chargé en interne de la précollecte respecte la filière adéquate pour chaque matériau. Certains prestataires de collecte mettent des contenants à la disposition de leurs clients, gratuitement ou non – cela est négociable. Le coût de la collecte varie lui-même en fonction des volumes, de la distance, du nombre de rotations, de la valeur marchande…, et s’ajoute à la TGAP (taxe générale sur les activités polluantes), calculée sur la base du tonnage de déchets banals et dangereux. Réduire la toxicité

Contrôler sa production de déchets passe aussi, dans la mesure du possible, par la réduction de la toxicité : comme pour la Papeterie du Doubs1, qui recycle son eau, des solutions existent dans de nombreux cas. Elles demandent souvent des investissements, mais la mise en place de solutions innovantes est toujours valorisante pour l’entreprise, et permet souvent d’anticiper une réglementation… Le salon Pollutec (salon international des équipements, des technologies et des services de l’environnement) fournit à cet égard nombre d’informations utiles.

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Vendre ses déchets

La notion de la valeur des déchets progresse. « Pourquoi continuer à enfouir des tonnes et des tonnes de matière plastique, alors même que la hausse du prix du pétrole fait qu’il coûte moins cher de recycler que de produire de la matière neuve ? » interrogeait Alain Maubert, directeur général d’Eurocompound (production de matières plastiques) dans Le Monde2 en décembre 2006. Par ailleurs, l’explosion des prix des matières premières a fait le bonheur des ferrailleurs et autres spécialistes du traitement des déchets : entre 2005 et 2006, le chiffre d’affaires des professionnels français de la récupération, du recyclage et de la valorisation a fait un bond de 1. Cf. encadré page 125. 2. Édition du 5 décembre.

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27 %. En 2007, le chiffre d’affaires annuel de la filière (quelque 2 450 entreprises employant 32 800 personnes) s’élevait à 10,8 milliards d’euros, indique le site de Federec1 (www.federec.org).

Alors que le monde s’inquiète d’une raréfaction sinon d’un épuisement des ressources, des chercheurs et des opérateurs suggèrent que les décharges pourraient constituer une source, jusqu’ici négligée, d’énergie et de matières premières. Cette question a été au centre de la première conférence internationale consacrée au landfill mining (« exploitation des décharges »), organisée à Londres, le 9 octobre 2008. L’idée n’est pas nouvelle : les matières organiques contenues dans une décharge de la région de Tel-Aviv en ont été extraites en 1953 pour enrichir les sols de plantations de citronniers, rapporte Gilles Van Kote dans Le Monde du 14 octobre 2008. L’augmentation récente du prix de l’énergie comme celui des matières premières a toutefois relancé l’intérêt pour ce type d’exploitation jusqu’ici surtout réservée aux déshérités. Les décharges constituent, en effet, un gisement considérable de métaux et de plastiques recyclables, ainsi que de matières pouvant être utilisées comme combustibles. Les participants à la conférence de Londres ont évoqué la présence de 3,2 milliards de tonnes de matériaux recyclables enfouis en décharge entre 1975 et 2015, rien qu’au Royaume-Uni. Quant aux décharges américaines, elles contiendraient à elles seules quelque 400 millions de tonnes d’acier… Mais l’exploitation de tels sites présente aussi quelques inconvénients : manque d’informations sur le contenu, risques sanitaires, environnementaux et de sécurité, en cas de présence de déchets dangereux. Ce qui fait dire à Philippe Belbèze, de Veolia Propreté : « Le message à retenir est celui-ci : continuons à trier et à recycler pour ne pas avoir à aller chercher un jour des ressources que nous aurons laissé partir en décharge. »

1. Organisation fédérale qui regroupe les acteurs essentiels de la récupération, du recyclage et de la valorisation en France avec 1 100 entreprises adhérentes.

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Vers le landfill mining ?

Les principales actions à entreprendre

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La chaîne de restauration rapide McDonald’s a lancé, à l’automne 2008, une campagne publicitaire sur ses économies de matières premières : eau, huile de friture, etc. Ce dernier « déchet » est emblématique de l’évolution en cours. Aux États-Unis, les vols d’huile de friture usagée se multiplient. De l’écologiste, qui l’utilise comme carburant, au voleur professionnel, qui la revend au premier, en passant par les recycleurs, les intéressés semblent être nombreux et les restaurants spécialisés dans la friture – qui se font aujourd’hui des revenus supplémentaires en vendant cette huile – sont désormais obligés de mettre leur conteneur sous clef : « L’huile de friture est devenue de l’or. Et il y a à peine un peu plus d’un an, j’étais obligé de payer quelqu’un pour m’en débarrasser », rapporte un restaurateur américain1. Son prix est passé de quelque 15 cents le litre en 2000 à 66 cents fin mai 2008… En France, cette huile fait également l’objet d’un nouveau marché avec l’association Roule ma frite, qui fait à la fois la collecte et la promotion de l’huile de friture comme carburant voiture, suivant les initiatives de valorisation existant déjà en Allemagne, en Suisse, en Autriche…

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Dans un article titré « L’automobile, mine d’or et de matières premières »2, Julien Pompey explique que, « boosté par la hausse des matières premières, le recyclage apparaît comme un gisement inépuisable alors que, selon l’Observatoire des matières premières, il ne resterait plus, au niveau mondial, et au rythme de consommation actuel, que quarante années de réserves de cuivre, vingt-huit années pour le plomb et seulement dix-sept années pour l’étain ». Si les ressources s’épuisent, le recyclage apparaît bien comme une solution à la pénurie. Lorsque les déchets sont collectés à fin de recyclage, le prestataire de collecte peut payer ceux-ci en fonction de leur valeur économique, de la quantité collectée, de la qualité du tri et, bien sûr, de la conjoncture économique : les cours des matériaux destinés au recyclage dépendent de la demande et les variations saisonnières et annuelles peuvent être importantes. Ainsi, les prix du vieux papier « ont chuté de 1. Article du New York Times rapporté dans le supplément du Monde du 7 juin 2008. 2. Le Monde, édition du 9 octobre 2008.

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45 % depuis 2001 et ils ont cédé 15 % sur la seule année dernière », indiquait en mars 20051 Jean-Luc Petithuguenin, fondateur et PDG de Paprec2, l’un des grands spécialistes du recyclage, expliquant que les grands groupes intégrés scandinaves ou nord-américains utilisaient de plus en plus de vieux papiers pour leur propre production, au point qu’on trouvait sur le marché, « pour la première fois à l’échelle mondiale, davantage de papier issu du recyclage que de fibre vierge ».

1. La réalisation d’un « diagnostic déchets ». Une visite de l’entreprise identifiera la quantité et les différents types de déchets produits, par quels processus ils le sont, quels collecteurs sont utilisés et où ils sont disposés, les lieux d’enlèvement par les prestataires externes de collecte… Le recueil des données relatives aux déchets doit comprendre les informations fournies par les bons d’enlèvement, les factures des prestataires, les bordereaux de suivi d’enlèvement, les avis d’imposition des taxes et redevances d’enlèvement. Une fois réalisé, ce diagnostic permet de vérifier la conformité aux exigences réglementaires, de définir de meilleures modalités de gestion et de choisir les prestataires qui permettront le mieux d’atteindre les objectifs fixés. 2. L’organisation du projet commencera par une identification des objectifs (mise en conformité, optimisation des coûts…), avec, idéalement, la mise en place d’une équipe réunissant des compétences managériales, organisationnelles, techniques, d’achat et de communication. Le responsable de cette équipe (personne juridiquement responsable du respect de la réglementation sur les déchets dans l’entreprise ou un site donné) travaillera avec un chef de projet chargé de la coordination, et un responsable technique qui, avec un responsable d’achats, assurera : – une veille sur la gestion des déchets et son évolution ; 1. Les Échos, édition du 21 mars 2005. 2. À l’origine spécialisé dans le recyclage des vieux papiers, le groupe Paprec a étendu et diversifié son offre depuis 1995, couvrant désormais l’ensemble de la palette des métiers du recyclage.

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Mise en place de la démarche de gestion des déchets

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– le suivi de la réalisation des aménagements et celui des prestataires assurant l’enlèvement des déchets ; – la rédaction et le suivi des contrats avec les prestataires d’enlèvement et de traitement des déchets ; – le choix du matériel pour la collecte en interne des déchets. De son côté, un chargé de communication mettra en œuvre un plan pour la sensibilisation et l’information des collaborateurs, qui devront connaître dès le départ le projet et l’évolution de son avancement. Si vous fabriquez des produits, il faudra aussi penser à leur fin de vie et notamment guider vos consommateurs clients pour les aider à mieux la gérer. L’organisation du projet implique également de prévoir un budget, en tenant compte des coûts initiaux supportés par l’entreprise (taxes et redevances payées à la commune, coûts éventuellement refacturés par certains prestataires, location ou achat des collecteurs, prestations de collecte…), et un calendrier, qui fixera de façon précise les étapes ainsi que les ressources humaines nécessaires à ces différentes étapes de la démarche (en fonction du type de déchets, de leur hétérogénéité, de la taille de l’entreprise…). 3. Un plan d’action sera alors arrêté, pour mettre les pratiques de l’entreprise en conformité avec la réglementation, valoriser tous les déchets qui peuvent l’être (dans une perspective économique et environnementale) et optimiser l’ensemble du dispositif. Diverses actions doivent être envisagées, à commencer par celles qui permettront de réduire à la source la production de déchets (acheter des produits de bonne qualité, ayant une longue durée de vie, utiliser des batteries rechargeables plutôt que des piles, imprimer le papier en recto verso, préférer l’archivage électronique à l’archivage papier…). De même, des mesures devront permettre la mise en place du tri et de la séparation de certains déchets précédemment mélangés : installation de collecteurs spécifiques, en particulier pour les déchets dangereux (batteries, cartouches et toners d’imprimantes, ampoules basse consommation…), et des conteneurs pour stocker les déchets triés en vue de leur enlèvement vers des filières adaptées. Ce plan d’action doit aussi prévoir, bien sûr, la sensibilisation des collaborateurs et leur

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information concernant les nouvelles modalités de tri des déchets au sein de l’entreprise : l’adhésion des équipes sera déterminante pour la réussite du projet.

Le contrat d’enlèvement avec le prestataire de collecte doit : – spécifier le type de déchets concernés ; – contenir une copie de l’agrément du prestataire pour son activité (transport, négoce…) ; – exiger la signature d’un bon d’enlèvement (précisant la nature et le volume ou le poids des déchets collectés) par le prestataire d’une part et le « responsable déchets » de l’entreprise de l’autre ; – préciser le mode de traitement des déchets collectés (enfouissement, valorisation énergétique, recyclage…) ; 1. Le réseau Envie, qui emploie des personnes en difficultés sociales et professionnelles, s’est positionné, dès la fin des années 1990, dans le traitement des D3E et s’est implanté en 2003 à Lesquin, où il exploite, en association avec Coolrec, une plate-forme de démantèlement de réfrigérateurs.

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4. La consultation des prestataires de collecte chargés de l’enlèvement des déchets permettra d’obtenir des conseils techniques, en particulier pour le tri et le choix du matériel et éventuellement en matière de réglementation. Elle peut aussi vous inciter à mettre vos prestataires en concurrence afin de trouver celui qui vous proposera la meilleure qualité de service au meilleur prix (dans le respect de la réglementation). Ces prestataires peuvent être des sociétés ou des associations humanitaires. (La France a en effet imposé aux éco-organismes de travailler avec les entreprises d’insertion qui sont traditionnellement actives dans le recyclage. C’est ainsi qu’Emmaüs ainsi que le réseau Envie1 ont été intégrés dans le circuit d’Éco-systèmes…). Les prestataires chargés du nettoyage des locaux doivent être informés des nouvelles modalités de collecte des déchets et leur contrat éventuellement revus de façon à inclure des clauses relatives au tri des déchets des locaux dans lesquels opèrent les personnes chargées du nettoyage. Mieux ces personnes sont associées au projet, meilleur sera le tri…

Les principales actions à entreprendre

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– présenter la garantie de valorisation des matériaux collectés ; – préciser le prix de rachat par le prestataire des matériaux triés (avec l’indice sur lequel ce prix est indexé, et la référence à partir de laquelle ce prix est estimé) ; – comporter éventuellement la garantie de confidentialité pour certains types de papiers (broyage) ; – exiger un reporting mensuel par le prestataire des quantités enlevées, traitées ou rachetées. 5. Le choix du matériel de collecte : le prestataire peut mettre à votre disposition des conteneurs de précollecte (corbeilles, bacs, poubelles, bennes…) ou au moins vous éviter des erreurs du fait de son expérience en matière de tri.

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6. La mise en place d’une signalétique claire permettant à chacun de savoir quel déchet déposer dans quel collecteur et où sont situés ces collecteurs. Cette signalétique s’effectue au niveau des collecteurs eux-mêmes (couleurs et/ou pictogrammes présentant le type de déchets reçus), mais aussi par affichage des instructions de tri (panonceaux rappelant les bonnes pratiques et plans indiquant les emplacements des collecteurs). 7. La sensibilisation des collaborateurs, essentielle, implique une action de communication interne sur la démarche. Il est très important de rappeler les finalités environnementales et économiques de la contribution des collaborateurs pour entretenir leur motivation et éviter les erreurs de tri. Mais cette étape est aussi importante parce qu’elle va susciter de leur part des suggestions d’amélioration et de réduction à la source. Des actions de sensibilisation doivent par conséquent être mises en place du lancement du projet à l’adoption de nouvelles modalités de tri. De plus, la contribution active doit être encouragée par une communication régulière sur les résultats obtenus. La mise en place d’une « boîte à idées » permettra de recueillir les suggestions. 8. Le suivi de la démarche, concrétisé par un reporting, intéressera toutes les parties prenantes. Le suivi permet aussi : – de surveiller le budget déchets ;

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– de s’assurer de (et pouvoir prouver) la conformité à la réglementation ; – de suivre les progrès de la gestion des déchets dans la durée (un état régulier, mensuel et annuel, des quantités collectées par type de déchets permet de suivre l’historique des quantités générées et valorisées) ; – d’identifier d’éventuelles dérives dans le respect des règles de tri et de collecte ; – d’apporter des informations pour le reporting développement durable de l’entreprise. Rappelons que toute remise d’un chargement supérieur à 100 kg de déchets « générateurs de nuisances » à un prestataire de collecte ou d’élimination doit impérativement être accompagnée d’un bordereau de suivi des déchets industriels (BSDI) qui précise la provenance, les caractéristiques, la destination, les modalités de collecte, transport, stockage et élimination des déchets dangereux. Le BSDI peut être demandé par l’administration. Adresses utiles

Les chambres de commerce et d’industrie (CCI) peuvent apporter un soutien technique (assistance relative à la gestion des déchets, réalisation de prédiagnostics déchets…) par le biais de leurs conseillers environnement. Le réseau des CCI a également mis en place une plate-forme d’échanges des déchets pour permettre aux entreprises de trouver des filières de valorisation pour leurs déchets, via Internet : www.bourse-des-dechets.fr. Que vous cherchiez du PEBD ou que vous vouliez vous débarrasser de D3E ou de sciure d’un quelconque matériau, vous pouvez soit consulter, soit passer une annonce.

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L’Ademe, Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, peut accorder des aides financières pour réaliser des études de faisabilité ou des aides à la R&D (pas d’aide à l’investissement ou aux travaux). Les adresses des délégations régionales sont sur le site www.ademe.fr.

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Les conseillers environnement des CCI locales peuvent aussi fournir les noms et adresses de prestataires de collecte de votre région. Certaines agences de l’eau accordent des aides financières aux entreprises productrices de déchets dangereux susceptibles de contaminer les eaux usées. Enfin, les collectivités locales peuvent aussi soutenir financièrement des projets contribuant à améliorer la gestion locale des déchets, en développant de nouvelles filières de traitement et de valorisation. Les transports et les PDE

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Si l’énergie est un poste sur lequel il est assez facile d’agir pour réaliser des économies à la fois sur les charges et sur les émissions de CO2, les transports constituent un volet « dérivé » (très consommateur d’énergie) qui, dans de nombreuses entreprises, vaut d’être soigneusement étudié. La contribution des transports aux émissions françaises de CO2 ne cesse d’augmenter depuis quarante ans : de 13 % en 1960, elle est de 27 % aujourd’hui, et on estime qu’elle devrait atteindre 34 % en 2010. Par ailleurs, les déplacements restent une source d’accidents et de mortalité très élevée en France (4 620 personnes tuées sur la route en 2007, soit en moyenne 13 par jour, et 103 201 blessés, dont quelque 4 400 blessés avec séquelles majeures). Enfin, les transports deviennent de plus en plus coûteux avec la hausse du prix du carburant. Aux Pays-Bas, « les embouteillages coûtent 2,5 milliards d’euros en heures non productives à l’économie néerlandaise. Ajoutés aux dégâts sur l’environnement, les coûts totaux pour la collectivité atteignent 7 milliards d’euros. Cette question ne doit pas seulement être du ressort des pouvoirs publics, mais elle doit aussi trouver des solutions du côté des chefs d’entreprise et des salariés », indiquait Piet Van Schijndel, directeur de Rabobank1.

1. Les Échos, édition du 27 mai 2008.

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Les entreprises qui opèrent dans le secteur des transports ont été les premières à se pencher sur la question : • en remplaçant leurs véhicules les plus gourmands en carburant par des véhicules plus sobres (et ce, d’autant que la nouvelle fiscalité sur les parcs de véhicules d’entreprise rend significativement plus intéressant le choix de petits modèles à faible consommation) ; • en réduisant au maximum les distances parcourues (les GPS sont à ce titre générateurs d’économie et les cartes de paiement, un moyen efficace pour connaître la consommation) ; • en diminuant enfin autant que faire se peut le volume et le poids de leurs chargements. Pour l’entreprise, une meilleure organisation des déplacements constitue un moyen efficace de réduire les consommations de carburant et son impact sur l’environnement, mais aussi de réduire les risques liés à la route et d’améliorer la qualité de vie des salariés et des riverains, spécialement en milieu urbain, où les voitures particulières peuvent être responsables de 73 % du CO2 émis. Le principe consiste à « compenser » volontairement et financièrement l’émission d’un volume de gaz à effet de serre généré par une activité comme un déplacement en avion, en voiture ou en train, ou un séminaire professionnel. Vous calculez, par exemple, le volume de CO2 que vous coûte un déplacement Paris-Toulouse aller et retour en avion, vous multipliez par le prix de la tonne de CO2 (environ 20 euros en 2008 mais peut-être 80 à 120 euros en 2015, selon les spécialistes de la question). La somme ainsi calculée est ensuite reversée à un organisme qui l’utilisera pour financer des opérations visant à réduire le CO2 atmosphérique. Ces opérations se font souvent sous la forme de reforestation, de production d’énergie renouvelable ou encore d’amélioration de l’efficacité énergétique. Citons quand même quelques organismes, parmi les plus renommés, qui vous permettront de compenser votre carbone : le plus

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Les systèmes de compensation carbone

Les principales actions à entreprendre

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médiatique, Action Carbone1, de l’ONG GoodPlanet fondée par le célèbre photographe Yann Arthus-Bertrand ; le pionnier, CO2 Solidaire2 du très sérieux GERES ; Climat Mundi3. Tous proposent des services de compensation en ligne sur Internet. Parmi les idées originales en matière de compensation, on peut citer celle mise en œuvre par Claude Fussler4. Il propose aux touristes qui viennent séjourner dans ses gîtes de compenser le CO2 qu’ils ont émis pour venir de leur lieu de domicile. En échange d’une somme correspondante, il plante de nouveaux arbres qui porteront le nom de leur donateur. En espérant que ceux-ci reviennent régulièrement au gîte rural constater la pousse de leur arbre. Ou comment fidéliser ses clients tout en leur permettant de voyager « zéro émission »… Attention cependant, ne lâchons pas la proie pour l’ombre car ces initiatives, qui partent d’un bon sentiment, ne permettent pas de baisser réellement les émissions comme la planète en a bougrement besoin, mais tout juste de les maintenir à niveau. En effet, avec ce système de compensation volontaire, il n’est pas question de réduction des émissions grâce à des changements de comportements ou à l’utilisation de technologies énergétiquement efficaces. Vous ne devez pas oublier que la moins mauvaise tonne de carbone, c’est d’abord celle que l’on n’émet pas…

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Le Plan de déplacements d’entreprise (PDE)

Les entreprises qui emploient un large effectif sur un même site sont appelées à mettre en place des Plans de déplacements d’entreprise, ou PDE. Ceux-ci ont pour objectif d’optimiser les déplacements liés à leurs activités et de réduire l’usage du véhicule individuel (privé ou d’entreprise) au profit d’autres modes de transport : collectif, covoiturage, vélo… Ce type d’organisation a un 1. 2. 3. 4.

www.actioncarbone.org. www.co2solidaire.org. www.climatmundi.fr. Actuel directeur général de Caring for the Climate ; il gère aussi, avec son épouse, un ensemble de gîtes ruraux à Bras dans le Luberon.

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effet significatif et rapide sur la consommation de carburant – donc sur l’environnement – et réduit les risques routiers pour les collaborateurs. Il contribue aussi à développer l’image d’une entreprise responsable. Dans la région de Bruxelles, la mise en place d’un PDE est obligatoire pour tout organisme de droit public ou privé employant plus de 200 personnes sur un même site. Si, en France, une telle initiative est laissée à l’appréciation des employeurs, des obligations réglementaires pourraient se développer au niveau local.

Les bénéfices pour l’entreprise sont multiples : site plus accessible, stationnement facilité pour les salariés mais aussi pour les clients, les visiteurs, les fournisseurs, etc., relations avec les riverains améliorées en résultat de la réduction de la circulation, de l’encombrement, du bruit, de la pollution atmosphérique. Sans compter la santé des salariés qui peut être améliorée du fait de l’abandon de la voiture au profit d’un transport collectif : moins de risques, moins de stress, moins de pollution… et moins de retards et d’absentéisme au final. Une étude menée par Jean-Paul Morin, de l’Inserm1, et publiée en 2007 a en effet montré que la pollution à l’intérieur des véhicules peut atteindre des niveaux extrêmes et dangereux, particulièrement dans les bouchons. Et aux heures de pointe, les bouchons sont fréquents ! Nul ne contestera que commencer sa journée de travail 1. Unité 644 de l’Inserm de Rouen.

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Pour les entreprises qui n’ont pas encore lancé leur PDE, l’augmentation brutale du prix des carburants, qui s’est fait durement sentir sur les budgets des collaborateurs obligés de prendre leur voiture pour se rendre à leur travail, a créé une situation propice. Mais d’autres occasions peuvent se présenter, comme une réorganisation des horaires de travail, un déménagement, la mise en place d’un plan de prévention du risque routier professionnel, la nécessité de récupérer pour un autre usage une surface dédiée au parking, ou encore la mise en service d’une nouvelle ligne de transport collectif…

Les principales actions à entreprendre

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par un quart d’heure d’exposition régulière à la pollution automobile n’est pas la meilleure habitude à prendre pour préserver sa santé ! Les bénéfices du PDE peuvent également se ressentir en termes de réduction des charges, avec une baisse des défraiements kilométriques, des cotisations de Sécurité sociale ou des primes d’assurance liées, par exemple, au recul des accidents de la circulation des salariés (prévention du « risque trajet »). Accidents de trajets : cause principale des accidents du travail

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Un accident de trajet est un accident qui se produit à l’occasion d’un déplacement entre le domicile et le lieu de travail ou entre le lieu de travail et le lieu de restauration habituel. Il est considéré comme un accident du travail (art. L. 411-2 du Code de la Sécurité sociale), mais, du fait de l’absence de subordination pendant le déplacement, la prévention du « risque trajet » ne dépend pas d’une obligation légale. Le risque routier est cependant l’une des causes principales d’accidents graves et mortels du travail : près de la moitié des accidents mortels du travail dont sont victimes les travailleurs salariés sont des accidents de la route. En allongeant les distances entre lieu d’habitation et lieu de travail et en rendant la voiture quasi obligatoire, l’étalement urbain a augmenté le « risque trajet » : la distance moyenne parcourue quotidiennement est passée de 3-4 kilomètres dans les années 1960-1970 à une quarantaine aujourd’hui. Partenaires sociaux et pouvoirs publics proposent un Code de bonnes pratiques1 dont les préconisations peuvent être introduites dans le PDE : – limiter les déplacements des salariés ; – favoriser les moyens de transport collectifs plutôt que les moyens individuels ; – aménager les accès à l’entreprise ; – inciter les salariés à veiller au bon état de leur véhicule ; – aider les salariés à prendre la route dans les conditions les plus sûres possibles ; – informer et former les salariés.

1. http://www.risqueroutierprofessionnel.fr.

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Le lancement et la mise en œuvre du PDE permettent aussi de relancer le dialogue social en organisant la concertation autour d’un projet novateur et dynamique, et en impliquant les acteurs dans une démarche collective en faveur du développement durable.

Un diagnostic des déplacements doit apporter toutes les informations nécessaires sur les pratiques des collaborateurs en fonction de leur lieu d’habitation. Pour cela, il faudra identifier les principaux flux de déplacement domicile-travail, étudier l’accessibilité de l’entreprise pour les différents modes de déplacement (marche, vélo, transports collectifs, voiture…), les possibilités de stationnement à l’intérieur et au voisinage du site. Le diagnostic permettra d’établir un bilan à partir duquel on pourra décider s’il est judicieux de se lancer dans la démarche, et, si oui, de définir un plan d’action. Concrètement, il faudra alors commencer par constituer un groupe de travail avec un coordinateur (selon la taille de l’entreprise), et annoncer le projet : • aux collaborateurs, dont il doit réduire les dépenses de transport, améliorer la qualité de déplacement (moins de stress, de fatigue, de risques), réduire l’empreinte écologique, etc. ; • aux parties prenantes externes : elles vont de l’Ademe, qui peut vous apporter son soutien technique et financier, à la chambre de commerce et d’industrie, qui peut avoir un rôle de conseil, mais aussi, éventuellement, aider à regrouper plusieurs entreprises autour d’un PDE (cela peut, par exemple, vous donner plus de poids pour négocier une meilleure desserte avec les opérateurs de transports…), en passant par les collectivités locales (communes, conseils généraux, régionaux : près de neuf PDE sur dix se réalisent dans la zone d’influence d’un Plan de déplacements urbains ou PDU). Pour ces dernières, un PDE signifie une meilleure qualité environnementale, une meilleure qualité de l’air et une réduction des nuisances sonores. Au niveau des communes et des agglomérations, il faut aussi annoncer le PDE à l’Autorité organisatrice des transports (AOT, une convention ou une charte signée par l’AOT et le dirigeant d’entreprise faisant foi pour le remboursement de

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Les étapes de la mise en place d’un PDE

Les principales actions à entreprendre

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l’abonnement annuel aux transports collectifs), incontournable pour faciliter les aménagements et améliorer la desserte de votre site par les transports collectifs. Enfin, la Caisse régionale d’assurance maladie peut être de bon conseil pour le volet prévention du risque routier au travail. Éventuellement, on peut aussi recourir à des bureaux d’études pour la réalisation du diagnostic, la programmation des actions, le suivi du projet…

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La réalisation d’une enquête auprès des collaborateurs concernant leurs modes de déplacement et leurs attentes, la collecte et l’analyse des données sont essentielles. Un document de synthèse du diagnostic doit faire apparaître : • le coût des déplacements et du stationnement des salariés ; • les parts de chaque mode de transport existant au lancement du PDE ; • les difficultés et problèmes à résoudre pour une utilisation optimale de chaque mode de transport ; • les différents profils d’usagers ; • le potentiel de collaborateurs éligibles à chacun des modes de transport et la part que l’on peut envisager de convaincre d’utiliser un moyen de transport alternatif ; • le potentiel de CO2 et de kilomètres susceptibles d’être économisés par la mise en œuvre du PDE pour chaque mode ; • le maillage des transports collectifs et l’évolution prévisible du Plan de déplacements urbains. La réussite de votre PDE dépend de la qualité de l’analyse préalable ! C’est elle qui va vous permettre d’identifier les solutions possibles et d’élaborer un plan d’action adapté. Le plan d’action doit fixer : • un objectif chiffré en termes de report modal (utilisation de voiture particulière vers les modes de déplacement alternatif ) ; • un agenda des mesures à court, moyen et long terme ; • les moyens à mettre en œuvre et les ressources financières nécessaires ;

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• les indicateurs de suivi du projet (taux de report modal, estimations de la diminution des émissions de CO2…). Enfin il est utile de prévoir, dès le départ, les actions à mettre en œuvre pour faire vivre le plan dans la durée puis de définir les modalités de reporting. Mais le plan d’action doit avant tout répondre à la question : quelles actions concrètes mettre en place en réponse au diagnostic réalisé ? Voici quelques suggestions : • développer le télétravail, l’audioconférence, la visioconférence, qui réduisent le nombre des déplacements ; • aménager les horaires de travail ; • organiser le stationnement ; • mettre en place une navette d’entreprise ; • participer financièrement aux abonnements des collaborateurs aux transports collectifs, et proposer la vente des titres de transport sur le lieu de travail ; • adapter l’offre de transports collectifs (desserte, fréquence, tarifs…) par le biais d’un partenariat avec un opérateur de transports ; • inciter les salariés à s’équiper en véhicules propres à l’instar de l’assureur Swiss Ré1, qui subventionne l’acquisition par ses propres salariés de voitures propres, à hauteur de 3 500 francs suisses ; • proposer des formations à l’éco-conduite ; • favoriser le vélo, la marche… ; • mettre à disposition des salariés une flotte de vélos en libreservice pour les déplacements au sein du site de l’entreprise. 1. Les Échos, édition du 1er février 2007.

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• organiser le covoiturage ;

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Le covoiturage, une solution à développer Le covoiturage est déjà en plein développement et des sociétés proposent aujourd’hui aux entreprises l’organisation de services de covoiturage « interne », à l’instar de www.123envoiture.com, qui met en contact, pour un trajet donné, les propriétaires de voiture et les personnes souhaitant être transportées. 123envoiture.com travaille ainsi avec une quarantaine d’entreprises (dont ADP, la Macif, Le Parisien, Radio France…) et de collectivités locales (Val-d’Oise, Essonne, Seine-Saint-Denis, Tours, Bourges…) qui utilisent ce site sous leur propre bannière. « Imaginez un salarié qui fait chaque jour 50 kilomètres pour aller à son travail et en revenir, et ce, deux cent vingt jours par an. Avec une voiture consommant 7 litres aux 100 kilomètres il dépense 1 500 euros par an rien qu’en carburant. S’il partage sa voiture avec un passager, il réduit sa facture par deux, et par trois s’il emmène deux personnes », fait valoir Arnaud Sarfati1, qui a créé ce site de covoiturage en 2002.

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Aéroports de Paris (ADP) utilise ainsi son propre site Internet de covoiturage2, mis en place en partenariat avec l’Association pour le développement économique du pôle Orly-Rungis (Ador), et qui s’adresse aux salariés des 4 000 entreprises du secteur OrlyRungis (Val-de-Marne) ainsi qu’aux 700 sociétés implantées sur l’aéroport de Roissy (plus de 140 000 salariés) : « Sur les aéroports, 90 % des salariés viennent au travail en voiture et seulement 2 % pratiquent le covoiturage. Il fallait réagir », explique François Rubichon, directeur général délégué d’ADP, qui a calculé que, si l’objectif de 5 % d’utilisateurs réguliers du covoiturage est atteint, quelque 3 500 à 4 000 tonnes d’émission de CO2 seront évitées chaque année. « Le site [Internet] met en rapport les personnes en fonction du parcours qu’elles souhaitent effectuer mais aussi de leurs horaires. Surtout, pour éviter tout problème de sécurité, nous effectuons un contrôle de chaque nouvelle inscription, en vérifiant notamment qu’elle appartient bien à une société partenaire du site », explique Arnaud Sarfati, également fondateur en 2003 de l’entreprise ••• 1. Le Parisien, édition du 11 février 2008. 2. Le Parisien, édition du 1er novembre 2008.

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••• Green Cove Ingénierie, concepteur du site, et qui propose des services de covoiturage pour le grand public, les entreprises, les collectivités, les administrations, et même pour l’événementiel…

La marche et le vélo, des modes alternatifs… qui préservent la santé

Encourager le recours au vélo ou à la marche impose parallèlement quelques aménagements assurant la sécurité : d’une part, la création de pistes cyclables protégées pour l’accès à l’entreprise (à négocier avec les collectivités locales), d’autre part, éventuellement, des pistes et des chemins piétonniers sur le domaine même de l’entreprise, ainsi que des parkings abrités et des vestiaires avec douche.

Parmi les mesures incitatives de son PDE, STMicroelectronics a décidé de fournir un kit de confort et de sécurité (brassards fluorescents, casques, éclairages…) aux cyclistes, de leur aménager un garage à vélos avec douches, et d’aider à l’achat d’un vélo électrique. Le responsable de ce plan a négocié avec la ville le prolongement des pistes cyclables jusqu’au site de STMicroelectronics. Aujourd’hui, environ 14 % des déplacements se font à vélo. À Grenoble également, le programme Accès Cible vise à améliorer l’accès de son site (70 hectares, inclus dans le polygone scientifique). Mis en place par le CEA en concertation avec l’ensemble des acteurs du site, il remédie, chaque matin, aux longues files de voitures des quelque 3 000 à 4 000 salariés y travaillant. Ainsi ont été aménagés une zone piétonnière équipée de transports « doux » comprenant une navette interne, et un chemin piétonnier couvert à partir du

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En juin 2008, STMicroelectronics a reçu le prix de l’European Platform on Mobility Management (Epomm), pour l’excellence du Plan de déplacements d’entreprise de son site grenoblois, mis en place dès 1999 et qui a permis de convaincre 54 % des quelque 2 400 salariés du site (un effectif constitué à 80 % de cadres et à 75 % d’hommes, deux catégories plus particulièrement portées sur la voiture individuelle) d’utiliser un mode de transport alternatif plutôt que leur propre voiture pour se rendre à leur travail (contre 20 % au lancement de ce PDE, il y a huit ans).

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Les principales actions à entreprendre

parking central. Une flotte de vélos a également été mise à la disposition des salariés. Mais, surtout, l’entreprise prend désormais en charge une partie des frais de transport collectif de ses salariés. Un service de covoiturage a été mis en place par le biais d’Internet, et, comme dans le cas de STMicroelectronics, le PDE du CEA favorise l’utilisation du vélo personnel avec la distribution de kits de sécurité – associés à des actions de sensibilisation à la sécurité – et l’entretien des vélos dans un garage dédié et gratuit. L’amélioration de la desserte de l’ensemble du polygone scientifique (300 hectares) est en cours, avec une extension du tramway et la mise en place d’un RER routier de bus qui auront une priorité absolue sur l’ensemble du réseau pour passer d’une vallée à l’autre. Enfin, un accès à pied depuis la gare doit être aménagé tandis qu’à l’intérieur du polygone des navettes et de petits véhicules utilitaires devraient rouler à l’électricité ou à l’hydrogène, produit à partir de panneaux photovoltaïques. Marche, vélo, transports collectifs, covoiturage…, les efforts des salariés pour rendre opérationnel et efficace le PDE doivent être reconnus. Offrir une allocation transport aux salariés qui ne stationnent pas sur le parking automobiles de l’entreprise, des places réservées aux « covoitureurs », des bornes électriques pour ceux qui se sont équipés de voitures propres… sont des gestes motivants qui contribueront à assurer la pérennité de votre PDE.

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Écologique mais lent à démarrer : le télétravail En France, le télétravail ne concerne encore que 6 % de la population active contre 13 % en moyenne pour l’Europe et 25 % aux Pays-Bas ou aux États-Unis. Pourtant, on estime que ce mode de travail pourrait générer pour l’entreprise jusqu’à 30 % de gain de productivité, sans parler de l’amélioration de la qualité de vie des salariés. Mais le télétravail implique une révolution en termes de management, et bien sûr, l’existence d’un réseau, ce qui le rend encore impossible dans certains villages « reculés ». Aux Pays-Bas, où sévissait en 2007 un taux de chômage à 4,5 % et où des offres d’emploi ne trouvent pas preneur, les employeurs •••

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••• craignent que leurs salariés ne démissionnent pour trouver un emploi plus près de chez eux, ou offrant des horaires plus flexibles ; la mobilité géographique des salariés est quasiment devenue une cause nationale. Pour Bas Boorsma, responsable du Connected Urban Development (CUD, créé par le géant californien de l’informatique et des réseaux Cisco) à Amsterdam, le télétravail « contribue à réduire l’énorme congestion automobile autour d’Amsterdam. Or une diminution de 20 % du trafic, c’est 40 % de CO2 en moins. Il est aussi intéressant pour les salariés, dont il améliore la qualité de vie, que pour les entreprises : les banques ont calculé que le poste de travail d’un salarié leur coûte 15 000 euros par an. Dans le smart work center, c’est moitié moins ». Le CUD est un programme international visant à démontrer par des expériences pilotes que les réseaux informatiques dans des smart work centers peuvent faire baisser la consommation énergétique et les émissions de gaz carbonique des villes, tout en contribuant à leur développement économique et social. Les smart work centers sont des immeubles de bureaux décentralisés, partagés et hyper-connectés (crèche et restaurant d’entreprise intégrés), qui rapprochent les bureaux des salariés : des postes de travail y sont loués aux entreprises et aux administrations, qui les partagent de manière souple entre leurs salariés, évitant à ceux-ci, certains jours ou aux heures de pointe, de longs trajets vers le centre-ville. Une dizaine de centres similaires sont en préparation dans l’ouest des Pays-Bas, dont le réseau routier est un des plus saturés d’Europe.

Aux États-Unis, une étude publiée par le Consortium Consumer Electronic Association1 indique que les quelque 3,9 millions de salariés travaillant chez eux au moins un jour par semaine économisent 3,2 milliards de litres d’essence par an, soit une économie de 14 millions de tonnes d’émissions de CO2 : l’impact de 2 millions de voitures. Le télétravail permettrait également d’économiser de 9 à 14 milliards de kilowattheures d’électricité par an, soit la consommation d’un million de foyers étatsuniens…

1. La Tribune, édition du 31 octobre 2007.

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Au Japon, le géant Matsushita Electronic Industrial (330 000 salariés dont 76 000 au Japon même) a sauté le pas en avril 2007 avec un programme de télétravail basé sur le volontariat, qui concerne près de 30 000 personnes, des cadres essentiellement, qui travailleront chez elles un à deux jours par semaine.

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Notons qu’au stade de l’élaboration du plan d’action, la concertation avec le personnel et la consultation des partenaires sont encore des étapes obligées et qui peuvent faire émerger des solutions originales et adaptées.

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De plus, certaines de ces actions peuvent éventuellement exonérer l’entreprise de tout ou partie du versement transport pour les employeurs des secteurs public et privé qui emploient plus de neuf salariés en région parisienne ou dans le périmètre d’une AOT et qui sont assujettis à cette contribution, destinée à financer les transports en commun (le versement transport est recouvré par les Urssaf, lesquelles sont chargées de le reverser aux AOT). Si l’essentiel des actions d’un PDE concerne les déplacements domicile-travail des salariés, il est utile dans certains cas d’envisager comment réduire les déplacements. Ceux liés à l’utilisation des services courants (restauration, garde d’enfants, formalités administratives, services postaux, bancaires…) sont générateurs de perte de temps et conduisent souvent à préférer la voiture particulière, qui permet le « porte-à-porte ». Afin de diminuer ce type d’allées et venues en centre-ville, STMicroelectronics a équipé des locaux en bornes Internet permettant l’accès à diverses administrations, et d’un service postal pour l’expédition des lettres personnelles. L’entreprise a, par ailleurs, élargi ses capacités de restauration, cafétéria et cantine. PricewaterhouseCoopers, de son côté, a renoncé aux navettes organisées, qui ne correspondaient jamais aux besoins de ses salariés, pour mettre en place une conciergerie d’entreprise qui facilite leur quotidien et les aide dans leur gestion du temps. Les crèches d’entreprise, entre autres multiples avantages, contribuent également à réduire le déplacement. La solution peut aussi passer par un rapprochement des salariés de leur entreprise. Un sondage1 indique que 91 % des entreprises 1. Sondage réalisé à l’automne 2007 auprès de 330 chefs d’entreprise, DRH et représentants du personnel par l’Institut de la ville en mouvement et Liaisons sociales. Rapporté par Les Échos du 12 février 2008.

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Également intéressante, l’initiative de Dominique Laure, patron de Laure Transport1, société de transport installée à Saint-Étienne-deMontluc (Loire-Atlantique), qui, face aux difficultés de ses collaborateurs2, et jugeant qu’une augmentation des salaires pèserait trop lourdement sur le budget de l’entreprise, a trouvé le moyen, par le biais d’un achat groupé, de proposer une Clio III TDI neuve à cent de ses salariés pour 1 euro par jour (250 euros par an), assurance et entretien compris ; le carburant restant à la charge du salarié, qui a la jouissance totale du véhicule pour sa vie privée comme professionnelle. Pour que cet avantage ne soit pas imposé au salarié, le bénéfice de la voiture n’est pas rattaché au contrat de travail, mais à un contrat de service, renouvelable chaque mois, entre l’entreprise et ses 1. La Croix, édition du 21 mai 2008 et Libération, édition du 22 septembre 2008. 2. Éloignés à 30 ou 50 kilomètres des villes, les salariés ont très vite été rattrapés par le coût des transports. Ainsi, chaque ménage devait dépenser environ 2 300 euros pour un petit véhicule et… 1 200 à 1 300 euros de carburant chaque année.

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reconnaissent que leur personnel exprime des difficultés de déplacement travail-domicile, et 87 % des difficultés de logement et de garde d’enfants. Or, les salariés qui arrivent fatigués par de longs trajets, ou sont souvent absents à cause de leur éloignement (sans compter, le cas est de moins en moins rare, ceux qui n’ont pas de logement du tout et dorment dans leur voiture ou dans la rue), ne sont pas des plus productifs. Cela conduit de plus en plus d’employeurs à mettre en œuvre des mesures visant à aider leurs collaborateurs à se loger à proximité de leur lieu de travail, ou dans une zone bien desservie. ADP a ainsi mutualisé des ressources avec quelque 700 autres sociétés de la zone de Roissy (75 000 salariés au total) pour recourir aux services de l’association Comité Habitat qui recense les demandes de logements, informe les salariés, loge les nouveaux arrivants… À plus petite échelle, c’est le directeur d’un supermarché Leclerc de la banlieue de Saint-Nazaire (Loire-Atlantique), qui, afin de réduire le temps de transport et l’impact de l’augmentation du prix des carburants pour ses salariés, a décidé de faire construire pour eux un immeuble de 17 à 19 logements sur un terrain proche du magasin.

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salariés : la voiture est facturée 5 euros de location à la journée et un contrat publicitaire (le logo de la société apposé sur chaque véhicule) en paye quatre. Une solution qui a permis de faire baisser rapidement absentéisme et turn-over : « Jusqu’à présent, les chauffeurs avaient tendance à démissionner pour des peccadilles, mais aujourd’hui, je les fidélise. J’ai même recruté huit personnes supplémentaires en ayant eu pour la première fois le choix », raconte le chef d’entreprise. Mais aussi, très certainement, les émissions de CO2, comme le suggère le commentaire d’un jeune salarié : « À mon âge, à 24 ans, on n’a guère les moyens d’acheter une voiture neuve. En plus elle consomme peu par rapport à ma vieille Peugeot 306, qui datait de 1994 et commençait à me coûter cher en entretien. Ça donne envie de rester dans l’entreprise. » Sachant, bien sûr, qu’une petite voiture neuve pollue infiniment moins qu’une voiture de 15 ans ! Mais aussi : le bilan carbone, l’éco-conception et la préservation de la biodiversité… Le bilan carbone s’applique désormais à « tout ce qui bouge », mais aussi à tout ce qui se vend ou s’achète. Le site Défi pour la Terre de Nicolas Hulot proposait à chacun de réaliser son bilan carbone personnel. Le groupe de distribution Casino affiche ce bilan pour 3 000 produits de sa marque par un étiquetage informant le consommateur des émissions de CO2 induites par la fabrication de l’emballage, le recyclage, le nombre de kilomètres parcourus par le produit. PricewaterhouseCoopers-Ecobilan et MPG ont élaboré un outil de mesure de l’impact environnemental d’une campagne publicitaire prenant en compte les émissions de CO2 et de déchets, la consommation de ressources non renouvelables, etc., tout au long du cycle de vie d’une publicité sur différents supports. Si, en juillet 2007, le gouvernement a demandé à ses ministères de réaliser leur propre bilan, les entreprises sont de plus en plus nombreuses à se pencher sur le bilan carbone lié à leur activité. Un bilan qui sera sans doute obligatoire après l’adoption de la loi Grenelle II. Ainsi, le bilan carbone est dans l’air du temps, et il est utile : c’est lui qui vous permet de connaître le niveau de vos émissions de dioxyde de carbone, d’identifier les activités les plus « polluantes »

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et éventuellement d’apporter des corrections pour les réduire, en particulier dans la perspective d’une énergie carbonée rare et chère. Il permet aussi de devancer des obligations réglementaires (projet de taxe carbone à l’échelle européenne). Il constitue par ailleurs un outil de communication à l’adresse des parties prenantes, de plus en plus intéressées par le niveau d’implication des entreprises dans la lutte contre le changement climatique. Jean-Marc Jancovici, ingénieur-expert en climat énergie, a développé pour l’Ademe une méthodologie dont il précise les détails sur son site1, permettant de comptabiliser (à partir de données facilement disponibles) les émissions de gaz à effet de serre (exprimées en équivalent carbone ou en équivalent CO2) induites par l’ensemble des activités. Renseignez-vous auprès de l’Ademe pour vous lancer dans cette opération.

• Vous pouvez décider de réaliser ce bilan en interne ou en externe : – en interne, la tâche sera confiée à un chef de projet formé à la démarche (l’Ademe délivre une formation spécialement formatée pour les futurs prestataires en diagnostics bilan carbone, qui s’adresse également aux intervenants des entreprises pour une application en interne de la démarche) ; – en externe, la mission sera assurée par un cabinet de conseil habilité par l’Ademe2. Cette dernière solution permet de bénéficier de l’expertise d’ingénieurs expérimentés, d’obtenir des aides financières et offre aussi l’avantage d’un regard externe. Dans les deux cas, il sera nécessaire de réunir les informations les plus précises concernant les facteurs d’émission de gaz à effet de serre : transports (fret, déplacement des collaborateurs…), chauffage, énergie, procédés industriels, activité d’emballage, cycle de vie des produits, déchets… En cas d’incertitude, des ordres de grandeur peuvent être obtenus à partir du Guide des facteurs 1. http://www.manicore.com/missions/bilan_carbone.html. 2. La liste est disponible sur le site de l’Ademe (www2.ademe.fr).

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Comment réaliser son bilan carbone ?

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d’émission de l’Ademe1. Par ailleurs, celle-ci fournit un tableur Excel prêt à l’emploi pour effectuer le calcul des émissions, comparer entre elles les émissions d’une année sur l’autre et évaluer le potentiel de diverses actions de réduction. • Cette collecte d’informations permet de rapidement définir puis d’entamer une dynamique de réduction des postes d’émission prioritaires. Les émissions de gaz à effet de serre résultent majoritairement de l’utilisation de combustibles fossiles, leur réduction se traduit par des gains à long terme sur les consommations énergétiques. • Au cas où aucune réduction d’émissions n’est viable économiquement sur les sites de production, vous pouvez, par exemple, choisir d’atteindre la neutralité carbone pour un produit ou un site (qui peuvent être labellisés « carbon neutral »), par « compensation », c’est-à-dire par l’achat de réductions d’émissions vérifiées et certifiées ou la réalisation de projets de réductions équivalentes au niveau d’émissions que vous souhaitez compenser. C’est ce qu’ont choisi de faire les compagnies d’aviation qui proposent à leurs passagers un supplément « CO2 » visant à compenser les émissions inévitables liées à leur transport aérien. Les sommes collectées servent à financer des projets de développement propres dans les pays du Sud.

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• Restez vigilant, fixez des objectifs chiffrés : les obligations réglementaires en matière d’émissions de gaz à effet de serre risquent de devenir au fil du temps de plus en plus contraignantes. • Quelques entreprises ont déjà indexé la part variable de la rémunération des cadres dirigeants sur les performances de l’entreprise en matière de réduction d’émissions. • Valorisez votre engagement, qui répond à une demande croissante du grand public et des investisseurs. Vos collaborateurs, clients, fournisseurs, actionnaires, etc., peuvent être sensibilisés à ce type d’actions et aux résultats obtenus. 1. www2.ademe.fr.

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Le Carbon Disclosure Project (CDP) est une association qui rassemble plus de 385 investisseurs institutionnels gérant quelque 41 000 milliards de dollars d’actifs dans le monde. Il a pour objectif d’éclairer les décisions d’investissement de ses membres en les informant sur les conséquences pour les entreprises de la « contrainte carbone » et du changement climatique. Chaque année depuis 2000, le CDP collecte des informations chiffrées sur les émissions de gaz à effet de serre auprès de 3 000 entreprises volontaires du monde entier, au moyen d’un questionnaire sur leur prise en compte du changement climatique (stratégie, risques et opportunités…) et sur leurs émissions (directes, indirectes et induites, objectif et politique de réduction…). Le CDP a ainsi pu mettre en place une base de données mondiale des émissions de gaz à effet de serre. Green it ! L’éco-conception

Elle consiste à envisager, de son début à sa fin de vie, la conception d’un produit ou d’un service à l’aune du développement durable, c’est-à-dire en économisant les ressources (matières premières, énergie) pour sa fabrication, son emballage, son fonctionnement et sa maintenance (consommation d’énergie…), puis son recyclage.

Pour l’entreprise, l’éco-conception est un moyen de mieux maîtriser les risques et les coûts liés au cycle de vie des produits, d’anticiper les attentes des donneurs d’ordres et des consommateurs, de plus en plus demandeurs de produits et services respectueux de l’environnement, comme en témoigne, par exemple, la montée en puissance de l’écotourisme ou de la voiture légère au détriment du 4x4 et autres SUV2. 1. Les Échos, édition du 17 juillet 2008. 2. Sport Utility Vehicle (littéralement « véhiculaire utilitaire sport »).

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La Commission européenne a adopté en juillet 2008 un plan d’action1 visant à favoriser une production et une industrie plus « durables », dont un premier volet concerne l’éco-conception et s’accompagne d’une directive définissant des exigences minimales contraignantes en matière de respect de l’environnement et d’économie d’énergie.

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Les principales actions à entreprendre

En interne, elle est non seulement un facteur de dynamisation et de créativité pour les équipes intervenant dans la conception, mais aussi de cohésion en aval : les collaborateurs ont toujours plus de fierté à travailler dans une entreprise soucieuse de préserver l’environnement. Il est intéressant de noter, en la matière, la démarche d’Apple qui, sous la pression des campagnes de Greenpeace et de son Guide pour une high-tech responsable – plaçant la marque à la pomme en dernière position –, a finalement mis sur le marché une gamme d’ordinateurs portables qui se revendique comme la plus « verte » : boîtiers en aluminium totalement recyclable (contrairement aux plastiques qui les composaient précédemment), écrans sans mercure ni arsenic, rétroéclairage par LED, réduisant de 30 % la consommation d’énergie, et emballage de volume réduit (moins 41 %)… De dernier de la classe, Apple est passé premier avec une offre originale et répond ainsi en pionnier à la demande d’une clientèle préalablement bien sensibilisée par les campagnes mêmes de Greenpeace… sur Internet !

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ACV, l’analyse « du berceau à la tombe » L’analyse du cycle de vie (ACV) est un moyen efficace et systématique pour évaluer les impacts environnementaux d’un produit, d’un service ou d’un procédé. L’objectif est de réduire leur pression sur les ressources et l’environnement tout au long du cycle de vie du produit ou service – de l’extraction des matières premières jusqu’à son traitement en fin de vie (mise en décharge, incinération, recyclage). C’est aussi pour cela que l’on emploie pour l’ACV l’expression très parlante « du berceau à la tombe ». Un effet secondaire, mais très intéressant, c’est qu’en limitant les besoins en ressources et en énergie, la chaîne de valeur du produit ou du service peut s’en trouver améliorée et, donc, la marge finale augmentée. L’analyse du cycle de vie est à la fois une procédure, c’est-à-dire une suite d’étapes standardisées, et un modèle permettant de transformer des flux en impacts environnementaux potentiels. Le World Business Council for Sustainable Development (WBCSD), qui réunit près de 150 grandes entreprises à travers le monde, suggère ainsi sept thèmes de travail pour améliorer l’éco-efficacité des produits et services : – réduire l’intensité des matières premières ; – diminuer l’utilisation des énergies ; •••

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••• – baisser la dispersion des substances toxiques ; – renforcer la recyclabilité ; – maximiser l’utilisation de composants recyclés ; – allonger la durabilité du produit ; – augmenter son intensité en service.

Quelques pistes pour se lancer dans l’éco-conception

Certains viticulteurs sont ainsi en train de reconsidérer la bouteille dans laquelle sera désormais vendu leur vin, rapporte Paul Molga des Échos1. Alors qu’une traditionnelle bouteille en verre pèse dans les 500 grammes et contient au mieux 81 % de matériaux recyclés, Artenius2 et sa filiale Semac, spécialisé dans l’emballage plastique, proposent un équivalent utilisant… 54 grammes de polyéthylène totalement recyclable (filière textile essentiellement) et permettant de réduire de façon significative les émissions de CO2, et donc l’empreinte écologique du produit fini. L’économie s’étend aux emballages secondaires (de 20 % moins lourds), et au transport, puisque cette nouvelle bouteille permet de ranger jusqu’à 60 % de produits supplémentaires dans le même volume. Les ingénieurs qui ont mis au point ce nouvel « emballage » ont également réussi à obtenir des qualités 1. Édition du 3 décembre 2008. 2. Filiale spécialisée dans l’activité polyéthylène (PET) du groupe chimique La Seda de Barcelone.

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1. Quand le choix est possible, choisir les matériaux qui ont le moins d’impact : papier, carton, verre… issus de ressources renouvelables plutôt que des plastiques (dérivés du pétrole), à condition toutefois que la masse de papier, de carton ou de verre ne soit pas trois fois supérieure à celle de ce plastique. Veiller à ce que le papier, s’il n’est pas recyclé, soit fabriqué à partir de bois issu de forêts gérées durablement, et préférer toujours des produits ou matériaux écolabellisés.

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de préservation du vin (protection contre la lumière, l’oxydation…) proches de celles obtenues avec le verre. Dans les cas où il n’est pas possible d’employer des ressources renouvelables, utiliser de préférence celles recyclées et/ou recyclables, ce qui réduit à la fois les émissions et les déchets. Greenpeace a publié une « hiérarchie » des plastiques en fonction de leur impact sur le milieu environnant, des bio-polymères (les moins « impactants ») au PVC (le plus impactant). 2. Réduire la masse et le volume des matériaux : économie de matériaux, mais aussi de place, de carburant pour le transport et, bien sûr, de déchets à traiter. De même, il est plus facile de recycler des objets qui ne sont pas constitués d’un trop grand nombre de matériaux différents. 3. Optimiser les techniques de production (réduire les consommations d’eau, d’énergie, de matières premières…) et utiliser des technologies propres, préférer les productions locales qui limitent à la fois le coût et l’impact des transports. 4. Limiter la quantité des emballages et les choisir de préférence réutilisables et avec les matériaux de moindre impact.

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5. Veiller à l’efficacité logistique pour les livraisons (optimisation des parcours, GPS…) afin de limiter les distances de livraisons, utiliser des flottes de véhicules aux normes Euro 4, pour les véhicules utilitaires légers, et Euro 5, pour les poids lourds. 6. Concevoir des produits durables, résistants, fiables et si possible réutilisables, et de taille la plus réduite possible. 7. Étudier la possibilité de passer d’une offre de produits à une offre de services. 8. Et, bien sûr, ne pas oublier de faire connaître votre démarche : elle est valorisante pour votre entreprise, susceptible d’augmenter les ventes, et rassurante pour vos investisseurs ! Dernière recommandation : toute déclaration en la matière doit être d’une absolue exactitude !… Rappelons que les déclarations

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environnementales sont régies par la norme ISO 14021, laquelle, sans être obligatoire, donne des directives pour étiqueter les produits de manière standardisée. Pour aller plus loin : • le logiciel d’analyse du cycle de vie Ecodesign Pilot, d’accès gratuit sur le site http://www.ecodesign.at/assist/assistent, est conçu pour vous aider à trouver les stratégies pour améliorer l’impact environnemental d’un produit ; • l’Ademe dispose d’un service spécialisé pour réalisation de projets d’éco-conception et permet, dans certains cas, d’obtenir des aides financières. Un module de sensibilisation à l’éco-conception peut également être consulté sur le site www.ademe.fr/entreprises ; • le site http://europa.eu.int/comm/environment/ecolabel fournit une liste des produits écolabellisés et le site www.marque-nf.com une liste des produits écolabellisés NF Environnement. La biodiversité, un atout pour vos sites d’entreprise

Pourtant, quelle entreprise peut, entre autres choses, se passer de papier ? Or, pour sa fabrication, il faut bien encore des arbres. Beaucoup de nos mobiliers de bureau utilisent aussi le bois. Le monde vivant est étroitement imbriqué dans nos activités, souvent sans qu’on y prête attention1. Par ailleurs, les constructions (bâtiments), infrastructures, déplacements, émissions polluantes (eaux usées…) 1. Ainsi, à l’origine du pétrole, on trouve encore le monde vivant, à savoir les restes de micro-organismes et de végétaux enfouis en profondeur et transformés, au cours de quelques millions d’années, en pétrole, eau et gaz…

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La biodiversité représente la diversité des êtres vivants et des écosystèmes dans lesquels ils vivent. Cela concerne la faune, la flore, mais aussi l’espèce humaine. Elle est le résultat de plusieurs milliards d’années d’évolution. Néanmoins, elle peut sembler a priori une préoccupation assez éloignée de la vie d’une entreprise qui ne travaille pas, par exemple, dans le secteur agroalimentaire, pharmaceutique ou cosmétologique…

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ont aussi une action – essentiellement négative – sur le monde vivant. Ce qu’il faut retenir, c’est que celui-ci est un univers extrêmement interactif et qu’une action à un niveau donné peut avoir des répercussions importantes souvent imprévues au départ. Ainsi, le monde du tourisme balnéaire s’inquiète aujourd’hui de la prolifération des méduses : la préfecture de Gironde a dû lancer, en août 2008, un appel à la vigilance après que des méduses1 eurent causé l’hospitalisation de huit baigneurs victimes de brûlures et de malaises résultant d’un tel contact. Mais la prolifération des méduses n’est pas le fruit du hasard. Comme le rapportait Christiane Gallus, dans Le Monde2, elle est due non seulement à la disparition de leurs prédateurs (le thon, l’espadon – tous deux surpêchés –, la tortue de mer qui ne trouve plus de lieux de ponte), mais aussi au changement climatique, qui agit à plusieurs niveaux de la chaîne. Et ce, sans compter le rejet de substances médicamenteuses, notamment en Méditerranée, qui a pu freiner la reproduction des poissons. Or, beaucoup de méduses dans un même lieu touristique nuisent à son attrait et, par contrecoup, au volume de ses activités… donc aussi à l’emploi local. Autre exemple, « Le déclin des abeilles produit ses premiers effets économiques », pour reprendre le titre d’un article du Monde3. Aux États-Unis, un apiculteur sur deux ne vit pas du commerce de miel, mais de la transhumance de ses ruches, et parcourt le pays avec plusieurs centaines de colonies d’abeilles dans son camion pour vendre aux grandes exploitations de fruits et légumes un service de pollinisation. Dans ce pays, l’impact économique du syndrome d’effondrement des colonies ne se limite donc pas à la production de miel, mais se répercute largement sur les coûts de production des fruits et légumes. Si la disparition des abeilles se poursuit au même rythme qu’aujourd’hui, il risque dès 2012 de ne plus y en avoir assez pour polliniser les plantations d’amandiers de Californie, qui produisent 1. La physalia physalis, dont le contact avec les très longs filaments de plusieurs mètres provoque des lésions cutanées urticantes très douloureuses. 2. Édition du 18 juillet 2008. 3. Édition du 20 septembre 2008.

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80 % des amandes consommées dans le monde. Il faut, en effet, la moitié des 2,4 millions de colonies d’abeilles américaines pour polliniser ces plantations. De même, pour la première fois en 2008, certains producteurs de concombres de Caroline du Nord ont dû réduire leur production de moitié simplement parce qu’ils n’ont pas trouvé suffisamment de colonies disponibles pour assurer la pollinisation…

Heureusement, la protection de la biodiversité commence à interroger quelques entreprises que l’on pourrait encore qualifier de pionnières. Ainsi, par exemple, la société Eramet (groupe minier et métallurgique/ nickel et manganèse) a prêté une très grande attention à la protection du gecko, une variété de lézard en voie de disparition. Elle en a retrouvé un spécimen lors des travaux qu’elle avait entrepris pour la construction d’une de ses nouvelles exploitations située sur la commune de Tiebaghi, dans la province Nord de la Nouvelle-Calédonie… Eramet a immédiatement pris ses dispositions, notamment un arrêt momentané des travaux, pour que cette espèce, dont on a retrouvé plus tard quelques spécimens supplémentaires, puisse continuer à exister. 1. À Paris, le 23 janvier 2008, sur le thème « Mécénat et développement durable : quels nouveaux enjeux ? ».

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Cécile Ducrot-Lochard, directrice adjointe du service relations entreprises de WWF France, expliquait, lors d’un Forum des entreprises et du développement durable1, que son organisation cherche dans le monde entier des moyens de mettre en œuvre des solutions concrètes et durables pour faire face aux problématiques et urgences environnementales. Son approche, basée sur des données scientifiques, comme ses objectifs, réalistes, tiennent compte des réalités sociales et économiques. Mais les entreprises, qu’elle considère pourtant comme un levier déterminant dans la protection de l’environnement, manquent, selon elle, d’intérêt pour la question particulière de la protection de la biodiversité. Seule La Poste avait alors participé en qualité de mécène à la mission « Forêt » du WWF…

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Les entreprises, dont un grand nombre dépendent de produits issus du vivant ou de services produits par nature (molécules extraites d’un organisme vivant, process biologique, etc.), ont donc un rôle essentiel à jouer dans la gestion durable de la biodiversité. Mais comment ?

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Biodiversité et entreprise : par quoi commencer ?

Il est clair que la biodiversité doit faire l’objet de mesures de conservation et de gestion. Celles-ci peuvent s’intégrer dans la gestion environnementale de votre site, de votre politique de développement durable ou de votre système de management environnemental. « Intégrer la biodiversité dans votre politique n’est pas un acte philanthropique ou désintéressé, est-il écrit sur le site Internet du Meeddat, c’est un moyen d’optimiser durablement l’activité de votre entreprise. » Pourquoi ? Parce que votre activité, quelle qu’elle soit, tire parti de la biodiversité, que vos matières premières sont produites par elle, que vos flux (eau, énergie…) ont un lien direct ou indirect avec la biodiversité, que votre activité aura forcément un impact sur votre environnement (émissions de gaz à effet de serre, rejets dans le sol ou les rivières, etc.). Enfin, parce que vous avez une responsabilité individuelle et citoyenne dans un environnement où la réglementation se fait de plus en plus exigeante sur le sujet. Ne pas se soucier de la biodiversité peut porter atteinte à l’image de marque de votre entreprise, être source d’amendes et de demandes de dommages et intérêts, faire baisser la valeur marchande de votre site, etc. Dans le pire des cas, vous risquez des poursuites pénales, des campagnes d’associations, un boycott de consommateurs, voire une remise en cause de vos activités. Au contraire, prendre en compte la biodiversité peut procurer des avantages à votre entreprise : amélioration de la qualité de vie autour de votre site, motivation accrue de votre personnel, possible amélioration de la productivité, optimisation de la qualité de gestion du site et de sa pérennité, renforcement de votre image de marque auprès de l’ensemble de vos parties prenantes, qu’il s’agisse de la population locale (elle peut aussi être votre bassin de recrutement), des consommateurs ou d’investisseurs socialement responsables… Surtout, ne sous-estimez pas l’intérêt des Français, donc de vos clients et partenaires, sur cette question de la biodiversité. Un

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sondage de l’institut CSA pour les Ateliers de la Terre1 indique que 84 % des Français estiment que « la protection de la biodiversité est un enjeu environnemental majeur du XXIe siècle » et 78 % que « la réduction du nombre des espèces animales et végétales met en danger la survie de l’homme ». Huit Français sur dix sont très inquiets pour l’avenir des plantes et des animaux ! Ça interpelle, comme on dit. L’usine Renault de Curitiba au Brésil2

Implantée dans une zone de protection des eaux, de la faune et de la flore, l’usine de Curitiba travaille, en collaboration avec les autorités locales, au respect du patrimoine écologique des environs. Elle réalise notamment la surveillance de la qualité des eaux de la rivière qui passe en limite de site, participe aux actions menées par l’organisme public des forêts et suit l’évolution de la population locale de singes. Afin de sensibiliser la population environnante à l’environnement, l’usine organise chaque année une semaine sur l’environnement. Voilà un bel exemple d’entreprise investie dans la protection de la biodiversité pour son bien et celui de son environnement.

1. Réalisé du 21 au 27 novembre 2008 par téléphone auprès d’un échantillon représentatif de 1 588 personnes. 2. Informations extraites du site Internet du ministère de l’Écologie, de l’Énergie, du Développement durable et de l’Aménagement du territoire.

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En complète cohérence avec la politique environnementale du groupe Renault, l’usine Ayrton Senna de Curitiba a intégré la biodiversité dès sa conception. Ainsi, les procédés de fabrication des moteurs de voitures ont été conçus sur le principe du « zéro rejet liquide ». Pour ce faire, les liquides de coupe et lessiviels ont été utilisés au juste nécessaire puis centrifugés afin d’en éliminer les pollutions huileuses ; les machines d’usinage ont été centralisées pour faciliter ces opérations et les machines à laver ont été alimentées par un liquide lessiviel unique. Dans un deuxième temps, le faible débit de rejet résiduel a été récupéré dans une cuve de stockage puis traité par évaporation. L’eau évaporée est ensuite recyclée dans les centrales et le concentré restant est éliminé dans une filière agréée en attendant d’être valorisé comme combustible.

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Vous êtes convaincu ? Alors, par quoi faut-il commencer ? D’abord, impliquez au plus haut niveau la direction de l’entreprise, ce qui nécessite au moins un échange et des explications – car ce n’est pas évident de but en blanc… –, et désignez un responsable en charge de bâtir et de coordonner le volet biodiversité. Celui-ci intégrera, dans la genèse même de votre projet d’implantation de site, la dimension biodiversité. Pour être aidé dans cette démarche, il pourra s’appuyer sur les structures locales ou nationales compétentes en la matière (Diren, Drire, collectivités territoriales, associations de protection de l’environnement, comme France Nature Environnement).

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Déterminez ensuite les zones de biodiversité protégée autour de votre site et les réglementations afférentes, de même que les caractéristiques de la nature ordinaire qui vous entoure et est menacée. Le site du Muséum national d’histoire naturelle (www.mhn.fr), qui fait l’inventaire national du patrimoine naturel, vous sera de bon conseil, de même que le site www.iucnredlist.org, qui recense les espèces menacées. À la suite de ces échanges et prises d’information, vous pouvez maintenant construire le volet biodiversité de votre projet d’implantation. En partant de votre identification des enjeux biodiversité pour votre site, vous allez déterminer des objectifs dans le temps et choisir au passage quelques indicateurs qui vont vous permettre de mesurer l’avancement de votre action et son efficacité. Il est préférable d’avoir eu le temps de développer au préalable, en vous appuyant sur les supports de communication interne de l’entreprise, une culture de la biodiversité. Il est également utile d’impliquer vos principaux fournisseurs et les acteurs concernés du territoire (associations, commune, administrations, voisinage…), en ayant identifié leurs attentes et aussi leur possible contribution. Faites connaître vos engagements à l’externe en commençant par la presse locale. Si vous devez quitter votre site, n’oubliez pas de proposer des solutions de réhabilitation intégrant les enjeux de la biodiversité, les attentes communes des différents acteurs, les ressources possibles et les contraintes à respecter.

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Le volet social et sociétal De nombreux exemples d’initiatives lancées par des entreprises innovantes ou pionnières sur cet aspect du développement durable sont proposés ici. Ces actions sont loin de constituer un ensemble exhaustif de ce qui peut être réalisé en la matière, mais un fonds à partir duquel trouver d’autres formes d’actions, en les adaptant, selon les situations et les opportunités.

Alors que le rôle des gouvernements se fait plus discret, cette implication dans la société de l’entreprise, dont les profits et l’influence ne cessent d’augmenter, correspond à une attente forte, comme en témoigne l’appel, en novembre 2008, du docteur Luis Gomes Sambo, directeur de l’OMS (Organisation mondiale de la santé) pour l’Afrique, lors d’une rencontre avec de grandes entreprises (dont des représentants de Total, Eni et Chevron, trois principaux opérateurs pétroliers du Congo), pour que celles-ci interviennent en faveur de la santé en Afrique : « Au Congo, les défis liés à la santé sont énormes. J’aimerais que vous renforciez vos interventions dans le domaine de la prévention de la maladie, notamment par l’amélioration de l’approvisionnement en eau, de l’hygiène et de l’assainissement du milieu », a-t-il lancé.

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Une démarche de développement durable ne saurait être engagée sans un projet solide concernant le volet sociétal. Celui-ci recouvre l’aspect social traditionnellement géré par les DRH, mais aussi l’ensemble des interactions de l’entreprise avec son environnement humain. En ce sens, la mise en place d’un PDE, par exemple, peut être également appréciée comme un élément de l’ensemble des actions que l’entreprise peut lancer pour établir des relations harmonieuses avec cet environnement. En réduisant les pollutions (atmosphériques, sonores…), le trafic, en aménageant ses voies d’accès et ses abords de façon plus « civilisée », l’entreprise renforce son atout « sympathie » auprès de ses salariés, mais aussi auprès des riverains, de la collectivité locale au sein de laquelle elle est implantée, de ses fournisseurs…

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De grandes entreprises implantées sur le continent africain n’ont pas attendu cet appel de l’OMS pour agir contre des maladies comme le paludisme ou le sida, qui peuvent faire des ravages chez leurs collaborateurs locaux. « Une entreprise de notre niveau qui n’entreprendrait rien en matière de sida souffrirait d’un handicap fort vis-à-vis des notations sociales et donc de son actionnariat », expliquait Patrice Lucas, directeur des politiques sociales du groupe Lafarge au quotidien La Croix1 en 2005. Un peu plus tard, Frédéric de Rougemont, directeur de Lafarge pour l’Afrique du Sud confiait au Monde2: « On me demande souvent pourquoi nous, société censée faire du profit, pas du social, nous nous lançons dans un tel programme. La réponse est simple : c’est aussi une question économique. Cela nous coûte moins cher de faire quelque chose que de ne rien faire. […] Il est difficile de chiffrer exactement ce que nous coûterait, en termes d’absentéisme, de baisse de productivité, et de funérailles, le fait de ne rien faire. On estime que ce serait environ 30 % plus cher que d’agir »… Alors que la Déclaration des droits de l’homme vient de fêter ses soixante ans, la lutte pour leur respect ou leur développement devient de plus en plus un axe d’action prisé par les entreprises. Les clients-consommateurs sont en effet d’autant plus disponibles pour accepter et apprécier ce type d’action de la part de l’entreprise dont ils achètent les produits que l’actuelle crise financière et économique leur renvoie progressivement l’espoir d’un monde un peu moins matérialiste et un peu plus attaché au fond des choses. Avec les actions pour le respect des droits de l’homme, il ne s’agit pas seulement d’un enjeu d’image mais réellement d’une des conditions du développement futur de la planète. Donc, par contrecoup, l’entreprise finira toujours par en récupérer quelque chose de positif pour son image et son business. À noter que la majeure partie de ces actions pour la défense ou le développement des droits de l’homme ne peut se faire qu’avec la connivence des clients des entreprises qui doivent pouvoir, le cas échéant, se mettre en situation de refuser de 1. La Croix, édition du 3 mai 2005. 2. Le Monde, édition du 15 février 2006.

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consommer des produits qui seraient fabriqués contre l’intérêt des droits de l’homme et, a contrario, s’encourager à consommer des produits fabriqués de façon « socialement responsable »… Dans le domaine sociétal, on perçoit donc qu’un grand nombre d’actions très diverses peuvent être envisagées.

Santé En France, où le taux de chômage reste, bon an mal an, autour de 10 %, les employeurs peuvent être tentés de considérer la fidélisation de leurs salariés comme un luxe. Mauvais calcul. Car, si le taux de chômage demeure élevé, nombre d’offres d’emploi restent sans réponse, témoignant de la difficulté pour certains secteurs à recruter ; le vieillissement de la population n’arrangera pas les choses… Par ailleurs, il est temps de réaliser que le turn-over est coûteux et que des salariés heureux sont plus productifs car ils sont moins souvent malades, moins souvent en retard ou… carrément absents. Offrir des conditions de travail motivantes et de qualité constitue ainsi le fondement d’une bonne politique de relations humaines, élément essentiel du volet social du développement durable.

À l’inverse, le coût collectif des maladies professionnelles et des accidents du travail et la perte de compétitivité qu’ils provoquent pour les entreprises ont été estimés par le Bureau international du travail (BIT) à quelque 3 % du PIB dans les pays industrialisés. Le fait qu’en matière de cotisations AT/MP1 les entreprises de moins de 10 salariés soient soumises à une tarification indépendante du nombre de maladies professionnelles déclarées (alors que celles employant au moins 200 salariés sont soumises à une tarification tenant totalement compte de leur taux individuel de cas déclarés) ne 1. Accidents du travail/maladies professionnelles.

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Pour l’entreprise, des conditions de travail préservant la sécurité, la santé et le bien-être des salariés sont un investissement et non un coût.

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doit en aucun cas inciter les petites entreprises à être moins précautionneuses. Quelle que soit sa taille, en effet, aucune entreprise n’échappe au lien très direct existant entre santé au travail et performance économique. L’absentéisme conduit à la fois à des charges supplémentaires (présence d’intérimaires pour remplacer les absents) ou à une surcharge de travail pour les salariés qui se partagent la part des absents et souvent à une perte de qualité liée au manque de formation des intérimaires, à l’insuffisance de temps pour accomplir des tâches supplémentaires… Des pathologies en hausse

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Les troubles musculo-squelettiques (TMS)

Les TMS, liés à l’exécution de gestes répétitifs, touchent en majorité les ouvriers non qualifiés, les caissières de supermarché, mais aussi les grands joueurs de tennis ou les pianistes… Ils sont devenus, avec une progression de quelque 20 % par an, un problème de santé majeur en France : ils représentent la grande majorité (70 %) de l’ensemble des maladies professionnelles reconnues. Soit, en 2006, selon les chiffres du ministère de la Santé, 32 500 cas indemnisés, 7 millions de journées de travail perdues, 710 millions d’euros de frais couverts par les cotisations des entreprises… Loin de représenter le prix à payer de la compétitivité, les TMS sont surtout synonymes de nombreux coûts indirects : baisse rapide de productivité, absentéisme obligeant à reporter le travail soit sur les salariés présents (avec les problèmes d’organisation, d’insatisfaction et de tension inhérents), soit sur des intérimaires, lesquels doivent être formés, rodés, et, bien sûr, payés… La prévention, qui passe souvent par une meilleure ergonomie des postes de travail, est efficace. Il revient moins cher à court terme d’aménager un poste de travail que d’indemniser un salarié affecté d’une TMS, et c’est aussi souvent moins difficile pour l’entreprise que de reclasser ce (ou ces) salarié(s). Le stress

Selon une enquête réalisée en 2005 par la Fondation européenne pour l’amélioration des conditions de vie au travail, le stress représentait chez les salariés français le troisième problème de santé au

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travail, après le mal de dos (dont le stress est d’ailleurs souvent responsable) et les TMS. C’est dire qu’il est également pour l’entreprise une source de coût :

• en termes juridiques : si la France n’a pas encore transcrit dans son droit national l’accord-cadre de lutte contre le stress au travail signé en octobre 2004 à Bruxelles par les partenaires sociaux, qui stipule que « si un problème de stress au travail est identifié, une action doit être entreprise pour le prévenir, l’éliminer ou le réduire », le ministre du Travail Xavier Bertrand a chargé l’Insee d’élaborer un outil permettant de mesurer chaque année le niveau global de stress des salariés en France et d’identifier les secteurs d’activité touchés. Parallèlement, patronat et syndicats ont conclu un accord visant à améliorer la prévention du stress au travail. Selon cet accord, il incombe aux employeurs de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des salariés. Ceux-ci, de leur côté, sont tenus de se conformer aux mesures de protection établies par l’employeur. Une entreprise qui ne dispose pas de l’expertise requise pour prévenir, réduire ou éliminer le stress au travail devra faire appel à une expertise externe. Enfin, une évaluation régulière des mesures mises en place pour lutter contre le stress devra être réalisée ;

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• en termes économiques : dans un rapport publié en 2001, l’Agence européenne pour la santé et la sécurité au travail évaluait à plusieurs millions le nombre de journées de travail perdues en Europe en raison de cette pathologie et de celles qu’elle induit (les personnes les plus stressées sont aussi parmi celles qui ont tendance à fumer plus, à consommer plus de substances psycho-actives, ou à avoir une alimentation moins équilibrée). Le BIT, pour sa part, a évalué le coût humain, social et économique du stress (arrêts maladie, soins, perte de productivité…) à 3 à 4 % du PIB dans les pays industrialisés. En France même, une étude publiée en 2004 par l’Assurance maladie indiquait que le stress serait la cause d’un quart des arrêts de travail de deux à quatre mois ;

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• en termes de compétitivité : en introduisant un élément pathologique au sein de l’entreprise, le stress en réduit les performances : absentéisme, turn-over augmentés, mauvaise ambiance de travail, perte de qualité…

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Rappelons aussi que le stress peut contribuer à l’alcoolisme, une particularité face à laquelle nombre de DRH s’estiment démunis. La loi, en effet, restreint la consommation d’alcool au travail, mais ne l’interdit pas. Et un salarié qui a un accident de voiture après « un pot » dans l’entreprise peut se retourner contre son employeur… Difficile aussi de ne pas évoquer la question du suicide, même si le lien de causalité n’est pas absolument établi : stress, pression sur les objectifs, harcèlement moral…, mais aussi problèmes personnels peuvent être en jeu dans la décision d’un salarié de mettre fin à ses jours. « Il n’y a pas de données nationales permettant de suivre l’évolution du nombre des suicides sur le lieu du travail et a fortiori liés au travail. Seule une étude menée en 2003 en Basse-Normandie apporte un éclairage à l’échelon régional : 55 médecins du travail, sur 190 ayant participé à l’enquête, ont signalé, de 1997 à 2001, 107 cas de suicides ou tentatives de suicide qu’ils estimaient liés au travail, dont 43 ayant entraîné un décès et 16 un handicap grave », note sur son site l’INRS1, qui ajoute qu’« un suicide, ou une tentative de suicide, constitue pour l’entreprise à la fois une situation d’urgence à gérer et un signal d’alerte sur un possible phénomène de malaise plus largement répandu. Pour éviter une contagion, des mesures peuvent être adoptées en urgence. Dans un deuxième temps, à distance de l’événement et afin de protéger la santé des salariés, il convient d’évaluer les risques d’atteinte à la santé physique et mentale et d’entamer une démarche de prévention (article L. 230-2 du Code du travail) ».

1. Institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles (http://www.inrs.fr).

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Les cancers

Les cancers constituent une autre famille de maladies en progression, face à laquelle l’entreprise fait souvent figure d’accusée : l’affaire de l’amiante et ses bataillons de victimes n’y sont évidemment pas étrangers. Les substances chimiques nombreuses et diverses auxquelles sont également exposés même ceux qui travaillent dans les bureaux – avec les solvants, colles, vernis, etc., entrant dans la composition des mobiliers – renforcent les inquiétudes. Même les produits d’entretien ne sont plus dénués de tout soupçon ! Wal-Mart et Google « chouchoutent » leurs salariés

Google, le géant américain de l’Internet, vient d’être classé, par le magazine économique Fortune, parmi les 100 meilleures entreprises américaines où il fait bon vivre. Par exemple, chez Google vous pouvez : – consacrer 20 % de votre temps de travail rémunéré par Google à des projets indépendants bien à vous ; – disposer sur place de : piscine, mur d’escalade, billards, tables de ping-pong, jeux vidéo, terrain de beach-volley ; – organiser des parties toutes les semaines avec des groupes de musique invités ; – utiliser les navettes gratuites de l’entreprise équipées de Wi-Fi pour arriver sur votre lieu de travail ; •••

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Pour remonter une image passablement écornée, Wal-Mart, le n° 1 mondial de la distribution, a décidé, il y a deux ans, de devenir un leader incontesté du développement durable. Pour ce faire, le groupe a notamment lancé un programme à l’adresse de ses 1,3 million de salariés. Chacun d’entre eux est ainsi appelé à se fixer un objectif personnel comme arrêter de fumer, maigrir, faire du sport, prendre les transports en commun, etc. Chaque engagement est accompagné d’indicateurs, grâce auxquels ils vont pouvoir mesurer leurs progrès. Des « salariés capitaines » sont chargés de motiver les troupes et de suivre les performances de chacun. Pour le groupe américain, les différents engagements pris, puis suivis par les salariés (près de la moitié s’est déjà engagée !), devraient améliorer leur santé et, de fait, les rendre plus présents au sein de l’entreprise. Donc, CQFD, plus efficaces et plus productifs.

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••• – acheter une voiture hybride, et Google vous dédommagera de 5 000 dollars ; – avoir un bébé, et Google vous remboursera 500 dollars de nourriture à emporter lors des premières semaines ; – faire de la gym et avoir des massages sur place ; – laver vos vêtements gratuitement sur place ; – accéder sur place à : un notaire, une bibliothèque mobile, un coiffeur, des soins pour enfants et une garderie, un médecin ; le tout gratuitement bien sûr ! – emmener votre toutou au bureau s’il n’y a pas de personnes allergiques ; mais attention : à la première plainte d’un de vos collègues de travail, le chien sera interdit… De plus, la nourriture et les repas sont gratuits. Une nouvelle forme moderne de paternalisme ou une certaine idée de la partie sociale du développement durable ? Le débat est lancé !

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N’hésitez pas à abuser du bio pour vos employés La recherche sur les aliments s’affinant, nous savons que l’alimentation joue un rôle important dans le déclenchement (ou pas) de certaines maladies. La façon notamment dont sont produits, conditionnés ou conservés les aliments a un impact réel sur notre santé. Cela est à considérer si vous mettez une cantine à la disposition de vos employés. Tout comme les produits du commerce équitable, les aliments bio commencent à être disponibles chez les fournisseurs de la restauration collective. Certes, ils restent encore un peu plus chers, mais la santé de vos employés n’a pas de prix. Quand ils sont malades, ils ne sont pas à leur poste de travail. Vous prendrez assurément une bonne initiative en faisant rentrer les aliments bio dans les repas qu’ils consomment au sein de la cantine de votre entreprise. Commencez par le faire un jour par semaine et augmentez progressivement leur part. Vos employés vous seront aussi reconnaissants du fait que vous vous préoccupiez de leur bonne santé.

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Les solutions passent par la prévention… et l’application du principe de précaution En matière de TMS, un aménagement des postes de travail peut s’avérer nécessaire. Cette solution, souvent très efficace, exige l’intervention de spécialistes. Il est utile, dans ce cas, de consulter le département Santé et Travail de l’Anact1, qui peut intervenir en entreprise pour procéder à une analyse globale du travail réalisé par les salariés à leurs postes, prenant en compte la prévention (particulièrement à cause de l’effet souvent différé des expositions : TMS, exposition aux cancérogènes, à l’amiante…). L’Anact peut aussi établir un diagnostic in situ des risques psychosociaux : stress, épuisement professionnel, harcèlement, conduite addictive au travail, etc. L’essentiel des informations sur la prévention des TMS et l’ensemble des thèmes qui y sont associés (organisation et prévention, risques psychosociaux, charge de travail, âges et travail…) sont disponibles sur le site Internet de l’Anact (www.anact.fr).

D’énormes progrès ont été réalisés en matière de protection contre l’exposition aux substances chimiques. Reste que de nouvelles substances apparaissent constamment et sont utilisées sans toujours avoir donné lieu à des études de non-toxicité aussi approfondies qu’il serait souhaitable. Ainsi, en présentant, le 10 octobre 2008, l’état de leurs travaux2 sur l’évaluation des risques éventuels liés aux nanomatériaux, les experts de l’Afsset3 ont indiqué qu’il n’était « pas possible d’exclure à cette date l’existence d’effets néfastes pour l’homme et 1. Association nationale pour l’amélioration des conditions de travail. 2. Cf. Le Monde, édition du 12 octobre 2008 et Les Échos, édition du 15 octobre 2008. 3. Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail.

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L’INRS met par ailleurs à jour régulièrement un Guide des maladies professionnelles destiné à reconnaître et à prévenir ces maladies. Ce guide – disponible gratuitement dans toutes les caisses régionales d’assurance maladie et consultable en ligne – présente une classification à double entrée, par symptômes et par pathologies, d’une part, et par agents nocifs et situations de travail, d’autre part.

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l’environnement ». Ils ont également recommandé « l’application du principe de précaution » à l’égard de ces matériaux, déjà présents dans des centaines de produits de consommation courante et auxquels leur très petite taille (inférieure à 100 nanomètres dans leur plus grande dimension) confère une réactivité particulière et encore mal connue. Rappelons enfin que, lorsqu’un chef d’entreprise ne remplit pas ses responsabilités en matière d’exposition de ses salariés (ou intérimaires), le donneur d’ordres peut être tenu pour responsable… Le principe de précaution a été introduit en droit communautaire par le traité de l’Union européenne (Maastricht, 7 février 1992). L’article 130 R. §2, qui énumère les principes devant fonder la politique de la Communauté dans le domaine de l’environnement, précise que cette politique « est fondée sur les principes de précaution et d’action préventive, sur le principe de la correction, par priorité à la source, des atteintes à l’environnement et sur le principe du pollueurpayeur ». La Commission européenne a par ailleurs retenu, le 2 février 2000, que l’Union européenne dispose du droit de fixer le niveau de protection de l’environnement, de la santé et des consommateurs qu’elle estime approprié, tout comme les autres membres de l’Organisation mondiale du commerce.

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Enfin le Conseil européen de Nice de décembre 2000 a adopté une résolution sur le principe de précaution dans laquelle est évoquée la nécessité d’en préciser les lignes directrices d’application. Dans la législation française, l’expression « principe de précaution » a été employée pour la première fois dans la « loi Barnier » de 1995. Elle est affirmée dans l’article L. 110-1 du Code de l’environnement, qui prévoit que les politiques de l’environnement s’inspirent du principe de précaution, « selon lequel l’absence de certitude, compte tenu des connaissances scientifiques et techniques du moment, ne doit pas retarder l’adoption de mesures effectives et proportionnées visant à prévenir un risque de dommages graves et irréversibles à l’environnement à un coût économique acceptable ».

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La jurisprudence a étendu le principe de précaution au domaine de la santé : il a ainsi été utilisé pour suspendre une autorisation de mise en culture de maïs OGM, et pour amener le ministre de l’Agriculture à réexaminer son refus de retirer du marché le gaucho, au motif que les risques que cet insecticide présentait pour les abeilles n’avaient pas été suffisamment analysés. La prévention vise les risques avérés, dont l’existence est démontrée ou connue empiriquement, comme le risque nucléaire, l’utilisation de produits tels que l’amiante, ou encore le tabagisme. L’incertitude ne porte pas sur le risque, mais sur sa réalisation. La précaution vise les risques probables, non encore confirmés scientifiquement, mais dont la possibilité peut être identifiée à partir de connaissances empiriques et scientifiques, par exemple, le développement des organismes génétiquement modifiés… Pour agir efficacement, respecter d’abord la réglementation1

Le CHSCT est notamment consulté lorsqu’une transformation importante des postes de travail découlant de la modification de l’outillage, d’un changement de produit ou dans l’organisation du travail, est prévue, ainsi qu’en cas de modification des cadences ou des normes de productivité. Il intervient lors de l’élaboration des plans d’adaptation, lors de la mise en œuvre de mutations technologiques importantes et rapides, et au niveau des mesures à prendre pour faciliter la mise, la remise ou le maintien au travail des accidentés du travail. 1. Informations fournies par le site du ministère du Travail, des Relations sociales, de la Famille et de la Solidarité.

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1. Dans les établissements employant au moins 50 salariés, le CHSCT (Comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail) veille à la protection de la santé et de la sécurité des salariés ainsi qu’à l’amélioration des conditions de travail.

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2. Il revient toutefois au dirigeant d’évaluer au moins une fois par an les risques que font courir aux collaborateurs les différentes activités de l’entreprise, à chaque poste : équipements, exposition à diverses substances, au bruit, à des températures excessives, aux poussières, etc., organisation du travail, contraintes, etc. Les sources d’information peuvent être l’analyse des risques réalisée par le CHSCT, les listes des postes de travail à risques particuliers, la fiche d’entreprise établie par le médecin du travail… 3. Cette évaluation doit toujours être actualisée lors de l’adoption de nouveaux procédés de fabrication, équipements de travail, lors de l’introduction dans les lieux de travail de nouvelles substances chimiques, lors de l’aménagement des lieux de travail ou de l’installation (ou transformation importante) de postes de travail, ou encore à l’occasion d’une modification de l’organisation du travail ou des normes de productivité.

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4. Les résultats de ces évaluations doivent, bien sûr, donner lieu, si nécessaire, à la mise en œuvre d’actions de prévention. 5. Quels que soient la taille de l’entreprise et son secteur d’activité, les résultats de ces évaluations doivent également être consignés dans un document unique établi (et mis à jour au moins annuellement, et à l’occasion de toute modification importante concernant le fonctionnement de l’entreprise ou à la survenue d’un accident du travail) par le dirigeant dans le cadre de son obligation générale de prévention des risques professionnels. Le document unique doit aussi contribuer à l’élaboration du programme annuel de prévention des risques professionnels (pour les entreprises d’au moins 50 salariés), avec une liste des mesures à prendre au cours de l’année à venir en matière de protection des salariés et d’amélioration des conditions de travail. Le document unique doit répondre à trois exigences : la cohérence, la lisibilité (il doit faciliter le suivi de la démarche de prévention dans l’entreprise), la traçabilité de l’évaluation des risques. La transparence et la fiabilité, gages de l’authenticité de l’évaluation, sont hautement recommandées. Attention : le défaut d’élaboration de ce document unique et l’absence de mise à jour sont pénalement sanctionnés.

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Les actions de prévention passent par l’obligation de faire respecter les consignes de sécurité, ainsi que par la formation des collaborateurs à la sécurité (imposée par le Code du travail). Tout salarié (même en contrat de travail temporaire) doit bénéficier, à l’initiative de l’employeur, d’une formation pratique et appropriée en la matière, à son arrivée dans l’entreprise, en cas de changement de poste de travail ou de technique, ou encore à la demande du médecin du travail, après un arrêt de travail d’une durée d’au moins vingt et un jours. Cette formation a pour objectif d’informer les collaborateurs des précautions à prendre pour assurer leur propre sécurité et, le cas échéant, celle des autres personnes. Son contenu dépendra de la taille de l’entreprise et de la nature de son activité (et donc du type de risques existants) ainsi que des emplois occupés par les collaborateurs concernés.

« Une discrimination est une inégalité de traitement fondée sur un critère prohibé par la loi, comme l’origine, le sexe, le handicap, etc., dans un domaine visé par la loi, comme l’emploi, le logement, l’éducation… », définit la Halde (Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité). Cette autorité administrative indépendante tient à jour, sur son site Internet1, un Répertoire des bonnes pratiques et des initiatives, où sont décrites des actions mises en place par des entreprises ayant adopté une politique volontariste en matière de lutte contre la discrimination. Ces initiatives vont de l’amélioration des procédures de recrutement à la mise en place d’un plan d’action « Diversité », en passant par la prévention contre le harcèlement, l’accompagnement du salarié en situation de handicap, les actions pour l’équité professionnelle hommes-femmes. Sont également répertoriées les bonnes pratiques professionnelles en matière d’orientation sexuelle ou encore toutes les actions de communication 1. www.halde.fr.

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La vie dans l’entreprise – la lutte contre toutes les discriminations

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destinées à sensibiliser contre la discrimination et en faveur de la diversité ; en ce domaine, la Halde (qui publie également une lettre d’information) est une mine dont on ne saurait trop recommander d’user et d’abuser…

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« La diversité ne se limite pas à la mixité et à l’internationalisation des cadres de direction, comme semblait le prioriser jusqu’à maintenant un certain nombre de grands groupes français. […] [elle] inclut aussi la diversité des âges (ce qui signifie d’accepter de reconnaître que la gestion des seniors est un vrai sujet), des origines et des parcours professionnels (ce qui signifie de reconsidérer le culte français du diplôme), des origines ethniques, culturelles, et confessionnelles (qui passe par la traque incessante du cancer de la discrimination), l’intégration et la valorisation des collaborateurs handicapés (ce qui impose une réflexion en profondeur sur les conditions de travail). Sans oublier la diversité des apparences physiques (ce qui implique de lutter quotidiennement contre les préjugés). La liste est longue des caractéristiques qui font que chaque être humain est différent », observe Philippe Laget, directeur de la qualité, de l’innovation et du développement durable à la Société Générale, tout en soulignant que « c’est de la confrontation de la diversité des points de vue, des modes de pensée, des savoir-faire et des talents que naîtront les solutions les plus innovantes aux problèmes de plus en plus complexes et imbriqués de notre monde moderne. […] L’entreprise intelligente doit agir […] pour que les différences s’additionnent, afin de faire de la diversité un véritable accélérateur de la création de valeur, une nouvelle source de performance. Une entreprise à l’image du monde dans lequel elle évolue : vivante, ouverte, diversifiée et créatrice de richesse ». Nous vivons pourtant dans une société discriminatoire : le nombre de femmes, de personnes issues des minorités visibles ou des « quartiers », ou encore le nombre de personnes handicapées dans les rangs du Sénat, ou parmi les professeurs ou doyens d’université reste suffisamment faible pour nous en convaincre. En mai 2008, Laurence Rossignol1 suggérait ainsi à Christian Poncelet, président du 1. Secrétaire nationale du Parti socialiste chargée des droits des femmes et de la parité ; Libération, édition du 15 mai 2008. Aujourd’hui, elle y est chargée de l’environnement.

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Sénat, comme thème de réflexion : « Les colloques du Sénat, miroir de la misogynie du monde politique et universitaire »… Le monde de l’entreprise n’a pas vraiment fait exception.

Il reste cependant un bon bout de chemin à parcourir : dans son rapport annuel publié en mai 2008, la Halde indique que, sur les 6 222 réclamations qu’elle a enregistrées en 2007, plus de la moitié concernait l’emploi. Le critère de discrimination le plus souvent invoqué étant l’origine (27,1 %), suivi par le critère santé-handicap (22 %) devant, à égalité, l’âge, le sexe, et les activités syndicales… Mais deux tiers des Français ignorant encore l’existence de la Halde, ces chiffres restent quelque peu biaisés. Son président, Louis Schweitzer, note ainsi que la discrimination par l’âge n’est qu’assez peu souvent signalée alors que les entreprises tentent par tout moyen « d’écarter les seniors du monde du travail ». Ne sont pas mentionnées non plus les discriminations à l’égard, par exemple, de l’obésité, alors qu’un testing1 réalisé en septembre 2005 par l’Observatoire des discriminations avait révélé que, postulant pour des emplois de commerciaux et de télévendeurs, ces personnes recevaient trois fois moins de réponses positives que les autres. 1. L’Obèse : « l’incroyable discriminé » sur : http://www.observatoiredesdiscriminations.fr/ images/stories/l_obese_lincroyablediscrimine.pdf.

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Aujourd’hui pourtant, ces entreprises mêmes qui sur certains secteurs ont du mal à recruter se rendent compte qu’exclure a priori certaines personnes pour des raisons qui n’ont rien à voir avec leurs compétences, c’est se priver de savoir-faire précieux. Par ailleurs, les entreprises qui vendent des produits ou des services, qu’il s’agisse d’alimentation, de cosmétiques, de téléphones ou de coupes de cheveux, ont également compris l’intérêt de faire vendre ceux-ci par des commerciaux qui reflètent la diversité de la population de consommateurs à laquelle elles s’adressent. Celles qui travaillent à l’international connaissent aussi l’avantage de disposer de cadres capables de comprendre les cultures des pays dans lesquels elles veulent s’implanter ou le sont déjà.

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La Halde réalise en effet des tests dont l’objectif est de repérer des écarts entre les réponses apportées à différents candidats (candidats de référence et candidats discriminables) sur une période définie. L’objet des tests réalisés en 2006 et en 2007 par la Halde auprès de grandes entreprises est de faire prendre conscience que personne n’est à l’abri du risque de discrimination dans la sélection des candidatures. Ces tests utilisent une ou plusieurs séries de candidatures élaborées, comportant chacune, pour chaque offre d’emploi sélectionnée, une candidature de référence et une candidature testée. Une série peut ainsi comporter trois candidats aux caractéristiques différentes, l’un « non discriminable » (candidat de référence), un second discriminable par son origine, et un troisième, par son âge. Pour des tests, réalisés entre juillet et décembre 2007, quelque 5 620 CV ont été envoyés en réponse à 1 469 offres. Les résultats ont montré que, globalement, sur l’ensemble des entreprises, la probabilité d’être convoqué en entretien est inférieure de 22,77 % pour les candidats susceptibles d’être discriminés en raison de leur origine (africaine ou maghrébine) qui postulent sur les mêmes postes que les candidats de référence, et inférieure de 42,17 % pour les candidats susceptibles d’être discriminés en raison de leur âge (plus de 45 ans).

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De tels tests peuvent être mis en œuvre par les entreprises ellesmêmes pour vérifier la régularité de leurs procédures d’embauche. La France n’est bien sûr pas la seule à devoir s’amender en matière de discrimination : en janvier 2008, la Commission européenne a rappelé à l’ordre quatorze États membres, pour qu’ils modifient leur législation nationale interdisant les discriminations en matière d’emploi, de façon à respecter la directive de novembre 2000 en faveur de l’égalité de traitement dans l’emploi et le travail. Depuis le 11 septembre 2008, le label « Diversité », initié, sous l’égide de l’État, par l’Association nationale des directeurs de ressources humaines (ANDRH), et qui s’applique à tous les domaines de la diversité (origine, âge, handicap, genre, orientations sexuelles,

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opinions politiques, religieuses, syndicales…), offre aux entreprises un cadre d’action pour leur politique de lutte contre les discriminations. Les entreprises candidates doivent se soumettre à un cahier des charges, sur la base duquel elles sont auditées par l’Afnor-Certification : communication, formation, processus de recrutement, évolution professionnelle, implication des partenaires sociaux, relations avec les territoires, évaluation des actions… sont passés au crible. Le label est accordé pour trois ans par une commission composée de représentants de l’État, de l’ANDRH, du patronat, des syndicats et d’experts.

Mais en matière d’égalité hommes-femmes, soulignent Sophie Serratrice, DRH, et Bertrand Pointeau, associé de Bain & Company, auteurs d’une étude1 menée auprès de vingt-cinq groupes européens, 30 % des entreprises ne mesurent pas leur taux de mixité par niveau hiérarchique, 70 % ne connaissent pas avec précision leurs chiffres de recrutement et de départ, ni ne savent comment les 1. Les Échos, édition du 15 octobre 2008.

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Créé un peu plus tôt, en mars 2004, le label « Égalité » est un outil au service des entreprises pour progresser dans le traitement de l’égalité professionnelle hommes-femmes, conformément aux exigences de la loi. Reposant sur une démarche volontaire, il propose un cahier des charges comprenant des mesures comme la signature au sein de l’entreprise d’un accord sur l’égalité professionnelle, la mise en place d’une politique de sensibilisation à la mixité ou d’actions à réaliser pour atteindre l’égalité salariale et renforcer l’accès des femmes à la formation continue, aux promotions internes… En la matière, ne pas méconnaître l’importance des « petits gestes » qui facilitent la conjugaison de la vie professionnelle et de la vie familiale, si l’on souhaite fidéliser ses cadres féminins ; par exemple, éviter les réunions qui s’attardent jusqu’à 21 heures quand on sait que les femmes sont aussi celles qui, dans la famille, ont le plus souvent la charge de trouver les solutions pour faire garder les enfants…

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taux de promotion se comparent entre hommes et femmes. Ce qui rend difficile de fixer un objectif chiffré. Par ailleurs, insistent ces auteurs, une bonne connaissance des chiffres permet d’éviter un certain nombre d’idées fausses (comme celle conduisant à la sous-estimation chronique des problèmes de diversité) et de déjouer les pièges les plus dangereux : qui sait, par exemple, que les gains obtenus en passant de 30 à 50 % de recrues féminines sont effacés en dix ans si le taux annuel de fidélisation des femmes se détériore de 5 points ?

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Il est donc important en la matière de connaître son point de départ et la dynamique d’évolution de carrière des uns et des autres afin de choisir les initiatives les mieux adaptées à ses priorités : recruter davantage de femmes, privilégier les initiatives visant à les garder… Cette question de la place des femmes dans l’entreprise amène très naturellement aussi la question de l’emploi précaire et de l’emploi à temps partiel, qui les pénalisent plus particulièrement (elles sont, plus souvent que les hommes, « confinées dans des emplois à faible productivité, mal rémunérées et vulnérables, sans protection sociale », soulignait une étude du Bureau international du travail début 2003), ainsi d’ailleurs que les jeunes et les personnes en situation de handicap : en 2004, ces dernières étaient près de 48 % à travailler moins d’un mi-temps1, contre 40 % en 2000. Et la Confédération européenne des syndicats, dans un rapport publié en mars 2008 (et donc avant la grande « crise économique » de l’automne), évoquait la montée du travail précaire en Europe : 32 millions de personnes, soit 14,5 % des travailleurs européens sont sous contrat à durée déterminée, contre 22 millions en 1997 (11,5 %) ; 40 millions de salariés travaillent à temps partiel (18 %), contre 32 millions dix ans plus tôt… La Poste, dans le cadre de son modèle social « employeurdéveloppeur2 », a parmi ses objectifs la diminution drastique de tout 1. Les Échos, édition du 4 janvier 2007. 2. « La Poste cherche à recruter les meilleurs mais pas seulement. La Poste cherche ceux qui veulent le devenir, qui ont le potentiel pour », dixit Foucauld Lestienne, de La Poste (entretien sur www.médiarh.com).

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ce qui n’est pas CDI (contrat à durée indéterminée). La part des CDI est ainsi passée de 67 % en 2003 à 87 % en 2007 et celle des CDD (contrats à durée déterminée), pour la même période, de 5,7 à 3,3 %. Quant au taux de promotions, il passait de 3,8 à 9,7 %, soit de 11 020 à 25 999 collaborateurs (pour environ 252 000 au total). Comme quoi, avec de la volonté et un plan d’action précis, on peut avancer rapidement dans ce domaine.

Depuis quelques années maintenant une autre catégorie de travailleurs donne également beaucoup de soucis aux gouvernements : les seniors, longtemps « jetés » à peine grisonnants de l’entreprise, mais priés désormais de rester en poste et de cotiser le plus longtemps possible… À côté de la suppression des mises à la retraite d’office, l’idée d’instaurer une pénalité financière pour les entreprises de plus de 50 salariés qui n’emploieraient pas suffisamment de seniors ou des quotas (à l’instar de la mesure mise en place en faveur de l’emploi des personnes handicapées) fait son chemin. « À compter

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L’emploi des personnes handicapées progresse difficilement en France malgré le durcissement de la réglementation obligeant les entreprises de plus de vingt salariés à employer 6 % de personnes en situation de handicap sous peine, si elles ne réalisent pas au moins une embauche en 2009, d’avoir à verser des amendes fortement majorées (sous la forme d’une contribution au fonds de développement pour l’insertion des handicapés, l’Agefiph). À partir de 2010, elles devraient même verser à l’Agefiph une « amende » d’un montant égal à 1 500 fois le Smic horaire par salarié handicapé manquant. Reste que, par manque d’accessibilité, l’enseignement supérieur ne forme pas assez de diplômés parmi les personnes handicapées pour toujours permettre aux employeurs de remplir leurs obligations légales, et le taux de chômage dans cette population demeure deux fois supérieur à la moyenne nationale. Aujourd’hui, plus de 20 000 entreprises, essentiellement des PME de moins de 100 salariés, ne comptent encore aucune personne handicapée dans leur effectif. Pourtant, fait valoir Pierre Blanc, directeur général de l’Agefiph : « Quand elles sont dans des collectifs de travail, [les personnes handicapées] mettent du liant et enrichissent le climat social. »

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du 1er janvier 2010, [les entreprises] qui n’auront pas conclu d’accord ni engagé de plan d’action en faveur de l’emploi des salariés âgés seront soumises à une pénalité correspondant à 1 % des rémunérations », annonçait un texte du ministre du Travail Xavier Bertrand en septembre 20081. Il est vrai que l’entreprise, en France, s’affiche particulièrement allergique aux « vieux » : à 38,3 % (contre 37,8 % en 2005…), le taux d’emploi des seniors français est le plus bas d’Europe, alors qu’il est supérieur à 50 % en Allemagne et au Royaume-Uni, et que la moyenne européenne se situe à 44,7 %, indique Eurostat.

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Les choses évoluent cependant, même si c’est très lentement… Certains employeurs se rendent compte que, face à une population de consommateurs vieillissante, les meilleurs vendeurs ne sont pas toujours les moins de 25 ans, tandis que d’autres apprécient chez leurs salariés les plus âgés une plus grande disponibilité, des compétences humaines, des capacités de communication, voire une meilleure résistance au stress… Ainsi, le modèle finlandais, dont le gouvernement, alerté par le vieillissement de sa population, plus précoce que chez ses voisins européens, a réussi à faire passer le taux d’emploi de ses seniors de 35,6 % en 1997 à… 55 % en 2005. En France, pour inciter les entreprises à négocier des accords sur les âges, le ministère de l’Économie, de l’Industrie et de l’Emploi et celui du Travail, des Relations sociales, de la Famille et de la Solidarité ont élaboré un guide des bonnes pratiques existantes. L’agence de notation sociale Vigeo (voir page 47) évaluera ensuite l’impact des mesures qui auront été prises en faveur des seniors au sein de dix entreprises volontaires. De l’avis de beaucoup, les résultats de cette mesure pourraient préparer le terrain à une future réglementation en la matière.

1. Les Échos, édition du 20 septembre 2008.

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Des entreprises misent sur le bien-être de leurs salariés Les transports Quéré1, entreprise familiale de transport basée à Quimper et opérant en Bretagne et dans les pays du nord de l’Europe avec un effectif d’un peu plus de 50 salariés, ont reçu, en 2006, le Trophée national et le Trophée régional de la qualité de vie au travail2 pour leurs démarches d’amélioration des conditions de travail de l’ensemble du personnel menées depuis plus de dix ans. En juin 2007 leur a été également décerné le Prix spécial du jury des étoiles du transport et de la logistique, organisé par L’Officiel des transporteurs (l’un des 60 titres de Wolters Kluwer France), sur le site duquel on peut lire : « Transports Quéré (29) – C’est le coup du cœur du jury ! Au “travailler plus pour gagner plus” je préfère le “travailler moins pour travailler mieux et être bien”, revendique Guy Quéré, président de l’entreprise. Ses valeurs à contrecourant ont porté leurs fruits : baisse du stress, maintien des salaires, forte politique sociale, ses préoccupations citoyennes et sociales n’ont pas freiné la croissance de cette PME ; au contraire, elle affiche une augmentation de 7 % de son chiffre d’affaires. Une idée de l’exception française… »

••• 1. Sources : exposé de Guy Quéré, P-DG de l’entreprise, au Forum des entreprises et du développement durable organisé par le ministère de l’Écologie et du Développement durable le 6 février 2007 sur le thème « Santé, travail et développement durable » et Étoiles du transport et de la logistique sur http://www.wkf.fr/pdf/presse/20070619_ Transport-Laureats-13e-Etoiles.pdf. 2. Les trophées de la Qualité de vie au travail, organisés depuis 2004, valorisent des actions exemplaires dans le domaine de l’amélioration de la qualité de vie au travail afin de contribuer à la diffusion de bonnes pratiques, conformément à la mission du réseau Anact et du CESTP-Aract.

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Fort du principe que le bien-être des salariés et la satisfaction des clients génèrent des résultats positifs à l’entreprise, M. Quéré a fait appel à l’antenne rennaise de l’Anact, avec laquelle de nombreux échanges ont abouti aux améliorations reconnues par l’attribution de ces prix et trophées. En 2003, l’entreprise a signé un accord totalement innovant – peut-être le seul de ce type en France alors – dans le secteur du transport routier de longue distance, permettant de respecter toutes les législations sociales et permettant aussi à ses conducteurs de rentrer chez eux chaque week-end. Cet

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Les principales actions à entreprendre

••• accord prévoit, pour le personnel roulant, huit semaines entières de RTT sur l’année – en plus de leurs cinq semaines de congés payés – planifiées par les délégués du personnel. Ce dialogue social de tous les instants a permis d’examiner de nombreuses questions, y compris celles visant à assurer la bonne santé financière et le développement de l’entreprise. Toutes les décisions d’achat des véhicules sont ainsi discutées avec l’ensemble des intéressés, le CHSCT apporte des améliorations constantes aux carrosseries des camions pour réduire les accidents du travail, les formations à la conduite rationnelle sont renforcées et les consommations surveillées de près. L’ensemble du parc moteur a été changé en trois ans pour adopter les normes anti-pollution Euro 3 et Euro 4 puis Euro 5, et au profit d’une marque qui permet d’économiser de 2 à 3 litres de carburant aux 100 kilomètres avec un moteur pouvant s’adapter sans modification aux biocarburants. Chaque conducteur dispose enfin d’un GPS qui lui évite des kilomètres à vide à la recherche de clients, avec la perte de temps, la dépense en carburant et les émissions inutiles de CO2 que cela implique. Les résultats sont là : le turn-over est quasi nul, le taux de sinistres sur les marchandises et les véhicules a sensiblement diminué, entraînant une baisse du coût des assurances, et le nombre des clients a augmenté de plus de 30 % en quatre ans. Enfin, il est par ailleurs intéressant de noter que ces clients se sont montrés sensibles à la démarche.

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Bretagne Ateliers1, de son côté, a placé l’homme au centre de son organisation avec son effectif de quelque 700 salariés dont 80 % en situation de handicap, travaillant sur des postes adaptés dans sept usines réparties entre l’Ille-et-Vilaine et les Côtes-d’Armor. Notre vocation est d’« offrir des emplois à ceux qui n’arrivent pas à en trouver du fait de leur handicap, et de les pérenniser. En trente ans, Bretagne Ateliers n’a pas procédé à un seul licenciement économique. Nous essayons, bien sûr, de faire des profits, mais nous voulons avant tout participer à un projet de vie et non à un projet financier », expliquait au Parisien2 son directeur général, Daniel Lafranche, qui a pris le parti d’adapter en profondeur l’entreprise ••• 1. www.bretagne-ateliers.com. 2. Édition du 12 décembre 2005.

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••• aux salariés, et non le contraire, précisant que Bretagne Ateliers n’en est pas moins « une entreprise à part entière, qui allie toutes les compétences nécessaires à un objectif humain ». Le surcoût de cette adaptation, par rapport à une entreprise classique, est de l’ordre de 6 à 8 % du chiffre d’affaires, mais en compensation celle-ci ne paye ni impôt sur les sociétés ni taxe professionnelle et la loi sur le handicap lui a permis d’accéder à de nouveaux marchés. Bretagne Ateliers a reçu en 2005 le trophée spécial PME Management et compétences pour son engagement auprès des travailleurs handicapés. Aujourd’hui en retraite, Jean-Michel Quéguiner, son fondateur en 1975, avait pour objectif l’intégration socioprofessionnelle de personnes handicapées. Il a reçu le Grand Prix de l’entrepreneur 2006.

Devenu une forme d’investissement prisée, le mécénat de compétences, encouragé depuis 2003 par des avantages fiscaux, est réalisé dans l’attente d’un retour positif, en termes de réputation, d’attractivité… Mais il crée aussi une dynamique collective sur les valeurs de l’entreprise. En interne, le mécénat de compétences est un formidable moyen de fédérer les collaborateurs. En externe, il contribue à l’ancrage de l’entreprise dans ses lieux d’implantation, par le biais d’actions locales, de partenariats avec des associations et peut aussi améliorer la réactivité de l’entreprise, et ses capacités d’innovation, grâce aux relations resserrées et renforcées, via des actions de mécénat, avec la société civile. Plusieurs sociétés ont ainsi choisi d’aider, par un aménagement du temps de travail ou par un soutien financier, ceux de leurs salariés qui s’investissent dans des missions d’intérêt général : • SFR a mis en place un « forfait temps citoyen » de six à onze jours par an pendant lesquels cinquante salariés peuvent, tout en étant rémunérés, se consacrer à des activités bénévoles dans les domaines de la protection de l’enfance ou du handicap. Par ailleurs, le

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Mécénat de compétences : soutenir l’engagement citoyen des salariés

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groupe a reçu en 2007 le trophée RH Orgaconsultants de la responsabilité sociale de l’entreprise pour son initiative « Passeport ingénieur télécoms » qui vise à répondre, à la fois, à son engagement pour la diversité et à son besoin de recruter des ingénieurs télécoms en accordant des bourses à de brillants élèves des quartiers sensibles. SFR les accompagne jusqu’à leur diplôme par le biais de tuteurs ; quelque 150 étudiants avaient alors déjà bénéficié de cet accompagnement, mobilisant une centaine de tuteurs ; • en partenariat avec Planète Urgence, des postiers et postières sont partis, de quinze jours à trois semaines sur leurs temps de congés, en Afrique francophone pour apprendre à lire et à écrire à de jeunes enfants habitant dans des régions reculées, l’entreprise prenant en charge la partie logistique des opérations. Une étude très sérieuse1 a montré une augmentation de leur productivité au travail après leur retour. Le fait d’avoir dû faire face pendant leur séjour à des situations imprévues et pour l’essentiel à devoir les régler les a enrichis dans leur façon de travailler, leur donnant notamment assurance et renforçant leur confiance2. À La Poste, environ une centaine de collaborateurs bénéficieront de congés solidaires ;

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• Accenture a mis à disposition une équipe de consultants pour concevoir le site Internet du musée du Louvre. Ce dispositif s’inscrit dans le cadre du mécénat de compétence, c’est-à-dire de la mise à disposition par l’entreprise de salariés pendant leur temps de travail pour la réalisation d’activités d’intérêt général ; • la Fondation Veolia Environnement, dotée de quelque cinq millions d’euros, regroupe toutes les actions de mécénat menées par le groupe dans les domaines de la solidarité, de l’insertion professionnelle et de la protection de l’environnement tant en France qu’à l’étranger. Depuis sa création en 2004, elle a déjà aidé plus 1. Réalisée en 2008 par la direction de l’Optimisation des coûts de La Poste sur les 42 collaborateurs partis en 2007 en congés solidaires. 2. L’Engagement des congés solidaires : les postiers et le développement Nord-Sud, éditions Autrement (2008).

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de 600 projets. Objectif prioritaire, l’implication des salariés : pour être soutenu (financement, accompagnement, mise à disposition de compétences…), un projet doit être parrainé par un collaborateur du groupe. Si, pour l’entreprise, les sommes consacrées au mécénat sont marginales, la mobilisation du personnel est exceptionnelle, et en améliorant la relation de l’entreprise avec les associations, il contribue à mieux intégrer celle-ci dans son environnement ; • à Eau de Paris, l’engagement humanitaire constitue un outil d’évaluation du personnel et la sélection des candidats aux missions humanitaires se fait par un jury qui comprend des responsables de la DRH. L’engagement humanitaire est pris en compte dans les entretiens d’activité annuels ; • EDF, à travers sa fondation DiversiTerre, utilise le mécénat de compétence comme outil de gestion de fin de carrière des seniors que le groupe encourage à s’engager. Des ingénieurs et des chercheurs mettent ainsi, par exemple, au service des archéologues les techniques utilisées par l’entreprise pour la conception, la construction et l’exploitation des ouvrages de production et de transport d’électricité.

Engagée auprès des communautés indiennes qui lui fournissent ses ingrédients1, en même temps que dans une activité respectueuse de la biodiversité amazonienne, l’entreprise brésilienne de cosmétique Natura2 ne connaît pas le commerce équitable ! Le coprésident de son conseil d’administration, Guilherme Leal, qui présentait les produits Natura à Paris en avril 2005, assurait n’en avoir jamais entendu parler. Créée en 1969 par Luiz Seabra et cotée à la Bourse de Sao Paulo, elle est pourtant aujourd’hui reconnue par le Global Reporting Initiative comme l’une des 50 meilleures entreprises au monde 1. La communauté Médio Juruá, qui extrait l’huile d’andiroba, celle d’Iratapuru, qui récolte les noix de Pará, celle de Belem, qui produit le priprioca… 2. Le Monde, édition du 3 mai 2005.

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Commercer équitablement…

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en matière de développement durable. Depuis plus de dix ans, elle applique des méthodes qui en sont très proches : sous le contrôle d’ONG locales, Natura cofinance en effet des projets coopératifs pour aider les communautés qui lui fournissent les matières premières (à un prix d’achat « juste »), et travaille avec l’université d’Amazonie à la diversification de leurs cultures afin de leur donner accès à une autonomie économique : « Ce qui est important, c’est de les aider à développer un accès au marché. Payer un prix juste ne suffit pas, il faut les accompagner », explique M. Leal. Natura a multiplié son chiffre d’affaires par 35 depuis la fin des années 1980, passant de 50 à 300 produits et M. Leal est aujourd’hui l’un des hommes les plus riches du Brésil. « Je ne suis pas contre le profit, je suis contre certaines façons d’en faire », commente-t-il. Action en faveur des populations défavorisées

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Une entreprise fonctionne dans les conditions les plus favorables à son développement quand elle est implantée dans un environnement florissant du point de vue économique et social : les hordes qui brûlent voitures et entrepôts à la nuit tombée ne sont pas plus favorables au business que les routes inondées, ou bloquées par les arbres abattus résultant d’épisodes climatiques violents comme on a pu en rencontrer trop abondamment ces dernières années. Les entreprises les plus engagées dans le développement durable ont bien compris que contribuer au progrès social par le développement économique des populations défavorisées, c’est, à terme, conquérir de nouveaux marchés. Bank of the West, par exemple, a su saisir l’opportunité. Faire du bien tout en gagnant de l’argent… Bank of the West (680 agences aux États-Unis), filiale américaine de BNP Paribas, et deuxième plus importante banque commerciale en Californie, est aussi l’une des institutions financières les plus engagées dans l’investissement au sein des communautés locales avec plusieurs dizaines de milliards de dollars investis chaque année. •••

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••• Bank of the West a mis en place dans une de ses agences d’Oakland (Californie), une ville populaire « black » et hispanique de la banlieue de San Francisco, un concept original dont le but est de réanimer des populations en difficulté. Ainsi, cette agence a été divisée en deux parties de surface égale : l’une consacrée à la banque traditionnelle, avec ses classiques guichets et automates, l’autre dédiée à la formation des habitants des quartiers sensibles de cette ville. La gestion de cette seconde partie a été confiée à une ONG à but non lucratif, Operation Hope1, fondée après les émeutes raciales de 1992 à Los Angeles. Operation Hope est aux États-Unis l’organisme national qui fournit des outils et des services financiers aux communautés délaissées et mal servies par le secteur privé. Sa mission est le développement de communautés défavorisées à travers l’établissement de partenariats entre les secteurs privé et à but non lucratif.

Les « diplômés », c’est-à-dire ceux et celles qui auront pu obtenir un crédit, vont former un club et parrainer d’autres candidats. Toute cette action d’Operation Hope reste en service bien après la fermeture à 17 heures de la partie « banque » traditionnelle. Il existe également pour les 12-18 ans un programme d’éducation financière de quatre heures, gratuit pour les plus pauvres. Les formateurs sont recrutés auprès des entreprises de la zone qui les détachent sur leur temps de travail. ••• 1. Littéralement : « Opération espoir ».

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Chaque jour, au sein de l’agence d’Oakland, six ou sept bénévoles mobilisés par l’ONG apprennent aux déshérités à se servir d’Internet, à écrire, et, aux plus jeunes, ce qu’est un compte bancaire, comment le gérer au mieux, comment restructurer sa dette. L’accès au crédit étant aux USA lié à un score établi pour chaque client par un organisme fédéral indépendant, les bénévoles aident les clients pénalisés par une mauvaise gestion de leur compte bancaire à mieux le gérer, de façon à remonter leur score pour, au final, leur ouvrir les portes de l’accession à la propriété ou leur permettre de monter une petite activité professionnelle. Cela prend de quatre-vingt-dix jours à deux ans. Bank of the West et Operation Hope ont ainsi monté une véritable plate-forme d’éducation à l’argent pour les plus jeunes et les plus déshérités.

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••• Bien entendu, les relations entre Operation Hope et les personnels de la partie « banque » de l’agence sont étroites et basées sur la complémentarité. Résultats, plusieurs dizaines de personnes ont été diplômées dans le domaine du développement d’activités depuis le début de l’action (conception de vêtements, restaurants, services à la personne, etc.). Les ouvertures de comptes bancaires ont été pour une même période de plus de 130 % supplémentaires à la moyenne des autres agences Bank of the West de Californie. Aucun incident (tenue de compte, remboursement de prêt…) n’a été enregistré auprès des clients qui ont participé à ces actions. Lors de la conférence « Federe », organisée en juin 2007 par Les Échos, John Bryant, président d’Operation Hope et ami de Bill Clinton, a qualifié son action de « Croix-Rouge économique » : « Avec ce programme, Bank of the West a appris qu’il y avait des affaires en vue auprès des communautés laissées-pour-compte par les autres banques. Aux États-Unis, il y a des millions de gens qui veulent avoir accès au rêve. Ce sont des gens qui ne sont pas complètement fauchés mais plutôt pauvres dans leur tête. Ils ne croient plus à leurs rêves. Operation Hope et Bank of the West leur donnent plus qu’une tape amicale sur l’épaule, un véritable coup de pouce vers le haut. »

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Sur une période de dix-huit mois, l’ensemble des agences de Bank of the West, en partenariat avec Operation Hope, ont formé au banking environ 200 000 adolescents issus des quartiers en difficulté. Le président de Bank of the West fait partie lui-même des formateurs bénévoles… Pour terminer sur une note d’humour, John Bryant, au cours de son intervention a fait remarquer à l’assistance que « développer du business bancaire auprès des pauvres est aux États-Unis une bonne idée car il y a beaucoup plus de pauvres que de riches, et les riches, eux, ils ont tout de suite quatre ou cinq avocats à leurs côtés, ce qui rend le business avec eux tout de suite plus compliqué »…

Voilà un bel exemple qui montre comment on peut à la fois créer de nouveaux marchés et services tout en développant l’autonomie d’acteurs locaux aux conditions plus que modestes. Toutes propor-

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tions gardées, il pourrait donner de bonnes idées d’actions aux entreprises qui sont installées dans les zones urbaines sensibles. Plus près de nous, une autre banque, française celle-là, la Société Générale, a organisé, au printemps 2008, une semaine de la solidarité pour soutenir ceux de ses salariés qui participent à de telles opérations (bénévolat, levées de fonds, expositions et conférences sur les thèmes de l’insertion professionnelle, de la lutte contre l’illettrisme…), ainsi que les associations caritatives partenaires. L’association Talents & Partages, fondée par les collaborateurs du groupe et travaillant en faveur de l’enfance défavorisée, des personnes âgées en difficulté, des personnes handicapées et de l’insertion professionnelle, était en première ligne. Les achats responsables Une politique d’achats responsables fait partie intégrante de la responsabilité sociale de l’entreprise. Elle est aussi un des éléments économiques de la démarche de développement durable, impliquant l’abandon d’une logique de « moins-disant » au profit d’une vision plus large et plus « durable ».

Des achats respectueux de l’environnement (« achats verts »), sélectionnant les produits qui ont le plus faible impact : ceux, par exemple, marqués d’un écolabel ou recyclés, biodégradables, ou encore issus de l’agriculture biologique. Des achats solidaires, par exemple des produits fabriqués par des associations de solidarité (CAT1, jeunes en réinsertion…), ou dont une partie des ventes est reversée à des associations de protection de l’environnement ou humanitaires. 1. Centres d’aide par le travail visant à l’insertion des personnes handicapées par une activité professionnelle.

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Qu’entend-on exactement par « achats responsables » ?

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Des achats issus du commerce équitable, forme de commerce qui garantit un revenu décent à une communauté de producteurs et accompagne ces derniers dans l’adoption de modes de production respectueux de l’homme et de son environnement. L’achat responsable implique entre acheteur et fournisseur un dialogue qui doit déboucher sur des engagements réciproques et des progrès partagés. Certaines entreprises « acheteuses » développent à l’égard de leurs fournisseurs des formules d’accompagnement et d’aide dans un esprit d’ouverture et de transparence. La pression sur les prix ou les délais, l’instauration d’un rapport de force, l’ingérence ou l’insuffisance d’information sont autant de grains de sable susceptibles de faire capoter une bonne relation. En arrière-fond, on le voit, le respect des droits de l’homme, l’équité socio-économique, la préservation de l’environnement sont ici en jeu… et toujours, bien sûr, l’image de l’entreprise.

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Dans le domaine des achats comme dans plusieurs aspects déjà vus d’une activité, ne pas adopter quelques règles éthiques, c’est risquer la réputation de son entreprise… et faire courir des risques aux investisseurs. Quelques grands groupes l’ont d’ailleurs compris à leurs dépens : après des campagnes négatives pour l’image de l’entreprise menées par les ONG et relayées par la presse, ils ont ensuite noué des partenariats avec ces mêmes ONG. En cause, le plus souvent, des affaires qui mettent en jeu le travail d’enfants, le non-respect des principes de l’OIT, l’utilisation de bois provenant d’exploitations non labellisées… Car si une politique d’achats responsables implique d’inciter ses fournisseurs et sous-traitants à adopter les mêmes exigences de développement durable que celles appliquées à sa propre entreprise et contribue ainsi à propager la notion de responsabilité sociale, elle impose un certain nombre de contraintes, notamment des vérifications régulières du respect des règles par ces mêmes fournisseurs et sous-traitants, ce qui oblige, éventuellement, à remonter toute une chaîne de fabrication, des matières premières aux produits finis. Or, il peut s’avérer difficile de bien connaître les conditions de fabrication dans des mines ou des ateliers situés à l’autre bout de la planète.

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Les grands groupes, qui sont aussi les mieux placés pour exiger de leurs fournisseurs des conditions de travail décentes, sont d’ailleurs largement sollicités à ce sujet par les ONG. La relation ONG-entreprise est, en la matière, profitable à l’une comme à l’autre : à l’entreprise elle apporte une reconnaissance de sa volonté d’agir dans le respect des règles de l’éthique, à l’ONG, elle apporte les moyens d’améliorer l’efficacité de son action.

Une charte fournisseur a été élaborée, document contractuel que Carrefour fait signer à chacun de ses fournisseurs et dont le nonrespect peut conduire à la remise en cause des relations commerciales, ainsi qu’une méthodologie visant à vérifier le respect des obligations contenues dans cette charte. À l’exception de cas de violation flagrante ou répétitive, il ne s’agit pas de sanctionner les fournisseurs qui ne respectent pas ces principes (une telle action induirait la suppression des revenus pour les populations locales), mais de contribuer à l’amélioration des conditions de travail, en recommandant des mesures correctrices et en contrôlant leur mise en œuvre. Casino, de son côté, a mis en place une politique d’accompagnement de ses fournisseurs visant à fidéliser ceux-ci en améliorant les modalités de collaboration. La création d’un « contrat de croissance » établi sur plusieurs années avec un engagement du distributeur à faire progresser le volume d’affaires offre aux PME une meilleure

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C’est ainsi que le groupe de distribution Carrefour a sollicité, dès 1997, la FIDH (Fédération internationale des droits de l’homme) afin d’obtenir son aide pour concrétiser son engagement en matière de protection des droits fondamentaux des individus au travail chez ses fournisseurs textiles. Ce partenariat, le premier conclu par la FIDH avec une entreprise, repose sur des principes exigeants pour Carrefour, qui doit s’interdire au sujet de cette coopération toute communication pouvant être exploitée pour cautionner son activité. Protégée de son côté de toute récupération en communication, la FIDH se réserve le droit de rompre le contrat à tout moment et de dénoncer publiquement tout manquement de Carrefour aux normes internationales en matière de droits humains.

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visibilité à moyen terme. Le lancement du cercle Marco-Polo a également offert aux PME un lieu de réflexion et de partage d’expériences. Les bénéfices de cette politique se ressentent sur la qualité de service et d’efficacité économique via une offre différenciée selon les régions (en Bretagne, par exemple, Casino fait travailler quelque 200 fournisseurs de crêpes…) et innovante pour le consommateur, qui stimule les ventes et contribue au développement économique des régions où le distributeur est implanté. L’optimisation de la chaîne d’approvisionnement, en termes de réactivité, de transparence, de traçabilité et de productivité, est aussi une source d’économie. Aujourd’hui, si l’article 2 de la loi sur les nouvelles régulations économiques (loi NRE) s’adressant aux sociétés cotées traite de l’importance de la sous-traitance, et si la réforme du Code des marchés publics introduit des critères environnementaux et éthiques1, aucune loi n’oblige les sociétés non cotées à respecter de telles conditions : les règles en la matière sont du domaine de la soft law, ni obligatoires ni contraignantes.

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Dans les faits, on voit qu’il découle des recommandations rapportées plus haut qu’un fournisseur pouvant faire valoir sa politique de développement durable met de son côté plus de chances de remporter un marché. Par ailleurs, une entreprise n’est pas automatiquement protégée contre le comportement social de ses sous-traitants : outre les sanctions médiatiques, des sanctions juridiques peuvent être appliquées. Il est dès lors légitime, pour un donneur d’ordres, de suspendre ou de rompre ses relations commerciales avec un sous-traitant qui, après des tentatives de remédiation (accompagnement, incitation de 1. L’article 14 stipule ainsi que « la définition des conditions d’exécution d’un marché dans les cahiers des charges peut viser à promouvoir l’emploi de personnes rencontrant des difficultés particulières d’insertion, à lutter contre le chômage ou à protéger l’environnement. Ces conditions d’exécution ne doivent pas avoir d’effet discriminatoire à l’égard des candidats potentiels ».

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l’entreprise cliente à corriger une politique non conforme), ne respecterait pas les préconisations en matière de comportement social ou environnemental. La charte globale des droits fondamentaux du groupe Danone prévoit ainsi l’arrêt de toute relation commerciale – après constat et mise en demeure – avec un sous-traitant ne respectant pas cette charte. Le modèle Ikea Ikea achète pour environ 17 milliards d’euros dans une année. Compte tenu qu’une partie très importante de ces achats concerne des ressources naturelles forestières, donc du bois, le distributeur suédois a depuis longtemps intégré une logique de développement durable et ne s’approvisionne plus en bois exotique depuis plus de quinze ans. Mieux, en 1994, Ikea a participé à la création du label FSC (Forest Stewardship Council). Son pôle achats est donc au cœur de sa politique de développement durable, nommée, pour la cause, « Ikea Way » ou « IWAY ». Ikea a créé son propre référentiel, l’« IWAY standard », dans le but d’intéresser progressivement ses 1 300 fournisseurs aux pratiques du développement durable. Tous les acheteurs d’Ikea ont été formés à l’IWAY et l’appliquent lors des appels d’offres. En amont de la livraison du matériel commandé, ce référentiel comporte quatre niveaux de conformité :

– au-delà du cadre légal, Ikea a construit son propre standard qui s’articule autour de la proscription de certains produits chimiques et de tous les bois exotiques, d’une certaine forme de standardisation de ses meubles et de leur conditionnement pour permettre une maximisation du remplissage de leurs moyens de transport. Pour tous ces points, Ikea accompagne ses fournisseurs pour faciliter leur mise à niveau ; – les fournisseurs certifiés ISO 14001 sont, bien sûr, adoubés ; – a contrario, les fournisseurs qui ne s’engagent pas dans une démarche d’amélioration de leurs standards, et quel que soit leur niveau de départ, peuvent voir leurs commandes gelées, voire être exclus. •••

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– strict respect par le fournisseur de la loi locale en matière de respect de l’environnement, du social et des règles de sécurité ;

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••• À ce jour, la quasi-totalité des fournisseurs d’Ikea respectent le fameux IWAY. Néanmoins, le distributeur s’est inscrit dans une logique de vérification régulière de l’adéquation de ses fournisseurs à ses standards. Ainsi, une fois tous les deux ans, un cabinet spécialisé pratique un audit de ces fournisseurs, alternativement sur la question environnementale et sociale. En cas de refus du fournisseur, de sa non-conformité ou de sa mauvaise volonté à s’aligner sur ces standards, Ikea stoppe le plus rapidement possible sa coopération avec celui-ci. Pour être référencés auprès d’Ikea, les fournisseurs doivent s’engager par écrit à respecter ses standards et aussi à effectuer euxmêmes leur audit et, le cas échéant, celui de leurs propres fournisseurs. Si un fournisseur qui intéresse beaucoup Ikea ne rentre pas dans ses standards minima, le distributeur suédois lui accorde de trois à vingt-quatre mois pour lui permettre de développer un plan d’action approprié.

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Ces exigences fortes d’Ikea vis-à-vis de ses fournisseurs ne sont pas sans contreparties. Afin d’avoir une relation gagnant-gagnant, le distributeur leur offre une certaine forme de pérennisation de leurs relations client-fournisseur, intéressante sur un marché très concurrentiel. Ikea a également intérêt à la bonne santé financière de ses sous-traitants et développe à cet effet des relations de confiance qui passent par un engagement sur un volume réel d’achats afin de faire baisser les coûts, un respect des délais de paiement à trente jours fin de mois et un accompagnement réel de ses fournisseurs dans une logique d’achats responsables ou lors des éventuelles cessations de contrat hors non-respect des standards.

Nul besoin cependant d’être une multinationale pour mettre en place une politique d’achats responsables. Ainsi, TDV Industries – PME basée à Laval et un des plus importants fabricants européens spécialistes de tissus pour vêtements de travail et de protection – propose, depuis 2005, à ses clients une offre en coton équitable labellisée Max Havelaar. Membre du programme « Fibre citoyenne » porté par Yamana et du Mouvement français de la qualité, certifiée ISO 9001 (gestion de la qualité) et ISO 14000 (management de l’environnement), TDV Industries est également engagée dans un Agenda 21.

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Les grandes sociétés et les collectivités locales sont « de plus en plus sensibles à l’argument » du commerce équitable, observe Christophe Lambert, son P-DG, lui-même très engagé dans la démarche de développement durable. « Ces grands donneurs d’ordres sont vraiment sensibilisés au développement durable. Ils se souviennent des déboires qu’a pu connaître Nike il y a quelques années, accusé d’employer des enfants pour la fabrication de ses chaussures », constate ce dirigeant, qui a également signé une convention avec Max Havelaar : l’association garantit la traçabilité du coton, depuis la récolte jusqu’au produit fini. Le commerce équitable, le summum de l’achat responsable ?

Le commerce équitable fonctionne sur la base d’une relation stable, qui permet des préfinancements – jusqu’à 60 % du prix de la future récolte dès le début de la saison – afin d’éviter au producteur de recourir à des usuriers pour financer son activité et sa vie quotidienne dans l’intervalle (dans les circuits conventionnels, le producteur doit en effet souvent attendre plusieurs mois pour être payé après sa livraison). En contrepartie, les producteurs doivent fournir des produits conformes aux exigences de qualité du consommateur. Le commerce équitable fonctionne dans le respect des exigences du développement durable : il favorise le développement économique en permettant aux petits producteurs de percevoir un revenu stable qui leur permet de vivre et d’investir pour mieux produire ; il

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Né de la conscience du caractère inégal des échanges du commerce mondial, le commerce équitable se caractérise par le souci de corriger les préjudices subis par les producteurs désavantagés, souvent des pays du Sud, en leur garantissant des conditions d’achat de leurs produits (café, chocolat, thé, bananes, coton…) à un prix minimum, tenant compte du coût des intrants, des rendements, de la main-d’œuvre, et capable d’assurer les besoins élémentaires de leur famille (nourriture, hygiène, éducation, santé…). Ce prix reste stable si le cours baisse, mais augmente avec lui s’il monte.

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favorise aussi le développement social en réunissant ces petits producteurs dans des organisations démocratiques, bien gérées et autonomes face au marché, au sein desquelles les droits sociaux sont respectés et les projets (santé, éducation…) financés au bénéfice de tous. Enfin, le commerce équitable préserve l’environnement en accompagnant les producteurs vers des modes d’exploitation réduisant les impacts sur la nature, et vers des méthodes d’agriculture biologique. Quel rôle pour l’acheteur responsable ?

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Pratiquement, pour l’acheteur responsable, il s’agit d’évaluer, pour tout produit acheté, son rapport qualité/prix selon les critères habituels auxquels il faut ajouter le niveau de respect social et environnemental de la chaîne de fabrication du produit (politique sociétale et environnementale du fournisseur), ainsi que l’éthique marketing : transparence, loyauté, respect des engagements. Au-delà de la simple « rentabilité » du produit (ou du service) acheté, c’est l’ensemble du cycle de vie qui doit être considéré. L’achat d’un produit « vert » peut être en effet plus coûteux au départ, mais il faut examiner si ce surcoût est compensé à long terme. Ainsi, les ampoules « basse consommation » sont plus chères à l’achat, mais durent significativement plus longtemps et consomment moins d’énergie. L’achat d’un photocopieur « recto verso » permet de faire de substantielles économies de papier… L’analyse doit donc tenir compte du coût initial, de la durée de vie, de la durabilité (entretien, réparations), du coût d’utilisation, et enfin de l’élimination du produit. Au final, acheter « responsable » ne coûte pas toujours plus cher. Un audit des fournisseurs doit par ailleurs garantir la réalité des informations communiquées et des engagements pris. Cette vérification peut trouver sa place dans le cadre d’une politique d’accompagnement des fournisseurs et la recherche d’une relation gagnantgagnant (pratique de prix équitables, partage d’informations…). Enfin, l’acheteur responsable peut aussi avoir recours au secteur protégé, qui intervient essentiellement via les établissements et services d’aide par le travail (ESAT, ex-CAT).

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À noter : les appels d’offres peuvent préciser l’exigence d’un écolabel (s’il existe pour le produit recherché) ou préciser les caractéristiques environnementales spécifiques, du type « photocopieur permettant de faire des tirages recto verso et consommant moins de x Watts » ou « bois originaire de forêts gérées de matière durable selon le label FSC »… Et la gouvernance…

Quelques récentes affaires financières de fraude et de corruption (Enron, Worldcom, Tyco…), en ôtant toute crédibilité en matière de responsabilité sociétale aux entreprises impliquées, montrent l’importance d’une gouvernance irréprochable pour la réussite d’une démarche de développement durable. Cette bonne gouvernance passe, bien sûr : • par le respect des lois et règlements, mais aussi par l’indépendance du conseil d’administration vis-à-vis de la direction de l’entreprise ; • par la reconnaissance du droit de parole et du droit à une représentation de l’actionnaire salarié selon les règles de la démocratie actionnariale ; • par une information transparente et rigoureuse des parties prenantes ; • par un reporting financier et de développement durable aux données chiffrées vérifiables sinon auditées.

Par ailleurs, alors qu’avec le renforcement des contraintes réglementaires les risques liés à l’éthique et à la conformité sont de plus en plus présents, chartes éthiques et codes de bonne conduite se sont multipliés dans les entreprises. Publiés sur l’intranet, distribués en version imprimée, mis en ligne sur Internet, voire diffusés par courrier électronique, ces textes visent à sensibiliser et à responsabiliser l’ensemble des collaborateurs et, même dans certains cas, à l’instar de ce que la « loi Sarbanes-Oxley » a rendu obligatoire aux ÉtatsUnis (et aux filiales de groupes non étatsuniens implantés là), à

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Elle implique enfin de donner un véritable droit de regard sur le reporting aux représentants des salariés et à la société civile.

Les principales actions à entreprendre

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appeler les collaborateurs à rapporter à une autorité ad hoc toute irrégularité dont ils auraient été témoins. Une mesure qui ne saurait être instaurée en France sans précaution (la Cnil1, très attentive sur ce terrain, avait annulé les premières chartes éthiques de McDonald’s France et de la Compagnie européenne d’accumulateurs) ni sans être accompagnée d’un système de protection pour le « lanceur d’alerte »… La lutte contre le blanchiment d’argent sale et la corruption sont au centre de ces politiques d’alerte : Les Échos2 rapportaient que « quelque 1 000 milliards de dollars se perdent, chaque année, […] dans les méandres de la corruption. Les seuls pots-de-vin liés aux appels d’offres publics sont évalués à 200 milliards de dollars »… Certaines entreprises ont choisi d’adhérer au Pacte mondial des Nations unies, sorte de guide de bonne conduite dont le dixième principe impose justement le respect de la Convention de Mérida (Mexique) : « Les entreprises sont invitées à agir contre la corruption y compris l’extorsion de fonds et les pots-de-vin. »

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Adoptée par l’Assemblée générale le 31 octobre 2003, elle constitue un premier instrument à la fois universel et global contre la corruption, en fixant un ensemble cohérent de principes et de règles communs, tant en matière de prévention que de répression, et en favorisant la coopération internationale entre un nombre important d’États. D’autres ont choisi de mettre en place des comités d’éthique, en s’inspirant de modèles extérieurs comme l’OCDE ; beaucoup de PME, pour leur part, se réfèrent au vade-mecum de Transparency International.

1. Commission nationale de l’informatique et des libertés. - Les Échos, édition du 2 novembre 2005. 2. Édition des 8-9 décembre 2006.

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Le guide du développement durable en entreprise

La corruption coûte très cher Le fait de proposer, sans droit, à tout moment, directement ou indirectement, des offres, des promesses, des dons, des présents ou des avantages quelconques à une personne dépositaire de l’autorité publique, chargée d’une mission de service public, ou investie d’un mandat électif public dans un État étranger ou au sein d’une organisation internationale publique, pour qu’elle accomplisse ou s’abstienne d’accomplir un acte de sa fonction, de sa mission ou de son mandat ou facilité par sa fonction, sa mission ou son mandat, en vue d’obtenir ou de conserver un marché ou un autre avantage indu est passible de dix ans d’emprisonnement et de 150 000 euros d’amende, précise la loi1.

La relation donneur d’ordres - sous-traitants

Le sidérurgiste ArcelorMittal s’est en effet retrouvé au centre de l’actualité à la mi-septembre 2008 à la suite d’un article de La Voix du Nord2, repris par l’ensemble de la presse, révélant une affaire de blanchiment de dizaines de millions de tonnes (entre 3 000 et 5 000 tonnes, selon ArcelorMittal) de déchets toxiques. L’usine Arcelor Atlantique et Lorraine, à Dunkerque, cédait (par l’intermédiaire de Solac, filiale d’Arcelor) du fioul naphtalisé, un toxique dont la gestion est normalement soumise à une réglementation stricte, issu du nettoyage de ses installations, à l’entreprise de valorisation de déchets Sonolub (filiale de Veolia). Mais au lieu de traiter ce fioul naphtalisé, Sonolub l’aurait, pendant des années, convoyé jusqu’en Belgique, sous couvert de faux documents administratifs le déclarant comme du fioul domestique, finalement utilisé comme carburant pour bateaux. Sonolub aurait bénéficié par la même occasion du 1. Articles 432-11, loi nº 2000-595 du 30 juin 2000, art. 1, Journal officiel du 1er juillet 2000. 2. La Voix du Nord, édition du 17 septembre 2008.

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Une affaire récente vient de mettre en relief la question délicate de la responsabilité sociétale et des risques encourus dans la relation entre une entreprise et ses sous-traitants.

Les principales actions à entreprendre

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remboursement de la Tipp1 par l’État… Pour ce qui était, en fait, un transport illégal de matière dangereuse vers un pays de l’Union européenne. Outre Arcelor et Sonolub, deux autres entreprises auraient été impliquées dans ce trafic frauduleux : Rubis Terminal, entrepôt d’hydrocarbures qui gère des bacs de stockage et des appontements sur le port de Dunkerque, et Agena Tramp, qui s’occupait des formalités douanières. Selon La Voix du Nord, les profits générés seraient estimés à plusieurs millions d’euros, une goutte d’eau dans les 7,5 milliards d’euros de bénéfices nets réalisés par ArcelorMittal en 2007. Et le groupe fait valoir2 qu’il « recycle un nombre relativement important de déchets, toujours dans le cadre de la réglementation de son arrêté d’exploitation et toujours sous le contrôle de la Drire3», mais précise qu’il n’a pas le contrôle de l’ensemble de la chaîne en aval de sa société : « Ces contrôles sont réglementés, mais ils ne sont pas exercés par nous-mêmes. » Reste que c’est le nom d’Arcelor qui figurait en première place dans les titres et les articles, et c’est ce nom qui sera retenu par le public : plus connu, plus exposé… Risque d’image.

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Le tribunal chargé de l’affaire retiendra-t-il l’argument du sidérurgiste ? Rien n’est moins sûr… Risque juridique. Un donneur d’ordres est en effet supposé connaître les conditions dans lesquelles sont fabriqués les produits qu’il met sur le marché, mais de plus en plus aussi ce qu’il advient de ces produits quand ils sont en fin de vie, et ce qu’il advient des externalités, sous-produits, produits dérivés, déchets…

1. Taxe intérieure sur les produits pétroliers. 2. Par la voix de Daniel Soury-Lavergne, directeur général d’ArcelorMittal France, cité par Mathieu Delahousse, du Figaro, édition du 18 septembre 2008. 3. Direction régionale de l’industrie, de la recherche et de l’environnement.

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Certes, les consommateurs ne vont pas bouder les produits d’ArcelorMittal comme ils ont pu, il y a quelques années, bouder les produits de Danone, à la suite de l’annonce, en mars 2001, du plan de restructuration de sa branche Biscuits, qui supprimait quelque 570 emplois en France. Ce « boycott », qui répondait à un appel d’une partie des salariés du groupe, avait significativement ralenti la croissance des ventes dans cette branche. On ne trouve pas de produits « ArcelorMittal » dans les rayons des supermarchés. Les investisseurs, en revanche, pourraient soudain trouver moins d’attrait à un groupe soupçonné de laxisme dans ses contrôles, une négligence susceptible de coûter cher en réparations dans le contexte d’une législation qui entend désormais que les pollueurs soient les payeurs.

Cette question est particulièrement délicate pour les donneurs d’ordres qui font travailler des sous-traitants à l’étranger. Les « affaires » se sont en effet multipliées ces dernières années. Depuis les dénonciations d’équipementiers sportifs faisant – indirectement – appel au travail des enfants1, les chaînes de sous-traitance mises en

1. Nike, pendant des années cible privilégiée des activistes et des campagnes de boycott, contrevenant aux pratiques de confidentialité en vigueur dans le secteur textile, a fini par publier la liste et la localisation de l’ensemble de ses sous-traitants.

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Plus ennuyeux encore, le risque d’être « sorti » d’un fonds éthique, à l’instar du groupe minier anglo-australien Rio Tinto : un fonds de pension appartenant au gouvernement norvégien a en effet revendu toutes ses actions de Rio Tinto en raison des risques que ce groupe fait peser sur l’environnement dans l’exploitation (avec la société américaine Freeport, elle-même exclue de ce fonds en 2006) de la mine Grasberg, en Indonésie, par ses rejets de produits toxiques dans une rivière voisine. Figurer dans la « liste noire » de ce fonds souverain norvégien constitue tant aux yeux des investisseurs qu’à ceux du public une très mauvaise publicité.

Les principales actions à entreprendre

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place dans les pays producteurs (ainsi que les volumes qui impliquent de traiter avec un nombre important de sites de production) rendent en effet les contrôles très difficiles. En même temps, les importations de produits présentant un danger pour les consommateurs1 se sont également multipliées et rendent les contrôles incontournables. En résumé Mille et une actions sont donc imaginables et réalisables en matière de RSE et, que ce soit en interne ou en externe, elles ont toutes les chances d’être bien accueillies et d’accroître le capital sympathie dont bénéficie l’entreprise. Embaucher une personne handicapée, privilégier l’emploi pérenne, éviter les réunions qui s’éternisent au-delà de 17 heures, aménager l’emploi de ses salariés seniors… sont autant de gestes qui n’exigent pas de gros investissements et renforcent la motivation et la cohésion des équipes. Améliorer l’image de l’entreprise au sein de son environnement en recrutant dans le bassin d’emploi même où elle est implantée, c’est aussi réduire les risques en situation de troubles sociaux. Quelle qu’elle soit, toute action devra cependant faire l’objet d’une concertation, être expliquée et s’inscrire dans le cadre d’une démarche clairement définie.

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Points d’appuis utiles

Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail (Anact) : établissement public organisé en réseau comprenant une agence nationale et vingt-cinq Aract (agences régionales). Ses actions 1. Par exemple, l’affaire des millions de jouets chinois rappelés par Mattel en 2007, ou des millions de boîtes d’aliments pour chiens et chats contaminés à la mélamine, vendues, toujours en 2007, en Amérique du Nord, faisant des milliers de victimes parmi les animaux familiers, ou encore, révélée par Le Parisien du 18 septembre 2008, les fauteuils contaminés par des sachets de diméthylfumarate, un fongicide provoquant des troubles cutanés, importés de Chine par Conforama.

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sont orientées autour de quatre axes inscrits dans le contrat de progrès conclu avec les pouvoirs publics : le développement et la promotion de la santé au travail ; le développement des compétences ; les changements techniques et organisationnels ; la gestion des âges. Autant de thèmes qui font écho au développement durable. Le département Santé et Travail intervient en entreprise, capitalise les avancées sur l’amélioration des conditions de travail, contribue au transfert des bonnes pratiques. L’Anact a signé une convention avec l’Ineris et travaille sur un projet de coopération avec l’Ademe dans le domaine de l’éco-conception. Sur le terrain, son mode d’intervention est basé sur l’analyse globale du travail réalisé par les salariés à leur(s) poste(s) de travail. Site Internet : www.anact.fr. Fondation européenne pour l’amélioration des conditions de vie et de travail (Eurofound) : organe européen créé en 1975 en vue de contribuer à la planification et à la mise en place de meilleures conditions de vie et de travail en Europe. Elle met à la disposition des gouvernements, des employeurs, des organisations syndicales et de la Commission européenne des données et des avis issus de recherches indépendantes et comparatives. La fondation déploie ses activités dans trois grands domaines d’expertise, et place l’accent sur les aspects suivants :

• conditions de vie : aspects influençant la vie quotidienne des citoyens européens, y compris l’équilibre entre la vie professionnelle et la vie familiale, la mise à disposition de services publics sociaux et la promotion de l’intégration dans le monde du travail ; • relations industrielles : mutations industrielles et restructurations d’entreprises, participation des travailleurs à la prise de décision, européanisation des relations industrielles.

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• conditions de travail : y compris l’organisation du travail, les horaires, la flexibilité, la maîtrise des mutations des conditions de travail ;

Les principales actions à entreprendre

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La fondation a créé récemment l’Observatoire européen du changement (EMCC) pour analyser et anticiper les mutations intervenant dans le monde industriel et au sein de l’entreprise en vue de soutenir le progrès socio-économique. Les rapports de recherche de la Fondation peuvent être téléchargés sans frais, directement, à partir du site Web, ou commandés en ligne sur www.eurofound.europa.eu. La fondation est pilotée par un conseil d’administration tripartite, composé de représentants des pouvoirs publics (les gouvernements et la Commission européenne), des organisations patronales et des organisations syndicales. L’Agence européenne pour la santé et la sécurité au travail a été mise en place en 1996 à la suite d’une décision du conseil des chefs d’État et de gouvernement. Sa fonction principale est de recueillir et diffuser les informations techniques, scientifiques et économiques disponibles dans le domaine de la santé et de la sécurité au travail. Le recueil et la diffusion d’informations se font à la demande de l’Union européenne, des États membres ou des partenaires sociaux. Pour réaliser sa mission l’Agence s’appuie sur des points focaux nationaux.

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Pour la France, le point focal national est implanté dans la sousdirection chargée des conditions de travail. C’est elle qui gère le site Internet http://fr.osha.europa.eu/. Elle est l’une des composantes de la direction des relations du travail au sein du ministère des Affaires sociales, du Travail et de la Solidarité. Les documents mis en ligne sont soit des lois ou règlements, soit des textes issus des travaux du Conseil supérieur de la prévention des risques professionnels. Ce conseil, placé auprès du ministre chargé du Travail, existe depuis 1978. Il est le lieu privilégié de la concertation entre partenaires sociaux et pouvoirs publics pour tout ce qui relève de la santé et la sécurité au travail. L’Observatoire des discriminations, créé en décembre 2003 et dirigé par le professeur Jean-François Amadieu, fait partie du Cergors (Centre d’étude et de recherche sur les organisations et les relations sociales) de l’université Paris I Panthéon-Sorbonne. Il mène des

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Le guide du développement durable en entreprise

travaux qui utilisent une grande diversité de techniques d’enquêtes et adopte une perspective pluridisciplinaire (gestion, sociologie, droit, économie) afin d’enrichir la connaissance des questions de discrimination. L’observatoire s’associe aux efforts menés par les pouvoirs publics ou les associations dans différents domaines (parité, homophobie, racisme, handicap, seniors, obésité, etc.). L’Observatoire est engagé au sein du réseau des entreprises au service de l’égalité des chances. L’Association française des managers de la diversité (AFMD) est un espace de rencontre, de réflexion, d’échanges et de partage d’expériences qui propose à ses adhérents, acteurs de la diversité (responsables fonctionnels en charge de promouvoir la diversité dans l’entreprise, managers de proximité…), de travailler ensemble pour professionnaliser, outiller, structurer, accompagner les managers dans leurs actions de promotion de la diversité (www.afmd.fr). L’Agefiph est une association privée au service des personnes handicapées et des entreprises, auxquelles elle apporte des aides et des conseils ainsi que l’appui d’un réseau de prestataires sélectionnés. Sa mission, qui s’inscrit dans le cadre d’une convention signée avec l’État, est de développer l’emploi des personnes handicapées dans les entreprises du secteur privé.

Depuis sa création en 1987, l’Agefiph a permis de multiplier par dix le volume annuel des recrutements de personnes handicapées. Sa connaissance du secteur et son travail d’analyse en font un expert de l’emploi des personnes handicapées. Ses études et ses publications contribuent à mieux connaître cette population et à mieux la préparer aux évolutions du marché du travail.

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Ses objectifs sont principalement d’améliorer l’accès à l’emploi des travailleurs handicapés, d’aider les entreprises à recruter et à conserver leurs salariés handicapés, d’approfondir la connaissance de la population active handicapée.

Chapitre 5

Les principaux leviers de réussite

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Votre entreprise dispose maintenant d’une stratégie de développement durable partagée, d’un plan d’action ad hoc, d’une organisation pour mettre tout cela en musique et de supports d’information et de modules de formation dédiés. Et, pour couronner le tout, le patron de votre entreprise est motivé à fond pour le développement durable. Mais tout cela est-il suffisant pour réussir ? Pour les premières semaines ou les premiers mois, oui, sans doute. Ce sont assurément les conditions nécessaires. Mais…, passée la période d’euphorie que connaissent toutes les entreprises et leurs collaborateurs lors de la mise en route d’un processus de développement durable, pour que votre action soit, justement, durable, il va vous falloir d’entrée de jeu consolider le tout et mettre en place en parallèle un certain nombre d’actions de soutien, des régulateurs et des accélérateurs de motivation. Tout d’abord, il va vous falloir sensibiliser les managers à cette nouvelle problématique du développement durable et notamment leur faire intégrer le plus rapidement possible l’idée que, mis concrètement en œuvre, celui-ci est un véritable levier de performance pour l’entreprise. Bien mené et bien appliqué, il leur permettra, entre autres, d’atteindre plus vite, et dans de meilleures conditions, leurs objectifs professionnels et ceux qu’ils ont fixés à leurs équipes.

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Le guide du développement durable en entreprise

Sensibiliser tous les acteurs de l’entreprise On l’a déjà lu dans ce présent ouvrage, le développement durable est avant tout un changement de comportement, presque un changement culturel. C’est pour cette raison précisément qu’il doit être soutenu en permanence par des actions de sensibilisation et particulièrement par des actions d’information et de formation. Il vous faut donner à tous les clés pour agir, mais aussi souligner et encourager les progrès.

Rien n’empêche ensuite, au contraire, de créer un lien régulier avec le réseau formé par ceux qui sont directement amenés à œuvrer au quotidien dans le développement durable. La formule newsletter est assurément la mieux adaptée, qu’elle soit sous forme imprimée ou électronique car, dans les périodes de démarrage d’une nouvelle activité, il faut pouvoir disposer de supports de communication souples et rapides. Leur rythme de parution : au moins mensuel, mais hebdomadaire, c’est plus efficace. Cette lettre de quelques pages de format A4 se voudra un support d’informations sur les trois piliers du développement durable, de partage d’expériences et de mutualisation de bonnes pratiques. La newsletter doit servir de trait d’union entre tous les contributeurs développement durable au sein de votre entreprise. Envoyée également en push par e-mail à ses principaux décideurs, elle va aider à mettre tout le monde sur un même niveau de connaissance et de compréhension, à faire monter progressivement en compétence sur cette problématique les principaux acteurs et soutiens du développement durable.

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Voyons d’abord les actions d’information : plutôt que de créer un site Internet dédié qui va identifier mais aussi, revers de la médaille, isoler le développement durable du reste, mieux vaut irriguer par des informations développement durable tous les supports d’information de l’entreprise, qu’ils soient imprimés, électroniques ou audiovisuels. Cela nécessite une bonne entente, voire une véritable osmose entre les producteurs d’information situés dans la ou les structures développement durable de l’entreprise et sa ou ses structures de communication.

Les principaux leviers de réussite

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Son contenu ? Informer sur tout ce qui bouge dans et autour de l’entreprise dans le domaine du développement durable. Au début, n’hésitez pas à faire mousser même les petites actions et n’ayez pas peur du répétitif : l’action que l’on va faire, l’action que l’on est en train de faire, l’action que l’on a faite et ses résultats. D’une pierre, trois coups… Il est important au début de créer une dynamique forte en faveur du développement durable. Le style des informations doit donc être plus ludique que technique.

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Pour mieux motiver encore ses lecteurs, la newsletter n’hésitera pas à leur montrer ce que font les autres entreprises en matière de développement durable, à commencer par vos concurrents. Tout comme la canicule de l’été 2003 a accéléré la prise de conscience des Français sur le changement climatique et ses conséquences, montrer ce que font vos principaux concurrents en la matière va accélérer la prise de conscience en interne… À cet effet, s’appuyer sur une synthèse finement choisie d’articles parus dans la presse au sujet d’actions de développement durable (cf. page 61) montrera d’abord que votre entreprise n’est pas la seule à s’engager et que certains de vos concurrents s’y sont mis, et même, parfois, ont pris de l’avance…. Si tel est le cas, appuyez-vous sur elle pour montrer ce qu’il est possible de faire dans votre secteur professionnel, dans votre entreprise. Une liste des sujets, dates et lieux des principales manifestations, publiée dans chaque numéro de la newsletter, indiquera par effet miroir l’importance grandissante de cette nouvelle thématique et entretiendra la flamme auprès des lecteurs tout en renforçant vos principaux acteurs développement durable en interne. Le rapport annuel de développement durable, autre source intéressante d’informations sur le sujet, vise d’abord une cible externe d’investisseurs, d’actionnaires, de gros clients, de journalistes… Mais, il ne faut pas hésiter à le diffuser aussi aux principaux managers de l’entreprise, aux collaborateurs intéressés quelle que soit leur activité ou leur position hiérarchique, aux partenaires sociaux, ONG et associations de consommateurs. N’hésitez pas non plus à envoyer, de temps en temps, au domicile de vos collaborateurs, avec votre magazine interne ou le bulletin de

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Le guide du développement durable en entreprise

En ce qui concerne la formation, il vaut mieux procéder par ordre et commencer par les managers, pierres de touche de la réussite dans l’entreprise de sa stratégie de développement durable. Pour le comité exécutif ou le comité de direction, un séminaire de sensibilisation au développement durable d’une journée sera des plus profitables. Pour cette catégorie, souvent plus impressionnée par la parole externe que par le discours du directeur développement durable lui-même, surtout à ses débuts, le plus efficace est de choisir des intervenants de haute volée, spécialistes du sujet comme Nicolas Hulot, Nicole Notat, Pierre Radanne (ex-patron de l’Ademe), Jean-Marc Jancovici1 Bruno Rebelle (ex-DG de Greenpeace) ou le patron d’une grande entreprise déjà bien engagée en la matière et qui présente des résultats intéressants. À « l’étage en dessous », les managers plus proches de l’opérationnel pourront être plongés dans une formation qui donne cette fois moins des vérités politiques que des pistes d’actions concrètes. D’ailleurs, le mieux est de leur faire trouver eux-mêmes ces pistes après quelques explications sur le développement durable et ce qu’il peut apporter à l’entreprise et à eux-mêmes au quotidien. La projection d’un film comme La Vérité qui dérange de David Guggenheim avec Al Gore (2007) ou La 11e Heure. Le Dernier Virage 1. Coauteur avec Alain Grandjean de Le plein s’il vous plaît, Le Seuil, 2006.

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paye, des plaquettes d’information (d’éducation) d’ordre général sur les grandes thématiques du développement durable. Dans cette optique, les petites brochures de poche éditées par l’Ademe sont excellentes et bien adaptées à l’enseignement de masse. Avec l’accord de l’Ademe, on peut même y « repiquer » quelques pages en y ajoutant un édito de l’entreprise, son logo corporate et une ou deux pages d’actions menées par votre entreprise autour du sujet central de la brochure en question. Ainsi, par exemple, La Poste a envoyé au domicile de ses 280 000 collaborateurs le petit opuscule de l’Ademe qui explique ce qu’est le changement climatique avec, en repiquage à l’intérieur, un édito du président de La Poste sur le même sujet et une page d’infos sur le développement durable à La Poste, le tout signé conjointement par l’Ademe et l’entreprise publique.

Les principaux leviers de réussite

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de Leonardo DiCaprio (2007), voire Le Cauchemar de Darwin, d’Hubert Sauper (2004), un documentaire effroyable sur la situation des pêcheurs du lac Victoria en Afrique, est une bonne entrée en matière pour un débat. Non pas pour leur contenu propre ou les messages qu’ils véhiculent et que l’on doit, pour le présent exercice, considérer comme de l’information donnée, mais plutôt parce qu’ils invitent à réfléchir ensemble sur « Et maintenant, que fait-on dans notre entreprise pour qu’elle impacte moins l’environnement ? Pour qu’elle soit plus responsable socialement ? » L’exercice peut alors consister à répartir les participants par petits groupes en prenant soin de bien les mélanger, et faire en sorte que les personnes d’une même direction ou d’un même service ne se retrouvent pas entre elles. Chaque groupe désigne ensuite un porte-parole qui sera chargé en séance plénière de rapporter les bonnes idées ou les bonnes pistes trouvées par ses collègues pour l’entreprise.

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Il existe aussi bien sûr des actions de sensibilisation plus proches de la formation classique. Certaines peuvent d’ailleurs être dispensées par des organismes extérieurs, grandes entreprises de consulting (Ernst & Young, Deloitte, PricewaterhouseCoopers, etc.) qui ont toutes maintenant des départements développement durable étoffés, par des agences spécialisées (Ethicity, Des Enjeux et des Hommes, Utopies, etc.), voire des associations du type Comité 21, Orse, IMS Entreprendre pour la Cité, etc. Si votre entreprise est importante, il est aussi possible pour elle d’envisager de construire des modules internes de formation dédiés au développement durable, que ce soient des formations générales ou spécialisées (achats responsables, marketing responsable, etc.). Avec la taxe d’apprentissage, vous pouvez aussi co-construire des modules de formation ad hoc, pour vos cadres par exemple, avec des grandes écoles, des universités ou des établissements d’éducation divers. Le groupe La Poste finance ainsi une chaire développement durable chez Euromed, l’école de la chambre de commerce et d’industrie de Marseille. Ce partenariat a aujourd’hui débouché sur la mise en place d’un module de formation au développement

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durable en trois fois deux jours pour les managers de La Poste. Il est aussi utilisable, sous réserve de quelques adaptations, par toutes les entreprises.

Les salons et les expositions sur le développement durable ne manquent pas non plus pour s’informer, se former et échanger des bonnes pratiques. Dans cette optique, le tout récent Salon du développement durable créé en 2008 a été une réussite pour sa première édition. Pas loin de chez nous, à Bruxelles, le market place de CSR Europe (voir page 288) rassemble chaque année, sur une journée en mars, plusieurs dizaines d’entreprises qui viennent de toute l’Europe vous présenter, comme sur un marché aux légumes et avec leurs porte-parole vêtus d’un tablier ad hoc, leurs expériences les plus intéressantes. En une journée, vous en apprenez plus qu’en restant six mois assis à votre bureau. Le développement durable étant très largement basé sur le partage d’expériences, il ne faut pas hésiter à sortir de sa tanière et à aller au-devant des autres entreprises pour partager et échanger sur le sujet. Contrairement à d’autres disciplines comme la vente ou le marketing, dans le développement durable, on n’hésite pas à se passer les bonnes recettes et à s’aider les uns les autres, y compris entre concurrents. L’avenir de la planète étant en jeu, ceci explique sans doute cela. Le développement durable, c’est avant tout une grande confrérie qui rassemble en première ligne des gens convaincus du grand danger que court la planète et des actions à mener pour l’éradiquer. Il y a d’ailleurs souvent un petit esprit militant qui flotte dans ces rassemblements… Enfin, l’organisation trois ou quatre fois par an en interne de journées d’information par thèmes et ouvertes à l’ensemble du personnel

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Par ailleurs, rien ne vous empêche d’envoyer vos managers participer à l’un des multiples colloques ou tables rondes qui se tiennent chaque année en France ou à l’étranger : Federe-Les Échos (en mars), Forum mondial du développement durable (en novembre ou décembre) à Paris, Assises nationales du développement durable (une fois par an) ou Jadde (Journée annuelle développement durable et entreprises), qui tourne dans les grandes villes de province, sont aujourd’hui les mieux « fréquentés » et les plus prisés (cf. Annexe 3).

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intéressé, avec des intervenants et des présentations aussi bien internes qu’externes, est aussi un moyen efficace de sensibilisation. Les sujets ne manquent pas : éco-conception, achats responsables, commerce équitable, diversité, énergies renouvelables, etc.

Mesurer l’impact de vos actions développement durable Qui ne mesure pas, n’avance pas… En effet, si l’on peut fort bien, dans l’euphorie des premières semaines, voire des premiers mois, avancer concrètement dans la mise en œuvre d’une stratégie de développement durable au sein de l’entreprise et obtenir des premiers résultats positifs, il sera difficile de tenir la distance en avançant dans le brouillard. Ainsi, par exemple, faute d’indicateurs réguliers, beaucoup d’entreprises, et en particulier leurs dirigeants, croient progresser dans la mixité, alors qu’elles font du surplace… Rapidement, vous aurez donc besoin de repères pour pouvoir mesurer vos avancées et vos reculs, identifier quand vous faites du surplace et prendre, au regard de ces informations, les décisions adéquates.

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L’idéal, c’est de pouvoir conjointement disposer, en permanence, d’un outil fiable de reporting dédié au développement durable, pouvant être audité par l’externe, et d’un baromètre interne qui mesure, chaque année, l’évolution de l’état d’esprit de votre personnel sur ce sujet, son degré de compréhension, ses mécanismes et l’intérêt qu’il présente pour l’entreprise et par conséquent pour les emplois, les clients et les partenaires.

Mettre en place un outil de reporting dédié au développement durable Son étendue et sa complexité sont évidemment en rapport avec la taille de votre entreprise ou la spécificité de ses activités. On pense sur ce dernier point aux entreprises très polluantes qui, bien sûr, devront, notamment dans la partie environnementale du développement durable, disposer d’une batterie très complète d’indicateurs

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ad hoc. Mais, il faut éviter, tant que faire se peut, de monter une usine à gaz alors que l’on est à la tête d’une PME ou d’une PMI. Quelques indicateurs bien choisis au sein des trois piliers du développement durable suffiront. A contrario, une grande entreprise sera encouragée à disposer d’un tableau complet pouvant présenter au final plusieurs dizaines d’indicateurs. Quant aux très grandes entreprises, type CAC 40 ou majors du public, elles pourront même aller jusqu’à disposer conjointement d’un tableau de reporting complet pour accompagner le fonctionnement au quotidien des structures internes chargées de mettre en œuvre la stratégie de développement durable, et d’un tableau plus succinct, composé d’une dizaine ou d’une quinzaine d’indicateurs, pour nourrir le tableau de bord mensuel du patron de l’entreprise. Si l’ampleur des voilures des outils de reporting peut se discuter, ce n’est pas le cas de leur existence. Ces outils s’avèrent plus que nécessaires et il n’est pas question d’envisager une politique de développement durable réussie sans que l’on puisse mesurer l’évolution de ses composantes et, quelque part, montrer, preuves chiffrées à l’appui, l’efficacité de sa politique de responsabilité sociale.

La première chose, c’est de disposer de ce que l’on appelle un « protocole de reporting ». À savoir, un document qui décrit les procédures à suivre pour la collecte des informations et la mesure des données. Ce protocole va constituer un guide pour les différentes directions ou structures de l’entreprise. Les données reportées devront être conformes aux spécifications qui y sont décrites et, le cas échéant, tout écart de procédure devra être documenté et explicité. Il va également servir de référentiel pour les vérifications aussi bien internes qu’externes. À ce titre, le protocole devra être accessible sur demande auprès de l’entreprise, notamment aux lecteurs de votre rapport annuel de développement durable, de façon à ce qu’ils puissent, si besoin est, comprendre la façon dont les chiffres publiés ont été établis.

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Comment construire cet outil de reporting ?

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Pour construire ce protocole, inutile de réinventer le fil à couper le beurre, des référentiels existent, que ce soit des méthodes de calcul faisant référence, par exemple celle d’Entreprises pour l’environnement (EPE) et de l’Ademe pour le calcul des émissions de CO2, ou des lignes directrices pour le reporting développement durable du Global Reporting Initiative (GRI). Quelle pertinence pour les indicateurs ? Ceux qui figurent dans le rapport de développement durable que vous publierez doivent porter sur des thèmes significatifs des impacts environnementaux, sociétaux et économiques de votre entreprise ou susceptibles d’influencer substantiellement les appréciations et décisions de vos parties prenantes (vos actionnaires, les consommateurs et principalement vos clients, les partenaires sociaux, votre profession, les communautés et en particulier les collectivités locales, vos fournisseurs et sous-traitants, les médias, agences de notation sociale, etc., sans oublier les pouvoirs publics en charge d’une mission législative ou réglementaire dans les domaines touchant au développement durable). Il est aussi important de tenir compte des intérêts et des sujets importants pour ces parties prenantes, mais aussi des défis actuels et futurs de votre secteur d’activités, de votre entreprise, des lois et règlements en cours où à venir prochainement, des accords internationaux ou des accords volontaires ayant une signification stratégique pour votre activité. En interne, il vous faudra construire des indicateurs qui tiennent compte des valeurs clés de votre entreprise, de sa politique, de sa stratégie, de ses systèmes de management opérationnel, des risques significatifs (environnementaux, juridiques, d’image, financiers, voire boursiers pour les entreprises cotées), des facteurs critiques, de vos compétences clés et de la manière dont elles pourraient contribuer à son développement durable. La couverture des thèmes pertinents par les indicateurs choisis ainsi que la détermination de leur périmètre doivent être suffisants pour bien représenter les impacts environnementaux, sociétaux et économiques significatifs, afin de permettre au lecteur de pouvoir évaluer la performance de votre entreprise en matière de développement durable. Ici, pas question de chercher à cacher ses mauvais résultats :

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Allons encore plus loin dans l’honnêteté : toute modification des procédures de reporting (périmètre, méthode de calcul…) devra être le fait d’une amélioration de la qualité et ces changements devront être clairement explicités et documentés pour permettre une juste comparaison d’une année sur l’autre. Les informations reportées doivent être suffisamment précises et détaillées pour que les lecteurs et les parties prenantes puissent évaluer la performance de votre entreprise en matière de développement durable, notamment par rapport aux engagements pris. Si la publication du rapport de développement durable est annuelle, les informations sont disponibles en temps voulu pour la prise de décision par les parties prenantes. Si certaines entreprises, c’est le cas par exemple de Michelin, ne publient pas un rapport complet tous les ans, elles n’en publient pas moins chaque année un abstract qui présente les principaux chiffres de reporting. La clarté est aussi une qualité, surtout si l’on exerce dans des secteurs dont la nature des activités est complexe et difficile d’accès au lecteur. Les informations données doivent donc être compréhensibles et accessibles tout en préservant le niveau de détail approprié. Pour aider à la compréhension, n’hésitez pas à publier, à côté des données, un glossaire, une table des matières, des schémas, des liens, des commentaires…

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on sera, en matière de développement durable, plus apprécié sur le mouvement, j’avance dans le bon sens ou pas, que sur le résultat brut lui-même. C’est pour cela qu’il vaut mieux attendre un deuxième exercice avant de publier ses résultats. Ainsi, le lecteur pourra faire les comparaisons d’une année sur l’autre et s’intéressera plus aux progressions qu’aux chiffres bruts eux-mêmes. Surtout, ne vous laissez pas entraîner dans un exercice de propa-gande : votre rapport annuel de développement durable, dont les tableaux de reporting sont les thermomètres, devra restituer de manière la plus impartiale possible la performance de votre entreprise. C’est-à-dire qu’il doit comprendre aussi bien les aspects positifs (facile) que les aspects négatifs (plus dur). Mais, c’est la loi du développement durable et il faut s’y plier, au risque, sinon, de perdre toute crédibilité vis-à-vis de vos lecteurs, parties prenantes et agences de notation extra-financière.

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Nous avons gardé pour la fin une recommandation des plus importantes. Les processus utilisés et les informations recueillies lors de la préparation des différents documents (rapport développement durable et ses tableaux de reporting) doivent être rassemblés, enregistrés, compilés, analysés et communiqués de façon à permettre un contrôle interne de votre entreprise, en principe par le service chargé de l’audit interne, ou une vérification par un tiers externe (analyste financier, agence de notation sociale, etc.). Pour faciliter une éventuelle vérification, on aura clairement défini les hypothèses retenues et les méthodes utilisées et conservé la trace des enregistrements afin de pouvoir fournir une documentation claire et complète. Le périmètre de chaque indicateur

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Revenons à nos indicateurs. Pour chacun d’entre eux, il est défini, au sein du protocole, le périmètre-cible qu’il couvre et le périmètre effectivement couvert lors du reporting de l’exercice. On entend par périmètre-cible l’ensemble des entités de votre entreprise concernées par un indicateur sur lequel les données peuvent être obtenues. Il s’agit bien entendu du périmètre que votre entreprise souhaite couvrir et qui correspond à la totalité de vos activités, c’est-à-dire les différentes unités d’affaires, les directions transverses, les filiales s’il y en a, et même, dans certains cas, vos sous-traitants. On pense ici, par exemple, aux entreprises qui sous-traitent le transport de leurs produits : le volume des émissions de CO2 des sous-traitants produit par votre part de marchandises transportées doit être comptabilisé dans votre total de CO2 émis. Votre protocole ne doit pas être immuable car votre entreprise évolue. Il doit donc être révisé et revalidé chaque année, au plus tard en novembre, de façon à pouvoir intégrer ces changements de façon opérationnelle. En amont de cette deadline, prévoir des réunions en interne avec les différentes entités concernées par les indicateurs de façon à ce qu’elles puissent, si besoin, demander la création d’un nouvel indicateur. Si vous pouvez envisager deux campagnes de reporting dans l’année, en mars et en septembre par exemple, ce n’est qu’une fois par an, en novembre, que l’on pourra créer de nouvelles

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fiches. À ce sujet, il est bon de disposer, au sein de chacune de ces entités, de responsables reporting désignés et identifiables sur qui vous pourrez vous appuyer tout au long de l’année. Attention, l’élaboration d’indicateurs et la mise en place de circuits d’information ad hoc pour remonter les données qui iront nourrir vos tableaux de reporting de développement durable ne sont pas neutres. Souvent, les travaux préparatoires vont lever des lièvres et, par là, remettre en cause des situations. Ainsi, par exemple, cette entreprise qui, en mettant en place des indicateurs pour mesurer la récupération des déchets (papiers, cartons, palettes en bois), s’est aperçue que, depuis bien longtemps en fait, les palettes en bois étaient récupérées et « valorisées » par… le personnel pour financer leur repas amical de fin d’année ! Certains équilibres sociaux peuvent ainsi être bousculés par la mise en place de simples indicateurs. Alors, prudence tout de même.

On classera, c’est une évidence, les indicateurs en tableaux correspondant aux trois composantes du développement durable : environnement, économique, social-sociétal, soit trois tableaux ou quatre si l’on sépare le social (plutôt des données ressources humaines) du sociétal (achats responsables, commerce équitable.). Si une ou plusieurs personnes sont chargées au sein de vos unités d’affaires, directions, services ou filiales, de la collecte, de la validité et du contrôle de la donnée brute pour un champ donné, le mieux et le plus efficace est de tout faire remonter à votre directeur ou responsable développement durable par l’intermédiaire de vos divers correspondants au sein des principales entités suivies. Ces derniers seront aussi chargés de transmettre le protocole à toute personne impliquée dans le process de reporting au sein de leur secteur de responsabilité, de s’assurer de sa bonne application et de signaler tout dysfonctionnement. Ils consolideront les données pour leur propre secteur, c’est-à-dire qu’ils contrôleront l’exhaustivité, la cohérence et la fiabilité de ces données au regard des définitions et des méthodologies définies dans le présent protocole. Enfin, ces correspondants renseigneront les tableaux d’indicateurs et les transmettront à l’échéance indiquée au service

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Collecte et consolidation des indicateurs

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centralisateur des données qui sera la plupart du temps la direction ou le service développement durable. Dans certaines entreprises, ils sont transmis à la direction financière, au service ayant déjà en charge les tableaux de bord financiers du rapport d’activité, c’est selon. Et bien entendu, last but not least, les correspondants développement durable des différentes entités de l’entreprise participent chaque année, on l’a vu plus haut, à la réactualisation du protocole ainsi qu’aux réunions prévues pour optimiser le reporting. Pour l’outil informatique à utiliser pour faire tourner votre reporting, vous pouvez soit construire votre propre système comme l’a fait Rhodia, soit faire appel sur le marché à une société spécialisée, comme Enablon ou Indicia, par exemple, qui fournissent d’excellents logiciels dédiés à cette collecte. Le tout est que le système puisse vous proposer l’extraction automatique du plus grand nombre d’indicateurs. Fiabilité des indicateurs

Afin d’évaluer l’exactitude des données et de pouvoir fixer des axes d’amélioration, les infos collectées par le service centralisateur devront être renseignées à deux niveaux de précision au moins :

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• le mesuré (données extraites de documents contractuels sans calcul ou re-travail tels que les factures, les relevés, les contrats, etc., en prenant en compte uniquement ce qui est facturé et enregistré entre le 1er janvier et le 31 décembre de l’année considérée) ; • l’estimé (données issues d’autre sources que les documents contractuels ou représentant une extrapolation des données). Exemple : toutes les personnes habilitées à conduire un véhicule de votre entreprise disposent d’une ou de deux cartes accréditives chez un pétrolier pour faire le plein. Mais, certains, parce que la stationservice qui les arrange le mieux ne correspond pas à ces cartes, vont aller chez un autre distributeur et se faire rembourser ces factures de carburant sur leurs notes de frais. Si vous avez un objectif de diminution de 10 % de vos émissions de CO2 transports, donc, c’est quasiment homothétique, de 10 % des consommations d’essence, et que 5 à 8 % de ces dépenses ne sont pas comptabilisées sur la

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bonne ligne, vous naviguerez en plein brouillard. Dans ce cas, vous devez faire une estimation du « coulage » à partir d’un croisé d’informations, et ainsi réduire au mieux l’incertitude. Mais cela n’en restera pas moins de l’estimé ; et l’honnêteté, inhérente à la pratique du développement durable, vous oblige à le mentionner. Les indicateurs incontournables En fonction de la nature des activités de telle ou telle entreprise, il est évident que des indicateurs incontournables pour l’une ne le seront pas automatiquement pour l’autre. Néanmoins, il existe un certain nombre d’indicateurs qui peuvent être communs ou presque à toutes les entreprises. En voici, pêle-mêle, quelques exemples non exhaustifs :

– social-sociétal : taux de personnel en CDI, à temps plein ; nombre des missions d’intérim ; taux de promotion ; part du personnel ayant bénéficié d’une formation dans l’année ; taux d’absentéisme pour maladie ; fréquence des accidents du travail ; taux de bénéficiaires de l’obligation d’emploi (handicapés ou équivalent achats dans secteur protégé) ; pourcentage de femmes cadres ; écart salarial entre les femmes et les hommes ; pourcentage de recrutements en zone urbaine sensible ; existence de structures de dialogue social ; part des salariés formés aux politiques et procédures anti-corruption ; part de fournisseurs et sous-traitants dont le respect des droits de l’homme a fait l’objet d’un contrôle ; nombre total d’incidents de discrimination ; part des personnes de nationalité étrangère ; etc. ; – économie et gouvernance : part des achats responsables (appels d’offres incluant des clauses de développement durable) ; consommation de produits du commerce équitable ; •••

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– environnement : volume des émissions de CO2 dues aux transports et aux bâtiments ; consommation globale d’énergie ; kWh consommés au m2 et par an ; consommation totale d’eau ; consommation globale de papier et part en son sein du papier responsable (recyclé ou provenant de forêts gérées durablement) ; quantité des déchets produite et part des déchets valorisés ; part des entités certifiées ISO 14001 ; part des énergies renouvelables dans l’énergie utilisée ; etc. ;

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••• nombre d’actions gratuites attribuées ; part des membres indépendants au conseil d’administration, dans le comité des rémunérations, dans le conseil d’audit ; part des domaines d’activités soumis à des analyses de risque en matière de corruption ; nombre total des actions en justice pour comportement anticoncurrentiel ; nombre de litiges traités ; taux de satisfaction des clients ; nombre total des sanctions non financières et montant des amendes significatives pour non-respect des lois et règlements ; nombre total d’incidents de non-conformité aux réglementations et aux codes volontaires relatifs à la communication marketing, y compris la publicité, la promotion et les parrainages, etc.

Vérifications internes et externes et contrôles L’idéal, avant de se confronter à la vérification externe par un tiers, c’est de mettre en place une vérification interne avec votre service de l’audit. Il vérifiera notamment le protocole en vigueur et, le cas échéant, les compléments spécifiques à certaines entités de votre entreprise ou de structures à l’étranger. Il lui sera expliqué les inclusions et/ou les exclusions faites lors de la définition du périmètre de reporting pour la période considérée, et mentionné toute modification de méthodologie pouvant influer sur la comptabilité de données reportées avec celles de l’exercice précédent ou toute autre information permettant l’évaluation de la qualité des données. © Groupe Eyrolles – © Les Echos Editions

En amont, trois niveaux de contrôle auront été assurés : • au niveau des responsables des données brutes, il sera vérifié si nécessaire que le chiffre, en le comparant avec celui de l’exercice précédent, présente une évolution explicable, notamment dans le cadre d’un écart supérieur à 5 %. Le service de l’audit devra être en mesure de justifier la source de cet écart. Cette analyse devra révéler s’il s’agit d’une erreur de remontée d’information ou d’une évolution liée à celle du périmètre concerné ou à l’activité ou, mieux, à la mise en place d’actions efficaces ;

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• au niveau du responsable développement durable de l’entité, où, après consolidation des données transmises par le responsable du recueil des données brutes, il réalise les mêmes contrôles qu’indiqués précédemment ; • au niveau du service, enfin, qui centralise les données pour toute l’entreprise, que ce soit la structure développement durable ou la structure de la direction financière, selon les entreprises.

Voilà, vous êtes maintenant prêt pour une vérification externe par un cabinet indépendant. Un programme de vérification est élaboré et communiqué aux personnes de l’entreprise concernées avant le 31 janvier de l’année n+1 pour une vérification du reporting sur l’année n. Le protocole doit être remis dans son intégralité au cabinet retenu et les données communiquées au cabinet en mars de l’année n+1. On aura préalablement vérifié qu’à chaque indicateur est bien associée une fiche précisant son périmètre cible, sa définition – commune à l’ensemble de l’entreprise et les éventuelles spécificités de certaines de ses entités –, la fréquence de reporting, le niveau de restitution, la méthodologie de collecte des données brutes et celle de calcul de l’indicateur, la méthodologie de consolidation, les contrôles et le système de transmission des données. Ouf ! on est au bout. Tout cela semble peut-être un peu pointu, trop précis ? Mais, à l’usage, vous verrez que cela vaut le coup de s’être donné un peu de mal en mettant en place un système de reporting précis et partagé. Pour une entreprise qui s’est lancée dans le

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Après la remontée des indicateurs à ce dernier niveau, on effectue une revue collective et critique, dernier contrôle avant l’audit, qui permettra aussi de bâtir l’analyse relative à chacun des indicateurs. Enfin, chaque année, une revue critique interne, via un comité de pilotage du reporting développement durable, permettra de cibler les améliorations possibles de la qualité de ce reporting, tant sur le plan de l’exhaustivité que sur celui de l’exactitude. Une revue critique pourra aussi se faire, en présence de l’audit interne, voire d’experts externes.

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développement durable, disposer d’un outil de reporting fiabilisé, c’est s’assurer pour une bonne part de la réussite de sa démarche. Car, qui ne mesure pas… Comment mesurer les évolutions de l’état d’esprit des managers et du personnel ? Mesurer régulièrement l’impact des actions que votre entreprise développe en matière de développement durable est certes des plus nécessaires, mais pas suffisant. En effet, puisque le développement durable est d’abord un changement de comportement, voire un changement culturel, mesurer régulièrement l’évolution de l’état d’esprit de ses acteurs va être des plus instructifs et éclaircira parfois le pourquoi de certains résultats enregistrés par votre outil de reporting. Et puis, au fond, c’est bien le niveau d’engagement du personnel qui va conditionner en très grande partie la réussite dans l’entreprise d’une stratégie et d’un plan d’action développement durable.

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Le baromètre interne développement durable

Chacun verra midi à sa porte sur la façon d’interroger ses collaborateurs. C’est souvent une question de moyens. Pour une étude ad hoc, on aura : le questionnement en face à face au domicile ou sur le lieu de travail, le questionnement par téléphone à domicile ou sur le lieu de travail et le questionnaire auto-administré, écrit ou transmis par voie électronique. Interroger les gens sur leur lieu de travail, en face à face ou par téléphone, peut influer leur réponse surtout quand ils ne sont pas seuls dans leur bureau ou leur atelier. Le sondage des collaborateurs de l’entreprise par téléphone à domicile est très efficace si on en a les moyens. Un interviewé, seul chez lui au téléphone, répondra plus librement et donnera assurément des réponses plus fiables. En tout cas, il sera placé dans les conditions les meilleures pour répondre. Enfin, le questionnaire auto-administré que l’on renvoie à une boîte aux lettres interne ou externe laisse toujours un sentiment de doute puisque l’on refait un échantillon à partir de ceux qui ont répondu. Ce qui laisse une grande marge d’incertitude. Que pensent en effet ceux qui n’ont pas répondu ?

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Quelle taille choisir pour l’échantillon ? Pour une très grosse entreprise, 1 000 personnes interrogées est un bon échantillon. Parce que souvent on veut aussi connaître ce que pensent les sous-populations (hommes-femmes, cadres, unités d’affaires, etc.). Or, pour tirer des enseignements crédibles de sous-population, il faut des sous-échantillons d’au minimum 100 à 150 personnes. Vous pouvez aussi suréchantillonner la population qui vous intéresse, par exemple les cadres. S’ils représentent seulement 70 interviewés dans un panel de 1 000, interrogez-en 200, donc 130 de plus, ce qui fera au total 1 130 interviewés et, pour les résultats globaux, on les réintégrera dans le panel en proportion de ce qu’ils représentent réellement au sein de votre entreprise. Pour de plus petites entreprises, les échantillons devront être d’au moins 150 personnes pour pouvoir donner des résultats significatifs. Pour des entreprises de moins de 100 personnes, un questionnaire administré adressé directement à tous les salariés, à remplir par eux et à renvoyer à la direction émettrice fera l’affaire.

Tout dépend bien sûr du niveau de connaissance de l’interviewé sur le développement durable. Au début du questionnaire, on interrogera donc le personnel sur son niveau de connaissance puis sur sa compréhension du développement durable. Mais, une fois l’interview bien engagée, on mesurera, et ce sera une des questions essentielles de l’enquête, son degré d’adhésion aux actions engagées par l’entreprise, avec une question du type : « Le fait que votre entreprise mène des actions de développement durable dans les domaines suivants vous paraît-il tout à fait prioritaire, assez prioritaire, peu prioritaire ou pas du tout prioritaire ? » Quand on parle « domaines », on pense aussi bien aux domaines environnementaux (économies d’électricité, recyclage des déchets, utilisation de papier recyclé…) que sociaux (égalité hommes-femmes, embauche de handicapés…), et économiques (achats de produits du commerce équitable, achats responsables…).

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Sur quoi poser les questions et quels types de questionnement ?

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Demander aux interviewé(e)s quelles personnes, dans l’entreprise, sont à l’origine des actions de développement durable est également intéressant, cela va vous permettre de mesurer le niveau d’engagement de vos managers sur le sujet, direction comprise, voire le niveau d’implication des partenaires sociaux. On pourra compléter cette investigation en demandant qui, parmi ces différents acteurs de votre entreprise (direction et dirigeants, structure de développement durable, managers, personnel…) ou autour de votre entreprise (associations de consommateurs, ONG, pouvoirs publics, collectivités locales, citoyens eux-mêmes…), vous paraît très, assez, peu ou pas du tout important dans la mise en place de la stratégie de développement durable. Et avez-vous confiance en eux pour relever les défis du développement durable ?… Intéressant aussi de jauger la compréhension, la perception de ce que le développement durable apporte à l’entreprise. Est-ce qu’il permet d’améliorer son image ? de développer l’innovation ? d’améliorer les relations avec les clients ? les conditions de travail ? d’être un atout concurrentiel pour les affaires ? de contribuer à la réduction des risques ? d’améliorer la qualité des produits et des services ? les résultats économiques ? le climat interne ? Autant de réponses qui vont vous permettre de peaufiner, voire de repenser votre stratégie ou votre plan d’action, ou encore de changer de rythme, dans un sens ou dans l’autre. Si, comme c’est le cas à La Poste, vous avez 92 % des collaborateurs qui estiment que le développement durable va améliorer l’image de leur entreprise, 87 % qu’il pousse au développement de l’innovation, 79 % qu’il améliore les résultats de l’entreprise, 76 % qu’il est un atout concurrentiel pour les affaires et qu’il contribue à la réduction des risques (financiers, juridiques, environnementaux et d’image), il n’y a pas de questions à se poser, ce personnel est réceptif au développement durable et il a bien compris qu’il était un levier de performance pour son entreprise. Vous pouvez donc assurément augmenter pour lui le rythme et la profondeur des actions menées. A contrario, ralentir le rythme de la mise en œuvre risque de le décevoir et sans doute de distendre les liens qui l’unissent à son entreprise.

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Bien entendu, dans le questionnaire, il faut aussi à un moment poser la question de l’engagement personnel avec une question du type : « Vous, personnellement, dans votre travail, dans votre établissement/ service/ atelier/ bureau, seriez-vous certainement, probablement, probablement pas ou certainement pas prêt(e) à vous impliquer dans des actions, à prendre des initiatives en matière de développement durable ? » Et si oui, dans quelle(s) action(s) ? Plus en avant encore, n’hésitez pas à tester l’engagement de vos employés dans leur vie hors de l’entreprise, en leur demandant quelles sont les attitudes qu’ils ont adoptées personnellement. S’ils trient les déchets dans leur cuisine, parce qu’ils sont convaincus de l’intérêt de cette action pour l’environnement, ils ne vont pas comprendre pourquoi on ne les trie pas au travail. Les réponses à cette question vont aussi parfois permettre d’anticiper les désirs des collaborateurs en termes d’actions à entreprendre au sein de leur entreprise.

Enfin, pour être complets, ou presque, on leur demandera dans une dernière question si, dans leur travail au quotidien, ils sont plus, autant ou moins heureux que l’année dernière. Les résultats à cette simple question seront lourds de sens puisque l’on sait que des gens heureux, confiants, bien dans leur peau au travail, que l’on associe régulièrement à l’organisation du travail et à l’élaboration des projets et des décisions, qui donc se savent reconnus et écoutés, sont assurément plus efficaces dans leurs tâches quotidiennes et plus rentables pour l’entreprise. Passer tous les projets significatifs au tamis du développement durable

Au moment où l’on construit un projet, il est bon de se poser tout simplement la question de savoir s’il impactera négativement, un peu, beaucoup ou pas du tout l’environnement, le social et l’économie. Puis, en fonction des réponses, prendre les mesures de rectification nécessaires pour que, le cas échéant, son impact négatif soit réduit voire annulé. Agir de cette façon, c’est déjà faire un grand pas

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On pourra aussi sonder le personnel sur la façon dont il perçoit d’une manière générale l’engagement de son entreprise (beaucoup, assez, assez peu ou pas du tout ?), et ce, thème par thème.

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pour le développement durable. Mais le mieux, c’est encore de rationaliser cette démarche et de la systématiser en développant un outil d’analyse et de notation de ses investissements qui prenne en compte les différents objectifs du développement durable. C’est par exemple ce que fait la SNCF depuis 2004 en prenant en compte des critères de développement durable dans l’analyse de la plupart de ses projets d’investissements. La SNCF réfléchit… avant d’agir

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Lors de la construction des premières lignes TGV, la SNCF a parfois dû affronter la mobilisation de différents lobbies (protecteurs de la biodiversité ou… des vignobles des Côtes-du-Rhône), ce qui aura d’autant retardé la mise en service commercial de ces lignes et, de ce fait, généré des manques à gagner importants. Cela a cependant été pour elle et ses équipes des plus instructifs et a sans doute contribué à cette décision prise par l’opérateur ferroviaire il y a cinq ans : faire en sorte que chaque porteur de projet nécessitant plus de 2,5 millions d’euros d’investissements soit désormais dans l’obligation de procéder à l’auto-analyse de celui-ci à l’aune d’une grille d’analyse et de notation de ses investissements prenant en compte le développement durable. Ainsi, plutôt que de découvrir les problèmes au fur et à mesure que la construction de la ligne avance, elle les anticipe, gagne du temps et donc de l’argent, car la résolution en amont des éventuels problèmes permettra de mettre plus tôt la nouvelle ligne en service commercial. Comment fonctionne cette grille d’analyse et de notation ? Elle concerne d’abord tout projet d’investissement (pôles d’échanges multimodaux, gares, ateliers de maintenance, bureaux, achats ou rénovation de matériel roulant…). La méthodologie d’évaluation a été développée par la direction de la stratégie de la SNCF en collaboration avec une équipe d’universitaires. Elle s’inspire de la RSE et s’articule autour des trois piliers du développement durable : – l’environnement : énergie et fluides, bruit, déchets, qualité de l’air, biodiversité, particularités locales, Haute Qualité Environnementale (HQE) ; – le social-sociétal : risques professionnels, conditions de travail, sûreté, concertation interne et externe, personnes à mobilité réduite, intermodalité ; •••

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••• – l’économie : retour sur investissement, maintenabilité, exploitabilité, innovation. La démarche mise en place par la SNCF se veut en cohérence avec les autres dispositifs de l’entreprise susceptibles d’intégrer certains enjeux du développement durable, en particulier les textes de prescriptions internes relatifs à la gestion des investissements, notamment celui relatif à la « démarche en coût global applicable aux projets immobiliers ». La méthodologie propose un processus en quatre phases : – l’auto-évaluation, où le maître d’ouvrage établit une auto-évaluation du projet d’investissement en question ; – l’expertise, où la direction du développement durable de l’entreprise procède avec les entités compétentes à l’expertise du dossier ; – la synthèse, où la direction du développement durable établit une note… de synthèse ; – la validation, enfin, où le projet de notation est présenté aux membres du comité des investissements et discuté avant validation. Il est intéressant de noter que cette démarche revêt un caractère pédagogique, incitant ainsi les équipes en interne à l’adopter en amont de leurs projets. Regardons la grille d’analyse proprement dite : le projet est analysé à travers un certain nombre d’items (maîtrise du bruit, qualité de l’air, consommations d’énergie et de fluides, concertation, intermodalité, conditions de travail, temps de retour sur investissement, robustesse aux aléas, innovation, etc.). Chaque fois, on regardera la prise en compte des critères : bonne, moyenne +, moyenne -, non-prise en compte. Un système de pondération pour chaque item – par exemple « 5 » pour le retour sur investissement et « 1 » pour la concertation externe ou « 7 » pour la robustesse aux aléas – permet de ne pas mettre tous les items sur le même plan et d’intégrer des priorités de l’entreprise. Une grille de notation est régulièrement réactualisée avec la prise en compte des nouvelles orientations et directives (énergies renouvelables, ICPE, déchets), de l’impact des projets sur la vie locale, de la question de la diversité. Il est aussi prévu de décentraliser le référentiel et la grille d’analyse dans les régions. •••

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••• Depuis 2004, année de sa mise en route, la démarche de notation des projets d’investissements s’est peu à peu diffusée au sein de l’entreprise et concerne également les relations de la SNCF avec ses fournisseurs. Par ailleurs, un département « achats durables » créé en 2008 définit les critères d’évaluation des fournisseurs sous l’angle de leur engagement en matière de RSE. Plusieurs centaines de dossiers ont ainsi fait l’objet d’une notation permettant de mettre en pratique concrètement les axes de la politique de développement durable de la SNCF. À en croire des responsables de la SNCF, cette méthode a comme premier intérêt d’obliger les équipes à se poser les bonnes questions. C’est un vrai outil pédagogique pour la sensibilisation des équipes au développement durable.

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Comment impliquer les managers ?

On ne le répétera jamais assez : les managers jouent un rôle clé dans la mise en place et la réussite d’une politique de développement durable. Outre la nécessité de les sensibiliser à la question par des actions d’information et de formation, et de mener en leur direction la bataille de conviction nécessaire à leur faire comprendre, si besoin est, que le développement durable va leur permettre d’atteindre plus vite et dans de meilleures conditions leurs objectifs professionnels, il est important de les inciter à s’investir fermement. Cette incitation passe par le discours mais aussi par la feuille de route que chaque manager, au sein d’une entreprise un tant soit peu organisée, élabore chaque année de concert avec son supérieur hiérarchique. Il est intéressant, à ce moment-là, d’évoquer les pistes possibles d’actions et d’initiatives en matière de développement durable, et de fixer ensemble des objectifs quantitatifs (là où cela a un sens, bien sûr) et/ ou qualitatifs. Un an après, le manager évaluera avec son n+1 le chemin parcouru, les résultats, les progrès, statu quo ou reculs. Puis, ils se refixeront de nouveaux objectifs pour l’année à venir. Compte tenu de la nature du développement durable qui implique souvent une prévalence du long terme sur le moyen ou court terme, on n’hésitera pas à fixer des objectifs à trois ou cinq ans avec des étapes intermédiaires. Il ne faut pas perdre de vue que beaucoup

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d’investissements dans le développement durable voient leur retour être inférieur à l’annualité budgétaire. Remplacer des robinets d’eau par des robinets qui mélangent 50 % d’air avec l’eau est rentable au bout de six ou sept mois. Il n’y a donc pas de raisons de s’en priver ou de reporter cette action aux calendes grecques. Au final, motiver chaque année ses managers sur le développement durable, c’est une façon efficace de les intégrer à la mise en œuvre de la stratégie de développement durable de votre entreprise. Cela donne aussi un sens supplémentaire à leur travail au sein de l’entreprise. Or, dans ces périodes chahutées, parfois de perte de sens, renforcer celui de son travail est généralement un élément fort de la motivation. Certaines entreprises vont assez loin dans l’évaluation puisqu’elles y rattachent primes ou intéressement. Ainsi, par exemple, à Aéroports de Paris, l’intéressement peut aller jusqu’à 15 % de la rémunération brute annuelle, au regard du niveau de la performance RSE de cette entreprise évaluée par une notation sociale annuelle de BMJ Ratings. Chez TNT, opérateur postal australo-hollandais, les cadres qui bénéficient de voitures de fonction se voient remettre une prime s’ils choisissent un modèle de catégorie inférieure, moins émetteur de CO2. Il est vrai que dans cette entreprise le patron a montré l’exemple en troquant en 2008 sa Porsche de fonction contre une Toyota Prius + un vélo…

Réussir sa performance économique par une différenciation positive vis-à-vis de la concurrence grâce à l’intégration des enjeux du développement durable dans les produits et services que l’on vend tout comme dans ceux que l’on achète pour son fonctionnement et sa production, voilà un autre des principaux leviers de réussite d’une politique de développement durable.

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Offrir et acheter des produits et des services responsables

Les principaux leviers de réussite

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Les offres et les produits responsables

Il s’agit d’abord de faire du développement durable un moyen de vraie création de valeur. Luc Balleroy, directeur général de la société de sondages LH2, déclarait1 que « le développement durable implique d’adopter un marketing de rupture, d’innovation, qui repense les modèles avec lesquels nous sommes aujourd’hui habitués à réfléchir et à agir. Jusqu’à maintenant, nous étions dans des économies où l’individu se concentrait sur l’appartenance et l’amour, l’estime et la réalisation de soi. Tout le marketing développé était centré sur la satisfaction de ces besoins. Cependant, quand les signaux d’alerte émis par la nature, par les ONG, puis par les instances gouvernementales, se multiplient, on renvoie vite l’individu au bas de la pyramide de Maslow sur les besoins physiologiques : comment allons-nous manger ? Comment allons-nous boire ? nous abriter ? assurer les besoins de sécurité pour soi et ses enfants ? ». Le développement durable est prometteur de bonheur, d’équilibre et d’épanouissement et, de fait, contient une force que le marketing moderne se doit de prendre en compte. Le rapport Emplois verts : pour un travail décent dans un monde durable, à faibles émissions de carbone2, publié par le PNUE et l’OIT, confirme ces attentes des consommateurs en matière de développement durable, en évaluant par exemple à 2 740 milliards de dollars en 2020 le marché des produits et services respectueux de l’environnement… L’exemple du succès de la Prius, véhicule hybride de Toyota, vendu déjà à plus d’un million d’exemplaires dans le monde, malgré un prix plus élevé qu’un modèle de même gamme qui fonctionne à 100 % à l’essence ou au diesel, illustre bien cette importance de la notion de développement durable et de son impact dans le processus de décision d’achat. Ou comment l’offre rencontre la demande à travers le développement durable… Pour fabriquer des produits et proposer des services aux impacts négatifs réduits, il faut le plus souvent en repenser la conception, devancer les réglementations contraignantes à venir, intégrer les 1. Lors d’un débat organisé par le Comité 21 qui s’est tenu à Paris le 22 mai 2008. 2. www.unep.org/labour-environment/features/greenjobs-report.asp.

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nouvelles donnes de la société, comme le vieillissement de la population ou la plus grande rareté des ressources. Cette démarche vous permettra non seulement de trouver de nouveaux clients convaincus par votre façon de faire, mais aussi de conserver les anciens, satisfaits, à l’aune de la montée de leur prise de conscience, que vous leur fournissiez des produits et des services plus « propres » et plus « responsables ».

Fabriquer de façon responsable et le faire savoir intelligemment, c’est aussi ce que fait la société textile bretonne Armor-Lux, qui, de cette façon, a redressé sa situation économique et financière, maintenu ses emplois en France malgré le dumping des pays en développement, Chine en tête. Une société d’audit, PricewaterhouseCoopers, accompagne Armor-Lux (voir aussi pages 82-83), pour sécuriser complètement sa supply chain de façon à bonifier ses appels d’offres. Thierry Raes, de Pricewaterhouse, explique : « Lorsqu’il répond à un appel d’offres de telle ou telle société, la SNCF ou Aéroports de Paris par exemple, nous l’aidons à faire en sorte que personne, notamment dans les organisations représentatives du personnel de ces entreprises, les médias ou les ONG, ne puisse dire que ses pulls avec le nom d’un de ses clients sont fabriqués dans un atelier dans des conditions déplorables. Nous l’aidons à se différencier de ses concurrents. » Jean-Guy Le Floc’h, le 1. Lors du même débat du Comité 21.

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L’exemple de Home Depot – un « Bricorama américain » –, rappelé opportunément par Ganaël Bascoul (ESCP-EAP)1, est fort instructif en la matière. Voilà un magasin de bricolage où, au lieu de la vidéo explicative classique de l’utilisation de la perceuse sur plaque béton et contreplaqué, on vous propose de visionner les impacts sur l’environnement des travaux de bricolage que vous allez faire. Au lieu de cacher les problèmes, Home Depot vous les montre, vous les explique, puis présente les produits éco-conçus qui vous les feront éviter. Avec cette démarche, en quelques semaines seulement, Home Depot était en rupture de stock sur tous les produits labellisés éco-conception…

Les principaux leviers de réussite

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président d’Armor-Lux, confirme : « Depuis près d’une décennie, nous faisons vérifier par un cabinet indépendant que les 15 usines avec lesquelles nous travaillons en Europe de l’Est et au Maghreb respectent les règles d’éthique et s’inscrivent bien dans le Pacte mondial des Nations unies et les préconisations de l’OIT (Organisation internationale du travail). C’est certainement un argument commercial pour Armor-Lux1» Et le patron breton d’appeler ensuite à ce que « les pouvoirs publics accompagnent avec rigueur leurs actes d’achat. Autrement dit que l’État fasse appel à des entreprises respectant l’éthique et le développement durable ». C’est aussi Tetra Pak, le fabricant de briques d’emballage, qui a tout d’abord entrepris une analyse de cycle de vie prouvant la supériorité du carton (qu’il utilise) sur le verre pour ses conditionnements. Ensuite, seulement, il a développé toute une campagne de communication pour le faire savoir, transformant un avantage environnemental en un argument marketing… On pourrait ici multiplier les exemples d’entreprises qui ont connu des succès marketing pour leurs produits ou services, simplement pour avoir eu la bonne idée d’intégrer dans leurs conceptions le développement durable à travers, qui, un avantage environnemental, qui, un autre plus social ou sociétal, qui, un avantage plus économique.

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Acheter de façon responsable

L’Afnor donne une définition claire de ce que l’on appelle les achats responsables : « Ce sont des achats de biens ou de services qui tout au long du processus d’approvisionnement intègrent une responsabilité sociale, environnementale et économique, basée sur les principes du développement durable énoncés lors du sommet de la Terre de Rio de Janeiro en 1992, ainsi que sur les différentes conventions internationales ou textes en vigueur dans les domaines du développement durable (environnement, droits humains, droits sociaux…) ainsi que sur les bonnes pratiques internationalement reconnues, notamment dans le cadre de la 1. Les Échos, édition du 8 septembre 2008.

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lutte contre la corruption. Qu’ils soient publics ou privés, les achats responsables privilégient ainsi les biens ou services respectueux de l’environnement, incluant une certaine responsabilité sociale favorisant l’équité des échanges et s’inscrivant dans une transparence optimum1. » L’intégration progressive du développement durable dans vos processus d’achat vous permet de prendre en compte, en amont des processus et des projets, leurs impacts environnementaux et sociaux, pour les maîtriser ou les diminuer. Elle se caractérise par des pratiques pouvant se définir selon deux approches : • une approche produit visant à acquérir des produits plus respectueux de l’environnement, des lois sociales et de l’éthique ;

Cette démarche d’achats responsables ouvre pour votre entreprise de véritables perspectives de développement économique, en procurant de réels avantages concurrentiels et en constituant un moteur de croissance, d’innovation, de motivation de vos collaborateurs. Mais pas seulement, ainsi que le déclare Philippe Vasseur, le président d’Alliances, une ONG développement durable, sur son site Internet : « Une entreprise qui applique une politique d’achats responsables se donne d’une part à elle-même un cadre strict pour respecter les droits de l’homme, l’équité socio-économique, la préservation de la santé, celle des enfants et de l’environnement. D’autre part, en imposant ces règles à ses fournisseurs et à ses sous-traitants – où qu’ils se trouvent dans le monde – elle met en œuvre un levier stratégique d’externalisation et de propagation de la responsabilité sociale d’entreprise. » Et de commenter : « L’enjeu en vaut la peine. » 1. Achats et développement durable. Enjeux, méthodologies et initiatives, janvier 2005.

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• une approche fournisseur visant à privilégier les fournisseurs engagés dans des démarches de développement durable se traduisant par exemple par une adhésion aux 10 principes du Pacte mondial des Nations unies, par des politiques de normalisation type ISO 14001 ou SA 8000 ou d’éco-conception. Mais aussi à inciter ses propres fournisseurs à s’engager dans ce type de démarches.

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Les principaux leviers de réussite

Les achats, parce qu’ils représentent un enjeu très fort dans l’équilibre des comptes de l’entreprise, parce qu’ils se situent en amont des process et des projets, sont un élément structurant de la démarche de développement durable de votre entreprise. On peut même affirmer qu’ils sont au cœur de la stratégie de développement durable d’une entreprise, raison pour laquelle ils constituent un des leviers de réussite pour votre démarche de responsabilité sociale.

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Pour que votre démarche d’achats responsables soit efficace, vos acheteurs devront a minima bénéficier d’une formation au développement durable et disposer d’une aide méthodologique qui garantisse la prise en compte du développement durable à toutes les étapes du processus d’achat. S’ils disposent d’une cartographie des risques environnementaux ou sociaux par famille d’achat et par produit, vos acheteurs pourront sélectionner le produit ou le fournisseur répondant au niveau d’exigences que vous aurez formulé. Pour sensibiliser vos acheteurs, vos prescripteurs et votre responsable ou, s’il existe, votre réseau développement durable interne, vous pouvez organiser des visites de sites de production de fournisseurs engagés. Ces actions à caractère pédagogique, organisées par la structure développement durable de votre entreprise, montrent au fournisseur l’importance que le donneur d’ordres accorde à son engagement et aux progrès réalisés. Et vos acheteurs peuvent constater sur le terrain les impacts réels de leur démarche d’achats responsables sur le quotidien des sous-traitants. La Poste rencontre régulièrement ses fournisseurs socialement responsables La Poste a emmené tout son réseau de contributeurs développement durable visiter à Quimper les sites de production des sociétés Armor-Lux (textile) et Filets bleus (biscuiterie). Toutes deux sont très engagées dans la responsabilité sociale, et fournisseurs, les premiers de vêtements pour les 100 000 facteurs et factrices, les seconds de gâteaux et de confiseries du commerce équitable pour les distributeurs automatiques internes de l’entreprise postale. Ces fournisseurs ont présenté leurs actions de progrès et les représen•••

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••• tants de La Poste ont pu en vérifier la réalité. Même type d’opération en direction de la coopérative au Mali qui fournit le coton équitable pour la fabrication des vêtements des facteurs (plus de 450 000 pièces placées à ce jour, ce qui correspond à 14 % du total du coton équitable acheté par la France…). Un concours interne a permis de sélectionner deux factrices qui sont parties sur place à la rencontre des producteurs de ce coton équitable. Elles leur ont expliqué pourquoi La Poste avait décidé d’utiliser celui-ci pour ses tenues et, en retour, les responsables de la coopérative leur ont fait part de ce que le marché de La Poste avait eu comme conséquences positives pour leur organisation et leur vie de tous les jours : maintien de l’emploi sur place, construction d’un hangar pour stocker les balles de coton et construction d’une école « en dur ». Écoutons Soloba Mady Keita, représentant du groupement des syndicats des producteurs cotonniers du Mali : « Chaque fois qu’un postier commande un vêtement issu du commerce équitable, il doit savoir qu’il contribue à envoyer un enfant à l’école, à diminuer la peine de nos femmes rurales, à nous permettre d’accéder à l’eau potable et à une meilleure santé. Qu’il sache aussi que nous faisons tout notre possible pour lui donner du coton de la meilleure qualité qui soit. Le commerce équitable, c’est plus de justice, plus de solidarité Nord-Sud. C’est l’esprit de partage qui prévaut. » Un petit film de trois minutes a été réalisé sur cette rencontre et a été largement diffusé ensuite en interne à La Poste. Dans ce petit film-témoignage, les deux factrices expliquent spontanément en quoi elles sont fières d’appartenir à une entreprise qui permet de développer ce type d’actions. Pour rester dans le domaine du textile, La Poste envoie également ses acheteurs et auditeurs internes assister, sur des sites de sous-traitants, comme ceux d’Armor-Lux au Maroc, à des contrôles de conformité de la mise en œuvre des recommandations des rapports d’audit effectués en amont. © Groupe Eyrolles – © Les Echos Editions

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Les principaux leviers de réussite

En résumé

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Pour réussir sa politique de développement durable, il faut commencer par sensibiliser la tête de l’entreprise, puis les managers et enfin tout le personnel. Car, comme pour la qualité, le développement durable souffre de ne pas être investi par la totalité de l’entreprise. Une fois qu’il est en route de façon organisée, pas de salut sans mesure régulière de vos résultats : outil de reporting dédié et baromètre interne pour mesurer l’évolution de l’état d’esprit de vos collaborateurs. Enfin, marquez du sceau de la responsabilité sociale aussi bien les produits et services que vous achetez que ceux que vous vendez. Celle-ci devient de plus en plus un atout discriminant dans les affaires commerciales. Ne perdez pas de clients. Mieux : gagnez-en !

Chapitre 6

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Le poste de directeur (ou responsable) du développement durable

Cela ne fait que cinq ou six ans, mais qu’il semble loin le temps où l’on pouvait lire dans un quotidien économique français (La Tribune) que le poste de directeur du développement durable était « un placard doré pour directeurs de la communication »… En effet, comme le principal travail du directeur du développement durable dans les débuts – c’est-à-dire, en gros, après le vote au Parlement en 2001 de la loi NRE – était de publier quelques informations sur ce que faisait son entreprise en matière de développement durable, agrémenté d’un tableau comprenant quelques indicateurs, beaucoup de chefs d’entreprise avaient alors trouvé tout naturel de confier cette responsabilité à quelqu’un qui connaissait bien la communication, voire d’installer la nouvelle fonction au sein même de leur direction de la communication. Du coup, en 2002-2003, chacun pouvait constater que les deux tiers des directeurs de développement durable avaient eu un passé de directeur de la communication ou venaient de ce secteur d’activité. Au regard des nécessités qu’impliquent une véritable politique de développement durable, tout cela, heureusement, s’est rapidement transformé. Même si dans le développement durable, qui nécessite beaucoup d’actions de sensibilisation, un savoir-faire dans le domaine de la communication, n’est pas un luxe.

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Le guide du développement durable en entreprise

Aujourd’hui, quand on veut recruter un directeur ou un responsable développement durable, il vaut mieux commencer par s’interroger sur quelles seront ses principales missions au sein de l’entreprise. Assez souvent, il s’agira, dans un premier temps, de faire passer le développement durable d’une démarche empirique (comme M. Jourdain faisait de la prose, mon entreprise a déjà engagé des actions de développement durable… certes, mais…) à une démarche organisée (c’est plus sûr si l’on veut obtenir des résultats significatifs et mesurables). Ensuite, il devra aider son entreprise à tenir compte des nouvelles contraintes environnementales, sociales, éthiques et économiques, tout en trouvant au final des leviers pour améliorer sa performance économique et financière. Donc, « d’une difficulté, savoir en faire un avantage », comme disait Lénine en son temps…

Avec une équipe en général plutôt réduite, le directeur du développement durable devra coordonner la mise en œuvre de la stratégie et du plan d’action, animer son réseau de contributeurs au sein de l’entreprise, proposer des pistes et des actions, et non pas tout faire lui-même directement. N’oublions pas le nécessaire travail de veille et de benchmark qu’il devra organiser en amont, le reporting pour mesurer les avancées et rendre compte des engagements pris, identifier les inerties et les éventuels reculs et prendre ensuite les bonnes décisions pour accentuer la démarche ou redresser la situation si nécessaire. Bien sûr, il lui faudra répondre aux questionnaires de plus en plus nombreux envoyés par les agences de notation sociale, certaines grandes entreprises en recevant quasiment toutes les semaines, à tel point que des sociétés de services commencent à proposer, sur le marché, des systèmes informatisés qui permettent de répondre en grande partie aux questions posées. Ce directeur et son équipe devront aussi, dans certains cas, contribuer aux réponses aux appels d’offres avec l’œil du développement durable, voire participer à la

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Prouver que le développement durable crée de la valeur

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construction d’offres nouvelles de produits et services en intégrant des critères de développement durable dès la phase de conception, ce qu’on appelle le « marketing responsable ». À l’externe, il valorisera, avec le service communication de l’entreprise, les actions développement durable positives de l’entreprise et/ ou celles enrichissantes et ayant valeur d’exemples, les axes de progrès ; à l’interne, avec le service formation et toujours le service communication, il développera les nécessaires actions de sensibilisation en direction des cadres et du personnel de l’entreprise. Parmi ses missions nouvelles, le directeur du développement durable peut aussi être en charge des dossiers éthique et déontologie, relations avec les investisseurs, notamment si son entreprise est cotée. Il sera également de bon conseil pour les questions relatives à l’innovation technologique ou sociale. Reste, pour le directeur du développement durable, à effectuer un travail plus « politique », qui apparaîtra toujours en filigrane de son action : prouver régulièrement qu’avec le développement durable il crée de la valeur pour son entreprise. Et ce ne sera pas sa tâche la plus facile… Une tâche qui l’oblige à se poser la question de savoir quelles sont, pour son entreprise, les actions développement durable les plus génératrices de valeur…

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Plus généraliste que technicien Le poste de directeur ou de responsable développement durable est donc, sauf cas très particuliers, moins un poste de technicien qu’un poste de généraliste, plutôt bon stratège et capable de traiter politiquement, au sens profond du terme, et de façon transverse, les trois piliers du développement durable. Il n’est nul besoin, par exemple, d’être un gourou de l’environnement pour réussir. Certes, pour faire un bilan carbone ou une analyse de cycle de vie d’un produit, il vaut mieux avoir des connaissances techniques. Mais celles-ci, vous les trouverez dans un(e) adjoint(e) chargé(e) d’environnement recruté(e) sur le marché ou à la sortie des formations qui existent aujourd’hui, généralement de haut niveau (bac + 4 ou + 5). Novethic, centre de

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recherche sur le développement durable, a recensé quelque 72 formations initiales et 20 formations continues. « Aujourd’hui, commente Anne-Catherine Husson, directrice générale de Novethic, la demande des entreprises concerne surtout la formation continue et très peu le recrutement de jeunes spécialistes développement durable sortant de l’école1. » Parmi les meilleures formations, on n’hésite pas à citer ici, en ce qui concerne l’environnement, l’université de Versailles Saint-Quentinen-Yvelines, qui a fourni ces dernières années d’excellents ingénieurs en économie de l’environnement aux grandes entreprises démarrant un processus développement durable.

Quant aux multiples grandes écoles (HEC, ESCP, Polytechnique, Sciences-Po, Euromed-Marseille, le Ceram…) et universités, elles développent à tour de bras, depuis cinq ou six ans, des formations au développement durable pour leurs étudiants dans le cadre de masters spécialisés « management du développement durable ». Si certains restent perplexes face à ce foisonnement des formations et estiment qu’une bonne expérience du terrain de l’entreprise est préférable aux formations spécifiques suivies au sein des grandes écoles, on peut voir celles-ci – excellentes pour la plupart, au demeurant – comme 1. Le Figaro, édition du 20 octobre 2008.

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Si vous ne pouvez pas recruter une deuxième personne, pas de panique, il existe une kyrielle de consultants spécialisés pour vous aider à résoudre les problèmes techniques. Et, pour le reste, les grands cabinets de consultants (Ernst & Young, PricewaterhouseCoopers, Deloitte, AT Kearney, etc.) disposent tous d’importantes structures ou savoir-faire dédiés au développement durable. Il existe aussi des unités de consulting en développement durable petites mais très performantes. On pensera ici à des agences comme Ethicity (très réputée pour le marketing responsable, mais pas seulement), Utopies, O2 France, Be Citizen et son patron très présent dans les médias imprimés, Maximilien Rouer, ou, pour la conduite du changement, Des Enjeux et des Hommes.

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une corde supplémentaire à son arc. D’autant que de nombreux métiers doivent aujourd’hui prendre en compte le concept de développement durable et ses déclinaisons. On pense ici notamment aux ressources humaines, au marketing et à la qualité, entre autres. Parmi les formations complémentaires dédiées notamment à ceux qui sont déjà dans l’entreprise, on signalera le CHEE&DD (Collège des hautes études de l’environnement et du développement durable). Créé en 1995, il prépare les dirigeants aux enjeux du développement durable. Le CHEE&DD repose sur un partenariat établi avec trois grandes écoles : l’École centrale de Paris, l’ESCP-EAP et l’AgroParisTech. Surtout, tous les enseignements dispensés aujourd’hui par les universités devraient intégrer dans leurs programmes de cours des modules de formation ou de sensibilisation au développement durable.

Les principales qualités requises Le choix d’un directeur ou d’un responsable développement durable devra reposer sur la recherche de quatre qualités essentielles :

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• être motivé et convaincu (un peu militant mais pas trop) car il lui faudra mener en permanence une bataille de conviction, à la fois pour mettre en mouvement tous les échelons de l’entreprise, à commencer par les managers, et savoir arbitrer en faveur du moyen et du long terme contre le court terme ; • bien connaître l’entreprise, sa culture, ses rouages, son fonctionnement et si possible disposer d’un solide réseau interne. Vous l’avez deviné, un recrutement interne sera souvent préférable à une recherche de candidat sur le marché. Les entreprises qui se sont lancées dans une politique de développement durable ont pour la plupart intégré cette donne. Il suffit de lire régulièrement les annonces de recrutement dans la presse pour constater que quasiment jamais on n’y recherche un directeur ou un responsable du développement durable. Et les pages « Nominations » ne mentionnent que très rarement un transfert de directeur développement durable d’une

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entreprise à l’autre. Dans les grands groupes du CAC 40 ou les majors du secteur public, les transferts depuis ces trois dernières années se sont en effet comptés sur les doigts d’une seule main et, malheureusement, pour la quasi-totalité, se sont terminés par des échecs, sans que la qualité intrinsèque et la motivation des intéressé(e)s puissent pourtant être mises en doute ;

• posséder d’excellentes dispositions pour communiquer, car il lui faudra, entre autres, savoir convaincre l’interne de changer de comportement et très souvent les managers de surmonter les quelques contradictions qui peuvent exister entre les résultats à court terme qui leur sont demandés dans le cadre de leurs responsabilités et le développement durable, qui s’apprécie plutôt sur le moyen ou le long terme. « Un bon joueur d’échecs, a dit un jour l’économiste Jacques Attali, c’est celui qui est capable de réfléchir plusieurs coups à l’avance. » Dans le développement durable, c’est exactement pareil. Bref, allier sens de la diplomatie et capacités à communiquer de façon à trouver, dans les meilleures conditions, les bons – et nécessaires – compromis que requiert la réussite concrète et partagée par toute l’entreprise d’une politique de développement durable. Interrogés courant 2008 par la société de consulting RSE Paradigm21, une quarantaine de directeurs développement durable de grandes entreprises confirmaient l’importance, dans leur travail, de la relation extérieure, en reconnaissant passer en moyenne 20 %

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• avoir le sens de la diplomatie, voire des qualités de négociateur, car il lui faudra savoir dialoguer efficacement avec les associations et tous ceux qui, à l’extérieur, s’intéressent au niveau de responsabilité sociale de votre entreprise. Et aussi, mener des actions intelligentes et subtiles de lobbying, histoire d’éviter à son entreprise de se voir imposer des contraintes irréalistes. Mais il devra aussi savoir trouver en interne les compromis adéquats et qui sont inhérents à une tâche transverse comme l’est le développement durable ;

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de leur temps hors de leur entreprise pour participer à des colloques, travaux d’associations, séminaires et autres formations en tant qu’enseignants.

À qui rattacher le directeur du développement durable ?

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Comme il s’agit d’une tâche transverse, tout est pratiquement possible en termes de rattachement. Cela peut parfois dépendre tout simplement du pilier du développement durable, l’environnemental, le social ou l’économique, qui est le plus impactant pour l’entreprise. Alors, il sera rattaché au directeur de la stratégie, au directeur de la qualité, voire au directeur financier, voire plus rarement au directeur des ressources humaines et, dans le « pire » des cas, au directeur de la communication, comme aux débuts du développement durable. La fonction Développement durable est parfois « mixée » avec la fonction Qualité (par exemple, la Société Générale ou Plastic Omnium,), avec la fonction Innovation (par exemple, la RATP, Vinci ou Eiffage Construction) ou avec la fonction Stratégie (comme à la SNCF). Mais l’expérience montre que là où le développement a pleinement réussi, là où il s’est le mieux ancré dans la stratégie de l’entreprise, c’est quand il est directement rattaché au président de l’entreprise ou à son directeur général. Rattacher votre directeur du développement durable au plus haut niveau de la hiérarchie sera aussi perçu par vos parties prenantes externes comme une volonté d’en faire un axe majeur de la politique de votre entreprise, ce qui n’est pas neutre. Dans une même logique, et compte tenu du poids grandissant que prennent, dans la société et dans la vie des entreprises, les questions d’éthique et de responsabilité sociale, on peut même envisager que les temps ne sont plus très éloignés où la fonction de directeur du développement durable sera, au même titre que celle, par exemple, de directeur de la communication ou de directeur des ressources humaines, membre à part entière du comité exécutif de l’entreprise. C’est d’ailleurs déjà le cas dans deux ou trois entreprises pionnières.

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Quel salaire ? La rémunération de votre directeur de la communication ou celle de votre directeur de la qualité sont selon nous un bon référentiel pour définir celle de votre directeur du développement durable. Sa rémunération pourra dans quelques cas être plus élevée, notamment si le sort de votre entreprise dépend directement de sa capacité à être « clean » et bien dans les clous en matière environnementale ou sociétale. La société de consulting Hewitt a bâti en 2007 un référentiel des rémunérations des directeurs de développement durable auquel vous pouvez vous reporter. En résumé

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Pour choisir un directeur du développement durable, n’hésitez pas à privilégier le recrutement interne. Une bonne expérience de terrain est un atout important dans ce qui reste avant tout un changement culturel. Il vous faut aussi rattacher le poste de directeur du développement durable au plus haut niveau de la hiérarchie de l’entreprise, c’est-à-dire soit au président, soit au directeur général. Principales qualités requises pour être un directeur efficace du développement durable : être très motivé pour le sujet, avoir une très bonne connaissance de l’entreprise, notamment de son organisation et de sa culture, posséder le sens de la diplomatie, être un excellent communicant à l’interne comme à l’externe, et savoir démontrer que son action crée de la valeur.

Chapitre 7

Où trouver les aides et les financements ?

Les aides et les financements pour soutenir vos actions de développement durable existent assurément et à tous les niveaux. Encore fautil les connaître, puis savoir à quelles portes frapper. Trop souvent encore, faute de projets déposés, les crédits alloués pour le développement durable ne sont pas entièrement consommés…

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Les entreprises doivent apprendre d’autres façons de calculer Le développement durable, s’il est une façon de réinventer les modes de fonctionnement de l’entreprise, notamment lorsque l’on élabore un projet ou que l’on prend une décision, entraîne aussi une autre façon de calculer. Ainsi, le « rythme » du développement durable est en général différent du cadre de l’annualité. Il vaut donc mieux prendre en compte tout de suite le moyen et le long terme en réintégrant, dans le calcul de coût initial, le retour sur investissement et les gains futurs. Exemple : prendre en compte dans le coût de la construction d’un bâtiment le renchérissement du coût des énergies à dix ou quinze ans et le réintégrer dans le coût total du départ. Un bâtiment construit aujourd’hui sans y intégrer des éléments de haute qualité environnementale (HQE), voire d’énergie positive, risque de

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perdre une grande partie de sa valeur au fur et à mesure du renchérissement du coût des énergies dont on aura besoin pour l’éclairer et le chauffer par exemple. Ne pas avoir une approche positive de ce que certains appellent, à tort, le « surcoût » des mesures environnementales, risque de coûter très cher à l’arrivée. Faute de procéder ainsi, on peut malencontreusement baisser à terme le capital immobilier de son entreprise. Le coût économique global : il s’agit ici de prendre en compte des données qui se situent au-delà du simple prix d’achat du produit ou du service. Par exemple, pour comparer le prix d’un véhicule thermique (essence ou diesel) avec un véhicule propre (électrique), on intégrera, dans le calcul de prix : • le coût différent de la consommation entre essence ou diesel et électricité, celui de la maintenance (par exemple, pas de vidange sur le véhicule électrique) ; • la durée de vie des véhicules ; • le taux d’accidentologie et l’absentéisme conséquent (50 % minimum d’accidents en moins avec les véhicules électriques parce qu’ils sont moins compliqués – pas de vitesse à passer – et moins stressants à conduire – pas de bruit) ; • le fait que le véhicule électrique est autorisé à pénétrer dans les centres-ville interdits ou réglementés aux véhicules thermiques ;

• la valeur résiduelle du véhicule à la revente (encore favorable au véhicule thermique, environ 30 à 35 % au bout de cinq ans d’utilisation). À ces éléments, on pourra ajouter, le cas échéant, des données plus ponctuelles comme la fiscalité, le coût parfois différent du parcage, les bonus écologiques pour les véhicules électriques qui se déduisent directement du prix d’achat, etc. Ainsi, pour un véhicule utilitaire léger (VUL) type Kangoo-Renault ou Berlingo-Citroën, un véhicule

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• la baisse des émissions de CO2 (même à 15 euros la tonne en 2008) ;

Où trouver les aides et les financements ?

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électrique qui coûtera à l’achat deux fois et demi le prix d’un véhicule thermique pourra être considéré comme ayant au final le même coût global économique1.

Les subventions de l’Union européenne L’Union européenne dispose de ressources importantes pour le financement de projets développement durable. Ce sont des aides accordées directement par l’UE et gérées par la Commission européenne. Les subventions sont un type de financement thématique accordé pour financer des projets habituellement à la suite d’appels à propositions. Les appels à propositions sont publiés sur les sites des différentes directions générales de la Commission européenne (par exemple pour les subventions pour l’environnement, voir le site de la DG Environnement http://ec.europa.eu/environment/funding/intro_en.htm) et regroupées sur le site http://ec.europa.eu/grants/index_en.htm.

Les fonds structurels

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Fonds européen de développement régional (Feder) et Fonds social européen (FSE), les fonds structurels servent au financement de la politique de cohésion de l’Union européenne sur une base pluriannuelle. La période de financement actuelle couvre les années 2007-2013 1. Calcul effectué par l’auteur sur la base d’un prix du baril à 100 dollars dans le cadre de ses responsabilités à la tête du groupe de travail « Achats de véhicules électriques » du Grenelle de l’environnement (Comop 8). Attention, le prix du baril, descendu fin 2008 en dessous de 40 dollars à cause, notamment, de la baisse de la demande due à la crise économique, remontera plus vite qu’il n’est descendu lorsque l’on sortira de cette crise. Car, à moins de 40 dollars le baril, on freine ou on arrête toute exploitation ou recherche nouvelle ou construction de structures de raffinage et autres. Sans compter l’impact de la raréfaction du pétrole. Le « pire » est donc devant nous. Façon de parler, car le pire, c’est que le prix du pétrole reste dans les basses eaux, ce qui pourrait impacter négativement les comportements des uns et des autres.

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pour un montant de 347 milliards d’euros, dont plus de 14 milliards d’euros pour la France. Ils sont répartis entre trois objectifs. L’objectif « Convergence » Il est destiné à soutenir la croissance et la création d’emplois dans les régions les moins développées, c’est-à-dire celles qui se situent en dessous de 75 % du PIB moyen dans les pays de l’Union européenne. Il vise, entre autres, à protéger l’environnement, à prévenir les risques et à développer les énergies renouvelables. Son financement se monte pour la France à près de 3 milliards d’euros et concerne les quatre départements d’outre-mer (Guadeloupe, Martinique, Guyane, Réunion). L’objectif « Compétitivité régionale et emploi » Il est destiné à renforcer la compétitivité et l’attractivité des régions ainsi que l’emploi. Doté pour la France d’un peu plus de 9 milliards d’euros, il comprend, entre autres thématiques, la protection de l’environnement et la prévention des risques, l’égalité des chances et la lutte contre les discriminations, l’inclusion sociale, l’adaptabilité des travailleurs et des entreprises, toutes des thématiques du développement durable.

Il est destiné à renforcer la coopération transfrontalière. La France participe à sept programmes transnationaux et onze programmes de coopération transfrontalière qui ont chacun défini des priorités spécifiques. Le développement durable apparaît comme une priorité dans la grande majorité de ces programmes. À signaler que la gestion des fonds structurels a été déléguée aux États membres et aux Régions. Dans ce cadre, la France a décliné les trois objectifs européens en plusieurs priorités nationales dans un document appelé « Cadre de référence stratégique national » (CRSN). Sont mentionnés le développement durable, l’environnement, la

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L’objectif « Coopération territoriale européenne »

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politique énergétique ainsi que la formation et l’emploi. Les Régions transposent enfin le Cadre de référence stratégique dans des programmes opérationnels (un par Région). La sélection des projets s’effectue en France au niveau de la Région. Les principaux interlocuteurs sont les préfectures de Région (autorités de gestion des fonds dans la majorité des Régions), mais aussi les préfectures de départements et les conseils régionaux. À noter que les fonds structurels sont utilisés sur une base de cofinancement et qu’ils ne peuvent jamais financer l’intégralité d’un projet.

Le Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader)

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L’Union européenne a mis en œuvre à côté de la PAC (Politique agricole commune) une politique de développement des territoires ruraux. Elle vise notamment à accompagner les mutations de l’espace rural. Cette politique est financée par ce nouvel outil. Un règlement de développement rural (RDR) fixe le cadre de la programmation 2007-2013 du Feader. Quatre axes ont été retenus ; parmi eux, « la diversification de l’économie rurale et la qualité de la vie » et « l’amélioration de l’environnement et la gestion de l’espace ». Cette orientation stratégique communautaire est déclinée dans chaque État membre par un plan stratégique national. Le plan français a fixé trois objectifs : un objectif économique, pour la compétitivité et l’emploi dans tous les secteurs ; un objectif humain, qui préconise un développement pour et avec les populations et acteurs locaux ; et un dernier objectif environnemental et territorial pour une gestion du patrimoine rural qui intègre les particularités des territoires. Quel est l’intérêt pour les entreprises ? En fonction de la nature de leurs activités, elles peuvent, par exemple, répondre à certains objectifs, comme celui de développer et de gérer l’attractivité résidentielle en se concentrant sur la pérennisation et le développement des services ou, dans le cadre d’une offre variée et équilibrée

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des services, développer des commerces de proximité. Le développement des TIC (technologies de l’information et de la communication) fait aussi l’objet d’une mesure Feader. Pour donner un ordre d’idées, l’enveloppe financière sur le plan de l’Hexagone est supérieure à 5 milliards d’euros. Il existe aussi des enveloppes de plusieurs dizaines, voire centaines de millions d’euros pour la Corse et les départements d’outre-mer.

Le Programme-cadre pour l’innovation et la compétitivité (PIC)

Les financements sont attribués par des appels à propositions et gérés par la Commission européenne. Des points de contact nationaux peuvent servir de relais d’information et fournir une assistance dans les demandes de financement. En France, c’est l’Ademe qui assure ce service.

Le septième Programme-cadre de recherche et développement technologique (PCRD) Ce programme regroupe toutes les actions de l’Union européenne dans le domaine de la recherche. Il est doté d’un budget important (plus de 50 milliards d’euros) sur la période 2007-2013. Une des spécificités du 7e PCRD est son caractère transnational : les projets

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Les actions soutenues par le programme-cadre appuient le développement de la société de la connaissance ainsi que le développement durable. Pour la période 2007-2013, le PIC dispose d’un budget de 3,2 milliards d’euros destiné essentiellement aux PME et divisé en trois sous-programmes dont un, intitulé « Énergie intelligente Europe », vise à promouvoir l’énergie durable en soutenant des projets sur l’amélioration de l’efficacité énergétique, l’adoption de sources d’énergie nouvelles et renouvelables, la pénétration plus large sur le marché de ces sources d’énergie, la diversification de l’énergie et des carburants et l’augmentation de la part d’énergie renouvelable.

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financés doivent présenter une « valeur ajoutée européenne » et être réalisés par des consortiums associant des participants de plusieurs pays européens. Les deux tiers du budget sont consacrés au programme « Coopération » qui favorise la recherche collaborative en Europe dans dix domaines thématiques dont l’énergie, l’environnement, les transports. Les appels à propositions peuvent être consultés sur le site : http:// cordis.europa.eu/fp7/home_en.html.

Les financements et les aides en France L’Ademe Créée en 1990, et dirigée depuis février 2009 par Philippe Van de Maele, un proche du ministre de l’Écologie et du Développement durable, Jean-Louis Borloo, l’Ademe (Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie) est un Épic (établissement public à caractère industriel et commercial) sous la tutelle conjointe du ministère de l’Écologie, de l’Énergie, du Développement durable et de l’Aménagement du territoire (Meeddat) et de celui de l’Enseignement supérieur et de la Recherche.

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À ses trois services centraux situés à Angers (Maine-et-Loire), Paris et Valbonne (Alpes-Maritime), l’Ademe, et c’est un de ses points forts, se rapproche de vous grâce à ses 26 délégations régionales et ses 3 représentations dans les territoires d’outre-mer. L’Agence met ses capacités d’expertise et de conseil à disposition des entreprises, des collectivités locales, des pouvoirs publics et du grand public et les aide à financer des projets dans cinq domaines (la gestion des déchets, la préservation des sols, l’efficacité énergétique et les énergies renouvelables, la qualité de l’air et la lutte contre le bruit) et à progresser dans leurs démarches de développement durable. L’Ademe développe de nombreux partenariats, notamment avec les entreprises, pour les aider à développer leurs actions de protection de

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l’environnement et de baisse de leurs consommations d’énergies. Ces partenariats peuvent prendre des formes diverses : collaboration sur une des compétences de l’Agence (énergie, déchets, transports, communication) ou un type d’actions (recherche, export). Concrètement, l’Ademe peut vous aider à monter vos projets liés à l’environnement et à la maîtrise de l’énergie en vous apportant une aide structurée et accompagner ainsi votre entreprise dans sa prise de décision à travers un soutien méthodologique, un suivi par un ingénieur, une aide à la réalisation de votre cahier des charges, des aides financières dans le cas d’études réalisées par un prestataire. L’Agence peut aussi vous relayer auprès de votre chambre consulaire et de votre syndicat professionnel.

L’Ademe aide aussi les entreprises à passer aux énergies renouvelables. Avec son tout nouveau Fonds Chaleur issu du Grenelle de l’Environnement, l’Ademe dispose en effet d’un milliard d’euros sur trois ans pour allouer des aides financières aux entreprises et aux collectivités qui veulent s’équiper de systèmes de production de chaleur utilisant les énergies renouvelables : bois, géothermie, solaire… Il faut simplement que l’entreprise (ou la collectivité) puisse assurer une production énergétique annuelle supérieure à 1 000 tep (tonnes équivalent pétrole). Un premier appel à candidature a été lancé (www.ademe.fr/fondschaleur) ; il sera clos le 29 mai 2009.

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Pour financer vos investissements, l’Ademe vous propose certaines modalités de subventions, mais elle peut également contribuer au montage de différents soutiens financiers, par exemple, le Fogime. Ce fonds de garantie, destiné à encourager les PME en faveur de la maîtrise de l’énergie, apporte une garantie financière supplémentaire aux crédits bancaires que vous avez demandés pour financer votre projet. Autre type de soutien financier, le fonds d’investissement en capital développement Demeter, qui est un Fonds commun de placement à risque (FCPR) sectoriel dont la stratégie est orientée majoritairement vers le capital développement (PME éco-industrielles déjà existantes) et minoritairement vers le capital-risque (énergies nouvelles, sécurité du cadre de vie). Il est à noter que l’Agence peut intervenir en donnant son avis technique sur les projets.

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Enfin, l’Ademe propose aussi aux entreprises de rejoindre ses clubs de partenaires comme le club Planète gagnante, plate-forme d’échanges et de partage d’expériences basées sur l’éco-exemplarité, ou le club Ademe International pour favoriser les activités d’export des écoentreprises. Consciente de la nécessité d’éduquer au développement durable, l’Ademe propose un grand nombre de supports d’information très instructifs, notamment toute une série de petits guides pratiques, très pédagogiques, au contenu accessible à tous. Sur le site de l’Ademe (www.ademe.fr), extrêmement clair, vous pourrez retrouver l’ensemble des mesures que l’Agence peut vous proposer pour vous aider dans vos actions à caractère environnemental.

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Le système d’échange des permis d’émissions de gaz à effet de serre Le Protocole de Kyoto, signé en 1997, avait prévu l’entrée en vigueur au 1er janvier 2008 d’un système international d’échange de permis d’émissions de gaz à effet de serre entre les États. Afin d’anticiper ce mécanisme, l’Europe avait mis en œuvre, dès janvier 2005, un système européen d’échange de quotas (emission trading scheme, ETS), qui attribue, dans les secteurs de l’industrie et de l’énergie, des allocations d’émissions de gaz à effet de serre aux principaux émetteurs (sidérurgie, ciment, céramique, pétrole, papier, verre, etc.) via des plans nationaux d’allocations des quotas (PNAQ). L’Europe a également mis en place à l’échelle européenne un marché qui permet d’échanger ces quotas. La première phase s’est étendue de janvier 2005 à décembre 2007. La phase actuelle a démarré en janvier 2008 et s’achèvera en 2012. Mais suite au rendez-vous de Bali en décembre 2007, préparatoire à une refonte des accords de Kyoto en décembre 2009 à Copenhague (Danemark), il est très probable que d’autres secteurs seront intégrés au processus. Ce sera sans doute le cas, par exemple, pour celui des transports. Rappelons ici que la France s’est engagée à diviser par quatre ses émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2050, objectif également connu sous l’appellation « Facteur 4 ».

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Comment ça marche ? Chaque État membre établit son plan d’allocations de quotas de CO2 définissant les volumes d’émissions annuelles à ne pas dépasser. À ce jour, près de 12 000 entreprises émettrices sont concernées au sein de l’Union européenne. Elles représentent environ 40 % des émissions européennes de gaz à effet de serre. Parmi elles, 1 500 environ se trouvent sur le territoire français. Elles représentent environ 30 % du total des émissions hexagonales. Chacune des installations reçoit gratuitement jusqu’à présent un quota d’émissions annuelles. Elle peut soit le respecter, soit le dépasser. Mais, dans ce dernier cas, elle doit acheter sur le marché des quotas correspondant à la masse d’équivalent CO2 qu’elle a émise de manière excédentaire. Inversement, si elle a engagé des actions débouchant sur une réduction effective du volume de ses émissions, elle peut revendre son excédent de quotas sur le marché. C’est ce qui a fait le succès de Rhodia, dont la santé financière et boursière s’est améliorée grâce à une baisse importante du volume d’émissions de CO2 de certaines de ses filiales à l’étranger. Si votre entreprise n’est pas couverte par ce système d’échange de quotas, elle n’aura pas directement d’incitations financières à réduire ses émissions. Néanmoins, des mécanismes annexes vous offrent la possibilité de valoriser financièrement vos actions de réduction d’émissions de CO2. Il s’agit des « projets domestiques » et des « certificats d’économies d’énergie ».

Ce mécanisme vise à rémunérer financièrement les entreprises non soumises aux quotas lorsqu’elles engagent volontairement des actions de réduction de leurs émissions. Les secteurs où vous pouvez réduire vos émissions de CO2 et vous faire financer sont ceux des transports, du bâtiment, de l’industrie (hors PNAQ, Plan national d’allocation des quotas), de l’agriculture et du traitement des déchets. Un arrêté daté du 2 mars 2007 fixe le cadre institutionnel nécessaire à la mise en œuvre de ces projets domestiques.

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Les projets domestiques

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En lançant le premier appel à « projets domestiques CO2 », la Caisse des dépôts et consignations facilite le montage des projets et garantit ainsi l’achat des unités d’émissions jusqu’en 2012. Une première liste réduite de projets éligibles publiée en 2007 s’est depuis étoffée d’autres familles de projets. Un exemple parmi d’autres : le remplacement d’une chaudière fioul par une chaudière au bois est éligible aux projets domestiques. Les certificats d’économies d’énergie (CEE)

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Les pouvoirs publics français ont mis en place, dès 2006, des certificats d’économies d’énergie ne répondant pas directement à l’ETS européen mais similaires dans leur fonctionnement. L’objectif est ici de valoriser financièrement les actions d’économies d’énergie réalisées par des entreprises ou des collectivités territoriales, dans les secteurs de la consommation diffuse, c’est-à-dire essentiellement dans les bâtiments (habitat et tertiaire), dans le secteur des transports pour certaines actions et dans les collectivités locales. Les principaux distributeurs d’énergie (EDF, GDF, fournisseurs de fioul…) doivent acquérir un volume donné de certificats d’économies d’énergie pour un nombre d’années précis. Pour ce faire, ils peuvent soit réduire leurs propres consommations d’énergie, soit aider leurs clients à l’économiser. Soit, encore, acheter des certificats à des personnes morales qui auront réalisé elles-mêmes des économies d’énergie. Quelles sont les actions possibles à mener par votre entreprise pour pouvoir bénéficier de ces certificats d’économies d’énergie ? En quelque sorte, comment faire financer en partie certaines de vos actions de développement durable ? Voici quelques actions parmi d’autres éligibles aux CEE : formation de votre personnel à l’éco-conduite, utilisation de véhicules propres, renouvellement d’équipements énergétiques, construction durable (HQE), énergies renouvelables, etc. Un conseil : étudier pour votre entreprise les opportunités de valorisation de ses actions d’économies d’énergie et de réduction de gaz à effet de serre grâce aux projets domestiques et aux certificats d’économies d’énergie.

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Les mécanismes de développement propre (MDP) Imaginés à l’initiative des Nations unies, ils permettent aux entreprises de remplir leurs objectifs de réduction de leurs émissions de CO2 en mettant en place dans des pays en développement une technologie qui conduit à y réduire ces émissions. En contrepartie, ces entreprises reçoivent des « unités de réduction certifiées des émissions » (Urce) équivalant chacune à une tonne de CO2 à hauteur des réductions obtenues. Dans ces mécanismes, les projets liés aux énergies renouvelables sont les plus performants. Ainsi, par exemple, le système des MDP a permis à des entreprises européennes, financées par ce système, de construire des champs d’éoliennes au Maroc. Si ces mécanismes sont remarquables, ils n’en sont pas moins imparfaits dans certains cas, notamment pour les pays qui ne polluent pas et donc n’ont pas grand-chose à échanger. Pour être clair, les MDP vont plus servir la Chine que l’Afrique centrale, par exemple. Du côté des gagnants, on trouve aussi des pays développés : l’hebdomadaire The Economist du 9 septembre 2006 rapporte que les entreprises du secteur britannique de l’électricité, composé majoritairement de centrales à charbon, ont réalisé 800 millions de livres de recettes en vendant le surplus de droits alloués par le gouvernement anglais dans le cadre du système d’échanges de droits…

Quotas d’émission de CO2 : de nouveaux outils pour l’industrie Conformément aux accords de Kyoto, l’effort de réduction des gaz à effet de serre repose en Europe sur un système qui lui est propre et dans lequel les exploitations émettrices de CO2, dans des secteurs déterminés (énergies, ciment, chauffage urbain, papier, etc.), se voient attribuer gratuitement une quantité pluriannuelle de droits d’émission selon un Plan national d’allocations de ces quotas •••

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Le nombre de crédits de réduction d’émissions délivrés d’ici à fin 2012 ne devrait pas dépasser les deux milliards d’euros.

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••• (PNAQ). Après une période probatoire, le système d’échanges de quotas est entré en France dans une nouvelle phase. Dans ce cadre, la Caisse des dépôts et consignations (CDC) tient un registre où sont listées les 1 200 installations françaises concernées par ces échanges de quotas.

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Un quota d’émissions non consommé par rapport à la quantité de quotas préalablement affectée peut être cédé par son titulaire à une autre entreprise qui aura dépassé ses quotas du fait d’une gestion peu efficace de ses émissions de gaz à effet de serre ou tout simplement parce que son activité a crû sensiblement. « Le dispositif, indique Raphaël Peuchot, avocat au barreau de Lyon, dans une tribune publiée par Les Échos du 14 octobre 2008, permet également d’obtenir, sous condition d’additionnalité, des crédits d’émission ou “unités de réduction” à travers des “mécanismes de projet” autorisant une compensation volontaire via des investissements dans les pays émergents pour aider à leur développement “propre”. En France, les exploitants peuvent utiliser des crédits d’émission à concurrence de 13,5 % des quotas alloués. Désormais, poursuit-il, ces mécanismes de projet sont complétés par la faculté d’obtenir des unités de réduction issues d’investissements dans des opérations de boisement ou de reboisement. Modifiant le Code de l’environnement, la loi introduit la possible délivrance d’unités de réduction certifiée des émissions durables (Urced) ou d’unités de réduction certifiée des émissions temporaires (Urcet) en fonction de la durée de capture des gaz à effet de serre dans les plantations correspondantes. »

Les contrats de projet 2007-2013 dans les Régions Ces contrats, négociés avec les préfets, sont centrés uniquement sur des investissements d’envergure dans une logique de grands projets. Trois priorités : compétitivité et attractivité, développement durable, cohésion sociale et territoire. Il existe une volonté de l’État de consacrer 70 % des crédits à l’enseignement, la recherche, les infrastructures de transports non routières et… l’environnement.

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Les critères de sélection des projets sont la création d’emplois, l’impact environnemental (par exemple, diminution de la consommation énergétique) et les TIC. Exemples d’actions à proposer : des projets de transports collectifs, de rénovation urbaine, lutte contre le changement climatique, etc.

Handicapés : la prime initiative emploi (PIE) D’un montant de 6 000 euros, cette prime est versée aux employeurs qui embauchent à temps plein pour au moins douze mois des personnes handicapées ayant des problèmes particuliers d’insertion sociale ou professionnelle : demandeurs d’emploi de longue durée, bénéficiaires des minima sociaux et personne ayant un handicap professionnel lourd. La PIE sera majorée de 50 %, (soit 9 000 euros au total) pour les employeurs à partir de 20 salariés qui recrutent pour la première fois une personne handicapée ou un senior de 45 ans et plus1. En France, aujourd’hui, environ 27 000 entreprises ne comptent aucun salarié handicapé…

Les tiers financeurs, par exemple, qui sont des entreprises du secteur énergétique (EDF, Schneider Electric…). Ils vous proposent des plans d’actions et des équipements mieux adaptés pour faire baisser vos consommations d’énergie. Vous réaliserez ainsi des baisses de charges qui sont autant d’économies pour les comptes de votre entreprise. Ces tiers financeurs se rémunèrent en vous prenant un pourcentage sur la baisse des consommations qu’ils auront induites. La fiscalité est aussi un moyen de financer en partie certains investissements ou actions, comme le célèbre bonus-malus pour les voitures qui vous servira quand vous aurez à choisir les modèles qui équiperont votre parc de véhicules de fonction ou de service. 1. Source : site Internet de l’Agefiph (www.agefiph.fr).

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D’autres moyens de financement

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Les compagnies d’assurances peuvent également vous permettre d’économiser en baissant, par exemple, vos primes si vous faites faire de l’éco-conduite aux personnels de votre entreprise amenés à conduire un véhicule pour leur travail ou si votre entreprise s’engage dans le mangement environnemental. La liste est loin d’être close et rien ne vous empêche d’imaginer à votre tour des moyens malins à proposer à vos partenaires, bien sûr, dans une logique de gagnant-gagnant, pour financer en partie vos investissements dans le développement durable.

En résumé

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On vient de voir, d’une façon non exhaustive, qu’il existe à tous les niveaux de nombreux moyens – malheureusement parfois trop complexes, notamment au niveau européen, ou bénéficiant de trop peu de publicité – pour se faire financer ou rembourser des investissements dans le domaine du développement durable. Une fois que vous les avez identifiés, n’hésitez pas ensuite à les solliciter, puis à les utiliser. En période de crise financière et économique, il ne s’agit pas de faire la fine bouche. En France, il n’y a pas si longtemps, des régions, faute de projets déposés suffisants, retournaient à Bruxelles une partie de leurs crédits non dépensés qui leur avaient été alloués pour financer des projets environnementaux… Le Grenelle de l’environnement, encore en discussion au Parlement en 2009, et, plus encore, les orientations de la prochaine conférence internationale de Copenhague (le « Kyoto de 2009 »), qui doit concrétiser en décembre les pistes dégagées lors de la conférence préparatoire de Bali de fin 2007, sont susceptibles d’entraîner des modifications, parfois sensibles, de ces systèmes existants d’aides ou de financements. On pense, entre autres, à la très probable entrée du secteur des transports dans la liste des entreprises soumises au système d’échange des quotas d’émissions de CO2 ou à la taxation en France, à hauteur de 1 % de la masse salariale brute, des

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entreprises qui n’auraient pas mis en place un plan d’action pour l’emploi des seniors, loi qui reste encore à voter au Parlement au moment où ces lignes sont écrites.

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Il n’y a, dans ce cadre, pas d’autre alternative pour vous et votre entreprise que de surveiller régulièrement, à Bruxelles et à Paris, l’évolution des lois et des règlements qui intéressent le développement durable et son financement.

Annexe 1

Déclaration de Rio sur l’environnement et le développement

La Conférence des Nations unies sur l’environnement et le développement, Réunie à Rio de Janeiro du 3 au 14 juin 1992, Réaffirmant la Déclaration de la Conférence des Nations unies sur l’environnement adoptée à Stockholm le 16 juin 1972, et cherchant à en assurer le prolongement,

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Dans le but d’établir un partenariat mondial sur une base nouvelle et équitable en créant des niveaux de coopération nouveaux entre les États, les secteurs clefs de la société et les peuples, Œuvrant en vue d’accords internationaux qui respectent les intérêts de tous et protègent l’intégrité du système mondial de l’environnement et du développement, Reconnaissant que la Terre, foyer de l’humanité, constitue un tout marqué par l’interdépendance, Proclame ce qui suit : PRINCIPE 1 Les êtres humains sont au centre des préoccupations relatives au développement durable. Ils ont droit à une vie saine et productive en harmonie avec la nature.

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PRINCIPE 2 Conformément à la Charte des Nations unies et aux principes du droit international, les États ont le droit souverain d’exploiter leurs propres ressources selon leur politique d’environnement et de développement, et ils ont le devoir de faire en sorte que les activités exercées dans les limites de leur juridiction ou sous leur contrôle ne causent pas de dommages à l’environnement dans d’autres États ou dans des zones ne relevant d’aucune juridiction nationale. PRINCIPE 3 Le droit au développement doit être réalisé de façon à satisfaire équitablement les besoins relatifs au développement et à l’environnement des générations présentes et futures. PRINCIPE 4 Pour parvenir à un développement durable, la protection de l’environnement doit faire partie intégrante du processus de développement et ne peut être considérée isolément.

PRINCIPE 6 La situation et les besoins particuliers des pays en développement, en particulier des pays les moins avancés et des pays les plus vulnérables sur le plan de l’environnement, doivent se voir accorder une priorité spéciale. Les actions internationales entreprises en matière d’environnement et de développement devraient également prendre en considération les intérêts et les besoins de tous les pays. PRINCIPE 7 Les États doivent coopérer dans un esprit de partenariat mondial en vue de conserver, de protéger et de rétablir la santé et l’intégrité de l’écosystème terrestre. Étant donné la diversité des rôles joués dans la dégradation de l’environnement mondial, les États ont des

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PRINCIPE 5 Tous les États et tous les peuples doivent coopérer à la tâche essentielle de l’élimination de la pauvreté, qui constitue une condition indispensable du développement durable, afin de réduire les différences de niveaux de vie et de mieux répondre aux besoins de la majorité des peuples du monde.

Déclaration de Rio sur l’environnement et le développement

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responsabilités communes mais différenciées. Les pays développés admettent la responsabilité qui leur incombe dans l’effort international en faveur du développement durable, compte tenu des pressions que leurs sociétés exercent sur l’environnement mondial et des techniques et des ressources financières dont ils disposent. PRINCIPE 8 Afin de parvenir à un développement durable et à une meilleure qualité de vie pour tous les peuples, les États devraient réduire et éliminer les modes de production et de consommation non viables et promouvoir des politiques démographiques appropriées.

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PRINCIPE 9 Les États devraient coopérer ou intensifier le renforcement des capacités endogènes en matière de développement durable en améliorant la compréhension scientifique par des échanges de connaissances scientifiques et techniques et en facilitant la mise au point, l’adaptation, la diffusion et le transfert de techniques, y compris de techniques nouvelles et novatrices. PRINCIPE 10 La meilleure façon de traiter les questions d’environnement est d’assurer la participation de tous les citoyens concernés, au niveau qui convient. Au niveau national, chaque individu doit avoir dûment accès aux informations relatives à l’environnement que détiennent les autorités publiques, y compris aux informations relatives aux substances et activités dangereuses dans leurs collectivités, et avoir la possibilité de participer aux processus de prise de décision. Les États doivent faciliter et encourager la sensibilisation et la participation du public en mettant les informations à la disposition de celui-ci. Un accès effectif à des actions judiciaires et administratives, notamment des réparations et des recours, doit être assuré. PRINCIPE 11 Les États doivent promulguer des mesures législatives efficaces en matière d’environnement. Les normes écologiques et les objectifs et priorités pour la gestion de l’environnement devraient être adaptés à la situation en matière d’environnement et de développement à

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laquelle ils s’appliquent. Les normes appliquées par certains pays peuvent ne pas convenir à d’autres pays, en particulier à des pays en développement, et leur imposer un coût économique et social injustifié.

PRINCIPE 13 Les États doivent élaborer une législation nationale concernant la responsabilité de la pollution et d’autres dommages à l’environnement et l’indemnisation de leurs victimes. Ils doivent aussi coopérer diligemment et plus résolument pour développer davantage le droit international concernant la responsabilité et l’indemnisation en cas d’effets néfastes de dommages causés à l’environnement dans des zones situées au-delà des limites de leur juridiction par des activités menées dans les limites de leur juridiction ou sous leur contrôle. PRINCIPE 14 Les États devraient concerter efficacement leurs efforts pour décourager ou prévenir les déplacements et les transferts dans d’autres États de toutes activités et substances qui provoquent une grave détérioration de l’environnement ou dont on a constaté qu’elles étaient nocives pour la santé de l’homme.

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PRINCIPE 12 Les États devraient coopérer pour promouvoir un système économique international ouvert et favorable, propre à engendrer une croissance économique et un développement durable dans tous les pays, qui permettrait de mieux lutter contre les problèmes de dégradation de l’environnement. Les mesures de politique commerciale motivées par des considérations relatives à l’environnement ne devraient pas constituer un moyen de discrimination arbitraire ou injustifiable, ni une restriction déguisée aux échanges internationaux. Toute action unilatérale visant à résoudre les grands problèmes écologiques au-delà de la juridiction du pays importateur devrait être évitée. Les mesures de lutte contre les problèmes écologiques transfrontières ou mondiaux devraient, autant que possible, être fondées sur un consensus international.

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PRINCIPE 15 Pour protéger l’environnement, des mesures de précaution doivent être largement appliquées par les États selon leurs capacités. En cas de risque de dommages graves ou irréversibles, l’absence de certitude scientifique absolue ne doit pas servir de prétexte pour remettre à plus tard l’adoption de mesures effectives visant à prévenir la dégradation de l’environnement. PRINCIPE 16 Les autorités nationales devraient s’efforcer de promouvoir l’internalisation des coûts de protection de l’environnement et l’utilisation d’instruments économiques, en vertu du principe selon lequel c’est le pollueur qui doit, en principe, assumer le coût de la pollution, dans le souci de l’intérêt public et sans fausser le jeu du commerce international et de l’investissement.

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PRINCIPE 17 Une étude d’impact sur l’environnement, en tant qu’instrument national, doit être entreprise dans le cas des activités envisagées qui risquent d’avoir des effets nocifs importants sur l’environnement et dépendent de la décision d’une autorité nationale compétente. PRINCIPE 18 Les États doivent notifier immédiatement aux autres États toute catastrophe naturelle ou toute autre situation d’urgence qui risque d’avoir des effets néfastes soudains sur l’environnement de ces derniers. La communauté internationale doit faire tout son possible pour aider les États sinistrés. PRINCIPE 19 Les États doivent prévenir suffisamment à l’avance les États susceptibles d’être affectés et leur communiquer toutes informations pertinentes sur les activités qui peuvent avoir des effets transfrontières sérieusement nocifs sur l’environnement et mener des consultations avec ces États rapidement et de bonne foi.

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Le guide du développement durable en entreprise

PRINCIPE 20 Les femmes ont un rôle vital dans la gestion de l’environnement et le développement. Leur pleine participation est donc essentielle à la réalisation d’un développement durable. PRINCIPE 21 Il faut mobiliser la créativité, les idéaux et le courage des jeunes du monde entier afin de forger un partenariat mondial, de manière à assurer un développement durable et à garantir à chacun un avenir meilleur. PRINCIPE 22 Les populations et communautés autochtones et les autres collectivités locales ont un rôle vital à jouer dans la gestion de l’environnement et le développement du fait de leurs connaissances du milieu et de leurs pratiques traditionnelles. Les États devraient reconnaître leur identité, leur culture et leurs intérêts, leur accorder tout l’appui nécessaire et leur permetre de participer efficacement à la réalisation d’un développement durable.

PRINCIPE 24 La guerre exerce une action intrinsèquement destructrice sur le développement durable. Les États doivent donc respecter le droit international relatif à la protection de l’environnement en temps de conflit armé et participer à son développement, selon que de besoin. PRINCIPE 25 La paix, le développement et la protection de l’environnement sont interdépendants et indissociables. PRINCIPE 26 Les États doivent résoudre pacifiquement tous leurs différends en matière d’environnement, en employant des moyens appropriés conformément à la Charte des Nations unies.

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PRINCIPE 23 L’environnement et les ressources naturelles des peuples soumis à oppression, domination et occupation doivent être protégés.

Déclaration de Rio sur l’environnement et le développement

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PRINCIPE 27 Les États et les peuples doivent coopérer de bonne foi et dans un esprit de solidarité à l’application des principes consacrés dans la présente Déclaration et au développement du droit international dans le domaine du développement durable.

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Déclaration de principes, non juridiquement contraignante mais faisant autorité, pour un consensus mondial sur la gestion, la conservation et l’exploitation écologiquement viable de tous les types de forêts.

Annexe 2

Les 10 principes du Pacte mondial des Nations unies

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Le Pacte mondial (ou Global compact) des Nations unies (créé en juillet 2000) invite les entreprises à adopter, soutenir et appliquer dans leur sphère d’influence un ensemble de valeurs fondamentales, dans les domaines des droits de l’homme, des normes de travail et de l’environnement, et de lutte contre la corruption. En d’autres termes, c’est seulement dans les domaines qui les concernent que l’on requiert des entreprises de véritables évolutions. Les 10 Principes sont tirés de la Déclaration universelle des droits de l’homme ; de la Déclaration de l’Organisation internationale du travail relative aux principes et droits fondamentaux au travail ; de la Déclaration de Rio sur l’environnement et le développement ; et de la Convention des Nations unies contre la corruption. Droits de l’homme

1. Les entreprises sont invitées à promouvoir et à respecter la protection du droit international relatif aux droits de l’Homme dans leur sphère d’influence ; et 2. À veiller à ce que leurs propres compagnies ne se rendent pas complices de violations des droits de l’Homme.

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Le guide du développement durable en entreprise

Droit du travail

3. Les entreprises sont invitées à respecter la liberté d’association et à reconnaître le droit de négociation collective ; 4. L’élimination de toutes les formes de travail forcé ou obligatoire ; 5. L’abolition effective du travail des enfants ; et 6. L’élimination de la discrimination en matière d’emploi et de profession. Environnement

7. Les entreprises sont invitées à appliquer l’approche de précaution face aux problèmes touchant l’environnement ; 8. À entreprendre des initiatives tendant à promouvoir une plus grande responsabilité en matière d’environnement ; et 9. À favoriser la mise au point et la diffusion de technologies respectueuses de l’environnement. Lutte contre la corruption (depuis le 24 juin 2004)

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10. Les entreprises sont invitées à agir contre la corruption sous toutes ses formes, y compris l’extorsion de fonds et les pots-de-vin.

Annexe 3

Les rendez-vous du développement durable en France

Forum des entreprises et du développement durable (FEDD) organisé à Paris par le Meeddat en janvier. Assises nationales du développement durable organisées dans une grande ville de province chaque année. En janvier 2009, c’était au tour de Lyon.

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Federe-Les Échos, fin mars à Paris, Forum européen pour le développement durable et une entreprise responsable, cycle de conférences organisé chaque année au printemps par le quotidien Les Échos avec le concours du Programme des Nations unies pour le développement : www.federe.fr. Semaine nationale des personnes handicapées physiques, en mars, partout en France. ÉcoBat, le salon de l’éco-construction, Porte de Versailles à Paris, en mars. www.salon-ecobat.com. Journée internationale de la femme, le 8 mars de chaque année et partout dans le monde.

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Le guide du développement durable en entreprise

Semaine du développement durable, organisée début avril dans toute la France, par le Meeddat : près de 3 000 initiatives traitant aussi bien de la gestion des déchets, de l’énergie, de l’alimentation, de l’habitat, des transports que de la biodiversité… Salon Planète durable organisé en avril. Salon grand public dédié à l’éco-consommation et très couru pour sa première édition en 2008 Porte de Versailles à Paris. Salon produrable en mars à Paris : 2 000 m2 d’exposition, débats et conférences sur les métiers (achats, supply chain, transport, environnement, finance, marketing et publicité, ressources humaines…). Dimension européenne, avec un focus sur les enjeux d’éducation et de formation, un dialogue étroit entre public, privé et tiers secteur (syndicats, ONG, associations), l’Ethical Academy et son trophée. Sous le patronage du Meeddat. Site Internet : http://www.produrable.com. Quinzaine du commerce équitable (en avril ou mai), précédée du Forum national du commerce équitable qui réunit l’ensemble des professionnels œuvrant pour un meilleur équilibre Nord-Sud et les acteurs de ce secteur. Site Internet : www.forumequitable.org. Salon de l’environnement et des métiers durables (SEMD) en juin : exposition, conférences et ateliers. Parrainé par les ministères de l’Économie et des Finances, de l’Emploi et le secrétariat d’État à l’Écologie.

Université d’été de la communication pour le développement durable, organisée à la fin de l’été au château de l’Environnement à Buoux dans le Luberon par Acidd. Site Internet : www.acidd.com. Semaine européenne de la mobilité organisée en septembre dans toute l’Europe. Global Annual Women’s Forum : à Deauville, en octobre, la place des femmes dans l’entreprise et la société. Site Internet : www.womens-forum.com.

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Semaine mondiale de l’eau en août.

Les rendez-vous du développement durable en France

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Université de la Terre, organisée en octobre à Paris par Nature et Découvertes avec Les Échos et Enjeux-Les Échos, en partenariat avec le ministère de l’Écologie, de l’Énergie, du Développement durable et de l’Aménagement du territoire, KPMG et Ionis Education Group. Site Internet : www.universitedelaterre.com. Festival du Vent à Calvi, organisé fin octobre-début novembre par Serge Orru, aussi directeur de WWF France. Pollutec : 23e salon international des équipements, des technologies et des services de l’environnement, organisé en décembre alternativement à Paris (2009) et à Lyon (2010). Site Internet : www.pollutec.com. La Journée internationale des personnes handicapées en décembre et partout dans le monde. Le Forum mondial du développement durable (FMDD), organisé chaque fin d’année à Paris par la revue Passages et Adapes. Propose, depuis 2008, des éditions internationales (pour 2009, FMDD au Burkina-Faso pour l’Afrique).

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Jadde (Journées annuelles du développement durable et des entreprises) à Lille, Paris, Strasbourg, etc.

Annexe 4

Les lieux où échanger les bonnes pratiques

En France Comité 21 www.comite21.org

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Créée en 1995 pour faire vivre en France l’Agenda 21 ratifié au Sommet de Rio quelques années plus tôt, cette association est sans doute la plus importante en nombre d’adhérents puisqu’elle en compte un peu plus de 400 répartis en quatre collèges : entreprises, collectivités locales, associations, établissements publics et médias. Ce premier réseau d’acteurs français pour le développement durable est présidé par Éric Guillon (président d’Éco-Emballages) et sa directrice générale Dorothée Briaumont (depuis avril 2008). Les principaux objectifs du Comité 21 sont d’accompagner ses adhérents dans leur mise en œuvre du développement durable, de favoriser la mutualisation de l’innovation à partir d’outils et de bonnes pratiques, d’être une force de proposition auprès de ses adhérents, de concevoir et de publier régulièrement des ouvrages et d’organiser des rencontres et des débats. Pour informer régulièrement ses adhérents, le Comité 21 dispose de deux newsletters, une mensuelle, Infos 21, et une bimestrielle, Climat 21. Le Comité 21 édite également de nombreuses brochures. Parmi

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Le guide du développement durable en entreprise

les plus récentes, on note Agir ensemble pour des territoires durables ou Agir ensemble pour un tourisme durable. Ses points forts : le mix entreprises-collectivités-associations, son expertise sur « territoires et développement durable », son savoirfaire comme tiers facilitateur de relations avec les parties prenantes. En avance aussi sur la thématique du tourisme responsable.

Orse www.orse.org

L’Orse (Observatoire de la responsabilité sociétale des entreprises) a été créé en juin 2000 pour rendre plus compréhensibles les outils de la RSE, identifier les différents enjeux, permettre à ses 130 membres d’être plus présents sur la scène internationale par une meilleure connaissance des lieux de régulation de la RSE. Pour ce faire, l’Orse collecte, analyse et fait connaître des informations, des documents et des études sur la responsabilité sociétale des entreprises et sur l’ISR (investissements socialement responsables) en France et à l’étranger, et diffuse le tout auprès de ses membres.

Ses adhérents sont surtout des entreprises, mais on trouve aussi parmi eux des consultants, des investisseurs, des ONG, des organisations professionnelles et des représentants des six grandes centrales syndicales de salariés, ce que l’on ne trouve nulle part ailleurs. Le principaux axes de travail concernent les questions de notation sociale, de reporting, de certification, d’égalité professionnelle hommes-femmes, de dialogue social, de partenariats avec les ONG, de finances ISR, etc. Du coup, l’Orse publie de nombreux guides pratiques, documents et rapports de travail sur ces thématiques. Parmi ses publications régulières, on trouve des newsletters comme La Lettre de l’Orse, mensuelle,

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Le président de l’Orse est Daniel Lebègue, ex-patron de la Caisse des dépôts et consignations, aujourd’hui président de Transparency International France et animateur de l’IFA, l’Institut français des administrateurs. François Fatoux en est le délégué général.

Les lieux où échanger les bonnes pratiques

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ou Orse Infos, tous les quinze jours, ainsi qu’un panorama de presse tous les quinze jours également. Ses points forts : le grand sérieux de ses travaux, son expertise sur les ONG et l’ISR, et ses guides pratiques… très pratiques.

EPE www.epe-asso.org

Créée en 1992, EPE (Entreprise pour l’environnement) regroupe aujourd’hui une cinquantaine de grandes entreprises de secteurs d’activités très variés autour de l’idée que la protection de l’environnement est un des enjeux majeurs du développement économique. Son président est Jean-Yves Gilet, d’ArcelorMittal, et sa déléguée générale Claire Tutenuit. Ses objectifs sont de développer les approches efficaces des problèmes d’environnement, de mobiliser les entreprises, de mutualiser, de formaliser et d’exprimer leurs opinions afin de les faire connaître auprès des « décideurs » (régulateurs, toutes parties prenantes, etc.), de promouvoir leur compétence et leur dynamisme dans le domaine du développement durable. Au sein d’EPE existe une commission du changement climatique avec différents groupes de travail : transports et effet de serre, scénario sous contrainte carbone, études des schémas post-2012, bâtiments et effet de serre, etc.

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Les principales publications d’EPE : La Lettre d’EPE, trimestrielle, et plusieurs rapports par an. Ses points forts : sa connaissance des problématiques environnementales dans l’entreprise et spécialiste « carbone ».

Orée www.oree.org

Créée en 1992, comme EPE, Orée (entreprises, territoires et environnement) compte aujourd’hui plus d’une centaine de membres dont une large majorité d’entreprises. Présidée par Ghislaine Hierso

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Le guide du développement durable en entreprise

(directrice des relations institutionnelles chez Veolia Propreté), Orée milite pour développer une réflexion commune sur la prise en compte de l’environnement et en particulier le management environnemental et sa mise en application à l’échelle d’un territoire. La déléguée générale d’Orée est, depuis quelques années, Nadia Loury. Orée publie tous les deux mois une newsletter intitulée La Lettre d’Orée et régulièrement des guides pratiques sur l’écologie industrielle, le management des zones d’activités, les entreprises et la biodiversité, les transports, les PDE (Plans de déplacements d’entreprise), etc. Ses points forts : la qualité générale de ses travaux, son avance sur le dossier concernant l’intégration de la biodiversité dans les stratégies d’entreprises, son expertise sur les dossiers environnementaux et la qualité de ses guides pratiques.

IMS Entreprendre pour la Cité www.imsentreprendre.com

Présidée par Claude Bébéar (président du conseil de surveillance d’Axa), IMS Entreprendre pour la Cité veut aussi favoriser les liens entre les entreprises et les associations à travers un réseau d’antennes (à Paris, Lyon, Nice) et de clubs (12) en régions. Tous les mois, IMS publie une newsletter intitulée tout simplement IMS-Entreprendre pour la Cité. Ses points forts : sa longue expérience dans le domaine sociétal et un réseau de points de contact répartis sur tout le territoire.

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Créée en 1986, cette association fédère un réseau de 200 entreprises. Sa vocation : les aider à intégrer dans leur politique de responsabilité sociale des démarches d’engagement sociétal innovantes, répondant à la fois à leurs propres enjeux et aux attentes de la société. Cette action se développe à travers les partenariats de solidarité, la promotion de la non-discrimination, et la gestion de la diversité, les services aux populations en difficultés notamment dans les quartiers sensibles, etc.

Les lieux où échanger les bonnes pratiques

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4D www.association4D.org

Créée en 1993 après le Sommet de Rio, comme beaucoup d’associations développement durable, 4D (Dossiers et débats pour le développement durable) constitue un réseau citoyen de plusieurs centaines de membres pour la promotion du développement durable et le suivi des engagements pris par la France et les autres États membres de l’ONU. Le président de 4D est Pierre Radanne, ancien patron de l’Ademe (1998-2002) et auteur du rapport officiel sur la division par quatre par la France de ses émissions de gaz à effet de serre à l’horizon 2050. Il a succédé à Michel Mousel, ex-responsable de la Mission interministérielle de l’Effet de serre (1997-2002). 4D anime des échanges entre réseaux associatifs, favorise l’élaboration de positions et la représentation commune des ONG auprès des Nations unies, le partage d’informations à travers la mise en réseaux des différents acteurs du territoire (ONG, syndicats, collectivités locales, chercheurs, éducateurs, individus) du local à l’international. 4D organise une conférence-débat chaque mois à Paris et à Montpellier et met en ligne sur Internet une encyclopédie du développement durable (www.encyclopédie-dd.org). Avec le Comité 21 (voir plus haut), 4D participe à l’Observatoire national des Agendas 21 locaux et des pratiques territoriales de développement durable.

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Outre de nombreux dossiers, 4D publie, tous les deux mois, une newsletter intitulée Facteur 4D. Ses points forts : la qualité politique et les connaissances techniques de ses animateurs ; son encyclopédie du développement durable en ligne.

Passages-Adapes www.passages-forum.fr

Présidée par le très actif Émile H. Malet, l’association Adapes publie la revue Passages et a réussi, malgré de très faibles moyens, le tour de

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Le guide du développement durable en entreprise

force d’organiser, en octobre 2008, à Brazzaville (Congo) une sixième édition de son Forum mondial du développement durable, qui se tenait jusqu’à présent et depuis cinq ans (fin novembre-début décembre) à Paris, au Sénat. Thème principal de ce forum « africain » qui aura réuni dix chefs d’État et plusieurs centaines de participants : le devenir de la forêt du Congo qui, répartie sur six pays de l’Afrique subsaharienne, représente le deuxième massif forestier du monde, véritable « deuxième poumon » pour la planète, après l’Amazonie et devant l’Indonésie. La revue Passages a été fondée en 1987 par Émile H. Malet. Espace de débats pluridisciplinaires et géostratégiques, elle n’est pas entièrement consacrée au développement durable, mais lui fait une très large place depuis quelques années. Passages est un véritable think-tank qui traite de tous les sujets, mais fait une place prépondérante au développement durable, notamment au travers de son séminaire de prospective énergétique et du Forum mondial du développement durable qu’elle organise sous le haut patronage du président de la République. Ses prochaines éditions se tiendront en 2009 au Burkina-Faso pour le continent africain, à Paris à l’Institut du monde arabe pour la zone Europe. Ses points forts : son ouverture sur les pays en développement et le carnet d’adresses de son président.

Le Pacte mondial (ou Global Compact) Le Pacte mondial des Nations unies a été lancé par l’ancien secrétaire général de l’ONU, Kofi Annan, au siège de l’ONU à New York, le 26 juillet 2000. Le secrétaire général a invité les dirigeants d’entreprise à se joindre à une initiative internationale, qui rassemblerait les entreprises et les organismes des Nations unies, le monde du travail et la société civile, autour de neuf principes universels relatifs aux droits de l’homme, aux normes du travail et à l’environnement. Depuis juin 2004, le Pacte mondial compte un dixième principe

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Transfrontières…

Les lieux où échanger les bonnes pratiques

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relatif à la lutte contre la corruption et le blanchiment de l’argent. S’appuyant sur le pouvoir de l’action collective, le Pacte mondial s’attache à promouvoir la responsabilité civique des entreprises afin que le monde des affaires puisse participer à la recherche de solutions pour résoudre les problèmes posés par la mondialisation. Aujourd’hui, des centaines de sociétés de toutes les régions du monde, dont 400 environ pour la France, ainsi que des organisations internationales du travail et de la société civile participent au Pacte mondial. Le Pacte mondial est une initiative volontaire d’entreprises responsables, à laquelle sont associés des objectifs complémentaires, à savoir : intégrer le Pacte mondial et ses principes à la stratégie et aux activités des entreprises, favoriser la coopération entre les principales parties intéressées, et promouvoir les partenariats établis à l’appui des objectifs poursuivis par l’ONU. Pour atteindre ces objectifs, le Pacte mondial propose plusieurs mécanismes de facilitation et de participation : concertation sur les politiques, apprentissage, structures locales et projets.

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Le Pacte mondial n’est pas un instrument de réglementation – il ne sert pas à sanctionner, à dicter ou à évaluer le comportement ou les actions des entreprises. Il s’appuie plutôt sur la responsabilité à l’égard du public, la transparence et l’intérêt à long terme des sociétés, du monde du travail et de la société civile pour lancer des actions concrètes et conjointes en appliquant les principes énoncés dans le Pacte mondial. Pour participer au Pacte mondial, une entreprise doit procéder de la façon suivante : son président envoie une lettre (approuvée dans la mesure du possible par son conseil d’administration) au secrétaire général, Ban Ki-moon, dans laquelle il exprime son appui au Pacte mondial et à ses 10 principes et l’adresse à l’Institut de l’entreprise (si vous êtes une société française, envoyez une télécopie au numéro : +33(0)1 47 23 79 01) qui transmettra au bureau de New York. La lettre d’adhésion doit être imprimée sur le papier à en-tête de l’entreprise. L’entreprise adhérente prend ensuite des mesures pour modifier, si nécessaire, son fonctionnement, de façon à intégrer les 10 principes

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Le guide du développement durable en entreprise

du Pacte mondial à sa stratégie, à sa culture et à ses activités quotidiennes. Elle est censée faire publiquement campagne en faveur du Pacte mondial et de ses principes en ayant recours à des moyens de communication tels que communiqués de presse, discours, etc. Elle est censée décrire dans son rapport annuel (ou autre rapport semblable) comment elle appuie le Pacte mondial et ses principes (engagement de la communication sur le progrès). Enfin, elle est censée rédiger chaque année un exemple de bonne pratique et le mettre en ligne sur le site du Global Compact de l’ONU (www.unglobalcompact.org) afin de partager son expérience. À noter que certains donneurs d’ordres (exemples : Schneider Electric, Vinci, etc.) se donnent en matière d’achats des objectifs en pourcentage du total acheté chez des fournisseurs et sous-traitants adhérents au Pacte mondial. En France, une structure appelée « Le Forum des amis du Pacte mondial » est le relais du bureau du Pacte mondial des Nations unies à New York. Hébergé sur le site Internet de l’institut de l’entreprise et bénéficiant de l’assistance de l’Orse et d’EPE (voir plus haut), le Forum organise des déjeuners-débats chaque trimestre environ. Cette structure est présidée actuellement par Gérard Mestrallet (GDFSuez), qui a succédé en 2008 à Bertrand Collomb (ex-Lafarge).

CSR Europe

CSR Europe (Corporate Social Responsibility) est un réseau européen d’entreprises créé en 1996 à l’initiative de Jacques Delors et de plusieurs patrons d’entreprises européens. CSR Europe est présidé par Étienne Davignon (vice-président de Suez-Tractebel). À travers des opérations de benchmarking sur les bonnes pratiques et la mise en place d’outils, ce réseau entend faire évoluer les valeurs, les styles de management et les pratiques de l’entreprise, en intégrant la responsabilité sociale et environnementale à tous les niveaux et dans toutes les fonctions de l’entreprise.

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www.csreurope.org

Les lieux où échanger les bonnes pratiques

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Ce réseau comprend 65 entreprises membres et 18 partenaires nationaux affiliés. Depuis quelques années, CSR Europe est devenu l’interlocuteur de référence des institutions européennes sur la RSE. Le Cime (Comité d’information et de mobilisation pour l’emploi) assure un lien avec les entreprises françaises. Les membres se réunissent et échangent leurs expériences en matière de responsabilité sociale afin de développer des concepts ou des projets qui soient bénéfiques à la fois pour l’entreprise et pour la société. Sa mission est d’encourager et aider les entreprises à stimuler l’emploi, augmenter l’employabilité et empêcher l’exclusion sociale, l’objectif final visant au développement durable et à une société plus équitable. CSR Europe, par son partenariat avec la Commission européenne, établit un pont entre les entreprises, les dirigeants nationaux et les hommes politiques européens. Par le biais de CSR Europe, les entreprises membres ont maintenant la possibilité de participer à la définition d’une politique de responsabilité sociale européenne.

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CSR Europe diffuse régulièrement de l’information sur les bonnes pratiques d’environ 500 entreprises européennes, notamment en publiant chaque semaine une newsletter sur Internet. Chaque année, sauf en 2009, elle organise, en mars à Bruxelles, un market place, où de nombreuses entreprises viennent présenter leurs bonnes pratiques et les entreprises visiteuses y faire… leur marché de bonnes idées. Il existe aussi, au sein de CSR, des laboratoires qui regroupent plusieurs représentants d’entreprises sur un projet, avec comme objectif au final de publier un livrable accompagné des outils et des guides qui vont pouvoir le rendre accessible et opérationnel à tous. CSR Europe diffuse également trois fois par an un journal, édite des guides pratiques, le dernier en date (octobre 2008) étant sur le marketing responsable.

Iddri www.iddri.org

Créé en 2001, l’Iddri, l’Institut du développement durable et des relations internationales, est une association loi 1901 composée de

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Le guide du développement durable en entreprise

membres fondateurs, de membres actifs (organismes de recherche, syndicats, organismes non gouvernementaux, acteurs de la vie économique, collectivités territoriales) et, le cas échéant, de membres d’honneur. Des chercheurs et personnalités s’associent régulièrement aux travaux de l’institut. Un vingtaine de membres, dont sept grandes entreprises et un syndicat, la CFDT, composent l’Iddri. Son conseil d’administration est présidé par Daniel Lebègue (voir plus haut, Orse) et sa directrice est Laurence Tubiana. La mission de l’Iddri est triple :

– identifier les sujets de demain : l’Iddri contribue ainsi à la préparation intellectuelle des décisions internationales et participe aux communautés d’expertise impliquées dans ces processus. L’Iddri conduit une réflexion prospective, de concert avec les acteurs impliqués, afin d’anticiper les enjeux de demain et de les traiter « à froid ». Il renforce les communautés scientifiques qui travaillent sur le développement durable par la promotion des travaux de recherche et d’expertise pluridisciplinaires sur des sujets nouveaux. Les travaux sont menés dans le respect des règles académiques et de la confidentialité ; – ouvrir un espace de dialogue : l’Iddri identifie les espaces de dialogue nécessaires pour lever les blocages de compréhension et d’appréciation des enjeux. Il anime un réseau, où des acteurs aux intérêts souvent divergents (administrations, communauté scientifique, entreprises, associations) déterminent conjointement les questions à approfondir, en débattent, identifient convergences et divergences.

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– éclairer les décisions : l’Iddri rassemble connaissances et expertise sur les principaux sujets internationaux du développement durable, notamment ceux faisant l’objet de controverses, à l’intention des décideurs publics et privés, économiques et sociaux. Ceux-ci disposent donc d’une pluralité d’avis, de propositions et de scénarios reposant sur la base scientifique la plus solide possible ;

Les lieux où échanger les bonnes pratiques

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L’Iddri publie régulièrement La Lettre de l’Iddri et noue chaque année de nombreux partenariats scientifiques et éditoriaux pour publier des ouvrages sur la thématique du développement durable.

WBCSD www.wbcsd.org

Sorte de conseil mondial des affaires sur le développement durable, le WBCSD (World Business Council of Sustainable Development) existe depuis 1999. Son président actuel est le Suédois Bjorn Stigson. Le montant de la cotisation annuelle est assez élevé, ce qui en écarte nombre de petites et moyennes entreprises. Ce réseau rassemble plus de 200 grandes entreprises internationales qui sont engagées pour le développement durable par le biais de la croissance économique, l’équilibre écologique et le progrès social. Les membres du WBCSD proviennent de 35 pays et de 20 secteurs industriels majeurs. Le WBCSD bénéficie également d’un réseau de plus de 55 bureaux nationaux et régionaux répartis dans 40 pays sur les cinq continents, le tout regroupant quelque 1 000 chefs d’entreprise.

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Les missions du WBCSD sont d’encourager le rôle prééminent des entreprises dans le changement vers une meilleure prise en compte du développement durable pour soutenir la croissance. Le WBCSD a mis en place quatre Focus Areas, qui permettent d’avoir des plates-formes de discussion sur des priorités développement durable stratégiques pour les entreprises : Énergie et climat, Développement, Écosystèmes et Rôle du business. Le groupe « Énergie et climat » a pour objectifs de proposer des mécanismes, des outils de mesures et des solutions innovantes pour aider les entreprises à réduire les impacts de leurs activités. Ce groupe vise également à proposer des solutions d’avenir pour produire sous la contrainte carbone en explorant des nouvelles pistes énergétiques et technologiques pour répondre aux besoins de demain.

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Le groupe « Développement » soulève la question des quelque trois milliards de personnes (près de la moitié de la population mondiale) qui survivent avec moins de deux dollars par jour et sont de ce fait exclues des marchés et des bénéfices que ceux-ci peuvent apporter. La réduction de la pauvreté est donc essentielle à la croissance économique, dont les entreprises sont le premier moteur. L’objectif du groupe « Développement » est d’inciter le secteur privé à contribuer à la réalisation des Objectifs du Millénaire. À court terme, ce type d’action participe à la gestion des risques externes et assoit la légitimité de l’entreprise, et à long terme… les économies émergentes constituent les marchés de demain. L’objectif du groupe « Écosystèmes » est d’attirer l’attention sur la valeur des services rendus, encore gratuitement aujourd’hui, par la nature et ses écosystèmes. Ce groupe est une plate-forme d’engagement et de collaboration pour s’attaquer aux défis et aux opportunités que présentent les écosystèmes et leurs nombreux et précieux services, aidant les entreprises à opérer, innover et croître tout en luttant activement contre les risques induits par la dégradation accélérée des écosystèmes et la disparition de leurs services.

Les membres du WBCSD choisissent et conduisent les projets appelés « Council Projects ». Ils assurent une coopération et une participation active aux différents groupes de travail mis en place. Chaque année, le WBCSD publie un rapport annuel d’activités, une dizaine de rapports thématiques et édite sept newsletters par thèmes sur Internet (énergie et climat, eau, mobilité, etc.).

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Le groupe « Rôle du business » a pour objectif d’explorer ce que les entreprises peuvent faire et comment elles doivent concilier leurs différents rôles pour agir de manière durable, et propose les plans d’actions ad hoc.

Les lieux où échanger les bonnes pratiques

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Les cercles ou les clubs de directeurs du développement durable Comme beaucoup de professions, les directeurs du développement durable aiment se retrouver entre eux pour partager leurs expériences, leurs bonnes pratiques, mais aussi pour chercher ensemble des solutions à leurs problèmes. Depuis quelques années, de nombreux cercles ou clubs, plus ou moins informels, malheureusement souvent très parisiens, réunissent chacun quelques dizaines de directeurs du développement durable, parfois les mêmes.

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Parmi les « officiels », on peut citer le Club des directeurs du développement durable de l’Orse (voir page 282), qui débat de sujets très concrets, ou celui de l’Anvie (Association nationale de valorisation interdisciplinaire des sciences humaines et sociales auprès des entreprises), plus axé recherche. On citera aussi un des derniers-nés, C3D, le Collège des directeurs du développement durable engagés (sic) qui bénéficie d’un site Internet (www.cddd.fr) et visiblement de bonnes ouvertures dans la presse écrite, qui publie de temps en temps une de leurs tribunes sur une thématique développement durable d’actualité. Il est vrai que l’un des objectifs affichés de ce collège est de « porter dans le débat public des propositions visant à renforcer le mouvement d’implication des entreprises en faveur du développement durable ». Citons également le Club développement durable des établissements et entreprises publiques, dont la responsable, Michèle Pappalardo, est la commissaire générale et déléguée interministérielle au Développement durable. Créé en 2006, et animé par Nicole Vernaz, il rassemble une cinquantaine de membres et souhaite leur donner les clés opérationnelles pour qu’ils passent à l’acte dans leurs secteurs respectifs. Parmi ses « productions », on notera la création d’une « Charte du DD des établissements et entreprises publiques » et la signature de celle-ci en 2008 par 33 dirigeants de ces structures publiques (la CDC, France Télévisions, la RATP, l’Ifremer, la Bibliothèque nationale de France, La Française des jeux, le Conservatoire du littoral, etc.). Le développement durable est aussi transfrontières, en témoigne la toute jeune association européenne des directeurs du développement

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Le guide du développement durable en entreprise

durable, SEED (Sustainable and Environment’s European Directors), présidée par Didier Hamon, l’actuel directeur du développement durable d’Aéroports de Paris, qui compte une trentaine de membres et ambitionne de devenir une nouvelle référence syndicale professionnelle en Europe au même titre qu’il en existe pour les médecins ou les architectes. Enfin, côté club « informel », mais ce n’est pas le club le moins important, loin de là, le très fréquenté Cercle des directeurs du développement durable, animé par Philippe Éon de la société Orange, qui rassemble une bonne cinquantaine de directeurs et responsables développement durable. Les particularités de ce cercle : pas de cotisation, on se réunit tous les premiers lundis du mois de 8 heures à 10 heures pour échanger de façon informelle, donc très librement, sur différents sujets développement durable qui préoccupent les membres, dans les locaux d’une entreprise adhérente, chacune recevant à son tour. Le seul hic, c’est que l’on y entre seulement par cooptation. Plus difficile à classer, le club Planète gagnante de l’Ademe, qui vous fait profiter d’un ensemble de bonnes pratiques environnementales à travers un site Internet (www.planetegagnante.fr), véritable plateforme d’échanges et de partage d’informations, où vous allez retrouver les pistes et les outils qui seront utiles à l’initiation et au développement de vos actions contre le changement climatique.

Les directeurs de développement durable peuvent aussi, quand elles existent, investir les commissions développement durable qui ont été mises en place ces toutes dernières années par certaines organisations syndicales professionnelles et y apporter leurs savoir-faire et leurs bonnes pratiques en la matière. On pense ici, mais la liste est très loin d’être exhaustive, à des syndicats professionnels comme le Medef (patronat français), la FCD (Fédération du commerce et de la distribution), l’Afom (Association française des opérateurs mobiles) ou à l’UDA (Union des annonceurs) dans le domaine de la communication.

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Les commissions développement durable des syndicats professionnels

Remerciements

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Philippe CABIN (à l'origine du projet de ce livre), Christine BARGAIN (diversité), Walter DELAGE (informations diverses), Éric FLAMAND (leviers de réussite), Benjamin GARCIA (environnement), Christelle GENESTE (financements européens), Jean-Louis GOURIO (sondages), Julia HAAKE (environnement), Valérie MARTIN (financements), Jean-Yves PETIT (risques juridiques), Max PRADES (reporting), Hélène RENARD (sociétal), Stéphanie SCOUPPE (informations diverses), Élisa VALL (financements).

Index

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A Ademe, 17, 69, 119, 140, 156–157, 162, 216, 221, 259–260 ADP, 154 Aéroports de Paris, 21 AFMD, 212 Agefiph, 186, 212 Agena Tramp, 207 Agence ~ européenne pour la santé et la sécurité au travail, 172 ~ française de développement, 15 Agenda 21, 31, 61, 64, 201 Agrica, 44–45 Amazone Euro Fund, 77 Anact, 209 Arcelor Atlantique et Lorraine, 206 ArcelorMittal, 77, 208, 285 Areva, 22, 103 Armor-Lux, 82–83, 238–239 B Bank of the West, 193, 195 Bilan carbone, 63 BIT, 25, 172 BNP Paribas, 77 Boeing, 45 Bretagne Ateliers, 189–190 C CalPERS, 43 Carrefour, 198

Casino, 199 CHSCT, 178–179 Citybank, 53 Coca-Cola, 103 Comité 21, 70 Commission européenne, 16, 28, 35, 73, 78, 158, 177 Crédit Agricole, 49, 78 Critères extra-financiers, 42 D Danone, 103, 105, 208 Dexia, 21, 78 E EADS, 77 EDF, 20, 22, 62, 84, 112, 115, 118, 266 Égalité hommes-femmes, 29, 76, 85, 94, 184 Elyo, 118 Émission ~ de CO2, 27, 34, 42, 55, 63, 73, 80, 102, 112, 122, 148, 155, 160, 226, 262, 264 ~ de gaz à effet de serre, 28, 33, 156 Équivalent CO2, 17 Eramet, 164 Esat, 74 Europarlement, 29

Le guide du développement durable en entreprise

F FIDH, 198 Fondation européenne pour l’amélioration des conditions de vie au travail, 171

Mécanisme de développement propre, 18 Medef, 21 Michelin, 222 Monoprix, 21

G Gaz à effet de serre, 38, 261 GDF-Suez, 21, 62, 84, 105 Generali, 79 Gimélec, 112 Google, 174 Grenelle, 66 ~ de l’environnement, 65, 69 Grenelle II, 28, 155

N Nations unies, 25, 33 Natura, 192 Nike, 208 Notation ~ extra-financière, 101 ~ sociale, 42, 45–46, 187

H Häagen-Dazs, 79 Halde, 49, 180, 183 I ICPE, 89, 234 Ikea, 114, 200–201 INRS, 173, 176 International Water Management Institute, 124 J Japan Post, 75 L Lafarge, 21, 169 La Poste, 21, 52, 62, 70, 79–81, 84, 103, 105–106, 109, 122, 164, 217, 241–242 Loi ~ LRE, 30–31 ~ NRE, 29–31, 91, 199, 245 M Mattel, 209 Max Havelaar, 202

O Observatoire des discriminations, 182 OMC, 25 ONG, 27, 37, 50, 52–53, 55, 96, 102, 108, 193–194, 197 P Pacte mondial, 9 Papeterie ~ de Giroux, 118 ~ du Doubs, 125–126, 133 Paprec, 136 Plan ~ Climat, 16–17, 31, 61–62, 64 ~ de déplacements d’entreprise, 143, 150 ~ de déplacements urbains, 31, 146–147 PostEurop, 34 Protocole de Kyoto, 18, 261 R Rapport Brundtland, 14 Renault, 105, 166 Rhizosphère, 125 Rhodia, 21–22, 103 RSE, 16 Rubis Terminal, 207

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Index

S Saint-Gobain, 77 Schneider Electric, 79, 112, 118, 266 SNCF, 20, 84, 103, 233–235 Société Générale, 71, 196, 251 Sommet de la Terre de Rio, 14, 239, 283 Sonolub, 206 STMicroelectronics, 103, 150–151, 153 Suez, 112 Syndicats, 67–68, 101

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T TDV Industries, 201 Tetra Pak, 239 Traité ~ d’Amsterdam, 28 ~ de Maastricht, 28 Transports Quéré, 188

U Union européenne, 28, 255 Union postale universelle, 33 Urbasolar, 115 Utopies, 48 V Veolia Environnement, 105, 112, 191 Vigeo, 45, 47, 187 Vinci, 21 W Wal-Mart, 45, 115, 174 WWF, 37, 52, 164 Y Yves Rocher, 42–43

Composé par Nathalie Bernick Achevé d’imprimer : EMD S.A.S. N° d’éditeur : 3805 N° d’imprimeur : xxxxxxx Dépôt légal : mars 2009 Imprimé en France

Développement durable en entreprise : mode d’emploi ! Levier de performance, le développement durable contribue largement à améliorer l’efficacité économique et financière des entreprises. Facteur de réduction des coûts, d’innovation, de motivation et de consensus en interne, le développement durable rapproche également l’entreprise des territoires. Il sert aussi à anticiper toutes sortes de risques et devient chaque jour un atout concurrentiel pour le business et le recrutement. Cerise sur le gâteau, il permet de limiter les impacts négatifs sur les territoires du changement climatique et les fractures économique et sociale. Il est aujourd’hui la condition pour que les entreprises puissent continuer, dans la durée, à créer de la valeur sur la planète. Un ouvrage complet et pragmatique qui pour la première fois : & fournit des indications claires pour mettre en œuvre et

Isabelle QUERNE est directrice de Hebdo DD, synthèse hebdomadaire du développement durable dans les médias.

barbarycourte.com

Patrick WIDLOECHER a été le premier directeur du Développement durable du groupe La Poste. Il est aujourd’hui conseiller du Président et du Directeur général de La Poste pour le développement responsable et Déontologue du Groupe. Il est également Administrateur du Comité 21.

Code éditeur : G54311 ISBN : 978-2-212-54311-7

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réussir le développement durable dans l’entreprise & prend en compte les aspects environnementaux mais aussi économiques, sociaux et sociétaux & met en exergue des exemples d’entreprises qui se sont engagées avec succès dans cette voie & propose des outils pour mesurer l’impact de son action