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LA GRANDE COLERE DU PERE DUCHESNE
De Hébert, Jacques-René (1757-1794). Auteur du texte « Je suis le véritable père Duchesne, foutre ». 1793.
Du Numéro 260, année 1793 Au Numéro 355, année 1794
LA GRANDE COLERE DU PERE DUCHESNE La grande douleur du Père Duchesne, N°260 Au sujet de la mort de Marat assassiné à coups de couteau par une garce du Calvados, dont l'évêque Fauchet était le directeur. Ses bons avis aux braves Sans-culottes pour qu'ils se tiennent sur leurs gardes, attendu qu'il y a dans Paris plusieurs milliers de tondus de la Vendée qui ont la patte graissée pour égorger tous les bons citoyens. Marat n'est plus, foutre. Peuple, gémis, pleure ton meilleur ami il meurt martyr de la liberté. C'est le Calvados qui a vomi le monstre sous les coups duquel il vient de périr. Une jeune fille, ou plutôt une furie armée par les prêtres, et pénitente, dit-on, du cafard Fauchet, part de Caen pour exécuter cet horrible attentat. Elle arrive à Paris, et après avoir acheté un large couteau au Palais que je ne cesserai d'appeler Royal, puisqu'il est le rendez-vous de tous les fripons de la terre, elle va trois jours consécutifs frapper à la porte de Marat et demande à lui parler. Le pauvre bougre épuisé de travail, ne pouvait voir ni entendre personne. Cependant la voix plaintive d'une femme, frappe son oreille il croit que c'est une infortunée qui vient implorer ses secours. Qu'on ouvre! Dit-il : la coquine se présente avec un air dolent et elle s'approche de son bain, où il était alors. Citoyen vous êtes le père des malheureux, le défenseur des opprimés je m'adresse à vous, avec confiance, pour obtenir justice. Mon père, vieillard infortuné, bon patriote, gémit dans les fers. Un vieillard, un père de famille, un bon citoyen est dans les fers, réplique Marat rassurez-vous, jeune citoyenne, je serai son vengeur. C'est m'obliger, que de me procurer l'occasion d'être utile à un homme aussi intéressant. Quel est votre pays? Caen,... Caen!... Oui citoyen Marat, j'en arrive,... Eh bien, votre département est-il toujours dans l'erreur, décidemment marchent ils contre Paris, ces Normands dont on nous fait peur? Vous voyez comme Paris est tranquille. Vous pouvez juger, par vous-même, les scélérats qui cherchent à allumer la guerre civile. Ils vous disaient que tout était ici à feu et à sang, qu'il n'existait plus de convention, et cependant l'ordre et la paix y règnent et la convention n'a jamais été si grande et si respectée. Elle reçoit de toutes parts des bénédictions d'avoir fait une constitution toute républicaine, toute populaire... Ami du peuple à mon tour, permettez moi de vous faire quelques questions. Que pensez-vous vous-même des députés qui se sont retirés dans notre département que leur arrivera t il?... Ce qui leur arrivera la France va connaître leurs complots criminels.
Bientôt ils n'auront plus d'asile, et sous peu la guillotine... A ce mot la guenon tire de son sein le couteau qu'elle y avait caché et l'enfonce dans la gorge de Marat. Au secours, à moi, s'écria t il. Ce mot est le dernier qu'il ait prononcé. Deux femmes accourent, elles voyent le sang jaillir de la plaie, elles veulent arrêter la garce qui vient de commettre ce crime, mais elle bataille et joue des jambes jusqu'à la porte. Les voisins accourent au bruit et saisissent la scélérate. La garde accourt toute la section de Marseille entoure aussitôt la porte avec ses canons. Cette fatale nouvelle est bientôt répandue dans tout Paris. Les aristocrates sont au comble de la joie les bons citoyens au désespoir vont pleurer sur le lit de leur véritable ami. Je ne fus pas des derniers à m'y rendre, foutre, et j'assistai à l'interrogatoire de la coquine. Elle a la douceur d'une chatte qui fait patte de velours, pour mieux égratigner elle ne paraissait pas plus troublée, que si elle avait fait la meilleure action. Le commissaire lui demande son nom elle répond qu'elle s'appelle Charlotte Corday, fille d'un ci-devant gentilhomme elle défile tranquillement son chapelet, et avoue qu'elle n'était venue à Paris que pour tuer Marat qu'elle regardait comme l'ennemi de la patrie, et elle se félicite de l'avoir égorgé. Je m'attends à mourir, dit-elle, mais mon parti est pris depuis longtemps moi seule j'ai formé ce projet il me semblait si beau, que je ne l'ai communiqué à personne, afin d'en avoir seule la gloire. Si je m'étais cru, j'aurais mis cette tigresse en chair à pâté, que t'avait fait Marat, lui dis-je? Tu as menti quand tu as avancé que tu le regardais comme un ennemi de ton pays. Toi-même l'as reconnu pour un bon citoyen et un brave bougre, puisque pour le voir, tu as cherché à exciter sa pitié. Elle ne répond pas à cette question. On la fouille, on lui trouve les poches bien garnies de gros écus et d'assignats faux. Elle répond à tout avec assurance, et marche aussi tranquillement en prison, que si elle allait au bal. Ce coup là n'est pas le dernier que nos ennemis doivent porter aux patriotes. Les mêmes jean-foutres qui ont tant de fois excité les pillages, n'ont plus d'autre moyen de mettre Paris sens dessus dessous, que de massacrer en détail les bons citoyens. Robespierre, Pache, Chaumette et moi, nous sommes sur leurs listes. Tous les jours je reçois des billets doux, dans lesquels on m'annonce que je dois être pendu, massacré, rompu, brûlé à petit feu d'autres me mandent qu'ils mangeront mon coeur en papillotes, d'autres qu'ils boiront mon sang, d'autres qu'ils me fendront le crâne, et boiront dedans à la santé du roi. Je me fous des menaces, et elles ne m'empêcheront pas de dire la vérité tant qu'il me restera un souffle, je défendrai les droits du peuple et ma république, foutre. Ma vie n'est point à moi, elle est à ma patrie, et je serai trop heureux si ma mort pouvait être utile à la Sans-culotterie qui, malgré les assassins et les empoisonneurs, sera toujours la plus forte. Si je meurs, au surplus, ce sera le plus tard que je pourrai, et j'ai de quoi répondre aux scélérats qui m'attaqueront. J'invite les bons citoyens à se
tenir sur leurs gardes, à protéger les véritables amis du peuple. Malheureusement leur nombre est petit. Songez bien, Sans-culottes, que si Marat et Robespierre n'avaient pas existé, vous n'auriez pas plus de liberté que dessus ma main. J'espère, foutre, que nos frères des départements, qui se sont laissé buzoter, vont revenir de leur erreur. Ils vont voir de quel côté sont les poignards. Voilà déjà deux députés égorgés par les Brissotins, et les Brissotins vivent encore. Pas un d'eux n'a reçu aucune chiquenaude. Je m'attends, cependant, que le prêtre Fauchet et son camarade Duperret, complices de la garce du Calvados et qui sifflent avec elle, la linotte, vont recevoir le prix de leurs forfaits. Qu'il soit élevé un tombeau à l’Ami du peuple que ses restes précieux y soient exposés à la vue des citoyens que sur la même place et en face du tombeau, un échafaud soit dressé pour Brissot, Duperret, Fauchet et la normande. D'un côté, les larmes du peuple prouveront sa reconnaissance de l'autre, les malédictions précéderont sa vengeance mais ce n'est point assez que la guillotine pour punir les traîtres, il faut un nouveau supplice plus terrible et plus infamant, égal au crime, s'il est possible, foutre. La grande joie du Père Duchesne, N°261 De voir que toutes les communes de la république se rallient autour de la constitution, que sa majesté Buzotine commence à jouer au roi dépouillé, et qu'avant qu'il soit l'âge d'un petit chien, les départements rendront justice aux Parisiens, malgré les accapareurs de Marseille et de Bordeaux et les marchands de galon de Lyon. Sa majesté Buzotine commence à jouer au roi dépouillé. Chaque jour lui enlève de nouveaux sujets. Partout où la constitution est connue, les aristocrates ont le nez cassé. Déjà plusieurs communes du Calvados l'ont acceptée déjà plusieurs sections de Bordeaux ont fait pâlir les marchands de sucre en adoptant cet évangile de tous les peuples libres. Tous les bons citoyens, en examinant cette constitution, se disent: voilà pourtant l'ouvrage de la Montagne sans elle nous serions encore au premier chant de mâtines, puisqu'elle a pu faire dans quinze jours ce que la convention n'avait pu seulement espérer dans neuf mois de travail. Il faut donc que cette Montagne soit la fine fleur de la république. Les Montagnards ne sont donc pas des voleurs de grand chemin, puisqu'ils font les lois les plus sages pour maintenir les propriétés? Ils ne sont donc pas des anarchistes, des désorganisateurs, puisqu'eux seuls veulent faire cesser l'anarchie, en établissant le règne de la loi? Nos frères de Paris avaient donc raison de défendre cette sainte Montagne? C'est à tort que nous les avons accusés. Les hommes du 14 juillet et du 10 août ne pouvaient nous tromper. Encore une fois nous leur devons le salut de la république.
Oui, foutre, c'est ainsi que raisonnent tous les francs Sans-culottes du Calvados, du Finistère, de la Gironde, de Lyon, de Marseille. S'ils ont été un moment égarés par des avocats à langues dorées, ou par les accapareurs, le flambeau de la vérité les va faire rentrer dans le bon chemin. Ils vont connaître les véritables amis de la république. Vous voilà démasqués, bougres d'aboyeurs qui vous égosillez à force de répéter la loi, la loi, quand il n'existait point de loi, et qui n'en voulez plus quand nous en avons. Vous êtes démasqués, infâmes tripotiers de la Gironde, qui vouliez anéantir Paris pour vous enrichir de ses dépouilles toutes vos bougres de manigances avec Barbaroux, et tous les corsaires de Marseille, prouvent que vous vouliez vous emparer de toutes les richesses de la France. Il est clair que les marchands de galon de Lyon sont d'accord avec vous pour perdre les départements du Nord aussi, foutre, les Rouennais, qui ont le nez fin, n'ont ils pas donné dans le gobas, ils ont senti que votre bougre de fédéralisme ne visait qu'à les ruiner, car foutre, Paris est une excellente vache à lait pour la ci-devant Normandie. C'est de là, foutre, que nous tirons toutes nos provisions. Si le voeu des Brissotins était accompli, s'il était possible qu'un jour on cherchât le lieu où exista Paris, tous les fabricants, manufacturiers et commerçants de Rouen, pourraient aller chercher des chalands dans la lune. Qu'on ne dise pas, foutre, que Paris est un gouffre qui engloutit tout car quelque chose qui arrive, il faudra que la république ait un centre, et dans quelque lieu qu'on le porte, soit dans le royaume de Buzot, ou dans les Landes de Bordeaux, ce serait toujours un second Paris. Je sais, foutre, qu'un certain vagabond, nommé Pierre, et auquel on donna le sobriquet de Grand, parce qu'il avait un grand ministre, quand il vint à Paris, fût curieux de contempler, du haut du Mont-Valérien, cette immense fourmilière. On assure qu'il dit, en voyant tant de clochers, tant de maisons, tant d'édifices entassés les uns sur les autres: ah si tu m'appartenais, comme je te brûlerais! Il n'y a qu'un roi, foutre, qui puisse tenir un pareil langage. Il y a apparence que cet empereur, en réfléchissant que Paris était le centre des lumières, entrevoyait notre révolution. Il se doutait bien que tôt ou tard un million d'hommes réunis prendrait la chèvre par la barbe, et se lasserait d'être gouvernés par des putains et des maquereaux. Une grande ville est toujours l'épouvantail de la tyrannie. Un despote n'est pas en sûreté. Il y a trop d'yeux et d'oreilles. C'est pour cette raison, foutre, que Louis-XIV fit bâtir Versailles mais, foutre, si les rois ont intérêt de séparer leurs esclaves, pour diminuer leurs forces, une république doit au contraire ramasser les citoyens, pour mieux les faire agir. Les grandes villes en sont le soutien. Qu'aurait fait l'assemblée constituante si elle avait été placée dans une bourgade qu'aurait elle pu opposer aux gardes de Capet, à tous les assassins de la louve autrichienne? Une bicoque aurait elle bravé l'armée de Broglio? Y aurait il jamais eu un 12 juillet, un 6 octobre, un 10 août, un 31 mai, si Paris n'avait pas existé? Pourquoi donc, foutre,
faire un crime à ce Paris d'avoir tant de fois sauvé la France? Est ce que Paris est une ville à part? N'est elle pas le rendez-vous de l'univers, le séjour de tous les Français? Ses habitants sont presque tous nés dans d'autres départements ils y ont leurs pères, leurs mères, leurs parents, leurs amis. Il y a de la badauderie, foutre, à répondre à toutes les calomnies des traîtres qui nous accusent. Ne leur opposons que les faits, et tous les départements penseront comme nous. On nous reproche des meurtres, des assassinats, on nous fout sans cesse au nez les massacres du 2 et 3 septembre, et cependant dans ces jours de vengeance et de justice il n'est péri que des scélérats qui avaient précipité la France à deux doigts de sa perte. Ces massacres ont été conduits par les coquins qui les reprochent à des hommes purs qui dans leur vie n'ont pas versé une seule goutte de sang. On a la preuve maintenant que Manuel laissa égorger les prisonniers de l'abbaye, parce que le feuillant Boquillon à qui il en voulait, y était enfermé. On sait aussi que Brissot lâcha la meute de ses mouchards pour septembriser ceux de la Conciergerie parce que son ennemi Morande y était. Tous ces massacres d'ailleurs ont été exécutés par des étrangers, et le vertueux Petion, alors maire, ne fit pas un pas pour les empêcher. Que les départements qui sont encore buzottés, réfléchissent à tous les coups de chien dont nous avons été témoins, qu'ils se mettent à notre place, et qu'ils disent s'ils auraient eu autant de patience que nous? Ils ont cru sur parole les Mandrins du côté droit qui ne rêvaient que de poignards, et cependant pas un de ces renégats de Sansculotterie n'a reçu une chiquenaude, tandis, foutre, que trois députés de la Montagne ont été massacrés. Les égorgeurs sont donc parmi les crapauds du Marais, tandis, foutre, que la raison et la justice sont opprimés, outragés au haut de la sainte Montagne? Marat était donc bien terrible pour les traîtres, puisqu'ils en sont délivrés par l'action la plus lâche et le plus exécrable des forfaits? Frères et amis des départements, songez que vous nous devez la liberté, l'égalité, la république, et que pour récompense, nous n'avons eu jusqu'à ce jour que la misère et les assignats, foutre. La grande visite du Père Duchesne, N°262 Au général Moustache, ci-devant comte de Custine, en se déguisant en baron allemand pour tirer les vers du nez de ce vieux renard, qui lui a fait connaître tous les coups de chien qu'il avait en tête pour livrer Condé et Valenciennes à nos ennemis, tandis que plus de vingt mille bandits, cidevant nobles, sont cachés dans Paris et attendent le signal pour égorger les Sans-culottes et faire la contre-révolution. Tous les traîtres sont du même acabit et semblent avoir été jetés dans le même moule ils employent les mêmes moyens pour nous foutre dedans. Comme ils ne peuvent rien faire sans les Sans-culottes, ils font
les chiens couchants au vis-à-vis d'eux, et ils sont aussi bas, aussi rampants devant le pauvre déguenillé, dont ils veulent avoir le suffrage, qu'ils l'étaient dans l'ancien régime, auprès du cocu royal, ou de l'architigresse d’Autriche. C'est ainsi que le singe blondinet jeta de la poudre aux yeux de nos badauds, en leur faisant des courbettes qu'il est poli notre général, disaient les grosses marchandes du quartier Saint-Honoré et de la rue Saint-Denis en vérité ma voisine, j'ai un caprice pour lui, et il n'y aura pas de sûreté pour mon mari, si j'avais seulement un quart d'heure de tête à tête avec ce joli marquis. Si quelque grosse luronne de la Halle, en voyant gambader le bougre de cheval blanc, haussait les épaules, et s'avisait, en bonne connaisseuse, de dire qu'elle n'aimait pas la face de mouton et la mine de papier mâché du chef des hoquetons bleus, tous les couteaux alors sortaient de leurs comptoirs, pour fondre sur elle avec leurs aunes combien te paye t on, vieille salope, lui disait on, pour parler ainsi de notre général. Ce sont les Jacobins, sans doute, qui font bouillir ta marmite. Elle avait beau soutenir qu'elle ne parlait que d'après sa conscience, et qu'elle gagnait sa vie à la sueur de son front qu'elle n'allait écumer aucune marmite, on ne la conduisait pas moins de corps de garde en corps de garde, de districts en districts. Après avoir été partout rudoyée, maltraitée après avoir perdu sa journée, on la renvoyait encore par grâce, et en rentrant dans son pauvre galetas, elle n'avait pas un morceau de pain à donner à ses enfants. Voilà pourtant, foutre, comme les Parisiens se sont laissé mener comme des buses voilà comme ils idolâtraient un scélérat qui les vendait à la cour, et qui a fini par être la bête noire et un objet d'horreur pour ceux qui l'avaient le plus honoré. Chat échaudé, dit-on, craint l'eau froide. Cet exemple aurait dû servir de leçon, et jamais aucun engueuseur n'aurait dû avoir le moindre crédit. Eh pourtant, foutre, le bateleur Dumouriez, croupi dans le vice, chargé de crimes, escroc de profession, le plus plat des valets de cour, a cru encore escamoter la confiance il aurait mené nos armées au fond des enfers, quand le pauvre Marat et moi nous osions lâcher quelque bordée contre lui quand nous dévoilions ses trahisons, on nous appelait anarchistes, désorganisateurs cependant nous avions raison, et si on avait suivi tous nos bons avis, les manigances du scélérat s'en seraient en allées en eau de boudin il n'aurait pas échappé, et il aurait aussi mis la tête à la fenêtre. Lorsque sa foutue tête fût mise à prix, si quelqu'un s'était avisé de dire que ce ne serait pas le dernier traître, qu'une nouvelle idole allait lui succéder, qu'un Custine oserait essayer d'achever ce qu'il n'a pu finir, et de donner un coup de grâce à la liberté, il n'est pas un bon citoyen qui ne se fût gendarmé en écoutant une pareille antienne. Rien n'est plus vrai pourtant que ce Custine, en héritant de la place de Dumouriez, a conçu les mêmes projets. Son ambition est la même il a autant d'amour pour l'argent, que de haine pour la Sans-culotterie. Heureusement, foutre, on
lui a barré le chemin et le comité de salut public, qui vient d'être renouvelé, et qui est composé de bougres à poil, ne lui a pas donné le temps de perdre la république. Ce fanfaron a été obligé de se rendre aux ordres de la convention, car, foutre, son armée n'était pas disposée à se révolter pour ses menus plaisirs. Aussitôt que mon jean-foutre a été arrivé à Paris, il m'est venu dans l'idée de lui rendre visite, pour examiner de près ses moustaches. Il faut plaider le faux pour savoir le vrai, me suis-je dit ainsi j'ai endossé le costume d'un vieux baron allemand j'en ai pris le baragouin, et après lui avoir dit, en langue de cheval, combien sa majesté impériale faisait cas de sa seigneurie il m'a tendrement serré la main, et saisi à bras le corps. Nous sommes seuls, baron, me dit-il, vous pouvez me parler en toute confiance, quel traité venez vous me proposer au nom de l'empereur, votre maître? Quel traité, foutre! Eh mais, ceux que vous avez fait avec lui sont à peu près exécutés. Général, vous ne pouvez mieux le servir que vous avez fait sans vous, les armées françaises seraient peut-être à Vienne ou à Berlin mais vous avez su retenir l'ardeur du soldat les Français sont restés les bras croisés, tandis que nous assiégions Condé et Valenciennes. La première de ces deux villes est déjà rendue, et la seconde sera bientôt à nous, si vous conservez encore quelques jours le commandement. Oui, comte de Custine, vous avez sauvé l'Empire et perdu la France. Mais se Peut-il qu'on vous ait rappelé dans le moment où vous alliez nous être utile? L'empereur, mon maître, a cependant répandu des flots d'or, pour vous trouver des protecteurs dans les comités de la convention. Si vous saviez tout ce qu'il a distribué aux journalistes, aux motionneurs, pour faire votre éloge mais Marat, Marat seul était cru des Sans-culottes, et Marat vous a tellement démasqué, que tout notre or a été inutile. Heureusement nos amis du Calvados ont envoyé à Marat un ambassadeur femelle qui, avec les leçons de Claude Fauchet, a su couper la parole à l’Ami du peuple. Si quelque chose me console dans ma disgrâce, répond le général Moustache, c'est d'abord ce que vous allez sans doute me remettre au nom de votre maître, puis, la satisfaction que j'éprouve de voir Marat immolé, massacré il ne me reste qu'un regret, c'est que ce ne soit pas de ma main. Sans lui Bouchotte était perdu. A la place de ce misérable ministre, je mettais mon petit Beauharnais, il aurait été pour moi, ce que Beurnonville fût à Dumouriez. Lui, il aurait désorganisé l'armée, et moi, je vous l'aurais livrée. Deux nobles, ainsi, à la tête des dernières ressources de la France auraient, avant la fin de la campagne, rétabli la royauté et la noblesse mais je ne désespère pas encore, si nous réussissons seulement à perdre Paris, la république ira aussi au foutre. Nous avons encore la ressource de la disette, des pillages. Plus de vingt mille nobles sont maintenant à Paris, tous armés jusque dans les dents au moindre trouble qui surviendra, cette armée sortira tout à coup des caves et des souterrains, fera main-basse sur les Sans-culottes, enlèvera le petit Capet du Temple. Il sera proclamé à l'instant roi, moi généralissime. Voilà donc
tes projets, infâme coquin avais-je tort, quand je foutais mes fourneaux sens dessus dessous, quand je brisais ma pipe toutes les fois que l'on m'annonçait qu'un noble avait été nommé à quelque place importante. Tu ne savais pas en défilant ton chapelet, archi-traître, que tu parlais au Père Duchesne? à moi mes gens, à moi mes aides de camp, on veut m'assassiner, s'écrie le capon. Non, foutre, lui répartis je, les Sansculottes n'assassinent personne, ils ne se souillent jamais dans un sang aussi vil que le tien. Je voulais savoir ce que tu avais dans l'âme. Je t'ai démasqué, je suis content, foutre. La grande colère du Père Duchesne, N°263 Contre tous les bandits qui veulent exciter du trouble dans Paris, en enlevant le pain chez les boulangers, pour le jeter dans la rivière. Ses bons avis à la convention, pour qu'elle fasse promptement jouer le général Moustache à la main chaude, attendu qu'il est le chef de tous les brigands et qu'elle s'occupe nuit et jour du soulagement des pauvres foutant la chasse aux accapareurs. J'avais prédit, foutre, que la constitution donnerait le coup de grâce aux feuillants, aux royalistes, aux fédéralistes. Il ne fallait pas être grand sorcier pour faire cette prédiction car, foutre, la nation, à l'exception d'une poignée de fripons qui ne demandent que plaie et bosse, oui, foutre, la nation entière veut la liberté, l'égalité, la république une et indivisible, la sûreté des personnes et des propriétés. Pour soulever les départements, pour y allumer la guerre civile, tous les roquets du boudoir de la vieille Roland avaient répandu d'un bout de la France à l'autre que les Parisiens étaient des voleurs et des brigands, qu'ils ne voulaient point de constitution, que la Montagne s'entendait avec eux pour rétablir la royauté. Il n'est pas étonnant qu'à deux cents lieues de Paris on ait été dans l'erreur mais enfin les Parisiens ont confondu leurs calomniateurs, en foutant la chasse aux avocats de Capet à la fameuse journée du 31 mai. La sainte Montagne a écrasé les crapauds et les serpents du Marais, en faisant une constitution excellente, en réparant dans quinze jours tout le temps que l'infâme clique des beaux esprits et des hommes d'état avait fait perdre à la convention. L'évangile de la liberté a été présenté au peuple français alors, foutre, le flambeau de la vérité a dissipé les nuages que le mensonge avait répandus sur toute la république. Les traîtres ont été démasqués les départements qui devaient marcher contre nous, se sont au contraire ralliés à la Sans-culotterie, ils bénissent les Parisiens, ils jurent avec eux de mourir pour cette constitution qu'ils ont acceptée. La capitale du royaume de Buzot, chante et danse la carmagnole avec les Sans-culottes de Paris qu'elle a reçus dans son sein, comme des amis et des frères. Les Calvadoriens commencent à se mordre les pouces, de s'être laissé embadauder par l'apôtre Fauchet. Il vaut mieux se dédire que de se détruire, disent ces
Normands. Le dictateur Wimpffen fait inutilement battre la générale, le pas de route, le pas de charge, personne ne veut le suivre Gérôme Petion premier et dernier roi du Calvados, Petion de la nigaudière a beau proclamer, pleurer dans la rue St-Jean, dans la rue St-Pierre, on ne l'écoute pas plus que le vent qui siffle. En vain, le sapajou Gorsas sautille, gambade de rangs en rangs pour encourager, les têtes à perruque de l'armée Buzotine, en vain le corsaire Barbaroux leur montre t il le faubourg St-Antoine comme la terre promise, tous répondent que ce n'est pas le Pérou. Les Normands ne s'embarquent pas étourdiment pour aller là où il y a tout à risquer et rien à gagner. Jusqu'à présent, foutre, les carabos ont écouté patiemment tous ses bateleurs qui leur annonçaient un remède infaillible pour sauver la France mais quand ils vont savoir que leur bougre de baume est un mortel poison, bientôt la moutarde va leur monter au nez et après la parade, arrivera la tragédie. Assassins de l’Ami du peuple, le sang de Marat va rejaillir sur vous. Oui, foutre, il n'est point d'assez grand supplice pour expier tous les crimes que vous avez commis et ceux que vous méditiez. Vous vous disiez les amis de la liberté, et vous avez voulu assassiner la liberté vous ne parliez que de lois, et vous les avez toutes violées vous avez sans cesse crié au désordre et à l'anarchie, et vous avez partout allumé la guerre civile vous nous accusiez de rétablir la royauté, nous qui l'avons anéantie, et vous, scélérats, vous avez employé le vert et le sec pour sauver le dernier de nos tyrans après sa mort vous avez voulu bouleverser la république, pour remettre son fils sur son trône, afin de régner en son nom. Vous avez accusé les hommes du 10 août d'être des dilapidateurs et ces pauvres bougres sont toujours aussi près de leurs pièces qu'avant la révolution, tandis que vous avez les mains pleines d'or et d'assignats pour faire la guerre à votre patrie vous fûtes les complices de Dumouriez vous l'êtes encore des brigands de la Vendée et de Custine. Malgré tous vos coups de chien pour perdre la république, nous la sauverons, infâmes intrigants. Du Nord au Midi de la France la liberté triomphera la constitution va être partout acceptée bientôt les patriotes de Lyon et de Marseille seront vengés. Déjà, foutre, un détachement de l'armée des Alpes vient de faire rebrousser chemin aux marchands de sucre marseillais qui s'avançaient contre Paris les soldats de Barbaroux ont mordu la poussière, et ils ont laissé leurs canons à nos braves républicains. Les marchands de galon de Lyon qui ont osé lever l'étendard de la révolte, vont être bientôt bombardés, s'ils ne s'empressent de mettre les pouces. Ainsi, foutre, tous les ennemis de la république vont être à quia mais pour les anéantir une bonne fois, et ne plus leur laisser d'espérance, il faut que la convention chasse de toutes les places les cidevant nobles, qu'elle fasse jouer le général Moustache à la guillotine, qu'elle fasse danser la danse de Samson au traître Biron, qu'elle purge Paris de tous les bandits qui cherchent à y exciter le désordre, et qui font disparaître le pain, pour le jeter à la rivière. Il faut que jour et nuit elle
s'occupe du soulagement des malheureux et de l'instruction publique, qu'elle fasse une guerre éternelle aux accapareurs. Il y a trop longtemps que les pauvres bougres de Sans-culottes souffrent et tirent la langue. C'est pour être plus heureux, qu'ils ont fait la révolution. La terre est couverte de la plus riche moisson. On dit qu'une année de récolte abondante doit nourrir la France pendant trois ans ainsi donc, foutre, nous devons être tranquilles pour nos subsistances pendant trois ans mais il ne faut pas les laisser disparaître, et les confier à des mains aussi impures que celles du vieux Roland. Que les comités d'agriculture et de commerce assurent la provision de chaque département, et surtout que le gardemanger de Paris soit bien garni. Quant aux autres denrées, le prix en diminuera avec la paix mais pour avoir la paix il faut chasser, je le répète, tous les nobles, car ce sont ces jean-foutres qui perpétuent la guerre par leurs trahisons. Que tous les Sans-culottes se lèvent à la fois, et qu'ils se précipitent de tous côtés sur les ennemis du dedans et du dehors. Dans peu de jours, foutre, la république n'en aura plus, et tous les brigands couronnés seront à ses pieds, et elle leur dictera les lois qu'elle voudra. Alors, foutre, les assignats auront le plus grand crédit le commerce reprendra une nouvelle vie l'abondance régnera, et tous les Français libres jouiront des bienfaits de la constitution qu'ils ont faite avec tant de peine, mais qui assurera à jamais leur gloire et leur bonheur, et celui de toutes les nations, foutre. La grande joie du Père Duchesne, N°264 Après avoir vu Marat dans un songe dans lequel il lui a fait connaître tous les intrigants, les fripons et les traîtres qui veulent perdre la république. Leur entretien bougrement patriotique sur les moyens de sauver la Sans-culotterie. Le serment du vieux marchand de fourneaux de marcher toujours sur les traces de l’Ami du peuple, malgré les poignards et le poison des hommes d'état. Je suis tout foutimassé depuis la mort de Marat. Oui, foutre, depuis que l’Ami du peuple n'est plus, la tristesse est peinte sur tous les visages des Sans-culottes, et la joie règne sur les faces de papier mâché de tous les échappés de Coblentz. Les patriotes, en se rencontrant, pleurent et gémissent nous n'avons plus de guide, se disent ils, nous ressemblons à des aveugles qui ont perdu leur bâton. Nous pouvions dormir en repos, lorsque Marat vivait car il veillait sans cesse pour nous il connaissait tous les traîtres, il les poursuivait partout leurs plus secrètes actions lui étaient connues, et jamais ils ne manigançaient un coup de chien contre la république, que nous n'en fussions avertis. De leur côté les aristocrates bénissent la main sacrilège de l'infâme Charlotte ils l'appellent la Judith du Calvados. Son couteau, disent-ils, nous a été plus utile que tous les sabres, que toutes les baïonnettes et tous les canons de la Prusse et de
l’Autriche nous pouvons conspirer désormais sans crainte nous sommes débarrassés du maudit Argus qui épiait toutes nos démarches, et ne cessait de nous dénoncer. Tous ces propos me troublent la cervelle, le souvenir de Marat me poursuit sans cesse. La nuit dernière je l'ai vu dans un songe sa plaie saignait encore, foutre. A cette vue, j'ai versé des larmes: Ami du peuple, m'écriai-je, en lui tendant le bras, est ce toi? Oui brave Père Duchesne, c'est Marat qui vient du séjour des morts pour s'entretenir avec toi, car, foutre, l'amour de la liberté me suit au delà du tombeau. Content d'avoir perdu la vie pour ma république, il ne me reste que le regret de ne l'avoir pas vu délivrée, avant ma mort, de tous les scélérats qui déchirent son sein. Père Duchesne, il faut que tu fasses ce que je n'ai pu faire. Tu m'as suivi de près dans la révolution comme moi tu as consacré ta vie à la défense des droits du peuple tu parle le langage des Sans-culottes, et tes bougreries, qui donnent des vapeurs aux petites maîtresses, ronflent agréablement aux oreilles des hommes libres car les hommes libres, il ne faut pas les chercher parmi les beaux esprits. Tes joies et tes colères ont fait plus de bien que tous les rêves des hommes d'état. Ils le savent bien les jean-foutres, et c'est pourquoi ils sont persécutés comme moi. Courage mon vieux, ne te rebute pas, quand tu devrais éprouver le même sort que moi, n'en sois point effrayé est-il une plus belle mort que la mienne? Mais comme tu es utile à tes concitoyens, tâche d'éviter le poignard des hommes d'état. Vis encore quelque temps pour les dénoncer, et pour achever, si tu peux, la tâche que j'avais entreprise. Ami du peuple, lui dis je, la bonne volonté ne me manque pas, foutre tu te rappelles ce que je te dis la veille de ta mort, en te voyant épuisé de travail: je désirais partager avec toi ma force et ma bonne santé. Il m'en reste assez, me répondis-tu, pour confondre les intrigants, comme j'ai fait des hommes d'état. Il en est encore dans la convention, il en est même à la Montagne quelques uns que je démasquerai. Oui, quand je pourrai m'y traîner, je me ferai encore décréter d'accusation mais les fourbes seront connus. Voilà, Marat, les dernières paroles que tu m'adressas, en me serrant la main elles sont gravées dans ma mémoire, foutre, et elle n'en sortiront jamais. Oui, Père Duchesne, il faut frapper d'estoc et de taille maintenant, et ne ménager qui que ce soit. Quand je proposai, il y a trois mois, de planter trois cents potences sur la terrasse des Tuileries, pour y accrocher les perfides mandataires du peuple, les uns me prirent pour un fou, les autres pour un buveur de sang et cependant si on m'avait cru, que de flots de sang auraient été épargnés! Plus d'un million d'hommes de moins auraient péri! Ainsi donc, au lieu d'être un homme sanguinaire, quand je faisais cette proposition, je parlais au contraire comme un ami de l'humanité. Les modérés ont plus immolé de victimes, qu'il n'en est tombé sous le fer de nos ennemis. Rien n'est aussi funeste en révolution que les demi-mesures. Nous voilà arrivés enfin à l'époque où il faut tailler dans le
vif. Les conspirateurs dont on a bêtement laissé le nombre se grossir sont d'un côté et les patriotes de l'autre le combat est commencé, mais c'est un combat à mort. Plus de quartier pour le parti vaincu car, foutre, si les hommes d'état avaient un moment le dessus, il n'existerait pas dans un mois un seul patriote. Les scélérats viennent de prouver de quoi ils sont capables. A Marseille tous les jacobins ont été massacrés à Lyon plus de cent républicains ont été guillotinés par les royalistes le sang des amis de la liberté inonde en ce moment les rues d’Avignon. Les hommes d'état voulaient commencer une semblable boucherie à Paris, quand ils nous firent arrêter, toi et moi, Père Duchesne mais les jean-foutres ne connaissaient pas les Sans-culottes de nos faubourgs. Ce n'est pas au milieu des hommes du 14 juillet et du 10 août que l'on peut impunément commettre de pareilles horreurs. Ainsi les hommes d'état ont ils changé leurs batteries. N'ayant pu corrompre, ni ébranler la masse formidable des Sans-culottes de Paris, ils les ont calomniés dans tous les départements ils les ont représentés comme des bêtes féroces qui ne vivaient que de chair humaine. Les bonnes femmes du Calvados, du Finistère et de la Gironde, d'après tous ces mensonges, ont épouvanté les petits enfants, en leur parlant de l'ogre Marat, devenu plus redoutable pour les imbéciles que le loup-garou mais la postérité me jugera, Père Duchesne elle saura que celui qu'on a tant de fois accusé d'être un homme féroce, était le meilleur des humains, qu'il n'avait rien à lui, qu'il partageait le fruit de ses veilles et de ses travaux avec les malheureux, et qu'après lui il n'a laissé d'autre héritage, que le bien qu'il avait fait à ses semblables. Mais c'est trop parler de moi, Père Duchesne, ne songeons qu'à la république. Tu viens de faire une action digne de moi, en dénonçant Custine, tu as mis au jour tous ses complots et ses trahisons. Si on eut tardé quelques jours à le rappeler, la liberté était au foutre. Cet infâme coquin, après avoir fait massacrer les Français à Francfort, après avoir abandonné Mayence, après avoir laissé cerner Valenciennes, après avoir livré Condé, n'attendait que le moment de conduire son armée à la boucherie et de donner le coup de grâce à la république, en sacrifiant ses dernières ressources. Le bougre, heureusement, est à l'ombre. Ses crimes sont prouvés, que sa tête tombe promptement sous le rasoir national, mais que ce ne soit pas la seule! Que tous les scélérats qui composent son état-major, soient également raccourcis. Poursuis, dénonce sans relâche l'infâme Tourville, qui était le bras droit de Lameth, et qui livrera Maubeuge, si on lui laisse le commandement. Fais connaître l'escroc Lapallière, et surtout le ci-devant marquis de Vérigni, connu dans tous les tripots sous le nom de Debrulis. Dis aux Sans-culottes de l'armée que ce coquin a émigré deux fois. N'oublie pas Levenneur, l'ami intime de La-Fayette, et l'âme damnée de Custine, ne donne point de relâche à ces bandits, jusqu'à ce qu'ils aient été chassés et punis comme des traîtres. Marat, je profiterai de tes leçons. Oui foutre, ombre chérie, inspire moi je te jure de braver les poignards et le poison, et de suivre toujours
ton exemple. Guerre éternelle aux conspirateurs, aux intrigants, aux fripons, voilà ma devise, foutre. Ce fût aussi la mienne, me dit le fantôme, en se séparant de moi tiens ta parole oui, foutre, je la tiendrai. La grande colère du Père Duchesne, N°265 De voir que les Sans-culottes s'amusent à la moutarde, au lieu de tailler dans le vif pour sauver la république. Les bons avis qu'ils leur donne pour exterminer les brigands de la Vendée, et faire mettre les pouces aux marchands de galon de Lyon. Sa grande motion pour qu'on mette le grappin sur tous les contre-révolutionnaires, les royalistes, les accapareurs, et qu'on les enferme dans des églises, en braquant devant le canon chargé à mitraille, jusqu'à ce que la paix soit assurée et la constitution établie. N'est-il pas bien foutant de voir les Français se manger le blanc des yeux, lorsqu'ils devraient être unis comme des frères? Les riches ne songent qu'à leur intérêt, et ils laissent de côté celui de la république. S’ils chérissent tant leurs propriétés, ils doivent tout faire pour les conserver et cependant, foutre, ils semblent qu'ils aient eux-mêmes juré leur perte. Cet avare, toujours occupé de son coffre fort, qui ne dort jamais que d'un oeil, qui a peur de son ombre, qui, au moindre bruit, crie au voleur, à l'assassin, que deviendrait-il, si la contre-révolution qu'il désire arrivait? Ne serait il pas la première victime? Les brigands de la Vendée, les Prussiens et les Autrichiens, ne convoitent pas les guenilles des Sans-culottes? Mais, foutre, ils brûlent d'envie de faire ravage dans les maisons des cidevant fermiers, de ces gros banquiers, qui entassent sacs sur sacs c'est pour eux que les agioteurs et les accapareurs auraient travaillé, ils sauraient bien déterrer tout l'or que cette foutue canaille a caché dans les caves. Voilà, foutre, ce que je ne cesse de vous répéter, infâmes égoïstes, qui perdez la patrie, et qui voulez renverser le temple de la liberté au risque de vous ensevelir sous ses débris. Vous êtes, dites vous, fatigués de révolution, vous soupirez après la paix et c'est vous seuls qui éternisez la guerre car si une bonne fois vous consultiez le simple bon sens et votre propre intérêt, au lieu de vous séparer de la Sans-culotterie, vous vous joindriez à elle, et de bonne foi pour chasser l'ennemi commun, en faisant un seul effort pour la république vous la verriez bientôt triomphante bientôt l'ordre et la paix régneraient la constitution affermie, vous pourriez dormir en paix, car cette constitution est la sauvegarde des propriétés. Mais, non, bougres d'imbéciles, vous voulez un roi, c'est à dire que vous souhaitez votre ruine totale et celle de votre pays. Un roi, millions de tonnerres! Avez-vous réfléchi, vils esclaves, à tous les maux qui précéderaient la royauté, s'il était possible qu'elle fût rétablie. Il faudrait auparavant faire perdre le goût du pain à tous les Sans-
culottes. Le sang coulerait à flots, et la France ne serait plus qu'un vaste cimetière. Ce ne serait que sur des cadavres et au milieu des ruines, que le petit avorton du Temple pourrait régner. Mais ce n'est pas ainsi que les royalistes calculent ils s'imaginent, foutre, de la république. Ils pensent que la misère le forcera bientôt à tomber à leurs pieds, et à redemander ses chaînes. Ainsi, foutre, pour arriver plus tôt à leur but, ils accaparent tout, ils font disparaître les subsistances et les denrées, pour les revendre ensuite au poids de l'or. Mais les scélérats, ignorent ils de quoi sont capables les hommes qui veulent être libres? Ont ils oublié que nos braves volontaires, sans habits, sans souliers, couverts de vermine, la boue jusqu'à la ceinture, se sont battus comme des lions contre les ours du Nord qui, l'année dernière, avaient porté le fer et le feu dans nos départements. Il ne serait pas échappé un seul de ces vagabonds, et le Mandrin de Berlin, comme son confrère Capet, aurait mis la tête à la fenêtre, si l'infâme Dumouriez n'avait lié bras et jambes à nos braves guerriers. Non, foutre, rien n'est impossible aux Français, combattants pour la gloire et la liberté. S'ils n'avaient pas été arrêtés dans leur course, s'ils n'avaient pas été trahis, il n'existerait pas maintenant un roi sur la terre. Nos ennemis, fussent ils maîtres de la moitié de la république, leur destruction n'en serait que plus certaine. Bientôt la France entière se lèverait pour les cerner de toutes parts, et il n'en échapperait pas un seul pour aller porter la nouvelle de leur capilotade. Qu'on ne s'effraye donc pas des dangers qui menacent la liberté plus ils sont grands, plus notre victoire sera signalée. Les brigands qui nous font la guerre, le savent bien, foutre aussi n'espèrent ils nous réduire que par la trahison, et en nous armant les uns contre les autres. Ils ont plus dépensé cent fois pour allumer chez nous la guerre civile, que pour armer les bandes d'esclaves qui nous font la guerre mais la masse de la Sans-culotterie est inébranlable elle veut la liberté, et elle l'aura, foutre, malgré les tyrans, malgré les traîtres. Nous connaissons maintenant la cause de tous nos maux, et nous savons aussi les grands remèdes qu'il faut y apporter nous savons que tous les nobles sont conjurés contre nous, que tant qu'il en existera à la tête de nos armées, nous ne cesserons d'être trahis et vendus à nos ennemis. Eh bien, foutre, de par la Sans-culotterie! On va donner de la pelle au cul à tous les nobles. Ils pourront, s'ils le veulent, aller rejoindre leurs bons amis de la Vendée mais la Vendée, malgré tous les grands succès de l'armée chrétienne, sera bientôt délivrée des monstres qui ravagent nos campagnes et nos villes dans ce département. Pour combattre ces loups enragés, on n'enverra plus des compagnies composées de jean-foutres de sac et de corde, qui ne s'enrôlent que pour escamoter les assignats, et qui reviennent huit jours après, en enfants de choeur, ayant un passeport du roi Louis-XVII. Il faut détacher de nos différentes armées douze ou quinze hommes par chaque compagnie. Ce renfort, ayant à sa tête un brave Sans-culotte, tel que Santerre, aura bientôt débusqué les rebelles, les amènera en plaine,
et en fera une dernière déconfiture. Mais encore une fois, plus de nobles. Que tous les états-majors soient supprimés, et que les talons rouges soient remplacés par de bon vieux médaillons, qu'en même temps tous les hommes en état de marcher et de porter les armes, soient requis, et qu'on se précipite de tous côtés où il y aura du danger avant la fin de la campagne, tous les brigands seront à nos pieds, et la paix sera assurée, foutre. Je vois ricaner nos fédéralistes, ils se foutent de mes projets ils se flattent de voir la république se déchirer elle-même. Je leur entends parler du royaume de Buzot, de la république de Lyon et de celle de Marseille. Ils s'imaginent qu'il est impossible d'anéantir ces différents noyaux de contre-révolution eh bien, foutre, je vais aussi leur donner du rabat joie, et leur prouver que si on veut, Caen, Lyon, Bordeaux, Marseille et Toulon seront Sans-culottisés comme le faubourg Saint-Antoine. Que l'on fasse marcher l'armée des Alpes contre les marchands de galon de Lyon, qu'il pleuve seulement quelques douzaines de bombes sur les gros magasins des accapareurs de cette ville rebelle, qu'on permette aux soldats le pillage de tous les nids d'aristocrates avant huit jours les fabricants et trafiquants lyonnais mettront les pouces et seront trop heureux de recevoir leur grâce et d'accepter la constitution. Il en sera de même des marchands de sucre de Marseille. Quant au roi Buzot, avant qu'il soit l'âge d'un petit chien, s'il ne joue pas des jambes du côté de la Vendée ou de l'Angleterre, nous lui verrons essayer à son tour le collier de Charlotte Corday. Ainsi, foutre, quand nous voudrons donner le moindre signe de vie, tous nos ennemis seront à quia. Qu'on mette le grapin sur tous les contre-révolutionnaires, que tous les feuillants, royalistes, aristocrates, accapareurs soient mis à l'ombre, qu'ils soient enfermés dans des églises, et que l'on braque vis-à-vis des canons chargés à mitraille, jusqu'à ce que la paix soit faite et la constitution établie. Voilà, foutre, les moyens de salut public que je propose, ils valent mieux que ceux du bateleur Barrère mais il ne faut plus biaiser, plus on tardera, plus le mal empirera. A bas les modérés, à bas les nobles, vive la Sans-culotterie, foutre. La grande colère du Père Duchesne, N°266 Au sujet de la capitulation honteuse de Mayence livré aux Autrichiens par les ordres de l'infâme Custine qui a placé dans toutes les villes de guerre des scélérats pour les rendre de la même manière. Ses bons avis à la convention pour qu'elle chasse tous les nobles des armées. Sa grande joie de voir le général Moustache jouer à la main chaude en présence des braves bougres des départements, qui arrivent pour la fête du 10 août. Depuis que le traître Custine siffle la linotte, je reçois à chaque poste
des billets doux de la part de tous les talons rouges des armées. L'un me mande qu'il mangera mon coeur à la croque au sel, l'autre qu'il me fera rôtir à petit feu, l'autre qu'il m'écorchera. Ces estafiers m'accusent d'être payé par Pitt et Cobourg pour calomnier le plus grand des hommes, celui qui seul, peut seul sauver la république, celui-là qui, suivant eux, a rétabli la discipline dans les armées car si on les en croit, nos braves frères de la troupe de ligne, nos intrépides volontaires ne sont que des brigands qui ne savent que piller, voler, ravager. Moi, foutre, qui connais le soldat, puisque j'ai blanchi sous les armes, je lui rends plus de justice. Je sais au contraire que c'est la faute des chefs, quand la discipline ne règne pas dans toutes les armées de tout temps, il y a eu plus de bravoure et de générosité parmi les pauvres bougres qui font la guerre pour cinq sols par jour, que parmi les foutriquets qui jusqu'à présent les ont commandé. Au surplus je me fous des injures et des menaces tant qu'il me restera une goutte de sang dans les veines, je dirai la vérité et je ferai une guerre mortelle à tous les intrigants, aux fripons, et aux traîtres. Quand j'ai dit, il y a plus d'un an, que Custine était un jean-foutre, je pouvais le prouver, j'avais vu ce fanfaron à l'assemblée constituante faisant toujours chorus avec les aboyeurs de la liste civile pour écraser le peuple et donner au cornard Capet tous les pouvoirs et l'autorité possible afin d'écraser la liberté. Aussi, pour prix de ses bons offices, fût il nommé général par le comité autrichien, et de la même fournée que La Fayette, Rochambeau, Dillon et autres pareils scélérats qui ont conduit la France à deux doigts de sa perte. Ce n'est pas ma faute, car depuis la prise de la Bastille je n'ai cessé de crier plus de nobles dans nos armées, plus de nobles dans aucune place, si nous voulons être libres. La suite a prouvé si j'avais raison. Qu'on me cite un seul bougre de cet acabit qui n'ait pas fini par trahir la patrie, ceux qui sont restés au milieu de nous, qui ont fait les bons apôtres pour nous tromper, nous ont fait cent fois plus de mal que les gredins qui ont vanné du côté de Coblentz et que ceux qui sont aujourd’hui dans la Vendée. Toute la canaille des ci-devant gens de qualité s'entend admirablement pour nous perdre et il serait à désirer que les patriotes fussent d'un aussi bon accord que ces bougres le sont entre eux. Aussitôt que les Sans-culottes se sont levés pour les anéantir il ne faut pas d'abord nous rebiffer, se sont-ils dit, car nous ne brillerions pas, nous ne sommes pas un contre mille mais puisque nous ne sommes pas les plus forts, tâchons d'être les plus fins. Partageons les rôles pour faire la contrerévolution, que les uns parcourent toute l’Europe pour aller recruter des ennemis à notre patrie, que les plus adroits restent en France et qu'ils soient en apparence des Sans-culottes enragés. Ils obtiendront des places et ils livreront en détail les Sans-culottes qui auront été assez dindons pour leur accorder leur confiance. A force de brouiller les cartes et de mettre les Sans-culottes à chien et à chat les uns contre les autres, nous fatiguerons le peuple et lorsqu'il ne lui restera plus que les yeux pour
pleurer, il tombera à nos pieds et nous lui ferons durement la loi. C'est alors qu'il payera chèrement tous les maux qu'il nous fait endurer. Voilà, foutre, comme les nobles, les financiers, les robins ont raisonné depuis les premiers jours de la révolution, voilà comme ils ont agi, voilà la cause de tous nos malheurs. Ne nous en prenons qu'à notre badauderie. Revenons à ce garnement de Custine et prouvons aux incrédules, (puisqu'il faut des preuves), que ce viédase est le second tome de Dumouriez. La mèche est découverte à la fin et les crimes de ce monstre sont prouvés. Il est clair comme le jour, foutre, qu'il a fait massacrer les Français à Francfort, qu'il a fait transporter la plus belle artillerie de nos frontières à Mayence pour la livrer aux Autrichiens et qu'il voulait y faire périr les vingt deux mille hommes qu'il y avait enfermés. Le comité de salut public possède les pièces qui prouvent que quelques jours après le commencement du blocus de cette place, le général Doiré fût invité par le général prussien à une conférence qui devait avoir lieu avec un agent de Custine pour livrer cette ville. Cette conférence eut lieu en effet et il existe un billet signé de la main du traître Custine, dans lequel il engageait le général Doiré à négocier la reddition de Mayence avec nos ennemis. Ainsi donc, foutre, tandis que cet infâme brigand jetait de la poudre aux yeux de la convention et que certains badauds de la Montagne, dupes de ses singeries patriotiques, l'élevaient au dessus des nues, il tramait sourdement la ruine de la France. Il disait que cette ville avait des provisions pour plus d'un an quand il était certain qu'elle allait manquer incessamment de vivres il laissait une armée de cent mille hommes les bras croisés plutôt que de voler au secours de cette place importante. Les soldats cependant ne demandaient pas mieux que de se foutre un coup de peigne et ils brûlaient du désir de repousser au loin les bandes de bêtes féroces que le Nord a vomies sur nos frontières. Pour dorer la pilule, Custine répondait de tout sur sa tête il disait qu'il n'était pas prudent d'attaquer les ennemis qui, suivant lui, étaient en force supérieure tandis que, foutre, le nombre de nos troupes était plus considérable que les leurs. Pour leur faire encore plus beau jeu, il avait éparpillé son armée afin qu'elle fût attaquée sur plusieurs points où elle n'aurait pas été en force et afin de la détruire petit à petit. C'est ainsi, foutre, qu'il a fait périr plus de trente mille hommes en détail. Quand il a vu que le projet de ses bons amis les Brissotins était à vau-l’eau, il s'est empressé de faire capituler la garnison de Mayence, qui s'est rendue honteusement, quoiqu'elle eut encore des vivres pour plus de quinze jours c'est un nommé Corbeau, rolandin renforcé de la section de la Butte-des-Moulins, qui a manigancé cette odieuse capitulation. Custine a placé dans toutes les villes de guerre de pareils jean-foutres pour les livrer également, quand il lui plairait de leur donner le mot d'ordre. Condé a été vendu de la même manière Valenciennes va l'être ou l'est peut-être déjà. Landeau, Lille, Strasbourg seront en la possession de nos ennemis avant un mois si on ne rappelle à l'instant tous les nobles mais puisque
nous tenons le chef de cette affreuse conspiration, que son supplice effraye les scélérats qui seraient tentés d'imiter son exemple! Eh vite, foutre, qu'on dresse la guillotine, que le général Moustache et tous ses complices jouent à la main chaude en présence de nos frères des départements qui arrivent de toutes parts pour la réunion du 10 août! Que ce beau jour, foutre, soit le dernier des nobles, des intrigants, des traîtres, foutre. La grande colère du Père Duchesne, N°267 Contre les Brissotins, les Rolandins, les Royalistes qui font assiéger les boutiques des boulangers par leur valetaille, dès la pointe du jour, afin d'exciter du trouble dans Paris pour sauver le traître Custine. Sa grande joie au sujet du décret qui va faire raccourcir tous les accapareurs. Ses bons avis aux Sans-culottes pour empêcher la disette et assurer du travail et du pain à tous les citoyens, quand on aura mis à l'ombre tous les jeanfoutres qui soufflent le froid et le chaud pour faire la contre-révolution. Tricherie revient toujours à son maître, foutre. Jusqu'à présent tous les coups de chien des ennemis du peuple sont retombés sur eux. Plus on a persécuté la Sans-culotterie, plus la Sans-culotterie a gagné. Oui, foutre, les scélérats qui ont conspiré contre la liberté nous ont appris à être défiants ils nous ont guéri de la maladie de l'adoration. Un homme, tel qu'il soit, n'est plus qu'un homme à nos yeux tant qu'il va droit on l'encourage s'il fait un faux pas, il est foutu. La-Fayette et Dumouriez nous avaient donné de trop bonnes leçons pour que nous les mettions dans la boîte aux oublis. Chat échaudé craint l'eau froide. Aussi, foutre, tous les patriotes sont ils à présent sur leurs gardes ils suivent tous les fonctionnaires publics à la piste rien ne leur échappe toutes les paroles, toutes les actions des généraux sont connues. Le traître Custine ne se doutait pas qu'il avait à ses trousses un essaim de Jacobins qui examinaient sa conduite et rendaient compte aux Sans-culottes de Paris de ses moindres pensées. On l'a laissé s'engager pas à pas dans le labyrinthe du crime et quand la mesure a été comblée mon jean-foutre a été criblé de toutes parts. Quand il s'est vu démasqué, il a fait contre fortune bon coeur il a cru qu'avec de l'audace il pourrait, encore pendant quelque temps, faire face à l'orage il s'est flatté qu'en jetant le chat aux jambes des Sans-culottes, qu'en accusant ceux qui le dénonçaient d'être des anarchistes, des désorganisateurs, on pourrait prendre le change sur son compte. Comme Dumouriez dont il a été le véritable singe, il est venu à Paris conspirer avec les Brissotins, les Rolandins, les Girondins, les Royalistes. "le pot aux roses est découvert, leur a t il dit cet aboyeur de Père Duchesne ne me donne pas de relâche. Je ne sais pas qui a pu l'instruire de tous mes projets mais il les connaît comme moi-même. Il les a dévoilés à toute mon armée et il a si bien mis le doigt dessus que les
soldats n'ont plus de foi dans les reliques du général Moustache. Plus j'ai fait d'efforts pour me justifier, plus on a eu de défiance sur mon compte. C'est en vain que j'ai fait brûler par mes agents et mes complices ses joies et ses colères, le soldat n'a été que plus avide de les lire. Cependant ce goujat de Duhem, ce législateur de balle, que j'ai si bien empaumé par mes cajoleries, et surtout par mes dîners, m'a défendu comme le meilleur des avocats. Danton et Lacroix n'avaient pas soutenu Dumouriez avec plus de chaleur mais malheureusement le soldat se défie des législateurs qui dînent avec les généraux. Quand un pauvre bougre de fusillier vient se plaindre au représentant du peuple des injustices de ses chefs et quand il voit ce représentant, la vue troublée et cherchant les murailles, sortant de s'en donner une pille avec ces mêmes chefs, il ne reçoit pour réponses à ses plaintes que des rots et des bouffées d'ivrogne il retourne en murmurant à sa tente, où, pour se consoler, il est trop heureux de jurer avec le Père Duchesne. Voilà ma position je suis foutu, mes amis, si vous ne m'indiquez pas quelque moyen de me raccrocher aux jambes. Il faut que vous répandiez à flots l'or et les assignats de Pitt et de Cobourg il faut crier plus fort que les accusateurs il faut me donner de la tête aux pieds une lessive pareille à celle dont se servit l'apôtre Fauchet pour rendre Narbonne blanc comme neige il faut que Danton et Lacroix plaident ma cause au haut de la Montagne il faut que notre cher Barrère épuise toute sa rhétorique pour prouver que je suis la perle des généraux il faut surtout que le bavard Thuriot, en nageant comme de coutume entre deux eaux, oppose ses si et ses mais aux bougres du nouveau comité de salut public, qui ne savent pas mâcher châtaigne et qui sont capables de me faire jouer à la main chaude, comme dit ce maudit Père Duchesne il faut surtout que quelque nouvelle Corday nous débarrasse de ce vieux bougre de marchands de fourneaux après cela, que je parte avec des pouvoirs illimités en arrivant à l'armée je ferai pâlir d'effroi quiconque osera souffler le mot je ferai fusiller les raisonneurs malheur à celui qui se plaindra je livrerai aux Prussiens et aux Autrichiens toutes les villes de guerre je diviserai mon armée par petits corps et elle sera détruite avant l'âge d'un petit chien alors, comme Dumouriez, je jouerai des jambes du côté de l’Autriche, alors les républicains, trahis de tous côtés, pressés de toutes parts, seront forcés de mettre les pouces, alors la royauté sera rétablie, alors les Brissotins reviendront sur l'eau, alors je serai généralissime". Telle est, foutre, l'intention du général Moustache en se rendant à Paris tels sont les complots qu'il a médités avec les scélérats qui voulaient allumer la guerre civile dans tous les coins de la république. Heureusement qu'il s'est brûlé à la chandelle, comme le papillon. Tous les Sans-culottes de Paris, à la vue de ce chien enragé, se sont levés pour l'étouffer. Toutes ses turpitudes ont été démasquées.
Tandis, foutre, qu'il distribuait des assignats à pleines mains à de prétendues poissardes pour se faire donner des couronnes et leur faire crier vive Custine tandis qu'il se promenait au Palais-Royal, au milieu de tous les escrocs de Paris, qui criaient aussi comme les fausses poissardes, vive Custine tandis, foutre, qu'il courait de spectacles en spectacles pour se faire applaudir, les Jacobins lui ont lâché une botte secrète, dont il ne se relèvera pas, foutre. A son arrivée de la comédie italienne où les coquines des loges et des coulisses lui avaient fait les yeux doux, où le bateleur Philippe lui avait adressé plusieurs couplets, il a été happé comme un renard dans le traquenard. Il était temps, foutre, car déjà les chevaux de poste étaient attelés à sa voiture. Enfin la prise de Mayence a achevé d'éventer la mine, on a trouvé des pièces qui prouvent qu'elle a été livrée ainsi que Condé, par les trahisons de ce garnement. Son fils, qui remuait ciel et terre pour exciter du désordre dans Paris afin de lui donner la clef des champs, vient d'être aussi arrêté. Montanet, président du tribunal révolutionnaire, le même jean-foutre qui a sauvé Miranda, et qui avait la patte bien graissée pour sauver également le général Moustache, qui déjà manigançait sa justification et celle des Brissotins, a été mis aussi en cage. Tous ces coquins sifflent maintenant la linotte. Nuit et jour le tribunal révolutionnaire travaille au raccourcissement de cette bande d'assassins du peuple pas un n'échappera au rasoir national. Depuis que leur procès est commencé, les aristocrates ont le bec jaune les bougres, pour s'en venger, ont recommencé leurs farces chez les boulangers dont les portes sont assiégées dès le point du jour. Mais les Sans-culottes leur font manger du fromage en restant paisibles. Ils ont de la peine, c'est vrai, à se procurer du pain mais enfin ils en ont. Ils se consolent dans l'espérance que Paris sera sous peu de jours délivré de tous les coquins qui y sèment le trouble et de voir rouler sur l'échafaud les crânes de tous les traîtres les accapareurs aussi jouent de leur reste. Le décret qui prononce contre eux la peine de mort va être mis à exécution. Ca ira, foutre, malgré les conspirateurs et les fripons. Mais pour que ça aille plus promptement, il faut que les bandits qui composent les états-majors des armées soient appelés, et qu'on les mette en lieu de sûreté. Ils sont tous complices de Dumouriez et de Custine. Il faut, foutre, que dans toutes les villes et campagnes de la république, on arrête à la fois, et à la même heure, tous les hommes suspects, qu'on les enferme dans des caves et dans des églises comme je l'ai déjà demandé, et que le canon, chargé à mitraille, soit braqué devant les lieux où ils seront détenus. Alors la paix régnera dans l'intérieur alors les citoyens pourront partir sans crainte, et marcher en masse pour chasser les brigands qui ravagent nos frontières. Il n'y a plus de temps à perdre, foutre les moments sont précieux.
Après cette bonne expédition, que la république s'empare de toute la moisson en indemnisant les cultivateurs que le bled, le vin, le cidre et toutes les denrées soient partagés entre tous les départements, suivant la population que la première part soit pour les armées, car ceux qui nous défendent ne doivent manquer de rien, qu'il soit donné des secours aux vieillards et aux infirmes que tous les citoyens soient assurés de trouver du travail et leur subsistance, la constitution le veut, la Sans-culotterie l'ordonne. Périsse le jean-foutre qui s'y opposera, foutre. La grande colère du Père Duchesne, N°268 Au sujet de la prise de Valenciennes, qui vient d'être livrée par les amis de Custine. Sa grande joie de voir que la louve autrichienne va être à la fin raccourcie. La grande visite qu'il lui a rendue à la Conciergerie pour entendre ses cris et ses injures contre la Sans-culotterie. Sa grande dénonciation au sujet d'un complot formé pour demander une amnistie, le 10 août, en faveur de Custine et de Brissot, et pour sauver tous les viédases qui ont voulu buzoter la France. Ses bons avis aux braves Sansculottes pour qu'ils se mettent sur leurs gardes pour empêcher ce nouveau coup de chien. Sommes-nous assez joués et ballottés par les fripons, foutre? Avaisje tort quand je me débaptisais dès le commencement de la révolution pour empêcher les nobles de foutre leur nez dans les affaires du peuple? Ai-je cessé, badauds imbéciles, de vous crier que si vous donniez votre brebis à garder au loup, il finirait par la croquer? Devions nous penser que cette bougre de canaille, engraissée de notre sang, qui mettait tout son bonheur à tourmenter la Sans-culotterie, changerait tout à coup de caractère et donnerait, tête baissée, dans la révolution, qu'elle aimerait de bonne foi la liberté et l'égalité? Il est aussi impossible à rendre un jeanfoutre de l'ancien régime bon citoyen que d'apprivoiser un tigre. Qu'on me cite un seul noble, depuis La-Fayette jusqu'à Custine, qui n'ait pas fini par être un conspirateur et un traître? Il nous en cuira longtemps, foutre, pour nous être laissé endormir par ces gredins. Après la trahison de Dumouriez, devions-nous en souffrir un seul dans nos armées. Quoi, foutre, plus de sept cent mille soldats sont à la solde de la république, plus de six millions de Français sont sous les armes, et nous n'avons pu empêcher les bandes d'esclaves des tyrans du Nord, d'envahir notre territoire! Nous avons vu de sang froid et les bras croisés Mayence, Condé et Valenciennes investis par ces brigands, et nous n'avons pas volé à leur secours! Nous avons attendu que ces places fussent livrées par les ordres de l'infâme Custine! Ce n'est pas la faute des braves bougres qui les défendaient s'ils avaient eu de bons Sans-culottes à leur tête, tous seraient morts sur la brèche plutôt que de se rendre.
Jamais désespoir n'a été comparable à celui de la garnison de Condé, quand elle a été forcée de capituler. Un porte-enseigne, en remettant son drapeau à l'ennemi, s'est brûlé la cervelle deux sergents qui l'accompagnaient se sont poignardés. Tous leurs camarades auraient suivi leur exemple s'ils n'en avaient été empêchés. Les intrépides lurons qui étaient renfermés dans Mayence auraient tenu dix ans, s'ils avaient eu des vivres, et ils étaient déterminés à mourir plutôt de faim que de se rendre. Le général Moustache connaissait leur courage, aussi le scélérat s'est-il empressé d'ordonner à ses amis qui y commandaient de livrer la place, quand il s'est vu forcé de marcher à son secours. La garnison n'a point été consultée pour la capitulation au contraire on a persuadé aux soldats qu'il y avait une suspension d'armes, tandis que l'état-major ouvrait les portes de la ville aux ennemis. Les Français se voyant ainsi trahis, s'arrachaient les cheveux, brisaient leurs armes ils ont protesté contre cette honteuse capitulation à laquelle ils n'ont point de part, et ils ont juré de venger la république, et d'immoler tous les traîtres qui leur tomberaient sous la main. Où étais tu, brave Merlin, dans ces moments affreux? Toi seul aurais empêché cette infâme capitulation. Le premier qui aurait parlé de se rendre aurait péri de tes mains. Les traîtres, pour consommer leur crime, se sont débarrassés de toi tu es tombé sous leurs coups reçois nos regrets, homme pur et courageux longtemps nous pleurerons ta perte mais tu seras vengé, foutre. Valenciennes vient aussi d'être livrée par une pareille perfidie. La république perd dans ces trois villes plus de neuf cent pièces d'artillerie. Lille était également vendue par le général Moustache il voulait en faire sortir les canons, quand les Sans-culottes lui ont barré le chemin et l'ont forcé de venir rendre compte de sa conduite à la convention au lieu d'approvisionner cette ville, il avait au contraire fait vider les magasins, afin qu'elle fût réduite par la famine dans le même temps que Condé et Valenciennes. Tous ces malheurs sont grands, foutre mais il y a du remède. Je voudrais que les ennemis fussent à vingt lieues de Paris c'est alors, foutre, que les Français prouveraient qu'ils ont du sang dans les veines. Bientôt les ennemis seraient cernés de toutes parts, et leur sang impur engraisserait nos champs. Mais les bougres savent bien ce qu'en vaut l'aune ils se souviennent de la Champagne ils savent qu'ils ne peuvent nous vaincre que par la trahison. Etouffons donc une bonne fois les traîtres nous en sommes environnés Paris renferme en ce moment plus de vingt mille brigands soudoyés par Pitt et Cobourg et ils n'attendent que le signal pour piller et égorger. Sans-culottes, mes amis, aiguisez vos piques et vos sabres pour faire main basse sur tous ces chenapans mieux vaut tuer le diable que le diable nous tue, comme je vous l'ai dit cent fois. Parisiens, on veut vous détruire, soyez unis et vous triompherez c'est à vous surtout, gens de boutique, que l'on en veut.
Les Anglais sont jaloux de votre industrie ils veulent anéantir Paris pour s'emparer de votre commerce Pitt vient d'accaparer plus de vingt millions d'assignats marqués de la face du traître Capet, afin de faire perdre le crédit de ceux de la république. La convention vient de le ramasser au contre, en empêchant le cours de cette monnaie des contrerévolutionnaires ces assignats ne seront plus reçus qu'en payement des contributions et des domaines nationaux, ainsi, foutre, ce bon décret va forcer Pitt et ses agents d'acheter les biens des émigrés. La masse des assignats étant diminuée, le prix des denrées va baisser et les contrerévolutionnaires auront encore un pied de nez. La veuve Capet qui, dans sa tour, se réjouissait de tous nos revers, et qui espérait voir arriver à chaque instant les Prussiens et les Autrichiens à Paris pour lui donner la clef des champs vient d'avoir un rabat joie, auquel elle ne s'attendait pas. La convention a livré la garce au tribunal révolutionnaire. Elle a été transférée du Temple à la Conciergerie j'espère, foutre, que cette tête de malédiction, qui a tant fait de mal à la France, ne pèsera pas une once. J'étais dans cette prison quand elle y est arrivée pâle et tremblante. Lorsqu'elle a été seule et livrée à elle-même, j'ai prêté l'oreille à son guichet, pour entendre ses hurlements. Telle qu'une louve affamée qui rugit quand on lui a arraché sa proie, elle poussait des cris affreux. "Ainsi que mon gros cocu, disait-elle, je vais donc être raccourcie! tout l'or de l’Autriche et de l’Angleterre ne pourront me sauver! Je ne verrai donc pas la ruine de Paris, que j'avais préparée depuis si longtemps je ne contemplerai pas vos maisons embrasées, badauds que je déteste je ne nagerai pas dans votre sang je ne verrai pas le jour où il n'existera pas pierre sur pierre dans cette maudite ville je serai morte satisfaite si j'avais vu vos enfants égorgés sur le sein de leurs mères, les femmes massacrées dans les bras de leurs maris. Je n'avais formé qu'un voeu et il ne sera pas accompli, celui de voir le dernier des Français à son dernier soupir!". Ainsi la guenon se lamentait. Voilà, foutre, les douces paroles qui sortaient de sa gueule empestée. Après les avoir entendues, je rentrai chez moi, transporté de colère, et je me couchai la tête remplie de cette furie je ne dormis pas tranquillement, et dans un songe Marat m'apparut encore. "vieux marchand de fourneaux, me dit-il, malgré tes lunettes, tu ne vois que du feu dans tous les coups de chien qu'on nous prépare. Tu as raison de te réjouir de la mort d'une scélérate qui a mis la France à deux doigts de sa perte. Sans doute il faut que la coquine expie ses forfaits sur l'échafaud, et le plus tôt sera le mieux mais tu ne vois que c'est un os qu'on jette aux chiens à ronger on croit, en raccourcissant cette guenon, faire oublier Custine et Brissot. Apprends, mon vieux, qu'il existe certains endormeurs à la convention qui se proposent de demander une amnistie, le 10 août, pour les infâmes députés qui ont voulu buzoter la France.
C'est à toi à avertir les Sans-culottes de cette nouvelle trahison. Renverse tes fourneaux, brise les le jour où on osera faire une pareille proposition, et fous en les morceaux à la tête des nouveaux hommes d'état qui veulent remplacer ceux que j'ai mis à quia. Point de grâce pour les monstres qui ont juré la perte de leur patrie". Braves Sans-culottes, ce rêve est une réalité. L'ombre de Marat m'a donné l'éveil, foutre, et je n'ai pas mis son avis en oreille d'âne. Oui, il existe des députés assez jean-foutres pour faire une pareille proposition j'ai la preuve que ce complot est formé par des bougres qui commencent à se démasquer. Il serait bien foutant, dans le moment où la convention marche si bien, de la voir arrêtée par les nouveaux Brissotins mais je les suis à la piste je saurai tout ce qu'ils feront, tout ce qu'ils diront, et je les dévoilerai, foutre. La grande colère du Père Duchesne, N°269 Contre une nouvelle clique de fripons et d'intrigants qui veulent remplacer les Brissotins et mener la convention à la lisière, livrer la France à nos ennemis, et donner la clef des champs au petit louveteau du Temple pour régner en son nom. Sa grande joie de voir arriver les braves Sans-culottes des départements pour la fête du 10 août. Les bons avis qu'il leur donne de mettre tous leur tête dans un bonnet pour exterminer tous les traîtres, et donner le grand coup de collier qui fera marcher la constitution. Tous les bons citoyens ont le coeur navré des malheurs de la république. Abattons-nous un traître, un autre le remplace. Ce n'est pas la faute du peuple, foutre, si nous retombons toujours de fièvre en chaud mal car ce pauvre peuple a fait plus que puissance pour être libre il s'est épuisé, dieu merci, et il est prêt à faire les derniers sacrifices pour en venir à son but. Il serait heureux, s'il avait été conduit par des bougres dignes de lui mais, hélas, il n'a cessé d'être trompé dans tous ses choix. Des milliers de gredins qu'il a tiré de la boue et qu'il a comblé de bienfaits le volent, le grugent et le trahissent à la journée. Qu'ont fait les trois assemblées nationales: rien, foutre? La première détruisit les grands, mais pour s'emparer de leurs dépouilles les avocats voulaient succéder aux ducs et aux marquis ils vendirent les Sans-culottes au tyran, et dans leur bougre de gâchis de la révision, ils préparèrent à la nation des chaînes plus dures et plus honteuses que celles qu'elle avait portées jusqu'alors. L'assemblée législative, toute composée de têtes à marc d'argent, pêcha en eau trouble elle foula aux pieds les Sans-culottes l'aristocratie des riches succéda à celle des nobles cette bougre de cohue ne voulait qu'un roi dans la constitution, parce que ce roi avait une liste civile et toutes les places en sa disposition la liberté était foutue l'infâme Capet allait être plus despote que dans l'ancien régime, s'il n'avait existé
des Jacobins, la fine fleur de la Sans-culotterie ces Jacobins bravèrent la rage des tyrans et les poignards de Bailly et de La-Fayette, pour défendre le peuple, et l'éclairer. Quand le sac est trop plein, il faut qu'il crève, foutre. A force d'être opprimés, les Sans-culottes se rebiffèrent le 10 août ils firent danser la carmagnole au comité autrichien mais malheureusement dans cette belle journée ils ne firent que la moitié de la besogne. Ce n'était pas assez que de foutre en canelle le trône que soixante et tant de mangeurs d'hommes avaient occupé depuis tant de siècles, ce n'était pas assez de mettre à l'ombre toute la ménagerie des Tuileries, il fallait, tandis que la masse du peuple était levée, qu'elle écrasât tous les ennemis de la liberté et de l'égalité, il fallait que le monstre qui venait de faire égorger tant de victimes, fût traîné par les chevaux avec sa bougre de race sur la place du Carousel, et que son sang impur fût versé sur les cadavres des citoyens qui venaient de périr, il fallait dans ce jour faire disparaître tous les monuments de la royauté, il fallait raser le château où la louve autrichienne avait juré la perte de la France, il fallait en même temps ne pas laisser pierre sur pierre à Versailles, à Marly, à Trianon, à Rambouillet, à St-Cloud, à Fontainebleau, à Chantilly car tant que les repaires du crime existeront toutes ces bêtes féroces qui seront avides du sang des hommes, tous les monstres qui auraient la fureur de régner, chercheraient à s'y nicher. Voilà, foutre, la seule faute du peuple pour s'être arrêté dans sa vengeance, il se voit encore au premier chant des mâtines il devait espérer qu'une convention, toute composée de Sans-culottes, donnerait à la révolution un si bon coup de collier, que les affaires iraient mieux il ne réfléchissait pas qu'une infinité de fourbes, couverts du masque du patriotisme, avaient jeté de la poudre aux yeux des Sans-culottes de tous les départements, et ils s'étaient fait nommer à cette convention il devait, quand il vit les gredins de la Gironde renommés à cette nouvelle assemblée, se souvenir de toutes les manigances de Guadet, Vergniaud, Gensonné avec le comité autrichien, et renvoyer tous ces jean-foutres aux Gascons qui les avaient nommés il devait demander aux Sans-culottes du pays chartrain quelque bon laboureur à la place de ce fripon de Brissot, qui fait et a plus fait de mal à sa patrie que Pitt, Cobourg et Brunswick c'est ce mauvais levain qui a manqué de perdre la convention et la république. Si on l'eut d'abord étouffé, la France serait partout triomphante. Sans-culottes, mes amis, je vous mets le doigt dessus. Que vos sottises passées vous servent de leçon, et vous empêchent d'en faire de nouvelles vous allez jouer de votre reste vous touchez à votre bonheur ou à votre perte le moment d'employer de grandes mesures est arrivé il n'y a plus à tortiller vaincre ou mourir, foutre vous allez être les plus vils, les plus malheureux des esclaves, ou les premiers des hommes ne craignez plus de tailler dans le vif enchaînez tous les amis de la royauté, si vous ne voulez être enchaînés par eux.
Frères et amis des départements, braves bougres, qui avez accepté avec transport la constitution républicaine, et qui êtes envoyés par vos concitoyens à Paris pour jurer, en leur nom, de défendre jusqu'à la mort cette constitution, apprenez tous les complots que l'on forme pour la détruire. Des ambitieux, des intrigants, des voleurs qui, jusqu'à présent, ont fait les bons apôtres, et qui vous ont si bien foutu dedans, que vous croyez d'excellents républicains, sont d'accord avec les brigands couronnés pour perdre la France. Déjà vous les avez vu défendre Dumouriez, et partager avec lui les dépouilles de la Belgique. Ces nouveaux hommes d'état vous donneront encore plus de fil à retordre que les Brissotins et les Girondins, si vous ne vous empressez de leur lier pieds et mains, pour les empêcher d'agir. Savez-vous, foutre, quel est le projet qui est maintenant sur le tapis? Je vais vous l'apprendre vous en frémirez, foutre il vous paraîtra extravagant, mais il n'en existe pas moins. On veut, à force de trahisons et de malheurs, forcer le peuple à désirer l'ancien régime, et à le redemander. Attendons-nous à voir toutes nos villes de guerre livrées comme Condé et Valenciennes, si la république ne fait pas un grand effort pour écraser ses ennemis du dedans et du dehors. On va tout tenter pour fatiguer le soldat, et pour faire débander nos armées mais, foutre, je suis bien tranquille sur leur compte, elles sont composées de la fine fleur de la république. Il n'est pas un seul de nos guerriers qui ne soit décidé à tenir le serment qu'il a fait de vivre libre ou de mourir. Les traîtres, en calculant ainsi la ruine de leur pays, comptent sans leur hôte lorsqu'ils nous auront réduit à cette extrémité, quand la moitié de la France sera ravagée par les brigands du Nord, ces jean-foutres se flattent que les Sans-culottes seront trop heureux de recevoir la paix à genoux. C'est alors que les hommes d'état, pour mettre fin à tous les maux qu'ils auront occasionnés, nous proposeront la royauté comme le seul remède c'est alors qu'ils iront donner la clef des champs au petit avorton du Temple. Des milliers de coquins, répandus dans Paris, et qui auront la patte bien graissée, crieront alors vive Louis-XVII les meilleurs patriotes seront massacrés les scélérats qui mitonnent cette contre-révolution s'empareront de l'autorité, et régneront au nom du louveteau. Voilà, foutre, le coup de chien qui se prépare que Faut-il faire pour l'empêcher? Ce qu'il faut faire, foutre? Il faut d'abord mettre à l'ombre tous les hommes suspects, chasser de nos armées tous les nobles et les intrigants il faut ensuite renouveler la convention, et ne la composer, cette fois ci, que de véritables républicains il faut, avant toutes choses, organiser un pouvoir exécutif, et ne pas réunir tous les pouvoirs dans les mêmes mains. La contre-révolution sera faite avant un mois, si on laisse le comité de salut public organisé tel qu'il l'est aujourd’hui. Les ministres ne sont plus que des commis sans responsabilité, puisqu'ils sont obligés de marcher comme des aveugles, et d'obéir comme des esclaves aux ordres de ce comité.
Je sais, foutre, qu'il est composé, en majorité, d'excellents citoyens, mais il y a dans le troupeau plus d'une brebis galeuse d'ailleurs ce comité sera renouvelé, et à la place de Robespierre, de Saint-André, de Prieur, je vois d'avance se glisser certains fripons qui convoitent les cinquante millions que la convention a accordé à ce comité gare le pillage et la contre-révolution, foutre. La grande colère du Père Duchesne, N°270 De voir manquer les subsistances au moment où nos frères des départements viennent manger avec nous le pain de la fraternité. Ses bons avis aux braves Sans-culottes pour qu'ils s'emparent de la clef du garde-manger, afin qu'il ne soit plus délivré de boufaille qu'aux ouvriers et aux hommes utiles, et que les godelureaux et les coquines de l'ancien régime, qui rient de la misère du peuple, soient condamnées à leur tour à faire carême. Sa grande joie de s'en foutre une pille éternelle avec les braves bougres qui vont jurer avec nous de défendre jusqu'à la mort la république, une et indivisible et la mort des tyrans, des traîtres et des accapareurs. Aussitôt que la convention fût accouchée de la constitution, je dis: la république est sauvée, foutre. D'un côté je voyais les mines allongées des aristocrates, de l'autre la joie des Sans-culottes cela ne va jamais l'un sans l'autre mais aussi je m'attendais que les ennemis du peuple emploieraient le vert et le sec pour empêcher cette constitution de s'établir " voilà, se sont-ils dit, une loi toute à l'avantage des malheureux si la France adopte cette constitution, la république est à jamais affermie tous les Français vont être libres et égaux, non pas en rêve, mais en réalité, foutre. Le Sans-culotte se moquera du riche, et lui dira de dîner deux fois ses enfants seront aussi puissants, aussi honorés que les nôtres, puisque cette constitution veut que l'éducation soit la même. La Sans-culotterie, qui jusqu'à présent ne produisait que de mauvais sauvajons, faute de culture, va pousser maintenant les tiges les plus hautes et les plus saines il en sortira des fruits en abondance, tandis, foutre, que nos troncs usés et pourris ne pourront plus rien produire réunissons nous tous, hommes de l'ancien régime, armons nous de haches pour couper l'arbre de la liberté il est encore fragile, il n'a poussé que de faibles racines, tâchons de le déterrer, pour placer à sa place le cyprès de la royauté il poussera comme le chiendent, il étouffera sous ses rameaux empoisonnés tous les arbrisseaux qui l'entourent un seul épi ne mûrira à son ombre mais les plantes venimeuses, c'est à dire la noblesse, le clergé, la finance, la robinaille, l'usure, l'agiotage, le monopole, l'accaparement croîtront à vue d'oeil autour de lui mais, foutre, il n'est pas facile d'exécuter ce projet les Sans-culottes n'entendent pas raison sur ce chapitre ils ont tous juré de mourir plutôt que d'avoir un roi ils tiendront leur serment, foutre. Jamais nous ne pourrons les réduire par la force, ils sont mille contre un.
Que faire donc? Il faut avoir recours à la trahison, c'est notre grand cheval de bataille, nous ne sommes qu'une poignée de contrerévolutionnaires, mais nous sommes tous riches. Commençons par accaparer toutes les subsistances, toutes les denrées. Quand nous aurons la clef du garde-manger, nous ferons tirer la langue d'une aulne à cette maudite canaille nous vendrons tout au poids de l'or. L'ouvrier ne pourra plus approcher de rien il faudra qu'il arrose de ses sueurs et de ses larmes le morceau de pain bis que nous lui jetterons comme à un chien. Quand il aura perdu sa journée, à la porte des boulangers pour avoir sa subsistance, et qu'il n'aura pu s'en procurer, quand il rentrera chez lui, désespéré d'entendre les cris de sa femme et de ses enfants, nous lui lâcherons aux trousses quelques uns de nos limiers qui lui tiendront un peu près ce discours: eh bien! Sans-culotte imbécile, te voilà républicain, et tu n'as pas de quoi mettre sous la dent! Reviens de ton erreur, va demander pardon à tes anciens maîtres ils ne demandent pas mieux que de te faire grâce. Leurs caves sont remplies d'écus et de beaux louis d'or. Quand tu voudras, ils te délieront les cordons de leurs bourses mais avant de ressentir les effets de leurs bontés, il faut que tu renonces à tous les projets de liberté, il faut que tu immoles de tes mains tous les hommes qui ont brisé tes fers, il faut que tu gueules à plein gosier pour redemander un roi, il faut que les princes, que les émigrés rentrent dans leurs biens, il faut que les cardinaux, archevêques, évêques, abbés, prieurs et chanoines reprennent leurs bénéfices, il faut ramener en triomphe les fermiers généraux, les rats de cave, les gabeloux, il faut que les têtes à perruque des ci-devant parlements, chambres des comptes, des aides recommencent leurs mascarades, et disent leurs messes rouges, il faut enfin, pour couronner l'oeuvre, une banqueroute générale voilà, Sansculotte, le seul chemin du bonheur, où tu puisses marcher maintenant. Ventre affamé n'a point d'oreille. Il faudra, bon gré, mal gré que les gueux obéissent. Les généraux qui sont dans notre manche, livreront aux étrangers toutes nos villes de guerre de faux patriotes, qui s'entendent avec nous, brouilleront les cartes à la convention la république sera déchirée de toutes parts elle ressemblera à la tour de Babel personne ne s'entendra que nous les patriotes s'armeront les uns contre les autres, se mangeront le blanc des yeux tous les mécontents se joindront à nous enfin nous deviendrons les plus forts c'est alors que nous ferons nos prouesses, et que les Jacobins apprendront de quel bois nous nous chauffons". Voilà, pauvres Sans-culottes, qui ne voyez pas plus loin que votre nez, toutes les manigances de vos ennemis. Ils vous enlèvent vos subsistances, et au lieu de vous en prendre à eux, c'est vos magistrats que vous gourmandez. Je conviens, foutre, que votre position est affreuse, mais prenez garde de la rendre encore plus malheureuse. Sans doute il est foutant et contre-foutant d'aller se coucher à jeun, quand on s'est épuisé pendant le jour à force de travail.
Oui, vous avez raison de vous débaptiser quand vous éprouvez la disette au milieu de l'abondance mais quand vous voudrez cette disette cessera. N'avez vous pas des bons bras pour exterminer les accapareurs? N'avez vous pas des bonnes jambes pour aller chercher le grain qui vous manque, chez les gros fermiers qui le cachent? Quand vous voyez la foule à la porte des boulangers, prenez la liste de tous les citoyens, distribuez vous-même le pain. Commencez par servir les ouvriers, les mères de famille ceux-là n'ont pas de temps à perdre. Faites la conduite de Grenoble à tous les coquins de riches qui rient de votre misère. Condamnez cette bougre de vermine à quelques jours de carême et je vous réponds que vous n'éprouverez plus de disette car eux seuls l'occasionnent, il y a toujours de vivres de reste pour les hommes utiles. Ceux qui ne le sont pas sont indignes de vivre. Quand vous les aurez fait fumer à leur tour, ils ne s'aviseront plus de vous escamoter les premières fournées pour les jeter à la rivière, comme ils ont fait depuis que la constitution est sur le chantier serrez aussi de près la botte aux mitrons qui, pour la plupart, ne valent pas les quatre fers d'un âne empêchez leur de vendre le pain aux gens de campagne, qui maintenant ont fait leur récolte. Encore une fois Sans-culottes, mes amis, songez que si vous êtes malheureux, vos frères des départements le sont encore davantage toute l'année ils ont payé le pain dix à douze sols la livre, et encore n'en ont ils pas pu avoir. Pour la plupart ils ont été réduits à manger des choux bouillis et des racines ils ne sont pas pour cela rebutés car ils savent que les aristocrates et les royalistes sont seuls cause de tous nos maux ils espèrent les voir bientôt finir, et maintenant ils dansent partout la carmagnole autour de l'arbre de la liberté, et bénissent la convention qui vient d'achever une constitution parfaite. Rallions nous autour d'elle. Braves lurons des départements, qui veniez ici pour chanter et boire avec nous en réjouissance de l'acceptation de l'évangile de la Sans-culotterie, ne vous effrayez pas si vous voyez Paris agité pendant votre séjour parmi nous vous devriez vous y attendre votre arrivée est la mort de tous nos tyrans. Le monstre du fédéralisme fait un dernier effort en expirant, pour empoisonner le beau jour qui nous réunit mais il n'en sera que plutôt étouffé. Aidez nous à lui donner le coup de grâce. Comme nous, vous connaissez la cause de cette disette factice mais les magistrats du peuple, et surtout le bon Sans-culotte Pache se sent tout remué nuit et jour. Nous aurons assez de pain pour le partager avec vous, et nous avons derrière les fagots quelques bonnes bouteilles de réserve que nous vous destinions buvons les, ensemble à la santé du peuple, à la Sans-culotterie, à la république, une et indivisible. Quand vous retournerez chez vous, vous direz à vos concitoyens tous les coups de chien que l'on emploie pour affamer Paris vous nous enverrez des vivres, et vos armes et les nôtres purgeront la république de tous les traîtres et des accapareurs, foutre.
La grande joie du Père Duchesne, N°271 De voir que les braves bougres, envoyés par les départements pour la fête de la constitution, sont décidés à donner avec nous le dernier coup de collier pour sauver la république. Le grand discours qu'il leur adresse avant leur départ, et les bons avis qu'il leur donne pour qu'il fassent sonner le tocsin dans tous les villages, afin de faire danser la carmagnole aux aristocrates, aux royalistes et aux accapareurs, et ensuite aux Autrichiens et aux Prussiens. Elle est donc acceptée, foutre, cette constitution qui fera à jamais la gloire et le bonheur de la France. La république entière a juré de défendre cet évangile de la Sans-culotterie. Quel spectacle, foutre, que celui de la réunion de tous les départements pour cette grande fête! Celle du 14 juillet 1790 n'était que de la St-Jean en comparaison à cette première fédération il faisait un temps de bougre tous les fédérés, mouillés jusqu'aux os, crottés jusqu'à l'échine, s'en prenaient au père éternel, qu'ils accusaient d'être un peu aristocrate mais, foutre, le père éternel avait raison, car il était sans doute indigné de voir la France embadaudée comme elle l'était alors il ne pardonnait pas aux Sans-culottes qui avaient pris la Bastille, et qui se vantaient d'avoir établi la liberté et l'égalité, de souffrir encore les distinctions de citoyens actifs et inactifs à cette cérémonie tous les nobles jouaient encore les premiers rôles. Les prêtres que le père éternel n'aime pas (quoiqu'ils se disent ses hommes d'affaires ici bas), les prêtres, au mépris de la liberté des cultes, y faisaient aussi leurs farces, et ce qu'il y avait de plus odieux encore, c'était la présence d'un roi. Ainsi donc, foutre, le père éternel, en lâchant tous les robinets de la voûte céleste, pour arroser les envoyés du peuple français, loin de se montrer aristocrate, prouva au contraire qu'il était le père de la Sansculotterie. Voyez, foutre, quel beau temps pendant la fête de la constitution républicaine. Je n'entreprendrai point, foutre, de faire le tableau de cette fête je laisse le soin à nos braves lurons des départements de raconter à leurs femmes et à leurs enfants tout ce qu'ils auront vu. Quand les vieilles grands-mères viendront leur demander combien chaque parisien mange de petits enfants à son déjeunée, combien les Jacobins boivent de pintes de sang à leur repas, ils les enverront au conte de la Barbe-Bleue, et ils rendront justice aux Sans-culottes de Paris. Oui, foutre, nous en sommes certains, frères et amis, vous ne nous quitterez point, sans répandre des larmes. Nous ne vous avons pas reçu aussi bien que nous l'aurions désiré, mais du moins vous avez pu connaître que vous et nous, nous n'avions qu'un coeur et qu'une âme. Vous savez maintenant si nous aimons la liberté et l'égalité, si nous voulons l'indivisibilité de la république! après tous les sacrifices que nous avons fait pour la révolution, nous n'aurions jamais dû vous être suspects mais des scélérats vous avaient trompés sur notre compte ils vous avaient persuadé que nous voulions
détruire notre ouvrage, que nous voulions devenir vos maîtres, nous qui ne pouvons vivre sans vous! C'est vous qui semez le grain qui nous nourrit, c'est vous qui nous envoyez toutes nos denrées en échange de ces dons précieux nous ne vous rendions sous l'ancien régime que des colifichets, maintenant nos bons républicains s'exerceront à des arts utiles: nous fabriquerons des étoffes solides avec la laine de vos moutons, nous forgerons le fer qui défendra vos propriétés notre commerce, notre industrie porteront l'abondance dans les campagnes Paris ne sera plus regardé comme un gouffre, où viendront se perdre toutes les richesses de la république ce que Paris recevra d'une main il vous le rendra de l'autre et vous ne perdrez point au change, car notre travail embellira tout ce que vous nous aurez confié, et le fera servir à l'utilité commune. Les boutiques des marchandes de modes se transformeront en ateliers les cafés, le rendez-vous des fainéants, seront occupés par des bons travailleurs, par des bougres de ma trempe, qui, avec une argile grossière, mouleront des poêles et des fourneaux. Les marchands de carrosses deviendront de bons charrons, les orfèvres se feront serruriers ces arrangements ne conviendront pas à nos petites maîtresses et à ces godelureaux à culottes étroites et aux habits carrés mais une république ne peut exister avec une pareille canaille, et j'espère qu'un de ces matins les Sans-culottes s'armeront de fouets pour foutre la chasse à tous ces courtauds de boutique, à tous ces clériaux, à tous ces bandits du Palais-Royal, qui tirent la langue sur les patriotes, et qui ne cessent de faire de l'esprit à perte de vue contre la république. Nous ne voulons souffrir parmi nous que des hommes utiles. Des bougres d'endormeurs qui s'imaginent faire toujours la pluie et le beau temps avec leur politique, prétendent que sans le luxe et le vice tous les habitants de Paris iraient à l'hôpital moi, je réponds à ces viédases que Paris ne saurait exister sans les bonnes moeurs dans l'ancien régime, nous nous laissions éblouir par mille foutaises. L'étranger, en entendant tout le fracas des voitures, en voyant dans les places publiques, dans les spectacles, tant de gens brillants et ne songeant qu'à leurs plaisirs, s'imaginait que ce Paris était un paradis terrestre mais, foutre, s'il venait à réfléchir que tous ce fatras d'or et d'argent, de soieries, de meubles magnifiques, était arrosé des sueurs, des larmes de sang des malheureux, s'il lui prenait fantaisie de perdre un instant de vue les superbes nids de cocu du quartier St-Germain, pour visiter les galetas des pauvres bougres du faubourg St-Marcel ou St-Antoine c'est là, foutre, que son coeur saignait de voir des milliers de bons pères de famille épuisés de fatigues, desséchés de misère, pour procurer aux fermiers généraux, aux évêques et à leurs putains les meubles et les décorations de leurs palais, de leurs boudoirs. L'homme libre se dégrade, quand il est aux gages du vice. Pourquoi les Marseillais, les Lyonnais, les Bordelais ont ils tourné casaque à la Sans-culotterie?
C'est que les gros marchands, trafiquants, boutiquiers de ces villes, sont tous des accapareurs, des usuriers qui s'engraissaient avec la cour et les nobles. Ils prévoient que la république va leur couper les vivres et délivrer les ouvriers de leur tyrannie, voilà pourquoi ils ont levé l'étendard de la révolte et massacré tous les amis de la liberté. Nous autres Sansculottes Parisiens, qui nous foutons des richesses et qui ne voyons de bonheur que dans l'égalité, nous périrons jusqu'au dernier pour défendre la république, une et indivisible. Voilà notre profession de foi, frères et amis de tous les départements. C'est à nous que vous devez la ruine de la Bastille, la destruction de la noblesse, de la gabelle, des entrées, de la taille, de la chasse, de la dîme. En nous levant les premiers contre notre tyran, nous savions que nous porterions tout le fardeau de la révolution mais nous avons tout bravé pour l'intérêt général. Depuis quatre ans nous endurons la misère et la famine pour achever notre ouvrage. Nous ne nous sommes jamais plaints que quand vous ne nous avez pas rendu justice. Vous êtes venus de tous côtés pour nous juger vous avez vu ce que nous sommes vous savez ce que nous voulons nous sommes satisfaits. Avant de rentrer dans vos foyers, frères et amis, il faut, foutre, que nous mettions tous nos têtes dans un bonnet et que nous donnions tous le grand coup de collier pour sauver la république. Aidez nous à la délivrer de tous les traîtres. Ils viennent de livrer à nos ennemis les plus fortes de nos villes de guerre. Nos campagnes du Nord sont ravagées par ces mêmes Prussiens dont tout le sang aurait dû engraisser les plaines de la Champagne, sans l'infâme Dumouriez. Volez dans vos départements sonnez y le tocsin que tous les bras des républicains soient armés pour exterminer d'abord tous les aristocrates, tous les royalistes précipitons nous ensuite comme un torrent sur les bandes de tigres que les monstres couronnés ont déchaînés contre nous. Donnons en même temps le coup de grâce aux accapareurs. Que toute la moisson de cette année d'abondance soit achetée par la nation, comme je l'ai déjà proposé. Que la première part soit pour les défenseurs de la république et les cultivateurs qu'il en soit ensuite délivré à toutes les villes, suivant leur population. Quand tout le monde sera approvisionné, que l'on forme avec l'excédent des magasins dans chaque département. Après cette mesure salutaire levons nous que tous les citoyens en état de marcher s'arment de piques, de sabres, de broches, de faux, pour faire danser la carmagnole aux ours d'Allemagne que nos femmes et nos filles fassent bouillir de l'huile, allument le soufre pour assaillir les soldats des despotes qui oseront pénétrer dans nos villes. Oui, foutre, que le signal de la mort des traîtres, des accapareurs, des modérés, des aristocrates, des royalistes, soit donné d'un bout à l'autre de la république, et elle sera sauvée, foutre. La grande colère du Père Duchesne, N°272
De voir que l'on allonge la courroie pour le jugement de Brissot, de Custine et des crapauds du Marais. Ses bons avis aux braves Sansculottes des départements pour qu'ils ne quittent pas Paris avant que tous les traîtres qui ont voulu allumer la guerre civile, aient mis la tête à la fenêtre. Son grand discours aux braves Montagnards qui ont fait la constitution pour les engager à délivrer le peuple des sangsues de la chicane, et décréter promptement l'instruction publique. Est ce que l'on veut se foutre éternellement du peuple? Il souffre, il languit, et il ne peut voir la fin de sa misère. Si nous vivions dans les déserts, je dirais aux Sans-culottes : pauvres bougres, prenez votre mal en patience la terre que vous habitez ne produit rien mangez les racines des bois et le gland des forêts, puisque vous n'avez pas autre chose mais, foutre, dans le pays le plus fertile de l'univers, sur un sol qui produit avec abondance du bled, du vin, sur une terre couverte des dons de la nature, il est odieux de voir des vieillards épuisés de fatigue, après avoir travaillé toute leur vie, n'avoir pas où poser leur tête. Le coeur saigne de voir les épouses de braves ouvriers, dont le sein desséché par la faim ne peut donner de nourriture à l'enfant qu'elle élève pour la patrie. Il faut en convenir, la bougre de race d’Adam est une espèce bien méprisable les uns ont tout, les autres n'ont rien. Je ne prétends pas, foutre, que nous devions être tous aussi riches les uns que les autres car, par exemple, si la France était partagée en égales portions, chacun n'aurait, dit-on, que quarante écus de rente, ce qui ferait le malheur de tout le monde, sans faire le bien de personne. Ces quarante écus d'ailleurs seraient bientôt réduits à zéro dans les familles nombreuses au bout de deux ou trois générations. Il est naturel, il est juste, foutre, que celui qui travaille le mieux, qui a le plus de talent, gagne d'avantage mais aussi il est foutant de voir tous les biens, tous les avantages entre les mains des lâches fainéants, des vils égoïstes, dont les autres hommes ne sont que les esclaves. C'est pour mettre fin une fois pour toutes à ce désordre que les Sans-culottes se sont rebiffés et ont fait la révolution. Depuis quatre ans le sang des citoyens coule pour assurer la liberté et l'égalité, une constitution véritablement républicaine leur promet le bonheur mais, foutre, ce n'est pas assez que de belles promesses, il nous faut des effets. Il est temps que nos maux finissent, il est temps de s'occuper des malheureux, d'un bout de la France à l'autre, le cri de la misère se fait entendre. Les aristocrates, les royalistes, qui seuls en sont cause, rient sous cape de nos souffrances ils veulent nous rendre la république odieuse, et nous forcer, par la guerre civile et la famine, à redemander l'ancien régime. La convention, qui est toute puissante, quand elle est au pas, et qu'elle marche avec le peuple, doit enfin couronner son ouvrage en assurant la félicité publique. Malheureusement cette convention conserve encore une partie de
ses vieilles habitudes elle s'endort trop souvent elle se laisse mener par un tas de bavards qui l'empêchent de faire le bien elle semble déjà avoir oublié qu'elle a promis au peuple, son maître et son souverain, de ne plus habiter avec les avocats, les procureurs, les journalistes et tous les beaux esprits elle les écoute plus que jamais, et ces jean-foutres recommencent à faire la pluie et le beau temps, et s'opposent à toutes les grandes mesures qu'elle pourrait employer pour sauver la patrie. Nous sommes trahis partout, foutre, et les traîtres restent impunis. Pas un conspirateur n'a mis la tête à la fenêtre. Le tribunal révolutionnaire n'a jugé jusqu'à présent que les valets, et les maîtres sont échappés. Les juges du nouveau et de l'ancien régime sont toujours des juges ils ont deux poids et deux mesures: l'un pour les grands, l'autre pour les petits. Une misérable cuisinière s'est avisée de crier vive le roi le lendemain elle a été raccourcie c'est bien fait elle le méritait, foutre mais pourquoi n'expédiez vous pas aussi promptement, citoyens jugeurs, les grands scélérats qui sont convaincus d'avoir voulu perdre la république? Pourquoi cet infâme Brissot, le plus cruel ennemi de sa patrie, qui nous a mis aux prises avec toute l’Europe, qui a causé la mort de plus d'un million d'hommes, qui avait la patte graissée par tous les brigands couronnés pour mettre la France à feu et à sang pourquoi, foutre, ce monstre vit il encore? Vous m'allez dire que les comités n'ont pas rédigé d'acte d'accusation contre lui? On ne paye pas avec pareille monnaie. Je vois làdessus une connivence entre le tribunal et les comités, pour sauver cet assassin du peuple. On craint qu'il ne jase quand il sera sur le fauteuil, et qu'il ne découvre ses complices. Je remarque, foutre, que depuis que ce garnement est à l'ombre, ainsi que les autres crapauds du Marais, la foule a augmenté à la porte des boulangers. On veut exciter un mouvement dans Paris. Je sais qu'une bande de coquins, soudoyés par Pitt, rode dans toutes les rues de Paris, dans tous les cafés pour exciter du trouble. Un de ces matins les prisons doivent être ouvertes, si nous n'y prenons garde, afin de donner la clef des champs à tous ces scélérats et à la veuve Capet qui était trop bien gardée au Temple par les Sans-culottes de la Commune. Voilà tout à l'heure un mois que le traître Custine siffle la linotte ses crimes sont prouvés cependant, et on ose allonger la courroie pour le sauver. Il fallait avoir des pièces, il fallait entendre tous les témoins, disent les aboyeurs du Palais. Des témoins, bougre d'endormeurs, en Faut-il d'autres que les prises de Mayence, de Condé, de Valenciennes, livrées par ses complices, et qu'il pouvait sauver, s'il n'avait pas enchaîné l'ardeur des braves soldats qu'il commandait? Je me souviens d'un certain approvisionneur d'armée, qui était un voleur insigne, et que certain général menaça de le faire pendre. On ne pend point un homme qui a cent mille écus, répondit-il en effet, il en donna cinquante mille au général qui le reconnut pour le plus galant homme de France. Il en est de même de Custine il peut dire aussi: j'ai plus de vingt millions à mon service, on
ne guillotine pas un homme qui a vingt millions c'est à dire en bon français, citoyens des comités, citoyens juges, si vous pouvez me dispenser de jouer à la main chaude, je partagerai le gâteau avec vous. Voilà le fin mot, foutre, Braves Sans-culottes des départements, qui êtes venus jurer avec nous de défendre jusqu'à la mort notre constitution, ne partez pas qu'elle ne soit cimentée avec le sang des traîtres. Soyez vous-mêmes leurs juges, attendez vous, quand Custine va paraître au tribunal, que le premier des braillards du Palais va se débattre comme un diable dans un bénitier pour prouver que ce qui est noir est blanc mais il faut que les cris du peuple, que ce brigand a voulu égorger, ne cessent de répéter, Mayence, Condé Valenciennes. Que ces mots terribles retentissent du faubourg Saint-Antoine au faubourg Saint-Germain alors il faudra bien que justice soit faite, malgré les 20 millions du général Moustache. Qu'il en soit de même pour Brissot et ses adhérents. Malheurs à la république si elle laisse les traîtres impunis si La-Fayette avait été raccourci, Dumouriez n'aurait pas osé l'imiter si Dumouriez n'avait pas échappé, Custine n'aurait pas livré le Nord à nos ennemis. Si Custine ne périt pas, si tous ces complices ne perdent pas le goût du pain, la république est foutue et la constitution s'en ira en eau de boudin. Vous qui avez fait cette constitution, Montagnards qui vous endormez comme le patriarche qui planta la vigne, après qu'il eut trouvé le secret de faire du vin, si vous ne prenez encore une fois le mors aux dents, vous êtes perdus, et vous perdez la France frappez, écrasez tous les fripons qui ont voulu allumer la guerre civile. Point de grâce pour les traîtres administrateurs du Calvados, de Marseille, de la Gironde décrétez que dans la prochaine législature, il n'y aura ni nobles, ni avocats chassez de nos armées tous les talons rouges, tous les freluquets qui ont été placés par Capet, La-Fayette, Dumouriez et Beurnonville assurez la subsistance des armées, des grandes villes exterminez tous les accapareurs délivrez les Sans-culottes des hommes de loi décrétez promptement le projet d'instruction publique de Michel Lepelletier il ne convient pas aux riches, mais il fera le bonheur des pauvres qui n'ont besoin que d'instruction pour cesser de l'être faites mettre à l'ombre tous les hommes suspects, c'est à dire les aristocrates, les royalistes, les banquiers, les financiers bientôt nous aurons la paix au dedans, et dans peu les ennemis du dehors fuiront devant nous, foutre. La grande colère du Père Duchesne, N°273 Contre les riches qui veulent affamer le peuple en accaparant le bled et les denrées. Ses bons avis à la convention, pour qu'elle lève une armée de dix mille Sans-culottes dans chaque département, pour forcer les gros fermiers de sortir le bled de leurs greniers, où il moisit, et pour
faire prendre l'air au sucre et au savon que les accapareurs cachent dans des souterrains, pour les vendre ensuite au poids de l'or. Du pain, foutre, voilà le mot à l'ordre du jour les Sans-culottes n'envient pas les richesses des dieux de la terre ils se foutent de leurs palais, de leurs cuisiniers, de leurs carrosses, de leurs chevaux, de leurs laquais le bonheur n'existe pas dans toutes ces foutaises, mais dans le travail et la vertu. Les Sans-culottes n'en connaissent et n'en désirent pas d'autre mais aussi il faut du pain aux Sans-culottes. La terre a été faite pour tous les êtres vivants, et depuis la fourmi jusqu'à l'insecte orgueilleux qui s'appelle homme, chacun doit trouver sa subsistance dans les productions de cette mère commune. Je sais que les gros veulent toujours manger les petits: les loups dévorent les moutons, l'aigle déchire les entrailles de la timide tourterelle l'homme, de son côté, détruit tout, ravage tout, mange tout ce qui lui tombe sous les mains. Il n'est pas d'animal à deux pieds, qui n'ait mangé dans sa vie des milliers d'autres animaux. Les lions que nous regardons comme des bêtes féroces, les tigres dont nous ne parlons qu'en frémissant, sont mille fois moins cruels et moins voraces que nous ces monstres, si sauvages et si sanguinaires, respectent au moins leurs semblables, et ils ne se mangent pas entre eux mais les hommes n'ont point de plus cruels ennemis qu'eux-mêmes ils se trahissent, ils s'outragent, ils se dévorent, ils inventent toutes sortes de moyens pour se nuire et se détruire ils se vantent cependant d'être le chef d'oeuvre de la nature et l'image de la divinité. Ah, foutre, quel blasphème! Il y a gros que le monde n'existerait plus, si son auteur était aussi méchant, aussi cruel que l'homme. D'où te revient donc cette humeur noire, vieux radoteur. Quel malheur t'est-il donc arrivé, joyeux marchand de fourneaux? Toi, qui d'ordinaire ne fais que rire des sottises d'autrui et qui n'es jamais si drôle que lorsque tu veux te fâcher, quelle mouche te pique aujourd’hui? Sur quelle herbe as tu marché? Crois-tu mieux valoir que tes semblables, toi qui en parle avec tant de mépris? Je ne les méprise pas, foutre, je les plains. Quoi donc, quand je vois l’Europe à feu et à sang quand du Nord au Midi, j'entends gronder le canon quand je vois des villes embrasées, des campagnes ravagées, la terre couverte de cadavres, n'ai-je pas raison d'être affligé quand je me demande la cause de tous ces désordres et que je songe qu'une demie douzaine d'imbéciles appelés rois, empereurs, occasionne tous ces maux, je me débaptise, je brise ma pipe, j'arrache les poils de mes moustaches, je bats tout ce qui m'entoure et dans mon humeur noire, je n'épargne pas même ma pauvre Jacqueline je lui fais des querelles d'allemand je lui cherche noise sur la pointe d'une aiguille: en un mot, je suis le bougre le plus maussade de la république.
Ce qui m'échauffe encore plus la bile, foutre, c'est de voir les Français à chien et à chat, et se mangeant le blanc des yeux, au lieu de se tenir par la main pour chasser les brigands qui leur font la guerre. Les riches ne songent qu'à leur intérêt la république n'a pas de plus grands ennemis qu'eux ils détestent la révolution, parce qu'elle a établi la liberté et l'égalité ils veulent, bon gré, mal gré, se mettre à la place des grands, pour nous faire la loi, et opprimer les Sans-culottes ils entassent sol sur sol leurs caves sont remplies de notre numéraire qu'ils y ont enfoui ils bâtissent chaque jour leur fortune sur la ruine publique ils accaparent toutes les denrées ils se vantent de nous faire tirer la langue d'une aulne, et de nous réduire à la plus affreuse misère, si nous ne rétablissons pas la royauté. Les jean-foutres tiennent entre leurs mains toutes les subsistances, les empêchent de circuler, et ils ne font sortir le bled de leurs greniers, que lorsqu'il est pourri encore ne se contentent ils à nous le céder qu'au poids de l'or. Il faut en finir, foutre. On a proposé aux Sans-culottes de se lever en masse c'est bien fait mais ce n'est pas contre les Prussiens, les Autrichiens, les Espagnols qu'ils doivent marcher. Nous avons sous les armes près de sept cent mille bougres à poil, qui sauront mettre en déroute et faire mordre la poussière aux vils esclaves qui combattent pour les tyrans. Que nos armées soient seulement délivrées de toute la canaille de l'ancien régime, de tous les freluquets à talons rouges, dont elles ont été empoisonnées qu'elles soient commandées, comme je n'ai cessé de le demander, par de bons vieux invalides, et je réponds de leur succès. Nous avons dans l'intérieur des ennemis mille fois plus redoutables, et nous n'aurons jamais de repos tant qu'ils existeront. Ainsi donc, foutre, puisqu'on veut faire marcher à la fois tous les républicains, ce ne doit être que contre les traîtres, les conspirateurs, les accapareurs, qui nous troublent et nous minent dans l'intérieur. Guerre mortelle à tous les scélérats. Elle ne sera pas longue si nous sommes bien conduits. Qu'il soit formé dans chaque département un corps de dix mille Sans-culottes, payés par la république. Il ne faudra pas faire de grandes dépenses pour leur équipement et leur armement. Le service dont on le chargera ne sera pas difficile. Qu'on leur fasse faire d'abord quelques promenades dans les campagnes, pour faire rendre compte aux gros fermiers de leur récolte, après avoir laissé à chaque canton toute la provision de l'année, que le reste soit transporté dans un grenier commun dans chaque département, après avoir été payé, comme de raison, par le trésor public. C'est là, foutre, que les armées, les grandes villes trouveront leurs subsistances, et comme l'année est bonne et que la récolte peut nourrir pendant trois ans tous les habitants de la république, il y aura une réserve en cas de disette. Après cette opération qui rétablira le calme et dissipera toutes les inquiétudes, nos patriotes iront rendre de pareilles visites aux accapareurs de Marseille, de Lyon, de Bordeaux, de Nantes, de Rouen. On videra leurs magasins, on fera prendre l'air au sucre, au savon, qui moisissent
dans les souterrains où ces bougres de voleurs les ont entassés. On les forcera de les mettre en vente, alors l'abondance de ces denrées en fera diminuer le prix et ça ira, foutre. Oui, les riches ne nous oppriment que parce que nous le voulons bien. Oui, foutre, quand il nous plaira de donner le moindre signe de vie, tous les tripotiers de banquiers, de marchands, seront obligés de mettre les pouces. Ils ont accaparé nos subsistances, accaparons des bras pour les forcer de nous les rendre, et il faudra bien qu'ils cèdent à la force et surtout à la loi. Le marchand doit vivre de son industrie, rien de plus juste mais il ne faut pas qu'il s'engraisse du sang des malheureux. La première propriété, c'est l'existence et il faut manger, n'importe à quel prix. La faim tire le loup des bois. Tremblez donc, bougres de sangsues du peuple, vous avez voulu nous réduire au désespoir. Vous vous êtes flatté que les Sans-culottes allaient tomber à vos pieds, pour vous supplier de leur donner un misérable morceau de pain, vous en aurez menti. Les mêmes bras qui ont mis en canelle le trône du cornard Capet, vont fondre sur vous. Vous ne vous foutrez plus des décrets de la convention vous n'insulterez plus à la misère publique. Le peuple, votre maître, ne languira pas plus longtemps. Vous l'avez réduit au désespoir il va frapper: frémissez, foutre. Les grands préparatifs du Père Duchesne, N°274 Pour faire marcher en masse tous les républicains contre les esclaves des despotes. Sa grande joie de foutre, à la gueule du canon, tous les courtauds de boutique, tous les petits clériaux et tous les foutriquets à culottes serrées et aux habits carrés. Sa grande découverte d'un nouveau complot, pour sauver le traître Brissot, et sa grande colère contre certains bougres, à double face, qui veulent marier la fille de Louis le traître avec un des fils du roi d’Angleterre. Enfin nous nous levons en masse pour foutre la chasse aux ours du Nord qui ravagent nos frontières, et pour faire danser la carmagnole à tous les brigands couronnés. Il y a longtemps que j'avais donné ce bon avis aux Sans-culottes, et si on l'avait suivi, Mayence, Condé, Valenciennes seraient encore à nous le traître Custine aurait été obligé de marcher quand il se serait vu entre deux feux mais ce n'est pas assez que de se lever, il faut frapper les derniers coups, et dans quinze jours assurer notre liberté, en faisant mettre les pouces à tous les despotes. Il est impossible, foutre, que cinq ou six millions d'hommes ne terrassent pas ces troupeaux qui jamais n'auraient pu mettre le pied sur le territoire de la république, si nous n'avions été trahis par les scélérats qui jusqu'à présent ont commandé nos armées. Oui, foutre, qu'un millions d'hommes serve de renfort à l'armée du Nord, et bientôt Mayence, Condé et Valenciennes nous seront rendues bientôt nos troupes victorieuses s'empareront encore une fois de la Belgique et de la Hollande, non pas pour rendre libres ces
balourds flamands qui préfèrent leurs reliquaires et leurs saints de bois à la liberté, mais pour leur faire restituer les provisions que l'infâme Dumouriez leur a abandonnées non pas pour réunir la Hollande à la France, mais pour faire payer les frais de guerre à ces accapareurs d’Amsterdam, et leur faire échanger tous nos assignats contre leurs tonnes d'or. Il faut en même temps, foutre, qu'un autre million de républicains se précipite du côté du Midi sur les crasseux Espagnols, qu'on les pourchasse jusqu'à Madrid, que l'on ramène le cousin Capet et ses inquisiteurs pieds et mains liés à Paris, pour les faire jouer à la main chaude mais surtout que les soldats de la liberté balayent, en passant, toutes les sacristies, tous les bancs d'oeuvre de l’Espagne et l’Italie, et qu'ils nous rapportent tout l'or de Notre-Dame de Lorette et de St-Jacques en Galicie, afin d'en fabriquer de la monnaie au coin de la république. Pendant cette expédition, que cent mille bougres bien déterminés fassent une descente en Angleterre! Aucune place forte, aucune armée ne peut les arrêter en entrant dans cette île, qu'il soit fait une proclamation au peuple anglais pour lui offrir la paix ou la mort, et qu'on lui parle à peu près dans ces termes : "Anglais, toi qui le premier as voulu être libre, mais qui n'a pas eu le courage de persévérer, toi, qui après avoir brisé tes chaînes, t'en es forgé de nouvelles, toi qui, après avoir chassé et raccourci tes rois, n'as pu te passer d'un roi, toi qui n'as jamais connu l'égalité, peuple fier et courageux, rentres dans tes droits le Français vient t'offrir ses secours contre tes tyrans que les deux nations les plus éclairées de l’Europe, les seules dignes de la liberté, cessent de se déchirer! Qu'elles soient à jamais unies pour faire triompher la raison et la justice! Quelle infamie pour l’Angleterre d'être gouvernée par un échappé des petites maisons! Anglais, envoyez à l'échafaud ce Pitt qui a mis le feu aux quatre coins de l’Europe, et qui vous ruine pour perdre la France il n'y réussira pas, foutre toutes ses finesses sont cousues de fil blanc nous les connaissons, nous savons qu'il veut détruire notre république, pour marier un des fils du roi Georges-Dandin à la fille de Louis le traître nous savons que les hommes d'état manigancent ce mariage, pour régner au nom de ce digne couple nous savons que plusieurs Montagnards à double face, qui jusqu'à présent ont cajolé les Sans-culottes, pour ensuite leur tourner casaque, quand ils seraient gorgés d'or et élevés au pinacle, doivent proposer cette alliance. S'il n'y avait quelque anguille sous roche, tarderait on autant à faire guillotiner Brissot et les autres jean-foutres qui, comme lui, ont allumé la guerre civile et qui avaient la patte si bien graissée par votre ministre, pour brouiller les cartes parmi nous? Peuple anglais, peuple français, ne soyez qu'un maintenant. Alliez vous, non pas sous les mêmes maîtres, mais par les liens de la fraternité. Les Français ont juré de vivre libres ou de mourir, ils le tiendront, foutre. Anglais, qu’avez-vous à gagner en combattant contre nous? Vous servez la cause des tyrans, s'il était possible qu'ils
eussent le dessus, vous en seriez les premières victimes, et on ne vous laissera pas même l'ombre de liberté que vous avez conservée. " Après cette déclaration appuyée par des canons et des bombes, je ne doute pas, foutre, que les Anglais ne revirent de bord et qu'ils ne se joignent à nous. Voilà de beaux projets pour un marchand de fourneaux mais comment les exécuter? Comment faire marcher à la fois plusieurs millions d'hommes? Comment les armer, les approvisionner? Comment, foutre? Rien n'est impossible à des hommes libres. Il faut, avant toutes choses, nous assurer de toutes les subsistances de la république, former des greniers publics dans tous les départements cuire force biscuit, pour nourrir les armées pendant leurs marches. Il faut mettre en réquisition tous les ouvriers qui travaillent aux métaux depuis le maréchal jusqu'à l'orfèvre, établir des forges dans toutes les places publiques et fabriquer, nuit et jour, des canons, des fusils, des sabres et des baïonnettes. Que feras tu, vieux radoteur, de tous les hommes suspects? Si nous les menons avec nous, quand ils seront en présence de l'ennemi, il nous brûleront le cul, pour se joindre à lui, et ils se serviront contre nous des armes que nous leur auront confiées. Je réponds: d'abord il faut purger la France de tous les traîtres, établir des tribunaux dans toutes les places publiques, pour y juger tous les scélérats qui ont conspiré contre leur patrie que le rasoir national nous délivre de tous les fripons, de tous les traîtres. Nous ferons ensuite marcher devant nous ces vils égoïstes qui, pendant la révolution, n'ont été ni chair ni poisson, nous leur ferons porter le bagage nous mettrons à la gueule du canon tous les accapareurs, les financiers, les avocats, les calotins et tous les bougres qui n'ont vécu jusqu'à présent que pour le malheur public: nous ménagerons les pères de famille, et autant que nous pourrons, nous les laisserons au quartier de réserve. Voilà, foutre, ce que je propose, et ce qui sauvera la France, si nous l'exécutons à la lettre. Mais, encore une fois, ne partons pas comme des ahuris, sans avoir tout préparé, sans avoir des armes, des vivres et des munitions gardons nous surtout de laisser derrière nous aucun ennemi de la liberté car, dans notre absence, nos propriétés seraient pillées, nos femmes égorgées, et la contre-révolution si bien combinée, que nous ne pourrions plus l'empêcher. Déjà tous les foutriquets du Palais-Royal rient sous cape de notre départ partez, Sans-culottes, disent ils, bon voyage dites, si vous voulez, qui m'aime me suit nous qui ne vous aimons pas, nous vous tournerons le dos nous allons nous cacher pendant le recrutement, et nous sortirons de nos caves quand vous serez sortis, pour brûler vos maisons quand il n'existera plus de faubourg St-Antoine, nous pourrons crier à notre aise: vive Louis-XVII, et faire à Paris ce que nos camarades, les muscadins, ont fait à Lyon. Culottes étroites, habits carrés, courtauds de boutique, petits clairiaux, vous comptez sans votre hôte nous avons les yeux sur vous, attendez vous, lâches bandits, à essuyer la première bordée vous ne nous échapperez pas, foutre.
La grande colère du Père Duchesne, N°275 De voir l'accaparement de savon que l'on fait pour blanchir Custine, et la grande lessive que l'on prépare pour le laver de la tête aux pieds. Sa grande dénonciation aux braves Sans-culottes, pour leur faire connaître les faux frères qui veulent rétablir la royauté, et tous les fripons qui pêchent en eau trouble. Tu dors, père Duchesne, foutre tu t'amuses à la moutarde, au lieu de te mettre en quatre pour sauver la république. Il est temps que tu fasses voir au peuple la profondeur de l'abîme où l'on veut le plonger il est temps qu'il sache la vérité jusqu'à présent il ne l'a vu qu'à travers un voile il faut qu'elle se montre toute nue. Tremblez, intrigants et fripons il vous avait confié le soin de le sauver, mais vous l'avez trompé, vous l'avez trahi vous vous êtes ligués avec ses ennemis pour le perdre encore une fois il va se sauver lui-même vous allez lui rendre compte du bien que vous n'avez pas voulu faire, et du mal que vous lui avez fait: vous ne jouirez pas de ses dépouilles et du fruit de vos brigandages. Intrépide marchand de fourneaux, casses maintenant les vitres, ne ménages personne, souviens toi que les Sans-culottes te regardent comme le successeur de Marat, remplis ta tâche elle est difficile, mais honorable pour toi le poison, les poignards ne doivent point t'effrayer celui qui n'est pas prêt de faire à chaque instant le sacrifice de sa vie à sa patrie, n'est pas républicain il n'est pas digne de vivre. Voilà, foutre, ce que Marat, Marat lui-même m'a dit dans un songe car son image me poursuit jour et nuit plus nous nous éloignons de lui, foutre, plus nous sentons sa perte il a laissé dans la convention un vide immense depuis sa mort les fripons sont devenus plus audacieux ils peuvent maintenant pêcher en eau trouble, ils ne craignent plus l'oeil perçant de l'ami du peuple. En le voyant, en l'entendant, des larmes coulèrent de mes yeux, et je lui tendis les bras pour l'embrasser. C'est toi, m'écriai-je, martyr de la liberté ombre sacrée, tu viens encore une fois visiter le vieux marchand de bougreries tu viens, après ta mort, l'éclairer et l'aider de tes conseils pourquoi ne t'ai-je pas vu plus souvent pendant ta vie le Père Duchesne était digne d'être ton ami, ton compère. Les mêmes jean-foutres qui t ont persécuté, m'ont aussi opprimé nos ennemis étaient les mêmes. Mais puisque je n'ai pu m'instruire à ton école, je te remercie de venir du séjour des morts, pour me servir de guide d'ailleurs, foutre, tu m'as laissé ton exemple, je le suivrai comme toi, je serai peut-être arrêté dans le bon chemin, mais je m'en écarterai jamais, foutre. Ne parlons pas de nous, Père Duchesne, ne songeons qu'à la chose publique, me dit-il puisque les vivants s'en occupent si peu, il faut que ceux qui sont morts parlent du fond de leurs tombeaux. Ah, si ma voix pouvait encore se faire entendre, si ma cendre pouvait se ranimer, quels
coups terribles je porterais à certains individus couverts du masque du patriotisme, et qui, dans leur intérieur, bénissent autant la main de Charlotte Corday, que tous les sujets du roi Buzot! J'irais à la convention le poignard à la main, comme je te le disais, la veille de ma mort placé au sommet de la sainte Montagne, je lancerais la foudre sur les faux patriotes Montagnards, il est des traîtres parmi vous. M'écrirai-je, il en est, n'en doutez pas. Vous avez écrasé les crapauds du Marais, des serpents se sont glissés à la montagne à côté des plantes salutaires croissent les plus mortels poisons. Je vous en avertis, vous qui aimez la liberté et l'égalité, qui ne voulez que la république, une et indivisible, on vous mène par le nez, sans que vous vous en doutiez de nouveaux hommes d'état ont remplacé ceux que j'ai pulvérisé. Vous qui ne cherchez que le bonheur du peuple, qui avez les mains aussi nettes que lorsque vous êtes entré à cette convention, défiez vous de ces bavards qui, pour trois ou quatre coups de gueule lâchés à tort et à travers en différents temps, se sont fait une réputation de patriotisme, grâce à leurs larges poumons, et qui sont restés muets quand la sans-culotterie a été dans le plus grand danger. Je vous le répète, défiez vous de tous ceux qui prétendent avoir plus d'esprit, de talent et de politique que vous. Quel bien ont-ils fait à la république, tous ces grands parleurs, tous ces raisonneurs à perte de vue? Ont-ils empêché Dumouriez de livrer la France à nos ennemis? Ont-ils chassé les Brissotins? Non quand le peuple a levé sa massue pour exterminer les hommes d'état, le 31 mai dernier, ils se sont montré les plus lâches, les plus méprisables des intrigants, en tournant casaque à la sans-culotterie, pour se ranger du côté des fédéralistes. Malgré eux le peuple s'est sauvé lui-même, malgré eux le peuple a eu une constitution. Tous ces endormeurs n'ont jamais songé qu'à leurs intérêts, et ils n'ont été habiles que pour eux. Braves Montagnards, ne souffrez pas au milieu de vous ceux qui sont arrivés à la convention en véritables Sans-culottes, et qui maintenant ont des voitures magnifiques, des terres et des châteaux qu'ils espèrent bientôt ériger en baronnies, marquisats et duchés, quand la contrerévolution qu'ils mitonnent, sera faite oui, la contre-révolution: nous y touchons, si vous ne prouvez pas que vous avez bec et ongle, et c'est pour les subsistances qu'elle arrivera, si vous n'y prenez garde. Le conducteur de l'aveugle roi Georges-Dandin, Pitt, a accaparé tous vos grains l'année dernière il a encore entre ses mains plus de cent millions pour occasionner la disette en France. Une nuée de gredins soudoyés par ce scélérat, tombent déjà sur la nouvelle moisson comme les sauterelles d’Egypte elle va être accaparée, et elle va disparaître dans un clin d'oeil. Il faut que le décret que vous avez rendu et qui déclare que toute la récolte appartient à la nation soit exécuté car ce n'est pas assez que de décréter, il faut faire ce qu'on annonce: mais comment faire quelque chose de bien, quand tout le monde veut être maître. Montagnards, tant que les comités
usurperont tous les pouvoirs, nous n'aurons jamais de gouvernement, ou nous en aurons un détestable. Pourquoi les rois ont-ils fait tant de mal sur la terre, c'est que rien ne s'opposait à leur volonté, pas plus qu'à celle de vos comités. La constitution acceptée par le peuple veut que chacun fasse son métier et rien de plus que ceux qui sont destinés à faire des lois, les fassent bonnes, et que ceux qui doivent les exécuter, les exécutent. Nous n'aurons jamais de liberté, notre constitution ne sera qu'une chimère, tant que les ministres ne seront que des galopins aux ordres des derniers balayeurs de la convention. Quand le bateleur Lacroix a demandé que l'on s'occupât de partager les Français comme des troupeaux de moutons, avant de songer à remplacer la convention, il avait de bonnes raisons: car cette opération durera trois ou quatre ans, et pendant ce temps ce nouveau Gargantua aura le temps de s'engraisser et de devenir aussi rond que St-Christophe mais, foutre, la république dévorée par tant d'insectes, deviendra étique et périra. Pour la sauver, il faut organiser promptement un gouvernement comme le veut la constitution. Alors les subsistances deviendront abondantes, car les ministres seront responsables et craindront pour leur tête. La liberté est foutue, quand tous les pouvoirs sont confiés à des hommes inviolables. Voilà, foutre, Père Duchesne, ce que je dirais à la convention, si je pouvais y parler encore. Je lui reprocherais surtout de laisser traîner en longueur le procès du traître Custine, et de souffrir que le tribunal qui le juge, se soit érigé en conseil de guerre. C'est pour jeter de la poudre aux yeux des Sans-culottes, qu'on l'interroge sur des délits militaires tandis qu'on ne devrait lui reprocher que son royalisme, son rolandisme, son brissotisme, son buzotisme, son fédéralisme mais Custine a vingt millions à son service, quel innocent, foutre! Que de savon accaparé pour le blanchir! On ne fit pas meilleure lessive pour Montmorin, Narbonne, Duport du Tertre, et Miranda, foutre. La grande colère du Père Duchesne, N°276 Au sujet du tripotage que l'on a employé pour affamer Paris et faire passer nos subsistances aux Muscadins de Lyon et aux accapareurs de Marseille. Sa grande ribotte à la Courtille avec toutes ses commères, pour leur faire découvrir le pot aux roses et leur faire connaître les jean-foutres qui sont cause que nous avons mangé notre pain blanc le premier. Je me promenais l'autre soir du côté de la Courtille, donnant le bras à ma Jacqueline. Malgré la guerre et la misère, les cabarets étaient pleins jusqu'à la porte. On chantait, on dansait, on s'en foutait des pilles éternelles. Vois donc, notre homme, me dit la vieille, comme on se divertit ça m'fait plaisir, et pourtant de la peine car quand j'songe que, tandis que l'on danse ici, nos frères, nos amis se battent sur les frontières, et versent leur sang pour nous, c-t idée là m'tourmente, et l'coeur me saigne.
Femme, taisez vous, vous ne voyez pas plus loin que votre nez rien ne prouve autant la force du peuple, que de le voir calme et joyeux au milieu des plus grands dangers. Les aristocrates seraient enchantés de nous voir tristes comme des bonnets de nuit rien ne leur fait tant de plaisir que nos plaintes, et rien ne leur fait autant manger le fromage que nous entendre rire, chanter et boire. D'ailleurs, foutre, pourquoi ces idées noires nos braves guerriers ne vont ils pas eux-mêmes au combat en chantant? Sont ils donc si malheureux de mourir pour la patrie? Ne vaut-il pas mieux être tué par un boulet de canon que par les médecins? Il faudra bien un jour que nous quittions la vie? Est-il rien de plus foutant que de s'éteindre comme une chandelle, et de languir pendant des années entières, le cul sur la plume, être environné de vieilles commères qui ne vous parlent que du diable, avoir sans cesse à son chevet un bougre à jaquette noire, qui vous fait des histoires de l'autre monde à faire trembler la volaille, qui vous annonce que votre âme sera rôtie comme un boudin, si vous ne lui racontez toutes vos fredaines, si vous ne vous laissez graisser par lui de la tête aux pieds, pour faire le grand voyage, et surtout si vous ne mettez pas dans sa patte crochue votre petit magot, pour vous dire des libéra et des oremus, tonnerre de dieu, une telle mort ne convient qu'à des poules mouillées mais des républicains, foutre, ne doivent avoir de lit de mort que le champ de bataille. Ce n'est rien, ma Jacqueline, que de mourir, quand on meurt pour la liberté mais, foutre, on expire la rage dans l'âme, quand on est trahi et livré à ses ennemis. Voilà mot pour mot notre entretien. Nous allions trottinant, en entendant dire autour de nous: voilà le Père Duchesne, foutre. C'est un brave bougre, disait l'un es tu en colère aujourd’hui es tu joyeux, disait l'autre? J'aperçois une jolie guinguette dont je ne me rappelle pas le nom. Sous des arbres touffus, de jeunes lurons aux larges épaules et des grosses filles bien portantes, bien joufflues dansaient la carmagnole en ronde au son du tambourin. Ca me ravigote de voir c-te jeunesse là, me dit la Jacqueline, ça nous rappelle notre jeune temps. Plaçons nous là, mon vieux. Nous nous asseyons à une petite table. Eh vite garçon, apportez nous chopine. Du bon, foutre. Enfin nous buvons à peine avions nous étouffé deux ou trois enfants de coeur que nous voyons arriver une coterie de notre voisinage, tous compères et commères, de braves gens à l'exception d'un vieux grimaud, grippe sol de son métier et tout cousu d'or et d'assignats. Pardi, c'est ben heureux d'rencontrer comme ça, Père Duchesne n'faisons qu'un écho. Plus on est de fous, plus on rit. Vous voilà donc, ministre manqué, me dit notre vieux pingre? Là sérieusement a t on voulu vous donner cette place, Père Duchesne? Je ne sais pas, foutre, si c'était une frime, mais au moins on m'a mis sur le tapis et si on avait eu la sottise de vous nommer, auriez vous fait celle d'accepter? Citoyen Pincemaille, à sotte demande, point de
réponse. Pardi, citoyen Duchesne, s'écrie la commère Martichon, la ravaudeuse du coin, comme çà serait farce de te voir avec ta vieille souguenille couverte de terre et de plâtre dans ce beau carrosse doré où le vieux Roland se carrait comme un prince. Au lieu de venir pomper avec nous de cette mauvaise piquette de Suresne, le plus chenu Bordeaux, le plus fin Muscat arroserait ton gosier desséché et vous, commère Jacqueline, comme vous vous dorloteriez dans le boudoir de la reine Coco! Vous nous donneriez, à notre tour, du nanan et des confitures, comme la viaille Roland à son petit Louvet. Auriez vous aussi bien arrangé le front du marchand de fourneaux que madame Coco le crâne pelé de son vieil intérieur? Nous auriez-vous regardé tous les deux par sus les épaules d'un air de protection? Ce que j'aurais fait, compères et commères? C'est mon secret mais, puisque vous me forcez à parler sur ce chapitre, je vais vous ouvrir mon coeur. Les ambitieux, les intrigants, les voleurs désirent grandes places, pour pêcher en eau trouble mais les bougres de ma trempe, ceux qui se foutent des richesses et des honneurs, regardent les plus grandes places comme un fardeau accablant. On ne pouvait me rendre un plus mauvais service, que de m'arracher de ma boutique, où je vis heureux, pour me foutre dans une passe où il est presque impossible de faire le bien, et où, sans le vouloir, on fait souvent beaucoup de mal je n'aurais pas été quinze jours ministre, sans être vilipendé de tous côtés un tas de coquins qui se disputent les places, comme des chiens affamés l'os qu'on leur jette, seraient tombés sur ma friperie, et dans peu, je n'aurais plus été bon, ni à bouillir, ni à rôtir. Qui trop embrasse, mal étreint. Je me souviens du brave Pache qui arriva, le fouet à la main, dans les bureaux de la guerre, et qui chassa tous les muscadins nommés par les comités de la convention et par les jean-foutres qu'il remplaçait. Tandis que ce père des Sans-culottes suait sang et eau, gardait le boire et le manger, pour approvisionner les armées, Dumouriez et les Brissotins qui ne voulaient que les armées fussent approvisionnés le criblaient d'injures tous les cuistres soudoyés par le roi Coco, tous les journalistes à tant la page lui reprochaient ses souliers crottés, ses mailles échappées, ses coudes percés. Eh bien, foutre, j'aurais été aussi tourmenté, si je m'étais avisé de continuer mes joies et mes colères, (comme je n'y aurais pas manqué), les gens du bon ton seraient venus me foutre sous le nez la civilité puérile et honnête pour m'empêcher de dire mes bougreries. Grand bien te fasse, maître Paré, qui tombes à cette place des nues. Lorsque Danton faisait la guerre aux aristocrates, vous étiez le feu et l'eau vous voilà amis comme cochons, aussi amis que ce Danton l'était de Dumouriez il vient de te donner un brevet de Cordeliers, où tu n'as jamais traîné ta savatte. Tout cela prouve que les loups du bois ne se mangent point. Monsieur Pincemaille, en m'entendant ainsi parler, me dit, en ricanant: vous ressemblez à ce renard, Père Duchesne, qui ne pouvant
attraper une grappe de raisin, disait qu'elle n'était pas mûre. La grappe que je tiens, foutu grippe sol, vaut mieux que celle qu'a attrapée le procureur Paré en s'accrochant sur les larges épaules de son confrère Danton. Je me fous des intrigants de tous les acabits. Ah çà, Père Duchesne, si tu avais été ministre, nous aurais tu procuré du pain, me dit la mère Javotte, en rompant les chiens oui, ma commère, si on m'avait donné carte blanche pour faire mettre à l'ombre tous les jean-foutres qui accaparent les subsistances, et si, pour me perdre, on ne m'avait pas joué des tours aussi perfides que ceux qu'on a fait à notre bon maire. Savezvous, foutre, pourquoi nous avons mangé à Paris notre pain blanc le premier, et pourquoi nous en avons si difficilement du bis? Voici le fin mot: Pache veut ménager la chèvre et le chou par trop de bonté moi, je vais vous découvrir le pot aux roses: quand Dumouriez fit sa belle équipée, l'ancien comité de salut public, croyant voir ce Mandrin aux portes de Paris, dit, en ma présence, à Pache d'approvisionner Paris à tel prix que ce soit, pour soutenir un siège, s'il en était besoin. Pache donna dans le godas, et acheta des farines pour près d'un an mais quand il fallut faire honneur aux marchés, le gentilhomme Barrère et les autres bougres du comité firent la sourde oreille et manquèrent de parole au maire qui fût forcé de manquer également à ses engagements. Les fournisseurs vendirent les bleds qu'ils nous destinaient aux marchands de galon de Lyon et aux accapareurs de Marseille. On a été forcé de vider les magasins de Paris, et ça ne se remplit pas dans un jour. Quoique ça soyez tranquilles, les farines arrivent de tous côtés, et ça ira, foutre. Ah qu'eux coups de chiens, quelles bougres de gabegies, dirent nos commères en revenant, elles ne firent que jurer avec moi contre ces jeanfoutres. La grande colère du Père Duchesne, N°277 Contre les jean-foutres qui ne sont dans les places que pour jouer au fin et tirer leur épingle du jeu. Ses bons avis aux braves Sans-culottes de ne choisir pour juger les traîtres et les conspirateurs que de pauvres bougres qui n'iront pas chercher midi à quatorze heures pour condamner Custine, et qui n'auront pas les pattes crochues pour empocher l'or et les assignats qu'on leur offrira, pour ne pas voir clair en plein midi. Quand je disais qu'on ne guillotinait pas un bougre qui avait une vingtaine de millions à son service, je ne me trompais pas. Quand Robespierre a dit que la tête du traître Custine tenait plus sur ses épaules que la sienne, il avait raison, foutre. Monnaie fait tout dans le régime actuel comme dans l'ancien la révolution n'a pas changé les hommes ceux qui étaient ambitieux le sont encore les libertins sont toujours libertins, les avares font et feront toujours leur dieu de leur coffre-fort.
Ce n'est qu'avec des lois sévères, et surtout par l'éducation, que l'on corrigera les vices, et que les bonnes moeurs s'établiront mais attendons peu de ceux qui ont sucé le lait du despotisme, et qui ont croupi dans l'esclavage. Les hommes sont comme les arbres celui qui a été planté par un bon cultivateur, qui a été greffé à temps, dont les rameaux ont été émondés, dont une main salutaire a éloigné toutes les plantes venimeuses qui auraient dévoré sa sève, croit à vue d'oeil et rapporte bientôt d'excellents fruits mais le triste sauvageon qui se trouve jeté au hasard sur une terre aride et qui est abandonné à lui-même est étouffé par les épines les chenilles le dépouillent de sa verdure, et il se dessèche sans rien produire. Non, foutre, non, jamais, on n'aura de bons généraux, de bons magistrats, jusqu'à ce qu'une bonne éducation ait réformé les hommes. Empressons nous donc de former nos enfants dans les principes républicains que leurs mères soient leurs nourrices, la nature l'ordonne que les premiers mots qu'elles leur feront balbutier, soient ceux de liberté et d'égalité que leurs vieilles grands-mères, au lieu de leur apprendre des contes de fées et de revenants, leur racontent dès le berceau, tous les crimes des rois. Ils apprendront de bonne heure à détester ces ogres véritables, qui ne vivent que de chair humaine. L'histoire de Capet leur fera plus horreur que celle de la barbe bleue. Il faut, foutre, qu'en entendant prononcer le nom de roi, qu'en voyant l'effigie d'un roi, l'enfant républicain recule de peur, comme s'il voyait un loup ou un tigre prêt à fondre sur lui. Aussitôt qu'il marchera, foutre, qu'il soit placé dans des écoles publiques, où on lui apprendre avec l’a-b-c la constitution ce sera là son premier catéchisme. Surtout que les prêtres n'approchent jamais de lui car ils corrompraient bientôt sa jeunesse, ils lui apprendraient à être fourbe, orgueilleux. La liberté des cultes étant permise, il choisira, quand il aura l'âge de raison, la religion qui lui conviendra le mieux s'il veut être chrétien, s'il croit que quelques mots de latin et un peu d'eau salée puissent laver son âme, et effacer un crime qu'il n'a pas commis, alors il se fera arroser la tête s'il veut être juif, il se fera raccourcir tout ce qu'il lui plaira, quoique la nature n'ait rien fait de trop s'il veut adopter la foi de certains peuples indiens, qui ne veulent manger ni chair ni poisson, qui croiraient étouffer s'ils avaient dévoré les entrailles d'un être vivant, il fera bien, foutre car je ne crois pas que les hommes aient le droit de tout détruire, de s'engraisser du sang des animaux qui ont autant coûté au créateur que l'homme qui prétend être le roi des animaux, et qu'il l'est en effet, puisqu'il les mange. Je ne serais pas fâché, foutre, que tous les habitants de l'univers fussent Koakers car ces braves gens ont le sang en horreur, ils se laisseraient plutôt égorger eux-mêmes que de porter la main sur leurs semblables ils sont chrétiens cependant, et c'est dans l'évangile qu'ils ont puisé ces principes d'humanité, tandis, foutre, que les prêtres catholiques, cet évangile à la main, ont fait égorger la moitié de la terre par l'autre moitié. Oui, cet évangile, sans les prêtres, serait le
meilleur livre que l'on puisse donner aux jeunes gens il formerait leur coeur à la vertu ils trouveraient le modèle de toute perfection dans le bon sans-culotte qui a fait ce livre divin. Je ne connais pas de meilleur Jacobin que ce brave Jésus. C'est le fondateur de toutes les sociétés populaires il ne les voulait pas trop nombreuses, car il sait que les grandes assemblées dégénèrent presque toujours en cohue, et que tôt ou tard il s'y glisse des Brissotins, des Rolandins, des Buzotins. Le club qu'il créa n'était composé que de douze membres tous pauvres Sans-culottes encore dans ce nombre se glissa t il un faux frère, appelé Judas, ce qui signifie, en langue hébraïque, un Petion. Avec ces onze Jacobins, Jésus enseigna l'obéissance aux lois, prêcha l'égalité, la liberté, la charité, la fraternité, fit une guerre éternelle aux prêtres, aux financiers, anéantit la religion des Juifs qui était un culte sanguinaire il apprit aux hommes à fouler aux pieds les richesses, à honorer la vieillesse, à pardonner l'offense. Toute la sans-culotterie se rangea bientôt autour de lui. Plus les rois, les empereurs persécutèrent ses disciples, plus le nombre en augmenta. Malheureusement, foutre, l'ivraie se mêle avec le bon bled. D'autres Judas succédèrent à celui qui le vendit, et après sa mort, ils le crucifièrent encore, en devenant papes, cardinaux, évêques, abbés, moines et chanoines. Cette foutue canaille, au nom de ce divin législateur qui n'aimait que la pauvreté, s'enrichit des dépouilles des sots, en imaginant un purgatoire, un enfer, en vendant au poids de l'or les indulgences. C'est ainsi, foutre, que les feuillants, comme les prêtres, ont voulu perdre la liberté en la déshonorant, et volant à toutes mains. En formant le coeur et l'esprit de nos enfants, habituons les au travail, qu'ils apprennent à supporter la fatigue, à endurer le froid et le chaud que leurs bras s'exercent au maniement des armes, pour défendre leur patrie et purger la terre de tous les rois et de tous les monstres qui ne veulent pas le bonheur de l'humanité. Quels hommes nous aurons dans vingt ans si nous adoptons ces principes! C'est alors, foutre, que la république s'établira sur des bases inébranlables. Si elle rencontre tant d'obstacles, c'est que les hommes ne sont pas assez mûrs. Chacun veut jouer au fin, et tirer son épingle du jeu. Etouffons l'intérêt particulier et nous ferons le bonheur de tous. Ce n'est pas ainsi que vous pensez, juges, si mal nommés révolutionnaires, et qui faites marcher la révolution à la manière des écrevisses vous qui jugez comme à Damfront une malheureuse cuisinière, et qui employez le vert et le sec pour sauver un scélérat qui a fait égorger plus d'un million d'hommes vous qui ne voulez pas voir que Custine est le second tome de Dumouriez et qui vous préparez à le savonner de la tête aux pieds et à le rendre blanc comme neige. Dites moi, foutus lâches, si un pauvre factionnaire avait quitté son poste à Mayence, à Condé, ou à Valenciennes, si l'ennemi avait profité de son absence pour s'emparer de
ces villes, balanceriez contre lui? Eh bien, foutre, ce Custine qui a abandonné ces places sans vivres, sans munitions, qui a laissé tous les braves bougres qu'il commandait les bras croisés, au lieu d'aller délivrer ces villes, qui n'en a confié le commandement qu'à des aristocrates qui étaient d'accord avec lui, n'est-il pas mille fois plus coupable que le misérable fusillier dont je vous parle? Et vous balancez à le condamner! Où est donc l'égalité? Qui ne voit pas que vos pattes crochues sont remplies de l'or et des assignats que ce brigand vous a donnés pour le sauver! Mais que peut on attendre des gens de justice? Vous vous souvenez des leçons de procureur que vous avez reçues. Si le tribunal révolutionnaire n'était composé que de pauvres bougres du faubourg Saint-Antoine, ils n'iraient pas chercher midi à quatorze heures, pour sauver l'ennemi de la république, ils mépriseraient son or, et depuis longtemps le général Moustache aurait joué à la main chaude. Législateurs, empressez vous donc de donner de l'instruction aux Sansculottes, pour les délivrer de la tyrannie des hommes de robe et des beaux esprits, foutre. La grande joie du Père Duchesne, N°278 Au sujet du raccourcissement du général Moustache, qui, après avoir vécu comme un traître et un scélérat, est mort comme un jeanfoutre. Ses bons avis à la convention, pour qu'elle établisse une douzaine de tribunaux pour faire mettre promptement la tête à la fenêtre à la louve autrichienne, à l'infâme Brissot, et aux autres coquins qui ont trahi le peuple et allumé la guerre civile. Enfin le traître Custine a joué à la main chaude. Quelle dent à arracher, foutre! Comme la tête des hommes riches et puissants tient sur leurs épaules! Que de simagrées pour condamner le plus traître, le plus scélérat des hommes! Quoi donc, foutre, tous les hommes sont égaux devant la loi, et ceux qui sont chargés de la faire exécuter, peuvent biaiser pendant deux mois pour condamner un grand conspirateur, tandis qu'ils font raccourcir à la minute un pauvre Sans-culotte! Où est donc l'égalité, foutre? Je l'ai déjà dit plus d'une fois: la révolution a changé les choses, et les hommes sont restés les mêmes, et malheureusement les juges ne sont que des hommes. Quand quelque gros Matador est cité devant eux, ils sont bientôt assaillis de tous ses amis, de ses parents. Un père, un frère va trouver chaque juge au saut du lit, et le poursuit dans son cabinet, à l'audience, à la table, partout où il va "citoyen président, citoyen magistrat, citoyen juré, dit-il, mon fils, mon frère est innocent, sauvez le" en même temps le suppliant tire de sa poche des rouleaux d'or, des portefeuilles remplis d'assignats. Si le juge est un bougre à poil, et assez honnête homme pour mépriser les richesses, s'il envoie faire foutre le coquin qui essaye de le corrompre, on s'adresse ensuite à sa femme, ou à
sa maîtresse les femmes ont le coeur sensible, surtout quand on leur fait voir quelques bijoux. On ne peut pas être coupable quand on offre un écrin rempli de diamants, quand on laisse sur la toilette des montres, des boîtes d'or, n'est-il pas vrai, chaste époux de l'incorruptible des Magdeleine? Ah, quel dommage, foutre, que votre loyal mari ait été si tôt forcé de déguerpir du tribunal révolutionnaire, et de jouer des jambes du côté du royaume de Buzot, avec son frère, Valazé! Quelle bonne vache à lait que Custine! Si le juge n'a point de femme dont on puisse faire tourner la tête, on ne se rebute pas encore, foutre. L'accusé a une jolie fille, une bru charmante, elle attend le soir notre magistrat célibataire quand il rentre, elle se présente devant lui, les cheveux épars, un mouchoir à la main elle se jette à ses pieds, elle pleure, elle se lamente, elle se désespère, et en se frappant la poitrine, dérange son châle et laisse entrevoir une gorge d'albâtre. "Serez vous insensible à mes larmes, citoyen? Etes-vous fils, êtes-vous homme? Si vous l'êtes vous vous laisserez toucher?" si le juge voit tout cela d'un oeil sec on se jette entre ses bras, on le serre, on l'embrasse, on s'évanouit, il faudrait avoir un coeur de roc pour ne pas se laisser attendrir. A la fin notre bougre mollit, il console l'affligée, il essuie ses larmes on le presse, on lui promet tout ce qu'il exigera pourvu qu'il consente à sauver le cher papa voilà, foutre, comment cela s'enfile. La justice a les yeux bandés mais, foutre, il n'en est pas de même des juges, ils ont malheureusement trop de bons yeux. Pour voir l'or qu'on leur offre et les charmes qu'on leur découvre. Voilà de quelle manière se jugent presque tous les grands procès. Il est impossible d'être raccourci, quand on a des millions à son service et de jolies filles pour demander grâce. Toujours les hommes ont un endroit sensible, et c'est de ce côté qu'on les attaque. Le premier talent des riches est celui de corrompre, et il faut être ferré à glace pour ne pas tomber dans les pièges qu'ils vous tendent. Vous autres, misérables Sans-culottes, qui n'avez pour lot que la misère, si vous vous oubliez un moment, si la faim vous fait commettre quelque crime, il n'y a pas de pardon pour vous. C'est trop peu que la guillotine pour punir vos forfaits. Vos femmes, vos enfants, ont beau gémir et se désespérer, vainement demandent ils grâce pour celui qui les fait subsister, on est sourd à leur voix. C'est se tuer la tête contre un mur que de solliciter, quand on est en guenilles. Les pauvres ont toujours tort personne ne les plaint on parle pendant des années, on s'attendrit sans cesse au récit du supplice des grands coupables, et on ne s'aperçoit pas d'un pauvre bougre qui met la tête à la fenêtre. Cependant, foutre, nous avons une constitution faite pour protéger les malheureux. Il faut enfin que nous jouissions de ses bienfaits il faut même justice à tous les citoyens il faut qu'il soit impossible à qui que ce soit d'échapper à la vengeance des lois que le général comme le soldat, le
magistrat comme le plus pauvre Sans-culotte, que les ministres, que les législateurs même soient également punis, quand ils seront coupables, mais pour arriver à ce but, il faut envoyer à la beurrière tout le foutu grimoire que l'on appelle code pénal qui a été fabriqué par des avocats il faut que tous les juges pendent leurs jaquettes noires au croc, que l'on délivre une bonne fois le peuple de toutes les vermines de la chicane que tous les procès soient jugés par des arbitres choisis par les deux partis, et que le jugement que porteront ces arbitres soit sans appel. J'ai entendu les juges et les jurés du tribunal révolutionnaire jeter le chat aux jambes de la convention, au sujet du procès de Custine ils se plaignaient d'être enchaînés par la loi. Eh bien, foutre, qu'une bonne loi les envoie tous planter leurs choux qu'il soit établi à Paris dix ou douze tribunaux composés de véritables Sans-culottes, pour juger tous les conspirateurs que les juges soient renouvelés à chaque procès, on n'aura pas le temps de leur graisser la patte. Si on ne prend pas ce parti, les plus grands coupables échapperont, et on ne punira que les petits. Faut-il donc tant de beurre pour faire un quarteron? Est-il si difficile, foutre, de décider si un tel a commis tel crime, et d'ouvrir la loi pour examiner quelle est la peine qu'il a méritée? On va tout à l'heure, dit-on, commencer le procès de l'archi-tigresse d’Autriche eh bien, foutre, si on la laisse juger de la même manière que Custine, on n'en finira pas. Tous les avocats vont suer sang et eau, pour prouver que c'est la meilleure et la plus honnête des femmes, et qu'elle n'a pas seulement tué une mouche en sa vie, tandis, foutre, qu'elle a fait égorger plus d'un million d'hommes. Pendant qu'on va la juger, on verra encore le pain disparaître, afin de forcer le peuple à redemander un roi. Si elle n'est pas jugée et raccourcie dans vingt quatre heures, je dirai, foutre, que nous ne sommes pas libres, que nous ne sommes pas dignes de l'être. Que l'infâme Brissot et les autres députés qui ont trahi le peuple, allumé la guerre civile à Marseille, à Lyon, dans le Calvados, qui avaient juré la perte de la république, soient aussi promptement expédiés! On va dire que je suis un buveur de sang, qu'il n'y a qu'un anthropophage, qu'un cannibale qui puisse faire de pareilles propositions moi, je dis, foutre, qu'il n'y a pas de plus grand ennemi de l'humanité que celui qui veut épargner les traîtres, et qui cherche à ouvrir la porte de derrière, pour les sauver. Ah, foutre, si les aristocrates avaient un moment le dessus, notre procès ne serait pas long, il n'y aurait pas assez de cordes pour nous pendre, pas assez de roues pour nous y attacher, pas assez de bois pour nous brûler à petit feu, pas assez de chevaux pour nous écarteler. Puisse le supplice de Custine effrayer les jean-foutres qui sont à la tête de nos armées! Que n'en ont-ils tous été témoins! Que n'ont ils vu l'infamie et l'opprobre de ses derniers moments! Que n'ont ils entendu les cris de joie et les malédictions du peuple, tandis qu'il traversait les rues de Paris! Le bougre, pour inspirer de la pitié, a fait comme Capet, et ne pouvant, après sa mort, être au nombre des citoyens, il a désiré avoir une
place dans la légende, et à côté de la vie de St-Louis-XVI, on lira celle de St-Custine mais les Sans-culottes ne sont pas dupes de ses singeries en le voyant lever les yeux au ciel, comme un hypocrite, et manger le petit bon dieu que son confesseur lui présentait, on lui a crié de toutes parts "après avoir vécu comme un scélérat, tu devais mourir comme un jeanfoutre ce n'est pas d'avoir péché que tu te repends, c'est de n'avoir pas comblé tous tes crimes!". Quand son chef pelé a été séparé de son dos rond, l'air a retenti des cris de vive la république, vive la liberté, vive l'égalité, à bas les traîtres. A bas les tyrans, et lorsque le valet de Samson a présenté cette tête hideuse aux quatre coins de l'échafaud, la tenant par ses moustaches, tous les citoyens ont applaudi. Voilà le sort qui vous attend, lâches conspirateurs le jour de votre supplice doit être un jour de fête, tremblez autant vous en pend à l'oreille, foutre. La grande colère du Père Duchesne, N°279 De voir que les gros continuent de manger les petits, et que les riches se déclarent tous les ennemis de la république. Sa grande joie de voir que les muscadins de Lyon vont être mis à la raison. Ses bons avis à la convention pour qu'elle ôte l'autorité aux riches, qu'elle protège les pauvres, et qu'elle ne souffre pas plus longtemps que tous les oeufs soient dans un même panier, comme dans l'ancien régime. Ils vont enfin être mis à raison, ces renégats de la Sans-culotterie, ces muscadins audacieux, qui se foutaient de la république et qui voulaient rétablir la royauté. Le sang des braves républicains, qu'ils ont versé à flots, va rejaillir sur eux, oui, vous allez être vengés, martyrs de la liberté. Déjà les bombes et les boulets pleuvent comme grêle sur les magasins des accapareurs et des marchands de Lyon déjà la flamme réduit en cendre les maisons des scélérats qui voulaient perdre leur patrie. Braves Sans-culottes, ne regrettez pas les richesses que les flammes dévorent c'est le fruit de vos sueurs et de votre sang. Ce n'était pas pour vous que vous aviez tissé toutes ces riches étoffes. Toutes ces soieries chargées d'or n'étaient pas à votre usage elles étaient destinées à vos tyrans vous ne retiriez du fruit de votre industrie qu'un morceau de pain arrosé de vos larmes tandis, foutre, que tous les riches fabricants, avec le produit de votre travail, bâtissaient des palais et tenaient des tables de fermiers généraux, vos femmes et vos enfants languissaient dans des galetas. Qu'elle périsse, cette ville rebelle vous n'y perdrez rien, citoyens laborieux, qui n'avez que vos mains pour subsister. Vos bras vous resteront. Fuyez cette terre souillée de crimes, où on voulait vous forger de nouveaux fers c'était vous qui l'aviez enrichie partout où vous irez, vous verrez renaître l'abondance. Le travail enrichit tous les lieux qu'il habite. Toutes les villes qui sont restées fidèles à la république vous recevront comme des frères. Vous trouverez partout des secours la
constitution vous en assure. Vous formerez de nouveaux ateliers, vous travaillerez à votre compte. Tout le produit de vos arts, de vos métiers, vous appartiendra. Il est triste, j'en conviens, d'en venir à des extrémités, il est cruel de voir des frères se battre contre des frères, mais il est encore plus foutant que des enfants déchirent le sein de leur mère. Assez longtemps la convention a usé de douceur envers ces rebelles. Au lieu de revenir à eux, et de se repentir de leurs forfaits, ils en ont commis de nouveaux les émigrés, les prêtres réfractaires, les étrangers même ont trouvé asile parmi ces révoltés les Sans-culottes ont été opprimés par cette foutue canaille les patriotes ont été jetés dans des cachots, et chargés de fers un grand nombre a été passé au fil de l'épée, les autres ont été jugés par un tribunal sanguinaire les amis de la liberté ont péri sur l'échafaud. Toutes ces atrocités n'étaient encore qu'un jeu en comparaison de celles que ces brigands méditaient. Pour mieux détruire la constitution, ils ont fait frime de l'accepter mais si l'armée de la république se fût éloignée de ce cloaque impur, bientôt les muscadins se seraient joints aux marchands de sucre de Marseille et aux rebelles du Jura, bientôt tout le Midi aurait marché contre le Nord, et tandis que la moitié des Français aurait été aux prises avec l'autre moitié, les Autrichiens, les Prussiens, les Espagnols, les Anglais se seraient emparés de toutes nos villes de guerre, et se seraient partagé les lambeaux de la république. Tels étaient les affreux projets de ces jean-foutres peu leur importe sous quels maîtres ils vivent ils en veulent un pour écraser avec lui les malheureux. Dans tous les temps, dans tous les pays les gens de commerce n'eurent ni coeur, ni âme leur coffre-fort est leur dieu ils ne savent que tromper et voler ils tondraient sur un oeuf, et ils attraperaient jusqu'à leurs pères ils trafiquent de tout, même de chair humaine ce sont leurs vaisseaux qui vont sur les côtes d’Afrique enlever les nègres qu'ils traitent ensuite comme un vil bétail. Devait on jamais s'attendre que des êtres aussi vils deviendraient citoyens? L'homme libre, avant tout, doit être humain, désintéressé il doit tout sacrifier à sa patrie, la patrie, foutre! Les négociants n'en ont point. Tant qu'ils ont cru que la révolution leur serait utile, ils l'ont soutenue, ils ont prêté la main aux Sans-culottes pour détruire la noblesse et les parlements mais c'était pour se mettre à la place des aristocrates. Aussi depuis qu'il n'existe plus de citoyens actifs, depuis que le plus malheureux Sans-culotte jouit des mêmes droits que le plus riche maltôtier, tous ces jean-foutres nous ont tourné casaque, et ils emploient le vert et le sec pour détruire la république ils ont accaparé toutes les denrées, toutes les subsistances, pour nous les revendre au poids de l'or, ou pour nous amener la disette mais comme ils voient les Sans-culottes disposés à mourir, plutôt que de redevenir esclaves, ces mangeurs de chair humaine ont armé leurs valets et leurs courtauds de boutique contre la Sans-
culotterie ils ont fait pis, ils ont nourri, habillé, approvisionné les brigands de la Vendée ils ouvrent en ce moment les ports de Toulon et de Brest aux Anglais, et ils sont en marché avec Pitt pour lui livrer les Colonies. Tonnerre de dieu, puisque nous nous levons en masse, écrasons d'abord tous ces monstres ce sont nos plus cruels ennemis. Les Prussiens et les Autrichiens qui ravagent nos frontières, qui égorgent les enfants au berceau, qui mutilent et mettent en chair à pâté les cultivateurs, qui ouvrent le sein des mères de famille, pour en arracher le fruit qu'elles portent, ces ours, ces tigres sont moins féroces que tous ces trafiqueurs qui nous minent et nous font périr à petit feu. Si nous ne coupons pas ces membres gangrenés, ils feront périr la république. Qu'on ne dise pas, foutre, en parlant de la sorte que je suis un buveur de sang qu'on ne croie pas que je méprise le commerce, personne n'honore plus que moi l'homme honnête qui vit de son industrie. Rien n'est plus respectable qu'un bon négociant, qu'un marchand patriote. Souvent une seule fabrique enrichit toute une ville et nourrit des milliers de citoyens. J'ai connu plusieurs négociants, qui étaient les pères de leurs ouvriers. Ils se contentaient d'un gain modique et ils n'étaient que les économes de la grande famille qu'ils faisaient travailler. Leur parole était sacrée. Bénis de tout ce qui les entourait ils ne désiraient pas amasser d'immenses richesses, mais ils voulaient laisser à leurs enfants leur exemple, leur probité, leur talent pour héritage. Malheureusement les hommes de cette trempe sont rares, mais la république en produira, j'espère eh, foutre, il faudra que la mémoire de celui qui aura amassé une trop grande fortune, soit déshonorée. Commençons d'abord à compter pour rien la richesse, à honorer l'indigence, et bientôt on deviendra moins avare. Que tous les biens nationaux soient vendus en petites portions que l'on cesse de mettre tous ses oeufs dans un panier qu'on divise les grandes terres, en louant à une douzaine de fermiers, celles qui ne sont cultivées que par un seul. Bientôt l'accaparement cessera, tout le monde vivra. Que la nation donne des secours à ceux qui feront des découvertes, qui travailleront le mieux que tous les paresseux soient envoyés à Cayenne, que les lois soient respectées, que tous les citoyens se regardent comme des frères, que le travail soit honoré, que la vieillesse soit respectée et surtout secourue: voilà la constitution, foutre. Nous aussi, nous allons dire et répéter comme les feuillants, la constitution, toute la constitution, rien que la constitution, avec cette différence que nous pensons ce que nous disons et que nous agirons comme nous pensons. Au contraire ces viédases avec leur bougre de rapsaudie de constitution royale, dans leur intérieur ne voyaient dans cette constitution, que la royauté, toute la royauté, rien que la royauté pour nous, (et nous l'avouons franchement), nous ne voulons voir dans la nôtre que le peuple, tout le peuple, rien que le peuple, foutre.
La grande joie du Père Duchesne, N°280 En apprenant que les marchands de sucre et les accapareurs de Marseille ont été forcés de mettre les pouces, et d'ouvrir les portes de cette ville aux troupes de la république qui y sont entrées en triomphe. Sa grande motion pour que le fonctionnaire Samson joue bientôt à la boule avec la tête de la louve autrichienne, et celle de Brissot, de Vergniaud, du calotin Fauchet, et des autres scélérats qui voulaient détruire la Sansculotterie. Ca va, foutre, et ça ira encore mieux avec le temps. Tous nos ennemis sont à quia. Encore un bon coup de collier, et la république est sauvée. Tous ces brigands couronnés qui se partageaient d'avance les lambeaux de la France, vont être tout à l'heure forcés de mettre les pouces. Dès le printemps, ils devaient être aux portes de Paris, et ils restent toujours dans la même position. Ils n'ont pu nous prendre jusqu'à présent que trois places fortes, et encore n'en sont ils venu à bout que par la trahison de nos généraux. Si le capucin Custine avait joué six mois plutôt à la main chaude, si on avait suivi mes bons avis en chassant, au commencement de la campagne, tous les nobles des armées, ainsi que presque tous les officiers de la troupe de ligne, qui, pour la plupart sont de fieffés aristocrates, depuis longtemps nos frontières seraient balayées et on nous demanderait maintenant la paix à genoux. Malgré tous les jeanfoutres qui, jusqu'à présent, ont commandé nos armées, elles ont toujours fait danser la carmagnole aux Prussiens et aux Autrichiens. Cela prouve la force d'un peuple libre. Des soldats républicains n'ont pas besoin de chefs pour vaincre. Tous les scélérats qui dans l'intérieur nous mettaient à chien et à chat les uns contre les autres, les faux patriotes, les royalistes, les feuillants, les fédéralistes, n'ont fait non plus que les ennemis du dehors, que de l'eau toute claire. Barbaroux ne sera pas plus empereur de Marseille, que Buzot roi du Calvados. Le vieux tondu de Roland ne régnera pas d'avantage à Lyon qu'à Paris. Les bombes, les boulets rouges ont réduit en cendre les magasins des marchands de galon et des accapareurs de cette ville rebelle. Il n'en échappera pas, maître Coco, aussi aisément que de la section de Beaurepaire il faudra qu'il soit livré vif ou mort aux commissaires de la convention, et il mettra aussi la tête à la fenêtre, le roi Coco. Les Mandrins de la Vendée sont presque détruits. Le général Rossignol allait leur donner le coup de grâce, mais les aristocrates, qui ont des amis partout, ont trouvé le moyen de lui barrer le chemin, lorsque ce brave bougre, la hache et la torche à la main, allait les poursuivre dans leurs derniers retranchements. Certain bailli de village, jadis intendant du Juigné, frère du ci-devant archevêque de Paris, Goupilleau, député de la Vendée à la convention, et commissaire en ce département, voyant cet intrépide Sans-culotte décidé à tout brûler, lui a dit: "halte là, vous ne
savez donc pas que moi aussi j'ai un petit château dans ce pays, des bois de haute futaie, des taillis du train dont vous y allez, vous allez me mettre à la besace périsse plutôt la république, que de voir ma propriété détruite! Songez combien il m'a fallu de temps, de travaux, de tours de passepasse pour l'acquérir! Que de pauvres plaideurs j'ai grugé, que de pots de vin il m'a fallu pour acquérir ce petit domaine que vous voulez dévaster! De par moi, de par mon collègue, Bourdon Leroux, mettez bas les armes nous vous destituons, pour mettre à votre place le gentilhomme Aubert du Baillet, qui arrive tout frais et remoulu de Valenciennes. C'est un homme comme il faut, que monsieur Aubert du Baillet. Ce n'est pas un brûleur de châteaux, ce n'est pas un anarchiste, un désorganisateur on sait de quelle manière il s'est conduit à l'assemblée législative on se rappelle de quelle manière il ménageait la chèvre et le chou. Dumas, Vaublanc et Pastoret n'étaient pas plus amis du roi, que monsieur Aubert du Baillet c'est le général qu'il nous faut ici nous n'avons confiance qu'en lui. Allez, citoyen Rossignol, pliez bagage, et partez en poste pour rejoindre vos Sansculottes de Paris. Nous aimons mieux dans nos forêts le chant du coucou, que celui du rossignol". Cependant tous nos braves soldats n'ont de confiance que dans leur général Sans-culotte tous répétaient que ce Rossignol leur ouvrirait toutes les portes, et leur tracerait le chemin de la victoire. Il est venu à Paris, il a confondu tous les jean-foutres qui avaient osé le calomnier, et la convention, satisfaite de sa conduite, lui a rendu le commandement. Malgré le pingre Goupilleau et le rouge Bourdon, il va raser tous les forts, tous les châteaux des brigands, et dans quinze jours, il n'y aura pas plus de Vendée que de dessus ma main. Ainsi, foutre, de tous côtés les affaires prennent bonne tournure. Les armes se fabriquent à force. Tous les jeunes républicains vont se lever en masse, et se porter aux frontières, pour en chasser les ours et les tigres du Nord. Les intrigants, les aristocrates commencent à avoir leur bec jaune. Sous peu de jours Samson jouera à la boule avec la tête de la femme Capet, avec celle de Brissot, de Vergniaud, de Gensonné, du calotin Fauchet, et des autres scélérats qui ont voulu perdre la république. La paix se rétablit dans tous les départements. Partout on bénit la constitution, et la France ne sera bientôt qu'une famille de frères, si on veut faire main-basse sur tous les traîtres. La lettre suivante prouvera quel esprit anime maintenant tous les départements elle est de mon petit neveu c'est un petit bougre qui n'est pas un niais de Sologne, comme il veut bien le dire il était député de son assemblée primaire pour la fête de la constitution, et il n'est pas venu me voir et pomper avec moi c'est un jean-foutre, et il me le payera. Mon cher oncle, j'prends la plume d'ma main droite, pour vous dire comme ça que je suis tout frais arrivé d’Sologne à Paris. Mon père n'voulait pas que j'men fusse, par c'qui m'disait que je serais mal reçu zà Paris mais mon assemblée primaire m'disait que mon père était z'un craintif, et dam' moi, qui n'suis pas peureux, j'suis v-nu et
me v-là. Oh, bigre, qu'eu différence! au lieu qu'les Parisiens m'ayent battu comm'plâtre, ils m'embrassent et par dessus et par dessous ils m'donnent à dîner, à bouche que veux tu et disent que je suis un bon patriote j'leux réponds et vous itou, eh dam' oui, s'font ils, et puis ils m'font boire à la santé d'la république. C-te gross dame que j'ai vu zà la Bastille, qui presse ses deux gros tétons pour nous donner zà boire de bien bonne eau fraiche et claire ensuite j'ai zeté à la procession qu'était b-en belle et b-en longue, j'ai rencontré un qu'ez un qui m'a prêté z'un livre que vous avez écrit et c'est çà qui m'a fait prendre la valicence de vous donner de mes nouvelles. Fichtre, me fis je, j'ai z'un oncle qu'a b-en de l'esprit, y n'me rsemble pas da mais je l'fréquente et si je l'hante, il m'en apprendra _ çà dit, çà fait_parmettez moi, mon cher oncle, de vous demander conseil sur c'qui vient d'arriver à mon grand frère ainé. Il était dans un vaisseau qui revenait des Indes, n'v-là t il pas qu'la tempête agite le bâtiment n'v-là t y pas que l'vent déchire les voiles, casse les cordages, brise les mâts et qu'un grand trou s'fait au ventre du vaisseau n'v-là t y pas qu'l'eau entre à grands flots dedans et le vaisseau s'emplissait, s'emplissait. L'capitaine qui n'voulait pas que l'bâtiment coulât zà fond, travaillait, travaillait comme cinq cents diables, il faisait travailler tout l'équipage mais mon grand frère qui est z'un lâche, ne voulait pas travailler. Crac, on assemble l'conseil, et il est décidé qu'il faut l'jeter dans la mer: aussitôt dit, aussitôt fait v-là qu'on l'prend par les bras et par les jambes et plouf le v-là dans l'iau à peine y est-il tout d'bon, que mon bigre se débat, se démène tant et plus:à la parfin, il gagne l'bord à l'aide d'une planche et le v-là sauvé. L'navire se sauve itou et au bout de quelques jours, mon frère vient réclamer ses bagages qui étaient dans le bâtiment, il voulait aussi qu'on lui donnât sa part dans le bénéfice de la cargaison, il a plaidé, il a perdu son procès et n'a eu rien du tout. Pour lui prouver que la justice avait raison à cet égard, il y eut un vieux juge qui lui dit comme çà, ce vaisseau ressemble à la république française: tous ceux qui feront les lâches et qui refuseront de partir, vont être déclarés incapables de posséder une seule propriété dans la république ils ne pourront pas héritier des biens de leurs parents à quelque degré que ce soit et si quelqu'un les favorise dans leur lâcheté, il sera puni tout de même que les lâches. Mon grand frère trouve que c'est bien dur, et moi je crois que l'on a raison. Qu'en dites vous, mon oncle, qui avez plus d'esprit que votre neveu? Mathurin Duchesne, (le cadet), envoyé de Sologne à Paris, rue du Change. La grande colère du Père Duchesne, N°281 De voir que l'on souffre tous les bandits du Palais-Royal, tous les vendeurs d'argent, tous les filous qui dévalisent tous les passants. Ses bons avis au général des Sans-culottes, de faire main-basse sur toute cette canaille, et d'en purger une bonne fois Paris. Sa grande douleur en apprenant que les soldats de la république ont abandonné la victoire
auprès de Lille, pour se livrer au pillage, et s'en foutre des pilles, tandis que les ennemis prenaient leurs canons. Je traversais l'autre jour le grand bordel appelé Palais-Royal, ce qui ne m'arrive pas souvent, foutre car autant que je le peux, je fuis les fripons et les escrocs. J'entrai dans un café pour voir ce qui s'y passait, et connaître un peu l'air du bureau je vois des foutriquets aux bottes bien cirées, aux habits carrés, d'un autre côté de vieilles têtes à perruque, surtout force garçons mâchotant leurs cure-dents, sans avoir seulement étrenné d'une bavaroise pendant toute la journée tous jabotaient autour des tables sur les affaires publiques, et faisaient un charivari de bougre chacun racontait sa nouvelle: l'un assurait que Toulon était pris l'autre racontait les exploits des muscadins de Lyon, et soutenait que jamais ce nid de banqueroutiers et d'accapareurs ne se rendrait. Chacun lâchait son paquet contre la république. J'étais d'une colère de bougre, et je me tenais à deux mains pour ne point gifler à droite et à gauche toutes ces faces de papier mâché j'appelle le garçon, pour qu'il m'apporte une taupette, point de garçon j'appelle encore, on ne me répond pas rendoublé nom d'un tonnerre, m'écriai-je, qu'elle est donc cette bougre de baraque, où l'on fait si peu attention aux républicains. Je menace de casser les tables et les glaces, et de foutre tout sens dessus dessous enfin un gros homme court, ayant des besicles sur son bougre de nez, accourt tout essoufflé avec un ventre aussi rond que Gargantua Lacroix. Qui fait donc tout ce tapage dans ma boutique, dit notre pataud? Citoyen c'est moi qui demande _ citoyen vous-même, s'écrie mon jean-foutre, que voulez vous? _ je veux une taupette _ il n'y a pas de taupette ici _ eh bien, foutre apporte moi, si tu veux, pinte ou chopine? _ je ne vends pas de bière _ qui te demande de la bière? C'est de l'eau de vie que je veux foutre _ vous n'en aurez qu'un petit verre, et vous le payerez douze sols, et d'avance encore. Me prends-tu pour le bourreau, bougre de marchand de tisane. Je vous allonge en même temps un moule de gant à ce viédase, et je le fais rouler sous les tables. Me voilà aussitôt entouré de tous les galopins de la fabrique d'eau chaude l'un veut me jeter un tabouret, l'autre me menace du poing, celui-ci lève le manche à balai, celui là appelle la garde je me débats et je frappe à droite et à gauche après avoir fait mesurer la semelle de mes souliers à cette foutue canaille, chacun vanne et gagne la porte. Les muscadins vont recruter dans les allées tous escrocs de leur connaissance, pour venir m'assaillir à la fois bientôt la garde arrive. L'officier, bien poudré, bien atiffé, s'écrie en entrant.. Quel est cet ivrogne qui vient ici faire du tapage, où est-il ? Qu'on l'arrête, qu'on le garrotte, qu'on l'entraîne au corps de garde. Je reconnais les pompons de la section de la Butte des Moulins. Arrêtez, foutre, leur dis je, bande de rafiats, vous ne mettrez pas la main sur le Père Duchesne. Le Père Duchesne, s'écrie l'homme au plat à barbe, oh, nous t'allons encore une fois faire siffler la linotte. C'est ce vieux coquin de marchand de fourneaux,
disaient toutes les coquines à travers les vitres, en prison, en prison. Suis je donc ici dans la Vendée pour être traité de la sorte? La foule augmente. Mon nom retentit de toutes parts, les Sansculottes accourent je raconte mon aventure. Le bougre d'épauletier qui m'avait donné tort, commence à faire le capon en me voyant soutenu. Tous les foutriquets qui faisaient si haut claquer leur fouet se retirent tous penauds, les baïonnettes disparaissent. La maîtresse du café quitte son comptoir et vient me faire des excuses. Apprenez à vivre une autre fois, lui dis-je. Vous êtes insolents avec les pauvres, tandis que vous n'êtes que de plats valets au vis-à-vis de tous les greluchons qui vous content des fleurettes. Nos assignats valent autant que ceux de tous les bandits que vous appelez monsieur, gros comme le bras, et auxquels vous faites les yeux doux, tandis que vous êtes froide comme une carafe d'orgeat avec les Sans-culottes, parce qu'ils n'ont pas de beaux habits et des culottes étroites. Une douzaine de braves commères restent avec moi, on ne nous parle qu'en tremblant et on nous sert tout ce que nous demandons à la parole. Après avoir vidé plusieurs flacons de parfait amour et de sacré chien tout pur, je demande les papiers. On me présente les petites affiches, je n'y trouve que des chiens perdus, que des terres à vendre. On voit bien qu'il ne vient ici que des gens inutiles, foutre. Que veux tu m'apprendre avec ce torche cul garçon, un autre journal : voilà celui de Paris, citoyen Duchesne, je ne me salis pas les doigts avec de pareilles ordures. Voulez vous Feuillant, voulez vous Perlet, citoyen Duchesne, voulez vous Courrier Français? Oui, foutre, si tu m'apportes en même temps un réchaud pour en faire un feu de joie. Vous ne vous contentez donc pas seulement de nous empoisonner de vos liqueurs, gargotiers du diable, vous voulez encore empoisonner l'esprit de ceux qui viennent chez vous? Quoi donc, dans toutes ces tabagies de Coblentz, on ne peut pas trouver un seul journal patriotique! Est ce qu'on laissera longtemps subsister ces antres de voleurs et ces repaires d'aristocrates? Quoi la convention a décrété que tous les hommes suspects seraient arrêtés, et on souffre ici le rendez-vous de tous les brigands, de tous les scélérats de l’Europe! On ne peut faire un pas dans cette forêt, sans être dévalisé par les marchands, par les coquines et par les filous de tous les acabits. Les agioteurs, les accapareurs, les marchands d'argent chassés de la bourse, se sont réfugiés sous ces arcades pour braver la convention et ses décrets! Eh vite, général des Sans-culottes, compère Hanriot, environne moi ce lieu d'horreur de toutes les piques des faubourgs. Que l'on ne se borne pas à arrêter les muscadins, il faut une bonne fois les exterminer et en purger Paris. Main-basse sur tous ces gredins. Tandis que je faisais ces réflexions, une des commères de notre écot, me dit, Père Duchesne, puisque tu veux savoir des nouvelles, en voilà de fraiches de l'armée du Nord. Lis cette lettre que j'ai reçue hier de mon fils qui est un brave canonnier, Père Duchesne. Je lis foutre:
"Je vous annonce, ma mère, que nous nous sommes battus comme des diables à tous les postes environnant Lille. Vous ne vous faite pas idée du courage des soldats républicains. J'en ai vu plusieurs avec un bras coupé, et qui se battaient contre la cavalerie jusqu'à ce qu'on leur eut coupé l'autre. Les Autrichiens n'ont jamais été mieux étrillés, et nous serions à présent à Menin, si les bataillons ne s'étaient pas amusés à piller, et si les canonniers n'avaient pas abandonné leurs canons, pour s'enivrer. L'ennemi a profité de ce désordre, et s'est emparé de plusieurs pièces d'artillerie. J'en ai été au désespoir ma mère car vous le savez, je ne suis pas de ceux qui préfèrent leur intérêt à celui de la république, et je tiendrai le serment que j'ai fait de mourir à mon poste." Votre fils est un brave bougre, ma commère. Faites lui promptement réponse, et engagez le à vivre toujours dans les mêmes sentiments. Est-il possible que des Français abandonnent la victoire, pour se livrer au pillage, que des canonniers laissent prendre leurs canons! J'ai servi autrefois dans l'artillerie, moi, et, foutre, je regardais ma pièce comme ma maîtresse, je ne la quittais jamais, et on m'aurait arraché mille fois la vie, plutôt que de me la faire abandonner. Les soldats qui se livrent à de pareils excès, ne voyent donc pas qu'ils sont les plus cruels ennemis de leur patrie. Ah, ma commère, cette nouvelle me saigne le coeur. Ce sont les amis de Custine qui ont excité ces désordres, afin de dire que la discipline ne règne pas dans l'armée depuis que le général Moustache est raccourci. Ils ne vont pas manquer de demander à la convention qu'elle donne le droit aux généraux de condamner à mort tout soldat qui manquera à la discipline, afin d'avoir un prétexte pour faire fusiller celui qu'ils voudront pour un oui ou pour un non. Que les soldats, véritablement républicains, fassent eux-mêmes la police, qu'ils immolent le premier qui osera conseiller le pillage, et le lâche qui abandonnera son canon! Voilà, foutre, ce qu'il faut recommander à votre fils allons nous en, ma commère, et avant de sortir, payons notre écot, foutre. La grande joie du Père Duchesne, N°282 Au sujet des bons décrets que la convention vient de rendre, pour faire ouvrir tous les greniers des accapareurs par la vertu de la sainte guillotine ambulante et par l'armée révolutionnaire qui va dauber les Muscadins, et donner le coup de grâce aux aristocrates et aux royalistes. Ah, Père Duchesne, quelle joie, foutre! Quelle pille aujourd’hui! Que d'enfants de choeur tu vas étouffer en réjouissance de tous les bons décrets que la convention vient de rendre, et qui vont sauver la république il était temps, foutre quelques jours plus tard pas plus de liberté, pas plus de constitution que de dessus ma main encore une fois nos ennemis se sont pris dans les pièges qu'ils nous tendaient ils ont craché en l'air, et ça retombe sur leurs bougres de nez. Il faut en convenir, nous avons plus de
bonheur que de prudence, et c'est presque toujours malgré nous que nous nous sauvons. Quel coup de chien on nous préparait, et nous n'y voyons que du boeuf! Les scélérats qui nous divisent, qui nous enlèvent nos subsistances, qui nuit et jour conspirent contre le peuple, qui sont soudoyés par les brigands qui nous font la guerre, pour brouiller les cartes, et allumer partout la guerre civile, s'étaient glissés dans toutes les sections, et même dans les sociétés populaires, pour y vomir leur poison ils ont fait les bons apôtres pour nous jeter de la poudre aux yeux. D'abord en les entendant motionner, on les prenait pour la fine fleur des républicains Marat et le Père Duchesne, au vis-à-vis d'eux, n'étaient que de la Saint-Jean ils étaient écoutés comme des oracles tout ce qu'ils disaient était applaudi à outrance tout ce qu'ils proposaient était adopté. Les pauvres Sans-culottes qui malheureusement ne voyent pas plus loin que leur nez, ignoraient que tous les coquins ne sont que des calotins et des nobles déguisés. Quand ils ont eu ainsi usurpé la confiance, ils ont commencé à vilipender les meilleurs citoyens, ils ont accusé les magistrats les plus patriotes de tous les maux qu'ils faisaient eux-mêmes par sous-main. Tandis, foutre, que des milliers de bandits, aux gages de Pitt et de Cobourg, empêchaient les subsistances d'arriver à Paris, tandis que les citoyens étaient obligés de passer les nuits à la porte des boulangers, pour se procurer un morceau de pain, on rencontrait à tous les coins de rues, au milieu des groupes des muscadins habillés en charbonniers, en maçons, qui mettaient le feu sous le ventre des Sansculottes, pour les exciter au désordre. "Voilà une belle république, disaient ils avec un air patelin nous étions mille fois plus heureux sous l'ancien régime, et cette constitution qui devait nous faire tomber les perdrix toutes rôties, ne nous donne pas seulement du pain. " quand j'entendais ces propos de jean-foutres, je commençais par examiner ces viédases de la tête aux pieds, et je remarquais toujours qu'ils avaient les mains blanches et délicates. Ces bougres là, disais-je, ne sont que des manoeuvres de contrebande. Nous autres, gens de fatigue, nous ne nous servons pas de pâte d'amande pour avoir de jolis doigts, et le travail est écrit sur nos mains couvertes de poireaux et de durillons. Défions nous de ces endormeurs qui viennent moucharder au milieu de nous. Les bougres disparaissaient comme l'éclair, quand ils entendaient faire ces observations, et allaient dans un autre quartier chercher des badauds pour les écouter et les croire. Il ne faut pas être grand sorcier pour deviner cette marotte, car on a entendu plusieurs de ces scélérats vanter la générosité de Cobourg et de Pitt, et proposer de placer sur le trône le duc d’York. Voilà, foutre, le complot des muscadins qui veulent non seulement nous empoisonner d'un roi, mais qui cherchent à rendre les Français esclaves des Anglais. Ce projet est sur le tapis depuis le commencement de la révolution, et on se souvient que le cuistre Carra le proposa aux Jacobins, il y a trois ans. L'infâme Brissot et la clique de la Gironde n'ont cessé de remuer ciel et
terre pour vendre la France au roi Georges-Dandin. C'est par leur manoeuvre que Toulon vient d'être livré à la flotte anglaise celui de Brest le sera également, si on ne chasse pas à l'instant tous les ci-devant nobles de la marine. Le renard Pitt sait bien, foutre, qu'il ne sera que l'eau toute claire, tant que Paris ne sera pas détruit, que, pour anéantir la république, il faut la frapper au coeur aussi le bougre a t il rassemblé dans le berceau de la liberté tous les ennemis de la révolution qu'il a pu recruter dans les départements. Les hôtels garnis regorgent, de la cave au grenier, de prêtres réfractaires, de ci-devant gardes du corps tous les échappés de Coblentz, tous les chefs des brigands de la Vendée sont maintenant à Paris ils bravent, ils insultent, ils outragent les patriotes depuis longtemps ils se disposent à un grand coup de main, et ils n'attendent que le signal pour égorger les Jacobins et la convention mais si ces jean-foutres osent lever la crête dans les tripots du Palais-Royal, ils frémissent d'horreur quand ils entendent parler du faubourg St-Antoine. Ce n'est qu'en divisant les Sans-culottes de Paris, qu'on espère les détruire. Quand je vois le trouble régner dans quelque section, quand les ouvriers sont obligés de faire jouer les chaises pour chasser les muscadins, quand on se bat pour avoir du pain, je m'écrie: combien en a t il coûté de guinées au porte esprit du roi Georges-Dandin pour exciter tout ce désordre? Oui, foutre, tous les maux que nous endurons, toutes les pertes que nous éprouvons, toutes les trahisons que nous découvrons, sont autant de chefs d'oeuvres des agents de Pitt. C'est lui qui a fait sonner la trompette d'alarme dans tous les ateliers, c'est lui qui a graissé la patte à tous les coquins qui criaient au pain dans toutes les rues de Paris, et qui demandaient la tête du maire, en l'accusant d'être un accapareur en égarant le peuple, on croyait qu'il allait prendre le change, et qu'on lui ferait égorger ses meilleurs amis, comme à Marseille et à Lyon mais, foutre, les Parisiens sont débadaudés, ils se sont entendus, et au lieu de se manger le blanc des yeux et de s'entredéchirer comme leurs ennemis le voulaient, ils se sont embrassés, ils ont juré la mort des traîtres. Et ce serment sera accompli, foutre. Tout le peuple de Paris ayant à sa tête la municipalité, s'est présenté à la convention il a exposé sa misère à ses représentants, il a demandé justice, il l'a obtenue. Ce jour qui devait être un jour de deuil et peut-être le dernier de la Sans-culotterie a été un jour de fête et de triomphe pour les amis de la liberté. La convention a décrété sur le champ la formation d'une armée révolutionnaire qui va parcourir tous les départements, suivie d'un tribunal redoutable qui balayera la république de tous les brigands, des royalistes, des accapareurs, et de tous les ennemis du peuple. La guillotine ambulante nous ouvrira tous les greniers, et dans quinze jours Paris, toute la république auront des subsistances assurées pour toute l'année. Les talons rouges sont enfin chassés de nos armées, tous les nobles vont être arrêtés. Pour engager les Sans-culottes
à assister à leurs sections, et à donner la chasse aux muscadins, les ouvriers recevront une gratification toutes les fois qu'ils se rendront à l'assemblée de leur section. Brissot et ses complices, la louve autrichienne vont dans cette semaine mettre tous la tête à la fenêtre, et six tribunaux composés de Sans-culottes à toute épreuve, vont juger nuit et jour tous les conspirateurs. Voilà, foutre, ce que le peuple a obtenu. Voilà une moisson qui réduit tous les accapareurs à zéro. Voilà le coup de grâce de l'aristocratie et de la royauté. Tremblez, scélérats, qui avez voulu enchaîner le peuple, il tient entre ses mains la massue qui va vous écraser. Tremblez, muscadins, qui n'avez pas voulu être des hommes libres l'heure de votre mort va sonner. Tremblez, riches égoïstes engraissés du sang des pauvres, le jour est arrivé. Vous, Sans-culottes, qui avez tant fait dans un jour, ne vous rebutez pas n'abandonnez pas le fer dont vous vous êtes armés jusqu'à ce que tous vos ennemis soient exterminés, il y va de votre salut, de celui de vos femmes et de vos enfants. Le combat à mort est commencé, il faut en sortir victorieux ou esclaves. Il faut tuer vos ennemis, si vous ne voulez pas l'être. La liberté ou la mort, foutre. La grande joie du père Duchesne, N°283 De voir le pain reparaître chez les boulangers depuis que le peuple a retrouvé la clef du grenier, en mettant à l'ombre tous les muscadins, tous les commis de Pitt et de Cobourg, qui se déguisaient le matin en Sans-culottes, pour faire rafle des pains de quatre livres, et les jeter dans la rivière, et qui le soir, bien poudrés et bien pomponnés, allaient insulter à la misère publique avec leurs culottes étroites et leurs habits carrés dans les promenades et les spectacles. Il n'y a rien qui vaille que les Sans-culottes, il n'y a rien de bien fait que ce que font les Sans-culottes on ne trouve de vertu et de patriotisme que parmi les Sans-culottes sans eux la révolution serait au foutre eux seuls sauveront la république. Il faut donc que toutes les lois les défendent et les protègent, que la convention ne travaille que pour leur bonheur, car eux seuls forment la nation ce sont eux qui arrosent de leurs sueurs la terre qui nous nourrit, ce sont eux qui font les étoffes dont nous sommes revêtus, ce sont eux qui travaillent les métaux, et qui fabriquent les armes qui servent à la défense de la république ce sont eux qui versent tous les jours leur sang pour la liberté et l'égalité pour prix des services qu'ils rendent à la société, ils n'ont eu jusqu'à présent pour lot que la misère et le mépris. Tandis que leurs femmes et leurs enfants languissent dans des galetas et dans des cabanes, tandis, foutre, qu'ils ont à peine une poignée de paille pour se coucher, de riches fainéants se dorlotent sur le duvet dans des alcôves dorés tandis que ces artisans laborieux s'épuisent à force de travail, pour gagner un misérable morceau
de pain bis, des financiers, engraissés du sang du peuple, des marchands, enrichis des dépouilles des dupes, des banqueroutiers, des accapareurs, des banquiers, des gens de loi, en un mot toutes les sangsues de la Sans-culotterie jouissent de tous les plaisirs leurs tables sont couvertes des mets les plus exquis d'un bout de la France à l'autre les routes sont couvertes de voitures pour apporter toutes les friandises de ces bouches inutiles. Assez longtemps la roue de fortune a été aveugle il faut enfin qu'elle lève son bandeau pour partager ses dons avec plus de justice il faut que sa roue tourne enfin du côté de la Sans-culotterie. Le soleil luit pour tous les hommes. La terre qui est notre mère commune, et qui prodigue avec abondance tous ses trésors, n'a été jusqu'à présent qu'une marâtre pour les pauvres qui la cultivent il faut que les moissons, que les fruits dont elle est couverte, soient partagés plus également à ses enfants celui qui plante la vigne doit avoir la plus belle grappe. Voilà, foutre, ce que les Sans-culottes désiraient, quand ils ont fait la révolution, voilà ce que la constitution leur promet, voilà ce qu'ils obtiendront, s'ils ne veulent pas jeter le manche après la cognée, et s'ils achèvent leur ouvrage. " Tu nous promets plus de beurre que de pain, vieux marchand de fourneaux, me dit-on depuis quatre ans nous avons foutu la danse aux aristocrates, nous les avons chassés, nous avons fait plus, et nous avons tout à fait taillé dans le vif, en raccourcissant le dernier de nos tyrans, et cependant nous n'avons encore fait que de l'eau toute claire. D'autres fripons ont remplacé ceux que nous avons détruits enfin nous sommes toujours aussi malheureux que par le passé. Les gueux porteront toujours la besace. " Oui, foutre, ils la porteront toujours, s'ils sont assez lâches pour se décourager. C'est là ce qu'attendent nos ennemis ils n'ont plus d'espérance que dans le désespoir des Sans-culottes. C'est pour nous faire perdre la carte, et nous faire mettre à chien et à chat les uns contre les autres, qu'ils ont tout accaparé, qu'ils nous enlèvent nos subsistances, pour nous faire tomber à leurs pieds et leur redemander des fers. Si nous en étions réduits à ces extrémités, pendant quelques jours ils nous cajoleraient, le pain ne manquerait pas d'abord mais, foutre, qu'ils nous le feraient payer cher par la suite! Il n'y aurait pas d'assez grands supplices pour nous faire expier le crime d'avoir voulu être libres et égaux. La taille, la gabelle, les entrées, la chasse, la corvée, les parlements n'étaient que de l'eau rose, en comparaison des maux qu'il faudrait endurer. Les bêtes à somme seraient moins malheureuses que les Sans-culottes. Dans l'ancien régime on a entendu des nobles, dire que si les chevaux manquaient en France, ils se serviraient des roturiers pour les traîner eh bien, foutre, ils réaliseraient cette prédiction, et il n'est pas un bon citoyen qui ne préférât alors être cheval plutôt que de vivre aussi dégradé. Oui, lâches qui demandez un roi, vous en auriez un et il vous en cuirait bougrement pour l'avoir demandé. Il faudrait doubler et tripler les impôts, pour fournir à ses plaisirs et entretenir les armées qu'il serait obligé de
mettre sur pied, pour régner en paix et pour opprimer le peuple riches et pauvres, tout serait également enchaîné, ou plutôt il n'y aurait bientôt dans toute la France que des gueux. Un roi! Qui peut être assez jeanfoutre, pour prononcer ce nom sans horreur? Existe t il un homme assez stupide, assez hardi, pour désirer le trône? Croit-il qu'il y resterait seulement 24 heures? N’existerait-il plus d'hommes libres pour le poignarder, avant qu'il les eut tous détruit avant que la terre fût couverte de nos cadavres, nous saurions nous venger. Nous aurions aussi du poison et des poignards pour immoler ceux qui seraient tentés d'être nos maîtres. Quand même nous serions battus de tous côtés, y eut il un million d'étrangers répandus sur notre territoire, fussions nous tous désarmés, il nous resterait encore à chacun un bout de fer que notre désespoir aiguiserait pour arracher la vie aux satellites des despotes qui voudraient nous faire la loi, et si nous n'en avions pas, nous les étoufferions, nous aurions encore des dents pour leur déchirer les veines et les entrailles. Notre rage égalerait celle de nos tyrans, et nous trouverions mille moyens pour délivrer la terre de pareils monstres. Jamais, foutre, on n'a empêché un peuple qui veut être véritablement libre de le devenir. En Suisse, une poignée de paysans s'est délivrée de la tyrannie des mêmes Autrichiens qui veulent aujourd’hui asservir la France. Des pêcheurs, sans armes, sans argent, sans bled, et ne vivant que de fromage et de harengs, vinrent à bout dans la Hollande de faire mettre les pouces à un empereur autrichien qui alors était maître de toute l’Allemagne, de l’Espagne, de presque toute l’Italie, des Pays-Bas des grandes Indes, de tous les trésors de l’Amérique, et même d'une partie de la France. Avec la foi, on transporterait, dit-on, des montagnes : eh bien, foutre, de la foi dans le patriotisme, et nous viendrons à bout de tout, nous abattrons tous les colosses qui nous menacent, et nous établirons la liberté universelle mais encore une fois, tenons bon et soyons fermes comme des rochers. Songeons que nous ne pouvons être détruits par nous-mêmes. Restons unis comme des frères. Plus on fera d'efforts pour nous diviser, plus nous devons rester serrés les uns contre les autres. Si on veut nous prendre par les vivres, tirons plutôt la langue d'un aulne, que de nous plaindre et de nous chamailler, sachons endurer la faim, pour avoir bientôt l'abondance songeons que les citoyens de Lille et des autres villes assiégées ont été réduits à manger des chats et des rats, tandis que leurs maisons étaient embrasées par les bombes et les boulets rouges. Si nous n'avons qu'un morceau de pain, partageons-le avec notre voisin, en attendant la fin de notre misère. Regardons la liberté comme une femme aussi bonne que belle, que nous brûlons de posséder. Que n'endure t on pas pour une maîtresse que l'on chérit! Pour être heureux, il faut un peu de peine. On n'a pas bâti Paris dans un jour. Quand le cultivateur jette son bled en terre, il ne s'attend pas que chaque grain en produira mille il a aussi à craindre les gelées, la sécheresse et la grêle. Pour recueillir, il faut semer. Entendons-nous encore une fois, et nous arriverons à notre but.
Quand nous éprouvons quelque disgrâce, ne nous en prenons jamais qu'à nos ennemis car, foutre, ils sont toujours à nos trousses, et ils ne cessent de nous harceler. Tandis, foutre, qu'il assiégeaient la porte des boulangers pour enlever le pain et le jeter à la rivière, ils accusaient les magistrats les plus vertueux d'être des accapareurs, ils croyaient que les Sans-culottes allaient faire main-basse sur leurs meilleurs amis mais, foutre, ils se sont encore une fois cassé le nez. On a organisé l'armée révolutionnaire les affameurs ont été mis à l'ombre tous les jean-foutres qui se déguisaient en charbonniers et en poissardes, pour assiéger les portes des mitrons, et qui le soir reprenaient leurs culottes étroites et leurs habits carrés, pour insulter à la misère publique dans les spectacles et les promenades, sifflent maintenant la linotte le pain a reparu, et chacun en a facilement. J'avais donc raison de dire que la vertu de la sainte guillotine nous rendrait la clef des greniers. Poursuivons, foutre, et promenons là dans tous les lieux où il y a des accapareurs et des contrerévolutionnaires, et bientôt l'abondance régnera, foutre. Avis aux Sansculottes. Vous qui regardez avec raison les rois comme la peste, voulez vous connaître un plat de leur métier allez demain mercredi, 11 septembre, au tribunal du sixième arrondissement, à l'Abbaye SaintGermain, entendre plaider la cause du brave Latude contre les héritiers de la Pompadour et ceux des ministres de Louis-XV, qui tenaient boutique ouverte de lettres de cachet, et qui ont fait languir ce pauvre bougre pendant quarante cinq ans dans les cachots de la Bastille et de Bicêtre pour les beaux yeux de la putain royale. J'espère que les juges qui sont de véritables Sans-culottes ne se laisseront pas graisser la patte, et qu'ils condamneront ces sangsues engraissées du sang du peuple à une bonne amende et à une forte pension, pour consoler ce vieillard malheureux de tous les maux qu'il a souffert. S'ils ne le font pas, je m'en souviendrai, foutre, et je les habillerai en enfants de bonne maison. La grande colère du Père Duchesne, N°284 De voir que les Sans-culottes de Paris restent les bras croisés, au lieu de marcher promptement en masse pour balayer les frontières de tous les brigands qui les ravagent. Ses bons avis aux jeunes Parisiens pour qu'ils forment promptement leurs bataillons, et qu'ils marchent sans délai vers l'ennemi, en faisant porter leurs sacs aux muscadins, et les forçant de traîner les équipages. Sa grande joie de voir siffler la linotte à tous les jean-foutres qui voulaient brûler Paris, et faire perdre le goût du pain aux braves Montagnards et aux Jacobins. Ah, foutre, comme les aristocrates mangent du fromage! Que sont ils devenus ces insolents muscadins qui faisaient tant claquer leur rouet, qui se vantaient de faire perdre le goût du pain à tous les Jacobins, qui devaient chasser la convention à coups de fouet, et être tous les grands officiers de l'avorton du Temple, qu'ils osent appeler Louis-XVII. Il n'est pas de courtaud de
boutique, de saute-ruisseau de notaire qui n'ait fait tous les soirs cette prière en place de son pater : "ô bienheureuse contre-révolution, quand arriveras tu! Les Autrichiens sont ils bientôt aux portes de Paris! Quand auront-ils brûlé ce maudit faubourg Saint-Antoine! Quand pourrons-nous laver nos mains dans le sang des Sans-culottes! Quand pourrons-nous danser sur leurs cadavres. " Voilà, foutre, ce que pensent tous ces foutriquets du Palais-Royal, tous ces piliers de tripot, tous ces joueurs, tous ces escrocs, tous ces bandits, tous ces polissons que l'on rencontrait à chaque pas dans les promenades et dans les spectacles. Où sont ils cachés, foutre depuis que la convention a décrété l'armée révolutionnaire et la guillotine ambulante, les jean-foutres sont rentrés dans les caves où ils s'étaient tapis le 10 août. Semblables à des rats qui fourragent dans un grenier, qui sautillent, gambadent, infectent et dévorent tout ce qu'ils rencontrent, et tant qu'ils se croient en sûreté, bravent de loin tous les chats de l'univers, et les défient de venir troubler leur ripaille mais quand le gros angora de la maison montre seulement sa barbe à la tête de la chatière, tous les rats muscadins le fleurent, et chacun vanne de son côté, et tous passeraient dans un trou de souris. Quelques uns tombent sous les griffes de minet qui leur fait payer les sottises des autres. Voilà, foutre, trait pour trait le tableau de Paris depuis que la convention a ouvert toutes les ratières et les souricières, pour attraper toutes les vermines qui infectent Paris, les muscadins qui ne sont pas allés se nicher avec les chauves-souris, pour mieux tromper l'espion, ont tout à coup quitté leurs culottes étroites pour prendre de larges pantalons et des vestes courtes à la place de leurs habits carrés une perruque noire et à cheveux plats ombrage leur face de papier mâché, et deux moustaches postiches pendent sous le nez de ces blancs-becs on les voit la pipe à la gueule, ni plus ni moins que le Père Duchesne, mais pour la frime car, foutre, une seule bouffée de tabac les suffoquerait. Les Sans-culottes, foutre, ont le nez fin, et d'une lieue ils sentent les aristocrates aussi, malgré ces farces et ces déguisements, reconnaissentils ces viédases. L'autre soir je me promenais au grand bordel, très bien nommé Palais-Royal, puisque c'est le rendez-vous de tout ce qu'il y a dans le monde de plus impur et de plus scélérat j'étais avec une douzaine de lurons d'affût nous voilà tout à l'heure faufilés parmi toutes les coquines et les escrocs qui à la vérité étaient clair-serrés. Pour tromper le Jobe, nous jasons avec ces salopes qui nous prennent pour des muscadins déguisés, et qui se déboutonnent à leur aise. " Qu'allons nous faire, disaient elles, qu'allons nous devenir d'un seul coup de filet cette maudite police vient de nous enlever toutes nos pratiques. Moi, disait l'une, je perds mon vieil abbé, et moi, mon gros banquier. Il faut donc pendre nos dents au croc. Pardi, j'ai bien du guignon, disait l'une de ces princesses je me suis fait enlever, il y a cinq ans, par le baron de la Crânerie, le plus dégourdi gentilhomme de mon canton il est vrai qu'il n'avait ni sol ni
maille, mais de l'esprit en revanche ah, comme il vous jouait des mains! Comme il vous travaillait les cartes! C'était de tous les gardes du corps le plus renommé pour les coups de main. Il fallait voir alors comme j'étais sur mon dix-huit. J'avais un appartement superbe, une voiture magnifique, les plus beaux laquais, les plus jolis jokais, ma petite loge à tous les spectacles. Il est vrai que pour fournir à toutes ces dépenses, il a fallu dévaliser quelques centaines de nigauds de province, et ruiner autant de marchands. La révolution est arrivée, et tout mon étalage a disparu. Mon pauvre baron a été obligé de faire comme les autres il a vanné du côté de Coblentz et je ne sais où. Je croyais ne le revoir de la vie mais il me tomba tout à coup sur les bras, il y a quelques mois, tout en loques, et arrivant de la Vendée je ne savais si je devais le reconnaître, mais enfin on a un coeur il sut me prendre par l'endroit sensible, et je me suis laissé aller. Ce jour là je fis un bon miché moyennant un portefeuille assez bien garni que je lui brissotai avec adresse, mon baron fût habillé de la tête aux pieds comme un cadet. Nous vivions tous les deux comme deux tourtereaux il me laissait, en joli garçon, faire tranquillement mon commerce lui, par ses connaissances, s'était procurés une place honnête qui lui rapportait joliment, et sans se donner de mal, sinon qu'il était obligé de se lever quelquefois avant le jour, pour aller faire sentinelle à la porte des boulangers mais quand il y a du quibus, coûte qui coûte autant d'assignats de vingt-cinq francs que de pains de quatre livres. Un brave Anglais de ses amis le payait rubis sur l'ongle, et lui donnait encore de bonnes gratifications, quand on venait à bout d'affamer les Sans-culottes, et de les faire pester, jurer et tempêter. Malheureusement le pot aux roses est découvert, et mon pauvre ami est obligé de se cacher. Après avoir tant jeté de pains de quatre livres à l'eau, il n'a pas seulement une flûte à casser, et moi qui n'étrenne pas! " Tandis que la garce jabotait ainsi, je vois s'avancer à pas de loup un grand flandrin, tenant à sa main un de ces gros gourdins courts appelés casse-tête avec un grand sabre à la Malbrouck pendu à son cul de chien. "La faim tire le loup du bois, s'écrie la petite guenon, le voilà, ce cher ami de mon coeur tu vas te fâcher, tu vas me battre, tu vas m'assommer, mais je ne puis pas te lâcher seulement un assignat de dix sols, foi de Sophie, je n'ai pas étrenné. " comment, s'écrie le coupe-jarret, entre vous toutes coquines, vous ne pourrez pas vous cotiser pour me donner à souper. C'est moi, gredin, lui dis-je, qui vas te régaler je saisis mon bougre au collet, et je lui fous les quatre fers en l'air je fais sauter sa perruque sous laquelle on aperçoit des cheveux blondins, bien roulés et bien crêpés mon jean-foutre est aussitôt entre les mains de la garde, et siffle maintenant la linotte. Paris est plein de ces scélérats il faut, foutre, que tous les bons citoyens se lèvent pour leur donner la chasse il faut les relancer dans toutes les cavernes de voleurs, où ils sont cachés. C'est cette maudite canaille qui nous tourmente sans cesse, et qui nous aiguise dans l'ombre
les poignards pour égorger les patriotes. Si nous avions différé de quelques jours de les mettre à l'ombre, ils foutaient Paris sens dessus dessous. J'invite tous les Sans-culottes à se joindre à moi, pour faire une dernière battue pour faire rafle de tous ces bandits. Oui, foutre, saisissons tous les muscadins, non pas pour leur faire l'honneur de marcher avec nous à l'ennemi, mais pour porter le sac et traîner les équipages. Ceux là qui ne veulent pas être des hommes, quand la patrie est en danger, doivent être traités comme des bêtes à somme. Et vous, jeunes citoyens, dignes fils des braves Sans-culottes, ralliez vous, foutre, soyez armés, formez promptement des bataillons pour voler aux frontières. Songez que c'est pour vous que vous travaillez c'est vous qui recueillerez les fruits de la révolution vos pères ne jouiront pas longtemps de leur ouvrage, mais vous la verrez heureuse et triomphante votre république nous n'avons que les épines, et les roses vous sont destinées. Aux armes, jeunes républicains, déjà vos frères des départements du Nord sont levés pour écraser les tyrans et leurs esclaves. Si vous tardez, vous ne partagerez pas leur gloire, et la France sera sauvée avant que vous soyez en marche. Quelle honte, foutre, pour les Parisiens! Nos braves volontaires, en revenant couverts de lauriers, se demanderont où sont les hommes du 14 juillet et du 10 août. Non, foutre, vous ne vous attirerez pas ce reproche vous ne serez pas comme le chien à Jean de Nivelle, qui s'enfuit quand on l'appelle. Vous allez voler où l'honneur vous commande. Partout où vous passerez, les aristocrates rentreront cent pieds sous terre à votre approche, les esclaves des brigands couronnés fuiront devant vous comme des lièvres, et le pied sur la gorge des rois, vous les forcerez à nous demander la paix, foutre. La grande joie du Père Duchesne, N°285 En apprenant toutes les victoires des braves défenseurs de la république sur les Anglais, les Autrichiens et les Prussiens, et de voir qu'avant qu'il soit l'âge d'un petit chien on promènera à Londres au bout d'une pique la tête de l'âne de Hanovre et celle de son porte esprit Pitt, le jokay. Ses bons avis aux Sans-culottes pour qu'ils continuent de lever les cottes des salopes soudoyées par les Anglais pour assiéger les portes des boulangers, et de les étriller comme elles le méritent. Nom d'un tonnerre, quels bougres à poil que ceux qui combattent pour la république! Quelle fameuse danse l'armée du Nord vient de donner aux brigands qui ravagent nos frontières! Il n'existerait pas un seul roi en Europe, si ces intrépides lurons avaient eu des chefs dignes d'eux. Oui, foutre, les Français iraient en enfer pour défendre la liberté et l'égalité. Les Mandrins couronnés savaient, dès l'année dernière, combien pesait le bras des républicains. Jamais, foutre, ils n'auraient été tentés de s'y frotter une seconde fois, s'ils n'avaient pas compté sur la perfidie de nos généraux et sur les coquins qu'ils soudoient dans l'intérieur pour nous
mettre à chien et à chat. Que doivent dire maintenant les Anglais de se voir aussi bien étrillés? Ils croyaient qu'ils n'avaient qu'à se baisser et en prendre parce que les traîtres de Toulon avaient vendu à la folle enchère leur port et leur ville au muscadin nommé duc d’York ce foutriquet s'imaginait que toutes les portes allaient s'ouvrir devant lui. Il se flattait que le cuistre Carra un de ces matins paraîtrait devant lui à la tête de tous les boutiquiers de Paris, pour lui présenter à genoux les clefs de la bonne ville, et le supplier de faire l'honneur aux Français d'accepter la couronne du cornard Capet. Pitt et les Brissotins avaient préparé toutes les batteries pour nous amener là, et ils espéraient nous réduire par la famine, mais, foutre, les Sans-culottes ont trouvé la clef du grenier, en mettant à l'ombre tous les coquins qui faisaient commerce de pains de quatre livres. Quelques salopes, malgré l'abondance du pain, ont encore osé assaillir la porte des boulangers, pour jeter l'alarme mais les bons citoyens les ont dispersées, en leur jetant de l'eau sur les guenilles qu'elles avaient empruntées pour continuer leur métier, et de braves commères ont levé les cottes de ces poissardes de contrebande, et les ont claquées d'importance. C'est ainsi, foutre, que tous les projets du fameux Pitt s'en vont en eau de boudin il voit s'évanouir tous ses châteaux en Espagne. Patience, avant qu'il soit l'âge d'un petit chien, le scélérat recevra le prix de tous ses forfaits. Quand les Anglais daubent les rois et les ministres, ils tapent dur, foutre. Il y a à Londres de bons Sans-culottes qui aiment la liberté, et qui n'attendent que le moment favorable pour se montrer quand ils vont apprendre la défaite honteuse de leur armée, ils vont faire un beau gâchis. " il faut que nous soyons bougrement badauds, vont ils dire, de nous laisser gouverner par un bougre échappé des petites maisons et par son polisson de ministre qui a ruiné notre commerce, et épuisé toutes les ressources de l'état, pour exciter une guerre injuste. Au lieu de respecter l'alliance que nous avions fait avec la France, nous avons perdu plus de quarante millions par an, que nous gagnions par ce traité, pour venger la mort d'un misérable ivrogne, et pour soutenir la cause d'une demie douzaine de mangeurs d'hommes, appelés rois et empereurs. Les Français n'avaient ils pas aussi bien que nous le droit de se défaire de leurs tyrans? Ne leur en avions nous pas donné plus d'une fois l'exemple, en chassant les nôtres? N'avons nous pas aussi raccourci autrefois certain faquin nommé Charles Stuart, dont le traître Capet n'était que le second tome? On voulut alors nous en faire un crime, et ses confrères prévoyant que tôt ou tard autant leur en pendait à l'oreille, dérouillèrent tous leurs vieilles flamberges pour fondre sur l’Angleterre, et lui faire la loi. Nous fîmes voir alors que nous avions bec et ongle, et nous prouvâmes à tous les Mandrins couronnés qu'on ne fait jamais mettre les pouces à une nation qui veut être libre. Pourquoi donc, foutre, blâmer dans les autres ce que nous avons fait nous-mêmes? Vengeons-nous de ce bougre de mannequin que nous avons tiré des petites maisons, et surtout de ce
jokay manqué qui règne en son nom! Une bonne fois prouvons que nous avons du sang dans les veines, en donnant le coup de grâce à la royauté. N'est-il pas honteux pour des Anglais d'avoir pour maître un cheval rétif d’Allemagne, qui n'a ni bouche ni éperon? Nous qui avons prononcé les premiers le mot sacré de république, nous avons encore des rois! Nous combattons pour les rois, quand les Français les exterminent! " Le même jour où cette motion sera faite dans les tavernes et dans le parc St-James, je réponds que la tête de l'âne de Hanovre sera promenée au bout d'une pique, ainsi que celle de son porte-esprit. Les Anglais iront un peu plus vite en besogne que nous, et ils ne laisseront pas échapper les traîtres, pour aller former une Vendée en Ecosse ou en Irlande. L'escroc royal nommé prince de Galles, ses frères et toute la bougre de race perdra le goût du pain. Les milords, les lords, les baronnets n'auront pas le temps d'émigrer et toutes les têtes à perruque de la chambre haute serviront de pâture aux brochets de la Tamise. Une députation de la commune de Londres s'embarquera à l'instant et voguera sous le pavillon tricolore et viendra proposer amitié et fraternité à celle de Paris, qui la recevra sans rancune. On fera la paix et le jour où elle sera signée, sera le dernier des rois. Voilà un beau rêve, foutre, mais il est arrivé de plus grands miracles. Qu'on ne croie pas, foutre, que je veuille endormir le peuple avec ces belles promesses. Jusqu'à ce que les Anglais soient à quia, nous devons les regarder comme nos plus mortels ennemis. Continuons de les rosser, faisons leur autant de mal qu'ils veulent nous en faire, faisons embarquer une centaine de mille hommes pour aller mettre à la raison les accapareurs de Londres. Plus ils éprouveront de malheurs, plus ils détesteront le roi Georges-Dandin et l'infâme Pitt qui les a jetés dans ce margouillis. Braves Sans-culottes, tandis que nos frères et nos amis font si joliment danser la carmagnole aux ennemis du dehors, tandis que les Prussiens, les Autrichiens, les Anglais, vannent, comme des daims, devant les troupes de la république, imitons leur exemple dans l'intérieur : ne donnons point de relâche aux royalistes, aux modérés, aux aristocrates et aux conspirateurs de toutes les acabits que l'armée révolutionnaire commence ses promenades salutaires dans les campagnes, pour forcer la main aux accapareurs de bled, et aux riches fermiers qui enterrent le bled et refusent de battre la nouvelle moisson que tous les départements qui avoisinent la Vendée, se lèvent en masse, puisque masse y a, pour mettre le feu à tous les bois où les brigands sont cantonnés que ces bêtes fauves soient brûlées dans leurs repaires. Tant que nos ennemis du dehors auront l'espérance d'entretenir chez nous la guerre civile, tant que la Vendée existera, n'attendons pas la paix. Eh, vite donc, plus vite que çà, Dubois de Crancé, achèves promptement de réduire en cendres les nids d'aristocrates de Lyon, pour aller cerner Toulon. Je me fous du reste et çà ira partout, si nous prenons le mors aux dents dans l'intérieur.
Périssent tous les rebelles, tous les ennemis de la liberté et de l'égalité! Périssent tous les rois et leurs esclaves! Le règne de la raison et de la justice est arrivé. Mourons plutôt que de n'être pas républicains. Nous le serons, j'en jure sur mes moustaches, foutre. La grande colère du Père Duchesne, N°286 De voir que les Sans-culottes s'amusent à la moutarde, au lieu de donner le coup de grâce aux royalistes, aux aristocrates, aux Rolandins, tandis que nos braves guerriers foutent de si bonnes danses aux ennemis du dehors. Ses bons avis à la convention pour qu'elle fasse promptement mettre la tête à la lunette à l'infâme Brissot, à la louve autrichienne et à toute la clique de la Gironde, et surtout qu'elle n'oublie pas le scélérat Bailly. Sa grande motion pour que le maire grue soit raccourci à l'entrée du Champ-de-Mars, où il a fait massacrer le peuple. Grande victoire remportée sur les Autrichiens et les Prussiens défaite totale de l'armée anglaise qui ont perdu toute leur artillerie, tous leurs bagages neuf mille six cents Hanovriens faits prisonniers avec leur trésor fuite honteuse du muscadin appelé duc d’York, qui s'est échappé à la nage, après avoir eu son cheval tué sous lui, voilà de bonnes nouvelles, Père Duchesne! Quelle joie! Quelle pille, foutre! Comme tu vas danser la carmagnole avec ta Jacqueline! Partout les troupes de la république sont victorieuses. Tous les Français, levés en masse, vont donner le dernier coup de collier, et faire mettre les pouces à tous les despotes. Voilà, foutre, le bon jour que tous les Sans-culottes me donnent en me serrant la main. Oui, foutre, ça va, mais ça pourrait encore mieux aller car tandis que nos braves guerriers tapent si dur sur les Autrichiens, les Prussiens, les Anglais, les Espagnols, nous nous amusons à la moutarde. Nos plus grands ennemis, foutre, sont au milieu de nous, et nous avons l'air de prendre des mitaines pour leur parler. Nous crions beaucoup, et nous ne faisons rien. Le temps d'agir est cependant arrivé. Le combat à mort est commencé, il faut que l'aristocratie soit étouffée, sinon la république est au foutre. Si nous perdons l'occasion, nous ne la trouverons plus. Tandis que les Sans-culottes dorment, les aristocrates veillent nuit et jour, et ils n'attendent que le moment de prendre leur revanche. Depuis que la convention a ordonné d'arrêter les hommes suspects, qu'avons nous fait pour exécuter ce décret qui doit sauver la république? Tout va encore par compère et commère comme dans l'ancien régime, et les plus fieffés aristocrates trouvent des défenseurs même parmi les Sans-culottes. L'homme riche et puissant a des amis partout. Un gros financier est-il en gage, cinq cents intrigants sont aussitôt sur pied pour lui donner la clef des champs. Avec de l'or on ouvre toutes les portes. Millions de tonnerres, quel fromage tu m'as fait manger, maudit paillard capucin, quand je t'ai entendu demander à la convention de lever les scellés qui avaient été mis chez les banquiers! Se peut-il,
foutre, que la convention se soit laissé jeter de la poudre aux yeux par un bougre d'étourneau de ton espèce? Ne devait elle pas voir que tu t'étais laissé endoctriner par les muscadines qui t'environnent nuit et jour? Tandis, foutre, que les assignats de Pitt et de Cobourg étaient sous les scellés, tous les coquins qui font commerce de pains de quatre livres, les fausses poissardes qui assiègent les portes des boulangers, ont eu les vivres coupés, et nous avons eu facilement de quoi mettre sous la dent mais depuis ta bougre de capucinade, imbécile Chabot, depuis que les moyens de nous nuire ont été rendus aux commis de l’Angleterre, les farces du pain ont recommencé. Heureusement la convention vient de balayer le comité de sûreté générale, et elle en a balayé tous les viédases qui préfèrent les dîners de fermier général et de jolies coquines aux intérêts de la république. J'espère que les bougres à poil qui composent maintenant ce comité, donneront une bonne consigne pour foutre la chasse à toutes ces muscadines qui viennent jouer de la prunelle, pour tirer de presse milord pot-au-feu. De vrais Montagnards doivent préférer des pommes de terre et des haricots à tous les dîners de l'univers, et ils ne doivent courtiser que la liberté, foutre il ne faut pas qu'ils aillent se faire attraper comme des mouches à des toiles d'araignées. Vous qui avez sauvé tant de fois la république, habitants de la sainte montagne, voulez vous, oui ou non, achever votre ouvrage? Après avoir planté la vigne, vous vous endormez comme le patriarche! C'est à vous de la cultiver, et de nous procurer le baume salutaire que vous nous avez promis. Vous nous avez fait une excellente constitution, et nous n'en jouissons pas. Tous les jours vous rendez des décrets qui comptent, et qui sauveraient la Sans-culotterie, s'ils étaient exécutés, mais on les fout dans la boîte aux oublis. Nous ressemblons à un pauvre gascon dont le ventre joue du violon, et qui hume la fumée d'un repas magnifique, sans pouvoir y toucher. Braves Montagnards, il faut que vous nous teniez la promesse que vous nous avez faite. Vous avez juré de ne pas abandonner votre poste, jusqu'à ce que la France soit sauvée. Il faut conserver l'édifice que vous venez d'achever, car si les colonnes en étaient renversées, vous et nous, nous péririons sous ses ruines. Toute la force, toute la puissance du peuple vous soutient, écrasez vos ennemis et les nôtres. Le monstre du fédéralisme fait le mort maintenant, mais si vous ne lui portez pas le coup mortel, il va bientôt se relever. Pourquoi, foutre, l'infâme Brissot qui l'a engendré, vit il encore? Pourquoi cette bande infernale de Girondins que vous avez fait mettre à l'ombre, n'est elle pas encore jugée? Faut-il donc tant de simagrées, pour condamner des scélérats que la république entière accuse? En les laissant aussi longtemps impunis, leurs complices s'enhardissent et se préparent à vous donner encore du fil à retordre. Oui, foutre, le feu couve sous la cendre, et il va bientôt embraser la France d'un bout à l'autre, si vous ne l'éteignez pas. Tous les jean-foutres qui se sont tant débattus
dans les départements pour allumer la guerre civile, tous ces rolandistes qui sont à la tête des administrations, bravent encore vos décrets et insultent les Sans-culottes. Pourquoi la guillotine ambulante ne roule t elle pas dans les départements de l’Eure et du Calvados? Tous ces avocats, tous ces hommes de loi, écharpés et à écharper, qui voulaient armer les départements contre Paris, continuent leurs fredaines ils protègent les accapareurs ils empêchent les subsistances de circuler et plus que jamais, ils oppriment les Sans-culottes. Dans la petite bourgade de Lisieux, une municipalité insolente vient de faire siffler la linotte à la femme d'un pauvre bougre nommé Debey, parce qu'elle demandait un certificat de civisme pour son mari, qui a été obligé de fuir et d'abandonner sa boutique pour avoir dénoncé ces coquins, dans le temps qu'ils voulaient forcer les Sans-culottes à marcher contre Paris. Dans toute la république, les Sans-culottes doivent s'attendre au même sort, si on ne lie pieds et jambes aux fédéralistes, si on ne raccourcit promptement tous les scélérats qui ont juré la perte de la Sans-culotterie. Il n'y a plus à reculer, foutre, la liberté ou la mort. Faut-il donc tant tâtonner pour nous délivrer de nos plus mortels ennemis? S'ils avaient un seul jour le dessus, ils iraient plus vite en besogne: dans vingt-quatre heures, Sans-culottes de tous les départements, votre affaire serait faite. Rappelez-vous comme on les a expédiés par centaines à Lyon et à Marseille. Agissons avec les traîtres comme ils agissent avec nous. Nous les avons pris les armes à la main, il faut les traiter comme des Autrichiens. Main basse sur tous les royalistes, sur les fédéralistes, sur les administrateurs perfides qui ont trahi le peuple main-basse sur tous les lâches qui veulent détruire la république main basse sur les accapareurs, sur ces gros fermiers qui enterrent le bled, qui brûlent les gerbes pour nous réduire par la famine. Purgeons si bien la république, qu'il n'y reste plus que des hommes libres que la tête de l'infâme Brissot, que celle de la louve autrichienne, paraissent, avant huit jours, à la lunette fatale que tous les traîtres et les fripons, d'un bout de la république à l'autre, jouent à la main chaude que le scélérat Bailly, que nous tenons enfin, soit raccourci à l'entrée du Champ-de-Mars, au même lieu où il dégaina le drapeau rouge et donna le signal pour massacrer le peuple que tous les gredins qui vendirent ce peuple au tyran, dans l'assemblée constituante, dans l'assemblée législative et dans la convention, perdent également le goût du pain. Point de quartier pour les ennemis de la Sans-culotterie. Le jour de la vengeance est arrivé, l'heure de la mort va sonner qu'ils périssent tous jusqu'au dernier, foutre! La grande ronde du Père Duchesne, N°287 Dans les prisons, pour passer en revue tous les aristocrates, tous les royalistes, tous les Brissotins qui sifflent la linotte. Sa grande colère de
voir que l'on se fout du peuple en allongeant la courroie au sujet du jugement de Brissot, de la veuve Capet, du prêtre Fauchet, de Vergniaud, de Gensonné, du borgne Manuel et de tous les autres scélérats qui voulaient dépecer la république, et en vendre les lambeaux au roi Georges-Dandin, au Mandrin de Prusse et au Cartouche de Vienne. Je viens de faire ma ronde dans les prisons. J'y ai passé en revue tous les jean-foutres qui sifflent la linotte. Ah, foutre, comme tous ces muscadins, si fiers, si rodomonds, quand ils avaient la clef des champs, sont maintenant adoucis! Comme ils ont le bec jaune! Comme ils font les chiens couchants, depuis qu'ils sont en cage. Tous ces fiers à bras qui devaient mettre les Jacobins en capilotade, qui, du soir au matin, gouaillaient les patriotes, qui se vantaient dans les cafés, dans les places publiques, de donner de la pelle au cul à la convention, qui se réjouissaient de nos disgrâces, qui, sans cesse, tiraient des lances pour La-Fayette, Dumouriez et Custine, qui devaient, avant la chute des feuilles, faire disparaître Paris de dessus la carte, qui osaient prononcer le nom de roi et nous menacer de remettre sur le trône le prétendu fils de Louis-le-raccourci, tous ces viédases, prêtres, nobles, financiers, robins, sont aussi capons qu'ils étaient insolents ils ne rêvent plus que guillotines, toutes les fois qu'ils entendent gémir les gonds des guichets ils se croient septembrisés, et ils se jettent à genoux, la face contre terre, pour demander grâce. Il faut voir la mine allongée de l'infâme Brissot le bougre, autant qu'il le peut, fait contre fortune bon coeur. Quand je parus devant lui, il frémit de rage. "vieux gueux, me dit-il, tu es un des auteurs des maux que j'endure tu n'as cessé de me vilipender et de me couvrir de boue c'est de ta foutue fabrique de fourneaux que les noms de Brissotins et de Girondins sont sortis tu n'as cessé de me dénoncer dans tes colères. Ce peuple badaud, à qui je savais si bien jeter de la poudre aux yeux, me regardait comme un franc Sans-culotte sans toi et une poignée de gueulards qui n'ont cessé de tomber sur ma friperie aux Jacobins, aux Cordeliers, la France aurait maintenant un roi, je serais premier ministre. Qu'as tu gagné en me persécutant, misérable marchand de fourneaux? Que t'avais je fait? Le compère Roland ne t avait il pas aussi fait un pont d'or pour chanter ses louanges? La reine Coco ne t'a t elle pas aussi voulu protéger? Au lieu de refuser ses bonnes grâces, et de dénoncer les offres qu'elle te faisait, si tu t'étais mis de notre bord, ta fortune serait faite. "Comme la tienne, bougre de Cartouche, lui répartis je. Te voilà propre maintenant, avec tes assignats, tes écus, tes louis, tes guinées. Que les tyrans dont tu étais l'espion et l'avocat, viennent donc te tirer de presse! Que le chétif palefrenier du cheval rétif d’Allemagne, appelé roi d’Angleterre, que ce Pitt si puissant et qui a tant de quibus à son service, essaye donc de te sauver, qu'il mette sur pied tous les matins, à la pointe du jour, cinq ou six cents bandits et autant de guenons pour assiéger la porte des boulangers et enlever le pain, afin de soulever le peuple. Toutes
ces finesses sont cousues de fil blanc, et les Sans-culottes n'en seront pas dupes. Toutes ces tracasseries, imaginées pour exciter la contrerévolution, retomberont sur toi, et avanceront le terme de ton abominable existence il ne te reste plus que le temps de dire ton in manus. On a beau tourner autour du pot pour te juger, il faudra bien, bon gré, mal gré, que tu joues à la main chaude. La France entière t'accuse. S'il ne se trouve personne pour rédiger ton acte d'accusation, je m'en charge, foutre, et je réponds dans deux heures de voir ta face blême à la fenêtre. Pour te condamner, je n'irai pas chercher midi à quatorze heures, et prendre le roman par la queue. Quand tu seras encruché sur le fauteuil, je te demanderai s'il a existé un complot pour dépecer la république tu ne pourras le nier car, foutre, dès le commencement de la révolution, tu l'as proposé aux Jacobins. Je prouverai comme quoi depuis tu as remué ciel et terre pour brouiller les cartes à l'assemblée législative et dans la convention. Que répondras tu, foutre, quand je mettrai au grand jour toutes tes cabales pour sauver l'ivrogne Capet, quand je dévoilerai ton âme de boue, quand je te reprocherai d'avoir défendu dans tous tes discours et dans tes écrits tous les ennemis du peuple, d'avoir fait nommer Dumouriez au ministère, et d'avoir plaidé sa cause à la convention, quand il livrait la France aux Prussiens et aux Autrichiens? Pourras-tu te défendre d'avoir été le complice de ce scélérat qui appelait ta clique la partie saine de la convention, et qui voulait faire marcher son armée contre Paris pour te protéger? Ne seras tu pas confondu, anéanti, quand je rappellerai tous les coups de chien que tu as employé pour détruire le berceau de la liberté, quand je dévoilerai toutes les manoeuvres du vieux tondu de Roland qui n'était que ton prête-nom pour allumer la guerre civile, et armer les départements contre Paris? Pourrastu nier, foutre, que c'est toi qui as fait massacrer les patriotes de Marseille et de Lyon? Si cette dernière ville est maintenant embrasée, n'est ce pas ton ouvrage? Sur ses ruines fumantes les vieillards, les femmes, les enfants demandent vengeance au ciel contre toi. Les muscadins euxmêmes, maintenant qu'ils sont entre deux feux, et qu'ils ne peuvent échapper au supplice qu'ils ont mérité, t'accuseront aussi de les avoir égarés, de les avoir excités à la révolte. C'est par tes mains que Toulon a été livrée aux Anglais. Tout le sang qui va couler pour les chasser de cette place, rejaillira encore sur toi. Mais tous ces forfaits ne sont encore que des bibus en comparaison de celui dont tu t'es rendu coupable, en forçant la France à déclarer la guerre à toute l’Europe. Je ne parle point des Colonies que tu avais vendues aux Anglais, et que tu as mises à feu et à sang. Non, foutre, la guillotine est un supplice trop doux pour tous les crimes que tu as commis. Il n'est pas de famille en France que tu n'aies mise en deuil, et pourtant tous les crimes dont tu t'es rendu coupable ne sont que de l'eau rose en comparaison de ceux que tu méditais. Après avoir ainsi défilé mon chapelet et vidé mon coeur, je fous le camp pour aller aussi chanter la même gamme à Gensonné, Vergniaud, et autres
cuistres de la Gironde. Je trouvai le prêtre Fauchet battant la campagne, et desséché comme un hareng-saur devant une image de Charlotte Corday. Manuel s'arrachait le reste de ses cheveux de rage, de n'avoir pas été le mari de la grosse Babet. Le cuistre Carra, qui dans ce moment n'avait pas ses lunettes, en me voyant entrer dans son galetas, me prit pour un Anglais qui venait le délivrer au nom de son cher duc York. "la France est elle conquise, s'écria t il mon petit prince est-il roi de France? Quelle place va t il me donner pour tout ce que j'ai souffert pour lui? Va t il me faire milord, duc ou prince? Milord Carra, le duc Carra, le prince de Carra! "Méprisable coquin, c'est donc pour de pareilles chimères que tu as trahi ta patrie? Je ne m'arrêtai pas longtemps avec tous ces brigands leur présence m'inspirait trop d'horreur. Chemin faisant, je donnai un coup de pied à la Conciergerie, pour rendre visite à la veuve Capet. Je trouvai la garce aussi insolente que de coutume. Tu as beau jurer et te débaptiser, vieux marchand de fourneaux, me dit elle, je ne serai pas raccourcie, j'ai des amis partout et dans la convention même ils ont la patte bien graissée pour allonger la courroie et pour m'ouvrir, un beau matin, les portes de cette prison. Oh je n'en doute pas, coquine, mais le peuple est là. Il faudra bien qu'on en passe par où il voudra, car c'est le souverain, c'est le maître ce n'est que quand il dort, qu'on peut se foutre de lui, mais quand il se réveille, gare la bombe ton gros cocu avait aussi de bons amis dans la convention, il n'en a pas moins joué à la main chaude tu essayeras aussi la cravate, foutre. La grande colère du Père Duchesne, N°288 De voir que des Muscadins déguisés, empêchent les femmes des braves Sans-culottes de porter la cocarde nationale. Ses bons avis à toutes les luronnes qui ont si bien foutu la danse à tous les Muscadins de Versailles, le 6 octobre, de ne pas se démentir. Sa grande motion pour qu'on enlève, d'un seul coup de filet, tous les aristocrates et les royalistes qui brouillent les cartes parmi nous, et qu'on les embarque pour le Mississipi. Les Sans-culottes ne s'entendent pas, foutre. L'un veut blanc, l'autre veut noir. Ils se chamaillent pour des vétilles, tandis qu'ils ne devraient avoir tous qu'un seul coeur, qu'une seule âme, qu'une seule volonté. Comme disent les bonnes gens, si l'un veut aller à dia, et l'autre à hue, la machine ne marchera jamais et pourtant il faut qu'elle aille et promptement, foutre. Ce n'est pas la faute de la convention, car, dieu soit loué, elle vient de donner un fameux coup de collier, en ordonnant l'arrestation de tous les gens suspects elle a fait plus: elle a désigné ceux que l'on doit regarder comme tels. Pourquoi donc, foutre, les Sansculottes qui ont maintenant la bride sur le col, s'endorment ils avec ce
qu'ils ont de poisson péché? Pourquoi s'amusent ils à prendre des mouches, tandis qu'il leur est si facile, d'un seul coup de filet, de balayer la république, de tous les monstres qui ont voulu la perdre? Pourquoi tous les jean-foutres qui ont trempé dans le tripotage du fédéralisme, sont ils encore à la tête des administrations, des départements et des municipalités? Ne devaient ils pas tous siffler la linotte? Qu'attend t on pour les juger? Veut-on leur donner le temps de recommencer leurs fredaines? Il est bon d'être humain, mais il ne faut pas être imprudent et, comme je l'ai souvent dit, il vaut mieux tuer le diable que le diable nous tue. Pourquoi tous les jean-foutres qui, dès le commencement de la révolution, ont tourné casaque à la Sans-culotterie, pour se ranger autour de l'ogre Capet, et le soutenir contre vent et marée, et qui maintenant ont l'air de mettre de l'eau dans leur vin, parce qu'ils ne sont pas les plus forts, pourquoi, tonnerre de dieu, ont ils encore leur olivier courant? Pouvonsnous être dupes de leurs singeries? Celui qui n'a pas toujours aimé le peuple, et qui n'a pas vu la lumière, quand le beau jour de la liberté a éclairé la France, celui-là est une bête brute, indigne de vivre avec des hommes libres, ou un tigre qu'il faut bannir de la société. Est-il possible qu'un homme de bonne foi ait pu jamais balancer entre la liberté et l'esclavage, entre la république et la royauté? Je passe en revue tous ceux qui sont restés fidèles au peuple et ceux qui l'ont trahi. Parmi les déserteurs de la Sans-culotterie, je ne vois que des riches croupis dans tous les vices, que des ambitieux, des intrigants, des voleurs, des escrocs, des joueurs, des hommes de loi, des accapareurs, tous les inutiles, tous les chefs de l'espèce humaine mais, foutre, en retournant la médaille, en examinant le côté des Sans-culottes qu'y rencontre t on? Des pères de famille, de bons artisans, des ouvriers, le soutien de l'état, qui dans leur misère bénissent la révolution et la soutiennent de tout leur pouvoir, dont les enfants combattent pour la liberté et versent leur sang pour la patrie. Ce n'est que là que je vois des hommes et de véritables républicains. Ce n'est pas pour avoir des places ni pour s'enrichir, qu'ils persévèrent leur unique ambition est d'être libres, et de pouvoir se dire en eux-mêmes: nul n'est au dessus de moi, personne n'est au dessous de moi. Voilà pourtant les deux espèces d'hommes qui sont en guerre maintenant. La raison est aux prises avec le mensonge, le vice avec la vertu, la probité avec le crime. Riches égoïstes vous avez engagé la danse, et bien, foutre, vous paierez les violons. Le combat est commencé, c'est un combat à mort, nous allons voir comme vous en sortirez. Braves Sans-culottes, plus de faiblesses, plus de pitié pour les lâches qui vous ont abandonné. Saisissez la balle au bond. Si vous ne portez pas le dernier coup à l'aristocratie, vous allez bientôt lui voir lever encore une fois la tête hideuse, pour vomir sur vous les poisons. Si dès le 14 juillet vous aviez fait main basse sur vos ennemis, vous seriez maintenant libres et
heureux. Vous vous levez en masse pour sauver la république, il faut que cette masse écrase les tyrans et leurs esclaves, il faut avant de vous rasseoir qu'il n'existe plus, ni aristocrates, ni royalistes, ni feuillants, ni modérés. Vous voulez tailler dans le vif et employer les grandes mesures pour vous sauver, eh bien! Foutre, le Père Duchesne va vous les indiquer. Faites moi rafle sans pitié de tous les jean-foutres, qui se sont montrés les ennemis de la révolution, non pas seulement pour les tenir en cage jusqu'à la paix, car alors qu'en feriez vous? En relâchant toute cette ménagerie, vous devriez vous attendre à une nouvelle guerre, tous ces coquins ne rentreraient dans la société que pour brouiller les cartes. Jamais ils ne vous pardonneraient de vous être rebiffés contre eux et de les avoir tenus un moment enchaînés. Leur rage n'aurait fait qu'augmenter, et il faudrait toujours que vous finissiez par les étouffer si vous ne vouliez être dévoré par eux. N'allons donc pas par deux chemins et marchons droit au but. Notre ennemi est là, tombons sur lui. Occupons nous de tous les traîtres, de tous les faux patriotes, de tous les royalistes. Traitons-les comme les Anglais ont traités les loups. Qu'il n'en reste pas un seul sur le territoire de la république. Qu'ils soient tous embarqués pour le Mississipi et qu'on les envoie à la garde du dieu de la Vendée, fonder une nouvelle colonie à Luchine, au Japon, en Afrique, dans les grandes Indes, où on voudra enfin, pour peu que ce soit bien loin de nous c'est là qu'ils pourront, s'ils le veulent se donner un roi et sacrer s'ils le veulent l'avorton du Temple. C'est là, foutre, qu'obligés de travailler pour subsister, tous ces muscadins sentiront les obligations qu'ils avaient aux Sans-culottes qui les nourrissaient et les habillaient, ou plutôt leurs mains douillettes se refuseront au travail ils ne sauront pas arroser la terre de leurs sueurs pour la rendre féconde ils seront obligés de se manger eux-mêmes, et la nature sera vengée, foutre. Sans-culottes, mes amis, si vous ne vous empressez d'embarquer cette pacotille de malédiction, vous ne ferez que de l'eau toute claire. N'oubliez pas surtout les calotins qui troublent la cervelle de vos femmes et de vos filles, qui, pour l'amour de dieu, vous enrôlent dans la grande confrérie je vous recommande cette bougre de canaille qui ne veut que plaie et bosse, qui, depuis tant de siècles, vit aux dépens des sots, qui empoisonne tout ce qu'elle approche, qui a fait périr plus d'un millier d'hommes depuis 1793 ans, et viendrait à bout de faire disparaître tout à fait l'espèce humaine de ce monceau de boue que nous habitons, si on lui laissait faire plus longtemps les tours de gibecière. Pour qu'elle n'aille pas empoisonner les autres contrées qui ont le bonheur de ne pas la connaître, foutons à fond de cale de nos plus vieux vaisseaux cette maudite engeance, et que le diable l'emporte au milieu des rochers ou au fond des mers. Voilà, Sans-culottes, le seul moyen d'avoir la paix. Quand vous n'aurez plus sur les bras tous les ennemis qui vous tourmentent dans
l'intérieur, ceux du dehors mettront bientôt les pouces. Organisons donc promptement l'armée révolutionnaire, pour mettre à la raison les royalistes, les aristocrates et tous les ennemis du peuple. Les moments sont précieux, foutre. Demain, si nous voulons nous entendre, et marcher d'accord, les ennemis de la république ne seront plus, et la liberté sera sauvée, foutre. A mes Commères des halles et des marchés. Tonnerre de Dieu, quels fagots ose t on débiter sur votre compte, braves luronnes? On dit que vous arrachez la cocarde nationale aux citoyennes qui vont acheter votre marée et vos choux? Est ce qu'il se serait glissé parmi vous quelques muscadines pour vous donner ces mauvais avis? N'est ce pas un honneur aux femmes aussi bien qu'à leurs maris, de porter les couleurs de la liberté? On se lasse de faire la guerre des pains de quatre livres, depuis que la farine nous arrive, la guerre des cocardes va commencer. Nos commères, souvenez vous du 6 octobre qui vous a fait tant d'honneur ce jour là, il n'y en avait pas une de vous qui n'eut un ruban tricolore. Vous n'avez pu changer, foutre continuez de porter le signe de la liberté et de l'égalité, c'est une plus belle parure que toutes les dentelles, que les pompons et les ajustorions des muscadines, foutre. La grande colère du Père Duchesne, N°289 De voir que les accapareurs se foutent des décrets de la convention, et qu'ils continuent, comme de plus belle, à affamer les Sans-culottes dans tous les départements. Ses bons avis aux braves Montagnards, pour qu'ils s'occupent nuit et jour des subsistances, et qu'ils fassent marcher promptement l'armée révolutionnaire avec la sainte guillotine qui fera miracle, et qui mettra à la raison les accapareurs, les traîtres et tous les contre-révolutionnaires. Comment, tonnerre de dieu, nous ne mettrons pas à la raison les riches, ces égoïstes infâmes, ces accapareurs, tous ces scélérats qui affament le peuple! Partout le peuple souffre, languit, se désespère. On se fout des décrets de la convention. Depuis qu'elle a fixé le prix du grain, les propriétaires, les gros fermiers enterrent nos subsistances, et les font disparaître, pour les vendre à nos ennemis. Depuis le décret contre les accapareurs, les marchands manufacturiers, les trafiquants vident leurs magasins, sans qu'on sache ce que deviennent leurs marchandises. C'est donc un parti pris de nous faire périr de froid et de faim. Il faut donc, foutre, que la république soit bien avantageuse aux Sans-culottes, puisque les riches font tant d'efforts pour la détruire! Quoi, nous sommes mille contre un, et nous nous laisserions lier et garrotter par une poignée de fripons qu'il ne tient qu'à nous de faire rentrer cent pieds sous terre! J'entends toujours prêcher le respect pour les propriétés cela est bel et bon mais la première propriété, n'est ce pas l'existence? Est-il une autorité dans le monde qui puisse nous la ravir? La terre, comme l'air et l'eau,
appartient à tous les hommes. Les riches ne doivent ils pas être satisfaits d'avoir les trois quarts et demi du gâteau, et veulent ils empêcher les pauvres de glaner, lorsqu'ils ont fait, eux, de si bonnes moissons? Encore une fois ventre affamé n'a point d'oreilles. Affameurs du peuple, craignez son désespoir. Que nous aurait servi d'avoir détruit nos anciens tyrans, si nous en laissions d'autres prendre leur place? Ce n'est pas à cause de leurs vieux parchemins rongés de vers, que nous avons foutu la chasse aux nobles, c'est parce qu'ils nous opprimaient. Que nous foutaient toutes leurs bricoles bleues, rouges, vertes, leurs crachats, leurs croix de Malte, de Saint-Louis, et un tas d'autres foutaises que l'on n'aurait jamais regardé que comme des hochets d'enfants et des marottes d'imbéciles, si tous les signes n'avaient été achetés au prix du sang du peuple? Dans tous les temps, dans tous les pays, ses oppresseurs ont une mauvaise fin. Quand le sac est trop plein, il faut qu'il crève. L'insecte qu'on veut écraser se recoquille, se regimbe et pique celui qui veut le détruire, et l'on croit que des hommes libres seront assez badauds pour ne pas exterminer les plats jean-foutres qui, pour être leurs maîtres, veulent les réduire à la plus affreuse misère? Non, foutre, non, le premier article de la déclaration des droits de l'homme, c'est la résistance à l'oppression, et quand la convention ne l'aurait pas décrété, ce principe est dans le coeur de tous les hommes. L'esclave souvent écrase avec ses fers, le tyran qui exige de lui plus que puissance. Quelle est donc votre espérance, ennemis de l'égalité? Croyez vous à force de nous faire souffrir, que nous tomberons à vos pieds pour vous supplier de nous donner la caristade, tandis, foutre, qu'il nous reste des bras, pour arracher de vos griffes l'or que vous avez accaparé et les clefs du grenier que vous ne voulez pas lâcher. Peuple, géant formidable, réveille-toi. Ecrases sous tes pieds tous ces nains qui profitent de ton sommeil, pour t'enchaîner. Quoi donc, après avoir foutu le tour à tous les hobereaux de l'ancien régime après avoir fait danser la carmagnole aux marquis, aux ducs, aux princes, aux moines, aux évêques, aux archevêques, aux cardinaux après avoir retranché le picotin de l'animal aux longues oreilles, appelé pape après avoir forcé toutes ces têtes à perruque et sans cervelle des parlements, de pendre au croc leurs robes rouges, après avoir rogné les ongles des oiseaux de proie de la finance après avoir détruit la ménagerie des Tuileries et fait rouler sur l'échafaud la tête du monstre biscornu, nommé roi de France et de Navarre, tu te vois encore au premier chant de mâtines. Tout ce que tu fais de bon et d'utile, est à l'instant détruit. De nouveaux fripons remplacent les anciens fripons. De nouvelles vermines veulent te ronger. Millions de foutre, je mange mon sang, en songeant à tous les maux qui nous accablent, tandis, foutre, qu'il est si aisé d'y apporter du remède. Où est donc cette armée révolutionnaire, qui devait marcher dans tous les départements avec la sainte guillotine, pour purger la république
des accapareurs, des traîtres, des conspirateurs? N'aurait elle pas dû, foutre, être formée le même jour que la convention l'a décrétée? D'où vient donc cette lenteur à exécuter les mesures les plus salutaires? Quels sont les viédases qui paralysent le bras de la république, quand il va frapper ses plus mortels ennemis? Ah, foutre, si les Sans-culottes étaient aussi agissants que les aristocrates, la France serait bientôt balayée de tous les scélérats qu'elle renferme. Ils ne s'amusent pas à la moutarde, ils ne sont qu'une poignée, et ils trouvent chaque jour mille moyens de nous nuire et de nous tourmenter. Il faut pourtant en finir, foutre. La misère est à son comble. Nos subsistances sont entre les mains des contre-révolutionnaires. Dans tous les départements, les Sans-culottes languissent. Eh bien, foutre, que les Sans-culottes se lèvent qu'ils s'emparent de tous les propriétaires, des gros fermiers accapareurs, qu'ils les menacent de leur faire perdre à euxmêmes le goût du pain, si la disette continue. Bientôt, foutre le bled abondera dans les marchés, et nous vivrons, foutre. Vous qui avez bâti l'édifice de la constitution braves Montagnards, vous n'avez rien fait en élevant ce temple, s'il ne devient pas celui de l'abondance. Je me fous d'un beau palais entouré de colonnes magnifiques, s'il est habité par la misère. Vous avez promis le bonheur au peuple en construisant cet édifice, malheur à vous si vous ne lui tenez pas parole. Occupez vous nuit et jour des subsistances. Laissez faire aux ministres leur besogne et ne souffrez pas que vos comités se mêlent de gouverner la république elle deviendrait bientôt la cour du roi Pétaut, si des avocats voulaient tracer des plans de campagne et conduire des armées, et si des emballeurs de magasins administraient les finances. Au lieu d'envoyer des commissaires dans les armées, pour pomper du soir au matin avec les généraux, faites en partir par centaines dans les départements pour assurer les subsistances. Du pain, foutre! Voilà le cri du peuple. N'attendez pas que les contre-révolutionnaires aient fait passer nos grains à nos ennemis pour vous occuper de nos garde-manger. Décrétez foutre, que tout propriétaire qui n'aura pas fourni à la république une quantité de bleds proportionnée au produit de ses terres, sera dépouillé de sa propriété et que ses champs seront partagés entre tous les sans-culottes qui ont de bons bras, et qui n'ont pas un sillon à labourer. Qu'une bonne part du gâteau soit également délivrée à celui qui dénoncera un propriétaire accapareur. Défendez surtout qu'il sorte une seule aulne de drap de nos manufactures pour l'étranger. La France produit vingt fois plus qu'il ne faut pour les besoins de ses habitants. Eh bien, foutre, que tous les citoyens soient d'abord calés de la tête aux pieds et bien nourris! C'est la volonté du peuple, législateurs. Vous avez été choisis pour l'exécuter, vous l'avez juré, foutre. Que tous les Sans-culottes soient culottés! Ainsi le veut la constitution que vous avez faite. Faites la donc exécuter cette constitution. Que tous vos ennemis et les nôtres périssent! N'allez pas jeter le manche après la
cognée. A vous la balle, et tandis que vous la tenez pour faire le bonheur du peuple, profitez en songez qu'en vous séparant, vous devez être comblés de gloire ou accablés de malédictions, foutre. La grande colère du Père Duchesne, N°290 Contre le palefrenier Houchard qui, comme son maître Custine, a tourné casaque à la Sans-culotterie. Sa grande joie de voir bientôt ce butor mettre la tête à la fenêtre. Ses bons avis aux braves soldats républicains pour qu'ils lui dénoncent tous les jean-foutres qui regrettent l'ancien régime, et qui préfèrent de porter la livrée du tyran, plutôt que d'endosser l'habit des hommes libres. Que des ci-devant nobles, que des calotins, que des financiers, que des robins trahissent la patrie, cela ne m'étonne pas, foutre. D'un sac à charbon on se saurait tirer blanche farine. La caque sent toujours le hareng mais qu'un Sans-culotte, élevé à un grade éminent, tourne casaque à la république, il y a de quoi se débaptiser, et cependant, foutre, nous n'en avons que trop d'exemples, pour l'honneur de la Sansculotterie. Quelle est donc l'espérance de ces renégats? Croient ils qu'ils jouiront du fruit de leurs trahisons, si la contre-révolution, qu'il est aussi impossible de faire que de prendre la lune avec les dents, pouvait arriver? Les aristocrates qui se servent de ces lâches comme le singe de la patte du chat pour tirer les marrons du feu, les méprisent autant que nous. On aime la trahison, mais on déteste le traître. Si les marquis, les ducs, les princes pouvaient remonter sur l'eau, pourraient ils se fier aux jean-foutres qui ont trahi leur patrie? Ils rougiraient d'avoir eu obligation à de pareils viédases, et ils commenceraient par les faire pendre, pour étouffer avec eux le souvenir des services qu'ils en auraient reçu, et leur faire restituer l'or qu'ils leur ont donné. Comment se Peut-il qu'un foutu palefrenier devenu général d'armée, ne soit pas content de son sort, qu'il veuille trancher du grand seigneur, en trahissant la république qui l'a tiré du fumier pour le mettre sur le pinacle? Un Houchard vouloir singer un Dumouriez! C'est bien l'occasion de dire que les petits chiens veulent comme les gros pisser contre les murs! Mais pouvait on mieux attendre d'un misérable goujat qui ne s'est élevé qu'à force de bassesses et en décrottant les bottes du général Moustache! Tel maître, tel valet, foutre. Si l'infâme Custine n'avait pas connu l'âme de boue de son ci-devant palefrenier, s'il ne l'avait pas regardé comme son bras droit, l'aurait il fait son égal? C'est le crispin de la comédie, qui prend les habits de son maître pour lui aider à faire un coup de main. J'espère, foutre, que le procès de ce vil coquin ne traînera pas, et qu'il va, sous peu de jours, jouer à son tour à la main chaude mais ce n'est point assez que de détruire ainsi les traîtres en détail, il faut une fois pour toutes faire main basse sur eux, et les balayer dans toutes nos
armées, et en purger la république. Pourquoi, tonnerre de dieu, souffre t on à la tête de la troupe de ligne un tas de viédases, ci-devant sergents, brigadiers, maréchaux de logis, plus aristocrates que les muscadins qu'ils ont remplacés, et qui ne sont parvenus sous l'ancien régime qu'en décrottant les bottes de leurs officiers? Ceux qui ont fait le métier de chlagueurs, sont ils dignes de commander à des hommes libres? La plupart de ces capons qui doivent tout à la république, qui ne pouvaient tout au plus espérer que devenir porte-drapeaux, ne sont pas contents de se voir aujourd’hui chefs des mêmes régiments, après avoir été les derniers officiers de guérite ils clabaudent comme des talons rouges, et poussent des soupirs à faire peur, en racontant la fin piteuse de Louis le traître ils méprisent l'habit national, et malgré les décrets de la convention, ils s'obstinent à porter la livrée de la royauté ils veulent continuer d'être des culs-blancs, plutôt que d'endosser l'uniforme de la liberté. Braves défenseurs de la patrie, dénoncez moi tous les jean-foutres qui vous commandent le Père Duchesne est un vieux soldat qui connaît le service il sait quel est l'esprit des épauletiers il se souvient de toutes les tracasseries qu'ils lui faisaient il n'a pas oublié que pour un verre de vin de plus ou de moins, pour une parole plus haute que l'autre, on vous foutait autrefois un pauvre fusillier dans un cachot pour trois ou quatre mois. Il faut obéir à ses chefs pour tout ce qui regarde le service, rien de plus juste, foutre mais, hors de là, l'officier n'a aucun droit sur vous, et quand un butor avec son plat à barbe s'avise de venir troubler votre chambrée, pour vous empêcher de chanter la carmagnole, envoyez le moi faire foutre: s'il ose en votre présence gouailler contre la république et regretter l'ancien régime, s'il cherche à vous embêter avec ces journaux du diable, et les feuilles empoisonnées que Pitt et Cobourg répandent dans les armées pour vous foutre dedans, écrivez à l'instant au Père Duchesne, et faites lui connaître le nom et le grade du jean-foutre qui a la patte graissée pour vous faire faire des pas de clerc j'ai le bras long, foutre, quoique je ne sois qu'un misérable marchand de fourneaux j'aurais du pain cuit pour le reste de mes jours, si j'avais autant de louis que j'ai débusqué de fripons. Braves Sans-culottes des armées, si on vous fait quelque injustice, si vos officiers gaspillent votre prêt, s'ils vous maltraitent encore une fois, adressez vous au Père Duchesne il se mettra en quatre pour vous rendre service, et vous venger mais surtout ne me dénoncez pas à tort et à travers, et n'allez pas confondre les braves bougres avec les traîtres surtout, mes amis, que le service se fasse. Tandis que les brigands qui vous font la guerre, ne remuent que comme des automates, et ne marchent qu'à coups de bâton, faites voir que des soldats républicains connaissent la discipline. Je ne vous recommande pas le courage, vous en avez assez. Suivez toujours les bons avis que je vous donnerai, car jamais je ne vous ai trompé ayez toujours confiance dans vos frères les Sans-culottes de Paris, vous n'avez pas de meilleurs amis continuez de combattre et de vaincre pour la république. Plutôt vous foutrez le tour aux
esclaves des brigands couronnés, plutôt vous jouirez du fruit de vos exploits. Quelle joie à la paix de vous voir au milieu de vos concitoyens, et d'embrasser vos mères, vos pères et vos frères! Toutes les jeunes filles qui sèchent d'ennui pendant votre absence, iront au devant de vous pour vous couronner de lauriers, tandis, foutre, que nous autres, lurons de la ganse, nous ferons sauter les brocs et les pintes pour vous recevoir. A ce spectacle les aristocrates frémiront de rage, et ils disparaîtront pour jamais. Lorsque vous serez partout fêtés et choyés, les Prussiens, les Autrichiens, les Anglais, les Hollandais, les Espagnols rentreront chez eux tous penauds, comme les colimaçons dans leurs coquilles. Le peuple de leurs pays, accablé de misère, pour avoir soutenu la cause de ses tyrans, gémira, pleurera à l'approche de ces pileurs de poivre. Toutes les portes leur seront fermées, et ils ne trouveront nulle part un misérable enfant de choeur à étouffer, pas seulement un pot de bière pour se désaltérer. Dans une république le soldat est citoyen il est regardé comme le sauveur de son pays, et chez les nations assez stupides pour se laisser gouverner par un âne couronné, les soldats sont avilis et traités comme des nègres. Guerriers républicains, soutenez jusqu'à la mort la cause de la liberté ébranlez, renversez tous les trônes des despotes vive la république, vive la Sans-culotterie, foutre. Avis les soirées de la campagne. Feuille périodique Jusqu'ici les journaux ont été rédigés en faveur de ceux qui savaient lire le nôtre est destiné à ceux qui ne savent qu'écouter : les rallier autour de la Constitution, leur inspirer le goût des vertus républicaines, leur présenter de nouvelles découvertes en agriculture, tel est le but que nous nous proposons. La simplicité du langage, le soin de décomposer les idées et de les amener à la portée de l'esprit le moins cultivé, voilà nos moyens. Chaque numéro sera de 8 pages in 8 il en paraîtra deux par semaine, le mardi et le vendredi, à commencer le premier octobre prochain. Le prix est de 18 livres par an, et 9 livres pour six mois, franc de port. On s'abonne à Paris, chez Girardin, directeur du cabinet littéraire, jardin de l'Egalité et dans les départements, chez les directeurs de la poste et les principaux libraires. La grande colère du Père Duchesne, N°291 De voir que les Sans-culottes saignent du nez quand il faut frapper à coups redoublés sur les vermines qui s'engraissent du sang du peuple. Ses bons avis à tous les citoyens, et surtout aux habitants des campagnes, pour qu'ils fassent la conduite de Grenoble à tous les cidevant robins, avocats, greffiers, procureurs qui sont à la tête des départements, et qui s'entendent comme des larrons en foire avec les
accapareurs pour affamer le peuple. Il n'y a pas de mauvais coups sur la bête puante, foutre c'est donc pain béni de dauber sans cesse les aristocrates et les calotins mais il est une autre vermine aussi dangereuse et dont on ne parle que par ricochet c'est la robinaille. Depuis le déluge jusqu'à la prise de la Bastille, les litanies de la Sans-culotterie de tous les pays, étaient: délivrez nous, mon Dieu, des griffes des hommes de loi. Cette espèce vorace a plus fait de mal aux hommes que la peste, la guerre et la famine car tous ces fléaux ne sont que passagers: comme dit le proverbe, il n'est point de si grande guerre, qu'il n'en réchappe. Quand les tyrans qui gouvernent le monde, et qui se disputent les dépouilles des peuples, ont épuisé tous leurs trésors, et fait massacrer tous les soldats, il faut bien que le combat cesse. Faute de combattants, les rois sont obligés de mettre bas les armes, jusqu'à ce que les enfants de ceux qui ont été assez badauds pour sacrifier leur vie pour ces monstres, aient la force d'endosser la cuirasse et de porter le mousquet. Quelques années de paix réparent les malheurs de la guerre: quand la peste ou la famine ont rendu déserte une riche contrée, une fois que le mal est passé, on n'y songe plus d'autres habitants viennent peupler ces lieux abandonnés la terre produit de nouvelles moissons, et dans quelques années elle est aussi peuplée qu'auparavant. Ainsi donc avec de la patience et du courage, les pauvres humains surmontent l'infortune et viennent à bout de tout mais se Peut-il, foutre, qu'après avoir détruit les nobles, les prêtres et les rois, ils ne puissent se délivrer des sangsues de la chicane? La constitution républicaine, en rendant tous les Français égaux, a détruit pour jamais le règne du plus fort il faut aussi que celui du plus fin finisse il est temps de renverser une bonne fois la marmite des gens de loi, que les imbéciles plaideurs font bouillir il est temps que les citoyens s'entendent pour ne plus se chamailler et pour ne pas engraisser à leurs dépens des juges, des avoués, des défenseurs officieux, des huissiers, et tous leurs saute-ruisseaux. Il faut enfin que tous les procès soient jugés par des arbitres et non par des engueuseurs à jaquettes noires, qui vont chercher midi à quatorze heures pour nous prouver que ce qui est blanc est noir, et que ce qui est noir est blanc. Avec du bon sens et de la probité, il n'est pas de Sans-culotte qui ne débrouille mieux le procès le plus entortillé, que tous les braillards de palais. Chez un peuple libre, les lois doivent être simples et à la portée de tout le monde il faut qu'en ouvrant le livre sacré, le citoyen touche du doigt le chapitre qui le concerne. Je me souviens d'une vieille histoire que j'ai entendu raconter devers Caen, et que je n'oublierai de ma vie. En fait de procès, les Normands s'y connaissent, foutre, et je ne connais que les Manceaux qui les dégottent. Cette aventure qu'ils me racontaient avec admiration, et qui aurait bien dû leur servir d'exemple, prouve que c'est faute de s'entendre que les hommes se mangent le blanc des yeux pour nourrir des jean-foutres qui
rient de leurs sottises. Voici le fait, foutre. Deux pauvres bougres que l'on appelait dans l'ancien régime des paysans, qui s'intitulent aujourd’hui citoyens, et qui le sont plus, foutre, que les plus huppés personnages, puisqu'ils nous nourrissent, s'avisèrent de plaidailler, sans trop savoir pourquoi car ils étaient amis dès le berceau, et, comme on dit dans le pays, ils avaient ensemble gardé les moutons mais leurs femmes s'étaient prises de propos, et les maris qui devaient savoir qu'on ne peut pas plus empêcher une femme de parler, que de faire cesser le vent qui siffle, furent assez benêts pour se mêler de la querelle. On en vient aux gros mots: les femmes jettent encore de l'huile sur le feu, et au lieu d'apaiser leurs maris, elles redoublent leurs cris. Dans la colère on ne prend pas garde à ce qu'on dit il échappe à ces furieux quelques expressions qui chatouillent l'honneur. En fait de ça, les Normands n'entendent pas raison l'un et l'autre compère crie haro sur son voisin. On prend des témoins, on dresse sa plainte chacun va trouver son procureur, son avocat des deux côtés on soutient que le cas est pendable. Voilà un bon procès bien emmanché. Déjà maître Harpagon, maître Brigandeau rient sous cape de la sottise des deux plaideurs, et ils se félicitent d'avance de les sucer jusqu'à l'eau rousse, et de ne leur laisser que les yeux pour pleurer. Déjà les apprentis Cartouches de ces deux corbeaux de palais commençaient à broyer du noir et à griffonner en lettres aussi larges que mon pouce la ruine de ces deux imbéciles. Quand on plaide, il faut avoir du foin dans les bottes, bon droit a toujours besoin d'aide, c'est ce qu'on sait mieux en Normandie que partout ailleurs. Aussi le jour où la cause devait être portée devant monsieur le bailli, chacun des deux plaideurs avait eu soin de garnir son gousset chacun avait chargé son cheval à le faire crever, de volaille, de gibier, de fruits, en un mot de ce qu'il avait de plus précieux il y avait des chapons pour celui-ci, des poulardes pour celui-là, une oie pour le greffier, un dindon pour le bailli. En cheminant vers la ville, nos deux hommes se rencontrèrent nez à nez dans le même cabaret et quoique l'un et l'autre fût triste comme un bonnet de nuit, ils font contre fortune bon coeur ils gardent le silence, mais ils avaient l'air de se dire: tu veux donc me ruiner? Le Père-la-joie, vieux riboteur, fermier du même canton, et leur ami commun, s'aperçoit de leur embarras, et quoiqu'il fût déjà dans une petite pointe de vin, il entreprend de les raccommoder. Colas, Mathurin, leur ditil, est ce que vous m-tais la clef sous la porte tous les deux? Ou portez vous donc toute votre basse-cour? V' n'avez, à c'qui m'semble, laissé à la ferme que la charrue? Ah, ah, ah, j'vous comprends v' allais graisser la patte d'vos proculeus, d'vos avocats et du bailli. Croyez moi, mes amis, arrangeons c-t affaire au cabaret v-nais choquer ensemble, et rebroussons chemin. J'ais honnête homme, dit Mathurin, et moi itou, répond Colas eh, foutre, qu'est ce qu'en doute, s'écrie le Père-la-joie. Tout un chacun dans le village vous aime et vous estime ça nous saignerait le coeur à trétous d'vous voir plus longtemps en bisbilles. Tout le grimoire du
bailli ne saura vous arracher un poil. Mathurin et Colas croient le Père-lajoie ils s'embrassent, et le procès est fini. Nos deux compères s'en retournent plus joyeux et plus amis que jamais. Qui mangea du fromage, foutre, à la place de la volaille et du gibier? Ce fût monsieur le bailli, ce furent les avocats, les procureurs. Braves Sans-culottes des campagnes, souvenez vous de la leçon du Père-la-joie si vous continuez de vous laisser jeter de la poudre aux yeux par les gens de loi, ils vous feront encore voir bougrement du pays chassez ces coquins de toutes les places n'en souffrez pas plus que de nobles et de calotins dans les administrations gardez vous surtout d'en nommer jamais un seul pour votre représentant n'oubliez jamais que Chapelier, Barnave, Thouret et les autres jean-foutres qui ont vendu le peuple à l'assemblée constituante, étaient des avocats rappelez vous sans cesse que Vergniaud, Gensonné, Brissot, Guadet, tous les crapauds du Marais étaient aussi des avocats. Si vous avez la guerre avec tous les tyrans, c'est la faute des gens de loi et de beaux esprits qui ont brouillé les cartes. Si vous manquez de subsistances, après une récolte excellente, si les denrées sont au poids de l'or, n'en accusez que les hommes de loi que vous souffrez bêtement à la tête des départements et des municipalités, et qui ont mis leur tête dans un bonnet avec les accapareurs pour vous affamer. Si vous ne donnez pas le coup de grâce à la robinaille, pas plus de liberté que de beurre, foutre. La grande joie du Père Duchesne, N°292 De voir que la convention donne le coup de grâce aux accapareurs, aux affameurs du peuple, aux muscadins et muscadines. Sa grande colère de ce que les grands intrigants et les gros fripons sont épargnés. Ses bons avis aux braves Montagnards pour qu'ils fassent déclarer suspects tous les jean-foutres qui étaient les amis de Brissot, et qui taupaient dans le fédéralisme avant le 31 mai. Le compère Audouin, brave montagnard, et journaliste de mon acabit, qui écrit pour instruire les Sans-culottes, et non pour amuser les muscadins, parle quelquefois de mes gaudrioles dans son journal souvent même il a fait l'éloge du vieux marchand de fourneaux, ce qui m'a chatouillé le coeur car, foutre, l'estime des véritables républicains m'a toujours paru préférable à toutes les richesses de l'univers il n'y a que ça qui reste l'or pur se trouve au fond du creuset. Que reste t il maintenant à ces cuistres soudoyés par la liste civile, pour mentir à tant la ligne dans leurs foutus journaux de malédiction? Le sapajou Gorsas n'est-il pas bien avancé d'avoir été dorloté par la vieille Roland? Au lieu d'aller faire des gambades dans le boudoir de cette guenuche, s'il avait au contraire continué de fréquenter les Sans-culottes, il serait encore aimé et chéri. Il est vrai, foutre, qu'il aurait eu moins de quibus, mais aussi il n'aurait pas le
trappe sur le col. Mais pourquoi salir le papier avec ces noms impurs revenons à nos moutons, et parlons du Sans-culotte Audouin. Dans son dernier numéro il m'adresse les paroles suivantes: "Eh bien, Père Duchesne, es-tu content de la convention? Elle a décrété l'armée révolutionnaire, elle a décrété un maximum pour les grains, elle a décrété l'incarcération de tous les scélérats, elle a décrété de grandes mesures, elle a décrété la taxe des denrées, elle a recomposé le tribunal révolutionnaire, en un mot, elle est décidée à se conduire avec une énergie vraiment républicaine. Presse donc l'exécution de tous ces décrets car, à quoi serviront-ils, s'ils ne sont pas exécutés? Ne vois tu pas que la Montagne agit depuis quelque temps pour écraser l'aristocratie financière, etc, comme la législature agissait pour détrôner le tyran? On lui ôtait sa garde, on rendait des décrets auxquels on savait bien qu'il refuserait sa sanction, on prenait tous les moyens de le rendre odieux et de l'affaiblir à mesure qu'il était détesté davantage, on mûrissait alors la journée du 10 août contre la cour, comme on mûrit maintenant le jour de la vengeance contre les accapareurs, les riches égoïstes, les vampires du peuple, il faut moins regarder les lois elles-mêmes appelées révolutionnaires que le but politique de ces mêmes lois: ou elles seront obéies par ceux qu'elles frappent, ou elles ne le seront pas. Dans le premier cas, le bien qu'elles promettent arrivera dans le second cas, le peuple reconnaîtra que la convention a rempli ses devoirs, et que c'est à lui en personne à suivre la route qui lui est implicitement indiquée. Le peuple n'a pas besoin de lunettes pour voir ce qu'il doit faire, si les scélérats que la convention veut frapper sont toujours scélérats. " Je réponds à mon compère Audouin, que je ne cesse de dire et de répéter ce qu'il m'adresse: comme lui, foutre, je rends justice à la convention la majorité est excellente elle veut sauver la république, et son voeu serait accompli, si tout ce qu'elle décrète était exécuté mais, par malheur, il y a des jean-foutres qui mettent des bâtons dans les roues. Des ambitieux, des fripons, des traîtres détruisent tout ce qu'elle fait de bon et d'utile mais, avec le temps, elle viendra à bout d'étouffer ses ennemis et les nôtres. Patience, foutre, on n'a pas fait Paris dans un jour: mais une fois pour toutes, si la convention veut être bien servie, qu'elle fasse donc impitoyablement raccourcir ceux qui la trompent ça me scie le dos de voir des jean-foutres qui l'ont déjà mise cent fois dedans, qui étouffent d'embonpoint à force de s'être engraissé du sang du peuple, continuer de plus belle, et faire la pluie et le beau temps, malgré la voix du peuple qui crie vengeance. Puisqu'il est décrété que les hommes suspects doivent être mis à l'ombre, pourquoi les bougres qui ont été les avocats de Dumouriez, et qui ont partagé avec lui le gâteau, se gobergent ils encore dans de riches appartements et font ils des chaires de chanoines avec l'or et les assignats qu'ils ont empochés? Pourquoi, foutre, certains Montagnards de nouvelle fabrique, qui jappaient comme des roquets, il y a quelques mois, au milieu des crapauds du Marais, ne sont ils pas aussi
regardés comme suspects? Ceux qui, avant le trente-et-un mai, étaient amis comme cochons avec la canaille Brissotine et Girondine, croient ils en être quitte aujourd’hui pour faire les bons apôtres, et pour nous dire que leurs chiens ne chassent plus ensemble? Croient ils que les Sansculottes se payent de cette monnaie? Non, foutre. Ceux qui ont une seule fois fait faux bond, et tourné, un seul instant casaque à la Sans-culotterie, ne doivent être regardés que comme des viédases. Ces jean-foutres n'ont reviré de bord que parce qu'ils ont vu le bon vent de notre côté s'il changeait encore, ils tourneraient de même comme des girouettes. Que la convention fasse donc elle-même un grand exemple qu'elle commence par se purger de tous ces intrigants et de tous les fripons qu'elle renferme mais, foutre, s'ils restent impunis, ils vont recommencer leurs fredaines elle verra encore deux partis se former dans son sein, et au lieu de travailler au bonheur du peuple, elle sera déchirée et avilie. Je vois l'orage gronder sur ma tête, et la grêle tomber sur moi, d'oser ainsi réveiller le chat qui dort mais, foutre, quand il s'agit du salut de la république, j'y vais de cul et de tête. Je n'ai pas plus de fiel qu'un pigeon au vis-à-vis de mes ennemis personnels mais j'ai une rancune éternelle envers ceux de la patrie. Je ne pardonne point, je ne pardonnerai jamais à ceux qui ont voulu armer les départements contre Paris je me souviendrai toujours du rapport de monsieur Barrère de Vieuzac sur les événements du 31 mai quand il aurait été dicté par Brissot il n'aurait pas été plus perfide. Si monsieur Barrère paraît aujourd’hui converti, je ne m'y fie pas plus qu'à la religion d’Henri-IV, qui répondit à un de ses courtisans, lorsqu'il lui reprochait d'avoir abandonné Calvin pour le pape, ventre saint gris, Paris vaut bien une messe. Je ne pardonne pas plus au cafard Cambon d'avoir empêché l'approvisionnement de Paris, en mettant son veto sur les secours que la convention voulait accorder à la municipalité pour acheter des grains quand il en était temps. Voilà, compère Audouin, ma profession de foi jamais on ne tirera de blanche farine d'un sac à charbon qui a bu, boira celui qui a été jeanfoutre, sera encore jean-foutre. Nous gâterons tout, si nous voulons ménager la chèvre et le chou tu as raison de dire que le peuple n'a pas besoin de lunettes pour voir ce qu'il doit faire mais il faut que la convention en ait d'excellentes pour examiner tout ce qui l'entoure, et examiner toutes les paroles et les actions des scélérats qui méprisent ses décrets et qui la foutent dedans. J'ai une joie de bougre de voir arrêter tous les muscadins et muscadines mais elle serait parfaite, si je voyais faire rafle des grands intrigants, des gros fripons comme des petits. Que la convention reste à son poste et qu'elle n'abandonne pas le terrain, jusqu'à ce qu'elle ait sauvé la république mais, pour arriver plus promptement et plus sûrement à son but, qu'elle prenne une bonne fois le mors aux dents pour exterminer les traîtres et faire exécuter les lois, foutre. La grande colère du Père Duchesne, N°293
En apprenant un nouveau complot pour forcer les prisons, afin de sauver la louve autrichienne et l'infâme Brissot. Ses bons avis aux braves Sans-culottes, pour qu'ils se tiennent sur leurs gardes, et qu'ils continuent de donner la chasse aux muscadins et muscadines. Sa grande joie de voir partir l'armée révolutionnaire pour aller mettre à la raison les gros fermiers qui enterrent leurs grains, ainsi que les vignerons qui ont vendu d'avance leur vendange à Pitt et Cobourg, afin de nous faire périr de faim et de soif. Il faut en convenir, le peuple est bougrement bon, bougrement sage de ne pas jeter le manche après la cognée après toutes les trahisons dont il est témoin et victime. Rien ne prouve mieux son amour pour la liberté que sa patience. Si depuis quatre ans il avait eu des magistrats et des mandataires dignes de lui, tous les trônes des despotes seraient en canelle, et leurs têtes auraient sauté comme celle de l'infâme Capet mais malheureusement pour construire le temple de la liberté, il a été obligé de se servir des ouvriers bons ou mauvais, qui lui sont tombés sous les mains. Les uns n'ont fait que du gâchis en posant les fondements de ce temple sur de l'argile au lieu de chercher le tuf les autres ont mangé la grenouille. Jamais l'édifice n'aurait été achevé, si le maître lui-même n'avait mis la main à la besogne pour réparer le temps perdu. Tout ce qu'il y a de bon dans le travail est son ouvrage. Pourquoi sa volonté sacrée est elle donc méprisée? Pourquoi, foutre, veut on le mener à la lisière, comme un enfant, tandis qu'il a la force d'un géant. J'entends tous les jours des bavards, qui se disent des fameux politiques, se plaindre de ce qu'on apprend trop de choses au peuple. Moi, foutre, je soutiens qu'il doit tout voir et tout connaître. Ceux qui lui déguisent la vérité sont des traîtres. C'est un crime que de n'avoir pas dans lui la confiance la plus absolue. Il veut être libre et heureux tout ce qu'on lui proposera pour arriver à ce but lui plaira malgré les fripons et les traîtres, il l'atteindra, foutre il sait ce qui lui convient tout ce qu'il voudra, il l'obtiendra, car il est tout-puissant. Quelle est donc l'espérance des jean-foutres qui le trompent à la journée? Tous ceux qui l'ont trahi jusqu'à présent ne filent ils pas un beau coton? Hommes vils et lâches, qui êtes dévorés par la soif de l'or, et qui vendez votre patrie au plus offrant, osez vous espérer de jouir en paix du fruit de vos crimes? Voyez quel est le sort des traîtres. Qu'est devenu ce La-Fayette, qui se croyait le premier moutardier du pape parce que les muscadins de Paris baisaient le talon de ses bottes et s'agenouillaient devant son bougre de cheval blanc? Où est maintenant ce polisson de Barnave que les badauds portaient en triomphe, quand ils le regardaient comme un franc Sans-culotte? Depuis près de trois ans il siffle la linotte, et déjà il aurait joué à la main chaude si on lui avait rendu justice. Quelle est la destinée de l'infâme Dumouriez? Que lui servent les dépouilles de la Belgique et tout ce qu'il a volé à la France? Comme le Juif errant, il est obligé de marcher sans s'arrêter, et il ne trouvera bientôt plus un seul lieu
de la terre où il puisse se reposer. Mais, foutre, l'exemple ne corrige point les ambitieux. Les voleurs sont toujours voleurs. De tous temps c'est un jour de moisson pour les filous que celui où on a fait quelque pendaison à la Grève. Tous les coupeurs de bourse sont alors sur pied pour dévaliser ceux qui vont à ce spectacle. Ainsi donc, foutre, quoique le traître Custine eut vu tomber à veau l'eau tous les projets de Dumouriez, et sa tête mise à prix, il n'en a pas moins formé le projet de le remplacer et d'achever ce qu'il avait entrepris. La mort honteuse de ce dernier jean-foutre n'a pas effrayé son palefrenier Houchard qui, comme son maître, va bientôt mettre la tête à la fenêtre. Il est donc vrai que les traîtres se foutent de la guillotine. Si on les faisait expirer sur la roue, ou au milieu des flammes, ils redouteraient du moins l'horreur du supplice et ils ne joueraient pas aussi facilement leur vie à pair ou à non. Je ne suis pas sanguinaire, foutre, mais je voudrais qu'on rétablit les gibets et la question pour des monstres, qui, de sang froid, ont fait égorger des milliers d'hommes. C'est une duperie que d'être humains avec des scélérats qui veulent perdre leur patrie. On nous annonce enfin le jugement de Brissot, et dans trois jours, dit-on, le comité de sûreté générale va présenter l'acte d'accusation contre ce traître. Que de simagrées pour condamner un pareil fripon! Ses amis prétendent encore qu'il ne sera pas raccourci et ils soutiennent qu'ils ont encore plus d'une corde à leur arc pour le sauver. Je m'attends que ce procès va traîner en longueur comme celui de Custine. On va faire venir des témoins des rives de la Gironde, des Bouches-du-Rhône, et même des Colonies, pour déposer en sa faveur il y a longtemps qu'on brave les Sans-culottes et qu'on veut leur faire monter la moutarde au nez. On voudrait voir les prisons forcées et les massacres recommencer, afin d'ouvrir une porte de derrière à la veuve Capet, qui n'a pas été transférée à la Conciergerie pour des prunes. Sans-culottes, mes amis, vous ne donnerez pas dans ce panneau. Souvenez vous, foutre, que c'est Manuel et Petion qui ont fait faire le hachis du mois de septembre, etc, l'année dernière, afin de sauver Montmorin, Thierry, Lessart et d'autres pareils jean-foutres qui leur ont grassement payé leur rançon. Ces traîtres que vous avez crus morts se portent aussi bien que moi et ils sont maintenant à Londres, où ils boivent du matin au soir à la santé de leur roi Louis-XVII. Plus on a mis de lenteur à juger la louve autrichienne et Cartouche Brissot, plus nous devons désirer qu'ils le soient, car, foutre, quand ils seront juchés l'un et l'autre sur le grand fauteuil, ils jaseront et nous découvrirons le pot aux roses. On sait que Brissot s'est vanté de faire connaître plus de quarante jean-foutres qui étaient dans son tripotage, et dont les têtes, comme la sienne, tomberont dans le sac. Soyons donc sur nos gardes, foutre, et songeons que nous sommes environnés de traîtres et de conspirateurs. Veillons sans cesse, et ne nous rebutons pas continuons de faire la chasse aux muscadins et de
foutre tous les coquins à l'ombre. Guerre éternelle aux accapareurs. Que l'armée révolutionnaire se mette promptement en marche pour nous amener des subsistances car, foutre, les riches propriétaires et les gros fermiers se foutent des décrets de la convention ils enterrent leur bled, ils brûlent leurs gerbes pour affamer le peuple. N'y a t il pas de quoi se manger le sang, de voir les pauvres Sans-culottes réduits à vivre de racines et d'herbes, après une moisson aussi abondante que celle que nous venons de faire. N'oublions pas non plus les vignerons, qui ont vendu leur vendange sur le cep à Pitt et à Cobourg. Si l'armée révolutionnaire ne met pas toute cette canaille à la raison, nous n'aurons cet hiver, ni pain, ni vin, et nous nous mangerons les uns les autres. J'espère, foutre, que nous ne mourrons pas de faim, quand nous savons où sont nos subsistances, et quand nous connaissons ceux qui les cachent et qui veulent nous les enlever. Eh vite donc, ami Ronsin, fais battre la générale, et marche à la tête des Sans-culottes révolutionnaires. A ton approche je vois renaître l'abondance tous les greniers te sont ouverts tous les traîtres prennent la fuite la liberté triomphe et les brigands couronnés, qui n'attendent leurs succès que de nos divisions sont obligés de mettre les pouces et de nous demander la paix à genoux, foutre. La grande joie du Père Duchesne, N°294 De voir l'infâme Brissot et la clique de la Gironde devant le tribunal révolutionnaire. Ses remerciements aux braves bougres qui composent maintenant le comité de sûreté générale de la convention, qui ne se sont pas amusé à chaboter les muscadins, et qui ont enfin trouvé le moyen de déméler la fusée, et de faire voyager cette bande de malédiction dans la charrette de Samson. Il n'y a plus à reculer, foutre les traîtres sont au pied du mur. Il faut que justice soit faite. Cartouche Brissot et sa bande de voleurs et d'assassins, les Mandrins de la Gironde. Vont recevoir le prix de leurs forfaits. Le décret d'accusation est à la fin lâché. Ce n'est pas sans peine que nous l'avons obtenu car, dieu merci, tout va encore par compère et compagnon. Il faut du temps, foutre, pour déterminer ceux qui font les lois à les faire pour eux. C'est avec raison qu'on a comparé la justice à une araignée, qui n'attrape dans sa toile que des moucherons, tandis que les frelons et les grosses mouches rompent cette toile, et dévorent l'araignée elle-même. Le peuple heureusement commence à se débadauder. Le Sans-culotte connaît sa dignité il s'estime autant que les plus huppés personnages il sait que le législateur n'est rien sans le peuple, et que ce que le peuple a fait, il peut le défaire. Ainsi donc malgré la bonne envie que certains jean-foutres avaient au fond du coeur de sauver Brissot et sa clique, la vengeance nationale sera satisfaite. "il faut donc toujours que tu donnes, en passant, ton coup de patte, vieux radoteur, me dit un feuillant renforcé? Tu n'es jamais content de
rien. Quand la convention montre une si grande énergie quand elle livre elle-même ses membres à la justice, que peux tu lui demander davantage?" mieux vaut tard que jamais, foutre mais, foutre, n'ai-je pas le droit de lui reprocher d'avoir si longtemps barguigné pour faire raccourcir des scélérats qui ont voulu perdre la république? Pourquoi a t elle eu si longtemps l'air de les frapper à regret et de les traiter avec plus d'égards que les autres citoyens? Pourquoi les infâmes jean-foutres du comité des douze et les autres scélérats, qu'elle avait fait mettre en état d'arrestation, n'ont ils eu pour prison que les murs de Paris et les coulisses des spectacles? Petion, Lanjuinais, Gorsas auraient ils échappés, s'ils avaient été mis en cage comme les autres citoyens? Ne devait-on pas s'attendre que ces bougres, cousus d'or et d'assignats, sacrifieraient une partie du butin pour se sauver. Devait-on exposer les Gens d'armes, qui les gardaient, à la tentation? J'ai donc eu raison quand je me suis plaint d'un privilège qui ne doit pas exister dans une république. Le soldat et le général, le plus pauvre Sans-culotte, et le magistrat, et le législateur même sont égaux devant la loi. La convention a donc foulé aux pieds la déclaration des droits, en traitant si poliment les plus infâmes coquins que l'enfer ait vomi sur la terre. Elle doit se reprocher d'avoir facilité leur fuite, mais le gibet ne perd jamais sa proie, et tôt ou tard les pigeons reviendront au colombier. Tenons-nous en donc à ce que nous avons de poisson pêché. Ce sera toujours un fameux abattis que le raccourcissement des scélérats sur lesquels nous avons mis le grapin. Remercions les braves bougres qui composent maintenant le comité de sûreté générale et qui ont su débrouiller la fusée en quelques jours car si ce comité n'avait pas été renouvelé, jamais nous n'aurions vu la fin de ce procès. Les muscadins seraient allés en procession se faire chaboter, et tandis qu'on s'amuse à chaboter, les fripons ont beau jeu. Quelle joie, foutre, de passer en revue cette longue file de fripons que nous allons sous peu de jours, voir jouer à la main chaude! Les jours se suivent, dit-on, et ne se ressemblent pas. Quelle différence d'avoir vu tous les crapauds barboter dans le Marais, et vomir le poison sur la Montagne et les Sans-culottes, ou de les voir tous écrasés à la fois par la massue de la loi. Je voudrais, foutre, lorsqu'on conduira tous ces brigands au supplice, qu'ils fussent revêtus de toutes les prétintailles des dignités qu'ils se flattaient d'obtenir, en faisant la contre-révolution que milord Brissot, dans la charrette de Samson, eut à côté de lui deux mannequins, l'un représentant le roi Georges Dandin, et l'autre son ministre Pitt, tenant des sacs remplis de guinées, pour le récompenser d'avoir mis les Colonies à feu et à sang, et allumé la guerre civile d'un bout de la république à l'autre. Je voudrais que le cuistre Carra fût placé également entre deux autres mannequins ressemblant au roi de Prusse et au duc d’Yorck, qui auraient l'air de marchander avec lui la couronne de France. Je voudrais que le prophète Isnard, avant de grimper sur le fatal théâtre, lorgnât avec une
bonne lunette d'approche, au beau milieu du pont de la Révolution, pour lui faire voir les deux rives de la Seine, et lui prouver que Paris existe encore, et qu'il existera encore quelques milliers de siècles, malgré les Gascons dont il nous a menacé. Je voudrais que Guadet, Vergniaud, Gensonné, Grangeneuve, Fonfrède et le petit Ducos, que Marat appelait le furet de la Gironde, fussent couverts de cordons bleus, caparaçonnés de robes rouges, de simarres et de toutes les foutarades de l'ancien régime, que ces coquins préféraient aux couleurs de la liberté, et qu'ils se flattaient de recevoir des mains de l'avorton du Temple. S'ils avaient pu lui donner la clef des champs, et transporter la Sainte ampoule à Bordeaux, pour graisser de la tête aux pieds cet embryon maudit. Jusqu'à ce que nous voyons défiler cette mascarade, si le sapajou Gorsas n'y peut figurer en réalité, il faudra du moins y voir sa ressemblance, tenant sous le bras une balle de coton, pour signifier la charge honorable qui lui était réservée à la cour du roi Louis-XVII. Il ne faudra pas oublier le muscadin Louvet que le friand paraisse barbouillé des confitures de la vieille Roland, et chargé de boîtes de dragées, de pistaches et de marrons glacés et toi, misérable barbouilleur à la toise, grappillard Dulaure qui as si perfidement abandonné les gros pendards de maman Lejay, pour aller flâner dans le boudoir de la reine Coco, quel rôle joueras tu dans cette cérémonie? Pendards pour pendards, il fallait plutôt t'en tenir à ceux qui faisaient doucement bouillir ta marmite, que d'aller trancher du Girondin et du Brissotin. Qui trop embrasse, mal étreint et toi, Philippe d'Orléans, quel sera ton rôle? Ton corps sera vêtu, d'un côté, d'une souguenille de Sans-culotte, et de l'autre, d'un manteau royal ton front bourgeonné sera couvert de la moitié d'un bonnet rouge et d'une demi-couronne. Le reste ne vaut pas l'honneur d'être nommé. Cependant, foutre, je ne serai pas fâché de voir fermer la marche par le prélat Fauchet, avec son habit d'ordonnance, accompagné de Poignard Duperret ce dernier baiserait tendrement l'effigie de Charlotte Corday, tandis que le saint évêque du Calvados lui donnerait la bénédiction pour l'encourager à faire perdre le goût du pain à l'ami du peuple. Voilà, foutre, le supplément que je propose à l'appareil du supplice de ces monstres qui ont occasionné tous les malheurs de la France, qui ont fait égorger plus de deux millions d'hommes, et qui avaient juré la mort de tous les patriotes. Je ne m'attends pas que l'on exécute ce que je propose, car ces brigands ont encore de puissants amis on va feuilleter tout le grimoire de la chicane, pour les empêcher de mettre la tête à la fenêtre mais j'espère que tous leurs défenseurs tireront des coups d'épée dans l'eau. Les crimes de ces brigands sont trop avérés, pour qu'on puisse les nier. Si des scélérats qui ont employé le vert et le sec pour sauver Capet, qui nous ont mis aux prises avec toute l’Europe, qui ont allumé la guerre de la Vendée, qui ont fait massacrer les patriotes à Lyon, et à Marseille, qui ont livré Toulon aux Anglais, qui avaient vendu tous nos
ports aux étrangers, qui voulaient raser Paris, ne sont pas coupables, je dirai que tous les juges sont leurs complices mais non, foutre, les jurés sont de bons Sans-culottes. Ca ira, foutre. La grande joie du Père Duchesne, N°295 En apprenant que le sapajou Gorsas, grand porte-coton de LouisXVII, est venu se brûler à la chandelle, et qu'il a été arrêté au PalaisRoyal, en venant chercher ses chemises chez sa blanchisseuse. Sa grande colère de voir qu'il existe encore bien des jean-foutres qui veulent remplacer les Brissotins. Ses bons avis à la convention, pour qu'elle empêche les commissaires qu'elle envoie dans les armées, de brûler la chandelle par les deux bouts, en menant un train de princes, et en godaillant comme des chanoines. Trop gratter cuit toute vérité n'est pas bonne à dire il ne faut pas jeter de l'huile sur le feu voilà de véritables propos de Feuillants. Moi, je crois au contraire qu'on ne doit jamais cacher la vérité, et que le moment est arrivé de tailler dans le vif. Pourquoi donc prendre des mitaines pour parler à certains individus? Celui qui s'effarouche des reproches qu'on lui fait, est un jean-foutre car si c'est à tort qu'on l'accuse, il lui est facile de répondre si c'est avec raison, il n'y a pas de mauvais coups sur une bête puante. Je déclare donc que je suis décidé à casser les vitres, et à dauber tous les bougres qui servent mal la république, ou qui conspirent contre la liberté. Généraux, magistrats, législateurs, ne bronchez pas, foutre j'ai la verge à la main pour vous corriger je n'écoute plus rien trop longtemps je me suis laissé endormir par des poules mouillées qui n'ont ni bouche ni éperon, et qui veulent ménager la chèvre et le chou. "Père Duchesne, me dit-on, mets donc un peu d'eau dans ton vin un tel que tu dénonces comme un grappillard, est pourtant un patriote il est vrai qu'autrefois il n'avait pas où reposer la tête, et que depuis à peu près un an il a des châteaux, de riches ameublements, une table de fermier général, des chevaux magnifiques, des équipages superbes, un bon carrosse mais qu'est ce que cela te fait, Père Duchesne, s'il continue toujours de bien servir la république? Pourquoi veux-tu mettre ton doigt entre l'arbre et l'écorce? Songe donc que nous avons besoin de bougres qui dans les moments périlleux nous donnent à propos deux ou trois grands coups de gueule, pour faire trembler les aristocrates. Doit-on se fâcher si le dogue qui garde la maison, fait disparaître quelque fois du garde-manger l'aloyau ou le gigot, quand il a bien aboyé au voleur? Que t'importe, vieux chiqueur, si celui qui peut être maintenant le soutien de la Sans-culotterie, a été le bras droit de Dumouriez, et nous a fait perdre la Belgique et tous nos magasins, en défendant ce traître, quand tous les patriotes, quand toutes les sociétés populaires demandaient sa destitution? Pourquoi harcèles-tu sans relâche monsieur Barrère-de-Vieuzac? Il est vrai qu'il a été tantôt Brissotin, tantôt Girondin il est vrai qu'il avait grande envie de
faire raccourcir tous les Sans-culottes, qui, le 31 mai, ont sauvé la république mais à tous péchés miséricorde. Il en dit maintenant son mea culpa, et de si bon coeur! Père Duchesne, on prend plus de mouches avec de l'huile qu'avec du vinaigre. Songe donc, mon brave, que les Sans-culottes ont besoin d'être unis comme frères, et que nous devons tendre les bras à ceux qui veulent se rallier à nous. Veux tu, en ne ménageant personne, que tout le monde se jette la pierre? As tu la force de résister à tous les ennemis que tu vas te mettre sur le dos?" Je ne sais, foutre, si la force me manque, mais je me sens le courage de cribler les intrigants et les fripons. Qu'on me persécute, qu'on m'accable, je m'en fous, et s'il faut comme Marat, me cacher dans un souterrain, pour dénoncer les ennemis de la république, je quitterai volontiers mes fourneaux, ma boutique je renoncerai même à ma Jacqueline, à tout ce que j'ai de plus cher, pour m'ensevelir tout vivant, afin de dénoncer et faire connaître de nouveaux La-Fayette, de nouveaux Brissot, qui veulent s'emparer de l'autorité, disposer de toutes les places, faire la guerre aux meilleurs citoyens. Si, comme Marat, je suis victime de mon zèle, si une autre Corday me plonge le poignard dans le sein eh bien, foutre! Je serai trop heureux de verser mon sang pour la république. Qu'on ne se flatte donc plus de m'amadouer. Je vais broyer du noir et frapper d'estoc et de taille sur tous ceux qui ne font pas leur devoir et qui ne jouent pas beau jeu bel argent. Personne ne respecte autant que moi la convention. Elle est notre unique refuge. Je pense qu'elle doit rester à son poste jusqu'à ce que la patrie soit sauvée mais pour remplir sa tâche, il faut qu'elle soit respectée et obéie. Il ne faut pas surtout qu'elle se laisse mener par des intrigants elle est assez grande pour marcher seule. Trop longtemps elle a été enchaînée par des scélérats. Qu'elle apprenne donc à se méfier des nouveaux Brissotins qui veulent encore la mener à la lisière pour lui faire faire des pas de clercs qu'elle n'accorde sa confiance qu'à des hommes purs et désintéressés. Si elle veut tenir la bride haute aux généraux et empêcher leurs trahisons si elle veut que les lois soient exécutées si elle désire donner le coup de grâce aux accapareurs, une fois pour toutes, elle ne doit donner sa confiance qu'à de véritables Sans-culottes. Elle doit rompre en visière à ceux qui s'enrichissent dans son sein car il n'y a pas de quoi faire florès avec dix-huit francs par jour, et un député honnête homme doit avoir peine à joindre les deux bouts dans le temps où nous sommes. Ainsi donc ceux qui achètent des maisons de campagne, qui ont leurs caves remplies de fines liqueurs, qui épousent des filles à deux cents, trois cents et même six cents mille livres de dot doivent lui paraître plus que suspects. Ceux qui soupent tous les soirs avec des muscadines, ne sont pas non plus de francs républicains car dis moi qui tu hantes, je te dirai qui tu es. Il n'y a pas de venin qui s'inocule comme l'aristocratie. Les muscadines connaissent bien tout le pouvoir ce n'est pas pour leur tournure et pour leurs perruques de Jacobins que ces godelureaux
inviolables donnent dans l'oeil de ces péronnelles mais les garces savent faire argent de tout en se livrant à ces imbéciles, dont elles ne voudraient pas pour leurs laquais, si la contre-révolution arrivait, elles trouvent les moyens d'empêcher leurs pères, leurs frères, leurs cousins et leurs véritables amoureux de mettre la tête à la fenêtre. Convention nationale, tu dois mettre fin à ce scandale. Celui qui n'a ni moeurs, ni probité, n'est pas digne de siéger dans ton sein. Tu ne dois souffrir rien d'impur autour de toi. Celui qui n'est pas Sans-culotte dans toute la force du terme, est indigne d'être législateur. Mère du peuple, jette tes regards sur nos armées examine la cause de tous les malheurs que nous avons éprouvés pendant cette campagne, tu n'en accuseras que les commissaires que tu y avais envoyé. Au lieu de godailler avec les généraux, s'ils avaient écouté les dénonciations et les plaintes du soldat, ou plutôt, s'ils ne s'étaient pas entendus avec les traîtres, Dumouriez aurait eu la tête sous la trappe Custine n'aurait pas livré Mayence, Condé, Valenciennes Houchard n'aurait pas fait massacrer notre armée et le duc d’Yorck nous servirait d'otage la guerre de la Vendée serait terminée. Mais, foutre, tant que tu souffriras que les représentants du peuple fassent une poussière de princes dans les armées et les départements qu'ils traînent avec eux des muscadines qu'ils fassent une chaire de chanoine qu'ils ordonnent de sonner les cloches et tirer le canon dans tous les lieux où ils passent, tu seras toujours trompée. Que doivent dire les citoyens en voyant tout cet attirail? Faut-il donc, pour annoncer la majesté du peuple, que le Sans-culotte, son commis, tranche du grand seigneur, et que lorsqu'un député traverse un canton dans un carrosse à six chevaux et environné de quarante ou cinquante cavaliers, on se demande si c'est Condé ou d’Artois qui sont rentrés en France et qui recommencent leurs fredaines. Avec de pareils abus, on ruine la république et on déshonore la convention, foutre. Sapajou Gorsas vient d'être arrêté, n'avais je pas raison de dire dans mon dernier numéro que le gibet ne perd jamais sa proie. Le jeanfoutre est hors de la loi, celui qui l'a arrêté était en droit de le sabrer, mais il a réfléchi sans doute que Samson avait une vieille querelle à vider avec le porte-coton de Louis-XVII. A tout seigneur, tout honneur. J'espère que ça ne traînera pas, foutre. Que venait-il faire, le cuistre, dans cette maudite galère?... Hélas! Il venait chercher les chemises à Gorsas. Hé vite, pantin, joue à la main chaude, foutre. La grande colère du Père Duchesne, N°296 De voir que l'on cherche midi à quatorze heures pour juger la tigresse d’Autriche, et que l'on demande des pièces pour la condamner, tandis que, si on lui rendait justice, elle devrait être hachée comme chair à pâté pour tout le sang qu'elle a fait répandre. Ses bons avis aux Sansculottes pour qu'ils soient unis comme frères, attendu que les aristocrates,
les royalistes, les prêtres, les gros marchands, les riches fermiers et les accapareurs se tiennent tous par la main pour nous manigancer un nouveau coup de chien. Il n'y a pas de monstre plus affreux que celui qui trahit sa patrie. Je ne connais pas de supplice assez grand, pour punir un renégat de la Sans-culotterie. Qu'un ci-devant noble, qu'un financier, qu'un robin, qu'un prêtre nous tourne casaque, je ne m'en étonne pas, mais qu'un jeanfoutre comblé des bienfaits du peuple, lui tourne le cul pour se ranger du côté de ses ennemis, je me débaptise, et moi-même je serai son bourreau! J'aurais voulu, foutre, que la France entière eût assisté au supplice de l'infâme Gorsas, et que ce monstre eût entendu les malédictions de tout le peuple qu'il a si lâchement trahi. Comme je l'avais prévu, son procès n'a pas été long. Je sais bon gré aux braves Sans-culottes, qui ont arrêté ce scélérat de n'avoir pas souillé leurs mains de son sang impur, il faut rendre à César ce qui appartient à César. Il était juste que le fonctionnaire Samson, qui avait une vieille querelle à démêler avec ce jean-foutre, ne perdit pas son droit. Quand je disais que le bougre avait encore bien des amis à Paris, et qu'il comptait sur leur puissance pour venir à la barbe de la Sans-culotterie former de nouveaux complots et tenter encore quelque coup de chien, je n'avais pas tort. Oui, foutre, nous sommes environnés de traîtres et de scélérats qui n'attendent que le signal pour égorger les Sans-culottes. On a beau faire rafle tous les jours des royalistes, des aristocrates les plus connus, on tirera sa poudre aux moineaux, si on n'en arrête pas cette fois davantage. Si nous ne profitons pas du bon vent, gare la tempête, foutre car, si nous avons le dessous, nos ennemis ne marchanderont pas, et ils iront plus vite en besogne. Il ne leur faut qu'un seul jour de triomphe pour que les patriotes perdent le goût du pain dans toute la république. Songeons, foutre, que les parents et les amis des gredins que nous foutons à l'ombre, vont remuer ciel et terre pour leur donner la clef des champs songeons que les gros marchands qui ont accaparé toutes les denrées, dans l'espérance de nous les vendre au poids de l'or, sont maintenant au désespoir d'être obligés de les céder au prix coûtant, et même à perte. Un marchand est une bête féroce qui veut tout dévorer, tout engloutir si sa proie lui échappe, il devient enragé, et il aimerait mieux perdre femme et enfants, que de lâcher de ses mains crochues l'or qu'il veut entasser. Songeons que les fermiers sont si vilains comme lard jaune, qui aiment mieux enterrer leurs grains, et brûler leurs gerbes, que de garnir les marchés au prix ordonné par la loi, vont faire feu des quatre pieds, et qu'ils vont employer le vert et le sec pour nous affamer songeons qu'il existe des milliers de scélérats soudoyés par les brigands couronnés pour tromper les Sans-culottes, pour les égarer, pour les mettre à chien et à chat songeons surtout à cette clique infernale, qui attise le feu, qui veut profiter de tout les désordres pour s'enrichir et s'emparer de l'autorité. Au milieu de tant d'ennemis, nous sommes foutus, si nous ne sommes pas
amis comme des frères si nous ne veillons pas nuit et jour, si nous ne nous entendons pas. Sapajou Gorsas avait sans doute calculé tous les dangers qui nous menacent, quand il est venu, comme un étourneau, se prendre à la glue quand il n'avait qu'un pas à faire pour entrer dans la Vendée, il y a gros qu'il y serait allé chercher son brevet de porte-coton de Louis-XVII, plutôt que de venir blanchir ses chemises à Paris. Je parierais foutre, que le vieux Roland, que Petion, Barbaroux et le roi Buzot, que nous croyons aux Antipodes, sont cachés dans les environs de Paris, et peut-être à Paris même. Ce sont eux encore qui distribuent dans quelque souterrain à assiéger la porte des boulangers, quoiqu'il soit prouvé que les farines ne manquent pas, puisque depuis trois mois que ce bacanal dure, tout le monde mange comme par le passé mais tricherie revient toujours à son maître j'espère que nous pêcherons tous les fripons en détail, et qu'aucun d'eux n'échappera au sort qu'il a mérité. Sans-culottes de tous les départements, qui avez été un moment égarés par les calomnies de nos ennemis, qui buviez à longs traits dans une coupe dont les bords étaient frottés de miel, qui avez été assez imbéciles pour regarder les Brissotins et les Girondins comme vos amis, comme de véritables républicains, apprenez que ce Gorsas qui ne cessait de parler de l'indivisibilité de la république, pour mieux vous foutre dedans, en vous dorant ainsi la pilule s'est lui-même démasqué quand il a vu sa tête de singe sous la trappe. "courage, camarade, a t il dit à un calotin qui allait être raccourci pour avoir prêché la royauté, courage, vous mourez pour la bonne cause. " il est donc prouvé, comme deux et deux font quatre, que Gorsas et sa séquelle regarde la royauté comme la bonne cause, qu'ils se foutaient du peuple, en lui parlant de république ces paroles sont précieuses, et j'espère, foutre, qu'on ne les oubliera pas les scélérats, malgré eux, laissent toujours passer un petit bout d'oreille. Le bougre, aussitôt qu'on lui a lu le décret de la convention qui le met hors la loi, a cependant osé soutenir qu'il était innocent il voulait encore jaboter avant de grimper dans le vis-à-vis de maître Samson mais les Sans-culottes, au lieu de l'écouter, l'ont régalé de cette musique: "donnez nous les oreilles à Gorsas, donnez nous ses oreilles. " D'autres, faisant chorus sur le même ton, s'écriaient, en s'adressant à son dernier valet de chambre: "voyons donc la chemise à Gorsas, voyons donc sa chemise. " Et l'air retentissait de tous côtés de ce refrain.. "voyons sauter la tête à Gorsas, voyons sauter sa tête. " Voilà, foutre, le requiem qu'il a entendu chanter à ses oreilles tout le long du voyage. Il est vrai que le bougre, qui faisait tant le fanfaron, s'était empafé de trois ou quatre bouteilles de vin pour s'étourdir mais quand il en aurait eu une barrique dans le ventre, il y avait de quoi le dégriser d'entendre les cris du peuple qui le maudissait. Vils intrigants, qui trompez le peuple, lâches, qui le trahissez,
frémissez à ce spectacle, le même sort vous attend. Scélérat Brissot, coquin de Fauchet, traître Vergniaud, perfide Guadet, cafard Gensonné, vous n'avez que le temps de dire votre in manus, nous allons tous vous voir passer à la queue le loup, pour essayer à chacun votre tour le fatal collier et toi monstre femelle, tigresse d’Autriche, monstre que l'enfer a vomi sur la terre, et que cinq cents millions de diables vont emporter, tu vas expier tous tes forfaits mais c'est un supplice trop doux que celui que tu vas subir, si tu étais punie par tous les bouts où tu as péché, si on te faisait endurer autant de souffrances que tu as fait immoler de victimes, il faudrait te mettre aussi menue que chair à pâté tu ne l'échapperas pas, foutre, malgré les traîtres qui veulent te sauver, qui sont assez jeanfoutres pour demander des pièces pour te juger, comme si tes crimes n'étaient pas prouvés, comme si tous les instants de ta vie n'étaient pas marqués par des brigandages et des assassinats. Vous qui avez été égorgés au Champs-de-Mars, à Nancy, morts du 10 août, sortez de vos tombeaux pour guérir de la berlue ceux que l'or et les assignats aveuglent, foutre. La grande colère du Père Duchesne, N°297 Contre les infâmes soldats du roi Georges Dandin, qui, après avoir pris Toulon par trahison, ont fait pendre les représentants du peuple, pillé les maisons, égorgé les femmes et les enfants. Ses bons avis aux braves Sans-culottes, pour qu'ils soient amis comme des frères, afin d'exterminer tous les chiens enragés que Pitt a lâché pour ravager la France, et nous réduire à l'esclavage. Ceux qui disent que le père éternel a fait l'homme à son image et ressemblance, lui font un foutu compliment, car il n'y a pas dans le monde d'animal plus méchant que celui qui marche à deux pieds. Il se vante d'être le chef d'oeuvre de la nature, et il est pétri de défauts et de vices. Il a des mains fort adroites, et il ne s'en sert que pour nuire à ses semblables. Il tire les métaux du sein de la terre il leur donne la forme qu'il lui plait, il en fait des armes pour tuer, massacrer tout ce qui l'entoure. Il a l'orgueil de croire que le monceau de boue qui le compose est animé par un autre esprit que les autres monceaux de boue qui pensent mieux que lui, puisqu'ils se conduisent mieux. "Te voilà dans ton humeur noire, vieux radoteur ne va t il pas te prendre fantaisie de marcher à quatre pattes, et de manger de l'herbe, pour faire croire que tu es plus sage que les autres hommes? Il convient bien à un sac à vin tel que toi de faire des raisonnements à perte de vue et de parler de choses que tu ne comprends pas. Tu oses nous comparer avec les brutes. A t'en croire, l'instinct des animaux vaut mieux que notre âme. Vois donc les merveilles que la tête de l'homme a enfantées vois les chefs d'oeuvre qui sortent de ses mains. " Je réponds au bougre d'endormeur, qui monte sur ses grands
chevaux, pour combattre mon raisonnement, qu'il n'est rien de si facile que de prouver la vérité de ce que j'avance. Oui, foutre, il n'y a pas d'animal dans le monde qui n'ait plus d'intelligence que l'homme, puisque tous trouvent moyen d'exister et d'être heureux sans avoir besoin des autres. Les petits oiseaux ont encore la coquille sur la queue, qu'ils trottinent dans les champs presqu'aussitôt que leur bec peut s'ouvrir, ils mangent seuls, tandis qu'il faut pendant deux ou trois ans torcher, empâter, avec de la bouillie, le monstre orgueilleux qui s'appelle homme, qui prétend être le roi de tous les êtres vivants, et qui l'est en effet, puisqu'il les mange. Il faut le mener presqu'autant de temps à la lisière, avant qu'il puisse marcher, et il est obligé de ramper pendant plusieurs mois et de porter des bourrelets pour ne pas se casser le col, quand il essaye de se jucher sur ses deux pieds. Jusqu'alors, il n'a fait que souffrir et crier, cependant, c'est encore le temps le plus heureux de sa vie, car quand il commence à parler, il devient esclave au lieu de jouer et de gambader, comme il le désire, il est obligé d'être enfermé dans une école, entouré de férules, de verges, de martinets. Il ne rit qu'à la sourdine il a toujours sur les épaules, un cuistre maudit, qui le fait bailler sur un grimoire latin. S'il parle, on le fait taire s'il rit, on le fait pleurer s'il pleure, on veut qu'il rie s'il veut se servir de sa main gauche, on lui rappelle la civilité puérile et honnête. Quand il a enduré ce supplice pendant dix à douze ans, il lui reste bien d'autres chats à tondre c'est alors qu'il va manger de la vache enragée. Demande-t-il un métier, on lui en donne un autre a-t-il du goût pour être soldat, il faut qu'il soit calotin. Pour se consoler de toutes les misères qu'il a endurées, la vue d'une jeune fille te fait palpiter son coeur il la cherche, elle lui répond de la prunelle, tous deux se serrent la main, s'embrassent innocemment ils s'aiment ils semblent faits l'un pour l'autre ils croient être unis mais un père avare, une mère acariâtre mettent leur veto à leur bonheur: l'amoureuse n'est pas assez riche, ou le garçon n'est pas d'un état assez brillant. Bref, voilà nos deux aimables enfants séparés pour la vie le jeune homme est obligé d’épouser une vieille sempiternelle, qui serait sa grand-mère la fille un vieux pingre qu'elle abhorre et qu'elle enrôle dans la grande confrérie, pour s'en venger. Les femmes ont du moins, cette consolation. Voilà, foutre, trait pour trait, le tableau de la vie humaine: l'enfance se passe dans les larmes la jeunesse, dans le désir l'âge viril, dans le travail et la peine, et la vieillesse, dans les infirmités. La mort termine tout, et un homme mort ne vaut pas un chien vivant, foutre. On me répond que l'homme a des plaisirs et des jouissances en proportion de ses maux. Les animaux seront condamnés à brouter l'herbe, tandis que nous savourons les mets les plus exquis oui, foutre, mais pour rassasier notre appétit dévorant, il faut faire la guerre à toute la nature il faut étouffer la colombe pour dévorer sa chair il faut égorger l'agneau pour manger ses entrailles. Nous avons de beaux palais où règne l'abondance, mais à côté de la cabane du pauvre, où la plus affreuse misère existe. Nous construisons
des vaisseaux, mais c'est pour aller chercher l'or et l'argent au fond des Indes, et avec ces trésors on nous amène la corruption. Nous lisons aux astres pour prédire des éclipses, la pluie et le beau temps, mais nous ne voyons pas sur la terre, le précipice où nous nous jetons à chaque pas. Nous avons inventé l'écriture et l'imprimerie, en sommes nous plus instruits, en valons nous mieux? Le grand livre de la nature est ouvert, c'est là celui qu'il faudrait consulter, il nous éclairerait davantage que toutes les rêveries des marchands d'esprit. Vous qui voulez être républicains, foutre, voyez une fourmilière amasser pendant l'été la provision de l'hiver. Insectes qui rampez sur cette prairie de la terre nommé France, prenez exemple sur ces insectes beaucoup plus sages que vous. Cette famille est encore plus nombreuse que la votre, et elle trouve le moyen de vivre en paix, et de s'approvisionner. Il n'y a pas là de paresseux ni d'ambitieux chacun travaille pour la communauté l'une apporte autant que l'autre, l'une ne veut pas plus manger que l'autre voilà pourquoi elles vivent en paix. Point de bonheur sans le travail et l'égalité. Si les bougres qui nous gouvernent, au lieu de vouloir tout dévorer comme des aigles et des vautours, n'étaient que des fourmis laborieuses comme les autres, la république serait bientôt heureuse et triomphante mais chacun veut tirer de son côté, tout le monde veut faire la loi, personne ne veut obéir. Nous sommes à chien et à chat, tandis que nous devrions être unis comme des frères. Tonnerre de dieu, quand nous sommes en guerre avec tous les tyrans de l’Europe, nous pouvons nous chamailler. Réfléchissons donc que les Anglais attisent le feu de la guerre civile, pour nous asservir plus facilement ce sont eux qui ont lâché les chiens enragés qui ravagent la Vendée, ce sont eux qui, à force d'or, se sont fait ouvrir les portes de Condé et de Valenciennes, qui ont graissé la patte de Custine et d’Houchard, pour engager ces deux scélérats à livrer les armées qu'ils commandaient. Jugeons, foutre, du sort qu'ils nous préparent, s'ils pouvaient arriver jusqu'à nous, jetons un coup d'oeil sur Toulon, et disons nous: autant nous en pend à l'oreille, si nous n'exterminons pas les brigands qui nous font une guerre plus atroce que des sauvages. Les Toulonnais qui les avaient appelés à leurs secours, savent ce que l'aulne en vaut. Les riches ont été dépouillés, leurs magasins pillés, les Sans-culottes massacrés et embarqués sur des vaisseaux sans fond deux représentants du peuple ont été immolés par ces monstres, le rebut des nations. Vengeons l'honneur de la France vengeons l'humanité rallions nous tous pour anéantir des brigands qui, depuis plus de quatre cents ans, ne cessent de nous outrager, de nous voler il n'y a pas de milieu, foutre il faut que, dans cette guerre, la France ou l’Angleterre périsse.
La grande joie du Père Duchesne, N°298 Au sujet du raccourcissement de la louve autrichienne, convaincue d'avoir ruiné la France, et d'avoir voulu faire égorger le peuple, pour le remercier de tout le bien qu'il lui avait fait. Ses bons avis aux braves Sansculottes, d'être sur pieds pour donner la chasse aux muscadins déguisés et aux fausses poissardes, qui se disposent à crier grâce, quand la guenon paraîtra dans le vis-à-vis de maître Samson. Il n'y a plus à reculer, foutre, il faut que l'infâme autrichienne reçoive le prix de ses forfaits. Tonnerre de dieu n'ai-je pas entendu des endormeurs douter s'il existait des preuves suffisantes pour la condamner. Quels sont donc les jean-foutres qui ne veulent pas voir clair en plein midi? Quoi, cette garce infâme, qui a ruiné la France qui, chaque jour de son abominable vie, a fait des milliers de malheureux qui, après avoir été l'idole du pauvre peuple, qu'elle avait embadaudé, lui a fait endurer autant de maux, qu'elle en avait reçu de bienfaits, et ne lui a laissé que les yeux pour pleurer. Quoi, ce monstre, qui était plus altéré du sang français que je ne trouve de plaisir à me foutre sur la conscience du vieux Bourgogne ou du chenu Bordeaux, qui avait juré la perte de la France qui a fait passer tout notre numéraire à nos ennemis qui voulait rôtir tous vivants, les pauvres Parisiens dans leurs nids de cocus qui a fait massacrer, à Nancy, les premiers soldats de la liberté qui donna l'ordre à l'infâme Bailly, et au traître La-Fayette, d'égorger, sur l'autel de la patrie, des vieillards, des femmes et des enfants sans armes, sans défense qui arma de poignards tous les muscadins de la cour, pour faire, dans Paris, une nouvelle Saint-Barthélemy qui, le 10 août, avait rassemblé, dans la bougre de ménagerie des Tuileries, tous les bandits de l'ancien régime, pour nous faire à tous perdre le goût du pain qui, d'accord avec Brissot et l'infâme clique de la Gironde, nous a fait déclarer la guerre à tous les brigands couronnés, quand nos finances étaient épuisées et que toutes nos richesses avaient servies à armer nos ennemis quand nous n'avions ni armées, ni fusils, ni canons quand toutes nos villes de guerre étaient sans garnisons, et toutes nos fortifications délabrées. Si une pareille scélérate n'a pas mérité la mort, il n'y a plus de justice sur la terre. Je suppose, foutre, qu'elle ne fût pas coupable de tous ces crimes, n'a t elle pas été reine? Ce crime là suffit pour la faire raccourcir car, foutre, qu'est ce qu'un roi ou une reine? N'est ce pas ce qu'il y a dans le monde de plus impur et de plus scélérat? Régner, n'est ce pas être le plus mortel ennemi de l'humanité? Les contre-révolutionnaires que nous étouffons comme des chiens enragés, ne sont nos ennemis que de bricole mais les rois et leur race sont nés pour nous nuire en naissant, ils sont destinés au crime, comme telle plante, à nous empoisonner. Il est aussi naturel aux empereurs, aux rois, aux princes et à tous les despotes d'opprimer les hommes, de les dévorer, qu'aux tigres et aux ours de déchirer la proie qui tombe sous leurs griffes ils regardent le peuple
comme un vil bétail dont le sang et les sueurs leur appartiennent, ils ne font pas plus de cas de ceux qu'ils appellent leurs sujets, que des insectes sur lesquels nous marchons, et que nous écrasons, sans nous en apercevoir. Ils jouent aux hommes comme nous jouons aux quilles, et quand un monstre couronné est las de la chasse, il déclare une guerre sanglante à un autre brigand de son acabit, sans sujet, et souvent contre ses véritables intérêts, mais pour avoir un nouveau passe-temps pour se désennuyer il entend de sang-froid la perte d'une bataille, il regarde d'un oeil sec les monceaux de cadavres qui viennent de périr pour lui, et il en est moins affecté que moi, foutre, quand je perds une partie de piquet, et qu'un de mes compères m'a fait pic, repic et capot. C'est un devoir à tout homme libre de tuer un roi, ou ceux qui sont destinés à être rois, ou qui ont partagé les crimes des rois. Une autorité qui est assez puissante pour détrôner un roi, commet un crime contre l'humanité, si elle ne profite pas du moment pour l'exterminer, lui et sa bougre de race. Que dirait on d'un benêt qui, en labourant son champ, viendrait à découvrir une nichée de serpent, s'il se contentait d'écraser la tête du père et qu'il fût assez poule mouillée pour avoir compassion du reste s'il disait, en lui-même, c'est dommage de tuer une pauvre mère au milieu de ses enfants, tout ce qui est petit est si gentil emportons ce joli nid à la maison, pour divertir mes petits marmots? Ne commettrait il pas, par bêtise, un très grand crime car, foutre, les monstres qu'il aurait réchauffés, et auxquels il aurait ainsi conservé la vie, ne manqueraient pas, pour le récompenser, de darder, lui, sa ménagère et sa petite marmaille qui périraient victimes de sa pitié mal entendue? Point de grâce autant qu'il nous tombera sous la main d'empereurs, de rois, de reines, d'impératrices, délivrons en la terre. Mieux vaut tuer le diable que le diable nous tue, comme je l'ai dit cent fois. Jamais nous ne ferons autant de mal à ces monstres qu'ils ne nous en ont fait, et qu'ils nous en veulent faire. J'espère qu'aujourd’hui, foutre, le tribunal révolutionnaire va faire jouer l'archi-tigresse d’Autriche à la main chaude. Il y a longtemps que nous aurions dû voir sa bougre de tête à la lunette. Mieux vaut tard que jamais. Il fallait la voir, hier, quand on lui a mis devant sa face ridée, le miroir de vérité. Cependant autant qu'elle a pu elle a fait contre fortune bon coeur mais, foutre, quand elle a été convaincue d'avoir recueilli le premier fruit de la vigne qu'elle avait plantée, et d'avoir fait, avec le petit avorton du Temple, comme le paillard Lot avec ses filles, alors la garce a perdu la carte. Vous, plats jean-foutres, qui combattez pour Dieu et le roi, voyez donc qu'elle est la cause que vous défendez: vous ravagez votre patrie, vous immolez vos frères, eh pourquoi? Pour une vieille putain, qui n'a ni foi ni loi, qui a fait périr plus d'un million d'hommes vous êtes les champions du meurtre, du brigandage, de l'adultère, de l'inceste, et vous osez dire que vous combattez pour Dieu : s'il existait un Dieu qui put approuver vos crimes, et qui put vous faire triompher, j'aimerai mieux être
crapaud qu'un pareil Dieu, car il n'y aurait pas dans le monde de monstre plus méprisable, plus odieux. Braves Sans-culottes, vous allez voir aujourd’hui sauter la tête de l'abominable furie qui voulait vous accabler de fers, soyez tous sur pied pour tenir la bride haute aux fausses poissardes et aux muscadins déguisés en charbonniers, qui s'apprêtent à crier grâce quand elle va paraître dans le vis-à-vis de maître Samson ne l'abandonnez pas, foutre, jusqu'à ce que sa tête soit roulée dans le sac, et que d'un bout de l'autre de Paris on entende crier vive la république, foutre. La plus grande de toutes les joies du Père Duchesne, N°299 Après avoir vu de ses propres yeux, la tête de veto femelle séparée de son foutu col de grue. Grand détail sur l'interrogatoire et le jugement de la louve autrichienne, et sa grande colère contre les deux avocats du diable, qui ont osé plaider la cause de cette guenon. Du temps des badauds, qui n'est pas éloigné, foutre, quand l'animal féroce, appelé roi, sortait de la ménagerie de Versailles, soit pour venir brûler un grand cierge devant la chasse de la patronne de Paris, à laquelle il ne croyait pas plus qu'à Jean de Verd, et pour faire frime de la remercier au sujet de la naissance d'un avorton, dont il n'était que le père postiche ou qu'après une guerre sanglante et entreprise pour les menus plaisirs de ses putains et les caprices de ses maquereaux, il venait enfin annoncer la paix, quand le pauvre peuple n'avait plus que les yeux pour pleurer alors, foutre, toute la canaille à talons rouges, avait grand soin de faire crier sur son passage, vive le roi, vive la reine, vive monseigneur le dauphin. "Voyez, sire, lui disaient ces jean-foutres, comme votre peuple est heureux comme il vous aime". L'ogre royal les croyait sur parole, et le soir il rentrait dans son nid de cocu, tout joyeux non pas des bénédictions qu'il croyait avoir reçues, mais enchanté de voir les Sans-culottes si bien disposés, et aussitôt dans son conseil il ordonnait la levée d'un nouvel impôt et il se félicitait de plumer ainsi la poule sans la faire crier. Les Pompadour, les Dubari, les Antoinette, quand les badauds avaient fait chorus, s'étaient égosillés pour témoigner leur joie au monstre biscornu, au nom duquel elles régnaient, se félicitaient d'avoir fait chanter les grenouilles (c'est ainsi qu'elles appelaient les Sans-culottes) mais, foutre, quand la misère était à son comble, quand le peuple écrasé, gémissait et murmurait tout bas en un mot, quand les grenouilles se taisaient malgré les gros sols et les cervelas qu'on leur jetait comme à des chiens affamés pour les empêcher d'aboyer alors, foutre, les rois et leur clique étaient dans leurs petits souliers. Jamais le peuple n'est aussi grand, aussi terrible que lorsqu'il est calme dans sa colère. J'aurais désiré, foutre, que tous les brigands couronnés eussent vu à travers la chatière, l'interrogatoire et le jugement de la tigresse d’Autriche. Quelle leçon pour eux, foutre! Comme ils auraient frémi en
contemplant deux ou trois cents mille Sans-culottes, environnant le palais et attendant, en silence, le moment où l'arrêt fatal allait être prononcé! Comme ils auraient été petits, ces prétendus souverains, devant la majesté du peuple! Qu'auraient ils pensé en se voyant ainsi soumis devant la loi, eux qui ne peuvent être obéis que par la terreur. Non, foutre, non, jamais on ne vit un pareil spectacle. Tendres mères, dont les enfants sont morts pour la république vous, épouses chéries des braves bougres qui combattent en ce moment sur les frontières, vous avez un moment étouffé vos soupirs, et suspendu vos larmes, quand vous avez vu paraître devant ses juges la garce infâme qui a causé tous vos chagrins et vous, vieillards, qui avez langui sous le despotisme, vous avez rajeuni de vingt ans en assistant à cette terrible scène. "Nous avons assez vécu, vous disiez vous, puisque nous avons vu le dernier jour de nos tyrans". Les jours se suivent, dit-on, et ne se ressemblent pas. Quelle différence de ces moments de vengeance à ces temps de badauderie, où tous les Français n'avaient point assez d'yeux pour admirer leur dauphine, assez de voix pour chanter ses louanges elle ne pouvait faire un pas, sans être suivie d'une foule immense qui faisait retentir l'air de cris de joie paraissait elle au spectacle, on oubliait musique, danse, tout enfin pour l'applaudir, et ne s'occuper que d'elle. Le pauvre Sans-culotte qui suait sang et eau d'un soleil à l'autre, pour payer toutes les mangeries, ne songeait plus à la taille, à la corvée, à la gabelle, à la chasse, aux procureurs, aux avocats et à toutes les vermines qui le rongeaient tout vivant, quand il voyait ce monstre, qu'il regardait comme une divinité, traverser le champ arrosé de ses larmes. Qui l'aurait jamais dit, foutre, que l'objet de tant d'amour ferait une si mauvaise fin! Mais tous chiens chassent de race. Il est aussi naturel aux rois et à leur bougre de progéniture de manger les hommes, qu'aux loups de manger les agneaux. Pour prix de tous les bienfaits qu'ils ont prodigué à cette furie, les Français ont été réduits par elle à deux doigts de leur perte. Depuis qu'elle a régné, elle n'a rêvé que meurtre et carnage. Plus d'un million d'hommes ont été ses victimes, et les crimes qu'elle a commis, ne sont encore que de l'eau de rose en comparaison de ceux qu'elle méditait. Il n'y avait pas d'assez grand supplice pour les expier, et c'est avec raison que ses juges, en prononçant son arrêt de mort, lui ont rappelé les bienfaits de la loi, puisqu'on n'avait pas imaginé un supplice nouveau pour venger la France et l'humanité. Malgré toi, coquine, tu as dû sentir le prix de l'égalité, puisque ton châtiment a été aussi doux que celui des autres coupables. Se peut-il, foutre, qu'il se soit trouvé un bougre assez hardi pour oser la défendre? Cependant deux braillards de palais ont eu cette audace. L'un deux a poussé l'effronterie jusqu'à dire que la nation lui avait trop d'obligations pour la punir, et de soutenir que sans elle, sans les crimes qu'on lui reproche, nous ne serions pas libres. Je ne conçois pas, foutre, comment on peut souffrir que des cuistres de Bazoche, par l'appât de la dépouille des scélérats, pour une boîte d'or, une montre, des
diamants trahissent leur conscience, et cherchent à jeter de la poudre aux yeux des jurés. N'ai-je pas vu ces deux avocats du diable non seulement se démener comme des diables dans un bénitier, pour prouver l'innocence de la guenon dont ils plaidaient la cause, mais encore oser pleurer la mort du traître Capet, et crier aux juges que c'était assez d'avoir puni le gros cocu, qu'il fallait au moins faire grâce à sa salope. Faire grâce à une scélérate couverte du sang des Français, laisser vivre un monstre pareil! Est ce donc pour qu'elle immole de nouvelles victimes? Mais j'ai eu une joie que je ne saurais rendre, quand j'ai appris que ces deux jeanfoutres avaient été arrêtés par ordre du comité de sûreté générale de la convention. J'espère qu'au moins jusqu'à la paix on les laissera siffler. Vous tous, qui avez été opprimés par nos anciens tyrans vous qui pleurez un père, un fils, un mari mort pour la république, consolez vous, vous êtes vengés. J'ai vu tomber dans le sac la tête de veto femelle. Je voudrais, foutre, pouvoir vous exprimer la satisfaction des Sans-culottes, quand l'archi-tigresse a traversé Paris dans la voiture à trente six portières. Ses beaux chevaux blancs, si bien panachés, si bien enharnachés, ne la conduisaient pas, mais deux rossinantes étaient attelées au vis-à-vis de maître Samson, et elles paraissaient si satisfaites de contribuer à la délivrance de la république, qu'elles semblaient avoir envie de galoper pour arriver plus tôt au lieu fatal. La garce, au surplus, a été audacieuse et insolente, jusqu'au bout. Cependant les jambes lui ont manqué au moment de faire la bascule, pour jouer à la main chaude dans la crainte, sans doute, de trouver, après sa mort, un supplice plus terrible que celui qu'elle allait subir. Sa tête maudite fut enfin séparée de son col de grue, et l'air retentissait des cris de vive la république, foutre. La grande colère du Père Duchesne, N°300 Contre les marchands, les fermiers, les accapareurs qui se foutent des décrets de la convention, et qui continuent, comme de plus belle, de manigancer la contre-révolution. Sa grande motion pour que l'armée révolutionnaire se mette promptement en marche, pour en abattre comme des quilles. Chacun plaide pour son saint. Voilà le mot de tous les égoïstes mais, dans une république, foutre, le grand saint, la première idole, c'est la liberté. Celui qui ne se sent pas le courage de lui sacrifier fortune, amis, parents, tout ce qu'il a de plus cher, doit plier bagage, et aller vivre avec les animaux stupides, que les rois appellent leurs sujets. Des hommes libres ne connaissent ni le tien, ni le mien, tout ce qu'ils possèdent appartient à la patrie, et leur premier désir est de mourir pour elle. Ca me scie le dos, foutre, d'entendre un tas de bougres, qui ne sont ni chair, ni poisson qui ne valent ni à rôtir, ni à bouillir, dire insolemment: je suis républicain, tandis qu'ils prennent la chèvre par la barbe, et qu'ils marchent, vers la liberté, comme les écrevisses. N'y a t il pas de quoi
manger son sang, de voir les riches resserrer plus que jamais, les cordons de leur bourse et faire du pis qu'ils peuvent pour ramener l'ancien régime. Je me débaptise, quand je songe aux marchands, négociants, trafiquants qui se réjouissent de la misère publique, et qui tous les matins demandent, dans leurs prières, la contre-révolution comme leur pain quotidien. Je brise ma pipe et mes fourneaux, quand on me parle de ces fermiers qui accaparent les subsistances qui enterrent leur bled qui brûlent les gerbes, plutôt que de vendre aux prix que leur ordonne la loi. Tonnerre de Dieu, il faut en finir une fois pour toutes, tremblez, ennemis du peuple, de le pousser à bout: si une fois la moutarde nous monte au nez, vous aurez bientôt cessé de vivre. Un brave montagnard vient, sur ce chapitre, de m'écrire de la bonne encre, et de me donner des avis dont je profiterai: Lejeune, représentant du peuple dans les départements de l’Aisne et circonvoisins, au Père Duchesne. "Depuis quinze jours, nous sommes, Roux et moi, en mission dans le département de l’Aisne, nous avons remarqué combien l'esprit public est peu à la hauteur des circonstances. L'intrigue paraît y dominer le cultivateur, qui ne connaît que son intérêt, satisfait avec lenteur aux réquisitions cependant nous prenons des mesures rigoureuses et nous espérons surmonter les difficultés que l'aristocratie et l'intrigue nous opposent. Crie dans tes feuilles, brave marchand de fourneaux, contre les administrations que nous allons refondre et contre les cultivateurs que la cupidité aveugle, et qui oublient les avantages qu'ils retirent de la révolution. Nous viendrons à bout de ces hommes là à l'aide de l'armée révolutionnaire et des arrestations qui nous restent encore à faire dans ce département. Continue à démasquer les intrigants, poursuis les coquins et remplis les Sans-culottes du feu brûlant de la liberté". Salut et fraternité. Signé, Lejeune, représentant du peuple. Oui foutre, je ferai main basse sur les fripons et les traîtres. Je n'ai pas besoin qu'on me mette le feu sous le ventre pour m'engager à remplir cette tâche. Je te remercie, brave montagnard, de me montrer de nouveaux monstres à combattre. Je les poursuivrai jusqu'en enfer, et je ne leur donnerai point de relâche qu'ils ne soient exterminés. Oui, je ne vous quitterai pas plus que notre ombre, vous qui vous engraissez au dépend du peuple: vous, qui accaparez nos subsistances vous, qui avez deux visages, et qui faites contre fortune bon coeur, qui tendez la main aux Sans-culottes en signe d'amitié, et qui, dans le fond du coeur, désirez les voir à cinq cents mille diables vous, qui voulez vous emparer de l'autorité, et qui vous servez de la patte du chat pour tirer les marrons du feu vous, qui, encore encrassés de la bourbe du marais, où vous avez barboté, osez paraître sur la cime de la montagne vous, qui portiez la besace avant la révolution, et qui nagez maintenant dans l'or vous, qui avez été les avocats de Dumouriez et qui avez partagé avec lui les dépouilles de la Belgique. Point de quartier pour les voleurs, les intrigants et les ambitieux.
J'y périrai, foutre, ou les projets des traîtres s'en iront en eau de boudin. C'est vous surtout que je dauberai, riches fermiers, pour qui la révolution a tout fait, et qui ne voulez rien faire pour elle. Si on vous eut dit, il y a dix ans, que la taille, la corvée, la chasse, la pêche seraient détruites, que vous deviendriez les égaux de ces hobereaux qui vous faisaient pourrir dans des cachots, et vous envoyaient aux galères, et quelque fois pendre, pour avoir foutu du plomb dans l'aile des pigeons qui détruisaient vos moissons, ou tué le lièvre qui mangeait vos choux, si on vous avait prédit alors que toutes les vermines de la chicane seraient écrasées, que les robes rouges des parlements seraient pendues au croc, que les évêques, archevêques, cardinaux et toute la bougre de calotte s'en irait au foutre, que tous les bougres de muscadins de la cour, qui vous traitaient de Turc à Maure, et qui avaient toujours le barin levé sur vos épaules, sans que vous osiez souffler le mot qu'enfin l'ogre royal qui, avec ses maquereaux et ses putains, dévoraient à lui seul tout le produit de vos sueurs, et qui s'abreuvait de votre sang, serait raccourci, ainsi que l'infâme autrichienne qui seule vous a fait plus de mal que toutes les grêles et les ouragans qui ont ravagé vos campagnes, n'auriez vous pas regardé toutes ces promesses comme les rêves d'un échappé des petites maisons, n'auriez vous pas tout sacrifié, n'auriez vous pas donné votre sang même pour voir arriver un aussi beau jour que celui où tous ces miracles seraient arrivés? Eh bien, foutre, il luit ce jour heureux. Vous jouissez de tous ces avantages. Vous étiez les plus vils et les plus malheureux des esclaves, et vous êtes aujourd’hui des hommes libres. Vous ne sentez donc pas la dignité du titre de citoyen qui vous élève au dessus de tous les rois de la terre vous craignez de faire des sacrifices pour vous assurer la possession de tant de biens. Qu'est ce donc que l'argent, en comparaison de la liberté misérables, qui calculez votre intérêt à celui de la patrie, croyez vous foutre, que les brigands qui nous font la guerre, respecteraient nos propriétés s'ils pouvaient détruire notre constitution non, foutre, vous seriez les premières victimes ils vous étoufferaient dans vos ruches, pour avoir la cire et le miel que vous avez amassés. Sans la constitution vous êtes foutus, avec elle vous serez à jamais libres et heureux. Vous n'avez pas dû vous attendre que les perdrix vous tomberaient d'abord toutes rôties. La liberté ne croît pas comme un champignon, le chêne que vous plantez ne vous ombragera pas de ses rameaux, il faudra qu'il résiste à bien des tempêtes avant que vos petits, en dansant à son ombre, bénissent votre mémoire de leur avoir procuré un abri contre les rayons ardents du soleil, et les mettre à couvert de la pluie vous qui murmurez de ne pas jouir des fruits de la révolution, n'a t il pas fallu à vos mères des peines et des soins infinis pour vous donner et vous conserver la vie? Ne vous a t on pas d'abord torché et empâté de bouillie, mené à la lisière! Avant que d'être homme vous avez plus coûté à vos parents que vous ne pensez. Eh bien, foutre, il est de même de la constitution c'est un
enfant plein de force qui ne demande qu'à vivre si vous ne lui donnez tous les secours qu'il vous demande, vous le verrez périr et dessécher quand vous l'aurez perdu, vous serez au désespoir. Mais il vivra, foutre, malgré les scélérats qui veulent lui donner la mort. Non, foutre, non, la liberté ne périra pas, mais les égoïstes, les intrigants et les traîtres sont à leur dernière heure. Le tocsin va sonner sur eux. Malheur aux riches qui préfèrent leur coffre-fort à la patrie malheur aux accapareurs malheur aux lâches administrateurs, qui ont soufflé le froid et le chaud malheur aux voleurs qui se sont enrichis des dépouilles de Sans-culottes. L'armée révolutionnaire va battre aux champs, et tous les traîtres vont tomber devant elle comme des quilles, foutre. La grande joie du Père Duchesne, N°301 De voir que les Sans-culottes des départements donnent le dernier branle aux calotins, et de ce que tous les magots d'or et d'argent que nos vieilles grand-mères appelaient des saints, sont enfin dénichés, et arrivent par charretées à la monnaie, pour être convertis en écus, qui serviront à payer les frais de la guerre, et à nous délivrer de la peste des rois et des prêtres. Par la vertu de sainte guillotine, nous voilà délivrés de la royauté à ton tour bougre de calotte. N'était il pas bien foutant de voir, depuis tant de siècles, deux animaux voraces, le roi et le prêtre, se disputer le droit de dépouiller, d'opprimer, de dévorer les hommes, comme deux loups les entrailles de la malheureuse brebis qui tombe sous leurs griffes? Quel pacte infâme que celui du trône et de l'autel? L'un disait à l'autre, comme les médecins, quand ils expédient un pauvre malade, passe moi la rhubarbe, je te passerai le séné c'est à dire, en bon français, toi, roi, qui a la force en main qui, d'un seul mot, peux faire égorger des milliers d'hommes qui peut lâcher de nombreuses armées, pour dévorer le peuple, comme tes chiens le cerf et la biche des bois sire, prête moi ton appui fais dresser des échafauds allume des bûchers, pour faire respecter mon culte tue, égorge, massacre quiconque ne voudra pas croire que un et deux ne font qu'un, et que le dieu de l'univers, qui a tout créé, qui gouverne tout, n'obéit pas à ma voix. Que celui qui ne croira pas que je puisse escamoter ce dieu comme une muscade, et qu'après que j'aurai marmotté quelques mots de latin, il n'existe pas tout entier dans un pain à cacheter, soit déclaré impie et sacrilège qu'il soit rôti tout vivant qu'il périsse dans l'huile bouillante. Roi, si tu veux seulement faire pour moi cette bagatelle, tu n'auras point affaire à un ingrat. Je dirai au peuple, que nous aurons grand soin d'abrutir, et qui languira dans l'ignorance je soutiendrai, dans la chaire du seigneur, que tu ne tiens ton autorité que de dieu seul, que tu as droit de vie et de mort sur tes sujets que le peuple est fait pour les rois, comme le cheval pour porter le bât pour te rendre plus redoutable, j'annoncerai, un beau matin, que le père éternel m'a envoyé
deux courriers de son cabinet c'est à dire deux anges, pour m'apporter une petite fiole, que je nommerai la sainte Ampoule, remplie d'huile, fabriquée avec les olives du paradis terrestre je te graisserai à la tête, à la poitrine aux bras, avec cette huile merveilleuse et après ce tour de passepasse, ta personne sera sacrée. Les quatre-vingt-dix-neuf moutons de la Champagne, devant lesquels je ferai ce grand miracle, ouvriront le bec d'une aulne, entonneront avec moi le domine salvum fac regem, qui sera répété par les badauds de Paris et de toutes les provinces du royaume. Après cette opération, tu seras l’oint du seigneur tu guériras les écrouelles, le mal caduc, aussi bien que les plus grands docteurs de la faculté on ne pourra te regarder en face, on ne te parlera qu'à genoux tes enfants, soit que tu les aies fait toi-même ou qu'ils aient été fabriqués par un laquais, un palefrenier, c'est égal, eux et toute la race seront également sacrés dans tous les siècles des siècles ils hériteront de la nation comme on hérite d'un champ, d'un pré. Eux seuls feront la loi, et il n'y aura point de lois pour eux. Ils pourront violer les femmes et les filles égorger le mari dans les bras de sa femme, le fils sur le sein de sa mère de par dieu tout ce qui serait un crime pour le reste des hommes, sera permis au sang royal. L'ouvrier travaillera nuit et jour le laboureur suera sang et eau, il arrosera la terre de ses larmes, pour entretenir les putains des rois et des princes, et pour engraisser leurs valets et leurs maquereaux. Taupe calotin, ton roi se laisse aller. La volonté de dieu soit faite. C'est ainsi foutre, qu'un barbier rase l'autre. Voilà le marché qui fût conclu entre certain évêque, nommé Rémy, de la trempe de Claude Fauchet, et saint, qui pis est, et un brûleur de maisons, un mangeur d'hommes, nommé Clovis, roi de France. Depuis ce pacte du diable, les Sans-culottes ont été traités comme des bêtes à somme. Quelquefois les rois et les prêtres se sont disputé le butin le peuple s'est divisé pour défendre le parti de ses tyrans des flots de sang ont coulés, mais les gueux ont toujours continué de porter la besace. Si des hommes avaient été instruits plutôt s'ils avaient connu tous les tours de gibecière, il y a gros qu'ils auraient foutu depuis longtemps le trône et l'autel en canelle mais malheureusement nos pauvres grands pères ne savaient ni a ni b, et ils baisaient en tremblant la main qui les écrasait. Enfin un plus grand saint que tous ceux de la légende dorée, dégota tous les faiseurs de miracles, en inventant l'imprimerie des bougres à poil, nommés philosophes, firent aussi de gros livres dans lesquels ils expliquèrent les singeries des papes, des cardinaux, des évêques, ses moines et de toute la foutue calotte ils apprirent au peuple que les rois n'étaient rien sans lui car c'est le peuple qui a fait les rois, et celui qui a pu faire une chose, peut aussi la détruire. Il est vrai que plusieurs de ces braves bougres furent étripés, grillés, écartelés tous vivants, pour avoir dit la vérité mais, foutre, une fois que nous avons vu la lumière, on a beau nous crever les yeux, le souvenir du soleil reste toujours gravé dans notre
mémoire. Un luron qui avait bec et ongle, et qui avait plus d'esprit dans son cerveau que tous les cuistres de l'église, un certain Voltaire arriva, le fouet à la main, pour dauber tous les imposteurs qui avaient fondé leur cuisine sur la bêtise du genre humain il prouva que l'enfer et le purgatoire étaient des contes à dormir debout, et avaient été imaginés par les prêtres pour faire peur aux vieilles femmes. Un autre Sans-culotte de Genève, nommé Jean-Jacques Rousseau, le plus franc et le meilleur des humains, parut en même temps pour combattre le mensonge et la tyrannie il prouva que la véritable religion est la probité et le patriotisme il prononça le mot sacré de liberté, et à sa voix, tous les bons Sans-culottes se prosternèrent devant cette nouvelle idole. Quand la poire est mûre, il faut qu'elle tombe. L'infâme Capet qui croyait encore être au temps de l'évêque Rémy, continua de fouler le peuple et de l'écraser. Le sac était plein, et il creva. Le peuple se rebiffa, et Capet a fini comme tous les tyrans doivent finir. Les nobles, les robins, les rois sont foutus sans retour, il faut à votre tour sauter le pas, prêtres menteurs, prêtres avides, prêtres sacrilèges. Tonnerre de dieu, quel branle on vous donne dans les départements. Les commissaires de la convention vont en besogne comme une pie qui abat des noix. Dans les départements du Loiret, de l’Allier, de la Nièvre où les prêtres faisaient la pluie et le beau temps, Fouché, Laplanche et d'autres braves Montagnards viennent de donner le coup de grâce à la cagoterie. Les Sans-culottes, éclairés par les apôtres de la liberté ont fait déménager tous les saints d'or et d'argent et on les apporte maintenant à pleins chariots à la monnaie. Ah! Foutre, si le Sans-culotte Jésus revenait sur la terre, comme il serait content de voir tous les voleurs chassés du temple, car il était l'ennemi juré des prêtres. C'est en plein champ et à la face d’Israël qu'il prêchait son évangile. Autant ses successeurs ont été insolents, autant il était doux. Il détestait les riches, il soulageait les pauvres. Voilà, foutre, le modèle de tous les Jacobins. Pour l'avilir, les prêtres en ont fait un dieu de sang, lui qui n'aurait pas voulu tuer une mouche, lui qui pardonna à la femme adultère, à la Madeleine, et même à ses bourreaux. Comme il aurait été content de vider son gousset, et de donner jusqu'à son dernier sol pour soutenir une guerre qui aurait détruit les rois et les prêtres! Sans-culottes de tous les départements, envoyez, à son exemple, tous les prêtres au Mississipi, et faites des écus avec les magots d'argent que vos nourrices vous ont appris à nommer des saints, foutre. La grande colère du Père Duchesne, N°302 En apprenant de nouvelles trahisons dans les armées. Ses bons avis au général Jourdan, pour qu'il continue de foutre le bal aux despotes et à leurs esclaves, et pour l'empêcher de nous tourner casaque, comme l'infâme Dumouriez et le traître Custine. Sa grande motion pour demander à la convention de faire jouer la sainte guillotine pour exterminer les
voleurs, les traîtres et les accapareurs. Comme les brigands couronnés doivent se mordre le bout des doigts d'avoir entrepris une guerre dont ils vont se tirer comme arlequin, avec les étrivières. S'ils avaient pu prévoir l'avenir au lieu de se liguer contre la France et d'épuiser leurs coffres pour détruire notre liberté, ils auraient au contraire ménagé leurs trésors pour soulager le peuple. C'est ainsi, foutre, qu'ils auraient retardé leur chute et qu'ils auraient pu batailler encore quelque temps contre la mort mais heureusement ils ont pris le roman par la queue et ils se sont brûlés à la chandelle. Quand on compte sans son hôte, il faut compter deux fois. Parce qu'ils avaient dans leur manche, toute la bougre de séquelle de l'ancien régime, ils ont cru qu'ils n'avaient qu'à se baisser et en prendre. "Mon très honoré frère et cousin, a dit le Cartouche de Vienne au mandrin de Berlin, nous sommes aussi brigands l'un que l'autre, nous aimons également le pillage, si nous n'avions pas été empereurs et rois, nous aurions été les deux plus fameux voleurs de grand chemin de notre siècle, et nous n'aurions pas manqué de nous réunir pour couper les bourses et pour égorger les passants. Puisque la nature nous a donné les mêmes inclinations, et qu'il se présente une belle occasion de voler, rapiner, ravager, massacrer, mettons tous les deux nos têtes dans un bonnet, et convenons de fondre sur la France comme deux loups sur un troupeau de moutons. Votre très cher frère et cousin, le roi de France et de Navarre, que ses sujets viennent de mettre en tutelle, consent à jouer au roi dépouillé, et il nous abandonne volontiers la moitié de ses vastes états, si nous pouvons lui aider à faire perdre le goût du pain à cette maudite assemblée nationale, et à tous les patriotes qui lui ont rogné les ongles, et qui ne lui ont accordé que quarante millions pour ses menus plaisirs. Ma soeur Toinon qui a juré la perte de la France, m'a déjà fait passer pour les frais de la guerre plus de deux cents millions en bons écus, et elle m'en promet encore davantage ainsi donc, foutre, ce seront les Français eux-mêmes qui nous donneront des verges pour les fouetter. Ce n'est rien encore, toute la noblesse, tout le clergé, tous les honnêtes gens, toute la robinaille, depuis les premiers présidents jusqu'aux derniers clercs de la Bazoche, tous les financiers, tous les gros marchands, commerçants, tous les riches enfin seront de notre bord. Pour mieux nous servir, ils feront d'abord contre fortune bon coeur, et, pour la frime, ils dégoteront les Sans-culottes en patriotisme. Quand ils les auront ainsi foutu dedans, et qu'ils auront trouvé moyen de se faire nommer à toutes les places, chacun à leur tour, ils tourneront casaque à la Sans-culotterie. C'est ainsi qu'ils désorganiseront les armées, et qu'ils allumeront la guerre civile. Quand le feu sera aux quatre coins de la France, il nous sera facile de nous en emparer. Ainsi nous n'aurons contre nous que ce que nous appelons la canaille il est vrai que c'est le côté le plus nombreux, mais sans chefs, sans argent, sans ressources, trahis de tous côtés, les Sans-culottes perdront bientôt la carte, et ils jetteront le manche après la cognée. Nous les verrons tomber
à nos pieds et nous demander grâce. Si toi et moi, mon cher frère, cousin et ami, nous n'étions pas assez forts, pour exécuter ce grand projet, notre confrère, le roi Georges Dandin, est derrière la toile avec son ministre Pitt. A l'aide de certains Brissot et de certains gredins de la Gironde, qui paraissent aujourd’hui des républicains enragés, et qui en secret ont la patte bien graissée pour brouiller les cartes et mettre les Français à chien et à chat, nous nous ferons un parti puissant en France. Ainsi, la liberté accablée de tous côtés, pressée au dehors et au dedans, succombera bientôt. Le pape, auquel ni toi, ni moi, ne croyons, donnera un dernier signe de vie. Il ameutera toute la bougre de calotte. Les prêtres qui ne pardonnent jamais, et qui sont désespérés de voir finir leur règne, prêcheront de tous côtés la révolte ils parcourront les campagnes, le crucifix et la torche à la main, et rassembleront autour d'eux tout ce qu'il reste d'imbéciles en France, pour rétablir la dîme, les canonicats et tous les bénéfices. " Voilà, foutre, les châteaux en Espagne que se bâtissait le tyran d’Autriche au commencement de la guerre. Tous les tyrans qui règnent en Europe, ont taupé dans ces projets, et chacun se flattait d'avoir sa part du gâteau. Il en faut bougrement rabattre aujourd’hui. Les scélérats savent maintenant de quel bois nous nous chauffons, et ils ont appris combien pèse le bras d'un peuple libre. Tous leurs trônes seraient maintenant en canelle, ils ne vivraient plus, foutre, et l'étendard de la liberté flotterait à Vienne et à Berlin, si l'infâme Dumouriez avait joué beau jeu, bel argent. Malgré les voleurs, les intrigants et les traîtres, nous avons tenu tête à tous les despotes ligués contre nous, et ils sont au bout de leurs volets. Malgré toutes leurs prouesses, ils n'ont pu nous enlever encore que trois villes, et encore par la plus lâche des trahisons. Ce Cobourg qui se vantait d'être un second César, vient d'être rossé à plate couture par un jeune Sans-culotte qui lui a étripé six mille gros talons et pilleurs de poivre qui engraissent maintenant la terre qu'ils ont ravagée. Continue, intrépide Jourdan, poursuis cette bougre de canaille, l'épée dans les reins, reprends Condé et Valenciennes et répare les crimes du général Moustache. Surtout, foutre, ne vas pas saigner du nez, et faire naufrage en arrivant au port foule aux pieds l'or et les assignats que l'on va t offrir, pour nous tourner casaque, et ne songe qu'à la gloire. Si tu continues, comme tu viens de débuter, tu reviendras couvert de lauriers partout où tu passeras, tu entendras bénir ton nom, et tu seras comblé de bénédictions mais, foutre, si le diable voulait te tenter, songe à La-Fayette, à Dumouriez songe à Custine, au palefrenier Houchard et à tous les autres jean-foutres qui ont trahi le peuple. Tricherie revient toujours à son maître. La liberté ne périra jamais, mais les traîtres tour-à-tour seront anéantis, foutre, Et vous, pères de la patrie, législateurs qui venez de donner un si bel exemple à l'univers en vous purgeant des immondices du marais prenez encore une fois le mors aux dents. Sauvez la république, foutre, ne vous arrêtez pas en si beau chemin. La France est levée en masse
pour faire exécuter vos lois profitez du moment pour exterminer les brigands de la Vendée. Ils viennent d'être débusqués de Mortagne et de Cholet. Faites brûler les bois et les forêts où ces bêtes féroces se sont réfugiées. Faites pleuvoir les bombes et les boulets rouges sur les rebelles de Toulon, avant tout, que les scélérats qui ont manigancé la contre-révolution à Lyon, à Marseille, à Bordeaux, dans le Calvados, soient raccourcis comme veto mâle et femelle que les infâmes coquins qui ont livré les lignes de Wissembourg, et occasionné la déroute de l'armée du Rhin, soient promptement livrés au tribunal révolutionnaire. Frappez, écrasez tous les voleurs, tous les conspirateurs, tous les accapareurs. La guillotine et du pain, voilà le secret de la république, foutre. La grande joie du Père Duchesne, N°303 De voir que les avocats de la veuve Capet, qui ont accaparé le savon pour blanchir Cartouche Brissot et les Mandrins de la Gironde, perdront leur lessive. Ses bons avis au fonctionnaire Samson, pour qu'il graisse promptement ses poulies, afin de faire faire la bascule à ces scélérats que cinq cents millions de diables ont vomi sur la France, pour perdre la république, et anéantir la liberté. Ah? Que les gens d'esprit sont donc bêtes dit je ne sais quelle soubrette, et je ne sais quelle comédie. Rien n'est plus vrai, foutre. Tous ces bougres qui parlent comme des livres, souvent n'ont pas le sens commun tout leur bavardage n'est que de la crème fouettée et ces grands docteurs qui veulent tout gouverner, ne savent pas se gouverner eux-mêmes. Qui trop embrasse, mal étreint. Qui mieux que vous peut nous dire des nouvelles, Brissotins et Girondins? Vous aviez des langues bien dorées, le miel était sur vos lèvres, et le poison dans votre coeur. Si vous n'y aviez pas entendu finesse, et si vous aviez tout unanimement marché dans le bon chemin, vous seriez arrivés au port après avoir contribué à sauver votre patrie, vous auriez été comblés des bénédictions du peuple votre vieillesse aurait été honorée les Sans-culottes, devenus libres et heureux, vous auraient montré à leurs enfants, en leur recommandant de suivre votre exemple voilà, leur auraient ils dit, ceux qui ont fait votre bonheur si vous êtes républicains, mes enfants, rendez en grâce à ces vieillards respectables qui siégeaient au haut de la montagne de la convention ce sont eux qui nous ont délivrés des rois. Souvenez vous à jamais, vous et les autres, des services qu'ils nous ont rendus que leur mémoire soit chérie et respectée tant qu'il existera sur la terre des hommes libres. Voilà, foutre, le sort qui vous était réservé, lâches déserteurs de la Sans-culotterie, qui avez préféré de barboter dans le marais et vous couvrir de sa boue, plutôt que gravir la sainte montagne où la gloire vous tendait les bras. Vous avez voulu péter plus haut que le cul, vous avez voulu faire fortune, et vous n'avez pas réfléchi que la guillotine était au bout de la route que vous preniez pour y arriver. Que les ambitieux et les
intrigants qui seraient tentés de vous imiter, viennent contempler l'opprobre où vous vous êtes plongés. Te voilà enfin sur la fatale sellette, infâme Brissot quand je te prédisais que tu ferais une mauvaise fin, n'étais je pas un bon prophète! N'avais je pas raison de te dire que le gibet ne perd jamais sa proie? Il y a plus de dix ans que tu aurais fait la grimace au pont Rouge, si l'on t'avait rendu justice, mais tes escroqueries d'alors, toutes les bourses que tu coupais dans l'ancien régime, n'étaient que des coups d'essai des brigandages que tu as fait pendant la révolution. Jamais, foutre, non jamais un seul homme n'a fait autant de mal à sa patrie que toi et les vils coquins de ta clique. C'est vous, foutre, qui, en marchandant la liberté de la France avec son dernier tyran, lui avez fait beau jeu pour rassembler autour de lui tous les chevaliers du poignard, tous les scélérats qui ont égorgé les patriotes le 10 août c'est vous, c'est vous qui avez empêché d'immoler ce monstre et sa bougre de race c'est vous qui lui avez tendu les bras, qui l'avez flagorné dans le moment où le canon ronflait autour de la ménagerie des Tuileries et de la convention c'est vous qui avez mis une barrière entre le peuple et lui pour le sauver c'est vous qui l'avez encore traité en roi quand le peuple venait de mettre son trône en canelle c'est vous qui depuis avez cherché les querelles d'Allemand aux braves bougres qui avaient mis la race veto à l'ombre c'est vous qui avez vilipendé, dans tous les départements, la commune de Paris et les Sans-culottes qui avaient fait la révolution, pour vous venger de ce qu'ils vous avaient coupé les vivres en détruisant le tyran qui vous graissait la patte pour acheter tous les décrets avec lesquels il voulait assassiner le peuple c'est vous qui avez jeté le chat aux jambes des meilleurs patriotes, quand toutes vos manigances ont été découvertes, qui avez accusé Robespierre et Marat de vouloir s'emparer de l'autorité, et qui avez cherché à perdre ces intrépides défenseurs du peuple qui vous portaient ombrage, et qui vous barraient chemin c'est vous qui avez fait Roland ministre, pour vous servir de lui, comme le singe de la patte du chat, pour tirer les marrons du feu, c'est à dire pour empoisonner tous les départements des journaux du diable qui vous ont servi à allumer la guerre civile, c'est vous qui avez également choisi le traître Servan pour ministre de la guerre, parce que vous vous entendiez avec lui comme larrons en foire, pour peupler nos armées de tous les ci-devant gardes du corps et de tous les muscadins de l'ancien régime c'est vous qui avez également nommé le coquin de Clavière, et qui lui avez fait donner le moule des assignats, pour pêcher avec lui en eau trouble c'est vous qui avez mis Dumouriez à la tête de nos armées, parce que vous saviez qu'ils les livrerait à nos ennemis, et que vous espériez partager avec lui le gâteau c'est vous, foutre, et c'est là le plus grand de tous vos crimes, c'est vous qui nous avez mis sur le dos toutes les puissances de l'Europe, et qui avez allumé la guerre universelle dans le temps où nous n'avions ni argent, ni armées, ni munitions quand toutes nos villes de guerre étaient
dégarnies et nos fortifications délabrées. Si nous avons triomphé de tous les brigands couronnés, ligués contre notre république, ne vous en attribuez pas la gloire, car, foutre, votre intention était d'anéantir la liberté, en livrant la France, aux despotes si les Prussiens et les Autrichiens n'avaient pas tant pompé de vin doux dans la Champagne, et n'avaient pas péri de maladie par milliers, ils arrivaient jusqu'aux portes de Paris, et alors tous les brigands, tous les royalistes, tous les aristocrates de l'intérieur se réunissaient à eux, et la contre-révolution était faite. C'est par vos manoeuvres, lâches et méprisables coquins, que les patriotes de Marseille, de Bordeaux, de Lyon ont été égorgés c'est vous qui avez vendu Toulon aux Anglais c'est vous qui avez allumé la guerre civile de la Vendée, qui avez fait égorger plus d'un million d'hommes. Tout le sang qui a été versé et qui coulera encore, vous l'avez répandu. Il rejaillit sur vous. La France entière vous accuse. Vous n'échapperez pas au supplice que vous avez mérité. Les avocats de la veuve Capet ont beau employer le vert et le sec pour vous blanchir, ils ont beau accaparer tout le savon de la France, ce savon ne mousse pas. A laver la tête d'un nègre, on perd sa lessive. Les juges et les jurés du tribunal révolutionnaire sont des bougres à poil qui sont cuirassés de la tête aux pieds, et ils ne se laisseront éblouir ni par l'or, ni l'argent que vos amis leur offriront pour se sauver. Eh, vite donc, maître Samson, graisse tes poulies et dispose toi à faire faire la bascule à cette bande de scélérats que cinq cents millions de diables ont vomi sur la terre, et qui auraient du être étouffés dans leur berceau, foutre. La grande colère du Père Duchesne, N°304 De voir que les feuillants, les royalistes, les accapareurs se cotisent pour sauver l'infâme Brissot et la clique de la Gironde, en enlevant encore le pain chez les boulangers, pour le jeter dans les égouts. Ses bons avis au tribunal révolutionnaire, pour qu'il ne s'amuse pas plus longtemps à la moutarde et qu'il fasse jouer bien vite à la main chaude ces scélérats qui sont déjà jugés par le peuple. Certain roi s'avisa un jour, je ne sais pas pourquoi, d'aller visiter les galériens rendre visite à des forçats c'est un petit passe-temps digne d'un roi, que de voir des hommes dans les fers mais rien pourtant en comparaison de celui de visiter une Bastille, de voir languir dans un cachot, et pourrir sur la paille le malheureux qui a fait un couplet contre sa majesté, ou contre monseigneur le ministre, ou contre sa maîtresse, tourmenter pendant un demi siècle, faire périr à petit feu l'écrivain patriote qui a eu le courage de dire la vérité, et de prononcer, seulement du bout des lèvres, le mot de liberté oh! Voilà, foutre, de véritables plaisirs de roi. Or donc, celui en question, en passant en revue tous les bougres qui étaient enchaînés dans le bagne, demandait à l'un: qu'as tu fait? Rien, sire à l'autre: quel crime t'a conduit ici aucun, votre majesté? Toute la file
répéta la même chanson tous dirent qu'ils étaient de pauvres contrebandiers, ou des braconniers tous n'étaient là que pour des foutaises, et dans tout ce qu'ils avaient fait, il n'y avait pas de quoi fouetter un chat un seul était tapi dans un coin, et il paraissait déchiré de remords l'animal couronné le contemple sur son fumier, et l'apostrophe comme les autres moi, lui répondit-il, je ne suis pas ici pour me vanter mais si on m'avait rendu justice, au lieu de la chaîne, j'aurais mérité la roue, et peutêtre d'être noyé dans un cent de fagots car j'ai commis les plus grands forfaits ma vie est chargée de tant de crimes, que je n'en puis supporter l'horreur. Qu'on ôte ce coquin là d'avec tous ces honnêtes gens, s'écria l'ogre royal, il les corromprait tous. Voilà, foutre, trait pour trait le tableau du tribunal révolutionnaire, depuis que milord Brissot est sur la sellette à la suite de la clique de la Gironde, rangée en espaliers autour de lui. Tous les crapauds qui barbotaient dans le marais et qui faisaient, il y a quelques mois, un charivari de bougre, en vomissant leur poison contre la montagne, ont maintenant leur caquet bougrement rabattu. Comme les galériens que je viens de citer, ils sont les plus braves gens du monde, mais avec cette différence qu'il ne s'en trouve pas un qui convienne d'être coupable. Quand on reproche à Cartouche Brissot d'avoir été espion en Angleterre et d'avoir été envoyé en France par Pitt au commencement de notre révolution pour brouiller les cartes, il commence par nier le fait, attendu que tous mauvais cas sont niables mais, foutre, quand on le presse, l'épée dans les reins, et qu'on lui prouve que son cas est sale sur ce chapitre, il convient qu'en effet il a été chargé de quelque commission pour la France par les Anglais, mais en tout bien et tout honneur, qu'il n'a jamais désiré que la gloire et le bonheur de sa patrie, et comme, suivant lui, l'Angleterre est un pays de Cocagne, il désirait que la France fût une province de ce beau royaume. Quand on dénonce Vergniaud, Gensonné, Fonfrède, Lacaze et le furet de la Gironde, le petit Ducos, et qu'on les accuse d'avoir taupé dans le tripotage de Brissot, en mettant les départements à chien et à chat avec Paris en demandant une armée départementale pour faire perdre le goût du pain aux Jacobins, en allumant la guerre civile à Marseille, à Bordeaux, à Lyon, dans les départements du Finistère, du Jura, du Calvados, de la Vendée, ils nient aussi, comme de raison mais quand on leur montre les lettres qu'ils ont écrites et dans lesquelles ils invitent la république à se lever en masse pour marcher contre Paris, qu'ils appellent une nouvelle Sodome alors mes jean-foutres ont le bec jaune et ne savent quoi répondre. Cependant le bateleur Vergniaud, dont la langue est si bien enfilée, explique du mieux qu'il peut l'affaire. "Nous étions dans l'erreur, dit-il nous croyons qu'on en voulait à nos jours nous pensions de bonne foi que Marat voulait nous faire égorger". Ah, foutre, comme certain juré lui a rivé son clou. "misérable, s'est-il écrié, en entendant ce jean-foutre insulter à la mémoire de l'ami du peuple, la preuve que tu mens, c'est que
Marat a été assassiné et que tu vis encore!" à ce mot le peuple, qui était sur le gril de voir outrager son meilleur défenseur, celui qui est péri pour lui, n'a pu retenir ses applaudissements. Quoique vous ayez bec et ongles, infâmes coquins, vous ne pourrez jeter de la poudre aux yeux de vos juges et vous n'échapperez pas au supplice que vous avez mérité. Je sais, foutre, que vous avez encore beaucoup d'amis, qui, par dessous cape, employent le vert et le sec, pour vous empêcher de faire la fatale culbutte au vis-à-vis de la statue de la liberté mais ils y perdront leur latin. Les feuillants, les royalistes, les aristocrates, les accapareurs, tous les gros marchands, qui se sont cotisés pour faire disparaître, encore une fois, le pain pendant votre jugement afin d'exciter un mouvement dans Paris, dont ils profiteraient pour vous donner la clef des champs toute cette bougre de canaille ne réussira pas plus à vous empêcher de mettre la tête à la fenêtre, qu'elle n'a pu s'opposer à ce que le cornard Capet et la louve autrichienne ne jouent à la main chaude. On a beau jeter les pains de quatre livres dans les fosses d'aisance et dans les égouts, les Sans-culottes ne perdront pas le change. S'ils n'ont qu'une livre de pain, ils la partageront avec leurs voisins ils savent maintenant où est la clef du grenier. Une fois que vous et vos amis, aurez la tête dans le sac, l'argent, l'or, les farines reviendront en abondance. Voilà le noeud gordien et nous allons le délier. Braves bougres qui composez le tribunal révolutionnaire, ne vous amusez donc pas à la moutarde. Faut-il donc tant de cérémonies pour faire raccourcir des scélérats que le peuple a déjà jugés en auraient-ils fait avec nous s'ils avaient eu un seul moment, le grappin sur les Sansculottes? Tonnerre de dieu, rappelez vous donc comme ils ont été vite en besogne avec les patriotes de Marseille et de Lyon. N'allez donc pas chercher midi à quatorze heures pour purger la république de ces brigands. Si on ose vous demander des preuves pour les condamner, en voilà, foutre. Les colonies réduites en cendres le Midi à feu et à sang la Vendée couverte de monceaux de cadavres Lyon en ruines, Toulon livré aux Anglais, les millions de citoyens égorgés sur des échafauds, Lepelletier, Marat assassinés, plus d'un million d'hommes morts sur les frontières, dont les femmes et les enfants vous demandent vengeance. Voilà, foutre, l'ouvrage de Brissot et de son abominable clique. Tous ces brigandages, tous ces meurtres, tous ces assassinats n'étaient encore qu'un jeu en comparaison des crimes qu'ils méditaient et qu'ils n'ont pu exécuter car, foutre, s'ils étaient arrivés à leur but, comme l'a dit le prophète Isnard, on chercherait sur les deux rives de la Seine le lieu où exista Paris, il n'y aurait pas plus de république que dessus ma main et la France entière ne serait plus qu'un vaste cimetière que les brigands couronnés se seraient partagés. Million de bombes, il n'y aurait plus de justice sur la terre, si un seul de ces scélérats pouvait échapper. Le repos de la France en dépend. Que les têtes de ces brigands tombent donc vite et qu'elles servent de signal pour abattre dans tous les départements
celles des jean-foutres qui tourmentent le peuple, qui l'affament et le trahissent, foutre. La grande joie du Père Duchesne, N°305 Après avoir vu défiler la procession des Brissotins, des Girondins et des rolandins, pour aller jouer à la main chaude à la place de la révolution. Le testament de Cartouche Brissot, et la confession du prêtre Fauchet qui a fait le cafard jusqu'à la fin, pour faire pleurer les vieilles dévotes, mais qui, dans le fond du coeur, se foutait autant du père éternel que du grand diable Belzébut. Adieu paniers, vendanges sont faites, tous les châteaux en Espagne que vous avez bâtis, infâmes Brissotins, s'en vont tous en fumée. Non, foutre, non la république que vous aviez vendue aux brigands couronnés ne sera point déchirée. Le roi Georges Dandin et Pitt, porte-esprit, ont tiré leur poudre aux oiseaux. Nous serons républicains malgré toutes les guinées de l'Angleterre et tout l'or de l'Autriche et de l'Espagne. Partout nos affaires prennent la meilleure tournure. Les brigands de la Vendée sont dispersés et leurs cadavres engraissent la terre qu'ils ont souillée par leurs crimes ce qu'il en reste est cerné de toutes parts et va bientôt tomber sous les coups des généreux défenseurs de la république tandis, foutre, que l'armée du nord partout victorieuse est aux trousses des gros talons et des pieds plats que commande Cobourg tandis que Mons ouvre ses portes au brave Jourdan, Brissot et sa clique marchent à l'échafaud. Tonnerre de dieu, que de besogne nous avons fait depuis cinq mois mais la meilleure, foutre, c'est d'avoir purgé la convention des scélérats qui voulaient perdre la république. Après avoir bataillé sept jours au tribunal révolutionnaire, leur arrêt a été enfin prononcé et tous ont été condamnés à aller rejoindre l'infâme Capet qu'ils ont si bien défendu, et qu'ils voulaient sauver contre vent et marée. Les bougres, qui se fiaient à leurs amis, et qui croyaient que leurs têtes tenaient si fort sur leurs épaules que jamais on ne réussirait à les en séparer, ont encore fait un dernier effort pour jeter de la poudre aux yeux de ceux qui assistaient à leur jugement, et pour les foutre dedans. Vive la république, se sont ils écrié, en jetant sur le peuple tous les assignats qu'ils avaient dans leurs poches mais, foutre, fin contre fin, ne fait pas de doublure les sans-culottes ont mis en pièces la fausse monnaie de ces coquins, et de leur côté, ils ont crié, mais de bon coeur, foutre, vive la république, vive le tribunal. Le traître Valazé, voyant qu'il n'y avait plus à reculer, et qu'il fallait, bon gré, mal gré, mettre la tête à la fenêtre, a tiré de sa manche à l'italienne un poignard, et s'en est percé le coeur. Il ne faut pas, a dit l'accusateur Fouquet, que ce jean-foutre échappe à l'infamie, je demande que son cadavre, soit traîné au lieu du supplice. Le peuple applaudit et le tribunal l'a ordonné ainsi. Quoiqu'il fit un temps du diable, jamais, foutre, il n'y a eu tant de foule dans les rues de Paris, que celle qui était rangée sur leur passage, pour les voir défiler de la cave au grenier on
entendait partout retentir les cris de vive la république, vive la liberté et l'égalité, à bas les fripons, à bas les traîtres, avant de voir cheminer cette procession, j'ai été curieux d'examiner de près ces garnements, et de connaître ce qu'ils renfermaient dans leur âme de boue. D'abord, foutre, j'ai changé mon vieux gazon roussi pour une petite perruque noire à l'anglaise, et après avoir pris tout l'accoutrement d'un matador de Londres, je me suis introduit dans la prison. Arrivé auprès du chef de la bande, j'ai baragouiné quelques mots anglais. Milord Brissot qui, comme on s'en doute, avait déjà la vue bougrement embrouillée, m'a pris pour un envoyé de son ami Pitt, et il m'a remis à la dérobée un paquet contenant son testament. Je m'esquive aussitôt, et je vais dans un coin pour fouiller dans cet amas d'ordures, et voir ce qu'il contenait, j'ouvre et je lis: testament de Jean-Pierre Brissot, ci-devant espion en Angleterre, aux gages de sa majesté le roi de la Grande-Bretagne, et grassement payé par son excellence milord Pitt, ministre de la susdite majesté, ainsi que par les empereurs, rois et autres puissances de l'Europe pendant la révolution française, pour brouiller les cartes, et mettre les français à chien et à chat, afin de les empêcher de devenir républicains. "au nom de la royauté et de la sainte aristocratie, dont je n'ai jamais cessé d'être le très humble et très dévoué serviteur, je déclare à tous les siècles à venir ma volonté dernière, et les sentiments sincères dont mon coeur fût toujours animé". "Je vois trop maintenant qu'on ne peut éviter son sort, et que lorsqu'on n'est pas homme, on ne fait que se tirer d'un bourbier, pour tomber dans un précipice. Après avoir cent fois escamoté le gibet et la roue sous l'ancien régime, je ne puis brissoter la guillotine. Me voilà sous la trappe avant que ma tête soit dans le sac, je profite de mes derniers moments pour mettre ordre à mes affaires, et disposer de ce qui est en ma possession. " "je lègue à sa majesté Georges, roi de la Grande-Bretagne, mes plans, discours, motions, projets, journaux et en général tous les écrits que j'ai composé par ses ordres. Tous ces ouvrages lui serviront à semer la discorde, à allumer la guerre civile, à dissoudre même le parlement si jamais le peuple anglais s'avise d'imiter le français et de vouloir être libre tout de bon. " "je lègue à sa majesté, le roi de Prusse, les grandes balances qui lui ont servi à peser l'or et l'argent pour payer sa rançon à mon compère Dumouriez, et le tirer du mauvais pas où il s'était engagé, dans les plaines de la Champagne. Comme j'en ai eu ma bonne part, ce don lui prouvera ma reconnaissance et mon profond respect". "Je lègue toute ma dissimulation, toute ma politique, toute ma perfidie à certains personnages très connus qui sont aussi avides de richesses que moi et qui ont des mains aussi pleines que je les avais, mais je les avertis d'être plus prudents, car les Sans-culottes voyent clair maintenant bientôt il n'y aura pas seulement de l'eau à boire avec eux". "Je lègue à son excellence, mon sérénissime protecteur le ministre Pitt, toutes mes observations sur l'espionnage elles sont de main de maître, il sait tout le fruit qu'il en a retiré". "Je ne recommande pas ma femme et mes enfants à
leurs majestés et puissances régnantes, pour les bons offices que je leur ai rendus je ne leur demande que la seule grâce de leur conserver les propriétés que j'ai acquises en Angleterre, en Suisse et en Hollande". Tels étaient, foutre, les principaux articles du testament de Cartouche Brissot après avoir fini ma farce auprès de lui, je me déguisai en calotin pour tirer également les vers du nez du prêtre Fauchet. En m'apercevant, le cafard se mit a genoux seulement pour la frime, car lorsque je lui demandai à défiler son chapelet, il me rembarra tout bas comme si j'arrivais du pays de Congo : "notre paradis, me dit-il, notre purgatoire, notre enfer sont de vieilles momeries pour embêter les vieilles femmes, mais nous autres enfants de la balle nous n'y croyons pas plus qu'à Jean de Verd, parlons de ma chère Calon, parlons de ces jolies muscadines, ah! C'est là le crève-coeur qu'il est cruel de se séparer pour jamais de ce qu'on aime! Si je pouvais croire à un paradis, ce ne serait qu'à celui de Mahomet. " Bougre d'imposteur, m'écriai-je, je savais bien que malgré toi, tu ferais ta confession sincère au Père Duchesne à ce mot, mon jean-foutre baisse la tête, joint les mains et dit des oremus pour tromper l'espion. Moi, foutre, je m'en vas chercher une place à louer sur la place de la révolution, pour voir jouer tous ces coquins à la main chaude. Plusieurs ont fait contre fortune bon coeur et quelques uns se chatouillaient pour rire, mais, foutre, ce n'était que du bout des lèvres, et l'as me foute si le diable y perdait rien. A chaque tête qui roulait dans le sac tous les chapeaux étaient levés en l'air, et la place retentissait des cris de vive la république. Ainsi finirent les Brissotins, ainsi passeront tous les traîtres, foutre. La grande joie du Père Duchesne, N°306 De voir que la convention fait la pluie et le beau temps depuis qu'elle a écrasé les serpents et les crapauds du marais. Ses bons avis aux braves Montagnards, pour les engager à donner le coup de grâce à tous nos ennemis de l'intérieur, en faisant raser tous les nids d'aristocrates de Lyon, et à ne pas donner de relâche aux brigands couronnés, jusqu'à ce qu'ils ayent payé les frais de la guerre. Comme la convention est grande, comme elle est puissante, quand elle marche d'accord avec les Sans-culottes! L'infâme guenon d'Autriche que nous venons de raccourcir, un jour, dit-on, demandait quelques centaines de millions au scélérat Calonne c'était pour meubler le bordel de Trianon, ou pour les jeter à la tête de la race du diable des Polignac. "je sais, lui dit la gueuse, que la France est épuisée, que le peuple est aux abois, mais dût il crever sous le fardeau, il me faut cette somme je la veux absolument, et bien vite mets toi la cervelle à la torture, imagine quelque nouvel impôt, ouvre un emprunt, casse les parlements, s'il le faut, mais je veux être obéie.
Si la chose est difficile, lui répondit le Mandrin, elle est déjà faite, si elle est impossible, elle se fera". Les millions furent trouvés dans le jour, et dépensés aussi facilement car ce qui vient de la flûte, s'en retourne au tambour. Ce coquin de Calonne connaissait bien les ressources de la France il savait, le jean-foutre, que la nation était inépuisable, et tant qu'il a eu l'éponge entre les mains, il l'a pressurée, jusqu'à ce qu'elle fût desséchée. Si les rois, leurs ministres et leurs putains, malgré tous leurs brigandages, n'ont pu réussir à ruiner et à perdre cette nation industrieuse, que ne sera t elle pas, lorsqu'elle sera bien gouvernée? Je ne demande à nos législateurs que de la probité et le sens commun, et ils feront miracle, foutre mais il faut qu'ils fassent tout avec les Sans-culottes et pour les Sans-culottes car, hors la Sans-culotterie, point de salut. Tous les bougres qui jusqu'à présent lui ont tourné casaque, et qui ont voulu jouer au fin, se sont cassés le nez. Quand j'ai vu les gredins de l'assemblée constituante manigancer leur bougre de constitution de Coblentz, et vendre le peuple au tyran, je me suis dit: ce marché là ne tiendra pas, c'est une lettre-de-change que le payeur n'a pas acceptée: quand on compte sans son hôte, il faut compter deux fois. Vous pouvez bien nous vendre, indignes et lâches mandataires mais vous ne vous livrerez pas. Quand les garnements de l'assemblée législative, qui se croyaient les premiers moutardiers du Pape, parce qu'ils avaient des têtes en façon de marc d'argent, suaient sang et eau pour achever l'ouvrage des gâcheux qu'ils avaient remplacé, je riais à gorge déboutonnée de leur sottise. Vous avez construit votre tour de Babel sur un sable mouvant, leur disais je tout votre échafaudage va dégringoler, et vous allez être écrasés vous-mêmes sous les ruines de votre édifice, les murs que vous voulez élever ne sont que de boue et de crachat. C'est à nous, foutre c'est aux Sans-culottes qu'il appartient de trouver le tuf nous seuls avons entre les mains les matériaux propres à élever un temple à la liberté qui durera autant que les siècles. C'est avec nos bras robustes qu'il sera construit c'est avec le sang des voleurs et des traîtres qu'il sera cimenté. Ce que j'ai prédit est arrivé, le grimoire de l'assemblée constituante ne sert plus qu'à l'épicier et à la beurrière, et les Sansculottes n'en ont pas fait un autre usage que des chiffons que les charlatans font distribuer sur le Pont-Neuf, pour annoncer qu'ils guérissent de tous les maux, excepté de celui qu'on a. Il n'en sera pas ainsi de votre ouvrage, législateurs Sans-culottes la constitution républicaine que vous avez donnée sera l'évangile des nations, parce que vous avez joué beau jeu, bel argent, et que vous avez voulu de bonne foi le bonheur du peuple. Tous les bougres qui vous ont barré chemin et qui ont mis des bâtons dans les roues, se sont brûlés à la chandelle. Vous avez voulu ce que le peuple voulait, vous avez fait ce que le peuple ordonnait, et vous avez été tous puissants. La tête du dernier tyran a roulé sur l'échafaud, la louve autrichienne a été raccourcie, les
Brissotins, les Girondins ont joué à la main chaude. Dans peu de jours les ennemis de l'égalité d'un bout à l'autre de la république, n'empoisonneront plus l'air que nous respirons malgré les perfidies et les trahisons des jeanfoutres qui commandaient nos armées, le sang des Autrichiens, des Prussiens, des Espagnols, des Anglais a arrosé nos campagnes et leurs cadavres engraisseront la terre de la liberté. Les accapareurs de Marseille et de Bordeaux, qui voulaient faire bande à part et démembrer la France pour être les rois du Midi, ont été forcés de mettre les pouces et de fléchir le genou devant la statue de la liberté. Les marchands de galon de Lyon qui, pour trouver un meilleur débit de leurs soieries et de toutes les foutaises qu'ils fabriquent, voulaient rétablir la royauté et ramener à Versailles toute la canaille de l'ancien régime, ont vu leurs maisons et leurs magasins réduits en cendres. Je m'en repose sur toi, brave Collot pour achever la besogne. Donne le coup de grâce aux muscadins qui osent encore lever la tête. Fais raser les restes de cette ville rebelle. Que son exemple épouvante celles qui seraient tentées de l'imiter, et toi, sainte montagne, lances la foudre de toutes parts sur les scélérats qui ont livré Toulon. Que les boulets rouges, que les bombes, que le soufre et le feu pleuvent sur ses remparts. Il n'y a plus dans ses murs que des traîtres à exterminer. Les patriotes y ont tous été égorgés. C'est là que deux représentants du peuple ont été assassinés. Quand cette ville criminelle ne sera plus, qu'avec ses débris on en construise une nouvelle peuplée des Sans-culottes qui ont été opprimés pendant la révolution. Braves Montagnards, qui avez sauvé la France, donnez le dernier coup de collier. Maintenant que vous connaissez toute votre force, frappez, renversez tous nos ennemis. Que nos armées victorieuses poursuivent leurs conquêtes dans la Belgique, non pas pour s'amuser à la moutarde, en plantant de ville en ville l'arbre de la liberté, qui ne peut prendre racine sur cette terre ingrate mais que les Belges stupides, qui ont prêté les mains à l'infâme Dumouriez pour faire massacrer les braves soldats qui combattaient pour les rendre libres, que ces vils esclaves soient désarmés que tous les magasins des villes, que nous allons réduire servent à habiller nos bataillons que toutes les propriétés des riches de cette contrée, que l'or et l'argent des églises nous indemnisent des frais de guerre. Quand nous aurons fait un vaste désert depuis nos frontières jusqu'à Bruxelles, que nos bataillons, chargés de butin, rentrent dans nos villes de guerre, pour y passer le quartier d'hiver, et y attendre de pied ferme les satellites des despotes jusqu'au printemps prochain s'il leur prend encore fantaisie de venir nous attaquer. Mais non, foutre, les tyrans sont à quia. Ils comptaient plus sur les traîtres qu'ils soudoyaient parmi nous, que sur leurs armées. Grâce à sainte guillotine, les conspirateurs disparaissent et ils ne pourront plus tirer que des coups d'épée dans l'eau, ainsi donc, tous les brigands couronnés, après avoir épuisé leurs dernières ressources pour nous asservir, ne vont savoir de quel bois faire flèche. Ils voient leurs trônes ébranlés et ils pâlissent d'effroi de subir,
avant qu'il soit l'âge d'un petit chien, le sort de leur confrère Capet. Ils vont tomber à nos pieds pour nous demander la paix. Ils ne doivent l'obtenir qu'aux conditions les plus dures et que lorsqu'ils auront payés les frais de la guerre et que lorsque nous leur aurons lié pieds et mains pour leur empêcher de nous nuire. Voilà, braves Montagnards, la tâche honorable que le peuple vous a confiée. Vous avez juré de la remplir et vous tiendrez parole. Quand la France sera délivrée de ses ennemis du dedans et du dehors, vous céderez le terrain à qui doivent vous remplacer. Vous irez dans vos départements jouir du fruit de vos travaux et recevoir les bénédictions du peuple dont vous aurez fait le bonheur. Vous y ferez respecter les saintes lois que vous avez décrétées vous défendrez les opprimés, vous serez le soutien des faibles et l'effroi des conspirateurs, la consolation des malheureux tant que vous vivrez, vous serez chéris et respectés, et après votre mort, votre mémoire sera sacrée. Voilà ce qu'on gagne à être honnête homme, foutre. La grande joie du Père Duchesne, N°307 En donnant le coup de grâce aux calotins, et en faisant connaître aux sots qu'ils embêtaient, tous leurs tours de passe-passe et leurs prétendus miracles. Sa grande joie de voir les braves Sans-culottes des villes et des campagnes dénicher tous les magots et magotes des églises, pour mettre à la place la statue de la liberté. L'homme est un animal d'habitude, qui, sans savoir pourquoi, fait toujours à sa vieille routine, il ne sait, la plupart du temps, ni comment, ni pourquoi il agit. Sur cent individus, il n'y en a pas deux qui se donnent la peine de penser et de réfléchir les trois quarts et demie des animaux à deux pieds sont de véritables singes qui gambadent, quand ils voient gambader, et qui font toutes les grimaces qu'ils voyent faire. Demandez, foutre, à ce cagot, qui passe les jours et les nuits en oraison, qui fait de sa vie un carême perpétuel, qui, pour plaire au père éternel, devient maigre comme un hareng-saur, et hideux comme un squelette, pourquoi il se détruit ainsi lui-même de ses propres mains il vous dira qu'il a peur du diable demandez lui ce que c'est le diable, il vous répondra que c'est un esprit malfaisant qui embroche avec sa fourche de fer les âmes des damnés, aussitôt qu'elles sortent de leurs corps, pour les précipiter au fin fond des enfers dans des chaudières remplies d'huile bouillante et dans le plomb fondu serrez la boîte à ce bougre d'imbécile, et demandez lui encore ce que c'est qu'un esprit, s'il a vu des esprits, il vous répondra que ça ne se voit pas, que ça ne se touche pas, que ça ne se sent pas même ripostez et soutenez que celui qui croit à ce qu'il n'a vu ni senti, est une foutue bête il vous appellera impie, athée foutez vous en, mais ne quittez prise que lorsqu'il vous aura appris de qui il tient ces contes à dormir debout, il sera forcé de convenir qu'il parle d'après sa nourrice allez
interroger la nourrice, celle-ci vous répondra également que c'est aussi sa nourrice qui lui a parlé du diable, du bon dieu, du paradis et de l'enfer ainsi donc, foutre, en remontant de nourrices en nourrices, de vieilles femmes en vieilles femmes, on trouvera la source de toutes les sottises et de tous les tours de gibecière avec lesquels on a embadaudé les hommes. Veut-on savoir au vrai quel est le bougre qui a inventé le diable et l'enfer, je vais le dire, foutre. Au temps jadis, avant le déluge, il y avait ni muscadins ni muscadines. Tous les hommes ne formaient qu'une même famille, tous travaillaient également. Ils étaient libres et égaux et heureux par conséquent tout était en commun, chacun mangeait dans la même gamelle. Personne ne songeait ni au tien ni au mien. Certain vaurien, paresseux, gourmand, libertin, s'ennuya de cette vie douce et paisible il se dit en lui-même: que je serais heureux si je pouvais rester les bras croisés, tandis que mes frères et mes voisins travaillent pour moi, si je pouvais à moi seul dévorer la part d'une demie douzaine ou plus, si, sans avoir aucune femme pour mon compte, je pouvais être le mari de toutes et vivre sur le commun! Qu'imaginer, que faire pour embêter les autres et leur persuader que je vaux mieux qu'eux, les déterminer enfin à croire que tout ce que je leur dirai. Tandis que mon jean-foutre bâtissait ces châteaux en Espagne, l'air se couvrait de nuages, la foudre grondait, l'éclair brille, l'orage redouble, la grêle tombe, chacun fuit dans sa cabane pour y trouver un asile, et mon jean-foutre fuit et se cache comme les autres. L'orage se dissipe peu à peu, le coquin voyant le danger passé, sort le premier de sa tanière, une baguette à la main, il trace des cercles sur terre, lève les mains au ciel tout le canton accourt pour examiner le bougre d'endormeur on le prend pour un fou mais le fripon ne perd pas la carte. "Savez-vous, dit-il à ceux qui l'entourent, savez vous ce que je viens de voir? Pendant l'orage, tandis que vous vous cachiez, je suis resté seul au milieu de ce champ, et j'ai bravé la foudre et la grêle j'ai fait plus, j'ai fixé les nuages d'où partaient les éclairs, et j'ai aperçu, tremblez, mes amis, mettez vous à genoux, j'y ai vu un vieillard vénérable avec une barbe blanche. C'est moi, m'a t il dit, qui ai créé le ciel et la terre, c'est moi qui tiens la foudre entre les mains, c'est moi qui conduis le soleil, c'est moi qui fais germer les grains et qui mûris les fruits c'est moi qui ai fait le premier homme avec un morceau de boue que j'ai pétri avec ma salive je te charge d'apprendre aux hommes ces grandes vérités tu m'appelleras dieu, tu leur ordonneras de frémir en entendant prononcer mon nom, et tu seras mon maître d'affaires sur la terre, et pour m'entretenir plus souvent avec toi, je te défends de travailler, et j'ordonne aux autres hommes de te nourrir, et t'habiller, de t'obéir, de te respecter comme moi-même". A ce discours, tous les badauds (car il y en a eu dans tous les temps et dans tous les pays, ) ouvrent le bec d'un aulne. "Ce n'est encore rien, ajoute le bougre de bateleur, après avoir vu, comme je vous vois, et parlé face à face avec le père éternel un animal cornu à longue queue,
vomissant le feu, ayant de longues griffes crochues, m'a aussi tôt apparu. Tu viens de voir le dieu du ciel, me dit-il moi, je suis celui des enfers, et quoique nous soyons aussi ennemis que le feu et l'eau, je suis forcé de lui obéir, c'est de moi qu'il se sert pour tourmenter les âmes après leur mort par ses ordres, je les plonge dans le soufre, dans l'huile bouillante, en un mot je m'appelle le diable". Tous les petits enfants, toutes les vieilles femmes joignent les mains et sont transis de peur en entendant ce récit. Quelqu'un embarrasse un peu cet imposteur, en lui demandant ce que le diable a voulu dire en parlant d'une âme. L'âme, réplique mon bougre, c'est votre esprit, votre raison, qui existeront encore après votre mort. Plusieurs vieillards, gens de bon sens, secouent la tête en entendant ainsi déraisonner, ils proposent de donner une calotte de plomb à l'animal sans cervelle qui croit les endormir avec ces contes bleues mais les vieilles femmes l'écoutent en silence, l'admirent, sont transies de peur. Le fourbe continue cette marotte le bon dieu, à ce qu'il assure, vient le visiter tous les jours, enfin, il prend le nom de prêtre. Ce mot là, dans la vieille langue, signifie celui qui vit des sottises d'autrui. Il obtient tout ce qu'il avait désiré. Il se couvre d'une longue robe chargée d'or. On lui apporte les premiers fruits de la terre, de jeunes agneaux, tout ce que la terre produit, tout ce qui sort des mains des hommes leur est délivré gratis pro deo enfin mon bougre boit et mange, ronfle, la grasse matinée, tandis que les imbéciles qui le nourrissent travaillent et suent sang et eau. Voilà, foutre, comment a commencé la bougre de calotte voilà comme quoi le premier autel a été élevé, et comme la bêtise des hommes a toujours été en augmentant. Les prêtres ont pris racine de plus en plus. Enfin, pour les démasquer et leur donner le meilleur et le plus sage des humains le fils d'un pauvre charpentier nommé Jésus, fit connaître toutes leurs fourberies avant lui les prêtres des Juifs ne vivaient que de brigandages, ils ordonnaient à l'un d'égorger son fils ils forçaient l'autre d'immoler sa fille ils n'avaient d'autre passe-temps que de faire massacrer les hommes, et ils nageaient dans des flots de sang mais quand le brave Sans-culottes Jésus parut, il prêcha la bienfaisance, la fraternité, la liberté, l'égalité, le mépris des richesses. Tous les prêtres menteurs eurent bientôt les ongles rognés, et ils tombèrent dans le mépris. Il est vrai que les scélérats s'en vengèrent de la bonne sorte d'accord avec les juges et le Capet de ce temps, ils firent pendre le pauvre Sans-culotte Jésus, mais pour mieux le persécuter, après sa mort, ils s'emparèrent de sa dépouille, ils défigurèrent son évangile, et ils le firent même servir à leurs jongleries. Ils ont fait un dieu de sang du meilleur Jacobin qu'il y a eu sous la calotte des cieux, et en son nom ils ont égorgé la moitié des générations. Dieu soit loué, les Jean-foutres sont démasqués. Dans les villes et les campagnes, on les chasse à coups de fouet. Ils sont obligés de rendre à la république tout ce qu'ils ont volé au peuple ignorant. Les calices, les ciboires, les croix d'or et d'argent pleuvent à la monnaie, la statue de la
liberté remplace, dans les églises, les magots que les fourbes appelaient des saints. Patience, avant peu, nous n'aurons pas plus de calottes, que de nobles et de rois, foutre. La grande joie du Père Duchesne, N°308 Au sujet du raccourcissement de Capet-Bordel, ci-devant duc d'Orléans. Ses bons avis au tribunal révolutionnaire pour qu'il batte le fer pendant qu'il est chaud, et qu'il fasse promptement passer sous le rasoir national le traître Bailly, l'infâme Barnave et tous les tripotiers de l'assemblée constituante qui ont vendu au plus offrant le peuple à la tyrannie. Tôt ou tard, foutre, la vérité perce, les fourbes se démasquent euxmêmes, et à la fin justice se fait que de fourbes, que d'intrigants, que de scélérats ont fait la pluie et le beau temps depuis la révolution! Pauvre peuple, que de miracles pour éviter tous les pièges qu'on t'a tendus! Qu'il t'a fallu de bon sens et de courage pour résister à tous les coups de chien que l'on a imaginé pour te perdre! Comment n'as tu pas jeté le manche après la cognée, en voyant tant de fripons abuser de ta confiance? Tonnerre de dieu, quand je regarde derrière moi, et que je repasse en ma mémoire tout ce qui s'est passé depuis la prise de la Bastille, les bras me tombent, et je n'en reviens pas, foutre. Un animal féroce nommé roi, c'est à dire mangeur de chair humaine, s'engraissait, lui et sa bougre de race, depuis plus de quinze cents ans du sang de vingt cinq millions d'hommes. Le peuple stupide et avili par un si long esclavage, ne connaissait plus ni sa force, ni sa dignité aussi docile que la bête à somme, il portait le fardeau sans murmurer, et il baisait en tremblant la main qui l'opprimait. Qui trop embrasse, mal étreint. Le tigre couronné croyant qu'il pourrait dévorer à son aise tout le troupeau timide qu'il gouvernait suivant ses caprices et son appétit glouton, a redoublé de cruauté. Le ver rampant que l'on écrase se recoquille, et fait du moins faible effort pour résister à la douleur. Le taureau rugit sous la hache du boucher, et s'il vient briser la corde qui l'enchaîne, transporté de fureur, il écrase avec ses cornes terribles le bourreau qui l'a frappé, et dans sa rage il se précipite sur tout ce qui l'entoure il renverse, il donne la mort de tous côtés et porte au loin l'épouvante. Voilà, foutre, l'image du peuple dans les premiers jours de la révolution quand il eut brisé sa chaîne, tout trembla devant lui, mais quand sa colère parut apaisée, il se vit environné aussitôt de milliers de jean-foutres qui l'amadouèrent pour l'enchaîner comme de plus belle. L'égorgeur royal se dit en lui-même: "il faut mettre de l'eau dans mon vin, car si je veux tomber à coup redoublés sur ce taureau furieux avant de l'avoir lié et garrotté, je m'expose à périr sous ses coups, il faut le réduire par finesse. Je vais le flatter, le cajoler, lui donner pour la frime tout ce qu'il parait désirer je consentirai à renvoyer pour un peu de tous
mes garçons de tuerie, c'est à dire, les princes, les ducs et pairs, les marquis, tous les nobles, enfin les cardinaux, les évêques, les financiers, les parlements je me servirai pour le dompter de nouveaux garçons de massacre et je les prendrai parmi les bergers que le taureau regarde comme ses défenseurs, c'est à dire dans l'assemblée nationale ellemême. Il est un loup déguisé sous la peau de l'agneau, un certain Mirabeau avec lequel j'ai déjà fait secrètement mon marché, je lui graisserai bien la patte pour me vendre une loi martiale, un droit de veto, une liste civile et d'autres lois pareilles, qui seront entre mes mains, autant de couteaux pour égorger ce peuple qui ose se regimber. J'ai aussi dans ma manche un Bailly, un La-Fayette tous prêts à me prêter les mains, quand je voudrai égorger, massacrer et dévorer les entrailles de la victime. Ce n'est rien encore, des Barnave, des Thouret, des Duport, le coquâtre Dandré et deux cents autres me prépareront les cordes et les chaînes avec lesquelles je réduirai mes esclaves". Ainsi raisonnait l'infâme cornard, que nous avons raccourci. Ce n'était pas la seule bête féroce qui voulait nager dans notre sang un loup-cervier, nommé d'Orléans, flânait autour du peuple, pour faire aussi sa curée. "Sansculottes, disait-il, fiez vous à moi, je suis l'ennemi mortel de l'ogre royal, et, quoique je sois de sa race, je ferai tout ce que vous exigerez pour vous en délivrer". Les Sans-culottes, qui savent que les loups ne se mangent pas, ne furent pas dupés des paroles sacrées du loup-cervier cependant, aussi fins que ceux qui voulaient les foutre dedans, ils se servirent de la patte du chat pour tirer les marrons du feu. Le loup-cervier, croyant se mettre à la place de l'ogre royal, épuisa toutes ses richesses, pour donner des crocs en jambes à son cousin Capet. Tandis, foutre, que ces deux monstres étaient aux prises, et s'entredéchiraient pour avoir leur proie, les Sans-culottes se fortifiaient, et ils marchaient petit à petit vers la liberté enfin ils foutirent le trône en canelle, l'ogre royal et la guenon d'Autriche jouèrent à la main chaude, ce ne fût pas sans peine, car les renards Brissotins, les serpents de la Gironde et tous les crapauds du Marais de la convention furent lâchés sur le peuple et l'assiégèrent de tous les côtés, quand il voulut donner le coup de grâce à la royauté. "nous avons consenti à la révolution, disaient les avocats, mais c'était pour être présidents et conseillers aux parlements, et pour changer nos robes noires pour des robes rouges, et puisque nous avons tiré notre poudre aux moineaux, nous nous rangeons sous la bannière de l'aristocratie et nous, ripostaient les gros marchands, nous avons endossé l'habit bleu et nous nous sommes joints d'abord aux Sans-culottes pour foutre la chasse aux nobles, mais c'était dans l'espérance de les remplacer puisqu'il n'existe plus de citoyens actifs, et qu'on veut nous confondre avec la canaille, nous allons faire du pis que nous pourrons, nous deviendrons accapareurs, fédéralistes, aristocrates, royalistes au foutre la république, vive la royauté et nous aussi, ripostaient les calotins,
en faisant chorus avec tous ces viédases, nous avons accepté la constitution civile du clergé, nous avons juré, mais c'était pour avoir des curés et des évêchés mais maintenant qu'on se fout de tous nos tours de passe-passe, et que nos singeries sont découvertes, nous allons aiguiser les poignards, allumer la guerre civile et remuer ciel et terre pour avoir un roi qui rétablisse la dîme, les canonicats, les bénéfices simples, les moines, les religieuses, et qui rende au clergé tous ses biens et dignités. Courage, courage, s'écriaient à la fois les riches, en attisant le feu, nous ne payerons point d'impôt, nous réduirons notre dépense pour faire tomber les manufactures, nous enterrerons notre or et nous ferons tirer la langue d'une aulne aux Sans-culottes, pour leur apprendre à vouloir être nos égaux. Voilà pourtant, foutre, tous les ennemis que nous avons eu à combattre: voilà toutes les étamines par lesquelles il a fallu passer. C'est au milieu de tous ces corsaires, qu' une poignée de véritables républicains a conduit une petite nacelle toujours prête à être engloutie par les gros vaisseaux, qui lâchaient sur elle leur bordées de tribord et de bâbord, elle arrive enfin à bon port. L'ogre royal a mis la tête à la fenêtre, les Brissotins ne sont plus, les accapareurs de Marseille et Bordeaux sont à quia. L'or des marchands de galon de Lyon va payer les frais de la guerre dans peu de jours Toulon sera rasée. Les calotins et les marchands d'orviétan sont sur la même ligne: l'armée révolutionnaire va mettre les riches à la raison les Autrichiens, les Prussiens, les Espagnols, ne savent plus de quel bois faire flèche: ça va, foutre, Philippe d'Orléans, autrement dit Capet-Bordel s'est pris dans le piège qu'il tendait à la Sans-culotterie, et le rasoir de l'égalité vient de faire sauter la tête de cet infâme escroc. On accusait les Jacobins de le vouloir pour roi. Les Jacobins demander un roi! C'est tout comme si on accusait Pitt et Cobourg d'être les amis de la république. C'est par des Jacobins, par de véritables Jacobins que le bougre vient d'être jugé voilà comme les patriotes répondent à la calomnie. A ton tour Coco-Bailly, maire-grue à ton tour bateleur Manuel à ton tour traître Barnave, et vous tous, gredins de réviseurs de l'assemblée constituante, qui avez vendu le peuple au tyran, vous ne l'échapperez pas, j'en jure sur ma moustache, foutre. La grande joie du Père Duchesne, N°309 De voir que les cagots sont obligés de se cacher dans leurs caves pour y dire leurs patenôtres et leurs oremus, et mangent du fromage de ce que les Français ne veulent pas avoir d'autre dieu que la liberté. Leurs prières et leurs lamentations en accusant le bon dieu de devenir Sansculotte, attendu qu'il ne lance pas sa foudre pour exterminer ceux qui ne croient pas à leurs contes de bonne femme. J'ai tant de choses à dire, foutre, que je ne sais pas par où commencer. Tonnerre de dieu comme le tribunal révolutionnaire en abat!
Ah! Foutre, s'il avait existé deux ans plus tôt, nous serions maintenant libres et heureux! Nous avons d'abord joué avec la liberté à Colin-maillard, et nous l'avons cherché en tâtonnant, au lieu de renverser et de détruire tout ce qui nous séparait d'elle. Si nous avions profité des bons avis de Marat, quand l'assemblée constituante tourna casaque au peuple, et si trois cents potences avaient été plantées sur la terrasse des Tuileries pour y accrocher les jean-foutres qui nous trahissaient, des flots de sang n'auraient pas coulés, il n'en aurait pas coûté la vie à un million de braves Sans-culottes pour assurer notre liberté. Si l'infâme Capet et la louve d'Autriche avaient été raccourcis, après l'équipée de Varennes, la révolution aurait avancée de deux ans notre numéraire n'aurait pas passé à Vienne, et nous n'aurions pas fourni des verges pour nous fouetter les brigands couronnés n'auraient pas osé foutre le nez dans nos affaires ils ne nous auraient jamais attaqué, si le monstre que nous avions lâchement conservé, ne leur avait livré les clefs de la France. Si le 10 août le peuple avait su réparer le temps perdu, en immolant le tyran et toute sa bougre de race sur les cadavres des citoyens qui venaient d'être égorgés par ses ordres, la convention n'aurait pas été déchirée pendant cinq mois et la république à deux doigts de sa perte. Il n'y a pas à barguigner, foutre, en révolution, il faut s'attendre à tuer ou à être tué. Si les Brissotins n'avait pas été guillotinés, les patriotes l'auraient été. Vous faites bien de nous raccourcir, a dit le traître Biroteau en allant au supplice car si nous avions eu le dessus, nous ne vous aurions pas épargné il n'y aurait pas eu assez de bourreaux pour vous détruire. Comme on voit, la bonne volonté ne manquait pas à ces jeanfoutres et nous devons une belle chandelle à sainte guillotine car si tous les Sans-culottes n'ont pas perdu le goût du pain, ce n'est pas leur faute. Ils voulaient couper l'arbre de la liberté par la tête et par les racines. D'abord ils se déchaînèrent comme des chiens enragés contre Robespierre, ils l'accusèrent de vouloir être dictateur, et ils voulaient le condamner sans entendre mais ce brave bougre avait heureusement bec et ongle il les confondit et ils ne tirèrent que des coups d'épée dans l'eau ensuite ils déchirèrent à belles dents Marat, et ils le firent passer dans les départements comme un véritable loup-garou: ils dirent qu'il voulait être roi ils le représentèrent avec une couronne de poignards surmontés de têtes de morts, tenant à la main une cuisse qu'il dévorait en guise de sceptre. Tous les badauds de la Gironde, des Bouches du Rhône, du Finistère, du Calvados croyaient aussi fermement au roi Marat, que Brissot à la contre-révolution. Et moi aussi, pauvre marchand de fourneaux, qui n'a jamais eu d'autre ambition que de voir la république établie et les Sans-culottes heureux, ils me firent passer pour un buveur de sang, ils m'accusèrent de vouloir dissoudre la convention, comme si une convention pouvait se manier comme une terre glaise que je pétris à mon gré et suivant mes caprices. Si la querelle d'allemand des viédases du comité des douze avait réussi, il y a gros, foutre, que ma vieille tête
aurait tombée dans le sac, et après la mienne, celle de tous les bougres à poil qui ont défendu les droits du peuple. C'est donc pain béni que d'exterminer tous les scélérats qui voulaient nous perdre. Mieux vaut tuer le diable que le diable nous tue, comme je l'ai dit cent fois. Les Sans-culottes ont donc bien fait, dame Coco, de te faire jouer à la main chaude car si ton vieux cocu ne s'était pas cassé le nez avec son brissotage, tu aurais été une seconde autrichienne. Ainsi donc, foutre, tandis que le tribunal révolutionnaire a la bride sur le col, qu'il nous délivre promptement de tous les jean-foutres qui ont manigancé la contre-révolution avec l'ogre royal et des scélérats qui ont voulu le sauver. Puisque la terreur est à l'ordre du jour, et la guillotine permanente, que tous les ennemis du peuple périssent! N'allons pas saigner du nez, et faire un seul pas en arrière car les contrerévolutionnaires se relèveraient bientôt, et recommenceraient de plus belle. Surtout ne perdons pas de vue les calotins, et tenons en joue toute la canaille de la cagoterie. Les dévots et les dévotes désolées de voir leurs saints dénichés, vont jouer de leur reste, et remuer ciel et terre pour nous tourmenter. Ah! Foutre, quel fromage ils ont mangé, quand ils ont vu l'évêque Gobet et ses grands vicaires venir faire amende honorable à la barre de la convention, et découvrir le pot aux roses, en déclarant que les prêtres étaient des escamoteurs, des fourbes qui vivaient aux dépends des sots, que l'enfer et le purgatoire étaient des contes de bonne femme. Ces bateleurs qui pendant quinze cents ans avaient fondé leur cuisine sur le mensonge et la superstition, auraient ils consenti à renverser ainsi leur marmite, s'ils n'avaient pas eu l'épée dans les reins et s'ils n'avaient pas cru davantage à la vertu de sainte guillotine qu'à leur petit bon dieu de pain à cacheter. Ah le beau jour! ah la bonne fête que nous avons célébrée à la dernière décade! Quel spectacle de voir tous les enfants de la liberté se précipiter dans la ci-devant cathédrale, pour purifier le temple de la sottise et le consacrer à la vérité, à la raison! Ces voûtes où on n'avait jamais entendu que le croassement des corbeaux de l'église, où on n'avait jusqu'alors entendu chanter que des psaumes et des litanies, ont retenti des chansons patriotiques. A la place de cet autel où des prêtres menteurs persuadaient à des imbéciles que le dieu du ciel descendait par leur ordre, en marmottant quelques mots de latin, et passait tout entier, comme une muscade, dans un petit morceau de croquet à la place de cet autel, ou plutôt de ces tréteaux de charlatans, on avait construit le trône de la liberté. On n'y plaça pas une statue morte, mais une image vivante de cette divinité, un chef d'oeuvre de la nature, comme l'a dit mon compère Chaumette. Une femme charmante, belle comme la déesse qu'elle représentait, était assise au haut d'une montagne, un bonnet rouge sur la tête, tenant une pique à la main, elle était entourée de toutes les jolies damnées de l'opéra qui à leur tour ont excommunié la calotte, en chantant mieux que des anges, des hymnes patriotiques. Les Sansculottes, enchantés, criaient bravo à plein gosier tous juraient de ne
reconnaître pour divinité que la patrie et de mourir pour elle. Après avoir ainsi purifié le temple de la jonglerie, les Sans-culottes firent une procession civique à la convention. Des canonniers ouvraient la marche en portant au bout d'une pique, en guise de bannière, la dépouille du prince de la calotte, c'est à dire, la chape, cousue d'or, et la mitre de l'archevêque. Les membres des autorités constituées défilaient avec les ministres, tous coiffés de bonnets rouges, en faisant retentir l'air des cris de vive la liberté, vive l'égalité, vive la république, vive la raison. Quatre lurons de la Halle portaient sur son trône la divinité chérie. Il fallait entendre les applaudissements de la convention, quand ce cortège défila dans son sein. La divinité fût placée auprès du président, c'est à dire de son grand prêtre: quand on est si près du bonheur, on ne peut s'empêcher de donner quelque signe de vie, le brave Laloy, au nom de tout le peuple français, donna, à la divinité, la plus douce accolade en signe du respect et de l'amour constant que les républicains auront toujours pour elle. La convention décréta que le peuple de Paris et ses autorités constituées avaient bien mérité de la république, en donnant ce grand exemple à l'univers. Elle voulut rendre le premier hommage au temple de la raison, et elle reconduisit la liberté dans son sanctuaire. Toutes les rues étaient garnies d'une foule immense qui était aux nues de voir ce grand spectacle. Les bigots étaient cachés dans leurs caves, et ils enrageaient contre leur bon dieu quelques uns même l'accusaient de devenir Sansculotte car il faisait le plus beau temps du monde. Pour combler la joie publique, l'écorcheur du Champs-de-Mars, le traître Bailly, venait d'être condamné par le tribunal révolutionnaire, tant il est vrai qu'un bonheur n'arrive jamais sans l'autre, foutre. La grande colère du Père Duchesne, N°310 De voir que toutes les bigotes font feu des quatre pieds, pour conserver leur vieilles reliques! Ses bons avis aux Sans-culottes, pour qu'ils aillent s'instruire à la comédie qui vaut mieux que les sermons des capucins. Sa grande revue des spectacles, pour dauber ceux qui gouaillent la Sans-culotterie, et pour soutenir les braves bougres qui jouent des pièces républicaines. L'autre jour je fumais ma pipe au coin de mon feu ma Jacqueline tricotait et mes petits marmots se roulaient par terre en jouant avec mon caniche tout était paisible dans mon ménage, quand tout à coup, foutre une vieille édentée du voisinage, une dévote à trente six carats vient nous montrer sa face de carême et m'ennuyer de ses contes à dormir debout. Mère Duchesne, s'écriait elle en joignant les mains et en s'adressant à ma Jacqueline, qu'allons nous donc devenir, on ne connaît plus dieu ni ses saints? On détruit la religion! Ah que le bon dieu doit être en colère! Miséricorde! Le jour du jugement va sans doute arriver. Je crois entendre la trompette je crois voir les morts sortir de leurs tombeaux il me semble
que je suis déjà dans la vallée de Josaphat et que le fils de dieu s'avance sur un nuage pour nous juger tous. Pardine, c'est grand dommage, riposte ma Jacqueline vous voyez que la fin du monde va arriver, parce qu'on fout de côté toute la bougre de calotte. N'y avait il pas assez de temps qu'elle nous embêtait? Moi aussi, comme une autre, j'ai été dupe dans ma jeunesse de toutes les singeries des prêtres j'étais assez sotte pour aller m'agenouiller aux pieds d'un cafard, et lui conter mes petites fredaines. Un certain jour que je défilais ainsi mon chapelet à certain paillard, j'allais achever mon confiteor et dire mon mea culpa le bougre m'arrête tout court, en me serrant la main. "C’est toujours la même chanson, me dit-il, vous me répétez à chaque fois que vous avez été gourmande, que vous avez menti et juré mais une fillette doit commettre quelques péchés plus jolis de quinze ans, qui a un minois aussi friand, que ceux dont vous vous accusez. Non, mon père, je vous l'assure, je vous ai tout dit. Comment, vous ne sentez point encore palpiter votre petit coeur? Pardonnez-moi, mon père, quand je vois souffrir quelque malheureux est ce qu'il y a du mal à cela? Vous ne vous faites jamais aucun attouchement? Vous grattez vous, quelques fois? Eh! Mon père, puisque j'ai des mains et des doigts, n'est ce pas pour m'en servir est ce un mal de se gratter où cela démange? Vous ne connaissez aucun garçon? Pardonnez-moi, mon père, je joue avec tous nos petits voisins à la clé-musette, au gage-touché, touché, à pied de boeuf. Et le jeu d'Amour, le connaissez vous? Pas encore, mon père. Eh bien, je vais vous l'apprendre. Le paillard alors me serre entre ses bras, me dévore des yeux il veut allonger son vieux museau sur mon visage, je me défends il me serre si fort que je crus qu'il m'étoufferait il cherche, avec son menton de galoche, à déranger mon mouchoir je crie de toutes mes forces mon bougre, craignant d'être surpris fût forcé de me lâcher. Remettez vous à genoux, me dit-il, d'un air hypocrite, j'ai voulu voir si vous étiez sage, et si vous saviez rembarrer les hommes quand ils veulent vous caresser, dites votre mea culpa, et je vais vous donner l'absolution, à condition que vous viendrez me voir dans ma chambre allez en paix et ne péchez plus. Je me retire toute confuse. Quelque temps après, ma mère qui donnait dans la momerie, s'apercevant que je rechignais plus que de coutume pour aller à confesse, m'en demanda la raison. Je lui racontai ingénument ce qui m'était arrivé. Vous êtes une morveuse, me dit elle, vous mentez, cela n'est pas possible. Mais mon père qui était un luron de la ganse, de la trempe de mon vieux marchand de fourneaux, jura comme le Père Duchesne contre le cafard, et me défendit d'approcher jamais un calotin d'une lieue. Ma mère eut beau se fâcher et me mettre en pénitence, j'obéis à mon père. Depuis ce temps, je n'ai plus eu foi dans les reliques des calotins, et à mesure que j'ai vieilli, mon mépris pour eux n'a fait qu'augmenter. Je les ai toujours regardés comme des brouilleménage qui ne voulaient pas prendre de femmes pour être les maris de toutes. Je ne crois plus à leur enfer et à leur paradis qu'à Jean de Vert. S'il
existe un dieu, ce qui n'est pas trop clair, il ne nous a pas créés pour nous tourmenter, mais pour être heureux. Il ne s'embarrasse pas plus de nous que des hérétiques. Les huguenots et les juifs vivent tout comme nous leurs enfants sont aussi dodus que les nôtres. S'ils étaient aussi détestés que le disent les prêtres de notre prétendu père éternel, qui a tout fait et qui peut tout détruire, il ferait perdre le goût du pain à ces hérétiques. Ma voisine, lamentez vous tant que vous voudrez, je me gausse de vos gros soupirs et je suis d'une joie de bougre de voir que nous voilà pour jamais déprêtraillés. La bigote fait un signe de croix. Vous serez damnés tous les deux comme la poule à la Charlotte, s'écria t elle. Tant mieux, vieille sotte, lui répondis-je. Ton paradis, s'il existe, ne sera qu'une basse-cour où tous les dindons et les cochons de la terre seront renfermés si je pouvais croire à ton enfer, c'est là que je voudrais habiter avec tous les hommes d'esprit et toutes les jolies damnés. Après avoir ainsi rivé le clou à la péronnelle, je lui fis voir la place où les maçons n'avaient point travaillé. Tu viens de parler comme un livre, dis je, à ma Jacqueline, quand nous fûmes délivrés de cette face à gifle pour t'en récompenser je te mènerai demain à la comédie: cela vaut mieux que la messe on y dit en riant de bonnes vérités, et quand la pièce est bonne, elle instruit mieux que le plus beau sermon. Où ça, mon vieux, aux grands danseurs de corde? Non pas, Jacqueline, un pareil spectacle est indigne des républicains. Il n'y a que des rois ou leurs valets qui puissent s'amuser à voir un pauvre diable s'écloper et souvent se casser le col pour gagner un misérable Corset. Nous irons donc voir les ci-devant comédiens du roi. Pas davantage. Je n'en suis pas fâchée, notre homme, car j'ai toujours baillé en entendant ces rois et ces princesses en détrempe. Ils ne feront plus bailler personne, ma vieille, si ce n'est les aristocrates avec lesquels ils sifflent maintenant la linotte. Cette bande de muscadins et de muscadines est à l'ombre pour avoir voulu gouailler la Sans-culotterie. Ils ont oublié que le plus beau de leur nez en était fait. Ecoute, notre homme, on dit comme ça, qu'il y a un nouveau théâtre qui est beau à faire peur, où ce qu'on vous prie très poliment d'entrer gratis, attendu que la salle est toujours vide: si tu veux, nous en tenterons, puisque ça ne coûte qu'un moment d'ennui. On m'a dit que c'est une brave citoyenne qui a fait construire exprès cette salle pour amuser seule tous les Sans-culottes de Paris et faire mettre la clef sous la porte à tous les autres comédiens. Quel est le laquais de muscadin qui t'a fait un pareil conte, c'est la Montansier dont tu veux me parler, et tu donnes le nom de citoyenne à une pareille guenon? Apprends que cette vieille balayeuse de coulisses était la première pourvoyeuse de la louve autrichienne. A Versailles, elle lui tenait complaisamment la chandelle, quand elle encornaillait l'ogre Capet dans sa petite loge. Quand la bougre de ménagerie des Tuileries fût à l'ombre, elle suivit le traître Dumouriez à Bruxelles, et après lui avoir rendu le même service, elle lui aida à faire perdre le crédit des assignats, en affichant à la porte de son spectacle que l'on payerait trois livres aux
premières places, en numéraire, et six francs en assignats. La garce qui aurait dû être raccourcie pour avoir commis un pareil crime, a eu l'audace, foutre, de venir ensuite demander quatre vingt mille francs à la convention pour récompense et Gargantua Lacroix, pour bonne raison, a appuyé sa demande de tous ses poumons. On connaîtra sous peu les voleurs de grands chemins qui ont fourni des fonds à cette banqueroutière pour construire ce nouveau bordel. On saura que chaque pierre est cimentée avec le sang du peuple, que les décorations ont été faites aux dépens des chemises de nos braves volontaires. Patience, le temps découvrira tout. En attendant, le comité de sûreté générale doit faire arrêter comme suspecte cette tripotière de l'ancien et du nouveau régime, et la convention ne doit pas souffrir un spectacle auprès de la bibliothèque nationale qui tôt ou tard y mettrait le feu et détruirait le monument le plus précieux de l'univers. Ainsi donc, ma Jacqueline, tu n'iras point à ce spectacle, mais je te conduirai à celui qui s'intitule avec raison Théâtre de la république tu verras le Jugement dernier des Rois, tu verras tous les brigands couronnés la corde au col, jetés dans une île déserte, tu verras le pape faire amende honorable, et obligé de convenir qu'il n'est qu'un joueur de gobelets tu verras tous les tyrans de l'Europe obligés de se dévorer eux-mêmes, et engloutis, à la fin de la pièce, par un volcan. Voilà un spectacle fait pour des yeux républicains. Nous passerons ensuite en revue tous les autres spectacles de Paris. Je mettrai au pas tous ceux qui sentent encore le musc mais tu crieras bravo avec tous les bons Sansculottes, en voyant le grand Opéra, et en entendant nos compères Cheron, Lais, Renaud chanter des hymnes en l'honneur de la Sansculotterie, foutre. La grande colère du Père Duchesne, N°311 Contre tous les jean-foutres qui pêchent en eau trouble, et qui s'enrichissent aux dépends de la république. Ses bons avis à la convention, pour qu'elle mette au pas les fournisseurs des armées, qui pillent le soldat, et qui s'entendent tous, comme larrons en foire, pour dégoûter les défenseurs de la patrie, en les faisant mourir de froid et de faim. Je reçois tous les jours des lettres des braves bougres qui se peignent si dur aux frontières avec les ennemis de la république. "Tu es un vieux camarade, m'écrivent les uns, tu connais le service, tu dois être notre soutien, nous te regardons comme le père du soldat, jure donc du matin au soir contre les fripons qui nous pillent, et contre les muscadins qui nous tourmentent. Les fournisseurs des armées sont des scélérats. L'étoffe des habits qu'on nous envoie est aussi mince que de la mousseline, et ils sont si étriqués qu'ils ne nous couvrent pas la moitié du corps ils sont si mal cousus, qu'en les mettant ils pètent de tous côtés nos chemises sont faites avec de la toile à torchon à peine nous viennent elles
jusqu'au nombril, et elles sont si étroites que nos bras et nos épaules n'y sauraient passer. On ne nous donne que des souliers de papier mâché, qui nous manquent dans les pieds, quand nous avons fait deux pas ce qui fait, mon vieux chiqueur, que nous sommes tous déguenillés et aussi nus que des petits Saint-Jean, et nous ne cessons de bivouaquer et de coucher à la belle étoile. Cependant nous avons une convention qui est une bonne mère, les défenseurs de la république sont ses enfants chéris. Elle ne veut pas sans doute qu'ils périssent de misère. Notre ministre est aussi le meilleur des humains. Il perd le boire et le manger, il ne dort ni jour ni nuit, nous le savons. S'il pouvait tout faire par lui-même, nous serions heureux, foutre. Recommande lui bien, Père Duchesne, la plupart des commissaires des guerres qui sont des ignorants et des voleurs. Ils s'entendent comme larrons en foire avec les fournisseurs, pour nous dépouiller. On croit peut-être nous dégoûter du métier en nous maltraitant de la sorte. On se flatte que nous jetterons le manche après la cognée. On se trompe bougrement. Nous avons juré de vivre libres ou de mourir, et de ne pas rentrer dans nos foyers jusqu'à ce que la France soit victorieuse de tous ses ennemis. Nous tiendrons parole, foutre, quoique tous en loques, sans bas et sans souliers, nous n'en faisons pas moins notre devoir en bons républicains la boue jusqu'à la ceinture nous marchons gaiement à l'ennemi en chantant tant la carmagnole. Si nous nous plaignons, foutre, ce n'est pas à cause du mal que nous endurons, mais nous mangeons du fromage de voir que la république est ainsi trompée et volée à la journée. Au surplus, brave marchand de fourneaux, nous nous en rapportons à toi. Tandis que nous foutons la danse aux ennemis du dehors, c'est à toi de faire la guerre aux fripons de Paris. Nous espérons être vengés après la guerre, et la convention en temps et lieu saura rogner les ongles aux jean-foutres qui s'enrichissent aux dépens du peuple. D'autres braves bougres m'adressent de toutes parts leurs plaintes, les uns crient contre les vivandiers, qui, ni plus ni moins que les épiciers de Paris, fabriquent eux-mêmes le brant-de-vin avec du bouillon de canard et du poivre long et qui leur font payer encore cette ripopée plus chère que le meilleur sacré chien. Il est foutant pour un pauvre bougre, après avoir humé toute une journée la fumée du canon et dont le gosier est aussi desséché que le coeur d'un calotin de n'avoir pas une goutte de bon rogome pour se gargariser le palais. Un luron de la ganse, nommé la Tulipe, m'écrit de l'armée de Moselle : tu te plains, me dit-il, de ce que les officiers de la ci-devant ligne ne sont pas tous au pas, et qu'ils sont encore commandés par des muscadins qui ne veulent pas prendre l'habit national. Apprends, vieux marchand de fourneaux, que les soldats de la république sont tous citoyens, et que nous ne connaissons d'autre distinction que celle des bons et des méchants. S'il y a encore à notre tête quelques muscadins, nous espérons en être délivrés petit à petit au reste ils n'auront pas beau
jeu avec des bougres à poil tels que nous mais puisque muscadins il y a, je vais te faire connaître ceux contre lesquels tu peux dégoiser à ton aise. Dis moi donc pourquoi les généraux et leurs aides de camp ne portent ils pas aussi l'uniforme national? Pourquoi sont ils couverts de galons d'or? Tu diras peut-être qu'il faut une distinction pour les grades, à fin de connaître ses chefs mais des républicains doivent ils se distinguer par de beaux habits. J'ai toujours entendu dire que ce n'est pas l'habit qui fait le moine, et cependant dans l'ancien comme dans le nouveau régime j'ai toujours cru que l'on ne regardait que l'écorce, qu'un sot bien vêtu serait le premier moutardier du pape, et que le plus brave homme, sous des haillons, est reçu partout comme un chien dans un jeu de quilles. Si nous sommes tous égaux, foutre, il faut faire cesser l'aristocratie des habits et surtout à l'armée. Je voudrais aussi que les généraux, au lieu de se tenir à l'écart dans leur bougre de quartier, fussent campés avec nous, pour voir tout ce qui se passe. Je désirerais surtout que les représentants du peuple auprès des armées, fussent plus souvent avec le soldat pour entendre ses plaintes, et lui rendre justice car les muscadins des étatsmajors, craignant que nous ne découvrions le pot aux roses, ont toujours grand soin de nous écarter. Le quartier général est toujours environné d'un tas de galopins quand un pauvre pileur de poivre ose en approcher, les chevaux des muscadins trépignent autour de lui, et le couvrent de boue pour l'éloigner. S'il se plaint, on le regarde avec dédain s'il crie contre pareilles viédaseries, on le fout dedans. Voilà la vérité, Père Duchesne, fais en ton profit et le nôtre, foutre. C'est ainsi que nos braves camarades des armées m'ouvrent leurs coeurs. La plupart de leurs plaintes sont justes qu'ils soient tranquilles, foutre, leurs bons amis, les Jacobins prennent leur défense, et la convention va les délivrer à jamais des muscadins et des voleurs. Déjà, foutre, elle vient de décréter que tous les bons citoyens seraient invités à fournir autant de chemises qu'ils pourraient pour leurs frères des armées. Il n'y a pas de bon Sans-culotte qui ne se dépouille de sa dernière pour garnir le sac d'un défenseur de la république, et maintenant que sainte guillotine fait tant de miracles, les riches font contre fortune bon coeur, ils seront forcés de donner à pleines mains pour n'être pas regardés de mauvais oeil. J'aurais voulu encore, tandis que la convention était en train de bien faire qu'elle eut ordonné à toutes les communes de la république de fournir chacune autant d'habits, de bas et de souliers qu'elles pourraient pour équiper nos frères d'armes. De cette manière, la fabrication serait surveillée par les Sans-culottes et les fournitures seraient de bonne qualité, mais on n'a pas fait Paris dans un jour. J'espère que nous profiterons de la mauvaise saison, pour nous préparer à donner une fameuse danse aux brigands couronnés.
L'or pleut de toute part à la monnaie tout ce que les prêtres avaient volé à nos pères est restitué à la république. Toutes les richesses, jointes aux biens des émigrés, payeront les frais de la guerre, et à la campagne prochaine les soldats de la liberté seront calés de la tête aux pieds, foutre. La grande colère du Père Duchesne, N°312 Contre les trois jean-foutres qui ont déserté la montagne pour aller barboter avec les crapauds du Marais, afin de sauver le reste de la bande de Cartouche Brissot. Ses bons avis aux braves Sans-culottes et aux Jacobins de se tenir sur leurs gardes, et de ne pas s'endormir jusqu'à ce que la grosse Babet ait été raccourcie, ainsi que tous les coquins qui ont voulu allumer la guerre civile entre Paris et les départements. L'argent fait tout, disent les fripons et les aristocrates avec l'argent, foutre, on vient à bout de tout, on ouvre toutes les portes avec l'argent, on fait la pluie et le beau temps avec l'argent on a bon droit partout avec l'argent, on fait voir que ce qui est blanc est noir avec l'argent, le plus grand voleur de l'univers passe pour le plus honnête homme avec l'argent, on met les citoyens à chien et à chat, on mitonne des contre-révolutions avec l'argent on peut détruire la république la plus calée et rétablir la république. Voilà comme quoi un tas de jean-foutres manigancent la contrerévolution, et s'imaginent tout détruire, parce qu'ils ont du quibus mais les Sans-culottes ont aussi leur contrepoison, et ils peuvent leur riposter par la vertu de sainte guillotine, nous nous foutons de votre or et de vos assignants car, foutre, le seul nom de cette grande sainte vous fait vesser de peur. Avec la guillotine, nous faisons mettre les pouces aux accapareurs avec la guillotine, nous ferons sortir des caves tout notre numéraire que les agioteurs y ont enterré, avec la guillotine, nous avons fait disparaître les muscadins avec la guillotine, le masque des calotins a tombé, et eux-mêmes ils ont été obligés de nous faire connaître leurs tours de gibecière, et d'avouer qu'ils étaient des fourbes et des imposteurs qui vivaient depuis quinze cents ans aux dépens des sots avec la guillotine, nous forcerons les riches de vider leurs coffres, avec la guillotine, ça ira, foutre, et la république triomphera mais il ne faut pas rester en si beau chemin, car, foutre, un seul pas à reculons nous replongerait dans le margouillis. Si nous donnions un seul moment de relâche aux aristocrates, si nous leur laissions le temps de respirer, ils lèveraient bientôt la crête, et notre tour arriverait. Pour se débarrasser de nous, ils ne feraient pas tant de façons, ils n'auraient pas besoin de juges pour nous faire perdre le goût du pain aussitôt pris, aussitôt pendu. Quels sont donc les viédases qui ont osé proposer à la convention de rebrousser chemin? Qu'elle était donc leur intention, foutre? Craignaient ils que les bougres qui sont prêts à cracher dans le sac ne découvrissent le pot aux roses? Sur quelle herbe avais tu donc marché,
endormeur Thuriot, quand tu as lâché ton robinet de paroles, au haut de la montagne, pour l'inonder du poison du Marais? Et toi, ci-devant Sansculotte et maintenant le plus musqué des muscadins, Bazire, as tu pensé que l'on tirerait le rideau sur tes aventures de Lyon, et sur tous tes tours de passe-passe au comité de sûreté générale! Apprends que les Sansculottes voyent tout, savent tout tôt ou tard, que rien ne leur échappe, qu'ils ont bonne mémoire et que quand le sac est plein, il faut qu'il crève. Et toi-même, paillardin Chabot, as tu pu te flatter que nous ne verrions que du feu à ton bougre de mariage autrichien? T'imagines tu qu'un seul patriote ait été dupe de ton conte bleu de la femme aux deux cents mille livres? Est-il un seul père de famille assez ennemi de lui-même pour te donner sa fille, quand elle n'aurait qu'un seul cotillon? Bougres de sots, il fallait cacher un peu votre jeu, et ne pas prendre la chèvre par la barbe. Quand vos manigances ont été découvertes, et quand les Sans-culottes ont jasé sur votre compte, vous leur avez tourné casaque. N'osant plus respirer l'air de la montagne, vous vous êtes jetés dans la fange du Marais. Vous espériez que tous les crapauds allaient vous suivre, et qu'ils allaient venir barboter autour de vous. Lâches déserteurs de la Sansculotterie, vous n'avez pas craint de dire qu'il n'existait plus de liberté à la convention. Pour le bien public, vous avez proposé de former un nouveau côté droit. Quoi! Il n'existe plus de liberté à la convention? Jamais, foutre, a t elle été plus libre? Jamais a t elle fait autant de choses que depuis que le Marais est desséché et que les crapauds en ont disparu? Aurions-nous une constitution, aurions-nous une république, si cette convention était restée enchaînée, et si la foudre de la montagne n'avait pulvérisé tous les fripons de la plaine? Est ce donc de la liberté de nuire et de perdre la patrie dont vous parlez? Vous n'avez pas crainte de demander quand finirait cette boucherie de députés? Vous pensez donc que les Brissotins, les Girondins et les rolandins qui ont été raccourcis, n'ont pas mérité leur châtiment, vous qui les avez accusé les premiers? Est ce donc une boucherie que de faire tomber le glaive de la loi sur des scélérats qui ont mis la France à feu et à sang? Les autres jean-foutres qui sont en arrestation, ne sont ils pas aussi coupables qu'eux? Comme eux, ne voulaient ils pas armer les départements contre Paris? Celui qui tient vaut il mieux que celui qui écorche? Oui, foutre, il n'est pas un seul individu de cette bande de mandrins qui n'ait dit comme le prophète Isnard, avant le 31 mai, que l'on chercherait un jour le lieu où exista Paris? Semblable au renard qui s'est pris dans un piège et qui fait le doucereux pour n'être pas assommé, qui promet, foi de renard, de ne plus croquer ni poules ni poulets chacun de ces gredins fait le bon apôtre. Tous soutiennent qu'ils ont été trompés, et depuis que l'infâme Brissot a joué à la main chaude, ils lui jettent le chat aux jambes comme si Brissot et les autres jean-foutres qui ont été raccourcis avaient pu seuls embêter la république entière de leur bougre de fédéralisme. Que l'on aille fouiller dans les registres de tous les départements, on y verra toutes les lettres que ces coquins
écrivaient à leurs commettants, pour brouiller les cartes on saura tous les mensonges qu'ils ont débité, les manoeuvres qu'ils ont employés, pour perdre la république. Qu'on leur fasse rendre un compte sévère de leur fortune, et l'on saura comme ils sont cousus d'or et d'assignats, on connaîtra comme quoi ils ont acheté des terres, bâti des châteaux et enrichi leur bougres de race. Est ce donc parce qu'ils sont députés que l'on voudrait les épargner? Mais ceux qui ont été appelés par le peuple pour le sauver, et qui n'ont cessé de le trahir, qui ont égorgé leur patrie, sont les plus grands des scélérats, et il n'y a pas d'assez grand supplice pour les punir. Point de pitié, foutre, car en donnant une lessive à ces brigands, ils n'en seront que plus acharnés dans leurs mauvais desseins, et la rage dans le coeur de voir leurs projets s'en aller en eau de boudin ils retourneraient bientôt dans leurs départements pour y allumer le feu de la guerre civile. Point de quartier, foutre, quand on a du mauvais sang, il faut le tirer. La convention s'est couverte de gloire en se purgeant de ces immondices, ceux qui veulent la faire revenir sur ses pas, sont des traîtres et les complices de la canaille brissotine. Braves Sans-culottes, intrépides Jacobins, veillez, veillez plus que jamais. Il se trame de nouveaux coups de chien. Si les traîtres ne sont pas tous guillotinés, attendez-vous à succomber vous-mêmes. Demandez, foutre, que tout ce qui reste de la race de Capet soit immolé, et surtout que la grosse Babet aille promptement rejoindre son prétendu Manuel. Ne lâchez pas prise, jusqu'à ce que le dernier des Brissotins ait mis la tête à la fenêtre, foutre. La grande colère du Père Duchesne, N°313 Contre le frocard Chabot, qui veut mesurer tous les Sans-culottes à son aune, et qui fait courir le bruit par les Autrichiens qui lui graissaient la patte, que les meilleurs Jacobins vont siffler la linotte avec lui, et que le marchand de fourneaux sera bientôt mis à l'ombre, comme s'il existait encore un comité des douze. Sa grande joie de voir que la mine est éventée, et que tous les fripons qui ont volé et pillé le peuple, vont avoir les ongles rognés. Si les aristocrates étaient aussi forts qu'ils sont fins, il y a gros, foutre, que depuis longtemps ils nous auraient mis le pied sur la gorge. Ils ne sont pas assez sots pour se chamailler entre eux comme les Sansculottes ils ne se mangent pas le blanc des yeux comme nous faisons, ils sont unis, non pas comme des frères, mais comme des voleurs qui ont besoin les uns des autres pour dévaliser les passants et être en force pour faire un coup de main. Ils n'ont tous qu'une seule volonté, celle de nous égorger. Jamais on ne les a vus se trahir, aucun d'eux ne découvre la mèche, car ils n'ont d'autre espérance que la contre-révolution ou la guillotine. Ainsi donc, foutre, pour leur propre intérêt, pour leur vie même, ils sont obligés de marcher droit dans le sentier du crime. Tonnerre de dieu, se Peut-il que l'amour du patriotisme ne soit pas
aussi puissant sur l'âme des républicains, que la haine de la liberté l'est sur les contre-révolutionnaires? Les Sans-culottes n'ont ils pas encore mille fois plus de raisons pour soutenir leur cause que les aristocrates à défendre le despotisme? Que deviendrons-nous tous tant que nous sommes, si les brigands couronnés pouvaient nous forcer à mettre les pouces. Les jean-foutres qui nagent entre deux eaux peuvent ils se flatter qu'on les ménagerait? Ils seraient les premiers allongés, car on ne leur ferait pas la grâce de les raccourcir. Leur compte serait bon, et les vils esclaves que commande Cobourg commenceraient par donner à chacun de ces viédases un bonnet de nuit de cheval, c'est à dire qu'on leur mettrait d'abord la corde au col et qu'on les accrocherait à tous les coins de rues. Vous n'échapperiez pas non plus, lâches coquins qui après vous être engraissé du sang du peuple, lui tournez casaque quand vous avez les mains pleines. Vous seriez autant de vaches à lait pour nos tyrans, et on vous égorgerait comme des ours, afin d'avoir votre peau. Ca me scie le dos de voir un tas de fripons bâtir des châteaux en Espagne, sacrifier honneur, patrie, braver le rasoir national pour devenir riches. A quoi donc servent les richesses? Celui qui a beaucoup d'or et d'assignats, dîne t il deux fois? Ah! foutre, si on pouvait lire dans l'intérieur de tous les bougres qui ont entassé sols sur sols pour garnir leur coffre fort si l'on connaissait les transes de tous ces ladres qui écorcheraient un pou pour en avoir la peau, si on les voyait toujours aux aguets, et ne dormant jamais que d'un oeil, transis jusque dans la moelle des os au moindre bruit, criant miséricorde lorsqu'ils entendent gueuler quelque décret contre les accapareurs, s'arrachant les cheveux quand on veut forcer les riches de lâcher les cordons de leur bourse pour soulager la patrie, en enterrant leur or, mourant d'effroi au seul nom de l'armée révolutionnaire? y a t il dans le monde un supplice pareil? Quelle différence, foutre, du sort de ce misérable à celui du brave Sans-culotte, qui vit au jour le jour du travail de ses mains! Tant qu'il a dans sa huche un pain de quatre livres et un verre de rogome, il est content. Dès le matin, il est gai comme un pinson, et à la pointe du jour, il prend ses outils en chantant la carmagnole quand il a bien travaillé le jour, il va le soir se reposer à la section, et lorsqu'il paraît au milieu de ses frères, on ne le regarde pas comme un loup garou, et il ne voit pas tout un chacun se parler tout bas, et le montrer au doigt comme un aristocrate, un modéré. L'un lui tend la main, l'autre lui frappe sur l'épaule, en lui demandant comment va la joie. Il ne craint pas d'être dénoncé on ne le menace jamais des visites domiciliaires. Il va partout la tête haute. Le soir, en entrant dans son galetas, sa femme lui saute au col, ses petits marmots viennent le caresser, son chien sautille pour le lécher, il raconte les nouvelles qu'il a apprises à sa section. Il est d'une joie de bougre en racontant une victoire sur les Prussiens, les Autrichiens, les Anglais il dit comme quoi on a guillotiné un général traître, un brissotin en citant l'exemple des coquins, il leur fait promettre d'être toujours bons citoyens
et d'aimer la république par dessus toutes choses. Il soupe ensuite avec un appétit de bougre et après son repas, il régale sa famille en leur lisant la grande colère ou la grande joie du Père Duchesne. Sa ménagère s'égosille à force de rire en écoutant les disputes de ma Jacqueline avec les bigotes qui pleurent leur saints dénichés. La petite marmaille éclate d'aise en entendant les B... Et les F... Dont je larde mes discours. "Ah! Qu'il doit être farce, le Père Duchesne, dit le grand fillot. Il a de grandes moustaches, s'écrie la petite Perrette. Fait il du mal aux petits enfants, riposte le petit cadet oui, foutre, s'écrie le papa, il les emporte dans sa grande poche, quand ils pissent au lit, et quand ils sont bien sages et qu'ils crient vive la république, il les embrasse et leur donne du croquet et du pain d'épice. Voilà la vie, voilà les jouissances du véritable Sans-culotte. Après avoir ainsi passé la journée, il se couche tranquillement et ronfle toute la nuit tandis, foutre, que le comité de surveillance va rendre visite à midi de loup aux ci-devant nobles, robins, financiers. Il faut entendre les cris de toute la nichée, quand on prie monsieur grippe sol ou monsieur pince maille de faire leur paquet dans un chausson, et de quitter leur appartements dorés et leurs lits de duvet pour aller tâter de l'égalité au grand hotel des haricots, autrement dit des Madelonettes. Se peut-il, foutre, que lorsqu'on est libre de choisir entre ces deux partis, on puisse prendre le change? Mais, comme on dit, c'est l'occasion qui fait le larron. Un Sans-culotte en place est environné, comme SaintAntoine, d'un million de diables, l'un lui présente des monceaux d'or, l'autre des poignées d'assignats une fois que le premier pas est fait, mon pauvre Job ne va plus qu'en clopinant, jusqu'à ce qu'il se soit cassé le col. Presque toujours quelque diablesse en falbalas agace le patron sur son sofa. N'est-il pas vrai paillardin Chabot qu'on ne résiste pas à pareille épreuve, tu peux nous en dire des nouvelles, ainsi que toi, godelureau Bazire, et toi de même, Julien, l'apostat de la Sans-culotterie, toi qui viens de faire un trou dans la lune. Quelle était donc votre espérance, misérables étourneaux? Si près du port vous avez fait naufrage? Les mêmes jean-foutres qui vous ont graissé la patte et qui ont trouvé les véritables Jacobins cuirassés, désespérés de voir la mine éventée, cherchent comme Samson à s'ensevelir avec les patriotes sous les ruines du temple. Ils font courir le bruit que le Père Duchesne a été dénoncé par Chabot. Partout on me salue de ces propos, déjà même il a couru un bruit que je sifflais la linotte. J'en ai ri de tout mon coeur, et j'ai demandé s'il existait encore un comité des douze. Mais, foutre, il n'y a point de feu sans fumée. Tu me menaces, infâme frocard, pour me faire peur et m'empêcher de dégoiser sur ton compte. Tu enrages de ce que je ne me suis pas plus laissé chaboter, que l'on n'a pu me brissoter. Ce n'était pas pour des prunes, je le vois maintenant, que tu m'as tant de fois offert le potage et la côtelette pour me faire faire connaissance avec ta bohémienne. Je n'ai pas été curieux de savoir ma bonne aventure, je n'ai
pas donné dans le panneau car je ne me fie pas plus aux moines qu'aux Autrichiens convertis. Au surplus, je te défie de mordre sur moi. Je suis ferré à glace, on peut tourner et retourner mes fourneaux, examiner toute ma vie, et l'on saura si je suis un franc républicain. En attendant, perfide moinaillon, je ne quitterai pas plus ton capuchon que le chef cornu du vieux Roland. Le vin est tiré, il faut le boire, foutre. La grande colère du Père Duchesne, N°314 De voir que les Sans-culottes donnent comme des buses dans tous les paquets qu'on lui débite. Sa grande découverte d'un nouveau complot des chabotins, pour mettre les Jacobins à chien et à chat, et brouiller la carte à la montagne et dans toute la république. Entretien secret du roi Georges-Dandin et de Pitt, son porte esprit, qui prouve que des milliers de jean-foutres ont la patte graissée pour assassiner les meilleurs patriotes. Il y a encore quelque anguille sous roche. Je vois de loin, foutre, et j'ai le nez fin. Je flaire tous les fripons, et rarement je me trompe sur leur compte aussi m'a t on dit souvent que j'étais sorcier pour avoir prédit, souvent un an d'avance, tout ce qui arriverait, et annoncé les plus fameux coups de chien avant que personne en eut seulement l'idée. Je ne suis pas pourtant un bel esprit et un grand politiqueur mais, foutre, en révolution il ne faut que le gros bon sens, et de la probité pour dérouter les coquins les plus renardés. D'ailleurs, foutre, toutes les ruses de guerre sont maintenant connues à force d'être trompés, les Sans-culottes deviennent défiants. Ils ont le tact maintenant pour juger les hommes, et le bougre qui voudra à présent jouer le peuple attaquera son maître, et se prendra lui-même en ses propres filets. Je dis donc, foutre, que le feu couve encore sous la cendre. Il ne faut qu'une étincelle pour faire un grand incendie, mais les Sans-culottes sont là ils veillent nuit et jour, et ils sauront bien l'éteindre il ne faut pas que le mal soit fait pour le guérir, il faut le prévenir d'avance. Les patriotes les plus purs sont menacés. On emploie de nouveaux moyens pour les détruire, ce n'est plus avec le poignard que l'on cherche à frapper les défenseurs du peuple. On ne trouve pas beaucoup de Charlotte Corday, mais, foutre, c'est avec le poison de la calomnie. On met les patriotes à chien et à chat, on les arme les uns contre les autres, et on espère qu'ils vont être assez sots pour se manger le blanc des yeux et se détruire de leurs propres mains. Je commence à voir clair dans ce brouillard de crimes. Je devine la main qui conduit cette marotte. C'est encore une manigance du porte esprit du roi Georges-Dandin. Je voudrais, me disait l'autre jour un brave Sans-culotte, être pendant quelque temps petite souris pour aller fureter dans tous les palais des brigands couronnés afin de savoir ce qui s'y passe, ce qu'ils disent, ce qu'ils pensent au sujet de notre république. Il n'y a pas besoin, lui
répondis-je, d'être souris pour découvrir tous leurs projets, car leurs finesses sont cousues de fil blanc. Tu prétends donc, pauvre marchand de fourneaux, ajouta le compère, lire du fond de ta boutique, dans le coeur des rois... Ah! Foutre, je sais mieux que personne que c'est la bouteille à l'encre, mais c'est sur leurs actions que je les juge, et je ne me trompe pas, foutre, je suis si sûr de mon fait que je pourrais répéter mot pour mot tout ce qui se dit dans le conseil de l'échappé des petites maisons qui gouverne les trois royaumes d'Angleterre, d'Ecosse et d'Irlande, et qui se prétend par dessus le marché, roi de France in partibus. Mais puisque tu es si curieux, compère, d'entendre parler les mangeurs d'hommes appelés rois, écoute l'entretien secret que ce cheval morveux d'Allemagne eut l'autre soir avec son digne palefrenier Pitt. Si tu me demandes de qui je le tiens, je te répondrai comme aux petits enfants, que c'est mon petit doigt qui me l'a dit au surplus, tu jugeras par la suite si je te dis la vérité. Entretien secret du roi Georges-Dandin avec son ministre Pitt, au sujet de la république française, traduit de l'anglais par le véritable Père Duchesne en bon français, foutre. Le roi Georges-Dandin. Ah! Quel bougre de métier que celui de roi? Je ne sais pas s'il n'est pas plus doux maintenant de porter un bat qu'une couronne. Au temps jadis, il y avait du plaisir à régner sur un troupeau d'esclaves qui se laissait tondre sans murmurer, mais le temps de plumer la poule sans la faire crier est passé. Qu'est-il devenu cet heureux temps où nous étions des dieux sur la terre où on ne nous abordait qu'en tremblant où on ne nous parlait qu'à genoux? Alors rien ne nous résistait. Le mari, dont nous convoitions la femme, était obligé de nous la céder, ou il était embastillé. Tout ce que possédaient nos sujets nous appartenait, attendu que nous ne tenons notre puissance que de dieu seul. Ah! Le beau droit que celui de vie et de mort sur vingt-cinq millions d'hommes? Quelle jouissance que de pouvoir dire: je puis faire pendre, rompre, brûler, écarteler celui qui me déplait. Mais à présent nous n'entendons plus corner à nos oreilles que les mots de liberté, d'égalité, de république, rien que d'y songer je suis transi de peur. Depuis la triste fin de notre cher frère, cousin et ami le roi très chrétien, je tâte sans cesse mon col pour voir si ma tête tient encore à mes épaules. Ma foi le jeu n'en vaut pas la chandelle, et s'il faut rester encore longtemps dans de pareilles transes, je me déroyaliserai. Qu'on me remette, si l'on veut, encore une fois aux petites maisons, pourvu que j'y mange et que j'y boive à mon aise. Je serai plus heureux que de rester sur un trône qui s'en va en canelle. Je renonce de bon coeur à porter un sceptre qui n'est plus maintenant qu'un misérable hochet. Pitt. "Quoi! Sire, est ce qu'il faut jeter le manche après la cognée? Est ce qu'il faut faire ainsi l'enfant? Je vous ai déjà fait voir bien du chemin, votre majesté en verra encore bien d'avantage. Apprenez qu'un bougre de ma trempe est fait pour changer la face de l'univers.
Depuis quatre ou cinq cents ans la nation anglaise a une dent contre la France ni par la force ni par la trahison l'Anglais n'a jamais pu faire la loi au Français. Enfin une occasion favorable s'est présentée de terminer cette vieille querelle, et de faire, moi seul, ce que toutes nos armées et nos flottes n'ont pu faire. Quand la France a été sens dessus dessous au sujet des finances, j'ai d'abord attisé le feu sans me montrer, mais quand j'ai vu que les Français jouaient beau jeu, bel argent, je me suis jeté dans la mêlée. Connaissant tout le prix de l'or dans un siècle corrompu, j'ai su mettre vos guinées à profit. C'est avec elles que j'ai armé les Français contre les Français, c'est avec elles que notre ami Brissot et la séquelle de la Gironde nous auraient livré la France pièce à pièce, sans la maudite guillotine, c'est avec elles que Dunkerque, Brest, Bordeaux, Cherbourg nous étaient hoc. Il ne faut pas rester en si beau chemin et nous en tenir à ce que nous avons de poisson pêché il faut anéantir la France, j'ai dans ma manche des milliers d'individus qui d'un bout à l'autre de la république brouillent les cartes et animent les Sans-culottes les uns contre les autres. C'est maintenant les plus fameux Jacobins que je couche en joue. Si je puis réussir à faire perdre le change et à faire massacrer ou guillotiner une vingtaine de Montagnards, c'est fini, la contre-révolution sera faite on ne saura plus à quelle branche se raccrocher on ne se fiera plus à personne tout le monde aura peur de son ombre et la France entière tombera aux pieds de votre majesté pour vous prier de lui donner un de vos fils pour roi". Mon compère ouvrait de grands yeux. Je crois, Père Duchesne, me dit-il, que tu as foutu le doigt dessus, mais les Sans-culottes ne donneront pas dans de pareils godats. Je te crois, foutre, mais il ne faut pas s'endormir. Jacobins, Montagnards qui avez les mains pures et qui ne les avez jamais salies avec l'or des tyrans, c'est à vous de vous réunir. On va faire un dernier effort pour vous perdre, mais les jean-foutres y perdront leur latin. Tenez-vous serrés. Après avoir détruit les rois, ce n'est plus qu'un jeu pour vous d'anéantir jusqu'au dernier des intrigants et des fripons. Les chabotins finiront comme les Brissotins et les Girondins, foutre. La grande colère du Père Duchesne, N°315 De voir que tous les estafiers de La-Fayette ont forcé Marat de vivre pendant quatre ans avec les chauves-souris, et tous les muscadins et muscadines qui, comme Charlotte Corday auraient voulu assassiner l'ami du peuple en son vivant, osent le fêter après sa mort. Ses bons avis aux braves Sans-culottes, pour qu'ils se défient des patriotes de deux jours, qui manigancent de nouveaux coups de chien contre la république. Je l'ai dit un million de fois, et je ne cesserai de le dire: les faux patriotes sont plus à craindre que les aristocrates déterminés. Quand je connais mon ennemi, foutre, je me tiens sur mes gardes, et je l'attends de
pied ferme. A bon chat, bon rat. Mais, foutre, le viédase qui fait contre fortune bon coeur, qui tend la main à celui qu'il voudrait baiser mort, est plus à craindre que le serpent comme lui, il se tortille en tous sens, il se glisse partout pour lancer son poison, et il vous a déjà fait une blessure mortelle, avant que vous sentiez son dard. Braves Sans-culottes, défiez vous plus que jamais de ces couteaux à deux tranchants. Craignez comme le feu ces bavards à la journée, qui ne disent jamais ce qu'il faudrait dire, et qui disent toujours plus qu'ils ne devraient. Songez, foutre, que vous êtes environnés de fourbes, de voleurs, de conspirateurs déguisés. Ceux qui, avant le 10 août, pissaient le verglas dans la canicule, qui n'étaient ni chair ni poisson, qui ne parlaient que d'ordre, de paix, de modération, qui avaient toujours la langue miellée, se battent maintenant les flancs pour paraître républicains, ils dégottent en apparence les meilleurs Sans-culottes ces bougres qui n'avaient ni bouche ni éperon, et qu'on avait beau aiguillonner du matin au soir pour les mettre au pas sans pouvoir les remuer, s'emportent maintenant comme la soupe au lait. Ils vous assomment de leurs rodomontades à les croire ils ont tout fait ils se vantent d'avoir pris la Bastille, et ils se gardent bien de dire qu'ils étaient au fond de leurs caves quand le premier coup de canon de la liberté s'est fait entendre. Ils soutiennent qu'ils étaient à Versailles le six octobre, mais ils ne vous disent pas de quel côté ils ne se vantent pas d'avoir été hoquetons bleus, ou rouges, ou verts de l'ogre royal ou des autres monstres de la ménagerie, ils ont également oublié les croquignoles qu'ils ont reçues à la journée des poignards, ils ne se souviennent pas davantage d'avoir fait la navette tantôt à Coblentz, tantôt dans la Vendée, tantôt à Lyon, tantôt à Toulon mais, foutre, ce qu'ils savent bien c'est le nouveau mot d'ordre donné par le porte esprit du roi Georges-Dandin, c'est à dire qu'il faut singer maintenant les patriotes avoir un large pantalon, une petite veste, une perruque noire, un bonnet rouge pour cacher la blonde chevelure, des moustaches postiches, une pipe à la gueule, à la place de cure dents, un gros gourdin en guise de badine, jurer ni plus ni moins que le Père Duchesne, au lieu de parluiser du bout des lèvres. Voilà, foutre, comment on vous fout dedans, pauvres Sans-culottes qui ne voyez pas plus loin que votre nez, et qui prenez toujours les apparences pour la chose. Parce que vous êtes bons, vous ne croyez pas qu'il existe des méchants, parce que vous êtes francs, vous ne vous imaginez pas qu'on puisse tromper. Encore une fois, défiez vous de tout le monde, car la méfiance est la mère de sûreté. Si les bougres qui vous ont paru les patriotes les plus déterminés ont pu vous foutre dedans, que devez vous espérer des jean-foutres que vous ne connaissez ni d'Eve ni d'Adam, et qui tombent comme des nues dans vos sections et dans les sociétés populaires. Vous les voyez se jeter à tort et à travers pour embrouiller tout, pour mettre les Sans-culottes à chien et à chat. Quand la convention rend un bon décret, ils en voudraient un meilleur. Parle t on
d'un brave magistrat qui sue sang et eau, qui perd le boire et le manger pour assurer les subsistances du peuple, et faire son bonheur, alors tous ces coquins mangent du fromage, et ils ne peuvent s'empêcher de vomir leur fiel. Quand ils ne peuvent trouver mordre sur la vertu, ils disent que c'est un ignorant mais, foutre, quand on dénonce un accapareur, tous les aboyeurs se mettent en quatre pour le défendre quand on accuse un Custine, un Houchard ou d'autres généraux d'avoir trahi, ces gredins crient à la calomnie, et accusent le brave bougre, qui veille nuit et jour pour le peuple, d'être un anarchiste, un désorganisateur. Il y a dans Paris des milliers de jean-foutres de cet acabit, soudoyés pour tourmenter les Sans-culottes. Quand les épiciers ont voulu nous vendre le sucre au poids de l'or, ils ont graissé la patte de ces gredins pour exciter le pillage quand les Brissotins voulaient forcer la convention à mettre la clef sous la porte, et la transplanter au beau milieu de la Vendée, afin de fabriquer un roi de Bourges, tous ces galopins se répandaient dans les rues de Paris, dans les cafés, chez les marchands de vin et traiteurs, et ils s'en foutaient des piles éternelles en vilipendant les Jacobins et la montagne qui payait l'écot, foutre? C'était le vieux Roland, avec les millions que les Brissotins avaient fait remettre en ses pattes crochues, soi-disant pour acheter des subsistances, mais dans le vrai pour mitonner la contre-révolution. Quand le 31 mai, tous les crapauds du Marais se virent au bout de leurs prouesses, et qu'à force de cris, ils obligèrent la convention à quitter le terrain, et à aller en procession à travers les Tuileries, toute la bande de Pitt était sur pied et divisée dans toutes les rues, pour demander la tête de celui-ci, la tête de celui-là, afin d'allumer la guerre civile, et de faire marcher tous les départements contre Paris. Une seule goutte de sang répandue alors, aurait fait égorger des milliers d'hommes, et, foutre, c'est ce que les Brissotins désiraient, et ils s'y attendaient si bien qu'ils étaient tous cachés et déjà en fuite. Cette bougre de canaille vient encore de nous donner un plat de son métier, aussitôt qu'elle a vu dénicher les saints d'or et d'argent des églises, elle a imaginé un nouveau coup de chien pour faire lever en masse tous les bigots et bigotes, tous les marguilliers, et toutes les confréries du ci-devant royaume. Tandis, foutre, que l'on célébrait la fête de la raison dans son nouveau temple, les estafiers de La-Fayette qui pendant quatre ans ont forcé le pauvre Marat d'habiter avec les chauvessouris, les muscadins et muscadines des sections, qui étaient autant de Vendée avant le 31 mai, se sont tout à coup convertis et ont voulu faire un dieu de l'ami du peuple qu'ils ont sans cesse persécuté pendant sa vie. On a vu fête sur fête en son honneur, et la main qui regrettait de n'avoir pas été emmanchée au poignet de Charlotte Corday a osé brûler l'encens devant la statue du père des Sans-culottes. Tonnerre de dieu, il faut être aveugle pour ne pas voir clair dans cette bougre de marotte. C'est encore un moyen pour ameuter les fédéralistes contre Paris, en disant que les Parisiens ne veulent plus reconnaître d'autre dieu que Marat. Marat un
dieu! Lui qui foutait des coups de poing aux viédases qui le flagornaient, et qui faisaient auprès de lui les pieds plats? Il n'avait pas plus d'envie d'avoir des autels que le Sans-culotte Jésus, que les prêtres, malgré lui, ont appelé le fils ainé du père éternel, quoiqu'il se fût toujours appelé le fils de l'homme, et qu'il eut renversé toutes les idoles de son temps, et fait une guerre éternelle aux prêtres, comme Marat aux aristocrates. Braves bougres, qui chérissez le nom de Marat, imitez son exemple mais ne souffrez pas que les muscadins l'adorent pour le rendre méprisable, foutre. La grande colère du Père Duchesne, N°316 Au sujet d'un nouveau complot des ci-devant financiers et des marchands d'argent, pour s'emparer du numéraire et faire tomber les assignats. Ses bons avis aux braves Sans-culottes, pour qu'ils se tiennent sur leurs gardes, attendu qu'ils sont environnés de fripons qui leur tendent des pièges, et qui manigancent la contre-révolution. Au foutre les belles protestations des coquins, je ne me fie pas plus aux modérés, aux royalistes, aux aristocrates qu'à une planche pourrie et jamais, foutre, je ne serai dupe de leurs grimaces. Qui a bu, boira. Jamais d'un sac à charbon il ne sortira de blanche farine. Ainsi donc quand je vois des calotins découvrir tous leurs tours de gibecière et convenir qu'ils n'ont jamais été que des joueurs de gobelets, que pendant dix-sept cents ans ils ont passé des muscades sous le nez des Sans-culottes, quand ils avouent qu'ils ont été toute leur vie des imposteurs, et qu'ils ont vécu aux dépens des sots, je leur demande, foutre, pourquoi ils n'ont pas fait plutôt leur confession, et si un coupeur de bourse, un voleur de grand chemin, quand il est pris sur le fait, disait à ses juges: "ne me condamnez pas pour avoir dévalisé les passants, il faut bien que chacun fasse son métier, le mien était d'être voleur maintenant que toutes les routes sont bien gardées et toutes les portes fermées, et qu'il n'y a plus d'espoir même de grappiller, je déclare que je renonce au métier et même j'avoue qu'il était infâme". Que devrait répondre le juge à l'audacieux fripon qui lui tiendrait un pareil langage? Il est bien temps, lui dirait-il, de se repentir quand le mal est fait? Ceux que tu as dépouillé jusqu'à ce jour n'ont ils pas le droit de se plaindre et de demander vengeance? Tu as beau faire le calin, quand on t'a pris la main dans le sac, et promettre de n'y plus revenir, il faut que justice se fasse, et, pour servir d'exemple à tes pareils, tu auras d'abord les honneurs de la séance dans la grande assemblée de la grève, et tu présideras sur le fauteuil de maître Perein. Peuple, c'est toi qui es le juge suprême, foutre maintenant que tu es débadaudé et que tu connais tous les tours de passe-passe de la bougre de calotte, défie t'en plus que jamais, car le monstre avant que d'expirer, peut encore te lancer son venin. Il y a gros, foutre, que les trois quarts et demi des imposteurs qui jettent le froc aux orties, sont sur la grande liste
des nouvelles recrues du roi Georges-Dandin et qu'ils ont le gousset bien garni de guinées pour jouer leurs farces. Les brigands couronnés ne sachant plus de quel bois faire flèche, ont imaginé ce nouveau coup de chien pour amener à leur bord toute la canaille à chapelet et à scapulaire, en disant que les Français n'avaient plus ni foi ni loi et qu'ils ne voulaient plus reconnaître ni dieu ni ses saints. Les bougres encore une fois se sont pris dans leurs filets et toi, peuple sage, tu as fait tourner à ton profit toutes ces manigances du diable. Tes coffres se sont garnis de tous les trésors dont les prêtres t'avaient dépouillé ces calices, ces ciboires, toutes ces prétintailles de l'église achetées au prix du sang des Sans-culottes, vont servir à nous donner des subsistances, à habiller nos frères d'armes, à forger les canons qui vont foutre la dernière danse aux esclaves des despotes c'est ainsi que la tricherie revient à son maître mais encore une fois, bon peuple que tant de milliers de fripons veulent égorger, ne vas pas perdre la carte et rester en si beau chemin. Souviens toi, foutre, que toutes les fois que tu as fait un pas vers la liberté, tu as rencontré sur ton passage des ustubrelus qui t'ont crié plus vite que ça et qui voulaient te faire galoper à travers des précipices, tandis qu'il ne fallait marcher qu'au petit pas pour les éviter et ne pas te casser le col. De la prudence, foutre, petit à petit l'oiseau fait son nid. Maintenant, foutre, que le temple de la superstition est abattu, élève à sa place celui de la raison, mais prends garde de faire de la bouillie pour les chats, il faut pour le bonheur des hommes que ce temple dure autant que le monceau de boue sur lequel nous rampons, sera éclairé par le soleil. Choisis donc des mains habiles pour le construire. Ne vas pas employer à sa construction les imbéciles qui cherchent à recrépir la vieille masure où les prêtres faisaient bouillir leurs marmites. Ceux-là gâteraient toute la besogne, quand tu leur demanderais du plâtre, ils t'apporteraient des pierres et ton bâtiment ne serait bientôt qu'une tour de Babel, mais rassemble tous les braves bougres qui ont du coeur à l'ouvrage et la besogne ira grand train. Quand ce chef d'oeuvre sera achevé, quand la divinité que tu chéris aura ranimé la paix et l'abondance, personne ne pourra douter de sa vertu. Elle fera de véritables miracles, et tous les peuples de la terre viendront lui rendre hommage. Jusque là, foutre, ne te hâte pas. Laisse les sots adorer leurs magots et magotes, qu'ils mangent aussi longtemps qu'ils voudront leur bon dieu de farine. Contente toi de rire de leur bêtise, mais ne les persécute pas. Plus on bat un âne plus il est têtu laisse manger des chardons à ceux qui les aiment. Avec le temps on vient à bout de tout. Si on n'avait pas tant fouetté les premiers chrétiens, si on n'avait pas pendu les uns, rôti les autres, écorché celui-ci, fait bouillir celui-là tout vivant, il n'y aurait jamais eu ni moines, ni évêques, ni papes. Il faut laisser mourir le fanatisme de sa belle mort en voulant le tuer à coup d'épingles, ce monstre pourrait encore ranimer ses forces et faire un dernier effort pour se venger. Qu'il pourrisse sur son fumier. Sans-culottes, mes amis, bornez vous en ce moment à couper les
vivres aux calotins, que ceux qui voudront, en naissant, se faire laver la tête ou se faire couper un petit bout de chair, soient libres de payer le charlatan qui le gourera ainsi pour le salut de leur âme. Bientôt le métier tombera de lui-même car les hommes se lassent bien vite de payer des sottises, et rien ne les réveille autant que leur intérêt particulier. D'ailleurs, foutre, la convention a mis sur le chantier le grand travail de l'instruction publique. Quand tous les Sans-culottes seront éclairés, ils rougiront des momeries de leurs vieilles grandes mères et ils riront avec nous des contes du temps passé. Au plus, j'en ai trop dit sur ce chapitre, le meilleur moyen de tuer le cagotisme c'est de n'en plus parler. Ne songeons qu'aux saints du jour. Chantons du soir au matin des hymnes à la raison, à la liberté, à la gloire de nos braves guerriers, et nos chants auront bientôt étouffé les cris des corbeaux d'églises. Parlons d'une autre vermine, foutre, aussi dangereuse et qu'il faut promptement écraser. C'est l'infâme clique des gens d'affaires, des monopoleurs, qui manigancent un nouveau complot pour s'emparer de tout ce qui reste de numéraire. Depuis que l'or et l'argent pleut au trésor national, les écus et les louis reparaissent, et l'argent est au pair avec les assignats. C'est un appât pour attraper les niais, et l'on nous lâche un pois pour avoir une fève, les financiers, les gens de banque se flattent en faisant ainsi circuler quelques sacs que tout le numéraire enterré va reparaître, ils se disposent à faire rafle encore une fois pour discréditer les assignats, quand, par leur bougre de jeu de la hausse et de la baisse, ils auront nos écus entre leur griffes crochues. Eh bien, foutre, prouvons à ces financiers que nous sommes des niais de Cologne, et que nous prendrons, s'ils le veulent des sols marqués pour des liards. Faisons voir que nous avons autant d'estoc que ceux qui croient ainsi nous jouer par sous jambes faisons plus, prouvons que nous sommes républicains en méprisant l'or et l'argent avec lequel on cherche à nous appâter. Foutons au nez de ces jean-foutres, les écus qu'ils nous présenteront et ne recevons que les assignats, qu'il arrive en même temps un bon décret qui oblige tous ceux qui possèdent du numéraire à le porter à la bourse commune en échange du papier national et bientôt la république possèdera à elle seule plus de richesses que tous les brigands couronnés qui nous font la guerre, et nous verrons après, qui d'eux ou de nous mangera le lard. Nous verrons, foutre, si toutes les mines de l'Espagne, et toutes les ruses de Cartouche-Pitt valent les vertus d'un peuple libre, et si on peut faire la loi à un peuple qui peut se suffire à luimême et qui sait se passer de tout, foutre. La grande colère du Père Duchesne, N°317 Au sujet de tous les coups de chiens que les aristocrates manigancent contre les meilleurs citoyens, en les menaçant de la contrerévolution et de les faire assassiner. Ses bons avis aux braves Sansculottes, pour qu'ils soient toujours sur le qui vive, en tenant tous les
fripons et les contre-révolutionnaires en joue, et en restant fidèles à la convention et à la sainte montagne. Un peuple républicain doit toujours être sur le qui vive. S'il n'est pas sans cesse sur ses gardes, s'il s'endort un seul instant, il est foutu, car les ambitieux veillent continuellement et ils profitent de son sommeil pour l'enchaîner. "Que viens tu nous rabâcher, me dira t on, avec tes vieilles réflexions qui sont aussi usées que le gazon roussi qui couvre ton crâne pelé. As tu aussi la patte graissée pour tourmenter les Sans-culottes et pour les effrayer par tes prédictions sinistres? Tu ne fais que clabauder contre les intrigants, les fripons et les traîtres à t'en croire il n'y aura bientôt plus que toi à qui l'on puisse se fier" tonnerre de dieu! Quel est le bougre de feuillant qui ose ainsi envenimer ce que je pense et ce que je dis? Il n'y a jamais eu que le pape qui ait prétendu être infaillible et c'est le dernier animal du monde auquel je voudrais ressembler. Je ne connais rien de si imparfait qu'un homme sans défaut. Celui qui est trop vertueux est un véritable coquin. Témoin Jérôme Petion qui nous a longtemps paru avoir l'âme aussi bien papillotée que sa chevelure de muscadin. L'homme pur ne se moque jamais, il dit franchement ce qu'il pense. Il appelle un chat un chat il ne ménage personne. Il crie, il jure contre ceux qui ne sont pas au pas. Dans sa colère, s'il frappe par méprise sur un brave bougre, il lui demande excuse, et il répare ses torts en allant au plus prochain cabaret, étouffer une demi-douzaine d'enfants de choeur avec lui. Il n'y a que de véritables fripons qui craignent d'être dénoncés. Quand la vérité les pique, ils se cabrent comme des chevaux rétifs mais l'homme de bien se fout des mauvais propos il gagne à être calomnié, puisqu'en l'accusant à tort, on lui fournit l'occasion de se justifier. Je me souviens d'un bougre à poil de l'antiquité, qui avait sauvé sa Patrie et qui fût dénoncé devant le peuple romain comme un traître tous les badauds de Rôme ouvraient de grandes oreilles est-il possible, disaient les uns, qu'un patriote de cet acabit puisse branler dans la manche, et nous tourner casaque? Rien de plus vrai, s'écriaient les aristocrates. Déjà on parlait de la roche Tarpéienne, qui était la guillotine de ce temps là, mais le grand homme se présenta au milieu du peuple, qui remplissait lui-même les fonctions du tribunal révolutionnaire, il paraît avec confiance devant un tribunal aussi équitable, et pour toute réponse à ses ennemis il s'écria: il y a aujourd’hui tant d'années que j'ai détruit Carthage, allons rendre grâces aux dieux. Tout le peuple cria bravo, il battit des mains et reconduisit en triomphe son fidèle défenseur. Les aristocrates eurent le bec jaune, et tous confus, ils allèrent se cacher dans leurs nids de hiboux, méditer quelque nouveau complot pour diviser les patriotes. Je vois ricaner certains gouailleurs en m'entendant parler des histoires du temps passé. Comme te voilà savant, me disent ils bientôt tu parleras comme un livre. Je conviens, foutre, que je m'éloigne un peu de mes fourneaux. Sortons des brouillards de l'antiquité, et revenons au temps présent. Je dis donc, et je soutiens, qu'il n'y a que ceux qui sentent
leur cas sale qui se fâchent quand on les dénonce. C'est ainsi, foutre, que tous les gredins qui fondaient leur cuisine sur la liste civile, se débattaient quand les Jacobins découvraient le pot aux roses, et faisaient connaître aux Sans-culottes les manigances du comité autrichien. Ils nous reprochaient d'avilir les autorités constituées ils nous appelaient des anarchistes, des désorganisateurs, quand le vieux Roland faisait ripaille avec le quibus que la convention lui avait confié pour les subsistances du peuple, quand tous les Brissotins, Girondins et tous les crapauds du Marais partageaient avec ce vil canard les dépouilles de la république quand nos braves Montagnards faisaient feu des quatre pieds pour débourber la machine que les fripons avaient enrayée, quelles injures ne vomissait t on pas contre eux? Toutes les rues, toutes les places publiques, tous les carrefours étaient tapissés de placards de toutes couleurs fabriqués dans le sboudoirs de la reine coco, et où les meilleurs patriotes étaient traînés dans la boue. Comment les Montagnards ont ils résisté à ce torrent d'injures et de calomnies, c'est en restant fermes et inébranlables c'est en embrassant l'arbre de la liberté plus étroitement! Ils ne se sont pas servi des armes de leurs ennemis pour les combattre. Ils n'ont pas eu recours au poison et aux poignards pour se débarrasser des infâmes scélérats qui leur donnaient tant de tourments. Ils savaient que tôt ou tard la vérité perce et que le peuple, qui est toujours juste, leur rendrait justice. Venez, disaient ils aux bons citoyens de tous les départements, vous dont on nous menace, accourez pour nous juger. Quand vous nous aurez vus de près, vous serez de notre bord. C'est ainsi, foutre, que la vérité triomphera toujours du mensonge, et que la vertu résistera au crime. Courage donc, braves républicains, vous que les intrigants et les traîtres couchent en joue ne vous effrayez ni des cris ni des menaces, foutre dites tout ce que vous savez sur les hommes en place ne ménagez personne ne craignez pas d'abattre l'idole du jour c'est un crime que de ne pas démasquer le traître qui se couvre du masque du patriotisme pour égarer les Sans-culottes et les foutre dedans. Un vrai républicain doit dénoncer son meilleur ami, son père, quand il a des reproches à lui faire. Où en serions nous, foutre, si l'intrépide Marat n'avait pas été sans cesse à la piste des fripons il les flairait d'une lieue, il devinait leurs complots avant même qu'ils les eussent manigancé il s'élançait avec sa verge au milieu du peuple, et il frappait à tours de bras tous les jean-foutres qui se faisaient adorer, et les badauds qui baisaient la croupe du cheval ou l'écharpe ensanglanté des dieux du jour. Il est vrai qu'il a été forcé de se cacher de caves en caves, qu'il a vu les districts armés contre les districts pour avoir sa tête il est vrai qu'il a été décrété d'accusation par les trois assemblées qui devaient au contraire lui donner des couronnes civiques, mais en véritable républicain il ne voyait que le bonheur de son pays, et la tête sur le billot, il n'en aurait pas moins dénoncé les ennemis de sa patrie. Il fût traîné devant les tribunaux comme un contre-révolutionnaire. On
l'accusa d'être payé par Pitt et Cobourg pour exciter le meurtre et le pillage, il confondit la calomnie, et le peuple porta en triomphe son véritable ami. Enfin, les jean-foutres qui n'avaient pu le faire éternuer dans le sac, ont armé d'un couteau le bras d'une furie que cent millions de diables ont amené du Calvados à Paris. Il est mort martyr de la belle cause qu'il avait si bien défendue. Qu'il est beau mourir ainsi! Ah! Foutre, s'il existait encore un comité des douze, que de coquins qui m'accusent dans l'ombre et qui jappent de loin contre moi, lèveraient la crête! Qu'ils osent m'accuser à la face du peuple. Comme toi je suis menacé de la guillotine ou de la main d'une nouvelle Charlotte, si je ne mets pas de l'eau dans mon vin, mais je me fous des coups que les ennemis de la république veulent me porter. Je suis ferré à glace et je les attends de pied ferme. Egalité, liberté, république une et indivisible, voilà mes dieux. Je mourrai, s'il le faut, pour eux. Tant qu'il me restera un souffle, je défendrai les droits du peuple je dénoncerai les fripons et les traîtres, et jusqu'à mon dernier soupir, je crierai vive la république, vive la convention, vive la sainte montagne. Tous les hommes bons et méchants passeront, mais le peuple restera libre et heureux, foutre. La grande colère du Père Duchesne, N°318 De voir que les gros poissons veulent toujours manger les petits, que chacun plaide pour son saint, et que les trois quarts et demi des animaux à deux pieds ne songent qu'à leur intérêt, et oublient celui de la Patrie. Ses bons avis aux braves républicains pour qu'ils foutent de côté tous les ambitieux et les riches, et qu'ils soutiennent de toutes leurs forces les bons Sans-culottes. L'argent et l'ambition, voilà, foutre, les dieux des trois quarts et demi des animaux à deux pieds. Presque tous les hommes sacrifient tout à ces deux idoles. Que de crimes la soif d'or ne fait elle pas commettre! Que de malheurs l'ambition n'occasionne t elle pas sur la terre! ah, foutre, si on pouvait arracher ces deux vices du coeur humain, tous les peuples ne formeraient bientôt qu'une famille, c'est alors qu'ils seraient libres et heureux. A quoi donc, foutre, servent les grandes richesses? Celui qui est riche dîne t il deux fois? Non, au contraire. Le sale pourceau qui à force de bombance s'est arrondi comme un tonneau, qui n'est que lard de la tête aux pieds, que la graisse étouffe, qui ne sait comment soutenir sa lourde bedaine, qui roule plutôt qu'il ne marche, maudit son existence. Quand il entend un robuste Sans-culotte chanter à pleine gorge dès la pointe du jour, quand il le voit leste et fringant, traîner le rabot, remuer une poutre, conduire la charrue, le butor ne peut s'empêcher d'envier son sort mais surtout quand il le voit dévorer avec appétit un morceau de pain, lorsque lui au contraire il est rebuté de tous les mets qui lui passent sous le nez, il dit en lui-même "mon cuisinier a beau se mettre la cervelle à
l'envers pour ravigoter mon goût par de nouvelles sauces, mon estomac est usé. Pour avoir trop joui, je ne connais plus aucun plaisir l'ennui me suit partout j'ai des petites loges à tous les théâtres, et je baille aux pièces qui font rire les autres à gorge déboutonnée les plus jolies femmes m'agacent, non pas pour moi, mais à cause de mon or qu'elles convoitent leurs beaux yeux, leurs minois friands, toute leur gentillesse ne fait plus d'impression sur mon coeur glacé j'ai honte de me chercher auprès d'elles et de ne plus me retrouver. L'artisan dans sa vieillesse est consolé par sa nombreuse famille ses enfants reconnaissants des services qu'il leur a rendu dans leur jeune âge, s'empressent à leur tour de le soulager dans ses infirmités il verse des larmes de joie en voyant des petits marmots dont il est deux fois grand-père, sautiller autour de lui, l'un grimper sur ses genoux, l'autre le tenant au col, et le petit nourrisson abandonnant le téton de sa bonne mère, tendre ses petits bras, et crier pour aller aussi embrasser le grand papa. Voilà les douces jouissances que goutte l'honnête ouvrier jusqu'au tombeau, tandis que moi, être inutile, aussi ennuyant qu'ennuyé, je suis abandonné de la nature entière j'avais des filles, j'en ai voulu faire de grandes madames je les ai mariées à des marquis, à des ducs même, et elles sont maintenant aux Madelonettes j'avais aussi des fils que j'avais élevé dans l'orgueil, et ils sont je ne sais où. Si j'avais été un pauvre gagne denier, j'aurais l'espérance de les revoir quand ils auraient battu la semelle pendant trois ou quatre ans, fait une ou deux campagnes, ils seraient revenus à leur clocher mais hélas! Ils ont pris la route de Coblentz depuis le commencement de la révolution, et cette route maudite est le grand chemin de la guillotine. On me tourmente moi-même on me regarde comme un homme suspect, et on n'a pas grand tort car si j'avais eu de bonnes jambes, je serais, comme nos amis, dans la Vendée. Je vis dans des transes continuelles au milieu de l'abondance je suis privé de tout je couche sur le duvet, et je ne connais plus le sommeil. Voilà pourtant mon triste sort, jusqu'à ce que j'étouffe d'apoplexie, à moins que le rasoir national n'abrège le cours de ma triste vie. " Eh bien, foutre! Voilà le tableau de la richesse. Quel bougre assez ennemi de lui-même peut la désirer à un pareil prix? Celui qui cherche les grandes places, qui veut dominer est encore plus malheureux en s'embarquant sur une mer orageuse, obligé de conduire sa barque au milieu des tempêtes, et à travers des rochers, presque toujours il fait naufrage au port. Malheur à l'homme qui s'élève trop haut, il ne faut qu'un faux pas pour le précipiter dans l'abîme. Malheur à celui qui fixe sur lui tous les yeux, et dont le nom est répété partout. Chacun s'en défie, on le jalouse. S'il est franc du collier, tous les fripons tombent sur sa friperie. On lui tend des pièges du soir au matin s'il les évite, s'il reste pur, s'il foule aux pieds l'or qu'on lui présente à pleine mains pour trahir sa patrie, s'il ferme sa porte aux muscadines qui l'assiégent pour le corrompre, s'il reçoit les flatteurs et les intrigants comme des chiens dans un jeu de
quilles enfin si on ne peut trouver à mordre sur lui, on le calomnie. On graisse la patte à des scélérats pour aller dans les cafés, dans les groupes répandre sur son compte les bruits les plus faux, les mensonges les plus atroces. On paye des journalistes et d'autres cuistres toujours aux gages du plus offrant pour l'insulter dans leurs plates rhapsodies. Est-il ferme et inébranlable au milieu de tous ces cris des hiboux et des sifflements des serpents, il finit par avaler un bouillon à l'italienne, ou il périt par le poignard. Il faut bien convenir, foutre, les hommes sont bien sots dans cette courte vie de se donner tant de peines et de tourments pour courir après un fantôme. Tous veulent être heureux, et ils font presque tous leur malheur. Encore une fois que chacun se contente de son lot, que chacun sache rester à sa place que celui qui a plus de talents et de vertus, soit le plus modeste qu'il ne s'en serve que pour être utile à ceux qui en ont moins. Généraux, magistrats, législateurs, quand vous connaissez l'étendue de vos devoirs, vous devez frémir de la tâche qui vous est imposée car vous êtes responsables au peuple qui vous a choisi, de toutes vos actions une seule étourderie, un seul moment de faiblesse de votre part peut perdre la patrie. Plaignons, foutre, ceux qui ont eu le malheur de sortir de la foule et de paraître sur le grand théâtre. Encourageons les, défendons les quand on veut les opprimer, mais s'ils sont jaloux de leur autorité, si ceux qui gouvernent s'estiment plus que ceux qui les ont élevé, s'ils préfèrent leur intérêt personnel à l'intérêt général, regardons les comme nos plus mortels ennemis. Bien des jean-foutres vont encore se plaindre de ce que je jette des pierres dans leur jardin. Tant pis pour ceux qui se reconnaîtront dans les portraits que je viens de tracer, mais je m'en fous, je ne prendrai pas de mitaines pour leur parler et je ne cesserai de dire que nous ne serons jamais républicains, tant que l'on fera plus de cas des beaux esprits et des riches, que des pauvres Sans-culottes, qui n'ont que le gros bon sens et la vertu. Guerre éternelle à l'ambition et à la richesse, secours et protection à la modestie et à l'indigence: voilà la devise de la Sans-culotterie, foutre. La grande colère du Père Duchesne, N°319 De voir que les jean-foutres qui ne sont ni chair ni poisson, osent accuser les meilleurs patriotes. Sa grande joie de voir que ces gredins se brûlent à la chandelle, et que toutes leurs manigances contre la république vont se découvrir. Ses bons avis aux braves Sans-culottes, pour qu'ils défendent les bougres intrépides qui les ont soutenus et qui les soutiendront jusqu'à la mort. Encore de nouveaux complots, tonnerre de dieu, nous n'aurons donc jamais de relâche. On nous dit que la convention est menacée, tous les bons citoyens sont consternés à ces tristes nouvelles. Je rencontre du
soir au matin de braves Sans-culottes qui me turlupinent pour que je leur dise ce que je sais sur tous ces bruits. "Père Duchesne, me disent ils, estil possible qu'il existe encore des traîtres et des conspirateurs? Toi qui as le tact si fin et qui les flaire de si loin, tu n'y vois toi-même que du feu tu ne brises pas ta pipe tu ne renverses pas tes fourneaux, tu n'aiguises pas ton sabre pour foutre l'âme à l'envers à tous ces scélérats. Quoi donc, foutre, ni l'armée révolutionnaire, ni la guillotine ne peut les effrayer?" non, foutre, Jamais les bougres qui sont dévorés de la soif de l'or, ou tourmentés par l'ambition, ne sont épouvantés d'aucun danger, et ils marcheraient sur des brasiers pour arriver à leur but. Ils ressemblent à ces insensés qui demeurent près d'un volcan, quand la lave et le soufre a détruit leurs habitations, ils se foutent des périls qu'ils ont couru quand ils sont passés, et sur les cendres de leurs maisons, ils en bâtissent de nouvelles qui seront encore un jour dévorées par les flammes. C'est ainsi, foutre, que pensent les fripons et les ambitieux. Toutes les fois qu'un voleur a fait la grimace au pont rouge, on a vu des filous se glisser dans la foule et profiter du moment pour couper des bourses. Tandis que la convention mettait à prix la tête de l'infâme Dumouriez, le traître Custine jouait la sienne à pair et non pour imiter son exemple et lui succéder dans ses affreux complots. A peine le général Moustache avait il la tête dans le sac que son palefrenier Houchard bravait le rasoir national et cherchait à donner le coup de grâce à la république, en livrant l'armée qu'il commandait à nos ennemis. Comment donc nous sauver, Père Duchesne, me dira t on, au milieu de ce déluge de trahisons? La république ainsi déchirée de toutes parts, pourra t elle résister longtemps? Si elle résistera, foutre! Quel est le lâche qui pourrait en douter? Les fripons et les traîtres passeront, mais la liberté ne périra jamais. Au milieu des orages et des tempêtes, nous trouverons toujours un port aux pieds de la sainte montagne. C'est de sa cime que partira la foudre qui écrasera et anéantira tous les conspirateurs. Jamais, foutre, la république n'a été aussi puissante qu'elle l'est aujourd’hui. Que l'on se rappelle donc tout ce que nous avons fait depuis un an. Que l'on songe à ce qu'était la convention il y a quelques mois à ce qu'elle est aujourd’hui elle renfermait dans son sein, tous les immondices de la république. Une bande de scélérats, aux gages des brigands couronnés, y faisaient une guerre atroce aux meilleurs patriotes. Nos braves Montagnards étaient outragés, vilipendés à la journée dans les cafés, dans les places publiques et même dans leurs fonctions. Proposaient ils quelques mesures révolutionnaires, demandaient ils la mort des traîtres, on les appelait septembristes-massacreurs portez un verre de sang à monsieur, s'écriait l'infâme Buzot à chaque fois qu'un député républicain disait oui au jugement du traître Capet. C'est alors, foutre, que la convention et la république étaient véritablement en danger. On pouvait trembler pour le salut public quand Marseille, Lyon, Bordeaux, le Calvados, le Finistère s'armaient contre Paris, et marchaient au grand
galop vers la contre-révolution en voulant étouffer la liberté dans son berceau. Après avoir triomphé de tous ces dangers, se peut-il, foutre, qu'elle ait encore des ennemis à redouter? Je ne prétends pas, foutre, que les Sans-culottes doivent s'endormir et rester les bras croisés. Après avoir détruit les lions et les tigres qui voulaient les dévorer, ils ne doivent pas oublier les insectes dont les piqûres sont souvent mortelles. Oui, foutre, il n'est un véritable ami du peuple qui n'ait à ses trousses une nuée de scélérats qui ne le quittent pas plus que l'ombre et qui employent le vert et le sec ou pour le corrompre ou pour le perdre n'importe comment. Moi, foutre, qui ne suis que la dernière sentinelle de l'arrière-garde des Sans-culottes, il n'y a pas de jours que je ne sois exposé à être assassiné par la calomnie ou par le poignard des aristocrates. Aujourd’hui je suis assiégé d'intrigants qui viennent me mettre le feu sur le ventre et qui cherchent à me faire perdre la carte en me racontant un tas de contes bleus pour me mettre à chien et à chat avec ceux qui doivent être mes meilleurs amis demain de jolies muscadines viendront me faire les yeux doux. Si je pouvais être dupe de leurs cajoleries, je serais tenté de faire jabot et de me regarder comme un beau fils. Quel est le but de cette foutue canaille? Ce ne sont pas mes moustaches noires et ma gueule en fumée qui leur donnent dans l'oeil mais foutre, si j'étais assez sot pour me jeter dans leurs filets, elles me feraient voir bougrement du chemin, et comme dit le proverbe: dis moi qui tu hantes, je te dirai qui tu es. Braves Sans-culottes, ce n'est point assez de rester pur, il ne faut pas seulement que vous soyez soupçonnés. Songez, foutre, que vous êtes environnés de pièges et d'embûches, mais en marchant droit foutez vous de vos ennemis attendez vous à être persécutés, c'est le sort de tous les braves gens. Quand on souffre pour sa patrie, on est trop heureux. Le sort de Marat, toujours menacé du poison et des poignards, n'est-il pas préférable à celui de ces jean-foutres qui ne sont ni chair ni poissons, qui ne vivent que pour eux? Quant à moi, foutre, si j'avais cent têtes, j'aimerais mieux les perdre l'une après l'autre que de vivre inutile. Je connais tous les coups de chien qu'on prépare, je sais tout ce qu'on manigance contre moi. Jamais les royalistes ne me pardonneront d'avoir traîné l'ogre royal dans la boue toujours les gredins qui ont fait leur orgies et qui se sont graissés des dépouilles du peuple, auront une dent contre moi, parce que j'ai rengainé tous les compliments de la reine Roland et que j'ai refusé les assignats de son vieux cornard. Les amis de Brissot et de la clique de la Gironde, me regardent comme un loup-garou parce que j'ai, un des premiers, éventé la mèche et dévoilé toutes leurs conspirations. Environné d'autant d'ennemis. Je dois m'attendre à être persécuté, mais je m'en fous. Je ne broncherai pas d'une ligne. Ce que j'ai été au commencement de la révolution, je le suis encore. Si mes ennemis se croient assez forts pour m'accabler, j'appellerai les Sans-culottes à mon secours. C'est eux qui seront mes juges. Je leur demanderai
d'examiner toute ma vie. S'ils ne me trouvent pas les mains nettes, j'ai cessé d'être leur défenseur, eux-mêmes me condamneront. Que l'on crie, que l'on jappe contre moi. Je suis bon cheval de trompette, je ne m'effraye pas du bruit, foutre. La grande colère du Père Duchesne, N°320 De voir que des jean-foutres qui n'ont ni bouche ni éperon, saignent du nez pendant le combat, et nous proposent de quitter le champ de bataille pendant la mêlée et au moment de la victoire. Ses bons avis aux braves Montagnards, pour qu'ils n'abandonnent pas la barque jusqu'à ce qu'elle soit arrivée à bon port, et jusqu'à ce qu'ils aient délivré la république de tous les fripons et de tous les traîtres qui mettent des bâtons dans les roues. On ne saurait plaire à tout le monde, foutre, car chacun a sa manière de voir et de sentir, et les trois quarts et demi des hommes ne savent ce qu'ils veulent. Quand il fait chaud, on aime le froid quand il gèle, on désire l'été dans la saison de fleurs, on voudrait être à celle des vendanges, et quand la terre se dépouille de ses richesses pour nous nourrir, les jeunes fillettes soupirent tout bas elles regrettent la violette, et soupirent de ne plus voir bientôt la feuille à l'envers. Les gens sages, foutre, prennent le temps comme il vient, et s'accoutument à tout mais malheureusement ils sont en petit nombre toute la famille d'Adam est une bougre de race de fous qui n'entend ni a dia ni a hue. Tout ce qui la compose ne rêve qu'extravagances. Les sots croient avoir tout l'esprit en partage les beaux esprits souvent n'ont pas le sens commun chacun fait des châteaux en Espagne tout le monde plaide pour son saint, l'un est prodigue, l'autre est avare, celui-ci est joueur, celui-là libertin comment s'entendre dans cette bougre de cohue? Comment mettre d'accord tous ces échappés des petites maisons? Comment faire le bonheur de tous? Ah! Foutre, c'est la bouteille à l'encre! Le plus embarrassé, c'est celui qui tient la queue de la poêle. Je ne conçois pas, foutre, comment il se trouve tant d'insensés qui se précipitent les uns sur les autres pour conduire et gouverner les bandes d'animaux indociles au milieu des lanternes, des guillotines et des poignards mais l'envie de dominer est aussi naturelle à l'homme que la faim et la soif. Le dernier caporal est plus despote dans sa compagnie que le général à la tête de son armée. Celui, foutre, qui ne peut sortir de la foule pour gouverner l'état, s'en venge par tout ce qui l'entoure. Le charbonnier est le roi dans sa cahute comme on disait dans l'ancien régime il tranche, il rogne comme il lui plait il commande en maître aux charbonniers subalternes, et il faut que tout cela cède à sa volonté. Celui qui n'a qu'un chien au dessous de lui est encore un petit despote il faut que le pauvre animal soit soumis à tous ses caprices.
Quoique la nature l'ait fait pour marcher à quatre pattes, il faut qu'il se juche sur ses deux ergots de derrière, qu'il danse, qu'il fasse l'exercice ou le mort, qu'il rapporte, qu'il aille à l'eau, quand il plait à son maître. C'est ainsi que presque tous les hommes tyrannisent tout ce qui les environne. Ils ont l'esclavage en horreur, et ils veulent que tout soit esclave auprès d'eux. Ils aiment tous la liberté ils l'adorent, et, autant qu'ils peuvent, ils veulent en priver leurs semblables. Cependant ils naissent tous avec l'amour de la justice ils plaignent ceux qu'on opprime, ils pleurent avec ceux qui souffrent ils ne peuvent pardonner le mal, excepté celui qu'ils font. Quel est donc, foutre, le moyen de corriger leurs vices et de les rendre tous heureux? Ah! C'est un grand secret que celui-là. Avec de bonnes lois, avec notre sainte constitution nous arriverons un jour à ce but mais, foutre, il nous faudra passer encore par bien des étamines. Patience, avec le temps on vient à bout de tout. Nous ne faisons encore que labourer la terre de la liberté. Nous n'avons pour nous que les épines, et nos enfants recueilleront les roses. Ne perdons pas courage, foutre, arrachons de cette terre sacrée les ronces et les épines. Détruisons les plantes venimeuses qui croissent encore sur son sein. Renversons ces vieux arbres qui ne rapportent aucun fruit, qui étouffent avec leur tête énorme les jeunes arbrisseaux, et qui les empêchent de croître et de profiter. Oui, foutre, ça ira, malgré les fripons, les traîtres et les ambitieux qui jettent des bâtons dans les roues. Il faut, si nous voulons être libres, n'avoir d'autre maître que la loi. Ce n'est que devant elle que nous devons fléchir. Tous les républicains doivent lui sacrifier tout, fortune, amis, parents, tout ce qu'ils ont de plus cher. Il ne faut pas calculer ce qu'elle nous coûte, ce qu'elle nous enlève, mais ce qu'elle vaut. Elle est bonne, si elle plait à la majorité de la république. Tout doit obéir à la volonté suprême du peuple. Ainsi donc, foutre, puisque ce peuple a dit qu'il voulait la liberté et l'égalité tous ceux qui n'en veulent pas sont des ennemis, ils doivent périr. Celui qui ose regretter un roi, celui qui voudrait s'élever d'une ligne au dessus des autres sont des monstres à étouffer. "Tu ne parles que d'étouffer, de tuer, de raccourcir, de massacrer, me disent les feuillants tu as donc grande soif du sang, misérable marchand de fourneaux, n'en a t on pas assez versé?" beaucoup trop, foutre, mais à qui la faute? C'est la votre, bougres d'endormeurs, qui avez arrêté le bras vengeur du peuple, quand il était temps de frapper. Si on avait lanterné quelques centaines de scélérats dans les premiers jours de la révolution, il n'aurait pas péri depuis, plus d'un million de Français. Le jour où le peuple fût assez fort pour faire trembler son tyran il fallait qu'il en profitât pour l'envoyer ad patres, avec toute sa bougre de race. Cet exemple aurait fait rentrer cent pieds sous terre, tous les coquins et tous les traîtres qui nous ont tant fait de mal depuis. Mais nous avons agi comme des poules mouillées, nous avons donné le temps à nos ennemis
de se réunir, de se fortifier, de s'armer jusqu'aux dents et à nos dépens, de nous diviser. Ce n'était qu'un peloton de neige au commencement, mais ce peloton est devenu une masse énorme qui a manqué de nous écraser. Que le passé nous serve donc de leçon, profitons des sottises que nous avons faites pour n'en plus faire par la suite. Plus de grâce à des coquins que nous avons trop longtemps ménagé, qui ne nous en feraient pas, s'ils avaient un seul instant le grapin sur nous. Le combat à mort, entre les hommes du peuple et les ennemis du peuple, est engagé, il ne peut finir que lorsque l'un des deux côtés aura anéanti l'autre. Ce n'est pas au milieu de la mêlée qu'il faut parler de suspension d'armes. Ce n'est pas au parti le plus fort, à celui de la raison, de la justice, de la vérité, de la liberté, de l'égalité à céder le champ de bataille à celui du mensonge, du brigandage, de la tyrannie. Si nous pouvions reculer d'un seul pas nous serions foutus et contrefoutus, car nos ennemis en profiteraient pour nous égorger tous. Quels sont donc les jean-foutres qui oseraient nous proposer de mettre les pouces au moment de la victoire? "mais, Père Duchesne, disent encore les feuillants, est ce qu'on ne craint pas d'augmenter les ennemis de la révolution avec toutes ces arrestations, toutes ces persécutions contre les honnêtes gens, contre les riches, contre les marchands, contre des patriotes même. " d'abord, foutre, je réponds que le nombre des patriotes opprimés n'est pas considérable. Au surplus si un bon citoyen, au fort du combat attrape une égratignure, a t il droit de se plaindre? N’est-il pas sûr que tôt ou tard on lui rendra justice? Quels sont donc les patriotes persécutés depuis le comité des douze? Et quand même il y en aurait, je le répète, ils doivent encore se trouver heureux de souffrir pour une si belle cause. Qu'ils se rappellent l'action d'un des braves Romains qui firent perdre le goût du pain à un fameux brigand nommé Jules César, dans le moment où ces braves républicains environnaient le tyran pour le massacrer, chacun voulait avoir l'honneur du premier coup et cherchait la place pour lui donner le coup mortel. "Frappez le à travers de mon corps, s'écria l'un de ces bougres à poil, je serai trop heureux de mêler mon sang à celui du tyran". C'est ainsi que pensent les républicains. Point de pitié pour les ennemis de la patrie. La convention, en mettant la terreur à l'ordre du jour, a sauvé la république, si elle parlait d'indulgence, elle se perdrait avec nous. Quand nous tenons le tigre en cage, gardons nous de le laisser échapper. Comité de sûreté générale, comité de salut public, allez toujours en avant, et vous Montagnards, ne quittez pas la barque jusqu'à ce qu'elle soit arrivée au port. Brave Dumont, toi qui as étouffé les germes d'une nouvelle Vendée dans les départements que tu as parcourus, ne jette pas le manche après la cognée, et poursuis comme tu as fait jusqu'aujourd’hui. Et vous, lurons de la gance, couple intrépide, Collot et Fouché qui avez été envoyés pour détruire les cavernes de voleurs des galonniers de Lyon, abattez, rasez, brûlez les palais de toute la canaille
marchande de cette ville rebelle, qui a osé trafiquer la contre-révolution. Cette leçon épouvantera les fédéralistes de Rouen, de Brest et d'autres villes de la ci-devant Normandie et de la ci-devant Bretagne qui voudraient ouvrir leurs portes au fils du roi Georges-Dandin et qui mitonnent depuis longtemps la contre-révolution avec l'infâme Pitt. Encore quelques jours, foutre, et la république est sauvée, mais il ne faut pas s'endormir, il ne faut pas s'arrêter un seul instant. Surtout, braves Sans-culottes, soyez unis comme des frères. Plus on fait d'efforts pour vous diviser, plus vous devez rester serrés. Réunissons tous nos efforts pour détruire le reste des brigands de la Vendée, que les bombes et les boulets pleuvent sur l'infâme Toulon, si dans quelques jours nous pouvons en débusquer les Anglais, la tête du roi Georges-Dandin et de son porte-esprit ne pèseront pas une once. Encore une fois, nous n'avons plus d'ennemis à craindre que ceux de l'intérieur. Anéantissons les, et nous sommes sauvés, foutre. La grande joie du Père Duchesne, N°321 En apprenant toutes les belles actions de nos braves bougres qui combattent pour la république et qui la sauveront malgré les fripons et les traîtres et tous les brigands couronnés, qui prendront plutôt la lune avec les dents que de nous faire la loi. S'il existait encore des individus assez jean-foutres pour douter si nous sommes républicains et pour croire à la résurrection de la royauté, je leur dirais de me suivre et de venir avec moi passer en revue toutes nos armées. C'est là, foutre, qu'ils verraient des hommes libres et qu'ils connaîtront ce que peut l'amour de la patrie. Oui, la fleur de la république est là. Tous ces guerriers grecs et romains dont on nous fait des histoires à perte de vue et des contes à dormir debout, n'étaient que de la SaintJean en comparaison des soldats français il faut voir avec quel courage, ils endurent le froid, le chaud, la fatigue et la faim. Les jours de bataille sont pour eux des jours de fêtes, et ils marchent au combat comme s'ils allaient au bal, en chantant, en dansant. Plus ils ont d'ennemis devant eux, plus ils sont intrépides. Il n'y a pas de musique plus agréable pour eux que le son du canon. Quand le butor a renversé une file de républicains, ils sont aussitôt remplacés par d'autres, et le dernier cri des mourants est toujours un cri de joie, les derniers mots qu'ils prononcent sont, vive la liberté, vive la république. Je n'en finirais pas, foutre, si je voulais raconter tous les beaux traits qui honorent nos braves défenseurs il est juste pourtant de les faire connaître, pour servir d'exemple aux jeunes citoyens. La seule récompense d'une bonne action aux yeux d'un véritable républicain, c'est l'estime de ses concitoyens. Sous le règne affreux du despotisme, nos anciens tyrans ne se contentaient pas seulement de dévorer la substance des Sans-culottes, et de s'engraisser de leurs sueurs et de leur sang ils leur enlevaient jusqu'à la gloire de leurs exploits. Quand dix à douze mille
hommes étaient morts pour la patrie, on n'en parlait pas plus que les Gascons de leurs vieilles dettes tout l'honneur était pour le général qui était resté au quartier de réserve pendant les combats des bougres qui n'avaient pas seulement senti la fumée de la poudre, passaient pour les plus intrépides guerriers. Les cuistres de journalistes qui avaient la patte bien graissée pour mentir à tant la ligne dans les gazettes royales, faisaient des éloges pompeux de toutes les poupées de cour qui étaient à la tête des armées. Le poitreau qui voulait gagner un habit noir, se mettait la cervelle à l'envers pour rimailler en l'honneur de tous les talons rouges il faisait de grands détails des combats qu'il n'avait vus que du haut de son grenier ici le prince un tel avait été couvert de sang et de poussière, là monseigneur un tel avait vu tant d'hommes blessés ou morts à ses côtés, tandis que tous ces foutus freluquets tournaient le cul à l'ennemi, et se dorlotaient sur le duvet avec les coquines qu'ils traînaient à leur suite. Jamais il n'était question des pauvres pileurs de poivre, et si quelqu'un d'eux avait fait une belle action ou contribué au gain de la bataille, la gloire en était au colonel ou au général qui, la plupart du temps, étaient de méprisables capons et les plus jean-foutres de l'armée. Maintenant que le tour des Sans-culottes est arrivé, ceux qui commandent et ceux qui obéissent sont des égaux. Le sang des uns n'est pas plus précieux que celui des autres, et celui qui sert bien la patrie dans le premier rang comme dans le dernier est également estimable. La patrie doit autant au simple fusillier qui, pendant le combat, a toujours soutenu la charge qu'au général qui, en conduisant des hommes libres à la victoire, n'a fait que son devoir, foutre. On disait, jadis, qu'il fallait rendre à César ce qui appartenait à César, on avait tort car tous les Césars, c'est à dire les rois, n'ont jamais été que des brigands, et rien ne leur devait appartenir que cent millions de potences pour les allonger, et des guillotines aujourd’hui pour les raccourcir disons donc aujourd’hui, avec plus de justice, qu'il faut rendre aux Sans-culottes ce qui appartient aux Sans-culottes, et ce ne sera pas peu, car tout ce que possédaient les ci-devant était le fruit des sueurs et des larmes des malheureux. Tonnerre de dieu, que j'ai de satisfaction quand il se présente une occasion de rendre justice à qui elle appartient et de faire connaître les braves bougres qui combattent pour nous. Un de mes compères vient de m'écrire de l'armée du Nord une lettre qui m'a fait pleurer comme un enfant. Le coeur saigne mon vieux, m’écrit-il, quand on voit nos braves guerriers étendus sur les champs de bataille après le combat mais on est transporté d'admiration quand on les entend chanter la carmagnole malgré leurs blessures. Après la journée du 15 au 16 Frimaire, un bougre à poil, nommé Denis Siboul, natif d'Issy-l-union, district du Bourg-l-égalité, département de Paris, sergent de canonniers au grand parc d'artillerie, compagnie de Mignonnet, a reçu un boulet qui lui a emporté les deux pieds, aussitôt il a crié: vive la république et a prié ses camarades, qui
venaient le secourir, de rester à leur poste. Quand le chirurgien l'a ensuite opéré, il a montré la plus grande fermeté, et n'a pas cessé de chanter et de crier, vive la liberté, vive la république, mais ensuite il n'a pas tardé à pleurer. Je lui ai demandé pourquoi son chagrin: ah! Mon ami, je suis époux et père de quatre enfants, m'a t il dit en sanglotant. Je l'ai consolé de mon mieux: il va bien maintenant, et je le regarde comme guéri". Ah! Foutre, voilà bien le modèle des républicains, sa première pensée est à sa patrie mais qu'il soit ensuite homme et père, c'est une vertu de plus. Console toi, brave homme, la convention est là pour te récompenser c'est notre mère commune, tes enfants sont les siens, elle en prendra soin, il te reste encore une âme et un coeur pour jouir du triomphe de la république, c'est au milieu de cette famille que tu chéris, que tu raconteras les exploits de nos frères d'armes et les tiens. Si tu ne peux marcher, nous disputerons à tes enfants le plaisir de te porter dans nos places publiques, dans nos assemblées, et nos jeunes citoyens envieront tes honorables blessures. Mon compère, dans sa lettre, me raconte une infidélité de traits héroïques qu'il ne faut pas passer sous silence. "un autre luron, natif de Vertus près Saint-Denis, volontaire au quatrième bataillon de l'Aisne, ayant eu aussi la jambe emportée par un boulet, s'est écrié tant mieux, foutre, il vaut mieux que ce soit moi qu'un autre, une jambe de plus, une jambe de moins pour un tailleur, c'est égal. " Jean Gorget, de SaintMartin-l-Andelle, district d'Avranche, volontaire au troisième bataillon de Seine-et-Oise, tandis qu'on lui coupait la cuisse, a demandé, pour toute consolation, un bon verre de vin pour boire à la santé de la république. LaCoste, natif de Villeneuve-d-Agen, département de la Haute-Garonne, ne cessait de crier vive la république, tandis qu'on lui coupait un bras. LAnglois, natif de Caen, ce qui prouve qu'il y a de braves gens partout, sergent au quatrième régiment, n'a pas sourcillé tandis qu'on lui coupait la cuisse. Leroux, section de la Croix-Rouge, et Antoine Masson, natifs de Paris, volontaires au huitième bataillon de Seine-et-Oise, n'ont pas démenti la gloire des Parisiens, et ils n'ont cessé de crier vive la république pendant des opérations semblables. Augustin Houssier, district de Montreuil, département du Pas-de-Calais, volontaire au huitième bataillon, a eu, le 16 sur les trois heures du soir, la cuisse emportée. Ce brave républicain, au milieu de l'opération, croit que notre armée est battue, et demande si l'ennemi va prendre Avesnes. Non, au contraire, lui réplique t on, Maubeuge est débloqué, ah! Foutre, s'écrie t il, coupez toujours, vive la république. Voilà des républicains, foutre. Avec de tels hommes, que l'on ose douter du salut de la France, et du triomphe de la liberté! Brigands couronnés, vous prendrez plutôt la lune avec les dents, que de faire la loi à un peuple aussi grand et aussi courageux, foutre.
Grande découverte du Père Duchesne, N°322 De tous les complots de l'infâme Pitt, premier porte-esprit du roi Georges-Dandin pour faire la contre-révolution en redoublant la foule à la porte des boulangers, en enlevant le beurre, les oeufs, et toutes les subsistances dans les campagnes, et surtout en mettant les meilleurs patriotes à chien et à chat, pour les détruire en détail. L'autre jour, après avoir roulé les quatre coins de Paris, pour connaître l'air du bureau, je rentrai chez moi le soir, l'esprit tout foutimassé et le coeur gros de toutes les sottises que j'avais entendu, et de tout ce qui s'était passé sous mes yeux. J'ouvre ma porte brusquement, je bouscule ma Jacqueline et sans la remercier, je prends mes pantoufles, qu'elle me présente, et pouf me voilà étendu tout de mon long dans mon grand fauteuil. Ma femme et mes marmots, sentant qu'il n'y faisait pas bon, sortirent en chuchotant tout bas, et me laissant jurer à mon aise. Mon gros caniche, mon fidèle compagnon, mon dragon, qui aboye si fort, quand on parle d'aristocrates et qui saute jusqu'aux nues pour les Jacobins, reste seul avec moi, et s'étale à mes pieds. Pauvre animal, lui dis je, toi et tes semblables, vous êtes mille fois plus heureux que les hommes, vous vivez au jour le jour, vous ne vous tourmentez pas la veille sur ce qui doit arriver le lendemain. Si par ci par là, il survient des querelles entre vous autres, le combat s'engage bravement et le battu en est quitte pour quelques coups de dent, presque jamais il ne s'en suit mort de chien vous avez même la générosité de laisser aboyer autour de vous les roquets, et vous ne daignez pas vous venger des insultes qu'ils vous font. Jamais, foutre, on ne vit tous les chiens d'un canton se réunir et former des armées pour aller livrer bataille à leurs voisins. Il est vrai pourtant, qu'à force de vivre avec l'homme vous avez pris ses vices. C'est de lui que vous avez appris à ramper, à caresser la main qui vous frappe, à faire la guerre aux lièvres, aux lapins et aux autres animaux timides qui habitent les forêts, à déchirer dans un cirque le taureau qui vous est livré mais encore une fois on ne doit pas s'en prendre à vous, mais à l'animal à deux pieds dont vous êtes devenus les esclaves. C'est ainsi, foutre, que je ruminais, en fumant ma pipe. On me demandera peut-être pourquoi cette humeur noire et ces lugubres réflexions je répondrai, foutre, qu'il y a de quoi se débaptiser, en voyant toujours complots sur complots et trahisons sur trahisons, les patriotes à chien et à chat, quand ils devraient être unis comme des frères et n'avoir tous qu'une seule volonté pour écraser tous leurs ennemis. Oui, foutre, il faut que nous renoncions à la liberté, il faut que nous devenions les plus vils, les plus malheureux des esclaves, ou plutôt il faut que nous nous attendions à périr avec ignominie les uns après les autres, si tous les patriotes et même tous les hommes qui ont le sens commun ne s'entendent pas. Les brigands couronnés qui nous font la guerre n'ont plus d'espérance que dans nos divisions, et nous sommes assez sots
pour nous jeter tête baissée dans tous les pièges qu'ils nous tendent, et tout le monde veut être maître, chacun veut tirer son épingle du jeu. On ne songe qu'à son intérêt, et celui de la patrie est foutu de côté. Les trois quarts et demie des gens en place et de tous les bougres que la république fait vivre, la regardent comme une vache à lait, c'est à qui l'épuisera davantage. Presque tous les riches sont aristocrates, tous les gros marchands sont des voleurs. Heureusement, foutre, que les dix-neuf vingtièmes de la nation ne sont ni riches, ni marchands, ni coureurs de place. Cette masse est toujours pure, elle restera toujours pure elle veut être libre, et elle le sera malgré cette poignée d'intrigants et de fripons qui conspire contre elle. Ayant la tête farcie de toutes ces idées noires, je prends mon bonnet de nuit, et je me couche pour les dissiper. Quand on n'a pas soupé, foutre quand on n'a pas seulement étouffé un enfant de choeur avant de se mettre au lit, on ne peut pas manquer de rêver. Aussi, foutre, pendant cette nuit mon sommeil fût troublé par des songes. Parmi tous mes rêves, il en est un pourtant qui n'est pas indifférent, et qui se rapproche tant de la vérité, que je dois le raconter. En fera le profit qui voudra. Après un cauchemar qui manqua de m'étouffer, je rêve tout à coup que je suis transporté au beau milieu de la ville de Londres je rode de tous côtés pour entendre ce que l'on dit de la guerre. Dans tous les cafés, dans les tavernes, dans les places publiques je rencontre des politiqueurs à perte de vue. Les Français sont à quia, disent les uns, dans quelques jours Le-Havre, Brest et tous les ports de France seront à nous comme Toulon. Avec quoi les achèterez vous, bougres d'enfonceurs de portes ouvertes, m'écriais je, venez y avec vos guinées, et les Sansculottes vous recevront en enfants de bonne maison d'autres font la gageure qu'avant qu'il soit l'âge d'un petit chien, la contre-révolution sera faite à Paris, et que le fils cadet du bon roi Georges-Dandin y sera couronné et proclamé roi de France et de Navarre malgré tous ces beaux discours, je vois cependant presque toutes les mines allongées ici c'est un manufacturier qui s'arrache les cheveux de désespoir d'avoir tout perdu par la guerre, là c'est un marchand qui a fermé sa boutique, et qui est réduit à la besace. Je n'entends parler à droite et à gauche que de banqueroutes les ouvriers murmurent de n'avoir plus de travail, et pour consoler tous les badauds de l'Angleterre de la misère qu'ils éprouvent, on leur annonce de nouveaux impôts pour soutenir l'honorable guerre, pendant laquelle ils ont été étrillés de toutes parts et d'importance, et qui ne leur a valu que la prise d'une seule ville, dans laquelle, encore, ils ne sont entrés qu'avec la clef d'or. Tout le monde désire la paix, et attend avec impatience le nouveau parlement pour mettre fin aux maux du peuple. Dans un rêve on fait bougrement du chemin, et en peu de temps, me voilà tout à coup transporté en corps et en âme, dans le cabinet secret du bateleur Pitt. Je le vois sans en être vu, et j'examine ce tigre qui rugit de voir sa proie lui échapper. "me voilà au bout de mes prouesses, dit-il, la
France ne sera pas conquise. Les brigands de la Vendée ne font plus que se battre contre la mort: Toulon va être réduit en cendres par les républicains français mes complots du Midi sont éventés. Je n'ai plus d'espérances que dans les bons amis que j'ai en France, il est vrai qu'ils jouent leur rôle à merveille et ils savent bien singer le patriotisme. Ils animent, comme je le désire, les véritables patriotes les uns contre les autres. Tandis que les républicains se chamailleront et se mangeront le blanc des yeux, j'aurai toujours beau jeu, et je profiterai de leurs querelles pour les perdre les uns après les autres, et les détruire en détail par leurs propres armes. C'est par les vivres surtout que je saurai les prendre. Je ferai naître la misère au milieu de l'abondance. La foule redoublera à la porte des boulangers. Je ferai enlever le beurre, les oeufs et toutes les denrées dans les campagnes. Je nourrirai les poissons de la Seine et de la Loire avec les subsistances des Sans-culottes de Paris, et quand ils tireront la langue d'une aune, il faudra bien qu'ils reçoivent les lois que je leur dicterai. " Quand on compte sans son hôte, infâme brigand, on compte deux fois, m’écriai-je, tes finesses sont cousues de fil blanc. Nous ne donnerons plus dans tes panneaux nous sommes debout pour exterminer les jean-foutres que tu soudoies. Ils ne nous foutront plus dedans nous resterons unis malgré tes manigances. Tremble, scélérat, ta dernière heure va sonner. Je me réveille désespéré de n'avoir approché qu'en songe de cet infâme garnement auquel j'aurais voulu foutre l'âme à l'envers. La grande joie du Père Duchesne, N°323 Au sujet de la grande victoire remportée par les soldats de la Liberté, dans la ville du Mans, sur les brigands de la Vendée, qui ont été taillés en pièces, et qui ont perdu leurs trésors, leur artillerie, leurs saints et leurs reliques. Sa grande ribotte avec tous ses compères et commères, en réjouissance de cette bonne nouvelle, qui donne le coup de grâce aux aristocrates, aux calotins et à tous les conspirateurs. On me reproche d'être trop souvent en colère. On s'imagine que je ne ris jamais que d'une joue les aristocrates me regardent comme un loup-garou. On ne parle que de mes moustaches, de ma voix de tonnerre, en un mot, je suis un bougre à faire trembler la volaille. Ceux qui me connaissent, savent bien cependant que je ne suis pas si diable que je suis noir. Au surplus, que l'on pense de moi tout ce qu'on voudra, je m'en fous, cela ne m'ôtera pas un seul cheveu de mon crâne pelé. Je marcherai toujours droit mon chemin, sans faire attention aux cris des corbeaux et aux sifflements des serpents que je rencontrerai sur mon passage. Je consens à passer pour un ours mal léché au vis-à-vis des conspirateurs et des traîtres, pourvu que les Sans-culottes continuent de me regarder comme un bon vivant et comme leur véritable ami. Avec eux,
je jurerai toujours tant que je verrai les sots dupes des intrigants, tant que les fripons pêcheront en eau trouble, tant que les loups se couvriront de la peau de l'agneau, pour mieux tromper le troupeau et pour nous manger la laine sur le dos mais, foutre, si je m'emporte comme une soupe au lait, quand j'apprends de mauvaises nouvelles, je me réjouis de même des bonnes. Quand je vois tourner la girouette au mauvais vent, je suis triste comme un bonnet de nuit, et quand le temps est beau, je suis gai comme un pinson. Les jean-foutreries des aristocrates me font renverser mes fourneaux, les bonnes actions des Sans-culottes, les victoires des républicains font sauter mes pintes. Ah foutre! Quelle joie dans ma boutique quand on est venu m'annoncer que les brigands de la Vendée avaient dansé une si fameuse carmagnole dans la ville du Mans! tous mes compères et commères du voisinage sont accourus en m'entendant crier: victoire, vive la république. Grande nouvelle, mes amis, leur ai-je dit femmes, taisez vous et écoutez. Alors j'ai pris mes besicles, et j'ai lu une lettre d'un brave canonnier de mes amis, contenant tous les détails de la bataille. Du Mans, ce 23 Frimaire, l'an 2 de la rép- une et indivisible. "Réjouis toi, brave marchand de fourneaux, l'armée du pape qui, pour la gloire du bon dieu, ravageait depuis si longtemps plusieurs départements, qui égorgeait les vieillards, les femmes et les enfants, dont la trace était plus funeste que la peste, qui a changé la Vendée dans un vaste cimetière, ces bandes de scélérats que l'Angleterre avait vomi sur la terre de la liberté pour renverser son temple, sont à la fin écrasés le fanatisme a reçu son coup de grâce. Ces scélérats, depuis qu'ils avaient été si bien étrillés à Granville, sachant combien pèse le bras des républicains, n'osaient plus revenir à la charge, et fuyaient comme des lièvres devant les soldats de la liberté. Enfin nous leur avons si bien serré la botte, qu'ils ont été forcés de faire volte-face comme ils étaient les plus forts en nombre, ils nous ont repoussé d'abord, et déjà ils criaient victoire les braves volontaires de Cherbourg arrivent et nous soutiennent, et nous les foutons en déroute mes jean-foutres se replient sur leurs retranchements, et semblaient défier à tous les diables de les débusquer. C'est alors que notre courage redouble ni retranchements, ni ponts, ni canons, rien ne peut arrêter des guerriers patriotes ils taillent en pièces les brigands c'est alors, foutre, qu'il fait chaud jamais on n'a vu un combat aussi terrible il dura jusqu'à neuf heures du soir la nuit le fait cesser quelques instants, mais les républicains craignant de perdre l'occasion de purger la république de ces monstres, recommencent, comme de plus belle, à leur foutre le bal ils se pressent, ils gagnent le terrain pied à pied, et les pourchassent à travers des rues jusqu'au beau milieu de la grande place du Mans. C'est là que se donne le grand coup de peigne. La mêlée a duré jusqu'à deux heures du matin. L'armée chrétienne, voyant alors que ses reliques étaient sans vertu, et que le grand dieu, le dieu tout puissant, celui auquel on ne saurait résister, c'est celui qui veut que les hommes soient libres,
commencent à jouer des jambes et à vanner à la faveur de la nuit, et ils s'éclipsent petit à petit de la ville. A la pointe du jour, nos chasseurs les ont poursuivi l'épée dans les reins, et les ont mis en pièce par milliers. Toutes les routes sont couvertes de leurs cadavres depuis quinze heures nous en avons fait une boucherie et le combat dure encore. Nous leur avons tout pris, leurs canons, leur trésor, leurs bagages, leurs malles, tous leurs effets, les carrosses qui étaient à leur suite pour conduire les princesses, duchesses, marquises, comtesses et toutes les muscadines que les chefs mènent à leur suite. Des croix d'or et d'argent, des mitres et d'autres prétintailles de la calotte sont aussi entre nos mains. Nous leur avons aussi enlevé leur plus chère pacotille, les reliques que des prêtres scélérats portaient avec eux pour embêter les habitants des campagnes. Les principales étaient un crâne pourri de St-Charles Borrhomé, car les vers mangent aussi bien les reliques des saints que les os des hérétiques, une dent de la mâchoire de St-Vincent, une côte de St-Julien, un morceau de la robe de l'enfant Jésus, un morceau du crâne de St-Sébastien, et une petite fiole du lait de la vierge Marie, qui, par parenthèse, devait en avoir plus à elle seule que toutes les vaches de Suisse, si tous les fourbes, qui se vantent d'en posséder sont crus sur parole. Voilà, mon vieux, une grande nouvelle qui va faire gueuler, dans tous les coins de Paris, la grande joie du Père Duchesne. Continue de défendre les généraux Sansculottes, qui, comme tu vois, jouent beau jeu bel argent, et qui répondent aux injures que l'on débite sur leur compte en remportant des victoires. Si nous n'avions eu que des Biron, des Dubayet, des Thunck et d'autres muscadins de cette espèce à notre tête, jamais, foutre, nous n'aurions vu la fin de cette guerre, que ces godelureaux regardaient comme leur potau-feu. Embrasse pour nous le brave Pache, et dis lui que son fils s'est battu comme un petit déterminé. Quand il aura de la barbe, ça fera un fier luron. A quinze ans, il dégote les plus vieux canonniers. Tandis que le petit bougre servait nos pièces avec une ardeur sans pareille, un boulet lui a passé entre les jambes. Il n'en a pas bronché d'une ligne. Notre bon maire pleurera de joie en apprenant les dangers que son enfant a bravé avec nous et ça le consolera des chagrins que les coquins lui font endurer, foutre". Salut et fraternité. Sans-quartier, canonnier de Paris. Ah! Père Duchesne, la bonne aubaine, s'écrièrent nos commères en réjouissance de ces heureuses nouvelles, il faut nous en foutre une pile volontiers, mes amis. Allons, Jacqueline, une table, des verres, vas vite à la cave, et prends derrière les fagots ces vieilles bouteilles de Bourgogne aussitôt dit, aussitôt fait nous voilà tous tablés, nous mangeons, nous buvons jusqu'au jour, ma maison retentit des cris de vive la liberté, vive la république, foutre.
La grande colère du Père Duchesne, N°324 De voir les aristocrates se sans-culottiser pour mieux nous foutre dedans, et pour perdre les véritables patriotes. Ses bons avis à tous les citoyens pour qu'ils se tiennent sur leurs gardes afin d'arracher le masque à tous les fripons et pour qu'ils environnent la convention et la défendent jusqu'à la mort contre les intrigants et les traîtres qui cherchent à la diviser. Ah! Quel bougre de métier que celui de se faire imprimer tout vivant, et de dire pour deux sols, tous les matins, la vérité à ceux qui ne veulent pas l'entendre! Il n'y a pas de cheval de bat qui souffre autant qu'un pauvre diable qui s'est lui-même imposé la tâche de dénoncer tous les fripons et les traîtres qui lui tombent sous la patte, et de dévoiler tous les complots que l'on manigance contre la république. S'il a de trop bons yeux, on veut les lui crever s'il ne ménage ni Pierre ni Paul, dans ses discours, on trouve bientôt le secret de lui couper la parole, soit en l'amadouant, soit en l'épouvantant. Sur quelle mauvaise herbe avais je donc marché, le jour où il me prit fantaisie de quitter mes fourneaux pour me mettre à broyer du noir? Quel démon, ennemi de mon repos, m'inspira un semblable dessein? Depuis ce temps j'ai passé ma vie dans des transes continuelles. Plus j'ai fait de bien, plus on m'a voulu de mal. Souvent j'ai passé pour un jean-foutre pour avoir démasqué les plus grands scélérats. La première fois qu'on entendit gueuler ma grande colère aux quatre coins de Paris contre le ministre Jean Farine : "est-il possible, s'écrièrent tous les badauds, que l'on ose accuser un aussi grand homme! Oui, celui qui peut ainsi vilipender le vertueux Necker, le digne mentor de notre bon roi, est un incendiaire payé par les aristocrates, il faut le lanterner, il faut le pendre" en attendant que ce beau jugement fût exécuté, on commençait par me brûler en effigie. On arrêtait par centaines tous les pauvres bougres qui avaient colporté ma feuille on les jetait dans les cachots, sans s'embarrasser si leurs femmes et leurs enfants avaient du pain cuit. Lorsque je me débaptisais en voyant tant de viédases agenouillés devant l'écharpe ensanglantée du traître Bailly, et tous les courtauds de boutique se disputant l'honneur de baiser la botte du général courbette, quand je tombais sur la friperie des têtes à perruque qui gouvernaient les districts, qui regardaient les Sans-culottes du haut de leur grandeur et qui se croyaient les premiers moutardiers du pape, attendu que par un décret sanctionné par sa majesté, ils avaient des têtes en façon de marc d'argent, alors, foutre, je n'étais pas bon à jeter aux chiens, mais surtout quand je découvrais le pot aux roses et que je foutais mon nez dans les mystères du comité autrichien, c'est alors que tous les aboyeurs de la liste civile jappaient contre moi. Tous les mouchards du maire grue étaient à mes trousses. Tantôt le juge de paix Brideoison me faisait arrêter pour ma grande colère contre madame veto un autre jour un échappé des petites maisons me dénonçait à l'assemblée nationale, et demandait le
décret d'accusation contre moi. Et voilà, depuis quatre ans, les menus plaisirs du Père Duchesne, toujours marchant entre deux feux, toujours sous le couteau des fripons je ne parle point des Brissotins, qui, après m'avoir fait un pont d'or pour tourner casaque à la Sans-culotterie et n'ayant pu me corrompre, ont remué ciel et terre pour me perdre je ne parle point du comité des douze, qui m'a fait siffler la linotte et qui voulait commencer par moi le massacre de tous les patriotes je ne parle point des estafiers de Custine, qui ont levé le poignard sur moi quand je dénonçais ce traître aux Jacobins mais je dis, foutre, que tous les amis et serviteurs de Capet, que les complices des Brissotins, des rolandins, des Girondins ont une dent de lait contre moi. Je dis que tous les hypocrites qui font contre fortune bon coeur, et qui crient à tue-tête, vive la république, tandis que dans leur intérieur ils soupirent après la royauté oui, foutre, tous ces scélérats me guettent comme le chat fait la souris, et ils n'attendent que le moment de se venger de moi et de me déchirer à belles dents. Ils me tendent des pièges mais je n'y tomberai pas. L'un me reproche d'être un emporte-pièce et de ne ménager personne l'autre soutient que je suis un modéré celui-ci prétend que j'ai tort d'estimer le Sans-culotte Jésus, et de recommander de suivre tout uniment son évangile sans chercher midi à quatorze heures et sans s'embarrasser de tous les mensonges et des tours de passe-passe des calotins celui-là soutient que je suis un athée, parce que j'ai toujours engagé les Sansculottes à vivre en paix, à ne jamais disputer sur ce qu'ils ne comprennent pas, et surtout à ne pas souffrir que l'on répande une seule goutte de sang au nom de celui qui prêcha toute sa vie la paix, l'union, la fraternité, et le mépris des injures. Comment faire, me disent tous les jours mes amis? Comment s'entendre au milieu de tout ce charivari? A qui se fier, foutre? Celui-ci veut blanc, celui-là veut noir l'un pousse à droite, l'autre à gauche. Voilà, foutre, le secret de conduire toujours sa barque à bon port au milieu de tous les orages et des bourrasques c'est de ne consulter que le bons sens et la probité, de ne croire que sa conscience. On nous annonce de nouveaux coups de chien, des complots affreux contre la convention, eh bien, foutre, c'est autour d'elle qu'il faut toujours se rallier, comme je n'ai cessé de le dire. Ceux qui voudraient y exciter la trouble, la diviser, doivent être regardés comme les plus mortels ennemis du peuple. Malédiction à celui qui voudrait ramener les crapauds dans les marais fangeux dont ils ont disparu depuis le trente-et-un Mai. Tant que nos législateurs seront unis, les ennemis de la république seront confondus, c'est du haut de la montagne que partira la foudre qui doit les écraser. C'est là, foutre, qu'est le trône de la liberté. C'est de là qu'elle va pulvériser tous les trônes des despotes, et verser ses bienfaits sur les humains. Le comité de salut public est son bras droit: elle lui a remis la massue qui écrasera tous les traîtres. Bons citoyens, mettez toute votre confiance dans ceux qui ont détruit la tyrannie, fondé la république, et à
qui vous devez cette belle constitution qui fera un jour votre bonheur. Il est impossible que ceux qui, depuis quatre ans, ont affronté tant de périls, bravé la rage de tous les despotes, pour défendre les droits du peuple, puissent jamais l'abandonner car foutre, quelle serait leur espérance? Les rois leur pardonneront ils jamais d'avoir fait raccourcir le dernier de nos tyrans? Ne seraient ils pas les premières victimes, si la contre-révolution arrivait? Souvenez vous au surplus de ce mot de Robespierre, qu'il soit à jamais gravé dans votre mémoire: s'il était possible que le comité de salut public trahit le peuple, je le dénoncerais. Vingt fois ce comité a sauvé la république il la sauvera encore. Braves Sans-culottes, restez donc unis à la convention, tout votre espoir est dans elle, toute sa force est dans vous. Veillez plus que jamais arrachez le masque à tous les jean-foutres qui se sont sans-culottisés pour brouiller les cartes ralliez vous tenez vous serrés, et vous confondrez tous vos ennemis, foutre. La grande colère du Père Duchesne, N°325 De voir que les Sans-culottes se laissent foutre dedans par des aristocrates à bonnet rouge, qui les mettent à chien et à chat. Sa grande joie d'avoir vu Marat en songe, et qui lui a dévoilé toutes les manigances des étrangers, des aristocrates, des complices de Brissot et des prêtres, pour brouiller les cartes, pour détruire les patriotes les uns par les autres. Encore un rêve, mais un rêve bougrement patriotique, dont il faut que j'entretienne les Sans-culottes ils ne m'en voudront pas de leur faire connaître jusqu'à mes songes, ça leur prouvera, foutre, que jour et nuit le Père Duchesne n'a que le bien public en tête, d'ailleurs, c'est de Marat que je vais leur parler. Je l'ai vu cette nuit pendant mon sommeil, ses yeux étincelaient de colère, il menaçait du poing, il se trémoussait, il s'agitait, il jurait même en frappant la terre de ses pieds il m'a semblé encore le voir à la tribune de la convention quand il bravait les poignards des Brissotins, ou quand il délivrait des brevets de guillotine aux infâmes tripotiers du comité des douze. "Bougre de Père Duchesne, s'est-il écrié d'une voix de tonnerre, tu dors, tu t'amuses à gober des mouches quand tu devrais faire feu des quatre pieds et fulminer contre les intrigants et les traîtres qui veulent perdre la république. On annonce de grands complots, et tu n'oses les dévoiler! Tu te contentes de dire qu'il y a quelque anguille sous roche tu annonces que le feu couve sous la cendre, et tu n'indiques pas d'avance aux bons Sans-culottes les moyens d'arrêter l'incendie qui les menace! Tu dénonces des fripons, des conspirateurs et tu ne nommes pas les masques! As- tu donc aussi la patte graissée pour te taire, ou bien n'es tu à présent qu'une poule mouillée qui craint pour sa peau et qui aime mieux voir la république en danger que de s'exposer en disant la vérité". Non foutre, m'écriai-je, je suis toujours le même. Si je ne vais pas si vite en besogne c'est que je me souviens que qui trop embrasse mal étreint. Depuis que tu n'es plus, ami du peuple, je suis comme un aveugle
qui a perdu son bâton. Tu étais la sentinelle avancée des écrivains patriotes. C'est toi qui allais à la découverte, tu nous donnais le mot d'ordre, et d'après toi nous pouvions charger l'ennemi en toute confiance mais depuis que l'infernale guenon du Calvados t’a percé le sein, les fripons, les traîtres ont beau jeu. Ton nom seul les glaçait d'effroi tes yeux perçants lisaient jusqu'au fond de leur coeur. Tu étais toujours à leur piste tu connaissais toutes leurs actions, et tu devinais la plus secrète de leurs pensées. Depuis ta mort ils ont redoublé d'audace. Pour mieux nous donner le change, ils singent de leur mieux les Sans-culottes. A les croire, ils dégottent les plus chauds patriotes, et tout ce qu'il y a de Cordeliers et de Jacobins ne sont que de la St-Jean. Ils se vantent d'avoir été républicains dès le ventre de leur mère, et avant d'avoir dit papa et maman, ils soutiennent qu'ils ont crié vive la république. Enfin, mon pauvre Marat, si tu revenais en ce bas monde, tu ne t'y reconnaîtrais plus. Tous les muscadins aux petites bottines, aux culottes étroites, sont devenus des fiers à bras. Ils portent maintenant des moustaches postiches qui, d'une lieue, font fuir les petits enfants et trembler la volaille. Ils traînent tous de grands sabres à leur cul de chien. On ne voit plus que de larges pantalons et des vestes de Sans-culottes. Les rues de Paris, les promenades sont comme des champs de coquelicots on y voit fourmiller les bonnets rouges. Jamais le faubourg St-Antoine ne vit un pareil carnaval. Bientôt pour n'être pas confondus avec tous les jean-foutres, qui ont pris leur costume, il faudra que les Sans-culottes prennent des culottes étroites, et se fassent à leur tour friser et bichonner. Le grand secret des contre-révolutionnaires est de tout embrouiller, et de mettre les patriotes à chien et à chat. Les véritables agents de Pitt et Cobourg, accusent les meilleurs républicains, et les Sans-culottes sont assez badauds pour tauper dans de semblables panneaux. "C'est pour faire cesser tout ce tintamarre que je viens trouver le Père Duchesne, me dit Marat en m'interrompant mes yeux sont toujours ouverts sur ma république, et au jour et à la minute je suis informé sur le rivage sombre de tout ce qui se passe sur la terre de la liberté. Je connais tous les intrigants qui brouillent les cartes, et qui veulent détruire les patriotes, et, comme dit le vieux marchand de fourneaux, qui se servent de la patte du chat pour tirer les marrons du feu. On connaîtra tous les fripons qui jettent de l'huile sur le feu. Sur les rapports les plus faux et les mensonges les plus atroces, on vient d'en imposer à la convention, et on lui a escamoté un décret pour mettre en état d'arrestation le patriote Vincent. Dis à tous nos braves Montagnards qu'il n'y a pas un mot de vrai dans tout ce qu'on a avancé contre lui dis leur que Vincent était mon ami dis leur que c'était lui qui me communiquait toutes les notes contre les généraux scélérats qui voulaient perdre la république, contre les fripons fournisseurs que je dénonçais dis leur que c'est l'énergie de Vincent qui a purgé les bureaux de la guerre de tous les muscadins que Servant, et Beurnonville y avaient placé dis leur que ces muscadins ont été
remplacés par de vieux Cordeliers et d'excellents Jacobins. Il peut se trouver parmi ces commis quelques faux frères, mais c'est ceux-là qu'il faut dénoncer et nommer, et ne pas confondre avec eux ceux qui ne l'ont pas mérité. Raconte ce qui s'est passé la veille de ma mort entre Vincent, toi et moi. Tu sais si nous trois nous nous occupions alors de la chose publique. Sans nous trois, l'infâme Custine vivrait encore il aurait livré l'armée du Nord Lille, Metz, toutes nos places de guerre auraient été vendues l'une après l'autre. Eh bien, foutre, tu peux l'attester, sans Vincent, cet infâme complot s'exécutait c'est lui qui a mis tout sens dessus dessous dans les bureaux pour réunir toutes les pièces qui ont prouvé les crimes de ce scélérat. Je sais que le petit bougre est hargneux, que dans sa fièvre patriotique il frappe quelquefois à tort et à travers c'est aussi le crime qu'on n'a cessé de me reprocher. Quand je couvrais de boue les aristocrates, un patriote a t il pu se plaindre de ce que je l'éclaboussais par mégarde. Au surplus, je sais bon gré à nos frères les Cordeliers, aux électeurs et aux citoyens de la section de « mutius soevola » d'avoir rendu hommage au patriotisme de Vincent. J'invite mes braves amis du comité de sûreté générale à examiner sa conduite, et à lui accorder prompte justice. Si comme tant d'autres, il a changé, ce que je ne saurais croire, il faut qu'il soit puni s'il est innocent, il faut lui rendre la liberté. Je ne doute pas qu'il n'y ait des milliers de jean-foutres à la porte de ce comité pour accuser les meilleurs patriotes. Les amis de la royauté, les complices de Brissot remuent ciel et terre pour se venger. On cherche surtout à sauver les restes de la bande brissotine et girondine. Les parents, les femmes de tous les jean-foutres qui sont en état d'arrestation, jettent le chat aux jambes des patriotes. Les banquiers qui mangent du fromage de voir les assignats au pair, cherchent à exciter un mouvement pour en profiter et ruiner encore la fortune publique. Surtout que l'on se défie de la conversion subite des prêtres. Le serpent qui quitte sa vieille peau reste toujours serpent. Recommande, Père Duchesne, à tous les Sans-culottes d'être toujours unis. Qu'ils daubent d'importance les coquins qui veulent les diviser. Qu'ils réfléchissent qu'en s'accusant, qu'en se déchirant entre eux ils font bouillir du lait aux aristocrates. Que la convention, que la sainte montagne soient toujours leur point de ralliement! Périssent tous les traîtres et les conspirateurs! Mais que les patriotes protègent les patriotes! Ils ont besoin de toutes leurs forces pour sauver la république. Adieu, Père Duchesne une autre fois je t'en dirai davantage, et je te montrerai au doigt ces bougres d'intrigants auxquels il faut livrer un combat à mort, foutre. " La grande joie du Père Duchesne, N°326 De voir que tricherie revient à son maître, que les fripons et les intrigants qui ont été pris les mains dans le sac, et qui voulaient jeter le chat aux jambes des patriotes sont démasqués. Ses bons avis à la
convention, pour qu'elle fasse danser la carmagnole aux intrigants et aux traîtres qui veulent la foutre dedans, diviser la montagne, armer les patriotes contre les patriotes et ramener sur l'eau tous les crapauds du marais. Mon dernier rêve où notre cher Marat m'est apparu, m'a remis du baume dans le sang, foutre. Avant ce songe heureux, j'étais tout foutimassé, je voyais tout en noir, j'entendais du soir au matin bourdonner à mes oreilles un essaim de commères qui foutent leur nez partout, qui abandonnent leurs enfants pour balayer avec leurs cottes toutes les rues de Paris en allant motionner à droite et à gauche, qui ne sachant pas gouverner leur ménage veulent gouverner l'état, qui enfin, si nous les laissons faire, s'empareront bientôt de nos culottes. Ces motionneuses soufflées je ne sais pas par qui, il y a gros pourtant qu'elles pourraient nous dire de quelle couleur et de quel poids est la monnaie de Pitt et de Cobourg ces viragos débitaient à tous les coins de rues des histoires à faire peur et des contes à dormir debout. L'une disait: "n'est ce pas indigne que l'on manque toujours de pain et que nous autres pauvres gens nous soyons obligés de perdre nos journées et de nous faire écharper à la porte des boulangers. C'est la municipalité, c'est ce coquin de Pache qui sont la cause de notre misère". Quelque bon luron regardait il entre les deux yeux de cette guenon, il y lisait le mensonge et le crime s'il allait à sa poursuite, il la voyait rentrer le soir dans quelque grand hotel et découvrait que c'était la chère moitié d'un maître laquais d'un émigré, ou la cuisinière d'un calotin, ou quelqu'autre salope de même acabit qui avait la patte bien graissée pour tourmenter les Sans-culottes. D'autres garces pareilles allaient clabaudant le long des rues, qu'aujourd’hui on avait arrêté tel patriote, que demain on en arrêterait tel autre. C'est ainsi, foutre, que les aristocrates et les conspirateurs mitonnent leurs complots dans l'ombre, et disposent les esprits aux coups de chien qu'ils nous préparent. Les pauvres Sans-culottes n'y voient que du feu: ils regardent jouer toutes les marionnettes, et ne connaissent pas les grands bateleurs qui sont derrière la toile. Polichinelle amuse les badauds avec ses quolibets, mais, foutre, le coupeur de bourse est là, il profite du moment où un nouveau débarqué ouvre le bec d'une aune, et rit à gorge déboutonnée. Quand la farce est jouée, mon nigaud se retire tout joyeux d'avoir vu gratis la comédie comme le temps a passé vite, il veut voir quelle heure il est mais il ne trouve plus sa montre il fouille à sa poche et son portefeuille est fondu. Il se lamente, il se désespère, il jure, il s'arrache les cheveux. Il n'est plus temps, il ne lui reste plus que les yeux pour pleurer, tandis, foutre, que l'homme aux marionnettes et le compère, et les filous se partagent sa dépouille et boivent à la santé des imbéciles. Voilà, foutre, trait pour trait le tableau de ce qui se passe tous les jours sous nos yeux. Le pauvre peuple est toujours dupe des apparences. A force d'avoir été trompé, il devrait cependant être un peu dégourdi et ne pas donner tête baissée dans tous les pièges qu'on lui tend. Mais il est
des bougres qui sont si fins, si déliés qu'il faudrait être sorcier pour deviner leurs desseins. Ce qui nous console pourtant c'est que tôt ou tard le papillon se brûle à la chandelle. Jusqu'à présent tous les fripons, tous les traîtres, tous les ennemis du peuple se sont pris eux-mêmes dans leurs propres filets. Tous les masques tombent peu à peu et à la fin du bal, les aristocrates dansent la grande Carmagnole. Revenons au fait et après, les réflexions. Je dis donc, foutre, que depuis quelque temps il s'est élevé autour des patriotes un certain brouillard si épais, foutre, qu'ils ne pouvaient plus se reconnaître les uns les autres. Les coquins qui voyent que leur cas est sale, n'avaient plus d'espérance qu'en brouillant les cartes et en mettant les Sans-culottes à chien et à chat. "le pot aux roses est découvert, se sont ils dit, on crie déjà sur nous, eh bien crions plus fort sur les Sans-culottes. On nous accuse d'avoir mis la main dans le sac et de nous être enrichi des dépouilles du peuple, accusons ceux qui nous accusent, et renvoyons leur le chat aux jambes. On nous reproche d'avoir sauvé les émigrés, d'avoir protégé les accapareurs, nous ne pouvons pas nous en défendre, on trouve dans nos poches des millions d'assignats, ripostons à ceux qui dévoilent notre turpitude, qu'eux-mêmes en ont reçu davantage de Pitt et de Cobourg. Tous ceux qui sont d'accord avec nous et qu'on ne connaît pas encore, nous défendront de toutes leurs forces. Nous trouverons des témoins, car nos dénonciateurs ont accusé avant nous tous les traîtres et les ont conduit à la fatale bascule, les parents, les amis, les complices des Brissotins, des Girondins et de tous ceux qui ont craché dans le sac, saisiront l'occasion de se venger de ces maudits patriotes. On les dénoncera, on épiloguera toutes leurs paroles, on envenimera toutes leurs actions, on leur supposera les plus criminelles intentions. Ainsi, foutre, si nous périssons, il faudra bien qu'ils périssent, ou du moins ils seront trop heureux de se sauver dans la même barque avec nous. Une amnistie générale confondra tous les accusés, et on ne saura, à la fin du compte, qui avait tort ou raison". Voilà, foutre, au doigt et à l'oeil le projet qui est maintenant sur le tapis. On a commencé par accuser le brave Ronsin, général de l'armée révolutionnaire. Il fallait arracher du pied la plus forte épine. Quand on frappe la tête, il est aisé de tuer le corps. Si on avait pu trouver à mordre sur le chef, les soldats auraient bientôt été accusés, et l'armée de la liberté aurait été détruite avant qu'il soit l'âge d'un petit chien. On a fait aussi siffler la linotte au patriote Vincent pour se débarrasser de ce maudit argus, qui a fureté dans tous les bureaux de la guerre, et qui a entre les mains des pièces capables de faire cracher dans le sac tous les fripons et tous les conspirateurs. Après eux, dit-on, c'était ton tour, vieux marchand de fourneaux. Tonnerre de dieu, je suis bon cheval de trompette, je ne m'effraie pas du bruit il n'y a plus de comité des douze, et quand il y en aurait, je m'en battrais l'oeil. La convention peut être trompée, mais elle est juste, et puis les bons Sans-culottes sont là pour l'éclairer, et lui
demander vengeance contre les ennemis de la liberté. Heureusement, foutre, l'intrépide défenseur de la Sans-culotterie, le brave Collot-d-Herbois est arrivé pour débrouiller toute l'intrigue. Le géant a paru, et tous les nains qui asticotaient les meilleurs patriotes sont rentrés cent pieds sous terre. Il a parlé au comité de salut public, à la convention, aux Jacobins, et il a confondu les intrigants qui voulaient armer les patriotes contre les patriotes, diviser la montagne, rappeler les crapauds du Marais. La convention connaît maintenant la vérité, et tricherie revient à son maître. Non, foutre, non, elle ne reculera pas la montagne restera unie. Les patriotes se serreront plus que jamais. Les aristocrates de Lyon qui voulaient assassiner la patrie, qui ont égorgé les meilleurs républicains subirent tous le supplice qu'ils ont mérité. La foudre nationale va achever la destruction de leurs superbes maisons bâties avec le sang du peuple. Les patriotes ne seront plus opprimés. La liberté leur sera rendue, ils reprendront leurs fonctions et, d'accord avec la montagne, ils vont donner le coup de grâce à l'aristocratie, au fédéralisme et ça ira, foutre. La grande joie du Père Duchesne, N°327 Au sujet de la prise de Toulon, et de voir dans l'embarras l'infâme conseiller du roi Georges-Dandin, qui va bientôt jouer à la main chaude comme son confrère Capet. Ses bons avis aux patriotes anglais, pour qu'ils se vengent de l'échappé des petites maisons qui les gouverne et de son infâme ministre qui les a ruiné pour mettre la France à feu et à sang. Victoire, foutre, victoire! Aristocrates, que vous allez manger de fromage! Sans-culottes, réjouissez vous, chantez, buvez à la santé de nos braves guerriers et de la convention. Nos ennemis sont à quia Toulon est pris, foutre. Brigands couronnés, mangeurs d'hommes, princes, rois, empereurs, pape qui vous disputiez les lambeaux de la république, tous vos projets s'en vont ainsi en eau de boudin. Comment vas-tu parer cette botte, méprisable conseiller du roi Georges-Dandin? Comment vas-tu dorer la pilule? Que vont dire les Anglais quand ils apprendront la défaite totale de leur armée, la prise de toutes ses provisions, la ruine de leur flotte, quand tu vas être entouré de tous les marchands que tu as ruinés, des femmes et des enfants que tu as fait égorger pour bâtir tous les châteaux en Espagne, que pourras tu leur répondre? Quand le parlement va être rassemblé pour juger ta conduite et celle de l'échappé des petites maisons que tu mènes par le nez, comment feras tu pour t'excuser? Je te vois sur la sellette en présence des représentants du peuple anglais je vois les mines allongées de toutes ces têtes à perruque. Assis sur leurs balles de laine les honorables membres vont tous se jeter le chat aux jambes, et t'accuser de tous les maux de la patrie. On va te demander compte de toutes les richesses que tu as prodiguées pour soutenir le despotisme. C'est alors, foutre, que l'amour de la liberté va se ranimer
dans le coeur des Anglais. Tu auras beau présenter tes mémoires d'apothicaire, et mettre en ligne de compte toutes les sommes que tu as dépensées pour entrer, avec la clef d'or, dans Toulon, et pour te faire ouvrir les portes de toutes les villes maritimes de France. Les Anglais ne se payent pas en monnaie de singe, ils savent compter, foutre. En vain tu leur montreras la liste de tous les mouchards que tu as payé pour brouiller les cartes en France, de tous les traîtres à qui tu as graissé la patte, de tous les accapareurs qui, avec tes guinées, nous ont si longtemps affamés lorsqu'à la fin de ton compte on verra qui de tant paye tant reste zéro et quand, par dessus le marché, tu seras obligé d'annoncer la banqueroute, la famine et la guerre civile, c'est alors, foutre, qu'il n'y aura pas assez de potences pour t'accrocher. Sire Georges, que tu fais jouer depuis si longtemps à colin-maillard, va jouer à son tour au roi dépouillé, et finir comme son très honoré frère et cousin le roi de France et de Navarre car, foutre, la tête du roi d'Angleterre ne pèse pas une once quand le peuple anglais est en train de bien faire. Ainsi, foutre, tôt ou tard, il faut que justice soit faite. Tonnerre de dieu comme ils ont le bec jaune tous les coquins qui voulaient nous faire marcher à la liberté comme les écrevisses! Si nous avions cru les viédases qui pissent le verglas dans la canicule, les modérés, qui barrent le chemin aux Sans-culottes quand ils sont au pas où en serions nous? Quelle différence de la situation actuelle de la république, à celle qu'elle était avant le 31 mai, nos armées chassées de la Belgique et presque détruites tous nos magasins livrés à nos ennemis nos braves soldats sans habits, sans souliers nos armées n'ayant à leur tête que des talons rouges qui se préparaient à les vendre au plus offrants la convention, espoir de la patrie, déchirée par des scélérats qui voulaient la perdre toutes les frontières ouvertes à nos ennemis, et l'Europe entière armée contre nous. Voilà, foutre, le tableau déchirant qui s'offrait à nos regards à l'ouverture de la campagne. Le génie de la liberté a tout bravé, il a triomphé de tous les obstacles. Plus un peuple libre est en danger, plus il est puissant, la convention a été délivrée des monstres qui l'enchaînaient, et aussitôt qu'elle a été libre, elle a fait plus de bien chaque jour que les autres assemblées qu'elle a remplacé n'en avaient fait en quatre ans. Elle nous a donné une constitution qui fera à jamais le bonheur du peuple. Les traîtres ont été raccourcis, les nobles chassés de nos armées sont remplacés par des braves Sans-culottes partout nos ennemis ont été battus à plate couture. Les villes rebelles ont été détruites la Vendée n'est plus, ça va, foutre, et ça ira encore mieux malgré les fripons et les ambitieux qui mettent des bâtons dans les roues. Comment avons nous fait tant de miracles en si peu de temps? C'est en nous rebiffant contre tous les jean-foutres qui nous trahissaient à la journée c'est en exterminant tous les coquins. Ce n'est depuis que nous avons mis les gens suspects à l'ombre, ce n'est que depuis que la terreur est à l'ordre du jour, ce n'est que par la vertu de la sainte guillotine que
nous nous sommes sauvés, si nous faisions un seul pas à reculons, nous serions foutus. Ne donnons pas à nos ennemis le temps de nous reconnaître. Que le torrent de la révolution entraîne tous les ennemis de la république, et renverse tous les traîtres. Ne nous lassons pas de frapper tant que nous rencontrerons des ennemis sur notre passage. Profitons de la grande battue, et tandis que nous cernons toutes les bêtes féroces qui voulaient nous dévorer, exterminons sans pitié. Mieux vaut tuer le diable que le diable nous tue, comme je n'ai cessé de le dire il n'y a que des poules mouillées ou des traîtres qui puissent s'effrayer de la vengeance nationale trop longtemps nous avons été bons et humains, trop souvent nous avons pardonné. Tous les scélérats que le peuple a épargné, au lieu de bénir sa clémence, ont au contraire tourné contre lui les armes qu'il leur a laissé entre les mains. Si les vils jean-foutres qui, l'année dernière, livrèrent Longwy et Verdun à nos ennemis avaient été passés au fil de l'épée si ces villes rebelles avaient été rasées comme il avait été décrété, les marchands de galons de Lyon y auraient regardé à deux fois avant de tauper dans le fédéralisme et de s'armer contre la patrie. Maintenant que ces traîtres voient renverser leurs nids d'aristocrates maintenant qu'ils sont à la gueule du canon et sous le fatal rasoir, ils crient miséricorde. Tonnerre de dieu, s'ils avaient réussi dans leurs affreux complots, nous auraient ils épargné? Existerait-il un seul montagnard? A t on oublié qu'ils avaient juré la mort de tous les Jacobins, de tous les patriotes. C'aurait bien été une autre boucherie sans la révolution du 31 mai, qui a fait tourner leurs projets en eau de boudin. Fiez vous donc au loup qui, quand il est pris, fait le chien couchant et promet de ne plus croquer les moutons. Ah, foutre, si ce n'était pas un jour de joie comme je jurerais contre les jean-foutres qui cherchent à nous endormir mais, foutre, la convention est payée pour ne plus se laisser foutre dedans par les coquins. Chat échaudé craint l'eau froide. Pour son salut, pour celui du peuple, ses décrets seront exécutés. Les galonniers de Lyon seront engloutis sous leurs murs les scélérats qui ont livré Toulon, qui ont égorgé les patriotes, massacré les représentants du peuple, vont perdre le goût du pain. Non, foutre, non, il n'existera aucune trace de ces villes abominables, et leurs cendres vont couvrir le sang des républicains qui y furent immolés tremblez, ennemis de l'égalité, tremblez, tyrans, le peuple est debout, il ne se reposera que lorsque vous serez exterminés, foutre. La grande joie du Père Duchesne, N°328 En apprenant la destruction totale des rebelles de la Vendée, et en songeant au désespoir des brigands couronnés, quand ils vont apprendre cette nouvelle. Sa grande colère contre certains jean-foutres qui veulent recruter tous les brigands et former une nouvelle Vendée en proposant d'ouvrir les prisons et de faire grâce aux conspirateurs. Ses bons avis aux braves Montagnards pour les empêcher de donner dans un pareil
panneau, et pour les engager à continuer d'exterminer les fripons et les traîtres. Je suis d'une telle joie, foutre, que je ne me possède pas. Ah! Quelle pille je vais m'en donner, en réjouissance de toutes les bonnes nouvelles qui nous arrivent de tous côtés quelle carmagnole on vous fait danser, Autrichiens, Prussiens et Anglais messieurs les bougres, vous savez ce que peut le bras des patriotes: il y a longtemps, foutre, que je vous ai prédit que vous vous en tireriez comme arlequin, et qu'à la fin du bal vous payeriez les violons. Brigands couronnés, ours du Nord, tigres d'Allemagne, vous croyez qu'il n'y avait qu'à se baisser et en prendre, des villes, des provinces des départements. D'avance vous vous partagiez nos dépouilles mais quand on compte sans son hôte, il faut compter deux fois. êtes vous satisfaits d'avoir fait égorger un million d'hommes pour venger soi-disant la mort d'un misérable ivrogne et d'une infâme guenon qui ne valait pas une pipe de tabac? Quel fruit allez-vous retirer de toutes les richesses que vous avez répandues et de tous les hommes que vous avez sacrifiés à votre ambition? Quand tu vas arriver à Berlin, sans sol ni maille, en pélerin de St-Jacques, Mandrin-2, tes sujets. Quand ils te demanderont où sont les dépouilles de la France que tu leur avais promises que pourras tu leur répondre quand ils chercheront derrière toi l'armée puissante que tu t'étais vanté de conduire à la victoire, et qu'ils apprendront que leurs pères, leurs frères, leurs amis ne sont plus quand, pour les consoler, tu leur annonceras de nouveaux impôts, et lorsqu'à coups de bâtons tu voudras les forcer de te suivre à leur tour. Vas te faire foutre, te répondront ils, maudit aventurier que celui qui a cassé les verres, les paye, nous avons été trop longtemps victimes de tes fredaines au lieu de continuer la guerre avec les Français, nous allons au contraire suivre leur exemple, et toi, pêcheur de grenouilles, petit François, empereur muscadin, pauvre blanc bec, qui te croyait déjà maître de la moitié de la France, toi qui te vantais d'exterminer jusqu'au dernier républicain, pour venger le raccourcissement de la guenon que tu nommais ta chère et très honorée tante, autant t'en pend à l'oreille. Toi, salope maudite qui as fait fondre la république fromage, et qui te crois reine de Hollande, ton compte est bon, les Hollandais vont se souvenir qu'ils ont été républicains, et, foutre, tu sauteras le pas. Je t'ai déjà annoncé ton triste sort, Georges-Dandin, c'est toi qui vas commencer la danse. Ton tour viendra bientôt, roi d'Espagne et des Indes. Tes chapelets, tes scapulaires, toutes tes reliques ne pourront te préserver de la foudre républicaine qui va écraser tous les tyrans. Oui, foutre, le tocsin de la liberté va sonner, tous les trônes vont tomber comme des quilles, et les peuples vont jouer à la boule avec les têtes couronnées. Mangeurs d'hommes, vous n'avez reculé que pour mieux sauter. Vous n'aviez d'espérance que dans nos divisions, eh bien, foutre, nous allons être unis plus que jamais pour vous détruire. Vous avez armés les Français contre les Français Lyon et Toulon vont être réduits en cendres,
la Vendée n'existe plus. La convention vient de recevoir la nouvelle de la destruction totale des brigands ceux qui ont échappé au fer des républicains ont été engloutis dans la Loire. Partout nos armées sont victorieuses. Les campagnes du Nord, les rives du Rhin sont couvertes des cadavres des monstres qui les ont ravagés. D'un bout de la république à l'autre, tout retentit des cris de la victoire. Braves Sans-culottes, foutre, ne soyez pas enivrés de vos succès. Vous avez encore bougrement de monstres à étouffer. Vous êtes encore environnés de traîtres et de conspirateurs. Défiez vous des bougres qui cherchent à vous endormir. Veillez plus que jamais. C'est au milieu de vos triomphes que vous fûtes toujours trahis. Ceux qui n'ont pu vous réduire par la force, vont employer la ruse pour vous perdre. Déjà, foutre, des serpents se sont glissés au pied de la montagne pour darder leur venin. On veut diviser la convention, on cherche à armer les patriotes contre les patriotes. Brissot et Gorsas sont ressuscités, oui, foutre, leur voix s'est déjà fait entendre. Des patriotes ont été dénoncés, accusés par les amis de Custine et de Dumouriez. On ose blâmer hautement toutes les mesures révolutionnaires qui ont sauvé la république. On pleure la mort des scélérats qui ont voulu égorger la patrie. Un bourriquet à longues oreilles, qui n'eut jamais ni bouche, ni éperon, fait feu des quatre pieds depuis quelques jours il paraît, foutre, qu'il veut gagner son avoine, et depuis qu'on lui a foutu sous le nez force picotins d'Angleterre, il rue à droite et à gauche, et, comme on dit, il donne le coup de pied de l'âne à tous les patriotes que les aboyeurs du roi Georges-Dandin outragent et calomnient. Il ose se dire l'avocat consultant des Montagnards, quoique jamais il n'ait été que l'avocat du diable. Après avoir défendu tous les tripotiers de Paris, après avoir plaidé la cause du muscadin Dillon, et soutenu que sans la protection des talons rouges, la république ne pouvait se sauver, il devient aujourd’hui le champion de tous les jean-foutres qui sifflent la linotte. « Ouvrez les prisons, dit-il, à ces deux cent mille citoyens que vous appelez suspects. Ouvrir les prisons, tonnerre de dieu, combien l'infâme Pitt a t il payé cette bougre de motion de Coblentz? Ouvrir les prisons, est ce donc pour recruter la Vendée, ou plutôt pour en former une nouvelle, mais suivons pied à boule notre endormeur ». « Vous voulez, continue t il, exterminer tous vos ennemis par la guillotine, mais y eut il jamais une plus grande folie? Pouvez-vous en faire périr un seul sur l'échafaud, sans vous faire dix ennemis de sa famille et de ses amis »? Quel est le républicain qui ne ménage pas son sang en entendant un pareil discours? Oui c'est une folie que de purger la France de tous les scélérats? Quoi c'est augmenter le nombre de nos ennemis que de nous délivrer des conspirateurs, suivant maître Camille, il faudrait que les Sansculottes tombassent aux pieds des aristocrates pour leur demander grâce. Où en serions nous, foutre, sans la sainte guillotine sans elle, existerait-il un seul jacobin? Aurions-nous encore une convention? Toutes nos armées ne seraient elles pas détruites? Si le rasoir national cessait un
seul instant d'être suspendu sur la nuque des contre-révolutionnaires, que deviendraient les patriotes? Bientôt ce serait leur tour, et on ne ferait pas tant de façons pour s'en débarrasser. Tel est le langage, foutre, d'un misérable intrigailleur qui ose s'appeler le vieux Cordelier, le doyen des Jacobins. Déjà les Cordeliers ont fait justice du viédase qui, sous leur étiquette, ose débiter un semblable poison, et ils l'ont chassé de leur sein. Jamais Gorsas et Carra ont ils eu plus d'audace? Celui qui traite les meilleurs patriotes de bourreaux, d'assassins, et qui en même temps s'apitoye sur le sort des aristocrates, n'est-il pas un conspirateur, qui veut rallier tous les malveillants, encourager tous les traîtres pour les armer contre la république? N'est-il pas un rebelle contre les décrets de la convention, qui a sauvé la Sans-culotterie en foutant à l'ombre tous les hommes suspects, et en mettant la terreur à l'ordre du jour? Mais j'ai déjà dit le fin mot, les faux patriotes, les fripons qui ne savent plus à quelle branche s'accrocher, tâtent les modérés et les aristocrates ils cherchent à faire cause commune pour écraser ensemble les hommes purs qui les pourchassent. Ca ne prendra pas, foutre, le peuple est éclairé. Il connaît les intrigants, il protégera ses véritables amis. L'apôtre du modérantisme est déjà bafoué, mais ce n'est pas assez, il faut savoir quelle nouvelle liste civile paye les rhapsodies qu'il débite gratis. Au dénouement de cette nouvelle farce contre-révolutionnaire, nous découvrirons plus d'un mystère, il y a gros que milord Pitt est encore derrière la toile patience, avec le temps tous les brouillards de la Tamise se dissiperont et nous verrons à nu tous les personnages, foutre. La grande joie du Père Duchesne, N°329 Après avoir vu la fête qui a été célébrée en réjouissance de la prise de Toulon, et en apprenant que l'armée du Rhin a fait danser la carmagnole aux esclaves des despotes et s'est emparée de leur artillerie après les avoir foutus en déroute. Ah! Le beau jour, ah! La belle fête que celle de la victoire d'un peuple libre. Badauds imbéciles, Français du temps jadis, qui avez eu le malheur de vivre sous les rois, vos jours de triomphe étaient des jours de deuil car ils ne servaient qu'à river vos fers. Quand vous vous étiez battus comme des lions, et que vous aviez étripé des milliers d'ennemis, que vous en revenait-il? Rien, foutre! Que de nouvelles calamités! La guerre n'était qu'un jeu pour l'infâme canaille qui vous gouvernait, les putains et les maquereaux conduisaient la partie, et le pauvre peuple était toujours la dupe. Après avoir versé son sang dans les combats, il fallait qu'il suât sang et eau pendant la paix pour payer les frais de la guerre. Pour l'étourdir sur ses souffrances, l'ogre royal et toute la ménagerie de Versailles défilait en pompe dans les rues de la bonne ville pour aller brûler un cierge devant la patronne de Paris, en réjouissance de ce qu'un des tigres, nommé Bourbons, venait d'être
proclamé roi d'Espagne et de Naples. Les échevins, avec leurs perruques à trente-six marteaux, allaient se prosterner devant le monstre couronné, et le félicitaient de ce qu'un autre peuple allait être dévoré par un des animaux voraces, soi disant sorti de la côte de Saint-Louis. Toutes les cloches étaient en branle, toutes les rues étaient illuminées, on s'égosillait à force de crier vive le roi, grand bal, grand feu d'artifice à la ville. Quand sa jean-foutre de majesté avait assez humé d'encens, quand elle était saoule de flatteries autant que de vin, on s'en retournait au grand galop malheur alors aux curieux qui se trouvaient sur son passage, les vieillards, trop faibles pour se tirer de presse, les femmes, les enfants renversés étaient foulés sous les pieds des chevaux des hoquetons bleus, et écrasés sous les voitures. Ces fêtes coûtèrent toujours la vie à plusieurs milliers d'hommes. Le lendemain pour terminer la farce on annonçait un grand édit pour la levée d'un nouvel impôt, les pauvres badauds étaient forcés d'avaler tous les goujons. Personne n'osait murmurer. Il fallait encore que les Sans-culottes adorassent la main qui les écrasait. Ah! Foutre, comme vous devez bénir votre sort, Français républicains! Vos pères, comme l'abeille, amassaient le miel, et les frelons le dévoraient, comme les oiseaux, ils faisaient leur nid, et d'autres y venaient pondre comme aux moutons, on leur mangeait la laine sur le dos comme le boeuf, ils portaient le joug, ils labouraient, ils suaient sang et eau pour engraisser les prêtres, des moines, des évêques, des financiers, des robins, des courtisans, les rois et leurs putains. Vous, hommes libres, travaillez pour vous et vos enfants. La liberté est devant vous, et vos ancêtres n'avaient pour vis-à-vis que l'image dégoûtante de l'esclavage. Il n'est pas étonnant que vous fassiez tant de prodiges de courage. Si vous tombez au champ de la gloire, votre mémoire est respectée, votre nom est répété avec attendrissement par vos concitoyens. Vos fils vous vengeront, et votre souvenir ne périra jamais. Voilà, foutre, les réflexions que je faisais avec quelques braves bougres de ma coterie, pendant la fête que nous avons célébrée en réjouissance de la prise de Toulon. Jamais, foutre, Paris ne vit un spectacle aussi beau. La joie la plus vive brillait dans les yeux des Sansculottes. Les aristocrates étaient cachés au fond de leurs nids de cocu. On en rencontrait cependant par ci, par là quelques uns qui se chatouillaient pour faire contre fortune bon coeur mais au lieu de rire ils grimaçaient, et ils avaient la face allongée d'une aulne. Au lieu de ces voitures dorées, qui traînaient autrefois dans les fêtes publiques tous les vices, tous les crimes réunis, on a vu rouler des chars simples, mais admirables par les ornements républicains qui les décoraient. Chacun d'eux était consacré à une de nos armées. Ils étaient chargés de lauriers et des attributs de la victoire, celui des bougres à poil qui nous ont délivré de la peste de la Vendée, traînait les dépouilles ensanglantées des brigands des drapeaux blancs, couverts de fleurs de lys, des images des saints et souillés du nom exécrable de l'avorton du Temple, ont balayé
toutes les rues. Celui de l'intrépide armée du Nord était entouré des drapeaux et des étendards enlevés aux ours et aux tigres de l'Allemagne quelle joie, foutre, quels chants de victoire retentissaient autour de celui qui portait les dépouilles des Anglais et des rebelles de Toulon! On n'a pas eu besoin de baïonnettes pour faire observer l'ordre pendant la marche tout le cortège défilait paisiblement. La convention n'a point avili le peuple en lui jetant au nez des sacs de monnaie et des saucissons de cheval, et des cervelats de chien et de chat, comme faisaient nos anciens tyrans mais chacun de nos braves Montagnards tenait à sa main une gerbe de blé, pour annoncer que nos législateurs honorent par dessus tout l'agriculture, et que leur premier soin est notre garde-manger. En passant devant le ci-devant Hotel-des-Invalides, qu'elle a nommé le temple de l'humanité, elle est allée toute entière visiter les vieux guerriers qui ont versé leur sang pour la patrie, quelques républicains ombrageux se sont effarouchés de voir le président de la convention, (le brave Couthon ) porté par des chevaux dans son fauteuil mais Fallait-il que ce brave bougre, qui a si bon coeur, fût privé de la fête parce qu'il est impotent ce n'est pas son président que la convention a voulu honorer, c'est la vertu et l'infirmité. Jamais, foutre, on n'a autant chanté et dansé. Tout le long de la route ce n'était que des rondes, des carmagnoles. Quant à moi, à force d'avoir remué le gigot j'étais harassé. Je me suis tant égosillé, foutre, en chantant la Marseillaise et en criant vive la république, que mon gosier était ardent comme un brasier. Je serais mort de soif, et quelle mort pour le Père Duchesne! Si je ne m'étais pas trouvé au beau milieu des gentilles commères qui m'ont pris mon mal en pitié et qui ont partagé avec le vieux marchand de fourneaux une petite gourde remplie d'excellent rogome. Pour mettre le comble à la joie publique, pendant la cérémonie, des courriers extraordinaires ont apporté la nouvelle d'une nouvelle victoire, on a annoncé que les lignes de Wissembourg avaient été reprises. Les ennemis ont été battus à plate couture. Toute l'artillerie des esclaves est tombée entre les mains des guerriers républicains. Haguenau a été évacuée on poursuit les gros talons du Nord l'épée dans les reins. Bientôt Landau en sera débarrassé, et avant qu'il soit l'âge d'un petit chien, l'étendard de la liberté flottera sur les remparts de Valenciennes, foutre. Le coeur plein de ces heureuses nouvelles, les patriotes faisaient retentir l'air de leurs chants arrivés à l'autel de la patrie les airs de joie ont redoublés. On a fait un grand feu de toutes les dépouilles des tyrans et traîtres, et une grande ronde, qui a durée jusqu'au milieu de la nuit, a terminé cette heureuse journée. Ce ne sera pas la dernière, car, foutre, nos braves guerriers, qui ne se mouchent pas du pied, préparent une danse générale à tous les ennemis de la république, et la dernière carmagnole des rois, foutre!
La grande colère du Père Duchesne, N°330 De voir une nouvelle clique de modérés, de feuillants, d'aristocrates nommés Phélipotins soudoyés par l'Angleterre, pour remplacer les Brissotins et brouiller les cartes à la convention, en dénonçant les meilleurs patriotes pour faire revenir sur l'eau tous les brigands qui sont à l'ombre et chasser tous les généraux Sans-culottes, afin de mettre à leur place tous les talons rouges et les blancs becs de l'ancien régime. Sans-culottes, mes amis, souvenez vous foutre, que je vous annonçais dans une de mes dernières colères encore quelques nouveaux coups de chien contre les patriotes je n'avais pas tort de dire qu'il y avait encore quelqu'anguille sous roche, mais que la mèche serait bientôt découverte j'aurais pu dès lors nommer les masques, mais j'ai voulu laisser les papillons se brûler à la chandelle je savais qu'il existait une nouvelle clique d'aristocrates, de modérés, d'intrigants, de voleurs qui s'entendaient comme larrons en foire pour animer les patriotes les uns contre les autres, et les détruire par eux-mêmes je savais que Pitt était derrière la toile, et qu'il vidait le restant de la bourse que le foutu roi de carreau Georges-Dandin, lui a confié pour brouiller les cartes, et mettre en bisbille nos braves Montagnards. Le moment est arrivé de dauber tous ces jean-foutres, et de dévoiler toutes leurs manigances. J'ai déjà dit, foutre, comme quoi tous ces gredins ne sachant plus à quelle branches se raccrocher accusent les meilleurs patriotes pour qu'on les oublie, ou du moins pour les entraîner dans leur naufrage. On ne peut être sali que par la boue, foutre. Au surplus la tricherie revient toujours à son maître. Plus on accuse, plus on calomnie, plus on persécute les patriotes, plus on leur rend service. Il est doux de souffrir pour sa patrie. L'honnête homme, qui se trouve aux prises avec un coquin, sort toujours victorieux du combat car le peuple a de bons yeux, il n'est pas facile de le foutre dedans il connaît ses véritables amis il est juste surtout. Malheur au scélérat qui cherche à l'égarer. Revenons à nos brigands, braves Sans-culottes, vous ouvrez de grands yeux, écoutez de toutes vos oreilles, vous cherchez autour de vous les nouveaux conspirateurs que je vous dénonce. Vous jurez, vous tempêtez, vous demandez leur nom eh bien, sachez qu'ils se nomment les phélipotiers. Quels sont, m'allez vous dire ces nouveaux insectes dont on ne connaît l'existence que quand ils font sentir leur dard empoisonné? Qui sont-ils? D'où viennent-ils? Ils sortent de la fange du Marais, foutre. Ce sont les vils excréments du royalisme et du brissotisme, en un mot, c'est le fond du sac de la contre-révolution. Mais laissons là tout cet amphigouri il faut nommer chaque chose par son nom. Il est certain canton de la république, voisin de la ci-devant Normandie. (La lisière, comme on sait, ne vaut pas mieux que le drap). Il y a pourtant de braves gens partout je le sais, mais dans le pays dont je veux parler, les huissiers, les avocats, les procureurs fourmillaient dans
l'ancien régime. C'est là qu'à chaque coche les témoins de toutes les façons arrivaient autrefois à Paris par douzaines pour déposer pour et contre et au plus offrant, c'est là qu'habitent des bougres si renardés en chicane qu'ils valent, dit-on, un normand et demi. Gens pesant l'air fine fleur de Normands. Enfin, comme chacun sait, le haut et le bas Maine ont été, de tous temps, un véritable pays de Cocagne pour tous les églefins du barreau. Un jour, le grand diable de la chicane en visitant son apanage, se déguisa en procureur, d'autres disent en bailli, qu'importe la maudite robe. Une je ne sais quelle dévergondée, longue, sèche, jaune comme le safran, tomba tout à coup amoureuse de lui. Tout diable qu'il était, il recula d'horreur quand elle lui défila son doux compliment. Voilà pourtant, se dit-il, une bonne occasion d'engendrer un second moi-même. Ne la perdons pas. La Mancelle fût endiablée, et de leur union infernale sortit un petit diablotin. La grosse horloge du palais carillonna le jour de sa naissance, toute la robinaille se disputa l'honneur de lui trouver un nom digne de la destinée qui lui était réservée, les uns proposaient de l'appeler Fripotin, mais celui de Phélipotin chatouilla davantage les oreilles des procureurs et procureuses qui environnaient son berceau. Phélipotin fût dans son enfance un petit prodige, il avait l'esprit comme un petit démon à sept ans, il crachait du latin comme le grand théologal, et il savait par coeur sa petite coutume. Il n'avait pas encore de barbe, qu'il dégotait tous les aboyeurs du grand baillage. Tous ces bougres s'ébahissaient en l'entendant plaider le vrai et le faux, et lui demandaient où il pêchait tout ce qui lui roulait dans la cervelle. Ils ne savaient pas, les jean-foutres quel était son véritable père, ils ne se doutaient pas que le diable en personne était toujours à son oreille pour l'inspirer et lui dicter son thème. Nul ne savait comme lui embrouiller une affaire, et prouver que ce qui est noir est blanc, et que ce qui est blanc est noir. C'est ainsi que Phélipotin faisait la pluie et le beau temps, en s'engraissant de poulardes, de chapons, de perdrix, de râles et du plus fin gibier, pour prix de toutes les mauvaises causes qu'il gagnait, des amis qu'il mettait à chien et à chat, des ménages qu'il brouillait. Malheureusement, foutre, la révolution arriva, et tous les escogriffes de la chicane eurent les ongles rognés. Phélipotin se désolait de ce qu'il n'y eu plus d'eau à boire, ni pour lui ni pour ses pareils, "Console toi, lui dit son père, je ne t'abandonnerai pas par ma vertu, tu auras deux visages, l'un pour les Sans-culottes et l'autre pour les aristocrates je t'apprendrai l'art de tromper tout le monde on te croira d'un côté, un patriote enragé, et de l'autre, tu seras l'espérance des nobles, des calotins et de tous nos amis" Ce qui fut dit fut fait, Phélipotin joua si bien son double rôle, qu'il arriva tout bâti à la convention. D'abord il se montra moitié montagnard, moitié brissotin. Dans le jugement de Capet, il opina pour et contre, malgré lui il dit oui, pour qu'on raccourcit le gros cornard, et, par sous-
main, il engagea les sots qui lui prêtaient l'oreille à dire non. Mais c'est dans la Vendée que tous les diables de l'enfer jetaient leur grand coup de filet. Phélipotin, toujours guidé par son papa, fit là ses grandes prouesses. C'est là qu'il brouilla les cartes de la bonne manière c'est là qu'il fit une guerre ouverte aux généraux Sans-culottes, et qu'il fût l'avocat de Biron, de Dubayet, de Tunc et de tous les talons rouges qui allongeaient la courroie et qui voulaient perdre la république. La convention y vit clair à la fin. Elle se lassa d'être Phélipotée, les protégés de Phélipotin furent mis à l'ombre et le protecteur rengaina tous ses bougres de projets de contrerévolution. Alors les généraux Sans-culottes furent partout victorieux et la Vendée a été détruite, foutre. Phélipotin se rongeait le bout des griffes de voir tous ses complots à vau-l-eau c'est alors que son père est venu à son secours. "Formons une nouvelle Vendée, lui a dit l'animal cornu, formons la à Paris, dans la convention même cries, gueule contre les meilleurs Montagnards, accuse le comité de salut public dans le moment où il vient de sauver la république dénonce les meilleurs patriotes. " Le monstre Phélipotin a vomi tout son fiel il a dénoncé à tors et à travers. Des jean-foutres de son acabit lui ont prêté la main par leurs menées le général de l'armée révolutionnaire et le patriote Vincent ont sifflé la linotte mais, foutre, ce n'était qu'un coup d'essai de ceux qu'il voulait porter aux patriotes. Le gros Bourdon de la Vendée a fait plus de charivari que Georges d'Amboise il a raisonné comme une véritable cloche, en faisant chorus avec Phélipotin, Fabre-d-Eglantine et le renégat Camille, pour perdre le Sans-culotte Bourbotte. Les plus francs républicains ont été dénoncés par ces aboyeurs de Pitt. Moi-même je suis accusé par Phélipotin d'être un muscadin soudoyé par l'Angleterre pour avoir rivé son clou à ce Phélipotin dans un dîner patriotique où il était venu écrémer la marmite sans être prié, et pour l'avoir rembarré de la bonne sorte lorsqu'il osa dire, en ma présence, que les Jacobins étaient des scélérats, et qu'il les ferait sauter. Il vient de faire imprimer à grands frais et avec des bonnes guinées, sans doute, que le roi Bouchotte vidait le trésor national pour me graisser la patte et pour empoisonner les armées de mes écrits. Braves défenseurs de la patrie, vous qui lisez avec tant de plaisir mes joies et mes colères, vous que j'ai averti de toutes les trahisons de l'infâme Dumouriez, du traître Custine, du palefrenier Houchard, c'est à vous à me rendre justice. Vous ai-je jamais trompé? M'avez vous jamais vu flagorner les ministres? N'ai-je pas toujours été votre ami sincère? Si Bouchotte avait été suspect, je serais le premier tombé sur sa friperie, et je vous l'aurais dénoncé. Je me fous bien des hommes, je ne vois que la république. Si mon père était un traître je ne l'épargnerais pas plus qu'un autre. C'est par ordre du comité de salut public que Bouchotte vous envoie ma feuille ainsi que les autres journaux patriotiques. Si je suis un homme vendu, le brave Audouin, Duval, auteur du républicain, Rousgiff, le
sont comme moi Marat l'était donc aussi. Si Bouchotte est coupable pour avoir éclairé ses frères d'armes, il faut donc aussi accuser les comités de la convention. Pour chauffer mes fourneaux on sait bien qu'il me faut de la braise, foutre. La grande colère du Père Duchesne, N°331 Contre certains brigands qui veulent crever les yeux des Sansculottes pour empêcher de voir leurs brigandages, et leur couper bras et jambes pour mieux manigancer la contre-révolution, en donnant la clef des champs aux aristocrates qui sifflent la linotte, en proposant une amnistie pour tous les traîtres. Son grand serment de braver la vengeance et les poignards de ces scélérats, et de continuer de démasquer les ennemis de la liberté. Il n'y a rien de si foutant que de parler de soi car les bons républicains ne doivent s'entretenir que de la patrie ils lui doivent toute leur existence, et le temps qu'ils perdent en s'occupant de foutaises, qui n'intéressent que Pierre ou Paul est volé à la chose publique! J'ai déjà dit, foutre, que la république est une grande ruche où chaque abeille doit apporter le plus de butin qu'il lui est possible celles qui s'amusent à bourdonner, au lieu d'amasser la cire et le miel, trompent ou trahissent le reste de la famille qui travaille de bon coeur et qui vit de bon accord. Mais quand, dans cette ruche il se glisse quelques frelons pour jeter le désordre, alors toutes les abeilles doivent se réunir pour exterminer l'insecte malfaisant. La meilleure besogne, le premier devoir est de se délivrer de l'ennemi commun. Braves Sans-culottes, c'est vous qui êtes les abeilles dont je parle. Personne plus que moi, foutre, ne respecte votre industrie. Vous ne m'avez jamais regardé comme un boute-feu et un emporte-pièce bien loin de là, foutre, je n'ai cessé de vous recommander l'union et la fraternité. Dans tous les temps je fus votre sentinelle vigilante et j'ai toujours crié qui vive dans les postes les plus avancés. J'ai essuyé toutes les bordées des aristocrates, des royalistes, des Brissotins, mais jamais ils ont pu me faire quitter mon poste, et je suis toujours dans la même guérite où vous m'avez vu depuis le premier jour de la révolution. Quand les conspirateurs et les traîtres ont emportés quelques victoires sur la Sans-culotterie, Marat et le marchand de fourneaux ont été les premiers mis en joue, et si vous ne vous étiez pas rebiffé pour les sauver, s'ils avaient eu cent têtes, ils les auraient perdues l'une après l'autre. Je croyais avoir du relâche et me reposer sur mes lauriers, foutre, lorsque j'ai vu la convention délivrer des serpents et des crapauds du Marais. J'étais d'une joie de bougre en songeant que la constitution républicaine allait rallier les bons Français. Je croyais m'en donner des pilles éternelles, et déjà j'avais quitté mon encrier pour retourner à mes fourneaux. Maintenant, disais je à mes compères et commères, que nos
braves Montagnards ont tous leur tête dans un bonnet, et qu'ils vivent d'un si bon accord, la machine va marcher sans le moindre choc. A l'aide de sainte guillotine qui va nous raccourcir tous les scélérats, personne ne sera aussi audacieux pour trahir la république. Ainsi donc je rengaine toutes mes colères, et je ne reprendrai la plume que pour exprimer ma joie sur toutes les victoires que nous allons remporter mais, foutre, les fripons et les traîtres vont et viennent comme les ombres chinoises, et comme on dit, un clou chasse l'autre. Mon rêve n'a duré qu'un instant, et je n'ai pas tardé à réfléchir que tant qu'il y aura des trésors à gaspiller, il existera des voleurs, que tant qu'il y aura des sots, il se trouvera des hypocrites pour les foutre dedans et les mener par le nez, que tant qu'il y aura des places et des dignités, il se trouvera des intrigants et des ambitieux qui affronteront la guillotine pour s'en emparer. Ne voit on pas les renards à la barbe du chien de la ferme faire main-basse sur la bassecour, et le loup croquer les moutons à la face du berger le plus vigilant. Bon gré mal gré, il a donc fallu que je continuasse de broyer du noir. J'ai juré comme un charretier embourbé toutes les fois que j'ai trouvé sur mon passage des bougres qui n'étaient pas au pas mais quand j'ai rencontré des ci-devant patriotes qui avaient l'air de saigner du nez et de vouloir tourner casaque, je les ai daubé comme les aristocrates. Quand j'ai vu Chabot, que j'aimais autrefois comme mes petites boyaux lorsqu'il était un des plus fermes soutiens de la Sans-culotterie quand je l'ai vu, bras dessus bras dessous, avec les plus fieffés garnements de l'ancien régime, et cajolé par toutes les muscadines, d'abord je me suis mis tout bas en colère contre lui. "Est ce que tu voudrais aussi nous faire faux bon, lui ai-je dit prends y garde, foutre car, comme dit le proverbe dis moi qui tu hantes, je te dirai qui tu es". Il s'est foutu de mes avertissements et du qu’en-dira-t-on, et pour s'achever de peindre, il s'est marié à qui, à je ne sais quelle bohémienne qui est tombée amoureuse de lui, dit-il, sans l'avoir vu. Et quelle est cette bohémienne encore? C'est la fille d'un aventurier, faisant une poussière de prince à la cour de Vienne, et dont l'impératrice, mère de la louve que nous avons raccourcie, a tenu tous les enfants sur les fonds de baptême. En voyant un mariage aussi biscornu, n'y avait il pas de quoi se débaptiser soi-même? N'est ce pas un crime à un sans-culotte français d'épouser une autrichienne? Que deviendraient donc nos jeunes filles qui sont si délaissées depuis la guerre, si le peu de républicains qui peuvent les contenter imitaient un pareil exemple? Un législateur épouser une esclave, et l'esclave d'un des tyrans qui nous font la guerre, quand il y a tant de filles libres qui sèchent sur pied à force d'attendre! Lorsqu'ensuite ce même Chabot coup sur coup, après le conte bleu de son mariage de deux cent mille livres, a le front de faire une complainte au beau milieu de la convention sur ce qu'il n'existe plus de plaine ni de marais, et de faire signe de loin à tous les crapauds, en leur disant qui m'aime, me suit, pour les engager à y venir barboter avec lui, ai-je eu tort de lui chanter sa
gamme? Après tout ce tripotage, j'apprends que mon frocard est à l'ombre pour avoir reçu quelques centaines de mille livres des brigands couronnés. Je jure, je tempête. Ses amis me répondent que c'est luimême qui a déposé cette somme au comité de sûreté générale, en découvrant un grand complot qu'il connaissait depuis plus de six mois. Je réponds pourquoi il n'a pas plus tôt dénoncé ce complot, pourquoi il ne l'a fait que le lendemain qu'il avait été dénoncé lui-même aux Jacobins on me répondra que tout cela s'éclaircira avec le temps. Je le désire foutre mais il n'est pas un bon républicain qui voit clair dans cette bouteille à l'encre, et qui n'ait dit et pensé tout ce que j'ai écrit sur ce chapitre. Eh bien, tonnerre de dieu, on m'en a fait un crime. N’est-il donc plus permis de réfléchir? Faut-il se crever les yeux pour ne pas voir les manigances de certains personnages? On dit que je suis un chef de parti parce que je pense et je parle comme les véritables Sans-culottes. Où est-il donc ce parti? Qu'a-t-il fait? C'est ce qu'on ne saurait dire, foutre. Si c'est être chef de parti que d'être sans cesse à l'affût et de donner la chasse à tous les conspirateurs, si c'est être chef de parti que de braver les poignards, si c'est être chef de parti que de vivre pendant quatre ans entre les baïonnettes et les cachots, que d'être persécuté tantôt par le comité autrichien, tantôt arrêté par le comité des douze, j'en conviens, j'en suis un, et je m'en fais gloire puisqu'on me force à parler de moi. Oui, j'ai toujours conspiré contre les ennemis de la liberté, et je ne lacherai pas prise, foutre. Je me fous de vos propos et de vos menaces, Chabotins et Phélipotins je vous défie de trouver à mordre sur moi. Vous pouvez répéter toutes les kyrielles de calomnies et d'injures dont Carra et Gorsas ont régalé tant de fois les aristocrates. Faites moi paraître comme Marat devant les tribunaux, j'en sortirai comme lui, foutre. Tout ce que vous dites de moi, vous l'avez dit de lui tout ce que vous manigancez contre moi vous l'avez employé contre lui. Vous ne me reprochez pas ce que les feuillants et les Brissotins m'ont reproché avant vous. Je n'ai pas changé, mais vous jouez leur rôle aujourd’hui. Malgré tous vos coups de chien que l'on connaît maintenant, vous ne diviserez pas les patriotes ils resteront unis à la montagne. On ne donnera pas la clef des champs aux aristocrates qui sont en cage, comme vous le voulez il n'y aura point d'amnistie, et, à votre tour, vous jouerez à la main chaude, foutre. La grande colère du Père Duchesne., N°332 De voir toutes les manigances des Phélipotins contre les meilleurs citoyens, et surtout contre les généraux Sans-culottes à qui l'on veut donner de la pelle au cul, afin de vendre encore des batailles à milord Pitt, et de lui livrer nos villes de guerre. Avant de faire le voyage dans la voiture à trente-six portières, Brissot et sa clique s'écrièrent: "ce qui nous console, c'est que nous aurons des vengeurs. " les jean-foutres savaient bien qu'ils
auraient une arrière-garde d'hypocrites, d'intrigants, d'ambitieux et de traîtres qui, tôt ou tard, prendraient leur place, et qui n'attendaient que le moment favorable pour lever la crête. Cette prophétie n'épouvanta pas les patriotes et ils ripostèrent: "s'il existe encore des conspirateurs, nous les verrons, foutre, et nous les ramasserons au contre. " Cependant on manigançait dans l'ombre de nouveaux coups de chien. Tous les furets de l'Angleterre se mirent aux trousses des patriotes pour les corrompre ceux qui résistèrent à l'appas de l'or ont été assassinés par le poignard de la calomnie. Les royalistes, les feuillants, les aristocrates de toutes les acabies, les complices de Brissot, les voleurs publics se sont tous ligués pour écraser ensemble la liberté. Mais pour mieux jouer leur jeu, tous les gredins ont pris le masque du patriotisme. On n'a plus vu que des bonnets rouges. Ces Sans-culottes de nouvelle fabrique se sont répandus dans les sections, dans les sociétés populaires pour mettre les patriotes à chien et à chat. de tous côtés on a soufflé le froid et le chaud. Les bons citoyens asticotés par ces jeanfoutres, se sont chamaillés, sans savoir ni pourquoi, ni comment leurs ennemis riaient sous cape de leurs disputes, et ils versaient autant qu'ils pouvaient, de l'huile dans le feu. Pour mieux brouiller les cartes, les modérés se sont mis sur les rangs ils ont jeté les hauts cris sur les arrestations la barre de la convention a été assiégée des pleureurs et de pleureuses à gage qui venaient demander d'un ton menaçant la clef des champs pour leurs frères, leurs pères, leurs fils, leurs époux. Comment s'entendre au milieu de ce charivari? La convention est restée ferme et inébranlable, et ces complots s'en sont allées en eau de boudin. Oui, foutre, tant que nos législateurs seront unis, ses ennemis ne tireront que des coups d'épée dans l'eau. Mais, malheur à elle, malheur à la république, si cette union cessait un seul instant. Ceux-là, foutre, qui ont voulu la diviser, en proposant au restant des crapauds Brissotins et Girondins de venir encore barboter dans le Marais, ont proposé la contrerévolution. Le feu de la guerre civile serait il éteint au Midi? Lyon, Toulon auraient ils été détruits? L'armée chrétienne et royale serait elle détruite s'il avait seulement existé une centaine de Phélipotins dans cette convention? Quels sont donc les scélérats qui osent se plaindre quand la machine est en si beau chemin quand nos ennemis fuient de toutes parts quand les brigands couronnés sont à quia et ne savent plus à quel saint se vouer. C'est au milieu de nos victoires, foutre, que l'on veut nous arrêter. C'est lorsque les Sans-culottes triomphent partout que l'on redouble d'efforts pour les perdre. Les escrocs les voleurs, les plus vils intrigants osent accuser les hommes les plus pures croient ils que le peuple prendra le change? C'est un juge redoutable qu'on ne saurait tromper. Celui qui fût un pilier de tripots qui écornifla les dîners des aristocrates qui fût l'avocat consultant de tous les talons rouges, qui défendit les complices de LaFayette et Dumouriez, celui-là, foutre, aurait beau dire: je suis le vieux
cordelier, doyen des Jacobins. On lui répondra qu'à bonne auberge, il n'y a pas besoin d'enseigne. Plus il vantera ses anciennes prouesses, plus on se méfiera de lui, mieux on le tancera, s'il a tourné casaque à la Sansculotterie. Après s'être autrefois intitulé le Procureur-général de la Lanterne, s'il devient le procureur général de l'aristocratie et de la Phélipoterie s'il propose de former une nouvelle Vendée en mettant en liberté ses bons amis les muscadins et muscadines qui sifflent la linotte, s'il ose appeler les hommes révolutionnaires des hommes de sang, des septembristes, qui lèchent le collier de la guillotine, on lui répondra qu'il frise de près la fatale cravate. Ou plutôt, on ne lui répondra rien. On lui donnera une loge aux petites maisons, et il sera fustigé comme un fou. Mais si cet écervelé, au lieu de profiter de son brevet de folie, continue dans sa fureur de mordre et de déchirer les meilleurs républicains on l'étouffera comme un enragé. Pardon, braves Sans-culottes, si je vous entretiens si souvent d'un aussi mince personnage mais, foutre, vous savez qu'il y avait autrefois à la cour des fous à titre d'office, c'est par eux souvent qu'on découvrait les plus grands secrets et que la mèche était éventée. Or donc, milord Pitt, qui a mis en jeu le niais Camille, et qui s'en sert comme le singe de la patte du chat pour tirer les marrons du feu, vous a, sans le vouloir, dévoilé tous les complots qu'il médite à son agonie. Voilà foutre, la dernière espérance de l'infâme Pitt, et en se débattant avec la mort, il a dit à Phélipotin : "après Brissot, il ne me reste plus que toi. Remue toi de cul et de tête pour me sauver dénonce, accuse tous les Sans-culottes, soutiens que les généraux qui ont détruit la Vendée sont des conspirateurs trouve quelques gobe-mouches pour appuyer tes grandes dénonciations, un Camille, par exemple: attache toi comme une teigne à la personne de ce maudit Bouchotte alors, foutre, ces généraux Sans-culottes qui m'ont fait danser leur bougre de carmagnole seront remplacés par des talons rouges: un nouveau Beurnonville reviendra sur le tapis, alors les Phélipotins pêcheront en eau trouble, alors, je n'épargnerai pas les guinées, je gagnerai des batailles, et je prendrai des villes, et à la fin la contre-révolution! Mets-toi en quatre surtout pour me délivrer de ce comité de salut public qui vient de m'enlever Toulon, et qui va me conduire à la lanterne si toi et tes amis vous ne lui donnez pas un croc en jambes. " N'ai-je pas mis le doigt dessus, foutre, il n'y a pas d'homme assez aveugle pour ne pas voir clair maintenant dans tout le phélipotage. La convention si grande et si forte depuis que ses membres sont unis, ne sera pas le jouet de cette nouvelle intrigue. Après avoir sauvé la France, elle restera à son poste jusqu'à ce qu'elle ait assuré le bonheur du peuple, et les bons républicains environneront toujours la sainte montagne et la défendront jusqu'à la mort, foutre. Encore une petite bouffée de ma pipe à Poinsinet-Camille. Il n'est pas si fou que l'on s'imagine, le benêt Camille et si on le prend pour un niais, je dis, foutre, que c'est un niais de Sologne, car il sait amadouer les
aristocrates et leur escamoter joliment leurs Corsets. Il a vendu plus de cent mille exemplaires de son vieux Cordelier à vingt sols le numéro et il me fait un crime d'avoir débité mes feuilles à raison de deux sols la pièce pour les armées. Il prétend que je suis riche comme un Crésus parce que depuis le mois de juin j'en ai débité cent mille, ce qui fait quatre-vingt-dix mille livres. Une telle somme à un misérable marchand de fourneaux! mais Camille doit rabattre dans son calcul plus de quinze mille livres de dépenses pour achat de presses, et de caractères, le papier, les frais journaliers, les dépenses de bois et de chandelle, la paie de 10 ouvriers, les gratifications de nuit, une augmentation de loyer, ce qui reste est peu de chose et encore n'en ai-je que la moitié, puisque j'ai un associé. Au surplus, j'ai placé mon bénéfice dans l'emprunt volontaire. C'est là que Camille appelle voler la République. La grande colère du Père Duchesne, N°333 De voir que les fripons, les intrigants, les modérés, les royalistes et les aristocrates osent lever la crête, et accusent les meilleurs patriotes de tous les coups de chien qu'ils manigancent contre la liberté. Ses bons avis aux braves Sans-culottes, pour qu'ils soient unis plus que jamais, et qu'ils montrent les dents aux jean-foutres qui veulent diviser la convention, et qui tripotent sous-main un nouveau projet de contre-révolution. Depuis deux ans je n'ai cessé de dire aux Sans-culottes qu'ils ne devaient pas attendre leur salut que d'eux-mêmes car ce n'est que pour eux qu'ils ont fait la révolution, et non pas pour se donner de nouveaux maîtres. Je me suis égosillé à force de leur crier: défiez vous des nobles et des calotins. Les uns m'appelaient vieux bavard, les autres m'ont appelé anarchiste, désorganisateur. Les talons rouges sont restés à la tête de nos armées, comme je l'avait prédit: les jean-foutres les ont livrés à nos ennemis, et ce n'est qu'après les trahisons de La-Fayette, de Dumouriez et de Custine, qu'on s'est rappelé les prédictions du vieux marchand de fourneaux, et qu'on est revenu à son avis, en donnant de la pelle au cul à tous les muscadins qui commandent nos armées, en mettant à leur place des bougres à poil, nés dans le sein de la Sansculotterie. C'est alors, foutre, qu'on est allé beau jeu bel argent, et que tous les esclaves des tyrans ont dansé la carmagnole au Nord et au Midi. Maintenant que ça va, et que tous les brigands couronnés sont forcés de mettre les pouces, ils jouent de leur reste, en employant le vert et le sec pour diviser les patriotes. On fait des querelles d'allemand à tous ceux qui, par leur vertu, par leur courage, ont sauvé la république. Les poltrons qui se sont cachés pendant le combat, veulent arracher les lauriers des vainqueurs, les fripons dénoncent les hommes les plus purs, les traîtres accusent les plus francs républicains de tous les complots qu'ils méditent. C'est ainsi, foutre, qu'après la révolution du 10 août on a vu les Brissotins lever la crête, et clabauder contre les Sans-culottes qui avaient
foutu le trône en canelle c'est ainsi que le vieux Roland vilipendait les Jacobins et cette commune intrépide, l'effroi des aristocrates et le plus ferme appui de la montagne le boudoir de la reine Coco devint un atelier de contre-révolution. C'est là que se manigançaient tous les coups de chien pour perdre les patriotes, c'est là que cette bande de pillards et de brigands se partageaient les dépouilles du peuple c'est là que le friand Louvet était régalé de nanan en composant son fameux discours contre Robespierre c'est là que l'infâme Gorsas recevait à pleines mains l'or et les assignats pour traîner dans la boue tous les amis de la liberté c'est là que le goujat Barbaroux couvrait d'une perruque de boeuf le front tondu de ce ministre de Coblentz, en promettant de lui livrer Marseille et les principales villes des départements du Midi c'est là que Petion Guadet, Vergniaud, Gensonné tripotaient leur bougre de fédéralisme. Malgré cette bande de Cartouches et de Mandrins, qui jetaient des bâtons dans les roues, nos armées étaient partout victorieuses. Les drapeaux tricolores flottaient sur les murs de Bruxelles et la Hollande allait être conquise, mais les victoires devaient bientôt s'en aller en fumée, car les conspirateurs avaient tous les généraux dans leur manche, et le traître Dumouriez leur avait promis de conduire nos braves défenseurs à la boucherie et de livrer nos magasins à l'ennemi, afin d'accabler les républicains à force de revers et de les contraindre à accepter une paix honteuse avec les étrangers. Il n'y avait alors dans le ministère qu'un seul homme qui leur barrât chemin. Le brave Pache, au lieu de donner dans leur tripotage contrerévolutionnaire, les démasqua et resta fidèle à la Sans-culotterie. On mit tout en usage pour perdre celui qu'on n'avait pu corrompre, on appela aussi un imbécile, un sot qui se laissait gouverner par des fripons: on lui reprocha même sa vieille redingote et ses coudes percés. Carra, Gorsas et Brissot dirent alors contre lui tout ce que le vieux Cordelier a depuis copié sur leurs libelles. Le Sans-culotte Pache ne put opposer que sa vertu à tous les assauts de l'intrigue, il succomba, il fût remplacé par le bateleur Beurnonville. Il fallut voir alors tous les patriotes déménager des bureaux de la guerre, une recrue de Coblentz succéda aux braves Sansculottes dont Pache s'était environné. Les deux battants de toutes les portes de ces commis muscadins étaient ouverts à toutes les coquines, et les défenseurs de la patrie couverts de blessures, trouvaient partout visages de bois dans ce nouveau Versailles. Tous les officiers Sansculottes furent opprimés, chassés, emprisonnés, et tous les bandits, auparavant soudoyés par la liste civile, tous les piliers de tripots du PalaisRoyal les émigrés et leurs valets furent placés à la tête de nos bataillons. Les fripons péchèrent en eau trouble. Enfin nous fûmes trahis et vendus à la journée, et il a fallu toute l'énergie républicaine pour sauver la France. Je réfléchis et je dis que nos ennemis se sont toujours servi des mêmes moyens pour nous opprimer. La-Fayette, Dumouriez, et Custine ont suivi la même route. Les Brissotins, comme les jean-foutres de conseillers de Capet, ont persécuté les patriotes et les ont accusés
également d'être des anarchistes. On se sert aujourd’hui d'un autre mot pour avilir les ardents républicains. On les appelle des ultrarévolutionnaires, parce que les mots de factieux et de désorganisateurs sont usés mais foutre, le peuple ne prendra pas le change, ce sont encore les apôtres du modérantisme, les amis de la royauté et les aristocrates déguisés qui les accusent. Ce n'est pas seulement aux généraux Sansculottes, c'est au gouvernement révolutionnaire qu'on en veut. Le comité de salut public est attaqué en même temps que les bougres à poil dont il s'est servi pour sauver la république. Qui ne voit pas, foutre, qu'il y a derrière la toile, comme je l'ai déjà dit, des fripons qui veulent brouiller les cartes et tout désorganiser pour qu'on les oublie? Existe t il donc de nouveaux Brissotins? Non, foutre ce n'est qu'une poignée de misérables intrigants qui veulent se venger des patriotes qui les ont démasqués mais, foutre, si on ne leur montrait pas les dents de bonne heure, et si on ne les arrêtait à temps bientôt peut-être ils seront redoutables car les feuillants, les royalistes et tous les ennemis de la révolution les applaudissent déjà, et ils se rangeraient bientôt sous leur bannière. Il faut donc que tous les amis de la liberté et de l'égalité se rallient plus que jamais autour de la convention car tant qu'elle marchera d'accord avec le peuple, elle triomphera de toutes les cabales et tous les conspirateurs se casseront le nez, foutre. Note du rédacteur. Le traître Carra, avant les Phélipotins, avait dit dans une de ses feuilles: le 12 juin: "Marat et Hébert ont touché 50 mille livres, à la trésorerie nationale, pour le prix de leurs journaux envoyés par le ministre de la guerre dans les départements et les armées... " Bouchotte répondit à cette calomnie par la lettre suivante insérée dans tous les journaux patriotes: "Le fait n'est pas exact, car les abonnements existaient avant le 12 juin, non pas pour ces deux feuilles seulement, mais pour un plus grand nombre de journaux patriotiques qui ne sauraient être trop répandus dans les armées, et c'est le conseil exécutif qui, sur les fonds qui sont à sa disposition, a accordé les 50 mille livres employés à cet usage. Signé, Bouchotte. " D'après cette note, j'avais avancé que le journal de Marat comme les autres feuilles patriotiques, était envoyé dans les armées. J'ai su depuis que Marat n'avait touché aucun fonds pour cet abonnement qui était projeté, mais que sa mort a empêché d'effectuer. Je m'empresse de relever cette erreur, non qu'elle puisse faire le moindre tort à la mémoire de l'ami du peuple mais pour rendre hommage à la vérité. Il serait au surplus bien utile de réimprimer les ouvrages de ce grand publiciste pour l'instruction du peuple. C'est le voeu de tous les patriotes, et il sera sans doute secondé par la convention.
La grande joie du Père Duchesne, N°334 De voir que l'infâme clique soudoyée par milord Pitt, pour brouiller les cartes et mettre les patriotes à chien et à chat, est enfin dénichée, et que les chefs de la conspiration sont maintenant sur le pot. Ses bons avis aux braves Sans-culottes, pour les engager à être unis et à rester sur pied jusqu'à ce que les fripons et les conspirateurs aient tous craché dans le sac. Quand je songe à cette multitude d'intrigants, de voleurs et de traîtres dont nous sommes entourés, je serais souvent tenté de jeter le manche après la cognée, et d'aller m'ensevelir dans le fond d'un bois. Oui, foutre, on est plus en sûreté au milieu des loups, des ours et de toutes les bêtes fauves, que parmi tant de scélérats qui vont et viennent tour à tour, qui se disputent les dépouilles du peuple et le fatal pouvoir d'opprimer les hommes. Il ne faut pas cependant que les bougres qui ont du courage, fléchissent. Plus le danger est grand, plus ils doivent montrer d'énergie. La vie d'un républicain ne lui appartient pas son sang est à la patrie il ne doit respirer que pour elle. Où en serions nous, foutre, sans cette poignée de braves Montagnards qui, pendant neuf grands mois, a résisté à tous les pièges de l'intrigue, bravé les poignards pour sauver la république? Sans ces bougres à poil, Brissot et son infâme clique feraient maintenant la pluie et le beau temps. Paris ne serait plus qu'un monceau de cendres il n'existerait plus un seul jacobin tous les patriotes auraient perdu le goût du pain tout le territoire de la république serait dévasté un crêpe lugubre serait étendu sur toutes nos villes les campagnes seraient couvertes de cadavres on ne verrait partout que l'image de la mort, et ce qui est plus affreux, sur les monceaux de cendres et les débris ensanglantés s'élèverait le trône d'un nouveau tyran. Un des fils du roi Georges-Dandin, ce polisson royal, nommé duc d'York, aurait été couronné roi de France, et graissé de la tête aux pieds dans la cathédrale de Reims par Claude Fauchet, son grand aumônier, avec cette huile puante que les moines assuraient avoir été craché par le père éternel et toute exprès apportée par les anges pour sacrer et rendre inviolables les fils aînés de l'église, c'est à dire, les soixante et tant de tigres qui, pendant quinze cents ans, ont dévoré les entrailles du peuple, et se sont engraissé de son sang. Maintenant l'infâme Dumouriez, pour prix de ses trahisons, serait le connétable de cette nouvelle majesté égorgeante Brissot serait son premier ministre, Carra, Vergniaud, Guadet, Gensonné et tous les chefs de la bande seraient à la tête du conseil royal. Aucun d'eux n'aurait été oublié, pas même le pantin Gorsas qui occuperait au moins la place de premier porte coton. Braves Sans-culottes, quel serait aujourd’hui votre sort? Songezvous, foutre, à tous les maux que vous auriez endurés, à tous ces supplices qu'on vous réservait? Riches égoïstes qui restiez les bras croisés et qui regardiez de loin le combat, croyez vous que vous auriez
été épargnés. Vieillards républicains qui versez des larmes de joie en entendant raconter les exploits de vos fils, vos cheveux blancs ne vous auraient pas fait respecter vous auriez vu votre sang couler avec celui des femmes et des filles. L'enfant aurait été égorgé sur le sein de sa mère. Voilà, foutre, trait par trait l'horrible tableau de la France, si les Sansculottes ne s'étaient pas rebiffés le 31 mai et si les francs républicains n'avaient mis leur tête dans un bonnet. Les conspirateurs auront beau remuer ciel et terre, ils n'ébranleront jamais la masse du peuple qui restera toujours pure. Ainsi donc, foutre, que tous les patriotes s'entendent, ils feront sauter les intrigants et les ambitieux. Les hommes du 14 juillet, du 10 août, du 31 mai, se retrouveront toujours. Les ennemis de la liberté passeront, mais la liberté ne passera jamais. Il ne faut pas s'étonner de voir tant de coquins se succéder nous sommes encore environnés des immondices de la royauté mais peu à peu l'air que le despotisme a corrompu, se purifiera. La révolution jette maintenant sa gourme. Au milieu des orages et des tempêtes, la mer s'enfle et bouillonne ses flots voiturent sur le rivage un limon empesté, mais enfin le calme revient, le soleil reparait et dessèche ce limon qui rend ensuite la terre plus fertile. Ainsi, foutre, tous les coups de chien que l'on médite contre la république, au lieu de la détruire, lui donnent au contraire une nouvelle vie. Ils tiennent les patriotes en haleine ils s'endormiraient dans le repos, le danger les ranime. Plus un bien est acheté, plus il est précieux. La liberté ressemble à une belle femme. Les uns la courtisent, mais pour la déshonorer mais ses faveurs ne sont réservées qu'à celui qui l'aime en tout bien et tout honneur. Pour la posséder, il faut lui faire tous les sacrifices, n'avoir des yeux que pour elle. On ne peut l'obtenir qu'après de longs tourments, mais une fois qu'on a été assez heureux pour en jouir, on ne l'oublie jamais, on ne saurait s'en séparer. Je dis donc, foutre, que tous les bons républicains doivent être constants et inébranlables dans leurs desseins. Quand je découvre quelque nouvelle manigance contre les Sans-culottes, mon front se ride, je jure, je tempête, je brise ma pipe, je renverse mes fourneaux mais pour cela je ne perds pas la carte, je vois venir de loin l'ennemi, et je l'attends de pied ferme si j'ai affaire à un bougre renardé, je tâche d'être plus fin que lui, je me garde surtout de faire un coup fourré, et autant qu'il est possible, je le laisse s'enfiler de lui-même. Il y a longtemps que je furetais pour découvrir la nouvelle conspiration qui est maintenant sur le tapis. Si j'avais d'abord nommé les masques, j'aurais tiré un coup d'épée dans l'eau j'ai laissé les papillons se brûler à la chandelle j'ai vu les fripons se rallier pour perdre les patriotes, j'ai vu les plus vils intrigants accuser les meilleurs républicains je me doutais bien que le viédase qui a osé dire que les patriotes qui ont fait jouer le traître Custine à la main chaude, étaient des agents de Pitt et de Cobourg, avait lui-même la patte graissée par le roi Georges-Dandin, pour armer les Sans-culottes contre les Sansculottes. Quand le sac est trop plein, il faut qu'il crève, foutre. Enfin nous
savons maintenant qui a graissé les roues du brillant carrosse de ce vil intrigant, nous savons qui a meublé si richement le grand hôtel du Figaro de la révolution, nous allons savoir qui a payé les riches domaines acquis par certain charlatan, il y a deux jours marchand de baume sur la place de Tours, et l'un des fameux généraux de la Vendée, qui n'a pas brûlé une amorce pendant la guerre. Il est prouvé maintenant que c'est avec le quibus de milord Pitt que tous ces équipages, ces chevaux magnifiques, ces palais, ces riches possessions ont été payées. Cartouche d'Eglantines est sur le pot. On doit deviner maintenant la cause de sa haine contre Bouchotte, Ronsin et Vincent. On voit enfin les Phélippotins à nu. J'avais donc raison de dire que tricherie revient à son maître. Patience, avec le temps, nous en découvrirons bien d'autres. La Sans-culotterie triomphera de toutes les intrigues. La révolution est comme la voûte d'un pont pour l'élever on est obligé de se servir de toutes sortes d'instruments, mais quand la clef est posée, en tirant une seule cheville, tout l'échafaudage fout le camp, et il ne reste que l'architecture, qui dégagé de cet amas de charpente à moitié pourrie, s'élève avec majesté et brave l'injure des temps. Voilà comme quoi, foutre, nous verrons disparaître les uns après les autres tous les mauvais ouvriers qui ont travaillé à la révolution non pour le peuple, mais pour leur propre intérêt. Les bons travailleurs recevront seuls le prix de leurs peines, mais, foutre, ce ne sera qu'après avoir achevé leur tâche. Le peuple est là pour examiner le travail, il offre à ceux qui l'auront bien servi, la couronne civique et à ceux qui lui auront tourné casaque, le sac fatal où il faudra qu'ils crachent, foutre. La grande colère du Père Duchesne, N°335 Au sujet de tous les complots des intrigants et des fripons, qui ont la patte graissée par milord Pitt pour dissoudre la convention et allumer la guerre civile. Ses bons avis à tous les francs républicains, en leur dévoilant tous les coups de chien et en leur faisant connaître tous les jean-foutres qui les trompent à la journée et qui, comme de plus belle, manigancent sous-main la contre-révolution. Les brigands couronnés jouent de leur reste. La grande débâcle va arriver, foutre, et nous allons voir tous les trônes tomber comme des quilles mais il ne faut pas encore chanter victoire, car tous ces jeanfoutres nous donneront pendant longtemps du fil à retordre. S'il ne leur reste pas assez de puissance pour éviter leur chute, ils ont eu bougrement de moyens de nous nuire. Ce serpent que l'on écrase se replie et darde son poison, il donne souvent la mort à celui qui le détruit. Ce n'est donc pas assez que d'exterminer tous les rois, il faut encore prévenir le mal qu'ils peuvent nous faire, avant qu'ils aient disparu de la terre. Soyons donc plus que jamais sur le qui vive, et quand nous sommes partout victorieux par la force des armes, prenons garde que nous ne
soyons vaincu par l'intrigue. Souvent, foutre, nous n'y voyons que du boeuf. Nous sommes payés pour nous méfier de tout le monde. Ceux qui nous paraissent les plus francs du collier, ne sont la plupart du temps que des hypocrites qui nous cajolent pour mieux nous foutre dedans. Je me souviens que le jour où Cartouche Brissot fût nommé député, fût un jour de fête. "Nous avons obtenu trois bonnes choses aujourd’hui, disaient les pauvres badauds, la constitution, Avignon et Brissot " eh bien, foutre, deux de ces cadeaux du diable ont manqué de donner la mort à la patrie. Il n'est pas un bon Sans-culotte qui ne s'en soit foutu une pille en réjouissance du triomphe de Petion, et pourtant cet infâme Petion, dans le temps où il était l'idole du peuple, aiguisait en secret le poignard qui devait égorger la Sans-culotterie. Guérissons-nous donc une fois pour toutes de cette badauderie qui a perdu toutes les nations. Habituons nous à voir par nos propres yeux et à juger par nous-mêmes. Malheureusement, foutre, on ne voit partout que des dindons qui se laissent mener à la baguette. Le premier qui passe est suivi de toute la bande, et s'il se jette dans un précipice tous les autres suivent son exemple. Tonnerre de dieu, des hommes qui se vantent d'être libres, ne le sont pas de leurs pensées et de leurs actions, s' ils ne font que ce qu'ils voyent faire et ne savent que singer les bougres les plus adroits et les charlatans qui leur jettent de la poudre aux yeux. On doit se rappeler que j'étais d'une colère de bougre quand j'ai vu tout à coup baisser l'argent. C'est encore un coup de chien des banquiers, m'écriai-je. Ils vont lâcher quelques sacs afin que tout le monde les imite, et lorsqu'ils se seront emparés de notre numéraire, ils resserreront les cordons de leurs bourses et ne feront encore une fois tomber nos assignats. On me regarda comme un vieux radoteur, et la suite cependant a prouvé que je n'avais pas tort. La mine est éventée et le complot que j'avais dénoncé, est enfin découvert. Quand j'ai vu les calotins jeter tous au même signal le froc aux orties, quand j'ai entendu ces jean-foutres faire leur confession générale et dire: "depuis quinze ou dix-huit siècles nous vivons aux dépens des sots, nous n'avons jamais été que des escamoteurs, et nous faisons amande honorable devant le peuple que nous avons trompé nous renonçons maintenant à un métier avec lequel il n'y a pas l'eau à boire aujourd’hui, " je me suis encore écrié: "défions nous de ces imposteurs celui qui a trompé toute sa vie, peut encore nous foutre dedans. " j'avais encore raison, puisque ces gueusarts t'ont rentrés depuis dans leurs boutiques de charlatan, et qu'ils continuent, comme de plus belle, leur commerce de confession et d’oremus. Tricherie revient à son maître, comme je l'avais prédit, foutre. Les traîtres se sont pris dans leurs propres filets, et tous ces coups de chien qui étaient dirigés contre le peuple tourneront à son bénéfice. La défroque des prêtres lui produira deux bons milliards, et ce qui vaut mieux encore, il sait maintenant à quoi s'en tenir sur ce chapitre. Son sang ne coulera plus
pour soutenir l'imposture. Il n'y a plus de Vendée, foutre, et jamais on ne verra des républicains s'égorger pour les menus plaisirs de la bougre de calotte. Chacun adorera son dieu à sa manière celui qui croira avoir un petit bout de chair de trop, et être damné pour manger du lard, sera libre de se faire raccourcir tout ce qu'il lui plaira celui qui, pour effacer le crime que ses premiers parents ont commis, en mangeant une pomme, se fera laver la tête, ne sera pas plus troublé. Mais surtout l'homme sage et paisible, qui rend hommage à la raison éternelle, qui ne reconnaît d'autre dieu que la nature, qui admire l'astre du jour, quand il vient éclairer la terre, dont le coeur tressaille de joie en voyant la verdure des près et des campagnes couvertes de moissons, qui bénit paisiblement l'auteur de toutes choses, sans le définir, et sans avoir l'orgueil de vouloir le connaître, qui jouit ses bienfaits, sans exiger de son créateur plus qu'il n'a fait pour lui, qui suit en tout son instinct, qui fuit le mal parce que sa conscience lui dit de faire le bien, qui attend la mort sans la désirer ni la craindre, celui-là surtout sera protégé des lois mais, foutre, si les sots veulent obliger ceux qui pensent, à croire à leur momeries si le cafard, qui fonde sa cuisine sur la bêtise des cagots, qui trafiquent le paradis avec les vieilles bigotes, veut contraindre le philosophe à prendre le chapelet à dire des litanies, ces mêmes lois viendront au secours du philosophe car, foutre, le premier bien de l'homme c'est son opinion. Nul n'a le droit de la gêner. Toutes les religions sont bonnes quand elles inspirent l'amour de l'humanité, le respect pour les lois, la paix, la concorde mais, foutre, celle qui troublerait les citoyens et qui les armerait les uns contre les autres, au lieu d'être regardé comme l'ouvrage d'un dieu, ne serait au contraire qu'une invention du diable, si diable y a. Je l'ai déjà dit cent fois et je le dirai toujours que l'on imite le Sans-culotte Jésus, que l'on suive à la lettre son évangile, et tous les hommes vivront en paix. Ce Jésus n'a jamais dit comme les prêtres qu'il fallait tuer et égorger ses semblables pour plaire à dieu au contraire, quand une troupe égarée et furieuse poursuivit la femme adultère, il écrivit sur le sable ces mots: que celui de vous qui est sans péché lui jette la première pierre, quand Pierre coupa l'oreille de certain Phélippotin, il ordonna à Pierre de rengainer son épée en lui disant: quiconque frappe du glaive, du glaive sera frappé. Pendant toute sa vie, ce brave républicain fit la guerre aux riches et aux prêtres en un mot, foutre, il n'a jamais existé de meilleur Jacobin. C'est assez parler de prêtres je reviens au chapitre des intrigants c'est sur eux, foutre, que les lois doivent frapper. Après les prêtres, le peuple n'a pas de plus grands ennemis car qui nous a mis sur les bras tous les brigands couronnés? Ce sont les intrigants ce sont eux foutre, qui depuis quatre ans ne nous ont pas donné un seul instant de relâche, qui, malgré vent et marée, ont soutenu l'ogre Capet, pour retirer en son nom et pour partager avec lui les dépouilles du peuple qui, lorsque ce monstre abominable a été raccourci, se sont entendus comme larrons en foire avec l'infâme Pitt, pour mettre les patriotes à chien et à chat: ce sont eux
qui jettent la pomme de discorde au milieu de la convention dans le moment où la république triomphe de tous ses ennemis, qui veulent sauver les fripons que l'on prend les mains dans le sac, et remuent ciel et terre pour perdre les meilleurs patriotes. Patience, justice sera faite la dernière heure de leur vie est sonnée, foutre. La grande colère du Père Duchesne, N°336 Au sujet de tous les coups de chien que les limiers de l'Angleterre manigancent contre les patriotes. Son grand déguisement pour découvrir tous les trous où se cache le restant des hiboux de l'aristocratie, et pour leur donner une bonne fois la chasse. Le monde est plein de jean-foutres qui rechignent sur tout. Quand on fait le bien, ils désirent le mieux. Personne ne leur plait, et ils trouvent à mordre sur les meilleurs patriotes. Parle t on devant eux d'un franc républicain, d'un bougre à poil, républicain jusqu'au bout des doigts ils disent que c'est un démagogue, un enragé, un factieux vantons la sagesse, la prudence d'un citoyen sans reproche, ils soutiennent que c'est un intrigant déguisé, un ambitieux. Celui dont la vertu les offusque, leur paraît un hypocrite: mais, foutre, quels sont ces pieds plats qui osent ainsi blâmer les meilleures choses, et vilipender les hommes les plus purs? Qu'on les épluche, et on verra qu'ils sont, pour la plupart, des feuillants renforcés, des royalistes déguisés, des aristocrates à bonnet rouge, qui veulent se venger de leurs chagrins sur les patriotes. On verra encore tous les fripons faire chorus avec eux. Ceux qui ont regardé la république comme une vache à lait, et qui se sont engraissés à ses dépens, accusent aussi les hommes purs pour faire prendre le change aux Sans-culottes. Dénonçons, disent ils, ceux qui nous connaissent et qui veulent nous démasquer, soutenons que ceux qui nous ont pris les mains dans le sac, sont aussi des voleurs crions à tue-tête contre les agents de Pitt et de Cobourg, et on ne nous soupçonnera pas d'avoir la patte graissée par eux embrouillons les affaires qu'un nuage épais couvre toute la république que les patriotes et les aristocrates, les hommes purs et les fripons soient confondus, alors les Sans-culottes ne sauront plus lequel entendre. Nous nous sauverons dans la mêlée avec le butin, ou si nous succombons, nous entraînerons du moins tous les républicains dans le précipice où nous serons engloutis. Mais, foutre, la vérité triomphera toujours du mensonge les patriotes ont de bons yeux. Je l'avais bien dit que tous les brouillards de la Tamise se dissiperaient, et que bientôt on découvrirait qui faisait agir toutes les marionnettes politiques dont milord Pitt se servait pour nous embêter. On commence à voir derrière la toile tous ces compères. On sait maintenant que ceux qui ont commencé ce branle contre-révolutionnaire, qui ont osé calomnier les patriotes, qui ont accusé les dénonciateurs de Custine d'être les pensionnaires du roi Georges-Dandin, avaient eux-mêmes les poches
pleines de guinées quand ils ont fabriqué toutes ces dénonciations à perte de vue. On saura avant qu'il soit l'âge d'un petit chien dans quel tripot se sont manigancées toutes ces intrigues. J'ai vu un moment les aristocrates riant sous cape de tous ces coups de chien. Leurs faces blêmes, qui s'étaient allongées d'une aulne depuis la prise de Toulon et la destruction des brigands de la Vendée, commençaient à se dérider. Déjà la joie brillait dans leurs yeux creux déjà ils se flattaient que les meilleurs républicains allaient siffler la linotte et que tous les guichets des prisons allaient s'ouvrir pour donner la clef des champs à leurs parents, à leurs amis déjà ils mitonnaient dans leurs têtes sans cervelle de nouveaux plans de contre-révolution une SaintBarthélemy de tous les comités révolutionnaires, de cette maudite commune, de ces Jacobins, de cette montagne dont le nom seul leur fait venir chair de poule. Eh bien, foutre, encore une fois tous leurs châteaux en Espagne s'en vont en eau de boudin. C'est au milieu de ces crises que je me trémousse, et que je suis aux aguets pour examiner les jean-foutres, et leur tirer les vers du nez. Je me déguise sous toute sorte de costumes, et je me faufile partout pour connaître l'air des bureaux. Quand je rencontre quelque mine de la Vendée, quelque face à guillotine, je ne les quitte pas plus que mon ombre je parle d'abord de la pluie et du beau temps, peu à peu la conversation s'enfile, et je plaide le vrai pour savoir le faux. C'est ce qui m'arriva l'autre jour dans le jardin encore appelé Luxembourg, je ne sais pour quoi je voyais roder dans le parterre un grand homme sec en habit noir, avec une perruque à trois marteaux, ayant sous le bras un parapluie, tenant, d'une main, une canne à bec de Corbin, et de l'autre une lorgnette d'approche il visait l'une après l'autre toutes les fenêtres du ci-devant palais, et, de temps à autre, il laissait échapper de gros soupirs. Je m'approche de mon bougre et je singe trait pour trait tout ce qu'il fait. Il me reluque, il me toise comme lui je prends un air consterné. "Monsieur, me dit-il, nous avons sans doute la même pensée. Comme moi, vous gémissez sur le sort des honnêtes gens qui sont ici détenus". Monsieur, lui répondis-je, je ne saurais vous dire tout ce que j'ai dans l'âme, car les murs ont des oreilles. "Monsieur, ajoute l'homme noir, vous m'avez l'air d'un homme comme il faut, voulez vous que nous ayons ensemble quelques instants d'entretiens? Faites moi l'honneur de venir chez moi, là nous pourrons parler sans contrainte et vider notre coeur". Très volontiers, monsieur, lui répondis-je. Je suis mon aristocrate et nous entrons ensemble dans un sapin qui l'attendait à la porte. Dans un autre temps, me dit-il, je vous aurais conduit dans mon carrosse, mais ces maudits Sans-culottes ont mis mes chevaux en réquisition, je suis obligé de marcher maintenant comme un va-nu-pieds. En vérité c'est révoltant. Nous jasons, chemin faisant, sur ce chapitre. Enfin nous arrivons dans je ne sais quelle petite rue du faubourg Saint-Germain. Nous entrons dans un grand hôtel désert. Nous passons d'abord dans le cabinet de Monsieur
qui, me croyant de son bord, se déboutonne au vis-à-vis de moi. Je le gratte où ça lui démange, et j'en dégoise comme si j'arrivais de Coblentz. Je veux, me dit-il, que nous fassions tout à fait connaissance et que ma famille partage avec moi cet avantage. Vous me ferez l'honneur de dîner. C'est autant de pris sur l'ennemi, me dis je en moi-même. Très volontiers, monsieur. Il me conduit dans le grand salon. Là je rencontre une vieille rechignée couverte de plâtre et de rouges, deux jeunes muscadines assez drôleries, mais qui avaient l'air de sécher sur pied, et enfin un foutriquet bien peigné, bien attifé, qui me tire l'escarpin en pirouettant. Après quelques compliments d'usage, on annonce le dîner. Nous passons dans le salon de la boufaille. On me place au haut bout de la table. Je ne perds pas un coup de dent, je vous pompe du Bourgogne et du Bordeaux, et je vous sable mon Champagne sans sonner le mot. Enfin le dessert arrive, entre la poire et le fromage chacun lâche son paquet. "Vous voyez une famille bien unie, me dit le baron, mais qui vit dans des transes continuelles. J'ai le malheur d'avoir trois ou quatre cent mille livres de rentes acquises par trente années de travaux dans la finance. Dites moi, Monsieur, croyez vous que la contre-révolution arrive bientôt, quant à moi je commence à en désespérer? Nous avions formé une société de gens d'affaires, de banquiers, de notaires, de riches capitalistes pour affamer ce maudit peuple. N'ayant pu le réduire par la force, nous croyons le prendre par les vivres. Nous mettions tous les matins sur pied quelques centaines d'estafiers pour faire écraser les femmes et les enfants à la porte des boulangers, notre ruse a été enfin découverte et le pain abonde maintenant. Nos femmes, qui ne croyent pas plus au diable que vous et moi, étaient tout à coup devenues des modèles de piété, et pour la gloire de dieu, elles donnaient à pleines mains l'or et l'argent aux prêtres que les Sans-culottes appellent réfractaires, pour allumer la guerre civile enfin nous avions mis sur le tapis un nouveau projet de banqueroute, ce complot est découvert, et nous sommes au bout de nos rolets, nous ne savons plus de quel bois faire flèche. " Entendant un pareil discours, la moutarde me monte au nez. Sais-tu, vieille tête à gifles, que tu parles au Père Duchesne, foutre! A ce mot toute la foutue nichée disparaît. Je fais un boucan sterlin, et je mets toute la maison en canelle je sors pour dénoncer cette canaille, mais les corbeaux étaient dénichés, foutre. La grande colère du Père Duchesne, N°337 De voir que les brigands couronnés ne savent de quel bois faire flèche, graissent la patte à des endormeurs pour demander la paix, pour allumer la guerre civile dans l'intérieur, en proposant de donner la clef de champs à tous les corbeaux de l'aristocratie, qui sifflent la linotte. Ses bons avis à la convention, pour qu'elle n'abandonne pas la barque avant de l'avoir conduite au port. Les Sans-culottes sont renardés maintenant, foutre ils ne se laissent
plus jeter de la poudre aux yeux on a beau leur dorer la pilule, ils ne l'avalent pas facilement ils se souviennent d'avoir été dupes, et ils ne veulent plus l'être, foutre. Ils regardent à deux fois avant que de mordre à l'hameçon. Ils ont toujours l'oeil au guet, et si par ci par là quelque fripon adroit les fout encore dedans, il ne le porte pas en enfer, il crache en l'air et ça retombe sur son bougre de nez. Vils intrigants, aristocrates maudits, infâmes royalistes, vous vous battez de la tête contre un mur. Tous vos complots s'en iront en fumée. Vous avez commencé la danse et vous payerez les violons, foutre. On se rappelle de quelle manière on a manigancé la guerre actuelle. On n'a pas oublié que le serpent Brissot se plia et replia pour mettre l'assemblée nationale aux prises avec tous les brigands couronnés. Ce monstre nous promettait alors monts et merveilles. "Avant qu'ils soit l'âge d'un petit chien, disait le jean-foutre, les Français planteront l'arbre de la liberté à Vienne, à Berlin Cato elle-même changera sa couronne impériale pour la cocarde tricolore et le grand Turc se fera jacobin". Tous les francs républicains secouaient la tête en entendant ces promesses de Gascon. "Cache tes cartes, infâme coquin, nous voyons ton jeu, lui répondirent ils, tu as la patte graissée par nos ennemis pour nous engager à faire des pas de clerc, et pour nous précipiter dans un bourbier, dont tu sais que nous ne pourrons nous tirer facilement. " Malheureusement, foutre, les patriotes n'étaient pas en force malgré eux, la guerre fût déclarée dans un temps où la France n'avait ni armes, ni fortifications, ni provisions, et pour donner plus promptement le coup de grâce à la liberté, on ne mit à la tête des troupes que des talons rouges qui s'entendaient comme larrons en foire avec l'ogre Capet, pour conduire à la boucherie les soldats de la liberté mais, foutre, plus le danger est grand, plus les hommes libres ont de courage. Les Sans-culottes jurèrent de mourir plutôt que d'être esclaves, ils forgèrent des piques, ils se rebiffèrent contre la cour et les Brissotins qui les vendaient à la journée, enfin le 10 août ils firent le siège de la ménagerie royale tous les ours mal léchés, tous les tigres, toutes les bêtes fauves dont le monstre Capet s'était environné, et avec lesquels il espérait faire curée des patriotes, furent immolés ce beau jour devait être le dernier des traîtres tandis, foutre, que le bras du peuple était levé, il devait exterminer jusqu'au dernier aristocrate. Il fallait, comme je m'égosillais à le dire, traîner par les cheveux l'égorgeur Capet et la louve autrichienne sur les cadavres des Sans-culottes qu'ils venaient de faire massacrer, et leur couper le sifflet, ainsi qu'à leur bougre de race mais les Sans-culottes furent embêtés par des scélérats ils laissèrent la vie à leurs plus mortels ennemis. Les Brissotins employèrent le vert et le sec, non seulement pour se sauver, mais même pour le remettre sur le pinacle et le regrimper sur son trône que nous venions de mettre en canelle. On sait, foutre, combien il nous en a cuit pour avoir été alors des poules mouillées et pour nous être arrêtés en si beau chemin. Tous les brigands que nous avions eu la sottise
d'épargner, levèrent bientôt la crête. Nous fûmes tourmentés plus que jamais. L'infâme clique des Brissotins, des Girondins, des rolandins brouilla les cartes dans la convention. Pendant cinq mois nos législateurs ne s'occupèrent que d'un misérable ivrogne dont la tête ne devait pas peser une once. Il fallut encore une fois que le peuple donnât un grand coup de collier pour faire aller la machine que les fripons avaient enrayée, et le 31 mai fût le dernier acte de la tragédie du 10 août. Depuis cette dernière victoire nos ennemis sont a quia la convention, délivrée des jean-foutres qui jetaient des bâtons dans les roues, a fait chaque jour, plus de bien que les assemblées qu'elle a remplacées n'en avaient fait pendant quatre ans elle a triomphé de tous les ennemis du dedans et du dehors. Les muscadins qui étaient à la tête de nos armées, ont eu de la pelle au cul, et on les a remplacés par de braves Sans-culottes. Les esclaves des brigands qui se partageaient d'avance les lambeaux de la république, ont été rossés à plate couture au Nord et au Midi. Les rebelles de Lyon, de Toulon, ont été pulvérisés. Il n'y a plus de Vendée, foutre. Les feuillants, les royalistes, les aristocrates qui mettaient les patriotes à chien et à chat, sifflent la linotte. Tous les scélérats qui ont trahi la république crachent dans le sac. Ca va, foutre, et ça ira encore mieux. Il existe cependant encore des bougres assez audacieux pour vouloir nous barrer chemin. Les mêmes viédases qui voulaient la guerre quand nous n'étions pas en force pour la soutenir, demandent aujourd’hui la paix à hauts cris, pour nous arrêter au milieu de nos victoires. La paix, tonnerre de dieu! Nous ne devons la faire que lorsque tous les brigands couronnés nous la demanderons à genoux lorsqu'ils auront payé les frais de la guerre. La paix, foutre, non, il ne peut en exister entre des hommes libres et des rois. Nous ne devons point donner de relâche à ces mangeurs d'hommes jusqu'à ce que nous leur ayons rendu tous les maux qu'ils nous ont faits. Oui, foutre, avant que les républicains rengainent le sabre que ces monstres couronnés les ont forcé de tirer, il faut que les rois deviennent l'horreur des peuples qu'ils ont épuisés pour faire une guerre injuste, il faut que tous leurs trônes s'éboulent comme des monceaux de neige aux rayons du soleil il faut que les Anglais, les Autrichiens, les Prussiens, les Espagnols, comme les Français, jouent à la boule avec la tête de leurs derniers tyrans. Quels sont donc les jean-foutres dont la langue miellée ose prononcer ce mot de paix? Ce sont des scélérats qui ont la rage dans le coeur et qui nous préparent dans l'intérieur la guerre la plus meurtrière. Ce sont les mêmes qui déjà nous ont proposé d'ouvrir les prisons et de donner la clef des champs aux corbeaux que nous avons mis en cage. Croyent-ils donc que la convention donnera dans un pareil panneau et qu'elle soit disposée à faire une nouvelle Vendée. Non, foutre, non, avant que de parler de paix, il faut que les ennemis du dehors soient exterminés, il faut que la république soit purgée de tous les traîtres. Législateurs, vous n'abandonnerez point la barque avant de l'avoir
conduite au port. Vous ne quitterez votre poste que lorsque la république sera sauvée et le règne de la liberté et de l'égalité assuré. Ce n'est pas assez, foutre, de nous avoir donné une constitution républicaine, il faut nous en assurer la jouissance, et vous ne devez pas abandonner le temple de la liberté que vous avez eu tant de peine à construire, à des intrigants qui détruiraient bientôt son culte. Votre tâche ne sera remplie que lorsque vous aurez assuré le bonheur du peuple. Continuez, foutre, de mériter les bénédictions des Sans-culottes en donnant la chasse à tous les fripons et en écrasant tous les ennemis de l'égalité. Foutez vous de tous les complots que l'on osera méditer contre vous. Le peuple est là pour vous soutenir tant que vous travaillerez pour sa gloire et sa prospérité. Et vous, braves défenseurs de la république, guerriers républicains, n'êtes vous pas indignés contre les jean-foutres qui veulent vous ravir les lauriers que vous allez cueillir? Quoi donc, on ose parler de paix quand vous voyez les esclaves des despotes fuir devant vous comme des lièvres! Marchez en avant, reprenez Condé et Valenciennes. Portez le fer et le feu dans l'Allemagne, la Hollande, l'Espagne. Vengez vos frères d'armes qui ont été massacrés à vos côtés par les trahisons de l'infâme Dumouriez et du traître Custine. Mais je n'ai pas besoin d'exciter votre courage, vous avez juré de vivre libres ou de mourir vous ne déposerez les armes que lorsque la liberté sera consolidée et quand la république n'aura plus d'ennemis. C'est alors, foutre, que vous rentrerez dans vos foyers, et que nous irons au devant de vous avec des couronnes civiques. Vos amis, vos mères, vos femmes, vos maîtresses vous serreront, en pleurant, entre leurs bras, et nous nous en donnerons des pilles éternelles en buvant à la santé de la république et de ceux qui l'auront sauvé, foutre. La grande joie du Père Duchesne, N°338 De voir que le tocsin de la liberté va se faire entendre chez toutes les nations, et que la dernière heure des brigands couronnés est prête à sonner. Ses bons avis à tous les républicains, pour qu'ils continuent de foutre la chasse aux esclaves des despotes, jusqu'à ce que tous ces mangeurs d'hommes soient dégringolés de leurs trônes. Quand je rumine tout seul sur les affaires publiques, il me passe en la cervelle des idées à perte de vue. Je suis si occupé de mon sujet, que je l'oublie moi-même, et je voyage dans le pays des chimères. Cependant, foutre, tout en bâtissant des châteaux en Espagne, en cherchant à lire dans l'avenir pour savoir tout ce qui doit arriver, quelques fois j'entrevois des tableaux si agréables, je forge des projets qui me paraissent si utiles, que je suis tenté de les coucher sur le papier. Je prends la plume, je griffonne quelques lignes, puis tout à coup j'efface, je déchire mon griffonnage, et j'allume ma pipe transporté de colère, je me frappe le front, et je retourne, en jurant, mon vieux gazon. Il te convient bien, m'écriai-je,
vieux songe creux, d'entretenir le peuple de tes rêveries, et de l'occuper d'un aussi mince personnage que toi, quand tu ne dois lui parler que des jean-foutres qui le trompent à la journée, et des complots des intrigants. Ma boutade se passe, et malgré moi, je reviens encore à mes folies en dépit de la raison, je me livre à mon délire, et j'écris tout ce que je sens, tout ce que je pense. Je me fous du qu’en-dira-t-on. Que l'on m'appelle fou, insensé, je m'en bats l'oeil, et je réponds que souvent il y a plus de sagesse et de bon sens parmi ceux qui sont aux petites maisons, que dans la tête sans cervelle de ces grands politiques qui se croient les premiers moutardiers du pape, qui blâment tout ce qu'ils n'ont pas fait, et qui ne trouvent rien de bon dans tout ce qui existe, quoiqu'on en dise et quoiqu'on glose, je dirai toujours la vérité à ma manière, et pour la dire, je choisirai autant que je pourrai les moments de bonne humeur, car tous les hommes aiment la gaieté, ils souffrent, sans se fâcher, qu'on jette des pierres dans leur jardin, et ils profitent des leçons qu'on leur donne lorsqu'on les fait rire mais ils se cabrent quand on les éperonne trop vivement. Braves Sans-culottes, excusez donc mes lubies, foutre, et pardonnez au vieux marchand de fourneaux de vous raconter une de ses visions. En ruminant l'autre jour, comme je viens de le dire, un vieillard caduc se présente à mon imagination il avait l'air si décrépit qu'à côté de lui je paraissais un cadet. Son visage, quoique couvert de rides, était encore beau, et ses traits inspiraient le respect de longs cheveux blancs tombaient sur ses épaules, et une barbe vénérable couvrait toute sa poitrine, et descendait jusqu'à sa ceinture, ses bras et ses jambes paraissaient desséchés par l'âge cependant il était plein de vigueur, et il marchait d'un train de poste. Une femme superbe, couverte d'un voile épais, le suivait de loin, je veux l'arrêter un moment, il m'échappe, je le conjure de m'entendre et de satisfaire l'envie que j'ai de le connaître. Téméraire, me dit-il, quel est le but de ta curiosité? Sais-tu qui je suis? Apprends que rien ne me résiste, que tout est détruit par moi, que dans ma course rapide je rase les palais des rois comme les cabanes des bergers, que je foule aux pieds tous les trônes, et que je renverse les empires ce flambeau qui éclaire l'univers, je l'ai vu s'allumer ce soleil qui donne la vie au monde, est moins ancien que moi tous ces animaux qui respirent sur ce monceau de boue, depuis le plus petit insecte jusqu'à l'éléphant, je les ai vus sans âme les eaux de la mer sont rentrées sous mes yeux dans les limites où la nature a voulu les renfermer. Eh bien, foutre, lui répliquai-je, qui que tu sois, tu m'entendras plus tu es puissant, plus tu as vu des choses, plus tu en sais, plus tu pourras m'instruire. Es tu devin, sorcier, dieu ou diable? Je ne te lâche pas que tu ne me dises ce que tu penses de l'avenir. Tu demandes, me dit le vieillard, ce qui ne peut être accordé à l'homme. Et, foutre, répondis-je, c'est que je désire savoir si tous les hommes seront un jour, libres et heureux. Tu me parles de liberté, s'écria t il, c'est mon plus bel ouvrage à peine jusqu'à présent a t
on pu l'entrevoir sur la terre mais enfin son règne commence pour ne plus finir. Je suspends ma course pour te parler de cette divinité chérie, et je vais prendre devant toi ma forme naturelle, je suis le temps, le créateur et le destructeur de toutes les choses. En prononçant ces mots, ses vêtements disparaissent j'aperçois des ailes sur ses épaules et une longue faux entre ses mains. Femme qui me suit, c'est la vérité, ajouta t il l'ignorance, le mensonge, la mauvaise foi, la calomnie la font fuir et la dérobent aux yeux des hommes mais tôt ou tard je la venge. Et je la montre telle qu'elle est. Le vieillard fait signe d'approcher à sa belle compagne: elle s'avance d'un pas timide le vieux barbu soulève le voile qui l'entoure. Je la vois toute nue et dans toute sa beauté. Je me jette à ses pieds et je l'écoute en silence. "tu veux savoir de ma bouche, dit elle, quelle sera la destinée de ta patrie? Sois satisfait! Dis aux braves Sans-culottes, qui combattent avec tant de courage pour la liberté, que la victoire va partout couronner leurs glorieux travaux. La dernière heure des rois est sonnée c'est en vain qu'ils se battent contre la mort. Tous les peuples que ces mangeurs d'hommes oppriment, vont s'armer contre leurs tyrans mais pour avancer leur chute, il faut que les Français se hâtent d'achever leur ouvrage. Il faut que tous les patriotes soient unis comme des frères, car ce n'est que par l'union et la concorde qu'ils peuvent exterminer leurs ennemis. Qu'ils ne s'endorment pas dans leurs triomphes. Pour arrêter leurs succès, des hypocrites leur proposeront la paix, mais ils ne doivent jamais la faire avec les rois. Le premier article des traités qu'ils concluront avec les peuples qui se lasseront de combattre pour la tyrannie, doit être signé avec le sang des despotes. Que la convention continue de se couvrir de gloire, qu'elle reste ferme et inébranlable à son poste jusqu'à ce qu'elle ait purgé la république de tous les traîtres. Lorsque la déesse eut achevé ce discours elle m'annonça qu'elle allait me faire lire dans le grand livre des destinées, et me dévoiler tous les événements qui vont suivre la révolution. On se doute bien qu'elle était ma joie, foutre. Je vois la république telle qu'elle sera dans quelques années. Les Sans-culottes ne font plus qu'une seule famille ils ne connaissent plus que la sainte égalité les talents, les vertus sont récompensés, la vieillesse est honorée. On ne voit plus de riches insolents, mais aussi la misère a disparu le faible est protégé, l'infirme est secouru et servi par ses plus de haine, plus de procès tous les citoyens respectent les lois et s'y soumettent aveuglément. Il n'existe plus de culte que celui de la raison la première idole, c'est la liberté. Les campagnes mieux cultivées, sont plus fertiles les villes s'embellissent et deviennent plus peuplées. Partout se retrace l'image du bonheur. Les hommes libres de tous les pays accourent pour contempler un si beau spectacle, et toutes les nations imitent l'exemple des Français. Tous les trônes des brigands couronnés sont renversés, tous les peuples sont enfin libres, ils jurent paix éternelle et amitié inviolable à la nation généreuse qui a brisé
leurs fers. Voilà un beau rêve, foutre, mais bientôt il s'accomplira. Si nous voulons voir ces jours heureux, il faut redoubler de zèle et de courage. En défrichant le champ de la liberté, nous n'avons encore cueilli que des épines il produira bientôt les fruits les plus doux, si nous arrachons les plantes venimeuses mais, foutre, si nous nous rabattons, si nous nous endormons, nous n'aurons fait que de l'eau toute claire. Il n'y a plus à reculer, il faut que nous soyons des hommes libres, ou les plus vils et les plus malheureux des esclaves, foutre. La grande joie du Père Duchesne, N°339 De voir que les bons Sans-culottes continuent de prendre coeur à l'ouvrage, et qu'ils sont toujours disposés à exterminer les ennemis du dedans et du dehors. Ses bons avis aux braves Montagnards, pour qu'ils laissent japper tous les roquets de l'aristocratie qui osent se plaindre de l'arrestation des hommes suspects. Sa grande motion pour que la bougre de séquelle qui siffle la linotte, soit promptement embarquée pour la Cayenne. C'est un beau titre que celui de républicain mais, foutre, il y a peu d'hommes qui méritent de porter ce nom! Ce n'est pas ce bavard qui crie à tue-tête contre les aristocrates, ce n'est pas ce bel esprit qui fait de beaux discours et qui griffonne de gros livres, ce n'est pas celui qui a toujours le nez en l'air pour voir de quel côté vient le vent, et qui tourne comme une girouette du côté des honneurs et des richesses, ce n'est pas celui qui, bouffi d'orgueil et dévoré d'ambition, traite la Sans-culotterie comme une maîtresse qu'il veut duper, qui la cajole pour obtenir ses faveurs, et qui se propose de lui tourner casaque quand il n'en pourra plus rien tirer ce n'est pas celui qui prend aujourd’hui la livrée des Sansculottes, qui se coiffe du bonnet rouge, ce n'est pas l'homme à moustache, cet enfonceur de portes ouvertes, qui jappe de loin comme le chien de la ferme qui au lieu d'aller sur les frontières combattre les ennemis de la liberté, traîne à son cul de chien un sabre à la Malbrough, et fait le crâne dans tous les tripots, balaye tous les bureaux pour demander des places qui ne devraient être accordées qu'au courage et à la vertu. Non, foutre, non, ce n'sont pas là des républicains. Pour être républicain, foutre, il faut aimer sa patrie plus que soimême, ne vivre que pour elle, lui sacrifier fortune, amis, parents, tout ce qu'on a de plus cher, être toujours prêt à verser son sang pour elle il faut être bien faisant, juste et surtout honnête homme car, foutre, il n'y a pas de patriotisme sans probité il faut mépriser l'argent et les dignités, n'employer ses talents que pour le bonheur commun. Peu de riches se reconnaîtront dans ce portrait, et pour trouver des bougres tel que je les peins, il ne faut pas les chercher dans les palais, ni dans les magasins des gros marchands et trafiquants, mais dans les greniers qu'ils habitent.
C'est là, foutre, que je rencontre l'artiste Sans-culotte quoique réduit à la besace par la révolution, il n'est pas moins joyeux. Je suis gueux comme un rat d'église, dit-il, mais je m'en fous. Dans l'ancien régime, je faisais grande poussière, j'avais de beaux appartements, des cabriolets, des diamants, mais il fallait acheter toutes ces folies par bassesses. J'étais aux gages du dernier pied-plat. Je dépendais des caprices des plus sots et des plus méprisables personnages. L'ignorant financier forçait mon pinceau à décorer le boudoir de la coquine avec laquelle il dévorait la substance du peuple quand je voulais peindre les grâces et les amours, une vieille duchesse édentée venait me relancer dans mon atelier, et bon gré, mal gré, m'obligeait de faire son portrait. Si je rendais fidèlement ses traits, mon tableau n'était qu'une croûte pour lui plaire, il fallait lui retrouver sa figure de quinze ans, et lui prêter tous les airs du premier âge. Ainsi, foutre, tous les hommes à talents n'étaient que des esclaves. Je suis libre aujourd’hui, et je puis travailler pour la gloire. Le bon temps reviendra bientôt. Les beaux-arts seront protégés et honorés par la république. On élèvera des monuments publics à la gloire des grands hommes on construira des temples à la liberté, à l'égalité, à la raison, à la philosophie. C'est alors que nous ferons une abondante moisson. C'est ainsi que pense le véritable républicain mais, foutre, veut on connaître la fine fleur de la Sans-culotterie, que l'on visite les galetas des ouvriers c'est là, foutre, que se trouvent les hommes purs, les véritables républicains. Le pauvre bougre qui vit au jour le jour et qui sue sang et eau pour nourrir sa famille, il faut le voir dans son ménage, il faut lire dans son coeur pour savoir comme il aime sa patrie ce n'est pas pour lui qu'il est patriote il ne vise pas aux grandes places mais, foutre, comme il a été longtemps opprimé et avili, comme il connaît le malheur, il bénit la révolution, il soutient la république, parce qu'il sait que la république rendra tous les hommes heureux. Quand il arrive quelque grabuge, quand les aristocrates manigancent quelques coups de chien contre la liberté, il prend son sabre et sa pique, il vole à sa section, et reste sur pied jusqu'à ce que l'ordre soit rétabli quand le son du tambour appelle tous les jeunes citoyens à la défense de la république, il va lui-même enrôler ses fils: "mes enfants, leur dit-il, en armant leurs bras, vous étiez l'espoir de ma vieillesse mais avant d'être à moi vous apparteniez à la patrie allez combattre ses ennemis, revenez victorieux, et à votre retour j'éprouverai plus de joie que le jour où vous êtes nés si vous perdez la vie pour la cause de la liberté, je m'en consolerai en songeant que vous avez fait le devoir de bons citoyens je marcherai à mon tour et je vengerai votre mort". Quelle différence, foutre, de ces sentiments d'avec ceux des hommes de l'ancien régime! Le jour de la milice était un jour de deuil. Le père maudissait son fils quand il lui voyait la cocarde au chapeau et suivre le racoleur qui l'avait embauché mais alors, foutre, le soldat n'était qu'un misérable esclave. C'était en pure perte qu'il versait son sang. Il
combattait pour la tyrannie, et aujourd’hui il défend la liberté. Aussi, foutre, c'est dans les armées qu'existe le véritable patriotisme. Les guerriers républicains vont au combat aussi gaiement qu'à la noce. Ils endurent sans se plaindre le froid et le chaud qu'ils aient le ventre vide ou plein, ils s'en foutent, et sans habits, sans bas, sans souliers, on les a vu cent fois pousser l'ennemi, la baïonnette dans les reins et enlever des redoutes en dansant la carmagnole. S'ils tombent sous les coups de l'ennemi, leur cri est celui de vive la république. Sauveurs de la Sans-culotterie, braves Montagnards, qui avez fondé la république, achevez votre ouvrage, foutre. Laissez japper tous les roquets de l'aristocratie et continuez de mériter les bénédictions du peuple en le délivrant de tous ses ennemis du dedans et du dehors. Toute votre force est dans ce peuple qui vous chérit et qui ne vous abandonnera jamais mais, foutre, prenez garde de faire un seul pas en arrière. Des bougres d'endormeurs osent vous parler de grâce en faveur des gredins qui sifflent la linotte. Songez que ces viédases, qui mettent aujourd’hui les pouces, aiguisaient, il y a quelques mois, les poignards pour vous égorger. Ils font aujourd’hui les chiens couchants ils vous flattent, mais c'est pour mieux vous mordre, si vous leur donniez la clef des champs. Ah, foutre! Si l'assemblée constituante n'avait pas saignée du nez avant de mettre la clef sous la porte et d'abandonner le terrain aux amateurs de la liste civile, si elle avait fait, comme vous, coffrer tous les feuillants, tous les royalistes, tous les aristocrates, elle se serait couverte de gloire et elle aurait empêché le sang de plus d'un million d'hommes de couler. Vous, Montagnards, vous, foutre, qui avez réparé ses sottises en faisant raccourcir le tyran qu'elle nous avait laissé sur les bras, tandis que vous tenez la balle, profitez en. Soyez fermes et inébranlables. Achevez d'exterminer l'aristocratie. Purgez la République de tous les intrigants, des fripons, des conspirateurs qui veulent vous faire aller comme des écrevisses il n'y a plus à reculer, foutre, le vin est tiré, il faut le boire. Envoyez à Cayenne toute la séquelle des hommes suspects. N'allez pas encore une fois mêler l'ivraie au bon bled sauvez vous en nous sauvant, foutre. La grande joie du Père Duchesne, N°340 De voir que le roi Georges-Dandin ne sait plus à quelle branche se raccrocher, et que sous peu de jours cet échappé des petits maisons et milord Pitt vont danser la carmagnole. Ses bons avis aux Ecossais et aux Irlandais pour les engager à commencer la danse à l'aide des Sansculottes français qui se préparent à s'embarquer et à faire une descente sur leurs côtes, pour leur donner un bon coup d'épaule. Dans le royaume des aveugles, les borgnes sont rois c'est à dire, foutre, que lorsqu'on ne trouve pas mieux, on se contente de ce qu'on a. Le pauvre bougre qui, toute l'année, est réduit à manger du pain bis, fait
carnaval quand il peut mettre au pot un morceau de lard. C'est ainsi, foutre, que les Anglais, dans le temps où ils étaient un peu moins fous que nous, nous regardaient comme des poupées et des marionnettes. Quand ces bougres à l'huile voyageaient en France, ils trouvaient à mordre sur tout ce qu'ils voyaient tout les offusquait ils nous appelaient des esclaves, parce qu'ils portaient des fers un peu moins lourds que les nôtres comme nous cependant ils avaient un roi, ce roi avait des ministres, ces ministres avaient des coquines, et le peuple anglais suait aussi sang et eau pour payer les impôts et pour entretenir cette bougre de ménagerie, comme nous celle de Versailles. Je me suis souvent pris de langue et même gourmé à coups de poings avec ces balourds, qui croyaient être sortis de la côte d'Adam, qui s'élevaient jusqu'aux nues, et qui nous ravalaient dans tous leurs discours. Il vous convient bien, leur disais je, foutus fanfarons, de blâmer un peuple qui vaut mieux que vous, et dont vous ne parlez que par envie. Vous nous reprochez des vices, et vous en avez de plus grands. Vous dites que nos femmes nous enrôlent tous dans la grande confrérie, croyez vous que les vôtres ménagent plus votre front, parce qu'elles paraissent froides comme des carafes d'orgeat. Les sournoises vous en font aussi bien porter que les nôtres elles savent se venger des coups de canif que vous donnez dans le contrat, et tandis que milord potau-feu vient semer chez nous ses guinées de coulisse en coulisse miladi, de son côté, prend sa revanche sans avoir l'air d'y toucher, et, dans son absence, lui fabrique des marmots dont il est autant père que l'ivrogne Capet des avortons maudits engendrés par la louve autrichienne. Oui, foutre, on est aussi bien cocu à Londres qu'à Paris. On y boit plus dur, mais c'est de la ripopée. Si, par ci, par là, nous autres Français, nous nous en foutons des piles, c'est un véritable plaisir quand le bon vin nous fait perdre la raison, il nous donne plus d'esprit, c'est avec lui que nous noyons nos chagrins, notre ivresse est toujours gaie mais, foutre, vous autres, enfants bâtards du patriarche qui planta la vigne, les Normands qui vous ont vaincu ne vous ont appris qu'à faire la vendange à coups de gaule, quand vous êtes empaffés de cidre ou de bière, vous êtes aussi lourds, aussi dégoûtants que le compagnon de Saint-Antoine, et comme lui, vous vous vautrez dans votre fumier ne me vantez pas votre punch au raki, au rhum. Quand vous sortez des tavernes, le ventre plein de ce poison, vous êtes furieux comme des taureaux échappés du combat. Passons votre ivrognerie, et revenons à vos vices. Dans la société vous n'êtes que des ours mal léchés jamais vous ne riez que du bout des lèvres: tristes, maussades, après avoir ennuyé, pendant trente ou quarante ans, tout ce qui vous entoure, il vous prend tout à coup fantaisie de déménager de ce bas monde en prenant un déjeuner à l'italienne, ou en vous brûlant votre cervelle mal organisée. C'est ainsi, foutre, qu'on rivait le clou à ces marsouins de la Tamise avant notre révolution, mais aujourd’hui, quel beau champ de bataille nous avons pour les bafouer. Eux, foutre, qui se vantaient d'être les seuls
hommes libres de l'Europe, sont les plus misérables, les plus avilis de tous les esclaves, et nous pouvons à notre tour redoubler les croquignoles sur les bougres de nez à lunette de ces grands politiques. Qu'ils viennent encore nous parler de rois qu'ils ont mis en cage, des tyrans auxquels ils ont fait la conduite de Grenoble, de celui qu'ils ont fait raccourcir, qu'ils n'osent se vanter d'avoir été quelques jours républicains, ils ne leur reste que le déshonneur d'avoir saigné du nez au moment de la victoire! Après avoir brisé leurs fers, ils ont eu la bassesse de tendre les bras pour en recevoir de nouveaux après avoir renversé le trône, ils ont été assez lâches pour le relever eux-mêmes. C'est ainsi que des nègres se rebiffent quelque fois contre le tigre blanc qui se nourrit de leur sang mais leur âme engourdie par l'esclavage, n'est pas assez forte pour immoler ce maître barbare la peur les saisit au moment d'exterminer leur bourreau ils tombent à ses pieds, ils tendent le dos sous le bâton en criant grâce. Voilà, foutre, trait par trait l'histoire de ces Anglais si orgueilleux, leur fierté est celle du cheval, il a beau se cabrer et faire quelques ruades, il est cependant obligé de se laisser brider et grimper par le plus petit jockey qui serre la bride, lui donne de l'éperon et le conduit où il veut, et comme il veut, au pas, au trot et au galop, suivant son caprice. Aujourd’hui, foutre, c'est un échappé des petites maisons qui gouverne cette nation que nous regardions, il y a quelques années, comme la plus libre de l'Europe. Au nom de ce mannequin couronné, un méprisable polisson a entrepris de mettre la France à feu et à sang, et de culbuter toute l'Europe. Tous les badauds de Londres ont taupé dans tous les projets à perte de vue de ce jean-foutre, qui leur a promis plus de beurre que de pain, pour escamoter leurs guinées, ni plus ni moins que l'infâme Calonne, le restant de nos écus. Maintenant, foutre, qu'il ne leur reste plus que les yeux pour pleurer, et qu'ils voyent que milord Pitt n'a pu tirer que des coups d’épée dans l'eau, ces têtes à perruques se mordent le bout des doigts d'avoir été dupes de ce bateleur, pour les consoler et leur remettre le coeur au ventre, Georges-Dandin, qui, non content d'être roi des trois royaumes, prétend encore être le pape de l'Angleterre, ordonne à tous ses fidèles sujets de faire un jeûne universel pour les menus plaisirs du père éternel, et afin d'obtenir son secours pour exterminer tous les républicains "goddem", s'écrient tous les pauvres Sans-culottes, qui n'ont plus ni travail ni secours, nous ne jeûnons que trop depuis la maudite guerre que tu as entreprise sans rime ni raison. S'il ne fallait qu'un carême pour gagner des batailles et prendre des villes, nous en avons fait un si long que toute la France serait déjà conquise. Crois-tu nous attraper avec ta graine de niais, disent aussi tous les marchands ruinés, tous les boutiquiers qui mettent la clef sous la porte, tous les fabricants qui font banqueroute, tous les propriétaires qui sont accablés d'impôts et qui serrent les cordons de leurs sacs. Tire toi, foutu roi de carreau, du bourbier où tu t'es engagé et où tu voulais nous précipiter avec toi, tire t'en comme tu pourras au lieu de te donner la main pour t'en sortir, s'il ne faut qu'un seul coup de pied pour
t'y enfoncer nous te le donnerons, foutre. Courage, foutre, courage, braves Ecossais qui avez jeté le gant et engagé le combat ne lâchez pas prise, et vous triompherez. Votre situation est la même que celle de nos braves Bretons en 1788. Ils commencèrent la danse, et bientôt toute la France suivit leur exemple. Les Irlandais que Georges-Dandin et les autres mangeurs d'hommes auxquels ils ont succédés, ont toujours regardé comme des bêtes à somme, frémissent sous le joug. Ils vous tendent les bras, et ils n'attendent que le signal. Levez vous ensemble, armez vous, faites main basse sur vos tyrans, renversez les bastilles où l'on jette vos défenseurs. Les Sans-culottes français sont là pour vous soutenir. Nos flottes sont prêtes. Devenez, comme nous, un peuple libre et indépendant quand le premier pas sera fait, Pitt et Georges sauteront le pas, foutre je suis bon prophète suivez les avis du Père Duchesne, foutre. La grande colère du Père Duchesne, N°341 Contre les marchands qui se foutent du maximum, et accaparent, comme de plus belle, toutes les denrées contre les épiciers qui volent à la journée les pauvres Sans-culottes contre les marchands de vin qui les empoisonnent plus que jamais avec leur bougre de mélange contre les bouchers qui n'ont plus que de la réjouissance pour les petites pratiques contre les cordonniers qui n'ont plus de cuir pour chausser les Sansculottes, mais qui ne manquent pas de carton pour fabriquer les souliers de nos braves défenseurs. Sa grande joie de voir que petit à petit la vertu de sainte guillotine nous délivrera de tous ces mangeurs de chair humaine. Il faut manger pour vivre, foutre, dit très savamment Molière or donc, les aristocrates qui savent très bien qu'avant d'être libres il faut manger, ne trouvent pas de plus court chemin pour nous mener à la contre-révolution que de nous couper les vivres. C'était le grand cheval de bataille des Brissotins. Ils avaient fait Roland grand pourvoyeur de la république mais comme de fripon à fripon il n'y a que la main, le vieux cornard et ses fournisseurs s'entendaient comme des larrons en foire pour plumer le pauvre peuple, et lui faire la loi car comme on dit: affamé n'a point d'oreilles. Coco pêchait en eau trouble, on lui donnait millions sur millions pour acheter des subsistances chez l'étranger, et le jean-foutre au lieu d'aller moissonner dans le Nord et dans l'Italie, comme il l'annonçait, épuisait au contraire les départements les plus fertiles de la république. Notre or et nos assignats, au lieu de nous procurer de l'abondance, servaient à amener la famine. Les rolandins, les Brissotins, les buzotins et toute la bougre de séquelle aristocratique et fédéraliste ont perdu le goût du pain, et nous autres Sans-culottes, nous avons bon appétit, nous voulons vivre libres et heureux nous avons du pain maintenant, grâce aux décrets de la convention et à l'armée révolutionnaire, qui a mis les fermiers au pas, mais surtout par la vertu de sainte guillotine.
Notre premier bien c'est le pain, je le sais, foutre, quand on en a, on ne meurt pas de faim, mais ce n'est pas assez, tonnerre de dieu, que de ne pas mourir, il faut que les Sans-culottes, en travaillant, vivent joyeux avec ce pain, il faut un peu de fricot il leur faut la goutte patriotique pour les ravigoter quand ils sont exténués de fatigue il leur faut des habits, des chemises, des souliers, ou tout au moins des sabots et bien, foutre, si on n'y met promptement ordre, pas un Sans-culotte ne pourra bientôt plus mettre le pot-au-feu, nous boirons de l'eau comme les cannes, ce qui, suivant moi, est le supplice qui ne doit être réservé qu'aux modérés, aux aristocrates, aux royalistes et aux phélippotins, enfin, nous serons obligés de marcher nus comme des petits Saint-Jean. Oui, les accapareurs se foutent du maximum et ils recommencent sur nouveaux frais tous leurs tripotages pour nous affamer et nous réduire à la plus affreuse misère. Les cultivateurs, les fermiers qui cependant ont tout gagné à la révolution, sont aussi voraces que les bêtes fauves qui ravageaient autre fois leurs moissons. Ils oublient ce que les Sansculottes des villes ont fait pour eux ils ne se souviennent plus de ceux qui les ont délivré de la taille, de la gabelle, de la chasse et de toutes les mangeries de l'ancien régime. Ils ne réfléchissent pas que c'est aux villes que les campagnes doivent toutes leurs richesses car, foutre, que feraient ils de leurs denrées, ces cultivateurs si ladres, s'ils n'y avaient pas de villes pour les consommer? Sans doute il n'y a pas d'homme plus utile, plus respectable que celui qui laboure la terre et qui l'arrose de ses sueurs pour nourrir son semblable. J'aime de tout mon coeur celui qui plante la vigne, celui qui élève et engraisse les troupeaux qui servent à nous nourrir et à nous habiller mais, foutre, le Sans-culotte qui file la laine du campagnard, qui en fabrique des étoffes, celui qui forge le soc de sa charrue et les armes avec lesquelles on extermine les ennemis de la république, ne sont ils pas aussi de braves bougres et des hommes aussi précieux? Tous les hommes qui travaillent sont égaux devant la loi elle doit tous les protéger. Les habitants des campagnes n'ont pas plus le droit d'affamer leurs frères des villes, que ceux-ci d'épuiser les campagnes, et de s'engraisser du sang des cultivateurs. Nous ne faisons tous maintenant qu'une seule famille le riche doit partager avec le pauvre celui qui est fort doit aider celui qui est faible l'homme d'esprit doit éclairer, instruire celui qui a le malheur de ne connaître ni a ni b il faut que tous les bons républicains se tiennent par la main, foutre, et qu'ils soient unis comme des frères. Malheureusement, foutre, il y a peu d'hommes qui pensent ainsi. Tous ont dans la bouche les mots de liberté et de l'égalité, et si peu de gens l'ont dans le coeur! Chacun plaide pour son saint, et cherche à tirer son épingle du jeu. C'est à qui sera le plus fin: l'un veut être libre, et, pour remplir son coffre-fort, tous les moyens lui sont égaux l'autre cherche les honneurs, et, pour y parvenir, il rampe d'abord, et ensuite il écrase tout ce qui s'oppose à son passage. Mais, foutre, je le répète, parmi tous ces égoïstes, cette peste publique, il n'est point de plus coupable que ceux qui
spéculent sur le travail des Sans-culottes, et qui s'engraissent de leur sang. Il est temps foutre, que la Convention donne le coup de grâce à tous les scélérats, qui bravent ses décrets et qui veulent tous nous mettre à la besace. N'est-il pas bien foutant de voir tous les marchés dégarnis depuis que la Convention a rogné les ongles aux accapareurs. Tous les marchands, depuis le plus petit jusqu'au plus gros, semblent s'être donné le mot. Le boucher n'a plus que de la réjouissance et des os pour les petites pratiques le marchand de vin, quand vous vous plaignez d'avoir été empoisonné par son foutu mélange, vous ricanne au nez, en vous disant que c'est du maximum. Le cordonnier n'a plus de cuir pour chausser les Sans-culottes, mais en récompense, il ne manque pas de carton et de papier mâché pour fabriquer les souliers des défenseurs de la patrie. Les regrattiers n'ont plus de beurre ni d'oeufs que pour les grosses bouches les épiciers (je ne suis pas las d'en parler, foutre) ils vous vendent de la poussière de bois pourri pour du poivre, de l'huile d'oeillet pour celle de Provence des fèves brûlées pour du café. Les riches rient sous cape de tous ces brigandages car, foutre, ils n'ont pas de plus grande jouissance que de voir pâtir les Sans-culottes plus la misère est grande, plus ils font bonne chair. Rira bien qui rira le dernier, foutre. Sans-culottes mes amis, vous avez pour vous la raison, la justice, la loi. On veut vous réduire par la faim, mais soyez fermes et constants, et vous forcerez tous vos ennemis à mettre les pouces. Surveillez tous les jean-foutres qui jouent au fin et qui trafiquent les subsistances. Suivez les dans les campagnes, lorsqu'ils vont dans les fermes acheter les denrées pour les empêcher de circuler dénoncez ces fermiers cossus qui refusent de vendre leurs boeufs, leurs moutons et leurs porcs, pour forcer la main des acheteurs. Soyez tranquilles, foutre, la convention est là pour vous soutenir et pour faire respecter ses lois. Si les riches s'obstinent à tourmenter les pauvres, s'ils continuent de manigancer la disette et la famine, il arrivera quelque matin un bon décret qui leur coupera les vivres à eux-mêmes. Oui, foutre, je voudrais que lorsqu'il y aura la moindre apparence de disette, il soit décrété que les riches, les marchands, les gros fermiers et tous ceux qui sont reconnus pour être les affameurs du peuple, soient condamnés à faire carême bientôt l'abondance reviendrait, foutre. La grande joie du Père Duchesne, N°342 Au sujet du décret de la convention, qui donne la clef des champs aux deux braves Sans-culottes Ronsin et Vincent. Ses bons avis à tous les républicains, pour qu'ils se tiennent sur leurs gardes, attendu qu'il existe un nouveau complot des royalistes et des Brissotins pour perdre tous les bougres à poil qui ont fait la révolution du 31 mai, et qui ont sauvé la montagne et la république.
Encore une victoire des patriotes sur les intrigants, les fripons et les aristocrates. Deux de mes compères, braves bougres, s'il en fût jamais, le Sans-culottes Vincent et le général Ronsin, avaient été dénoncés à la convention comme des contre-révolutionnaires, les phélippotins les accusaient d'être des agents de Pitt et de Cobourg les aristocrates faisaient chorus et, de leur côté, ils criaient haro sur ces deux républicains. "s'ils sont des traîtres, disaient les Sans-culottes, nous les renions et nous demandons qu'ils soient raccourcis mais, tonnerre de dieu, s'ils sont innocents, il faut qu'on leur rende une bonne et prompte justice". "rien de plus juste, répondaient nos braves Montagnards mais il faut débrouiller tout ce tripotage car si l'on donnait la clef des champs à des patriotes, avant d'avoir confondu leurs calomniateurs, on aurait l'air de leur faire grâce, et les républicains n'en veulent point. Cependant il est foutant, pour des bougres aussi francs du collier, de siffler la linotte pendant près de deux mois d'être confondus avec les ennemis du peuple, et de manger à la gamelle des aristocrates mais foutre, il est beau de souffrir pour la patrie. Un républicain aime à faire voir les blessures qu'il a reçues en combattant pour la liberté, eh bien! Foutre, nous qui combattons les ennemis de l'intérieur, nous devons aussi nous attendre à recevoir quelques bordées. Plus un patriote est persécuté, plus il sera récompensé: les injures, les libelles, les dénonciations des modérés, des intrigants et des royalistes sont autant de couronnes civiques. Quel est, foutre, le bon républicain qui ne se glorifie pas aujourd’hui d'avoir été pourchassé par les hoquetons bleus de Bailly et de La-Fayette d'avoir été appelé factieux par le cocâtre Dandré d'avoir été plongé dans les cachots, quand les patriotes étaient égorgés au Champ-de-Mars d'avoir escamoté la guillotine, quand les Brissotins faisaient la pluie et le beau temps, et lorsque l'infâme comité des Douze, comme Kénoir et Sartines, faisait arracher, la nuit, le citoyen des bras de sa femme, et enlever les magistrats au milieu de leurs fonctions. Ronsin, Vincent, mes vieux camarades, ne vous plaignez donc pas de votre sort, foutre. Déjà vous pouvez vous vanter d'avoir été persécutés par les royalistes et les aristocrates, après avoir fait face à l'avant-garde et au corps d'armée des contre-révolutionnaires, vous deviez vous attendre à quelques chiquenaudes de la part des traîneurs. Toi, général de l'armée révolutionnaire, bougre à poil, dont la plume et le sabre sont également redoutables aux ennemis de la liberté ceux qui t'ont accusé de lâcheté, oseraient ils ôter un seul poil de ta moustache? Quand tu te donnais de si bons coups de peigne avec les brigands de la Vendée, que faisait ce Phélippotin qui a voulu te lâcher le coup de pied de l'âne? Dans son carrosse doré, il fuyait à toutes brides et il tournait le cul aux intrépides lurons qui faisaient danser la carmagnole à l'armée royale et catholique? A t il humé de loin seulement la fumée du canon, quand tu combattais comme un lion à la tête des bataillons quand le danger était passé, il revenait en poste sur le champ de bataille faire claquer son fouet, parler
des boulets qui avaient caressé son panache. On ne peut être sali que par la boue fous-toi de toutes les calomnies des intrigants et va ton train. Achève de démolir les nids des aristocrates de Lyon extermine tous les fédéralistes continue d'être la terreur des aristocrates et des accapareurs. Et toi, véritable Sans-culotte, ami Vincent qui n'as jamais bronché d'un pas depuis la prise de la Bastille, franc cordelier, que les phélippotins de 1789 appelaient un factieux, un désorganisateur, un anarchiste toi qui n'échappas au fer des assassins du peuple au Champ-de-Mars, que pour être plongé dans les cachots de la Conciergerie toi que j'ai toujours vu pauvre et vertueux batailler sans relâche avec les ennemis de l'égalité toi que j'ai vu environné de poignards, quand on a donné de la pelle au cul à tous les muscadins qui étaient à la tête de nos armées toi qui as flairé de cent lieues l'infâme Dumouriez, qui as prédit sa trahison dans le temps où il jetait de la poudre aux yeux des meilleurs patriotes toi, foutre, qui as de même dévoilé toutes les manigances du traître Custine et de son palefrenier Houchard, tu avais à dos trop de coquins pour n'être pas persécuté. Mais, foutre, comme je l'avais prédit, tricherie revient à son maître la vérité est plus forte que toutes les intrigues. Celui qui te dénonçait comme un agent du roi Georges-Dandin, est maintenant démasqué son palais, ses châteaux, ses riches ameublements, son carrosse, ses beaux chevaux ne sont pas sortis des brouillards de la Seine mais, foutre, c'est pour lui et ses complices que la Tamise est un fleuve d'or et une source de richesses. Toi, pauvre diable, qui sortiras aussi pur de ta place que tu y es entré, ne va pas jeter le manche après la cognée que tes yeux perçants ne se lassent point d'examiner toutes les intrigues, et de lire dans le coeur de tous les hypocrites frappe à coups redoublés sur les fripons et les traîtres: sois toujours inflexible pour les aristocrates qu'ils te reprochent d'être un cerbère, un ours mal léché tant mieux, foutre mais aussi ne cesse pas d'être le soutien des patriotes, le défenseur des généraux Sans-culottes et l'appui du soldat. Sans-culottes, mes amis, qui êtes témoins de tous les coups de chien que l'on manigance contre les patriotes, soyez plus que jamais sur vos gardes car, foutre, il y a encore bougrement de Brissotins et de royalistes. La guillotine nous délivre des plus connus, mais il y a tant d'aristocrates déguisés, tant de jean-foutres qui singent le patriotisme, que si les républicains s'endormaient un seul instant, à leur tour, ils seraient exterminés. On ne s'amuserait pas à les juger. Oui, foutre, si les aristocrates pouvaient un seul instant jeter le grappin sur nous, les Jacobins, les Montagnards seraient écrasés comme des mouches. Il existe un complot abominable contre les bougres à poil qui ont fait la révolution du 31 mai. Les complices des Brissotins et des Girondins craignent pour leur peau ils savent, foutre, qu'ils frisent la guillotine, et ils emploient le vert et le sec pour se délivrer des hommes courageux qui leur portent ombrage. Cependant, foutre, sans cette révolution, où en serions- nous? Les rebelles de Lyon, de Toulon, de Marseille nous
feraient la loi. Les brigands de la Vendée seraient aux portes de Paris, ou plutôt Paris n'existerait plus. La prophétie de ce bougre d'Isnard serait accomplie pas plus de convention que dessus ma main. Pas un seul montagnard ne verrait le jour. Pitt et Cobourg se partageraient les lambeaux de la république. Républicains, achevez votre ouvrage tenez bon, foutre: ralliez vous sans cesse autour de la montagne qui, avec vous, a sauvé le vaisseau au milieu des orages et des tempêtes. Nous essuierons encore quelques bourrasques mais le plus fort est fait. Les patriotes pourront encore être tourmentés quelque temps mais leur triomphe est assuré oui, foutre, tant qu'ils seront unis, ils seront invincibles mais le jour où ils cesseront de s'entendre, serait le dernier jour de la république. Union, courage, persévérance, voilà notre cri de ralliement vive la liberté, l'égalité! Vive la convention, vive la montagne, foutre! La grande colère du Père Duchesne, N°343 En passant en revue tous les brigands couronnés et les esclaves qui nous font la guerre. Sa grande joie de voir arriver au printemps la grande débâcle qui fera tomber tous les trônes comme des quilles. Ses bons avis à tous les peuples, pour qu'ils fassent danser la carmagnole à tous les rois, à tous les empereurs, et qu'ils mettent avec nous leur tête dans un bonnet, afin d'étouffer tous ces mangeurs d'hommes et cette poignée de bêtes féroces qui s'engraissent du sang des Sans-culottes. Ah! foutre, si le premier homme revenait sur la terre, quelle serait sa douleur de voir toutes les sottises et tous les crimes de ses descendants que dirait-il, en contemplant tous les animaux à deux pieds, qui sont sortis de lui et que couvrent toute la surface de la terre, se déchirer les uns les autres? Pourrait-il retenir ses larmes en voyant tant de nations dans l'esclavage? On nous dit, foutre, que le pommier fatal dont il partagea le fruit avec la mère Eve, que ce maudit arbre de Normandie, était celui de la science du bien et du mal, c'est du moins ce que le diable persuada à sa femme pour lui tourner la tête la sotte se lassa d'être ignorante et innocente, elle voulut tout savoir et tout connaître. Son badaud de mari se fia comme elle aux paroles du serpent, et il mordit le fruit défendu. Mais le diable n'était qu'un Gascon car, foutre, si cette pomme avait eut la vertu de lui donner la science, il aurait lu l'avenir, au lieu de peupler la terre des plus méchants et de plus cruels animaux, il l'aurait abandonné aux tigres et aux bêtes féroces, qui du moins respectent leur espèce et ne se dévorent pas entre eux. Oui, foutre, je voudrais que le papa du genre humain fût un moment témoin de tout ce qui se passe aujourd’hui. En entendant ronfler le canon du Nord au Midi en voyant partout forger des armes, toutes les mers couvertes des vaisseaux, des fourmilières d'hommes s'exerçant aux combats, partout les apprêts de mort et du carnage, des villes réduites en
cendres, les campagnes inondées de sang, et à chaque pas des monceaux de cadavres, "où suis-je", s'écrierait il. "Quel est cet affreux désordre? Ai-je pu donner le jour à cette race criminelle? Ah! Je reconnais les enfants de Caen! Pourquoi, monstres féroces, égorgez vous vos frères? D'où vous vient cette soif du sang de vos semblables? Qu'espérez vous en vous détruisant ainsi? Pourquoi commettez vous tant de forfaits contre la nature" ? Nous n'en savons rien, répondraient les rustres de Prusse et d'Autriche, mais notre auguste monarque, notre grand roi Frédéric, et notre très cher souverain et maître, l'empereur, le veulent, nous n'avons pas le droit de souffler le mot, et de fidèles sujets comme nous doivent se trouver trop heureux de mourir pour leur princes. Il est vrai que nous sommes les plus malheureux des hommes, que nous suons sang et eau pour payer les impôts que nous sommes si accablés sous le fardeau que nous ne saurions plus tenir, et que nous sommes prêts à crever de fatigue et de faim mais c'est égal. "Eh! Quels sont donc, foutre, s'écrierait le premier père, ces deux monstres pour qui vous vous sacrifiez ainsi ?"... S'il faut vous le dire franchement, mais tout bas, l'un est un grand, gros et large butor qui ne sut jamais que boire et dormir pendant la paix, il s'amusait à jouer des gobelets et à faire des cocus tout à coup l'ivrogne a pris le mors aux dents, et parce qu'il était neveu d'un grand guerrier, il a rêvé qu'il serait aussi un fameux conquérant. Il est allé chercher une querelle d'allemand à un peuple qui ne devait avoir rien à démêler avec lui, et dans l'espérance de rendre esclaves vingt cinq millions d'hommes, il a vidé son coffre-fort, et nous a réduit à la besace. Après avoir été étrillé, comme il le méritait, après avoir fait périr cinquante à soixante mille hommes, il est revenu tout penaud trop heureux d'en avoir réchappé, il devait du moins s'en tenir là mais y a t il dans le monde animal aussi têtu qu'un roi. Sur nouveaux frais, il a recommencé la danse et il payera les violons, foutre. L'autre viédase que tu veux connaître est un foutriquet qui n'a pas encore de barbe, sa grande passion était de prendre des grenouilles, au lieu de s'en tenir à ce qu'il avait de poisson pêché et de vivre en paix pour réparer tous les maux que le jean-foutre qu'il remplaçait avait fait à ses sujets, il les a au contraire jeté de fièvre en chaud mal, et il joue maintenant sa couronne royale et impériale à pair ou non. "Quoi! C'est pour de pareils bougres que les hommes s'entreégorgent! Quoi! Vous êtes assez imbéciles pour ne pas vous délivrer des scélérats qui vous arment les uns contre les autres! Quoi! C'est pour les menus plaisirs d'un ivrogne et d'un blanc bec que vous versez des flots de sang!" ce n'est encore rien, père Adam, puisque vous êtes en train de donner la correction à toute la grande famille, allez aussi demander aux Hollandais, pourquoi ils sont de même transportés de la rage d'égorger. Eux qui ont autrefois connu la liberté, ils devraient protéger ceux qui veulent devenir libres. Ils ont secoué le joug des rois et ils sont aujourd’hui les plus vils esclaves. Ils prodiguent toutes leurs richesses, ils versent
leur sang pour soutenir la tyrannie, et ils se laissent museler par une putain mais, foutre, ce qui va vous fâcher encore davantage, c'est de voir le pays de Brutus, Rome gouvernée par un prêtre. Ah! Père Adam, quelle kyrielle de meurtres, d'assassinats, d'empoisonnements! Jamais la guerre, la peste et la famine n'ont autant détruit d'hommes que les monstres sacrés qui font ici baiser leur mule à votre race badaude et crédule. Vous allez frémir d'indignation en jetant un regard sur l'Espagnol abruti. Voyez la terre la plus fertile, sans culture, les plus riantes campagnes presque désertes, les villes dépeuplées, les routes, les grands chemins remplis de moines et de mendiants un peuple stupide et bigot n'ayant d'autre amusement que le combat du taureau et les bûchers de l'inquisition, des hommes couverts de vermine, de reliques et de scapulaires, jeûnant toute l'année encore plus par fainéantise que par cagoterie, toujours à genoux devant les calotins, massacrant les femmes et les enfants de ceux qui ne croyent pas que Saint-Jacques est un des cordons bleus de la cour du père éternel et le premier favori de la vierge Marie. Mais, foutre, le tableau qui vous révoltera davantage, vieux papa, c'est celui de l'Angleterre. C'est là, foutre, que vous verrez un peuple orgueilleux dans la servitude, un ours lié et garrotté qui ose se vanter de sa liberté des marchands, des banquiers, des écumeurs de mer qui veulent envahir toutes les richesses de l'univers, un échappé des petites maisons, et qu'un polisson mène par le nez, régnant sur cette nation avide et sanguinaire, des têtes à perruque et sans cervelle oser tenir la place du représentant du peuple et trafiquant sa liberté avec le tyran. Voilà, père Adam, les scélérats qui, depuis quatre ans ont fait immoler plus d'un million de vos petits enfants. Vous frémissez vos cheveux se dressent vous désirez qu'un nouveau déluge vienne engloutir cette postérité avilie et dégradée qui vous déshonore mais, foutre, pour vous consoler, jetez un regard sur un peuple généreux, la seule espérance de votre race. Les Français, vos dignes enfants, ont juré de réparer tous les maux qui affligent leurs frères ils sont armés ils combattent, mais c'est pour exterminer les tyrans, c'est pour purger la terre des brigands couronnés, de cette poignée d'assassins qui s'engraissent du sang des hommes. La victoire couronne leurs efforts. Ils ont juré guerre éternelle aux despotes et amitié inviolable à tous les peuples qui voudront être libres. Ils ne veulent plus connaître que la liberté, l'égalité, la fraternité, et ils n'ont d'autre culte que celui de la raison et de la justice il faut espérer que bientôt tous les peuples suivront leur exemple et que tous les hommes vivront en paix, foutre. Après avoir ainsi passé en revue tout le genre humain, notre premier père pourrait se consoler dans cette espérance mais, foutre, si nous-mêmes nous détruisions notre ouvrage si, au lieu d'être unis comme des frères, nous pouvions nous déchirer, nous n'aurions fait qu'un beau rêve, notre liberté, notre bonheur et celui de tous les peuples seraient ajournés jusqu'au jugement dernier, et il serait à souhaiter que la gourmande Eve, eut cassé
tous les oeufs de la nichée, foutre. La grande joie du Père Duchesne, N°344 De voir tous les ouvriers républicains forger des armes pour exterminer les tyrans et les Parisiens fabriquer à force le salpêtre qui va foudroyer tous les trônes des despotes. Ses bons avis à tous les Sansculottes pour qu'ils continuent de prendre coeur à l'ouvrage, en leur annonçant qu'avant qu'il soit l'âge d'un petit chien le drapeau de la liberté flottera sur les murs de Condé et de Valenciennes. Les rois sont aussi sots qu'ils sont scélérats. non, foutre, je ne connais rien de si stupide que le monstre qui porte une couronne, si ce n'est la brute qui lui obéit, et qui rampe sous ses lois. Quelqu'en soit, dans mon humeur noire je me rappelle toutes les fanfaronnades, tous les châteaux en Espagne des mandrins qui nous font la guerre, le coeur me saigne en songeant à toutes les sottises que ces mangeurs d'hommes ont faites depuis quatre ans, et je gémis, foutre, de voir tant de peuples enchaînés et tant de millions d'hommes victimes des caprices et de la rage d'une poignée de brigands qu'il est si facile de détruire et qui ne valent chacun qu'un coup de poignard. Habitants du Nord, vos coeurs sont ils donc aussi glacés que vos rochers? Ne seront ils donc jamais échauffés du feu sacré de la liberté? Les ours de vos forêts sont moins abrutis que vous. Leur instinct leur apprend à vivre dans l'indépendance. Jamais, foutre, vous ne pouvez les dompter. Celui que vous avez pris dans vos pièges et que vous muselez, vous épouvante de ses rugissements, et quand il ne peut dévorer son maître, il l'étouffe. Dans je ne sais quel chapitre, le premier prédicateur de la Sansculotterie, le bon, le brave Rousseau a dit que pour être libre, il suffit de le vouloir. Pourquoi donc, foutre, tous les peuples ne sont ils pas libres? Tous les hommes cependant désirent l'être. Le mot sacré de liberté est dans toutes les bouches, et presque toutes les nations languissent dans l'esclavage il faut espérer cependant que bientôt les hommes ouvriront les yeux, et que la terre sera purgée de la peste des rois. Le combat est engagé entre la liberté et le despotisme la raison et la justice triompheront. Oui, foutre, je le prédis, et je ne serai pas un faux prophète, tous les tyrans seront immolés eux-mêmes ils ont filé la corde qui doit les pendre, et ils ne font plus que se battre contre la mort leur dernière heure va sonner tous leur trônes sont ébranlés, et ils vont être engloutis sous leurs débris. Ces jean-foutres savent maintenant ce que peut le bras des républicains. Ils croyaient, au commencement de la guerre, que ce n'était qu'une promenade que d'aller de Berlin et de Vienne à Paris. D'avance ils se partageaient les lambeaux de la France. "Moi, comme empereur et chef du Saint-Empire, disait le muscadin François, j'aurai la première et la meilleure part du gâteau, la fève m'appartient, je retiens donc la Lorraine, la Flandre, l'Alsace, etc. J'y consens, répondait le grand escogriffe de
Prusse, mais à condition que tu m'abandonneras le pillage de Paris et que la Bourgogne et la Champagne seront dans mon lot, car j'aime le bon vin. " C’est ainsi, foutre, que ces deux mandrins se disputaient la peau de l'ours avant de l'avoir couché par terre, comme dit la chanson. Pour mettre le coeur au ventre de leurs pandores, ces deux garnements leur promettaient plus de beurre que de pain. Les troupeaux d'esclaves qui marchaient à leur suite se flattaient d'arriver tout bottés et sans résistance aux portes de Paris. Déjà ils nous débusquaient des Porcherons et de la Courtille. C'est là, qu'en buvant le vin des républicains, ils espéraient partager le butin, après avoir pillé, saccagé et brûlé tous les nids de cocus des pauvres badauds. " Choulis p-tit femmes, choulis p-tit horloges", disaient ces mangeurs de choucroute dans leur baragouin mais quand on compte sans son hôte, il faut compter deux fois. Les balourds ne se doutaient pas qu'entre eux et Paris, il y avait un rempart de vingt-cinq millions d'hommes. Oui, les vagabonds sont entrés en France, mais c'est pour engraisser de leur sang les campagnes qu'ils avaient ravagées. Ils ont passé le Rhin, mais, foutre, c'est pour laisser leurs os sur le rivage oui, ils ont pénétré dans la Champagne ils ont fourragé dans les vignes des républicains, mais, foutre, ils ont perdu le goût du pain. Ils devaient une bonne fois se souvenir de la conduite de Grenoble, que les soldats de la liberté leur avaient fait, et ne pas revenir à la charge. Une seconde fois ils se sont fait étriller et écharper maintenant, foutre, que ces soldats de la royauté, que ces enfonceurs de portes ouvertes sont aussi clairsemés que les épis dans un champ ravagé par la grêle maintenant que la république possède quatorze armées et que douze cent mille bougres à poil sont sur pied pour faire danser la dernière carmagnole aux brigands couronnés ces esclaves jouent des jambes et ils fuient de tous côtés comme des lièvres dans une battue. Ils ne songent plus aux choulis p-tit femmes, aux choulis p-tit horloges, et ils y renoncent, comme leurs maîtres aux provinces qu'ils convoitaient. Mais, foutre, puisque le vin est tiré, il faut le boire. Dans quelques jours nos champs vont reverdir. Le soleil en se rapprochant de nous, va donner la vie à toute la nature, mais son retour annonce la chute de tous les trônes. Ils vont tomber comme la neige du haut des montagnes pour la dernière fois, il éclairera les crimes des despotes. Nos braves guerriers qui, pendant l'hiver, se sont exercés aux combats, vont sortir de leurs cantonnements, ils vont couvrir toutes les frontières. Les armes que nous avons forgées, vont exterminer tous les ennemis de la liberté. Du Nord au Midi, tout retentit du bruit du canon. Encore quelques jours, et le drapeau tricolore flottera sur les murs de Condé et de Valenciennes. Les patriotes liégeois rentreront dans leurs murs, et ils y planteront l'arbre de la liberté, mais, foutre, il prendra cette fois et il ne se trouvera pas un second Dumouriez pour l'arracher. La Belgique sera libre tout de bon, les Sans-culottes hollandais prendront le bonnet rouge, et les gros marchands de morue de La-Haye et
d'Amsterdam nous payeront les frais de guerre. L'infâme Pitt dansera en l'air et le roi Georges essayera à son tour la cravate de Capet. Les gazetiers d'Allemagne nous annoncent que leurs majestés qui leur graissent la patte pour mentir à tant la ligne, vont aussi faire lever en masse leurs fidèles sujets, c'est à dire, foutre, que les racoleurs ne pouvant plus étrenner, on va essayer de faire marcher à coups de bâton les paysans de la Bohême et de la Hongrie. Une pareille recrue sera en effet une véritable masse, sans âme et sans mouvement. Il n'y a que l'amour de la liberté qui puisse arracher le cultivateur de sa charrue. Non, foutre, il n'appartient qu'à des hommes libres d'abandonner leurs foyers, et de se séparer de leurs femmes et de leurs enfants pour voler à la défense de la patrie. L'esclave, en combattant pour son maître, ne fait que river ses fers mais le républicain travaille pour son compte, et il ne verse pas inutilement son sang ce n'est pas à coups de fouet qu'on le fait marcher quand le bruit du tambour le réveille, il vole au combat en chantant. Ah! foutre, si les despotes voyaient quel zèle, quel courage anime tous les jeunes Français, s'ils connaissaient l'ardeur de tous les ouvriers républicains, pour forger les armes qui doivent anéantir la tyrannie s'ils savaient de quelle manière les braves Parisiens fabriquent le salpêtre qui va foudroyer leurs esclaves, comme ils se mordraient les pouces d'avoir entrepris une guerre injuste d'où ils sortiront comme arlequin. Braves républicains, redoublez d'ardeur, et battez le fer pendant qu'il est chaud soyez unis, je ne cesserai de vous le répéter marchez tous de bon accord, et vous allez écraser tous vos ennemis de l'intérieur et du dehors. Encore un grand coup de collier, et la république est sauvée, et vous allez être à jamais libres et heureux. Soyez sur vos gardes gare les trahisons sans les traîtres, depuis longtemps vous seriez au port. Le plus difficile à écorcher, c'est la queue, foutre. La grande colère du Père Duchesne, N°345 De voir que les marchands et les accapareurs se foutent du maximum. Sa grande motion pour que les bouchers qui traitent les Sansculottes comme leurs chiens, et qui ne leur donnent que des os à ronger, jouent à la main chaude comme tous les ennemis de la Sans-culotterie, ainsi que les marchands de vin qui font vendange sous le Pont-Neuf, et qui empoisonnent avec leur ripopée les joyeux républicains. Je prends le mors aux dents, foutre. Transporté de colère, je fous de côté mes fourneaux pour ne plus m'occuper que des accapareurs et des affameurs du peuple. Je leur déclare une guerre éternelle, et j'invite tous les bons Sans-culottes à suivre mon exemple jusqu'à ce que nous ayons mis à la raison cette bougre de canaille. Riches fermiers, marchands et trafiquants de toute espèce, je vous livre un combat à mort. Je n'épargnerai pas plus le marchand de carottes que le plus gros
négociant car, foutre, je vois une ligue formée de tous ceux qui vendent contre tous ceux qui achètent, et je trouve autant de mauvaise foi dans les échoppes que dans les gros magasins. C'est à qui débitera la plus mauvaise denrée c'est à qui gourera le mieux le pauvre chaland. Je ne suis pas moins indigné d'acheter un chou vingt sols, que de payer cent francs une aulne de drap. Ce n'est pas la faute de la convention, car, foutre, elle a employé le vert et le sec pour nous procurer l'abondance, elle a fait les lois les plus sages contre les accapareurs mais ces lois n'ont point été exécutées. On se fout du maximum, et à la barbe de toutes les autorités, les boutiques vendent à prix défendu. bon gré mal gré, pourtant ils ont été au pas pendant quelques jours, et sainte guillotine semblait les avoir convertis, à l'approche de l'armée révolutionnaire, tous les magasins s'ouvraient, les tonnes de sucre et d'épices sortaient des caves où elles étaient cachées, tous les marchés regorgeaient de denrées de toutes espèces, les courtauds de boutique n'étaient plus insolents, et ils faisaient autant de courbettes au Sans-culotte le plus déguenillé pour son gros sol, qu'au muscadin le mieux attifé qui vidait son portefeuille. Qui donc a pu produire d'aussi grands miracles? Je le répète, foutre, sainte guillotine et l'armée révolutionnaire mais depuis qu'on a proposé d'ouvrir les prisons, les espérances des traîtres et des conspirateurs se sont ranimées ils ont recommencé à lever la crête ils s'entendent maintenant comme larrons en foire avec les marchands et les accapareurs pour nous couper les vivres. Des bandits soudoyés par les ennemis de la république, parcourent les campagnes et font rafle dans les villages et dans les fermes, du beurre, des oeufs et de toutes les denrées ils les achètent au poids d’l'or, pour empêcher les pauvres Sans-culottes d'en approcher. Les gens de campagne, qui n'ont d'autre dieu que leur intérêt, prêtent les mains à ce bougre de tripotage ils sont avides d'argent, qu'ils se vendraient euxmêmes au diable tout cornu qu'on le dit, pour grappiller quelques sols de plus. Voilà, foutre, pourquoi les marchés sont dégarnis, voilà la cause de la disette des villes. Millions de foutre, mon sang bouillonne de voir ainsi le peuple ballotté par les fripons et les traîtres. Ca finira, foutre, nous avons des lois, elles seront exécutées ou j'y perdrai mes moustaches, tonnerre de dieu. Quoi donc nous avons foutu la chasse aux nobles, nous avons fait mettre les pouces aux calotins, nous avons raccourci le dernier de nos tyrans quoi? Le Sans-culottisme a ébranlé tous les trônes des despotes, et les marchands nous feraient la loi? Nous nous laisserions manger la laine sur le dos par une poignée de coquins qui rentreront cent pieds sous terre quand nous voudrons leur montrer les dents? N'y a t il pas mille acheteurs contre un vendeur? Eh bien, foutre, que tous les républicains mettent donc leur tête dans un bonnet rouge, qu'ils s'entendent aussi bien que les capons qui cabalent pour les affamer! Que l'avare fermier qui refuse de vendre ses denrées au maximum, soit dénoncé que le manufacturier qui
fabrique de mauvaises étoffes, que le marchand qui vend à faux poids, et qui altère la qualité de ses marchandises, soient punis comme la loi le veut surtout que les riches qui mettent le feu à toutes les denrées, soient pourchassés et daubés comme ils méritent: que tous les accapareurs, grands comme petits, jouent à la main chaude, et bientôt l'abondance renaîtra, et l'ordre se rétablira mais, foutre, pour arriver à ce but, il faut que les administrations ne soient plus composées que des véritables Sansculottes car si on souffre des accapareurs dans les municipalités et dans les comités révolutionnaires, la loi sera toujours méprisée. Je touche du bout du doigt la cause de tous nos maux. Qui voyons nous à la tête de la plupart des municipalités? De riches fermiers, de gros marchands. Les loups du bois ne se mangent point, et ceux-là, qui sont juges et parties malgré nous, à notre barbe et à notre nez, feront toujours la pluie et le beau temps. Que l'on commence donc par balayer toutes les autorités constituées, qu'on en fasse sortir le restant des immondices de l'ancien régime. Pour tuer d'un seul coup l'aristocratie fermière et marchande, que l'on divise toutes les grandes terres en petites métairies, elles en seront mieux cultivées, et, foutre, nous n'aurons pas tous nos oeufs dans le même panier. Le bon Sans-culotte qui n'aura que quelques arpents à labourer, se contentera de vivre libre et heureux il n'aura d'autre ambition que celle de nourrir et d'élever ses petits marmots il n'enterrera pas son bled, mais travaillera mieux son champ. Pour qu'il en produise davantage comme les gros fermiers, il ne tuera pas ses vaches, mais il en élèvera un plus grand nombre pour avoir plus de lait, de fromage et de beurre il ne détruira pas sa basse cour, il la regardera au contraire comme sa première richesse, et il s'empressera, pour jouir de son produit d'échanger ses poules et ses chapons avec les étoffes dont il a besoin. Voilà, foutre, je le répète, le seul moyen de rogner les ongles des gros fermiers, et de réprimer leur aristocratie. Si en même temps on ne vend les domaines nationaux qu'en petites portions, si on met en culture tous les parcs des émigrés, si des vignes et des arbres fruitiers remplacent les sapins et les cyprès des jardins anglais, si la pomme de terre croît dans les larges allées des parterres, si des gazons inutiles sont changés en pâturages, nous aurons des subsistances à vendre, et jamais nous n'éprouverons la disette. Pour faire cesser ce bougre de tripotage des agioteurs et la cupidité des marchands, que l'on double, que l'on triple l'armée révolutionnaire, foutre. Qu'il en soit envoyé de forts détachements dans tous les départements, c'est le seul moyen d'établir le maximum. Que les têtes des affameurs du peuple tombent comme celles des traîtres et des conspirateurs que le boucher qui traite les Sans-culottes comme ses chiens, et qui ne leur donne que des os à ronger, lorsqu'il réserve l'aloyau pour les grosses pratiques, soit raccourci comme un ennemi de la Sansculotterie que le marchand de vin, qui fait vendange sous le Pont-Neuf et
qui empoisonne les républicains joyeux, soit traité de même. Je ne parle pas des boulangers, car, dieu soit loué, nous avons trouvé un bon moyen de les mettre au pas. Le grand garde-manger est bien garni, et le trafic des pains de quatre livres ne recommencera pas de si tôt. Braves Sans-culottes, prenez donc patience et ne vous rebutez pas. Vous avez des lois qui feront votre bonheur quand elles seront exécutées. Mettez toute votre confiance dans la convention qui s'occupe avant toute chose de vos subsistances. Malgré tous les brigands couronnés, malgré tous les coups de chien des ennemis de l'intérieur, elle a trouvé moyen d'alimenter et de tenir sur pied douze cents mille hommes elle verra bientôt tous les tyrans de l'Europe à ses pieds, et elles ne pourront mettre à la raison les marchands et les accapareurs. N'avons nous pas vingt millions de bras pour faire respecter ses décrets, tremblez, sangsues du peuple, sa hache est levée pour vous frapper. Il suffit de sa volonté pour vous réduire en poudre. Le jour de la vengeance est arrivé elle sera terrible, foutre. La grande colère du Père Duchesne, N°346 Au sujet de tous les nouveaux coups de chien que les aristocrates manigancent, pour rebuter les Sans-culottes, et leur faire jeter le manche après la cognée, en les alarmant sur les subsistances. Son grand projet pour rogner les ongles des gros fermiers, des bouchers et de tous les affameurs du peuple, et pour procurer l'abondance aux armées, en réduisant la pitance des riches fainéants et de tous les muscadins et muscadines qui sifflent la linotte. Des bougres qui ne sont ni chair ni poisson, des jean-foutres qui pissent le verglas dans la canicule, s'effrayent de tous les événements. Dans la saison des orages et des tempêtes, ils voudraient jouir des douceurs du printemps. Dans toutes leurs litanies ils ne cessent de répéter: hélas! Que deviendrons-nous? Ce que nous deviendrons, foutre! Rien que ce que nous sommes, des républicains jamais, non, foutre, jamais nous ne reviendrons sur nos pas. Nous avons juré d'être libres, nous resterons libres, malgré tous les brigands couronnés et les millions d'esclaves qu'ils ont armés contre nous. La nature entière serait elle conjurée contre nous, un nouveau déluge fût il prêt à fondre sur nous, la terre dût elle nous engloutir, le monde entier fût il bouleversé, jusqu'au dernier soupir, nous crierons: vive la république, vive la liberté et l'égalité. L'âme d'un véritable patriote est inébranlable, son courage augmente avec les dangers. Il ne redoute qu'un seul malheur c'est celui d'être esclave. Infâmes tyrans, qui, pour nous faire la loi, avez voulu nous épouvanter par des brigandages, des incendies, des massacres, vous vous battez la tête contre un mur, foutre, nos campagnes ravagées, les vieillards, les femmes, les enfants égorgés nous crient vengeance. Le
sang que vous avez versé rejaillira sur vous. Toutes les trahisons que vous avez manigancées pour nous perdre ne feront que hâter votre chute. Vous avez commencé la danse, et, foutre, nous vous avons appris notre fameuse carmagnole la dernière ronde va commencer, et, foutre, vous sauterez le pas, j'en jure par ma moustache. Vous êtes au bout de votre rollet, et vous ne savez plus de quel bois faire flèche vous êtes si bas percés, foutre, que vous n'osez plus nous tenir tête, et vous n'avez plus d'espoir que dans les trahisons que vous cherchez à exciter parmi nous. La disette est votre grand cheval de bataille, vous espérez réduire par la famine un grand peuple que vous n'avez pas la force de combattre. Encore une fois, ignorez-vous de quoi les républicains sont capables? Avez-vous oublié les sièges de Lille et de Landau? Les bougres à poil qui défendaient ces deux places, n'ont ils pas préféré mourir de faim et s'ensevelir au milieu des ruines, plutôt que de capituler? Eh! Foutre, ne vous ont ils pas forcés, par leur constance et leur courage, à rebrousser chemin, et rentrer chez vous comme des colimaçons dans leur coquille? Comme les lièvres, perdez vous donc la mémoire en courant? N'avez vous pas vu nos braves guerriers sans habits, sans bas, sans souliers, vous pousser l'épée dans les reins, et, la baïonnette en avant, vous enlever des redoutes hérissées de canon. Non, foutre, il n'y a que des républicains capables de pareils traits mais, tonnerre de dieu, les Sans-culottes de l'intérieur ne se laisseront pas plus dégoter en générosité. Ils ont aussi une rude guerre à soutenir: environnés d'intrigants, de voleurs et de traîtres, toujours aux prises avec les aristocrates et les royalistes, ils ne cessent de batailler, et ses lâches ennemis, qui veulent assassiner la république, ne sont pas moins cruels que les pandores prussiens et autrichiens. Leurs poignards sont plus redoutables que les canons chargés à mitraille. Diviser les Sans-culottes et les affamer, voilà la devise de cette clique infâme. Des lois salutaires et la surveillance des magistrats Sans-culottes avaient fait cesser la guerre du pain, mais, foutre, la bande de Cartouche, soudoyé par Pitt pour nous tourmenter, est revenue à la charge ces scélérats se sont répandus dans les campagnes, ils y achètent tout ce qu'ils peuvent trouver de vaches et de brebis pleines. Les bouchers, qui ne demandent pas mieux que nous faire manger de la vache enragée, ont donné à plein collier dans cet affreux tripotage la génisse a été égorgée avec le veau qu'elle portait, la brebis et l'agneau qui était prêt à naître, la truite et ses petits marcassins, à peine formés, ont été détruits. Heureusement, foutre, les braves lurons du faubourg Saint-Antoine, qui sont sans cesse à l'affût, ont découvert cet abominable complot, et ils l'ont dénoncé il était temps, foutre, car, en détruisant ainsi toutes les femelles des animaux utiles à l'agriculture, bientôt les campagnes auraient été sans engrais, bientôt les boeufs auraient manqué à la charrue, bientôt nous n'avions plus de laine pour nous vêtir, bientôt plus de cuir pour nous chausser nos armées de terre n'allaient plus avoir de subsistances, et la
gamelle était renversée, plus de salaison pour nos braves marins. Les jean-foutres qui ont prêté les mains à ce nouveau coup de chien, sifflent maintenant la linotte, et j'espère que leur châtiment servira d'exemple à ceux qui seraient tentés de les imiter. Pour réparer le mal que ces coquins ont déjà fait, et pour donner le temps de peupler à toutes les espèces d'animaux utiles qui commencent à s'épuiser, je voudrais, foutre, que l'on prenne d'avance des précautions je me débaptise, foutre, quand je vois de riches fainéants qui ne font oeuvre de leurs dix doigts, et qui ne savent que conspirer et dévorer à eux seuls, toutes nos subsistances. Que l'on commence d'abord par mettre au régime tous ces muscadins et muscadines, toute cette canaille qui regorge dans nos prisons, et qui, au mépris de l'égalité, y fait une chair de chanoine, tandis que les autres prisonniers, beaucoup moins coupables, n'ont que du pain détrempé dans leurs larmes. Je voudrais que dans les halles et les marchés, les hommes utiles, les ouvriers eussent la première part. Les subsistances appartiennent de préférence à ceux qui travaillent pour les autres. Les paresseux ne sont pas même dignes de glaner sur la terre de la liberté. Si notre révolution se perfectionne, comme je n'en doute pas, le Lazare ne sera pas étendu sur son fumier à la porte du mauvais riche en attendant les miettes de sa table mais, foutre, à son tour le Sans-culotte jouira du fruit de ses sueurs, et ce sera le riche égoïste, l'être inutile qui crèvera de honte et de misère, ou plutôt cette race pestiférée disparaîtra. Avant tout il faut songer à nos braves frères des armées. Il n'est pas un bon Sans-culotte qui ne se réduise au pain et à l'eau pour assurer les subsistances de ceux qui défendent la patrie. Je propose donc, et je suis assuré qu'aucun républicain ne me démentira, de faire un carême civique dans toute l'étendue de la république. Le printemps approche lorsque nous pourrons remplacer la viande par les légumes, qu'il soit défendu de tuer un seul animal, bientôt ils fourmilleront dans tous les départements et nous en aurons à revendre. Les gourmands vont crier haro sur moi, mais, foutre, celui qui préfère son ventre à la patrie, doit plier bagage et ne pas rester avec les républicains qui doivent faire tous les sacrifices à la patrie. Eh, foutre! En est-il d'assez grands pour obtenir la liberté? D'ailleurs nous ne ferons que semer pour recueillir. Quand nous aurons chassé nos ennemis de notre territoire, quand la paix sera assurée au dehors et au dedans, nous nous décarêmerons et nous nous en foutrons des pilles éternelles. J'invite donc tous les amis sincères de la liberté à appuyer ma motion. Qu'est ce donc que quelques mois de privation pour assurer la liberté? Ah! Foutre, si nous pouvions jeter le manche après la cognée, si les mangeurs d'hommes, qui veulent nous asservir, pouvaient réussir, il faudrait bien nous attendre à un autre carême. Les Sans-culottes qui échapperaient à la hache des bourreaux seraient condamnés à un jeûne éternel.
Plongés dans le plus dur esclavage, la terre arrosée de leur sang, ne produirait que pour les maîtres barbares qui les feraient expirer dans les plus longs et les plus cruels tourments, foutre. La grande joie du Père Duchesne, N°347 Au sujet de la fête que les Sans-culottes ont célébrée dans le temple de la raison, en réjouissance de l'abolition de l'esclavage des nègres. Ses bons avis à tous les républicains, pour qu'ils continuent de ne reconnaître d'autre culte que celui de la liberté et de l'égalité, en dépit des cagots, des calotins et des intrigants qui cherchent à se raccrocher aux branches, pour tromper le peuple et l'égarer. Si je n'ai pas encore parlé du fameux décret qui abolit l'esclavage des nègres, qu'on ne s'imagine pas, foutre, que le Père Duchesne ait été un des derniers à l'approuver et à bénir la convention d'avoir tranché le noeud gordien, en rendant la liberté à tant de milliers d'hommes. Fallait-il donc tourner si longtemps autour du pot pour savoir s'il peut exister des esclaves dans un pays libre! Quoi donc, la nation française a déclaré dans sa constitution qu'elle donnerait assistance à tous les peuples opprimés, et elle souffrirait qu'au delà des mers on put exercer en son nom la plus odieuse tyrannie. Je sais que des raisonneurs à perte de vue prétendent que sans l'esclavage des nègres, les colonies ne pourraient exister. Tonnerre de dieu! Quelle est la terre maudite qui ne peut rien produire si elle n'est arrosée de sang, et quels sont les fruits amers et empoisonnés qui sortent de son sein? Quoi! Nos îles seraient stériles, si elles étaient cultivées par des hommes libres! Oui, foutre, elles le seraient, mais pour qui? Pour les marchands, les accapareurs, les riches égoïstes, pour ces aventuriers, ces vagabonds, le rebut de l'Europe, pour ces tigres blancs qui s'engraissent du sang des noirs mais, foutre, ces noirs, devenus libres, en seront ils moins industrieux? Deviendront-ils impotents quand ils travailleront pour eux? Croit on que la liberté soit moins puissante pour leur donner du coeur à l'ouvrage que les fouets et les bâtons sous lesquels on les fait expirer? Non, foutre, le nègre devenu libre et propriétaire deviendra plus industrieux, plus actif. Ce ne sera plus pour un maître barbare qu'il arrosera la terre de ses sueurs et de ses larmes. Ses enfants lui appartiendront, ils lui feront chérir la vie en échange du sucre et des autres denrées qu'il aura cultivées, nous troquerons avec lui nos étoffes et les productions de notre sol. Alors nous ferons avec lui des traités d'alliance et de commerce. Heureux, foutre, si le blanc républicain peut un jour, par sa bonne foi et sa justice, faire oublier à l'homme noir tous les maux que ses pères lui ont fait endurer. Ah! Quel beau jour, foutre, que celui où on a vu un brave africain et un mulâtre prendre séance à la convention. Un temps viendra, je l'espère, où tous les peuples de la terre, après avoir exterminé leurs tyrans, ne formeront qu'une seule famille de frères.
Peut-être un jour verra t on des Turcs, des Russes, des Français, des Anglais, des Allemands même réunis dans le même sénat, et composer une grande convention de toutes les nations de l'Europe. C'est un beau rêve qui cependant peut se réaliser. Je ne crois cependant pas, comme le prophète Anacharsis, que nous devions faire les Don-Quichotte, et aller entreprendre une croisade universelle pour convertir à la liberté ceux qui ne sont pas encore dignes de la connaître. C'est au temps et à la raison à faire un pareil miracle. Commençons à établir chez nous cette liberté lorsque les autres nations verront les fruits qu'elle aura produits, lorsque sous des lois sages nous serons tous heureux, alors les hommes qui auront un peu de sang dans les veines, chercheront à nous imiter, et nous donnerons un coup d'épaule à ceux qui voudront sortir d'esclavage. Un événement aussi heureux, foutre, que celui qui anéantit jusqu'au dernier signe de l'esclavage en France devait être célébré par les Sansculottes. La commune de Paris qui, la première, a levé le drapeau de la liberté, vient de rendre hommage à la raison de ce nouveau triomphe. J'aurais voulu, foutre, que la France entière eut assisté à la fête républicaine qui a eu lieu, décadi dernier, en réjouissance de l'abolition de l'esclavage des nègres. Jamais, foutre, les voûtes de la ci-devant cathédrale ne retentirent d'un pareil te deum. Tous les bons Sans-culottes, les sociétés populaires, les autorités constituées environnaient l'autel de la raison. Une députation de la convention vint aussi lui offrir l'encens des représentants du peuple. Tous les regards étaient fixés sur les trois Montagnards américains. Alors, foutre, je me suis rappelé l'histoire ou le roman du Sans-culotte Jésus en contemplant auprès de la statue de la liberté, ces trois braves lurons qui viennent du bout du monde rendre hommage à la divinité des hommes libres j'ai cru voir les trois mages qui visitaient dans son berceau le prétendu fils du patron des cocus. Mais, foutre, ce n'est pas une étoile qui leur a servi de chandelle, mais c'est le flambeau de la vérité qui les a conduit ce n'est pas un dieu mangeant de la bouillie qu'ils viennent adorer, mais c'est la divinité éternelle, c'est la raison. Les bergers et les pastoureaux, en célébrant la naissance du fils de Marie, se réjouissaient de ce qu'il venait de leur naître un nouveau roi, mais, foutre, les Sans-culottes au contraire, dans leurs chants de victoire ont annoncé la chute de tous les rois. Chaumette, agent national, dans un discours rempli de patriotisme, a célébré la liberté des noirs, et tous les bons Sans-culottes lui ont pardonné son réquisitoire de malheur, et dont lui-même il a fait depuis longtemps amende honorable. Tous les bons républicains s'empresseront sans doute d'imiter leurs frères de Paris comme nous, foutre, ils se réjouiront de l'abolition de l'esclavage des nègres. Les sociétés populaires, d'un bout de la république à l'autre, établissent le culte de la raison. Pour prouver comme elles sont au pas, je copie le serment que les Sans-culottes de Moulins viennent de prêter. J'espère qu'il sera bientôt celui de tous les Français. "je jure de maintenir de tout mon pouvoir l'unité et l'indivisibilité de la
république, je jure en outre de reconnaître pour mon frère tout homme juste et vraiment ami de l'humanité, quelque soit sa couleur, sa taille et son pays, je jure enfin de n'avoir jamais d'autre religion que celle de la nature, d'autre temple que celui de la raison, d'autres autels que ceux de la patrie, d'autres prêtres que nos législateurs, ni d'autre culte que celui de la liberté, de l'égalité et de la fraternité. " Voilà, foutre, la véritable religion des patriotes. Voilà la foi des hommes libres, malgré les cagots, malgré les calotins qui cherchent à se raccrocher aux branches, malgré les fourbes et les intrigants, les bons républicains n'auront d'autre culte que celui de la raison. La religion des esclaves ne sera jamais celle d'un peuple libre. Les Français ne s'égorgeront plus pour des prêtres imposteurs qui, au nom d'un dieu de paix, ont inondé la terre de sang, et établi leur domination sur des ruines et des monceaux de cadavres. Si l'être qui nous a créés exige de nous un culte, celui de la raison doit seul lui être agréable. Il a mis dans nos coeurs l'amour de la justice et la haine des méchants. Sa volonté est donc, foutre, que nous soyons humains, bienfaisants et justes, n'importe comment. Puisque la raison seule peut nous apprendre nos devoirs et nos droits, n'écoutons qu'elle seule. Tout le reste n'est que mensonge et imposture. Ainsi donc, foutre, vive la raison, vivent la vérité et l'humanité! Au foutre les prêtres, qui ne savent que mentir, tromper, voler et égorger, foutre. La grande colère du Père Duchesne, N°348 En apprenant une nouvelle conspiration des phélippotins, pour armer tous les ci-devant procureurs, avocats, huissiers et clercs du Haut et Bas Maine, contre les Jacobins et la Montagne. Grand serment prêté par ces cartouches de ne pas souffrir qu'un seul chapon du pays de la chicane, entré dans le garde-manger des Sans-culottes parisiens, jusqu'à ce que le brevet des petites maisons, qui a été délivré à Phélippotin, ait été changé contre un certificat de raison et de probité. Lorsqu'un grand orage se prépare, on aime à le voir se former, à examiner les nuages qui s'élèvent et qui portent la foudre. Il n'y a pas de plus beau feu d'artifice que les éclairs qui en partent, et de musique comparable au bruit du tonnerre mais, foutre, c'est de loin que tout cela est beau, car lorsqu'on se voit environné de feu, quand on entend sur sa tête les roulements des tambours du père éternel, et, comme disent les bonnes femmes, lorsqu'il déchire ses draps, lorsque la grêle renverse les arbres et les maisons, lorsque la foudre, en tombant, ébranle la terre, alors le bougre le plus intrépide est frappé d'épouvante. Ce tableau ressemble à celui de la guerre. Rien de plus beau que les préparatifs lorsque le son de la trompette ou le bruit de la caisse appellent les jeunes républicains aux combats, quel plaisir, quelle joie, foutre, de voir tous les soldats voler aux armes! L'air alors retentit du son des instruments guerriers et des chansons civiques.
Tous les bons Sans-culottes sont émus jusqu'aux larmes. Le vieillard se sent rajeunir, il ranime le peu de forces qui lui restent pour se mettre sur les rangs, et pour voler comme les enfants à la défense de la patrie. Les femmes mêmes oublient leur faiblesse et n'écoutant que leur courage, elles veulent partager les dangers de leurs pères et de leurs époux. Tel est, foutre, en ce moment le grand spectacle que la république nous retrace d'un bout à l'autre. Partout je vois forger des armes. Tous les bras sont occupés à fabriquer les instruments qui vont porter la mort à tous les brigands couronnés et à leurs esclaves. Le salpêtre travaillé par les Sans-culottes, arrive par charretées à la convention. Les routes sont couvertes de chariots et d'équipages de guerre. Encore quelques jours et le grand coup de peigne va commencer. Jamais, foutre, depuis que le monde existe, on n'aura vu une carmagnole semblable. D'un côté, douze cent mille bougres à poil qui ont juré de vivre libres ou de mourir, s'exercent du soir au matin aux combats, et ils brûlent d'impatience de voler à la victoire. Ils n'attendent que le signal pour se précipiter, comme un torrent, sur les lâches et vils satellites des tyrans. De l'autre côté, je vois ces bandes de voleurs et d'assassins, que l'espoir du pillage avait armés qui, après avoir ravagé nos frontières sans défense, saccagé les villes et les villages, égorgé les vieillards, les femmes et les enfants, auraient tous laissé leur os dans les plaines de la Champagne et sur les bords du Rhin, sans les trahisons de l'infâme Dumouriez, du général Moustache et du galfâtre Houchard. Maintenant, foutre, que ces enfonceurs de portes ouvertes savent ce que pèsent les bras des républicains, ils sont comme le chien à Jean de Nivelle, qui s'enfuit quand on l'appelle. Ce n'est plus qu'à coups de bâton que l'on peut remuer ces ours mal léchés. Quoiqu'il en soit cette foutue canaille aura beau mettre les pouces et demander quartier, ils n'en sera plus temps, il faut que tout le sang pur versé par ces monstres soit enfin vengé. Le vin est tiré, il faut le boire, foutre. Tonnerre de dieu, quand je songe au grand combat qui va s'engager entre la liberté et le despotisme, mon sang bouillonne, et je m'arrache les poils de la moustache en songeant que je resterai les bras croisés pendant la mêlée, quoi, foutre, on va donner le coup de grâce à la tyrannie, et le Père Duchesne ne sera pas de la fête! Quoi! Pendant cette guerre sanglante je n'aurai pas seulement dérouillé ma vieille rapière! Quoi, dans mon jeune âge j'étais le plus terrible canonnier-bombardier de toute l'armée je me peignais si dur et si bêtement pour un roi, et je n'aurai pas brûlé une seule amorce pour la république! Je n'aurai pas foutu l'âme à l'envers à un seul Autrichien! Quand nos jeunes républicains, après la victoire, rentreront couvert de lauriers, on me montrera au doigt comme un capon, et je n'oserai plus montrer mon bougre de nez. C'est fini, foutre adieu mes fourneaux, adieu ma Jacqueline, adieu mes petits marmots, je vous quitte pour voler à la gloire. Je pars pour la guerre, foutre mais, nom
d'une pipe, quand je n'y serai plus qui surveillera les traîtres? N'y a t il donc plus de conspirateurs à dénoncer? Aristocrates, royalistes, phélippotins, quelle épine je vous tirerais du pied en allant me faire casser gueule. C'est alors que vous feriez la pluie et le beau temps non, foutre, non, je vous l'ai promis, je ne vous quitterai pas plus que votre ombre, et vous me verrez toujours à vos trousses jusqu'à ce que vous ayez fait la dernière révérence à la statue de la liberté sur la place de la révolution. Si j'ai eu la bouche close pendant quelques instants, c'était pour mieux vous observer. Je connais tous les coups de chien que vous manigancez contre les patriotes. Jean-foutres, vous serez confondus, et je reste pour vous combattre puisque mon lot est d'écraser les crapauds et les serpents qui infectent la terre de la liberté, je renonce aux honneurs de la guerre. C'est toujours servir sa patrie que de la délivrer des plus vils et des plus méprisables de ses ennemis. Ainsi j'abandonne mon projet d'aller batailler avec les brigands du Nord, pour livrer un combat à mort aux CartouchePhilippotins qui osent encore lever la crête. Tremblez, Sans-culottes, vous ne connaissez pas, foutre, tous les dangers qui vous menacent apprenez à ne jamais chanter victoire avant d'avoir foutu votre ennemi sur le carreau. Phélippotin qui devait se trouver trop heureux d'être sorti du combat avec ses longues oreilles, est encore le champion qui va vous donner du fil à retordre c'est un second Charette qui, après avoir été étrillé, sort de dessous terre, et reparait à la tête de nouveaux brigands, en un mot, c'est un bougre à faire trembler la volaille. Aussitôt que les avocats et procureurs du Haut et Bas Maine, ont été informés de la fatale déconfiture, aussitôt qu'ils ont appris que le grand Phélippotin, le dernier espoir de la chicane avait reçu un brevet des petites maisons, tous se sont levés en masse pour venger l'honneur de la robinaille: "Vengeons nous, se sont ils écriés d'une commune voix, déclarons à la face de la Haute et Basse Normandie que Phélippotin a toujours notre confiance, quoique les Jacobins lui aient donné les étrivières. Soutenons malgré la montagne, que Phélippotin a plus d'esprit, de bons sens et de probité que la convention entière demandons à grands cris que Vincent, Ronsin et Rossignol soient remis en cage, et si notre pétition est sifflée, mettons une barrière éternelle entre la Seine et la Sarthe. Jurons que jamais un seul chapon du Maine n'entrera dans le garde-manger d'un Parisien jurons qu'aucun jacobin ne sentira le fumet de nos perdrix jusqu'à ce que Levasseur et Choudieux, ces renégats manceaux, aient été raccourcis, jusqu'à ce que ce maudit Père Duchesne ait éternué dans le sac". Ce serment terrible a été prononcé, foutre, nous voilà dans des beaux draps, mais heureusement qu'il y a de braves gens partout. Il ne faut pas croire que tous les Manceaux soient des phélippotins. Les Sansculottes du Mans doivent se connaître en brigands ils ont vu de près ceux de la Vendée. Ils verront que les phélippotins ressemblent aux soldats de l'armée catholique, comme un petit lièvre à un grand, et eux-mêmes ils se
joindront à nous pour en purger la terre. Au surplus, les gens de loi qui savent si bien dévirer les chapons, ne les élèvent pas malgré les phélippotins, nous mangerons encore des poulardes et des perdreaux mais les phélippotins à force de cabaler et de conspirer, finiront par perdre le goût du pain, foutre. La grande colère du Père Duchesne, N°349 De voir que l'instruction publique ne va que d'une aile, et qu'il existe des accapareurs d'esprit qui ne veulent pas que le peuple soit instruit, afin que les gueux continuent de porter la besace. Ses bons avis à toutes les sociétés populaires, pour qu'elles donnent le grand coup de collier à l'instruction des Sans-culottes, afin d'écraser une bonne fois le fanatisme et la tyrannie. Le plus grand malheur de l'homme, c'est l'ignorance, foutre elle est la cause de presque toutes les sottises et de tous les crimes qui se commettent sur la terre. C'est elle, foutre, qui a engendré tous les maux qui nous affligent. Le despotisme est son ouvrage, le fanatisme est son chef d'oeuvre car, foutre, si les hommes avaient eu le sens commun, jamais ils n'auraient été dupes des tours de gibecière des charlatans à calotte, et ils ne se seraient pas laissé lier, garrotter et museler pendant tant de siècles par les faquins qui osaient s'intituler princes, rois et empereurs. Le premier qui fut prêtre était un bougre un peu plus dégoisé que les sauvages avec lesquels il vivait. Il avait remarqué que son chat se frottait le museau ou que son âne remuait l'oreille toutes les fois que le temps devait changer. Tout fier d'avoir fait cette grande découverte, il s'en servit pour tromper les autres et pour les voler, en leur disant que le père éternel ou même le diable lui soufflaient dans l'oreille pour lui annoncer la pluie ou le beau temps. Comme on sait, il n'y a que le premier pas qui coûte, foutre. L'imposteur, après avoir une fois trouvé des dupes, imagina d'autres sornettes pour embêter les sots qui l'entouraient. Il se joignit ensuite à d'autres fourbes qui lui servirent de paillasses et qui imaginèrent d'autres tours de force pour jeter de la poudre aux yeux. Voilà, foutre, la véritable origine du métier de calotin, qui est devenu si bon pour ceux qui l'exerçaient, et si funeste pour les peuples qui se sont laissé gourer par ces bateleurs. C'est donc, foutre, parce que de pauvres badauds, qui ne savaient ni a ni b, n'avaient pas examiné pourquoi les chats se grattaient, c'est parce qu'ils ne savaient pas toute la science qu'il y a dans les oreilles d'âne, qu'ils ont eu des prêtres, et que le chancre du fanatisme a si longtemps rongé l'espèce humaine. Si l'on veut également remonter au premier roi, on trouvera un brigand farouche et cruel, un véritable chouan qui n'a eu d'autre mérite que d'avoir une crinière longue et plus noire que celle des autres sauvages, et une barbe si touffue, qu'il avait l'air d'un loup-garou, et s'il osa le premier faire la loi à ses semblables, c'est qu'il savait jouer du
bâton à deux bouts. Voilà, foutre, le premier sceptre qui a existé sur la terre ce n'était qu'un casse-tête qui servait à ce mangeur d'hommes à fendre les crânes de ceux qui osaient lui disputer la meilleure part de la chasse quoique ce sceptre ne paraisse plus qu'un hochet entre les mains des muscadins couronnés, c'est cependant l'arme la plus terrible il écrase des milliers d'hommes, il donne le signal de l'incendie, du viol, du meurtre, du carnage, et il détruit plus d'hommes que la peste et la famine. C'est donc encore l'ignorance qui a fait les rois, et, comme je le soutiens, si les lâches qui, les premiers, ont pu se donner un maître, n'avaient pas été des poules mouillées, s'ils n'avaient pas eu peur d'une grande barbe, si, au lieu de se laisser rondiner par le premier scélérat qui osa lever la main sur son semblable, ils avaient aussi appris à jouer du bâton, ou plutôt s'ils avaient mis leur tête dans un bonnet pour étouffer ce monstre, ils auraient continué de vivre libres et heureux. Au lieu de se déchirer et de se dévorer les uns aux autres, ils seraient restés unis comme des frères. Les tyrans, foutre, qui savaient bien que leur pouvoir est fondé sur l'ignorance, ont grand soin de l'entretenir, car il ne faut qu'un souffle de la raison pour renverser tous leurs châteaux de cartes. Ils protègent la superstition, parce que la superstition abrutit l'homme et lui ôte tout son courage et son énergie, ils veulent que le peuple soit trompé, car, foutre, tandis qu'il a la tête pleine de sorciers, de revenants, et de tous les contes du diable et de l'enfer, il ne songe pas au véritable enfer, à l'enfer de l'esclavage. Aussi, foutre, le plus grand crime aux yeux des despotes, c'est de parler raison et de prêcher la vérité. J'ai vécu dans ces temps de malheur, où il n'était permis aux Sans-culottes que de lire l'almanach de Liège et le messager boiteux. Malheur au pauvre barbouilleur qui osait dans son grenier griffonner un livre pour éclairer le peuple. Je me souviens d'avoir vu brûler au pied de l'arbre de la Bazoche, tous les écrits des braves bougres qui nous ont appris à devenir libres. Je me souviens de tous les mandements d'évêques et d'archevêques contre le bonhomme J-J- Rousseau, de tous les arrêts du parlement, de toutes les lettres de cachet qui pleuvaient comme la grêle sur la tête de cet ami de l'humanité. Comme Marat, il était obligé de se cacher de cave en cave pour n'être pas grillé tout vivant en place de Grève. Le paillard, le crapuleux Louis-XV n'aurait jamais pardonné à Voltaire d'avoir fait Brutus, et d'avoir turlupiné, toute sa vie, les calotins. Si ce même Voltaire, pour se tirer de presse et pour éviter la brûlure, ne s'était pas avili en flagornant les rois et en faisant des couplets muscadins en l'honneur de toutes les putains royales et des maquereaux du roi très chrétien. Il est donc clair comme deux et deux font quatre, que le grand secret de la tyrannie, pour écraser les hommes, c'est de les tenir dans l'ignorance, il faut donc, foutre, que tous les bougres qui ont du sang dans les veines et qui savent aussi que la raison est la botte secrète pour tuer la tyrannie, ne cessent de prêcher la raison. Il faut donc, si on veut
sincèrement établir la liberté, combattre, étouffer tous les préjugés il faut instruire tous les hommes. Car, foutre, si nous continuons de laisser toujours tous nos oeufs dans le même panier, c'est à dire, si les Sansculottes ne peuvent se procurer autant d'instruction que les riches, bientôt ils redeviendront esclaves, il y aura bientôt un accaparement de science, et les gueux porteront toujours la besace. Ah! foutre, si l'assemblée constituante avait joué beau jeu, bel argent, si elle avait été de bonne foi comme la convention, les écoles primaires seraient établies depuis quatre ans, et il n'y aurait pas un seul Sans-culotte dans toute l'étendue de la république qui ne sut lire et écrire. Nous ne serions pas à la merci des gens de loi et des calotins qui occupent toutes les places, et qui feront la pluie et le beau temps jusqu'à ce que tous les Sans-culottes soient instruits. Pour réparer le temps perdu, et pour écraser une bonne fois toutes les vermines de l'ancien régime, je voudrais que tous les amis de la liberté se réunissent pour donner un grand coup de collier à l'instruction publique. Sociétés patriotiques quelle belle tâche je vous propose! Désignez tous les hommes purs et éclairés pour remplir les places dans les écoles primaires chargez vous vous-mêmes d'instruire les Sansculottes, et ouvrez, toutes les décades, des cours d'instruction pour les pauvres Sans-culottes donnez des prix à ceux qui composeront les meilleurs ouvrages pour cette instruction, et pour les livres élémentaires que la convention a décrétés obligez chacun de vos membres à payer ce tribut qu'il doit à la patrie. Quand tous les hommes qui savent penser et écrire auront couché leurs idées sur le papier, vous ramasserez tout ce que vous trouverez de bon. C'est vous, foutre, qui avez fondé la liberté mais ce n'est pas assez vous devez nous apprendre à la conserver délivrez nous du mensonge et de l'ignorance, et vous donnerez le coup de grâce à toute espèce de tyrannie, foutre. La grande joie du Père Duchesne, N°350 Au sujet du fameux décret qui confisque les châteaux, les palais et tous les biens des jean-foutres qui sifflent la linotte, et de voir que les viédases qui avaient la patte graissée pour demander l'ouverture des prisons, ont enfin un pied de nez. Ses bons avis pour qu'on foute à fond de cale tous ces aboyeurs et des journalistes de Coblentz, et qu'on les envoie avec toute la pacotille du diable qui va partir pour le Mississipi. Dans ce bas monde tout va par compère et compagnon chacun a sa coterie et chaque coterie veut l'emporter sur les autres. Voilà, foutre, la cause de toutes les disputes, de toutes les querelles des trois quarts et demi des hommes au lieu de suivre la route que la raison leur a tracée, ils semblent chercher toutes les pierres pour se casser le col, et tous les précipices pour s'y plonger ils se forgent mille chimères, ils bâtissent des châteaux en Espagne, ils veulent tous être heureux, et ils tournent le dos au bonheur ils détestent l'esclavage, et ils ne font que se forger des fers
toujours dupes des charlatans et des fripons, ils méprisent ceux qui leur donnent de bons avis, et ils baillent quand on leur parle raison ils cherchent la vérité, et ils se bouchent les yeux quand son flambeau les éclaire, ils sont sourds à sa voix. Je pardonne ces défauts, tous ces vices à des pauvres bougres abrutis par l'esclavage, mais, foutre, je mange mon sang quand je vois des républicains se faire des procès sur la pointe d'une aiguille. Je me débaptise quand je songe à tous les malheurs que leurs divisions peuvent occasionner, et je voudrais étouffer de mes mains tous les jean-foutres qui les trompent et qui les égarent. Il est des scélérats qui ne cherchent que plaie et bosse, monstres qui ne respirent que le meurtre et le carnage pour s'engraisser, comme des corbeaux, sur les cadavres des Sansculottes. Pendant quelques instants ces oiseaux de proie avaient disparus, foutre, et depuis que la terreur était à l'ordre du jour, ils restaient tapis dans leurs trous. Le peuple commençait à respirer les denrées abondaient, les assignats étaient au pair, et les patriotes, avec raison, regardaient la sainte guillotine comme la pierre philosophale mais, foutre, depuis que les renégats de la Sans-culotterie ont proposé d'ouvrir les prisons, et de donner la clef des champs à tous les brigands qui sifflent la linotte, les fripons, les conspirateurs ont repris le mors aux dents, et plus que jamais ils ont osé lever la crête. Des Jean-foutres, qu'on ne connaissait ni d'Eve ni d'Adam, sont tombés, comme des nues, dans les sections et dans les sociétés populaires avec des bonnets rouges et des larges pantalons. Ils ont soufflé le froid et le chaud, et ils ont trouvé le moyen de brouiller les cartes, et de mettre tous les citoyens à chien et à chat. Les meilleurs patriotes ont été vilipendés, traînés dans la boue par les plus vils jean-foutres des bougres à poil qui depuis la prise de la Bastille n'avaient pas bronché d'une ligne, ont été jetés dans les cachots on ne savait plus lequel entendre, ni à quelle branche se raccrocher les fripons qui bâtissent leur fortune publique, ont profité de ce désordre pour mieux pêcher en eau trouble tandis, foutre, que les patriotes étaient obligés de se défendre, on ne songeait pas à eux, et ils ont eu un moment de répit. Tonnerre de dieu, ils ne porteront pas en enfer, et ils auront du rabat joie avant qu'il soit l'âge d'un petit chien. Déjà, foutre, tous les véritables républicains se réveillent. On ne leur fera pas plus longtemps à croire que des vessies sont des lanternes. C'est en vain que l'on veut ménager la chèvre et le chou, et que l'on cherche à sauver des scélérats qui ont conspiré contre la liberté. Justice sera faite, malgré les endormeurs qui veulent nous mettre au pas des écrevisses. Nous savons maintenant là où le bat nous blesse. L'ordre, la sûreté, l'abondance, le salut de la république dépendent de notre courage et de notre énergie ce dernier signe de vie que les aristocrates viennent de nous donner, ne fera que hâter leur supplice. Le peuple connaît ses véritables ennemis malgré tous
les masques dont ils se couvrent, il les tient en joue et foutre, au premier signal ils vont être exterminés. Pas un n'échappera au sort qu'il a mérité. Chat échaudé craint l'eau froide. Les Sans-culottes ne se laisseront plus foutre dedans par les intrigants. Il leur a cuit l'année dernière pour être restés les bras croisés lorsque l'infâme Dumouriez manigançait tous ses coups de chien avec les Brissotins. Les bougres qui veulent aujourd’hui ressusciter le fédéralisme, les jean-foutres qui accusent les généraux Sans-culottes, et qui employent le vert et le sec pour mettre à la tête de nos armées certain coupe-jarrets, que nous connaissons tous, ces intrigants, tous ces gibiers de guillotine, auront un pied de nez, et, comme les Brissotins, dont ils suivent les traces, ils finiront par faire la grande bascule. Au surplus, je suis tranquille, foutre, la convention, au milieu de tous les orages et environnée de toutes sortes d'intrigues, est toujours au pas. Dans le moment où j'écris, j'apprends qu'elle vient de rendre un décret fameux qui va ronger les ongles à tous les ennemis du peuple, et mettre à quia tous les conspirateurs. Bravo, foutre, bravo, les gredins qui sifflent la linotte ne souilleront jamais la terre de la liberté. Au foutre toutes les motions de Coblentz et tous les projets des phélippotins, au foutre le tribunal de clémence, le grand jugement du peuple, porté sur tous les hommes suspects, sera exécuté. Il est décrété, foutre, qu'à la paix ils seront tous embarqués pour le Mississipi, leurs châteaux, leurs palais, tout ce qu'ils possèdent est confisqué au profit de la république. Que de jean-foutres ont les vivres coupés. Tous ces écrivailleurs qu'ils soudoyent, tous ces brigands à qui ils graissent la patte pour nous affamer, perdront leur dents aux crocs: ainsi donc, foutre, ce décret salutaire va ramener la paix dans l'intérieur, et va procurer de nouvelles ressources à la république pour combattre ses ennemis, et pour récompenser ses braves défenseurs. Il est foutant qu'on ne s'est pas tout de suite délivré d'une pareille peste car, foutre, tant que cette bougre de canaille respirera près de nous, nous devons nous attendre à être toujours sur le qui-vive. Les parents, les amis de ces coquins combattront encore, ils intrigueront de toutes manières pour empêcher cette pacotille du diable d'arriver aux Indes. Mais nous ne nous endormirons pas, foutre, et quiconque osera prendre leur défense sera comme eux foutu à fond de cale. Courage, braves Montagnards, continuez de mériter les bénédictions du peuple, en rendant tous les jours de pareils décrets frappez le fer pendant qu'il est chaud, et ne remettez jamais à demain ce que vous pouvez faire aujourd’hui. Encore quelques jours, et tous les brigands couronnés seront à vos pieds tandis que d'une main vous tenez la foudre pour écraser les despotes et leurs vils esclaves, tendez l'autre aux malheureux, assurez du travail à tous les citoyens, accordez des secours aux vieillards et aux infirmes, et pour couronner votre ouvrage, organisez promptement l'instruction publique ce sera là votre chef d'oeuvre car, foutre, sans instruction, point de liberté, foutre.
La grande colère du Père Duchesne, N°351 De voir tous les coups de chien que les aristocrates manigancent pour tourmenter les Sans-culottes au sujet des subsistances. Sa grande dispute à la Courtille avec des calotins et des émigrés déguisés, qui lui sont tombés sous la main et qu'il a étrillés solidement. Il n'y a qu'un Paris dans le monde, il n'y a qu'une Courtille dans Paris donc, foutre, la Courtille est le plus beau lieu de tout l'univers que des badauds, cependant, qui n'ont jamais rien vu que par le trou d'une bouteille, ignorent s'il y a une courtille sur la terre, que je les plains, foutre car qui n'a jamais vu la Courtille, n'a rien vu, je le soutiens. Tonnerre de dieu, y a t il dans le monde un plus beau spectacle que celui d'une ville dont toutes les maisons sont des cabarets? Peut-il exister un tableau plus animé que celui des plus francs, des meilleurs Sans-culottes rassemblés comme des fourmilières? Tout ce qu'on y voit annonce la gaieté, tout ce qu'on y entend réjouit le coeur le vin y coule à flots, l'air retentit des chansons les plus joyeuses de tous côtés le son du tambourin et du violon font trémousser tous les jeunes gens, et sautent tous les cotillons. Oui, foutre, la Courtille est un véritable pays de Cocagne. Si des prêtres qui, pour nous engueuser, ont imaginé des paradis de toutes les façons, en avaient imaginé un tel que la Courtille, je crois, foutre, que je me serais converti, et que je me serais laissé aller à leurs promesses. Un luron de la gance, en quittant la vie, se consolerait s'il croyait rejoindre tous les bons enfants qu'il a connus, et s'il espérait s'en foutre là haut des pilles avec les anges et le père éternel mais, foutre, faire un si long voyage pour aller trouver qui? Tous les sots qui nous ont fait damner de leur vivant, ces vieilles et laides dévotes, ces capucins crasseux et toute la séquelle de la cagoterie? En pareille compagnie, je serais aussi à mon aise qu'une anguille dans un grenier mais, foutre, pouvais je me perdre avec ces réflexions qui ne sont plus de saison. Revenons au paradis des vivants, parlons de la Courtille, foutre. La dernière décade, après avoir célébré le matin, au temple de la Raison, la messe républicaine avec tous les Sans-culottes de ma section, c'est à dire, foutre, qu'après avoir entendu prononcer les discours les plus patriotiques, et chanter, à pleine gueule, des hymnes en l'honneur de la liberté, tout joyeux, je m'acheminais le soir avec quelques bons enfants, pour aller à vêpres à cette chère Courtille. Je ne parle point des stations que nous fîmes en route je passe sous silence tous les petits cabarets où nous étouffâmes des enfants de choeur, tous les vinaigriers où nous pompâmes quelques roquilles. De pareilles fontaines ne sont pas dignes de vous occuper, Sans-culottes, mes amis il ne faut pas, comme dit Paillasse, vous amuser aux bagatelles de la porte, entrez avec moi à la Grande pinte. Ah! foutre, quelle foule, que de coups d'épaule il fallut donner pour la traverser, et pour arriver à une table! Quel boucan il fallut faire pour trouver des places! Cependant, à force de jurer, j'en viens à
mon honneur, foutre, et nous voilà, tant bien que mal, assis sur une banquette branlante. Citoyen garçon, vite une pinte, en attendant mieux la pinte arrive, et, dans un clin d'oeil, elle est vide une autre, citoyen garçon aussitôt arrivée, aussitôt pompée eh! Foutre, camarade, apporte-nous tout de suite un broc ça y est, citoyen, réplique le marmiton ce qui fut dit, fut fait le broc arrive. En bons compagnons, nous allumons à force. La conversation s'anime, et nos oreilles s'échauffent en écoutant certains propos de certaines coteries qui nous avoisinent. Ah! Que le temps est dur, disait certaine commère, en criant à tue-tête pour être mieux entendue hélas! Oui, répétait un gros joufflu habillé en fort de la halle on n'y saurait plus tenir, ripostait un grand flandrin couvert d'une sousguenille de charbonnier qu'allons nous devenir, l'pauvre monde va mourir de faim. La moutarde me monte au nez qui t'a dit cela, bougre d'oiseau de mauvais augure, m'écriai-je, en lui montrant mon poing. C'est ce que ça ne saute pas aux yeux, s'écria la garce mal enguenillée qui avait commencé la bougre d'antienne au temps jadis on ne manquait de rien en venant à la Courtille, on était sûr de trouver son éclanche, la fine salade et les oeufs rouges au jour d'aujourd’hui il faut faire carême, un carême civique, comme dit ce vieux jean-foutre de marchand de fourneaux, que cent millions de diables lui tortillent le col... Au Père Duchesne, foutre, à lui-même! Est ce que tu prends sa défense, vieux sac à vin?" oui, foutre, et je m'en vante, mais encore moins la sienne que celle des bons Sansculottes que des échappés de la Vendée, tels que vous autres, poursuivent partout, jusque dans leurs plaisirs, pour les troubler. Nous connaissons les jean-foutres qui veulent nous couper les vivres mais le rasoir national leur tranchera le sifflet en nous affamant, on croit nous faire perdre patience mais non, foutre plus on nous tourmentera, moins nous nous rebuterons ce n'est pas pour enfiler des perles que l'armée révolutionnaire a été formée, mais pour mettre à la raison tous les ennemis du peuple quand elle aura fait une tournée à vingt lieues à la ronde, pour balayer tous les châteaux où se sont tapis tous les bougres qui nous enlèvent les denrées, alors, foutre. L'abondance renaîtra d'ellemême. C'est donc en vain que l'on veut semer parmi nous, et jusqu'à la Courtille de la graine d'Angleterre jamais elle ne perdra racine. Ainsi donc, foutus gibiers de guillotine, cachez vos cartes, nous voyons votre jeu toutes les prophéties de malédiction que vous venez débiter ici, comme vous voyez, ne nous empêchent pas de boire, de chanter et de danser. Un verre de vin et un croûton, c'est tout ce qu'il faut à des véritables Sansculottes. Bravo, bravo, Père Duchesne, s'écrient à la fois les citoyens et citoyennes qui étaient dans le cabaret et qui m'écoutaient défiler ainsi mon chapelet. A ce mot, foutre, la bougre de coterie de Coblentz cherche le chemin par où les marrons n'ont point travaillé mais, nous poursuivons ces jean-foutres, et bientôt ils sont rattrapés. J'empoigne, d'une main la prétendue commère, et de l'autre, le faux charbonnier un brave luron de
nos amis ramène par le toupet le fort de contrebande qui se trouve être un ci-devant chanoine, le charbonnier un garde du corps émigré, et la commère un de ces muscadins du Palais-Royal. Nous les menons en lieu de sûreté. C'est ainsi, foutre, que les filous, les voleurs et les scélérats de toute espèce se déguisent, et sous toutes sortes de masques, cherchent à tromper le peuple mais, foutre, les Sans-culottes ont le nez fin, ils flairent d'une lieue les aristocrates et les conspirateurs qui finissent toujours par payer les violons, foutre. La grande joie du Père Duchesne, N°352 En apprenant la générosité des braves défenseurs de la patrie qui, non contents de verser leur sang pour la République, sacrifient encore leurs subsistances et renoncent à leur ration de viande. Sa grande colère contre les jean-foutres qui n'ont d'autre dieu que leur ventre, et qui, au lieu d'imiter un si bel exemple, emploient le vert et le sec pour nous réduire à la famine. Dans tous les temps, foutre, les soldats français ont été des bougres intrépides. Un jour, dit-on, il prit fantaisie à Voltaire de voir de quelle manière ces bougres se peignaient, quand je dis voir, c'est à dire de loin. Quand il revient de la campagne, le royal jean-foutre, nommé Louis-XV, lui demanda ce qu'il avait vu cent mille heures à cinq sols par jour, répondit Voltaire. Si le bougre vivait aujourd’hui, et s'il faisait une tournée sur nos frontières, que dirait-il de nos braves guerriers? Les soldats du temps passé n'étaient que de la St-Jean, en comparaison de ceux d'aujourd’hui, et on ne saurait leur en faire un crime car, foutre, ils servaient la tyrannie, tandis que nos jeunes républicains combattent pour la liberté c'est pour eux qu'ils travaillent leurs vertus civiques surpassent encore leur courage. Je l'ai déjà dit, foutre, et je ne cesserai de le répéter, la fine fleur de la Sans-culotterie est dans nos armées il faudrait de gros volumes pour retracer toutes les belles actions qu'ils font je n'en finirais pas, foutre, si j'entreprenais de les raconter cependant ce serait un crime d'oublier celles qui peuvent servir d'exemple aux bons républicains. Je crois donc, que mes amis les Sans-culottes me sauront bon gré de leur faire part de la lettre suivante qu'un de mes camarades m'écrit de l'armée du Nord. "Tu fus un des premiers, brave marchand de fourneaux, à engager les Sans-culottes à diminuer leur consommation de viande, afin de conserver cette denrée de première nécessité tu devais t'attendre sans doute que tous les bons républicains des villes allaient se disputer l'honneur de commencer à donner l'exemple de cette privation civique. Il était réservé aux braves bougres qui combattent pour la liberté, de donner, encore une fois, un nouvel exemple de leur dévouement à la chose publique. Tu n'apprendras pas, sans admiration, qu'aussitôt qu'ils ont entendu tes bons avis à ce sujet, la division cantonnée à Maroilles, sur
la rive droite de la consommation de cette denrée. Dès le lendemain tous les soldats de ce cantonnement firent la remise de la moitié de la viande qu'on avait coutume de leur donner. J'ai cru te faire plaisir en te faisant connaître cette action de nos braves camarades. Sans doute ils ne tarderont pas à avoir des imitateurs, et les Sans-culottes triompheront encore de cet obstacle comme de tous les autres. Dans peu, j'espère, nous ferons danser la grande carmagnole aux Autrichiens. Tous nos bougres à poil brûlent d'envie de commencer le bal, et le jour où ils seront aux prises avec les satellites des despotes, sera pour eux un jour de fête il les consolera de tout ce qu'ils ont enduré pendant l'hiver. Vive la république, foutre". Signé, Celliers. Tonnerre de dieu, voilà le véritable patriotisme. Moi, foutre, à qui ne sort pas plus d'eau des paupières, qu'il ne m'en passe par le gosier, en lisant cette lettre, des larmes de joie ont coulé de mes yeux je me suis senti le coeur gonflé. Quel exemple, me suis je écrié, pour tous ces jeanfoutres qui ont les pieds bien chauds, et qui se dorlotent dans des lits de duvet, tandis que nos braves frères d'armes marchent nu pieds, et couchent sur la dure. Je vois tous ces bougres d'égoïstes accoutumés à faire des chairs de chanoine, jurer, tempêter de ne pouvoir plus se restaurer après leurs débauches avec leurs friands consommés. J'entends tous ces gourmands regretter le succulent aloyau ils meurent de faim, disent ils, parce qu'ils ne peuvent plus digérer de veau de Pontoise et de mouton de Pré-salé c'est un supplice pour eux de renoncer à la moindre jouissance ils aimeraient mieux voir la république saccagée, et la liberté au foutre, que de s'imposer la moindre privation ils se foutent d'être esclaves, pourvu qu'ils puissent, comme le cochon s'engraisser sur leur fumier, et nos braves volontaires qui depuis le commencement de la guerre affrontent le canon et supportent avec tant de courage la fatigue et la misère, renoncent à la moitié de leur existence. Ce n'est pas assez pour eux de verser leur sang pour la patrie, ils lui sacrifient encore leur subsistance. Millions de foutre, quand ils auront exterminé les ennemis de la république, quand la paix arrivera, il n'y aura pas assez de couronnes civiques pour récompenser de tels hommes. Oh! Que la république sera forte, lorsque tant de héros rentrés dans leurs foyers, se joindront aux véritables patriotes, pour foutre la chasse aux intrigants et aux aristocrates! Quand des bougres aussi généreux, aussi désintéressés occuperont les fonctions publiques, c'est alors que le peuple sera heureux. Quand les assemblées nationales ne seront composées que de ceux qui auront si bien défendu la cause commune, tout y sera montagne on n'y verra plus d'intrigues, ni factions, ni Brissotins, ni Girondins, ni rolandins, pas même de phélippotins. Braves défenseurs de la république, ne croyez pas, foutre, que les bons Sans-culottes de l'intérieur soient moins généreux que vous ils ont des ennemis plus dangereux que vous à combattre, et ils leur tiennent tête, foutre. La corruption les environne, l'intrigue les assiège et ils restent
fermes et inébranlables. Plus on fait d'efforts pour les diviser, plus ils sont amis. Veut on les prendre par les vivres et les réduire à force de misère, ils s'en vengent sur les jean-foutres qui les tourmentent et tricherie revient toujours à son maître. Oui, foutre, le feu sacré de la liberté embrase tous les coeurs de bons Sans-culottes ils ont tout bravé pour briser leurs fers, et ils sauront tout endurer pour défendre leurs droits rien ne les épouvante, rien ne les rebutera, foutre. Braves bougres qui nous servez de remparts sur les frontières, reposez vous sur nous pour défendre la république que les scélérats voudraient frapper au coeur pour mieux la tuer. Nous sommes en sentinelle pour observer tous les intrigants, tous les fripons. Vous ne verrez plus à votre tête des bougres de sac et de corde ne craignez plus d'être commandés par des Dumouriez, des Custine. Nous connaissons certains coupe-jarrets prônés par les phélippotins, qui remuent ciel et terre pour escroquer le commandement des armées, comme autrefois les portefeuilles et l'argenterie des traiteurs. Marat, de son vivant mit sur leur front le sceau de l'infamie. C'est en vain, foutre, qu'ils veulent appeler de son jugement. Le sort de la république ne sera plus confié à des mains aussi impures. Soldats républicains, vous ne serez plus commandés que par des généraux Sans-culottes, que par des lurons dignes de vous continuez, foutre, de vous exercer aux combats, soyez soumis à la discipline, et lorsque tout à l'heure, le signal vous sera donné, précipitez vous, comme des lions, sur les bandes d'animaux stupides que les brigands couronnés ont déchaînés contre votre patrie marchez sur leurs cadavres jusqu'à Valenciennes et Condé, et faites flotter l'étendard de la liberté sur les portes de ces villes que la clef d'or ouvrit à nos ennemis, et que le canon républicain doit enfoncer, foutre. La grande colère du Père Duchesne, N°353 Au sujet d'une nouvelle conspiration des aristocrates déguisés et des faux patriotes, pour dégoûter les bons Sans-culottes de la Révolution, à force de les persécuter. Sa grande joie de ce que le tribunal révolutionnaire continue à être au pas, et qu'il est aussi empressé à venger les innocents que de punir les traîtres et les conspirateurs. Nom d'un foutre, entendrai-je toujours les plaintes des patriotes? Jusqu'à quand les défenseurs du peuple seront ils persécutés? Quoi, foutre, les meilleurs Sans-culottes et les plus infâmes aristocrates sont confondus? Quoi! Les plus francs républicains sont jetés dans les cachots pêle-mêle avec les aristocrates et les royalistes? Il est temps que ce désordre finisse il est temps que les jean-foutres qui prennent le masque du patriotisme et de la vertu pour opprimer tous les bons citoyens, soient punis de leurs crimes. Il est temps que l'innocence soit vengée il est temps enfin que le peuple que l'on tourmente de tant de manières, pour le dégoûter de la révolution, commence à respirer. Périssent tous ses
ennemis, foutre mais que les braves bougres qui ont constamment défendu ses droits, cessent d'être vilipendés, et tyrannisés par une poignée d'intrigants et de fripons qui manigancent dans l'ombre les plus noirs complots, qui embrouillent les affaires, pour pêcher en eau trouble, qui protègent et défendent tous les scélérats, pour grossir leur parti, qui accusent et calomnient les hommes purs, pour se débarrasser d'eux, qui veulent assassiner le patriotisme, pour établir la tyrannie, foutre! C'est en vain que ces jean-foutres se flattent de réussir dans leurs affreux complots. Jamais, non jamais la liberté ne périra quelques patriotes, au milieu de la mêlée, pourront être victimes, mais ils seront vengés. Eh! Foutre, quel est le républicain qui n'ambitionne pas le sort du martyr Challier! Sa gloire est immortelle son sang a servi à cimenter la liberté. Les monstres qui l'ont égorgé, n'ont fait que hâter leur perte. Il en sera de même, foutre, de tous les intrigants, de tous les ambitieux, de tous les scélérats qui oseront s'élever contre la Sans-culotterie, et faire la guerre aux patriotes. Les bons citoyens doivent s'attendre à la persécution, foutre. Plus un homme est vertueux, plus il a des ennemis plus il veut faire le bien, plus il est exposé mais, foutre, ce qui doit l'encourager, c'est la récompense qui l'attend, c'est l'estime publique qu'on ne peut lui ravir car, foutre, la masse du peuple est toujours pure il est quelque fois trompé, mais ses intentions sont bonnes, jamais on ne peut le corrompre s'il aime à voir tomber la tête des conspirateurs, il est encore plus flatté de trouver des innocents. Puisque je suis sur ce chapitre, il faut que je raconte une scène délicieuse qui vient de se passer au tribunal révolutionnaire, et dont j'ai été témoin, foutre. Deux patriotes de Marseille, deux bougres à poil qui depuis le commencement de la révolution avaient toujours été la terreur des aristocrates, paraissent sur le fatal gradin on les accuse, dans leurs fonctions de juges, d'avoir rendu journellement des jugements arbitraires en faveur des aristocrates de Marseille et des fédéralistes. Les journaux phélippotins, pour les noircir, avaient répandu que ces deux magistrats étaient des ultra-révolutionnaires, des hommes de sang, et, comme dit le gentil Camille, qu'ils n'avaient pas de plus grand plaisir que de lécher le collier de la guillotine. Enfin les débats commencent plusieurs témoins sont entendus, et déclarent ne pas connaître seulement les accusés un brave député, membre du comité de sûreté générale, Moyse Bayle, parait a son tour, et dit: "je connais ces deux citoyens depuis le commencement de la révolution ils ont tout fait, tout sacrifié pour elle ils ont été constamment à Marseille les fléaux de l'aristocratie pendant le triomphe des rebelles, ils furent précipités dans les cachots leurs mains portent encore l'empreinte de leurs chaînes, et sans l'entrée inattendue du général Cartaux, ils étaient menacés, le même jour, de perdre la tête. Quels que soient leurs accusateurs, je ne vois encore dans ces deux citoyens que des patriotes purs et des magistrats intègres. " vingt autres témoins sont encore entendus, et tous font l'éloge des accusés.
Déjà, foutre, l'affaire est jugée par le grand juge, par le peuple qui assistait à l'audience. Tous les Sans-culottes se demandent à l'oreille quels sont les jean-foutres qui ont osé accuser d'aussi braves bougres? C'est un ci-devant noble, c'est un nommé Montmo, sentinelle perdue de la Vendée et apostée à Marseille pour y brouiller les cartes et mettre les Sans-culottes à chien et à chat. C'est un ci-devant comte de Lapoipe, autrefois officier aux gardes françaises, qui, pour se raccrocher aux branches, singea le patriotisme après la prise de la Bastille mais Capet le raccourci, qui le connaissait à fond, malgré son prétendu Sans-culottisme, le nomma colonel, sans doute pour le récompenser d'avoir épousé la fille de Jean Fréron, l'apôtre de la tyrannie et du fanatisme, l'ennemi de Voltaire, de Rousseau et de tous les philosophes. Le pape Royou, ce bougre d'empoisonneur, auteur de l'ami du roi, comme toute la France sait, avait enrôlé Jean Fréron dans la grande confrérie, et en reconnaissance, il eut toujours une affection paternelle pour ses petits marmots ce fût lui qui prononça le conjungo, lorsque le gentilhomme Lapoipe mit l'anneau au doigt de sa filleule Fréronnette. Voilà comme quoi de fil en aiguille, et par le canal du pape Royou, Lapoipe fut fait colonel. Il n'y a que le premier pas qui coûte. Un colonel de cette acabit n'a pas eu de peine à devenir général. Dumouriez, Custine, Houchard et tant d'autres n'avaient pas d'aussi grandes protections que l’âne à Fréron. Ah! Foutre, quelle grêle va tomber sur ma tête! Moi, chétif marchand de fourneaux, oser mettre mon doigt entre l'arbre et l'écorce, oser toucher aux hautes puissances du jour! Gare la colère du vieux Cordelier l'avocat des nobles va reprendre sa plume pour prouver que je suis un ultra, un avilisseur des autorités constituées, mais je m'en fous maintenant je suis ferré à glace j'en ai une kyrielle à dégoiser, et je casse les vitres. Lorsque le brave Antonelle dont toute la vie a été consacrée à la vertu, est rayé des Jacobins, parce qu'il a eu le malheur de naître de parents nobles, je ne verrai pas, sans jurer et tempêter, à la tête de nos armées des ci-devant officiers aux gardes, des protégés de Royou. Qu'on ne me parle pas des exploits du comte de Lapoipe. Dumouriez aussi passait pour un grand général à Jemappes, il chargeait, le sabre à la main, à la tête des bataillons, et il enlevait les redoutes il n'en était pas moins un traître. La bravoure ne prouve rien, et ne peut effacer la tâche du ci-devantisme. D'ailleurs, foutre le général Royou s'est lui-même démasqué en désarmant les Sans-culottes de Marseille, en voulant y rétablir une bastille que les patriotes avaient démolie au commencement de la révolution, en détruisant les beaux monuments de cette ville républicaine, et surtout en persécutant les magistrats Sans-culottes. Revenons à ces braves bougres échappés à la fureur du général Royou. Aussitôt que les témoins eurent été entendus, un mouvement général d'indignation se fit entendre. L'accusateur public devint le défenseur des accusés. "Quelque soit, s'écria ce brave bougre, le crédit de leurs persécuteurs, quelque soit leur pouvoir, qu'ils ne pensent pas
trouver dans le tribunal révolutionnaire l'instrument de leurs passions et de leurs vengeances. " les jurés déclarent qu'ils sont suffisamment instruits, et ils demandent à émettre leur opinion, sans désemparer à l'unanimité ils déclarent que jamais l'innocence n'a été si audacieusement et si atrocement persécutée. Citoyens, dit alors le président, en s'adressant aux accusés: "comme vous, Marat fut traduit devant ce tribunal redoutable, comme lui, venez embrasser vos juges". Des larmes coulaient de tous les yeux tous les coeurs étaient suffoqués juges, jurés, accusés, spectateurs, tous volent dans les bras les uns des autres la salle du tribunal et les lieux qui l'entourent, retentissent des cris, mille fois répétés, de vive la république, vive l'innocence, vive le tribunal, mort aux intrigants, aux ambitieux et à tous les ennemis de la liberté, foutre. La grande joie du Père Duchesne, N°354 De voir que les jean-foutres qui voulaient mettre les Jacobins et les Cordeliers à chien et à chat, ont tiré des coups d'épée dans l'eau. Sa grande colère contre ces mêmes bougres qui osent le mesurer à leur aulne et l'accusent d'être un accapareur, Sans-culottes de Paris, républicains de tous les départements, si vous avez jusqu'à ce jour triomphé de tous vos ennemis, si le vaisseau de la patrie si longtemps battu par la tempête, a résisté à tous les orages, et échappé à tant d'écueils, à qui en êtes vous redevables, foutre n'est ce pas aux sociétés patriotiques? Sans elles, tous les faquins de l'ancien régime feraient la pluie et le beau temps, l'infâme Capet engraissé de votre sang, régnerait encore, la louve autrichienne tiendrait dans ses mains impures la clef du trésor national, et toute la bougre de ménagerie de Versailles se partagerait les dépouilles du peuple. Vous n'avez pas oublié tous les efforts des véritables amis de la liberté pour nous délivrer de cette peste vous vous souvenez des sacrifices qu'ils ont faits, des dangers qu'ils ont bravés pour défendre vos droits, foutre. Tant qu'il existera un homme libre sur la terre, il se rappellera deux sociétés fameuses qui ont foutu le trône du tyran en canelle, et fondé la république, les Jacobins et les Cordeliers. Je suis fâché, soit dit en passant, que les deux premiers temples élevés à la liberté, portent des noms de moines mais, foutre, l'habitude fait tout au reste les noms ne font rien, et les braves bougres qui portent aujourd’hui ceux de Jacobins et de Cordeliers sont aussi aimés et estimés des bons Sans-culottes, que les autres étaient avilis et détestés. Mais, foutre, c'est trop baliverner sur les mots, revenons au fait parler à un aristocrate d'un jacobin ou d'un cordelier, c'est lui donner la fièvre, foutre. L'infâme La-Fayette dont ils dévoilèrent courageusement toutes les manoeuvres leur déclara une guerre à mort, et son bougre de cheval blanc fit feu des quatre pieds pour marcher à la tête de son armée contre Paris, afin d'exterminer les clubistes. Quand le mandrin Léopold, d'accord avec l'ogre Capet,
commença le fameux branle qui a mis toute l'Europe à feu et à sang, il n'en voulait qu'aux Jacobins l'ours mal léché de Berlin, Georges-Dandin, la vieille Cato, le roi des marmottes, l'âne chargé de reliques qui gouverne les Espagnols, et même le porte-clefs du paradis répètent tous le même refrain. Pourquoi tous ces bougres de mangeurs d'hommes ont ils tant de haine contre les sociétés populaires? Ah! Foutre, c'est qu'ils savent là où le bat les blesse, ils s'attendent que tôt ou tard chacun d'eux mettra la tête à la lunette comme leur confrère Capet, et ils n'ignorent pas que ce sont les Jacobins et les Cordeliers qui leur feront faire le saut périlleux aussi ces monstres en jouant de leur reste, jettent ils l'or par les fenêtres pour diviser les Sans-culottes, et dissoudre toutes les sociétés républicaines. Armer les Jacobins contre les Cordeliers, ce serait pour eux le plus grand coup d'état mais, foutre, les Jacobins et les Cordeliers resteront à jamais unis ils verront tomber tous les trônes, et tous les hommes libres leur devront leur bonheur. Cependant, foutre, les furets de Pitt qui sont toujours aux aguets pour brouiller les cartes parmi nous, viennent d'essayer de mettre ces deux sociétés à chien et à chat. Les Cordeliers indignés de voir les fripons aller la tête haute, tandis, foutre, que les meilleurs patriotes étaient persécutés, ayant les oreilles rebattus de tous les projets de contrerévolution de nos ennemis, s'apercevant que les modérés, les feuillants et les royalistes osaient lever la crête, et menaçaient de former une faction pour dissoudre la convention et anéantir la liberté, la moutarde leur a monté au nez, et encore une fois ils ont prouvé aux aristocrates qu'ils avaient bec et ongle, et qu'ils sauraient les faire rentrer cent pieds sous terre. "Tremblez, ennemis du peuple, se sont ils écriés, vous voulez une insurrection, eh bien, foutre, nous en ferons encore une, mais ce sera la dernière le peuple encore une fois se lèvera en masse, mais ce sera pour vous exterminer les Jacobins et nous, toujours unis à la convention, nous allons tous mettre nos têtes dans un bonnet, pour purger la république de tous les traîtres". A ce mot d'insurrection, tous les jean-foutres qui craignent pour leur peau, parce qu'ils ont volé la république, ou conspiré contre la Sans-culotterie, ont commencé à jeter feu et flamme ils ont osé dire que les Cordeliers, qui cent fois ont sauvé la convention, voulaient la dissoudre. Les Jacobins alarmés par ce bruit répandu par les journalistes et les gazetiers de Coblentz et de la Vendée, sont venus demander une explication fraternelle à leurs frères les Cordeliers. Déjà, foutre, les aristocrates riaient sous cape, et s'applaudissaient d'avoir jeté une pomme de discorde rendu compte de leur conduite à leurs frères qui loin de les blâmer, ont juré de s'unir à eux plus intimement pour exterminer tous les conspirateurs cette scène touchante a fini par des embrassements. Une députation de la société fraternelle, compagne fidèle et inséparable des Cordeliers, qui, avec eux, vit ses membres égorgés au Champ-de-Mars, est venue, pendant cette séance, déclarer à ses frères les Cordeliers qu'elle partageait toujours ses opinions, et qu'elle marcherait
constamment avec eux dans la route de la révolution. Ainsi donc, foutre, tous les aristocrates qui croyaient voir les patriotes aux prises, ont tiré un coup d'épée dans l'eau. Le bateleur Pitt a perdu ses guinées, et tous les bons Sans-culottes se réjouissent de cette explication salutaire qui a rallié tous les flancs républicains. C'est encore l'occasion de dire: tricherie revient à son maître, foutre. Atroce calomnie à ajouter aux mille et une fabriquées contre le Père Duchesne. Le comité révolutionnaire de la section de Bonne-Nouvelle vient de faire une visite patriotique dans son arrondissement, et il a déniché beaucoup de saloirs très bien garnis, et entre autres, chez certain marchand de vin signataire, qui, toutes les nuits, fait vendange en son puits, et qui, pour sa provision, n'avait qu'un porc et demi. Allez donc aussi chez le Père Duchesne, a dit monsieur Mélange, et vous verrez quelle provision lui est arrivée hier. Les commissaires viennent est-il vrai, Père Duchesne, que tu es un accapareur de lard, me disent ils? Moi, foutre, pour qui me prenez vous? Tenez, voilà mon accaparement, visitez. Je présente aussitôt un petit pot contenant vingt-quatre livres qu'un de mes compères avait reçu de ses parents, et qu'il m'avait envoyé la veille le pot était empaqueté encore avec l'adresse de la messagerie je le donne, et moi-même je presse les commissaires de l'emporter et de le distribuer. Les malveillants saisissent cette occasion pour débiter dans tout Paris que l'on a trouvé chez moi plus de cinq cents livres de salé, que je suis arrêté comme un accapareur, et que je vais être, pour le moins, guillotiné. Une telle atrocité ne méritait pas d'être relevée mais pour éloigner tout soupçon, je fais afficher ma justification signée du comité révolutionnaire et de la société populaire de la section. La grande colère du Père Duchesne, N°355 Contre les modérés qui emploient le vert et le sec pour s'opposer à l'exécution des décrets révolutionnaires et pour sauver les aristocrates et les conspirateurs. Ses bons avis à tous les francs républicains pour qu'ils mettent tous leur tête dans un bonnet pour faire exécuter la loi du maximum et celle qui confisque les biens des hommes suspects. Ah! Foutre, que l'aristocratie est dure à tuer. Quand elle est prête à recevoir le coup de grâce, elle fait la morte, et lorsqu'elle parait écrasée, elle se révolte et se ranime tout à coup pour lancer son poison avec plus de force. Chaque jour elle enfante de nouveaux monstres pour tourmenter le peuple. Pourquoi, foutre, les patriotes s'arrêtent ils presque toujours à moitié chemin? Pourquoi, quand ils sont en train de frapper, n'exterminent ils pas à la fois tous leurs ennemis? Tout était fini le 10 août si des bougres d'endormeurs n'avaient pas arrêté le bras vengeur du peuple l'ogre Capet et son abominable race perdaient le goût du pain, pas un seul chevalier du poignard n'aurait échappé d'un seul coup de filet on enlevait à Paris tous les feuillants, tous les royalistes, tous les
aristocrates, et les départements qui désiraient autant que nous cette grande journée, auraient donné à plein collier dans tout ce que les Parisiens auraient fait mais au contraire les Sans-culottes se laissèrent embêter par des jean-foutres à double face le modérantisme l'emporta qu'en arriva t il, foutre? Les Brissotins firent la pluie et le beau temps le vieux Roland, avec les millions que la convention lui avait confié pour acheter des subsistances, manigança la contre-révolution. Le boudoir de la putain qui l'encornaillait, remplaça le comité autrichien ses mouchards, dispersés dans toutes les parties de la république, allumèrent partout le feu de la guerre civile. Presque tous les journalistes vendus à cette infâme clique, empoisonnèrent l'opinion. Les meilleurs citoyens furent traînés dans la boue. Les législateurs purs et courageux passèrent pour des scélérats. On accusa ceux qui avaient détruit la tyrannie de vouloir la rétablir. La voix de la vérité fût étouffée par le mensonge et la calomnie. Il n'y eut plus de sûreté pour le petit nombre d'écrivains qui était resté fidèle au peuple. Marat fût regardé comme un loup-garou il passa pour une bête féroce, et dans plusieurs départements on se demandait combien il mangeait de petits enfants à son déjeuner et combien par jour il buvait de pintes de sang cependant, foutre, il n'y avait pas dans la république d'homme plus humain. Les jean-foutres qui voulaient s'en débarrasser à tel prix que se fût, le firent décréter d'accusation, et pour l'assassiner plus sûrement, ils avaient formé le projet de donner de la pelle au cul au tribunal révolutionnaire, pour en créer un autre composé de coquins et de brigands de leur acabit mais, foutre, les Sans-culottes se rebiffèrent, le peuple défendit la cause de son véritable ami, il ne laissa pas aux Brissotins le temps d'achever leur crime Marat parut devant ses juges, et il confondit ses accusateurs ramené en triomphe au haut de la sainte montagne, il y épouvanta tous les scélérats. Tandis, foutre, qu'une poignée de braves Montagnards faisait face à l'orage, et bravait tous les dangers pour sauver la république, l'infâme Dumouriez, d'accord avec les Brissotins, menait nos soldats à la boucherie, et vendait la Belgique aux Autrichiens Roland et sa séquelle en même temps prêchaient le fédéralisme, armaient les départements contre Paris, et déjà, foutre, ils manigançaient la guerre de la Vendée. Pour donner le coup de grâce à la liberté, le bougre de tripot appelé comité des douze, fût imaginé ce fût dans la fange du Marais qu'on alla chercher les crapauds et les serpents qui le composèrent. La mort de tous les patriotes fût arrêtée. Il t'en souvient, pauvre marchand de fourneaux, c'était par toi que devait commencer la danse car, foutre, dans tous les temps tu fus toujours le premier couché en joue auparavant le comité autrichien t'avait fait également siffler la linotte, et les feuillants avaient juré que ta tête serait le premier cadeau qu'ils feraient à la louve autrichienne. Quand le sac est trop plein, il faut qu'il crève, foutre. La journée du 31 mai servit de second acte à la tragédie du 10 août elle a sauvé la république, elle a mené à l'échafaud les principaux chefs de la conjuration mais, foutre, tout
n'est pas détruit depuis qu'on a osé demander l'ouverture des prisons, les aristocrates ont employé le vert et le sec pour délivrer leurs amis et leurs parents, et pour perdre les patriotes. Carra et Gorsas sont ressuscités les mêmes infamies qu'ils débitaient, sont répétées par d'autres cuistres de leur espèce. Les plus grands conspirateurs trouvent des hommes assez audacieux pour faire leur éloge et pour les défendre, et les meilleurs patriotes, calomniés, persécutés, traînés dans les cachots et confondus avec les fripons, les aristocrates et les royalistes, sont lâchement abandonnés ou s'il se trouve des hommes assez justes, assez hardis pour prendre leur défense, on les accuse d'être des chefs de parti, des ambitieux, des désorganisateurs. L'or de Pitt circule à flots pour exciter tous ces désordres, pour entretenir la corruption, pour protéger le crime et pour accabler l'innocence et la vertu. Ce ne sont pas seulement les patriotes que l'on veut perdre, c'est la république, foutre. Les feuillants, les Brissotins de nouvelle fabrique, en même temps qu'ils répandent le poison du modérantisme, osent blâmer les mesures révolutionnaires qui ont sauvé la liberté ils minent sous-main le gouvernement, afin de s'en emparer. Un comité de salut public, un comité de sûreté générale, composé de phélippotins, serait le chef d'oeuvre de l'aristocratie bientôt de nouveaux crapauds barboteraient dans le Marais, bientôt recommencerait un combat meurtrier entre le crime et la vertu. Voilà pourtant ce que certains coquins n'ont pas crainte de demander. Et c'est à la veille du grand coup de peigne, c'est le moment où nos braves guerriers brûlent d'impatience d'exterminer les esclaves des despotes, que l'on jette ainsi des bâtons dans les roues! Oui, foutre, les patriotes ont raison d'exprimer leur indignation, en voyant se former de pareils complots. Il faut sauver la république, et pour la sauver, il faut faire justice de tous les fripons, de tous les intrigants, de tous les conspirateurs. Braves Sans-culottes, il ne faut pas jeter le manche après la cognée. Ceux qui prêchent le modérantisme sont vos plus grands ennemis. Il n'y a plus à reculer, foutre il faut que la révolution s'achève. La convention vient de rendre un nouveau décret sur le maximum, qui va tuer les accapareurs et ramener l'abondance. La loi qui confisque les biens des hommes suspects, et qui ordonne leur déportation, va ôter à tous les ennemis du peuple les moyens de troubler la paix, et purger la république de tous les monstres qui l'empoisonnent. Ainsi, foutre, pour triompher de toutes les cabales et de toutes les intrigues, il faut que tous les vrais républicains continuent d'environner la convention qui travaille d'arrache pied au bonheur du peuple. Que les Sans-culottes se rallient donc pour la délivrer de tous les traîtres qui conspirent contre la liberté: leur nombre est encore grand mais, foutre, si les lois révolutionnaires sont exécutées promptement et vigoureusement, ils rentreront tous dans le néant. Je ne saurais trop le répéter: la cause de tous les troubles qui nous agitent, vient de l'indulgence que l'on a mise dans le châtiment des traîtres.
Un seul pas en arrière perdrait la république. Jurons donc, foutre, la mort des modérés, comme celle des royalistes et des aristocrates. De l'union, du courage, de la constance, et tous nos ennemis seront a quia, foutre.