Aux Origines de La Torah by Israël Finkelstein Thomas Römer [PDF]

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Zitiervorschau

Des mêmes auteurs D’Israël Finkelstein Avec Neil Asher Silberman, La Bible dévoilée. Les nouvelles révélations de l’archéologie, Paris, Bayard, 2002. Avec Neil Asher Silberman, Les rois sacrés de la Bible. À la recherche de David et Salomon, Paris, Bayard, coll. « Folio histoire 159 », 2006. Un archéologue au pays de la Bible, Paris, Bayard, 2008. Le royaume biblique oublié (Collège de France), Paris, Odile Jacob, 2013.

De Thomas Römer La première histoire d’Israël. L’école deutéronomiste à l’œuvre, Genève, Labor et Fides, coll. « Le monde de la Bible », 2009. La Bible, quelles histoires ! Entretien avec Estelle Villeneuve, Paris, Bayard / Genève, Labor et Fides, 2014. L’invention de Dieu (Les livres du nouveau monde), Paris, Seuil, 2014. Moïse en version originale. Enquête sur le récit de la sortie d’Égypte (Exode 1–15), Paris : Bayard / Genève, Labor et Fides, 2015.

© Bayard Éditions, 2019 18, rue Barbès, 92128 Montrouge Cedex (France) EAN : 978-2-227-49335-3 Ce document numérique a été réalisé par Nord Compo.

Système de transcription de l’hébreu

Les consonnes lettre

nom

translittération

prononciation

‫א‬

alef



celle de voyelle attenante

la

‫ב‬

beth

b

/b/ ou /v/

‫ג‬

ghimel

g

/g/ (garder)

‫ד‬

daleth

d

/d/

‫ה‬



h

/h/ (aspiré)

‫ו‬

waw

w

/w/

‫ז‬

zayin

z

/z/

‫ח‬

ḥeth



/h/ (allemand Bach)

‫ט‬

ṭeth



/t/

‫י‬

yod

y

/y/

‫כ‬/‫ך‬

kaf

k

/k/ ou /h/

‫ל‬

lamed

l

/l/

‫מ‬/‫ם‬

mem

m

/m/

‫נ‬/‫ן‬

nun

n

/n/

‫ס‬

samekh

s

/s/

‫ע‬

ayin

ʿ

gutturale sonore

‫פ‬/‫ף‬



p

/p/ ou /f/

‫צ‬/‫ץ‬

ṣadé



/ts/

‫ק‬

qof

q

/k/

‫ר‬

resh

r

/r/

‫שׂ‬

sin

ś

/s/

‫שׁ‬

šin

š

/ch/ (chacun)

‫ת‬

taw

t

/t/

Introduction

Bible et Archéologie n’ont pas toujours fait bon ménage. L’archéologie biblique, dont on peut situer l’essor majeur dans la première moitié du e XX siècle, avait surtout pour but de prouver l’historicité des récits bibliques en identifiant les lieux bibliques et en enracinant les événements racontés dans la Bible dans la matérialité des découvertes archéologiques. Pour les biblistes, les Européens tout particulièrement, l’archéologie était une « science auxiliaire », étrangère à la complexité de l’exégèse biblique. Pourtant, la plupart des premiers archéologues en Palestine étaient des biblistes chrétiens, souvent issus des sphères évangéliques du christianisme, qui travaillaient sur le terrain, une pelle dans une main et la Bible dans l’autre. Ainsi, la fameuse stèle de Mésha qui fut découverte par un missionnaire anglican alsacien, Frederick A. Klein, il y a 150 ans, offre un bon exemple de la tension qui existait entre les deux disciplines. Cette découverte de la première inscription monumentale du Levant fit grand bruit 1. En effet, le texte de la stèle confirmait la Bible, puisque l’on y trouvait les noms des rois d’Israël et de Moab, Omri et Mésha, ainsi que les quatre consonnes du nom du dieu d’Israël, Yhwh, et le nom du dieu de Moab, Kemosh, éléments qui figurent également dans le texte du livre biblique des Rois. Mais, en même temps, on constate des différences entre 2 Rois 3 et l’inscription moabite, notamment quant à la manière dont est

relatée l’issue de la guerre entre Israël et Moab. Par ailleurs, la stèle de Mésha atteste l’existence d’un sanctuaire yahwiste à Nébo qui n’est nullement mentionné dans la Bible hébraïque. Notons en passant qu’à l’époque, l’archéologie biblique n’était pas du tout intéressée par la stratigraphie et la chronologie, mais se concentrait sur des monuments, des « trésors » ou de grands bâtiments. Pendant longtemps, l’archéologie de la Terre Sainte s’est donc trouvée écartelée entre, d’un côté, la volonté de prouver l’historicité des récits bibliques et, de l’autre, des découvertes qui allaient à l’encontre de cet effort. Ainsi, dans les années 1950, lorsque l’archéologue britannique Kathleen Kenyon fouilla le site de Jéricho, il s’avéra qu’il n’y avait pas de traces de destruction d’une grande muraille autour de la fin du deuxième millénaire, époque à laquelle on situait traditionnellement « la conquête » du pays. Le récit biblique de la destruction de Jéricho (Jos 6) n’était donc pas un récit historique mais un récit légendaire. Par la suite, la plupart des biblistes et des archéologues entamèrent une sorte de divorce. D’un côté, il y avait des archéologues juifs et chrétiens, dont la plupart avaient une lecture assez naïve de la Bible et qui essayaient, bon gré mal gré, d’utiliser les écrits bibliques d’une manière immédiate pour expliquer les découvertes archéologiques. Ainsi, à Megiddo, le complexe d’édifices sur piliers fut interprété comme les écuries du roi Salomon, parce que la Bible le décrit comme un monarque extrêmement puissant qui aurait régné sur un empire allant de l’Égypte jusqu’à l’Euphrate et mentionne pour son règne des « villes de chars et de chevaux » (1 R 9,19). Toutefois, le texte biblique n’établit pas de lien entre ces « villes de chars et de chevaux » et Megiddo. De plus, reste toujours posée la question de savoir si le seul verset mentionnant Megiddo décrit véritablement l’époque de Salomon ou plutôt une réalité postérieure, « projetée » vers un passé idéalisé. De même, la découverte de deux stèles couchées dans le sanctuaire d’Arad fut interprétée comme une preuve de l’historicité de la réforme du roi Josias qui aurait ordonné la destruction

de ce sanctuaire, alors qu’une analyse détaillée de la stratigraphie du site ne soutient pas cette interprétation. De l’autre côté, les biblistes, surtout en Europe, étaient de plus en plus déconnectés de l’archéologie. Ils aboutissaient souvent à des datations très récentes de textes bibliques, les situant souvent à l’époque perse, sans s’occuper des données archéologiques. Or, peut-on vraiment imaginer une activité scribale intensive à Jérusalem à l’époque perse, alors que la ville et la province de Yehud (Juda) étaient très peu peuplées ? Et peut-on imaginer, à la même époque, la création, voire l’invention de récits qui mettent en scène des sanctuaires comme Silo ou Béthel alors que ceux-ci ont été détruits ou abandonnés bien plus tôt ? Il est donc temps que l’archéologie moderne et les sciences bibliques critiques se parlent à nouveau, les sciences bibliques cessant de considérer l’archéologie comme une « science auxiliaire » et les archéologues renonçant à imaginer l’archéologie comme étant la « cour suprême », qui pourrait définitivement trancher les questions et datations débattues par les exégètes. La critique historique et les découvertes archéologiques s’accordent sur l’idée que Jérusalem ne devint une ville importante qu’à partir du VIIIe ou e VII siècle avant l’ère chrétienne et que l’on peut, par conséquent, situer la première mise par écrit de certaines traditions fondatrices, à cette époque. L’archéologie fait également des découvertes qui rendent nécessaire la remise en question de la reconstruction de l’histoire des royaumes d’Israël et de Juda selon la documentation biblique même à la fin de la période monarchique. Cela est dû au fait que l’archéologie traite d’économie, de société et de vie quotidienne, alors que le texte transmet la théologie de ses auteurs et l’idéologie royale de leur époque. La description du roi Manassé en constitue un bon exemple. Alors qu’il ramena la prospérité en Juda après la catastrophe que fut la campagne du roi assyrien Sennakérib, le Deuxième livre des Rois le dépeint comme le pire apostat et le parfait vilain.

Les deux auteurs de ce volume ont entamé depuis plusieurs années un dialogue entre archéologie et sciences bibliques et ce livre présente quelques résultats de cette collaboration. Il s’agit d’une collection de six articles traduits de l’anglais, dont deux ont été co-écrits, et qui traitent tous principalement du Pentateuque. Le volume s’ouvre par deux articles méthodologiques. Israël Finkelstein reprend et expose la question de l’archéologie « biblique », de ses potentialités, mais aussi du mauvais usage que certains en font. Thomas Römer pose la question des critères que nous possédons pour dater des textes du Pentateuque. Suivent deux articles sur les patriarches Abraham et Jacob. Les auteurs montrent comment il est possible d’arriver à des hypothèses plus solides sur la formation de ces traditions, en réunissant observations archéologiques et exégétiques. Deux articles sur les traditions de l’exode et de Moïse donnent également un éclairage croisé sur ce mythe fondateur qui s’enracine à la fois dans des contextes historiques au niveau de « traces de mémoire » tout comme dans les contextes historiques des milieux rédactionnels. Nous espérons que ce volume contribuera à encourager le dialogue des disciplines biblique et archéologique, et à intéresser les biblistes au travail archéologique comme les archéologues à l’exégèse dite historicocritique. Rappelons que les biblistes et les archéologues s’intéressent à la diachronie, aux strates (d’un tell ou d’un texte) et à une meilleure compréhension d’un passé, sans la connaissance duquel il est impossible de comprendre le présent. Nous remercions Joëlle Cohen-Finkelstein, Hervé Gonzalez et Colette Briffard pour la traduction, la préparation et la relecture des textes réunis dans ce volume. Les noms propres bibliques sont écrits selon l’orthographe de la TOB, sauf pour quelques cas, où nous suivons la Bible de Jérusalem (notamment Megiddo, Jezréel, Gezer). Paris/Tel Aviv, juin 2018, Israël Finkelstein Thomas Römer

1

L’histoire de l’Israël ancien entre archéologie et texte biblique. État des lieux

Israël Finkelstein

Dans un article publié il y a près de quinze ans, je présentais ma vision de l’interaction entre archéologie et texte biblique, dans la perspective de tenter une reconstruction de l’histoire de l’Israël ancien 1. Pour diverses raisons, la première d’ordre général et les deux autres plus personnelles, les années qui ont suivi cette publication exigèrent une mise à jour de mon point de vue en la matière. La première raison est l’incroyable rythme que connaît l’archéologie en Israël : de nouvelles données ont été collectées et de nouvelles méthodes sont utilisées. Particulièrement importante est la révolution qui s’est opérée ausur le plan de la dation des trouvailles. La datation par le radiocarbone des couches de l’âge du Fer, qui était à peine ébauchée dans la toute dernière partie des années 1990, s’est intensifiée au cours de la décennie suivante, rendant dorénavant possible l’établissement d’une chronologie des vestiges de l’âge du Fer sur des bases solides et impartiales, libérant ainsi le chercheur des théories

traditionnelles hautement conjecturales, trop souvent fondées sur une compréhension personnelle du texte biblique. La deuxième raison est mon intérêt toujours croissant pour l’exégèse biblique et ma fréquentation de spécialistes en ce domaine, européens pour la plupart, qui ont influencé mon travail. La troisième raison, toute naturelle je suppose, est que le temps passant, ma ferveur rebelle s’est émoussée, me permettant plus aisément de chercher la « voie du milieu » quand cela est nécessaire. Dans le présent article, je souhaite donc décrire mon approche actuelle — ce qui n’est en aucune façon un engagement à ne pas le faire à nouveau dans quinze ans !

Brève histoire de la recherche Dans le domaine de la reconstruction de l’histoire de l’Israël ancien, le pendule n’a cessé d’osciller au cours des deux cents dernières années entre le pôle de l’interprétation traditionnelle et celui de l’interprétation critique. Une vigoureuse controverse existait avant même le début de la recherche archéologique. Elle commença avec l’exégèse biblique de Spinoza, il y a presque quatre siècles, et culmina avec Wellhausen et d’autres chercheurs, au XIXe siècle. Pour ce qui est de l’archéologie, une grande partie des premiers travaux effectués en Palestine, par Sellin et Petrie par exemple, fut professionnelle, c’est-à-dire sans lien avec une lecture non-critique du texte biblique. Cela changea pourtant avec le développement de l’archéologie biblique traditionnelle, menée par l’école d’Albright dans les années 1920, dont l’objectif était de contrer les théories critiques et de prouver que l’histoire biblique était une relation exacte des événements du passé. Les archéologues israéliens, et tout particulièrement Yadin, rejoignirent le camp d’Albright dans les années 1950, pour des raisons culturelles plus que théologiques. Cette archéologie biblique conservatrice régna en maître pendant presque tout

le XXe siècle. La réaction à cette tendance fut une approche ultra-critique (le « Minimalisme » ), apparue dans les années 1990, qui rejeta l’utilisation traditionnelle de l’archéologie dans la reconstruction de l’Israël ancien à l’âge du Fer, soutenant que les textes bibliques se rapportant à cette histoire avaient tous été compilés à l’époque perse et hellénistique et n’avaient donc aucune valeur pour la compréhension des périodes anciennes (voir Davies ; Thompson) 2. Le terme « Minimalisme » se réfère spécifiquement à l’interprétation textuelle. Par conséquent, accuser un archéologue d’être « minimaliste » démontre une totale incompréhension de toute la discipline 3. Parallèlement aux travaux des Minimalistes, se développa une école que l’on peut présenter comme promouvant une « vue à partir du centre ». Cette école, à laquelle j’appartiens, prône une attitude critique tout aussi bien des textes que de l’archéologie, mais diffère pourtant du Minimalisme en ce qu’elle affirme qu’un nombre significatif des écrits bibliques date de la fin de la période monarchique et que d’autres récits, certes mis par écrit plus tard, contiennent des traditions reflétant des realia de l’âge du Fer. Récemment, cette approche 4 a été ingénieusement décrite par Jean-Marie Durand comme une déconstruction positive. Le groupe adepte de la « vue du centre » est loin d’être homogène. Bien évidemment, je ne décrirai donc ici que ma propre position. De façon prévisible, la propagation de l’approche critique, en particulier de la « vue du centre », considérée en quelque sorte comme posant une plus grande menace, a engendré toute une série de tentatives pour en démontrer l’inanité et pour ré-établir la reconstruction conservatrice de l’histoire de l’Israël ancien. De manière ironique, alors que les néo-traditionnalistes sont tous des archéologues, leur interprétation est fondée sur des textes. Leurs argumentations peuvent être vues comme une renaissance de l’attaque menée par l’école d’Albright contre les développements de la recherche biblique critique européenne à la fin du XIXe et au début du XXe siècle, même si ces néo-traditionnalistes appartiennent à des milieux culturels variés. Cette tendance conservatrice

actuelle apparaît tout particulièrement dans certaines affirmations récentes, telles que : – Le palais du Roi David a été découvert dans la Cité de David à 5 Jérusalem . – Les trouvailles à Khirbet Qeiyafa dans la Shéphélah prouvent l’existence d’un royaume développé en Juda au Xe siècle av. J.-C. et doivent être interprétées dans le contexte de textes bibliques censés 6 décrire des événements s’étant produits à cette même époque . Quant à l’ostracon trouvé sur place, il démontre la possibilitéd’une composition des textes bibliques dès le Xe siècle av. J.-C. 7 – La production de cuivre à Khirbet en-Nahas et Timna dans la Arabah est liée aux accomplissements économiques du Roi Salomon 8. Plus subtiles mais non moins erronées sont des interprétations d’une série de données en provenance de fouilles anciennes, comme par 9 exemple les « forteresses israélites » dans les hautes terres du Néguev , ainsi que les interprétations de l’ostensible transformation des modèles d’occupation au Xe siècle av. J.-C., considérée comme l’indicateur de l’organisation d’un royaume développé dans l’Israël ancien 10. Ces exemples illustrent une méthodologie défectueuse qui sélectionne et présente les données de manière à arriver aux conclusions désirées 11. Mise à part l’approche non-critique des textes bibliques que révèlent tous ces exemples, une autre question méthodologique se pose : où et comment établir la limite entre trouvailles archéologiques sur le terrain et interprétation de ces trouvailles.

Comment « Voir à partir du centre » ? Je dirai tout d’abord que le chercheur doit se détacher des « concepts historiques » des auteurs bibliques. Archéologie biblique conservatrice et reconstruction de l’histoire traditionnelle de l’Israël ancien reposent sur

une acceptation du concept le plus fondamental, qui est celui de l’auteur ou des auteurs du texte biblique : l’histoire de l’Israël ancien, depuis les patriarches de la Genèse jusqu’au retour d’Esdras et Néhémie, est une description véridique et linéaire de l’histoire de la nation hébraïque. Cela 12 n’est pas le cas . En ce qui me concerne, j’aborde l’histoire biblique à partir d’un point de vue autrefois décrit par l’historien des Annales, Marc Bloch, comme étant celui d’une histoire régressive. L’idée étant que, dans une situation d’incertitude (or des récits comme ceux des Patriarches, de l’Exode, de la Conquête et des Juges appartiennent à cette catégorie), le chercheur doit s’appuyer sur une époque pour laquelle les témoignages (historiques, économiques, sociaux, ou ayant trait à la culture matérielle) sont clairement définis et, à partir de là, reconstruire pas à pas les périodes plus anciennes, en remontant dans le temps. Dans le cas de l’Israël ancien, l’époque qui peut servir le plus sûrement de point d’ancrage est celle à laquelle ont vécu les premiers auteurs, à savoir, la fin de la période monarchique (voir ci-dessous). Afin de respecter les « règles » que je vais décrire, cette reconstruction doit se faire avec une compréhension aussi sûre que possible de la question de la transmission des traditions, orales et/ou écrites, et des objectifs idéologico-théologiques des auteurs bibliques. Dans certains cas, les archéologues bibliques traditionnels héritèrent, à leur insu, d’un autre concept venant de ces auteurs, selon lequel les épisodes de l’histoire de l’Israël ancien étaient uniques dans les chroniques du Levant. Le meilleur exemple en est l’effondrement survenu à la fin de l’âge du Bronze, qui était considéré comme un événement unique en son genre. Je pense que l’archéologie, surtout concernant ce que cette discipline peut nous apprendre de l’histoire occupationnelle, oblige le chercheur à considérer l’histoire de Canaan/Israël selon les lignes d’un autre concept de l’École des Annales, la longue durée. Dans cette perspective, nombre de processus qui caractérisèrent la région aux âges du Bronze et du Fer, au moins jusqu’à la main mise assyrienne, furent de nature cyclique et influencés par des conditions géographiques. Cela est

vrai pour les vagues d’occupation et pour les périodes de déclin dans les hautes terres et les zones arides, de même que pour les cycles d’essor urbain et d’effondrement dans les basses terres. Par ailleurs, l’histoire de Canaan/Israël ne peut être séparée des événements et processus avérés dans les régions voisines, le Proche-Orient ancien et la Méditerranée orientale. L’exemple le plus probant est la nécessité de traiter les destructions en Canaan de la fin de l’âge du Bronze comme faisant partie du phénomène plus vaste des « années de crise » en Méditerranée 13 orientale . La question cruciale, bien évidemment, est de savoir comment procéder lorsque l’archéologie et le texte biblique présentent des vues 14 conflictuelles. Dans un tel cas, lequel des deux doit l’emporter ? En archéologie, deux facteurs prédominent : 1) l’importance quantitative de la trouvaille, y compris la taille de la zone exposée et le degré de représentation de cette trouvaille en divers endroits du site, lorsque celuici est vaste ; 2) la qualité du contrôle des données : une stratigraphie assurée, un assemblage céramique clair et de bonnes datations par radiocarbone offrent à l’archéologie des preuves fiables, impartiales et en temps réel. Pourtant, il va sans dire que, même dans des conditions presque parfaites, les trouvailles archéologiques peuvent donner lieu à différentes interprétations culturelles et historiques. Pour ce qui est du texte, la question la plus fondamentale est le temps écoulé entre les événements rapportés et le moment de leur mise par écrit. Quand il y a une grande proximité chronologique et que le texte est de nature chronistique (à savoir libre de toute affirmation de type théologique, comme on peut en voir dans les discours ou les prophéties, par exemple) le texte peut être considéré comme fiable. Lorsque les événements décrits sont censés s’être déroulés plusieurs siècles avant la composition du texte et que le récit n’est pas d’ordre chronistique, le texte a moins de chance d’être un témoignage fidèle du passé. Tout cela nous enseigne qu’en ce qui concerne l’histoire de l’Israël ancien nous ne sommes pas dans une situation manichéenne, ce n’est ni tout blanc ni tout

noir et il n’existe aucune liste exhaustive concernant l’historicité des textes. Chaque cas doit être envisagé selon les circonstances spécifiques (voir les exemples ci-dessous). Ayant posé le cadre de la discussion, je souhaite maintenant me tourner vers ce que je considère être les règles de base à respecter lorsque l’on traite d’histoire biblique.

Tout est question de datation Pour pouvoir utiliser l’archéologie dans la reconstruction historique, on doit être en contrôle effectif de la chronologie absolue. Par « contrôle effectif », j’entends que les trouvailles doivent provenir d’un contexte stratigraphique sûr et avec une bonne compréhension de la chronologie relative, c’est-à-dire de l’assemblage céramique provenant dudit contexte. Étant donné que l’association d’un événement historique avec des trouvailles archéologiques — comme, par exemple, des couches de destruction — est une entreprise ardue et du fait que certains textes bibliques, sur lesquels les chercheurs fondent leurs théories, ne peuvent être considérés comme des récits historiques directs, la chronologie absolue, indépendante et fiable, est absolument nécessaire. Elle peut être obtenue par l’élaboration d’un programme rigoureux de datation par le radiocarbone. Toutefois, un problème se pose : la datation par le radiocarbone, c’est bien connu, donne des résultats ayant un intervalle d’incertitude de plusieurs décennies. Dans le cas de l’histoire biblique, cela peut conduire à des reconstructions de types totalement différents. La datation des palais du Fer IIA tardif à Megiddo en est un exemple probant : un écart de 70 à 80 ans (entre ca. 940 et 860 av. J.-C.) les situe dans des contextes historiques radicalement différents : à la période censée être celle de la Monarchie Unifiée ou sous le règne de la dynastie omride du royaume du

Nord. Une situation encore plus complexe est la datation de certaines trouvailles dans le nord d’Israël. Les dater de la première moitié du e IX siècle (ca. 850 av. J.-C.) les attribuerait aux Omrides, alors que les situer dans la deuxième moitié de ce siècle (ca. 830 av. J.-C.), les mettrait en relation avec l’hégémonie damascène sur la région. Un troisième exemple est la datation de l’activité dans les hauteurs du Néguev : situer leur période d’occupation majeure au milieu du Xe siècle ou, au contraire, e dans la première moitié ou le milieu du IX siècle entraîne une vision différente de la situation géopolitique relative à la campagne militaire de Sheshonq I, la production de cuivre dans la Arabah et la période de 15 l’hégémonie damascène dans le sud du Levant . Voici donc les règles à suivre pour utiliser avec succès la datation au radiocarbone : – Seuls des résidus de substances à vie courte (grains de céréales, noyaux d’olive, etc.) doivent être échantillonnés. Le charbon de bois est problématique parce qu’il implique le risque du old wood effect, à savoir la possibilité que l’échantillon provienne d’un morceau de bois ancien, réutilisé durant plusieurs décennies, si ce n’est plusieurs siècles, après que l’arbre a été abattu. – Dater en fonction d’une unique détermination radiocarbone n’est pas fiable, parce qu’un résultat unique peut toujours être une exception. – La datation d’un site devrait se faire de préférence sur une séquence de phases céramiques ou de strates, parce qu’examiner les résultats selon un modèle bayésien en introduisant comme paramètre la stratigraphie des données, permet de diminuer de façon significative les incertitudes. Ceci peut être obtenu en mettant en relation des données en provenance de plusieurs sites (si possible voisins) dont la séquence relative peut être déterminée en fonction de leurs assemblages céramiques respectifs 16, ou en utilisant des données en provenance d’une séquence dense de strates bien séparées sur un même site 17.

– Dans le cas d’un site à couche archéologique unique, les résultats devraient plutôt être situés dans un contexte régional, en relation avec des couches représentant une séquence de phases céramiques. Notons par exemple qu’à Khirbet Qeiyafa dans la Shéphélah, lorsqu’ ils sont datés sans autre référence, les résultats indiquent majoritairement la deuxième moitié du XIe siècle 18, alors que quand ces résultats sont placés en contexte (spécialement versus des sites du Fer I voisins), le e 19 site est daté majoritairement de la première moitié du X siècle . – Une moyenne des résultats ne peut être effectuée que lorsque l’on est à même de croire que les échantillons originaux représentent un laps de temps très court, de quelques années à peine, dans l’histoire de l’occupation du site. Si cela n’est pas le cas, les résultats doivent être présentés individuellement par un graphe 20. Tout écart par rapport à ces règles peut conduire à des datations fausses et, donc, à une reconstitution historique erronée.

La dichotomie Israël — Juda Au cours de la reconstruction de l’histoire de l’Israël ancien, il est nécessaire de prendre en considération les différences existant entre les traditions du Nord et les traditions du Sud insérées dans la Bible 21. Le texte biblique reflète, à n’en pas douter, une perspective du Sud. Cela est visible par exemple dans l’arrangement opéré dans le livre de la Genèse : le récit des Patriarches débute avec le héros du Sud, Abraham, qui est présenté comme le grand-père du héros du Nord, Jacob. Dans ce que l’on nomme l’histoire deutéronomiste, tous les rois du Nord sont évalués négativement et dans le livre des Chroniques le royaume du Nord est presque totalement ignoré. Cette révision de majeures parties de la Bible hébraïque opérée dans le royaume du Sud a influencé les chercheurs, qui ont bien souvent adopté la perspective du royaume du Sud, Juda.

Pourtant, les écrits extrabibliques et l’archéologie montrent qu’historiquement, le royaume du Nord, Israël, fut le plus puissant des deux royaumes hébreux. Israël connut un essor démographique et économique bien avant Juda. Les territoires du Nord, des deux côtés du Jourdain, étaient déjà densément peuplés au Fer I, alors que les hautes terres de la région de Judée étaient marginales et avaient une population clairsemée. À cette époque, la proportion sur le plan démographique entre les Hautes Terres d’Israël (le Galaad inclus) et Juda était de 25 contre 1. e Même au milieu du VIII siècle (avant la conquête du Galaad par Damas) la proportion est encore estimée à 4 contre 1. 22 Juda ne commença à se développer de façon significative qu’à la dernière phase du Fer IIA tardif (fin du IXe siècle) 23 et n’atteignit un véritable pic de prospérité qu’au Fer IIB-C, c’est-à-dire à partir de la fin du e 24 VIII siècle av. J.-C. Ces chiffres de population se traduisaient assurément en termes de puissance militaire et économique. En effet, sous les Omrides, la puissance d’Israël est clairement attestée dans la liste de Salmanasar III des participants à la bataille de Qarqar en 853 av. J.-C. et dans certaines allusions apparaissant dans les inscriptions de Tel Dan et de Mésha. Elle est également visible dans certaines références bibliques aux règnes des Omrides et aux règnes de Joas et de Jéroboam II, un peu plus tard. De plus, Israël contrôlait des régions plus fertiles, telle la vallée de Jezréel, ainsi que les grandes routes commerciales, comme la route internationale le long de la côte et des vallées du nord, et la Voie Royale en Transjordanie. De plus, Israël était mieux connecté que Juda à la côte et aux régions voisines. Tout cela accrut la production agricole et les revenus du commerce du royaume du Nord. En un mot, aux plans démographique, économique, militaire et géopolitique, Israël fut la force dominante pendant presque toute la période où les deux royaumes hébreux existèrent côte à côte. Ces facteurs doivent être pris en considération lorsque l’on analyse les récits bibliques.

L’absence de preuve d’une compilation de textes complexes avant le début du viiie siècle Dans un article récent, Benjamin Sass et moi-même avons réétudié les inscriptions alphabétiques ouest-sémitiques du Levant datant du Bronze Récent jusqu’à la première phase du Fer IIB, à savoir, jusqu’au début du e 25 VIII siècle av. J.-C. Nous en avons conclu que les inscriptions hébraïques apparurent pour la première fois à la fin du Fer IIA à Gath, dans le sud, et à Rehob, dans le nord. Mais à cette époque (le IXe siècle av. J.-C.), hormis une unique inscription proto-cananéenne de Jérusalem, on ne les trouve pas dans les territoires centraux d’Israël et de Juda. Il est particulièrement significatif qu’aucune inscription en hébreu ne provient des sites majeurs de l’époque omride : Megiddo, Samarie, Jezréel, Yokneam et Haçor. Quoi qu’il en soit, les courtes inscriptions alphabétiques datant du IXe siècle (ou un peu plus tôt) n’attestent pas d’une capacité à composer des textes élaborés. Quant aux inscriptions lapidaires monumentales, elles e n’apparaissent qu’à la fin du IX siècle. Là encore, pourtant, la capacité des scribes royaux à composer des inscriptions royales (ou, en théorie, celle d’administrateurs à établir des listes de marchandises) ne peut être comparée à celle de rédiger des textes bibliques élaborés. Les premières inscriptions longues et complexes, dans un genre qui rappelle les compositions bibliques, apparaissent seulement dans la première moitié du VIIIe siècle sur des plâtres, dans le royaume du Nord. Il s’agit du texte de Balaam à Tell Deir Alla 26 et d’un texte de Kuntillet-Ajrud récemment interprété par Na’aman comme pouvant être lié au récit de l’Exode 27. Les observations ci-dessus semblent exclure la possibilité d’une composition des textes bibliques avant la première moitié du VIIIe siècle av. J.-C. Cette affirmation englobe les théories ayant trait aux matériaux anciens du Pentateuques et aux matériaux pré-deutéronomistes dans les livres de Samuel, comme l’histoire de l’ascension de David et l’histoire de

la succession 28. Sur le plan historique, cela fait parfaitement sens : la soudaine apparition de textes élaborés dans la première moitié du e VIII siècle, sans doute sous le règne de Jéroboam II, est liée à la prospérité générale de cette période, à l’influence assyrienne sur le royaume du Nord et probablement aussi à une réorganisation du royaume en ce temps-là.

Les traditions anciennes dans la Bible : anciennes à quel point ? Ce qui vient d’être dit sur la propagation de l’écrit pourrait conduire à la conclusion selon laquelle des matériaux décrivant des événements qui se seraient apparemment déroulés dans les premières phases de l’histoire de l’Israël ancien, des siècles avant la compilation des textes bibliques, ou même la capacité à écrire des textes de cet ordre relèverait de la fiction — uneinvention des auteurs tardifs dans le but de promouvoir leurs objectifs. Une autre manière de formuler cela serait d’affirmer que les débuts de l’histoire de l’Israël ancien sont anhistoriques. Une telle affirmation serait erronée. L’archéologie, l’étude de textes extrabibliques et l’exégèse biblique avancée montrent tous que la Bible hébraïque contient ce que je décrirai comme des « mémoires » anciennes, historiques ou plutôt « quasihistoriques », qui se formèrent des siècles avantla date la plus ancienne possible pour la composition du texte biblique. Elles auraient été transmises oralement avant d’être mises par écrit et pourraient être considérées comme la préservation de références à des situations historiques anciennes, bien qu’il ne faille surtout pas les considérer comme des descriptions précises du passé. On les découvre parfois aujourd’hui comme « celées » dans le matériau biblique tardif et « enveloppées » de l’idéologie de la ou des périodes auxquelles vécurent les auteurs. Prenons donc quelques exemples.

Le premier provient de mes fouilles à Silo, il y a plus de trente ans. L’archéologie a montré que Silo fut prospère entre le début et le milieu du Fer I et fut totalement détruite avant la fin de cette période. Les résultats d’analyse de radiocarbone placent cette destruction dans la deuxième e 29 moitié du XI siècle . Il n’y eut pas d’occupation significative à Silo au Fer II et à la période perse. Les vestiges datant de ces périodes sont maigres et ne sont en rien remarquables ; ils ne révèlent aucun signe de lieu de culte ou de destruction par le feu. Il est donc impossible de lire la tradition relative au sanctuaire de Silo dans un contexte du Fer II ou dans un contexte plus tardif. Il est donc impossible d’associer la tradition concernant la dévastation du lieu de culte à Silo, telle qu’elle est décrite dans le livre de Jérémie, avec la conquête du royaume du Nord par les Assyriens à la fin du VIIIe siècle 30. Toutefois, on ne peut échapper à la conclusion qu’à la fin de la période monarchique dans le royaume de Juda existait un souvenir fort de l’existence d’un lieu de culte à Silo. Cela peut avoir été une tradition du Nord transmise oralement et qui atteignit Juda après 720 av. J.-C. Une reconnaissance par Juda de l’importance de ce lieu de culte peut avoir eu pour but de trouver grâce aux yeux des nombreux ex-Israélites qui formaient désormais un élément majeur de sa population à la fin de la période monarchique (voir ci-dessous). Pourtant, en même temps, la tradition biblique rapportée dans le livre de Jérémie reflète strictement le point de vue de Juda en ce qu’elle subordonne Silo à Jérusalem. Les récits évoquant le comportement impie des prêtres de Silo, la défaite d’Israël et le transfert de l’Arche d’Alliance de Silo à Jérusalem peuvent avoir servi l’idéologie deutéronomiste comme un parallèle, sur le plan cultuel, au rejet de Saül (et du Nord) et à l’élection de David (voir également Ps 78,60-71) 31. Avec le cas de Silo, nous avons donc un exemple de la préservation dans le texte biblique de mémoires, aussi vagues puissentelles être, concernant des événements qui eurent sans doute lieu dans la deuxième partie du XIe siècle.

D’autres traditions anciennes mieux connues, originaires du Nord, furent insérées dans le Pentateuque. La première est une strate ancienne du cycle de Jacob, qui semble provenir des environs de la rivière Yabbok dans le Galaad. Elle traite de la frontière entre Israélites et Araméens dans cette région et, sans doute aussi, de la fondation d’un temple à Penouël. En nous fondant à la fois sur l’étude textuelle et sur l’archéologie (sur les modèles d’occupation du territoire notamment), Thomas Römer et moimême avons proposé de dater l’origine (orale) de ces récits avant le e 32 milieu du IX siècle . Le récit de l’Exode peut avoir son origine dans une tradition encore plus ancienne, que certains auteurs proposent d’associer à 33 la situation géopolitique au Levant à la fin du Bronze Moyen ou au Bronze Récent 34. À l’évidence, ces deux traditions possèdent des couches plus tardives, datant du temps de leur incorporation à la fin de la période monarchique en Juda, puis de l’addition d’un niveau postexilique. Un bon exemple de mémoires anciennes ayant trouvé leur chemin jusque dans des compilations tardives est le récit de Moab dans le livre des Nombres 21-22. Ces chapitres préservent des traditions relatives à la conquête du nord de Moab sous la dynastie omride, traditions soutenues par les trouvailles archéologiques 35 et l’inscription de Mésha 36. Les livres de Samuel incluent des traditions pré-deutéronomistes 37 originaires du royaume du Nord et du royaume du Sud . Concernant la première, je ferai mention de ce que j’appellerai le récit positif de Saül. Les histoires se déroulent dans les hautes terres de Benjamin et dans la région du Yabbok et démontrent une grande similitude avec les lieux mentionnés par Sheshonq I à la suite de sa campagne en Canaan dans la deuxième moitié du Xe siècle. Les hautes terres de Benjamin présentent un réseau de sites fortifiés datant de ce siècle, pouvant témoigner du fait qu’une entité territoriale primitive existait dans cette région. Quant à la seconde, elle se rapporte à la Shéphélah et à la limite sud des hautes terres de la région de Judée. L’histoire de l’ascension de David désigne Gath comme la plus puissante des cités philistines. Gath est décrite comme régnant sur la totalité de la zone sud de la Shéphélah : de Çiqlag,

au sud-ouest, à la vallée de Béer-Shéva au sud et à la vallée du Soreq au nord. Les fouilles à Tell es-Safi (le site de la Gath biblique) montrent que dans la première moitié du IXe siècle, Gath était sans doute la plus vaste et la plus prospère des cités des basses terres du sud. Elle fut violemment détruite à la fin du IXe siècle, sans doute par Hazaël, le roi de Damas, et ne put jamais s’en relever complètement 38. Selon la grande inscription sommaire de Sargon II, à la fin du VIIIe siècle Gath était assujettie à Ashdod. Elle n’apparaît plus parmi les villes philistines des sources e assyriennes du début du VII siècle, ni dans les écrits prophétiques de la fin de la période monarchique. Le rôle dominant de Gath dans les récits de David en 1 Samuel doit donc refléter une réalité d’avant 840-830 av. J.C. 39 Ce qui peut être décrit comme l’atmosphère Apirou dans l’histoire de l’ascension de David 40 doit sans doute aussi être vu comme la préservation de traditions datant d’avant la fin du IXe siècle, lorsque le système d’occupation en Juda s’étendait jusqu’au sud de la région d’Hébron. En d’autres termes, il est raisonnable de penser que vers le milieu du e IX siècle, il n’y avait plus guère de place pour des activités de type Apirou dans cette région. Toutefois, tous les récits décrivant les premiers jours de l’Israël ancien ne possèdent pas nécessairement un fond historique. Aucune des traditions relatives au récit de la Conquête dans le livre de Josué ne peut être associée avec certitude à des événements ayant eu lieu dans le Levant à la fin du Bronze Récent, d’autant plus que bien des lieux cités dans ces récits n’étaient pas habités à cette époque. Pourtant, même dans ce cas, certains d’entre eux possèdent des racines anciennes. Je ne fais pas ici référence à l’exemple souvent cité de Haçor comme étant « à la tête de tous ces royaumes » (Jos 11,10) qui est sans doute un récit étiologique servant à expliquer la ruine massive de l’ancienne Haçor, telle que pouvaient l’observer les habitants de la région dans les dernières phases de l’âge du Fer. Je fais allusion à un bouleversement dans la vallée de Jezréel qui peut avoir été le souvenir de troubles survenus à la fin du

Bronze Récent (fin du XIIe siècle) et encore plus à la fin du Fer I (le e X siècle) lorsque de nombreux centres de cette région furent attaqués et dévastés par le feu. Je souhaite résumer cette brève discussion des matériaux bibliques reflétant des phases archaïques de l’histoire de l’Israël ancien par deux commentaires. Premièrement, nombre d’entre eux proviennent du royaume du Nord, qui avait une population plus nombreuse, qui se développa plus tôt que Juda et qui fut donc sans doute capable de composer des textes complexes plus tôt que le royaume du Sud. Deuxièmement, c’est l’archéologie qui joue un rôle important — pour ne pas dire crucial — dans l’identification de telles traditions anciennes.

Mémoires accumulées Il va sans dire qu’ayant été transmises des siècles durant, d’abord oralement puis par écrit, ces anciennes mémoires ou traditions ont dû absorber des éléments plus tardifs, additions ou élaborations, qui peuvent avoir reflété des réalités successives. Les résultats sont des textes, parfois longs, parfois simples références, que l’on peut décrire comme étant des traditions accumulées ou, pour employer un terme propre à l’archéologie, des traditions stratifiées. Un des meilleurs exemples de traditions stratifiées est le récit de David en 1 Samuel. Cette narration présente des réalités correspondant à divers contextes historiques. Je mentionnerai ici les trois plus évidentes. Comme nous l’avons noté plus haut, le cœur du récit décrit David et sa bande comme étant des mercenaires opérant dans la zone aride de Juda au sud d’Hébron et à la frontière de Gath, la Philistine. Cet élément représente une phase de l’histoire de la région précédant l’expansion démographique (et par conséquent administrative) de Juda dans cette zone, avant le Fer IIA tardif (dans ce cas précis, sans doute avant la dernière phase de

cette période dans la deuxième moitié du IXe siècle av. J.-C.). Les descriptions des guerres menées par David semblent refléter des réalités plus tardives, lorsque les royaumes territoriaux du Levant et leurs armées 41 respectives s’étaient déjà renforcés . Une strate encore plus tardive fait largement référence aux Philistins comme étant des mercenaires grecs et emploie une terminologie de caractère deutéronomiste ; elle correspond par conséquent à une situation qui ne peut être plus ancienne que le e 42 VII siècle av. J.-C. Les chapitres concernant Salomon peuvent être lus de manière identique. La partie ancienne (1 Rois 1-2) appartient à l’histoire de la succession et pourrait refléter des nécessités du VIIIe siècle. Les traditions qui décrivent Salomon comme un grand monarque, constructeur et marchand, reflètent des réalités du VIIIe siècle avant la chute du royaume du Nord et du siècle suivant, « le siècle assyrien » de l’histoire de Juda. La référence à Haçor, Megiddo et Gezer comme étant d’importants centres du royaume de Salomon (1 R 9,15) ; la description de ses chevaux et de ses écuries ainsi que les réalités derrière l’épisode des villes données à Hiram roi de Tyr doivent provenir du royaume du Nord. En revanche, des récits comme la visite de la Reine de Saba et les expéditions de commerce maritime à partir d’Eciôn-Guèvèr reflètent la participation de Juda dans le commerce arabe dominé par les Assyriens, sans doute sous le règne de Manassé, qui fut une période de grande prospérité dans le royaume du Sud. Enfin, la condamnation de Salomon en 1 Rois 11 se formule sur le ton incontestablement deutéronomiste du VIIe siècle, après le retrait assyrien. Ces strates représentent non seulement des contextes historiques différents mais également des idéologies différentes. Un bon exemple de tradition courte et stratifiée est la référence à Aram Beth-Rehov et [Aram] Çova en 2 S 10,6-8 et 2 S 8,3.5.12. L’auteur créa ici une histoire à partir de quatre mémoires différentes provenant de siècles différents. Hadadèzèr réfère sans doute à Hadadidri, roi de Damas, l’allié d’Akhab à la bataille de Qarqar. L’idée d’un puissant roi araméen

hostile à Israël renvoie apparemment à Hazaël 43. Rehov, probablement une cité-état de la vallée de Beth-Shéân à l’époque cananéenne tardive et influencée par Aram du point de vue de la culture matérielle, est confondue avec Beth-Rehov dans la Beqaa du Liban, qui ne peut avoir survécu en tant que principauté indépendante après l’expansion damascène vers l’ouest dans la deuxième moitié du IXe siècle. Cette confusion provient probablement de l’importance de Çova (Subat) comme centre administratif assyrien du temps de Téglath-Phalasar III et e Sargon II. Tous ces éléments se retrouvent ainsi « télescopés » au X siècle e par un auteur de la fin du VII siècle.

Comment furent préservées et transférées à Juda les anciennes traditions du royaume du Nord ? Comment les vieilles histoires sont-elles préservées, surtout avant leur formulation écrite ? Cela reste une énigme. Il serait possible qu’elles aient d’abord été transmises oralement dans des sanctuaires régionaux, gardiens des traditions locales. Le cycle de Jacob, par exemple, peut avoir été conservé au temple de Penouël ; le récit de l’Exode peut avoir été célébré à Samarie et les traditions anciennes, évoquant la présence d’Israël dans le nord de Moab, peuvent avoir été mémorisées à Nébo qui, selon l’inscription de Mésha, était un sanctuaire israélite. Dans la perspective de ce qui a été dit plus haut concernant l’histoire de l’activité des scribes, il semblerait que la transition entre tradition orale et tradition écrite pourrait se situer autour de 800 av. J.-C. ou un peu plus tard en Israël, peut-être même vers la fin du VIIIe siècle en Juda. Dans le royaume du Nord des considérations historiques semblent désigner le règne de Jéroboam II, époque à laquelle Israël atteignit son apogée de prospérité et

au cours de laquelle, apparemment, le royaume connut une réorganisation comprenant la centralisation du culte dans divers sanctuaires régionaux 44. Dans le royaume du Sud, la transition peut avoir eu lieu un peu plus tard, du temps de la domination assyrienne. La seconde question, à savoir, quand et comment les traditions du nord migrèrent vers Juda, est essentielle pour tenter de reconstruire l’histoire de l’Israël ancien et pour établir, de fait, la base de la compréhension de la composition de la Bible hébraïque, pour la bonne raison que ces traditions en provenance du royaume du Nord sont particulièrement nombreuses et leurs dates relativement anciennes (voir ci-dessus). Ceci renvoie à une autre question : pourquoi ces traditions, dont certaines sont hostiles à Juda, furent-elles insérées dans le canon élaboré dans le royaume du Sud ? Après tout, les auteurs du Sud auraient pu tout simplement ignorer le Nord, comme le firent les auteurs des Chroniques, des siècles plus tard. Plusieurs chercheurs ont suggéré que les traditions du Nord étaient arrivées en Juda avec les Israélites qui s’y installèrent dans les décennies qui suivirent la conquête d’Israël par les Assyriens en 720 av. J.-C. 45 L’archéologie et, tout particulièrement, l’examen des modèles d’occupation du territoire, semble apporter son soutien à cette théorie. Je fais référence, en l’occurrence, à la croissance démographique de Jérusalem en particulier, et de Juda en général, à la fin e e du VIII siècle et au début du VII siècle av. J.-C. Autant que je puisse en juger, la transformation démographique en Juda ne peut s’expliquer autrement 46. Un tel bouleversement démographique pourrait avoir été le catalyseur de l’essor d’une idéologie pan-israélite en Juda. À ses débuts, sous la domination assyrienne, ce pan-israélisme était tourné vers l’intérieur, vers cette nouvelle population mixte d’habitants de Juda et d’anciens Israélites vivant dorénavant ensemble dans le royaume du Sud, dans un effort pour créer une identité commune. Ce n’est que plus tard, après le retrait assyrien de la région, que cette idéologie pan-israélite fut « exportée » vers les Israélites vivant dans les territoires de l’ex-royaume du Nord. C’est l’époque de l’essor de l’idéologie territoriale davidique, qui

trouvera son expression majeure dans la description d’un âge d’or de David et Salomon, vu comme la grande Monarchie Unifiée à venir.

Théologie versus Histoire À l’évidence, la description biblique de l’histoire de l’Israël ancien est imbibée de l’idéologie politique et de la théologie véhiculées par les auteurs de la fin de la monarchie et de la période postexilique. Par conséquent, la question sera de savoir comment lire cette histoire sans souscrire au programme idéologique de ses auteurs. Évidemment, la première distinction à opérer doit être entre les relations chronistiques et les déclarations, prophéties et discours chargés de sens théologique. Si l’on prend comme exemple l’épisode concernant Jéroboam I en 1 R 12,2529, il est relativement clair que le récit concernant Sichem et Penouël au verset 25 est de nature chronistique, alors que les versets 26-29 sont d’ordre théologique. L’archéologie indique en effet que Dan était probablement inoccupé à l’époque de Jéroboam I 47. À ce propos, je souhaite revenir sur la question de savoir si les récits bibliques sont plus historiques lorsqu’ils décrivent des événements proches de l’époque à laquelle vécurent les auteurs. La réponse est en fait à la fois positive et négative. Prenons l’exemple du « siècle assyrien » en Juda, entre 730 et ca. 630 av. J.-C. Trois rois se succédèrent à Jérusalem à cette époque : Akhaz, Ézékias et Manassé. Le contexte de leurs règnes, dates, nombres d’années sur le trône et lien avec les monarques assyriens, sont parfaitement historiques, mais la théologie intervient dans la manière de les présenter 48. Akhaz est évalué de façon négative, alors que l’archéologie montre que sous son règne Juda progressa fortement, devenant un royaume densément peuplé et économiquement prospère. Ézékias, quant à lui, est présenté de façon positive, alors que l’archéologie montre qu’à son époque, et en raison de l’inanité de sa décision à participer à une

révolte contre les Assyriens, la Shéphélah et la vallée de Béer-Shéva furent dévastées par Sennakérib : dans ces régions, tous les centres liés à Juda, explorés par l’archéologie, révèlent, en effet, des signes de destructions majeures. Manassé est considéré par les textes comme le pire et le plus impie de tous les rois de Juda. Son attitude vis-à-vis du culte étant même présentée comme responsable de la chute de ce royaume. À l’opposé, l’archéologie montre que, sous le règne de ce roi, Juda connut un renouveau, car ce vassal complaisant et fidèle des Assyriens participa alors à leur économie globale, de telle sorte que le royaume du Sud connut sous Manassé une prospérité jamais atteinte auparavant. C’est à cette époque que l’activité scribale se répandit ; et cela favorisa, quelques décennies plus tard, la composition de la première compilation de l’histoire deutéronomiste. L’absence de consensus dans la recherche exégétique concernant la date de compilation de nombre — pour ne pas dire de la majorité — des textes traitant de l’histoire de l’Israël ancien représente un obstacle majeur. Cela rend difficile l’évaluation du temps passé entre des événements, réels ou non, et la date à laquelle ils ont été compilés. De bons exemples se trouvent dans les parties des Chroniques (surtout 2 Ch) qui ne sont pas mentionnées dans les livres des Rois et qui décrivent des événements à caractère ostensiblement historique, telles la guerre entre Abiya et Jéroboam I ou l’invasion de Juda par Zérah le Koushite. La date des Chroniques a longtemps été débattue, les opinions variant sur un intervalle de quatre siècles, entre le VIe et le IIe siècles av. J.-C. À l’évidence, l’auteur peut avoir eu accès à des matériaux originaux datant de l’âge du Fer, s’il a effectivement opéré au VIe ou au Ve siècle 49 ; cet accès est beaucoup moins concevable s’il l’a fait au IIe siècle, dans des circonstances historiques radicalement différentes 50.

Résumé : Les points de repères dans les développements de l’histoire biblique Écrire cet article a présenté un véritable défi, le résumer en est un encore plus grand. Mais je vais le faire dans le but de mettre en relief ce que je considère comme les facteurs majeurs du processus de compilation de l’histoire de l’Israël ancien dans la Bible. Bien que les paragraphes qui vont suivre puissent sembler dénués de perspectives archéologiques, le lecteur doit savoir qu’une recherche archéologique moderne sous-tend quasiment chacune de leurs phrases. Alors voici mon Ani Maamin (« ce que je crois », en Hébreu) ou mieux, en fait, « ce que je suppose » : La description biblique de l’histoire de l’Israël ancien recèle d’anciennes « mémoires » remontant aussi loin que la phase terminale du deuxième millénaire (pour le cas de Silo, par exemple) et étant peut-être même antérieures, si l’on admet que le texte de l’Exode préserve une référence à l’expulsion d’Asiatiques du Delta du Nil au XVIe siècle av. J.C. 51 La plupart de ces mémoires proviennent du royaume du Nord. Cela ne devrait pas surprendre si l’on considère qu’Israël était plus peuplé que Juda, économiquement plus prospère, mieux relié aux grandes routes commerciales et aux événements survenant dans les basses terres et mieux intégré à la scène géopolitique du Levant. En conséquence, l’écrit se développa et se répandit dans le Nord plus tôt que dans le royaume du Sud. Toutefois, Juda lui aussi préserva des traditions anciennes, par exemple dans le récit de David évoluant aux franges du royaume comme chef de bande Apirou. Le grand pas en avant se produisit au VIIIe siècle. Je soupçonne que les capacités en matière d’écrit démontrées à Deir Alla et Kuntillet-Ajrud sont liées à une réorganisation du royaume sous Jéroboam II, sans doute le plus grand des monarques israélites. Bien qu’ impossible à prouver, il est logique de considérer que les plus anciennes traditions israélites furent mises par écrit de son temps 52. En Juda, la composition des textes peut

avoir débuté un demi-siècle plus tard, au moment où ce royaume fut incorporé comme vassal à l’empire assyrien et fut sous son influence économique et culturelle. Par influence culturelle, j’entends à la fois une bureaucratie avancée et l’impact des genres littéraires assyriens. Idéologiquement et théologiquement, l’histoire biblique commence en 720 av. J.-C., au moment de la chute du royaume du Nord. Juda et Israël, deux royaumes très différents en termes d’environnement et de types de populations, avaient toutefois des caractéristiques communes du point de vue de la langue, de la culture matérielle et du culte. Avec la chute d’Israël et la migration de nombreux Israélites vers Jérusalem et Juda, le profil démographique de Juda se modifia radicalement, les Israélites devenant une large fraction de la population du royaume. Se considérant désormais comme l’héritier et le préservateur de la tradition commune aux deux royaumes hébreux, Juda s’appropria le nom devenu vacant, « Israël », pour décrire la nation unifiée sous son égide. C’est à ce moment que l’idéologie pan-israélite se développa pour la première fois, promouvant deux messages : tous les Israélites devront accepter la royauté de la dynastie davidique et admettre la primauté de Jérusalem et de son Temple. Pendant un siècle, ces idées se propagèrent uniquement en Juda, parmi la population mixte d’anciens Israélites et d’habitants de Juda, dans une sorte de monarchie unifiée interne. Parmi les efforts faits pour faire de Juda un « nouvel Israël », les traditions israélites furent insérées dans les textes en provenance du royaume du Sud, tout en étant subordonnées aux objectifs idéologiques de Juda. Ce n’est qu’avec le retrait des Assyriens à la fin du VIIe siècle, sous le règne de Josias, que ces thèses furent « exportées » vers les anciens territoires israélites, devenant l’idéologie dominante selon laquelle tous les Hébreux qui vivaient en Juda ou dans un des territoires de l’ancien royaume du Nord, « de Dan à BéerShéva », se devaient d’accepter les Davidites et le Temple de Jérusalem afin de faire partie des Benê Yiśra’el. Cette idéologie nécessita une mise à jour à l’époque exilique, après la destruction de Jérusalem et la fin de la dynastie davidique. Cela impliqua

la rédaction et la révision d’anciens textes et la production de nouveaux écrits. Ce qui suivit est une énigme. La période perse est devenue « à la mode » dans l’exégèse biblique, presque chaque livre biblique se voit désormais attribuer une compilation ou une rédaction à cette époque. Pourtant, nous ne connaissons presque rien de cette période dans les sources extrabibliques et les vestiges archéologiques sont maigres. Le risque de reconstruire l’histoire biblique à partir du texte lui-même uniquement, qui implique évidemment un raisonnement circulaire, a été démontré à maintes reprises pour les phases anciennes de l’histoire d’Israël. Malgré cela, certains chercheurs ne cessent de retomber dans ce piège. Une Jérusalem en ruines, avec une population d’à peine 500 âmes, pourrait-elle être créditée de la production d’une large portion de la littérature biblique ? Une œuvre aussi colossale pourrait-elle être le fait de l’insignifiante province de Yehud dont la population ne dépassait pas quelques milliers ? L’archéologie et les sources extrabibliques, en l’occurrence la riche e littérature juive d’époque hellénistique au II siècle av. J.-C., semblent indiquer qu’une grande partie du matériel pouvant servir à reconstruire l’histoire dans Néhémie et dans les Chroniques, et en particulier les toponymes, reflètent des réalités de l’époque hasmonéenne. La recherche future doit encore déterminer si et dans quelle mesure il est possible d’identifier une « touche » hasmonéenne dans d’autres textes bibliques décrivant l’histoire de l’Israël ancien, en gardant à l’esprit la question suivante : Y eut-il une tentative de réécrire l’histoire biblique à l’époque hasmonéenne ?

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Comment dater les textes du Pentateuque ? Quelques cas d’étude

Thomas Römer

De quels faits disposons-nous ? Si c’était dans sa forme massorétique actuelle que l’on se posait la question de la date de la Bible hébraïque, la réponse serait relativement simple. La Bible hébraïque telle que nous l’avons a été éditée au Moyen Âge : le Codex de Saint-Pétersbourg au XIe siècle, le Codex d’Alep, mutilé, un peu plus tôt et le textus receptus, quelques siècles plus tard. Cela, bien sûr, ne répond pas à notre question, mais montre que lorsque nous travaillons avec la BHS (Biblia Hebraica Stuttgartensia) ou la BHQ (Biblia Hebraica Quinta) nous avons affaire à une forme très tardive du texte biblique 1. Grâce à la découverte des fragments de Qumrân, nous possédons la preuve factuelle de l’existence de presque tous les livres bibliques aux alentours du IIe ou du Ier siècle av. J.-C., même si la plupart d’entre eux ne sont attestés que sous une forme très fragmentaire. Les divergences entre

les manuscrits d’un même livre, Samuel, Jérémie ou Isaïe par exemple, montrent clairement que ces livres ne peuvent pas avoir été écrits pour la première fois à cette époque et doivent être bien plus anciens. Mais de combien plus anciens ? Pour la Torah/le Pentateuque, on peut essayer de reculer d’un pas et se référer à la traduction en grec. D’après la lettre d’Aristée, écrite aux alentours de 150-100 av. J.-C., la traduction en grec de la Torah s’effectua sous Ptolémée II, à Alexandrie, au IIIe siècle av. J.2 C . Bien qu’il s’agisse d’une légende, il est assez plausible qu’il y ait eu des e traductions grecques du Pentateuque dès le III siècle. Cela est confirmé par le travail de Démétrius le Chronographe (221-204), auteur de commentaires sur des passages difficiles de la Torah, qui utilisait vraisemblablement une traduction en grec. Aristobule de Panéas (ca. 150 av. J.-C.) atteste lui aussi l’idée que le Pentateuque a été traduit en grec sous Prolémée Philadelphe 3. Par contraste, les fragments d’Aegyptiaca d’Hécatée d’Abdère (communément datés ca. 320 av. J.-C.) montrent que l’auteur connaissait des traditions sur Moïse, par exemple celles selon lesquelles ce dernier a conduit les Hébreux hors d’Égypte et vers la terre, a construit Jérusalem et promulgué des lois, dont certaines étaient assez différentes de celles que l’on trouve dans le Pentateuque 4. Par conséquent, il semble raisonnable de dater le début de la traduction grecque de la Torah, qui se poursuivit pendant plusieurs décennies, aux alentours de 270 av. J.-C. 5. Cela présuppose qu’un Pentateuque hébreu faisait autorité, au moins à la fin du IVe siècle. Après cette date, nous nous trouvons en terrain relativement sûr ; avant, cependant, les choses deviennent plus compliquées.

Bref récapitulatif de l’histoire de la recherche

La manière traditionnelle de dater la Torah fut de commencer par le terminus a quo. Le dernier événement rapporté étant la mort de Moïse, les rabbins, qui soutenaient que Moïse était l’auteur de la Torah, admirent cependant que Moïse n’avait pas écrit sa propre mort et que, par conséquent, la Torah avait été complétée par Josué, qui aurait ajouté les derniers versets du Pentateuque (Talmud de Babylone, baba Bathra 14b). Évidemment, ils ne s’intéressaient pas à une date historique précise de la Torah ; leur objectif était d’affirmer l’autorité mosaïque de la Loi. Toutefois, ils admettaient aussi certaines considérations diachroniques ou logiques. On peut également mentionner le « postmosaica » identifié par Abraham ibn Ezra (1089-1164), qui indiqua discrètement un certain nombre de versets du Pentateuque présupposant une époque bien plus tardive que celle de Moïse. Au XVIIe siècle, Spinoza, dans son Traité théologico-politique (1670) utilisa lui aussi l’argument du terminus a quo, bien que de façon différente. Il postula l’existence d’un Ennéateuque, en affirmant que les livres depuis la Genèse jusqu’aux livres des Rois étaient « l’ouvrage d’un seul historien, qui s’est proposé d’écrire les antiquités juives depuis les temps les plus reculés jusqu’à la première dévastation de Jérusalem. Ces livres, en effet, sont si étroitement liés qu’il est visible, par cet unique point, qu’ils forment un seul et même récit » 6. Ainsi, le Pentateuque ne pouvait avoir été écrit avant la destruction de Jérusalem et l’exil babylonien, et, selon Spinoza, le meilleur candidat pour la rédaction de ces livres, ne serait autre qu’Esdras. Le point de vue de Spinoza consistant à voir un seul auteur, un « historien », comme responsable de l’Ennéateuque fut abandonné lorsqu’apparurent des différences stylistiques et théologiques ou des contradictions à l’intérieur de ces livres. Quand de Wette écrivit sa Dissertatio Critica sur le livre du Deutéronome en 1805, il se préoccupait surtout de démontrer que le Deutéronome était différent des autres livres du Pentateuque 7. Étant donné que Lv 26 constitue une conclusion claire à la Loi de Moïse et que Dt 28 répète ce chapitre dans un style différent, de Wette en déduisit que le Deutéronome provenait d’un auteur différent. Le

fait que le Deutéronome contienne aussi des parallèles aux lois et aux récits des précédents livres montrait que son auteur était familier de ces traditions et que, par conséquent, son travail devait être plus récent. De Wette observa, par ailleurs, que la préoccupation principale de la loi deutéronomiste reposait sur l’idée de la centralisation du culte qui, selon lui, ne pouvait se référer qu’au temple de Jérusalem. Dans une longue note de bas de page, il suggéra donc que la première édition du Deutéronome correspondait au livre de la réforme de Josias. Si l’identification du Deutéronome avec le livre de la loi de Josias n’était en rien nouvelle, la possibilité que le Deutéronome pût voir le jour à l’époque de Josias, quant à elle, l’était assurément, et cela permettrait une datation précise de ce livre. Avec cette affirmation de Wette offrait (comme le dit O. Eissfeldt ) « un “point d’Archimède” à la recherche sur le Pentateuque lui permettant de se libérer des contraintes de l’Église et de la Synagogue et d’élaborer une datation scientifique du Pentateuque » 8. Dans son Beiträge zur Einleitung in das Alte Testament, de Wette démontre que le récit même de 2 R 22 prouve que le livre était inconnu auparavant et probablement caché dans le temple par le prêtre Hilqiyahou ; De Wette soutenait ainsi l’idée que la première édition du Deutéronome avait vu le jour au VIIe siècle. Situer le Deutéronome au VIIe siècle permit ensuite de dater les sources plus anciennes apparaissant dans les livres allant de la Genèse aux Nombres (J/E), entre le Xe et le VIIIe siècle. Depuis les années 1830, plusieurs chercheurs (Vatke, Popper, Reuss, entre autres) observèrent que la loi du code sacerdotal P ou, du moins, une partie de cette loi, était plus tardive que le Deutéronome et les sources anciennes et qu’elle était inconnue des prophètes préexiliques 9. Graf alla plus loin dans ces observations en affirmant que les lois du code sacerdotal n’avaient été insérées dans l’Hexateuque qu’à la période perse 10. De Wette fournit ainsi la base de la datation tardive du document sacerdotal, à partir de laquelle Kuenen et Welhausen 11 élaborèrent l’hypothèse documentaire. Notons, toutefois, que l’école de Kaufmann n’accepta pas cette datation tardive de P 12. Dans le contexte de

l’hypothèse documentaire, la datation du Pentateuque devint une entreprise aisée (et circulaire). Une fois qu’un passage était attribué à J, E, D ou P, sa date était assurée par la théorie globale sous-tendant les sources de l’hypothèse documentaire. Toutefois, dès le début des années 1970, le paradigme wellhausenien de l’hypothèse documentaire fut de plus en plus critiqué, de telle sorte qu’il n’est plus possible de le prendre pour acquis, du moins en Europe 13. La question de la datation redevient cruciale. Il est fascinant, en effet, de voir comment un passage comme Gn12,1-4a, considéré par G. von Rad et H. W. Wolff comme étant le résumé du kérygme d’un Yahviste daté de l’époque de Salomon 14, peut maintenant être daté de la période perse, comme l’a fait par exemple J.L. Ska dans un excellent article, qui considère le passage comme postexilique, mêlant des styles et des thèmes deutéronomistes et sacerdotaux dans le but d’intégrer les traditions sur Abraham dans le Pentateuque 15. La « démocratisation » de l’idéologie royale et son application à Abraham (voir les parallèles en 2 S 7,9 et Ps 72,17) qui est construit, à maints égards, comme un précurseur non seulement de Moïse mais aussi de David, n’est possible qu’après la fin de la monarchie judéenne 16. On peut avoir de la sympathie pour une telle hypothèse, mais il faut également reconnaître que notre datation des textes du Pentateuque est intimement liée à une vision globale concernant la formation de la Torah. C’est pourquoi, avant d’avancer quelques possibilités pour la datation de ces textes, il convient d’examiner brièvement certaines questions idéologiques.

Pourquoi avons-nous besoin de dater le Pentateuque ? Contrairement aux livres des Rois, qui nomment de nombreux souverains étrangers et donnent des détails historiques (concordants ou

non avec des sources extrabibliques), le Pentateuque ne semble pas très enclin à offrir de tels détails historiographiques. Dans le récit de l’Exode, le pharaon, souvent identifié à Ramsès II, ne porte pas de nom ; il en est de même pour le roi d’Égypte dans les histoires d’Abraham et de Joseph. Et lorsqu’un monarque étranger porte un nom, comme Abimélek, il ne peut être aisément identifié avec un souverain philistin historique, même s’il existe peut-être un lien entre Abimélek et Abdi-Milki, mentionné dans une inscription d’Assarhaddon de 673/672 comme étant le roi d’Ashdod. Une identification d’Abimélek avec ce roi fournirait en effet un terminus a quo pour Gn 20 et 26, très différent du contexte « historique » suggéré par le narrateur 17. La plupart des récits du Pentateuque semblent construire des types ou des personnages à travers lesquels ils cherchent à décrire l’intervention de Yhwh en faveur de son peuple. En Exode 1-15, le Pharaon représente l’Égypte, ses dieux et sa puissance, qui seront détruits par le dieu d’Israël 18. L’intérêt pour l’historicité des récits du Pentateuque et pour leur datation émergea aux débuts de la recherche historicocritique, puisque celle-ci était devenue un critère pour établir la vérité de la Bible et que les chercheurs pensaient que plus un texte était ancien, plus il était crédible et avait une valeur historique et théologique. Aujourd’hui encore, de nombreux chercheurs viennent d’un milieu religieux et ont, de manière consciente ou non, cachée ou dévoilée, des objectifs théologiques, qui peuvent être en rapport avec certains points de vue concernant l’âge de textes ou de traditions du Pentateuque. Nous devrions en être conscients lorsque nous nous posons la question de savoir pourquoi il est si important d’identifier des textes du Pentateuque comme étant « anciens » et pouvant être aussi près que possible d’événements supposément historiques. Bien sûr, la question de la date d’un texte appartient à la recherche critique et ne devrait pas être négligée, parce qu’elle aide à comprendre comment et dans quels contextes historiques s’est formée la Bible. Mais nous ne devrions pas transformer la question de la datation en question de foi.

La preuve linguistique ? La question de la date des textes du Pentateuque ou d’autres textes bibliques peut-elle être résolue par la distinction entre hébreu biblique classique et hébreu biblique tardif, distinction qui offrirait certains critères apparemment objectifs pour la datation des textes bibliques ? Il n’est pas étonnant que cette méthode ait trouvé un nombre important d’adhérents, particulièrement en Amérique du nord et en Israël ; on n’entrera pas ici 19 dans les détails . Soulignons simplement quelques précautions à prendre dans l’emploi de cette méthode. En premier lieu, nous devons nous demander, avec E. Ullendorf et E.A. Knauf, si l’hébreu biblique était véritablement une langue parlée 20. La preuve de l’existence d’un hébreu dit classique 21 en dehors de la Bible est limitée à quelques inscriptions et noms de personnes qui ne nous permettent pas d’affirmer qu’existait un « hébreu classique » unifié à la période monarchique. Nous devons admettre des variations dialectales dans les textes extrabibliques écrits et oraux et, plus important encore, des différences entre langue littéraire et langue vernaculaire. Par ailleurs, il ne fait aucun doute que certains textes tardifs comme l’Ecclésiaste (Qohéleth) diffèrent de l’hébreu biblique dit classique, mais des textes qui pourraient bien être aussi tardifs que l’Ecclésiaste peuvent aussi être écrits dans un parfait hébreu « classique », comme c’est le cas de Zacharie 1–8 et du psaume extra-canonique 151. 22 Pour finir, il est également très difficile, pour ne pas dire impossible, de fixer une ligne de démarcation claire entre hébreu biblique « classique » et hébreu biblique « tardif ». Comme le fit récemment observer C. Edenburg, les textes bibliques que tous les chercheurs admettent comme tardifs (de la période perse) partagent avec des inscriptions hébraïques/moabites de l’âge du Fer une préférence pour des suffixes d’objet directement attachés aux verbes 23. Cela signifie que l’on ne peut affirmer qu’il y ait eu une évolution linéaire 24. L’« hébreu biblique » est avant tout une langue littéraire, dont la longévité aurait dépassé le stade « parlé » (si jamais un tel stade a existé), et qui perdura

dans le milieu des scribes. La distinction entre hébreu biblique classique et hébreu biblique tardif, surtout quand on l’applique à l’intégralité d’un livre, ne tient pas compte du fait largement reconnu que tout texte biblique est le produit d’un long processus de rédaction et de révision. Il apparaît ainsi que les scribes étaient capables de préserver ou même d’inventer en partie une langue qui n’avait pas été parlée depuis de nombreux siècles. On se doit donc d’être prudent lorsque l’on affirme que l’ensemble du Pentateuque a été rédigé avant l’exil parce qu’il est en 25 majorité écrit en hébreu biblique classique . Quelles sont donc les autres possibilités à notre disposition pour dater les textes du Pentateuque ?

La datation « allégorique » L’utilisation d’une méthode de datation que l’on pourrait dire « allégorique » est relativement répandue, bien qu’elle ne soit jamais désignée de cette façon. La promesse faite à Abraham en Gn 12,1-4a, mentionnée ci-dessus, fut datée par von Rad de la période salomonienne parce que, selon son argumentation, la promesse d’une grande nation et d’un pays immense fut réalisée sous le règne de ce roi. Toutefois, cette argumentation ne tient que sur l’hypothèse que le Yahwiste fut écrit du temps de Salomon et sur celle de l’historicité des récits bibliques sur ce roi. Plus récemment, T. Veijola et K. Schmid ont daté (à juste titre probablement) l’histoire de la Aqedah en Gn 22 de la période perse, soutenant que l’ordre divin selon lequel Abraham devait sacrifier son fils, devrait être lu comme le reflet de la crainte des habitants de la province de Yehud, au début de la période perse, concernant l’avenir (la descendance) d’Israël 26. Là encore, cette interprétation n’est pas patente, même si l’on ne peut l’exclure. Genèse 22 est avant tout une épreuve

divine du patriarche, qui la subit avec succès. À mon sens, l’interprétation théologique de ce texte ne devrait pas être utilisée pour le dater. Un autre cas intéressant est l’épisode du veau d’or en Ex 32 (//Dt 9), où une datation allégorique est associée à des arguments intertextuels. Ex 32,4 et 1 R 12,28 sont clairement liés l’un à l’autre ; la question est de savoir comment utiliser ce parallèle pour dater le récit de l’Exode (ou des Rois) 27. Exode 32,4 : Ce sont tes dieux, Israël, qui t’ont fait monter du pays d’Égypte 1 Rois 12,28 : Voici tes dieux, Israël, qui t’ont fait monter du pays d’Égypte d’Égypte La première version d’Exode 32 a-t-elle été écrite du temps du royaume d’Israël, afin de critiquer les sanctuaires nordistes de Béthel et de Dan 28 ? Exode 32 présuppose-t-il la chute du royaume du Nord et la réforme de Josias (voir les parallèles entre la destruction du veau par Moïse en Exode 32 et la réforme de Josias en 2 Rois 23) 29 ? À moins 30 qu’Exode 32 ait été une allégorie de la chute de Juda ? À eux seuls, les contextes allégoriques historiques des récits du Pentateuque sont trop spéculatifs pour convaincre une majorité de chercheurs. Cette approche ne peut être utilisée que pour corroborer d’autres arguments.

Arguments ex silencio Également utilisée dans d’autres domaines des études classiques, cette méthode est fondée sur l’hypothèse que dès lors qu’une tradition n’est pas mentionnée dans des textes plus anciens, elle doit être plus récente que ceux-ci. La recherche de H. Vorländer sur la formation et l’âge des

documents yahwiste et élohiste était essentiellement fondée sur l’affirmation que l’histoire « jéhowiste » (J/E) doit être datée de l’époque exilique parce que les traditions qu’elle comporte ne sont pas attestées 31 dans les textes préexiliques des prophètes antérieurs et postérieurs . Cette méthode est problématique, non seulement parce que nombre de textes prophétiques sont difficiles à dater, mais également parce qu’elle repose sur des citations ou des allusions à des traditions du Pentateuque hors de la Torah. Cela étant dit, chercher la présence ou l’absence de traditions du Pentateuque en-dehors du Pentateuque peut parfois être utile, comme c’est le cas des références à Abraham comparées aux références bien plus fréquentes à Jacob. Les textes datables mentionnant Abraham en-dehors de la Torah, voire de l’Hexateuque, appartiennent probablement à la période babylonienne ou au début de la période perse (Ez 33,24) 32. Ceci pourrait accréditer la théorie, assez commune de nos jours dans la recherche allemande, selon laquelle la formation littéraire de la tradition sur Abraham ne débuta pas beaucoup plus tôt qu’au VIe siècle av. J.-C 33. Un cas plus intriguant est le personnage de Joseph. Bien que le nom ‘Joseph’ apparaisse dans plusieurs livres prophétiques comme référence au royaume du Nord, aucune allusion claire à l’histoire de Joseph (Genèse 37-50) ne se trouve hors de l’Hexateuque, hormis le psaume 105, un texte habituellement considéré comme présupposant toute la Torah 34. Si l’on tient compte des observations de l’égyptologue Donald Redford, qui nota que les allusions aux coutumes et aux noms égyptiens conviennent plus particulièrement à la période saïte ou aux périodes postérieures 35, cela étayerait une datation tardive du récit de Joseph. Associée à une interprétation de type « allégorique », l’histoire de Joseph pourrait être comprise comme un « roman de diaspora » écrit (probablement en Égypte) à la période perse, voire au début de l’époque hellénistique 36.

Terminus a quo et terminus ad quem Nous avons déjà mentionné que le terminus a quo n’était pas un critère suffisant pour la datation du Pentateuque. Ce critère doit aussi être utilisé avec circonspection quand on l’applique aux autres textes. Il est bien connu que M. Noth utilisa le dernier passage des livres des Rois, 2 R 25,27-30, pour dater ladite histoire deutéronomiste aux alentours de 520 av. J.-C. De manière intéressante, Noth arriva à cette identification d’un terminus a quo et d’un terminus ad quem en se fondant sur l’idée que le Deutéronomiste (Dtr) était un « courtier honnête » qui transmit toutes les 37 informations et sources à sa disposition : en d’autres termes, Noth supposa que si le Deutéronomiste avait eu connaissance d’événements datant de la période perse, il les aurait inclus. Mais comme l’a fait remarquer Graeme Auld avec une pointe d’ironie : « Le fait que les livres des Rois s’achèvent sur le destin du dernier roi de Juda ne nous en dit pas plus sur la date de leur composition (généralement considérée comme exilique) que le fait que le Pentateuque s’achève sur la mort de Moïse » 38. Malgré la perspective exilique de Deutéronome — Rois, il est très plausible que l’histoire deutéronomiste ait subi une ou plusieurs rédactions à la période perse (un sujet que nous ne pouvons traiter ici 39). Il y a pourtant des cas dans la Torah où un argument de type terminus a quo peut être intéressant. L’expression « Our Casdim » en est un exemple. Elle apparaît dans la Bible hébraïque en Gn 11,28.31 (P) ; Gn 15,7 et et Ne 9,7 (qui cite apparemment Gn 15,7). L’expression « Casdim » est, en revanche, largement attestée, surtout dans les livres des Rois et de Jérémie, où elle fait chaque fois référence aux Néo-Babyloniens. L’expression ne peut donc être apparue avant la fin du VIIe siècle av. J.-C., et la date du VIe siècle (ou une date plus tardive) est plausible pour les textes de la Genèse. Si Gn 11,28.31 appartient à la même strate littéraire que d’autres textes P, cette observation a des conséquences pour le terminus a quo des écrits sacerdotaux du Pentateuque.

Une approche analogue peut être effectuée pour le nom « Yawan », qui apparaît dans le Pentateuque dans la table des nations (P) en Gn 10,2.4 et qui pourrait être en relation avec le nom « Ionien ». Dans la Bible hébraïque, il est employé en Is 66,19 ; Ez 27,13.19 ; Za 9,13 et Dn 10,20 et 11,2 pour désigner des populations grecques d’Asie mineure ou de Grèce. Tous ces textes ne sont pas antérieurs à la période perse, ce qui situerait les passages P en Genèse 10 dans le même contexte 40. Le nom Ionie (KURia-man) apparaît dans une inscription d’Assarhaddon et peutêtre aussi sous Sennakérib (bien que, dans ce cas, le nom soit restauré) voire encore dans d’autres textes de la période néo-assyrienne, ce qui suggère la possibilité d’un terminus a quo antérieur 41. Néanmoins, dans le e contexte de la Bible hébraïque, un terminus a quo au VI siècle av. J.C. semble plus plausible. Le terminus ad quem de tous les principaux textes du Pentateuque devrait se situer autour de 350-300 av. J.-C., ce qui ne signifie pas que des révisions ultérieures aient été impossibles, comme le montre la variété des manuscrits de Qumran et les différences existant entre le texte massorétique et la Septante dans les notices chronologiques (durées de vie, etc.), notamment dans la Genèse

La datation par comparaisons externes Plusieurs textes du Pentateuque sont en relation avec des textes ou des noms de personnages extrabibliques. Les récits sacerdotaux et nonsacerdotaux du déluge en sont l’exemple le plus patent. Ils ont de proches parallèles avec les récits mésopotamiens de déluge et, tout particulièrement, avec la tablette 11 de la version standard de l’épopée de Gilgamesh appartenant à la Bibliothèque d’Assourbanipal. Cette version est considérée comme une copie d’une version plus ancienne. La question est de savoir quand les scribes judéens acquirent la connaissance de ce

récit ou d’un récit similaire. De tels récits étaient-ils accessibles à l’époque où Israël et Juda étaient sous domination assyrienne ? Ou serait-il plus plausible de penser que ces scribes conçurent une version yahwiste du 42 déluge lors de leur exil à Babylone ? L’histoire originelle de la naissance d’Ismaël pourrait aussi être datée à partir de parallèles externes, si l’on accepte de suivre Knauf, selon lequel le nom d’« Ismaël » reflète une fédération de tribus arabes attestée au e 43 VII siècle, dans des documents assyriens . Le récit originel de Genèse 16 e pourrait donc avoir vu le jour au VII siècle, en tant qu’étiologie de ces tribus et comme une tentative de les relier à Abraham. Le récit de la naissance de Moïse en Ex 2,1-10 possède un proche parallèle dans la légende de la naissance de Sargon 44, dont des copies sont attestées au VIIIe siècle 45. Il est donc plausible que le récit de la naissance de Moïse ait été écrit au VIIe siècle (sous le roi Josias ?) 46 dans le but de démontrer que Moïse fut aussi important que le fondateur de la dynastie assyrienne. Un autre cas intéressant est la bénédiction sacerdotale en Nb 6,22-26, qui possède un parallèle extrabiblique dans les amulettes de Ketef Hinnom. Ces amulettes ont été datées du VIIIe ou du VIIe siècle av. J.-C. 47, une date utilisée par certains chercheurs pour revendiquer une date préexilique pour le code sacerdotal, si Nombres 6 fait bien partie d’un 48 « document P » . Cet argument ne tient pas compte de la possibilité que la bénédiction ait été, à l’origine, une pièce poétique indépendante, qui pourrait avoir été insérée dans le livre des Nombres. Quoi qu’il en soit, il n’existe plus de consensus sur la datation des amulettes 49. La première version du livre du Deutéronome reste l’objet majeur des efforts de datation à l’aide de comparaisons externes. Il a souvent été remarqué que le livre reflète le style et l’idéologie des traités de vassalité néo-assyriens ou plus encore des serments de loyauté. Il est intéressant de noter que les documents néo-assyriens utilisent le Numeruswechsel (le changement fréquent entre les deuxièmes personnes du singulier et du

pluriel), qui apparaît souvent dans le Deutéronome. H.-U. Steymans a poussé ces comparaisons plus loin en affirmant que la plus ancienne édition du Deutéronome avait un modèle spécifique : le serment de loyauté (adê) d’Assarhaddon, écrit dans le but de garantir la succession de son fils, Assourbanipal. Les parallèles entre les exhortations de loyauté et Dt 6,4-9* ainsi que Dt 13*, de même que les parallèles entre les malédictions du adê et Dt 28 sont trop proches pour être de pures coïncidences ; la meilleure solution peut être, en effet, de conclure que l’auteur de Dt 6, 12-18* et 28* a utilisé le texte néo-assyrien, que l’on peut dater de manière assez précise en 672 50. Cela confirmerait la tendance de de Wette à situer la première édition du Deutéronome à l’époque du roi Josias. Certains de mes collègues allemands et finlandais peuvent considérer cela comme naïf et préférer une date à la période babylonienne ou même perse pour la première édition du livre du Deutéronome 51, mais il est difficile de comprendre pourquoi, à une telle époque, quelqu’un construirait la partie centrale du Deutéronome selon des normes littéraires néo-assyriennes. Cela ne signifie pas que toutes les parties du Deutéronome peuvent être expliquées par des parallèles néoassyriens, étant donné que le Deutéronome a été à nouveau édité et révisé au cours du VIe et du Ve siècle av. J.-C., mais les parallèles néo-assyriens e 52 indiquent une date du VII siècle pour la partie originelle de ce livre .

La datation relative par comparaison interne Pour finir, les traditions parallèles à l’intérieur du Pentateuque permettent, dans certains cas, une datation relative. L’exemple le plus évident, sur lequel s’accorde la majorité des chercheurs, est la relation entre le Code d’Alliance en Exode 20-23* et le Code deutéronomique (Dt 12-26). Si ce dernier avait pour objectif une nouvelle édition du Code

d’Alliance, comme le soutient par exemple B.M. Levinson 53, il serait alors clair que le Code d’Alliance devrait être antérieur d’au moins quarante ou cinquante ans à la première édition du Code deutéronomique. Et si Lv 26 dépend de Dt 28, et probablement aussi d’autres textes sacerdotaux, il 54 doit donc être plus tardif . Il en serait de même pour le code appelé Code de Sainteté (Lévitique 17-26), dont Lévitique 26 est la conclusion 55. Par conséquent, cette méthode peut fournir d’importants arguments en faveur d’une chronologie relative des textes du Pentateuque, que l’on peut ensuite tenter d’ancrer dans une chronologie absolue. Une telle datation reste bien sûr hypothétique, jusqu’à ce que l’on trouve des documents susceptibles d’être analysés au radiocarbone.

Conclusion La date la plus assurée pour l’existence des textes du Pentateuque est la période perse, parce que ce contexte peut être déduit de données concrètes. Plus on recule dans le temps, plus la datation devient hypothétique et compliquée. On doit donc commencer toute analyse d’un texte en se demandant s’il convient à la période perse, s’il est ou non composite et quelles sont les possibilités d’identifier des strates plus anciennes. La première édition du Deutéronome au VIIe siècle av. J.-C. est restée depuis l’époque de de Wette un bon point de départ, apparemment, pour la datation de textes plus anciens. En ce qui concerne P, il y a de fortes raisons de penser qu’une datation de la période perse reste la meilleure option. Mais il ne faut pas dramatiser les divergences. Même les chercheurs qui soutiennent une date postexilique pour le document sacerdotal admettent que les rituels et les prescriptions en Lévitique 1-15 peuvent très bien dater, au moins partiellement, de l’époque du Premier Temple 56. D’un point de vue méthodologique toutefois, il est plus sûr

d’étudier les textes P de la Torah en les situant avant tout dans le contexte du Second Temple.

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Observations sur les contextes historiques de l’histoire d’Abraham — entre archéologie et exégèse

Israël Finkelstein — Thomas Römer

Depuis que s’est effondrée la traditionnelle hypothèse documentaire, au moins en Europe mais aussi jusqu’à un certain point dans la recherche israélienne, il n’est plus possible d’établir ni la date ni l’origine des traditions du Pentateuque en les attribuant à des « documents » supposément bien datés. Par conséquent, nous ne pouvons plus désormais adhérer au traditionnel point de vue historico-critique concernant la formation des textes sur Abraham 1 qui, selon cette conception classique, auraient leur origine dans une composition yahviste sous Salomon (voir von Rad et de nombreux autres auteurs) ou, même plus tôt, au tout début de la monarchie israélite, dans le fameux Grundschrift de Noth 2. Le discours divin en Gn 12,1-4, dans lequel Yhwh promet à Abraham un grand nom et de faire de lui une bénédiction pour toutes les nations ainsi que les termes de l’alliance en Gn 15,18 où il lui annonce le don d’une terre s’étendant du Nil à l’Euphrate, étaient compris comme reflétant la

situation géopolitique de l’empire salomonien (voir von Rad ; Wolff 3). D’autres situèrent l’origine de la tradition d’Abraham autour d’Hébron, afin de dater du temps de David les plus anciennes strates de cette histoire, parce que, selon 2 Samuel 5, David fut oint comme roi à Hébron. Les plus anciens récits sur Abraham étaient alors considérés comme constituant une légitimation de la dynastie davidique 4. Ces hypothèses étaient fondées pourtant sur une argumentation circulaire, consistant à 5 dater des textes à partir d’informations contenues dans ces mêmes textes . Il est bien sûr encore plus anachronique de continuer à chercher un « Abraham historique » (comme le firent Albright, Westermann et bien d’autres) en utilisant des textes de lois du deuxième millénaire, Nuzi et 6 autres, censés refléter les coutumes des Patriarches , postulant par làmême une date du deuxième millénaire pour l’époque des Patriarches 7. Cela ne signifie pas que l’on doive nier la possibilité qu’ait existé un individu historique nommé Abraham, dont la tombe devint un lieu vénéré. Cependant, il n’est pas possible de reconstruire quoi que ce soit d’autre sur cet « Abraham historique ». Dans les textes, en effet, l’élément le plus ancien qui lui soit associé est sa tombe et/ou son culte à Mamré (Gn 25,9). Ce que nous pouvons et devons faire est donc de chercher des indications nous permettant de localiser et de dater des éléments ou des couches de ce cycle complexe sur Abraham. Il y a certes très peu de consensus sur cette question dans la recherche récente et les chercheurs construisent souvent leurs théories sur la base d’une chronologie relative des divers textes bibliques, qu’ils datent par comparaison avec d’autres traditions bibliques. Gn 12,1-4 par exemple, était auparavant considéré, dans le contexte de l’hypothèse documentaire, comme un texte clef du Jahviste du Xe siècle, alors qu’il est maintenant identifié comme un texte appartenant à la période perse parce qu’il reprend l’idéologie royale (voir Ps 72,8.17) et la transfère sur Abraham. Il semble également présupposer des idées et une terminologie deutéronomistes et sacerdotales 8. Dans les publications récentes, en effet,

tout le récit d’Abraham en Genèse 12-25 est censé dater, au plus tôt, de la période exilique (babylonienne) 9. Lorsqu’une date (tardive) des traditions sur Abraham est avancée, il n’est pas suffisamment tenu compte des situations géographiques et des toponymes qui apparaissent dans les récits et, par conséquent, de l’archéologie. En d’autres termes, trop peu d’intérêt est porté à enquêter sur les réalités historiques et archéologiques qui pourraient sous-tendre ces textes. Au sein des récits sur les Patriarches en Genèse 12-36, l’existence même d’un ensemble nordiste ancien (le cycle de Jacob), qui dépeint des réalités de l’âge du Fer (voir ci-dessous), semble contester l’idée que la 10 totalité de la tradition patriarcale serait exilique ou postexilique . Il n’y a simplement aucune réalité postérieure à l’âge du Fer qui puisse expliquer certains toponymes ou certains contextes géopolitiques apparaissant dans ce matériel 11. Dans la discussion qui va suivre, nous souhaitons utiliser à la fois l’exégèse biblique et des connaissances provenant de l’archéologie et de l’examen de sources historiques extrabibliques, afin de proposer quelques observations préliminaires sur des « realia » que l’on trouve dans les récits sur Abraham et qui semblent importantes pour découvrir leur date et leur contexte historique. Toutefois, avant de traiter du cycle d’Abraham de cette manière, rappelons la différence majeure entre les traditions sudiste et nordiste dans la Bible. Il ne fait aucun doute que les récits bibliques, par de nombreux aspects, reflètent une perspective sudiste. Cela est bien sûr visible dans ce que l’on nomme l’histoire deutéronomiste, qui présente tous les rois du Nord de manière négative, et dans les livres des Chroniques, qui ignorent presque totalement le royaume du Nord. Il en est de même pour l’organisation du livre de la Genèse : les récits patriarcaux débutent avec le personnage du sud, Abraham, qui est présenté comme le grand-père du nordiste Jacob ; le récit plus tardif de Joseph met en exergue le rôle de Juda et minimise l’importance de Ruben 12. Cette révision sudiste de parties importantes de la Bible

hébraïque a influencé la recherche biblique, qui a « hérité » de cette même perspective sudiste. Si « Juda » (à travers Abraham) possède la primauté dans les récits des Patriarches ainsi que dans la recherche traditionnelle, les textes extrabibliques et l’archéologie démontrent qu’historiquement Israël était l’état le plus puissant des deux royaumes hébreux, s’étant développé économiquement et démographiquement bien avant Juda. Israël était déjà densément peuplé au Fer I, alors que Juda était encore relativement peu peuplé. Le royaume du Sud ne se développa qu’à la e 13 phase tardive du Fer IIA récent (la fin du IX siècle av. J.-C.) et n’atteignit son apogée qu’à la fin du Fer IIB-C (fin du VIIIe et VIIe siècles av. J.-C.) 14. En un mot, Israël était la puissance dominante d’un point de vue démographique, économique, militaire et géopolitique pendant la plus grande partie de la période où les deux royaumes hébreux existèrent côte à côte 15. Les récits d’Abraham et de Jacob sont « en correspondance » l’un avec l’autre, de telle sorte que pour comprendre les traditions liées à Abraham, nous devons commencer par dire quelques mots sur la strate ancienne du cycle de Jacob. Nous ne nous étendrons pas longuement sur la question de son adjonction au cycle d’Abraham (un traitement compétent de cette 16 question est fait par M. Köckert ).

Le cycle de Jacob, le plus ancien récit d’ancêtre dans le livre de la Genèse Si Osée 12 date du VIIIe siècle 17, nous avons déjà à cette époque de claires allusions aux épisodes majeurs du cycle de Jacob, tel qu’il nous est connu dans le livre de la Genèse : la naissance et le conflit entre les frères (Gn 25,24-26) ; le combat avec Dieu (El) ou son ange 18 (32,23-32) ; la rencontre à Béthel (28,10-22*) ; l’enrichissement de Jacob (30,25-42*) ;

la fuite d’Aram (31,1-22*) et la servitude pour une femme (27,15-30*). Il est intéressant de noter que, mise à part l’allusion à son frère non-nommé, tous les autres éléments mentionnés en Osée 12 sont liés au récit de Jacob et Laban. Ce récit dans sa forme pré-P peut très bien avoir vu le jour au e 19 VIII siècle av. J.-C. . À cette époque, Haran était la capitale occidentale de l’empire assyrien et le récit de Jacob y séjournant pouvait avoir été raconté afin d’indiquer aux auditeurs comment se comporter intelligemment vis-à-vis des Assyriens, qui sont décrits en fait comme des « Araméens ». Il existe en effet des signes d’une symbiose entre Araméens et Assyriens et de la pénétration d’Araméens à tous les niveaux de la société assyrienne. Cela est attesté par le fait que l’araméen était devenu une langue officielle et était largement utilisé dans les écrits 20. Une autre possibilité, peut-être même préférable, serait de considérer les trois références à Haran (Gn 27,43 ; 28,10 ; 29,4) comme des insertions tardives datant d’une période de prospérité au VIe siècle. Le récit original, de l’âge du Fer, traiterait alors d’Aram, à la frontière d’Israël. Cette thèse pourrait être renforcée par le fait qu’Osée 12 mentionne Aram et non Haran. Derrière ce récit du VIIIe siècle sur Jacob et Laban, il est possible de distinguer une tradition plus ancienne, sans doute pré-monarchique. On peut aisément remarquer que la conclusion d’un traité entre Jacob et Laban en Gn 31,45-54* suggère que la frontière ainsi établie entre eux se situait dans les zones de pâturage au nord-est du Galaad israélite 21 ; c’est là que se trouvait le « pays de Kedem », à savoir, le pays des gens de l’est. Cela indique que l’origine des traditions de Jacob se trouve dans le Galaad. Cette localisation offre une sorte de terminus ante quem, parce qu’elle suggère une période antérieure à celle de l’expansion d’Israël vers les vallées du nord et vers la Galilée, des territoires qui ne sont pas mentionnés dans le cycle de Jacob et qui firent graduellement partie du royaume du Nord, à partir de la fin du Xe siècle 22. Cette ancienne tradition de Jacob, dans laquelle celui-ci n’est pas encore l’ancêtre d’« Israël », pourrait avoir émergé en Galaad, puis, plus tard, sous Jéroboam II au

e

siècle, elle peut avoir été reliée à Éphraïm. Sous le règne de Jéroboam II, la tradition de Jacob pourrait avoir été encouragée comme un mythe de tout Israël, le royaume du Nord dont la portée dépassait le champ local. La promotion de sanctuaires, comme ceux de Béthel et de Penouël, pourrait, elle aussi, être mise en relation avec la tentative de l’administration royale de Jéroboam II de légitimer ces deux sites à travers la figure de Jacob, identifié comme l’ancêtre d’Israël ? Il est difficile de répondre à la question de savoir si les récits sur Jacob e et Esaü appartiennent également à la rédaction du VIII siècle. L’idée première serait de dire qu’un conflit avec Édom convient mieux à un contexte relatif à Juda et, donc, que cette partie du récit reflèterait déjà la conscience d’un Israël « théologique » centré autour de Juda. Pourtant, il semble qu’il y ait eu une relation plus ancienne entre le Nord (Israël) et Édom, comme paraît l’attester un graffiti de Kuntillet-Ajrud qui mentionne à la fois un Yhwh de Samarie et un Yhwh de Témân (le Sud) qui comprend Édom 23. La première compilation de l’ancien récit de Jacob fut apparemment entreprise dans la première moitié du VIIIe siècle, sans doute à Béthel. Ce récit atteignit Juda après 722 av. J.-C. et fut repris par les rédacteurs de la tradition liée à Abraham, qui agencèrent les récits d’Abraham (et d’Isaac) avec l’épopée de l’ancêtre du Nord. VIII

L’ensemble primitif sur Abraham dans le Sud Comme nous l’avons mentionné plus haut, le système d’occupation du territoire, dans le Sud, s’intensifia à partir de la fin du Fer IIA (sans doute au cours de la phase tardive, dans la deuxième moitié du IXe siècle) et culmina au Fer IIB (le VIIIe siècle) 24. Comme pour le cas de Béthel dans les

collines d’Éphraïm et de Penouël dans le Galaad, il est raisonnable d’affirmer que cette population du Sud avait, elle aussi, au moins un sanctuaire central et des récits d’ancêtres éponymes. Si, dans le Nord, les traditions de Jacob virent le jour relativement tôt à l’âge du Fer et furent e mises par écrit au début du VIII siècle, il est difficile d’imaginer qu’il n’ait pas existé de traditions sudistes concurrentielles, pendant les quelques siècles au cours desquels les deux royaumes hébreux existèrent côte à côte, et après la chute d’Israël. En d’autres termes, il est impensable que le Sud, dont la démographie s’intensifia au Fer IIB, n’ait pas développé une ou plusieurs traditions concernant des ancêtres éponymes. Il est également logique, sur le plan historique, d’imaginer qu’une fusion des récits de Jacob et d’Abraham (après 722 av. J.-C. mais avant 586 av. J.-C.) ait été dans la ligne de l’idéologie « pan-israélite », qui pourrait avoir vu le jour sous le règne de Josias. Il serait également logique de considérer que la tradition originale 25 concernant Abraham provenait d’un sanctuaire au chêne sacré de Mamré (le texte massorétique en Gn 13,18 ; 14,13 ; 18,1 utilise le pluriel afin de minimiser l’aspect cultuel de cet arbre sacré ; la Septante garde le singulier et reflète la terminologie originale). À l’origine, Mamré peut avoir été un lieu saint lié à un arbre et/ou à un bosquet sacré situé près d’Hébron, au cœur des monts de Judée. Son emplacement exact est impossible à déterminer 26. Il est également fort plausible que, dès la période monarchique, ait existé une tradition concernant la tombe d’Abraham dans la région d’Hébron, surtout si l’on considère qu’un « lieu de mémoire » en relation avec un ancêtre est dans bien des cas un sanctuaire lié à sa tombe. L’identification avec Makpéla ‘ašer ’al penê Mamrê 27 (« qui est face à Mamré » ; Gn 23,17.19 ; 25,9 ; 49,30 ; 50,13) est une invention tardive qui n’apparaît que dans des textes du code sacerdotal (P) ou post-P, datant de la période perse. L’origine de ce concept pourrait être liée à la situation géopolitique de la période perse : le lieu de culte originel (et sans doute la tombe vénérée) ne faisant pas partie de la province de Yehud (bien que situé à une très faible distance),

une tradition de Makpéla « surplombant Mamré » se développa dans les cercles sacerdotaux. Selon P, il y aurait eu un Mamré quelque part près d’Hébron et une tombe à Makpéla, un peu plus au nord. P voulait peutêtre « remplacer » le lieu de culte par la tombe et « désacraliser » la 28 tradition de Mamré, comme le suggéra Van Seters . Plus tard, Hérode construisit deux monuments, l’un pour la tombe et l’autre pour le sanctuaire, ce dernier sans doute à l’intention de la population iduméenne, non-juive. L’emplacement originel de Mamré peut avoir été 29 oublié , par conséquent son identification avec Ramet el-Halil est tardive et n’apparaît sans doute pas avant l’époque d’Hérode le Grand 30. En résumé, il existait une ancienne tradition du Sud concernant Abraham, son sanctuaire et sa tombe, mais cette tradition fut radicalement transformée à la période perse. Si l’on veut rassembler des critères permettant de dater les récits sur Abraham, il est utile d’analyser les textes se référant aux Patriarches hors du Pentateuque 31. Abraham est mentionné en Ez 33,23-29 qui contient une disputatio contre ceux qui étaient restés (à Jérusalem ?), n’étaient pas partis en exil, et réclamaient la possession de la terre. Elle commence par la citation d’une revendication de la population : « Alors la parole de Yahvé me fut adressée en ces termes : Fils d’homme, ceux qui habitent ces ruines () sur le sol d’Israël, parlent ainsi : “Abraham était seul (‫)אחד‬, lorsqu’il a été mis en possession de ce pays (). Nous qui sommes nombreux, c’est à nous que le pays est donné () en patrimoine ( )” » (v. 23-24). Ces versets soulèvent trois points. Tout d’abord, la référence à Abraham indique qu’il était une figure connue, et ce fait même montre clairement que les plus anciennes traditions sur Abraham ne sont pas une invention de la période babylonienne, mais qu’elles doivent plutôt remonter à l’âge du Fer. Ensuite, Abraham est présenté comme , « seul ». Cet adjectif s’oppose à l’adjectif , « nombreux ». Il est intéressant de noter que le lien avec Jacob en relation avec le don de la terre 32 (Ez 37,25 et 28,25) est apparemment sans importance ou même non connu 33. Enfin le texte dit qu’Abraham posséda ou prit possession de la terre, ce qui indique

que ce qui est dit par « ceux qui habitent ces ruines » se fondait sur une tradition sur Abraham, qui racontait comment le patriarche en était venu à posséder cette terre. Il est intéressant de noter qu’il n’est pas fait mention d’un don divin ou de la promesse de la terre, pas plus que d’une origine mésopotamienne du patriarche. Abraham apparaît comme une figure autochtone. Ce qui est dit d’Abraham et de sa possession de la terre, cité dans Ez 33,24, semble présupposé par l’auteur d’Isaïe 51,1-3 : « Écoutez-moi, vous qui êtes en quête de justice, vous qui cherchez Yahvé. Regardez le rocher d’où l’on vous a taillés, et la fosse 34 d’où l’on vous a tirés. Regardez Abraham votre père et Sara qui vous a enfantés. Il était seul () quand je 35 l’ai appelé (), mais je l’ai béni () et multiplié (). Oui, Yahvé a pitié de Sion, il a pitié de toutes ses ruines () ; il va faire de son désert un Éden, et de sa steppe un jardin de Yahvé… ». La date exacte d’Is 51,1-3 est difficile à déterminer. Ce qui est clair, toutefois, c’est que l’évocation de Sara et d’Abraham semble présupposer et « corriger » le passage d’Ez 33,23-29. Is 51,2 atteste que le thème de la descendance était une partie importante de la tradition sur Abraham, sans doute dès les origines. En conséquence, la meilleure solution est de considérer Is 51,2 comme une allusion à ce motif, qui ne repose pas forcément sur un texte du récit de la Genèse, comme l’affirmait Köckert 36. Cette solution est également confirmée par le verset quelque peu étrange d’Is 51,1, « Regardez le rocher dont on vous a taillés et la fosse d’où l’on vous a tirés. », qui n’a pas de parallèle dans la Genèse. Il est souvent invoqué que cette métaphore concerne Abraham (et Sara), reflétant une conception archaïque selon laquelle les personnes naissaient de la terre ou des pierres 37. Cette explication soutient l’idée selon laquelle Abraham était à l’origine une figure autochtone. La métaphore du rocher, toutefois, est souvent appliquée à Yahvé (voir en particulier Dt 32,18) qui pourrait donc également être identifié avec le rocher en Is 51,1. Les deux textes, Ezéchiel 33 et Isaïe 51, présentent les deux thèmes majeurs du cycle d’Abraham dans la Genèse : la terre et la descendance.

Vraisemblablement, aucun des deux ne se fonde sur des textes spécifiques de Genèse 12-26, de telle sorte qu’ils apparaissent comme les mentions les plus anciennes d’Abraham en dehors du livre de la Genèse. Ils contribuent donc à fonder la thèse selon laquelle les plus anciennes traditions sur Abraham naquirent à l’âge du Fer et contenaient l’histoire d’un héros autochtone. Ces observations indiquent que les plus anciens récits sur Abraham virent le jour à l’époque monarchique. Cette datation pourrait être appuyée par diverses realia géographiques et historiques apparaissant dans ces récits. a) La relation entre Lot et sa descendance. Lot et ses filles représentent les Moabites et les Ammonites. Le récit contempteur sur la naissance de Ammon et Moab en Gn 19,30-37*, de même que le fait de reconnaître qu’ils sont liés à Abraham (Lot est soit le neveu soit le frère d’Abraham) font sens à l’âge du Fer. Quel serait l’intérêt de ces récits étiologiques dans une période postérieure à l’âge du Fer, quand Moab et Ammon n’existaient plus ? Lié au personnage de Lot, c’est le récit étiologique des cités de la plaine. À la fin de l’âge du Fer, dans le royaume de Juda, une population conséquente habitait sur la rive occidentale de la Mer Morte, le désert de Judée 38, la partie orientale de la vallée d’Arad et le sud de la Mer Morte (pour cette dernière zone, au fort de Ein Hazeva par exemple, voir ci-dessous) ; à la période perse, en revanche, il n’existait plus qu’une seule agglomération judéenne aux environs de cette région, Ein Gedi. b) La mention de Guérar dans deux versions du récit concernant l’épouse de l’ancêtre (Gn 20,1-2 et Gn 26,1.6.17.20.26). Dans ces deux récits, Abraham et Isaac séjournent dans le territoire d’Abimélek, un roi philistin présenté de manière positive. En Genèse 26, Isaac s’installe à cet endroit avant de retourner à Béer-Shéva. Dans la recherche récente, les deux récits sont considérés comme des compositions tardives. Selon Blum et d’autres chercheurs, Genèse 20 présente des caractéristiques d’hébreu postbiblique et doit par conséquent être considéré comme un « roman de la Diaspora » de la fin de la période perse 39. Il est également possible que

Genèse 26 soit fondé sur Genèse 20 et soit par conséquent encore plus tardif 40. Pourtant, d’un point de vue historique, la mention de Guérar convient mieux à une période plus ancienne 41, du fait que les deux histoires semblent traiter de la question de la frontière occidentale de Juda. Le récit en Genèse 26 rapporte une dispute concernant une terre et des puits à Guérar, non loin de Çiqlag « qui a appartenu aux rois de Juda jusqu’à ce jour » (1 S 27,6). Ce récit peut évoquer un conflit sur la frontière sud-ouest de Juda, à la fin de la période monarchique. Les récits qui concernent Çiqlag, aussi bien que ceux qui évoquent Guérar, semblent avoir pour objectif de justifier la revendication de Juda sur ces territoires. Par conséquent, ils pourraient contenir un noyau ou un souvenir du e VII siècle av. J.-C., qui aurait été retravaillé plus tard. La question de la possession de la Shéphélah occidentale devint un sujet pressant après 701 av. J.-C., lorsque Sennakérib transféra des territoires ayant appartenu à Juda aux cités philistines. Il est plausible que du temps de Manassé, qui fut un vassal discipliné des Assyriens, Juda ait récupéré certaines parties de la Shéphélah 42. Le récit originel derrière Genèse 20 et 26 reflète-t-il la situation de cette époque ? Un contexte du VIIe siècle est également plausible, si l’on considère la possible relation entre le roi Abimélek de Guérar dans la Genèse (inconnu par ailleurs) et Ahimilki, roi d’Ashdod, qui paya tribut aux Assyriens du temps d’Assarhaddon et d’Assourbanipal. Enfin, les résultats des fouilles à Tel Haror, très probablement le site biblique de Guérar, indiquent que le lieu avait une importance particulière à l’époque où il était un centre administratif assyrien fortifié, dans la dernière partie de l’âge du Fer 43. c) L’histoire d’Ismaël et de Hagar en Genèse 16 44. Se fondant sur des observations plus anciennes, E.A. Knauf a démontré de manière convaincante qu’Ismaël, en Genèse 16, devrait être considéré comme étant en relation avec la confédération tribale de Shumu’il, mentionnée dans des sources assyriennes énumérant « les rois de Shumu’il » 45, et qui existait peut-être déjà au VIIIe siècle et certainement au VIIe avant de se dissoudre au VIe siècle 46. Le récit originel racontant comment cet

Ismaël/Shumu’il devint le fils d’Abraham en Genèse 16,1-2*.4-8.11-13 (14?) conviendrait donc à un contexte du VIIe siècle. La tentative de faire d’Ismaël un fils d’Abraham reflèterait l’expansion de Juda vers le sud du temps de l’hégémonie assyrienne. On peut par exemple noter l’engagement de Juda et de sa population à Qadesh-Barnéa dès la fin du e e 47 VIII siècle, activité qui atteignit son apogée au VII siècle . d) La question de la relation entre les traditions sur Abraham et son deuxième fils, Isaac. Si l’on examine les textes autres que le Pentateuque, Isaac n’est mentionné indépendamment de la triade patriarcale (Yhwh, le 48 Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob/Israël, etc. ) que dans Amos 7,9.16 et dans les écrits généalogiques tardifs de 1 Ch 1,28.34. En Amos 7, Yiṣḥāq semble représenter le Sud en opposition ou en parallèle au Nord. Si l’un ou les deux passages (le v. 9 fait partie des visions, le v. 16 fait partie de l’épisode d’Amasias) proviennent d’une version préexilique 49 d’Amos , ils attesteraient alors de l’existence d’un ancêtre sudiste nommé Isaac (voir également la mention de Béer-Shéva dans Am 5,5 et 8,14), qui était suffisamment important pour représenter le Sud. Si la tradition d’Isaac provient effectivement de la vallée de Béer-Shéva 50, elle a dû naître dès l’âge du Fer, parce qu’après 586 av. J.-C. la région avait une population clairsemée et se trouvait éloignée de Yehud. Il est par conséquent plausible qu’il y ait eu une deuxième figure ancestrale dans le Sud, vénérée dans un sanctuaire à Béer-Shéva. Isaac dut devenir le fils d’Abraham relativement tôt. L’auteur de l’histoire des visiteurs divins en Gn 18,1-15, dans laquelle l’hospitalité d’Abraham est récompensée par le don d’un fils, fait déjà un jeu de mot sur le nom ‘Isaac’ en introduisant le thème du rire de Sara (Gn 18,12-15, voir aussi 21,6). Genèse 18* ne présuppose pas qu’Abraham avait déjà un fils ; au contraire, toute l’intrigue nécessite un couple ou un homme sans enfant, comme dans les parallèles grec et romain (entre autres) 51. Cela signifie soit que Genèse 16* et Genèse 18* constituent deux traditions différentes concernant un fils d’Abraham, soit que l’une de ces traditions

était plus ancienne (peut-être Genèse 18*?) et que le deuxième fils est une addition postérieure. Les traditions sur Isaac sont très éparses dans le livre de la Genèse, se limitant à Genèse 26 (dans tous les autres chapitres, il n’a qu’un rôle de fils ou de père). Les traditions en Genèse 26 ont toutes des parallèles dans les récits d’Abraham (Gn 26,1-11//Gn 12,10-20 ; Gn 20,1-18 ; Gn 26,1233//Gn 20,22-34) Par conséquent, soit elles ont été empruntées à Abraham soit, ce qui est plus plausible, Abraham a « vampirisé » (au moins partiellement) Isaac, étant donné que la localisation à Béer-Shéva en Genèse 21 indique une tradition d’Isaac originelle 52. Au VIIe siècle, donc, Abraham, avait probablement deux « fils », Isaac, dans la vallée de Béer-Shéva, et Ismaël, dans les régions plus au sud. Cela peut évoquer des réalités de l’époque : la présence de Juda dans la vallée de Béer-Shéva connut son apogée au VIIe siècle et plus tard ; une activité plus au sud caractérise aussi le « siècle assyrien », lorsque des soldats et administrateurs originaires de Juda étaient postés à Qadesh-Barnéa et sans doute aussi dans des forts assyriens le long des routes du commerce arabe 53. La présence de Juda dans le désert du sud perdura plusieurs décennies après le retrait assyrien 54. Il pourrait également sembler logique d’ajouter aux matériaux anciens sur Abraham la liste, en Gn 14,1-11, qui, par certains aspects, conviendrait bien aux réalités du VIIIe et du VIIe siècle. Mais cette liste, qui imite des annales et des récits de guerre néo-assyriens 55, n’était pas liée au récit sur Abraham dans sa rédaction première 56, et son lien avec Abraham ne fut établi qu’à un stade très tardif 57. Pour résumer la discussion à ce stade, les plus anciennes traditions sur Abraham que l’on puisse retrouver derrière les récits du livre de la Genèse sont en Genèse 13*, qui est lié à Genèse 19*. Genèse 19* est introduit par 18,1-15*, un récit préparant la naissance d’Isaac en Genèse 21*. Genèse 16* reflète ce qui est peut-être une tradition indépendante à propos d’un autre fils d’Abraham, qui fut plus tard combinée avec le cycle AbrahamIsaac. Il existait certainement aussi une tradition indépendante sur Isaac,

qui peut difficilement être reconstruite. Les récits autour de Guérar et Béer-Shéva (Genèse 20* et 26*) étaient probablement liés à cette tradition. Le matériel ancien sur Abraham représente des traditions liées à la population des hautes terres du sud dans les phases tardives de l’âge du Fer et relatives à leur héros éponyme. Ces traditions peuvent avoir été préservées au sanctuaire de Mamré, en lien peut-être avec la tombe de ce héros. Elles doivent avoir vu le jour à une période antérieure à celle du « tissage » des traditions de Jacob avec celles d’Abraham. Le terminus a quo de cette fusion des traditions peut en toute certitude être placé à la fin du Fer II, après 720 av. J.-C 58. Les origines des histoires anciennes sur Abraham s’étendent sans doute sur une longue période, débutant avec l’expansion démographique dans les hautes terres du sud dans la deuxième moitié du IXe siècle et perdurant jusqu’au VIIe siècle av. J.C. Dans ce cas également, les plus anciennes traditions n’avaient pas été mises par écrit ; il est plus raisonnable d’imaginer que les premiers textes furent écrits au VIIe siècle (vers la fin de ce siècle ?) lorsque l’alphabétisation se propagea en Juda.

La fusion des traditions nordistes et sudistes Il est clair qu’après 720 av. J.-C. le royaume de Juda fut plus densément peuplé, possédant une composante nordiste importante. En quelques décennies à peine, la population de Juda doubla et Jérusalem passa d’une petite ville de moins de 10 hectares à une métropole couvrant 60 hectares 59. La plupart des chercheurs sont également d’accord sur le fait que les traditions nordistes atteignirent le Sud après 720. La nouvelle situation démographique rendit nécessaire le renforcement de la cohérence de cette nation « unifiée » grâce à la création d’une histoire

commune mêlant des traditions sudistes et nordistes. Le plus ancien contexte propice à une telle entreprise est le règne de Josias, avec son idéologie pan-israélite concernant le territoire et le peuple. La fusion de ces traditions s’effectua dès le début sous forme écrite, étant donné qu’il s’agissait d’une entreprise délibérée pour imposer une nouvelle histoire des Patriarches, « officielle » et globale, alors que les traditions orales ne sont normalement pas « inventées ». Par ailleurs, les années postérieures à e 720 av. J.-C. en Juda, et tout particulièrement la fin du VII siècle et le e VI siècle, sont caractérisées par une utilisation étendue de l’écrit dans 60 l’administration et la correspondance . Dans cette histoire unifiée, la réalité des faits fut inversée ; Juda (Abraham et Isaac) reçut la primauté dans la tradition patriarcale et Jacob fut placé en dernier. L’objectif était de subordonner les histoires de Jacob à celles d’Abraham, donc, par essence, de subordonner Israël (qui n’existait plus) à Juda. Cette fusion des traditions ne s’opéra pas en une seule étape ; ce fut plutôt un long processus qui débuta probablement au e VII siècle et se poursuivit jusqu’à la période perse. D’un point de vue littéraire, cette unification fut effectuée par différents rédacteurs ayant des stratégies diverses : l’une étant, par exemple, de réitérer aux trois patriarches les promesses divines concernant la terre et la descendance 61. On a souvent remarqué que dans le récit unifié, les traditions sudistes « réagissent » aux traditions nordistes. En Gn 12,5-9, Abraham part, lui aussi, vers Béthel et Sichem. Il « sort » de Juda pour maîtriser toute la région des hautes terres et la revendiquer pour la monarchie de Juda ou pour sa population 62. La question qui se pose est celle de savoir quel contexte convient le mieux à cet accent mis sur Béthel en Gn 12,8. De nos jours, ce passage est souvent considéré comme « exilique » ou postérieur à l’exil 63, mais à ces époques-là le site était soit inhabité soit très partiellement occupé 64. Il est intéressant de noter qu’Abraham n’est pas lié à Penouël (contrairement à Béthel), parce que la fusion des traditions se fit à un moment où Penouël n’était plus à l’ordre du jour et ne le serait

plus jusqu’à l’époque hasmonéenne, le Galaad ayant été perdu lors de l’offensive de Rezin de Damas dans la deuxième moitié du VIIIe siècle 65. En Genèse 12, les autels bâtis par Abraham sont « près » de Béthel comme de Sichem. Cette localisation pourrait être une stratégie visant à montrer que même avant la centralisation du culte au temple de Jérusalem, le vénéré patriarche n’accomplissait pas de rituels dans des lieux « illégitimes », et surtout pas à Béthel, abhorrée par l’idéologie deutéronomiste. Et, de façon intéressante, en ces lieux, Abraham « invoque le nom de Yhwh » mais n’offre pas de sacrifices. Le seul endroit où il offre un sacrifice animal est à Moriyya, en Genèse 22, dont le nom est une allusion à Sion ou à Jérusalem. Ces textes présupposent clairement le concept deutéronomiste de centralisation du culte et, par conséquent, ils ont dû apparaître au plus tôt à la période exilique ou postexilique. Pour finir, tous les textes extérieurs au livre de la Genèse 66 qui mentionnent les trois Patriarches ensemble sont des résumés théologiques tardifs, datant de la période babylonienne ou de la période perse 67. Cela n’est pas surprenant, étant donné qu’à ces époques (et même à l’époque hellénistique) fleurirent des révisions de l’histoire des Patriarches.

Abraham aux périodes exilique et postexilique Les contours de la plus ancienne tradition relative à Abraham restent difficiles à cerner. Les plus anciens récits devaient probablement être associés aux thèmes de la terre (et des voisins) et de la naissance d’un ou de deux fils (Genèse 13* ; 16* ; 18-19* ; 21,1-4*) 68. La reconstruction des éditions et des additions au récit sur Abraham aux époques babylonienne et perse repose sur des fondements plus stables :

a) Gn 12,10-20 reflète peut-être le contexte de l’époque exilique. Selon ce récit, Abraham descend en Égypte et y comprend que cet endroit n’est pas pour lui. Cela peut évoquer une discussion qui avait cours à la période babylonienne sur l’option d’un « exil égyptien ». De manière intéressante, ce même sujet apparaît en Jérémie 42-44 (voir particulièrement 43,2) et en Jérémie 32* (la description de l’acquisition d’un champ à Anatoth), deux passages insistant sur la nécessité de rester sur sa terre, comme le fait Gn 12,10-20. Ce dernier texte, qui a de nombreux parallèles en Genèse 16*, fut probablement ajouté au récit sur Abraham et composé comme une sorte de prologue à Genèse 16 69 dans le but d’enseigner aux auditeurs à demeurer dans le pays. b) Au début de la période perse, apparemment, l’auteur du Code Sacerdotal (P) offrit une nouvelle version des traditions sur Abraham et des traditions sur Jacob. Le fait de donner de l’importance à Haran au début de la généalogie semble concorder avec la prospérité et l’importance de ce lieu au VIe siècle. Le fait que la famille d’Abraham était venue de Babylonie et avait résidé un temps à Haran pouvait constituer une invitation à ceux qui étaient nés en « exil » à retourner au pays. P est le premier à inventer une origine mésopotamienne à Abraham, afin de rendre possible pour la Golah une identification avec cet ancêtre. Il existe 70 un relatif consensus concernant l’étendue du texte P en Genèse 12-26 qui, en ce qui concerne Abraham, correspond principalement aux chapitres 17 et 25, où le patriarche est construit comme un « ancêtre œcuménique » 71. En Genèse 17, Abraham reçoit la circoncision comme un signe d’alliance avec Yhwh, ce qui fait sens dans un contexte de Diaspora et non à l’époque préexilique où, à l’exception des Philistins, tous les peuples pratiquaient la circoncision. Le Code sacerdotal P montre de l’intérêt pour l’intégration d’Ismaël dans cette alliance et pour sa bonne relation avec Isaac (alors même qu’ils sont séparés, ils se réunissent pour inhumer leur père). Pour P, les « Ismaélites » étaient en contact avec les habitants de Juda ; par conséquent, les auteurs du Code sacerdotal ont cherché à souligner

l’intégration de l’Idumée et du Sud (d’un point de vue territorial et théologique) dans la descendance d’Abraham. Comme nous l’avons mentionné plus haut, P montre de l’intérêt pour (ou même « invente ») Makpéla où, selon lui, les Patriarches furent inhumés. L’histoire de l’acquisition de Makpéla en Genèse 23 et les remarques concernant les inhumations des Patriarches ont pour objectif de renforcer le lien avec Hébron, qui était désormais hors de Yehud (la 72 frontière sud se trouvant à Beth-Zur) . En citant l’enterrement des 73 Patriarches, l’auteur P (ou post-P) de Genèse 23 reflète probablement la connaissance que son époque avait du passé. Il est aussi plausible que, pour illustrer le lien familial des Patriarches, la sépulture de Jacob ait été « transférée » de Sichem à Hébron. De manière intéressante, dans le Nouveau Testament, les Actes des Apôtres semblent encore présupposer un lien avec Sichem, y situant la sépulture d’Abraham, sur une terre acquise à cet endroit (Ac 7,16). c) L’histoire du sacrifice en Genèse 22 et son prologue en 21,9-21 qui explique pourquoi Abraham au début de Genèse 22 n’a qu’un seul fils, furent sans doute mis par écrit à la période perse 74. En l’absence de Davidides au pouvoir, Abraham devient alors une figure royale (de même en Gn 12,1-4a qui montre de nombreux parallèles linguistiques et thématiques avec Genèse 22, comme cela a été souvent observé). Cette 75 figure est ainsi mise en relation avec Jérusalem et son temple . L’autre lien entre Abraham et Jérusalem apparaît en Genèse 14, où il paie la dîme au roi de « Salem », mais la rencontre entre Abraham et Melkisédeq est probablement une insertion. Dans sa forme originelle, l’histoire met en exergue le statut royal d’Abraham et Genèse 14 (sans l’épisode de Melkisédeq) est présupposé par Genèse 15 76. d) L’histoire d’Abraham envoyant son serviteur chercher une épouse pour Isaac en Aram-Naharayim, un terme tardif désignant la Mésopotamie 77, possède un style très différent de celui des autres récits sur Abraham ainsi qu’un vocabulaire convenant au plus tôt à la période perse 78 ou, peut-être même, à la période hellénistique. Ce récit ne possède

pas le ton vindicatif des textes du Deutéronome ou d’Esdras et Néhémie. Il se préoccupe bien moins des « femmes étrangères » que du fait que des membres de la Golah babylonienne se marient uniquement à l’intérieur des familles aisées de cette communauté. e) Enfin, Genèse 15 peut aisément être considéré comme l’un des textes les plus tardifs du cycle d’Abraham 79. Il offre une sorte de résumé et présente Abraham non seulement comme le premier Patriarche, mais également comme le premier roi, le premier prophète et même un protoMoïse, puisqu’il reçoit, dans ce chapitre, la révélation du nom divin.

Des additions et révisions d’époque hellénistique ? À quel moment le cycle d’Abraham fut-il terminé ? Ou, pour poser la question autrement, est-il possible de concevoir que le dernier travail éditorial du récit sur Abraham ait eu lieu à la période hasmonéenne ? Il a souvent été observé que l’épisode de Melkisédeq peut se comprendre dans un contexte hasmonéen. La seule autre référence à Melkisédeq, dans la Bible, se trouve dans le psaume 110, un psaume souvent mis en relation avec les Hasmonéens. Et sa description comme « prêtre d’El Elyon », en Genèse 14, possède le meilleur parallèle à l’époque des Maccabées, lorsque les Hasmonéens prirent le titre de « grands prêtres du Dieu TrèsHaut » (Jos. Ant. XIV, 163). Cela signifie-t-il que « la légende de Melkisédeq était particulièrement à la mode du temps des Hasmonéens » 80 ou plutôt qu’elle naquit à cette époque ? La dernière option semble en fait la plus raisonnable 81. Genèse 14 pourrait, dans sa forme actuelle, provenir de la période hellénistique 82 et servirait alors parfaitement les desseins hasmonéens. Cela nous conduit à la difficile question de la traduction de la Torah en grec, qui est communément supposée avoir eu lieu au cours du

e

siècle av. J.-C 83. Cette date est probablement correcte, étant donné que les premières attestations de textes grecs du Pentateuque datent du e II siècle av. J.-C. Il est, par conséquent, difficile de concevoir que la première traduction grecque ait été fondée sur un texte hébreu auquel des chapitres entiers auraient été ajoutés plus tard. D’un autre côté, il est également évident que le texte hébreu traduit n’était pas alors considéré comme « fixe » et « stable » et que le texte grec de la Torah est le résultat 84 de révisions tout au long de la période hasmonéenne . Il est donc tout à fait possible qu’après une première traduction en grec, de courts passages aient été ajoutés ou édités. L’épisode de Melkisédeq en Genèse 14 est un parfait candidat pour de telles insertions, et il a pu être ajouté lors de la production de nouvelles copies du rouleau de la Genèse 85. D’autres révisions pourraient concerner l’introduction de Moriyya en Genèse 22 et sans doute aussi la réécriture de Genèse 15. Pour clarifier ces questions, une analyse approfondie de ces chapitres serait nécessaire, mais cela dépasserait le cadre du présent article. III

Résumé L’objectif de cette présentation n’était pas de fournir une théorie complète concernant la formation du cycle d’Abraham. Dans le contexte de la situation parfois chaotique de la recherche sur le Pentateuque, nous avons simplement souhaité montrer l’importance de certaines « realia » géographiques autant qu’archéologiques qui, s’ajoutant à l’analyse exégétique, soutiennent l’idée que les traditions sur Abraham émergèrent à l’âge du Fer ; que le VIIe siècle fut un moment important pour leur mise par écrit et que la fusion de la tradition d’Abraham (et d’Isaac) avec la tradition nordiste de Jacob est un produit de la période qui suivit la chute d’Israël.

4

Observations sur les contextes historiques de l’histoire de Jacob dans la Genèse

Israël Finkelstein — Thomas Römer

1

Si l’on accepte l’hypothèse documentaire traditionnelle , appelée nouvelle hypothèse documentaire 2, ou même une date tardive du Jahviste (avec ou sans un « Elohiste ») 3, l’histoire de Jacob devrait être considérée comme faisant partie d’un enchaînement narratif plus vaste, qui débute avec la création du monde ou avec les Patriarches et continue avec l’histoire de Moïse, jusqu’à la mort de ce dernier ou jusqu’à la conquête du pays. Ce modèle, selon lequel le Pentateuque ou l’Hexateuque serait formé de trois ou de deux documents parallèles (si l’on écarte l’Elohiste), auxquels aurait été ajouté le Deutéronome, a été abandonné par la majorité des chercheurs, au moins en Europe continentale. En 1976 déjà, Rendtorff 4 soutenait que les Patriarches constituaient une unité narrative indépendante qui ne fut liée aux autres thèmes du Pentateuque qu’à un stade tardif. Concernant les histoires d’Abraham, Isaac et Jacob, on peut observer que les trois Patriarches ne furent reliés que de manière secondaire, en particulier à travers le thème des promesses divines ainsi qu’à travers le fait que Yhwh se présente à Isaac comme le « Dieu de ton

père Abraham » et à Jacob, comme le « Dieu de ton père Isaac ». Depuis les années 90, la recherche sur le Pentateuque a redécouvert des observations faites par W. Staerk et K. Galling selon lesquelles les récits des Patriarches et de l’Exode constituaient originellement deux mythes 5 d’origine différents (et concurrents) . Selon Römer, Schmid, Gertz et maintenant aussi Blum et d’autres 6, c’est l’auteur ou le rédacteur du récit sacerdotal qui créa pour la première fois un lien entre les Patriarches et l’histoire de L’Exode et de Moïse. Accepter cette hypothèse ne signifie pas nécessairement que les deux traditions d’origine aient été mises par écrit pour la première fois à l’époque exilique ou au début de la période postexilique. Concernant la tradition patriarcale, A. de Pury a avancé l’idée que l’histoire de Jacob préserve une tradition ancienne reflétant des réalités de la fin du deuxième millénaire av. J.-C., le premier récit écrit ayant été produit au e 7 8 VIII siècle . Une position assez semblable est adoptée par Blum . D’un autre côté, N. Na’aman soutient que le récit sur Jacob fut composé à l’époque exilique, comme partie intégrante d’une histoire des Patriarches comprenant les récits sur Abraham et Isaac 9. Le présent article tente d’aborder la question de la date et des contextes historiques du récit sur Jacob en combinant des considérations archéologiques et exégétiques. Nous proposons de rechercher des indications permettant de localiser et de dater des composantes ou des strates de ces récits complexes, afin de tenter de reconstruire l’histoire dans sa longue durée ou, plus précisément, l’histoire culturelle de ces traditions. De telles indications peuvent être décelées dans la relation entre textes, contextes géopolitiques, réalités démographiques et d’occupation des lieux ainsi que dans les toponymes mentionnés et les trouvailles archéologiques faites dans les lieux en question. Selon la même méthode, nous avons suggéré dans un précédent article une « stratigraphie » et une chronologie des récits sur Abraham et tenté d’identifier les couches littéraires et les réalités à la fois archéologiques et historiques qui les sous-tendaient, depuis l’âge du

Fer jusqu’aux époques exiliques et postexiliques et, éventuellement, jusqu’à la période hellénistique 10. Dans ce qui suit, nous souhaitons faire de même pour les traditions sur Jacob. Nous utiliserons l’exégèse biblique ainsi que des indices fournis par l’archéologie et des sources extrabibliques afin de proposer quelques observations préliminaires sur des aspects importants de « realia », capables d’éclairer l’histoire culturelle de la tradition de Jacob.

Nord et Sud Il est largement admis que le livre de la Genèse (de même que d’autres parties de la Bible hébraïque) inclut des traditions du royaume du Nord. Toutefois, il ne fait aucun doute que le produit final du récit sur les Patriarches reflète une perspective du royaume du Sud. Celle-ci comprend l’agencement même du livre de la Genèse : l’histoire débute avec l’ancêtre du Sud, Abraham, présenté comme le premier Patriarche et grand-père de l’ancêtre du Nord, Jacob. Cela fut certainement effectué dans le but de promouvoir l’idée de la domination de Juda sur Israël et, en fait, de subordonner Israël à Juda, à un moment où le royaume du Nord n’existait déjà plus et où Juda devenait le seul héritier des anciennes traditions du peuple hébreu. L’exégèse ancienne ayant parfois utilisé un raisonnement de type circulaire, cette idéologie sudiste a souvent été « héritée » par la recherche biblique et historique. Si, à travers Abraham, le royaume de Juda possède la primauté dans les récits patriarcaux et a fait le premier l’objet de la recherche traditionnelle, les textes extrabibliques et l’archéologie démontrent que sur le plan historique, Israël était la force dominante des deux royaumes hébreux. D’un point de vue démographique et économique, Israël se développa bien avant Juda 11. Les territoires du nord sur les deux rives du Jourdain (les hautes terres centrales et le Galaad) étaient densément

peuplés dès le Fer I, au temps où les hautes terres marginales de Juda n’avaient qu’une population clairsemée 12. À cette époque, la proportion entre les hautes terres d’Israël (Galaad inclus) et Juda peut être estimée à 13 25 contre 1 ! Juda, en revanche, ne commença à se développer de manière significative qu’au cours de la dernière phase de la fin du Fer IIA (la fin du IXe siècle) 14 et n’atteignit son apogée qu’au Fer IIB-C., à la fin du e e 15 e VIII et au VII siècle . Même au milieu du VIII s. (c’est-à-dire, avant la conquête du Galaad par Damas) la proportion entre la démographie 16 d’Israël et celle de Juda est encore estimée à 4 contre 1 . La démographie peut évidemment se traduire en termes de force militaire et économique. La puissance d’Israël sous la dynastie des Omrides est en effet attestée dans la liste de Salmanasar III contenant les participants à la bataille de Qarqar, en 853 av. J.-C., et elle est suggérée par les inscriptions de Tel Dan et de Mésha ; elle est également dépeinte dans les textes bibliques faisant référence aux règnes des Omrides et à ceux un peu plus tardifs de Joas et de Jéroboam II (pour ce dernier, voir par exemple 2 R 13,25 ; 14, 25a.28). De plus, Israël contrôlait des régions plus fertiles, comme la vallée de Jezréel, et des routes commerciales, telle la route du commerce international le long de la côte et des vallées du nord, ainsi que la Voie Royale en Transjordanie. Israël était également mieux relié à la côte et aux régions voisines. Tout cela accrut sa production agricole et ses revenus commerciaux. En un mot, du point de vue démographique, économique, militaire et géopolitique, Israël fut la puissance dominante pendant pratiquement toute la période où les deux états hébreux existèrent côte à côte 17. On peut également le percevoir dans les livres des Rois, notamment dans les récits prophétiques concernant la dynastie omride et en 1 R 22 18 et 2 R 8,28-29 ainsi qu’au sujet de la bataille de Beth-Shèmesh entre Joas et Amasias de Juda (2 R 14,8-14). Ces facteurs doivent être pris en considération dans l’analyse des récits sur les Patriarches.

Les couches anciennes du récit de Jacob On a toutes les raisons de penser que le récit de Jacob inclut deux couches de l’âge du Fer, l’une écrite, datant de la première moitié du e VIII siècle, et une antérieure, orale, qui peut être considérée comme la plus ancienne tradition sur Jacob. Commençons par la première, et par des observations d’ordre exégétique. e 19 Si Osée 12 date du VIII siècle , nous avons de claires allusions à l’existence, à cette époque, d’épisodes majeurs du cycle de Jacob dans le livre de la Genèse : sa naissance ; son conflit avec son frère et une allusion à son nom (Gn 25,24-26 ; cf. Os 12,4) ; le combat avec Dieu (El) ou son ange et l’étymologie du nom « Israël » 20 (32, 23-32 ; cf. Os 12,5) ; la rencontre à Béthel (28,10-22* ; cf. Os 12,5) ; l’enrichissement (30,2542* ; cf. Os 12,9) ; la fuite d’Aram (31,1-22* ; cf. Os 12,13) ; l’allusion au Galaad comme à un « monceau de pierres » (Gn 31,46-47 ; cf. Os 12,12) ; la servitude pour une femme (29,15-30* ; cf. Os 12,13) et peut-être, également, le thème de Jacob « vivant sous la tente » (Gn 25,7 ; cf. Os 12,10). Ces allusions sont corroborées par une similitude entre les termes employés : (Gn 27,36//Os 12,4) ; (Gn 32,29//Os 12,4) ; (Gn 32,29//Os 12,4) ; ‫( ברח‬Gn 27, 43 ; 31,20-22.27 //Os 12,13) ; (Gn 31,46//Os 12,12) ; (Gn 29,15.18 etc.//Os 12,13) ; ‫אהלים‬Ø(‫ )ב‬Ø‫ישב‬ (Gn 25,27//Os 12,10). Ces nombreux parallèles indiquent une relation entre Osée 12 et le récit de Jacob dans la Genèse. Récemment, N. Na’aman a soutenu, à la suite d’autres chercheurs, qu’Osée 12 avait en fait été la source choisie par l’auteur du récit sur Jacob pour bâtir l’ensemble de Genèse 25-35. Toutefois, le caractère allusif d’Osée 12 présuppose une connaissance antérieure du récit par les auditeurs, faute de quoi le texte d’Osée leur aurait été incompréhensible. Bien sûr, on ne peut savoir si Osée fait allusion à un texte écrit ou à une tradition orale, mais pour ce qui est du récit concernant Jacob et Laban, les événements auxquels Osée fait référence sont les mêmes que ceux qui apparaissent

dans le récit de la Genèse. Le fait que Jacob soit mis en parallèle avec Éphraïm montre qu’il n’était pas considéré alors comme l’ancêtre d’un Israël « théologique » mais comme le patriarche du royaume d’Israël. Contrairement à Abraham qui n’apparaît, en dehors Pentateuque, que dans un nombre limité de textes qui ne sont pas plus anciens que la période babylonienne, Jacob est très souvent mentionné, surtout pour désigner « Israël », le royaume du Nord. Le passage de Jr 9,3, généralement considéré comme remontant au prophète Jérémie, emploie lui aussi la racine qui n’est attestée qu’en Gn 27,36 et Os 12,4. Cela indique la connaissance, à la fin du VIIe siècle, d’une tradition concernant un conflit entre Jacob et son frère. Pour ce qui est d’Osée 12, hormis l’allusion à un frère non-nommé 21, tous les autres éléments mentionnés sont liés à l’histoire de Jacob et Laban. Ce récit dans sa forme présacerdotale peut avoir émergé au VIIIe siècle et avoir contenu tous les 22 épisodes majeurs apparaissant dans le récit de la Genèse . La mention de Haran dans le récit mérite attention. À cette époque, Haran était la capitale occidentale de l’empire assyrien, et le séjour de Jacob en ce lieu pourrait avoir été raconté dans le but de montrer aux auditeurs comment se comporter intelligemment avec les Assyriens, qui 23 sont décrits comme des « Araméens » . Il existe, en effet, des signes de symbiose entre Araméens et Assyriens ainsi que des traces de la pénétration des Araméens dans la société assyrienne, à tous les niveaux. Selon Jean-Marie Durand 24, la cour néo-assyrienne était, en fait, « araméenne ». Cela est d’ailleurs attesté par le fait que l’araméen était devenu une langue écrite officielle, largement utilisée 25. Une autre possibilité, peut-être plus adéquate encore, serait de considérer les trois références à Haran (Gn 27,43 ; 28,10 ; 29,4) comme des insertions tardives, datant de l’ère de prospérité du VIe siècle 26. L’histoire originelle, constituée à l’âge du Fer, devait donc se préoccuper d’un Aram aux frontières d’Israël. Cette théorie est notamment appuyée par une observation : Osée 12 mentionne Aram et non Haran, ce qui ajoute à la difficulté de dater Osée 12 de la période perse.

La vision dont Jacob fait l’expérience à Béthel en Gn 28, est également compatible avec des concepts religieux mésopotamiens 27 : la porte du ciel, une sorte de rampe ou de ziggourat, une divinité dans les cieux et une divinité se tenant près de l’adorateur. Il est possible que le texte du e VIII siècle distingue encore entre El, assis au ciel, et Yhwh, le dieu personnel de Jacob, se tenant debout à ses côtés (pour ce concept voir également la forme originelle de Dt 32,8, où Yhwh apparaît comme le fils 28 de El ). On pourrait argumenter, dans ce cas, que le récit qui fait de Jacob le fondateur du sanctuaire du dieu El à Béthel représente en même temps l’introduction de Yhwh dans ce sanctuaire. Il existe un assez large consensus sur le fait que d’importantes parties du discours de Yhwh en Gn 28,13-15 appartiennent à une rédaction plus tardive, et que Yhwh n’apparut que de façon silencieusedans une vision ou, plus probablement, qu’il se présenta et offrit une assistance divine (v. 13* et v. 15*), de manière assez semblable à ce que l’on observe dans les oracles divins néo29 assyriens . Derrière ce récit du VIIIe siècle sur Jacob et Laban, il est possible de détecter une tradition plus ancienne, peut-être pré-monarchique — le plus ancien récit sur Jacob. Selon Gn 31,45-54*, la conclusion d’un traité entre Jacob et Laban situait la frontière entre eux deux dans les terres de pâturage du nord-est du Galaad israélite 30 ; c’est là que se trouvait le « pays de Kedem », à savoir, le pays des gens de l’est. Le récit concernant le monceau de pierres (gal‘ed = « cairn ») établi par Jacob (Gn 31,48) est sans doute un récit étiologique (qui a pu être inspiré par les pierres de frontières assyriennes, les kuduru), dont l’objectif était d’expliquer un élément géographique du Galaad, élément relié d’une façon ou d’une autre à la réalité de la frontière entre populations israélite et araméenne, vivant à proximité l’une de l’autre, dans le nord de la Transjordanie. Déterminer la localisation de ce récit est important pour la compréhension de son contexte. Un lieu nommé Miçpa, apparemment situé à proximité du gal‘ed, joue un rôle important dans le récit, une étiologie du terme étant d’ailleurs

fournie (Gn 31,49). Il doit probablement être identifié avec Tell el-Masfa (et le village de Suf) ou en être proche, surplombant la vallée supérieure du Yabboq, à quelques kilomètres au nord-ouest de Jerash. Ce petit site, qui pourrait préserver le nom ancien, domine nettement : c’est un des monts les plus élevés du Levant (ca. 1 100 m au-dessus du niveau de la mer). Cela concorde avec le sens du nom (un lieu dominant ses environs) ainsi qu’avec l’idée d’un lieu pouvant être vu de loin et, donc, servir de repère territorial. Ce Miçpa semble être le plus oriental des sites israélites au Galaad, à la frontière du territoire de la ville araméenne de Lidbir, que l’on peut probablement identifier avec el-Husn, au sud d’Irbid 31. L’autre site important mentionné dans le cycle de Jacob est Penouël, situé dans la 32 vallée inférieure du Yabboq . En effet, la tradition concernant la fondation d’un temple à Penouël peut aussi faire partie de la strate ancienne du récit sur Jacob 33 (Soukkoth sans doute aussi, si l’on tient compte de Gn 33,17 34) et, peut-être, aussi Mahanaïm 35. Tout cela semble indiquer que les premières traditions sur Jacob étaient locales, liées au territoire israélite du Galaad, peut-être même au cœur le plus ancien du territoirenommé Galaad, dans le Yabboq et au sud de celui-ci 36, une région ne dépassant pas les 500 km2. Les histoires liées à ce « patriarche » et à son territoire furent, dans un premier temps, probablement mémorisées et commémorées dans un sanctuaire de El à Penouël. Les réalités dépeintes dans la strate la plus ancienne de la tradition sur Jacob devraient être datées de l’âge du Fer, sans doute avant le Fer IIB (voir ci-dessous), lorsque se forma la frontière d’occupation (à différencier de la frontière politique) entre Israélites et Araméens dans cette région. Une telle situation semble convenir à la fin du Fer I ou au début du Fer IIA, c’est-à-dire la fin du XIe ou le Xe siècle. Notons que le conflit relatif à Ramoth-de-Galaad à la fin du règne des Omrides (1 R 22 ; 2 R 8,28-29) et que le fait qu’à l’époque de Jéroboam II Lidbir était considérée comme une ville araméenne bien établie (Am 6,11-14), semblent effectivement montrer que la frontière ethnique dans le Galaad avait été stabilisée dès avant le IXe siècle. Dans cette phase ancienne de son histoire culturelle, la

tradition de Jacob (dans laquelle Jacob n’était pas encore l’ancêtre « d’Israël » mais d’un groupe nommé Benê Yaʿaqob 37) n’existait pas sous forme écrite (voir ci-dessous). Si tel avait été le cas, comment expliquer l’association de Jacob avec Béthel, qui doit elle aussi être comprise dans le contexte de l’âge du Fer, comme on l’a montré plus haut ? Cette tradition peut dater de la première moitié du VIIIe siècle av. J.-C. lorsque Béthel était un temple important du royaume du Nord (Am 7,13), sans doute parallèle à celui de Samarie, ou seulement inférieur à celui-ci (voir ci-dessous). Cela est indiqué par l’archéologie de Beitin. Le site fut tout particulièrement prospère au Fer I et au Fer IIB ; les indices d’une activité au début du Fer IIA et aux périodes néo-babylonienne et perse manquent et l’activité à la fin du Fer IIA est tout au plus réduite 38. Même si l’on ne peut balayer d’un geste qu’il est possible qu’une tradition sur Jacob à Béthel soit née au Fer I ou au début du Fer IIA 39, il nous semble que l’institutionnalisation du lien entre Jacob et Béthel convient mieux au règne de Jéroboam II (788-747 av. J.-C.). À son époque, l’ancienne tradition sur Jacob fut « importée » à Béthel dans le cadre d’une réorganisation du culte et du royaume ou y fut encouragée (pour le cas où elle aurait déjà été connue à l’ouest du Jourdain). Le fameux récit de 1 R 12,29 attribue, au règne de er er Jéroboam I , la construction de- sanctuaires à Béthel et à Dan . Pourtant les preuves archéologiques recueillies à Dan et à Béthel indiquent qu’une réalité du temps de Jéroboam II 40 est sous-jacente à ce verset : ces deux sites n’étaient pas occupés au début du Fer IIA (l’époque de Jéroboam Ier 41) et Dan n’a sans doute pas été contrôlé par le royaume d’Israël avant 800 av. J.-C. 42 Cela s’accorde avec l’analyse du texte de 1 R 12 qui distingue entre une ancienne tradition pré-deutéronomiste d’une part, préservée aux versets 1-20 et 25 et selon laquelle Jéroboam Ier bâtit Sichem et Penouël, et le récit sur les veaux d’or à Béthel et à Dan d’autre part, attribué à un ou plusieurs rédacteurs deutéronomistes 43 qui souhaitaient peut-être placer la construction de Béthel et de Dan au tout début de l’histoire du

royaume du Nord, afin de la présenter comme le « péché originel » de cette monarchie. Cette analyse littéraire confirme la distinction entre Penouël et le récit de Béthel-Dan dans le texte deutéronomiste des livres des Rois, sans doute à cause du souvenir de l’importance de ce lieu dans la tradition de Galaad au début du Fer IIA. La première mise par écrit de l’histoire de Jacob fut apparemment entreprise sous le règne de Jéroboam II au VIIIe siècle, probablement à Béthel. Hormis une inscription unique de trois lettres (trouvée à Khirbet Raddana et datant du Fer I tardif ou du début du Fer IIA), il n’existe presque aucune preuve d’alphabétisation dans les hautes terres, sur les deux rives du Jourdain, avant la fin du Fer IIA, dans la deuxième moitié du IXe siècle. L’hébreu apparaît pour la première fois aux marges des hautes terres, en particulier dans les centres urbains de Gath et de Réhob, au IXe siècle, puis dans le centre des royaumes hébreux un peu plus tard. La première propagation de l’activité scribale en Israël est connue par les ostraca de Samarie et les inscriptions de Kuntillet-Ajrud, datant les uns et les autres du début du Fer IIB, dans la première moitié du VIIIe siècle 44. Il est intéressant de noter qu’ostraca et inscriptions sont en lien avec l’administration royale à Samarie et un des exemples, au moins, en provenance de Kuntillet-Ajrud est également lié au culte. La « migration » des traditions sur Jacob du Galaad vers les hautes terres centrales à l’ouest du Jourdain et leur promotion à Béthel soulèvent la question de la tradition concernant la sépulture de Jacob à Sichem (Gn 33,18-20) 45. Il existe une certaine logique à rechercher une mémoire ancienne concernant la tombe d’un héros/patriarche (et un sanctuaire associé ?) 46, mais la terminologie du verset 18 semble tardive (PaddanAram appartient à des contextes sacerdotaux, de même que l’expression « pays de Canaan ») 47. Il en est de même pour le verset 19 : telle qu’elle se présente maintenant, la mention de Hamor prépare la transition vers Gn 34 48, et le terme qśîṭah (argent, mouton ?) n’apparaît que dans deux textes tardifs, Jos 24,32 et Jb 42,11. On pourrait tenter de reconstruire

l’ancienne tradition comme suit, sans qu’il s’agisse nécessairement des mêmes mots (le stade rédactionnel tardif est entre crochets) : [18 ‫םלש[ בקעי אביו‬ ‫ריעה ינפ תא ןחיו ]םרא ןדפמ ואבב ןענכ ץראב רשא[ םכש ריע‬ ‫ ]הטישק האמב םכש יבא רומח ינב דימ[ ולהא‬19 ‫תקלח תא ןקיו‬ ‫םש הטנ רשא הדשה‬ 20 ‫לארשי יהלא לא ול ארקיו חבזמ םש בציו‬ 18 Jacob alla [...] à la ville de Sichem [...] et il campa devant la ville. 19 Il acheta la parcelle de champ où il avait dressé sa tente [...]. 20 Il y éleva un autel et l’appela El dieu d’Israël. La note au verset 20 confirmerait la mémoire de la vénération d’une divinité « El » par le clan de Jacob, à Penouël, Béthel et sans doute aussi Sichem. Le cœur de la tradition de Sichem devrait dans ce cas être considéré comme faisant partie de « l’importation » du récit sur Jacob du Galaad et de sa promotion dans les hautes terres, à l’ouest du Jourdain, entre Sichem et Béthel. Ceci conviendrait aussi relativement bien au règne de Jéroboam II et à sa réorganisation du culte dans le royaume du Nord. Suivant notre analyse de Gn 28,10-22* ci-dessus, la première version de la découverte de Béthel par Jacob avait sans doute pour but de combiner la vénération originelle du dieu El avec celle de Yhwh. Le fait qu’à l’ouest du Jourdain les traditions sur Jacob soient cantonnées à la partie méridionale des hautes terres nord-israélites entre Sichem et Béthel soulève la question des traditions qui étaient localisées dans la partie septentrionale des hautes terres centrales, entre Sichem et la vallée de Jezréel, particulièrement à Samarie et dans ses environs. Les inscriptions et dessins de Kuntillet-Ajrud indiquent la forte implication d’un monarque israélite à cet endroit, sans doute Jéroboam II 49. Particulièrement importante est la mention de Yhwh de Témân et de Yhwh de Samarie dans ces inscriptions. À Kuntillet-Ajrud, le culte semble avoir été voué à Yhwh de Témân, à savoir Yhwh des zones arides du sud, et à Ashéra, considérée par certains chercheurs comme sa

consort et par d’autres comme son temple 50. Yhwh de Samarie, qui peut également avoir été vénéré à Kuntillet-Ajrud, devrait sans doute être compris comme le patron ou la divinité protectrice de la capitale du royaume du Nord (à comparer avec le Yhwh de Jérusalem dans 51 l’inscription de Beit Lei ). L’inscription 3.1 (et 3.8 ?) de Kuntillet-Ajrud pourrait en fait faire référence à un temple de Yhwh à Samarie 52.Il est également possible qu’il soit fait allusion à ce temple en Os 8,6 et 1 R 53 16,32, dont le texte originel parle d’une « Maison de Yhwh » à Samarie . La possible relation entre Kuntillet-Ajrud et les récits de l’Exode et de l’errance dans le désert 54 suggère la possibilité que la tradition de l’Exode ait été liée à ce temple. Il semble, par conséquent, que le royaume du Nord possédait deux récits d’origine 55ou mythes de fondation 56 : le cycle de Jacob d’une partet le récit de l’Exode et du séjour au désert d’autre part. Leurs sources peuvent être recherchées dans les débuts du royaume du Nord, ou même encore plus tôt 57, mais elles semblent n’avoir été « institutionnalisées » e que dans la première moitié du VIII siècle, du temps de Jéroboam II. Ce dernier peut avoir tenté de centraliser le culte du royaume du Nord dans des sanctuaires officiels, avec, sans doute, l’objectif d’établir un contrôle étroit de la bureaucratie royale sur le culte et les revenus émanant des temples. Au moins deux de ces temples centraux étaient en relation avec l’un des mythes fondateurs d’Israël 58 : Jacob, le héros local du Galaad, était alors vénéré à Béthel au temple du dieu El et, probablement, lié aussi à Yhwh, tandis que l’Exode était célébré au temple de Yhwh à Samarie 59. Il n’est guère possible de savoir si une autre tradition était révérée au temple de Dan, qui fut érigé à cette époque 60. C’est probablement dans ces sanctuaires de Béthel et de Samarie que furent mises par écrit, pour la première fois, les traditions nord-israélites. Cette situation semble suggérée par l’auteur d’Osée 12, un tenant de la tradition de l’Exode comme seul mythe de fondation d’Israël, lorsqu’il critique Jéroboam II pour avoir promu Jacob et offre, pour ce faire, un point de vue négatif sur le Patriarche, présenté comme un imposteur 61. (Ce motif existe aussi dans

le récit de Jacob et Laban tel qu’il apparaît dans la Genèse, dans une perspective néanmoins plus neutre, voire même positive.) Il est difficile de reconstruire le cadre précis de l’ancienne tradition sur Jacob à partir des premières phases de l’âge du Fer. Toutefois, la géographie du récit offre quelques indices regardant le « Haftpunkt » (point d’ancrage) de cette tradition, l’un d’entre eux ayant vraisemblablement été Penouël. À ce stade, il se peut que la divinité concernée ait été El, comme cela est encore reflété dans certains passages du récit de la Genèse. Il est possible que le lien entre Jacob et Yhwh ait été effectué dans le récit du VIIIe siècle. Il est difficile de savoir quand Yhwh apparut dans le nord. Les histoires d’Élie reflètent une concurrence entre Yhwh et un Baal phénicien. S’il existe un fond historique derrière le putsch de Jéhu, il est possible qu’il ait fait de Yhwh la divinité tutélaire des rois d’Israël et que Jéroboam II fut celui qui encouragea le culte de Yhwh en Israël. Les noms d’Ochozias et de Joram donnés à des membres de la dynastie omride avant Jéhu attestent cependant que Yhwh était déjà vénéré dans les cercles palatiaux sous les Omrides. La « révolution de Jéhu » devrait alors être comprise comme une tentative d’éradiquer la vénération des ba‘alim phéniciens et d’installer Yhwh comme seule divinité tutélaire de la monarchie, institutionnalisée par Jéroboam II.

Le récit d’Ésaü Une question non résolue dans la reconstruction de la formation du cycle de Jacob est la relation entre Jacob et Esaü/Edom. Si Ésaü était dès l’origine une personnification de Édom/Séïr, ce qui est une hypothèse plausible, nous avons alors trois possibilités pour lier Édom et Jacob. Selon la première, les relations difficiles entre Édom et « Israël » présupposent le concept « théologique » d’Israël, après que les traditions de Jacob furent arrivées en Juda et que ce royaume se fut approprié le

nom « Israël » comme un terme désignant le peuple de Yhwh. Dans ce cas, l’histoire de Jacob et Ésaü aurait été ajoutée au récit sur Jacob, au plus tôt dans une phase tardive du VIIe siècle ou, mieux encore, au cours du e VI siècle, avant ou après la chute de Jérusalem. On peut noter l’animosité vis-à-vis d’Édom dans les dernières phases de l’histoire de Juda 62 et remarquer qu’il n’existe pas de contexte historique clair expliquant les relations (tendues) entre Israël et les Édomites à l’époque du royaume du 63 Nord . Une deuxième possibilité consisterait à relier le conflit avec les Édomites à des moments plus anciens de la tradition sur Jacob, en se fondant sur le fait que Yhwh était à l’origine une divinité du sud ou même une divinité édomite 64. Dt 33,2 présente Yhwh comme venant de Séïr et Ha 3,3 (El) de Témân 65. Ceci signifierait que les conflits et la réconciliation entre les frères, Jacob et Ésaü, reflèteraient l’adoption d’une divinité édomite ou d’une divinité du sud par le clan de Jacob, peut-être par l’intermédiaire d’un groupe Shasou. Mais cela est hautement spéculatif. Une troisième option est présentée par les inscriptions de KuntilletAjrud, qui peuvent être datées de manière assurée de la première partie e 66 du VIII siècle av. J.-C . Elles offrent la preuve qu’à cet endroit Yhwh était invoqué sous le nom « le Yhwh de Samarie » et « le Yhwh du Témân » (avec l’article défini), de telle sorte qu’une relation entre Jacob et Ésaü/ Édom (Témân) pourrait également avoir tout son sens dans un contexte du VIIIe siècle. Dans ce cas, le récit de la réconciliation et de la séparation entre Jacob et Ésaü/Édom pourrait refléter le « transfert » de Yhwh d’Édom à « Israël ». De cette manière, le récit sur Jacob du VIIIe s. serait une reconnaissance de la vénération commune de Yhwh (sous diverses manifestations). On remarque qu’après sa rencontre avec Ésaü, Jacob prétend qu’il le rejoindra à Séïr (Gn 33,14-15), alors qu’il s’installe en fait à Soukkoth et Sichem.

Bien sûr, une date tardive pour le récit « Jacob-Ésaü » ne saurait être exclue, mais il est difficile de déconnecter Ésaü d’Aram 67 et de Haran, c’est-à-dire d’un contexte du VIIe ou du VIe siècle. Enfin, le fait qu’Abraham ait eu, tout comme Isaac, deux fils concurrents suggère probablement que les rédacteurs du récit sur Abraham avaient connaissance de la tradition sur Jacob et Ésaü.

L’union des récits sur Jacob et des récits sur Abraham Il existe un assez large consensus sur l’idée que l’importation des traditions anciennes sur Jacob dans le royaume du Sud n’eut lieu qu’après la destruction de Samarie en 722 68. C’est seulement à partir de ce terminus a quo qu’elles ont pu être combinées aux histoires relatives au patriarche du Sud, Abraham. Il existe d’ailleurs une logique historique à imaginer l’union des récits sur Jacob et de ceux sur Abraham en Juda, après 720 et avant 586, sans doute dans le droit fil d’une idéologie « panisraélite » du peuple et du territoire, qui dut voir le jour sous le règne de Josias. La nouvelle situation démographique en Juda, une nation désormais composée d’une mixité de groupes du royaume du Nord et du royaume du Sud, rendait nécessaire le renforcement de la cohésion de cette monarchie « unifiée » 69 grâce à la création d’une histoire combinant des traditions du Sud et des traditions du Nord. La fusion de ces traditions s’effectua dès le début sous forme écrite, étant donné qu’elle constituait une tentative délibérée d’imposer une histoire nouvelle, « officielle » et globale des Patriarches. Les années post 720 en Juda, et tout particulièrement le VIIe et le VIe siècles, sont d’ailleurs caractérisées par une vaste propagation de l’usage de l’écrit dans l’administration et la correspondance 70. Dans cette nouvelle « histoire » des Patriarches, la réalité des faits, à

savoir la prééminence d’Israël sur Juda tout au long de leur existence parallèle, fut inversée ; Juda (Abraham et Isaac) reçut la primauté de la tradition unifiée et Jacob fut placé en dernier. Le récit sur Abraham « vampirisa » également des traditions provenant des récits sur Jacob, tel que l’itinéraire en Gn 12,4-9, la construction de lieux de culte (voir cidessous) et, peut-être également, l’idée de deux fils qui doivent se séparer. L’objectif était de subordonner les récits sur Jacob à ceux sur Abraham, c’est-à-dire de subordonner Israël (qui n’existait plus) à Juda. Cette fusion des traditions ne s’effectua pas en une seule étape ; elle dut constituer un long processus qui débuta probablement au VIIe siècle et se poursuivit jusqu’à la période perse. L’idée selon laquelle ce lien fut établi assez tardivement est soutenue par le fait qu’en dehors du livre de la Genèse, les passages mentionnant les trois Patriarches ensemble sont des résumés théologiques tardifs, datant des périodes babylonienne et perse 71. Dans le livre de la Genèse, l’unification des récits des Patriarches fut effectuée par divers rédacteurs, ayant des stratégies différentes : l’une d’entre elle fut, par exemple, la réitération, aux trois ancêtres, des promesses divines sur la terre et la descendance 72. On a souvent remarqué que, dans le récit unifié, les traditions du Sud « réagissent » à celles du Nord : en Gn 12,5-9, Abraham se rend à Béthel 73 et à Sichem . Il « sort » de Juda afin de parcourir l’ensemble des hautes terres et de les revendiquer pour la monarchie de Juda ou pour sa population. De façon significative, Béthel et Sichem symbolisent probablement ici les traditions sur Jacob (les lieux plus au nord ne sont pas mentionnés), ce qui atteste l’idée d’un lien ancien entre Jacob et Sichem, sans doute autour d’une tombe révérée. La question qui se pose alors est de savoir à quel contexte convient le mieux la mise en avant de Béthel en Gn 12,8. De nos jours, ce passage est souvent considéré comme exilique ou postérieur 74, mais, en ces temps-là, le site n’était pas occupé ou ne possédait qu’une population très clairsemée 75. Il est intéressant de noter qu’Abraham n’est pas mis en relation avec Penouël (contrairement à Béthel) parce que la fusion des traditions doit avoir été effectuée lorsque

cette ville n’avait déjà plus de pertinence, le Galaad ayant été perdu lors de l’offensive de Rezîn de Damas dans la deuxième moitié du VIIIe siècle 76. Il ne redeviendra pertinent que plus tard, à la période hasmonéenne. La visite de Jacob à Mamré (Gn 35,27) relève probablement de la même stratégie visant à consolider les parallèles entre les deux ancêtres et à établir la supériorité de Juda sur Israël. Il est également plausible que, pour unifier la famille des Patriarches, le lieu de sépulture de Jacob ait été 77 « transféré » de Sichem à Hébron . Il est intéressant de remarquer que, dans le Nouveau Testament, les Actes des Apôtres semblent présupposer un lien avec Sichem, indiquant que le lieu de sépulture d’Abraham y aurait été acheté (Ac 7,16).

Le récit sacerdotal de Jacob Il existe un relatif consensus quant à l’étendue du matériel sacerdotal (P) dans le récit sur Jacob 78 : Gn 25,19-20… 25. 26b ; 26,34-35 ; 27,46 ; 28,1-9…(28,24.28b ; 29… 30,22 79) ; 31,18* ; 35,6a.9-15.22b-29 ; 46,34 ; 47,27-28 ; 50,12-13 80. Contrairement à l’histoire d’Abraham, où le récit P peut être reconstruit comme un enchaînement narratif cohérent, la version sacerdotale des faits et gestes de Jacob contient d’importantes lacunes. Soit P fut composé afin d’intégrer immédiatement le plus ancien récit sur Jacob 81, soit P n’était pas très intéressé par Jacob, le considérant uniquement comme un lien généalogique entre Abraham, avec lequel Yhwh avait conclu une alliance (Gn 17), et le peuple d’Israël. Selon P, ce lien se forma à travers la révélation divine à Moïse (Ex 6) 82. Notons que P lie (pour la première fois ?) Jacob et le récit de l’Exode. Pour cette raison, P ne fut pas entièrement préservé lorsqu’il fut intégré aux matériaux plus anciens sur Jacob. Comme dans le cas d’Ismaël, P chercha à atténuer le conflit entre Jacob et Ésaü, faisant en sorte que son départ vers Laban ne soit pas le résultat d’une fuite mais le souhait de sa mère, désirant le

marier au sein de la famille 83. Cela implique une histoire de Jacob qui contenait déjà la relation à Ésaü. Le seul autre épisode qui intéresse P est la théophanie à Béthel, qu’il réécrit en Genèse 25. De manière intéressante, P transfère le changement de nom de Jacob de Penouël à Béthel. Comme l’a observé Blum, il omet l’explication du nom de Béthel et transforme la maṣṣebâ en un « mémorial du discours divin » 84. En quelque sorte, en employant le terme « El Shadday » pour la divinité qui apparaît à Abraham et à Jacob (Gn 17,1 ; 28,3 ; 35,1), P reconnaît encore la « tradition du dieu El » en relation avec les Patriarches. Cette utilisation d’une divinité adorée en Arabie au temps où P était écrit est une reconnaissance des divers « El » présents dans les anciens récits sur les Patriarches 85 ; P identifie bien sûr Yhwh et El Shadday à travers la notion d’une révélation divine en trois étapes (Ex 6,2-3). Apparemment, P partage le point de vue de Juda en transférant la tombe de Jacob à Makpéla (Gn 50,12-13).

Les additions post-sacerdotales au récit sur Jacob Les textes sacerdotaux ne sont pas les dernières additions au récit sur Jacob. Il a été retravaillé après la fusion de la tradition plus ancienne avec le récit P. Les passages suivants font partie des insertions plus tardives. La présentation des enfants de Jacob comme les douze tribus d’Israël est une construction tardive, qui a remplacé un récit plus ancien concernant les enfants de Jacob en Gn 29-30 86. Le récit de la naissance de Benjamin et de la mort de Rachel relève aussi de cette construction ; la date tardive de ce passage a récemment été démontrée par N. Na’aman 87. La prière de Jacob avant sa rencontre avec Ésaü en Gn 32,10-13 est une addition post-deutéronomiste qui transforme Jacob en un juif pieux (voir les parallèles en Ne 9 et Dn 9) et corrige la narration plus ancienne 88. Le

récit composite concernant le massacre à Sichem en Gn 34 est également post-P, transformant le lien traditionnel de Jacob avec ce lieu en un lien problématique, dans lequel Jacob ne joue pas le rôle principal (cela reflèterait-il une idéologie anti-samaritaine ?). Comme l’a montré Macchi, l’histoire centrée sur le comportement violent de Lévi et de Siméon anticipe les expressions tribales de Gn 49 et l’exaltation de Juda dans ce texte 89 ; elle pourrait appartenir à une rédaction pro-davidique datant de la période perse (voir Gn 49,10). Le passage en Gn 35,1-7* a délibérément été inséré avant le récit P en Gn 35,9 ss. Il introduit le thème du renoncement aux dieux étrangers 90 à Sichem, un thème repris en Jos 24. Par conséquent, ce passage fait probablement partie de la 91 rédaction d’un Hexateuque qui s’achevait avec Jos 24 . Il pourrait même avoir été inséré comme réponse à Gn 34 dans le but de montrer que Sichem était (elle aussi) le lieu du vrai culte du dieu de Jacob et d’Israël 92.

Synthèse La combinaison de l’archéologie, de considérations d’ordre géographique et de la recherche biblique nous a permis de suivre la trace de la formation de la tradition sur Jacob, depuis les débuts de l’âge du Fer jusqu’au milieu ou à la fin de la période perse. Le récit sur Jacob est probablement l’une des plus anciennes traditions des origines préservées dans la Bible hébraïque. Il a existé de manière indépendante, sans relation avec les patriarches du Sud et fut, au départ, un récit sur les origines des Benê Yaʿaqob transjordaniens, qui ne furent identifiés avec Israël que plus tard. Cette identification, et sans doute aussi la première version écrite du récit sur Jacob, s’opéra au VIIIe s. av. J.-C. Jacob devint alors le fondateur des sanctuaires (principalement des sanctuaires du dieu El), dans lesquels Jéroboam tenta d’introduire Yhwh. Peu avant, et/ou après la chute de Juda, et durant le VIe siècle, Jacob fut lié à Abraham, qui devint le premier

ancêtre, démontrant ainsi la primauté de Juda. P était moins intéressé par Jacob ; il réinterpréta le confit avec Ésaü ainsi que la théophanie à Béthel et il établit un lien entre les Patriarches et le récit de l’Exode. Après P, le rôle de Sichem fut consolidé, probablement dans le contexte des relations difficiles entre Judéens et « Samaritains ».

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Le récit de l’errance au désert, ses itinéraires et l’évolution de la tradition de l’exode

Israël Finkelstein

Les chercheurs qui ont tenté de traiter de la réalité historique liée au 1 récit de l’Exode et de l’Errance au désert appartiennent grosso modo à deux camps. L’un adhère au concept de la recherche traditionnelle, selon laquelle les textes bibliques dépeignent une situation de l’âge du Bronze Récent, au XIIIe siècle av. J.-C., une datation évaluée par déduction logique fondée sur une chronologie interne de la Bible 2. Ces chercheurs se confrontent à deux problèmes majeurs : d’une part, il est clair aujourd’hui qu’il n’existait pas d’activité scribale significative dans l’Israël ancien avant 800 av. J.C. 3 ; ils doivent donc supposer une transmission orale du récit dans tous ses détails sur une période de quatre siècles, sans qu’aucune réalité contemporaine à cette longue période s’infiltre dans le récit ; d’autre part aucun indice ne confirme spécifiquement une origine de la tradition au

Bronze Récent : ces indices peuvent tout autant être attribués à d’autres périodes, plus tardives 4. Ceux qui adhèrent à l’autre camp suggèrent que le texte décrit des réalités concordantes avec la période de compilation du texte, de la fin de 5 la période monarchique à la période postexilique . La difficulté majeure à laquelle se confrontent les chercheurs de cette école est la nécessité d’expliquer la solide tradition concernant l’Exode et l’expérience au désert e dans les écrits des prophètes du royaume du Nord, dès le VIII siècle av. J.6 C. Lorsque l’on traite des textes bibliques relatifs à la tradition de l’Exode et de l’Errance au désert, il est nécessaire de prendre en considération les points suivants : 1) Cette tradition tient une place importante dans le royaume du nord dès le VIIIe siècle 7. 2) Elle possède une histoire littéraire « inhérente » 8. 3) Elle était originellement indépendante des récits des patriarches et leur était, d’ailleurs, antérieure. 4) Les deux ensembles, Patriarches et Exode, furent mis en relation à une période relativement tardive. 5) Dans sa forme présente, le récit représente des compilations sacerdotales (P et/ou même post-P) 9. Je souhaite aborder ici la question du point de vue de l’archéologie, tout en choisissant un chemin différent de l’habituelle « chasse » aux trouvailles du Bronze Récent, mises au jour dans les sites et les régions mentionnées dans le texte biblique. Pour ce faire, j’examinerai le matériel relatif à l’Errance au désert à travers le prisme des toponymes apparaissant dans le récit et dans la liste des étapes dans les livres de l’Exode, des Nombres et du Deutéronome. Les itinéraires ont été étudiés en détail en termes de structure, sources, rédactions et géographie 10. Pourtant, la question de la réalité historique a rarement été abordée. En d’autres termes, bien que les listes des itinéraires appartiennent à des rédactions tardives du Pentateuque, pour des raisons que nous tenterons d’expliquer ci-dessous, elles sont sans doute fondées sur des sources antérieures. J’essayerai donc d’identifier ces matériaux plus anciens, afin de tenter de reconstruire l’histoire de la tradition de l’Exode et de

l’Errance au désert. Dans ce but, il faut se poser une question : Que savaient les divers auteurs bibliques des différentes époques et des contextes du désert du sud ? Cette question est particulièrement pertinente lorsque l’on examine les contrées habitées : les auteurs de la fin de la période monarchique, de la période exilique et de la période postexilique étaient familiarisés avec la géographie de Juda-Yehud et des régions adjacentes, comme le plateau de Benjamin et de Moab, mais leur connaissance de régions à peine plus éloignées, comme le nord du 11 Galaad et le nord de la Samarie, était limitée et partielle. Si tel était le cas de régions proches de l’univers géographique des auteurs, que pouvait-il en être de régions désertiques, désolées et lointaines, situées à des centaines de kilomètres ? Quelle pouvait être la source de leur connaissance sur ces régions ?

Les itinéraires Les sites du désert visités au cours de la période d’Errance sont mentionnés dans plusieurs versets du Pentateuque, dans le récit de l’Exode et des Nombres (Ex 12,37 ; 13,20 ; 14,2 ; 15, 22-23 ; 16,1 ; 17,1 ; 19,2 ; Nb 10,12 ; 11,35 ; 12,14 ; 20,1.22 ; 21,10-12) ; dans la liste récapitulative en Nb 33,1-49 et dans plusieurs versets du Deutéronome (1,1-2 ; 1,46-2,1 ; 10,6-7). Ces textes ont fait l’objet de nombreuses recherches concernant des thèmes tels que la division en zones géographiques 12 ; la signification des formules utilisées 13 ; les relations entre le récit et la liste récapitulative 14 ; le genre spécifique aux itinéraires dans la Bible et dans les textes du Proche-Orient ancien 15 ; l’identification de lieux distinctifs et de routes dans le désert 16 et les questions de sources et de rédactions 17. Concernant ces dernières, les chercheurs supposent que les itinéraires étaient fondés sur des matériaux plus anciens 18.

Une des manières de mettre en évidence ces matériaux anciens et leurs contextes consiste à examiner l’archéologie des lieux mentionnés dans le récit et les listes, pouvant être identifiés avec certitude. Autant que je puisse en juger, à l’est du delta du Nil et au sud de Moab, il s’agit uniquement de trois sites : Qadesh-Barnéa (= Tell el-Qudeirat, dans le nord-est du Sinaï), Eciôn-Guèvèr (= Tell el Kheleifeh, entre Aqaba et Eilath), Pounôn (= Khirbet Faynan, dans la Arabah orientale au sud de la Mer morte) et d’une région, Édom. Deux autres sites du sud pourraient également éclairer notre question sur la connaissance du désert du sud par les auteurs : Ein Hatseva, dans la Arabah occidentale au sud de la Mer morte, et Kuntillet-Ajrud, dans la région nord-est du Sinaï.

Les sites QADESH-BARNÉA Ce tell, situé dans l’oasis de Ein el-Qudeirat, a été presque totalement fouillé 19. La publication finale et certains traitements récents des trouvailles ont ouvert la voie à une réévaluation du site 20 ; les points pertinents pour cet article sont résumés ci-dessous. La Sous-strate 4c représente la plus ancienne occupation du site. De la céramique peinte ‘Qurayyah’ et d’autres trouvailles datées de l’âge du Fer I 21 doivent appartenir à cette occupation et datent probablement du e XII siècle av. J.-C. L’analyse radiocarbone d’échantillons de graines donne des dates du Xe siècle 22 et devrait les associer elles-aussi à cette phase d’occupation, qui dura longtemps. Les Sous-strates 4b et 4a représentent une occupation couvrant l’essentiel du Fer IIA (fin Xe et début du e IX siècle). Les différentes phases de la Strate 4 présentent les vestiges d’un site de petite taille, probablement occupé par une population autochtone

du désert ; la Sous-strate 4b correspond au phénomène des sites des hautes terres du Néguev au Fer IIA : une phase de sédentarisation de populations autochtones liée à la prospérité apportée par l’industrie du 23 cuivre dans la Arabah . Les données archéologiques ne suffisent pas à e déterminer si le site était occupé dans la première moitié du VIII siècle. Les Strates 3 et 2 sont les plus importantes pour notre discussion. Elles représentent les vestiges d’un fort rectangulaire bien conservé datant du Fer IIB-C, entouré par une solide muraille servant de fondation à un système de casemates. Ce fort fut édifié dans la deuxième moitié du e VIII siècle (c’est-à-dire, du temps de l’occupation de cette région par les Assyriens) et continua de fonctionner jusque vers 600 av. J.-C. Cohen et Bernick-Greenberg 24 l’identifièrent à un centre administratif judaïte 25 construit le long de la route commerciale Darb el-Ghazza, menant de la Mer rouge à la côte méditerranéenne. Na’aman 26, quant à lui, soutient que son édification fut une initiative assyrienne et que le fort fut administré pour les Assyriens par des ressortissants de royaumes vassaux. Je considère ce site comme une forteresse construite par Juda sous les ordres de l’Assyrie et servant les intérêts et objectifs de l’administration assyrienne (voir ci-dessous). En tenant compte du contexte géopolitique e global au Levant dans la deuxième moitié du VII siècle, on peut e raisonnablement supposer que l’Égypte de la XXVI dynastie prit le contrôle du sud, y compris de Qadesh- Barnéa, après le retrait assyrien de cette région. La destruction de la Strate 2 devrait être mise en relation avec l’attaque babylonienne de 604/603 av. J.-C. ou avec la chute de Juda au début du VIe siècle. Avec la destruction de sa forteresse, Qadesh-Barnéa perdit de son importance. Des vestiges peu nombreux, apparemment associés à une poterie caractéristique de la fin de l’âge du Fer, ont été découverts sur un des chantiers de fouilles, au-dessus de la Strate 2. De maigres vestiges de la période perse, découverts en divers endroits du site au-dessus de la Strate 2, comprennent une empreinte de sceau « Yehud » appartenant au

groupe 14 de la classification de Vanderhooft et Lipshits 27 et daté des IVee III siècles.

ECIÔN-GUÈVÈR Eciôn-Guèvèr est identifié avec le site de Tell el-Kheleifeh, à la pointe septentrionale du golfe d’Aqaba ; aucun autre site de l’âge du Fer n’est connu dans cette région. Nelson Glueck fouilla la majeure partie du site 28 entre 1938 et 1940 . Il répartit les trouvailles en cinq périodes d’activité et les data entre le Xe et le Ve siècles av. J.-C., attribuant une strate à chacun des rois de Juda dont la Bible mentionne qu’ils ont été actifs dans cette région. Glueck interpréta les vestiges de la première période comme les preuves d’une vaste industrie de production de cuivre datant de l’époque salomonienne. Quelques tessons de type ‘Qurayyah’ 29 pourraient attester d’une certaine activité au XIIe siècle, sans doute liée à l’extraction de cuivre à 30 Timna . La mise en relation du site avec Salomon et avec l’industrie du cuivre faite par Glueck s’est révélée être imaginaire. Une étude approfondie des trouvailles par Pratico 31 n’a révélé aucun indice d’activité de fonderie. Détail non moins important, aucune trouvaille du Xe siècle n’a été mise au jour à Tell el-Kheleifeh ; le premier établissement de taille significative n’y fut installé qu’au VIIIe siècle av. J.-C. Sur le plan architectural, le site présente deux structures majeures : un fort à casemates de près de 45 x 45 mètres et une forteresse plus grande et plus tardive, de près de 75 x 75 mètres et ayant une enceinte massive, que Glueck et Pratico décrivent comme un établissement fortifié postérieur. En se fondant sur les assemblages céramiques, la première devrait sans doute dater de la première moitié du VIIIe siècle et il est possible qu’elle puisse être mise en relation avec le récit de 2 Rois 14,22, selon lequel le roi Ozias « rebâtit Eilath et la rendit à Juda » ; ceci peut avoir eu lieu du temps de l’hégémonie d’Israël dans cette région 32. Tenant

compte de la poterie caractéristique du Fer IIB-C trouvée sur le site et de sa similitude architecturale avec Ein Hazeva, la seconde forteresse devrait être interprétée comme une construction assyrienne. 33 Les empreintes de sceaux de Qosanal et l’ostracon 6043 montrent que, vers 600 av. J.-C., le site était habité par des Édomites. Des tessons de poterie attique et des ostraca en araméen attestent d’une certaine activité à l’époque perse, mais la nature de cette activité n’a pas été clairement établie. Quoi qu’il en soit, après le retrait assyrien du Levant, à e la fin du VII siècle ou le contrôle d’Édom par Nabonide au milieu du e VI siècle au plus tard, le site doit avoir décliné.

POUNÔN Dans la Bible hébraïque, ce site est uniquement mentionné dans la liste résumant les « étapes » dans le désert (Nb 33, 42-43). Il devrait être identifié avec le tell de Khirbet Faynan, situé dans la Arabah orientale, près de 50 kms au sud de la Mer morte. Occupé à diverses périodes, ce site était connu à l’époque romaine-byzantine sous le nom de Phaeno. C’est le plus vaste site de la région, s’étendant sur une superficie de 15 hectares. Lors d’explorations de surface sur place, de la poterie nabatéenne, romaine et byzantine a été collectée 34. Une zone située au nord du tell a révélé de grandes quantités de tessons de l’âge du Fer, dont certains semblent dater « d’avant le VIIe siècle » 35. Des tessons du Fer tardif ont été trouvés au sud-ouest du tell 36. Hauptmann 37 décrit un entassement de scories immédiatement à l’est du tell. Trois déterminations 14C d’échantillons collectés à cet endroit fournirent des dates correspondant au Fer IIA. Au cours de la première saison de fouilles archéologiques sur le site, la tête d’une figurine anthropomorphe, assez semblable aux figurines du Fer IIC trouvées à Horvat Qitmit, fut découverte 38.

Une importante industrie du cuivre du Fer IIA a été notée dans d’autres sites voisins, particulièrement à Khirbet en-Nahas 39. La date de la forteresse qui domine la surface du site, Fer IIA ou Fer IIB-C, fait débat 40.

ÉDOM D’un point de vue géographique, le texte biblique fait référence au territoire d’Édom comme à un territoire s’étendant à l’ouest de la Arabah ; les villes du Néguev biblique (la vallée de Béer-Shéva) sont localisées « vers la frontière d’Édom » ( — Jos 15,21). L’archéologie montre qu’au Fer IIC la culture matérielle édomite était présente sur des sites comme Horvat Qitmit (dans la vallée de Béer-Shéva) et Ein Hatseva (dans la Arabah occidentale), à la frontière de Juda. Pourtant, le texte biblique et l’archéologie situent le cœur d’Édom dans les hautes terres transjordaniennes du sud, la seule région au sud de la Mer morte où une activité agricole conséquente était possible 41. Les fouilles et les explorations effectuées sur le plateau d’Édom n’ont fourni aucune preuve d’activité permanente au Bronze Récent 42. Quelques sites du Fer I sont 43 connus en Édom ; même si mon évaluation initiale fut relativement exagérée 44, il est clair que des tessons du Fer I ont été trouvés à Buseirah et à Tawilan 45. À ce jour, aucun site du Fer IIA n’a été détecté sur le plateau édomite. Une vague d’installation y débuta à la fin du VIIIe siècle, vraisemblablement liée au transfert par les Assyriens de la route principale du commerce arabe de Darb el-Ghazza au plateau à l’est de la Arabah (voir ci-dessous). L’activité d’occupation s’intensifia et atteignit son apogée à la fin du VIIe siècle et au début du VIe 46. Édom fut conquise par Nabonide en 553 av. J.-C. 47 S’ensuivit une réduction de l’activité du site au cours de la période perse 48.

EIN HATSEVA

Ce site, qui correspond probablement à la Tamar biblique 49, a été totalement fouillé 50. Les archéologues décrivent les vestiges de l’âge du Fer comme représentant trois édifices fortifiés. De maigres vestiges (Strate 6) découverts sous la porte de la forteresse principale (voir cie 51 dessous) furent interprétés comme appartenant à un fort du X siècle . La couche d’occupation majeure (Strate 5) révèle les vestiges d’une vaste forteresse à casemates datant du Fer II, avec des tours d’angle carrées et une porte à double tenaille, mesurant 100 x 100 m et protégée par un glacis en terre et un fossé. Les archéologues décrivent deux phases : à la première, se trouvait une structure de casemates de 50 x 50 m ; au cours d’une phase postérieure, cette structure fut incorporée dans l’angle nordest d’une plus grande forteresse. Ils attribuèrent l’édification de la forteresse au royaume de Juda et la datèrent des IXe-VIIIe siècles. La Strate 4 présente les maigres vestiges d’une forteresse plus petite, établie e au-dessus des vestiges de la Strate 5, datée de la fin du VII et du début du e VI siècles et attribuée au roi Josias de Juda. Un petit sanctuaire contenant un riche assemblage de vaisselles de culte a été mis au jour à l’extérieur du mur nord de la forteresse, dans son voisinage immédiat. Les trouvailles ont été interprétées comme appartenant à un lieu de culte édomite et datées de la Strate 4. Aucune découverte d’époque perse n’a été faite à ce jour. L’absence de rapport de fouilles final empêche toute tentative de reconstruction de l’histoire d’Ein Hatseva. Toutefois, nous pouvons faire les remarques suivantes : à ce jour, aucune preuve n’a été fournie d’une couche du Fer IIA sur le site. Les vestiges attribués à la Strate 6 ne semblent pas être ceux d’une forteresse 52. Les vestiges de la Strate 5 doivent être considérés comme la substructure de la forteresse 53 datant de la fin du VIIIe siècle et/ou du VIIe siècle, qui devrait être reliée au contrôle assyrien de la route du commerce arabe à travers le plateau édomite et en direction de la côte 54. La forteresse présente certaines similitudes de plan et de méthode de construction avec celle mise au jour par Glueck à Tell el-

Kheleifeh (voir ci-dessus). Elle était sans doute occupée par des autochtones : des Édomites et peut-être aussi des Judaïtes. La nature et la date des vestiges de la Strate 4 (s’agit-il seulement d’une forteresse ?) n’ont pas été totalement clarifiées. Le sanctuaire avec ses vaisselles de culte date bien de la dernière phase de l’âge du Fer et était consacré à la divinité édomite Qos 55.

KUNTILLET-AJRUD Kuntillet-Ajrud, probablement le plus important site pour notre discussion, est situé dans le désert, sur l’une des voies du Darb el-Ghazza, à près de 50 km au sud de Ein el-Qudeirat (Qadesh-Barnéa). Le site date de la première moitié du VIIIe siècle. Cela est clairement attesté par l’assemblage céramique 56, les inscriptions 57 et l’évaluation des résultats de l’analyse au 14C 58. De nouvelles déterminations 14C d’échantillons à vie courte, non encore publiées, soutiennent cette date 59. Les trouvailles indiquent un lien fort avec le royaume du Nord 60 et l’assemblage 61 céramique démontre un certain lien avec Juda . En ce qui concerne les inscriptions 62, les plus importantes pour l’objet de cet article sont celles qui font référence à Yhwh de Samarie, qui apparaît une fois, dans l’Inscription 3.1 (voir aussi Inscription 3.8) ; Yhwh de Témân ou Yhwh du Témân (Inscriptions 3.6 et 3.9, une fois dans chacune, et deux fois dans l’Inscription 4.1.1 63) et, peut-être, la référence à un roi d’Israël dans les Inscriptions 3.1, 3.6, et 3.9 et dans une inscription qui fut omise dans la publication finale 64. J’ajouterai que Na’aman propose de voir une référence au récit de l’Exode dans l’Inscription 4.3 en plâtre 65. Quant aux dessins, le plus significatif concernant cet article est la possible représentation d’un roi d’Israël assis sur son trône sur un plâtre du hall d’entrée 66. Ornan a également donné une interprétation de scènes royales à des dessins supplémentaires 67.

Que savaient les auteurs bibliques du désert du sud ? Commençons par l’époque des dernières rédactions du texte par les scribes sacerdotaux (P), ou post-P 68 à la période perse. La province de Yehud, à l’habitat clairsemé et à la population restreinte, ne s’étendait pas 69 plus au sud que Beth-Zur . Il n’y avait pas de présence juive à cette époque dans les collines méridionales d’Hébron ou dans la vallée de BéerShéva. Et bien que quelques sites de la période perse aient été découverts 70 dans les hautes terres du Néguev , l’activité dans les sites principaux du sud était faible : Tell el-Qudeirat perdit son importance ; Tell el-Kheleifeh semble également avoir décliné ; Ein Hatseva n’était pas occupée ; il n’y a guère d’indices signifiants de présence à Wadi Faynan à la période perse et l’activité sur le plateau d’Édom était mineure. Dans de telles circonstances, la connaissance du désert du sud par les auteurs sacerdotaux (P) doit avoir été au mieux fragmentaire 71. Par conséquent, les toponymes apparaissant dans les récits de l’Errance et dans les itinéraires peuvent difficilement représenter des réalités de la période perse. Ce qui signifie que les matériaux bibliques discutés ici se fondent 72 sur des sources plus anciennes, reflétant des réalités antérieures . Dans les paragraphes qui suivent, je souhaite tenter d’identifier le contexte de ces éventuelles sources, en remontant d’étape en étape, des plus tardives aux plus anciennes. Dans les dernières décennies de son histoire, après le retrait assyrien de la région, Juda était encore fortement présent dans la vallée de BéerShéva. Plus au sud-ouest, les trouvailles du Fer IIC à Qadesh-Barnéa indiquent que le fort continua de fonctionner après le retrait assyrien. Plusieurs indices démontrent que Juda y était encore actif à la fin du e VII siècle ; je fais ici référence aux ostraca hébreux qui conviennent au mieux à une date ca. 600 av. J.-C. 73 et à plusieurs ostraca d’Arad contemporains, qui semblent faire référence à des unités militaires du

royaume de Juda en mouvement dans le désert 74. Il y a donc suffisamment d’indices d’une bonne connaissance du désert dans le royaume de Juda, avant sa destruction. L’importance de Juda dans le réseau du commerce arabe dans le sud est manifeste dans l’inscription sabéenne, datée ca. 600 av. J.-C., qui fait référence aux « villes de Juda » 75. C’est au cours du « siècle assyrien » (entre ca. 730 et 630 av. J.-C.) qu’est avérée la plus importante activité de Juda dans le désert du sud. L’Assyrie transféra le tracé de la route du commerce arabe du Darb elGhazza, difficile à contrôler, isolé et aride, vers le plateau d’Édom et la vallée de Béer-Shéva, régions dominées par des royaumes vassaux, Édom 76 et Juda. La vallée de Béer-Shéva connut alors l’apogée de sa prospérité . Dans les villes et forts qui s’y trouvaient et, tout particulièrement, dans les marchés et les caravansérails, tel celui mis au jour à Aroer 77, marchands et membres de l’administration de Juda étaient en contact avec des Édomites et des Arabes du désert 78. Des informations concernant le sud pouvaient aussi avoir été transmises par les marchands arabes qui se rendaient à Jérusalem 79. Au-delà de la vallée de Béer-Shéva, les Assyriens contrôlaient les routes du commerce dans le désert à partir de quatre places fortes principales : Qadesh-Barnéa à l’est, une forteresse judaïte dont l’édification avait sans doute été ordonnée par l’Assyrie afin de sécuriser le mouvement des personnes et des denrées le long du Darb elGhazza ; les imposants forts assyriens de Ein Hatseva et Tell el-Khelleifeh, qui étaient probablement maintenus par des autochtones, édomites, arabes et peut-être aussi judaïtes 80 ainsi que le centre administratif impérial édifié sur un vaste podium à Buseirah. À Qadesh-Barnéa et, peutêtre aussi, à Ein Hazeva, les Judaïtes pouvaient rencontrer des autochtones et recueillir des informations sur les lieux habités et les routes des régions désertiques plus lointaines. Des Judaïtes pouvaient également avoir servi dans l’administration assyrienne et par conséquent avoir voyagé vers des lieux plus lointains, tels que Buseirah et Tell elKhelleifeh.

Cette connaissance du désert trouve son expression dans une série de références bibliques. La description par Ézéchiel de la frontière méridionale de la terre de Canaan (47,19 ; 48,28) se fonde sur deux lieux : Tamar à l’est et Qadesh-Barnéa à l’ouest. Il faut également remarquer la connaissance géographique détaillée, y compris celle d’une des routes du désert, exprimée dans la description de la frontière sud de la tribu de Juda en Jos 15,2-3. Cette connaissance du sud est également présente en Genèse 14 : ce chapitre est certes constitué de plusieurs couches rédactionnelles dont une partie est tardive (peut-être même hellénistique) 81, mais l’itinéraire de la campagne militaire qui mentionne El-Paran (Eilath), la Source du Jugement (Enmishpat, c’est-à-dire Qadesh) et Haçaçon-Tamar (vv. 6-7) se fonde sur des centres de contrôle assyriens dans le sud, bien connus 82. Cette connaissance s’exprime dans le récit de l’Errance, dans lequel Qadesh joue un rôle majeur (il est vrai pourtant que l’absence de Tamar pose problème). Il va sans dire que l’histoire du roi Édom refusant aux Israélites de traverser son territoire (Nb 20,14-21) e trouve aussi un ancrage dans la période allant de la fin du VIII au début du VIe siècle, le seul moment au cours de l’âge du Fer et de la période perse où un puissant royaume existait dans cette région. Cela me conduit aux années précédant 720 av. J.-C. et à ce que je considère comme la question la plus captivante : l’origine de l’importante tradition de l’Exode et de l’Errance au désert dans le royaume du Nord, telle qu’elle est exprimée dans les livres d’Osée et d’Amos 83. Le site-clef pour aborder cette question est Kuntillet-Ajrud, qui date de la première moitié du VIIIe siècle, du temps de Jéroboam II (788-747 av. J.-C.). Plusieurs éléments d’information semblent indiquer l’existence, pas plus tard que le IXe siècle, d’une route du commerce arabe passant à travers les terres 84. À son extrémité nord-ouest, l’ancien commerce arabe peut avoir rejoint la côte méditerranéenne le long de l’une des deux routes suivantes : par le plateau d’Édom (avant l’émergence d’un royaume territorial en Édom) ou par le Darb el-Ghazza. Cette dernière route était l’alternative la plus courte, mais la plus difficile, à cause de l’absence de

sources d’eau. Au IXe siècle, le commerce du désert était vraisemblablement dominé par Gath et Damas 85. Cette situation changea avec l’expansion de l’Assyrie sous Adad-Nirari III et le déclin de Damas e dans les dernières années du IX siècle. Le texte d’Adad-Nirari qui mentionne Édom 86 semble indiquer qu’il hérita de l’hégémonie de Damas dans le sud. L’Assyrie assura ses intérêts dans la région en renforçant le royaume du Nord en tant qu’allié/vassal. Vraisemblablement, dès le règne de Joas (dont la stèle de Tell el-Rimah indique qu’il payait tribut à AdadNirari), le royaume du Nord contrôla les territoires auparavant gouvernés par Damas. Si l’on considère 2 Rois 14,8-14 comme un récit historique, Israël avait également soumis Juda. La prospérité et la domination d’Israël dans le sud se renforcèrent du temps de Jéroboam II (voir, par exemple, 2 Rois 14,25). Les trouvailles de Kuntillet-Ajrud indiquent que, dans la première e moitié du VIII siècle, Israël dominait non seulement les basses terres du sud mais également la route du commerce dans le désert le long du Darb el-Ghazza et de son débouché. Inscriptions 87 et dessins 88 découverts sur le site indiquent l’importante implication d’un monarque israélite en ce lieu, très vraisemblablement Jéroboam II, au point qu’Ornan considère Kuntillet-Ajrud comme une étape royale de la route du commerce. Quelle 89 que soit la nature de l’activité de ce site , la principale question qui nous concerne ici est la mention dans une inscription de « Yhwh de Témân » et de « Yhwh de Samarie ». À Kuntillet-Ajrud, le culte semble avoir été voué à Yhwh de Témân, à savoir, Yhwh des régions arides du sud, et Ashérah 90. Témân est mentionné dans la Bible hébraïque en relation avec Édom, mais également avec Dedân dans le nord-ouest de l’Arabie (Jr 49,7-8). On doit noter les mots d’Habaquq « Eloah vient de Témân et le Saint du mont Parân » (Ha 3,3) 91. Yhwh de Samarie doit probablement être compris comme la divinité protectrice de la capitale du royaume du Nord 92. En fait, l’inscription fait, semble-t-il, référence à un temple de Yhwh à Samarie 93, auquel il est également possible qu’Os 8,6 fasse allusion 94. Le royaume du Nord

possédait deux mythes de fondation, le cycle de Jacob 95 et le récit de l’Exode et de l’Errance au désert 96. La couche ancienne des récits de Jacob traitait de la fondation des temples à Pénouël et Béthel. Cette tradition 97 était à l’évidence préservée dans ces deux sanctuaires . Existait-il un sanctuaire directement lié à la tradition de l’Exode et de l’Errance ? À moins que cette tradition ait été elle aussi vénérée à Béthel 98. Le temple de Yhwh à Samarie est peut-être une meilleure option 99. Le lien fort existant entre Kuntillet-Ajrud et le roi d’Israël ainsi que la découverte sur le site de l’inscription possiblement relative à l’Exode pourrait soutenir cette hypothèse. Dans ce contexte, il est clair que des habitants du royaume du Nord, y compris des marchands et des membres de l’administration de Samarie, fréquentèrent le site de Kuntillet-Ajrud en particulier, et le Darb el-Ghazza en général, l’extrémité du golfe d’Aqaba (Eciôn-Guèvèr) incluse. Là, ils doivent avoir été en contact avec des nomades locaux impliqués dans le commerce du sud. Par leur propre expérience et par ces contacts, ces Israélites ont pu recueillir des connaissances sur les lieux et itinéraires du désert « profond », principalement ceux situés entre l’extrémité du golfe d’Aqaba et la côte méditerranéenne. Il me faut maintenant aborder les toponymes qui, dans la Bible hébraïque, apparaissent uniquement dans la liste en Nombres 33 mais sont absents du récit en Exode-Nombres, des itinéraires du Deutéronome et de tout autre texte biblique. Il s’agit de Dofqa et Aloush (vv. 12-14) ; le groupe de 12 lieux de Ritma à Hashmona (vv. 18-30) ; Avrona (vv. 3335) ; Çalmona et Pounôn (vv. 41-43). À l’exception de Pounôn, aucun de ces toponymes n’a pu être identifié. Ils proviennent vraisemblablement d’une source différente, indépendante 100, liée au royaume du Nord et datant sans doute du VIIIe siècle. Faisaient-ils à l’origine partie d’un itinéraire de pèlerinage 101 ? Un tel itinéraire était-il en lien avec un récit du voyage d’Élie à l’Horeb, décrit en 1 Rois 19 102 ? Et cet itinéraire de pèlerinage était-il lié à Kuntillet-Ajrud ? Il est impossible de le dire. Une

chose est claire pourtant : ces sites n’avaient plus de pertinence pour les scribes de Juda au VIIe siècle. C’est le plus loin où l’on puisse remonter dans le temps pour tenter de répondre à la question posée au début de cet article où je me demandais quelles étaient les connaissances des auteurs bibliques sur le désert du sud et à quel moment et de quelle manière ils les ont acquises.

Les racines de la tradition de l’Exode et de l’Errance Il est clair qu’Osée et Amos n’ont pas « inventé » la tradition de l’Exode et de l’Errance au désert. Quelle était donc la source de cette tradition du e VIII siècle dans le royaume du Nord ? Jusqu’où peut-on remonter ? Toutes les tentatives pour identifier un « épisode en Égypte » au XIIIe siècle qui convienne au récit de l’Exode 103 sont vouées à l’échec 104, une explication plus nuancée doit donc être cherchée. En l’absence de preuve claire dans le texte biblique et dans les sources égyptiennes, autant que sur le plan archéologique, on est contraint de s’engager sur le terrain de la spéculation historique. Redford suggéra que la tradition de l’Exode trouvait sa source dans une mémoire de l’expulsion de Cananéens de la région du delta du Nil au e 105 XVI siècle av. J.-C. . Na’aman soutint, quant à lui, que le récit biblique préservait la mémoire de l’oppression infligée au peuple de Canaan par l’administration égyptienne à la fin du Bronze II-III, aux XIIIe et e 106 XII siècles . Bietak et Römer ont eux aussi cherché les racines de la tradition de l’Exode et de Moïse au Bronze Récent 107. Le problème de ces théories est qu’elles n’expliquent pas pourquoi cette mémoire fut préservée et promue dans le royaume du Nord. Les basses terres du sud (la Shéphélah et la plaine côtière méridionale) seraient une région plus

propice. La réminiscence d’une expulsion du delta du Nil à la fin du Bronze Moyen aurait dû être gardée dans la plaine côtière méridionale et la région de Besor. Des inscriptions hiératiques ainsi que d’autres trouvailles archéologiques indiquent que c’est dans les basses terres du e sud qu’au XII siècle l’oppression économique était la plus forte, alors que, dans le nord, le joug égyptien devait être particulièrement ressenti dans les vallées, autour de Megiddo et Beth-Shéân (la place forte égyptienne la plus imposante de la région), et non pas dans les hautes terres. Là, en effet, le contrôle égyptien était beaucoup plus faible, comme le démontrent les manœuvres de Labayu de Sichem et de ses fils, au cours de la période Amarna. Il n’y a pas d’indice de pression économique égyptienne dans cette région. En fait, à cette époque, les hautes terres, y compris les collines du nord de la Samarie, étaient peuplées de façon clairsemée. Enfin, il faut noter que la situation en Canaan au Bronze Récent n’apparaît dans aucun autre texte de la Bible hébraïque. En résumé, si l’on veut avoir une perspective complète sur l’origine de la tradition de l’Exode, il nous faut chercher un élément de mémoire spécifiquement lié aux hautes terres du nord ainsi qu’à leur population et qui soit chronologiquement plus proche de l’époque d’Osée et d’Amos. Dans plusieurs articles récents, j’ai évoqué le rôle tenu par la e XXII dynastie égyptienneet, tout spécialement, par la campagne militaire du pharaon Sheshonq Ier dans le déclin de la première entité territoriale nord israélite, centrée sur la région de Gabaôn-Gibéa au nord de Jérusalem, à la fin du Fer I 108. L’entité territoriale Gabaôn-Gibéa fut remplacée par le royaume du Nord, dont le centre se trouvait au début dans la région de Sichem-Tirça. D’ailleurs, la création de cette entité peut elle aussi avoir été liée à la campagne de Sheshonq Ier 109. La version de la LXX de 1 Rois 12, « l’histoire alternative » de la division de la Monarchie unifiée, fait allusion à une possible implication de l’Égypte dans l’histoire de Jéroboam Ier, le fondateur du royaume du Nord. Les chercheurs sont divisés sur l’importance de ce texte, sur la possibilité qu’il reflète une source pré-deutéronomiste 110 ou soit simplement un midrash tardif 111.

Van der Toorn et Albertz suggèrent que le récit de l’Exode peut avoir eu une fonction de mythe fondateur ou de récit d’action de grâce sous le règne de Jéroboam Ier 112. Des mémoires de ces événements ont pu être préservées dans les régions de Béthel et de Sichem. Ces mémoires peuvent avoir été intégrées à des traditions plus anciennes relatives à la délivrance du joug de l’Égypte par Yhwh, qui étaient originaires des basses terres et furent « importées » dans les hautes terres lors de l’expansion d’Israël dans 113 les vallées du nord . Si, en effet, « l’histoire alternative » de la division de la Monarchie unifiée est fondée sur une source pré-deutéronomiste, et si une figure de Moïse existait déjà à cette phase ancienne 114, une motivation supplémentaire peut avoir joué en faveur de l’adaptation de cette tradition : la similitude des thématiques entre la biographie de Moïse et celle de Jéroboam Ier 115. La tradition de la délivrance de l’Égypte devint ainsi l’un des deux mythes fondateurs d’Israël. Aux premiers temps du royaume du Nord, c’était encore une tradition orale, et l’on ne peut savoir si, dans cette phase de formation, elle incluait un élément lié à l’Errance dans le désert. Il est également impossible de dire si, à ce moment, existait déjà un « lien » entre le cycle de Jacob et le récit Égypte-Exode.

Synthèse Je résumerai donc mon hypothèse sur le développement de la tradition de l’Exode et de l’Errance, en partant maintenant des périodes les plus anciennes et en poursuivant vers les plus récentes, tout en insistant sur une mémoire culturelle de longue durée 116, plutôt que sur un événement ponctuel, spécifique. Le début est vague et désormais non-traçable. Les mémoires des relations orageuses entre l’Égypte et la population de Canaan entre le XVIe et le Xe siècle peuvent s’être accumulées de manière graduelle et avoir

évolué en une forte tradition de la délivrance du joug égyptien parmi les habitants de la région. Les racines de cette tradition se trouvent vraisemblablement dans les basses terres ; au Xe siècle, cette tradition fut « importée » dans la partie nord des hautes terres centrales, où elle devint l’un des deux mythes-chartes du royaume d’Israël. La première connaissance intime des habitants du royaume du Nord avec le désert du sud se fit dans la première moitié du VIIIe siècle, en relation avec l’importante activité des rois d’Israël le long de la route du commerce arabe du Darb el-Ghazza. Cette période peut servir de contexte aux premiers itinéraires du désert décrits dans la Bible hébraïque, ainsi que pour les matériaux relatifs à l’Errance et à l’Exode dans les livres d’Osée et d’Amos. La tradition de l’Exode et de l’Errance au désert « migra » vers Juda après 720 av. J.-C. 117 L’archéologie atteste une croissance spectaculaire de Juda au Fer IIB, en termes de nombre de localités, de leur taille et de leur population. Cela ne peut être expliqué par une croissance naturelle et doit refléter un mouvement migratoire vers le royaume du Sud, en provenance d’Israël, après la chute de ce royaume 118. Ces Israélites apportèrent avec eux, en Juda, des traditions du Nord, dont le récit de l’Exode et de l’Errance au désert. Ce récit fut développé et transformé du temps de la domination de Juda par l’Assyrie, lorsque les Judaïtes connurent à leur tour, directement, les diverses contrées du désert. Il semble que cette phase soit également caractérisée par l’addition d’éléments concernant la vie de Moïse et l’insertion d’une idéologie anti-impérialiste 119. Le retrait assyrien de la région au cours de la deuxième moitié du e VII siècle provoqua des changements dans la situation géopolitique locale. Une grande partie de la zone précédemment dominée par l’Assyrie fut dès lors contrôlée par la XXVIe dynastie égyptienne. Juda et l’Égypte, ayant l’un et l’autre leurs propres objectifs en termes d’expansion territoriale et d’idéologie, se trouvèrent dès lors au bord de la collision. À la fois fable sur le passé et prédiction de l’avenir, le récit de l’Exode et, tout particulièrement, la victoire de Yhwh sur le pharaon d’Égypte, servit

grandement l’idéologie de Juda, sous le règne du roi Josias. Certaines réalités égyptiennes propres à l’époque de la XXVIe dynastie, quand des Judaïtes vivaient dans le delta du Nil, peuvent, elles aussi, avoir influencé 120 l’évolution de la mise en forme de la tradition de l’Exode . Les réalités géopolitiques qui permirent l’accès à la connaissance du désert par les scribes de Juda disparurent à la fin de l’âge du Fer. Toutes les grandes forteresses du désert étaient à l’abandon et Édom déclina après 560 av. J.-C. Les scribes sacerdotaux qui, aux époques postexiliques, vivaient à Jérusalem et ailleurs ne connaissaient pas les régions arides du sud. Toutefois le récit de l’Exode et de l’Errance continua à se développer. Les compilations successives, les élaborations et rédactions à la période perse sont de caractère purement littéraire, mais elles résonnaient parfaitement avec les préoccupations de l’époque, à savoir le retour de l’exil en Mésopotamie, vu comme un exode 121. Le travail des auteurs sacerdotaux donna à la tradition de l’Exode sa forme finale et la para d’une importance majeure dans la tradition juive et occidentale, bien audelà de ses modestes débuts dans les basses terres de Canaan puis dans les hautes terres du nord du royaume d’Israël. La tradition de l’Exode et de l’Errance au désert est par conséquent le résultat final de nombreux siècles d’accumulation et de développements, oraux puis écrits, et d’une histoire rédactionnelle complexe éclairée par les diverses transformations des réalités géopolitiques et historiques.

6

La révélation du nom divin à Moïse et la construction d’une mémoire sur les origines de la rencontre entre Yhwh et Israël

Thomas Römer

L’Exode, Yhwh et Moïse

Il ne fait guère de doute que la tradition de l’Exode se trouve au cœur même de la « mémoire historique » de la Bible hébraïque. Elle introduit par exemple le Décalogue, où Yhwh se présente comme le dieu qui a fait sortir Israël d’Égypte : C’est moi Yhwh ton Dieu qui t’ai fait sortir du pays d’Égypte, d’une maison de servitude. ָ ‫תי‬ ָ ‫הי‬ ‫בִדים‬ ָ ‫ע‬ ֲ ‫בּית‬ ֵ ‫מ‬ ִ ‫צרי ִם‬ ְ ‫מ‬ ִ ‫ארץ‬ ֶ ‫מ‬ ֵ ‫ך‬ ִ ‫צא‬ ֵ ‫שׁר הוֹ‬ ֶ ‫א‬ ֲ ‫ך‬ ֶ ֹ ‫אל‬ ֱ ‫כי י ְהָוה‬ ִ ‫( אָנ‬Ex 20,2 = Dt 5

Il est intéressant de noter que Yhwh apparaît ici comme le seul protagoniste de l’Exode, sans aucune mention de Moïse. Cela est également le cas pour d’autres allusions au récit de l’Exode. Ledit « credo historique », en Dt 26,5-9, présente lui aussi Yhwh comme l’auteur de l’Exode. De même, des textes comme Amos 2,10 et les Psaumes présentent, à ce propos, un intérêt particulier. À l’inverse des traditions sur les patriarches, la tradition de l’Exode est 1 au cœur même des « rétrospectives historiques » dans les Psaumes . On peut ainsi observer que Moïse n’est mentionné que dans quelques psaumes tardifs : Ps 77,21 et 105,26. En Ps 99,6, Moïse et Aaron apparaissent en tant que prêtres ; en Ps 103,7, Moïse est le médiateur de la volonté de Yhwh et en 106,16 et 23, il est mentionné dans le contexte de la révolte du peuple dans le désert (au verset 16, avec Aaron). Les autres psaumes qui évoquent l’Exode ne mentionnent pas Moïse, même ceux qui font allusion aux plaies, comme Ps 78,43-51 ; 111,4 (?) ; 135,8-9 (notamment la destruction des premiers-nés d’Égypte), et 136,10 (similaire à 135,8-9) ainsi qu’aux miracles de la mer des Joncs (notamment l’annihilation de l’armée d’Égypte : Ps 76,7 ; 78,13 ; et 136,15 ; le recul de la mer : Ps 114,3-6 ; le partage de la mer : Ps 77,20 ; 78,12 ; 136,13-14). Moïse est également absent des allusions générales à l’Exode que l’on trouve en Ps 80,9-10. Le Psaume 135 lie la tradition de l’Exode à la conquête du territoire transjordanien sans mentionner Moïse ou la conquête de Canaan. Dans l’allégorie du Psaume 80, l’Exode est lié à l’implantation d’Israël sur la terre (de même qu’à la perte de cette terre) ; de manière semblable, Ps 111,4-6 associe les miracles de Yhwh en Égypte à l’évocation de l’alliance « éternelle » (avec les Patriarches ? au Sinaï ?) et la conquête de la terre. Les très rares mentions de Moïse dans les allusions à l’Exode sont confirmées par ses apparitions très sporadiques en dehors de l’Histoire deutéronomiste (ainsi que dans les livres des Chroniques et d’Esdras-Néhémie) : seuls Is 63,11-12 et Mi 6,4 le mentionnent en relation avec l’Exode (les autres rares mentions en Jr 15,1 ; Ml 3,22 et Dn 9,11.13 sont liées à la loi ou à sa fonction d’intercesseur). Cette

observation semble indiquer qu’il existait peut-être une tradition de l’Exode sans Moïse. Le récit de 1 Rois 12 pourrait également soutenir cette idée. Selon cet er épisode, Jéroboam I construisit deux temples, à Béthel et Dan, où il fit placer des statues de taureaux : « Après avoir délibéré, il fit deux veaux d’or et dit au peuple : « Cela fait suffisamment de temps que vous êtes montés à Jérusalem. Israël, voici tes dieux qui t’ont fait monter du pays d’Égypte. » Il installa l’un à Béthel et il mit l’autre à Dan. » (1 R 12,28-29) : ָ ‫עלוּ‬ ָ ‫הי‬ ‫צרי ִם‬ ְ ‫מ‬ ִ ‫ארץ‬ ֶ ‫מ‬ ֵ ‫ך‬ ֱ ‫ה‬ ֶ ‫שׁר‬ ֶ ‫א‬ ֲ ‫אל‬ ֵ ‫שׂר‬ ְ ִ ‫ך י‬ ֶ ֹ ‫אל‬ ֱ ‫הנּ ֵה‬ ִ Le pluriel, qui apparaît également dans l’épisode du veau d’or en Ex 32,4, interpelle. Même si le texte mentionne deux sanctuaires, il est clair que les taureaux ou les veaux ne représentent pas différentes divinités, mais le dieu national. Faut-il comprendre ce pluriel comme une allusion au dieu national et à sa parèdre Ashéra, comme l’a suggéré E. A. Knauf 2 ? Pourtant, on ne trouve pas ailleurs d’indications claires associant Ashéra à l’Exode ; cette thèse reste donc très spéculative. À moins que ce pluriel ne fasse allusion à Yhwh dans ses diverses manifestations : le Yhwh de Béthel et le Yhwh de Dan ? La solution la plus simple serait de considérer ce pluriel comme polémique, comme une transformation d’une formule cultuelle originelle. Une comparaison de 1 R 12,8 avec le début du Décalogue montre que les deux formules sont très similaires. S’il y avait un singulier originel en 1 R 12,28, la similarité serait encore plus importante. Les rédacteurs de 1 R 12,28 qui opéraient dans le royaume de Juda voulaient apparemment convaincre leur auditoire que le culte nordiste à Béthel et Dan (et ailleurs) était un culte « polythéiste ». La mention de Dan en 1 Rois 12 intrigue également. Selon Eran Arie, ce n’est qu’au VIIIe siècle que Dan fut intégré au territoire d’Israël 3. Dans ce cas, il est possible que 1 Rois 12 soit une rétroprojection datant de l’époque de Jéroboam II. On pourrait même se demander si la figure de Jéroboam Ier, dans son intégralité, ne serait pas une création fondée sur la

figure du roi Jéroboam II au VIIIe siècle. Une telle spéculation, toutefois, dépasse le cadre de cet article. Pour en revenir à Yhwh et à l’Exode, il apparaît clairement que, au e moins à partir du VIII siècle, Yhwh était vénéré en Israël (mais probablement pas encore en Juda) en tant que divinité ayant fait sortir son peuple d’Égypte. Cependant, dans les textes bibliques qui peuvent être datés avec certitude de l’époque monarchique, il n’est fait aucune mention de Moïse ; nous laisserons pour l’instant de côté les textes du Pentateuque, dont la datation est particulièrement complexe. La construction de l’Exode comme « véritable » mémoire nationale peut être observée au chapitre 12 du livre d’Osée. Il est possible que ce chapitre révèle, si ce n’est la voix du prophète lui-même, du moins la situation du royaume du Nord dans la deuxième moitié du VIIIe siècle, bien que des dates bien plus tardives aient aussi été suggérées 4. Comme l’a montré A. de Pury, ce texte oppose les traditions de Jacob à celles de 5 l’Exode . Dans ce texte, Jacob est décrit de manière très négative : il a supplanté son frère et est devenu un « Cananéen », un marchand aux balances trompeuses qui aime opprimer (Os 12,4.8). Même son combat avec Dieu est, contrairement à Gn 32, rapporté de façon différente et négative (12,4-5). Dès le début de ce poème, il devient évident que « Jacob » sera jugé par Yhwh (12,3). Alors que Jacob est mis en relation avec une divinité nommée « Elohim » ou « El » 6, Yhwh se présente comme le Dieu du pays d’Égypte : (Os 12,10) ָ ‫הי‬ ‫צרי ִם‬ ְ ‫מ‬ ִ ø‫ארץ‬ ֶ ‫מ‬ ֵ ø‫ך‬ ֶ ֹ ‫אל‬ ֱ øø‫י ְהָוה‬ø‫כי‬ ִ ‫ְואָנ‬ Encore une fois cette déclaration rappelle le Décalogue, bien que l’expression « qui t’ai fait sortir » soit absente ; Yhwh est décrit comme une divinité dont l’origine est liée à l’Égypte. En 12,13-14, la fuite de Jacob en Aram et sa « servitude » en échange d’une femme sont opposées au prophète de Yhwh qui mène Israël hors d’Égypte et le protège : ‫מר‬ ָ ‫שׁ‬ ָ ø‫שׁה‬ ָּ ‫א‬ ִ ‫ב‬ ְ ‫וּ‬ø‫שׁה‬ ָּ ‫א‬ ִ ‫בּ‬ ְ ø ‫אל‬ ֵ ‫שׂר‬ ְ ִ ‫י‬ø‫בד‬ ֹ ‫ע‬ ֲ ַ ‫ַויּ‬ø‫ארם‬ ֲ ø‫שׂדה‬ ְ ø‫עקב‬ ֲ ַ ‫י‬ø‫ברח‬ ְ ִ ‫ַויּ‬ ‫מר‬ ָ ‫שׁ‬ ְ ִ ‫ביא נ‬ ִ ָ ‫בנ‬ ְ ‫צרי ִם וּ‬ ְ ‫מּ‬ ִ ‫מ‬ ִ ‫אל‬ ֵ ‫שׂר‬ ְ ִ ‫י‬-‫את‬ ֶ ‫לה י ְהָוה‬ ָ ‫ע‬ ֱ ‫ה‬ ֶ ‫ביא‬ ִ ָ ‫בנ‬ ְ ‫וּ‬

Jacob s’enfuit aux plaines d’Aram et Israël servit pour une femme et pour une femme il garda les troupeaux. Mais par un prophète, Yhwh a fait monter Israël d’Égypte et par un prophète Israël a été gardé. La mention du prophète est anticipée au verset 11, qui affirme que Yhwh révèle ses volontés par l’intermédiaire de ses prophètes. Il est généralement admis que le prophète mentionné au verset 14 est Moïse, mais on note qu’il n’est pas nommé. Pourquoi en est-il ainsi ? Probablement parce que le groupe prophétique à l’œuvre derrière la rédaction d’Osée 12 cherchait à se légitimer en affirmant qu’il existait déjà une médiation prophétique du temps de l’Exode. En résumé : Osée 12 peut être compris comme un texte polémique contre la tradition de Jacob. Contre la tentative d’établir la tradition de Jacob comme mythe d’origine national du royaume du Nord (Os 12,4-5 fait allusion au changement de nom de Jacob en « Israël »), l’auteur d’Osée 12 affirme que Yhwh est lié à l’Égypte et non à ce Patriarche. Cela signifie également que la relation entre Israël et son dieu n’était pas « héréditaire » ou médiatisée par un Patriarche, mais plutôt le résultat d’une rencontre, et que le médiateur de cette relation est un prophète. Osée 12 représente peut-être l’une des premières tentatives de mettre en exergue le rôle de Moïse dans la tradition de l’Exode. Il est intéressant de noter que le récit de l’Exode dans le Pentateuque met lui aussi en avant l’idée que Yhwh n’était connu des Hébreux qu’en relation avec l’Exode et qu’il érige, lui aussi, Moïse en prophète.

Exode 3-4 et 6 et leurs fonctions dans les récits sacerdotaux et non-sacerdotaux de l’Exode : divergences et convergences

Dans le débat actuel sur la formation de la Torah, le consensus traditionnel qui était construit sur l’hypothèse documentaire s’est écroulé. En Europe, la plupart des chercheurs ont abandonné le paradigme de J. Wellhausen, alors qu’en Amérique du nord l’hypothèse documentaire traditionnelle est encore populaire. Mais ceux que l’on nomme les « Néodocumentaristes » ont développé une variante qui n’a pas grand-chose à voir avec le modèle traditionnel 7. Dans cette situation difficile, la distinction entre les textes sacerdotaux (P) et non-sacerdotaux (non-P) est apparemment l’un des rares résultats de l’analyse scientifique du Pentateuque sur lesquels la plupart des chercheurs s’accordent. Toutefois, la question de savoir si, à l’origine, P était un document indépendant ou conçu comme une élaboration rédactionnelle fondée sur un récit plus ancien fait encore débat. De plus, de nombreux textes « non-P » (traditionnellement J/E) sont désormais considérés comme post-P. C’est le cas également des deux variantes de la rencontre de Yhwh avec Moïse (en Exode 3-4 et 6) dans laquelle Yhwh le charge de mener les Hébreux hors d’Égypte, en terre de Canaan. Récemment K. Schmid et d’autres chercheurs ont soutenu qu’Exode 34 doit être compris comme un texte unifié, écrit par un même auteur qui connaissait le texte P de la révélation du nom divin à Moïse ; il souhaitait remettre en question l’idée que la révélation divine du nom divin avait eu lieu en Égypte en la transférant à la « montagne de Dieu » 8. D’après Schmid, la déclaration de Yhwh selon laquelle il aurait entendu le cri des Hébreux en 3,7 est prise d’un passage P en Ex 6,2-8. En effet, le cri des Israélites apparaît en Ex 3,7-9 (‫ )צעקה‬et en Ex 2,23 (‫)ויזעקו‬. Mais cela ne prouve pas que l’auteur d’Exode 3-4 avait une connaissance préalable du récit P d’Exode 6. L’idée selon laquelle les Israélites crièrent sous l’oppression apparaît également dans le « credo historique » deutéronomiste en Dt 26,7 (‫עק‬ ַ ‫צ‬ ְ ִ ‫ )ַונּ‬avec la même orthographe qu’en Exode 3 (‫ צעק‬au lieu de ‫ זעק‬en Ex 2,23). Il n’est donc pas nécessaire de postuler une dépendance littéraire d’Exode 3-4 par rapport aux textes P

d’Exode 2,23-35 et 6. Il semble également difficile de soutenir que Exode 3-4 soit fondamentalement un texte uniforme, écrit par un même auteur. L’analyse littéraire démontrera que la version non-P de l’appel de Moïse fut révisée et amplifiée à plusieurs reprises. Je préfère par conséquent l’option traditionnelle, qui date la première édition d’Exode 3-4 légèrement plus tôt que la variante P d’Exode 6,2-8 9. Dans le cadre de cet article, il m’est impossible de traiter de tous les problèmes littéraires de ces chapitres. Je me concentrerai sur la question de la révélation du nom divin et sur la construction de la figure de Moïse dans ces deux textes. a) Exode 3 : Moïse le prophète et Yhwh le Dieu inconnu Dans la forme actuelle du livre de l’Exode, Ex 3,1-4,18 constitue clairement une unité, encadrée par la mention de Jéthro, le beau-père de Moïse, en 3,1 et 4,18, et par l’arrivée de Moïse à la montagne de Dieu suivie de son retour. Il existe une étrange répétition entre 4,18 et 4,19. En 4,18, Moïse dit à Jéthro qu’il doit retourner en Égypte voir ses frères et Jéthro lui répond d’aller en paix. En 4,19, en revanche, on lit : « Yhwh dit à Moïse en Madiân : “Va, retourne en Égypte, car ils sont morts, tous ceux qui cherchaient à te faire périr” ». Ce verset ne semble pas avoir de sens après 4,1, étant donné que Moïse a déjà annoncé à Jéthro son intention de se rendre en Égypte. Mais le verset 4,19, quant à lui, concorde parfaitement avec le début d’Exode 2,23 : « Au cours de cette longue période, le roi d’Égypte mourut » (2,23aßb-25 sont généralement considérés comme faisant partie de P). Si on lit 2,23aα avec 4,19, on peut conclure, comme le fit déjà Wellhausen 10, qu’il existait un récit plus ancien dans lequel fut inséré ultérieurement le passage de l’appel de Moïse. Donc, apparemment, le récit originel de Ex 3,1-4,18, ne faisait pas partie de la version la plus ancienne de l’histoire de Moïse. Comme l’affirme William Propp dans son commentaire, « Exode 3-4 est un passage clef pour l’analyse documentaire de la Torah » 11. Cependant, il a toujours été difficile de reconstruire deux

récits parallèles dans ce texte 12. En ce qui concerne l’usage des noms divins yhwh et ’elohîm, il faut noter qu’il existe une troisième variante ha-’elohîm (3,6.11-13). L’expression « ha-’elohîm » contient souvent l’idée d’un Dieu « mystérieux » ou « inconnu », et son emploi récurrent en Exode 3 est sans doute lié à la révélation du nom divin. Cette expression apparaît jusqu’en Ex 3,13, où Yhwh dévoile à Moïse son identité. Dans sa forme absolue, cette expression relativement rare, comparée à ’elohîm, n’apparaît plus dans le récit de l’Exode jusqu’en Exode 18, le récit de la visite de Jéthro à Moïse et de son sacrifice à Yhwh. Cela indique déjà une relation entre Exode 3 et Exode 18. Il existe une sorte de redondance dans les versets 7-10, mais cette redondance souligne l’importance du discours divin qui, comme cela a parfois été signalé, possède une structure en chiasme : ABCB’A’. À Yhwh voyant l’oppression de son peuple (‫מּי‬ ִ ‫ע‬ ַ ) en Égypte (‫צרי ִם‬ ְ ‫מ‬ ִ ‫בּ‬ ְ ) au v. 7a correspond la mission de Moïse de mener le peuple de Yhwh (‫מּי‬ ִ ‫ע‬ ַ ) hors d’Égypte (‫צרי ִם‬ ְ ‫מּ‬ ִ ‫מ‬ ִ ), au v. 10. Le motif de Yhwh entendant (‫תּי‬ ִ ‫ע‬ ְ ‫מ‬ ַ ‫שׁ‬ ָ ) le cri du peuple (‫תם‬ ָ ‫עָק‬ ֲ ‫צ‬ ַ ) au v. 7 est repris au v. 9 par l’affirmation que le cri d’Israël ( ‫אל‬ ֵ ‫שׂר‬ ְ ִ ‫י‬ø-ø‫בּנ ֵי‬ ְ ø‫עַקת‬ ֲ ‫צ‬ ַ ) est arrivé (‫בּאָה‬ ָ ) jusqu’à Yhwh. Au centre, au v. 8, on trouve la promesse du transfert d’Israël de « ce pays » vers un bon et vaste pays, ruisselant de lait et de miel. Il est difficile de concevoir qu’une structure aussi claire soit le résultat accidentel de l’assemblage de deux documents différents. Le verset 10 est lié au verset suivant parce qu’il inaugure le mandat de Moïse, construit comme un appel prophétique. Le plus proche parallèle d’Ex 3,10-12 est l’appel de Jérémie en Jr 1,4-10 13. Les deux passages contiennent les éléments suivants : Envoi

Exode 3

Jérémie 1

v. 10 : Va, je t’enverrai v. 7 : Tu iras partout où ָ ‫ח‬ ‫ך‬ ֲ ‫ל‬ ָ ‫שׁ‬ ְ ‫א‬ ֶ ‫כה ְו‬ ָ ‫ל‬ ְ je t’enverrai

ָ ‫ח‬ ‫ך‬ ֲ ‫ל‬ ָ ‫שׁ‬ ְ ‫א‬ ֶ ø‫שׁר‬ ֶ ‫א‬ ֲ -ø ‫כּל‬ ָ ø ְ ‫ל‬ ‫על‬ ַ ø‫ך‬ ֵ ‫תּ‬ ֵ Objection

v. 11 : Qui suis-je pour v. 6 : Je ne sais pas parler aller car je suis un enfant

Promesse d’assistance

v. 12aα : Je serai avec v. 8 : je suis avec toi ָ ‫תּ‬ toi ‫אנ ִי‬ ֲ ‫ך‬ ְ ‫א‬ ִ ְ ‫מּ‬ ‫ך‬ ָ ‫ע‬ ִ ‫הי ֶה‬ ְ ‫א‬ ֶ

Signe

v. 12aβb : voici le signe qui te montrera que c’est moi qui t’ai envoyé […] vous servirez Dieu sur cette montagne

v. 9 : Alors Yhwh tendit la main et me toucha la bouche […]

Moïse apparaît comme le prophète grâce auquel Yhwh mènera son peuple hors d’Égypte, en accord avec Osée 12. Ex 3,10-13 exprime la même idée que Dt 18,15-20, un passage qui d’ailleurs présente aussi des parallèles avec Jr 1,4-10. Par conséquent, avec E. Blum et d’autres, il semble approprié de qualifier le récit originel en Exode 3 de « composition D » 14 et de le dater du VIe siècle av. J.-C. Après l’appel (prophétique) de Moïse, le récit aborde la question de l’identité de la divinité qui est sur le point de le mandater. Cette question est déjà posée au verset 6 dans la scène du buisson ardent avec l’autoprésentation de la divinité « Je suis le Dieu de ton père » suivie de l’apposition « le Dieu d’Abraham, le Dieu d’Isaac et le Dieu de Jacob ». Cela est assez singulier sur le plan grammatical et se trouve déjà modifié dans le Pentateuque samaritain et dans certains manuscrits grecs. L’apposition semble la tentative postérieure de créer un lien avec les traditions des Patriarches 15.

On peut se souvenir ici d’une remarque faite par R. Rendtorff, selon laquelle la terre promise par Dieu aux Israélites a été introduite en Exode 3 comme s’il s’agissait d’une terre totalement inconnue 16. Il est intéressant de noter qu’il n’est pas dit qu’elle a été promise aux Patriarches, comme c’est le cas dans le récit P de l’appel de Moïse en Exode 6,8. Cela pourrait indiquer qu’il n’y avait aucune mention des Patriarches dans le récit originel d’Exode 3. Après la deuxième objection émise par Moïse (il ne connait pas le nom du dieu ancestral au nom duquel il devrait parler aux Israélites) et après que Yhwh se fut révélé (ou non) par l’expression abondamment commentée ‫הי ֶה‬ ְ ‫א‬ ֶ ø‫הי ֶה‬ ְ ‫א‬ ֶ ø ‫שׁר‬ ֶ ‫א‬ ֲ « Je serai qui je serai », le verset suivant identifie de nouveau Yhwh comme le « Dieu d’Abraham, Isaac et Jacob ». Des arguments forts conduisent à penser que ce verset n’appartient pas au récit originel. Tout d’abord ce discours est introduit après le v. 14 par « wayyomer ‘od ’elohîm ». Comme en Gn 22,15, ‘od (« encore ») indique que ce qui suit est une addition. Cette addition, que l’on peut comparer au verset 13 du Ps 135, pourrait être comprise comme une tentative de créer un parallèle avec l’idée sacerdotale exprimée en Exode 6,2 selon laquelle même si Yhwh n’était pas apparu aux Patriarches sous son vrai nom, il est sans conteste le dieu des Patriarches. Si l’on considère que le v. 15 est une addition, alors la transition entre le v. 14 et le v. 16 est encore plus fluide. Il n’y aurait alors qu’un seul discours divin, qui débute par le jeu de mot sur le tétragramme, celui-ci étant finalement révélé en deux étapes (’ehyê, puis Yahweh). S’il est vrai que les noms des Patriarches aux w. 6 et 15 appartiennent à une révision du texte originel, on peut se demander s’il n’en est pas de même pour le v. 16 17. Je reconnais que cela pourrait être suspecté de raisonnement circulaire ; la décision dépend bien sûr d’un modèle d’ensemble sur la composition. On peut toutefois remarquer que la mention des noms des patriarches est séparée de la forme ’elohê ’abotêka par le verbe et n’intervient que relativement tard. Cela pourrait indiquer

que ces mots furent d’abord inscrits dans la marge du rouleau, avant qu’un copiste ne les introduise dans le texte. Dans le cadre limité de cette contribution, il m’est impossible de démontrer que le récit originel s’achevait en 3,17 suivi de 4,18. Il contenait approximativement 3,1-2*(sans le mal’ak ?).3-4.6aαb.714.16aαb.17 et 4.18 18. L’objectif du récit originel était double : légitimer le statut de Moïse en tant que proto-prophète et reconnaître que la connaissance du nom divin est liée à l’Exode. Comme l’ont fait remarquer 19 F. Michaeli, K. Berge, Schmid et d’autres, le récit partage avec Exode 6 l’idée que la révélation du nom divin Yhwh est quelque chose de nouveau. Dans le texte originel, la divinité se présentait à Moïse comme le dieu des Patriarches (v. 6) et Moïse identifiait ce dieu avec la divinité ancestrale des Israélites. Le fait que les dieux ancestraux ne portent pas de nom personnel est attesté par des textes d’Ougarit qui mentionnent souvent ’ilu 20 ’ibi (« dieu du père ») . L’auteur d’Exode 3* cherche à souligner que ce dieu inconnu est en fait la divinité Yhwh. Une démarche similaire peut être observée en Exode 6. Avant d’aborder ce texte, mentionnons encore qu’Exode 3 ne faisait pas initialement partie de l’histoire la plus ancienne sur l’Exode et Moïse, dans laquelle il a été inséré. Le plus ancien récit débutait par une brève description de la difficile situation des Hébreux en Égypte ainsi que par la naissance de Moïse et son « adoption » par la fille du Pharaon. L’histoire de sa naissance et de son abandon indique une dépendance littéraire avec la tradition de la naissance de Sargon, le légendaire fondateur de l’empire assyrien, comme cela a souvent été noté 21. Sargon et Moïse sont l’un et l’autre abandonnés par leurs mères, toutes deux liées d’une certaine façon à la prêtrise. La mère de Sargon est une prêtresse et celle de Moïse est la fille de Lévi, l’ancêtre de la tribu des prêtres d’Israël. Leurs pères n’interviennent pas. Les enfants sont placés dans un panier, flottant à la dérive sur une rivière, avant d’être découverts et adoptés. Dans les deux cas, il s’agit d’une adoption royale : Sargon est « aimé » par Ishtar et Moïse devient le fils de la fille du Pharaon. Bien

qu’elle se rapporte à un roi assyrien du troisième millénaire, l’histoire de Sargon a été rédigée sous Sargon II, son homonyme, à la fin du e VIII siècle ; elle contient des formes orthographiques et des expressions 22 idiomatiques néo-assyriennes uniquement attestées à cette période . Par conséquent, l’histoire de Moïse, modelée sur ce récit, ne peut être datée avant le VIIe siècle av. J.-C. Exode 2 ne présuppose aucune connaissance de Moïse, de ses origines ou de son nom ; tout doit être expliqué. Il est donc tentant de comprendre la première mise par écrit du récit sur Moïse (qui ne peut être reconstruit en détail) comme une réaction à l’idéologie royale néo-assyrienne, développée à la cour de Josias. Le contexte assyrien est ּ ְ ‫עכ‬ également visible dans la mention des « villes-entrepôts » (‫רניֹות‬ ‫ס‬ ָ ְ )‫מ‬ ִ 23 en Ex 1,11, qui utilise un mot emprunté de l’assyrien, maškanu . Si un contexte du VIIe siècle, pour le plus ancien récit de Moïse, est plausible, on peut supposer que l’insertion de Moïse dans le récit et sa construction comme figure royale sont liées à la réécriture en Juda d’une tradition plus ancienne en provenance du Nord. Mais abordons maintenant Exode 6,2-8. b) Exode 6,2-8 : Le nom inconnu de Yhwh et la théorie de la révélation divine Le récit P de la révélation du nom divin, en Exode 6,2-8, présente une 24 structure claire : v. 2

‫אנ ִי י ְהָוה‬ ֲ C’est moi Yhwh

v. 3



ø‫צחק‬ ְ ִ ‫י‬ø-ø‫ אל‬ø‫ברהם‬ ְ ‫אַ‬øø ‫אל‬ ֶ øø‫ארא‬ ֵ ‫ָו‬ ‫עקב‬ ֲ ַ ‫י‬ø-ø‫אל‬ ֶ ‫ו‬ Je suis apparu à Abraham, à Isaac et à Jacob

v. 4



ø‫הם‬ ֶ ‫ל‬ ָ ø‫תת‬ ֵ ‫ל‬ ָ ø‫תּם‬ ָ ‫א‬ ִ ø‫תי‬ ִ ‫בּרי‬ ְ -‫את‬ ֶ ø‫תי‬ ִ ‫הִקמ‬ ֲ ø J’ai établi mon alliance avec eux, pour leur donner le pays de Canaan

v. 5



øø‫צרי ִם‬ ְ ‫מ‬ ִ ø‫שׁר‬ ֶ ‫א‬ ֲ ø ‫אל‬ ֵ ‫שׂר‬ ְ ִ ‫י‬ø‫בּנ ֵי‬ ְ ø‫אַקת‬ ֲ ַ ‫נ‬ø‫תם‬ ָ ‫א‬ la plainte des Israélites que l’Égypte réduit en esclavage



‫תי‬ ִ ‫בּרי‬ ְ -‫את‬ ֶ ø‫אזְכּר‬ ֶ ‫ָו‬ et je me suis souvenu de mon alliance

v. 6

‫אנ ִי י ְהָוה‬ ֲ C’est moi Yhwh

ø‫בל ֹת‬ ְ ‫ס‬ ִ ø‫חת‬ ַ ‫תּ‬ ַ ‫מ‬ ִ ø‫כם‬ ֶ ‫ת‬ ְ ‫א‬ ֶ ø‫תי‬ ִ ‫צא‬ ֵ ‫והוֹ‬ø‫צרי ִם‬ ְ ‫מ‬ ִ je vous ferai sortir des corvées de l’Égypte ‫כם‬ ֶ ‫ת‬ ְ ‫א‬ ֶ ‫תּי‬ ִ ‫ל‬ ְ ‫גאַ‬ ָ ‫ְו‬

Je vous rachèterai v. 7



‫עם‬ ָ ‫ל‬ ְ ‫לי‬ ִ ‫כם‬ ֶ ‫ת‬ ְ ‫א‬ ֶ ‫תּי‬ ִ ‫ח‬ ְ ‫לַק‬ ָ ‫ְו‬ Je vous prendrai pour moi comme peuple



‫הים‬ ִ ֹ ‫לאל‬ ֵ ‫כם‬ ֶ ‫ל‬ ָ ‫תי‬ ִ ‫הי ִי‬ ָ ‫ְו‬ et je serai pour vous Dieu

‫אנ ִי י ְהָוה‬ ֲ C’est moi Yhwh

v. 8



ø‫בלוֹת‬ ְ ‫ס‬ ִ ø‫חת‬ ַ ‫תּ‬ ַ ‫מ‬ ִ ø‫כם‬ ֶ ‫ת‬ ְ ‫א‬ ֶ ø‫ציא‬ ִ ‫המּוֹ‬ ַ ø‫צרי ִם‬ ְ ‫מ‬ ִ celui qui vous fait sortir des corvées de l’Égypte ‫שׁר‬ ֶ ‫א‬ ֲ ø‫האֶָרץ‬ ָ - ‫אל‬ ֶ ø‫כם‬ ֶ ‫ת‬ ְ ‫א‬ ֶ ø‫תי‬ ִ ‫בא‬ ֵ ‫ה‬ ֵ ‫ְו‬

Je vous ferai entrer dans le pays que ‫הם‬ ָ ‫בר‬ ְ ‫לאַ‬ ְ ø‫תהּ‬ ָ ‫א‬ø‫תת‬ ֵ ‫ל‬ ָ ø‫י ָדי‬-ø‫את‬ ֶ øø‫תי‬ ִ ‫שׂא‬ ָ ָ‫נ‬ ø‫כם‬ ֶ ‫ל‬ ָ øּ‫תה‬ ָ ‫א‬ø‫תּי‬ ִ ‫ת‬ ַ ָ ‫ְונ‬ø‫עקב‬ ֲ ַ ‫לי‬ ְ ‫וּ‬ø‫חק‬ ָ ‫צ‬ ְ ִ ‫לי‬ ְ



‫שׁה‬ ָ ‫מוֹר‬ j’ai juré, à main levée, de donner à Abraham, à Isaac et à Jacob ; je vous le donnerai en possession ‫אנ ִי י ְהָוה‬ ֲ C’est moi Yhwh Cette structure révèle l’importance de la présentation divine, l’affirmation « C’est moi Yhwh » apparaissant quatre fois. Ces autoprésentations encadrent le discours divin aux w. 2 et 8, alors qu’aux w. 6 et 7 elles sont suivies d’affirmations presque identiques « je vous ferai sortir des corvées de l’Égypte ». Ici, comme en Exode 3, Yhwh se définit comme le dieu qui fait sortir d’Égypte. Contrairement à la version originelle d’Exode 3, Exode 6 insiste sur la forte continuité entre les Patriarches et l’Exode. Dans le discours divin, l’Exode et la conquête de la terre sont présentés comme les conséquences de l’alliance divine et des promesses faites aux Patriarches. Cette relation est théorisée au v. 3, où P construit une théologie de la révélation divine : « Je suis apparu à Abraham, à Isaac et à Jacob comme El Shaddaï mais par mon nom de Yhwh je ne me suis pas fait connaître à eux ». C’est une référence claire à Gn 17,1 (« […] Yhwh 25 lui apparut et lui dit : “Je suis El Shaddaï […]” »), qui permet à l’auteur sacerdotal de construire une histoire de la révélation divine en trois étapes. Dans l’histoire primitive, Dieu est connu de tous les hommes en tant que « elohim » ; pour Abraham et ses descendants il est « El Shaddaï » et seuls Moïse et le peuple d’Israël en Égypte sont instruits du nom personnel de Dieu, « Yhwh ». Cela signifie que le privilège singulier d’Israël est la

connaissance du nom divin et, à travers ce privilège, Israël devient la seule nation capable d’adorer Dieu au moyen d’un culte sacrificiel adéquat. D’un autre côté, pourtant, à l’encontre des Deutéronomistes, P prône un monothéisme inclusif : tous les peuples de la terre vénèrent le même dieu, qu’ils s’adressent à lui en tant qu’Elohim, El, ou El Shaddaï. Cette idée fonctionne mieux si l’on considère P comme étant l’auteur d’un document indépendant et non le rédacteur de récits non-P plus anciens. De manière surprenante, la révélation de Dieu à Moïse se fait en Égypte, contrairement à Exode 3, qui situe la révélation du nom divin sur « la montagne de Dieu ». L’idée d’une révélation divine met Exode 6 en parallèle avec Ézéchiel 20 (v. 5 « Je me suis fait connaître à eux [yd‘, nif‘al] au pays d’Égypte », cf. Ex 2,25 et 6,3 où apparaît la même racine). Selon la tradition sacerdotale, Dieu révéla son véritable nom en Égypte. Pour les auteurs de P et d’Ézéchiel 20, le récit de l’Exode est aussi et avant tout le récit de la révélation du nom divin. Selon P, le discours divin à Moïse est la dernière étape dans l’histoire de la révélation de Dieu, grâce à laquelle Israël, par l’intermédiaire de Moïse, est informé de son véritable nom. c) Exode 3 et Exode 6 : Brève comparaison

Exode 3 situe la révélation divine sur la montagne de Dieu à l’aide de trois expressions : « montagne de dieu » (‫הים‬ ִ ֹ ‫אל‬ ֱ ‫ה‬ ָ ø ‫הר‬ ַ ø ), « à Horeb » (‫בה‬ ָ ‫ )חר‬et l’expression rare ‫סּנ ֶה‬ ְ ‫ה‬ ַ (ha-senê), « le buisson », qui apparaît uniquement en Ex 3,2-4 (Dt 33,16 est probablement aussi une allusion au Sinaï). De son côté, Exode 6 situe la révélation en Égypte. Néanmoins, les deux textes admettent de fait que Yhwh ne fut pas de tout temps le Dieu d’Israël mais qu’il a révélé son nom au peuple par l’intermédiaire de Moïse. Et même si Exode 3 est construit comme une anticipation de la

théophanie au Sinaï, il est inséré dans un contexte narratif où Moïse séjourne à Madiân, dans le « Sud ». Dans le contexte du récit du Pentateuque, une telle présentation met en exergue le rôle central de la tradition de l’Exode (en transformant les récits des Patriarches en une sorte de prologue) de même qu’elle rend légitime le personnage de Moïse en tant que seul médiateur et premier prophète d’Israël. e Les deux textes ne sont pas antérieurs au VI siècle, mais ils peuvent préserver la mémoire historique selon laquelle Yhwh n’a pas toujours été le dieu « d’Israël ». Il est certain que ni Exode 3 ni Exode 6 ne sont des textes historiques. Mais ils pourraient préserver une mémoire ancienne de « longue durée » sur « l’adoption » par Israël de la divinité Yhwh, en lien avec des traditions venues d’Égypte ou du sud 26.

Quelques spéculations historiques sur les origines de Yhwh et sur son adoption par « Israël » Nous commencerons par une remarque initiale concernant le nom « Israël », qui est attesté en dehors de la Bible par la stèle du pharaon Mérenptah à la fin du XIIIe siècle av. J.-C. et peut-être aussi, un peu plus tôt, sur un piédestal de statue datant du règne de Ramsès II (cette interprétation restant toutefois très spéculative et, d’après une communication orale de Thomas Schneider, peu convaincante) 27. Le nom « Israël » contient l’élément théophore « El » et non pas Yhwh ou Yhw. Nadav Na’aman a certes fait remarquer que la localisation de l’entité « Israël », sur la stèle de Mérenptah, « ne peut être établie avec certitude et toutes les tentatives pour la situer dans les hautes terres centrales […] repose sur une idée préconçue de son emplacement » 28, il est clair

néanmoins que la stèle fait référence à un groupe vivant dans le Levant, dont le dieu patron est vraisemblablement El, ou Ilu, comme à Ougarit. D’un autre côté, il existe cinq textes bibliques qui situent Yhwh dans le 29 sud et qui décrivent une rencontre entre lui et Israël . En Jg 5,4-5 et son parallèle « élohiste » dans le Ps 68,8-9, Yhwh semble être identifié avec le Sinaï, et selon Jg 5,4, il viendrait de Séïr : « Yhwh, quand tu sortis de Séïr, quand tu t’avanças depuis la région d’Édom, la terre trembla, les cieux se déversèrent, les nuées se déversèrent en eau. Les montagnes ruisselèrent devant Yhwh, le Sinaï, devant Yhwh, le Dieu d’Israël. » Une affirmation similaire se trouve en Dt 33,2 : « Yhwh est venu du Sinaï, pour eux il a brillé de Seïr ; il a resplendi depuis le mont Parân. Pour eux, il est arrivé à Mériba de Qadesh ; de son midi vers les pentes, pour eux 30. ». Là encore Yhwh vient de Séïr, qui est mis en parallèle avec le mont Parân, dont l’emplacement ne peut être clairement établi 31. Et finalement Ha 3,3 : « Dieu (Eloah) vient de Témân et le Saint du mont Parân. Selah. Son éclat couvre les cieux, et sa louange remplit la terre. » Dans ce verset, le nom Yhwh est remplacé par Eloah, mais les w. 2 et 8 suggèrent une identification de Eloah avec Yhwh. De façon intéressante, ce psaume situe l’origine de Yhwh à Témân, un nom qui apparaît en Gn 36 comme le nom d’un clan d’Édom. Le lien entre Témân et Édom est également clair dans d’autres textes bibliques (Jr 47,7.20 ; Ez 25,13 ; Am 1,11-12 ; Ab 8,9). Une localisation édomite de Témân conviendrait également aux textes cités ci-dessus mentionnant Séïr. Il est aussi certes possible que Témân soit un terme plus générique pour désigner le sud, mais bien évidemment, le sud inclut le territoire édomite. En ce qui concerne Témân, les inscriptions de Kuntillet-Ajrud sont de grande importance. Même après la récente publication de l’editio princeps 32, plusieurs questions font encore débat, particulièrement la fonction du site. Était-ce une sorte de caravansérail ou, même, un sanctuaire dans lequel Ashéra jouait un rôle majeur, comme l’ont récemment suggéré Nurit Lissovsky et Nadav Na’aman ? 33 Selon I. Finkelstein et E. Piasetzky, « Kuntillet Ajrud a fonctionné entre 795 et

730/20 BCE environ » 34. Deux inscriptions mentionnent un « Yhwh de Témân » 35, associé à Ashéra. Cela indique qu’au VIIIe siècle Yhwh était encore vénéré en tant que divinité du sud. D’un autre côté, une autre 36 inscription invoque un « Yhwh de Samarie » avec son Ashéra . Si le site était effectivement utilisé par des voyageurs ou des adorateurs originaires d’Israël/Samarie, il est intéressant de noter qu’ils reconnaissaient eux aussi l’existence d’un « Yhwh du sud ». On pourrait donc s’aventurer à rattacher l’existence d’une divinité e « Yhwh de Témân » au VIII siècle aux fameux nomades Shasou qui apparaissent dans certaines inscriptions égyptiennes, notamment celles datant des règnes d’Aménophis III et de Ramsès II, comme tƷ šƷšw yhwƷ. L’expression yhwƷ semble être un toponyme qui peut aussi désigner une divinité (voir l’identification de Yhwh et du Sinaï en Juges 5). Dans la liste d’Amara, les différents groupes shasou sont désignés sous le terme tƷ šƷšw ś’rr (la terre shasou de Séïr) qui, selon Manfred Weippert, pourrait être une sorte de titre indiquant la localisation des diverses tribus shasou 37. Une localisation édomite de ces groupes shasou a été rendue plausible par les fouilles au Jabal Hamrat Fidan de Thomas Levy et son équipe, qui affirment que dans le cas du Wadi Fidan « le rapport archéologique 38 conforte le témoignage biblique et historique » . Il serait donc plausible que la vénération de Yhwh en tant que dieu qui défit les Égyptiens ait été transmise à Israël par un groupe shasou. Comme le fit remarquer Na’aman « la description biblique de l’Égypte comme “maison de servitude” reflète très bien la réalité égyptienne du Nouvel Empire » 39. Il est par conséquent possible d’imaginer que Yhwh a pu être apporté à Israël par un groupe qui vénérait un Yhwh « édomite » ou « du sud ». Peut-être existait-il aussi une tradition narrative concernant un personnage comme Moïse, car ses liens avec les Madianites peuvent difficilement avoir été inventés, de même que le passage en Exode 18 où son beau-père, prêtre de Madiân, offre un sacrifice à Yhwh 40. Bien sûr, toute reconstruction précise est impossible. Le texte biblique de la

révélation divine du nom de Yhwh préserve néanmoins, pour employer une expression de Jan Assmann, des « traces de mémoire » concernant l’origine non-autochtone de Yhwh.

Brève synthèse Le récit biblique de l’Exode fut mis par écrit pour la première fois en Juda. Moïse y apparaît comme le prototype de Josias et la situation d’oppression en Égypte semble refléter la situation de domination de l’Assyrie. La tradition de l’Exode était bien évidemment plus ancienne et parvint depuis Israël jusqu’en Juda après 722. Les contours littéraires de cette tradition ne peuvent être reconstruits. Néanmoins, Osée 12 montre que Yhwh, le dieu de l’Exode, est mis en opposition avec la tradition de Jacob. Cela pourrait refléter la tentative de faire de l’Exode le mythe de fondation « officiel » d’Israël. Les deux récits de la révélation de Yhwh à Moïse, mis par écrit au VIe siècle seulement, gardent toutefois la mémoire d’un Yhwh qui n’était pas une divinité autochtone mais importée « du sud ». Cette théorie est renforcée par les inscriptions de Kuntillet-Ajrud ainsi que par les découvertes concernant les groupes shasou, dont certains vénéraient apparemment une divinité nommée Yahu. Même si cela nous fait remonter aux derniers siècles du deuxième millénaire av. J.-C., les textes bibliques ont préservé une mémoire de longue durée sur les origines de Yhwh, liées à l’Exode.

Textes originaux 1. « History of Ancient Israel: Archaeology and the Biblical record — the view from 2015 », Rivista Biblica, no 63, 2015, 371-392. 2. « How to Date Pentateuchal Texts — Some Case Studies », dans Jan C. Gertz, Bernard M. Levinson, Dalit Rom-Shiloni et Konrad Schmid (éd.), The Formation of the Pentateuch. Bridging the Academic Cultures of Europe, Israel, and North America, , Tübingen, Mohr Siebeck, coll. « Forschungen zum Alten Testament 111 », 2016, 357-370. 3. « Comments on the Historical Background of the Abraham Narrative. Between “Realia” and “Exegetica” », Hebrew Bible and Ancient Israel, no 3, 2014, 3-23. 4. « Comments on the Historical Background of the Jacob Narrative in Genesis », Zeitschrift für die altestamentliche Wissenschaft, no 126/3, 2014, 317-338. 5. « The Wilderness Narrative and Itineraries and the Evolution of the Exodus Tradition », dans Thomas E. Levy, Thomas Schneider et William H. C. Propp (éd.), Israel’s Exodus in Transdisciplinary Perspective: Text, Archaeology, Culture, and Geoscience, Cham (CH) et al., Springer, 2015, 39-53. 6. « The Revelation of the Divine Name to Moses and the Construction of a Memory About the Origins of the Encounter Between Yhwh and Israel », dans Thomas E. Levy, Thomas Schneider et William H. C. Propp (éd.), Israel’s Exodus in Transdisciplinary Perspective: Text, Archaeology, Culture, and Geoscience, Cham (CH) et al., Springer, 2015, 305-315.

54. C. NIHAN, « Heiligkeitsgesetz und Pentateuch : Traditions-und kompositionsgeschichtliche Aspekte von Levitikus 26 », in F. HARTENSTEIN et K. SCHMID (éd.), Abschied von der Priesterschrift ? Zum Stand der Pentateuchdebatte, Leipzig, Evangelische Verlagsanstalt, 2015, 186-218. 55. E. OTTO, « Innerbiblische Exegese im Heiligkeitsgesetz : Levitikus 17-26 », in H.-J. FABRY et H.-W. JÜNGLING (éd.), Levitikus als Buch, Berlin, Philo, 1999, 125-196 ; C. NIHAN, « The Holiness Code between D and P : Some Comments on the Function and Significance of Leviticus 17-26 in the Composition of the Torah », in E. OTTO et R. ACHENBACH (éd.), Das Deuteronomium zwischen Pentateuch und Deuteronomistischem Geschichtswerk, Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, 2004, 81-122 ; J. STACKERT, Rewriting the Torah : Literary Revision in Deuteronomy and the Holiness Legislation, Tübingen, Mohr Siebeck, 2007. Bien que ces auteurs aient des vues diverses concernant la date et le rôle du Code de Sainteté, ils s’accordent sur la chronologie relative. 56. C. NIHAN, From Priestly Torah to Pentateuch : A Study in the Composition of the Book of Leviticus, Tübingen : Mohr Siebeck, 2007, 198-231.

58. Pour plus de détails voir M. KÖCKERT, « Abraham- und Jakobüberlieferung ». 59. M. BROSHI, « The Expansion of Jerusalem in the Reigns of Hezekiah and Manasseh » Israel Exploration Journal 24 (1974), 21-26 ; R. REICH et E. SHUKRON, « The Urban Development of Jerusalem in the Late Eight Century B.C.E. » in A. G. VAUGHN et A. E. KILLEBREW (éd.), Jerusalem in Bible and Archaeology : The First Temple Period, Atlanta, Society of Biblical Literature, 2003, 209-218 ; H. GEVA, « Western Jerusalem at the End of the First Temple Period in Light of the Excavations in the Jewish Quarter », in VAUGHN et KILLEBREW (éd.), Jerusalem in Bible and Archaeology, 183-208 ; FINKELSTEIN et SILBERMAN, « Temple and Dynasty ». 60. JAMIESON-DRAKE, Scribes and Schools in Monarchic Judah. 61. R. KESSLER, Die Querverweise im Pentateuch. Überlieferungsgeschichtliche Untersuchungen der expliziten Querverbindungen innerhalb des vorpriesterlichen Pentateuchs, thèse de doctorat, université de Heidelberg, 1972 ; R. RENDTORFF, Das überlieferungsgeschichtliche Problem des Pentateuch, Berlin, de Gruyter, 1976 ; pour la traduction anglaise, voir The Problem of the Process of Transmission in the Pentateuch, Sheffield, JSOT Press, 1990 ; KÖCKERT, Vätergott und Väterverheißungen. 62. La visite de Jacob à Mamré (Gn 35,27) appartient sans doute à cette même stratégie : renforcer les parallèles entre les deux ancêtres et affirmer la supériorité de Juda sur Israël. 63. Par exemple BLUM, Vätergeschichte, 462. 64. I. FINKELSTEIN et L. SINGER-AVITZ, « Reevaluating Bethel », Zeitschrift des Deutschen Palastina-Vereins 125 (2009), 33-48. Le fait qu’en Gn 12,8 Abraham n’aille pas directement à Béthel, mais « près » de Béthel, contrairement à Jacob, peut s’expliquer dans le contexte de l’idéologie deutéronomiste de centralisation du culte et du « caractère impie » de Béthel dans les rédactions (dtr.) du livre d’Osée ; J. BLENKINSOPP, « Bethel in the Neo-Babylonian Period », in O. LIPSCHITS et J. BLENKINSOPP (éd.), Judah and the Judeans in the Neo-Babylonian Period, Winona Lake, Eisenbrauns, 2003, 93-107, a soutenu que Béthel joua un rôle majeur durant la période babylonienne. Au regard des trouvailles archéologiques, cette revendication devient quelque peu problématique. 65. N. NA’AMAN, « Rezin of Damascus and the Land of Gilead », Zeitschrift des Deutschen Palastina-Vereins 111 (1995), 105-117. 66. Voir ci-dessus, n. 47. 67. Voir R. J. TOURNAY, « Genèse de la triade “Abraham-Isaac-Jacob” », Revue Biblique 103 (1996), 321-336. 68. Il est intéressant de noter que cette reconstruction rejoint des résultats similaires à ceux de plusieurs études littéraires sur le cycle d’Abraham : I. FISCHER, Die Erzeltern Israels. Feministisch-theologische Studien zu Genesis 12-36, Berlin, de Gruyter, 1994 ; B. GOSSE, Structuration des grands ensembles bibliques et intertextualité à l’époque perse, Berlin, de Gruyter, 1997, 93. Le fait que des approches différentes arrivent à des conclusions similaires joue fortement en faveur de la validité de l’hypothèse.

69. Les parallèles entre Gn 12,10-20 et Genèse 16 ont souvent été observés. Voir par exemple, T. RÖMER, « The Exodus in the Book of Genesis », Svensk Exegetisk Årsbok 75 (2010), 1-20. 70. Voir par exemple la liste in P. P. JENSON, Graded Holiness. A Key to the Priestly Conception of the World, Sheffield, JSOT Press, 1992, 220-221, qui donne un synopsis des attributions de Holzinger, Noth, Elliger, Lohfink et Weimar, montrant une identité de vue importante sur le matériel sur Abraham. 71. A. DE PURY, « Abraham : The Priestly Writer’s “Ecumenical” Ancestor » in S. L. MCKENZIE et T. RÖMER (éd.), Rethinking the Foundations. Historiography in the Ancient World and in the Bible. Essays in Honour of John Van Seters, Berlin, de Gruyter, 2000, 163-181. 72. A. DE PURY, « Le tombeau des Abrahamides d’Héron et sa fonction au début de l’époque perse », Transeuphratène 30 (2005), 183-184. 73. Traditionnellement Genèse 23 était considéré comme faisant partie de P ; certaines publications récentes le considèrent toutefois comme post-P. Voir J. BLENKINSOPP, « Abraham as Paradigm in the Priestly History in Genesis », Journal of Biblical Literature 128 (2009), 225241, avec de bons arguments pour l’attribution de Genèse 23 à P. 74. T. VEIJOLA, « Das Opfer des Abraham — Paradigma des Glaubens aus dem nachexilischen Zeitalter », Zeitschrift für Theologie und Kirche 85 (1988), 129-164 ; K. SCHMID, « Die Rückgabe der Verheißungsgabe. Der ‚heilsgeschichtliche’ Sinn von Gen 22 im Horizont innerbiblischer Exegese », in M. WITTE (éd.), Gott und Mensch im Dialog. Festschrift für Otto Kaiser zum 80. Geburtstag, Berlin, de Gruyter, 2004, 271-300 ; T. RÖMER, « Abraham’s Righteousness and Sacrifice : How to Understand (and Translate) Genesis 15 and 22 » Communio Viatorum 54 (2012), 3-15. 75. L’identification de Moriyya avec le Mont du Temple est faite en 2 Ch 3,1, mais Genèse 22 semble déjà présupposer cette identification lorsqu’il emploie le terme maqôm qui, à la lumière de Deutéronome 12, peut aisément se comprendre comme une référence au temple hiérosolymitain. 76. Voir déjà Gn 15,1 — la promesse d’un butin faite par Yhwh reprend clairement sa victoire militaire en Genèse 14. Le nom « Damas » n’apparaît dans l’histoire du patriarche qu’en Gn 14,15 et 15,2. Le nom du serviteur d’Abraham, Éliezer, correspond selon la gematria au nombre 318, qui est le nombre des serviteurs d’Abraham en Genèse 14. 77. Dans la Bible hébraïque, cette expression n’apparaît qu’en Gn 24,10 ; Dt 23,4 ; Jg 3,8 ; Ps 60,2 ; 1 Ch 19,6. 78. A. ROFÉ, « An Inquiry into the Betrothal of Rebeka », in E. BLUM, C. MACHOLZ et E. W. STEGEMANN (éd.), Die Hebräische Bibel und ihre zweifache Nachgeschichte. FS R. Rendtorff, Neukirchen-Vluyn, Neukirchener Verlag, 1990, 27-39. 79. Cette opinion est largement partagée par la recherche européenne récente ; pour plus de détails, voir T. RÖMER, « Abraham and the “Law and the Prophets” », in P. CARSTENS et N. P. LEMCHE (éd.), The Reception and Remembrance of Abraham (Piscataway, Gorgias, 2011, 103118. La date tardive de Genèse 15 est également acceptée par L. Schmidt, qui défend l’hypothèse deutéronomiste traditionnelle ; voir L. SCHMIDT, « Genesis xv » Vetus Testamentum 56 (2006), 251-267.

80. J. SKINNER, A Critical and Exegetical Commentary on Genesis, Edinburgh, Scribner, 1910, 271. 81. De même que pour le personnage de Néhémie en 2 Maccabées ? Voir Abraham en 1 M 2,52 versus Gn 15,6 ; bien sûr le premier a pu être tiré du second. 82. J. A. SOGGIN, « Abraham and the Eastern Kings : On Genesis 14 » in Z. ZEVIT, S. GITIN, et M. SOKOLOFF (éd.), Solving Riddles and Untying Knots. Biblical Epigraphic, and Semitic Studies in Honor of Jonas C. Greenfield, Winona Lake, Eisenbrauns, 1995, 283-291. 83. M. TILLY, Einführung in die Septuaginta, Darmstadt, Wissenschaftliche Buchgesellschaft, 2005, 26-36 ; A. A. FISCHER, Der Text des Alten Testaments. Neubearbeitung der Einführung in die Biblia Hebraica von Ernst Würthwein, Stuttgart, Deutsche Bibelgesellschaft, 2009, 118-128. 84. TILLY, Einführung, 57-58, 81-87. 85. G. GRANERØD, Abraham and Melchizedek. Scribal Activity of Second Temple Times in Genesis 14 and Psalm 110, Berlin, de Gruyter, 2010, 252. Granerød, qui offre une intéressante analyse de Genèse 14, pense que la première version de ce chapitre (sans l’épisode de Melkisédeq), fut déclenchée par le Leerstelle après Gn 13,17 (voir p. 93-98) au cours de la fin de la période perse ou au début de la période hellénistique.

51. A. LEMAIRE, « Prières en temps de crise : les inscriptions de Khirbet Beit Lei », Revue Biblique 83 (1976), 558-568. 52. O. KEEL et C. UEHLINGER, Gods, Goddesses and Images of Gods in Ancient Israel, Minneapolis, MN, Fortress Press, 1998, 228 ; M. DIJKSTRA, « El, the God of Israel — Israel, the People of YHWH : On the Origins of Ancient Israelite Yahwism », in B. BECKING, M. DIJKSTRA, M. C. A. KORPEL et J. H. VRIEZEN (éd.), Only One God ? Monotheism in Ancient Israel and the Veneration of the Goddess Asherah, Londres — New York, Sheffield Academic Press, 2001, 81126, 116 ; K. SCHMID, The Old Testament : A Literary History, 2010, 53. 53. M. KÖCKERT, « YHWH in the Northern and Southern Kingdoms », in R. G. KRATZ et H. SPIECKERMANN (éd.), One God — One Cult — One Nation. Archaeological and Biblical Perspectives, Berlin — New York, W. de Gruyter, 2010, 357-394. 54. NA’AMAN, « Inscriptions of Kuntillet ‘Ajrud » ; I. FINKELSTEIN, « The Wilderness Narrative and Itineraries and the Evolution of the Exodus Tradition », in T. E. LEVY, T. SCHNEIDER et W. H. C. PROPP (éd.), Israel’s Exodus in Transdisciplinary Perspective : Text, Archaeology, Culture and Geoscience, Heidelberg, Springer, 2015, 39-53. 55. Le terme est employé par E. BLUM, « Jacob Tradition », 207. 56. VAN DER TOORN, Family Religion ; R. ALBERTZ, « Exodus : Liberation History against Charter Myths », in J. W. VAN HENTEN et A. W. J. HAUTEPEN (éd.), Religious Identity and the Invention of Tradition. Papers read at a NOSTER Conference in Soesterberg, January 4-6, 1999, Assen, Royal Van Gorcum, 2001, 128-143. 57. Pour les scénarios possibles de l’histoire ancienne de la tradition de l’Exode voir, par exemple, D. B. REDFORD, « An Egyptological Perspective on the Exodus Narrative », in A. F. RAINEY (éd.), Egypt, Israel, Sinai : Archaeological and Historical Relationships in the Biblical Period, Tel Aviv, Tel Aviv University Press, 1987, 137-161 ; N. NA’AMAN, « The Exodus Story : Between Historical Memory and Historiographical Composition », Journal of Ancient Near Eastern Religions 11, 39-69 ; T. RÖMER, L’invention de Dieu, Paris, Éditions du Seuil, 2014 ; FINKELSTEIN, « Wilderness Narrative ». Notons qu’il n’y a pas d’indice permettant de lier ces mythes aux territoires de la vallée de Jezréel et de la Galilée dans le royaume du Nord, ce qui suggère qu’ils se cristallisèrent avant l’expansion d’Israël dans ces zones, dès le début du Fer IIA. Sur cette question, voir FINKELSTEIN, « Stages ». 58. Les autres sanctuaires dans les campagnes furent éradiqués. Cela est clair à Megiddo : au Fer IIA tardif Megiddo possédait au moins deux, si ce n’est trois ou quatre, sanctuaires domestiques, en relation avec les divers quartiers de la ville. D’autres sanctuaires de taille modeste sont connus à Tel Amal, près de Beth-Shéân, et à Tanak, dans la vallée de Jezréel, au sud de Megiddo. Ces sanctuaires locaux disparurent au début du VIIIe siècle. À Megiddo aucun lieu de culte ne survécut à cette transition. Sur cette question, voir N. NA’AMAN, « The Abandonment of Cult Places in the Kingdoms of Israel and Judah as Acts of Cult Reform », Ugarit-Forschungen 34 (2002), 585-602. 59. Voir VAN DER TOORN, Family Religion, 300.

60. ARIE, « Reconstructing ». 61. En même temps, Osée est souvent polémique contre le « veau » de Samarie qui, selon le récit dtr. de 1 R 12, était aussi vénéré en relation avec l’Exode à Béthel et à Dan. La situation est donc quelque peu confuse. 62. Voir divers articles dans D. V. EDELMAN (éd.), You Shall not Abhor an Edomite for He is Your Brother, Atlanta, Scholar Press, 1995. 63. N. NA’AMAN, « Jacob Story ». 64. J. R. BARTLETT, Edom and the Edomites, Sheffield, JSOT Press, 1989 ; RÖMER, L’invention de Dieu. 65. Selon H. PFEIFFER, Jahwes Kommen von Süden : Jdc 5, Hab 3, Dtn 33 und Ps 68 in ihrem literatur-und theologiegeschichtlichen Umfeld, Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, 2005, la tradition biblique de Yhwh venant du sud est une invention exilique cherchant à dé-localiser Yhwh après la destruction du temple de Jérusalem (voir aussi son article : « Die Herkunft Jahwes und ihre Zeugen », Berliner theologische Zeitschrift 30 [2013], 44-61). Cela n’est pas très convaincant et il est difficile d’imaginer des scribes de Juda inventant un Yhwh « du sud ». Sur l’origine du sud de Yhwh, voir entre autres M. LEUENBERGER, « Jhwhs Herkunft aus dem Süden. Archäologische Befunde — biblische Überlieferungen — historische Korrelationen », ZAW 122 (2010), 1-19. 66. Pour les preuves par le radiocarbone, voir le résumé dans I. FINKELSTEIN et E. PIASETZKY, « The Date of Kuntillet ‘Ajrud : The 14C Perspective », Tel Aviv 35 (2008), 175-185 ; BOARETTO, conférence à l’université de Tel Aviv, janvier 2013. 67. Il y a consensus sur le fait que l’expression Padan-Aram, qui désigne le nord de la Mésopotamie, n’apparaît dans le livre de la Genèse que dans les textes P ou les textes plus tardifs (Gn 25,20 ; 31,18 ; 33, 18 ; 35,9.26 ; 46,18 ; voir aussi Padan en 28,2.5-7 ; 48,7). Pour la signification de ce terme voir D. JERICKE, Die Ortsangaben im Buch Genesis. Ein historisch-topographischer und literarisch-topographischer Kommentar, Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, 2013, 180. 68. Selon l’hypothèse documentaire classique, ce lien existait déjà dans le travail du Jahviste au Xe siècle, voire même plus tôt. Une telle construction présuppose l’idée d’une « monarchie unifiée » qui, autant que nous puissions en juger, est une construction théologique du ou des auteurs de la strate ancienne du texte écrit, dite histoire deutéronomiste ; pour les données bibliques, voir J. C. GERTZ, « Konstruierte Erinnerung. Alttestamentliche Historiographie im Spiegel von Archäologie und literarhistorischer Kritik am Fallbeispiel des salomonischen Königtums », Berliner Theologische Zeitschrift 21 (2004), 3-29 ; pour l’archéologie, voir le résumé dans I. FINKELSTEIN et N. A. SILBERMAN, David and Solomon : In Search of the Bible’s Sacred Kings and the Roots of the Western Tradition, 2006 ; I. FINKELSTEIN, « A Great United Monarchy ? Archaeological and Historical Perspectives », in KRATZ et SPIECKERMANN (éd.), One God, 3-28. Cela présuppose également un haut degré d’alphabétisation, qui n’existait pas au e X siècle ; B. SASS, The Alphabet in the Turn of the Millennium : The West Semitic Alphabet ca. 1150-850 BCE, the Antiquity of the Arabian, Greek and Phrygian Alphabets, Tel Aviv, Emery and Claire Yass Publ. in Archaeology, 2005 ; FINKELSTEIN et SASS, « West Semitic ». 69. FINKELSTEIN et SILBERMAN, « Temple and Dynasty ».

70. JAMIESON-DRAKE, Scribes and Schools. 71. Voir R. J. TOURNAY, « Genèse de la triade « Abraham-Isaac-Jacob », Revue Biblique 103 (1996), 321-336. 72. R. KESSLER, Die Querverweise im Pentateuch. Überlieferungsgeschichtliche Untersuchungen der expliziten Querverbindungen innerhalb des vorpriesterlichen Pentateuchs, Frankfurt-amMain, P. Lang, 1972 ; RENDTORFF, « Problem » ; M. KÖCKERT, Vätergott und Väterverheißungen. Eine Auseinandersetzung mit Albrecht Alt und seinen Erben, Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, 1988. 73. Notons qu’en Gn 12 les endroits où Abraham accomplit un rituel sont « près de » : près de Béthel et près de Sichem. Cela pourrait avoir été une stratégie visant à montrer qu’avant même la centralisation du culte au temple de Jérusalem, le vénéré patriarche ne fréquentait pas les lieux de culte « illégitimes », surtout Béthel, tant honni par l’idéologie dtr. 74. Par exemple, E. BLUM, Die Komposition der Vätergeschichte, Neukirchen-Vluyn, Neukirchener Verlag, 1984, 462. 75. FINKELSTEIN et SINGER-AVITZ, « Reevaluating Bethel » ; BLENKINSOPP, « Bethel », soutient que le sanctuaire de Béthel joua un rôle majeur à la période babylonienne. Cette affirmation est contredite par les trouvailles archéologiques. 76. N. NA’AMAN, « Rezin of Damascus and the Land of Gilead », Zeitschrift des Deutschen Palästina-Vereins 111 (1995), 105-117. 77. Pour plus de détails, voir, dans cet ouvrage au chapitre 3, notre article sur Abraham : FINKELSTEIN et RÖMER, « Observations sur les contextes historiques de l’histoire d’abraham ». 78. Voir par exemple la synopse dans P. P. JENSON, Graded Holiness. A Key to the Priestly Conception of the World, Sheffield, JSOT Press, 1992, 220-221, où il compare les reconstructions faites par Noth, Elliger, Lohfink, Weimar et Holzinger. Hormis quelques divergences mineures, elles sont identiques à la reconstruction faite par T. Nöldeke en 1869, résumée par BLUM, « Jacob Tradition », 190-191. 79. Selon JENSON, seul HOLZINGER attribue ces versets à P. 80. Cette énumération ne tient pas compte des références à l’histoire de Joseph qui sont censément attribuées à P, mais qui sont peut-être post-P. 81. Comme le soutient BLUM, « Jacob Tradition », 192. 82. A. DE PURY, Genèse 12-36 », in T. RÖMER, J.-D. MACCHI et C. NIHAN (éd.), Introduction à l’Ancien Testament, Genève, Labor et Fides, 2009, 2e éd, 217-238, 226. 83. Il est intéressant de noter que, selon P, Ésaü épouse deux femmes hittites (26,34-35 ; cf. 27,46) et Ismaël épouse une Égyptienne (21,21). 84. BLUM, « Jacob Tradition », 192. 85. E. A. KNAUF, « Shadday », in K. VAN DER TOORN, B. BECKING, P. W. VAN DER HORST, Dictionary of Deities and Demons in the Bible, Leiden, Brill, 1999, 2e éd., 749-753, 751. 86. C. LEVIN, « Das System der zwölf Stämme Israels », in J. A. EMERTON (éd.), Congress Volume, Paris 1992, Leiden, Brill, 1995, 163-178 (également dans idem, Fortschreibungen : gesammelte Studien zum Alten Testament, Berlin — New York, W. de Gruyter, 2002, 111-123).

87. NA’AMAN, « Jacob Story ». Voir aussi, dans une différente perspective, B. J. DIEBNER, « Rachels Niederkunft bei Betlehem und die judäische Vereinnahmung der israelitischen Königstradition », Dielheimer Blätter zum Alten Testament und seiner Rezeption in der Alten Kirche 26 (1989/90), 48-57. 88. Pour plus de détails, voir RÖMER, « Genèse 32,2-22 », 186-187 et 191 avec la bibliographie. 89. J.-D. MACCHI, « Les interprétations conflictuelles d’une narration (Genèse 34,1-35,5 ; 49,57) », in G. J. BROOKE et J.-D. KAESTLI (éd.), Narrativity in Biblical and Related Texts, Leuven, Peeters — University Press, 2000, 3-15. 90. Selon U. BECKER, « Jakob in Bet-El und Sichem », in A. C. HAGEDORN et H. PFEIFFER (éd.), Die Erzväter in der biblischen Tradition. Festschrift für Matthias Köckert, Berlin — New York, W. de Gruyter, 2009, 159-185 (170-171), ce thème fut inséré dans un itinéraire plus ancien. 91. BLUM, Komposition der Vätergeschichte, 35-61. 92. Pace BECKER, « Jakob », 171, qui voit ici une tentative de minimiser Sichem en faveur de Béthel.

60. Pour une vue d’ensemble voir B. A. MASTIN, « Who Built and who Used the Buildings at Kuntillet ‘Ajrud ? », in J. K. AITKIN, K. J. DELL et B. A. MASTIN (éd.), On Stone and Scroll : Essays in Honour of Graham Ivor Davies, Berlin, de Gruyter, 2011, 69-85 ; pour la poterie, voir AYALON, « The Iron Age II » ; J. GUNNEWEG, I. PERLMAN et Z. MESHEL, « The Origin of the Pottery of Kuntillet ‘Ajrud », Israel Exploration Journal 35 (1985), 270-283 ; pour les inscriptions, voir LEMAIRE, « Date et origine » ; B. A. MASTIN, « The Theophoric Elements yw and yhw in Proper Names in Eight-Century Hebrew Inscriptions and the Proper Names at Kuntillet ‘Ajrud », Zeitschrift für Althebräistic 17-20 (2004-2007), 109-135 ; idem, « The Inscriptions Written on Plaster at Kuntillet ‘Ajrud », Vetus Testamentum 59 (2009), 99-115 ; AHITUV, ESHEL et MESHEL, « The Inscriptions », 95, 126-129 ; NA’AMAN, « The Inscriptions ». 61. AYALON, « The Iron Age II » ; GUNNEWEG, PERLMAN et MESHEL, « The Origin ». Pour des vues contradictoires concernant le langage des inscriptions en alphabet phénicien et l’identité des auteurs (de l’hébreu écrit par des habitants de Juda ou du phénicien écrit par des habitants de Tyr) voir AHITUV, ESHEL et MESHEL, « The Inscriptions », 130 ; A. LEMAIRE, « Remarques sur les inscriptions phéniciennes de Kuntillet ‘Ajrud », Semitica 55 (2013), 83-99, respectivement. 62. AHITUV, ESHEL et MESHEL, « The Inscriptions » ; NA’AMAN, « The Inscriptions », avec bibliographie. 63. Trois fois, selon NA’AMAN « The Inscriptions », 10. 64. NA’AMAN, ibid, 4-5, 8-9. 65. Ibid, 12-14. 66. P. BECK, « The Art of Palestine during the Iron Age II : Local Traditions and External Influences (10th-8th Centuries BCE) », in C. UEHLINGER (éd.), Images as Media : Sources for the Culture History of the Near East and the Eastern Mediterranean (1st Millennium BCE), Fribourg, University Press, 2000, 180-181 ; NA’AMAN, ibid, 2-3. 67. T. ORNAN, « Drawings from Kuntillet ‘Ajrud », in S. AHITUV, E. ESHEL, Z. MESHEL, et T. ORNAN, To Yahweh Teiman and his Ashera, the Inscriptions and Drawings from Kuntillet ‘Ajrud (Horvat Teman) in Sinai, Jerusalem, Israel Exploration Society, 2015, 43-69 (en hébreu). 68. T. RÖMER, « Israel’s Sojourn in the Wilderness and the Construction of the Book of Numbers », in R. REZETKO, T. H. LIM and W. B. AUCKER (éd.), Reflection and Refraction. Studies in Biblical Historiography in Honour of A. Graeme Auld, Leiden, Brill, 419-445. 69. I. FINKELSTEIN, « The Territorial Extent and Demography of Yehud/Judea in the Persian and Early Hellenistic Periods », Revue Biblique 117 (2010), 39-54. 70. R. COHEN et R. COHEN-AMIN, Ancient Settlement of the Negev Highlands. Volume II : The Iron Age and the Persian Period, Jerusalem, Israel Antiquities Authority, 2004, 159-201. 71. L’empreinte de sceau « Yehud » de Tell el-Qudeirat (VANDERHOOFT et LIPSCHITS, « A New Typology », 27) devrait être considérée comme une trouvaille due au hasard, de même qu’une empreinte de sceau similaire trouvée en Babylonie.

72. Dans la perspective du texte, voir NOTH, Numbers, 243 ; idem, A History, 224-227 ; FRITZ, Israel, 116-117 ; G. I. DAVIES, « Wilderness Itineraries and the Composition » ; E. W. DAVIES, Numbers, 342. 73. A. LEMAIRE et P. VERNUS, « Les ostraca paléo-hébreux de Qadesh-Barnéa », Orientalia 49 (1980), 341-345 ; idem, « L’ostracon paléo-hébreu No. 6 de Tell Qudeirat (Qadesh-Barnéa) », in M. GÖRG (éd.), Fontes atque pontes. Fine Festgabe für Hellmut Brunner, Wiesbaden, Harrassowitz, 1983, 302-326 ; R. COHEN, « Inscriptions », in R. COHEN et H. BERNICKGREENBERG (éd.), Excavations at Kadesh Barnea (Tell el-Qudeirat) 1976-1982, Jerusalem, Israel Antiquities Authority, 2007, 245-254. 74. L’ostracon 2 décrit les provisions nécessaires à un voyage de quatre jours, ce qui concorderait avec un voyage à Qadesh-Barnéa — Y. AHARONI, Arad Inscriptions, Jerusalem, Israel Exploration Society, 1981, 15, 145. 75. F. BRON et A. LEMAIRE, « Nouvelle inscription sabéenne et le commerce en Transeuphratène », Transeuphratène 38 (2009), 11-29 ; A. LEMAIRE, « New Perspectives on the Trade between Judah and South Arabia », in M. LUBETSKI (éd.), New Inscriptions and Seals Relating to the Biblical World, Atlanta, Society of Biblical Literature, 2012, 93-110. 76. I. FINKELSTEIN, « Comments on the Date of Late-Monarchic Judahite Seal Impressions », Tel Aviv 39 (2012), 203-211, contra O. LIPSCHITS, O. SERGI et I. KOCH, « Judahite Stamped and Incised Jar Handles : A Tool for Studying the History of Late Monarchic Judah », Tel Aviv 38 (2011), 5-41. 77. Y. THAREANI-SUSSELY, « Ancient Caravanserais : An Archaeological View from ‘Aroer », Levant 39 (2007), 123-141 ; Y. THAREANI, Tel ‘Aroer : The Iron Age II Caravan Town and the Hellenistic-Early Roman Settlement, Jerusalem, Hebrew Union College, 2011, 301-307. 78. Pour les inscriptions en hébreu, édomite et sudarabique trouvées à Aroer, voir THAREANI, Tel ‘Aroer, 223-228. 79. Y. SHILOH, « South Arabian Inscriptions from the City of David, Jerusalem », Palestine Exploration Quarterly 119 (1987), 9-18 ; LEMAIRE, « New Perspectives », 2012. 80. Pour l’Assyrie et les trois forts, voir NA’AMAN, « An Assyrian Residency », 267-268. 81. G. GRANERØD, Abraham and Melchizedek : Scribal Activity of Second Temple Times in Genesis 14 and Psalms 10, Berlin, de Gruyter, 2010. 82. Pour un lien possible entre les itinéraires de la campagne militaire en Genèse 14 et l’Errance dans le désert (dans des directions opposées), voir GRANERØD, Abraham, 106-107. 83. HOFFMAN, The Doctrine ; idem, « A North Israelite » ; DOZEMAN, « Hosea ». Il n’existe pas d’indice concernant une quelconque importance accordée à la tradition de l’Exode/Errance dans le désert en Juda avant 720 av. J.-C. ; il n’existe pas de références à ce récit dans les œuvres prophétiques anciennes de Juda (HOFFMAN, « A North Israelite », 181-182). Cela est particulièrement significatif du fait de la présence de Judaïtes à Kuntillet-Ajrud. 84. M. LIVERANI, « Early Caravan Trade between South-Arabia and Mesopotamia », Yemen 1 (1992) : 111-115, pour les contacts avec la Mésopotamie ; B. SASS, The Alphabet at the Turn of the Millennium, Tel Aviv, Tel Aviv University, 2005, 118 ; M. JASMIN, « Les conditions

d’émergence de la route de l’encens à la fin du IIe millénaire avant notre ère », Syria 82 (2005), 49-62. 85. Avant et après ca. 830 av. J.-C., voir I. FINKELSTEIN, « The Southern Steppe of the Levant ca. 1050-750 BCE : A Framework for a Territorial History », Palestine Exploration Quarterly 146 (2014), 89-104. 86. M. COGAN, The Raging Torrent : Historical Inscriptions from Assyria and Babylonia Relating to Ancient Israel, Jerusalem, Carta, 2008, 34-35. 87. NA’AMAN, « The Inscriptions ». 88. ORNAN, « The Drawings ». 89. Synthèses en NA’AMAN, « The Inscriptions » ; MESHEL, Kuntillet ‘Ajrud, 65-69. 90. Asherat, selon NA’AMAN, ibid. 91. Pour ceci et d’autres références liant Témân, Parân et Sinaï, voir AHITUV, ESHEL et MESHEL, « The Inscriptions », 96, 130. 92. Comparé à Yhwh de Jérusalem dans l’inscription de Beit Lei. Voir, par exemple, LEMAIRE, « Date et origine ». 93. O. KEEL et C. UEHLINGER, Gods, Goddesses and Images of Gods in Ancient Israel, Minneapolis, Fortress Press, 1998, 228 ; M. DIJKSTRA, « El, the God of Israel — Israel, the People of Yhwh : On the Origins of Ancient Israelite Yahwism », in B. BECKING, M. DIJKSTRA, M. C. A. KORPEL et J. H. VRIEZEN (éd.), Only One God ? Monotheism in Ancient Israel and the Veneration of the Goddess Asherah, Sheffield, Academic Press, 2001, 116 ; SCHMID, « Genesis », 53. 94. Z. ZEVIT, The Religions of Ancient Israel : A Synthesis of Parallactic Approaches, London, Continuum, 2001, 391. 95. Par exemple, A. DE PURY, « Le cycle de Jacob comme légende autonome des origines d’Israël », in J. A. EMERTON (éd.), Congress Volume Leuven 1989, Leiden, Brill, 1991, 78-96 ; « family tradition » selon VAN DER TOORN, Family, 287-315. 96. « State tradition » selon VAN DER TOORN, Family, 287-315. Pour un lien thématique possible entre les récits de Moïse et de Jéroboam Ier, voir ALBERTZ, « Exodus » ; SCHMID, The Old Testament, 83 avec bibliographie. 97. Sur l’importance de Béthel au VIIIe siècle av. J.-C., voir I. FINKELSTEIN et L. SINGER-AVITZ, « Reevaluating Bethel », Zeitschrift des Deutschen Palästina-Vereins 125 (2009), 33-48. 98. Voir par exemple, VAN DER TOORN, Family, 289, qui considère l’Exode comme une tradition d’Éphraïm ; DOZEMAN, A Farewell, 55 ; A. D. H. MAYES, « Pharaoh Shishak’s Invasion of Palestine and the Exodus from Egypt », in B. BECKING (éd.), Between Evidence and Ideology, Leiden, Brill, 2011, 136. 99. Sur le fait que ce temple avait ses propres écrits relatifs au culte, voir SCHMID, The Old Testament, 53. 100. NOTH, Numbers, 243 ; E. W. DAVIES, Numbers. 101. NOTH, « Der Wallfahrtsweg » ; idem, Numbers, 245-246 ; R. P. KNIERIM et G. W. COATS, Numbers, Grand Rapids, Eerdmans, 2005, 309.

102. Bien que le texte actuel de 1 Rois 19 puisse représenter des rédactions tardives (SCHMID, « Genesis », 60, avec bibliographie), et que « Horeb » soit une expression deutéronomiste (DOZEMAN, God, 67-68), il est possible que l’origine de la tradition remonte au IXe siècle av. J.C. (M. WHITE, The Elijah Legends and Jehu’s Coup, Atlanta, Scholars Press, 1997). 103. Par exemple, HALPERN, « The Exodus » ; KITCHEN, « Egyptians » ; HOFFMEIER, Israel ; idem, Ancient Israel. 104. FINKELSTEIN et SILBERMAN 2001, The Bible, 48-71. 105. D. B. REDFORD, « An Egyptological Perspective on the Exodus Narrative », in A. F. RAINEY (éd.), Egypt, Israel, Sinai : Archaeological and Historical Relationships in the Biblical Period, Tel Aviv, Tel Aviv University, 1987, 150-151 ; idem, Egypt, 412. 106. NA’AMAN, « The Exodus », à la suite de R. HENDEL, « The Exodus in Biblical Memory », Journal of Biblical Literature 120 (2001) : 601-608. 107. M. BIETAK, « Comments on the “Exodus” », in A. F. RAINEY (éd.), Egypt, Israel, Sinai : Archaeological and Historical Relationships in the Biblical Period, Tel Aviv, Tel Aviv University, 1987, 163-171 ; T. RÖMER, Moïse : « Lui que Yahvé a connu face à face », Paris, Gallimard Découvertes, 2002, 54-67. 108. I. FINKELSTEIN, « The Last Labayu : King Saul and the Expansion of the First North Israelite Territorial Entity » in Y. AMIT, E. BEN ZVI, I. FINKELSTEIN et O. LIPSCHITS (éd.), Essays on Ancient Israel in its Near Eastern Context, A Tribute to Nadav Na’aman, Winona Lake, Eisenbrauns, 2006, 171-177 ; plus récemment I. FINKELSTEIN et A. FANTALKIN, « Khirbet Qeiyafa : An Unsensational Archaeological and Historical Interpretation », Tel Aviv 39 (2012), 38-63. 109. I. FINKELSTEIN, « Tell el-Farah (Tirzah) and the Early Days of the Northern Kingdom », Revue Biblique 119 (2012), 331-346. 110. A. SCHENKER, « Jeroboam and the Division of the Kingdom in the Ancient Septuagint : LXX 3 Kingdoms 12.24 A-Z, MT 1 Kings 11-12 ; 14 and the Deuteronomistic History », in A. DE PURY, T. RÖMER et J.-D. MACCHI (éd.), Israel Constructs its History : Deuteronomistic History in Recent Research, Sheffield, Academic Press, 2000, 214-257 ; idem, « Jeroboam’s Rise and Fall in the Hebrew and Greek Bible », Journal for the Study of Judaism 39 (2008), 367-373. 111. Z. TALSHIR, The Alternative Story of the Division of the Kingdom, Jerusalem, Simor, 1993 ; D. SWEENEY, « A Reassessment of the Masoretic and Septuagint Versions of the Jeroboam Narratives in 1 Kings/3 Kingdoms 11-14 », Journal for the Study of Judaism 38 (2007), 165195. 112. VAN DER TOORN, Family, 287-315 ; ALBERTZ, « Exodus ». 113. Pour les traditions anciennes relatives à la délivrance du fardeau égyptien, voir DOZEMAN, « Hosea », 62, 69. 114. R. SMEND, « Mose als geschichtliche Gestalt », Historische Zeitschrift 260 (1995), 1-19 ; E. BLUM, « Der historische Mose und die Frühgeschichte Israels », Hebrew Bible and Ancient Israel 1 (2012), 37-63. 115. ALBERTZ, « Exodus » ; SCHMID, The Old Testament, 83, avec bibliographie.

116. Sur ce concept, voir par exemple J. ASSMANN, Moses the Egyptian. The Memory of Egypt in Western Monotheism, Cambridge, Harvard University Press, 1998 ; HENDEL, « The Exodus ». 117. HOFFMAN, « A North Israelite », 181-182. 118. I. FINKELSTEIN et N. A. SILBERMAN, « Temple and Dynasty : Hezekiah, the Remaking of Judah and the Rise of the Pan-Israelite Ideology », Journal for the Study of the Old Testament 30 (2006) : 259-285. 119. E. OTTO, « Mose und das Gesetz : Die Mose-Figur als Gegenentwurf Politischer Theologie zur neuassyrischen Königsideologie im 7 Jh. v. Chr », in E. OTTO (éd.), Mose : Ägypten und das Alte Testament, Stuttgart, Verlag Katholisches Bibelwerk, 2000, 51-67 ; F. BLANCO WISSMANN, « Sargon, Mose und die Gegner Salomos. Zur Frage vor-neuassyrischer Ursprünge der MoseErzählung », Biblische Notizen 110 (2001), 42-54 ; RÖMER, Moïse, 24-29 ; idem, « La construction » ; SCHMID, The Old Testament, 81. 120. REDFORD, « An Egyptological » ; idem, Egypt, 408-422 ; VAN SETERS, « The Geography ». 121. Y. HOFFMANN, « The Exodus — Tradition and Reality the Status of the Exodus Tradition in Ancient Israel », in I. SHIRUN-GRUMACH (éd.), Jerusalem Studies in Egyptology, Wiesbaden, Harrassowitz, 1998, 193-202.

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Notes 1. Pour la stèle de Mésha et son importance, voir l’exposition « Mésha et la Bible : quand une pierre raconte l’Histoire », organisée par le Collège de France et le Musée du Louvre du 15 septembre au 19 octobre 2018, ainsi que le catalogue qui l’accompagne.

Notes 1. I. FINKELSTEIN, « Archaeology and Text in the Third Millennium : A View from the Center », in A. LEMAIRE (éd.), Congress Volume Basel 2001, Leiden 2002, 323-342 2. P. DAVIES, In Search of Ancient Israel, Sheffield, Sheffield Academic Press, 1992 ; T. L. THOMPSON, The Mythic Past : Biblical Archaeology and the Myth of Israel, New York, Basic Books, 1999. 3. Y. GARFINKEL, « The Birth and Death of Biblical Minimalism », Biblical Archaeology Review 37 (2011), 46-53.78. 4. Voir par exemple, M. LIVERANI, Israel’s History and the History of Israel, London, Equinox, 2005 ; J. M. MILLER et J. H. HAYES, A History of Ancient Israel and Judah, Louisville, Westminster John Knox Press, 2006 ; N. NA’AMAN, « Hezekiah and the Kings of Assyria », Tel Aviv 21 (1994), 235-254 ; A. KNAUF, Data and Debates : Essays in the History and Culture of Israel and its Neighbors in Antiquity, Münster, Ugarit-Verlag, 2013 ; I. FINKELSTEIN et N. A. SILBERMAN, The Bible Unearthed : Archaeology’s New Vision of Ancient Israel and the Origin of its Sacred Texts, New York, The Free Press, 2001. 5. E. MAZAR, Preliminary Report on the City of David Excavations 2005 at the Visitors Center Area, Jérusalem, Shoham, 2007 ; idem, The Palace of King David, Excavations at the Summit of the City of David, Preliminary Report of Seasons 2005-2007, Jérusalem, Shoham, 2009 ; voir la réponse, I. FINKELSTEIN, Z. HERZOG, L. SINGER-AVITZ et D. USSISHKIN, « Has the Palace of King David in Jerusalem been Found ? », Tel Aviv 34 (2007), 142-164. 6. Y. GARFINKEL, S. GANOR et M. HASEL, « The Contribution of Khirbet Qeiyafa to Our Understanding of the Iron Age Period », Strata. Bulletin of the Anglo-Israel Archaeological Society 28 (2010), 39-54 ; pour une réponse, voir N. NA’AMAN, « Khirbet Qeiyafa in Context », Ugarit-Forschungen 42 (2012), 497-526 ; I. FINKELSTEIN et A. FANTALKIN, « Khirbet Qeiyafa : An Un-sensational Archaeological and Historical Interpretation », Tel Aviv 39 (2012), 38-63. 7. G. GALIL, « The Hebrew Inscription from Khirbet Qeiyafa/Netafim », Ugarit-Forschungen 41 (2009), 193-242 ; É. PUECH, « L’Ostracon de Khirbet Qeyafa et les débuts de la royauté en Israël », Revue Biblique 117 (2010), 162-184 ; réponses par C. ROLLSTON, « The Khirbet Qeiyafa Ostracon : Methodological Musings and Caveats », Tel Aviv 38 (2011), 67-82 ; A. MILLARD, « The Ostracon from the Days of David Found at Khirbet Qeiyafa », Tyndale Bulletin 61 (2011), 1-13. 8. Voir T. E. LEVY, T. HIGHAM, C. BRONK RAMSEY et al., « High-Precision Radiocarbon Dating and Historical Biblical Archaeology in Southern Jordan », Proceedings of the National Academy of Sciences 105 (2008), 16460-16465, qui reprennent le thème de Glueck d’un Roi Salomon, « roi du cuivre », sans la moindre preuve de la présence de Juda sur ces sites. Pour une réponse, voir par exemple, A. FANTALKIN et I. FINKELSTEIN, « The Sheshonq I Campaign and the 8th Century Earthquake : More on the Archaeology and History of the South in the Iron I-Iron IIA », Tel Aviv 33 (2006), 18-42. 9. A. FAUST, « The Negev “Fortresses” in Context : Reexamining the “Fortress” Phenomenon in Light of General Settlement Processes of the Eleventh-Tenth Centuries B.C.E. », Journal of the

American Oriental Society 126 (2006), 135-160, récemment prouvé étant erroné par des datations au radiocarbone qui placent ces sites au IXe siècle av. J.-C., voir E. BOARETTO, I. FINKELSTEIN et R. SHAHACK-GROSS, « Radiocarbon Results from the Iron IIA Site of Atar Haroa in the Negev Highlands and their Archaeological and Historical Implications », Radiocarbon 52 (2010), 1-12. 10. A. FAUST, « Abandonment, Urbanization, Resettlement and the Formation of the Israelite State », Near Eastern Archaeology 66 (2003), 147-161. 11. I. FINKELSTEIN, « [De]formation of the Israelite State : A Rejoinder on Methodology », Near Eastern Archaeology 68 (2005), 202-208. 12. T. RÖMER, « La périodisation de l’histoire de l’Israël ancien : constructions bibliques et historiques », Atala, cultures et sciences humaines 17 (2014), 87-100. 13. W. A. WARD et M. SHARP JOUKOWSKY (éd.), The Crisis Years : The 12th Century B.C. From Beyond the Danube to the Tigris, Dubuque, Kendall : Hunt Pub. Co., 1992. 14. Voir la discussion dans N. NA’AMAN, « Does Archaeology Really Deserve the Status of A “High Court” in Biblical and Historical Research ? », in B. BECKING et L. L. GRABBE (éd.), Between Evidence and Ideology, Leiden, Brill, 2010, 165-183 ; I. FINKELSTEIN, « Archaeology as High Court in Ancient Israelite History : A Reply to Nadav Na’aman », Journal of Hebrew Scriptures 10 (2011), Article 19. 15. BOARETTO, FINKELSTEIN et SHAHACK-GROSS, « Radiocarbon Results from the Iron IIA Site of Atar Haroa ». 16. Voir I. FINKELSTEIN et E. PIASETZKY, « Radiocarbon-Dated Destruction Layers : A Skeleton for Iron Age Chronology in the Levant », Oxford Journal of Archaeology 28 (2009), 255-274. 17. Pour Megiddo voir M. B. TOFFOLO, E. ARIE, M. A. S. MARTIN, E. BOARETTO et I. FINKELSTEIN, « Absolute Chronology of Megiddo, Israel, in the Late Bronze and Iron Ages : High-Resolution Radiocarbon Dating », Radiocarbon 56 (2014), 221-244. 18. Y. GARFINKEL, K. STREIT, S. GANOR et M. G. HASEL, « State Formation in Judah : Biblical Tradition, Modern Historical Theories, and Radiometric Dates at Khirbet Qeiyafa », Radiocarbon 54 (2012), 359-369. 19. I. FINKELSTEIN et E. PIASETZKY, « Radiocarbon Dating Khirbet Qeiyafa and the Iron I-IIA Phases in the Shephelah : Methodological Comments and a Bayesian Model », Radiocarbon 57 (2015), 891-907. 20. Voir les vues opposées : GARFINKEL, STREIT, GANOR et HASEL, « State Formation in Judah » ; contra, FINKELSTEIN et PIASETZKY, « Radiocarbon Dating Khirbet Qeiyafa ». 21. D. E. FLEMING, The Legacy of Israel in Judah’s Bible : History, Politics, and the Reinscribing of Tradition, Cambridge, Cambridge University Press, 2012. 22. Voir M. BROSHI et I. FINKELSTEIN, « The Population of Palestine in Iron Age II », Bulletin of the American Schools of Oriental Research 287 (1992), 47-60. 23. FANTALKIN et FINKELSTEIN, « The Sheshonq I Campaign » ; O. SERGI, « Judah’s Expansion in Historical Context », Tel Aviv 40 (2013), 226-246. 24. D. W. JAMIESON-DRAKE, Scribes and Schools in Monarchic Judah, Sheffield, Almond Press, 1991.

25. I. FINKELSTEIN et B. SASS, « The West Semitic Alphabetic Inscriptions, Late Bronze II to Iron IIA : Archeological Context, Distribution and Chronology », Hebrew Bible and Ancient Israel 2 (2013), 149-220. 26. Résumé en S. AHITUV, Echoes from the Past : Hebrew and Cognate Inscriptions from the Biblical Period, Jerusalem, Carta, 2008, 433-465 et bibliographie en page 465. 27. N. NA’AMAN, « The Inscriptions of Kuntillet ‘Ajrud Through the Lens of Historical Research », Ugarit-Forschungen 43 (2011), 1-43. 28. Voir B. HALPERN, David’s Secret Demons : Messiah, Murderer, Traitor, King, Grand Rapids, W. B. Eerdmans Pub. Co, 2001 ; W. DIETRICH, The Early Monarchy in Israel : The Tenth Century B.C.E., Atlanta, Society of Biblical Literature, 2007. 29. FINKELSTEIN et PIASETZKY, « Radiocarbon-Dated Destruction Layers ». 30. Contra, voir par exemple R. A. PEARCE, « Shiloh and Jer. VII 12, 14 and 15 », Vetus Testamentum 23 (1973), 105-108. 31. MILLER et HAYES, A History of Ancient Israel and Judah, 133. 32. I. FINKELSTEIN et T. RÖMER, « Comments on the Historical Background of the Jacob Narrative in Genesis », Zeitschrift für die Alttestamentliche Wissenschaft 126 (2014), 317-338. 33. D. B. REDFORD, « An Egyptological Perspective on the Exodus Narrative », in A. F. RAINEY (éd.), Egypt, Israel, Sinai : Archaeological and Historical Relationships in the Biblical Period, Tel Aviv : Tel Aviv University, 1987, 137-161. 34. M. BIETAK, « Comments on the “Exodus” », in RAINEY (éd.), Egypt, Israel, Sinai : Archaeological and Historical Relationships in the Biblical Period, Tel Aviv, Tel Aviv University, 1987, 163-171 ; R. HENDEL, « The Exodus in Biblical Memory », JBL 120 (2001), 601-608 ; N. NA’AMAN, « The Exodus Story : Between Historical Memory and Historiographical Composition », Journal of Ancient Near Eastern Religions 11 (2011), 39-69. 35. I. FINKELSTEIN et T. RÖMER, « Early North Israelite “Memories” on Moab », in J. C. GERTZ, B. M. LEVINSON, D. ROM-SHILONI and K. SCHMID (éd.), The Formation of the Pentateuch : Bridging the Academic Cultures of Europe, Israel, and North America, Tübingen, Mohr Siebeck, 2016, 711-727. 36. A. LEMAIRE, « The Mesha Stele and the Omri Dynasty », in L. L. GRABBE (éd.), Ahab Agonistes : The Rise and Fall of the Omri Dynasty, London, T & T Clark, 2007, 135-144. 37. HALPERN, David’s Secret Demons ; DIETRICH, The Early Monarchy in Israel. 38. M. MAEIR, « The Historical Background and Dating of Amos VI 2 : An Archaeological Perspective from Tell es-Safi/Gath », Vetus Testamentum 54 (2004), 319-334 ; A. M. MAEIR, « The Tell es-Safi/Gath Archaeological Project 1996-2010 : Introduction, Overview and Synopsis of Results », in A. M. MAEIR (éd.), Tell es-Safi/Gath I : The 1996-2005 Seasons Volume I : Text, Wiesbaden, Harrassowitz, 2012, 1-88. 39. MAEIR, « The Historical Background and Dating of Amos VI 2 ». 40. N. NA’AMAN, « David’s Sojourn in Keilah in Light of the Amarna Letters », Vetus Testamentum 60 (2010), 87-97.

41. N. NA’AMAN, « In Search of Reality behind the Account of David’s Wars with Israel’s Neighbors », Israel Exploration Journal 52 (2002), 200-224. 42. Sur cette question, voir I. FINKELSTEIN et N. A. SILBERMAN, David and Solomon : In Search of the Bible’s Sacred Kings and the Roots of the Western Tradition, New York, The Free Press, 2006. 43. NA’AMAN, « David’s Wars with Israel’s Neighbors ». 44. N. NA’AMAN, « The Abandonment of Cult Places in the Kingdoms of Israel and Judah as Acts of Cult Reform », Ugarit-Forschungen 34 (2002), 585-602. 45. M. BROSHI, « The Expansion of Jerusalem in the Reigns of Hezekiah and Manasseh », Israel Exploration Journal 24 (1974), 21-26 ; K. VAN DER TOORN, Family Religion in Babylonia, Syria and Israel, Leiden, Brill, 1996, 339-372 ; W. M. SCHNIEDEWIND, How the Bible Became a Book : The Textualization of Ancient Israel, Cambridge, Cambridge University Press, 2004. 46. Concernant le débat sur cette question, voir I. FINKELSTEIN et N. A. SILBERMAN, « Temple and Dynasty : Hezekiah, the Remaking of Judah and the Rise of the Pan-Israelite Ideology », Journal for the Study of the Old Testament 30 (2006), 259-285 ; N. NA’AMAN, « When and How did Jerusalem become a Great City ? The Rise of Jerusalem as Judah’s Premier City in the Eighth-Seventh Centuries B.C.E. », Bulletin of the American Schools of Oriental Research 347 (2007), 21-56. 47. E. ARIE, « Reconsidering the Iron Age II Strata at Tel Dan : Archaeological and Historical Implications », Tel Aviv 35 (2008), 6-64. Pour le texte biblique, voir A. BERLEJUNG, « Twisting Traditions : Programmatic Absence-Theology for the Northern Kingdom in 1 Kgs 12 : 26-33* (The “sin of Jeroboam”) », Journal of Northwest Semitic Languages 35 (2009), 1-42. 48. Voir NA’AMAN, « Hezekiah and the Kings of Assyria ». 49. F. M. CROSS, From Epic to Canon : History and Literature in Ancient Israel, Baltimore, Johns Hopkins University Press, 1998. 50. I. FINKELSTEIN, « The Expansion of Judah in 2 Chronicles : Territorial Legitimation for the Hasmoneans ? », Zeitschrift für die Alttestamentliche Wissenschaft 127 (2015), 669-695. 51. REDFORD, « An Egyptological Perspective on the Exodus Narrative ». 52. I. FINKELSTEIN, « A Corpus of North-Israelite Texts in the Days of Jeroboam II ? », Hebrew Bible and Ancient Israel 6 (2017), 262-289.

Notes 1. Ces deux sigles désignent l’édition scientifique du Codex de Saint-Pétersbourg sous sa forme actuelle (BHS) et sous une nouvelle forme dont existent déjà quelques fascicules et qui contient davantage d’informations sur les variantes contenues dans d’autres manuscrits ou dans des traductions. 2. A. PELLETIER, Lettre d’Aristée à Philocrate, Paris, Éditions du Cerf, 1962. 3. Deux fragments de son œuvre sont conservés chez Eusèbe, Praeparatio Evangelica VIII, 10 et XIII, 12, et chez Clément d’Alexandrie, Stromates, I, 305. Pour une traduction anglaise voir C. R. HOLLADAY (éd.), Aristobulus, Fragments from Hellenistic Jewish Authors, vol 3, Atlanta, Scholars Press, 1995. 4. Pour plus de détails, voir C. ZAMAGNI, « La tradition sur Moïse d’“Hécatée d’Abdère” d’après Diodore et Photius », in P. BORGEAUD et al. (éd.), Interprétations de Moïse : Égypte, Judée, Grèce et Rome, Leiden, Brill, 2010, 133-169. 5. Voir E. TOV, Textual Criticism of the Hebrew Bible, Minneapolis, Fortress, 2012 (3e éd.), 131 ; M. TILLY, Einführung in die Septuaginta, Darmstadt, Wissenschaftliche Buchgesellschaft, 2005, 26-37 ; T. H. LIM, The Formation of the Jewish Canon, New Haven, Yale University Press, 2013, 74-88. 6. B. DE SPINOZA, Traité théologico-politique, extrait du ch. VIII, traduit par E. DE SAISSET (1948), texte numérisé par S. SCHOEFFERT et D. BOSMAN, édition H. DIAZ : http://spinozaetnous.org/wiki/Trait%C3%A9_th%C3%A9ologico-politique/ChapitreVIII 7. W. M. L. DE WETTE, Opuscula theological, Berlin, G. REIMER, 1830, 149-168. L’original en latin a été traduit en allemand et est aisément accessible dans H. — P. MATHYS, « Wilhelm Martin Leberecht de Wettes Dissertatio critico-exegetica von 1805 », in M. KESSLER et M. WALRAFF (éd.), Biblische Theologie und historisches Denken, Wissenschaftsgeschichtliche Studien : Aus Anlass der 50. Wiederkehr der Basler Promotion von Rudolf Smend, Basel, Schwabe, 2008, 171-211. 8. O. EISSFELDT, The Old Testament : An Introduction, Oxford, Basil Blackwell, 1965, 171. 9. Pour les détails, voir T. RÖMER, « “Higher Criticism” : The Historical and Literary-Critical Approach — with Special Reference to the Pentateuch », in M. SÆBØ (éd.), Hebrew Bible/Old Testament, The History of Its Interpretation, Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, 2013, 31 : 393-423. 10. K. H. GRAF, « Die sogenannte Grundschrift des Pentateuch », Archiv für die wissenschaftliche Erforschung des Alten Testaments 1 (1869), 466-477. 11. J. WELLHAUSEN, Die Composition des Hexateuchs und der historischen Bücher des Alten Testaments (1899), Berlin, de Gruyter, 1963 ; A. KUENEN, A Historical-Critical Inquiry into the Origin and Composition of the Hexateuch, London, Macmillan, 1886. 12. Y. KAUFMANN, The Religion of Israel : From Its Beginnings to the Babylonian Exile, Chicago, University of Chicago Press, 1960. Parmi ses plus célèbres disciples, voir particulièrement J. MILGROM, « The Antiquity of the Priestly Source : A Reply to Joseph Blenkinsopp »,

Zeitschrift für die alttestamentliche Wissenschaft 111 (1999), 10-22, et A. HURVITZ, « Once Again : The Linguistic Profile of the Priestly Material in the Pentateuch and Its Historical Age : A Response to J. Blenkinsopp », Zeitschrift für die alttestamentliche Wissenschaft 112 (2000), 180-191. Pour une réévaluation critique, voir E. MEYER, « Dating the Priestly Text in the PreExilic Period : Some Remarks about Anachronistic Slips and Other Obstacles », Verbum et Ecclesia 31 (2010), 6, http://www.ve.org.za/index_php/VE/article/view/423/475 (consulté le 02/03/2015). 13. Pour une vue d’ensemble sur la recherche européenne sur le Pentateuque, voir T. B. DOZEMAN et K. SCHMID (éd.), A Farewell to the Yahwist ? The Composition of the Pentateuch in Recent European Interpretation, Atlanta, Society of Biblical Literature, 2006, et C. NIHAN et T. RÖMER, « Le débat actuel sur la formation du Pentateuque », in T. RÖMER et al. (éd), Introduction à l’Ancien Testament (2004), Genève, Labor et Fides, 2009 (2e éd.), p. 158-184. 14. G. VON RAD, The Problem of the Hexateuch and Other Essays (trad. E. A. TRUEMAN), London, SCM, 1984 (original allemand 1938), 1-78 (71-73) ; H. W. WOLFF, « The Kerygma of the Yahwist », in W. BRUEGGEMANN et H. W. WOLFF (éd.), The Vitality of Old Testament Tradition, Atlanta, John Knox, 1975 ; orig. allemand, 1964, 41-82 (56). 15. J. -L. SKA, « L’appel d’Abraham et l’acte de naissance d’Israël. Genèse 12,1-4a », in M. VERVENNE et J. LUST (éd.), Deuteronomy and Deuteronomic Literature. Festschrift C.H.W. Brekelmans, Leuven, University Press — Peeters, 1997, 367-389. 16. M. KÖCKERT, Vätergott und Väterverheißungen : Eine Auseinandersetzung mit Albrecht Alt und seinen Erben, Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, 1988, 276-299. 17. I. FINKELSTEIN et T. RÖMER, « Abraham », dans le présent volume. 18. Il y a, bien sûr, quelques commentaires historiques intéressants, comme par exemple en Nb 13,22 « Hébron avait été fondée sept ans avant Tanis d’Égypte », mais comme le fait remarquer B. A. LEVINE, Numbers 1-20, New York, Doubleday, 1993, 354, cette information ne devrait pas être prise dans un sens historique : « This statement merely reflects the image of Tanis held in the first millennium BCE, when it was thought that this town in the northern delta had served as a capital city during the Ramesside period. » 19. Voir à ce sujet les très importants commentaires de C. EDENBURG, Dismembering the Whole : Composition and Purpose of Judges 19-21, Atlanta, Society of Biblical Literature, 2016, 115-123. 20. E. ULLENDORF, Is Biblical Hebrew a Language ? Studies in Semitic Languages and Civilizations, Wiesbaden, Harrassowitz, 1977, 3-17 ; E. A. KNAUF, « War Biblisch-Hebräisch eine Sprache ? Empirische Gesichtspunkte zur linguistischen Annäherung an die Sprache der althebräischen Literatur (1990) », in K. SCHMID et al. (éd.), Data and Debates : Essays in the History and Culture of Israel and Its Neighbors in Antiquity, Münster, Ugarit-Verlag, 2013, 411423 (421) : « l’hébreu biblique n’a jamais été une langue parlée. » 21. KNAUF, « War Biblisch-Hebräisch eine Sprache ? » remet même en question la plausibilité d’un tel concept. 22. I. YOUNG, « What Is “Late Biblical Hebrew” ? », in E. BEN ZVI et al. (éd.), A Palimpsest : Rhetoric, Ideology, Stylistics, and Language Relating to Persian Israel, Piscataway, Gorgias Press,

2009, 253-268 (258-259). 23. EDENBURG, Dismembering ; 120-121. 24. Voir I. YOUNG, « What Do We Actually Know about Ancient Hebrew », Australian Journal of Jewish Studies 27 (2013), 11-31, qui remet en question ladite théorie des trois étapes (hébreu classique, hébreu tardif et hébreu mishnaïque), voir également des appréciations différentes du livre de Job par A. HURVITZ, « The Date of the Prose Tale of Job Linguistically Reconsidered », Harvard Theological Review 67 (1974), 17-34, et par I. YOUNG, « Is the Prose Tale of Job in Late Biblical Hebrew ? », Vetus Testqmentum 59 (2009), 606-629. 25. M. EHRENSVÄRD, « Once Again : The Problem of Dating Biblical Hebrew », Scandinavian Journal of Old Testament 11 (1997), 29-40. 26. T. VEIJOLA, « Das Opfer des Abraham — Paradigma des Glaubens aus dem nachexilischen Zeitalter », Zeitschrift für Theologie und Kirche 85 (1988), 129-164 ; K. SCHMID, « Die Rückgabe der Verheißungsgabe : Der “heilsgeschichtliche” Sinn von Gen 22 im Horizont innerbiblischer Exegese », in M. WITTE (éd.), Gott und Mensch im Dialog : Festschrift für Otto Kaiser zum 80. Geburtstag, Berlin, de Gruyter, 2004, 271-300. 27. Pour une histoire de la recherche jusqu’en 2000, voir K. SCHMID, « Israel am Sinai : Etappen der Forschungsgeschichte zu Ex 32-34 in seinen Kontexten », in M. KÖCKERT et E. BLUM (éd.), Gottes Volk am Sinai : Untersuchungen zu Ex 32-34 und Dtn 9-10, Gütersloh, Kaiser, 2001, 9-39. 28. G. N. KNOPPERS, « Aaron’s Calf and Jeroboam’s Calves », in A. B. BECK et al. (éd.), Fortunate the Eyes That See : Essays in Honor of David Noel Freedman in Celebration of His Seventieth Birthday, Grand Rapids, Eerdmans, 1995, 92-104. 29. T. RÖMER, « Le jugement de Dieu et la chute d’Israël selon Exode 32 », Foi et Vie 91 (1992), 3-14. 30. T. B. DOZEMAN, Exodus, Grand Rapids, Eerdmans, 2009, 700. Voir aussi T. B. DOZEMAN, « The Composition of Ex 32 within the Context of the Enneateuch », in M. BECK et U. SCHORN (éd.), Auf dem Weg zur Endgestalt von Genesis bis II Regum : Festschrift für Hans-Christoph Schmitt zu seinem 65. Geburtstag, Berlin, de Gruyter, 2006, 175-189. 31. H. VORLÄNDER, Die Entstehungszeit des jehowistischen Geschichtswerkes, Bern, Lang, 1978. 32. Pour plus de détails, voir T. RÖMER, « Recherches actuelles sur le cycle d’Abraham », in A. WENIN (éd.), Studies in the Book of Genesis. Literature, Redaction and History, Leuven, University Press — Peeters, 2001, 179-211. 33. Voir aussi notre article sur le cycle d’Abraham dans ce volume. 34. Voir récemment, S. RAMOND, Les leçons et les énigmes du passé : Une exégèse intra-biblique des psaumes historiques, Berlin, de Gruyter, 2014, 154-159. 35. D. B. REDFORD, A Study of the Biblical Story of Joseph (Genesis 37-50), Leiden, Brill, 1970. 36. Cette date pour l’histoire de Joseph devient de plus en plus fréquente dans la recherche européenne ; voir T. RÖMER, « Joseph approché : Source du cycle, corpus, unité », in O. ABEL et F. SMYTH (éd.), Le livre de traverse : De l’exégèse biblique à l’anthropologie, Paris, Cerf, 1992, 73-85 ; A. CATASTINI, Storia di Guiseppe (Genesi 37-50), Venise, Marsilio, 1994 ; J.-M. HUSSER, « L’histoire de Joseph », in M. QUESNEL et P. GRUSON (éd.), La Bible et sa culture : Ancien

Testament, Paris, Desclée, 2000, 112-122 ; C. UEHLINGER, « Fratrie, filiations et paternités dans l’histoire de Joseph (Genèse 37-50*) », in J.-D. MACCHI et T. RÖMER (éd.), Jacob : Commentaire à plusieurs voix de Gen. 25-36 : Mélanges offerts à Albert de Pury, Genève, Labor et Fides, 2001, 303-328 ; M. FIEGER et S. HODEL-HOENES, Der Einzug in Ägypten : Ein Beitrag zur alttestamentlichen Josefsgeschichte, Bern, Lang, 2007, 375-376 ; J. EBACH, Genesis 37-50 Freiburg im Breisgau, Herder, 2007, 693 ; D. NOCQUET, « L’Égypte, une autre terre de salut ? Une lecture de Gn 45,1-46,7 », Études Théologiques et Religieuses 84 (2009), 461-480 ; H. C. P. KIM, « Reading the Joseph Story (Genesis 37-50) as a Diaspora Narrative », Catholic Biblical Quarterly 75 (2013), 219-238 37. M. NOTH, Überlieferungsgeschichtliche Studien : Die sammelnden und bearbeitenden Geschichtswerke im Alten Testament, Darmstadt, Wissenschaftliche Buchgesellschaft, 1967 )1ère éd., 1943), et traduction anglaise The Deuteronomistic History (trad. J. DOULL et al.), Sheffield, Sheffield Academic, 1991 (2e éd.), 26, 128. 38. A. G. AULD, Samuel at the Threshold : Selected Works of Graeme Auld, Burlington, Ashgate, 2004, 45-61 (61). 39. Pour plus de détails voir T. RÖMER, La première histoire d’Israël. L’École deutéronomiste à l’œuvre, Genève Labor et Fides, 2007. 40. Une telle date pour Genèse 10 est proposée par A. DE PURY, « Sem, Cham et Japhet : De la fraternité à l’esclavage », in A. KOLDE et al. (éd.), κορυφαίῳ άνδρί : Mélanges offerts à André Hurst, Genève, Droz, 2005, 495-508, qui considère les textes non-P de ce chapitre comme étant post-P. 41. C. TUPLIN, Achaemenid Studies, Stuttgart, Steiner, 1996, 27. D’autres textes peuvent faire référence aux Ioniens ; voir A. M. BAGG, Die Orts-und Gewässernamen der neuassyrischen Zeit, Teil 1 : Die Levante, Wiesbaden, L. Reichert, 2007, 123-124. Pour le contexte historique, voir R. ROLLINGER, « The Ancient Greeks and the Impact of the Ancient Near East Textual Evidence and Historical Perspective (ca. 750-650 BC) », in R. M. WHITING (éd.), Mythology and Mythologies : Methodological Approaches to Intercultural Influence, Helsinki, Neo-Assyrian Text Corpus Project, 2001, 233-264. 42. Voir la discussion en J. C. GERTZ, « Beobachtungen zum literarischen Charakter und zum geistesgeschichtlichen Ort der nichtpriesterlichen Sintfluterzählung », in M. BECK et U. SCHORN (éd.), Auf dem Weg zur Endgestalt von Genesis bis II Regum : Festschrift für Hans-Christoph Schmitt zu seinem 65. Geburtstag, Berlin, de Gruyter, 2006, 41-57 ; T. RÖMER, « La création des hommes et leur multiplication. Lecture comparée d’Athra-Hasis, de Gilgamesh XI et de Genèse 1 ; 6-9 », Semitica 55, 2013, 147-156. 43. E. A. KNAUF, Ismael : Untersuchungen zur Geschichte Palästinas und Nordarabiens im 1. Jahrtausend v. Chr., 2e éd., Wiesbaden, Harrassowitz, 1989, 1-16, 25-55 ; voir également FINKELSTEIN et RÖMER, dans ce volume et récemment E. A. KNAUF, « Ishmael, I : Hebrew Bible/Old Testament », Encyclopedia of the Bible and Its Reception 13 (2016), cols. 352-355 (353-354). 44. M. GERHARDS, Die Aussetzungsgeschichte des Mose : Literar-und traditionsgeschichtliche Untersuchungen zu einem Schlüsseltext des nichtpriesterlichen Tetrateuch, Neukirchen-Vluyn, Neukirchener Verlag, 2006, 149-259.

45. B. LEWIS, The Sargon Legend : A Study of the Akkadian Text of the Tale and the Tale of the Hero Who Was Exposed at Birth, Cambridge, American Schools of Oriental Research, 1980. 46. E. OTTO, Das Gesetz des Mose, Darmstadt, Wissenschaftliche Buchgesellschaft, 2007, 182185. Les chercheurs mettent parfois en exergue les parallèles entre Exode 2 et la légende de la naissance de Cyrus, transmise par Hérodote, voir par exemple, H. ZLOTNICK-SIVAN, « Moses the Persian ? Exodus 2, the “Other” and Biblical “Mnemohistory” », Zeitschrift für die alttestamentliche Wissenschaft 116 (2004), 189-205, mais ces parallèles sont moins convaincants. 47. G. BARKAY, « The Priestly Benediction on Silver Plaques from Ketef Hinnom in Jerusalem », Tel Aviv 19 (1992), 139-192, et G. BARKAY et al., « The Amulets from Ketef Hinnom : A New Edition and Evaluation », Bulletin of the American Schools of Oriental Reasearch 334 (2004), 41-71. 48. E. WAALER, « A Revised Date for Pentateuchal Texts ? The Evidence from Ketef Hinnom », Theologische Bibliothek 53 (2002), 29-55 ; voir aussi la présentation en J. D. SMOAK, The Priestly Blessing in Inscription and Scripture : The Early History of Numbers 6 : 24-26, New York, Oxford University Press, 2015, 61-88. 49. Pour une date du VIe ou du Ve siècle, voir par exemple, A. BERLEJUNG, « Ein Programm fürs Leben : Theologisches Wort und anthropologischer Ort der Silberamulette von Ketef Hinnom », Zeitschrift für die alttestamentliche Wissenschaft 120 (2008), 204-230, et N. NA’AMAN, « A New Appraisal of the Silver Amulets from Ketef Hinnom », Israel Exploration Journal 61 (2011), 184-195. 50. H. U. STEYMANS, Deuteronomium 28 und die adê zur Thronfolgeregelung Asarhaddons : Segen und Fluch im Alten Orient und in Israel, Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, 1995 ; H. U. STEYMANS, « Die neuassyrische Vertragsrhetorik der “Vassal Treaties of Esarhaddon” und das Deuteronomium », in G. BRAULIK (éd.), Das Deuteronomium, Frankfurt am Main, Lang, 2003, 89-152 ; E. OTTO, Das Deuteronomium : Politische Theologie und Rechtsreform in Juda und Assyrien, Berlin, de Gruyter, 1999. 51. R. G. KRATZ, « Der literarische Ort des Deuteronomiums », in R. G. KRATZ et H. SPIECKERMANN (éd.), Liebe und Gebot : Studien zum Deuteronomium ; Festschrift zum 70. Geburtstag von Lothar Perlitt, Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, 2000, 101-120 ; J. PAKKALA, « The Date of the Oldest Edition of Deuteronomy », Zeitschrift für die alttestamentliche Wissenschaft 121 (2009), 388-401. 52. Cette date est confortée par la récente découverte d’une copie du serment de loyauté d’Assarhaddon dans le temple de Tayinat. Cette découverte rend tout à fait plausible qu’il y ait eu également une copie du traité de vassalité d’Assarhaddon (= TVA) à Jérusalem. Voir H. U. STEYMANS, « Deuteronomy 28 and Tell Tayinat », Verbum et Ecclesia 34 (2013), 13, http://www.ve.org.za/index php/VE/article/view/870 (consulté le 02/16/2016). Pour le texte, voir J. LAUINGER, « Esarhaddon’s Succession Treaty at Tell Tayinat : Text and Commentary », Journal of Cuneiform Studies 64 (2012), 87-123. Bien sûr, on peut aussi mettre en évidence des parallèles entre le Deutéronome et les traités de vassalité hittites, comme le fit J. BERMAN, « Histories Twice Told : Deuteronomy 1-3 and the Hittite Treaty Prologue Tradition », Journal of Biblical Literature 132 (2013), 229-250, mais ces parallèles ne sont pas aussi proches que ceux que l’on peut établir avec le TVA et ils montrent juste que la

rhétorique de vassalité néo-assyrienne fut probablement influencée par des précurseurs occidentaux, comme les traités hittites. 53. B. M. LEVINSON, Deuteronomy and the Hermeneutics of Legal Innovation, New York, Oxford University Press, 1997. Cette idée est acceptée par la majorité des chercheurs ; pour différents points de vue, voir J. VAN SETERS, A Law Book for the Diaspora : Revision in the Study of the Covenant Code, Oxford, Oxford University Press, 2003, et, dans une perspective encore différente, W. OSWALD, Israel am Gottesberg : Eine Untersuchung zur Literaturgeschichte der vorderen Sinaiperikope Ex 19-24 und deren historischem Hintergrund, Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, 1998, et J. U. RO, « The Portrayal of Judean Communities in Persian Era Palestine through the Lens of the Covenant Code », Semitica 56 (2014), 249-289.

Notes 1. Sur les débuts de la recherche historico-critique sur les patriarches au XIXe siècle, voir J.L. SKA, « Abraham between History and Poetry », Hebrew Bible and Ancient Israel 3 (2014), 2442. 2. G. VON RAD, « The Form Critical Problem of the Hexateuch », in The Problem of the Hexateuch and Other Essays, Edinburgh, Oliver & Boyd Ltd., 1984 (original 1965), 1-78 ; M. NOTH, A History of Pentateuchal Traditions, Atlanta, Scholars Press, 1981 (original 1972). 3. H. W. WOLFF, « Das Kerygma des Jahwisten », Evangelische Theologie 24 (1964), 73-98. 4. A. LEMAIRE, « Cycle primitif d’Abraham et contexte géographico-politique », in A. LEMAIRE et B. OTZEN (éd.), History and Traditions of Early Israel. Studies Presented to Eduard Nielsen, Leiden, Brill, 1993, 62-75. 5. L’idée que la description de la terre promise en Gn 15,18 reflèterait les frontières de l’empire davidique ou salomonien est typique d’une telle argumentation circulaire. La théorie concernant un tel empire est uniquement fondée sur certains textes bibliques (mais pas sur tous). La description d’un « territoire » s’étendant de la rivière d’Égypte à l’Euphrate reflète des réalités administratives de la période perse (voir aussi 2 R 24,7). Il existe en effet des tentatives de décrire Abraham comme un nouveau David ou pourvu d’attributs royaux, mais cela n’apparaît que dans des textes tardifs, post-monarchiques, qui cherchent à le présenter comme un substitut de la dynastie davidique ; voir par exemple, M. KÖCKERT, Vätergott und Väterverheißungen. Eine Auseinandersetzung mit Albrecht Alt und seinen Erben, Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, 1988, 276-299 et T. RÖMER, « Abraham and the Law and the Prophets », in P. CARSTENS et N. P. LEMCHE (éd.), The Reception and Remembrance of Abraham, Piscataway, Gorgias, 2011, 103-118. 6. Voir une présentation radicalement critique de ces approches chez J. VAN SETERS, Abraham in History and Tradition, New Haven, Yale University Press, 1975. 7. Voir la discussion et la critique dans I. FINKELSTEIN et N. A. SILBERMAN, The Bible Unearthed. Archeology’s New Vision of Ancient Israel and the Origin of its Sacred Texts, New York, Free Press, 2001. 8. J.-L. SKA, « The Call of Abraham and Israel’s Birth-certificate (Gen 12 : 1-4a) », in idem, The Exegesis of the Pentateuch, Tübingen, Mohr Siebeck, 2009, 46-66. 9. C’est, par exemple, l’opinion d’A. DE PURY, qui soutient que le niveau P du récit d’Abraham est le plus ancien, le datant du début de la période perse ; tous les autres textes non-P auraient été insérés plus tard ; voir A. DE PURY, « Abraham : The Priestly Writer’s “Ecumenical” Ancestor », in S. L. MCKENZIE et T. RÖMER (éd.), Rethinking the Foundations. Historiography in the Ancient World and in the Bible. Essays in Honour of John Van Seters, Berlin, de Gruyter, 2000, 163-181. 10. Voir récemment P. WAJDENBAUM, Argonauts of the Desert : Structural Analysis of the Hebrew Bible, Sheffield, Equinox, 2011, qui soutient que tout l’Ennéateuque reprend une mythologie hellénistique, mais n’offre pas d’analyse précise du texte hébreu.

11. On pourrait bien sûr argumenter que les traditions liées à Jacob reflèteraient les revendications des Samaritains. Aux Ve et IVe siècles, l’insistance sur des traditions nordistes dans le Pentateuque sert certainement à rendre la Torah « acceptable » par les habitants du Nord (voir également la fin du Deutéronome). Mais si l’on considère la complexité des matériaux réunis en Genèse 25-37, on ne peut pas soutenir que cela fut le point de départ de l’édition des traditions liées à Jacob. 12. J.-D. MACCHI, Israël et ses tribus selon Genèse 49, Fribourg, Presses universitaires, 1999, 119-128. 13. I. FINKELSTEIN, « The Rise of Jerusalem and Judah : The Missing Link », Levant 33 (2001), 105-115 ; A. FANTALKIN et I. FINKELSTEIN, « The Sheshonq I Campaign and the 8th Century Earthquake : More on the Archaeology and History of the South in the Iron I-Iron IIA », Tel Aviv 33 (2006), 18-42 ; O. SERGI, « Judah’s Expansion in Historical Context », Tel Aviv 40 (2013), 226-246. 14. D. W. JAMIESON-DRAKE, Scribes and Schools in Monarchic Judah, Sheffield, Almond Press, 1991 ; I. FINKELSTEIN, « The Settlement History of Jerusalem in the Eighth and Seventh Centuries BCE » Revue Biblique 115 (2008), 499-515 ; I. FINKELSTEIN et N. A. SILBERMAN, « Temple and Dynasty : Hezekiah, the Remaking of Judah and the Rise of the Pan-Israelite Ideology » Journal for the Study of the Old Testament 30 (2006), 259-285. 15. Pour une vue d’ensemble, voir I. FINKELSTEIN, Le Royaume biblique oublié, Paris, Odile Jacob, 2013. 16. M. KÖCKERT, « Wie wurden Abraham- und Jakobüberlieferung zu einer “Vätergeschichte” verbunden ? », Hebrew Bible and Ancient Israel 3 (2014), 43-66. 17. A. DE PURY, « The Jacob Story and the Beginning of the Formation of the Pentateuch », in T. B. DOZEMAN et K. SCHMID (éd.), A Farewell to the Yahwist ? The Composition of the Pentateuch in Recent European Interpretation, Atlanta, Society of Biblical Literature, 2006, 5172 ; E. BLUM, « Hosea 12 und die Pentateuchuberlieferungen », in A. C. HAGEDORN et H. PFEIFFER (éd.), Die Erzväter in der biblischen Tradition. Festschrift für Matthias Köckert, Berlin, de Gruyter, 2009, 291-321. Voir, néanmoins, H. PFEIFFER, Das Heiligtum von Bethel im Spiegel des Hoseabuches, Gottingen, Vandenhoeck & Ruprecht, 1999 ; S. RUDNIG-ZELT, Hoseastudien. Redaktionskritische Untersuchungen zur Genese des Hoseabuches, Gottingen, Vandenhoeck & Ruprecht, 2006 et J. M. BOS, Reconsidering the Date and Provenance of the Book of Hosea : The Case for Persian Period Yehud, New York, Bloomsbury, 2013. Tous ces spécialistes proposent une date bien plus tardive. Là encore l’argumentation semble circulaire : du fait que les textes du Pentateuque sont « tardifs », toute allusion les concernant doit aussi être tardive. Mais même si Osée 12 est le résultat d’interventions rédactionnelles, elles peuvent cependant contenir des matériaux anciens. 18. Des considérations de critique textuelle suggèrent un ʾel originel. 19. E. A. KNAUF, « Towards an Archaeology of the Hexateuch », in J. C. GERTZ, K. SCHMID et M. WITTE (éd.), Abschied vom Jahwisten. Die Komposition des Hexateuch in der jüngsten Diskussion, Berlin, de Gruyter, 2002, 275-294. 20. A. R. MILLARD, « Assyrians and Arameans », Iraq 45 (1983), 101-108.

21. O. EISSFELDT, « Das Alte Testament im Licht der safatenischen Inschriften », Zeitschrift der Deutschen morgenländischen Gesellschaft 104 (1954), 88-118. Sur le territoire israélite de Galaad, y compris la localisation de Miçpa, voir I. FINKELSTEIN, I. KOCH et O. LIPSCHITS, « The Biblical Gilead : Observations on Identifications, Geographic Divisions and Territorial History », Ugarit-Forschungen 43 (2012), 131-159. 22. I. FINKELSTEIN, « Stages in the Territorial Expansion of the Northern Kingdom », Vetus Testqmentum 61 (2011), 227-242. 23. Nous revenons sur cette question dans l’article traduit en français dans le présent volume, « Observations sur les contextes historiques de l’histoire de Jacob dans la Genèse ». 24. FINKELSTEIN, « The Rise of Jerusalem and Judah » ; FANTALKIN et FINKELSTEIN, « The Sheshonq I Campaign » ; SERGI, « Judah’s Expansion in Historical Context ». 25. Par pure convenance nous employons toujours le nom « Abraham ». L’histoire biblique présente cet ancêtre sous le nom d’« Abram » (qui est un nom sémitique connu), changé en « Abraham » en Genèse 17, dans les textes P, — une construction théologique de l’auteur de P. La transformation du nom de l’ancêtre peut être mise en relation avec la figure royale d’Abraham en Genèse 17 (un roi ayant souvent deux noms) ou une volonté de mettre cet ancêtre du Sud en parallèle avec Jacob, dont le récit contient lui aussi un changement de nom. 26. Il est intéressant de noter qu’Absalom, selon 2 S 15,7, visite un lieu de culte à Hébron. S’agirait-il du même lieu sacré lié à la figure d’Abraham ? 27. Ce qui devrait sans doute être traduit par « Makpéla surplombant Mamré ». 28. VAN SETERS, Abraham in History and Tradition, 293-295. 29. Il a souvent été noté que Flavius Josèphe semble avoir été confus. Dans Antiquités I, 186 il explique qu’Abraham résidait près d’Hébron, près d’un chêne nommé ogyges. Dans La Guerre des Juifs IV, 533, il mentionne un térébinthe situé à 6 stades d’Hébron. Apparemment, dans les Antiquités, il reprend le récit biblique, alors que, dans La Guerre des Juifs, il se réfère au lieu de culte existant de son temps. 30. B. J. DIEBNER, « “Schaut Abraham an, euren Vater” — Spekulationen über die “Haftpunkte” der Abraham-Tradition “Mamre” und “Machpela” », Dielheimer Blätter zum Alten Testament 8 (1975), 18-35. 31. Pour plus de détails, voir T. RÖMER, « Abraham Traditions in the Hebrew Bible outside the Book of Genesis », in C. A. EVANS, J. N. LOHR et D. L. PETERSEN (éd.), The Book of Genesis. Composition, Reception, and Interpretation, Leiden, Brill, 2012, 159-180. 32. T. RÖMER, Israels Väter. Untersuchungen zur Väterthematik im Deuteronomium und in der deuteronomistischen Tradition, Freiburg (CH), Universitätsverlag, 1990, 506-513. 33. Ez 33,28 mentionne les « montagnes d’Israël », mais ici Israël signifie Juda, comme dans le v. 24. 34. (manquant en Syr.) peut-être une glose pour expliquer l’hapax , dont la sonorité rappelle Makpéla. 35. Pour la vocalisation du texte massorétique rendu par un temps du passé dans les différentes versions, voir J. GOLDINGAY et D. F. PAYNE, A Critical and Exegetical Commentary on Isaiah 40-55. Volume II, Londres, T&T Clark, 2006, 224. 1QEs se lit « Je l’ai fait / le fais

fructifier » (), ce qui convient parfaitement au contexte. Le couple et apparaît particulièrement dans des textes P ou des textes plus tardifs de la Genèse et de l’Exode 1,7 ; Lv 26,9 (au hiph’il, seulement en Gn 17,20 ; 28,3 ; 48,4 ; Lv 26,9). Il est difficile de déterminer si tel était le texte originel. On peut argumenter que le TM a altéré le texte afin de le rendre cohérent avec Gn 12,2. D’un autre côté, la lecture du texte de Qumrân peut aussi être considérée comme une tentative de mettre le texte en parallèle avec une expression standardisée de la Genèse (voir E. Y. KUTSCHER, The Language and Linguistic Background of the Isaiah Scroll, Leiden, Brill, 1974, 275-276). au hiph’il est utilisé en relation avec Abraham (et Ismaël) dans le texte sacerdotal Gn 17,6 et 20. 36. M. KÖCKERT, « Die Geschichte der Abrahamuberlieferung », in A. LEMAIRE (éd.), Congress Volume Leiden 2004, Leiden, Brill, 2006, 103-128, 110. 37. G. FOHRER, Jesaja 40-66. Deuterojesaja ; Tritojesaja, Zürich, Theologischer Verlag Zürich, 143. 38. Voir par exemple, P. BAR-ADON, Excavations in the Judean Desert, Jerusalem, Israel Antiquities Authority, 1989 (Hébreu) ; L. E. STAGER, Ancient Agriculture in the Judaean Desert, A Case Study of the Buqecah Valley, thèse de doctorat, Harvard University, 1975. 39. E. BLUM, Die Komposition der Vätergeschichte, Neukirchen-Vluyn, Neukirchener Verlag, 1984, 405-410 ; J. WÖHRLE, « Abraham und das Leben im Ausland. Zur Intention der AhnfrauErzahlung in Gen 12,10-20 und ihrer frühen inner- und außerbiblischen Rezeption », Biblische Notizen 151 (2011), 23-46. 40. VAN SETERS, Abraham, 166-183. 41. Guérar est pourtant mentionné également dans 2 Ch 14,13-14 (dans la description du règne d’Asa, qui n’a pas de parallèle dans les livres des Rois). L’auteur des Chroniques peut avoir pris ce nom dans le livre de la Genèse, dont il était familier. 42. I. FINKELSTEIN, « The Archaeology of the Days of Manasseh », in M. D. COOGAN, J. C. EXUM, et L. E. STAGER (éd.), Scripture and Other Artifacts : Essays on the Bible and Archaeology in Honor of Philip J. King, Louisville, Westminster John Knox, 1994, 169-187 ; I. FINKELSTEIN et N. NA’AMAN, « The Shephelah of Judah in the Late 8th and Early 7th century BCE : An Alternative View », Tel Aviv 31 (2004), 60-79 ; contra O. LIPSCHITS, O. SERGI et I. KOCH, « Judahite Stamped and Incised Jar Handles : A Tool for Studying the History of Late Monarchic Judah », Tel Aviv 38 (2011), 5-41. 43. E. D. OREN, « Haror, Tel », The New Encyclopedia of Archaeological Excavations in the Holy Land. Volume 2, Jerusalem, Israel Exploration Society, 1993, 583-584. Le site fut également occupé à la période perse. 44. Gn 20,8-21, ce texte, qui a souvent été considéré dans le contexte de l’hypothèse documentaire comme le parallèle E du récit J de Genèse 16, est en fait un midrash tardif de Genèse 16 dont l’objectif est de préparer au récit de la mise à l’épreuve d’Abraham en Genèse 22 ; voir entre autres, E. A. KNAUF, Ismael. Untersuchungen zur Geschichte Palästinas und Nordarabiens im 1. Jahrtausend v. Chr., Wiesbaden, Harrassowitz, 1989 (2de éd.), 16-25 et 140. 45. Pour une présentation aisée de ces textes, voir J. RETSÖ, The Arabs in Antiquity : Their History from the Assyrians to the Umayyads, London, Routledge, 2003, 165-168.

46. KNAUF, Ismael, 1-16 and 25-55. 47. Pour le site, voir R. COHEN et H. BERNICK-GREENBERG (éd.), Excavations at Kadesh Barnea (Tell el-Qudeirat) 1976-1982, Jérusalem, Israel Antiquities Authority, 2007 ; pour les inscriptions hébraïques, voir A. LEMAIRE et P. VERNUS, « Les ostraca paléo-hébreux de QadeshBarnéa », Orientalia 49 (1980), 341-345 ; idem, « L’ostracon paléo-hébreu No. 6 de Tell Qudeirat (Qadesh-Barnéa) » in M. GÖRG (éd.), Fontes atque pontes. Fine Festgabe für Hellmut Brunner, Wiesbaden, Harrassowitz, 1983, 302-326 ; R. COHEN, « Inscriptions », in Excavations at Kadesh Barnea (Tell el-Qudeirat) 1976-1982 in COHEN et BERNICK-GREENBERG, Excavations at Kadesh Barnea, 245-254. 48. Ex 2,24 ; 3,6.15.16 ; 4,5 ; 6,3.8 ; 32,13* ; 33,1 ; Lv 26,42 ; Nb 32,11 ; Dt 1,8 ; 6,10 ; 9,5.27 ; 29,12 ; 30,20 ; 34,4 ; Jos 24,2-5 ; 1 R 18,36* ; 2 R 13,23 ; Jr 33,26 (TM) ; 1 Ch 1,2734* ; 1 Ch 29.18* ; 2 Ch 30,6* ; Ps 105,9-10 (= 1 Ch 16,16-17). 49. C’est l’opinion de J. WELLHAUSEN, Prolegomena to the History of Israel. With a reprint of the article Israel from the « Encyclopaedia Britannica », Edinburgh, A. & C. Black, 1885 ; voir aussi la réimpression de ce titre chez New York, Meridian 1957, 319-320 ; H. W. WOLFF, Joel and Amos : A Commentary on the Books of the Prophets Joel and Amos, Philadelphia, Fortress Press, 1984, 301-302. Les publications récentes proposent souvent une date tardive, voir par exemple S. PETRY, Die Entgrenzung JHWHs : Monolatrie, Bilderverbot und Monotheismus im Deuteronomium, in Deuterojesaja und im Ezechielbuch, Tübingen, Mohr Siebeck, 2007, 134 — une option qui ne réussit toutefois pas à offrir une explication plus adéquate de cet usage singulier de « Isaac ». 50. M. NOTH, A History of Pentateuchal Traditions, Englewood Cliffs, Prentice Hall, 1972 (réimpression Atlanta, Scholars Press, 1981, 103-107). 51. Voir à ce sujet T. RÖMER, « Quand les dieux rendent visite aux hommes (Gn 18-19). Abraham, Lot et la mythologie grecque et proche-orientale », in F. PRESCENDI et Y. VOLOKHINE (éd.), Dans le laboratoire de l’historien des religions. Mélanges offerts à Philippe Borgeaud, Genève, Labor et Fides, 2011, 615-626. 52. Wellhausen pensait que, contrairement à Isaac, Abraham était « a free creation of unconscious art. He is probably the youngest figure in the company » (Prolegomena, 320). Pour des détails supplémentaires concernant Isaac voir H. SCHMID, Die Gestalt des Isaak. Ihr Verhältnis zur Abraham- und Jakobtradition, Darmstadt, Wissenschaftliche Buchgesellschaft, 1991. 53. N. NA’AMAN, « An Assyrian Residence at Ramat Rahel ? », Tel Aviv 28 (2001), 267-270. 54. Cette présence est démontrée par les ostraca hébreux trouvés à Qadesh-Barnéa, qui conviennent à une date ca. 600 av. J.-C., et par plusieurs ostraca contemporains d’Arad, qui semblent faire référence à au transfert par Juda d’unités militaires dans le désert. Pour les premiers ostraca, voir le résumé fait par COHEN, « Inscriptions » ; pour les deuxièmes, voir Y. AHARONI, Arad Inscriptions, Jérusalem, Israel Exploration Society, 1981, 15, 145. 55. VAN SETERS, Abraham, 299-300. 56. La liste débute par une description d’une sorte de « guerre mondiale ». Les noms aux w. 57 peuvent être expliqués dans le contexte des réalités du « siècle assyrien ». Les sites du sud, El-Paran = Elath, Enmishpat = Qadesh-Barnéa, et Hazazon-Tamar = Ein Hazeva, sont les trois postes militaires des Assyriens le long des routes stratégiques du commerce arabe, où des

soldats et des administrateurs originaires de Juda avaient été postés. Ashterot-Qarnayim était importante en tant que capitale provinciale assyrienne. L’idée d’une invasion venant du nord provient elle aussi des périodes assyrienne et babylonienne. Ces versets ont des parallèles en Dt 2,9-12 et peuvent y avoir été empruntés. Quoi qu’il en soit, Gn 14,1-11* reflète une sorte d’exercice scribal du VIIe siècle, réutilisé lorsque Genèse 14 fut composé (au plus tôt à la période perse). 57. W. SCHATZ, Genèse 14 : une recherche, Bern, P. Lang, 1972, offre une vue d’ensemble de l’histoire de la recherche ; B. ZIEMER, Abram — Abraham. Kompositionsgeschichtliche Untersuchungen zu Genesis 14, 15 und 17, Berlin, de Gruyter, 2005, démontre une fois encore la composition tardive de Genèse 14, mais son argumentation sur le fait que ce chapitre serait plus tardif que Genèse 15 n’est pas convaincante, étant donné que ce dernier présuppose Genèse 14. C’est la raison pour laquelle J. CH. GERTZ, qui souhaite lui aussi dater Genèse 15 avant Genèse 14, doit postuler, sans argumentation diachronique, que tous les liens de Genèse 15 avec Genèse 14 furent ajoutés plus tard. C’est, là encore, un cas de raisonnement circulaire ; voir J. C. GERTZ, « Abraham, Mose und der Exodus. Beobachtungen zur Redaktionsgeschichte von Genesis 15 », in J. C. GERTZ, K. SCHMID et M. WITTE (éd.), Abschied vom Jahwisten. Die Komposition des Hexateuch in der jüngsten Diskussion, Berlin, de Gruyter, 2002, 63-81.

Notes 1. Pour les récits des patriarches, voir L. RUPPERT, Genesis. Ein kritischer und theologischer Kommentar, 2. Teilband : Gen 11, 26-25,18, Würzburg, Echter Verlag, 2002. 2. J. S. BADEN, The Composition of the Pentateuch : Renewing the Documentary Hypothesis, New Haven, Yale University Press, 2012. 3. J. VAN SETERS, Prologue to History. The Yahwist as Historian in Genesis, Zürich, Theologisher Verlag, 1992, et, récemment, idem, The Yahwist : A Historian of Israelite Origins, Winona Lake, IN, Eisenbrauns, 2013. 4. R. RENDTORFF, Das überlieferungsgeschichtliche Problem des Pentateuch, Berlin — New York, W. de Gruyter, 1976 ; Traduction anglaise : The Problem of the Process of Transmission in the Pentateuch, Sheffield, JSOT Press, 1990. 5. W. STAERK, Studien zur Religions- und Sprachgeschichte des alten Testaments, I. und II. Heft, Berlin, G. Reimer, 1899 ; K. GALLING, Die Erwählungstraditionen Israels, Giessen, A. Töpelmann, 1928. 6. T. RÖMER, Israels Väter. Untersuchungen zur Väterthematik im Deuteronomium und in der deuteronomistischen Tradition, Freibourg (CH), Universität Verlag / Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, 1990 ; K. SCHMID, Erzväter und Exodus. Untersuchungen zur doppelten Begründung der Ursprünge Israels innerhalb der Geschichtsbücher des Alten Testaments, Neukirchen-Vluyn, Neukirchener Verlag, 1999 ; traduction anglaise : Genesis and the Moses Story. Israel’s Dual Origins in the Hebrew Bible, Winona Lake, IN, Eisenbrauns, 2010 ; J. C. GERTZ, « Abraham, Mose und der Exodus. Beobachtungen zur Redaktionsgeschichte von Genesis 15 », in J. C. GERTZ, K. SCHMID et M. WITTE (éd.), Abschied vom Jahwisten. Die Komposition des Hexateuch in der jüngsten Diskussion, Berlin — New York, W. de Gruyter, 2002, 63-81 ; E. BLUM, « The Literary Connection Between the Books of Genesis and Exodus and the End of the Book of Joshua », in T. B. DOZEMAN et K. SCHMID (éd.), A Farewell to the Yahwist ? The Composition of the Pentateuch in Recent European Interpretation, Atlanta, Society of Biblical Literature, 2006, 89-106 ; voir aussi, E. OTTO, Das Deuteronomium im Pentateuch und Hexateuch. Studien zur Literaturgeschichte von Pentateuch und Hexateuch im Lichte des Deuteronomiumsrahmen, Tübingen, Mohr Siebeck, 2000 ; A. DE PURY, « Pg as the Absolute Beginning », in T. RÖMER et K. SCHMID (éd.), Les dernières rédactions du Pentateuque, de l’Hexateuque et de l’Ennéateuque, Leuven, Peeters — University Press, 2007, 99-128. 7. A. DE PURY, « Situer le cycle de Jacob. Quelques réflexions, vingt-cinq ans plus tard », in A. WÉNIN (éd.), Studies in the Book of Genesis. Literature, Redaction and History, Leuven, Peeters — University Press, 2001, 213-241. 8. E. BLUM, « The Jacob Tradition », in C. A. EVANS, J. N. LOHR et D. L. PETERSEN (éd.), The Book of Genesis. Composition, Reception, and Interpretation, Leiden, Brill, 2012, 181-211. 9. N. NA’AMAN, « The Jacob Story and the Formation of Biblical Israel », Tel Aviv 41 (2014), 91-124. 10. I. FINKELSTEIN et T. RÖMER, « Comments on the Historical Background of the Abraham

Narrative : Between “Realia” and “Exegetica” », Hebrew Bible and Ancient Israel 3 (2014), 4565 ; traduction française dans ce volume. 11. I. FINKELSTEIN, « State Formation in Israel and Judah, A Contrast in Context, A Contrast in Trajectory », Near Eastern Archaeology 62 (1999), 35-52 ; idem, Le Royaume biblique oublié, Paris, O. Jacob, 2013 ; Traduction anglaise, The Forgotten Kingdom. The archaeology and history of Northern Israel, 2013. 12. I. FINKELSTEIN, The Archaeology of the Israelite Settlement, 1988 ; différents articles dans I. FINKELSTEIN et N. NA’AMAN (éd.), From Nomadism to Monarchy : Archaeological and Historical Aspects of Ancient Israel, 1994. 13. C’est une estimation fondée sur des données présentées dans I. FINKELSTEIN, Archaeology of the Israelite Settlement, 332-333, auxquelles s’ajoute la population du Galaad. 14. I. FINKELSTEIN, « The Rise of Jerusalem and Judah : The Missing Link », Levant 33 (2001), 105-115 ; A. FANTALKIN, « The Appearance of Rock-Cut Bench Tombs in Iron Age Judah as a Reflection of State Formation », in A. FANTALKIN et A. YASSUR-LANDAU (éd.), Bene Israel : Studies in the Archaeology of Israel and the Levant during the Bronze and Iron Ages in Honour of Israel Finkelstein, Leiden — Boston, Brill, 2008, 17-44 ; A. FANTALKIN et I. FINKELSTEIN, « The Sheshonq I Campaign and the 8th Century Earthquake : More on the Archaeology and History of the South in the Iron I-Iron IIA », Tel Aviv 33 (2006), 18-42 ; O. SERGI, « The Expansion of Judah in the 9th Century BCE : Date and Historical Context », Tel Aviv 40 (2013), 226-246. 15. D. W. JAMIESON-DRAKE, Scribes and Schools in Monarchic Judah, Sheffield, Sheffield Academic Press, 1991 ; I. FINKELSTEIN, « The Settlement History of Jerusalem in the Eighth and Seventh Centuries BCE », Revue Biblique 115 (2008), 499-515 ; I. FINKELSTEIN et N. A. SILBERMAN, « Temple and Dynasty : Hezekiah, the Remaking of Judah and the Rise of the PanIsraelite Ideology », Journal for the Study of the Old Testament 30 (2006), 259-285. 16. Selon M. BROSHI et I. FINKELSTEIN, « The Population of Palestine in Iron Age II », Bulletin of the American Schools of Oriental Research 287 (1992), 47-60 avec les références citées. 17. Pour une vue d’ensemble, voir FINKELSTEIN, Archaeology of the Israelite Settlement. 18. L’identité originelle du roi d’Israël dans cette histoire n’est pas claire. Seul le v. 20 l’identifie à Akhab, car pour les rédacteurs dtr il fut l’un des rois les plus détestables du royaume du Nord. Il n’est donc pas certain que cette histoire ait concerné un roi du Nord spécifique ; le narrateur pourrait avoir cherché un « prototype » comme le « Pharaon » employé dans l’Exode (voir la discussion des différentes solutions dans E. WÜRTHWEIN, Die Bücher der Könige. 1. Kön 17-2. Kön. 25, Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, 1984, 261-262. En tout cas, il est clair que le roi de Juda apparaît comme une sorte de vassal. 19. A. DE PURY, « The Jacob Story and the Beginning of the Formation of the Pentateuch », in DOZEMAN et SCHMID (éd.), A Farewell to the Yahwist ?, 51-72 ; E. BLUM, « Hosea 12 und die Pentateuchüberlieferungen », in A. C. HAGEDORN et H. PFEIFFER (éd.), Die Erzväter in der biblischen Tradition. Festschrift für Matthias Köckert, Berlin — New York, W. de Gruyter, 2009, 291-321. Voir pourtant, H. PFEIFFER, Das Heiligtum von Bethel im Spiegel des Hoseabuches, Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, 1999 ; S. RUDNIG-ZELT, Hoseastudien. Redaktionskritische Untersuchungen zur Genese des Hoseabuches, Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, 2006 ; J. M. BOS, Reconsidering the Date and Provenance of the Book of Hosea : The Case for Persian Period Yehud, New York, Bloomsbury, 2013, qui préconisent tous une date bien plus tardive. Là

encore, l’argumentation semble circulaire : les textes du Pentateuque étant « tardifs », les allusions à ces textes doivent donc, elles aussi, être tardives. Il faut ajouter que, même si Osée 12 était le résultat d’interventions rédactionnelles, il pourrait tout de même contenir des matériaux anciens. 20. Des considérations de critique textuelle suggèrent un ʾel originel. 21. Cela pourrait indiquer que l’histoire de Jacob et Ésaü/Édom est plus tardive que le cycle de Jacob et Laban (voir ci-dessous). Selon NA’AMAN (« Jacob Story »), dans la tradition orale, le frère de Jacob était Juda, mais cette solution est difficile à accepter, étant donné que la mention de Juda en Osée 12,3 est considérée comme le remplacement tardif d’un « Israël » originel. 22. E. A. KNAUF, « Towards an Archaeology of the Hexateuch », in GERTZ, SCHMID et WITTE (éd.), Abschied vom Jahwisten, 275-294 ; BLUM, « Jacob Tradition ». 23. Cela est, à notre avis, une meilleure option que celle qui consiste à identifier les « Araméens » avec des déportés israélites comme le propose N. NA’AMAN, « Jacob Story ». 24. Communication orale. Nous remercions notre collègue pour son aide sur cette question. 25. A. R. MILLARD, « Assyrians and Arameans », Iraq 45 (1983), 101-108. 26. Voir, sur ce point, NA’AMAN, « Jacob Story ». Notons toutefois que Haran avait déjà occupé une position prédominante dans le dernier tiers du VIIIe siècle et durant le VIIe siècle. 27. V. A. HUROWITZ, « Babylon in Bethel. New Light on Jacob’s Dream », in S. W. HOLLOWAY (éd.), Orientalism, Assyriology and the Bible, Sheffield, Sheffield Academic Press, 2006, 436448. Pour des illustrations sur le thème d’un dieu mineur menant un être humain vers une divinité assise sur son trône, voir O. KEEL, Die Welt der altorientalischen Bildsymbolik und das Alte Testament. Am Beispiel der Psalmen, Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, 19803, 18, n. 9, 179, n. 272 ; N. NA’AMAN, « Does Archaeology Really Deserve the Status of A “High Court” in Biblical and Historical Research ? », in B. E. J. H. BECKING et L. L. GRABBE (éd.), Between Evidence and Ideology, Leiden, Brill, 2010, 165-183, opte pour la période babylonienne comme contexte de cette tradition. Toutefois, la possibilité que des transferts de traditions de Babylone à Béthel aient déjà eu lieu avant l’époque de la domination néo-babylonienne « aux temps de Sennakérib et Assarhaddon » (Hurowitz, « Babylon in Bethel », 447) affaiblit l’argumentation de Na’aman ; voir I. FINKELSTEIN, « Archaeology as High Court in Ancient Israelite History : A Reply to Nadav Na’aman », Journal of Hebrew Scriptures 10 (2010), article 19. 28. Selon une reconstruction fondée sur la LXX* et un fragment de Qumrân, ce verset affirme que lorsque El Elyon créa le monde, il donna un peuple à chacun de ses (soixante-dix ?) fils, « Et Yhwh reçut Jacob/Israël » ; voir T. RÖMER, « L’Ancien Testament est-il monothéiste ? », in G. EMERY et P. GISEL (éd.), Le Christianisme est-il un monothéisme ?, Lieux théologiques 36, 2001, 72-92 ; N. WYATT, « The Seventy Sons of Athirat, the Nations of the World, Deuteronomy 32.6B, 8-9 and the Myth of the Divine Election », in R. REZETKO, T. H. LIM et W. B. AUCKER (éd.), Reflection and Refraction. Studies in Biblical Historiography in Honour of A. Graeme Auld, Leiden, Brill, 2007, 547-556. 29. Voir similairement BLUM, « Jacob Tradition », 197, n 39. Des oracles néo-assyriens, dans lesquels Ishtar (ou une autre divinité) se présente et promet au roi son assistance, pourraient

soutenir cette reconstruction. 30. Voir O. EIßFELDT, « Das Alte Testament im Licht der safatenischen Inschriften », Zeitschrift der Deutschen Morgenländischen Gesellschaft 104 (1954), 88-118. Sur les territoires israélites du Galaad, voir I. FINKELSTEIN, I. KOCH et O. LIPSCHITS, « The Biblical Gilead : Observations on Identifications Geographic Divisions and Territorial History », Ugarit-Forschungen 43 (2012), 131-159. 31. Sur Miçpa de Galaad voir FINKELSTEIN, KOCH et LIPSCHITS, ibid., qui fournit des références à la recherche antérieure. La question de la relation entre ce Miçpa et celui du récit de Jephté dans Juges (10,17 ; 11,11. 29.34) dépasse le cadre de cet article. 32. Ibid. 33. L’histoire de Gn 32,23-32 n’est probablement pas antérieure au VIIIe siècle, lorsque (sous Jeroboam II ?) Jacob devint l’ancêtre d’Israël, et dut donc changer de nom. Le récit est centré sur ce changement de nom et l’étiologie de Penouël n’est pas nécessairement son centre d’intérêt majeur. Il serait donc possible que cette étiologie ait été ajoutée à cause du souvenir d’un lien entre les Benê Ya‘aqob et Penouël. Cela signifie-t-il que le clan de Jacob adorait la divinité El ? Voir également K. VAN DER TOORN, Family Religion in Babylonia, Syria and Israel : Continuity and Change in the Forms of Religious Life, Leiden, Brill, 1996, 300, qui suggère que les traditions sur Jacob étaient liées à El et que celles sur l’Exode étaient liées à Yhwh. La recherche traditionnelle ancienne met souvent en exergue les nombreuses mentions de El dans les récits des Patriarches, avec pourtant une explication historique erronée selon laquelle ceux-ci vénéraient au début un dieu sans nom, le « dieu du père », qui fut identifié à El ou à une manifestation spécifique de la principale divinité cananéenne. 34. Gen 33,17 suggère une sorte de fondation de Soukkoth par Jacob, dont il fournit le nom, comme il le fait pour Béthel et Mahanaïm. 35. De nouveau, le récit en Gn 32,2 ss. n’est pas antérieur à la période néo-assyrienne ; voir T. RÖMER, « Genèse 32,2-22 : préparations d’une rencontre », in J.-D. MACCHI et T. RÖMER (éd.), Jacob. Commentaire à plusieurs voix de Gn. 25-36. Mélanges offerts à Albert de Pury, Genève, Labor et Fides, 2001, 181-196, avec bibliographie additionnelle. Dans ce passage Mahanaïm fait partie d’un jeu de mots sur mahan/im (« camp/s ») qui apparaît très fréquemment. Mais on peut soutenir que l’auteur du VIIIe ou du VIIe siècle connaissait le lien entre Jacob et Mahanaïm, ou le lien entre Penouël et Manahaïm, deux sites voisins situés dans les gorges du Yabboq. 36. FINKELSTEIN, KOCH et LIPSCHITS, « Biblical Gilead ». 37. DE PURY, « Jacob Story ». 38. I. FINKELSTEIN et L. SINGER-AVITZ, « Reevaluating Bethel », Zeitschrift des Deutschen Palästina-Vereins 125 (2009), 33-48, contra des chercheurs qui, se fondant uniquement sur une évaluation textuelle, accordent une grande importance au rôle de Béthel aux périodes babylonienne et perse, comme par exemple, J. BLENKINSOPP, « Bethel in the Neo-Babylonian Period », in O. LIPSCHITS et J. BLENKINSOPP (éd.), Judah and the Judeans in the Neo-Babylonian Period, Winona Lake, IN, Einsenbrauns, 2003, 93-107 ; E. A. KNAUF, « Bethel : The Israelite Impact on Judean Language and Literature », in O. LIPSCHITS et M. OEMING (éd.), Judah and the Judeans in the Persian Period, Winona Lake, IN, Einsenbrauns, 2006, 291-349 ; P. R.

DAVIES, The Trouble with Benjamin », in REZETKO, LIM et AUCKER (éd.), Reflection and Refraction, 2007, 93-111 ; NA’AMAN, « Does Archaeology ». 39. Notons, par exemple, le lien entre la région du Yabboq et la région de Béthel dans la tradition profondément ancrée concernant le territoire contrôlé par la Maison de Saül ainsi que dans la liste de Sheshonq I, qui date de la deuxième moitié du Xe siècle ; voir I. FINKELSTEIN, « The Last Labayu : King Saul and the Expansion of the First North Israelite Territorial Entity », in Y. Amit, E. Ben Zvi, I. FINKELSTEIN et O. LIPSCHITS (éd.), Essays on Ancient Israel in its Near Eastern Context, A Tribute to Nadav Na’aman, Winona Lake, IN, Einsenbrauns, 2006, 171-187, 171-177. 40. Pour une conclusion identique atteinte par l’exégèse du texte, voir A. BERLEJUNG, « Twisting Traditions : Programmatic Absence-Theology for the Northern Kingdom in I Reg 12, 26-33* (The “sin of Jeroboam”) », Journal of Northwest Semitic Languages 35 (2009), 142. 41. Pour Dan, voir E. ARIE, « Reconstructing the Iron Age II Strata at Tel Dan : Archaeological and Historical Implications », Tel Aviv 35 (2008), 6-64 ; pour Béthel, voir FINKELSTEIN et SINGER-AVITZ, « Reevaluating Bethel ». 42. I. FINKELSTEIN, « Stages in the Territorial Expansion of the Northern Kingdom », Vetus Testamentum 61 (2011), 227-242. 43. Voir, par exemple, E. WÜRTHWEIN, Die Bücher der Könige. Das erste Buch der Könige. Kapitel 1-16, Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, 1977, 150-166. 44. Sur cette question, voir I. FINKELSTEIN et B. SASS, « The West Semitic Alphabetic Inscriptions Late Bronze II to Iron IIA : Archaeological Context, Distribution and Chronology », Hebrew Bible and Ancient Israel 2 (2013), 149-220. 45. Son association avec la grotte de Makpéla en Gn 49,30 et 50,13 est clairement de date tardive, voir ci-dessous. 46. A. DE PURY, Promesse divine et légende cultuelle dans le cycle de Jacob. Tome I et II, Paris : Gabalda, 1975, 562. 47. E. BLUM, « Genesis 33,12-20 : Die Wege trennen sich », in MACCHI et RÖMER (éd.), Jacob, 227-238, 237. 48. L’acquisition d’un lieu peut aussi faire allusion à Gn 23 (P ou plus tardif). Dans ce cas, tout le verset 19 serait tardif. 49. Voir par exemple N. NA’AMAN, « The Inscriptions of Kuntillet ‘Ajrud through the Lens of Historical Research », Ugarit-Forschungen 43 (2012), 1-43 ; T. ORNAN, « Drawings from Kuntillet ‘Ajrud », in S. AHITUV, E. ESHEL, Z. MESHEL et T. ORNAN (éd.), To Yahweh Teiman and his Ashera, the Inscriptions and Drawings from Kuntillet ‘Ajrud (« Horvat Teman ») in Sinai, Jerusalem, Israel Exploration Society, 2015, 43-68 (Hébreu). 50. Le cas d’Ashéra fait encore l’objet d’un débat. Un nombre important de chercheurs soutient qu’Ashéra (ou « la déesse ») était l’épouse de Yhwh (S. M. OLYAN, Ashera and the Cult of Yahweh in Israel, Atlanta, Scholars Press, 1988 ; J. M. HADLEY, « Yahweh and “his Ashera” : Archeological and Textual Evidence for the Cult of the Goddess », in W. DIETRICH et M. A. KLOPFENSTEIN (éd.), Ein Gott allein ? JHWH-Verehrung und biblischer Monotheismus im Kontext der israelitischen und altorientalischen Religionsgeschichte, Freibourg (CH), Universität Verlag /

Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, 1994, 235-268 ; C. UEHLINGER, Anthropomorphic Cult Statuary in Iron Age Palestine and the Search for Yahweh’s Cult Images », in K. VAN DER TOORN (éd.), The Image and the Book. Iconic Cults, Aniconism, and the Rise of the Book Religion in Israel and the Ancient Near East, Leuven, Peeters, 1997, 97-156). Dans « On epigraphic Hebrew ʾŠR and *ʾŠRH, and on Biblical Asherah* », Transeuphratène 46 (2014), 47-66, B. Sass reprend à son compte une suggestion antérieure, fondée sur des évidences extrabibliques, selon laquelle Ashéra était le nom du temple de Yhwh, qui finit par être déifié.

Notes 1. Pour la possibilité d’un lien entre les deux, voir T. B. DOZEMAN, « Hosea and the Wilderness Wandering Tradition », in S. L. McKENZIE and T. RÖMER (éd.), Rethinking the Foundations : Historiography in the Ancient World and in the Bible, Essays in Honour of John Van Seters, Berlin, de Gruyter, 2000, 64. 2. Voir, par exemple, K. A. KITCHEN, « Egyptians and Hebrews, from Raamses to Jericho », in E. OREN (éd.) The Origin of Early Israel — Current Debate (Beer-Sheva XII), Beer-Sheva, Ben Gurion University, 1998, 65-131 ; B. HALPERN, « The Exodus and the Israelite Historian », Eretz Israel 24 (1993), 89*-96* ; J. K. HOFFMEIER, Israel in Egypt : The Evidence for the Authenticity of the Exodus Tradition, New York, Oxford University Press, 1997 ; idem, Ancient Israel in Sinai : The Evidence for the Authenticity of the Wilderness Tradition, Oxford, Oxford University Press, 2005. 3. I. FINKELSTEIN, et B. SASS, « The West Semitic Alphabetic Inscriptions, Late Bronze II to Iron IIA : Archeological Context, Distribution and Chronology », Hebrew Bible and Ancient Israel 2 (2013), 149-220. 4. Voir, par exemple, N. NA’AMAN, « The Exodus Story : Between Historical Memory and Historiographical Composition », Journal of Ancient Near Eastern Religions 11 (2011), 56-60. 5. D. B. REDFORD, Egypt, Canaan, and Israel in Ancient Times, Princeton, Princeton University Press, 1992, 408-422 ; J. VAN SETERS, « The Geography of the Exodus », in J. A. DEARMAN et M. P. GRAHAM (éd.), The Land that I Will Show You : Essays on the History and Archaeology of the Ancient Near East in Honor of J. Maxwell Miller, Sheffield, Academic Press, 2001, 255-276 ; I. FINKELSTEIN et N. A. SILBERMAN, The Bible Unearthed : Archaeology’s New Vision of Ancient Israel and the Origin of its Sacred Texts, New York, The Free Press, 2001, 48-71 ; M. LIVERANI, Israel’s History and the History of Israel, London, Equinox, 2005, 277-282. 6. Pour une version quelque peu différente, mettant en relief une plus ancienne réalité de l’âge du Fer, sous le règne de Jéroboam Ier, voir K. VAN DER TOORN, Family Religion in Babylonia, Syria and Israel : Continuity and Change in the Forms of Religious Life, Leiden, Brill, 1996, 287-315 ; R. ALBERTZ, « Exodus : Liberation History against Charter Myths », in J. W. VAN HENTEN et A. W. J. HAUTEPEN (éd.), Religious Identity and the Invention of Tradition : Papers Read at a NOSTER Conference in Soesterberg, January 4-6, 1999, Assen, Van Gorcum, 2001, 128-143. 7. Voir par exemple, Y. HOFFMAN, The Doctrine of the Exodus in the Bible, Tel Aviv, Tel Aviv University, 1983 (en hébreu) ; idem, « A North Israelite Typological Myth and a Judaean Historical Tradition : The Exodus in Hosea and Amos », Vetus Testamentum 39 (1989), 169182 ; VAN DER TOORN, Family, 287-315 ; DOZEMAN, « Hosea ». 8. Voir par exemple, T. B. DOZEMAN, God on the Mountain : A Study of Redaction, Theology and Canon in Exodus 19-24, Atlanta, Scholars Press, 1989 ; T. RÖMER, « La construction d’une “vie de Moïse” dans la Bible hébraïque et chez quelques auteurs hellénistiques », Revue de l’Institut Catholique de Paris 85 (2003), 13-30 ; D. M. CARR, « The Moses Story : Literary Historical Reflections », Hebrew Bible and Ancient Israel 1 (2012), 7-36, concernant Moïse.

9. Pour les points 3-5, voir par exemple T. RÖMER, Israels Väter. Untersuchungen zur Väterthematik im Deuteronomium und in der Deuteronomistischen Tradition, Freiburg, Universitatsverlag Freiburg, 1990 ; J. C. GERTZ, Tradition und Redaktion in der Exoduserzählung. Untersuchungen zur endredaktion des Pentateuch, Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, 2000, 380-388 ; R. G. KRATZ, The Composition of the Narrative Books of the Old Testament, London, T. & T. Clark, 2005, 248-308 ; K. SCHMID, The Old Testament : A Literary History, Minneapolis, Fortress Press, 2010 ; idem, « Genesis and Exodus as Two Formerly Independent Traditions of Origins for Ancient Israel », Biblica 93 (2012), 187-208 ; plusieurs articles in T. B. DOZEMAN and K. SCHMID (éd.), A Farewell to the Yahwist ? The Composition of the Pentateuch in Recent European Interpretation, Atlanta, Society of Biblical Literature, 2006 ; T. RÖMER et K. SCHMID, Les Dernières Rédactions du Pentateuque, de l’Hexateuque et de l’Ennéateuque, Leuven, Uitgeverij Peeters, 2007. 10. Récemment, A. R. ROSKOP, The Wilderness Itineraries : Genre, Geography, and the Growth of Torah, Winona Lake, Eisenbrauns, 2011 ; T. B. DOZEMAN, « The Priestly Wilderness Itineraries and the Composition of the Pentateuch », in T. B. DOZEMAN, K. SCHMID et B. J. SCHWARTZ (éd.), The Pentateuch. International Perspectives on Current Research, Tübingen, Mohr Siebeck, 2011, 257-288. 11. I. FINKELSTEIN, I. KOCH et O. LIPSCHITS, « The Biblical Gilead : Observations on Identifications, Geographic Divisions and Territorial History », Ugarit-Forschungen 43 (2012), 131-159. 12. J. T. WALSH, « From Egypt to Moab : A Source Critical Analysis of the Wilderness Itinerary », Catholic Biblical Quarterly 39 (1977), 1-19. 13. G. W. COATS, « Wilderness Itineraries », Catholic Biblical Quarterly 34 (1972), 135-152. 14. M. NOTH, « Der Wallfahrtsweg zum Sinai (Nu 33) », Palästina-Jahrbuch 36 (1940), 5-28 ; F. M. CROSS, Canaanite Myth and Hebrew Epic : Essays in the History of the Religion of Israel, Cambridge, Harvard University Press, 1973, 301-321 ; Z. KALLAI, « The Wandering-Traditions from Kadesh-Barnea to Canaan : A Study in Biblical Historiography », in Z. KALLAI (éd.), Biblical Historiography and Historical Geography. Collection of Studies, Frankfurt, P. Lang, 1998, 165-174 ; G. I. DAVIES, « The Wilderness Itineraries and the Composition of the Pentateuch », Vetus Testamentum 33 (1983), 1-13 ; R. S. J. NORTH, « Perspective of the Exodus author(s) », Zeitschrift für die Alttestamentliche Wissenschaft 113 (2001), 481-504 ; W. W. LEE, Punishment and Forgiveness in Israel’s Migratory Campaign, Grand Rapids, Eerdmans, 2003 ; ROSKOP, The Wilderness, 223-232. 15. COATS, « Wilderness » ; G. I. DAVIES, « The Wilderness Itineraries : A Comparative Study », Tyndale Bulletin 25 (1974), 46-81 ; ROSKOP, The Wilderness. 16. Voir par exemple, G. I. DAVIES, The Way of the Wilderness : A Geographical Study of the Wilderness Itineraries in the Old Testament, Cambridge, Cambridge University Press, 1979 ; idem, « The Wilderness Itineraries and Recent Archaeological Research », in J. A. EMERTON (éd.), Studies in the Pentateuch, Leiden, Brill, 1990, 161-175 ; NORTH, « Perspective ». 17. NOTH, « Der Wallfahrtsweg » ; idem, Numbers : A Commentary, London, SCM Press, 1968, 242-246 ; COATS, « Wilderness » ; G. I. DAVIES, « Wilderness Itineraries and the Composition » ; E. W. DAVIES, Numbers : Based on the Revised Standard Version, London, M. Pickering, 1995, 341-343 ; T. RÖMER, « Israel’s Sojourn in the Wilderness and the

Construction of the Book of Numbers », in R. REZETKO, T. H. LIM et W. B. AUCKER (éd.), Reflection and Refraction. Studies in Biblical Historiography in Honour of A. Graeme Auld, Leiden, Brill, 2007, 419-445 ; W. W. LEE, « The Concept of the Wilderness in the Pentateuch », in K. E. POMYKALA (éd.), Israel in the Wilderness. Interpretations of the Biblical Narratives in Jewish and Christian Traditions, Leiden, Brill, 2008, 1-16. 18. NOTH, Numbers, 243 ; idem, A History of Pentateuchal Traditions, Englewood Cliffs, Prentice-Hall, 1972, 224-227 ; V. FRITZ, Israel in der Wüste : Traditiongeschichtliche Untersuchung der Wüstenüberlieferung des Jahwisten, Marburg, N. G. Elwert, 1970, 116-117 ; G. I. DAVIES, « Wilderness Itineraries and the Composition » ; E. W. DAVIES, Numbers, 342. 19. Voir le rapport final de fouilles, R. COHEN et H. BERNICK-GREENBERG, Excavations at Kadesh Barnea (Tell el-Qudeirat) 1976-1982, Jerusalem, Israel Antiquities Authority, 2007. 20. I. FINKELSTEIN, « Kadesh Barnea : A Reevaluation of its Archaeology and Historty », Tel Aviv 37 (2010), 111-125. 21. L. SINGER-AVITZ, « The Earliest Settlement at Kadesh Barnea », Tel Aviv 35 (2008) : 73-81. 22. A. GILBOA, A. J. T. JULL, I. SHARON et E. BOARETTO, « 14C Dates from Tell el-Qudeirat (Kadesh Barnea) », Tel Aviv 36 (2009), 82-94. 23. I. FINKELSTEIN, Living on the Fringe : The Archaeology and History of the Negev, Sinai and Neighbouring Regions in the Bronze and Iron Ages, Sheffield, Academic Press, 1995, 103-126 ; M. MARTIN et I. FINKELSTEIN, « Iron IIA Pottery from the Negev Highlands : Petrographic Investigation and Historical Implications », Tel Aviv 40 (2013), 6-45. 24. COHEN et BERNICK-GREENBERG, Excavations at Kadesh Barnea, 13. 25. Les néologismes « Judaïte » (pour habitants de Juda, comme Édomites, Moabites, Israélites, etc.) et « judaïte » (adjectif) sont employés tout au long de mes écrits, afin de différencier Juda, le royaume du Sud à l’âge du Fer, de Yehud, à la période perse, et de la Judée, aux périodes hellénistique et romaine. 26. N. NA’AMAN, « The Kingdom of Judah under Josiah », Tel Aviv 18 (1991), 48-49 ; idem, « An Assyrian Residency at Ramat Rahel ? », Tel Aviv 28 (2001), 268. 27. D. VANDERHOOFT et O. LIPSCHITS, « A New Typology of the Yehud Stamp Impressions », Tel Aviv 34 (2007), 12-37. 28. Voir la synthèse en N. GLUECK, « Ezion-geber », Biblical Archaeologist 28 (1965), 70-87. 29. G. D. PRATICO, Nelson Glueck’s 1938-1940 Excavations at Tell el-Kheleifeh : A Reappraisal, Atlanta, Scholars Press, 1993, 49-50. 30. P. BIENKOWSKI, « Iron Age Settlement in Edom : A Revised Framework », in P. M. M. DAVIAU, J. W. WEVERS et M. WEIGL (éd.), The World of the Aramaeans II : Studies in History and Archaeology in Honour of Paul-Eugène Dion, Sheffield, Academic Press, 2001, 261 ; SINGER-AVITZ, « The Earliest Settlement », 78. 31. PRATICO, Nelson Glueck’s. 32. I. FINKELSTEIN, « The Archaeology of Tell el-Kheleifeh and the History of Eziongeber/Elath », Semitica 56 (2014), 105-136.

33. R. DIVITO, « The Tell el-Kheleifeh Inscriptions », 51-63 in G. D. PRATICO (éd.), Nelson Glueck’s 1938-1940 Excavations at Tell el-Kheleifeh : A Reappraisal, Atlanta, Scholars Press, 1993. 34. G. W. BARKER, O. H. CREIGHTON, D. D. GILBERTSON, C. O. HUNT, D. J. MATTINGLY, S. J. McLAREN, D. C. THOMAS et G. C. MORGAN, « The Wadi Faynan Project, Southern Jordan : A Preliminary Report on Geomorphology and Landscape Archaeology », Levant 29 (1997), 21. 35. D. MATTINGLY, J. G. NEWSON, R. TOMBER, G. BAKER, D. GILBERSTON et C. HUNT, « The Making of Early States : The Iron Age and Nabataean Periods », in G. BARKER, D. GILBERTSON et D. MATTINGLY (éd.), Archaeology and Desertification, The Wadi Faynan Landscape Survey, Southern Jordan, Oxford, Council for British Research in the Levant, 1997, 278-279. 36. G. W. BARKER, R. ADAMS, O. H. CREIGHTON, D. D. GILBERTSON, J. P. GRATTAN, C. O. HUNT, D. J. MATTINGLY, S. J. McLAREN, H. A. MOHAMED, P. NEWSON, T. E. G. REYNOLDS et D. C. THOMAS, « Environment and Land Use in the Wadi Faynan, Southern Jordan : The Second Season of Geoarchaeology and Landscape Archaeology », Levant 30 (1998), 20-21. 37. A. HAUPTMANN, The Archaeometallurgy of Copper : Evidence from Faynan, Jordan, Berlin, Springer-Verlag, 2007, 97. 38. T. E. LEVY, M. NAJJAR, A. D. GIDDING, I. W. N. JONES, K. A. KNABB, K. BENNALLACK, M. VINCENT, A. N. LAMOSCO, A. M. RICHTER, C. SMITHERAM, L. D. HAHN et S. BALASWAMINATHAN, « The 2011 Edom Lowlands Regional Archaeology Project (ELRAP) : Excavations and Surveys in the Faynan Copper Ore District, Jordan », Annual of the Department of Antiquities in Jordan 56, 2012, 423-445. 39. T. E. LEVY, R. B. ADAMS, M. NAJJAR, A. HAUPTMANN, J. D. ANDERSON, B. BRANDL, M. A. ROBINSON et T. HIGHAM, « Reassessing the Chronology of Biblical Edom : New Excavations and 14 C Dates from Khirbet en-Nahas (Jordan) », Antiquity 78 (2004), 865-879. 40. LEVY et al., « Reassessing the Chronology » pour une date du Fer IIA ; I. FINKELSTEIN et E. PIASETZKY, « 14C and the Iron Age Chronology Debate : Rehov, Khirbet en-Nahas, Dan and Megiddo », Radiocarbon 48 (2006), 373-386, pour une date du Fer IIB-C. 41. LEVY décrit la région de Wadi Faynan par le terme ‘basses terres d’Édom (voir par exemple, LEVY et al., « Édom »). Autant que je puisse en juger, l’activité, dans cette région, devrait être mise en relation avec les territoires situés plus au nord-ouest plutôt qu’avec celle d’Édom, bien qu’elle soit géographiquement proche du plateau. Voir I. FINKELSTEIN, « Khirbat en-Nahas, Edom and Biblical History », Tel Aviv 32 (2005), 119-125. 42. BIENKOWSKI, « Iron Age Settlement », 257, 265. 43. I. FINKELSTEIN, « Edom in the Iron I », Levant 24 (1992), 159-166. 44. BIENKOWSKI, « Iron Age Settlement ». 45. Céramique type Qurayyah — BIENKOWSKI, « Iron Age Settlement », 262. 46. BIENKOWSKI, ibid. 47. J. R. BARTLETT, Edom and the Edomites, Sheffield, Jsot Press, 1989, 157-161 ; P. BIENKOWSKI, « New Evidence on Edom in the Neo-Babylonian and Persian Periods », in J. A. DEARMAN et M. P. GRAHAM (éd.), The Land that I will Show You. Essays in the History and

Archaeology of the Ancient Near East in Honour of J. Maxwell Miller, Sheffield, Academic Press, 2001, 198-213. 48. B. MACDONALD, L. G. HERR, M. P. NEELEY, T. GAGOS, K. MOUMANI et M. ROCKMAN, The Tafila-Busayra Archaeological Survey 1999-2001, West-Central Jordan, Boston, American Schools of Oriental Research, 2004, 58 ; BIENKOWSKI, « New Evidence », faisant état de trouvailles de la période perse à Buseirah et Tawilan uniquement. 49. Y. AHARONI, « Tamar and the roads to Elath », IEJ 13 (1963), 30-42. 50. La description la plus détaillée et la plus complète se trouve dans R. COHEN and Y. YISRAEL, « The Iron Age Fortresses at ‘En Hazeva », BA 58 (1995), 223-235. 51. Les fouilles actuelles sur le site ont révélé des indices d’une activité à l’époque préassyrienne, peut-être assez similaire à celle de la couche la plus ancienne de Tell el-Qudeirat (Tali ERICKSON-GINI, communication personnelle). 52. Pour une situation similaire à Qadesh-Barnéa voir FINKELSTEIN, « Kadesh Barnea ». 53. D. USSISHKIN, « En Haseva : On the Gate of the Iron Age II Fortress », Tel Aviv 37 (2010), 246-253. 54. NA’AMAN, « An Assyrian Residency », 267-268. 55. P. BECK, « Horvat Qitmit Revisited via En Hazeva », Tel Aviv 23 (1996), 102-114 ; S. BENARIEH, « Temple Furniture from a Favissa at En Hazeva », ‘Atiqot 68 (2011), 107-175. 56. E. AYALON, « The Iron Age II Pottery Assemblage from Horvat Teiman (Kuntillet ‘Ajrud) », Tel Aviv 22 (1995), 141-205 ; L. FRUED, « The Date of Kuntillet ‘Ajrud : A Reply to Lily SingerAvitz », Tel Aviv 35 (2008), 169-174 ; contra L. SINGER-AVITZ, « The Date of Kuntillet ‘Ajrud », Tel Aviv 33 (2006), 196-228. 57. A. LEMAIRE, « Date et origine des inscriptions hébraïques et phéniciennes de Kuntillet ‘Ajrud », Studi Epigrafici e Linguistici 1 (1984), 131-143. 58. I. FINKELSTEIN et E. PIASETZKY, « The Date of Kuntillet ‘Ajrud : The 14C Perspective », Tel Aviv 35 (2008) : 175-185, avec bibliographie. 59. BOARETTO, conférence à l’université de Tel Aviv, janvier 2013 ; pour différentes interprétations du site, voir Z. MESHEL, Kuntillet ‘Ajrud (Horvat Teman) : An Iron Age II Religious Site on the Judah-Sinai Border, Jerusalem, Israel Exploration Society, 2012, 68 ; S. AHITUV, E. ESHEL et Z. MESHEL, « The Inscriptions », in Z. MESHEL (éd.), Kuntillet ‘Ajrud (Horvat Teman) : An Iron Age II Religious Site on the Judah-Sinai Border, Jerusalem, Israel Exploration Society, 2012, 73-142 ; N. NA’AMAN, « The Inscriptions of Kuntillet ‘Ajrud Through the Lens of Historical Research », Ugarit-Forschungen 43 (2012), 1-43, avec références aux discussions.

Notes 1. Pour plus de détails sur cette question, voir T. RÖMER, « Extra-Pentateuchal Biblical Evidence for the Existence of a Pentateuch ? The Case of the “Historical Summaries,” Especially in the Psalms », in T. B. DOZEMAN, K. SCHMID, and B. J. SCHWARTZ (éd.), The Pentateuch. International Perspectives on Current Research, Tübingen, Mohr Siebeck, 2011, 471-488. 2. E. A. KNAUF, « Bethel », Die Religion in Geschichte und Gegenwart (4ème éd., 1998), vol. 1, col. 1375-1376. 3. E. ARIE, « Reconsidering the Iron Age II Strata at Tel Dan : Archaeological and Historical Implications », Tel Aviv 35 (2008), 6-64 (34-38). 4. Pour une datation au VIIIe siècle voir A. DE PURY, « Osée 12 et ses implications pour le débat actuel sur le Pentateuque », in P. HAUDEBERT (éd.), Le Pentateuque. Débats et recherches, Paris, Éditions du Cerf, 1992, 175-207 ; et idem, « The Jacob Story and the Beginning of the Formation of the Pentateuch », in T. B. DOZEMAN et K. SCHMID (éd.), A Farewell to the Yahwist ? The Composition of the Pentateuch in Recent European Interpretation, Atlanta, Society of Biblical Literature, 2006, 51-72 ; E. BLUM, « Hosea 12 und die Pentateuchüberlieferungen », in A. C. HAGEDORN et H. PFEIFFER (éd.), Die Erzväter in der biblischen Tradition. Festschrift für Matthias Köckert, Berlin — New York, W. de Gruyter, 2009, 291-321. Pour une datation exilique ou postexilique W. D. WHITT, « The Jacob Traditions in Hosea and Their Relation to Genesis », Zeitschrift für die alttestamentliche Wissenschaft 103 (1991), 18-43 ; et H. PFEIFFER, Das Heiligtum von Bethel im Spiegel des Hoseabuches, Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, 1999. 5. DE PURY, « Osée 12 » ; idem, « Jacob Story ». 6. en 12,5 est probablement un petit ajout qui a transformé le « El » originel en une glose, voir par exemple M. GERTNER, « The Masorah and the Levites. An Essay in the History of a Concept », Vetus Testamentum 10 (1960), 241-284 (277, 281). 7. Voir également, sur cette question, les contributions de K. SCHMID « Distinguishing the World of the Exodus Narrative from the World of Its Narrators : The Question of the Priestly Exodus Account in Its Historical Setting » in T. LEVY, T. SCHNEIDER et W. H. C. PROPP (éd.) Israel’s Exodus in Transdisciplinary, Text, Archaeology, Culture, and Geoscience, Heidelberg, Springer, 331-344 ; et C. BERNER, « The Exodus Narrative Between History and Literary Fiction : The Portrayal of the Egyptian Burden as a Test Case », in LEVY, SCHNEIDER et PROPP (éd.) Israel’s Exodus, 285-292 ; de même que l’évaluation de l’état actuel de la recherche sur le Pentateuque dans T. RÖMER, « Zwischen Urkunden, Fragmenten und Ergänzungen : Zum Stand der Pentateuchforschung », Zeitschrift für die alttestamentliche Wissenschaft 125 (2013), 2-24. 8. K. SCHMID, Erzväter und Exodus. Untersuchungen zur doppelten Begründung der Ursprünge Israels innerhalb der Geschichtsbücher des Alten Testaments, Neukirchen-Vluyn, Neukirchener Verlag, 1999, 186-208 ; E. OTTO, « Die nachpriesterliche Pentateuchredaktion im Buch Exodus », in M. VERVENNE (éd.), Studies in the Book of Exodus. Redaction — Reception —

Interpretation, Leuven, University Press — Peeters, 1996, 61-111 ; J. KEGLER, « Die Berufung des Mose als Befreier Israels. Zur Einheitlichkeit des Berufungsberichts in Exodus 3-4 », in C. HARDMEIER, R. KESSLER et A. RUWE (éd.), Freiheit und Recht. Festschrift für Frank Crüsemann zum 65. Geburtstag, Gütersloh, Chr. Kaiser/Gütersloher Verlagshaus, 2003, 162-188. 9. Voir également J. C. GERTZ, Tradition und Redaktion in der Exoduserzählung. Untersuchungen zur Endredaktion des Pentateuch, Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, 1999, 254-326. 10. J. WELLHAUSEN, Die Composition des Hexateuchs und der historischen Bücher des Alten Testaments, Berlin, W. de Gruyter, 1963 (réimpression de la 3e éd. 1899), 71. 11. W. H. C. PROPP, Exodus 1-18, New York et al., Doubleday, 1999, 190. 12. Voir à ce propos T. RÖMER, « Exodus 3-4 und die aktuelle Pentateuchdiskussion », in R. ROUKEMA (éd.), The Interpretation of Exodus. Studies in Honour of Cornelis Houtman, Leuven — Paris — Dudley, Peeters, 2006, 65-79. 13. M. KÖCKERT, « Zum literargeschichtlichen Ort des Prophetengesetzes Dtn 18 zwischen dem Jeremiabuch und Dtn 13 », in L. PERLITT. R. G. KRATZ et H. SPIECKERMANN (éd.), Liebe und Gebot. Studien zum Deuteronomium. Festschrift zum 70. Geburtstag, Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, 2000, 80-100 ; et S. GRÄTZ, « “Einen Propheten wie mich wird dir der Herr, dein Gott, erwecken”. Der Berufungsbericht Jeremias und seine Rückbindung an das Amt des Mose », in A. GRAUPNER et M. WOLTER (éd.), Moses in Biblical and Extra-Biblical Traditions, Berlin — New York, W. de Gruyter, 2007, 61-77. 14. E. BLUM, Studien zur Komposition des Pentateuch. Berlin New York, de Gruyter, 1990, 1743. 15. P. WEIMAR, Die Berufung des Mose : Literaturwissenschaftliche Analyse von Exodus 2,23-5,5, Freiburg (CH) — Göttingen, Universitätsverlag — Vandenhoeck & Ruprecht, 1980, 38 et 341. 16. R. RENDTORFF, The Problem of the Process of Transmission in the Pentateuch (trad. J. J. SCULLION), Sheffield, JSOT Press, 1990 (original allemand Das überlieferungsgeschichtliche Problem des Pentateuch, Berlin — New York, de Gruyter, 1976), 85. 17. WEIMAR, Berufung des Mose, 332-323 et 341. 18. Pour une reconstruction similaire, voir GERTZ, Tradition und Redaktion, 394. 19. F. MICHAELI, Le livre de l’Exode, Neuchâtel, Delauchaux et Niestlé, 1974, 65 ; K. BERGE, Reading Sources in a Text. Coherence and Literary Criticism in the Call of Moses, St. Ottilien, EOS Verlag, 1997, 116 : « Moses, already knowing the identity of the speaking God, now asks for his name because he does not know it » ; SCHMID, Erzväter und Exodus, 206. 20. K. VAN DER TOORN, « Ilib and the “God of the Father” », Ugarit Forschungen 25 (1993), 379387. 21. C. COHEN, « The Legend of Sargon and the Birth of Moses », Journal of Ancient Near Eastern Studies 4 (1972), 46-51 ; P. R. ARDIÑACH, « La leyenda acádia de Saegón », Rivista Bíblica 50 (1993), 103-114. 22. B. LEWIS, The Sargon Legend. A Study of the Akkadian Text of the Tale and the Tale of the Hero who was Exposed at Birth, Cambridge, Mass, ASOR, 1980, 98-110.

23. Voir E. A. KNAUF, Midian. Untersuchungen zur Geschichte Palästinas und Nordarabiens am Ende des 2. Jahrtausends v. Chr, Wiesbaden, Harrassowitz, 1988, 104 ; la description, rare, du « moulage des briques » en Exode 5,7 (‫בנ ִים‬ ֵ ‫לּ‬ ְ ‫ה‬ ַ ‫לבּן‬ ְ ‫ל‬ ִ , cf. aussi in Ex 1,14 ‫בנ ִים‬ ֵ ‫ל‬ ְ ‫ב‬ ִ ‫וּ‬ø‫בּחמר‬ ְ ø‫קשׁה‬ø‫עבדה‬ ֲ ‫ )בּ‬peut être mise en relation avec l’expression akkadienne libnate labanu, qui est, par exemple, employée dans une inscription monumentale d’Assarhaddon ; voir C. UEHLINGER, Weltreich und « eine Rede ». Eine neue Deutung der sogenannten Turmbauerzählung (Gen 11,1-9), Freiburg (CH) — Göttingen, Universitätsverlag — Vandenhoeck & Ruprecht, 1990, 361, cf. 250-251 ; néanmoins, ces textes sont souvent attribués à des rédacteurs sacerdotaux.

24. Pour une proposition similaire, voir J. MAGONET, « The Rhetoric of God: Exodus 6.2-8 », Journal for the Study of the Old Testament 27 (1983), 56-67. 25. Certains commentateurs ont considéré que le nom Yhwh en Gn 17,1 ne concorde pas avec la théorie de P sur la révélation divine. Mais ce n’est pas exact : le tétragramme est employé par le narrateur afin d’informer le lecteur de l’identité d’El Shaddaï. Dans le récit, Abraham n’en est pas informé. 26. Sur la construction d’une « mémoire culturelle », voir aussi les contributions de J. ASSMANN, « Exodus and Memory », in LEVY, SCHNEIDER et PROPP (éd.) Israel’s Exodus, 3-15 ; et A. MAEIR, « Exodus as a Mnemo-Narrative : An Archaeological Perspective », in LEVY, SCHNEIDER et PROPP (éd.) Israel’s Exodus, 409-418. 27. P. VAN DER VEEN, C. THEIS et M. GÖRG, « Israel in Canaan (Long) Before Pharaoh Merenptah ? A Fresh Look at Berlin Statue Pedestal Relief 21687 » Journal of Ancient Egyptian Interconnections 2 (2010), 15-25. Les auteurs suggèrent de lire « Ia-cha-ri » ou « Ia-cha-l », ce qui est assez différent du « Isrial » de la stèle de Mérenptah. Sur le piédestal, le toponyme est inscrit dans un cartouche, ce qui indique qu’il s’agit du nom d’un pays ou d’une ville. 28. N. NA’AMAN, « The Exodus Story : Between Historical Memory and Historiographical Composition » Journal of Ancient Near Eastern Religions 11 (2011), 39-69 (47). 29. Il y a bien sûr débat sur l’ancienneté de ces textes. Selon H. PFEIFFER, Jahwes Kommen von Süden : Jdc 5, Hab 3, Dtn 33 und Ps 68 in ihrem literatur- und theologiegeschichtlichen Umfeld, Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, 2005, 268, l’idée d’une localisation originelle de Yhwh dans le Sinaï est une invention tardive, datant de l’Exil, après la destruction du Temple. Cela me semble une sorte d’« exégèse allégorique ». Sur la possibilité que ces textes préservent des mémoires anciennes, voir aussi M. LEUENBERGER, « Jhwhs Herkunft aus dem Süden. Archäologische Befunde — biblische Überlieferungen — historische Korrelationen », Zeitschrift für die alttestementliche Wissenschaft 122 (2010), 1-19. 30. La deuxième partie du verset soulève nombre de problèmes de critique textuelle, voir, par exemple, PFEIFFER, Heiligtum von Bethel, 182-183.

31. Le Mont Parân qui n’est attesté qu’ici et en Ha 3 dans la Bible hébraïque (contrairement au désert de Parân) pourrait être une spéculation savante ; son identification avec Qadesh, ‘en el-qedarat, permet de dater le texte entre le Xe et le VIe siècle av. J.-C. 32. Z. MESHEL, Kuntillet ʻAjrud (Ḥorvat Teman) : An Iron Age II Religious Site on the JudahSinai Border, Jerusalem, Israel Exploration Society, 2012. 33. N. NA’AMAN et N. LISSOVSKY, « Kuntillet ‘Ajrud, Sacred Trees and the Asherah », Tel Aviv 35 (2008), 186-203. 34. I. FINKELSTEIN et E. PIASETZKY, « The Date of Kuntillet ‘Ajrud : The 14C Perspective », Tel Aviv 35 (2008), 135-185 (178). 35. MESHEL, Kuntillet ‘Ajrud, 95 (inscription 3,6) et 98 (inscription 3.9 avec l’article). 36. MESHEL, Kuntillet ‘Ajrud, 87 (3.1). 37. M. WEIPPERT, « Semitische Nomaden des zweiten Jahrtausends. Über die Š3św der ägyptischen Quellen », Biblica 55 (1974), 265-280, 427-433 (270-271). 38. T. E. LEVY, R. B. ADAMS et A. MUNIZ, « Archaeolgy and the Shasu Nomads : Recent Excavations in the Jabal Hamrat Fidan, Jordan », in R. E. FRIEDMAN et W. H. C. PROPP (éd.), Le-David maskil : A Birthday Tribute for David Noel Freedman, Winona Lake, Eisenbrauns, 2004, 63-89 (89). 39. N. NA’AMAN, « The Exodus Story », 49. 40. J. BLENKINSOPP, « The Midianite-Kenite Hypothesis Revisited and the Origins of Judah », Journal for the Study of the Old Testament 33 (2008), 131-153.