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Interface dans les composites fibreux par
Jean-Paul FAVRE Docteur ès Sciences Chef de Division à l’Office National d’Études et Recherches Aérospatiales (ONERA)
1. 1.1 1.2 1.3
1.4
8 - 1992
A 7 765 - 3 — 3 — 3 — 4 — 4 — 4 — 4 — 4 — 4 — 5
2. 2.1 2.2 2.3 2.4
Modèles de l’interface ............................................................................ Modèles mécaniques .................................................................................. Modèles issus de l’analyse chimique ou physico-chimique.................... Modèles fondés sur la thermodynamique ................................................ Modèles de type énergétique .....................................................................
— — — — —
5 5 6 6 6
3. 3.1
3.3
Apport de la micromécanique.............................................................. État de contrainte à l’interface.................................................................... 3.1.1 Contraintes locales moyennes .......................................................... 3.1.2 Contraintes aux extrémités : le transfert de charge......................... 3.1.3 Validations expérimentales................................................................ Caractéristiques ultimes : résistance et ténacité....................................... 3.2.1 Particules ............................................................................................. 3.2.2 Fibres ................................................................................................... Micromécanique implicite ..........................................................................
— — — — — — — — —
7 7 7 7 8 8 8 9 10
4.
Contribution aux propriétés des matériaux chargés .....................
—
11
5. 5.1 5.2 5.3 5.4
Contribution aux caractéristiques de l’unidirectionnel................ Matrices organiques.................................................................................... Matrices métalliques ................................................................................... Matrices céramiques ................................................................................... Tentatives de prise en compte par le calcul .............................................. 5.4.1 Contrainte à rupture en traction ........................................................ 5.4.2 Énergie de rupture..............................................................................
— — — — — — —
13 13 13 14 15 15 15
6. 6.1 6.2
Contribution aux caractéristiques du multidirectionnel .............. Caractéristiques liées au matériau ............................................................. Caractéristiques liées aux fonctions de la pièce .......................................
— — —
16 17 17
7.
Conclusion .................................................................................................
—
17
Références bibliographiques .........................................................................
—
18
3.2
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Phases en présence ................................................................................. Nécessité du contact ................................................................................... Caractéristiques intrinsèques du renfort et du liant ................................. Caractéristiques des phases pour une association optimale................... 1.3.1 Surface du renfort............................................................................... 1.3.2 Propriétés de la matrice ou du liant .................................................. 1.3.3 Ensimages, protections et dépôts ..................................................... Zone de contact : interface/interphase ...................................................... 1.4.1 « Voir » l’interface ............................................................................... 1.4.2 Approche séméiologique...................................................................
e lecteur risque d’être dérouté par cet article : l’interface dans les matériaux composites ne relève pas d’une discipline particulière et l’étude des problèmes qu’elle pose exige le recours à un ensemble de sciences et de techniques. Toutes proportions gardées, l’attitude est la même que pour les problèmes de
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collage. D’ailleurs, nombre de concepts et de démarches méthodologiques sont partagés par ces deux branches de la technologie, ce qu’illustrent les nombreux articles communs que l’on trouve dans beaucoup de traités qui les rassemblent souvent sous le terme de science de l’adhésion. Associé à ceux traitant des matériaux composites, cet article a pour objet l’interface qui se forme spontanément lorsque deux phases sont mises en présence l’une de l’autre au moment de l’élaboration et qui se maintient entre ces deux phases pendant toute la vie du matériau. Il ne s’agit donc pas strictement de l’interface entre couches, lieu des contraintes interlaminaires, que l’on trouve dans les stratifiés. Seuls les rapports de l’interface avec la mécanique des matériaux seront abordés dans cet article. On admettra comme préalable que l’interface n’est pas seulement une simple discontinuité entre les deux phases du matériau hétérogène ou leur juxtaposition mais : — qu’elle consiste d’une manière ou d’une autre en la combinaison des portions éventuellement altérées de l’une et/ou l’autre des deux phases : ainsi, même en l’absence de réaction chimique, la structure d’une matrice organique est-elle quelque peu modifiée au contact de la charge du fait des effets d’orientation ou d’un développement préférentiel de la cristallinité ; — que ces phases sont éventuellement nettement séparées par une zone de réaction ou par un constituant volontairement interposé entre elles, par exemple, l’ensimage qui protège les fibres de verre pendant toutes les opérations textiles avant imprégnation par la résine ou encore l’agent qui va favoriser le mouillage des particules de carbonate de calcium avant leur dispersion dans le liant polymère ; — que cette troisième phase, constituée par l’interface, se forme au moment de l’élaboration du matériau et que son comportement dans les conditions de service n’est pas réductible à celui des phases constituantes. La source de nombreux problèmes rencontrés par les industriels réside dans la constatation suivante : contrairement aux constituants, qui peuvent faire l’objet d’un cahier des charges et être soumis à des contrôles précis, l’interface, issue de leur interaction, échappe en partie aux efforts d’analyse et de prévision. L’élaborateur se procure la meilleure fibre de verre et le meilleur polyester, personne ne peut lui garantir que la meilleure interface résultera automatiquement de leur association. Or, plusieurs fonctions essentielles pour le fonctionnement harmonieux du matériau peuvent lui être attribuées a priori : — assurer la continuité physique d’un constituant à l’autre à travers tout le matériau en empêchant, par exemple, la formation de porosités ou l’accumulation d’humidité ; — transmettre les efforts : on compte que les fibres du composite travaillent ensemble et que la matrice est là pour répartir et transmettre les efforts entre fibres, mais ces efforts doivent d’abord passer à l’interface ; — protéger l’une ou l’autre phase : les fissures peuvent ainsi être déviées ou stoppées, l’humidité arrêtée par l’ensimage (fibres de verre) ou la réaction chimique de la matrice sur le renfort ralentie (matrices métalliques). Au demeurant, la meilleure interface est bien celle qui confère au matériau final les meilleures propriétés. Mais comment en faire l’analyse dans la mesure où, en l’absence des deux constituants, elle n’existe pas ? La première difficulté est donc d’ordre méthodologique : la présence des deux constituants est nécessaire (charge et liant, lorsque la phase continue est l’élément principal, comme dans les plastiques ou élastomères chargés, ou fibre et matrice). Cette difficulté fait que le discours sur l’interface passe le plus souvent par les observations faites sur le comportement global du matériau, comportement complexe dans lequel il est toujours difficile de discerner les contributions respectives des éléments en présence.
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On se propose d’abord d’illustrer à travers quelles expériences ou quels comportements on peut voir l’interface et quelles représentations suggèrent ces expériences ou ces comportements. L’apport de la micromécanique, théorique et expérimental, sera ensuite développé. On tentera enfin, à travers divers exemples, de repérer la contribution de l’interface au comportement global, macroscopique, des matériaux en indiquant, lorsqu’elles existent, les voies par lesquelles cette contribution peut être introduite dans les modèles de comportement. En choisissant le titre de cet article, l’auteur n’a pas souhaité donner au terme interface une signification trop précise. Le terme doit être pris ici dans son acception la plus commune.
Notations et Symboles Symbole
Définition
D Ec
diamètre de la fibre module d’élasticité (ou module d’Young) du composite modules d’élasticité de la fibre et de la matrice respectivement module d’élasticité de l’interface charge de décollement (ou de décohésion) modules de cisaillement de la fibre et de la matrice respectivement ténacité critique de l’interface ténacité critique de la fibre longueur d’une fibre longueur critique d’une fibre rapport d’aspect longueur de la fibre/diamètre de la fibre rayon de la fibre température fractions volumiques des fibres et de la matrice respectivement Vm + Vf = 1 énergie restituée lors d’une extension de la fissure dans le plan de la fibre énergie restituée lors d’une extension de la fissure le long de l’interface coefficients de dilatation de la fibre et de la matrice respectivement déformation déformations à rupture de la fibre et de la matrice respectivement coefficients de Poisson de la fibre et de la matrice respectivement contrainte de traction interfaciale contrainte de traction longitudinale contrainte de traction radiale contrainte de traction dans la fibre au moment de la décohésion contraintes de traction à rupture de la fibre et de la matrice respectivement contraintes de décohésion pour une longueur de fibre implantée = e et = 0 respectivement contrainte de cisaillement moyenne contrainte de friction
Ef , E m Ei Fd Gf , Gm Gci Gcf c s rf T Vf , Vm Wf Wi
αf , αm ε ε fr , ε mr νf , νm σ σL σR σd σ fr , σ mr τi , τd τ τF
1. Phases en présence 1.1 Nécessité du contact C’est une exigence élémentaire : tout le procédé d’élaboration du matériau tend à faciliter, voire à forcer, un contact intime, sans interposition d’éléments étrangers (malaxage, imprégnation, infiltration sous pression, etc.). Des conditions préalables, détaillées au paragraphe 1.3, doivent cependant être remplies : la résine liquide doit mouiller la phase solide ; la couche d’oxyde de l’alliage matriciel doit être éliminée ou déplacée, etc.
1.2 Caractéristiques intrinsèques du renfort et du liant Quelles que soient les fonctions assignées à l’interface, elles ne peuvent être remplies que si les constituants eux-mêmes donnent satisfaction. Une performance médiocre du matériau composite ne peut pas toujours lui être imputée. ■ Les composites obtenus à partir de certaines fibres polymères comme les aramides (exemple : le Kevlar ) ou le polyéthylène haut module présentent des caractéristiques faibles en compression, en flexion, ou en cisaillement. Le rapport des contraintes à rupture compression/traction est de 0,75, 0,57 et 0,2 pour des composites carbone/résine, verre/résine et Kevlar /résine respectivement. La faiblesse de ce dernier composite a pour origine la structure hétérogène des fibres aramides qui ont une tendance naturelle à se défibriller. Ainsi, même si la liaison de la surface de la fibre avec la matrice est bonne, il est clair que la résistance sera limitée par la cohésion de la fibre. Un cas semblable se rencontre avec certaines variétés de particules d’alumine : elles ont une structure lamellaire de faible cohésion qui favorise leur clivage en cas de rupture du polymère chargé. L’interface n’est le plus souvent pas en jeu. ■ Les composites verre/résine ont vu en quelques années leurs performances en cisaillement interlaminaire (on induit, par un essai de flexion sur appuis rapprochés, un cisaillement entre les couches dont la valeur est en partie tributaire de l’adhésion fibre/matrice) croître de 50 à 110 MPa au fur et à mesure de l’introduction de résines plus résistantes. Ce résultat est d’ailleurs surtout significatif de l’ambiguïté de cet essai pour apprécier la qualité de l’interface.
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1.3 Caractéristiques des phases pour une association optimale Lorsque leur qualité propre n’est pas en jeu, les phases ne vont former un ensemble harmonieux et donner le matériau attendu que si l’interface résultant de leur association remplit pour sa part les fonctions très générales citées dans l’introduction (et qu’il faudra mieux définir par la suite). Un préalable est donc de s’assurer que les surfaces qui vont se trouver en contact présentent les qualités requises, en s’intéressant aux caractéristiques qui vont se trouver a priori concernées : — les caractéristiques de surface pour les charges ou le renfort ; — l’ensemble de leurs propriétés pour la matrice ou le liant. Ces caractéristiques sont les seules à pouvoir être mesurées avant la réalisation du matériau et elles sont donc souvent employées pour le contrôle.
■ Les fibres de verre sont recouvertes d’un ensimage qui limite les effets de l’abrasion au cours des opérations textiles (tissage, assemblage) et freine l’accès de l’humidité vers le verre ; dans le stratifié fini, cet ensimage, constituant autour des fibres une couverture de composition complexe, empêche encore à l’humidité, qui diffuse à travers la matrice, d’accéder à la fibre et de la dégrader. ■ Les fibres de carbure de silicium destinées à renforcer les alliages d’aluminium ou de titane sont souvent recouvertes d’un dépôt de carbone pyrolytique qui protège la fibre de l’attaque par le métal et joue le rôle d’un fusible mécanique en se rompant, évitant ainsi la rupture précoce de la fibre elle-même. Le problème de la protection du renfort en présence de matrices métalliques est très général en raison des températures d’élaboration élevées : sa résolution conduit le plus souvent à des interfaces épaisses où des phénomènes de diffusion et la formation de composés définis sont attendus.
1.4 Zone de contact : interface/interphase 1.3.1 Surface du renfort Toutes les techniques d’investigation des propriétés des surfaces solides peuvent être mises à contribution : — mesures de rugosité et d’aire spécifique ; — microscopies optique et électronique ; — dosage fonctionnel des groupements présents en surface ou analyse des produits adsorbés et qui risquent de se localiser à l’interface ultérieurement (vapeur d’eau, oxygène, etc.) ; — techniques spectroscopiques pour analyser la composition des couches superficielles ; — techniques thermodynamiques pour déterminer les énergies disponibles pour l’interaction avec la matrice : mesures d’angle de mouillage, enthalpies d’adsorption, chromatographie en phase inverse, etc. Ces techniques sont largement utilisées pour comparer entre eux des traitements de surface.
1.3.2 Propriétés de la matrice ou du liant Formant la phase continue du composite, ce sont leurs propriétés en masse qui importent : module d’élasticité et résistance, résistance à la propagation de fissure, tenue à l’environnement au sens large (les matériaux polymères doivent résister à l’humidité, surtout dans le cas où les fibres y sont sensibles ; l’innocuité de la matrice vis-à-vis du renfort ou de la charge est essentielle lorsque une attaque ou une corrosion de ceux-ci sont à craindre au cours d’élaborations à haute température). On n’oubliera pas que la mécanique de la matrice n’est en réalité connue que très imparfaitement à proximité des particules ou des fibres puisque, sans même invoquer l’existence de véritables réactions, l’interaction entraîne des modifications de structure (taille de grain, microstructure et composition de l’alliage d’aluminium au voisinage des particules de carbure de silicium ; formation de cristaux au contact de la fibre de verre ou de carbone pour une matrice organique de type semi-cristallin, etc.) et que l’état de contrainte local (triaxial) modifie notablement la réponse du matériau.
1.3.3 Ensimages, protections et dépôts Dans de nombreux cas, le renfort se présente déjà muni d’un revêtement destiné à le protéger dans l’attente de son inclusion dans la matrice ou en prévision de la réaction qui ne manque pas de se produire au cours de la mise en œuvre.
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L’interface se formant au cours du procédé même d’élaboration du composite, le contrôle de ce procédé est d’importance majeure pour l’industriel : contamination des surfaces, phénomènes de diffusion, gradients thermiques, etc., sont autant de paramètres qui influent sur la constitution de l’interface. Celle-ci peut être le lieu où se concentrent les défauts de toutes sortes constituant ce que Bikerman a appelé weak boundary layers : porosité et humidité, couches de réaction formées de produits fragiles, gradients de contrainte ou de composition, modifications de texture cristalline, etc. Toute une théorie de l’adhésion fibre/matrice a pu être élaborée par Bikerman à partir d’une classification des principaux défauts susceptibles d’être rencontrés [1].
1.4.1 « Voir » l’interface Les observations directes ou la mise en évidence d’une région douée de caractéristiques spécifiques sont possibles dans un petit nombre de cas. On observe ainsi facilement en microscopie optique la couche de carbone pyrolytique qui protège la fibre de carbure de silicium dans les composites à matrice de titane (figure 1a ). De même, lorsque la matrice polymère est susceptible de cristalliser, une organisation dite transcristalline se développe à partir des fibres jouant le rôle de germes, aisément identifiable en lumière polarisée. À une échelle encore plus réduite (figure 1b ), on observe en microscopie à haute résolution la zone de contact entre la surface relativement bien ordonnée des fibres de carbone et la matrice amorphe de résine [2]. À côté de ces observations de l’interface en place, les fractographies d’échantillons rompus donnent l’occasion de formuler une appréciation sur la manière dont l’interface s’est comportée lors de la rupture et l’on parle de rupture cohésive ou adhésive suivant que le cheminement laisse apparaître un renfort apparemment recouvert ou non de matrice (figure 2). Cette appréciation est souvent sommaire mais des informations d’ordre quantitatif peuvent être recueillies, par exemple, la distribution des longueurs des fibres déchaussées, informations qui peuvent être introduites dans des modèles de rupture pour valider des mécanismes de rupture (§ 5.4.1). Enfin, des méthodes puissantes d’analyse (ESCA, SIMS) sont capables d’identifier sur les fibres extraites et apparemment dénudées les traces de matrice, amenant à préciser le lieu exact de la rupture. Nota : le lecteur pourra se reporter aux articles Émission ionique secondaire : SIMS. Principes et appareillages [P 2 618] et Analyse de surface par ESCA. Principe et instrumentation [P 2 625] du traité Analyse et Caractérisation.
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Ainsi, certaines modifications des propriétés thermomécaniques des composites à matrice organique peuvent être attribuées à l’existence d’une zone douée d’un comportement particulier. Cette zone peut être l’interface ou encore la portion de polymère de mobilité réduite qui se trouve au voisinage des fibres. On peut, par exemple, repérer dans le spectre de relaxation mécanique d’un composite verre/époxyde l’apparition d’une transition caractéristique de l’ensimage, transition absente dans le spectre du matériau sans ensimage qui ne montre que la transition vitreuse de la résine. Ces perturbations du spectre thermomécanique sont souvent invoquées pour établir l’existence d’une zone d’interaction fibre/matrice ayant des caractéristiques spécifiques. Le comportement mécanique des composites relève très généralement de ce caractère séméiologique dans la mesure où toutes les caractéristiques sont plus ou moins dépendantes de ce qui se passe entre fibre (ou particule) et matrice. Pour les composites à renfort fibreux, cela est vrai aussi bien des caractéristiques contrôlées par la fibre (par exemple, l’unidirectionnel sollicité en traction suivant la direction des fibres) que de celles contrôlées plutôt par la matrice (l’unidirectionnel en traction, transversalement aux fibres). C’est vrai au premier chef chaque fois qu’apparaît un cisaillement relatif à la surface des fibres, ce qui est pratiquement toujours le cas. Pour les plastiques chargés, même le module d’élasticité, qui ne dépend en principe que du taux volumique des constituants, est parfois affecté (§ 4) : l’explication qui est proposée est fondée sur l’effet que la surface des particules exerce sur la structure du polymère qui les entoure.
2. Modèles de l’interface
Figure 1 – « Voir » l’interface [2]
Chacune des approches qui viennent d’être présentées conduit à sa propre description, voire à un modèle simplifié, intégrant les observations réalisées et suggérant les modes par lesquels l’interface intervient dans le comportement macroscopique du matériau. Sauf pour le modèle thermodynamique où seules des interactions superficielles sont admises, il est partout postulé l’existence d’une phase intermédiaire dotée de caractéristiques spécifiques.
2.1 Modèles mécaniques Ces modèles partent de la représentation la plus classique du matériau composite : celle d’une particule ou d’une fibre entourée par la matrice. La théorie est ensuite modifiée afin de prévoir ce qui se passe lorsque l’on interpose entre fibre ou particule et matrice une phase supplémentaire. Un problème est d’ajuster les propriétés de cette phase et le volume qu’elle occupe. Cela est le plus souvent réalisé par identification à partir du comportement global macroscopique du matériau : ainsi Broutman et Agarwal [3], dans une analyse simplifiée par éléments finis, assignent arbitrairement à cette phase, de module E i , un volume de 4 ou 8 %. Le module d’élasticité du composite E c est calculé pour Ei variant entre Ef , module de la fibre, et zéro, cette dernière valeur représentant le décollement complet entre fibre et matrice. Pour E i E f , les fibres ne contribuent pas à la rigidité du composite et Ec < Ef . Figure 2 – Rupture parallèle aux fibres dans des composites carbone/résine : la rupture se produit dans la matrice (a ) ou à l’interface (b )
1.4.2 Approche séméiologique Par ce terme, on veut signifier que l’on n’accède le plus souvent à l’interface qu’indirectement, par ses manifestations, par les comportements qu’elle engendre dans le composite ou ceux qu’on lui attribue.
Cette conception, illustrée aussi par les travaux de Théocaris [4], fait l’impasse sur la composition de la couche intermédiaire et considère seulement son extension volumique et ses caractéristiques mécaniques, en réalité son module d’élasticité. Par définition, ce module varie continûment (mésophase) entre ceux des deux phases prises comme bornes, ce qui est, a priori, difficile à justifier. On trouve pourtant l’idée juste d’une interphase venant modifier les réponses physique ou mécanique de matériaux que les théories antérieures ont considérés comme constitués de deux phases seulement. Ces modifications sont expérimentalement constatées par les mesures de capacités thermiques ou de températures de transition vitreuse sur des matériaux contenant des charges ou des fibres en quantité croissante : la proximité d’une surface solide gêne, en
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effet, la mobilité des chaînes, que les polymères soient réticulés ou non, et certaines théories tentent d’évaluer l’extension de la zone de polymère ainsi perturbée.
2.2 Modèles issus de l’analyse chimique ou physico-chimique Le plus connu est certainement le modèle relatif au verre en raison de l’importance industrielle qu’ont acquise les composites verre/résine et de l’aptitude du verre à se prêter aux analyses de surface (infrarouge par exemple). Dans les nombreuses versions de ce modèle qui ont été proposées, l’interface est décrite comme le lieu des réactions chimiques entre les fonctions chimiques disponibles à la surface du verre, et l’ensimage réactif toujours présent. Un modèle récent est celui proposé par Pluedemann [5] : on y trouve (figure 3) les classiques réactions de l’ensimage silane avec les groupements silanol de la surface du verre, mais le modèle est complété, côté résine, par l’existence d’une zone diffuse constituée par l’ensimage et le polymère matriciel et prenant la forme précise d’un réseau interpénétré dont la richesse en polymère matriciel croît à mesure que l’on s’éloigne du verre. Lorsque l’existence d’interphases épaisses est établie, avec des gradients de composition et de structure comme dans le cas du verre, le problème est d’attribuer à ces couches des caractéristiques adéquates si l’on veut rendre le modèle opérationnel du point de vue mécanique. Si l’on sait, par exemple, que la réaction entre les fibres et une matrice métallique, décrite à travers les diagrammes de phases des deux constituants, mène à la formation de carbures dont le caractère fragile est connu, la situation est moins simple avec les matériaux organiques : pour des interfaces carbone/ensimage/ résine dans lesquelles on soupçonne qu’une partie du durcisseur de la résine migre dans l’ensimage, donnant naissance ainsi à une couche rigide mais fragile, des mélanges ensimage /durcisseur censés reproduire la composition de l’interphase ont été reconstitués et leurs caractéristiques mécaniques mesurées.
Figure 3 – Représentation de l’interface verre/résine (d’après [5])
2.3 Modèles fondés sur la thermodynamique Appliqués à l’adhésion des fibres de carbone, et déjà évoqués pour les phénomènes de collage en général, les modèles admettent que la solidité de la liaison dépend de l’intensité des interactions superficielles qui peut être calculée, pour le renfort et la matrice, à partir des diverses contributions à l’énergie de surface : forces de dispersion, forces polaires, interactions acido-basiques, toutes quantités susceptibles de mesure. La pertinence de l’approche thermodynamique est illustrée par l’effet des traitements de surface des fibres de carbone : une relation existe entre le paramètre calculé à partir des interactions acido-basiques et la contrainte de cisaillement (mesurée par un essai de fragmentation sur monofilament) des systèmes carbone/époxyde [6], ou encore entre l’énergie réversible d’adhésion et la contrainte en flexion de composites unidirectionnels carbone/PEEK sens travers [7]. Nota : PEEK : polyéther-éther-cétone.
Pour les composites verre/thermoplastique cependant, l’analyse en termes d’énergie d’adhésion n’est plus valable en raison probablement de la présence d’un ensimage qui interdit aux surfaces d’être en contact direct, ce qui rend caduque l’application des idées précédentes ; elle n’est pas satisfaisante non plus pour les composites carbone/thermoplastique [8]. Une tentative de généralisation a pourtant été récemment présentée par Gutowski [9] : reprenant les exemples des références [6] ou [8], l’auteur montre que la résistance interfaciale décrit toujours une sorte de courbe maîtresse en fonction du rapport des énergies superficielles du renfort et de la matrice : un optimum est noté lorsque le rapport de ces énergies est de 1 (figure 4).
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Figure 4 – Relation entre l’énergie superficielle (rapport des énergies liquide/solide) et la résistance mécanique de composites (d’après [9])
2.4 Modèles de type énergétique Ils sont fondés sur l’observation que, dans un grand nombre de cas (spécialement avec les matrices métalliques et céramiques), les fissures qui se propagent dans le composite sont déviées, au voisinage de la fibre, dans des directions parallèles à celle-ci. Avec un renfort qui conserve ainsi son intégrité, la vie du composite est prolongée en dépit d’un endommagement qui s’accumule. En termes d’énergies, la condition de protection d’un composite dans lequel la fibre, de ténacité critique G cf , est entourée d’une interface épaisse formée par la couche de protection et la zone de réaction, de ténacité G ci , peut s’écrire : Gci /G cf < W i /W f
(1)
en notant W i et W f les énergies restituées lors d’une extension de la fissure le long de l’interface ou dans le plan de la fibre respectivement (termes à corriger d’un angle de phase tenant compte du
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mode de propagation). Dans ces matériaux, on est donc conduit normalement à réduire délibérément la ténacité interfaciale G ci , seul paramètre sur lequel on ait quelque latitude de contrôle par le choix du revêtement ou de son épaisseur. On reviendra plus loin (§ 5.2 et 5.3) sur ce concept de fusible mécanique.
3. Apport de la micromécanique L’interface ayant un développement spatial réduit, son comportement est difficile à caractériser sur le composite global puisque la réponse est diluée (masquée par celle des constituants principaux). Des expériences ont cependant été conçues pour exalter cette réponse, expériences plus simples à analyser puisqu’elles se réalisent à l’échelle même de la fibre. On considérera ici la fibre ou la particule entourée de matrice, d’abord isolée, puis dans l’environnement naturel constitué par les autres fibres ou particules.
3.1 État de contrainte à l’interface 3.1.1 Contraintes locales moyennes La disparité des coefficients thermo-élastiques entre fibre et matrice fait de l’interface le siège de contraintes si l’on admet qu’il y a continuité des déformations (interface intacte, parfaitement liée, sans décollement ou fissure). Le calcul de ces contraintes pour une fibre ou une particule entourée d’un volume infini de matrice se fait facilement pour des géométries axisymétriques ou planes. À l’état initial, avant application de tout chargement extérieur, des contraintes résiduelles sont présentes, fonctions de la différence des coefficients de dilatation et de l’écart entre la température d’élaboration et la température de référence : pour E f > E m et α f < α m , la fibre est comprimée par la matrice, radialement et axialement. Un calcul simple montre que la contrainte radiale autour d’une fibre unique infiniment rigide atteint un maximum lorsqu’elle est entourée d’un cylindre de matrice 20 fois plus grand, et qu’elle est donné approximativement par :
σ R ≈ E m ∆T∆ α
(2)
module d’élasticité de la matrice, écart entre la température du moulage et la température ambiante, ∆ α différence des coefficients de dilatation entre fibre et matrice. Dans le cas du carbone ou du verre entourés de résine, σ R est de l’ordre de la moitié de la résistance à rupture de la résine. Le retrait thermique s’exerce également dans le sens long puisque l’interface est censée avoir acquis pendant le chauffage une solidité suffisante : un microflambage voire même la rupture de la fibre peuvent être observés après retour à la température ambiante. avec E m ∆T
À ces contraintes thermiques et, éventuellement, celles ayant pour origine un retrait de la matrice (retrait chimique) ou son gonflement (sous l’effet de l’humidité par exemple) vont se superposer les contraintes résultant du chargement mécanique. Le résultat est le plus souvent un frettage de la fibre par la matrice. Ce frettage peut être une composante importante de l’effort à exercer pour faire glisser la fibre, surtout lorsque l’interaction fibre/matrice initiale est faible (cas des céramiques renforcées). Lorsque cette interaction initiale est forte, on remarque que les fibres ayant le plus fort coefficient de dilatation dans le sens travers sont les plus faciles à déchausser (§ 3.3). La présence d’autres fibres ou particules est prise en compte dans des modèles idéalisés où le composite est assimilé à un arrangement régulier de sphères ou de cylindres suivant un empilement carré ou
hexagonal, la distance entre sphères étant proportionnelle à la fraction volumique considérée. Le calcul est fait sur une cellule élémentaire. On a besoin pour ces calculs des coefficients thermo-élastiques et de la fraction volumique du renfort et de la résine. Les constituants sont supposés avoir un comportement élastique linéaire. Le calcul des contraintes à l’interface a d’abord été fait analytiquement et certaines vérifications effectuées à l’aide de modèles macroscopiques photoélastiques. Un résultat de calcul est donné sur la figure 5 pour une traction exercée suivant le sens des fibres disposées en arrangement hexagonal [10]. On voit que, suivant la direction θ autour de la fibre centrale, le signe du rapport de la contrainte radiale σ R à la contrainte longitudinale appliquée σ L change : c’est encore une compression dans la direction des fibres les plus proches mais c’est une traction suivant la direction à 30o. La prise en compte des contraintes résiduelles d’origine thermique ne fait qu’accentuer cette dissymétrie. Les conclusions tirées de ces calculs prévoient que la probabilité d’une rupture de l’interface est nulle en traction longitudinale, faible en traction transversale et élevée en cisaillement. En l’absence de tout critère d’endommagement de l’interface, cette probabilité ne peut cependant être évaluée que par rapport à la résistance macroscopique de la matrice seule. Les analyses par éléments finis sont venues confirmer plus récemment ces calculs. Le modèle proposé par Adams [11], par exemple, raisonne sur une cellule comportant un quart de fibre entouré de matrice, représentative d’un arrangement carré. Il incorpore les propriétés du renfort et de la matrice, éventuellement sous forme non linéaire, et calcule l’état de contrainte résultant de la combinaison des chargements d’origine hygrothermique et mécanique. Les courbes contrainte-déformation pour la caractéristique macroscopique recherchée sont calculées et accompagnées de cartographies des contraintes au niveau de la cellule. Ici également, aucun critère de rupture de l’interface n’est proposé, mais il reste la possibilité de la dégrader numériquement afin d’identifier le modèle aux résultats expérimentaux. Cette approche fonctionne un peu comme un système expert puisque la dégradation de l’interface, une fois constatée pour un premier matériau, est susceptible de se retrouver pour un matériau proche dont on peut ainsi prévoir le comportement.
3.1.2 Contraintes aux extrémités : le transfert de charge À la périphérie des particules de charges et aux extrémités des fibres courtes ou des fibres rompues, les concentrations de contraintes sont considérables. Le point est d’importance puisque c’est par les extrémités que se produit le rechargement du renfort par la matrice, principe du fonctionnement des composites.
Figure 5 – Rapport de la contrainte radiale à la contrainte longitudinale appliquée pour une fibre entourée de 6 voisines plus ou moins proches (Vf) : on passe d’un état de compression à un état de traction selon la direction observée [10]
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Pour une particule sphérique rigide entourée d’une matrice élastique, la contrainte maximale est localisée aux pôles, et vaut environ 2 fois la contrainte de traction appliquée : c’est dans cette zone que l’interface cédera éventuellement. La présence, dans le voisinage, de particules en quantité croissante a pour effet d’abaisser en proportion la contrainte à laquelle la décohésion se manifestera. Pour une fibre unique entourée de matrice, de nombreuses solutions analytiques ont été proposées. L’une des premières, celle de Cox [12], prévoit la forme de la contrainte de cisaillement le long d’une fibre de longueur comme étant de la forme (figure 6) : -–x E f r f ε sin h β ---2 τ ( x ) = ------------------ β -----------------------------------------2 cos h β /2
β =
2G m
-------------------------------E r ln R/r f
2 f
(3)
1/2
(4)
f
Figure 6 – Profil de cisaillement aux extrémités d’une fibre de longueur (selon Cox [12])
avec E f
module d’Young de la fibre, Gm module de cisaillement de la matrice, ε déformation appliquée, rf rayon de la fibre, longueur de la fibre avec 0 < x < . Dans l’expression ci-dessus, R est la distance dans la matrice à laquelle le cisaillement est annulé : c’est une grandeur qui a toujours prêté à discussion ; pour Cox, qui traitait le cas du composite unidirectionnel, R est la demi-distance entre fibres. Suivant les modèles, des concentrations de contrainte (rapport entre le cisaillement à l’interface et la contrainte longitudinale appliquée) comprises entre 2 et 4 en bout de fibre sont calculées. À partir des extrémités, les concentrations de contrainte diminuent ensuite rapidement le long de la fibre. La longueur nécessaire pour que le cisaillement s’annulle est d’une grande importance pratique : sous le nom de longueur ineffective, elle définit la longueur minimale de fibre (longueur critique = 2 fois la longueur ineffective) pour qu’il y ait rechargement complet (figure 6) et donc effet de renfort. Si, pour une raison ou pour une autre, l’interface est incapable de supporter ces contraintes de cisaillement, le processus de transfert de charge ne suit plus les lois précédentes et d’autres phénomènes prennent le relais. Ces calculs de contrainte en extrémité de fibres ont été repris par des méthodes analytiques ou numériques en tenant compte de la triaxialité des contraintes, des contraintes thermiques, de l’effet de Poisson, de l’effort normal supporté par l’extrémité de la fibre, etc. Les résultats ne font pas pour l’instant l’unanimité. Comme précédemment, la proximité des fibres dans le composite réel affecte la concentration des contraintes aux extrémités de celle qui est rompue. Qualitativement, tout se passe comme si la matrice effective (c’est-à-dire le matériau moyen environnant) voyait son module d’élasticité croître, ce qui revient à une diminution du rapport E f /G m dans le modèle de Cox et une diminution de la longueur critique. La solidité de l’interface exercera ses effets dans le même sens que pour le monofilament.
3.1.3 Validations expérimentales Si, comme on l’a dit (§ 1.4.1), il n’est pas possible de « voir » l’interface, certaines méthodes visant à mesurer in situ les déformations et contraintes à une échelle assez fine sont en cours de développement. Bien que limitées à l’examen de la surface ou d’une zone subsurfacique des échantillons, elles donnent des informations quantitatives sur les distorsions de l’état de contrainte à proximité des interfaces.
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— La photoélasticimétrie : elle est déjà utilisée sur des modèles macroscopiques de matériaux (billes de verre ou de métal dans une résine transparente). L’amélioration des techniques permet de l’utiliser pour dresser la carte des contraintes autour d’une fibre ou d’une particule lorsque la matrice présente un effet photoélastique suffisant. — La spectroscopie Raman : certains matériaux présentent dans la bande de fréquence Raman une diffusion caractéristique à une longueur d’onde qui dépend de l’état de déformation ; c’est le cas des fibres de carbone : mieux la fibre est organisée, plus le pic de diffusion est étroit et intense. On peut ainsi mesurer point par point l’état local de déformation le long d’une fibre noyée dans la résine optiquement transparente et n’absorbant pas dans la même région. — Les techniques de grille : elles sont utilisées en particulier pour les matériaux opaques (alliages chargés de particules). On sait maintenant déposer des grilles dont le pas peut être de l’ordre du micromètre : la déformation de la grille, supposée suivre fidèlement celle du substrat, va renseigner sur les microdéplacements locaux.
3.2 Caractéristiques ultimes : résistance et ténacité 3.2.1 Particules Pour les matériaux chargés, la liaison interfaciale n’est pas accessible par les méthodes mécaniques directes en raison de la géométrie des particules. On doit obligatoirement recourir à des méthodes indirectes et remonter aux paramètres recherchés après avoir identifié le lieu et les conditions de la rupture entre charge et liant (par des essais mécaniques sous microscope, fractographies d’éprouvettes rompues, etc.). Une méthode indirecte largement utilisée pour les plastiques chargés fait appel aux variations de volume que l’on peut enregistrer lors de l’essai mécanique. Pour un corps isotrope, cette variation est déterminée par la valeur du coefficient de Poisson suivant : ∆V/V = (1 – 2ν ) εx
(5)
l’éprouvette étant sollicitée suivant x, avec ν = – εy /εx = – εz /εx . En présence d’un volume supplémentaire créé dans le matériau par la décohésion, ∆V /V croît plus fortement que ne le laisse prévoir l’équation (5) et l’on note la contrainte et la déformation auxquelles se produit la déviation. On a vu au paragraphe 3.1.2 que la concentration de contrainte maximale est localisée aux pôles de la particule et que le décollement s’amorce en ce point.
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3.2.2 Fibres Le fort rapport d’aspect des fibres (rapport de la longueur au diamètre) rend possible la réalisation d’essais mécaniques spécifiques destinés à mesurer directement le comportement de l’interface en traction ou en cisaillement, ce dernier mode étant plus représentatif du type de sollicitation rencontré dans le composite réel. Ces essais (figure 7) mettant en jeu une seule fibre se prêtent bien à la vérification des modèles théoriques puisque les interactions entre fibres sont absentes. L’éprouvette profilée dite de Mc Garry contient une fibre alignée suivant l’axe. Une compression exercée sur la résine génère, par le jeu des coefficients de Poisson, un effort de traction à l’interface. La contrainte de traction interfaciale est calculée suivant :
εx ( νm – νf ) Ef Em σ = --------------------------------------------------------------------------------( 1 + ν m ) E f + ( 1 – ν f – 2 ν 2f ) E m avec Ef et Em
νf et νm εx
(6)
modules d’Young respectifs de la fibre et de la matrice, coefficients de Poisson respectifs de la fibre et de la matrice, déformation de l’éprouvette en compression au moment où le décollement s’amorce.
Pour solliciter l’interface en cisaillement, on tire sur la fibre dont une extrémité est plantée dans la matrice (pull-out ) ou on comprime la fibre qui affleure à la surface d’un échantillon mince (push-out ). Le choix de la technique est commandé essentiellement par les difficultés de réalisation des expériences (le diamètre des fibres impose l’épaisseur maximale pour la compression), mais on remarque que la traction est plus conforme au type de sollicitation à laquelle les fibres sont généralement soumises. L’effet de Poisson, tendant à désolidariser ou à fretter l’interface, joue en sens inverse dans les deux configurations d’essai. Par la première technique, la contrainte de décohésion τ i d’une fibre de rayon r f , enfoncée d’une longueur e et se décollant à la charge Fd , est donnée par :
τ i = 2F d / ( πr f e )
(7)
Cependant, dans de nombreux cas où la matrice a un comportement quasi élastique, la contrainte n’est pas uniforme (figure 8) et la valeur mesurée τ i dépend donc de la longueur d’enchâssement suivant : (8) τ i = τ d tanh α e / ( α e ) expression due à Greszczuk dans laquelle τ i et τ d représentent la contrainte de décohésion pour une longueur de fibre implantée = e et = 0 respectivement et α une constante pour un système donné. Dans l’expérience, les valeurs de τ i sont déterminées pour plusieurs longueurs d’enchâssement et τ d calculé par ajustement à l’expression (8) [13]. Lorsque la longueur libre de fibre est suffisamment faible, l’énergie élastique emmagasinée n’est pas suffisante pour provoquer l’extraction complète de la portion décollée et un processus d’extraction avec friction peut être observé jusqu’à la séparation complète. On peut dans ce cas calculer une contrainte de friction et le coefficient correspondant. L’expression de Greszczuk peut être réécrite en termes de contrainte σd dans la fibre au moment de la décohésion sous la forme : ( 2 τd / β ) σ d = ----------------------------------(9) tanh ( β e /r f ) avec
2G i β = r f ------------------bi rf Ef
1/ 2
(10)
Figure 7 – Techniques micromécaniques de caractérisation de l’interface fibre/matrice
ou, encore, en remarquant que, pour e grand, le terme tanh tend vers 1 : 2 E f b i 1/ 2 σ d = τ d -----------------(11) Gi rf
dans laquelle, suivant Cox, b i représente l’épaisseur d’interface et G i son module de cisaillement. On peut aussi écrire l’équation (11) de façon à faire apparaître une énergie de décohésion G IIc :
σd = (4Ef G IIc /r f )1/2
(12)
équation proposée par Outwater et Murphy dans laquelle G IIc représente l’énergie de fracture de l’interface. Les expressions en contrainte ou en énergie sont toutes deux une fonction de r f–1/ 2 et peuvent être employées en équivalence.
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Ces essais de push-out sont bien adaptés aux fibres de fort diamètre (carbure de silicium) associées à une matrice métallique ou céramique. Avec les matrices céramiques, la contrainte de décohésion (τ d) est souvent faible et la contrainte de friction devient le paramètre essentiel de formulation des combinaisons fibre/matrice. Une alternative au push-out consiste à mesurer la force nécessaire pour décoller puis enfoncer la fibre d’un seul côté d’un échantillon de forte épaisseur (indentation). La préparation de l’échantillon se réduit alors au polissage d’une seule surface, mais l’acquisition des paramètres indispensables au calcul des contraintes de décohésion et de friction s’avère alors délicate en raison des faibles déplacements à mesurer et de la complexité de l’état de contrainte : répartition de la charge de l’indenteur sur la surface de la fibre, réponse propre de celle-ci (elle peut se déformer localement sous l’effort ou éclater), choix d’un critère de décohésion, évaluation de la longueur décollée, influence des fibres voisines réparties aléatoirement sont autant de problèmes à résoudre. Dans une dernière série de techniques, on profite du transfert de charge lui-même pour rompre en fragments la fibre (en exerçant un effort de traction sur la matrice, cas A) ou la matrice (en exerçant un effort de traction sur la fibre, cas B). Connaissant la résistance, ou plutôt la distribution des résistances, de la phase qui se rompt, on peut évaluer la capacité τ de l’interface à transmettre l’effort. L’essai, introduit par Kelly et Tyson [15], est analysé suivant un simple équilibre des forces entre la traction et le cisaillement à l’interface et on peut écrire à la fin de l’essai :
Figure 8 – Essai mécanique en cisaillement entre une fibre et une matrice ([13] pour (a ) et [14] pour (b ))
Dans une autre configuration de l’essai de déchaussement, ce sont les minuscules gouttes de résine que l’on a formées en chapelet à la surface de la fibre que l’on vient décoller par cisaillement. La contrainte de décohésion est encore donnée ici en rapportant la force nécessaire pour décoller les gouttes à la surface de contact (longueur des gouttes × périmètre de la fibre). Les essais dans lesquels on comprime la fibre sont facilement réalisés en prenant comme échantillons des sections droites de composite unidirectionnel où la fibre sollicitée, entourée d’autres fibres à des distances variables, est dans une situation naturelle. Si les échantillons sont suffisamment minces, la fibre peut être totalement extraite de sa matrice (push-out ) et l’enregistrement de la force en fonction du déplacement au cours de l’essai présente un ou deux maximums suivant les systèmes. Dans la figure 8, la contrainte de décohésion, correspondant au premier maximum Fd , est donnée par la même expression que pour le déchaussement, avec e représentant cette fois l’épaisseur de l’échantillon tandis que la contrainte de friction est calculée d’après :
τ F = µσ R
(13)
dans laquelle la contrainte radiale de frettage σ R est donnée par : F max = ( πr 2f σ R /k ) [ exp ( 2 µ k e /r f ) – 1 ]
(14)
k représentant l’effet de Poisson (qui contrarie l’extraction puisqu’on pousse sur la fibre) suivant : k = Em νf / [Ef (1 + ν m)]
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(15)
cas A (rupture de la fibre) ε fr ε mr
cas B (rupture de la matrice) ε mr ε fr
τ / σ fr = r f / c
τ / σ mr = r f ( 1 – V f )/ c
(16)
où c est la longueur critique, c’est-à-dire la longueur au-dessous de laquelle la fibre (ou la matrice, cas B) ne peut plus rompre et σ fr et σ mr les contraintes de traction à rupture respectives de la fibre et de la matrice à cette longueur c . Concrètement, le cas A est celui d’une fibre de verre dans une résine de fort allongement ou une fibre de carbone dans une matrice aluminium ; le cas B, celui d’une gaine d’alumine entourant une fibre de carbure de silicium : on doit tenir compte ici du volume de la gaine qui se fragmente (terme Vf ). L’essai est global car la quantité τ peut recouvrir divers comportements et plusieurs modes de rechargement des fragments à leurs extrémités sont possibles : rechargement élastique, friction, déformation plastique. La distinction des processus de rupture et leur description en termes mécaniques restent le problème de ces essais sur composites modèles car si, au demeurant, les méthodes répondent bien aux modifications de l’état de surface des fibres, les valeurs annoncées n’ont pas immédiatement une valeur intrinsèque. Pour un même système carbone/époxyde, les 3 méthodes précédentes (fragmentation, micro-indentation et déchaussement) donnent respectivement les valeurs de 54,88 et 115 MPa. Si l’on adopte la description énergétique (déchaussement), on trouve une énergie de rupture de 10 à 50 J/m2. Il est clair qu’un effort considérable reste à faire pour analyser la signification de ces résultats.
3.3 Micromécanique implicite À de rares exceptions près, les expériences précédentes ne sont pas encore assez nombreuses ni assez bien analysées pour que les grandeurs auxquelles elles aboutissent puissent être concrètement introduites dans les calculs. Jusqu’à présent, elles ont été surtout destinées à comparer des traitements de surface de fibres, des traitements thermiques, etc.
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Au contraire, issue des essais sur composites réels et fondée sur l’analyse des mécanismes de rupture, une autre micromécanique (dite implicite) s’est développée en parallèle. Elle a pour origine le constat suivant : si les caractéristiques élastiques ou les propriétés à rupture sens long des composites renforcés de fibres peuvent être assez bien approchées par les lois des mélanges, il n’en est pas de même pour l’énergie consommée par la rupture. Cette énergie, que l’on peut apprécier à travers toute une série de propriétés de grande importance technologique comme la ténacité, la tenue à l’impact, la sensibilité à la fissuration, etc., est, dans la plupart des cas, sans commune mesure avec la fragilité inhérente des constituants : alors que le verre et le polyester sont des matériaux fragiles, les polyesters renforcés de verre sont relativement très tenaces ; de même, les céramiques, lorsqu’on y ajoute des fibres. L’origine de cette énergie supplémentaire réside naturellement dans les processus dont l’interface est le siège et un grand nombre de travaux tente depuis longtemps de faire un classement exhaustif de ces mécanismes et une comptabilité scrupuleuse de l’énergie qu’ils consomment. La figure 9 représente quatre des mécanismes d’absorption d’énergie les plus souvent invoqués [16] lorsqu’une fissure matricielle, se propageant perpendiculairement aux fibres d’un composite unidirectionnel soumis à une traction, se présente à l’interface. — La fissure est stoppée au voisinage de la fibre (ouverture de la fissure bloquée par la fibre rigide et fibre supposée assez résistante pour ne pas casser) ; l’état de contrainte local qui s’instaure entraîne, puisque la charge appliquée continue à croître, une décohésion de la fibre par propagation d’une fissure en mode II sur une longueur d . Ce processus est consommateur d’énergie (figure 9b ). On notera que σd et d peuvent être mesurées directement par les essais de déchaussement ou de push-out décrits dans le paragraphe 3.2.2. Dans l’équation, la contrainte à considérer dans la fibre est non pas la contrainte à rupture, mais σd , contrainte en traction dans la fibre au moment de la décohésion. — La fissure matricielle initiale se propage au-delà de la fibre. Celle-ci, toujours sous contrainte, frotte contre la matrice sur toute sa partie décollée d (figure 9c ). Pour calculer l’énergie consommée, on doit connaître la contrainte de friction τ F et la différence de déplacement entre fibre et matrice. — Lorsque la fibre casse dans sa portion décollée (figure 9d ), son énergie élastique de déformation est instantanément dissipée dans la matrice avoisinante. La contribution énergétique de cette redistribution est importante puisque proportionnelle au carré de la résistance des fibres à la longueur considérée. — La fissure principale continue à s’ouvrir, l’extrémité de fibre encore en place doit être déchaussée, ce qui implique encore une fois un frottement contre la matrice (figure 9e ). Ce frottement s’exerce sur une longueur de fibre comprise entre 0 et /4 ou c /2 suivant que la longueur des fibres est inférieure ou supérieure à la longueur critique c , notion introduite dans le paragraphe 3.2.2. En calculant ces énergies, on trouve les expressions données dans la figure 9. On doit dire que l’accord n’est complet, ni sur l’indépendance de ces mécanismes les uns par rapport aux autres, ni sur leur extension respective pour tel ou tel matériau : classiquement, on admet que l’énergie de redistribution est plutôt responsable de la consommation d’énergie dans les composites verre/résine, tandis que c’est l’énergie de déchaussement qui intervient plutôt pour les matériaux carbone/résine.
Figure 9 – Étapes de la progression d’une fissure matricielle au droit des fibres dans un composite unidirectionnel soumis à traction et contributions respectives à l’énergie de rupture (d’après [16])
4. Contribution aux propriétés des matériaux chargés ■ L’incorporation de charges particulaires conduit très généralement à une augmentation du module d’élasticité, qu’il s’agisse de particules de carbure de silicium dans un alliage d’aluminium, de billes de verre dans du polypropylène, ou de noir de carbone dans un élastomère (on laissera de côté de problème des élastomères où la distinction traditionnelle entre charges renforçantes et charges inertes recouvre en fait une grande complexité de comportement).
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L’augmentation du module est inscrite dans la loi des mélanges dans la mesure où la particule est plus raide que la matrice et l’interface supposée parfaite (tableau 1). Une amélioration de la résistance de l’interface, telle qu’elle résulte d’un traitement des charges par les ensimages employés pour les fibres de verre, n’apporte pas d’accroissement supplémentaire. Pourtant, la loi des mélanges peut être mise en défaut dans la mesure où la présence des particules induit, au cours de la mise en œuvre, une réorganisation de la matrice qui a pour résultat de la rendre, précisément, plus raide. Cette interprétation a été avancée pour expliquer la légère diminution du module d’élasticité du polystyrène chargé lorsque l’on augmente la taille des particules, à fraction volumique constante : avec 10 % de billes de verre de diamètre moyen de 2, ou 30, ou 100 µm, le module d’Young prend les valeurs 1,31 ; 1,22 et 1,16 GPa respectivement[17]. Pour les auteurs, les particules se comportent comme des sites à partir desquels, lors du refroidissement, le matériau cristallise. Plus les particules sont nombreuses (fines), plus cette zone organisée est étendue, d’où un module plus fort. ■ Pour la résistance à rupture ou la limite d’élasticité, le résultat est moins net et dépend beaucoup des systèmes : le plus souvent, la particule est amenée à se décoller (dewetting ) à partir d’une certaine déformation de la matrice et dès lors ne participe plus à la transmission des efforts ; lorsque les particules sont nombreuses, il y a interaction des champs de contrainte et accumulation des effets, ce qui explique que la rupture est atteinte pour une contrainte et une déformation plus faibles qu’en l’absence de charges et, en général, d’autant plus faibles que la fraction volumique est forte. Dans ces conditions, les ensimages réactifs, qui augmentent l’adhésion, ont un effet positif (tableau 1) puisque l’interface ne se décolle plus et que le polymère peut continuer à se déformer. Des améliorations de la ténacité (25 %, en termes de K Ic ) d’époxydes chargés de 20 % de billes de verre ont été également obtenues par interposition d’une fine couche d’élastomère (de l’ordre de 4 % du rayon des billes) à la surface du verre : là encore, c’est la capacité de la matrice à relaxer les concentrations de contraintes autour des billes qui est restaurée. ■ On retrouve des comportements semblables pour les alliages d’aluminium chargés de particules de carbure de silicium, mais ici l’interface du composite semble extrêmement résistante car peu de particules décollées sont observées au microscope électronique. De plus, la présence des particules modifie profondément la
microstructure et donc les propriétés de toute la phase matricielle, rendant difficile toute comparaison avec l’alliage non chargé. Il semble cependant établi qu’une décohésion de l’interface à un niveau élevé de charge (c’est-à-dire avant que la matrice ou la particule ne rompent) doit favoriser une relaxation des contraintes locales et donc retarder l’endommagement critique des deux phases principales. Des travaux récents notent l’intérêt qu’il y aurait à appliquer aux matériaux métalliques chargés le concept de fusible mécanique déjà mis en œuvre pour les composites à fibres longues. ■ Comme on l’a dit (§ 3.2.1), les techniques mécaniques directes font défaut pour l’étude des relations entre particule et matrice et on doit regarder les matériaux dans leur globalité. L’exemple d’un travail récent [18] illustrera ces difficultés : le polypropylène peut être chargé de particules renforçantes, et le module du matériau chargé augmente alors avec le taux de renfort. Cependant, la résistance diminue dans le même temps suivant une loi empirique que les auteurs écrivent : x = x m [(1 – Vf )/(1 + 2,5 Vf )] exp (BVf )
(17)
où x et x m sont les caractéristiques du matériau chargé et non chargé respectivement et B un paramètre qui rend compte de l’interaction polymère-charge. En réalité, B change suivant la propriété considérée (module d’élasticité, limite d’élasticité, ou résistance à rupture) et on peut l’expliciter selon : B = (1 + A f ρ f h) log(x /x m) = C 1 + C 2 A f
(18)
avec A f , surface spécifique de la charge et ρ f , masse volumique de la fibre. Le terme h représente l’épaisseur de l’interface. Comme B est effectivement trouvé variant linéairement avec A f , les auteurs concluent que la valeur de h qui satisfait l’équation représente bien l’épaisseur de l’interface. Les valeurs trouvées pour h sont : 0,005 à 0,012 µm pour le module d’élasticité, mais 0,149 µm pour la limite d’élasticité et 0,156 µm pour la résistance à rupture. L’épaisseur de l’interface varie donc avec la propriété mesurée. L’interprétation qui en est donnée est que l’effet de l’interface se fait davantage sentir sur la résistance que sur le module puisque la matière est plus sollicitée. (0)
Tableau 1 – Plastiques chargés : comportements mécaniques influencés par l’interface Charge
(GPa)
Contrainte de traction à rupture (MPa)
non chargé ......................................................... .............................. billes de verre (∅ = 20 à 50 µm) : non traitées ..................................................... 9 + 0,3 % silane .................................................. 9 non traitées ..................................................... 23,5 + 0,3 % silane .................................................. 23,5
2,80
72,6 (1)
>8
3,55 3,48 4,54 4,63
68,1 (1) 77,7 51,1 80,4
>8
non chargé ......................................................... .............................. 10 hydrate d’alumine (∅ = 8 µm) ....................... 30 quartz (∅ = 6,3 µm) ........................................... 30
3,86 4,20 6,65 7,35
77,0 30,2 45,6 50,0
Matrice Nature Polyamide
Époxyde
Taux en masse (%)
Module d’élasticité
(1) Limite d’élasticité. Source : — polyamide : Van Hartingsveldt [33] ; — époxyde : Radford [34].
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Allongement à rupture (%)
3,50 2,20 0,70 0,20 0,47
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5. Contribution aux caractéristiques de l’unidirectionnel Toute la mécanique du composite unidirectionnel est sensible à l’état de l’interface. La distinction des matériaux par matrice n’est pas arbitraire car, au-delà des aspects communs, l’accent sera mis sur les propriétés qui sont les plus critiques pour chacun d’entre eux : antagonisme résistance-ténacité et problèmes de tenue à l’environnement pour les matrices organiques ; protection contre une interaction fibre/matrice excessive à haute température pour les matrices métalliques ; atténuation de la fragilité pour les matrices céramiques. Quelques tentatives de prise en compte par le calcul, intégrant les données issues des études micromécaniques, seront présentées.
5.1 Matrices organiques Parmi les essais destinés à mesurer l’effet, sur les caractéristiques mécaniques du composite, de la tenue de l’interface, le plus ancien est certainement l’essai de flexion sur appuis rapprochés (cisaillement induit ou cisaillement interlaminaire, ou CIL). La méthode est simple puisqu’elle ne nécessite que très peu de matériau (l’essai a été introduit par les chercheurs du Naval Ordnance Laboratory aux États-Unis qui le pratiquaient sur des tronçons d’anneaux dits NOL destinés aux essais de traction par un dispositif de pression interne), un équipement rudimentaire et fort peu de calcul. Partout critiqué, le CIL est cependant partout pratiqué pour contrôler les matériaux, évaluer les traitements de surface de fibres, etc. Lorsqu’il y a réellement délaminage des couches et non pas rupture de l’éprouvette en traction ou en compression, l’application de la formule de flexion des poutres, pour le cas où le rapport de la distance entre appuis à l’épaisseur est de 4, fournit la contrainte de délaminage : CIL = 3F/(4bh) avec F b et h
(19)
charge maximale, largeur et épaisseur du barreau respectivement.
L’essai de cisaillement interlaminaire repose sur le fait que la rupture le long des fibres dans l’unidirectionnel est plus probable que la rupture des fibres elles-mêmes : si l’interface est trop solide cependant, la rupture se propage normalement aux fibres et l’essai n’est plus qu’une mesure de leur résistance. Précisément, dans le cas d’interfaces très résistantes, la propagation de fissures se fait avec une faible consommation d’énergie et les mécanismes d’absorption d’énergie qui ont été décrits dans le paragraphe 3.3 n’apportent aucune contribution : la mesure de l’énergie de propagation de fissure est donc aussi une mesure indirecte des performances de l’interface, mais cette fois de sa contribution à la ténacité du composite. Une constante du développement des composites est bien cet antagonisme entre la résistance et la ténacité. Cela est particulièrement net dans le cas où, comme pour le carbone, un traitement de surface de la fibre s’avère absolument nécessaire pour qu’un minimum de cohésion interfaciale soit obtenu : si les premiers composites carbone/époxyde se délaminaient pour des valeurs de CIL de 25 MPa, les matériaux commerciaux actuels, où les fibres subissent une oxydation ménagée de leur surface, montrent couramment des valeurs atteignant 110 à 120 MPa, mais cette forte liaison interfaciale se paye en ténacité (figure 10). D’autres caractéristiques sont encore sensibles à l’état de surface : la traction dans le sens travers et le cisaillement dans le plan (dans la figure 10, cette propriété est mesurée en fait par un essai de traction sur stratifié ± 45o, mais d’autres essais sur unidirectionnel montrent la même tendance). Le problème se pose exactement dans les mêmes termes pour les composites renforcés de fibres aramide ou de fibres polyéthylène à haut module : le traitement de surface double pratiquement la
Figure 10 – Effet du traitement de surface des fibres sur les caractéristiques mécaniques du composite unidirectionnel carbone/époxyde sensibles à l’état de l’interface [19]
valeur du CIL (qui varie de 15 à 27 MPa pour un traitement par plasma de ces dernières fibres) mais rend du même coup le matériau moins tenace (la ténacité varie de 160 à 120 kJ/m2 en essai Charpy). On sait (§ 1.2) que les composites à renfort polymère périssent en général par effondrement de la fibre si la sollicitation n’est pas strictement de traction dans le sens longitudinal : cela explique pourquoi les améliorations que l’on peut noter lorsque les traitements de surface sont évalués à l’aide des techniques micromécaniques de type déchaussement ou fragmentation ne se retrouvent que faiblement sur le composite lui-même. Pour les composites verre, il s’agit moins d’améliorer une liaison insuffisante de la fibre non traitée que de conserver cette liaison en présence d’humidité, l’ensimage jouant ici le rôle d’une barrière contre la corrosion du verre par l’humidité atmosphérique. Au demeurant, les améliorations constantes des ensimages depuis 40 ans ont conduit à faire passer la résistance en flexion (autre caractéristique sensible à l’état de l’interface) des composites tissu de verre/polyester à l’état sec de 400 à 650 MPa. La résistance après un séjour des composites à l’humidité s’est accrue dans des proportions encore supérieures.
5.2 Matrices métalliques Bien que l’on ait pu répartir les composites à matrice métallique en trois classes suivant le degré d’interaction entre fibre et matrice (I = non réactifs et insolubles ; II = non réactifs mais solubles ; III = réactifs), il se trouve que les matériaux les plus intéressants du point de vue des applications mécaniques sont ceux de la classe III. Le principal problème est alors d’assurer la protection de la fibre aux températures élevées rencontrées tant pendant la mise en œuvre que dans les conditions de service. La fibre est en effet littéralement consommée par la matrice et ses caractéristiques mécaniques se dégradent rapidement. Le résultat est exprimé souvent par un schéma qui décrit l’évolution du système pendant la réaction (figure 11) : alors que la liaison interfaciale s’établit et se renforce par diffusion continue et de plus en plus lente des espèces réactives,
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le renfort subit une diminution de ses caractéristiques. La résistance apparente au cisaillement est donnée par la combinaison des branches basses des deux phénomènes : la rupture est d’abord interfaciale (ou adhésive), puis cohésive dans le renfort fragilisé par une réaction excessive. Pour les matériaux de cette classe III, les réactions donnent généralement naissance à des interfaces épaisses et fragiles : formation de composés intermétalliques entre fibres de carbure de silicium (SiC) et alliages de titane, formation de carbures entre fibres de carbone et aluminium ou magnésium. À partir du moment où des fissures dangereuses, se propageant à travers cette zone fragile, risquent d’endommager les fibres, il devient impératif d’introduire un mécanisme de découplage qui devient actif à partir d’un certain niveau de charge. Ce découplage est assuré par des dépôts faisant office de fusibles mécaniques (§ 1.3.3, 2.4 et 4). Une méthodologie pour choisir ces dépôts dans le cas de fibres de carbone destinées à renforcer des alliages d’aluminium est exposée par Honjo et Shindo [20] : les fibres de carbone (fibres Toray T300, diamètre 6,5 µm) sont revêtues par CVD (Chemical Vapor Deposition ) de 0,2 µm environ de produits tels que TiC, SiC, TiN et C. L’adhésion du dépôt est mesurée en déchaussant la fibre d’un bloc de résine dans laquelle elle a été introduite par son extrémité. Lors de l’essai, le dépôt se décolle et ne suit pas la fibre, qui est extraite sans sa gaine. La couche double carbone + TiN s’avère la moins solidement liée à la fibre de carbone et donc la plus efficace. D’un autre côté, ces dépôts préservent en grande partie la résistance originale de la fibre : alors que la résistance à rupture des fibres de carbure de silicium non protégées (fibres Sigma, 100 µm de diamètre) passe de 3 250 à 725 MPa après réaction avec le titane dans des conditions identiques à celles de la mise en œuvre, celle de fibres protégées par une couche de carbone (fibres Textron SCS6, 140 µm de diamètre dont une protection de carbone pyrolytique de 3 µm d’épaisseur) passe de 3 860 à 3 350 MPa (essais sur fibres de 25 mm de longueur de jauge ; traitement thermique de 1 heure à 925 oC). C’est la rupture de la couche protectrice qui assure ici le découplage entre fibre et matrice [21]. Pour les matériaux carbone/aluminium, des couches de transfert encore plus complexes ont été proposées : depuis la surface de la fibre de carbone, on trouve en effet une couche de carbone pyrolytique chargée de stopper les fissures, une couche de carbure de silicium qui empêche la diffusion vers la fibre du métal matriciel, enfin une couche de TiB2 afin de faciliter le mouillage par l’aluminium liquide [22].
5.3 Matrices céramiques Pour pallier la fragilité naturelle des constituants, l’interface va être au maximum utilisée pour dévier les fissures dangereuses en provenance de la matrice, éviter leur propagation catastrophique à travers le matériau et permettre aux fibres d’accomplir tout leur travail (figure 12). Comme dans les deux cas précédents, ces mécanismes ne peuvent se développer dans le cas d’une trop forte liaison ; sinon, le matériau se rompt pour une déformation égale à celle de la matrice. Si, au contraire, un découplage des deux phases se produit, les fibres continuent à jouer leur rôle, même après rupture multiple de la matrice. Ce comportement, prévu dans le cadre de la théorie dite ACK [23], investit l’interface d’un rôle essentiel. De plus, comme, contrairement au cas précédent, l’épaisseur concernée est réduite et ne couvre pas une zone de réaction aussi développée, le dimensionnement d’interfaces adaptées repose sur une parfaite compréhension des aspects mécaniques, alimentée par les résultats des essais micromécaniques. Pour du verre renforcé de fibres de carbone [24], ces essais (mesures de micro-indentation) donnent, pour les matériaux fragile et tenace correspondant aux figures 12b et c, des valeurs de la contrainte de décohésion interfaciale de 38 et 16 MPa respectivement. Le rendement de la fibre de carbone (obtenu en corrigeant
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Figure 11 – Évolution de la résistance interfaciale en fonction de la réaction entre fibre et matrice
la contrainte à rupture de la fraction volumique en fibre) passe dans le même temps de 248 à 1 275 MPa, c’est-à-dire que l’effet est considérable. En réalité, un tel effet n’est pas seulement imputable aux variations de la contrainte de décohésion mais également à la dégradation subie par la fibre lors de l’élaboration. Quant à la variation de la contrainte de décohésion, elle est le résultat net des changements intervenus au cours des étapes successives de la fabrication tant au sein des deux phases que dans leur zone d’interaction : plus ou moins bon mouillage par le verre fondu, texture fine de la surface du verre et présence d’entités cristallines, oxydation de la fibre, réactions entre la surface de la fibre et la matrice verre, etc. L’importance de ces paramètres microstructuraux se retrouve dans toutes les études de composites à matrice céramique. Ainsi des matériaux constitués de tissus de carbure de silicium (Nicalon NLM 202, fibres de 15 à 20 µm de diamètre) dans une matrice de carbure de silicium montrent-ils des allongements à rupture dans le sens des fibres compris entre 0,067 % pour un SiC/SiC normal et 0,16 à 0,87 % lorsque la fibre de départ est pourvue d’une couche de pyrocarbone (0,1 µm d’épaisseur). Naturellement, celui-ci se prête bien à la déviation des fissures : dans le premier système (SiC/SiC), l’interface est bien constituée d’une couche complexe de carbone et de silice formée pendant la réaction à haute température, mais l’orientation des plans de carbone est défavorable. Dans les autres systèmes, la couche de pyrocarbone remplit complètement son rôle mais la microstructure de la couche complexe carbone-silice a alors un effet encore plus important sur la déformation finale du matériau [25]. Ici encore, toutes les caractéristiques du composite ne peuvent pas être optimisées en même temps par un réglage judicieux de l’interface : en général, une ténacité accrue se paye par une diminution du cisaillement interlaminaire et de mauvaises propriétés dans le sens travers.
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Figure 12 – Courbes contrainte-déformation de composites à matrice céramique (d’après [24])
5.4 Tentatives de prise en compte par le calcul Dans tous les exemples qui précèdent (§ 5.1, 5.2 et 5.3), l’interface est reconnue comme un paramètre important à travers la démarche suivante : modification des phases et/ou du procédé, constatation des effets sur le comportement mécanique sensible du matériau, recherche a posteriori des éléments responsables de ces effets. Pour aller plus loin, une double question est posée : — dans quelle mesure, connaissant la complexité de comportement des composites, est-il possible d’introduire, dans des expressions de type loi des mélanges, la contribution de l’interface au même titre que celles du renfort et de la matrice ? — peut-on introduire cette contribution de l’interface autrement que sous forme de paramètres arbitraires, par exemple, en se servant des résultats micromécaniques censés en fournir une mesure dans des situations volontairement simples ?
5.4.1 Contrainte à rupture en traction Depuis Rosen, la résistance à rupture d’un faisceau de fibres est décrite comme un processus dans lequel la charge supportée par les fibres rompues est reportée sur les fibres intactes. Ce report se fait par l’intermédiaire de l’ensemble matrice-interface et peut être mesuré à l’aide des divers essais micromécaniques qui ont été cités (§ 3.2.2). Dans les modèles les plus simples (arrangement régulier de fibres), cette charge est répartie également sur les seules plus proches voisines et la loi de rechargement est de type élastique (§ 3.1.2). Les modèles plus récents, bien qu’ils considèrent toujours un arrangement régulier, admettent suivant les cas une hiérarchie dans le report et un rechargement qui peut comporter plusieurs modes (élastique, plastique, friction). Une telle modélisation a été proposée récemment [26] pour les composites unidirectionnels carbure de silicium /titane : en raison du faible taux de renfort (30 à 35 % environ) du matériau, on peut appliquer directement les résultats des essais micromécaniques sur monofilament (essais de fragmentation) au composite. La quasi parfaite disposition des fibres en réseau hexagonal rend par ailleurs la modélisation aisée. La figure 13 montre la prévision de la contrainte à rupture de l’unidirectionnel entre la température ambiante et 800 oC, comparée aux résultats expérimentaux de traction à chaud
effectués en parallèle sur le composite. On a superposé sur le diagramme la courbe correspondant à la loi des mélanges, calée sur les propriétés du composite à température ambiante et ne tenant compte que de la diminution des caractéristiques de l’alliage avec la température : on voit que, même pour une propriété étroitement contrôlée par la résistance des fibres comme l’est la résistance en traction, la contribution de l’interface est loin d’être négligeable et qu’il y a avantage à l’introduire. Le cas des matériaux renforcés avec des fibres courtes a été étudié par Piggott [27]. Dans ce cas, l’orientation aléatoire des éléments de renfort rend particulièrement ardue une expression des grandeurs mécaniques incluant les caractéristiques d’interface ; aussi l’auteur traite-t-il du cas de matériaux dans lesquels les fibres courtes sont alignées. Dans ce cas, la contrainte à rupture en traction dans le sens long du composite σ L est donnée en fonction de la résistance σ fr des fibres par :
Vm Em sc σ L = V f 1 – ------- σ fr - + -----------------2s Ef
(20)
où s est le rapport d’aspect des fibres (rapport longueur/diamètre) et sc le rapport d’aspect critique qui contient l’information interfaciale puisque s c = σ fr /2τ [équation (16)]. Par les essais de déchaussement, Piggott trouve τ ≈ 20 MPa pour le couple verre /polyester ou verre /époxyde. Avec des fibres de résistance 4 GPa et de diamètre 20 µm, s c est de l’ordre de 100. Pour suivre (à 5 % près) la loi des mélanges, donnée par σ L ≈ σ fr Vf , on doit avoir s 1 000 , soit des fibres d’au moins 20 mm de long. Dans le même esprit, des équations simplifiées sont proposées pour plusieurs autres caractéristiques : toutes contiennent un paramètre relatif à l’interface qui peut être obtenu à partir des essais micromécaniques.
5.4.2 Énergie de rupture Les expressions de l’énergie associées aux différents micromécanismes décrits dans le paragraphe 3.3 reposent sur une analyse simplifiée des interactions entre fibre et matrice. Elles ont fait l’objet d’une vérification semi-quantitative partielle dans le cas de composites carbone-résine où seul l’état de surface de la fibre est modifié dans le but d’accroître ou de diminuer la liaison interfaciale [28]. Les auteurs, remarquant que les longueurs de déchaussement des fibres varient fortement avec le traitement de surface, calculent les énergies
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Figure 13 – Évolution de la résistance d’un composite SiC/titane unidirectionnel en fonction de la température [26]
de décohésion et de déchaussement à l’aide des expressions de la figure 9. Les résultats sont donnés dans la figure 14 : les deux contributions à l’énergie totale sont portées en fonction d’une résistance interfaciale dérivée de l’essai de CIL et exprimée ici en unités arbitraires. L’énergie totale passe par un maximum (figure 14b ). Quant aux points expérimentaux, ils sont obtenus par des essais au mouton-pendule Charpy ou par intégration de la courbe force-flèche d’essais de flexion sur éprouvettes entaillées. L’existence d’un maximum, compromis entre des propriétés toutes deux désirables, est donc fondée à la fois expérimentalement et théoriquement. Un tel maximum a été rencontré pour les composites à matrice métallique (§ 5.2). Les distributions de longueurs déchaussées sur les faciès de rupture sont donc l’image, en fin d’essai, des divers processus ayant concouru à la formation de l’énergie de rupture. Elles peuvent être analysées dans le but de valider les modèles de rechargement à l’interface, en s’aidant des techniques micromécaniques pour assigner à certains paramètres une valeur plausible reposant sur l’expérience. C’est, par exemple, la démarche de Rouby et coll. [29] qui comparent aux distributions expérimentales, relevées sur composites SiC/SiC ayant subi divers traitements thermiques, les distributions calculées suivant plusieurs lois de transfert de charge entre fibres et matrice : élastique, avec cisaillement constant, ou avec frottement. De l’examen des éprouvettes rompues, les auteurs concluent qu’aux longueurs moyennes de déchaussement très petites (1,6 à 2,8 µm) correspond un mode de rechargement élastique tandis que les grandes longueurs (125 à 2 000 µm) sont compatibles avec un régime de cisaillement constant à l’interface. Expérimentalement, il faut mesurer la longueur de centaines de fibres (diamètre moyen de 7 et 14 µm respectivement dans les cas cités) sans introduire de biais statistique ; sur le plan théorique, des simplifications sont inévitables. Enfin, on ne peut exclure que plusieurs régimes puissent se relayer ou se combiner au fur et à mesure de la localisation de la rupture, conduisant in fine au faciès observé. L’analyse des surfaces de rupture apparaît néanmoins d’un intérêt considérable pour relier la micromécanique au comportement macroscopique, au moins dans le cas où la rupture des fibres est impliquée.
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Figure 14 – Comparaison entre énergie de rupture et CIL pour des matériaux carbone/polyester [28]
6. Contribution aux caractéristiques du multidirectionnel Pour de nombreuses applications, on préfère à l’unidirectionnel et à ses défauts des directions de renforcement multiples par superposition de couches ou des structures tissées à n directions. L’influence de l’interface est alors diluée et l’analyse de sa contribution devient difficile : puisqu’il n’y a plus, par principe, de direction faible, c’est la précocité de l’endommagement, son accumulation plus ou moins rapide, qui vont servir d’indicateur pour guider le choix d’une interface adaptée.
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6.1 Caractéristiques liées au matériau En bonne règle, la sensibilité de l’unidirectionnel à l’état de l’interface doit se répercuter sur le comportement du multicouche et pouvoir être prise en compte dans la mesure où les calculs de stratifiés incorporent eux-mêmes les caractéristiques du pli élémentaire : si ces caractéristiques sont contrôlées par l’interface, le multicouche doit automatiquement s’en trouver affecté. Même stratifiés, les composites présentent donc, pour certaines propriétés, une certaine sensibilité à l’état de l’interface : on l’a vu (§ 5.1) à propos des résultats en traction sur stratifié carbone/résine ± 45o. C’est aussi le cas de la tenue en compression : sur des empilements de 16 couches à 0 et ± 45o, celle-ci passe de 650 à 850-900 MPa, soit 27 % d’amélioration, lorsque l’on va des fibres non traitées aux fibres ayant leur traitement de surface commercial [30] . Dans les mêmes conditions [19], des empilements contenant 8 couches à 0,90 et ± 45o voient leur résistance en compression augmenter de 25 % ainsi que la résistance au délaminage entre couches (mesurée par des essais dits O’Brien en traction, sur des empilements sensibles au délaminage par effets de bord). Comme pour l’unidirectionnel, cette amélioration s’obtient cependant au détriment de la ténacité, ce qu’indiquent les évolutions de la résistance à l’impact, de la sensibilité au trou et de l’allongement à rupture. Comme on l’a déjà vu (§ 5.1), la protection du verre contre l’humidité a donné naissance à des formulations perfectionnées d’ensimages qui sont actives pour toutes les géométries de renfort : un tissu de verre (satin de 8, style 181) associé à une résine époxyde perd 63 % de sa résistance en flexion après un séjour de 72 heures dans l’eau bouillante ; cette perte n’est plus que de 25 à 40 % (suivant les ensimages) lorsque les fibres sont protégées par un silane. Elle n’est que de 10 à 25 %, après 8 heures dans l’eau bouillante, pour des tissus de verre/polyester [31]. Même dans les structures complètement bloquées telles que les composites à géométrie 3 D (matériaux carbone /carbone ou SiC/SiC), dotés d’interfaces fragiles dans le but d’obtenir un comportement global non fragile, la friction entre fibres et matrice (résidu mécanique de l’interface initiale) est altérée par divers facteurs : gaz adsorbés, contraintes résiduelles, effets dynamiques, débris, etc. En modifiant le coefficient de friction, ces facteurs ont une influence sur la linéarité de la réponse aux efforts mécaniques ou aux variations de température et sur le rendement apparent de la fibre.
Figure 15 – Sensibilité à l’entaille de matériaux carbone/résine unidirectionnels contenant une entaille centrale et sollicités en traction [32]
d’endommagement cette fonction de répartition des surcontraintes. A contrario, une matrice très tenace (thermoplastique PEEK), et formant avec le carbone une interface solide, donne des composites plus sensibles que les matrices thermodurcissables fragiles. On retrouve ici, à l’échelle des accidents de forme visibles comme le trou ou l’entaille, le rôle de fusible mécanique qu’assure l’interface. Plusieurs modélisations de cet écrêtement des surcontraintes autour du trou ont été proposées récemment : elles pourraient probablement être aménagées pour prendre en compte un paramètre physique, représentatif de l’endommagement localisé et contenant l’information relative à l’interface.
6.2 Caractéristiques liées aux fonctions de la pièce
7. Conclusion
Essentielle pour que la pièce composite assure sa fonction sans risque de rupture brutale, la sensibilité à l’entaille ou à la présence de trous est très fortement dépendante de la liaison fibre/matrice. Cela est déjà manifeste sur les matériaux unidirectionnels. La figure 15 compare les résistances en traction d’éprouvettes trouées de deux composites carbone/époxyde renforcés de fibres à haut module HM : le matériau avec fibres traitées est très sensible à la présence de l’entaille centrale alors que les fibres non traitées confèrent pratiquement l’insensibilité [32].
Quelques constatations semblent s’imposer à l’issue de cette revue des problèmes que pose l’interface.
Ces comportements se retrouvent, bien qu’atténués, sur les stratifiés multidirectionnels : plusieurs mécanismes coopèrent alors pour diminuer les concentrations de contrainte autour du trou et répartir sur une zone plus étendue un endommagement limité prenant la forme de fissures longitudinales (splitting ), de décohésions interfaciales et de microfissuration de la matrice. D’ailleurs, en comparant divers matériaux, une relation empirique a pu être établie récemment entre le facteur de sensibilité au trou de stratifiés 0, ± 45, 90o quasi isotropes à renfort carbone et la contrainte de transfert de charge mesurée par un essai de fragmentation sur monofilament, ce qui permet d’assigner aux micromécanismes
■ Cette région du composite ou du matériau chargé mérite l’intérêt qui lui est porté depuis quelques années. On peut dire que la mise au point de matériaux pointus, qui oblige les fournisseurs des constituants de base puis les élaborateurs à contrôler au plus près la qualité des produits et du procédé de mise en œuvre, rend de plus en plus manifeste l’existence d’une zone d’ombre. Cette zone d’ombre ne peut être admise plus longtemps dans un temps de matériaux taillés sur mesure. ■ À quatre reprises (figures 4, 10, 11 et 14), des points de vue fondés sur une confrontation avec les résultats d’expérience, dans des domaines n’ayant apparemment pas de rapports entre eux, ont convergé vers la notion d’un optimum de caractéristiques qui peut être obtenu pour un état de l’interface situé quelque part entre un découplage total entre phases et une interaction trop forte. Cet optimum est à rechercher pour chaque système. Son existence implique que toutes les caractéristiques ne peuvent être améliorées à la fois.
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■ Pour rechercher cet optimum, la démarche qui consiste à valider des améliorations potentielles (nouveaux traitements de surface, dépôts, ensimages, interfaces hybrides, etc.) en fabriquant et en soumettant à un nombre croissant d’essais un grand nombre d’échantillons représentatifs des architectures finales ne semble plus adaptée. Même si les techniques micromécaniques, économes en matière et riches en informations, ne sont pas encore complètement maîtrisées, elles seront d’un apport essentiel pour la genèse des idées, l’analyse des processus élémentaires et l’acquisition des valeurs caractéristiques. Il restera à transférer ces valeurs dans le matériau réel, par des modèles adéquats et identifiables.
À travers les études qui ont été présentées, un corpus de doctrine est, à l’évidence, en train de se mettre en place, profitant des avancées accomplies sur l’un ou l’autre matériau. À l’image de l’évolution constatée pour les problèmes de mécanique, les problèmes d’interface des matériaux à renfort particulaire ou fibreux trouvent peu à peu un cadre de réflexion unifié, alimenté par des techniques d’investigation communes, quelle que soit la nature des phases constituantes.
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