Economie Du Travail [PDF]

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Zitiervorschau

Economie du travail Peut-on définir précisément la socio-économie ? Non, ce n'est une discipline mais plutôt un ensemble de méthodes destinées à traiter de l'économie. La socio-économie va combiner les apports des thèses néo-classiques et les théories sociologies, anthropologiques et science politique. C'est donc une approche plurielle. Dans le champ de la socio-économique, les variables économiques côtoient les variables nonéconomiques. Par exemple, la qualification et les valeurs sociales, la norme... L'apport sociologique s'applique particulièrement bien avec le monde du travail. 3 axes majeurs sont développés :  La rationalité mobilisée par les acteurs est diverse  Cette rationalité est limitée (information imparfaite)  les rationalités sont encastrées, socialement situées La socio-économie possède une posture méthodologique proche de la sociologie : elle privilégie l'analyse empirique (étude statistique, monographie, étude de terrain). Les pères fondateurs sont Max Weber, Mars, Karl Polanyi, ou Veblen. Aujourd'hui, elle tente de se structurés d'un point de vue institutionnel avec le SASE (Society for the Advancement of Socio-Economics. ou association du développement de la socio-économie). Différents courants débattent des sujets et questions. Les revues les plus célèbres sont Economies et sociétés et Travail et emploi. Pour bibliographie, il est conseillé de lire :  B. Burgenmaier, Economica  Levesque, la nouvelle sociologie économique  Revue MAUSS, n°9, la sociologie économique, nouvelle discipline?

Plan du cours : I) Éléments de cadrage 1. L'utilité d'une démarche socio-économique pour étudier le travail et l'emploi 2. Le marché du travail et l'emploi : grandes tendances et sources d'information II) Parcours théoriques 1. Rôle du cadre institutionnel 2. Pouvoir et rapports de force 3. Valeurs et pluralité des formes de rationalité 4. Réseau et encastrement : la notion de "l'embeddedness" III) Parcours thématique 1. Marché du travail et question de genre 2. Réflexion sur le temps de travail 3. Emplois non-qualifiés et conditions de travail.

PREMIERE PARTIE : ELEMENTS DE CADRAGE Chapitre 1 : L'utilité d'une démarche socio-économique pour étudier le travail et l'emploi I)

La vision économique traditionnelle du marché du travail.

a) Cadre logique et hypothèse de départ Nous allons ici définir une vision théorique ; ce n'est donc pas un but premier à réaliser. La vision théorique modélise une situation avec une logique d'ensemble, une sorte « d'idéaltype ». Sur le marché du travail, les offreurs sont les travailleurs et les demandeurs sont les entreprises. Au contraire, sur le marché de l'emploi, les demandeurs sont les travailleurs et les offreurs, les entreprises. On pose un cadre logique. On fait une analyse en terme de marché partiel, c'est-à-dire qu'on isole le marché du travail et qu'on l'étudie indépendamment des autres marchés. La théorie classique et néo-classique pose trois hypothèses principales : • Le travail est un bien (ou un facteur de production) comme un autre. Il y a donc une marchandisation du travail. Il peut être divisé, remplacé (par du capital). On peut également substituer le travail au loisir. • Les agents sont rationnels, il a une information parfaite. De plus, il cherche à maximiser son profit. • Les acteurs sont symétriques c'est-à-dire qu'il n'y a pas de pouvoir sur le marché du travail. b) L'offre du travail en microéconomie Les théories microéconomiques étudient l'arbitrage entre revenu et loisirs. [VOIR SEMESTRE 4] http://en.wikipedia.org/wiki/Labour_economics#The_classical_microeconomics_of_labour_mark ets pour les courbes Ce modèle peut paraître simpliste ici, mais il s'est complexifié pour intégrer de nouveaux éléments. Becker a introduit le rôle du ménage en adaptant la théorie des avantages comparatifs à la spécialisation des individus au sein d'un ménage. La notion de cycle de vie a également été intégrée. Ces théories ont des implications concrètes dans les politiques de l'emploi, notamment la droite libérale. Pour les néo-classiques, le chômage ne peut pas être involontaire. De plus, beaucoup de libéraux militent pour la suppression du SMIC car fixé un revenu minimum est contre-productif dans le marché. Lire : Bernard Gazier, Economie du travail et de l'emploi.

II) a)

Le travail comme marchandise ? invention du travail abstrait

Pour les classiques et le néo-classiques, le travail est homogène et divisible. Pourtant, il a existé et il existe encore des sociétés sans travail (le travail définit au sens d'Hannah Arendt, c'est-à-dire celui qu'on vend : « vendre sa peine »). Sahlins a notamment étudié les sociétés d’abondance. Dans la Grèce antique, le travail est assimilé à l'esclavage ; travailler c'est ne pas participé aux activités démocratiques de la cité. Pour le dogme catholique, le travail n'est pas une vertu. Ainsi, la Réforme protestante va faire une rupture nette avec le catholicisme. En effet, le concept de Beruf (la vocation) va progressivement imposer le travail comme accomplissement de la volonté de Dieu. Réussir ses affaires temporelles signifie alors que l'on est un élu de Dieu. Au 18° siècle, l'industrialisation organise ce travail abstrait. On mesure désormais le travail avec le temps. John Locke base la richesse sur le travail et le temps. Smith parle de valeur « travail » car le travail est divisible. Le travail est également pour Smith la base de la richesse des nations. b) marchandisation du travail « Travailler plus pour gagner plus ». Outre une proposition de Nicolas Sarkozy, il s'agit du fondement de la théorie classique. Le travail est un bien que le travailleur offre sur le marché du travail. Chaque travailleur a le même capital temps (24h par jour) et doit le gérer comme un patrimoine individuel. L'équation du travail hédonique (théorisé par Rosen) rend compte de cette marchandisation du travail. Le salaire est le résultat de plusieurs coefficients : pénibilité, complexité, qualification, prise de risque… Par exemple, le salaire d'un peintre en bâtiment est le travail multiplié par 1.5 de pénibilité et 2 de prise de risque. c) vision insatisfaisante Ces théories sont loin de la réalité. Le salarié aujourd'hui ne considère pas le travail comme un arbitraire entre le temps et l'argent. Un sondage pose la question « Acceptez-vous un horaire différent si le salaire est plus élevé ? », cet horaire différent est le dimanche. Au Pays-Bas, 99% ont répondu « Non ». Au Royaume Uni, 61% ont répondu « non » et 66% en France. Le temps du dimanche n'est pas à vendre, donc il n'y a pas d'arbitrage temps/argent possible car il y a d'autres raisons plus importantes que l'argent. Cela pose la question de la signification du temps : il y a d'autres valeurs que l'argent, d'autres formes de rationalité. Ainsi, la pluralité de conception de temps et du travail est nécessaire pour comprendre la société. d) Conclusion La relation de travail est encastrée au sein de relations sociales. Etudier l'environnement sociologique et institutionnel est donc primordial. Voir : Karl Polanyi, La Grande Transformation Dominique Méda, Le travail, une valeur en voie de disparition

III) a)

L'individu est rationnel ? l'information est parfaite ?

Sans information, les relations entre individus (au sein d'un marché ou non) sont changées, faussées, biaisées… L'hypothèse de l'information pose plusieurs problèmes :  L'asymétrie (pas les mêmes infos en main)  L'aléa moral (tricheries…) Ces deux hypothèses ont été résolues par les économistes avec la théorie des contrats implicites : les agents n'ont pas le même rapport au risque. Ex des dés : préférez risquer de gagner beaucoup mais de tout perdre en misant tout ou préférez assurez en misant moins. Le risque est une caractéristique de l'entrepreneur. Le salarié ne prend pas de risque : il a un salaire stable. En embauchant le salarié, l'entrepreneur prend un risque. Le salaire est fixé à 1000€. En période de crise, le salarié doit être payé 750€ et en période de croissance, il peut être rémunéré 1300€. Pourtant, le salarié ne prend pas de risque même s'il peut gagner plus. Toutefois, c'est un comportement rationnel malgré tout. Une autre théorie est le salaire d'efficience qui lie le salarié à la productivité.  L'interdépendance Par exemple, un salarié A travaille 35h alors qu'un salarié B travaille 45h. Le A va choisir une autre durée de travail (travailler autant que B) car il a peur de rater une promotion ou d'être mal vu dans son entreprise. Les problèmes d'information empêchent les acteurs de prendre une décision correcte. b) De plus, le calcul de rationalité est biaisé et ne s'observe pas toujours La logique individuelle de maximisation est inefficace. La rationalité est limitée car les solutions satisfaisantes ne sont pas forcément optimales. (voir analyse de Simon sur la rationalité limitée : l’acteur est rationnel. Cependant, lors d'un choix complexe, il ne cherche pas à étudier l'ensemble des possibilités et donc être pleinement rationnel. Au contraire, il va s'arrêter sur la première option qui lui semble juste, la rationalité consistant pour lui à ne pas consommer trop de temps à effectuer son choix. On parle également d'Effet Tetris). Il existe également une pluralité des formes de rationalité : Etzioni parle de rationalité affective. L'école des conventions (Luc Boltanski et Laurent Thévenot) étudiera également le sujet : pour la sociologie pragmatique, l'homme fait la « société » et les acteurs sont compétents pour prendre position, juger, dénoncer, critiquer, en rendre compte c) conclusion Dans un environnement incertain, les individus agissent selon les logiques diverses et se référent à des critères de jugements pluriels. Voir : Laurent Cordonnier, Pas de Pitié pour les Gueux

IV) Les acteurs sont égaux ? a) Cette hypothèse n'a pas été seulement théorique Pareto en fait un fondement de la pensée libérale. Ainsi on ne peut pas comparer les situations. Cela a servit de base à l'absence de droit du travail jusqu'à 1898 (Loi Le Chapelier, fin des

corporations). Avant 1898, quelques lois ont régulées l'activité des enfants et des femmes. Un droit du travail remettrait en cause l'intégrité de l'ouvrier : en effet, il serait protégé par une loi et donc supérieur aux autres. b) Cette hypothèse reste peu réaliste Les juristes ont apporté plusieurs notions importantes. Le contrat est une relation de dépendance. On peut parler de subordination à un employeur. Le maintien des positions statutaires amène une inégalité nette : · Il faut prendre en compte l'autorité (et donc les rapports de force qui y découlent) · Le statut des personnes engagées (CDI, contrats atypiques) ? · Rôle des acteurs collectifs avec les syndicats et les conventions collectives. Certains secteurs sont mieux protégés que d'autres. c) Conclusion La relation de travail est conflictuelle et met face à face des acteurs au intérêt divergeant, en dépit que tout cela s'inscrit dans une même communauté. Il y a également la question de la personnalité : les acteurs ne sont pas anonymes.

V) Conclusion Hypothèses de l'économie néoclassique

Hypothèse de la socio-économie

Le travail est une marchandise

Le travail est le support de relations économiques au sein de relations sociales

L'individu est rationnel et l'information est parfaite

L'environnement est incertain, la rationalité est limitée, obéissant à une pluralité de logique Relation hiérarchisée socialement et au sein des organisations

Absence de pouvoir et situation symétrique des offreurs et des demandeurs

Chapitre 2 : Approche empirique du marché du travail : définitions et éléments statistiques. 1.

De la population active à l'emploi : définitions et points de repère

1.1 Activité, chômage, emploi : des frontières floues Le terme activité renvoie à plusieurs significations. L'activité c'est le fait d'avoir un travail ou être à la recherche d'un travail. Parmi les actifs, on compte donc les occupés (qui ont un emploi et les chômeurs).

Depuis 2000, la notion d'activité est utilisée comme un substitut à la notion de travail car il permet d'être plus large en englobant le travail domestique, associatif et militant. (Voir Dominique Méda). Ce n'est pas à confondre avec la définition traditionnelle de l'activité (c'est-à-dire tous les actifs). En décembre 2005, on compte 2.6 millions de chômeurs en France. Selon le Bureau International du Travail, un chômeur est quelqu'un qui n'a pas travaillé la semaine précédent et qui est en recherche effective d'emploi. C'est donc une limite très floue. Qu'est ce que la recherche d'emploi ? : s'inscrire à l'ANPE suffit pour le BIT et pour l'INSEE mais pour Eurostat, l'ANPE ne suffit pas. Il y a 2.3 millions de demandeur d'emploi fin de moi (DEFM, catégorie 1), c'est-à-dire les personnes qui ont travaillé moins de 78h le mois précédent immédiatement disponible pour un emploi à plein temps. Il y a 3.6 millions de DEFM catégorie 1 à 6 c'est-à-dire les chômeurs qui ne cherche plus d'emploi (comme les plus de 57 ans). Les statisticiens de l'INSEE prennent le chiffre des données puis pondère le chiffre en fonction de l'évolution des DEFM. Cette méthode se trompe souvent. Le chômage n'est pas naturel. Il a été inventé à un moment ou un autre. A la fin du 19° siècle, la relation d'emploi salariale prend de l'ampleur; le concept de chômage prend donc son sens. En 1896, on compte 250.000 chômeurs, donc 1.4% des actifs (Difficilement vérifiable; pour être proche de la réalité de 1896, il faudrait multiplier par deux ce chiffre). On commence à faire une distinction entre le bon et le mauvais. Il faut aider le bon pauvre, c'està-dire le vieillard, l'infirme... Ceux qui sont disponibles pour travailler et qui ne veulent pas travailler sont des mauvais pauvres. Comment articuler taux d'emploi, taux d'activité et taux de chômage ? Le taux d'emploi est la proportion de personnes disposant d'un emploi parmi celle en âge de travailler (15 à 64 ans). Le taux d'activité comprend les chômeurs et les employés. Le taux de chômage compte uniquement les chômeurs. Les frontières restent floues car les chiffres peuvent être manipulés Plusieurs exemples :  On peut transformer des femmes chômeuses en femmes inactives : En France, le taux de chômage des femmes est de 9.8% alors que le taux d'activité est de 59%. En Allemagne, le taux de chômage des femmes est de 9.7% (donc plus bas qu'en France) alors que le taux d'activité des femmes est de 57.5% Ainsi les femmes allemandes ne sont pas à la recherche d'un emploi et donc sont comptées comme inactives 

L'accès aux études peut également jouer. L'étudiant est considéré comme inactif. Le taux d'activité des jeunes en Seine Saint-Denis est

plus élevé que le taux d'activité en Hauts-de-Seine. Les jeunes des Hauts-de-Seine font plus d'études et donc rentre plus tardivement dans le monde du travail. Jacques Freyssinet souligne ces frontières floues.

1) Emploi et inactivité : temps partiel volontaire 2) Emploi et chômage : temps partiel involontaire 3) Chômage et inactivité : pré-retraités, chômeurs "découragés" 4) Emploi, chômage et inactivité : travail clandestin (ce dernier point n'a aucun sens !) 1.2 Repères sur les évolutions de longues périodes Évolution du taux d'activité en trois phases : 1- Augmentation jusqu'à la Première Guerre mondiale. C'est ce que la pensée marxiste a appelé la mise au travail. Forte hausse du taux d'activité masculin mais stagnation (voire baisse) du taux féminin. 2- Après 1918 et jusqu'au années 60. Stagnation des taux masculins et baisse du taux féminin. La CGT et le patronat sont d'accord sur la place de la femme qui ne doit pas travailler à l'usine. Réduction du temps de travail chez les hommes 3- Depuis 1960, le taux d'activité baisse chez les hommes car ils arrivent plus tard dans le monde du travail. Le taux d'activité féminin augmente; on assiste à un retournement de situation.

Le taux d'activité des femmes se rapprochent des hommes : en 1962, celui des hommes était de 78.3% contre 42.7% pour les femmes. En 2000, celui des hommes est de 63% et celui des femmes 50%. Le chômage de masse se développe également à la fin des années 70. Avant, il y avait du chômage frictionnel c'est-à-dire entre 1 à 2%. En 1975, la durée moyenne du chômage est de 3 mois contre 17 mois en 1993. La notion de salaire de réservation est également importante. Il s'agit du salaire que je suis prêt à accepter pour avoir un emploi. Il y a donc augmentation des salaires faibles lorsqu'il y a un fort taux de chômage. Il faut également regarder la part des salaires dans la valeur ajoutée. Cette part traduit les rapports de force présents. Si la part des salaires dans la VA augmente jusqu'à 1980, elle baisse jusqu'à 2000. Comment expliquer la diminution d'emplois par habitants en France depuis 50 ans ? L'emploi augmente plus vite que la population mais le taux d'emploi a diminué. Cela s'explique par la diminution de la vie active. En 1955, plus de la moitié des 16-20 ans travaillaient; aujourd'hui c'est l'ordre des 10%. L'âge d'entrée dans le monde du travail est passé de 18 à 22 ans. Il y a également un décalage à la sortie. En 1954, 72% des hommes travaillent encore à plus de 60 ans contre 15% aujourd'hui. Il y a cumul des phénomènes : le nombre d'emploi a baissé car la population active baisse. La population active occupée baisse également à cause du chômage. Pourquoi le Nord-Pas-de-Calais possède-t-il moins d'emplois par habitants que les autres régions ? Le NPDC c'est 6.89% de la population française pour seulement 5.46% du PIB. On produit donc moins de richesse que l'on a de population. Hypothèse : l'emploi du NPDC est moins productif. C'est faux

Autre hypothèse : il y a moins d'emplois. Cela provient d'un taux d'activité plus faible, d'un taux de chômage plus fort et d'une population jeune et donc inactive. Le taux de chômage du NPC est de 17.7% contre 12.8% en France Il y a également beaucoup de femmes inactives : le taux d'activité des femmes du NPC a 9 points d'écart avec la moyenne nationale.

2. Trois mutations majeures du marché du travail 2.1. Le développement du salariat La proportion de salarié et de non-salarié était égale en 1886. Puis progressivement la part du salariat a augmenté. 11 salariés contre 9 au début du 20° siècle. En 1936, le salariat montre à 60%. L'augmentation est lente et est expliqué par la baisse progressive de la population agricole. On assiste à une accélération après la seconde guerre mondiale. En 60, le salariat atteint 80%. Aujourd'hui, il est à 90%. Ce chiffre stagne. Jusqu'en 93, il y a présomption du salariat. C'était à votre employeur de prouver que vous êtes son employé. La loi de Madelin où l'employé doit prouver qu'il est salarié a eu un impact faible. L'objectif était une indépendance accrue du salarié qui pouvait vendre son travail à plusieurs employeurs. Aujourd'hui, le MEDEF revient même sur ces réformes (en demandant un nouveau contrat de travail plus flexible). 2.2 La féminisation de la population active Ce phénomène est récent et massif. Entre les années 50 et aujourd'hui, l'emploi féminin a doublé (passe de 6 millions à 11.5 millions). Sur l'ensemble des emplois crées, 83% l'ont été au profit des femmes. "Le chômage c'est la faute des femmes". Cette idée commune est fausse. Les nouveaux emplois sont des créations d'emploi (et non des remplacements.) Il y a inversion de la courbe d'activité féminine. Moins de13 points d'écart entre hommes et femmes. Plusieurs mesures peuvent faire chuter le taux d'activité des femmes comme l'Allocation parentale pour les femmes avec 2 enfants et plus. Avec cette mesure, le taux d'activité a perdu 15 points Il y a une spécificité de l'emploi féminin : ce n'est pas la même branche, le même poste hiérarchique, le même salaire, la même carrière. Le taux de chômage est également plus élevé chez les femmes. Les emplois sont également concentrés sur des secteurs particuliers. En effet, 70% des emplois féminins sont dans l'enseignement, le service à la personne et dans l'administration. 2.3 La tertiarisation des branches et des professions

L'activité économique se tertiarise en développant les services. Si le secteur tertiaire progresse, l'industrie (secondaire) stagne. Toutefois, les emplois du tertiaire ne sont pas tous dans l'encadrement. En effet, il existe des "ouvriers du tertiaire" comme les manutentionnaires de la grande distribution. Ainsi la désindustrialisation ne signifie pas la fin de l'emploi ouvrier. La production industrielle ne baisse pas, c'est la part du secteur secondaire qui diminue. De même que l'emploi industriel ne baisse pas : 70% de l'intérim est de l'intérim industrielle (mais compté dans le tertiaire). Il s'agit ici d'un effet statistique 2.4 Conclusion Ces trois phénomènes sont liés : les femmes sont salariés dans les services. On peut donner l'exemple de Roubaix. La désindustrialisation a fermé les usines textiles. Des emplois ont été crées dans la grande distribution et dans le commerce.

3. Évolutions des conditions de travail 3.1 Précarisation des conditions de travail On observe un déclin de la norme fordiste et de l'emploi à temps plein sécurisé. Le type "emploi fonction publique". Il y a une augmentation des formes particulières de l'emploi : CDD, Intérim, temps partiel... Paradoxalement, l'ancienneté moyenne augmente (signe de stabilité). Il y a une mobilité plus réduite due au chômage. Le marché du travail est donc dual :  D'un côte, il y a la norme de stabilité avec le CDI ultra-majoritaire  De l'autre, les emplois crées sont la plupart du temps des contrats précaires. 3.2 Une montée des qualifications La formation initiale a augmenté. De 8 ans dans les années 50, elle est passée à 12 dans les années 90. En 1950, moins de 5% des actifs ont le bac; en 2004, 43.5% des actifs ont le bac. Dans les années 90, il y a une augmentation des formations et des qualifications notamment dans les conventions collectives. Le nombre de qualifiés a augmenté. Pourtant dès 1994, il y a un retournement de tendances : les employés non-qualifiés reprennent davantage de place dans les créations d'emplois. Aujourd'hui, le plan Borloo crée un gisement d'emploi non-qualifié. Avec le chèque emploi service, il défiscalise les service à la personne. L'objectif est de créer 2 millions d'emplois en structurant une offre de service et en incitant la demande. 3.3 Réduction du temps de travail Cette tendance n'est pas vraie sur une longue période. De la moitié du 18° siècle jusqu'au troisième quart du 19° siècle, le temps de travail a augmenté. Puis il a baissé dès 1880. Dans les années 30, il y a une très forte diminution (semaine de 40h); puis le temps de travail stagne et rebaisse. La réduction n'est pas vraie car il y a une prise en compte du temps partiel et le temps de travail des actifs à temps plein augmente. La tendance est donc difficile à décrire précisément. Les disparités entre temps partiel et temps plein ont tendance à s'accentuer

3.4 Où trouver les données ? Plusieurs moyens :  les enquêtes : recensement, enquête emploi (INSEE), enquête force de travail  les organismes stats : INSEE, Eurostat  les centres de recherche : DARES, CEE, Fondation de Dublin

2° Partie : Parcours Théorique Chapitre 3 : Le rôle du cadre institutionnel (théorie de la régulation et analyse sociétale) 1. La relation d'emploi comme institution au coeur de la dynamique macroéconomique 1.1 La théorie de la régulation (http://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89cole_de_la_r %C3%A9gulation) C'est une vision des institutions particulières partagées par Alain Lipietz, Robert Boyer et Michelle Aglietta. Il est l'héritier des théories marxistes; en effet, la théorie de la régulation apparaît dans les années 70 où la recherche était très influencée par le marxisme. L'idée principale est la distinction entre l'économie de marché et le capitalisme. L'objet d'étude des chercheurs étant le capitalisme. Chez Marx, schématiquement, l'économie de marché est représenté par A - M - A'. A est l'argent, M est la marchandise, A' est l'argent avec la plus-value. Ici, il faut que A' soit supérieur à A. M est transformé avant d'être vendu. Ainsi le schéma est A - M - Production - A'. Il y a l'achat de travail pour revendre à un autre. Le travail fait le prix de la marchandise. L'heure de travail (ou la force de travail) coûte au nombre d'heure à la reproduire. Ainsi le travail crée plus qu'il ne coûte. La production permet donc de dégager de la plus-value. Le marché est une construction sociale donc il ne peut pas fonctionner correctement sans institution. L'individu n'est pas rationnel; les théories de la régulation développent une vision holiste avec l'importance de la notion de groupe dans le marché. Le marché économique est une construction politique. La monnaie crée des échanges grâce à une logique d'appropriation (voir René Girard

La théorie de la régulation est franco-française avec un héritage et une filiation marxiste et keynésien. Il reprend du marxisme, l'achat de marchandise pour revendre et faire la plus-value (échange de travail.). De même le marché est une construction sociale où les pouvoirs politiques jouent un rôle. Il met en avant les conflits : chaque groupe d'acteur a un intérêt conflictuel.

Dans la théorie des jeux, l'acteur est rationnel sur un marché avec des interaction (voir dilemme du prisonnier : l'acteur travaille pour sa promotion individuel). Les acteurs n'ont pas la capacité de prévoir. Pour les régulationistes, les acteurs sont collectifs (ils critiquent donc la théorie des jeux). L'absence d'autorégulation fait que la crise est inhérente au système. La crise se manifeste lorsqu'il n'y a pas le plein emploi ou de périodes d'expansion. Keynes critique la loi de Say. Cette dernière est la loi des débouchés : "toute offre crée sa propre demande". Pour Keynes, la crise est inhérente au système car le revenu est en partie épargné (et donc n'est pas consommé). L'épargne est une fuite donc l'offre ne trouve pas tout de suite la demande. (Pour Say, l'épargne est une consommation future) Quelles sont les institutions nécessaires à la mise en place d'une économie capitaliste qui fonctionne ? Le concept clé est une analyse immédiatement historique :  1) Mode de régulation : Robert Boyer : "Tout ensemble de procédure et de comportement individuel et collectif qui a les triples propriétés : - reproduction des rapports sociaux fondamentaux (problématique de Polanyi : reproduire les facteurs de production) - soutien et pilotage du régime d'accumulation en vigueur (système qui marche est en croissance) - assurance de la comptabilité dynamique d'un ensemble de décisions décentralisée (permettre à un ensemble d'acteur de coordonner les intérêt divergents dans une position entre Etat et marché autorégulé) 

2) régime d'accumulation : l'ensemble des régularités assurant une progression générale et cohérente de l'accumulation du capital. L'accumulation peut être extensive (croissance permise par une hausse de population ou de nouveaux facteurs de production) ou intensive (croissance permise par l'augmentation de la productivité).



3) formes institutionnelles : il y en a 5 : - régime monétaire

- forme de la concurrence - adhésion au régime international - forme de l'Etat - rapport salarial Les formes institutionnelles sont définis comme un compromis institutionnalisé : un ensemble de règle ou de dispositifs qui simplifient un accord plus globale entre des groupes aux intérêt divergents. Dans le rapport salarial, c'est le syndicat et le patronat où est trouvé un compromis (lois, règles, convention collective). Dans le régime monétaire, le compromis est la gestion de la monnaie par la BCE. Les formes de concurrence sont monopole ou oligopole... L'adhésion au régime international est le protectionnisme ou au contraire le libre-échange. La forme de l'Etat est peu ou beaucoup d'interventions...

C'est une question politique : par exemple les Etats-Unis d'après 1930 ont une politique de protectionnisme et d'intervention de l'Etat (New Deal). Les principaux résultats représentent l'architecture de l'ensemble du système économique et de son évolution (voir poly). On peut classifier les crises :  classe 1 : cause exogène (guerre, choc pétrolier, dysfonctionnement temporaire)  classe 2 : crise faisant parti de la régulation (provient d'une dynamique interne sans la remettre en cause : cycle économique)  classe 3 : crise de régulation (formes institutionnelles qui bloquent les autres. On note l'absence de cohérence. Par exemple, le rapport salarial du 19° siècle n'est pas cohérent aujourd'hui car il n'y avait pas de production de masse. L'ouverture salariale n'est pas compatible avec le rapport salarial de type fordiste)  classe 4 : crise des modes de production. Remise en cause de l'ensemble des rapports de production (ex : fin du régime soviétique, fin du féodalisme). La périodisation du capitalisme est possible :  régulation de l'Ancien Régime (traditionnel). L'économie est agricole et peu monétarisé, fermé et très encadré par l'Etat. Pas de reproduction des revenus  régulation concurrentielle. Marché ouvert, autorégulateur avec une quasi-absence de l'Etat. Régime monétaire de type étalon-or  régulation fordiste : économie fermée, peu d'échange interne, monnaie très contrôlée par l'Etat avec taux d'intérêt bas. Partage des gains de productivité, redistribution de l'Etat. Relation salariale stable. Neutralisation du marché international.  régime post-fordiste : pas de consensus sur ce régime parmi les économistes. Capitalisme financier ou capitalisme patrimoniale. 1.2 Le rapport salarial Il s'agit ici de la vision du travail dans la théorie de la régulation. Le rapport salarial est une forme institutionnelle au centre de la question. Ils adoptent une vision socio-économique du travail : marchandise fictive (Polanyi), relation conflictuelle, rationalité limitée... La régulation collective par les syndicats, Etat et patronat est un compromis institutionnalisé. Cela se traduit dans différents dispositifs :  loi ou absence de loi (droit du travail en France)  conventions collectives  contrats types  règlements Le compromis institutionnalisé (= stabilisation de la relation institutionnalisé) comporte trois caractéristiques :  statistiquement dominant  comportement légitime et reconnu (horaire, temps de travail (exemple du dimanche chômé comme norme)

appuyé par des "objets" : renforcement du rapport dominant (exemple simple : dans les agendas, le samedi et le dimanche ont une petit place). Ces trois caractéristiques permettent de distinguer l'institutionnalisation d'un compromis dominant. 

Définition du rapport salarial chez Robert Boyer : "Ensemble des comportements juridiques et institutionnelles qui régissent l'usage du travail salarié ainsi que la reproduction de l'existence des travailleurs". Il y a 5 dimensions qui déterminent le rapport salarial:  organisation du procès de travail  forme de la division du travail (ou hiérarchie des qualifications)  modalités de mobilisation des salariés (sécurité de l'emploi ?)  déterminants du revenu salarial (stable, fluctuant, garanti, primes ?)  mode de vie des salariés De cela découle la lutte des classes : conflit employeurs - salariés sans compromis, ni cohérence. 1.3 Diversité des formes du rapport salarial Les régulationistes soulignent la diversité des formes de relations. Voir tableau. Le constat dans la législation du travail est une régularité historique. Jusqu'à 1892, il ne régule que le travail des femmes et des enfants; Entre 1892 et 1936, s'instaure un rapport de force (acquis sociaux, 40h) Entre 36 et 1982, rien de nouveau n'est acquis Entre 1982 et aujourd'hui, on assiste à l'alternance politique. On avance, on recule... Il y a une incohérence du compromis fordiste contesté de part et d'autre. On ne trouve pas de nouveaux compromis dans le rapport salarial. Peut-on dire que nous sommes dans une relation post-fordiste ? Ce serait un rapport salarial proche du type "Toyota" avec ce que l'on appelle un "stabilité polyvalente" (l'emploi est garanti mais oblige le travailleur à une polyvalence accrue). On assiste également à un retour à la flexibilité externe de marché. Au niveau international, le rapport salarial est différent. Il y a une pluralité de capitaliste et donc par exemple une durée de travail différentes (car les évolutions ont été différentes) Bilan de la théorie de la régulation :  Description de l'évolution du capitalisme  Grille de lecture de situation complexe L'école de la régulation est aujourd'hui très structuré avec laboratoire, revue et chercheurs influents. Voir : http://fr.wikipedia.org/wiki/Robert_Boyer

http://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89cole_de_la_r%C3%A9gulation

2) L'emploi au carrefour d'une pluralité d’espace socio-économique - les analyses sociétales. 2.1 Les cadres des analyses sociétales. L'objectif commun de ces 4 analyses est de pouvoir faire une comparaison internationale. Ce ne sont pas des constructions théoriques mais des réponses de recherches empiriques (commande de l'État). Cela résulte d'une insatisfaction du modèle néoclassique et son aspect mécanique. La théorie néoclassique est trop universaliste : les marchés peuvent fonctionner de la même façon partout. Pourtant, les analyses sociétales mettent en avant une spécificité nationale. Le principe général est de mobiliser des espaces de régulation pour comprendre un phénomène donné. Notre travail est une marchandise encastrée donc produite hors marché; Les auteurs placent la question de l'emploi au centre. 2.2 Les espaces professionnels et les systèmes de mobilité (Silvestre et Maurice). Le point de départ sont les écarts de salaires entre les pays expliqués par un effet d'entreprise. En effet, la hiérarchie des salaires est différente en France et en Allemagne. L'effet d'entreprise signifie que c'est l'entreprise qui change le salaire et non le marché. Ils introduisent la notion d’espace professionnel :  mode d'acquisition donc qualification et reconnaissance de ces qualifications.  système d'organisation des tâches polyvalence ? coopération ? chaîne ?  système de salaire et de promotion : incitative ? sélective ? En Allemagne, le système qualificationnel est centré sur l'apprentissage et sur la coopération des salariés. En France, il y a peu de formations : le poste détermine le revenu. On évalue le potentiel des individus dans la formation générale. La hiérarchie salariale est plus étendue en France. L'espace professionnel évolue. Trois changements majeurs dans les relations de travail :  mécanique : la périphérie (CDD, temps partiel) de l'espace professionnel s'adapte  organique : s’appuie sur les règles du système lui-même.  structurel : notion de crise. nouvel règle salariale. 2.3 Les espaces socio-économiques On prend l'exemple du commerce de détails en France, au Japon et aux Etats-Unis. Dans le contexte des années 90, ce secteur manque d'emploi mais espoir d'un gisement. On compare chacun des pays pour chaque secteur. Par exemple, il y a plus d'emplois dans le secteur du commerce aux Etats-Unis donc il y a possibilité de créer de l'emploi dans le commerce en France. Certains nombres d'espace expliquent le niveau d'emploi dans un secteur donné :

La question posée (volume d'emploi peut être expliqué par les quatre espaces. 2.4 Rôle et diversité de l'Etat-Providence (Esping - Andersen) Il y a trois mondes de l'Etat Providence. L'idée de départ est que le marché du travail est lié à l'Etat Providence. Toute réforme de l'un rejaillit sur l'autre. Ce qui caractérise l'Etat providence :  niveau de démarchandisation du statut des individus (dépendance du marché ?)  type de stratification sociale mise en place (plusieurs systèmes à chaque branche ?)  articulation des actions de l'Etat providence sur la famille Le niveau de démarchandisation du statut des individus est de même caractérisé par le type d'Etat :  héritage conservateur : la famille ou une organisation corporatiste limitent la marchandisation  confiance au marché libéral : l'Etat providence installe tout de même un filet de sécurité (une assurance).  politique social-démocrate : coupe le lien entre individu et marché par des revenus de remplacement ou par l'indépendance du marché au droit fondamental plus élevé. L'auteur va mesure chacun des niveaux d'une quinzaine de pays. La santé, la vieillesse et le chômage sont des conditions d'éligibilité. L'éligibilité peut être large ou faible. La durée des prestations peut être longue ou courte.

En France, le système de sécurité générale (comme le modèle socio-dém) mais diversité des mutuelles (comme corporatif) mais mutuelle privée (comme anglo-saxon).  



Stratification corporatif continentale : Les frontières statutaires dans la hiérarchie et dans la redistribution sont marquées. Chaque profession a son modèle. Stratification dans le système libéral : plusieurs groupes : 1) stigmatisé (bénéficiaire d'aide sociale) ; 2) assistance sociale obligatoire ; 3) assurance liée à la situation du marché (système privé : fonds de pension). Stratification social-démocrate : universaliste. Le standard est la classe moyenne. Prestation élevée pour tous.

Quels sont les liens entre Etat-Providence et emploi ? L'Etat détermine l'offre et la demande d'emploi : départ à la retraite, entrée dans la vie active, travail féminin, travail des étudiants, fonction publique, services de proximité). Définition du plein emploi : homme et femme (modèle libéral) ; homme uniquement (modèle corporatif). L'Etat a une volonté d'atteindre le plein-emploi. Il y a donc des arrangements institutionnels. L'Etat contrôle les rémunérations et le niveau de régulation. La trajectoire d'emploi post-industriels : l'Etat développe certains secteurs et pas d'autres. C'est par exemple, l'emploi féminin public en Suède ou l'emploi managérial aux États-Unis. En Allemagne, il y a peu d'emploi de service post-industrielle (car moindre externalisation). Cela peut amener des conflits avec notamment la notion de mauvais emploi ou d'emploi-poubelle. Conclusion : Nous avons deux ensembles théoriques : régulation et analyse sociétale. L'emploi se situe au coeur des institutions. L'emploi s'intègre dans la société mais les analyses et les méthodes sont diverses.

Chapitre 4 : La segmentation du marché du travail Peut-on voir une critique de la durée de la relation d'emploi soi-disant durable ? Simon souligne la différence entre contrat de travail et contrat marchand, notamment dans la durée de relation. Une relation durable amène de la confiance. Il y a possibilité de triche ou d'erreur de prévision. Mais le contrat de travail peut être incomplet (car travail difficile à définir). Le salarié s'engage alors à faire ce qui lui est demandé. En 1991, dans Carrière et mobilité, 44% des hommes n’avaient pas connu plus de 2 employeurs. L'ancienneté moyenne en France dépasse les 10 ans. Cela fait apparaître des organisations au delà du marché.

I) Pourquoi le marché ne répond-il pas à toutes les interactions ? 1.1 Marché ou hiérarchie ? Williamson prend comme point de départ le fait que le contrat de travail est durable mais aussi incertain (pas de prévision). Le coût de la transaction s'oppose au coût d'organisation. Dans certains cas, le coût de transaction est supérieur donc parfois il est mieux de ne pas utiliser le marché pour embaucher mais la hiérarchie.

La relation dans l'organisation a un coût d'organisation. Tandis que chaque contrat a un coût de transaction. Le patron qui hiérarchise les relations centralise l'information. Un exemple de marché reste la sous-traitance. On peut prendre un exemple historique. Dans le Creusot, la relation de travail était stable et durable alors qu'à Billancourt au usine Renault, la relation de travail est instable car marchande. "On vend une journée de travail". Comment l'employeur va coordonner les salariés ? Il existe trois mécanismes de coordination :



 

marché : échange d'objet équivalent avec individus égaux qui s'accordent pour trouver un prix juste. Le patron peut contourner la norme, notamment dans les branches à horaires atypiques (horaire jour/nuit). Ceux du jour travaillent plus. Les heures supplémentaires sont payées plus. autorité : échange passe par l'inégalité. Par exemple, dans un hypermarché où l'on travaille 20h/semaine, les caissières n'ont pas le choix de refuser les heures supplémentaires réciprocité (don/contre don) : ne repose pas sur la valeur identique. L'échange implique la personne. Les heures supplémentaires ne sont pas réclamées car on aime son métier, ou le métier a une utilité sociale (milieu associatif). Mais en retour, le salarié attend quelque chose (vacances).

1.2 Exit ou Voice ? Il s'agit d'une thèse de Hirschman. En Français, cela a été traduit défection ou prise de parole. Hirschman n'est pas un économiste pur. Que fait-on lors d'un désaccord ? Dans une organisation, la parole, la contestation et la critique sont possibles. Dans un marché, le conflit amène l'Exit. C'est-à-dire la démission, la casse du contrat. Mais l'Exit a besoin d'une alternative. Voice est donc une possibilité de parole. Lorsque la défection est impossible, la prise de parole est facilitée (et inversement). La parole peut être collective ou individuelle. Extraits du livre : "Dans une position néo-classique, l'Exit est efficace car la firme change pour s'adapter à mes désirs. En quittant mon employeur, je peux renégocier un contrat. Mais cette position est limitée : une relation durable de travail basée sur la confiance est plus efficace". La parole est donc une marque de confiance et l'Exit est souvent dû à un manque de confiance (turn-over). Pour le turn-over, Olson a étudié dans des petites organisations. Pour baisser le turn-over, la solution était de baisser les coûts. On dépersonnalise la relation de travail. Pourtant, il faut construire une relation stable (conditions de travail, esprit d'entreprise) bien que cela ait un coût. Moins de turn-over peut être fait en limitant l'Exit. Le salarié s'enchaîne lui-même à l'entreprise. Le passage est difficile après le chômage. On adapte les conditions de travail pour segmenter la main d'oeuvre : à Ikea, il y a 75 contrats différents pour chaque profil. La durée de la relation a des répercutions (positives) sur le salarié.

II) Notion de marché interne 2.1 Définition et distinction marché interne / externe Doeringer et Piore : Internal Labor Markets and manpower analysis "Un marché interne est une unité administrative à l'intérieur de laquelle la rémunération et l'affectation du travail sont déterminés par des règles et des procédures administratives. Le marché externe est régit par le prix, le marché interne par les règles. Le marché interne peut être l'entreprise, le groupe, la branche, le district (ex : Italie du Nord); Les termes de l'échange

dépendent des règles. La mobilité et la définition des postes sont organisées. La variable d'ajustement n'est plus le salaire (donc ce n'est plus un marché). Le marché interne n'est pas seulement une alternative au marché externe. Il y a articulation des deux.

Dans la grande distribution, il y a un peu des deux schémas. D'un côté, il y a recrutement externe pour les salariés libre-service. Puis, les chefs de rayon sont recrutés en interne. Puis la direction est formée grâce au marché interne sans marché externe. 2.2 Les fonctions des marchés internes 





Sélection : c'est une porte d'entrée dans les deux sens. L'essai permet de faire un tri. Se séparer d'un collaborateur après un essai n'est pas coûteux. Pour monter, il s'agit d'un tournoi (voir Lazear). Formation : on oppose les compétences spécifiques aux compétences générales. Si le capital humain est spécifique, l'entreprise peut se permettre de payer une formation (car pas de possibilité que le salarié parte et monnaye ses compétences ailleurs). La promotion interne permet d'éviter que la concurrence en profite. Incitation : salaire à l'ancienneté, promotion et contrat à paiement différé.

2.3 Exemples Tous les marchés internes ne sont pas identiques. Dans la fonction publique, il y a un marché interne fort avec des échelons administratifs. Dans les banques jusqu'en 1997, il y avait des grades A, B et C qui permettaient une progression par ancienneté et par diplôme. La hiérarchie salariale était faible. Mais en 1997, un décret casse les conventions collectives. La hiérarchie se rapproche désormais des pays anglo-saxons. La

négociation est individuelle et donc c'est une relation marchande (fin du marché interne). Voir le scandale du crédit lyonnais : spéculation qui permet aux meilleurs salariés d'obtenir des grosses primes. Ces spéculations ont amené 130 millions de francs de pertes à la banque. Dans les sociétés d'ingénierie informatique, le marché du travail est proche d'une relation marchande. Il y a une grande mobilité et le marché est régulé selon l'offre et la demande. Le marché interne est dégradé mais c'est une situation positive pour les salariés car les salaires augmentent sans marché interne. On peut créer un marché interne dans un secteur restreint à salaire réduit. Les caissières n'ont pas de grades mais le niveau de répartition des heures supplémentaires se fait selon l'ancienneté. Celui qui a le plus d'ancienneté gagne en possibilité et en sécurité d'emploi. Mais toutefois, le marché interne est dégradé car il y a peu d'avantages financiers et les salaires sont réduits.

III) Dualisme du marché du travail 3.1 Stratification de l'emploi. Pour Piotre et Deoringer, ceux qui rentrent sur le marché interne sont déjà signalé c'est-à-dire déjà sur un marché externe.

Il y a une séparation entre les marchés externe/interne et au sein du marché externe. Le marché primaire permet de rentrer dans le marché interne. La stratification concerne également la qualité du travail. Un bon travail permet de cumuler des avantages tandis qu'un "sale travail" cumule des désagréments. Ce cumul est expliqué par les

théoriciens néo-classiques. En référence à Smith, ils ont construit le salaire hédonique dans la théorie de compensation. Le salaire est la somme du salaire de base, de l'indice de qualification, de l'indice de pénibilité... On peut ajouter de nombreux facteurs. Selon Smith, "l'inégalité dans la nature même de l'emploi explique l'inégalité de salaire". Plusieurs autres raisons :  agrément des emplois : condition de travail, propreté, travail méprisé/valorisé  facilité/difficulté à les apprendre : facilité et bon marché. Capital humain  occupation constante / interruption : travail irrégulier = perte à compenser  confiance en ceux qui les exerce  probabilité d'y réussir : notion de risque Les emplois du marché secondaires cumulent : peu payé, méprisé, pénible. Ce dualisme est auto-entrenu ? Le marché secondaire connaît un cercle pervers. Cela répond à différentes stratégies :  Pour les entreprises qui ont embauché sur le marché primaire, on recherche un gain de productivité qui sera partagé.  Pour les entreprises qui ont embauché sur le marché secondaire, c'est une stratégie de coût. La lutte sur les prix amène l'entreprise à payer peu. Il y a peu de mobilité dans ce dualisme. 3.2 La stratification de la main d'oeuvre On peut opposer main d'oeuvre masculine, qualifié et vieux avec main d'oeuvre féminine, peu qualifiée et jeune. La stratification découle d'une "ségrégation" à l'horizontale et à la verticale :  horizontale : "plafonds de verre" entre poste élevé et postes moins qualifiés. C'est par exemple, dans l'enseignement, la féminisation des petites classes.  verticale : on ne retrouve pas les mêmes personnes au même métier. Il y a plus de femmes en sociologie qu'en mécanique. En Suède, la ségrégation horizontale est faible mais ségrégation verticale est forte car certains secteurs sont très féminisés.

Les conditions de travail sont peu reconnues. Dans les heures atypiques de travail, il y a une inégalité homme/femme. On peut également poser la question des compétences naturelles. Il y aurait donc invisibilité des qualifications. Par exemple, dans une usine, il faut surveiller les machines automatiques. Les machines manuelles sont surveillées par des femmes car elles sont plus habiles pour mettre des chocolats dans des boîtes. Mais ces compétences naturelles se traduisent de manière faible dans les salaires. Les possibilités de promotion sont restreintes.

IV) Les fondements du dualisme 4.1 Explication néo-classique La théorie insider/outsider peut expliquer. Il s'agit du pouvoir de fermer le marché. Un salarié syndiqué peut fermer la porte à d'autres et créer une concurrence imparfaite. Il y a un monopole dans les emplois : comme ceux de dockers auparavant. Cela peut-être une discrimination statistique. "Les gens qui ont de grandes oreilles sont plus productifs". On peut vérifier cette affirmation absurde par la statistique. Ainsi cela explique la ségrégation blanc et noir. Les blancs sont plus diplômés et donc certainement plus productifs. Certains groupes sont ainsi restaient sur le marché secondaire. 4.2 Explication organisationnelle : la segmentation comme outil d'efficacité productive L'économie de coût de transaction reprend la logique de la division du travail chez Smith (2 formes de division : sociale et technique) Ici, il y a la même logique d'efficacité avec un triple avantage : augmentation de l'habileté, gain de temps et propension à l'invention.

Smith reconnaît que cette division technique a des conséquences sociales importantes. La segmentation est une réponse au besoin de flexibilité.

L'emploi du marché primaire est stable, tandis que celui du marché secondaire fluctue selon l'emploi disponible. De même, chez Renault, dans l'usine, il y a un emploi stable, tandis que chez les sous-traitants, l'emploi est flexible. 4.3 L'explication radicale : la segmentation comme manifestation du pouvoir Stephen Marglin prend comme point de départ, Adam Smith. Il reconnaît que la division du travail est efficace mais il insiste sur les conséquences sociales. Mais pour Smith, même ceux qui sont en statut défavorisé sont mieux sans division du travail. Marglin insiste plutôt sur la logique de reproduction : la division du travail maintient la domination et construit les hiérarchies sociales. La segmentation est le produit du contrôle social de la main d'oeuvre. "What bosses do ?" mais A quoi servent les patrons ?. Les arguments en faveur de la division du travail ne sont pas convaincants. Dans l'ancêtre de l'industrie, on aurait pu obtenir les avantages de la division du travail sans diviser le travail, c'est-à-dire enchaîner les tâches dans un paquet de tâche. Pour Smith, il fallait terminer une épingle avant d'en commencer une autre (voir exemple de la manufacture d'épingle). Dans la proto-industrie, le marchand met à disposition de la matière première au village puis récupère le produit fini grâce aux "métiers à tisser décentralisés". Mais ce système disparaît au profit du regroupement des salariés dans une même usine (centralisation pour plus d'efficacité ?). Marglin conteste cela. Landes dit que l'on peut trouver une efficacité économique dans la division du travail. On peut payer ceux qui font les tâches simples, moins cher. Ainsi cela permet de faire travailler les

femmes et les enfants. Marglin conteste cela car dans la proto-industrie les femmes et les enfants étaient déjà mis à contribution. Pour Marglin, il s'agit de diviser pour mieux régner. C'est un choix des capitalistes que de confier différentes tâches à différents travailleurs. Cela empêche les ouvriers d'accéder au marché. Dans la proto-industrie, le marchand n'est qu'un intermédiaire. Les patrons ne servent pas à grand chose, juste à diviser et régner. Dans une théorie antérieure à la théorie de la régulation, Gordon et Reich divise en trois phases :  1820-1890 : La prolétarisation de la société permet de baisser le coût du travail  1890-1940 : L'effet de mécanisation homogénéise le facteur travail (baisse des qualifications).  1940-... : Segmentation : l'homogénéisation a cassé les métiers et a limité le pouvoir de négociation des ouvriers qualifiés. Le rôle des collectifs de travail est d'avoir un poids plus fort dans les rapports de force. Toutefois, cela est cassé par la segmentation. On crée plusieurs marchés (primaires et secondaires) et de nouvelles classifications (cadres / ouvriers). La segmentation est également sexuelle et raciale. Margaret Maruani prend l'exemple du Canard Enchaîné où les hommes sont correcteurs typographiques et les femmes, claviste alors que c'est le même métier (ou presque). Le salaire est également différent. Les femmes sont également plus contrôlées. Le salarié masculin est organisé dans le syndicat du livre (contrairement à la femme). Stone applique l'analyse de Marglin dans une industrie. La hiérarchie est un moyen de contrer l'homogénéisation. Illich et Gorz distingue autonomie et hétéronomie. Bon nombre font l'objet de substitution improductive. Ceux qui sont plus lent que moi sont payés moins cher. Conclusion : les marchés sont non homogènes. Le dualisme traduit des rapports de force au sein du travail.

CHAPITRE 5 : Conventions et fonctionnement du marché du travail Il y a des rapports de force comme vu auparavant. Ici il y a diversité des rationalités des acteurs. On part d'un constat : le contrat de travail est incomplet donc la rationalité est incomplète. L'agent ne bénéficie par d'une information précise et donc la rationalité est imparfaite.

1) Concepts de conventions 1.1 Convention stratégique (à la Lewis) C'est issu de la théorie des jeux. Convention est une réponse à un problème de coopération. Pourquoi fait-il R ? (R est une règle) :  car tout le monde le fait [mais tout le monde aurait pu faire R' [R prime]]

   

tout le monde suit R chacun croit que tout le monde se conforme à R c'est un choix décisif au moins, une autre régularité R' aurait pu exister.

Je fais la convention car je suis persuadé que tout le monde va le faire. Par exemple, la conduite à gauche/droite. La convention résulte d'une répétition d'un jeu. L'équilibre choisi par la convention. L'agent est rationnel mais pour qu'il soit rationnel, il faut une convention. Les préférences sont également modifiées par le fait de la convention. 1.2 Convention légitimée Le point de départ est les travaux de Weber et le concept de légitimité (quelque chose qui doit être comme cela). André Orléans dit que la répétition d'un jeu ne change pas les choses Par exemple, dans ce jeu :

Si on répète ce jeu, on n’arrivera pas à trouver un équilibre et donc une convention commune. Quelque chose de plus doit être fait : la légitimité. Ainsi la convention s'écarte du point stratégique. Ce qui est légitime sanctionne le groupe. On peut faire une distinction entre la convention (sanction du groupe) et la règle de droit (sanction extérieure). La convention partagée ne peut pas être un équilibre car la convention n'est pas la meilleure solution possible. Dans le domaine du travail et de l'emploi, ce type de convention est courant. Par exemple, dans l'effort fourni par le salarié. Même si on augmente les salaires pour les plus productifs, il y a une convention d'effort moyen. On travaille moyennement pour gagner moyennement et le collectif de travail fait respecter cette convention. Cela se traduit également sur la qualité du travail du salarié. La même usine produisait en Allemagne 50% de voitures en plus qu'aux Etats-Unis.

2) Diversité des conventions comme outil d'analyse 2.1 Les économies de la grandeur (1991) Boltanski et Thévenot Il y a un nombre limité mais affiné de principe de grandeur (critères de légitimité). La démarche de Boltanski et Thévenot est de chercher la légitimité dans les textes fondamentaux et dans les manuels de gestion. Ils distinguent 6 mondes : monde de l'inspiration : objet valorisé renvoyant au génie du créateur. Ce qui est grand est ce qui est original et crée.  monde domestique : famille, tradition, ancienneté, proximité.  monde de l'opinion : célébrité, renommée. Ce qui est reconnue par l'opinion.  monde civique : intérêt collectif  monde marchand : place aux lois du marché et de l'offre/demande  monde industriel : performance, efficacité/technique. Dans le Nouvel esprit du capitalisme, Boltanski ajoute le monde du projet. 

Les mondes regroupent des formes d'accord et des objets sociaux différents. Cette grille apporte des principes de légitimité et met en évidence les conflits entre les différents mondes. Par exemple, l'Eglise et les indulgences est un conflit entre le monde marchand et le monde de l'inspiration. 2.2 Illustrations de conflit entre les mondes 

monde industriel / marchand (Ford) : l'évaluation est complexe car il y a plusieurs critères pour juger le bon et le mauvais (fondement de la théorie des conventions). Le Fordisme arrive dans un contexte où c'est le client qui a le choix. Ford dit le contraire : on uniformise la production pour baisser les coûts et augmenter les salaires. "Le client n'est pas le meilleur juge de la qualité" c'est le producteur qui doit choisir la qualité. Le client est ici non rationnel. Il n'y a pas de spéculation sur les prix : un "juste prix" est fixé (pour un économiste c'est impensable). Le juste prix dérive des coûts de production. Sur le marché du travail, le salaire dérive d'autres caractéristiques (la qualification) que le marché. Dans cette organisation scientifique du travail, l'augmentation des salaires permet de baisser le turn-over. C'est donc industriellement efficace puisque la production est plus stable. On intègre la production dans une société car il y a un contrôle social des ouvriers Ainsi le modèle fordiste est à mi-chemin entre le modèle marchand et industriel. Marchand car il y a une dépendance de la production vis-à-vis du marché demandant une réactivité et un contact avec le client. Industriel car c'est l'organisation rationnelle et efficace du travail (travail de nuit et du week-end). On le voit également dans d'autres structures : La Poste est divisée en deux secteurs : le commercial et la production. Le but des ingénieurs est que 80% du courrier arrive à J+1. Le but des commerciaux est de vendre du 100% J1 et donc la marge d'erreur rend la chose difficile.



monde domestique / industriel (Camembert Appellation origine contrôlée) : le camembert est à la fois issue d'un processus industriel et d'un terroir (donc d'une structure familiale, réduite, avec un recrutement personnalisé). Alors que dans le domaine de l'emploi, le monde industriel signifie un recrutement plus vaste mais plus anonyme.



modèle civique / marchand (service public) : on voit ici la dichotomie entre usager et client dans les services publics. Par exemple, dans l'organisation des facteurs, on a procédé à un chronométrage; 5 à 20% du temps était passé à des interactions sociales (relations, aides). Que faire de ce travail social qui ne rapporte pas ? Le modèle marchand dit qu'il faut limiter ce travail social mais les facteurs et les syndicats défendent ce modèle civique et social.

3) Les "communautariens" américains : Amitaï Etzioni, Michael Walzer et Nancy Fraser. 3.1 Diversité des formes de rationalité et importance du sentiment de justice Il n'y a pas qu'une seule rationalité (c'est-à-dire la rationalité instrumentale). Pour Etzioni, il y a la rationalité affective et normative. De même, les approches de la Justice sont diverses. Pour Pareto, il est impossible de comparer deux situations individuelles. situation

1

2

3

A

10

12

1000

B

10

13

980

C

10

11

8

La situation 2 est meilleure que la 1 car tout le monde a plus (donc 2 est plus efficace). La situation est collectivement mieux. Pareto interdit toute forme de redistribution. Pour Rawls, les situations de Pareto sont trop figées. Pour une situation juste, il ne faut pas connaître la position que l'on occupe. La justice détermine collectivement par contrat social. Le voile d'ignorance est quand l'individu connaît la répartition mais pas la position au sein de cette réputation. Ainsi, il formule la notion de maximin : maximiser le minimum. Il faut accepter une situation qui défavorise certains à condition que le plus défavorisé s'améliore. Situation

1

2

A

100

1000000

B

100

100000

C

1

1.5

Ici, il y a un creusement des inégalités mais le plus défavorisé s'est amélioré. Les communautariens insistent sur le fait que la répartition des biens touche plusieurs éléments qui ne se répartissent pas tous de la même manière. Chez Fraser et Honneth c'est le principe de reconnaissance. On doit partager la valeur symbolique. Pour Fraser, la justice est la parité de participation, c'est-à-dire pour participer à égalité, il faut une ressource minimale (matériel) et un minimum de reconnaissance (dignité). Pourtant, les salariés du ménage ont un travail indigne et représentent 1.5 millions de salariés. 3.2 Walzer et le principe de justice Le point de départ est la notion de pluralisme : les agents sont différents, et donc leurs critiques de jugement sont différents. De même, les biens répartis et les dispositifs de décisions sont répartis différemment. 6 caractéristiques des biens sociaux :  évaluable par un groupe et non par un individu unique  les biens sont partis intégrante de l'identité (Méda)  caractéristiques ne sont pas primaires ou secondaires mais dépendent des choix sociaux préalables.  la signification a un impact sur la distribution  la signification est historiquement datée.  A signification sociale distincte, bien distinct et donc une sphère de justice distincte. Avec cette vision de biens sociaux à répartir, on se pose la question d'atteindre l'égalité. Historiquement, par exemple, l'Union Soviétique a tenté de trouver l'égalité mais la redistribution du prestige était inégalitaire (nomenklatura). Ainsi la recherche d'égalité est difficile car démarque sur un autre bien qui n'est pas égalitaire. Pour une égalité complexe, il faut lutter contre le monopole et la tyrannie. Il ne faut pas qu'une sphère de justice détermine la répartition d'autres biens. Dans son livre, Walzer examine plusieurs biens : appartenance à une communauté, sécurité, argent. On peut prendre l'exemple du travail pénible et du temps libre. Comment répartir ? On peut reporter le travail pénible sur un groupe stigmatisé et isolé, sur les immigrés ou sur une composante ethnique. Ou on répartir sur une logique de "à tour de rôle" ou de service national (serveur dans la restauration rapide avec un fort turn-over et une main d'oeuvre jeune). On peut exploiter les compétences / affinités de chacun (voir Fourrier). Dans les différents emplois, la répartition ne peut pas obéir à un seul critère (celui marchand). Pour le temps, il oppose deux visions de la répartition :  ordre marchand : on achète du temps libre avec un compte épargne temps. Argent = temps.  ordre collectif : il y a des principes de jour férié collectif. Le dimanche répond à une logique de temps libre.

4) Un exemple d'analyse plus macroéconomique Jean Gadrey étudie les systèmes d'emploi. Il utilise la convention d'égalité pour comparer les systèmes d'emploi. Dans le modèle des pays développés, 3/4 des emplois sont dans les services mais les écarts dans la structure de l'emploi sont considérables. [voir texte]. La répartition est différentes selon le service : sociaux ou commerciaux. La convention d'égalité et de genre est différente. Gadrey regroupe les pays par modèles (pays nordiques vs pays anglo-saxons). Les inégalités de revenus sont plus fortes aux Etats-Unis mais plus faible en Suède. Le type d'emploi dans le service est différent : prise en compte de ce qui est juste et légitime pour les acteurs. Légitimité des comportements. [voir texte]

Le marché du travail et la notion d'embeddedness Le marché du travail est encastré (critique faites aux néoclassique). La notion d'encastrement est formulée par Marc Granovetter. L'accent est mis sur les relations sociales : l'acteur est au coeur de réseaux.

1) L'origine de la notion d'encastrement : Polanyi Part d'un constat : l'économie comme un champ est normalement / traditionnellement encastré dans des relations sociales. L'économie n'est pas une sphère indépendante. Elle est liée à la politique, à la religion... Au 19° siècle en Angleterre, on sépare l'économie des autres sphères. Quelles sont les conséquences de cette autonomisation ? Polanyi a une vision historique. A un moment donné, l'économie de marché s'est considérée comme le système social principal. Les marchés locaux sont devenus un grand marché autorégulateur. Pour Smith, le passage est naturel. Mais pour Polanyi, la construction du marché a été facilitée par l'Etat. Ainsi il fait un passage entre la figure politique et la place du marché. L'Etat crée le marché, la monnaie, le transport (pour agrandir le marché), abolit les octrois (douanes intérieures). Paradoxalement, les prémisses du capitalisme sont dans les petits Etats comme les états italiens (Gênes, Florence). Cela s'explique par la baisse d'influence d'un grand pouvoir central. L'essor du capitalisme dans les grands Etats s'est fait grâce aux pouvoirs publics. Les idées de l'époque ont également joué un rôle : le libéralisme avec l'économie au centre. La terre, le travail et la monnaie deviennent des marchandises (fictives) autorégulée par un marché. 3 enseignements essentiels :  degré divers de marchandisation : Le travail a une marchandisation plus forte au début du siècle que maintenant. Pour Gadrey, la situation est différente selon les pays. Les conditions de vie sont liées à l'état du marché plus important dans certains pays que d'autres.  Retrouver des espaces non-marchands. Le lien social est irréductible au lien marchand. J-L Laville étudie les économies sociales et solidaires (association, service de proximité).  Relation sociale influe sur la nature et l'efficacité des relations économiques (car les relations économiques encastrées dans les relations sociales). Notion de réseaux, chez Granovetter.

2) Encastrement et construction sociale des marchés Cette théorie prend ses racines dans la nouvelle sociologie économique avec Harisson White, Burt, Granovetter, Lazega... L'analyse est individualiste mais les acteurs ne sont pas isolés. Ils refusent l'idée d'un acteur sursocialisé (obéissance à la norme chez Bourdieu) ou sous-socialisé (homo economicus). Granovetter cherche le juste milieu. L'acteur "mort-vivant" habité par la norme. Le marché est construit socialement et nécessite des structures et des dispositifs créent par les institutions. Granovetter reproche à Polanyi sa vision trop stricte entre le marché traditionnelle et le marché auto-régulateur. Granovetter a une volonté de lier macro et micro. Comment s'agrègent certains phénomènes. 2.1 Principes généraux Granovetter analyse en terme de réseaux. L'agent est inséré au sein d'un réseau (l'ensemble des relations sociales d'un individu). Les réseaux sont très divers et doivent être mesurables. La sociométrie permet de faire une modélisation de ces réseaux. Le réseau montre la nature des liens entre A, B, C et D. Le lien est plus fort ou plus faible. Il y a 4 critères pour distinguer fort et faible :  force du lien : quantité de temps que je passe avec lui.  intensité émotionnelle : sentiment éprouvé  intimité et confiance mutuelle  service réciproque; Il y a volonté chez Granovetter de donner au lien un vrai contenu mais il va laisser tomber ces critères pour séparer lien fort et lien faible de manière binaire. Ses outils sont l'enquête : si l'enquêté répond ami, c'est un lien fort ; s'il répond connaissance, c'est un lien faible. La force des liens est liée à la taille du réseau. L'interception des réseaux de A et de B est corrélée à la force de leur lieu.

ex : Il est plus probable d'avoir un lien avec C si le lien est fort : réseau commun. On peut distinguer deux principes : principes qualitatifs (goût commun) et principes quantitatifs (temps passé).

Ici, c'est impossible. Car il y a forcément un lien faible entre B et C. A cela, on peut ajouter la notion de pont : chemin le plus court entre deux réseaux.

Distance sociale : combien faut-il de personnes pour passer de G à F. Seul des liens faibles peuvent être des ponts car il y a le principe de triade impossible. Si A et B ont un lien fort, B a forcément un lien fort avec le réseau de A. L'individu est un noeud au sein des relations. Il faut distinguer acteurs centraux et marginaux. Les acteurs marginaux sont ceux avec qui les ponts peuvent être fait. Par exemple dans un hôpital, la rumeur a été lancé par 6 personnes qui n'avait aucun ami dans l'hôpital et donc le pont se sont fait avec des liens faibles). 2.2 Exemple du marché du travail Granovetter, Getting a Job, 1974 Comment obtenir un job ? Il part d'un constat : les salariés trouvent plus facilement un emploi grâce à un contact professionnel. Il fait une grosse enquête sur la base d'un échantillon aléatoire de cadre de profession tertiaire. Les caractéristiques communes permettent de voir s'ils changent d'emploi grâce à une connaissance personnelle. L'individu rencontre ce contact personnel. C'est une bonne mesure de l'intensité du lien : 16.7%, le voit souvent; 55% occasionnellement ; 27.8% rarement. Le lien pour l'obtention d'un emploi est donc faible. Granovetter dit que pour obtenir un emploi, "la force des liens faibles" prime. L'entretien des liens faibles est un investissement rentable. Ce lien peut être associatif, religieux, politique... Au niveau de l'entreprise, le lien faible est le séminaire où l'on rencontre d'autres salariés. Granovetter observe deux communautés : celle des commerçants de Chine et ceux des commerçants de Bali. La communauté Chine marche mieux que la communauté de Bali. Le réseau de Bali est plus fort notamment à l'étranger. Il existe une forte solidarité mais les liens sont quasi exclusifs. Le réseau des commerçants chinois rend possible les ponts car les relations sont hiérarchisées dans un réseau vaste. 2.3 La vision dynamique du monde du travail Y-a-t-il mobilité ? Il y a plutôt refus d'une opposition : mobilité positive (accumulation de compétences) et mobilité négative (turn over)

Granovetter critique les visions sur l'hétérogénéité des individus : les individus sont différents car certains sont plus susceptibles de se faire embaucher que d'autre. (Granovetter préfère la dépendance à l'Etat) Certains ont plus de probabilité d'avoir une situation A que B. La dépendance de l'Etat arrive quand les périodes de chômage se répètent; Les réseaux et les contacts tendent à s'accumuler. C'est l'effet "boule de neige". Cela entretient les inégalités : la mobilité est trop rapide pour être efficace (intérim). Il y a la trappe au chômage car pas d'accès au réseau par le travail. L'importance des stages est mis en avant : les stages peuvent aider à trouver un emploi mais les stages demandent un réseaux. Ainsi, il y a une hétérogénéité des stages initiaux. Pour comprendre les trajectoires professionnels, Granovetter utilise l'analyse des réseaux : comprendre la mobilité par l'accès inégalitaires aux réseaux et aux marchés.