Construire Et Defendre Son Budget 2e Edi [PDF]

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Zitiervorschau

Construire et défendre

son budget   

Outils Méthodes Comportements Caroline SELMER 2e édition

Construire et défendre son budget

Construire et défendre son budget Outils, méthodes et comportements Caroline SELMER

2e édition

DU MÊME AUTEUR Concevoir le tableau de bord, Dunod, 2003, pour la nouvelle édition. Toute la fonction Finance, Dunod, 2006. La Boîte à outils du responsable financier, Dunod, 2008.

L’auteur a participé à l’ouvrage Finance d’entreprise, (dir. Norbert Guedj), Éditions d’Organisation, 1997.

© Dunod, Paris, 2009 © Dunod, Paris, 2003, pour l’ancienne édition

ISBN 978-2-10-053844-7

PRÉFACE

C

omment préparer, défendre et suivre son budget? Voilà une triple question que des milliers de responsables se posent au sein des d’entreprises privées et publiques qui composent le paysage économique français et international. Le sujet du livre me semblait si ardu que j’étais plutôt dubitatif. Pourtant, quand Caroline Selmer m’a soumis la première mouture de son ouvrage, j’ai su immédiatement qu’il correspondrait à l’attente des gestionnaires qui chaque année connaissent comme moi d’ailleurs, les «affres» du budget. Dès qu’une entreprise atteint une taille suffisamment critique, l’existence d’un budget devient indispensable. La quadrature du cercle consiste à ce qu’il soit volontaire mais réaliste, compris et accepté par les dirigeants et les actionnaires, en rapport étroit avec les besoins et les moyens de l’entreprise tout en fédérant les salariés et leurs responsables. À la tête de la direction administrative et financière d’un groupe qui se sera particulièrement développé au cours de ces dix dernières années, j’ai pu constamment mesurer l’importance primordiale du budget. Au fil des années, les différentes constructions budgétaires se seront enrichies de l’expérience passée amenant le Groupe Lucien Barrière à ne connaître que peu d’écarts. Il s’agissait tout de même en 2000 d’atteindre pour 13 hôtels de luxe et 13 casinos, répartis à travers toute la France, un volume d’affaires dépassant les 500 millions d’euros. Le nombre d’établissements à gérer, la variété des activités à développer, l’hétérogénéité des opérateurs demandent et nécessitent une rigueur constante dans le discours et la méthode, une organisation sans faille et une maîtrise des

VI

CONSTRUIRE ET DÉFENDRE SON BUDGET

outils de gestion, tels que le budget. L’ensemble doit être en plus fédérateur, rassembleur et homogène. Un budget est, à mon sens, un «contrat» que son concepteur et en même temps responsable signe avec son supérieur hiérarchique quel qu’il soit. Sous-entendu, il est dit en substance «donnez-moi les moyens de mes ambitions et vous aurez en retour les résultats que vous attendez». Le problème est que cet engagement s’inscrit dans un environnement économique qui fluctue continuellement et qui doit pourtant tenir compte du temps qui ne vous appartient pas, et de paramètres financiers qui vous sont imposés. Faire un budget ne consiste pas à se faire plaisir, un peu comme si on admettait par avance que le contrat pouvait être rompu à tout moment. C’est au contraire un engagement formel et formalisé qu’un responsable aura pris vis-à-vis de l’entreprise qui l’emploie. Les dirigeants ou les actionnaires de l’entreprise doivent pouvoir s’appuyer sur un document de pilotage qui soit une référence commune, reconnue et acceptée. Mais entre la réalité économique et la promesse de meilleures perspectives, il peut y avoir en cours d’années des écarts quelquefois significatifs. Les responsables devront s’employer à les rectifier et, dans ce dessein, proposer des actions correctrices immédiatement suivies d’effets bénéfiques. Ce livre prétend à juste titre donner, ou quelquefois simplement rappeler, une méthodologie. L’intérêt majeur de cet ouvrage réside dans le fait qu’il est avant tout pratique et tourné vers les acteurs du processus budgétaire de l’entreprise. Ainsi un lectorat large — opérationnels, gestionnaires, et même dirigeants — y trouvera des informations utiles pour préparer les budgets, tout en découvrant l’art et la manière de négocier, de défendre, de convaincre de la justesse de ses arguments, ainsi que des outils de suivi une fois qu’ils ont été acceptés. Tous les responsables de budget pourront s’en inspirer. Les managers opérationnels qui ont vécu le stress du grand oral que représente la soutenance d’un budget apprendront ou redécouvriront avec plaisir comment trouver des arguments pour en renforcer la pertinence ou comment favoriser le dialogue avec la direction pour mieux défendre leur budget. Concevoir un budget est une chose, le défendre en est une autre! Personne ne perdra son temps à s’aguerrir en la matière. Vous lirez comme moi avec intérêt ce «nouvel art de guerre» dans le chapitre consacré à la défense du budget. L’auteur passe également en revue les différents budgets existants. Mais que ce soit un budget commercial, de production, de frais généraux, d’investissements ou de trésorerie, il sera démontré qu’il s’inscrit dans un tout, ce qui effacera peut-être certaines idées reçues. On ne soulignera jamais assez le rôle prépondérant des contrôleurs de gestion dans la construction et la vie du budget tout au long de l’année. Cet ouvrage contribuera, je l’espère, à leur redonner leur vraie place au sein de

Préface

VII

l’entreprise. Bien plus qu’un grand consommateur de chiffres, le contrôleur de gestion, tout en restant lié à la direction générale, se doit d’apporter conseil et assistance aux directions opérationnelles et fonctionnelles afin de les aider à tirer le meilleur parti de l’outil de production et du capital humain. Ils trouveront ici des idées complémentaires sur l’amélioration de la procédure budgétaire dans leur entreprise, via une méthode de travail, des conseils pratiques et des astuces. Écrire des milliers de pages ne suffirait certainement pas pour répondre à toutes les questions qui se posent. Ce livre ne peut être exhaustif tant le sujet est vaste; il constitue néanmoins une synthèse et un guide pour tous les gestionnaires de métier dont je fais partie. À ce titre, je suis fier d’en avoir écrit la préface. Laurent WEILLER Directeur général adjoint du Groupe Lucien Barrière

REMERCIEMENTS

Je tiens à remercier: – Siegfried Leblanc pour ses connaissances littéraires et son sens de l’écrit; – Laurent Weiller pour sa préface et la qualité de nos échanges; – mes collègues de la Cegos pour leurs conseils et leurs encouragements; – Georges et Thierry pour m’avoir fait part de leur vision du sujet.

TABLE DES MATIÈRES INTRODUCTION

1 PREMIÈRE PARTIE

La préparation du budget

1

LE PROCESSUS BUDGÉTAIRE 1. Le lien avec le plan

9 10

1.1. Les pratiques actuelles

13

1.2. La gestion contractuelle

15

2. Les étapes du processus budgétaire 2.1. Définir le cadre budgétaire Analyse de la conjoncture et prise en compte des objectifs pour l’année à venir Construction d’un ou plusieurs scénarios et choix d’un scénario: le prébudget Diffusion des éléments de cadrage vers les responsables opérationnels

16 17 18 19 23

2.2. Lancement du processus budgétaire

23

2.3. Élaboration des budgets fonctionnels

24

2.4. Consolidation des budgets et arbitrage budgétaire

26

X

2

3

CONSTRUIRE ET DÉFENDRE SON BUDGET

L’APPORT DU CONTRÔLE DE GESTION

29

1. Un rôle de technicien

31

1.1. Modélisation économique et financière Les composantes d’un modèle Les choix de modélisation

31 32 34

1.2. Les outils informatiques Les tableurs Les progiciels de gestion budgétaire L’apport d’un intranet et d’un workflow

36 37 37 39

2. Un rôle de conseil et d’animateur

41

2.1. La procédure budgétaire Le contenu de la procédure La qualité de la procédure L’animation de la procédure

42 42 45 46

2.2. Les réunions périodiques d’analyse des résultats La préparation de la réunion L’animation de la réunion Le compte rendu de la réunion

47 47 48 48

2.3. Organiser le benchmarking Benchmarking et tableau de bord Les trois étapes d’une opération de benchmarking

49 50 51

CONSTRUIRE SON BUDGET

52

1. Analyse des performances du passé et chiffrage du probable de fin d’année

53

1.1. Traitement des informations passées

53

1.2. Outils de diagnostic L’analyse interactive L’analyse cause-effet

55 55 55

1.3. La prévision ou le probable de fin d’année

56

2. Déclinaison des objectifs et des plans d’action

58

2.1. Aligner l’organisation sur la mise en œuvre de la stratégie

59

2.2. Fixer les objectifs de performance des responsables budgétaires

60

XI

Table des matières

2.3. Formaliser des plans d’action à court terme Choisir des leviers d’action Mettre en œuvre un plan d’action

63 63 63

2.4. Choisir les indicateurs Grille d’analyse par destination Grille d’analyse par nature

66 66 66

3. Le chiffrage des objectifs et des plans d’action

67

3.1. Valoriser les coûts et les marges Les coûts Les marges Les investissements

67 67 70 72

3.2. Créer un fichier de normes élémentaires et de coûts standard

72

3.3. Prendre en compte les aléas

75

DEUXIÈME PARTIE

Les différents types de budgets

© Dunod – Le photocopie non autorisée est un délit.

4

LE BUDGET COMMERCIAL

79

1. Détermination du programme des ventes

80

1.1. Méthodes quantitatives Analyse des séries chronologiques Modèles explicatifs Répartition saisonnière des ventes

81 81 82 83

1.2. Méthodes qualitatives Les méthodes d’enquête encore appelées «études de marché» Les simulations ou méthodes des «marchés-tests» Les enquêtes de conjoncture Les méthodes de connaissance de son marché

84 84 84 87 87

2. Estimation du chiffre d’affaires

88

3. Évaluation des moyens commerciaux et chiffrage des charges d’exploitation

90

4. Consolidation au niveau des chefs de vente, des directeurs commerciaux et de la direction générale de l’entreprise 92

XII

5

CONSTRUIRE ET DÉFENDRE SON BUDGET

LE BUDGET DE PRODUCTION

93

1. La détermination du programme de production

93

1.1. Les quantités à produire

94

1.2. Les facteurs de production

94

2. La valorisation du programme de production

99

2.1. Budget des approvisionnements Les matières et les consommables La sous-traitance Les conditions de règlement des achats

99 100 100 100

2.2. Budget de main-d’œuvre directe

101

2.3. Coûts indirects de production

101

3. Le calcul des coûts standard et le bouclage du budget de production

6

7

103

3.1. Le calcul des coûts standard Définition et apports de la méthode Méthodes d’élaboration des coûts standard

103 103 104

3.2. Le bouclage du budget

108

LE BUDGET DES FRAIS GÉNÉRAUX

110

1. Le budget basé sur la relation client-fournisseur

113

2. Le budget base zéro (BBZ)

115

2.1. Les buts d’une opération BBZ

115

2.2. Les principes d’analyse du BBZ

116

2.3. Les étapes d’une opération BBZ Réaliser le diagnostic Rechercher des alternatives Présenter des budgets modulaires Consolider et décider

117 117 119 120 121

3. Le budget basé sur les activités (ABB)

122

LE BUDGET DES INVESTISSEMENTS

126

1. L’étude des projets

127

1.1. Détecter et poser correctement le problème

128

Table des matières

© Dunod – Le photocopie non autorisée est un délit.

1.2. Quantifier le projet Le montant total de l’investissement Les gains futurs La durée de vie

8

XIII

129 129 130 131

2. La sélection des projets

132

2.1. Projets en cours

132

2.2. Critère stratégique

132

2.3. Critère de rentabilité L’actualisation Le délai de récupération (DR) La valeur actuelle nette (VAN) Le taux interne de rentabilité (TIR) Le retour sur le capital employé (ROCE)

132 133 134 134 135 136

2.4. Critère obligatoire

137

2.5. Critère de risque La méthode des scénarios probabilisés L’analyse de sensibilité La méthode de Monte-Carlo

137 137 138 139

2.6. Autres critères

139

3. Le choix des projets

139

3.1. La décision

139

3.2 L’inscription au budget Budget des dépenses d’investissement Budget des recettes et des dépenses d’exploitation Budget de trésorerie

140 140 140 142

LE BUDGET DE TRÉSORERIE

143

1. Les éléments déterminants du budget de trésorerie

145

1.1. Le compte de résultat

145

1.2. Le besoin en fonds de roulement (BFR)

146

1.3. L’investissement

147

1.4. Le capital

148

1.5. Les dettes à long et moyen terme

148

XIV

CONSTRUIRE ET DÉFENDRE SON BUDGET

2. L’élaboration du budget de trésorerie

149

2.1. Le traitement des informations reçues Transformation des dates comptables en dates d’encaissement et de décaissement Les charges et produits traités en abonnement Le chiffre d’affaires export La TVA La fiabilité des prévisions

149 149 150 151 151 151

2.2. La prévision du solde de trésorerie

151

TROISIÈME PARTIE

La défense et le suivi du budget

9

DÉFENDRE SON BUDGET

157

1. Construire son dossier budgétaire 1.1. Le contenu 1.2. La forme 1.3. La validation

159 160 162 163

2. Préparer une argumentation solide et étayée 2.1. Élaborer son argumentation 2.2. Mieux connaître son interlocuteur Qui est-il? Quelles sont ses préoccupations? Vous écoute-t-il seulement? Quelles sont les règles du jeu?

164 164 167 167 168 169

2.3. Améliorer et peaufiner sa communication personnelle 3. Faire face aux objections

169 171

3.1. Développer des comportements de négociation Adopter une attitude positive Chercher le consensus

171 172 174

3.2. Argumenter pour influencer Les différentes formes d’une argumentation Le plan d’argumentation

176 176 179

3.3. Traiter l’objection Préparer sa réfutation Choisir son mode de réfutation

180 180 181

XV

Table des matières

10

SUIVRE SON BUDGET

184

1. La mesure de la productivité par les surplus

186

1.1. La technique de l’analyse de la productivité par les surplus

186

1.2. Processus où l’utilisation de l’analyse des surplus est précieuse

189

1.3. Précautions et difficultés de mise en œuvre

189

2. La prévision glissante 2.1. Intégrer les données internes et externes

191

2.2. Fixer le cap et tracer la route

192

2.3. Répertorier tous les risques et déterminer les dérives

193

2.4. Prévoir plusieurs scénarios

194

2.5. Faire des points d’avancement

194

2.6. Alerter et procéder aux corrections

195

2.7. Communiquer intensément

195

3. Le contrôle budgétaire et le tableau de bord 3.1. Le contrôle budgétaire Suivi de l’exploitation courante Suivi des investissements et des projets 3.2. Le tableau de bord © Dunod – Le photocopie non autorisée est un délit.

190

Les principes de conception L’alerte et l’anticipation Les actions correctrices

CONCLUSION

196 196 196 202 205 206 212 213 217

Annexes

1

LE CHIFFRAGE DE LA MASSE SALARIALE 1.1. Les informations de base

225 225

XVI

CONSTRUIRE ET DÉFENDRE SON BUDGET

1.2. La budgétisation Méthode globale de prévision de la masse salariale Méthode de prévision de la masse salariale poste par poste

227 227

2

PROGICIELS DE GESTION BUDGÉTAIRE (étude Progiforum 2007)

229

3

NOMENCLATURE DES FRAIS GÉNÉRAUX (enquête CEGOS 2000)

231

228

1.

Frais généraux administratifs

231

2.

Frais généraux commerciaux

232

3.

Frais généraux de production

233

4.

Frais généraux divers

234

4

CESSIONS INTERNES

235

5

ANALYSES D’ÉCARTS

238

1. 2.

Analyse de l’écart sur chiffre d’affaires dans une entreprise multiproduits

238

Analyse de l’écart sur coûts fixes

239

BIBLIOGRAPHIE

241

INDEX

243

INTRODUCTION

ue l’on soit dans le secteur industriel, des services ou non marchand, le principe d’élaboration et de mise en place d’un budget est toujours le même, seule la forme change. Mais que ce soit sur le fond ou la forme, des règles du jeu s’emboîtant, aussi nombreuses que les pièces d’un puzzle, doivent être respectées. J’ai voulu écrire un livre qui rassemble les différentes composantes du processus budgétaire et qui rappelle en même temps les procédures nécessaires pour les optimiser.

Q

Bien que parfois décrié au cours de ces dernières années, le budget demeure, tout comme le tableau de bord, l’outil de gestion par excellence. Aujourd’hui, on constate que toutes les entreprises ou organisations, à part peut-être encore celles du milieu artisanal, établissent un budget. Il ne faut jamais perdre de vue que les actionnaires, les dirigeants, les banquiers et toute la communauté financière observeront avec attention le contenu du budget de l’entreprise pour déterminer leur position. Un processus plan-budget efficace améliore la performance boursière. En effet, l’optimisation des pratiques d’élaboration budgétaire et de planification apporte au management: – une efficacité renforcée dans sa mission quotidienne; – une meilleure définition et application de la stratégie; – une pertinence accrue des prévisions; Elles permettent également à l’entreprise d’améliorer sa communication avec les investisseurs, de renforcer sa crédibilité et ainsi de gagner la confiance des

2

CONSTRUIRE ET DÉFENDRE SON BUDGET

marchés. La performance et donc la valeur de l’entreprise pour l’actionnaire s’en trouveront dopées. Un budget peut être considéré comme un ensemble cohérent d’hypothèses et de données chiffrées prévisionnelles, fixées avant le début de l’exercice comptable, décrivant l’ensemble de l’activité. Les données les plus importantes constituent les objectifs à atteindre, qui se doivent d’être ambitieux mais réalistes, définis à la suite d’un dialogue entre les responsables, quelque soit leur niveau hiérarchique. Le cadre prévisionnel du budget se dessine au travers de l’expression d’objectifs, d’un référentiel dans le temps et l’espace et à partir d’un ensemble de supports formels aidant à la communication au sein de l’entreprise. Il permet de clarifier les responsabilités, les performances, les moyens et les plans d’action en rendant cohérentes les actions des différents acteurs de l’entreprise dans le cadre de la décentralisation. Force est de constater malheureusement que, dans la pratique, l’effort réalisé pour produire le budget est rarement en rapport avec les bénéfices attendus. Beaucoup d’opérationnels ont des attitudes sceptiques sur le processus budgétaire annuel qu’ils trouvent trop lourd, trop rigide (ou pas assez !), trop long et surtout trop financier. Les attaques sont aussi variées que multiples. Quelques entreprises ont essayé de s’abstraire de l’exercice budgétaire classique. Des groupes, comme BP, ABB, Boréalis, Rhodia, Ikéa, Air Liquide en son temps… ont décidé de travailler par objectifs. Par exemple, chez BP, lorsque les résultats financiers consolidés des budgets élaborés par les unités opérationnelles ne correspondent pas à ceux attendus par la direction, les différentes unités se voient simplement fixer des objectifs ambitieux qui servent à combler les écarts. Cette procédure coupe court à tout arbitrage entre les différents niveaux de décision. Le reporting évalue ensuite la capacité de chaque unité à atteindre ses objectifs. Pour la plupart, les groupes ont abandonné la technique du «sans budget» et sont revenus à des pratiques plus classiques. D’autres entreprises ont utilisé la technique des budgets glissants. Certaines étaient motivées par des considérations économiques, comme les entreprises qui connaissent une forte croissance de leur chiffre d’affaires, notamment lorsqu’elles ont réalisé leur budget annuel après six mois d’activité, voire trois mois pour celles du secteur de la nouvelle économie. Sont également concernées les entreprises qui viennent de se créer et qui ne disposent pas d’historique et d’information sur leur marché. Cette technique s’applique également aux groupes dont la principale préoccupation est d’identifier les besoins en trésorerie des filiales, afin de les doter de moyens financiers nécessaires pour qu’elles assurent leurs activités. Enfin, quelques-unes se sont contentées d’utiliser des outils destinés à optimiser le processus budgétaire, comme le BBZ (le budget base zéro), ABB (le budget basé sur les activités), prévision glissante… Il apparaît parmi ces

Introduction

3

techniques que celle des prévisions glissantes est celle qui est privilégiée par les entreprises, mais sans que cela les ait conduites à supprimer le processus budgétaire classique. Certes, un processus budgétaire doit être optimisé au moindre coût pour répondre efficacement aux attentes des acteurs de l’entreprise. Le budget est en réalité un processus de décision. On considérera que ce dernier s’est correctement déroulé, si les décisions prises de part et d’autre sont communiquées aux intéressés dans des délais raisonnables, si les résultats du contrôle budgétaire mensuel confirment que ce sont les bonnes décisions qui ont été prises, et si les prévisions de résultats sont réalisées. La gestion budgétaire doit s’inscrire dans le cadre prévisionnel du contrôle de gestion, en quantifiant les objectifs, les options et leurs moyens associés, en développant la communication interne et la coordination des responsables, et en démontrant la cohésion globale des objectifs avec la stratégie. En structurant l’organisation générale, le processus budgétaire oriente les comportements. C’est une démarche d’amélioration des performances économiques et qualitatives. Une nouvelle approche de la gestion budgétaire exige d’appréhender l’environnement des organisations comme un tout complexe, faisant intervenir une pluralité de causes, en interactions constantes et itératives. Un budget décisionnel est la rencontre coordonnée entre différents protagonistes, autour d’un langage commun. Cela suppose au préalable que les modalités de construction budgétaire soient connues et maîtrisées. Toutes ces considérations m’ont conduite à rédiger cette nouvelle édition de Construire et défendre son budget, qui intègre quelques nouveaux outils et développe les pratiques les plus retenues actuellement.

© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit.

Dans la première partie, l’accent est mis sur l’intégration du plan stratégique et du budget qui se généralise dans les sociétés qui font des plans stratégiques. Les contrôleurs de gestion sont d’ailleurs conduits à participer de plus souvent aux processus de planification. Les variations rapides de l’environnement et les nombreux questionnements qui sous-tendent les simulations conduisent à la nécessité de développer des modèles de simulations qui pourront être utilisés à différentes mailles d’analyses. On privilégie la rapidité et donc une certaine globalisation. La technique du budget détaillé s’éloigne. Il ne s’agit plus de valoriser un groupe d’hypothèses pour voir où cela nous conduit, mais de faire évoluer la prévision au vu des évolutions internes et externes, de tester différents scénarios, de réaliser des analyses de sensibilité. Pour réaliser ces modèles, le contrôleur de gestion devra s’aider d’outils informatiques plus performants. Favorisée par les nouvelles technologies, l’offre1 1. L’annexe 2 présente une mise à jour des progiciels disponibles sur le marché.

4

CONSTRUIRE ET DÉFENDRE SON BUDGET

des fournisseurs de progiciels de simulations de gestion propose les outils nécessaires à la réorganisation des processus budgétaires. Elle est confirmée par les avantages obtenus par les acteurs ayant su très tôt engager cette évolution: un gain de temps et une plus grande réactivité qui autorise un suivi en temps réel – ou presque – des performances. Un workflow est particulièrement adapté à la gestion administrative dans le tertiaire ou dans tous les services administratifs. Il libère l’acteur pour des tâches à plus forte valeur ajoutée, et renforce la confidentialité. Il permet une maîtrise accrue des tâches liées à l’information, et une plus forte réactivité. On note un renforcement de la culture du progrès, que le plan et le budget sont conduits à intégrer. Pour E. Deming, le progrès ne repose pas sur le fait que «chacun fait de son mieux», mais sur la bonne orientation des efforts. En langage courant, on parle de PDCA. Ce cycle correspond en anglais à quatre étapes: plan, do, check, act:

Check

Do

Plan : prévoir, préparer, programmer un changement ou un essai et décider de la façon d’utiliser les observations, définir les indicateurs. Act

Plan

Do : faire, former et appliquer. Check : vérifier, contrôler les résultats, trouver les causes. Act : agir, mettre en œuvre le changement, tirer les enseignements, établir la règle et/ou recommencer.

Le cycle de Shewart ou cycle du progrès selon Deming

Ces quatre étapes constituent un management du type «en boucle fermée». Ce management mesure la compréhension complète de ce qui s’est passé, les conséquences des décisions, jusqu’à quel point elles auront été efficaces et comment il faudra soit standardiser les bonnes solutions, soit remettre en cause les méthodes insuffisantes en relançant un nouveau cycle. Cela se traduit par une déclinaison de la stratégie sous forme d’actions stratégiques, puis de plans d’action à court terme qui sont alors inclus dans le budget. Le suivi budgétaire s’oriente ainsi essentiellement autour de la réalisation de ces plans d’action. Il s’agit de forcer au progrès. Le pilotage par les plans d’action permet d’aligner l’ensemble de l’organisation sur la mise en œuvre de la stratégie. En décentralisant les objectifs et les plans d’action, on privilégie la réactivité et l’efficacité à la précision des analyses et des chiffres.

Introduction

5

Dans la deuxième partie, j’ai développé quelques outils permettant d’affiner la pertinence des budgets. La comptabilité en coût standard consiste à allouer les coûts fixes de l’entreprise au cours d’une période donnée, sur les unités produites durant cette période, et à enregistrer les résultats comme les coûts totaux de production. Elle permet aux managers d’analyser les résultats de chaque période en référence aux coûts standard pour n’importe quel produit. Tout projet d’investissement important comporte des risques, propres à remettre en cause son intérêt. Plusieurs techniques permettent d’optimiser les situations à caractère imprédictible, et les décisions qui doivent être prises en environnement incertain. La méthode de scénarios probabilisés aide à comprendre les différentes façons dont les événements futurs pourraient se produire. Ces scénarios présentent plusieurs représentations de la problématique que l’on désire étudier afin d’en permettre la communication, le travail en groupe, et de faciliter la prise de décision. L’analyse de sensibilité correspond à l’étude de l’impact sur les résultats d’un modèle des différentes sources de variations. Elle peut être utilisée pour déterminer les facteurs qui contribuent le plus à des variations significatives des résultats, la zone pour laquelle la variation du modèle est maximum, ainsi que les interactions entre ces facteurs. Lorsqu’il y aura un grand nombre de variables à prendre en compte, on utilisera la méthode de Monte Carlo afin de pouvoir intégrer l’effet de l’ensemble des composantes. Enfin, la troisième partie présente une évolution du suivi budgétaire courant. Il s’agit d’aller à l’essentiel, de ne pas se limiter à l’analyse du passé, et d’étendre les analyses à la recherche de la performance. Savoir mesurer la productivité globale est un problème central pour une entreprise, tant pour fixer des objectifs, sélectionner des projets, que pour évaluer ses performances. L’analyse budgétaire permet d’évaluer a posteriori la productivité globale par rapport au budget, mais on est généralement dépourvu d’outils pour apprécier la productivité réelle accomplie d’une année sur l’autre. L’analyse de la productivité globale permet de comprendre comment on progresse d’une année sur l’autre et quels sont les facteurs de progrès qui sont inscrits dans le plan, le budget. Faire des prévisions, c’est comme dessiner une carte pour le futur de votre entreprise. La prévision glissante qui sera revue tous les trimestres se focalise sur l’objectif à atteindre et adapte les objectifs et les moyens afin de se mettre en conformité avec le cap prévisionnel. L’objet de ces trois parties est de vous montrer qu’un budget est un tout. J’espère que vous trouverez dans les pages qui vont suivre de nouvelles motivations à vous intéresser à ce qui est pour moi la pierre angulaire de la gestion d’une entreprise ou d’une organisation. Au-delà de cette ambition, je souhaite que ce livre vous soit utile et profitable dans votre métier qui est aussi le mien…

PREMIÈRE PARTIE

LA PRÉPARATION DU BUDGET

1 LE PROCESSUS BUDGÉTAIRE

a maîtrise du processus budgétaire a pour avantage de permettre aux responsables de comprendre la construction du budget de leur entreprise. Pour pouvoir l’améliorer, le simplifier ou en renforcer la pertinence, ils doivent participer activement au processus budgétaire. Il est usuel de distinguer deux modes de travail quasiment opposés: le budget imposé et le budget proposé. Dans certaines entreprises, c’est la direction générale qui assigne à chaque responsable ses objectifs et les moyens de les atteindre: c’est un budget imposé. À titre d’exemple, un responsable maintenance se verra accorder une enveloppe budgétaire correspondant à une liste des travaux à conduire, incluant une liste intangible des fournisseurs avec lesquels il devra travailler. Sa responsabilité portera uniquement sur la bonne exécution des travaux et sur le respect du budget alloué. Cette façon de travailler, plus fréquente qu’on ne croit, consacre l’implication personnelle du dirigeant, mais a pour inconvénient de laisser peu d’autonomie aux responsables budgétaires et une place mineure à leur créativité. Le budget proposé procède d’un raisonnement inverse. Dans ce mode d’élaboration du budget, très couru dans les structures en création, chaque responsable fixe ses propres objectifs et détermine les moyens de les atteindre. Les limites de cette approche apparaissent lors de la consolidation des budgets individuels. Le premier inconvénient est que cette phase peut demander beaucoup de temps, notamment parce qu’il s’agit de concilier l’intérêt général et les préoccupations individuelles. Le deuxième inconvénient est que la non-

L

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LA PRÉPARATION DU BUDGET

acceptation d’un projet jugé important par son initiateur peut entraîner la démotivation de ce dernier. Les pratiques actuelles s’efforcent de concilier les avantages des deux méthodes décrites ci-dessus. Elles reposent sur des travaux préparatoires qui donnent aux responsables budgétaires des orientations tout en définissant leurs limites. Cette façon de faire permet aux intéressés d’affirmer leur capacité d’initiative avec un risque de déception réduit. Pour une certaine catégorie d’entreprises, les travaux préparatoires commencent dès la préparation du plan duquel découlera le budget, puisqu’il correspondra à la première année du plan. Pour d’autres, la préparation consiste à élaborer un prébudget. Ces travaux préliminaires sont formalisés dans une lettre de cadrage. Par la suite, une procédure budgétaire structure les différentes étapes de l’élaboration budgétaire. Au cours de leurs réflexions, les responsables opérationnels peuvent ainsi confronter en permanence leurs propositions qui déboucheront à terme sur des objectifs clairs et des plans d’action cohérents. Avant toute chose, il faut situer le budget dans la réflexion stratégique. Ce n’est qu’ensuite que l’on peut décrire les étapes du budget en précisant les différents rôles des opérationnels, de la direction et des contrôleurs de gestion.

1

LE LIEN AVEC LE PLAN

On peut définir trois grandes formes de prévisions (figure 1.1). L’approche corporate performance management CPM recouvre les méthodes, les indicateurs, les processus et les systèmes utilisés pour piloter, mesurer et comprendre la performance de l’entreprise. L’objectif final est d’adapter au mieux toutes les mesures opérationnelles à la stratégie d’entreprise et de faire apparaître leurs répercussions sur le résultat d’exploitation. Le processus planbudget en constitue la clé de voûte. ➤ Les prévisions à long terme à caractère stratégique (3 à 10 ans)

Il s’agit de préciser les grandes orientations pour l’entreprise, comme celles de devenir leader sur son marché, de se lancer dans un nouveau métier, de doubler le rendement des investissements ou encore d’augmenter de 50% le chiffre d’affaires… ➤ Les prévisions à moyen terme d’orientation plus opérationnelle

(1 à 5 ans) En général, une fois par an, l’équipe dirigeante se réunira pour des discussions approfondies, qui amèneront à fixer des objectifs quantifiables et évolutifs

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Le processus budgétaire

Analyses externes

Menaces et opportunités

Analyses internes

Forces et faiblesses

Planification stratégique

Planification à moyen terme

Planification à moyen terme

Plans par projets importants

Contrôle de l’atteinte des objectifs tentatifs Alternatives Risques et anticipation Plans d’action Objectifs à un an et moyen terme Allocation de moyens (investissement, notamment)

Contrôle des objectifs (fréquence au moins mensuelle) Processus budgétaire

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Orientations stratégiques Priorités Objectifs tentatifs Grands projets

Budgets annuels

Contrat de résultats et de moyens Tableau de marche, et base de contrôle

Figure 1.1 – Corporate performance management (CPM).

sur plusieurs années. On définira des priorités dans les programmes d’investissements et d’actions, ainsi que les ressources nécessaires. Cette réflexion doit aboutir à un compte de résultat prévisionnel pluriannuel. Celui de la première année devra être plus détaillé. ➤ Les prévisions à court terme impliquant l’engagement

des opérationnels (à 1 an) Le processus budgétaire contiendra des passerelles entre les objectifs à long et moyen terme et ceux à court terme. Il fixera des objectifs détaillés des indicateurs financiers comme le chiffre d’affaires, les charges d’exploitations, le

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LA PRÉPARATION DU BUDGET

bénéfice net, la trésorerie et le retour sur investissement. Il autorisera le niveau des différentes dépenses en matière d’équipement, de recherche et développement, de marketing et de promotion. L’entreprise aura soin de contrôler de façon permanente la cohérence des prévisions. Les responsables devront analyser les dérapages par rapport aux objectifs et décider d’actions correctrices. Chaque jour, managers et employés doivent appliquer des plans d’action déterminés par avance, tout en restant attentifs aux changements qui interviennent chez leurs clients, sur les marchés, dans la technologie, au sein de la concurrence… La réflexion repose sur l’indispensable nécessité de prendre à la fois du recul et de la hauteur. «Le nez dans le guidon» ne constitue pas une stratégie de gestion profitable à l’entreprise. En revanche, si la définition des objectifs est correctement élaborée, le processus budgétaire consistera simplement à traduire la première année d’un plan en différents budgets de fonctionnement. Déclinaison des prévisions dans un groupe industriel

Le système de planification comprend des objectifs préliminaires (OP), le plan et le budget. « Vision » Mission politique

Orientations stratégiques

Stratégie Programmes d’actions

Actions

OP (6 mois)

Plan (3 mois)

Budget (3 mois)

• Objectifs préliminaires Pour les dirigeants du groupe, c’est l’occasion de faire le point sur les différents marchés, produits, technologies et sur tous les problèmes y afférents. C’est également pour eux l’opportunité de rencontrer de façon informelle, ou non, les principaux dirigeants de leurs filiales en les informant des différents axes stratégiques et politiques qu’ils comptent mettre en œuvre. Pour la division, c’est un moment privilégié pour confronter les points de vue des membres des comités de direction avec ceux de la direction générale du groupe. Cette démarche engendrera plus facilement une synthèse cohérente et partagée en situant leurs objectifs dans le cadre de cette stratégie globale du groupe. • Plan Il se déroulera en trois étapes: – un examen des alternatives opérationnelles afin de mettre en œuvre une opération stratégique et de choisir les solutions optimales;

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Le processus budgétaire

– le chiffrage du plan qui devra tenir compte des programmes d’actions prioritaires, de l’environnement (PIB, inflation, coûts…), d’hypothèses internes à la division (marché, nouveaux produits…); – la mise en évidence des objectifs préliminaires, des programmes d’actions, des chiffrages et des inflexions par rapport aux plans précédents. • Budget Il reflétera les engagements (résultat/moyens) passés par les opérationnels à tous les niveaux de la hiérarchie.

1.1. Les pratiques actuelles Selon Hugues Jordan 1, «les outils mis en place qui fonctionnent en 1998 montrent un fort développement en direction des systèmes intégrés, cette évolution ne se vérifiant toutefois que dans les structures de plus de 500 personnes». Tableau 1.1 1976 (%)

1982 (%)

1986 (%)

1998 (%) (> 500 pers.)

1998 (%) (< 500 pers.)

Intégrés

28

28

42

65

45

Prospectifs

48

48

51

32

48

Rétrospectifs

24

24

7

3

7

Systèmes

Exemple de mise en œuvre d’un système intégré en milieu industriel

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Stratégie La planification porte sur: – les produits, les marchés, – le positionnement vis-à-vis de la concurrence, – le différentiel de rentabilité entre la gestion interne et la gestion externe. Plan à 3 ans Il repose sur un contexte économique évolutif, et non sur des hypothèses fixes: – définition des orientations en tenant compte des grands facteurs externes (hypothèses sur stratégies concurrentes), – modélisation simplifiée: trois états financiers (résultat, bilan, tableau des flux), – synthèse qui conduira peut-être à la remise en cause de certains aspects du plan par la DG.

1. Cahier de recherche «Planification et contrôle de gestion en France en 1998» par H. JORDAN, Direction de la Recherche Groupe HEC.

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LA PRÉPARATION DU BUDGET

Budget Il est établi selon un dossier budgétaire type pour l’année à venir: – prévisions commerciales et de production, – plan d’investissements suffisamment détaillé, – compte de résultat mensualisé, – tableau des flux trimestriels, – bilan simplifié, – élimination des opérations intragroupe. La consolidation budgétaire pourra également remettre en cause certains investissements industriels. Planification de production à long terme Elle porte sur un horizon de 6 à 9 mois et permet: • la répartition et l’équilibrage des charges entre les différentes usines sur la base des prévisions commerciales: – établissant le plan directeur de production et de vente, – décidant mensuellement l’équilibrage de la production (heures supplémentaires), – recalant les prévisions jusqu’à la fin de l’année, – aidant à l’élaboration du budget annuel; • l’établissement de macrodonnées pour les GPAO* d’usines. GPAO Elle se répartit sur trois niveaux: – lancement: calculé quotidiennement sur 2 à 3 semaines, – ordonnancement avec une visibilité de 1 à 2 jours, – programmation des lignes à l’heure. * GPAO: gestion de production assistée par ordinateur.

Les systèmes intégrés comportent un plan opérationnel pluriannuel étroitement lié au plan stratégique et au budget, ainsi qu’un outil de prévision dynamique à échéance annuelle et pluriannuelle. Toujours selon Hugues Jordan, les systèmes prospectifs se limitent la plupart du temps à un outil budgétaire à un an et à un outil de suivi mensuel des résultats, ainsi qu’à un plan stratégique peu formalisé et souvent déconnecté du budget. Dans les entreprises ayant adopté ce système, les objectifs stratégiques de l’entreprise ne sont pas toujours traduits en objectifs opérationnels pour les départements, les services et les salariés. Les personnes qui ont en charge la planification et celles qui exécutent le budget ne sont généralement pas les mêmes. La conséquence est qu’il n’y a pas ou peu de communication sur les résultats découlant de la stratégie, car le retour d’expérience se limite essentiellement à la performance opérationnelle à court terme. La performance est strictement évaluée sur la capacité à respecter les budgets prévisionnels et est mesurée dans le cadre du contrôle de gestion classique. Peu de

Le processus budgétaire

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managers ont un salaire lié à la réalisation des objectifs stratégiques à long terme. Au mieux, les salaires ont une partie variable basée sur les résultats annuels de l’entreprise. Les systèmes rétrospectifs n’incluent, eux, aucun outil prévisionnel. Si le budget est découplé de la stratégie 1 et n’apparaît pas comme le début d’un cheminement à long terme, il risque fort de se fonder sur une simple extrapolation des historiques ou une juxtaposition de visions locales sans aucun lien, réduisant le discours stratégique à une incantation.

1.2. La gestion contractuelle Seules quelques grandes entreprises du secteur marchand ou organismes publics d’envergure nationale pratiquent la gestion contractuelle afin de s’assurer: – du respect des engagements du plan de développement en clarifiant les différentes contributions de chacun; – de la performance de chaque centre de responsabilité budgétaire en analysant les résultats en fonction des objectifs et des moyens négociés et ensuite contractualisés; – de l’optimisation des coûts et des résultats.

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La gestion contractuelle s’appuie sur un plan de développement pluriannuel qui est décliné au niveau national, régional ou local. Ce plan est également relayé par des plans d’actions annuels associés aux plans de développement. La négociation autour des objectifs se fait à partir de l’analyse des performances de l’année écoulée, et du plan d’action institué pour l’année à venir. Les discussions et les propositions de contrat de gestion annuel entre les différents niveaux hiérarchiques sont également prises en compte. Le contrat de gestion correspond à un engagement mutuel, formalisé et signé, sur les objectifs et les moyens négociés entre deux niveaux hiérarchiques. Il doit comprendre: – des indicateurs qui engagent le niveau N vis-à-vis du niveau N + 1; – d’autres indicateurs eu égard à l’environnement du niveau N; – pour chaque indicateur, des objectifs et des moyens négociés pour l’année à venir. 1. Selon le magazine Fortune, moins de 10% des stratégies correctement formulées sont efficacement mises en œuvre. Cela est dû à: – des objectifs stratégiques insuffisamment traduits en objectifs opérationnels, – des ressources allouées sans rapport avec des objectifs stratégiques, – l’incitation des dirigeants et des managers à se préoccuper du court terme au détriment des objectifs stratégiques.

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LA PRÉPARATION DU BUDGET

Le système de contractualisation est un système arborescent, permettant à un responsable, d’agréger les indicateurs qui le concernent. Lorsque toutes les présentations de budget sont réalisées, le responsable du niveau N + 1 effectue la consolidation des propositions d’objectifs des niveaux N, et notifie ses objectifs. Celle-ci se traduit par un document d’une page, reprenant les indicateurs définis, les objectifs et moyens sur l’année à venir. La contractualisation est ensuite étendue au niveau des N – 1. Certains indicateurs du contrat de gestion du niveau N sont systématiquement retenus pour les niveaux N – 1. Ils se basent à la fois sur des critères de résultats et des critères de moyens. Il est intéressant d’évaluer les performances de chacun au moyen d’un entretien formel annuel. Tableau 1.2 – Contrat de gestion. Natures

Réel N – 1

1) CA total

Objectif N

Indicateurs

Réel N

Objectif N

CA région Nord CA région Ouest CA région Est CA région Sud

2) … Natures spécifiques:

Moyens

Indicateurs spécifiques:

Réel N – 1

Budget N

Signatures:

Coûts directs liés à l’activité Frais de personnel Incitations commerciales Frais de déplacement Coûts indirects communs

2

LES ÉTAPES DU PROCESSUS BUDGÉTAIRE

L’élaboration des budgets devrait tenir compte de l’interaction entre toutes les fonctions. Le processus budgétaire étant un processus itératif, chaque budget doit être établi en corrélation étroite avec les autres budgets. Pour que cette synchronisation puisse avoir lieu, elle suppose un travail d’articulation préparatoire qui oblige les intéressés à admettre, d’une part des remises en cause, d’autre part des modifications successives. De ce fait, il est normal d’avoir à «recommencer sa copie», alors qu’on pensait avoir remis une version définitive de son budget, a fortiori lorsque ce dernier a déjà été accepté.

Le processus budgétaire

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Déroulement du processus budgétaire dans un groupe bancaire

• Communication des objectifs stratégiques du groupe • Préparation des outils (procédure interne, calendrier, modélisation, programmes et équipements informatiques) qui permettront la réalisation matérielle du budget dans des délais brefs et pour un coût minimal. • Harmonisation des objectifs généraux de chaque établissement avec les objectifs généraux du groupe. Cette phase correspond à des échanges entre les directions des établissements et du groupe. Ils démarrent avec la lettre de précadrage, et aboutissent à l’envoi de la lettre de cadrage. • Élaboration du budget proprement dit par les responsables de centres de responsabilité budgétaire. Une organisation précise et des outils adaptés permettent la préparation de différents scénarios, et la finalisation rapide de l’un d’entre eux en fonction de la lettre de cadrage. La version définitive est adressée à la direction sous forme d’un dossier budgétaire. • Examen de la proposition: les propositions détaillées des centres de responsabilité budgétaire font l’objet d’une analyse et d’une consolidation par la direction des programmes et du contrôle de gestion, puis d’un examen par les directions des établissements et du groupe. • Approbation: l’accord de la direction du groupe sur le budget final est formalisé par une lettre de confirmation, adressée avant le début de l’exercice concerné. Il appartient aux directions des établissements de finaliser ensuite l’accord sur leurs budgets aux responsables des centres de responsabilité budgétaire. • Mensualisation: le budget fait l’objet d’un suivi mensuel, et sa programmation, au mois le mois, doit être adressée dans le mois suivant la réception de la lettre de confirmation.

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2.1. Définir le cadre budgétaire Une réflexion préalable à un niveau global a pour but de faire gagner un temps considérable dans la construction des budgets détaillés et le déroulement du processus budgétaire dans son ensemble. Elle permet, en effet, de valider les hypothèses générales qui serviront de fil conducteur aux travaux individuels. Il faut évidemment, autant que possible, éviter d’emblée des prévisions incompatibles avec les orientations d’ensemble. Cette réflexion est généralement conduite par le comité de direction, auquel devront participer le contrôleur de gestion, le responsable du service études et prévisions et le service marketing. Réussir l’organisation de cette étape préparatoire repose sur une approche en trois temps: – analyse de la conjoncture et prise en compte des objectifs pour l’année à venir; – construction d’un ou plusieurs scénarios aboutissant au choix d’un seul: le prébudget; – diffusion des éléments de cadrage vers les responsables opérationnels.

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LA PRÉPARATION DU BUDGET

Analyse de la conjoncture et prise en compte des objectifs pour l’année à venir Pour les entreprises qui possèdent un système budgétaire intégré, les objectifs globaux pour l’année à venir reprendront ceux énoncés dans la première année du plan à moyen terme, sauf évolution majeure. Pour les autres entreprises, la réflexion budgétaire commencera par une analyse de la conjoncture. L’analyse de la conjoncture portera à la fois sur: – des éléments internes, en identifiant dans son métier les forces et les faiblesses de l’entreprise; – des éléments externes, en isolant dans l’environnement les opportunités et les menaces sur son propre marché. Tableau 1.3 – Analyse de la conjoncture. Opportunités sur le marché Forte croissance Développement de l’externalisation Nouvelles technologies Barrières à l’entrée Sécurité de la distribution Contrat spécifique

Menaces sur le marché Concurrence sur le marché Arrivée de nouveaux entrants Réglementation Produit de substitution Monopole sur une matière première Concentration des fournisseurs

Forces de l’entreprise

Faiblesses sur l’entreprise

Bonne implantation sur le territoire Notoriété Orientée client Savoir-faire Capacité d’innovation Fiabilité et qualité des immobilisations Style de management

Prix élevés Produits en fin de vie Besoin de nouvelles compétences Mauvaise maîtrise des risques Ressources humaines insuffisamment qualifiées Système d’informations

Il s’agit en fait d’évaluer les facteurs clés de succès (qualité de service, notoriété, internationalisation…) de l’entreprise et sa performance relative, par rapport à la concurrence sur chacun d’entre eux, et de repérer les événements et les évolutions majeures affectant son secteur d’activité. Selon M. Porter, une entreprise subit l’influence d’un certain nombre de facteurs externes qu’il faut évaluer en termes de risques ou d’opportunités. 1

1. Matrice de M. Porter: Choix stratégiques et concurrence.

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Le processus budgétaire

Nouveaux entrants potentiels

Fournisseurs

Concurrence actuelle

Réglementation

Technologie

Clients

Substitution

Figure 1.2 – Analyse structurelle d’un secteur1.

Ces analyses permettront de déceler des potentiels de développement et de progrès, les objectifs et les plans d’action. Objectifs et plans d’action métier Forces

Faiblesses

À maintenir

Suivi

À diminuer

Progresser

Opportunités

Menaces

À saisir

À maîtriser, contourner Objectifs et plans d’action stratégiques

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Figure 1.3 – Définition des objectifs et plans d’action.

À l’issue de ce diagnostic stratégique, on définira les objectifs généraux de progrès attendus pour l’année (profits, nouveaux produits, qualité…), ainsi que les hypothèses relatives aux contraintes techniques internes ou externes.

Construction d’un ou plusieurs scénarios et choix d’un scénario: le prébudget Comme le disait Nietsche, «tout choix est un renoncement». Quel que soit le nombre de scénarios recensés, il faudra en choisir un seul qui constituera le prébudget. Comme on ne mettra personne d’accord, il devra être le plus proche des tendances observées et testées sur une modélisation budgétaire simple, car il a pour objectif d’évaluer les perspectives et la marche des affaires de l’organisation pour l’année à venir.

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LA PRÉPARATION DU BUDGET

Les principaux thèmes concernés seront donc étroitement liés aux caractéristiques essentielles de l’activité: – chiffre d’affaires: par produit/prestation, client, marché…, en volume et en prix, – taux de change, – organisation et périmètres de responsabilité, – effectifs: recrutements, départs, évolutions de postes, – masse salariale et politique de rémunération, – cours du dollar, – 35 heures, – etc. Les simulations du prébudget entraîneront une meilleure harmonisation des hypothèses et valideront leur incidence sur les grands postes de recettes et de dépenses. Tableau 1.4. Chiffre d’affaires (hors taxes) – Remises, ristournes

%

= Chiffre d’affaires net global

100

– Coût variable de production des produits vendus – Coût variable de distribution = Marge sur coûts variables* – Coûts fixes: • de production • de distribution • d’administration = Résultat opérationnel * Cette notion de marge sur coûts variables est expliquée au chapitre 3.

Néanmoins, toute la difficulté consistera à choisir le scénario le plus vraisemblable en tenant compte de versions élaborées dans un cadre haut, moyen et bas, chacun d’eux correspondant à des choix cruciaux de gestion pour les dirigeants. L’intérêt des chiffrages dits optimistes ou pessimistes est de pouvoir appréhender les gains ou les pertes extrêmes auxquels on peut se trouver confronté. Cette méthode est indispensable pour des sociétés travaillant sur des marchés très concurrentiels et soumis à des aléas, gérant des contrats spécifiques ou

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Le processus budgétaire

pour les industries à risque. Elle l’est également dans le cas de création d’une nouvelle activité ou d’un nouveau site… Dans la version haute, la notion de chiffre d’affaires ou de volume d’activité sera optimisée. Par voie de conséquence, on émettra l’hypothèse que les capacités de production (humaines ou matérielles) seront à leur rendement maximum, voire à saturation. Exemple de définition du cadre budgétaire dans une entreprise du secteur automobile

Analyse des performances du passé 1. Constat d’une baisse des prises de commandes, et donc du chiffre d’affaires: le résultat opérationnel a été actualisé à 11% du CA et le ROI* à 19%, alors que les objectifs étaient respectivement fixés à 13% et 22%. 2. Après enquête, il est ressorti des dysfonctionnements tels que: – turnover commercial, inexpérience de nos jeunes vendeurs, absence de motivation; – démarrage de l’activité marketing direct plus lent que prévu; – mauvaise politique de prix auprès des grands comptes; – le nouveau système de gestion de production génère moins de profits que prévu; – difficultés à ajuster le niveau de dépenses au niveau d’activité.

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Objectifs pour l’année future 1. Financiers: – résultat opérationnel à 15% du CA et ROI à 21%; – développement de nouveaux produits entrant pour 15% du CA; – renforcement du mix-produits sur les gammes les plus profitables; – accentuation de la pénétration du marché M. 2. Qualité: geler au niveau N – 1 le coût de non-qualité. 3. Formation (communication): – programme de communication/management à mettre en place; – développement de groupes de travail par secteur. 4. Gestion des actifs: stabiliser l’évolution du besoin en fonds de roulement à un niveau inférieur de 30% à l’évolution du CA. Hypothèses pour l’année future 1. Hypothèses d’évolutions économiques (externe): – principaux indices prix/salaires pour N + 1: salaires prévus (N + 1), prix de services divers, INSEE, matières premières…; – taux d’intérêt applicable; – taux de conversion des opérations à l’étranger en euros; – charges sociales (Assedic, retraite, SS). 2. Évolution des rémunérations par catégorie de salariés et des taux horaires de travail. * ROI: retour sur investissement.

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LA PRÉPARATION DU BUDGET

La version basse est a contrario pessimiste. Le chiffre d’affaires ou le volume d’activité a été volontairement sous-évalué, ce qui entraîne automatiquement des surcapacités. De ce fait, on commencera par restreindre tous les engagements de dépenses. Certaines grandes entreprises étudient l’impact d’un événement particulier (une catastrophe aérienne aura-t-elle une influence directe sur la stabilité financière de la compagnie? Le naufrage d’un pétrolier peut-il, ne serait-ce qu’indirectement, entacher les résultats d’une société pétrolière?). Entre ces deux extrêmes, la version moyenne correspond aux prévisions les plus réalistes. Seule cette hypothèse sera diffusée aux responsables opérationnels et leur servira à valoriser leurs objectifs et leurs plans d’actions pour l’année à venir.

Haute

Moyenne

Basse

n–1

n

n+1

n+2

n+3

Figure 1.4 – Les différentes hypothèses.

Dans le secteur pétrolier, trois scénarios sont systématiquement estimés autour de différentes hypothèses de hausse ou de baisse du cours du dollar. Le budget retiendra une hypothèse moyenne. Néanmoins, les autres cas de figure seront également envisagés de manière approfondie. Une autre façon d’intégrer l’incertitude consiste à introduire une loi de probabilité sur des variables sensibles. Chacun des trois scénarios (optimiste, normal, pessimiste) sera affecté d’un coefficient de probabilité plus ou moins important. Il serait imprudent pour une direction générale de ne pas prendre en compte tel ou tel risque qui pourrait bouleverser l’équilibre des comptes de la société. Le contrôleur de gestion contribuera à l’évaluation de la pertinence des scénarios proposés, et devra participer au choix de la solution retenue. Tout le monde comprendra que la difficulté du choix repose sur la production d’arguments objectifs qui plaideront en faveur d’un scénario, plutôt qu’un autre. L’absence d’arguments objectifs a pour inconvénient de rendre la décision arbitraire.

Le processus budgétaire

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Diffusion des éléments de cadrage vers les responsables opérationnels La lettre de cadrage est un document émis par la direction générale qui communique les principales données chiffrées devant apparaître dans les propositions budgétaires formalisées. Certaines directions générales diffusent en amont une lettre de précadrage indiquant les grandes orientations quelles souhaitent voir prises en compte dans les budgets des unités. Les thèmes suivants peuvent être traités dans la lettre de cadrage: 1. Le contexte: – développement ou maintien de l’activité, – création de nouveaux produits, d’une nouvelle activité, – maintien de la rentabilité actuelle. 2. Les types d’objectifs demandés aux différents acteurs: – réduction de la dette, – développement commercial, – vente des immeubles pour financer des investissements à l’étranger, – réduction des coûts de la sous-traitance avec un objectif de progrès gagnant-gagnant, – remplacement de tous les équipements de plus de vingt ans, à budget d’entretien constant, – saturation de l’outil de production, – productivité, – assurer les mutations technologiques en poursuivant l’effort de formation du personnel, – améliorer la trésorerie en maîtrisant les niveaux des stocks et le crédit client, – maîtriser les dépenses d’investissement à … millions d’euros, – limiter les coûts de structure à … euros. La lettre de cadrage décrit les pas de progrès sur lesquels l’opérationnel doit s’engager: pourcentage de progression du taux de service ou diminution de coûts à service constant. 3. Les types de ressources faisant l’objet des décisions budgétaires: les effectifs, les qualifications, le parc machines et les investissements.

2.2. Lancement du processus budgétaire Le lancement du processus budgétaire a lieu, le plus souvent, au cours d’une réunion dite de «lancement» à laquelle sont conviés tous les responsables des CRB 1. La préparation et l’animation de la réunion incombent à la direction générale et au contrôleur de gestion. 1. Centre de responsabilité budgétaire.

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LA PRÉPARATION DU BUDGET

Les exposés et les débats porteront sur l’analyse des faits marquants de l’année en cours (échecs et réussites), les axes prioritaires de développement de l’année future, les risques et les opportunités. Les moyens nécessaires (organisations, effectifs, investissements) seront évoqués. Les opérationnels prendront connaissance de la procédure budgétaire (calendrier des opérations, maquettes des documents à retourner). À l’issue de cette réunion, ne doit subsister aucun doute sur les objectifs et sur les travaux à produire. L’engagement des responsables concernés doit être total. La qualité de la réunion de lancement est une des conditions essentielles qui autorisera le raccourcissement du processus budgétaire.

2.3. Élaboration des budgets fonctionnels Les budgets fonctionnels sont élaborés par les responsables des CRB. Un CRB ou centre de responsabilité budgétaire doit avoir les caractéristiques suivantes: – un responsable opérationnel clairement identifié, – une structure à caractère permanent, – une mission se traduisant par des objectifs de résultats, – des moyens en rapport avec les objectifs, – une capacité d’autonomie vis-à-vis du niveau supérieur hiérarchique et une capacité d’arbitrage vis-à-vis du niveau inférieur, – la capacité à élaborer son propre budget. Les budgets fonctionnels sont donc construits par les responsables de CRB, éventuellement assistés par leurs proches collaborateurs 1. Leur réflexion commence par l’analyse des performances réalisées au sein du CRB au cours des premiers mois de l’année, afin d’en ressortir des enseignements et de nouvelles orientations en s’appuyant, bien entendu, sur les documents du contrôle budgétaire transmis par le contrôleur de gestion. Une fois les résultats du CRB projetés sur la fin de l’année, le responsable définira les nouveaux objectifs de son centre qui contribueront à la réalisation des objectifs du budget global pour l’année suivante. Il structurera et formalisera le plan d’action qui lui permettra d’atteindre ses objectifs. Formaliser un plan d’action, c’est identifier la personne en charge de conduire l’action, décrire en quoi consiste l’action, préciser sa durée de réalisation probable, lister et quantifier les moyens humains ou matériels correspondant à son bon déroulement. On distingue communément trois catégories de budgets: – les budgets proportionnels au volume d’activité (cycle vente/production), 1. Contrairement aux autres étapes du processus budgétaire, cette phase d’élaboration des budgets fonctionnels sera développée au chapitre 3.

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Le processus budgétaire

– les budgets d’investissements (liés, mais non proportionnels à l’activité), – les budgets de frais généraux (liés, mais non proportionnels à l’activité). Il existe deux types de budgets «déterminants»: le budget des ventes et le budget de production. Tous les autres budgets dérivent des deux premiers (approvisionnements, main d’œuvre, sous-traitance, coûts de distribution, coûts de structure en support à la production et à la commercialisation, frais généraux de siège, investissements et trésorerie). C’est l’ensemble de ces budgets qui constituera le budget global de l’organisation. Dans une société industrielle, la première phase du processus budgétaire consiste à réfléchir sur le programme des ventes. De celui-ci et de la politique de gestion des stocks résultera le programme de production. Après homologation, on chiffrera les moyens commerciaux et les moyens de production. Parallèlement, on entérinera les frais de structure générale et on en valorisera les différents budgets de fonctionnement. Dans une société de services (activité de négoce, service après-vente, assurances…), le processus sera le même, à la différence près que le programme des ventes et celui de la gestion des stocks détermineront un programme d’approvisionnement ou un programme des dossiers à traiter. Après validation, on valorisera les moyens commerciaux, les coûts d’achat et les coûts de main-d’œuvre.

Charges de production

Comment on va le vendre Frais variables Frais fixes

Charges de structure

Charges de commercialisation

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Ce qu’on va vendre

Stocks

Stratégie

Ce qu’on doit produire

Ce qu’on doit investir

Comment on va le produire (MO, approvisionnement, sous-traitance) Frais fixes

Comment on va le financer Capitaux Trésorerie

Comment on va administrer Frais variables Frais fixes

Résultats Quelles sont les marges ?

Figure 1.5 – Enchaînement des budgets.

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LA PRÉPARATION DU BUDGET

Dans une organisation du secteur non marchand, le processus budgétaire prendra en compte les revenus éventuels, mais intégrera aussi le montant des subventions potentielles. Il y aura lieu ensuite de dimensionner en conséquence les moyens humains et matériels nécessaires pour traiter les opérations courantes et mener à bien les projets. Ce n’est qu’à l’issue de ces travaux préparatoires que le responsable chiffrera enfin sa proposition budgétaire. Cette dernière se fera sous la forme d’un budget détaillé, établi dans le respect de la lettre de cadrage, et sera soumise à l’approbation de la direction générale ou des administrateurs. Il appartient au responsable de présenter et de défendre sa propre proposition budgétaire. Un des rôles des contrôleurs de gestion est de piloter la procédure en s’assurant de son avancement, et en agissant préventivement pour faire respecter les dates de transmission des budgets. Il devra également offrir un appui technique aux responsables, afin d’éviter toute erreur de compréhension ou d’interprétation.

2.4. Consolidation des budgets et arbitrage budgétaire Une autre fonction du contrôleur de gestion est aussi de vérifier la cohérence des budgets proposés, au fur et à mesure de leur transmission. Rappelons que la procédure budgétaire est une procédure itérative qui suppose donc un travail d’équipe. Elle sera limitée dans le temps, car trop de versions différentes impliqueraient une perte de temps «productif» et des risques de confusion. Budget des ventes • Développement ventes produit A • Lancement produit B • Pénétration du marché allemand

Budget de production

Budget des charges de commercialisation

Budget des investissements

Budget de trésorerie

Figure 1.6 – Procédure itérative.

Le processus budgétaire

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Une fois que les différentes propositions de budget seront collectées auprès des services concernés, le contrôleur de gestion aura à les consolider. Il présentera ensuite une synthèse budgétaire globale sous forme d’un compte de résultat évaluant la rentabilité prévisionnelle de l’entreprise. À son tour, le trésorier élaborera le budget de trésorerie qui montrera comment l’entreprise financera ses choix budgétaires. Leurs travaux seront transmis à la direction générale pour approbation. En cas d’insuffisance des résultats, par exemple, la direction générale peut être amenée à modifier les prévisions financières à la hausse, à demander de diminuer les effectifs de production, de réduire l’augmentation générale des salaires ou de limiter les investissements… Tous les responsables des CRB concernés devront alors revoir leurs objectifs et modifier leurs plans d’action. Or, ces révisions doivent se faire dans un laps de temps souvent très court, d’où la nécessité impérative d’avoir au préalable une bonne préparation budgétaire, afin d’éviter de dégrader la pertinence du budget. Dans les entreprises d’une taille significative, et davantage encore dans les groupes ou les organisations publiques à obédience nationale, les réunions d’arbitrages budgétaires ont lieu à plusieurs niveaux, chacun des échelons hiérarchiques pouvant demander un effort supplémentaire. Là encore, si le cadrage budgétaire a été correctement établi, les arbitrages en seront facilités. Après ratification de la direction générale, la version retenue sera diffusée largement et promptement, afin que les responsables des CRB connaissent leurs engagements définitifs. Toutes ces opérations doivent être effectuées avant la fin de l’exercice afin de pouvoir démarrer le nouvel exercice sur des objectifs connus.

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Notification du budget dans une société de produits de grande consommation

Elle se fait sous la forme d’un document écrit et signé émanant de la direction générale. Il indique les objectifs fixés et les ressources allouées pour les atteindre. Ce même document peut indiquer les règles d’engagement et de suivi des budgets: – opérations nécessitant une autorisation de dépenses (campagnes publicitaires, investissements, mise en place anticipée d’effectifs avant la mise en fabrication d’un nouveau produit); – rythme de suivi: mensuel, trimestriel, prévision; – principaux indicateurs de performance retenus pour le suivi.

Ce budget irrévocable peut être assimilé à un «contrat» passé entre la direction générale et les directions opérationnelles. Il est la «référence» par excellence. En conséquence, aucune révision ne doit avoir lieu en cours

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LA PRÉPARATION DU BUDGET

d’exercice, sauf événement externe exceptionnel. En effet, entériner une modification budgétaire c’est oblitérer: – le «contrat» en tant qu’étape dans la mise en œuvre de la stratégie de l’entreprise, – la capacité à réagir aux dérives, – la cohérence entre les moyens et les objectifs, – l’assiette d’évaluation des performances des managers. Les évolutions constatées en cours d’année seront tout de même prises en compte, mais dans un document connexe au budget (prévision). Seuls des événements exceptionnels ou des changements déterminants peuvent amener à le revoir, comme par exemple l’effet d’une nouvelle réglementation (instauration ou suppression d’une aide fiscale pour l’achat d’un véhicule), d’un déréférencement d’une centrale d’achat lors de négociations annuelles, d’une crise majeure (ESB)… qui entraîneront une perte significative de chiffre d’affaires. Conserver le budget dans sa forme initiale n’a plus de sens et peu même se révéler dangereux dans la mesure où les écarts qui seront constatés sont tels, qu’ils démotiveront toute l’entreprise. Dans ce cas précis, le budget recalé deviendra la nouvelle «référence». A contrario, certaines entreprises, qui connaissent des explosions de chiffre d’affaires (start-up), sont souvent obligées de pratiquer la prévision glissante 1. Elles n’élaborent pas de budget, et travaillent donc sans référence annuelle, mais refont un estimé tous les trois mois, sur les quinze ou dix-huit mois à venir. Elles pilotent ainsi leurs résultats sur les indicateurs clés de leur métier.

1. Voir chapitre 10, section 2.

2 L’APPORT DU CONTRÔLE DE GESTION

hierry Morin 1 a utilisé la métaphore suivante pour décrire le rôle clé d’un contrôleur de gestion 2: «Tout au long de la course, le copilote fait défiler la feuille de route (le budget), préparée avant la course avec le pilote et le chef d’équipe. Il reporte les écarts qu’il observe et analyse (les tableaux de bord). Il s’assure également que son véhicule respecte en tout point le règlement de la course (respect des procédures).» L’enquête 3 menée par Hugues Jordan conclut à un fort accroissement de la coopération entre contrôleurs de gestion et opérationnels, a fortiori lors de la mise en place du budget annuel. D’après cette étude, la tendance ne fera que se renforcer au cours des années à venir. Les opérationnels attendent beaucoup d’un contrôleur de gestion. Au-delà de toute considération hiérarchique, ils souhaitent tout d’abord qu’il ne se limite pas à être un simple demandeur d’informations mais qu’il devienne un véritable interlocuteur. Ce faisant, son profil devrait, outre des compétences techniques indéniables, s’enrichir d’une capacité à comprendre les différents métiers de ses interlocuteurs. Le dialogue avec les opérationnels s’en trouverait facilité. Ils attendent de sa part un rôle de conseil, à même, par exemple, de les aider à préparer une argumentation pour défendre leur propre budget ou à analyser leurs résultats mensuels…

T

1. Directeur général adjoint de Valéo. 2. Éditorial de la revue Échange n° 153 de mars 1999. 3. Cahier de recherche, «Planification et contrôle de gestion en France en 1998» par H. JORDAN, Direction de la Recherche Groupe HEC.

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LA PRÉPARATION DU BUDGET

Tableau 2.1 – La coopération contrôleurs de gestion/opérationnels. 1976 (%)

1982 (%)

1986 (%)

Analyse des résultats et des écarts

7

15

Compte rendu et explication des résultats

6

Propositions d’actions correctrices

7

1998 (%) > 500 pers.

< 500 pers.

12

46

35

11

22

43

30

9

18

50

42

Autrement dit, ce serait un «régulateur 1» dont l’action consisterait à renforcer en permanence l’interactivité et la cohérence entre tous les responsables de CRB. Le contrôleur de gestion remplit en fait plus ou moins ces rôles suivant le niveau hiérarchique auquel il est rattaché. Dans certaines entreprises, son expertise budgétaire est avant tout au service de sa direction. Lorsque les opérationnels sollicitent son aide, il se contente de faire part de ses réserves, mais n’intervient pas directement dans leurs propositions. C’est au responsable de la défendre, et à lui seul. C’est la direction qui arbitrera. Au contraire, dans d’autres sociétés, la direction générale souhaite que le contrôleur de gestion descende dans l’arène en s’impliquant beaucoup plus dans la construction des propositions pour assurer une plus grande cohérence de gestion. Les raisons en sont hautement pragmatiques. Les dirigeants désirent renforcer un esprit d’équipe et que le contrôleur de gestion soit un liant entre eux et les opérationnels. Dans la pratique, cela amènera le contrôleur de gestion à savoir «exporter son savoir-faire» vers les opérationnels. Son but doit être non seulement de les former à la compréhension de l’outil de gestion, mais également de faire en sorte qu’ils se l’approprient. Ainsi le contrôleur de gestion, en leur transmettant le cadre qui permettra de réaliser leur propre budget ou leur tableau de bord, renforcera leur implication dans le pilotage et le fonctionnement de leur propre unité. Face aux attentes des dirigeants et des responsables opérationnels, le contrôleur de gestion devrait donc remplir trois rôles: ceux de technicien, conseil et animateur.

1. Certains sont allés jusqu’à inventer le néologisme de «facilitateur» pour exprimer cette idée-force.

L’apport du contrôle de gestion

1

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UN RÔLE DE TECHNICIEN

Sans conteste possible, le contrôleur de gestion est avant tout un technicien du système budgétaire, c’est-à-dire qu’il sait concevoir et entretenir le système d’informations de gestion aussi bien en termes de délais que de qualité (fiabilité et signification). Quand il met en place des systèmes d’information (dont le but est d’optimiser les moyens techniques, humains et financiers à court, moyen et long terme), il est aussi le garant de leur bon fonctionnement et doit s’assurer constamment que l’information qu’il met à disposition est utile. Pour mieux motiver, il suffit de responsabiliser. Les dirigeants veulent pouvoir décliner plus finement les objectifs de gestion pour mieux responsabiliser les opérationnels. Pour obtenir ce résultat, le contrôleur de gestion aura à réguler le système d’objectifs de l’entreprise afin d’assurer le déploiement des objectifs stratégiques. La première année du plan sera détaillée dans le cadre du budget. Les objectifs budgétaires seront traduits sur le terrain en termes de normes, de procédures, de nomenclatures, de gammes… Il aura à vérifier que les résultats obtenus sont en phase avec la stratégie de l’entreprise. En contrepartie, les dirigeants veulent aussi être alertés plus tôt des dérives de trajectoires. Par voie de conséquence, il sera indispensable de mesurer avec une plus grande précision les effets des multiples prises de décision, et être à même d’interpréter un plus grand nombre de résultats. Tout ceci implique au final que le contrôleur de gestion devra travailler plus vite et plus efficacement. Il n’a aucune chance de réussir si on ne lui en donne pas les moyens (en dehors d’un pouvoir d’investigation). Ceux-ci devront lui permettre d’une part de modéliser les données de l’entreprise, d’autre part de bénéficier d’un outil informatique de premier plan.

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1.1. Modélisation économique et financière La mise au point d’une modélisation économique et financière de l’entreprise a pour but de permettre à toute personne autorisée de simuler les hypothèses les plus vraisemblables. Le directeur général d’une société dans le domaine de l’électronique témoigne:

«Le système de gestion actuel doit être une aide à la décision, une aide à l’anticipation du futur, une aide à la réactivité parce qu’en principe nous ne pouvons pas tout anticiper. Nous ne savons pas toujours être réactifs lorsque les événements ne se déroulent pas comme prévu. L’intérêt de la simulation est de prendre en compte des hypothèses, qui peuvent paraître invraisemblables à un instant t, mais se concrétiser dans le futur. La simulation nous entraîne à mieux réagir dans n’importe quelle situation, et à n’importe quel moment et dans n’importe quel environnement.»

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LA PRÉPARATION DU BUDGET

Les composantes d’un modèle Un modèle de gestion est composé des éléments suivants. ➤ Les variables de décision

Elles représentent les critères choisis pour analyser la pertinence d’une décision. Ce sont les premiers éléments à définir pour construire un modèle. Il s’agira par exemple de la valeur actualisée rapportée à l’investissement pour une décision d’investissement, ou de la progression du bénéfice net par action pour une acquisition d’entreprise. Dans des cas fréquents et plus complexes, on fixera plusieurs variables de décision et on définira une «région», c’est-à-dire des fourchettes admissibles pour chacune de ces variables correspondant à l’acceptation de la décision. Par exemple, les conditions d’acceptation d’un projet peuvent être d’atteindre: – une valeur actualisée par euro investi supérieure à 2; – un bénéfice par action jamais en repli et dépassant 10% de croissance annuelle à partir de l’année 3. ➤ Les variables d’entrées

Elles correspondent aux variables qui ont une influence sur les variables de décision. On devra définir: – les variables externes, décrivant l’environnement, comme le taux de change des monnaies, le cours des matières premières, l’évolution d’un marché…; – les variables d’action qui représentent les choix qui dépendent du décideur, comme le montant de l’investissement publicitaire pour le lancement d’un produit, la définition technique du produit représentée par sa gamme et sa nomenclature de production, etc. Le nombre de variables retenu détermine fortement la complexité du modèle. Ainsi, on décidera s’il est licite de raisonner toutes références de produits confondues, ou si on doit distinguer des familles. De même pour les marchés, on choisira le niveau d’agrégation géographique, des canaux ou des clients. Il n’y a pas de réponses absolues. Cependant, chaque fois qu’il est impossible d’être pertinent dans une estimation des variables concernant une sous-catégorie à l’intérieur d’une catégorie de niveau supérieur, il convient de remonter et de s’en tenir à cette catégorie supérieure. Elle sera choisie comme niveau de définition des variables.

33

L’apport du contrôle de gestion

➤ Les relations

Enfin, le modèle décrira les relations permettant de calculer les variables de décision à partir des variables d’action et des variables externes. Ces relations peuvent être de simples calculs comptables, ou représenter des interdépendances plus complexes. Par exemple, la part de marché pourra être choisie comme variable de décision ou bien elle sera calculée à partir d’un sous-modèle économétrique la reliant au prix de vente et au niveau d’investissement publicitaire. Cela implique évidemment que l’on ait su modéliser une telle relation, à partir de statistiques sur les lancements de produits comparables réalisés dans le passé, par exemple. Variables externes Relations Variables d’action

Variables de décision

➤ La définition et la navigation

Le travail sur la définition des relations et des variables constitue le cœur même de la tâche du concepteur du modèle. Celle-ci doit se faire à partir de la prise en compte des questions que l’on veut que le modèle éclaire.

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Si une problématique clé est l’évolution d’un coût de revient de produits existants, on aura soin de le modéliser sous la forme d’une relation introduisant explicitement les rendements de la main-d’œuvre, les taux de rebuts, ainsi que les indices des coûts des familles de matières correspondant à au moins 80% des coûts totaux. Si la problématique est l’impact de l’introduction d’un nouveau produit, on le constituera en famille isolée, et on modélisera l’évolution du mix en paramétrant par une variable (qui pourra être considérée comme sensible) le taux de cannibalisme avec des familles partiellement substituées. L’ergonomie du modèle devra permettre de naviguer le plus simplement possible, en distinguant des blocs de variables correspondant à des domaines différents. On pourra, par exemple, constituer le bloc des prévisions de ventes, avec les prévisions par familles, mais préservant la possibilité d’entrer des prévisions à un niveau global, le modèle se chargeant de proposer un éclatement de la prévision globale à la famille sur des bases historiques. On pourra aussi créer le bloc des prix d’achat des familles de matières, en distinguant celles dont le cours est dépendant du Dollar ou de la Livre ou du Yen, et

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LA PRÉPARATION DU BUDGET

introduire comme variables les cours en devises, ainsi que les taux de change. ➤ Les scénarios

Les relations ayant été modélisées, la définition de l’ensemble des valeurs des variables externes et des variables d’action correspond à un scénario. Le scénario sera jugé par les valeurs de variables de décision établies par le modèle. On pourra donc valider ou non les décisions représentées par les variables d’action. Il est important de rester complètement lucide et critique sur les choix faits sur les variables d’action et les variables externes. Ces variables sont un ensemble de prévisions, d’hypothèses et d’objectifs, et ne sont pas, pour la plupart, des valeurs certaines. On étudiera plusieurs scénarios correspondant à des alternatives, c’est-àdire définis par un autre choix de certaines variables d’action. Par exemple, réduire l’investissement industriel en acceptant une augmentation du prix de revient, augmenter la publicité pour augmenter la part de marché, etc.

Les choix de modélisation ➤ L’information décisionnelle

Le modèle est spécifique à chaque entreprise ou du moins à chaque type d’entreprise. Ayant pour but, notamment, de conduire à un travail sur les objectifs des grandes fonctions de l’entreprise il se doit d’être construit en modules correspondant à ces grandes fonctions. Le modèle doit traduire les interdépendances majeures entre les différents modules mais doit laisser une certaine autonomie à chacun d’eux afin qu’ils puissent être exploités isolément. Après un certain nombre d’itérations de chaque module exploité de façon autonome, ils sont ensuite intégrés les uns aux autres pour des simulations d’ensemble. Dans une entreprise classique de production et de commercialisation de biens de grande consommation, on a généralement un module marketing et commercial, un module technologique et production, et un module économique et financier. Chaque module doit avoir, à son niveau, des indicateurs de performance susceptibles d’éclairer le responsable dans le montage du plan et du budget.

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L’apport du contrôle de gestion

Tableau 2.2 – Les indicateurs de performance par module. Module marketing et commercial

Module technologie et production

Module économique et financier

Croissance des ventes en € courants ou à prix constants, (ou en volume) % d’évolution des prix de ventes Évolution des marges contributives par cause (évolutions des volumes, des coûts, des prix de ventes et du mix-produit) Incidence des nouveaux produits, sur les ventes et les marges Marges/famille après affectation des frais directs commerciaux Évolution de frais de structure comparée aux activités

Indices des prix d’achat par grandes catégories de matières Évaluation des charges des usines, en effectifs et unités d’œuvre (avec comparaison/capacités existantes) Productivité introduite par les services achat (changement de fournisseurs ou de composants) Synthèse des plans de productivité Évolutions des rendements, taux de rebuts, taux de retouches Évolution des prix de revient par famille, par site de production Incidence de la productivité directe, de l’évolution des frais de période, de l’absorption de frais par la variation des volumes Investissements par but économique, par famille de produits, par site Évolution des frais de structure et comparaison aux activités

Comptes d’exploitation /familles de produits /marchés, et global Évolution du fonds de roulement, avec les variations de besoins et de ressources Mesure de la productivité globale, et son recoupement avec les impacts attendus des plans identifiés et des grands projets Évolution des frais généraux et comparaison aux activités

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➤ La maille d’analyse

Une caractéristique précieuse d’un modèle est l’aide à la prévision qu’il peut apporter. De façon générale, le modèle pourra avoir des possibilités d’agréger ou désagréger les données, c’est-à-dire soit d’entrer les valeurs à un niveau fin (référence produit), le modèle fournissant la synthèse au niveau supérieur (famille de produits), soit d’entrer la valeur à un niveau global (famille de produits), le modèle décomposant en niveaux inférieurs (référence produit). Les scénarios définis par le management pour la réflexion ayant leur place lors de la planification à moyen terme, le sont sous une forme relativement globale, qui s’accorde mal avec une modélisation construite de façon trop détaillée. Les managers souhaitent pouvoir simuler facilement des scénarios alternatifs dans le but soit d’étudier des variantes décisionnelles, soit d’effectuer des analyses de risque. Par exemple, les produits seront définis à la famille de produits qui correspond à l’agrégat à l’intérieur duquel, dans le cadre du plan, il n’est pas pertinent de faire l’hypothèse de l’évolution du mix. Les prévisions de vente et de prix de vente seront alors entrées à cette maille. Les clients seront différenciés

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LA PRÉPARATION DU BUDGET

dans la mesure où un changement de politique commerciale est un enjeu du plan. De même, le modèle des coûts directs de revient du plan se limitera à une formule de la forme: – Coût MOD = Nb d’heures ¥ Rendement ¥ Taux horaire moyen; – Coût matières (et consommables) = (1 + Taux de rebut) ¥ (Part matière catégorie 1 + Part matière catégorie 2 + … + Part matière catégorie n). Faute de simplifications dans le modèle, les variables à introduire pour monter une alternative seraient trop nombreuses et rendraient l’exercice excessivement lourd. Le concepteur de modèle devra faire des choix simplificateurs. Il est important que celui-ci anticipe le type de questions que les managers poseront, non seulement pour que le modèle puisse fournir les analyses pertinentes, mais aussi pour être apte à simuler sans lourdeur les alternatives demandées. Le budget, parce qu’il a aussi pour but d’établir une base de contrôle et d’analyse des réalisations, sera le plus souvent construit sur une maille fine reproduisant fidèlement la diversité réelle. Il sera monté à la maille de la référence de produits et sera mensualisé. De même, les prix de revient seront construits pour chaque référence à partir des gammes et nomenclatures de production. Celles-ci font appel à des coûts de section et à des coûts unitaires de matières premières. Le nombre de variables d’entrées de façon indépendantes dans le budget est donc considérable.

1.2. Les outils informatiques Les outils informatiques facilitent sans aucun doute la mise en œuvre de la construction budgétaire en: – favorisant l’autonomie et l’implication des opérationnels; – simplifiant les simulations en phase d’élaboration budgétaire; – permettant un suivi et des restitutions adaptées aux besoins des opérationnels; – simplifiant l’analyse des résultats et mettant en évidence l’origine des phénomènes; – préservant l’intégrité des structures budgétaires et la sécurité des données. Pour élaborer de manière plus rationnelle les budgets et les tableaux de bord, les contrôleurs de gestion ont développé des modèles d’analyse à partir de différents logiciels 1. 1. Le choix du logiciel par le contrôleur de gestion devra bien entendu être en adéquation avec le matériel informatique dont il dispose.

L’apport du contrôle de gestion

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Les tableurs Dans les petites structures, où les travaux budgétaires sont souvent centralisés par une personne, les tableurs sont les outils traditionnels de la production budgétaire. L’inconvénient, c’est qu’ils atteignent rapidement leurs limites dès lors qu’il s’agit de concevoir des systèmes complexes d’élaboration, de simulation ou de consolidation budgétaire, dans un environnement multiutilisateurs. Dans une entreprise de taille plus significative, l’utilisation d’un tableur est à déconseiller, car il monopolise trop souvent le contrôleur de gestion dans la récupération, l’intégration et la saisie des données et les validations de cohérence. En conséquence, son usage va plutôt le pénaliser en le détournant du cœur de son métier, à savoir la définition des règles de gestion, l’analyse et la simulation des différents scénarios possibles, l’interprétation des résultats ou encore la réflexion sur les actions correctrices. En outre, tous les modèles sur tableurs sont rigides par essence même. Un ensemble d’applications monopostes développées sur tableurs empêche une consolidation efficace, le partage des règles de gestion, des informations, ainsi que le contrôle des différentes étapes du processus budgétaire. Enfin, mettre à jour, maintenir ou modifier ces modèles nécessitent la plupart du temps plusieurs semaines de programmation de macros.

Les progiciels de gestion budgétaire

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Beaucoup de groupes et de grosses PME se sont dotées d’un système intégré assurant une moindre consommation de ressources et l’utilisation des informations les plus récentes. Par exemple, Ford en passant d’un système de planification décentralisée par pays sur tableurs (19 pays, 5 systèmes de planification budgétaire, 5 méthodes de calcul de prévisions) a réduit le temps consacré au budget de 2 et 7 JH de travail/pays à 1 JH/pays. Une plate-forme coordonnée et partagée apporte la rapidité et la flexibilité nécessaires à la prise en charge des prévisions continues. La puissance de fonctionnalité procure la souplesse idéale pour élaborer, comparer et évaluer différents modèles économiques, scénarios, conditions et hypothèses. Un tel outil facilite: – la diffusion automatique des objectifs stratégiques à travers n’importe quel profil, par exemple les chiffres réels de la période précédente ou la répétition projetée, et dans de multiples dimensions, comme les produits, les clients, les territoires ou les périodes, sans avoir à définir de règles de gestion particulières; – l’analyse multidimensionnelle qui permet de comparer les objectifs fixés aux équipes et aux individus et les chiffres réels actuels, les historiques et les

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LA PRÉPARATION DU BUDGET

points de référence externes comme les indices économiques. Le système prend en charge les devises, les ajustements et les hiérarchies multiples, de même que les principes comptables qui gouvernent la consolidation; – une vue unifiée des principaux indicateurs permettant de consacrer son temps à l’analyse et à la prise de décision. Les indicateurs de performance peuvent être puisés dans diverses sources et réintégrés au sein d’une source de données centralisées, ce qui renforce la cohérence de l’information financière. Les indicateurs de suivi peuvent être aisément définis, configurés, partagés et reliés; – la communication de la stratégie grâce à la création automatisée de milliers de plans personnalisés, alimentés si nécessaire avec des chiffres réels, pour chaque entité. Ces plans ont le même langage commun, mais restent néanmoins propres à chaque département. Temps Zones Pays A Devises Pays B Pays C Euro Dollar Scénarios

97 98 99 00 01

Il est opportun de coupler ces progiciels avec un tableur du type Excel pour entreprendre des simulations budgétaires. Par exemple, si on souhaite simuler un chiffre d’affaires de 100 K€, le progiciel fera automatiquement la ventilation par produits sans pour autant introduire une nouvelle formule de calcul.

Budget Prévision 1 Prévision 2

Rubriques

Figure 2.1 – Modélisation d’un compte de résultat.

Le système puise dans l’information en temps réel afin de pouvoir ajuster le plan-budget en continu (accès immédiat aux toutes dernières données pour les comparer au plan) pour mieux appréhender quelles seront les performances opérationnelles à venir. Le système regroupe tous les plans et toutes les mises à jour de résultats, permettant ainsi de voir l’impact des nouvelles prévisions et des nouveaux rapports au plan. Il permet: – une compréhension immédiate: l’analyse des informations relatives à la performance permet de comprendre les données sous-jacentes; – une comparaison possible avec des données comparables issues d’autres systèmes afin de voir rapidement les écarts; – une puissance analytique: les données sources peuvent être replacées dans leur contexte grâce à des méthodes allant de simples calculs aux tableaux de bord.

L’apport du contrôle de gestion

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Les rapports d’alerte et d’exception, envoyés par email, permettent de repérer les écarts suffisamment tôt sans avoir à parcourir des pages et des pages de données avant de trouver les raisons de l’écart constaté. La technologie web assure au système une rapidité optimale même dans le cas d’une volumétrie importante lorsque des milliers de collaborateurs (internes ou externes) l’utilisent simultanément. Des assistants web facilitent la saisie des données, les utilisateurs devant uniquement saisir les données qui sont propres à leur secteur d’activités, laissant de côté les termes financiers. Ainsi, les directeurs commerciaux peuvent établir leurs prévisions de chiffre d’affaires en se basant sur le mix-produits, le nombre de contrats et le montant moyen. La moindre saisie chiffrée impacte automatiquement l’ensemble des paramètres financiers du plan ou du budget s’y rapportant.

L’apport d’un intranet et d’un workflow

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L’utilisation d’un intranet et d’un workflow apporte une dimension supplémentaire à la modélisation car le processus de décision et les flux d’informations décisionnelles vont être représentés. Les rôles des principaux responsables (information, validation, décision…) sont décrits dans l’organisation du modèle (figure 2.2). La communication entre différents acteurs, directions de produits, directions continentales, sociétés de produits et de marchés, est grandement facilitée par un intranet. Chacun, selon ses responsabilités, entre des données qui sont mises à la disposition de ceux qui en ont l’usage, bien entendu sans aucune ressaisie. Par exemple, la direction des achats fixe les hypothèses de variation des coûts d’achat des principales familles de matières qui sont automatiquement prises en compte par les usines pour les calculs de coûts de revient; les volumes de ventes sont immédiatement connus des usines pour les calculs de charge, les besoins d’investissement de capacité et le calcul des coûts. De même, les directions de produits suivront les prévisions de ventes écrites par les marchés, et pourront réagir rapidement si des orientations ne sont pas suivies: il peut s’agir d’une mauvaise compréhension du marché, ou d’une condition particulière importante et justifiée du marché sous-estimée par la direction des produits. Il en résulte un gain de temps, un dialogue facilité et plus de consensus, de fiabilité et de cohérence. Le modèle représente le schéma de la structure décisionnelle d’un Groupe. Les informations élaborées à un niveau de responsabilité sont synthétisées, analysées et, par un workflow, sont transmises à l’autorité hiérarchique qui à la mission d’approuver ou de retourner à l’envoyeur avec demande de modifications. Au final, le hiérarchique approuve par signature électronique, et le processus peut se poursuivre.

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LA PRÉPARATION DU BUDGET

Données de base extraites des systèmes de reporting

Information sur les nouveaux produits

Plan marketing

Évolution des co˚ts

Plan industriel

Analyse économique Comptes d’exploitation

Hypothèses économiques Coûts des facteurs

Figure 2.2 – Organisation générale du modèle.

L’explicitation de cette structure décisionnelle traduite dans le workflow est en soi un exercice extrêmement bénéfique, qui impose de préciser les rôles et les pouvoirs de décision de chacun, au terme d’un processus de concertation, et de clarifier quelle diffusion de cette décision doit être faite. Il est alors important que le modèle prépare les indicateurs de synthèse préparant la décision du hiérarchique, comme par exemple pour un directeur continental, le taux de croissance d’un Marché ou d’une région, l’évolution des marges, le taux de charge publicitaire, la proportion des nouveaux produits dans les ventes, la profitabilité des nouveaux produits par rapport à ceux que l’on abandonne…; pour un directeur industriel, la productivité globale d’une usine, le taux de charge des principaux équipements… Pour la direction générale du groupe, il est possible de suivre, en cours de processus, sans attendre que tout soit «bouclé», si tel objectif ou orientation majeure est bien pris en compte. Il peut s’agir d’un objectif d’ensemble ou particulier concernant la croissance, d’un objectif de réduction de frais de fonctionnement, d’un objectif de lancement d’une nouvelle activité… Le suivi de l’avancement du processus est facile et permet de relancer tel ou tel responsable qui est en retard pour fournir des informations ou donner une validation.

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L’apport du contrôle de gestion

Tableau 2.3 – Workflow pour l’étape des plans marketing. Société marché

Direction continentale

Site de production

Direction des produits

Direction groupe

Saisie coûts des nouveaux produits Validation coûts nouveaux produits Saisie évolution des coûts Accord Portefeuille produits disponibles Frais d’approche Base des coûts Prévisions de ventes Prix de vente, publicité Synthèse des ventes Remarques Demandes de modification Modifications prévisions prix, publicité

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Accord prévisions prix, publicité Plan marketing approuvé

2

UN RÔLE DE CONSEIL ET D’ANIMATEUR

Le métier de contrôleur de gestion consiste, entre autres, à mettre au point des procédures aussi différentes que celles qui concernent l’élaboration des objectifs, des programmes, des budgets ou encore des tableaux de bord. Il assurera la pérennité des procédures en les concevant de façon suffisamment souple afin qu’elles intègrent les évolutions sans être constamment remises en cause. Au cours des réunions d’analyse, il vérifiera que l’information de gestion est correctement utilisée.

42

LA PRÉPARATION DU BUDGET

Une entreprise non seulement évolue mais connaît parfois de profonds bouleversements d’ordre structurel qui entraînent une modification des habitudes prises. Tout changement procède d’un nouvel état d’esprit qu’il faut faire partager à toute l’entreprise. Du fait de sa fonction transversale, le contrôleur de gestion est un promoteur naturel de la dynamique d’acceptation du changement. Organiser un dialogue hiérarchique fondé sur la fixation d’objectifs de changement doit être une de ses priorités. Pour favoriser les prises de décision, le contrôleur de gestion animera et mettra en place des procédures de concertation. Son rôle de «copilote» le conduira à développer, à côté des savoir-faire techniques, des «savoir se comporter», notamment en apprenant à être déterminé, factuel et imaginatif. Pour ce faire, il aura lui-même intérêt à s’adapter à la psychologie de ses interlocuteurs.1

2.1. La procédure budgétaire Dans certaines entreprises, la procédure budgétaire matérialise en fait le lancement des travaux de conception des budgets individuels. Elle assure un certain formalisme sous forme d’un guide précis pour les opérationnels et permet un gain de temps précieux. Si on tient à une définition précise, disons que la procédure budgétaire est un ensemble de règles et de processus écrits qui déterminent le mode de préparation, d’approbation et de suivi du budget. Sa mise au point est le plus souvent un travail collectif, piloté par le contrôleur de gestion. Pour être certain que l’utilisateur l’appliquera correctement, on veillera à la détailler suffisamment. Une procédure fiable est une procédure qui définit de manière précise les actions à entreprendre et le rôle de tous les intervenants. Précise et sans ambiguïté, elle clarifie les interfaces si nécessaire, en déterminant concrètement les informations à échanger entre les différents acteurs, et en préconisant les supports ainsi que le calendrier.

Le contenu de la procédure La procédure budgétaire doit comporter plusieurs volets: – une présentation des hypothèses de la version moyenne du prébudget; – le document budgétaire de synthèse, identique pour tous les CRB, validé par chaque responsable opérationnel; – des annexes reprenant le détail des postes budgétaires et mettant en valeur les priorités; – le calendrier des opérations: actions, responsables et dates. 1. Sur ce thème, le contrôleur pourra se reporter au chapitre 7 et y trouver des références utiles.

L’apport du contrôle de gestion

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Exemple de calendrier budgétaire dans une entreprise industrielle

21.08

CG

Examen du calendrier budgétaire

25.09

DC

Définition des orientations des ventes et présentation à la direction générale

04.10

DC

Prévisions de ventes Évolutions des produits

12.10

DC/DT

Confirmation des hypothèses de ventes Hypothèses de productivité usine

16.10

DT

Hypothèses d’évolution des coûts standard usine Projets spécifiques

23.10

CG

Assurances, taxe professionnelle et impôts fonciers Taux de change

28.10

DC

CG

Hypothèses de prix de ventes, remises, ristournes, tarif France et options logistiques Équilibrage des productions et des ventes Estimation des coûts directs d’exploitation Estimation des coûts directs spécifiques

31.10

CG

Budget d’investissement

10.11

DC RH

Estimation des coûts de distribution Effectifs par section et valorisation de la masse salariale

14.11

CG/DT/DC

Coûts directs d’exploitation, coûts directs spécifiques, coûts de distribution: harmonisation des postes

17.11

DG/CG

Comptes filiales Charges de structure: harmonisation des postes et valorisation

19.11

DC

Programmes d’actions prioritaires Premières hypothèses en publicité-promotion

21.11

CG

Marge brute par domaine d’activité Dotations aux amortissements Estimation des éléments hors exploitation Variation du stock en valeur

24.11

DG/DC

Validation de la publicité-promotion

25.11

CG

Contribution nette des produits par domaine d’activité

30.11

CG

Résultat opérationnel Résultat net consolidé

05.12

CG

Constitution du dossier budgétaire

07.12

DG

Présentation au groupe

20.12

CG

Mensualisation

© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit.

DT

44

LA PRÉPARATION DU BUDGET

Une fois établie, une procédure doit être validée. Rien ne vaut une mise en application ne serait-ce que temporaire, pour se rendre compte de la validité d’une description, qui risque toujours d’être un peu théorique. Une procédure fiable étant par essence une procédure mise à jour, on se donnera d’emblée les moyens de la tenir à jour. Rubriques d’une procédure budgétaire dans une entreprise de services

Cadre général Champ d’application (nomenclature des centres de responsabilité budgétaire). Planning (préparation des objectifs à moyen terme, préparation et notification du budget). Cadrage à moyen terme (réunions d’élaboration du plan, dont la première année sera le budget). Composition des différents dossiers budgétaires Normes de présentation: utilisation de tableaux normalisés dans un souci de langage commun (tableaux, commentaires, annexes, variations, indicateurs, nature des corrections). Présentation du dossier de précadrage: – champ d’activité en termes de produits ou services par clientèles visées, avantages compétitifs par rapport aux concurrents, coopérations développées avec les autres unités, principales règles d’action suivies, objectifs à moyen terme; – et, pour la première année, évolution proposée des objectifs, projets d’investissements, actions majeures qui seront menées pour favoriser le développement, risques pesant sur l’activité, données relatives au marché et à l’environnement, données relatives à la concurrence. Présentation du dossier budgétaire: – au niveau de la division: une courte note de présentation des objectifs majeurs, un bilan et un compte d’exploitation prévisionnel, un tableau de synthèse des comptes d’exploitation des CRB, un tableau de moyens, un tableau d’évolution des effectifs, une synthèse des investissements; – au niveau du CRB: quatre tableaux de base 1: objectif, bilan, compte d’exploitation et moyens. Présentation du dossier de suivi budgétaire: – au niveau de la division: un tableau de réalisation des principaux objectifs, un compte d’exploitation, un tableau de suivi des résultats par division, un tableau des moyens, un tableau de suivi des investissements; – au niveau du CRB: un tableau de réalisation des principaux objectifs, un compte d’exploitation, un tableau des moyens. 1. La liasse de base pourra être complétée par des documents spécifiques à chaque activité. Une annexe présente un exemple des différents tableaux budgétaires commentés et organisés sous forme d’un dossier budgétaire type.

L’apport du contrôle de gestion

45

Synthèse transversale: Une partie importante des moyens d’exploitation sera gérée de manière centralisée car ils nécessitent l’intervention de spécialistes. La procédure budgétaire fera apparaître la somme des besoins des utilisateurs. Elle la confrontera aux possibilités techniques des gestionnaires de ces moyens. Les synthèses seront présentées par les gestionnaires de moyens: – personnel: sommes des demandes, conséquences sur la masse salariale et sur les pyramides des âges et hiérarchiques, contraintes pour assurer la satisfaction des demandes; – machines: fiches d’investissement pour les matériels lourds, détails des enveloppes pour les autres; – travaux: fiches d’investissement; – études informatiques: arbitrages pour ajuster les demandes avec les possibilités techniques.

La qualité de la procédure La qualité de la procédure budgétaire est une des conditions essentielles pour obtenir un gain de temps, voire une réduction des délais. On retiendra, entre autres, trois principes pour simplifier le processus budgétaire et donc en raccourcir la durée: ➤ Se limiter strictement aux étapes d’élaboration budgétaire décrites

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au premier chapitre Il vaut mieux éviter de concentrer tout l’effort de réflexion sur le progrès de l’entreprise pendant la période budgétaire. Ainsi est-il préférable de définir les plans de progrès de la société bien avant le commencement du processus budgétaire. D’ailleurs, la réflexion sur le progrès doit être déconnectée des décisions d’allocation de ressources. En effet, le progrès découlant de plus en plus souvent de travaux pluridisciplinaires, ses orientations ne doivent aucunement être prises dans la précipitation. La procédure budgétaire devant surtout être orientée vers la prise de décision, on s’abstiendra de surcharger les chiffrages avec des calculs complexes de prestations ou de répartitions de coûts. Les calculs de coûts de revient seront à faire en marge. ➤ Préparer à l’avance les prises de décision afin que lesdites décisions

puissent se prendre au cours d’une seule et même réunion En amont de la première réunion budgétaire, des simulations préalables permettront d’avoir une idée assez juste des allocations de ressources disponibles. On pourra toujours faire évoluer ces simulations au fur et à mesure

46

LA PRÉPARATION DU BUDGET

des décisions prises. Pendant la période budgétaire, le dialogue entre le contrôle de gestion et la direction générale sera évidemment permanent. On choisira avec soin l’ordre des réunions budgétaires. Commencer par celles qui concernent les budgets transversaux, comme par exemple l’informatique, semble préférable. Une fois le budget de l’informatique validé, le service opérationnel pourra plus facilement entériner les réductions ou les augmentations de postes liées à l’informatisation. On affectera des ressources aux projets transversaux uniquement si les effectifs restent hiérarchiquement rattachés à leur direction d’origine. Enfin, pour écarter les blocages de décision pendant les réunions budgétaires, on aura l’idée de demander plusieurs propositions de budget ou de demander à un service quelles seraient ses prestations à effectif constant ou avec un effectif réduit de 10%, On pourra également prévoir d’allouer des «budgets temporaires» autorisant un budget pour une période limitée (par exemple, la constitution d’un annuaire). ➤ Concentrer les réunions budgétaires sur un nombre limité d’indicateurs

augmente les chances que les décisions importantes soient prises On peut parfaitement se contenter de quatre ou cinq indicateurs pertinents qui engageront suffisamment le responsable d’un CRB. Tableau 2.4 – La performance de votre processus de planification (étude du magazine CFO). Process

Moyenne

Meilleure pratique

Durée du cycle de planification tactique et financière

4 mois

1 mois

Durée du cycle de planification stratégique

5 mois

1 mois

Niveau de détail du budget

230 postes

15 postes

Besoins en ressource pour la planification et le reporting (JH/milliards de dollars de CA)

25 703 JH

700 JH

Année civile

En continu et trimestriel

Base prévisionnelle

L’animation de la procédure Le contrôleur de gestion a encore pour fonction d’être le conseiller économique de l’entreprise, non seulement de la direction générale mais aussi de tous les responsables de CRB. Coordonnant les travaux et les analyses des opérationnels, il aura à cœur de dissiper leurs éventuelles incompréhensions. Il veillera particulièrement à ce que les prévisions reposent sur des réalités financières tangibles. Exerçant son sens critique sur les prévisions commerciales,

L’apport du contrôle de gestion

47

il évitera qu’on ne présente lors des réunions des versions trop optimistes ou trop pessimistes, ce qui est souvent le cas lorsqu’il y a réorganisation. Son rôle est aussi de conseiller davantage les managers sur les perspectives et les stratégies de leurs unités (quels objectifs atteindre, comment, quand, pourquoi?). À ce titre, il assistera les responsables dans l’élaboration de leurs objectifs, de leurs plans d’action et de leurs budgets. Au lieu d’émettre des réserves, il les convaincra de mettre en face de leurs projets les bons chiffres. Il usera de son influence auprès des intervenants techniques pour optimiser les moyens de production, canaliser les investissements, recentrer les études et recherches, calculer des coûts de revient fidèles à la réalité économique de la société.

2.2. Les réunions périodiques d’analyse des résultats C’est souvent l’occasion d’un certain rituel qui passe par une organisation formalisée, avec un ordre du jour précis, des documents standardisés, commentés et diffusés à temps. Un compte rendu du suivi des plans d’action permettra d’obtenir un engagement plus formel des responsables sur les différentes actions correctrices. L’organisation de ces réunions incombe complètement au contrôleur de gestion. Ces réunions ont souvent lieu à deux niveaux: – réunion trimestrielle organisée sur les sites avec la direction générale qui permet de voir les réalisations des projets d’investissement, de comprendre les projets envisagés pour l’année suivante, d’être en contact direct avec les équipes locales; – réunion mensuelle organisée avec les responsables d’un site. Il est important que cette réunion ait lieu le plus tôt possible dans le mois, à un jour fixe (par exemple le premier vendredi ou le cinquième jour ouvrable de chaque mois). Un calendrier précisant les dates de ces réunions trimestrielles et mensuelles sera diffusé en début d’année aux directions et aux responsables concernés. Avant chaque réunion, le contrôleur de gestion préviendra les opérationnels qui ont de mauvais résultats, non pour les admonester, mais afin de les former à analyser eux-mêmes leurs résultats et leurs écarts mensuels. Tout en leur expliquant les raisons de la mauvaise performance, il devra être à même de leur suggérer des leviers d’action possibles permettant d’inverser la tendance et même de progresser bien plus avant dans le mois.

La préparation de la réunion Des tableaux de bord, adaptés à chaque niveau de responsabilité et de plus en plus synthétiques au fur et à mesure que l’on remontera dans la hiérarchie, seront envoyés aux participants avant chaque réunion. Conjointement, ils recevront un ordre du jour qui précisera les questions à traiter (par qui et sur

48

LA PRÉPARATION DU BUDGET

quelle durée), ainsi que les décisions à prendre. Chaque responsable pourra prendre connaissance des résultats de son propre CRB, et préparer un topo sur le point le concernant. Exemple d’ordre du jour d’une réunion mensuelle dans une usine sidérurgique

• • • •

Éléments mensuels de coût Comparaison avec le budget Progrès dans les actions de réduction de coûts Révision pour les trois mois à venir des ratios techniques

L’animation de la réunion Au cours de la réunion, il est fortement recommandé de ne pas commenter systématiquement les tableaux de bord préalablement envoyés, mais de s’en tenir à l’ordre du jour. En effet, une réunion d’information sur les résultats n’a que peu d’intérêt (d’autant qu’ils sont déjà connus), contrairement à une exploitation concrète de ces tableaux de bord amenant à décider d’actions correctrices. Les débats seront essentiellement orientés sur l’explication des dérives et des actions à prendre, ainsi que sur le suivi de l’avancement des plans d’action en cours. Il est toutefois recommandé de prendre le temps d’analyser telle excellente performance afin de capitaliser l’expérience acquise par un responsable ou une équipe, et de voir comment insuffler l’exemple à d’autres CRB. Il s’agit de «forcer au progrès». Afin d’éviter toute dérive, on peut désigner en début de réunion une personne qui sera garante du temps imparti à chaque point de l’ordre du jour. Une autre personne pourra être chargée de repérer des sujets importants apparaissant au cours des débats, nécessitant de figurer à l’ordre du jour d’une prochaine réunion, et qui seront donc provisoirement délaissés.

Le compte rendu de la réunion Il répond d’abord à des impératifs d’information et de mémoire. C’est un aide-mémoire à disposition des participants qui a pour but de faire connaître aux tiers le contenu ou les conclusions de la réunion. Il est indifféremment un document d’analyse ou de synthèse. Il comprendra: 1. les éléments d’identification indispensable: – – – – –

auteur: prénom, nom, fonction, période, destinataires: prénoms, noms, fonctions, date, heure et lieu de l’événement, liste des participants et leur qualité, rappel de l’ordre du jour ou du planning prévu;

L’apport du contrôle de gestion

49

2. le compte rendu proprement dit: – un titre résumant l’événement, – un ordre logique pour présenter les différents points: exposé d’un problème, analyse des points forts et faibles et actions à entreprendre. Il a pour but à la fois de résumer ce qui s’est passé pendant la période considérée et d’analyser les événements afin de dégager des pistes d’action ou des recommandations. Sa rédaction sera sobre et précise. Le contrôleur de gestion le diffusera très rapidement après la réunion aux participants, ainsi qu’à toute personne concernée par les décisions prises.

2.3. Organiser le benchmarking Le benchmarking est une technique de motivation consistant à comparer ses propres pratiques avec «les meilleures parmi les meilleures», ce qui induit une tension permanente dans la recherche du progrès et rend l’autosatisfaction très éphémère. D. Kearns 1 a donné une définition précise: «Le benchmarking est la recherche des méthodes les plus performantes pour une activité donnée, permettant de s’assurer une supériorité.» Sa définition s’est élargie par la suite: «Le benchmarking consiste à être assez humble pour admettre que quelqu’un est meilleur que vous dans un domaine, et être assez sage pour apprendre comment l’égaler, voire le surpasser.» Le benchmarking va au-delà d’un simple mimétisme. C’est une méthode pour tirer parti efficacement, par imitation ou par analogie, des solutions les plus pragmatiques et les plus performantes aux problèmes rencontrés. Il vise à comprendre les pratiques, méthodes et moyens qui ont permis à d’autres de réaliser le grand écart avec leurs propres résultats. © Dunod – La photocopie non autorisée est un délit.

Il y a trois sortes de benchmarking, toutes les trois sont utiles: – le benchmarking interne, que tous les groupes bien gérés devraient pratiquer largement: on compare entre elles les performances des unités comparables, au sein d’une même société ou d’un même groupe, soit sur des processus, soit sur une fonction; – le benchmarking compétitif, souvent basé sur des études faites par des tierces parties, telles que des consultants, organisations professionnelles, administrations… amène à se comparer à ses concurrents; – le benchmarking générique, qui compare des fonctions ou des processus indépendamment dans un autre secteur d’activité. 1. Directeur chez Rank Xerox.

50

LA PRÉPARATION DU BUDGET

Ces opérations de benchmarking sont encore absentes dans beaucoup d’organisations. Il serait positif que les contrôleurs de gestion poussent à leur généralisation, en osant donner un retour d’informations aux responsables pour qu’ils se comparent entre eux, et en osant aller rechercher les meilleures pratiques dans d’autres organisations.

Benchmarking et tableau de bord La pratique régulière et habituelle du benchmarking est une nécessité pour se situer et savoir évaluer une prise de décision en toute connaissance de cause. Comparer les prix de revient, les prix de vente et leurs évolutions, les produits, les organisations, apporte aux responsables de précieuses informations pour adapter le fonctionnement de leur entreprise et les démarquer de leurs concurrents. Mais comme il est difficile d’opérer des comparaisons dans tous les domaines, on choisira les sujets pour lesquels il existe une certaine sensibilité et qui réclament un éclairage différencié. Les opérations de benchmarking sont tout à fait utiles en interne à l’entreprise. Elles ne consistent pas seulement à donner à chaque opérationnel un retour sur les performances des autres à partir d’indicateurs identiques et comparables… (par exemple, l’excédent brut d’exploitation des unités opérationnelles, le nombre de prestations par habitant pour les agences…). Le benchmarking portera aussi sur les facteurs déterminants de la performance, qui ont permis à une unité d’atteindre de meilleurs résultats, afin d’inciter les autres unités à être aussi efficaces (par exemple, on suivra le ratio m2/p si c’est un levier important pour augmenter la rentabilité). Ces opérations de benchmarking permettent incontestablement de créer une dynamique de progrès. Un contrôleur de gestion rapporte: «Le simple fait d’avoir diffusé les éléments de synthèses des agences comparables entre elles a créé une émulation et amélioré les résultats.»

Agence 1 Agence 4 Agence 2 Agence 3 Agence 5 Agence 6 –

Objectif

écart défavorable

écart favorable

Figure 2.3 – Exemple de benchmarking compétitif.

+

L’apport du contrôle de gestion

51

Afin de crédibiliser le tableau de bord, on fournira un document qui explique les chiffres inclus dans la comparaison afin d’en valider le contenu en permanence. On fera de ces indicateurs de benchmarking la référence des réunions périodiques, en ayant toutefois pris le soin de se limiter à un petit nombre d’indicateurs.

Les trois étapes d’une opération de benchmarking ➤ Préparer l’opération

En délimitant le champ couvert par l’opération, on définira les indicateurs de performance déterminants qui feront l’objet du benchmark. Après avoir choisi les partenaires (internes ou externes), qui participeront à l’opération, on leur fera parvenir un dossier de présentation avec la liste des points à traiter. ➤ Collecter et exploiter l’information

Un débriefing aura lieu à l’issue de chaque réunion afin d’identifier les points clés de la réunion. La synthèse des conclusions comprendra une liste des améliorations et des actions à entreprendre. ➤ Conduire le changement

Il s’agit bien évidemment de mettre en œuvre les améliorations annoncées. Les effets de chaque action seront disséqués lors de la prochaine réunion.

3 CONSTRUIRE SON BUDGET

e contenu et la forme du budget obligent chaque responsable à piloter son activité grâce à des indicateurs pertinents. Pour ce faire, les responsables de centres de CRB devront: – compléter leurs données financières à l’aide des éléments opérationnels (quantités produites, taux d’utilisation des ressources…); – pouvoir mettre en exergue l’origine des chiffres et la définition des termes budgétaires; – se focaliser sur des leviers d’action efficaces et compréhensibles.

L

Analyse des performances du passé Définition des objectifs et des plans d’action Chiffrage du budget : CA, coûts, marges

Figure 3.1 – Construction d’un budget.

Construire son budget

53

Pour préparer son budget, le responsable d’un CRB devrait commencer, en principe, par analyser les performances de son centre sur l’année écoulée et extrapoler ses résultats sur la fin de l’année. Ces enseignements lui seront utiles pour définir ses objectifs et ses plans d’action pour l’année future. La valorisation des revenus et des coûts de fonctionnement du CRB n’interviendra qu’au final, puisqu’elle ne sera que la traduction chiffrée des objectifs et des plans d’action. Nous allons nous attacher à décrire successivement ces trois étapes.

1

ANALYSE DES PERFORMANCES DU PASSÉ ET CHIFFRAGE DU PROBABLE DE FIN D’ANNÉE

On prendra la précaution de se procurer les derniers chiffres auprès du service de contrôle de gestion pour dégager les performances sur les premiers mois de l’année. Il est à noter, qu’en démarrant l’élaboration budgétaire au mois de septembre, on disposera déjà des réalisations des huit premiers mois de l’année en cours. On cherchera à expliquer les écarts (dérapages ou réussites) par rapport au budget, avant d’élaborer le probable 1 de fin d’année sur lequel seront bâtis les objectifs et plans d’action pour l’année suivante.

1.1. Traitement des informations passées

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L’analyse portera sur les indicateurs clés du CRB afin de comprendre les écarts: causes internes, causes externes, éléments exceptionnels non reportable. On repérera les tendances (N – 1/N) et on prendra en compte les remontées du terrain pour valider les prévisions d’activité. Il s’agit de comprendre l’efficacité des plans d’action. À titre d’exemple, les informations qui seront remises aux commerciaux concerneront les données suivantes: – volumes des ventes, chiffre d’affaires, prix de vente… pour chaque segment de clients et par produit; – évolution du marché, de la concurrence, de la législation…; – progrès réalisés au cours de l’année par rapport à l’année antérieure: part de marché, impact d’actions promotionnelles…; – axes de progrès potentiels. 1. Les termes projection ou atterrissage de fin d’année sont aussi utilisés couramment.

54

LA PRÉPARATION DU BUDGET

Cette démarche mettra en évidence les événements imprévus qui ont influencé la marche des affaires, le degré de fiabilité des prévisions commerciales, l’efficacité des actions commerciales, l’effet d’une évolution d’un taux de change, etc. Pour un responsable de production, les informations à collecter seront très différentes. Il s’intéressera plutôt aux informations suivantes: – consommations par matière, par énergie, – rendements main-d’œuvre et machines, – évolution des prix matières, – quantités produites, – rotation des stocks, – taux d’utilisation des équipements, – temps de «marche, arrêt, panne», – productivité, – déchets et rebuts. Cette étude contribuera à remettre à jour les standards techniques, les nomenclatures et les gammes 1. On évaluera le résultat des actions passées: Budget N

Réel N

Réel N/Budget N

Réel N – 1

Réel N/Réel N – 1

Commentaires

Et on comparera les performances réalisées avec celles d’unités similaires: Indicateurs

Unité 1

Unité 2

Unité 3

Unité 4

Unité 5

Unité 6

Activité réelle Activité potentielle Activité/activité totale Activité réelle/moyens consommés 1. La nomenclature identifie les spécificités et les quantités de matières requises pour chaque type de produits (uniquement en milieu industriel). La gamme décrit le processus opératoire de chaque produit, ou prestation, avec les différentes phases de la fabrication, ainsi que le «temps homme» et le «temps machine» nécessaires selon le type de produit ou de prestation (utilisé dans l’industrie, les services et le secteur non marchand).

Construire son budget

55

Cette démarche permet de mettre en avant les points forts et les points faibles du CRB en matière de coût, de qualité, de productivité, de technologie, d’organisation, de management… Cette réflexion s’appuie sur les éléments du tableau de bord disponibles au démarrage du processus budgétaire 1.

1.2. Outils de diagnostic Différents outils de diagnostic peuvent être utilisés pour approfondir ces analyses. Ils aideront à préparer le plan d’action pour l’année suivante. Nous nous contenterons d’en citer deux.

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L’analyse interactive Pour trouver l’information qui incitera à l’action, on détaillera si possible l’étude, notamment en remplaçant la loi des «20/80» 2 en loi des «2/98» 3, dans le but d’affiner la cohérence de l’ensemble, ce qui empêchera de laisser de côté ce qui peut paraître non significatif. Le propos de l’analyse interactive est de visualiser les interactions entre plusieurs composantes. Cet outil s’applique très bien par exemple à un diagnostic du mix-marketing: produit, segment, marge, client et vendeur. Dans un premier temps, on se contentera d’apprécier les grandes masses du chiffre d’affaires et de la marge des produits par vendeurs, réseaux de distribution, segments de clientèle en utilisant la méthode «20 ¥ 80»: où l’entreprise gagne-t-elle de l’argent? Dans un second temps, on se focalisera sur les situations (exemples de réussites, d’anomalies…) susceptibles d’appuyer des actions de développement ou de consolidation avec le concept du «2 ¥ 98», cette méthode améliorant la première. Enfin, on cherchera les dysfonctionnements en croisant deux par deux les éléments du mix-marketing. En découpant l’information en tranches, on pourra comparer des éléments comparables, car on repérera indiscutablement les facteurs singuliers (le client captif, le vendeur génial, la bonne affaire…) qui masquent la plupart du temps la compréhension des situations.

L’analyse cause-effet On peut également utiliser la méthode du «QQOQCP», autrement dit: «qui, quoi, où, quand, comment, pourquoi?». Ensuite, on classifiera les causes par rubriques: main-d’œuvre, environnement, méthodes, gestion, stratégie… 1. Le suivi budgétaire est traité au chapitre 9. 2. Loi qui permet de constater que, par exemple, 20% des clients génèrent 80% du chiffre d’affaires. 3. Même loi que la précédente, plus affinée: est-ce que 2% des clients génèrent 98% du chiffre d’affaires?

56

LA PRÉPARATION DU BUDGET

Diagnostic des frais généraux

Dans une entreprise X, il a été constaté depuis quelque temps, une augmentation «mécanique» des frais généraux. Un audit a permis de déterminer:

Qui?

Qui est concerné?

La division…

De quoi s’agit-il? Qu’observe-t-on? Quel est le problème?

Augmentation du taux de frais généraux.

Quoi?

Où?

Où se manifeste-t-il? Où prend-il racine?

Dans les résultats de la division…

Quand apparaît-il? Depuis quand? À quel moment?

Depuis 1999.

Quand?

Combien de fois? Combien coûte-t-il? Combien de temps?

De 15,3% (1998) à 20,1% (2000).

Combien?

Pourquoi?

Pourquoi se produit-il?

À rechercher.

Après enquête, on a découvert plusieurs causes, entre autres:

Rubriques

Causes

Actions

Stratégie

Manque de spécialistes en interne

Externaliser certaines fonctions

Environnement

Coût des nouveaux embauchés Politique sociale du groupe

Réduire le turnover des salariés

Gestion

Opérationnels peu sensibilisés

Revoir les tableaux de bord

Méthodes

Peu de contrôles des coûts Pas de procédure écrite

Établir une bible des procédures

1.3. La prévision ou le probable de fin d’année Afin que les décideurs puissent anticiper et prendre rapidement les décisions adéquates, les indicateurs seront impérativement orientés vers l’avenir. La prévision est censée être l’estimation la plus probable de ce que seront les principales données chiffrées de l’activité d’une unité au terme de l’exercice comptable. Les prévisions peuvent être considérées comme une variété de futurs alternatifs.

57

Construire son budget

La prévision 1 consiste à élaborer une simulation de scénarios pour le futur en s’appuyant sur l’incertitude des événements extérieurs et en combinant les dernières réalisations connues de l’activité. Ainsi distinguera-t-on: • Prévision = Réel cumulé des mois passés + Budget des mois restants Ce raisonnement a pour inconvénient de présenter une faible valeur ajoutée. • Prévision = (Réel cumulé des mois passés/Nombre de mois passés) ¥ 12 Cette méthode est une simple extrapolation des réalisations sur les mois restants. • Prévision = Réel cumulé des mois passés + Nouvelle prévision détaillée Cette démarche présente, en revanche elle, une vraie valeur ajoutée, à la condition que les données prévisionnelles prennent en compte: – les données concernant les mois passés, – l’évolution prévisible de l’environnement pour les mois à venir, – les actions permettant d’atteindre le résultat prévu au budget. L’analyse portera sur les indicateurs clés du CRB afin de comprendre les écarts: causes internes, causes externes, éléments exceptionnels non reportables. On repérera les tendances (N – 1/N) et on prendra en compte les remontées du terrain pour valider les prévisions d’activité. Il s’agit de comprendre l’efficacité des plans d’action. Tableau 3.1 – Les tendances prévisionnelles. Réel N 9 mois

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Réel N 9 mois

Prévisionnel N 3 mois

+ Budget N mois 10 à 12

Écart volume Réel N /budget N

+

+ Tendances 3 mois restants

Écart sur des variables sensibles Taux de change matières 1res ….

+

Projection écarts budgétaires mois 10 à 12

Événements exceptionnels

+

Dérive rendement Dérive heures supplémentaires ….

De nombreuses entreprises ont institué ce type d’exercice trois fois dans l’année. Pour les entreprises clôturant au 31 décembre, les prévisions sont souvent réalisées fin avril, fin août et fin novembre. La prévision de fin août est souvent retenue dans les faits, comme le probable de fin d’année. 1. On emploie aussi les termes de reprévision, forecast, reforecast…

58

LA PRÉPARATION DU BUDGET

kF Boni de gestion Hausse salariale

Amortissements

Effet de change

Prévisions

Budget

Figure 3.2 – Le «pont»: passage du budget à la prévision.

Le cycle des prévisions dans une entreprise du bâtiment

Par choix, le budget est un objectif. Il est souvent ambitieux, bien qu’il doive rester réaliste et rigide, car on ne change pas d’objectif au gré des événements. Il ne donne donc pas une vision prudente de ce que seront les résultats financiers de l’exercice. L’analyse des écarts mensuels fournira tous les mois des éléments de correction à cette prévision qui permettront au contrôleur de gestion de tenir à jour une prévision permanente des résultats. Néanmoins, cette méthode se révèle insuffisante et doit être complétée par des exercices de prévision. Ces exercices se traduisent par la préparation d’une liasse budgétaire simplifiée par tous les CRB. Mais contrairement au budget, ces prévisions présentent un caractère probable de réalisation. Elles sont élaborées sous la seule responsabilité des CRB et ne modifient en rien les engagements pris dans le cadre du budget. Elles seront établies trois fois par an. Par principe, et sous réserve de la précision de l’estimation, tous les événements ayant une probabilité supérieure à 50% doivent être inclus dans la prévision. Cette dernière permettra de déterminer une fourchette, à l’intérieur de laquelle le résultat final devra se situer.

2

DÉCLINAISON DES OBJECTIFS ET DES PLANS D’ACTION

Un objectif général qui n’est pas décliné en objectifs et plans d’action locaux n’a pas lieu d’être. L’objectif renvoie obligatoirement aux définitions des missions des responsables de CRB. Il est à noter que les responsabilités ne doivent pas être distribuées en termes de tâches à réaliser, mais en termes de

59

Construire son budget

missions à accomplir. Le découpage de l’entreprise en CRB est une opération de gestion qui a pour objet de sectoriser l’entreprise. L’atteinte d’objectifs particuliers concourra à tenir l’objectif global. À ce titre, les responsables possèdent une délégation pour pouvoir engager des moyens dans le cadre d’un plan d’action.

2.1. Aligner l’organisation sur la mise en œuvre de la stratégie Le budget étant la première année du plan stratégique, les objectifs et les plans d’actions seront définis en lien avec la stratégie. Plan stratégique ou business plan

Processus budgétaire

Grandes options stratégiques et hypothèses Leviers de la création de valeur Actions stratégiques Objectifs

Plan d’actions court terme Plan d’actions Objectif court terme Actioncourt terme Responsable Objectif court terme Action Plan d’actions Responsable court terme Objectif court terme Action Responsable

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Quatre à cinq leviers de création de valeur, nécessaires à la réalisation du plan stratégique, ont été déterminés dans le cadre de la réflexion stratégique autour de quatre axes: – analyse stratégique par segment stratégique; – impératifs stratégiques donnés par les actionnaires, le corporate ou la direction générale; – les nouveaux challenges que se fixent les responsables; – l’analyse des performances des processus métiers (écart en % par rapport aux meilleures pratiques). On commence par déterminer l’impact à trois ou cinq ans des leviers de la création de valeur (augmenter la part de marché de 6%), puis, on liste les actions stratégiques à entreprendre sur les prochaines années. Chaque levier de création de valeur est accompagné d’une action stratégique au minimum (augmenter les ventes en Europe, mettre au point une nouvelle gamme de produits, acheter un concurrent).

60

LA PRÉPARATION DU BUDGET

Chaque action stratégique donne lieu à un plan d’actions à entreprendre au cours des mois à venir en se concentrant sur celles dont les effets seront les plus importants. Les actions et leur mise en œuvre doivent être étudiées avant leur décision de lancement. On sélectionnera les actions selon la loi de Pareto (80%/20%) et la valeur crée. On utilisera la matrice d’impact pour définir et prioriser les plans d’actions (impact en terme de création de valeur et de consommation de ressources). On valorisera l’impact sur les ventes, le résultat opérationnel, le cash, les capitaux employés. Les processus contributifs

Maint.

Prod.

Sup. Chain.

Ventes

Résultat

Cash

Action 1 Levier

IMPACT

Action 2 Action 3 Levier Action 4 Action 5 Levier Action 6

Figure 3.3 – La matrice d’impact.

Le choix étant effectué, on élabore une fiche de plan d’actions qui décrit l’impact sur les ventes, le résultat opérationnel, le cash et les capitaux employés.

2.2. Fixer les objectifs de performance des responsables budgétaires Niveau N O B J E C T I F S

Niveau N – 1

Objectif N

A C T I O N S

Processus de délégation

V A L I D A T I O N

R E P O R T I N G Objectif N – 1

Construire son budget

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Les missions et les objectifs sont élaborés et déclinés top-down sur les fonctions et les processus. Cette déclinaison des objectifs aux plans d’actions permettra d’instituer un pilotage par les plans d’action mobilisant l’ensemble de l’organisation sur la mise en œuvre de la stratégie. En décentralisant les objectifs et les plans d’action, on privilégie la réactivité et l’efficacité à la précision des analyses et des chiffres. Cela permet d’orienter les ressources et d’anticiper le futur. Un objectif doit être cohérent, négocié, réaliste, daté et mesurable. ➤ Cohérent

Les objectifs individuels contribuent aux objectifs généraux de l’entreprise, amalgamant des priorités et des buts communs. Ils doivent être précis pour chaque individu concerné (par exemple, devenir leader sur un marché est trop vague pour un vendeur). L’objectif doit être chiffré, écrit et personnalisé (augmenter le chiffre d’affaires de son secteur de 3% en N – 1 par rapport à N). Chaque objectif se verra concrétiser par une et une seule action que l’intéressé devra accomplir. Si deux variables sont réellement importantes, il vaut mieux dédoubler l’objectif (diminuer le nombre de réclamations et réduire le temps de réponse de celles-ci). ➤ Négocié

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Ils devraient être conçus avec ceux qui sont chargés de les exécuter, dans un esprit de consensus sans pour autant nier le fait qu’ils puissent être tout simplement acceptés de confiance. Les objectifs doivent porter sur les aspects majeurs de l’activité et sélectionnés en fonction de la répercussion sur la rentabilité générale. Il faudra choisir entre les caractéristiques parfois contradictoires d’une activité. Certains d’entre eux pourront ne pas être retenus. ➤ Réaliste, bien qu’ambitieux

Chaque objectif doit être réaliste et réalisable, pour pouvoir être motivant pour l’intéressé par rapport au défi qu’il représente. Il est assez courant de voir une hiérarchie imposer des objectifs commerciaux par paliers (la direction générale demande 100, le directeur de région 120, et le chef des ventes 150), alors que les moyens accordés sont sur la base de 100. Fixer la valeur raisonnable d’un «bon niveau de performance» nécessite d’avoir plusieurs variantes de valeurs à choisir et de pouvoir adapter les moyens nécessaires pour s’y conformer. Le système de sanction-récompense lié à l’atteinte de l’objectif (prime exceptionnelle) doit inciter les personnes concernées à aller au-delà de la réalisation de leur objectif (si cela est jugé souhaitable).

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LA PRÉPARATION DU BUDGET

➤ Daté, échelonné dans le temps

Un objectif doit être daté (réduire les délais de règlement des clients de 10 à 5 jours au 1er juin). On peut en revanche retenir des objectifs intermédiaires par rapport à l’objectif final, afin de mesurer à l’avance et de manière régulière si la marche vers l’objectif final se déroule comme prévu (acquérir dix nouveaux clients par mois). ➤ Mesurable

Sans mesure, il n’y a pas de progrès possible. Les objectifs quantitatifs doivent inclure un résultat visible grâce aux critères de performance proposés (euro, nombre d’opérations, temps passé…). Lorsqu’ils sont qualitatifs, ils doivent décrire un résultat tangible qui sera évalué par des critères adaptés (taux d’absentéisme ou pourcentage de participation aux réunions pour apprécier un objectif d’amélioration du climat social). La réussite d’un responsable dans l’exercice de sa mission se compose principalement des résultats (efficacité) qu’il obtiendra dans un certain nombre de domaines. Il est essentiel de donner au responsable les moyens d’agir pour que ses résultats soient conformes aux attentes de ses clients. Néanmoins, l’obtention de ce résultat peut ne pas suffire. Il doit l’être dans le respect des contraintes financières (efficience) imposées par la direction. Les points clés de la performance s’exprimeront donc en termes: • d’efficacité: – coût: d’une prestation, d’un produit, d’un processus, d’une intervention, d’un projet, – qualité: conformité d’un service, d’un composant, d’une matière, d’une prestation, satisfaction des clients, – délai: de livraison, de mise en place, de conception, de dépannage, de traitement; • d’efficience: nombre de dossiers traités par agent, nombre de ventes à l’heure. Pour un responsable d’un service de maintenance, dont la mission est «assurer la bonne marche des installations et du parc machines en optimisant leurs coûts», les objectifs de performance s’expriment en termes de qualité de fonctionnement des installations, de délai de remise en service, de coût de non qualité et de coût de fonctionnement du CRB. Pour un directeur des ressources humaines, dont la mission est «assurer le développement des ressources humaines dans le cadre des objectifs économiques de l’entreprise», les objectifs de performance s’estiment en termes de coûts salariaux, de développement des compétences, de qualité du recrutement et de coût de fonctionnement du CRB.

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Que ce soit pour le responsable maintenance ou pour le DRH, l’absence de maîtrise d’une seule de ces composantes se traduit par une mauvaise performance globale… et peut se voir considérée comme un échec.

2.3. Formaliser des plans d’action à court terme Les objectifs de performance conditionnent toute la construction du système de contrôle. À chacun de ces objectifs correspondent des leviers d’action qui influent sur la performance du service. De leur choix dépendent la qualité et la pertinence des décisions.

Choisir des leviers d’action Savoir sélectionner les bons leviers d’action renforce les chances d’obtenir une meilleure performance. Pour le responsable du service maintenance 1, la qualité du fonctionnement des installations dépendra du programme d’entretien. Le délai de remise en service sera lié à l’optimisation des interventions, tandis que les coûts de non-qualité seront influencés par une maintenance préventive.

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Pour le DRH, les leviers d’actions seront différents. L’évolution des coûts salariaux dépendra des règles d’évaluation des performances et des révisions des rémunérations. Le développement des compétences est en corrélation étroite avec le plan de formation et le choix des organismes de formation. La qualité du recrutement est dépendante de la bonne définition de fonction exprimée par les demandeurs. Un bon climat social résultera aussi d’une politique de communication adéquate.

Après avoir effectué une sélection, il y a lieu d’établir une hiérarchie entre les différents leviers retenus. En fonction des objectifs de performance précédemment définis, il convient d’identifier quels sont les points forts et les points faibles du CRB. Ces derniers constituent les points clés à prendre en compte et font l’objet des plans d’actions. Les efforts du CRB doivent se porter en priorité sur les secteurs les plus vulnérables et s’accompagnent d’un processus formel comme décrit dans le paragraphe suivant.

Mettre en œuvre un plan d’action Un plan d’action commande l’implication des responsables à la correction des indicateurs déviants ou à la mise en place de nouveaux moyens d’action. 1. Suite des exemples cités précédemment.

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LA PRÉPARATION DU BUDGET

C’est en formalisant l’ensemble des actions concrètes que l’on peut atteindre les objectifs de performance. Un plan d’action est généralement finalisé sous l’aspect d’un tableau donnant dans le temps les précisions suivantes: – une brève description des actions, – la désignation de la personne en charge de son bon déroulement, – le calendrier de réalisation, – le résultat attendu de chaque action (augmentation de revenus, économies de coûts, meilleure qualité, réduction des délais…), – les moyens à mettre en œuvre (temps passé, investissements…), – l’indicateur permettant de suivre le résultat et le coût. Tableau 3.1 – Modèle de fiche de plan d’action. Résultat attendu

Date Actions

Responsable Début

Fin

®

Budget

Moyens nécessaires Nature

Indicateurs

Coût ©

®/©

Budget

Tableau de bord

Dans l’exemple concernant le DRH 1, l’amélioration des recrutements passe, entre autres, par une action d’analyse des besoins en collaboration avec les responsables demandeurs. Les résultats attendus de cette action seront de limiter le turnover des nouveaux recrutés à 1% et d’optimiser à 97% le taux de qualité des recrutements. Les indicateurs permettant de suivre les résultats du plan d’actions seront: «le nombre de départs en période d’essai/nombre de candidats recrutés», et «le nombre de recrutements appropriés à la description du poste». Quant au responsable maintenance 2, le résultat attendu de l’action (amélioration du délai de remise en service des installations) consistera en une remise en service des installations dans les deux heures. Ses résultats seront mesurés par deux indicateurs: la durée moyenne des arrêts et le nombre d’arrêts supérieurs à deux heures. 1. Suite de l’exemple précédent. 2. Suite exemple précédent.

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Construire son budget

Lorsque le plan d’action est suffisamment détaillé, le responsable dispose d’éléments suffisants pour: ➤ Valoriser son budget

Les résultats attendus pourront correspondre à une augmentation des produits d’exploitation ou à une réduction des charges d’exploitation, ainsi qu’à des améliorations qualitatives ou de délais. S’interroger sur les moyens nécessaires permet de déterminer les coûts supplémentaires à intégrer en termes de charges d’exploitation (par nature) ou d’investissements (quantification du projet et chiffrage des amortissements grâce au planning). ➤ Défendre son budget

Un plan d’action construit et valorisé donne des éléments factuels pour argumenter et négocier les moyens nécessaires auprès de sa hiérarchie dans le cadre des objectifs qu’elle aura fixés. ➤ Suivre son budget

La fiche du plan d’action doit intégrer des éléments de suivi afin de contrôler la production du CRB (résultats attendus) et sa productivité (résultats/moyens). Lorsque les indicateurs de suivi sont formalisés, ils peuvent être intégrés au tableau de bord. Ils évolueront dans le temps et se renouvelleront en fonction des progrès de l’entreprise et des modifications de la concurrence et de l’environnement (aussi bien externe qu’interne).

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Utilisation d’une fiche de plan d’action pour un projet d’investissement 1

Axes d’amélioration: réduire les coûts variables Objectifs: augmenter la rentabilité réduire le coût de revient des produits Action

Responsable

Projet n° 1

M. Dupont

Année 1 Démarrage 15.02.2001 Fin 15.02.2002

Investissement global (kF)

Gain annuel sur 5 ans (kF)

Avancement par semestre

Équipements: 500 000 euros Formation: 30 000 euros Études: 25 000 euros

Coûts matières: 180 000 euros

30.06.2001: 30%

Coûts de maind’œuvre: 120 000 euros

31.12.2001: 80%

1. Le chiffrage du retour sur investissement est traité au chapitre 7.

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LA PRÉPARATION DU BUDGET

Hypothèses: Diminution d’un kWh/T …

Aspects qualitatifs: Service au client Environnement Augmentation de la productivité

Aspects quantitatifs: Investissement de 550 000 euros Gain de 300 000 euros

Indicateurs*: Délai de récupération Valeur actuelle nette Taux interne de rentabilité

* Ces indicateurs de mesure de la rentabilité d’un investissement sont définis dans le chapitre 6.

2.4. Choisir les indicateurs La désignation des indicateurs découle directement des paramètres dont ils reflètent l’évolution. Les indicateurs s’exprimeront: – en valeur absolue (nombre total de défauts dans une période pour un produit donné); – en valeur relative (% de produits retournés par rapport au nombre de livraisons de la période); – en indice (indice des prix d’achat niveau 104 base 100 au 31.12. N – 1); – en notation (1 à 4… par exemple pour les fournisseurs). Ils peuvent être regroupés en fonction de leur utilisation:

Grille d’analyse par destination Les indicateurs de performance ont trait aux relations entre le service et son environnement. Ils seront diffusés aux niveaux hiérarchiques supérieurs ou adjacents. Les indicateurs de pilotage portent sur l’utilisation des moyens d’action propres d’un responsable (activités et ressources) et doivent décrire la gestion interne du service. En principe, ils ne sont pas communiqués.

Grille d’analyse par nature Les indicateurs d’activité portent sur le volume de produits ou prestations fournis ceux de productivité sur l’utilisation des moyens à disposition pour atteindre une production déterminée (production/effectif). On pourra également suivre des indicateurs de qualité (non-qualité classée par causes), de délai (écart entre deux dates) et de ressources humaines. D’autres grilles d’analyse peuvent aussi exister en fonction des besoins de l’entreprise, en particulier en croisant les natures et les destinations des indicateurs. En tout état de cause, l’indicateur doit être clair et compris de toutes les personnes qui l’utiliseront. Autrement dit, il est apte à rendre compte de la réalité en exprimant toutes les variations ou changements de l’activité. Il sera

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donc parfois nécessaire d’abandonner un indicateur lorsque celui-ci devient obsolète ou qu’il est incapable de traduire un événement majeur.

3

LE CHIFFRAGE DES OBJECTIFS ET DES PLANS D’ACTION

Pour faciliter la valorisation des budgets, il est opportun d’étudier comment: – se valoriseront les coûts et les marges; – sur quelles bases se fera cette valorisation en utilisant des normes élémentaires ou des coûts standard; – prendre en compte des aléas.

3.1. Valoriser les coûts et les marges Élaborer un budget serait aisé s’il suffisait d’estimer les volumes de produits et de services à vendre pour les douze mois à venir, puis de les multiplier par leur coût unitaire. Toute la difficulté réside dans l’évaluation de ces coûts: – les volumes et le mix 1 des ventes peuvent évoluer dans le temps; – les règles de fixation des coûts fixes ou variables sont associées aux volumes de ventes;

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– les coûts variables ne sont pas toujours strictement proportionnels aux volumes de ventes; la courbe d’expérience et les actions de progrès réduiront petit à petit le coût variable unitaire; – les activités sont interdépendantes entre elles. Privilégier la performance d’un CRB peut se faire au détriment d’un autre; – l’existence de goulots d’étranglement peut interrompre les travaux dans d’autres services et dégrader la structure des coûts.

Les coûts Il est important de connaître les différents types de coûts et d’appréhender leur utilisation. Seuls les coûts contrôlables devraient être budgétés au niveau 1. Le mix fait référence à la répartition des produits ou services vendus entre différentes familles ou sous-familles. On peut vendre des volumes identiques sur plusieurs mois et avoir des marges différentes en raison de la variation du mix, les marges étant plus ou moins favorables selon les familles de produits.

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LA PRÉPARATION DU BUDGET

des CRB. Autrement dit, seuls les coûts sur lesquels le responsable aura une action seront à prendre en compte. ➤ Coûts directs et indirects

Un coût direct est affectable sans ambiguïté sur un objet de coût (une prestation, un produit, un projet, un service, une activité). Par exemple, lors du lancement d’une nouvelle prestation, les frais de publicité relatifs au lancement devraient être affectés en totalité sur ses résultats, même si la campagne profite, entre parenthèses, à l’ensemble de la marque. Par opposition, un coût indirect est commun à plusieurs prestations ou produits, activités, projets, services… et devra donc être réparti (les frais de chauffage du siège social sont communs à tous les services). Généralement pour un projet, les coûts directs sont constitués des coûts d’achat et de main-d’œuvre directe; les coûts indirects sont plutôt des coûts d’approvisionnement, de planning, de suivi de projet… Il est à observer que ces coûts directs ou indirects peuvent être aussi bien variables que fixes. ➤ Coûts variables et fixes

Un coût variable suit une courbe strictement proportionnelle au volume de l’activité qui l’a généré, soit selon le volume de production (matières, maind’œuvre directe…), soit selon le volume des ventes (transport, commissions…). Par opposition, un coût fixe est indépendant du volume d’activité. Une charge fixe devrait théoriquement rester au même niveau durant toute l’année. Ce sont essentiellement des coûts de structure, qui ne varieront que lorsque celle-ci sera remise en cause. Pour un séminaire, les charges variables sont constituées des frais de documentation et de repas, et les charges fixes des coûts du consultant et de la salle. Coût total Coût variable

Coût fixe

Quantités

Figure 3.4 – Évolution coût variable/coût fixe.

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Dans la réalité de l’entreprise, ces concepts sont flexibles. Il est courant de dire que les coûts fixes évoluent par paliers. Un coût variable unitaire peut changer suite à une revalorisation des salaires (une des conséquences du passage aux 35 heures…). De même, un coût fixe peut globalement être modifié lors d’une augmentation importante de volume nécessitant l’embauche d’un comptable pour traiter l’accroissement du nombre de factures.

Coût total

Coût fixe

Volume/temps

Figure 3.5 – Courbe d’un coût variable.

Volume/temps

Figure 3.6 – Courbe d’un coût fixe.

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Certains coûts peuvent être semi-variables. À partir du moment où la part relative fixe ou variable devient significative, elle doit être identifiée et traitée comme telle. Dans une activité hôtelière, la part de l’énergie consommée par les cuisines est proportionnelle à l’activité des cuisines, l’autre part consommée pour chauffer le bâtiment est pratiquement fixe. Il en est de même des coûts d’entretien. L’entretien systématique est variable en fonction de l’utilisation des équipements de la cuisine, l’entretien préventif devenant un choix de politique.

La connaissance des charges variables et fixes facilite les simulations budgétaires en faisant ressortir l’incidence d’une variation d’activité sur le résultat et les coûts, ainsi que le montant supplémentaire de frais fixes que l’on peut tolérer suite à une augmentation du volume d’activité. En matière de contrôle budgétaire, cette distinction permettra également de vérifier si un écart de coût est dû à la variation du volume d’activité ou à un incident.

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LA PRÉPARATION DU BUDGET

Les marges Une marge est, en principe, la différence entre le chiffre d’affaires et les coûts. Paradoxalement, il n’existe pas de définition légale. En conséquence, celle-ci peut varier d’une entreprise à une autre. Il appartiendra aux contrôleurs de gestion de définir le niveau de marge répondant aux besoins des utilisateurs. Les marges n’apparaîtront que dans les centres de profit. Tableau 3.2 – Deux types d’analyse. Analyse selon l’avancement

Analyse selon le point mort

Prix de vente – Coût d’achat = Marge sur coût d’achat

Prix de vente – Coûts variables = Marge sur coûts variables

– Coût de transformation = Marge sur coût de production

– Coûts fixes directs = Marge sur coûts fixes directs

– Coût de distribution = Marge sur coût de distribution

– Coûts fixes indirects = Marge sur coûts de revient

– Frais généraux = Marge sur coût de revient

➤ Analyse selon l’avancement

• La marge sur coûts d’achat est appelée marge commerciale dans les entreprises de négoce. C’est le premier indicateur de leur activité qui tend à avoir un taux constant. Son évolution dans le temps dépendra de plusieurs paramètres: prix, consommations de marchandises vendues, coûts d’achat des marchandises vendues, mix-produits. La marge sur coûts d’achat correspond plutôt à une marge brute dans les entreprises industrielles. Elle découle du montant des achats de matières premières consommables dans la production, et est donc principalement un indicateur de productivité matière. Cependant, son évolution peut provenir de plusieurs facteurs: variations des prix de vente, des matières premières, des quantités consommées, du mix vendu. • La marge sur coût de production traduit la performance des sites de production et permet de comparer entre elles les performances des sites comparables par leur activité, leur process et leur taille. • La marge sur coût de distribution est le résultat d’exploitation de l’entreprise qui, en excluant les mouvements à caractères financiers et fiscaux, permet d’apprécier la performance industrielle et commerciale d’entreprises dotées de politiques de financement différentes. Cette marge-là est représentative

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Construire son budget

de la performance purement commerciale, lorsque les coûts de production se trouvent valorisés en valeurs standards. ➤ Analyse selon le point mort

• La marge sur coûts variables indique la performance des activités ou des produits. Si elle se révèle négative, on envisagera sérieusement d’abandonner l’activité ou le produit, en dehors de toute autre considération (stratégique, commerciale, sociale…). Lorsque cette marge est égale aux coûts fixes de l’entreprise, on dit que l’activité du centre de profit est au point mort 1. Celui-ci est atteint lorsque le chiffre d’affaires couvre exactement les charges variables et fixes. En deçà, le centre de profit est en perte. Après son franchissement, il commence à être rentable. Le point mort s’exprime en volume de ventes (coûts fixes globaux/marge sur coût variable unitaire) ou en chiffre d’affaires (coûts fixes globaux/taux de marge sur coût variable unitaire). Coût total

Chiffre d’affaires

Coût variable + coût fixe

Coût variable

Coût fixe

Point mort

Quantités

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Figure 3.7 – Recherche du point mort.

La connaissance du point mort permet d’évaluer le risque des prévisions budgétaires de son CRB. On comprend aisément que le risque n’est pas le même si la marge de sécurité (chiffre d’affaire budgété – chiffre d’affaire du point mort) s’élève seulement à 2% ou à 30%. Lorsque la marge de sécurité est trop faible, plusieurs leviers d’action sont à la disposition du responsable du centre de profit pour abaisser le point mort. Il peut augmenter les prix de vente, et le volume des ventes, réduire les coûts variables et les coûts fixes, ou encore améliorer le mix des ventes. Le résultat des diverses simulations conduit souvent à utiliser les effets combinés de deux ou trois des leviers d’action. 1. On emploie aussi couramment le terme de «seuil de rentabilité».

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LA PRÉPARATION DU BUDGET

• La marge sur coûts fixes directs est un très bon indicateur pour décider s’il faut exécuter une activité en interne ou la donner en sous-traitance. ➤ La marge sur coût de revient

Dans les centres de profit, les objectifs sont le plus souvent fixés en termes de résultat opérationnel, c’est-à-dire avant frais financiers, impôt société et éléments exceptionnels. La marge mesure le résultat lié à l’activité d’un centre de profit après renouvellement des immobilisations (dotations aux immobilisations).

Les investissements Les investissements en immobilisations incorporelles (brevet, licence, marque…), corporelles (bâtiment, outillage, informatique, mobilier…) et financières (prêt, prise de participation) n’auront aucune incidence directe sur les coûts ou les marges, puisque la dépense sera inscrite au bilan et non au compte de résultat. Toutefois, il faudra prendre en compte les amortissements qui constatent l’usure ou l’obsolescence d’une immobilisation 1. Cette perte de valeur constitue un coût supplémentaire dans les frais de fonctionnement du CRB. Son montant est calculé soit en mode linéaire avec une annuité constante (montant de l’investissement/nombre d’années d’amortissement), soit en mode dégressif avec une annuité plus forte les premières années et plus faible par la suite. L’amortissement commence à la date de mise en service de l’investissement.

3.2. Créer un fichier de normes élémentaires et de coûts standard Le plan comptable général définit le coût standard comme un coût évalué a priori soit pour faciliter certains traitements analytiques, soit pour permettre le contrôle de gestion par l’analyse des écarts 2. Il est préétabli avec précision par une analyse à la fois technique et économique. Il présente généralement le caractère de norme. L’utilisation de normes et de coûts standard réduit le temps consacré au chiffrage des objectifs et des plans d’action et permet des simulations plus rapides.

1. Pour les immobilisations corporelles (sauf terrain) et quelques immobilisations incorporelles. 2. L’analyse des écarts sera traitée au chapitre 10.

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Ces normes élémentaires s’expriment en: – unités physiques: nombre de dossiers, de kilos, de minutes, d’heures machine, de piqûres… – unités monétaires: prix des matières au kilo, prix de cession interne par transaction, marge par dossier, taux horaire… Les coûts standards ou coûts préétablis sont des coûts prévisionnels définissant les dépenses à engager pour parvenir aux objectifs dans des conditions normatives d’exploitation. Coût standard = Norme quantitative ¥ Norme de prix (ou de coût unitaire) En production, les normes élémentaires portent sur le mode d’utilisation des installations (type de machine, circuit de fabrication, vitesse, cadence, rendement…), l’utilisation des matières (consommation), le temps d’utilisation de la main-d’œuvre (opération par opération)… Normes standard à retenir pour un budget de production

1. Entreprises à process continu (industries chimiques, sidérurgie…): standards techniques établis à partir des formules de composition déterminant le dosage des matières, la quantité respective de produits à obtenir. 2. Entreprises fabriquant des lots (automobiles, électroménager…): nomenclatures définissant les éléments à réaliser, les matières à employer et les quantités à mettre en œuvre, ainsi que les gammes opératoires précisant la qualification de la main-d’œuvre et le temps d’exécution. 3. Entreprises travaillant sur commandes (imprimerie…):

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devis faits à partir de normes spécifiques à la commande.

Dans le domaine des approvisionnements, les normes standard sont déterminées par des données unitaires de prix d’achat des matières premières, le nombre de commandes prises, le nombre de réceptions effectuées, le nombre de mises à jour de fichier… En gestion du personnel, les normes élémentaires concerneront le coût horaire de main-d’œuvre catégorie par catégorie, les taux de charges sociales, les taux de primes par objectif… Dans le domaine commercial, les normes seront liées au prix de vente à l’unité, au taux de remise ou de ristourne, au taux des commissions, au taux des primes sur objectif, au nombre de visites pour un commercial, au nombre de clients…

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LA PRÉPARATION DU BUDGET

Dans des services administratifs, on identifiera un coût de fonctionnement par catégorie de personnel, incluant le coût des locaux occupés, du téléphone, de la micro-informatique, des fournitures diverses… Pour être pertinents, ces coûts prévisionnels ne devront pas être simplement extrapolés à partir de la tendance observée dans un passé récent, mais à partir des coûts normés, incluant des facteurs de progrès et utiles au contrôle. Ils expriment plus ou moins la volonté de progrès en fonction des principes de base qui ont servi à leur établissement. Lorsqu’ils existent, il peut être intéressant de décliner les éléments standard par rapport à une référence métier ou sectorielle, à moins que ce ne soit par rapport à une référence interne (meilleure agence de France). Se créer un fichier de ses propres normes élémentaires permet de structurer les hypothèses de travail. Elles peuvent être classées par catégories: revenus, coûts, marges, puis par critères en distinguant d’une part les coûts variables et fixes, et d’autre part les coûts directs ou indirects si le CRB a plusieurs activités. Par exemple, pour un centre de profit, on peut constituer une grille d’analyse des coûts (tableau 3.3). Tableau 3.3 – Grille d’analyse des coûts.

Coûts directs

Coûts indirects

Coûts variables

Coûts fixes

Commissions Prime du responsable commercial Frais de facturation

Salaire fixe du responsable commercial Salaires des équipes techniques Frais de déplacement Frais de formation Frais de développement produit

Intéressement à la marge après charges communes Frais financiers imputés

Salaire du responsable de département Salaire de la secrétaire Salons professionnels

Lors de l’élaboration des budgets, il est particulièrement recommandé de: • standardiser les coûts variables (directs ou indirects) en se servant des normes élémentaires et de coûts standard afin de pourvoir: – chiffrer plusieurs scénarios, – réaliser rapidement des simulations, – modifier avec pertinence la version budgétaire, eu égard aux demandes de la direction générale ou de la direction du groupe; • budgéter les frais fixes: – fonction par fonction, – CRB par CRB, – rubrique budgétaire par rubrique budgétaire.

Construire son budget

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3.3. Prendre en compte les aléas Néanmoins on devrait prendre en compte les événements accidentels qui risquent d’affecter l’exploitation. Un aléa est un événement imprévisible dont on ne connaît pas en plus l’intensité. On distinguera les aléas usuels (pannes sur une machine) des aléas exceptionnels (impayé important). Aucune entreprise n’y échappe à un moment ou à un autre. Pour évaluer l’incidence financière de l’aléa, il est recommandé de: – connaître les variables susceptibles d’être modifiées par un aléa; – déterminer les fourchettes de ces aléas; – choisir une stratégie face aux aléas: gestion ou prévention des crises. On ne doit pas sous-estimer l’impact de l’aléa sur les coûts d’exploitation. Il vaut mieux prévoir une ligne budgétaire spécifique sous forme de provision.

DEUXIÈME PARTIE

LES DIFFÉRENTS TYPES DE BUDGETS

4 LE BUDGET COMMERCIAL1

outes les entreprises, et même les organisations à but non lucratif, sont concernées par le budget commercial. L’objectif du budget commercial est de déterminer le futur chiffre d’affaires de l’entreprise ou, pour les organisations, les recettes à venir (cotisations, subventions…).1

T

Le programme des ventes reste l’élément primordial de l’édifice budgétaire. Il doit être cohérent avec le plan à moyen terme fixé par la direction de l’entreprise. Il sera établi en fonction des contraintes du marché, de la concurrence, de la capacité de production, et de sa propre capacité à modifier ses contraintes. La réalisation du chiffre d’affaires ou des recettes passe par la mise en place d’un plan d’actions commerciales qui regroupe l’ensemble des moyens nécessaires pour atteindre les objectifs des ventes prévisionnelles. Les moyens à mettre en œuvre regardent à la fois la politique de tarification, la politique en matière d’actions promotionnelles, celle de gestion des ventes et l’organisation administrative. Le budget commercial s’intéresse à la détermination du programme des ventes, l’estimation du chiffre d’affaires, l’évaluation des moyens commerciaux et des charges d’exploitation, et la consolidation au niveau des chefs de vente, des directeurs commerciaux et de la direction générale de l’entreprise.

1. Certaines des techniques budgétaires évoquées dans ce chapitre intéresseront également tous les CRB.

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1

LES DIFFÉRENTS TYPES DE BUDGETS

DÉTERMINATION DU PROGRAMME DES VENTES

Le programme des ventes nécessite l’étude des éléments de prévision à court terme sur les douze derniers mois, au travers des données internes et externes disponibles. Celles qui sont internes seront évidemment extraites de l’analyse des statistiques commerciales (historique des ventes, taux de renouvellement des cotisations, taux de fréquentation à des expositions…), de la situation du carnet de commandes et de la liste des produits existants. Celles qui sont externes seront intégrées à la suite: – des études de la conjoncture globale (pouvoir d’achat, désirs d’achat, environnement politique, législatif…); – des prévisions du niveau des marchés de l’entreprise (France, étranger); – des données de marketing (études de marché, tendance INSEE de l’économie, compétitivité produits, situation de la concurrence, actions promotionnelles, prix…); – des informations recueillies auprès des organismes et réseaux professionnels, sans oublier les salons. On prendra en compte des objectifs fixés par la lettre de cadrage, qui s’exprimeront en termes d’évolution ou de maintien du chiffre d’affaires ou de la part de marché, de lancement de nouveaux produits ou de nouvelles prestations… Les responsables commerciaux procéderont à une analyse des forces et faiblesses de l’entreprise (compétence des vendeurs, qualité du réseau de distribution, image de marque…). Chaque responsable au sein de l’organisation commerciale élaborera ses propres prévisions de ventes quantitatives, en évaluant les possibilités de réalisation, au mois le mois, produit par produit, et en y incluant des projets de lancement de nouveaux produits ou d’abandon de produits obsolètes. Il est recommandé de construire plusieurs scénarios selon les familles de produits, les marchés ou les segments de clients. Certaines entreprises élaborent systématiquement trois versions: une optimiste, une moyenne et une pessimiste. D’autres ne mettent au point qu’une seule version, puis déclinent une version modifiée au vu de l’analyse des risques de réalisation du premier scénario. Organisation syndicale

Le budget d’un syndicat est fonction des recettes quasi certaines, compte tenu du taux habituel de renouvellement des cotisations. Un budget bis est basé sur une espérance de nouvelles cotisations et de signatures de contrats de droit syndical. Par prudence, les crédits ne seront débloqués qu’au fur et à mesure des encaissements.

Le budget commercial

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Le programme des ventes doit être présenté selon un format compatible avec le système d’information de l’entreprise: par famille de produits ou de prestations, par type de marché (France, export), par canal de distribution (grossiste, GMS, détaillants) par segment de clientèle. Plus la prévision s’avère difficile, plus elle se révèle indispensable. Les techniques de prévisions s’appliquent particulièrement aux prévisions des ventes. Différentes méthodes de prévisions s’offrent aux entreprises. Elles sont autant quantitatives que qualitatives.

1.1. Méthodes quantitatives Une analyse prospective du marché aura recours à des techniques statistiques, qui s’appuieront à leur tour sur les données du passé afin d’extrapoler et d’anticiper les ventes futures.

Analyse des séries chronologiques On ne peut employer ces techniques que lorsque les informations sont disponibles sur plusieurs années antérieures (au moins deux ou trois) et que les tendances sont claires ou relativement stables. Il faut cependant dans un premier temps corriger les résultats à cause de la saisonnalité et de facteurs exogènes significatifs (campagne de publicité importante, grèves…).

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Les modèles de séries chronologiques sont des modèles par extrapolation qui prolongent l’évolution du passé vers le futur. Ils reposent sur la stabilité ou sur la continuité temporelle et supposent donc qu’aucun bouleversement ne s’est produit dans l’espace économique de l’entreprise. L’analyse graphique permet de mieux visualiser ces phénomènes en mettant en évidence des tendances de fond, des cycles saisonniers ou des ruptures de rythme. Une courbe de ce type (figure 4.1) donnera lieu à de multiples interprétations. En effet, plusieurs interprétations sont possibles. Un événement exceptionnel a perturbé les ventes qui retrouveront leur rythme naturel sans pour autant rattraper les volumes perdus (scénario 1). Une autre sorte d’événement a décalé les ventes, mais elles seront récupérées sur les périodes suivantes (scénario 2). Le niveau d’activité a été modifié et les ventes vont reprendre la même progression mais à un palier inférieur (scénario 3). L’activité est en déclin sans espoir de redressement (scénario 4). Dans tous les cas de figure, il sera nécessaire de disposer d’informations complémentaires pour interpréter correctement les ruptures ou les changements de tendance.

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LES DIFFÉRENTS TYPES DE BUDGETS

Volumes Scénario 2 Scénario 3 Scénario 1 Scénario 4

N–3

N–2

N–1

N

N+1

Temps

Figure 4.1 – L’analyse graphique.

La projection des tendances du passé sur le futur peut aussi résulter de la reconduction du taux de croissance passé: ventes N + 1 = ventes N ¥ (1 + taux de croissance observé). Le taux de croissance observé pouvant être: – [ventes N – ventes (N – 1)]/ventes N – 1, – moyenne simple sur les trois dernières années, – moyenne pondérée sur les trois dernières années. On pourra également procéder en recherchant uniquement la tendance générale. Cette méthode suppose que celle-ci soit significative et ne tienne pas compte des aléas. Différentes tendances peuvent apparaître du type fonction linéaire, exponentielle, puissance, quotient ou logarithmique. Les modèles de séries chronologiques sont nombreux et parfois complexes, mais certains sont plus fréquemment utilisés que d’autres par les entreprises.

Modèles explicatifs Les modèles explicatifs (dits encore économétriques) sont des modèles admettant que la valeur d’une certaine variable (celle que l’on cherche à prévoir) est fonction de plusieurs autres variables, et ne découle pas de la seule période de temps considérée. On s’en servira lorsque sur des données historiques, il est possible de déterminer explicitement les corrélations entre le facteur à prévoir et d’autres facteurs. À l’aide de ces techniques de prévision, le responsable commercial pourra développer toute une gamme de prévisions correspondant à des valeurs multiples de différentes variables. À titre d’exemple, on déterminera les volumes de ventes, pour l’année à venir, en fonction d’actions sur les prix, du budget de publicité, des remises consenties aux grossistes…

Le budget commercial

83

Pour créer un modèle explicatif, il faudra sélectionner des variables causales, les lier entre elles. Parmi les modèles les plus utilisés on retiendra ceux basés sur la corrélation et l’élasticité. Un événement se corrèle avec un autre lorsque la variation de l’un entraîne la variation de l’autre. La corrélation pourra être d’ampleur différente ou non, instantanée ou décalée (exemple: ventes de voitures et consommations de pneumatiques). Il n’est pas toujours facile de trouver une variable extérieure qui génère le chiffre d’affaires étudié avec une certaine stabilité dans le temps. Les volumes de ventes de nombreuses entreprises sont soumis aux aléas de la météo: ventes de bières, d’eaux minérales, ventes de recharges de butagaz… Certaines entreprises n’hésitent pas à pratiquer des relevés météo au quotidien, et exploiteront ces séries statistiques pour prévoir leurs ventes. L’élasticité se définit comme le rapport entre les variations, absolues ou relatives, de deux phénomènes économiques. Si y mesure l’importance du phénomène A et x celle du phénomène B, on appelle élasticité absolue de A par rapport à B le rapport de vy/vx, est élasticité relative de A par rapport à B le rapport (vy/y)/(vx/x). L’exemple type est l’élasticité des prix et des volumes. Si l’on constate que le prix augmente de 1%, la demande diminue de 2%, alors l’élasticité est quantifiée de la manière suivante: – 0,02/+ 0,01 = – 2. Les entreprises devant faire face à une forte concurrence ou ayant des produits ou des prestations banalisées sont très sensibles à cette élasticité prix-volume.

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Répartition saisonnière des ventes À ce stade, la mensualisation est une étape décisive, car c’est lors de cet exercice que l’on pourra s’assurer du bien-fondé entre les prévisions de ventes et les moyens techniques, humains et financiers disponibles dans l’entreprise. Cette liaison est particulièrement importante car elle doit être en phase avec le budget de production et celui de trésorerie. La mensualisation des ventes interviendra très tôt dans l’élaboration du budget commercial, en particulier pour les activités fortement saisonnières. Le chiffre d’affaires ou les recettes seront éclatés au mois le mois, voire au jour le jour (cas d’une activité de loisir, de tourisme…). Les itérations porteront sur des périodes précises. Même si cette procédure alourdit le processus budgétaire, elle est indispensable pour dimensionner les effectifs (dans le but de ne pas embaucher le personnel trop tôt). La répartition mensuelle (ou trimestrielle) des ventes sera effectuée à l’aide d’un coefficient de saisonnalité. Celui-ci pourra être calculé suivant plusieurs méthodes. La méthode de base est de prendre en compte le calcul de fin de mois moyen (ou trimestre).

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LES DIFFÉRENTS TYPES DE BUDGETS

Tableau 4.1 – Répartition trimestrielle. Trimestre 1

Trimestre 2

Trimestre 3

Trimestre 4

Total

Année 1 Année 2 Année 3

1 000 1 200 1 400

900 1 100 1 300

1 400 1 800 1 600

800 900 1 000

4 100 5 000 5 300

Moyenne trimestrielle

1 200

1 100

1 600

900

4 800

Coefficient trimestriel

1 200/4 800 = 25%

1 100/4 800 = 22,9%

1 600/4 800 = 33,3%

900/4 800 = 18,8%

Si la prévision annuelle pour l’année 4 est de 6 000, la répartition trimestrielle des ventes sera: • T1 = 6 000 ¥ 25,0% = 1 500 • T2 = 6 000 ¥ 22,9% = 1 374 • T3 = 6 000 ¥ 33,3% = 2 000 • T4 = 6 000 ¥ 18,8% = 1 128

1.2. Méthodes qualitatives La prévision qualitative utilise des méthodes d’analyse qui font appel à des données subjectives et générales concernant le produit et le marché. Elles seront pratiquées en l’absence de fournitures de données historiques.

Les méthodes d’enquête encore appelées «études de marché» On distingue principalement: – les études de motivation: connaître les raisons d’achat ou de non-achat; – les études de consommation (exemple: le panier de la ménagère); – les études de clientèle, panel, segment… Ces enquêtes peuvent également porter sur des produits directement concurrents ou complémentaires et mener à une analyse des créneaux, qui peuvent dégager une opportunité dans laquelle l’entreprise s’engouffrera en créant, par exemple, un produit nouveau.

Les simulations ou méthodes des «marchés-tests» Dans le cadre d’un groupe, il est opportun de tester un produit sur une agence, une région. C’est ce que La Lyonnaise des eaux a pratiqué avec le

85

Le budget commercial

câble en le testant d’abord sur deux régions en France. Les résultats ont servi d’enseignement avant le lancement général du produit. Exemples de tableaux de présentation d’un budget des ventes 1 Ventes (volume ou valeur)

Total

Activité 1

Activité 2

Activité 3

Réel N Probable N % Budget N + 1 %

Chiffre d’affaires Pays

Réel N Valeur

Probable N %

Valeur

Budget N + 1

%

Valeur

%

Pays 1 Pays 2 Pays 3 Pays 4 Pays 5

Ventes (volume ou valeur)

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Principaux clients

Activité 1

Réel N

Probable N

Activité 2

Budget N+1

Réel N

Probable N

Activité 3

Budget N+1

Réel N

Probable N

Budget N+1

Client 1 Client 2 Client 3 Client 4 Client 5

Activité 1

Vendeur Dubois

Vendeur Durand

Vendeur Dupont

Janvier Février Mars Avril Mai Juin

1. Ces exemples sont présentés uniquement à titre d’illustration. Il existe bien d’autres modèles.

Pays 3 Entreprise Concurrent 1 Concurrent 2

Pays 2 Entreprise Concurrent 1 Concurrent 2

Pays 1 Entreprise Concurrent 1 Concurrent 2

Pays

Part de marché

Réel N

Probable N

Total

Budget N+1

Réel N

Probable N

Activité 1 Budget N+1

Réel N

Probable N

Activité 2 Budget N+1

Réel N

Probable N

Activité 3 Bud et N+1

86 PRÉPARER, DÉFENDRE ET SUIVRE SON BUDGET

87

Le budget commercial

Les enquêtes de conjoncture Un certain nombre d’organismes comme ceux de direction de la conjoncture de la Banque de France, ou de INSEE 1, pour les plus connus 2, établissent continuellement des enquêtes de tendance sur les prévisions d’activité des différents secteurs de l’économie.

Les méthodes de connaissance de son marché En interne, on peut avoir recours à la méthode d’agrégation des estimations remontées par le personnel de vente. En effet, les vendeurs sont proches des clients et sont ponctuellement les mieux placés pour apporter des informations sur les données qualitatives concernant le marché. Les prévisions des vendeurs sont à prendre en considération, mais devront être pondérées en fonction de leur optimisme ou de leur pessimisme naturel. En externe, on se référera aux avis des experts et à la collecte d’informations via les canaux de distribution. Quelle que soit la méthode, il est recommandé de confronter plusieurs approches. Dans une entreprise de produits grand public, les prévisions de vente sont élaborées suite à un croisement entre les trois approches suivantes: Approche globale

Approche fine marketing

Direction générale

Marketing

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Définition de la politique générale industrielle = saturation de la capacité usine

D’où Q Prod. Max

Détermination du potentiel de produits et de la part de marché

Approche par régions et par familles de produits à partir des statistiques de ventes passées et de paramètres économiques locaux

D’où Q Vente Max

Approche fine terrain Direction des ventes Définition des orientations générales de la politique commerciale

D’où Prévision de ventes deux hypothèses : des attachés commerciaux : Q Vente Fort Q Vente Faible Secteur 1 Secteur 2

Objectifs de ventes pour l’année N + 1

1. Institut national des statistiques et des études économiques. 2. IPECODE, CCA, COFREDA.

88

2

LES DIFFÉRENTS TYPES DE BUDGETS

ESTIMATION DU CHIFFRE D’AFFAIRES

Prévoir le chiffre d’affaires consiste à multiplier les quantités prévues par les prix de vente. À l’aide des résultats prévisionnels mixés aux objectifs généraux, la direction commerciale pourra établir des simulations et des arbitrages à partir des paramètres de quantités, de prix de vente. La politique des prix de vente d’une entreprise résulte d’une alchimie plus ou moins savante entre ces différents paramètres. La connaissance des prix de la concurrence, le système de ristournes et de remises ainsi que les conditions de paiement accordées aux clients ont une forte influence sur cette politique. Il en est de même du pouvoir de persuasion des vendeurs ou des distributeurs, de la sensibilité au manque de charge de la production, de la valeur donnée à telle qualité du produit ou à l’effet de gamme. La formule de prévision du chiffre d’affaires est généralement: Quantité de produits ¥ Prix de vente actuels

= Chiffre d’affaires en valeur actuelle ¥ Coefficient d’évolution des prix

= Ventes brutes (ou ventes à prix catalogue) – Commissions, remises… = Ventes nettes prévisionnelles Pour construire une politique de prix de vente, on ne se contentera pas de l’adage «c’est le marché qui fixe le prix». Nous pouvons dégager quelques orientations. ➤ Prix de vente et prix de revient

Pour certains produits, l’élasticité du prix ou le positionnement par rapport à la concurrence, pourra avoir une forte influence sur les quantités vendues. Le prix de revient fluctue sensiblement selon les variations de volume. ➤ Prix de vente et propriété du produit

Nul ne doute que la mode dans le secteur du prêt à porter soit une notion difficile à quantifier. Il en est de même pour la vente d’un certain nombre de produits qui échappe à toute logique de valeur réelle parce que la marque est censée être synonyme de qualité ou représentative d’un phénomène de mode.

Le budget commercial

89

Voilà deux des raisons pour lesquelles une clientèle spécifique accepte de payer des prix plus élevés que la moyenne. ➤ Prix de vente et péréquation

Pour améliorer la charge usine ou décrocher une première affaire chez un nouveau client, il est parfois décidé de vendre à un prix très bas, voire à marge zéro. Aucune entreprise ne pouvant généraliser ce type de vente, il faudra effectuer une péréquation avec les autres offres, à l’année ou au moins au semestre. ➤ Niveau de prix et niveau de qualité

Dans certaines catégories de produits, on trouvera des niveaux différents de qualité (par exemple dans le domaine des textiles ou de l’électroménager). Si l’on veut que le client établisse une correspondance entre le niveau de qualité et celui du prix, il faut veiller à retrouver de fortes différences entre les groupes de produits. ➤ Prix et gestion client ou gestion produit

Dans certains métiers on gère la rentabilité produit par produit. Or, très souvent, le service est mieux perçu par le client pour certains produits de la gamme. Par exemple, en matière d’assurance, le client comprend l’intérêt du service, et admet des différences sensibles de prix dans l’assurance de personne ou dans des produits d’investissements financiers… alors qu’il ne cherchera qu’un prix bas pour une assurance automobile au tiers.

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➤ Prix et spectre de décision

Chez de nombreux clients, les circuits de décision 1 sont constitués par différents interlocuteurs (acheteur, technicien, utilisateur, prescripteur). Les décideurs peuvent être multiples et avoir des critères de jugement différentiés. L’un pourra valoriser le facteur marque ou sécurité, un autre le prix et les conditions de paiement, un autre les conditions de l’après-vente. En tout état de cause, une fois qu’on aura identifié le principal décideur, on tiendra compte de ce qui lui tient le plus à cœur pour établir le prix final. Les conditions de règlement seront négociées en même temps que les prix de vente. Les estimations prévisionnelles et les objectifs fixés par la direction financière, commerciale ou générale pour l’année à venir auront une incidence directe sur le budget de trésorerie. 1. Encore appelé «spectre de décision».

90

3

LES DIFFÉRENTS TYPES DE BUDGETS

ÉVALUATION DES MOYENS COMMERCIAUX ET CHIFFRAGE DES CHARGES D’EXPLOITATION

On ne répétera jamais assez que les moyens commerciaux doivent être en rapport avec le chiffre d’affaires (ou les recettes) visé, la marge bénéficiaire prévue et les objectifs de dépenses fixés par la direction générale. Leur dimensionnement nécessite de définir un plan d’actions. Il faudra alors rechercher la cohésion entre les six éléments du mix-marketing (marché, produit, prix, communication, force de vente, publicité et promotion) avec les politiques de l’entreprise et les exigences qui en découlent. La présentation des coûts commerciaux devra également obéir à des règles compatibles avec celles du système d’information de l’entreprise, et à un découpage calqué sur celui des centres de responsabilité. Des regroupements peuvent être effectués par produits, familles de produits (ou de prestations), par région, par zone géographique… Les budgets de frais commerciaux sont destinés à financer les coûts directs commerciaux, c’est-à-dire composés de la force de vente, de la distribution, de la logistique, du conditionnement, de la mise en service, de la garantie (dans certains cas), de la publicité, de la promotion des ventes, des foires, des expositions, des salons… Ils financeront également les frais généraux commerciaux ou coûts indirects 1, c’est-à-dire ceux de la direction commerciale, de l’administration des ventes et du service marketing. Tableau 4.2 – Les différents frais commerciaux. Budget de la force de vente Salaires Commissions Primes/objectif Charges sociales Téléphone Déplacements Amortissement véhicules

Budget ADV, direction, marketing Salaires Charges sociales Frais de gestion Amortissements locaux, Micro-ordinateurs, mobilier Frais de structure imputés Frais financiers sur encours clients

Budget d’actions commerciales Publicité Promotions, PLV Foires, expositions, salons Études de marché Plaquettes d’informations Mailings Missions, réceptions Mécénat

1. Le chapitre 6 décrit trois méthodes permettant d’améliorer la maîtrise des coûts indirects commerciaux.

Le budget commercial

91

Le dimensionnement des moyens commerciaux nécessite constamment de remettre à jour l’organisation commerciale: – nombre de vendeurs, qualification, intéressement aux résultats, – structure du réseau et des services support, – système de distribution.

Évaluation du nombre de commerciaux nécessaires dans une société de produits de grande consommation

Cette entreprise vend ses produits au travers de deux canaux de distribution: commerces de détail et des grossistes (ou distributeurs). Un commercial effectue en moyenne 4 visites par jour chez ses clients détaillants (moyenne estimée compte tenu du territoire à couvrir, du temps passé dans les trajets, de celui de la «visite» proprement dite et compte rendu nécessaire). Sur une période de 18 jours ouvrables en moyenne, il pourrait donc effectuer 72 visites par mois, soit 792 visites par an. Si la direction commerciale souhaite que chaque client soit vu 10 fois par an, le vendeur ne pourra visiter qu’environ 80 clients chaque année. Si la société a 1 300 clients, un rapide calcul déterminera qu’il faudra un réseau de 16 commerciaux.

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Pour les visites aux grossistes, la direction exige qu’elles aient lieu à raison de 6 par mois. Pour visiter les 200 grossistes, il faudra effectuer environ 1 200 visites par mois soit 13 200 visites par an. Compte tenu qu’un commercial est opérationnel 220 jours par an, et dans la mesure où il ne peut effectuer que 2 visites par jour, il faudra donc 30 commerciaux. Le rôle d’un commercial est de vendre et non de passer son temps à faire du traitement administratif. Ce dernier devrait être pris en charge par l’administration des ventes, ce qui aura pour conséquence un renforcement de la performance soit sur le plan qualitatif, soit sur le plan quantitatif.

Pour les équipes commerciales, la motivation passe essentiellement par la rémunération, d’autant qu’elle comporte généralement une partie variable importante. Dans beaucoup d’entreprises, cette partie variable est versée dès la signature du bon de commande, sans responsabiliser pour autant le commercial sur l’aboutissement de sa vente. Certaines ont réduit la partie variable, en introduisant une notion de rémunération liée à l’encaissement. La force d’encadrement aura soin de vérifier en permanence les compétences des vendeurs et les objectifs qu’ils ont à remplir.

92

4

LES DIFFÉRENTS TYPES DE BUDGETS

CONSOLIDATION AU NIVEAU DES CHEFS DE VENTE, DES DIRECTEURS COMMERCIAUX ET DE LA DIRECTION GÉNÉRALE DE L’ENTREPRISE

C’est en général à ce stade qu’interviennent les «négociations» finales sur les chiffres de ventes à réaliser, les niveaux de remises à accorder ou les moyens à mettre à disposition. Des éléments peuvent être retirés de la proposition budgétaire, car ils apparaissent souvent après consolidation, en contradiction avec les objectifs généraux et les propositions des autres centres de responsabilité budgétaire. À ce propos, il est évidemment indispensable que le budget commercial soit conçu comme un instrument de motivation, et non le contraire. Pour y parvenir, certaines pratiques (malheureusement encore trop fréquentes) sont à proscrire, et notamment: – la minimisation des objectifs de vente par les vendeurs, dans le but d’être certain de les atteindre, voire de les dépasser; – l’inflation des moyens nécessaires en personnel ou en frais de déplacement… pour «avoir de la réserve»; – l’incorporation, par le responsable, d’objectifs irréalisables, qui ont pour conséquence la démotivation du vendeur; – les modifications de dernière minute prescrites par les dirigeants commerciaux, sans consultation préalable des vendeurs… Le budget ne doit pas diviser, mais au contraire fédérer.

5 LE BUDGET DE PRODUCTION e budget de production concerne essentiellement les responsables des centres de coûts productifs, soit en milieu industriel ou administratif, soit dans les secteurs marchand et non marchand. Quelles que soient les organisations, la construction du budget de production est un processus assez complexe. En substance, on doit dimensionner et valoriser les moyens nécessaires à la réalisation de la production demandée. Cette production est constituée non seulement de biens tangibles, mais également de prestations, de dossiers ou d’affaires à réaliser sur une période donnée. Le budget de production sera bâti à partir du programme des ventes ou de la prévision d’activité ainsi que de la politique de stockage. Le dimensionnement des capacités de production aura une influence directe sur les budgets des approvisionnements, des investissements, des effectifs et de la trésorerie. L’élaboration d’un budget de production se déroule selon trois étapes: – la détermination du programme de production, – la valorisation du programme de production, – le calcul des coûts standard et le bouclage du budget de production.

L

1

LA DÉTERMINATION DU PROGRAMME DE PRODUCTION

Le budget commercial n’est pas forcément en harmonie avec la capacité de production disponible. En conséquence, il faudra mettre en adéquation l’appareil productif et l’objectif des ventes dans le programme de production.

94

LES DIFFÉRENTS TYPES DE BUDGETS

1.1. Les quantités à produire Le programme de production s’exprimera en termes de quantité selon le type d’activité: Industrie Nombre de produits finis

Service Nombre de voyages Nombre de crédits Nombre de couverts

Non marchand Nombre de dossiers Nombre de feuilles de maladie

Programme de production = Programme des ventes – Encours initial de produits semi-finis ou finis + Encours final de produits semi-finis ou finis Détermination du programme de production dans une usine des profilés en aluminium

Le programme des ventes prévoit de vendre 16  250 profilés A et 3 000 profilés B. Les stocks en début d’année sont de 2 892 profilés A et de 612 profilés B. Les objectifs de stocks de fin d’année ont été fixés par la direction à 1,8 mois de ventes pour A et 3,6 mois de ventes pour B, soit: – profilés A: (1,8 mois ¥ 16 250)/11 = 2 659 profilés; – profilés B: (3,6 mois ¥ 3 000)/11 = 982 profilés. La demande en production sera alors de: Profilés A: 2 659 – 2 892 + 16 250 = 16 017 profilés Profilés B: 982 – 612 + 3 000 = 3 370 profilés

Cette notion de stock se rencontre également en milieu administratif. Par exemple, les agences de traitement bancaires devront traiter à la fois les crédits vendus sur l’année, et tous les encours de crédits vendus les années précédentes mais qui ne sont pas encore arrivés à terme.

1.2. Les facteurs de production La phase suivante va consister à déterminer les conditions techniques de faisabilité de la production en listant les exigences en matière de maind’œuvre, de matière première, de composants, de sous-traitance et de temps machine.

95

Le budget de production

Ces calculs s’appuieront: – d’une part sur la nomenclature produit qui reconnaît les spécificités et quantités de matières requises pour chaque type de produits; Dans une usine de fabrication de vêtements de sport, la nomenclature indiquera:

Produits

Compositions

Bermuda

Coton simple: 2 mètres Un kit fourniture A (boutons, doublure…)

Survêtement

Coton molletonné: 3 mètres Un kit fourniture B (élastique, fermeture éclair…)

Parka

Coton duveteux: 2,5 mètres Un kit fourniture C (doublure, fermeture éclair…)

– d’autre part sur la gamme opératoire qui décrit le processus de production opération par opération, en précisant le temps homme et le temps machine nécessaires selon le type de produit ou de prestation. Pour ces mêmes produits, la gamme indiquera:

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Produits

Opérations

Temps homme

Temps machine

Bermuda

Découpe Montage

1 minute 5 minutes

2 minutes

Survêtement

Découpe Montage

1,5 minute 20 minutes

3 minutes

Parka

Découpe Montage

3 minutes 15 minutes

5 minutes

Ces paramètres devront assimiler des facteurs de déperdition qui peuvent apparaître au cours du processus de production: – déperdition au niveau de la matière: gâches, rebuts, chutes, pertes techniques (évaporation), pertes administratives (démarque inconnue); – déperdition au niveau de la main-d’œuvre de production: absentéisme (légal ou non), temps improductif (pannes, ruptures de stock, sous-activité, attentes, réunions, formations, pauses, grèves); – déperdition au niveau des équipements: réglages, pannes, entretien, incidents techniques, arrêt annuel, démarrages, nettoyages.

96

LES DIFFÉRENTS TYPES DE BUDGETS

Ces facteurs de déperdition matière, qui se soldent en général par un renchérissement des consommations, doivent s’insérer dans le budget d’approvisionnement. L’intégration se fera soit directement dans les nomenclatures, soit sous forme d’une ligne rectificative lors du calcul des consommations. Les facteurs de déperdition MO nécessitent d’être identifiés et mesurés cause par cause afin de pouvoir agir en conséquence. Les causes de dysfonctionnement obligent à maintenir une capacité supérieure aux besoins. On déterminera par la suite, en regard de la capacité de production actuelle, les besoins en main-d’œuvre (ou équipements) indispensables pour concrétiser la production demandée. La méthode à utiliser sera la suivante: Jours ouvrés de la période – Jours fériés – Congés payés = Journées de travail théoriques ¥ Horaire journalier

= Heures de travail théoriques – Absentéisme = Présence effective – Heures de présence non productives: pauses, délégation, pannes, formation… = Heures directes réalisables par homme ¥ Coefficient d’efficacité

= Heures standard réalisables par homme Effectif nécessaire = Volume de production demandé exprimé en heures /Heures standard réalisables par homme Cette étape a pour intérêt de mettre au même niveau la demande de production et la capacité de production. Si l’effectif nécessaire est supérieur ou inférieur à l’effectif actuel, on aura recours soit aux heures supplémentaires, soit au recrutement ou, au contraire, au chômage partiel ou encore au travail à temps partiel.

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Le budget de production Détermination des besoins en effectifs dans un centre de traitement des opérations bancaires (centre de coût productif administratif)

Unité d’œuvre*

Activités Remise de chèque

bordereau

Virement permanent

autorisation

Transfert de compte

transfert

Temps unitaire**

Volume mensuel

Minutes produites

0,20 mn

246

49

5 mn

8 638

43 190

14 mn

7 773

108 822 152 061 mn = 2 534 h

Total (mn ou h)

* L’unité d’œuvre est l’unité de mesure de l’activité d’un atelier. ** Temps gammé.

2 534

Heures productives Taux: heures productives/heures de production directe

1,08 2 736

Heures de production directe Taux: heures productives/heures de production directe et indirecte

0,067 197

Heures de production indirecte Taux: heures improductives/heures de production directe et indirecte

0,08 235

Heures improductives Total des heures de présence Taux: heures d’absence/heures de présence

3 168 0,2 634

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Heures d’absence Total des heures payées Nombre d’unités de temps par personne (UTP) sur une base de 35 h Nombre de personnes

3 802 27,16 28

Le taux d’absentéisme est de 20% (3 802 h/3 168 h) et le taux d’heures de présence non productives de 25% (3 168 h/2 534 h). En conséquence, l’effectif nécessaire ressortira à 28 personnes au lieu de 18 personnes (2 534/140 h).

La prise en compte des facteurs de déperdition au niveau des équipements amènera à identifier leur capacité normale. On isolera le taux d’utilisation des équipements par rapport à cette capacité, en comparant cette dernière au

98

LES DIFFÉRENTS TYPES DE BUDGETS

volume de production. On repérera ainsi les goulots d’étranglement, les besoins en investissement, et les besoins en sous-traitance. Capacité maxi (définie par le fournisseur) – Facteurs de déperdition (données internes: pannes, entretien, réglages, nettoyages…) = Capacité normale Tableau 5.1 – Ajustement offre/demande. Demande > offre (suractivité)

Industrie

Service

Non marchand

Demande < offre (sous-activité)

Heures supplémentaires Recours aux intérimaires Embauches Sous-traitance Maintenance préventive Changement rapide d’outils Investir

Chômage partiel Formation du personnel Supprimer une partie de la soustraitance Licencier Prêt de personnel

Heures supplémentaires Renfort de personnel Embauches Informatisation, nouvelles technologies de l’information

Favoriser le travail à temps partiel Licencier Prêt de personnel Supprimer une partie de la soustraitance Formation

Heures supplémentaires Renfort de personnel Embauches Informatisation, nouvelles technologies de l’information

Favoriser le travail à temps partiel Prêt de personnel Non-remplacement des départs en retraite Formation

Cette phase ultime réconciliera en principe la demande du budget des ventes avec la capacité de production. En cas d’incompatibilité persistante, deux leviers sont possibles. Le premier consistera à ajuster la capacité de production en flexibilisant la durée d’occupation des équipements (heures supplémentaires, en mise en place d’une équipe supplétive), en recourant à la sous-traitance ou en investissant. Le deuxième est de jouer sur la demande, en régulant les ventes et en agissant sur les stocks. Calcul d’un goulot d’étranglement dans une usine qui fabrique des profilés en aluminium

Cette usine, équipée d’une presse de 12 000 tonnes, transforme des billettes d’aluminium en profilés après les avoir chauffées. Cet atelier fonctionne avec deux équipes de jour, cinq jours par semaine. La durée hebdomadaire du travail

Le budget de production

99

est fixée à 35 heures. Toutefois, la société est fermée au mois d’août, ce qui a pour conséquence que la presse n’est en usage que 47 semaines. Sachant qu’il y a 5 jours ouvrables par semaine, elle est en activité 235 jours par an, avec deux équipes sur 35 heures, soit 3 290 heures par an. Lors du dernier budget, les quantités à fabriquer de chaque produit, compte tenu des prévisions de ventes et de stock, s’élevaient à 16 017 profilés du premier type et 3 370 profilés du deuxième type. La gamme de fabrication donnait des temps opératoires dans l’atelier de 0,2 heure et 0,25 heure pour chaque type de profilés. Le temps nécessaire de fabrication dans l’atelier était donc de: (0,2 h ¥ 16 017) + (0,25 h ¥ 3 370) = 4 046 heures sur l’année. En conclusion, l’atelier ne pourra jamais honorer la totalité de la production dans l’état actuel des choses, puisqu’il y a un déficit de 756 heures (4 046 h – 3 290 h).

2

LA VALORISATION DU PROGRAMME DE PRODUCTION

La valorisation du programme de production concerne:

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– les charges directes (celles qui se rapportent sans ambiguïté à un produit ou une prestation), c’est-à-dire essentiellement le coût des matières consommées et les frais de main-d’œuvre directe (personnes travaillant directement sur les dossiers ou les produits), ainsi que certaines dotations aux amortissements pour des équipements dédiés. – les charges indirectes (celles qui se rapportent a priori à plusieurs produits ou prestations, et qui nécessitent un calcul intermédiaire avant imputation), c’est-à-dire les frais généraux des centres de production. On différenciera toutefois certains coûts indirects variables comme l’énergie, les petits équipements, des consommables, et certains coûts indirects fixes comme l’encadrement, le bureau d’étude… C’est en référence à cette distinction que l’on sera conduit à valoriser les budgets des approvisionnements, de main-d’œuvre directe et le budget des coûts indirects de production.

2.1. Budget des approvisionnements La raison d’être d’un service achat est d’approvisionner au moindre coût sans rupture de stock. Or, pour optimiser les modalités d’approvisionnement, le service achat devra agir en intégrant les quatre paramètres essentiels que sont la consommation, la cadence d’approvisionnement, le stock de sécurité et le délai d’approvisionnement.

100

LES DIFFÉRENTS TYPES DE BUDGETS

Les matières et les consommables La prévision du prix unitaire des matières (prix standard) est relativement plus simple que celle des quantités consommées, mais en revanche beaucoup plus approximative. Alors que les quantités consommées dépendent avant tout des conditions techniques de production (variable interne à l’entreprise) pouvant être mesurées avec une relative précision, les prix seront liés au contraire aux mécanismes du marché (variable externe à la firme). Ils ne pourront faire l’objet que d’estimations. Si le marché se révèle stable, cellesci seront facilitées et l’on pourra les valoriser avec un prix unique. Si, en revanche, on utilise des matières sujettes à d’importantes fluctuations de cours, comme c’est le cas pour le papier, le pétrole ou le nickel…, les prix prévisionnels seront beaucoup moins fiables. Il faudra abandonner la technique de l’établissement d’un prix standard moyen valable pour l’ensemble de l’exercice budgétaire, au profit d’autres méthodes de valorisation (révision périodique du prix standard en cours d’exercice, évaluation initiale au dernier cours connu puis valorisation au cours du jour). On remarquera en tout cas qu’au stade de la fabrication, les variations de prix des matières consommées n’ont généralement pas une grande incidence, car la prévision et le contrôle portent essentiellement sur les quantités. En effet, la responsabilité des prix des matières concerne beaucoup plus le service achats que celui de la fabrication.

La sous-traitance On distinguera la sous-traitance ponctuelle de la sous-traitance structurelle. Dans le cas de la sous-traitance ponctuelle, le déroulement du programme de production conduira à s’interroger sur la part de production à réaliser en interne et la part à sous-traiter, ainsi que sur ses rythmes sur les douze mois à venir. La mensualisation tiendra compte de l’adéquation entre les moyens techniques et humains et des besoins non satisfaits lors des périodes de saturation. Dans le cas de la sous-traitance structurelle, le programme des quantités à produire sera diffusé suffisamment longtemps à l’avance aux sous-traitants qui déclineront leur budget de production selon les mêmes principes.

Les conditions de règlement des achats Par principe, elles devraient être négociées en même temps que les prix d’achats avec les fournisseurs. Les estimations prévisionnelles et les objectifs fixés par la direction financière ou générale pour l’année à venir auront en effet un impact direct sur le budget de trésorerie.

Le budget de production

101

2.2. Budget de main-d’œuvre directe Les besoins de main-d’œuvre directe nécessaires du programme de production ont été clairement fixés. Ces besoins exprimés au mois le mois, service par service, catégorie par catégorie serviront de base à l’établissement du budget des salaires et des charges pour l’année suivante. La masse salariale sera chiffrée selon la méthode globale ou la méthode poste par poste, telles qu’elles sont décrites dans l’annexe 1.

2.3. Coûts indirects de production Parmi ceux-ci, certains vont évoluer en fonction de l’activité, comme l’énergie, les outillages, les consommables de production. Ce sont des frais variables dont la budgétisation est aisée car il suffit de déterminer la relation entre la production à réaliser et la consommation de ces charges variables. Par exemple pour l’énergie, on tiendra compte des temps prévisionnels d’ouverture des équipements et des puissances installées par équipement. D’autres, au contraire, sont totalement indépendants du niveau de l’activité, comme la main-d’œuvre indirecte (contremaîtres, magasiniers), les amortissements, les frais d’entretien… Ils correspondent à des frais fixes. Toutefois, certains pourront évoluer ou régresser par palier à partir du franchissement de certains seuils d’activité. Par exemple, à la suite d’un programme d’embauche de main-d’œuvre directe, il faudra également penser à recruter des chefs d’équipe et des contremaîtres. On établira des ratios entre le pourcentage de MOD et de MOI en production (effectif direct/effectif indirect).

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Toute prévision de frais indirects de production exige préalablement une dissociation des charges en matière de coûts fixes ou variables: 1 Coûts indirects de production = (Coûts variables par unité d’œuvre ¥ Nombre d’unités d’œuvre 1) + Coûts fixes

1. L’unité d’œuvre correspond soit à un volume (kilo, m2, km parcouru, commande…) ou à un temps («homme» ou «machine»).

102

LES DIFFÉRENTS TYPES DE BUDGETS

Exemples de tableaux de présentation d’un budget de production 1

Nombre d’équipes Production (volumes)

Réel N

Probable N

% capacité utilisée

Budget N+1

Réel N

Probable N

Budget N+1

Ligne 1 Ligne 2 Ligne 3 Ligne 4 Ligne 5

Coût de production

Réel N

Probable N

Budget N + 1

%

Matières premières Énergie Consommables Emballages Sous-traitance Frais de personnel direct Frais de personnel indirect Entretien Amortissements Assurances et taxes

Matières premières

Coût unitaire N–1

N

N+1

Quantités consommées N–1

N

N+1

Coût total N–1

N

N+1

Famille 1 Famille 2 Famille 3 Famille 4 Énergie Pétrole Gaz Électricité

1. Ces exemples sont présentés à titre d’illustration. Il existe beaucoup d’autres modèles qui s’adapteront mieux à certaines formes de process de production.

103

Le budget de production

Qualité

N–1

N

N+1

Rabais Rebuts Retouches 2e choix

Au même titre que les coûts directs de fabrication, ces coûts indirects devront être soigneusement validés et justifiés. Le contrôleur de gestion s’attachera à en vérifier la conformité et l’importance1, dans un souci de productivité.

3

LE CALCUL DES COÛTS STANDARD ET LE BOUCLAGE DU BUDGET DE PRODUCTION

Ce sont deux opérations spécifiques rattachées au budget de production, qui sont le plus souvent réalisées par le contrôleur de gestion via le retraitement des chiffres élaborés préalablement dans les CRB.

3.1. Le calcul des coûts standard Définition et apports de la méthode

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Les coûts standard sont des coûts préétablis, autrement dit évalués par avance pour chaque composante du coût de revient. L’ensemble de ces coûts préétablis constitue le fichier des coûts standard. Par définition, ils sont applicables sur une longue période car leurs calculs reposent sur des objectifs d’évolution des différents paramètres entrant dans leur composition. Traditionnellement, on retient les standards normaux établis en prenant en compte la législation en cours (temps de pause…), les chutes et rebuts incompressibles… Ils servent: – d’objectifs pour les responsables opérationnels: amélioration de l’organisation, réduction des rebuts; – à déterminer le niveau d’activité normale en tenant compte de la capacité des outils de travail, du potentiel du marché…; – à mesurer des performances et à analyser des écarts par rapport à la norme, ou aux objectifs; 1. Le chapitre 6, consacré aux frais généraux, décrit trois méthodes améliorant la maîtrise des coûts indirects.

104

LES DIFFÉRENTS TYPES DE BUDGETS

Tableau 5.2 – Les différents types de coûts standard. Standard

Historiques

Normaux

Idéaux

De référence

Normes

Réel d’une période précédente

Établis par les méthodes, dans les conditions actuelles Tenant compte d’un certain % de pertes diverses, de la législation en cours

Normes «dures» sans % de pertes, dans des conditions d’organisation optimum

Moyenne professionnelle, moyenne de l’ensemble des unités opérationnelles fabricant le même produit, équipements neufs

Utilisation

Fixer aux opérationnels des objectifs basés sur les résultats des années précédentes

Objectifs pour les responsables opérationnels

Direction générale pour juger du potentiel de progrès

Comparaison des performances par rapport à une référence Sert de base au prix de cession

Avantage

Facile à établir

Prend en compte les améliorations prévues de «l’organisation» des postes de travail et un certain réalisme

Calcul du coût de revient optimum

Ne favorise pas un département au détriment d’un autre

Risque

Inclure la sousactivité, la nonperformance

Un potentiel d’amélioration non pris en compte

Difficilement atteignable

Surévaluation des coûts par prise en compte de non-performance de certaines entités

– d’aide à la décision d’actions correctrices: orientation de la politique commerciale, réduction des coûts de production, chiffrage des devis, fabriquer ou sous-traiter, monter des dossiers d’investissements; – améliorer la relation client fournisseur: la fixation des prix de cession internes en coûts standard permet à chacun dans l’entreprise de s’engager, sans reporter sa «non-performance» sur le prestataire interne.

Méthodes d’élaboration des coûts standard Les coûts standard seront chiffrés selon la même méthode que les coûts réels (complets ou partiels), mais leurs calculs seront basés sur les données prévisionnelles du budget (et non sur des constatations et des mesures a posteriori) suivantes:

Le budget de production

105

– données techniques portant à la fois sur les spécifications et les consommations de matières et de pièces détachées, sur l’enchaînement des opérations de fabrication et les consommations d’unités d’œuvre dans chaque CRB (nomenclatures et gammes); – données financières issues des budgets: les coûts prévisionnels des matières et pièces détachées et les coûts standard des taux horaires (unités d’œuvre) de chaque CRB, supputés à partir des budgets des ateliers ou des services. Les coûts standard peuvent être appliqués partiellement ou totalement à l’ensemble des coûts. Les utilisations potentielles peuvent se faire au travers de deux axes de réflexion: – par nature de charges: • matière première: les achats se font dans le cadre de contrats annuels, avec un prix négocié en début d’année et complété par des ristournes de fin d’année, • valeur ajoutée: les frais de personnel, de fonctionnement et les amortissements sont en général des charges fixes sur l’année. Ils sont pris en compte par le biais d’unité d’œuvre valorisées Leur coût calculé à partir d’une activité normale répartie sur un nombre de jours travaillés est assez stable au cours d’une année; – par activité: ils conviennent à la plupart des activités de grande série. Ils se prêtent moins à des activités dans lesquelles les gammes et nomenclatures sont élaborées pour une prestation unique. Toutefois, cette prestation peut être constituée de produits intermédiaires standard.

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Pour établir des coûts standard, cela suppose d’avoir des procédures claires et exhaustives, ainsi que des outils informatiques adéquats: – définir des règles: principes de valorisation (normaux, idéaux…), champ d’application (coût de production uniquement, tout), établissement des gammes et nomenclatures, et détermination des coûts (matière, unité d’œuvre…); – choix des modes de calcul des écarts (source d’information), traitements mensuels et réincorporation des écarts en stocks et dans les comptes de résultats; – élaborer les règles de valorisation des stocks (standard/réel), de mise à jour des standards en cours d’année; – des outils adéquats: • une GPAO qui gère plusieurs gammes pour un même produit, valorise les encours et les stocks, • une comptabilité analytique interfacée à la GPAO et paramétrée pour calculer automatiquement les écarts et gérer les stocks d’écarts.

106

LES DIFFÉRENTS TYPES DE BUDGETS

Toutefois, la mise en place de standards peut comporter des risques si les écarts deviennent significatifs, d’où l’importance d’un suivi mensuel. Il en est de même si le nombre d’écarts analysés est trop excessif, d’où l’importance de réaliser un choix et de déterminer à l’avance ceux qui n’auront qu’une analyse en quantité. Tableau 5.3 – Fiche des coûts standard. Quantité unitaire

Prix (Coût d’achat)

Coût standard

Cumul coût standard

Matières premières: – Acier 25 CD 4

3,5 kg

euros 2,88

euros 10,08

euros 10,08

Fabrication: – Sciage – Tournage – Fraisage – Rectification

0,10 H 0,30 H 0,25 H 0,45 H

(Taux horaire) 54 87 104 93

0,54 26,10 26,00 41,85

10,62 36,72 62,72 104,57

Désignation

Coût standard

104,57

Ces coûts standard seront nécessaires pour entreprendre des simulations afin de fixer des prix de vente, établir des devis, développer une activité ou l’externaliser. Facturation interne des prestations dans une banque

Cette facturation interne des prestations consiste à définir les règles de la tarification interne entre les centres de traitement et les centres de profit. Elle doit remplir trois objectifs: – une tarification aux coûts des traitements (assimilable à un prix usine) sans marge bénéficiaire; – une désensibilisation des centres de profits aux écarts de rendement des centres de production; – une désensibilisation des centres de production aux écarts sur activité. La direction générale se réservera le droit de définir un coût commercial ou stratégique de manière à favoriser le développement d’une catégorie d’opérations. La facturation se fera au coût standard: coût prévisionnel déterminé dans un contexte de fonctionnement normal des centres de production avec un volume d’activité normatif en cohérence avec le niveau des moyens disponibles. Le comité de tarification, sur proposition du contrôle de gestion, validera les coûts de facturation interne des opérations sur la base des volumes prévus. Les centres de production s’engagent à fournir une prestation de qualité sur la base d’un coût standard qui est fonction d’un temps prévu déterminé dans des conditions optimales de fonctionnement, et après prise en compte d’une éventuelle

Le budget de production

107

réorganisation en cours du service. Les centres de profit s’engageront à apporter aux centres de production un niveau de volume estimé. Les centres de production peuvent dès lors adapter leurs moyens en fonction de l’activité prévue. Ce contrat passé pour l’année à venir sera négocié sous l’égide du service contrôle de gestion lors de la procédure budgétaire.

La construction du budget de production et des coûts standard n’est pas que la résultante d’effets mécaniques. Elle intègre également une volonté de progrès qui peut être demandée dans la lettre de cadrage, et/ou lors de la consolidation au niveau de l’établissement, de la direction de la production ou de la direction générale. En milieu industriel, les plans d’action consisteront à améliorer le taux de rendement synthétique (TRS), c’est-à-dire: Temps d’ouverture – Arrêts – Maintenance préventive – Attentes (commande, ordre de fabrication, matières, hommes) – Changements d’outillages = Temps d’utilisation brute – Pertes de performance, mauvais réglages vitesse = Temps d’utilisation nette – Production de non-qualité = Temps de production réel TRS = Temps de production réel/Temps d’ouverture Le taux de rendement est dit synthétique car il donne une bonne image de la performance de la production, de la maintenance, du commercial (attentes commandes), des approvisionnements (attentes matières) et des ressources humaines (attentes de personnel). Tous les effets des actions de progrès au niveau de la production seront traduits par le TRS, à savoir: productivité, maintenance préventive (TPM 1), changement rapide d’outils (SMED 2), assurance qualité, diminution des rebuts et des retouches, etc. L’enjeu consistera 1. TPM (Total Productive Maintenance): permet de réduire le temps et le coût des arrêts pour maintenance. 2. SMED (Single Minute Exchange of Dye avantages: NON

120

LES DIFFÉRENTS TYPES DE BUDGETS

À la Sécurité sociale, afin de favoriser le système du tiers-payant, l’agent ne coche plus chaque vignette; il se contente aujourd’hui d’une lecture rapide. Le nombre de feuilles traitées par agent a doublé. Des effectifs ont été redéployés vers d’autres activités, comme celle du contrôle dans des sociétés qui n’honorent pas leurs échéances.

Présenter des budgets modulaires On peut parfaitement proposer un budget qui inclurait des alternatives arbitrées (intégrant donc un premier niveau d’amélioration par rapport à l’existant), de façon modulaire. Une première version du budget, qualifiée de version de base, prendra en compte les moyens indispensables dont le CRB aura besoin pour remplir l’essentiel de sa mission. Ainsi pour la fonction comptable, on se contentera de répondre strictement aux obligations légales en matière de bilan, de compte de résultat et d’annexes. Cette proposition budgétaire (qui représente souvent 50 à 70% du budget de l’année précédente) est en fait un artifice courant qui conduira à faire prendre conscience, surtout dans les fonctions tertiaires, que toutes les autres activités rendues ne sont pas forcément indispensables. L’inconvénient de cette manière d’opérer est qu’elle entraîne sans conteste une dégradation de la qualité. Pour respecter celle-ci, on proposera des activités additionnelles sous forme de budgets complémentaires (appelés ajouts) qui renforceront le niveau qualitatif ou quantitatif des prestations. La version de base sera alors étoffée avec ces ajouts et leur cumul constituera la proposition budgétaire présentée au final par le responsable du CRB. Il est à noter au passage qu’elle peut aussi bien correspondre à un niveau inférieur ou supérieur au service actuellement délivré. Par exemple, en ce qui concerne le service comptable, on adjoindra à la version de base un premier ajout correspondant à des ressources complémentaires dans l’optique de réaliser des travaux d’arrêtés mensuels et un deuxième ajout pour pouvoir obtenir un compte de résultat analytique… Cette présentation budgétaire a pour avantage de rendre complètement transparente la relation entre les objectifs à atteindre, les moyens mis en face et les ressources (personnel, matériel, fonctionnement) à mobiliser. Toute modification des objectifs (à la hausse comme à la baisse) appellera à une révision simultanée des moyens et par voie de conséquence du budget.

121

Le budget des frais généraux Exemple pour les services généraux d’une entreprise

Services généraux 1re version de base et ajouts

Effectif

Ajout seul

Cumul

Version de base

2,0

2,0

Ajout 1

0,6

Ajout 2

1,4

Total

Budget

% budg. n – 1/n

Performance

Ajout seul

Cumul

% budg. n – 1/n

Quantitative

Qualitative

56

46 000

46 000

59

Insuffisant

Minimal

2,6

72

19 000

65 000

84

Satisfaisant

Satisfaisant

4,0

111

35 000

100 000

127

Très satisfaisant

Satisfaisant

4,0

111

100 000

127

Consolider et décider Les propositions, une fois classées, donneront lieu à une consolidation par groupe de CRB, puis à l’échelle de la direction. Cette hiérarchisation, par ordre d’intérêt décroissant, amènera à décider plus facilement: – du choix des prestations à supprimer ou à rajouter, avec une mise en œuvre rapide; – du choix des alternatives à mettre en place, dans le cadre d’un plan à plus long terme;

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– des études à mener pour régler des problèmes décelés mais trop complexes. On limitera les discussions au classement des ajouts pouvant faire l’objet d’une suppression ou d’une introduction. Les ressources que l’entreprise consacre aux frais généraux n’étant pas illimitées, la barre budgétaire générera elle-même l’enveloppe attribuée au financement de ces frais. Elle définira de surcroît la contribution et les moyens provenant de chaque unité décisionnelle. Après notification des budgets, toute modification des objectifs (à la hausse ou à la baisse) par la direction appellera une révision simultanée des moyens et donc du budget. Les responsables de CRB et le contrôleur de gestion élaboreront des plans d’actions garantissant le passage de la décision à son exécution. Il est du plus grand intérêt d’établir, six mois après la fin de la mission BBZ, un constat de mise en application des différentes décisions prises. Dans le cadre d’une volonté de budgétisation permanente, les améliorations seront moins significatives les années suivantes. En revanche, ce qui demeurera intéressant, c’est la présentation en budgets modulaires, sous forme d’une

122

LES DIFFÉRENTS TYPES DE BUDGETS

version de base avec ajouts. Après cinq à six ans, il sera utile de réitérer complètement la démarche complète, car l’organisation aura évidemment beaucoup changé.

3

LE BUDGET BASÉ SUR LES ACTIVITÉS (ABB)

L’ABB (Activity Based Budgeting) est une méthode d’élaboration budgétaire fondée spécifiquement sur les activités. Contrairement au BBZ qui s’appuie sur une remise en cause, l’ABB s’inscrit plutôt dans une logique de répartition des coûts. Elle s’adresse aux organisations qui possèdent une comptabilité basée sur les activités, modèle ABC 1. Selon cette méthode, les responsables pourront estimer plus finement les volumes des activités qu’ils auront à réaliser, ainsi que leurs besoins en ressources 2 pour leurs CRB. ABB présente une bonne vision de la charge de travail des services supports, en expliquant les causes directes des variations sur lesquelles le responsable pourra agir, en mettant en exergue les sur- ou sous-capacités. Cette analyse se révèle de qualité supérieure tout en étant plus complexe que celle menée en ABC ou ABM 3. ABB permettra aux responsables de piloter plus efficacement leurs frais de structure, en transformant les coûts fixes en coûts variables. Par exemple, le coût d’une activité d’accueil est en principe variable selon le nombre de personnes à l’accueil, la plage horaire de réception et le temps de réponse. La variabilité du coût dépendra des décisions de dépenses du responsable pour se procurer de nouvelles ressources ou les maintenir. Une fois la décision prise, le niveau de ces ressources deviendra fixe, puisque non directement relié aux volumes vendus. Élaborer un budget basé sur les activités consiste à faire fonctionner le modèle ABC, en utilisant la méthode de rétrocalcul. Le modèle sera alimenté avec des volumes cibles de ventes, de production… et il calculera automatiquement les volumes d’activités et de ressources nécessaires pour chaque service afin d’atteindre les objectifs fixés (effectifs, matériel…). 1. L’ABC (Activity Based Costing) permet principalement de mieux rattacher les coûts des ressources aux objets de coûts par l’intermédiaire de la consommation des activités réalisées par l’entreprise. 2. La quantité et la valeur budgétée de ces ressources peuvent être intégrées au système de contrôle opérationnel qui rapprochera les réalisations du budget. 3. L’ABM (Activity Based Management) mesurera la performance des activités en allant audelà des coûts menés avec l’ABC. L’ABM permet de réorganiser l’entreprise, de mesurer la valeur des activités et des tâches réalisées en double dans plusieurs services.

123

Le budget des frais généraux

ABC

RESSOURCES

Combien dépense-t-on ? Maille stratégique

Ce qui est utilisé pour faire le travail : • frais de personnel • fournitures • frais de déplacement •… Inducteurs

de ressources

Inducteurs de coûts

Activités

Mesure de performances

Critères influençant le travail : • nombre de lignes réceptionnées • nombre d’écriture • nombre de contrôles

Travail : • réceptionner • tenir un fichier • contrôler

Le travail est-il bien fait : • nombre de réception/poste • volumes entrés/sortis •…

Inducteurs

d’activité

ABM

ABB

Pourquoi dépense-t-on ?

OBJETS DE COÛT À quoi aboutira le travail : • produits • clients • projets

Maille opérationnelle

À quel niveau doit-t-on budgéter les ressources ? Maille opérationnelle et stratégique

Figure 6.1 – La croix1 du modèle ABC-ABM-ABB.

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D’où les séquences suivantes: 1 1

2

3

4

5

Volume de production estimé

Consommation d’inducteur de coût

Demande d’activité

Consommation d’inducteur de ressource

Demande de ressource

➀ Estimation des volumes de ventes et de production pour l’année future, comme énoncée aux chapitres 3 et 4. Elles concernent non seulement les 1. Source CAM-1: organisation à but non lucratif créée en 1972 pour appuyer la recherche et développement dans des domaines stratégiques pour des sociétés industrielles. CAM-1 a, entre autres, défini des stratégies nouvelles et efficaces permettant de résoudre des problématiques émergentes dans le domaine des coûts.

124

LES DIFFÉRENTS TYPES DE BUDGETS

produits, mais aussi les clients. Le budget devra donc être plus détaillé que d’habitude, en incluant des informations sur les processus de fabrication et de vente comme, par exemple, le nombre d’activités pour chaque produit (nombre de modifications de spécification, nombre d’élaborations de devis…), la fréquence de commandes pour les matières, le mode de livraison… ➁ Prévision des inducteurs d’activités 1. Les responsables devront estimer le nombre d’inducteurs d’activités qu’ils souhaiteront avoir l’année suivante. À titre d’exemple, du programme de ventes prévisionnel découlera le nombre de factures, le nombre de dossiers à recouvrer, le nombre de lancements en fabrication, le nombre de commandes d’approvisionnement à passer… ➂ Calcul des ressources nécessaires. Si, par exemple, le processus d’approvisionnement suppose qu’une personne peut passer 2 000 commandes par mois, 14 500 commandes par mois nécessiteront l’intervention de 7,25 personnes. D’autre part, un responsable ne pouvant superviser que 10 personnes, il faudra 0,725 responsable. Chaque personne aura besoin de 10 m2 d’espace de travail, d’un ordinateur coûtant 20 000 francs et de fournitures pour 2 500 francs par mois. ④ Détermination des inducteurs de ressources 2. Il s’agira de convertir la demande de chaque ressource en fixant une enveloppe globale de coûts, sachant que certaines d’entre elles seront variables et d’autres fixes. Ainsi, le responsable du service approvisionnement budgétera son poste, plus 8 autres, ainsi que les dépenses de fonctionnement (locaux, informatique, fournitures pour 9 personnes). Si les personnes sont appelées à d’autres activités, comme la facturation, l’encaissement…, alors l’effectif devra être calculé sur la somme des besoins de toutes ces activités. ➄ Identification de la capacité de chaque activité. En prenant comme base les consommations d’inducteurs de ressources, le niveau de ces dernières dépassera souvent le besoin prévisionnel. Une fois déterminées, on fera tourner le système à l’envers pour identifier quel élément de ressource contient la quantité maximum de l’activité fournie. Dans notre exemple du service approvisionnement, la capacité de ressources sera de 16 000 commandes par mois (8 personnes assurant 2 000 commandes chacune). Dans beaucoup d’entreprises, cette dernière étape du calcul sera itérative. L’ABB est une théorie accessible à tout le monde, mais sa mise en œuvre est complexe. En effet, l’entreprise doit plonger plus profondément dans les détails, en précisant ses consommations d’activités dans chaque CRB, le rendement minimum de ces activités de support, les dépenses, les expressions de besoins, le niveau de chaque ressource. Ce n’est qu’à partir de ce moment-là, 1. Mesure la fréquence et l’intensité de la demande d’activités des objets de coûts: pièces fabriquées, réparations, commandes, factures, recrutements… 2. Mesure le volume de ressources consommées par une activité: effectifs, m2, microordinateurs…

125

Le budget des frais généraux

que les responsables pourront alors ajuster leurs ressources au niveau prévisionnel, et donc réduire la sous-activité adjacente dans l’entreprise. L’ABB recentre la réflexion budgétaire sur les besoins en ressources des différentes activités, à travers des inducteurs de coûts et des leviers d’action. Les objectifs stratégiques et les objectifs de performance se verront convertis en objectifs de niveaux d’activités. Le modèle permettra de répondre aux questions suivantes: • Quels sont les produits affectés par telle nature de charge? • Quels services ont contribué au coût réel de tel client ou de tel produit? • Quel est le poids des activités de support sur telle combinaison d’objets de coûts? ABB se rapporte aussi aux prévisions de charges des activités budgétées dans l’organisation existante comme les frais de personnel et ses frais de fonctionnement. En effet, les responsables doivent déceler les personnes et choisir les équipements en adéquation avec la charge des activités. Ceci signifie que les coûts des activités doivent être regroupés et traduits en comptabilité dans les CRB et dans le plan de compte. Pour un service, on aboutira au modèle présenté dans le tableau 6.2. Tableau 6.2 – Modèle de plan comptable. Activités

Planifier

Valoriser

Facturer



Total/service

Coût de l’inducteur Volumes d’inducteur

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Total budget/activité Nature des charges: – Frais de personnel – Fournitures – Téléphone – Loyer –… Total budget/activité

Le modèle contribue à la traçabilité des coûts, jusqu’à la nature des charges par service et par activité, et met en évidence: – les causes qui sont à l’origine des coûts; – les cohérences ou les incohérences des allocations de ressources; – les niveaux de service réellement offerts; – les résultats d’opérations de benchmarking pour réduire les coûts; – les tendances.

7 LE BUDGET DES INVESTISSEMENTS

C

e type de budget concerne tous les projets d’engagement de dépenses en biens matériels et immatériels dont le cycle d’exploitation est supérieur à une année. Un investissement peut se caractériser, d’une part par l’acquisition de biens constituant le patrimoine de l’entreprise, d’autre part par la recherche de bénéfices futurs. Il est composé de la quotepart annuelle des investissements menés sur plusieurs exercices, dont le cadre de décision était le plan, ainsi que des projets de moindre importance décidés au cours du processus budgétaire. L’investissement recouvre des projets de remplacement ou de productivité, destinés à maintenir la capacité de production ou à améliorer son efficacité par réduction des coûts ou accroissement de la qualité. On citera aussi les investissements réalisés pour le lancement d’un produit ou la mise en place d’un nouveau procédé (expansion ou diversification), ceux qui doperont le potentiel de l’entreprise (publicité, formation, recherches et études, brevets), et des dépenses effectuées pour se mettre en conformité avec les obligations légales (respect de la législation en matière d’hygiène, de sécurité ou d’environnement). Les investissements stratégiques sont un domaine à part (rachat d’une autre entreprise, prise de participation) et sont plutôt de l’initiative des dirigeants de l’entreprise. Généralement, ce type d’investissement suit des buts d’expansion et se distingue par son ampleur et son niveau de risque. L’intérêt de cette typologie est de moduler les exigences que devra respecter un investissement quel qu’il soit, en matière d’étude, de critères de sélection et de choix.

Le budget des investissements

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Un investissement n’a pas toujours lieu à un instant précis et figé dans le temps. Dans la plupart des cas, on engage une dépense ponctuelle avec une exploitation étalée. D’autres genres d’investissement connaissent une dépense et une exploitation étalées (cas des investissements par tranche, comme dans la sidérurgie) ou encore une dépense étalée et une exploitation ponctuelle (comme dans un chantier de construction navale). Un investissement est rarement un acte isolé. D’autres dépenses (déménagement, formation) viendront souvent s’y greffer. C’est pour cette raison qu’il vaut mieux prendre l’habitude de remplacer le terme investissement par celui de projet d’investissement. La décision d’investir implique souvent plusieurs services dans l’entreprise: approvisionnement, production, commercial, finance, personnel, développementrecherche, direction générale… Il est primordial que chaque secteur de l’entreprise y participe en apportant sa propre expertise. Un certain formalisme est nécessaire dans la mise en œuvre de la décision d’investir, ce qui se traduira par une procédure d’investissement. La direction générale doit pouvoir choisir les projets les mieux adaptés aux objectifs stratégiques, en favorisant les idées de progrès et de changement. Les opérationnels disposant d’outils d’étude et de sélection des projets prendront en compte des objectifs stratégiques dans la recherche d’idées nouvelles. Cette procédure d’investissement comportera trois phases: l’étude, la sélection et le choix des projets.

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L’ÉTUDE DES PROJETS

Un investissement ne se décide pas par hasard. Chaque responsable qui souhaite faire un investissement ne doit jamais occulter le fait qu’il doit s’inscrire dans un cadre politique, stratégique et économique de l’entreprise, c’est-à-dire en s’insérant dans un plan à long terme (expansion des ventes, augmentation de la capacité des installations, sortie de produits nouveaux, études et recherches, développement des hommes…). Beaucoup s’imaginent que la difficulté en matière d’investissement réside dans la recherche de financements. Force est de constater que c’est plutôt l’étude des projets qui pose problème. En effet, celle-ci a, d’une manière ou d’une autre, un certain coût, et nécessite de dégager du temps pour la réaliser. L’étude doit suivre deux étapes logiques: faire émerger des idées de projets, puis les quantifier.

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LES DIFFÉRENTS TYPES DE BUDGETS

1.1. Détecter et poser correctement le problème La réflexion doit commencer longtemps à l’avance. Les actions les plus efficaces dans ce domaine, et les plus utilisées, sont les suivantes: – détacher des cadres de l’entreprise surtout pour l’étude des gros investissements, pendant le temps nécessaire; – passer en revue systématiquement tous les postes de travail de l’entreprise pour examiner avec les responsables quelles sont les améliorations à apporter et déceler les goulots d’étranglement; – se tenir au courant des évolutions techniques (visiter les salons ou les entreprises extérieures); – avoir des contacts avec des fournisseurs d’équipement; – essayer des machines semblables fonctionnant dans une autre entreprise; – consulter des spécialistes extérieurs. Il est recommandé qu’un projet d’investissement ait plusieurs scénarios (acheter un bâtiment ou le construire). Les responsables recenseront et examineront le maximum de solutions ou de procédés techniques différents sans en éliminer aucun a priori. Par exemple, la manutention peut être envisagée sur plates-formes roulantes manœuvrées à la main, avec l’aide de chariots élévateurs électriques, de bande transporteuse ou de balancelle. On examinera soigneusement plusieurs versions pour l’application d’un même procédé technique. Au final, il faudra exprimer clairement son choix pour une solution. Exemple

Projet 1 Proposition d’investissement dans une machine-outil entièrement automatisée. Le coût de l’équipement est estimé à 2 millions d’euros et le gain annuel brut à 1 million d’euros. Projet 1 bis On peut atteindre quasiment le même résultat (90%) avec un équipement offrant un peu moins de possibilités (fonctionnement non entièrement automatique, accessoires non indispensables supprimés…). Le coût de l’équipement se voit ramené à 1 million d’euros et le gain annuel brut à 850 000 euros. Le projet 1 paraît très rentable (le retour sur investissement se fait sur deux ans). Mais en étudiant le projet 1bis, on s’aperçoit qu’il est proportionnellement bien plus rentable. Dans le projet 1, il faut investir 1 million d’euros supplémentaire, pour seulement un gain complémentaire de 150 000 euros par an (1 000 000 euros – 850 000 euros).

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Un chef d’entreprise avait, à ce propos, l’habitude de refuser tout projet d’investissement qui ne comportait qu’une seule version afin, disait-il, de se prémunir contre toute erreur qui entraînerait immanquablement du gaspillage. Les responsables doivent éviter que ce soit toujours les cadres les plus actifs qui aient le droit d’investir, soi-disant parce qu’ils sont les seuls à proposer des projets suffisamment élaborés. En effet, tous les secteurs de l’entreprise auront en permanence à s’améliorer pour contribuer à la performance globale. On aura donc soin de pratiquer dans tous les secteurs, et auprès de tous les cadres, un recensement systématique des investissements possibles.

1.2. Quantifier le projet Le chiffrage participe activement à la maîtrise des flux de trésorerie (décaissements et encaissements) pour chaque projet. Il consiste à quantifier le montant total d’un investissement, ses gains futurs et sa durée de vie.

Le montant total de l’investissement Le montant de l’investissement ne se limite pas à l’achat d’un bien proprement dit, mais devrait inclure également les coûts aussi variés que ceux engendrés par: – l’étude préalable (plans, experts…), – le transport et la mise en place (douane), – la mise en route (mise au point, rebuts), – la formation du personnel, – les installations annexes (réfection sol, renforcement de la puissance électrique),

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– les outillages complémentaires et les études d’outillages, – le coût indirect des services connexes (contrôle de gestion, service logistique…), – les coûts bancaires éventuels (s’ils peuvent être déterminés à l’origine). Lorsqu’un équipement se voit remplacé et qu’il est revendu, son prix de cession viendra réduire le coût d’achat du nouvel équipement. On n’oubliera pas de prendre en compte les incidences fiscales. Les investissements de capacité ayant une conséquence sur le niveau d’activité induiront de façon durable une augmentation du niveau des stocks un accroissement du crédit accordé aux clients. Le besoin supplémentaire en fonds de roulement 1 doit être financé par des capitaux permanents et sera donc incorporé dans les flux économiques des projets. 1. Cette notion est expliquée dans le chapitre 8.

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De ce fait, l’investissement ne se limitera pas à la seule notion d’immobilisation, mais se traduira par: Immobilisations + Charges + Besoin en fonds de roulement

Les gains futurs Pour apprécier les gains futurs d’un investissement, il faudra décomposer le solde des flux financiers engendrés par celui-ci, autrement dit calculer sa capacité d’autofinancement 1 (CAF). Ces flux peuvent être de deux sortes: soit il s’agit d’un apport de chiffre d’affaires supplémentaire, soit d’une économie de coûts (un investissement de remplacement pouvant dégager une réduction des frais d’entretien). L’économie de coût peut parfaitement constituer à elle seule une marge supplémentaire. Les domaines suivants recèlent souvent des économies potentielles: – matières premières, consommables, énergie, entretien… On se bornera à s’intéresser aux coûts variables directs des consommations, en excluant les variations de remise ou de ristourne occasionnées par des modifications du volume d’achat; – main-d’œuvre variable directe. Les économies de frais de personnel devront être justifiées, en joignant des arguments pertinents à la fiche de rentabilité, car elles peuvent nuire à la stabilité sociale de l’entreprise; – frais généraux 2… On procédera avec circonspection dans le chiffrage des économies réalisées, en accompagnant celui-ci d’un plan de réduction détaillé. Les règles de prudence commandent de surévaluer un peu les charges standard avant de les répartir. Inversement, ces mêmes principes nous incitent à ne retenir, pour les investissements de productivité, que l’économie marginale des charges, d’ailleurs souvent assimilables au coût direct variable. On aura soin de se procurer des informations complémentaires, comme celles qui se rapportent à la durée de vie prévisionnelle de l’investissement, aux valeurs résiduelles retenues, à l’origine des prévisions de vente ou de production, aux conséquences sur les effectifs ou l’organisation du travail, ou encore à l’impact d’un rejet du projet… Ces éléments faciliteront des simulations afin d’observer les effets sur la rentabilité de l’opération. 1. Ce concept essentiel est connu sous trois noms: capacité d’autofinancement (CAF), marge brute d’autofinancement (MBA) et Cash Flow Net (CFN). 2. Se reporter à la définition donnée au chapitre précédent.

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Les gains futurs s’estimeront à l’aide du solde des flux nets de trésorerie engendrés par le projet d’investissement. On parle alors de capacité d’autofinancement qui est en quelque sorte la différence entre les produits encaissables ou encaissés et les charges décaissables ou décaissés sur la durée de vie du projet. La CAF est le premier objectif financier de l’entreprise. Il appartient à la direction financière et au contrôle de gestion de défendre cet objectif financier fondamental. Elle est calculée de deux façons: soit à partir du résultat net, soit à partir de l’excédent brut d’exploitation (tableau 7.1). Tableau 7.1 – Calcul de la CAF. Calcul des gains futurs (euros)

N

N+1

N+2

N+3

Chiffre d’affaires (1) Coûts d’exploitation: Achats de consommables (2) Frais de personnel (3) Entretien (4) … Excédent brut d’exploitation (5) = (1) – (2) – (3) – (4) – … Amortissement (6) Résultat d’exploitation (7) = (5) – (6) Impôt société (8) Résultat net (9) = (7) – (8)

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Capacité d’autofinancement financement = (5) – (8) = (9) + (6)

La durée de vie La durée de vie d’un projet est le temps au bout duquel l’investissement initial aura cessé de produire ses effets. Dans le cadre d’un projet donné, plusieurs durées peuvent coexister: – durée de vie physique de l’investissement, – durée de vie technologique utilisée ou durée d’obsolescence, – durée de vie du produit réalisé grâce à l’équipement, – durée de vie contractuelle (exploitation de carrière), On ne tiendra compte dans le projet que de la durée la plus courte.

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LA SÉLECTION DES PROJETS

L’enveloppe financière consacrée aux investissements, prévue dans la lettre de cadrage, est bien souvent inférieure à l’ensemble des exigences des responsables opérationnels. Il faudra donc définir des critères stricts de sélection, permettant de dégager les priorités.

2.1. Projets en cours Pour les projets qui se déroulent sur plusieurs années, il est nécessaire d’isoler la quote-part du projet qui concerne l’année suivante. Celle-ci sera automatiquement inscrite au budget.

2.2. Critère stratégique Les investissements sont d’abord liés au développement du potentiel stratégique de l’entreprise (nouvelle chaîne de montage pour la sortie du nouveau véhicule), puis à des améliorations comme celles de la qualité, de la satisfaction des clients, de la compétence des salariés (utilisation de nouvelles technologies permettant de réduire les délais vis-à-vis des clients). Exemple de sélection des projets dans le secteur du nucléaire

Tous les projets font l’objet d’une notation selon 4 critères: – sécurité, – dosimétrie, – rentabilité, – social. Chacun des critères sera noté de 1 à 4, le chiffre 1 signifiant très favorable et 4 très défavorable. La priorité est accordée aux projets qui sont notés au moins une fois 1 sur un des quatre critères, puis ceux notés 2, puis 3… Ces projets seront portés au budget. Les projets notés 4 ne sont en fait jamais retenus faute d’enveloppe budgétaire suffisante.

2.3. Critère de rentabilité On dégagera d’abord la rentabilité économique de l’investissement, sans s’occuper particulièrement de son financement. Puis on évaluera la rentabilité financière après la prise en compte du financement. Dissocier ces deux aspects se révèle indispensable afin de pouvoir prendre une décision en connaissance de cause.

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Le but du calcul de rentabilité économique est d’apprécier si l’investissement envisagé est rentable et dans quelles proportions. Ne serait-ce qu’à cause de la limitation des capitaux disponibles, ce calcul permettra de comparer la rentabilité de l’investissement avec celle des autres projets. Un calcul de rentabilité n’aura cependant de sens que si les prévisions d’encaissements et de décaissements ont été déjà très affinées. Il faut donc apporter un soin extrême aux préliminaires. La méthode de calcul à retenir dépend de la taille et de la forme ou de la catégorie de l’investissement: • Dans le cas d’un investissement d’augmentation de capacité, on ne pourra prévoir que la rentabilité totale de l’opération (par exemple, augmentation de production, écoulement des ventes). Les dépenses réelles — techniques, commerciales, de production, d’investissement, d’augmentation des stocks — seront rapportées aux revenus générés par le projet. La méthode de calcul tiendra compte uniquement des valeurs actuelles des flux nets de trésorerie. • Pour un investissement de productivité, la rentabilité d’un nouvel équipement remplaçant un équipement ancien sera appréciée en isolant l’opération. On utilisera la méthode du délai de récupération et la méthode des valeurs actuelles des soldes annuels de trésorerie. • En ce qui concerne les autres projets, on chiffrera seulement l’importance financière des éléments en cause, tout en faisant un sondage sur l’avantage qualitatif que va procurer l’équipement (possibilités accrues d’investigation données au personnel de recherche grâce à des appareils de laboratoire plus perfectionnés). En principe, ce sont des projets qui ne dégagent pas de rentabilité directe.

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L’actualisation L’actualisation est la méthode universelle pour calculer la rentabilité, en rapprochant des valeurs générées sur des périodes différentes. Elle repose sur la notion de préférence pour le présent qui, elle, sera quantifiée par le taux d’actualisation. L’actualisation est l’inverse de la capitalisation. Elle s’appuie sur l’utilisation d’une table des valeurs actuelles qui n’est autre que l’inverse d’une table d’intérêts composés. Exemple d’un placement à 10% sur un an

Cent euros placés en année n rapporteront 110 euros (100 € ¥ 1,10) en année n + 1. C’est le principe de la capitalisation. Cent dix euros acquis en année n + 1 sont équivalents à 100 euros (110 € /1,10) en année n. C’est le principe de l’actualisation.

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Un taux d’actualisation généralement normé dans une entreprise représente le coût des financements de l’entreprise.

Le délai de récupération 1 (DR) Le DR est le temps nécessaire pour que l’entreprise soit remboursée des fonds qu’elle a dépensés pour réaliser l’investissement. Lorsqu’il y a plusieurs projets de même nature en concurrence, on aura tendance à retenir celui dont le DR est le plus court. C’est un phénomène qu’on rencontre souvent dans les PME et les entreprises anglo-saxonnes, très soucieuses de rentabilité à court terme. Pour des investissements de productivité ou des investissements qui doivent être rentabilisés rapidement, c’est un critère acceptable. En revanche, pour des investissements lourds (accroissement de capacité, nouveaux produits…), l’utilisation de ce critère est déconseillée. Il est en effet insuffisant pour comparer des projets à longue durée de vie ou à durée de vie différente, et dont les bénéfices sont en plus variables dans le temps. Étant un critère de liquidité, il s’accompagne généralement d’un autre critère, plus axé sur la rentabilité: la valeur actuelle nette ou le taux interne de rentabilité.

La valeur actuelle nette (VAN) La VAN permet de connaître immédiatement si un projet est rentable ou non. Si la VAN est positive, le projet sera rentable. Elle se calcule de la façon suivante: G1 Gn G2 VAN = – I + ----------- + ( ... ) + ------------------ + -----------------2 n 1 + a (1 + a) (1 + a) I = montant de l’investissement a = taux d’actualisation G = gain futur (CAF) n = durée du projet

1. Temps de retour, payback.

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Le budget des investissements Investissement d’installation dans une grande surface

Compte tenu des CAF prévisionnelles, le projet dégage une VAN positive. Années

Investissement

0 1 2 3 4 5

– 2 000

CAF

Actualisation (10%)

400 600 800 800 600

0,909 0,826 0,751 0,683 0,621

VAN

CAF actualisée – 2 000,00 363,60 495,60 600,80 546,40 372,60 379,00

VAN = – 2000 + (400/1,10) + (600/1,10)2 + (800/1,10)3 + (800/1,10)4 + (600/1,10)5 = 379

La valeur actuelle nette mesure le vrai bénéfice économique restant à l’entreprise, après remboursement de l’investissement et actualisation des gains futurs 1 (CAF). C’est un critère favorable aux gros investissements, et au contraire mal adapté à la comparaison de projets de même nature dont le capital investi est très différent, ainsi qu’aux projets très disparates (sauf bien entendu si l’enveloppe financière disponible est illimitée).

Le taux interne de rentabilité (TIR)

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Le TIR est un taux d’actualisation qui annule la VAN. On peut aussi définir le TIR comme le taux auquel il faudrait emprunter de l’argent à intérêts composés pour que l’opération se solde sans bénéfice ni perte. La formule est la même que celle de la VAN. Il se calcule de la façon suivante: G1 Gn G2 0 = – I + ---------- + ( ... ) + ----------------- + ----------------2 n 1 + t (1 + t) (1 + t) I = montant de l’investissement t = TIR G = gain futur (CAF) n = durée du projet a = taux d’actualisation 1. Équivalent au paiement d’un intérêt égal au taux d’actualisation sur les fonds restant investis.

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LES DIFFÉRENTS TYPES DE BUDGETS

Ce calcul s’effectue par approches successives, jusqu’à ce qu’on ait reconnu les deux taux qui permettent de s’approcher d’une VAN égale à zéro (à l’aide d’une valeur positive, puis négative). C’est un processus itératif par excellence. VAN > 0 VAN  a TIR  CC, l’investissement créant de la valeur, il peut être accepté. En revanche, si RO/CE