Commentaire D'arret [PDF]

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Zitiervorschau

Travail fait par : Oumaima Assad

L3 Économie Gestion Travaux dirigés de DROIT SOCIAL Responsable chargée du cours : Madame Camille DROUILLER Chargée des travaux dirigés : Maître Afef JAMAI-PERPIGNAA

Séance n°8 Commentaire d’arrêt

Cour de cassation, Chambre sociale, 7 juillet 2016, n°15-15.342 Le 7 juillet 2016, la Chambre sociale de la Cour de cassation a rendu un arrêt eu égard au changement du lieu de travail dans le même secteur géographique sur la modification des conditions de travail dans le cadre de l’autorité et du pouvoir de direction de l’employeur. En l’espèce, un salarié a été engagé le 1er avril 2002 par une société A aux droits de laquelle est venue une société B, en qualité d’agent de propreté et exerçant en dernier lieu les fonctions de chef de site. Le salarié a été licencié pour faute grave le 4 juin 2009. Le salarié saisit le conseil de prud’hommes. Le conseil de prud’hommes ne fait pas droit à la demande du salarié. Le salarié interjette appel. Le 17 juin 2014, la Cour d’appel de Paris ne fait pas droit à la demande du salarié. Pour justifier sa décision, la Cour d’appel retient que le salarié ne démontrait pas en quoi la mutation proposée portait atteinte à sa vie personnelle et familiale, alors qu'il travaillait de nuit à partir de 00 heure. Le salarié se pourvoit en cassation. En effet, le demandeur au pourvoi soutient que l’arrêt n’aurait pas dû retenir que son licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse et également afin de réclamer des dommages et intérêts. Il argue que la nouvelle affectation même si elle se trouve dans le même secteur géographique, cette dernière constitue une modification du contrat. Il s’agissait pour les juges de savoir : si le changement du lieu de travail dans le même secteur géographique constituait une modification des conditions de travail du salarié alors même que le salarié ne démontre pas en quoi cette modification porte atteinte à sa vie personnelle et familiale ? Dans un arrêt en date du 7 juillet 2016, la Chambre sociale de la Cour de cassation rejette le pourvoi aux motifs que : « Mais attendu que la cour d'appel, qui a relevé que le salarié ne démontrait pas en quoi la

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nouvelle affectation portait atteinte à sa vie personnelle et familiale, et qui a fait ressortir en l'état de ses constatations relatives à la distance entre les deux sites, aux moyens de transport les desservant et à la durée supplémentaire de trajet que représentait pour le salarié le fait de se rendre sur son futur lieu d'affectation, que le nouveau lieu de travail se situait dans le même secteur géographique que l'ancien, a pu décider que le changement de lieu de travail ne constituait qu'une modification des conditions de travail qui relevait du pouvoir de direction de l'employeur ; que le moyen n'est pas fondé ». Il s’agira de voir que le salarié doit absolument démontrer que la nouvelle affectation de son lieu de travail porte atteinte à sa vie personnelle et familiale afin que celle-ci soit retenu et que par conséquent la durée supplémentaire de trajet pour se rendre à la nouvelle affectation ne justifie pas cette atteinte (I). De ce fait, le nouveau lieu de travail dans un même secteur géographique relève du pouvoir de direction de l’employeur et ne constitue pas une modification des conditions de travail du salarié (II).

I. La nécessité d’une démonstration de l’atteinte à la vie personnelle et familiale à la suite de la nouvelle affectation du salarié Pour que l’atteinte à la vie personnelle et familiale en cas d’une nouvelle affection soit retenue le salarié doit la prouver et pas seulement l’invoquer (A). D’autant plus que le temps de trajet supplémentaire n’étant pas excessif ne peut justifier cette atteinte (B).

A. Des moyens insuffisants à la reconnaissance d’une atteinte à la vie personnelle et familiale du salarié Le refus du salarié de changer de lieu de travail est fautif et justifie un licenciement disciplinaire. Toutefois, un salarié peut refuser une mutation vers un nouvel établissement sans que le caractère fautif soit retenu mais pour cela il doit prouver que cette mutation porte une atteinte à sa vie personnelle et familiale. En l’espèce, la Cour d’appel avait en l’espèce admis que l’atteinte ne pouvait être considérée au vu des éléments médicaux et familiaux apportés par le salarié. En effet, la jurisprudence tenait compte de raisons familiales impérieuses caractérisées par des situations particulièrement complexes, excessive et d’une certaine gravité et pas seulement contraignante (Cass. Soc. 5 mai 2009, n°07-45483). Or, en l’espèce la mutation ne portait pas atteinte à la vie personnelle et familiale du salarié. Il a été retenu par la Cour d’appel « qu’un travail de nuit n'est aucunement de nature à écarter toute atteinte à la vie personnelle en raison de ses nouveaux temps de trajet ». Le salarié travaillant de nuit à partir de minuit sa nouvelle affectation ne porte pas atteinte à sa vie personnelle et familiale. Le salarié a également invoqué le temps de trajet supplémentaire pour démontrer cette atteinte (B). B. Un temps de trajet supplémentaire ne justifiant pas une atteinte à la vie personnelle et familiale du salarié

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Selon la Cour de cassation, la notion de secteur géographique est en principe déterminée en fonction de la distance géographique, des temps de trajet et des moyens de transport. En l’espèce, le salarié a refusé sa mutation en raison du temps de transport qu’il estimait trop long entre son domicile à Mantes la Jolie est son nouveau lieu de travail à Roissy. Cependant, ce trajet n’étant que de 30 minutes de plus à partir de l’ancien site. La Cour d’appel a souligné que le salarié n’a pas prouvé en quoi la nouvelle affectation portait atteinte à sa vie personnelle et familiale, a fait ressortir, compte tenu de la distance entre les deux sites, aux moyens de transport les desservant et à la durée supplémentaire de trajet que représentait pour le salarié le fait de se rendre sur son futur lieu d’affectation. En l’espèce, la Cour de cassation a retenu « qu’en l'état de ses constatations relatives à la distance entre les deux sites, aux moyens de transport les desservant et à la durée supplémentaire de trajet que représentait pour le salarié le fait de se rendre sur son futur lieu d’affectation ».

De plus, la Cour de cassation retient que l’employeur est détenteur du pouvoir de direction de son entreprise peut décider de transférer le lieu de travail sans modification du contrat de travail si la mutation a lieu dans le même secteur géographique, peu important l’absence de clause de mobilité dans le contrat de travail du salarié (II).

II. La mutation dans un même secteur géographique, un simple changement des conditions de travail du salarié Lorsque la mutation intervient dans un même secteur géographique une clause de mobilité n’est pas nécessaire car cette mutation dépend du pouvoir de direction de l’employeur (A). Ce pouvoir de direction de l’employeur va voir sa jurisprudence évoluer concernant la mutation du salarié (B).

A. Une clause de mobilité inutile pour la mutation d’un salarié dans un même secteur géographique La mention du lieu de travail dans le contrat a valeur d'information, sauf s'il est précisé par une clause claire et précise que le salarié exécutera son travail exclusivement dans ce lieu (Cass. Soc. 26 octobre 2011, n°09-71322). Ainsi, lorsque votre contrat de travail ne contient pas de clause de mobilité, le changement de lieu de travail qui intervient dans le même secteur géographique constitue un simple changement des conditions de travail et non une modification du contrat de travail (Cass. Soc, 30 mai 2013, n°12-16949). En l’espèce, il n’y avait aucune clause de mobilité et la Cour de cassation a considéré que « le changement de lieu de travail ne constituait qu'une modification des conditions de travail qui relevait du pouvoir de direction de l'employeur ; que le moyen n'est pas fondé ». Cette notion de secteur géographique relève de l’appréciation souveraine des juges du fond (Cass.soc., 4 mai 1999, n°97-40.576).

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En l’espèce, la Cour de cassation a dégagé le fait qu’il est nécessaire de vérifier si le nouveau lieu d’affectation est facile d’accès via les transports en commun et/ou de la durée des trajets. Elle a également rappelé qu’il fallait vérifier s’il rallongeait la distance entre les deux postes de travail (Cass.soc., 7 juill. 2004, n° 02-43.91). Le lieu de travail n'étant, en principe, pas un élément essentiel du contrat de travail, il peut être modifié par l'employeur sans l'accord du salarié dans le cadre de son pouvoir de direction, seulement si cette mutation se situe bien dans le même secteur géographique. En principe, le salarié ne peut s’y opposer sous peine de s’exposer à un licenciement. En l’espèce, la Cour d’appel a retenu que le nouveau lieu de travail se situait dans le même secteur géographique que l’ancien. C’est ainsi que la Cour de cassation a conclu que le changement de lieu de travail ne constituait qu’une modification des conditions de travail relevant du pouvoir de direction de l’employeur. Cette décision de la Cour de cassation entre dans une continuité de la jurisprudence qui va conduire à réduire le pouvoir de direction de l’employeur concernant la possibilité qu’il a de muter un salarié (B).

B. Une réduction du pouvoir de direction de l’employeur par une jurisprudence évolutif Même si la mutation n’est qu’un simple changement des conditions de travail, qu’elle s'effectue dans le même secteur géographique et qu'elle est mise en œuvre en application d'une clause de mobilité, la mutation peut être refusée. Plusieurs arrêts postérieurs de la Cour de cassation laissent entrevoir la possibilité de retirer tout caractère fautif à la décision de refus, lorsque ce changement de lieu de travail porte atteinte à la vie personnelle et familiale du salarié, ce qu’il appartient à ce dernier de démontrer (v. Cass. soc., 7 juillet 2016, n° 15-15.342). Si cet argument est avancé par le salarié, le juge doit en effet rechercher si l’atteinte est caractérisée et si elle peut être justifiée par la nature de la tâche à accomplir et si elle est proportionnée au but recherché (C. trav., art. L. 1121-1). Il semble que la Cour de cassation laisse de moins de moins de souplesse à l’exercice du pouvoir de direction de l’employeur. Elle a considéré que le refus du salarié pouvait être justifié lorsque la nouvelle affectation portait atteinte à sa vie personnelle et familiale (Cass. Soc. 7 juillet 2016, n°15-15342). Mais la Cour de cassation a également décidé que la mutation du salarié ne doit pas porter atteinte aux droits

du salarié à la santé, au repos et à une vie personnelle et familiale, et doit être basée sur la tâche à accomplir et à la mesure du but poursuivi. (Cass. soc., 16 nov. 2016, n° 15-23.375) Donc, même si le changement de lieu de travail intervient dans le même secteur géographique, la Cour de cassation a admis que le salarié puisse refuser ce changement lorsqu’il porte atteinte aux droits à la santé et au repos du salarié et à une vie personnelle et familiale et que cette atteinte n’est ni justifiée par la nature de la tâche à accomplir, ni proportionnée au but recherché. Ce sont ces jurisprudences qui vont venir réduire le pouvoir de direction de l’employeur.

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