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C ancer/ R adiot hérapie 14 Suppl . 1 (2010) S1
Éditorial F. Denisa,*, Y. Pointreaub a Centre
Jean-Bernard, Clinique Victor-Hugo, 9 rue Beauverger, 72000 Le Mans, France d’oncologie radiothérapie, Centre Henry-S.-Kaplan, CHU Bretonneau, 2 boulevard Tonnellé, 37044, Tours, France
b Clinique
La délinéation des volumes cibles en radiothérapie oncologique est au cœur de notre spécialité. Cette délinéation, ou contourage, s’appuie sur de nombreux éléments d’appréciation comme l’anatomie, l’histoire naturelle du cancer, la biologie et, bien sûr, les essais thérapeutiques. Les variations intra- et inter-opérateurs des volumes cibles en radiothérapie sont un point qui fait débat et ont déjà fait l’objet de nombreuses publications révélant les différences de pratiques. Il est en effet difficile, voire impossible, de déterminer des standards indiscutables et immuables tant les situations cliniques sont nombreuses. Des outils d’aide à la délinéation des volumes cibles apparaissent peu à peu ainsi que des guidelines pour les principales localisations tumorales. Ces outils reposent sur des atlas de radio-anatomie scanographique et remnographique. L’accès à ces outils n’est pas aisé (langue anglaise, journaux scientifiques multiples, mises à jour rares…) et ils ne couvrent pas toutes les localisations tumorales. Nous avons élaboré avec la SFjRO (Société française des jeunes radiothérapeutes oncologues) et l’Afcor (Association de formation continue des oncologues radiothérapeutes) un site Internet ouvert en novembre 2008 de radio-anatomie et d’aide à la délinéation des volumes cibles accessible gratuitement aux professionnels de l’oncologie radiothérapie (http://www.siriade.org). Ce site a reçu le soutien de la Société française de radiothérapie oncologique (SFRO) et du Syndicat national des oncologues radiothérapeutes (SNRO). Ce site Internet élaboré par plus de 30 experts et jeunes oncologues radiothérapeutes français permet d’accéder facilement aux grands principes de la délinéation des volumes cibles des principales localisations tumorales en les illustrant de cas cliniques. Les cas présentés ne constituent pas des références
de traitement, mais une aide au contourage pour les cliniciens. Un comité scientifique et pédagogique a validé chaque cas avant mise en ligne sur le site. Le site a été complété en septembre 2009 par un module de radio-anatomie scanographique corps entier unique en son genre. Ce module développé par nos collègues d’Imaios (e-anatomy) spécifiquement pour notre communauté permet de visualiser toutes les structures anatomiques utiles en cancérologie (aires ganglionnaires, segmentations pulmonaire et hépatique, radioanatomie ORL, etc.) Le succès de cet outil nous a incités à rédiger ce numéro spécial de radio-anatomie en présentant chaque localisation tumorale par un article comportant les principes de la délinéation des volumes cibles selon les guidelines internationaux. Le tout est illustré par de nombreuses coupes scanographiques présentant les contours des volumes cibles et des cas cliniques. Il ne s’agit pas d’une revue exhaustive de la littérature et encore moins de référentiels mais d’une présentation synthétique des données actuelles. Ce numéro s’adresse ainsi à nos jeunes collègues débutant dans notre spécialité, et aux médecins plus expérimentés qui souhaitent mettre à jour leur connaissance et homogénéiser leur pratique. Nous espérons que ce numéro spécial trouvera une place près de vos consoles de dosimétrie et participera à homogénéiser les pratiques dans vos centres.
Conflits d’intérêt Les auteurs ont déclaré n’avoir aucun conflit d’intérêts pour cet article.
* Correspondance. Adresse e-mail : [email protected] (F. Denis) © 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
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Site de radio-anatomie et d’aide à la délinéation (SIRIADE) : présentation et bilan à un an Radio-anatomy Atlas for delineation SIRIADE website: features and 1 year results F. Denisa,*, Y Pointreaub a Centre
Jean-Bernard, Clinique Victor-Hugo, 9 rue Beauverger, 72000 Le Mans, France d’oncologie radiothérapie, Centre Henry-S.-Kaplan, CHU Bretonneau, 2, boulevard Tonnellé, 37044, Tours, France
b Clinique
INFO ARTICLE
RÉSUMÉ
La figure 6 est visible uniquement sur : http://www.sciencedirect.com/
La radiothérapie conformationnelle tridimensionnelle s’appuie en grande partie sur la délinéation des volumes cibles. Cette détermination fait notamment appel à des notions de radio-anatomie complexes et difficilement accessibles actuellement. De plus, les sources des recommandations pour la délinéation des volumes des différents types de tumeur sont disparates. Pour faciliter la formation à la délinéation, nous avons conçu un site internet de radio-anatomie et d’aide à la délinéation (http:// www.siriade.org) accessible gratuitement aux professionnels. Ce site est un moteur de recherche des principes de délinéation des principales localisations tumorales illustrés de cas cliniques. Son objectif n’est pas d’être un référentiel, mais un support de formation iconographique avec des mises à jour régulières. Nous présentons ici les modalités de sa création, les fonctionnalités de ce site et rapportons les statistiques de connexion après une année d’existence.
Mots clés : Délinéation Radiothérapie Radio-anatomie Atlas
© 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
ABSTRACT Keywords: Delineation Radiotherapy Radio-anatomy Atlas
3-D conformal radiotherapy is based on accurate target volumes delineation. Radio-anatomy knowledge’s are useful but sometimes difficult to obtain. Moreover, the sources of recommandations for volume definition are disparate. We thus developed a free radio-anatomy website dedicated to volumes delineation for radiation-oncologists (www.siriade.org). This website is a search engine allowing to access to delineation characteristics of main tumours illustrated with clinical cases. It dœs not aim to provide guidelines. Its main purpose is to provide an iconographic training support with frequent updatings. We present the features of this website and one year connexion statistics. © 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Published by Elsevier Masson SAS. All rights reserved.
* Correspondance. Adresse e-mail : [email protected] (F. Denis) © 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
F. Denis et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S2-S5
1.
Introduction
La délinéation des volumes cibles en radiothérapie, couramment appelée « contourage », est le cœur du métier de l’oncologue radiothérapeute. La définition de ces volumes fait appel à de nombreux paramètres (biologie, clinique imagerie, pronostic, résultats d’essais thérapeutiques, etc.) permettant de proposer un traitement personnalisé pour nos patients. Ces nombreux paramètres induisent des différences de pratique importantes, bien supérieures aux incertitudes de repositionnement du patient ou de prise en compte du mouvement des organes [5,12,15]. Des outils d’aide à la délinéation ainsi que des recommandations commencent à apparaitre mais leur accès n’est pas aisé (langue anglaise, journaux scientifiques multiples, mises à jour rares…) et ils ne couvrent pas l’ensemble des localisations tumorales [2,4,6-8,11,13,14,16,17]. Afin d’homogénéiser les pratiques, des sociétés savantes, des groupes coopérateurs et des équipes ont proposé des outils d’aide à la définition et à la délinéation des volumes cibles et des organes à risques, telles que des recommandations décrivant les volumes à prendre en compte, des atlas (imagerie en coupes de délinéation ou encore des logiciels d’autosegmentation). Cette utilisation d’atlas d’aide à la délinéation est considérée comme un des éléments de la qualité du traitement car elle permet de réduire les déviations liées à la variabilité de la délinéation des différentes équipes et également au sein d’une même équipe. Face à cette problématique et à une demande importante de nos collègues juniors et séniors d’avoir un outil de radio-anatomie scanographique et d’aide à la délinéation dédié à la radiothérapie, nous avons débuté en 2008 la création d’un site Internet dédié, sécurisé et ouvert aux professionnels comportant une synthèse des principes de traitement par irradiation des principales localisations tumorales. Nous rapportons ici le fonctionnement de ce site internet et les résultats à un an des statistiques de connexion. 2.
Mise en œuvre
Le site Internet devait remplir le cahier des charges suivant. Son contenu devait intéresser les oncologues radiothérapeutes en formation et les médecins séniors dans le cadre de leur Formation médicale continue. La radiothérapie conformationnelle avec ou sans modulation d’intensité était concernée. Le site devait être sécurisé par un mot de passe, gratuit et contenir une base de données de diaporamas concernant les principes de la radiothérapie des principales localisations tumorales illustrés par plusieurs cas cliniques. Des jeunes oncologues radiothérapeutes en cours de formation encadrés par des experts devaient rédiger des diaporamas pour chaque localisation selon un plan et une mise en page prédéfinis (classification, radioanatomie, indications de la radiothérapie selon le stade, arbre décisionnel des doses à délivrer, volumes cibles [volume tumoral macroscopique (GTV), volume cible anatomoclinique (CTV), volume cible prévisionnel (PTV)] et organes à risque à délinéer, protocole d’acquisition scanographique avec ou sans fusion d’images, contraintes de doses, toxicités aiguë et tardive). Les cas cliniques proposés devaient avoir été traités selon les modalités décrites dans les principes du traitement et les modalités du traitement réalisées devaient apparaître clairement
S3
(histoire clinique, coupes scanographie/TEP/IRM, doses prescrites, organes à risque, volumes, dosimétries, champs d’irradiation, histogrammes dose-volumes, Beam Eye Views, etc.). Les diaporamas devaient être validés par un conseil scientifique et un conseil pédagogique validés par le bureau de la Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Une fois la base de données créée, un moteur de recherche devait être intégré pour une recherche par localisation tumorale et/ou par mots-clés. La recherche des résultats devait être intuitive, rapide, simple, pour une utilisation pratique « près de la console de contourage ». Des modules complémentaires de radio-anatomie scanographique du corps entier ont été ajoutés (en collaboration avec la société Imaios), ainsi que la possibilité de télécharger les diaporamas sur n’importe quel support électronique (y compris les smartphones). Enfin, des mises à jour régulières devaient pouvoir être réalisées et la date de ces mises à jour devait apparaitre. L’ensemble des étapes à nécessité plusieurs mois de travail et de coordination pour une ouverture officielle lors du congrès de la SFRO de 2008 sous la forme de flyers d’information et de la présentation d’un poster, ce dernier ayant été récompensé par le premier prix décerné par la SFRO [3]. 3.
Utilisation du site
Le site internet a été développé avec le soutien de l’Afcor (Association de formation continue en oncologie radiothérapie), de la SFRO, du SNRO (Syndicat national des radiothérapeutes oncologues) et de la SFjRO (Société française des jeunes radiothérapeutes oncologues), en partenariat avec les laboratoires Novartis. Après sa présentation officielle en 2008, il s’est progressivement enrichi pour actuellement proposer un accès aux principes du traitement des 20 localisations les plus fréquentes avec 30 cas cliniques pour les illustrer. Chaque recherche aboutit sous la forme d’un tableau comportant l’organe concerné, un résumé du cas clinique, un lien vers le diaporama des principes de traitement de l’organe concerné, un second diaporama d’un cas clinique, l’adresse électronique de l’expert qui a validé les diaporamas, la date de mise en ligne du cas clinique et la date de sa mise à jour (Figs. 1 à 4). Les informations mises en ligne sont volontairement synthétiques afin de pouvoir être téléchargées rapidement et, si besoin, être imprimées. Les mises à jour sont effectuées régulièrement et de nouveaux cas peuvent être envoyés après validation par l’expert et, si nécessaire, par le conseil scientifique. De plus, un module de radioanatomie scanner corps entier est intégré au site, permettant l’accès à des coupes illustrées comportant les structures anatomiques utiles en oncologieradiothérapie (organes, vaisseaux, lymphonœuds, segmentation hépatique…) comme illustré (Figs. 5 et 6), ainsi qu’un calculateur d’équivalence de dose. 4.
Bilan depuis l’ouverture du site
En ce qui concerne les statistiques de connexion des 12 derniers mois, celles-ci montrent une augmentation continue du nombre de visites (694 par mois en mars 2009, 1 210
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Fig. 1. Page d’accueil du site internet. Website home page.
Fig. 3. Exemple de contenu de diaporama de principes de traitement (ici, les carcinomes bronchiques). Example of treatment principle slide show contents (here, lung carcinomas).
Fig. 2. Moteur de recherche par localisation et affichage des requêtes sous forme d’un tableau. Search engine by location and table of requests displayed.
en janvier 2010, pour les visiteurs ayant un code d’accès) (Fig. 7). En un an, 117807 fichiers ont été ouverts (uniquement avec une autorisation par mot de passe) soit 76 giga octets de fichiers. Les dix localisations les plus consultées (sur le mois de janvier 2010) sont le poumon (16 %), la prostate (15 %), le sein (10 %), la sphère ORL (10 %), le col utérin (6 %), le rectum (6 %), l’endomètre (4 %), le cerveau (3 %) et les lymphomes (3 %). L’origine des connexions au site dépasse nos frontières (même si le site n’est actuellement qu’en Français). En effet, 59 % des connexions viennent de France, 21 % sont d’origine hors de France mais indéterminées, 8 % viennent du Maroc, 8 % des États-Unis, 2 % d’Allemagne, 1 % du Canada et 1 % de la Belgique. 5.
Conclusion et perspectives
Après 14 mois d’existence, le site internet www.siriade.org est devenu un outil de formation initiale et continue d’aide à la délinéation très Fig. 4. Exemple de cas clinique : radiothérapie d’un carcinome bronchique. consulté par les oncologues radiothérapeutes. Les Example of clinical case: radiotherapy of lung carcinoma. contourages présentés ne sont que des propositions de traitement pour un cas clinique précis et Ces outils viennent en complément du guide des procédures ne constituent donc pas une référence de traitement. de radiothérapie externe de 2007 et le numéro thématiques sur Afin de permettre un accès à des articles plus détaillés sur les doses de tolérance à l’irradiation des tissus sains [8-10]. les principes de traitement des principales localisations une Nous espérons que le SIRIADE (sous toutes ses formes) transposition du site sous la forme du numéro spécial du journal continuera à contribuer à la formation initiale et continue et bleu actuel est réalisée sous la forme de « mises au point » (sur gardera une bonne place près des consoles de dosimétrie des un modèle proche du numéro spécial précurseur de la revue oncologues radiothérapeutes. Cancer/Radiothérapie publié en 2001) [1].
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Fig. 5. Atlas de radio-anatomie scanographique : aires ganglionnaires cervicales. CT radiological anatomy atlas: cervical lymph nodes.
[4]
[5]
[6]
[7]
[8] Fig. 7. Statistiques de connexion de mars 2009 à janvier 2010 (nombre de visites par mois de visiteurs ayant un mot de passe). Connection statistics, March 2009 to January 2010 (number of visits per month by visitors with a password).
Conflits d’intérêts
[9] [10] [11] [12]
Les auteurs ont déclaré n’avoir aucun conflit d’intérêts pour cet article. Références [1]
[2]
[3]
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Segmentation automatique des images pour la planification dosimétrique en radiothérapie Automatic image segmentation for treatment planning in radiotherapy D. Pasquiera,*, L. Peyrodieb,c, F. Denisd, Y. Pointreaue, G. Bérae, É. Lartigauf a Centre
Galilée, polyclinique de la Louvière, 69 rue de la Louvière, 59000 Lille, France des hautes études d’ingénieur, 13, rue de Toul, 59046 Lille, France d’automatique, génie informatique et signal (LAGIS), Cité scientifique, 59651 Villeneuve d’Ascq, France d Centre Jean-Bernard, 9, rue Beauverger, 72000 Le Mans, France e Clinique d’oncologie radiothérapie, Centre Henry-S.-Kaplan, CHU Bretonneau, 37044 Tours cedex 9, France f Département universitaire de radiothérapie, Centre O. Lambret, Université Lille II, 3, rue F. Combemale, 59000 Lille, France b Ecole
c Laboratoire
RÉSUMÉ Mots clés : Traitement d’images Segmentation automatique Radiothérapie conformationnelle Radiothérapie guidée par l’image Atlas
L’essor de la radiothérapie conformationnelle et de la radiothérapie guidée par l’image a pour corollaire l’accroissement du temps consacré à la délinéation des volumes d’intérêt, qui est également le siège d’une variabilité inter et intraobservateur. Les développements informatiques et du traitement d’images ont permis des progrès dans l’automatisation partielle ou totale de ces tâches. Cet article détaille les grands principes de la segmentation d’images appliquée à la radiothérapie, ses applications ainsi que ses résultats les plus récents dans un contexte clinique. © 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
ABSTRACT Keywords: Computer Assisted Image Processing Automatic segmentation Conformal radiotherapy Image-guided radiotherapy Atlas
1.
One drawback of the growth in conformal radiotherapy and image-guided radiotherapy is the increased time needed to define the volumes of interest. This also results in inter- and intra-observer variability. However, developments in computing and image processing have enabled these tasks to be partially or totally automated. This article will provide a detailed description of the main principles of image segmentation in radiotherapy, its applications and the most recent results in a clinical context. © 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Published by Elsevier Masson SAS. All rights reserved.
Introduction
La radiothérapie conformationnelle et la radiothérapie guidée par l’image impliquent un accroissement considérable du temps nécessaire à la délinéation des volumes d’intérêt, ce qui rend souhaitable une automatisation au moins partielle de ces tâches. Cette délinéation est également le siège d’une variabilité inter et intra-observateur, qui tend à être diminuée par les recommandations internationales et les atlas de radio-anatomie comme SIRIADE (site de radio-anatomie et d’aide à la délinéation) [55].
Dans de nombreux domaines médicaux, une automatisation du traitement des données a été développée, comme l’analyse des signaux électrocardiographiques, électro-encéphalographiques, ou encore l’imagerie cardiaque et des maladies inflammatoires neurologiques. Les développements informatiques et du traitement d’images ont permis plus récemment l’extension de ces techniques d’automatisation à la radiothérapie. Cet article traite des méthodes et résultats de la segmentation d’images morphologiques destinées à la planification dosimétrique (tomodensitométrie et remnographie). Il détaille les grands principes
* Correspondance. Adresse e-mail : [email protected] (D. Pasquier) © 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
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de la segmentation d’images appliquée à la radiothérapie, ses méthodes d’évaluation, ses applications, et ses résultats les plus récents dans un contexte clinique.
consiste en une succession d’une dilatation et d’une érosion. Les structures proches fusionnent avec le contour lors de la dilatation et seules les fusions ponctuelles disparaissent lors de l’érosion, permettant d’obturer ainsi les courts defects des contours.
2.
2.3. Recalage élastique avec atlas, modèles déformables
Méthodes de segmentation automatique
La segmentation d’image est une opération de traitement d’images dont la finalité est de rassembler des pixels entre eux suivant des critères prédéfinis, le plus souvent les niveaux de gris ou la texture. Les pixels sont ainsi regroupés en régions, qui constituent une partition de l’image. Il existe de nombreuses méthodes de segmentation, que l’on peut schématiquement regrouper en deux principales catégories : segmentation par régions et segmentation par contours.
2.1. Segmentation par régions La méthode la plus basique pour définir une région d’intensité uniforme est le seuillage des niveaux de gris. Une autre méthode consiste à diviser successivement l’image jusqu’à ce que les voxels des sous-régions satisfassent à des propriétés de similitude. Les sous-régions voisines sont ensuite examinées afin d’effectuer d’éventuelles fusions (méthode de division-fusion ou split and merge). Cet algorithme a pour inconvénient d’intervenir à un niveau moindre de détails que d’autres algorithmes, comme par exemple l’agglomération de voxels (region growing). Cette méthode consiste à rattacher à un voxel de départ les voxels voisins respectant des fonctions identiques, comme une faible variation d’intensité.
2.2. Segmentation par contours La détection de contours consiste à rechercher les primitives au sein de l’image. Elles sont de plusieurs types, et peuvent consister en des lignes, des courbes ou des contours (détection des gradients d’intensité). Des filtres permettent de mesurer des sauts d’intensité dans l’image. Un seuillage permet d’éliminer des voxels au sein desquels la variation d’intensité est trop faible pour qu’ils puissent appartenir à un contour. Poussé au maximum, un seuillage peut donner une image binaire au sein de laquelle tout voxel de l’image est un point de contour. Des réglages intermédiaires permettent de conserver certaines valeurs d’intensité. Un autre type de seuillage, par hystérésis, fait intervenir deux seuils : un seuil bas et un seuil haut. Tout voxel dont le module de contour est supérieur au seuil haut est considéré comme appartenant à un contour ; les voxels voisins sont examinés dans la direction du contour et ajoutés au contour si leur valeur est supérieure au seuil bas. Les caractéristiques d’un filtre détecteur de contour doivent permettre une détection et une localisation correctes, et une réponse unique par contour. Parmi les plus utilisés, citons les filtres de Canny [7] et de Deriche [17]. Des opérations morphomathématiques peuvent être appliquées afin d’améliorer les contours, comme une érosion ou une dilatation. Une ouverture consiste à appliquer une érosion suivie d’une dilatation : les petites structures et détails disparaissent lors de l’érosion et ne sont pas recréés lors de la dilatation. Une ouverture permet ainsi d’éliminer des segments courts et bruités. Une fermeture
D’autres méthodes ont été plus récemment développées et appliquées à la segmentation d’images en radiothérapie, avec des résultats prometteurs, comme le recalage élastique avec un atlas et l’application de modèles déformables. La première méthode consiste à construire un atlas qui va comporter les différentes structures à délinéer ; cet atlas peut être créé à partir d’images de patients ou d’images synthétiques. Un recalage élastique, avec déformation de l’atlas, est ensuite appliqué aux images à segmenter. Le recalage élastique est souvent précédé d’un recalage rigide. Il existe différents algorithmes de recalage élastique, qui vont déformer les structures de l’atlas, selon un mode non linéaire, de façon globale ou locale. Ces algorithmes ne seront pas détaillés ici, mais nous pouvons classer les méthodes de recalage en deux grandes catégories [36] : — l’approche géométrique, qui repose sur la recherche de primitives caractéristiques au sein des images puis sur l’appariement de ces caractéristiques. Les primitives peuvent être des points, des lignes ou des surfaces, et peuvent être sélectionnées manuellement ou automatiquement. En imagerie médicale et notamment cérébrale, les primitives les plus souvent employées sont les modèles surfaciques. Les méthodes d’appariement les plus souvent utilisées sont les splines de plaque mince et la méthode des plus proches voisins itératifs (Iterative Closest Point) [1] ; — l’approche iconique est plus générale que l’approche géométrique, en étant basée sur l’ensemble des informations des images recalées, et ne nécessite pas de prétraitement des images. La mesure de similarité entre les deux séries d’images peut faire intervenir notamment les critères d’erreur quadratique, le coefficient de corrélation, la variance d’intensité, l’entropie (information mutuelle). La technique des atlas se heurte à la grande variabilité de la forme et du volume des structures à délinéer, notamment pour les localisations pelviennes. Cette technique est utilisée pour la segmentation des structures cérébrales, pelviennes ou de la tête et du cou [5,15,16,25,47]. Pour certaines localisations comme la tête et le cou, de multiples atlas ont été créés, afin que l’utilisateur puisse choisir celui qui se rapproche le plus du patient dont les images doivent être segmentées [11]. La méthode des modèles déformables est basée sur l’évolution d’un contour fermé et permet de s’affranchir partiellement des problèmes de bruits parasites et de chaînage. Cette technique, dont le principe est de faire évoluer un contour initial vers une position d’équilibre, peut être assimilée à une segmentation par contours. Le modèle peut être élaboré à partir d’une forme mathématique (sphère, ellipse) ou intégrer des connaissances relatives au volume d’intérêt à segmenter, comme la forme ou la texture. La première étape consiste à placer le modèle au sein de l’image à segmenter. Le processus de déformation, souvent selon la normale, est lié à la minimisation d’une fonctionnelle d’énergie. Les forces dépendent des informations présentes dans l’image (gradient, intensité…) et des propriétés de régularité des
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contours. La déformation va se faire sous l’action de plusieurs forces : une énergie propre ou interne, assimilable à une énergie mécanique de tension et contrôlant l’aspect du contour, et une énergie externe introduite pour répondre aux contraintes spécifiques du volume d’intérêt et attirant le contour vers l’objet dont on cherche à déterminer les frontières [26,49]. Le contour actif va se déformer pour rechercher la position d’énergie minimale en respectant au mieux les contraintes. Cette fonctionnelle d’énergie peut être représentée sous la forme de l’équation : 1
1
E =∫(α v'(s) +β v''(s) )ds−λ∫ ∇I(v(s)) ds 2
0
2
0
Energie interne
Energie externe
dans laquelle α et β sont les coefficients d’élasticité et de rigidité de la courbe. Les contraintes liées à l’énergie interne des modèles peuvent limiter leur flexibilité géométrique et rendre plus difficile leur application à des volumes présentant d’importantes irrégularités [32]. Diverses méthodes ont été proposées pour améliorer et mieux automatiser le processus de segmentation du contour déformable. Cohen et al. et Terzopoulos et al. ont utilisé une force d’« inflation interne » rendant le modèle moins sensible aux conditions initiales de placement du modèle au sein de l’image [13,49]. De nombreux auteurs ont intégré au modèle déformable des connaissances a priori, comme la taille, la forme, les variations de forme attendues, la localisation et l’orientation du volume d’intérêt, ou encore la texture [18]. La limite des modèles déformables est leur caractère surfacique et l’absence de modélisation de la partie centrale des objets, ce qui rend plus difficile leur représentation et l’établissement de relations inter-objets. Cette technique est employée pour la segmentation des volumes d’intérêt pelviens (prostate, vessie, têtes fémorales) et de la tête et du cou [2,3,21,28,37,39]. L’équipe de Pizer et Chaney a contribué au développement des modèles déformables et à leur utilisation en radiothérapie, en particulier en décrivant les « medial representations » ou m-reps [33,40]. Les m-reps sont des modélisations d’objets solides, à la fois de leur structure interne et de leur surface. La structure interne est modélisée par un échantillonnage du plan médian grâce à des atomes, reliés entre eux par des rayons. Chaque atome contient comme informations : sa position spatiale, la longueur des rayons qui le relient aux atomes voisins ou à la surface, l’orientation des rayons, et sa distance avec le bord pour les atomes situés près des arêtes. Les volumes d’intérêt cylindriques comme le rectum sont représentés par des m-reps en forme de tube comprenant une seule chaîne d’atomes comportant des rayons d’inégales longueurs afin de modéliser les sections non circulaires (Fig. 1). L’architecture des m-reps avec leurs interactions étroites entre les atomes permettrait une meilleure représentation des propriétés géométriques des formes et de leur variation [11]. Les m-reps contiennent également des connaissances a priori sur l’apparence des objets, grâce à une analyse statistique des images à la fois à l’intérieur et à l’extérieur des modèles, ce qui permet à un objet d’appréhender son environnement et les structures voisines. Cette méthode a été appliquée à la segmentation des reins, de la prostate, de la vessie et du rectum [33,40,42]. Les résultats sont encourageants, avec néanmoins un certain degré d’interaction, l’utilisateur devant par exemple déterminer manuellement les limites du
Fig. 1. M-reps du rein, du foie et du pelvis masculin. Ligne supérieure : réseau d’atomes centraux. Ligne centrale : réseau d’atomes avec leurs rayons. Ligne inférieure : surface des modèles associées aux atomes, d’après Pizer [40]. M-reps for kidney, liver, and male pelvis. Top row: mesh of atom hubs; middle row; mesh atoms including spokes; bottom row: the implied boundaries shown with atom meshes from Pizer [40].
volume d’intérêt à segmenter sur 3 coupes pour la prostate et le rectum.
3.
Évaluation des outils de segmentation automatique
La littérature traitant du développement et de l’évaluation des algorithmes appliqués à des images tests à type de fantômes est très abondante et son étude dépasse le cadre de notre article, qui traite des résultats les plus récents dans le contexte d’une évaluation clinique ou « préclinique ». De nombreuses méthodes sont utilisables pour l’évaluation des résultats obtenus, et leur multiplicité dans la littérature rend difficile la comparaison des différents outils de segmentation automatique. La plupart des auteurs utilise les distances linéaires entre les contours définis manuellement et automatiquement comme la distance radiale, la distance entre deux points les plus proches, la distance à partir de la normale de la surface et la distance de Hausdorff. La distance de Hausdorff représente la distance maximale entre deux contours ou deux surfaces A et B ; elle est définie par l’équation : dh (A, B) = Max{d (A, B), d (B, A) } Le calcul de la distance moyenne permet d’apprécier une similitude plus globale entre les contours. Ces distances peuvent être calculées sur des contours, coupe par coupe, ou sur des volumes. La distance radiale est définie comme la distance entre deux points situés sur un même rayon tiré depuis le centre de gravité d’un volume. Elle est plutôt adaptée aux volumes sphériques mais peut être prise en défaut, même pour la comparaison des volumes prostatiques, lorsque les contours sont asymétriques ou lorsque les vésicules séminales sont incluses dans l’analyse (Fig. 2). Dans
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⊂
Vcd =Vm Va×100 Vm Vcd = volume correctement délinéé ; Vm = volume manuel, Va = volume automatique — Indice kappa ou coefficient de similarité de Dice (CSD), défini par l’équation :
⊂
Ki=2×Vm Va Vm+Va Fig. 2. Inconvénients des méthodes de comparaison linéaires dans le cas de contours non symétriques. La distance radiale (DR) peut sur ou sous-estimer la distance si la droite n’est pas perpendiculaire à l’un ou l’autre des contours. Les méthodes des distances des points les plus proches (DPP) et de la surface normale (DSN) ne sont pas symétriques et donnent des résultats différents en fonction du point de départ. Disadvantages of line-based comparison methods when using asymmetric contours. The radial distance (RD) may over- or underestimate the true distance if the straight line is not perpendicular to one or other of the contours. The closest-point and surface normal distance methods are not symmetric and their outcomes vary as a function of the starting point.
ce cas, le rayon n’est pas perpendiculaire aux deux surfaces et la distance est surestimée [45]. La distance entre les deux points les plus proches est une méthode utilisée notamment par Rao et al. pour l’évaluation des m-reps [42]. Son inconvénient est d’être asymétrique, le résultat dépendant du point de départ (Fig. 2). Les auteurs y ont pallié en mesurant les distances les plus proches, en interchangeant les rôles des points de départ et d’arrivée et en poolant les valeurs [42]. Une autre méthode employée par Steenbakkers et al. et Deurloo et al. utilise la distance à partir de la normale de la surface [19,48]. De la même façon, cette méthode n’est pas symétrique (Fig. 2) ; Steenbakkers et al. [48] contournent cette limite en employant la méthode des points les plus proches si la distance à partir de la normale de la surface dépasse une valeur prédéterminée (2 cm dans le cas de la délinéation d’un volume cible tumoral macroscopique pulmonaire). Un autre inconvénient des méthodes linéaires est la perte des informations sur la topographie des différences entre les contours (par exemple au niveau de la base et de l’apex prostatiques). Van der Put et al. [50] ont élaboré une méthode de comparaison quantitative à partir de deux champs de vecteurs déterminés à partir des deux contours. La combinaison de ces deux champs de vecteurs permet de relier les points correspondants de chaque contour. Leurs résultats dans la délinéation prostatique montrent que la distance radiale surestime les distances essentiellement au niveau de l’interface avec le rectum, et des vésicules séminales, régions ou la forme de la prostate est la moins sphérique. Les indices volumiques permettent d’apprécier relativement et plus globalement les différences de délinéation. Les indices suivants sont utilisés : — rapport volumique (rapport des volumes automatique et manuel, dont la valeur optimale est 1) — Volume overlap (rapport du volume de l’intersection sur le volume de l’union, dont la valeur optimale est 1) comme défini dans l’équation [27] :
⊂
⊂
Vo =Vm Va Vm Va VO = volume overlap, Vm = volume manuel, Va = volume automatique — « Volume correctement délinéé » (pourcentage du volume de l’intersection sur le volume manuel dont la valeur optimale est 100) comme défini dans l’équation [6,34] :
Ki = Kappa Index ; Vm = volume manuel, Va = volume automatique Les évaluations basées sur les indices volumiques (VO, Vcd, Ki) sont plus sensibles aux erreurs de recouvrement que les évaluations métriques. Par exemple, le VO de deux volumes se recouvrant à 85 % ne sera que de 0,74. De la même manière le VO de deux cubes de 10 × 10 × 10 voxels décalés de un voxel selon la diagonale du cube sera de 57 % seulement (729/1271) alors que la distance moyenne entre les surfaces est d’environ 1 voxel [27]. Les résultats peuvent également être exprimés en termes de sensibilité et de spécificité, et représentés sous la forme de courbes ROC (Receiver Operating Characteristic). Le « vrai positif » (VP) représente le nombre de voxels communs aux segmentations automatique et manuelle, le « faux positif » (FP) représente les voxels délinéés à tort par rapport à la segmentation manuelle, le « faux négatif » (FN) les voxels non délinéés à tort, et le « vrai négatif » (VN) les voxels non délinéés à juste titre. La sensibilité (Se) et la spécificité (Sp) peuvent être déterminées par les relations [16,25,47] :
Se= VP VP+ FN Sp= VN VN + FP L’indice kappa ou le coefficient de similarité de Dice peut alors s’écrire [16] :
Ki=
2VP 2VP+ FN + FP
Le contour manuel est considéré comme le « gold standard » alors que la variabilité inter et intra-observateur dans la délinéation des volumes d’intérêt a été largement étudiée en fonction des localisations tumorales et de l’examen d’imagerie employé [9,10,20,22,43,46,51,52,54]. Pour y pallier, Pallotta et al. ont utilisé un fantôme numérique de géomètre connue afin de tester un algorithme de segmentation automatique de la prostate et des volumes d’intérêt pelviens [35]. Ce fantôme numérique simulait des images tomodensitométriques comportant sept régions de niveaux de gris différents. Malgré l’ajout de bruit de Poisson homogène à ces images, le contraste entre les régions restait différent des conditions cliniques, conduisant probablement à une surestimation des capacités de l’algorithme de segmentation. Il n’existe pas de consensus sur les valeurs des indices cités plus haut au-delà desquels les contours automatiques peuvent être considérés comme acceptables. L’évaluation des outils de délinéation automatique dans un contexte clinique ou « préclinique », c’est à dire sans utiliser les contours obtenus pour le traitement des patients, devrait donc être réalisée préférentiellement dans le cadre d’études multi-observateurs afin de
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s’assurer que les contours automatiques sont concordants avec la variabilité interobservateurs. Ces évaluations multi-observateurs devraient comporter un nombre suffisant de patients et d’observateurs afin d’obtenir des résultats statistiquement fiables. Remeijer et al. ont modélisé l’incertitude de la détermination de la variabilité intra et interobservateurs, à partir des données de Rasch et al., comparant les contours prostatiques délinéés par trois médecins chez 18 patients [43,45]. L’écart type de ces paramètres est inversement proportionnel à la racine carrée du nombre de patients et au nombre d’observateur. Des différences systématiques peuvent facilement être mises en évidence dans les régions pour lesquelles la variabilité intra et inter-observateurs est la plus faible. À l’inverse les régions comme l’apex prostatique nécessitent un effectif plus important pour déterminer avec précision les variabilités de délinéation. Par exemple, la précision de la détermination de la variabilité intra-observateur de l’apex (écart type de 3,5 mm) est de 0,7 mm (19 %) à partir des données de Rasch et al. [43]. Une précision de 5 % nécessiterait de multiplier l’effectif par 9, soit près de 150 patients au total, ce qui devient plus difficilement réalisable [45]. Les outils de délinéation automatique doivent également être évalués en termes de réduction de temps passé pour la délinéation. L’évaluation de l’influence de ces outils sur la variabilité inter-observateurs paraît également être un champ d’investigation important, tout comme l’influence des contours obtenus automatiquement sur les doses délivrées aux volumes cibles et organes à risque.
4.
Résultats
radiale, relativement simple et adapté aux volumes réguliers ; les résultats étaient satisfaisant chez les quatre patients, qui étaient atteints d’un méningiome. Des résultats de délinéation automatique du cerveau, du cervelet et du noyau caudé avaient été présentés auparavant par Dawant et al. [16]. Le coefficient de similarité de Dice (CSD) était respectivement de 0,95 et 0,97 pour le cerveau et le cervelet par rapport aux volumes définis par deux observateurs, et de 0,85 pour le noyau caudé. Les résultats inférieurs pour cette dernière structure étaient dus à l’association d’un petit volume et de la faible résolution d’IRM, rendant moins pertinent le CSD, la valeur de 0,85 correspondant à une différence de l’ordre du pixel. Bondiau et al. ont modélisé un atlas destiné à la segmentation automatique du tronc cérébral à partir d’IRM artificielles [5]. Cet outil a été comparé au volume défini à partir des contours des sept experts pour chacun des six patients. Les résultats étaient fiables et reproductibles, et s’intégraient dans la variabilité inter-observateurs. Isambert et al. ont présenté plus récemment les résultats de cet outil de délinéation automatique chez 11 patients [25] ; les contours obtenus sur des images remnographiques pondérées en T1 pour les yeux, les nerfs optiques, le chiasma, l’hypophyse, le cervelet et le tronc cérébral étaient comparés à ceux de deux experts. Les CSD obtenus étaient élevés pour les structures les plus volumineuses (valeur moyenne de 0,81 à 0,85 pour les yeux, le cervelet et le tronc cérébral) mais de façon similaire aux résultats de Dawant et al. [16] les CSD étaient nettement inférieurs pour les structures de plus petit volume (valeur moyenne de 0,3 à 0,41 pour l’hypophyse, les nerfs optiques et le chiasma). Le CSD était supérieur à 0.8 pour des volumes supérieurs à 7 cm3. Ces résultats fiables et reproductibles permettaient l’utilisation de cet outil de délinéation automatique pour les globes oculaires, le cervelet et le tronc cérébral [25].
4.1. Cerveau 4.2. Voies aéro-digestives supérieures Le cerveau a été l’une des premières localisations étudiées, en raison du contraste élevé pour les tissus mous de l’imagerie par résonance magnétique (IRM) employée communément pour la délinéation des volumes d’intérêt. Les méthodes les plus anciennes, basées sur le seuillage, permettent de segmenter des structures simples dans des régions contenant un fort contraste, comme le volume tumoral macroscopique (GTV) avec injection de produit de contraste ; elles ne seront pas détaillées ici. Mazzara et al. ont évalué deux méthodes de croissance de régions pour la définition du volume tumoral macroscopique chez 11 patients traités pour un gliome de haut grade [30]. Les contours obtenus automatiquement étaient comparés à ceux définis par trois médecins d’après des IRM avec injection de Gadolinium. Les résultats étaient évalués selon une méthode d’appartenance des pixels aux contours communs réalisés par les médecins. Les volumes communs à la délinéation manuelle étaient pour les deux méthodes de segmentation de seulement 56 % ± 6 et 52 % ± 7, mais ces résultats étaient comparables à la variation inter-observateurs. Différentes équipes ont développé des méthodes de délinéation basées sur le recalage élastique avec un atlas. Cuadra et al. ont intégré dans la délinéation cérébrale la déformation induite par la lésion tumorale [15]. Une information a priori de croissance tumorale était intégrée, à partir d’un point de départ défini par l’observateur. Il s’agit cependant d’un modèle de croissance
L’élaboration d’un atlas à partir de données scanographiques de 45 patients est détaillée dans l’atlas de Commowick et al [14]. Les volumes d’intérêt étaient les aires ganglionnaires cervicales II, III et IV selon la classification internationale, les glandes parotides et sous-maxillaires. L’évaluation a été menée chez 12 des 45 patients ayant servi à l’élaboration de l’atlas (les données de chaque patient étudié ont alors été exclues de l’atlas). La sensibilité et la spécificité étaient respectivement de 0,82 et 0,86. Des résultats plus détaillés de cet outil ont été publiés par Sims et al. dans le cadre du projet Methods and Advanced Equipment for Simulation and Treatment in Radio Oncology (MAESTRO) [47]. Cette évaluation a concerné la délinéation du tronc cérébral, des parotides et de la mandibule chez 13 patients. Les contours obtenus étaient comparés à ceux d’experts appartenant à deux sites. Les experts devaient définir les volumes d’intérêt manuellement (site 1) ou corriger si besoin les contours obtenus automatiquement (site 2). La délinéation automatique aboutissait à une « sous-estimation » du tronc cérébral en raison d’une extension crâniale insuffisante des images scanographiques ayant servi à l’élaboration de l’atlas, et une « surestimation » des parotides qui sera corrigée par une opération morphomathématique d’érosion. La concordance avec les contours des experts était satisfaisante avec un CSD moyen de toutes les structures de 0,68 ± 0,25 et 0,82 ± 0,13 selon respectivement les sites 1 et 2.
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Les CSD s’étalaient de 0,58 ± 0,2 (tronc cérébral) à 0,78 ± 0,06 (mandibule) pour le site 1, et de 0,77 ± 0,07 (tronc cérébral) à 0,86 ± 0,07 (parotide) pour le site 2 [47]. Ces erreurs systématiques dans la délinéation des glandes parotides semblent avoir été corrigées dans la dernière version évaluable (version 4.2), comme l’a souligné un travail présenté en communication orale durant le congrès de la Société française de radiothérapie oncologique (SFRO) en 2009 [41]. Ce travail portait sur 11 cas de cancer des voies aéro-digestives supérieures et les aires II, III, IV et V et les parotides étaient délinées. Il existait une bonne corrélation entre les contours des trois oncologues radiothérapeutes mais une discordance avec les volumes proposés par le logiciel. La différence portait essentiellement sur les niveaux de transition entre les aires ganglionnaires (différence supprimée en cas d’unification des aires II, III et IV) et sur les aires V. La délinéation des parotides était d’emblée acceptable. Par ailleurs, les auteurs notaient l’absence de gain de temps compte tenu de la somme des corrections nécessaires. Zhang et al. ont présenté leurs résultats dans le cadre de la radiothérapie guidée par l’image [56]. Un atlas a été développé à partir des données de la scanographie de planification dosimétrique. Une évaluation a été réalisée chez sept patients et pour 32 images. Les résultats obtenus pour le tronc cérébral, la moelle épinière, la mandibule, les parotides et les aires ganglionnaires cervicales étaient reproductibles, avec un CSD variant pour l’ensemble de ces structures de 0,65 à 0,9. Wang et al. ont mené un travail similaire, en évaluant le recalage élastique entre les examens de tomodensitométrie de planification et réalisés au cours du traitement (scanographe sur rail) [53]. Les contours obtenus étaient comparés à ceux définis manuellement ou simplement corrigés après délinéation automatique. L’analyse des résultats chez huit patients (100 images au total) montrait un VO moyen de 73 à 86 % pour les parotides par rapport au contour manuel et de 98 à 100 % par rapport aux contours corrigés. Le VO moyen variait de 94 à 97 % pour le volume cible anatomo-clinique par rapport aux volumes corrigés. Les résultats respectifs de plusieurs algorithmes de recalage élastique sont détaillés dans Castadot et al. [8].
4.3. Pelvis De nombreuses méthodes de segmentation automatique ont été évaluées dans le cadre de la radiothérapie pelvienne. Une méthode basée sur l’algorithme de la ligne de partage des eaux a été présentée pour le rectum, la vessie et les vésicules séminales d’après des images scanogaphiques avec des résultats satisfaisants au vu de sa simplicité (1,2 à 1,7 mm de distance moyenne entre les contours automatiques et manuels pour le rectum et la vessie) [6]. Les résultats d’une segmentation par extension de région de la prostate, du rectum et de la vessie sur des images tomodensitométriques ont été publiés par Mazonakis et al. [29], mais il ne s’agit pas à proprement parler d’une méthode automatique, l’utilisateur devant choisir manuellement les seuils de niveaux de gris. Plus récemment plusieurs équipes ont présenté des résultats basés sur des modèles déformables et des atlas pour la délinéation automatique de la prostate et/ou des organes à risque. Des modèles déformables ont été élaborés pour la délinéation prostatique sur des images échographiques [2,3,21]. Pekar et al.
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ont présenté les résultats d’une segmentation automatique basée sur des modèles déformables de la vessie, du rectum et des têtes fémorales d’après des images tomodensitométriques [39]. Les contours obtenus étaient comparés à ceux réalisés par un expert chez 40 patients pour le rectum et la vessie, et 15 patients pour une tête fémorale. Après correction manuelle des écarts les plus importants, les distances moyennes et maximales entre les contours automatiques et manuels de la vessie étaient respectivement de 1,47 ± 0,45 mm et 8 ± 1,5 mm. Ces valeurs étaient respectivement de 1,6 ± 0,4 mm et 7,6 ± 1,8 pour le rectum, et de 0,93 ± 0,1 mm et 5 ± 1 mm pour une tête fémorale. D’autres équipes ont utilisé un modèle déformable cette fois pour la délinéation de la prostate, notamment d’après des images remnographiques. Les rapports de volume, VO et Vcd étaient respectivement de 1,13 ± 0,1, 0,78 ± 0,05 et 94,75 ± 3,3 par rapport à la délinéation manuelle chez 24 patients dans [37]. Un VO moyen de 0,78 ± 0,05 correspond à un CSD de 0,88 ± 0,04 [28,37]. Le contraste élevé des images remnographiques a permis d’utiliser des méthodes d’extension de région pour le rectum et la vessie. Pour le rectum, les rapports de volume, VO et Vcd étaient respectivement de 0,97 ± 0,1, 0,78 ± 0,06 et 86,52 ± 5, et de 0,95 ± 0,03, 0,88 ± 0,03 et 91,3 ± 3 pour la vessie [37]. Has et al. ont détaillé l’élaboration de leur méthode dans [23] ; les résultats spécifiques de la segmentation de la prostate, du rectum, de la vessie et des têtes fémorales d’après des images scanographiques sont présentés dans [24]. Une évaluation qualitative était réalisée par six experts chez 39 patients. Les contours automatiques devaient être classés comme excellents, bons, acceptables ou non acceptables. Les contours prostatiques ont été considérés comme bons, acceptables et non acceptables dans 45 %, 30 % et 15 % des cas respectivement. Les résultats étaient similaires pour la vessie, avec 36 % et 42 % de contours considérés comme excellents ou bons, mais étaient inférieurs pour le rectum et les têtes fémorales. L’évaluation quantitative menée par sept experts chez sept patients montrait des résultats qui s’inscrivaient dans la variabilité inter-observateurs pour la prostate et la vessie, et là encore inférieurs pour le rectum. Une méthode basée sur un atlas prostatique incluant les vésicules séminales a été proposée par Klein et al. [28]. L’évaluation a été réalisée sur des images remnographiques chez 50 patients. Le CSD médian était de 0,85, proche du CSD médian inter-observateurs de 0,87. Les auteurs soulignaient l’importance de la constitution de l’atlas, qui doit se rapprocher des conditions cliniques et comporter des variations anatomiques.
4.4. Autres critères d’évaluation L’un des principaux buts des outils de segmentation automatique est de réduire le temps de délinéation. Pour Isambert et al. [25], le temps moyen de segmentation automatique des structures cérébrales était de 7 à 8 minutes sans intervention humaine, contre environ trente minutes à une heure pour la délinéation manuelle de ces mêmes structures. En ce qui concerne les localisations pelviennes un gain de temps peut également être obtenu [24,31,39]. La segmentation des organes à risque est obtenue en dix à 15 minutes, interactions comprises [39], et en une minute pour la prostate et les organes à risque contre 25 minutes manuellement [24]. Une segmentation rénale était obtenue en sept minutes dans [40,42]. Dans un contexte de radiothérapie
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guidée par l’image Wang et al. ont rapporté des durées de deux et trois minutes pour les localisations des voies aéro-digestives supérieures et thoraciques [53]. Il est parfois difficile dans la littérature de déterminer si le temps de correction et d’interaction est comptabilisé dans la durée de segmentation automatique. Peu de données sont disponibles concernant l’influence de la segmentation automatique sur la variabilité inter-observateurs. Chao et al. ont montré que cette variabilité pouvait être significativement diminuée entre huit médecins dans la délinéation des volumes cibles anatomocliniques (CTV) et organes à risque chez deux patients atteints d’une tumeur des voies aéro-digestives supérieures avec envahissement ganglionnaire [12]. Les VO moyens des différents volumes cibles anatomocliniques s’étalaient de 0,53 à 0,65 et de 0,91 à 0,93 respectivement sans et avec segmentation automatique dans le cas de la tumeur de base de langue (p < 0,001). Ces valeurs étaient de 0,32 à 0,61 et 0,89 à 0,92 dans le cas de la tumeur du cavum (p < 0,001). Dans les deux cas la concordance de la délinéation des organes à risque était également améliorée. La segmentation automatique peut également diminuer la variabilité de la délinéation de la glande mammaire. Dans l’article de Reed et al. les volumes définis par huit médecins chez dix patientes d’après des images scanographiques étaient comparés, avec et sans aide à la segmentation [44]. La délinéation de chaque médecin était confrontée à un volume « commun » à cinq des huit médecins. La distance moyenne était réduite de 1,6 à 1 mm (p = 0,049) ; le CSD était augmenté de 0,92 à 0,94 (p = 0,049) et la durée de délinéation diminuée de 30 % (p = 0,028). Une diminution de la variabilité inter-observateurs ne préjuge cependant pas d’une amélioration de la précision, des erreurs systématiques des outils de segmentation pourraient conduire à s’écarter des recommandations de délinéation. La finalité des aides automatiques est leur utilisation clinique et quelques équipes ont publié des résultats préliminaires sur leur évaluation dosimétrique. Les écarts de délinéation sont lissés par l’ajout de marges lors de la création du volume cible planifié ; ces résultats dosimétriques sont dépendants des techniques de radiothérapie [4,38].
de notre environnement et deviendront des aides précieuses à la délinéation, sans toutefois pouvoir remplacer l’expertise humaine ni la confrontation multidisciplinaire.
Conflits d’intérêts Les auteurs ont déclaré n’avoir aucun conflit d’intérêts pour cet article. Références [1] [2]
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5.
Conclusion
Les développements informatiques ont permis de réaliser récemment des progrès considérables dans l’évolution des outils de segmentation automatique ; ces progrès ont été rendus nécessaires par l’essor de la radiothérapie conformationnelle et guidée par l’image. Les résultats cliniques sont pour la plupart préliminaires. Dans la littérature, le degré d’interaction nécessaire est parfois peu détaillé ou important. Alors que la présence d’outils de délinéation automatique fait partie des arguments commerciaux mis en avant par les industriels lors du choix d’une station de dosimétrie ou d’un système de radiothérapie guidée par l’image, les résultats de ces outils sont parfois insuffisamment évalués. Ils nécessitent une évaluation rigoureuse préclinique, multicentrique, portant sur leur fiabilité, leur concordance avec les recommandations de délinéation, le gain de temps apporté et leur reproductibilité. Leur apport dans la réduction des écarts inter-observateurs paraît être un champ d’investigation important. Leurs développements actuels laissent penser que ces outils feront prochainement partie intégrante
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C ancer/ R adiot hérapie 14 Suppl . 1 (2010) S14– S22
Gliomes cérébraux Malignant gliomas S. Haberer, A. Assouline, J.-J. Mazeron* Service d’oncologie radiothérapique, centre des tumeurs, groupe hospitalier Pitié-Salpêtrière, 47-83, boulevard de l’Hôpital, 75651 Paris cedex 13, France
RÉSUMÉ Mots clés : Glioblastome Radiothérapie conformationnelle Volumes cibles Atlas
Les tumeurs gliales représentent 2000 à 3000 nouveaux cas par an en France et 75 % d’entre elles sont de haut grade. Depuis quelques années, la biologie moléculaire de ces tumeurs est mieux comprise avec la découverte de l’importance pronostique de la codélétion 1p19q et de la méthylation du promoteur du gène de la MGMT. La radiothérapie a, elle aussi, beaucoup évolué avec les progrès diagnostiques en imagerie qui permettent une meilleure définition des volumes cibles. Les progrès thérapeutiques, quoique modestes, viennent de l’association de la radiothérapie avec le témozolomide et de ceux des techniques d’irradiation tridimensionnelle et non coplanaire. La survie des patients étant actuellement allongée, il est aujourd’hui nécessaire de prendre en compte les effets potentiels à long terme de nos traitements. © 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
ABSTRACT Keywords: Glioblastoma Conformal radiotherapy Target volumes Atlas
Glial tumors represent 2000 to 3000 new cases per year in France and 75 % of them are of high grade. Recent understanding of the molecular biology of these tumors revealed the importance of 1p19q codeletion and mgMT promotor methylation. Radiotherapy also recently evolved with the progress in medical imaging which allows a better definition of the target volumes. Even modest, therapeutic progress is based on chemoradiotherapy with temozolomide and on the development of non-coplanar conformational radiotherapy. Knowledge and precise evaluation of potential late effects of our treatments is necessary due to actual improvement of survival with chemoradiotherapy in glioblastoma. © 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Published by Elsevier Masson SAS. All rights reserved.
1.
Épidémiologie
Avec une prévalence d’environ 5 à 8 cas pour 100 000 habitants et par an, les gliomes sont les plus fréquentes des tumeurs cérébrales primitives de l’adulte. On compte ainsi 2 000 à 3 000 nouveaux cas par an en France. Soixante-quinze pour cent des gliomes diagnostiqués sont de haut grade (III ou IV de la classifi cation de l’Organisation mondiale de la santé).
L’âge médian des patients lors du diagnostic est de 45 ans pour les tumeurs gliales anaplasiques et de 55-60 ans pour le glioblastome. Le seul facteur de risque reconnu est l’exposition aux radiations ionisantes mais les cas sont rares [8]. Aucune relation n’a pu être clairement établie avec d’autres facteurs tels que l’exposition aux ondes électro-magnétiques, les antécédents de traumatismes crâniens, l’alimentation ou les facteurs environnementaux. Plus récemment, plusieurs larges études n’ont pas retrouvé de relation
* Correspondance. Adresse e-mail : [email protected] (J.-J. Mazeron) © 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
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entre l’utilisation des téléphones portables et l’augmentation d’incidence des tumeurs cérébrales malignes. [17,23]. Il existe quelques rares cas de tumeurs gliales (< 5 %) qui surviennent dans le cadre d’une prédisposition génétique : syndromes de Li-Fraumeni, neurofibromatose de type 1 ou 2, syndrome de Turcot.
2.
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Il a ainsi été mis en évidence que la transformation maligne des cellules gliales résulte d’une accumulation au cours du temps d’aberrations génétiques qui conduisent à une dérégulation du cycle cellulaire (par inactivation de p53 par exemple) et une dysrégulation de plusieurs voies de signalisation telles que celle du VEGF-R (récepteur du Vascular Endothelial Growth Factor) [41]. Au niveau thérapeutique, la biologie moléculaire semble pouvoir être utile aux cliniciens.
Classification
3.1. La codélétion 1p/19q Les tumeurs gliales sont des tumeurs histologiquement hétérogènes, dérivées des différentes cellules de la glie. La classification anatomo-pathologique de référence actuelle est fondée sur les critères de l’OMS de 2007. Elle distingue les gliomes en fonction de leur morphologie et de leur degré de malignité croissant (grade histopronostique côté de I à IV). On distingue ainsi : — les tumeurs astrocytaires dont il existe quatre grades pronostiques : l’astrocytome pilocytique ou de grade I, l’astrocytome diffus ou de grade II, l’astrocytome anaplasique ou de grade III, l’astrocytome de grade IV ou glioblastome ; — les tumeurs oligodendrogliales dont on distingue deux sousgroupes pronostiques : • l’oligoastrocytome et l’oligodendriogliome bien différencié ou de grade II, • l’oligoastrocytome et l’oligodendriogliome anaplasique ou de grade III. Les tumeurs de grade III ou IV sont considérées comme malignes. Les gliomes de grade II sont des tumeurs lentement évolutives dont l’histoire naturelle est caractérisée par l’évolution quasi inéluctable vers la malignité avec un délai variable, en général de plusieurs années. En France, une deuxième classification, dite de Saint-Anne, est parfois utilisée. Elle est fondée sur l’analyse histologique et les données de l’IRM. On distingue ainsi les oligodendrogliomes et oligoastrocytomes de grade A (absence d’hyperplasie endothéliale et de prise de contraste) ; les oligodendrogliomes et oligoastrocytomes de grade B (présence d’hyperplasie et/ou prise de contraste) ; les glioblastomes. Les facteurs de pronostic défavorable des tumeurs gliales malignes sont : l’âge avancé, le geste chirurgical incomplet, l’histologie (glioblastome) et l’état général altéré. L’examen clinique, le mini-mental status (MMS) et le compte rendu opératoire permettent de caractériser les patients selon la RPA (recursive partitioning analysis modifiée par l’European Organization on Research and Treatment of Cancer, EORTC) [28].
La codélétion des bras chromosomiques 1p/19q est retrouvée dans plus de 60 % des oligodendrogliomes et dans 15 à 20 % des oligoastrocytomes. C’est une altération génomique qui survient précocément dans l’oncogenèse de ces tumeurs. Elle est associée à un pronostic clinique plus favorable et c’est aussi un facteur prédictif pour la réponse à la radiothérapie et à la chimiothérapie par temozolomide ou PCV [procarbazine, lomustine (CCNU), et vincristine] [39]. Le mécanisme de cette meilleure sensibilité aux traitements reste inconnu et par ailleurs, l’identification de ce marqueur n’est pas toujours aisée et la technique de référence reste à trouver. Les protocoles des essais cliniques en cours dans les oligodendrogliomes tiennent compte de cette anomalie génétique, qui est utile pour stratifier les patients.
3.2. Méthylation du promoteur du gène de la MGMT La methylguanine-methyltransférase (MGMT) est une enzyme de réparation des lésions de l’ADN chimio-induites. La méthylation des îlots CpG situés en 5’ du promoteur inhibe la transcription du gène et l’expression de la MGMT. Hegi et al. ont ainsi montré que chez les patients atteints de glioblastome traités dans l’essai de l’EORTC (European Organization for Research and Treatment of Cancer) 26981/22981, la méthylation était associée à une meilleure réponse à l’association de radiothérapie et de temodal [14,15]. La durée médiane de survie était ainsi de 21,7 mois en cas de methylation versus 12,7 mois (p = 0,007) dans le cas contraire. Dans cette même étude, les patients chez qui le promoteur n’était pas méthylé ne tiraient pas bénéfice de la chimiothérapie concomitante. Li et al ont par ailleurs montré une relation entre l’expression de p53 et la survie sans progression lorsque l’expression de la MGMT était faible et qu’une chimio-radiothérapie concomitante était délivrée pour un glioblastome [24]. Les essais cliniques en cours dans le glioblastome sont différents selon l’état de méthylation du promoteur de la MGMT.
4. 3.
Indications de la radiothérapie
Biologie moléculaire
La classification histologique de l’OMS des gliomes apporte des éléments importants en termes de diagnostic et de pronostic mais souffre d’un manque de précision et de reproductibilité. En effet, un même sous-groupe histologique peut comprendre des tumeurs d’évolution et d’agressivité très variables. De nombreux travaux récents concernaient la biologie moléculaire afin de mieux appréhender la diversité des gliomes, de mieux comprendre leur oncogenèse et d’adapter les traitements [7].
Tant qu’elle est techniquement possible et qu’il n’existe pas de contre-indication anesthésique, la chirurgie maximale doit toujours être le premier traitement des tumeurs gliales malignes [4]. Elle a, de plus, une valeur pronostique positive si elle est macroscopiquement complète. Néanmoins, la chirurgie reste insuffisante à cause de la nature infiltrante de ces tumeurs. La radiothérapie adjuvante est maintenant devenue un standard. Ces modalités diffèrent selon la nature histologique de la tumeur et les caractéristiques du patient :
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4.1. Glioblastome 4.1.1. Chez les patients en bon état général et ayant moins de 70 ans Radiothérapie focalisée de 60 Gy en 30 fractions de 2 Gy associée à une chimiothérapie concomittante et adjuvante par témozolomide [33,34]. En effet, l’essai conduit par l’EORTC et le NCIC (National Cancer Institute of Canada), rapporté par Stupp et al. en 2005 [32], a démontré un bénéfice de survie avec la délivrance d’une chimiothérapie concomitante par témozolomide à la dose de 75 mg/m² du premier au dernier jour de la radiothérapie, puis de six cures de témozolomide (150-200 mg/m² pendant 5 jours tous les 28 jours) : 14,6 contre 12,1 mois de survie médiane [Hazard Ratio (HR) = 0,63, p < 0,0001]. L’actualisation des données publiée en 2009 [35] a montré une amélioration de la probabilité de survie à cinq ans en faveur du bras expérimental : 9.8 % de taux de survie à 5 ans avec la chimio-radiothérapie contre 1,9 % avec la radiothérapie seule (HR = 0,63, p < 0,0001) ; ce bénéfice était retrouvé dans tous les sous-groupes de patients et avec quelques patients maintenant en vie à plus de sept ans.
progression mais n’avait pas d’impact sur la survie globale par rapport à une radiothérapie seule, y compris dans le sous-groupe des tumeurs ayant une codélétion des chromosomes 1p/19q. L’adjonction du témozolomide en concomitance de la radiothérapie est en cours d’évaluation dans deux essais. Le premier est l’essai de phase III de l’EORTC CATNON (26053-22054) pour les gliomes anaplasiques non délétés 1p/19q et le deuxième est l’essai de l’EORTC 26081-22086 pour les oligodendrogliomes et tumeurs mixtes avec délétion 1p19q.
4.3. Tumeur gliale de bas grade (grade II) La chirurgie d’exérèse maximale est essentielle. La radiothérapie est indiquée en cas de tumeur évolutive, inopérable ou en rechute après chirurgie. En effet, l’essai de Van Den Bent et al. n’a pas montré de différence de survie selon que la radiothérapie était délivrée précocement en situation adjuvante ou lors de la progression [38]. Malgré les nombreux progrès de ces dix dernières années, le pronostic des tumeurs gliales reste néanmoins sombre avec un taux de survie à 5 ans d’environ 9 % en cas de glioblastome et de 20 % en cas de tumeur gliale de grade III. [26,35]
4.1.2. Chez les patients de plus de 70 ans et en bon état général Il a été montré dans un essai randomisé de l’Anocef (Association des neuro-oncologues d’expression francaise) un bénéfice, quoique modeste, de durée médiane de survie (29,1 semaines) par comparaison à des soins de confort (16,9 semaines) [21]. La tolérance de la radiothérapie étant parfois plus mauvaise chez les personnes âgées, une radiothérapie hypofractionnée accélérée leur est maintenant généralement proposée [16,25] : Roa et al. ont en effet démontré qu’un schéma de traitement de 40 Gy en 15 fractions sur une période de 3 semaines était équivalent en termes de survie globale à une radiothérapie en fractionnement classique [30]. L’association de cette radiothérapie et du témozolomide est en ce moment testée. Une autre alternative chez les sujets âgés est une chimiothérapie par témozolomide sans radiothérapie, cette approche ayant montré des résultats encourageants en termes de réponse et de qualité de vie [6,10].
4.1.3. Chez les patients jugés inopérables La chimioradiothérapie concomitante selon le protocole de Stupp et al. [34] doit être proposée. Dans un essai randomisé, l’implantation de pastilles imprégnées de chimiothérapie (carmustine, gliadel®) dans le lit opératoire a montré un bénéfice contre un placebo chez 240 adultes atteint d’un gliome malin de haut grade nouvellement diagnostiqué [42]. Cependant, la place du Gliadel® par rapport au schéma dit de Stupp et al. [35] n’est pas clairement définie aujourd’hui pour le traitement de première ligne.
4.2. Gliomes anaplasiques La radiothérapie adjuvante focalisée de 60 Gy en 30 fractions de 2 Gy est un standard thérapeutique. Deux études randomisées menées par l’EORTC et le RTOG (Radiation Therapy Oncology Group) [3,39] ont montré que la chimiothérapie adjuvante à base de nitroso-urées (PCV) augmentait la probabilité de survie sans
5.
Examens complémentaires nécessaires à la planification du traitement
L’IRM est actuellement le standard pour l’évaluation du volume tumoral et de l’œdème. Les séquences nécessaires sont T1, T2, T1 après injection de gadolinium, T2 flair. Si le malade a été opéré, une IRM est demandée après cette opération. Les techniques de fusion d’images et de recalage permettent de réaliser une étude dosimétrique scanographique en intégrant les données de l’IRM.
6.
Modalités de traitement
La scanographie dosimétrique est réalisée chez un patient en décubitus dorsal, avec un plan incliné sous la tête si la tumeur est frontale ou temporale. Un masque de contention thermoformé est réalisé avant l’acquisition des images. L’injection de produit de contraste n’est pas nécessaire, sauf si la fusion des images de la scanographie dosimétrique avec une IRM récente n’est pas possible. (Les modalités de traitement sont détaillées plus précisément dans les cas cliniques ci-dessous.)
7.
Détermination des volumes cibles
Le volume tumoral macroscopique (GTV ou Gross Tumor Volume) est le volume tumoral visible sur l’imagerie. Le volume tumoral macroscopique est obtenu à partir de la masse visible sur la scanographie avec injection mais surtout à partir de la prise de contraste sur la séquence T1 après injection de gadolinium de l’IRM [19]. Le volume tumoral macroscopique est parfois difficile à définir quand une partie de la tumeur ne prend pas le contraste. Dans ce cas, il est alors possible d’utiliser les images pondérées en T2 Flair. Mais il est souvent difficile, sur celles-ci, de différencier
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œdème et tumeur, qui sont parfois intimement liés. Ces difficultés peuvent être encore accentuées en situation postopératoire du fait des remaniements occasionnés par le geste chirurgical. Le volume cible anatomoclinique (CTV ou Clinical Target Volume) correspond à l’extension microscopique probable de la tumeur au-delà du volume tumoral macroscopique. Cette marge inclut une couronne de tissus apparemment sains et dans tous les cas l’œdème en hypersignal en T2 ou T2 flair. La présence de barrières anatomiques estimées infranchissables telles que les structures osseuses ou les méninges est prise en compte pour affiner le volume cible anatomoclinique. Le volume cible prévisionnel (PTV ou Planning Target Volume) prend en compte les incertitudes dues au repositionnement du patient. Il dépend des instruments de contention : 1 à 2 mm en cas d’utilisation d’un cadre de stéréotaxie, 3 mm en cas d’utilisation d’une technique de guidage par l’image (IGRT), 5 mm en cas de masque de contention classique.
8.
Doses
Glioblastomes et tumeurs gliales de haut grade : — 60 Gy en 30 fractions de 2 Gy ou 59.4 Gy en 33 fractions de 1,8 Gy, parfois seulement 54 Gy selon les doses reçues par les organes à risque ; — 44-46 Gy dans la zone d’œdème péri-tumoral ; — Alternative chez les sujets âgés : 40 Gy en 15 fractions et 3 semaines. Tumeurs gliales de bas grade : — 45 à 54 Gy en fractions de 1,8-2 Gy.
9.
Organes à risque et contraintes de doses
Les organes à risque à déterminer sont les suivants [11,13] : — Encéphale sain : dose maximale de 60 Gy si irradiation partielle de l’encéphale. Dose maximale de 45 Gy si irradiation de l’encéphale en totalité. — Tronc cérébral : dose maximale de 50 Gy. Dans un volume très limité, la dose peut atteindre 54-55 Gy. — Moelle épinière : dose maximale de 45 Gy en fractionnement habituel. Dans certains cas, cette dose pourra être dépassée dans un petit volume sous réserve d’une dosimétrie tridimensionnelle avec délinéation de la moelle, histogramme dose-volume et contrôle du positionnement. — Chiasma et nerfs optiques : dose maximale de 54 Gy. — Conduit auditif, oreille moyenne et interne : dose maximale de 50-55 Gy sauf si le contexte carcinologique impose une dose supérieure. — Lobes temporaux : dose maximale de 60 Gy. — Hypophyse : dose maximale de 45-50 Gy, mais selon le contexte carcinologique une dose de 60 Gy ou plus pourra être acceptée si nécessaire.
10. Balistique et dosimétrie Le traitement standard est une radiothérapie conformationelle tridimensionnelle focale normalement fractionnée (sauf
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chez les sujets de plus de 70 ans où une irradiation hypofractionnée est le plus souvent préférée) [20]. L’utilisation de faisceaux non coplanaires peut être nécessaire, notamment si la tumeur intéresse les lobes temporaux. La radiochirurgie a des indications limitées dans le traitement des tumeurs gliales puisqu’elles sont très infiltrantes. Elle peut trouver sa place comme traitement de rattrapage de petites lésions localisées [27,37]. La modulation d’intensité peut aussi s’avérée utile mais l’escalade de dose au delà de 60 Gy reste du domaine de la recherche [5].
11. Toxicité aiguë Durant la radiothérapie, une consultation hebdomadaire est nécessaire afin de surveiller l’apparition d’effets aigus et d’adapter le traitement symptomatique. La toxicité attendue est la suivante [13] : — L’asthénie, quasi constante, variable selon les sujets. Elle peut persister plusieurs semaines après la fin du traitement. — La majoration de l’œdème péri-tumoral qui peut être responsable d’une hypertension intracrânienne. Elle est plus fréquente en cas de gliome de haut grade et/ou inopérable. Le traitement repose sur une corticothérapie orale (voire intraveineuse en hospitalisation si nécessaire), sans oublier les mesures associées à la corticothérapie au long cours. — L’alopécie : dessinant les portes d’entrée des faisceaux, elle survient à partir de la 3e semaine de traitement. La repousse des cheveux est complète ou quasi-complète mais lente : elle débute environ 3 mois après la fin de la radiothérapie. — L’érythème cutané : traité par les soins locaux habituels. — Les crises d’épilepsie : à craindre en cas d’antécédents au cours de l’histoire de la maladie. En général, un traitement préventif est instauré au début de la prise en charge.
12. Toxicité tardive La toxicité tardive était jusqu’à présent peu considérée vu le pronostic défavorable des gliomes malins. Actuellement, la survie des patients a été nettement allongée et des malades survivent à long terme. La toxicité tardive est donc importante à considérer [29]. Plusieurs facteurs influencent le risque de toxicité tardive cérébrale : le volume de tissus sains irradié, l’irradiation des structures symétriques controlatérales qui empêchent le recours à la plasticité cérébrale, la dose totale et le fractionnement. Par ailleurs, l’âge avancé et une détérioration pré-existante des fonctions supérieures semblent être des facteurs de risque de troubles mnésiques radio-induits [22]. La toxicité tardive peut se manifester par des dégradations neurocognitives, une nécrose cérébrale, une leucoencéphalopathie, des atteintes vasculaires et des troubles endocriniens. Elles sont été décrites en détail par ailleurs [13]. Les nécroses radiques cérébrales sont devenues exceptionnelles depuis l’amélioration des techniques de radiothérapie et le respect des contraintes de doses des tissus sains avoisinant. [20,26]. Elles surviennent classiquement 6 mois à 5 ans après la radiothérapie cérébrale et miment un processus intracérébral
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expansif. En scanographie et IRM, la radionécrose est très souvent difficile à différencier d’une progression tumorale. La spectroIRM, l’IRM de perfusion et la TEP (tomographie par émission de positons) peuvent aider au diagnostic. Les données prospectives sur les séquelles neuro-psychologiques de la radiothérapie cérébrale ont été obtenues surtout grâce à des séries pédiatriques [9,31,40]. Chez l’adulte, les données de la littérature sont contradictoires mais les séquelles fonctionnelles semblent minimes en cas d’irradiation focale de 50 à 60 Gy [2,13]. Une détérioration de l’audition et des fonctions hypophysaires peuvent survenir à distance de la radiothérapie cérébrale, justifiant un suivi régulier [1,12,18].
— Délinéation des organes à risque (Fig. 2 et 3) : encéphale, tronc cérébral, chiasma, yeux, nerf optique, oreille interne, hypophyse, cristallin. — Validation du plan de traitement : (Fig. 4, 5 et 6) Choisir la balistique qui permet d’obtenir la meilleure couverture du volume cible prévisionnel [selon le rapport 62 de l’International Commission on Radiation Units and Measurements (ICRU) 62 : 95 % < volume cible prévisionnel < 107 %] et un respect des contraintes de doses aux organes à risque. (cf. ci dessus). En général, photons de 6 à 10 MV. En général, six à huit faisceaux au total : trois ou quatre pour le volume initial, trois ou quatre pour le volume réduit. Tous les faisceaux sont utilisés chaque jour. — Vérification en cours de traitement : imagerie embarquée (On Board Imager, OBI®) tous les jours.
13. Cas clinique commenté n °1 : glioblastome inopérable Il s’agissait d’une femme de 73 ans en bon état général qui avait comme antécédent une hypertension artérielle non traitée et une hystérectomie pour fibrome. L’histoire de la maladie a débuté avec l’apparition progressive d’une hémiparésie droite avec chutes à répétition. À l’examen clinique d’entrée, la patiente était en bon état général avec un indice de Karnofsky de 80 %. L’examen clinique a montré une hémiparésie droite. Il n’y avait pas d’autre anomalie à l’examen clinique, notamment pas d’anomalie des paires crâniennes ni de syndrome cérébelleux. Les examens complémentaires biologiques étaient normaux. Un bilan d’imagerie par tomodensitométrie et résonance magnétique a mis en évidence un volumineux processus thalamique droit de 3 cm. La biopsie chirurgicale a permis de conclure à un glioblastome. Étant donné la localisation et la taille de la lésion, il a été propose à la patiente une chimioradiothérapie exclusive : radiothérapie focalisée de 60 Gy en fractions de 2 Gy associée à une chimiothérapie concomitante et adjuvante par témozolomide [32, 36]. En pratique : — Simulation : scanographie dosimétrique : patient en decubitus dorsal, plan incliné sous la tête si tumeur frontale ou temporale, masque de contention thermoformé, alignement des lasers de positionnement et des marques sur les masques. Pas d’injection de produit de contraste (recommandée seulement si fusion avec IRM impossible). Epaisseur de coupes : 2,5 mm. — Fusion avec IRM (séquences T1, T1 gado, T2, T2 flair) : fusion des images scanographiques avec une IRM récente. — Délinéation des volumes cibles (Fig. 1 et 3) : • Volume tumoral macroscopique (défini au mieux sur la séquence IRM en T1 avec injection de gadolinium). • Volume cible anatomo-clinique • o volume initial : volume tumoral macroscopique et marge de 2,5 cm jusqu’à 44-46 Gy (après exclusion des barrières anatomiques jugées infranchissables, telles que l’os ou les méninges). Ce volume doit aussi couvrir toute la zone en hypersignal sur la séquence IRM en T2 flair avec une marge de 1-2 cm. • o volume réduit : volume tumoral macroscopique et marge de 1,5 cm jusqu’à 60 Gy (après exclusion des barrières anatomiques jugées infranchissables). Volume cible prévisionnel : volume cible anatomoclinique + 5 mm.
14. Cas clinique commenté n °2 : glioblastome opéré Il s’agissait d’un homme de 44 ans, sans antécédent médical ou chirurgical, qui a souffert de troubles de la marche puis de l’équilibre en mai 2009 qui ont fait découvrir une masse parenchymateuse intra-cérébrale, pariéto-calleuse gauche, mesurant 4 cm de grand axe sur l’IRM, dont l’aspect est fortement évocateur d’un gliome malin. Le patient a été opéré le 25/05/2009. L’exérèse a été macroscopiquement incomplète et l’IRM postopératoire montrait la présence d’une masse résiduelle L’analyse histologique finale retrouvait un glioblastome. Il a donc été proposé au patient une chimioradiothérapie concomitante. Selon le protocole de Stupp et al. : 60 Gy en 30 séances par photons de 10 MV associés au témozolomide durant la durée de la radiothérapie (modalités classiques). Le patient a ensuite reçu des cures de témozolomide pendant six mois [32,36]. En pratique : — Simulation : idem que le cas clinique n°1. — Fusion avec IRM : fusion des images de la scanographie dosimétrique avec les IRM pré et postopératoires. — Délinéation des volumes cibles (Fig. 7) : • Volume tumoral macrocopique : reliquat tumoral correspondant à la zone prenant le produit de contraste sur l’IRM postopératoire en séquence T1 après injection de gadolinium. • Volume cible anatomoclinique : • o volume initial : volume tumoral macroscopique et marge de 2,5 cm jusqu’à 44-46 Gy (après exclusion des barrières anatomiques jugées infranchissables) Ce volume doit couvrir la cavité porencéphalique et l’œdème péritumoral visible sur les séquences T2 et T2 flair avec une marge d’un à deux cm • o volume réduit : volume tumoral macroscopique et marge de 1,5 cm jusqu’à 60 Gy (après exclusion des barrières anatomiques jugées infranchissables). • Volume cible prévisionnel : volume cible anatomoclinique + 5 mm — Délinéation des organes à risque (Fig. 8) : encéphale, tronc cérébral, chiasma, yeux, nerf optique, oreille interne, hypophyse, cristallin. — Validation du plan de traitement : Choisir la balistique qui permet d’obtenir la meilleure couverture du volume cible prvisionnel (selon ICRU 62 ; 95 %< volume cible prévisionnel < 107 %)) et un respect des contraintes de doses aux organes
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à risque. (cf. ci dessus). En général, photons de 6 à 10 MV. En général, six à huit faisceaux au total : trois ou quatre pour le volume initial, trois ou quatre pour le volume réduit (Fig. 9 et 10). Tous les faisceaux sont utilisés chaque jour.
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Conflits d’intérêts Les auteurs ont déclaré n’avoir aucun conflit d’intérêts pour cet article.
Fig. 1. Délinéation du volume tumoral macroscopique (en orange) après fusion d’images. Images scanographiques et remnographiques en séquence T1 après injection de gadolinium fusionnées. Création du volume cible anatomoclinique (rouge) et du volume cible prévisionnel (jaune). Delineation of gross tumor volume tumoral (orange) after image fusion. Fused CT and MRI images T1-weighted sequence after injection of gadolinium. Creation of clinical target volume (red) and planned target volume (yellow).
Fig. 2. Délinéation des organes à risque grâce aux différentes séquences d’IRM (nerfs optiques, chiasma, tronc cérébral). Delineation of at-risk organs based on different MRI sequences (optic nerves, chiasma, brainstem).
Fig. 3. Reconstruction tridimensionnelle des organes cibles (volume tumoral macroscopique en orange) et des organes à risque (yeux, nerfs optiques, chiasma, tronc cérébral). 3D reconstruction of target organs (gross tumor volume, orange) and at-risk organs (eyes, optic nerves, chiasma, brainstem).
Fig. 4. Balistique de traitement. Ici, quatre faisceaux. Treatment ballistics. Here, four beams.
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Fig. 6. Obtention des histogrammes dose-volume. Obtaining dose-volume histograms.
Fig. 5. Dosimétrie. Dosimetry.
Fig. 7. Délinéation du volume tumoral macroscopique (rouge) après fusion avec l’IRM en séquence T1 après injection de gadolinium et de l’œdème (bleu) après fusion avec l’IRM en séquence T2 flair. Delineation of gross tumor volume tumoral (red) after fusion with T1-weighted MRI sequence after gadolinium injection and edema (blue) after fusion with MRI T2-weighted FLAIR sequence.
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Fig. 9. Dosimétrie. Dosimetry.
Fig. 8. Reconstruction tridimensionnelle des organes cibles et des organes à risque (yeux, nerfs optiques, chiasma, tronc cérébral). 3D reconstruction of target organs and at-risk organs (eyes, optic nerves, chiasma, brainstem).
Fig. 10. Histogrammes dose-volume. Dose-volume histograms.
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Ca ncer/ R adi o t hérapie 14 Suppl . 1 (2010) S23– S33
Cancers du cavum de l’adulte Nasopharyngeal cancer B. Fleury*, M.C. Biston, X. Montbarbon, P. Pommier Département de radiothérapie, Centre de lutte contre le cancer Léon-Bérard, 28, rue Laennec, 69008 Lyon, France
RÉSUMÉ Mots clés : Radiothérapie conformationnelle avec modulation d’intensité Cancer du nasopharynx Volumes cibles Atlas
L’objectif de ce travail était de proposer des recommandations pour la délinéation des volumes cibles des cancers du nasopharynx, la planification de l’irradiation, et de décrire les résultats escomptés en termes d’efficacité et de toxicité. Ces recommandations sont basées sur l’anatomie et l’histoire naturelle des ces tumeurs ainsi que sur les expériences de radiothérapie en modulation d’intensité publiées par différentes équipes. © 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
ABSTRACT Keywords: Intensity modulated radiotherapy Nasopharyngeal cancer Target volumes Atlas
The main objective of this work was to propose recommendations concerning the delineation of the target volume of the nasopharyngeal cancers, the planification of the treatment, and describe the expected results about the efficacity and the toxicities. Theses recommendations are based upon anatomy, natural history of theses tumors, and upon published experiences from different teams working with IMRT. © 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Published by Elsevier Masson SAS. All rights reserved.
1.
Épidémiologie
L’incidence varie de 0,5-2/100 000/an dans les zones à faible endémie, à 30-80/100 000/an dans les zones de forte endémie : Asie du sud-est, en particulier dans la région cantonaise, Taiwan, Vietnam, Malaisie, le Bassin méditerranéen et l’Afrique du nord, les populations Esquimaux d’Alaska et du Groenland [5,6,42,43]. On distingue deux grands types histologiques : les carcinomes épidermoïdes, kératinisants ou non, qui réalisent les types I et II de l’OMS, et les carcinomes indifférenciés dits UCNT (Undifferenciated Carcinoma of Nasopharyngeal Type), qui constituent le type III. La prévalence respective des différents sous-types varie selon le lieu
géographique ; le type III représente ainsi entre 65 % (Amérique du nord) et 95 % (Chine) des cas [34]. Le pic se situe vers 40-50 ans, avec une distribution souvent bimodale (20-30 ans et après 50 ans) et l’homme est plus fréquemment touché que la femme (sex ratio : 2,5-3) [5,6,42,43]. Il n’y a pas d’agent étiologique clairement identifié. Le virus Epstein Barr est fréquemment retrouvé dans les carcinomes indifférenciés, mais sa causalité n’a encore jamais été clairement établie. Des formes familiales ont été décrites, mais restent rares. Enfin, les nitrosamines présentes dans les salaisons et fumaisons participent vraisemblablement à la carcinogénèse [5,42].
* Correspondance. Adresse e-mail : bxfl[email protected] (B. Fleury) © 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
S24
2.
B. Fleury et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S23-S33
Classification
La classification de l’AJCC (American Joint Committee on Cancer) [10,12] est la plus couramment utilisée en Europe et en Amérique du nord, alors que la classification de Ho [40], qui en diffère significativement, est utilisée en Asie. Elles sont rapportées dans les Tableaux 1 et 2.
3.
Tableau 2 Classification de l’AJCC et de Ho (identique entre les deux systèmes). AJCC and Ho classifications (identical in two systems). Stade 0
Tis
N0
M0
Stade I
T1
N0
M0
Stade IIA
T2a
N0
M0
Stade IIB
T1
N1
M0
T2a
N1
M0
T2b
N0, N1
M0
T1
N2
M0
T2a, T2b
N2
T3
N0, N1, N2
Stade IVA
T4
N0, N1, N2
M0
Stade IVB
Tout T
N3
M0
Stade IVC
Tous T
Tout N
M1
Tous T
N3
M0
Tous T
Tous N
M1
Indications de la radiothérapie Stade III
Le traitement de référence est la radiothérapie externe, associée à une chimiothérapie concomitante dans les formes évoluées [3,31,35]. En cas de récidive locale, une nouvelle radiothérapie peut permettre d’obtenir le contrôle local ; il peut s’agir d’une radiothérapie externe conformationelle, idéalement avec modulation d’intensité [9,18,32] ou d’une curiethérapie de bas voire de haut débit (pour des récidives limitées, superficielles, sans infiltration vers les espaces para et rétro-pharyngés ou vers la base du crâne) [25,30].
Tableau 1 Classification de l’AJCC et de Ho. AJCC and Ho classifications. Stade T
Classification de Ho
Stade T
Classification de l’AJCC
T1
Tumeur restreinte à la muqueuse nasopharyngée ou détectable uniquement par la biopsie
T1
Localisation limitée au nasopharynx
T2
Extension aux fosses nasales, à l’oropharynx, aux muscles adjacents ou atteinte des nerfs cervicaux
T2
Extension aux parties molles de l’oropharynx et/ou aux fosses nasales
T2a
T2a : sans extension parapharyngée
T2b
T2b : avec extension parapharyngée.
T3
Atteinte des structures osseuses et/ou atteinte des sinus maxillaires
T4
T4
Extension intra crânienne, et/ou aux nerfs crâniens, et/ou à la fosse infra temporale et/ou à l’hypopharynx et/ou à l’orbite et/ou à l’espace masticateur
Stade N
Stade N
T3
Tumeur T2 avec T3a : envahissement osseux en-dessous de la base du crâne T3b : envahissement osseux de la base du crâne T3c : atteinte des nerfs crâniens T3d : envahissement orbitaires, du larynx ou de la fosse infra temporale
N0
Pas d’adénopathie présente
N0
Pas d’atteinte ganglionnaire démontrée
N1
Adénopathie(s) cervicale(s) supérieure(s) au-dessus du larynx
N1
Adénopathie(s) unilatérale(s), ≤ 6 cm de plus grand diamètre, au-dessus du creux sus claviculaire
N2
Adénopathie(s) cervicale(s) médiane(s) située(s) entre le larynx et le creux sus claviculaire
N2
Adénopathie(s) bilatérale(s), ≤ 6 cm de plus grand diamètre, au-dessus du creux sus claviculaire
N3
Adénopathie cervicale du tiers inférieur ou du creux sus-claviculaire
N3
Adénopathie(s) > 6 cm dans sa plus grande dimension ou dans le creux sus claviculaire
N3a
Adénopathie(s) > 6 cm dans sa plus grande dimension
N3b
Atteinte du creux sus claviculaire
Stade M
Stade M
M0
Absence de métastase à distance
M0
Pas d’atteinte métastatique démontrée
M1
Présence de métastase à distance
M1
Présence de métastase (os, poumon, foie, ganglion extra cervical.. (risque augmente avec l’atteinte N)
B. Fleury et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S23-S33
4.
Modalités de traitement
S25
4.2. Détermination des volumes cibles
4.1. Radio-anatomie – histoire naturelle
4.2.1. Volumes cibles tumoral primitif
4.1.1. Extension tumorale locale
Les descriptions apportées dans ce chapitre sont basées sur des articles décrivant l’utilisation de la RCMI. La très grande majorité de ces articles rapportait des séries de cancers du nasopharynx localement évolués.
L’analyse de l’extension locale des cancers du nasopharynx requiert une bonne connaissance de l’anatomie ORL et de la base du crâne. Le nasopharynx peut être décomposé en loges anatomiques, certaines médianes (espace pharyngé muqueux, espace rétropharyngé, espace prévertébral) et d’autres latérales et paires (espaces parapharyngés, espace rétrostylien ou carotidien, espace masticateur) définies par des fascias plus ou moins résistants à l’extension de la tumeur (fascia prévertébral, fascia pharyngo-basilaire, diaphragme stylien, aponévrose masticatrice essentiellement) (Fig. 1) [15,24]. L’extension de la tumeur peut être décrite selon trois principaux axes [33]. L’axe postérolatéral, dans 80 % des cas. Le fascia pharyngobasilaire, prolongement du muscle constricteur supérieur du pharynx, fait obstacle mais présente une déhiscence appelée sinus de Morgani, qui laisse passage au muscle élévateur du palais et au torus tobarius, portion cartilagineuse de la trompe d’Eustache. Les troubles de perméabilité de la trompe peuvent alors induire un dysfonctionnement de celle-ci : sensation d’oreille pleine, otite séreuse, épanchement des cellules mastoïdiennes. En cas de franchissement, la tumeur peut alors atteindre : — l’espace parapharyngé, et diffuser alors dans son plan crâniocaudal (Fig. 2) ; — l’espace carotidien, la tumeur peut alors remonter au travers du foramen jugulaire ou du canal carotidien et devenir intra crânienne (Fig. 2). Plus loin, la tumeur peut envahir vers l’avant (et latéralement) les muscles ptérygoïdiens, puis la fosse ptérygomaxillaire et remonter vers l’orbite via la fissure orbitaire inférieure (Fig. 3, 4 et 5) ; plus latéralement, elle peut envahir l’espace masticateur et remonter jusqu’au foramen ovale (Fig. 3, 4 et 5), pour envahir le ganglion de Gasser et le sinus caverneux ainsi que les nerfs à proximité (III, IV, VI). L’axe postero-inférieur, dans 20 % des cas : on observe une atteinte de l’espace rétropharyngé et de l’espace prévertébral (Fig. 6), avec possibilité de coulée le long de l’axe cervical, en théorie jusqu’au médiastin [15]. Plus en arrière, la tumeur peut s’infiltrer dans le canal vidien et se prolonger dans le foramen lacerum et le sinus sphénoïdal (Fig. 7a et 7b). Enfin, l’axe supérieur direct est possible, par érosion osseuse de l’os sphénoïde. L’atteinte intra-crânienne est rare (< 10 %) [5].
4.1.2. Extension ganglionnaire Le cancer du nasopharynx est extrêmement lymphophile. L’atteinte ganglionnaire est présente lors du diagnostic dans 70 à 90 % des cas et souvent bilatérale (50 % des cas), quelle que soit la taille tumorale. Les aires les plus fréquemment envahies son les II, III, IV et rétropharyngées, mais toutes peuvent être concernées, notamment l’aire V [3,5,14,26].
4.2.2. Volume tumoral macroscopique primitif Le volume tumoral macroscopique (GTV) est communément défini comme la masse tumorale objectivable par l’examen clinique et endoscopique et les modalités d’imagerie disponibles. Notons que l’équipe du Queen Mary Hospital, à Hong Kong, inclut systématiquement la totalité du nasopharynx, y compris dans les formes localisés de stades T1-T2, dans un volume défini comme « GTV » [22].
4.2.3. Volume cible anatomoclinique tumoral primitif (Tableau 3) Le volume cible anatomoclinique (CTV) doit couvrir les voies d’extension précédemment décrites. Les différents auteurs s’accordent pour qu’il inclue : — en haut : au moins la moitié inférieure du sinus sphénoïdal et l’étage moyen de la base du crâne (ce qui comprend donc les foramina ovale, épineux et lacerum) [11,22,23,27,28,33,39,41]. Certains auteurs incluent la fossette du ganglion de Gasser [33] ou le sinus caverneux [20] ; — en bas : le volume doit couvrir les extensions dans la muqueuse oropharyngée (espace pharyngée muqueux) [33]. En bas et en arrière, le volume cible anatomoclinique tumoral se fusionne avec les espaces ganglionnaires rétropharyngés [11,19,20,27,28,33,39,41] ; — latéralement : le volume cible anatomoclinique doit couvrir les espaces parapharyngés et, pour plusieurs auteurs, les espaces carotidiens [11,33]. Il est possible d’inclure ces espaces en fonction de l’extension tumorale locale ou régionale (i.e. envahissement des aires IIA). Dans tous les cas, il faudra couvrir les voies d’extension le long de la trompe d’Eustache. Plus loin, l’inclusion des muscles ptérygoïdiens médiaux [22,23], ou médiaux et latéraux [11] est systématique pour plusieurs auteurs ; — en avant : le volume cible anatomoclinique inclut la partie postérieure des fosses nasales et, pour la plupart des auteurs, le tiers postérieur des sinus maxillaires [11,22,23,27,28,33,39,41]. Il doit aussi inclure les fosses ptérygo-maxillaires, car elles constituent une voie d’extension importante (cf. supra) [11,20,22,23,27,28,41] ; — en arrière : le clivus est inclus par tous les auteurs [11,20, 22,23,27,28,33,39,41] ; de fait, les espaces pré-vertébraux sont aussi systématiquement inclus. Le Tableau 3 fait la synthèse des descriptions du volume cible anatomoclinique faites par les différents auteurs. Les Figures 6 à 12 représentent le volume cible anatomoclinique conjuguant les descriptions faites par les équipes citées dans ce paragraphe : les zones communes au plus grand nombre
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Tableau 3 Définition du volume cible anatomoclinique (CTV) par les équipes utilisant la modulation d’intensité. Definition clinical target volume (CTV) by the teams using intensity modulation. Article
Equipe
Limites du CTV tumoral En haut
En bas
En avant
En arrière
Latéralement
Marcy et al., 2005 [33]
CAL, France
Sinus sphénoidal (moitié inférieure) Base du crâne dont foramen lacerum, foramen ovale et ganglion de Gasser
Musculature pharyngée Voile du palais Ogive amygdalienne Ganglions rétropharyngés
Fosses nasales Fosses ptérygo-maxillaires Canal ptérygoïdien
Espace prévertébral Clivus
Espaces parapharyngés espaces carotidiens
Sultanem et al., 2000 [39]
UCSF, USA
Sinus sphénoidal inférieur Base du crâne
Ganglions rétropharyngés
Fosses ptérygomaxillaires Tiers postérieur des cavités nasales et des sinus maxillaires
Clivus
Espaces parapharyngés
Lee et al., 2002 [28] Lee et al., 2003 [27]
UCSF, USA
Partie inférieure du sinus sphénoïde Base du crâne
Ganglions rétropharyngés
Fosses ptérygo maxillaires - Tiers postérieur des cavités nasales et des sinus maxillaires
Clivus
Espaces parapharyngés
Eisbruch et al., 2002 [11]
U. Michigan, USA
Sinus sphénoïdal Base du crâne dont sinus caverneux, foramen ovale, foramen épineux
Ganglions rétropharyngés
Apophyses ptérygoïdes Tiers postérieurs des cavités nasales et des sinus maxillaires
Clivus
Espaces parapharyngés (jusqu’à mi amygdales) Muscles ptérygoïdiens Espaces carotidiens
Kwong et al., 2006 [22] Kwong et al., 2004 [23]
QMH, Hong Kong
Sinus sphénoidal Base du crâne dont pointe de l’os pétreux, fissure orbitaire inférieure, foramen ovale, foramen épineux, sinus caverneux
Moitié antérieur du corps vertébral de C1 Muscles pré vertébraux
Tiers postérieur des cavités nasales et des sinus maxillaires
Clivus Muscles prévertébraux
Espaces parapharyngés Trompe d’Eustache Muscles ptérygoïdiens médiaux
Tham et al., 2009 [41]
NCC, Singapourg
Sinus sphénoïde Sinus caverneux Pointe des rochers Foramen ovale
Ganglions rétropharyngés
- Fosses ptérygo maxillaires - Tiers postérieur des cavités nasales et des sinus maxillaires
Clivus (moitié antérieure si intact, en entier si envahi)
Espaces parapharyngés
Kam et al., 2004 [20]
PoWH, Hong Kong
Sinus sphénoidal Sinus caverneux pointe des rochers
Ganglions rétropharyngés
- Fosses ptérygo maxillaires - Tiers postérieur des cavités nasales et des sinus maxillaires
Clivus (moitié antérieure si intact, en entier si envahi)
Espaces parapharyngés entiers
sont en rouge, les variantes plus larges sont en orange, celles plus petites sont en jaune. Ces variantes concernent avant tout l’inclusion des muscles ptérygoïdiens, des espaces carotidiens et des sinus caverneux. Bien entendu, la délinéation du volume cible anatomoclinique dépend avant tout de l’extension locale de la tumeur. En se basant sur tout ce qui a été décrit, on pourrait proposer de définir le volume cible anatomoclinique en faisant une extension d’un centimètre autour du volume tumoral macroscopique et d’adapter secondairement le volume créé à l’anatomie et aux zones à risque décrites dans ce paragraphe. Le volume minimal est le volume commun décrit par les différents auteurs.
4.2.4. Volume cible prévisionnel tumoral primitif. Les marges pour obtenir le volume cible prévisionnel (PTV) tumoral sont de l’ordre de 2 à 3 mm autour du volume tumoral macroscopique ou du volume cible anatomoclinique tumoral selon les équipes [11,20,22,23,27,28,33,39,41]. Deux à trois volumes cibles prévisionnels sont créés, en fonction des niveaux de doses prescrites. Le volume cible prévisionnel tumoral de plus forte dose (PTV T1) est en général créé à partir du volume tumoral macroscopique et un deuxième volume cible prévisionnel tumoral de dose plus modérée (PTV T2) est créé à partir du volume cible anatomoclinique tumoral. Une équipe construit un troisième volume cible prévisionnel, sur lequel sera prescrit une dose intermédiaire entre les deux premiers, correspondant au volume tumoral macroscopique plus 8 mm [41].
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Fig. 1. Espaces anatomiques composant et bordant le nasopahrynx. Anatomical spaces making up and bordering the nasopharynx.
Fig. 3. Voies d’extensions suivant l’espace masticateur et la fosse ptérygo maxillaire. Extension pathways following the masticator space and the pterygomaxillary fossa.
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Fig. 2. Extension postéro-latérale : la tumeur peut envahir l’espace graisseux parapharyngé, l’espace masticateur (muscle pétrygoïdien médial sur cette coupe) et plus en avant atteindre la fosse ptérygomaxillaire. Plus en arrière, la tumeur peut s’étendre à l’espace carotidien ( ou rétro stylien). Posterolateral extension : the tumor can invade the fatty parapharyngeal space, the masticator space (medial pterygoidal muscle on this view) and farther forward reach the pterygomaxillary fossa. Farther back, the tumor can extend to the carotid (or retrostyloid) space.
Fig. 4. Voies d’extensions suivant l’espace masticateur et la fosse ptérygo maxillaire. Extension pathways following the masticator space and the pterygomaxillary fossa.
Fig. 5. Voies d’extensions suivant la fosse ptérygo maxillaire jusqu’à la fissure orbitaire inférieure. Extension pathways following the pterygomaxillary fossa to the inferior orbital fissure.
Fig. 6. Extension postéro inférieure. Posteroinferior extension.
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Fig. 7a. Extension vers le foramen lacerum. Extension toward the foramen lacerum. Fig. 7b. Exemple d’un volume cible anatomoclinique sur une scanographie normale, en suivant les directives des principales équipes (du haut vers le bas). Example of a clinical target volume on a normal CT scan, following the directives of the main teams (from top to bottom).
Fig. 8. Exemple d’un volume cible anatomoclinique sur une scanographie normale, en suivant les directives des principales équipes (du haut vers le bas). Une équipe n’inclut dans le volume cible anatomoclinique que la moitié antérieure du clivus si celui-ci est intact [41]. Example of a clinical target volume on a normal scan, following the directives of the main teams (from top to bottom). One team only included half the clivus in the clinical target volume if it was intact [41]. Fig. 9. Exemple d’un volume cible anatomoclinique sur une scanographie normale, en suivant les directives des principales équipes (du haut vers le bas). Example of a clinical target volume on a normal CT scan, following the directives of the main teams (from top to bottom).
Fig. 10. Exemple d’un volume cible anatomoclinique sur une scanographie normale, en suivant les directives des principales équipes (du haut vers le bas). La partie intra-pétreuse de l’espace carotidien a été ici proposée comme variante, les différents auteurs ne précisant pas leurs limites supérieures. Example of a clinical target volume on a normal scan, following the directives of the main teams (from top to bottom). The intrapetrous part of the carotid space was proposed here as a variant ; the different authors did not specify their upper limits. Fig. 11. Exemple d’un volume cible anatomoclinique sur une scanographie normale, en suivant les directives des principales équipes (du haut vers le bas). Example of a clinical target volume on a normal CT scan, following the directives of the main teams (from top to bottom). Fig. 12. Exemple d’un volume cible anatomoclinique sur une scanographie normale, en suivant les directives des principales équipes (du haut vers le bas). Une seule équipe inclut systématiquement la moitié antérieure de C1 [22, 23]. Example of a clinical target volume on a normal CT scan, following the directives of the main teams (from top to bottom). Only one team systematically included the anterior half of C1 [22, 23].
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4.2.5. Volume cible ganglionnaire
8.
Etant données la topographie médiane du nasopharynx ainsi que la richesse du drainage lymphatique, il convient d’inclure systématiquement les aires jugulo-carotidiennes II, III, et IV, les aires spinales V et rétropharyngées des deux côtés dans le volume prophylactique [13,14]. Un volume à plus forte de dose sera créé au niveau des aires envahies. Il n’existe actuellement aucune donnée permettant d’envisager une adaptation des volumes ganglionnaires à traiter en fonction de l’extension locale de la tumeur.
Dans les séries publiées, la majeure partie des récidives a lieu soit en plein volume irradié aux plus fortes doses, soit à distance, mais rarement en bordure (Tableau 4). Les récidives sont décrites soit comme locales lorsqu’elles surviennent dans le site tumoral initial (poursuite évolutive ou récidive à distance du traitement), soit comme régionales lorsqu’elles surviennent dans les volumes ganglionnaires, soit comme à distance, lorsqu’elles surviennent sous forme de métastases.
9. 5.
Toxicité aiguë
Doses prescrites
La dose et le fractionnement de référence définis à partir des séries de radiothérapie classiques sont de 70 Gy en fractionnement de 2 Gy dans le volume cible tumoral et ganglionnaire et 50 Gy dans les volumes prophylactiques (tumoraux et ganglionnaires). Dans le cadre de la modulation d’intensité, il est possible d’opter pour un boost intégré [37,39], et de définir trois niveaux de dose : au moins 70 Gy équivalents en fractions de 2 à 2,2 Gy dans le volume tumoral à plus haut risque ainsi que dans les aires ganglionnaires envahies, 60-70 Gy équivalents en fractions de 1,8 à 2 Gy dans le volume tumoral à bas risque et de 54 Gy équivalents en fractions de 1,8 Gy dans le volume ganglionnaire prophylactique [22,23,27,28,41,44]. L’équipe du National Cancer Center de Singapour définit un volume tumoral à risque intermédiaire, qui correspond au volume tumoral macroscopique plus 5 mm, dans lequel est prescrite une dose de 66 Gy équivalente de 70 Gy [41]. Le Tableau 5 fait la synthèse des volumes tumoraux et doses prescrites par les différentes équipes ; les dose rapportées sont calculées en équivalence de 2 Gy en utilisant le modèle linéaire-quadratique [36], en supposant un rapport alpha/béta de 10 et en négligeant les différences d’étalement.
6.
Contrôle tumoral
Organes à risque et contraintes de dose
Les données sont répertoriées dans le Tableau 6 et sont issues du Guide des procédures en radiothérapie externe 2007, en fractionnement de 2 Gy, à raison de 5 séances par semaine [2].
Dans les séries de RCMI, il s’agit essentiellement de radiomucite d’intensité variable (grade II ou III, rarement de grade IV) [19,21,22,28,41], avec entre 5 et 10 % des patients requérant la pose d’une sonde naso-gastrique, les critères exacts de décision de pose n’étant pas rapportés [19,23], de radioépithéliite [19,22,23], de dysgueusie, d’hyposialie [19,26,29,39,46]. Une toxicité hématologique se surajoute en cas de chimioradiothérapique concomitante [23,26].
10. Toxicité tardive Étant donnée la complexité de la région anatomique traitée, les complications potentielles tardives sont nombreuses, mais restent rares, voire exceptionnelles en dehors de l’hyposialie. Ainsi ont été décrites des hyposialies et xérostomies, avec 25 à 35 % d’asialies complètes [22], des trismus [27,28], une fibrose sous cutanée [1,27-29], des sténoses nasopharyngées [27], des caries (imposant une protection fluorées), une hypoacousie de transmission ou de perception [17,27,28], une nécrose du lobe temporal [20,23,28], des troubles cognitifs [8], une paralysie des paires crâniennes [27], des vertiges centraux ou périphériques, associés à une insuffisance vertébro-basilaire [45], des sténoses carotidiennes [7] ou des pseudo-anévrismes carotidiens pouvant être responsables d’épistaxis cataclysmiques [23,28] des troubles cognitifs, une insuffisance hypophysaire [38], ou des ulcérations muqueuses ont été rapportés [4,16,26,29].
11. Cas clinique commenté 7.
Balistique, dosimétrie
Le traitement peut être délivré soit dans deux volumes [22] : — un volume tumoral, traité avec modulation d’intensité, et un volume sus-claviculaire, traité sans modulation — soit dans un volume unique [20,27,28,41,44], traité avec modulation d’intensité. Le volume tumoral est généralement traité avec une balistique comportant de 5 à 9 faisceaux équidistants. Une technique de pondération inverse est utilisée : une optimisation propre à chaque centre et dépendante du type de logiciel de planification est élaborée. Celle-ci doit permettre au logiciel d’optimiser la distribution de dose pour chacune des incidences de faisceau, afin d’obtenir une couverture optimale pour les différents volumes cibles prévisionnels tout en préservant au mieux les organes à risque.
M. D. M., 25 ans, a été adressé pour carcinome du nasopharynx. Ce patient n’avait pas d’antécédent médical ou chirurgical particulier. Le tabagisme était estimé à une dizaine de cigarettes par jour. Il travaillait comme chauffeur routier. Depuis mai 2009, il se plaignait d’une otalgie droite, puis gauche. Rapidement sont apparues des adénopathies cervicales. Un premier bilan comportant échographie et scanographie cervicale a été réalisé ; celui-ci a confirmé l’existence d’adénopathies cervicales bilatérales mais ne s’est pas étendu jusqu’au cavum. M. M. a ensuite été adressé au chirurgien ORL. L’interrogatoire et l’examen clinique objectivaient alors une perte de 13 kg en deux mois (poids de forme : 110 kg), une polyadénopathie cervicale avec atteinte clinique spinale gauche et sous-mandibulaire droite, et en nasofibroscopie une lésion du cavum qui a été biopsiée.
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Tableau 4 Résultats des principales équipes travaillant en RCMI. Results of the main teams working in RCIM. Référence
Equipe
Nombre patients
Stade III-IV (%)
Sultanem et al., 2000 [39]
UCSF, USA
35
72
Kwong et al., 2004 [22]
QMH, Hong Kong
33
Kwong et al., 2006 [23]
QMH, Hong Kong
Lee et al., 2002 [28]
Suivi médian (mois)
Contrôle local
Contrôle ganglionnaire
Contrôle à distance
Survie globale
Détails des récidives
21,8
100 % à 4 ans
100 % à 4 ans
57 % à 4 ans
94 % à 4 ans
7 récidives à distance
0
24
100 % à 3 ans
92,3 % à 3 ans
100 % à 3 ans
100 % à 3 ans
1 poursuite évolutive
50
100
25
90 % à 2 ans
-
94,2 % à 2 ans
92,1 % à 2 ans
2 poursuites évolutives et 3 récidives locales en plein champ 2 récidives à distance
UCSF
67
70
31
97 % à 4 ans
-
66 % à 4 ans
88 % à 4 ans
1 récidive locale 1 récidive ganglionnaire 17 récidives à distance
Tham et al., 2009 [41]
NCC, Singapourg
195
63
36,5
89,6 % à 3 ans
-
89,2 % à 3 ans
94,3 % à 3 ans
10 récidives locales 3 récidives ganglionnaires 2 récidives loco-régionales 19 récidives à distance
Wolden et al., 2006 [44]
MSKCC, USA
74
77
35
91 % à 3 ans
93 % à 3 ans
78 % à 3 ans
83 % à 3 ans
6 récidives locale dont 5 en plein champ et & en bordure
Kam et al., 2004 [20]
PoWH, Hong Kong
63
57
29
92 % à 3 ans
98 % à 3 ans
79 % à 3 ans
90 % à 3 ans
4 récidives locales 1 récidive ganglionnaire 13 récidives à distance
Abréviations : MSKCC : Memorial Sloan Ketterin Cancer Center, NCC : National Cancer center, PoWH : Prince of Whales Hospital, QMH : Queen Mary Hospital UCSF : University of California - San Francisco, U. Michigan : Université du Michigan
Tableau 5 Doses prescrites sur les différents volumes par les équipes ayant publié leur expérience en RCMI. Les doses sont données en équivalence pour des fractions de 2 Gy, en supposant un ratio alpha/béta de 10 et en négligeant les différences d’étalement. Doses prescribed for the different volumes by teams that have published their experience on RCIM. The doses are given as equivalence for 2-Gy fractions, assuming an alpha:beta ratio of 10 and ignoring the differences in extension. Référence
Equipe
Définition PTV T1
Dose au PTV T1
Définition PTV T2
Dose PTV T2
Kam et al., 2004 [20]
PoW
GTV T + 2 mm
66 GyE
CTV + 3 mm
59 GyE
Wolden et al., 2005 [44]
MSKCC
GTV T + 10 mm (5 mm en postérieur)
74 GyE
CTV + 5 mm
54 GyE
Kwong et al., 2004 [22]
QMH
GTV
68 - 70 GyE
CTV + 2 mm
66 - 68 GyE
Kwong et al., 2006 [23]
QMH
GTV T
77 GyE
CTV + 2 mm
70 GyE
Lee et al., 2002 [28]
UCSF
GTV T
70 GyE
CTV
59 GyE
Lee et al., 2003 [27]
UCSF
GTV T
70,7 GyE
CTV
59 GyE
Tham et al., 2009 [41]
NCC
GTV + 3 mm
70,7 GyE
CTV + 3 mm
59 GyE
Abréviations : GyE : Gy en équivalent en fractions de 2 Gy, MSKCC : Memorial Sloan Kettering Cancer Center, NCC : National Cancer center, PoWH : Prince of Whales Hospital, QMH : Queen Mary Hospital UCSF : University of California - San Francisco
L’analyse histologique a conclu à un carcinome de type III de l’OMS (UCNT). L’IRM montrait une lésion envahissant les espaces parapharyngés et carotidiens et le muscle ptérygoïdien médial du coté droit, mais sans infiltration de la base du crâne, une extension ganglionnaire qui confirmait les données cliniques mais intéressait aussi d’autres territoires (niveaux IV droit et gauche, sus-claviculaire gauche). La lésion a été classée T4N2c (Fig. 13 et 14). Une chimiothérapie néoadjuvante a été réalisée (trois cures associant cisplatine et 5-fluoro-uracile) sans incident
notable. Un bilan et une mise en état dentaire ont été organisés pendant cette phase du traitement, ainsi qu’une prise en charge nutritionnelle. La réévaluation par IRM après deux cures a conclu à une réponse partielle. Une chimioradiothérapie concomitante (avec du cisplatine toutes les trois semaines) a été organisée trois semaines après la troisième cure. Les volumes ont été construits à partir de l’envahissement avant la chimiothérapie. Une technique de boost intégré a été utilisée.
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Tableau 6 Contraintes de dose. Restriction dose. Organe
Contrainte(s)
Tronc cérébral
Dose max : 50 Gy
Nerf optique, chiasma
Dose max : 54 Gy
Moelle épinière cervicale
Dose max : 45 Gy
Cerveau (lobe temporal)
Dose max : 60 Gy
Œil
Dose moyenne < 35 Gy
Cristallin
Dose la plus basse possible
Parotide controlatérale
V26 < 50 % Dose moyenne < 30 Gy
Parotide homolatérale
Dose la plus basse possible
Articulation temporo mandibulaire
Dose max : 65 Gy
Cavité buccale (hors PTV)
Dose max : 55 Gy
Larynx sain
Dose max : 20 Gy dans toute partie du volume quant l’extension tumorale le permet
Oreille interne
Dose max : 60 Gy
Cochlée
Dose max : 58 Gy
Thyroïde
A documenter
Volumes cibles et doses dans la tumeur [le volume tumoral macroscopique (GTV) et le volume cible anatomoclinique (CTV) sont représentés sur les Fig. 15 et 16] : — PTV T66 : volume cible prévisionnel dans lequel ont été prescrits 66 Gy en 30 fractions sur six semaines (70 GyE), qui correspondait au volume tumoral macroscopique initial avec une marge de 3 mm ;
Fig. 13. IRM en coupe axiale transverse, séquence T1 avec injection de gadolinium. Infiltration des espaces parapharyngés et carotidiens. MRI, transverse axial view, T1-weighted sequence with gadolinium injection. Infiltration of the parapharyngeal and carotid spaces.
S31
— PTV T60 : volume cible prévisionnel dans lequel ont été prescrits 60 Gy en 30 fractions sur six semaines, qui correspondait au volume cible antomoclinique (délinéé sur les bases de ce qui a été décrit plus haut) avec une marge de 3 mm. Volumes cibles ganglionnaires : — PTV N66 : volume cible prévisionnel dans lequel ont été prescrits 66 Gy en 30 fractions sur six semaines, qui correspondait aux niveaux ganglionnaires initialement envahis (niveau IIA droit, IV droit et gauche, V gauche) avec une marge de 5 mm ; — PTV N54 : volume cible prévisionnel dans lequel a été prescrit 54 Gy en 30 fractions sur six semaines, qui correspondait aux aires IB, II, III, IV et rétropharyngées non couvertes par les deux volumes précédents, avec une marge de 5 mm. Les organes à risque délinéés ont été : les lobes temporaux, les oreilles internes (cochlée + vestibule), le tronc cérébral, la moelle épinière, le chiasma, les articulations temporo-mandibulaires, les globes oculaires, les nerfs optiques, les parotides, la cavité buccale, le larynx et la trachée. Les contraintes de dose recommandées dans le Guide des procédures 2007 de la Société française de radiothérapie oncologiques (SFRO) ont été appliquées. Une balistique à sept faisceaux isopondérés équidistants a été retenue. La Figure 17 donne une représentation de la distribution de dose.
Conflits d’intérêts Les auteurs ont déclaré n’avoir aucun conflit d’intérêts pour cet article.
Fig. 14. IRM en coupe axiale transverse, en séquence T1 avec injection de gadolinium. Atteinte ganglionnaire jugulocarotidienne bilatérale, dans le tiers inférieur du cou. MRI, transverse axial view, T1-weighted sequence with gadolinium injection. Bilateral jugulocarotid lymph node involvement in the inferior third of the neck.
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Fig. 15. Volumes CTV T66 et CTV T60. CTV T66 and CTV T60 volumes.
Fig. 16. Volumes cibles anatomoclinqiues (CTV) T66 et T60. T66 and T60 clinical target volumes (CTVs).
Références [1]
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[8]
[9]
[10] Fig. 17. Représentation de la distribution de dose en axial transverse. Representation of the dose distribution, transverse axial view.
[11]
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C ancer/ R adiot hérapie 14 Suppl . 1 (2010) S34– S42
Cancer de l’oropharynx Oropharyngeal Cancer C. Lafonda,*, Y. Pointreaub,c,d,e, C. Debelleix f,g, F. Denisa, G. Calaisb, J. Bourhish, J. Thariati a Centre
Jean-Bernard, Clinique Victor-Hugo, 9, rue Beauverger, 72000 Le Mans, France de radiothérapie, Centre régional universitaire de cancérologie Henry-S.-Kaplan CHU de Tours, Hôpital Bretonneau, 2, Boulevard Tonnellé, 37000 Tours, France c Université François-Rabelais-de-Tours, génétique immunothérapie chimie & cancer, 37000 Tours, France d CNRS, UMR 6239 « Génétique, Immunothérapie, Chimie et Cancer », 37000 Tours, France e CHRU de Tours, Laboratoire de Pharmacologie-Toxicologie, 37000 Tours, France f Service de radiothérapie-Centre Hospitalier Dax-Cote d’Argent boulevard Yves-du-Manoir, 40100 Dax, France g Service de radiothérapie-Hôpital Saint André, CHU Bordeaux, 1, rue Jean-Burguet, 33800 Bordeaux h Département de radiothérapie-oncologie, Institut Gustave-Roussy, 39, rue Camille Desmoulins, 94805 Villejuif cedex, France i Département de radiothérapie oncologie / IBDC CNRS UMR 6543, Centre de cancer Antoine-Lacassagne, Université Nice Sophia-Antipolis, 33, avenue Valombrose, 06189, Nice cedex 2, France b Service
INFO ARTICLE
RÉSUMÉ
Les figures 8b et 8c sont visibles uniquement sur : http : //www. sciencedirect.com/
Les cancers de l’oropharynx sont des lésions fréquentes. Leur traitement comporte généralement une radiothérapie soit exclusive, associée ou non à la chimiothérapie, soit en postopératoire. La définition des volumes cibles est rendue difficile par la complexité anatomique de cette zone. L’objectif de ce travail était de préciser les principes de l’irradiation conformationnelle tridimensionnelle illustrés par un cas clinique.
Mots clés : Cancer de l’oropharynx Radiothérapie conformationnelle Volumes cibles Atlas
Keywords: Oropharyngeal cancer Conformal radiotherapy Target volumes Atlas
1.
© 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
ABSTRACT Cancers of the oropharynx are common lesions. Their treatment often includes radiation therapy either exclusively or in combination with chemotherapy or after surgery. The definition of target volumes is made difficult by the complex anatomy of this area. The aim of this work is to clarify the principles of 3D conformal radiation illustrated by a case report. © 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Published by Elsevier Masson SAS. All rights reserved.
Épidémiologie
Le cancer des voies aérodigestives est le 4e en France avec 19 600 nouveaux cas en 2000 et 5600 décès chez les hommes et 900 chez les femmes [1]. Les facteurs de risque sont l’alcool, le tabac et les virus dont les Human Papilloma Virus. Le carcinome épidermoïde est de loin le plus fréquent avec 85 à 90 % des cas puis suivent les lymphomes malins et enfin les adénocarcinomes. D’autres tumeurs plus rares ont été décrites mais ne seront pas abordées ici. De la même façon, les variants du carcinome épidermoïde commun ne seront pas détaillés.
2.
Classification
2.1. Classification TNM de l’UICC de 2002 C’est cette classification qui est de loin la plus utilisée [2].
2.1.1. Tumeur : T — Tis : Carcinome in situ. — T1 : Tumeur ≤ à 2 cm dans sa plus grande dimension. — T2 : Tumeur ≥ à 2 cm et ≤ 4 cm.
* Correspondance. Adresse e-mail : [email protected] (C. Lafond) © 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
C. Lafond et al. / Cancer/Radiothérapie 14 (2010) S34-S42
— T3 : Tumeur > 4 cm. — T4 : T4a : tumeur envahissant une des structures suivantes : larynx, musculature profonde ou extrinsèque de la langue, muscle ptérygoïdien médian, palais osseux, mandibule. — T4b : tumeur envahissant une des structures suivantes : muscle ptérygoïdien latéral, apophyses ptérigoïdes, paroi latérale du nasopharynx, base du crâne ou englobant l’artère carotide.
2.1.2. Ganglions : N — N0 : pas de signe d’atteinte des ganglions lymphatiques régionaux. — N1 : métastase dans un seul ganglion lymphatique homolatéral inférieur ou égal à 3 cm dans sa plus grande dimension. — N2 : métastase unique dans un seul ganglion lymphatique homolatéral supérieur strictement à 3 cm et inférieur ou égal à 6 cm dans sa plus grande dimension, ou métastases ganglionnaires multiples, toutes inférieures ou égales à 6 cm. — N2a : métastase dans un seul ganglion lymphatique supérieur strictement à 3 cm mais inférieur ou égal à 6 cm. — N2b : métastases homolatérales multiples toutes inférieures ou égales à 6 cm. — N2c : métastases bilatérales ou controlatérales toutes inférieures ou égales à 6 cm. — N3 : métastases supérieures à 6 cm.
2.1.3. Métastase : M — M0 : pas de métastase à distance. — M1 : présence de métastase(s) à distance.
2.1.4. Stadification — — — —
Stade 1 : T1N0M0. Stade 2 : T2N0M0. Stade 3 : T1T2N1M0 ; T3N0M0. Stade 4 : correspond aux autres cas.
2.2. Indications de la radiothérapie Ce travail n’a pas pour but d’être exhaustif dans les indications de la radiothérapie. Il présente les grandes indications. Pour les tumeurs « superficielles » classées T1-3 NO-1, deux stratégies thérapeutiques sont équivalentes : une radiothérapie de la tumeur et des ganglions et une chirurgie de la tumeur et des ganglions. En fonction de l’analyse anatomopathologique de la pièce opératoire, une radiothérapie et(ou) une chimiothérapie peuvent être décidées. Pour les tumeurs classées T1 T2 N2 ou N3 et T3 T4 N0-N3, une radiothérapie externe peut être indiquée en première intention, le plus souvent en association à une chimiothérapie concomitante à base de sel de platine ou de cetuximab ou après la chirurgie, en cas de risque élevé de récidive [3].
2.3. Histoire naturelle des cancers de l’oropharynx L’extension locale des tumeurs de l’oropharynx se fait de proche en proche vers les structures avoisinantes, les tissus conjonctifs et épithéliaux ainsi que vers les structures lymphoïdes puis en
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profondeur. Ces différents volumes sont décrits dans les articles de Lapeyre et al. et Eisbruch et al. [4,5].
2.4. Volumes cibles et organes à risque Les volumes cibles et les contours des organes à risque sont déterminés à partir des coupes tomodensitométriques réalisées avec un patient en position de traitement avec une contention thermoformée personnalisée à 3 ou 5 points (5 points en cas de traitement avec modulation d’intensité) [6]. Typiquement, la scanographie est réalisé avec des coupes de 3 mm d’épaisseur tous les 3 mm, avec injection de produit de contraste iodé si possible et idéalement en double injection temps veineux et artériel (en l’absence d’allergie ou d’altération de la fonction rénale), en particulier dans le cas d’un traitement avec modulation d’intensité. Des fusions d’images avec l’IRM ou la TEP peuvent être utiles. Le malade est en décubitus bras le long du corps, tête en hyper-extension dans une cale mousse adaptée à la courbure du cou. Les épaules sont en position basse. Un espaceur de langue, dans l’idéal personnalisé à l’arcade dentaire, permet l’épargne des glandes salivaires accessoires du palais pour les tumeurs de la langue mobile et de la base de langue.
2.5. Les volumes cibles Le volume cible macroscopique (Gross Tumor Volume, GTV) est défini d’après les données cliniques et para cliniques du bilan pré thérapeutique (examen clinique, TDM, IRM et éventuellement TEP FDG) et se décompose en un volume tumoral et un volume ganglionnaire. Le schéma initial de la lésion et la description de la panendoscopie sont primordiaux à sa définition en particulier dans le cas d’une chimiothérapie néo-adjuvante. Le volume cible anatomoclinique (Clinical Target Volume, CTV) peut être décomposé en un volume à haut risque et un volume à bas risque eux-mêmes décomposés en volumes ganglionnaires et tumoral : — les CTV N, CTV N+R+ à haut risque et CTV N0 à bas risque pour les aires ganglionnaires ; — et CTV T ou lit opératoire (CTV lit op) à haut risque et CTV T et lit op à bas risque ; — le CTV T à haut risque consiste en une extension aux tissus mous adjacents du GTV T, avec une marge de 3 à 10 mm en fonction de l’extension de la lésion et des barrières anatomiques et modes de diffusion selon le site primitif [4] ; — la dose prescrite est de 66 à 70 Gy [5,7].
2.6. En postopératoire Le CTV lit op à haut risque correspond au lit opératoire avec une marge de 10 mm en cas de berges atteintes ou limites (< 5 mm) [5,7].
2.7. Volumes ganglionnaires Le GTV N est défini d’après les données cliniques et paracliniques du bilan préthérapeutique (examen clinique, TDM, IRM et éventuellement TEP FDG). Le CTV N à haut risque (patient non opéré) consiste en une extension géométrique de 5 mm dans toutes les directions pour les
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adénopathies de taille inférieure ou égale à 3 centimètres. En effet d’après une étude anatomopathologique de S. Apisarnthanarax et al., [8] 98 % des cellules tumorales sont à moins de 5 mm de l’adénopathie si sa taille est inférieure à 3 cm. Il n’y a pas de relation entre l’extension extra-capsulaire et la taille du ganglion pour les adénopathies n’excèdait pas 3 cm. Si le muscle en regard de l’adénopathie est proche ou envahi, il faut inclure celui-ci sur au moins un centimètre [9].
En cas d’atteinte ganglionnaire du groupe II ou si la maladie et classé N2 ou N3, il est recommandé d’inclure l’espace rétrostyloïdien dans le CTV N0. S’il existe une atteinte du groupe IV ou Vb, il est recommandé d’inclure la fosse sous-claviculaire [9]. En situation postopératoire, en cas d’atteinte ganglionnaire avec rupture capsulaire, il faut prendre toute l’aire ganglionnaire avec une extension à la peau du patient [7].
2.8. Organes à risque Le CTV N+R+ (patient traité après la chirurgie) consiste à contourer la zone initialement atteinte avec une marge de 1 cm. Si le muscle en regard de l’adénopathie est envahi ou proche, il faut inclure le muscle en question sur toute sa hauteur correspondant au niveau ganglionnaire atteint [9]. Le CTV T et lit op à bas risque correspond au risque d’atteinte microscopique péritumorale et est faite à une dose de 50 à 56 Gy. Ce volume dépend de l’histoire naturelle des cancers, de la localisation tumorale et de l’extension tumorale (stade T). Des recommandations pour la définition des volumes ont été publiées par Lapeyre et al. et Eisbruch et al. [4,5] (Tableau 1). Le CTV N0 consiste à inclure les aires ganglionnaires en fonctions de leur risque d’atteinte comme défini par le GORTEC (groupe d’oncologie et radiothérapie tête et cou). Leur délimitation est définie par le consensus intergroupe qui édite un atlas des différents niveaux ganglionnaires [10,17].
L’irradiation de la sphère ORL est rendue difficile par la présence de nombreux organes à risque dont la moelle épinière, le tronc cérébral, les nerfs optiques et le chiasma, qui sont des organes en série et pour lesquels les contraintes de doses doivent être respectées afin d’éviter des complications sévères, d’autant plus que souvent la radiothérapie est associée à la chimiothérapie. D’autres organes à risque, tels que les parotides, le larynx, la cochlée, l’oreille interne, l’œil et le cristallin, se trouvent également à proximité des zones à traiter. D’autres organes à risque pourront être délimités en fonction des techniques d’irradiations, comme le plexus brachial, en s’aidant par exemple de l’article de Hall et al. [11]. Les contraintes de dose classiquement utilisées en France sont répertoriées dans le Guide de procédures de la radiothérapie externe publié par la SFRO [12] et seront prochainement actualisées :
Tableau 1 Oropharynx. Volume péritumoral microscopique (CTV global) à délimiter selon les sous-localisations tumorales. Le principe repose sur le fait de prendre au moins une structure anatomique (« CTV structure ») de contiguïté supplémentaire par rapport à la tumeur macroscopique. Le CTV global est obtenu en additionnant les différents « CTVs structures » sélectionnés [4,5]. Oropharyngeal cancer. Clinical target volumes according to tumour location. The aim is to include at least one adjacent anatomical area to CTV. Addition of “CTV structures” leads to global CTV [4, 5]. Sous-localisations
Volumes à délimiter pour obtenir le CTV global
Pilier antérieur
CTV amygdale et pilier postérieur, CTV pilier antérieur et sillon amygdaloglosse, CTV base de langue homolat. (2 cm), CTV langue postérieure homolat. (2 cm), CTV plancher postérieur homolat. (2 cm), CTV glande sous-mandibulaire homolat., CTV voile homolat., CTV joue (2 cm), CVT trigone rétromolaire homolat., gencive postérieure homolat. (2 cm), muscle ptérygoïdien médial homolat.
Amygdale
CTV amygdale et pilier postérieur homolat., CTV pilier antérieur et sillon amygdaloglosse homolat., CTV base de langue homolat. (2 cm), CTV langue postérieure homolat. (2 cm), CTV voile homolat., CTV carrefour des 3 replis homolat., CTV espace parapharyngé homolat., CTV foramen ovale homolat., CTV Gasser homolat. Tumeur évoluée : prendre en plus : muscle ptérygoïdien médial homolat., branche montante de mandibule homolat., CTV espace carotidien homolat., CTV sinus caverneux homolat., CTV rétropharyngé homolat., CTV cavum homolat.
Pilier postérieur
CTV paroi pharyngée postérieure homolat., CTV pilier postérieur et amygdale homolat., CTV voile homolat., CTV cavum homolat., CTV espace rétropharyngé homolat., repli pharyngoépiglottique homolat., CTV carrefour des 3 replis homolat., CTV parapharyngé homolat.,
Voile
CTV voile bilat., CTV amygdale et piliers bilat. (partie supérieure), CTV cavum homolat., CTV trigone rétromolaire supérieur homolat., CTV espace parapharyngé homolat. Tumeur avec extension supérieure : prendre en plus : muscle ptérygoïdien médial homolat., CTV sinus sphénoïdal homolat., CTV foramen ovale homolat., CTV Gasser homolat. Tumeur latéralisée : prendre en plus : CTV fosse ptérygomaxilllaire homolat.
Sillon amygdaloglosse
CTV sillon amygdaloglosse et pilier antérieur homolat., CTV amygdale et pilier postérieur homolat., CTV base de langue homolat., CTV langue et plancher* (1/3 postérieur) homolat., CTV vallécule homolat., CTV carrefour des 3 replis homolat., CTV espace parapharyngé homolat.,
Base de langue
CTV base de langue bilat., CTV vallécule homolat., CTV langue homolat. (2 cm), CTV sillon amygdaloglosse homolat., CTVs amygdale et piliers homolat. Tumeur évoluée : prendre en plus : CTV langue bilat., CTV racine de langue et plancher* bilat., CTV glandes sous-mandibulaires bilat., CTV espace parapharyngé bilat., CTV espace carotidien bilat.
Vallécule
CTV base de langue bilat., CTV vallécule bilat., CTV carrefour des 3 replis homolat., face linguale de l’épiglotte, espace préépiglottique. Tumeur latéralisée : prendre en plus : sinus piriforme (partie supérieure), paroi pharyngée latérale (2 cm)
Paroi pharyngée postérieure
CTV paroi pharyngée postérieure (marge > 2 cm), CTV pilier postérieur de l’amygdale bilat., CTV espace parapharyngé homolat.., CTV espace rétropharyngé homolat., CTV cavum homolat., CTV voile homolat.,
Homolat. : homolatéral ; bilat. : bilatéral ; CTV : volume cible anatomoclinique. *muscles génioglosse, géniohyoïdien, mylohyoïdien et glandes sublinguales
C. Lafond et al. / Cancer/Radiothérapie 14 (2010) S34-S42
— — — — — — — — — — —
dose maximale à la moelle 45 Gy ; nerf optique : dose maximale de 54 Gy ; chiasma : dose maximale de 54 Gy ; tronc cérébral : dose maximale de 50 Gy ; œil : dose moyenne < 35 Gy ; cristallin : dose la plus basse possible ; parotide controlatérale V26 < 50 %, dose moyenne < 30 Gy ; articulation temporo-mandibulaire, dose maximale < 65 Gy ; larynx : dose maximale < 20 Gy ; oreille interne : dose maximale de 60 Gy ; plexus brachial : dose maximale de 55 Gy. Ces doses sont données pour un fractionnement et un étalement classiques de 5 fractions de 2 Gy par semaine. Respecter toutes ces contraintes de doses est parfois difficile, en fonction des localisations et de la technique disponible. Il faut donc faire un compromis en privilégiant le contrôle tumoral et les organes en série.
2.9. Balistique La balistique peut être assez simple en utilisant deux faisceaux latéraux et un faisceau antérieur pour le creux susclaviculaire avec une réduction à 40 Gy au niveau de la moelle et deux faisceaux spinaux jusqu’à 50 Gy et deux faisceaux latéraux réduits en avant de la moelle. Mais le plus souvent elle est adaptée à chaque patient après avoir défini un isocentre pour couvrir au mieux les volumes cibles et épargner les organes à risques. Le complément jusqu’à 66-70 Gy utilisera des faisceaux de photons et/ou d’électrons. Des filtres en coin sont souvent nécessaires pour obtenir une dosimétrie homogène. Dans le cas d’un traitement avec modulation d’intensité, on utilise souvent 4 à 7 faisceaux équidistants.
2.10. Toxicité aiguë La radiothérapie de l’oropharynx entraîne des effets aigus fréquents et invalidants pour les patients, d’autant plus que ce traitement est couplé à la chimiothérapie.
Fig. 1. Coupes transversales et sagittales de la scanographie diagnostique. Axial and sagital views on CT scan.
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Il s’agit essentiellement d’épidermite, de mucite, d’hyposialie, de dysphagie, dont la fréquence, celles de grades 2-3, varie de 25 % à 61 % en fonction de l’association à une chimiothérapie et de son type [13-15].
2.11. Toxicité tardive La séquelle la plus fréquente est l’hyposialie en raison de la forte sensibilité des glandes salivaires aux radiations ionisantes variant en fonction des auteurs de 14 % à 57 % de grade ≥ 2 [13, 16].s 3.
Cas clinique
Il s’agissait d’un patient de 61 ans, marié, père de 2 enfants, médecin, en parfait état général (classe 0 selon l’OMS), pesant 75 kg pour 1,70 m, ayant perdu 3 kg depuis un mois, sans antécédent, en particulier d’intoxication tabagique ou alcoolique. L’interrogatoire retrouvait une dysgeusie depuis environ un an, avec une première consultation auprès d’un chirurgien ORL ne retrouvant pas de lésion primitive. Deux mois plus tard, le patient a reconsulté pour une déviation de la pointe de la langue. Une scanographie cervicothoracique a alors été réalisée et a mis en évidence une masse de la base de langue droite venant au contact de la vallécule droite mesurant 22*32 mm, associée à une adénomégalie du groupe II droit de 32*22 mm (Fig. 1). Le bilan a alors été complété par une IRM faciale qui a retrouvé une lésion de 30*42 mm, affleurant la loge hyo-thyro-épiglottique et envahissant le muscle génio-glosse, associée à une adénopathie nécrotique du groupe II droit de 37 mm (Fig. 2). Une TEP a retrouvé la lésion primitive sans extension à distance (Fig. 3). La biopsie était en faveur d’un carcinome épidermoïde. Le dossier a été discuté en réunion de concertation pluri-disciplinaire et une indication de chimioradiothérapie exclusive retenue après pose préalable d’une gastrostomie. Les contours ont été réalisés après fusion avec l’IRM. Une dose de 70 Gy a été prescrite aux CTV2 T et ganglionnaire et 50 Gy aux CTV1 T et N (Figs. 4-10). Le traitement a été réalisé avec modulation d’intensité en deux temps (un temps de 50 Gy puis un complément de 20 Gy).
Fig. 2. Coupe transversale de l’IRM. Axial MRI view.
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Fig. 3. Images de la TEP. PET-CT imaging.
Fig. 4. Contours du volume cible anatomoclinique (CTV) 70 Gy T et N (rouge), parotides droite et gauche (vert). CTV 70 Gy T and N (red), both parotid glands (green).
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Fig. 5. Contours du volumes cibles anatomocliniques (CTV) 50 Gy T et N (rose), parotides droite et gauche (vert). CTV 50 Gy T and N (pink), both parotid glands (green).
Fig. 6. Contours des volumes cibles prévisionnels (PTV) 70 Gy (bleu) et 50 Gy (violet), CTV 50 Gy (rose). PTV 70 Gy (blue) and 50 Gy (violet), CTV 50 Gy (pink).
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Fig. 7. Balistique. Radiation-therapy fields.
Fig. 8 a, b, c. Dosimétrie. Dosimetry.
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Fig. 9 a, b. Histogrammes dose-volume : CTV (volume cible anatomoclinique) 50 Gy (rose), hypophyse (vert), PTV1 (volume cible prévisionnel) 50 Gy T et N droit et gauche (bleu ciel), PTV2 70 Gy T et N droit (bleu foncé). Dose volume histograms: CTV 50 Gy (pink), hypophysis (green), PTV1 50 Gy T and right and left N (light blue), PTV2 70 Gy T and right N (dark blue).
Fig. 10. Histogramme dose-volume : moelle (vert). Dose-volume histogram of spinal cord (green).
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Conflit d’intérêt Aucun
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Ca ncer/ R adi o t hérapie 14 Suppl . 1 (2010) S43– S51
Cancer de l’hypopharynx et du larynx : proposition de sélection et délimitation des volumes cibles microscopiques péri-tumoraux (aires ganglionnaires exclues) Hypopharynx and larynx cancers: propositions for the selection and the delineation of peritumoral microscopic disease volumes (lymph nodes excluded) M. Lapeyrea, *, C. Baillyb, I. Toledanoa, A. Montalbanc, M. Russierc a b c
Département de radiothérapie, centre Jean-Perrin, 58 rue Montalembert, BP 5026, 63011 Clermont Ferrand cedex 1, France Département de radiodiagnostic, centre Jean-Perrin, 58 rue Montalembert, BP 5026, 63011 Clermont Ferrand cedex 1, France Département de chirurgie ORL, centre Hospitalier universitaire, hôpital Gabriel-Montpied, 58 rue Montalembert, 63003 Clermont Ferrand cedex 1, France
INFO ARTICLE
RÉSUMÉ
Présenté au printemps de l’Afcor (Association pour la formation continue des oncologues radiothérapeutes) le 27 mars 2010, Ecquevilly 78920, France
Cet article propose le concept de la sélectivité des zones péritumorales microscopiques à traiter de principe (à une dose de 50 Gy ou 54-60 Gy pour une irradiation avec modulation d’intensité en un temps) dans les carcinomes épidermoïdes du larynx et de l’hypopharynx en se basant sur le mode d’extension des cancers. Il présente les différentes délimitations des volumes cibles anatomocliniques (CTV) péritumoraux, pour la réalisation d’une radiothérapie conformationnelle classique ou avec modulation d’intensité (larynx sus-glottique, glottique, sous-glottique, sinus piriforme, paroi pharyngée latérale et postérieure et région rétrocricoïdienne). Il ne traite pas des indications de radiothérapie externe mais précise les volumes à traiter si une radiothérapie est retenue. Les volumes cibles anatomo-cliniques sont illustrés sur des planches scanographiques.
Mots clés : Volume cible anatomo-clinique CTV Cancer Radiothérapie conformationnelle Larynx Hypopharynx Atlas
Keywords: Clinical target volume CTV Conformal radiotherapy Cancer Larynx Hypopharynx Atlas
© 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
ABSTRACT This article reviews the concept of selectivity in peritumoral microscopic disease to be included in the Clinical Target Volume (CTV) for elective treatment for larynx and hypopharynx squamous cell carcinoma (50 Gy or 54-60 Gy for SIB-IMRT), using the local tumoral spread. The objective of the present article is to present the different delineations of the target volumes, required for an appropriate application of 3-DCRT and IMRT (supraglottic larynx, vocal cord, subglottic larynx, pyriform sinus, lateral and posterior pharyngeal wall and postcricoid pharynx). These propositions are for the delineation of microscopic peritumoral target volumes when external beam irradiation is required. CTVs are illustrated on CT sections. © 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Published by Elsevier Masson SAS. All rights reserved.
* Correspondance. Adresse e-mail : [email protected] (M. Lapeyre) © 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
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1.
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Introduction
La radiothérapie des cancers du larynx et de l’hypopharynx nécessite une bonne connaissance de la radio-anatomie et de l’histoire naturelle des cancers. L’anatomie de cette région est complexe avec de nombreux organes critiques sensibles à l’irradiation laissant des séquelles comme la dysphagie et la dysphonie [2,4,9-11]. La radiothérapie conformationelle et en particulier avec modulation d’intensité (IMRT ou RCMI) permet de réduire les effets secondaires. Elle a un intérêt dans l’irradiation des cancers des voies aéro-digestives supérieures [5,8,23,24,26,29,32,33]. Ces techniques permettent une irradiation très ciblée et précise, ce qui impose de définir strictement et rigoureusement chaque volume cible tumoral sur les images scanographiques pour la préparation des traitements par simulation virtuelle. L’objectif de ce document est de proposer une approche de la délimitation sur images scanographiques des volumes cibles anatomo-cliniques (CTVs) péritumoraux du larynx et de l’hypopharynx (aires ganglionnaires exclues) susceptibles de contenir des cellules cancéreuses non perceptibles par les différents examens cliniques et paracliniques et qui doivent recevoir la dose dite « prophylactique » de 50 Gy. Cette dose de 50 Gy est délivrée en 25 fractions. En cas de RCMI en un temps, cette dose est plus élevée pour garder une équivalence d’efficacité. Elle est de l’ordre de 54-60 Gy en 33-35 fractions [19]. Ce document ne traite pas des indications de radiothérapie externe mais précise les volumes à traiter si une radiothérapie externe est retenue.
2.
peritumorales sont décrites [1,7,18,27,28,30,34]. La description radio-anatomique s’applique à l’imagerie scanographique avec injection de produit de contraste qui est réalisée lors des acquisitions pour les simulations virtuelles. Les images choisies pour illustrer ce chapitre sont tirées d’une acquisition scanographique diagnostique. Leur nombre est volontairement réduit pour être le plus didactique, ce qui explique que toutes les structures des voies aéro-digestives supérieures n’y figurent pas. Les sites préférentiels de diffusion tumorale et les barrières anatomiques sont rapportés localisation par localisation.
3.1. Larynx Le larynx comprend trois régions et sites anatomiques (Figs. 1, 2 et 3) : – le larynx supraglottique, comprenant deux régions, le larynx sus-hyoïdien (épilarynx) et le larynx sous-hyoïdien (l’épiglotte infra-hyoïdienne, les bandes ventriculaires et les ventricules, la loge pré-épiglottique et une partie de l’espace paraglottique) ; – Le larynx glottique ou étage glottique, comprenant les cordes vocales, l’espace para-glottique, la commissure antérieure et la commissure postérieure ; – Le larynx sous-glottique. Le bord supérieur du cartilage cricoïde correspond à la partie supérieure de la sous-glotte. Il se trouve à 5 mm sous les cordes vocales dans leur partie postérieure et 1 cm dans leur partie antérieure. Pour cette localisation, ce document se propose de résumer les points servant à la délimitation des volumes. Il complète les données déjà publiées en 2005 [3].
Rappel sur les volumes d’irradiation [6,20,21]
3.1.1. Zones de résistance Pour définir le volume cible antomo-clinique devant recevoir 50 Gy, il faut délimiter dans un premier temps le volume tumoral macroscopique (GTV) déterminé à partir de l’examen clinique et des données des examens para-cliniques. Le volume tumoral macroscopique permet de réaliser un volume cible anatomoclinique devant recevoir une dose totale de 70 Gy. Celui-ci correspond habituellement au volume tumoral macroscopique avec une marge de 5 mm à 1 cm, voire plus, selon les barrières et zones de diffusions préférentielles. Après chimiothérapie d’induction, même en cas de réponse complète, le volume cible anatomo-clinique devant recevoir 70 Gy doit être replacé en repérant les structures initialement envahies [31]. En situation postopératoire, le volume tumoral macroscopique n’est plus présent. Dans ce cas, il est délimité un volume cible anatomo-clinique devant recevoir 50 Gy soit d’emblée, soit après avoir repéré un volume cible anatomo-clinique devant recevoir une dose de 66 Gy en cas d’atteinte des tranches de section ou de ganglions en rupture capsulaire. La délimitation des volumes des aires ganglionnaires n’est pas abordée. Elle fait l’objet de plusieurs recommandations [5,12-17,25].
3.
Radio-anatomie scanographique et voies d’extension des cancers
Il est fait un rappel sur l’anatomie et la radio-anatomie scannographique du pharyngo-larynx, puis les voies d’extensions
Les principaux points de résistances à la progression tumorale sont le cartilage cricoïde et le cartilage thyroïde, le ligament hyo-épiglottique, le ligament et la membrane thyro-hyoidienne et la membrane fibro-élastique sous muqueuse endolaryngée se terminant en sous-glotte par le cône élastique. Les cartilages laryngés de l’adulte ont une composante ossifiée et une non-ossifiée. Seuls les cartilages aryténoïdiens et l’épiglotte sont le plus souvent non-ossifiés. L’infiltration cartilagineuse est difficile à mettre en évidence car l’ossification est hétérogène. Une érosion ou lyse, une condensation peuvent faire suspecter l’atteinte, mais bien souvent seule l’extension extra-cartilagineuse permet d’affirmer l’envahissement.
3.1.2. Zones de faiblesse Il existe plusieurs points de faiblesse aux extensions des tumeurs du larynx. La zone de fragilité glottique correspond à la région de la commissure antérieure qui est en étroit contact avec le cartilage thyroïde par le tendon de Broyles. Il s’agit d’une bande de tissus fibreux dont l’insertion est située à la partie supérieure de l’angle rentrant du cartilage thyroïde. Il s’attache à trois formations ligamentaires (le ligament thyro-épiglottique, le ligament thyro-aryténoïdien supérieur et inférieur). Les autres zones de faiblesse sont les ligaments thyro-épiglottiques et thyro-aryténoïdiens (supérieurs et inférieurs), le ligament et la membrane crico-thyroidienne, les zones ossifiées de certaines
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parties du cartilage thyroïde, les perforations de l’épiglotte soushyoïdienne et le fond du ventricule par son mince contact avec l’espace para-glottique.
3.1.3. Espaces de diffusion intralaryngés L’extension principale du cancer du larynx se fait vers l’espace para-glottique et vers la loge pré-épiglottique (espaces en communication). L’espace para glottique est un espace graisseux situé entre la muqueuse et les structures cartilagineuses laryngées. Il est pair et symétrique. Il contient la musculature intrinsèque du larynx (muscles laryngés thyro-aryténoïdiens supérieurs et inférieurs, muscle crico-aryténoïdien latéral). Il est limité en haut par le repli ary-épiglottique, en avant la commissure antérieure et la loge pré-épiglottique, avec laquelle il est en communication, en dedans la membrane fibro-élastique, en bas le cône élastique et en dehors la partie interne du cartilage thyroïde. Au niveau glottique, l’espace para-glottique est délimité médialement par le muscle thyro-aryténoïdien qui donne la forme des cordes vocales, par le cartilage thyroïde et le cartilage cricoïde latéralement. Au niveau de la région sus-glottique, l’espace para-glottique se situe en profondeur des bandes ventriculaires et des membranes élastiques. La loge pré-épiglottique est antérieure et médiane. C’est une zone graisseuse à forme pyramidale. Elle est limitée en avant par le ligament et la membrane thyro-hyoidienne et le cartilage thyroïde, en arrière par le cartilage épiglottique, en haut par le ligament hyo-épiglottique, en bas par le ligament thyro-épiglottique et latéralement et en bas par les espaces para-glottiques.
3.1.4. Voies d’extension des lésions de l’étage susglottique (Fig. 4) Les lésions de la partie sus-hyoïdienne s’étendent : — en avant, à partir du bord libre de l’épiglotte, sur la face linguale de l’épiglotte, les vallécules puis la base de langue pour infiltrer en profondeur la partie supérieure de la loge pré-épiglottique en traversant vers le bas le ligament hyo-épiglottique ; — latéralement vers la zone des trois replis, le repli aryépiglottique, l’angle antérieur du sinus piriforme puis la paroi pharyngée latérale ; — vers le bas le long de l’épiglotte. Les lésions de l’épiglotte sous-hyoïdienne s’étendent : — vers l’avant à travers l’épiglotte dans la loge pré-épiglottique via les pores épiglottiques ou par infiltration de l’épiglotte latéralement ; — en bas vers la commissure antérieure et le ligament thyroépiglottique. Puis l’extension va progressivement se faire vers la glotte puis la sous-glotte. Les lésions peuvent également s’étendre progressivement en avant vers la loge pré-épiglottique puis progresser vers le haut, transfixier le ligament hyo-épiglottique, et envahir la vallécule puis la base de langue ; — latéralement vers les bandes ventriculaires, les ventricules et les replis ary-épiglottiques ; — en haut vers le bord libre de l’épiglotte. Les lésions des bandes ventriculaires s’étendent : — en haut sur le repli ary-épiglottique et l’aryténoïde ;
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— en avant vers le pied de l’épiglotte ; – en bas sur les ventricules. Les lésions des ventricules s’étendent : — latéralement vers l’espace para-glottique et les muscles intrinsèques du larynx, le mur pharyngo-laryngé et le cartilage thyroïde ; – en avant vers le bord de l’épiglotte et la loge pré-épiglottique (en haut) ; – en bas vers les cordes vocales et la sous-glotte après rupture du cône élastique. Les lésions de la région aryténoïdienne ou du repli aryépiglottique s’étendent : – en bas vers le muscle crico-aryténoïdien et fixent l’hémilarynx. La fixité de l’hémilarynx peut également être en rapport avec l’atteinte du nerf laryngé supérieur qui passe à travers la membrane thyro-hyoïdienne ou par une atteinte de l’espace para-glottique. L’extension aux cartilages se fait plus tardivement (thyroïde, épiglotte, cricoïde) ; – latéralement vers le sinus piriforme ; – en haut et en avant vers l’épiglotte puis la base de langue et les vallécules ou le zone des trois replis.
3.1.5. Voies d’extension des lésions de l’étage glottique (Fig. 4) Pour les lésions de la corde vocale, l’extension se fait : – en avant et en superficie vers la commissure antérieure, puis va s’étendre vers la corde vocale opposée le long du tendon de Broyles ; – latéralement vers le plancher puis le fond du ventricule et l’espace para-glottique ; – en arrière vers l’articulation crico-aryténoïdienne et la commissure postérieure ; – vers le bas, sur la face inférieure de la corde vocale et la sous glotte le long du cône élastique ; – en haut vers l’étage sus-glottique, via le ventricule et la bande ventriculaire. Pour les lésions de la commissure antérieure, l’extension se fait : – vers le tendon de Broyles puis va infiltrer la loge pré-épiglottique en franchissant le ligament thyro-épiglottique en haut ou plus en avant vers le cartilage thyroïde puis les tissus pré-laryngés en franchissant le ligament crico-thyroïdien vers le bas ; – vers le bas sur la sous glotte ; – en arrière vers les cordes vocales. Les lésions avancées vont traverser le cartilage thyroïde puis s’étendre dans les tissus du cou et la glande thyroïde.
3.1.6. Voies d’extension des lésions de l’étage sous-glottique (Fig. 4) L’extension se fait : – vers l’anneau cricoïdien en priorité ; – latéralement et en avant à travers la membrane crico-thyroidienne dans le cou et vers la thyroïde, et latéralement et en arrière vers la bouche œsophagienne ; – en bas vers la trachée ; – en haut vers le plan glottique (plus rarement en raison de la présence du cône élastique).
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3.2. Hypopharynx L’hypopharynx comprend 3 régions (Figs. 3 et 5) : – le sinus piriforme : il s’agit d’une structure paire et symétrique. Le sinus piriforme s’étend du repli pharyngo-épiglottique à la bouche œsophagienne. Il est limité latéralement par le cartilage thyroïde, médialement par le repli ary-épiglottique, les aryténoïdes et le cricoïde ; – la paroi pharyngée postérieure et la paroi pharyngée latérale : elles se situent entre, en haut, l’os hyoïde et en bas, le bord inférieur du cartilage cricoïde. Elles vont du sommet d’un sinus piriforme à l’autre ; – la région rétro-cricoïdienne : elle s’étend des cartilages aryténoïdes et des replis voisins au bord inférieur du cartilage cricoïde. Les infiltrations superficielles des cancers de l’hypopharynx sont difficilement visibles en imagerie scanographique et les extensions sous-muqueuses sont fréquentes. Elles sont mieux repérées en endoscopie. Les manœuvres de Valsava permettent une meilleure visualisation mais elles ne peuvent être utilisées en radiothérapie pour la planification car elles sont non reproductibles pendant les séances d’irradiation. Contrairement au larynx, l’hypopharynx n’a pas de barrières nettes à l’extension des cancers. La limite entre l’oropharynx et l’hypopharynx n’est que théorique pour les parois pharyngées et les limites entre les différentes régions sont plus des repères anatomiques que de réelles barrières.
3.2.1. Voies d’extension des lésions du sinus piriforme (Fig. 6) Les tumeurs du mur pharyngo-laryngé ou de l’angle antérieur du sinus piriforme s’étendent : – en avant et médialement pour infiltrer l’aryténoïde, puis les autres cartilages laryngés puis l’espace para-glottique et la loge pré-épiglottique ; – vers le haut en direction de l’union des trois replis ; – vers le bas le long de la membrane crico-thyroïdienne ; – latéralement vers la paroi latérale du sinus piriforme ; – en arrière sur le rétrocricoïde et vont atteindre le sinus piriforme opposé. Les tumeurs de la partie latérale du sinus piriforme ont tendance à envahir : – latéralement la partie postérieure du cartilage thyroïde et rejoindre la paroi pharyngée latérale et les tissus mous du cou ; – en avant l’espace para glottique ; – médialement le mur pharyngo-laryngé. L’extension crânio-caudale se fait pour ces deux souslocalisations : — vers le haut le long du pilier postérieur de l’amygdale pour atteindre le voile puis la base du crane via les des muscles palato-pharyngiens, stylo-pharyngiens et salpingo-pharyngiens (Fig. 7) ; – vers le bas vers la bouche œsophagienne. L’hémilarynx va se fixer lorsque le muscle vocal, le muscle ou l’articulation crico-aryténoidienne seront envahis ou lorsque les nerfs laryngés seront infiltrés.
3.2.2. Voies d’extension des lésions de la paroi pharyngée latérale (Fig. 6) La paroi pharyngée latérale de l’hypopharynx se prolonge vers le haut sur l’oropharynx puis le rhinopharynx. Il n’y a pas de limite anatomique nette entre les deux structures. L’infiltration va se faire : – latéralement vers les muscles constricteurs du pharynx puis les tissus du cou et l’espace vasculaire, puis la glande thyroïde ; – en arrière et médialement vers la paroi pharyngée postérieure ; – en avant vers l’aile thyroïdienne ; — dans la partie supérieure vers le repli pharyngo-épiglottique puis secondairement, la vallécule et le sinus piriforme médialement et en avant. L’extension supérieure se poursuit le long des muscles pharyngiens jusqu’à la base du crane (Fig. 7). Elle peut se faire également le long de la paroi pharyngée de l’oropharynx et remonter dans le cavum tardivement (Fig. 7) ; – dans la partie inférieure jusqu’à la bouche œsophagienne.
3.2.3. Voies d’extension des lésions de la paroi pharyngée postérieure (Fig. 6) L’évolution est souvent sous-muqueuse. Les lésions de la paroi pharyngée postérieure s’étendent : — vers le haut le long de la paroi pharyngée de l’oropharynx et remonter dans le cavum tardivement. L’extension supérieure peut se faire également le long des muscles pharyngiens jusqu’à la base du crane (Fig. 7) ; — vers le haut et latéralement le long du pilier postérieur de l’amygdale et atteindre le voile via le muscle palato-pharyngien (Fig. 7) ; – en arrière vers les muscles pré-vertébraux qui forment une barrière solide ; – en avant et latéralement vers la paroi pharyngée latérale ; – médialement pour franchir la ligne médiane et devenir circonférentielles ; – dans la partie inférieure jusqu’à la bouche œsophagienne ;
3.2.4. Voies d’extension des lésions de la région rétro-cricoïdienne (Fig. 6) L’invasion est le plus souvent sous-muqueuse. L’extension se fait : – caudalement vers la bouche œsophagienne ; – en avant vers le cartilage cricoïde pour infiltrer l’endolarynx via la région inter-aryténoïdienne ; – en haut vers les aryténoïdes et les replis ary-épiglottiques ; – latéralement vers les sinus piriformes et les murs pharyngolaryngés.
4.
Propositions de volumes à délimiter
Les volumes cibles anatomo-cliniques sont définis à partir des modalités d’extension des cancers du larynx et de l’hypopharynx. Il existe plusieurs propositions dans la littérature [3,7,27]. Ils doivent être adaptés au cas par cas selon le stade et l’extension du
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volume tumoral macroscopique. Ils comprennent un ensemble de structures ou de compartiments anatomiques de contiguïté supplémentaires par rapport à la tumeur macroscopique permettant de traiter les zones d’infiltrations microscopiques péritumorales à distance. En cas de doute sur une extension sous-muqueuse, il est préférable d’agrandir les volumes pour limiter le risque de récidive. Les délimitations des volumes cibles anatomo-cliniques se trouvent dans une série de coupes scanographiques sélectionnées à partir d’un examen réalisé avec injection de produit de contraste. Lors d’une simulation virtuelle, comparativement à un examen scanographique diagnostique, les structures peuvent avoir une projection différente sur les coupes réalisées en raison des différentes positions de la tête du patient (examen sans manœuvre de Valsalva ou en hyper-extension par exemple). Pour délimiter les volume à traiter, il est conseillé de repérer dans l’ordre : volume tumoral macroscopique, volume cible anatomo-clinique devant recevoir 66 ou 70 Gy en situation postopératoire en cas d’atteinte des tranches de section ou d’adénopathie en rupture capsulaire et enfin volume cible anatomo-clinique devant recevoir 50 Gy (ou 54-60 pour la RCMI en un temps). Pour être plus didactique, sur les figures 8 et 9, il a été rapporté le volume tumoral macroscopique (en rouge) et le volume cible anatomo-clinique devant recevoir 70 Gy (en bleu) d’une tumeur latéralisée. Le volume cible anatomo-clinique devant recevoir 70 Gy correspond au volume tumoral macroscopique plus une marge de 5 mm à 1 cm, voire plus, selon les voies de diffusions ou barrières anatomiques immédiates. Le volume cible anatomo-clinique devant recevoir 70 Gy ne doit pas être modifié selon la réponse à une éventuelle chimiothérapie d’induction. Il correspond aux structures anatomiques initialement atteintes [31]. Le contourage des volumes cibles anatomo-cliniques devant recevoir 50 Gy ou 54-60 pour la RCMI en un temps (en jaune) correspond au volume cible anatomo-clinique devant recevoir 70 Gy avec une structure supplémentaire estimée à risque (selon les barrières et les zones de diffusions plus éloignées).
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Pour les cancers de l’hypopharynx (hors rétrocricoïde), la limite supérieure n’a pas de barrière anatomique nette. Du fait des extensions sous-muqueuses mal visibles, la limite supérieure du volume cible anatomo-clinique devant recevoir 50 Gy (54-60 pour la RCMI en un temps) peut être estimée à 2 cm au-dessus du pole supérieur du volume cible anatomo-clinique devant recevoir 70 Gy. En cas de tumeur du pharyngo-larynx avec extension à l’oropharynx, les volumes cibles anatomo-cliniques peuvent être agrandis selon les propositions publiées en 2005 sur les volumes cibles péri-tumoraux des cancers de la cavité buccale et de l’oropharynx [22]. Les volumes cibles anatomo-cliniques du larynx sont représentés dans la figure 8 et ceux de l’hypopharynx dans les figures 7 et 9. Les tableaux I, II et III font une synthèse des limites des volumes cibles anatomo-cliniques.
5.
Conclusion
Le concept de la sélectivité des zones péritumorales à traiter de principe dans les carcinomes épidermoïdes du larynx et de l’hypopharynx est une approche rigoureuse. En effet, par la technique classique en deux dimensions, ces volumes étaient jusqu’à présent inclus automatiquement dans les volumes irradiés. La radiothérapie conformationnelle et surtout la RCMI imposent la nécessité d’une procédure rigoureuse pour la délimitation des volumes cibles anatomo-cliniques péritumoraux, afin d’éviter tout « sous-dosage » des zones d’infiltrations microscopiques péritumorales et tout risque de récidive.
Conflits d’intérêts Les auteurs ont déclaré n’avoir aucun conflit d’intérêts pour cet article.
Tableau I Limites du volume cible anatomo-clinique devant recevoir 50 Gy (ou 54-60 pour la RCMI en un temps) des cancers des trois étages du larynx (Fig. 8) Boundaries of the CTV50 (or CTV54-60 for SIB-IMRT) for larynx cancers (Fig. 8) limites CTV50
supérieure
inférieure
homolatérale
controlatérale
antérieure
postérieure
supraglottique sus-hyoïdien et soushyoïdien
épiglotte, base de langue (1 cm au-dessus du CTV70), aryténoïdes
bord inférieur du cricoïde
os hyoïde, muscles infrahyoïdiens latéralement au cartilage thyroïde, cartilage cricoïde +élargissement au sinus piriforme selon GTV
os hyoïde, muscles infrahyoïdiens latéralement au cartilage thyroïde, cartilage cricoïde
os hyoïde, cartilage thyroïde et cricoïde muscles infrahyoïdiens en avant de la loge préépiglottique et du cartilage thyroïde et cricoïde
épiglotte, cartilage thyroïde rétrocricoïde, aryténoïdes
glottique
épiglotte soushyoïdienne, sommet de la loge préépiglottique (ligament hyo-épiglottique), os hyoïde, aryténoïdes
bord inférieur du cricoïde
idem supraglottique +élargissement au sinus piriforme et à la glande thyroïde selon GTV
idem supraglottique
idem supraglottique
idem supraglottique
sous-glottique
idem glottique
limite supérieure du premier anneau trachéal (selon GTV)
idem supraglottique +glande thyroïde
idem supraglottique
idem supraglottique
rétrocricoïde, aryténoïdes, bouche oesophagienne selon le GTV
La limite du volume cible anatomoclinique 50 Gy (CTV 50 Gy) doit prendre une marge de plus de 5 mm autour du volume cible anatomoclinique 70 Gy (CTV 70 Gy) (sauf barrière anatomique). Elle est adaptée à l’extension du volume tumoral macroscopique (GTV). Cette limite peut être plus importante dans les régions d’extension sans réelles barrières (exemple : base de langue).
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Tableau II Limites du volume cible anatomo-clinique (CTV) devant recevoir 50 Gy (ou 54-60 pour la RCMI en un temps) des cancers de l’hypopharynx : sinus piriforme et rétrocricoïde (Figs. 7 et 9) ; GTV : volume tumoral macroscopique. Boundaries of the CTV50 (or CTV54-60 for SIB-IMRT) for hypopharynx cancers : piriform sinus and postcricoid pharynx (Fig. 7 and 9) limites CTV50
supérieure
inférieure
homolatérale
controlatérale
antérieure
postérieure
sinus piriforme
épiglotte, union des 3 replis, vallécule, base de langue (1 cm au-dessus du CTV70), muscles pharyngiens* (2 cm au-dessus du CTV70)
cartilage cricoïde, bouche oesophagienne, (2 cm sous le GTV)
os hyoïde, muscles infrahyoïdiens latéralement au cartilage thyroïde, cartilage cricoïde, axe carotidien, glande thyroïde (élargissement aux tissus mous du cou selon GTV)
portions antérolatérales de l’os hyoïde, du cartilage thyroïde et cricoïde, des muscles infrahyoïdiens latéralement au cartilage thyroïde et au cartilage cricoïde, corde vocale et espace para glottique, aryténoïde
os hyoïde, cartilage thyroïde et cricoïde, muscles infrahyoïdiens en avant de la loge pré-épiglottique et du cartilage thyroïde et cricoïde
muscles pré-vertébraux et paroi pharyngée postérieure unilatérale
rétrocricoïde
épiglotte, union des 3 replis, vallécules, aryténoïdes
idem
sinus piriforme, cartilage thyroïde, cartilage cricoïde, glande thyroïde
sinus piriforme, cartilage thyroïde, cartilage cricoïde, glande thyroïde
cartilage thyroïde et cricoïde, loge pré-épiglottique, bord postérieur de l’os hyoïde
paroi pharyngée postérieure bilatérale
La limite du volume cible anatomoclinique 50 Gy doit prendre une marge de plus de 5 mm autour du volume cible anatomoclinique 70 Gy (sauf barrière anatomique). Elle est adaptée à l’extension du volume tumoral macroscopique. Cette limite peut être plus importante dans les régions d’extension sans réelles barrières (exemple : base de langue, paroi pharyngée). * muscles pharyngiens : muscle stylo-pharyngien, salpingo-pharyngien et palato-pharyngien
Tableau III Limites limites du volume cible anatomo-clinique (CTV) devant recevoir 50 Gy (ou 54-60 pour la RCMI en un temps) des cancers de l’hypopharynx : paroi pharyngée latérale et postérieure (Figs. 7 et 9) ; GTV : volume tumoral macroscopique. Boundaries of the CTV50 (or CTV54-60 for SIB-IMRT) for hypopharynx cancers : lateral and posterior pharyngeal wall (Figs. 7 and 9) limites CTV50
supérieure
inférieure
homolatérale
controlatérale
antérieure
postérieure
paroi pharyngée latérale
épiglotte, union des 3 replis, vallécule, base de langue (1 cm au-dessus du CTV70), muscles pharyngiens* et paroi pharyngée postérieure, (2 cm au-dessus du CTV70)
cartilage cricoïde, bouche oesophagienne, (2 cm sous le GTV)
os hyoïde, muscles infrahyoïdiens latéralement au cartilage thyroïde et cartilage cricoïde, axe carotidien, glande thyroïde (élargissement aux tissus mous du cou selon GTV)
portions antérieures de l’os hyoïde, du cartilage thyroïde et cricoïde, des muscles infrahyoïdiens latéralement au cartilage thyroïde et au cartilage cricoïde
os hyoïde, cartilage thyroïde et cricoïde, muscles infrahyoïdiens en avant de la loge pré-épiglottique et du cartilage thyroïde et cricoïde
muscles pré-vertébraux et paroi pharyngée postérieure bilatérale
paroi pharyngée postérieure
épiglotte sous-hyoïdienne, union des 3 replis, vallécule, muscles pharyngiens* et paroi pharyngée postérieure, (2 cm au-dessus du CTV70)
idem
idem
loge pré-épiglottique, commissure antérieure, cartilage cricoïde homolatéral (ligne médiane), paroi pharyngée postérieure et latérale
idem paroi pharyngée latérale sauf os hyoïde
idem
La limite du volume cible anatomoclinique 50 Gy doit prendre une marge de plus de 5 mm autour du volume cible anatomoclinique 70 Gy (sauf barrière anatomique). Elle est adaptée à l’extension du volume tumoral macroscopique. Cette limite peut être plus importante dans les régions d’extension sans réelles barrières (exemple : paroi pharyngée postérieure) * muscles pharyngiens : muscle stylo-pharyngien, salpingo-pharyngien et palato-pharyngien
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Fig. 1. Vue latérale du larynx. Représentation simplifiée des points de faiblesse et de résistance (espace para glottique non représenté). Lateral view of the larynx. Schematic representation of weakness and strength areas (paraglottic space excluded). Fig. 2. Coupe frontale du larynx. Représentation simplifiée des barrières et zones de diffusion. Frontal view of the larynx. Schematic representation of the tumor spread areas.
Fig. 3. Coupes scanographiques du pharyngolarynx et structures anatomiques. CT scan slices and anatomic structures of the normal pharynx and larynx. Fig. 4. Voies d’extension des cancers des trois étages du larynx sur coupes scanographiques. Les flèches jaunes représentent les voies de diffusion préférentielles. Local tumor spread of the larynx carcinomas on the CT scan. The yellow arrows indicate the local spread areas.
Fig. 5. Vue postérieure simplifiée du pharyngolarynx. L’hémipharynx droit est ouvert et les structures sous muqueuses sont reportées schématiquement. Schematic posterior view of the pharynx (right pharynx opened with submucosal structures)
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Fig. 7. Repères radio-anatomiques et volume cible anatomo-clinique devant recevoir 50 Gy (ou 54-60 pour la RCMI en un temps) : le volume cible anatomo-clinique des muscles stylo-pharyngiens, salpingo-pharyngiens et palato-pharyngiens (partie antérieure) est en jaune (pour les lésions du sinus piriforme, de la paroi pharyngée latérale et postérieure) ; le volume cible anatomo-clinique « paroi pharyngée postérieure » est en orange (pour les lésions de la paroi pharyngée latérale et postérieure). Du fait des infiltrations sous-muqueuses, la limite supérieure du volume cible anatomo-clinique peut être estimée à 2 cm au-dessus du pole supérieur du volume cible anatomo-clinique devant recevoir 70 Gy. Anatomic structures and CTV50 (or CTV54-60 for SIB-IMRT) : CTV of the stylo, salpingo and palatopharyngeal muscles is yellow ; CTV of the posterior pharyngeal wall is orange. The superior boundary of the CTVs can be estimated to 2 cm upper the CTV70 due to the submucosal extension of the tumor. Fig. 8. Volumes cibles anatomo-cliniques des cancers des trois étages du larynx. Le volume tumoral macroscopique est en rouge, le volume cible anatomo-clinique devant recevoir 70 Gy en bleu, et celui devant recevoir 50 Gy (ou 54-60 pour la RCMI en un temps) en jaune. Les flèches et contours en pointillés représentent les variations de volumes selon le risque d’infiltration du volume tumoral macroscopique. Larynx cancer CTVs. The GTV is red, the CTV70 is blue and the CTV50 (or CTV54-60 for SIB-IMRT) is yellow. The arrows and the dashed lines represent the variations due to the local spread of the tumor.
Fig. 6. Voies d’extension des cancers de l’hypopharynx sur coupes scanographiques. Les flèches jaunes représentent les voies de diffusion préférentielles. Les extensions latérales vers le voile correspondent aux infiltrations le long des muscles stylo-pharyngiens, salpingo-pharyngiens et palato-pharyngiens (cf fig. 7). Local tumor spread of pharyngeal carcinomas on axial CT slices. The lateral spread to the vellotonsillar region corresponds to the extension on the stylo, salpingo and palatopharyngeal muscles (Fig. 7).
supraglottique sus-hyoïdien
A
B
glottique
A
A
B
B
C
C
D
D
supraglottique sous-hyoïdien
C
A
B
sous-glottique
A
B
B
D
B
C
D
A
B
C
D
D
A
C
A
C
D
C D
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Fig. 9. Volumes cibles anatomo-cliniques des cancers de l’hypopharynx. Le volume tumoral macroscopique est en rouge, le volume cible anatomoclinique devant recevoir 70 Gy en bleu, et celui devant recevoir 50 Gy (ou 54-60 pour la RCMI en un temps) en jaune. Les flèches et contours en pointillés représentent les variations de volumes selon le risque d’infiltration du volume tumoral macroscopique. Hypopharynx cancer CTVs. The GTV is red, the CTV70 is blue and the CTV50 (or CTV54-60 for SIB-IMRT) is yellow. The arrows and the dashed lines represent variations due to the local spread of the tumor.
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C ancer/ R adiot hérapie 14 Suppl . 1 (2010) S52– S60
Cancer des sinus de la face Paranasal sinus carcinoma S. Vieillot*, P. Boisselier, N. Aillères, M.H. Hay, J.B. Dubois, D. Azria, P. Fenoglietto Département de cancérologie radiothérapie, Université Montpellier I, CRLC Val d’Aurelle - Paul-Lamarque, Rue Croix-Verte, 34298 Montpellier, cedex 5, France
RÉSUMÉ Mots clés : Cancer des sinus Radiothérapie conformationnelle Volumes cibles Atlas
Les cancers des sinus de la face sont des tumeurs rares, dont le traitement repose sur une approche multidisciplinaire. La chirurgie et la radiothérapie, plus ou moins associées à la chimiothérapie, permettent d’obtenir des taux de survie spécifique à cinq ans tous stades confondus de 60-70 %. Les progrès de la radiothérapie, avec notamment l’utilisation de l’imagerie tridimensionnelle pour une approche conformationnelle, nécessitent une connaissance précise de la radioanatomie de ce type de tumeur afin de déterminer les différents volumes d’intérêt. L’objectif de ce travail était de préciser les particularités radioanatomiques et les modalités d’irradiation conformationnelle pour les cancers du sinus, illustrées par un cas clinique. © 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
ABSTRACT Keywords: Sinus cancer Conformational radiotherapy Target volumes Atlas
Cancers of the paranasal sinuses are rare tumors, with treatment based on a multidisciplinary approach. Surgery and radiation therapy, possibly associated with chemotherapy are used to obtain 5 years specific survival rate of 60-70 %. Advances in radiotherapy, including the use of imaging for 3D conformal approach require precise knowledge of the radioanatomy for this type of tumor to determine the different volumes of interest. Purpose of this study was to specify radioanatomy and conformal radiation modalities for cancers of the sinuses, and is illustrated by a case report. © 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Published by Elsevier Masson SAS. All rights reserved.
1.
Introduction
Les cancers des sinus de la face ne représentent que 3 à 4 % des cancers des voies aérodigestives supérieures [19]. Ils se développent préférentiellement aux dépens de la muqueuse qui tapisse les cavités naso-sinusiennes et sont dans 60 à 80 % des cas à des carcinomes épidermoïdes, dans 10 à 20 % des cas des adénocarcinomes, plus rarement des tumeurs neuronales, ou « esthésioneuroblastomes », le plus souvent situés au niveau de la cavité nasale. Ils sont associés
au tabagisme, ainsi qu’à certaines expositions professionnelles (chrome, isopropyl d’alcool, nickel et thorotrast). L’atteinte du sinus ethmoïdal est liée dans plus de 80 % des cas à l’exposition à la poussière de bois, et est considérée comme une maladie professionnelle. Les localisations les plus fréquentes sont le sinus maxillaire, puis l’ethmoïde. Les atteintes des autres sinus étant rares, nous décrirons dans cet article uniquement la radioanatomie de ces deux principaux sites, et le cas clinique portera sur un adénocarcinome du sinus de l’ethmoïde.
* Correspondance. Adresse e-mail : [email protected] (S. Vieillot) © 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
S. Vieillot et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S52-S60
2.
Présentation clinique
La tumeur peut se développer longtemps avant de devenir symptomatique et est donc souvent évoluée au moment du diagnostic. Une obstruction nasale, le plus souvent unilatérale, une rhinorrhée ou un épistaxis, mais aussi une tuméfaction du nez, de la joue ou de la cavité buccale, sont des symptômes classiques. Des douleurs buccales persistantes ou une sinusite maxillaire chronique peuvent aussi révéler la maladie. L’atteinte ophtalmologique, telle qu’une diplopie ou une exophtalmie, doit faire craindre une atteinte plus évoluée.
3.
Classification
La classification utilisée le plus couramment est la TNM de l’UICC de 2002 [21]. Elle est détaillée pour le cancer du sinus maxillaire et pour le cancer de l’ethmoïde dans le tableau 1.
4.
Indications de la radiothérapie
Les tumeurs des sinus de la face étant rares, nous ne disposons essentiellement que de données rétrospectives sur un nombre limité de patients, aussi la meilleure stratégie thérapeutique est elle difficile à définir. Si la tumeur n’est pas résécable au moment du diagnostic, une radiothérapie exclusive est indiquée et la dose recommandée est de 70-72 Gy. Un effet de la dose totale a été démontré, avec un seuil minimum de 65 Gy [6]. Cette irradiation peut aussi être préopératoire, si une réévaluation de la maladie vers 56 Gy est réalisée, et que la chirurgie devient possible [6]. Cette stratégie de réduction tumorale permet d’augmenter les chances d’une résection complète et évite une chirurgie mutilante, telle qu’une énucléation. Si la chirurgie est possible d’emblée, elle est réalisée de première intention lorsqu’elle ne constitue pas un geste morbide majeur. La radiothérapie postopératoire est alors presque toujours indiquée, compte tenu du bénéfice démontré dans plusieurs séries rétrospectives de cancers de tous stades [2,10,13]. Dulguerov et al. ont publié une méta-analyse en 2001 sur 220 patients mettant en évidence le bénéfice de l’association des
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deux modalités de traitement (taux de contrôle local à cinq ans avec radiothérapie seule de 57 % contre 66 % avec l’association de chirurgie et de radiothérapie), même si la comparaison était biaisée car il y avait plus de tumeurs évoluées dans la population traitée par irradiation exclusive [4]. La chirurgie exclusive se discute uniquement pour les rares tumeurs de stade T1, mais l’existence de tranches de section de résection douteuses, d’une invasion périnerveuse, voire d’un contingent indifférencié, constitue alors un argument pour une radiothérapie postopératoire [3]. Jiang et al. ont rapporté un faible taux d’atteinte ganglionnaire au moment du diagnostic pour les adénocarcinomes de l’ethmoïde, de l’ordre de 3 à 7 %, ne justifiant pas la réalisation d’une irradiation prophylactique [12]. En ce qui concerne les cancers du sinus maxillaire, Lee et al. ont observé un taux de rechute ganglionnaire à cinq ans de 0 % après radiothérapie contre 20 % en cas d’absence de radiothérapie, et ces rechutes étaient pour 84 % d’entre elles homolatérales, limitées aux zones I, II, III. Dans cette série rétrospective, le taux de rechute ganglionnaire était lié au risque d’évolution métastatique (p = 0,02). Toutes les atteintes ganglionnaires concernaient des tumeurs de stade T3 ou T4 [14]. Le taux de risque d’évolution ganglionnaire a été évalué dans une autre série rétrospective de 650 malades atteints d’un cancer du sinus maxillaire à 19 %, alors même qu’il était lors du diagnostic de moins de 10 % [11]. Ces auteurs recommandaient donc une irradiation prophylactique pour les cancers de stade T3 ou T4, en particulier les carcinomes épidermoïdes. L’efficacité de la chimiothérapie en association avec la radiothérapie a été démontrée pour les cancers de la tête et du cou dans la méta-analyse MACH-NC (Meta-analysis of chemotherapy in head and neck cancer), mais la plupart des essais excluaient les cancers des sinus [17]. Aucune étude de phase III n’a évalué le bénéfice de la chimiothérapie pour les cancers des cavités nasosinusiennes, que ce soit en situation néoadjuvante, concomitante, ou adjuvante. Quelques séries rétrospectives semblent confirmer son intérêt, surtout pour des tumeurs évoluées, en permettant une amélioration du taux des contrôles locaux et de survie globale et en autorisant des chirurgies moins mutilantes avec préservations orbitaires [14,18]. Sa place reste cependant aujourd’hui discutée.
Tableau 1 Classification TNM de l’UICC de 2002 des cancers des sinus de la face (sinus maxillaire et ethmoïde). 2002 UICC TNM classification, facial sinus cancers (maxillary and ethmoid sinus). Sinus maxillaire
Sinus ethmoidal
T1
limité à la muqueuse, l’os est respecté
un site de fosse nasale ou sinus éthmoidal avec ou sans atteinte osseuse
T2
érosion ou destruction osseuse
2 sites dans un seul siège ou envahissant un site voisin du complexe naso-éthmoidal avec ou sans atteinte osseuse
T3
paroi osseuse postérieure du sinus maxillaire, tissu sous cutané, plancher et/ou paroi interne de l’ orbite, fosse ptérygoide, sinus éthmoidal
paroi interne ou plancher de l’orbite, sinus maxillaire, palais ou lame criblée
T4
a : cavité orbitaire antérieure, peau de la joue, apophyses ptérygoides, fosse intratemporale, lame criblée, sinus sphénoidal ou frontal b : toit de l’orbite, dure-mère, cerveau, étage moyen de la base du crâne, nerfs crâniens (sauf division maxillaire du V2), nasopharynx, clivus
a : orbite antérieure, peau du nez ou de la joue, extension minime base du crâne, apophyses ptérygoides, sinus frontal ou sphénoidal b : toit de l’orbite, dure-mère, cerveau, étage moyen de la base du crâne, nerfs crâniens autre que V2, nasopharynx, clivus
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5.
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Résultats attendus
Le pronostic de ces tumeurs varie en fonction de l’histologie, de la localisation, du stade ou encore du traitement réalisé. Le tableau 2, issu de la méta-analyse de Dulguerov et al., rapporte les taux de survie spécifique actuariels obtenus dans les essais les plus récents [4].
6.
Algorithme décisionnel
Chargari et al. ont publié récemment un algorithme décisionnel pour la prise en charge des carcinomes du sinus maxillaires. Cette stratégie peut être appliquée aux cancers des autres sinus, en dehors de l’irradiation ganglionnaire non retenue pour les cancers de l’ethmoïde (Fig. 1) [3].
Tableau 2 Probabilité de survie spécifique en fonction de l’histologie, du site tumoral, du stade selon la classification TNM et du traitement. Cancer-specific survival probability by histology, tumor site, and stage in relation to TNM classification and treatment. Caractéristiques
%
Histologie C. épidermoide
50
C. glandulaire
60
adénocarcinome
50
C. indifférencié
28
Site S. maxillaire
45
ethmoide
51
S. nasal
66
TNM T1
7.
Modalités de traitement
7.1. Radioanatomie
90
T2
70
T3
44
T4
28
Traitement
La tomodensitométrie avec injection de produit de contraste est indispensable, elle explore le massif facial de la base de crâne jusqu’au plancher buccal, et visualise les ganglions cervicaux. L’IRM est nécessaire pour apprécier l’extension vers la fosse infratemporale, et les espaces parapharyngés [15].
Fig. 1. Algorithme décisionnel selon Chargari et al. [3] Decision tree according to Chargari et al. [3]
chirurgie
79
radiothérapie
57
radiothérapie+chirurgie
66
Abréviations: C.: carcinome, S.: sinus, SSA: survie spécifique actuarielle
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Les voies de développement préférentielles des tumeurs du sinus maxillaire et de l’éthmoïde sont décrites dans la fi gure 2 : pour les cancers du sinus maxillaire, l’extension tumorale peut se faire en haut vers l’ethmoïde, car il n’existe pas de barrière anatomique, vers l’orbite via le canal sous orbitaire et vers la fosse cérébrale moyenne à travers le foramen rond. Les extensions inférieures correspondent à l’invasion de l’os maxillaire et du palais osseux. La cavité nasale peut être envahie via l’ostium. En arrière, la tumeur peut envahir la graisse rétroantrale, les muscles ptérygoïdiens et la fosse ptérygopalatine. Pour les cancers de l’ethmoïde, l’extension la plus fréquente se fait via le méat moyen vers la cavité nasale. Une atteinte bilatérale par l’intermédiaire de la cloison septale est plus tardive. En haut, la méninge est facilement atteinte car le toit de l’ethmoïde offre peu de résistance. L’envahissement
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endocrânien est consécutif au franchissement de cette méninge, qui constitue une barrière anatomique efficace. Cependant, au niveau du toit des fosses nasales, la lame criblée est perméable jusqu’aux gouttières olfactives. En arrière, l’extension se fait vers le sphénoïde. La tumeur s’étend également vers la graisse rétro-antrale, les muscles ptérygoïdiens et la fosse ptérygopalatine. En dehors, l’érosion de la lame papyracée est classique, mais le périoste de l’orbite est résistant. En bas et en dehors, l’extension se fait vers le sinus maxillaire et plus rarement la fosse ptérygomaxillaire. En cas d’indication d’irradiation ganglionnaire, les aires Ib, II et III homolatérales et éventuellement controlatérales – si la tumeur dépasse la ligne médiane – doivent être incluses dans le volume cible. La figure 3 présente les différentes aires ganglionnaires cervicales d’intérêt. Leurs limites radioanatomiques ont été décrites par Grégoire et al. [7].
Fig. 2. Radioanatomie : coupes scanographiques des cavités nasosinusiennes Radiological anatomy : CT slices of sinonasal cavities.
Fig. 3. Radioanatomie : coupes scanographiques des aires ganglionnaires cervicales Radiological anatomy : CT slices of cervical lymph nodes.
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7.2. Détermination des volumes cibles
7.4. Contraintes de doses aux organes à risque
En radiothérapie conformationnelle, une scanographie de simulation avec injection de produit de contraste – en l’absence de contre-indication – est réalisée pour l’acquisition des données anatomiques du patient afin d’apprécier les limites géométriques de la tumeur et ses rapports avec les organes voisins. Le patient est en position de traitement : décubitus dorsal, les bras le long du corps. Un masque individuel thermoformé 3 ou 5 points est réalisé, avec un angle orbitoméatal à 90 ° par rapport au plan horizontal de la table. Un abaisselangue peut être utilisé. L’acquisition tomodensitométrique consiste en des coupes de 3 mm du vertex jusqu’à 5 cm sous les clavicules [22]. Selon les critères des rapports 50 et 62 de l’ICRU (International commission on radiation units and measurements) [8,9], les différents volumes suivants sont délinéés : – le volume tumoral macroscopique (GTV ou Growth Tumor Volume) qui correspond à la tumeur. En situation adjuvante, ce volume n’existe pas ; – le volume cible anatomoclinique (CTV ou Clinical Target Volume) qui correspond au volume tumoral macroscopique plus la zone à risque d’extension microsopique. Le sinus atteint est toujours inclus dans sa totalité ; les structures adjacentes au sinus atteint sont prises en compte en fonction de l’atteinte clinique et des zones anatomiques de vulnérabilité. Le volume cible anatomoclinique n’inclut l’orbite qu’en cas de franchissement périostique. Une effraction osseuse postérieure du sinus maxillaire implique l’inclusion de la fosse ptérygomaxillaire et des muscles ptérygoïdiens [15]. Un volume cible anatomoclinique à haut risque, qui correspond au lit tumoral, et un volume cible anatomoclinique à bas risque, pour l’extension vers les structures adjacentes, peuvent être différenciés. Le volume cible anatomoclinique ganglionnaire correspond aux aires Ib, II et éventuellement III homolatérales, bilatérales s’il existe un franchissement de la ligne médiane ; – le volume cible prévisionnel (PTV ou Planning Target Volume ou) correspond au volume cible anatomoclinique augmenté d’une marge de 1 cm, qui peut être diminuée à 3 à 5 mm en RCMI.
Les contraintes de dose doivent être conformes au guide de procédure de radiothérapie externe [22]. Pour la moelle, la dose maximale doit être inférieure à 45 Gy. Le tronc cérébral ne doit pas recevoir plus de 50 Gy dans sa totalité et 55 Gy dans un volume très limité, les lobes temporaux plus de 60 Gy, l’hypophyse plus de 55 Gy, les articulations temporomandibulaires plus de 60 Gy. Moins de 50 % de la parotide controlatérale doivent recevoir 26 Gy et la dose moyenne acceptée est de 30 Gy. Le chiasma et les nerfs optiques ne doivent pas recevoir plus de 55 Gy. La dose moyenne tolérée par l’œil est de 35 Gy, et la dose au cristallin doit être la plus faible possible. Il n’y a pas de contrainte spécifique pour les glandes lacrymales. L’oreille interne homolatérale ne doit pas recevoir plus de 50-55 Gy, et l’objectif pour l’oreille interne controlatérale est la dose la plus faible possible. Enfin la dose maximale délivrée au larynx est de 20 Gy. La thyroïde est délinéée, afin de renseigner sur la dose reçue.
7.5. Balistique, dosimétrie L’implémentation de la RT conformationnelle tridimensionnelle a permis une amélioration de la distribution de la dose aux volumes d’intérêt, autorisant une réduction de la dose délivrée aux organes à risque, en particulier aux voies optiques. La RCMI semble même offrir une épargne supérieure [1,5]. L’énergie des faisceaux utilisés se situe entre 4 et 10 MV pour les photons et 9 à 10 MeV pour les électrons. Le nombre, l’angulation et de la pondération des faisceaux sont optimisés en considérant le volume à irradier et les organes à risque à protéger. Un collimateur multilame ou des caches personnalisés sont utilisés. La prise en compte de la pénombre impose une marge entre le volume cible prévisionnel et le collimateur multilame. Un exemple de plan de traitement avec modulation d’intensité, est donné dans le cas clinique. Il correspond aux résultats d’une étude menée dans notre centre, qui cherchait à définir la meilleure balistique pour les cancers des sinus [20].
8.
Toxicité aiguë
7.3. Doses prescrites En cas de radiothérapie exclusive, la dose recommandée est de 70 Gy pour la tumeur (et les ganglions métastatiques). Une dose de 50 à 66 Gy est délivrée aux zones à risque d’extension microscopique. Aucune étude n’a montré le bénéfice d’un fractionnement ou d’un étalement différents cinq fractions de 1,8-2 Gy par semaine. Pour une irradiation postopératoire, la dose prescrite au lit tumoral est de 50 à 66 Gy, les reliquats tumoraux et les ganglions en rupture capsulaire devant recevoir au moins 60 Gy. Les contraintes à respecter, selon le rapport 62 de l’ICRU 62 [9] sont : le volume cible prévisionnel doit recevoir au minimum 95 % de la dose prescrite, et au maximum 107 %. Les critères de l’ICRU pour la RCMI (radiothérapie conformationnelle avec modulation d’intensité) sont en cours d’élaboration.
Elle est fréquente et représentée essentiellement par une symptomatologie oculaire à type de conjonctivite et/ou de larmoiement. Une rhinite, mucite et radiodermite sont également fréquentes.
9.
Toxicité tardive
Les séquelles sont surtout visuelles, avec un syndrome sec, une baisse d’acuité visuelle. Les cataractes sont fréquentes. Les risques de rétinopathie et de névrite optique sont liés à la dose totale et apparaissent respectivement pour une dose supérieure à 45 Gy 60 Gy [16]. De rares cas de nécrose cérébrale ont été décrits. L’hyposialie, voire l’asialie, dépend de la dose reçue aux parotides.
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10. Cas clinique Il s’agit d’un patient de 71 ans, marié, trois enfants, qui a été menuisier pendant 14 ans puis entrepreneur en maçonnerie. Dans ses antécédents, on notait un double pontage en 1988, un pace-maker pour troubles du rythme cardiaque et un tabagisme sevré depuis 1988 mais pas d’intoxication alcoolique. Des épistaxis unilatérales récidivantes ont révélé une lésion ethmoïdale, dont les biopsies étaient en faveur d’un adénocarcinome. La scanographie faciale a mis en évidence une masse expansive ostéolytique aux dépens des cellules ethmoïdales semblant détruire la lame papyracée sans extension intra-orbitaire, ni endo-crânienne, avec a priori un comblement frontal d’allure rétentionnelle et un comblement polypoïde du sinus maxillaire gauche. Il n’a pas été effectué d’IRM compte tenu du pace-maker. La lésion a été classée T3. Une déclaration de maladie professionnelle a été faite. Le dossier a été présenté en réunion de concertation pluridisciplinaire, la lésion étant résécable d’emblée, une chirurgie première a été réalisée : ethmoïdectomie para-latéro-nasale droite avec ablation de la lésion intéressant le plancher de l’orbite, la paroi interne, sans envahissement de la péri-orbite, l’éthmoïde antéropostérieur et la partie postéro-supérieure de la cloison nasale. La rétention des sinus maxillaires et frontaux a été aspirée. Le sphénoïde était sain. Une reconstruction du plancher et de la paroi interne de l’orbite a été effectuée. Il s’agissait dun adénocarcinome moyennement différencié muco-sécrétant et les différentes recoupes étaient indemnes de lésion tumorale. Une radiothérapie adjuvante a été prescrite, à la dose de 66 Gy en 33 fractions de 2 Gy dans le lit d’exérèse tumorale, et 56 Gy en 33 fractions dans les zones à risque. Cette radiothérapie a été effectuée avec modulation d’intensité pour permettre une meilleure préservation des nerfs optiques. La consultation d’annonce de radiothérapie a permis d’expliquer au patient les modalités de la radiothérapie, les objectifs mais aussi les effets secondaires aigus et tardifs. Une scanographie de simulation est réalisée, après fabrication du masque personnalisé de contention, et les volumes d’intérêt délnéés (Fig. 4 et 5). Le premier volume cible anatomoclinique
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correspondait aux zones à risque d’extension microscopique, le deuxième volume cible anatomoclinique au lit tumoral. Les volumes cibles prévisionnels ont été crées à partir des volumes cibles anatomocliniques en ajoutant une marge automatique de 4 mm. Le plan de traitement avec modulation d’intensité utilisait cinq faisceaux isopondérés sans filtres de 6 MV. L’angulation a été définie comme suit : 0 °, 70 °, 140 °, 210 °, 290 ° La prise en compte de la pénombre a nécessité une distance de 6 mm entre les volumes cibles prévisionnels et le collimateur multilame. La technique du boost intégré a été utilisée, et la prescription de dose à l’isocentre a alors été la suivante : 56 Gy en 33 fractions (1,69 Gy par fraction) au premier volume cible prévisionnel et 66 Gy en 33 fractions (2 Gy/fr) au deuxième volume cible anatomoclinique, en six semaines et demi. La dosimétrie a été effectuée, et les figures 6 et 7 rapportent la couverture des volumes cibles prévisionnels par l’isodose 95 %. Les histogrammes dose volume sont rapportés dans la figure 8.
11. Conclusion Le traitement des cancers du sinus localisés est multimodal, associant chirurgie, radiothérapie et parfois la chimiothérapie. L’enjeu est important tant en termes de contrôle local que de séquelles, compte tenu de la proximité d’organes sains. Les avancées technologiques de la radiothérapie ont permis des progrès importants dans cette pathologie : la définition précise des volumes cibles, le choix de la balistique pour une dosimétrie respectant les contraintes à la fois aux organes à risque et au volume cible prévisionnel, dans le cadre d’une radiothérapie conformationnelle, en particulier avec modulation d’intensité, sont le gage d’un traitement de qualité.
Conflits d’intérêts Les auteurs ont déclaré n’avoir aucun conflit d’intérêts pour cet article.
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Fig. 4. Contours des volumes d’intérêt Delineation of volumes of interest.
Fig. 5. Volumes cibles prévisionnels et organes à risque, vue tridimensionnelle supérieure. Target volume plans and organs at-risk, upper 3D view.
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Fig. 6. Dosimétrie : couverture du PTV1 (premier volume cible prévisionnel) par l’isodose 95 % (pour une prescription de 56 Gy. Dosimetry : PTV1 coverage by 95 % isodose (for a 56-Gy prescription).
Fig. 8. Histogrammes dose-volume. Dose-volume histograms.
Fig. 7. Dosimétrie : couverture du PTV2 (deuxième volume cible prévisionnel) par l’isodose 95 % (pour une prescription de 66 Gy) Dosimetry : PTV2 coverage by 95 % isodose (for a 66-Gy prescription).
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Cancer/ R adi o t hérapie 14 Suppl . 1 (2010) S61– S73
Cancer bronchique non à petites cellules Non small cell lung cancer D. Leignel Argoa, P. Giraudb,* a Service bService
d’oncologie radiothérapie, Hôpital européen Georges-Pompidou, 20, rue Leblanc, 75015 Paris, France d’oncologie radiothérapie, Université Paris-Descartes, Hôpital européen Georges-Pompidou, 20, rue Leblanc, 75015 Paris, France
INFO ARTICLE
RÉSUMÉ
Les figures 4, 8, 12, 23, 24 et 28 sont visibles uniquement sur : http://www. sciencedirect.com
L’objectif était la rédaction d’un document décrivant la technique d’irradiation conformationnelle tridimensionnelle d’un cancer pulmonaire non à petites cellules. Les principes et recommandations concernent la prise en charge de patients atteints de cancer pulmonaire localisé au thorax et inopérables ou devant bénéficier d’une irradiation postopératoire. Ils ont été établis à partir des données actuelles de la science après une analyse de la littérature et d’accords d’experts. Les principes et recommandations proposés concernent les différentes étapes d’une irradiation conformationnelle thoracique pour un cancer pulmonaire non à petites cellules : le centrage et le contourage des volumes à traiter ou à protéger, le calcul de la distribution de la dose, le traitement et la surveillance pendant le traitement.
Mots clés : Radiothérapie conformationnelle Cancer pulmonaire non à petites cellules Volumes cibles Atlas
© 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
ABSTRACT Keywords: Conformal radiotherapy Non small cell lung cancer Target volumes Atlas
The objective was the drafting of a document describing the technique of tridimensional conformal irradiation of a non small cell lung cancer (NSCLC). Principles and recommendations concern patients affected by lung cancer localized in the thorax and inoperable or patients who must undergo postoperative irradiation. They have been developed according to the current scientific data from an analysis of the literature and professional agreements. Principles and recommendations describe : the centering and the contouring of tumor volumes and organs at risk, the calculation of the dose distribution, the treatment and the surveillance during the treatment. © 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Published by Elsevier Masson SAS. All rights reserved.
1.
Épidémiologie
Le cancer bronchique est le premier cancer au monde, que ce soit en incidence ou en mortalité ; en 1990, il était classé au dixième rang des causes de mortalité tous pays confondus [31]. En France, avec 30 651 nouveaux cas estimés de cancers du poumon en 2005 dont 78 % survenant chez l’homme, le cancer du poumon représente 9,6 % de l’ensemble des cancers
incidents. En 2000, il y a eu 27 743 nouveaux cas, dont 83 % d’hommes et la mortalité était de 27 164 cas dont également 83 % d’hommes. Il se situait au 4e rang en termes d’incidence et au premier rang en termes de mortalité, représentant ainsi 18,1 % de l’ensemble des décès par cancer en France. Les taux de mortalité standardisés étaient de 42 chez l’homme et de 9,4 chez la femme, le sex-ratio étant de 3,6. Plus de 9 nouveaux cas sur 10 estimés en 2005 étaient diagnostiqués à 50 ans ou
* Correspondance. Adresse e-mail : [email protected] (P. Giraud) © 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
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plus. Les âges moyens au moment du diagnostic chez la femme et chez l’homme sont respectivement de 64 ans et de 65 ans tandis que celui au décès est de 68 ans. Chez l’homme, le taux d’incidence des cancers broncho-pulmonaires, standardisé à la population mondiale a augmenté en moyenne annuelle de 0,2 % entre 1980 et 2005 et diminué de 0,5 % entre 2000 et 2005. Celui lié à la mortalité a, quant à lui, diminué de 0,1 % et 1,7 % pendant les mêmes périodes. Chez la femme, au cours de ces mêmes périodes, le taux d’incidence a respectivement augmenté en moyenne annuelle de 5,1 % et 5,8 % au moment où la mortalité augmentait également de 3,5 % et 4,2 % [34]. Le facteur de risque de loin le plus important, et le mieux connu, est bien sûr le tabac. Environ 83 % des cancers du poumon sont attribuables au tabac chez les hommes et 69,2 % chez les femmes. Le risque relatif d’avoir un cancer du poumon pour un fumeur par rapport à un non-fumeur est de 9,9. On note une diminution du risque de cancer 5 à 9 ans après l’arrêt du tabac chez les anciens fumeurs par rapport aux fumeurs actuels ; néanmoins, les anciens fumeurs conserveront toujours un risque plus élevé de cancer du poumon. D’autres facteurs de risque environnementaux sont aussi connus, comme l’exposition au béta-carotène, à l’arsenic, au radon, à l’amiante et aux rayonnements ionisants. Le rôle de la pollution atmosphérique reste discuté. Sur le plan professionnel, l’amiante, la silice, le cadmium, le chrome VI, le nickel, le cobalt, les hydrocarbures aromatiques polycycliques et le béryllium sont reconnus comme des facteurs de risque de cancer. L’exposition commune à plusieurs facteurs est très fréquente et multiplie probablement le risque de cancer du poumon [34].
2.
sont décidées en réunion de concertation pluridisciplinaire (RCP) au cas par cas. Les marqueurs n’ont aucune indication sauf le CYFRA 21-1 qui peut avoir pour certains un intérêt pronostique dans les carcinomes épidermoïdes. Une médiastinoscopie peut être demandée pour préciser l’atteinte médiastinale. L’échoendoscopie par voie bronchique (EBUS) ou œsophagienne (EUS) représente une nouvelle technique d’expertise médiastinale prometteuses [18,35,44]. Les cancers du poumon non à petites cellules sont classés selon leurs stades TNM. Cette classification, actualisée en 2009 (7e édition) par l’UICC (Union internationale contre le cancer), permet d’orienter la stratégie thérapeutique initiale (Annexes 1 et 2).
3.
Indications de la radiothérapie
Les indications thérapeutiques sont présentées dans les Standards-Options-Recommandations (SOR) publiées en 2007, dont la nouvelle mise à jour doit paraître début 2010 [35]. Sur le plan respiratoire, des épreuves fonctionnelles respiratoires complètes avec étude de la diffusion du monoxyde de carbone (DLCO) doivent être réalisées avant la radiothérapie. Il est déconseillé d’effectuer une irradiation thoracique classique sans technique d’asservissement respiratoire ou stéréotaxique si le volume expiré maximal en une seconde (VEMS) est inférieur à 40 % de la valeur théorique ou si le rapport DLCO/VA (capacité de diffusion du monoxyde de carbone par unité de volume alvéolaire) est inférieur à 60 % de la valeur théorique [17,35].
Classification TNM et par stade 4.
Les signes cliniques évocateurs d’un cancer du poumon sont très nombreux et souvent peu spécifiques. Ils incluent en particulier des symptômes d’obstruction bronchique (toux surtout chronique et persistante, sifflement, hémoptysie, pneumonie), des symptômes d’envahissement local (douleur pariétale, dyspnée, syndrome cave supérieur, dysphonie) et des symptômes liés à la présence de métastases (cérébrales, osseuses, hépatiques, cutanées, surrénaliennes…). Une altération de l’état général, une perte de poids et/ou des symptômes liés à un syndrome paranéoplasique (hippocratisme digital, thrombophlébite, hypercalcémie, syndrome de sécrétion inappropriée d’hormone…) peuvent également être présents. Le cancer du poumon peut aussi être découvert fortuitement sur une radiographie standard du thorax [18]. Le bilan initial systématique comprend un bilan biologique complet, une radiographie thoracique standard, une scanographie thoracique et de l’abdomen supérieur, et une fibroscopie bronchique avec biopsies et/ou lavage si possible ou tout autre technique de prélèvement (médiastinoscopie, ponction biopsique sous scanographie ou thoracoscopie…) pour confirmation histologique. Le bilan préthérapeutique comprend le bilan d’extension (scanographie thoraco-abdominale et cérébrale, une scintigraphie osseuse) et un bilan général et d’opérabilité si indiqué (épreuves fonctionnelles respiratoires [EFR], scintigraphie de ventilation-perfusion, bilan cardiaque…). La tomoscintigraphie par émission de positons (TEP) et la remnographie (IRM) cérébrale
Stades I et II
Le traitement standard repose sur la chirurgie. Pour les patients non opérables, une irradiation externe conformationnelle à visée curative avec un fractionnement classique doit être réalisée si l’état respiratoire du patient le permet. Il est recommandé de n’irradier que les volumes tumoraux envahis. Pour les cancers de stade I, une radiothérapie en conditions stéréotaxiques constitue une alternative à la radiothérapie classique. Un traitement par radiofréquence pourra également être proposé. Pour les cancers de stade II, une irradiation peut être discutée en complément de la chirurgie et de la chimiothérapie en cas d’atteinte pariétale ou d’exérèse incomplète. Dans le cas particulier où la tumeur se présente sous une forme endobronchique exclusive, une curiethérapie peut constituer une alternative à la radiothérapie externe [18,35].
5.
Stade III
Les cancers de stades III doivent être séparés en ceux de stade IIIA, résécables et éligibles à un traitement chirurgical, et ceux de stades IIIA et IIIB, non résécables, pour lesquels la chimioradiothérapie est le traitement de référence. En pratique, pour les cancers de stades IIIA, il n’existe pas à ce jour d’attitude thérapeutique standardisée. La prise en charge doit être discutée dans le cadre d’une réunion de concertation
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pluridisciplinaire. Elle repose sur un traitement multimodal, associant la chimiothérapie et la radiothérapie, voire la chirurgie. Pour les cancers de stade IIIB, le traitement de référence repose sur une chimioradiothérapie concomitante. La prise en charge est cependant guidée par l’évaluation du score de performance. Pour les patients dont le score est 0 et 1, une chimioradiothérapie concomitante comprenant une bithérapie à base de sels de platine (plutôt du cisplatine) et une radiothérapie conformationnelle tridimensionnelle (RT3D) doivent être proposée. Il est recommandé de n’irradier que les volumes tumoraux envahis. En cas de contre-indication à la chimioradiothérapie concomitante, une chimioradiothérapie séquentielle peut être proposée. Pour les patients dont l’indice de performance selon l’OMS est 2 ou plus, il n’y a pas d’attitude standard. Une radiothérapie exclusive peut être proposée. En situation postopératoire chez les patients atteints de cancer classé pN2, une irradiation médiastinale est discutée. Les inclusions dans un essai en cours (Lung Art pour Lung Adjuvant Radiotherapy Trial) doivent être encouragées afin de déterminer son bénéfice dans cette indication [18,35].
6.
Stade IV
Une métastase unique synchrone à un cancer de stade T1-3, N0-1 doit bénéficier d’un traitement à visée curative (chirurgie ou radiothérapie). Chez un malade opéré, l’apparition ultérieure d’une métastase unique (cérébrale, pulmonaire ou surrénalienne) est une indication à une chirurgie et/ou une radiothérapie à visée curative. L’existence de deux ou trois métastases cérébrales (synchrones ou métachrones) doit conduire en réunion de concertation pluridisciplinaire à la discussion d’un éventuel traitement à visée curative. Une irradiation complémentaire de l’encéphale en totalité ou du lit opératoire peut être réalisée après neurochirurgie ou radiothérapie en conditions stéréotaxiques. La radiothérapie hypofractionnée est le traitement de référence des symptômes associés à des métastases osseuses symptomatiques ou cérébrales multiples (plus de trois). Un traitement désobstructif endobronchique peut être indiqué dans les obstructions proximales graves. Une radiothérapie thoracique hypofractionnée à visée palliative peut être délivrée en cas de symptômes thoraciques importants [18,35].
7.
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ou un simple repose-bras pour améliorer la reproductibilité, les bras le long du corps en cas de tumeur apicale ou au dessus de la tête dans tous les autres cas, avec une injection de produit de contraste après vérification de la clairance de la créatinine [18,39]. L’acquisition doit couvrir l’ensemble des structures anatomiques d’intérêt (poumons en totalité, cœur, œsophage…). Habituellement, la limite d’acquisition supérieure est la glotte et la limite inférieure est l’interligne L1-L2. L’épaisseur des coupes doit être inférieure à 5 mm ; une épaisseur de 2,5 mm est un bon compromis entre qualité et nombre de coupes [2,39]. Un dispositif d’asservissement respiratoire est recommandé, notamment pour les lésions tumorales situées à la partie moyenne ou inférieure du thorax [14,39]. Des examens d’imagerie complémentaires peuvent être fusionnées ou recalées à la scanographie de planification pour préciser les contours des volume-cibles. Une IRM peut être réalisée pour les tumeurs de l’apex et en cas d’envahissement de la paroi ou des espaces prévertébraux avec suspicion d’infiltration des trous de conjugaison (tumeur de Pancoast-Tobias). La TEP couplée à la scanographie est intéressante, non pas pour délinéer directement les volumes tumoraux, mais pour décider du caractère néoplasique d’une image tomodensitométrique (valeur prédictive négative élevée : une adénomégalie dont le plus petit diamètre est 1 cm sur la scanographie et non fixante lors de la TEP n’est pas considérée comme spécifique) ou pour préciser le contour tumoral en cas d’atélectasie [8,24,39,43,44].
7.2. Détermination des volume-cibles Seules les structures ou volumes anatomiques considérés comme tumoraux sont irradiés. Ainsi, seuls les ganglions pathologiques, notamment médiastinaux, sont pris en compte dans le volume cible macroscopique ou GTV (Gross Tumor Volume). L’aire sus-claviculaire ne devra être irradiée à titre prophylactique qu’en cas de tumeur de l’apex ou d’atteinte massive des aires ganglionnaires médiastinales hautes sous-jacentes (aires 1 et 2) [25,42]. Une chimiothérapie néo-adjuvante est de plus en plus prescrite avant la radiothérapie. En l’absence de données, le volume-cible macroscopique correspond au volume tumoral avant la chimiothérapie. Les marges « idéales » proposées cidessous seront bien sûr réduites en fonction des histogrammes dose-volume (HDV) finaux [19,39,42].
Modalités du traitement
7.2.1. Volume tumoral macroscopique Les modalités techniques de la radiothérapie conformationnelle tridimensionnelle ont déjà été publiées en grande partie dans plusieurs articles de Cancer/Radiothérapie et dans le Guide de radiothérapie des tumeurs de la Société française de radiothérapie oncologique (SFRO) [5,17,25]. Nous reprendrons ici les points les plus importants.
7.1. Acquisition des données anatomiques L’acquisition des données anatomiques doit être la plus précise et soigneuse possible. Elle est réalisée à l’aide d’une scanographie en position de traitement : en décubitus dorsal, avec un système d’immobilisation personnalisé de type alpha-cradle
Le volume tumoral macroscopique correspond à la tumeur pulmonaire (GTVT) et aux adénopathies visibles à l’imagerie (GTVN). Il est important de bien définir la fenêtre de contourage optimale pour la scanographie. Les valeurs « optimales » retenues pour la visualisation de la tumeur intra-parenchymateuse sont un niveau de -600 UH (unités Hounsfield) et une fenêtre de ± 1600 UH. Pour la visualisation du médiastin, les valeurs optimales sont un niveau de + 20 UH et une fenêtre de ± 400 UH [13]. Il n’y a pas encore de valeur recommandée pour la TEP, une attention particulière doit donc être apportée à ces réglages. Un ganglion est considéré comme pathologique si son petit diamètre est supérieur à 1 cm, s’il fixe sur la TEP ou, a fortiori, si l’atteinte
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histologique est confirmée (médiastinoscopie, écho-endoscopie par voie bronchique…) [39,43,44].
7.2.2. Volume cible anatomoclinique Le volume cible anatomoclinique ou CTV (Clinical Target Volume) inclut le volume tumoral macroscopique augmenté de la maladie infraclinique. CTVT : les marges à ajouter autour du GTVT doivent tenir compte de l’envahissement tumoral microscopique non visible à l’imagerie. Cet envahissement varie en fonction de l’histologie : il est de 8 mm pour un adénocarcinome, 6 mm pour un cancer épidermoïde, et en l’absence d’étude spécifique, de 5 mm pour les autres types histologiques [11]. CTVN : en situation postopératoire, il est déterminé des régions ganglionnaires – définies selon la classification de Mountain et Dresler – à « haut risque » en fonction du site tumoral initial [26,29]. Le drainage du lobe supérieur droit se fait préférentiellement dans les aires 7 puis 4R et parfois 8 et 9 ; pour le lobe moyen droit, dans les aires 7 et 4R ; pour le lobe inférieur droit, dans les aires 4R, 2R et plus rarement 7 ; pour le lobe inférieur gauche, surtout dans l’aire 7, puis 4L et 2L, moins souvent dans l’aire 5 et au-delà 4R et 2R ; enfin pour le lobe supérieur gauche, dans les aires 4L, 2L et 3 [29,36]. Autour des ganglions envahis, il est recommandé une marge pour définir un CTVN de 3 mm si le plus petit diamètre du ganglion est inférieur à 2 cm et 8 mm au-delà [16].
7.2.3. Volume cible prévisionnel Le volume cible prévisionnel comprend une marge « technique » qui s’ajoute au volume cible anatomoclinique en raison des incertitudes liées aux mouvements des organes et du patient. Dans le rapport 62 de l’International Commission on Radiation Units ans Measurements (ICRU) 62, ce volume a été scindé en deux selon les causes d’incertitudes [19]. Les mouvements internes des organes permettent de définir un volume cible interne ou ITV (Internal Target Volume). Le passage du volume cible interne au volume cible prévisionnel s’effectue par l’addition d’une marge de mise en place (set-up margin). Il est important que chaque centre détermine la valeur de ces marges en fonction de sa propre technique ou procédure de traitement. Le plus souvent, le volume cible prévisionnel inclut une marge de 5 à 10 mm autour du volume cible anatomoclinique [25,39]. Pour réduire le volume cible interne, notamment pour les tumeurs des lobes moyen et inférieurs, il est conseillé d’utiliser une technique d’asservissement respiratoire, plutôt en blocage volontaire ou actif en inspiration profonde de la respiration [14,39].
7.3. Doses prescrites Les doses de prescription varient selon que la radiothérapie est délivrée en exclusivité ou après la chirurgie [35].
7.3.1. Radiothérapie exclusive La dose totale à délivrer en fractionnement classique varie entre 66 à 70 Gy ; l’escalade de dose est en voie de recherche.
Cependant, cette dose apparaît comme la dose minimale à atteindre ; il a été publié que la dose de 60 Gy ne permettait d’obtenir seulement un qu’un taux de contrôle local de 20 % à un an [38]. De même, Vijayakumar et al. ont montré à partir de différentes séries de la littérature une forte relation entre l’augmentation de la dose totale et le taux de contrôle local [45]. L’irradiation médiastinale prophylactique des aires non macroscopiquement envahies de 46 Gy a tendance à disparaître, car le taux de récidive en dehors du volume irradié n’est que de 8 à 9 %, et cette irradiation prophylactique représente un obstacle à l’escalade de dose [10,37,42]. Un récent essai randomisé a comparé une irradiation du seul volume tumoral et une irradiation du volume tumoral et prophylactique de l’ensemble du médiastin. Aucune différence n’a été mise en évidence en termes de survie et les taux de réponse objective ont été supérieurs pour le bras expérimental avec une moindre toxicité [47]. L’irradiation prophylactique des aires ganglionnaires non envahies n’est donc pas recommandée [35]. D’ailleurs, la dose reçue par les ganglions adjacents au volume cible est non négligeable ; ces ganglions sont donc traités involontairement dans la plupart des cas [10,20].
7.3.2. Radiothérapie postopératoire Les indications de radiothérapie postopératoire sont plus rares et non complètement validées [31]. En cas de résection R1, une dose de 60 à 66 Gy est préconisée dans la zone en exérèse incomplète. Pour les lésions de stade pT3, notamment celles situées au contact de la paroi thoracique, une dose de 46 à 56 Gy est indiquée [17]. Pour les patients atteints de cancer de stade pN2, il est habituel de proposer une irradiation médiastinale de 46 à 54 Gy en fractionnement classique. Cependant, la dernière métaanalyse PORT (Postoperative Radiotherapy) a remis en question cette indication [31]. Il faut ainsi encourager l’inclusion de ces patients dans l’essai LUNG ART (Lung Adjuvant Radiotherapy Trial) randomisant les patients atteints de cancer de stade pN2 entre abstention et irradiation médiastinale de 54 Gy. Le délai optimal pour commencer la radiothérapie est de six à huit semaines après la chirurgie et d’un mois après une chimiothérapie adjuvante [22,23,28].
7.4. Organes à risque et contraintes de doses Un numéro spécial de Cancer/Radiothérapie reprend en détails l’ensemble des organes à risque et les contraintes de doses pour l’irradiation thoracique. Succinctement, les principaux organes à risque pour l’irradiation pulmonaire comprennent les deux poumons, le cœur, l’œsophage et la moelle épinière [5,39]. L’ensemble de ces organes doit donc apparaître sur les histogrammes dose-volume (HDV) (Tableau 1).
7.4.1. Poumon L’ensemble des deux poumons doit être délinéé [39]. Les recommandations de la littérature sont hétérogènes, prenant en compte parfois les deux poumons, parfois ce volume pulmonaire total moins le volume cible prévisionnel ou le volume tumoral macroscopique, etc. Classiquement, on analyse le
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7.4.5. Plexus brachial
Tableau 1 Principales contraintes de dose pour une irradiation thoracique. Main dose restrictions for thoracic irradiation. Organes
Rapport Dose/ Volume (HDV)
Poumon*
V5 42 % V13 40 % V20 30 % V30 20 %
Cœur
V40 30 % D100 30 Gy
Œsophage
L40 15 cm V50 35 %
Moelle
Dose moyenne
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Dose Maximum
15 à 20 Gy
La dose maximale doit être inférieure à 55 Gy. Durant tout le traitement, le patient est vu chaque semaine par l’oncologue radiothérapeute, qui évalue et cote la toxicité aiguë (Criteria for Adverse Events [CTCAE]) [17,35,41].
7.5. Balistique et dosimétrie : rayonnement
45 Gy
*Volume des 2 poumons moins le volume cible prévisionnel (PTV). Vx y % : le volume de l’organe recevant la dose x doit être inférieur ou égal à y % de cet organe. L : longueur ; D : dose.
risque de complications à partir du volume des deux poumons auquel on retrait le volume du volume cible prévisionnel. Les contraintes sont alors les suivantes : V20 (volume des deux poumons – volume cible prévisionnel recevant une dose d’au moins x, ici 20 Gy) : < 30 ou 35 % et V30 < 20 % [2,9,15]. En cas de poumon unique, les données sont encore moins nombreuses. On recommande que le V20 soit < 20 % [17]. D’autres données attirent l’attention sur les doses moyennes avec des limites du V5 < 42 % et V13 < 40 %. La dose moyenne pourrait également être prédictive avec un seuil entre 15 et 20 Gy [40,46]. Enfin, pour les systèmes de planification des doses (TPS pour Treatment planning system) qui permettent de calculer les valeurs du NTCP (Normal Tissue Complications Probability ou probabilité de complications des tissus sains), les valeurs de 15 ou 18 % sont habituellement retenues [33,40,46].
7.4.2. Cœur Le volume cardiaque doit être délinéé jusqu’à l’émergence des gros vaisseaux (aorte et artères pulmonaires). Bien que les données soient limitées, il est recommandé de ne pas dépasser 40 Gy dans le tiers du volume cardiaque (V40 < 30 %) et 30 Gy dans tout le cœur [D100 (dose reçue dans 100 % du cœur) < 30 Gy], en étant particulièrement prudent en cas de coronaropathie ou de risque d’insuffisance cardiaque [12].
7.4.3. Œsophage Le risque d’œsophagite de grades 3 et 4 semble plus corrélé avec l’association de chimioradiothérapie concomitante qu’à la longueur d’œsophage irradiée. Les contraintes générales sont les suivantes : pas plus de 40 Gy ne doivent être délivrés sur plus de 15 cm de longueur d’œsophage (L40 < 15 cm). Le volume de l’œsophage recevant au moins 50 Gy doit être inférieur à 35 % du volume œsophagien total (V50 < 35 %) [1,5,21].
7.4.4. Moelle La dose maximale doit rester inférieure à 45 Gy en un point et inférieure à 40 Gy sur un segment.
La dosimétrie doit être réalisée avec un système de planification des doses qui prend en compte les hétérogénéités de dose rencontrées dans le thorax. Compte tenu de ces hétérogénéités et de l’élargissement de la pénombre qui en résulte, des photons de 6 à 10 MV au maximum doivent être privilégiés [4,39]. Pour une meilleure distribution de dose, il est recommandé de réaliser une balistique avec de trois à cinq faisceaux d’emblée sans réduction. Cette balistique est à adapter en fonction de la taille, de la localisation tumorale et aux contraintes de dose décrites ci-dessus. La dose doit être prescrite au point ICRU, 95 % du volume cible prévisionnel devant recevoir au moins 95 % de la dose prescrite, 98 % du volume au moins 90 % de la dose et 3 % du volume ne doivent pas recevoir plus de 107 % de la dose prescrite [19]. Une image de contrôle des faisceaux d’irradiation (imagerie portale) doit être réalisée selon un protocole établi afin de détecter les erreurs systématiques et aléatoires de positionnement [17].
8.
Toxicité de la radiothérapie
Les effets aigus sont les manifestations survenant jusqu’au 90e jour de la fin de la radiothérapie. Elles sont fréquentes mais, en général, mineures. Les effets tardifs sont les manifestations survenant plus de trois mois de la fin de la radiothérapie [7]. Ces effets peuvent être très tardifs mais le délai moyen de leur survenue est de deux ans. Ils ne sont pas forcément précédés de manifestations aiguës bruyantes. Les principaux effets aigus et tardifs sont repris dans le numéro spécial de Cancer/Radiothérapie sur les organes à risque [48]. La principale complication, et la plus crainte, reste la pneumopathie radique aiguë (PRA) [3,5]. La pneumopathie radique aiguë survient dans la majorité des cas entre 6 et 12 semaines après la fin de l’irradiation [27]. Toutefois, des formes suraiguës survenant en cours d’irradiation ont également été observées. Sa fréquence est d’environ 10 à 15 %. La symptomatologie clinique est aspécifique. La toxicité pulmonaire aiguë se manifeste par une dyspnée et une toux améliorée par la corticothérapie ; dans les formes plus graves, le patient peut souffrir d’un tableau de détresse respiratoire aigue [3,5,27]. La toxicité pulmonaire tardive apparaît comme le développement d’une insuffisance respiratoire de sévérité variable [27]. La douleur thoracique et l’hémoptysie, quoique beaucoup plus rares, ont également été décrites. L’examen clinique peut noter l’existence de crépitants auscultatoires ou d’un souffle pleural. La biologie montre l’existence d’un syndrome inflammatoire non spécifique. Les signes radiologiques sont habituellement plus parlants, bien que non spécifiques. Le cliché radiographique montre le plus
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souvent la coexistence d’images alvéolaires et interstitielles d’allure confluente, classiquement situées dans le volume irradié. La tomodensitométrie retrouve le plus souvent des opacités en verre dépoli non systématisées. Plus rarement, les images radiologiques prennent une allure extensive et se mettent à déborder largement les volumes irradiés pour s’associer à de véritables syndromes de détresse respiratoire aiguë (SDRA) [3]. Les explorations fonctionnelles respiratoires associent l’existence d’un trouble ventilatoire restrictif et une altération de la diffusion du monoxyde de carbone. Le lavage broncho-alvéolaire (LBA), s’il est fait, retrouve souvent une lymphocytose de l’ordre de 30 %. Elle est constituée essentiellement de lymphocytes T CD4+. En l’absence de critères diagnostiques pathognomoniques, le diagnostic de pneumopathie radique aiguë reste, à l’heure actuelle, un diagnostic d’élimination. Une fois le diagnostic posé, l’évolution de la pneumopathie radique aiguë est habituellement favorable, soit spontanément, soit sous corticothérapie [3]. La toxicité cardiaque est également fréquente et peut entraîner des complications multiples, par atteinte de ses différentes composantes anatomiques : insuffisance cardiaque, péricardite, ischémie myocardique. Leur mise en évidence peut être difficile en raison de leur évolution à bas bruit [12,32]. L’œsophagite radique aiguë a vu sa fréquence augmenter depuis l’apparition de l’association d’une chimiothérapie concomitante, elle apparaît en cours d’irradiation et se manifeste essentiellement par une dysphagie. Les symptômes sont liés à l’atteinte de la muqueuse œsophagienne. L’œsophagite radique tardive est moins fréquente, est liée à une atteinte de la paroi musculaire, la présentation clinique est celle d’une sténose, voire de perforation œsophagienne [30].
9.
Iconographie de radio-anatomie
Les figures. 1 à 13 représentent les recommandations de contours du cœur et de l’œsophage établies lors du STIC (Programme de soutien aux techniques innovantes coûteuses) sur la radiothérapie asservie à la respiration. Les figures. 14 à 21 affichent des exemples de segmentation des principales aires ganglionnaires (selon Servois) [6].
10. Cas cliniques commentés
10.1. Cas clinique n°1 (T2N0M0) M. M, 80 ans, tabagique à 50 paquets-année non sevré, a consulté pour une majoration d’une dyspnée d’effort. Une radiographie thoracique puis une scanographie thoracique ont mis en évidence une opacité spiculée de quatre centimètres lobaire inférieure droite. Une biopsie sous fibroscopie bronchique a confirmé la présence d’un adénocarcinome d’origine bronchique. Le bilan d’extension comprenant une TEP et une IRM cérébrale a éliminé la présence d’une atteinte ganglionnaire médiastinale ou à distance. La tumeur a donc été classée T2N0M0. La chirurgie a été écartée en raison de l’état général du patient (non opérabilité), ainsi l’irradiation exclusive est retenue. Une scanographie dosimétrique en position de traitement avec
une synchronisation respiratoire (quadridimensionnelle) a été réalisée ; les contours du volume cible et des organes à risque sont présentés figure 22. La marge définie autour du volume tumoral macroscopique était de 8 mm (adénocarcinome) ; celle autour du volume cible interne de 3 mm (après analyse de la scanographie quadridimensionnelle) et la marge de positionnement de 2 mm. La dose prescrite était de 66 Gy, à raison de cinq fractions hebdomadaires de 2 Gy. Le traitement a été réalisé avec des photons de 4 MV, par quatre faisceaux isopondérés (latéral droit, oblique postérieur droit, oblique postérieur gauche, et postérieur) (Fig. 23). La dosimétrie et les histogrammes dosevolume sont présentés figures 24 et 25.
10.2. Cas clinique n°2 (T2N2M0) M. P, âgé de 81 ans, a consulté en pneumologie suite à un épisode d’hémoptysie. La fibroscopie bronchique montait une lésion suspecte localisée dans la bronche lobaire inférieure droite. Il s’agissait d’un carcinome épidermoïde bien différencié. Une scanographie thoraco-abdominale, une TEP et une IRM cérébrale ont été réalisées et permettaient de classer la lésion T2N2M0 (adénomégalies hyperfixantes hilaire droite et sous carénaire). La tumeur était donc de stade IIIA. Le bilan d’opérabilité du patient permettait une prise en charge chirurgicale (résécable et opérable). Une lobectomie inférieure droite associée à un curage médiastinale a ainsi été réalisée ; l’analyse histologique de la pièce opératoire a permis de classe la tumeur pT2N2, R0. Compte tenu de l’envahissement massif des ganglions médiastinaux, l’indication d’une irradiation médiastinale postopératoire a donc été posée en réunion de concertation pluridisciplinaire. Une scanographie dosimétrique en respiration libre a été réalisée ; les contours du volume cible anatomoclinique (CTV) et des organes à risque sont présentés figure 26. La dose prescrite était de 54 Gy, à raison de cinq fractions hebdomadaires de 2 Gy. Le traitement a été réalisé avec des photons de 4 et 10 MV, par quatre faisceaux (antérieur, oblique antérieur gauche, oblique antérieur droit, et postérieur) (Fig. 27). La dosimétrie et les histogrammes dose-volume sont présentés figures 28 et 29.
10.3. Cas clinique n°3 (stade IIIA) M. W, âgé 79 ans, tabagique à 80 paquets-année sevré depuis dix ans était suivi pour un flutter auriculaire traité par Préviscan®. En 2009, un épisode d’hémoptysies a amené la réalisation d’une scanographie thoracique qui a montré un nodule lobaire supérieur droit associé à des adénopathies de la loge de Baréty (4R) et du médiastin antérieur. La fibroscopie bronchique était non contributive. La médiastinoscopie a mis en évidence un carcinome épidermoïde bien différencié et confirmé l’atteinte ganglionnaire médiastinale (N2). Le bilan d’extension était négatif (pas de fixation extrathoracique sur la TEP, ni de lésion à l’IRM cérébrale). La tumeur a été classée T2N2M0, de stade IIIA. Mr W. n’était pas opérable en raison de ses antécédents médicaux ; il a été adressé pour une chimioradiothérapie concomitante avec asservissement respiratoire de type blocage volontaire en inspiration. Une scanographie dosimétrique avec asservissement respiratoire (RAR) a été réalisée, les contours du volume cible et des organes à risque sont présentés figure 30. Le GTVT et GTVN ont été délimités. Une marge de 6 mm est
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appliquée entre le GTVT et le CTVT (carcinome épidermoïde). Les marges complémentaires du volume cible anatomoclinique pour aboutir au volume cible prévisionnel étaient de 7 mm au total (2 mm pour le volume cible interne compte tenu du dispositif d’asservissement respiratoire, 5 mm pour la marge de positionnement). La dose prescrite au point ICRU était de 66 Gy, à raison de cinq fractions hebdomadaires de 2 Gy. Le traitement a été réalisé avec des photons de 4 MV, par quatre faisceaux (antérieur, oblique antérieur droit, oblique postérieur droit, et postérieur) (Fig. 31). La dosimétrie et les histogrammes dose-volume sont présentés figures 32 et 33.
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Conflits d’intérêts P. Giraud : Essais cliniques : en qualité d’investigateur principal, coordonnateur ou expérimentateur principal (Laboratoires Lilly) ; Essais cliniques : en qualité de co-investigateur, expérimentateur non principal, collaborateur à l’étude (Laboratoires Lilly) ; Conférences : invitations en qualité d’intervenant (Laboratoires Astra Zeneca) ; Conférences : invitations en qualité d’auditeur (frais de déplacement et d’hébergement pris en charge par une entreprise : Laboratoires Lilly et Pfizer). D. Leignel Argo : aucun.
Fig. 1 à 6. Recommandations de contours du cœur établies lors du Programme de soutien aux techniques innovantes coûteuses (Stic) sur la radiothérapie asservie à la respiration (V. Servois, Radiologie, institut Curie). Guidelines for heart delineation established during the Support Program for Costly Innovative Techniques (Programme de Soutien aux Techniques Innovantes Coûteuses, STIC) on respiratory radiotherapy (V. Servois, Radiologie, Institut Curie).
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Fig. 7 à 13. Recommandations de contours de l’œsophage établies lors du Programme de soutien aux techniques innovantes coûteuses (Stic) sur la radiothérapie asservie à la respiration (V. Servois, Radiologie, institut Curie). Guidelines for esophagus delineation established during the Support Program for Costly Innovative Techniques (Programme de Soutien aux Techniques Innovantes Coûteuses, STIC) resiratory radiotherapy (V. Servois, Radiologie, Institut Curie).
Fig. 14. Schéma des principales aires ganglionnaires médiastinales et hilaires selon [26]. Main mediastinal and hilar lymph nodes according to [26].
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Fig. 15 à 21. Exemples de segmentation des principales aires ganglionnaires (V. Servois, Radiologie, institut Curie) selon [6]. Examples of segmentation of the main lymph nodes (V. Servois, Radiologie, Institut Curie) according to [6].
Fig. 22. Cas clinique n °1 : contours. Case 1: delineation.
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S70
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Fig. 25. Cas clinique n° 1 : histogrammes dose-volume. Case 4: dose-volume histograms.
Fig. 26. Cas clinique n °2 : contours. Case 2: delineation.
Fig. 27. Cas clinique n °2 : balistique avec quatre faisceaux. Case 2: ballistic with 4 beams.
Fig. 29. Cas clinique n °2 : histogrammes dose-volume. Case 2: dose-volume histograms.
Fig. 30. Cas clinique n °3 : contours. Case 3: delineation.
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Fig. 31. Cas clinique n °3 : balistique avec quatre faisceaux. Case 3: ballistic with 4 beams. Fig. 32. Cas clinique n °3 : dosimétrie. Case 3: dosimetry
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[12] [13] Fig. 33. Cas clinique n °3 : histogrammes dose-volume. Case 3: Dose-volume histograms.
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ANNEXE 1 Classification TNM publiée en 2009 (7e édition) par l’UICC (Union Centrale Contre le Cancer). TNM classification published in 2009 (7th edition) by the International Union Against Cancer (UICC). T – Tumeur primitive TX : tumeur ne peut être évaluée ou est démontrée par la présence de cellules malignes dans les expectorations ou un lavage bronchique sans visualisation de la tumeur par des examens endoscopiques ou d’imagerie T0 : pas d’évidence de tumeur primitive Tis : carcinome in situ T1 : tumeur de 3 cm ou moins dans sa plus grande dimension, entourée par le poumon ou la plèvre viscérale, sans évidence bronchoscopique d’invasion plus proximale que la bronchique lobaire (c’est-à-dire pas la bronche souche) T1a : tumeur de 2 cm ou moins dans sa plus grande dimension T1b : tumeur de plus de 2 cm sans dépasser 3 cm dans sa plus grande dimension T2 : tumeur de plus de 3 cm sans dépasser 7 cm dans sa plus grande dimension ou présentant une des caractéristiques suivantes* : – atteinte de la bronche souche à 2 cm ou plus de la carène ; – invasion de la plèvre viscérale ; – présence d’une atélectasie ou d’une pneumopathie obstructive s’étendant à la région hilaire sans atteindre l’ensemble du poumon. T2a : tumeur de plus de 3 cm sans dépasser 5 cm dans sa plus grande dimension T2b : tumeur de plus de 5 cm sans dépasser 7 cm dans sa plus grande dimension *les tumeurs avec ces caractéristiques sont classées T2a si leur dimension est de 5 cm ou moins T3 : tumeur de plus de 7 cm ; ou envahissant directement une des structures suivantes : la paroi thoracique (y compris la tumeur de Pancoast), le diaphragme, le nerf phrénique, la plèvre médiastinale, pleurale ou pariétale ou le péricarde ; ou une tumeur dans la bronche souche à moins de 2 cm de la carène sans l’envahir ; ou associée à une atélectasie ou d’une pneumopathie obstructive du poumon entier ; ou présence d’un nodule tumoral distinct dans le même lobe T4 : tumeur de tout taille envahissant directement une des structures suivantes : médiastin, cœur, grands vaisseaux, trachée, nerf laryngé récurrent, œsophage, corps vertébral, carène ; ou présence d’un nodule tumoral distinct dans un autre lobe du poumon atteint N – Ganglions lymphatiques régionaux NX : les ganglions ne peuvent pas être évalués N0 : pas de métastase ganglionnaire lymphatique régionale N1 : métastase dans les ganglions lymphatiques intrapulmonaires, péribronchiques et/ou hilaires ipsilatéraux, y compris par envahissement direct N2 : métastase dans les ganglions lymphatiques médiastinaux ipsilatéraux et/ou sous-carinaires N3 : métastase dans les ganglions lymphatiques médiastinaux controlatéraux, hilaires controlatéraux, scalènes ou sous-claviculaires ipsilatéraux ou controlatéraux M – Métastase à distance MX : les métastases à distance n’ont pas pu être évaluées M0 : absence de métastase à distance M1 : métastase à distance M1a : nodule (s) tumoral distinct dans un lobe controlatéral ; tumeur avec nodules pleuraux ou épanchement pleural (ou péricardique) malin M1b : métastase à distance
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ANNEXE 2 Classification par stades. Classification by stage. Cancer occulte
TX
N0
M0
Stade 0
Tis
N0
M0
Stade IA
T1a,b
N0
M0
Stade IB
T2a
N0
M0
T1a,b
N1
M0
T2a
N1
M0
T2b
N0
M0
T2b
N1
M0
T3
N0
M0
Stage IIA
Stade IIB
Stade IIIA
T1, T2
N2
M0
T3
N1, N2
M0
T4
N0, N1
M0
T4
N2
M
Stade IIIB
Tout T
N3
M0
Stade IV
Tout T
Tout N
M1
C ancer/ R adiot hérapie 14 Suppl . 1 (2010) S74– S83
Cancer de l’œsophage Esophageal cancer O. Dupuisa, *, G. Ganema, G. Bérab, Y. Pointreaub, O. Pradierc, P. Martind, X. Mirabele, F. Denisa a Centre
Jean-Bernard, clinique Victor-Hugo, 9, rue Beauverger, 72000 Le Mans, France d’oncologie radiothérapie, Centre Henry S. Kaplan, CHU Bretonneau, 2, boulevard Tonnellé, 37044, Tours, France c Département de radiothérapie, CHU de Morvan, 5, avenue Foch, 29200 Brest, France d Centre Bourgogne 144, avenue de Dunkerque, 59800, Lille, France e Département universitaire de radiothérapie, centre Oscar-Lambret, 59000 Lille, France b Clinique
INFO ARTICLE
RÉSUMÉ
Les figures 3b, 6a, 6d, 7a, 11a et 11c sont visibles uniquement sur : http : //www. sciencedirect.com/
Les cancers de l’œsophage sont des lésions hautement malignes et d’un pronostic souvent très sévère, en dehors des lésions minimes traitées par chirurgie. La radiothérapie, ou plutôt l’association de radiothérapie et de chimiothérapie concomitante est la modalité thérapeutique la plus souvent utilisée, seule ou avec l’œsophagectomie. La définition des volumes cibles profite actuellement de la possibilité d’utiliser en routine les nouvelles techniques d’imagerie [Tomographie par émission de positons (TEP) en particulier]. L’objectif de ce travail est de préciser les particularités radio-anatomiques, les modes d’extension des cancers de l’œsophage et les principes de l’irradiation conformationnelle tridimensionnelle illustrés par un cas clinique.
Mots clés : Cancer de l’œsophage Radiothérapie conformationnelle Volumes cibles Atlas
© 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
ABSTRACT Keywords: Esophageal cancer Conformal radiotherapy Target volumes Atlas
Esophageal cancers are highly malignant tumours with often a poor pronostic, except for minimal lesions treated with surgery. Radiation therapy, or combined radiation and chemotherapy is the most used therapeutic modality, alone or before oesophagectomy. The delineation of target volumes is now more accurate owing the possibility to use routinely the new imaging techniques (mainly PET). The aim of this work is to precise the radio-anatomical particularities, the pattern of spread of esophageal cancer and the principles of 3D conformal radiotherapy illustrated with a clinical case. © 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Published by Elsevier Masson SAS. All rights reserved.
1.
Épidémiologie
Le cancer de l’œsophage atteint chaque année en France plus de 5 000 nouvelles personnes. La France a une des incidences les plus élevées en Europe malgré une forte régression dans les deux dernières décennies. Il atteint surtout les hommes (sexratio de 12) et augmente avec l’âge après 60-65 ans. Il existe de
fortes disparités régionales : en Basse-Normandie et en Bretagne, l’incidence est le triple de la moyenne française. La majorité des cancers de l’œsophage sont encore des carcinomes épidermoïdes (72 à 96 %), liés à la consommation d’alcool et de tabac. Néanmoins, l’incidence des adénocarcinomes est en forte augmentation, atteignant maintenant 20 à 25 % des cas [12]. Cette dernière forme histologique survient généralement
* Correspondance. Adresse e-mail : [email protected] (Dr Olivier Dupuis) © 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
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au niveau du tiers inférieur de l’œsophage, et a comme facteur étiologique reconnu l’endobrachyœsophage [16].
2.
Radio-anatomie et modes d’extension
2.1. Définition des régions anatomiques L’œsophage s’étend de la bouche de Killian au cardia et comporte les segments cervical, thoracique et abdominal : — œsophage cervical : du bord inférieur du cartilage cricoïde à l’entrée dans le thorax, vers 19 cm des arcades dentaires. — œsophage thoracique : • tiers supérieur : de l’orifice supérieur du thorax à la bifurcation trachéale, à 25 cm des arcades dentaires environ ; • tiers moyen : sous la bifurcation trachéale, de 25 à 32 cm des arcades dentaires environ ; • tiers inférieur, incluant l’œsophage abdominal : de 32 à 40 cm des arcades dentaires environ.
2.2. Drainage lymphatique (Fig. 1a & 1b) Les aires ganglionnaires lymphatiques de drainage sont celles du médiastin postérieur et du médiastin moyen, prolongées par les aires sus-claviculaires puis cervicales vers le haut et gastriques supérieures puis cœliaques vers le bas. Il existe par ailleurs un très riche réseau lymphatique sous-muqueux qui draine essentiellement longitudinalement : la circulation se fait principalement vers le haut puis les aires sus-claviculaires pour la moitié supérieure de l’oesophage et vers le bas puis les ganglions coeliaques pour la moitié inférieure [8].
S75
2.5. Classification AJCC 2010 T - Tumeur primitive — T0 = pas de tumeur primitive — Tis = carcinome in situ, dysplasie de haut grade — T1 = tumeur envahissant la lamina propria, la muscularis mucosae ou la sous-muqueuse — T1a = tumeur envahissant la lamina propria ou la muscularis mucosae • T1b = tumeur envahissant la sous-muqueuse — T2 = tumeur envahissant la musculeuse propre — T3 = tumeur envahissant l’adventice — T4 = tumeur envahissant les structures adjacentes • T4a = tumeur résécable envahissant plèvre, péricarde, diaphragme, péritoine adjacent • T4b = tumeur non résécable envahissant d’autres structures (aorte, corps vertébral, trachée …) N - Adénopathies régionales qui ne dépendent plus de la localisation tumorale Le N concerne les ganglions dans le territoire de drainage œsophagien, y compris les ganglions cœliaques et cervicaux, sauf les ganglions sus-claviculaires (classés M1). - Nx = ganglions non évaluables — N0 = pas d’envahissement des ganglions régionaux — N1 = 1 à 2 ganglions envahis — N2 = 3 à 6 ganglions envahis — N3 6 ganglions envahis M - Métastase — M0 = pas de métastase à distance — M1 = présence de métastase à distance — le Mx disparaît
2.6. Ajout du grade histologique G 2.3. Modes d’extension des cancers de l’œsophage Le réseau lymphatique sous-muqueux explique la possibilité d’extension très à distance de la tumeur primitive, soit directement, soit sous la forme de véritables métastases lymphatiques. Les études sur pièces chirurgicales montrent une extension moyenne de plus d’un cm et jusqu’à 3 cm dans 94 % des cas [4]. L’extension en périphérie, facilitée par l’absence de séreuse et l’envahissement de structures telles que l’arbre trachéo-bronchique, la plèvre, le péricarde, les nerfs récurrents, peut être précoce. Bien que la diffusion ganglionnaire des cancers de l’oesophage puisse se faire sur l’ensemble des sites décrits plus haut, des études principalement japonaises ont mesuré le risque d’atteinte ganglionnaire en fonction de la localisation primitive (Tableau 1). Ainsi pourrait-on parfois limiter quelque peu l’étendue des zones à irradier [6].
2.4. Classifications des cancers de l’œsophage La classification pré-thérapeutique utilise les résultats des examens para-cliniques et essentiellement l’écho-endoscopie, qui visualise avec le plus d’acuité l’extension en profondeur de la lésion tumorale [18]. Une nouvelle classification TNM est à notre disposition depuis le début 2010 et peut-être utilisée, même s’il s’agit d’une classification établie après la chirurgie [19].
G1 = bien différencié G2 = moyennement différencié G3 = peu différencié G4 = indifférencié Les stades correspondants sont indiqués dans les tableaux 2 et 3 et prennent en compte pour les carcinomes épidermoïdes la localisation de la tumeur primitive.
3.
Indications de la radiothérapie
La radiothérapie était jusque dans les années 1980 le traitement des cancers de l’œsophage inopérables, soit du fait de l’extension, soit à cause du terrain du patient. Néanmoins, rapidement, l’association à une chimiothérapie par 5-fluorouracile puis par cisplatine a démontré sa supériorité sur l’irradiation exclusive, au prix d’une toxicité accentuée [9]. Cette modalité thérapeutique est devenue alors le traitement standard des cancers évolués inopérables ou des lésions moins étendues chez des patients atteints de « comorbidités » rendant la solution chirurgicale difficile à envisager. Compte tenu du pronostic défavorable des tumeurs de stade T3 ou atteignant les ganglions (N+), la recherche clinique a exploré les options de chimioradiothérapie pré-opératoire [5]. Cette stratégie a montré une amélioration de la survie par rapport à la chirurgie
S76
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Tableau 1 Risque d'atteinte des aires ganglionnaires en fonction de la localisation tumorale (%) [8]. Risk of lymph node involvement depending on tumor location (%) [8]. Sus-clav. D
Sus-clav. G
Paratrachéale
Sous la carène
Médiastin inf.
Para-cardiale/ gastriques sup.
Cœliaque
Œsophage supérieur
26,7
13,3
46,7
18,4
16,3
28,6
2
Oesophage moyen
21,1
17,5
42,1
25,7
16,1
34,1
6,9
Oesophage inférieur
16,7
0
33,3
18,7
24,6
66,4
17,2
Tableau 2 Classification pronostique des carcinomes épidermoïdes selon l’AJCC (American Joint Comittee on Cancer) [19]. AJCC prognostic staging of epidermoid carcinomas [19]. Stade
T
N
M
Grade
Localisation tumorale
Survie à 5 ans
Stade IA
1
0
0
1,X
Toute
70 %
Stade IB
1
0
0
2,3
Toute
60 %
2,3
0
0
1,X
1/3 inférieur
Stade IIA Stade IIB Stade IIIA
2,3
0
0
1,X
1/3 sup et moyen
2,3
0
0
2,3
1/3 inférieur
2,3
0
0
2,3
1/3 sup et moyen
1,2
1
0
Tout
Toute
1,2
2
0
Tout
Toute
3
1
0
Tout
Toute
4a
0
0
Tout
Toute
Stade IIIB
3
2
0
Tout
Toute
Stade IIIC
4a
N1,N2
0
Tout
Toute
Stade IV
4b
Tout N
0
Tout
Toute
Tout T
N3
0
Tout
Toute
Tout T
Tout N
1
Tout
Toute
Tableau 3 Classification pronostique des adénocarcinomes selon l’AJCC (American Joint Comittee on Cancer) [19]. AJCC prognostic staging of adenocarcinomas [19]. Stade
T
N
M
Grade
Survie à 5 ans
Stade IA
1
0
0
1,2,X
80 %
Stade IB
1
0
0
3
60 %
2
0
0
1,2,X
Stade IIA
2
0
0
3
50 %
Stade IIB
3
0
0
Tout
40 %
1,2
1
0
Tout
Stade IIIA
1,2
2
0
Tout
3
1
0
Tout
4a
0
0
Tout
Stade IIIB
3
2
0
Tout
Stade IIIC
4a
N1,N2
0
Tout
Stade IV
4b
Tout N
0
Tout
Tout T
N3
0
Tout
Tout T
Tout N
1
Tout
25 %
< 20 %
seule [7]. Cet effet est peut-être restreint aux adénocarcinomes et aux populations non asiatiques [10]. Puis, a été étudiée la possibilité de se dispenser de la chirurgie pour les cancers évolués opérables : l’essai 9102 de la FFCD (Fédération française
50 % 40 % 25 %
< 20 %
de cancérologie digestive) comparant la chirurgie précédée de chimioradiothérapie et la chimioradiothérapie exclusive n’a pas montré de différence de survie globale entre ces deux approches chez des patients atteints de tumeur de stade T3, en situation de réponse à la chimioradiothérapie [2]. Les malades opérés avaient une mortalité précoce plus importante, une durée d’hospitalisation plus longue mais moins de récidives locorégionales. Dans un essai allemand, la randomisation se faisait avant le début du traitement : cet essai a confirmé l’équivalence des stratégies avec ou sans chirurgie sur la survie globale, avec un contrôle local amélioré par la chirurgie et une mortalité liée au traitement plus importante dans ce cas [17]. Il convient d’essayer d’optimiser l’usage de ces deux options thérapeutiques. Actuellement la radiothérapie est souvent utilisée dans le traitement des cancers de l’œsophage : — radiothérapie exclusive chez des patients trop fragiles pour être opérés et pour supporter la chimioradiothérapie, ou à titre palliatif pour diminuer la dysphagie même chez des patients atteints de cancer métastatique ; — radio-chimiothérapie exclusive en cas de cancer évolué, a fortiori sus-carinaire, ou d’un cancer moins évolué chez un patient inopérable ; — chimioradiothérapie préopératoire pour des cancers évolués (de stade T3 ou atteignant les ganglions), opérables : la difficulté consiste à déterminer quels patients bénéficient de la chirurgie. Les patients en situation de réponse partielle
O. Dupuis et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S74-S83
4.
S77
Modalités de la radiothérapie conformationnelle
4.1. Définition des volumes cibles
Fig. 1a & 1b. Délimitation tomodensitométrique des zones ganglionnaires thoraciques et abdominales supérieures concernées par les cancers de l’œsophage. Abréviations adaptées de la classification de l’AJCC (American Joint Comittee on Cancer) : Oe, œsophage & g. péri-œsophagiens ; PTCd, paratrachéal cervical droit ; PTCg, paratrachéal cervical gauche ; SCd, sus-claviculaire droit ; PTSd, paratracheal supérieur droit ; PTSg, paratracheal supérieur gauche ; PTId, paratrachéal inférieur droit ; MH, médiastinal haut ; PV, pré-vasculaire (pré-aortique) ; SC, sous-carénaire ; PHd, péri-hilaire droit ; PHg, péri-hilaire gauche ; PVe, pré-vertébral ; PAd, para-aortique droit ; PC, péri-cardial ; RAo, rétro-aortique ; Spl, splénique ; Coe, cœliaque ; GaG, gastrique gauche. CT delimitation of thoracic and upper abdominal lymph node regions involved in esophagus cancers. Abbreviations adapted from AJCC classification: Oe, esophagus and periesophageal lymph nodes; PTCd, right cervical paratracheal; PTCg, left cervical paratracheal; SCd, right supraclavicular; PTSd, right superior paratracheal; PTSg, left superior paratracheal; PTId, right inferior paratracheal; MH, upper mediastinal; PV, prevascular (preaortic); SC, subcoronary; PHd, right perihilar; PHg, left perihilar; PVe, prevertebral; PAd, right paraaortic; PC, pericardial; RAo, retroaortic; Spl, splenic; Coe, celiac; GaG, left gastric.
seraient probablement les meilleurs candidats : les patients en situation de réponse complète ont de bonnes probabilités de contrôle local sans oesophagectomie et le rattrapage d’un échec de la radiothérapie est probablement illusoire ; — une chimioradiothérapie postopératoire sur le modèle du traitement des cancers de l’estomac peut être discutée pour des adénocarcinomes du cardia étendus vers le bas.
Les volumes cibles et les contours des organes à risque sont déterminés à partir des coupes tomodensitométriques réalisées avec un patient en position de traitement. Typiquement, la scanographie est réalisée avec des coupes de 3 mm d’épaisseur tous les trois mm, sans injection si les possibilités de fusion avec des images tépographiques le permettent. Toutefois, l’injection de produit de contraste iodé (en l’absence d’allergie ou d’altération de la fonction rénale) peut être proposée si elle est jugée utile et réalisable. La position du malade dépend de la localisation à traiter : bras le long du corps pour les cancers de l’oesophage cervical ou thoracique haut, bras au dessus de la tête pour les localisations moyennes ou basses (le but étant de dégager les régions sus-claviculaires dans le premier cas et de permettre des faisceaux latéraux dans le deuxième cas). La position du patient et des bras peut être modifiée au décours du premier temps de traitement en particulier lors de la poursuite ou de la reprise de la radiothérapie pour la phase de complément de dose dans un volume plus réduit, mais dans ces cas, il peut être difficile d’obtenir des histogrammes dose-volume (HDV) totalement fiables. Une contention par masque à trois ou cinq points est recommandée pour les tumeurs hautes. — Le volume tumoral macroscopique (Gross Tumor Volume, GTV) est délinéé en repérant la zone d’épaississement de la paroi oesophagienne et/ou d’infiltration de la graisse médiastinale, assez facile à voir pour les tumeurs évoluées. Les données de la fibroscopie sont utiles, mais il faut rester très critique à cause de la faible précision sur la localisation des limites tumorales. Pour les très petites tumeurs, des clichés fibroscope en place voire des clips posés au décours de l’examen aideront aux
S78
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repérages de la tumeur. Des clichés après déglutition barytée sont des solutions classiques mais plus approximatives. La fusion avec une TEP est très utile pour les tumeurs moins évoluées et pour mieux définir l’extension en hauteur de la lésion, voire des extensions sous muqueuses ou des « skip lesions » [14] ; par ailleurs, cet examen aide à l’identification des adénopathies envahies (en l’absence de TEP, les adénomégalies dont le plus petit diamètre dépasse 1 cm sont généralement considérées comme atteintes) : — le volume cible anatomo-clinique (Clinical Target Volume, CTV) peut être décomposé en un volume tumoral (CTVt) et un volume ganglionnaire (CTVg). Le CTVt doit tenir compte de l’extension possible le long de la paroi œsophagienne et une marge crânio-caudale de quatre à cinq cm du volume tumoral macroscopique est considérée comme suffisante. Pour des localisations très distales, cette marge n’est pas applicable : en haut, la limite supérieure est souvent la bouche œsophagienne, sauf en cas de signe d’extension à la paroi pharyngée postérieure ; en bas, le volume cible anatomoclinique inclut le cardia sans aller au-delà [12,13]. La marge circonférentielle dépend des structures adjacentes et ne devrait pas être une simple expansion géométrique du volume tumoral macroscopique : par exemple, le médiastin autour du volume tumoral macroscopique est à risque mais l’extension se fait d’abord sur la circonférence de la paroi aortique et non son épaisseur. Le volume cible anatomoclinique comprend les aires ganglionnaires à risque, dont la topographie dépend du siège de la tumeur mais sont souvent déjà incluses dans le CTVt. Les aires ganglionnaires médiastinales immédiatement adjacentes à la tumeur oesophagienne sont incluses de principe dans le volume cible anatomoclinique. Les aires sus-claviculaires sont traitées si les aires ganglionnaires médiastinales supérieures sont atteintes ou si la tumeur concerne l’œsophage cervical ou thoracique supérieur sus-carinaire. Les ganglions cervicaux homolatéraux (niveau III) sont traités en cas d’atteinte susclaviculaire. L’aire ganglionnaire gastrique supérieure est incluse dans le volume cible anatomoclinique si la tumeur primitive concerne l’œsophage au-dessous de la carène (± 24 cm des arcades dentaires). La région cœliaque est incluse dans le volume cible anatomoclinique en cas d’atteinte de l’aire gastrique supérieure et pour les lésions du bas œsophage (± 32 cm des arcades dentaires). Pour les lésions étendues de part et d’autre de la carène, le volume cible anatomoclinique comprend les aires ganglionnaires médiastinales et les ganglions sus-claviculaires en cas d’atteinte ganglionnaire sus-carinaire et les ganglions gastriques supérieurs en cas d’atteinte ganglionnaire sous-carinaire ; — les volumes cibles prévisionnels (Planning Target Volume, PTV) sont obtenus en créant une marge par expansion automatique autour des volumes cibles anatomocliniques. Cette marge dépend des caractéristiques physiques des faisceaux utilisés et des techniques de repositionnement. Au mieux, elle est déterminée après évaluation individualisée des mouvements du volume cible. Habituellement, cette marge est de cinq à dix mm. La planification du traitement prévoit généralement une réduction du volume traité après 30 à 40 Gy environ : le volume qui reçoit le complément de dose est défini par le volume tumoral macroscopique oesophagien étendu sur un
à deux cm dans le sens crânio-caudal et de cinq mm dans les autres directions en se limitant aux barrières anatomiques, associé aux adénopathies envahies.
4.2. Dose prescrite & fractionnement Le schéma considéré comme standard encore actuellement est celui dit d’Herskovic et consiste en une irradiation à raison de cinq séances de 2 Gy par semaine, jusqu’à une dose totale de 50 Gy en 5 semaines [9]. Un fractionnement de 1,8 Gy par séance jusqu’à 50,4 Gy est admis. L’escalade de la dose n’est pas recommandée hors essai thérapeutique car pour le moment, la seule étude ayant comparé 50,4 Gy à 64,8 Gy a conclu en l’absence d’amélioration (l’effet délétère, parfois évoqué n’est néanmoins pas démontré car l’excès de décès iatrogéniques survenait avant que la dose de 50 Gy ne soit atteinte) [13]. Une chimiothérapie par 5-fluoro-uracile en perfusion continue (1 000 mg/m²/j, j1-4) et cisplatine (75 mg/m², j1) les première et quatrième semaines de radiothérapie y est associée (deux cycles supplémentaires de chimiothérapie sont décrits dans l’article princeps mais ne sont pas toujours réalisables).
4.3. Organes à risque et contraintes de dose Bien que la dose totale à délivrer soit peu élevée, la proximité de l’œsophage avec des organes à risque et la grande étendue des faisceaux dans le sens longitudinal accroissent les difficultés. La moelle épinière représente le principal organe critique et le strict respect des contraintes de dose à son niveau s’avère parfois délicat : en cas de tumeur de l’oesophage cervical ou cervicothoracique, la balistique prévoit habituellement des faisceaux obliques après 40-45 Gy et la marge est souvent mince par rapport au canal médullaire. De même, pour une tumeur très étendue en hauteur, les différences d’épaisseur entre la région cervico-thoracique et la région thoracique moyenne créent un gradient de dose défavorable vers le haut. Enfin, l’association à la chimiothérapie doit rendre très prudent. Le parenchyme pulmonaire irradié est réduit au minimum possible mais pose problème pour les tumeurs les plus étendues en hauteur ou très volumineuses. L’irradiation du coeur concerne les lésions des tiers moyen et inférieur surtout. Le foie est un organe à risque pour les tumeurs sous-carénaires et du cardia. L’analyse des histogrammes dose-volume doit être très pertinente. Les contraintes de dose classiquement utilisées en France sont répertoriées dans le Guide de procédures de la radiothérapie externe publié par la SFRO (Société française de radiothérapie oncologique) [15] : — dose maximale à la moelle : 45 Gy ; — pourcentage de volume pulmonaire total recevant 20 Gy ou plus (V20) idéalement inférieur ou égal à 30 % ; volume hépatique recevant 30 Gy ou plus (V30) < 50 % ; irradiation de la totalité du coeur < 35 Gy et minimisation du V40 (volume recevant 40 Gy) ; Enfin, dans les lésions cervicales, le larynx et la thyroïde jouxtent la bouche oesophagienne et peuvent recevoir l’ensemble de la dose prescrite : le respect d’éventuelles contraintes est alors impossible. Il faudra surveiller l’évolution de la fonction thyroïdienne avec des dosages biologiques réguliers.
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4.4. Balistique La balistique peut être assez simple pour des lésions étendues avec atteinte ganglionnaire, se limitant souvent en deux faisceaux antérieur et postérieur pour traiter les grands volumes jusqu’à 40 Gy environ, avec un complément par des faisceaux latéraux : cet agencement est celui qui protège au mieux les poumons. Néanmoins, au vu des résultats de la plupart des études cliniques et de l’expérience qui ne retrouvent pas d’amélioration pour des irradiations très étendues, une économie du volume traité est souvent possible, permettant de prévoir trois à quatre faisceaux non opposés d’emblée (cf. cas clinique). Pour les cancers touchant la région cervico-thoracique, le complément est souvent réalisé par des faisceaux obliques antérieurs (300°, 60°), les épaules représentant un obstacle relatif.
5.
Toxicité aiguë
La chimioradiothérapie des cancers de l’œsophage est un véritable défi : grand volume d’irradiation, chimiothérapie, patient souvent fragilisé. Le risque de complication grave est important avec la chimioradiothérapie (taux de 20 % dans l’étude d’Herskovic). La prise en charge nutritionnelle précoce est indispensable afin de permettre de mener à bien le traitement sans interruption. La surveillance attentive tout au long des cinq semaines de traitement et jusqu’à la disparition des effets aigus est fondamentale, afin de réagir le plus rapidement possible. Les patients souffrent souvent d’une mucite œsophagienne, qui débute généralement après 20 Gy et qui accentue la dysphagie déjà présente. Une épithéliite parfois intense peut se développer vers 30-40 Gy et est plus marquée en cas d’irradiation des régions cervico-sus-claviculaires. Les symptômes sont souvent aggravés par une infection mycosique surajoutée. Le risque de toxicité hématologique concerne en premier les plaquettes à cause de la toxicité du cisplatine conjuguée au nombre important de vertèbres incluses dans les faisceaux, et est accentuée par le terrain (hépatopathie, toxicité de l’alcool). La toxicité sur la lignée blanche peut néanmoins être marquée et être compliquée par des épisodes fébriles. Une neutropénie sévère est particulièrement dangereuse sur ce terrain : « comorbidités », risque d’inhalation maximum en cas de sténose haute… S’ajoutent les possibilités d’insuffisance rénale aiguë qui survient typiquement chez des patients isolés, très dysphagiques, mal hydratés, et qui minimisent souvent leurs difficultés pour éviter l’hospitalisation.
6.
Toxicité tardive
La séquelle la plus fréquente est probablement la sténose œsophagienne : elle est liée à la cicatrisation fibreuse de la paroi oesophagienne dont la structure a été détruite par la tumeur. L’estimation de son incidence est difficile à chiffrer mais la persistance d’une certaine dysphagie est assez fréquente pour les tumeurs évoluées : il a été rapporté dans une série
S79
canadienne un taux de 16 % chez des survivants à long terme après chimioradiothérapie exclusive [1]. Elle impose en cas de dysphagie trop importante, des dilatations itératives, voire la mise en place d’une prothèse. La toxicité pulmonaire « tardive » se traduit essentiellement par un risque plus élevé de pneumopathie post-opératoire [Syndrome de détresse respiratoire aiguë (SDRA) ou pneumopathie infectieuse] : une étude a montré une corrélation avec un volume recevant 10 Gy (V10 Gy) > 40 % et un recevant 15 Gy (V15 Gy) > 30 %, avec un risque de complication passant de 10 à 30 % [11]. En ce qui concerne le cœur, toute irradiation thoracique augmente le risque de pathologie péricardique, coronarienne et myocardique et particulièrement ici du fait du tabagisme fréquemment associé. Les études essayant de mesurer spécifiquement cet effet sont rares et les données des essais cliniques assez pauvres : il a été rapporté dans une série un taux de risque de 27 % d’épanchement péricardique [21,22], dans une autre une réduction de 6 % de la fraction d’éjection ventriculaire [20].
7.
Cas clinique
Le patient de 68 ans, marié, était atteint d’un psoriasis, une épilepsie, une artérite des membres inférieurs avec sténose très serrée de l’artère iliaque commune droite et lésion fémorale gauche (indication prochaine de Stent), une coronaropathie. Une dysphagie s’accentuait progressivement depuis quelques mois avec perte de 6 kilos (poids habituel de 72 kg pour 1,61 m). La fibroscopie a révélé une sténose circonférentielle à 30 cm des arcades dentaires, étendue sur 5 cm et correspondant histologiquement à un carcinome épidermoïde peu différencié. La scanographie a montré une lésion tumorale sous-carénaire assez peu importante mais une volumineuse adénopathie para-œsophagienne inférieure droite. La TEP montrait un foyer hypermétabolique œsophagien étendu du tiers moyen de l’œsophage avec une fixation ganglionnaire coeliaque. Il n’y avait pas de signe d’extension à distance. L’état général restait bon, avec un indice de performance selon l’OMS de 1. L’alimentation était essentiellement semi-solide. Le patient ne signalait pas d’autres symptômes. Il n’a pas eu de douleurs thoraciques depuis l’épisode survenu il y a quelques mois. À l’examen clinique il n’y avait pas de signe d’extension de la maladie. En réunion de concertation pluridisciplinaire, il a été proposé une chimioradiothérapie exclusive sous couvert d’une hospitalisation du fait des antécédents cardiovasculaires. Les contours ont été réalisés après fusion avec une TEP (Fig. 2 à 5). Un premier volume comprenant le médiastin moyen et inférieur ainsi que les ganglions coeliaques a été traité par quatre faisceaux de 25 MV jusqu’à 41,4 Gy, puis 9 Gy ont été délivrés par trois faisceaux dans un volume réduit (Fig. 6-11).
Conflits d’intérêts Les auteurs ont déclaré n’avoir aucun conflit d’intérêts pour cet article.
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Fig. 2. Fusion de TEP et de scanographie dans les plans horizontal, sagittal et coronal. Figure 2. PET-CT fusion in horizontal, sagittal, and coronal planes.
Fig. 3 a, b, c. Contours du volume tumoral macroscopique (GTV tumeur) (mauve), du volume tumoral macroscopique ganglionnaire (orange), du volume cible anatomoclinique (CTV) (bleu) et du volume cible prévisionnel (rouge) à différents niveau de coupe horizontale. Gross tumor volume (GTV) delineation, lavender; lymph node GTV, orange; clinical tumor volume (CTV), blue; planning target volume, red at different levels of horizontal view.
Fig. 4. Contours du volume tumoral macroscopique (GTV) (mauve), du volume cible anatomoclinique large (violet) et du volume cible anatomoclinique (CTV) réduit dans les plans coronal (4a) et sagittal (4b) (vert). Gross tumor volume (GTV) delineation (lavender), wide clinical tumor volume (purple), and reduced clinical tumor volume (CTV), (green) in the coronal (4a) and sagittal (4b) planes.
Fig. 5. Contours du volume tumoral macroscopique (GTV) (mauve), du volume cible prévisionnel large (PTV) (en rouge) et du volume cible prévisionnel réduit (en jaune) dans les plans coronal (5a) et sagittal (5b). Gross tumor volume (GTV) delineation (lavender), wide planning target volume (PTV) (red), and reduced planning target volume (yellow) in coronal (5a) and sagittal (5b) planes.
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Fig. 6 a, b, c, d. Vue des faisceaux (Digitally Reconstructed Radiographs, DRR) et du volume cible prévisionnel (PTV) large. View of digitally reconstructed radiographs (DRR) and wide planning target volume (PTV).
Fig. 7 a, b, c. Vue des faisceaux (Digitally Reconstructed Radiographs, DRR) et du volume cible prévisionnel (PTV) réduit. View of DRR and reduced planning target volume (PTV).
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Fig. 8. Orientation des quatre premiers faisceaux : 110 °, 180 °, 270 ° et 330 °. Orientation of first four beams: 110°, 180°, 270°, and 330°.
Fig. 9. Orientation des faisceaux réduits : 70 °, 180 ° et 290 °. Orientation of reduced beams: 70°, 180°, and 290°.
Fig. 10. Histogramme dose-volume : poumons (brun), coeur (rose), moelle (kaki), CTV 1&2 (vert), PTV1 & 2 (bleu). Dose-volume histogram: lungs (brown), heart (pink), spinal cord (olive green), CTV 1 & 2 (green), PTV1 & 2 (blue).
Fig. 11a, b, c. Isodoses de traitement (Gy). Treatment isodoses (Gy).
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C ancer/ R adiot hérapie 14 Suppl . 1 (2010) S84– S93
Cancer de l’estomac Gastric cancer L. Mineura,*, E. Jaeglea, Y. Pointreaub, F. Denisc a Unité
de cancérologie digestive, Institut Sainte Catherine, Chemin du Lavarin, 84000 Avignon cedex, France d’oncologie radiothérapie, Centre Henry-S.-Kaplan, CHU Bretonneau, 2, boulevard Tonnellé, 37044, Tours, France c Centre Jean-Bernard, Clinique Victor-Hugo, 9, rue Beauverger, 72000 Le Mans, France b Clinique
RÉSUMÉ Mots clés : Cancer de l’estomac Radiothérapie conformationnelle Volumes cibles Atlas
La chimioradiothérapie a été évaluée dans un large essai contrôlé et a apporté une amélioration significative des probabilités de survie et de contrôle local dans une population de patients opérés d’un cancer gastrique. Elle n’est cependant plus largement appliquée et ce pour plusieurs raisons : manque d’expérience des oncologues radiothérapeutes dans la définition des volumes cibles, crainte de la toxicité et surtout la chimiothérapie néoadjuvante à base de 5-fluoro-uracile de cisplatine avec ou sans épirubicine est un nouveau standard pour les cancers gastriques résécables sur la base de l’imagerie. Cela justifie que la stratégie thérapeutique soit discutée en réunion de concertation pluridisciplinaire avant et aussi après la chirurgie. Cette mise au point a pour objectif de définir les conditions de la mise en œuvre de la radiothérapie gastrique et d’aborder ses aspects techniques dans le cadre des indications retenues lors des réunions de concertation multidisciplinaire et du respect des recommandations nationales. © 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. © 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
ABSTRACT Keywords: Gastric cancer Conformal radiotherapy Target volumes Atlas
Radiochemotherapy Gatrointestinal intergroup study have demonstrated a convincing local control and overall survival benefit. Oncologists and GI workshops have in the present not had a major interest in the radiotherapy treatment of gastric cancer due to a number of factors. Primary because toxicities may be severe, second physicians may have low experience in definition of clinical target volume and in third perioperative chemotherapy is widely used in this indication. In Summary this issue should be used as guides for defining appropriate radiation planning treatment for the adjuvant postoperative therapy of gastric cancer. © 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Published by Elsevier Masson SAS. All rights reserved.
1.
Épidémiologie
On estime à 7 300 le nombre de nouveaux cas de cancers gastriques chaque année en France. Le nombre diminue depuis 25 ans. Le cancer gastrique représente 3 % des nouveaux cas de cancers chaque année. L’incidence, estimée à 15,6/100 000 atteint 142/100 000 vers l’âge de 85 ans. Les chances de survie
à 5 ans des patients atteints d’un adénocarcinome gastrique opéré restent médiocres mais semblent s’améliorer depuis 20 ans pour atteindre un taux de 45 % après une exérèse à visée curative [3,7,14,23,27]. Les cancers de l’estomac sont dans 31 % des cas dans le tiers supérieur, dans 14 % le tiers moyen et dans 26 % le tiers inférieur. Dans 10 %, des cas la tumeur est pangastrique.
* Correspondance. Adresse e-mail : Laurent [email protected] (L. Mineur) © 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
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2.
Radio-anatomie et modes d’extension
2.1. Définition des régions anatomiques L’estomac est un réservoir mobile divisé en une partie verticale et une horizontale limitée en haut en avant par le cardia et en bas par le pylore, faisant la jonction avec le duodénum. La partie verticale comprend la grosse tubérosité (fundus) et le corps gastrique, la portion horizontale représente l’antre. L’estomac se prolonge au-delà du pylore par le duodénum. Le duodénum comporte deux portions, dont la première n’est pas accolée au pancréas et est séparée du pancréas par le prolongement de l’arrière-cavité des épiploons, qui s’étend jusqu’à l’artère gastroduodénale. Cette partie du duodénum est intéressée dans la plupart des gastrectomies. Le petit épiploon est un feuillet péritonéal tendu en pont du pédicule hépatique à la petite courbure gastrique. Le petit épiploon comporte trois parties : la pars vasculosa, qui correspond au pédicule hépatique et à l’arc artériovasculaire de la petite courbure gastrique ; la pars flacida qui correspond à une zone avasculaire ; et enfin la pars condensa correspondant à la partie supérieure du petit épiploon, allant du lobe gauche du foie à la portion verticale de la petite courbure. Le petit épiploon forme la limite supérieure droite de l’arrière cavité des épiploons. Le chirurgien accède par son ouverture au tronc cœliaque, qui donne naissance à l’artère gastrique gauche, formant une crosse allant le long de la petite courbure, l’artère hépatique commune et l’artère splénique. L’artère hépatique commune donne naissance à l’artère hépatique propre et gastroduodénale se terminant en artère gastro-épiploique droite.
2.2. Définition des territoires ganglionnaires. La classification japonaise est retenue [19]. Les ganglions sont définis par des numéros 1 à 16 (Fig. 1).
2.3. Classification des cancers de l’estomac. Le stade selon la classification TNM des cancers gastriques est évalué à partir de l’imagerie disponible, soit la scanographie thoraco-abdomino-pelvienne et l’écho-endoscopie, qui reste un
examen dont la sensibilité et la spécificité sont mauvaises, et la classification pTNM à partir des données histopathologiques. Des groupes pronostiques ont été définis dans la classification de l’American Joint Committee on Cancer (AJCC) (Tableau 3).
2.3.1. Classification de l’AJCC de 2009 [9] T - Tumeur primitive — T0 = pas de tumeur primitive — Tis = carcinome in situ, — T1 = tumeur envahissant la lamina propria, la muscularis mucosae ou la sous-muqueuse — T1a = tumeur envahissant la lamina propria ou la muscularis mucosae • T1b = tumeur envahissant la sous-muqueuse — T2 = tumeur envahissant la musculeuse propre ou la sous séreuse, le ligament gastro colique, gastro hépatique, le petit ou grand épiploon si absence de perforation du péritoine viscéral. — T3 = tumeur envahissant le péritoine viscéral (séreuse) sans envahissement d’organes adjacents — T4 = tumeur envahissant les structures adjacentes • T4a = tumeur envahissant toute la séreuse • T4b = tumeur envahissant les structures adjacentes
2.3.2. Ganglions N Les ganglions régionaux sont les ganglions périgastriques le long de la petite courbure ou grande courbure gastrique et le long de l’artère gastrique gauche, l’artère hépatique commune, splénique et du tronc cœliaque. Le curage doit contenir au moins 15 ganglions lymphatiques. L’envahissement des autres ganglions les fait considérer comme des sites métastatiques (ganglions retropancréatiques, mésentériques, para-aortiques…) — Nx = ganglions non évaluables — N0 = pas d’envahissement des ganglions régionaux — N1 = 1 à 2 ganglions envahis — N2 = 3 à 6 ganglions envahis — N3a = 7 à15 ganglions envahis — N3b = 16 ganglions et plus envahis — M - Métastase — M0 = pas de métastase à distance — M1 = présence de métastase à distance
3.
Fig. 1. Représentation des sites de drainage ganglionnaire de l’estomac. Classification japonaise des groupes ganglionnaires. Lymph node drainage sites of the stomach. Japanese classification of lymph node groups.
S85
Indications de la radiothérapie
La chimioradiothérapie postopératoire améliore la probabilité de survie. Le Southwest Oncology Group (SWOG), sur un total de 556 malades ayant eu une résection d’un cancer gastrique ou du cardia, a conduit un essai randomisé comparant la chimioradiothérapie adjuvante concomitante et la chirurgie seule. Le traitement adjuvant comprenait 425 mg/m²/j de 5-fluoro-uracile et 20 mg/m²/j d’acide folinique, pendant cinq jours, puis une radiothérapie de 45 Gy 28 jours après. Deux cycles de chimiothérapie étaient administrés pendant la radiothérapie. Un cycle était administré la première semaine de la radiothérapie avec 400 mg/m²/j de 5-fluoro-uracile et 20 mg/m² d’acide folinique pendant cinq jours et la dernière semaine pendant trois jours. Un mois après la fin de
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la radiothérapie, deux cycles de 5-fluoro-uracile de 425 mg/m²/j pendant cinq jours et 20 mg/m²/j d’acide folinique étaient administrés à 28 jours d’intervalle. La durée médiane de survie était dans le groupe chirurgie seule de 27 mois et dans le groupe chimioradiothérapie de 36 mois [24]. Trois patients (1 %) sont décédés de la toxicité de la chimiothérapie. Une toxicité hématologique ou gastro-intestinale de grade 3 ou 4 est survenue respectivement chez 54 % et 33 % des malades dans le groupe chimioradiothérapie. Les autres effets secondaires étaient rares. La probabilité de survie globale à 3 ans était de 50 % pour le bras chimioradiothérapie postopératoire contre 41 % dans le bras chirurgie seule (p = 0,005). Les auteurs ont conclu qu’une chimioradiothérapie postopératoire devait être envisagée chez tous les malades atteints d’un cancer de l’estomac ou du cardia à haut risque de récidive, après résection à visée curative. Cette étude a été critiquée du fait d’un curage à minima dit D0 ne comprenant pas tous les ganglions de la lymphadénectomie D1 [4]. Cependant, la probabilité de survie à 5 ans du groupe chimioradiothérapie était de près de 45 % malgré un curage D0 réalisé dans 54 % des cas et une atteinte ganglionnaire dans 84 %. La survie de ce groupe de patients avec curage limité, atteinte ganglionnaire fréquente, est proche de celle des patients chez qui le curage était plus étendu et l’atteinte ganglionnaire moins fréquente [6]. De plus, le curage D0 ne permet d’analyser qu’un nombre moindre de ganglions. Une sous-évaluation du stade est donc probable. Le taux de complications imputables au traitement a également été critiqué [1]. Trente pour cent des patients n’ont pas terminé le traitement en raison d’une toxicité hématologique, digestive ou autre. L’utilisation de faisceaux multiples et l’amélioration du protocole de chimiothérapie devraient permettre de diminuer significativement ce taux de complications [11,16,18,30,33]. La chimioradiothérapie adjuvante semble donc améliorer la probabilité de survie des patients en cas d’atteinte ganglionnaire, que le curage soit étendu ou pas. C’est un traitement standard aux États-Unis. La chimiothérapie péri-opératoire a montré dans deux essais un bénéfice de survie globale [8]. La place de la chimioradiothérapie postopératoire chez les patients en situation de non-réponse à une chimiothérapie préopératoire reste à définir, de même des stratégies de chimiothérapies préopératoires associées à une chimioradiothérapie préopératoire. Le thésaurus de la société nationale française de gastroentérologie (SNFGE) [34] recommande : — une discussion du dossier du patient en réunion de concertation avant chirurgie ; — une proposition d’une chimiothérapie péri-opératoire à tous les malades atteints de cancer de stade supérieur à I. (niveau de la recommandation : grade A) de type ECF (épirubicine – cisplatine -5-fluoro-uracile) (grade B) ou 5-fluoro-uracile - cisplatine (grade B). La résection chirurgicale (niveau de la recommandation : grade A) et le curage ganglionnaire (niveau de la recommandation : grade B) doivent être proposée selon les modalités décrites dans les recommandations. Une chimioradiothérapie postopératoire doit être proposée (niveau de la recommandation : grade B) aux malades n’ayant pas eu, quelle qu’en soit la raison, de chimiothérapie péri-opératoire ou dont le dossier n’a pas été discuté avant la chirurgie : • s’il s’avère que le curage est D0 et que la tumeur est de stade supérieur à I ;
• si l’envahissement ganglionnaire est N2 ou N3 quel que soit le type de curage réalisé. Pour les formes superficielles T1, la mucosectomie peut être discutée (accord d’experts). Le schéma de chimiothérapie préopératoire retenu peut être un schéma ECC (épirubicine, cisplatine, capécibatine) ou LV5FU2 (leucovorine – 5-fluoro-uracile) -cisplatine (accord professionnel). La chimiothérapie du protocole Mac Donald peut être remplacée par un protocole LV5FU2 (accord professionnel). En cas d’envahissement ganglionnaire N1 et de curage ganglionnaire D1 ou D2, une chimioradiothérapie doit être discutée au cas par cas selon l’état général, nutritionnel du malade et son avis après information claire (accord d’experts).
4.
Modalités de la radiothérapie conformationnelle
4.1. Technique de radiothérapie et ballistique La position en décubitus dorsal est utilisée avec les bras au-dessus de la tête. La radiothérapie asservie à la respiration peut être utilisée afin de diminuer les marges du volume cible prévisionnel (PTV). Le patient peut être traité à jeun tout en tenant compte de l’aspect nutritionnel. Une coque est réalisée dans les meilleures conditions avant la chirurgie et conservée afin d’effectuer un recalage de la scanographie dosimétrique préet postopératoire. Une acquisition scanographique de données anatomiques avec injection d’iode et transit œsogastroduodénal avant et après chirurgie est réalisée avec des coupes de 3 mm. Pour l’opacification du grêle et du jéjunum, 20 ml de sulfate de baryum peuvent être administrés vingt minutes avant l’examen. Une injection de 150 ml d’Omnipaque 300 est ensuite faite avant l’acquisition des coupes scanographiques de D2 à S1. Le volume cible anatomoclinique (CTV) est défini dans les meilleures conditions à partir de la scanographie dosimétrique préopératoire et un recalage d’images effectué avec la scanographie postopératoire peut être fait (Figs. 2 et 3). Une modification du volume cible anatomoclinique sur la scanographie postopératoire est réalisée afin d’inclure les anastomoses dans le volume cible anatomoclinique. La technique a été initialement décrite dès 1983 et les volumes à irradier sur l’analyse des sites de récidives faite par Gunderson et al. [16]. La dose est de 45 Gy avec un fractionnement de 1.8 Gy par jour cinq jours par semaine. Le traitement est délivré sur cinq semaines. La chimiothérapie est concomitante à la radiothérapie et selon le schéma FUFOL (5-fluoro-uracile – acide folinique) semaine 1 et 5 de la radiothérapie ou LV5FU2 j1 j14 j28 avec un profil de tolérance semblant meilleur [12]. Le 5-fluoro-uracile « protracté » semble être mieux toléré dans les irradiations sous diaphragmatiques [28, 29].
4.2. Définition du volume cible anatomoclinique (CTV) Cette définition s’appuie sur les études documentant les sites de récidives et les sites d’atteinte ganglionnaire qui est fonction du siège de la tumeur (Tableaux 1 et 2). La résection chirurgicale considérée comme curative s’accompagne
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Fig. 2. Image de contrôle du recalage de la scanographie de repérage préopératoire et postopératoire. (contour des structures osseuses (bleu). Image of CT adjustment for preoperative and postoperative identification (delineation of bony structures, blue).
Fig. 3. Image de contrôle du recalage de la scanographie de repérage préopératoire et postopératoire avec contrôle de la respiration (contour jaune représentant le contour du foie de la scanographie préopératoire). Image of CT adjustment for preoperative and postoperative identification using breath control (yellow line represents the delineation of the liver on the preoperative CT).
généralement d’un taux d’envahissement ganglionnaire de plus de 50 % [6,31] et un taux de récidive locale et métastatique respectivement de 67 % et 87,8 % [16,17]. Landry et al. ont rapporté une série de 130 patients opérés d’un adénocarcinome gastrique et suivis pendant cinq ans [21]. Le taux de récidive loco-régionale était de 37 % avec 16 % des patients en situation de récidive loco-régionale isolée. Les sites de récidive loco-régionale étaient l’anastomose, le moignon gastrique, et les territoires ganglionnaires 1 à 11 selon la classification japonaise en incluant les ganglions para-aortiques. Les récidives loco-régionales apparaissaient pour plus de la moitié des patients lorsque la séreuse était atteinte. La récidive loco-régionale était plus fréquemment isolée en cas d’envahissement ganglionnaire. La récidive ganglionnaire isolée était rare : 8 % de la totalité des cas, 5 % des tumeurs stade I et II (tumeurs T1T2T3N0 ou N1), 3 % si la séreuse était respectée. Lorsque la séreuse était atteinte, une récidive ganglionnaire survenait dans 7 % des cas et une récidive loco-régionale dans 39 %. Gunderson et al. ont rapporté une série de 107 malades ayant été réopérés. Cinquante pour cent des patients atteints de cancer de stade pT2 pN+ étaient en situation de récidive loco-régionale et 71 % de ceux atteints d’un cancer de stade pT3, pT4 pN+ [17]. En conclusion, ces études montrent que le
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lit opératoire, sur le moignon gastrique ou l’anastomose, reste le site de récidive le plus fréquent (Tableau 2). Le volume cible anatomoclinique doit donc comprendre l’anastomose œso-jéjunale ou gastro-jéjunale, le moignon gastrique, le lit gastrique reconstruit à partir d’une scanographie préopératoire et les aires de drainage ganglionnaire. Une reconstruction du positionnement de l’estomac avant l’intervention est recommandée si une scanographie dosimétrique préopératoire n’est pas disponible. Idéalement, des clips sont mis en place par le chirurgien afin de délimiter le mieux possible le lit opératoire, le siège initial de la tumeur et les sites à risque de rechute (résidu macroscopique, résection avec adhérences suspectes, groupes ganglionnaires fixés). Pour les tumeurs du fundus, la coupole diaphragmatique gauche sera incluse dans le volume cible anatomoclinique. Le moignon gastrique est visualisé par l’ingestion de baryte de même l’anastomose. Si la scanographie est utilisée pour la définition des volumes cibles, elle a l’avantage de rechercher des signes précoces d’une carcinose ou de métastases hépatiques contre-indiquant la chimioradiothérapie [9]. Une atteinte du mésentère est recherchée. En effet, l’extension tumorale précoce peut se faire le long des fascias mésentériques (gastrocoliques ou mésocoliques). Ces fascias réalisent de véritables ponts anatomiques entre l’estomac, le pancréas et le colon transverse. Une fixité anormale des anses grêles, une augmentation de la densité du mésentère ou des parois digestives sont des signes à rechercher. Pour la plupart des cancers gastriques, L3 représentera la limite inférieure du volume cible anatomoclinique. Cette limite inférieure permet d’inclure les ganglions n °5, 6, 7, 8, 9, 12 (Fig. 1). Les ganglions des territoires 10 et 11 seront inclus dans le volume cible anatomoclinique dans les situations suivantes : tumeur du fundus (tiers supérieur de l’estomac), atteinte des ganglions paracardiaux droits (groupe 1), des vaisseaux courts de l’estomac (groupe 7), des vaisseaux gastro-épiploïques gauches (territoires 3, 4). Fréquemment, la proximité du lit opératoire (totalité de l’espace occupé initialement par l’estomac) et du hile splénique assure une couverture de ces aires ganglionnaires. Pour les ganglions aortiques (territoires 16a, 16b, 16c), Kunisaki et al. ont démontré en analyse multifactorielle que l’atteinte des ganglions péri aortiques est corrélée avec l’atteinte des ganglions du hile et de l’artère splénique (territoire 10 et 11). De même, l’atteinte des ganglions des territoires 10 et 11 est corrélée avec l’atteinte des ganglions de la petite courbure et des vaisseaux courts de l’estomac et des ganglions paracardiaux droits (territoires 1,3,7) [20]. La majorité des équipes chirurgicales n’effectue pas de curage péri-aortique et splénique. Il semble donc nécessaire d’inclure dans le volume cible anatomoclinique les ganglions para-aortiques si les ganglions de la petite courbure, des vaisseaux courts et/ou des territoires 10, 11 sont envahis. Pour les tumeurs du fundus ou de la jonction œsogastrique, l’inclusion des ganglions des territoires 5, 6, 13 dans le volume cible anatomoclinique est optionnelle s’il existe une atteinte ganglionnaire limitée. Cette situation permet de limiter la dose délivrée à la région duodéno-jéjunale et donc la toxicité digestive et rénale droite. Pour les tumeurs du tiers moyen de l’estomac tout le corps gastrique est inclus. En résumé, le volume cible anatomoclinique correspond au volume tumoral macroscopique (GTV) et aux volumes suivants.
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Tableau 1 Atteinte ganglionnaire en pourcentage selon Maruyama et al. en fonction du site tumoral (adénocarcinome gastrique classé pT3 de 5 cm de diamètre) [25]. Lymph node involvement in percentage according to Maruyama et al. in relation to tumor site (pT3-stage gastric adenocarcinoma 5 cm in diameter) [25]. Risque d’atteinte ganglionnaire en %
cardia
Petite courbure grande courbure
Sus et sous pylorique
Coronaire stomachique
Artère hépatique commune
Tronc coeliaque
Hile et artère splénique
Artère hépatique propre
Classification Japonaise
1-2
3-4
5-6
7
8
9
10 et 11
12
Fundus
50-25
20-60
0 à 7-0 à 9
27 à 48
10
25
10 à 20
0à6
Corps
30-10
40 à 70-20 à 80
0 à 17-10 à 25
40
10 à 33
20
0 à 17
0
Antre
20-0
50 à 60-30 à 85
7 à 15-60 à 85
30 à 50
20 à 46
0 à 36
0 à 10
0 à 14
Tableau 2 Fréquence des récidives locorégionales et des métastases après chirurgie. Frequency of locoregional recurrence and metastasis after surgery. Effectif
RLR seule %
RLR et Métastases %
RLR Totales %
Métastases Seules %
Gunderson et al. 1982 [17]
107
27
25
52
11
Landry et al. 1990 [21]
130
16
22
38
30
Bonenkamp et al. D1 1999 [6]
380
13
23
36
7
Bonemkamp et al. D2 1999 [6]
331
11
16
27
16
Macdonald et al. chirurgie 2001 [24]
275
29
NP
NP
18
Macdonald et al. RTCT 2001 [24]
281
19
NP
NP
33
Baeza et a.l 2001 [5]*
52
13
9
22
32
RLR : récidive loco-régionale ; *Chimioradiothérapie postopératoire ; NP données non précisées.
Tableau 3 Classification pronostique de l’AJCC des adénocarcinomes gastriques 7e edition [9]. AJCC prognostic staging of gastric adenocarcinomas, 7th edition [9]. STADE
T
N
M
STADE IA
1
0
0
STADE IB
T1
N1
0
2
0
0
STADE IIA
T2
N1
0
STADE IIB
T4a
N0
0
T3
N1
0
3
2
0
T2
N3
0
4a
1
0
STADE IIIA
STADE IIIB
STADE IIIc STADE IV
T3
N3
0
T4b
N0-1
0 0
T4a
N2
T4a
N3
0
T4b
N2-3
0
Tout T
Tout N
1
Quel que soit le siège du cancer gastrique – en dehors des tumeurs du cardia - tout l’estomac est inclus dans le volume cible anatomoclinique avec les anastomoses. — Pour les adénocarcinomes du cardia sans extension au fundus ou à l’œsophage : cardia, petit épiploon, médiastin inférieur (limite supérieure 2 cm sous la carène). Grosse tubérosité gastrique en totalité, piliers du diaphragme, ganglions 1, 2, 3, 7, 8 et 9. En dehors de la grosse tubérosité, l’estomac n’est pas inclus en totalité.
— Pour les adénocarcinomes du fundus et sous cardiaux : estomac et une marge de 3 mm autour, petit épiploon. La moitié de la coupole diaphragmatique gauche est incluse dans le volume cible anatomoclinique. Les ganglions péri-œsophagiens dans le médiastin inférieur sont inclus dans le volume cible anatomoclinique jusqu’à 4 cm sous la carène. Les groupes ganglionnaires 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11 sont inclus dans le volume cible anatomoclinique (classification Japonaise). Les autres groupes ganglionnaires sont inclus s’ils sont suspects en écho-endoscopie ou au scanner. — Adénocarcinomes de la petite courbure ou de la grande courbure : estomac et marge de 3 mm, petit épiploon. Groupes ganglionnaires 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11. — Adénocarcinomes de l’antre : estomac et marge de 3 mm, petit épiploon. Les groupes ganglionnaires 1 à 16. — Situations particulières : Les ganglions des territoires 10 et 11 sont inclus dans le volume cible anatomoclinique pour les situations suivantes : tumeur du fundus (tiers supérieur de l’estomac envahissement des ganglions 10,11 dans 10 à 20 % des cas pour les tumeurs de stade T3), atteinte des ganglions paracardiaux droits (groupe 1) des vaisseaux courts de l’estomac (groupe 7), des vaisseaux gastro-épiploïques gauches (territoires 3, 4). Il semble nécessaire d’inclure dans le volume cible anatomoclinique les ganglions para-aortiques si les ganglions coronaires stomachiques sont suspects et si la tumeur est dans le tiers inférieur de l’estomac ou intéresse tout l’estomac, de même pour les tumeurs gastriques supérieures ou égales à 90 mm de grand axe. Pour les tumeurs du tiers supérieur de l’estomac, les ganglions para-aortiques sont inclus s’il existe un doute sur l’atteinte des
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ganglions de la petite courbure ou des ganglions spléniques. Dans toutes ces situations il existe une corrélation étroite entre ces variables, ce qui implique d’inclure dans le volume cible anatomoclinique les ganglions para-aortiques [20]. Les aires ganglionnaires para-aortiques situées en dessous de l’artère mésentérique inférieure ne sont pas incluses dans le volume à irradier, sauf si doute en imagerie puisqu’ils n’appartiennent pas au curage chirurgical para-aortique (Figs. 4 à 8).
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La marge définissant le volume cible prévisionnel (planning target volume) est de 2 cm [26]. Cette marge correspond aux erreurs de positionnement, aux mouvements des organes les uns par rapport aux autres. Les déplacements médians des organes critiques sont de 6 mm dans un axe crânio-caudal et 2 mm dans les autres directions. Wysocka et al. ont recommandé une marge crânio-caudale de 1 cm et une marge de 5 mm dans les autres axes avec une approche individuelle pour les patients avec une grande amplitude respiratoire [36]. Caudry et al. ont proposé de réduire également cette marge à 10 mm sous condition d’un contrôle rigoureux de la mise en place des patients (contention, laser, décubitus dorsal, imagerie portale) [10]. La radiothérapie asservie à la respiration doit également limiter les marges du volume cible prévisionnel à 10 mm dans l’axe crânio-caudal et 5 mm dans les autres.
Le rein gauche est rarement épargné notamment si la tumeur siège sur la grande courbure. Il faut s’assurer de la fonctionnalité relative des deux reins au mieux avec une scintigraphie rénale au 99mTc-dimercapto-succinyl acid (DMSA). La fonction de chaque rein est alors mieux appréciée et permet d’objectiver une hypertrophie rénale compensatrice, de mesurer la clairance séparée de la créatinine pour chaque rein. La fonction rénale doit donc être connue avec précision surtout chez les patients à risque (diabète, hypertension artérielle, terrain vasculaire…). La toxicité aiguë ou tardive potentielle de la radiothérapie est ainsi mieux appréhendée chez les patients à risque (hypertension artérielle, diabète, population âgée en rappelant que 50 % des patients opérés ont plus de 70 ans). Dewitt et al. ont montré que l’irradiation de la totalité d’un rein diminuait la fonction glomérulaire et tubulaire de 60 % mais la clairance de la créatinine ne diminuait que de 20 % [13]. Pour Smalley et al., la toxicité rénale est rare quand les trois quarts d’un rein sont conservés ou quand en termes de volume l’équivalent d’un rein est exclu du volume de radiothérapie [33]. De même, l’irradiation de la moitié d’un rein semble préserver la fonction rénale. La clairance de la créatinine semble diminuée de moitié quand plus de la moitié d’un rein est irradiée, quelle que soit la dose [35]. Pour un rein, 70 % de ce rein reçoit moins de 20 Gy (V20 < 70 %). Trente pour cent du rein controlatéral reçoivent moins de 20 Gy (V20 < 30 %). Moins de 30 % du cœur recevront 40 Gy [24]. Pour l’intestin grêle, pour Caudry et al., la limite est fixée à 45 Gy dans 25 % du volume total [10].
4.4. Dosimètrie
4.6. Balistique. Place de la radiothérapie de conformation
Un plan de traitement en trois dimensions est réalisé avec correction des inhomogénéités. Le plan de traitement doit être conforme aux recommandations des rapports 50 et 62 de l’international commission on radiation units and measurements (ICRU). Les histogrammes dose-volume de chaque volume sont réalisés. Quatre vingt quinze pour cent du volume cible prévisionnel reçoit plus de 95 % de la dose prescrite. Les inhomogénéités de dose seront acceptées avec un intervalle compris entre pour les points chauds +7 % de la dose prescrite et les points froids -5 % (volume de calcul inférieur à 1.8 cm3).
Elle apporte probablement un bénéfice non négligeable dans la diminution des effets secondaires digestifs et une meilleure protection des organes critiques (reins, foie, intestin). L’utilisation de techniques multifaisceaux permet de diminuer significativement la toxicité. Vingt-deux pour cent des patients souffraient d’une toxicité grade 4 si une technique à deux faisceaux était utilisée contre 4 % pour une technique à au moins quatre faisceaux (p = 0,045) [26]. L’optimisation des plans de traitement apportée par la radiothérapie conformationnelle doit permettre également d’améliorer la couverture du volume cible, la distribution de dose par rapport aux organes critiques définis (foie, reins, intestin, duodénum). Une technique à quatre ou cinq faisceaux semble améliorer la balistique en diminuant la toxicité en améliorant le facteur de conformation (pourcentage du volume cible prévisionnel recevant une dose ≥ 45 Gy), la protection des tissus sains (rapport du volume de tissu sain recevant une dose ≥ 45 Gy sur le volume de l’isodose 45 Gy). Une standardisation de la balistique à quatre ou cinq faisceaux a été proposée. Une technique à quatre faisceaux orthogonaux peut être utilisée ou mieux une technique à cinq faisceaux avec certaines variabilités incitant à proposer deux types de balistique standardisés [30] (Tableau 4).
4.3. Définition du volume cible prévisionnel (PTV, planning target volume)
4.5. Organes à risque et contraintes de dose Les poumons, les reins, le foie, le cœur et la moelle épinière sont délinéés et définis comme organe à risque. Des recommandations ont été faites dont celles issues du groupe de l’European Organization on Research and Treatment of Cancer (EORTC) en situation préopératoire [26]. La dose maximale à la moelle ne doit pas dépasser 45 Gy. Le pourcentage de volume pulmonaire total recevant 20 Gy ou plus (V20) est idéalement inférieur ou égal à 30 %. Le foie représente également un organe critique. Le volume hépatique recevant 30 Gy ou plus (V30) est inférieur à 30 % ; la dose moyenne au foie inférieur à 21 Gy. Si des faisceaux latéraux sont utilisés, ils apportent une dose limitée ≤ 20 Gy. L’analyse de l’essai de Macdonald suggérait que 60 % du foie ne devaient pas recevoir plus de 30 Gy [24].
5.
Toxicité aiguë
Le statut nutritionnel des patients opérés d’un cancer gastrique reste un problème majeur [2]. Quatre-vingts pour cent des
S90
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Fig. 4. Délimitation tomodensitométrique des territoires ganglionnaires sous-diaphragmatiques concernés par les cancers de l’estomac sur l’imagerie préopératoire et postopératoire. 7 Coronaire stomachique (Cs), 8 artère hépatique commune (Hc), 9 tronc coeliaque, 11 ganglions artère splénique, 12 artère hépatique propre (Hp), Ao Aorte descendante, Rd Rein droit, Rg Rein gauche, F foie, E estomac. CT delimitation of the subdiaphragmatic lymph node territories involved in stomach cancers on preoperative and postoperative CT. 7, left gastric artery (Cs) ; 8, common hepatic artery (Hc) ; 9, celiac trunk ; 11, splenic artery lymph nodes ; 12, hepatic artery (Hp). Ao, descending aorta ; Rd right kidney ; Rg, left kidney ; F liver.
Fig. 5 à 8. Repositionnement de l’estomac sur la scanographie postopératoire après recalage (pointillé marron) et repérage des territoires ganglionnaires. Coupes avec représentation des territoires 3,4 (petite et grande courbures 7 (coronaire stomachique), 10,11 (artère et hile splénique). Repositioning of the stomach on the postoperative CT after adjustment (brown dotted line) and identification of lymph node territories, views with representation of areas 3, 4 (small and large curvature, 7 (left gastric artery) 10,11 (splenic artery and hilum)).
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patients atteints d’un cancer du tractus digestif supérieur ont perdu du poids et cette perte sera aggravée par les traitements mis en route (chimiothérapie, radiothérapie…) [22]. La perte de poids a lieu souvent avant la chirurgie et est révélatrice de la maladie dans 62 % des cas. Cette perte de poids s’aggrave fréquemment après la chirurgie. Trente pour cent des patients recevant une chimioradiothérapie adjuvante après gastrectomie souffriront d’une toxicité digestive de grade 3 ou 4. La stomatite, les nausées (majorées par la chimiothérapie et les opiacées), la diarrhée contribuent à l’aggravation de la perte de poids déjà présente. Un suivi nutritionnel régulier est indispensable et comporte au minimum un calcul de l’indice de masse corporel, du Nutritionnal risk index à partir de l’albumine et une consultation de diététique afin de calculer et adapter la ration calorique prise par le patient.
6.
Cas clinique
Il a été découvert chez un homme souffrant d’une perte de poids de 3 kg, d’une anorexie grade 1 et de douleurs ulcéreuses à l’endoscopie œsogastrique une lésion indurée infiltrante et micro-érosive en selle de cheval entre la face antérieure et la face postérieure étagée sur environ 7 cm, laissant cependant l’antre libre ainsi que la partie haute de l’estomac. L’écho-endoscopie montrait une tumeur du corps gastrique de 70 mm de diamètre, sans contact avec le pancréas, deux ganglions de la petite courbure de 5 mm et un de 5 mm du tronc cœliaque. Il n’y avait pas d’autres images suspectes. La tumeur a été classée T3us. Il n’y avait pas de contact étroit
S91
avec le pancréas. La scanographie thoracique était normale, la scanographie abdomino-pelvienne montrait un épaississement du corps gastrique de 20 mm sans adénopathie, ni métastases hépatiques ou péritonéales. L’ACE était de 7 et le CA199 de 70 U/ml. La tumeur a été classée T3N+ M0. Il a été décidé d’une chimiothérapie néoadjuvante par trois cures d’ECC (épirubicine, cisplatine, capécitabine) et une scanographie avec contention (coque de repérage et tatouage avant chirurgie). La chirurgie a consisté en une gastrectomie des trois quarts pour un cancer médio-gastrique et une cholécystectomie. La pièce opératoire a permis de retrouver une tumeur de 65 mm de hauteur, hémicirconférentielle, la marge latérale était de 8 mm, il y avait des emboles lymphatiques et vasculaires, un ganglion de la faux de l’artère hépatique était sain, dix des 16 ganglions de la faux de la coronaire stomachique et du tronc cœliaque étaient atteints, les six ganglions paracardiaux étaient sains, les trois ganglions de la petite courbure haute étaient atteints, de même que quatre des 16 ganglions de la grande courbure et six des 16 de la région sous -pylorique. La pièce de cholécystectomie était normale. Le patient est sorti à j18. L’état nutritionnel était satisfaisant avec une ration calorique de 1 700 kcal, un indice de masse corporel de 21 et un nutritional risk index de 101. Il a été décidé en réunion de concertation multidisciplinaire une chimioradiothérapie postopératoire. (Figs. 8 à 11).
Conflit d’intérêt Les auteurs n’ont déclaré aucun conflit d’intérêts pour cet article.
Tableau 4 Balistiques à 4 ou 5 faisceaux après optimisation dans le traitement des cancers gastriques en situation postopératoire. Deux groupes de patients possibles. Le groupe 2 représente 75 % des situations et le groupe 1 25 % [30]. Balistics with 4 or 5 beams after optimization in gastric cancer treatments in the postoperative situation. Two groups of patients possible. Group 2 accounts for 75 % of the situations and group 1 25 % [30]. Obliquité des faisceaux
Faisceau 1
Faisceau 2
Faisceau 3
Faisceau 4
Faisceau 5
Groupe 1
180°
135°
93°
42°
338°
Groupe 2
180°
90°
45°
349°
329°
Groupe1
180°
90°
44°
0°
325°
Groupe 2
181°+-5
135°+-2
93°+-4
43°+-12
333°+-7
Groupe 1
181°+-5
134°+-1.6
93°+-4.8
43°+-12
335°+-4
Groupe 2
180°
94°+-9
47°+-8
353°+-11
307°+-26
cardia
Corps gastrique
antre
S92
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Fig. 8 à 11. Dosimétrie avec cinq faisceaux après avoir inclus l’ensemble des ganglions des territoires 1 à 11. Les critères dosimétriques sont respectés malgré une courbe dose-volume histogramme défavorable sur le rein gauche. Dosimetry, 5 beams after including all lymph nodes in territories 1–11. Dosimetric criteria are respected despite unfavorable DVH on the left kidney.
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C ancer/ R adiot hérapie 14 Suppl . 1 (2010) S94– S102
Cancer du pancréas Pancreatic cancer F. Hugueta, *, A. Orthuona, E. Touboula, R. Marseguerraa, F. Mornexb a Service b Service
d’oncologie radiothérapie, hôpital Tenon, Assistance-Publique-Hôpitaux de Paris, Université Paris VI, 4, rue de la Chine, 75020 Paris, France de radiothérapie, Centre hospitalier Lyon-Sud, Hospices Civils, 165, chemin du Grand-Revoyet, 69495 Pierre-Bénite, France
RÉSUMÉ Mots clés : Cancer du pancréas Radiothérapie conformationnelle Volumes cibles Atlas
On estime qu’environ 7 200 nouveaux cancers du pancréas exocrine ont été diagnostiqués en France en 2005. Au moment du diagnostic, 20 % des patients sont atteints d’une tumeur jugée opérable, 30 % d’une tumeur localement évoluée inopérable, et 50 % d’une maladie métastatique. Après exérèse chirurgicale, la durée médiane de survie des patients opérés n’est que de 12 à 20 mois en raison de la fréquence des récidives. La place de la radiothérapie chez les patients atteints de cancer du pancréas opérable ou localement évolué est actuellement controversée. En situation adjuvante, le traitement standard est une chimiothérapie par acide folinique et 5-fluoro-uracile ou gemcitabine pendant six mois. En association avec une chimiothérapie concomitante, la radiothérapie postopératoire permettrait d’améliorer la probabilité de survie des patients en situation de résection tumorale incomplète. Ceci reste à démontrer dans un essai prospectif. La chimioradiothérapie néo-adjuvante est une approche prometteuse mais non validée à ce jour. Pour les tumeurs localement évoluées, il n’existe pas de standard thérapeutique. Une chimiothérapie première par gemcitabine suivie chez les patients en situation de non-progression d’une chimioradiothérapie représente une stratégie thérapeutique séduisante qui est en cours de validation. Alors que dans les premiers essais de radiothérapie pancréatique étaient utilisés de grands faisceaux d’irradiation, la tendance actuelle est à la réduction des volumes traités afin d’améliorer la tolérance. La définition des volumes cibles a été améliorée par l’utilisation de la scanographie de simulation. L’objectif de ce travail était de préciser les particularités radio-anatomiques, les modes d’extension des cancers du pancréas et les principes de l’irradiation conformationnelle tridimensionnelle illustrés par un cas clinique. © 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
ABSTRACT Keywords: Pancreatic cancer Conformal radiotherapy Target volumes Atlas
About 7200 new cases of pancreatic adenocarcinomas are diagnosed each year in France. At the time of diagnosis, an efficient carcinologic surgery will not be possible for nearly 80 % of patients, in relation to loco-regional extension or metastatic dissemination. After surgical resection, the median survival of resected patients ranges from 12 to 20 months, with a high rate of relapses. Currently, the use of radiotherapy for patients with pancreatic cancer is controversial. In adjuvant setting, the standard treatment is six months of chemotherapy with FUFOL or gemcitabine. Chemoradiation (CRT) may improve the survival of patients with incompletely resected tumors (R1). This must be validated in a prospective trial. Neoadjuvant CRT is a promising treatment but always under evaluation. For the treatment of patients with locally advanced tumors, there is not a standart treatment. A strategy of initial chemotherapy followed by CRT for non progressive patients is under evaluation. Whereas in the first trials of CRT large fields were used, the current trend is to reduce the treated volumes to improve tolerance. The delineation of target volumes has been improved by the use of simulation CT. The aims of this work are to precise the radio-anatomical particularities, the pattern of spread of pancreatic cancer and the principles of 3D conformal radiotherapy illustrated with a clinical case. © 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Published by Elsevier Masson SAS. All rights reserved.
* Auteur correspondant. Adresse e-mail : fl[email protected] (F. Huguet) © 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
F. Huguet et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S94–S102
1.
Préambule
S95
Les données présentées dans ce chapitre doivent être interprétées avec nuances et adaptées à chaque patient en fonction de son état spécifique.
gène BRCA2 est de l’ordre de 15 %. En pratique, on considère que la survenue d’un cancer chez au moins deux apparentés au premier degré doit faire évoquer une susceptibilité familiale. La majorité des cancers du pancréas sont des adénocarcinomes canalaires.
2.
3.
Épidémiologie
On estime qu’environ 7700 nouveaux cancers du pancréas exocrine ont été diagnostiqués en France en 2009 [11]. Ce cancer est plus fréquent chez l’homme avec un sex ratio de 1,6. Les taux d’incidence en 2005 étaient de 7,7 pour 100 000 habitants chez l’homme et 4,7 pour 100 000 chez la femme [2]. Ils sont en augmentation depuis deux décennies, plus nettement chez la femme (3,8 % par an) que chez l’homme (2 % par an). Le risque de voir se développer un cancer du pancréas est faible jusqu’à 50 ans (moins de 5 % des cas) puis augmente avec un pic de fréquence entre 65 et 75 ans. C’est la cinquième cause de décès par cancer avec 8 623 décès observés en 2007 en France (5,3 % des décès par cancer). Le taux de mortalité est stable chez l’homme et en légère augmentation chez la femme. Les facteurs de risque du cancer du pancréas sont assez mal connus. L’exposition aux amines aromatiques est associée à une augmentation du risque de cancer du pancréas. Le facteur de risque le mieux connu est le tabagisme par le biais des amines aromatiques contenues dans la fumée de cigarette. De nombreuses études prospectives ont montré une association entre le tabagisme et le cancer du pancréas, confirmant ce qui avait été mis en évidence dans des études animales et sur des séries autopsiques. Des études castémoins ont observé un risque relatif de cancer du pancréas de 1,3 à 5,5 chez les fumeurs [9]. Il existe aussi probablement une augmentation du risque de cancer du pancréas dans certaines catégories de travailleurs exposés aux amines aromatiques, dans l’industrie chimique et pétrochimique. L’association entre alimentation riche en viandes et poissons cuits et cancer du pancréas peut être expliquée par les propriétés mutagènes et carcinogènes des amines aromatiques hétérocycliques formées lors de la cuisson par pyrolyse. En revanche, la consommation de fruits et de légumes a un effet protecteur vis-à-vis du cancer du pancréas probablement grâce aux effets anti-oxydants de la vitamine C qu’ils contiennent. Les rôles du café et de l’alcool ont été longtemps controversés mais semblent aujourd’hui écartés. Dans 5 à 10 % des cas, on retrouve chez les patients une histoire familiale de cancer pancréatique [13]. Schématiquement, on distingue les cancers s’intégrant dans un syndrome génétique déterminé et ceux, plus fréquents, survenant dans un contexte d’agrégation familiale non syndromique. Dans le premier groupe, on trouve des affections à expression phénotypique variée : syndromes des cancers du sein et de l’ovaire familiaux (mutation du gène BRCA2), mélanome familial multiple (CDKN2A/p16), syndrome de Peutz-Jeghers (STK11/lKB1), pancréatite chronique héréditaire (PRSS1), syndrome de Lynch (MLH1, MSH2, MSH3) ou encore syndrome de Li-Fraumeni (TP53). Dans le second groupe, les cancers surviennent par agrégation dans certaines familles. Le taux d’incidence standardisé varie de 5 à 30 selon le nombre d’apparentés atteints. La recherche d’une mutation germinale est actuellement souvent négative, sauf dans les familles comprenant de nombreux cas. Ainsi, lorsqu’il existe trois apparentés atteints ou plus, la probabilité de trouver une mutation germinale du
Radio-anatomie
3.1. Définition des régions anatomiques [27] Le pancréas est à la fois une glande endocrine et exocrine ; il est étroitement lié à la voie biliaire et au duodénum. C’est un organe profond, en avant de la première et de la deuxième vertèbre lombaire. Son grand axe est oblique en haut, à gauche et en arrière. C’est un organe fixe, accolé à la paroi abdominale postérieure par le fascia de Treitz. Il est solidaire du cadre duodénal. Ses dimensions sont de 15 cm de longueur, 6 cm de hauteur et 2 cm d’épaisseur. Il pèse environ 80 g. Il est constitué de quatre structures dénommées de droite à gauche, la tête, l’isthme, le corps et la queue. La face antérieure du pancréas est tapissée par le péritoine pariétal postérieur. Le bord inférieur du corps est longé par la racine du mésocôlon transverse, qui recouvre la partie inférieure de la tête. La presque totalité du pancréas est donc en situation sus-mésocolique et recouverte par le péritoine. Ses canaux excréteurs sont au nombre de deux. Le canal de Wirsung est le canal excréteur principal parcourant toute la glande de gauche à droite, de trois mm de diamètre, recevant une multitude de petits canaux latéraux. Il s’accole au bord inférieur du cholédoque dans la tête du pancréas et il se termine par deux orifices juxtaposés à la partie moyenne du bord interne de D2, dans une cavité (ampoule de Vater) sous un repli muqueux (grande caroncule). Un appareil musculaire complexe entoure leur terminaison : le sphincter d’Oddi. Le deuxième canal est le canal de Santorini. C’est un canal excréteur plus petit, qui parcourt la tête du pancréas et vient rejoindre le duodénum au bord interne de D2, 3 cm au-dessus de la grande caroncule. Son orifice d’entrée dans le deuxième duodénum est recouvert de la petite caroncule. La veine porte est au contact du pancréas : dans les cancers du pancréas, son envahissement est précoce. Au-delà du plan du confluent veineux portal, les rapports se font avec une région très profonde et riche en éléments vasculaires : les pédicules rénaux et la face antérieure de l’aorte. En arrière et à distance, les rapports se font avec la face antérieure de l’aorte, la naissance de l’artère mésentérique supérieure, la veine rénale gauche, qui passe dans la pince aorto-mésentérique, la face antérieure de la veine cave inférieure, qui reçoit les veines rénales droite et gauche et plus en dehors, les bassinets droit et gauche et les hiles rénaux.
3.2. Drainage lymphatique Le réseau ganglionnaire lymphatique régional comprend plusieurs groupes. Il existe des groupes supérieurs et inférieurs, situés au-dessus et en dessous de la tête et du corps du pancréas. En avant, se trouvent les ganglions pancréaticoduodénaux antérieurs et mésentériques supérieurs proximaux. La tête du pancréas est drainée par les ganglions pyloriques ainsi que par le groupe cœliaque. En arrière, il existe les ganglions pancréaticoduodénaux postérieurs, mésentériques proximaux et le long du canal cholédoque. De plus, le drainage lymphatique se fait
S96
F. Huguet et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S94–S102
aussi par le groupe splénique situé au niveau du hile de la rate et de la queue du pancréas. 4.
Classifications des cancers du pancréas
4.1. Classification de l’AJCC (American Joint Committee on Cancer) de 2002 [1] T – Tumeur primitive : – T0 : pas de tumeur primitive ; – Tis : carcinome in situ ; – T1 : tumeur limitée au pancréas inférieure ou égale à 2 cm dans son plus grand diamètre ; – T2 : tumeur limitée au pancréas supérieure à 2 cm dans son plus grand diamètre – T3 : tumeur s’étendant au-delà du pancréas mais sans envahir le tronc cœliaque ni l’artère mésentérique supérieure ; – T4 : tumeur étendue au tronc cœliaque ou à l’artère mésentérique supérieure. N – Adénopathies : – Nx : renseignements insuffisants pour classer les adénopathies régionales ; – N0 : pas de métastase ganglionnaire régionale ; – N1 : envahissement des ganglions lymphatiques régionaux. M – Métastases viscérales : – M0 : pas de métastase à distance – M1 : présence de métastase(s) à distance Stades : – Stade 0 : Tis N0M0 ; – Stade IA : T1, N0, M0 ; – Stade IB : T2, N0, M0 ; – Stade IIA : T3, N0, M0 ; – Stade IIB : T1-3, N1, M0 ; – Stade III : T4, tout N, M0 ; – Stade IV : M1 quel que soit T et N. Cette classification est peu utilisée. En pratique, on distingue trois groupes de prise en charge et pronostic distincts. Premièrement, les tumeurs résécables (stades I et II), pour lesquelles le traitement de référence est l’exérèse chirurgicale. Deuxièmement, les tumeurs localement évoluées (stade III), non métastatiques mais non résécables en raison d’un envahissement vasculaire pour lesquelles il n’existe actuellement pas de standard thérapeutique. Troisièmement, les tumeurs métastatiques (stade IV) pour lesquelles le seul traitement est la chimiothérapie. 5.
Indications de la radiothérapie
Au moment du diagnostic, environ 20 % des patients sont atteints d’une tumeur jugée opérable, 30 % d’une tumeur localement évoluée inopérable, et 50 % d’une maladie métastatique.
5.1. Cancers du pancréas résécables : traitement adjuvant Le seul traitement potentiellement curatif d’un cancer du pancréas est l’exérèse chirurgicale, le plus souvent par duodénopancréatectomie céphalique (DPC) pour les tumeurs de la tête du pancréas ou par splénopancréatectomie gauche, pour les tumeurs de la queue. Celle-ci est réalisable chez 20 % des patients au moment du diagnostic. Parmi les cancers opérés, 80 % vont
rechuter, localement ou à distance, et le taux de survie est de moins de 20 % à cinq ans. Les années 1980 ont vu l’apparition des premières chimioradiothérapies. Le premier essai randomisé mené à la fin des années 1970 aux États-Unis par le Gastrointestinal Tumor Study Group (GITSG) comparait chez 43 patients une exérèse chirurgicale seule ou suivie d’une chimioradiothérapie avec du 5-fluoro-uracile en bolus [16]. Les taux de survie globale et de survie à deux ans étaient significativement supérieurs dans le bras chimioradiothérapie (20 mois contre 11 mois et 43 % contre 18 %, respectivement ; p = 0,005). L’essai de l’European Organization for Research and Treatment of Cancer (EORTC) n’est pas venu confirmer le bénéfice de la chimioradiothérapie adjuvante [17]. Cet essai comparait chez 218 patients ayant eu une duodénopancréatectomie céphalique le même schéma de chimioradiothérapie adjuvante et une surveillance. Les taux de survie globale à deux ans étaient identiques entre les deux bras (51 % dans le bras chimioradiothérapie contre 41 % ; p = 0,2). Alors que les États-Unis ont admis comme traitement standard une chimioradiothérapie postopératoire, les résultats de l’essai de l’EORTC n’ont pas permis de considérer ce traitement adjuvant comme un standard en Europe. L’essai ESPAC-1 (European Study Group for Pancreatic Cancer) comparait chez 289 patients après chirurgie une surveillance et une chimioradiothérapie ou une chimiothérapie [23]. La chimioradiothérapie était une radiothérapie en splitcourse (irradiation par séries de deux semaines espacées de deux semaines) associée à du 5-fluoro-uracile en bolus, identique à celle du bras expérimental de l’essai du GITSG. La chimiothérapie adjuvante était composée de six cycles de 5-fluoro-uracile en bolus et acide folinique (FUFOL selon le schéma de la Mayo Clinic). L’analyse des résultats a conclu à probabilité de survie moins bonne chez les patients ayant reçu une chimioradiothérapie en comparaison avec ceux n’en ayant pas reçu (15,9 mois contre 17,9 mois ; p = 0,05). En revanche, les patients ayant reçu une chimiothérapie avaient une survie significativement plus longue que ceux n’en ayant pas reçu (20,1 mois contre 15,5 mois ; p = 0,009). Il est possible que l’absence de critère de qualité de la radiothérapie dans cet essai ait entraîné des irradiations de grand volume potentiellement toxiques, d’autant plus que la dose initialement prévue de 40 Gy pouvait être augmentée à 60 Gy à la discrétion des investigateurs. Plus récemment, une méta-analyse sur données publiées a montré qu’il existait un bénéfice de la chimioradiothérapie adjuvante pour le sous-groupe des patients en situation de résection incomplète (R1) [28]. Par ailleurs, l’étude allemande de phase III CONKO-1 a montré un allongement de la durée médiane de survie sans récidive (13,4 mois contre 6,9 mois, p < 0,001) chez les malades traités par gemcitabine pendant six mois par rapport à ceux n’ayant pas de traitement adjuvant [25]. Un effet bénéfique était rapporté quel que soit le statut des tranches de résection, R0 ou R1. Un gain significatif en termes de survie globale a été rapporté en 2008 lors de la réactualisation des résultats de cette étude (22,8 mois dans le bras gemcitabine contre 20,2 mois dans le bras contrôle, p = 0,005). L’essai ESPAC-3 a comparé chez 1088 patient une chimiothérapie adjuvante par FUFOL pendant six mois et six cycles de gemcitabine administrée selon le schéma de Burris [24]. La durée médiane de survie globale était identique entre les deux bras (23 mois dans le bras FUFOL contre 23,6 mois dans le bras gemcitabine, p = 0,39). La durée médiane de survie sans progression était aussi identique entre les deux bras. La tolérance était meilleure dans le bras gemcitabine. Très récemment
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ont été communiqués les résultats d’un essai de phase II randomisé mené par l’EORTC, la FFCD (Fondation francophone de cancérologie digestive) et le Gercor ayant comparé après exérèse chirurgicale chez des patients après résection classée R0 une chimiothérapie par quatre cycles de gemcitabine et une chimiothérapie par deux cycles de gemcitabine suivis d’une radiothérapie avec chimiothérapie concomitante par gemcitabine [33]. La survie sans progression et la survie globale étaient identiques dans les deux bras. Un essai de phase III de plus grande envergure serait nécessaire pour conclure sur le rôle de la chimioradiothérapie en situation adjuvante. En l’état actuel des connaissances, en cas d’atteinte de tranche de section (résection R1), peut se discuter après trois à six mois de chimiothérapie, une chimioradiothérapie.
5.2. Cancers du pancréas résécables : traitement néo-adjuvant Plusieurs arguments théoriques viennent plaider en faveur de la réalisation d’un traitement néo-adjuvant : – la possibilité de délivrer la totalité du schéma thérapeutique à une plus grande proportion de patients. En effet, on estime qu’environ 20 % à 30 % des patients opérés ne peuvent pas avoir un traitement adjuvant, en raison de la survenue de complications postopératoires et du délai nécessaire pour retrouver un état général compatible avec ce type de traitement ; – la possibilité d’une réévaluation préopératoire permettant d’épargner une chirurgie lourde aux patients en situation de progression rapide de la maladie ; – la fréquence de l’envahissement des tranches de section, suggérant que la chirurgie seule n’est pas suffisante pour assurer le contrôle local ; – une meilleure radiosensibilité tumorale, l’irradiation survenant sur des tissus non disséqués et donc mieux oxygénés. Ces trois dernières années, les résultats de plusieurs essais de phase II de chimioradiothérapie néo-adjuvante ont été publiés. En France, l’essai 97-04 de la FFCD et de la SFRO (Société française de radiothérapie oncologique) portant sur 41 patients ayant reçu un traitement néo-adjuvant (irradiation de 50 Gy avec 5-fluorouracile et cisplatine en concomitance) a montré la faisabilité de ce protocole : 90 % des patients avaient reçu une dose d’irradiation d’au moins 46 Gy et 73 % des patients avaient reçu au moins 75 % de la dose totale de chimiothérapie [20]. Vingt-six patients (63 %) ont eu une exérèse chirurgicale à visée curative avec un taux de réponse histologique majeure de 50 % et une réponse complète. La gemcitabine ayant d’une part montré sa supériorité par rapport au 5-fluoro-uracile pour les tumeurs évoluées et d’autre part fait la preuve d’un fort pouvoir radiosensibilisant, il était logique de l’associer à la radiothérapie préopératoire. Talamonti et al. ont étudié dans un essai de phase II l’association d’une chimiothérapie par gemcitabine de 1000 mg/m2 et d’une radiothérapie préopératoire de 36 Gy en 15 fractions de 2,4 Gy [31]. Parmi les 20 patients inclus, 95 % ont reçu tout le traitement prévu, 85 % ont eu une résection chirurgicale. Chez les patients opérés, les tranches de section étaient envahies dans 6 % des cas (R1) et les ganglions dans 35 %. Le taux de complications postopératoires sévères était de 24 %. La durée médiane de survie des 17 patients opérés était de 26 mois. Dix cancers ont présenté une rechute en médiane huit mois après la chirurgie. La rechute était métastatique dans 80 % des cas.
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Une équipe du M. D. Anderson Cancer Center a inclus 86 patients dans un essai de phase II associant une chimiothérapie par gemcitabine de 400 mg/m2 et une radiothérapie préopératoire de 30 Gy en dix fractions de 3 Gy [7]. Cinquantetrois pourcent des patients ont été hospitalisés en cours de la chimioradiothérapie pour toxicité. Parmi les 86 patients inclus, 74 ont été jugés opérables lors du bilan d’évaluation quatre à six semaines après la fin de la chimioradiothérapie. Soixante-quatre patients (74 %) ont finalement pu avoir une duodénopancréatectomie. Parmi les patients opérés, les tranches de sections étaient envahies dans 11 % des cas (R1) et les ganglions dans 38 %. Le taux de complications postopératoires sévères était de 9 % avec un décès lié à un lâchage de sutures. La durée médiane de survie des 64 patients opérés était de 34 mois avec un taux de survie à cinq ans de 36 %. Le taux de rechute locale était de 11 %. Etant donné le taux élevé de rechute à distance dans cet essai, la même équipe du M. D. Anderson Cancer Center a ajouté au schéma précédemment décrit une chimiothérapie par gemcitabine et cisplatine avant la chimioradiothérapie afin d’essayer d’agir plus efficacement sur une potentielle maladie micro-métastatique [34]. Cet essai de phase II a inclus 90 patients. Cinquante-un pourcent des patients ont été hospitalisés en cours de chimioradiothérapie pour toxicité. Soixante-dix-neuf patients ont reçu le traitement complet. Parmi ces 79 patients, 52 (66 %) ont eu une duodénopancréatectomie. Parmi les patients opérés, les tranches de section étaient envahies dans 4 % des cas (R1) et les ganglions dans 58 %. Le taux de complications postopératoires sévères était de 9,6 %. La durée médiane de survie des 52 ayant bénéficié d’une résection était de 31 mois alors qu’elle était de 10,5 mois pour les patients non opérés. Le taux de rechute locale était de 25 %. L’ajout d’une chimiothérapie première à la chimioradiothérapie néo-adjuvante ne semblait pas allonger la survie des patients. Ces différents résultats sont prometteurs, la chimioradiothérapie néo-adjuvante permettant d’obtenir une survie de longue durée chez les patients opérés. L’étape suivante consiste peut-être en l’identification précoce des patients atteints d’une maladie micrométastatique d’emblée pour lesquels chirurgie et chimioradiothérapie sont inutiles. Tant que la chimioradiothérapie néo-adjuvante n’a pas été comparée à la chimiothérapie adjuvante dans un essai randomisé, celle-ci doit se faire uniquement dans le cadre d’essai thérapeutique.
5.3. Cancers du pancréas localement évolués Pour les cancers du pancréas localement évolués, c’est-à-dire non résécables et non métastatiques (stade III), il n’y a pas de standard thérapeutique [15]. Il y a deux options, la chimiothérapie par gemcitabine et la chimioradiothérapie. Deux méta-analyses récentes sur données publiées ont conclu à l’absence de supériorité de la chimioradiothérapie sur la chimiothérapie [29,35]. Plus récemment, chimiothérapie et chimioradiothérapie ont été comparées dans un essai de phase III mené par la FFCD et la SFRO (5). Cet essai a comparé la survie de 119 patients traités soit après chimiothérapie seule (par gemcitabine telle que dans le schéma de Burris), soit après chimioradiothérapie de 60 Gy avec 5-fluoro-uracile et cisplatine. Dans les deux bras, la chimiothérapie de maintien était de la gemcitabine jusqu’à progression ou toxicité inacceptable. La durée médiane de survie était plus courte dans le bras chimioradiothérapie (8,6 mois contre 13 mois,
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p = 0,03). Le taux de toxicité de grade 3-4 était plus élevé dans le bras chimioradiothérapie, que ce soit pendant la phase initiale de traitement (36 % contre 22 %) ou pendant la chimiothérapie d’entretien (32 % contre 18 %). Ce taux de toxicité élevée était probablement dû au schéma de chimioradiothérapie utilisé avec une dose élevée (60 Gy alors que la dose recommandée est de 50 à 54 Gy) et une chimiothérapie concomitante par 5-fluorouracile et cisplatine, moins bien tolérée que le 5-fluoro-uracile seul. Dans le même temps, l’Eastern Cooperative Oncology Group (ECOG) amené un essai de phase III presque similaire [21]. Une chimiothérapie par sept cycles de gemcitabine seule (de 1000 mg/m2 J1, J8, J15) était comparée à une chimioradiothérapie de 50,4 Gy avec gemcitabine concomitante (de 600 mg/m2/sem) suivie de cinq cycles de gemcitabine seule. Plus de 300 patients devaient être inclus or l’essai a été clos après 74 inclusions en raison de la lenteur des inclusions. Le taux de réponse objective était de 2,7 % dans le bras chimiothérapie contre 8,8 % dans le bras chimioradiothérapie. La durée médiane de survie était plus longue dans le bras chimioradiothérapie (11 mois contre 9,2 mois, p = 0,022). Le taux de toxicité de grade 4 était beaucoup plus élevé dans le bras chimioradiothérapie (41,2 % contre 5,7 %, p < 0,001).
Même si le nombre de patients inclus dans cet essai est peu important, ses résultats viennent contredire ceux de l’essai de Chauffert et al. [5]. Plutôt que de continuer à opposer chimiothérapie et chimioradiothérapie, plusieurs équipes ont développé une stratégie thérapeutique consistant à associer chimiothérapie et chimioradiothérapie avec une durée médiane de survie de 12 à 17 mois [14,18,19]. En effet, quel que soit le mode de traitement utilisé, environ 30 % des cancers progressent durant les trois premiers mois de traitement. Une chimiothérapie première pourrait donc permettre de sélectionner les patients pouvant potentiellement bénéficier ensuite d’une chimioradiothérapie. L’essai de phase III LAP07 mené par le Gercor, la FFCD et la FNCLCC (Fédération nationale des centres de lutte contre le cancer) vient de débuter pour confirmer cette hypothèse. Dans cet essai international sont inclus des patients atteints d’un cancer du pancréas localement évolué. Pendant les quatre premiers mois de traitement, ils reçoivent une chimiothérapie d’induction par gemcitabine associée ou non avec de l’erlotinib. Les patients ayant une tumeur contrôlée après cette première phase de traitement sont ensuite randomisés entre poursuite de la chimiothérapie pour deux cycles
Fig.1. Contours du volume tumoral macroscopique (GTV) (rouge), du volume cible prévisionnel (PTV) (bleu), du foie (jaune), de la moelle (orange), des reins droit (rose) et gauche (vert) sur la scanographie de simulation. Delineation of GTV (red), PTV (blue), liver (yellow), bone marrow (orange), right kidney (pink), left kidney (green) on simulation CT.
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et chimioradiothérapie (radiothérapie conformationnelle de 54 Gy avec chimiothérapie concomitante par capécitabine). Les patients ayant été randomisés initialement dans le bras gemcitabineerlotinib reçoivent ensuite un traitement d’entretien par erlotinib jusqu’à progression.
6.
Modalités de la radiothérapie conformationnelle
6.1. Définition des volumes cibles Dans les premiers essais de chimioradiothérapie, de grands volumes d’irradiation étaient traités par une technique à quatre faisceaux (antérieur et postérieur, latéraux ou obliques). Le volume traité était défini par les limites suivantes : limite supérieure au niveau des disques D10-D11, limite inférieure au niveau des disques L3-L4, limite postérieure à mi-disque vertébral de D11 à L3, limite antérieure deux cm en avant du volume cible anatomoclinique (CTV). Avec la généralisation de l’irradiation conformationnelle en trois dimensions, le volume traité a diminué. Des données récentes sont en faveur d’une irradiation limitée à la tumeur sans irradiation prophylactique des aires ganglionnaires. Van der Geld et al. ont estimé que les récidives ganglionnaires étaient rares (0-5 % des cas) et recommandé de ne pas inclure les ganglions lymphatiques régionaux non envahis [32]. Dans une étude dosimétrique de faisabilité d’escalade de dose avec modulation d’intensité, Brown et al. ont rapporté l’impossibilité de réaliser une escalade de dose sans dépasser les contraintes de dose aux organes à risque (OAR) tout en incluant les ganglions lymphatiques régionaux [3]. Une irradiation limitée au volume tumoral macroscopique (GTV), sans irradiation prophylactique des ganglions lymphatiques régionaux, a été signalée dans une étude rétrospective et un essai prospectif [10,22]. Dans une étude rétrospective, Murphy et al. ont évalué la faisabilité d’une chimioradiothérapie avec de la gemcitabine (1000 mg/m2/semaine) avec une dose totale de 36 Gy en 15 fractions [22]. Le volume cible prévisionnel (PTV) comprenait le volume tumoral macroscopique avec une marge limitée à 1 cm. Les taux de survie sans progression locale à un an et à deux ans étaient respectivement de 64 % et 38 %. Quatre cancers (5 %) ont rechuté dans les ganglions lymphatiques péripancréatiques (trois dans le volume traité et un à la limite du volume traité). La rechute locale était un facteur prédictif significatif pour la survie globale (p = 0,007). Le volume cible prévisionnel était corrélé avec la toxicité gastro-intestinale (p = 0,007). Un essai prospectif de phase II avec une chimioradiothérapie par 5-fluoro-uracile a utilisé des marges similaires pour le volume cible prévisionnel (10). Les auteurs de ces deux études ont rapporté les mêmes taux de récidive locale que dans les précédentes études publiées. Par ailleurs, les mouvements du pancréas induits par la respiration doivent être pris en compte dans la définition du volume cible prévisionnel. Bussels et al. ont évalué ces mouvements chez 12 patients en utilisant une iIRM dynamique [4]. Les mouvements les plus importants étaient dans le sens crânio-caudal (23,7 ± 15,9 mm). Les mouvements selon les axes antéro-postérieur et médiolatéral étaient moins prononcés (respectivement 12,1 ± 9,0 mm et 6,0 ± 3,4 mm). Dans une autre étude, 17 patients atteints d’un cancer du pancréas non résécable ont eu une IRM dynamique avec respiration libre [8]. Les tumeurs pancréatiques se déplaçaient en bas et en avant avec l’inspiration. Dans les coupes coronales, les mouvements moyens des marges supérieure et inférieure étaient respectivement de 13 mm (8-22) et
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14 mm (6-25). Dans les coupes sagittales, les mouvements moyens des marges antérieure et postérieure étaient de 6 mm [2-13] et 4 mm (0-9). Les mouvements latéraux étaient négligeables. Les auteurs ont conclu que les mouvements des tumeurs du pancréas étaient très variables entre les patients, avec une déformation importante liée à la respiration. Une autre étude avait pour buts de quantifier les mouvements du pancréas avec la respiration et d’évaluer si l’utilisation de marges personnalisées en fonction de ces mouvements permettait de réduire la dose aux organes à risque [12]. Les scanographies de simulation étaient acquises en respiration libre calme, en expiration et en inspiration. Les mouvements du pancréas étaient évalués à partir du déplacement d’un point reproductible dans le pancréas dans toutes les directions. Les déplacements moyens du pancréas dans les sens inférosupérieur, médio-latéral et antéropostérieur étaient respectivement de 15,3 mm ± 4,3, 5,2 mm ± 3,5 et 9,7 mm ± 6,1. L’utilisation de marges personnalisées permettait de réduire le volume cible prévisionnel moyen de 33,5 % (p = 0,005). Les réductions proportionnelles du pourcentage de rein recevant une dose de plus de 10 Gy, de l’intestin grêle recevant une dose de plus de 45 Gy et du foie recevant plus de 30 Gy s’élevaient respectivement à 63,7 % (p = 0,005), 29,3 % (p = 0,01) et 29,2 % (p = 0,01).
6.2. Volume tumoral macroscopique (Gross Tumor Volume ou GTV) Pour les tumeurs localement avancées, le volume tumoral macroscopique inclut la tumeur primitive et les adénopathies de plus d’1 cm désignées comme envahies par le radiologiste sur la scanographie. Le volume tumoral macroscopique n’inclut pas les aires de drainage ganglionnaires du pancréas en l’absence d’envahissement. En effet, le bénéfice de l’irradiation prophylactique des aires ganglionnaires n’a jamais été prouvé, le site principal de rechute étant la masse elle-même. Par contre, il a été montré que la toxicité augmente avec le volume irradié [10,22]. Il n’est pas nécessaire d’inclure la totalité du pancréas. Le volume tumoral macroscopique est délinéé sur la scanographie de simulation coupe par coupe en utilisant un logiciel de planification en trois dimensions.
6.3. Volume cible anatomo-clinique (Clinical Target Volume ou CTV) En situation adjuvante, le CTV1 inclut jusqu’à 40-45 Gy le lit opératoire défini par la scanographie préopératoire. Dans le CTV1 sont aussi inclus les aires ganglionnaires de drainage pancréatiques, cœliaques, mésentériques supérieures, le hile hépatique et éventuellement le hile splénique pour les tumeurs de la queue [6,26]. Le CTV2 est réduit au lit opératoire uniquement et reçoit généralement 5 à 10 Gy supplémentaires. La présence de clips chirurgicaux peut aider à définir le CTV2. Pour les tumeurs localement évoluées, les aires ganglionnaires régionales ne sont pas incluses, il n’y a donc pas de volume cible anatomoclinique.
6.4. Volume cible prévisionnel (Planning Target Volume ou PTV) Des marges, prenant en compte les incertitudes de repositionnement et les mouvements potentiels des organes, sont ajoutées autour du volume cible anatomoclinique afin de générer
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Fig. 3. Histogrammes dose-volume du volume cible macroscopique (GTV) (rouge), du volume cible prévisionnel (PTV (bleu), du foie (jaune), de la moelle (orange), des reins droit (rose) et gauche (vert). Dose-volume histograms : GTV (red), PTV (blue), liver (yellow), bone marrow (orange), right kidney pink), left kidney (green).
Fig. 2. Isodoses de traitement (Gy). Treatment isodoses (Gy).
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le volume cible prévisionnel. En situation adjuvante, une marge d’1 à 2 cm est ajoutée au volume cible anatomoclinique. Pour les tumeurs localement avancées, on recommande que le volume cible prévisionnel comprenne le volume tumoral macroscopique avec une marge de 2 cm dans les directions antérieure, postérieure et latérale et une marge de 3 cm dans les directions crâniale et caudale pour prendre en compte les mouvements respiratoires. Ces marges doivent être adaptées en fonction de l’anatomie du patient pour ne pas irradier inutilement un volume hépatique ou rénal trop important.
6.5. Dose prescrite et fractionnement La dose recommandée est de 50 Gy au point ICRU (International Commission on Radiation Units and Measurements) en situation adjuvante et d’environ 55 Gy en situation localement évoluée. Un fractionnement de 1,8 à 2 Gy par séance, à raison de cinq séances par semaine, est recommandé. La prescription de la dose doit être conforme au rapport 50 de l’ICRU. L’escalade de la dose n’est pas recommandée hors essai thérapeutique car n’ayant jamais apporté de bénéfice. Une chimiothérapie par 5-fl uoro-uracile en perfusion continue (250 mg/m²/j) pendant toute la durée de l’irradiation est le traitement de référence. La gemcitabine, puissant radiosensibilisant, ne doit pas être utilisée en concomitance à la radiothérapie en dehors d’un essai thérapeutique.
6.6. Organes à risque et contraintes de dose Ce sont les organes sains dont la radiosensibilité peut influencer la planification du traitement et/ou la dose prescrite. Dans la région pancréatique, les organes à risque sont principalement la moelle épinière, le foie, les reins, le tube digestif (estomac, duodenum, intestin grêle, colon). Les contraintes de dose classiquement utilisées en France sont répertoriées dans le Guide de procédures de la radiothérapie externe publié par la SFRO [30] : – moelle épinière : dose maximale de 45 Gy en fractionnement classique ;
Fig. 4. Vue des faisceaux antérieur et latéral gauche (DRR). View of anterior and left lateral beams (DRR).
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– foie : une dose de 30 Gy ne doit pas être délivrée dans plus de 50 % du volume du foie (V30 ≤ 50 %) avec une dose maximale dans la totalité du foie de 26 Gy ; – reins : dose maximale de 20 Gy dans un volume cumulé équivalent à un rein entier sur des reins fonctionnellement normaux ; – estomac, duodénum : dose maximale de 45 Gy. En raison de la proximité de la tête du pancréas et du duodénum, une dose un peu plus élevée (54 Gy) est autorisée dans un petit volume (V45 ≤ 10 %) ; – intestin grêle : c’est un organe extrêmement mobile d’un jour sur l’autre et souvent difficile à visualiser et délinéer sur les scanographes de dosimétrie. Plutôt que d’essayer de le délinéer anse par anse, il est recommandé de définir un volume « intestin grêle » comprenant le contenu abdominal, après soustraction du volume cible prévisionnel, des autres organes à risque et des corps vertébraux, avec une limite postérieure à la face dorsale des corps vertébraux lombaires et excluant l’espace rétropéritonéal (32). La dose maximale est de 45 Gy, une dose un peu plus élevée (54 Gy) est autorisée dans un petit volume (V45 ≤ 10 %). Dans un grand volume, il est recommandé de ne pas dépasser 40 Gy.
6.7. Balistique L’irradiation doit être planifiée de manière conformationnelle en trois dimensions. Une technique isocentrique est conseillée. Le choix de la balistique est libre, cependant elle doit comprendre plus de deux faisceaux. Des caches personnalisés ou réalisés grâce à un collimateur multilame permettent de réduire la dose reçue par les tissus sains et les organes à risque. L’angle des faisceaux doit être choisi afin de minimiser la dose reçue par les organes à risque. Tous les faisceaux doivent être traités chaque jour. 7.
Conclusions
La place de la radiothérapie dans le traitement des cancers du pancréas est débattue depuis plus de 30 ans. Pendant longtemps, il y avait d’un côté les Américains considérant la chimioradiothérapie
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comme un standard thérapeutique que ce soit en adjuvant ou pour les cancers localement avancés, et de l’autre les Européens plus partisans de la chimiothérapie. En situation adjuvante, les résultats de l’essai ESPAC-1, bien que contestés, suivis de ceux de l’essai CONKO-1, ont amené à considérer la chimiothérapie postopératoire comme un standard thérapeutique. La chimioradiothérapie est recommandée pour les patients en situation de résection incomplète (R1). En ce qui concerne les traitements néo-adjuvants, on attend toujours l’essai de phase III, qui comparera chimioradiothérapie néo-adjuvante et chimiothérapie adjuvante. Pour les tumeurs localement évoluées, le débat continue même si la stratégie consistant à associer une chimiothérapie première suivie d’une chimioradiothérapie en l’absence de progression tumorale paraît séduisante. L’essai de phase III LAP07 en cours a été conçu pour valider cette attitude. Sur le plan technique, la tendance actuelle est à la réduction des volumes irradiés afin d’améliorer la tolérance. 8.
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Conflits d’intérêts [21]
F. Huguet : aucun A. Orthuon : aucun E. Touboul : aucun R. Marseguerra : aucun F. Mornex : essais cliniques : en qualité de co-investigateur, expérimentateur non principal, collaborateur à l’étude ; essais cliniques : en qualité d’investigateur principal, coordonnateur ou expérimentateur principal ; interventions ponctuelles : rapports d’expertise ; conférences : invitations en qualité d’intervenant. Références [1]
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Cancer/ R adi o t hérapie 14 Suppl . 1 (2010) S103– S110
Tumeurs primitives hépatiques Primary liver cancer M. Quivrina,*, F. Mornexb, C. Enachescub, E. Martina, A. Ligey-Bartolomeua, E. Nouhauda, J. Chamoisa, P. Maingona, G. Créhangea aDépartement bDépartement
de radiothérapie, Centre Georges-François-Leclerc, Dijon, France de radiothérapie, Centre hospitalier Lyon-Sud, Lyon-Pierre-Bénite, France
INFO ARTICLE
RÉSUMÉ
Les figures 1, 11, 13 et 14, ainsi que les tableaux 1 à 7 sont visibles uniquement sur : shhtp://www.sciencedirect.com/
L’incidence croissante des cancers primitifs hépatiques et leur pronostic défavorable représentent un défi diagnostique et thérapeutique. Pour les petites tumeurs localisées, les traitements à visée curative de référence sont la résection chirurgicale et la transplantation hépatique ; les possibilités thérapeutiques sont limitées pour les cancers localement évolués ou métastatiques. Au total, moins de 20 % des malades sont éligibles à une prise en charge chirurgicale. Le dépistage précoce chez les patients à risque et l’éviction des facteurs favorisants sont des éléments privilégiés de la prise en charge. La radiothérapie est une alternative non invasive très prometteuse pour les patients non opérables, son ambition est de rendre curable des tumeurs de pronostic défavorable.
Mots clés : Carcinome hépatocellulaire Radiothérapie conformationnelle Volumes cibles Atlas
© 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
ABSTRACT Keywords: Hepatocarcinoma Conformal radiotherapy Target volumes Atlas
Due to its increasing incidence and a grim prognosis, primary liver cancer remains a diagnostic and therapeutic challenge. For small localized tumors, surgical resection and liver transplantation are standart treatments with a curative-intent. Therapeutic options for locally advanced or metastatic diseases are limited. Globally, surgery fits less than 20% of patients. Early detection in high-risk patients and prevention of risk factors remain the key points in the standard care. External radiotherapy is a non invasive treatment with encouraging results for non operable patients. Emerging stereotactic radiotherapy yields high rates of local control without compromising toxicity. Tumors with bad prognostic factors could be cured with this approach. © 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Published by Elsevier Masson SAS. All rights reserved.
1.
Épidémiologie
En 25 ans, l’incidence des cancers primitifs hépatiques a considérablement progressé en France avec 6 433 nouveaux cas en 2005, (5 104 hommes et 1 329 femmes) contre 1 408 en 1980. L’âge moyen au moment du diagnostic était de 65 ans. Au plan mondial, en 2005, le nombre de nouveaux cas de cancer
du foie était supérieur à 670 000, dont 70 % d’hommes. Plus de 80 % des cancers hépatiques surviennent dans les pays en voie de développement. L’incidence est bien plus faible dans les pays développés, environ trois pour 100 000 habitants par an en Europe. Le pronostic reste très défavorable avec une durée de survie moyenne autour d’un an. Il s’agit de la troisième cause de mortalité par cancer dans le monde [17].
* Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (M. Quivrin) © 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
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2.
M. Quivrin et al./ Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S103–S110
Classification
2.1. Histologique Les cancers primitifs du foie appartiennent à deux principales catégories histologiques : – le carcinome hépatocellulaire (CHC) ou hépatocarcinome dont la forme la plus fréquente est développée aux dépens des hépatocytes dans un contexte d’hépatite chronique (hépatite B ou C), de fibrose ou de cirrhose ; – le cholangiocarcinome est moins fréquent, il se développe sur l’épithélium des canaux biliaires intrahépatiques. Dans les pays développés, il peut aussi compliquer l’évolution d’une cirrhose biliaire cholestatique.
2.2. Pronostic Il n’existe pas de consensus sur la classification pronostique à utiliser [8, 19]. Plusieurs classifications ont été validées et sont utilisées en routine, en fonction des pays ou des équipes. Cependant les critères de Milan sont souvent employés pour orienter la décision thérapeutique : un « petit » carcinome hépatocellulaire est défini comme un nodule unique de moins de 5 cm ou comme deux ou trois nodules de moins de 3 cm chacun [10]. Toute autre situation correspond à un « gros » carcinome hépatocellulaire. La classification TNM [21] est peu utilisée (Tableau 1). La classification de l’American Joint Committee on Cancer (AJCC) reprend la classification TNM (Tableau 2). La classification Child Pugh (Tableau 3) et la classification d’Okuda permettent d’évaluer la fonction hépatique selon des paramètres clinico-biologiques [19] (Tableau 4). La classification du CLIP (Cancer of the Liver Italian Programme) reprend le score de Child Pugh (Tableau 5).
3.
Indications de radiothérapie
Actuellement, les traitements à visée curative de référence pour les petits carcinomes hépatocellulaires (localisés) sont la transplantation hépatique, la résection chirurgicale et la destruction percutanée par radiofréquence ou alcoolisation. Pour les cancers localement évolués ou métastatiques, on dispose de thérapeutiques dites palliatives : chimio-embolisation artérielle, traitement médicamenteux et plusieurs essais thérapeutiques sont en cours. Les tumeurs primitives hépatiques ont longtemps été considérées comme radiorésistantes. Cette théorie ancienne vient de la mauvaise tolérance hépatique observée après des irradiations du foie entier à doses élevées. Pour le carcinome hépatocellulaire d’origine primitive, une irradiation non invasive est indiquée pour des tumeurs localisées ou localement évoluées, non résécables ou non accessibles aux traitements percutanés. La non-opérabilité peut être liée à des caractéristiques tumorales (multifocalité, taille importante de la tumeur, thrombose portale), ainsi qu’aux « comorbidités » du patient. Cependant, il existe des contre-indications relatives à la radiothérapie hépatique [11] : une atteinte multifocale avec trois lésions ou plus envahissant les deux lobes, un stade Child Pugh B ou C, une dénutrition avec apports de moins de 1500 kcal par jour, des antécédents d’infarctus du myocarde de moins de trois mois et
d’irradiation thoracique basse ou abdominale. La radiothérapie peut être associée à une chimiothérapie artérielle ou à une chimio-embolisation séquentielle [24].
4.
Modalités de traitement
4.1. Radio-anatomie Un nodule hépatique est souvent découvert à l’échographie abdominale trans-pariétale, néanmoins, les examens de référence pour le caractériser sont la scanographie hélicoïdale, avec acquisition artérielle, parenchymateuse et portale. L’imagerie par résonance magnétique (IRM) est optionnelle mais peut aider pour définir les limites tumorales si le scanner est peu contributif. Un nodule hypervascularisé au temps artériel précoce, avec lavage (wash-out) tardif au temps portal est évocateur d’un carcinome hépatocellulaire [3, 20] (Fig. 1). Des nouvelles techniques d’imagerie ultrasonique transpariétale (SonoView®) permettent de réaliser des reconstructions tridimensionnelles avec visualisation de la circulation normale et tumorale. L’ensemble de ces examens d’imagerie doivent amener é préciser la vascularisation tumorale, le segment(s) hépatique(s) envahi(s) et les rapports avec la vascularisation normale.
4.2. Détermination des volumes cibles Dans le cas d’une irradiation hépatique partielle, les volumes cibles sont définis sur la scanographie dosimétrique. Il est possible de réaliser une fusion multimodale avec une IRM avec injection de gadolinium récente (datant de moins d’un mois). Cette fusion devient particulièrement nécessaire quand la scanographie de planification a été réalisée sans injection (contre-indication a l’iode) ou trop tardivement par rapport à l’injection. L’acquisition peut être schématiquement représentée par trois types possibles d’acquisition des images : cas n° 1 : une acquisition classique tridimensionnelle en respiration libre (volume cible prévisionnel, PTV, le plus large car incertitude de repositionnement la plus grande) ; cas n° 2 : scanographie quadridimensionnelle en respiration libre (le volume cible interne, ITV, qui en découle permet de réduire l’incertitude de repositionnement et donc la marge (setup margin) associée pour créer le volume cible prévisionnel final) ; cas n° 3 : acquisition quadridimensionnelle en respiration bloquée si une technique de gating respiratoire est utilisée pour le traitement. En cas d’acquisition quadridimensionnelle, les critères du rapport 62 de l’International Commission on Radiation Units and Measurements (ICRU) doivent être utilises, faisant intervenir la notion de volume cible interne. Le volume cible prévisionnel doit associer une marge pour le volume cible interne qui prend en compte les mouvements de la tumeur (situation idéale) ou de l’organe contenant la tumeur et la marge [« set-up margin » (SM)] pour les incertitudes de repositionnement. Le volume cible interne tient compte des mouvements interne des organes au cours du cycle respiratoire (le foie bouge d’1 à 3 cm en moyenne dans le sens crânio-caudal [23]). Ce type d’acquisition par ciné-imagerie permet d’optimiser le traitement en réduisant le volume cible prévisionnel par réduction du volume cible interne grâce aux techniques dites de « gating »
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respiratoire et réduction de la marge par l’application de systèmes de contention efficaces (compression abdominale, Blue-bag… Fig. 13). Ainsi, le bénéfice du traitement peut être optimisé et permettre de réaliser une escalade de dose tout en diminuant ou minimisant la dose délivrée au foie sain (diminution de la probabilité de complications des tissus sains, NTCP) [1,23,25]. Dans le cas ou l’acquisition scanographique de planification ainsi que les séances de traitements sont réalisés avec une technique de « gating » respiratoire, le volume cible prévisionnel devient le plus petit possible et permet ainsi la plus grande épargne de parenchyme hépatique sain. Le volume tumoral macroscopique (Gross Tumor Volume ou GTV) correspond au volume tumoral qui prend le contraste (Fig. 2). Le volume cible anatomoclinique (Clinical Target Volume ou CTV) inclut une marge de 1 cm dans toutes les directions autour du volume tumoral macroscopique (Fig. 2). Les marges pour définir le volume cible prévisionnel (Planning Target Volume ou PTV) sont de 5 mm pour les incertitudes de repositionnement et de trois à 30 mm (principalement dans l’axe crânio-caudal) pour les mouvements selon le cycle respiratoire et la localisation de la tumeur, soit un total de à huit à 35 mm pour le volume cible prévisionnel (Fig. 2).
4.3. Doses prescrites Avec une technique conformationnelle tridimensionnelle, une irradiation hépatique partielle à haute dose devient possible. Plusieurs études ont montré des résultats significatifs et reproductibles en matière de survie globale et de tolérance en pratiquant une escalade de dose comprise entre 54 et 66 Gy, par fractions de 1,8 à trois Gy, à condition de sélectionner les patients, de considérer leurs « comorbidités » et de tenir compte
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des histogrammes dose-volume et de la tolérance des tissus sains [12] (Tableau 6) : L’étude rétrospective de Seong et al., a inclus 158 malades atteints de carcinome hépatocellulaire localement évolués dont 107 avaient bénéficié d’une embolisation trans-artérielle de première intension [19]. Les patients avaient reçu 40 à 60 Gy en mode conformationnel. Le taux de réponse était de 67 %, la durée médiane de survie de dix mois et le taux de survie à deux ans de 20 %. D’autres études rétrospectives ont montré la reproductibilité de ces résultats [16]. Une étude prospective française de phase II [15], portant sur 27 patients atteints d’une cirrhose hépatique compliquée d’un carcinome hépatocellulaire de petite taille, non éligibles aux traitements de référence, a montré l’intérêt d’une escalade de dose de radiothérapie conformationnelle seule jusqu’à 66Gy, avec un taux de réponse tumorale élevé (78 %). Néanmoins, bien que la toxicité hépatique soit jugée acceptable, les résultats doivent attirer l’attention sur l’importance du respect des contraintes et de la sélection des patients. En situation antalgique palliative, il est possible de délivrer une dose comprise entre 27 et 30 Gy dans l’ensemble du foie sur un mode bifractionné, avec des fractions de 1.5 Gy, dix fois par semaine [2,18].
4.4. Organes à risque et contraintes de dose (Tableau 7, figs. 3, 5, 9, 10) : La moelle épinière ne doit pas recevoir plus de 45 Gy, le cœur tolère une dose maximale de 35 Gy dans l’ensemble de sa structure. Pour les poumons (droit et gauche), une dose de 20 Gy ne doit pas être délivrée dans plus de 35 % du volume (V20 ≤ 35 %) et une dose de 30 Gy ne doit pas être délivrée dans plus de 20 % du volume (V30 ≤ 20 %). L’œsophage peut recevoir une dose maximale de 40 Gy sur une longueur de 15 cm. En ce qui concerne l’estomac ou le duodénum, la dose maximale recommandée est de 45 Gy, elle est de 50 Gy pour l’intestin grêle. Au niveau des reins, la dose maximale est de 20 Gy dans un volume cumulé équivalent à un rein entier avec un fonctionnellement normal [11]. Les contraintes de dose au niveau du foie pour un traitement normalement fractionné sont particulières, il faut tenir compte du volume de foie sain non irradié, un volume de 700 cc de foie sain doit recevoir moins de 15 Gy, on observe des complications dans 50 % des cas à 66 Gy, quand le volume du foie total moins le volume cible prévisionnel est supérieur à 30 % du volume hépatique total, à 36 Gy, quand le volume du foie total moins le volume cible prévisionnel est supérieur aux deux tiers du volume hépatique total, et à 50 Gy, quand le volume du foie sain épargné est intermédiaire [13]. Si ces contraintes ne peuvent être respectées compte tenu d’un volume tumoral important, une réduction peut être envisagée après 46 Gy seulement en cas de bonne réponse tumorale (diminution de la taille et de la vascularistion en IRM ou Sonoview®).
4.5. Balistique et dosimétrie
Fig. 2. Contourage des volumes cibles (volume tumoral macroscopique, volume cible anatomoclinique et volume cible prévisionnel). Delineation of GTV, CTV, and PTV.
Dans le cas d’une irradiation hépatique partielle, la technique tridimensionnelle conformationnelle autorise une escalade de dose, avec une bonne couverture du volume cible prévisionnel et une protection acceptable des organes à risque (Figs. 3, 4, 5,
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7, 9, 12, 14, 15, 16, 18). La RCMI n’a pour l’instant pas montré de supériorité significative pour la couverture des volumes cibles, ni pour la tolérance du traitement [5]. La multiplication des faisceaux doit être évitée. Idéalement si la tumeur peut être irradiée par une balistique simple, comme par deux faisceaux (antéro-postérieur et postéro-antérieur ou obliques), cela permet de diminuer la dose délivrée au foie sain, qui doit être épargné le plus souvent possible. À la différence d’autres situations cliniques, l’organe malade (le foie sain) doit être considéré comme un organe a risque dans lequel on recommanderait de délivrer une dose nulle. Une optimisation des conditions de traitement avec une meilleure contention, une bonne connaissance de la tolérance des tissus sains en fonction des « comorbidités » [9], une meilleure gestion des mouvements respiratoires avec différents systèmes de ciné-imagerie actifs ou passifs, permet une escalade de dose et un traitement hypofractionné en conditions stéréotaxiques (Figs. 6, 8, 10, 11, 13, 17, 19, 20). Ces techniques sont réservées aux tumeurs uni- ou bifocales (primitive ou métastatique). Le repérage tumoral doit être très précis pour permettre de délivrer une dose totale comprise entre 36 et 60 Gy en trois à six fractions. Une étude de phase I, a été récemment publiée par l’équipe de l’université du Michigan portant sur 41 patients atteints de « grosses tumeurs hépatiques », (volume médian de 293 cm3) pour lesquels une dose totale de 57 Gy en six fractions était délivrée [6,7]. Les résultats en termes de contrôle local et de tolérance étaient prometteurs (aucune hépatite radio-induite n’a été observée). En situation antalgique palliative, l’ensemble du volume hépatique est traité par deux faisceaux antéro-postérieur et postéro-antérieur.
5.
Toxicité aiguë
La toxicité aiguë la plus sévère est l’hépatite radio-induite, c’est un syndrome comparable à la maladie veino-occlusive des hémopathies. L’hépatite radio-induite est une complication subaiguë qui survient dans les deux à huit semaines suivant la fin de l’irradiation et se caractérise par l’apparition d’une hépatomégalie anictérique, associée à de l’ascite et à une élévation des enzymes hépatiques, notamment des phosphatases alcalines, à deux fois la valeur normale. C’est une complication de pronostic très défavorable, qui peut évoluer en fibrose hépatique sévère ou en défaillance d’organe fulgurante. Les facteurs prédictifs pour l’hépatite radio-induite sont une cirrhose hépatique sévère et une co-infection de l’hépatite B [4,14]. Les autres effets aigus, plus classiques en situation d’irradiation abdominale, concernent la tolérance digestive et peuvent se manifester par une gastrite ou une entérite radique, ainsi qu’une majoration des risques de cholécystite. Dans la situation d’un traitement hypofractionné en conditions stéréotaxiques, la principale complication digestive est l’ulcère gastroduodénal ou l’ulcère colique.
6.
Toxicité tardive
La toxicité tardive est rarement rapportée dans la littérature du fait d’un faible de survivants à long terme à cette maladie. Néanmoins en dehors de la fibrose hépatique et de l’insuffisance
hépato-cellulaire, il faut redouter la néphropathie radique, la péricardite radique et le grêle radique. L’estomac et le duodénum peuvent encore saigner plusieurs années après une irradiation hépatique. Une surveillance post thérapeutique est recommandée tous les trois mois pendant deux ans (examen clinique, scanographie thoraco-abdomino-pelvienne et bilan biologique hépatique avec dosage de l’alpha-fœtoprotéine, endoscopie digestive si méléna ou douleurs d’ulcère), puis tous les six mois.
7.
Iconographie (Figs. 2, 3, 4, 5, 7, 9, 12, 14, 15, 16, 18). Cas clinique : carcinome hépato-cellulaire traité par irradiation conformationnelle tridimensionnelle
Il s’agit d’un patient, âgé de 75 ans, ayant comme principaux antécédents une hémorragie digestive sur ulcère gastrique, une infection par le virus de l’hépatite C, une arythmie cardiaque avec fibrillation auriculaire traitée par fluindione et une intoxication œnolique. Il bénéficiait d’un suivi régulier dans le cadre d’une infection par le virus de l’hépatite C. Lors d’une échographie abdomino-pelvienne, il a été découvert un nodule de 45 mm de grand axe, de contenu hétérogène cerclé d’une couronne hypo-échogène, situé dans le lobe droit, et associé à des signes de cirrhose (signe d’hypertension portale). À l’examen clinique, l’état général était légèrement atteint (classé 1 selon l’OMS), et il y avait des signes d’insuffisance hépatique. L’IRM hépatique avec injection de gadolinium a retrouvé le nodule avec un wash out au temps artériel. Le bilan biologique a montré une concentration d’alpha-fœtoprotéine de 310 μg/l, un taux de prothrombine de 75 %, une albuminémie de 30 g/l, une bilirubinémie de 30 μmol/l, une concentration de transaminases (ALAT et ASAT) de 1,5 fois la normale, de phosphatases alcalines de deux fois la normale. Il s’agissait selon la classification de Milan d’un petit carcinome hépato cellulaire sous la forme d’un nodule unique de moins de 5 cm de stade A de Child Pugh. Le patient n’était pas éligible aux traitements de référence, en raison de plusieurs « comorbidités » qui constituaient des contre indications. La résection chirurgicale était contre-indiquée du fait de la localisation profonde du foie droit et de l’hypertension portale. La destruction percutanée était aussi contre-indiquée car le nodule était trop volumineux pour la radiofréquence et l’alcoolisation difficilement réalisable du fait du traitement anticoagulant. Après discussion en réunion de concertation pluridisciplinaire, l’indication d’une radiothérapie externe à visée curative a été retenue. La scanographie dosimétrique a pu être fusionnée avec une IRM hépatique datant de moins d’un mois : – volume tumoral macroscopique : volume tumoral prenant le contraste à l’imagerie ; – volume cible anatomoclinique : volume tumoral macroscopique plus une extension microscopique de 1 cm autour ; – volume cible prévisionnel : volume cible anatomoclinique plus une marge de 1 cm. Les organes à risque suivant sont repérés : – volume de foie sain (volume foie total – volume cible prévisionnel) ; – poumon droit ; – poumon gauche ; – reins ; – moelle épinière ;
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intestin grêle ; cœur ; estomac ; duodénum. La dose a été prescrite au point d’ICRU, de 66 Gy, en 33 fractions de 2 Gy, en six semaines et demi (dose qui n’est délivrée que si la contrainte au foie sain est respectée). La dosimétrie a été réalisée selon une technique d’irradiation conformationnelle tridimensionnelle (Fig. 17). Deux balistiques sont proposées : deux faisceaux antéropostérieurs ou trois faisceaux de photons X de 18 MV, un oblique antérieur droit, un oblique postérieur droit et un oblique postérieur gauche, en utilisant des lames dynamiques. – – – –
7.1. Histogrammes dose-volume Une balistique à trois faisceaux a été proposée (Fig. 18, dans laquelle le volume cible anatomoclinique est en rose). Quatre
vingt quinze pour cent du volume cible prévisionnel (en orange) recevaient 95 % de la dose prescrite. La dose maximale délivrée à la moelle (en marron) était de 25 Gy. Cinquante pour cent du foie sain recevaient 45 Gy. Cinquante cinq pour cent du poumon droit (en turquoise) recevaient 20 Gy, 20 % du poumon gauche (en bleu) 2 Gy, 20 % des poumons droit et gauche moins de 30 Gy. La dose maximale au rein droit (en vert) était de 6 Gy. La comparaison des deux balistiques permettait néanmoins de se rendre compte que deux faisceaux antéropostérieurs, parallèles et opposés, permettaient d’augmenter le volume de foie sain non irradié et de diminuer le volume de foie irradié à hautes doses (Fig. 20). On préfère des dosimétries comportant le moins de faisceaux possible afin de protéger au mieux le foie sain, en effet, on considère que chaque faisceau altère la zone de parenchyme hépatique sain traversé. Il faut donc « sacrifier » le moins de tissu sain possible et préserver un volume maximal de foie sain en appliquant une contrainte à 0 Gy.
Fig. 3. Contourage de volumes cibles et organes à risque. Delineation of target volume and at-risk organs.
Fig. 4. Contourage de volumes cibles et organes à risque. Delineation of target volume and at-risk organs.
Fig. 5. Contourage des volumes cibles et organes à risque. Delineation of target volume and at-risk organs.
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Fig. 6. Dosimétrie de radiothérapie en conditions stéréotaxiques. Dosimetric technique for stereotaxic radiosurgery.
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Fig. 7. Faisceaux de traitement avec une technique conformationnelle tridimensionnelle. Treatment beams with 3D conformal radiation technique.
Fig. 8. Faisceaux de traitement avec technique stéréotaxique. Treatment beams with stereotaxic technique.
Fig. 9. Histogramme dose-volume pour une technique conformationnelle tridimensionnelle, volume cible anatomoclinique (CTV) en rose, volume cible prévisionnel (PTV) en orange, moelle en marron, foie sain en rouge. DVH for 3D conformal technique, CTV (pink), PTV (orange), blood marrow (brown), healthy liver (red).
Fig. 10. Histogramme dose-volume avec technique stéréotaxique, volume tumoral macroscopique (GTV) en rose, volume cible anatomoclinique (CTV) en bleu et volume cible prévisionnel (PTV) en rouge, foie sain en jaune. DVH with stereotaxic technique, GTV (pink), CTV (blue), PTV (red), healthy liver (yellow).
Fig. 12. Fusion multimodale d’une scanographie et d’une IRM hépatiques pondérées en T1 Multimodal fusion of hepatic CT and T1-weighted MRI.
Fig. 15. Contourage des volumes cibles sur la scanographie dosimétrique. Delineation of target volume and at-risk organs on dosimetric CT scan
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Fig. 16. Contourage des volumes cibles à l’aide de l’image de fusion, volume tumoral macroscopique (GTV) en rouge, volume cible anatomoclinique (CTV) en rose, volume cible prévisionnel (PTV) en orange. Delineation of target volumes using image fusion; GTV (red), CTV (pink), PTV (orange).
Fig. 18. HDV en technique conformationnelle. Volume cible anatomoclinique (CTV) en rose, volume cible prévisionnel (PTV) en orange, foie sain en rouge. HDV conformal technique. CTV (pink), PTV (orange), healthy liver (red).
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Fig. 17. Exemple de dosimétrie en technique stéréotaxique Example of dosimetry in stereotaxic technique.
Fig. 19. Exemple d’histogramme dose volume en technique stéréotaxique Example of DVH, stereotaxic technique
Fig. 20. Comparaison de deux plans de traitement, en technique conformationnelle, par un faisceau postérieur et deux obliques ou par des faisceaux antéropostérieurs. Comparison of two treatment planes with conformal technique, with posterior beam and two diagonals or with anteroposterior beams.
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Le cancer du rectum Rectal cancer P. Blancharda, A. Levyb, J. Breunotb, S. Michaudb, V. Delmasc, C. Hennequinb,* a Département
de radiothérapie, institut Gustave-Roussy, Villejuif, France de cancérologie radiothérapie, hôpital Saint Louis, 1, avenue Claude-Vellefaux, 75010 Paris, France c Service d’Urologie, hôpital Bichat, Paris, France b Service
RÉSUMÉ Mots clés : Cancer de du rectum Radiothérapie conformationnelle Volumes cibles Atlas
Les cancers du rectum sont une entité fréquente avec une incidence annuelle en France d’environ 12000 nouveaux cas par an. La chimioradiothérapie concomitante préopératoire à base de fluoropyrimidine suivie d’une chirurgie avec exérèse totale du mesorectum est devenue le standard thérapeutique des tumeurs localement évoluées (classées T3-4) ou atteignant les ganglions (N+ ) du bas ou du moyen rectum. Les modalités d’irradiation varient selon le siège de la tumeur (bas/moyen) et son extension locale. Le volume cible anatomoclinique (CTV) couvre toujours l’ensemble du mesorectum, qui s’étend de la ligne de réflexion péritonéale (à hauteur de S3) au plan des muscles releveurs de l’anus, ainsi que les aires ganglionnaires iliaques internes jusqu’à la bifurcation iliaque interne - iliaque externe. L’objectif de cet article est de rappeler les particularités épidémiologiques, anatomiques, radiologiques et de pronostic des cancers du rectum essentielles à la définition des modalités optimales de l’irradiation conformationnelle. La définition des volumes cibles et des organes à risque, les doses à prescrire et les contraintes de dose sont abordées. Ces propos sont illustrés par un cas clinique concernant une tumeur du moyen rectum. © 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. © 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
ABSTRACT Keywords: Gastric cancer Conformal radiotherapy Target volumes Atlas
With 12,000 new cases each year in France, rectal cancers are a frequent entity. Concurrent fluoropyrimidin-based chemoradiation followed by a surgery including total mesorectal excision is the standard of care for locally advanced (T3-4) or node positive cancers of the mid and lower rectum. Modalities of irradiation depend on tumour location (mid versus lower rectum) and its local extension. Nevertheless, the clinical target volume (CTV) always encompasses the entire mesorectum, that goes from the peritoneal reflexion line (facing the third sacral vertebrae) to the levator ani muscles. The internal iliac lymph nodes are as well always included in the CTV. The aim of this article is to review the main epidemiological, anatomical, radiological and prognostic factors that are meaningful to define the optimal modalities of conformal radiation of rectal cancers. Definition of target volumes and organs at risk will be discussed, as well as doses and dose-constraints. A case report will be used to illustrate this article. © 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Published by Elsevier Masson SAS. All rights reserved. © 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Published by Elsevier Masson SAS. All rights reserved.
* Correspondance. Adresse e-mail : [email protected] (C. Hennequin) © 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
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1.
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Épidémiologie
Les données récentes épidémiologiques font état de 36 000 nouveaux cas de cancer colorectal par an en France [6,8]. La difficulté provient du fait qu’il n’y a pas d’information fiable permettant une distinction entre cancer colique et rectal dans ces données épidémiologiques. On peut estimer l’incidence annuelle des cancers du rectum à environ 12 000 nouveaux cas par an et la mortalité annuelle autour de 5 000 [4,6]. Les taux de rechute obtenus par chirurgie seule (sans exérèse totale du mésorectum) vont de 10 à 70 % selon la profondeur de l’envahissement pariétal, le statut ganglionnaire et la marge de résection circonférentielle [3]. Deux améliorations majeures ont modifié la prise en charge des cancers du rectum : la chirurgie d’exérèse totale du mésorectum et l’avènement de la chimioradiothérapie préopératoire, qui ont fait régresser les taux de rechute locale. Actuellement, quatre rechutes sur cinq sont métastatiques [2,3,5,7].
2.
4.
Modalités du traitement
4.1. Anatomie du rectum Le rectum se divise en trois portions. Le haut rectum, situé au-delà de 10 cm de la marge anale, est recouvert de péritoine ; les tumeurs qui s’y développent se traitent de la même manière que les tumeurs du côlon sigmoïde. Dans sa portion souspéritonéale, le rectum chemine au travers d’un tissu cellulograisseux, le mésorectum. L’essentiel des ganglions de drainage du rectum est situé dans le mésorectum, d’où le risque accru de récidive si la chirurgie ne résèque pas en entier cette structure. Le mésorectum est donc le site-clé des rechutes des cancers du rectum. Les limites anatomiques du mésorectum sont : — latéralement : lames sacro-recto-génito-pubiennes ; — en arrière : fascia rétrorectal (aponévrose présacrée, sous S3) ; — en avant : vessie et vagin (femme : cloison recto-vaginale) ou prostate (homme : aponévrose de Denonvilliers) ; — en dessous : insertion des releveurs de l’anus (Fig. 1)
Classification
La classification actuelle de référence est celle établie par l’UICC en 2002, qui regroupe les tumeurs en différents stades. Ainsi on distingue : — stade I : envahissement jusqu’à la musculeuse rectale ; — stade II : envahissement de la graisse périrectale et au-delà ; — stade III : envahissement ganglionnaire (N+ , au mieux évalué sur 12 ganglions) ; — stade IV : maladie métastatique (M+ ). On distingue également les tumeurs selon leur position par rapport à la marge anale : — bas rectum : 0 à 5 cm ou mieux < 2 cm du bord supérieur du sphincter ; — moyen rectum : 5 à 10 cm ou mieux 2 à 7 cm du bord supérieur du sphincter ; — haut rectum : 10 à 15 cm ou mieux plus de 7 cm du bord supérieur du sphincter.
Fig. 1. Schéma de l’ampoule rectale. Rectal ampulla.
4.2. Anatomie radiologique : l’IRM est l’examen « clé » 3.
Indications de la radiothérapie
La radiothérapie est au mieux réalisée avant la chirurgie, en combinaison avec une chimiothérapie concomitante par 5-fluoro-uracile ou capécitabine. Elle s’adresse à toutes les tumeurs classées T3-4 (de stade II) ou TxN1 (de stade III) du bas ou du moyen rectum. Les tumeurs du haut rectum ne relèvent pas d’un traitement par irradiation, sauf si elles descendent sur le moyen rectum ou sont fixées à des organes de voisinages par une extension de contiguïté [1]. En cas de tumeur avec facteurs histologiques de risque de récidive locale (T4, N+, résection incomplète), mais n’ayant pas été irradiées avant la chirurgie, une chimioradiothérapie postopératoire doit être réalisée [1].
L’imagerie par résonance magnétique (IRM) pelvienne est l’examen clé pour évaluer l’extension locale des tumeurs rectales. Elle permet l’appréciation de la marge de résection circonférentielle et d’évaluer le statut ganglionnaire. À défaut une écho-endoscopie rectale peut informer sur l’extension en profondeur mais est moins précise pour dépister des adénopathies du mésorectum. La tomographie par émission de positons n’a pas de place à l’heure actuelle dans le bilan d’extension locale des tumeurs du rectum [13]. Pour améliorer la visualisation des volumes cibles, la scanographie dosimétrique doit être réalisé en position de traitement (en décubitus ventral avec bras autour de la tête ou en décubitus dorsal avec bras sur la poitrine). La contention utilise une cale sous les pieds ou les genoux, un matelas de contention est possible mais on déconseille l’utilisation d’un moule thermoformé. L’acquisition va de L4-L5 jusqu’à sous les petits trochanters en coupes de 2 à 5 mm d’épaisseur, et peut comporter une
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opacification rectale ou l’injection de produit de contraste pour améliorer la visualisation de la tumeur primitive et des structures ganglionnaires. Le repérage de la marge anale est recommandé. Un rectum anormalement distendu doit faire refaire l’acquisition [11].
conservatrice), alors il faut définir un volume tumoral macroscopique qui prenne en compte (Fig. 2) : — la tumeur macroscopique (opacification rectale nécessaire) ; — les adénopathies macroscopiques immédiatement péritumorales.
4.3. Détermination des volumes cibles
4.4. Doses prescrites
La détermination du volume cible est liée aux voies d’extension tumorale (transpariétale, via le mésorectum, chaînes iliaques internes), à la localisation tumorale (bas/moyen rectum, extension aux organes de voisinage, à la marge anale…) et aux sites de prédilection de récidive locale (pelvis inférieur et région présacrée) [9,10,11,14].
Le standard actuel en France est une radiothérapie délivrant 45 Gy en fractionnement classique, avec éventuellement un complément de 5,4 Gy dans la tumeur macroscopique. La chirurgie intervient alors cinq à sept semaines après l’irradiation. L’alternative est un schéma hypofractionné délivrant 25 Gy en cinq fractions et cinq jours dans le même volume, suivi par la chirurgie une semaine après [2,5,7].
4.3.1. Volume cible anatomoclinique (CTV) des tumeurs du moyen rectum — Régions périrectale, présacrée, iliaque interne. — Couvrant l’ensemble du mésorectum jusqu’à au moins deux centimètres sous le volume tumoral macroscopique (GTV). — Limites : • en haut : jonction rectosigmoïdienne ou deux cm au-dessus de la tumeur macroscopique ; • en bas : un cm sous la jonction anorectale (insertion des muscles releveurs de l’anus = limite inférieure du mésorectum) ; • latéralement : le fascia recti.
4.3.2. Volume cible anatomo-clinique des tumeurs du bas rectum
4.5. Organes à risque et contraintes de dose Les organes à risque sont principalement l’intestin grêle, la vessie, les têtes et les cols fémoraux. Les contraintes de dose posent peu de problème dans l’irradiation des tumeurs rectales car la dose totale délivrée reste modérée [11]. On retiendra : — intestin grêle : dose maximale de 50 Gy dans quelques dizaines de cm³, sans dépasser 40 Gy dans un grand volume ; — vessie : la dose de 60 Gy ne doit pas être délivrée dans plus de 50 % du volume vésical (V60 < 50 %) ; — têtes, cols fémoraux et grands trochanters : la dose de 50 Gy ne doit pas être délivrée dans plus de 10 % d’un volume osseux délinéé par convention du sommet des têtes fémorales au petit trochanter exclu (V50 10 %) ; — La dose au canal anal est à documenter même s’il n’existe pas actuellement de contrainte de dose précise [12].
— Régions périrectale, présacrée, iliaque interne. — Couvrant l’ensemble du mésorectum. — Limites : • en haut : jonction moyen-haut rectum ; • en bas : un cm sous la jonction anorectale (insertion des releveurs de l’anus = limite inférieure du mésorectum) : inclusion de la partie haute du canal anal ; • prise en compte des fosses ischio-rectales (donc inclusion des muscles releveurs de l’anus), plus ou moins profondément selon l’extension de la tumeur ; • latéralement : le fascia recti.
Habituellement la balistique fait appel à trois ou quatre faisceaux : — trois faisceaux : deux latéraux et un postérieur ; — quatre faisceaux (à préférer en cas de tumeur à développement antérieur) : deux latéraux, un antérieur et un postérieur. Le bénéfice de la radiothérapie tridimensionnelle conformationnelle réside dans la possibilité d’épargner au mieux les organes à risque et de documenter la dose qui leur est délivrée par les histogrammes dose-volume.
4.3.3. Volume cible anatomoclinique ganglionnaire
4.7. Toxicité aiguë et tardive
— Systématiquement : aires iliaques internes (prendre jusqu’à la bifurcation iliaque interne-externe). — Pas d’irradiation systématique des ganglions iliaques externes ou inguinaux. — Irradiation élective des ganglions : • iliaques externes : extension au-delà du fascia du mésorectum, extension aux organes adjacents (prostate, vagin, utérus, vessie) ; • ganglions inguinaux : à discuter en cas d’extension au canal anal, ou au tiers inférieur du vagin. Si un complément d’irradiation est prévu (en vue d’augmenter la régression tumorale et de permettre une chirurgie
La toxicité aiguë est essentiellement marquée par une rectite radique aiguë en général modérée. La toxicité tardive est modérée en raison : — de la limitation des doses à environ 45-50 Gy ; — de l’irradiation en situation préopératoire : • le rectum est enlevé par la suite ; • le rectum refoule les anses grêles hors du volume cible ; • la mobilité grêle est améliorée en l’absence de chirurgie antérieure. On peut observer cependant de rares cas de grêle radique. Des fractures post-radiques tardives peuvent également être observées.
4.6. Balistique, dosimétrie
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5.
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Cas clinique commenté
Il s’agissait d’un homme de 65 ans, en bon état général (indice de performance de 1 selon l’OMS), ayant comme seul antécédents un glaucome chronique traité par ß-bloquant en collyre. Des rectorragies et des troubles du transit étaient associés à une perte de cinq kg en six mois (70 kg à ce jour), qui ont fait découvrir une tumeur du moyen rectum. La coloscopie a trouvé une tumeur sténosante débutant à six cm de la marge anale, remontant sur dix cm, sans autre lésion sur le cadre colique. Il s’agissait d’un adénocarcinome lieberkühnien infiltrant moyennement différencié. À l’examen clinique, il n’existait pas d’argument en faveur d’une extension à distance, les aires ganglionnaires étaient libres et le toucher rectal retrouvait la lésion décrite par l’endoscopiste. Le bilan d’extension à distance (tomodensitométrie thoraco-abdomino-pelvienne avec injection) était normal, l’IRM pelvienne a permis de classer la tumeur T3N1 (Fig. 3). Le traitement proposé en réunion de concertation pluridisciplinaire reposait sur une association radiothérapie
préopératoire délivrant 45 Gy en fractions de 1,8 Gy et de chimiothérapie concomitante à base de 5-fluoro-uracile suivie cinq semaines après d’une chirurgie avec exérèse totale du mésorectum. La délinéation des volume-cibles et la dosimétrie sont présentées (Fig. 4). Le traitement a été réalisé en décubitus ventral par quatre faisceaux. Il a été privilégié quatre faisceaux et non trois en raison du développement antérieur de la tumeur. La couverture du volume cible anatomoclinique aurait été imparfaite en l’absence de faisceau antérieur. La technique conformationelle permettait un traitement optimal dans le cas de ces tumeurs évoluées, en protégeant les organes à risque. Ici la vessie était proche de la tumeur, mais a pu être largement protégée.
Conflit d’intérêts Les auteurs n’ont déclaré aucun conflit d’intérêts pour cet article.
Fig. 2. Volume-cible et organes à risque dans le cas d’une tumeur du moyen rectum. Volume tumoral macroscopique (GTV) en rouge, volume cible anatomoclinique (CTV) en violet mauve, vessie en jaune, tube digestif en vert, têtes fémorales droite en bleu et gauche en jaune pâle. Target volume and at-risk organs in a tumor of the mid-rectum. Gross tumor volume (GTV), red; clinical target volume, light purple; bladder, yellow; digestive tube, green; right femoral heads, blue; left femoral head, light yellow.
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Fig. 2. (suite) Volume-cible et organes à risque dans le cas d’une tumeur du moyen rectum. Volume tumoral macroscopique (GTV) en rouge, volume cible anatomoclinique (CTV) en violet mauve, vessie en jaune, tube digestif en vert, têtes fémorales droite en bleu et gauche en jaune pâle. Target volume and at-risk organs in a tumor of the mid-rectum. Gross tumor volume (GTV), red; clinical target volume, light purple; bladder, yellow; digestive tube, green; right femoral heads, blue; left femoral head, light yellow.
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Fig. 3. IRM pelvienne : Adénocarcinome rectal classé T3N1. Pelvic MRI: T3N1 rectal adenocarcinoma.
Fig. 4. Contourage des volume-cibles et des organes à risque : volume tumoral macroscopique (GTV) en rouge, volume cible anatomo-clinique (CTV) en violet, canal anal en vert, vessie en jaune, intestin grêle en vert pomme, sigmoïde en rose, têtes fémorales en orange ; dosimétrie dans les trois plans de l’espace et histogrammes dose-volume. Delineation of at-risk organ volume : GTV, red; CTV, purple; anal canal green; bladder, yellow; small intestine, bright green; sigmoid, pink; femoral heads, orange. Dosimetry in three planes and dose-volume histograms.
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Fig. 4. (suite) Contourage des volume-cibles et des organes à risque : volume tumoral macroscopique (GTV) en rouge, volume cible anatomo-clinique (CTV) en violet, canal anal en vert, vessie en jaune, intestin grêle en vert pomme, sigmoïde en rose, têtes fémorales en orange ; dosimétrie dans les trois plans de l’espace et histogrammes dose-volume. Delineation of at-risk organ volume : GTV, red; CTV, purple; anal canal green; bladder, yellow; small intestine, bright green; sigmoid, pink; femoral heads, orange. Dosimetry in three planes and dose-volume histograms.
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Fig. 4. (suite) Contourage des volume-cibles et des organes à risque : volume tumoral macroscopique (GTV) en rouge, volume cible anatomo-clinique (CTV) en violet, canal anal en vert, vessie en jaune, intestin grêle en vert pomme, sigmoïde en rose, têtes fémorales en orange ; dosimétrie dans les trois plans de l’espace et histogrammes dose-volume. La première et la dernière coupe présentées sont respectivement la coupe inférieure et la coupe supérieure du volume cible anatomo-clinique. Balistique et histogramme dose-volume. Delineation of at-risk organ volume : GTV, red; CTV, purple; anal canal green; bladder, yellow; small intestine, bright green; sigmoid, pink; femoral heads, orange. Dosimetry in three planes and dose-volume histograms. The first and the last view presented are inferior and superior views, respectively, of the clinical target volume. Treatment beams and dosevolume histograms.
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Fig. 4. (suite) Dosimétrie et balistique Dosimetry and treatment beams.
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Cancer du canal anal Anal cancer M. Fesneaua, É. Champeaux-Orangea, b, C. Hennequinc,* a
Service de radiothérapie, Centre régional universitaire de cancérologie Henry-S.-Kaplan CHU de Tours, Hôpital Bretonneau, 2 Boulevard Tonnellé, 37000 Tours, France. Service d’oncologie-radiothérapie, Centre hospitalier régional d’Orléans 14 avenue de l’hôpital 45100 Orléans, France. c Service de cancérologie-radiothérapie, hôpital Saint-Louis, 1 avenue Claude-Vellefaux 75475 Paris, France. b
RÉSUMÉ Mots clés : Cancer du canal anal Radiothérapie conformationnelle Volumes cibles Atlas
Les cancers du canal anal représentent 1,2 % des cancers digestifs, et 6 % des cancers ano-rectaux. Lorsqu’ils sont localisés, le traitement de référence repose sur la radiothérapie associée ou non à la chimiothérapie par 5-fluoro-uracile et cisplatine ou mitomycine selon le stade. La dose préconisée est de 45 Gy dans le canal anal, le mésorectum, les ganglions pararectaux, les ganglions inguinaux droits et gauches. Un complément de dose de 15 à 20 Gy est ensuite délivré dans la tumeur résiduelle en cas de bonne réponse. Dans le cas contraire, une chirurgie de type amputation abdomino-pelvienne est envisagée. Les organes à risque à prendre en considération sont la vessie, les têtes fémorales, l’intestin grêle et la vulve. L’objectif de ce travail est de préciser les particularités épidémiologiques, radioanatomiques, le pronostic de ce type de tumeur et les modalités de l’irradiation conformationnelle, illustrés par un cas clinique. © 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
ABSTRACT
Keywords: Anal cancer Conformal radiotherapy Target volumes Atlas
Anal canal epidermoid carcinomas represent 1.2% of digestive cancers and 6% of ano-rectal cancers. For localized diseases, the treatment is based on radiotherapy with or without chemotherapy (5-FU and cisplatin or mitomycin), according to tumour and nodal extension. The recommended treatment dose is 45 Gy in the anal canal, the mesorectum, pararectal lymph nodes, and inguinal lymph nodes. An additional dose of 15 to 20 Gy is delivered in the initial tumour for good responders. Salvage surgery is necessary in case of poor response. The organs at risk to be considered are bladder, femur heads, small intestine and vulva. The objective of this work is to summarize the epidemiological and radio-anatomic and prognostic characteristics of this tumour. The conformal radiotherapy technique is illustrated by a case report. © 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Published by Elsevier Masson SAS. All rights reserved.
1.
Généralités – Épidémiologie
Le canal anal est la partie terminale du tube digestif mesurant trois à quatre centimètres située entre le rectum et la peau de la marge de l’anus. Les tumeurs de la marge anale sont classées avec les tumeurs cutanées (selon l’OMS). Le traitement vise à obtenir
le meilleur taux de contrôle local en conservant un sphincter fonctionnel. Les cancers du canal anal sont rares, ils prédominent chez la femme (sex ratio de 0,4 à 4,4 en France) [2]. Ils représentent 1,2 % des cancers digestifs, et 6 % des cancers ano-rectaux et leur incidence est en augmentation [2,17]. Deux tiers des patients ont
* Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (C. Hennequin) Les Drs Fesneau et Champeaux-Orange ont participé à part égale au travail en tant que co-auteurs de cet article. © 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
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plus de 65 ans [9]. Les carcinomes épidermoïdes représentent 95 % des cas de cancers du canal anal. Seuls 5 % sont métastatiques au moment du diagnostic [9]. Outre le sexe féminin et l’âge, l’homosexualité, les infections par le virus de l’immunodéficience humaine et le tabagisme sont des facteurs de risque.
2.
Anatomopathologie ; classification TNM
On distingue les carcinomes épidermoïdes des autres formes : — cancers épidermoïdes : • à grandes cellules kératinisant ; • non kératinisant (transitionnel) ; • basaloïde ; — adénocarcinomes • de type rectal - glandes anales ; • sur fistule anorectale ; — carcinomes à petites cellules ; — carcinomes indifférenciés ; — autres tumeurs (sarcomes-lymphomes-mélanomes…). Les carcinomes épidermoïdes, plus ou moins différenciés et kératinisants représentent 60 à 80 % des cas. Les cancers cloacogéniques (ou transitionnels ou basaloïdes) naissant de la muqueuse transitionnelle constituent 8 à 10 % des cas. Ils ne semblent pas avoir un pronostic plus défavorable que les autres types histologiques. Les adénocarcinomes, représentant 7 à 9 % des cas, naissent à partir d’îlots glandulaires de la muqueuse. Les formes évoluées sont difficiles à distinguer des adénocarcinomes rectaux à extension canalaire. Sont encore plus rares, les carcinomes adénosquameux, les carcinomes colloïdes muqueux à forme fistuleuse et les mélanomes malins. La classification TNM est résumée dans le tableau 1. Tableau 1 Classification TNM (UICC 6e édition 2002) Tumeur primitive T1 : tumeur 2 cm dans sa plus grande dimension T2 : tumeur > 2 cm mais 5 cm dans sa plus grande dimension (de 21 mm à 50 mm) T3 : tumeur > 5 cm dans sa plus grande dimension T4 : tumeur, quelle que soit sa taille, qui envahit un ou plusieurs organes adjacents (vagin, urètre, vessie) à l’exception du rectum, de la peau périnéale, du tissu cellulaire sous-cutané et du sphincter. Adénopathies régionales (N) Nx : ganglions non évalués N0 : pas de métastase ganglionnaire N1 : ganglions périrectaux N2 : ganglions iliaque interne et/ou inguinal unilatéraux N3 : ganglions périrectaux et inguinaux et/ou iliaques internes bilatéraux et/ou inguinaux bilatéraux. NB : nombre de ganglions à examiner histologiquement : au moins 12 sur un curage péri-rectal et pelvien ou au moins 6 sur un curage inguinal. Si les ganglions examinés sont indemnes, même si ce nombre n’est pas atteint, classer pN0. Métastases à distance (M) MX : non évaluées M0 : pas de métastase M1 : métastases à distance
3.
S121
Indications de la radiothérapie
La radiothérapie à visée curative des cancers du canal anal avec conservation du sphincter a été développée, entre autres, par Papillon, dans les années 1980. Elle a montré sa capacité à contrôler efficacement la maladie locale, et donc à garder un sphincter fonctionnel. Par rapport au traitement chirurgical, elle offre une survie globale comparable mais avec de meilleurs résultats fonctionnels. Ainsi, depuis ces résultats, la radiothérapie est le traitement standard à visée curative des carcinomes épidermoïdes du canal anal [1,3,8,12,18,20,21,26,28]. Celle-ci se déroule en deux temps, un premier consistant en une irradiation pelvienne large, un deuxième en un complément localisé à la tumeur selon plusieurs modalités. L’efficacité d’une chimioradiothérapie à visée curative a été démontrée en termes de survie sans rechute et de survie sans colostomie dans des séries rétrospectives [4,5,11,13-16,19,23-25] et dans trois études prospectives randomisées avec l’association 5-fluoro-uracile et mitomycine [1,10,28]. La chimioradiothérapie concomitante est considérée comme un standard thérapeutique des formes localement évoluées (classées T3–T4, T2 ≥ 4 cm de longueur, ou tout T avec envahissement ganglionnaire). En ce qui concerne l’intérêt d’une chimiothérapie néoadjuvante et d’une escalade de dose pour le traitement des carcinomes épidermoïdes du canal anal localement évolués, les résultats préliminaires de l’essai accord 03 ont été présentés en 2008 [22]. Cette première analyse ne montrait pas de bénéfice en termes de contrôle local et de survie.
4.
Modalités de la radiothérapie
4.1. Acquisition des données anatomiques Elle doit être réalisée de façon conformationnelle en trois dimensions avec simulation virtuelle. La scanographie de dosimétrie est réalisée en décubitus dorsal, mains croisées sur la poitrine avec cale-pieds et billot sous les genoux, avec injection de produit de contraste sous réserve d’une clairance correcte de la créatinine. Il est souhaitable d’opacifier le grêle par l’ingestion d’un faible volume d’eau. Un repère est placé au niveau de la marge anale. L’acquisition scanographique est faite de L3 jusqu’à un cm sous les petits trochanters en coupes jointives de 2,5 à 5 mm. En cas de distension rectale, la scanographie doit être répétée.
4.2. Détermination des volumes cibles Les volumes cibles sont le canal anal et les aires ganglionnaires pararectales, iliaques internes et externes et inguinales droites et gauches. Le volume tumoral macroscopique (GTV) correspond à la tumeur, à ses extensions macroscopiques locales et aux adénomégalies visualisées sur l’imagerie. Le volume cible anatomoclinique (CTV) correspond au canal anal en totalité et aux aires ganglionnaires ilio-obturatrices bilatérales et inguinales bilatérales. Une marge d’un cm (pour obtenir le volume cible prévisionnel, PTV) est requise dans toutes les directions mais ces extensions restent variables selon les centres.
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4.3. Doses prescrites aux points ICRU (International Commission on Radiation Unists and Measurements) L’irradiation se déroule en deux temps : le premier temps consiste en une radiothérapie externe de la tumeur et des aires ganglionnaires. Le deuxième temps d’irradiation, réalisé trois à quatre semaines après la fin du premier temps, est réalisé par curiethérapie ou par radiothérapie externe. Ce délai permet la régression tumorale et la cicatrisation des tissus sains au niveau du périnée. Les doses habituellement recommandées sont de 45 à 50 Gy dans le pelvis et les aires ganglionnaires ilio-obturatrices. Un complément de 15 à 20 Gy est délivré dans la tumeur résiduelle (volume réduit). En ce qui concerne les aires ganglionnaires inguinales, l’irradiation prophylactique est de 45 Gy avec un complément de 15 Gy en cas d’atteinte macroscopique. Le fractionnement est classique, 1,8 à 2 Gy par fraction, cinq fractions hebdomadaires. Selon les recommandations de l’ICRU, 95 % du volume cible prévisionnel doivent recevoir au moins 95 % de la dose, 98 % du volume cible prévisionnel doivent recevoir au moins 90 % de la dose et 3 % du volume ne doivent pas recevoir plus de 107 % de la dose.
4.4. Organes à risque et contraintes de doses [24,25] Les organes à risque sont l’intestin grêle, la vessie, la vulve et les grandes lèvres, la tête, les cols fémoraux et les grands trochanters.
4.5. Dosimétrie Le traitement doit être réalisé aux photons > 10 MV avec protection des organes à risque par caches personnalisés ou utilisation du collimateur multilame. Il comporte en règle deux temps : — 1er temps : volume pelvien incluant le canal anal et les aires ganglionnaires ilio-obturatrices, et inguinales bilatérales ; — 2 e temps : complément limité à la tumeur et aux adénomégalies. Pour le volume pelvien, la technique habituellement retenue est isocentrique, avec optimisation de la balistique et des pondérations en considérant la dose aux volumes à irradier et les contraintes de dose aux organes à risque. Pour le complément d’irradiation, la même technique peut être utilisée avec des faisceaux réduits ou bien une curiethérapie.
5.
Toxicité de la radiothérapie
5.1. Toxicité aiguë Ce sont les manifestations survenant jusqu’au 90e jour de la fin de la radiothérapie (définition du Radiation Therapy Oncology Group). Elles sont fréquentes mais, en général, mineures. Sont concernés par la toxicité : les muqueuses, la peau, le système digestif et urinaire. Par conséquent, la toxicité précoce la plus fréquemment rencontrée est une épithéliite, une anite, une mucite, une diarrhée et les troubles urinaires à type de cystite.
5.2. Toxicité tardive 4.4.1. Intestin grêle C’est l’un des organes à risque important à protéger. Sa protection est d’autant plus importante qu’une chimiothérapie est associée. C’est un organe extrêmement mobile d’un jour sur l’autre et souvent difficile à visualiser et à délinéer sur les scanographies de dosimétrie. La dose maximale est de 50 Gy dans quelques dizaines de cm3. Dans un grand volume, il est recommandé de ne pas dépasser 40 Gy.
4.4.2. Vessie La dose de 60 Gy ne doit pas être délivrée dans plus de 50 % du volume vésical (V60 ≤ 50 %). Cette dose ne devrait pas être atteinte dans cette procédure. L’urètre et le méat urinaire doivent être protégés chez la femme.
4.4.3. Vulve et grandes lèvres La vulve et les grandes lèvres, qui sont habituellement en dehors du volume cible, doivent être protégées au maximum.
Ce sont les manifestations survenant plus de trois mois de la fin de la radiothérapie (définition du Radiation Therapy Oncology Group, RTOG). Ces effets peuvent être très tardifs mais le délai moyen de leur survenue est de deux ans. Ils ne sont pas forcément précédés de manifestations aiguës bruyantes. Il s’agit essentiellement des complications cutanées à type de nécrose ou d’ulcération. Ils sont actuellement en diminution grâce à l’amélioration des techniques de radiothérapie. Deniau et al. ont rapporté en 2003 et 2006 des taux respectivement de 3 et 6 % [6,7]. Des rectites accompagnées de rectorragies ont aussi été décrites. Enfin, une altération sévère de la fonction sphinctérienne anale est possible, liée aux dommages provoqués par la radiothérapie et la lésion tumorale primitive, ce d’autant que la lésion initiale est volumineuse. Dans la série de Deniau et al. publiée en 2006, le taux de conservation du sphincter était de 23 % pour les tumeurs classées T4 [7]. La CTCAE [27] (Tableau 2) (Common Terminology Criteria for Adverse Events version 3), est actuellement volontiers utilisée sans besoin de différenciation entre la toxicité aiguë et la toxicité tardive.
4.4.4. Têtes, cols fémoraux et grands trochanters
6.
Cas clinique commenté
La dose de 50 Gy ne doit pas être délivrée dans plus de 10 % d’un volume osseux, délinéé par convention du sommet des têtes fémorales au petit trochanter exclu (V 50 ≤ 10 %).
M. B., 49 ans, a consulté pour des douleurs anales et des rectorragies évoluant depuis plusieurs mois. Il avait comme seuls antécédents une appendicectomie et une intoxication
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Tableau 2 Classification CTCAE v3.0 . Grade 0
Pas de symptomatologie
Grade 1
N’affecte pas l’activité quotidienne habituelle du patient. Signes ou symptômes ne nécessitant le plus souvent aucun traitement.
Grade 2
Perturbe l’activité quotidienne habituelle du patient. nécessite le plus souvent un traitement médical ambulatoire sans interruption du traitement par irradiation.
Grade 3
Empêche l’activité quotidienne du patient. Nécessite un traitement avec hospitalisation et/ou un arrêt du traitement supérieur ou égal à 4j
Grade 4
Menace le pronostic vital. Impose des mesures de réanimation
Grade 5
Toxicité responsable du décès
alcoolo-tabagique non sevrée. Le toucher rectal retrouvait une lésion du canal anal de 4 cm de hauteur, à droite, occupant les trois-quarts de la circonférence. Des explorations ont alors été réalisées : la coloscopie a mis en évidence une lésion ulcérovégétante sus-anale droite hémi-circonférentielle étendue sur 3 à 4 cm de hauteur dont les biopsies étaient en faveur d’un carcinome épidermoïde moyennement différencié non kératinisant infiltrant. Une IRM rectale a montré la présence d’une lésion circonférentielle du bas rectum mesurant 5,1 cm de hauteur et descendant jusqu’à trois centimètres de la marge anale avec effraction
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musculaire antérieure (disparition localisée de l’espace inter rectoprostatique droit) et deux adénomégalies infra-centimétriques (présacrée et avant du promontoire). Un bilan d’extension comprenant une scanographie thoraco-abdomino-pelvienne n’a pas retrouvé de localisation secondaires a distance. Enfin, le dosage du SCC (squamous cell carcinoma) retrouvait une concentration de 2,1 ng/ml pour une normale inférieure à 1,5. Il s’agissait donc d’un cancer de stade T3 N0 M0 pour lequel une radiothérapie associée à une chimiothérapie concomitante par trois cycles de 5– fluroro-uracile et mitomycine ont été recommandées. La radiothérapie est réalisée sur un mode conformationnel avec simulation virtuelle à l’aide d’une scanographie de dosimétrie injectée en coupes jointives de 2,5 mm. Les contours des volumes d’intérêt et des organes à risque sont présentés (Figs. 1 et 2). La dose prescrite au point ICRU était de 45 Gy, le volume cible incluait le canal anal, mésorectum, ganglions pararectaux, inguinaux droits et gauches. Le traitement est réalisé à raison de cinq séances de 1,8 Gy par semaine par des photons de 25 MV pour le faisceau antérieur et 6 MV pour le faisceau postérieur. Le volume a été traité par deux faisceaux, antéro-postérieurs, couvrant le même volume (volume cible prévisionnel tumoral et ganglionnaire). La dosimétrie et les histogrammes dose-volume sont présentés (Fig. 3). Les contraintes de dose pour la vessie, les têtes fémorales et l’intestin grêle ont été respectées avec une bonne couverture du volume cible prévisionnel. Quatre semaines après la fin de ce traitement, un complément d’irradiation de 15 Gy a été délivré dans la tumeur par curiethérapie de débit pulsé.
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DDA faisceau antérieur
DDA faisceau postérieur
Fig 1. Délinéation des volumes cibles et DRR (digital reconstructed radiography) des champs pelviens incluant les aires ganglionnaires. Target volumes delineation and DRR of the pelvic fields including the lymph nodes.
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vue sagittale sagittal view
vues axiales axial view
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vue coronale coronal view
Fig 2. Dosimétrie. Dosimetry.
Fig 3. Histogrammes dose-volume. Dose-volume histograms.
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Conclusion
La radiothérapie, associée à la chimiothérapie pour les tumeurs localement évoluées, est le traitement de référence des cancers du canal anal. La tolérance à la radiothérapie, délivrée de façon conformationnelle avec respect des contraintes de dose, est correcte. Ce traitement conservateur permet de bons résultats à long terme, tant sur le plan carcinologique que fonctionnel.
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Conflits d’intérêts [16]
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Cancer/ R adi o t hérapie 14 Suppl . 1 (2010) S127– S135
Cancer du sein sans atteinte ganglionnaire axillaire Early breast cancer without axillary lymph node involvement I. Ghorbela,b, S. Kanouna,c, A. Kallela,d, A. Belaida,b, F. Azourya, S. Heymanna, C. Pichenote, R. Verstraete, H. Marsigliaa,f, C. Bourgiera,* a Département
de Radiothérapie, Unité fonctionnelle de Sénologie, institut Gustave-Roussy, Villejuif, France. de Radiothérapie Carcinologique, institut Salah-Azaiz. Tunis, Tunisie. c Service de Radiothérapie, hôpital Farhat-Hached, Sousse, Tunisie. d Service de Radiothérapie, clinique Ennasr, Tunis, Tunisie. e Département de Physique, institut Gustave-Roussy, Villejuif, France. f Université de Florence, Italie. b Service
INFO ARTICLE
RÉSUMÉ
Les figures 1, 8, 10, 11, 12, 14, 16, 17, 18, 19, 21, 22, 23, 26, 28, 29, 31, 32, 34, 36 sont visibles uniquement sur : http : //www.sciencedirect.com/
Le cancer du sein est le premier cancer chez la femme en France (incidence en l’an 2000 : 88,9 pour 100,000 femmes). Grâce au dépistage, le diagnostic des cancers du sein est plus précoce, permettant ainsi la réalisation d’un traitement local conservateur par tumorectomie, ganglion sentinelle/ curage axillaire et irradiation. Cette dernière consiste en l’irradiation de l’ensemble de la glande mammaire de 50 Gy avec un complément (« boost ») dans le lit de tumorectomie de 16 Gy. L’irradiation tridimensionnelle conformationnelle est indispensable pour optimiser l’irradiation des volumes cibles (glande mammaire et lit de tumorectomie) et pour épargner les tissus sains (poumon, cœur). L’objectif de ce travail est de préciser les particularités épidémiologiques et radio-anatomiques, les facteurs pronostiques et enfin, les modalités de l’irradiation conformationnelle du cancer du sein sans atteinte axillaire ; illustrés par un cas clinique.
Mots clés : Cancer du sein Radiothérapie conformationnelle Volumes cibles Atlas
© 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
ABSTRACT Keywords: Early breast cancer Conformal irradiation Target volumes Atlas
Breast cancer is the most common cancer in women. In France, breast cancer incidence was 88.9 per 100,000 women in 2000. Early detection of breast tumours by screening mammography allows a breast conserving treatment, i.e., breast irradiation preceded by a lumpectomy and a sentinel node biopsy. The standard irradiation of early breast cancers consists in delivering 50 Gy to the whole breast in 2 Gy fractions over a five-week period followed by an additional dose targeting the tumour bed of 16 Gy in eight fractions. The 3D-conformal treatment planning optimizes dose distribution to the whole breast and to the tumour bed and lessens the normal tissue irradiation (heart and ipsilateral lung). The aim of this article is to describe epidemiologic, radio anatomic and prognostic features of early stage breast cancer and to propose guidelines for 3D-conformal treatment planning in early breast cancers. This review is illustrated by a case report. © 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Published by Elsevier Masson SAS. All rights reserved. © 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Published by Elsevier Masson SAS. All rights reserved.
* Correspondance. Adresse e-mail : [email protected] (C. Bourgier) © 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
S128
1.
I. Ghorbel et al./ Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S127–S135
Épidémiologie
2.1. Indications de la radiothérapie
Le cancer du sein est le cancer le plus fréquent chez la
2.1.1. Facteurs de risque de récidive locale
femme avec plus d’un million de nouveaux cas par an dans le monde, soit 22 % de l’ensemble des cancers diagnostiqués chez la femme et un taux d’incidence standardisé sur la population mondiale de 88,9 pour 100 000 femmes. Il s’agit du cancer le plus fréquemment observé, avec une incidence de 35,7 % des cancers féminins en 2000 [51]. En France, l’incidence augmente avec 42,000 nouveaux cas de cancers du sein invasifs en 2000 contre 35,000 en 1995 [40, 51]. Il représente la première cause de décès par cancer dans le monde avec plus de 370,000 par an, soit 14 % des décès par cancer chez les femmes avec un taux de mortalité standardisé sur la population mondiale de 19,7 pour 100,000 [2, 51]. En France, c’est également la première cause de décès par cancer chez la femme, avec 11,637 en 2000 [51]. Le taux de mortalité augmente en particulier dans la tranche d’âge 50-80 ans avec un rapport incidence/mortalité de 3,7 [40]. Ce rapport incidence/mortalité reflète l’amélioration du dépistage et des thérapeutiques [40]. En France, le dépistage par mammographie du cancer du sein a débuté en 1980 et ne concernait que certains départements pour finalement se généraliser depuis 2004 [46]. Ce dépistage systématique concerne les femmes âgées de 50 à 74 ans et consiste en une mammographie de contrôle tous les deux ans [46] avec des indices de performance proches des recommandations du programme Europe contre le cancer [18, 47] : en 2003, le taux de prévalence des carcinomes intracanalaires était de 14,3 % et celui d’incidence de 14,5 % avec des recommandations européennes de l’ordre de 10 à 20 % des cancers [18, 47]. En 2003, le programme de dépistage a permis de détecter 35,3 % des cancers invasifs de taille inférieure ou égale à dix millimètres parmi tous les cancers diagnostiqués, dont 71 % de cancers sans atteinte ganglionnaire [18, 47]. La détection précoce des cancers du sein grâce à la politique du dépistage systématique contribue à la baisse de la mortalité spécifique du cancer du sein [9] en plus de l’amélioration des possibilités thérapeutiques.
2.
Classification La nouvelle classification clinique TNM/AJCC des cancers du
La récidive loco-régionale est un facteur de risque indépendant de survenue de métastases à distance et de mortalité par cancer. C’est par conséquent une des complications les plus redoutées après traitement conservateur [54]. De nombreux paramètres cliniques et histologiques ont été jusqu’à présent décrits comme facteurs de risque de récidive locale, dont les principaux sont la jeunesse de la patiente, les marges d’exérèse incomplètes, une composante intracanalaire extensive [3, 22, 4, 34], mais aussi un grade histologique élevé, la présence d’engainements périnerveux ou d’emboles vasculaires, la taille tumorale [13, 25, 28, 38]. Toutefois, aucun d’entre eux ne permet actuellement d’individualiser une population à haut risque de récidive locale. Il en est de même pour l’utilisation de nomogramme (IBTR, Ipsilateral Breast Tumor Reccurence) qui n’est correct que pour la population à faible risque de récidive [45, 52]. D’autres outils sont nécessaires, en particulier, des outils prédictifs et pronostiques biologiques. Récemment, la classification intrinsèque par Tissue-Micro-Array, i.e. cancers du sein de type luminal A et B, basal-like ou surexprimant l’oncoprotéine Her2, met en exergue un risque de récidive locale plus grand dans le sous-type basal-like ou surexprimant Her2 [41]. D’autres signatures génomiques, telles que « Wound Signature », permettraient également d’individualiser une population à haut risque de récidive locale [42].
2.1.2. Irradiation de l’ensemble de la glande mammaire Depuis de nombreuses années, le traitement de référence des cancers du sein de stade précoce est le traitement conservateur par tumorectomie, ganglion sentinelle/curage axillaire et irradiation postopératoire de l’ensemble de la glande mammaire de 50 Gy, en 25 fractions et cinq semaines [14]. De nombreux essais ont comparé traitement conservateur et mastectomie tels que le B06 du NASBP (National Surgical Adjuvant Breast and Bowel Project) et l’essai randomisé mené par Veronesi et al. Ces essais ne montrent aucune différence en termes de survie globale à 20 ans [24, 53]. La radiothérapie adjuvante des cancers de petit stade joue un rôle majeur dans leur contrôle local en réduisant le risque relatif de récidive locale de 66 %. Ainsi, ce gain de 20 % sur le risque de récidive locale à 15 ans se traduit par une diminution du taux de mortalité spécifique de 5.1 %. Plus concrètement, pour quatre rechutes locales après cinq ans, un décès sera évité après 15 ans [14].
sein de 2002 [47] tient compte de la clinique et de l’histologie. La classification clinique est résumée dans le tableau 1. La classification histopathologique est individualisée par le préfixe « p » : (i) pT pour tumeur primitive dont la classification pT est superposable à la classification T et ne mesure que la taille de la tumeur avec une composante invasive. Par exemple, s’il existe une tumeur de grande taille mais avec une faible composante invasive (< 5 mm), la tumeur est alors codée pT1a. En cas de chimiothérapie néo-adjuvante le préfixe « y » est utilisé ; (ii) pN pour adénopathies régionales (Tableau 2) dont la classification est réalisée d’après l’analyse de l’exploration ganglionnaire axillaire (curage axillaire avec ou sans exploration du ganglion sentinelle). Si seule l’exploration du ganglion sentinelle a été effectuée, on lui assigne les lettres (sn) pour « ganglion sentinelle ».
2.1.3. Irradiation du lit de tumorectomie Historiquement, d’après des modélisations mathématiques, il a été montré dès 1985 qu’au-delà de 35 Gy délivrés dans le sein, l’apport d’un complément de dose de 15 Gy diminuait de 2/3 le risque de récidive locale des cancers du sein [5]. Plus récemment, l’essai de l’EORTC (European Organization for Research and Treatment of Cancer) 22881-10882 a démontré qu’un complément d’irradiation de 16 Gy dans le lit de tumorectomie permettait un meilleur contrôle local. En effet, à tout âge, cette irradiation focalisée sur le lit de tumorectomie diminuait de 50 % le risque de récidive locale à cinq et dix ans (à cinq ans, taux cumulatifs d’incidence de rechute locale de 7,3 % contre 4,3 % pour les patientes respectivement sans et avec boost [8] et à 10 ans, taux de récidive
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S129
Tableau 1 Classification TNM TNM classification. Tumeur primitive (T) Tx
La tumeur primitive ne peut être évaluée
T0
Absence de tumeur primitive décelable
Tis
Carcinome in situ
T1 Soit, T ≤ 2 cm dans sa plus grande dimension
T1 mic
micro-invasion ≤ 0,1 cm dans sa plus grande dimension
T1a
0,1 cm < T ≤ 0,5 cm dans sa plus grande dimension
T1b
0,5 cm < T ≤ 1 cm dans sa plus grande dimension
T1c
1 cm < T ≤ 2 cm dans sa plus grande dimension
T2
2 cm < T ≤ 5 cm dans sa plus grande dimension
T3
T > 5 cm dans sa plus grande dimension
T4 Soit, tumeur de toute taille avec extension directe à la paroi thoracique (a) ou à la peau (b)
T4a
extension à la paroi thoracique sans inclusion du muscle pectoral
T4b
œdème (y compris peau d’orange) ou ulcération de la peau du sein ou nodule de perméation cutané localisé sur le même sein
T4c
association T4a et T4b
T4d
carcinome inflammatoire
Adénopathies régionales (N) Nx
Les adénopathies régionales ne peuvent être évaluées
N0
Absence d’adénopathie régionale métastatique
N1
Adénopathie(s) métastatique(s) axillaire(s), homolatérale(s) mobile(s)
N2 Adénopathies métastatiques axillaires homolatérales fixées entre elles ou indurées
N2a
Adénopathies métastatiques axillaires homo latérales fixées entre elles ou à une autre structure
N2b
Adénopathies métastatiques mammaires internes homo latérales mis en évidence au travers des techniques d’imageries (sauf lympho-scintigraphie)
N3 Adénopathies métastatiques infra claviculaires homolatérales
N3a
Adénopathies métastatiques infra-claviculaires homo latérales avec ou sans adénopathies métastatiques axillaires ou adénopathies métastatiques mammaires internes
N3b
Adénopathies métastatiques mammaires internes homo latérales avec adénopathies métastatiques axillaires
N3c
Adénopathies métastatiques supra-claviculaires homo latérales
Mx
Les métastases à distance ne peuvent être évaluées
M0
Absence de métastases à distance
M1
Existence de métastases à distance
Métastases à distance (M)
locale de 10,2 % contre 6,2 % respectivement avec et sans boost [17, 23, 44]. La différence était plus forte pour les patientes de moins de 40 ans [8, 17, 23]. L’étude « Young boost », en cours, compare des boosts de 26 Gy et de 16 Gy chez les patientes de mois de 50 ans atteintes de cancer du sein à haut risque de récidive locale [7].
de traitement avec un pas de coupes de 2 à 4 mm, allant de la mandibule jusqu’en dessous des coupoles diaphragmatiques.
2.2. Modalités de l’irradiation tridimensionnelle conformationnelle dans les cancers du sein de stade précoces
2.2.2.1. La glande mammaire en totalité (Fig. 1)
2.2.1. Positionnement de la patiente et acquisition des images pour la planification de l’irradiation tridimensionnelle conformationnelle La position de traitement de la patiente consiste à placer celle-ci en decubitus dorsal sur un plan incliné, les deux bras relevés au-dessus de la tête. Une scannographie dosimétrique sans injection de produit de contraste est alors réalisée en position
2.2.2. Radio anatomie du sein et du lit de tumorectomie – Détermination des volumes cibles
Le volume mammaire est défini cliniquement et radiologiquement. Les contours cliniques du sein sont repérés par la palpation et matérialisés par des fils radio-opaques (Fig. 1), repères utiles facilitant la délinéation de la glande mammaire sur les coupes scanographiques [27]. Le volume cible anatomoclinique (CTV, Clinical Target Volume) de la glande mammaire (Figs. 2-6) est délimité par : — (I) en avant, 5 mm en dessous du contour cutané ; — (II) en arrière, la face supérieure du muscle pectoral et des côtes ;
S130
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Tableau 2 Classification histopathologique du statut ganglionnaire. Histopathologic node involvement classification. pNx
Les adénopathies régionales ne peuvent être évaluées
pN0
Absence d’adénopathie régionale métastatique histologiquement démontrée
pN1
pN2
pN3
pN0(i–)
Absence d’adénopathie régionale métastatique histologiquement démontrée, IHC négative
pN0(i+)
Absence d’adénopathie régionale métastatique histologiquement démontrée, IHC positive, absence de groupe IHC+ > 0,2 mm : cellules isolées
pN0(mol–)
Absence d’adénopathie régionale métastatique histologiquement démontrée, technique moléculaire négative
pN0(mol+)
Absence d’adénopathie régionale métastatique histologiquement démontrée, technique moléculaire positive
Métastases atteignant 1 à 3 ganglions axillaires et/ou mammaires internes avec atteinte microscopique mis en évidence par biopsie du ganglion sentinelle mais non apparente cliniquement pN1mi
Micro-métastases 0,2 < mi < 2 mm
pN1a
Métastases atteignant 1 à 3 ganglions axillaires
pN1b
Métastases atteignant les ganglions mammaires internes avec atteinte microscopique mis en évidence par biopsie du ganglion sentinelle mais non apparente cliniquement
pN1c
Métastases atteignant les ganglions axillaires et mammaires internes avec atteinte microscopique mises en évidence par biopsie du ganglion sentinelle mais non apparente cliniquement
Métastases atteignant 4 à 9 ganglions axillaires. pN2a
Métastases atteignant 4 à 9 ganglions axillaires (avec au moins un foyer tumoral > 2 mm)
pN2b
Métastases atteignant les ganglions mammaires internes de façon cliniquement apparente sans atteinte métastatique des ganglions axillaires
Métastases atteignant au moins 10 ganglions axillaires pN3a
Atteinte métastatique ≥ 10 ganglions axillaires (avec au moins un foyer tumoral > 2 mm) ou métastases ganglionnaires infra-claviculaires
pN3b
Métastases cliniquement apparentes dans les ganglions mammaires internes homo latéraux avec présence d’au moins 1 ganglion axillaire positif ou métastases atteignant plus de 3 ganglions axillaires et ganglions mammaires internes avec atteinte microscopique mis en évidence par biopsie du ganglion sentinelle mais non cliniquement apparente
pN3c
Métastases atteignant les ganglions supra-claviculaires homo-latéraux
— (III) en dedans, la racine interne clinique (matérialisée par un fil radio-opaque) et radiologique ; — (IV) en dehors, la racine externe clinique (matérialisée par un fil radio-opaque) et radiologique ; — (V) en haut, la limite supérieure clinique et prolongement axillaire de la glande mammaire (matérialisée par un fil radio-opaque) ; — (VI) en bas, la limite inférieure clinique et sillon sous-mammaire (matérialisée par un fil radio-opaque). Le volume cible prévisionnel (PTV, Planning Target Volume) est une expansion du volume cible anatomoclinique de 5 mm dans toutes les directions de l’espace.
2.2.3. Détermination des organes à risque – cœur et poumon homolatéral Le contour du cœur est délimité en haut sur la coupe passant par l’artère pulmonaire et en bas sur la coupe passant par la pointe cardiaque (Figs. 15-24). Les stations de délinéation sont généralement équipées d’une délinéation automatique des poumons.
2.2.4. Planification du traitement : dose/fraction, dose totale et contraintes de dose des volumes cibles et des organes à risque
2.2.2.2. Le lit de tumorectomie (Figs. 7-14)
2.2.4.1. Fractionnement, dose totale, étalement classique
Le lit tumoral est préférablement repéré sur la scanographie dosimétrique par : — (I) l’existence d’un remodelage cicatriciel intramammaire postopératoire ; — et/ou (II) d’une cavité de sérum postopératoire et préférentiellement par la mise en place de clips chirurgicaux placés aux quatre extrémités du lit de tumorectomie [1,21,36]. En effet, le repérage clinique est insuffisant et peut être source d’erreur [10]. D’autres outils radiologiques peuvent être utilisés pour repérer le lit de tumorectomie telles que l’échographie qui visualise nettement la cavité chirurgicale immédiatement après l’opération. Cependant, cet examen est moins fiable à distance de la chirurgie [36].
Selon les dernières recommandations de Saint Paul de Vence et de Saint Gallen, après traitement chirurgical conservateur des cancers du sein de petit stade, une irradiation de l’ensemble de la glande mammaire de 50 Gy et un complément d’irradiation du lit tumoral de 10 à 16 Gy sont indispensables, étalés sur six et demi à sept semaines.
2.2.4.2. Organes à risque et contrainte de dose — Lors d’une planification bidimensionnelle, deux paramètres sont à prendre en considération : la CLD, Central Lung Distance, qui doit être au maximum de deux centimètres ; et la MHD, Maximum Heart Distance qui doit être inférieure ou égale à un cm. Lorsque la CLD est mesurée à 2 cm, le volume pulmonaire moyen irradié est de 10 à 12 % [15]. — Lors d’une planification tridimensionnelle conformationnelle : le volume du poumon homolatéral qui reçoit plus de 20 Gy
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doit être inférieur à 15 % du volume pulmonaire (V20 Gy < 15 %) et le volume qui reçoit une dose égale ou supérieure à 30 Gy inférieure à 10 % (V30 Gy < 10 %). En ce qui concerne l’irradiation cardiaque, il est primordial que la dose moyenne et maximale soit la plus faible possible [15].
S131
97-13 du Radiation Therapy Oncology Group (RTOG) [26]. Seule l’étude menée par Pommier et al. a montré l’efficacité du Calendula officinalis dans la prévention de la toxicité de grades 2 et 3 [43].
3.2. Toxicité tardive
2.2.4.3. Balistique (Fig. 25-30)
3.2.1. Facteurs de risque de survenue d’effets secondaires tardifs
L’irradiation du sein se fait par deux faisceaux tangentiels opposés, en technique distance source-peau (DSP) ou distance source-axe (DSA) dont la balistique est adaptée et personnalisée en prenant en compte les contraintes dosimétriques énoncées ci-dessus. Les limites des faisceaux tangentiels sont : — (I) en haut, l’extrémité inférieure de la clavicule, qui peut être matérialisée par un fil radio-opaque si besoin ; — (II) en bas, 1 à 2 cm sous la glande mammaire ; — (III) en dehors, 1 cm en dehors de la racine externe de la glande mammaire ; — (IV) en dedans, 1 cm en dedans de la racine interne de glande mammaire. Le complément d’irradiation sur le lit de tumorectomie est délivré soit par deux faisceaux tangentiels de photons, opposés ou non, en technique DSP ou DSA, ou par un faisceau direct d’électrons.
Différents facteurs sont impliqués dans la genèse de ces complications tardives radio-induites. Ils sont soit dépendants du patient : — (I) génétiques tels que le déficit de la réparation de l’ADN [11, 35] ; — (II) ou peuvent être liés à des « comorbidités » préexistantes telles que l’obésité, les anomalies de la vascularisation (hypertension artérielle, diabète) ou maladies du collagène ; — (III) et enfin l’âge de la patiente. Il existe également des facteurs de risque liés au traitement : — (I) par irradiation, tels que la dose totale, la dose par fraction, le volume traité [19, 33, 48-50] ; — (II) les antécédents de chirurgie ; — (III) l’association concomitante de chimiothérapie ou hormonothérapie [6, 20, 37].
3.2.2. Toxicité cutanée et sous-cutanée 3.
Toxicité de la radiothérapie
L’ensemble de la toxicité est classé à l’aide de l’échelle de toxicité CTCAE v4 (Common Terminology Criteria for Adverse Events, version 4.0) (http : //ctep.cancer.gov/protocoldevelopment/electronic_applications/docs/ctcaev4.pdf).
3.1. Toxicité aiguë de la radiothérapie La toxicité aiguë est essentiellement cutanée sous la forme d’érythème qui survient à partir d’une dose de 25 à 30 Gy, rarement plus sévère à type de desquamation humide ou sèche [17, 23], et n’entraîne qu’exceptionnellement une perte de substance (Tableau 3). Le maximum de dépôt de dose pour les rayonnements de haute énergie est situé à 0,5 à 4 cm de la surface cutanée. Ceci permet de limiter les réactions aiguës au cours de la radiothérapie en étalement et fractionnement classiques jusqu’à 66 Gy. Il n’existe pas à l’heure actuelle de recommandation concernant la prise en charge de cette toxicité aiguë, que ce soit en situation préventive ou en curative [12]. La Biafine® ne semble pas prévenir l’apparition de ces effets aigus de la radiothérapie d’après l’étude Tableau 3 Échelle d’évaluation de la toxicité cutanée aiguë selon la CTCAE v4.0 Dermatitis radiation scale according to the CTCAE v4.0 Grade 0
Absence de toxicité
Grade 1
Érythème débutant, épithélite desquamative sèche
Grade 2
Érythème modéré à intense, dépilation, oedème modéré, épithélite exsudative limitée aux plis cutanés
Grade 3
Épithélite exsudative confluente, ou en dehors des plis cutanés, oedème important, saignement provoqué par un traumatisme modéré ou une abrasion cutanée
Grade 4
Nécrose cutanée, ulcération de toute l’épaisseur du derme, saignement spontané dans les champs d’irradiation
Grade 5
Décès
La toxicité cutanée et sous-cutanée est de type télangiectasies, hyperpigmentation ou dépigmentation. Elle peut se manifester par de la fibrose sous-cutanée et/ou graisseuse, pouvant aller de la simple induration du lit de tumorectomie à une rétraction de la glande mammaire. Le taux d’incidence de cette fibrose radioinduite dépend essentiellement du degré d’hétérogénéité au sein du volume mammaire, allant de 6 % chez les patientes ayant un petit volume mammaire à 39 % chez les patientes ayant un volume mammaire important [39]. Les télangiectasies surviennent après une toxicité cutanée aiguë sévère telle que la desquamation exsudative et sont très souvent localisées dans le sillon sousmammaire [23]. Les facteurs de risque sont essentiellement une dose totale et des doses par fractions fortes dans un large volume mammaire. La radiothérapie peut favoriser la survenue de cytostéatonécrose (15-25 %) en induisant des lésions des petits vaisseaux avec occlusion de leur lumière centrale et induire ainsi des lésions ischémiques des tissus avoisinants. Cependant, la survenue de cytostéatonécrose est multifactorielle, associant le traumatisme chirurgical et la radiothérapie [16].
3.2.3. Toxicité cardiovasculaire La toxicité cardiovasculaire survient essentiellement après irradiation des cancers du sein gauche [30]. Cette toxicité se manifeste par divers symptômes : péricardite chronique obstructive, myocardite, atteinte coronarienne, valvulopathies, troubles de la conduction et survient après un délai médian de 10-15 ans [31]. La méta-analyse de l’EBCTCG (Early Breast Cancer Trialists Collaborative Group) a rapporté que l’excès de mortalité cardiaque secondaire à la radiothérapie est estimé à 4 % après un recul de plus de 15 ans. Toutefois, cette estimation a été effectuée chez des patientes traitées dans les années 1980 avec des techniques d’irradiation qui sont de nos jours dépassées [14]. Cet excès de mortalité cardiaque
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sera probablement inférieur grâce à l’avènement des nouvelles technologies. La toxicité cardiaque est directement liée au volume cardiaque irradié, à la dose délivrée, à la technique de traitement, à l’énergie et à l’association de chimiothérapie [15].
3.2.4. Toxicité pulmonaire La toxicité pulmonaire, sous forme de fibrose qui apparaît 6 à 24 mois après le traitement et s’accompagne d’une réduction limitée mais irréversible de la fonction respiratoire [29]. L’incidence varie de 9 à 30 % avec comme principaux facteurs favorisants, le volume irradié, la fonction respiratoire avant la radiothérapie, le territoire pulmonaire irradié et l’antécédent de chimiothérapie [32].
3.2.5. Second cancer L’incidence des cancers radio-induits est rarissime (< 2/1 000) et se caractérise par l’apparition d’un nouveau cancer de type histologique différent du cancer primitif dans les territoires irradiés. La dernière méta-analyse de l’EBCTCG (Early Breast Cancer Trialists Collaborative Group) a montré une augmentation du risque de second cancer après radiothérapie, en particulier de cancer du poumon [Hazard Ratio (HR) = 1,61], de cancer de l’œsophage (HR = 2,06), de leucémie (HR = 1,71) et de sarcome des tissus mous (HR = 2,34) [14]. 4.
Cas clinique
Mme F., patiente âgée de 62 ans, nulligeste, était ménopausée depuis l’âge de 51 ans avec comme principal antécédent personnel un traitement hormonal substitutif pendant sept ans, arrêté depuis quatre ans. Dans le cadre du dépistage systématique, il a été découvert une opacité spiculée de 10 mm du quadrant inféro-interne du sein droit dont la cytoponction conclut à la présence de cellules adénocarcinomateuses. Elle a eu une tumorectomie droite – ganglion sentinelle (GS) dont l’étude anatomopathologique définitive a mis en évidence un carcinome
canalaire infiltrant de 12 mm, de grade E.E. I (2.2.1), dont 100 % des cellules exprimaient des récepteurs aux estrogènes, 90 % ceux à la progestérone, mais n’exprimaient pas Her2, sans atteinte ganglionnaire (1GS-/1GS). L’indication d’une radiothérapie adjuvante a été posée et prévoyait de délivrer : — 50 Gy en 25 fractions dans l’ensemble de la glande mammaire droite ; — suivi de 16 Gy en huit fractions dans le lit de tumorectomie (quadrant inféro-interne). Lors de la planification du traitement, la patiente a été informée des effets secondaires aigus et tardifs de la radiothérapie : fibrose mammaire, cytostéatonécrose, pneumopathie, second cancer… Le repérage dosimétrique a été effectué à l’aide d’un scanographe dédié sur lequel la patiente a été installée sur un plan incliné en décubitus dorsal. Afin de faciliter la visualisation de la glande mammaire, des fils radio-opaques ont été apposés à la peau, délimitant cliniquement le volume de la glande mammaire, l’induration postopératoire, la cicatrice de tumorectomie. La planification tridimensionnelle conformationnelle a commencé par la délinéation de la glande mammaire, du lit de tumorectomie visualisé par la mise en place de quatre clips chirurgicaux aux quatre points cardinaux de la tumorectomie (Figs. 1-14) et aussi la délimitation des organes à risque, à savoir le cœur et les poumons (Figs. 15-24). La dosimétrie a consisté à positionner les faisceaux de traitement en fonction de l’anatomie de la patiente, des volumes cibles et des organes à risque (Figs. 25-30). Elle a ensuite été optimisée par des filtres en coin afin d’homogénéiser la répartition de la dose dans la glande mammaire. La distribution de la dose était, conformément au rapport 62 de l’International commission on radiation units and measurements (ICRU), comprise entre la 95 % et la 107 % (Figs. 31-38). Conflit d’intérêt Les auteurs n’ont déclaré aucun conflit d’intérêts pour cet article.
Figs 2 à 6. Contours de la glande mammaire (rose). Mammary gland delineation (pink).
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Figs 8 à 14. Délimitation du lit de tumorectomie (vert). Lumpectomy cavity delineation (green).
Figs 15 à 24. Délimitations du poumon homolatéral (jaune), controlatéral (vert) et du cœur (rouge). Organs at risk delineation (ipsilateral lung in yellow, controlateral lung in green and heart in red).
Fig. 25. Planification tridimensionnelle conformationnelle de l’irradiation de la glande mammaire : faisceau tangentiel interne, TGI (jaune). 3D-conformal treatment planning: Internal whole breast photon beam (yellow).
Fig. 27. Planification tridimensionnelle conformationnelle de la surimpression du lit de tumorectomie : faisceau d’irradiation interne par photons (bleu foncé). 3D-conformal Treatment Planning: Mini-Internal boost photon beam (blue).
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Fig. 31 à 34. Dosimétrie de l’ensemble de la glande mammaire et du complément d’irradiation du lit de tumorectomie, coupes transverses. Dosimetry of whole mammary gland and boost of lumpectomy cavity, axial CT-slices. Fig. 30. Planification tridimensionnelle -conformationnelle : Visualisation à la peau du faisceau d’irradiation de la glande mammaire : tangentiel externe, TGE (bleu) ; et du complément d’irradiation du lit de tumorectomie : minitangentiel externe (bleu). Visualization of External whole breast photon beam and of mini-External boost photon beam on virtual patient view (blue).
Fig. 37. Histogramme Dose – Volume du poumon homolatéral (rose) avec V20 Gy (Volume recevant 20 Gy et plus) = 5 %, du cœur (jaune) V30 Gy (Volume recevant 30 Gy et plus) < 1 % et du lit de tumorectomie (vert) D99 % > 65 Gy. Dose-Volume Histogram of ipsilateral lung (pink) V20 Gy=5 %, heart (yellow) V30 Gy65 Gy.
Fig. 35. Dosimétrie de l’ensemble de la glande mammaire et du complément d’irradiation du lit de tumorectomie, coupe sagittale. Dosimetry of whole mammary gland and boost of lumpectomy cavity, saggital CT-slices.
Fig. 38. Dose moyenne délivrée au poumon homolatéral, au poumon controlatéral et au lit de tumorectomie. Mean ipsilateral and controlateral lung dose and mean boost dose (lumpectomy cavity).
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Cancer du sein avec atteinte ganglionnaire axillaire Breast cancer with axillary lymph node involvement A. Belaida,b, S. Kanouna,c, A. Kallela,d, I. Ghorbela,b, F. Azourya, S. Heymanna, C. Pichenote, R. Verstraete, H. Marsigliaa,f, C. Bourgiera,* aDépartement
de radiothérapie, Unité fonctionnelle de Sénologie, institut Gustave-Roussy, Villejuif, France. de radiothérapie Carcinologique, institut Salah-Azaiez, Tunis, Tunisie. cService de radiothérapie, hôpital Farhat-Hached, Sousse, Tunisie. dUnité de radiothérapie, clinique Ennasr, Cité Ennasr 2, Tunisie. eDépartement de physique, institut Gustave-Roussy, Villejuif, France. fUniversité de Florence, Italie. bService
INFO ARTICLE
RÉSUMÉ
Les figures 2, 3, 5, 7, 8, 10, 12, 14, 16, 18, 21, 25, 26, 29, 32, 34, 35, 40 sont visibles uniquement sur : http://www. sciencedirect.com/
Le cancer du sein est le cancer le plus fréquent chez la femme dans les pays occidentaux avec plus d’un million de nouveaux cas par an dans le monde (22 % des cancers diagnostiqués chez la femme) et plus de 370 000 décès par cancer du sein par an (14 % des décès par cancer chez les femmes). Plus de la moitié des cancers du sein atteignent les ganglions axillaires lors du diagnostic. La radiothérapie postopératoire joue un rôle essentiel dans le traitement de ces cancers du sein, en diminuant le taux de risque de récidive locorégionale de 17 % à 5 ans. Cette réduction du risque de récidive locorégionale se traduit par une diminution significative de la mortalité spécifique de 5,4 % à 15 ans. L’irradiation tridimensionnelle conformationnelle inclut comme volumes cibles, la paroi thoracique (après mastectomie) ou la glande mammaire et le complément dans le lit de tumorectomie (en cas de chirurgie conservatrice) et les aires ganglionnaires de drainage du sein (sus et sous-claviculaire ± mammaire interne, ± axillaire). Les principaux organes à risque sont le poumon homolatéral, le cœur et le plexus brachial. L’objectif de ce travail est de préciser les particularités épidémiologiques, radio-anatomiques, le pronostic et les modalités d’irradiation conformationnelle du cancer du sein avec envahissement ganglionnaire axillaire.
Mots clés : Cancer du sein Radiothérapie conformationnelle Volumes cibles Atlas
© 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
ABSTRACT Keywords: Breast cancer Conformal irradiation Target volumes Atlas
Breast cancer is the most frequent cancer of women in western countries. There are one million new cases per year in the world which represents 22% of all female cancers, and more than 370.000 deaths due to breast cancer per year (14% of cancer mortality). More than half of breast cancers are associated with axillary nodal involvement. Post-operative radiation therapy (XRT) is a crucial part of locoregional treatment in axillary nodal involvement breast cancer owing to a 15-years risk reduction of locoregional recurrence of 70% and to a 5.4% risk reduction of specific mortality. In 3D-conformal irradiation in such breast cancers, target volumes are chest wall when mastectomy was performed
* Correspondance. Adresse e-mail : [email protected] (C. Bourgier) © 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
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or breast and boost of tumor bed in case of breast conservative surgery, and supra-clavicular and/or axillary and/or internal mammary node areas. The main organs at risk are ipsilateral lung, heart and brachial plexus. The aim of this article is to describe epidemiologic, radio anatomic and prognostic features of axillary nodal involvement breast cancer and to propose guidelines for 3D-conformal treatment planning in locally advanced breast cancers. This review is illustrated by a case report. © 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Published by Elsevier Masson SAS. All rights reserved.
1.
Épidémiologie
Le cancer du sein est le plus fréquent chez la femme dans les pays occidentaux. En France, l’âge médian des patientes est de 61 ans avec un taux d’incidence qui croît régulièrement entre 30 et 60 ans [62]. Plus d’un million de nouveaux cas sont annuellement diagnostiqués dans le monde et représentent 22 % de l’ensemble des cancers diagnostiqués chez la femme. Le cancer du sein est à l’origine de 14 % des décès par cancer chez les femmes, soit plus de 370 000 décès par an dans le monde [1]. L’incidence des cancers du sein est de 4 à 10 fois plus élevée dans les pays occidentaux (États-Unis et Europe du nord principalement) en comparaison avec l’Asie et avec l’Afrique [54]. Globalement le taux standardisé pour la population mondiale varie de 10 à 100 pour 100 000 femmes [19]. Plus de la moitié des cancers du sein atteignent les ganglions lors du diagnostic. L’analyse des essais I-IX de l’International Breast Cancer Study Group Trials montre que les cancers du sein d’une taille inférieure à 2 cm envahissent les ganglions axillaires dans 54 % des cas et ceux de plus de 2 cm dans plus de 60 % [32].
2.
Classification
La classification TNM de l’UICC de1997, révisée en 2002, est la plus utilisée [55], ses définitions sont décrites dans l’article de Ghorbel et al. de ce numéro spécial [70].
3.
Indications de la radiothérapie
3.1. Généralités Le traitement standard thérapeutique de ces cancers du sein avec atteinte ganglionnaire, que la chirurgie soit conservatrice ou non, comprend une chimiothérapie et/ou hormonothérapie et/ou thérapies ciblées, dont les modalités dépendent des caractéristiques histologiques définitives. Le traitement locorégional comporte systématiquement une irradiation adjuvante. Après traitement conservateur, celle-ci diminue significativement le taux de risque de récidive locorégionale de 30,1 % à cinq ans, se traduisant par une diminution de la mortalité spécifique de 7,2 % à 15 ans. Après mastectomie, celle-ci diminue significativement le risque de récidive locorégionale de 17,1 % à cinq ans se traduisant par une diminution de la mortalité spécifique de 5,4 % à 15 ans [11].
3.2. Facteurs de risque de récidive locorégionale 3.2.1. Après chirurgie conservatrice En l’absence de radiothérapie des aires ganglionnaires, les principaux sites de récidives locorégionales chez les patientes atteintes d’un cancer du sein colonisant les ganglions axillaires sont principalement la glande mammaire (57 %) puis les aires ganglionnaires (25 %) [38]. La jeunesse de la patiente et l’atteinte des tranches de section chirurgicales sont les principaux facteurs de risque de récidive locorégionale avec un Hasard Ratio (HR) respectivement de 2,3-2,9 et 1,5-3,5 [2,3,17,29,67] ; mais aussi, un grade histologique élevé, la présence d’engainements périnerveux ou d’emboles vasculaires et la taille tumorale [10,20,21,39]. Aucun de ces facteurs de risque, isolés ou associés ne permet actuellement d’individualiser une population à haut risque de récidive locale. L’apport des outils biologiques, tels que la classification intrinsèque par Tissue-Micro-Array, i.e. cancers du sein de type luminal A et B, basal-like ou surexprimant l’oncoprotéine Her2, ou la « Wound Signature » pourrait permettre d’individualiser à l’avenir des populations à haut risque de récidive locorégionale, et ainsi de proposer à ces patientes des traitements personnalisés (radiothérapie et chimiothérapie concomitantes…) [43,45].
3.2.2. Après mastectomie et curage axillaire Après mastectomie, le site de récidive locale est essentiellement pariétal [44,46,47]. Classiquement, après mastectomie et curage axillaire, on distingue trois populations à risque de récidive locorégionale : population à faible risque de récidive locorégionale (taux estimé à moins de 10 %) correspondant le plus souvent aux cancers du sein sans envahissement ganglionnaire ; population à risque intermédiaire de récidive locorégionale (taux estimé entre 10 et 20 %) et population à haut risque de récidive locorégionale (taux estimé à plus de 20 %) [48]. L’atteinte ganglionnaire axillaire est le principal facteur de risque de récidive locorégionale, et plus particulièrement le nombre de ganglions atteints et le rapport de nombre de ganglions atteints sur celui de ganglions prélevés. La jeunesse de la patiente, la taille tumorale, la présence d’emboles vasculaires ou d’engainements péri-nerveux, le grade tumoral élevé, l’absence d’expression de récepteurs hormonaux, la surexpression de l’oncoprotéine Her2 sont également d’autres facteurs de risque de récidive locorégionale [31,32,35,60,63,69]. Bien que ces facteurs pronostiques cliniques et histologiques soient quotidiennement pris en compte pour déterminer et définir les indications de radiothérapie après mastectomie, ils restent insuffisants pour définir son indication. En effet, les cancers du sein sont composés de plusieurs entités
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[57,64,65] avec des pronostics différents les uns des autres. Ainsi, à terme, l’utilisation de signature génomique (« bon » contre « mauvais » profil génomique) pourrait être un outil intéressant dans l’aide à la décision des traitements locorégionaux. Par exemple, chez les patientes traitées par mastectomie sans radiothérapie adjuvante pour un cancer du sein atteignant de un à trois ganglions axillaires, le taux de contrôle local est de 100 % à cinq ans si la signature génomique « de bon profil » contre 47 % si elle est « de mauvais profil » [9].
3.3. Irradiation après mastectomie Les pratiques sont assez disparates en fonction des pays [7] : autant pour les patientes chez qui plus de quatre ganglions sont envahis lors du curage axillaire, l’indication de radiothérapie pariétale est un standard, en revanche elle est un sujet de controverse si un à trois sont atteints.
3.3.1. Un à trois ganglions axillaires atteints Les grands essais randomisés évaluant l’apport de la radiothérapie adjuvante après mastectomie montrent une nette diminution du taux de risque de récidive locorégionale dans cette population, de 30 % sans radiothérapie à 7 % après radiothérapie [44,46,47,50,51]. Toutefois, l’indication de radiothérapie dans ce sous-groupe de patientes est contestée en raison du caractère considéré comme incomplet du curage axillaire (nombre médian de ganglions prélevés de sept) et avec un taux de risque de récidive axillaire nettement inférieur dans les essais avec un curage axillaire satisfaisant. Se pose alors la question du rôle curatif de la chirurgie si celle-ci était complète. Il en est de même en ce qui concerne les traitements systémiques, qui sont considérés aujourd’hui comme insuffisants ou obsolètes dans ces essais. L’analyse des essais randomisés comprenant une chirurgie complète et des traitements systémiques optimaux montre un taux de risque de survenue de récidive locorégionale de 13-16 % [33,53,59,68]. Après analyse multifactorielle, l’indication diminue significativement le taux de risque de récidive locorégionale lorsque le rapport du nombre de ganglions atteints sur celui de ganglions prélevés dépasse 50 % [31,32,35,60,63,69]. Pour conclure, est-il éthique ou non d’accepter un taux de risque de récidive locale de 13-16 % en l’absence de radiothérapie après mastectomie dans ce sous-groupe de patientes ?
patientes avec un phénotype luminal (exprimant des récepteurs hormonaux mais non Her2) en se traduisant par une amélioration du taux de survie globale [35].
3.3.3. Conclusion Pour conclure, l’indication de radiothérapie après mastectomie reste un standard chez les patientes chez qui plus de trois ganglions axillaires sont atteints ; elle est encore débattue dans le cas contraire. Probablement que l’aire de la biologie nous permettra de mieux individualiser les groupes de patientes qui seront traités par irradiation adjuvante.
4.
Modalités de l’irradiation tridimensionnelle conformationnelle dans les cancers du sein de petit stade
4.1. Positionnement de la patiente et acquisition des images pour la planification de l’irradiation tridimensionnelle conformationnelle Une scanographie dosimétrique en vue de la planification de la radiothérapie est réalisée en position de traitement, i.e. la patiente est placée en décubitus dorsal sur un plan incliné, les deux bras relevés au dessus de la tête. Une scanographie dosimétrique sans injection de produit de contraste est alors réalisée en position de traitement avec un pas de coupes de 2 à 4 mm, allant de la mandibule jusqu’en dessous des coupoles diaphragmatiques. Des repères métalliques (fil de plomb) peuvent être placés sur la patiente afin d’aider le repérage des structures anatomiques telles que les racines de la glande mammaire, la cicatrice de tumorectomie/mastectomie… [27].
4.2. Radio anatomie et détermination des volumes cibles (Figs. 1-20) Les volumes cibles d’intérêt sont ici la glande mammaire suivie d’un complément d’irradiation du lit de tumorectomie et/ou la paroi thoracique ; les aires ganglionnaires (la chaîne mammaire interne, l’aire sus et sous-claviculaire ± l’aire axillaire). La radioanatomie de la glande mammaire et du lit de tumorectomie est développée dans l’article de Ghorbel et al. de ce numéro.
3.3.2. Plus de trois ganglions axillaires atteints
4.2.1. Paroi thoracique
La radiothérapie adjuvante est dans cette population un standard thérapeutique car elle réduit de 80 % le taux de risque relatif de récidive locorégionale et augmente d’une part, les taux de survie sans récidive métastatique (HR = 0,78) et de survie spécifique [44,46,47,50,51]. Il est important de rappeler que les aires de traitements dans ces essais comprenaient la paroi thoracique, l’aire axillo-sus-claviculaire et la chaîne mammaire interne. Cependant, est-ce vraiment une certitude ? Récemment, Kyndi et al. ont rapporté, après analyse des blocs tumoraux par Tissue Micro-Array, que la radiothérapie n’avait aucun impact en termes de taux de contrôle local ni de survie globale dans le sous-groupe basal-like (RH-/Her2-), alors qu’elle diminuait significativement le taux de risque de récidive locorégionale des
La cicatrice de mastectomie doit être délimitée et dessinée dans son intégralité grâce à la mise en place d’un fil de plomb. La glande mammaire controlatérale est de préférence délimitée par un fil de plomb apposé à la peau. Le volume cible anatomoclinique (CTV, Clinical Target Volume) représente l’ancien emplacement de la glande mammaire : (I) en avant, 5 mm en dessous du contour cutané ; (II) en arrière, la face supérieure du muscle pectoral et des côtes ; et en miroir de la glande mammaire controlatérale ; (III) en dedans, la racine interne clinique (matérialisée par un fil radio-opaque) et radiologique ; (IV) en dehors, la racine externe clinique (matérialisée par un fil radio-opaque) et radiologique ; (V) en haut, la limite supérieure clinique et prolongement axillaire de la glande mammaire (matérialisée
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par un fil radio-opaque) ; (vi) en bas, la limite inférieure clinique et sillon sous-mammaire (matérialisée par un fil radio-opaque). Le volume cible prévisionnel (PTV, Planning Target Volume) est une expansion du volume cible anatomoclinique de 5 mm dans toutes les directions de l’espace.
4.2.2. Aire ganglionnaire sus-claviculaire [34,40] (Figs. 1-6) Le volume cible anatomoclinique est délimité (I) en avant par une ligne située à 5 mm en dessous du contour cutané, (II) en arrière par les apophyses vertébrales latérales et la plèvre, (III) en dedans par le tendon du muscle sterno-cléido-mastoïdien, le bord externe du lobe thyroïdien, la trachée et l’œsophage, (IV) en dehors par la jonction des deux tiers internes et du tiers externe de la clavicule, (V) en haut par un plan parallèle à la clavicule, dont la limite supérieure correspond à l’articulation acromio-claviculaire (en dessous du cartilage cricoïde) et (VI) en bas par un plan parallèle à la clavicule à hauteur du bord de l’articulation sterno-claviculaire.
4.3. Aire ganglionnaire sous-claviculaire [34,40] (Figs. 7-11) Elle correspond au drainage lymphatique allant de la dissection axillaire chirurgicale au sommet de l’aisselle. Le volume cible anatomoclinique est délimité : (I) en avant par le muscle pectoral ; (II) en arrière par le muscle de la fosse antérieure de l’omoplate ; (III) en dedans par la paroi thoracique ; (IV) en dehors par l’aire ganglionnaire axillaire ; (V) en haut par le bord inférieur de la clavicule ; et (VI) en bas par la limite supérieure du curage axillaire repéré par des clips chirurgicaux.
4.4. Aire ganglionnaire axillaire (Figs. 12-17) Le volume cible anatomoclinique est délimité : (I) en avant par le muscle pectoral ; (II) en arrière par le muscle de la fosse antérieure de l’omoplate ; (III) en dedans par la paroi thoracique (muscle grand dentelé, côtes et plèvre) ; (IV) en dehors par un plan allant du muscle dorsal au pectoral (5 mm en dedans du contour cutané, si celui-ci se situe à proximité du contour cutané) ; (V) en haut par le bord inférieur de la clavicule, dans le prolongement de l’aire sous-claviculaire et (VI) en bas par la limite supérieure du prolongement axillaire de la glande mammaire.
4.4.1. Aire ganglionnaire de la chaine mammaire interne [6,34] (Figs. 17 à 20) Elle se situe autour des vaisseaux de la chaine mammaire interne. Le volume cible anatomoclinique est délimité (I) en avant par la face postérieure du muscle pectoral, (II) en arrière par la plèvre pariétale, (III) en dedans par le bord externe du sternum, (IV) en dehors par l’angle du triangle cellulo-graisseux formé par le muscle pectoral et la paroi thoracique, (V) en haut par le bord inférieur de la tête de la clavicule et (VI) en bas par le troisième espace intercostal.
4.5. Détermination des organes à risque – cœur et poumon homolatéral Le cœur est délimité en haut sur la coupe passant par l’artère pulmonaire et en bas sur la coupe passant par la pointe
S139
cardiaque (Figs. 20-24). Les stations de délinéation sont généralement équipées d’une délinéation automatique concernant les poumons.
4.6. Planification du traitement : dose/fraction, dose totale et contraintes de dose des volumes cibles et des organes à risque 4.6.1. Fractionnement, dose totale, étalement classique Les modalités d’irradiation des cancers du sein classés pN0i+ et pN1mi ne sont pas traitées dans cette revue, ni les modalités d’irradiation après chimiothérapie néo-adjuvante. Après traitement chirurgical conservateur, une irradiation de l’ensemble de la glande mammaire à la dose totale de 50 Gy et un complément dans le lit tumoral de 10 à 16 Gy sont indispensables, étalés sur 6,5 à 7 semaines. Après chirurgie radicale, l’irradiation de la paroi thoracique est prescrite à la dose totale de 50 Gy en 25 fractions. En ce qui concerne l’irradiation des aires ganglionnaires, si le curage axillaire est considéré comme suffisant, i.e. si plus de dix ganglions ont été prélevés, l’irradiation des aires ganglionnaires intéresse l’aire sus / sous-claviculaire et la chaîne mammaire interne à la dose totale de 50 Gy en 25 fractions. L’irradiation axillaire peut être indiquée : (I) lorsque le curage axillaire est insuffisant ; (II) lorsque le curage axillaire n’a pas été réalisé en raison du grand âge de la patiente ou de la présence de « comorbidités » faisant craindre un retentissement majeur de cette chirurgie axillaire sur la qualité de vie et si la connaissance du statut ganglionnaire ne modifiera pas le traitement postopératoire [66].
4.6.2. Volumes cibles, contraintes de dose Les volumes cibles (glande mammaire ou paroi thoracique et aires ganglionnaires) doivent recevoir 100 % ± 5 % de la dose prescrite [24].
4.6.3. Organes à risque et contrainte de dose (Figs. 36 et 37) 4.6.4. Le poumon Lors d’une planification tridimensionnelle conformationnelle, l’épaisseur maximale de poumon incluse dans les faisceaux tangentiels doit être inférieure à 2,5 cm [14,37]. Le pourcentage du volume pulmonaire homolatéral qui reçoit plus que 20 Gy (V20 Gy) et plus de 30 Gy (V30 Gy) et la dose moyenne reçue par la totalité du poumon homolatéral (DM) sont des facteurs prédictifs pour la toxicité pulmonaire [23,52]. Le V20 Gy doit être inférieur à 31 %, le V30 Gy inférieur à 18 % et la DM inférieure à 20 Gy [52].
4.6.5. Le cœur L’épaisseur maximale de cœur incluse dans le champ d’irradiation (MHD) est un paramètre prédictif pour la mortalité cardiaque tardive. Une MHD de 11 mm est associée à un taux de risque de mortalité cardiaque tardive de moins de 1 % [28]. La dose moyenne et maximale reçue par le cœur doivent être la plus faible possible (100 % du cœur doivent recevoir moins de 35 Gy) [24].
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4.6.6. Le plexus brachial Le plexus brachial est un organe à risque à considérer et à repérer en cas d’irradiation sus-claviculaire. La dose maximale délivrée à ce niveau doit être de moins de 55 Gy [56].
4.6.7. Balistique L’irradiation du sein ou de la paroi se fait par deux faisceaux tangentiels opposés (inclinaison de l’angle ± 40 à 60 °), en technique distance source-peau (DSP) ou distance source-axe (DSA) dont la balistique sera adaptée et personnalisée en prenant en compte les contraintes dosimétriques énoncées ci-dessus. Les limites des faisceaux tangentiels sont (I) en haut, l’extrémité inférieure de la clavicule, qui peut être matérialisée par un fil radio-opaque si besoin ; (II) en bas, 1 à 2 cm sous la glande mammaire ou de la limite inférieure de la paroi thoracique ; (III) en externe, 1 cm en dehors de la racine externe de la glande mammaire ou de la paroi thoracique ; (IV) en interne, 1 cm en dedans de la racine interne de glande mammaire ou de la paroi thoracique. Le complément d’irradiation du lit de tumorectomie est délivré soit par deux faisceaux tangentiels de photons, opposés ou non, en technique DSP ou DSA, soit un faisceau direct d’électrons [41]. L’irradiation de la chaîne mammaire interne [4] (Figs. 27-30, 32, 40, 43) se fait par un faisceau direct (inclinaison de l’angle ± 0 à 15 °), en technique DSP dont la balistique est adaptée et personnalisée en prenant en compte les contraintes dosimétriques énoncées ci-dessus. Les limites du faisceau de la chaîne mammaire interne sont (I) en haut, 0,5 cm en dessous du faisceau sus-claviculaire antérieur ; (II) en bas, le quatrième espace intercostal ; (III) en dehors, jointif avec le faisceau tangentiel interne ; (IV) en dedans, 1 cm en dehors de la ligne médiane du côté opposé. Le traitement du volume de la chaîne mammaire interne est un mixage photons et électrons. L’irradiation des aires ganglionnaires sus et sous-claviculaire (Figs. 26, 30) se fait par un faisceau direct de photons (inclinaison de l’angle + /- 10 à 15 ° afin d’épargner la moelle épinière), en technique DSP dont la balistique sera adaptée et personnalisée en prenant en compte les contraintes dosimétriques énoncées ci-dessus. Les limites du faisceau sus-claviculaire sont (I) en haut, le sommet de la clavicule, soit 1 cm sous le bord libre du muscle trapèze ; (II) en bas, 1 cm sous l’articulation sterno-claviculaire ; (III) en dedans, en dedans de la tête de la clavicule, soit 1 cm en dehors de la ligne médiane ; (IV) en externe, 1 cm en dedans de la tête humérale. Il est nécessaire d’ajouter des caches afin de protéger la tête humérale, le larynx, la thyroïde et la moelle épinière. Le point de prescription de ce faisceau est généralement de 2 à 3,5 cm de profondeur en fonction de l’épaisseur du creux sus / sous-claviculaire de la patiente [40]. Lorsque l’irradiation axillaire est indiquée (Figs. 38, 39, 41,42), celle-ci se fait par deux faisceaux opposés antéro-postérieurs (faisceau antérieur incliné de ± 10 à 15 ° afin d’épargner la moelle épinière et faisceau postérieur incliné de 180 °), en technique DSA dont la balistique est adaptée et personnalisée en prenant en compte les contraintes dosimétriques énoncées ci-dessus. Les limites du faisceau axillo-sus-claviculaire antérieur sont (I) en haut, le sommet de la clavicule, soit 1 cm en dessous du bord
libre du muscle trapèze ; (II) en inférieur, 1 cm sous l’articulation sterno-claviculaire ; (III) en dedans, en dedans de la tête de la clavicule, soit 1 cm en dehors de la ligne médiane ; (IV) en dehors, débord de 5 mm sur la tête humérale. Les limites du faisceau axillo-sus-claviculaire postérieur sont (I) en haut, le long du bord supérieur de la clavicule ; (II) en bas, 1 cm sous l’articulation sterno-claviculaire, en limitant la divergence et d’éventuelle recoupe avec les faisceaux tangentiels ; (III) en dedans, le long du gril costal en laissant 1 cm de poumon ; (IV) en dehors, débord de 5 mm sur la tête humérale. Il est nécessaire d’ajouter des caches afin de protéger le reste de la tête humérale, l’articulation acromio-claviculaire, le larynx, la thyroïde et la moelle épinière. Le point de prescription de ce faisceau est à mi-épaisseur.
5.
Toxicité aigue de la radiothérapie [41]
5.1. Radiodermite Elle se manifeste vers la 3e-4e semaine de traitement par un érythème, un œdème et une diminution des sécrétions sébacées. À la 5e semaine (vers 45 Gy), il peut exister une desquamation sèche puis exsudative. La ré-épithélialisation débute en général sept à dix jours après la fin de l’irradiation.
5.2. Œsophagite Elle apparaît à la 2e semaine de traitement lorsque l’œsophage est inclus dans le champ d’irradiation. Elle se manifeste par une dysphagie plus ou moins importante. Elle se répare plus rapidement que la radiodermite et peut être traitée par l’administration d’anti-acides.
5.3. Pneumopathie aigue Elle apparaît deux à quatre mois après la radiothérapie, souvent asymptomatique et de découverte radiologique. Elle peut s’accompagner de signes fonctionnels (toux, dyspnée, fièvre). Dans les cas les plus sévères, un tableau de pneumopathie interstitielle diffuse peut survenir, faisant intervenir un œdème interstitiel pulmonaire avec réduction de l’espace alvéolaire favorisant les surinfections.
5.4. Péricardite aigue Elle est observée pendant ou peu après la radiothérapie, et est marquée par une douleur thoracique, une fièvre et des signes électrocardiographiques. La survenue d’un épanchement péricardique n’est pas constante.
6.
Toxicité tardive
6.1. Facteurs de risque de survenue d’effets secondaires tardifs Différents facteurs sont impliqués dans la genèse de ces complications tardives radio-induites. Ils sont soit dépendants du patient : (I) génétiques tels que le déficit de la réparation
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de l’ADN [8,30] ; (II) ou peuvent être liés à des « comorbidités » préexistantes telles que l’obésité, les anomalies de la vascularisation (hypertension artérielle, diabète) ou les maladies du collagène ; (III) et enfin l’âge de la patiente. Il existe également des facteurs de risque liés au traitement : (I) par irradiation, tels que la dose totale, la dose/fraction, le volume traité [15,26,58,61] ; (II) antécédent de chirurgie ; (III) association concomitante de chimiothérapie ou hormonothérapie [5,16,36].
6.2. Toxicité cutanée et sous-cutanée Elle se traduit par une peau atrophique, sèche, dépigmentée et parsemée de télangiectasies. Elle est souvent associée à une fibrose sous-cutanée. Elle s’observe pour des doses de plus 60 Gy. Le principal risque est la nécrose cutanée, qui se manifeste par une ulcération atone de cicatrisation difficile et pouvant nécessiter dans les cas extrêmes une greffe ou une plastie cutanée [41]. Le taux d’incidence de la fibrose mammaire après traitement conservateur du sein a été évalué à 20,8 % dans une étude 2288110882 de l’European Organization for Research and Treatment of Cancer [13]. Les principaux facteurs de risque identifiés sont l’existence d’un œdème ou d’un hématome postopératoire dans le sein, la chimiothérapie concomitante, la dose totale délivrée dans la glande mammaire et la faible énergie des photons utilisée (≤ 6MV).
6.3. Lymphœdème Il se manifeste par une augmentation de la circonférence du bras homolatéral au sein traité. Le taux d’incidence du lymphœdème du membre supérieur après curage axillaire de niveau I ou II, suivie ou non de radiothérapie est d’environ 4 %. Le principal facteur de risque impliqué dans ce cas est l’irradiation axillo-sus-claviculaire [12].
6.4. Toxicité pulmonaire Elle se manifeste à la fin de la première année suivant le traitement et se traduit par une perte de l’élasticité pulmonaire avec dyspnée et altération progressive des fonctions respiratoires. La radiographie pulmonaire montre un syndrome interstitiel. Les signes évoluent progressivement en un à deux ans, avant de se stabiliser. Leur fréquence et leur intensité sont proportionnelles au volume pulmonaire irradié, à la dose totale [18,42], à la dose par fraction (le risque augmentant rapidement au-dessus de 2 Gy). Les lésions pulmonaires sont de plus favorisées par une bronchite chronique ou un emphysème et par certains agents de chimiothérapie [37,41].
6.5. Toxicité cardiaque Il s’agit essentiellement de cardiopathies ischémiques, d’insuffisances cardiaques et de valvulopathies [25]. Le risque de maladies cardio-vasculaires après irradiation est 1,3 fois supérieur à celui de la population générale. L’irradiation mammaire interne augmente significativement le risque d’affection coronarienne de 7 à 18 % et celui d’infarctus du myocarde de 3 à 9 % [63]. Par ailleurs, la dose totale, la technique d’irradiation, une anatomie défavorable de la patiente sont des facteurs de
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risque de complications cardiaques radio-induites [22] et l’association de chimiothérapies cardio-toxiques, même administrées à distance de la radiothérapie, peut accroître la gravité de ces complications.
6.6. Cancer radio-induit L’incidence des cancers radio-induits, c’est à dire de cancers de type histologique différent du cancer primitif dans les territoires irradiés est très faible (< 2/1000). La dernière méta-analyse de l’EBCTCG (Early Breast Cancer Trialists’Collaborative Group) a montré une augmentation du risque de second cancer après radiothérapie, en particulier de cancer du poumon (HR = 1,61), de cancer de l’œsophage (HR = 2,06), de leucémie (HR = 1,71), de sarcome des tissus mous (HR = 2,34) [11]. Le risque de cancer bronchique radio-induit pourrait être augmenté, notamment en cas de tabagisme associé (HR = 3,08) [49].
6.7. Toxicité neurologique La plexite radique se manifeste par des douleurs et/ou des déficits sensitivo-moteurs et peut survenir pour une dose de plus de 55 Gy délivrée en cinq semaines [41,56].
6.8. Toxicité osseuse Les ostéonécroses s’observent pour une dose totale de 60 à 70 Gy. Leur fréquence et leur gravité sont liées à l’importance du volume osseux irradié. Des fractures spontanées de côtes ou de la clavicule peuvent s’observer pour une dose de 65 Gy [41].
7.
Cas clinique 1
Mme… R., patiente de 54 ans, sans antécédents familiaux particuliers, ménarche à l’âge de 15 ans, mère de deux enfants âgés de 22 et 25 ans, ménopausée à l’âge de 45 ans, n’ayant jamais pris de traitement hormonal substitutif, s’est autopalpée un nodule du quadrant supéro-externe du sein droit. À l’examen clinique (taille du soutien gorge : 85 B), il y avait un nodule d’environ 30 × 20 mm du quadrant supéro-externe du sein droit et les aires ganglionnaires étaient libres. Une biopsie de ce nodule a mis en évidence un carcinome canalaire infiltrant de grade II (3,2,1). Une chimiothérapie néo-adjuvante a été proposée, mais après discussion, la patiente a opté clairement pour une mastectomie totale droite et curage axillaire sans traitement systémique initial. L’examen anatomo-pathologique définitif a conclu à la présence d’un carcinome canalaire infiltrant de 21 mm, de grade II (2,2,2), les tranches de section chirurgicales étaient saines, 90 % des cellules exprimaient des récepteurs aux estrogènes, 100 % des récepteurs à la progestérone, il n’y avait pas de surexpression de Her2 et un ganglion axillaire était envahi sur 18. La patiente a reçu trois cycles de FEC100 (épiribicine-5-fluoro-uracile cyclophosphamide) suivis de trois cycles de Taxotère®. Trois à quatre semaines après le dernier cycle de chimiothérapie, a été débutée une radiothérapie 50 Gy en 25 fractions et cinq semaines de la paroi thoracique droite, de la chaîne mammaire interne droite et du creux sus-claviculaire droit. Lors de la planification du traitement, la patiente a été
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prévenue du risque de survenue d’éventuels effets secondaires aigus et tardifs de la radiothérapie. Le repérage dosimétrique a été effectué par un scanographe dédié sur lequel la patiente a été installée sur un plan incliné en décubitus dorsal. Afin de faciliter la visualisation de la cicatrice de mastectomie et de la glande mammaire controlatérale, des fils radio-opaques ont été apposés à la peau, délimitant cliniquement la cicatrice de mastectomie et le volume de la glande mammaire controlatérale. La planification tridimensionnelle conformationnelle (Fig. 25) a compris la délinéation des différentes aires ganglionnaires (sus-claviculaire, sous-claviculaire, chaîne mammaire interne, (Fig. 1-11) et 17-20 (Fig. 18) ainsi que la délimitation des organes à risque, à savoir le cœur et les poumons (Fig. 21-24). La dosimétrie a consisté à positionner les faisceaux de traitement en fonction de l’anatomie de la patiente, des volumes cibles et des organes à risque (Fig. 36-40). Elle a ensuite été optimisée par des filtres en coin afin d’homogénéiser la répartition de la dose au sein de la paroi thoracique et en pondérant la prescription en profondeur du creux sus-claviculaire et de la chaine mammaire interne. La dose a été, conformément au rapport 62 de l’International commission on radiation units and measurements (ICRU), comprise entre la 95 % et la 107 % (Fig. 31-35,41-45).
8.
Cas clinique 2
Mme… G., patiente de 51 ans, sans antécédents familiaux particuliers, ménarche à l’âge de 13 ans, mère d’un enfant âgé de 26 ans, ménopausée à l’âge de 50 ans, n’ayant jamais pris de traitement hormonal substitutif, a consulté pour une rétraction rétro-mamelonnaire. À l’examen clinique (taille du soutien gorge : 90 B), il y avait un nodule de 20 mm dans le quadrant inféro-externe du sein gauche et une adénopathie axillaire gauche de 15 mm mobile (T2N1). Une biopsie de ce nodule a mis en évidence un carcinome canalaire infiltrant de grade II (3,2,2). Une tumorectomie gauche et un curage axillaire ont été réalisés et l’examen anatomopathologique définitif a conclu à la présence d’un carcinome canalaire infiltrant de 25 mm, de grade III (3,3,3) ; l’exérèse était complète (avec une marge de plus de 10 mm), il y avait de nombreux emboles tumoraux vasculaires et lymphatiques venant au contact de la berge profonde de la pièce opératoire, les
récepteurs hormonaux étaient exprimés (dans 40 % des cellules pour les estrogènes et 20 % pour la progestérone), il n’y avait pas de surexpression de Her2, 16 ganglions sur 17 étaient atteints, dont dix avec rupture capsulaire. La patiente a reçu quatre cycles de FEC100 (épiribicine ; 5-fluoro-uracile cyclophosphamide) suivis de quatre cycles de Taxotère®. Trois à quatre semaines après le dernier cycle de chimiothérapie, a été débutée une radiothérapie de 50 Gy en 25 fractions et cinq semaines de l’ensemble de la glande mammaire gauche suivie d’un complément de 16 Gy dans le lit de tumorectomie, et de 50 Gy en 25 fractions et cinq semaines des aires ganglionnaires (chaîne mammaire interne gauche et aire axillo-sus-claviculaire gauche). Lors de la planification du traitement, la patiente a été prévenue du risque de survenue d’éventuels effets secondaires aigus et tardifs de la radiothérapie. Le repérage dosimétrique a été effectué à l’aide d’un scanographe dédié sur lequel la patiente a été installée sur un plan incliné en décubitus dorsal. Afin de faciliter la visualisation de la glande mammaire, des fils radio-opaques ont été apposés à la peau, délimitant cliniquement le volume de la glande mammaire, l’induration postopératoire, la cicatrice de tumorectomie. La planification tridimensionnelle conformationnelle a compris la délinéation des différentes aires ganglionnaires (sus-claviculaire, sous-claviculaire, axillaire, mammaire interne) (Fig. 1 à 20), la délinéation de la glande mammaire, du lit de tumorectomie visualisé par la mise en place de quatre clips chirurgicaux aux quatre points cardinaux de la tumorectomie [70] ainsi que la délimitation des organes à risque, à savoir le cœur et les poumons (Fig. 21 à 24). La dosimétrie a consisté à positionner les faisceaux de traitement en fonction de l’anatomie de la patiente, des volumes cibles et des organes à risque (Fig. 36 à 38). Elle a ensuite été optimisée par des filtres en coin afin d’homogénéiser la répartition de la dose au sein de la paroi thoracique et en pondérant la prescription en profondeur du creux sus-claviculaire et de la chaîne mammaire interne. La dose a été, conformément au rapport 62 de l’ICRU, comprise entre 95 % et la 107 % (Fig. 39 à 41).
Conflit d’intérêt Les auteurs n’ont déclaré aucun conflit d’intérêts pour cet article.
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S143
Fig. 31 à 34. Dosimétrie de l’ensemble de la glande mammaire et du complément d’irradiation du lit de tumorectomie, coupes transverses. Dosimetry of whole mammary gland and boost of lumpectomy cavity, axial CT-slices.
droite
Fig. 37. Dose moyenne délivrée au poumon homolatéral, au poumon controlatéral, au cœur et à la chaîne mammaire interne. Mean ipsilateral and controlateral lung dose and mean heart and IMC dose.
Fig. 36. Histogramme dose-volume du poumon homolatéral (rose) avec V20 Gy (volume recevant 20 Gy ou plus) < 30 % et V30 Gy (volume recevant 30 Gy ou plus) < 20 %, du cœur (vert) V30 Gy < 1 % et de la chaîne mammaire interne avec D 95 % (dose dans 95 % du volume) > 45 Gy (vert). Dose-Volume Histogram of ipsilateral lung (pink) V20 Gy 65 Gy. Dose-Volume Histogram of ipsilateral lung (yellow) V20 Gy T2b, concentration sérique de PSA >20 ng/ml, score de Gleason ≥ 8) : la radiothérapie associée à une hormonothérapie de longue durée est le traitement standard [5,6,15,24,26]. Un curage pelvien peut être effectué au préalable, si le taux de risque d’atteinte ganglionnaire est élevé. L’indication d’une irradiation pelvienne en cas d’absence de curage est actuellement débattue [8]. La prostatectomie n’est pas recommandée, elle est parfois discutée pour des tumeurs classées T2C et de score de Gleason de moins de 8 ou pour certains patients atteints de tumeur de stade T3 sélectionnés (patients jeunes souffrant de symptômes obstructifs) ou dans le cadre de protocoles.
4.
Modalités du traitement
4.1. Détermination des volumes cibles Les volumes d’intérêt sont définis selon les critères des rapports 52 et 62 de l’International commission on radiation units and measurements (ICRU) [9]. La détermination des volumes cibles pour la radiothérapie du cancer de prostate a fait l’objet de recommandations par l’European Organization on treatment of cancer (EORTC) [4]. Le volume tumoral macroscopique, ou GTV (Gross Tumor Volume), correspond à la tumeur. Il est en pratique souvent difficile de l’individualiser au sein de la tumeur, notamment sur le scanner de simulation. Le volume cible anatomoclinique, ou CTV (Clinical Target Volume), contient la prostate, avec une marge de 5 mm pour les patients atteints de cancer à risque intermédiaire ou élevé afin de prendre en compte le risque d’extension extracapsulaire [7]. Les vésicules séminales sont également incluses pour ces patients atteints de cancer de
Tableau 1 Classification TNM de 2007 du cancer de la prostate 2007 TNM classification, prostate cancer T1 T1a T1b T1c
Tumeur cliniquement inapparente, non palpable, non visible par imagerie médicale Tumeur découverte de manière fortuite par histologie (< 5 % de copeaux de résection) Tumeur découverte de manière fortuite par histologie (> 5 % de copeaux de résection) Tumeur diagnostiquée par biopsie à l’aiguille (par exemple à cause d’un niveau élevé de PSA)
T2 T2a T2b T2c
Tumeur limitée au tissu prostatique Tumeur limitée à la moitié d’un lobe Tumeur limitée à un lobe Tumeur impliquant les deux lobes
T3 T3a T3b
Tumeur envahissant la capsule Envahissement extracapsulaire unilatéral ou bilatéral Envahissement d’une ou des deux vésicules séminales
T4
Tumeur fixée aux tissus avoisinants ou envahissement des organes voisins autres que les vésicules séminales : col vésical, sphincter externe, rectum, muscle releveur et/ou plancher pelvien
NX N0 N1
Renseignements insuffisants pour classer l’atteinte des ganglions régionaux Pas de ganglions régionaux positifs Métastase au niveau des ganglions régionaux
MX M0 M1 M1a M1b M1c
Renseignements insuffisants pour classer les métastases à distance Pas de métastases à distance Métastases à distance Ganglions non régionaux Métastases osseuses Autre(s) métastase(s)
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risque intermédiaire ou élevé, voire à risque faible en fonction de la localisation des biopsies positives. L’irradiation des deux premiers centimètres semble suffisante [17]. La dose reçue par les vésicules est différente de celle pour la prostate, en pratique on définit un CTV1 (prostate et vésicules séminales), puis un CTV2 (prostate seule). L’irradiation des aires ganglionnaires n’est pas systématique et actuellement controversée depuis l’actualisation des résultats de l’essai 94-13 du RTOG (Radiation therapy oncology group) [8,19]. Elle peut être discutée en cas d’absence de curage ou de prélèvement inférieur à huit ganglions, en fonction d’un taux de risque d’atteinte ganglionnaire de plus de 15 % selon la formule de Roach [27] ou des tables de Partin [21]. Elle est à mettre en balance avec la toxicité digestive. Il n’existe en tout cas aucun argument pour irradier les ganglions pelviens chez un patient atteint de cancer classé pN0. Le drainage ganglionnaire de la prostate se fait selon quatre voies : le long de l’axe pudendal et de la fosse obturatrice en bas, dans les ganglions hypogastriques et iliaques internes bilatéralement, au niveau des iliaques externes « supérieurs » en haut et le long du rectum dans les ganglions présacrés et du promontoire. Le volume cible anatomoclinique ganglionnaire correspond au contour de ces aires ganglionnaires, on peut exclure les ganglions présacrés qui ne sont retrouvés envahis que dans 2 à 5 % des cas. Le volume cible prévisionnel correspond au volume cible anatomoclinique, auquel on ajoute une marge dans les trois dimensions pour prendre en compte les mouvements internes des organes et les erreurs de repositionnement. Cette marge est définie en fonction des procédures de chaque centre ; en pratique dix mm est la marge la plus fréquemment choisie, 5 mm semblent acceptables avec un contrôle quotidien par imagerie portale, grâce à l’imagerie embarquée. Les organes à risque suivants doivent être contourés : vessie, rectum (deux cm au dessus et en dessous du volume cible prévisionnel), canal anal, l’intestin grêle (contours des parois externes), les têtes fémorales (de l’acétabulum au petit trochanter-exclu-), ainsi que le bulbe pénien.
4.2. Radio-anatomie Les vésicules séminales, la prostate ainsi que les différents organes à risque sont visualisés sur la Fig. 1. La vessie et le rectum, qui sont des organes creux, sont facilement identifiables sur la scanographie, de même que les limites des têtes fémorales en fenêtre osseuse. La scanographie n’est pas le meilleur examen pour l’analyse de la prostate, notamment pour la définition de l’apex. Si les logiciels le permettent, la fusion de la scanographie de simulation avec une IRM en position de traitement est intéressante, à défaut d’une simulation directement réalisée avec une IRM [16].
4.3. Doses prescrites La dose totale est de 70 à 80 Gy pour une radiothérapie exclusive en fonction de la technique utilisée et selon le contexte clinique est recommandée [29]. Plusieurs études ont mis en évidence l’intérêt de l’escalade de dose sur la survie sans récidive biochimique, mais n’ont pas démontré d’avantage en termes de survie globale. L’équipe
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du MD Anderson Cancer Center (MDACC) a comparé 70 et 78 Gy chez des patients atteints de cancer de stades T1b-T3. La probabilité de survie sans récidive biochimique était améliorée, le bénéfice le plus large était observé pour les patients dont la concentration sérique de PSA dépassait 10 ng/ml. À noter que les patients ne recevaient pas d’hormonothérapie [18,25]. Peeters et al. ont comparé les doses de 68 Gy et 78 Gy pour des cancers de stades T1b-T4, et l’escalade de dose se traduisait par une augmentation du taux de contrôle de PSA chez les patients atteint de cancer de risques intermédiaire et élevé. En analyse de sous groupe, seuls les patients atteints de cancer de risque intermédiaire bénéficiaient de l’escalade de dose [22]. Zietman et al. ont rapporté les résultats d’un essai concernant 393 patients atteints de cancer de stade T1b-T2b avec une concentration sérique de PSA de moins de 15 ng/ml. Dans cette étude, l’escalade de dose était obtenue avec un boost par protonthérapie. Tous les patients, quel que soit le risque du cancer, bénéficiaient de la radiothérapie à la dose de 79,2 Gy par comparaison à 70,2 Gy [32]. Plus récemment, l’essai RT01 du Medical Research Council, qui a inclus 843 patients essentiellement atteints de cancer de risque intermédiaire ou élevé, a comparé les doses de 64 Gy et 74 Gy, en association à une hormonothérapie de trois à six mois. Un bénéfice de survie sans progression biochimique a été là aussi retrouvé, sans modification de la survie globale [14]. Ces différents essais nous montrent le bénéfice d’une escalade de dose à 78 Gy pour les cancers de risques faible et intermédiaire. Le standard pour les cancers de risque élevé à l’ère de l’hormonothérapie reste une radiothérapie à la dose de 74 Gy. Le bénéfice d’une dose supérieure en association à une hormonothérapie reste à prouver.
4.4. Organes à risque et contraintes de dose Ces contraintes de dose sont issues du guide de procédure de radiothérapie externe 2007 [29]. Le rectum donne lieu à plusieurs contraintes de dose, sous forme de Vx < n % (dose de x Gy ne doit pas être délivrée dans plus de n % du volume) : V74 ≤ 5 %, V70 ≤ 25 %, V60 ≤ 50 %. La dose maximale au niveau de la circonférence rectale ne doit pas dépasser 60 Gy. La dose reçue par le canal anal doit être renseignée. Pour la vessie, les contraintes de dose recommandées par le guide de procédure de radiothérapie externe sont : V70 ≤ 25 % et V60 ≤ 50 %. Les têtes fémorales ne doivent pas recevoir plus de 50 Gy dans 10 % de leur volume (V50 ≤ 10 %) [29].
4.5. Balistique, dosimétrie Une scanographie de simulation est réalisée pour localiser les différents volumes d’intérêt, définir les axes et les dimensions des faisceaux. Le patient est en en position de traitement, c’est à dire en décubitus dorsal, avec des cales sous les genoux, permettant un déplacement postérieur du rectum plus important que celui de la prostate et offrant ainsi un gain dosimétrique. La cale sous les pieds est indissociable de la cale sous les genoux, et permet un repositionnement fiable à 3 mm près [30]. Pour reproduire les mêmes conditions lors du traitement, il faut essayer d’avoir une réplétion des organes internes, vessie et rectum, la plus proche possible de celle obtenue pendant la
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phase de préparation du traitement, afin de diminuer le risque de mouvements internes. Le choix de l’optimisation de la balistique et de la pondération des faisceaux est variable selon chaque centre, et utilise des photons d’énergie ≥ 10 MV. Des caches personnalisés et/ou des collimateurs multilames permettent une conformation aux volumes cibles définis par l’oncologue radiothérapeute, afin de protéger les organes à risque. La radiothérapie tridimensionnelle, si possible avec modulation d’intensité, offre une conformation et une homogénéité supérieure de la dose délivrée au volume cible, avec une protection accrue des organes à risque. Cela permettrait une réduction significative de la toxicité ; de plus cela ouvre le champ de l’escalade de dose en contribuant ainsi à une amélioration des taux de contrôle local et de survie sans récidive [2]. L’objectif est de respecter la prescription de dose selon les critères des rapports 50 et 62 de l’ICRU 50 : le volume cible prévisionnel doit recevoir des doses comprises entre 95 % et 107 % [9], tout en considérant la dose reçue par les organes à risque. Le calcul des histogrammes dose-volume est recommandé.
5.
Toxicité
5.1. Aiguë La toxicité aiguë urinaire, représentée essentiellement par une dysurie, une pollakiurie et des brûlures urinaires est fréquente, et nécessite parfois un traitement symptomatique. La toxicité digestive est également fréquente, à type de diarrhées, ténesmes et faux besoins.
périnerveux. L’IRM pelvienne a retrouvé une infiltration bilatérale de la base des vésicules, mais elle ne notait aucun ganglion suspect. La scintigraphie osseuse et la scanographie thoraco-abdopelvienne étaient normales. Le dossier du patient a ét présenté en réunion de concertation pluridisciplinaire, et une association de radiothérapie externe et d’hormonothérapie de trois ans a été décidée. Compte tenu du risque élevé d’atteinte ganglionnaire et de l’absence du curage, une radiothérapie du pelvis a été retenue. Le patient a bénéficié d’une scanographie de simulation en position de traitement, en décubitus dorsal avec un système de contention pour les genoux et les pieds, et une injection de produit de contraste a été effectuée. Les Figs. 2 et 3 montrent les différents volumes d’intérêt. Le premier volume cible prévisionnel (PTV1) comprenait le volume cible anatomoclinique de la prostate avec une marge de 10 mm (cinq en arrière), les vésicules séminales et les aires ganglionnaires à risque. Le deuxième volume cible prévisionnel (PTV2) comprenait le volume cible anatomoclinique de la prostate seule avec une marge de 10 mm (5 mm en arrière). Le traitement a été réalisé avec modulation d’intensité, afin de préserver au maximum les organes sains tout en délivrant la dose prescrite. Le PTV1 a reçu une dose de 54 Gy en 37 fractions de 1.45 Gy, soit un équivalent biologique pour des fractions de 2 Gy de 46 Gy. Le PTV2 a reçu 74 Gy en 37 fractions de 2 Gy. Il s’agissait d’un traitement utilisant un boost intégré simultané ou SIB. Sept faisceaux d’énergie de 18 MV ont été utilisés. La couverture du PTV1 par l’isodose 95 % (une prescription de 54 Gy au point ICRU) est visible sur la figure 4. Enfin les histogrammes dose-volume sont représentés sur la figure 5.
5.2. Tardive
7.
Les séquelles tardives sont essentiellement urinaires et digestives. Zelefsky et al. ont rapporté dans une série de plus de 1500 patients la toxicité tardive de la radiothérapie externe conformationnelle tridimensionnelle avec modulation d’intensité de plus de 70 Gy [31]. À dix ans, les taux de risque de toxicité ≥ grade 2 digestive et urinaire étaient respectivement de 9 et 15 %. Les délais médians de survenue étaient de 17 et 30 mois. Ils ont observé un taux de 1 % de toxicité rectale de grade 3, et de 3 % de toxicité urinaire de grade 3. La toxicité de grade 4 était exceptionnelle. Le risque de survenue d’une toxicité tardive, notamment digestive, était corrélée avec l’existence d’une toxicité aiguë (42 contre 9 %, p < 0,0001). La RCMI était associée à une réduction de la toxicité tardive rectale, en dépit de la délivrance de plus fortes doses (80 Gy dans cette étude).
Il s’agissait d’un patient de 70 ans dont la concentration sérique de PSA était de 11,8 ng/ml. Au toucher rectal, la prostate était souple. Des biopsies prostatiques ont été réalisées, mettant en évidence sur deux (de la base et la partie moyenne gauche) un adénocarcinome de score 7 de Gleason (3 + 4). Les biopsies étaient atteintes sur moins de 50 % de leur longueur. Il n’y a pas d’embole, ni d’effraction extra-capsulaire. Le bilan d’extension était normal. En réunion de concertation pluridisciplinaire, une radiothérapie externe a été décidée pour ce patient qui était atteint d’une lésion de stade T1c, classée en risque intermédiaire selon D’Amico. La lymphadénectomie première n’a pas été retenue, mais compte tenu du risque faible d’atteinte ganglionnaire, il n’y avait pas d’indication d’irradiation pelvienne. Une hormonothérapie concomitante et adjuvante a également été prescrite pour un total de six mois. Le patient a bénéficié d’une scanographie de simulation en position de traitement, en décubitus dorsal avec un système de contention pour les genoux et les pieds, et une injection de produit de contraste a été effectuée. La Fig. 6 montre les différents volumes d’intérêt : — premier volume cible anatomoclinique (CTV1) : prostate et vésicules séminales (deux premiers centimètres) ; — deuxième volume cible anatomoclinique (CTV2) : prostate ; — volume cible prévisionnel (PTV1, 2) : volume cible anatomoclinique + 1 cm (0,5 cm en arrière).
6.
Cas clinique 1
Un homme 52 ans, sans antécédent médicochirurgical particulier, a été adressé à la consultation de radiothérapie pour un adénocarcinome prostatique révélé par une concentration sérique de PSA de 21 ng/ml. Le toucher rectal mettait en évidence une lésion de stade T3. Les biopsies étaient massivement infiltrées (dix biopsies sur 12) ; il y avait un envahissement de la capsule périprostatique en regard du lobe moyen gauche, ainsi que des engainements
Cas clinique 2
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Le traitement est réalisé avec modulation d’intensité, afin de préserver au maximum les organes sains tout en délivrant la dose prescrite. Les PTV1 et PTV2 ont reçu une dose respective de 56 et 80 Gy, en 40 fractions respectivement de 1,4 et 2 Gy. L’équivalent biologique pour le PTV1 était de 46 Gy. Six faisceaux d’énergie de 18 MV ont été utilisés, selon l’angulation suivante : 60, 95, 130, 230, 265 et 300 °. Les couvertures du PTV1 et du PTV2 par l’isodose 95 % sont montrés sur les Figs. 7 et 8. On peut observer la haute conformité de l’isodose 76 Gy au PTV2, épargnant complètement le rectum pour des doses supérieures à 76 Gy. Enfin, les histogrammes dose-volume sont représentés sur la Fig. 9.
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On pourrait également proposer un plan de traitement associant un premier volume cible prévisionnel, prenant en compte les vésicules séminales et la prostate jusqu’à 56 Gy (46 Gy en équivalence biologique), puis un deuxième volume cible prévisionnel pour la prostate seule, pour au moins 74 Gy. La dose recommandée est d’au moins 74 Gy, ici nous avons pu prescrire 80 Gy à l’isocentre, grâce à la technique utilisée, la RCMI. La Fig. 11 montre la couverture du volume cible prévisionnel (PTV) par l’isodose 95 % (76 Gy), pour une prescription au point ICRU de 80 Gy. On peut observer la haute conformation au volume cible, permettant une épargne complète du rectum pour des doses supérieures à 76 Gy.
8.
Cas clinique 3
Il s’agissait d’un patient de 71 ans qui avait comme antécédent une hypertension artérielle. Il a consulté pour une élévation du PSA sérique à 8,36 ng/ml. Au toucher rectal, la prostate était souple, aucun nodule décelable. Les biopsies prostatiques ont mis en évidence un adénocarcinome de score 6 de Gleason (3+3). Une biopsie sur six était tumorale, au niveau du lobe moyen droit, de longueur 5/13 mm. À noter, l’absence d’embole et d’effraction extracapsulaire. La lésion a donc été classée T1C, de faible risque selon D’Amico. En réunion de comité pluridisciplinaire, une indication de radiothérapie externe exclusive a été retenue, en accord avec le patient. Le patient a bénéficié d’une scanographie de simulation en position de traitement, en décubitus dorsal avec un système de contention pour les genoux et les pieds, et une injection de produit de contraste a été effectuée. Les figures montrent les différents volumes d’intérêt (Fig. 10) : — volume cible anatomoclinique : prostate ; — volume cible prévisionnel : volume cible anatomoclinique + 1 cm (0,5 cm en arrière).
Les histogrammes dose-volume sont représentés sur la Fig. 12.
9.
Conclusion La radiothérapie est une arme thérapeutique dans les cancers
de prostate. Les progrès technologiques, avec notamment la conformation tridimensionnelle et la modulation d’intensité nécessitent une définition précise des volumes cibles, une connaissance parfaite de la radio-anatomie de la prostate et du pelvis. Le choix de la balistique et de la dose prescrite permettent d’obtenir une dosimétrie respectant les contraintes à la fois aux organes à risque et au volume cible prévisionnel, gage d’un traitement de qualité.
Conflits d’intérêts Les auteurs n’ont déclaré aucun conflit d’intérêts pour cet article.
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Fig. 2. Volumes d’intérêt pour une radiothérapie de prostate et du pelvis d’un cancer de prostate à haut risque. Vessie : en jaune clair ; rectum : en vert ; grêle : jaune foncé ; vaisseaux : rose ; volume cible anatomoclinique ganglionnaire : en violet ; vésicules séminales : en bleu clair ; prostate : en rouge. Volumes of interest for prostate and pelvis radiotherapy for high-risk prostate cancer. Bladder (light yellow); rectum (green); small intestine (dark yellow); vessels (pink); lymph node CTV (purple); seminal vesicles (light blue); prostate (red).
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Fig. 2. (suite) Volumes d’intérêt pour une radiothérapie de prostate et du pelvis d’un cancer de prostate à haut risque. Vessie : en jaune clair ; rectum : en vert ; grêle : jaune foncé ; vaisseaux : rose ; volume cible anatomoclinique ganglionnaire : en violet ; vésicules séminales : en bleu clair ; prostate : en rouge. Volumes of interest for prostate and pelvis radiotherapy for high-risk prostate cancer. Bladder (light yellow); rectum (green); small intestine (dark yellow); vessels (pink); lymph node CTV (purple); seminal vesicles (light blue); prostate (red).
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Fig. 2. (suite) Volumes d’intérêt pour une radiothérapie de prostate et du pelvis d’un cancer de prostate à haut risque. Vessie : en jaune clair ; rectum : en vert ; grêle : jaune foncé ; vaisseaux : rose ; volume cible anatomoclinique ganglionnaire : en violet ; vésicules séminales : en bleu clair ; prostate : en rouge. Volumes of interest for prostate and pelvis radiotherapy for high-risk prostate cancer. Bladder (light yellow); rectum (green); small intestine (dark yellow); vessels (pink); lymph node CTV (purple); seminal vesicles (light blue); prostate (red).
Fig. 3. Représentation en 3 dimensions des volumes cibles. Premier volume cible prévisionnel : pelvien, en orange ; deuxième volume cible prévisionnel : prostate, en bleu. 3D diagram of target volumes. PTV1, pelvis (orange); PTV2, prostate (blue).
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Fig. 4. Dosimétrie. Vue en 3 dimensions de la couverture par l’isodose 95 % (51,3 Gy) du premier volume cible prévisionnel, auquel on a prescrit 54 Gy. La dose maximum est de 76,988 Gy (< 79,18, qui correspond à 107 %). Dosimetry. 3D view of 95% isodose coverage (51.3 Gy) of PTV1, for which 54 Gy is prescribed. The maximum dose is 76,988 Gy ( 5 % de copeaux de résection) Tumeur diagnostiquée par biopsie à l'aiguille (par exemple à cause d'un niveau élevé de PSA)
T2 T2a T2b T2c
Tumeur limitée au tissu prostatique Tumeur limitée à la moitié d’un lobe Tumeur limitée à un lobe Tumeur impliquant les deux lobes
T3 T3a T3b
Tumeur envahissant la capsule Envahissement extracapsulaire unilatéral ou bilatéral Envahissement d'une ou des deux vésicules séminales
T4
Tumeur fixée aux tissus avoisinants ou envahissement des organes voisins autres que les vésicules séminales: col vésical, sphincter externe, rectum, muscle releveur et/ou plancher pelvien
NX N0 N1
Renseignements insuffisants pour classer l'atteinte des ganglions régionaux Pas de ganglions régionaux positifs Métastase au niveau des ganglions régionaux
MX M0 M1 M1a M1b M1c
Renseignements insuffisants pour classer les métastases à distance Pas de métastases à distance Métastases à distance Ganglions non régionaux Métastases osseuses Autre(s) métastase(s)
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de délinéer le volume cible anatomoclinique 1 cm en avant de cette anastomose. En haut, le volume cible anatomoclinique comprend le col vésical et la base des vésicules séminales. En cas d’indication d’irradiation du lit des vésicules séminales (ou des résidus en place), l’irradiation des deux premiers centimètres semble suffisante [12]. En bas, la présence de l’anastomose vésico-urétrale rend difficile la localisation du lit de l’apex. Si l’on dispose d’une IRM pour la délinéation, Michalski et al. ont recommandé de délinéer 8 mm sous cette anastomose, bien visualisée en coupes coronales [14]. Sinon, le bulbe pénien est un repère fixe aisément identifiable sur la tomodensitométrie, et une distance de 10 mm entre la limite inférieure du volume cible anatomoclinique et le bulbe doit être observée. Le volume cible anatomoclinique n’inclut pas le bulbe pénien. Latéralement, le volume cible anatomoclinique vient au contact des lames sacro-recto-génito-pubiennes. Il n’y a pas d’indication à prendre les muscles ilio-obturateurs dans le volume. L’irradiation des aires ganglionnaires n’est pas systématique. Elle répond aux mêmes critères que pour une irradiation de la prostate en place, c’est à dire en fonction des facteurs pronostiques et d’un taux de risque d’atteinte ganglionnaire de plus de 15 % selon la formule de Roach [19] et les tables de Partin [17] ou en cas d’absence de curage ou de prélèvement inférieur à huit ganglions. Il n’existe aucun argument pour irradier les ganglions pelviens chez un patient atteint de cancer classé pN0. Cependant, cette irradiation est actuellement de plus en plus débattue, notamment depuis l’actualisation de l’essai 94-13 du du RTOG [8, 13]. Le drainage ganglionnaire de la prostate se fait selon quatre voies : le long de l’axe pudendal, de la fosse obturatrice en bas, de l’axe des déférents vers les ganglions iliaques externes et le long du rectum dans les ganglions présacrés et du promontoire [8]. Le volume cible anatomoclinique ganglionnaire correspond aux vaisseaux augmentés d’une marge de 7 mm [22], on peut exclure les ganglions présacrés, qui ne sont envahis que dans 2 à 5 % des cas. Le volume cible prévisionnel (PTV ou planing target volume), correspond au volume cible anatomoclinique auquel on ajoute une marge dans les trois dimensions pour prendre en compte les mouvements internes des organes et les erreurs de repositionnement. Cette marge est définie en fonction des procédures de chaque centre ; en pratique 10 mm est la marge la plus fréquemment choisie, 5 mm semblent acceptables avec un contrôle quotidien par imagerie embarquée. Les organes à risque suivants doivent être délinéés : la vessie, le rectum, le canal anal, l’intestin grêle (contours des parois externes), les têtes fémorales (de l’acétabulum au petit trochanter-exclu-), ainsi que le bulbe pénien.
3.2. Radioanatomie Les limites radioanatomiques du volume cible anatomoclinique ainsi que les différents organes à risque sont visualisés sur la Figure 1. La vessie et le rectum, qui sont des organes creux, sont facilement identifiables sur la scanogarphie, de même que les limites des têtes fémorales en fenêtre osseuse. L’anastomose vésico-urétrale est parfois plus difficile à individualiser ; mais lorsqu’une injection de produit de contraste peut être réalisée, on peut retenir que cette structure correspond à la jonction entre la vessie injectée et l’urètre non opacifié.
3.3. Doses prescrites Les trois essais randomisés ont montré un gain significatif de survie sans récidive biochimique pour des doses comprises entre 60 et 64 Gy. L’escalade de dose semble prometteuse, certains auteurs rapportant un bénéfice de survie sans récidive biochimique et de survie sans maladie pour des doses de plus 70 Gy [10], ce d’autant que la RCMI permettrait de délivrer ces doses sans augmenter la toxicité [15]. En cas de récidive biochimique avérée, la dose de radiothérapie doit être d’au moins 65 Gy [2, 4, 26].
3.4. Organes à risque et contraintes de dose Ces contraintes de dose sont issues du guide de procédure de radiothérapie externe [20]. Le rectum fait l’objet de plusieurs contraintes de dose, sous forme de Vx < n % (dose de x Gy ne doit pas être délivrée dans plus de n % du volume) : V74 ≤ 5 %, V70 ≤ 25 %, V60 ≤ 50 %. La dose maximale au niveau de la circonférence rectale ne doit pas dépasser 60 Gy. La dose reçue par le canal anal doit être renseignée. Pour la vessie, les contraintes de dose recommandées par le guide de procédure de radiothérapie externe sont : V70 ≤ 25 % et V60 ≤ 50 %. Les têtes fémorales ne doivent pas recevoir plus de 50 Gy dans 10 % de leur volume (V50 ≤ 10 %) [20].
3.5. Balistique, dosimétrie Pour une radiothérapie avec simulation virtuelle, la scanographie de simulation est faite en position de traitement, c’est à dire en décubitus dorsal, avec des cales sous les genoux, permettant un déplacement postérieur du rectum plus important que celui de la prostate et offrant ainsi un gain dosimétrique. La cale sous les pieds est indissociable de la cale sous les genoux, et permet un repositionnement fiable à 3 mm [21]. Le choix et l’optimisation de la balistique et de la pondération des faisceaux est variable selon chaque centre, mais utilise des photons d’énergie au moins égale à 10 MV. Pour une radiothérapie conformationnelle, quatre faisceaux isopondérés (0 °, 90 °,180 ° et 270 °) peuvent être choisis. On utilise des caches personnalisés et/ou un collimateur multilame pour protéger les organes à risque, et la pénombre doit être prise en compte (distance déterminée pour chaque appareil et énergie). L’objectif est de respecter la prescription selon les critères des rapports 50 et 62 de l’ICRU (International Commission on Radiation Units and Measurements) : les doses délivrées au volume cible anatomoclinique doivent être comprises entre 95 % et 107 % [9], tout en considérant la dose reçue par les organes à risque. Le calcul des histogrammes dose-volume est recommandé.
3.6. Toxicité aiguë La toxicité aiguë urinaire, représentée essentiellement par une dysurie, une pollakiurie et des brûlures urinaires, est fréquente, mais essentiellement de grades 1 et 2. Dans moins de 5 % des cas, elle est de grade 3. Il en est de même pour la toxicité digestive, avec 5 % de diarrhées de grade 3, aucun de grade 4 [5, 23, 28].
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3.7. Toxicité tardive Les séquelles tardives notées dans les essais randomisés étaient essentiellement urinaires avec des sténoses urétrales et une incontinence urinaire, retrouvées dans 4 à 17 % des cas et à un moindre degré rectales, pour 3 % des patients [5, 23]. La dose délivrée était comprise entre 60 et 64 Gy, mais sans modulation d’intensité.
4.
Cas clinique
L’histoire de la maladie de ce patient âgé de 67 ans a débuté par une élévation de la concentration sérique du PSA à 7,45 ng/ ml, qui a conduit à la réalisation de biopsies prostatiques. Celles-ci ont révélé un adénocarcinome de score 7 de Gleason (3+4) du corps et de la base droite, sans franchissement de la capsule. Une scintigraphie osseuse a été réalisée dans le cadre du bilan d’extension, et n’a trouvé qu’une hyperfixation en D12 et L1 en rapport avec une discarthrose étagée. À noter dans les antécédents personnels du patient un séminome testiculaire en 1977 traité par orchidectomie, et dans ses antécédents familiaux un cancer du sein maternel. Son traitement ne comprenait que de la tamsulosine. La tumeur pouvait être classée T1c et était de pronostic intermédiaire selon la classification de D’Amico. Une prostatectomie radicale et un curage bilatéral sous cœlioscopie ont été réalisés et l’examen histologique définitif a conclu à un adénocarcinome prostatique de score 7 de Gleason (3+4) et de stade pT3b pN0. Il y avait une invasion débutante de la vésicule séminale gauche et une des sections chirurgicales a été retrouvée envahie sur 3 mm de hauteur. La concentration sérique de PSA était deux mois après l’intervention de moins de 0,01 ng/ml. En réunion de concertation pluridisciplinaire, la décision de radiothérapie adjuvante a été prise. Celle-ci a été retardée de quatre mois par rapport à l’intervention chirurgicale du fait de la persistance de troubles urinaires. Une scanographie de simulation a été réalisée, patient en position de traitement avec un système de contention pour les
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genoux et les pieds, et une injection de produit de contraste a été effectuée. Les figures 2 et 3 montrent les contours des différents volumes d’intérêt, le volume cible anatomoclinique, le volume cible prévisionnel et les différents organes à risque : vessie, rectum, têtes fémorales, bulbe pénien. Le plan de traitement de radiothérapie conformationnelle a utilisé quatre faisceaux isopondérés sans filtre de 18 MV. L’angulation a été définie comme suit : 0°, 90°, 180°, 270°. La prise en compte de la pénombre a nécessité une distance de 8 mm entre les volumes cibles prévisionnels et le collimateur multilame. La couverture du volume cible prévisionnel par l’isodose 100 % d’une prescription de 64 Gy au point ICRU est visible sur la figure 4. Enfin les histogrammes dose-volume sont représentés sur la figure 5.
5.
Conclusion
La radiothérapie postopératoire des cancers localisés de prostate à haut risque (pT3, et/ou tranches de section atteintes) offre un gain significatif de survie sans progression biochimique, voire de survie globale et de survie sans métastases, selon les résultats des différentes études randomisées avec une toxicité aiguë et tardive modérée. La définition précise des volumes cibles, le choix de la balistique pour une dosimétrie respectant les contraintes à la fois aux organes à risque et au volume cible prévisionnel, dans le cadre d’une radiothérapie conformationnelle, sont le gage d’un traitement de qualité. Il reste à déterminer la meilleure séquence thérapeutique – en situation adjuvante ou lors la récidive biochimique – ainsi que l’intérêt d’une association à l’hormonothérapie de courte durée ; ces questions font actuellement l’objet d’essais randomisés.
Conflits d’intérêts Les auteurs ont déclaré n’avoir aucun conflit d’intérêts pour cet article.
Fig. 1. Radioanatomie a : symphyse pubienne, b : rectum, c : bulbe pénien, d : apex vésical, e : lames sacrorectogénitopubiennes, f : tête fémorale ligne rouge : limite antérieure, lame préprostatique (symphyse pubienne), ligne bleue : limite postérieure, face antérieure du rectum, ligne jaune : limite latérale, lames sacrorectogénitopubiennes, ligne verte : limite inférieure : aponévrose moyenne du périnée. Radio-anatomy a, pubic symphysis ; b, rectum ; c, penile bulb ; d, vesical apex ; e, pubovesical and sacral ligaments, f, femoral head. red line, anterior limit, vesical venous plexus (pubic symphysis); blue line, posterior limit, anterior side of rectum; yellow line, lateral limit, pubovesical and sacral ligaments; green line, inferior limit, perineal membrane.
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Fig. 2. Contours volume cible anatomoclinique (CTV en rouge), et organes à risque (rectum en vert et vessie en jaune) sur des coupes sériées tomodensitométriques. Delineation of clinical target volume (CTV, red) and organs at-risk (rectum, green; bladder, yellow) on serial CT scans.
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Fig. 3. Vue dans les 3 plans sagittal, transversal et coronal, et en trois dimensions des volumes d’intérêt (volume cible anatomoclinique, CTV, en rouge, volume cible prévisionnel, PTV, en orange, rectum en vert et vessie en jaune). View in sagittal, transversal, and coronal planes and in 3D of volumes of interest (CTV, red; PTV, orange; rectum, green; bladder, yellow).
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Fig. 4. Dosimétrie : couverture du volume cible prévisionnel (PTV) par l’isodose 100 %. Prescription au point ICRU : 64 Gy. Dosimetry: coverage of PTV with 100% isodose. Prescription at ICRU point, 64 Gy.
Fig. 5. Histogrammes dose-volume. Dose-volume histograms.
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Cancer/ R adi ot hérapie 14 Suppl . 1 (2010) S182– S188
Séminomes testiculaire de stade 1 Stage 1 testicular seminoma E. Grossa, * , C. Champetiera , Y. Pointreaub , A. Zaccariottoa , T. Dubergéa , B. Chauvetc a
Département de radiothérapie, hôpital de la Timone, 264, rue Saint-Pierre, 13005 Marseille, France. Service de radiothérapie, centre régional universitaire de cancérologie Henry-S.-Kaplan CHU de Tours, Hôpital Bretonneau, 2, Boulevard Tonnellé, 37000 Tours, France. c Institut Sainte-Catherine, Avignon, France. b
INFO ARTICLE
RÉSUMÉ
Les figures 2 et 3 sont visibles
Le cancer du testicule est rare, représentant seulement 1 % des tumeurs malignes, mais reste le cancer le plus fréquent chez l’homme jeune. La radiothérapie, en situation adjuvante dans les séminomes testiculaires de stade I opérés, permet une quasi-disparition du risque de rechute. Elle a pour objectif d’éradiquer la maladie micro-métastatique dans les territoires ganglionnaires de drainage. Dans le cas d’une irradiation adjuvante, le taux de survie sans rechute est de 96 % avec un taux de survie globale de 98 % à cinq ans. Le volume cible de l’irradiation est constitué par les aires ganglionnaires lombo-aortiques, auxquelles il est possible d’ajouter le hile rénal homolatéral à la lésion testiculaire (Fig. 6) ; l’irradiation en dog-leg, historiquement plus ancienne peut aussi être proposée. La dose actuellement la plus souvent utilisée est de 20 Gy en dix fractions et deux semaines, délivrée le plus souvent par deux faisceaux antérieurs et postérieurs iso-pondérés. La toxicité aiguë est essentiellement représentée par des signes digestifs, qui sont rapidement résolutifs à la fin de l’irradiation. La toxicité tardive implique une préservation du sperme, qui doit être envisagée avant la radiothérapie en raison de la crainte d’une infertilité post-thérapeutique. Le risque de second cancer lié à l’exposition aux rayonnements ionisants, même s’il est faible, est important à considérer chez ces patients à l’espérance de vie importante. Néanmoins, l’évolution des techniques de radiothérapie ainsi que la diminution des doses et des volumes irradiés permettra probablement de diminuer ce risque.
uniquement sur : http://www. sciencedirect.com/ Mots clés : Radiothérapie conformationnelle Seminome testiculaire Irradiation lombo-aortique Fertilité Volumes cibles Atlas
© 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
ABSTRACT Keywords: Conformal radiotherapy Seminoma testicular Paraaortic lymph node irradiation Infertility Target volume Atlas
Testicular cancer is rare, representing only 1 % of malignant tumors, but the most common cancer in young men, 15 to 35 years. Adjuvant radiotherapy after orchidectomy in testicular seminoma stage I, reduces risk of relapse. It aims to eradicate micro-metastatic disease in lymph drainage territories. In the case of adjuvant radiotherapy, the relapse-free survival of 96 % with an overall survival of 98 % at 5 years. The irradiation volume is made up of lymph nodes paraaortic which it is possible to add the ipsilateral renal hilum to the testicular lesion. The current recommended dose is 20 Gy in 10 fractions and 2 weeks, usually delivered by two antero-posterior beams. The acute toxicities, mainly represented by nausea and diarrhea are usually quickly resolved to the end of irradiation. Regarding toxicities long-term, preservation of semen should be considered after surgery because of fear of infertility post-treatment. The risk of second cancer associated with exposure to ionizing radiation, albeit small, is especially important to consider these patients to significant life expectancy. Nevertheless, developments in radiotherapy techniques and lower doses and irradiated volumes can probably reduce this risk further. © 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Published by Elsevier Masson SAS. All rights reserved.
* Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (mmanuel Gross) © 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
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1.
Épidémiologie
Le séminome testiculaire est un cancer rare, représentant seulement 1 % des tumeurs malignes, mais reste le cancer le plus fréquent chez l’homme de 15 à 35 ans. En France, son incidence a doublé entre 1970 et 2000. Les facteurs de risque habituellement identifiés sont : la cryptorchidie ; l’atrophie testiculaire ; l’infertilité ; le tabagisme ; le syndrome de Klinefelter et les antécédents familiaux de cancer testiculaire. Le taux de survie globale est excellent, de l’ordre de 99 % à cinq ans, et 80 % des patients sont guéris par l’orchidectomie seule.
2.
Classification
Les cancers testiculaires sont répartis en tumeurs germinales et non germinales. Les premières représentent 95 % des cancers du testicule dont 60 % ont un contingent cellulaire unique et 40 % sont des tumeurs mixtes.
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— T4 Tumeur envahissant le scrotum avec ou sans invasion vasculaire ou lymphatique. N Ganglions régionaux : — Nx Ganglions régionaux non évaluables ; — N0 Absence d’adénopathie métastatique régionale ; — N1 Métastase ganglionnaire unique < 2 cm de plus grande dimension ou multiples ganglions métastatiques < 2 cm de plus grande dimension ; — N2 Métastase unique de 2 à 5 centimètres de plus grande dimension ou multiples ganglions positifs < 5 cm de plus grande dimension ; — N3 Métastase > 5 cm de plus grande dimension ; M Métastases à distance — Mx Métastases non évaluables ; — M0 Absence de métastase à distance ; — M1 Métastase à distance ; — M1a Métastase ganglionnaire non régionale ou pulmonaire ; — M1b Métastase à distance autre que ganglionnaire non régionale et pulmonaire.
2.2.2. S Marqueurs sériques 2.1. Les tumeurs germinales : — Les séminomes, qui sont radiosensibles et de pronostic favorables ; — les tumeurs germinales non séminomateuses dont le pronostic est également favorable depuis l’utilisation du cisplatine en chimiothérapie, qui associent à des degrés divers des composantes de : • carcinome embryonnaire, • choriocarcinome, • tumeur vitelline, • tératomes matures ou immatures.
2.2. Les tumeurs non germinales Ce sont les tumeurs à stroma non gonadique : — tumeurs à cellules de Leydig ; — tumeurs à cellules de Sertoli ; — tumeurs de la granulosa. On observe également comme dans tous les autres organes des lymphomes du testicule et des sarcomes.
2.2.1. TNM T Tumeur primitive : — Tx Tumeur non évaluable (en l’absence d’orchidectomie, Tx est utilisé) ; — T0 Absence de tumeur primitive évidente (par exemple simple cicatrice résiduelle) ; — Tis Carcinome in situ ; — T1 Tumeur limitée au testicule et à l’épididyme, sans invasion vasculaire ni lymphatique : la tumeur peut envahir l’albuginée, mais pas la vaginale ; — T2 Tumeur limitée au testicule et à l’épididyme, avec invasion vasculaire ou lymphatique, ou tumeur étendue à l’albuginée avec envahissement de la vaginale ; — T3 Tumeur envahissant le cordon spermatique, avec ou sans invasion vasculaire ou lymphatique ;
— Sx Marqueurs non évalués ; — S0 Marqueurs normaux ; — S1 LDH (lactate déshydrogénase) < 1,5 × N (normale) et HCG (human Chorionic Gonadotropin) < 5000 et AFP < 1000 ; — S2 LDH 1,5-10 × N ou HCG 5000-50000 ou AFP (alpha-fœtoprotéine) 1 000-10 000 ; — S3 LDH > 10 × N ou HCG > 50000 ou AFP > 10 000.
2.3. Stades pronostiques En fonction de la classification TNM les tumeurs du testicule sont classées en stades pronostiques de stade 0 (lésion pré cancéreuse) au stade IIIc. Le stade I correspond à une tumeur limitée au testicule. L’atteinte des enveloppes (rete testis, albuginée) ne change pas le pronostic, mais aggrave le risque de métastase. Stade II atteinte des ganglions para-aortiques et rétropéritonéaux : — IIa 1 ganglion atteint < 2 cm de grand axe ; — IIb 1 ganglion atteint > 2 cm et < 5 cm ou plusieurs ganglions < 5 cm ; — IIc ganglion (s) > 5 cm. Stade III atteinte supra-diaphragmatique et/ou viscérale : — Stade III « non bulky » : • atteinte ganglionnaire limitée ; • atteinte pulmonaire avec nodules < 2 cm ; — Stade III « bulky » : • atteinte rétropéritonéale extensive ; • nodules pulmonaires > 2 cm ; • atteinte hépatique ou cérébrale.
3.
Indications de la radiothérapie externe dans les séminomes de stade 1
La radiothérapie est un standard thérapeutique en situation adjuvante [marqueurs tumoraux : Alpha Fœto protéine, Béta-
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HCG, ACE (antigène carcino-embryonnaire) et LDH normaux] après orchidectomie par voie inguinale, dans les séminomes testiculaires de stade I opérés. Elle a pour objectif d’éradiquer la maladie micro-métastatique dans les territoires ganglionnaires de drainage. Le taux de rechute en l’absence de traitement adjuvant est de l’ordre de 15 à 20 % à cinq ans avec une localisation lombo-aortique dans plus de 80 % des cas. Trois options peuvent actuellement être discutées après orchidectomie : une irradiation ganglionnaire prophylactique, une chimiothérapie adjuvante par carboplatine AUC (Area Under Curve) 7 ou une surveillance « armée » [17,18,20,21]. En cas de décision d’irradiation, une consultation dans un Centre d’étude et de conservation des oeufs et du sperme (Cecos) est systématiquement proposée.
4.
Modalités du traitement
4.1. Radio-anatomie et détermination des volumes cibles Le traitement standard adjuvant du séminome de stade I opéré a longtemps consisté en une irradiation adjuvante des aires ganglionnaires de drainage impliquées ou à risque de dissémination micro-métastatique. Historiquement, la radiothérapie était délivrée dans les aires ganglionnaires lombo-aortique et iliaques homolatérales (dog-leg du coté du testicule opéré) à la dose de 30 Gy en 15 fractions étalées sur trois semaines. Le volume cible comprenait les aires ganglionnaires lombo-aortiques, obturatrices et iliaques homo-latérales à la lésion (Fig. 1). Cette irradiation permettait d’obtenir un taux de survie sans rechute de 96 % et un taux de survie globale de 98 % [1] avec cependant une toxicité aiguë contraignante et un risque non négligeable de cancer radioinduit à long terme. En raison de cette toxicité et du très faible taux de rechute iliaque (2 à 3 %) de nombreux auteurs ont proposés de réduire le volume cible aux seules aires ganglionnaires lombo-aortiques (Fig. 2 et 3). Kiricuta et al. ont d’abord proposé ce type d’irradiation dans des séries non comparatives [15], avant qu’un essai randomisé mené par le Medical Research Council ne montre des taux de survie sans récidive comparables à ceux obtenus avec une irradiation en dog-leg classique [14]. Classen et al. ont montré dans leur large étude sur 675 patients des taux de survie sans récidive comparables (de 1,6 % de récidive iliaque) en utilisant une radiothérapie lombo-aortique exclusive [5]. Ces deux études ont permis de valider l’irradiation lombo-aortique seule comme un standard (au même titre que l’irradiation en dog-leg) dans le traitement adjuvant par irradiation des séminomes testiculaires de stade I opérés. La radiothérapie médiastinale adjuvante est maintenant abandonnée en raison d’une toxicité cardio-pulmonaire inacceptable sans efficacité prouvée [25]. La détermination des volumes cibles s’établit après réalisation d’une tomodensitométrie dosimétrique avec de préférence une injection de produit de contraste après vérification du bilan rénal. Le patient est positionné en décubitus dorsal, les bras le long du corps : des moyens de contention simple sont utilisés (kneefix / coques thermoformées, cales sous les genoux). Il n’y a pas de volume tumoral macroscopique (Gross Tumor Volume,
GTV) dans la délinéation des aires ganglionnaires en situation adjuvante. Le volume cible déterminé est directement le volume cible anatomoclinique (Clinical Tumor Volume, CTV). La limite supérieure du champ d’irradiation intéressait initialement le bord supérieur de la vertèbre T12 mais peut aussi se situer au bord supérieur de T11 sans que l’on ne retrouve une majoration des rechutes au dessus de T11 [3] (Fig. 4). La partie inférieure du champ d’irradiation se situe à la bifurcation aorto-iliaque, qui peut présenter des variations anatomiques individuelles (L4/l5-L5/S1) et doit être déterminée sur la tomodensitométrie dosimétrique (Fig. 5). Les aires ganglionnaires lombo-aortiques sont considérées comme le volume cible anatomoclinique. Du côté gauche, il est nécessaire d’inclure le pédicule rénal homolatéral à la lésion testiculaire dans le volume cible anatomoclinique (Fig. 6). Le volume cible anatomoclinique (Planning Tumor Volume, PTV) est réalisé avec une extension physique de 0,5 à 1 cm sur le volume cible anatomoclinique. La radiothérapie, qu’elle soit lombo-aortique ou classique en dog-leg, reste est un standard thérapeutique dans la prise en charge adjuvante du séminome de stade I.
5.
Doses prescrites
L’ancien standard était une irradiation à la dose de 30 Gy en 15 fractions de 2 Gy sur 3 semaines [16,19]. Le séminome testiculaire étant une tumeur radio-sensible de nombreux auteurs ont rapporté des taux de survie sans récidive similaires avec l’utilisation de doses d’irradiation plus faibles. Une étude allemande non randomisée proposait de délivrer 26 Gy en 13 fractions de 2 Gy [6]. L’équipe de l’institut Gustave-Roussy a proposé dans un essai une diminution à 20 Gy en 10 fractions de 2 Gy étalés sur deux semaines en même temps qu’une diminution des volumes [9]. Cette désescalade de dose a été confirmée par l’essai du Medical Research Council (MRC) TE18 et de l’European Organisation for the Research and Treatment of Cancer Trial (EORTC) 30942, qui comparait pour des volumes semblables une dose de 30 Gy en 15 fractions sur trois semaines à une dose de 20 Gy en dix fractions sur deux semaines. L’efficacité en termes de rechute était la même avec un suivi de quatre ans. La toxicité aigue était réduite dans le bras 20 Gy en dix fractions [14].
5.1. Organes à risque et contraintes de dose L’infertilité représente une complication fréquente dans les cancers testiculaires en particulier chez les patients irradiés après orchidectomie [10]. Un spermogramme est nécessaire avant la radiothérapie d’autant plus que le patient est jeune et émet un désir de paternité. La préservation du sperme doit idéalement être réalisée avant l’orchidectomie. Malgré des limites de champ d’irradiation à distance du testicule restant, un cache plombé testiculaire est souhaitable même chez des patients bénéficiant d’une radiothérapie lombo-aortique isolée [21]. Le testicule est un organe hautement radio-sensible et la dose au testicule restant doit être la plus faible possible. En utilisant ces précautions, la radiothérapie adjuvante délivre une
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dose au testicule controlatéral moins importante que l’ensemble des tomodensitométries de surveillance nécessaire dans l’option surveillance armée [19]. Les contraintes de dose aux reins sont habituellement facilement respectées étant donné les faibles doses utilisées.
5.2. Balistique et dosimétrie La balistique la plus communément utilisée comprend deux faisceaux opposés à 0 et 180 degrés iso-pondérés. Cette balistique simple permet notamment d’éviter au maximum l’irradiation rénale qu’engendrerait l’utilisation de faisceaux obliques. L’irradiation est réalisée par des photons de haute énergie.
6.
Toxicité aiguë
Les effets aigues sont le plus souvent rapidement résolutifs dès la fin de l’irradiation. Les troubles digestifs sont au premier plan et sont représentés par des diarrhées et des vomissements dans 15 % des cas [7,11]. L’utilisation du métoclopramide et des 5 anti-HT3 permet de contrôler simplement les symptômes digestifs [2]. Ils dépendent principalement du volume d’irradiation. L’asthénie est souvent retrouvée avec un taux qui semble plus élevé chez les patients ayant reçu un traitement en dog-leg [14].
7.
Toxicité tardive
L’infertilité post-thérapeutique est une des complications tardives redoutées en raison de la jeunesse des patients touchés par cette pathologie. Une préservation du sperme doit être envisagée avant, ou à défaut après, l’opération, même si le rôle de la radiothérapie adjuvante sur le taux de fécondité n’a pu être démontré [4]. Il semble qu’une irradiation lombo-aortique exclusive serait moins hypofertilisante qu’une irradiation en dog-leg classique [8]. Le risque de second cancer lié à l’exposition aux rayonnements ionisants est spécialement important à considérer chez ces patients à l’espérance de vie importante : le risque relatif (RR) de développer un second cancer est de 2 par comparaison à la population générale au même âge [23]. Ce risque diminue avec l’âge. Ces risques relatifs ont été établis à partir de patients suivis sur une très longue période (1943-2001) au cours de laquelle la survenue de cancers secondaires étaient statistiquement plus importantes avant 1997 qu’après 1997 [4] : la radiothérapie adjuvante a évolué en termes d’appareillage, de dosimétrie, de techniques, de volumes irradiés et de dose ; en prenant exemple sur le risque de leucémie secondaire, qui est corrélée à la dose délivrée [22], on peut imaginer que la diminution des doses diminuera probablement ce risque relatif. La toxicité cardiaque tardive de l’irradiation infra-diaphragmatique est controversée. Deux études différentes ont retrouvé
S185
respectivement un RR de complication cardiovasculaire de 1,8 et 2,4 avec un suivi de 15 ans [13]. L’interprétation de ces résultats est difficile d’autant plus que des études plus récentes ne retrouvaient pas de sur-morbidité cardio-vasculaire avec l’ajout de la radiothérapie à la chimiothérapie chez des patients nécessitant une chimiothérapie [12]. Une récente étude hollandaise ne retrouvait pas de lien entre une radiothérapie infra-diaphragmatique et les complications cardio-vasculaires [24].
8.
Cas Clinique commenté
Mr F., 31 ans, chauffeur routier, ayant deux enfants, voyait depuis deux ans augmenter progressivement le volume de son testicule droit, sans douleur. Une échographie scrotale a montré de nombreuses formations nodulaires du testicule droit dont la plus volumineuse mesurait 4 cm. La scanographie thoraco-abdomino-pelvienne pré-thérapeutique ne retrouvait pas d’image en faveur d’une localisation secondaire. Les marqueurs HCG, FP et ACE étaient normaux et les LDH élevées à 1452. Mr F. a refusé la consultation au Cecos. Il a bénéficié d’une orchidectomie par voie inguinale. L’examen anatomopathologique a retrouvé une volumineuse tumeur germinale, séminomateuse pure, de 8 cm de grand axe, remaniée par des phénomènes nécrotiques et fi breux, avec des emboles vasculaires et lymphatiques. L’albuginée était tumorale alors que la vaginale et le cordon n’étaient pas envahis. Il s’agissait donc d’une tumeur de stade pT2N0M0. Les marqueurs tumoraux étaient normaux après l’opération. L’indice de performance était selon l’OMS de 0. L’examen clinique était sans particularité. En raison de la passivité du patient qui a laissé sa tumeur évoluer plus de deux ans, l’option d’une surveillance active ne semblait pas la meilleure. En accord avec le patient, et après informations des risques encourus et des bénéfices attendus, une radiothérapie adjuvante a été décidée. Le patient a été placé en décubitus dorsal, dans une coque thermoformée. L’irradiation conformationnelle a délivré par deux faisceaux opposés, antéropostérieurs, des photons de 8 MV, 20 Gy en dix fractions dans les aires de drainage ganglionnaires lombo-aortiques (Fig. 2 et 3). La dosimétrie est rapportée figure 7. L’histogramme dose-volume montre une bonne couverture des volumes cibles antomoclinique et prévisionnel avec une irradiation rénale minime (Fig. 8). Une irradiation en dog-leg droit aurait aussi pu être proposée. La tolérance aiguë du traitement a été excellente. La surveillance post-thérapeutique des effets secondaires tardifs doit comporter au minimum une consultation par an pendant 5 ans avec l’oncologue radiothérapeute.
Conflits d’intérêts Les auteurs ont déclaré n’avoir aucun conflit d’intérêts pour cet article.
S186
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Fig. 2. Faisceau antérieur : irradiation lombo-aortique seule (volume cible anatomoclinique en rouge). Anterior field lombo-aortic irridiation (CTV, red). Fig. 1. Digital reconstructed radiography (DRR) : irradiation en dog-leg classique. Classic dog-leg irradiation DRR.
Fig. 4. Digital reconstructed radiography (DRR) vue sagittale : irradiation lombo aortique seule (volume cible anatomoclinique en rouge) DRR, sagittal view : lombo-aortic irradiation (CTV, red).
Fig. 5. Coupe transversale basse : dernière coupe délinéée comprenant le volume cible anatomoclinique. Low axial view : last delineated slice including CTV.
E. Gross et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S182–S188
Fig. 6. coupe transversale passant par le hile rénal homolatéral au testicule opéré Axial view through the renal hilum ipsilateral to the operated testicle.
Fig. 8. Histogramme dose-volume. Dose-volume histograms, clinical case Fig. 7. Dosimétrie. Dosimetry, clinical case
S187
S188
E. Gross et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S182–S188
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Cancer/ R adi o t hérapie 14 Suppl . 1 (2010) S189– S197
Cancer de la Vessie Bladder cancer Y. Pointreaua, b, c, d, S. Klotze, F. Denisf, C. Durduxe, a
Service de radiothérapie, centre régional universitaire de cancérologie Henry-S.-Kaplan CHU de Tours, Hôpital Bretonneau, 2, Boulevard Tonnellé, 37000 Tours, France Université François Rabelais de Tours, Génétique immunothérapie chimie et cancer, 37000 Tours, France c CNRS, UMR 6239 « Génétique, Immunothérapie, Chimie et Cancer », 37000 Tours, France d CHRU de Tours, Laboratoire de pharmacologie-toxicologie, 37000 Tours, France e Service d’oncologie-radiothérapie, hôpital européen Georges-Pompidou, 20 rue Leblanc 75015 Paris, France f Centre Jean-Bernard, 9, rue Beauverger, 72000 Le Mans, France b
INFO ARTICLE
RÉSUMÉ
Les tableaux 3 et 4 sont visible uniquement sur : http://www.sciencedirect.com/
Les tumeurs infiltrantes de vessie sont caractérisées par une atteinte tumorale du muscle vésical. Lorsqu’elles sont localisées, le traitement de référence repose sur la cystectomie radicale avec reconstruction par entérocystoplastie ou dérivation de type Bricker. Le caractère mutilant de la chirurgie et la fréquence des métastases ultérieures malgré un geste radical a conduit aux développements des chimioradiothérapies exclusives. Celles-ci sont basées sur l’utilisation d’un sel de platine concomitante à l’irradiation menée jusqu’à un niveau de dose de 60-65 Gy. Un bilan endoscopique à 45 Gy est indispensensable pour différencier les cancers répondeurs des non répondeurs, ces derniers justifiant d’une chirurgie de rattrapage. En règle, la vessie vide doit être traitée en totalité avec des marges de l’ordre de 20 mm pour obtenir une bonne couverture du volume cible prévisionnel. Un contrôle de qualité intégrant échographie, tomographie conique, voire la pose de fiduciel devrait permettre de réduire ces marges. La radiothérapie avec modulation d’intensité semble prometteuse pour la protection de l’intestin grêle. À partir d’un cas clinique, la présente mise au point détaille les aspects techniques de la radiothérapie (définition du volume cible et des organes à risque, acquisition scanographique, dosimétrie…) ainsi que les principales toxicités aiguës et tardives attendues.
Mots clés : Cancer de vessie Radiothérapie conformationnelle Atlas Volumes cibles
© 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
ABSTRACT Keywords: Bladder cancer Conformal radiotherapy Atlas Target volumes
Bladder cancer is an urologic common tumor after prostate carcinoma. Radical treatment of localized invasive tumor is based on cystectomy. Surgical mutilation could be important when Bricker’s urinary derivation is performed. Moreover, delayed metastasis frequently appeared in spite of radical surgery. Thus, chemoradiotherapy is a valid alternative treatment to cystectomy for selected patients. Cisplatin or derivatives are usually concurrently administered to radiation therapy up to 60 – 65 Gy. Patients undergo control cystoscopy at midtime of treatment in order to select responders from non responders. For majority of cases, the empty bladder should be entirely treated with added margins (about 20 mm) to build the PTV. Control assessment could be improved by echography, cone beam imaging as well as bladder fiduciaries implantation before treatment. From a case report, this review summarizes the technical aspects of radiation therapy (GTV, CTV and PTV, organs at risk, planning) and main acute and late related toxicities. © 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Published by Elsevier Masson SAS. All rights reserved.
* Correspondance. Adresse e-mail : [email protected] (C. Durdux). © 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
S190
1.
Y. Pointreau et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S189–S197
Introduction
Les cancers de la vessie sont actuellement au deuxième rang des cancers urologiques en France. Le diagnostic, porté sur biopsies multiples réalisées lors de la cystoscopie, permet de différencier les tumeurs superficielles (respectant la musculeuse) des tumeurs infiltrantes (atteignant le muscle ou envahissant la graisse périvésicale). Cette distinction anatomique est capitale dans la stratégie thérapeutique. Le traitement de référence des tumeurs infiltrantes de vessie localisées est la cystectomie totale précédée d’un évidement ilio-obturateur. Depuis la fin des années 1980, une stratégie conservatrice par chimioradiothérapie concomitante s’est progressivement développée et peut actuellement constituer une alternative thérapeutique à la chirurgie radicale chez des patients sélectionnés. L’objectif de cette revue était de présenter les bases médico-techniques (contourage et dosimétrie) de la radiothérapie ainsi que la principale toxicité.
2.
de l’urothélium avec 8 à 10 % de localisations multiples sur l’arbre urinaire. Les métaplasies épidermoïdes sont fréquentes, sans signification pronostique particulière. Elles doivent être distinguées des carcinomes épidermoïdes des zones d’endémie bilharzienne ou de ceux favorisés par irritation vésicale chronique (exstrophie vésicale, cathétérisme). Outre les très particuliers rhabdomyosarcomes vésicaux de l’enfant, les autres types histologiques sont très rares (adénocarcinomes, carcinomes à petites cellules, sarcomes, paragangliomes, mélanomes, lymphomes). Lors de leur découverte, 75 % des tumeurs de vessie sont superficielles et 25 % infiltrantes d’emblée. Deux tiers des formes superficielles récidiveront dont environ 15 % sur un mode infiltrant. Les prélèvements biopsiques per cystoscopie doivent donc être larges et comporter des fibres musculaires pour affirmer le caractère infiltrant ou non de la lésion, dont dépend la stratégie thérapeutique. Une fois le bilan d’extension terminé (scanographie thoraco-abdomino-pelvienne avec uroscan et scintigraphie osseuse), les stades TNM sont précisés selon la classification de 2002, indiquée Fig. 1.
Rappels généraux
2.1. Épidémiologie Les tumeurs infiltrantes de vessie sont actuellement au deuxième rang des cancers urologiques en France, avec environ 11 000 nouveaux cas par an et représente la 4 e cause de décès par cancer chez l’homme. L’incidence est de 27 pour 100 000 en Europe occidentale. Il existe une nette prédominance masculine avec un sex ratio de 5:1. L’âge moyen de survenue est de 65 ans. (survie des patients atteints de cancer en France, étude de registres ; réseau Francim (France-cancer-incidence et mortalité) ; 2007). Les carcinomes transitionnels sont de loin les plus fréquents, favorisés par le tabagisme et certaines expositions professionnelles aux amines aromatiques et aux hydrocarbures (industrie textile et du cuir, industrie de la peinture, pétrochimie, imprimerie). Enfi n, certaines thérapeutiques (cyclophosphamide au long cours, radiothérapie pelvienne) peuvent être des facteurs favorisants. En raison de la très nette prépondérance du tabagisme dans la genèse de ces tumeurs, les « comorbidités » liées au tabac sont très souvent présentes (atteinte polyvasculaires), ce qui aura un impact sur la décision de la stratégie thérapeutique.
2.2. Anatomopathologie ; classification TNM En France, 95 % des tumeurs infiltrantes de vessie sont de type transitionnel urothélial. Il s’agit volontiers d’une maladie
Fig. 1. Classification TNM des tumeurs de vessie TNM classification, bladder tumors.
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2.3. Indications de la radiothérapie Le traitement à visée curative des tumeurs infiltrantes de vessie consiste en une cystectomie totale (cystoprostatectomie chez l’homme et pelvectomie antérieure chez la femme) avec dérivation urinaire externe par urétérostomie cutanée transiléale de type Bricker ou si possible avec entérocystoplastie [3,18] et curage ganglionnaire iliaque bilatéral. La chirurgie permet d’obtenir un taux de contrôle local de l’ordre de 90 % pour les tumeurs classées T2, de 75 % pour les T3b mais avec 85 % de récidives à trois ans. Il s’agit d’une chirurgie lourde, notamment chez le sujet âgé et souvent mutilante. Par ailleurs, le risque métastatique reste important pour les cancers de stades pT3b-pT4a ou en cas d’envahissement ganglionnaire, même minime (40 %). Le taux de mortalité opératoire est d’environ 4 % [28]. Pour ces raisons, la radiothérapie des cancers de vessie s’est développée dès les années 60. Plusieurs études anciennes ont évalué l’intérêt d’une radiothérapie exclusive préopératoire à un niveau de dose voisin de 45 Gy. L’analyse anatomopathologique des pièces de cystectomie montrait un taux de rémission complète de 31 à 43 % [31]. Ces résultats témoignent de la radiosensibilité des tumeurs urothéliales. Néanmoins actuellement, la radiothérapie exclusive est de moins en moins utilisée dans une optique curative, ses résultats étant décevants, quoique difficiles à interpréter, les séries publiées étant anciennes et composites. À stade égal, les résultats semblent inférieurs à ceux des séries chirurgicales. Une méta-analyse portant sur trois essais randomisés et un total de 439 patients comparant chirurgie et radiothérapie a montré des taux de survie globale à cinq ans respectivement de 36 % et 28 % [25]. À partir des années 1990, de nombreux essais pilotes de chimioradiothérapie concomitante secondairement corroborés par des études portant sur un plus grand nombre de patients ont été publiés comme alternative à la chirurgie (Tableau 1) [1, 2, 7-9, 12, 13, 19, 22, 24, 26, 29, 32]. Les patients sélectionnés étaient atteints d’une tumeur urothéliale infiltrante de stade T2 à T4 M0 sans envahissement ganglionnaire radiologique. Une résection transurètrale de vessie était réalisée de première intention et devait être la plus complète possible. La radiothérapie était administrée le plus souvent en fractionnement classique jusqu’à un niveau de dose de 40-50 Gy. Le cisplatine était systématiquement délivré en même temps que la radiothérapie, selon des modalités très variées ; il était associé ou non au 5-fluoro-uracile. Quatre à six semaines plus tard, une nouvelle cystoscopie avec biopsies de contrôle était effectuée. Les patients en situation de rémission complète histologique recevaient un complément de chimioradiothérapie jusqu’à un niveau de dose totale de 55-65 Gy puis s’astreignaient à un suivi endoscopique régulier. Les patients pour lesquels persistait un reliquat tumoral se voyaient proposer une cystectomie. Plusieurs conclusions ont émergé de ces essais : — la tolérance était acceptable même chez les patients les plus âgés, sans décès iatrogénique ; — le taux de rémission complète histologique observé sur l’évaluation endoscopique intermédiaire était de 60 à 90 % selon les séries, soit plus du double de celui retrouvé après radiothérapie ou chimiothérapie néoadjuvante, témoignant ainsi d’une réelle synergie clinique ; — le taux de récidive locale variait de 5 % à 25 %, incluant les récidives superficielles ;
S191
Tableau 1 Principales séries de chimioradiothérapie dans les tumeurs infiltrantes de vessie. IA : intra-artériel ; CDDP : cisplatine ; 5FU : 5-fluoro-uracile ; RC : rémission complète ; CV : conservation vésicale Main series of radiochemotherapy in infiltrating bladder tumors. IA, intra-arterial; CDDP, cisplatin; 5FU, 5-fluorouracile; RC, complete remission; CV, vesical preservation. Série
Stade
CT
% RC (5 ans)
% survie (5 ans)
91
T1-T4
CDDP
75
62
Kachnic et al. 1997 [13]
106
T2-T4
CDDP
70
52
Chauvet et al. 1998 [2]
109
T1-T4
CDDP
79
36
Sauer et al. 1998 [24]
79
T1-T4
CDDP
76
41
Arias et al. 2000 [1]
50
T2-T4
CDDP
68
48
Dunst et al. 2001 [7]
139
T2-T4
CDDP
76
47
Housset et al. 2001 [9]
173
T2-T4
5-FUCDDP
78
66
45
T1-T4
5-FUCDDP
87
67
Tester et al. 1993 [29]
Rodel et al. 2002 [22] Shipley, 2002 [26]
N
190
T2-T4
CDDP
78
54
Zappatero et al. 2009 [32]
33
T2-T4
CDDP
NP
65
Miyanaga et al. 2000 [19]
42
T2-T
CDDP IA
93
72
200
T1-T4
CDDP IA
83
48
27
T2-T4
CDDP IA
81
81
Eapen et al. 2004 [8] Ikushima et al. 2008 [12]
— le taux de survie à cinq ans ne semblait pas inférieur à celui observé après cystectomie totale à stade T égal, le statut ganglionnaire pN restant inconnu ; — le taux de conservation vésicale avec vessie fonctionnelle était de plus de 40 % avec peu de complications tardives. Il importe cependant de noter que, d’une part, qu’il n’existe aucun essai randomisé comparant chirurgie radicale et chimioradiothérapie exclusive et que d’autre part, aucune étude médico-économique n’a évalué le coût des chimioradiothérapies concomitantes. Les indications actuelles reconnues de la radiothérapie des tumeurs de vessie sont : — à visée curative, les tumeurs infiltrantes localisées pour lesquelles une chirurgie n’est pas possible ou bien refusée par le patient. Le standard est alors la chimioradiothérapie avec un sel de platine. De même, bien que plusieurs publications mentionnent des résultats intéressants de la chimioradiothérapie pour les tumeurs de stade pT1 récidivantes, leur traitement de référence reste la chirurgie ; — à visée palliative, les tumeurs évoluées (extension ganglionnaire massive et/ou métastatique) symptomatiques sur le plan urinaire (douleurs pelvienne, dysurie majeure, hématuries) malgré une chimiothérapie bien conduite. Le standard est la radiothérapie exclusive, éventuellement hypofractionnée ; — au cas par cas, après cystectomie totale en cas de résection de type R1 (voire de façon discutée dans les tumeurs de stade pT3b) ou après cystectomie partielle pour tumeur développée dans un diverticule.
S192
Y. Pointreau et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S189–S197
2.4. Modalités de la radiothérapie
2.4.3. Doses prescrites aux points ICRU (International Commission on Radiation Units and Measurements)
2.4.1. Acquisition des données anatomiques Elle doit être réalisée de façon conformationnelle en trois dimensions avec simulation virtuelle. Le scanner de dosimétrie est réalisé en décubitus dorsal, mains croisées sur la poitrine avec cale-pied et billot sous les genoux, avec injection de produit de contraste sous réserve d’une clairance correcte de la créatinine, qui est volontiers altérée chez ces patients âgés, poly-vasculaires et/ou en raison du retentissement de la tumeur sur le haut appareil. Il est souhaitable d’opacifier l’intestin grêle par l’ingestion d’un faible volume d’eau. Vessie et rectum doivent être vidés juste avant l’examen. Le remplissage dans l’heure doit être de moins de 150 ml. L’acquisition scannographique est faite de L4 à la marge anale en coupes jointives de 2,5 à 5 mm. En cas de distension rectale, le scanner doit être répété. Un dosage du PSA dans le sang doit être systématiquement réalisé avant la mise en œuvre du traitement pour éviter de négliger un carcinome prostatique synchrone. La mise en place de fiduciels lors de la cystoscopie diagnostique (grains d’or ou titane) pour optimiser le contrôle de qualité est en cours d’évaluation [11].
2.4.2. Détermination des volumes cibles Les volumes cibles sont la vessie et les aires ganglionnaires ilio-obturatrices. D’après les séries chirurgicales, le drainage lymphatique de la vessie se fait directement dans les chaînes moyennes (préveineuse) et interne (sous-veineuse) des ganglions iliaques externes, parfois dans un ganglion présacré ou iliaque primitif et aussi largement vers les ganglions hypogastriques. La vessie doit être traitée en totalité (maladie de l’urothélium avec carcinome in situ fréquent à distance du site tumoral). Dans des cas très sélectionnés de tumeur unifocale de petite taille sans carcinome in situ associé ni retentissement urétéral, une irradiation localisée peut se discuter, éventuellement avec escalade de dose, à condition de disposer d’un contrôle de qualité performant [5]. Le volume tumoral macroscopique (GTV) correspond à la tumeur, à ses extensions macroscopiques locales et aux adénomégalies visualisées sur l’imagerie ; le volume cible anatomoclinique (CTV) correspond à la vessie en totalité et aux aires ganglionnaires ilio-obturatrices bilatérales. La paroi de la vessie est délinéée, selon une épaisseur de 5 mm. En l’absence d’extension extravésicale, une marge de 2 cm (volume cible prévisionnel, PTV) est requise au-delà de la paroi vésicale dans toutes les directions sauf vers la tête où une marge de 25 mm est conseillée en raison des incertitudes de positionnement de la partie mobile de la vessie (dôme vésical) mais ces extensions restent variables selon les centres. À noter que dans certains cas (patient obèse), la vessie peut déborder largement en avant de la symphyse pubienne et là aussi une marge antérieure de 25 mm peut être souhaitable [15,20]. Ces marges semblent pouvoir être réduites si le contrôle de qualité comporte une échographie et/ou une tomographie conique [14,16].
En l’absence de chirurgie préalable et d’adénopathies décelables, les doses habituellement recommandées sont de 46 Gy dans le pelvis (40-50,4 Gy) et de 60-66 Gy au niveau de la vessie, selon un fractionnement classique de cinq fractions de1,8 à 2 Gy par semaine. Selon les recommandations de l’ICRU, 95 % du volume cible prévisionnel doivent recevoir au moins 95 % de la dose, 98 % du volume cible prévisionnel doivent recevoir au moins 90 % de la dose et 3 % du volume ne doivent pas recevoir plus de 107 % de la dose. Des essais cliniques ont démontré la faisabilité d’un traitement hyperfractionné accéléré, dont certains utilisent une chimiothérapie concomitante. Le schéma le mieux connu, bifractionné, traite l’ensemble du pelvis lors de la première fraction journalière et uniquement la vessie lors de la seconde (concomitant boost) [17].
2.4.4. Organes à risque et contraintes de doses Les organes à risque sont la vessie elle-même [21], le rectum, le grêle et les têtes fémorales. Le canal anal peut être concerné en cas d’atteinte bas située (col vésical et urètre). L’ensemble de ces paramètres doit apparaître sur l’histogramme dose-volume. De plus, la prostate doit être systématiquement contourée. La paroi du rectum (3 mm) est délinéée sur toute sa hauteur, jusqu’à la jonction rectosigmoïdienne projetée en S2-S3. La dose de 60 Gy ne doit pas être délivrée dans plus de 50 % du volume rectal (V60 < 50 %) et ne doit pas concerner toute la circonférence. Le grêle est difficile à délinéer. Plusieurs méthodes décrites par Sanguineti et al. semblent donner des résultats similaires en termes d’histogramme dose-volume [23]. En fait, le problème essentiel est la mobilité du grêle d’un jour à l’autre, rendant les histogrammes dose-volume imprécis et sujets à caution. La dose de 50 Gy doit être restreinte à quelques cm3. Dans un grand volume, il est recommandé de ne pas dépasser 40 Gy. Les têtes fémorales sont délinéées jusqu’au petit trochanter. La dose maximale acceptable est de 55 Gy et le V50 (volume recevant 50 Gy) ne doit pas excéder 10 %.
2.4.5. Dosimétrie Le traitement doit être réalisé aux photons d’au moins 10 MV avec protection des organes à risque par caches personnalisés ou utilisation du collimateur multilame. Il comporte en règle deux temps : — 1er temps : volume pelvien incluant la vessie et les aires ganglionnaires ; — 2e temps : complément limité à la vessie. Dans le cadre des chimioradiothérapies à visée curative, ce 2e temps fait suite au contrôle cystoscopique réalisé quatre à six semaines après la fin du premier temps pelvien et ne s’adresse qu’aux patients en situation de rémission complète histologique. Pour le volume pelvien, la technique habituellement retenue est isocentrique, avec 4 faisceaux orthogonaux à 0°, 90°, 180° et 270 ° isopondérés (25 %) ou bien selon une pondération 37,5 % pour les faisceaux antéro-postérieurs et 12,5 % pour les faisceaux latéraux. Pour le complément d’irradiation, la même technique
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peut être utilisée avec des faisceaux réduits (et inversion des pondérations le cas échéant) mais une technique à trois faisceaux (un antérieur et deux latéraux) permet souvent de mieux protéger le rectum sans être rédhibitoire pour les têtes fémorales. Les données de radiothérapie conformationnelle avec modulation d’intensité et traitement en un temps sont encore très parcellaires. Elles semblent intéressantes sur le plan dosimétrique pour la protection du grêle [27].
2.5. Toxicité de la radiothérapie 2.5.1. Toxicité aiguë Ce sont les manifestations survenant jusqu’au 90e jour de la fin de la radiothérapie (définition du Radiation Therapy Oncology Group, RTOG). Elles sont fréquentes mais en général mineures, notamment sur le plan digestif (majorité de grade 1). La classification du RTOG des effets urinaires aigus de la radiothérapie est rappelée Tableau 2. Tableau 2 Classification du RTOG des effets urinaires aigus de la radiothérapie. ROTG classification of acute urinary effects of radiotherapy. Grade 0
Pas de symptomatologie
Grade 1
Pollakiurie diurne ou nocturne 2 fois plus fréquente qu’avant traitement, ne requérant pas de traitement
Grade 2
Pollakiurie diurne ou nocturne moins fréquente que toutes les heures. Dysurie, impériosités ou spasmes vésicaux requérant un anesthésique local
Grade 3
Pollakiurie diurne ou nocturne au moins toutes les heures. Dysurie, impériosités ou spasmes vésicaux requérant des antalgiques. Hématurie avec ou sans caillots
Grade 4
Hématurie nécessitant des transfusions. Rétention aigue non liée à un caillotage. Ulcération ou nécrose vésicale
Grade 5
Toxicité responsable du décès
La toxicité vésicale aiguë est due à une desquamation exagérée de l’urothélium avec retard à la réparation. Il existe une inflammation et un œdème de la muqueuse qui disparaît en général en 4 à 6 semaines. Selon les séries entre 50 et 80 % des patients présentent des complications de grade 1 ou 2. Les complications de grades III-IV sont exceptionnelles et se voient surtout dans les irradiations palliatives avec une tumeur localement très évoluée.
2.5.2. Toxicité tardive Ce sont les manifestations survenant plus de trois mois de la fin de la radiothérapie (définition du RTOG). Ces complications peuvent être très tardives mais le délai moyen de leur survenue est de deux ans. Elles ne sont pas forcément précédées de manifestations aiguës bruyantes. Les iléites et les rectites grades III-IV sont rares, de l’ordre de 2 % [22]. La classification RTOG/EORTC (European Organization for Research and Treatment of Cancer) des effets urinaires tardifs de la radiothérapie est rappelée Tableau 3. La classification CTCAE (Common Terminology Criteria for Adverse Events version 3), plus simple, est actuellement plus volontiers utilisée sans besoin de différenciation entre les effets aigus et tardifs (Tableau 4) [30]. Une version 4 est désormais disponible. La fréquence des complications
S193
vésicales est de l’ordre de 5 %. Il s’agit essentiellement de la cystite radique (dysurie, cystalgies, pollakiurie, impériosités, hématuries éventuellement compliquées de rétention par caillotage). Le traitement est avant tout symptomatique (anticholinergiques pour la pollakiurie, alpha-bloquants pour la dysurie, antalgiques, lavages vésicaux). En cas d’hématurie non contrôlées par les lavages, peuvent se discuter des traitements endoscopiques (électrocoagulation ; instillation de formol) et l’oxygénothérapie hyperbare [4]. Le taux d’incidence des fistules vésicales est inférieur à 2 %. Elles sont favorisées par des résections trans-urétrales itératives et/ou des instillations endovésicales. Leur traitement est exclusivement chirurgical [6]. Dans l’étude de Rodel et al. incluant 415 patients, les taux de toxicité vésicale de grade 2, 3 et 4 étaient respectivement de 10 %, 3 % et 2 %. Un cas de grêle radique était aussi mentionné [22]. À ce jour, les études portant sur la qualité de vie après chimioradiothérapie sont très parcellaires. Dans l’étude de Housset et al., tous les patients professionnellement actifs ont maintenu sans changement leur activité. Soixante pour cent des patients ne se plaignaient d’aucun trouble urinaire. Sur les 82 % ayant une activité sexuelle avant traitement, 40 % ont déploré un retentissement négatif sur leur vie sexuelle [10]. Zietman et al. se sont intéressés plus précisément à la tolérance urodynamique après chimioradiothérapie à partir de la série de 221 patients traités au Massachussetts General Hospital. Soixante et onze patients en situation de rémission complète ont reçu un questionnaire d’évaluation. Soixante neuf pour cent y ont répondu ; 6 % ont signalé une incontinence, 15 % des mictions impérieuses et 14 % des troubles digestifs mineurs [33].
3.
Cas clinique commenté
Mr B., âgé de 83 ans, atteint d’une cardiopathie ischémique stabilisée et une insuffisance aortique minime a consulté pour plusieurs épisodes d’hématurie macroscopique. Mr B. était tabagique à 50 paquets/année, tabagisme non sevré. L’échographie vésicale a montré une tumeur du dôme vésical, confirmée sur la tomodensitométrie, qui par ailleurs ne montrait ni adénopathie ni urétérohydronéphose. La cystoscopie a confirmé la présence d’une tumeur infiltrante de type urothélial au moins de stade pT2 G3, de 5 cm de diamètre, avec plusieurs foyers de carcinome in-situ sur la résection transurètrale. Le bilan d’extension ne montrait pas d’atteinte métastatique. La clairance de la créatinine était de 62 ml/min. Une prostatocystectomie avec curage ganglionnaire a été proposée au patient, qui l’a refusée. L’indication d’une chimioradiothérapie exclusive a finalement été retenue avec évaluation endoscopique à un niveau de dose de 46 Gy. Celle-ci ne montrant aucun reliquat tumoral, le complément de chimioradiothérapie limité au volume cible prévisionnel vessie a été délivré. La radiothérapie a été réalisée sur un mode conformationnel avec simulation virtuelle à l’aide d’une scanographie de dosimétrie après injection de produit de contraste en coupes jointives de 2,5 mm, vessie et rectum vides. Les contourages des volumes d’intérêts et des organes à risque sont indiqués Fig. 2. La dose prescrite aux point ICRU est de 46 Gy dans le pelvis et 66 Gy dans le volume cible prévisionnel vesical, à raison de cinq fractions hebdomadaires de 2 Gy. Le traitement est réalisé par des photons de 18 MV.
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A
B
Fig. 2. Contourage des volumes d’intérêt et des organes à risque. A, plan vésical / B, plan pelvien (aires ganglionnaires). Delineation of volumes of interest and at-risk organs. A, Bladder / B, pelvic plane (lymph nodes).
A
B Fig. 3. DRR (Digitally Reconstructed Radiographs) des champs pelviens incluant les aires ganglionnaires. A, faisceaux antéropostérieurs / B, faisceaux latéraux. DRR (digitally reconstructed radiographs) of pelvic fields including lymph nodes. A, anteroposterior beams / B lateral beams.
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B
A
Fig. 4. DRR (Digitally Reconstructed Radiographs) des champs réduits limités à la vessie. A, faisceau antérieur / B, faisceaux latéraux. DRR (digitally reconstructed radiographs) of reduced fields limited to the bladder. A, anterior beam / B, lateral beams.
A
B Fig. 5. Dosimétrie. A, plan pelvien (aires ganglionnaires) / B, plan vésical. Dosimetry. A, pelvic plane (lymph nodes) / B, bladder plane.
S195
S196
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Fig. 6. Histogrammes dose-volume. Dose-volume histograms.
Le volume pelvien a été irradié par quatre faisceaux ortho-
5.
Conflits d’intérêts
gonaux antéro-postérieurs et latéraux (Figs. 3a et b). Le volume réduit a été irradié par trois faisceaux (antérieur et deux latéraux ; Figs. 4a et b). La dosimétrie et les histogrammes dose-volumes
Les auteurs n’ont déclaré aucun conflit d’intérêts pour cet article.
sont présentés respectivement Figs. 5 a-b et 6. Ceux-ci montrent une couverture adéquate du volume cible prévisionnel vésical,
Références
avec une faible hétérogénéité dans le volume cible, ainsi que pour
[1]
le volume cible anatomoclinique ganglionnaire. Les contraintes de dose pour le rectum et les têtes fémorales ont été respectées. La dilatation rectale était physiologique chez ce patient,
[2]
contrôlée sur plusieurs coupes scanographiques successives. On note l’importance du grêle irradié, en relation avec le traitement des aires ganglionnaires. Le traitement « vessie pleine » aurait
[3]
probablement réduit la quantité d’intestin grêle traitée mais
[4]
aux dépends de la reproductibilité du positionnement vésical. Cette stratégie peut être discutée si le contrôle de qualité intègre
[5]
une tomographie conique. La radiothérapie conformationnelle avec modulation d’intensité permettrait très certainement une optimisation de l’histogramme dose-volume intestinal.
[6] [7]
4.
Conclusion [8]
Chez les patients atteints d’une tumeur infiltrante de vessie localisée, la chimioradiothérapie est une alternative à la cystec-
[9]
tomie chez des patients sélectionnés. Elle devient la référence thérapeutique des patients inopérables en raison d’une comorbidité importante ou d’un envahissement ganglionnaire pelvien.
[10]
Pour l’ensemble de ces indications, la technique de radiothérapie se doit d’être irréprochable. La radiothérapie conformationnelle,
[11]
avec respect des contraintes de dose au rectum, grêle et têtes fémorales, est actuellement le standard. Le développement de
[12]
la radiothérapie conformationnelle avec modulation d’intensité permettra très certainement d’optimiser les doses reçues par les organes à risque, notamment l’intestin grêle. L’amélioration du
[13]
contrôle de qualité intégrant échographie, tomographie conique et matching sur fiduciels pourrait faire discuter des escalades de dose localisées à la tumeur.
[14]
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Lymphome de Hodgkin Hodgkin’s Lymphoma F. Droueta, X. Cahub, Y. Pointreauc, F. Denisd, M.A. Mahéa* aService
de radiothérapie du Centre René-Gauducheau, CRLCC Nantes-Atlantiques, Boulevard Jacques-Monod 44805 Saint-Herblain cedex, France. d’hématologie clinique CHU de Rennes, hôpital Pontchaillou, 2 rue Henri-Le-Guilloux 35033 Rennes cedex 9, France. cService de radiothérapie, centre régional universitaire de cancérologie Henry-S.-Kaplan CHU de Tours, Hôpital Bretonneau, 2, Boulevard Tonnellé 37000 Tours, France. dService de radiothérapie du centre Jean-Bernard, 9, rue Beauverger, 72000 Le Mans, France. bService
INFO ARTICLE
RÉSUMÉ
Les Annexes Définitions Champs d’irradiation sont visibles uniquement sur : http://www.sciencedirect.com/
Avec environ 1 500 nouveaux cas par an en France, le lymphome de Hodgkin ne représente que 10 à 15 % des lymphomes et 0,5 à 1 % des nouveaux cas de cancers. La prise en charge de cette lymphopathie a connu de profondes évolutions conceptuelles avec le temps, permettant actuellement d’obtenir une guérison dans 75 à 80 % des cas tous stades confondus, et dans plus de 90 % des cas de formes localisées. Si initialement le traitement consistait quel que soit le stade en une irradiation extensive (lymphoïde totale ou sub-totale) exclusive, la place de la radiothérapie dans la prise en charge des lymphomes de Hodgkin a évolué avec le temps, et reste aujourd’hui encore une des pierres angulaires du traitement. Elle s’intègre désormais dans le cadre de traitements associant chimiothérapie (s) puis irradiation pour les lymphomes de Hodgkin localisés, et reste une alternative thérapeutique dans toutes les situations (de rechute et/ou de maladie d’emblée disséminée) où se pose la problématique d’accroître le taux de contrôle tumoral locorégional. Malgré l’apport indéniable de la radiothérapie dans le contrôle de la maladie, les effets secondaires tardifs des traitements ne sont pas négligeables. Le suivi à long terme des patients traités est indispensable compte tenu principalement d’un risque accru de morbidité et de mortalité d’origine cardio-vasculaire, et de second cancer. Il est important de rappeler qu’encore aujourd’hui l’irradiation de type « Involved Field » reste la technique de référence, même si on assiste actuellement à l’émergence de nouveaux types d’irradiations visant à réduire les volumes irradiés pour tenter de limiter les risques de complications radio-induites tardives. L’objectif de cet article est de préciser les particularités (épidémiologiques, radio-anatomiques et pronostiques) de ce type de tumeur, ainsi que les modalités pratiques de l’irradiation (illustrées par un cas clinique) lorsqu’une indication de radiothérapie est posée.
Mots clés : Lymphome de Hodgkin Radiothérapie conformationnelle Atlas Volumes cibles
© 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
ABSTRACT Keywords: Hodgkin’s lymphoma Conformal radiotherapy Atlas Target volumes
With approximately 1500 cases per year in France, Hodgkin’s lymphoma (HL) represents only 10 to 15 % of new cases of lymphomas, and 0.5 to 1 % of new cases of cancers. The management of this lymphoproliferative disease has undergone profound conceptual changes over time, allowing at present to obtain a cure rate of 75 to 80 % of all confused stage, and up to 90 % in case of early stage HL. If initial treatment consisted in an exclusive extensive (total or sub-total lymphoid) irradiation whatever the stage may be, the place of radiotherapy in the management of HL has evolved over time but remains today one of the cornerstones of the treatment. It becomes integrated within the framework of combined modality therapies associating chemotherapy then irradiation for the early stage HL, and stays a therapeutic alternative in all situations (in advanced stage and\or recurrent
* Correspondance. Adresse e-mail : [email protected] (Marc-André Mahé) © 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
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disease) which raises the issue of increasing the locoregional tumor control. Despite the undeniable contribution of radiotherapy in controlling the disease, delayed side effects of treatments are not negligible. So the long-term monitoring of treated patients is essential, mainly because of an increased risk of morbi-mortality due to cardiovascular events and/or secondary cancers. It is important to remember that even today the «Involved Field» irradiation type remains the gold standard, even if we witness at present the emergence of new types of irradiation, which aim to reduce the amount of irradiated tissues to try to limit the risks of delayed radio-induced complications. The purpose of this article is to clarify the specific aspects (epidemiological, radio-anatomical and prognostic characteristics) of HL, as well as the practical modalities of the irradiation (illustrated by a clinical case record) when an indication of radiotherapy is placed for its treatment. © 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Published by Elsevier Masson SAS. All rights reserved.
1.
Épidémiologie Avec environ 1 500 nouveaux cas par an (soit 2 à 3 nouveaux
cas/100 000 habitants/an) le lymphome de Hodgkin ne représente que 0,5 % des cancers incidents [35]. On observe essentiellement deux pics d’incidence : avant 30 ans et après 50 ans [35, 46, 47]. Les causes de la maladie sont inconnues, néanmoins on retient comme facteur de risque l’antécédent d’infection par le virus Epstein-Barr [2, 5, 10, 36, 46, 47].
2.
Classifications Le tableau clinique caractéristique est l’apparition, chez un
Bilan clinique • Age • Score OMS • Poids actuel • Signe généraux d’évolutivité o Perte de poids o Fièvre o Sueurs nocturnes • Palpation des aires ganglionnaires périphériques o Consigner les résultats sous la forme d’un schéma daté en rapportant la taille des adénopathies éventuellement retrouvées • Palpation de l’abdomen à la recherche d’une organomégalie (hépatomégalie, splénomégalie) et/ou d’une masse intraabdominale • Examen ORL avec inspection des amygdales de l’anneau de Waldeyer
enfant ou un adulte jeune, d’adénomégalies périphériques (le plus fréquemment dans le territoire cervico-sus-claviculaire) ou médiastinales, généralement de façon asymptomatique mais parfois dans un contexte d’altération de l’état général. Le diagnostic de lymphome de Hodgkin est histologique et repose sur une biopsie-exérèse ganglionnaire.
2.1. Entités anatomo-pathologiques [27] Le lymphome de Hodgkin est une prolifération maligne lymphoïde B ganglionnaire. Le lymphome de Hodgkin se distingue des autres lymphomes par la présence de cellules géantes basophiles à noyaux polylobés et multinucléolés, appelées cellules de Reed-Sternberg, au sein d’un infiltrat inflammatoire réactionnel polymorphe. On distingue plusieurs variantes cytologiques de lymphome de Hodgkin, selon l’architecture ganglionnaire et le type d’infiltrat réactionnel : la forme classique scléro-nodulaire
Bilan paraclinique • Bilan sanguin o Numération Formule Sanguine o Bilan inflammatoire : VS, CRP, fibrinogénémie o Ionogramme sanguin avec Calcémie o Albuminémie – Protidémie o Fonction rénale : Urémie, Créatinémie o Bilan hépatique complet o LDH o TSH-T4L en cas d’irradiation cervicale envisagée o Sérologie VIH, VHB, VHC o β-hCG chez les femmes en âge de procréer • Biopsie ostéo-médullaire • Radiographie pulmonaire avec calcul de l’index médiastinothoracique • Scanographie thoraco-abdomino-pelvienne avec injection intra-veineuse de produit de contraste • TEP-Scan au 18-FDG (à réaliser en position de traitement) • Électro-cardiogramme et Echographie cardiaque • IRM du rachis en cas de point d’appel
qui est la plus fréquentes (60 à 80 %), la forme dite à cellularité mixte (20 à 30 %), la forme dite riche en lymphocytes (≤ 5 %), la forme dite à déplétion lymphocytaire (< 1 %). Chacune de ces variantes correspond à une entité anatomo-clinique particulière avec une épidémiologie et un pronostic qui lui sont propres.
2.2. Bilan d’extension et Staging Une fois le diagnostic de la maladie établit, un examen clinique minutieux ainsi qu’un bilan para-clinique complet, doivent être réalisés au plus vite afin de déterminer l’extension précise de la maladie (Fig. 1.) L’objectif étant de définir le pronostic individuel de la maladie pour proposer une stratégie de traitement adaptée.
Fig. 1. Bilan d’extension et pré-thérapeutique. Pretherapeutic workup and staging.
2.2.1. Classification de Ann Arbor modifiée (Tableau 1) On définit quatre stades différents selon le nombre d’aires ganglionnaires atteintes (I vs II et III) et leur localisation par rapport au diaphragme (I et II contre III), ainsi que par la présence ou non d’atteinte extra-ganglionnaires d’origine hématogène (I-II-III vs IV). Le stade est complété par l’apposition de sigles, de définition clinico-biologique, correspondant à la présence (ou non) : de signes généraux d’évolution, d’une masse ganglionnaire bulky, d’une atteinte extra-ganglionnaire de contiguïté, d’un syndrome inflammatoire.
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Tableau 1 Classification de Ann Harbor modifiée. Modified Ann Arbor staging.
Facteurs pronostiques défavorables : • Sexe masculin • Age ≥ 45ans • Stade IV • Albuminémie < 40 g/l • Concentration d’hémoglobine < 10,5 g/dl • Leucocytose ≥ 15000/mm3 • Lymphopénie < 600/mm3 (ou Taux de lymphocytes < 8% des leucocytes) Si au moins 3 critères (sur les 7) sont présents, alors la maladie appartient au groupe pronostique défavorable.
Stade
Extension de la maladie
Stade I
Un seul territoire ganglionnaire atteint
Stade II
Plus de deux territoires ganglionnaires atteints mais tous situés du même côté du diaphragme
Stade III
Plus de deux territoires ganglionnaires atteints et situés des deux côtés du diaphragme
Stade IV
Atteinte médullaire ou viscérale (d’origine hématogène)
Sigle
Classification clinico-biologique
A
Absence de signe clinique d’évolutivité
A
Présence d’au moins un des signes cliniques d’évolutivité
3.
B
Absence de syndrome inflammatoire
B
Présence d’un syndrome inflammatoire
X
Présence d’une masse bulky
E
Présence d’une atteinte viscérale de contiguïté
Une fois le pronostic de la maladie établi, il convient de réaliser un certain nombre d’explorations complémentaires, dans le cadre d’un bilan pré-thérapeutique, afin de préciser d’éventuelles « co-morbidités » et ainsi de déterminer s’il n’y aucune contreindication d’ordre médicale à la réalisation d’un des différents traitements que le patient peut être amené à subir. En l’absence de contre-indication, on reconnaît classiquement à la radiothérapie les indications suivantes [3, 4, 7, 11, 13, 15, 17, 20, 22, 25, 26, 28, 32, 33, 42, 47, 49, 51, 52, 54].
2.2.2. Classifications pronostiques [4, 7, 11, 13, 17, 22, 47, 49] On distingue en premier lieu les formes dites localisées (stades I et II de Ann Arbor) et les formes dites disséminées ou étendues (stades III et IV de Ann Arbor). Ensuite, au sein de chacune de ces deux grandes formes distinctes, il a été défini différents sous-groupes de patients afin d’affiner encore le pronostic. En effet, au sein des formes localisées, le score de l’EORTC (European Organization for Research and Treatment of Cancer) (Tableau 2) permet, à partir de cinq items, de définir deux sous-groupes pronostiques (favorable contre défavorable). Parallèlement, au sein des formes étendues, l’IPS (International prognostic score) (Fig. 2) permet, à partir de sept items, de définir également deux sous-groupes pronostiques (favorable contre défavorable).
Tableau 2 Groupes pronostiques de l’EORTC pour les lymphomes de Hodgkin de stade I-II. EORTC prognostic groups for stage I– II HL. Groupe favorable
Groupe défavorable
Si tous les critères suivants sont réunis
Si au moins des critères suivants est présent
Âge < 50 ans
Âge > 50 ans
Nombre de territoires ganglionnaires atteints ≤ 3
Nombre de territoires ganglionnaires atteints > 3
Index médiastinothoracique < 35 % et absence de masse bulky
Index médiastino-thoracique >35 % et/ou présence d’une masse bulky
Présence d’un syndrome inflammatoire mais vitesse de sédimentation < 30 mm
Présence d’un syndrome inflammatoire avec vitesse de sédimentation > 30 mm
Présence de signe clinique d’évolutivité mais vitesse de sédimentation < 50 mm
Présence de signe clinique d’évolutivité avec vitesse de sédimentation > 50 mm
Fig. 2. Score pronostique IPS pour les lymphomes de Hodgkin de stade III-IV. IPS prognosis score for stage III– IV HL.
Indications de la radiothérapie (Fig. 3)
• Stade Localisé (I-II) : chimiothérapie d’induction puis radiothérapie de consolidation 9 Groupe Favorable : 2 à 3 cycles d’ABVD puis IFRT 30 Gy 9 Groupe Défavorable : 4 cycles d’ABVD (option : 6 cycles si masse initiale Bulky) puis IFRT 30 Gy (option : 40 Gy si masse initial Bulky ou réponse incomplète) • Stade Etendu (III-IV) : chimiothérapie ± radiothérapie 9 Groupe Favorable : 6 à 8 cycles d’ABVD (= 4 cycles d’induction puis 2 cycles de consolidation au delà de l’obtention d’une réponse complète) 9 Groupe Défavorable : 3 options 8 cycles d’ABVD BEACOPP escaladé Essai thérapeutique Place de la radiothérapie extrêmement limitée = Option à discuter dans 3 circonstances : En cas de masse initiale Bulky, IFRT dans cette dernière après les 6 à 8 cycles d’ABVD En cas de résidu ganglionnaire > 15 mm sur la scanographie après les 6 à 8 cycles d’ABVD mais avec une TEP normale (anciennement « réponse complète incertaine »), IFRT sur le résidu ganglionnaire En cas de réponse incomplète à l’issue de 8 cycles d’ABVD, IFRT dans l’ensemble des résidus ganglionnaires qu’ils soient hypermétaboliques ou non. Dans ce cas, la radiothérapie n’est qu’une option à mettre en balance avec une stratégie de rattrapage comprenant une induction par chimiothérapie de haute dose suivi d’une auto-greffe de cellules souches Fig. 3. Indications thérapeutiques dans la prise en charge du Lymphome de Hodgkin. IFRT = involved field radiotherapy. Therapeutic indications in Hodgkin lymphoma management.
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3.1. Dans les formes localisées Le traitement standard associe chimiothérapie et radiothérapie. En effet, après un traitement d’induction par une chimiothérapie de type ABVD (adriamycine, bléomycine, vinblastine, dacarbazine) dont le nombre de cycle dépend de l’appartenance du patient au groupe pronostique favorable/défavorable selon le score de l’EORTC, on réalise un traitement de consolidation sous la forme d’une radiothérapie centrée sur les aires ganglionnaires initialement atteintes.
3.2. Dans les formes étendues Le traitement standard repose sur un traitement par chimiothérapie seule ± intensifiée. Dans ce cadre, la place de radiothérapie est extrêmement limitée. Elle peut cependant se discuter chez des patients atteints de la maladie de Hodgkin de pronostic favorable dans deux situations : — Patients avec une masse bulky au moment de la présentation clinique initiale : dans ce cas la radiothérapie effectuée au décours de la chimiothérapie, est centrée sur la région de la masse bulky initiale ; — Patients en situation de réponse complète incertaine à l’issue de huit cycles d’ABVD (résidu tissulaire visualisé sur les scanographies réalisées après le chimiothérapie mais avec une TEP normale) : dans ce cas, la radiothérapie est centrée sur la masse tissulaire résiduelle.
4.
Modalités de la radiothérapie [29, 30, 32, 33, 37, 38, 41, 43, 44, 50]
4.1. Position du patient pendant la simulation et en cours de traitement Le patient est positionné en décubitus dorsal strict sur la table de traitement et la position des bras dépend de la localisation du ou des volume (s) à traiter : en cas d’irradiation susdiaphragmatique, les bras sont placés en abduction complète (au-dessus de la tête) ou en abduction incomplète (avant-bras fléchis et mains croisées sur l’abdomen à hauteur de l’ombilic), tandis qu’en cas d’irradiation sous-diaphragmatique, les bras sont placés le long du corps. Les volumes à traiter sont irradiés par deux faisceaux de photons opposés, antéro-postérieurs, délivrés tous les deux le même jour sans changement de position du patient. Le traitement des creux inguinaux constitue une exception car en effet pour ce faire, on utilise un faisceau direct antérieur d’électrons ou un mixage d’électrons et de photons.
4.2. Définition des volumes à traiter Au fur et à mesure du temps, la place et les modalités de la radiothérapie dans la prise en charge du lymphome de Hodgkin ont évoluées. Historiquement, les premiers cas de lymphome de Hodgkin guéris ont été obtenus par radiothérapie exclusive, en réalisant une irradiation lymphoïde (sub-) totale. Actuellement, après de multiples essais qui ont fait évoluer les concepts, le traitement de référence du
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lymphome de Hodgkin localisé correspond à une association de chimiothérapie et de radiothérapie (Combined Modality Therapy). Dans le cadre de ces associations, après réalisation d’une chimiothérapie d’induction, le type de radiothérapie qui fait référence aujourd’hui est une irradiation limitée aux aires ganglionnaires initialement atteintes (Involved Field Radiotherapy ou IFRT). Dans le cadre de l’IFRT, il n’existe pas de définition univoque des volumes à traiter. On distingue dix aires ganglionnaires indivisibles (mais dont les limites précises ne sont pas consensuellement définies) : les hémi-cous droit et gauche (qui comprennent chacun le creux sus-claviculaire homolatéral), les creux axillaires droit et gauche, le médiastin, la barre lombo-aortique, les aires pelviennes droite et gauche, les creux inguinaux droit et gauche. Lorsqu’un ganglion est pathologique au niveau de l’une de ces aires ganglionnaires au moment du bilan d’extension initial, le principe de l’IFRT consiste à réaliser, à l’issue de la chimiothérapie d’induction, une irradiation de toute l’aire ganglionnaire à laquelle appartenait le ganglion pathologique. Il s’agit donc d’une irradiation régionale, de type « classique » en deux dimensions, avec une définition des volumes à traiter qui se basent sur des repères osseux, et qui ne répond pas aux critères d’une irradiation conformationnelle. Comme nous l’avons déjà dit, il n’existe pas de définition consensuelle précise des volumes à traiter, mais on peut retenir les principes suivants. Toute adénopathie cervicale et/ou du creux sus-claviculaire doit conduire à l’irradiation de l’hémi-cou dans sa globalité. En cas d’atteinte sus-claviculaire isolée, il faut discuter l’irradiation associée du creux axillaire homolatéral (annexe définition des champs d’irradiation Figure 1). Toute adénopathie axillaire doit conduire à l’irradiation de l’aisselle dans sa globalité ainsi que du creux sus-claviculaire homolatéral (annexe définition des champs d’irradiation Figure 2). Toute adénopathie médiatino-hilaire doit conduire à l’irradiation du médiastin dans sa globalité ainsi que de la partie médiane des deux creux sus-claviculaire (annexe définition des champs d’irradiation Figure 3). En cas d’atteinte médiastinale et sus-claviculaire (même unilatérale), l’irradiation doit couvrir le médiastin ainsi que les deux hémi-cous (mais de manière réduite, jusqu’à hauteur de C2-C3) (annexe définition des champs d’irradiation Figure 3). En cas d’atteinte médiastinale, sus-claviculaire et cervicale, l’irradiation doit correspondre à un mantelet complet couvrant le médiastin, les deux hémi-cous ainsi que les deux creux axillaires. (annexe définition des champs d’irradiation Figure 4). Toute adénopathie lombo-aortique haute (au-dessus de l’espace L3-L4) et/ou du hile hépato-splénique et/ou de la rate, doit conduire à l’irradiation de la barre lombo-aortique. La rate n’est incluse dans la barre lombo-aortique et donc irradiée, que si elle est objectivement atteinte (annexe définition des champs d’irradiation Figure 5). Toute adénopathie lombo-aortique basse (au-dessous de L3) et/ pelvienne, doit conduire à une irradiation en Y inversé réduite comprenant la barre lombo-aortique ainsi que les aires pelviennes droite et gauche. Les creux inguinaux ne sont irradiés, dans le cadre d’une irradiation en Y inversé complète, que si des ganglions inguinaux sont objectivement atteints (annexe définition des champs d’irradiation Figures 6, 7 et 8).
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4.2.1. Les limites d’un hémi-cou (Annexe Définition des Champs d’irradiation Figure 1)
4.2.3. Les limites de l’aire médiastino-sus-claviculaire (Annexe Définition des Champs d’irradiation Figure 3)
Limite supérieure = ligne passant 1 à 2 cm au-dessus de l’extrémité inférieure de l’apophyse mastoïde (pour épargner le conduite auditif externe), à la moitié de la branche montante de la mandibule, et par la pointe du menton. A noter qu’en cas d’atteinte sus-claviculaire isolée, il est possible d’abaisser le limite supérieure du champ d’irradiation en regard de C2-C3 ou au niveau de l’os hyoïde, afin d’épargner les glandes parotides. Limite inférieure = ligne horizontale passant 2 cm sous le pied de l’extrémité interne de la clavicule. Limite externe = ligne verticale passant à l’union des deux tiers internes et du tiers externe de la clavicule. Limite interne = elle dépend de l’atteinte ganglionnaire. En l’absence d’adénopathie cervicale médiane et/ou sus-claviculaire, la limite interne du champ d’irradiation est une ligne verticale passant par le bord homolatéral du rachis cervical. En cas d’adénopathie cervicale proche de la ligne médiane et/ou d’adénopathie sus-claviculaire, la limite interne du champ d’irradiation passe par l’extrémité des apophyses transverses controlatérales pour englober la totalité des corps vertébraux du rachis cervical.
Limite supérieure : ligne horizontale passant par C5-C6, au niveau du bord inférieur du cartilage thyroïde. A noter qu’en cas d’atteinte sus-claviculaire associée, la limite supérieure du champ doit être remontée jusqu’en C2-C3 avec néanmoins une protection du rachis cervical haut et du larynx par une brique médiane qui descend jusqu’en C5-C6. Limite inférieure : — sur les côtés : 1 à 2 cm sous le bord inférieur de la clavicule ; — au centre : classiquement au niveau de l’interligne T10-T11. La tendance actuelle étant d’essayer de protéger au maximum le cœur et ses annexes, on peut recommander deux à trois cm sous le niveau le plus bas de l’atteinte ganglionnaire initiale ou cinq cm sous le résidu après la chimiothérapie. Limites latérales : — au niveau du médiastin : 1 à 2 cm en dehors de la silhouette médiastino-hilaire après chimiothérapie ; — en haut : ligne verticale passant à l’union des deux-tiers interne et du tiers externe de la clavicule.
4.2.2. Les limites de l’aire axillo-sus claviculaire (Annexe Définition des Champs d’irradiation Figure 2)
Limite supérieure : interligne T10-T11. Limite inférieure : interligne L4-L5 ou L5-S1, selon les auteurs. Limites latérales : classiquement 1 à 2 cm au delà des apophyses transverses de part et d’autre du rachis, mais en tenant compte d’éventuels résidus après la chimiothérapie.
Limite supérieure = ligne horizontale passant par C5-C6, au niveau du bord inférieur du cartilage thyroïde. À noter qu’en cas d’atteinte sus-claviculaire associée, la limite supérieure du champ doit être remontée jusqu’en C2-C3, avec néanmoins une protection du rachis cervical haut et du larynx par une brique médiane qui descend jusqu’en C5-C6. Limites inférieures : — en externe : ligne horizontale passant par la pointe de l’omoplate, au niveau de l’arc moyen de la sixième côte ; — en interne : 1 à 2 cm sous bord inférieur de la clavicule. Limite externe = ligne passant en haut par l’articulation acromio-claviculaire puis qui longe ensuite vers le bas le bord médial de l’humérus. Cette limite externe doit donc protéger la tête humérale. Limites internes : — au niveau du thorax : ligne convexe en dehors qui suit la paroi thoracique, 1 cm en dedans du gril costal ; — au niveau cervical : elle dépend de l’atteinte ganglionnaire. En l’absence d’adénopathie sus-claviculaire, la limite interne cervicale du champ d’irradiation est une ligne verticale passant par le bord homolatéral du rachis. En cas d’adénopathie sus-claviculaire, la limite interne du champ d’irradiation passe par l’extrémité des apophyses transverses controlatérales pour englober la totalité des corps vertébraux du rachis. Néanmoins, il convient dans ce cas de protéger le rachis cervical haut et le larynx par une brique médiane, qui descend jusqu’en C5-C6.
4.2.4. Les limites d’une barre lombo-aortique (annexe définition des champs d’irradiation Figure 5)
4.2.5. Les limites du Y inversé (sans traitement des aires inguinales) (annexe définition des champs d’irradiation Figure 6) Limite supérieure : interligne T10-T11. Limite inférieure : ligne oblique en haut et en dehors partant, de part et d’autre du cache centro-pelvien, depuis le bord interne du trou obturateur jusqu’à un point situé 1 à 2 cm en haut et en dehors du toit du cotyle. À noter que le cache centro-pelvien remonte lui jusqu’à une ligne horizontale passant par l’interligne S3-S4. Limites latérales : ligne verticale passant 1 à 2 cm au delà des apophyses transverses de part et d’autre du rachis (en tenant compte d’éventuels résidus après la chimiothérapie) jusqu’à hauteur de L4, puis selon une ligne oblique en bas et en dehors vers un point situé 1 à 2 cm en haut et en dehors du toit du cotyle. Les creux inguinaux ne sont irradiés dans le cadre d’un Y inversé qu’en cas d’atteinte initiale objective. Dans ce cas, le creux inguinal initialement atteint est traité par un faisceau direct antérieur supplémentaire d’électrons (de 10 à 13 MeV), selon un champ d’irradiation dont la limite supérieure est jointive à ± 5 mm avec la limite inférieure de l’Y inversé, et dont la limite inférieure descend jusqu’à au moins 5 cm sous le bord inférieur du petit trochanter (afin de couvrir complètement le triangle de Scarpa) (annexe définition des champs d’irradiation Figure 8).
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5.
Dose à délivrer, fractionnement, et données dosimétriques
Classiquement, la dose à délivrer recommandée, après une chimiothérapie d’induction, est de 30 Gy en 15 fractions de 2 Gy à raison de cinq séances par semaine. Un complément d’irradiation (Boost) de 5 à 10 Gy peut-être délivré au niveau de la région correspondant à une masse bulky initiale, ou à un résidu hyper-métabolique sur la TEP à l’issue de la chimiothérapie d’induction. Comme nous l’avons dit plus haut, les volumes à traiter sont irradiés par deux faisceaux de photons opposés, antéro-postérieurs, délivrés tous les deux le même jour sans changement de position du patient. L’énergie des photons utilisés dépend de la localisation du ou des volume (s) à traiter : photons de 4 à 6 MV pour les régions anatomiques superficielles (territoires cervicaux et axillaires) et de plus de 10 MV pour des régions anatomiques profondes (médiastin, territoires lombo-aortiques et pelviens). La pondération pour la contribution à la dose totale entre le faisceau antérieur et le faisceau postérieur est variable, elle est fonction elle aussi de la localisation et de la profondeur des masses ganglionnaires initiales. Pour la validation du plan de traitement, la dose à délivrer est calculée à mi-épaisseur dans l’axe des faisceaux.
6.
Organes à risque et contraintes de dose (consensus d’expert selon le Guide Procédures en radiothérapie) [21]
— La moelle épinière : la dose maximale (Dmax) doit être inférieure à 45 Gy, c’est-à-dire que moins de 2 % de la moelle épinière doivent recevoir une dose supérieure à 45 Gy. — Les glandes parotides : la dose moyenne doit être inférieure à 30 Gy et le V26 (c’est-à-dire le volume qui reçoit plus de 26 Gy) doit être inférieur à 50 %, dans chacune des deux parotides. — La thyroïde : lorsque la thyroïde est irradiée dans sa totalité, la Dmax doit être inférieur à 40 Gy, c’est-à-dire que moins de 2 % de la thyroïde doit recevoir une dose supérieure à 40 Gy. — Les poumons : le V30 (c’est-à-dire le volume qui reçoit plus de 30 Gy) doit être inférieur à 20 %. Le V20 (c’est-à-dire le volume qui reçoit plus de 20 Gy) doit être inférieur à 35 %. — Le cœur : lorsque le cœur est irradiée dans sa totalité, la Dmax doit être inférieure à 30 Gy, c’est-à-dire que moins de 2 % du cœur doit recevoir une dose supérieure à 30 Gy. Lorsque le cœur n’est irradié que partiellement, il faut essayer de protéger au maximum le ventricule gauche et le V40 (c’est-à-dire le volume qui reçoit plus de 40 Gy) doit être le plus faible possible. A noter qu’en cas d’atteinte initiale limitée au médiastin supérieur, il est possible lors de l’irradiation médiastino-susclaviculaire de protéger le cœur (et notamment le ventricule gauche) par un cache après une dose délivrée de 20 Gy, sans compromettre le contrôle de la maladie. — Les reins : en l’absence d’insuffisance rénale, une dose maximale de 20 Gy peut-être délivrée dans un volume cumulé équivalent à un rein entier. — Les ovaires : la Dmax doit être inférieure à 5 Gy, c’est-à-dire que moins de 2 % d’un ovaire doit recevoir une dose supérieure à 5 Gy. Au besoin, il est possible d’organiser une transposition chirurgicale des ovaires avant la réalisation d’une irradiation pelvienne.
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— Les têtes humérales : Lors d’une irradiation axillo-susclaviculaire ou d’un mantelet complet, les têtes humérales doivent être protégées par cache.
7.
Toxicité aiguë en cours de traitement
Au cours d’une irradiation cervicale ou axillo-sus-claviculaire, la toxicité en cours de traitement est essentiellement marquée par la survenue d’une épithéliite, mais qui reste la plupart du temps modérée compte tenu de la dose délivrée. Au cours d’une irradiation cervicale ou médiastino-sus-claviculaire, la toxicité en cours de traitement est essentiellement marquée par la survenue d’une œsophagite, mais qui reste la plupart du temps modérée compte tenu de la dose délivrée. Au cours d’une irradiation sous-diaphragmatique, la toxicité en cours de traitement est essentiellement marquée par la survenue d’un syndrome gastro-intestinal avec des nausées ± vomissements, des coliques intestinales ainsi que des diarrhées. Néanmoins, là encore, compte tenu des doses délivrées, ces réactions restent la plupart du temps modérées et parfaitement contrôlables par des traitements symptomatiques simples et quelques conseils diététiques. À noter que la mise en place systématique d’un cache centro-pelvien permet de prévenir la survenue d’une cystite radique.
8.
Toxicité semi-retardée
Au décours d’une irradiation médiastino-thoracique en mantelet, deux types de manifestations semi-retardées peuvent survenir :
8.1. Pneumopathies radio-induites Les symptômes apparaissent en général six à douze semaines après la fin de l’irradiation. Ils restent généralement modérés (à type de toux, dyspnée d’effort) et sont spontanément régressifs dans la plupart des situations en quelques semaines. Dans les formes les plus graves, l’introduction précoce d’une corticothérapie peut atténuer les symptômes mais son efficacité sur d’éventuelles séquelles pulmonaires tardives (à type de fibrose rétractile) reste discutée. La probabilité de survenue de ces pneumopathies semi-retardées est d’autant plus importante que l’irradiation médiastinothoracique est associée à une chimiothérapie (et notamment la bléomycine). Par ailleurs, ce type de complication est également favorisé par la poursuite d’une intoxication tabagique en cours d’irradiation.
8.2. Myélite transitoire radio-induite – Syndrome de Lhermitte Apparition chez 5 à 20 % des patients, dans un délai de un à six mois après la fin de l’irradiation, de douleurs neuropathiques para-rachidiennes lors de la flexion du cou, à type de décharges électriques descendantes et irradiantes jusqu’aux extrémités. Ces symptômes sont attribués à une démyélinisation transitoire au niveau de la moelle épinière, liée à la mort radio-induite
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d’oligodendrocytes. L’évolution spontanée se fait vers une régression progressive des symptômes sur plusieurs mois, et aucun traitement spécifique n’est recommandé. Cette myélite transitoire semi-retardée semble indépendante de la dose reçue par la moelle épinière (des cas ont été décrits pour des doses inférieures à 35 Gy) et ne préjuge pas de la survenue de séquelles neurologiques tardives (tant que la dose reçue par la moelle reste strictement inférieure à 50 Gy).
9.
Toxicité tardive [1, 6, 8, 9, 14, 23, 24, 31-34, 36, 39, 40, 48, 49, 53]
Il est important de souligner en préambule, que les données présentées ci-dessous sont issues du suivi de patients traités il y a plus de dix ans, afin d’avoir un recul suffisant pour pouvoir étudier les complications tardives. Les études épidémiologiques et statistiques qui ont été réalisées avec ces données comportaient donc un nombre non négligeable de patients ayant subi des irradiations extensives et à des doses supérieures aux doses actuellement préconisées. Par ailleurs, la plupart des études réalisées sont discutables sur le plan méthodologique (problème des populations choisies comme population « témoin », absence d’analyse stratifiée en fonction de facteurs de risque éventuellement confondants…) et sont difficilement comparables les unes aux autres car elles n’utilisent pas les mêmes indicateurs. Ceci étant dit, l’analyse des données que l’on possède montre que si dans les dix premières années qui suivent la fin du traitement, la première cause de mortalité reste la récidive ou progression du lymphome de Hodgkin, au-delà de ces dix premières années, 98 % des récidives qui devaient avoir lieu l’ont été et les deux principales causes de mortalité sont alors la survenue de second (s) cancer (s) et de complications cardio-vasculaires, qui sont potentiellement liés aux traitements réalisés.
9.1. Survenue de seconds cancers Le suivi à long terme des patients traités pour un lymphome de Hodgkin a pu mettre en évidence une augmentation de l’incidence des cancers par rapport à la population générale, qui se traduit au final par un excès de mortalité par cancer. Vingt-cinq ans après la fin du traitement pour le lymphome de Hodgkin, l’incidence cumulée de second cancer atteint entre 10 et 30 % selon les séries. Presque tous les types de cancer sont augmentés en incidence (sauf notamment les cancers de la prostate) mais par ordre de fréquence, les second cancers les plus fréquents chez les patients traités pour un lymphome de Hodgkin sont : les cancers bronchopulmonaires, les cancers du sein (chez les femmes traitées), les leucémies et lymphomes non-hodgkiniens. Bien évidemment, de multiples facteurs liés au traitement lui-même concourent à la survenue d’un second cancer dont : le type et la dose de chimiothérapie associée à la radiothérapie, la taille des faisceaux d’irradiation, la localisation de l’irradiation, la dose d’irradiation…. Mais, par ailleurs, il a pu être montré que certaines habitudes de vie chez les patients traités (tabagisme, exposition solaire, régime alimentaire…) pouvaient accroitre encore plus le risque, et ce de manière plus importante que pour la population générale.
9.2. Problèmes cardio-vasculaires Après une irradiation médiastino-thoracique, plusieurs types de complications tardives radio-induites ont été décrites : — insuffisance cardiaque par cardiomyopathie ; — infarctus du myocarde et/ou insuffisance cardiaque par coronaropathie ; — péricardite constrictive ; — valvulopathies ; — troubles de conduction ; — et troubles du rythme cardiaque. Par ailleurs, après irradiation cervicale, des cas de sténose carotidienne ont été décrits, certains s’étant compliqué d’accidents vasculaires cérébraux. Globalement, toutes ces complications entraînent un excès de morbidité et de mortalité cardiovasculaires chez les patients traités pour un lymphome de Hodgkin. On estime que 25 ans après le traitement du lymphome de Hodgkin, le taux de risque cumulé de décès par événement cardio-vasculaire atteint 5 à 20 % des patients. De la même manière que précédemment, de multiples facteurs liés au traitement lui-même concourent à la survenue de ces complications cardio-vasculaires (le type et la dose de chimiothérapie associée à la radiothérapie, la taille des champs d’irradiation, la localisation de l’irradiation, la dose d’irradiation….) mais il a pu être démontré que les habitudes de vie du patient (tabagisme, exercice physique, habitudes alimentaires…) ainsi que les classiques facteurs de risque cardio-vasculaires jouent un rôle important, probablement plus encore que pour la population générale.
9.3. Dysfonction thyroïdienne Selon les séries 20 à 80 % des patients présentent une dysfonction de la glande thyroïde après irradiation cervico-susclaviculaire, essentiellement sur le versant de l’hypothyroïdie. À noter que ce type de trouble endocrinien est important à dépister puisqu’une hypothyroïdie sans opothérapie substitutive peut modifier le profil lipidique sanguin du patient et à terme accroître le risque de complications cardio-vasculaires.
9.4. Infertilité Elle résulte le l’effet combiné de la chimiothérapie et d’une éventuelle radiothérapie pelvi-inguinale. Pour les patients masculins, il convient de proposer une cryopréservation de sperme avant de débuter tout traitement. Pour les patientes pour qui il est envisagé de réaliser une radiothérapie pelvienne, il est possible de proposer une transposition chirurgicale des ovaires avant sa réalisation.
10. Conclusion Le traitement combiné associant chimiothérapie d’induction suivie d’une radiothérapie de type IFRT (Involved Field Radiotherapy), s’est imposé comme de traitement de référence des lymphomes de Hodgkin localisés. Malgré l’amélioration incontestable qu’il a apporté en termes de taux de guérison, de
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survie sans récidive et de survie globale par rapport aux traitements historiques, on constate lorsque l’on étudie le devenir des patients traités, à distance du traitement initial et après avoir écarté tout risque de rechute du lymphome de Hodgkin, que la survie observée est inférieure à celle attendue (déterminée à partir d’une population témoin appariée par âge et par sexe). Il existe donc une surmortalité qui n’est pas liée au lymphome de Hodgkin lui-même, mais liée aux traitements réalisés et qui amoindrie le bénéfice tiré de ces derniers. Afin de limiter au maximum cette surmortalité liée aux traitements, plusieurs nouvelles approches thérapeutiques sont en cours d’évaluation : — Diminution de la dose délivrée à 20 Gy en cas de lymphome de Hodgkin de pronostic favorable [20]. — Diminution des volumes traités avec le concept de la radiothérapie type INRT (« Involved Nodal Radiotherapy ») centrée non plus sur l’aire ganglionnaire initialement envahie dans son ensemble, mais sur les seules masses ganglionnaires initialement pathologiques. Il s’agit donc d’une irradiation conformationnelle qui nécessite l’acquisition d’une imagerie tridimensionnelle, et le recalage entre les images réalisées avant et après chimiothérapie d’induction afin de définir au mieux le volume à traiter ainsi que la balistique la plus adéquate pour ce faire [12,16,17,18,19,45,53]. — Diminution du volume de tissu sain irradié par l’utilisation des nouvelles techniques de radiothérapie : radiothérapie avec modulation d’intensité, radiothérapie asservie à la respiration, radiothérapie guidée par l’image [16,17,20,52]. — Personnalisation de la stratégie thérapeutique avec un traitement adapté en fonction de la réponse du lymphome de Hodgkin à la chimiothérapie d’induction. En effet, plusieurs essais thérapeutiques en cours, évaluent l’efficacité de stratégies thérapeutiques modulées en fonction d’une TEP réalisée pendant ou au décours de la chimiothérapie d’induction [20]. Par ailleurs, indépendamment de l’optimisation du traitement radiothérapique, il convient de : — donner des conseils hygiéno-diététiques aux patients : insister sur l’arrêt du tabac, la pratique régulière d’exercice physique, une alimentation limitée en graisses saturées et en sucres… ; — prendre en charge efficacement les différents facteurs de risque cardio-vasculaire du patient ; — surveiller étroitement et longtemps les patients vis-à-vis de leur risque accru de second cancer et de morbidité et mortalité cardiovasculaires.
11. Cas clinique Une patiente de 18 ans, sans antécédent particulier hormis un terrain atopique (avec de multiples allergies médicamenteuses et un asthme contrôlé) a consulté son médecin traitant devant l’apparition d’une tuméfaction à la base du cou. À l’interrogatoire, il a été retrouvé la notion de polyarthralgies diffuses d’apparition insidieuse, dans un contexte d’asthénie croissante et d’altération de l’état général. À l’examen clinique, il a été retrouvé essentiellement une masse pré-trachéale en regard de la loge thyroïdienne, ainsi que quelques ganglions cervicaux mais jugés peu spécifiques (bilatéraux et ≤ 1 cm initialement). Devant ce
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tableau clinique et compte tenu du terrain, le diagnostic s’est orienté dans un premier temps vers une pathologie dysimmunitaire associée à un tableau de thyroïdite, et la patiente a été mise sous corticothérapie orale. Après un mois de traitement par corticoïdes, l’état général de la patiente s’est nettement amélioré, les arthralgies ont disparu, mais la masse pré-trachéale persistait et des adénomégalies cervicales sont apparues. Une échographie cervicale a été réalisée ; elle ne retrouvait aucune anomalie au niveau de la thyroïde mais par contre elle mettait en évidence de multiples adénopathies jugulo-carotidiennes bilatérales qui se prolongaient en une masse ganglionnaire d’un seul tenant de la loge pré-trachéale jusqu’au niveau du médiastin supérieur. Des biopsies ganglionnaires écho-guidées ont été réalisées dans le même temps, et l’examen histologique des fragments biopsiques a révélé qu’il s’agissait d’un lymphome de Hodgkin classique. Une scanographie du corps entier puis une TEP ont été réalisées ; elles ont confirmé la présence des adénopathies cervico-médiastino-hilaires et n’ont retrouvé aucune autre atteinte ganglionnaire sus- ou sous-diaphramatique. Sur le plan biologique, aucune anomalie significative n’a été mise en évidence et notamment aucun syndrome inflammatoire patent. Une biopsie ostéo-médullaire a été réalisée et n’a retrouvé aucun envahissement médullaire. Au final, le lymphome de Hodgkin a été classé de stade II (car plus d’une aire ganglionnaire était atteinte mais toutes les aires envahies étaient situées du même coté du diaphragme), B et b par défaut (car l’appréciation des signes généraux et le syndrome inflammatoire biologique n’étaient pas fiable compte tenu de la corticothérapie initiale), Bulky (car la masse ganglionnaire cervico-médiastinale mesurait plus de 10 cm de plus grand axe). Il s’agit donc d’un lymphome de Hodgkin localisé appartenant au groupe pronostique défavorable et le standard thérapeutique dans cette situation reste une induction par quatre cycles de chimiothérapie de type ABVD suivie d’une consolidation par une irradiation de type IFRT cervico-médiastino-hilaire. Après deux cures d’ABVD, la TEP, réalisée précocement pour évaluer la réponse à la chimiothérapie, a montré une réponse en volume d’environ 70 % au niveau de la masse initialement bulky, même s’il persistait des hyperfixations ganglionnaires cervicales bilatérales et médiastino-hilaires. Compte tenu de cette bonne réponse précoce à la chimiothérapie, la décision a été prise en réunion de concertation pluridisciplinaire de poursuivre le programme thérapeutique d’induction standard par deux cycles supplémentaires d’ABVD et de réévaluer la situation par une nouvelle TEP. Cette dernière, réalisée donc après quatre cycles de chimiothérapie, a montré une poursuite de la réponse à la chimiothérapie sous la forme d’une réponse complète cervicale avec la disparition des résidus ganglionnaires cervicaux (tant sur le plan tomodensitométrique que métabolique), associée à une très bonne réponse partielle médiastinale avec une réduction en volume d’au moins 90 % au niveau de la masse initialement bulky et une disparition de toute activité hypermétabolique médiastino-hilaire. Après une nouvelle discussion en réunion de concertation pluridisciplinaire, compte tenu d’une masse ganglionnaire initialement bulky, il a été décidé de réaliser une consolidation par une irradiation de l’ensemble des aires ganglionnaires initialement atteintes, mais compte tenu d’une réponse tomodensitométrique ≥ 90 % en volume au niveau de la masse initiale bulky et de la normalisation de la TEP au niveau
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de l’ensemble des cibles après la chimiothérapie d’induction, il a été décidé que l’irradiation ne délivrerait qu’une dose de 30 Gy (en 15 fractions de 2 Gy, à raison de cinq séances par semaine) dans l’aire médiastino-hilaire et des deux hémi-cous, sans boost dans la masse initialement bulky. Pour la préparation de la radiothérapie, la patiente a d’abord été convoquée pour réaliser une scanographie cervico-thoracique de centrage, à visée dosimétrique. Cette dernière est réalisée avec injection d’iode et pour une patiente en position de traitement (en décubitus dorsal avec les avant-bras fléchis et les mains croisées posées sur l’abdomen à hauteur de l’ombilic). Une fois les images récupérées, elles sont recalées avec celles de la TEP préthérapeutique afin de définir précisément les volumes cibles. Un volume cible anatomoclinique (CTV) a été délinéé sur les images tépographiques en englobant toutes les masses ganglionnaires présentant une fixation hypermétabolique, et a été reporté sur les images recalées scanographiques de centrage. Par ailleurs, les organes à risque régionaux (dans le cas présent : la moelle épinière, les poumons, le cœur, la thyroïde) ont été délinéés afin de pouvoir ultérieurement évaluer la dose reçue par chacun d’entre
eux (Fig. 2, 3 et 4). Ensuite, les deux faisceaux d’irradiation antéropostérieurs ont été définis, en s’assurant d’une marge d’au moins 1 cm avec entre leurs limites et le volume cible anatomoclinique (Fig. 5). Puis l’étude dosimétrique permet de préciser, en fonction de la position du volume cible anatomoclinique par rapport à la mi-épaisseur du patient, l’énergie (voir le mixage des énergies) des photons utilisés pour chaque faisceau d’irradiation, ainsi que la pondération de chacun d’entre eux pour la contribution à dose totale. La validation du dossier technique a reposé sur la vérification de la bonne couverture du volume cible, à la fois sur les coupes scanographiques (Fig. 6 et 7) et sur l’histogramme dosevolume (Fig. 7), l’objectif étant que le volume cible antomoclinique reçoive ≥ 95 % de la dose prescrite tout en respectant au mieux les contraintes aux organes à risque.
Conflits d’intérêts Les auteurs ont déclaré n’avoir aucun conflit d’intérêts pour cet article.
Fig. 4. Définition des volumes = regroupement images 1,2, et 3 Definition of volumes = combining images 1, 2, and 3.
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Fig. 5. Définition des champs d’irradiation = regroupement images 4 et 5 Definition of radiation fields = combining images 4 and 5.
Fig. 6. Courbes isodoses = regroupement images 6 à 10 Isodose curves = combining images 6–10.
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Fig. 7. Histogramme dose-volume (HDV) Dose-volume histograms.
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Lymphomes malins non hodgkiniens Non-hodgkin’s lymphomas F. Droueta, X. Cahub, Y. Pointreauc, F. Denisd, M.-A. Mahéa, * a
Service de radiothérapie du centre rené-gauducheau, CRLCC Nantes-Atlantique, Boulevard Jacques-Monod, 44805 Saint-Herblain cedex, France Service d’hématologie clinique CHU de Rennes, hôpital Pontchaillou, 2 rue Henri-Le-Guilloux 35033 Rennes cedex 9, France c Service de radiothérapie, centre régional universitaire de cancérologie Henry-S.-Kaplan CHU de Tours, hôpital Bretonneau, 2, Boulevard Tonnellé 37000 Tours, France d Service de radiothérapie du centre Jean-Bernard, 9 rue Beauverger 72000 Le Mans, France b
INFO ARTICLE
RÉSUMÉ
Les figures 1 à 8 de l’annexe Définition des Champs d’irradiation, l’image 3 de la figure 8, la figure 9, l’image 9 de la figure 10, l’image 16 de la figure 12, l’image 22 de la figure 15, l’image 24 de la figure 16, les images 28, 31 et 31 de la figure 18 et l’image 38 de la figure 19 sont visibles uniquement sur : http://www. sciencedirect.com
Avec environ 10 000 nouveaux cas par an en France, les lymphomes malins non hodgkiniens représentent l’hémopathie maligne la plus fréquente et 5 à 10 % des nouveaux cas de cancer. Les lymphomes malins non hodgkiniens constituent un ensemble hétérogène de lymphopathies, regroupant des entités aux caractéristiques épidémiologiques, évolutives et pronostiques très différentes. Il existe plusieurs classifications des lymphomes malins non hodgkiniens mais sur le plan pratique, on individualise des lymphomes agressifs dont le lymphome B diffus à grandes cellules (qui est le lymphome le plus fréquent), et les lymphomes indolents dont le lymphome folliculaire et les lymphomes de MALT (Mucosa-associated lymphoid tissue). La place de la radiothérapie dans la prise en charge des lymphomes malins non hodgkiniens varie selon le sous-type précis de lymphome, mais elle est devenue de plus en plus limitée avec le temps. Généralement, elle ne trouve des indications à titre curatif que dans des situations de lymphomes malins non hodgkiniens localisés, soit associée à de la chimiothérapie dans le cadre d’un traitement combiné comme pour la prise en charge des lymphomes B diffus à grandes cellules, soit comme traitement exclusif, notamment dans les rares situations de lymphomes folliculaires localisés. Par ailleurs, les lymphocytes étant des cellules extrêmement radiosensibles, la radiothérapie conserve d’excellentes indications à but palliatif dans de volumineuses masses tumorales symptomatiques, et ce, quel que soit le sous-type de lymphome malin non hodgkinien. Il est important de rappeler qu’encore aujourd’hui l’irradiation de type « Involved Field » reste la technique de référence pour le traitement des lymphomes malins non hodgkiniens ganglionnaires, même si on assiste actuellement à l’émergence de nouveaux types d’irradiations visant à réduire les volumes irradiés pour tenter de limiter les risques de complications radio-induites tardives. L’objectif de cet article est de préciser les particularités (épidémiologiques, radio-anatomiques et pronostiques) des différents lymphomes malins non hodgkiniens (à l’exception des lymphomes cérébraux), ainsi que les modalités pratiques de l’irradiation (illustrées par des cas cliniques) lorsqu’une indication de radiothérapie est posée dans le cadre de leur prise en charge.
Mots clés : Lymphomes malins non hodgkiniens Radiothérapie conformationnelle Atlas Volumes cibles.
© 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
ABSTRACT With approximately 10000 cases per year in France, non-Hodgkin’s lymphoma (NHL) represents the most frequent hematological malignancy, and 5 to 10 % of new cases of cancers. NHLs constitute a heterogeneous group of lymphoproliferative diseases, including entities with very different epidemiological and evolutive characteristics, as well as prognosis and treatments. Several classifications exist, but in practice, we individualize aggressive NHL including Diffuse Large B-Cell
* Correspondance. Adresse e-mail : [email protected] (M.-A. Mahé). © 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
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Keywords: Non-Hodgkin’s lymphomas Conformal radiotherapy Atlas Target volumes.
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Lymphomas (DLBCL) which is the most common lymphoma, and indolent NHL including follicular lymphomas and mucosa-associated lymphoid tissue (MALT) lymphomas. The role of the radiotherapy in the management of NHLs varies according to the specific sub-type of lymphoma, but it has become increasingly limited over time. Overall it finds indications with curative intent only in situations of localized LMNH: either associated with chemotherapy as part of a combined modality therapy as for the treatment of localized DLBCL, or as exclusive treatment specially in the rare situations of localized follicular lymphomas. Moreover, lymphocytes being extremely radiosensitive cells, radiotherapy retains excellent indications with palliative intent for the management of symptomatic bulky tumor masses, and that whatever the sub-type of NHLs may be. It is important to remember that even today the «Involved Field» irradiation type remains the gold standard for the treatment of nodal NHLs, even if we witness at present the emergence of new types of irradiation, which aim to reduce the amount of irradiated tissues to try to limit the risks of delayed radio-induced complications. The purpose of this article is to clarify the specific aspects (epidemiological, radio-anatomical and prognostic characteristics) of each NHLs’sub-types (except primary central nervous system lymphomas), as well as the practical modalities of the irradiation (illustrated by a clinical case record) when an indication of radiotherapy is placed for their treatment. © 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Published by Elsevier Masson SAS. All rights reserved.
1.
Épidémiologie
Avec environ 10 000 nouveaux cas par an (soit 15 à 20 nouveaux cas/100 000 habitants/an) les lymphomes malins nonHodgkiniens ne représentent que 3 à 4 % des cancers incidents. Néanmoins il est important de souligner que les lymphomes malins non hodgkiniens représentent la seule hémopathie maligne dont l’incidence augmente significativement depuis les années 70, et ce d’environ 5 % par an [21]. L’incidence augmente par ailleurs avec l’âge, ainsi l’âge moyen au moment du diagnostic se situe autour de 65 ans (même si certains types de lymphome malin non hodgkinien se voient plus spécifiquement chez des sujets plus jeunes). Les causes précises de la maladie sont inconnues, néanmoins on retient un certain nombre de facteurs de risque (parmi lesquels certains sont spécifiques de types particuliers de lymphome malin non hodgkinien) [9] : — l’immunodépression, congénitale ou acquise (infection par le virus de l’immuno-déficience humaine, transplantation d’organes…) ; — certaines maladies dysimmunitaires : • syndrome de Gougerot-Sjögren (lymphome de MALT des glandes salivaires) ; • thyroïdite de Hashimoto (lymphome thyroïdien) ; • polyarthrite rhumatoïde ; • lupus érythémateux disséminé ; • sclérodermie ; • sarcoïdose ; • maladie coeliaque (lymphomes intestinaux) ; — certaines infections : • helicobacter pylori [lymphome de MALT (Mucosa-associated lymphoid tissue, gastrique) ; • campylobacter jejuni (lymphome de MALT intestinal) ; • chlamydia psittaci (lymphome de MALT orbitaire) ; • borrelia burgdorferi (lymphome de MALT cutané) ; • virus de l’hépatite C (lymphome de MALT splénique) ; • virus T-lymphotropique humain (HTLV) -1 (lymphome leucémique à cellules T) ; • virus d’Epstein Barr (lymphome de Burkitt et lymphomes T/NK centro-faciaux) ; • l’herpès virus humain type 8 (lymphome des cavités séreuses) ;
— exposition à des radiations ionisantes ; — exposition à des toxiques chimiques : certains solvants, le benzène, la dioxine, certains pesticides et herbicides…
2.
Classifications [15, 16, 18, 25, 28, 29, 34]
Les lymphomes malins non hodgkiniens font partie des syndromes lymphoprolifératifs et constituent un groupe très hétérogène de maladies, sachant que chaque entité possède une épidémiologie, une présentation clinique, un profil évolutif, un traitement et un pronostic qui lui est propre. En raison de l’hétérogénéité fonctionnelle des cellules lymphoïdes et de leur répartition anatomique ubiquitaire, ces affections peuvent se développer au sein de n’importe quel organe, voire tissu de l’organisme. Il n’existe donc pas de présentation clinique type ou spécifique, néanmoins les circonstances de découverte les plus fréquentes sont : — poly-adénopathies superficielles, fermes, non douloureuses et non inflammatoires, de taille variable, persistantes sur plus d’un mois ; — altération de l’état général avec l’apparition d’une fièvre (température ≥38,5 °C, oscillante mais persistante) sans cause infectieuse, accompagnée de sueurs nocturnes et/ou d’une perte de poids inexpliquées ; — syndrome compressif lié à la présence d’un masse ganglionnaire profonde « Bulky » ; — syndrome cave supérieur ; — dyspnée ; — dysphonie ; — dysphagie ; — douleurs abdominales ; — syndrome occlusif ; — compression vasculo-nerveuse ; — insuffisance médullaire avec cytopénies ; — atteinte extra-ganglionnaire symptomatique (tous les organes pouvant être atteints) ; —… Le diagnostic de lymphome malin non hodgkinien est histologique et repose sur la réalisation de prélèvements biopsiques (biopsie-exérèse ganglionnaire et/ou biopsie tissulaire). Lorsque plusieurs sites s’offrent au choix du prélèvement, il est préférable
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d’éviter de prélever ceux qui peuvent être le siège de réactions inflammatoires non spécifiques (comme les ganglions inguinaux ou axillaires). Il est important de réaliser des prélèvements de bonne taille afin de pouvoir les échantillonner. En effet, il convient d’adresser : — un fragment fixé au service d’anatomo-pathologie afin de réaliser une analyse histologique du prélèvement avec étude immuno-phénotypique ; — un fragment congelé au laboratoire de biologie moléculaire ; — un fragment frais au laboratoire de cytogénétique ; — un fragment mis en culture aux laboratoires de bactériologie, virologie et parasitologie afin de rechercher un agent infectieux (dont le bacille de Koch…).
Tableau 1 Classification de Ann Arbor modifiée. Modified Ann Arbor classification. Stade
Extension de la maladie
Stade I
Un seul territoire ganglionnaire atteint
Stade II
Plus de deux territoires ganglionnaires atteints mais tous situés du même côté du diaphragme
Stade III
Plus de deux territoires ganglionnaires atteints et situés des deux côtés du diaphragme
Stade IV
Atteinte médullaire ou viscérale (d’origine hématogène)
Sigle
Classification clinico-biologique
A
Absence de signe clinique d’évolutivité
a
Présence d’au moins un des signes cliniques d’évolutivité
B
Absence de syndrome inflammatoire
b
Présence d’un syndrome inflammatoire
X
Présence d’une masse bulky
E
Présence d’une atteinte viscérale de contiguïté
2.1. Entités anatomo-pathologiques Au cours des quarante dernières années, la classification des lymphomes malins non hodgkiniens a été plusieurs fois remaniée (Classification de KIEL, REAL (Revised European American Lymphoma)…) pour tenter de regrouper les différentes entités. La dernière classification, en vigueur actuellement, est celle de l’OMS (Fig. 1). Cette dernière ne regroupe plus, à la différence de la classification REAL, les lymphomes selon leur « grade de malignité », elle classe les lymphomes sur des critères cytologiques (grandes contre petites cellules), histologiques (nodulaires contre diffus), immunophénotypiques (selon les marqueurs CD), cytogénétiques et moléculaires.
2.2. Bilan d’extension et staging Une fois le diagnostic de la maladie établi, un examen clinique minutieux ainsi qu’un bilan para-clinique complet, doivent être réalisés au plus vite afin de déterminer l’extension précise de la maladie (Fig. 2). L’objectif étant de définir le pronostic individuel de la maladie pour lui proposer une stratégie de traitement adaptée.
2.2.1. Classification d’Ann Arbor modifiée (Tableau 1) On définit quatre stades différents selon le nombre d’aires ganglionnaires atteintes (I contre II et III) et leur localisation par rapport au diaphragme (I et II contre III), ainsi que par la présence ou non d’atteinte extra-ganglionnaires d’origine hématogène (I-II-III contre IV). Le stade est complété par l’apposition de sigles, de définition clinico-biologique, correspondant à la présence (ou non) : de signes généraux d’évolution, d’une masse ganglionnaire bulky, d’une atteinte extra-ganglionnaire de contiguïté, d’un syndrome inflammatoire.
2.2.2. Classifications pronostiques Schématiquement et sur le plan pratique, on distingue : — lymphomes B (85 %) contre lymphomes T (15 %) ; — lymphomes agressifs contre lymphomes indolents : • les lymphomes T sont tous considérés comme des lymphomes agressifs (sauf les lymphomes T cutanés) ; • les lymphomes B sont eux séparés en agressifs (ou de haut grade de malignité) contre indolents (ou de bas grade de malignité) ;
— lymphomes localisés (de stades I-II) contre lymphomes disséminés (de stades III-IV). Afin d’affiner encore le pronostic individuel des lymphomes non hodgkiniens et ainsi nous permettre de leur proposer le traitement le plus approprié à leur situation oncologique, des facteurs pronostiques propres à chaque type de lymphome malin non hodgkinien ont été individualisés à partir de l’analyse rétrospective d’essais thérapeutiques de phase III. Ces différents facteurs ont pu ensuite être regroupés en scores ou indices pronostiques, qui dans un second temps ont été validés sur des études prospectives. Ainsi pour les deux lymphomes malins non hodgkiniens les plus fréquents, le lymphome B diffus à grandes cellules et le lymphome folliculaire, deux indices pronostiques ont été validés, respectivement l’IPI (International Prognostic Index) (Fig. 3) et le FLIPI (Follicular Lymphoma International Prognostic Index) (Fig. 4). Il est important de retenir que paradoxalement, la perspective d’une guérison vraie est importante dans les formes agressives, alors que les formes indolentes ne sont pas réellement curables, même si spontanément ou sous l’effet des traitements, leur évolution peut être longue et asymptomatique.
3.
Indications de la radiothérapie (Figs. 5-7)
Une fois le pronostic du patient établi, il convient de réaliser un certain nombre d’explorations complémentaires, dans le cadre d’un bilan pré-thérapeutique, afin de préciser d’éventuelles co-morbidités et ainsi de déterminer s’il y a une contre-indication d’ordre médicale à la réalisation d’un des différents traitements qu’il peut être amené à recevoir. En l’absence de contre-indication, on reconnait classiquement à la radiothérapie les indications suivantes [1-8,10-13,15,18,2225,30-34] : Dans les formes ganglionnaires localisées de lymphome B diffus à grandes cellules, chez les patients de moins de 60 ans
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avec un aaIPl < 2 (faible risque = pronostic favorable), une des options de traitement correspond à un traitement associant chimiothérapie et radiothérapie. En effet, après un traitement d’induction par une chimiothérapie de type CHOP (cyclophophamide, adriamycine, vincristine, prednisone)-rituximab (dont le nombre de cycles dépend du l’indice aaIPI et/ou de la présence ou non d’une masse bulky), on peut réaliser un traitement de consolidation sous la forme d’une radiothérapie centrée sur les aires ganglionnaires initialement atteintes. Dans les formes étendues ou de mauvais pronostic de lymphome B diffus à grandes cellules, le traitement standard repose sur une chimiothérapie seule plus ou moins intensifiée, associée à une prophylaxie méningée sous la forme d’injections intra-thécales de méthotréxate. Dans ce cadre, la place de radiothérapie est extrêmement limitée. Elle peut cependant se discuter chez des patients avec une masse bulky au moment de la présentation clinique initiale et en situation de réponse complète incertaine au niveau de cette dernière à l’issue de six à huit cycles de chimiothérapie de type CHOP-rituximab (résidu tissulaire visualisé sur la scanographie réalisée après la chimiothérapie mais avec une TEP normalisée) : dans ce cas, la radiothérapie délivrée après la chimiothérapie est centrée sur la masse tissulaire résiduelle. Dans les formes extra-ganglionnaires localisées de lymphome B diffus à grandes cellules (formes testiculaires, mammaires, médiastinales, ORL), le traitement standard repose sur une chimiothérapie (six cycles de CHOP-Rituximab avec injections intra-thécales de méthotréxate) suivie d’un traitement de consolidation sous la forme d’une radiothérapie centrée sur l’atteinte initiale. A noter que pour les formes testiculaires, mammaires et ORL, il se discute, en plus de la prophylaxie méningée par injections intra-thécales de méthotréxate, la réalisation d’une irradiation prophylactique cérébro-méningée jusqu’à hauteur de C2. Dans les formes localisées de lymphomes folliculaires (rares ≤ 15 % des cas), à condition d’être de grade < 3 (selon le grading de Berard et Mann) et que le FLIPI soit de faible risque, une radiothérapie exclusive centrée sur les aires ganglionnaires initialement atteintes, reste le standard thérapeutique. Dans les formes étendues et/ou de mauvais pronostic de lymphomes folliculaires, il n’y a pas de prise en charge (traitement immédiat contre « watchfull waiting » et traitement différé) ni de traitement standard, de multiples facteurs concourent à la décision thérapeutique. Néanmoins si un traitement est décidé, il repose sur une chimiothérapie exclusive. Dans ce cadre, la place de radiothérapie est extrêmement limitée mais elle peut cependant se discuter à titre palliatif chez des patients atteints de volumineuse(s) masse(s) ganglionnaire(s) symptomatique(s), et dans ce cas l’irradiation est évidemment centrée sur cette (ou ces) dernière (s). Dans les formes localisées (70 à 90 % des cas) de lymphomes de MALT, une radiothérapie exclusive centrée sur l’organe atteint reste le standard thérapeutique, hormis dans les lymphomes de MALT gastriques, pour lesquels on n’envisage une radiothérapie qu’en cas de non-éradication d’Helicobacter pylori ou de maladie résiduelle à distance d’une éradication réussie d’Helicobacter pylori. Dans les lymphomes NK/T centro-faciaux, la radiothérapie est la pierre angulaire du traitement et doit être débutée dès
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que possible. Une chimiothérapie est le plus souvent associé à l’irradiation de la sphère ORL mais selon les centres, soit de façon concomitante à la radiothérapie, soit de manière séquentielle au décours de cette dernière. Dans les formes localisées de lymphomes cutanés (B ou T), un traitement par radiothérapie exclusive centrée sur la zone cutané atteinte, reste le standard thérapeutique.
4.
Modalités de la radiothérapie pour les lymphomes malins non hodgkiniens ganglionnaires [17-20,23,26,27,31,32,34,35]
4.1. Position du patient pendant la simulation et en cours de traitement Le patient est positionné en décubitus dorsal strict sur la table de traitement et la position des bras dépend de la localisation du ou des volume(s) à traiter : en cas d’irradiation sus-diaphragmatique, les bras sont placés en abduction complète (haut dessus de la tête) ou en abduction incomplète (avant-bras fléchis et mains croisées sur l’abdomen à hauteur de l’ombilic), tandis qu’en cas d’irradiation sous-diaphragmatique, les bras sont placés le long du corps. Les volumes à traiter sont irradiés par deux faisceaux de photons opposés, antéro-postérieurs, délivrés tous les deux le même jour sans changement de position du patient. Le traitement des creux inguinaux constitue une exception car en effet pour ce faire, on utilise un faisceau direct antérieur d’électrons ou un mixage électrons-photons.
4.2. Définition des volumes à traiter Au fur et à mesure du temps, la place et les modalités de la radiothérapie dans la prise en charge du lymphome ont évolué. Historiquement, les premiers cas de lymphome malin non hodgkinien guéris ont été obtenus par radiothérapie exclusive, en réalisant des irradiations lymphoïdes (sub)totales. Actuellement, après de multiples essais qui ont fait évoluer les concepts, le type de radiothérapie qui fait référence aujourd’hui est une irradiation limitée aux aires ganglionnaires initialement envahies (« Involved Field Radiotherapy » ou IFRT). Dans le cadre de l’IFRT, il n’existe pas de définition univoque des volumes à traiter. On distingue dix aires ganglionnaires indivisibles (mais dont les limites précises ne sont pas consensuellement définies) : les hémi-cous droit et gauche (qui comprennent chacun le creux sus-claviculaire homolatéral), les creux axillaires droit et gauche, le médiastin, la barre lombo-aortique, les aires pelviennes droite et gauche, les creux inguinaux droit et gauche. Lorsqu’un ganglion est pathologique au niveau de l’une de ces aires ganglionnaires au moment du bilan d’extension initial, le principe de l’IFRT consiste à réaliser une irradiation de toute l’aire ganglionnaire à laquelle appartient ce ganglion pathologique. Il s’agit donc d’une irradiation régionale, de type « classique » en deux dimensions, avec une définition des volumes à traiter qui se basent sur des repères osseux, et qui ne répond pas aux critères d’une irradiation conformationnelle.
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Comme nous l’avons déjà dit, il n’existe pas de définition consensuelle précise des volumes à traiter, néanmoins on peut retenir les principes suivants : — toute adénopathie cervicale et/ou du creux sus-claviculaire doit conduire à l’irradiation de l’hémi-cou dans sa globalité. En cas d’atteinte sus-claviculaire isolée, il faut discuter l’irradiation associée du creux axillaire homolatéral. (annexe définition des champs d’irradiation Fig. 1) ; — toute adénopathie axillaire doit conduire à l’irradiation de l’aisselle dans sa globalité ainsi que du creux sus-claviculaire homolatéral. (annexe définition des champs d’irradiation Fig. 2) ; — toute adénopathie médiatino-hilaire doit conduire à l’irradiation du médiastin dans sa globalité ainsi que de la partie médiane des deux creux sus-claviculaire. (annexe définition des champs d’irradiation Fig. 3) ; — en cas d’atteinte médiastinale et sus-claviculaire (même unilatérale), l’irradiation doit couvrir le médiastin ainsi que les deux hémi-cous (mais de manière réduite, jusqu’à hauteur de C2-C3). (annexe définition des champs d’irradiation Fig. 3) ; — en cas d’atteinte médiastinale, sus-claviculaire et cervicale, l’irradiation doit correspondre à un mantelet complet couvrant le médiastin, les deux hémi-cous ainsi que les deux creux axillaires. (annexe définition des champs d’irradiation Fig. 4) ; — toute adénopathie lombo-aortique haute (au-dessus de l’espace L3-L4) et/ou du hile hépato-splénique et/ou de la rate, doit conduire à l’irradiation de la barre lombo-aortique. La rate n’est incluse dans la barre lombo-aortique et donc irradiée, que si elle est objectivement atteinte. (annexe définition des champs d’irradiation Fig. 5) ; — toute adénopathie lombo-aortique basse (au-dessous de L3), doit conduire à une irradiation en Y inversé comprenant la barre lombo-aortique ainsi que les aires pelviennes droite et gauche. Les creux inguinaux ne sont irradiés, dans le cadre d’une irradiation en Y inversé complète, que si des ganglions inguinaux sont objectivement atteints. (annexe définition des champs d’irradiation Figs. 6 et 8) ; — toute adénopathie pelvienne (autour des vaisseaux iliaques) doit conduire à une irradiation pelvienne homolatérale associée à une irradiation médiane lombo-aortique basse. Les creux inguinaux ne sont irradiés, dans le cadre d’une irradiation pelvi-inguinale complète, que si des ganglions inguinaux sont objectivement atteints. (annexe définition des champs d’irradiation Fig. 7).
— limite externe : ligne verticale passant à l’union des deux-tiers internes et du tiers externe de la clavicule ; — limite interne : elle dépend de l’atteinte ganglionnaire : • en l’absence d’adénopathie cervicale médiane et/ou susclaviculaire, la limite interne du champ d’irradiation est une ligne verticale passant par le bord homolatéral du rachis cervical ; • en cas d’adénopathie cervicale proche de la ligne médiane et/ou d’adénopathie sus-claviculaire, la limite interne du faisceau passe par l’extrémité des apophyses transverses controlatérales pour englober la totalité des corps vertébraux du rachis cervical.
4.2.2. Limites de l’aire axillo-sus claviculaire Les limites de l’aire axillo-sus claviculaire sont (annexe définition des champs d’irradiation Fig. 2) : — limite supérieure : ligne horizontale passant par C5-C6, au niveau du bord inférieur du cartilage thyroïde. À noter qu’en cas d’atteinte sus-claviculaire associée, la limite supérieure du champ doit être remontée jusqu’en C2-C3, avec néanmoins une protection du rachis cervical haut et du larynx par une brique médiane qui descend jusqu’en C5-C6 ; — limites inférieures : • en externe : ligne horizontale passant par la pointe de l’omoplate, au niveau de l’arc moyen de la sixième côte ; • en interne : 1 à 2 cm sous bord inférieur de la clavicule ; — limite externe : ligne passant en haut par l’articulation acromio-claviculaire puis qui longe ensuite vers le bas le bord médial de l’humérus. Cette limite externe doit donc protéger la tête humérale ; — limite interne : • au niveau du thorax : ligne convexe en dehors qui suit la paroi thoracique, 1 cm en dedans du grill costal ; • au niveau cervical : elle dépend de l’atteinte ganglionnaire : • en l’absence d’adénopathie sus-claviculaire, la limite interne cervicale du champ d’irradiation est une ligne verticale passant par le bord homolatéral du rachis. • en cas d’adénopathie sus-claviculaire, la limite interne du faisceau d’irradiation passe par l’extrémité des apophyses transverses controlatérales pour englober la totalité des corps vertébraux du rachis. Néanmoins, il convient dans ce cas de protéger le rachis cervical haut et le larynx par une brique médiane qui descend jusqu’en C5-C6.
4.2.1. Limites d’un hémi-cou 4.2.3. Limites de l’aire médiastino-sus-claviculaire Les limites d’un l’hémi-cou sont (annexe définition des champs d’irradiation Fig. 1) : — limite supérieure : ligne passant un à 2 cm au dessus de l’extrémité inférieur de l’apophyse mastoïde (pour épargner le conduit auditif externe), à la moitié de la branche montante de la mandibule, et par la pointe du menton. À noter qu’en cas d’atteinte sus-claviculaire isolée, il est possible d’abaisser le limite supérieure du champ d’irradiation en regard de C2-C3 ou au niveau de l’os hyoïde, afin d’épargner les glandes parotides ; — limite inférieure : ligne horizontale passant 2 cm sous le pied de l’extrémité interne de la clavicule ;
Les limites de l’aire médiastino-sus-claviculaire sont (annexe définition des champs d’irradiation Fig. 3) : — limite supérieure : ligne horizontale passant par C5-C6, au niveau du bord inférieur du cartilage thyroïde. A noter qu’en cas d’atteinte sus-claviculaire associée, la limite supérieure du faisceau doit être remontée jusqu’en C2-C3 avec néanmoins une protection du rachis cervical haut et du larynx par une brique médiane qui descend jusqu’en C5-C6 ; — limite inférieure : • sur les côtés : 1 à 2 cm sous le bord inférieur de la clavicule ;
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• au centre : classiquement au niveau de l’interligne T10T11. La tendance actuelle étant d’essayer de protéger au maximum le cœur et ses annexes, on peut recommander 2 à 3 cm sous le niveau le plus bas de l’atteinte ganglionnaire initiale ou 5 cm sous le résidu post-chimiothérapie. — limites latérales : • au niveau du médiastin : 1 à 2 cm en dehors de la silhouette médiastino-hilaire après chimiothérapie ; • en haut : ligne verticale passant à l’union des deux-tiers internes et du tiers externe de la clavicule.
4.2.4. Limites d’une barre lombo-aortique Les limites d’une barre lombo-aortique sont (annexe définition des champs d’irradiation Fig. 5) : — limite supérieure : interligne T10-T11 ; — limite inférieure : interligne L4-L5 ou L5-S1, selon les auteurs ; — limites latérales : classiquement un à deux cm au delà des apophyses transverses de part et d’autre du rachis, mais en tenant compte d’éventuels résidus post-chimiothérapie.
4.2.5. Limites du Y inversé Les limites du Y inversé (annexe définition des champs d’irradiation Fig. 6) : — limite supérieure : interligne T10-T11 ; — limite inférieure : ligne oblique en haut et en dehors partant, de part et d’autre du cache centro-pelvien, depuis le bord interne du trou obturateur jusqu’à un point situé 1 à 2 cm en haut et en dehors du toit du cotyle. À noter que le cache centropelvien remonte lui jusqu’à une ligne horizontale passant par l’interligne S3-S4 ; — limites latérales : ligne verticale passant un à deux cm au delà des apophyses transverses de part et d’autre du rachis (en tenant compte d’éventuels résidus après la chimiotérapie) jusqu’à hauteur de L4, puis selon une ligne oblique en bas et en dehors vers un point situé 1 à 2 cm en haut et en dehors du toit du cotyle.
4.2.6. Limites d’une irradiation pelvienne unilatérale Les limites d’une irradiation pelvienne unilatérale (annexe définition des champs d’irradiation Fig. 7) : — limite supérieure : interligne L3-L4 ; — limite inférieure : ligne oblique en haut et en dehors partant, de part et d’autre du cache centro-pelvien, depuis le bord interne du trou obturateur jusqu’à un point situé un à deux cm en haut et en dehors du toit du cotyle ; — limite latérale : ligne verticale passant 1 à 2 cm au delà des apophyses transverses de part et d’autre de L4, puis à partir de l’interligne L4-L5 selon une ligne oblique en bas et en dehors vers un point situé 1 à 2 cm en haut et en dehors du toit du cotyle ; — limite « médiale » : verticale passant 1 à 2 cm au delà des apophyses transverses de part et d’autre du rachis, puis à partir de l’articulation sacro-iliaque selon une ligne oblique en bas et en dehors vers le bord interne du trou obturateur.
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4.2.7. Limites d’une irradiation pelvienne complète Les limites d’une irradiation pelvienne complète (annexe définition des champs d’irradiation Fig. 7) : — limite supérieure : interligne L3-L4 ; — limite inférieure : ligne oblique en haut et en dehors partant, de part et d’autre du cache centro-pelvien, depuis le bord interne du trou obturateur jusqu’à un point situé 1 à 2 cm en haut et en dehors du toit du cotyle. À noter que le cache centropelvien remonte lui jusqu’à une ligne horizontale passant par l’interligne S3-S4 ; — limites latérales : ligne verticale passant 1 à 2 cm au delà des apophyses transverses de part et d’autre du rachis jusqu’à hauteur de l’interligne L4-L5, puis selon une ligne oblique en bas et en dehors vers un point situé 1 à 2 cm en haut et en dehors du toit du cotyle. Les creux inguinaux ne sont irradiés dans le cadre d’une irradiation en Y inversée ou pelvienne, qu’en cas d’atteinte initiale objective. Dans ce cas, le creux inguinal initialement atteint est traité par un faisceau direct antérieur supplémentaire d’électrons (10 à 13 MeV), selon un champ d’irradiation dont la limite supérieur est jointive à ± 5 mm de la limite inférieur de l’irradiation pelvienne, et dont la limite inférieur descend jusqu’à au moins 5 cm sous le bord inférieur du petit trochanter (afin de couvrir complètement le triangle de Scarpa). (annexe définition des champs d’irradiation Figs. 7et 8).
4.3. Dose à délivrer, fractionnement, et données dosimétriques Pour les lymphomes B diffus à grandes cellules, classiquement, la dose à délivrer recommandée après une chimiothérapie d’induction dépend du nombre de cycles de chimiothérapie réalisés : 40 Gy en fractionnement classique après trois ou quatre cycles de R-CHOP (stade localisé, aaIPI 0 sans masse bulky), 30 Gy en fractionnement classique après six à huit cycles de R-CHOP (lymphome localisé, aaIPI 1 et/ou masse bulky). Pour les lymphomes folliculaires, classiquement la dose à délivrer recommandée, dans le cadre de la prise en charge par radiothérapie exclusive d’un lymphome de stade localisé grade < 3 de faible risque, est de 30 Gy en fractionnement classique (avec ou sans boost de 5 à 10 Gy en cas de masse bulky). Pour les lymphomes indolents disséminés, se présentant avec une masse ganglionnaire bulky symptomatique, il est possible de réaliser, à titre décompressif et palliatif, une irradiation localisée à faible dose (4 Gy en une ou deux fractions délivrées à 48 h d’intervalle), qui permet dans 80 à 90 % des cas d’améliorer les symptômes. Comme nous l’avons dit plus haut, les volumes à traiter sont irradiés par deux faisceaux de photons opposés, antéro-postérieurs, délivrés tous les deux le même jour sans changement de position du patient. L’énergie des photons utilisés dépend de la localisation du ou des volume(s) à traiter : photons de 4 à 6 MV pour les régions anatomiques superficielles (territoires cervicaux et axillaires) et de plus de 10 MV pour des régions anatomiques profondes (médiastin, territoires lombo-aortiques et pelviens). La pondération pour la contribution à la dose totale entre champ antérieur et le faisceau postérieur est variable, elle est fonction elle aussi de la localisation et de la profondeur des
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masses ganglionnaires initiales. Pour la validation du plan de traitement, la dose à délivrer est calculée à mi-épaisseur dans l’axe des faisceaux.
5.
Modalités de la radiothérapie pour les lymphomes malin non hodgkiniens extra-ganglionnaires [18,23,31,32,34]
photons tangentiels et opposés, suivi par un boost dans la zone de l’atteinte initiale ; — l’irradiation prophylactique cérébro-ménigée est réalisée par deux faisceaux de photons latéraux et opposés comme toute irradiation de l’encéphale in toto, mais il convient de faire attention de bien couvrir le canal rachidien au niveau du rachis cervical haut, jusqu’à hauteur de l’interligne C2-C3.
5.3. Dose à délivrer et fractionnement 5.1. Position du patient pendant la simulation et en cours de traitement Le patient est positionné en décubitus dorsal strict sur la table de traitement et la position des bras dépend de la localisation du ou des volume (s) à traiter. En cas d’irradiation de la sphère ORL ou de l’encéphale, il convient d’immobiliser la tête du patient par un masque, au moins trois points, fixés à la table de traitement.
5.2. Définition des volumes à traiter Dans le cadre de la prise en charge des lymphomes malins non hodgkiniens extra-ganglionnaires, la radiothérapie est centrée sur l’organe atteint ainsi que sur d’éventuels ganglions associés objectivement pathologiques, mais sans irradiation prophylactique ganglionnaire (au niveau des ganglions non pathologiques). Dans ce cadre, et afin de limiter au maximum l’irradiation des tissus sains, il convient de réaliser une irradiation conformationnelle basée sur la définition en trois dimensions de volumes cibles (volume tumoral macroscopique, volume cible anatomoclinique, volume cible prévisionnel). La simulation est dans l’idéal de type virtuel, réalisée à partir d’une scanographie effectuée sur le patient en position de traitement. Il convient par ailleurs de récupérer l’ensemble de l’imagerie dont a bénéficié le patient (TEP, IRM…) afin de pouvoir définir au mieux les volumes cibles. Le volume tumoral macroscopique (GTV) est défini sur les images scanographiques de simulation en s’aidant éventuellement de la TEP ou de l’IRM recalée. Le volume cible anatomoclinique (CTV) est obtenu par expansion géométrique du volume tumoral macroscopique selon une marge de 5 à 10 mm, mais en effectuant une correction du volume en excluant les tissus sains environnants non susceptibles d’être atteints (ex : l’os, les vaisseaux sanguins…). Le volume cible prévisionnel (PTV) est obtenu en réalisant une expansion géométrique de 10 mm du volume cible anatomoclinique pour tenir compte de la mobilité interne des organes ainsi que des incertitudes de repositionnement. La balistique du traitement est établie pour respecter la prescription de dose au volume cible (≥ 95 % du volume cible prévisionnel doivent recevoir ≥ 95 % de la dose prescrite), tout en respectant les contraintes de doses sur les organes à risque. Pour les irradiations médiastino-thoraciques ou abdominales hautes, il est préconisé de réaliser une irradiation asservie à la respiration, dans la mesure où cette technique est disponible. À noter, l’existence de deux particularités : — l’irradiation du sein dans le cadre de la prise en charge d’un lymphome malin non hodgkinien, relève du même principe que dans le cadre de la prise en charge d’un carcinome, à savoir l’irradiation du sein dans sa globalité par deux faisceaux de
Dans le cadre de la prise en charge des lymphomes malins non hodgkiniens extra-ganglionnaires, la dose à délivrer recommandée est de 30 à 35 Gy en fractionnement classique. Pour l’irradiation prophylactique cérébro-ménigée, la dose à délivrer recommandée est de 18 Gy en fractionnement classique.
6.
Organes à risque et contraintes de dose (consensus d’expert selon le Guide des procédures en radiothérapie) [14]
6.1. Moelle épinière La Dmax (dose maximale) doit être inférieure à 45 Gy, c’està-dire que moins de 2 % de la moelle épinière doivent recevoir une dose supérieure à 45 Gy.
6.2. Glandes parotides La dose moyenne doit être inférieure à 30 Gy et le V26 (c’està-dire le volume qui reçoit plus de 26 Gy) doit être inférieur à 50 %, sur chacune des deux parotides.
6.3. Thyroïde Lorsque la thyroïde est irradiée dans sa totalité, la Dmax doit être inférieure à 40 Gy, c’est-à-dire que moins de 2 % de la thyroïde doivent recevoir une dose supérieure à 40 Gy.
6.4. Poumons Le V30 (c’est-à-dire le volume qui reçoit plus de 30 Gy) doit être inférieur à 20 %. Le V20 (c’est-à-dire le volume qui reçoit plus de 20 Gy) doit être inférieur à 35 %.
6.5. Cœur Lorsque le cœur est irradié dans sa totalité, la Dmax doit être inférieure à 30 Gy, c’est-à-dire que moins de 2 % du cœur doivent recevoir une dose supérieure à 30 Gy. Lorsque le cœur n’est irradié que partiellement, il faut essayer de protéger au maximum le ventricule gauche et le V40 (c’est-à-dire le volume qui reçoit plus de 40 Gy) doit être le plus faible possible. A noter qu’en cas d’atteinte initiale limitée au médiastin supérieur, il est possible lors de l’irradiation médiastino-sus-claviculaire de protéger le cœur (et notamment le ventricule gauche) par un cache après une dose délivrée de 20 Gy, sans compromettre le contrôle de la maladie.
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6.6. Reins En l’absence d’insuffisance rénale, une dose maximale de 20 Gy peut-être délivrée dans un volume cumulé équivalent à un rein entier.
6.7. Ovaires La Dmax doit être inférieure à 5 Gy, c’est-à-dire que moins de 2 % d’un ovaire doit recevoir une dose supérieure à 5 Gy. Au besoin, il est possible d’organiser une transposition chirurgicale des ovaires avant la réalisation d’une irradiation pelvienne.
6.8. Têtes humérales Lors d’une irradiation axillo-sus-claviculaire ou d’un mantelet complet, les têtes humérales doivent être protégées par cache.
7.
Toxicité aiguë en cours de traitement
Au cours d’une irradiation de la sphère ORL, la toxicité en cours de traitement est essentiellement marquée par la survenue d’une épithéliite, d’une mucite, ainsi que d’une modification de la salive (tant dans sa quantité, que dans de sa qualité). Au cours d’une irradiation cervicale ou axillo-sus-claviculaire, la toxicité en cours de traitement est essentiellement marquée par la survenue d’une épithéliite, mais qui reste la plupart du temps modérée compte tenu de la dose délivrée. Au cours d’une irradiation cervicale ou médiastino-sus-claviculaire, la toxicité en cours de traitement est essentiellement marquée par la survenue d’une œsophagite, mais qui reste la plupart du temps modérée compte tenu de la dose délivrée. Au cours d’une irradiation sous-diaphragmatique, la toxicité en cours de traitement est essentiellement marquée par la survenue d’un syndrome gastro-intestinal avec des nausées avec ou sans vomissements, des coliques intestinales ainsi que des diarrhées. Néanmoins, là encore, compte tenu des doses délivrées, ces réactions restent la plupart du temps modérées et parfaitement contrôlables par des traitements symptomatiques simples et quelques conseils diététiques. À noter que la mise en place systématique d’un cache centro-pelvien permet de prévenir la survenue d’une cystite radique.
8.
Toxicité semi-retardée
Au décours d’une irradiation médiastino-thoracique en mantelet, deux types de manifestations semi-retardées peuvent survenir.
8.1. Pneumopathies radio-induites Les symptômes apparaissent en général six à douze semaines après la fin de l’irradiation. Ils restent généralement modérés (à type de toux, dyspnée d’effort) et sont spontanément régressifs dans la plupart des situations en quelques semaines. Dans les formes les plus graves, l’introduction précoce d’une corticothérapie peut atténuer les symptômes mais son efficacité sur
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d’éventuelles séquelles pulmonaires tardives (à type de fibrose rétractile) reste discutée. La probabilité de survenue de ces pneumopathies semi-retardées est d’autant plus importante que l’irradiation médiastinothoracique entre dans le cadre d’un traitement comprenant de la chimiothérapie (et notamment la bléomycine). Par ailleurs, ce type de complication est également favorisé par la poursuite d’une intoxication tabagique en cours d’irradiation.
8.2. Myélite transitoire radio-induite – syndrome de Lhermitte Apparition chez 5 à 20 % des patients, dans un délai de un à six mois après la fin de l’irradiation, de douleurs neuropathiques para-rachidiennes lors de la flexion du cou, à type de décharges électriques descendantes et irradiantes jusqu’aux extrémités. Ces symptômes sont attribués à une démyélinisation transitoire au niveau de la moelle épinière, liée à la mort radio-induite d’oligodendrocytes. L’évolution spontanée se fait vers une régression progressive des symptômes sur plusieurs mois, et aucun traitement spécifique n’est recommandé. Cette myélite transitoire semi-retardée semble indépendante de la dose reçue par la moelle épinière (des cas ont été décrits pour des doses inférieures à 35 Gy) et ne préjuge pas de la survenue de séquelles neurologiques tardives (tant que la dose reçue par la moelle reste strictement inférieure à 50 Gy).
9.
Toxicité tardive
Il est important de souligner en préambule, que les données présentées ci-dessous sont tirées de l’analyse de cohortes de patients traités pour des lymphomes de Hodgkin, et qui sont transposées aux patients traités pour des lymphomes malins non hodgkiniens compte tenu de techniques et de doses d’irradiation relativement similaires [36]. Par ailleurs, ces données sont issues du suivi de patients traités il y a plus de dix ans, afin d’avoir un recul suffisant pour pouvoir étudier les complications tardives. Les études épidémiologiques et statistiques qui ont été réalisées avec ces données comportaient donc un nombre non négligeable de patients ayant reçu des irradiations extensives et à des doses supérieures aux doses actuellement préconisées. Par ailleurs, la plupart des études réalisées sont discutables sur le plan méthodologique (problème des populations choisies comme population « témoin », absence d’analyse stratifiée en fonction de facteurs de risque éventuellement confondants…) et sont difficilement comparables les unes aux autres car elles n’utilisent pas les mêmes indicateurs. Ceci étant dit, les données que l’on possède révèlent que les deux principales causes de mortalité dans le suivi dans patients traités (hormis la progression et/ou récidive du lymphome malin non hodgkinien) sont alors la survenue de second(s) cancer(s) et de complications cardio-vasculaires, qui sont des complications potentielles des traitements réalisés.
9.1. Survenue de seconds cancers Le suivi à long terme des patients traités pour un lymphome de Hodgkin a pu mettre en évidence une augmentation de
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l’incidence des cancers par rapport à la population générale, qui se traduit au final par un excès de mortalité par cancer. Vingt cinq ans après la fin du traitement pour le lymphome de hodgkin, l’incidence cumulée de second cancer atteint entre 10 et 30 % selon les séries. Presque tous les types de cancer sont augmentés en incidence (sauf notamment les cancers de la prostate) mais par ordre de fréquence, les second cancers les plus fréquents chez les patients traités pour un lymphome de hodgkin sont : les cancers bronchopulmonaires, les cancers du sein (chez les femmes traitées), les leucémies et lymphomes non-hodgkiniens. Bien évidemment, de multiples facteurs liés au traitement lui-même concourent à la survenue d’un second cancer dont : le type et la dose de chimiothérapie associée à la radiothérapie, la taille des faisceaux d’irradiation, la localisation de l’irradiation, la dose d’irradiation… Mais, par ailleurs, il a pu être montré que certaines habitudes de vie chez les patients traités (tabagisme, exposition solaire, régime alimentaire…) pouvaient accroitre encore plus le risque, et ce de manière plus importante que pour la population générale.
9.2. Problèmes cardio-vasculaires Après une irradiation médiastino-thoracique, plusieurs types de complications tardives radio-induites ont été décrites : — insuffisance cardiaque par cardiomyopathie ; — infarctus du myocarde et/ou insuffisance cardiaque par coronaropathie ; — péricardite constrictive ; — valvulopathies ; — troubles de conduction et Troubles du rythme cardiaque. Par ailleurs, après irradiation cervicale, des cas de sténose carotidienne ont été décrits, certains s’étant compliqué d’accidents vasculaires cérébraux. Globalement, toutes ces complications entrainent un excès de morbidité et mortalité cardiovasculaires chez les patients traités pour un lymphome de hodgkin. On estime que 25 ans après le traitement du lymphome de hodgkin, le taux de risque cumulé de décès par événement cardio-vasculaire atteint 5 à 20 % des patients. De la même manière que précédemment, de multiples facteurs liés au traitement lui-même concourent à la survenue de ces complications cardio-vasculaires (le type et la dose de chimiothérapie associée à la radiothérapie, le volume irradié, la localisation de l’irradiation, la dose d’irradiation…) mais il a pu être démontré que les habitudes de vie du patient (tabagisme, exercice physique, habitudes alimentaires…) ainsi que les classiques facteurs de risque cardio-vasculaires jouent un rôle important, probablement plus encore que pour la population générale.
9.3. Dysfonction thyroïdienne Selon les séries 20 à 80 % des patients présentent une dysfonction de la glande thyroïde après irradiation cervico-susclaviculaire, essentiellement sur le versant de l’hypothyroïdie. À noter, que ce type de trouble endocrinien est important à dépister puisqu’une hypothyroïdie sans opothérapie substitutive
peut modifiée le profil lipidique sanguin du patient et à terme accroître le risque de complications cardio-vasculaires.
9.4. Infertilité Elle résulte de l’effet combiné de la chimiothérapie et d’une éventuelle radiothérapie pelvi-inguinale. Pour les patients masculins, il convient de proposer une cryopréservation de sperme avant de débuter tout traitement. Pour les patientes pour qui il est envisagé de réaliser une radiothérapie pelvienne, il est possible de proposer une transposition chirurgicale des ovaires avant sa réalisation.
9.5. Xérostomie et détérioration bucco-dentaire En cas d’irradiation cervico-faciale, il existe un risque de xérostomie séquellaire avec les risques de détérioration de l’état bucco-dentaire qui en découlent. Néanmoins, compte tenu du niveau de dose prescrite et des possibilités apportées par les nouvelles techniques de radiothérapie, il est assez aisé de ramener les doses moyenne et médiane reçues par les parotides bien en deçà de 30 Gy (sauf bien évidemment pour les lymphomes malins non hodgkiniens des glandes parotides elles-mêmes), et ainsi d’éviter tout risque de xérostomie importante.
10. Conclusion La place de la radiothérapie dans la prise en charge des lymphomes malins non hodgkiniens est de plus en plus restreinte compte-tenu d’une part qu’il s’agit le plus souvent de maladies d’emblée disséminées (à l’exception des lymphomes extra-ganglionnaires), et d’autres part des excellents résultats qu’apportent l’association de chimiothérapie et de rituximab seule. Néanmoins la radiothérapie conserve quelques bonnes indications dans le cadre de la prise en charge des lymphomes malins non hodgkiniens localisés. Afin de limiter au maximum la morbidité et la mortalité liées aux traitements, plusieurs nouvelles approches thérapeutiques sont actuellement en cours d’évaluation : — diminution de la dose délivrée ; — diminution des volumes traités avec le concept de la radiothérapie type INRT (« Involved Nodal Radiotherapy ») centrée non plus sur l’aire ganglionnaire initialement envahie dans son ensemble, mais sur les seules masses ganglionnaires initialement pathologiques. Il s’agit donc d’une irradiation conformationnelle qui nécessite l’acquisition d’une imagerie tridimensionnelle, et le recalage entre les images avant et après chimiothérapie d’induction afin de définir au mieux le volume à traiter ainsi que la balistique la plus adéquate pour ce faire (article sur le lymphome de Hodgkin dans le même numéro de Cancer/Radiothérapie). Ce concept d’irradiation sélective a été développé dans un premier temps dans le cadre de la prise en charge du lymphome de hodgkin, néanmoins si les essais thérapeutiques à venir montrent que ce type d’irradiation est aussi efficace et moins toxique que l’IFRT (« Involved Field Radiotherapy »), le concept de l’INRT sera probablement transposé à la prise en charge des lymphomes malins non hodgkiniens ;
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— diminution du volume de tissu sain irradié par l’utilisation des nouvelles techniques de radiothérapie : radiothérapie avec modulation d’intensité (RCMI), radiothérapie asservie à la respiration (Gated-RT), radiothérapie guidée par l’image (IGRT)… ; — personnalisation de la stratégie thérapeutique, avec un traitement adapté en fonction de la réponse à la chimiothérapie d’induction. En effet plusieurs essais thérapeutiques en cours, évaluent l’efficacité de stratégies thérapeutiques modulées en fonction d’une TEP réalisée pendant ou au décours de la chimiothérapie d’induction. Par ailleurs, indépendamment de l’optimisation de la radiothérapie, il convient de : — donner des conseils hygiéno-diététiques aux patients : insister sur l’arrêt du tabac, la pratique régulière d’exercices physiques, une alimentation limitée en graisses saturées et en sucres… ; — prendre en charge efficacement les différents facteurs de risque cardio-vasculaire du patient ; — surveiller étroitement et de manière prolongée dans le temps les patients vis-à-vis de leur risque accru de second cancer et de morbidité et mortalité cardiovasculaires.
11. Cas clinique
11.1. Cas clinique concernant un lymphome B diffus à grandes cellules Une patiente de 58 ans, ayant pour principal antécédent une greffe rénale il y a vingt ans pour une insuffisance rénale d’origine mal déterminée et depuis sous traitement immunosuppresseur, a consulté son médecin traitant devant l’apparition d’une tuméfaction cervicale gauche depuis quelques semaines. À l’interrogatoire la patiente allait bien, elle ne souffrait d’aucune altération de l’état général et ne manifestait aucune plainte fonctionnelle particulière hormis la présence de cette tuméfaction. Sur le plan clinique, l’examen ne retrouvait qu’une volumineuse adénomégalie cervicale gauche, isolée, sans autre adénopathie ni syndrome tumoral. Une scanographie cervicofaciale a été réalisée et ne retrouvait qu’une adénopathie isolée de 3 cm au niveau de l’aire III cervicale gauche. La patiente a été adressée en ORL pour réaliser un bilan complet de la sphère cervico-faciale. L’examen de la cavité buccale, de l’oropharynx et de l’ensemble de la sphère ORL ne retrouvait aucune lésion tumorale ni foyer infectieux. Devant cette adénopathie cervicale isolée sans étiologie retrouvée, il a été décidé la réalisation d’une biopsie-exérèse ganglionnaire par voie chirurgicale. L’examen anatomopathologique de l’adénopathie réséquée a révélé qu’elle était le siège d’un lymphome de haut grade sans précision supplémentaire. Le dossier a été discuté en réunion de concertation pluridisciplinaire et il a été décidé une suspension temporaire du traitement immunosuppresseur et de refaire le point avec un bilan complet dans trois mois. Deux mois et demi plus tard, la patiente a consulté par anticipation devant la ré-apparition d’une volumineuse masse ganglionnaire cervicale gauche évoluant rapidement depuis une semaine, associée à plusieurs autres adénopathies cervicales homolatérales. À l’interrogatoire, la patiente allait toujours
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bien et il n’y avait aucune altération de l’état général. Sur le plan clinique, l’examen retrouvait une poly-adénopathie cervicale gauche comprenant notamment une volumineuse masse mesurant plus de 5 cm, sans autre atteinte ganglionnaire périphérique ni syndrome tumoral. Une scanographie du corps entier a retrouvé une volumineuse adénopathie de 9 cm au niveau de l’aire II gauche associée à de multiples adénopathies cervicales homolatérales de 1 à 1,5 cm, mais sans autre atteinte ganglionnaire (sus comme sous-diaphragmatique) et/ou extraganglionnaire. Le bilan d’extension a été complété par une TEP, qui a retrouvé une intense hyperfixation au niveau de la volumineuse adénopathie de l’aire II, associée à des hyperfixations plus modérées des adénopathies cervicales homolatérales, mais sans hyperfixation inattendue, tant sus- que sous-diaphragmatique. Compte tenu d’une atteinte ganglionnaire isolée au niveau d’un hémi-cou, des biopsies écho-guidées on été réalisées et l’examen anatomopathologique des fragments biopsiques a révélé qu’il s’agissait d’un lymphome malin non hodgkinien de type B diffus à grandes cellules. Sur le plan biologique, aucune anomalie significative n’a été mise en évidence, notamment aucun syndrome inflammatoire patent. Une biopise ostéomédullaire a été réalisée et ne retrouvait aucun envahissement médullaire. Au final, il s’agissait donc d’un lymphome malin non hodgkinien de type DLBCL (Diffuse large B-cell lymphoma) localisé, avec un score pronostique ajusté à l’âge (aaIPI) de 0 et une présentation initiale comprenant une masse ganglionnaire « bulky ». Dans cette situation, l’un des standards thérapeutiques reste une induction par six cycles de chimiothérapie de type R-CHOP21 suivis d’une consolidation par une irradiation de clôture de type IFRT (Involved Field Radiotherapy). Après deux cures de R-CHOP21, la réponse à la chimiothérapie a été évaluée précocement par une TEP, qui a montré une réponse partielle en volume tant au niveau de la masse ganglionnaire initialement bulky que des adénopathies homolatérales (qui sont devenues infra-centimétriques), associée à une très bonne réponse métabolique puisque tous les foyers initiaux d’hyperfixation ont disparu à l’exception d’un seul qui persiste, localisé au niveau de la masse initialement bulky, mais avec une SUV (Standard Uptake Value) en nette diminution. Compte tenu de cette bonne réponse précoce à la chimiothérapie, la décision est prise en réunion de concertation pluridisciplinaire de poursuivre le programme thérapeutique d’induction standard par deux cycles supplémentaires de R-CHOP21 et de réévaluer la situation par une nouvelle TEP. Cette dernière montrait une poursuite de la réponse à la chimiothérapie sous la forme d’une réponse en volume ≥ 80 % au niveau de la masse initialement bulky avec une disparition complète des autres adénopathies, associé à une très bonne réponse partielle métabolique puisqu’il ne persistait plus qu’une faible activité résiduelle au niveau de la masse initialement bulky. Après nouvelle discussion du dossier en réunion de concertation pluridiciplinaire, compte tenu d’une masse ganglionnaire initialement bulky, il a été décidé de réaliser de poursuivre l’induction par deux cures supplémentaires de type R-CHOP21 pour arriver à un total de six cures puis de réaliser une consolidation par une irradiation de clôture de type IFRT. Compte tenu du fait qu’il persistait une activité hypermétabolique résiduelle au niveau de la masse initialement bulky, il a été décidé que l’irradiation délivrerait
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30 Gy dans l’ensemble de l’hémi-cou gauche, avec un boost de 10 Gy dans le résidu ganglionnaire. Pour la préparation de traitement radiothérapie, la patiente a d’abord été convoquée pour réaliser une scanoghraphie cervicothoracique de centrage, à visée dosimétrique. Cette dernière est réalisée avec injection d’iode et sur une patiente en position de traitement (en décubitus dorsal avec les avant-bras fléchis et les mains croisées posées sur l’abdomen à hauteur de l’ombilic). Une fois les images récupérées, elles sont recalées avec celles de la TEP préthérapeutique afin de définir précisément les volumes cibles. Un volume cible anatomoclinique (CTV) a été délinéé sur les images tépographiques, il englobait l’ensemble de la masse ganglionnaire initialement bulky, et été reportée sur les images scanographiques recalées de centrage. Sur ce volume cible anatomoclinique, il a été appliqué une expansion volumique d’1 cm dans toutes les directions de l’espace afin d’obtenir un volume cible prévisionnel (PTV) (Fig. 8). Par ailleurs, les organes à risque régionaux (dans le cas présent : la moelle épinière, la parotide gauche, la thyroïde, les globes oculaires) sont délinnéés afin de pouvoir ultérieurement évaluer la dose reçue par chacun d’entre eux (Fig. 8). Ensuite, les deux grands champs d’irradiation antéro-postérieurs qui délivreront la première partie du traitement (30 Gy sur l’ensemble de l’hémi-cou gauche) sont définis en s’assurant d’une marge d’au moins 1 cm avec entre leurs limites et le volume cible prévisionnel (Fig. 9), de même que les deux faisceaux antéro-postérieurs de réduction qui délivreront le boost de 10 Gy dans le volume cible prévisionnel lui-même. Puis l’étude dosimétrique permet de préciser, en fonction de la position du volume cible prévisionnel par rapport à la mi-épaisseur du patient, l’énergie (voir le mixage des énergies) des photons utilisés pour chaque champ d’irradiation, ainsi que la pondération de chacun d’entre eux pour la contribution à la dose totale. La validation du dossier technique reposait sur la vérification de la bonne couverture des volumes cibles, à la fois sur les coupes scanographiques (Fig. 10) et sur l’histogramme dose-volume (Fig. 11), l’objectif étant que le volume cible prévisionnel et les aires ganglionnaires le l’hémi-cou gauche recevaient ≥ 95 % de la dose prescrite tout en respectant au mieux les contraintes sur les organes à risque.
11.2. Cas clinique concernant un lymphome folliculaire Un patient de 55 ans, aux lourds antécédents cardiovasculaires (long passé tabagique, artériopathie des membres inférieurs asymptomatique, cardiopathie ischémique traitée par angioplasties puis pontages mais compliquée d’au moins un épisode d’infarctus et d’une insuffisance cardiaque débutante…), a consulté son médecin traitant devant l’apparition d’une tuméfaction axillaire droite depuis quelques semaines en dehors de tout contexte infectieux. À l’interrogatoire le patient allait bien, il n’y avait aucune altération patente de l’état général. Sur le plan fonctionnel, le patient rapportait outre une gêne axillaire, des douleurs d’allure neuropathique du membre supérieur droit témoignant d’une probable compression du plexus brachial. Sur le plan clinique, l’examen retrouvait une volumineuse adénopathie associée à plusieurs ganglions centimétriques du creux axillaire droit, sans autre adénopathie des autres aires ganglionnaires périphériques ni syndrome tumoral. Une échographie du creux axillaire a retrouvé une masse ganglionnaire
principale de 5 cm de grand axe, avec de multiples ganglions satellites centimétriques. Des biopsies écho-guidées de l’adénopathie la plus volumineuse ont été réalisées au décours et l’examen anatomopathologique des fragments biopsiques a révélé qu’elle est le siège d’un lymphome folliculaire typique, avec à l’analyse cytogénétique une translocation t (14;18), de grade 1 à 2 de Berard et Mann. Un bilan biologique complet n’a retrouvé aucune anomalie significative (notamment aucun syndrome inflammatoire patent) ainsi qu’une concentration de lactico-déshydrogénase (LDH) dans le sang dans les limites de la normale. Une biopsie ostéo-médullaire n’a retrouvé aucune infiltration médullaire. La scanographie du corps a retrouvé outre la volumineuse adénopathie axillaire d’environ 5 cm de grand axe, de multiples ganglions satellites centimétriques remontant jusqu’au dans le creux sus-claviculaire homolatéral mais sans atteinte d’autre aire ganglionnaire (sus comme sousdiaphragmatique) ni atteinte extra-ganglionnaire. Compte tenu des antécédents du patient, une échographie cardiaque a été réalisée et a retrouvé une insuffisance cardiaque débutante avec une diminution modérée et asymptomatique sous traitement médical de la FEVG (fraction d’éjection ventriculaire gauche), sans akinésie segmentaire patente. Au final, il s’agissait d’un lymphome malin non hodgkinien de type lymphome folliculaire localisé, de grade < 3, chez un patient de moins de 60 ans en relatif bon état général (indice de performance selon l’OMS de 0) et atteint d’un lymphome appartenant au groupe pronostic FLIPI de faible risque mais aux antécédents cardiovasculaires lourds. Le dossier a été discuté en réunion de concertation pluridisciplinaire et il a été décidé, compte tenu d’une réticence à l’usage des anthracyclines chez ce patient, de réaliser une TEP en vue d’une radiothérapie exclusive. Une TEP réalisée sur le patient en position de traitement a confirmé le caractère strictement localisé du processus lymphomateux au creux axillaire droit (les ganglions centimétriques visualisés au niveau du creux susclaviculaire ne présentant aucun foyer d’hyperfixation). Ainsi une radiothérapie exclusive a été programmée. Elle a été de type IFRT, pour délivrer 30 Gy (en dix fractions de 2 Gy à raison de cinq séances par semaine) dans l’aire axillaire droite et de la racine du creux sus-claviculaire homolatéral. Pour la préparation de la radiothérapie, le patient a d’abord été convoqué pour réaliser une scanographie cervico-thoracique de centrage, à visée dosimétrique, avec injection d’iode et sur un patient en position de traitement (en décubitus dorsal avec les avant-bras fléchis et les mains croisées posées sur l’abdomen à hauteur de l’ombilic). Une fois les images récupérées, elles ont été recalées avec celles de la TEP afin de définir précisément le volume cible. Un volume cible anatomoclinique a été délinéé sur les images tépographiques en englobant l’ensemble les masses ganglionnaires visualisables (qu’elles présentent ou non une activité hypermétabolique), et il a été reporté sur les images scanographiques recalées de centrage. Sur ce volume cible anatomoclinique, il a été appliqué une expansion volumique de 1 cm dans toutes les directions de l’espace afin d’obtenir un volume cible prévisionnel (Fig. 12). Par ailleurs, les organes à risque régionaux (dans le cas présent : la moelle épinière, les poumons, la thyroïde) ont été délinéés afin de pouvoir ultérieurement évaluer la dose reçue par chacun d’entre eux (Fig. 12). Ensuite, les deux faisceaux d’irradiation antéro-postérieurs ont été définis en s’assurant d’une marge d’au moins 1 cm avec entre leurs limites
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et le volume cible prévisionnel (Fig. 13). Puis l’étude dosimétrique a permis de préciser, en fonction de la position du volume cible prévisionnel par rapport à la mi-épaisseur du patient, l’énergie (voir le mixage des énergies) des photons utilisés pour chaque faisceau d’irradiation, ainsi que la pondération de chacun d’entre eux pour la contribution à dose totale. La validation du dossier technique a reposé sur la vérification de la bonne couverture des volumes cibles, à la fois sur les coupes scanographiques (Fig. 14) et sur l’histogramme dose-volume, l’objectif étant que le volume cible prévisionnel reçoive ≥ 95 % de la dose prescrite tout en respectant au mieux les contraintes sur les organes à risque. Deux ans après cette prise en charge initiale par radiothérapie exclusive, le patient a consulté de manière anticipée en raison de l’apparition d’adénopathies disséminées à l’ensemble des aires ganglionnaires périphériques dans un contexte d’altération de l’état général (avec une perte de poids substantielle) et de sueurs nocturnes. La scanographie du corps entier a confirmé une atteinte disséminée de l’ensemble des aires ganglionnaires sus et sous-diaphragmatiques mais avec une atteinte prédominante de l’aire cervicale gauche, les adénopathies les volumineuses étant localisées à ce niveau. Une échographie cervicale gauche a été réalisée et des biopsies écho-guidées ont été réalisées sur l’adénopathie la plus volumineuse visualisée. L’examen anatomopathologique des fragments biopsiques a révélé qu’il s’agissait d’une récidive du lymphome folliculaire, sans argument pour une transformation en un lymphome de haut grade. Le dossier a été rediscuté en réunion de concertation pluridisciplinaire, et pour la prise en charge de cette récidive disséminée avec présence de signes généraux il a été décidé la réalisation d’un traitement systémique mais sans anthracycline compte tenu du terrain d’insuffisance cardiaque. Le patient a reçu au total de 6 cures de CVP-IFN (cyclophosphamide, vincristine, and prednisone, interféron) qui ont permis d’obtenir une récupération de l’état général, une disparition des signes généraux, ainsi qu’une réponse clinique et tomodensitométrique complète. Compte tenu d’une tolérance devenant médiocre des traitements, le dossier a été rediscuté en réunion de concertation pluridisciplinaire et il a été décidé de suspendre les traitements systémiques sous couvert d’une surveillance régulière et rapprochée. Deux après cette première récidive, le patient a consulté par anticipation en raison de la réapparition d’adénopathies disséminées au niveau de l’ensemble des aires ganglionnaires périphériques dans un contexte de nouvelle dégradation de l’état général avec la réapparition de sueurs nocturnes. La scanographie du corps entier a confirmé une nouvelle récidive disséminée avec à nouveau une atteinte ganglionnaire prédominante au niveau de l’aire cervicale gauche. Une échographie cervicale gauche a été réalisée ainsi que des biopsies écho-guidées sur l’adénopathie la plus volumineuse visualisée. L’examen anatomopathologique des fragments biopsiques a révélé qu’il s’agissait d’une récidive du lymphome folliculaire, sans argument pour une transformation en un lymphome de haut grade. Le dossier est rediscuté en réunion de concertation pluridisciplinaire et il a été décidé de rependre un traitement systémique de 2e ligne. Le patient a reçu au total six cures de fludarabine et cyclophosfamide, avec une fois encore une bonne réponse symptomatique avec une récupération de l’état général et une disparition des signes généraux d’évolution, mais une réponse clinique et tomodensitométrique
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incomplète avec la persistance de résidus ganglionnaires supra-centimétriques de l’hémi-cou gauche. Le dossier a été rediscuté en réunion de concertation pluridisciplinaire et il a été décidé de réaliser une radiothérapie « de clôture » permettant de délivrer une dose de 30 Gy en fractionnement classique dans l’ensemble de l’hémi-cou gauche. Pour la préparation du traitement radiothérapique, le patient a d’abord été convoqué pour réaliser une scanographie cervico-thoracique de centrage, à visée dosimétrique qui a été réalisée sans injection d’iode et sur un patient en position de traitement (en décubitus dorsal avec les avant-bras fléchis et les mains croisées posées sur l’abdomen à hauteur de l’ombilic). Une fois les images récupérées, les faisceaux d’irradiation antéro-postérieurs ont été définis selon les repères définis plus haut pour couvrir l’ensemble de l’aire ganglionnaire cervicale gauche (Fig. 15-17). Deux après cette seconde récidive, le patient a consulté à nouveau de manière anticipée, en raison d’une altération profonde de l’état général avec une asthénie invalidante et une anorexie conduisant à une perte de 10 kg en trois mois dans un contexte de nouvelle réapparition d’adénopathies disséminées. Sur le plan fonctionnel, le patient se plaignait, outre de son état général, d’une gêne cervicale avec dysphagie en rapport avec une masse ganglionnaire cervicale droite et d’un lymphœdème du membre inférieur droit en rapport avec une masse ganglionnaire inguinale droite. Une scanographie du corps entier a confirmé une nouvelle récidive disséminée mais avec deux atteintes ganglionnaires prédominantes, l’une dans l’hémi-cou droit et l’autre dans le creux inguinal homolatéral. Une échographie cervicale droite a été réalisée ainsi que des biopsies écho-guidées sur l’adénopathie la plus volumineuse visualisée. L’examen anatomopathologique des fragments biopsiques a révélé qu’il s’agissait d’une récidive du lymphome folliculaire, sans argument pour une transformation en un lymphome de haut grade. Le dossier a été rediscuté en réunion de concertation pluridisciplinaire et il a été décidé de reprendre un traitement systémique de troisième ligne associé à une radiothérapie à visée symptomatique et décompressive, des masses ganglionnaires cervicale et inguinale droites. Cette irradiation a été de type conformationnel, centrée exclusivement sur les adénopathies symptomatiques, et a délivré 4 Gy en deux fractions de 2 Gy à 48 heures d’intervalle. Pour la préparation de la radiothérapie, le patient a d’abord été convoqué pour réaliser une scanographie cervico-thoraco-abdomino-pelvienne de centrage, à visée dosimétrique, avec injection d’iode et sur un patient en position de traitement (en décubitus dorsal avec les bras le long du corps). Un volume cible anatomoclinique a été délinéé en englobant l’ensemble les masses ganglionnaires visualisables et potentiellement responsables de la symptomatologie. Sur ce volume cible anatomoclinique, il a été appliqué une expansion volumique de 1 cm dans toutes les directions de l’espace afin d’obtenir un volume cible prévisionnel (Fig. 18). Par ailleurs, les organes à risque régionaux (dans le cas présent : la moelle épinière, les poumons, la thyroïde, la vessie) ont été délinéés afin de pouvoir ultérieurement évaluer la dose reçue par chacun d’entre eux. Ensuite, les faisceaux d’irradiation ont été définis en s’assurant d’une marge d’au moins 1 cm avec entre leurs limites et le volume cible prévisionnel. Puis l’étude dosimétrique a permis de préciser, en fonction de la position du volume cible prévisionnel par rapport à la mi-épaisseur du
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patient, l’énergie (voir le mixage des énergies) des photons utilisés pour chaque faisceau d’irradiation, ainsi que la pondération de chacun d’entre eux pour la contribution à la dose totale. La validation du dossier technique a reposé sur la vérification de la bonne couverture des volumes cibles, à la fois sur les coupes scanographiques (Fig. 19) et sur l’histogramme dose-volume, l’objectif étant que le volume cible prévisionnel reçoive ≥ 95 % de la dose prescrite. L’irradiation palliative au niveau de l’hémi-cou droit et du creux inguinal homolatéral, a été efficace pour atténuer les symptômes compressifs, permettant ainsi d’améliorer la qualité de vie du patient. Par ailleurs, la réponse globale au traitement systémique de 3 e ligne par rituximab-
chloraminophène a été relativement satisfaisante avec une amélioration clinique de l’état général (reprise de poids et disparition des sueurs nocturnes) et une réponse à l’imagerie d’environ 60 %. Finalement, le patient est décédé non pas de son lymphome folliculaire mais d’un infarctus massif, un peu plus de huit ans après le diagnostic et la prise en charge initiale de son lymphome.
Conflits d’intérêts Les auteurs n’ont déclaré aucun conflit d’intérêts pour cet article.
Bilan clinique • • • •
Âge Score OMS Poids actuel Signe généraux d’évolutivité o Perte de poids o Fièvre o Sueurs nocturnes • Palpation des aires ganglionnaires périphériques o Consigner les résultats sous la forme d’un schéma daté en rapportant la taille des adénopathies éventuellement retrouvées • Palpation de l’abdomen à la recherche d’une organomégalie (hépatomégalie, splénomégalie) et/ou d’une masse intraabdominale • Examen ORL avec inspection des amygdales de l’anneau de Waldeyer, des fosses nasales.
Bilan paraclinique • Bilan sanguin o Numération formule sanguine o Bilan inflammatoire : vitesse de sédimentation, C-reactive protéine, fibrinogénémie o Ionogramme sanguin avec calcémie o Albuminémie – protidémie o Fonction rénale : urémie, créatinémie o Bilan hépatique complet o Electrophorèse des protéines plasmatiques o Lactico-déshydrogénase, ß2-microglobuline o Sérologie virus de l’immuno-déficience humaine, virus d’Epstien-Barr o Sérologie virus de l’hépatite B (Rituximab) • Biopsie ostéo-médullaire • Radiographie pulmonaire avec calcul de l’index médiastinothoracique • Echographie abdominale • Scanographie thoraco-abdomino-pelvienne avec injection intraveineuse de produit de contraste et opacification digestive • TEP-Scan au 18-FDG (à réaliser en position de traitement) • Électro-cardiogramme et échographie cardiaque • IRM du rachis en cas de point d’appel • Scanographie et/ou IRM encéphalique en cas de point d’appel • Ponction lombaire en cas de point d’appel clinique en cas de lymphome agressif, et/ou d’atteinte rachidienne, testiculaire, mammaire, ORL. Fig. 1. Classification de l’OMS des neoplasms à cellules B, à cellules T et à cellules NK d’après [16]. WHO classification of the mature B-cell, T-cell, and NK-cell neoplasms (2008), from [16].
Fig. 2. Bilan d’extension et pré-thérapeutique. Pretherapeutic workup and staging.
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Fig. 5. Indications thérapeutiques dans les lymphomes B diffus à grandes cellules primitivement ganglionnaires et localisés. Therapeutic indications for primary diffuse large B-cell lymphoma of the in the lymph nodes.
Fig. 3. Indice pronostique des lymphomes B diffus à grandes cellules. D’après [1,28]. Prognostic index for diffuse B-cell lymphoma. From [1,28].
Fig. 4. Index pronostique des lymphomes folliculaires. D’après [29] Prognostic index for follicular lymphoma. From [29].
Fig. 7. Indications thérapeutiques dans les lymphomes folliculaires. Therapeutic indications in follicular lymphoma.
Fig. 6. Traitement des lymphomes B diffus à grandes cellules extraganglionnaires (hors système nerveux central). Therapeutic indications for extraganglion diffuse large B-cell lymphoma (not in CNS).
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Fig. 8. Définition des volumes : regroupement images 1,2, et 3. Definition of volumes: combining images 1, 2, and 3.
Fig. 10. Courbes isodoses : regroupement images 8-12. Isodose curves: combining images 8–12.
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Fig. 11. Histogramme dose-volume (HDV) : image 13. Dose-volume histograms: image 13.
Fig. 12. Séquence d’irradiation n °1 – définition des volumes : regroupement images 14, 15, et 16. Radiation sequence 1 – definition of volumes: combining images 14, 15, and 16.
Fig. 13. Séquence d’irradiation n °1 – définition des champs d’irradiation : regroupement images 17,18. Radiation sequence 1 – definition of radiation fields: combining images 17 and 18.
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Fig. 14. Séquence d’irradiation n °1 – courbes isodoses : image 19. Radiation sequence 1 – isodose curves = Image 19.
Fig. 15. Séquence d’irradiation n °2 – définition des volumes : regroupement images 20, 21, et 22. Radiation sequence 2 – definition des volumes: combining images 20, 21, and 22.
Fig. 16. Séquence d’irradiation n °2 – définition des champs d’irradiation : regroupement images 23,24. Radiation sequence 2 – definition of radiation fields: combining images 23 and 24.
Fig. 17. Séquence d’irradiation n °2 – courbes isodoses : image 25. Radiation sequence 2 – isodose curves : image 25.
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Fig. 18. Séquence d’irradiation n °3 – définition des volumes : regroupement images 26-32. Radiation sequence 3 – definition des volumes: combining images 26–32.
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Fig. 19.Séquence d’irradiation n °3 – courbes isodoses : regroupement images 33-38. Radiation sequence 3 – isodose curves: combining images 33–38.
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