2nde Figure Médecin Knock LA3 Fiche Prof-1 [PDF]

  • 0 0 0
  • Gefällt Ihnen dieses papier und der download? Sie können Ihre eigene PDF-Datei in wenigen Minuten kostenlos online veröffentlichen! Anmelden
Datei wird geladen, bitte warten...
Zitiervorschau

2nde / Séquence : La figure du médecin dans la comédie. Séance : « Appelez-moi docteur. » Dominante : lecture analytique n°4 Objectifs : pouvoir analyser le comique des personnages ; saisir la portée universelle de la satire (critique implicite du peuple et de la médecine) Support : Jules Romains : Knock, ou le triomphe de la médecine, acte II scène 2 https://www.youtube.com/watch?reload=9&v=xwQ4Zt6Me Knock, ou le triomphe de la médecine de Jules Romains Acte II scène 2 – Knock, le tambour de ville.

5

10

15

20

Knock C'est vous, le tambour de ville ? Le Tambour Oui, monsieur. Knock Appelez-moi docteur. Répondez-moi "oui, docteur", ou "non, docteur". Tambour Oui, docteur. Knock Et quand vous avez l'occasion de parler de moi au-dehors, ne manquez jamais de vous exprimer ainsi : "Le docteur a dit", "le docteur a fait"... J'y attache de l'importance. Quand vous parliez entre vous du docteur Parpalaid, de quels termes vous serviez-vous ? Le Tambour Nous disions : "C'est un brave homme, mais il est pas bien fort." Knock Ce n'est pas ce que je vous demande. Disiez-vous "le docteur" ? Le Tambour Non. "M. Parpalaid", ou "le médecin", ou encore "Ravachol". [1] Knock Pourquoi "Ravachol" ? Le Tambour C'est un surnom qu'il avait. Mais j'ai jamais su pourquoi. Knock Et vous ne le jugiez pas très fort ? Le Tambour Oh ! pour moi, il était bien assez fort. Pour d'autres, il paraît que non. Knock Tiens ! Le Tambour Quand on allait le voir, il ne trouvait pas. Knock Qu'est-ce qu'il ne trouvait pas ? Le Tambour Ce que vous aviez. Neuf fois sur dix, il vous renvoyait en vous disant : "Ce n'est rien du tout. Vous serez sur pied demain, mon ami." Knock Vraiment ! Le Tambour Ou bien, il vous écoutait à peine, en faisant "oui, oui", et il se dépêchait de parler d'autre chose, pendant une heure, par exemple de son automobile. Knock Comme si l'on venait pour ça !

25

30

35

40

45

50

55

Le Tambour Et puis il vous indiquait des remèdes de quatre sous ; quelquefois une simple tisane. Vous pensez bien que les gens qui payent huit francs pour une consultation n'aiment pas trop qu'on leur indique un remède de quatre sous. Knock Ce que vous m'apprenez me fait réellement de la peine. Mais je vous ai appelé pour un renseignement. Quel prix demandiez-vous au docteur Parpalaid quand il vous chargeait d'une annonce ? Le Tambour Il ne me chargeait jamais d'une annonce. Knock Oh ! Qu'est-ce que vous me dites ? Depuis trente ans qu'il était là ? Le Tambour Pas une seule annonce en trente ans, je vous jure. Knock Vous devez avoir oublié. Je ne puis pas vous croire. Bref, quels sont vos tarifs ? Le Tambour Trois francs le petit tour et cinq francs le grand tour. D'ailleurs, je conseille à monsieur... Knock "Au docteur." Le Tambour Je conseille au docteur, s'il n'en est pas à deux francs près, de prendre le grand tour, qui est beaucoup plus avantageux. Knock Bien, je prends le grand tour. Vous êtes disponible, ce matin ? Le Tambour Tout de suite si vous voulez... Knock Voici donc le texte de l'annonce. Le Tambour "Le Docteur Knock, successeur du docteur Parpalaid, présente ses compliments à la population de la ville et du canton de Saint-Maurice, et a l'honneur de lui faire connaître que, dans un esprit philanthro-pique, et pour enrayer le progrès inquiétant des maladies de toutes sortes qui envahissent depuis quelques années nos régions si salubres autrefois..." Le Tambour "... il donnera tous les lundis, de neuf heures trente à onze heures trente, une consultation entièrement gratuite, réservée aux habitants du canton. Pour les personnes étrangères au canton, la consultation restera au prix ordinaire de huit francs." Le Tambour Eh bien ! C'est une belle idée ! Une idée qui sera appréciée ! Une idée de bienfaiteur ! Mais vous savez que nous sommes lundi. C'est le jour de marché. Mon annonce va tomber dans tout ce monde. Vous ne saurez plus où donner de la tête. Knock Je tâcherai de me débrouiller. Le Tambour Il y a encore ceci : des clients. M. Parpalaid n'en voyait guère que ce jour-là. Si vous les recevez gratis... Knock Vous comprenez, mon ami, ce que je veux, avant tout, c'est que les gens se soignent. Si je voulais gagner de l'argent, c'est à Paris que je m'installerais, ou à New York. Le Tambour Ah ! vous avez mis le doigt dessus. On ne se soigne pas assez. On ne veut pas s'écouter, et on se mène trop durement. Quand le mal vous tient, on se force. Autant vaudrait-il être des animaux. Knock Je remarque que vous raisonnez avec une grande justesse . Le Tambour Oh ! sûr que je raisonne, moi. Je n'ai pas l'instruction que je devrais. Mais il y en a de plus instruits qui ne m'en remontreraient pas [2]. M. le maire, pour ne pas le nommer, en sait quelque chose. Si je vous racontais qu'un jour, monsieur...

60

65

70

Knock "Docteur." Le Tambour Docteur !... qu'un jour, M. le préfet, en personne, se trouvait à la mairie dans la grande salle des mariages, et même que vous pourriez demander attestation du fait à des notabilités [3] présentes, à M. le premier adjoint, pour ne pas le nommer, ou à M. Michalon, et qu'alors... Knock Et qu'alors M. le préfet a vu tout de suite à qui il avait affaire, et que le tambour de ville était un tambour qui raisonnait mieux que d'autres qui n'étaient pas tambours mais se prenaient pour quelque chose de bien plus fort qu'un tambour. Et qui est-ce qui n'a plus su quoi dire ? C'est M. le maire. Le Tambour C'est l'exacte vérité ! Il n'y a pas un mot à changer ! On jurerait que vous étiez là, caché dans un petit coin. Knock Je n'y étais pas mon ami. Le Tambour Alors, c'est quelqu'un qui vous l'a raconté, et quelqu'un de bien placé ? Vous ne m'ôterez pas de la tête que vous en avez causé récemment avec M. le préfet. Knock Donc, je compte sur vous, mon ami. Et rondement, n'est-ce pas ?

Vocabulaire 1. Ravachol : terroriste anarchiste et assassin célèbre, guillotiné en 1892. 2. en remontrer à quelqu'un : lui faire la leçon ; lui montrer sa supériorité 3. notabilités : notables ; personnes auxquelles la situation sociale confère une certaine autorité dans les affaires publiques.

Activité 1. Rédigez l'introduction du commentaire de cet extrait en vous aidant du plan indiqué ci-dessous et de la fiche-méthodologique distribuée. 2. Préparez le commentaire de cet extrait, en remplissant un tableau C.P.I. Votre analyse des procédés utilisés suivra le plan indiqué ci-dessous. I. Le comique des personnages. a) Les ruses comiques du docteur Knock. - l'affirmation tyrannique de son statut - son hypocrisie et ses flatteries - sa philanthropie fallacieuse b) Les ridicules risibles du Tambour. - son manque d'instruction et de culture - sa prétention - sa naïveté II. La portée universelle de la satire. a) L'image inquiétante de la médecine. - Parpalaid : un médecin incompétent - Knock : un manipulateur cupide b) La critique implicite du peuple. - son grégarisme - son avarice - sa tendance à la plainte et au laisser-aller (hypocondrie)

I. Le comique des personnages. Citations

Procédés

Knock Appelez-moi docteur. Répondez- Phrases injonctives moi "oui, docteur", ou "non, ( "Appelez-moi" / "Répondezdocteur". [...] Et quand vous avez moi / "Ne manquez jamais" ) l'occasion de parler de moi audehors, ne manquez jamais de vous exprimer ainsi : "Le docteur a dit", "le docteur a fait"... J'y attache de l'importance. (l.3 à 6)

Interprétations Knock ordonne au tambour de ne le nommer que "docteur" et en toute occasion. Il lui donne des ordres comme s'il s'adressait à l'un des ses subordonnés, ce qui a pour effet d'intimider le Tambour et de marquer aux yeux du spectateur sa supposée supériorité sur lui. Le comique naît ici de la répétition du mot "docteur" et de l'aplomb avec lequel Knock exige une reconnaissance qu'il devrait naturellement inspirer.

Knock feint de partager l'indignation du Tambour quant aux manquements de son prédecesseur. Il est au contraire très satisfaisait de découvrir qu'il pourra tirer profit de la mauvaise « Ce que vous m'apprenez me fait Valeur modalisatrice de l'adverbe réputation de celui-ci. Le comique naît réellement de la peine.»(l.27) qui souligne l'ironie. ici de l'emploi des exclamatives et de l'adverbe "réellement", lesquels mettent en relief l'ironie de son propos. Knock « Tiens! » (l.15) ; "Vraiment !" Phrases exclamatives. (l.20) ; «Comme si l'on venait pour ça !»(l.23).

Knock Je remarque que vous raisonnez avec Antiphrase. une grande justesse. (l.56)

Knock, en vérité, se moque bien de la santé des habitants de Saint-Maurice. Aussi dit-il le contraire de ce qu'il pense afin de flatter le Tambour. Il ne cherche ici qu'à gagner la confiance de celui-ci pour l'utiliser à son profit.

Le Tambour Ravachol. [...] C'est un surnom qu'il Style oral (suppression du "ne" de avait. Mais j'ai jamais su pourquoi. négation). (l.10 à 12)

Le Tambour s'exprime de façon moins raffinée que le docteur, ce qui, en plus de marquer l'écart entre leurs positions sociales, a pour effet de dévaloriser sa parole. Il ne comprend pas en outre la référence à Ravachol, terroriste anarchiste et assassin très célèbre en France à cette époque, ce qui trahit aussi son manque ridicule de culture.

Quand le mal vous tient, on se force. (l.55)

Le Tambour Oh ! sûr que je raisonne, moi. Je n'ai Opposition et jeu sur pas l'instruction que je devrais. Mais l'homophonie raisonner / il y en a de plus instruits qui ne m'en résonner. remontreraient pas. (l.56 à 59)

Le Tambour se vante ici d'être intelligent en dépit de son manque d'instruction. Le ridicule naît ici d'une opposition entre ce qu'il prétend être (un être lucide) et ce qu'il est vraiment (la dupe de Knock). Knock suggège aussi que les raisonnements du Tambour n'ont pas plus de sens que la résonance de son instrument.

Le Tambour Eh bien ! C'est une belle idée ! Une Exclamatives idée qui sera appréciée ! Une idée de et gradation ascendante. bienfaiteur !" (l.46-47)

Le Tambour exprime ici son enthousiasme à l'annonce d'une mesure qu'il estime bénéfique et respectable et qui n'est en réalité qu'une entreprise de manipulation. Le comique naît ici de la naïveté du personnage, laquelle éclate d'autant qu'elle est exprimée par des exclamatives et une gradation

ascendante. II. la portée universelle de la satire.

Citations « Ravachol » (l.10)

Procédés

Interprétations

Référence à une figure historique. Que Parpalaid soit comparé à Ravachol, terroriste anarchiste et assassin très célèbre en France à cette époque, laisse entendre que ce médecin ne respectait pas les règles et qu'il constituait un danger public aux yeux des habitants de Saint-Maurice. L'image qui nous est ici donnée des médecins en général est semblable à celle présente dans les comédies de Molière : les médecins sont dangereux pour la communauté.

Le Tambour Quand on allait le voir, il ne trouvait Enumération des manquements pas. [...] Neuf fois sur dix, il vous du prédécesseur de Knock. renvoyait en vous disant : "Ce n'est rien du tout. Vous serez sur pied demain, mon ami. [...] Ou bien, il vous écoutait à peine, en faisant "oui, oui", et il se dépêchait de parler d'autre chose, pendant une heure, par exemple de son automobile.

Le Tambour décrit Parpalaid comme un médecin à la fois incompétent et indifférent au sort de ses malades. L'image des médecins qui s'en dégage est celle de charlatans plus soucieux de leur confort matériel et financier que de la santé de leurs malades.

Knock « dans un esprit philanthropique » Antiphrase. (l.41-42)

Le comique naît ici du décalage évident entre l'intention invoquée par Knock – celle de porter secours à autrui – et sa motivation réelle, qui est de s'enrichir au détriment de ses patients.

Knock Vous comprenez, mon ami, ce que Antiphrase. je veux, avant tout, c'est que les gens se soignent. Si je voulais gagner de l'argent, c'est à Paris que je m'installerais, ou à New York. (l.52-53)

Cette affirmation de Knock s'oppose de façon évidente à l'aveu qu'il fait à Parpalaid dans la première scène (« J'aurais évidemment préféré une grande ville »). Knock avoue donc ici à demi-mots la raison véritable de sa présence à Saint-Maurice qui est de s'enrichir le plus possible malgré tout. Son cynisme est tel qu'il provoque le rire.

Le Tambour Nous disions : « C'est un brave Opposition entre l'emploi de la homme, mais il est pas bien fort.» 3ème personne du pluriel et les paroles rapportées qui semblent une remarque personnelle.

Le Tambour Eh bien ! C'est une belle idée ! Une Série d'exclamatives. idée qui sera appréciée ! Une idée

Ce procédé suggère que les villageois répètent bêtement et de concert la même formule. Le dramaturge se moque ici implicitement du grégarisme du peuple qui ne pense pas individuellement, mais agit ou réagit comme un seul homme. Le Tambour se montre très enthousiaste à l'annonce des consultations gratuites. Il ajoute en

de bienfaiteur ! Mais vous savez que nous sommes lundi. C'est le jour de marché. Mon annonce va tomber dans tout ce monde. Vous ne saurez plus où donner de la tête.

Le Tambour Ah ! vous avez mis le doigt dessus. Parallélismes On ne se soigne pas assez. On ne veut pas s'écouter, et on se mène trop durement. Quand le mal vous tient, on se force. Autant vaudrait-il être des animaux.

outre que les villageois réagiront tout aussi positivement que lui et que Knock sera débordé. Ce qui est implicitement critiqué ici est l'avarice du peuple, ou tout du moins sa tendance à profiter de ce qui lui est offert gratuitement. Le Tambour est flatté de ce que Knock reconnaisse à la fois son courage et la rudesse de son existence. L'insistance qu'il met à abonder dans le sens du médecin trahit sa tendance à se laisser aller au moindre symptôme de maladie. En plus de laisser présager des succès futurs de Knock auprès des villageois, cette réplique porte en creux une critique de l'hypocondrie facilement exploitable du peuple.