le monde 09 03 2011 [PDF]

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Zitiervorschau

Mercredi 9 mars 2011 - upbybg

Latransparence et l’utilisation des sondages en question

Isolé, le colonel Kadhafi cherche une parade t Retour sur les frasques du dictateur, vues par l’ambassade des Etats-Unis P. 5 et 17

K Contre-enquête Comment sonde-t-on l’opinion ? t Une deuxième étude confirme l’avance du FN

L

a diffusion, lundi 7 mars, d’un deuxième sondage sur la présidentielle de 2012, réalisé par l’institut Harris Interactive, n’a pas mis fin à la controverse. Le résultatest sensiblementle même :Marine Le Pen arriverait en tête du premier tour, quel que soit le candidat socialiste. Au-delà

de ces intentions de vote, la polémique a relancé les critiques sur la multiplication des études d’opinion et leur rôle dans la vie politique, avec, notamment, cette interrogation: faut-il encadrer les sondages ?p

Près de l’installation pétrolière de Ras Lanuf, le 7 mars. ASMAA WAGUIH

Lire page 9, la contre-enquête pages 10-11 et Débats page 19

«Le Monde Education»

L’ancien président iranien La difficile traque Rafsandjani perd un poste-clé des cyberespions de Bercy

Supérieur Universités et grandes écoles françaises dans la « guerre » planétaire des talents. Supplément

Politique Conservateur modéré, l’ex-chef de l’Etat a cédé la place, à la tête de l’Assemblée des experts, qui nomme et contrôle le Guide suprême, à un ancien premier ministre plus radical, M. Mahdavi Kani. Page 7

Les Chinois à la conquête du «droit au bonheur»

UK price £ 1,50

L

es Pères fondateurs de la République américaine jugeaient que la « quête du bonheur » faisait partie des «droits inaliénables » de tout homme, au même titre que « la vie et la liberté ». Ils consignèrent ce droit au bonheur dans la Déclaration d’indépendance du 4 juillet 1776. On ne sait pas si le premier ministre chinois, Wen Jiabao, a beaucoup lu Thomas Jefferson, John Adams, Benjamin Franklin et quelques autres des grands esprits qui donnèrent sa Constitution à l’Amérique. Mais M. Wen vient, lui aussi, à sa façon, d’évoquer le droit au « bonheur » des Chinois. Il faut l’en féliciter, assurément, et l’encourager à avoir la conception la plus étendue du « bonheur » de ses compatriotes… M. Wen s’adressait, samedi 5 mars, lors de la session annuelle

de l’Assemblée nationale du peuple, exercice assez rituel dans la vie politique chinoise. Le premier ministre tirait le bilan économique des cinq dernières années et présentait un rapport sur le programme des cinq prochaines. Il a confirmé le virage que les dirigeants de Pékin entendent faire prendre à l’économie chinoise : passer à un modèle de croissance autant nourri par la demande intérieure que par les exportations et davantage respectueux de l’envi-

Editorial ronnement. D’ici à 2016, la croissance devrait être de l’ordre de 7 % – pour une moyenne de 11,2 % ces dix dernières années. Le gouvernement promet de faire la guerre à l’inflation – de 4,9 %, selon les chiffres officiels, mais vraisemblable-

ment très supérieure. Il se donne pour priorité de lutter contre la montée vertigineuse des inégalités dans la société chinoise. Cela passe, dit-il, par la revalorisation des salaires et la lutte contre la corruption. Et c’est là, dans le nouveau discours officiel chinois, que sont apparues, au-delà du mot d’ordre sur « l’harmonie », les notions de bonheur et de bien-être du peuple, posées comme un « enjeu politique majeur », selon une partie de la presse locale. L’ensemble de la planète a tout à gagner à un rééquilibrage de l’économie chinoise. L’ampleur des excédents commerciaux de la Chine – et celle de l’épargne ainsi accumulée par elle – constitue l’un des déséquilibres majeurs, et les plus déstabilisants, de l’économie mondiale. Mais on ne s’interdira pas de

La boxe, sport favori du septième art t Deux cinéastes américains montent à leur tour sur le ring

I

l y eut Rocky, et Raging Bull, et tant d’autres films célèbres ou peu connus.Fighter, fiction hollywoodienne de David O. Russell, et Boxing Gym, documentaire de Frederick Wiseman, offrent au spectateur deux visions très différentes du ring, de ce qui s’y passe et du contexte social de la boxe. Fighter obéit à la liturgie des grands mélodrames du noble art, tout en atteignant souvent une intensité comique digne du meilleur cinéma italien. Frederick Wiseman nous fait passer, avec Boxing Gym, une heure et demie dans le cocon d’une petite salle d’entraînement d’Austin, Texas. Une usine à brutalité ? Non, un lieu où l’on apprend à se connaître soi-même. p Lire pages 18 et 20

penser que le souci ainsi affiché du bien-être des Chinois et de la réduction des inégalités tient aussi au climat politique de l’heure. La Chine est concernée par les événements du monde arabe. Elle ne peut être indifférente à la contestation des autocraties. Depuis la mi-février, des appels à manifester chaque dimanche sont relayés dans une dizaine de grandes villes par un réseau d’activistes usant de toutes les ressources de la communication électronique. A en juger par leurs réactions – militants arrêtés, journalistes étrangers intimidés –, les autorités prennent cette menace très au sérieux. Sur fond de fortes tensions sociales, le régime est en quête d’un regain de légitimité. Cela passe par un début d’ouverture politique. Encore un petit effort, camarade Wen ! p

Piratage Même si les enquêteurs parvenaient à démasquer les hackeurs qui ont forcé les ordinateurs du ministère, les commanditaires de l’opération resteraient vraisemblablement hors d’atteinte. Page 12

Stella McCartney, tenue bio exigée Mode Elevée dans une ferme biologique par une famille végétarienne, la styliste britannique met sa passion pour la nature au service d’une mode à la fois très contemporaine et «écologiquement correcte» qui bannit cuirs et fourrures. Elle a transformé une partie de son équipe en chercheurs agronomes. Page 23

Prix du pétrole: le spectre de la pénurie durable

N

Mark Wahlberg, acteur et producteur de « Fighter ». JOJO WHILDEN

i la spéculation, ni la crainte d’une contagion des révoltes arabes aux pays du golfe Arabo-Persique n’expliquent totalement la flambée actuelle du cours du brut. L’inquiétude est plus profonde. Si les prix s’envolent, c’est que les marchés anticipent une période longue de déséquilibre offre-demandeen raison de la baisse des capacités excédentaires de l’OPEP. La perspective de pétrole rare et cher devrait inciter aux économies d’énergie. Or, face à la réticence des Etats membres, la Commission européenne a dû renoncer à introduire un objectif contraignant dans son plan d’efficacité énergétique 2011 présenté le 8 mars. p Lire pages 4 et 14

Algérie 150 DA, Allemagne 2,00 ¤, Antilles-Guyane 2,00 ¤, Autriche 2,40 ¤, Belgique 1,50 ¤, Cameroun 1 500 F CFA, Canada 4,25 $, Côte d’Ivoire 1 500 F CFA, Croatie 18,50 Kn, Danemark 25 KRD, Espagne 2,00 ¤, Finlande 2,50 ¤, Gabon 1 500 F CFA, Grande-Bretagne 1,50 £, Grèce 2,20 ¤, Hongrie 700 HUF, Irlande 2,00 ¤, Italie 2,20 ¤, Luxembourg 1,50 ¤, Malte 2,50 ¤, Maroc 10 DH, Norvège 25 KRN, Pays-Bas 2,00 ¤, Portugal cont. 2,00 ¤, Réunion 1,90 ¤, Sénégal 1 500 F CFA, Slovénie 2,20 ¤, Suède 30 KRS, Suisse 3,00 CHF, Tunisie 2,00 DT, Turquie 6,00 TL, USA 3,95 $, Afrique CFA autres 1 500 F CFA,

24 heures dans le monde Les gens

Les faits

t Ziad Takieddine interpellé auBourget enprovenance de Libye

Les chiffres t Olympisme

t Robert Diamond, patron de la banque Barclays,6,5millions de livres de bonus

Alger

OCÉAN AT L A N T I Q U E

Tripoli

MAROC

Marie Skolodowske-Curie, née à Varsovie en 1867, Prix Nobel de physique en 1903, a été désignée comme « la plus grande Polonaise de tous les temps » par un vote sur Internet organisé par le Musée de l’histoire de la Pologne et la revue historique Mowia Wieki. Le Sénat polonais lui a dédié l’année 2011. Société éditrice du « Monde » SA Président du directoire, directeur de la publication : Louis Dreyfus Secrétaire général du directoire : Pierre-Yves Romain Directeur du «Monde», membre du directoire : Erik Izraelewicz Directeur adjoint : Laurent Greilsamer Editeur : Michel Sfeir Directrice de la rédaction : Sylvie Kauffmann Directeurs éditoriaux : Gérard Courtois et Alain Frachon. Rédacteurs en chef : Jean-Jacques Bozonnet, Michel Kajman, Franck Nouchi, Isabelle Talès, Didier Pourquery (« Le Monde Magazine »). Chef d’édition : Françoise Tovo. Directrice artistique : Sara Deux. Veille de l’information : Eric Azan. Secrétaire général : Jean-Pierre Giovenco Médiatrice : Véronique Maurus Conseil de surveillance : Pierre Bergé, président. Gilles van Kote, vice-président Le Monde est édité par la Société éditrice du «Monde» SA Durée de la société : 99 ans à compter du 15 décembre 2000. Capital social : 149 017 497 ¤. Actionnaire principal : Le Monde SA. Rédaction :80,boulevardAuguste-Blanqui,75707Paris Cedex13 Tél. :01-57-28-20-00 ;télécopieur :01-57-28-21-21 Abonnements :partéléphone:deFrance32-89 (0,34¤ TTC/min) ;del’étranger:(33)1-76-26-32-89 ouparinternet :www.lemonde.fr/abojournal

0123 est édité par la Société Editrice du Monde (SA). La reproduction de tout article est interdite sans l’accord de l’administration. Commission paritaire des publications et agences de presse n° 0712 C 81975 ISSN 0395-2037

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Imprimerie du Monde 12, rue Maurice-Gunsbourg, 94852 Ivry cedex

L I BA N

SY R I E

IRAN

IRAK KOW E Ï T

J O R DA N I E

Le Caire

BA H R E Ï N Riyad

É GY PT E

Sahara occ.

Manama QATA R

ARABIE SAOUDITE

E . A .U.

Mascate

OMAN

Sanaa

Manifestations

Crise politique

Emeutes

YÉMEN

Morts

400 km

aLes révoltes dans le monde arabe Libye Un raid aérien a visé, mardi 8 mars, la base la plus avancée des insurgés, à huit kilomètres à l’est du port pétrolier de Ras Lanouf. Un émissaire de Kadhafi a contacté les rebelles de l’est pour proposer des conditions au départ du dirigeant libyen. Le Conseil national libyen (insurgés) a refusé de négocier.

ment égyptien, dirigé par Essam Charaf, a prêté serment, lundi

t Marie Curie, «plus grande Polonaise de tous les temps»

Mer Méditerranée

L I BY E

A LG É R I E

Egypte Le nouveau gouverne-

L’homme d’affaires libanais Ziad Takieddine a été interpellé, samedi 5mars au Bourget alors qu’il rentrait de Libye en possession de 1,5million d’euros en liquide. Il a été remis en liberté dimanche, mais une enquête pour « suspicion de blanchiment» a été ouverte. M. Takieddine est présenté comme un intermédiaire imposé par le cabinet de François Léotard, alors ministre de la défense, par des responsables de la Direction des constructions navales, qui a vendu les sous-marins en 1994 au Pakistan et qui sont au cœur de l’affaire Karachi. (PHOTO : SIPA) Lire page 9

1,5million d’euros

Tunis TUNISIE

Rabat

INFOGRAPHIE LE MONDE

Le patron de la banque britannique Barclays, l’Américain Robert Diamond, 59 ans, a touché un bonus de 6,5 millions de livres (7,6 millions d’euros) pour l’année 2010. Alors que ces gratifications suscitent toujours la polémique au Royaume-Uni, il cumulera cette somme avec son salaire annuel de 250000 livres (290 000 euros). Le patron de Barclays, qui avait renoncé à son bonus en 2009, après la crise financière, a récemment déclaré devant une commission parlementaire que «le temps des excuses » pour les banques était «révolu ».

0123 Mercredi 9 mars 2011

7 mars, devant le chef du Conseil suprême des forces armées, le maréchal Hussein Tantaoui. Six ministères ont été renouvelés. Nabil Al-Arabi, un diplomate de carrière, remplace Ahmed Aboul Gheit, un baron de l’équipe du président déchu, à la tête de la diplomatie. Le général Mansour Al-Issaoui a été nommé à l’intérieur en remplacement de Mahmoud Wagdi, et l’ancien procureur général Mohammed El-Guendi à la justice.

aInternational L’ouest de la Côte d’Ivoire s’embrase De nouveaux combats ont éclaté, lundi 7 mars, dans l’ouest de la Côte d’Ivoire frontalière du Liberia, alors que les Forces nouvelles (FN), fidèles à Alassane Ouattara, tentaient de prendre une nouvelle ville aux forces et miliciens du président sortant, Laurent Gbagbo. Les combats faisaient rage en fin de journée dans les environs de Blolékin, à quelques dizaines de kilomètres de la ville de Toulépleu que les FN avaient prise dimanche. Les FN visent probablement le port de San Pedro, plus au sud, par où transite l’essentiel du cacao de Côte d’Ivoire. Abidjan a connu de nouvelles violences, lundi, avec la mort de trois personnes dans une attaque attribuée par Laurent Gbagbo aux « rebelles » alliés à son rival. n Sur Lemonde.fr : porfolio sonore

Florence Cassez dépose un recours devant la Cour suprême mexicaine Les avocats de la Française Florence Cassez, 36 ans, condamnée à soixante ans de prison pour enlèvements et séquestrations, ont déposé, lundi 7 mars, un recours en révision de son procès devant la Cour suprême du Mexique. Ils demandent la révision pour inconstitutionnalité du rejet du pourvoi en cassation, décidé, le 10 février, par trois juges, et qui avait rendu définitive sa condamnation. Les conditions de son arrestation, reconstituée à la télévision, le 9 décembre 2005, seront au cœur de l’argumentation devant la Cour suprême. Selon l’avocat de Florence Cassez, Me Frank Berton, les chances de voir cette démarche aboutir sont « faibles ».

aFrance Incertitude sur la poursuite du procès de Jacques Chirac Le tribunal correctionnel de Paris devait décider, mardi 8 mars, deuxiè-

Tunisie Un nouveau gouvernement de transition formé de techniciens a pris ses fonctions, lundi 7 mars, en Tunisie où la Direction de la sécurité du territoire (DST) et la police politique ont été dissoutes. C’est le troisième cabinet formé depuis la fuite de l’ex-président. Aucun membre de la nouvelle équipe présentée par le premier ministre Caïd Beji Essebsi n’a servi sous le règne de Ben Ali. Dix-sept de ses membres faisaient toutefois partie de la précé-

dente, déjà dirigée par Essebsi. Algérie Des milliers de gardes chargés de suppléer la gendarmerie algérienne dans les villages ont bravé lundi 7 mars l’interdiction de manifester à Alger en forçant plusieurs cordons de police pour marcher jusqu’à l’Assemblée nationale en faveur d’une hausse de salaire. n Sur Lemonde.fr la situation à travers médias et télévisions. Portfolio

me jour du procès des emplois présumés fictifs de la Ville de Paris, si ce procès pouvait ou non se poursuivre. Il devait rendre sa décision sur un point de procédure soulevé par la défense d’un coprévenu de Jacques Chirac, Rémy Chardon, son ex-directeur de cabinet à la Mairie de Paris. A l’ouverture du procès, lundi, l’avocat de Rémy Chardon, Me Jean-Yves Le Borgne, a déposé une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) portant sur la « connexité » des deux affaires en cause, l’une instruite à Paris, l’autre à Nanterre. Le tribunal doit décider de transmettre ou non à la Cour de cassation qui doit ensuite décider de transmettre – ou non – au Conseil constitutionnel. Si ce processus est enclenché, le procès serait renvoyé. Lire page 13 n Sur Lemonde.fr : le blog « Chroniques judiciaires »

Propositions du gouvernement sur la précarité dans la fonction publique Les syndicats doivent se prononcer, d’ici au 31 mars, sur les mesures retenues pour réduire la précarité dans la fonction publique. A l’issue d’une ultime réunion de négociation, lundi 7 mars, le texte prévoit notamment des conditions de titularisation spécifiques pour les contractuels et la transformation des CDD accumulésen contrats à durée indéterminée. Les contrats de projets pour des missions temporaires ont été abandonnés. Les ministres sesont refusés à fournir une évaluation du nombre d’agents concernés. Un projet de loi devrait être présenté avant le mois de juin.

aEconomie Prix de l’essence: envolée record Les prix de l’essence ont dépassé, la semaine dernière, leurs records historiques de juin 2008. Selon les chiffres, publiés lundi 7 mars, par la Direction générale de l’énergie et du climat (DGEC), le litre de super sans plomb 95 s’est vendu, en moyenne, 1,5067 euro. Le litre de sans plomb 98 : 1,5417 euro. Le prix du gazole a atteint 1,3513 euro. Ce carburant, qui représente près de 78 % de la consommation en France, reste cependant 10 centimes moins cher que son record historique de mai 2008. Lire page 14

de la Caisse des dépôts pour la candidature d’Annecy aux JO de 2018 La Caisse des dépôts et consignations (CDC) s’est engagée, lundi 7 mars, à verser 1,5 million d’euros au Comité national olympique et sportif français (CNOSF) et à mettre du personnel à sa disposition pour la candidature d’Annecy aux Jeux olympiques d’hiver de 2018. « On avait besoin d’un coup de pouce financier, de quoi nous aider à montrer au CIO que notre dossier participe au développement durable », a commenté Charles Beigbeder, président d’Annecy 2018. Le nom de la ville organisatrice sera révélé le 6 juillet à Durban (Afrique du Sud). Annecy est en concurrence avec Pyeongchang (Corée du Sud) et Munich.

t Syrie

13

militants des droits de l’homme en grève de la faim Treize militants des droits de l’homme emprisonnés en Syrie, ont annoncé, lundi 7 mars, avoir entamé une grève de la faim pour réclamer la fin de l’« oppression » dans le pays. Ils réclament « la fin des détentions politiques » et dénoncent « l’état d’urgence décrété en Syrie depuis quarantehuit ans par une autorité militaire non élue». Parmi ces détenus figurent plusieurs avocats et écrivains.

t Santé

227000 IVG par an Alors que la contraception est largement diffusée, le nombre des IVG ne diminue pas en France et augmente même chez les plus jeunes, ont déploré lundi 7 mars, des spécialistes réunis à Paris à l’occasion d’un forum sur le droit à l’IVG présidé par le Pr. Israël Nisand. Ce dernier a accusé en particulier l’absence d’éducation sexuelle à l’école, théoriquement obligatoire depuis 2001.

L’histoire Clarisse Fabre

Les scores

Le film «Shoah» diffusé en persan en Iran

L 2 : Evian-Thonon en tête

C

laude Lanzmann, le réalisateur de Shoah (1985), n’aime pas les événements diplomatico-culturels. Ou alors il était de méchante humeur, ce lundi 7 mars. Bizarrement, le cinéaste, âgé de 85 ans, a cassé l’atmosphère consensuelle qui régnait à la Maison de l’Unesco, à Paris, à l’occasion du lancement de Shoah en persan. La traduction de ce film culte, documentaire de neuf heures et trente minutes consacré à l’extermination des juifs d’Europe dans les camps nazis, a été proposée par le Projet Aladin, une organisation internationale basée à Paris, qui lutte contre la banalisation de la Shoah. Dans le cas de l’Iran, il s’agit de répondre au discours négationniste tenu par le président iranien Ahmadinejad, depuis 2005. Vers 17 heures, de nombreuses personnalités, dont le ministre de la culture, Frédéric Mitterrand, s’apprêtaient à suivre « un moment historique » : la diffusion en direct d’un extrait du film en Iran, par la chaîne satellite iranienne Pars, basée à Los Angeles.

Les flashes ont crépité lorsque le visage du présentateur iranien est apparu, sur un écran géant… Puis ce fut au tour de la présidente du Projet Aladin, Anne-Marie Revcolevschi, d’introduire longuement le documentaire… Sur l’estrade, Claude Lanzmann commençait à s’impatienter. Quelques minutes plus tard, il lançait cette phrase stupéfiante à l’ancienne directrice générale de la Fondation pour la mémoire de la Shoah : « Tu as de très beaux yeux, mais tu parles depuis trop longtemps, comme une prédicatrice américaine. Si je suis un téléspectateur, j’ai envie de déserter et de baiser ma femme. »

5 millions de téléspectateurs Au bug diplomatique s’est ajouté un incident technique : l’image du film s’est figée au bout d’une vingtaine de minutes. « Mais la diffusion continue en Iran, depuis Los Angeles. C’est l’Unesco qui a un peu foiré dans la retransmission », a assuré la présidente du Projet Aladin. La projection a été un peu

écourtée, laissant la place au débat. Si l’on peut utiliser ce mot ! Alors qu’une jeune femme, dans la salle, demandait « comment la chaîne iranienne allait pouvoir mesurer la réalité de l’audience », Claude Lanzmann a répliqué : « Ce n’est pas la question, c’est un début, un commencement », s’attirant quelques soupirs d’agacement. « Les chaînes satellite iraniennes peuvent attirer entre 4 et 5 millions de téléspectateurs. Elles sont beaucoup plus regardées par les Iraniens que les chaînes étatiques », estime, pour sa part, le journaliste et écrivain iranien Nasser Etemadi. La diffusion du film peut, certes, être parasitée par le pouvoir. Mais ce qui importe « c’est le débat public qui va être engendré. Shoah fournit des clés pour l’intelligibilité du mal que nous affrontons. Les Iraniens sont prêts à comprendre la vérité parce qu’ils vivent le mal au jour le jour », a insisté la directrice de la fondation pour les droits de l’homme en Iran, Ladan Boroumand. p

t Football

Evian-Thonon a repris la tête de la Ligue 2 grâce à sa victoire sur le terrain de Boulogne (2-1), lundi 7 mars, en match de clôture de la 26e journée. Les Savoyards devancent Le Mans et Ajaccio à la différence de buts alors que Boulogne, qui pouvait remonter sur le podium en cas de victoire, est passé de la 5e à la 8e place.

La FIFA « libère » Fernandez La Fédération internationale de football (FIFA) a levé la suspension de Luis Fernandez, le sélectionneur français d’Israël, interdit d’activité liée au football, a indiqué, lundi 7 mars, la Fédération israélienne. Luis Fernandez, 51 ans, a été suspendu le 20 février pour ne pas s’être plié à une mesure disciplinaire de 2009 relative à un contentieux financier avec un club qu’il avait entraîné au Qatar.

Page trois

0123 Mercredi 9 mars 2011

Coupédumondeparlerégimechinois,lemilitantaveugleChenGuangcheng estparvenuàdiffuserunevidéosurleWeb.Ilappelleàluttercontrelesystème

Le nouveau défi de M. Chen Dongshigu (Chine) Envoyé spécial

D

epuissixans,levillage de Dongshigu, dans la province du Shandong, dans l’est du pays, réserveunaccueil unpeu particulieraux visiteurs.Unebrigade de sécurité d’une vingtaine de gros bras, recrutés dans les environs, repoussent, agressent, maltraitent toute personne qui tente d’approcher de la demeure du militant aveugle Chen Guangcheng, l’un des plus célèbres « avocats aux pieds nus » chinois. Cela a été le cas pendant les mois qui ont précédé son procès en 2006, puis, pour son épouse, Yuan Weijing, pendant qu’il était lui-même en prison, et enfin, depuis sa libération, en septembre2010. Parvenus au cœur du village, à quelques centaines de mètres de la granderoutedeLinyi,lavilleprincipale de la région, dans le sud de la province,troisjournalistesfrançais en ont fait l’expérience, dimanche 13 février. Repoussés sans ménagement, menacés, dépouillés d’une partie de notre matériel, qui nous sera rendu intact mais vidé de son contenu, nous ne parviendrons pas à rencontrer le militant. Un confrère se fait arracher sa carte de presse chinoise. Au commissariat local, on promet «d’enquêter ». D’autres sont moins chanceux : deux médias américains s’en tirent avec du matériel endommagé les jours suivants. Des dizaines d’amis de la famille, d’avocats ou de militants ont subi des violences. Lundi soir 14 février, Gao Xingbo, un jeune Chinois lancé dans une action de « weiguan », le mouvement de « vigilance » des internautes, a pénétré, déguisé, dans le village pour porter 7,5 kg de viande d’agneau à une famille amie de Chen Guangcheng. Celui-ci rêvait d’en manger depuis sa sortie de prison. Le jeune militant a été matraqué, kidnappé, puis relâché en pleine campagne. Cette forme de détention extralégale est courante en Chine. Liu Xia, la femme de Liu Xiaobo, le Nobel de la paix 2010, des avocats, des pétitionnaires, même des artistesenfontl’expérience,parfoispendant plusieursannées. Elle estcoordonnéeparlapolicepolitique.Pourtant, elle a rarement donné lieu, sur autant de temps, à un tel déchaînementdeviolence,etcontre unepersonnalité aussi emblématique du mouvement de défense des droits de l’homme. Ladiffusion,parl’ONG américaine ChinaAid, d’une vidéo dans laquelle Chen Guangcheng s’exprime pendant une heure, de sa maison, lance un nouveau défi aux autorités chinoises. Il y décrit la

Capture d’écran de la vidéo de Chen Guangcheng, diffusée, il y a dix jours, par l’ONG américaine ChinaAid. CHINA AID ASSOCIATION/AP Chine « dans une phase cruciale de transition », otage d’un « système anachronique », « voué à l’échec », où les « plus extrémistes parmi les cadresdu Parti communiste tentent d’instiller la peur et de bâillonner les gens ». Pourtant, « l’Internet, Twitter, les blogs ont doté les citoyens de leur propre voix ». Habillé d’un manteau boutonné jusqu’au cou, souriant parfois derrière ses lunettes noires, s’exprimant dans un chinois très littéraire,lemilitantcite lescasdeLiuXiaobo, mentionne la Birmane Aung San Suu Kyi, ou encore l’enquête en ligne de l’artiste Ai Weiwei sur les écoles du Sichuan. Pourtant, il est privédetéléphoneportable(unsystèmebrouille les ondes autour de la maison), surveillé 24heures sur 24, et n’a pas accès à un ordinateur. A maintes reprises, il encourage à «surmontersespeurs»età«boycotter, exposer et dénoncer les agissements éhontés» des cadres du Parti. Ce sont des « violations grossières delaConstitution,delaloi,desengagements internationaux, dépourvus de la moindre considération morale ou humanitaire ». Il décortique son propre cas. Les gens qui le surveillent sont payés

100 yuans par jour (10 euros). Ils appartiennent souvent à la famille de cadres locaux. Tout le monde bénéficie du système et des larges subsidesallouéspoursa surveillance, le comité des affaires politiques et légales du parti local ayant toute latitude pour faire appel aux organes de l’Etat pour défendre ses propres intérêts.

Rarementun tel exposédu mécanisme derépression auraétéaussi percutantet détaillé Rarementuntelexposédumécanisme de répression chinois aura été aussi percutant et détaillé: malgréla censure, l’appelàla résistance civique de Chen Guangcheng circule sur Internet. Un groupe a lancé le 12 février une nouvelle pétition pour libérer le militant. Les avocats pékinois qui le soutiennent depuis le début tentent de se mobiliser à nouveau – ce qui a valu à plusieurs d’entre eux d’être détenus par la police à Pékin le 16 février.

Les ennuis de Cheng Guangcheng ont débuté en 2004. Il est à l’époque une célébrité du district de Linyi, 10 millions d’habitants. Il est reconnu pour son combat pour les droits des handicapés – il a gagné un procès contre le métro de Pékin en 2003 – et ceux des paysans. Il les représente bénévolement car il n’a pas de licence d’avocat. Sa femme l’assiste. A l’époque, le district est montré du doigt pour ses piètres performancesdansledomainedelaplanification familiale. Le secrétaire du parti à Linyi, Li Qun, sait que sa carrière est en jeu, et lance une campagne d’action. Dès 2005, des familles harcelées pour avoir violé la politique de l’enfant unique contactent Chen Guangcheng. Habituellement,danslescampagnes chinoises, les femmes enceintes d’un deuxième enfant s’éloignent des villages les derniers mois de grossesse, et reviennent une fois l’enfant né, puis paient l’amende. Cette fois, les moyens déployés sontradicaux:«Silafemmenerevenait pas, le mari, les proches, les voisins même étaient enfermés dans desmaisonsvides,parfoissansnourriture », dit Guo Yushan, un jeune

Campagne d’intimidation contre les journalistes étrangers Pékin Correspondant

Trois semaines après le coup d’envoi, dimanche 20 février, d’une « révolution du jasmin» à la mode chinoise, les journalistes étrangers en Chine sont soumis à une campagne d’intimidation. Plusieurs dizaines de correspondants étrangers ont été appelés ou convoqués à plusieurs reprises dans les bureaux de l’immigration ou des polices de Pékin et de Shanghaï, le plus souvent pour « vérifier leur visa», pendant que les militants manifestaient sous forme de « promenades dominicales » dans les grandes villes chinoises.

Certains journalistes ont reçu la visite de policiers à leur domicile, d’autres ont été embarqués pour des interrogatoires alors qu’ils se trouvaient sur les lieux désignés des rassemblements, et parfois retenus, comme à Shanghaï, dimanche 6 mars, dans un bunker en sous-sol, le temps que l’événement soit terminé. Au moins deux représentants de médias ont subi des violences. Des zones piétonnières banales sont soudain décrétées hors limites : il faut s’accréditer auprès d’une entité dont l’existence est parfois laissée dans le flou. Cinq correspondants étrangers à Pékin ont rapporté avoir été placés

ostensiblement sous surveillance à leur domicile, selon le FCCC, le Club des correspondants étrangers en Chine, une association informelle de journalistes étrangers. Trois assistants de médias étrangers ont reçu des appels de leur famille en province à la demande de la police locale.

Vives protestations La situation a conduit à de vives protestations de la part des ambassades, notamment européennes – et à des réponses parfois peu cohérentes de la part de leurs interlocuteurs. En privé, le ministère des affaires étrangères fait comprendre que la sécurité publique a tous

pouvoirs face à une situation où des personnes mal intentionnées (les militants fantômes de la «révolution du jasmin ») « instiguent des troubles ». Un porte-parole du ministère a accusé récemment les journalistes étrangers de «fabriquer des informations ». Ce déploiement de force est inédit ces dernières années. Le gouvernement chinois s’était engagé, un an avant les Jeux olympiques de 2008, à donner l’entière liberté aux médias étrangers d’interroger toute personne qui accepte de leur répondre. Auparavant, il fallait une autorisation des autorités locales. p B. Pe.

intellectuel pékinois qui se rend à l’époque, avec l’avocat Teng Biao, auprès de Chen Guangcheng pour mener avec lui une enquête dans trois comtés du district. Ils recueillent des dizaines de témoignages : violences, avortement quelques jours avant le terme de la grossesse… «Toutcelaviolaitlesdirectivesde lacommission centraledeplanification familiale, qui interdit le recours

à la violence. Mais aussi les droits les plus élémentaires des gens », dit M. Guo, aujourd’hui président de l’ONG Transition Institute, et luimêmeplacésoussurveillance.L’enquête, toujours disponible sur Internet, fait grand bruit. L’équipe se fait vite harceler. Chen Guangshengest kidnappé lorsd’un voyage à Pékin et ramené à Dongshigu. Guo Yushan passe trois mois assigné à résidence à Pékin. En 2006, Cheng Guangcheng est finalement arrêté… pour avoir perturbé la circulation. On l’a en fait empêché de monter dans une voiture, ce qui a créé un embouteillage.Cetteinterpellationestvuecomme une vendetta personnelle de Li Qun, le secrétaire du parti. Le procès de Chen Guangcheng ne respecte aucune procédure, disent ses avocats. Surtout, ceux-ci sont victimes de violences répétées: convoqués un jour par le juge de Linyi, Li Fangping et Li Jinsong sont descendus de force d’un bus en provenance de Pékin et battus à coups de barre de fer. Li Qun, le premier secrétaire, poursuit lui une carrière brillante : il passe chef de la propagande du Shandong, puis premier secrétaire de la grande ville de Qingdao. «Il a parfaitement réussi à faire valider l’affaire comme un cas politique au niveau central, faisant de Chen Guangcheng un ennemi qui conspire avec les forces hostiles étrangères ! Ils ont tous les pouvoirs », dénonce Guo Yushan. Le grand paradoxe, notent les connaisseurs du dossier, c’est que Li Qun faisait pourtant partie d’un groupe de jeunes cadres chinois envoyés aux Etats-Unis poursuivre pendant trois mois un master d’administration publique, en 2000. Les mois suivants, il est stagiaire auprès du maire de New Haven dans le Connecticut. A son retour en Chine, il avait publié un livre sur son expérience… p Brice Pedroletti

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0123 Mercredi 9 mars 2011

«La Boudeuse» sauvée

Morts de froid

La Boudeuse, dont la mission « Terre-Océan » avait été interrompue en 2010, va reprendre la mer. Patrice Franceschi, son capitaine, et Frédéric Roussel, cofondateur d’Acted, ONG de solidarité internationale, ont créé un fonds de dotation pour relancer les expéditions du navire.

Les basses températures en Slovaquie ont fait 122 morts cet hiver dans ce pays de 5,4 millions d’habitants, membre de l’Union européenne, ont indiqué, lundi 7mars, les autorités médicales, qui n’ont pas été en mesure de préciser le pourcentage des sans-abri parmi les victimes.

www.audition-infos.org A l’occasion de la 14e Journée nationale de l’audition,jeudi 10mars, 870 villes participent à une campagne de prévention sur le thème «nuisances sonores et gêne auditive», ponctuée de dépistages gratuits, de conférences et d’animations.

L’Europe publie sa politique d’économies d’énergie La Commission ne rend pas obligatoire l’objectif de 20% de réduction de la consommation dans l’Union européenne

PROJECTION D’UTILISATION D’ÉNERGIE PRIMAIRE DE L’UNION EUROPÉENNE EN 2020, en millions de tonnes équivalent pétrole 1850

1 842

1 800 1 750

CONSOMMATION PRIMAIRE D’ÉNERGIE PAR HABITANT en 2007, en tonnes équivalent pétrole (tep)

Projection 2007 A activité économique inchangée (“Business as usual”)

1 700

1 678

1 650 1 600

Projection 2009 Projection la plus récente - 164 Mtep

Européenne à 27

3,63

Russie

3,63

7,87

Etats-Unis

1 550

Chine

1,55

1 500 Objectif 2020

1 450

1 474 Consommation réduite de 20 % - 368 Mtep

1 400 2005

2010

2015

2020

a L’énergie primaire est l’énergie disponible avant toute transformation. L’énergie finale est l’énergie consommée après une éventuelle transformation, telle que la production d’électricité.

Parlement européen a voté une résolution demandant « un objectif contraignant d’efficacité énergétique d’au moins 20 % en 2020 ». La Commission n’a pas retenu cette option dans sa communication sur le « Plan d’efficacité énergétique 2011 » diffusé le 8 mars. « Les Etats membres n’y sont pas

favorables », explique au Monde Günter Oettinger, le commissaire européen chargé de l’énergie. « Nous ferons un point en 2013, et, si à ce moment, il apparaît que l’objectif de 20 % risque de ne pas être atteint, nous proposerons un objectif contraignant pour 2020 ». Comme le constate elle-même

Inde

0,53

Japon Afrique sub-saharienne

4,12

0,61

la Commission, l’évolution actuelle conduit à une réduction de la consommation de seulement 10 % d’ici à 2020. Selon Claude Turmes, député Vert luxembourgeois au Parlement européen, « tant qu’il n’y a pas d’objectif contraignant, l’efficacitéénergétique n’est pas prise au sérieux par les décideurs poli-

En Espagne, des trains moins chers et des voitures ralenties Madrid Correspondance

Réduction des tarifs des trains de banlieue, baisse de la vitesse autorisée sur autoroute ou encore amélioration de l’éclairage public, le gouvernement espagnol a adopté en urgence, vendredi 4 mars, vingt mesures visant à faire face à la hausse du prix du baril de pétrole, mais aussi à réduire à plus long terme la consommation d’énergie et les émissions de CO2. Cet ambitieux plan d’économie d’énergie est chiffré à 1,15 milliard d’euros. Les chiffres avancés par le gouvernement prévoient ainsi que ce plan permettra une réduction de la consommation énergétique de 5 % (soit 2,3 milliards d’euros) et une baisse de 12,5 tonnes des émissions de CO2. Pour l’Espagne, l’enjeu est d’autant plus important que le pays importe 75 % de l’énergie

L’aviation doit économiser 3 % de CO2 en 2012

L’Européen consomme moins qu’un nord-Américain, mais plus qu’un Chinois

qu’il consomme, 57 % provenant du pétrole et 15,5 % du gaz. Première mesure, la vitesse maximale autorisée sur les autoroutes est passée, lundi 7mars, de 120 km/h à 110km/h, ce qui permettra, selon le gouvernement, une réduction de 11% à 15 % de la consommation de carburants. Des chiffres jugés trop optimistes par l’Institut universitaire de recherche de l’automobile (INSIA), qui parle de 1% à 3 % d’économie, mais défendus par les écologistes qui évoquent les bénéfices en matière de pollution. Cette mesure se maintiendra jusqu’au 30 juin, mais elle pourra être prolongée si la hausse du pétrole perdure.

La Catalogne rechigne Jusqu’en juillet, le prix des billets de trains de banlieue est réduit de 5%, afin de favoriser l’usage des transports publics. La Catalogne, qui détient la compétence en

la matière, refuse de mettre en pratique cette mesure, car elle lui coûterait « 26millions d’euros ». Convaincu de la nécessité de «défendre le transport public », le gouvernement s’est dit prêt à en assumer le coût. Dans la même optique, 260 millions d’euros seront destinés à la création de couloirs réservés au transport public et aux voies cyclistes dans les villes de 20 000 à 50000 habitants. D’autre part, une subvention de 20 euros par pneumatique soutiendra le remplacement des anciens par des modèles plus efficients, dans la limite de 60 000 véhicules. La part du biodiesel dans les carburants devrait être portée à 7 % en 2011 et le chauffage à partir de biomasse sera favorisé dans les administrations publiques. Le gouvernement a également annoncé qu’il financera l’achat et l’installation d’ampoules de basse

consommation dans les municipalités de moins de 200 habitants, tandis que les villes de plus de 25 000 habitants auront cinq ans pour moderniser leurs systèmes d’éclairage public. Dans ces villes, ce sont les entreprises de services énergétiques qui prendront en charge l’investissement initial. Elles seront payées sur la base des économies obtenues sur la facture électrique des municipalités. Reste à savoir si le gouvernement maintiendra ce cap une fois la crise passée. A l’été 2008, lorsque le baril avait atteint les 140dollars, le ministère de l’industrie avait présenté un plan d’économie d’énergie composé de 31 mesures, dont une grande partie, comme le rappelle le quotidien El País, est restée au stade des bonnes intentions lorsque le prix du pétrole est redescendu. p Sandrine Morel

SOURCE : DG ENER, GLOBAL CHANCE

D

ifficile d’économiser l’énergie ! Le rapport sur la politique d’efficacité énergétique de la Commission européenne, présenté mardi 8 mars, ne fixe pasd’objectifs contraignants, et liste des actions que les écologistes jugent insuffisantes. Experts et politiques répètent depuis des années que les économies d’énergie sont un instrument essentiel pour réduire les émissions de gaz à effet de serre et diminuer la dépendance au pétrole – dont le prix du baril se maintient au-dessus des cent dollars depuis début février. Lors du Conseil européen de mars 2007, les gouvernements adoptaient « l’objectif visant à économiser 20 % de la consommation énergétique de l’UE par rapport à l’année 2020 ». Mais cet objectif n’était pas obligatoire, à la différence de ceux concernant, pour 2020, la réduction de 20 % des émissions de gaz à effet de serre et une proportion de 20 % de renouvelables dans la consommation énergétique. En 2009, la Commission avait prévu de proposer un plan sur les économies d’énergie rendant contraignant l’objectif de 20 % de réduction de la consommation. Mais ce document a été repoussé et il ne réapparaît que maintenant, dans une version qui ne fixe pas d’objectif obligatoire aux Etats. Pourtant, le 15 décembre 2010, le

tiques et économiques ». De fait, observe Brook Riley, des Amis de la Terre Europe, « les Etats sont réticents à un nouvel objectif obligatoire : ils se disent qu’il va encore falloir investir, sans qu’on voie les bénéfices immédiats ».

Lobbies du gaz Pourtant, selon les études de la Commission européenne citées danssa communication, leséconomies d’énergie « ont le potentiel d’économiser jusqu’à 1 000 euros par ménage chaque année, d’améliorer la compétitivité, de créer jusqu’à deux millions d’emplois et de réduire les émissions de gaz à effet de serre de 740 millions de tonnes ». Si les Etats n’ont guère montré d’enthousiasme pour renforcer la politique d’efficacité énergétique, le rôle de l’industrie n’est pas négligeable. « Les compagnies électriques et gazières détestent l’efficacité énergétique, parce que l’énergie économisée n’est pas vendue et donc pas source de profit, analyse Claude Turmes. Or, alors que le lobby des économies d’énergie n’est pas organisé, les lobbies du gaz et del’électricité ont l’oreille des ministres de l’énergie. » Le plan de la Commission prévoit une série d’incitations, appuyées sur différentes directives et modifications législatives à venir. Les bâtiments publics devront être rénovés thermiquement au rythme de 3 % chaque

Pour nourrir la planète, l’«agroécologie» doit remodeler l’agriculture Olivier De Schutter, rapporteur spécial des Nations unies pour le droit à l’alimentation, invite à «changer de cap»

P

our satisfaire les besoins alimentaires de la planète, il va falloirsensiblementaugmenter la production agricole, et, dès lors, réinvestir massivement dans l’agriculture. Massivement, mais «surtout différemment », estime le rapporteur spécial des Nations unies pour le droit à l’alimentation, le Belge Olivier De Schutter. Mardi 8 mars, devant le Conseil des droits de l’homme de l’ONU à Genève, il devait appeler la communauté internationale à « une réorientation radicale des investissements dans l’agriculture ». Jusqu’alors,lespolitiquesdesoutien à l’agriculture visaient essentiellement à orienter celle-ci vers un mode de production industriel. Pour M. De Schutter, il faut à présent qu’elles soutiennent « l’agroé-

cologie », autrement dit qu’elles favorisent le développement d’une agriculture s’appuyant sur la polyculture plutôt que la monoculture, utilisant des semences traditionnelles plutôt qu’industrielles, des biopesticides et des engrais organiquesplutôtquedesproduitsdesynthèse, pour lutter contre les espèces invasives et fertiliser les sols. Les traductions de l’agroécologie sont par nature diverses puisqu’à chaque écosystème correspond un type de production adapté. Dans les provinces occidentales de Tanzanie, par exemple, l’agroforesterie a permis de transformer 350 000 hectares de terres, qui étaient hier appelées le « désert de Tanzanie », en une zone agricole riche. Car les arbres fertilisent les sols, limitant le recours aux engrais

azotés, et ils y permettent également une rétention de l’eau de pluie. Au Kenya, au lieu d’utiliser des pesticides, quelque 25 000 agriculteurs recourent depuis 2009 à la stratégie de la « répulsion-attraction».ElleconsisteàplanterduDesmodium dans les champs de maïs afin d’en éloigner les insectes tout en les attirant aux abords des champs. Cette simple technique permet de doubler le rendement tout en améliorant le sol. Par ailleurs, le Desmodium peut servir de fourrage. Ces modes de production à faibleutilisation d’intrants,et qui préservent les ressources, « peuvent être hautement productifs », relève M. De Schutter, qui, dans son rapport annuel remis au Conseil des

droits de l’homme, cite toute une série d’expériences concluantes. «L’agroécologie, insiste-t-il, est une réponse au défi de la pauvreté rurale.»

« Crise de la pauvreté » S’appuyant sur des biopesticides ou des engrais organiques produitslocalement,utilisantdesplantes pouvant capter l’azote et fertiliser les sols, l’agroécologie diminue en effet la dépendance des agriculteurs à l’égard des engrais chimiques et les rend moins vulnérables à l’égard du crédit et des subventions. Ils produisent à moindre coût, sans risque de tomber dans la spirale de l’endettement, et voient leurs revenus augmenter. L’agroécologie limite aussi la dépendance envers l’énergie fossile, contri-

buantainsiàl’atténuationduchangement climatique. «Produire plus ne suffira pas. La crise que nous affrontons n’est pas seulement une crise de l’offre, devait souligner, mardi, M. De Schutter. C’est aussi une crise de la pauvreté:ilfautaugmenterlesrevenus dans les zones rurales, où résident75 %despersonneslespluspauvres,afin qu’elles puissent se nourrir dignement.Etc’estunecriseécologique : des méthodes de production non durables accélèrent le changement climatique et la dégradation des sols et épuisent les réserves d’eau douce, menaçant à terme notre capacité à nourrir la planète. » Pour M. De Schutter, ces crises peuvent être surmontées. Pourvu que l’on « change de cap ». p Laetitia Van Eeckhout

Le secteur de l’aviation devra réduire ses rejets de CO2 de 3 % en 2012, année de son entrée dans le système européen de quotas d’émissions. La Commission européenne a fixé, lundi 7 mars, le plafond imposé aux 4 000 compagnies aériennes opérant dans l’Union. Elles recevront 213 millions de quotas en 2012, puis 208 millions en 2013, alors que leur niveau moyen d’émissions s’est monté à 219 millions de tonnes de CO2 par an entre 2004 et 2006. En cas de dépassement, les sociétés devront acheter des quotas supplémentaires sur le marché du carbone européen. L’inclusion de l’aviation dans le système européen des quotas devrait permettre d’économiser 183 millions de tonnes de CO2 par an d’ici à 2020, selon Bruxelles.

année. La formation des professionnels du bâtiment dans le domaine de l’efficacité énergétique sera renforcée. Les entreprises de services énergétiques – qui se rémunèrent sur les gains de consommation qu’elles génèrent chez leurs clients – seront encouragées. L’autorisation de nouvelles centrales thermiques sera conditionnée à la mise en place de systèmes combinés d’électricité et de chauffage. Les certificats d’économie d’énergie seront amplifiés. Des engagements volontaires de réduction chez les industries seront encouragés. L’éco-design des appareils électroniques (ordinateurs, aspirateurs, climatiseurs, radiateurs, etc.) suivra des normes plus sévères. Enfin, la Commission fonde de grands espoirs sur les réseaux électriques intelligents, où des dispositifs électroniques permettront de mieux gérer la consommation. De même, en ce qui concerne le transport, des systèmesde gestion du trafic sont censés fluidifier le trafic, donc diminuer sa consommation. Le Plan d’efficacité énergétique est présenté conjointement avec la « Stratégie pour 2050 » pour réduire les émissions de gaz à effet de serre en 2050. Dans celle-ci, l’objectif de réduction des gaz à effet de serre reste à 20 % pour 2020, et non 30 % comme le demandaient les députés écologistes. p Hervé Kempf

Pharmacovigilance Le Japon suspend deux vaccins Les autorités japonaises ont suspendu l’utilisation de deux vaccins durant l’enquête déclenchée après la mort, entre le 2 et le 4 mars, de quatre enfants de moins de 2 ans dans les jours suivant l’administration des deux produits. Il s’agit du Prevenar, du laboratoire Pfizer, vaccin contre les pneumonies à pneumocoque, et de l’ActHIB, de Sanofi-Aventis, destiné à prévenir les infections dues à la bactérie Haemophilus influenzae. En France, un nouveau vaccin, Prevenar 13, a remplacé depuis juin2010 le Prevenar. «Six mois après la mise sur le marché et 1,4millions de doses distribuées à ce jour, aucune préoccupation n’a émergé», indiquait, le 24février, un communiqué de l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé. Les autorités américaines ont dit n’avoir «pas d’inquiétude» sur ces vaccins. – (AFP.)

International 5

0123 Mercredi 9 mars 2011

Les révoltes au Maghreb et au Moyen-Orient

La pression extérieure s’accentue sur le régime de Mouammar Kadhafi Le projet de zone d’exclusion aérienne reçoit un soutien grandissant. Sur le terrain, les combats restent incertains

L

es raids aériens des forces loyales au colonel Mouammar Kadhafi contre des positionstenues par larébellion libyenne à Ras Lanouf se sont poursuivis, mardi 8 mars, après d’autres raids lundi contre Brega et Ajdabiya. Aux Nations unies, les efforts diplomatiques se sont intensifiés. La France et le Royaume-Uni ont commencé de préparer un projet de résolution instaurant une zone d’exclusion aérienne en Libye pour empêcher ces bombardements. Ils doivent convaincre la Russie et la Chine, deux des cinq membres permanents du Conseil de sécurité. Ce projet a reçu, mardi, le soutien le chef de l’Organisation de la conférence islamique (OCI), Ekmeleddin Ihsanoglu, qui a toutefois réaffirmé son opposition à une intervention militaire directe en Libye. Paris a affirmé, lundi, que la Ligue arabe serait favorable à une telle initiative. Lundi soir, le Conseil de coopération du Golfe (CCG) s’est également déclaré favorable à la mise en place d’une zone d’exclusion aérienne « pour protéger les civils » en Libye, au terme d’une réunion organisée à Abou Dhabi, aux Emirats arabes unis.

Combats entre pro et anti-Kadhafi TUNISIE

Zawiyah

Raid aérien

Zones aux mains de l’opposition Al-Beida

Tripoli Misratah

Benghazi

Syrte

A LG É R I E

Ghadamès

Ben Jawad

Ghat

LIBYE

S A H A R A

SOURCE : AFP

Alors que les Etats-Unis ont jugé « prématuré » l’armement de la rébellion, le régime du colonel Mouammar Kadhafi a argué de ces efforts diplomatiques pour dénoncer l’ingérence de Paris, de Londres et de Washington. Le chef de la diplomatie libyenne, Moussa Koussa, a accusé lundi soir la France, la Grande-Bretagne et les EtatsUnis de prendre « contact avec ceux qui ont fait défection » et sont passés dans l’opposition pour diviser le pays. De son côté, le président des Etats-Unis, Barack Obama, a envoyé lundi « un message très

É GY PT E

Brega Ras Lanouf

Sebha

Tobrouk

Ajdabiya

A Ras Lanouf, sur la côte libyenne, le 7 mars, une contre-attaque des forces armées demeurées fidèles au colonel Mouammar Kadhafi. GORAN TOMASEVIC/REUTERS

Désert de L i bye Koufra

200 km

clair aux collaborateurs du colonel Kadhafi » pour favoriser des divisions au sein du régime. « C’est à eux qu’il revient de choisir comment ils vont agir à l’avenir. Ils devront rendre des comptes », a averti M. Obama.

« Le sang des Libyens » Plus isolé que jamais sur la scène internationale après trois semaines d’insurrection, le colonel Kadhafi avait déjà accusé la France d’« ingérence » après le soutien apporté, dimanche, par Paris au Conseil national mis en place par l’insurrection à Benghazi,

En Libye, l’absence d’une économie moderne a perpétué les solidarités tribales Vienne Correspondante

Warfalla, Kadhafa, Megarha, Zouwaya, Toubous… : depuis le début de l’insurrection dans l’est de la Libye, le 17 février, les publics arabe et occidental découvrent les noms de groupes tribaux qui renouvellent ou retirent leur allégeance au régime de Mouammar Kadhafi, voire menacent de couper l’approvisionnement en pétrole. Et les combattants dépenaillés de la rébellion ont parfois des allures de guerriers du désert. Pourtant, il ne faut pas exagérer le rôle des tribus dans une société transformée par quatre décennies de «révolution kadhafienne», mais aussi par l’irruption de l’islam politique, avertit Wolfram Lacher, chercheur à l’Institut allemand de politique internationale et de sécurité (SWP), un centre de réflexion, à Berlin, qui conseille le gouvernement allemand. « 85% de la population libyenne habite dans des villes », rappelle au Monde cet expert de l’Afrique du Nord, qui estime cependant que ces allégeances auront une importance significative dans la guerre civile en train de se développer. Les structures tribales ont davantage perduré en Libye que chez son voisin égyptien ou au Maghreb. Cela tient à sa géographie désertique, où la survie dépendait de la solidarité du clan, rappelle Hans-Peter Mattes, spécialiste de la Libye à l’Institut allemand d’études globales et régionales (GIGA) de Hambourg, dans un entretien publié sur le site spiegel.online. Selon lui, Mouammar Kadhafi a su rapidement jouer la carte tribale. Des quelque 140 groupes et clans familiaux recensés par les historiens, une trentaine exerçaient une influence politique avant le coup d’Etat des « officiers libres », en septembre 1969. Trois tribus de l’intérieur sont alors devenues prépondérantes au

détriment des élites côtières: la petite Kadhafa – dont est issu le Guide de la révolution –, son alliée Megarha, à laquelle appartient l’ancien numéro deux du régime, le commandant Abdessalam Jalloud, et la puissante Warfalla, qui compterait près d’un million d’individus, soit un Libyen sur six. Même tombé en disgrâce – et toujours en résidence surveillée –, M. Jalloud a ainsi réussi à s’opposer, six années durant, à ce que les deux accusés de l’attentat de Lockerbie (1988), membres de sa tribu, soient livrés à la justice internationale. La levée des sanctions adoptées par l’ONU n’a pas incité le régime à ouvrir l’éventail de ses appuis internes, au-delà de prétendues réformes destinées à rassurer les partenaires occidentaux. Au

La capacité de résistance des réseaux islamistes risque de peser plus lourd que la nébuleuse des tribus contraire, « depuis les années 1990, presque tous les postes-clés – notamment dans l’appareil de sécurité – sont occupés par la famille ou des gens issus de la tribu de Kadhafi», constatait, en 2008, la chercheuse suisse Isabelle Werenfels. Une aile de la Warfalla avait déjà exprimé ses frustrations en participant, en 1993, à une tentative de putsch : l’année suivante, le Guide crée une instance de consultation des tribus (qu’il a encore réunie au début de la crise actuelle, le 21 février), puis leur impose un « code d’honneur », qui prévoit de les priver collectivement des largesses de l’Etat si certains de leurs membres s’engagent dans des activités séditieuses. En échange, pour se concilier les milieux conservateurs, il introduit certaines dispositions de la

loi islamique, la charia. Malgré un féminisme de façade, les Libyennes restent ainsi largement absentes de l’espace public. Car, dans un système qui a réussi à empêcher « l’émergence de structures économiques modernes, un système où l’on n’est pas rétribué parce qu’on est efficace, mais parce qu’on soutient le régime, les structures tribales restent les mieux adaptées à la distribution de la rente », relève Wolfram Lacher. La Libye entretient un million de fonctionnaires, et figurait, en 2007, au 155e rang (sur 157) dans l’indice de compétitivité internationale mesuré par la fondation américaine Heritage. « Ce que je veux faire dans la vie ? Mais voyons, je suis warfalli ! », ironisaient les moins bien lotis. La rébellion actuelle consacre le retour sur le devant de la scène, selon M. Lacher, d’élites urbaines et claniques privées de leur rôle par la révolution de 1969, surtout dans le nord-est, bastion de l’opposition. Les zaouïas (centres religieux) de la confrérie Senoussiya, colonne vertébrale de l’ancienne monarchie, ont été détruites il y a quarante ans par le régime de Kadhafi. Mais celui-ci n’a jamais réussi à éradiquer la contestation islamiste. Même après le bombardement au napalm, en 1995, des maquis de la région de Derna, en Cyrénaïque, et l’arrestation de centaines de militants qui ont désavoué depuis l’usage de la violence, des filières ont survécu. Les Américains ont été choqués, en découvrant, fin 2007 à Sinjar, en Irak, des données informatiques sur plus de 600 jeunes combattants étrangers recrutés par Al-Qaida : 111 d’entre eux venaient de Libye, dont une cinquantaine de Derna. Dans la période troublée qui s’annonce, la capacité de résistance de réseaux islamistes risque de peser plus lourd que les liens tribaux. p Joëlle Stolz

deuxième ville du pays, le 27 février. Sur place, un porte-parole de ce Conseil a confirmé les informations de plusieurs médias arabes faisant état d’une médiation du Guide libyen. « Un émissaire de Kadhafi est entré en contact avec nous pour tenter de négocier [son] départ. Nous avons rejeté cette proposition. Nous ne négocions pas avec quelqu’un qui a répandu le sang des Libyens et qui continue à le faire», a assuré Moustafa Gheriani à l’agence Reuters. C’est dans ce contexte incertain que l’Union européenne prépare un sommet extraordinaire des 27 chefs d’Etat et de gouvernement de l’Union européenne (UE) sur la Libye, le 11 mars. « Il importe que l’Union européenne agisse avec

détermination et envoie un message clair et positif à l’ensemble de la région pour exprimer son soutien sans réserve à la transition vers plus de démocratie, le pluralisme et

l’inclusion sociale », a écrit, lundi, le président de l’UE, Herman Van Rompuy, dans une lettre adressée aux dirigeants européens. p Service international

Nouvelle vague de sanctions de l’Union européenne L’Union européenne devait adopter, mardi 8mars, une nouvelle série de sanctions financières contre la Libye. Celles-ci consisteront à geler les participations détenues en Europe par la Banque centrale libyenne, et par le fonds souverain qui gère les revenus du pétrole, la Libyan Investment Authority. Cette nouvelle vague de sanctions survient après le gel des avoirs et l’interdiction de visa décidés fin février à l’encontre de 26 responsables

libyens, dont le colonel Mouammar Kadhafi. Le fonds d’Etat dans le collimateur des Européens possède en particulier 3,27% du groupe britannique d’édition Pearson, propriétaire du Financial Times, et 2,5 % de la banque italienne UniCredit. En revanche, les avoirs en Europe de sociétés pétrolières libyennes ne devraient pas encore être gelés : les Vingt-Sept hésitent, car certaines sociétés sont désormais contrôlées par des opposants.

6 International

0123 Mercredi 9 mars 2011

Les révoltes au Maghreb et au Moyen-Orient

En Egypte, la révolution fait tomber la puissante sécurité d’Etat Dans tout le pays, des manifestants ont pris d’assaut les bureaux de l’Amn Al-Daoula

AuMaroc,unallié dupouvoirrejoint lesislamistes Samir Abdelmoula quitte le «parti de l’ami du roi» pour rallier le Parti de la justice Rabat Envoyée spéciale

L

A Alexandrie, des centaines de manifestants ont pris d’assaut l’immeuble de la Sécurité d’Etat, le 4 mars. AHMED MOHAMMED/AP Le Caire Envoyée spéciale

D

es larmes de joie ont encore coulé en Egypte. Pour les innombrables malheureux passés entre les mains des tortionnaires de la redoutable Amn Al-Daoula – la sécurité d’Etat – les 5 et 6 mars seront les vraies dates de la révolution égyptienne. Car durant ces deux jours, les bâtiments abritant, dans tout le pays, ce tentaculaire appareil de répression, sont tombés entre les mains de foules de manifestants. L’armée, seule à assurer l’ordre public depuis le retrait des forces de police, le 28 janvier, occupe désormais tous les quartiers généraux de cette institution – que les militaires n’aimaient guère plus que le peuple – qui la haïssait. Cette victoire a cependant ses revers. Des centaines de documents d’archives – vrais, faux ou fauxvrais – circulent désormais dans le public et les médias. Or ceux-ci étaient, peu ou prou, sous influence de cette sécurité d’Etat, dont l’ombre, et la corruption, s’étendait à tous les secteurs d’activité du pays, et qui est soupçonnée

d’avoir manipulé des affaires de terrorisme islamiste ou de tensions interconfessionnelles. Tout a commencé vendredi, le jour où le nouveau premier ministre Essam Charaf est venu proclamer son « allégeance au peuple » sur la place Tahrir du Caire. Les manifestants l’ont applaudi, tout en entonnant un nouveau mot d’ordre : « Le peuple veut la fin de la

Descentaines de documents d’archives –vrais, faux ou faux-vrais – circulent désormais dans le public et les médias sécurité d’Etat. » A Alexandrie, le soir même, les agents de cet appareil auraient commencé à brûler leurs dossiers compromettants, aux dires de témoins qui ont alerté des manifestants. Accueillis par des tirs, ceux-ci ont fini par prendre d’assaut le QG – avec ou sans la complicité de l’armée. Le scénario s’est répété, samedi puis dimanche, dans toutes les

villes du pays – mais sans résistance, cette fois, autre que celle des militaires entourant les bâtiments, déjà désertés par leurs occupants. L’armée a généralement fini par laisserentrer des représentantsdes protestataires, accompagnés d’envoyés du parquet. Mais parfois, ils se sont trouvés débordés, comme dans le QG principal du Caire, situé dans la banlieue de Madinat Nasr : 2 500 manifestants, selon l’agence officielle,ontfini parsillonnerl’immense forteresse, ses bureaux, installations d’écoute et mini-cellules secrètes et aveugles installées dans les sous-sols. Ils ont filmé et ramassé les dossiers qui n’avaient pas été brûlés, broyés ou emportés ailleurs, « ou bien laissés exprès pour nous induire en erreur », mettaitengarde, surTwitter,unactiviste du mouvement des jeunes. Alors que des documents présentés comme issus de ces archives apparaissaient dimanche dès l’aube sur des comptes Facebook créés pour l’occasion, le Conseil suprême des forces armées (CSFA), dans son communiqué n˚27, a appelé à remettre d’urgence tous les documents saisis au parquet. En précisant que leur divulgation

tombait sous le coup de la loi, pour atteinte à la sécurité intérieure – et extérieure – de l’Etat. Des journaux en ont néanmoinsévoquécertains:ils compromettentdes juges,ministres, opposants ou journalistes qualifiés d’« amis de la sécurité » ; rendent compte de « plans » de destruction des archives ou de « dissolution simulée» de la sécurité d’Etat pour mieux la préserver, ou d’« analyses » accusant en bloc les EtatsUnis, l’Union européenne et Israël d’avoir provoqué la révolution égyptienne ; voire impliquent la sécurité d’Etat dans des attentats dans le Sinaï, ou dans celui du 31 décembre 2010 dans une église d’Alexandrie. L’arrestation de dizaines d’officiers de la sécurité d’Etat accusés de destruction d’archives a étéannoncée lundi, alors que le chef du CSFA, le maréchal Hussein Tantaoui, présidait à l’investiture du nouveau gouvernement.Unnouveauministredel’intérieur, ungénéraldepolice, aura la responsabilité – jusquelàtoute théorique– de cet Etat dans l’Etat qu’était l’Amn Al-Daoula. Pour tenter de la réformer. p Sophie Shihab

a nouvelle a fait l’effet d’une bombe : Samir Abdelmoula, jeune homme brillant et gâté, archétype de la bourgeoisie des affaires au Maroc, quitte le « parti de l’ami du roi » pour rejoindre les islamistes du Parti de la justice et du développement (PJD). Est-ce le débutde la fin pour le Parti authenticité et modernité (PAM), une formation qui doit sa notoriété au fait qu’elle a été créée, en 2008, par Fouad Ali Al-Himma, un ami d’enfance du roi ? Cette défection s’inscrit en tout cas dans l’atmosphère de fronde qui agite le royaume depuis le début desrévoltes arabes. C’est ce week-end que Samir Abdelmoula, homme d’affaires de 36 ans, vice-président d’une société de transport maritime (la Comarit), originaire de Tanger dont il a été le maire, a annoncé sa démission du bureau politique du PAM. Une gifle pour ce parti qui voyait dans le jeune homme et sa famille un allié de poids dans le nord du royaume pour les échéances électorales de 2012. Or non seulement M. Abdelmoula claque la porte du parti, mais il rejoint son principal adversaire, le PJD. La nouvelle en fait ricanerplus d’un :Samir Abdelmoula, Ray-Ban et look de playboy, est connu pour être un bon vivant, à l’opposé du profil supposé de l’islamiste. Sur ses motivations, l’intéressé ne s’explique guère. « Je n’ai jamais été favorable à la marginalisation ni à la diabolisation du PJD, dit-il simplement. Dans le cadre de mes fonctions de maire de Tanger [de juin 2009 à octobre 2010], j’ai eu l’occasion de les côtoyer, ce sont des gens fréquentables et sérieux. » De son expérience de maire, qui n’aura duré que dix-sept mois, car ila fini par démissionner,M.Abdelmoula garde un souvenir cuisant. Le pire dans sa mémoire reste le conflit qui l’a opposé à Veolia et à sa filiale Amendis, chargée de la distribution de l’eau et de l’électricité à Tanger. L’ancien maire accuse la multinationale d’imposer des prix exorbitants pour ses services et de refuser obstinément, depuis 2006, la révision quinquennale prévue dans le contrat. « Tanger est la seule ville au monde où la facture d’eau et d’électricité est plus lourde que le

loyer ! », dit-il avec exaspération. Le PAM ne l’a pas soutenu dans sa lutte, pas plus qu’il ne l’a aidé dans son combat contre la corruption, « le fléau de Tanger et de tout le Maroc », déplore-t-il. « Il s’est senti très seul. C’est pour cela qu’il a abandonné la mairie de Tanger. Et c’est pour cela qu’il a décidé de quitter le PAM », indique un de ses proches selon lequel « on peut tout lui reprocher sauf sa lutte contre la corruption, qui est sincère ». Une chose est sûre : en abandonnant le PAM, Samir Abdelmoula ouvre une brèche. Depuis quarante-huit heures, le jeune homme reçoit de nombreux SMS d’élus communaux qui lui annoncent leur intention de rendre, eux aussi, leur carte du PAM. Voilà longtemps que le « parti de l’ami du roi » se voit reprocher

Cettedéfections’inscrit dansl’atmosphère defrondequiagite leroyaume d’être instrumentalisé par le Palais et de contribuer à paralyser toute vie politique au Maroc. Mais la rage avec laquelle il est aujourd’hui publiquement montré du doigt, et même présenté comme l’un des maux du royaume, est nouvelle. Dans les manifestations du 20février, organisées parde jeunes contestataires reliés par Facebook, on pouvait lire sur de nombreuses pancartes : « PAM dégage», « Al-Himma dehors», ou encore Pamtagia, en écho au fameux Baltagia égyptien (« salopards »). « Le PAM, c’est fini ! Il a voulu imposer au Maroc un parti [unique] à la Ben Ali, mais il a échoué ! Samir Abdelmoula ne sera pas le dernier à quitter ce parti et à nous rejoindre », prédit Abdelilah Benkirane, le secrétaire général du PJD. Pour le chef du seul parti islamiste agréé du royaume, il serait grand temps que le roi « débarrasse le Maroc » de trois personnes « néfastes » qui gravitent autour de lui : « Fouad Ali Al-Himma [son ami d’enfance], Lyas El-Omari, [bras droit d’Al-Himma] et Mounir Majidi [son secrétaire particulier]. Tous trois se comportent en chefs de bande et s’ils se sont imposés jusque-là, c’est par la terreur. »p Florence Beaugé

Le gouvernement tunisien supprime les organes de la police politique Tunis a retrouvé son calme après le départ de l’ancien premier ministre, Mohamed Ghannouchi, et les manifestants de la Casbah ont plié bagage Tunis Envoyée spéciale

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n annonçant, lundi 7 mars, par un simple communiqué du ministère de l’intérieur, la « suppression de la direction de la sûreté de l’Etat » et, plus généralement, de « toute forme d’organisation s’apparentantà la police politique », le gouvernement tunisien de Beji Caïd Essebsi a pris tout le monde de court. C’est une « vraie surprise », a reconnu, lundi soir, le président de la Ligue tunisienne de défense des droits de l’homme (LTDH), l’avocat Mokhtar Trifi, qui s’est félicité de cette décision « extrêmement importante ». Les tortionnaires de l’ancien régime « ne doivent pas, pour autant, échapper à la justice », prévient Me Trifi. Présidente du Conseil national pour les libertés en Tunisie (CNLT), Sihem Bensedrine, victime elle-même, pendant desannées,duharcèlement dessbi-

res du « KGB tunisien », a qualifié de« formidable » lamesuredu gouvernement. La crainte reste vive, néanmoins, de voir réagir, par la violence, ces policiers de l’ombre, « qui ont de l’argent et gardent le contact avec les acteurs de l’ancien régime», estime Mme Bensedrine. Nul doute que ces derniers, parmi lesquels plusieurs conseillers de l’ancien président déchu Zine El-Abidine Ben Ali et certains hauts gradés du ministère de l’intérieur, auront aussi entendu le message. Les casseurs de l’avenue Bourguiba qui ont, deux jours durant, à la fin février, semé la terreur dans le centre de la capitale, avaient fait craindre, un moment, un retour en force de la « contre-révolution », selon la formule consacrée. Le nouveau premier ministre Beji Caïd Essebsi, dont le discours du 4 mars a contribué, par sa fermeté, à rassurer une population tunisienne lassée des violences de la rue, confirme ainsi sa volonté de

restaurer l’autorité de l’Etat, en mettant fin aux désordres – d’où qu’ils viennent. La place de la Casbah, fief de la contestation radicale et rendezvous de la jeunesse, a retrouvé son calme : les manifestants, satisfaits du départ du premier ministre Mohammed Ghannouchi, membre de l’ancien régime, ont plié bagage, nettoyant la place à grande eau et repeignant en blanc les murs barbouillés de graffitis.

« Sans haine et sans passion » L’avenue Bourguiba, malgré des frises de barbelés, posées ici et là, devant l’ambassade de France notamment, estenvahiepar la foule des badauds, et les terrasses des cafés, soleil oblige, sont prises d’assaut. Quant aux sages protestataires de la Coupole, complexe sportif du quartier d’Al-Menzah, ils ont, eux aussi, décidé de lever le pied. Parfois considérés comme des « anti-Casbah », ces manifestants

atypiques, représentants de la classe moyenne, se sont rassemblés chaque soir, durant une semaine, afin d’exprimer leur désir d’une révolutionpacifique et leur rejet de toute « surenchère extrémiste ». Ils étaient plusieurs milliers, samedi, pour un dernier rendez-vous aux allures de kermesse, avec ventes de tee-shirts aux couleurs du drapeau tunisien et collectes « en faveur des réfugiés » de la frontière libyenne. « Etudions, travaillons ! », pouvait-onlire sur les banderoles géantes, tandis qu’orateurs et rappeurs se succédaient à la tribune, certains conspuant le dirigeant du syndicat UGTT (Union générale du travail tunisien), Abdesselam Jrad, accusé de souffler sur les braises de la révolte après avoir été, des années durant, un proche de l’ancien régime. « Nous, on ne revendique rien, sinon la reprise de l’économie », résume un jeune cadre, membre de l’association Touensa. En attendant le 24juillet, date de

l’élection des représentants de l’Assemblée constituante, la Tunisie avance en zigzaguant. « Nous sommes dans une période de consensus instable », résume la juriste Senna BenAchour,présidentedel’Association tunisienne des femmes démo-

Un nouvel ambassadeur de Tunisie auprès de l’Unesco M. Khemaïs Chammari, opposant de longue date au président déchu Ben Ali, vient d’être nommé ambassadeur de Tunisie auprès de l’Unesco à Paris. Economiste de formation, cet ancien vice-président de la Fédération internationale des ligues des droits de l’homme (FIDH) a été député au Parlement tunisien, du Parti démocrate socialiste (PSD, opposition), avant d’être condamné à cinq ans de prison par le régime Ben Ali. Après sept ans d’exil en France, M. Chammari avait regagné Tunis en 2004.

crates (ATFD). Dernier exemple en date :la plainte déposée, la semaine dernière, par un groupe d’avocats afin d’obtenir la suspension de la commission chargée d’enquêter sur les affaires de corruption. «Pourquoicetteplainte?Dansl’intérêt de qui ?», fait mine de s’interroger le juriste Abdelfattah Amor, qui dirigelacommission.«L’ancienprésident Ben Ali aurait-il donné mandat à quelqu’un pour parler en son nom?»,ajouteM.Amor,ancienprésident du Comité des droits de l’homme des Nations unies. La commission, auprès de laquelle quelque 5 000 dossiers ont été déposés, a déjà auditionné des dizaines de personnes, dont « une quinzaine d’anciens ministres ou hauts dirigeants » de l’ère Ben Ali. Une vingtaine de dossiers ont déjà été transmis à la justice. La commission, insiste Abdelfattah Amor, poursuivra sa tâche « sans haine et sans passion ». p Catherine Simon

International 7

0123 Mercredi 9 mars 2011

Les révoltes arabes

Lesprojetsdel’UEpouraider lesuddelaMéditerranée La Commission européenne propose un «pacte pour la démocratie et la prospérité» Bruxelles Bureau européen

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osé Manuel Barroso devait proposer, mardi 8 mars, un « Pacte pour la démocratie et la prospérité » aux pays de la Méditerranée. L’initiative présentée par le président de la Commission européenne a été préparée sous la pression des événements afin de nourrir les discussions entre les chefs d’Etat et de gouvernement, lors du sommet extraordinaire sur la Libye et le monde arabe, vendredi 11mars. Tandis que la France propose de relancer l’Union pour la Méditerranée (UPM), la Commission souhaite refondre au plus vite les instruments politiques et financiers dont elle dispose afin de stabiliser les pays en pleine transition. Pour elle, il s’agit de «réorienter » la politique de voisinage menée en direction du sud de la Méditerranée afin, selon un haut responsable, « d’éviter que les révolutions ne soient volées». La Commission, qui a longtemps fermé les yeux sur les dérives autoritaires des dirigeants de la région, propose de favoriser les pays engagés vers la démocratie, la Tunisie et l’Egypte en particulier. Il s’agit aussi de renforcer les engagements politiques pris par les pays soutenus par les fonds européens. «Ceux qui s’engagent de plus en plus rapidement dans les réformes devront pouvoir compter sur un plus large soutien de la part de l’Union européenne », selon le projet de document soumis aux com-

missaires européens, mardi. L’aide européenne pourra être révisée pour « ceux qui retardent ou réduisent les plans de réformes approuvés ». Une série d’indicateurs vont être définis, dont la tenue d’électionslibres,afin dejuger desperformances des pays aidés. La Commission énonce par ailleurs une série de propositions susceptibles de soutenir la transition sur le plan économique. Avec un double objectif : éviter tout afflux migratoire et réduire les risques de radicalisation politique. Elle milite en faveur d’accords de libre-échange afin de renforcer «l’intégration » économique entre l’UE et la région. Plutôt que de créer une banque pour la Méditerranée, Bruxelles propose de modifier le mandat de la Banque européenne de reconstruction et de développement (BERD), créée après la chute du Mur de Berlin pour aider l’Europe de l’Est, afin qu’elle puisse agir en Afrique du Nord. Certaines des suggestions font débat. La Commission propose ainsi un « partenariat pour la mobilité » aux pays en pleine transition, tandis que des pays comme l’Italie et la France craignent une vague migratoire incontrôlée et que d’autres, comme l’Allemagne, ne veulent pas entendre parler d’une libéralisation rapide des visas. Les Etats d’Europe centrale se méfient par ailleurs de tout redéploiement des moyens financiers au profit de la rive sud de la Méditerranée.p Philippe Ricard

Iran:sous lapression,M.Rafsandjani cède laprésidencede l’Assembléedesexperts La perte d’un poste-clé par l’ex-président de la République illustre la crispation et l’isolement du pouvoir

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umeurs, pressions et de rares déclarations :la campagne pour l’élection du président de l’Assemblée des experts, ce rouage religieux de la République islamique au rôle en théorie essentiel puisqu’il peut « élire, contrôler ou démettre le Guide suprême », a été aussi discrète qu’acharnée. Le dénouement est intervenu mardi8 mars, lorsque les 86 mojtaheb (docteurs de la loi) qui composent l’Assemblée se sont retrouvés pour une élection qui a lieu tous les deux ans. L’ancien président de la République Ali Akbar Hachemi Rafsandjani a cédé de lui-même la place qu’il occupait depuis 2007 à la tête de cet organe de pouvoir à l’ayatollah Mohammad Reza Mahdavi Kani, 80 ans. Cet ayatollah conservateur, éphémère premier ministre par intérim peu après la révolution de 1979 et dirigeant de l’université Imam-Sadeghquiformeles élitesdelaRépublique islamique, était soutenu par les fondamentalistes. Conscient de ce que la bataille était perdue d’avance après les pressions dont ont été l’objet les membresde l’Assemblée (unebonne trentaine avait fait allégeance à M. Mahdavi Kani avant le vote), M. Rafsandjani a préféré éviter un affrontement interne dévastateur. Mais dans son discours d’ouverture de la séance de l’Assemblée il n’a guère mâché ses mots, sortant de sa réserve habituelle. Expliquant que « le monde d’aujourd’hui n’est plus le même

qu’il y a trente ans », il a mis en cause les plus hautes autorités du régime entraînées dans une spirale de répression face à toute forme de contestation, en déclarant : « La République islamique a perdu la confiance des fidèles, la solution n’est pas la terreur mais le dialogue. » Evoquant le vote des « experts », M. Rafsandjani a ajouté : « Ici, les décisions sont prises en dehors de cette Assemblée. » Ce qui était une allusion très claire à l’un des paradoxes de cette Assemblée, où les « experts » chargés de surveiller les

« La République islamique a perdu la confiance des fidèles» Ali Akbar Hachemi Rafsandjani actions du Guide suprême sont avalisés par ce même Guide sur une liste restreinte soumise ensuite au vote de la population… Enfin, l’ancien président de la Républiques’estlivré àune vivecritique des dérives du régime parlant de « mystification », de « paroles vidées de tout sens islamique » et de « mensonges » permanents. Pourquoi une telle violence dans ses propos ? Parce qu’en réalité, l’épisode qui s’est dénoué mardi, le début de l’éviction de M. Rafsandjani, n’est que l’aboutissement d’une rivalité politique qui dure depuis plus de vingt ans entre le Guide suprême,

Ali Khamenei, et M. Rafsandjani. Ce dernier, personnage très contesté (le pouvoir l’accuse régulièrement de corruption) mais historique, et surtout dernier « poids lourd » du régime à ne pas s’être totalementaligné sur leclan fondamentaliste au pouvoir, a pourtant été le « parrain » de M. Khamenei lorsqu’il a succédé à l’imam Khomeyni à sa mort, en 1989. Depuis, les relations entre les deux hommes se sont dégradées. M. Rafsandjani, qui a l’écoute des grands ayatollahs de Qom, la ville sainte, ou des membres influents du bazar en raison de sa politique affairiste, s’était rendu incontournable. Il était devenu une gêne pour le nouveau Guide suprême qui a toujours manqué, entre autres, d’une grande légitimité religieuse. C’est ainsi qu’en 2005, le clan conservateur, à l’instigation de M. Khamenei, avait évincé M. Rafsandjani de l’élection présidentielle. Le Guide lui ayant préféré la candidature du maire populiste de Téhéran, Mahmoud Ahmadinejad. Une situation qui s’est encore dégradée lors des manifestations suscitéesen juin2009 parla réélection contestée de M. Ahmadinejad. Tout en gardant ses distances, M. Rafsandjani, connu pour son pragmatismeet sonhabiletéà trouver des compromis, a soutenu le mouvement « vert » d’opposition, appelant dans un discours remarqué en juillet 2009, au « dialogue » devant « la grave crise de confiance

populaire qui met l’avenir de la République islamique en danger ». A l’heure où, devant un regain de contestation en dépit de la répression, le pouvoir iranien s’est durci demandant à chacun de faire allégeance, l’élimination de l’ancien président de la République d’un poste stratégique semblait cruciale à ses yeux. Ce n’est pas la première fois que les ultraconservateurs tentaient de le déloger de l’Assemblée des experts. Ces dernières années M. Khamenei avait favorisé l’élection d’experts qui lui sont proches, souventpassés par des postesidéologiques dans les forces armées, mais M. Rafsandjani avait réussi à sauver sa place. Cette fois, il a jeté lui-même l’éponge,semblant seplacer ouvertement dans une forme d’opposition. Il lui reste encore des atouts, ne serait-ce que son poste à la tête du Conseil de discernement qui arbitre les litiges entre le Parlement et le gouvernement. Sa disparition d’un poste-clé comme celui de président de l’Assemblée des experts marque cependantuntournant. «SiRafsandjani saute, le Guide aura franchi la dernièreligne rouge: il sera plusisolé que jamais face à l’opposition, car seul M. Rafsandjani a l’étoffe et la crédibilité pour lancer un pont, si c’est encore possible entre pouvoir et opposition », nous confiait peu avant l’élection un dirigeant réformateur de passage à Paris. p Marie-Claude Decamps

Cet animal va être égorgé à vif sans étourdissement et dans de grandes souffrances. Crédit photo : Getty Images

C’est ça, un abattage rituel. “Du point de vue de la protection des animaux et par respect pour l’animal en tant qu’être sensible, la pratique consistant à abattre les animaux sans étourdissement préalable est inacceptable, quelles que soient les circonstances.” Fédération des Vétérinaires d’Europe, Avis 02/104, 2006.

abattagerituel.fr

Œuvre d’Assistance aux Bêtes d’Abattoirs - Fondation Brigitte Bardot - Fondation Assistance aux Animaux - Protection Mondiale des Animaux de Ferme Conseil National de la Protection Animale - Société Nationale pour la Défense des Animaux - Confédération Nationale des SPA de France

8 International&Europe

0123 Mercredi 9 mars 2011

Irlande:lenouvelexécutifveutrenégocier BarackObama autoriseladétention lesconditionsdel’aidedel’UEetduFMI provisoireillimitée Le programme de la coalition gouvernementale entre le Fine Gael et le Labour demeure flou àGuantanamo Londres Correspondante

Le décret concerne 47 détenus. Aucun nouveau suspect ne pourra être ajouté Washington Correspondante

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ar un décret présidentiel publié lundi 7 mars, Barack Obama a autorisé les détentions provisoires illimitées sur la base américaine de Guantanamo, à Cuba. Cette mesure a déçu les défenseurs des droits de l’homme mais ils ont été soulagés de voir que le président américain n’avait pas cédé aux appels à institutionnaliser les incarcérations sans jugement. Seuls les 47 détenus qui ne peuvent ni être jugés, faute de preuves, ni remis en liberté, de peur qu’ils repartent au combat, sont concernéspar le décret.Aucun nouveau suspect ne pourra être ajouté. « L’administration est réticente à étendre la détention illimitée au-delà des cas dont elle a hérité de l’administration Bush », s’est félicitée l’ONG Human Rights Watch tout en condamnant fermement une pratique qui constitue une « violation du droit international ». Dans son discours aux Archives nationales il y a deux ans, M. Obama avait indiqué qu’il n’excluait pas de maintenir les détentions sans jugement. Mais il ne voulait pas qu’un seul homme, fût-il président, puisse décider tout seul de l’incarcération d’un individu. Il envisageait une codification par la justice ou le Congrès. Devant les protestations des juristes, Barack Obama a renoncé à ce qui aurait abouti à faire entrer dans le droit des mesures d’exception. Quant au contrôle des décisions, il sera exercé par un nouvel organisme, le « Bureau de révision périodique », composé de représentantsdesministèresdela défense, de la justice, de la sécurité intérieure, des affaires étrangères

et des services de renseignement. Les responsables américains réfutent l’idée que la démarche ressemble fort à celle du président George W.Bush, qui, en 2004, pour répondre aux critiques de la Cour suprême,avaitdonnéauxdétenuslapossibilité de voir leur dossier passé en revue par un organe administratif, le Combatant Status Review Tribunal. Selon eux, « le processus est beaucoupplussérieux»:les47détenus auront droit à un « représentant » qui aura accès aux éléments à charge et défendra leur situation une fois tous les six mois. Ils pourront aussi avoir leur propre avocat (non payé par l’Etat).

Commissions militaires La Maison Blanche a indiqué ne pas renoncer à juger des détenus sur le territoire américain, bien que le Congrès lui dénie les fonds. Elle a aussi annoncé que les commissions militaires, réformées par le Congrès en 2009, vont reprendre pour juger les détenus. Enfin, le président va proposer au Sénat de ratifier le protocole additionnel II et l’article 75 du Ier protocole des conventionsde Genèvequi améliorent les conditions de détention des prisonniers. Ronald Reagan l’avait soumis au Sénat en 1987, sans succès. Neuf ans après l’ouverture, 172 détenus sont encore à Guantanamo. Outre les 47 voués à la détention indéfinie, 36 sont poursuivis devant la justice, 89 sont en attente de transfèrement dans un autre pays. Indispensable concession aux républicains, à moins de deux ans de l’élection présidentielle : le décret mentionne expressément qu’aucun détenu ne pourra être remis en liberté sur le territoire américain.p Corine Lesnes

Sud-Soudan

Près de 100 morts dans des combats entre armée et rebelles KHARTOUM. Près de 100 personnes ont été tuées, dimanche 6 et lundi 7 mars, dans des combats entre l’armée sudiste et des milices rebelles dans les Etats du Haut-Nil et du Jonglei, au Sud-Soudan, province semiautonome de la Fédération soudanaise, qui devrait déclarer son indépendance au mois de juillet. Ces affrontements opposent l’Armée de libération des peuples du Soudan (SPLA) aux hommes du général George Athor, un ancien haut gradé de la SPLA entré en rébellion. Dans l’Etat du Jonglei, situé à la frontière avec le Nord, 21 personnes ont été tuées, dont sept soldats, lundi. Le 9 février, des violences similaires s’étaient soldées par la mort de 200 personnes. Les relations entre le Nord et le Sud s’étaient apaisées pendant le référendum d’autodétermination du Sud-Soudan, début janvier. Juba, capitale du Sud-Soudan, a, depuis, accusé George Athor d’agir pour le compte de Khartoum afin de déstabiliser le Sud, ce qu’ont nié les responsables nordistes. Khartoum, de son côté, accuse les autorités sudistes de soutenir les groupes rebelles du Darfour, région de l’ouest du pays. – (AFP.)p

Etats-Unis Barack Obama nomme son secrétaire au commerce ambassadeur en Chine WASHINGTON. Le président Barack Obama devait nommer, mardi 8 mars, son secrétaire au commerce, Gary Locke, ambassadeur des EtatsUnis en Chine, a annoncé, lundi 7 mars, un responsable américain sous le couvert de l’anonymat. La nomination de M. Locke, fils d’immigrés chinois et ancien gouverneur de l’Etat de Washington, devra être entérinée par le Sénat. Il remplacerait Jon Huntsman, un ex-gouverneur républicain modéré de l’Utah. M. Locke pourra se prévaloir d’une grande expérience de négociateur avec les autorités chinoises, au moment où les relations sino-américaines sont marquées par des tensions, en particulier sur des dossiers commerciaux et monétaires. – (AFP.)

Pakistan Un attentat fait 20 morts et 127 blessés LAHORE. Au moins 20 personnes ont été tuées et 127 blessées, mardi 8 mars, par une bombe qui a déclenché une série d’explosions dans une station d’essence du centre du Pakistan. Le pays est en proie à une vague d’attentats sans précédent : plus de 450 en trois ans et demi, perpétrés pour l’essentiel par des kamikazes talibans, alliés à Al-Qaida. Ces attaques ont tué plus de 4 000 personnes. Elles ont visé le plus souvent les forces de sécurité – armée, police, services de renseignement –, mais aussi, de plus en plus fréquemment, des cibles civiles. Les talibans ont déclaré le djihad à Islamabad pour son soutien à la « guerre contre le terrorisme » menée depuis fin 2001 par les Etats-Unis. – (AFP.)

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n ne savait pas encore, lundi 7 mars, quels seraient les ministres du nouveau gouvernement irlandais qui doit se réunir pour la première fois mercredi. Les élections du 25 février, si elles ont clairement mis à bas le Fianna Fail qui a dominé la vie politique de la jeune république depuis quatre-vingts ans, n’ont en effet donné de majorité parlementaire à aucune des formations en lice. Conséquence, le Fine Gael de centre droit, premier groupe avec 76 sièges, a dû s’allier au Labour et à ses 37 députés. Dimanche, les deux partis, dont la dernière collaboration au gouvernement remonte à 1994-1997, sont parvenus à un accord de coalition qui reste flou à bien des égards. Dans un document de 64 pages, ils tentent de dégager les grandes lignes qui guideront la législature à venir. Alors que la crise immobilière et financière a mis à terre le « tigre celtique », le nouvel exécutif s’engage à ramener le déficit budgétaire à 3 % du produit intérieur brut (PIB) en 2015, contre 32 % en 2010. Et, en la matière, à respecter l’engagement de ses prédécesseurs vis-à-vis de l’Union européenne (UE) et du Fonds monétaire international (FMI), qui lui ont accordé un prêt de 85 milliards d’euros en novembre 2010 pour lui éviter la faillite pure et simple. Enda Kenny, le chef du Fine Gael, appelé à être premier ministre, visait 2014 quand Eamon Gilmore, son homologue travailliste promis au poste de vice-premier ministre, souhaitait retarder l’échéance à 2016. Reste désormais à savoir comment Dublin compte mettre en œuvre cette cure d’austérité sans précédent. Quelque 6 milliards d’euros de hausses d’impôts et de baisses des dépenses publiques sont prévus

Enda Kenny (à droite), le futur premier ministre, et ses partisans à Castlebar. C. MCNAUGHTON/REUTERS pour 2011. Il manque encore 9 milliards d’ici quatre ans pour atteindre l’objectif. Les deux partis se sont certes entendus pour supprimer 25 000 postes dans le secteur public, un compromis entre les 18 000 revendiqués par le Labour et les 30 000 préconisés par le Fine Gael. Mais ils parlent, aujourd’hui, de départs volontaires, avec tout ce que cela implique d’incertitudes. Pour le reste, l’accord de coalition se prive de marges de manœuvre plus qu’il ne donne des pistes.

Compteurs d’eau L’impôt sur le revenu ne sera pas rehaussé, pas plus que les charges sur le travail. Quant à la TVA sur les services, elle sera allégée. Côté recettes, la mise en place d’une taxe sur la propriété est évoquée, sans plus de détails, ainsi que la vente d’actifs non stratégiques de l’Etat et l’installation de

compteurs d’eau qui permettront de faire payer aux Irlandais leur consommation effective au lieu de leur facturer un forfait annuel. Le partage prévu, pour des raisons politiques, du ministère des financesendeux – avecle budget et les banques pour un ministre Fine Gael d’un côté, les dépenses publiques et la réforme de l’Etat pour un ministre Labour de l’autre –, laisse augurer un processus décisionnel compliqué et laborieux. Dans l’immédiat, le nouveau gouvernement s’est donné comme priorité de renégocier avec l’UE et le FMI les conditions de cette aide internationale que les Irlandais jugent humiliante. Il souhaite obtenir une baisse du taux de 5,8 %, plus élevé même que celui qui a été imposé à la Grèce. Angela Merkel a déjà prévenu que ce serait « donnant, donnant ». Alors que la chancelière allemande prône un pacte de compé-

titivité et une plus grande coordination des politiques économiques au sein de la zone euro, il semble probable que Berlin en profite pour demander une nouvelle fois à Dublin d’augmenter le taux de son impôt sur les sociétés, aujourd’hui de 12,5 %, si attirant pour nombre de multinationales. Une concession dont, jusqu’ici, aucun parti politique ne voulait entendre parler. Le nouveau gouvernement a par ailleurs décidé de ne pas respecter deux des engagements qui avaient été pris par le précédent dans le cadre de la négociation du prêt de l’UE et du FMI : celui de vendre le plus vite possible tous les actifs des banques, quitte à les brader, et celui de recapitaliser ses institutions financières sans attendre les résultats des stress tests (« tests de résistance »), prévus pour la fin mars. p Virginie Malingre

La Slovénie souhaite jouer un rôle de pont entre les Etats des Balkans occidentaux et l’Union européenne Alors que la Serbie et le Kosovo s’apprêtent à ouvrir un dialogue historique, le premier ministre de la Slovénie, Borut Pahor, redoute le manque d’intérêt des Vingt-Sept Rencontre

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e processus s’annonce long, noueux et incertain, mais il est historique. Pour la première fois depuis février 2008 et la proclamation de l’indépendance du Kosovo, Belgrade et Pristina devaient entamer un dialogue direct, mardi 8 mars à Bruxelles. Un dialogue fortement encouragé par l’Union européenne (UE) qui provoque de vifs débats dans les deux pays. Le Kosovoconsidèreque la question de son statut est réglée, alors que Belgrade refuse de reconnaître son ancienne province. Pour contourner cet obstacle, le pari européen consiste à nouer une relation sur des questions de vie quotidienne, comme la libre circulation des personnes et des biens et l’implantation de l’Etat de droit. La délégation serbe est conduite par un diplomate, Borko Stefanovic; celle du Kosovo par la vice-première ministre, Edita Tahiri. Mais cet événement positif ne suffit pas à rassurer les avocats de l’entrée des pays balkaniques dans l’UE. Gagnés par les crispations identitaires, les Etats membres regardent vers le sud et craignent une intensification des flux migratoires. Les Balkans occidentaux, victimes des révoltes dans le monde arabe ? En visite à Paris lundi 7 mars, le

premier ministre de la Slovénie, Borut Pahor, a confié au Monde sa crainte d’un oubli de la région. « Du fait de la crise, l’élargissement a rétrogradé, trop bas selon moi, sur l’agenda européen », dit-il. Selon M. Pahor, « il existe une peur dans l’air bruxellois, quand on parle des Balkans. Ça paraît tellement compliqué que le réflexe est de se dire : mon Dieu, pourrait-on peut-être remettre ça à plus tard ? » Petite par la taille et la population (2 millions d’habitants), la Slovénie n’en joue pas moins un rôle important de pont entre l’UE et les aspirants de la région, après avoir longtemps tourné le dos à ces voisins tourmentés, impliqués dans les guerres sanglantes des années 1990. La Slovénie est le seul pays des Balkans occidentaux à avoir déjà intégré l’Union, en 2004. A présent, elle se prétend médiatrice, en érigeant en exemple à suivre le règlement du conflit frontalier qui l’opposait à la Croatie, validé par référendum le 6 juin 2010. Enmars 2010, la Slovénie a organisé à Brdo Pri Kranju une réunion de six pays de la région pour relancer le processusd’intégration européenne. « La région se trouve à la croisée des chemins, dit le premier ministre slovène. Si nous estimons que la paix suffit et qu’il n’est pas nécessaire de s’occuper d’autres questions multilatérales, nous allons rater l’occasion unique de

parvenir à la réconciliation et à la prospérité. Dans un avenir très proche, on pourrait arriver à une situation imprévisible », avertit M. Pahor, en référence aux mouvements sociaux intenses en Albanie et en Serbie, depuis le début 2011. « Si les problèmes sociaux se transformaient en problèmes nationaux, précise-t-il, personne ne pourrait prévoir la suite. »

La Slovénie est le seul pays des Balkans occidentaux à avoir déjà intégré l’UE Le président serbe, Boris Tadic, avait déclaré forfait au dernier moment lors de la réunion de Brdo Pri Kranju. Malgré ce revers, la conférenceaconfirmél’intensification du dialogue entre les anciens membres de la Fédération yougoslave,aux économiesdeplusenplus imbriquées.«La Slovéniepeutaider l’UE à saisir la subtilité des problèmes dans les Balkans et à les résoudre, explique M. Pahor. Par exemple, Paris et Berlin ne voient pas forcément le début des échanges entre Belgrade et Pristina comme une grande avancée. Mais si ce processus est lancé, il pourrait conduire à des solutions définitives.» L’une des hypothèses envisagées par les Européens consisterait

àtrouverun compromis sur unstatut spécial pour le nord du Kosovo, autour de la ville de Mitrovica, toujourscoupée endeux entre population serbe et partie albanaise. Mais ces discussions sur l’avenir pourraient être perturbées par les spectres du passé. La question des crimes de guerre et des disparus continue de hanter les pays de la région. Interrogé sur la question explosivedutraficd’organes présumé, dont se seraient rendus coupables des combattants albanais après la guerre de 1999 aux dépens de prisonniers serbes, Borut Pahor semble approuver la demande serbe d’une enquête internationale, sous l’égide des Nations unies. « Il ne faut pas de deux poids, deux mesures dans les investigations sur les crimes de guerre », affirme-t-il. Au-delà des Balkans, la Slovénie joue aussi sa partition au sujet de la Turquie, dont elle promeut la candidature à l’UE, malgré les réticences de certains membres majeurs, comme la France. « Il serait erroné de pousser l’UE à accélérer vis-à-vis de la Turquie, mais il faut continuer le processus engagé, affirmele premier ministre. La Turquie doit avoir le sentiment que l’UE est prête à envisager, un jour, l’élargissement. A long terme, il sera dans l’intérêt de l’UE de compter la Turquie parmi ses membres, et pas seulement le contraire. » p Piotr Smolar

France 9

0123 Mercredi 9 mars 2011

Jean-Louis Borloo veut faire entendre la voix du centre Le président du Parti radical hésite encore sur sa stratégie: aller ou non à l’élection présidentielle de 2012 urbaine et sur le Grenelle de l’environnement. « Une centaine de députés» lui sont favorables, veutil croire. A Mulhouse, lundi, M. Borloo a fait entendre sa différence sur le débat polémique sur la laïcité, appelant à « ne pas courir derrière le Front national ». A Strasbourg, il a constaté : « A chaque fois que vous tendez la main, les extrêmes reculent. Lorsque vous ne tendez pas la main, ils progressent. » Mais les mots restent prudents. Il laisse à ses alliés les paroles plus

Mulhouse, Strasbourg Envoyé spécial

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undi 7 mars, dans le train qui le ramenait de Strasbourg vers Paris, Jean-Louis Borloo a pris connaissance du nouveau sondage Harris-Interactive, qui élimine Nicolas Sarkozy au premier tour delaprésidentielle face à MarineLe Pen et Dominique Strauss-Kahn. Il a froncé les sourcils, s’est fendu d’une moue dubitative. Puis d’un «bon… » énigmatique. Le patron du Parti radical sait que Nicolas Sarkozy, qu’il voit régulièrement, ne veut pas le voir s’émanciper. Depuis quelques semaines, M. Borloo agite l’idée de se présenter à la présidentielle, pour « peser », pour « défendre ses idées », dans une majorité où l’UMP flatte sa droite en oubliant ses modérés, qu’il entend incarner. Même s’il se garde de franchir le pas : « Tout reste ouvert. » « Il faut monter progressivement », dit un de ses proches. La crainte d’un 21 avril 2002 à l’envers, où Marine Le Pen empêcherait M. Sarkozy d’atteindre le second tour, si la droite se présente divisée sur la ligne de départ, donne un argument massue à ceux qui veulent tuer dans l’œuf ses velléités. M. Borloo l’assure : « Je ne me laisserai pas dicter ma conduite. Même si, à l’UMP, nombreux sont ceux qui estiment que je ferai “ce que Sarkozy me dira” ». « On oublie, parce que je l’ai fait très poliment, que je suis le seul qui lui a dit non », rappelle-t-il. C’était au lendemain du feuilleton du remaniement de l’automne 2010. Il a cru qu’il obtiendrait Matignon, mais le président a préféré reconduire François Fillon. M. Borloo a

« Soit il devient le dernier premier ministre de la dernière ligne droite du quinquennat, soit il va au bout et se présente » Jean-Marie Bockel Gauche moderne

Le député du Nord multiplie les déplacements en province. Il reçoit et, après une cure de silence, remplit son agenda médiatique. Il sera sur France 2, le 13 mars, dans « 13 h 15 le dimanche… », puis le 7 avril, en invité vedette d’« A vous de juger ». M. Borloo entreprend de tisser sa toile, en s’appuyant sur les réseaux créés lorsqu’il a œuvré sur la rénovation

radicales, dans un bal qui commence à s’organiser. « Il a deux options. Soit il devient le dernier premier ministre de la dernière ligne droite du quinquennat, soit il va au bout et se présente », analyse Jean-Marie Bockel, le patron de la Gauche moderne, qui le soutient. M. Borloo, pourtant, ferme la porte à un retour au gouvernement, d’un définitif « jamais ! ». Il fait savoir qu’il aurait refusé, récemment, la place de Michèle Alliot-Marie aux affaires étrangères. Histoire, probablement, de convaincre les sceptiques, qui doutent de sa capacité à dire « non ». p Pierre Jaxel-Truer

Les centristes mobilisés contre l’extension de la déchéance de la nationalité

M. Sarkozy n’est pas assuré d’être au second tour

LE PROJET de loi sur l’immigration, voté en octobre 2010 à l’Assemblée nationale et en février au Sénat en première lecture, revient en deuxième lecture à l’Assemblée à partir du mardi 8 mars. Entre-temps, le ministère a changé de titulaire : Brice Hortefeux, qui défendait encore le texte, mi-février, devant la commission des lois, a cédé son poste à Claude Guéant. Pour l’ancien secrétaire général de l’Elysée, ce sera un baptême du feu. Il n’a cependant pas eu besoin de réviser pour s’approprier un dossier dont il connaît les moindres ressorts depuis qu’il seconde Nicolas Sarkozy, d’abord au ministère de l’intérieur puis à l’Elysée. «Nous allons enfin avoir devant nous le vrai responsable de la politique migratoire, se réjouit Sandrine Mazetier (PS, Paris). Ce qui est paradoxal, c’est que c’est l’échec de

Jean-Louis Borloo en visite dans le quartier du Neuhof, à Strasbourg, lundi 7 mars. PASCAL BASTIEN/FEDEPHOTO POUR « LE MONDE » donc fait ses valises, après huit années passées au gouvernement, refusant les ministères proposés en guise de consolation. « L’UMP ne peut gagner seule en 2012 », insiste-t-il aujourd’hui. L’un de ses proches livre cette analyse : « Les vases communicants se font entre l’UMP et le FN. Il y a un espace au centre, pour tous ceux qui ne voteront ni Sarkozy ni Le Pen. Aujour-

sa politique, mise en œuvre par d’autres, qui lui vaut aujourd’hui de devenir ministre.» Changement de titulaire, mais aussi changement de contexte. L’emprise du chef de l’Etat sur sa majorité se délite au fil d’une situation politique de plus en plus mal assurée. Le texte revisité en première lecture portait l’empreinte sécuritaire du discours de Grenoble. La discussion qui s’engage en deuxième lecture souligne les affres d’une majorité qui redoute, à force de s’aventurer sur les terres droitières, de s’y embourber. Au Sénat, une majorité alliant gauche et centristes avait rejeté l’extension de la déchéance de nationalité voulue par M. Sarkozy. Avant l’examen en séance à l’Assemblée, la commission des lois l’a rétablie. Pour la première fois depuis le début de la législature, c’est un amendement cosigné par

d’hui,il est occupé par François Bayrou, qui n’est pas fiable. Borloo peut occuper l’espace avantageusement. » Sa grande affaire du moment est de reconstituer une formation politique sur les décombres del’ancienneUDF. Il a pris le pas, dans cette entreprise, sur Hervé Morin, le patron du Nouveau Centre. Mardi, à l’Assemblée nationale, 68 dépu-

68 députés de la majorité, dont les chefs de file de toutes les sensibilités et sous-groupes centristes et radicaux, dont Jean-Louis Borloo, Hervé Morin, Pierre Méhaignerie, qui demande la suppression de l’article. La première entaille significative dans la discipline majoritaire. «Un acte politique », revendiquent-ils.

« Grandes manœuvres » Les « mutins » iront-ils jusqu’au bout de leurs intentions ? Ce sera un test important. D’autant qu’en face les députés de la Droite populaire, conduits par Christian Estrosi, ont eux aussi déposé un amendement visant, lui, à étendre les conditions de déchéance de la nationalité. Ce qui pourrait, au final, faire le jeu du gouvernement en lui permettant de faire passer sa position comme « équilibrée ».

tés, sous la toute nouvelle étiquette « Confédération du centre », vont déposer un amendement contre le dispositif d’extension de la déchéance de la nationalité prévu dans le projet de loi sur l’immigration. Un geste politique qui agace l’Elysée. Plusieurs signataires ont été rappelés à l’ordre. « Je vais remettreun peu d’amidon», s’amusait, lundi soir M. Borloo.

« Ce n’est que le début des grandes manœuvres à droite, souligne Mme Mazetier, mais nous ne voulons pas que tout se cristallise sur ce volet du texte, alors qu’il n’en est qu’un parmi d’autres. » Pour Olivier Dussopt (PS, Ardèche), « les modifications apportées par le Sénat ne rendent pas le texte acceptable, mais seulement moins inacceptable ». La plupart des assouplissements votés au Sénat – sur l’intervention du juge des libertés et de la détention (JLD) en zone de rétention, sur l’accès à un titre de séjour pour les étrangers malades, sur les « mariages gris » – ont d’ailleurs été réintégrés en commission des lois. En revanche, les sénateurs avaient donné leur aval à un certain nombre de durcissements du régime de la rétention. Ainsi, les avocats des étrangers en instance

d’expulsion verront limitées leurs possibilités de soulever des nullités de procédures. Pour les personnes condamnées pour des actes de terrorisme ou visées par une mesure d’expulsion « pour un comportement lié à des activités terroristes », la durée de rétention pourra aller jusqu’à dix-huit mois. Le Sénat a accepté des mesures tendant à un régime d’exception pour les étrangers, comme la pose du bracelet électronique sur simple décision de l’autorité administrative. Il a aussi approuvé les articles visant à limiter la responsabilité des entreprises, ou leurs sous-traitants, employant des sans-papiers en leur permettant de plaider la « bonne foi » en cas de contrôle les mettant en cause. Toutes ces mesures sont assurées de rester.p Patrick Roger et Elise Vincent

Avec 20 % des intentions de vote, Nicolas Sarkozy serait éliminé dès le premier tour de la présidentielle de 2012 face à Marine Le Pen (24 %) et Dominique Strauss-Kahn (23 %). C’est ce qu’indique le sondage Harris Interactive/Le Parisien publié mardi 8 mars. L’enquête a été réalisée en ligne, les 5 et 6 mars, auprès d’un échantillon représentatif de 1 347 personnes. Elle succède à une autre étude du même institut publiée dimanche par Le Parisien, qui plaçait M. Sarkozy derrière Marine Le Pen (23 %), à égalité avec Martine Aubry (21 %). Dans un autre sondage LH2-NouvelObs.com, le chef de l’Etat perd six points d’opinions positives (à 32 %) et se situe à son plus bas niveau depuis 2007. L’enquête a été réalisée après le remaniement du 27 février (par téléphone, du 4 au 6 mars auprès de 955 personnes).

L’étrange voyage de journalistes du «JDD» en Libye avec l’intermédiaire Ziad Takkiedine L’homme d’affaires libanais, qui transportait 1,5million d’euros en liquide, affirme avoir «facilité» la rencontre entre le «JDD» et le colonel Kadhafi

L

es services des douanes attendaient sur le tarmac de l’aéroport du Bourget (Seine-SaintDenis). Samedi 5 mars, lorsqu’un avion affrété par l’Etat libyen s’est posé, les agents n’ont plus eu qu’à contrôler et fouiller ses occupants. Deux journalistes du Journal du dimanche (JDD), Laurent Valdiguié et son photographe Bernard Bisson rentraient de Tripoli, où ils venaient d’interroger le dictateur libyen Mouammar Kadhafi. Mais, c’est leur compagnon, Ziad Takieddine qui a retenu l’attention. Cet homme d’affaires libanais transportait 1,5 million d’euros en liquide. Les journalistes n’ont pas vu la douane saisir l’argent. « Nous étions pressés de rentrer au journal avant le bouclage », explique Laurent Valdiguié. Ziad Takieddine a

été placé en garde à vue jusqu’à dimanche soir. Il fait l’objet d’une enquête préliminaire pour « manquements aux obligations déclaratives » et « suspicion de blanchiment », comme l’a révélé Lexpress.fr, lundi.

Transaction fiancière Ziad Takieddine n’est pas un inconnu du pouvoir et de la justice. Très introduit dans les marchés d’armement entre la France, l’Arabie Saoudite, la Libye ou la Syrie, il a été cité à plusieurs reprises dans l’affaire Karachi. Il est présenté par d’anciens responsables de la Direction des constructions navales (DCN) comme l’intermédiaire qui, en 1994, avait été imposé par le cabinet du ministre de la défense François Léotard, dans la

vente des sous-marins Agosta au Pakistan. Ce contrat, pensent les juges, aurait pu s’accompagner de rétrocommissions destinées à financer la campagne présidentielle d’Edouard Balladur. Il pourrait avoir donné lieu au paiement de commissions au Pakistan dont l’arrêt, supposent les juges, a pu entraîner l’attentat qui causa, en 2002, la mort de onze Français. Elégant, plein d’entregent, Ziad Takieddine fréquente volontiers les responsables politiques comme Brice Hortefeux, Jean-François Copé, ou le ministre des relations avec le Parlement, Patrick Ollier, qui lorsqu’il présidait le groupe d’études France-Libye de l’Assemblée nationale, faisait du lobbying pour le Rafale auprès du colonel Kadhafi. Ziad Takieddine affirme

aussi avoir joué un rôle dans la libération des infirmières bulgares détenues en Libye, en 2007. A-t-il organisé pour le JDD l’entretien du colonel Kadhafi ? « On n’obtient pas une interview de Kadhafi en appelant seulement ses bureaux », explique M. Valdiguié qui refuse de confirmer l’hypothèse au nom du « secret des sources ». Il réfute toutefois toute transaction financière pour obtenir l’entretien. Ziad Takieddine, lui, est plus explicite. Il explique au Monde avoir « facilité » la rencontre « afin de faire comprendre la situation en Libye ». Mais démentait, lundi, sur les radios avoir rapporté de l’argent de Libye. Au JDD, détenu par le groupe Lagardère,l’affaire sème le trouble. Même si le directeur de la rédac-

tion Olivier Jay s’affirme « très fier » de l’entretien, l’hypothèse qu’il puisse avoir été négocié avec un intermédiaire dans des ventes d’armes provoque un malaise. M. Valdiguié avait déjà donné largement la parole à Ziad Takieddine, à deux reprises. En mai 2010, dans un entretien sur l’enquête Karachi, l’intermédiaire mettait en cause Jacques Chirac, Dominique de Villepin, le diplomate Maurice Gourdault-Montagne, et l’un de ses rivaux, homme d’affaires et intermédiaire, Alexandre Djourhi. Objet d’une enquête pour faux témoignage ouverte à l’automne, M. Takieddine avait été à nouveau interrogé par le JDD, le 5 décembre 2010 : il y affirmait avoir reçu de l’ancien premier ministre libanais assassiné, Rafic Hariri, proche de

Jacques Chirac, 300 millions d’euros en dédommagement de l’abandon de ses commissions sur la vente de frégates à l’Arabie saoudite. p Raphaëlle Bacqué

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Contre-enquête France

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K Comment les sondages sont-ils fabriqués? K Les études d’opinion faussent-elles le fonctionnement du débat démocratique? K Faut-il les encadrer plus sévèrement? Décodage

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ncoupmédiatique? Sans doute. Une manipulation? Rien ne le prouve. Resteune certitude : en donnant, dans Le Parisien du 6 mars, Marine Le Pen en tête des intentions de vote au premiertourdel’électionprésidentielle de 2012 face à Nicolas Sarkozy et Martine Aubry, et en affirmant deuxjoursplustard,aprèsunenouvelle enquête, que la présidente du Front national arriverait en tête dans tous les cas de figure, l’institut Harris Interactive a jeté un gros pavé dans la mare. Et rouvert un débat dont l’enjeu est fondamentalement civique : celui de la fabrication des sondages d’opinion, de leur utilisation par les journalistes

et les hommes politiques, et de leur degré de fiabilité. Critiques A l’origine du débat, il y a d’abord un constat : celui de l’inflation sondagière. Selon la commission des sondages, 293 enquêtes ont été publiées à l’occasion de l’élection présidentielle de 2007. Elles étaient 111 en 1981, 153 en 1988, 157 en 1995, et 193 en 2002. Ce phénomène, qui vaut aussi pour les législatives (153 sondages en 2007 contre 63 en 2002), ne concerne ni les européennes ni les régionales, pourlesquelles lenombre d’enquêtes a même légèrement diminué dans la décennie 2000-2010. Depuis qu’ils se sont imposés sur la scène politico-médiatique française, c’est-à-dire en 1965, date de la première élection présidentielle au suffrage universel direct,

les sondages ont été régulièrement brocardés. Deux types d’arguments leur sont opposés. Citant le titre d’un article publié par Pierre Bourdieu en 1973, certains expliquent ainsi que « l’opinion publique n’existe pas ». L’idée est que ceux que le sociologue appelait les « doxosophes » (ceux qui discourent surl’opinion) considèrent comme une donnée ce qui n’est qu’un « artefact », une construction. Ils font valoir que les sondés sont invités à prendre position sur des opinions qui leur sont soumises mais ne correspondent pas nécessairement aux questions qu’ils se posent. L’autre critique vise l’impact des sondages. En 1972, dans Le Monde, l’académicien Maurice Druon dénonçait une « pollution de la démocratie » aboutissant à une

« manipulation de l’opinion ». Le présupposé, ici, est que les sondages contribuent à faire l’élection. Reste à savoir comment. Or sur ce point, les observateurs sont divisés. Les uns défendent la théorie du bandwagon, c’est-à-dire l’idée que les électeurs sont incités à se rallier aux présumés vainqueurs. Pour d’autres, c’est au contraire l’effet underdog qui prime, soit l’idée que les candidats donnés perdants bénéficient d’une dynamique qui peut les mener jusqu’à la victoire.

1%

« Mises au point » et contrôles

Marie, de CSA. Que des magistrats, comme aujourd’hui, vérifient nos chiffres, parfait. Mais confier cette tâche à des spécialistes de l’opinion, c’est donner à la commission un pouvoir interprétatif qui n’est pas de son ressort. » Beaucoup plus controversée, en revanche, est la condamnation par les sénateurs des « gratifications » – points de fidélité, chèques cadeaux – offertes à ceux qui acceptent de participer à des enquêtes sur Internet. « L’opinion n’est pas une marchandise », explique Jean-Pierre Sueur. Face à ce qu’ils qualifient volontiers de « posture idéologique », les sondeurs sont vent debout. « Vu ce que nous offrons, l’idée que nos résultats seraient frelatés car achetésne tientpas, plaide JérômeFourquet, de l’IFOP. Interdire les gratifications, c’est en revanche mettre un coup d’arrêt aux sondages en ligne. » Ancien vice-président de la Sofres et directeur du Centre d’études et de connaissance sur l’opinionpublique,Jérôme Jaffréconfirme que « les gratifications permettent de fidéliser des panels d’internautes dont la stabilité est un gage de qualité ». Comprenant toutefois les réserves des sénateurs, il propose que l’on privilégie le principe de la loterie sur celui du cadeau systématique. « Avoir une chance de gagner quelque chose me paraît plus judicieux que d’être automatiquement récompensé à chaque réponse donnée », dit-il. Une telle solution, toutefois, ne résout pas le problème de fond posé par l’existence de ces fameux panels d’internautes. « La logique même d’un sondage suppose que l’on tire au sort : en n’interrogeant

La prise en compte d’une partie de ces critiques a abouti, en 1977, à l’adoption d’une loi encadrant les sondages électoraux et leur publication. Convaincus de son obsolescence, deux sénateurs, Jean-Pierre Sueur (PS, Loiret) et Hugues Portelli (UMP, Val-d’Oise), plaident, depuis 2009, pour une révision du texte. Malgré l’opposition du gouvernement, leur proposition de loi a été adoptée à l’unanimité par le Sénat, le 14 février. Elle attend aujourd’hui d’être inscrite à l’ordredu jour de l’Assemblée nationale. Et fait l’objet de discussions passionnées parmi les sondeurs et les politologues. Le chapitre le moins contesté concerne le renforcement de la commission des sondages. Créée en 1977, elle a pour mission de contrôler les études publiées (soit moins de 10 % des enquêtes d’opinion réalisées, l’écrasante majorité étant confidentielle). Au fil des années, les informations livrées par les instituts concernant la construction des échantillons, l’administration des questions et leurs méthodes de redressement se sont précisées. Parallèlement, le nombre de « mises au point » publiées par la commission a baissé. Il n’y en eut qu’une avant les présidentielles de 2002 et de 2007, contre 19 en 1981 (15 en 1988 et 3 en 1995). Si personne, aujourd’hui, ne s’oppose à l’idée de donner plus de moyens financiers à la commission, un point de la proposition de loi fait l’objet de débat. Il concerne son élargissement à des politologues, des sociologueset des statisticiens. « L’idée est séduisante, mais risquée, observe Jérôme Sainte-

C’est la part des sondages politiques dans le chiffre d’affaires des instituts de sondage. Le marché des études d’opinion représentait 1,93 milliard d’euros en 2009.

que des volontaires, on fausse le jeu », remarque Loïc Blondiaux, professeur de science politique à l’université Paris-I. La transparence prônée par les sénateurs, enfin, fait l’objet d’âpres débats. La seule avancée admise par la profession concerne l’obligation de mettre au jour tous les « maillons de la chaîne du sondage », selon la formule de Jean-Pierre Sueur. « Le rapport de la Cour des comptes sur le système des sondages de l’Elysée [en 2009, l’institution pointait l’opacité et le caractère « exorbitant » de la convention signée avec Patrick Buisson, conseiller opinion de Nicolas Sarkozy] a révélé des choses inadmissibles. Il faut effectivement en savoir beaucoup plus sur qui commande, qui paie et quelles sont touteslesquestionsqui ont été posées », explique Patrice Bergen, président de Syntec Etudes Marketing et Opinion, le syndicat français des professionnels des études. « Polémiques à la chaîne »

Contre la proposition de loi, qui veut rendre accessibles les marges d’erreur et les chiffres bruts des sondages électoraux, c’est-à-dire avant qu’ils ne soient « redressés » par les instituts, ces derniers sont unanimes. « C’est la meilleure façon de polluer le débat politique avec des polémiques à la chaîne sur nos systèmes de pondération », s’emporteJean-Marc Lech,lefondateurd’Ipsos,quidénonceune«nouvelle tyrannie de la transparence ». «Inévitablement, la publication des résultats bruts va faire débat, mais aprèsun tempsd’apprentissage douloureux, le profit démocratique sera réel car on comprendra enfin comment les sondeurs travaillent», tempère Loïc Blondiaux. Pour Jérôme Jaffré, en revanche, une solution acceptable serait de publier les résultats bruts une fois l’élection passée. Ce faisant, explique-t-il, « on éviterait les polémiques avant le scrutin tout en accédant à la demande d’une certaine transparence ». Et surtout, ajoute-t-il, « on verrait ainsi quels instituts ont le meilleur “terrain”, c’est-à-dire ceux dont les résultats bruts sont les plus proches du résultat final ». p Thomas Wieder

«Pifomètre » et autres recettes Méthode

R

edressement. C’est le mot magique, celui qui alimente tous les fantasmes. Par quelle opération précise les sondeurs transforment-ils des donnéesbrutes en donnéespubliables ? A cette question, tous répondent de façon assez laconique. « Au fond, c’est comme de la cuisine, admet Pierre Weill, le fondateur de la Sofres, qu’il dirigea de 1963 à 2001. Il y a une part de pifomètre, mais cela n’empêche pas de suivre quelques recettes. »

Celles-ci se fondent d’abord sur des critères sociologiques. En clair, si dans un sondage les retraités ne sont représentés qu’à hauteur de 90 % de leur présence réelle dans la population totale, il convient de pondérer leurs réponses en leur affectant un coefficient multiplicateur de 1,1. Les critères sont également politiques. Par exemple, si on ne trouve dans un sondage que 5 % des gens qui disent avoir voté pour un candidat X en 2007 alors que celuici a fait 10 % des voix, il faut appliquer un coefficient multiplicateur de 2 aux réponses de ces sondés. Ces critères se combinent et, à ce jour, seule la commission des

sondages a connaissance de l’ensemble des redressements opérés pour chaque étude. « Nous intervenons quand les chiffres publiés par les sondeurs sortent de la fourchette des différents redressements qui nous sont communiqués », explique Mattias Guyomar, secrétaire général de la commission. Traditionnellement, les scores du Front national (FN) sont davantage redressés que ceux des autres partis. « Aujourd’hui, c’est vrai que nous les redressons plutôt moins car les gens disent plus facilement qu’avant qu’ils ont voté FN à une élection précédente », confie Edouard Lecerf, de TNS Sofres. p T. W.

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Bulles sondagières, marges d’erreur et effets pervers Zoom

C Les estimations des résultats des élections européennes au siège du Parti socialiste, à Paris, le 7 juin 2009. J.-C. COUTAUSSE POUR « LE MONDE »

Les principaux instituts réalisant des enquêtes politiques TNS Sofres

Ipsos

CSA

Responsable du politique : Edouard Lecerf (directeur général) Dirigeant : Denis Delmas (président)

Responsables du politique : Brice Teinturier (directeur général délégué), Jean-François Doridot (directeur général d’Ipsos Public Affairs) Dirigeant : Yannick Carriou (directeur général) REA

Responsable du politique : Jérôme Sainte-Marie (directeur général adjoint, chargé du département politique-opinion) Dirigeant : Etienne Giros (président du directoire)

DR

AFP

Opinionway

LH2

BVA

Président : Hugues Cazenave

Responsable du politique : Adelaïde Zulfikarpasic (directrice du département opinion institutionnelle) Dirigeant: Jean-François Levionnois

Responsable du politique : Gaël Sliman (directeur général adjoint) Dirigeant : Gérard Lopez (président du directoire)

REA

DR

DR

IFOP

Harris Interactive

Viavoice

Responsable du politique : Frédéric Dabi (directeur du département opinion et stratégies d’entreprise) Dirigeant : Stéphane Truchi (président du directoire)

Responsable du politique : Jean-Daniel Lévy (directeur du département Opinion & Corporate) Dirigeants : Patrick Van Bloeme et Nathalie Perrio-Combeaux (cofondateurs)

Dirigeant et responsable du politique : François Miquet-Marty

MAXPPP

DR

AFP

Quand les études servent aussi à limoger les ministres A l’Elysée

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n sondage ne fait jamais de mal pour confirmer une décision. Nicolas Sarkozy a décidé de limoger Michèle Alliot-Marie, conforté par le jugement très négatif des Français confirmé par les sondages. Il a fait de même avec le ministre de l’intérieur, Brice Hortefeux. L’émission du président face à neuf Français sur TF1, le 10 février, attestait du volontarisme du chef de l’Etat en matière de sécurité et d’immigration. Mais d’autres enquêtes ont montré que l’intendance ne suivait pas et que Brice Hortefeux ne parvenait pas à

incarner suffisamment ce marqueur décisif du sarkozysme. Al’heure de la démocratie d’opinion, le chef de l’Etat a été accusé de diriger les yeux rivés sur les sondages, comme en atteste le rapport très critique de la Cour des comptes de juillet 2009. L’Elysée avait signé en 2007 des contrats exorbitants, sans appels d’offres, avec la société de l’ancien journaliste de Minute et LCI, le politologue Patrick Buisson.

Croiser les courbes Après avoir contré la menace d’une commission d’enquête parlementaire et de plaintes pénales – aujourd’hui enterrées –, l’Elysée a régularisé sa situation : des appels d’offres ont été passés et une grande partie du budget études et sondages a été déplacé à Matignon.

Pour 2010, l’Elysée avait budgété 1,3 million d’euros de sondages. Mais aujourd’hui encore, Patrick Buisson se rend au moins chaque dimanche à l’Elysée, en compagnie du spécialiste de l’opinion, Pierre Giacometti, pour décortiquer, sondages à l’appui, l’évolution de l’opinion en compagnie du chef de l’Etat. L’équipe est complétée par le publicitaire Jean-Michel Goudard, le conseiller en communication, Franck Louvrier, et le secrétaire général de l’Elysée, Xavier Musca, depuis le remaniement ministériel. L’Elysée a recours à des enquêtes qualitatives au lendemain des émissions télévisées, comme celle face aux Français. L’idée est notamment de croiser les courbes d’audience avec les sujets traités. Ainsi, selon Franck Louvrier, le pré-

sident a été convaincant sur les sujets régaliens. Les thèmes développés par l’entrepreneuse de Bretagneont moins concerné les téléspectateurs. Le but de ces enquêtes est aussi de vérifier si les personnes interrogées se sentent ou non bien représentées par les panélisteslors d’une émission qui s’est étirée en longueur. Les sondages guident l’action du candidat Sarkozy. En 2007, il avait été particulièrement sûr de son fait, surveillant l’évolution de l’électorat frontiste dont peu avaient imaginé qu’il pourrait à ce point le siphonner. C’est pour cela notamment qu’il avait lancé l’idée d’un ministère de l’immigration et de l’identité nationale. Le concept avait été validé ex post par un sondage publié dans Le Figaro. p Arnaud Leparmentier

omme toute information, un sondage d’opinion doit être lu avec un regard critique. Quelques principes simplessontàretenir. D’abord,s’assurer de ce qu’on lit. Sont parfois estampillées comme « sondages » de simples consultations qui ne répondentpas aux exigences minimales, quantitatives (au moins 1 000 personnes interrogées) et qualitatives (respect du caractère représentatif de l’échantillon). L’un des objectifs de la proposition de loi adoptée par le Sénat le 14février est précisément d’interdire que de telles enquêtes soient qualifiées de sondages. L’« échantillon représentatif » est donc une première garantie. Selon la méthode d’interrogation pratiquée, toutefois, certains biais peuvent exister. Ainsi, les sondages faits par Internet sont parfois critiqués parce que certaines catégories de la population sont sousreprésentées, les personnes âgées notamment. Les sondeurs expliquent qu’ils en tiennent compte dans leurs pondérations, mais cela nerésout pas unequestion de fond. «Le fait de faire partied’une catégorieneveutpas direquevouslareprésentez. On peut ainsi se demander dans quelle mesure les 75 ans et plus quirépondentsurInternetsontvraiment représentatifs de leur classe d’âge», remarque le politologue et ancien sondeur Roland Cayrol. Essentielle, la qualité de l’échantillon ne fait cependant pas tout. S’agissant des sondages qui donnent des « intentions de vote », dont on ne dira jamais assez qu’ils sont des photographies à un instant donné et non des prophéties, trois remarques doivent être faites. D’abord, il faut regarder précisément l’« offre » qui est proposée. Avant que la liste des candidats ne soit fixée, toute enquête qui ne teste pas l’ensemble des configurations plausibles est nécessairement tronquée. Le problème est que cela est rarement fait, notamment pour des raisons de coût. « En montrant, par exemple, que JeanLuc Mélenchon ferait un meilleur score qu’André Chassaigne pour le Front de gauche, on construit une bulle sondagière qui fabrique une réalitépolitico-médiatique»,déplore le politologue Loïc Blondiaux. En deuxième lieu, il faut s’interroger sur deux variables essentielles. « Un sondage sur les intentions de vote n’a aucun sens si l’on n’a pas une idée du taux de mobilisation, c’est-à-dire du pourcentage de gens qui sont sûrs d’aller voter, et du taux decertitude,c’est-à-diredupourcentage de ceux qui sont sûrs d’avoir arrêté leur choix», explique Patrick Lehingue, professeur de science politique à Amiens et auteur de Subunda. Coups de sonde dans l’océan des sondages (Ed. du Croquant, 2007). Là encore, le problème est que ces variables sont rarement communiquées. La troisième remarque concerne les fameuses marges d’erreur.

En toute rigueur statistique, cellesci ne valent que pour les sondages effectués selon la méthode dite « aléatoire ». Mais, par extension, elles sont appliquées aux enquêtes réaliséesselonla méthodedes quotas, ce qui est le cas des sondages faits en France. Dépendantdelatailledel’échantillon, les marges d’erreur varient enfonction despourcentages obtenus. Ainsi, si l’échantillon interrogé est constitué de 1 000 personnes, la marge d’erreur d’un candidat crédité de 10 % des voix est de deux points en plus ou en moins. Elleseradetrois pointspourlescandidatscrédités de 50% desvoix. « Si on avait publié les marges d’erreur en 2002, on aurait montré que les zonesdeJospinet deLe Pen se recouvraient en partie, et qu’il y avait donc un risque que le Front national soit présent au second tour », explique le sénateur (PS, Loiret) Jean-Pierre Sueur, farouche partisan de leur publication. A cela, Pierre Weill répond que « publier des marges d’erreur n’a aucun sens ». Pour le fondateur de la Sofres, « cela n’aurait de sens que si les opinions étaient solidifiées ». Or, rappelle-t-il, « les opinions sont d’intensité variable, la plupart des gens répondant à des questions dont, au fond, ils se moquent éperdument ».

«Unsondageisolé nevaut ques’ilestconfirmé pard’autres» Jérôme Jaffré politologue S’agissant de la lecture des enquêtes d’opinion au sens large, plusieursconseilsdoiventêtredonnés. D’abord, veiller à la façon dont les questions sont formulées. «Quand on présente un énoncé sur le mode positif, on obtient plus de “oui” que lorsqu’on pose une question: c’est ce qu’on appelle le “biais d’acquiescement” », explique Loïc Blondiaux. Auteur de La Fabrique del’opinion(Seuil,1998),le politologue met également en garde contre l’« effet de halo », c’est-à-dire contre l’impact produit par une question sur la façon dont les sondés répondent aux suivantes. « Si vous faites un sondage sur l’islam en évoquant au début du questionnaire un thème comme celui du terrorisme, vous conditionnez les gens àrépondred’une façonquiestforcément biaisée », explique-t-il. Le « contexte » dans lequel est effectué le sondage est donc essentiel pour interpréter celui-ci. Sur ce point, tous les observateurs sont d’accord : « Un sondage isolé ne vaut que s’il est confirmé par d’autres », résume le politologue Jérôme Jaffré, pour qui les enquêtes les plus intéressantes sont les « baromètres », autrement dit celles qui posent les mêmes questions à intervalles réguliers. « En matière d’opinion, résume-t-il, c’est le mouvement, beaucoup plus que le niveau, qui doit être observé. » p T. W.

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12 France

0123 Mercredi 9 mars 2011

Uneforteabstentionpourraitfavoriser Piratagede Bercy: lesduelsUMP-FNouPS-FNausecondtour ladifficiletraque Elections cantonales Le scrutin des 20 et 27 mars concerne 2023 cantons descommanditaires

L

es élections cantonales des 20 et 27 mars qui concernent 2023 cantons se présentent dans les pires conditions pour la majorité présidentielle. Et ce n’est pas la rafale de sondages, tous plus navrants les uns que les autres pour leur héraut, qui risque de regonfler le moral de ses candidats. Bien téméraires, cependant, ceux qui se hasarderaient à un pronosticen termes de gains oude pertes de départements, tant plane sur ce scrutin une inconnue : celle de la participation. Jamais, lors des précédentes éditions, l’abstention au premier tour des élections cantonales n’a dépassé 40 % du corps électoral. Elle pourrait cette fois toucher plus de la moitié des électeurs inscrits. Parmi les experts électoraux des partis, les plus pessimistes n’hésitent pas à envisager qu’elle puisse atteindre 60 %. Difficile, dans ces conditions,de prévoir le comportement des électeurs, de cerner les motivations de ceux qui se rendront aux urnes. « Nous sommes dans le brouillard total », avoue Jérôme Lavrilleux, le directeur du cabinet du secrétaire général de l’UMP, Jean-François Copé. Un tel taux d’abstention pourrait avoir des conséquences imprévisibles. Surtout avec un Front national qui a le vent en poupe et qui espère bien le confirmer à cette occasion. Bien que les élections cantonales ne lui soient pas, traditionnellement, le scrutin le plus favorable : en 2008, le FN avait recueilli 4,85 % des voix au niveau national. La plupart de ses candidats sont souvent inconnus, ils ne font guère campagne, pas plus de réunions publiques. Toutefois, l’air du temps semble

Un scrutin qui mobilise peu TAUX D’ABSTENTION AUX ÉLECTIONS CANTONALES, en % 46

44,55

Au second tour

42 38

35,13

34 30

Au premier tour

26 1992

1994

1998

2001

2004

2008

SOURCE : MINISTÈRE DE L’INTÉRIEUR

« décomplexer » le vote en faveur du parti de Marine LePen. «Aujourd’hui, où que l’on aille, il est rare que l’on n’entende pas parler du FN», constateBruno Le Roux, député (PS) de Seine-Saint-Denis. « Au porte-à-porte, les gens nous disent sans complexes qu’ils vont voter Le Pen», confirme Christophe Borgel, maire adjoint de Villepinte (SeineSaint-Denis) et secrétaire national du PS chargé des élections. A l’occasion de la réforme des collectivités territoriales, la droite, soucieuse d’aménager la désignation des futurs conseillers territoriaux à son avantage, en avait profité pour modifier le mode de scrutin applicable à ces dernières élections cantonales avant liquidation. Le seuil de qualification au second tour a ainsi été porté de 10% à 12,5% des inscrits:une disposition censée limiter le nombre de triangulaires éventuelles au second tour. Cette « précaution » pourrait avoir un effet boomerang. Avec une abstention forte, il peut y avoir un nombre significatif de cantons dans lesquels aucun ou

un seul candidat atteindra la barre de 12,5 % des inscrits. Dans ce cas, les deux candidats arrivés en tête pourront se maintenir. Nul n’est en mesure de prévoir combien de seconds tours pourraient mettre en lice un(e) candidat(e) du FN face à un(e) candidat(e) de gauche ou de la majorité.

« Au porte-à-porte, les gens nous disent sans complexes qu’ils vont voter Le Pen » Christophe Borgel maire adjoint de Villepinte (Seine-Saint-Denis) Quelle attitude les uns et les autres adopteront-ils alors ? Du côté du PS, M. Borgel rappelle la position constante : faire battre le FN au second tour. A droite, les états-majors évitent, pour l’heure d’évoquer la question. Pourtant le premier ministre lui-même, dans son entretien au Figaro, le 5 mars, l’aborde : « Pour ma part, mon attitude sera sans ambiguïté, affir-

me-t-il : nous n’avons pas à faciliter l’ascension du FN. » M. Copé, de son côté, se refuse à envisager ce scénario. « Je donnerai bien entendu mon point de vue », se contente-t-il de répondre si ce cas de figure devait se présenter dans certains cantons, tout en écartant l’idée d’un mot d’ordre national. La question, toutefois, risque de se poser dès le premier tour dans des cantons où la majorité, faute de candidat, est absente. Un exemple symbolique : dans l’Aisne, le département de l’ancien secrétaire général de l’UMP, Xavier Bertrand,aucun candidat n’aété investi dans le canton de Marle face au sénateur (PS) et président sortant du conseil général, Yves Daudigny, qui sera donc opposé à un candidat du FN. La fédération départementale de l’UMP se garde, pour l’heure, de toute déclaration. Autre signe qui ne trompe pas, le nombre de candidats de la majorité présidentielle qui évitent d’afficherla moindre étiquette partisane. Certes courant lors des élections cantonales, le phénomène a pris une proportion inédite à l’occasion de ce scrutin. La majorité redoute ces élections locales, dont elle s’efforce par tous les moyens de minimiser l’enjeu. Il lui sera toutefois difficile d’échapper à un bilan qui serait d’autant plus marqué si quelques départements symboliques comme la Sarthe, celui de M. Fillon, ou le Rhône, présidé par le ministre de la justice, Michel Mercier, devaient passer à gauche. Même les Hauts-de-Seine, fief historique de Nicolas Sarkozy, ne sont pas totalement à l’abri, tant y sont vives les dissensions internes à la droite. p Patrick Roger

Le Parti socialiste et Europe Ecologie-Les Verts à l’assaut des derniers bastions communistes en Ile-de-France LE PS a adopté la stratégie du coup de sonde en terre communiste. Après avoir conquis le conseil général de Seine-Saint-Denis en 2008, les socialistes se lancent à l’assaut du Val-de-Marne. Mais, au-delà, ce sont des municipalités communistes que visent les socialistes associés aux écologistes. Dans une série de cantons emblématiques de l’Ile-de-France, un accord a été scellé entre les instances du PS et celles d’Europe Ecologie-Les Verts (EELV). Les socialistes concrétisent ainsi l’alliance privilégiée qu’ils tentent de dessiner pour 2012 avec les écologistes. Ils poursuivent aussi la conquête de bastions communistes affaiblis qu’ils entendent bien récupérer. Persuadés que le déclin électoral du PCF va se poursuivre aussi lors des scrutins locaux, les socialistes espèrent emporter de nouveaux cantons et préparer ainsi les municipales de 2014. C’est le cas dans le Val-de-Marne – un des deux derniers conseils généraux, avec l’Allier, présidé par un communiste – où les hostilités ont été déclenchées pour la première fois voici quelques semaines avec la présentation d’un candidat commun PS/EELV dans huit des dix cantons renouvelables détenus par le PCF. Deux sont particulièrement sensibles : VillejuifEst et Valenton (à cheval sur la ville et celle de Villeneuve-SaintGeorges, où Cécile Duflot est conseillère municipale). Socialistes comme écologistes démentent toute agressivité contre le président sortant, Christian Favier, et expliquent la situation par un refus des communistes de céder un canton aux écologistes. « On voulait un rééquilibrage en notre faveur, mais les durs du PCF ont refusé, nous renvoyant sur

L’opération, découverte début janvier, a affecté près de 150 ordinateurs du ministère

L

’ Agence nationale de sécurité des systèmes informatiques (Anssi), organisme d’Etat créé en 2009 pour mettre en œuvre la politique de la France en matière de cyberdéfense, a confirmé lundi 7mars queles ministèresdes finances et du budget avaient été victimes d’une série d’attaques informatiques très dommageables. Selon Patrick Pailloux, directeur général de l’Anssi, il s’agissait d’une véritable opération d’espionnage, menée par une équipe de professionnels « déterminés et organisés », qui a duré plusieurs semaines. A partir de décembre 2010, peut-être même avant, les espions ont réussi à pénétrer près de 150 ordinateurs installés dans les bureaux de Bercy et à voler des masses de documents, concernant en priorité la présidence française du G20 et la politique économique internationale de la France. L’Anssi tient cependant à préciser que les fichiers ultrasecrets du ministère des finances n’ont pas été touchés. Par ailleurs, d’autres ministères et peut-être même l’Elysée auraient subi des attaques similaires, mais l’Anssi assure qu’elles ont échoué, ou du moins que rien n’a été volé. M. Pailloux refuse de livrer les détails techniques sur les méthodes des pirates, mais il accepte d’évoquer leur tactique. Pour commencer, ils ont identifié précisément leurs cibles – des hauts responsables traitant les dossiers du G20, mais aussi des chargés de mission et des assistants : « Parfois, on en apprend plus en visitant les dossiers d’une secrétaire que ceux de son patron. » Puis ilsleur ont envoyé des courriels en se faisant passer pour un collègue ou un contact régulier : « Chaque mail contenait un fichier attaché accompagné d’un message du genre : “Regardez ce document, il pourrait vous intéresser ” ». Quand le destinataire cliquait pourouvrir la pièce jointe,il découvrait un texte banal, qui n’éveillait pas sa suspicion. Mais en réalité, il déclenchait à son insu un fichier piégé contenant un virus inédit (indécelable par les anti-virus), qui s’installait subrepticementsur l’ordinateur et permettait d’en pren-

dre le contrôle à distance. Dès lors, les pirates ont pu siphonner à leur guise le contenu des ordinateurs grâce à une panoplie d’outils d’extraction très sophistiqués. Pour déjouerles systèmes de surveillance, ils ont modifié plusieurs fois leurs procédures et leurs logiciels d’attaque. L’opération a été découverte début janvier presque par hasard, quand des fonctionnaires ont remarqué que la provenance de certains courriels étaient erronée

Les services informatiques de l’Etat ont dû mobiliser une quarantaine de spécialistes pendant près de deux mois ou incohérente. Puis, pour évaluer l’ampleur des dégâts, analyser les virus et les modes d’intrusion, et colmater les failles de sécurité, les services informatiques de l’Etat ont dû mobiliser une quarantaine de spécialistes pendant près de deux mois, et désactiver les réseaux de Bercy pendant tout un week-end. A présent, M. Pailloux assure que tout est rentré dans l’ordre –jusqu’à la prochaine fois. A ce stade de l’enquête, il est incapable de désigner les coupables : « Ils disposent de systèmes d’“anonymisation” et de serveurs relais éparpillés sur la planète, qu’ils utilisent pour brouiller les pistes. Il est très difficile deremonterjusqu’aucentredecommande. » Même si les enquêteurs parviennent un jour à démasquer les auteurs directs, leurs commanditaires resteront peut-être hors d’atteinte : certains hackers sont manipulés à leur insu, d’autres sont des mercenaires qui se vendent au plus offrant, sans chercher à savoir qui est leur client... M. Pailloux assure que le gouvernement va lui donner les moyens de contrer les prochaines attaques : en 2012, l’Anssi devrait compter 250 employés (contre 170 aujourd’hui) et disposer d’un budget de 90 millions d’euros. p Yves Eudes

Ecole normale supérieure

Le Conseil d’Etat donne raison à la direction de l’ENS Le samedi 26 février, le tribunal administratif avait donné raison aux élèves. Saisi en appel par la direction de l’Ecole normale supérieure (ENS), le Conseil d'Etat a finalement tranché, lundi 7 mars, en faveur de celle-ci. Il estime que la directrice de l’ENS, Monique Canto-Sperber, « n’a pas porté une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté de réunion » en refusant que le collectif Palestine ENS organise une série de rencontres sur l’« apartheid » pratiqué par Israël. Lundi soir, le collectif Palestine ENS a annoncé qu’il saisirait la Cour européenne des droits de l’homme et le Comité des droits de l’homme de l’ONU. p Patrick Braouezec et Florence Haye (PCF), le 6 mars, sur le marché de Saint-Denis. MADJID MESSAOUDENE les cantons de droite », explique Mme Duflot. Mais juré, ce ne sera pas la guerre, et le président sortant aurait son siège préservé. «La prise du conseil général n’est pas à l’agenda politique des socialistes », promet Christophe Borgel, secrétaire national chargé des élections au PS. « Ils visent le coup d’après », estime un cadre communiste.

Tiraillements L’ambiance est tout autre en Seine-Saint-Denis, où le PS poursuit son offensive anti-PCF. Les deux anciens partenaires sont à fleurets mouchetés sur le bilan des communistes avec les emprunts toxiques. Après avoir gagné le département, Claude Bartolone ne cache plus ses appétits. En ligne de mire,

deux villes symboles : Saint-Ouen, où la maire, Jacqueline Rouillon, est sortante, et Saint-Denis, où Florence Haye, première adjointe au maire, repart à la bataille. Le nouveau président est persuadé que, si ces cantons tombent, les deux villes seront mûres pour passer sous la bannière PS en 2014. M. Bartolone multiplie donc les sorties aux côtés de « ses » candidats. Son offensive a provoqué des tiraillements tant au PS que chez les écologistes. Ainsi à Saint-Denis, une partie des socialistes ne font pas campagne et le font savoir. A Europe Ecologie-Les Verts, une vingtaine de militants et élus ont publié un appel où ils dénoncent «l’utilisation d’EELV comme simple marque» par les socialistes et

des documents de campagne sans «aucune place à une parole écolo». Même grogne chez les écologistes de Saint-Ouen. A l’approche de 2012, la division risque de laisser des traces. Car au second tour, les nouveaux alliés ne sont pas d’accord sur les consignes de vote. Le PS soutiendra le candidat de gauche le mieux placé «quelle que soit la configuration», assure M.Borgel. « Cette logique de désistement quand il n’y a pas de danger à droite n’est pas la nôtre », réplique Mme Duflot. «Fragiliser les sortants à l’intérieur de la gauche n’est pas un bon présage pour la présidentielle », dénonce Didier Paillard, le maire PCF de SaintDenis. p Sylvia Zappi

Fiscalité Les parlementaires jugent le coût de la réforme de l’ISF sous-évalué Les parlementaires des commissions des finances de l’Assemblée nationale et du Sénat jugent « très optimiste » le chiffrage gouvernemental du coût de la réforme de l’impôt sur la fortune (ISF). Ils estiment que l’ampleur des recettes alternatives à trouver est sous-évaluée, puisque cette réforme devra être neutre pour l’Etat. Leurs premières évaluations portant sur l’option d’un allégement de l’ISF font état d’un « financement alternatif à trouver » de 1 à 1,5 milliard d’euros – voire 2 milliards pour certaines estimations – quand le gouvernement évoque 800 millions d’euros.

Retraites complémentaires La CGT appelle à des rassemblements mercredi 9 mars Le secrétaire général de la CGT, Bernard Thibault, appelle à des rassemblements partout en France, mercredi 9 mars, pour faire pression sur le patronat le jour de la reprise des négociations sur les retraites complémentaires. « La séance de négociation peut être conclusive sur la question des moyens financiers (…). C’est donc crucial », a estimé lundi 7 mars M.Thibault. La centrale appelle aussi à des manifestations sur la pénibilité, jeudi 28 avril, à l’occasion de la Journée mondiale pour la sécurité et la santé au travail décrétée par l’Organisation internationale du travail.

France 13

0123 Mercredi 9 mars 2011

Au procès des emplois fictifs, de prestigieux prévenus et un absent remarqué Le tribunal devait décider, mardi, du renvoi éventuel du procès pour des raisons de procédure. Jacques Chirac devrait comparaître mercredi

J

acques Chirac ? » On entend le point d’interrogation dans la voix du président du tribunal, Dominique Pauthe. Il regarde les neuf prévenus assis devant lui. « Monsieur Jacques Chirac est… absent », constate-t-il. Dominique Pauthe poursuit l’appel. « M. de Gaulle ? », Jean de Gaulle, ex-député RPR de Paris, se lève. « M. Debré ? » Le regard du président se pose sur la frêle silhouette du filsde l’ancienpremier ministre Michel Debré, frère du président du Conseil constitutionnel, JeanLouis Debré et du député Bernard Debré, qui hoche la tête. « Levezvous, M. Debré », dit-il. Un peu plus tard, alors qu’un vague désordre agite le prétoire, on entendra enco-

Lavoixinégalablede Me LeBorgne, l’avocat deRémyChardon, s’élève.«Cedossier présenteunedifficulté procédurââle…» re le président du tribunal lancer : «Taisez-vous, M. de Gaulle ! » On se souviendra qu’un lundi 7 mars, dans la première chambre civile du palais de justice de Paris, ces trois patronymes qui évoquent soixante-dixansd’histoire deFrance ont été appelés à la barre. Que Marc Blondel, l’ex-secrétaire général de Force ouvrière, qui comparaît pour avoir bénéficié de la prise en charge de son chauffeur par la Mairie de Paris, a oublié d’éteindre son portable, dont la sonnerie guillerette a retenti. « M. Blondel est enpleine pause publicitaire… », a dit ensouriantleprésident.Qu’ungendarme, s’apprêtant à éconduire l’homme qui s’avançait dans la travée, s’est empourpré en l’entendant se présenter : c’était Michel Roussin, que ses fonctions d’ancien directeur de cabinet de M. Chirac à la mairie, mène une fois de plus devant les juges. Il y a retrouvé son successeur, Rémy Chardon.

On relève encore que la défense de Jacques Chirac, Mes Georges Kiejman, Jean Veil, Eric Dezeuze et Marie Burgurburu, s’est appropriée d’autorité tout le flanc gauche du prétoire,légèrement surélevé par rapport à ses confrères. Que Me Veil a pris soin de s’assurer que le siège capitonné de M. Chirac avait bien été retiré du prétoire afin de ne pas offrir aux chroniqueurs en quête d’images celle, trop belle, d’une chaise restée vide. Le reste fut une journée d’audience terriblement ordinaire. Après l’appel des prévenus est venu celui des rares témoins cités au procès. Le président leur a signifié leur date de convocation, tout en les prévenant qu’il existait « un relatifaléa sur le déroulement chronologique de ces débats ». Il s’est alors tourné vers Me Jean-Yves Le Borgne, l’avocat de Rémy Chardon. Le « relatif aléa », c’est lui, avec sa question prioritaire de constitutionnalité (QPC) dont dépend, à cet instant, la suite du procès de Jacques Chirac. La voix inégalable de Me Le Borgne s’élève. « Ce dossier présente une difficulté procédurââle… » Voilà, on y est. L’avocat savoure l’attention dont il est l’objet. « J’ai entendu que l’on voyait là je ne sais quel stratagème pour gagner du temps… Ce n’est pas la question. Il est normal que la dimension romanesque d’un procès fasse naître des réactions passionnelles. Il est normal, quand le contexte est politiquement connoté, que cette passion soit plus forte encore. » Il se tourne vers le président et ses deux assesseurs. « Mais je pense qu’il est nécessaire que vous ayez la haute main sur cette procédure judiciaire sans vous troubler des bruits de la rue. » Me Le Borgne entre alors dans le cœur du débat : celui de la jurisprudence de la Cour de cassation qui permet de contourner la prescription de trois ans en matière de délits financiers en s’appuyant sur la connexité d’un dossier avec un autre, portant sur le même sujet.

Le procureur: «Beaucoup de bruit pour rien» IL Y A quelques mois, le procureur de la République de Paris, JeanClaude Marin, prononçait de cette même place, dans cette même salle du palais de justice de Paris, des réquisitions de condamnation contre l’ancien premier ministre Dominique de Villepin, qui était jugé dans l’affaire Clearstream. Lundi 7 mars, Jean-Claude Marin a tenu à venir personnellement expliquer les réquisitions de relaxe de l’ancien président de la République que le parquet sollicitera dans les deux dossiers qui lui sont reprochés. Evoquant « le plaignant hors du commun », qui a exercé pendant quarante-cinq ans des responsabilités nationales, « dont les plus hautes fonctions de l’Etat », M. Marin a d’abord rappelé que ce n’est pas en qualité d’ancien chef de l’Etat, mais à raison de ses fonctions de maire de Paris que M. Chirac comparaît devant ses juges.

« Procès anachronique » «Voilà donc l’affaire, l’affaire Chirac, puisqu’il faut sacrifier aux raccourcis journalistiques, procédure qui emplit les colonnes et les écrans depuis bien des semaines et des années. Mais le bruit médiatique fait-il le poids des charges et la culpabilité d’un homme quel qu’il

soit?», s’est interrogé le procureur. Rappelant qu’il avait signé des réquisitions de non-lieu contre M. Chirac dans l’affaire de Paris et que son homologue, le procureur Philippe Courroye, avait fait de même dans le dossier de Nanterre, M. Marin a affirmé que « ce n’est pas dans la considération due [à M. Chirac] que de telles réquisitions ont été prises. Elles sont le fruit d’une analyse détaillée, en fait et en droit, de la procédure ». Citant Aristote – « Le doute est le commencement de la sagesse » –, le procureur de la République a appelé le tribunal à se montrer « sensible et attentif au doute raisonnable ». « Les faits sont anciens sans que la justice puisse être critiquée pour cela, mais, malgré tout, ce procès est anachronique. Il a toutefois un mérite, celui d’avoir lieu envers et contre tout, et de permettre d’exposer en toute clarté les tenants et les aboutissants de cette affaire dans des conditions de sérénité et d’objectivité essentielles. Je suis certain que vous aurez à cœur de faire en sorte que notre institution ne déçoive pas, dans une affaire où beaucoup pourront peut-être dire, avec Shakespeare : “Beaucoup de bruit pour rien.” » p P. R.-D.

Si cette jurisprudence devait être remise en cause par le Conseil constitutionnel, au motif qu’elle n’est pas conforme à la Constitution,elle ferait tombertoute l’affaire des chargés de mission de la Ville de Paris et, avec elle, les charges retenues contre ses dix prévenus. Celles-ci tiennent sur l’application de ce principe de connexité avec l’autre dossier, celui des emplois fictifs de Nanterre dans lequel plusieurs responsables du RPR, dont Alain Juppé, ont été condamnés, et quiest reprochéaujourd’hui à l’ancien président de la République. D’une même voix, les avocats des autres prévenus, dont ceux de M. Chirac, se joignent à cette demande. Ils sont rejoints par le procureur de la République de

Me Jean-Yves Le Borgne, le lundi 7 mars, au Palais de justice de Paris. CHARLES PLATIAU/REUTERS Paris, Jean-Claude Marin, qui estime que le tribunal doit transmettre cette QPC à la Cour de cassation et, en conséquence, renvoyer le procès jusqu’à ce que la haute juridiction se prononce. Deux heures à peine se sont écoulées lorsque le président annonce que le tribunal rendra sa

décision à la reprise de l’audience, mardi après-midi. La salle s’ébroue. Les avocats ont tous entendu l’insistance avec laquelle Dominique Pauthe a rappelé que cette QPC ne porte que sur l’un des deux dossiers dont il est saisi. La faille du dispositif est là : rien n’interdit au tribunal de transmettre

la demande de Me Le Borgne à la Cour de cassation, tout en commençant les débats de l’affaire de Nanterre. Me Veil a compris, qui rejoint aussitôt le bureau de Jacques Chirac. Et demande à l’ancien président de se préparer à comparaître, mercredi 9 mars. p Pascale Robert-Diard

14 Economie

0123 Mercredi 9 mars 2011

En hausse Subway

En baisse Mattel

Le spécialiste du sandwich est devenu la première chaîne de restauration commerciale au monde, détrônant McDonald’s par le nombre d’établissements (33749 contre 32737, au 1er janvier).

Le fabricant de jouets américain a fermé, lundi 7mars, un magasin consacré à la poupée Barbie à Shanghaï, faute de succès. Ouvert il y a deux ans, unique au monde, il regroupait 900poupées.

Les cours du jour ( 08/03/11, 09h47 ) Euro 1 euro : 1,4028 dollar (achat) Or Once d’or : 1 437,50 dollars Pétrole Light sweet crude : 103,87 dollars Taux d’intérêt France : 3,539 (à dix ans) Taux d’intérêt Etats-Unis : 3,396 (à dix ans)

Le scénario d’un prix durablement élevé du pétrole se confirme La crise arabe est un révélateur. Les marchés redoutent surtout un déséquilibre offre-demande plus structurel

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’Arabie saoudite est aux marchéspétroliers ceque la Réserve fédérale américaine (Fed) està l’économie:une «banque centrale » capable d’injecter des liquidités – de l’or noir, en l’occurrence – pour rassurer les opérateurs et faire baisser les prix. Mais une « banque » qui, pour des raisons techniques et politiques, ne peut pas pomper toujours plus de brut comme on fait tourner la planche à billets. La flambée du baril de pétrole, ces dernières semaines, en a apporté la preuve. Dès le début de la crise libyenne, Riyad a pris l’engagement de compenser la baisse de la production du treizième exportateur mondial pour détendre les cours. Le royaume wahhabite est le seul des douze membres de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) qui puisse jouer le « producteur d’appoint ». Mais les Saoudiens ont eu beau mettre 700 000 barils supplémentaires sur le marché, l’effet du « calmant » n’a duré que deux jours. La fièvre a repris de plus belle, au point que les EtatsUnis n’excluent pas de puiser dans leurs réserves stratégiques (727 millions de barils) pour calmer les marchés. Lundi 7 mars, le prix du baril de brent a clôturé à 115 dollars à Londres, se rapprochant de son pic de près de 120 dollars du 24 février ; le lightsweet crudeaméricaina terminé à 105,44 dollars. Dans la foulée, les prix à la pompe ont battu, la semaine dernière, leur record de l’été 2008 : 1,5067 euro le litre de super sans plomb 95, 1,5417 euro le SP 98 et 1,3513 euro le gazole. Il n’y a pourtant aucun risque de pénurie à court terme. Les pays industrialisés membres de l’Agence internationale de l’énergie (AIE) disposent actuellement, avec leurs stocksd’urgence, d’une couverture de 145 jours d’importation. La crainte d’une contagion des mouvements populaires aux pays dugolfe Arabo-Persiqueouà l’Algérie, ne peut expliquer seule cette flambée – pas plus que la spéculation. La crise a ébranlé la confiance ; la Bourse de Riyad a chuté ces quinze derniers jours avant de se

COURS DU BARIL DU BRENT en dollars, depuis le 1er/01/2007 à Londres

160 115,11

120 80 40 0 1er Janvier 2007

7 mars 2011

SOURCE : BLOOMBERG

ressaisir samedi ; l’agitation de la minorité chiite dans l’Est pétrolifère du pays, comme celle de la majorité chiite de Bahreïn aux portes de l’Arabie saoudite, est unautre sujet d’inquiétude. Mais le premier exportateur mondial de brut semble à l’abri d’un effondrement. Si les prix s’envolent, c’est que les marchés voient se profiler dans les deux prochaines années un

déséquilibre offre-demande, déjà responsable de la flambée du baril (147 dollars) à l’été 2008. Les pays non-OPEP – notamment la Russie – produisent au maximum de leurs capacités. Pour répondre à la défaillance d’un pays, l’OPEP (40 % de la production mondiale) dispose de 4,5 à 6 millions de barils par jour, selon les estimations. Soit, dans le meilleur des cas, la production cumulée de la Libye, de l’Algérie et du Nigeria.

Le terminal pétrolier de Ras Tanura. C’est depuis cet isthme situé sur le golfe Arabo-Persique que l’Arabie saoudite exporte une grande partie de son brut. RENE TCHEKOF MINOSA/EPICUREANS

A la merci de turbulences Mais avant la crise arabe, le baril était déjà proche de 100 dollars. Ce prix reflétait la crainte des traders face à une offre qui pourrait ne pas répondre à la reprise de la demande, dopée par la croissance en Asie. Celle-ci s’est accrue de 2,7 millions de barils en 2010 et se confirmera en 2011 et 2012, réduisant de mois en mois les capacités excédentaires de l’OPEP. En 2009, elles représentaient 8 % de la demande ; le retour de la croissance conjugué à la crise libyenne les ont réduites

à moins de 4 %. Or plus ces capacités diminuent, plus les marchés s’affolent et plus ils amplifient les baisses de production liées à des arrêts de puits, à des accidents et à des attentats contre une raffinerie, un tanker ou un oléoduc. Un autre facteur de déstabilisation joue : la différence de qualité du brut mis sur le marché. Le « libyen » est réputé pour sa légèreté, comme le brent de la mer du Nord ou le « light » du golfe de Guinée. Plus lourd et plus soufré, le pétrole saoudien ne plaît guère à

des compagnies dont les raffineries ne sont pas toujours capables de le traiter. Cela risque d’entraîner des goulots d’étranglement dans l’approvisionnement de certains marchés… et des hausses de prix. Même si les cours devaient refluer en cas d’apaisement au Maghrebet danslegolfe Arabo-Persique, les mois à venir s’annoncent difficiles. D’autant que dans certains pays, la production reste à la merci de turbulences, comme en Iran et au Venezuela. Le Nigeria, où l’instabilité politique chronique et

l’extrême pauvreté alimentent attentats et syphonnage des réserves pétrolières, est sous surveillance des marchés à un mois de l’élection présidentielle du 9 avril. Même une bonne nouvelle, comme le retour de l’Irak à son niveau de production d’avant la chute de Saddam Hussein en 2003, n’émeut plus les opérateurs. Face à un avenir incertain, banquiers et conjoncturistes ont révisé à la hausse leur prévision sur le prix du baril en 2011. p Jean-Michel Bezat

La spéculation n’influence guère la tendance des cours à long terme Londres Correspondant

Pour expliquer son métier de spéculateur sur le pétrole, un gérant de hedge fund londonien a eu recours à l’image du surfeur : « Il ne crée pas les rouleaux mais les négocie. Et s’il prend mal la déferlante, il peut se faire mal en tombant à l’eau. » A écouter ce professionnel voulant conserver l’anonymat, l’influence des intermédiaires financiers sur le prix du pétrole est marginale par rapport aux fondamentaux de la loi de l’offre et de la demande, auxquels s’ajoute, depuis janvier, la prime de risque liée à l’embrasement du monde arabe. Aux politiciens qui accusent les fonds de mettre les consommateurs en coupe réglée, il répond qu’ils se trompent de cible. Et que loin d’orchestrer la flambée, les milieux financiers ne

sont que les messagers de vents venus d’ailleurs. Pour mesurer l’influence des acteurs financiers sur les prix, une description des mécanismes du marché de la matière première la plus échangée au monde s’impose. Deux types d’acteurs y interviennent : les commerciaux et les financiers. Dans la première catégorie figurent les industriels et les négociants, dans la seconde, les hedge funds et les banques. Les grands groupes pétroliers et leurs clients, comme les compagnies aériennes, échangent de vraies cargaisons de pétrole physique. Les négociants comme Glencore, Trafigura ou Vitol, qui font le pont entre le producteur et le consommateur, sont dans le même cas. Leur marge bénéficiaire provient des arbitrages géographiques, de la qualité du brut ou de leurs capacités de stockage, de transport ou de distribution.

Même si les sociétés de trading doivent, entre l’achat et la vente, se protéger des mouvements de prix par le truchement de contrats à terme (futures) négociés sur les marchés financiers organisés, à ce stade, on est dans l’économie réelle et les produits tangibles. Tout se complique quand, parallèlement, intervient un troisième acteur du Meccano pétrolier: la haute finance, hedge funds et banques d’affaires, qui s’intéressent au barilpapier, virtuel.

Une volatilité accentuée Les fonds spéculatifs s’efforcent d’identifier les dysfonctionnements de l’économie énergétique mondiale et les sources d’inefficacité dans la chaîne d’approvisionnement pour en faire bénéficier leurs investisseurs, en majorité des caisses de retraite. Ils prennent des positions en pariant sur l’évolution du prix du brut, mais

aussi sur des marchés plus spécifiques (marges de raffinage, gasoil, essence, kérosène etc.). De leur côté, les banques sont très actives sur le baril-papier pour le compte de leurs clients, à l’instar des dits hedge funds. Ces opérateurs financiers affirment qu’en améliorant la liquidité, la transparence et l’évaluation des prix futurs, le trading du barilpapier est bénéfique à long terme. Pour leurs détracteurs, en revanche, ils accentuent la volatilité des prix qui, seule, leur permet de faire des bénéfices. Pour ce faire, ces pirates sans foi ni loi se servent de produits dérivés dangereux car non réglementés. L’innovation financière dresse un écran opaque sur leurs activités. Par ailleurs, les critiques stigmatisent l’effet des études sur les prix, très médiatisées, des analystes pétroliers des grandes banques. Ces derniers sont accusés de

conflits d’intérêt en protégeant les positions de leurs traders. De plus, les groupes financiers sont aussi souvent propriétaires de firmes de négoce, intégrées ou autonomes, comme Phibro (Citigroup) ou J. Aron (Goldman Sachs). Toute cette spéculation sur le baril-papier augmenterait l’instabilité naturelle des cours en entretenant le climat d’incertitude. Or de tous les marchés de matières premières, celui du pétrole est le plus adapté à la spéculation financière. La longue et complexe chaîne de production, les différentes qualités, le statut d’actif event driven influencé par les facteurs macroéconomiques multiplient les opportunités de paris. Reste que, si d’après plusieurs études officielles, la spéculation peut agir à très court terme à la marge, elle n’influence guère la tendance des prix à long terme. p Marc Roche

La Banque d’Angleterre guerroie contre la City sur la réglementation financière Les critiques adressées aux établissements bancaires par le gouverneur, Mervyn King, font craindre au secteur un renforcement des contraintes Londres Correspondant

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éplairait-il tellement aux banquiers qu’un grand commis de l’Etat leur dît leurs quatre vérités ? En dénonçant dans un entretien accordéau DailyTelegraph, dimanche 6 mars, le risque d’une nouvelle crise financière en raison de la poursuite par les banques d’une recherche de profits à court terme etlemauvaistraitementdela clientèle, le gouverneur de la Banque d’Angleterre, Mervyn King, a mis à mal le rapprochement intervenu récemment entre le gouvernement et la City. Les attaques du patron de l’institut d’émission de Threadneedle Street interviennent alors que la

première place financière européenne est sur la défensive malgré le retour de bénéfices annuels d’avant la tourmente de 2008. Tout d’abord, la banque HSBC, qui avait menacé de déménager son siège de Londres à Hongkong en raison du coût des réglementations et de la hausse des impôts au Royaume-Uni, a dû démentir officiellement cette tentative grossière de chantage. Ensuite, l’annonce, le 7 janvier de l’octroi d’un bonus de 6,5 millions de livres (7,6 millions d’euros) au président de la Barclays, Bob Diamond, a relancé la polémique sur la cupidité des seigneurs de l’argent. Les critiques de M. King pourraient aussi peser sur la publication, le mois prochain, d’un rapport préliminaire de la commis-

sion bancaire indépendante chargée d’examiner la possible séparation des activités de dépôt et d’investissement des mastodontes financiers.Legouverneurdela Banque d’Angleterre est favorable à un démembrement des géants offrant toute la panoplie de services comme HSBC, Barclays ou Royal Bank of Scotland.

Sous les projecteurs du G20 De surcroît, en passant à l’offensive, M. King veut faire capoter la campagne lancée par le lobby bancaire dans le cadre de la préparation du budget du 23 mars. Les milieux d’affaires font pression sur le gouvernement pour atténuer le taux d’imposition des hauts revenus à 50 % et pour diminuer voire supprimer la taxe sur

les actifs bancaires. Le gouverneur a vu d’un mauvais œil l’accord conclu en février entre la City et la coalition conservatrice-libérale démocrate au pouvoir limitant les contraintes sur les primes de fin d’année en échange d’une hausse des prêts aux petites et moyennes entreprises. Enfin, les projecteurs du G20 comme des régulateurs sont braqués sur la « banque de l’ombre » (shadow banking), le système financier parallèle qui pratique des opérations similaires à celles des banques mais échappe à une régulation digne de ce nom. Or, les grands établissements bancaires fontleurs vaches grasses de la fourniture de financement comme de services aux hedge funds, firmes de capital-investissement, instru-

ments financiers sur les matières premières (ETF),chambres de compensation ou autres « conduits » comme les Specialized Investment Vehicules actuellement dans le collimateur de M. King.

La « Vieille Dame » renforcée Malgré les attaques souvent excessives voire cruelles qui déferlent sur lui depuis sa retentissante déclaration, le gouverneur reste serein. Le projet de réforme de la régulation financière britannique renforce les pouvoirs de la Banque d’Angleterre. La « Vieille Dame » doit accueillir deux des trois organismes devant remplacer la Financial Services Authority (FSA) en 2012:le contrôle du risquesystémique (Financial Policy Committee) et le respect des normes pruden-

tielles (Prudential regulatory Authority). Quant au troisième pilier, la Financial Conduct Authority, il est chargé de protéger l’investisseur contre les méthodes de vente musclées, par les banques, de produits financiers. Face à un tel rouleau compresseur, les avertissements de la City sur les risques de l’excès de régulation, ont du mal à se faire entendre. Difficile, la situation de la profession financière est pourtant loin d’être désespérée. L’un des économistes les plus renommés de la City est entré au Comité de politique monétaire de la Banque d’Angleterre. Il s’agit de Ben Broadbent, l’une des stars de la célèbre banque new-yorkaise Goldman Sachs. L’honneur est sauf. p M. R.

Economie 15

0123 Mercredi 9 mars 2011

La grande consommation s’engage dans l’étiquetage environnemental Plus de trois ans après le Grenelle, 168 entreprises vont expérimenter cette mesure

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eu de mesures du Grenelle de l’environnement ont, jusqu’à présent, eu un effet concret dans la vie des Français. L’affichage de l’impact environnemental des produits de grande consommation pourrait changer la donne. S’il était rendu obligatoire, il pourrait influencer les modes de consommation, mais aussi de production, en favorisant une conception moins polluante et plus économe en ressources. Plus de trois ans après le Grenelle, la mesure est mise sur les rails, mardi 8 mars, par la ministre de l’écologie, Nathalie KosciuskoMorizet, qui devait dévoiler la liste des 168 entreprises volontaires pour participer à l’expérimentation prévue à partir du 1er juillet. Au total, 230 sociétés s’étaient portées candidates. Première surprise : le ministère en attendait beaucoup moins. Les entreprises mettant l’accent sur la complexité du dispositif et ses contraintes, la généralisation prévue initialement a été transformée en expérimentation, suivie d’un bilan au bout d’un an, lors de l’examen de la loi Grenelle 2 à l’Assemblée nationale. Deuxième source d’étonnement, la variété des sociétés retenues, dont beaucoup ne sont pas particulièrement attendues sur ce créneau. De toutes tailles (30 % comptent moins de 50 salariés, 45 % de 50 à 500, et 25 % plus de 500), elles appartiennent aux secteurs d’activité les plus variés : la distribution (Auchan, Monoprix, Mousquetaires, Boulanger, Fnac, La Redoute, Promod, Leroy Merlin), l’agroalimentaire (Bonduelle, Glon, Coca-Cola, Heineken), la téléphonie mobile (Orange). On trouve aussi dans la liste des imprimeurs, des fabricants de gel douche ou de chaussures… Opération marketing ou véritable intérêt pour l’environnement ? « Participer ne leur apporte ni profit direct ni soutien particulier des pouvoirs publics, elles savent que c’est le sens de l’histoire », affirme-t-on au ministère.

Des collectivités locales ont créé une association pour mener des actions judiciaires collectives

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Plusieurs entreprises revendiquent un engagement ancien en faveur dudéveloppement durable, lié à la perception d’une attente du public, etaux convictionsde certaines directions. C’est le cas de Casino, qui affiche, depuis 2008, un indice carbone sur 600 produits de sa marque, ou de Conforama, qui expérimente déjà l’affichage environnemental sur 100 produits depuis janvier. Certains, comme le papetier Hamelin, souhaitent être « leader dans la filière sur ce type d’opération ». SFR souhaitait« anticiper la réglementation ». Reste à savoir ce qui sera affiché, et comment. « L’idée est d’aboutir, par catégorie de produits, à deux, trois, ou quatre indicateurs pertinents, incluant l’impact sur le changement climatique », explique-t-on au ministère. Emissions de gaz à effet de serre, effet sur la biodiversité, consom-

mation ou dégradation de la qualité de l’eau, pollution de l’air, consommation de ressources… Le tout devra être calculé sur l’ensemble du cycle de vie : production des matières premières, transformation, transport, distribution, voire fin de vie du produit.

Des questions à trancher Vulacomplexité du sujet,la plupart des entreprises pionnières ont fait appel à des bureaux d’études. Certains secteurs posent particulièrement problème : les produits de l’élevage par exemple, dont l’impact varie en fonction du mode et de la zone de production. Comment, ensuite, informer le consommateur? Certains ont choisi d’indiquer des valeurs brutes, en grammes de CO2 par kilo par exemple. SFR affiche une note sur 5, qui agrège trois données. « Cela revientà faire une moyenne de cho-

ses qui n’ont rien à voir, reconnaît Catherine Moulin, directrice santé et environnement chez SFR. Mais il faut se faire comprendre.» L’utilisation ou non d’échelles de notation (comparables à l’étiquette énergie ou à l’indice de la qualité de l’air) fait partie des questions importantes à trancher. Tout comme le mode d’affichage, sur des produits déjà surchargés. Pour Christian De Meerschman, directeur qualité chez Conforama, cesdifficultés nedoiventpasempêcher d’avancer. « C’est moins compliqué que nous ne l’imaginions, estime-t-il. Les fournisseurs sont de plus en plus sensibilisés sur le sujet et ont des informations. » « Notre objectif est de démontrer que c’est faisable, de manière pertinente et robuste, sans que cela devienne une usine à gaz », renchérit Marc Voinnesson chez Casino. p Gaëlle Dupont

Les acteurs du tourisme sur Internet se concentrent pour offrir les meilleurs prix aux clients La moitié des Français qui partent en vacances préparent leur voyage en ligne

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e plus en plus ancrée dans les comportements, la réservation sur Internet de billets de train et d’avion, de nuits d’hôtels ou de séjours – bref, le e-tourisme – s’accompagne d’un mouvement de concentration qui s’accélère. Dernier rapprochement en date : le rachat, par l’agence de voyages suisse Kuoni, du britannique Gullivers Travel Associates (GTA) pour 515 millions d’euros, rendu public lundi 7 mars. Cette acquisition suit de quelques semaines l’annonce, début février, de la cession par le groupe espagnol Amadeus de sa filiale Opodo aux fonds d’investissements Axa PE et Permira. Une opération d’un montant d’environ 500 millions d’euros qui doit permettre à Opodo de fusionner avec Go Voyages et eDreams afin de former le leader européen du voyage sur Internet. En février était aussi intervenu le rachat, par le portail français Easyvoyage.com, de trois sociétés britanniques (DMC, FSI Travel) et allemande (Travel Jungle) pour un peu plus de 10 millions d’euros. Une transaction permettant de faire d’Easyvoyage.com le numéro un européen dans le domaine des comparateurs de voyage. Avec un « panier moyen » de 258 euros en 2009 (contre

Prêts toxiques: les élus s’allient pour attaquer les banques

153 euros pour les produits techniques et 106 euros pour l’équipement de la maison), le tourisme s’impose comme le premier secteur d’achat sur la Toile. Désormais, la moitié des Français qui partent en vacances préparent leur voyage sur Internet et la moitiéréservent en ligne, pour un chiffre d’affaires évalué à plus de 8 milliards d’euros. Les principales prestations portent sur les billets de transport (en France, le numéro un, VoyagesSNCF. com, réalise un volume de vente annuel supérieur à 2,5 milliards d’euros), devant l’hôtellerie et les locations de vacances. « En 2008-2009,en pleine période decrise, le e-tourisme a poursuivi sur sa lancée et pour 2012 à 2015, on peut s’attendre à une progression de 10 % à 15 % par an et à une accéléra-

tion du processus de concentration », prévient Stéphane Botz, directeur du pôle tourisme-loisirs chez le cabinet de conseil KPMG. Ce mouvement soulève des objections. Ainsi, la fusion Opodo-

Avec un «panier moyen» de 258euros en 2009, le tourisme s’impose comme le premier secteur d’achat sur la Toile Go Voyages-eDreams est examinée de près par les autorités de la concurrence, en raison, notamment, de la prééminence dont disposerait le nouvel ensemble dans les réservations de billets d’avion.

Les trois grands types de sites de e-tourisme Les agences de voyage en ligne Opodo, Amadeus, SNCF-Voyages, Expedia, Selectour, Voyage privé, Go Voyages, Kuoni, etc., assurent les réservations sur Internet et négocient les tarifs avec les compagnies, les hôteliers, les tour-opérateurs. La réservation en direct Ces sites permettent aux compa-

gnies aériennes ou aux hôtels de vendre leurs prestations sans intermédiaire. Les comparateurs de prix EasyVoyage, Sprice, Kelkoo, etc., proposent des sélections de tarifs et de services. Ils sont rémunérés en fonction du trafic qu’ils engendrent à destination des agences de voyages.

En constituant des ensembles toujours plus vastes, les acteurs du e-tourisme veulent peser encore plus fortement auprès de leurs fournisseurs pour négocier de meilleurs prix. Ils recherchent aussideséconomiesd’échelleenmatière de technologie mais surtout dans le domaine du marketing et de la course à la notoriété. Guy Raffour, président du cabinet d’étude Raffour Interactif, remarque aussi que le secteur touristique, «régulièrement confronté à des situations de crise [grippe H1N1, nuage volcanique, grèves et dernièrement, révolutions dans les pays arabes], doit en outre s’adapter à des consommateurs aguerris et parfaitement informés des réalités tarifaires ». Ce qui, insiste-t-il, « contribue également à la recherche d’un seuil critique». Président de l’Association des experts du tourisme, Patrick Viceriat considère que le e-tourisme va connaître de nouveaux changements. « A partir de 2014-2015, l’activité va progressivement basculer sur l’Internet mobile, assure-t-il. En fonction de la destination, de la période souhaitée et du budget prévu, chacun pourra recevoir sur l’écran de son téléphone des propositions en provenance des touropérateurs. » p Jean-Michel Normand

e président (PS) du conseil général de Seine-Saint-Denis, Claude Bartolone, a pris la tête du combat des collectivités locales contre les banques qui leur ont vendu des prêts spéculatifs, devenustoxiques. Ildevait officialiser la création, mardi 8 mars, d’une association d’élus ayant pour but d’échanger des informations, mettre des moyens en commun et mener une action judiciaire collective contre les prêteurs, voire contre l’Etat. Une poignée d’élus ont déjà rejoint ce projet, notamment Henri Plagnol, député et maire (UMP) de Saint-Maur-des-Fossés (Val-deMarne), Maurice Vincent, maire (PS) de Saint-Etienne, ou Eugène Binaisse, maire (DVG) d’HéninBeaumont (Pas-de-Calais)… Des élus de plus petites communes ont rejoint le mouvement, comme Marc Goua, maire (PS) de Trélazé (Maine-et-Loire, 12 000 habitants) jusqu’à Séverin Médori, maire d’un village corse de 300 habitants, Linguizzetta. «Beaucoup d’autres municipalités et organismes publics, comme le Service départemental incendie et secours de l’Ain, nous ont contactés et s’apprêtent à nous rejoindre », précise un porte-parole du conseil général de Seine-SaintDenis.L’hôpital d’Ajaccio, confronté au même problème, s’est, lui, heurté au veto de sa tutelle, le ministère de la santé. Les collectivités, les hôpitaux et les organismes HLM pris au piège des prêts toxiques sont nombreux et de toutes tailles, mais souvent victimes des mêmes types de prêts, dont la nocivité se révèle au fil des ans. « Aujourd’hui, ce sont les formules dont les taux évoluent en fonction du franc suisse ou de son différentiel avec l’euro ou le dollar qui sont les plus dangereux », observe Michel Klopfer, conseiller financier.

Fin février, le département de Seine-Saint-Denis a assigné trois banques – le Crédit agricole, Dexia et l’irlando-allemande Depfa Bank – pour réclamer l’annulation de six prêts ou contrats de swap, c’est-à-dire de couverture de taux. Ainsi, le taux d’un emprunt de 10 millions d’euros auprès de Depfa Bank, basé sur la parité entre l’euro et le franc suisse, est passé de 1,47 % à plus de 24 %, occasionnant un surcoût annuel de 1,5 million d’euros. Un contrat d’échange de taux datant de 2006, signé avec le Crédit agricole, basé sur la double parité entre l’euro, d’une part, le dollar et le franc suisse, d’autre part, a vu son taux passer à 7,516 % le 1er décembre 2010, s’avérant plus risqué que le taux qu’il était censé couvrir…

Le précédent britannique DidierSeban, avocat du département de Seine-Saint-Denis, invoque le défaut de conseil des prêteurs et se fonde sur la circulaire de la direction des collectivités locales du 15 septembre 1992, qui indique que « l’engagement des finances descollectivitéslocalesdansdesopérations de nature spéculative ne relève ni des compétences qui leur sontreconnues parla loi, nide l’intérêt général ». La circulaire poursuit : « Les actes ayant un tel objet sont déférés par le représentant de l’Etat au juge administratif », raison pour laquelle les demandeurs envisagent de mettre aussi en cause la responsabilité de l’Etat. C’estce qui s’est passé au Royaume-Uni dans les années 1980, où des collectivités locales ont de la même manière été confrontées à des hausses spectaculaires des taux d’intérêt de contrats de swap. Au terme de deux ans d’âpres procédures, l’équivalent britannique de la Cour de cassation leur a donné raison en 1992. p Isabelle Rey-Lefebvre

Déjà au régime sec, la Grèce est punie par Moody’s

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e premier ministre grec, Georges Papandréou, peut toujours courir les capitales européennes pour jurer que son pays remboursera les prêts de ses partenaires « avec les intérêts »… Les promesses n’engagent que ceux qui les écoutent. Voilà peutêtre ce à quoi pensait l’agence de notation américaine Moody’s en décidant de dégrader de trois crans, lundi 7 mars, la note souveraine de la Grèce, de Ba1 à B1. Selon la subtile échelle de risques établie par Moody’s, la dette grecque est désormais considérée comme « hautement spéculative ». Tant pis pour les plans de rigueur appliqués à marche forcée, le déficit budgétaire réduit de six points en un an, les sacrifices consentis par la population grecque. « Nous n’en pouvons plus », clamaient les manifestants à Athènes le 23 février. Rien n’y fait. Moody’s estime que « la possibilité d’un défaut ou d’un échange de dette a augmenté depuis la dernière dégradation de note en juin 2010 ». En cause : l’énormité de la tâche qui incombe au gouvernement grec, sa difficulté à faire rentrer les recettes fiscales et les incertitudes quant à la solidarité de ses partenaires européens sur le long terme. L’annonce a fait sortir Athènes de ses gonds. La dégradation est « complètement injustifiée », a

dénoncé le ministère des finances dans un communiqué de deux pages au ton vengeur, accusant Moody’s de centrer «son analyse sur les risques » sans tenir compte de « l’impact positif » du plan de consolidation. Et de s’indigner : alors qu’elles ont « complètement échoué » à prévoir la crise financière de 2008, les agences sont maintenant lancées entre elles dans une course à l’échalote.

« Paranoïa » En réalité, sur les marchés, nul ne conteste le risque d’une restructuration de la dette grecque. Mais Moody’s n’y est pas allée avec le dos de la cuillère. Un abaissement de trois crans en un seul coup est une sanction plutôt rare. Après avoir longtemps «surnoté» la Grèce par rapport à ses consœurs Standard & Poor’s et Fitch, Moody’s lui attribue maintenant le rating (notation) le plus bas. Pourquoi une telle punition ? « Les agences vivent dans la paranoïa », affirme Norbert Gaillard, consultant à la Banque mondiale. Selon l’expert, elles ne veulent plus qu’on les accuse d’avoir « raté » une crise, ou de l’aggraver en soufflant sur les braises. « Moody’s a profité du relatif calme sur les marchés, indique M. Gaillard. Elle s’est dit : tant qu’à dégrader, autant y aller franchement. » p Marie de Vergès

16 Economie Le point de vue des chroniqueurs de l’agence économique

Reuters Breakingviews Bernard Arnault met le prix pour emporter Bulgari

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l y a déjà plusieurs années que Bulgari était devenu la « noncible » la plus convoitée de l’industrie du luxe. Le joailler-horloger italien était étroitement contrôlé par une famille qui protestait encore il y a quelques mois que l’entreprise n’était pas à vendre. Mais certains arguments sont apparemment plus puissants que d’autres, et il semble que Bernard Arnault ait fini par trouver le chiffre qu’il devenait tout à fait impossible de refuser. En offrant à la famille BulgariTrapani une prime de près de 60 % sur le cours de Bourse de la société italienne – elle porte la valeur totale de la transaction à quelque 3,7 milliards d’euros –, le groupe LVMH de Bernard Arnault ajoute un nouvel étalon à son écurie prestigieuse du luxe qui accueille déjà des marques comme Vuitton, Givenchy, les champagnes Moët ou les montres Tag Heuer (Le Monde du 8 mars).

Une cible rare et de qualité L’opération donne à Bulgari une valeur équivalente à vingt fois son excédent brut d’exploitation (ebitda) et quarante fois ses bénéfices attendus. C’est deux fois la valeur que les marchés donnent actuellement à LVMH, et à peu près l’équivalent de celle qu’ils attribuent à Hermès, le maroquinier français dans lequel M.Arnault a pris, en 2010, une participation hostile de 20 %. Les deux groupes sont restés muets sur les synergies attendues de l’acquisition, se bornant à formuler le vague espoir que leur union leur permettra de « saisir de nouvelles opportunités de croissan-

ce ». Mais M. Arnault n’a pas abandonné tout sens de la prudence. Il va payer en actions LVMH la participation de 50,4 % de la famille, laquelle recevra en échange un peu plus de 3 % du groupe français, ainsi que deux sièges à son conseil d’administration. Le PDG actuel de Bulgari, Francesco Trapani, deviendra en outre le directeur de la division horlogerie et joaillerie de LVMH, qui va ainsi doubler de volume et faire enfin du groupe français un acteur significatif sur ce marché – même si le chiffre d’affaires dans ce domaine représentera à peine 10 % de celui du groupe. LVMH va aussi lancer une offre en numéraire sur le reste du capital de Bulgari, qui pourrait lui coûter jusqu’à 1,8 milliard d’euros. Mais dans l’hypothèse où tous les actionnaires minoritaires du groupe italien acceptent l’offre qui leur est faite – et compte tenu de la prime proposée, on voit mal pourquoi ils refuseraient – la dette de LVMH ne représenterait qu’à peine 0,8 fois son ebitda – autant dire un niveau négligeable. M. Arnault vient d’une certaine manière de procéder à son embauche la plus onéreuse. Mais la principale justification du prix qu’il a décidé de payer réside tout bonnement dans le fait que, dans l’industrie du luxe, des cibles de la qualité de Bulgari se font de plus en plus rares, à mesure que s’éclaircissent les rangs des groupes familiaux indépendants et prospères. L’homme d’affaires français a montré une fois de plus qu’il a l’art et la manière de saisir les occasions. p Pierre Briançon

Du bien-être social au maintien de l’ordre, Pékin fixe ses priorités

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e discours prononcé par le premier ministre chinois Wen Jiabao lors de l’ouverture de la session annuelle de l’Assemblée nationale populaire, samedi 5 mars, devrait rassurer les investisseurs sur trois points : la croissance deviendra plus durable grâce à la priorité donnée au bien-être social ; la hausse des dépenses publiques devrait entraîner un cercle positif ; et si cela ne suffit pas, le budget record consacré… au maintien de l’ordre et à la sécurité intérieure devrait limiter les risques de mécontentement. Inflation, durcissement de la politique monétaire, tensions sociales : les investisseurs étaient inquiets ces derniers temps. Résultat, la Bourse de Shanghaï faisait du surplace depuis trois mois. Lundi 7 mars, à la suite du discours du premier ministre, elle s’est adjugée 2 %. Le budget 2011 fixe les objectifs de Pékin dans trois domaines clés : un taux d’inflation à 4 %, une croissance du produit intérieur brut (PIB) de 7 % et la construction de 10 millions de logements à des prix abordables, autant de prévisions clairement destinées à contenter les « masses ». La priorité donnée à l’action sociale est pertinente. Les inégalités aggravent les risques politiques. Mesurés par l’indice de Gini, les écarts de revenus ont dépassé le niveau d’alerte dès 2007 et, selon la Banque mondiale, ils sont les plus importants du monde développé. Par ailleurs, une hausse des revenus donnerait à Pékin une croissance plus stable, moins tributaire des investissements et davantage alimentée par la consommation. Une politique de dépenses publiques visant à financer des projets sociaux devrait maintenir la croissance du PIB au-dessus de la barre des 8 %, tout en garantis-

sant un niveau de liquidités suffisant pour soutenir le prix des actifs. Ainsi, en 2011, les dépenses budgétaires augmenteront de près de 1 000 milliards de dollars, (715 milliards d’euros) soit de 13 % par rapport à 2010, contre une progression de 10 % en 2010 par rapport à 2009. A noter que la Bourse de Shanghaï affiche généralement de bonnes performances lorsque les dépenses publiques s’accroissent.

Des objectifs très ambitieux Wen Jiabao a défini des objectifs difficiles à tenir. La hausse des revenus est invariablement inférieure à la croissance du PIB – de 1,9 point de pourcentage sur la période 2006-2010, selon les chiffres officiels. Même si Pékin parvient à inverser la tendance, le relèvement du salaire minimum risque d’accélérer l’inflation et de peser sur l’emploi. Quant au programme de construction de logements, il paraît bien ambitieux : la Chine prévoit d’en mettre en chantier en 2011 presqu’autant que durant les cinq années précédentes. D’où l’importance des dépenses de sécurité. Les troubles dans le monde arabe marquent les esprits. Par conséquent, la police et les forces de sécurité intérieure verront leur budget croître de 14 % en 2011 – pour la première fois, il dépassera celui de la défense. On ne peut pas dire que c’est une bonne nouvelle pour ceux qui aimeraient voir la démocratie s’installer en Chine. Mais les investisseurs soucieux de voir leurs profits pérennisés pousseront, quant à eux, un profond soupir de soulagement. p Wei Gu (Traduction de Béatrice Laroche)

n Sur Breakinviews.com Plus de commentaires sur l’actualité économique et financière.

0123 Mercredi 9 mars 2011

Les fictions rognent les audiences des journaux télévisés de TF1 et de France2 «Plus belle la vie» sur France 3 et «Scènes de ménages» sur M6 gagnent des parts de marché

R

ire ou s’informer ? Ces derniers mois, de plus en plus de téléspectateurs ont choisi de délaisser les journaux de 20 heures de TF1 et de France 2 pour se divertir devant les fictions de M6 et de France 3. A elles deux, « Plus belle la vie » sur France 3 et « Scènes de ménages » sur M6 rassemblent plus de téléspectateurs que le « 20 heures » de TF1. L’information sur la Une ne capte plus, en moyenne, que sept millions de fidèles, contre plus de huit millionspour les deux séries. Pourtant, début janvier, le JT de TF1 revendiquait plus de 7,4 millions de téléspectateurs en moyenne. Cette décrue soudaine fait dire à Thomas Valentin, le vice-président de M6, que « “Scènes de ménages” a pris 500 000 téléspectateurs à TF1 ! ». Pire encore pour la Une, depuis quelques semaines, la comédie quotidienne de M6 dispute à TF1 son leadership auprès des fameuses ménagères de moins de 50 ans,

la cible privilégiée des annonceurs : mercredi 2 mars, M6 a pris le dessus, avec une part d’audience de 27,4 % chez les femmes de moins de 50 ans, contre 22,9 % pour le journal de TF1.

Rampe de lancement Désormais, c’est une lutte au couteau qu’ont entamée les deux chaînes privées pour séduire les plus jeunes. France 2, pour sa part, paraît hors course. Avec une audience vieillissante et de plus en plus masculine, le 20 heures de la chaîne publique n’est plus suivi, en moyenne, que par 10 % des femmes. Lancée en novembre 2009, entre 20 heures et 20 h 30, « Scènes de ménages » a d’abord été un succès sur la chaîne espagnole Antenna 3, dont M6 est actionnaire. Sur M6, la série est montée lentement en puissance. Un peu à la manière de « Plus belle la vie ». En 2010, la fiction a attiré en moyenne deux millions de téléspectateurs. Mais

depuis janvier, avec l’éclatement des révoltes dans le monde arabe, les téléspectateurs ont délaissé encore plus les journaux télévisés. En moyenne, « Scènes de ménages » rassemble désormais 3,6 millions de téléspectateurs avec des pointes à plus de 4 millions. De plus en plus, la fiction sert de rampe de lancement aux soirées de M6. La preuve, lundi 7 mars, la chaîne privée a largement dominé TF1. Aux 3,6 millions de fidèles de la série ont succédé 3,8 millions d’amateurs de l’émission culinaire « Top Chef ». M6 a obtenu 30,3 % de part d’audience auprès des femmes, contre 22 % à TF1.

« Pas de solution miracle » Ces succès d’audience rapportent beaucoup à M6. Fixé à 26 000 euros en janvier 2010, le spot de publicité de l’écran de coupure de « Scènes de ménages » a été porté, en mars 2011, à 38 000 euros. Selon l’institut Yacast, la série a dégagé un chiffre

d’affaires publicitaire d’environ 36 millions d’euros brut entre le lancement de la saison 2 à la rentrée de septembre 2010 et la fin du mois de février. Face au boom des fictions de France 3 et M6, Catherine Nayl, la directrice de l’information de TF1, ne voit « pas de solution miracle » pour redresser l’audience du 20 heures de Laurence Ferrari. Opposée à « un JT marketing », Mme Nayl affirme que le 20 heures « ne cessera pas de parler de la Libye, de la Tunisie et de l’Egypte ». Pour autant, Mme Nayl « ne veut pas faire de mauvais procès à ceux qui nous regardent ». Elle ne « croit pas à la mort du carrefour de l’info de 20 heures ». Surtout à l’approche de l’élection présidentielle. Selon la directrice de l’information, la Une doit à tout prix maintenir son leadership car « TF1 ne peut pas se permettre d’être deuxième quel que soit le programme et quelle que soit l’heure ». p Guy Dutheil

Conjoncture et entreprises Commerce En janvier, le déficit français s’est encore creusé

Télécommunications

Le déficit commercial de la France s’est creusé en janvier à 5,89 milliards d’euros, contre 5,6 milliards le mois précédent, en données corrigées des variations saisonnières, ont indiqué les douanes, mardi 8 mars. En janvier, les importations ont atteint 40,20 milliards d’euros, après 38,88 milliards en décembre 2010. Les exportations sont passées de 33,82 à 34,31 milliards d’euros. – (AFP.)

Finance Dette d’Etat : les eurodéputés votent la limitation de la spéculation Les députés européens ont voté, lundi 7 mars, « dans une grande majorité », les dispositions du rapport de l’eurodéputé vert Pascal Canfin visant à interdire l’achat de titres dérivés de dettes, les CDS (contrats d’échanges sur défaut) utilisés pour spéculer contre les dettes souveraines, et pour la quasi-interdiction des ventes à découvert à nu. Les Etats membres doivent maintenant arrêter leur position sur ce texte.

Les opérateurs s’engagent à proposer un tarif social pour le mobile Pour 10 euros par mois au maximum, les plus démunis pourront bientôt téléphoner pendant 40 minutes, envoyer 40 SMS et être appelés à tout moment. Lundi 7 mars, lors de la signature d’une convention avec Eric Besson, ministre de l’industrie, et Frédéric Lefebvre, secrétaire d’Etat à la consommation, les opérateurs de téléphonie mobile (Orange, Bouygues et SFR) et certains MVNO (Virgin Mobile, Breizh Mobile, Tele2 Mobile…) se sont engagés à lancer un « tarif social mobile » d’ici six mois au plus tard. L’offre sera disponible dès sa mise en place aux bénéficiaires du revenu de solidarité active (RSA), soit 1,2 million de foyers. Outre son prix fixe, l’offre ne doit pas comporter d’engagement de durée, de frais d’activation ou de résiliation de ligne. En juin, un tarif social pour l’accès à Internet sera discuté. p G. D.

Restauration Fondations Capital veut « exporter » les Courtepaille

Luxe Hermès : démission du président du conseil de surveillance

Le fonds d’investissement Fondations Capital, nouvel actionnaire majoritaire de Courtepaille, a annoncé, mardi 8 mars, qu’il comptait ouvrir 78 restaurants d’ici cinq ans, pour atteindre 300 enseignes, et recruter 1 500 collaborateurs. Courtepaille, qui ne possède qu’un restaurant hors de France, en Pologne, réfléchit aussi à s’« exporter ».

Le président du conseil de surveillance d’Hermès, Jérôme Guerrand, a démissionné, le 3 mars et a été remplacé par Eric de Seynes, a annoncé le groupe lundi 7 mars, sans préciser les raisons de ce départ, qui pourrait être lié à des raisons de santé. M. de Seynes, âgé de 51 ans, est actuellement directeur général de Yamaha Motor France.

Marchés

Assurance Les bénéfices de Scor en hausse de 13 % Le réassureur français Scor a indiqué, mardi 8 mars, avoir enregistré en 2010 un bénéfice net en augmentation de 13 %, à 418 millions d’euros, grâce notamment à une hausse des produits financiers.

Agriculture Les banques prêtes à aider les éleveurs Reçues, lundi 7mars, par les ministres de l’agriculture et de l’économie, Bruno Le Maire et Christine Lagarde, les cinq grandes banques françaises (Crédit agricole, BNP Paribas, Société générale, BPCE et Crédit mutuel) se sont engagées à étudier au cas par cas la situation des éleveurs bovins ayant des difficultés à rembourser leurs prêts.

LES BOURSES DANS LE MONDE 8/3, 9h47

Mardi 8 mars 9h45 ACCOR .........................◗ AIR LIQUIDE .......................◗ ALCATEL-LUCENT ...........◗ ALSTOM ............................◗ ARCELORMITTAL................ AXA ....................................◗ BNP PARIBAS ACT.A ........◗ BOUYGUES .......................◗ CAP GEMINI ......................◗ CARREFOUR .....................◗ CREDIT AGRICOLE ............◗ DANONE ............................◗ EADS ...................................◗ EDF ......................................◗ ESSILOR INTL ....................◗ FRANCE TELECOM ............◗ GDF SUEZ ...........................◗ LAFARGE ...........................◗ L’OREAL ............................◗ LVMH MOET HEN. ............◗ MICHELIN...........................◗ NATIXIS ..............................◗ PERNOD RICARD...............◗ PEUGEOT............................◗ PPR .....................................◗ PUBLICIS GROUPE ...........◗ RENAULT............................◗ SAINT-GOBAIN..................◗ SANOFI-AVENTIS .............◗ SCHNEIDER ELECTRIC .....◗ SOCIETE GENERALE .........◗ STMICROELECTR. .............◗ SUEZ ENV. ..........................◗ TECHNIP.............................◗ TOTAL .................................◗ UNIBAIL-RODAMCO ........◗ VALLOUREC .......................◗ VEOLIA ENVIRON. .............◗ VINCI...................................◗ VIVENDI ..............................◗

Le laboratoire Sanofi-Aventis va supprimer 700 postes en Europe, en premier lieu au Portugal et notamment parmi ses visiteurs médicaux, rapporte, mardi 8 mars La Tribune. Un porte-parole du groupe a refusé de confirmer ce chiffre. – (Reuters.)

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VALEURS DU CAC40 Valeur

Pharmacie Sanofi-Aventis va supprimer 700 postes

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32,41 92,70 3,92 41,45 25,76 15,09 52,31 34,56 41,80 32,38 11,76 44,49 19,45 31,36 51,39 15,59 27,51 43,60 81,80 113,40 59,00 4,18 66,08 28,57 110,00 39,96 41,76 41,90 50,33 117,60 46,51 9,48 14,93 71,03 43,60 147,10 72,85 22,21 43,69 19,88

32,44 93,13 4,04 41,59 25,72 14,85 52,23 34,23 42,02 32,26 11,78 44,52 19,30 31,09 51,53 15,54 27,57 43,48 81,84 112,95 57,74 4,16 65,78 28,30 110,55 40,02 41,56 41,89 50,48 118,10 46,55 9,45 14,88 70,72 43,70 147,75 73,60 22,18 43,65 19,90

-0,11 -0,46 -2,97 -0,32 0,16 1,62 0,15 0,99 -0,54 0,37 -0,17 -0,04 0,80 0,88 -0,27 0,35 -0,22 0,26 -0,05 0,40 2,18 0,43 0,46 0,94 -0,50 -0,16 0,47 0,02 -0,30 -0,42 -0,10 0,38 0,34 0,44 -0,23 -0,44 -1,02 0,16 0,09 -0,13

-2,69 -2,05 79,72 15,75 -4,45 21,16 9,87 7,16 19,67 4,96 23,74 -5,37 11,55 2,18 6,67 -0,03 2,46 -7,08 -1,54 -7,88 9,87 19,49 -6,08 0,56 -7,56 2,46 -4,00 8,83 5,18 5,00 15,63 22,56 -3,37 2,79 9,96 -0,61 -7,32 1,58 7,39 -1,61

36,20 96,99 4,12 44,91 28,55 16,16 59,93 35,05 43,38 36,61 12,92 48,07 22,27 32,75 52,75 16,65 30,05 48,67 90,00 125,35 61,49 4,39 72,78 33,60 122,80 41,84 50,53 44,85 52,23 123,30 52,70 9,64 15,99 76,30 44,55 150,80 85,59 24,30 44,68 22,07

Plus bas

Divid. net

Code ISIN

32,20 1,05 T FR0000120404 90,47 2,25 T FR0000120073 2,20 0,16 T FR0000130007 34,59 1,24 T FR0010220475 24,71 0,16 A LU0323134006 12,53 0,55 T FR0000120628 47,03 1,50 T FR0000131104 31,84 1,60 T FR0000120503 34,02 0,80 T FR0000125338 31,00 1,08 T FR0000120172 9,31 0,45 T FR0000045072 43,04 1,20 T FR0000120644 17,55 0,17 T NL0000235190 30,24 0,57 A FR0010242511 46,60 0,70 T FR0000121667 15,54 0,60 A FR0000133308 26,61 0,83 A FR0010208488 42,51 2,00 T FR0000120537 81,68 1,50 T FR0000120321 109,25 0,70 A FR0000121014 52,00 1,00 T FR0000121261 3,51 0,45 T FR0000120685 65,17 0,73 S FR0000120693 27,55 1,50 T FR0000121501 109,45 3,30 T FR0000121485 36,15 0,60 T FR0000130577 41,44 3,80 T FR0000131906 37,47 1,00 T FR0000125007 48,11 2,40 T FR0000120578 108,35 2,05 T FR0000121972 39,25 0,25 T FR0000130809 7,90 0,06 S NL0000226223 14,77 0,65 S FR0010613471 67,79 1,35 T FR0000131708 40,01 1,14 A FR0000120271 137,60 20,00 D FR0000124711 72,00 3,50 T FR0000120354 21,55 1,21 T FR0000124141 39,37 0,52 A FR0000125486 19,73 1,40 T FR0000127771

Cours en euros. ◗ : valeur pouvant bénéficier du service de règlement différé (SRD). # : valeur faisant l'objet d'un contrat d'animation. Plus haut et plus bas : depuis le 1/1/2011. n/d : valeur non disponible. A : acompte, S : solde, T : totalité.

Indice

ROYAUME UNI ETATS-UNIS

Maxi 2011

Mini 2011

PER

CAC 40

3993,07 8/3

0,07

4169,87 16/2

3790,96 10/1

7201,98 8/3

0,56

7441,82 21/2

6835,74 10/1

11,20

FTSE 100 index

5977,16 8/3

0,06

6105,77 21/2

5815,44 31/1

10,50

Dow Jones ind. 12090,03 8/3

10,80

-0,66

12391,29 18/2

11573,87 10/1

11,80

2745,63 8/3

-1,40

2840,51 18/2

2663,64 4/1

16,20

Nikkei 225 10525,19 8/3

0,19

10891,60 17/2

10182,57 31/1

13,60

Nasdaq composite JAPON

% var.

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Enquête Décryptages 17

0123 Mercredi 9 mars 2011

«Ilestclair qu’ilnevapasbien» Mouammar Khadafi et sa fille Aïcha lors de festivités célébrant le quarantième anniversaire de la prise de pouvoir du Guide libyen, Tripoli, le 1er septembre 2009. AMMAR ABD RABBO/ABACAPRESS.COM

Les télégrammes diplomatiques révélés par WikiLeaks montrent que Washington suit de près la santé de Kadhafi… jusqu’à ses implants capillaires. Mais il y a aussi ses bonnes affaires, ses frasques et celles de ses enfants Yves Eudes

L

es rapports diplomatiques confidentielsaméricains, divulgués par WikiLeaks et examinés par Le Monde, montrent qu’auprintemps2009,l’ambassade des Etats-Unis à Tripoli a cherchéàse renseigner sur la santédu colonel Kadhafi, alors âgé de 67 ans : « La nature exacte de ses maux n’est pas confirmée, mais il est clair qu’il ne va pas bien. »

La santé du colonel Tout le monde avait remarqué qu’il montait les escaliers difficilement, et que son visage était moins mobile. On disait aussi qu’il faisait des siestes prolongées, et que son emploi du temps avait été allégé. Grâce à leur réseau d’informateurs, parmi lesquels des médecins libyens et des hommes d’affaires européens, les Américains en arrivent à la conclusion que les rumeurs persistantes sur un cancer de la prostate ou de la gorge sont infondées. En revanche, il semble avéré que le colonel est hypertendu et « quasi diabétique ».

Il est surtout hypocondriaque : il fait filmer tous ses examens médicaux, puis il invite d’autres médecins à visionner les images pour qu’ils donnent leur avis sur leurs collègues. Le chef d’un service hospitalier raconte qu’il a perdu un après-midi à voir et revoir la vidéo d’une endoscopie qui venait d’être pratiquée sur le colonel. On sait aussi que dans tous ses déplacements,le Guide de la révolution est accompagné par son infirmière personnelle, une Ukrainienne qualifiée par les diplomates américains de « blonde voluptueuse », qui lui prodigue des soins quotidiens. D’autres informateurs ont raconté aux diplomates que le colonel Kadhafi, qualifié « d’homme extrêmement vaniteux », a subi des injections de Botox pour atténuer ses rides – ce qui expliquerait la nouvelle rigidité de son visage. Il s’est aussi fait greffer des implants capillaires, mais l’opération a mal tourné : « Il a souffert d’une forme rare de réaction auto-immunitaire, et on a dû retirer les greffons. »

Kadhafi Inc. Pour décrire la mainmise de la famille et de l’entourage du colonel Kadhafi sur les secteurs les plus lucratifs de l’économie, les diplomates américains en poste à Tripoli n’ont pas hésité, en 2006, à intituler leur rapport secret « Kadhafi Incorporated ». Pour commencer, « les enfants et les favoris de Kadhafi sont censés recevoir un fluxde revenus en provenance de la compagnie nationale de pétrole et de ses filiales ». Ceux qui vivent à l’étranger ont aussi droit à cette distribution, qui peut se chiffrer en millions de dollars par an. D’autre part, les principaux membres du clan Kadhafi se sont lancés dans les affairessans retenue,en profitant au maximum de leur position privilégiée. Aïcha, la fille du colonel, utilise son association caritative comme tremplin pour investir dans les secteurs de la santé, de l’énergie et de la construction. En outre, avec sa mère Safia, la seconde épouse du colonel, Aïcha a ouvert des boutiques de mode haut de gamme spécialisées dans les vêtements importés d’Europe. Selon un informateur de l’ambassade américaine, Safia serait intervenue personnellement auprès du servicedes douanespour que les marchandises des boutiques concurrentes restent bloquées en transit pendant toute la pério-

de du Nouvel An. Elles ne furent livrées qu’après la fin de la saison des cadeaux. De son côté, Saadi, l’un des fils du colonel, réussit à cumuler sa carrière militaire et ses activités d’homme d’affaires dans différents secteurs, notamment le football et le tourisme. Cela dit, il a connu quelques déboires : il s’était réservé une île côtière pour y faire construire un complexe hôtelier, mais en deux ans, rien ne s’est passé, « peut-être parce qu’en face de l’île, le panorama est gâché par une grosse installation pétrolière». Son frère Mohammed a préféré investir dans la téléphonie. Selon les diplomates américains, ce choix est à la fois commercial et politique : « Compte tenu du rôle joué par les téléphones mobiles lors des émeutes de Benghazi en 2006, la famille voudra absolument conserver le contrôle complet des télécoms. » Même les apparentes ouvertures du régime doivent être interprétées à la lumière des intérêts matériels de la famille. On comprend mieux le plaidoyer de Saïf, un autre fils du colonel, en faveur de la libre circulation de la presse étrangère dans le pays, quand on sait qu’il souhaite s’arroger le monopole de sa distribution.

Même les apparentes ouvertures du régime doivent être interprétées à la lumière des intérêts matériels de la famille Parfois, le partage du butin provoque des conflits au sein même du cercle familial. Deux des fils du chef de l’Etat, Mohammed et Motassim, se sont chamaillés pendantdesannées pourle contrôled’une activité apparemment modeste : la licence de commercialisation du Coca-Cola pour la Libye. Motassim, codétenteur originel de la licence, avait été exilé en Egypte par son père à cause d’une affaire politico-familiale. Or Mohammed avait profité de l’absence de son frère pour le spolier, en transférant la licence Coca-Cola au Comité olympique libyen, qu’il contrôlait. A son retour, pour récupérer son bien, Motassim n’avait pas hésité à faire occuper l’usine locale de Coca-Cola par sa milice privée, ce qui blo-

qua la production pendant des mois. Finalement, après plusieurs épisodes violents, y compris deux kidnappings, un compromis bancal fut trouvé grâce à une médiationdu clan etaux fortespressions de l’ambassade des Etats-Unis, qui défendait les intérêts dugroupe américain. Lesdiplomates notent toutefois que jusqu’en 2006, la famille Kadhafi ne faisait pas étalage de son train de vie luxueux devant la population libyenne – moins en tout cas que les émirs du Golfe, certaines dynasties africaines ou le « clan Hariri » au Liban.

Soap opera Quatre ans plus tard, la situation a empiré, au point que le colonel Kadhafi et son épouse semblent avoir complètement perdu le contrôle de leurs enfants. Début 2010, les diplomates américains rédigent un nouveau rapport sur le style de vie du clan, en insistant cette fois sur leurs frasques : « Ils ont fourni aux observateurs locaux suffisamment de scandales pour produire un soap opera libyen. » Motassim, l’un des fils, nommé par son père conseiller spécial pour la sécurité nationale, passe les fêtes du Nouvel An dans l’île antillaise de Saint-Barthélemy, où il dépense des millions de dollars pour organiser des fêtes décadentes et des concerts privés avec des stars américaines de la chanson comme Mariah Carey, Beyoncé ou Usher. Son frère Hannibal bat sa femme et ses serviteurs, ce qui lui vaut des ennuis avec les autorités locales lors de séjours en Europe. Face à ces dérèglements, le comportement de leur frère Saïf semble presque exemplaire. Au lieu de fréquenter les palaces et les boîtes de nuit, il va chasser dans les montagnes de Nouvelle-Zélande et d’Algérie, loin des paparazzis. Diplômé de la prestigieuse London School of Economics (LSE), il a la réputation d’être un homme cultivé, et s’occupe d’une association caritative qui, selon les Américains, fait du bon travail auprès des victimes du tremblement de terre à Haïti. En affaires, il semble plus avisé que ses frères. A la suite d’une série de conversations informelles avec des étudiants et des hommes d’affaireslocaux, les diplomates américains semblent penser que Saïf, « le fils raisonnable », est le meilleur candidat possible à la succession de son père et que s’il se retrou-

ve un jour à la tête du pays, il saura le moderniser et le démocratiser. A posteriori, quand on observe le comportement agressif et irrationnel de Saïf depuis le début de la rébellion de février, on peut douter de la justesse de cette analyse. La LSE soupçonne Saïf Kadhafi de plagiat dans la rédaction de sa thèse, et a ouvert une enquête. Et Howard Davies, directeur de cette université a démissionné, le 3 mars, à la suite de révélations sur les liens économiques entre la LSE et la Libye, et plus particulièrement le financement par la Libye d’un programme visant à former des jeunes Libyens. Plus généralement, au début de 2010, les diplomates américains estimaient que le régime en place allait sans doute perdurer, et qu’il convenait de poursuivre le rapprochement avec le clan Kadhafi, en oubliant au maximum le passé. La période était propice, car l’arrivée au pouvoir du président Obama avait amélioré l’image des Etats-Unis dans la région, y compris aux yeux du colonel Kadhafi. Par ailleurs, le sénateur indépendant Joseph Lieberman, très influent à Washington, avait fait un voyage officiel à Tripoli, et n’avait pas hésité à affirmer que la Libye, ancien « Etat terroriste », était devenue un « allié important dans la guerre contre le terrorisme ». L’ambassade souhaitait donc faciliter le séjour d’étudiants libyens dans les universités américaines, et examinait les demandes libyennes d’assistance technique dans différents secteurs de pointe, allant du trafic aérien à la sismologie. Par ailleurs, des organismes publics et privés américains étaient prêts à conseiller le gouvernement libyen pour qu’il accélère son programme de privatisation de secteurs importants de l’économie encore contrôlés par l’Etat, ce qui pourrait ouvrir des nouvelles perspectives aux investisseurs américains. A la suite de la publication en décembre 2010 des rapports diplomatiques par WikiLeaks et cinq journaux partenaires (dont Le Monde), les Etats-Unis ont rappelé leur ambassadeur à Tripoli, qui avait signé une série de télégrammes critiques ou sarcastiques à l’égard du clan Kadhafi. Mais dans le même temps, le colonel, toujours imprévisible, a félicité WikiLeaks à plusieurs reprises, pour avoir exposé au monde entier les conspirations internationales ourdies par les Américains, et leur hypocrisie envers leurs alliés. p

18 Décryptages Analyses

0123 Mercredi 9 mars 2011

La nouvelle réalité du partenariat européen U

ne histoire invraisemblable a été publiée dans le journal irlandais Irish Independent(du 13 février,et miseenexergue par le blog Eurointelligence). Lors d’une conférence européenne interministérielle, un délégué grec a désapprouvé une proposition allemande. Selon le journal, le représentant allemand s’est alors levé, a traversé la salle de conférence, fait mine de prendre le Grec par la joue pour avoir osé émettre une opinion, et est retourné tranquillement à sa place. Et l’éditorialiste irlandais de conclure «telle est la nouvelle réalité du partenariat européen », ajoutant au passage quelques commentaires désagréables sur la France. Cette anecdote, dont il ne faut pas exagérer l’importance, est représentative du virage que l’Europe a pris depuis le commencement de la crise de la dette souveraine. Nouvel épisode de La Cigale et la Fourmi, la polarisation de la zone euro entre les pays endettés et leurs prêteurs a fait vaciller un édifice qu’on croyait plus stable. Qu’est-ce qui n’a pas fonctionné ? A lire les

propositions retenues dans le « pacte de compétitivité» initialement proposé par l’Allemagne, le problème essentiel tiendrait à la dérive des finances publiques. Imposer (constitutionnellement) un équilibre budgétaire aux pays de la zone, et la crise de l’euro disparaîtra… Ce n’est hélas! pas si simple. Si la crise grecque est indiscutablement celle des finances publiques, la crise irlandaise ou espagnole ne l’est pas. Ces deux pays étaient les mieux gérés de la zone, avant que la crise n’éclate. Ils ont été victimes, non de la gabegie des autorités, mais de la bulle immobilière qui les a frappés. Si l’on compare la situation européenne à ce quis’est passé aux Etats-Unis au plus fort de leur propre crise immobilière (celle des subprimes), le contraste est frappant. La Réserve fédérale (Fed) a racheté par milliards les actifs toxiques accumulés par les banques (triplant son bilan),

Analyse Daniel Cohen Editorialiste associé

etlebudget fédéral estvenu ausecours desEtats, lesquels étaient souvent dans l’interdiction constitutionnelle d’être en déficit… D’aucuns concluent de cette comparaison que l’euro ne peut être viable que dans le cadre d’une union fiscale. Comme on en est très loin, ce dont témoigne l’anecdote rapportée par le journal irlandais, cette conclusion est en fait désespérante pour l’avenir de la zone. Entre l’union fiscale et la dissolution de la zone euro, il existe toutefois de la marge. On

peut d’abord s’entendre sur un mécanisme efficientde résolutiondescrises bancaires.Leprécédent gouvernement irlandais a pris à sa charge le sauvetage de ses banques, ce qui l’a poussé au désastre.Lanouvellemajoritél’avertementcritiqué, considérant que le secteur privé aurait pu être davantage mis à contribution. Le risque d’une contagion aux autres banques européennes avait conduit le reste de l’Europe à retenir le bras du gouvernement irlandais. Il y a une dimension systémique au problème, ce pourquoiilfautallerversunschémaeuropéen degestion des crises futures. Les « stress tests » bancaires de 2010 avaient été une farce ; l’heure est venue de prendre ce sujet sérieusement. Concernant la dette souveraine, la Banque centrale européenne (BCE) en a racheté en petites quantités, apportant un faible répit aux Etats menacés. Ce faisant, elle a provoqué une crise en son propre sein, débouchant sur la démission du président de la Banque centrale allemande,

Ecologie Hervé Kempf

Mauvaise neige

I

Axel Weber. Pour éviter à la BCE d’intervenir, la création d’un fonds pérenne de stabilisation doté de 440milliards d’euros est en cours de discussion. Jamais toutefois un tel mécanisme ne sera à la hauteur des enjeux systémiques. Comment pourrait-il réagir à une crise espagnole ou italienne avec des montants aussi limités ? Une autre voie est possible. Elle a été suggérée par Jean-Claude Juncker et Giulio Tremonti. Elle consiste à créer une dette européenne… Selon ce schéma, la dette d’un Etat consisterait en deux niveaux. Jusqu’à un certain seuil, réputé sans risque, la dette est émise sous la signature européenne. Au-delà, elle est émise sous la seule signature de l’Etat, aux risques et périls du pays. Statutairement, le remboursement de la dette européenne serait prioritaire sur celui de la dette nationale. Angela Merkel, la chancelière allemande, s’est immédiatement opposée à cette idée. A ses yeux, elle ferait entrer par la fenêtre le fédéralisme fiscal dont elle ne veut pas. Cette crainte est pourtant déplacée. Dans la mesure où la dette européenneseraitrembourséeenpremier,lerisque de défaut est théoriquement nul, si le seuil est bien choisi. De plus, à la différence des dettes souveraines, la BCE pourrait intervenir sur le marchédela detteeuropéenne sansêtreaccusée de favoritisme. Au final, en distinguant le niveaueuropéenduniveaunational,cesystème à deux étages réduirait en fait le besoin de venir au secours d’un pays en difficulté, ce qui devrait rassurer les contribuables des autres pays. Toutcelareprésenteun sautqualitatifimportant. Le chef du SPD au Bundestag, Frank-Walter Steinmeier, a toutefois laissé entendre qu’il y était favorable. Les idées sont là, et la période est propiceauxchangements.L’heureestà«unnouveau partenariat européen ». p [email protected]

l me souvient que la quinzaine passée, la fatigue du travail, l’occasion, le ciel radieux et je pense quelque diable aussi me poussant, j’allai passer une journée de ski au Lioran, dans le Cantal. Le soleil était badin, la journée plaisante, la neige aussi fraîche qu’un pré d’herbe tendre. En devisant avec l’échoppier qui baillait les souliers et les planches, j’appris que, faute de neige tombée du firmament, il avait fallu recourir à des flocons artificiels. Des canons, dans la brise du matin, avaient transformé l’eau en un tapis blanc sur lequel nous nous égayâmes en nombreuses glissades. Néfaste insouciance ! Quelques jours après cette récréation, on m’avertit d’une lettre écrite par trois groupements écologistes au représentant de la République. La Commission internationale pour la protection des Alpes, la Fédération Rhône-Alpes de protection de la nature et Mountain Wilderness y informaient le préfet coordonnateur du Massif des Alpes que l’hiver avait été sec dans les Alpes ; que de ce fait, les stations de ski avaient massivement recours à la neige artificielle ; que ce moyen requiert de grandes quantités d’eau ; d’où il s’ensuivait que les retenues devenaient insuffisantes et qu’il faudrait pomper dans les cours d’eau, en la période où leur débit était au plus bas ; qu’ainsi, la neige artificielle pouvait affecter la faune et la flore des milieux asséchés. On demandait au préfet de faire respecter la loi sur les « débits réservés », c’est-à-dire le volume minimal d’eau qu’il convient de

conserver dans un ruisseau. Dix jours plus tard, nul n’avait entendu parler d’une réponse du préfet ni d’une quelconque action. Les stations de ski, face au changement climatique qui se traduit par une réduction progressive de l’enneigement, recourent de plus en plus massivement à la neige artificielle, qui absorbe plusieurs dizaines de millions de mètres cubes d’eau chaque année. On estime que chaque hectare enneigé correspond à l’émission de 8 tonnes de CO2. De surcroît, l’utilisation de cette neige s’accompagne de travaux de terrassements des pistes qui favorisent l’érosion.

Chaque année, on compte plus de canons à neige, plus de retenues, la fuite en avant continue En 2009, le conseil général de l’environnement a réalisé une étude sur la « neige de culture». Il concluait que la question de savoir si ce moyen pouvait «assurer à long terme la pérennité du “capital nature’’ne trouvait pas “de réponse convaincante’’ ». Il recommandait une «diversification efficace et rapide » pour sortir de cette économie de ski écologiquement insoutenable. Mais chaque année, on compte plus de canons à neige, plus de retenues, la fuite en avant continue. Que faire ? Cela ne suffira pas, mais sans doute arrêter de skier… p [email protected]

Le livre du jour

Frederick Wiseman, cinéaste des lieux

ORS-SÉRIE

Afrique CFA 5000 F CFA, Algérie 750 DA, Antilles-Guyane-Réunion 8,50 €, Belgique 7,90 €, Canada 11,95 $CAN, Luxembourg 7,90 €, Maroc 70 DH, Suisse 11,90 CHF, TOM avion 1600 XPF.

UNE VIE, UNE ŒUVRE

Simone de Beauvoir

Une femme libre L’aventure d’être soi, par Josyane Savigneau

Romancière, essayiste, compagne de Jean-Paul Sartre, l’auteure du Deuxième Sexe est devenue la référence du féminisme contemporain. Un grand portrait, un entretien avec Julia Kristeva, des extraits de ses œuvres, les débats et hommages de l’époque et d’aujourd’hui réunis dans ce hors-série du Monde pour découvrir cette femme singulière, éprise de la liberté d’être soi.

124 PAGES - 7,90  - EN VENTE CHEZ VOTRE MARCHAND DE JOURNAUX

A

lors qu’il vient de tourner à Paris un film sur le Crazy Horse (encore inédit), son dernier film, Boxing Gym, pour lequel il a planté sa caméra dans une salle d’entraînement de boxe à Austin, dans le Texas, est en salles le 9 mars après avoir été montré au Festival de Cannes, tandis que le Musée d’art moderne de New York lui consacre une vaste rétrospective. Frederick Wiseman, dont l’œuvre est diffusée partout dans le monde, dans les festivals, les universités, les musées, les cinémathèques et sur les chaînes de télévision, est le « héros » de ce livre franco-américain qui donne la parole à uncertainnombre de gensqui l’ont accompagné, ou qui ont mené une réflexion sur son œuvre.

Frederick Wiseman Sous la direction de MarieChristine de Navacelle et Joshua Siegel Gallimard/MoMA, 160 p., 26 €. «Sesfilmsconstituentunpanorama grandiose de la vie américaine et,plusrécemment,delavieculturelle parisienne [il a filmé la ComédieFrançaise et l’Opéra de Paris] : une sorte de comédie humaine moderne », écrit Joshua Siegel, du musée d’art moderne de New York (MoMA.). C’est cette générosité bal-

zacienne du travail de Frederick Wiseman que l’on cite toujours d’emblée, soulignant que nombre de ses documentaires (il préfère le terme de « films ») sont consacrés à des institutions : la prison, le lycée, le poste de police, l’hôpital, la caserne…Descentainesd’heuresenregistrées «avec une patience illimitée », en se rendant «invisible», et livrées en « un montage léger, comme une plantearrachéeavecencoredelaterre », écrit le romancier William T. Vollmann, pour observer ses concitoyens, se faire le chroniqueur du monde occidental. Chez Frederick Wiseman, « la star c’est le lieu » qu’il observe longuement, mais ces textes dissèquent la démarche et l’univers de celui que le cinéaste Errol Morris surnomme le « roi du cinéma misanthrope ». Le professeur de sciences humaines Christopher Ricks parle de son goût de la « célébration»,delafoireligieusequibaigne ses films, de sa fascination pour la répétition, l’entraînement, la « performance». Les pas des boxeurs, dans Boxing Gym, apparaissent comme une « revisitation » de La Danse filmée à l’Opéra Garnier. William T. Vollman enchaîne : « Il est attiré par le déroulement des processus, la routine. » C’est l’art du « portraitiste » que souligne le professeur de lettres Andrew Delbanco, tandis

que le critique de cinéma David Denbyestfrappéparsa propension à scruter les hommes et femmes effectuant jour après jour un travail ingrat, en véritable « poète des gens de bonne volonté méconnus ».

« Petits moments radieux » « Toute l’œuvre de Wiseman nous donne l’impression d’avoir été autorisés à voir avec les yeux de l’enfant ou de l’étranger qui sait peu de choses ou rien de l’endroit où il se trouve ni de ce qui l’a amené ici », enchaîne l’écrivain Geoffrey O’Brien. Son confrère Jay Neugeborenest saisi, lui, par «la sorte detendresse » qu’il semble éprouver « lorsque, en se promenant sur des gens et des objets, sa caméra et lui découvrent de petits moments radieux d’espoir dans un monde ordinaire, cruel et sombre ». Beaucoup font référence à des tableaux, des poèmes, parlent de « l’oreille » de Frederick Wiseman dont les œuvres sont sans narration ni musique. Ils insistent sur l’importance du temps : « L’expérience du temps comme vanitas, l’arrangementimaginatif du quotidien comme réflexion sur, et rappel de notre propre mortalité : telle est l’essence de ses films. » Un entretien avec Frederick Wiseman complète ce bel album illustré. p Jean-Luc Douin LirelacritiquedeBoxingJim,page20

Rectificatifs&précisions Dominique Meyer Le directeur de l’Opéra de Vienne s’appelle Dominique Meyer, et pas Meye, comme nous l’avons écrit par erreur dans Le Monde du 3 mars.

Richard Pyle Dans l’article « Guerre du Vietnam : des images, des amis et des morts », publié dans Le Monde du 24 février, nous avons mal orthographié le nom

de Richard Pyle, qui fut photographe et chef du bureau de l’agence Associated Press à Saïgon de 1968 à 1973. Richard Pyle est l’auteur, avec Horst Faas, du livre Lost Over Laos.

CAC40 Le montant du dividende Vallourec de 1,30 euro proposé au titre de 2010 diminue de 25,7 % par rapport à l’année précédente,

et non de 63 %, comme indiqué dans le tableau sur les résultats des entreprises du CAC 40 (Le Monde du 5 mars). Les actions Vallourec ayant été divisées par deux le 9 juillet 2010, il faut en effet comparer le dividende 2010 à la moitié de celui effectivement distribué en 2009, soit 1,75 euro par action, et non 3,50 euro, comme calculé par erreur.

Débats Décryptages 19

0123 Mercredi 9 mars 2011

Il est inutile de légiférer Ce que la révolution libyenne a d’unique sur la question des sondages Le peuple tiendra jusqu’au bout La suspicion contre les professionnels est injuste

I

l a suffi d’un sondage, effectué par Internet, pour que la classe politique s’embrase : Marine Le Pen, présente au second tour! Nous ne sommes qu’à quatorze mois du scrutin présidentiel, et déjà les sondages font l’agenda de l’élection, faute, pour les acteurs politiques, de savoir engager le débat sur les enjeux de la période. Déjà, les sondages sont, de ce fait, dans la ligne de mire. Non sans raison : ils nous donnent des indications précieuses sur les tendances de l’opinion, nous devenons, de leur fait, les stratèges de l’élection en cours, nous savons en permanence sur quels rapports de forces notre vote peut agir. Un éventuel nouveau 21 avril ne nous prendra pas par surprise. Du coup, en même temps, nous devons avoir une confiance encore plus grande dans l’instrument. Et le citoyen se méfie de plus en plus, au fil des années : y a-t-il des risques de manipulation ? Pouvons-nous contrôler la véracité des sondages ? Dans ce contexte, le Sénat a voulu être utile. Sous la houlette de deux élus de bonne volonté, mes amis Hugues Portelli (UMP) et Jean-Pierre Sueur (PS), il a créé une commission, où des débats intellectuels utiles ont réuni politiques et professionnels. Cela a débouché sur une proposition, aboutissant – singularité notable – à un vote unanime de la Chambre haute. Diable, tiendrions-nous, à l’unanimité, pour la présidentielle, le texte garde-fou dont le citoyen a besoin pour être rassuré ? Hélas, non.

Un média qui publie unsondage devrait publier non seulement les réponses aux questions posées, mais aussi l’énoncé de ces questions» Il ne suffit pas de comprendre comment les sondages sont faits, comme dans ces dîners en ville où l’on interroge le sondeur, pour établir des textes normatifs, utiles à la démocratie et à la transparence. L’inconvénient avec les sondages, c’est que c’est une technique, et que, chacun le sait, la technique ennuie tout le monde. Eh bien, tant pis, et pardon : puisque le sondage est devenu un élément-clé de la démocratie d’opinion moderne, invitons le lecteur à plonger un peu dans la technique ! A vrai dire, la sympathique loi sénatoriale, pleine de bonnes intentions, énonce des dispositions fort louables (qui, pour la plupart, figurent déjà dans les lois de la République !) : un média qui publie un sondage devrait publier non seulement les réponses aux questions posées, mais aussi l’énoncé de ces questions (on doit comprendre à quelles questions précises les “enquêtés” ont répondu) ; le média devrait préciser l’identité du commanditaire du sondage, la date de l’enquête, la méthodologie adoptée, le nombre de personnes interrogées. Fort bien ! En prime, la publication devrait comporter aussi les observations méthodologiques de la Commission des sondages. Pourquoi pas ? Mais, voulant bien faire, le Sénat semble se fourvoyer, sur trois points. Il exige d’abord que chaque publication de sondage comporte la mention de sa marge d’erreur. Le sondage est sans conteste un outil comportant une marge d’erreur, c’est son principe même. Nous devons habituer les lecteurs à cette évidence que les chiffres des résultats d’enquête d’opinion ne sont pas des euros, des litres ou des kilos, mais des données approximatives, comportant une marge d’erreur. Mais, dans les sondages effectués en France (comme au Royaume-Uni ou dans les pays d’Europe du Sud), la technique utilisée pour constituer les échantillons de population interrogés est celle des quotas. Or, aucun statisticien au monde ne sait calculer les marges d’erreur, avec le système des quotas. Cette obligation légale serait donc absurde. Elle figure d’ailleurs

E

Roland Cayrol Politologue, directeur de recherche associé à la Fondation nationale des sciences politiques, cofondateur de l’institut de sondages CSA, auteur d’« Opinion, sondages et démocratie » (Presses de Sciences Po) déjà dans la loi de 1977 ! Certains animateurs d’institut affirment que la marge d’erreur des quotas est sans doute « du même ordre » que celle des sondages aléatoires (où l’on sait la calculer), mais rien ne le prouve, statistiquement. Au demeurant, on ne pourrait pas publier une marge d’erreur : chaque chiffre de sondage comporte sa marge d’erreur (plus petite pour les petits chiffres). Un tableau de résultats de sondage serait donc envahi de marges d’erreur. Ne vaudrait-il pas mieux faire confiance à la sagesse des professionnels, et des lecteurs, qui s’habituent en effet à connaître cette spécificité des chiffres de sondage ? Plus grave, et sans doute plus mû par une suspicion à l’égard des sondeurs : le Sénat dispose – vieille antienne – que la Commission des sondages devrait mettre en ligne, et donc publier à l’attention de chacun, non seulement les résultats du sondage, établis par l’institut, mais les « résultats bruts » recueillis par ses enquêteurs. On sait que les sondeurs savent faux ces résultats bruts. Les électeurs « n’avouent » en effet pas tous leur intention de vote aux enquêteurs. Les données brutes sous-estiment le vote Front national et l’abstention, ils surestiment le vote Verts et UMP – puisque des électeurs FN préfèrent dire voter pour l’UMP (plus « présentable »), et que des abstentionnistes (parce que « voter est un devoir civique ») prétendent voter écologiste. Tout le savoir professionnel des sondeurs tient à établir ces « redressements », pour rendre leur photo plus fidèle à la réalité. Ces redressements ne se font pas au hasard, ils sont le fruit d’un travail minutieux, sans cesse remis sur le métier, et ils sont tous transmis à la Commission des sondages, avant publication. Mais comment ne pas voir que les mettre sur la place publique n’aurait aucun sens, puisque chacun sait que les « chiffres bruts » sont faux ! On imagine en revanche les polémiques sans fin, issues de ceux qui sont minorés, et qui pourraient prétendre que les « vrais » chiffres recueillis par les instituts leur seraient plus favorables ! Enfin, et c’est peut-être le plus surprenant, le Sénat a prévu que la présente loi serait précisée par un décret en Conseil d’Etat, et que « ce décret détermine, en particulier, les règles méthodologiques que les organismes réalisant des sondages doivent respecter afin de garantir leur objectivité et leur sincérité ». On croit rêver : un décret fixerait les règles méthodologiques des instituts de sondages. Aucun pays au monde, même dans des démocraties « musclées », n’a encore osé proposer un tel système, où le gouvernement fixerait les règles professionnelles des instituts d’études d’opinion. Une bonne idée, donc : donner plus de transparence aux sondages. Quelques principes louables. Mais aussi des dangers de dérapage sérieux pour le fonctionnement de la démocratie, et pour la libre information des citoyens – celle qui concerne l’état de l’opinion. Plutôt que de légiférer encore, ne vaudrait-il pas mieux inviter tous les acteurs concernés – sondeurs, journalistes, dirigeants politiques, citoyens – à un débat permanent sur la publication des sondages, pour que cette pratique cesse, en France, d’apparaître comme magique ou pernicieuse ? Plutôt que de s’affoler au premier sondage venu, il conviendrait d’inscrire la publication des sondages dans une réflexion adulte. Pour que la prochaine présidentielle ne soit pas vécue comme une simple course de chevaux. p

n quelques jours, tout a basculé. Je le sens au plus profond de moi ; mes épaules sont plus légères. Sans même me regarder dans le miroir, je sais que mon regard n’est plus voilé par cette tristesse ancienne. Mouammar Kadhafi, dont l’ombre plane sur la Libye depuis quarante-deux ans, est toujours là, mais l’Histoire l’a supplanté : désormais, on ne peut plus envisager l’avenir de la Libye avec lui. Pendant trente-deux ans, depuis que ma famille a fui la Libye, je n’ai cessé de regarder par-dessus mon épaule. Je me souviens qu’à notre arrivée à Heathrow (dans l’avion, j’avais taquiné mon père à propos de sa nouvelle couleur de cheveux), un homme qui attendait dans le hall de l’aéroport a murmuré à son acolyte : « Il ressemble à quoi, ce Jaballa Matar ? » Il avait l’accent libyen. Jamais plus je n’ai ricané quand mon père se teignait les cheveux, se cachait derrière des lunettes noires ou me tenait à l’écart pendant qu’il vérifiait que la voiture n’était pas piégée. A l’époque où nous habitions en Egypte, nous étions sous surveillance armée vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Des gardes étaient postés devant chez nous, ils ne nous lâchaient pas d’une semelle. Nous nous étions faits à l’idée que toutes nos conversations étaient enregistrées. Mon père étant un opposant déclaré à la dictature de Kadhafi, nous étions à la merci des services secrets libyens et égyptiens. Même les employés de maison pouvaient être à la solde d’Hosni Moubarak. Cette garde rapprochée que nous imposait le gouvernement égyptien n’avait pas vocation à assurer notre protection mais à surveiller nos moindres faits et gestes. Au bout de dix ans, en 1990, l’Egypte trouva intérêt à livrer mon père à la Libye. Les gardes le kidnappèrent et, sous la menace, on nous imposa le silence : « Si vous parlez, M. Jaballa aura des ennuis. » Les Egyptiens nous ont laissé croire que mon père était détenu en Egypte. Trois ans plus tard, nous avons reçu une lettre, envoyée clandestinement

Hisham Matar

Ecrivain et opposant libyen d’Abou Salim, la fameuse prison politique de Tripoli. Elle était de la main de mon père. Il nous faisait savoir qu’il avait été embarqué dans un avion pour la Libye dès le lendemain de son enlèvement. En révélant toute la vérité, il nous faisait pourtant jurer de garder le silence : « Si vous parlez, je tomberai au fond du gouffre. Plutôt mourir sous la torture que trahir ceux qui m’ont aidé à faire passer cette lettre. » A la longue, ce silence m’est devenu insupportable. Avec la parution de mon premier roman en 2006, In the Country of Men (Au pays des hommes, Denoël 2007), j’ai enfin manifesté publiquement mon opposition à la dictature libyenne. Ma famille s’en est beaucoup inquiétée et il est devenu dangereux pour moi de retour-

Desreprésentants libyens ont cherché à me faire taire, d’abord en me soudoyant, puis en me menaçant à mots couverts» ner en Egypte. Voilà cinq ans que je n’ai pas pu leur rendre visite. Plusieurs amis et parents libyens ne me contactent même pas lorsqu’ils sont de passage à Londres. Je me suis retrouvé doublement exilé. Des représentants libyens ont cherché à me faire taire, d’abord, en me soudoyant, puis en me menaçant à mots couverts. Après chacune de mes interventions dans les médias, où je critiquais le gouvernement libyen et dénonçais son dictateur (crime passible de la peine de mort en Libye), j’étais hanté par l’impression, paranoïaque peut-être, que j’étais suivi par l’œil du régime. A New York, à Londres, à Paris ou au Cai-

re, quand vous dites à un chauffeur de taxi d’où vous venez, il répond presque invariablement : « Ah, oui, Kadhafi. » « Non, non, je ne viens pas de Kadhafi, je viens de Libye », dis-je en ravalant ma colère (parce que même les opprimés ne veulent pas se montrer déplaisants). Ces dix dernières années, j’avais fini par perdre espoir. Je me demandais si Kadhafi n’avait pas tué l’âme libyenne. Je me durcissais contre mon propre pays. J’étais rongé par une rancœur perverse contre mon peuple ; perverse, parce que la haine des siens équivaut à la haine de soi. Parfois, en présence de mes compatriotes, ce sentiment s’évaporait et je me prenais de passion pour tout ce qui était libyen. Ce passage d’un extrême à l’autre m’a souvent laissé vidé, épuisé. J’ai 40 ans. Je n’ai jamais connu la Libye sans Kadhafi. En assistant à la chute de la dictature et, surtout, au soulèvement du peuple libyen, je me rends compte que, jusqu’à présent, mon pays était surtout une source de peur, de douleur et de honte. Aujourd’hui, il est source de joie et de fierté. La révolution libyenne, pourtant si proche chronologiquement et géographiquement des événements en Tunisie et en Egypte, a quelque chose d’unique. Un constat d’autant plus gratifiant que Kadhafi entretenait le projet narcissique de façonner les masses à son image. Cette ambition maladive a échoué : les hommes ne cesseront jamais de chercher la lumière. Devant le tribunal de Benghazi, au bord de la mer, les Libyens dansent, se tiennent par la main et chantent : « Nous resterons, jusqu’à ce que la douleur s’apaise.» Ils redécouvrent la beauté de leur pays : sa longue résistance au fascisme de Mussolini et de Kadhafi, sa modération, son ouverture méditerranéenne sur le monde, son humour, ses chansons. J’ignore ce que Kadhafi a fait de mon père. Mais je sais qu’il n’a pas réussi à étouffer l’âme de la Libye. p Traduit de l’anglais par Myriam Dennehy © AP Watt limited

Simone de Beauvoir, toujours à relire L’actualité des «Mandarins», paru en 1954

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our peu qu’on fasse une lecture un peu kitsch populi des Mandarins, on voit bien qu’on se trouve face à une « préquelle » des grandes séries télé. Saint-Germain, l’immédiat après-guerre, Jean-Paul Sartre, ses amphétamines et son goût des petites blondes, Simone de Beauvoir et son whisky, Arthur Koestler et ses colères tonitruantes, Albert Camus, formidable fil rouge de la série, clope au bec, Burberry et vague à l’âme. Pour une version contemporaine, évidemment, on pourrait penser à une série de flash-back à la « Lost », qui nous ferait découvrir qui résista, qui hésita et qui fut double face, ainsi qu’à quelques flashforward bien sentis – qui restera communiste et qui basculera à droite, qui trouvera la chose plus complexe et qui s’emparera du journal de qui. En 1954, à la publication du roman, Simone de Beauvoir se défend d’avoir écrit un roman à clés, genre qu’elle déclare ne pas apprécier. Ilrestecependantdifficile dene paspenser qu’elle a, au moins par moments, eu conscience de piocher dans la vie d’Albert Camus pour établir quelques traits de son personnage. Henri des Mandarins dirige Espoir, quand Camus dirigeait Combat ? ; Henri publie après guerre un roman qui rencontre un grand succès, quand Camus publia L’Etranger ? ; Henri et Dubreuilh sont amis dix ans avant de se brouiller, comme Camus et Sartre furent proches avant de s’insulter par voie de presse. Que Simone de Beauvoir ait profité de l’occasion pour régler quelques comptes avec la réalité, c’est son droit d’auteur. Qu’Albert Camus l’ait mal pris, c’est la moindre des choses. Mais le point troublant, rétrospectivement, c’est que le personnage d’Henri, sans conteste, est le plus complexe et le plus excitant, le plus en relief de tout le roman. Encore une preuve

Virginie Despentes Romancière et réalisatrice, son dernier roman publié, « Apocalypse Bébé » (Grasset, 2010), a obtenu le prix Renaudot 2010 que le roman a ses raisons que le romancier ignore : une démarche qui n’était pas fondamentalementbienveillante, niforcément honnête ou élégante, devient la meilleure source d’inspiration, libérant une voix qui sans ce procédé n’aurait pu forcer le seuil du toléré.

Camus comme source d’inspiration Dubreuilh, qui figure clairement Sartre dans Les Mandarins, existe à peine. Un homme courageux, presque un second rôle, qui peine à prendre chair dans le roman, si ce n’est qu’il influe sur la destinée d’Henri. Quant à l’amant américain d’Anne, il est traité comme le sont les femmesdans lesromans d’hommes:ilest désirable,sexuellementsatisfaisant,etlanarratrice peine à comprendre sa psychologie chaotique, est obsédée par lui en ce sens qu’il lui permet de se sentir vivante, et ne s’intéresse guère aux événements qui jalonnent sa vie. Avec Henri, c’est différent. L’auteure a semé assez d’indices pour dérouter le lecteur, on n’ira pas la débusquer dans cet homme-là, puisqu’elle a désigné Camus comme source d’inspiration. Elle peut travailler tranquille. Elle a trouvé une clé, qui lui laisse champ libre pour faire sauter les verrous qui l’intéressent. Enoncer par la bouche d’un autre ses propres doutes politiques, sur l’usage de la violence, son envie égoïste de partir en voyage quand la guerre est finie au lieu de s’occuper de politique,

sur la manipulation malhonnête des proches au nom du politique, un sens certain de la dépression politique, qui fait qu’entre lemodèleimpérialisteaméricainetle communisme soviétique, il n’y ait guère de raisond’espérerqu’on soitenroute versl’Utopie. L’auteure,quivientdepublierLeDeuxième Sexe, sait de quoi elle parle. Elle peut dire, aussi, le mépris que lui inspirent des hommes lâches qui couchent avec des gamines insipides, et qui feraient n’importe quoi – à commencer par renier leurs convictions– pour garder leursfaveurs. Les Mandarins,c’estaussil’histoiredes intellectuels de gauche d’après guerre. La révolution russe a le même âge qu’Anne et Hélène – l’âge de Simone de Beauvoir. La révolution russe, comme le corps et le cœur des femmes du roman, est assez rouée de dialectique pour donner le change, mais elle aussi est entrée dans la guerre sans âge, et elle en sort avec un passé qui paraît plus lourd que l’avenir. Ce que l’auteure ne peut s’autoriser à dire de vive voix, le roman le répète à chaque page : il est déjà trop tard. Il fallait passer par le corps d’un ennemi intime pour pouvoir penser, sans trahir, à contre-courant de l’homme aimé. Henri, politiquement, est condamnable au moment où Simone de Beauvoir écrit : « mou, indécis, pessimiste, comme le sont les poètes ». Entre l’impérialisme américain et le communisme soviétique, il fait le constat dépressif d’une situation en forme d’impasse. Soixante ans après publication, c’est la position complexe d’Henri qui nous paraît la plus lucide. La leçon est à méditer : pour écrire, on n’est jamais mieux servi que par un personnage auquel nul n’ira nous identifier. p Extrait du hors-série : « Simone de Beauvoir : une femme libre » (120 pages, 7,90 ¤, en kiosques).

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Mercredi 9 mars 2011

La boxe et le 7e art

Entre réel et fiction, le cinéma vainqueur aux points Un mélo pugilistique et un documentaire rigoureux témoignent de la permanence de la boxe sur grand écran Fighter

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maternelle ou à la police, pour ses effortsdésespérés pourretrouverle fil de sa vie. Pour compléter le tableau,AmyAdams,danslerôle de la petite amie de Micky Ward, qui dispute le jeune homme à sa mère, confirme l’extraordinaire étendue de son registre : l’ex-princesse de chez Walt Disney est ici une barmaid à rendre alcoolique Elliott Ness. Ce qui laisse Mark Wahlberg très en retrait. L’ex-idole des petites filles (du temps où il se produisait sous le nom de Mark E. Mark) est devenu un acteur économe, qui peut porter un film (comme The Yards, de James Gray). Si l’on prête

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l suffit de chercher sur YouTube pourvoirlafindeFighter:àLondres, en 2000, Irish Mickey Ward de Lowell, Massachusetts, affronte Shea Neary pour le titre WBU des welters. Sur le ring, le terrassier irlandais devient un héros ensanglanté – l’honneur de sa famille, de sa ville, de sa tribu. La boxe raconte toujours la même histoire. Mais le cinéma n’en fait pas toujours le même film – il y a loin de Rocky à Raging Bull ou, cette semaine, du Boxing Gym de Frederick WisemanauFighterdeDavidO.Russell. Ces deux dernierslongs-métrages, un documentaire et une fiction hollywoodienne, ont en commun de considérer le noble art comme l’expression de la condition prolétaire. Wiseman le fait avec la lucidité analytique qui lui est propre, en exposantminutieusementlequotidien d’une salle d’entraînement. David O. Russell, l’un des plus brillantsreprésentantsdelagénération des quadragénaires hollywoodiens (avec Paul Thomas Anderson etDavidFincher)empruntedeschemins plus convenus. Fighter obéit donc à la liturgie des grands mélodrames de la boxe. Du caniveau, le héros se hissera jusqu’au sommet. Pourtant, l’impression de déjà-vu n’est pas celle qui prédomine. La boxe occupe bien une place stratégique dans le film, les entraînements et les combats sontdécrits minutieusement(comme on rêve de voir les combats filmés à la télévision – on comprend tout, on voit tout), mais le parcours sportif de Micky Ward (Mark Wahlberg) sert aussi d’agent d’unecomédie noire qui met en scène un clan prolétaire dans lequel dominent

Une collection de harpies effrayantes qui imposent la volonté maternelle aux mâles de la tribu

L’acteur Mark Wahlberg livre un portrait fidèle du boxeur américain Micky Ward. DR deux figures formidables, Dicky Eklund, le demi-frère et entraîneur de Ward et leur mère, Charlene (Melissa Leo). Sans vouloir faire de l’Académie américaine l’arbitre absolu des talents, il faut convenir que les Oscars qui ont récompensé Christian Bale et Melissa Leo pour leur interprétation de ces personnages étaientprobablementlesplusmérités de l’année. Ancien boxeur luimême,DickyEklunddevientl’incar-

nation de la disparition de la classe ouvrière. La vie de ce fumeur de crack est faite d’allers et retours entre la maison familiale où règne sa mère et la fumerie où il dilapide sa vie. Avec la matriarche, il gère la carrière du pauvre Micky en dépit du bon sens, l’envoyant se faire démolir par des adversaires plus lourds, mieux entraînés. Melissa Leo est entourée de ses filles, une collection de harpies effrayantes (la plus effrayante de

toutes est sans doute Jill Quigg, une gueule qu’on avait déjà vue dans le Gone Baby Gone, de Ben Affleck), qui imposent la volonté maternelleauxmâlesdelatribu.Le fonctionnement absurde du groupe, les disputes homériques qui n’arrivent pas à mettre à bas une solidarité presque indestructible donnent au film une intensité comique presque italienne. On est souvent plus près d’Affreux, sales et méchant que de Roc-

ky.ChristianBaleapporteunenuance tragique à cette atmosphère quasi-hystérique. L’acteur britannique ne s’économise jamais, au détriment parfois de ses personnages. Cette fois, la débauche d’énergie est en phase avec l’addiction de Dicky Eklund – le crack n’a jamais porté à l’introspection. Dès qu’il est à l’écran, on n’a d’yeux que pour lui, pour les pirouettes souvent imbéciles qu’il fait pour échapper à la réprobation

un peu d’attention à son travail dans The Fighter, on voit un portrait sans doute assez fidèle du vrai Micky Ward, un homme sérieux qui compense ses limites intellectuelles et physiques par la persévérance et le courage. Cette modestie œuvreparfois contre le film, tant le héros positif pâlit face à l’intensité de ses comparses dévoyés. C’est donc Mark Wahlberg – par ailleurs producteur du film – qui assure l’orthodoxie de The Fighter, qui fait qu’au bout du compte ce film, par moments étonnant, revient à la liturgie de la boxe au cinéma. p Thomas Sotinel Film américain de David O. Russell, avec Mark Wahlberg, Christian Bale, Melissa Leo. (1 h 53.)

Une heure dans le cocon d’une petite salle d’entraînement, à Austin, Texas Les candidats au défoulement de «Boxing Gym», de Frederick Wiseman, relèguent la barbarie à l’extérieur des rings Boxing Gym

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’est entre les murs d’un club de boxe d’Austin (Texas)que Frederick Wiseman a tourné Boxing Gym, son 38e long-métrage. Petit club sans enseigne, mais dont le nom, Lord Gym, est à lui seul un signe d’élection. On se le repasse sous le manteau, comme les meilleures adresses, pour le préserver des mauvaises fréquentations. Une heure et demie entre ces murs sans rien voir ou presque de la lumière du jour, en réduisant les scènes dialoguées à la portion congrue: voilà le principe du film.

L’expérience pourrait être oppressante, ou lassante. C’est tout le contraire. En posant là sa caméra, le vétéran du cinéma direct qu’est Frederick Wiseman transmet au spectateur la passion qu’il filme chez ses personnages. Comment ? En s’en remettant aux moyens les plus basiques du cinéma documentaire – la captation à vif d’images et de sons – et à un instinct acéré. Des cadres parfaitement composés, une attention aux moindres gestes, aux moindres détails du lieu également, dont l’agencement à lui seul raconte une riche histoire. Un sens du rythme ensuite, raccord avec sa

matière, quis’exprimepar desboucles, des répétitions, un montage aérien qui rapproche la boxe de la danse plus que d’un quelconque sport violent. Tant et si bien que sansavoirjamaiseulamoindreattirance pour cette discipline, on sort du film avec l’envie de taper dans un punching-ball.

Contrôle des corps Frederick Wiseman a passé la plus grande partie de sa carrière à ausculter les tensions entre le contrôle institutionnel des corps et la manière dont ceux-ci y réagissaient – que ce soit dans le champ social (Public Housing, Welfare),

médical (Hospital, Near Death, Titicut Follies, Primate…) ou judiciaire (Law and Order, Domestic Violence, Juvenile Court…). Ici, comme dans sonfilmprécédent,LaDanse,la dialectique se joue à l’échelle individuelle, entre les pulsions des personnages et la manière dont ils parviennent à les canaliser. Quelques indications données par un coach permettront aux moins initiés de comprendre que ce qui se joue dans cette enceinte est de l’ordre de la connaissance de soi. Chez Lord Gym, on apprend à se protéger plus qu’à frapper. On apprend que la puissance est avant tout affaire de rythme, d’équilibre

interne. Si le combat est l’horizon, et le ring le centre de gravité, on n’y arrive qu’à l’issue d’un long travail d’autodiscipline. Tel que le montre le cinéaste américain, le petit club est un cocon,unespacedecivilisationprotégé des agressions du monde. En attestentleslongsplans répétéssur le rituel du bandage des mains, les pauses de la caméra sur des couffins posés aux pieds de parents venus s’entraîner une heure ou deux, ou encore cette conversation entre la mère d’un jeune épileptique et le patron du lieu, qui lui assure que son fils pourra s’entraîner sans risquer de prendre un

coup. Qu’il s’agisse de la tuerie de Virginia Tech, en 2007, ou de la guerre en Irak, dont parlent entre eux les membres du club, la barbarie est reléguée à l’extérieur. «Ceux quiviennenticiontrenoncé à se battre dans la rue, dit un des entraîneurs à un nouveau venu. La priorité, c’est garder ses forces pour lescombats. » p Isabelle Regnier Documentaire américain de Frederick Wiseman. (1 h 31.) Lire la critique de « Frederick Wiseman », ouvrage publié sous la direction de Marie-Christine de Navacelle et Joshua Siegel, page 18.

Au-delà de la mythologie, la boxe raconte une aventure humaine Le romancier Frédéric Roux, auteur d’un «Mike Tyson» et d’un roman intitulé «Ring», est allé voir «Fighter» et «Boxing Gym» pour «Le Monde»

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onter sur un ring de cinéma, même Charlot l’a fait. Magnifier les épreuves du boxeur avant sa gloire, et après sa chute, est l’un des scénarios préférés d’Hollywood. C’est la métaphore sportive rêvée pour figurer l’art d’encaisser et de se relever. « Ce qui est livré au public, écrivait Roland Barthes, c’est le grand spectacle de la douleur, de la défaite et de la justice. » Au panthéon des grandes gueules cassées, la trogne têtue de Robert Ryan dans Nous avons gagné ce soir, de Robert Wise (1949), orgueil et punition de l’homme qui refuse de se coucher devant la pègre ; l’énergie positive d’Errol Flyn dans Gentleman Jim, de Raoul Walsh (1942), consacré à la carrière du cogneur James Corbett ; l’obstination de Paul Newman dans Marqué par la haine, de Robert Wise

(1956), biopic de Rocky Marciano ; le KO encaissé par Anthony Quinn, le colosse Moutain Rivera terrassé par Cassius Clay, dans Requiem pour un champion, de Ralph Nelson (1962). Tant d’autres… « Le plus beau des films sur la boxe, c’est Fat City, de John Huston (1972). Le film est juste, les acteurs ne sont pas hystériques, les personnages sont d’ailleurs des boxeurs de troisième catégorie. C’est plus facile d’interpréter un charlot qu’un champion du monde, comme le fit Robert de Niro dans Raging Bull. Avec brio certes : il a chopé quatre ou cinq gestes, et ça marche ! Mais je reproche à Scorsese sa complaisance. La vraie violence, ça va tellement vite qu’on ne voit rien. Le moyen le plus vulgaire pour la rendre visible, c’est le ralenti. Et Scorsese en abuse. On voit le sang gicler du visage! » Qui parle ? Le romancier Frédé-

ric Roux, qui a publié un Mike Tyson (Grasset 1999), signé un roman intituléRing (Grasset 2004), et enfilé lui-même les gants lorsque, engagé dans un mouvement para-situ et post-dada nommé Présence Panchounette, il s’est piqué d’organiser un championnat du monde de boxe des artistes. On le retrouve sur son blog : Red-Dogpagesperso-orange.fr/.

Mythologie Notre expert n’est pas tendre avec la série des Rocky (« Du guignol ! Stallone, comme tous les adversaires qu’il rencontre, est grotesque! Dans la réalité, pour un seul des centaines de coups qu’ils se portent, t’es mort ! »). Avoir pratiqué la boxe permet de comprendre l’enjeu du sujet, derrière la caméra – ce fut le cas de Stanley Kubrick, auteur du Baiser

du tueur (1955), un thriller tournant autour du ring. Et d’avoir un jugement éclairé, côté spectateur. Frédéric Roux est allé voir pour nous Boxing Gym, le documentaire de Fred Wiseman sur une salle d’entraînement à Austin, au Texas. Et Fighter, de David O. Russell, que les Oscars viennent d’honorer. « La boxe est un sport de cadences, de rythmes. Un-deux-trois, gauche-droite, gauche-droite, un-deuxtrois-quatre, et on recommence…, tout est scandé, c’est une partition. Le temps est l’ennemi. C’est un travail à la chaîne, un sport qui a à voir avec des valeurs ouvrières, le travail à la chaîne.» Le film de Wiseman « montre ça assez bien. Il a compris que l’essentiel, ce n’est pas le combat mais le hors-champ. Huston montrait lui aussi que tout se passe à l’entraînement. Ce n’est pas triomphant, on

se bat avec le chronomètre, la vie d’un boxeur est scandée comme ça: une minute, trois minutes, une minute,troisminutes…Wisemanfilme l’horloge. Il rend compte du côté abrutissant, les secondes qui défilent». La boxe ne signifie pas la même chose chez nous qu’en Amérique, où elle est valorisée, et au-delà de la mythologie, elle raconte une aventure humaine. « Une aventure qui recommence sans cesse, dit Roux. Une histoire de filiation. C’est parce qu’il fait le combat de trop que le règne du champion du monde s’achève, et qu’il est remplacé par celui qui l’a battu, lequel refera la même erreur dix ans plus tard, passantleflambeauàlagénérationsuivante. Je n’aime pas quand Hollywood rajoute ses rédemptions finales à cette belle figuration de l’Histoire. De ce point de vue, le Mil-

lion Dollar Baby de Clint Eastwood était affreux, avec son plan sur la croix quand l’héroïne meurt! » Ce que Frédéric Roux a apprécié dans Boxing Gym comme dans Fighter, c’est leur caractère bienveillant. Leurs auteurs ont « le respect des gens qu’ils montrent. Wiseman regarde, sans rien souligner. Dans la salle où il a planté sa caméra, il y a des obèses, des Blancs, des Noirs, des latinos, des avocats, des chômeurs… toutes les catégories sociales, qui fraternisent quelques heures.C’est unemétaphoredumelting-pot. Il se contente de montrer. Il n’y a pas de jugement moral dans Fighter, ni condamnation du mauvais, ni béatification du bon, en dépit de sa morale très chrétienne. Question : pourquoi sommes-nous incapables de faire ça en France ? »p Jean-Luc Douin

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Voyage dans une «interzone» Quatorze ans après son dernier long-métrage, «Docteur Chance», F.J. Ossang revient avec «Dharma Guns» Dharma Guns

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a rareté sied bien à F. J Ossang. Trois ans après son dernier court-métrage, Ciel éteint, quatorze ans après son dernier long, Docteur Chance, le réalisateur français revient au cinéma avec un bel oxymore en guise de titre (littéralement : « Les Fusils de l’enseignement du Bouddha »), et un style qui n’a rien perdu de sa puissance d’évocation : compositions plastiques d’une beauté entêtante, associations énigmatiques de textes, d’images, de sons, ancrage dans une mythologie personnelle du cinéma qui tire des

D’abordla vie, consumée par les deuxbouts sur un hors-bord, puis le choc cordes entre l’expressionnisme muet et la nouvelle vague sans s’interdire des incursions chez Guy Debord ou David Lynch, entre autres. Dharma Guns s’ouvre sur un premier plan étonnant, un lac filmé à la lisière de l’eau, laquelle vient trancher l’espace en son milieu comme le faisait le rasoir sur l’œil dans Un chien andalou. Baignés dans la lumière chaude d’un après-midi d’été, deux espaces symétriques se répondent : le haut et le bas, le gazeux et le liquide, le sonore et

Le réalisateur F.J. Ossang joue sur les formes du cinéma muet. DR le silencieux…. Le film qui s’annonce est un voyage dans une « interzone » – les limbes où flottent les âmes suspendues entre la vie et la mort. Mais d’abord, la vie, consumée par les deux bouts sur un horsbord poussé à plein régime. Piloté par une femme fatale semblant tout droit issue de l’âge d’or d’Hollywood, le bateau glisse sur la surface du lac, tirant un hom-

me en ski nautique. Reflets du soleil sur l’eau, griserie de la vitesse. Et puis c’est le choc fracassant, silence. Passage au noir et blanc. Le skieur se réveille, censément après un long coma, et nous embarque avec lui dans un polar mental rétro-futuriste où résonnent, parmi d’autres, les échos d’Alphaville. Stan van Der Decken est son nom, assène-t-il face à l’objectif, dans un français

teinté d’un fort accent. Scénariste de profession et aventurier romantique dans l’âme, il se découvre légataire testamentaire d’un certain Starkov, et embringué à partir de là dans une aventure politico-existentielle déployée selon une temporalité hallucinée. Compressions et dilatations, bonds en avant et retours en arrière, articulation entre temps vécu temps rêvé, temps imaginé,

entre sensations et projections mentales… Est-ce ainsi qu’un homme se débattant entre la vie et la mort perçoit le temps ? L’intuition plastique d’Ossang est si fertile, qu’elle engage à le suivre. Pour mettre en scène le voyage intérieur de son personnage, il joue avec les registres musicaux (du folk à l’électro industrielle), exacerbe les contrastes entre le noir et la lumière en puisant dans les formes du cinéma muet, fait résonner celles-ci avec des structures architecturales obsédantes. De la part d’un artiste qui a créé son nom à partir d’un verset de la Bible (« Je solidifierai mon sang, j’en ferai de l’os »), il faut s’attendre à des énigmes à tous les étages. Emprunté au capitaine du Hollandais volant, ce bateau de légende condamné à hanter indéfiniment les océans, le nom Van der Decken ouvre la voie à une trame qui s’enroule dans les méandres de l’enfer, sur laquelle viennent se greffer des références au mythe d’Orphée, à Lovecraft, le look de parfait nazi d’un des personnages secondaires, une collection de codes-barres géants qui s’invite dans la danse… Le film n’exige pas de tout décrypter, au contraire. Il invite plutôt à se frayer son chemin dans la foisonnante forêt de signes qu’il organise, voire à s’y perdre. p I. R. Film français de F. J. Ossang. Avec Elvire, Guy McKnight, Lionel Tua. (1 h 33.)

Des femmes, une mère, dans leur course contre la culpabilité L’ actrice Marina Déak impose sa personnalité, un nouveau visage, dans le film qu’elle a aussi réalisé Poursuite

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n peut se poser la question du titre, Poursuite. Ni thriller ni action judiciaire. Il s’agit d’une course à la vie. De quelqu’un qui cherche sa voie, en persévérant, sans se laisser démonter. L’idée d’une quête qui s’obstine. Ce quelqu’un est une jeune femme, Audrey. Elle a quitté Eric, avec lequel elle a eu un fils, Mathieu, 7 ans. Elle a un amant, Stéphane. Elle a des aventures, sans lendemain. Elle a la volonté de ne rien lâcher, de mener son existence comme elle l’entend. Ses choix ne dissipent pas pour autant les difficultés, les doutes, le blues. Quelle femme d’aujourd’hui peut se targuer de surfer sur une vie toute rose ? On pourrait définir le sujet de Poursuite autrement : de la complication, pour une jeune femme, de circuler entre enfant,

désirs, travail. Le poser ainsi définit bien le ton du film, qui oscille sans cesse entre le social et le psychologique, le documentaire et la fiction. Marina Déak part d’un réel qu’elle connaît bien, mais elle en joue pour tisser une histoire. Elle imagine pour son héroïne des situations de fantasmes, mais elle l’interprète elle-même. Elle casse brutalement son récit au bout de vingt minutes pour faire surgir des interviews de femmes confrontées à la même situation : dans un couple qui explose, qui s’occupe de l’enfant ? Ces femmes sont filmées face caméra selon un dispositif de reportage, mais ce sont des comédiennes qui les incarnent, et la troisième d’entre elles n’est autre qu’Audrey (Marina Déak, donc) qui nous replonge dans le schéma de reconstitution. Cet acharnement (assez ludique) à « donner des coups de pied à la fiction » pour approcher au plus

près d’une expression de la vérité, se conjugue avec une belle capacité à capter le naturel. Il faut dire quelques mots de la « présence » de l’actrice-réalisatrice. Marina Déak habite le cadre d’instinct, imposant sa personnalité, nouveau visage, nouveau corps, des silences, mimiques, facéties qui la font échapper à une sobriété opaque. Elle s’investit physiquement, non sans audaces, dans son plaidoyer pour le droit aux jeunes mères d’avoir des amants, rappelant les prestations de comédienne-réalisatrice de la regrettée Christine Pascal. Les deux ou trois choses qu’elle nous dit d’elle sont d’une décomplexante banalité. Audrey a mis son fils chez sa mère, parce qu’elle n’avait « pas envie de [SE]retrouver seule avec lui, tous les matins, tous les soirs, courir, toujours assurer, jamais flancher ». Elle a fait ça « en attendant ». En attendant quoi ? De

trouver un logement, un emploi, un compagnon stable ? Va savoir. Est-elle une mère indigne ? Estelle une mauvaise femme de préférer voir son amant sans Mathieu pour ne pas briser par des « trucs de couple » l’enchantement d’être « en amoureux » ?

Epuisants chassés-croisés Audrey est comme tout le monde, une femme ordinaire, confrontée à la précarité, c’est ce que Marina Dréak souligne en commençant son film par un plan de voyageurs anonymes dans le métro, en rythmant son récit de choses quotidiennes, les chassés-croisés chez sa mère pour déposer Mathieu, reprendre Mathieu, passer avec lui un week-end sur deux, rassurer l’agence de placement qui vous a trouvé un job très astreignant, le métro encore, la solitude dans l’ascenseur, les réflexions des gens, la culpabilité (« J’y arrive

pas ! »), le monologue de la mère sur Mathieu (« Il peut pas être trimbalé comme ça, le gosse ! »), l’explication douloureuse avec l’amant, parce que les problèmes matériels parasitent tout. Poursuite n’est pas un portrait d’Audrey. C’est un film sur la séparation, la liberté de vivre, de respirer, de s’offrir ses bouffées d’air, qu’on soit homme ou femme, père ou mère. Aux yeux des bien-pensants, Audrey peut paraître irresponsable et libertine, mais Marina Dréak élargit le champ d’investigation, montre que le père de Mathieu séduit des filles, arrive en retard pour récupérer Mathieu. Personne n’est parfait, chacun vit sa vie, en conscience, tolérance et bonne volonté. C’est la vision d’une féministe bien tempérée. p J.-L. D. Film français de Marina Déak, avec Marina Déak, Renaud Dehesdin, (1 h 32.)

La justice mexicaine censure un film qui la met en cause, le public afflue

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e la justice ou de la société civile, qui aura le dernier mot? Le documentaire Presunto culpable (Présumé coupable) reste sur les écrans mexicains, malgré une ordonnance de suspension. Ce film pointe les failles du système judiciaire en suivant la poignante lutte d’Antonio Zuniga, un innocent accusé de meurtre. Le 2 mars à Mexico, Blanca Lobo, juge fédérale, a suspendu provisoirement la projection du documentaire qui connaissait depuis sa sortie le 18février un succès record avec plus de 600 000 entrées dans 200 salles de cinéma. Ce verdict a provoqué une levée de boucliers. Parlementaires de tous bords, journalistes, réalisateurs et universitaires dénoncent une atteinte à la liberté d’expression. Le sous-directeur chargé des médias au ministère de l’intérieur, Hector Villareal, a jugé la décision judiciaire « confuse» et «ambiguë ».

L’un des protagonistes du film, Victor Daniel Reyes Bravo, avait déposé plainte pour préjudice moral, estimant que son témoignage avait été filmé sans son autorisation et que la diffusion du film avait bouleversé sa vie privée. M. Reyes est l’unique témoin à charge dans cette poignante affaire. Arrêté le 12décembre 2005 par deux policiers dans une rue de Mexico, ce commerçant de 26ans est accusé d’avoir tué un membre d’une bande de son quartier, malgré ses dénégations. Celui qu’on surnomme Tonio a passé plus de deux ans dans les geôles surpeuplées d’une prison de Mexico alors que les études balistiques prouvent qu’il n’a pas utilisé d’arme à feu. Au moment du crime, le jeune rappeur a été vu vendant des disques sur un marché de la capitale mexicaine. Mais le témoignage à charge de Victor Daniel Reyes Bravo, cousin de la victime, le condamne à vingt ans de prison.

Tonio parviendra à sortir de son calvaire grâce aux caméras de Layda Negrete et Roberto Hernandez. Face à l’absence de preuves, les deux réalisateurs, un couple d’avocats, sollicitent un second procès et font appel à un brillant confrère.

Manipulation policière Sa libération semble assurée après que Victor Daniel Reyes Bravo eut avoué ne pas l’avoir vu tirer sur la victime. Contre toute attente, le juge confirme la sentence. Les images vidéo de cette décision arbitraire permettront de solliciter un procès en appel. Cette fois, l’accusé est immédiatement libéré. « Comme Tonio, nous sommes tous des présumés coupables dans un système judiciaire, où 93 % des mandats d’arrêt se basent sur des témoins oculaires, parfois manipulés par la police. Ce système fabrique des coupables», explique Roberto Hernandez. Dans une

interview radio, le réalisateur a réagi à la décision de suspension de son film en précisant qu’elle est basée sur une nouvelle « manipulationdu témoin à charge». «Durant le tournage, il ne s’est jamais opposé à être filmé. (…) Nous ne savons pas par qui ni à quelles fins, mais il semble clair qu’une personne l’utilise. » Sa compagne et coréalisatrice, Layda Negrete, a déposé un recours devant le tribunal collégial de Mexico. Selon Alejandro Ramirez, directeur général de Cinépolis, qui distribue le film « il est ironique qu’un film, qui révèle les erreurs et déficiences du système judiciaire mexicain, soit victime de ce même système ». Il a précisé que le documentaire resterait sur les écrans «dans l’attente d’un ordre formel des autorités». Le 11 mars, la juge Blanca Lobo devrait rendre ses conclusions définitives et dire si le film doit ou non rester sur les écrans. En regard des files d’atten-

te dans les cinémas de Mexico, l’affaire de la suspension du film semble déjà avoir dopé sa notoriété auprès des spectateurs. p Frédéric Saliba (Mexico, correspondance)

Les deux combats des Kollas du nord de l’Argentine A ciel ouvert ppv

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n est à 2 000 kilomètres de Buenos Aires, dans les confins provinciaux de Jujuy et de Salta, situés au nordouest de l’Argentine. Dans cette région inhospitalière, vit le peuple amérindien des Kollas, qui représentent environ 15 % de la démographie nationale. Vivre est un grand mot. Survivre serait plus juste. Les villages sont privés d’eau et d’électricité, difficiles d’accès, et cette population, la plus démunie du pays, subsiste péniblement des revenus de l’élevage. Encore veut-on les en priver. La région, riche en matières premières, suscite la convoitise de l’Etat et de l’industrie. Fermées depuis plus de dix ans en raison de la chute des cours boursiers, après avoir laissé nombre d’autochtones sur le carreau, les mines vont rouvrir. Elles empiètent sans vergogne sur les territoires d’élevage et menacent d’une grave pollution la région. Cette fois, une forte mobilisation y répond.

Les intérêts de l’Etat A ciel ouvert en témoigne, entrelaçant deux luttes, d’ampleur inégale. La première concerne la protestation de villageois qui réclament depuis quinze ans au gouvernement un toit pour leur école municipale. La seconde, dirigée contre l’installation d’une gigantesque mine d’argent à ciel ouvert allouée à une puissante entreprise canadienne, se confronte à un ennemi plus redoutable encore que l’impéritie de l’Etat : son intérêt financier. De ce canevas, le film ne tire ni un libellemilitant ni unedénonciation misérabiliste. Il montre avec beaucoup d’intelligence, parfois de drôlerie, un état des lieux du conflit entre tradition et modernité. Il ne passe sous silence ni les dissensions internes des indigènes, partagés entre nécessité de la lutte et obligation de travailler, ni les promesses rassurantes de l’entreprise en matière de développement durable. Mais il montre les choses à qui sait les voir. Ainsi, l’une des séquences les plus fortes est l’exposition des consignes de sécurité délivrées aux enfants de l’école par des membres de l’entreprise, qui les déguisent en mineurs et leur expliquent l’avantage providentiel qu’ils trouveront à y être employés. Il faut être parfaitement maître de soi pour retenir à cet instant, devant cette grotesque condescendance, l’insulte qui vient aux lèvres. Le film est signé d’une réalisatrice française qui a visité quinze ans durant ces confins. Elle a su trouver le juste regard pour témoigner de la lutte d’un peuple dépossédé de sa terre, méprisé, exploité. Ici, le cinéma contrecarre l’Histoire, éveillant chez le spectateur empathie et solidarité. p Jacques Mandelbaum Documentaire français d’Ines Compan. (1 h 34.)

Reprise /production

du 15 au 28 mars 2011

Le Théâtre de l’Amante anglaise de Marguerite Duras conception Elizabeth Macocco et Ahmed Madani mise en scène Ahmed Madani

Réservations 02 35 70 22 82

22 Cinéma

0123 Mercredi 9 mars 2011

ppp excellent

Jimmy Rivière, candide tête brûlée

ppv à voir

pvv pourquoi pas

Les films de la semaine

Teddy Lussi-Modeste met en scène le héros tourmenté d’un camp de Roms pentecôtistes

nRetrouvez l’intégralité de la critique sur Lemonde.fr

Jimmy Rivière

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Fighter

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etenez bien ce nom : Guillaume Gouix. Vous l’avez peut-être vu récemment dans Poupoupidou (le jeune gendarme), Copacabana, Belle épine… Il éclate dans ce film où il interprète un Gitan tourmenté, petit coq frimeur, beau gosse irascible, une graine de Mickey Rourke à petits biceps. Il y a un autre acteur intrigant dans Jimmy Rivière : c’est la communauté des gens du voyage, dont est issu le réalisateur Teddy Lussi-Modeste. Un groupe social sous-représenté au cinéma, mal connu par nos concitoyens, associé dans l’inconscient public à une certaine délinquance, objet de dénigrement durant l’été 2010 lors de la polémique sur les campements roms. Ces gens-là, on a récemment découvert l’un de leurs visages, celui de la ferveur religieuse, dans La BM du Seigneur de Jean-Charles Hue. Installé dans l’Isère, près de Grenoble, le clan qui est dépeint ici est de religion pentecôtiste. Jimmy Rivière est une tête brûlée au sourire candide que la communauté pousse à se convertir, abjurer sa vie d’avant, ses passions funestes que sont la boxe thaïe et Sonia, une beurette qu’il a séduite (Hafsia Herzi, qui peine à convaincre depuis La Graine et le mulet d’Abdellatif Kechiche). Une chape de moralité pèse sur le campement dirigé par un pasteur prêcheur exalté (Serge Riaboukine). Quiconque se refuse à « extirper la violence de son cœur » et à faire sacrifice de ses mauvaises pulsions encourt le risque d’être banni. Telle est la menace qui plane sur Jimmy Rivière, qui vient

Film américain de David O. Russell (1 h 53).

Boxing Gym Documentaire américain de Frederick Wiseman (1 h 31). Film français de F. J. Ossang (1 h 33).

Poursuite Film français de Marina Déak (1 h 32).

Jimmy Rivière Film français de Teddy Lussi-Modeste (1 h 30).

pvvpourquoi pas nLa Ligne droite

d’être baptisé et qui se destine à épouser la vierge et blonde Becka avec laquelle il chante durant la messe. Les Gitans réclament aux autorités locales un terrain de 300 hectares pour rassembler leurs frères pentecôtistes européens. Jimmy endure les quolibets des clans rivaux, « Gadgé » athées (« Ton camion est en panne ? Avec un Amen et un Alléluia, ton Dieu va te le réparer ! »), il repousse Sonia, qui cherche à le rendre jaloux, et éconduit Gina (Béatrice Dalle), une organisatrice de matches de boxe qui a investi sur lui. Jimmy a le sang chaud, et des secrets familiaux qui vont lui faire péter les plombs. En proie aux doutes, à ses désirs, il va revoir

Sonia, remettre ses gants de boxe, aller soigner sa fièvre du samedi soir en se prenant pour Travolta, être dénoncé, assimilé à un tricheur, menteur, traître à la communauté. Le sujet du film est là :

Les gens du voyage : ungroupe social sous-représenté au cinéma comment s’affranchir d’un groupe auquel on appartient ? Toutes proportions gardées (tout de même !), c’est un Mean Streets à la française, avec un héros poursuivi par ses démons, Jimmy entre cantiques chrétiens et boîte de

nuit locale comme Harvey Keitel tiraillé entre tentation de devenir prêtre et séduction de la Mafia. Teddy Lussi-Modeste n’a évidemment pas l’époustouflante maestria de Scorsese, il lâche (avec sa coscénariste Rebecca Zlotowski, l’auteure de Belle épine) des dialogues trop explicatifs, mais signe un premier film original, stylisé, affranchi des guitares à la Gipsy Kings, où l’eau et la forêt jouent un rôle initiatique, un film âpre, rythmé comme un chaos, entre lyrisme et mélancolie. p J.-L. D. Film français de Teddy Lussi-Modeste, avec Guillaume Gouix, Béatrice Dalle, Hafsia Herzi, Serge Riaboukine. (1 h 30.)

L’animation traditionelle en 2D fait de la résistance

Film français de Régis Wargnier (1 h 38). Leïla (Rachida Brakni), ex-athlète de haut niveau, sortie de prison, devient le guide de Yannick (Cyril Descours), jeune coureur qui vient de perdre la vue. Reliée à lui par un cordon, elle court à ses côtés. Une envie de revanche les unit. La réussite du film n’est pas totale, à cause d’un scénario trop explicatif, d’une musique résonnant parfois en surcharge. p J.-L. D

nVents de sable, femmes de roc Documentaire belge de Nathalie Borgers (1 h 30). A l’extrême sud du Sahara vivent les Toubou, bergers nomades. Chaque année, après la saison des pluies, les femmes quittent le campement, et parcourent en caravane plus de 1 500 km pour aller cueillir des dattes dans une oasis. Photo magnifique (signée Jean-Paul Meurisse), dialogues parfois superfétatoires. p J-L. D

nLe Marquis Film français de Dominique Farrugia (1 h 28).

O

que : « Le relief est un argument commercial. » Personne ne le nie, cet argument est la voix du marché international. Sans doute a-t-il eu sa part dans les options prises pour Ana de Carlos Carrera, conte fantastique situé dans une institution psychiatrique mexicaine. Son directeur artistique Marec Fritzinger, confie que le choix des images de synthèse 3D ne fut pas évident : « Nous cherchons à préserver une texture qui rattache le film à la peinture. En 3D, c’est un défi qu’il nous semble possible de relever étant donné les progrès de cette technologie. » Parmi les motivations de l’équipe, il cite la pénurie croissante d’animateurs 2 D. Et puis les poten-

le Chœur de Radio France jeudi 10 mars 2011* mardi 15 mars 2011** Basilique Sainte-Clotilde 20h30

Œuvres de Percy Grainger * Lili Boulanger, Graciane Finzi, Maurice Ohana et de Edith Canat de Chizy ** Graham O’Reilly direction * David Selig et Maciej Pikulski pianos et harmonium * Roland Hayrabedian direction **

01 56 40 15 16 concerts.radiofrance.fr [email protected]

tialités qu’elle offre en termes d’éclairage, de mouvements de caméra. Autant d’arguments qui vont, en tout état de cause, dans le sens du marché : « Une fois qu’on est arrêté sur la 3D, le relief coulait de source. » Même son de cloche chez Prim’Alinea, où la productrice Valérie Schermann, qui fait avec Majorettes ! ses premiers pas dans la 3D, ne cache pas une forme d’inquiétude : « Le choix était celui du réalisateur, mais c’est sûr, la 3D conduit à cette forme d’uniformité que l’on constate aujourd’hui. » Patrice Leconte, lui, a trouvé le moyen de préserver « la sensation dudessin » et le relief. Venu présenter Le Magasin des suicides, le premier film d’animation de sa carrière, le réalisateur des Bronzés faisait l’apologie de la « 2D relief », procédé visuellement séduisant qui consiste à empiler les strates de décors pour créer de la profondeur de champ. De fait, tout semble possible aujourd’hui en animation, y compris les hybridations les plus étranges. Reste que les plus beaux projets relevaient de l’animationtraditionnelle. Improbable aventure située dans la Russie tsariste, Le Grand Nord frappait par le romanesque de son récit, la beauté de ses peintures et les principes de mise en scène que son auteur, Rémi Chayé, défendait avec fougue. Remarqué aussi, Insaisissable d’Alain Gagnol et Jean-Loup Felicioli, les auteurs d’Une vie de chat. Pour Jacques-Rémy Girerd, leur producteur chez Folimage, la 3D n’est pas au programme, bien au contraire. Pour son prochain film, Tante Hilda, le réalisateur de La Prophétie des grenouilles aurait même mis au point une nouvelle technique de dessin au stylo-bille « qui oblige à être dans le geste vrai ».

L’exploitant et distributeur lyonnaisMarc Bonny (Gebeka) leconfirme : il y a encore de la place pour ces films. « Il y a un fort rejet du relief de la part des parents de jeunes enfants ». Les adolescents par ailleurs seraient freinés par le prix des billets. « La 3D a été le cheval de Troie d’Hollywood pour pousser les salles à s’équiper en projecteurs numériques. Cela a provoqué beaucoup d’abus. Il faut voir maintenant quels sont les films pour lesquels elle apporte quelque chose au spectateur. »

La 3D a été le cheval de Troie d’Hollywood pour pousser les salles à s’équiper en projecteurs numériques Pour l’heure, les distributeurs sont confrontés à un nouveau défi : « Le 15 décembre, j’ai sorti Une vie de chat sachant que quatre films en 3D sortaient à la même date. Je n’avais pas prévu que dans plusieurs multiplexes, entre les versions relief et non-relief, ils allaient occuper huit écrans, et prendre la place de mon film. » Pour échapper à ce type d’encombrement, Marc Bonny remet en cause ses pratiques, envisageant des sorties hors des vacances scolaires pour les films « les plus solides ». Pour les autres, il cible son public avec une précision accrue. « Emilie Jolie est un conte musical pour les filles de 3 à 7 ans. J’ai donc décidé que je pouvais le sortir en même temps qu’ Un Monstre à Paris, le film EuropaCorp, qui s’adresse surtout aux garçons, un peu plus âgés. » p I. R.

Film britannique de Nigel Cole (1 h 53). En 1968, la grève des ouvrières de l’usine Ford de Dagenham, dans la banlieue de Londres, déboucha sur la parité des salaires. Le récit de ce conflit par l’auteur de Calendar Girls mêle de façon imprévue une critique de gauche de la bureaucratie syndicale et les ressorts les plus usés de la comédie britannique sentimentale. Le cocktail est tour à tour plaisant et écœurant. p T. S.

vvvà éviter nL’Assaut Film français de Julien Leclercq (1 h 30). Avec ses tics de magazine télévisé à sensation, ce retour sur le détournement sanglant du vol Alger-Paris d’Air France, en décembre 1994, n’éclaire pas vraiment un épisode toujours entouré de zones d’ombre. Privilégiant le point de vue du GIGN, ce film brutal et sommaire finit par ressembler au discours d’un sergent recruteur. p T. S.

nLe Rite Film américain de Mikael Hafström (1 h 52). Un réalisateur suédois laborieux, une vedette anglaise cannibalisée par un rôle ancien (Anthony Hopkins), un jeune premier écossais insipide (Colin O’Donoghue), un scénario débile et une mise en scène lamentable. Le tout mis au service d’une misérable resucée de L’Exorciste. p J. M.

Les meilleures entrées en France Nombre de semaines d’exploitation

Cartoon Movie, rendez-vous annuel du cinéma d’animation, s’est tenu à Lyon du 2 au 4 mars n le sait : il y a un avant et un après Avatar. Alors que les salles de cinéma s’équipent à vitesse grand V en projecteurs numériques, quels films ont intérêt à être projetés en relief ? Dans le secteur de l’animation, la question s’articule avec celle des images de synthèse en 3D, utilisées pour la fabrication des films depuis le milieu des années 1990. Du 2 au 4 mars, on pouvait en creuser les enjeux à Lyon, où se tenait le forum Cartoon Movie, le grand rendez-vous annuel de la profession. Venue soutenir Riviera, une coproduction entre Les Armateurs et EuropaCorp qu’elle représente, Nathalie Bloch-Lainé est catégori-

Comme dans les films de Francis Veber, un abruti et un gros dur voient leurs destins liés par une aventure exotique. Franck Dubosc et Richard Berry reprennent les emplois tenus jadis par Pierre Richard et Gérard Depardieu. Le ton est bon enfant, mais la mécanique comique n’est pas d’une précision suisse. p T. S.

nWe Want Sex Equality

Dharma Guns

Jimmy (Guillaume Gouix) a deux passions, Sonia (Hafsia Herzi) et la boxe thaïe. LAURENT THURIN-NAL

vvv à éviter

Nombre d’entrées (1)

Nombre d’écrans

Evolution par rapport à la semaine précédente

Total depuis la sortie

Rien à déclarer

5

458 348

890

 – 39%

Sans identité

1

321 567

339



_

321 567

Le Discours d’un roi

5

271 988

450



6%

2 069 724

Black Swan

4

263 848

441

 – 21%

2 003 873

Paul

1

257 841

280



_

257 841

7 382 174

True Grit

2

257 576

428

 – 46%

862 843

Les Femmes du 6e étage

3

238 525

423

 – 33%

1 201 557

Largo Winch 2

3

171 970

546

 – 44%

1 154 175

Les Voyages de Gulliver

2

160 916

501

 – 29%

464 119

4

150 978

379

 – 15%

834 146

ie

Animaux & C (3D) Source : Ecran total

(1) Période du 2 au 6 mars inclus

Si l’on fait abstraction de l’hégémonie nordiste, un peu allégée cette semaine (Rien à déclarer a réuni moins d’un demi-million de spectateurs en ce début de semaine), le haut du classement est résolument anglo-saxon. Certes, Sans identité se passe à Berlin, mais on ne fait guère plus américain que ce film réalisé par un Espagnol. Le reste est londonien (Le Discours d’un roi, auréolé de ses Oscars, augmente sa fréquentation et passe la barre des deux millions d’entrées), new-yorkais (Black Swan, qui lui aussi bénéficie de l’effet de la statuette remise à Natalie Portman) ou carrément à l’Ouest (le True Grit des frères Coen). Les autres sorties du 2 mars ont été distribuées sur des combinaisons modestes et n’ont pas démérité. A la quinzième place, Une pure affaire frôle les 75 000 entrées sur 179 copies. La Permission de minuit passe le cap des 60 000 spectateurs et Avant l’aube en réunit 46 764. Winter’s Bone, sorti sur seulement 47 écrans, approche les 28 000 entrées.

La commissaire européenne à la culture garantit l’avenir du programme Media La commissaire européenne chargée de la culture, Androulla Vassiliou, se veut rassurante quant à l’avenir du programme Media : ce dispositif, qui soutient depuis vingt ans le financement et la circulation du cinéma européen, pourrait fusionner avec le programme culture de la Commission européenne. Dans une tribune publiée par Libération, Mme Vassiliou répond aux cinéastes signataires d’une pétition (Le Monde daté 23 février) que leurs craintes sont « infondées et injustifiées ». Le programme Media sera préservé « dans ses principes comme dans ses moyens financiers », soit 755 millions d’euros, dit-elle, mais il faut « augmenter la part des sommes consacrées directement » au cinéma. « Nous voulons réduire les frais administratifs. L’idée serait de regrouper les deux programmes dans une même entité, dénommée Europe Creative », précise-t-on dans l’entourage de la commissaire. p Clarisse Fabre

Mode 23

0123 Mercredi 9 mars 2011

Paris, prêt-à-porter femme automne-hiver 2011-2012

La styliste britannique issue d’une famille végétarienne revendique une mode «écologiquement correcte» où cuirs et fourrures sont bannis

Stella McCartney, bio à porter

C

e jour-là à Paris, le spectacle était sur les marchesdu Palais Garnier. Lundi 7 mars, à l’heure du déjeuner, des artistes du Cirque du Soleil et des comédies musicales Mozart et Dracula, le visage dissimulé sous un masque de phoque, se sont jetés sur une femme en fourrure, comme pour la dépecer. « Ils reprennent leur peau, c’est la revanche des animaux », déclarait Dan Mathews, le senior viceprésident de Peta, l’association de défense des animaux initiatrice de ce ballet macabre. « Nous projetons des actions similaires, plutôt artistiques, dans chaque fashion week », a précisé l’Américain qui veut sensibiliser le public au « scandaleux carnage » des animaux, quand il s’agit de chiffon. Stella Mc Cartney, dont le défilé venait de s’achever au Palais Garnier, a échappé à leur colère. Pour cause. La créatrice britannique, membre de Peta, dirige la seule

Lacréatricea transforméunepartie desonéquipeen chercheursagronomes marque (adossée au groupe PPR) qui n’utilise ni cuir, ni fourrure, ni même la nacre. Cela ne l’empêche pas de faire une mode dans l’air du temps, comme en témoigne sa collection de l’hiver, admirée par son Beatles de père, Sir Paul McCartney, au côté de l’actrice Liv Tyler. Le jour, d’amples pantalons alternent avec des jupes crayons et corsages bleu encre, réchauffés par des vestes masculines surdimensionnées ; le soir, la femme McCartney se glisse dans des tuniques dorées ou des petites robes en tulle recouvertes de pastilles en simili peau. « J’ai été élevée dans une ferme biologique, entourée d’une famille végétarienne », rappelle la créatrice. « Je veux créer une mode luxueuse que les femmes ont envie d’acheter. Si je peux préserver l’environnement sans sacrifier le design, pourquoi je m’en priverais ? ! ». Saison après saison, cette jeune quadragénaire réalise un tour de force dans l’élaboration de créations qui ne nuisent pas à la vie animale ou à la planète. Pour ses chaussures – bottines, souliers plats à boucles et escarpins bicolores – elle a recours à des polyuréthanes (pas de PVC), mais aussi

des velours, des cotons, du lin, du raphia, du bois et du Nylon recyclé… « 50 millions d’animaux meurent par an sur l’autel de la mode…, or il y a toutes ces alternatives que nous travaillons. Finalement, c’est bien plus créatif », souligne-t-elle, fière de proposer, depuis l’automne, des semelles en caoutchouc biodégradable. Un tiers des tissus qu’elle utilise sont « écologiquement corrects ». La laine est achetée en Uruguay selon les règles du commerce équitable. Le denim, à base d’un coton bio, est délavé en utilisant le moins d’eau possible. « Le résultat est fade, souvent irrégulier, et les clients ne comprennent pas toujours le sacrifice que l’on fait sur l’aspect esthétique du vêtement, et le prix que l’on en demande », regrette Stella McCartney. A Londres, dans sa maison de couture où l’énergie est fournie par une éolienne, elle a transformé une partie de son équipe en chercheurs agronomes. Le lin moins gourmand en eau, le coton qui pousse plus vite, de façon à avoir plusieurs récoltes par an et mobiliser moins de terre arable, n’ont pas de secrets pour eux. « J’ai utilisé des cocons abandonnés par les vers à soie, pour ne pas avoir à faire bouillir ces petites bêtes, mais les quantités sont limitées et la qualité est bien plus rustique, ce qui n’est pas toujours ce que je souhaite obtenir », souligne la créatrice. Elle s’est ainsi tournée vers deux coopératives agricoles, au Laos et en Thaïlande, qui éduquent, « à l’ancienne », des vers sur des feuilles de mûrier, avant de filer et tisser la soie à la main. Vêtements pour petits et grands, accessoires et cosmétiques bio…, la passion de Stella McCartney pour la « green attitude » pourrait faire d’elle, un jour, une sorte de pionnière dans l’histoire de la mode. La marque Commuun, créée en 2005 à Paris, tente aussi de proposer une mode belle et bio. Sweater sur une superposition de jupon long et mini-jupe, parka garni de velours, robe tunique à bandes colorées : l’esprit couture années 1960 magnifie des vêtements de sport, l’ensemble taillé dans des étoffes naturelles pour la plupart d’origine biologique. « Nous ne faisons pas de publicité de notre démarche, déclarent les Japonais Iku Furudate et Kaito Hori qui se cachent derrière cette griffe. C’est un secret partagé entre la cliente et nous. » p Véronique Lorelle

Un modèle de Stella McCartney. PATRICK KOVARIK/AFP

Yves Saint Laurent, Valli et Chloé: modernes, urbains ou bohèmes chics C’EST CERTAIN, Stella McCartney n’aurait pas aimé la collection que Giambattista Valli a présentée peu après la sienne : la fourrure y est très présente. Ses créations sont pourtant séduisantes, minimalistes, modernes et couture tout à la fois. Le créateur joue subtilement le contraste du noir et du blanc. Des boléros capes aux formes ovoïdes s’opposent à des pantalons fuseaux. Il dessine des courbes autour des hanches de robes de soirée pour terminer sur d’imposantes robes style infante d’Espagne. De la fourrure, on en retrouve aussi sur quelques capuches des vestes de la collection Yves Saint Laurent. Confirmant un mouvement amorcé depuis la saison précédente. Stefano Pilati, le directeur artistique maison, revisite ses codes tout en apportant une touche de modernité. Il donne sa

vision du chic parisien en réinterprétant les années 1970 et construit une silhouette urbaine, très graphique, dominée par le blanc, le gris et le noir. Le prince-de-galles sert de fil conducteur. Il est décliné en tailleur, jupe très courte ou au-dessous du genou portée avec de longues bottes lacées, en nubuck noir. Stefano Pilati introduit une nouvelle veste croiséedeux boutons, taille basse, portée à même la peau.

Combinaison et salopette Des jupes à pans coupés sous le genou sont mariées avec des blouses de satin de soie immaculée, aux manches bouffantes. Du vinyle noir apparaît sur le col d’une veste, ou est taillé en robe trapèze sans manches, et est troué pour donner un effet pois blancs. Le soir, le créateur joue le blanc : pan-

talon-cigarette, combinaisonshort et surtout combinaisonpantalon – un des classiques de la maison – à la taille délicieusement marquée d’une ceinture chaîne dorée. Après plusieurs saisons d’errements, Hannah MacGibbon signe pour Chloé une collection plus cohérente où souffle aussi l’esprit des années 1970. L’ancien bras droit de Phoebe Philo – désormais chez Céline – lorsqu’elle dessinait les collections de la griffe, s’essaie au bohème chic. Les pantalons sont larges, les chemises fermées jusqu’au denier bouton, le cuir taillé en combinaison et salopette. La Britannique ose le jean taille haute et bas évasé et court. Elle est plus convaincante avec ses mélanges d’imprimés serpent relevés avec de vraies peaux. Stella McCartney n’aurait pas apprécié non plus. p Joël Morio

De gauche à droite : Hannah MacGibbon pour Chloé (PIERRE VERDY/AFP). Giambattista Valli. (FRANÇOIS GUILLOT/AFP). Stefano Pilati pour Yves Saint Laurent (PATRICK KOVARIK/AFP).

24 Météo & Jeux < -10°

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Lever 08h31 Coucher --.--

Lever 07h16 Coucher 18h45

Sainte Françoise Coeff. de marée 77/81

Séville

Aujourd’hui Jeudi Une perturbation de très faible 7 11 activité traversera la moitié nord du pays. Elle donnera de nombreux nuages mais très peu de pluie, avec 5 12 tout au plus quelques gouttes ou bruines passagères entre la Bretagne, le Nord et les Ardennes. Le soleil restera en revanche omniprésent 3 16 plus au sud de cette ligne, hormis des entrées maritimes persistantes sur le Golfe du Lion. Douceur l'après-midi.

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Chronique Franck Nouchi

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www.meteonews.fr

Amiens Rouen

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En Europe

Mercredi 9 mars Nuages au nord, soleil ailleurs Cherbourg

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Dans le monde

Alger souventdégagé Amman averseslocales Bangkok risqueorageux Beyrouth aversesorageuses Brasilia risqueorageux Buenos Aires beautemps Dakar beautemps Djakarta risqueorageux Dubai beautemps Hongkong éclaircies Jérusalem averseslocales Kinshasa risqueorageux Le Caire averseslocales Mexico souventdégagé Montréal faibleneige Nairobi souventdégagé

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New Delhi New York Pékin Pretoria Rabat Rio de Janeiro Séoul Singapour Sydney Téhéran Tokyo Tunis Washington Wellington

beautemps 14 25 éclaircies 1 6 beautemps -2 11 souventdégagé 15 30 souventdégagé 12 16 aversesmodérées 23 27 largementdégagé 0 9 risqueorageux 26 30 éclaircies 20 29 éclaircies 5 15 beautemps 4 11 largementdégagé 6 14 aversessporadiques 2 10 largementdégagé 14 16

Cayenne Fort-de-Fr. Nouméa Papeete Pte-à-Pitre St-Denis

risqueorageux souventdégagé averseslocales beautemps souventdégagé souventdégagé

Outremer

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Météorologue en direct au 0899 700 703 1,34 € l’appel + 0,34 € la minute 7 jours/7 de 6h30-18h

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L

e petit monde des fonds spéculatifs (hedge funds) ne connaît pas la crise. Dans Le Monde d’hier, on apprenait que ces investisseurs ont renoué, en 2010, avec les profits spectaculaires, gommant ainsi complètement les pertes de l’année 2008. Au total, ils pèseraient aujourd’hui la modique somme de 1917 milliards de dollars (1 371 milliards d’euros) – contre 1 868milliards de dollars avant la crise, en 2006. Ces chiffres impressionnants – on pourrait y ajouter les profits réalisés en 2010 par les plus grandes banques mondiales – sont rendus publics alors qu’un article, publié dans le magazine américain Rolling Stone, fait, depuis quelques jours, grand bruit. Ecrit par le journaliste Matt Taibbi, son titre est on ne peut plus explicite : « Why isn’t Wall Street in jail ? » (« Pourquoi Wall Street a échappé à la prison ? »). A en juger par le nombre de commentaires qu’elle a suscités, cette enquête, résumée sur le site Slate.fr, a fait mouche. Tout commence par un verre de bière dans un bar de Washington. Un enquêteur du Sénat américain dit à Matt Taibbi : « Tout est bousillé et personne ne va en prison. Toute votre histoire est là. Bon Dieu, vous n’avez même pas besoin d’écrire la suite ! Ecrivez juste ça (…). Vous pouvez arrêter votre article là-dessus.» Le journaliste ne suivra pas ce conseil. Sur plusieurs pages, il tente de comprendre ce qui s’est passé: «Une véritable montagne de preuves indique que, en ce qui concerne Wall Street, la justice, non seulement échoue à punir la délinquance financière, mais s’est en fait transformée en un mécanisme très efficace de protection des délinquants financiers (…). La justice

Mots croisés n˚11-057

Sudoku n˚11-057

Solution du n˚11-056

Mardi 8 mars TF 1

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Facile

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Compl´ etez toute la grille avec des chiffres allant de 1 ` a 9. 5 7 8 Chaque chiffre ne doit ˆ etre utilis´ e qu’une 3 4 8 seule fois par ligne, colonne et par 4 2 5 3 7 par carr´ e de neuf cases. R´ ealis´ e par Yan Georget (http://yangeorget.blogspot.com)

V VI VII VIII IX

Loto

X

«En ce qui concerne Wall Street, la justice s’est transformée en un mécanisme très efficace de protection des délinquants» Matt Taibbi Journaliste à « Rolling Stone » présidence Clinton à celle de Barack Obama, ont gangrené l’administration américaine. «Trois ans après la crise, pas un seul responsable financier n’a été condamné à la prison, et ce n’est pas acceptable», avait déclaré Ferguson lors de la cérémonie de remise des Oscars, le 27février à Los Angeles. On pense aussi à cet incroyable voyage dans les entrailles du krach qu’est Le Casse du siècle, de Michael Lewis (Ed. Sonatine). Chroniqueur à Bloomberg News, Lewis n’est pas davantage optimiste. Pour les dirigeants de Wall Street, écrivait-il le 16 février, « du point de vue de leurs entreprises et de leurs bénéfices potentiels, la prétendue crise financière était un hoquet. Ils l’ont déjà oubliée et ils supposent que ce sera bientôt votre cas.» Jusqu’au prochain krach. p

Horizontalement

I. Facilite la libre circulation des alcools. II. Passe beaucoup de temps à l’arène. III. Genre littéraire. Petit fauve au ventre blanc. IV. Traitées comme de belles peaux. Possessif. V. Bagatelles. Fait preuve d’originalité. VI. Une de ses dames a inspiré Alphonse et Georges. Entend comme avant. Fait tout à moitié. VII. Ornent les belles de Polynésie. Supprimais. VIII. Point matinal. Mouilla en surface. IX. Ne tiennent pas du tout compte de la réalité. Poudre d’écorce pour faire la peau. X. Manifestassent leur humeur.

Solution du n° 11 - 056 I. Bourlingueur. II. Lubie. Eosine. III. Avulsion. Dés. IV. Ne. Etonnée. V. Crayon. Epris. VI. STO. Nille. Et. VII. Es. Assoles. VIII. Pi. Eve. Eon. IX. Narguée. Tint. X. Gloussements.

Verticalement

1. Risque de mettre le mâle à mal. 2. Suit tous les bons coups. 3. Une lettre pour faire le tour. A suivi Napoléon III. 4. Balaie pour donner des images. Bout de parapluie. 5. Arturo pour ses proches. Pour suspendre. Dans la sciure. 6. Bout de feuille. Montre les dents en couverture. 7. Compositeur roumain. Fit des réductions. 8. Dans la main du travailleur. Capitale des ducs d’Auvergne. 9. Poésie. 10. Prise en considération. Dans la pièce. 11. Pour les proches. Milieu. 12. Donne du tonus. Philippe Dupuis Verticalement

1. Blanc-seing. 2. Ouverts. Al. 3. Ubu. Ao. Pro. 4. Riley. Aigu. 5. Lestons. Us. 6. Ionisées. 7. Néon. Lovée. 8. Gonnelle. 9. US. Epée. Té. 10. Eider. Sein. 11. Une. Ie. Ont. 12. Résistants.

7, 9, 17, 23, 38 ; numéro chance : 5. Rapports :

5 bons numéros et numéro chance : 2 000 000,00 ¤ ; 5 bons numéros : 82 356,00 ¤ ; 4 bons numéros : 661,30 ¤ ; 3 bons numéros : 7,20 ¤ ; 2 bons numéros : 4,00 ¤. Numéro chance : grilles à 2 ¤ remboursées. Joker : 6 261 864.

Les résultats du Loto sont publiés dans nos éditions datées dimanche-lundi, mardi, mercredi et vendredi. Tous les jours Mots croisés et sudoku.

Abonnements : par téléphone : de France 32-89 (0,34¤ TTC/min) ; de l’étranger : (33) 1-76-26-32-89. Sur Internet : www.lemonde.fr/abojournal/ Tarif 1 an : France métropolitaine : 394 ¤ Internet : site d’information: www.lemonde.fr finances : http://finance.lemonde.fr Emploi : www.talents.fr/ Immobilier: http ://immo.lemonde.fr Documentation : http ://archives.lemonde.fr Collection : Le Monde sur CD-ROM : CEDROM-SNI 01-44-82-66-40 Le Monde sur microfilms : 03-88-04-28-60

TF 1 20.45 Grey’s Anatomy. Série.

Série. Repose en paix. Dernier combat (saison 6, 18 et 20/23, inédit) U. Messages codés (saison 3, 4/24) V. Avec Gary Sinise. 23.15 Enquêtes et révélations. Vraies arnaques et fausses bonnes affaires : enquête sur les nouveaux scandales immobiliers. 0.55 Appels d’urgence (95 min).

A fleur de peau U. La Comédie du bonheur U. Je l’aime... [1/2] V. Je l’aimais [2/2] V (saison 6, 21 à 24/24, inédit). 0.00 Les Experts : Miami. Série. Retour sur le passé (S4, 15/25) U. 0.50 Compte à rebours. Série. Farce cruelle (S2, 13/16, 60 min) V.

FRANCE 2

FRANCE 2

20.35 Une semaine sans les femmes.

20.35 Accusé Mendès France.

Magazine présenté par Véronique Mounier. 22.15 Dans le cœur des femmes. Débat. Invités : Audrey Pulvar, Anne Lauvergeon, Brigitte Grésy, Nathalie Depoire, Gilles Pelisson, Florence Foresti, Maud Fontenoy... 23.55 Journal, Météo. 0.15 Docteur Françoise Gailland Film Jean-Louis Bertucelli. Avec Annie Girardot, Jean-Pierre Cassel (France, 1975, 90 min).

Téléfilm. Laurent Heynemann. Avec Bruno Solo, Jacques Spiesser, Didier Bénureau (Fr., 2010). 22.05 Juin 1940 : le piège du « Massilia ». Documentaire (2010). 23.05 Face aux Français... conversations inédites. Débat. 1.25 Des mots de minuit (150 min).

20.35 Corps perdus. Téléfilm. Alain Brunard. Avec Bruno Todeschini, Sophie Broustal, Elina Löwensohn (Fr., 2008). 22.10 et 2.05 Soir 3. 22.40 Ce soir (ou jamais !) (85 min).

FRANCE 3 20.35 Des racines et des ailes. Châteaux d’Alsace, trésors basques. Magazine. 22.30 et 1.20 Soir 3. 22.55 Ce soir (ou jamais !) (85 min).

CANAL + 20.45 Football.

CANAL + 20.30 La Grande Soirée Champions League. Ligue des champions (8es de finale retour) : FC Barcelone- Arsenal (1-2). 20.45 Coup d’envoi. 22.35 Résumé de Donetsk - AS Roma (3-2). 23.15 Mr. Nobody p Film Jaco Van Dormael. Avec Diane Kruger, Jared Leto (Bel. - Fr. - Can., 2009, 135 min) U.

ARTE Rédaction : 80, boulevard Auguste-Blanqui,75707 Paris Cedex 13 Tél. : 01-57-28-20-00 ; télex : 202806F ; télécopieur : 01-57-28-21-21 Courrier des lecteurs : par télécopie : 01-57-28-21-74 ; Par courrier électronique : [email protected] Médiatrice : [email protected]

Mercredi 9 mars

20.45 Les Experts : Manhattan.

FRANCE 3

Résultats du tirage du lundi 7 mars.

Horizontalement

pénale s’est transformée en un cocktail mondain entre amis et collègues, où, de mois en mois et d’année en année, on s’échange ses postes. » A cet instant, impossible de ne pas penser à Inside Job, le film de Charles Ferguson qui a remporté, cette année, l’Oscar du meilleur documentaire. Dans cette formidable analyse des mécanismes qui ont conduit à la débâcle du système financier international, le cinéaste pointe les innombrables cas de conflits d’intérêts qui, de la

Les soirées télé

Les jeux

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0123 Mercredi 9 mars 2011

20.40 Spécial Journée de la femme. Le Combat d’une femme. Téléfilm. Martin Enlen. Avec Heike Makatsch. [1 et 2/2] (All., 2009). 23.40 Arte Lounge. Magazine. 0.45 Psychose ppp Film Alfred Hitchcock. Avec Anthony Perkins (EU, 1960, N., v.o., audiovision, 105 min).

Ligue des champions (8es de finale retour). Tottenham - Milan AC (1-0). 22.35 Résumé de Schalke - Valence (1-1). 23.15 La Rafle p Film Roselyne Bosch. Avec Mélanie Laurent, Jean Reno, Gad Elmaleh (France, 2010) U. 1.15 Les Herbes folles ppp Film Alain Resnais (Fr. - It., 2009, 105 min).

ARTE 20.40 Les Mercredis de l’Histoire. Hitler et Mussolini. Documentaire (All. - It., 2007). 22.10 Le Dessous des cartes. Occident, l’empire du soleil couchant ? [1/2]. 22.25 Les Nerfs à vif pp Film J. Lee Thompson. Avec Gregory Peck, Robert Mitchum, Polly Bergen (1962, N., v.o.). 0.05 La Lucarne - Balaou (80 min).

M6 M6 20.45 D&CO, une semaine pour tout changer. Spécial solidarité. 0.55 Les 4 400. Série. L’Ange de la mort U. Les Fugitifs (saison 3, 6 et 7/13, 90 min).

20.45 Bones. Série. Guido on the Rocks (S6, ép. 3, inédit) U ; Le Feu sous la glace U. La Chute des héros. Le Chevalier noir U (saison 4, 13 à 15/26). 0.10 Enquête exclusive (145 min) V.

Carnet 25

0123 Mercredi 9 mars 2011

 

                           

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Elise Lucet, sa femme, Rose, sa fille, Martine et Marc Bourgeois, ses parents, Julie, Adrien et Cédric, sa sœur et ses frères, Luce et Michel Weber, ses grands-parents, Sa famille Et ses amis,

ont la douleur d’annoncer le décès de

ont la profonde tristesse de faire part du décès de

vous expriment leurs remerciements pour votre témoignage d’amitié et de sympathie manifesté lors du décès de

Martin,

Mme Geneviève LADAM

qui nous a quittés beaucoup trop tôt le 1er mars 2011.

et vous prient de trouver ici l’expression de leur très sincère gratitude.

René, Georges FRACHOT, ancien directeur de la CARAC de 1983 à 1990, survenu le 3 mars 2011, dans sa quatre-vingt-cinquième année. Il a rejoint sa première epouse, Yolande, (1936-1983)

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AU CARNET DU «MONDE»

Naissances Françoise et Rudiger FURKEL ont la joie d’annoncer la naissance de

Lea, le 3 mars 2011,

Paris. Washington. Cargèse. Ajaccio. Saint-Martin-d’Ablois. Cavaillon.

et ses filles Hélène (1965-1981) Bénédicte (1957-2010). La cérémonie religieuse aura lieu le jeudi 10 mars 2011, à 10 h 30, en l’église Saint-Gilles à Saint-Leu la Forêt (Val-d’Oise). Cet avis tient lieu de faire-part.

chez Clarisse et Michael Untere Zahlbacherstr. 52 D - 55131 Mayence. Colombe BROSSEL, Ugo LANTERNIER et Lila sont heureux d’annoncer la naissance de

[email protected]

Anniversaire Silvia LEPEL et Frédéric de BURE sont heureux de faire part du premier anniversaire de

Décès François et Ana Bergère et leurs enfants, Camille et Bastien, ont la tristesse de faire part du décès de leur père et grand-père,

Roland BERGÈRE, X 48, ancien directeur de recherche au CEA, prix Humboldt de physique nucléaire,

Mme CASTEX, L’inhumation a eu lieu le samedi 5 mars 2011, au cimetière de SoortsHossegor (Landes), dans la stricte intimité familiale.

  

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Ses obsèques auront lieu dans la plus stricte intimité familiale.

Clermont-L’Hérault.

née Marie-Laure BLANCK.

  

M. Hubert GARITEY.

Les obsèques ont eu lieu dans l’intimité familiale.

ont le grand chagrin de faire part du décès de



ont la tristesse de faire part du décès de

Ni plaques ni fleurs.

M. et Mme Jean Castex et leurs fils, Rémi et Simon,

  

Mme Colette Garitey, son épouse, Ses filles, Ses Petites-filles, Ses arrière-petites-filles,

survenu le 2 mars 2011, à Meudon, à l’âge de quatre-vingt-trois ans.

3, rue A. de Lapparent, 75007 Paris.

  

Un moment de reconnaissance et d’adieu aura lieu le jeudi 10 mars, à 14 heures, au centre funéraire de Strasbourg (Robertsau), 15, rue de l’Ill.

Saint-Geroges-de-Didonne (Charente-Maritime).

le 9 mars 2011.

  

Peter Pan est parti retrouver sa Fée Clochette.

Contact : [email protected]

Victor

 

ont le très grand chagrin de faire part du décès soudain de

survenu le 5 mars 2011.

le 7 mars 2011.

  

Helga Priacel, sa mère, Anne et Jean-Pierre Fontaine-Priacel, sa sœur et son beau-frère, Matthieu Freund-Priacel, son neveu, Ilse Bourgain, sa tante,

Stefan FREUND-PRIACEL,

Lune,

Jean-René CHAUVIN est décédé le 27 février 2011, dans sa quatre-vingt-treizième année. Cet avis tient lieu de faire-part. M. Yves Fargette, son mari, Denis et Mireille Fargette, Jean-Yves et Lili Fargette, Barbara et Stéphane Klajzyngier, ses enfants, André, Camille, Naïs, Thibault, Amélie, Gauthier, Vivien, Angèle, Maÿlis, ses petits-enfants, ont la tristesse de faire part du décès de

Mme Anne-Olga FARGETTE, née ROBERT, survenu le dimanche 6 mars 2011, à l’âge de soixante-dix-neuf ans. La cérémonie religieuse sera célébrée le jeudi 10 mars, à 14 h 45, en l’église Notre-Dame-de-l’Assomption de Meudon, 39, avenue du général Gallieni (Hauts-de-Seine). Elle sera suivie de l’inhumation dans l’intimité familiale. 5, rue de la Tour, 92190 Meudon.

Il aura, jusqu’aux derniers instants, mené sa vie avec cette élégance et cette ironie pleine de pudeur et de tendresse qui le caractérisaient.

Éliette Balalas, sa mère, Pierre Papadacci Stephanopoli, son père, Les familles Balalas, Papadacci Stephanopoli, Frémigacci, Hengen, Biron et Parraud, ont l’immense douleur de faire part du décès de leur fils unique

Nicolas PAPADACCI STEPHANOPOLI, lieutenant navigateur officier système d’armes, escadron La Fayette base aérienne 116 - Luxeuil, survenu à l’âge de trente ans, en service aérien commandé dans la nuit du 1er au 2 mars 2011 lors de l’écrasement de son Mirage 2000N dans la Creuse. Une réunion de prière à sa mémoire se tiendra le mercredi 9 mars, à 11 h 30, en l’église Saint-Julien-le-Pauvre, Paris 5e. La cérémonie militaire, suivie d’une messe, aura lieu le jeudi 10 mars, à 9 heures, à la BA116 - Luxeuil (Haute-Saône).

ont la tristesse de faire part du décès de

M. Georges GRANIER,

docteur en médecine, chevalier de la Légion d’honneur, survenu dans sa quatre-vingt-dix-septième année. La cérémonie religieuse aura lieu le mercredi 9 mars 2011, à 15 heures, en l’église Saint-Paul de ClermontL’Hérault, suivie de l’inhumation au cimetière de Marseillan. 16, avenue Ronzier Joy, 34800 Clermont-L’Hérault.

Laure, Claire, Aline et Jean-Marc, ses enfants, Edith, sa compagne, Annie, sa maman, Doris, sa sœur, Parents Et amis, ont la tristesse de faire part du décès de

très touchée par les nombreux témoignages d’amitié qui lui ont été adressés après le décès de

Jean-Paul VALABREGA,

survenu à l’âge de cinquante-trois ans.

Mme Odile PLANQUAIS s’est éteinte à l’âge de soixante-dix-neuf ans. Claude et Philippe Planquais, ses enfants adorés, Cynthia, Alexandra, Jessica et Romain, ses petits-enfants, Les familles Baur et Gautier, ses deux familles adoptives, gardent en eux son amour, sa force et sa dignité.

L’AMIF (Association des médecins israélites de France) en collaboration avec le service culture du FSJU organise, le jeudi 10 mars 2011, à 20 h 30, une conférence

« Ceux qui soignent autrement ». Avec les docteurs Michelle Levy-Soussan, Serge Rafal, Jean-Marc Benhaiem et le rabbin Elie Lemmel. Modérateur : Paule-Henriette Levy. Espace Rachi : 39, rue Broca, Paris 5e. Entrée libre avec réservation obligatoire par téléphone (01 42 17 10 70) ou par mail ([email protected]).

Séminaire Lire Céline aujourd’hui,

Avis de messe La Ligue française contre la sclérose en plaques, Le docteur Olivier Heinzlef, son président Et les membres du conseil d’administration, très émus de la disparition de leur président fondateur et ami,

René MARTEAU, professeur de médecine, chevalier de la Légion d’honneur, vous prient d’honorer de votre présence, la messe dite à sa mémoire, le mardi 15 mars 2011, à 10 h 30, en l’église Saint-François-Xavier, place du PrésidentMithouard, Paris 7e.

Conférence

séminaire doctoral ouvert, avec Julia Kristeva et les conférences de Philippe Sollers, le 10 mars 2011, Henri Godard, le 17 mars, Michel Crépu, le 24 mars, Bernard-Henri Lévy, le 7 avril, tous les jeudis de 10 h 30 à 12 h 30, Université Paris 7, École doctorale « Langue, littérature, image », Centre Roland-Barthes, bât. « Les Grands Moulins », 5, rue Thomas Mann, Paris 13e, bât. C, 6e étage, salle Pierre Albouy. Contact : 01 57 27 64 40.

Stage STAGE TAICHI ET FELDENKRAIS sur une île en Bretagne Sud début juillet avec Valérie LE HUCHE. www.artdumouvement.fr

Communication diverse

L’UniverCité, le cycle de conférences de la Cité nationale de l’histoire de l’immigration. Jeudi 10 mars 2011, à 18 h 30, « Quand la culture se mêle du social. Les politiques culturelles en direction des immigrés depuis 1958. » avec Angéline Escafré-Dublet. Palais de la Porte Dorée, 293, avenue Daumesnil, Paris 12e.

La famille remercie par avance toutes les personnes qui prendront part à sa peine.

Chaire E. Gilson Six conférences de Joseph O’Leary Thème : « Philosophie occidentale et concepts bouddhistes » 14, 15, 16, 21, 22 et 23 mars 2011 18 heures-20 heures Faculté de Philosophie - ICP 21, rue d’Assas, Paris 6e. Tél. : 01 44 39 52 64 ou [email protected]

remercie tous ceux et toutes celles qui partagent sa profonde tristesse.

Frédéric PERONNY,

Renseignements : [email protected]

Centre Communautaire de Paris Rencontre autour de Benjamin Fondane mercredi 9 mars 2011, à 19 h 30 Dominique Guedj, Till R. Kuhnle, Anne Mounic, lecture de textes par Daniel Mesguich : « Benjamin Fondane, un destin singulier » par Monique Jutrin « La voix du poète » par Evelyne Namenwirth « Philosophie de l’existence de judaïsme » animé par Margaret Teboul. Tél. : 01 53 20 52 52 119, rue La Fayette, Paris 10e - (PAF.).

Assemblée générale L’Assemblée générale ordinaire de l’Association Jeunesse et Marine se tiendra samedi 19 mars 2011, à 17 heures, 9 rue de la Véga, Paris 12e. Rapport moral 2010. Rapport d’activité 2010. Rapport de gestion 2010. Budget 2011. Acquisition d’un nouveau centre. Renouvellement du CA.



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Toute l’équipe du journal Parti Pris a l’immense tristesse de faire part du décès de

Pierre PONTET, membre fondateur du journal,

ont la grande tristesse de faire part du décès de

font part de la mort de

37, rue de Trévise, 75009 Paris.

Nicole Belmont-Valabrega,

Grenoble. Fréjus. Fort-de-France.

survenu le 3 mars 2011.

Les obsèques ont eu lieu au crématorium du cimetière du Père-Lachaise, le mardi 8 mars 2011.

M. Albert Ladam, son époux, Ses enfants, Ses petits-enfants Et arrière-petits-enfants Ainsi que toute la famille,

[email protected]

Sylvie et Bruno Plane, ses enfants, Raphaël Plane et Cécile Vernochet, Héloïse et François Leboucher, Florent Plane et Ning-Ning Li, ses petits-enfants et leurs conjoints, Eulalie, Sidonie, Élias, Énora, ses arrière-petits-enfants, Henri Pinhas, son neveu, Haoua Diarra, son amie dévouée Et toute la famille,

Annette KLEIN, veuve de Maurice KLEIN.

Creil.

L’inhumation aura lieu le vendredi 11 mars, à 10 h 30, au cimetière SaintPierre, à Marseille (Bouches-du-Rhône).

ingénieur TPE, M. Jean Granier, son frère et sa famille, Mme Colette Nolorgues, sa belle-sœur et sa famille, Jean-Joseph, Marie (†), Louis, Catherine, Colette, Christophe, Michel ses enfants et leurs familles, Parents Et amis,

Remerciements



Nous perdons un ami très cher et un camarade dévoué à la lutte pour le socialisme démocratique et l’égalité des droits. Nous présentons nos plus sincères condoléances à sa famille. Éliane, Marc,







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Paul PROFFIT-BLANC, chevalier de la Légion d’honneur, survenue le 25 février 2011. L’affection infinie du vieux maître d’Oban est en nous. Que la raison progresse.



         

   



Micheline Frachot, son épouse, Vincent, Antoine et Anne-Marie, ses enfants, Claire, Clément, Camille, Cédric, Clémentine, Valentin, Sébastien, ses petits-enfants, Josette Cochot, sa cousine, Les familles Montreau, Annen, Picot, Schneider, Cochot, Barazzuol, Corthier, Hansen,

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Mercredi 9 mars 2011

La crise, c’est la faute des autres Lettre de la City Marc Roche

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rois noms pratiquement inconnus du grand public ont récemment occupé le devant de la scène financière. Trois noms qui, pour beaucoup, ne disent rien, mais qui symbolisent la philosophie d’une profession n’ayant rien appris et cependant tout compris : banquier un jour, banquier toujours. A la vie, à la mort ! Qu’on se le dise ! Commençons par le Français du lot. Jean-Pierre Mustier doit prendre le 21 mars ses nouvelles fonctions de directeur des activités de finance et d’investissement de l’établissement italien UniCredit, « pour pouvoir pousser certaines convictions ». Ce personnage énigmatique était le patron, à la Société générale, du trader fou Jérôme Kerviel. Il en avait démissionné en 2009.

Le deuxième protagoniste est l’Américain Bill Winters, membre de la commission officielle britannique planchant sur la réforme bancaire. Cet ancien banquier d’affaires vient de s’associer avec deux locomotives de la vie des affaires, le raider Lord Rothschild et l’industriel du luxe Johann Rupert, pour créer un fonds d’investissement. Winters avait été l’un des animateurs de l’équipe de JP Morgan, qui en 1994-1997 avait inventé les credit default swaps, ces produits financiers hautement toxiques qui ont contribué à l’explosion de la planète finance. Enfin, il y a le cas d’Alan Schwartz, dernier patron de Bear Stearns, la banque d’affaires plombée de crédits immobiliers vérolés, dont la chute en 2007 avait été le signe prémonitoire de la tourmen-

Le courrier du jour Economie L’exemple allemand Les raisons des déficits français et des excédents allemands sont loin d’être uniquement ni même essentiellement dues à une question de salaires et de « charges ». L’excédent allemand résulte du fait que l’industrie allemande fabrique des produits de haute technicité, de grande qualité et qui correspondent à la demande. On peut se demander pourquoi, dans les tests comparatifs, les lavelinge, lave-vaisselle et autres produits ménagers allemands sont souvent les meilleurs, même s’ils sont aussi les plus chers. De même, pourquoi les Pays-Bas semblent avoir dépassé la France comme premier fournisseur de l’Allemagne, alors que la France demeure son premier client? Est-ce seulement une question de « charges » ? Je ne savais pas les salariés et les assurés sociaux français à ce point favorisés. Le problème est donc complexe et ne réside pas uniquement dans une problématique des charges, comme le prétend le Medef. Pierre Aron Paris

La fiscalité en Suisse «La France est le seul pays d’Europe à taxer la fortune.» Cette affirmation catégorique est répétée à l’envi, comme une incantation par le patron de l’UMP, Jean-François Copé. Or – à moins de considérer que la Suisse n’est pas en Europe –, c’est totalement faux. La Suisse, pays capitaliste et libéral, impose, aux niveaux cantonal et communal (les plus importants du point de vue de la charge fiscale) la détention d’une fortune sous forme d’épargne monétaire, de titres boursiers ou d’immobilier. Et il n’est pas nécessaire d’être très riche pour passer à la caisse : dans le canton de Vaud, le minimum imposable (fortune) est de 50000francs suisses, soit environ 38000 euros. On répète aussi inlassablement en France qu’il est injuste de taxer le bénéfice de la vente de son propre logement. La Suisse impose une telle vente comme s’il s’agissait de n’importe quel bien immobilier.

Pire, ou mieux, c’est selon: celui qui habite dans le logement qu’il a payé avec des revenus déjà imposés se voit taxer sur la «valeur locative» de ce logement, comme s’il en tirait un revenu en le louant à un tiers! A fortiori, cet «impôt sur la valeur locative» s’applique à la possession d’une résidence secondaire, qu’elle soit louée ou non à un tiers. Ah, le modèle fiscal suisse ne ferait-il pas le bonheur de la gauche française? Avec une TVA à 7%… Francis Luisier Pully (Suisse)

te à venir. Après sa sortie ignominieuse, le banquier new-yorkais avait pris la tête d’un hedge fund, Guggenheim Partners. Ce fonds a annoncé la semaine dernière la création d’un département de trading utilisant ses capitaux propres, une activité très risquée et hautement spéculative désormais interdite aux banques. Les banquiers emportés par la crise de 2008-2009 sont donc de retour, comme si de rien n’était, et par la grande porte. Et la liste est longue, très longue, à lire quotidiennement les pages de la presse financière. Le cas le plus scandaleux demeure celui d’Antigone Loudiadis, la banquière de Goldman Sachs qui a aidé la Grèce à maquiller ses comptes pour lui permettre d’entrer dans l’euro. Ce forfait lui a valu d’être promue à la tête de la compagnie d’assurances maison de GS ! Convenons-en, de quelque côté que l’on regarde, la tête nous en tourne. Saisi d’un semblant de repentance, Jean-Pierre Mustier a ainsi potassé pendant son intermède londonien d’un an et demi les biographies d’Alan Greenspan, ancien patron de la Réserve fédérale américaine, et d’Henry Paulson, le secrétaire au Trésor entre 2006 et 2008. Dans le genre flagellant, on fait mieux. Greenspan passe pour l’un des grands responsables de la débâcle par sa politique d’argent bon marché et par son refus d’une réglementation des produits dérivés. Quant à Paulson, qui fut président de Goldman Sachs entre 1999

et 2006, il n’a eu de cesse quand il était au pouvoir de promouvoir les intérêts de son ancien employeur. La déroute financière a vu des millions de ménages perdre logement, emploi, retraite. A quelques exceptions près, on retrouve aujourd’hui les mêmes patrons à la tête des grandes institutions financières. Aucun dirigeant de banque n’a été sanctionné, même dans les cas de fraude avérée sur les crédits hypothécaires. Dans ce genre d’affaires complexes, les preuves sont difficiles à réunir, et l’incompétence n’est pas un crime : telle est l’antienne officielle pour justifier ce laxisme judiciaire.

Dans la lecture particulière qu’ont les banquiers de la déontologie, reconnaître ses torts serait un aveu de faiblesse ou de culpabilité Alors que le contribuable qui a sauvé le système bancaire doit se serrer la ceinture, l’heure est à nouveau à l’octroi en toute impunité de bonus mirobolants, à Wall Street comme à la City. A Bruxelles et à Washington, le lobby bancaire a émasculé les projets de régulation, poussant même des cris d’orfraie à l’idée d’un renforcement des normes prudentielles de capital. Au mépris du civisme

le plus élémentaire, les zones offshore aident les multinationales comme les grosses fortunes à s’adonner à l’évasion fiscale légale. Pour échapper à l’impôt comme au régulateur britanniques, les hedge funds londoniens auraient trouvé leur nouvelle terre promise, Malte, pour spéculer en toute quiétude. La profession bancaire ne voit pas en quoi elle aurait failli à l’honneur ou à la morale, nous explique le consultant londonien Amin Rajan, spécialiste du leadership d’entreprise. « Les milieux financiers ont réussi à faire passer le message que la crise est la faute du système, des régulateurs, des banques centrales, des actionnaires, voire des ménages, bref, des turpitudes des autres. » Dans la lecture particulière qu’ont les banquiers de la déontologie, reconnaître ses torts serait un aveu de faiblesse ou de culpabilité. Toutefois, il faut en convenir, les banques, dont personne ne peut se passer, ne sont pas toutes à mettre dans le même sac, et certaines remplissent les fonctions normales de financement de l’économie. Le cardinal archevêque de Westminster, Vincent Nichols, n’a pas dit autre chose en déclarant à l’adresse des banquiers : « Votre mission consiste en priorité à servir l’intérêt public. » Ce prêche ne devrait-il pas être frappé au fronton du Guildhall, l’hôtel de ville de la City ? p [email protected]

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Armées Une approche critique Dans son dernier rapport, la Cour des comptes vient de formuler une série de critiques vigoureuses de l’institution militaire (service de santé, quart de place SNCF, statut des officiers généraux, etc.). Rien de choquant en soi, si ce n’est que l’ensemble des recommandations de la Cour va dans le sens d’une dégradation des conditions de vie et de travail des militaires, en revenant notamment sur des droits acquis de longue date. Il ne m’appartient pas de répondre sur le fond et de juger de la suite à donner à ces recommandations, mais, en tant qu’ancien responsable de nos armées, je m’interroge sur les motifs de cette campagne qui vise le seul corps de l’Etat qui ne bénéficie pas d’une protection syndicale. Je relève que le moment est particulièrement mal choisi, alors que nos armées sont engagées dans une réforme considérable, inenvisageable dans un ministère civil, et dont les effets sont douloureux pour la communauté militaire. Il y a aussi quelque indécence à menacer de fermer les hôpitaux militaires et, par là même, ruiner la compétence reconnue et cruciale du Service de santé des armées, alors que, chaque semaine, des soldats français meurent ou sont blessés en Afghanistan. Que cherche donc la Cour des comptes ? Henri Bentégeat Paris Courrier et contributions des lecteurs : [email protected] Fax : 01-57-28-21-74

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