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Jacob Lorber LA NOUVELLE REVELATION PRÉSENTE
SATURNE vu dans un cosmorama spirituel d'après la version italienne de Salvatore Piacentini Cercle Spirituel d'Amour de Trieste-Egidio Paronit Traduit de l'italien par Noël RÉYNAUD -C. T. S. G. Domaine de L'Etanche -73200- Mercury (Albertville)-France
"Édition hors commerce" Tous droits:
Lorber-Verlag - Postrach 229 – Biétigheim 7120 - Allemagne Fédérale
PREFACE Le traducteur de cette œuvre, Salvatore Piacentini, ne s'étant pas décidé à transmettre la vieille préface, en raison de la forme, nous laisserons en dehors aussi le reste, parce qu'il a peu de valeur en face de l'œuvre même; tandis que l'on ajoutera la lettre personnelle que Salvatore Piacentini envoie à son ami et frère en Christ Jésus, Umberto Donati, lesquels, avec d'autres amis se sont voués à faire en sorte que l'œuvre de la Nouvelle Jérusalem puisse-être présentée aussi en Italie, comme un *Document Spirituel* de la Nouvelle Culture du *Futur Règne du Millénaire*. Trieste, 5 octobre 1932 Cher Umberto, La présente traduction, je l'ai faite d'après une vieille édition, tout bonnement de 1855, dont j'eus en cadeau en son temps une copie de la part de feu notre bon Frantz. Je retiens sans aucun doute que l'édition plus récente sera tenue sous une autre forme, c'est-à-dire avec des subdivisions en chapitres, chacun précédé du résumé respectif. Au cas où ce serait le cas, et je ne doute pas que ce le soit, le jour où l'on pourra donner à l'impression *SATURNE*, il faudra penser aussi à la traduction des divers résumés; et alors, si Dieu nous laisse en vie, nous nous mettrons d'accord. La vieille édition est précédée d'une Préface que j'ai omis de traduire, car je n'ai pas l'idée qu'elle ait été ou non éventuellement répétée telle quelle dans les nouvelles éditions; de toute façon c'est une chose qui pour le moment n'apparaît pas urgente, et par conséquent on pourra la considérer plus tard. Cordiales salutations de ton ami et frère Salvatore Piacentini. N. B. Ici plus que tout il est montré: l'honnêteté et le caractère scrupuleux de l'homme, qui en raison de la traduction d'une langue à l'autre sont indispensables, afin que la Parole du Seigneur ne soit pas perturbée et déformée. Quant à moi, à son manuscrit, j'ai ajouté les chapitres et les versets, et en outre, dans l'Index, j'ai ajouté aussi le résumé, très important dès lors que l'on doive aller à la recherche pour retracer quelque chose.
TABLE DES MATIERES CHAPITRE
SUJETS
1
Mensurations de Saturne, de ses anneaux et de ses lunes.
2
Les îles de Saturne comme continents. L'île de Herrifa.
3
Les magnifiques arbres de Saturne, le Kibra, l'arbre entonnoir et d'autres.
4
Ahaharke, l'arbre de la variété. Féhura, l'arbre du feu.
5
Une céréale ressemblant au maïs. Le tonneau jaillissant. La feuille automotrice.
6 L'herbe salutaire Hellatharianga. La plante du métal, Kibri, Briden, ou fleurs lunaires. Fibre, mousse alpine. 7
La chaiaba, ou mousse bateau.
8
Caractéristiques naturelles des montagnes, des fleuves, des lacs et de la mer.
9 Les habitants des lacs ou des fleuves comme navigateurs éprouvés, et de la nage. La force des esprits de la vapeur d'eau. Façon erronée de concevoir le sens de la Trinité sur la Terre. 10 chanteurs. 11
Les eaux limpides des quatre fleuves principaux. Les concerts des oiseaux Les grands lacs communicant entre eux, avec de magnifiques îles habitées.
12 Les grandes montagnes d'eau gravitant sur la mer, par suite du flux et du reflux. Pouvoir d'attraction de l'anneau. Début de la vie sur la mer, les grands coquillages. 13
L'escargot-perche, l'escargot-pyramide, l'escargot-disque.
14
Le grand escargot septuple.
15
Le plus grand et le plus intéressant, l'escargot rayonnant.
16 Le grand poisson, le *Bisorhohiohio*, comme ultime organe récepteur de tous les êtres des eaux. La mouche et l'étoile volante. Les papillons et les oiseaux. 17 Le *Behor* ou bien le bateau spatial. Le *Messager céleste*, ressemblant à la colombe. Les oiseaux chanteurs. 18
L'oiseau à deux têtes, à la merveilleuse voix unitonale, appelé: *Promoteur de
19
La poule. Le *Ballon doré*, volatile d'ornement.
20
Le *Mud*, l'animal le plus grand des quadrupèdes, ressemblant à notre porc.
21
Le *Sisterkihi*, espèce d'éléphant.
22
*L'Ihur* ou bien, l'ours bleu.
paix*.
23 maison.
Le *Horud* ou lion de Saturne. S'il est domestiqué, il devient un serviteur de
24 Le *Zigst* ou bien, *Pied pointu*, comme une antilope de Saturne. Les escrocs avec leurs éléments spécifiques de longue vie.
25
Le *Bauor* ou *L'œil unique*. L'honorabilité que crée la fourrure de cet
26
L'harmonie entre les corps de l'univers. L'essence du ton.
27
La vache sur Saturne se nomme *Buka*.
28
La *Chèvre bleue*.
29
Le *Fur* ou bien *Le fidèle serviteur* ou singe domestique.
animal.
30 Les habitations des hommes sur Saturne, sur les arbres, les demeures en bois sur le sol, et les demeures vivantes. 31 L'origine de l'homme sur Saturne. A la recherche de nouveaux territoires. La construction du temple à travers les semailles miraculeuses. 32 La constitution sociale. Le travail des métaux. L'inexistence commerciale. Échange des marchandises. 33 Le travail des étoffes. La structure physique des femmes et des hommes. La procréation parfaite. 34 Les hommes de Saturne reconnaissent le Grand Esprit, comme un Homme parfait. Comment est combattue la vanité. Comment se manifeste la mort du corps. 35 Les montagnards comme lumière des hommes de la plaine. L'émigration est effectuée aussi en raison du manque de femmes pour le mariage. 36 L'éducation spirituelle et le simple cérémonial. Le jour de fête au temple, pour écouter le patriarche dans ses sermons inspirés de Dieu. 37 Le spirituel littéral, et celui pratique. La distillation du bon vin, comme exemple du spirituel rectifié. La régénération. 38 *Purak*, ou bien *L'exil perpétuel* pour les escrocs. Les régions glaciales de Saturne, et les esprits du feu. 39 L'anneau de Saturne avec les caractéristiques d'une vraie planète. Motif très important à cause de la grandeur des saturniens. 40
Les sept lunes de Saturne, dans ses sept degrés de développement spirituel.
CHAPITRE 1 -1Pour se faire une idée claire de ce corps de l'Univers que vous appelez *SATURNE*, alors que son vrai nom signifie réellement *REPOS* ou bien *PARESSE PLANTAIRE*, il est avant tout nécessaire de connaître, de la manière la plus exacte possible pour vos facultés de compréhension, sa sphère naturelle, sa distance du Soleil et sa taille, de même que celle de ses lunes. -2Une fois que cela est connu, peuvent ensuite avec une facilité d'autant plus grande être rendus accessibles à la compréhension sa nature et sa constitution puissantes, celles de ses habitants, soit sur la planète en tant que telle, soit sur ses anneaux et sur ses lunes, l'ensemble de sa flore en rapport avec les conditions climatiques on ne peut plus variées, et également aussi la totalité de la faune sur cette planète, ainsi que sur ses anneaux respectifs et ses satellites. -3Et quand tout cela sera connu, alors seulement on pourra faire la lumière, en premier lieu sur l'histoire de cette planète, ensuite sur sa constitution et ses dispositions intérieures, sur les rapports de polarité avec d'autres planètes, et seulement en dernier, sur sa sphère spirituelle. -4En ce qui concerne sa distance du Soleil, la chose peut être considérée de trois points de vue, et ce précisément pour la raison que, comme cela vous est déjà archi-connu, aucune planète ne parcourt autour du Soleil une orbite parfaitement circulaire, mais bien plutôt elle se déplace le long d'une ligne de forme ovale, de sorte qu'alors le Soleil par rapport à l'orbite d'une planète vient à se trouver exactement dans la situation où vous prendriez un œuf et le tiendriez avec l'extrémité la plus large vers le bas et celle la plus pointue vers le haut; dans quel cas, le jaune d’œuf ne se trouve pas dans le centre précis de l’œuf entier, mais bien de fort loin le plus près de la pointe inférieure. -5Dans notre cas, le centre du jaune d’œuf représente le Soleil, et la ligne de la gousse blanche l'orbite de la planète. Si maintenant vous mesurez les distances entre cette ligne et le centre du Soleil dans le jaune d’œuf vous arriveriez à la constatation suivante: que la partie inférieure de l'orbite est la plus proche du centre-soleil, les deux côtés allongés de l'orbite, semblables entre eux, se trouvent à une distance moyenne, tandis que la partie supérieure, plus pointue, vient certainement à se trouver à la distance la plus grande du centre. -6Vous voyez, ainsi sont les choses en ce qui concerne l'ample orbite de notre planète-ci. Quand elle vient à se trouver pour ainsi dire au point le plus bas, elle est dans sa plus grande proximité du Soleil; en ce cas, selon votre mode de calcul, sa distance du Soleil ne s'élève qu'à: 187.719.120 milles géographiques. -7Si elle se trouve sur l'un des deux côtés allongés de l'orbite, la distance est en moyenne de 198.984.136 milles géographiques; lorsque enfin elle se trouve au point haut, cette distance comporte à partir du centre solaire 210.249.152 milles géographiques, distance qui est aussi la plus grande. -8Cependant vous ne devez pas considérer de telles distances par rapport à votre Terre, mais par rapport au soleil seulement, parce que la distance de la Terre par rapport à cette planète peut varier de beaucoup, et précisément de façon telle que ces deux corps de l'univers peuvent bien souvent s'approcher entre eux jusqu'à un million de milles géographiques de plus, et aussi tout autant s'éloigner de plus l'un de l'autre.
-9Car lorsqu'il arrive que les deux planètes se trouvent d'un même côté par rapport au Soleil, c'est-à-dire toutes les deux à proximité du Soleil, elles viennent alors à se tenir entre elles de bien loin plus près que lorsqu'elles se trouvent entre elles, pour ainsi dire en opposition, c'est-à-dire, qu'il peut arriver que Saturne se trouve à la distance maximale du Soleil, tandis qu'au contraire la Terre se trouve à la proximité maximale de celui-ci, et alors la différence ne comporte plus seulement un million mais bien souvent de 2 à 3 millions de milles. -10- Le chiffre des distances est exprimé ici de manière imprécise, étant donné qu'aucune planète ne circule avec une exactitude mathématique toujours à une distance déterminée du Soleil; mais bien plutôt certaines années elle s'en éloigne davantage, et d'autres fois par contre elle s'en approche à nouveau; de là plus grande ou la plus petite proximité dépendent ensuite aussi les variations de la température; à cet égard vous pouvez admettre avec certitude que, sur 77 tours autour du Soleil, il n'y en a pas deux à s'égaler parfaitement en ce qui concerne la distance. -11- Et maintenant, étant donné que le sujet des distances est épuisé, nous passerons encore à déterminer le diamètre de cette planète, sa circonférence la plus grande, sa surface en milles carrés et son volume en milles cubiques. -12- En ce qui concerne le diamètre, il est de 17.263 milles géographiques; si vous considérez donc que celui de la Terre ne mesure que 1719 milles géographiques, vous pouvez en toute facilité vous faire une idée de combien cette planète est plus grande que la Terre. -13- Sa circonférence la plus grande s'élève à 54.517 milles géographiques. Quant à sa superficie, elle comporte 936.530.820 milles carrés. Ensuite le volume en est de 2.757.547.946.775 milles géographiques cubiques. -14- Étant donné ces dimensions, cette planète apparaît donc être, en chiffre rond, presque exactement 1037 fois plus grande que la Terre. -15- Pour parcourir son orbite autour du Soleil, elle emploie 29 années, de 164 à 166 jours, 2 heures, zéro minute et 2 secondes terrestres. -16- Ainsi donc il apparaît à tous égards défini ce qu'il y a à exprimer avec des nombres au sujet de cette même planète. Mais comme cette planète possède encore autour d'elle un anneau double, nous devons aussi fixer avec des nombres les dimensions de celui-ci. -17- Le diamètre de tout l'anneau est de 40.006 milles géographiques, Mais étant donné que l'anneau est formé en vérité de deux anneaux, la distance de la surface de l'anneau interne jusqu'à l'anneau externe, ou mieux jusqu'à la surface interne de l'anneau extérieur, est de 545 milles géographiques. -18- Le diamètre de l'extérieur à l'intérieur est de 1350 milles géographiques, et le diamètre, pareillement ainsi mesuré, de l'anneau intérieur est de 3850 milles géographiques. Mais comme cet anneau (tant l'extérieur que l'intérieur) est de forme ovale, bien entendu non pas par rapport à toute sa circonférence autour de la planète, mais bien par rapport à sa section verticale, si on voulait le couper, la section aurait une forme ovale; le diamètre de l'ovale ainsi obtenu, mesuré au point de la plus grande largeur de la ceinture, comme expression de la grosseur de l'anneau, s'élève à 130 milles géographiques pour l'anneau extérieur et à 380 milles géographiques pour celui intérieur. -19- L'anneau intérieur a par ailleurs aussi en lui trois demi-fissures encore, dont chacune mesure de 20 à 30 milles géographiques, et qui sont appelées ici *demi-fissures* pour la raison qu'elles ne courent pas également tout au long du développement du second anneau, et donc ne le séparent pas aussi complètement comme l'anneau extérieur est divisé ou
séparé de celui intérieur; mais bien plutôt ces trois demi fissures sont remplies de tant de sphéroïdes de forme ovale ayant le diamètre indiqué plus haut, que, par l'effet de ces sphéroïdes qui se trouvent entre l'une et l'autre subdivision, les trois anneaux intérieurs ne constituent en réalité qu'un seul anneau; dans la zone des fissures se trouvent donc tout au long du développement de l'anneau des espaces libres qui ont la figure de pyramides aux surfaces concaves, avec le sommet tant vers le haut que vers le bas. -20- Ces sphéroïdes situés en file l'un à côté de l'autre en ces trois fissures ont déjà fait naître en plus d'un astronome à la vue perçante l'opinion erronée que cet anneau était composé exclusivement de très nombreuses lunes, parce que, vu à travers de forts télescopes il se présente à le voir comme ce que l'on appelle un rosaire, lequel est formé justement lui aussi d'autant de petites billes et non de roses. -21- En ce qui concerne les autres caractéristiques et les particularités de l'anneau, comme déjà dit, le sujet viendra faire l'objet d'explications plus tard, et c'est pourquoi maintenant nous donnerons encore un coup d’œil aux satellites de cette planète pour en tirer des chiffres. Autour de cette planète circulent sept lunes de diverses grandeurs et à des diverses distances de la planète. -22- La première, la plus proche et en même temps la plus petite, ne mesure que 120 milles de diamètre et est distante de la planète de 29.840 milles géographiques; distance qui certes est entendu comme distance moyenne. -23- La seconde a un diamètre de 240 milles géographiques et est distante de la planète de 40.516 milles. La troisième a 666 milles géographiques de diamètre, et sa distance de la planète est de 60.500 milles géographiques. La quatrième mesure 699 milles géographiques de diamètre et est située à 87.920 milles géographiques de la planète. La cinquième lune a un diamètre de 764 milles géographiques, en étant distante de la planète de 190.000 milles. La sixième a 900 milles géographiques de diamètre et se trouve à 277.880 milles de la planète; enfin la septième lune a un diamètre de 1120 milles géographiques et est distante de la planète de 360.920 milles géographiques. -24- De ces indications numériques vous pourrez donc désormais déjà avec une certaine facilité commencer à conclure que, étant donné sa taille, sa structure variée, et étant considéré aussi ses sept lunes, ce corps de l'univers ne doit pas avoir dans l'espace de la création réellement une destination infime. -25- Car, plus un quelconque mécanicien a donné forme à une œuvre avec art et talent, d'autant plus une semblable œuvre doit certainement avoir une plus grande multiplicité d'aspects; et comme un mécanicien, en entreprenant de faire une œuvre plus artistique, se propose d'assigner à celle-ci des fonctions d'autant plus diverses afin d'atteindre de multiples buts, de même Moi aussi certainement, en tant que le plus grand mécanicien des mondes, Je n'aurais pas formé avec tant d'art et placé dans le vaste espace des créations un semblable corps de l'univers, sans lui assigner des missions d'une importance considérable, étant donné que Je n'ai pas coutume de faire, pas même des plus petits grains de poussière solaire, un objet de divertissement; et d'autant moins ensuite aura été créé par Moi, dans le seul but d'un vain divertissement, un corps de l'univers tel que justement celui mentionné à l'instant. -26- La suite de cette révélation autour de la planète Saturne vous fera connaître sa destination d'un côté si grandiose, qu'à grand-peine il vous restera la faculté de respirer. Car si déjà à l'occasion où vous fut révélée votre lune, vous êtes restés bouche ouverte et l'esprit grandement secoué, qu'en sera-t-il lorsque guidés par Moi par la main vous aurez l'occasion de voyager un peu sur ce corps de l'univers ? -27- Certes, Je vous dis: Préparez-vous à entendre de grandes choses, et disposez bien
votre esprit; car de telles choses, vous les supporterez à grand-peine, étant donné que là où des choses si grandes sont révélées par Moi, il faut aussi des cœurs grands et forts pour comprendre les grandes choses et pour soutenir leur poids; et seulement lorsque vous aurez eu la révélation entière au sujet de ce corps de l'univers dans la mesure qu'il vous sera possible de supporter, alors seulement il commencera à vous apparaître clairement quelle signification a ce passage de l'Evangile le qui dit: -28- *Aucun œil d'homme n'a jamais vu, aucune oreille humaine n'a jamais entendu, et jamais aucun homme n'a entrevu dans son cœur et dans son esprit ce que Dieu a réservé à ceux qui L'aiment.* -29- Car ce que quelqu'un reçoit de Moi, est toujours le plus grand don du Ciel, puisqu'il vient de Moi qui suis Moi-Même le Souverain des Cieux comme aussi de tous les mondes; et si Je voulais vous révéler le Ciel ou bien l'enfer, tant l'un que l'autre ne pourrait que tourner à votre plus grand bonheur; parce que, quelle que soit la signification de Ma Parole, Elle est absolument vivante, et celui qui la reçoit et l'accueille en tout amour, avec gratitude, humilité et foi vive, en est rendu lui-même éternellement vivant, et par conséquent immensément heureux en Moi déjà ici, et bien plus encore dans l'Au-delà. -30- Et maintenant, après cette nécessaire introduction, nous pouvons déjà nous hasarder à jeter un regard sur cette planète. Voyez, ainsi se présente sa surface. La plus grande partie est recouverte par les eaux. Sur ce corps de l'univers il n'y a pas de véritables continents, mais bien plutôt des îles de considérable grandeur situées surtout dans la zone équatoriale, îles qui, chacune prise en soi, sont certes plus grandes que votre Europe, que l'Asie, l'Afrique, l'Amérique et l'Australie. -31- Mais, étant donné la grandeur de cette planète, elles ne sont pas à considérer par rapport à celle-ci comme des continents, mais bien comme des îles seulement, qui sont beaucoup plus distantes les unes des autres que l'Asie de l'Amérique aux latitudes près de l'équateur terrestre; mais sans aucun doute, entre une grande île et une autre il se trouve aussi une quantité d'îles moindres, qui par rapport aux grandes, sont comme les îles de la Terre par rapport aux continents de celle-ci. -32- Vers les pôles ce corps de l'univers est recouvert de neiges et de glaces éternelles, glaces qui commencent là à une latitude de 40 degrés plus avant que sur la Terre; et en rapport avec ce qui concerne ce que vous appelez votre zone tempérée, celle-ci représente déjà sur Saturne le royaume des neiges; ce qui ensuite pour vous est la zone froide, est là le royaume des glaces éternelles; votre zone torride enfin correspond sur Saturne vraiment seulement à la zone tempérée et en même temps à la zone plus claire et plus pure sur laquelle bien rarement s'élèvent des nuages ou des brouillards, tandis que les deux autres zones gisent perpétuellement sous des amas de nuages et de brouillards. -33- Et autant, désolées et rudes se présentent les zones de la neige et de la glace, autant est sereine, douce et limpide la zone médiane qui est aussi la zone habitable. En cette zone donc, on trouve bien 77 grandes îles, parmi lesquelles, celles de moyenne grandeur sont plus grandes que vos Amériques; et cependant chaque île, tant en ce qui concerne la structure que les produits, se différencie de l'autre de bien loin plus que votre Laponie ne se différencie des régions tropicales plus proches de l'équateur. -34- Vous penserez certainement, qu'à une si grande distance du Soleil, il y aura déjà là une obscurité assez prononcée, et que même à l'équateur il ne fera pas vraiment trop chaud; mais en pensant ainsi, vous tomberiez dans une grosse erreur, car, en premier lieu, dans la proportion où cette planète est plus grande que la Terre, elle possède aussi une plus forte lumière propre; en second lieu ensuite cette planète est entourée par une atmosphère
mille fois plus grande et qui arrive à très grande distance de la surface de la planète, atmosphère qui a un diamètre d'environ cent mille milles, tandis que celle de la Terre n'en mesure pas même deux mille. -35- Étant donné une semblable dimension aussi extraordinairement grande du diamètre de l'atmosphère de Saturne, vous pouvez vous imaginer quelle quantité de rayons solaires est capable d'accueillir cette immense sphère d'air pour les amener ensuite en ligne convergente, toujours plus concentrés, sur la surface de la planète, motif pour lequel aussi, pour ses habitants, le Soleil apparaît beaucoup plus grand que pour vous; et justement pour cette raison, à l'équateur de cette planète la chaleur serait insupportable si celle-ci, grâce à l'anneau n'était adoucie par le fait que l'anneau accueille les rayons solaires les plus concentrés, en utilisant pour lui une partie, et en irradiant une autre partie à son tour en toutes les régions de l'espace; raison pour laquelle, observé au télescope, il apparaît aussi plus brillant que la planète elle-même. -36- D'un autre côté, son ombre projetée sur la planète exerce une action on ne peut plus bénéfique en conférant à la zone torride les caractéristiques de la zone tempérée. -37- Par l'effet de cet anneau, sur ce corps de l'univers il ne fait aussi jamais nuit comme chez vous, parce que là c'est continuellement le jour, d'un côté en raison de l'action directe du Soleil, tandis que d'un autre côté, la surface interne de l'anneau étant aussi illuminée par le Soleil, justement à cause de cette forte lumière bien souvent assistée aussi par celle des lunes circulant autour de la planète sur diverses orbites, il y a donc de la lumière en abondance. -38- A cette vraie lumière nocturne, ou bien, si cela vous paraît plus clair, à ce jour nocturne, il faut ajouter encore une troisième lumière, et c'est la lumière des étoiles fixes, qui vues de cette planète, en conséquence de son atmosphère pure et très haute, apparaissent dix fois plus grandes, et ont en proportion une d'autant plus grande splendeur en comparaison de votre Vénus ou étoile du soir dans son plus grand éclat. -39- Et maintenant transportez-vous en esprit sur une quelconque terre de la zone médiane de cette planète, et de là considérez la magnificence grandiose du ciel étoilé. En vérité, vous pouvez exciter au maximum votre imagination et vous pouvez la hisser dans les vols les plus sublimes, et cependant vous ne réussirez pas à vous faire une idée pas même de la millionième partie du spectacle immense qui s'offre là à la vue; parce que là les nuits sont claires comme chez vous ne l'est pas le jour, et durant le jour-même, à l'ombre bénéfique de l'anneau, les belles étoiles ne manquent jamais de se faire voir, particulièrement à qui monte sur les montagnes d'où l'on jouit d'un panorama illimité. -40- A cette hauteur l'effet de la lumière stellaire sous l'anneau est si prodigieusement diverse dans la splendeur des couleurs, que quelque chose de semblable vous ne pouvez vous l'imaginer pas même de très loin. -41- En ce qui concerne les autres particularités des régions de cette zone médiane, les montagnes et les fleuves, la végétation, la faune et les hommes, tout cela vous sera fait connaître durant les prochaines communications. -42- Pour aujourd'hui en attendant contentez-vous de ce qui vous a été donné, réfléchissez-y, et déjà en cela vous trouverez une grande portion à pouvoir servir, comme elle doit aussi servir, de bon repas à votre esprit. -43- Tout le reste, comme on l'a dit, vous sera donné prochainement en quantité surabondante au maximum, naturellement jusque là où cela pourra être accessible à votre intellect; mais vous devez vous appliquer grandement à comprendre tout cela, parce que les
matériaux qui viendront s'accumuler seront plutôt considérables; c'est pourquoi, comme déjà indiqué, soyez diligents; et pour aujourd'hui, AMEN.
CHAPITRE 2 -1Pour ce qui concerne donc les pays, leur structure et leurs particularités, il est à noter, comme déjà dit au commencement, qu'ils se différencient tant les uns des autres, soit dans la forme et dans la construction intérieure, soit même dans les plantes et dans les animaux, dans les eaux, dans les métaux et dans les pierres, que l'on ne peut trouver en aucun point de la planète un pays qui ressemble en quelque chose à un autre. -2D'égal en tous les pays il n'y a que l'être humain, et l'air qui entoure la planète; tout le reste se présente avec la plus grande variété; et ainsi, sans autrement différer, nous prendrons en considération un pays qui là est appelé HERRIFA. -3Ce pays, quant à l'étendue, est plus grand que vos Asie, Europe et Afrique prises ensemble, et précisément ainsi, comme si ce que l'on appelle la mer Méditerranée située entre ces trois parties de votre monde était elle aussi un terrain sec. -4Ce pays est sis un peu obliquement sur l'équateur de la planète, et son profil périphérique ressemble à peu près à celui d'un œuf quelque peu allongé. -5C'est en premier lieu le pays où se trouvent les plus hautes montagnes, et il est dans son ensemble plus montagneux que tous les autres pays; sa montagne la plus haute est appelée par ces habitants GIRP, et, selon vos mesures, elle atteint la hauteur de 243.150 pieds; mais en dépit de cela cette montagne est jusqu'à son plus haut sommet recouverte partout d'herbe et d'autres petites plantes d'odeur très agréable. -6De tous les côtés elle n'est absolument pas raide et en aucun point, et au contraire elle a des pentes très douces; c'est pourquoi les habitants peuvent y monter sans aucune fatigue et avec la même facilité que, vous, vous montez sur votre *hochplatte* ainsi que vous l'appelez. -7Cette montagne est en même temps aussi la pharmacie des habitants ainsi que celle des animaux de ce pays; parce que, comme déjà observé, là se trouvent les herbes les plus parfumées, et donc, chacun est en mesure d'y trouver la petite herbe curative pour n'importe quelle maladie dont avec le temps on peut être frappé; pour cette raison aussi, cette montagne avec les régions environnantes, qui ensemble occupent une surface de plus de 100.000 milles carrés, est la partie la plus grandement peuplée de ce pays. -8Pour passer maintenant aux arbres à tronc, il faut observer qu'ici il ne s'en trouve que de dix espèces; mais chaque espèce est ainsi constituée qu'ils ne portent pas de fruits seulement qu'une ou deux fois l'an comme vos arbres, mais bien plutôt que, des fleurs et des fruits mûrs sont ici toujours présents. -9Parmi les arbres on distingue particulièrement celui que l'on appelle l'arbre du Soleil et qui est ici dénommé Gliuba. Cet arbre atteint bien souvent une hauteur de plus de cent toises; son tronc est parfois si gros que cent de vos hommes n'arriveraient pas à en faire le tour avec les bras, et que, selon votre système de mesure, ses branches s'étendent souvent jusqu'à une distance d'un quart d'heure de marche du tronc; mais pour éviter qu'à cause du poids elles puissent se briser, ces branches, à leur partie inférieure chassent au-dehors verticalement des branches de soutien jusque sur le sol de la même façon que l'arbre terrestre que vous appelez Banian, branches qui, lorsqu'elles ont bien poussé, offrent l'aspect d'une très belle colonne. -10-
Ces branches de soutien descendent jusqu'à terre-même depuis les branches les
plus hautes, de manière que lorsqu'un semblable arbre est dans son plein développement, il ressemble à une petite montagne de basalte sur votre Terre, avec la différence seulement qu'au milieu des branches de soutien qui descendent perpendiculairement jusqu'à terre, il reste toujours assez d'espace libre pour pouvoir approcher de tous les côtés du tronc avec la plus grande commodité. -11- Une feuille de cet arbre est si grande, qu'ici sur la Terre un cocher pourrait avec elle couvrir entièrement sa voiture, si grande qu'elle puisse être; sa couleur est azur brillant comme les plumes de paon; la feuille-même est ornée de très beaux dessins et garde sa fraîcheur et sa couleur même quand elle est desséchée, état qui ressemble à celui d'une feuille mûre sur votre Terre quand elle tombe de l'arbre, ce qui certes, arrive aussi sur Saturne, mais avec la seule différence que sur cette dernière planète un arbre semblable n'apparaît jamais dépouillé de feuilles; mais bien plutôt, lorsqu'une feuille quelconque mûre tombe à terre, au même endroit ou bien à un autre en pousse une autre en remplacement de celle tombée. -12- Les habitants du pays mentionné recueillent ces feuilles, et, étant donné qu'elles sont très résistantes et ne se déchirent pas si facilement, elles sont employées pour confectionner une sorte de survêtements qui sont très élégants et qui représentent pour ces habitants ce que sont pour vous les manteaux. Ces vêtements peuvent être très bien portés même sur la peau nue, car elles sont très moelleuses et douces, parce que, en surface ces feuilles ne sont pas aussi totalement lisses que celles de beaucoup de vos arbres, mais au contraire elles ont l'aspect de votre velours. -13- Ces feuilles offrent à l’œil une merveilleuse variété de couleurs quand elles sont exposées à la lumière du Soleil, à peu près comme les plumes de la queue d'un de vos paons; seulement les couleurs de ces feuilles sont plus marquées et plus brillantes que celles des plumes de paon. -14- Ainsi donc se présente la feuille de cet arbre; quand elle est éclose depuis peu, elle apparaît comme d'or bruni recouverte d'une fine couche d'azur clair. Mais quel aspect a maintenant la fleur de cet arbre ? S'agissant de la fleur on pourrait sans autre confirmer l'assertion: Que Salomon dans toute sa majesté royale n'était pas aussi bien habillé que l'est cette fleur par sa nature. -15- Plus que tout on pourrait comparer la fleur de cet arbre à votre rose avec la différence seulement que cette rose de Saturne n'est pas remplie de pétales, mais forme bien plutôt un large calice à peu près comme les roses sauvages de vos haies. Les pétales sont entièrement de couleur rose claire, et chaque fleur porte trente de ces pétales, chacune grande à peu près comme l'une de vos feuilles de papier d'un bon format. -16- Le bord des pétales est rayé de couleur or qui va toujours plus en tirant sur le rouge intense, plus il pénètre dans le calice. Du milieu du calice se dressent deux étamines grosses comme un bras d'homme et longues de quelques toises, qui sont parfaitement transparentes et ont l'aspect comme chez vous les glaçons durant l'hiver; mais au point où dans vos fleurs l'étamine se termine habituellement avec ce que l'on appelle l'anthère, ces deux étamines finissent en deux fleurs caractéristiques qui resplendissent comme si elles étaient de flamme, et précisément l'une de couleur verdâtre et l'autre rouge; cependant ce rouge apparaît beaucoup moins intense que celui de la véritable fleur. -17- La fleur, ou bien les pétales diffusent un parfum on ne peut plus délicieux, et les pétales, comme aussi les étamines, sont soigneusement recueillis par les habitants; les pétales sont ensuite employés comme un médicament fortifiant, les étamines par contre servent aux habitants d'aliment particulièrement choisi. -18-
Tel est l'aspect de cette fleur. Mais quels fruits se développent-ils à partir
d'elle ? Ici il sera un peu difficile que l'on puisse vous le représenter avec beaucoup de précision, étant donné que sur votre Terre il n'existe aucune chose de semblable. Cependant, afin que vous puissiez vous en faire quelque idée, imaginez-vous un long fût de section hexagonale, gros comme un bras d'homme et de couleur rouge embrasé, et qui se termine en de nombreux autres fûts. -19- Par contre, à la base, là où il est attaché à la branche, il finit en un gros nœud qui cependant à la distance de deux empans seulement de la branche va en se transformant dans le fût indiqué auparavant. Depuis ce fût pend un fruit noueux si grand que quatre hommes de la Terre même très robustes auraient bien à faire pour le porter. -20- A l'intérieur de ce fruit noueux se trouve une petite graine d'aucun aspect voyant, grande comme l'une de vos noix, de couleur verte et dure comme la pierre. La pulpe de ce fruit a la saveur précise que vous révélerait votre palais si vous mangiez du pain avec des amandes, un peu sucré. -21- Mais chacun des nœuds qui se trouvent dans l'un de ces fruits noueux, est creux et rempli à moitié un suc de saveur égale à celle de votre meilleur hydromel. Quant à la couleur de ce suc, elle est jaune comme l'est chez vous un bon vin vieux. -22- La pulpe du fruit est blanchâtre; l'écorce extérieure du fruit apparaît au contraire de couleur grise, parfois même d'une teinte pâle argentée. -23- Les hommes qui vivent sous un arbre semblable sont à l'abri de tous leurs besoins, et ils ne possèdent aucun autre fonds ou morceau de terrain limité; mais bien plutôt leur possession est constituée justement d'un arbre semblable qui ne périt pas, mais pousse au contraire continuellement, et pour être précis bien plus en largeur qu'en hauteur. -24- Et ici on demande à présent: Etant donné que cet arbre pousse jusqu'à une telle hauteur, comment peut-on monter de chaque côté pour cueillir les fruits ? Même à cela, voyez-vous, il est pourvu; car, autant le tronc que chaque branche sont munis à droite et à gauche de certaines saillies sous forme d'épines qui confèrent au tronc et respectivement aux branches, l'aspect de ce que vous appelez une échelle à barreaux, moyennant lesquels sans même le moindre danger on peut grimper jusqu'à la plus haute cime de l'arbre, ainsi que monter sur les branches même les plus distantes du tronc; et quand bien même quelqu'un glisserait et tomberait, il n'en subirait absolument aucun dommage, car, tant les hommes que les animaux peuvent sur cette planète dans le cas d'extrême besoin, se maintenir librement dans l'air, et c'est pourquoi pour leur amusement ils peuvent même volontairement sauter en bas depuis la cime la plus haute de l'arbre, exercice qui est pratiqué souvent particulièrement par les jeunes. -25- Qu'une chose semblable soit possible là, vous pouvez le déduire avec assez de facilité, si vous considérez que l'anneau distant de quelques milliers de milles, partage la force d'attraction entre lui et la planète de sorte que le rapport vient à se trouver de 1 à 3/5. -26- Si, à ce rapport cité, pour éclairer les choses, on ajoute encore une disposition organique particulière et opportune, à une apparente difficulté de ce genre il est porté remède avec beaucoup de facilité, et l'homme est mis en mesure de se maintenir librement dans l'air pendant un temps considérable. -27- Nous aurons ainsi appris à connaître un arbre; et donc il nous en reste encore neuf à examiner, mais qui de par eux ne sont pas de tant d'importance ni d'utilité aux hommes, mais, bien plutôt pour les animaux de cette planète, particulièrement pour ceux qui ressemblent à vos oiseaux. Particulièrement digne de note, en ce qu'il est destiné à servir aussi à l'homme est celui que l'on appelle l'arbre de la pluie, qui est dénommé ici *Briura*.
-28- Cet arbre, comme vos sapins, n'a qu'un tronc qui souvent atteint la hauteur de 40 toises, et est bien souvent gros comme un de vos clochers de moyenne grandeur ; lui aussi étend très loin ses branches, et presque dans le même ordre que chez vous le sapin. -29- Ses feuilles cependant ne sont autre que des tubes de couleur d'un blanc-verdâtre d'où suinte continuellement l'eau la plus pure. Pour ce motif, les hommes creusent autour d'un semblable arbre une sorte de bassin d'un diamètre de 100 toises, ce qui donne à l'arbre l'apparence d'être placé au milieu d'un grand étang. -30- Ces bassins cependant, ils les construisent dans le but de recueillir l'eau qui coule abondamment de ces arbres, pour servir tant à leurs besoins personnels, qu'à ceux de leurs quelques animaux domestiques. -31- A ce moment vous demanderez: N'y a-t-il pas sur cette planète, particulièrement dans les régions montagneuses, des sources comme on en trouve dans nos montagnes ? - Et Je vous réponds: Là aussi il y a des sources en grandes quantités, dont certaines donnent tant d'eau, qu'en comparaison, votre MUR devrait aller se cacher; mais cette eau de source n'est pas employée par les habitants de Saturne parce que trop grossière. -32- L'eau de l'arbre au contraire représente pour eux quelque chose de purifié et de cuit; raison pour laquelle ils en font usage en n'importe quelle circonstance nécessitant l'emploi de l'eau, car ils disent ainsi: L'eau de source est faite seulement pour les animaux qui vivent dans l'eau, et pour abreuver le terrain; mais pour les hommes et pour les animaux les plus nobles le Grand Dieu a créé un arbre approprié afin qu'il fournisse une eau déjà bien préparée. -33- Voilà, ceci est une seconde espèce d'arbre, espèce qui, certes dans un état beaucoup plus imparfait, se trouve ici et là sur votre Terre, particulièrement dans les zones tropicales. - Après cet arbre, il serait à noter *l'arbre chevelu* qui est blanc, et qui sur Saturne se dénomme KLUP. Cet arbre aussi a un tronc droit qui souvent arrive à 30 toises de hauteur, et qui est conformément aussi gros de section et parfaitement rond. -34- Il n'a pas de branches, mais à la place depuis la cime du tronc pousse une espèce de filaments blancs-argentés, qui, étant très abondants forment comme une très grande touffe. Ces cheveux, ou ces fils, pendent bien souvent jusqu'à la moitié du tronc et entourent celui-ci jusqu'à une épaisseur de plusieurs toises. -35- Et lorsque souffle le vent, comme aussi du reste si l'air est calme, ces arbres offrent un spectacle merveilleusement beau, et un bois de ces arbres donne alors l'impression que les arbres eux-mêmes sont totalement couverts de neige. Les fils qui tombent à terre sont recueillis avec beaucoup de soin par les hommes qui en tressent une sorte de toile, qui est élastique, douce et durable. -36- Ceci est à peu près toute l'utilité que ces êtres humains retirent d'un arbre semblable. Après celui-là, remarquable est celui que l'on appelle *l'arbre large* dénommé là, BRAK. Cet arbre ne trouve de pendant en aucun arbre de votre Terre; parce que là, il pousse du sol comme une paroi d'un rouge-doré, et précisément, au début, en de nombreux troncs ronds placés en une ligne, mais qui par la suite se serrent rapidement de manière si étroite les uns les autres, qu'ils viennent à former un seul mur. -37- Un mur de ce genre atteint souvent une longueur de plusieurs centaines de toise et une hauteur parfois de 20 à 25 toises. Le mur n'a pas de branches principales, ni de secondaires, ni de feuilles; par contre le bord supérieur de cet arbre se présente comme un panneau de teinte bleue-verdâtre, dont les feuilles ne sont pas différentes de celles de vos platanes.
-38- Du milieu de ce panneau se dressent souvent jusqu'à une bonne hauteur des petits rameaux pointus qui portent des fleurs et même le véritable fruit. Cependant le fruit ne sert pas d'aliment pour l'homme, mais bien seulement pour les oiseaux, et consiste en une espèce de baie de couleur rougeâtre et de forme oblongue; mais les fleurs qui tombent sont aussi recueillies par les hommes qui en remplissent à ras bord des sacs, et sur ces sacs ils ont l'habitude de se coucher pour se reposer en raison du parfum réparateur qu'ils émanent. -39- Un bois de semblables arbres ressemble bien souvent à un immense labyrinthe, et quand les hommes s'y rendent pour recueillir les fleurs, ils font ici et là des marques afin de ne pas s'y perdre et de pouvoir revenir à leurs demeures. Cela est tout ce qui mérite d'être révélé sur cet arbre. Particulièrement beau se présente un semblable rassemblement d'arbres quand il est illuminé par le soleil, c'est-à-dire, lorsque le mur réfléchit fortement la lumière, comme le ferait chez vous une surface dorée. -40- Il est encore à noter celui qu'on appelle *l'arbre radial* dénommé là BRUDA. Cet arbre est tout entier de couleur jaune, il a un tronc droit duquel partent seulement à droite et à gauche des branches et des petits rameaux toujours en ligne droite. La partie inférieure des branches portent à leur tour un court duvet blanc; la partie supérieure par contre reste rue. -41- De feuillage, cet arbre n'en a absolument pas, mais bien plutôt les pointes extrêmes des branches portent une sorte d'étoiles, d'aspect grisâtres, qui, avec assez de régularité finissent en six pointes. Sur chaque pointe pousse une petite fleur ressemblant à vos campanules, fleur à laquelle se substitue ensuite un fruit de couleur rouge pas beaucoup différent des baies de certains de vos arbustes des haies. -42- Si vous voulez vous faire une idée assez exacte de cet arbre, pensez à ce que l'on appelle un ostensoir, avec la seule différence que l'arbre en question constitue un ostensoir proportionnellement gigantesque. De la part des habitants presque absolument rien n'est utilisé de cet arbre, mais bien plutôt il leur sert uniquement pour former à votre manière de ravissantes avenues. -43- En ce qui concerne les autres arbres, ainsi que quelques autres plantes d'espèce particulièrement remarquable, tout cela vous sera exposé d'une manière circonstanciée, comme jusqu'à présent, dans la prochaine communication; donc pour aujourd'hui, AMEN.
CHAPITRE 3 -1Au sixième rang parmi les arbres on trouve celui qu'on appelle *L'arbre entonnoir* dénommé par ces habitants KIBRA. Cet arbre a un tronc d'un diamètre d'environ trois toises, et il a lui aussi une écorce très lisse de couleur bleuâtre. Au sommet du tronc haut d'environ vingt toises et en chacun de ses points de grosseur égale, partent dans toutes les directions, sous un angle de 45 degrés selon votre façon de calculer, des branches droites. -2Ces branches portent à gauche et à droite des rameaux, parallèles entre eux comme les rameaux de votre sapin, qui, d'autant plus ils sont éloignés du tronc, d'autant plus se présentent longs et larges. -3De tels rameaux ne sont en réalité pas autre chose que des branches et des feuilles de cet arbre en même temps. A l'extrémité des branches se trouve la fleur, à laquelle succède ensuite aussi le fruit, raison pour laquelle un tel arbre ne porte pas plus de fruits qu'il n'y a précisément de branches de l'espèce qu'il a. -4Le phénomène le plus merveilleux dans cet arbre se présente à la période de sa floraison; car, avant que ne paraisse la fleur, l'extrémité de chaque branche s'enflamme automatiquement; cependant il s'agit ici d'un feu, pour ainsi dire, froid, qui ressemble à la lueur des lucioles et du bois pourri, avec la différence que ce feu d'avant la floraison diffuse une lumière de bien loin plus intense que celles susmentionnées que l'on peut observer sur votre Terre. -5Tout un bois de ces arbres-entonnoirs offre un spectacle de lumière particulièrement splendide, et cela pour le fait particulier que là non plus les arbres ne commencent pas à fleurir au même instant, et ainsi donc le feu de l'avant floraison se manifeste en certains arbres avant et en certains autres plus tard. -6Or comme ce feu a son début toujours sept jours avant la floraison, et qu'à partir dudit jour il brûle continuellement en changeant de couleur, il arrive que pendant le temps des sept jours sont révélées aussi toutes les sept couleurs fondamentales, ainsi que toutes les variations produites par le passage d'une couleur à l'autre. -7Imaginez-vous maintenant même un seul de ces arbres proches de la floraison, en considérant en outre que pas même sur un seul arbre toutes les branches ne commencent à fleurir le même jour, et que par conséquent aussi le feu de l'avant floraison déjà dans un arbre se manifeste d'une manière multicolore; ensuite, lorsque tout un bois de ces arbres-entonnoirs commence de cette façon à fleurir, vous pouvez déjà, seulement avec un minimum d'imagination, vous faire une assez bonne idée du spectacle merveilleux que doit offrir, contemplé de quelque hauteur, un semblable bois, qui parfois, a une étendue de plusieurs centaines de milles carrés, à son stade de floraison, ou mieux même, d'avant floraison. Après ce feu de l'avant floraison de l'arbre-entonnoir, apparaît la fleur qui est, elle aussi, très étrange. -8En vérité, chez vous elle ne serait pas tolérée en tous les états ! Car elle se présente ainsi: Sur un fût de couleur jaune doré, long de deux à trois toises et plus gros qu'un bras d'homme, pousse un ruban tricolore long de une à deux toises et jusqu'à six toises, et ce ruban est de trois couleurs toujours égales, c'est-à-dire, rouge clair et blanc neigeux; et autant il y a de fleurs d'un arbre semblable, précisément tout autant de rubans colorés flottent autour de lui.
-9Et maintenant vous pouvez à nouveau vous faire une petite idée de la magnificence des fleurs de cet arbre. Passé le temps de la floraison, hampes et drapeaux tombent bien vite de l'arbre, et les exemplaires les plus beaux sont eux-aussi recueillis par les hommes. -10- Étant donné que ces rubans, à l'état sec, perdent beaucoup de leur splendeur, ces hommes les utilisent seulement ainsi: ils les enroulent, en font des tas, et tant qu'ils sont encore frais et doux, ils ont l'habitude de s'y reposer dessus pour redonner des forces à leurs membres. -11- Puis, lorsqu'ils deviennent plus secs et plus rigides, on leur donne le feu, et pendant qu'ils brûlent, ils dégagent une fumée d'une odeur très agréable; les cendres, de couleur blanc-argenté, servent ensuite d'excellent engrais pour le terrain. -12- Les exemplaires moins beaux de ces fleurs sont par contre laissés sous l'arbre où ils sont tombés; là ils pourrissent et servent ainsi également à fumer le terrain. -13- Cependant la chose la plus merveilleuse en cet arbre est le fruit qui se développe aussitôt après la floraison; ce fruit, en ce qui concerne l'aspect extérieur, ressemble à peu près à vos courges oblongues, avec la différence seulement que la canne proprement dite de cette courge atteint souvent la longueur de 4 à 5 toises, et le diamètre, deux pieds. -14- Par contre, la tête, à l'extrémité de la canne est formée toujours par une sphère parfaite d'un diamètre d'une toise et demie, et parfois même deux. L'écorce externe de ce fruit a, strictement parlant, l'aspect de l'or pur. Et maintenant interrogez à nouveau un peu votre imagination, et dites ensuite quel spectacle ne-doit-il pas offrir à l’œil un bois de semblables arbres quand il est illuminé par le soleil ? -15- Mais à présent vous voudriez certainement savoir à quel usage sert là ce fruit ? La réponse est on ne peut plus facile: précisément au même usage que celui à quoi vous servent vos courges oblongues; en partie afin de pouvoir puiser des liquides en quelque petite profondeur, et en partie aussi comme récipients dans le but d'y garder à l'intérieur des sucs obtenus par le pressurage de diverses plantes. -16- Sur cette planète de semblables fruits sont soigneusement récoltés en plus grand nombre possible pour en faire un objet d'échange avec d'autres produits, et dans ce but ils sont aussi bien conservés. Vous voudriez peut-être savoir encore la raison pour laquelle cet arbre a proprement une semblable forme en entonnoir ? -17- La forme en entonnoir est donnée en particulier à cet arbre en premier lieu afin qu'en son entonnoir il puisse avec une d'autant plus grande efficacité recueillir la lumière du Soleil, ainsi que le fluide électromagnétique; puis en second lieu, au milieu de l'entonnoir débouchent des petits canaux médullaires qui, en particulier à la faveur de la nuit, exhalent un vrai brouillard. -18- Cependant ce brouillard, pour l'autre végétation et même aussi pour l'homme qui l'aspire, est de nature un peu vénéneuse et destructive tant qu'il n'est pas décomposé et dispersé par la lumière solaire ; mais cet entonnoir est ainsi constitué, qu'il ne laisse filtrer le brouillard mentionné d'aucune autre manière, ni jamais en quantité plus grande que ce qui est nécessaire précisément à la fécondation de l’arbre par l'effet de la nuit, et même cela, seulement tant que le fruit n’est pas arrivé à mi-maturation. -19- Après quoi les petits canaux médullaires dans l'entonnoir se ferment, et l'exhalaison dont nous avons parlé est à la place dirigée et employée au gonflement régulier du fruit, à quel moment, cet entonnoir se trouve au contraire contenir un air vital si nourrissant, que beaucoup d'hommes y montent dessus en se servant de certaines échelles, se
font en ces entonnoirs des couchettes et y passent la nuit pendant une longue période de temps. -20- Voilà, cela est donc ce qui de remarquable peut être raconté d'un arbre semblable. D'utilisable pour le corps humain il n'a rien à l'exception de son air vital; en ce qui concerne ensuite les graines, qui ne sont pas différentes de celles de vos courges, celles-ci ne sont mangées que par les animaux domestiques. - Et maintenant passons encore à la septième espèce d'arbre par laquelle il faut entendre celui que l'on appelle *l'arbre pyramide*, dénommé par les habitants de Saturne, UHURBA. -21- Cet arbre est certainement le plus grand et le plus haut de tous sur ce corps de l'univers, et il a à peu près les caractéristiques de vos sapins nobles au tronc blanc. Il pousse souvent jusqu'à une hauteur telle que sur votre Terre vous pourriez à grand-peine trouver un mont capable de se mesurer avec lui en ce domaine. -22- Cet arbre aussi n'a qu'un seul tronc, qui dans sa partie la plus basse au voisinage des racines mesure bien souvent 80, 90 et même 100 toises de diamètre. Ses branches se séparent du tronc déjà près de la terre dans toutes les directions possibles, et celles les plus basses, dans un arbre-pyramide déjà parfaitement développé, ont souvent la longueur de mille toises. -23- Puis, d'autant plus on s'approche du sommet, d'autant plus les branches se font régulièrement plus courtes, de sorte qu'à la fin un tel arbre en vient à prendre dans son ensemble vraiment l'aspect d'une immense pyramide à base circulaire, c'est-à-dire d'un immense cône, en comparaison duquel toutes vos grandes pyramides égyptiennes doivent être considérées comme de vraies coquilles d'escargots; car, s'il vous était possible de vous transférer corporellement sur cette planète, il vous semblerait vous trouver en face des plus grandes montagnes en contemplant de semblables arbres. -24- Cet arbre appartient au genre des conifères, et ses feuilles ressemblent, sauf bien sûr les proportions de bien loin plus grandes, assez bien aux feuilles aciculaires de vos sapins; il faut seulement noter que la couleur n'en est pas verte, mais bien plutôt bleu azur. -25- L'utilité de cet arbre, en ce qui concerne la dépuration de l'air et sa saturation avec des éléments vitaux, est si extraordinaire, que la puissance salutaire qui se diffuse de ses pointes et de ses branches arrive même jusqu'à votre Terre, et c'est de préférence de là que vos conifères à l'odeur balsamique tirent leur substance éthérée. -26- Aussi, ces arbres sont plantés partout avec le plus grand soin et à cette fin il ne suffit de rien autre que de détacher un rameau de quelque arbre de cette espèce et de le planter en quelque endroit où il y a du bon terrain; ensuite le rameau commence bien vite à croître et en peu d'années de Saturne il devient déjà un arbre de grandeur absolument respectable; le développement progresse ainsi continuellement, et l'arbre peut atteindre l'âge de plusieurs centaines d'années de Saturne. -27- Mais quand un tel arbre, avec l'écoulement des années, meurt, il commence aussitôt à pourrir aux racines et se consume ensuite de lui-même jusqu'aux branches extrêmes; puis, à la place où se trouve un semblable arbre qui s'est consumé de lui-même, les habitants répandent immédiatement de la terre maigre, et en peu d'années ils ont à leur disposition le terrain le plus fertile que l'on puisse imaginer pour y cultiver leurs herbes juteuses préférées. -28- Ici aussi vous pouvez avoir recours à votre imagination et considérer l'un après l'autre quelques-uns de ces arbres; certes, votre grandeur terrestre en sortira quelque peu diminuée. Ainsi, de cet arbre vous connaissez désormais déjà les caractéristiques les plus essentielles, et par conséquent nous pouvons passer à une autre espèce d'arbre, la huitième,
laquelle devra sans aucun doute vous apparaître ô combien extraordinaire; car à nouveau sur votre Terre il n'est pas possible de trouver même la plus minime trace de quelque chose de semblable. Or, cet arbre de la huitième espèce, extrêmement digne d'être connu est celui que l'on appelle l'arbre de verre ou bien *arbre miroir* que les habitants de Saturne appellent UBRA. -29- Cet arbre a un tronc quadrangulaire tout à fait parfaitement régulier, dont le tronc est transparent comme l'est pour vous un verre de coloration vert-clair. Le tronc qui finit en pointe se développe jusqu'à une hauteur de 20 à 30 toises et n'a absolument pas de branches; mais bien plutôt, un peu plus au-delà de la moitié de ce tronc de l'arbre-miroir, s'épanouissent comme dans vos cactus de grandes fleurs pendantes qui, mises à part les dimensions beaucoup plus grandes, ont à peu près l'aspect de vos lys; il y a seulement une différence dans la couleur, car cette fleur a la particularité que chacun des dix pétales qui la forment sont de couleur différente l'un de l'autre. -30- Quand en cet arbre après une demi-année la floraison est terminée, aussitôt ensuite sur un fût noueux de substance semblable à du cristal, se développe un fruit, pour vous certes assez digne d'être connu. Ce fruit, au commencement, consiste uniquement en une vessie d'eau très transparente qui va se faire peu à peu toujours plus grande; et quand il est mûr, ce fruit a l'aspect d'un ballon d'un diamètre de une toise à une toise et demie. -31- Quand ce fruit est arrivé à l'état d'une semblable première maturation, alors le liquide en cette vessie commence à se condenser de manière telle, que la vessie se flétrit et progressivement ensuite se détache du liquide figé intérieurement. Ce liquide condense, bien souvent ensuite tombe à terre avec le fût respectif; alors les habitants viennent, recueillent ce suc durci, le taillent avec exactitude de tous les cotés et en forment des tableaux spéciaux quadrangulaires parfaitement réguliers; ils utilisent ces tableaux à peu près dans le même but que vous sur la Terre utilisez les miroirs. -32- Et justement cet arbre ne leur sert à aucun autre usage sinon qu'à celui encore de l'embellissement des jardins comme vous faites, vous, avec certains arbres; car, lorsqu'une rangée de semblables arbres est plantée, elle constitue pour les habitants de cette planète une avenue en ne peut plus luxueuse, et ils se servent très volontiers de cet arbre dans ce but aussi pour la raison que, comme l'arbre-pyramide, il est très facile à transplanter, certes pas au moyen des branches, étant donné qu'il n'en a pas du tout, mais bien plutôt au moyen des graines qui cependant ne se trouvent pas dans le fruit, mais dans la fleur. -33- La transparence de cet arbre a ses origines en ce que, tant son organisme en particulier, que lui-même en sa totalité, consistent uniquement en petits canaux quadrangulaires à travers lesquels se diffusent en montant les sucs qui conviennent à sa nature; car si les organes sont à section circulaire, aucun rayon ne peut les franchir étant donné que dans la forme ronde le rayon même vient à se briser plusieurs fois; sous cette forme quadrangulaire au contraire le rayon n'est pas exposé à être brisé sinon qu'en de très minimes proportions, et c'est pourquoi aussi il peut y passer à travers presque sans aucun empêchement. -34- Et puisque tous les arbres de cette planète et particulièrement ceux de ce pays, ont une écorce complètement lisse, la surface d'un arbre semblable, pour vous merveilleux, resplendit vraiment comme celle de vos plaques de miroir; raison pour laquelle, qui se promène devant une rangée de ces arbres peut se regarder parfaitement de la tête aux pieds. -35- Ceci est tout ce que l'on peut dire de cet arbre. Ici, réveillez aussi un peu votre imagination, et alors, avec peu de difficultés vous pourrez commencer à vous persuader que Moi-même en me passant des villes et des palais construits par les hommes, Je sais très bien
comment on fait pour embellir un monde; et avec cela nous mettons un point pour aujourd'hui. -36occasion.
Tout le reste, en ce qui concerne les arbres, est renvoyé à une prochaine
CHAPITRE 4 -1L'arbre que nous nous apprêtons à décrire comme le numéro 9 porte le nom de Ahaharke. Vouloir traduire en langue allemande ce nom, c'est-à-dire dans une langue de cette Terre, ou mieux, interpréter avec une certaine exactitude l'idée qu'il exprime, en employant vos formes de langage, serait chose très difficile, étant donné que sur toute la surface terrestre il n'est pas facile de trouver quelque chose de semblable pour pouvoir par voie de comparaison, composer un nom convenant à cet arbre. -2Mieux que tout encore on pourrait le définir en lui donnant le nom de *arbre de la variété*. Cet arbre sort du terrain avec un tronc, pour ainsi dire, fondamental, ayant environ 16 toises de circonférence. Or, du tronc, partent dans toutes les directions des branches dont les plus longues arrivent jusqu'à dix toises de distance du tronc. De chacune de ces branches s'élèvent en lige verticale, régulièrement parfaite trois autres troncs qui atteignent souvent la hauteur de 12, 13, 14, et même 15 toises. -3A l'extrémité de ces troncs partent à nouveau en toutes les directions d'autres branches de grandeur proportionnelle. Puis, de toutes les branches qui partent de chacun de ces troncs s'élèvent à nouveau trois autres troncs jusqu'à la hauteur de 10 toises, qui à leur tour finissent par se subdiviser en proportion en une grande quantité de nouvelles branches. -4Au-dessus de cette troisième couronne s'élèvent encore une fois des troncs ou des branches verticales et droites, à l'extrémité desquelles partent d'autres branches et des rameaux proportionnellement plus petits, de sorte que lorsque cet arbre est dans son plein développement, il est ainsi formé de 7 et jusqu'à 10 semblables paliers, et précisément toujours dans un ordre identique, c'est-à-dire que de chaque branche s'en élèvent toujours trois nouvelles, et par conséquent un tel arbre à son dernier et plus haut palier en est à représenter vraiment un bois entier d'arbres. Et maintenant, dans le but que vous puissiez vous en faire une idée, pourquoi cet arbre s'appelle-t-il *l'arbre de la variété* ? -5Le motif est on ne peut plus facile à exposer; cependant pas aussi facile en est la compréhension, car chacun des paliers produit des fruits différents, et en conséquence, le feuillage et les fleurs sont certes aussi différents d'un plan à l'autre, et ce qu'ensuite en cet arbre il y a de merveilleux et pour vous tout bonnement d'incroyable, c'est que le même arbre après dix ans seulement reproduit les mêmes fruits; car à cet égard il change continuellement d'une année à l'autre, et précisément de manière que d'une année à l'autre personne ne peut prévoir quels fruits il portera; et comme sont variés les fruits, pareillement variées sont aussi les feuilles et les fleurs, et lorsqu'on se trouve en face de plusieurs de ces arbres, en aucun cas les fruits d'un arbre sont identiques à ceux de l'arbre voisin. -6Mais afin que les habitants, en dépit de tout cela, puissent disposer continuellement de tous les produits de cet arbre, ils le cultivent par séries de dix en en plantant chaque année un nouveau; et qui, sur son propre terrain possède dix de ces arbres, celui-là peut jouir de tous les produits de l'arbre; car alors chaque arbre produit d'autres fruits, et ainsi en changeant jusqu'à la dixième année; et seulement à la onzième il revient à son ordre premier. -7Mais étant donné que les produits de chaque arbre varient d'une année à l'autre, il arrive par exemple qu'un premier arbre dans la seconde année porte bien sûr des fruits totalement nouveaux, mais l'arbre suivant porte en cette année les même fruits que le premier arbre avait portés dans la première année; et quand le premier arbre dans la troisième année
produit à nouveau une autre qualité de fruits, le second arbre dans la troisième année produit les mêmes fruits que le premier arbre avait produit dans la seconde année, tandis que le troisième arbre produit les mêmes fruits produits par le premier arbre dans la première année et par le second arbre dans la deuxième année. -8Et ainsi en cet ordre se maintient toujours continuellement la production du fruit. Si dans l'intervalle un semblable arbre dépérit et meurt, à sa place, ou mieux, pour cet arbre seul dix autres sont plantés, afin qu'aucune quantité de fruits ne vienne complètement à manquer pendant plusieurs années. Pour ce qui ensuite concerne particulièrement les fruits de cet arbre et la façon dont ils sont distribués, l'ordre est tel que les plus grands et les plus pesants poussent naturellement toujours dans les paliers inférieurs, et en montant ils vont se faire, au fur et à mesure, toujours plus petits et plus légers. -9La façon et la manière en lesquelles les fruits de cet arbre sont constitués dans leur ensemble, et l'usage qu'il en est fait par ces habitants, ne peuvent être exposés ici en détails complètement, pour la raison qu'une description détaillée de tout cela ne trouverait même pas de place dans 100 de vos feuilles de papier; mais en général qu'il vous soit dit que cet arbre est dans l'expression la plus noble le représentant de toutes ces espèces d'arbres à fruits qui prospèrent sur votre Terre dans la zone tempérée et dont les fruits portent en leur milieu une ou plusieurs graines bien développées. -10- Ainsi, par exemple, le palier le plus bas serait pour une année celui de toutes les espèces de pommes, pour une autre celui de toutes les qualités de poires, dans la troisième de toutes les prunes, dans la quatrième de toutes les pêches, dans la cinquième de tous les abricots, et ainsi de suite. -11- En ce qui concerne ensuite les paliers plus élevés ils produisent pareillement des fruits semblables, mais tous en proportions de qualités beaucoup plus nobles, et aussi de formes totalement différentes, et, entre autre, de saveur extrêmement délicate; de sorte que les fruits du palier le plus haut sont vraiment déjà de nature pour ainsi dire éthérée; c'est pourquoi aussi leur forme et leur saveur se différencient de celles des fruits d'un palier inférieur, comme se différencie chez vous un raisin bien mûr d'une pomme très ordinaire, puis, en ce qui concerne la saveur, comme se différencie un vin très fin au suc non fermenté pressé de frais, des pommes à moitié mûres. -12- Voilà: ainsi sont les choses au sujet de cet arbre; et si vous réveillez un peu votre imagination, il ne vous sera pas difficile d'en compléter en assez bonne mesure la représentation en ce qui concerne ce qui ici, pour des raisons de temps, ne peut être traité seulement que de loin, mais non pas décrit de manière exhaustive; par conséquent, de cet arbre, nous dirons encore seulement que ses fruits servent aussi de nourriture aux habitants de cette planète, et précisément surtout ceux des paliers supérieurs, tandis que ceux des paliers inférieurs sont souvent employés comme pâture pour leurs animaux domestiques. Mais il va de soi qu'en général tous ces fruits sont environ dix fois plus grands que les fruits similaires sur votre Terre. -13- L'écorce de cet arbre plus qu'autre chose, ressemble à celle de votre pommier, et est pareillement rêche; seulement, la couleur de l'écorce n'est pas grise comme celle de votre pommier, mais bien plutôt rouge sombre, qui à chaque palier plus élevé se fait cependant toujours plus claire. Et maintenant de cet arbre nous passerons à la dernière espèce dans l'ordre des dix, afin de prendre connaissance d'un arbre que sous plusieurs aspects on peut considérer comme le plus merveilleux de ce pays. -14- Là, cet arbre est dénommé FEHURA, ce qui, traduit dans votre langue, signifierait: *L'arbre du feu*. Cet arbre, dans sa façon de croître, a une certaine ressemblance
avec ce que vous appelez les fleurs de mars (aragonite coralloïdale), et, d'une certaine manière, est de nature parfaitement minérale. Le tronc est semblable à une colonne de marbre blanc ayant environ six toises de circonférence, qui se dresse sur le sol toujours également grosse, pour atteindre une hauteur de 15 à 20 toises, point à partir duquel elle se subdivise comme un arbre de corail en diverses branches et en rameaux, qui, à leurs extrémités se terminent en autant de subtils petits canaux. les rameaux se tournent et se courbent de tous les côtés en grand nombre, justement comme les fleurs que l'on dit *de mars*, citées ci-dessus. -15- Cet arbre n'a ni feuilles, ni fleurs, ni fruits d'aucune espèce; mais bien plutôt sa mission est uniquement celle de produire du feu. Le feu donc, correspond à son fruit qu'il produit d'habitude en ce lieu et en cette période de temps, où une quelconque partie du pays se trouve à l'intérieur de la zone d'ombre de l'anneau. Car sur cette planète, le temps, c'est-à-dire les saisons, ne se caractérisent pas comme chez vous selon l'été et l'hiver, mais bien selon la période de l'ombre, c'est-à-dire, du manque de lumière solaire; c'est aussi la raison pour laquelle les racines de cet arbre, qui ne sont réellement rien autre que de petits canaux, ont pour unique fonction et capacité d'absorber du sol de la planète les gaz les plus purs qui se sont développés à partir de l'huile minérale, et de les pousser ensuite à travers ses nombreux petits tubes ou vaisseaux capillaires jusqu'aux débouchés extrêmes des branches. -16- Arrivé à ce point, quand le gaz est au contact de l'air atmosphérique local qui, à la période de l'ombre, contient de l'oxygène en abondance, il s'allume immédiatement et continue à brûler, tant que n'est pas revenue la lumière solaire qui, en dilatant l'air atmosphérique, fait tomber l'oxygène; en conséquence de quoi cet arbre du feu s'éteint progressivement, et ensuite se repose, et ultérieurement ne pousse pas tant que n'est pas revenu l'époque de l'ombre. -17- La période de l'ombre dure cependant là aussi une demi-année comme chez vous l'hiver, mesuré selon le rapport de température entre chaud et froid. Et cet arbre commence à pousser comme chez vous les champignons, c'est-à-dire, sans semence; cependant, non pas comme ceux qui poussent là où la terre est la plus maigre, mais bien plutôt l'arbre du feu se rencontre avec une fréquence plus grande là où le sol de Saturne est le plus riche en naphte. -18- Et les habitants ont l'habitude aussi de le planter de la manière suivante: à l'époque de l'ombre ils coupent un rameau du tronc et l'enfoncent en un quelconque point d'un terrain où le naphte abonde, et là il continue à brûler, et avec cela il pousse aussi, tant en sa partie inférieure en mettant des racines, qu'en sa partie supérieure en développant des branches. -19- En soi le feu de cet arbre n'est pas brûlant, cependant par l'effet de ses rayons de couleur intensément blanc, il a, à une certaine distance une action calorifique, ou bien mieux encore, il dégage la substance calorifère; raison pour laquelle aussi pour cette planète il est avec cela pourvu à ce que durant la période de l'ombre il ne fasse pas beaucoup plus froid en comparaison de la vraie période de lumière solaire; et ainsi il arrive que chaque famille cherche toujours à planter autour de sa demeure et de ses terrains une quantité appropriée de tels arbres, obtenant ainsi l'avantage que, tandis que l'ombre dure, on ne ressent pas du froid ni l'on ne souffre du manque de lumière. -20- Maintenant, en considérant aussi cet arbre, et en appelant un peu à l'aide votre imagination, vous ne manquerez certainement pas ensuite de relever - en faisant même abstraction de la grande magnificence d'un tel arbre - que sa lumière obtient un effet plus grand que tout votre éclairage à gaz, même si vous vouliez accumuler tout votre gaz et le faire brûler en un seul endroit sur un quelconque phare construit à dessein.
-21- Et en vérité, s'il vous était possible de planter un arbre de cette espèce sur une montagne proche, non seulement votre ville en aurait tout autant de lumière que de dix pleines lunes, mais bien aussi absolument tous les environs pourraient en jouir eux-aussi d'une lueur suffisante. -22- Imaginez-vous à présent au contraire de nombreux milliers de ces arbres poussant ici et là dans un pays, et quel effet ils peuvent faire avec leur lumière. Si déjà la lumière rougeâtre et de nature maligne de votre feu vous réconforte dans la profonde obscurité de la nuit, combien un plus grand plaisir ne devrait-elle pas vous procurer une semblable lumière blanche et douce ? -23- Mais de tels arbres ne sont pas destinés pour la Terre, bien que dans l'Orient, et précisément dans diverses localités du Caucase, il se manifeste des cas où il suffit d'enfoncer dans le sol un roseau de marais ou bien un quelconque morceau d'un bois très poreux, pour vous donner du feu à l'extrémité supérieure; et alors il arrive que l'extrémité allumée continue toujours également à brûler comme un flambeau, sans que pour cela le bois, ou le roseau, soit consumé; seulement il y a cette différence: que de telles flammes sont rougeâtres et extrêmement brûlantes. -24- Avec cela nous aurons au sujet de ce pays appris à connaître les arbres, et nous pouvons donc donner à présent un coup d’œil en général aussi aux arbustes. -25- Tous les arbustes sur Saturne ont la particularité qu'ils ne sont pas comme les vôtres aussi bas, et en cet état ils constituent simplement une classe plus petite d'arbres, qui cependant en ce qui concerne la forme et la qualité, se différencie beaucoup des vrais arbres; de toute façon l'arbuste le plus bas et le plus insignifiant sur Saturne est toujours plus haut et mieux développé que les plus importants de vos arbres. Déjà dans le seul pays dont on parle, on peut rencontrer plus de 12000 espèces d'arbustes qui sont toutes bien différentes les unes des autres; chaque espèce porte son fruit particulier, mais dont, en dehors des nombreux habitants de l'air, nul ne retire réellement un avantage. -26- Parmi ces très nombreux arbustes il y en a un qui se rencontre avec une plus grande fréquence que les autres, et qui par ces habitants est soigné avec une particulière attention; faire mention d'un tel arbuste devrait être de quelque intérêt pour vous, étant donné qu'il ressemble parfaitement à votre olivier, avec la différence seulement que lui-aussi sur cette planète est à tous égards beaucoup plus grand que l'olivier sur votre Terre. -27- Les fruits respectifs ou baies, à l'état de maturité, sont si grands, que chacun rend selon vos mesures un bon litre d'huile très pure. Si donc un semblable arbuste porte souvent à maturation sur ses branches de 20 à 30000 baies, vous pouvez déjà vous faire une idée de la richesse d'une telle récolte d'huile, et d'autant plus si vous considérez encore que sur les terrains d'une seule famille poussent bien souvent plusieurs milliers de ces arbustes, ou mieux de ces arbrisseaux à huile. Certes vous ne devez pas vous figurer la propriété terrienne d'une famille de Saturne aussi petite que celle de l'un de vos plus gros propriétaires de campagne, mais bien plutôt sans aucun doute grande comme tout votre empire, et parfois aussi quelque chose de plus. -28- Mais en même temps il est nécessaire aussi que vous ne vous représentiez pas les hommes de Saturne à la figure extrêmement belle aussi petits, physiquement parlant, que vous l'êtes vous; parce que là déjà la femme mesure en hauteur de 80 à 90 pieds, et l'homme ensuite de 95 à 135 pieds, et en cette proportion sont formés aussi leurs nombreux animaux domestiques.
-30- Si donc à présent vous connaissez par avance tout cela, d'autant plus clair vous paraîtra ensuite tout ce qui encore vous sera dit de la végétation fructifère; ce qui, comme plusieurs fois déjà annoncé, suivra dans l'ordre voulu; donc pour aujourd'hui, AMEN.
CHAPITRE 5 -1Ce qu'il y avait donc de notable à dire au sujet des arbustes, nous l'avons déjà appris dans ses lignes principales, et c'est pourquoi à présent nous porterons notre attention sur les herbes et sur les autres plantes de ce pays. Ce pays est l'un des plus montueux de cette planète, et c'est pourquoi aussi il possède le nombre le plus grand de plantes et d'herbes de toutes les espèces imaginables parmi les plus utiles et dotées du plus grand pouvoir curatif. -2Des plantes de l'espèce de vos céréales, comme par exemple, le blé, le froment, l'orge, etc... ne poussent ici en aucun lieu; mais à la place on y trouve une autre qualité de céréale, plus noble, qui ressemble presque à votre maïs, avec la différence seulement que la plante en question pousse jusqu'à une hauteur de 20 à 30 fois plus grande que votre maïs et ses feuilles sont bien souvent longues de 2 à 3 toises et demie et larges de 2 à 3 brasses et demie. -3Les feuilles mêmes ont une couleur parfaitement bleu-clair, et sur les bords elles apparaissent bordées sur la largeur d'un empan d'une couleur rouge-carmin clair, tandis que la nervure médiane, large aussi d'un empan à la base et qui va en diminuant jusqu'à un pouce vers la pointe, est de couleur or tendant au verdâtre. -4La tige, qui en sa partie inférieure devient souvent grosse comme le tronc de l'un de vos chênes à son plein développement, apparaît au voisinage du sol de couleur or sombre doucement luisant; et en même temps que monte la tige, la couleur aussi se fait plus claire; la couronne des fleurs qui souvent a des rameaux d'une toise à une toise et demie de longueur, a précisément l'aspect qu'a chez vous un lustre de très beau cristal brillant, et ce pour la raison que sur cette planète tout se présente en proportions plus grandes. -5Si vous vous donniez la peine d'observer une fleur de votre maïs à travers un bon microscope, vous apercevriez presque le même jeu de lumières très brillantes sur le pollen qui autrement apparaît de teinte blanchâtre claire. Mais en ce qui concerne le fruit de cette plante, il est quant à la forme certes semblable à celui de votre plante terrestre, bien sûr en proportions beaucoup plus grandes, mais par contre, tel n'est pas le cas en ce qui concerne l'usage qu'on en fait et sa saveur; sur Saturne ce fruit fournit le morceau absolument le plus savoureux et le plus délicat, et sous cet aspect il ressemble quelque peu à ce que vous appelez l'ananas, avec la différence seulement que là chaque grain peut se détacher avec beaucoup de facilité de la plante quand le fruit est arrivé à maturité, et l'on peut en manger aussitôt; ils ne sont pas farineux, mais remplis de suc comme chez vous le raisin. -6L'un de ces grains - ou baies - pèse, selon votre façon de mesurer, souvent 2 livres et jusqu'à 3. Étant donné que sur une semblable grappe on trouve ensuite 3, 4, et même 500 de ces baies, et qu'un seul arbuste produit partout bien souvent de 20 à 30 de ces grappes, vous pouvez déjà vous faire une idée de combien de nombreuses fois est riche une semblable récolte; mais où les habitants conservent-ils ensuite cette récolte ? -7Vous avez déjà fait la connaissance avec les récipients pratiques fournis par *l'arbre à entonnoir*, eh bien, c'est justement à l'intérieur de ces récipients que les baies en question sont conservées, une partie comme baies et une autre partie comme suc pressé. Ce fruit pousse quatre fois par an; il est on ne peut plus sain et fortifiant et son suc réjouit le cœur des habitants de Saturne tout autant et mieux même que votre raisin et son suc réconfortant. -8Après avoir enlevé le fruit, les habitants laissent la feuille reposer sur le terrain jusqu'à ce qu'elle soit devenue complètement sèche; ensuite ils font venir leurs grands
animaux de trait là où se trouvent ces plantes desséchées, et les animaux mangent alors les feuilles tandis qu'ils laissent intactes les tiges. Ces tiges sont ensuite sciées en morceaux par les habitants avec un outil spécial, et avec ce qui en résulte sont formés partout sur le terrain des tas auxquels enfin est mis le feu, et avec cela le champ lui-même vient à se trouver fumé de la meilleure des façons possibles pour une prochaine récolte. -9Un champ semblable a besoin d'un terrain humide si l'on veut que le fruit prospère bien. Mais étant donné qu'en ce pays, comme du reste presque en toute la zone tempérée de la planète il n'y a jamais, ou de très rares fois seulement, de précipitations de pluie ou de rosée, et que même les sources en terre ferme ne sont réellement pas très fréquentes, comment se comportent alors les habitants, et comment font-ils pour irriguer un semblable champ qui, selon vos mesures, a souvent une étendue de 30 à 40 milles carrés ? -10- Voilà: à cela J'ai à nouveau pourvu avec une autre merveilleuse plante qui se charge d'assurer de manière excellente le pénible travail de l'irrigation, et qui pour cette occasion est, elle aussi, cultivée avec beaucoup de diligence. -11- Là, cette plante est appelée *le tonneau jaillissant* et elle est très ressemblante à votre courge, seulement avec la différence qu'une telle courge pousse souvent si grande, qu'un homme de Saturne a bien à faire s'il veut voir ce qu'il y a de l'autre côté du fruit. La plante en tant que telle pousse bien souvent sur plusieurs milliers de toises en étendue sur le sol, avec un tronc dont la circonférence se mesure en toises, et se développe à partir de sa racine en de nombreuses centaines d'embranchements qui glissent dans toutes les directions possibles. -12- Ses feuilles sont parfaitement semblables à celles de vôtre plante de courge, seulement elles sont cent fois plus grandes et leur couleur n'est pas verte, mais bien plutôt bleu clair violacé, en outre elles sont toutes parsemées de petites étoiles blanc-argent. -13- Le pétiole est long de 2 à 3 toises, rond, mesurant souvent plusieurs toises de diamètre et intérieurement creux; cependant à l'intérieur des parois courent de nombreux milliers de petits canaux qui en premier lieu, nourrissent la feuille avec un suc de saveur douceâtre, et puis à travers les multiples pores des pointes qui se trouvent à la partie inférieure de la feuille elles laissent filtrer ces humeurs sous forme de gouttes, et de cette façon elles humectent le terrain qui est dessous comme par l'effet d'une petite pluie fine permanente. -14- Toutefois, en ce qui concerne la fonction irrigatrice principale celle-ci est vraiment effectuée par le fruit, car lorsque le fruit arrive même à la moitié de sa maturation, alors précisément durant la nuit s'ouvrent les pores qui se trouvent sur sa surface et les petits tubes qui y sont formés à dessein et qui font saillie à la surface; et à travers ceux-ci ensuite est poussé au-dehors, comme d'une fontaine, de tous les côtés, un liquide limpide et douceâtre; et ainsi chaque nuit le terrain est régulièrement arrosé en suffisance. -15- Et ici vous vous demanderez: Mais où ce fruit prend-il ensuite une eau si abondante ? Et à ce sujet Je vous réponds qu'une semblable plante fonctionne comme une vraie foreuse de puits artésien; car elle pousse ses racines aussi loin et aussi profondément vers le bas jusqu'à ce qu'elle rencontre un quelconque bassin souterrain d'eau; arrivée à ce point, elle se met avec la plus grande assiduité à sucer l'eau qui lui convient, et la pousse et la conduit comme le meilleur des aqueducs, épurée, vers toutes les directions possibles de son territoire extérieur de développement qui va en s'amplifiant avec beaucoup de rapidité. -16- Mais ce fruit, en de-ors de sa fonction d'arrosage, n'a-t-il pas d'autre but ou d'autre emploi ? Certes il en a, et les habitants utilisent cette courge encore à d'autres fins.
-17- Quand le fruit a atteint sa pleine maturité, alors il est scié à partir du pétiole et il est transporté par les habitants en leurs maisons. Là il est coupé par le milieu en deux parties dans le sens de sa longueur; on en extrait les graines et la pulpe, en laissant les graines destinées naturellement à l'ultérieur réensemencement, et la pulpe pour servir de pâture à ces animaux domestiques, comme les brebis, les chèvres et les vaches; mais l'écorce, qui est grosse d'environ une toise, est ensuite laissée à sécher, et ainsi elle acquiert dureté et grande solidité; quand elle est complètement sèche, la partie inférieure est communément employée comme une sorte de bateau, tandis que la partie supérieure qui est très poreuse et constituée par un ensemble de petits canaux, trouve emploi comme char, et cela d'une manière on ne peut plus facile. -18- Dans le milieu des deux côtés est pratiqué un trou, au travers duquel il est fait passer ensuite un axe bien travaillé et relativement gros et résistant, et sur les deux extrémités qui dépassent sont fixées deux roues proportionnées à la taille du véhicule. -19- De la même façon ensuite est pratiqué un second trou dans la partie antérieure, et à travers celui-ci il est fait passer, jusqu'à atteindre l'axe des roues, un autre axe faisant fonction de timon; on fixe ce timon à l'axe des roues avec un clou et on l'équipe du côté opposé d'une barre transversale longue et robuste en proportion. -20- De cette manière alors le char est ainsi déjà bel et bien prêt, et cela d'autant plus rapidement, si en plus vous pensez encore que là, les roues ne sont pas fabriquées par les mains de l'homme; mais bien plutôt à cela supplée l'art de la nature en ce que, dans ce but, est mise à profit toujours la même plante; et il ne faut rien d'autre que scier autant de fois que l'on veut le fût parfaitement rond de cette courge pour obtenir autant d'autres roues solides et déjà prêtes, ayant un diamètre de 3 à 4 et souvent 5 à 6 toises. Si enfin à la traverse fixée sur le timon on attache un bœuf, ou bien, s'il s'agit d'un voyage plus rapide, l'un de ces chiens ou de ces cerfs de trait, tout le véhicule se trouve achevé et prêt; et sur lui peuvent voyager commodément quatre habitants de Saturne et se faire transporter où ils veulent. -21- Certes, cette espèce de chariots est employée comme moyen de transport léger seulement; car ces habitants disposent aussi de chariots beaucoup plus grands et plus lourds qu'ils fabriquent en employant le bois, et que là où il convient ils revêtent et garnissent soigneusement, comme vous le faites vous avec vos chariots, d'un métal très malléable et solide qui n'est pas différent de votre fer; seulement ici il s'agit d'un métal plus compact et plus durable et qui ne rouille pas comme votre fer mais qui garde continuellement brillante sa surface comme il arrive de l'or, et il a une couleur semblable à celle de ce que vous appelez le platine, métal qui est aussi chez vous un mélange d'or pur et de fer pur. -22- Certes, il sera on ne peut plus difficile que l'un de vos chimistes réussisse jamais à reconstituer un tel mélange en usant de procédés scientifiques. Et maintenant, puisque nous avons fait la connaissance de ces deux plantes, passons à considérer une autre plante de Saturne, très étrange dans son genre et en même temps aussi très utile. -23- Cette plante représente pour vous sans aucun doute quelque chose d'incroyable, parce que sur la Terre on ne peut rien trouver de semblable, et ce que l'on appelle, *la feuille mobile* qui pousse en Amérique Méridionale, n'est pas vraiment une plante, mais bien simplement un animal. Par contre la plante de cette planète qu'à présent nous nous apprêterons à considérer est effectivement une plante migrante qui, comme le fait l'animal, se transporte d'un endroit à un autre. -24- La force qui lui confère le mouvement réside dans sa racine, qui a à peu près l'aspect d'un pied humain très déformé; seulement, elle ne possède naturellement pas de vrais doigts peut-être, ni de talon ou ce qui d'autre appartient donc à un pied; mais bien plutôt, le
tout se réduit à un tronc nu long d'environ dix toises se séparant à angle droit et dont partent dans toutes les directions une quantité de racines aspirantes et de prise, racines qui s'accrochent partout comme les vrilles d'une vigne, avec la différence seulement que ces racines restent agrippées à un point déterminé du sol tant qu'elles y trouvent une nourriture suffisante. -25- Mais quand en un endroit elles ont absorbé toutes les humeurs, alors elles se dégagent à nouveau du terrain, se tendent en avant et continuent ainsi à avancer jusqu'à ce qu'elles aient atteint un autre endroit du terrain riche en humeurs; ensuite elles pénètrent à nouveau activement dans le terrain en le perforant, s'entortillent dans le sol humide autour d'autres herbes et d'autres plantes, et moyennant cet entortillement tirent derrière elles toute la plante. Par suite de l'intense activité de cette racine-pied, une plante de ce genre réussit souvent dans le cours d'une année à accomplir un voyage de plusieurs milles selon vos mesures. -26- Mais quelle est vraiment l'aspect de la plante elle-même ? Voilà, la plante en tant que telle a un tronc haut de 4 à 5 toises qui, déjà à la hauteur d'une toise au-dessus du terrain envoie des branches, dont quelques-unes partant de chaque côté du tronc poussent vers le bas jusqu'à atteindre le sol, protégeant ainsi toute la plante contre un renversement possible. -27- Ces branches sont d'ordinaire nues et absolument dépouillées de feuilles; mais celles qui poussent vers le haut avec de nombreuses sinuosités portent des feuilles, des fleurs et du fruit, toutes choses qui ont une assez bonne ressemblance avec les parties correspondantes de votre vigne; cependant, les feuilles sont naturellement beaucoup plus grandes et de couleur bleu-clairet leur partie inférieure est parsemée de loupes rouges. Ensuite le fruit est parfaitement semblable à cette espèce de vos vignes que vous appelez *Gaisdutte*, seulement la couleur n'en est pas bleue, mais bien jaune-orange, et les grains sont servitransparents comme ceux de vos raisins blancs. -28- Voilà donc comme se présente cette plante merveilleuse de Saturne, et elle a outre tout cela l'avantage qu'elle n'a absolument pas besoin d'être cultivée, mais bien plutôt, elle se cultive elle-même de la meilleure des façons, se fournit elle-même et prospère. Mais afin qu'auprès des habitants de cette planète ne surgissent pas des litiges pour la propriété d'une semblable plante que chacun désire fortement, c'est-à-dire, dès lors qu'elle donnerait des signes de vouloir diriger ses pas vers les terrains d'un voisin, les habitants eux-mêmes la plantent surtout au milieu de leurs possessions; ou bien ils la placent autour de leurs *arbres de la pluie*, où ensuite elle s'établit tranquillement et ne se déplace plus ni de ci ni de là, étant donné que ses racines se trouvent là pourvues de nourriture; et quand bien même se présenterait le cas, de temps en temps, où elle serait contrainte d'émigrer, elle ne pourrait pas aussi vite passer sur les terrains de quelques voisins, car du milieu d'une telle propriété il lui serait quelque peu difficile d'en franchir les lointaines limites, étant donné que, comme nous eûmes déjà auparavant à l'observer, une telle propriété foncière dépasse souvent en étendue deux fois votre empire. -29- Du suc qu'ils en retirent, les habitants font précisément cet usage que vous faites du suc de vos vignes. Ce suc contient cependant des éléments d'énergie plus grands encore que ce que nous avons déjà mentionné, et il n'est pas conservé dans les récipients dont il a été auparavant fait mention, mais bien plutôt en vue de la conservation de ce suc pousse là un fruit particulier en forme de bouteille qui n'est pas différent de celui produit par certaines de vos plantes qui pareillement se prête à servir de récipient, comme en particulier ce serait le cas de ce que vous appelez la courge oblongue; mais avec la différence qu'une semblable courge de Saturne laisserait dans l'ombre votre tonneau de heidelberg, car la bouteille formée
par une semblable courge, quand elle est parfaitement développée, pourrait contenir avec une entière commodité mille de vos *emeri*(environ 500 hectolitres) de liquide. -30- De telles courges sont là-aussi extraordinairement solides; leurs parois ont l'épaisseur d'une bonne demi-toise, et dans la partie inférieure l'épaisseur atteint même une toise entière; puis, une fois qu'elles sont vidées comme il faut - lequel travail est accompli là par un certain animal - le récipient est ainsi bel et bien prêt. En ce qui concerne la description des autres plantes et herbes les plus dignes de notes, cela est réservé à la prochaine communication; et par conséquent, pour aujourd'hui, AMEN.
CHAPITRE 6 -1Parmi les plantes, dont certaines utiles ont déjà été mentionnées, Je devrai Me limiter à jeter pour vous un coup d’œil seulement général; car faire mention en particulier et en détails de chaque plante digne d'être notée sur cette planète, ne le permettrait, ni le temps, ni l'espace, spécialement si vous considérez que nous avons à visiter encore environ 76 continents presque tout aussi grands, et quelques centaines d'îles plus petites, les très vastes régions glaciales tant méridionales que septentrionales, et ensuite seulement les pays beaucoup plus grands encore de l'anneau et des sept lunes. -2C'est pourquoi nous devons nous arrêter partout seulement sur ce qui est d'un très grand intérêt, et nous contenter, en ce qui concerne tout le reste, de faire mention simplement de ce qui a plus ou moins d'affinité avec les produits de votre Terre. Et ainsi justement en ce pays aussi dont nous parlons maintenant, il y a en nombre sans fin des classes de plantes de toutes sortes, qui en partie ont une ressemblance avec chaque plante de votre planète, mais qui pour une autre partie sont par contre tout à fait étranges, ou bien mieux encore, qui sont tellement une particularité de Saturne que de semblables on en trouve sur aucune autre planète. -3En ce qui concerne les plantes semblables à celles de votre planète, la différence en général tient seulement en ce qu'elles, sans exception, dépassent les vôtres de cent fois en taille et en luxuriance, chose pour laquelle il arrive aussi que ces merveilles de la végétation, dont sur la Terre vous pouvez vous apercevoir seulement en faisant usage du microscope, se rendent là très bien visibles librement et sans l'aide de microscopes, en toutes leurs multiples magnificences. -4La seconde différence est celle de la couleur, parce que là, au lieu de votre vert, domine surtout une couleur d'un bleu-clair et brillant dans toutes ses gradations, à peu près comme on rencontre dans votre Amérique, où là aussi en plus d'une plante le bleu se rend plus visible que le vert, et la couleur verte elle-même s'approche plus du bleu que du jaune; cette dernière couleur étant réellement la plus éloignée de la couleur de la vie. -5Une troisième différence encore tient en ce que les fleurs de ces plantes de Saturne sont en premier lieu beaucoup plus grandes et plus riches en contenu; et en second lieu que la vivacité des couleurs est souvent augmentée comme par l'effet d'une transparence brillante provoquée par un substrat métallique poli. -6En ce qui concerne le fruit de semblables plantes, pour celui-ci aussi la différence consiste en ce que, un grain de blé ou de maïs, par exemple, se développe sur Saturne de manière si grosse, qu'il peut en faire 100 et même parfois 1000 des vôtres, et que le nombre des grains d'un épi est de plus de dix fois et même cent fois plus grand que dans les vôtres. -7Un semblable plus grand rendement est cependant aussi nécessaire sur cette planète, étant donné qu'une récolte d'une demi-année a là la même signification qu'aurait chez vous sur la Terre une plante qui porterait du fruit tous les quinze ans une seule fois; motif pour lequel aussi, un garçonnet de dix ans de Saturne représenterait pour vous un vieillard d'un âge on ne peut plus inhabituellement avancé. -8Ce sont donc les différences essentielles que l'on peut constater en ces plantes de Saturne qui, toutefois en proportions très réduites, prospèrent aussi sur votre planète. Si vous voulez un peu réveiller votre imagination, il suffit que vous preniez une plante terrestre;
représentez-vous la en chacune de ses parties cent fois plus grande, de couleur différente comme décrit auparavant, et ornée de toutes les autres magnificences d'une plante comme si elles étaient révélées par un microscope, et de cette manière vous pourrez vous faire une idée, certes assez vague encore de la végétation de ce corps de l'univers. -9Cependant là, particulièrement dans les hautes régions montagneuses, poussent encore d'autres plantes et des herbes médicinales de nature extraordinaire, dont le pouvoir curatif éthéré-aromatique est si grand et agit à une telle distance que, non seulement elles maintiennent ces habitants toujours dans les meilleures conditions de santé, mais elles influent aussi avec leurs émanations salutaires à une distance de plus de mille millions de milles à travers l'éther, de manière que, par exemple, vos plantes médicinales, particulièrement votre genévrier, votre sureau et autres plantes de ce genre munies de piquants, puisent à cette source une partie considérable de leur arôme curatif éthéré. -10- Il est nécessaire que Je vous décrive un peu plus en détails une espèce de ces herbes saturniennes de haute montagne. Cette herbe est appelée là *hellathurianga*, ce qui correspond à *arbuste d'or aux mille feuilles*. -11- Sur Saturne, elle pousse immédiatement sur la roche nue, et sa tige atteint souvent la hauteur de 3 à 4 toises; autour de cette tige se trouvent, disposées en séries montant comme les volutes d'un escargot, ordinairement 1000 feuilles de couleur rouge-clair de forme ovale allongée, longues bien souvent de 5 à 6 pieds et large de 2 pieds, parfois même 3. Les bords de la feuille ne sont pas lisses, mais de ceux-ci partent au contraire des pointes longues de quelques empans, et précisément depuis la base de la feuille jusqu'à sa pointe il y en a régulièrement cent; et par conséquent des deux cotés de la feuille deux cents en tout. -12- De telles pointes sont de couleur bleue assez sombre qui vers les extrémités tend à se faire toujours plus claire; et cette pointe plus longue que les autres, qui se trouve à l'extrémité de la côte médiane porte à son sommet un paquet de piquants qui est rouge comme l'est la feuille elle-même; la partie supérieure de la feuille a une teinte rouge comme l'a chez vous un fer chauffé au rouge, ou bien un charbon ardent sous l'action d'un doux courant d'air, et elle émane aussi en réalité une splendeur telle que celle du feu. -13- La partie inférieure de la feuille est recouverte de poils longs d'un demi-empan, qui en s'éloignant de la feuille prennent successivement toutes les couleurs de l'arc-en-ciel, de sorte que sous chaque feuille, en regardant à quelque distance, on découvre déjà un brillant arc-en-ciel dont la splendeur, quand on s'en approche, doit naturellement augmenter, étant donné que le scintillement des couleurs frappe les yeux d'une manière toujours plus concentrée. -14- Le fût, ou tronc de la plante, apparaît comme s'il était fait d'or de teinte sombre, et il s'élève au-dessus de la zone des feuilles bien souvent encore sur une demi-toise; et là ensuite apparaissent diverses fleurs déjà fanées, et d'un autre côté, de nouveaux boutons qui les remplacent continuellement. -15- La fleur n'a de ressemblance avec aucune fleur de votre Terre; mais elle se présente comme une balle d'une couleur rouge-doré ayant une circonférence correspondant au diamètre d'une demi-toise, et sur laquelle il y a comme si y avaient été accrochés des bras humains parfaitement formés; avec la différence que, de l'extrémité du bras, au lieu de 5 doigts inégaux, partent dix rayons pointus ayant l'apparence de l'or, qui ont presque l'aspect, comme si quelqu'un ayant voulu dessiner une main étendue y avait ajoute au lieu des doigts, la moitié d'un disque solaire avec dix rayons partant de celui-ci. -16- De ces pétales, autour d'un semblable bouton, il y en a cinq, qui pointent droit depuis la ceinture médiane de ce bouton sphérique déjà mentionné; de sorte qu'une demi-
sphère en vient à se trouver dans le calice de la fleur. Du milieu de cet hémisphère partent deux étamines, l'une grosse comme la moitié d'un bras humain et l'autre n'ayant pas plus d'un pouce de diamètre; la plus fine représente l'organe femelle, tandis que l'autre est l'organe mâle; l'organe femelle est de couleur blanche et le mâle de couleur rose. -17- Tous les deux font saillie du calice de plus d'un demi-mètre et pendent pour ainsi dire vers la Terre; bien entendu sans la toucher. L'organe femelle se termine par une espèce d'entonnoir tourné vers le haut, au-dessus duquel se penche celui mâle pourvu à l'extrémité d'une ouverture. -18- L'étamine mâle laisse tomber continuellement, de temps en temps, une goutte d'humeur très parfumée en celle femelle, et cela constitue proprement l'acte générateur de la fleur; l'organe femelle absorbe ensuite en lui cette humeur et suite à cela met au jour la graine de cette plante qui est extrêmement chargée d'énergie. -19- L'étamine mâle reçoit cette humeur éthérée des pétales, tandis que ceux-ci à leur tour le reçoivent des feuilles de la plante dont il a déjà été fait mention. En ce qui concerne la couleur des fleurs, les pétales sont parfaitement blancs, plus encore que votre lys; le demi-disque attaché au bras en forme de main étendue, comme il en a été fait mention plus haut, a cependant l'aspect comme s'il était fait d'un rubis ouvragé et un peu sillonné de veines; les rayons apparaissent parfaitement comme de l'or transparent. -20- Cette fleur, ou mieux cette plante médicinale fleurit et pousse également en n'importe quelle saison, de sorte qu'elles ne viennent jamais à y manquer; si, ici ou là, une plante ou une autre est enlevée par les habitants, bien vite à sa place en pousse une autre. Quand elle est en pleine floraison, cette plante diffuse autour d'elle un parfum si délicieux, que pour vous il ne sera jamais possible de vous en faire même une lointaine idée, car sur votre Terre il n'existe rien qui ait un parfum semblable, et, en comparaison, même votre rose ne peut donner à l'odorat une autre sensation que celle d'une chose pourrie. -21- Si une semblable plante médicinale en pleine floraison pouvait faire, même une seule fois, son apparition en quelque lieu de la Terre, par suite de l'intensité de son extraordinaire parfum elle obtiendrait le résultat de charger de l'odeur la plus délicieuse toute une région comme l'est votre province; car s'il n'en était pas ainsi, comment l'influence aromatique curative d'une semblable fleur pourrait-elle s'étendre même aux régions planétaires lointaines. -22- Mais pour vous convaincre qu'il en est effectivement ainsi, il suffit que vous interrogiez une personne aux nerfs très faibles et malade dans son âme, quand elle se trouve en rapport animique d'influence réciproque avec cette planète et elle vous dira ouvertement comment elle perçoit de façon très marquée le bienfaisant effet d'une telle plante médicinale qui pousse sur la dite planète encore que très lointaine. -23- Cette plante est gardée avec le plus grand soin par les habitants de la planète, mais par contre peu en recueillent; car ils jouissent du pouvoir bénéfique et restaurateur principalement de l'atmosphère qui entoure ces plantes; ce n'est seulement que lorsque ici ou là une semblable plante s'est faite déjà très vieille et est prête à mourir - ce qui se reconnaît à la couleur blanchâtre que commencent à prendre les poils des feuilles - alors seulement ils répandent la semence de la plante elle-même sur les rochers voisins. -24- La semence de cette fleur est très petite, et ressemble à une poussière au délicat parfum plutôt qu'à une vraie semence, poussière qui est ensuite absorbée par les pores des roches, et alors ici et là pousse à nouveau une semblable plante, Une seule chose encore doit être ici mentionnée, et précisément, comment il est possible que cette plante mette des racines sur la pierre nue.
-25- La question s'explique de la manière suivante: La plante avance ses racines de tous les côtés sur un vaste terrain, de manière semblable à ce que vous appelez votre *lichen* des roches; en partant de ces racines principales qui s'étendent largement tout autour, une quantité innombrable de racines filiformes très subtiles s'insinuent avec une action perforatrice à l'intérieur des pores de la pierre et tiennent le tronc de cette plante si solidement fixé sur la roche nue, qu'il n'y a pas une force humaine capable de l'en arracher. -26- Mais à présent on demande ce que peuvent sucer ces racines de la pierre aride et dure ? Voici: le processus se déroule grâce à une force particulière propre à cette plante, qui est comme un vrai feu dissolvant et qui se manifeste avec de très minutieuses étincelles électriques, certes invisibles à l’œil nu, qui ont précisément la force qu'il faut pour dissoudre les atomes de la pierre qui se trouvent au voisinage immédiat et pour les transformer en une huile éthérée; cette huile est ensuite immédiatement absorbée par les racines, et ensuite, toujours plus purifiée, elle est conduite dans la tige, dans les feuilles et finalement dans la semence éthérée. -27- Voici que désormais vous a été exposé tout ce qu'il y a d'essentiel sur cette plante médicinale de la planète Saturne, plante on ne peut plus remarquable. Ici, réveillez donc un peu votre imagination, et sur la base de cette description véridique vous pouvez vous représenter une telle fleur pour ainsi dire matériellement devant vos yeux, et vous délecter en esprit à considérer sa magnificence et son pouvoir curatif. -28- Mais ce n'est pas la seule plante médicinale; il y en a diverses autres encore qui ont une efficacité bénéfique et curative, elles aussi justement non seulement sur la planète où elles prospèrent, mais bien encore s'étendant par les voies de l'éther même à d'autres zones planétaires. -29- Puis, éminemment dignes d'être notées, il y aurait partout sur cette planète toutes les plantes que l'on dit de métal, dénommées ici *kibri*; car, au moyen de cette végétation, les habitants de Saturne arrivent à disposer des métaux les plus purs sans besoin de faire recours à aucun processus chimique de fusion et de dépuration, étant donné que justement les métaux eux-mêmes à l'état pur sont fournis par de telles plantes aux formes des plus merveilleuses, qui poussent dans les diverses régions de la planète. -30- Il y a bien sûr ici chez vous, ça et là, des plantes qui, si elles ne sont pas réellement tout à fait métalliques, contiennent toutefois une certaine quantité de métal; mais en aucun lieu vous ne pourriez trouver une quelconque plante qui ait les racines, le tronc et les feuilles absolument de pur métal. Vous pouvez produire artificiellement quelque chose de semblable en tenant seulement une baguette de zinc à l'intérieur de plomb fondu, grâce à quoi en peu de temps il va se former ce que l'on appelle *l’arbre de Saturne*, dénommé autrement aussi *arbre de plomb*. -31- De toute façon, ce qu'ici vous pouvez produire seulement artificiellement et avec peine, et en outre encore dans la plus grande malheureuse uniformité, là, les énergies naturelles richement dotées obtiennent tout cela librement et de la manière la plus abondante, la plus variée et la plus grandiose sans que la science humaine y contribue le moins du monde, raison pour laquelle aussi les anciens sages dénommèrent cette planète Saturne; car Saturne signifie ceci: une étoile rassasiée et saturée, étant donné que le mot SATUR presque dans tous les idiomes principaux a le sens de satiété, tandis que SUR ou bien NUS apporte l'idée d'étoile migrante ou planète. -32- Vous voyez, ainsi sont les choses sur cette planète qui, à tous égards, est un monde extrêmement béni. Ensuite, pour ce qui concerne la végétation, celle-ci correspond à
l'herbe sur votre Terre; elle est sur Saturne naturellement plus luxuriante et plus grandiose que sur votre planète. -33- La couleur de l'herbe est partout bleu, et précisément avec une tendance plutôt au violet. Les tiges destinées à porter la graine, tiges qui s'élèvent bien souvent à deux toises au-dessus du sol, sont généralement blanches, mais aussi ça et là d'un vert clair, et dans ces cas aussi les grappes de la graine sont souvent d'une couleur vert-clair elles-aussi. -34- Etant donné la variété des espèces d'herbe, il y a là aussi en conséquence une variété extraordinaire dans la forme des épis et des grappes, ainsi que dans leurs couleurs et dans la conformation des feuilles. Ces prés se présentent particulièrement riches, tant en fait de variétés que de magnificence merveilleuse des fleurs, car sur un pâturage grand seulement d'un mille carré, un botaniste passionné aurait beaucoup à faire pour réaliser en 50 ans, simplement un travail de classement. -35- Particulièrement dignes d'être notées sont ces fleurs qui sur Saturne sont appelées *BRIDEN*; ce sont des espèces de fleurs de pré qui en une année changent dix fois de forme; et autant de fois la Lune de Saturne la plus lointaine accomplit sa ronde autour de la planète, ainsi que les autres lunes, tout autant de fois aussi de semblables plantes changent leur forme, et reprennent la forme précédente seulement quand toutes les lunes sont revenues dans la position qu'elles avaient avant; ce qui durant une année de Saturne se manifeste justement environ dix fois; et cela justifie aussi le nom avec lequel ces fleurs sont appelées, nom qui dans votre langage signifie *fleurs lunaires*. -36- Après toutes les espèces d'herbes et de fleurs des prés, particulièrement dignes d'attention sont les nombreuses espèces de mousses alpines qui sont appelées là *FIRBI*; car ces mousses confèrent à une zone montagneuse dépourvue d'arbres, sous la lumière du soleil, littéralement une splendeur dorée telle, qu'il est difficile de la contempler longtemps. Ces plantes de mousse de genre extrêmement varié poussent drues l'une à côté de l'autre hautes d'environ un bras sur le terrain pierreux des montagnes, et elles ont généralement l'aspect d'un tapis multicolore parsemé de poudre d'or et émanant un parfum alpin des plus merveilleux. -37- Celui qui se consacre là aux ascensions en montagne, vient à se trouver à peu près continuellement dans cette atmosphère parfumée, en laquelle viendrait à se trouver celui d'entre vous qui pourrait grimper sur le Liban, en Orient, et viendrait dans un bosquet de seuls arbrisseaux de baume, précisément au temps de la floraison; en quelle occasion aussi, quiconque entreprend de faire une récolte de telles fleurs, a l'impression de se trouver dans l'antichambre du Paradis. -38- Des hauteurs et des montagnes de cette planète il a été fait mention déjà au commencement; toutefois il faut observer encore que sur Saturne même les plus hautes cimes des montagnes sont aptes à donner vie à quelque végétation, ce qui sur votre Terre, en conséquence de l'épaisseur nécessairement moindre de l'atmosphère, constitue une impossibilité absolue. -39- Ainsi aussi les montagnes ici ne s'étendent pas en formations de chaîne ininterrompue; mais bien plutôt elles se dressent au-dessus de la plaine à peu près comme se dressent sur l'un de vos prés fauchés les monticules de foin, et elles se font toujours plus hautes d'autant plus elles s'élèvent près du centre du continent, de manière que, si quelqu'un monte sur la plus haute cime du pays dont nous avons déjà parlé, il peut jouir du panorama tout entier et balayer de l’œil commodément au-delà de toutes les autres cimes. -40- Les rochers de ces montagnes que l'on rencontre ça et là, n'apparaissent pas aussi déchirés que chez vous; mais bien plutôt ils s'élèvent d'un côté ou de l'autre du mont, comme des pains de sucre mis l'un à côté de l'autre en files, dont plus d'un atteint souvent la
hauteur de 30, 40 et même plus de 100000 pieds ; cependant même ceux-ci détonnent en comparaison de certains arbres-pyramides à leur complet développement; car bien souvent ils dominent de leur cime les sommets de montagnes même considérables. -41- Il suffit que vous compariez la hauteur déjà indiquée d'un tel arbre avec celle de la plus haute montagne, et bien vite vous vous convaincrez que cet arbre devrait être appelé plutôt une *montagne croissante*; cependant sa hauteur ne peut être comparée certes à la hauteur de ces montagnes qui souvent s'élèvent sur Saturne pour autant de quarts de milles qu'il y a de toises qui mesurent en hauteur les montagnes de votre Terre. -42- Du reste ce pays est vraiment compté parmi les plus montagneux de la planète. En dépit de cela il est aussi riche de plaines très étendues qui sont dans toutes les directions sillonnées de fleuves très beaux au cours extrêmement tranquille, qui trouvent tous leur embouchure dans la grande mer de Saturne. Comment ceux-ci sont-ils utilisés, et quelles plantes encore on rencontre sur leurs berges, tout cela vous sera éclairé la prochaine fois, et donc pour aujourd'hui: AMEN.
CHAPITRE 7 -1Etant donné que nous nous sommes déjà entretenus au sujet de la végétation de cette planète et que nous en avons considéré les très diverses espèces d'arbres et d'arbustes, avant que l'on ne passe à traiter des fleuves et des lacs de ce pays, il sera nécessaire de faire encore la connaissance d'une plante des rivières, qui prospère abondamment partout au long des berges des fleuves et des lacs, à peu près comme poussent chez vous les roseaux de marais et les autres plantes aquatiques. -2La plante en question est appelé CHAIABA, c'est-à-dire *la mousse-bateau*. Cette plante appartient au genre des cucurbitacées, avec la différence seulement que chaque fois que le tronc, durant sa continuelle croissance sur la surface du sol, est en train de former un quelconque nœud, en ce point se développent une quantité de racines de couleur blanchâtre qui pénètrent dans le sol, et à partir de ce sol, sucent ainsi de nouvelles humeurs et de nouvelles énergies, afin de se propager de cette manière, avec une d'autant plus grande vitalité et d'autant plus loin, dans toutes les directions, et particulièrement dans celle signalée: les berges des cours d'eau de cette planète. -3- Quel aspect a donc cette plante, quel fruit produit-elle et à quoi sert ce dernier ? Dès qu'une telle plante apparaît hors du terrain, elle projette un tronc élevé et très solide à peu près à la manière de vos roseaux de marais que vous utilisez dans la construction de vos maisons en maçonnerie et particulièrement dans ce que l'on appelle les travaux de masticage. Ici, le tronc pousse souvent jusqu'à la hauteur de 15 à 20 toises, sans aucune feuille, comme une perche de couleur vert-doré ; mais au sommet il porte, au début, un bouton bleu, dont éclôt ensuite progressivement une fleur d'espèce tout à fait particulière, qui a un peu l'aspect, comme si vous, à un obélisque de section transversale ronde, vous vouliez appliquer tout autour dix drapeaux. -4Ces drapeaux, qui au commencement sont enroulés, se déroulent en ayant pour hampes des tiges droites, longues de deux toises et de couleur jaune blanchâtre, et, à partir de celles-ci pendent à équidistance en flottant sur une longueur de 4 à 5 toises. Cette fleur se départissant d'une semblable longue tige est ainsi constituée que, d'une certaine manière, elle forme d'elle-même et en elle-même une sorte de fruit de cette plante, et que, pour cette raison aussi elle ne se flétrit pas si facilement, mais demeure dans le même état durant des années. -5Le fût même, ou pour mieux dire le tronc, qui près de la terre a bien souvent un diamètre de 1, 2 et même jusqu'à 3 brasses, est à l'intérieur parfaitement creux, mais malgré cela il est solide comme s'il était fait de métal. Quand cette perche a atteint un état de consolidation qui correspond à la demi maturité, alors à la racine commencent aussitôt à se développer des protubérances qui ensuite croissent rapidement et abondamment en serpentant sur le terrain et qui sont, elles-aussi, de couleur vert-doré mais un peu plus pâle. -6De ces rameaux serpentants et ronds se répartissent à chaque tronçon des feuilles grandes et larges sur de hauts pétioles. Le pétiole de ces feuilles est bleu verdâtre, rond et creux, et il est souvent long de 1, 2 et même 3 toises. La forme de la feuille est d'un ovale obtus et elle a une longueur de cinq toises et une largeur de trois. -7La couleur en est rouge comme celle de vos plus belles roses; mais sur les bords la feuille est sur une largeur d'environ deux brasses bordée comme chez vous apparaît un bel arc-en-ciel aux teintes vives. La surface de cette feuille brille comme si elle était d'or bruni et bien poli, et en particulier ses bords resplendissent majestueusement. La surface
inférieure de la feuille est complètement de couleur bleu-sombre et totalement recouverte d'un duvet comme de très fine soie, longue d'un empan, pendant de la feuille elle-même et d'une teinte comme l'est votre indigo de qualité très pure, mais celui-ci est quelque peu plus clair. -8Le pétiole de cette feuille est lui aussi de couleur vert-doré, et précisément comme si vous recouvriez une feuille d'or bien poli avec une légère couche de couleur vertpâle; il est parfaitement lisse et là où il se détache du tronc il a souvent un diamètre de 1 à 2 brasses. -9Mais au point où il sort du tronc, il est entouré d'une sorte de couronne à pointes à peu près comme est formée chez vous ce que l'on appelle une couronne de fer; seulement de telles pointes sont plutôt nombreuses et toutes d'une forme ronde parfaite et de couleur d'un blanc éblouissant. -10- A peu près à la hauteur du troisième segment du pétiole s'épanouit ensuite sur une tige longue et robuste une fleur très singulière. Cette fleur ressemble parfaitement à l'une de vos grandes cloches qui aurait à l'ouverture un diamètre de 4 à 5 toises et d'environ une ou une toise et demie à la partie inférieure où la cloche se ferme. -11- Cette fleur pousse en toutes ses parties de forme aussi ronde que si elle avait été travaillée par le tourneur le plus expert; seulement elle se différencie d'une cloche en ce que leur large bord est garni avec des pointes longues de quelques brasses qui poussent vers le haut, situées régulièrement l'une à côté de l'autre à la manière de dents de peigne. La fleur est de couleur jaune intense, tandis que les pointes ont une teinte rouge-clair. -12- Du milieu de ce calice en cloche s'élève une colonne d'un blanc éblouissant qui fait saillie hors du calice et est haut comme deux fois la fleur-cloche elle-même, compte tenu aussi des pointes dont il fut parlé ci-dessus. Cette colonne est l'étamine, ou l'organe mâle de la fleur, tandis que les pointes sur le bord de la cloche en constituent proprement les pistils ou organes femelles. -13- Quand l'étamine a atteint le parfait état de maturité, elle commence à lancer de petites étoiles lumineuses, qui sont ensuite attirées et absorbées, comme si elles étaient des étincelles électriques, par ces pointes femelles, et ce processus constitue aussi vraiment l'acte fécondateur de cette plante. -14- Quand le processus de la fécondation est arrivé à un degré suffisant de maturation, cette fleur massive se fane et tombe au bas de la tige sans rien changer de sa forme; puis elle est récoltée avec soin, car, étant faite d'une matière très élastique et moelleuse, ces habitants s'en servent pour rembourrer toute sorte de sièges et de couchettes. Cependant les pointes en sont enlevées, et comme elles sont extrêmement dures et solides, elles sont employées comme clous. -15- Mais à présent on demandera: Quelle espèce de fruit en sort-il? Je vous le dis: le fruit le plus merveilleux de ce monde. Car, pour aussi invraisemblable et sotte que puisse apparaître le chose, il reste toutefois le fait que cette plante produit à la fin comme fruit un vrai bateau; mais vous ne devez pas déjà penser qu'il s'agisse d'un bateau comme les vôtres qui peuvent couler à pic avec équipage et cargaison, ce qui constitue une impossibilité absolue pour de tels bateaux naturels; et vous pourrez vous en convaincre quand vous seront mises en lumière avec une plus grande précision les particularités d'un semblable fruit. -16- Voici comment se déroule le processus de formation du fruit: Après que la fleur soit tombée, comme c'est le cas de vos courges, fleur qui se trouve vraiment déjà pendue au fruit visible, le fruit-môme commence à se développer avec une grande rapidité et dans des proportions colossales, précisément comme si vous faisiez confectionner un grand œuf en
feuille métallique très subtile, et puis que vous le comprimiez de dessus, mais cependant pas dans le sens d'une pointe vers l'autre, mais bien plutôt dans celui de la longueur; toutefois toujours de manière que la partie supérieure comprimée ne vînt pas toucher celle inférieure, mais qu'au contraire entre l'une et l'autre paroi il restât encore un relatif espace vide. -17- Et maintenant imaginez-vous cette forme appliquée à notre fruit qui justement pousse en ayant l'aspect d'un œuf rendu convexe-concave par la compression et qui, à l'état de complète maturité, atteint souvent une longueur de 30 à 40 toises et une largeur de 15 à 20 toises. -18- La distance entre la paroi supérieure comprimée et celle inférieure s'élève d'habitude à 1, 2 et jusqu'à 2 toises et demie. Quand le fruit s'est fait parfaitement mûr, ces parois ont chacune une épaisseur de 2 et jusqu'à 3 brasses et sont plus résistantes que si elles étaient de métal. -19- Quand il est mûr, le fruit se détache de lui-même de sa tige dans laquelle se cache la véritable graine de forme circulaire. Dans le fruit-même il n'y a rien comme contenu en dehors d'un fluide gazeux très subtil, et c'est pourquoi aussi il arrive qu'un semblable fruit acquière une telle légèreté, que même un enfant peut d'un petit effort le soulever de terre et le traîner. -20- Le bord de ce fruit est pourvu tout autour d'une frise de facture très particulière qui fait saillie bien souvent d'environ 2 toises au-delà du fruit proprement dit, et qui a à peu près l'aspect des nageoires de vos poissons; cependant. il est en chaque point du fruit également formé en éventail et élastique, mais en même temps résistant à un tel degré qu'à personne il n'est possible d'en arracher avec facilité un morceau. Eh bien: ce fruit, tel qu'il est et se trouve, il est aussitôt placé sur l'eau et utilisé comme embarcation presque indestructible. -21- Et afin que les habitants de Saturne puissent gouverner cette embarcation en n'importe quelle direction à leur gré, il est employé par eux le fruit principal dont nous avons fait mention auparavant, au moyen duquel ils dirigent le bateau à peu près comme vous guidez vos barques fluviales; seulement le fruit en question a l'avantage d'être en premier lieu très léger, et en second lieu qu'étant creux, il n'y a absolument pas de nécessité pour se déplacer de l'appuyer contre le fond, mais bien plutôt c'est l'eau elle-même qui provoque la résistance nécessaire; parce que le volume de l'eau déplacée pèse plus que la portion correspondante immergée de la tige creuse; et ainsi arrive-t-il que c'est l'eau elle-même qui oppose une résistance à la pression d'une semblable tige vide. -22- Certes, dans ce but, de la tige sont sciés les fanions dont il a été fait mention auparavant, fanions que ces habitants savent utiliser avec art comme gracieux ornement en les fixant tout autour sur le bord de ces embarcations naturelles. - Un autre système pour mettre en mouvement le bateau est ensuite le suivant: ils prennent les feuilles de cette plante, déjà décrite avant, et ils en font des voiles; pour obtenir ce but, ils n'ont rien autre à faire que de scier une semblable feuille avec son pétiole et sa couronne à pointes se trouvant au-dessous, et en se servant du suc visqueux d'une autre plante, de la fixer sur le fond du bateau si solidement, que même un ouragan du type de ceux de votre planète ne serait pas en mesure de la briser. -23- De cette façon, vous voyez, l'embarcation se trouve désormais prête, et celle-ci en cas de nécessité extrême est capable de porter de 10 à 20 habitants de Saturne; mais ces habitants réunissent aussi artificiellement beaucoup de semblables embarcations et en font un immense bateau en ordre, en comparaison duquel vos vaisseaux de ligne feraient figure de véritables jouets à l'usage des enfants; car sur les fleuves les plus larges, sur les lacs et sur les mers souvent sont mis et attachés des milliers de ces embarcations.
-24Sur ce radeau extrêmement colossal sont ensuite construits des édifices très légers et de structure vraiment merveilleuse, au point même qu'un semblable groupe d'embarcations a ensuite plutôt l'aspect d'une importante ville que d'un véritable bateau. -25- Et ainsi vous avez tout ce qu'il vous faut pour connaître ce fruit merveilleux. Réveillez même ici un peu votre imagination, et certainement vous en resterez hautement et on ne peut plus agréablement surpris. Il est seulement nécessaire d'ajouter encore une chose, à savoir, en ce qui concerne la couleur de ce fruit, qui est vraiment, entre toutes ses particularités la plus inimitable, car elle ressemble tout à fait à ce brillant de la peau de votre brochet, et même d'aspect le fruit est écailleux comme ce poisson.
CHAPITRE 8 -1Etant donné que la dernière fois nous avons fait la connaissance de l'une d'entre les meilleures plantes de cette planète, il ne nous reste que peu d'autre chose encore à mentionner à son sujet, et précisément avec quelle fréquence on la rencontre et combien de semblables fruits elle peut porter en une saison. Cette plante prospère avec une extraordinaire fréquence à proximité des fleuves et des lacs, et particulièrement au long des rivages très étendus de la mer; au cours de la période d'une année de Saturne elle porte deux fois des fruits, rendant à chaque fois de 4 à 500 fruits. -2Mais sur cette planète, ou plus particulièrement en ce pays de la planète, nul ne peut revendiquer sur liste administrative un droit de propriété sur ces plantes, mais bien plutôt à cet égard est normative une sentence existant déjà anciennement chez vous, sentence qui dit: *Primo occupanti fiat jus*. -3Donc, qui a besoin d'une ou plus de ces semblables plantes, s'en va là où elles poussent et cueille ce dont il a besoin; et ce qu'il a recueilli est sa propriété absolue, et personne n'est disposé à lui disputer une telle propriété pour la raison on ne peut plus simple et suprêmement morale que là, partout, chacun se considère toujours le moindre et le plus petit parmi tous; ce qui sera traité et mis en lumière de plus près encore lorsque nous en viendrons à parler du genre humain sur Saturne; et maintenant nous passerons à donner un coup d’œil aux eaux de cette planète et en particulier à celles du continent principal que nous connaissons. -4En ce pays, il y a quelques milliers de fleuves très grands et larges, qui presque tous tirent une origine commune de la très grande montagne que nous avons déjà mentionnée et se dressant au milieu du pays même. Mais pour pouvoir rendre compréhensible une telle possibilité, il ne faut pas que vous vous imaginiez que le pied de cette montagne est semblable à celui d'une montagne de votre Terre; mais bien plutôt vous devez calculer que la circonférence de cette montagne en tout son développement régulier inclue à sa base une superficie presque plus grande que celle de votre Europe toute entière. -5Et maintenant vous pourrez éventuellement bien comprendre combien de sources peut alimenter un semblable colosse montueux. Mais comme cette montagne, en dépit de toute sa hauteur et de son étendue, à sa base, a la forme d'un cône presque parfait interrompu dans la régularité de sa ligne seulement par les rochers déjà mentionnés avant et émergeant ça et là des flancs de la montagne, ainsi que par des cavités formées par les nombreuses et abondantes sources, on peut bien comprendre comment les eaux jaillissant d'une semblable montagne doivent s'écouler dans toutes les directions possibles, et comment, arrivées à la plaine, grossies en outre, comme cela arrive aussi sur votre Terre de la contribution copieuse des sources des autres montagnes, elles doivent ensuite se déverser placidement dans les océans. -6La différence entre les fleuves terrestres et ceux de Saturne consiste avant tout en ce que ces derniers ont tous une égale vitesse de débit, ou bien une même inclinaison, chose qui trouve sa raison dans le fait qu'il n'existe là en aucun lieu ce que l'on appelle des hauts plateaux; mais bien plutôt on ne trouve que des montagnes, des vallées plus ou moins larges, et enfin aussi des plaines très étendues, qui toutes sont presque élevées d'un niveau parfaitement identique au-dessus de la mer, et l'inclinaison du terrain en partant des plages jusqu'au pied de la montagne centrale, atteint partout également au maximum mille toises,
inclinaison assez douce par l'effet de laquelle même les fleuves doivent avoir tous la même vitesse de courant. -7Parmi tous les nombreux fleuves et torrents de cette planète, J'entends attirer votre attention seulement sur quatre, et ce pour le motif que ces quatre sont les plus importants entre tous, et ont marqué leur lit jusqu'à la mer en ligne si droite, qu'il semble que leur cours ait été réglé avec l'aide d'un cordeau tendu du pied de la montagne à la mer. -8Là où ils naissent, ils sont déjà plus grands que votre Danube au point où il se jette dans la Mer Noire, et puis ils vont en augmentant continuellement en largeur; quand ils arrivent enfin à la mer, chacun de ces fleuves atteint en largeur 200 de vos milles, et ils se différencient de vos fleuves et de vos torrents seulement en ce que leur lit est tout au long du parcours d'une égale profondeur; c'est pourquoi les eaux d'un semblable fleuve ne sont en aucun lieu, ni plus hautes ni plus basses qu'elles ne le sont au point où elles jaillissent, c'est-àdire où elles commencent à s'éloigner du pied de la montagne; car, même lorsque plus tard elles sont grossies des eaux de diverses autres provenances, le fleuve va simplement s'élargir mais il ne se fait jamais plus profond. -9Certes, en vous naîtra ici la pensée et vous demanderez: Comment un phénomène de cette espèce ? - Et Je vous réponds qu'il n'y a pas de possibilité plus facile à se rendre évident ce phénomène; car si le fond est constitué par une surface droite et intacte, déclinant partout sous le même angle, surface sur laquelle est déposée une couche de terre partout parfaitement égale due à l'activité des eaux déjà depuis leur origine, comment pourrait se manifester une quelconque inégalité dans la profondeur du lit du fleuve étant donné une semblable uniformité de conditions ? -10- Mais afin que vous ayez à considérer la chose avec une attention d'autant plus grande et puissiez d'autant plus radicalement la comprendre, il est nécessaire de vous faire une légère mention du fait que cette planète, à l'époque de la destruction universelle des mondes, dont vous eûtes connaissance déjà quand J'eus à vous raconter la chute d'Adam, en ce qui concerne celle-ci qui en sa masse existe encore, elle resta complètement intacte dans sa constitution; mais, antérieurement à cette époque elle avait été beaucoup plus grande. -11- Mais quelle taille elle a eu : ses anneaux actuels vous le montrent; parce que le pourtour de l'anneau extérieur marquait alors la limite de la surface de cette planète; mais à cette époque la planète fut pour ainsi dire secouée à gauche et à droite, c'est-à-dire au nord et au sud, de façon telle que tant la calotte septentrionale que celle méridionale furent comme deux immenses coquilles creuses lancées dans l'espace sidéral infini, pour la raison que sur ces deux parties le perfide serpent avait aussi engendré sa mauvaise race avec une certaine abondance. -12- Seule la zone médiane torride était restée pure, et c'est pourquoi aussi elle fut conservée, en souvenir éternel que le Grand Architecte des mondes peut maintenir un corps de l'univers, même quand il ne se trouve plus dans l'état de sa première perfection planétaire. -13- Et maintenant vous voudriez certainement savoir comment est donc né le présent corps planétaire beaucoup plus petit qui se trouve à l'intérieur de l'anneau ? - Et Moi Je vous dis en réponse de très bien ouvrir vos yeux et vos oreilles, et ainsi vous pourrez jeter un coup d’œil en profondeur non seulement sur la planète dont nous sommes en train de parler mais bien encore sur tous les corps de l'univers. -14- Parce que cet actuel corps planétaire à l'intérieur de l'anneau existait déjà avant l'arrachement des coupoles, précisément comme ce serait le cas de votre Terre dès lors que lui seraient enlevées les deux calottes; car, même à l'intérieur de votre Terre se cache une autre
sphère plus petite, et en cette petite une troisième plus petite encore, lesquelles sont séparées entre elles seulement par des couches gazeuses et liquides ou de feu. -15- L'actuelle planète Saturne représente vraiment déjà la sphère du milieu, étant donné que l'anneau témoigne de l'existence passée déjà de deux sphères plus extérieures, et précisément là où elle se présente divisée en deux anneaux concentriques parfaitement détachés l'un de l'autre. -16- Et ainsi en Saturne vous avez d'une certaine façon l'occasion d'observer un corps de l'univers comme vous pourriez le faire à peu près avec une pomme qui aurait été coupée par moitié, de manière que les parties rendues visibles par la coupe vous montrent aussi la construction mécanique intérieure d'un corps de l'univers; seulement, en ce qui concerne la planète actuelle elle-même, celle-ci, certes, n'est pas visible jusqu'en son centre, cependant le rapport reste toujours le même, car, même cette planète visible présente ensuite en son intérieur la même construction, et précisément dans le même rapport-comme cela apparaît dans la partie de la surface de l'anneau le plus extérieur-que celle de l'actuelle planète visible. -17- Car, en admettant que la planète perdît encore une fois ses calottes, il s'en serait formé un autre anneau plus petit encore à l'intérieur duquel resterait suspendue une planète plus petite et à son tour parfaitement ronde, comme c'est le cas de la planète actuelle à l'intérieur de l'anneau plus grand. -18- Pour peu que vous cherchiez à aiguiser le pouvoir de votre intelligence et de votre sensibilité, cela ne manquera pas de se faire en vous toujours plus clair et plus évident; mais de cela vous reconnaîtrez aussi combien il est facile pour Ma Puissance, dès lors que cela se rend nécessaire, de rapetisser ou même d'agrandir un semblable corps de l'univers. -19- Si vous pouviez observer tous les corps de l'univers qui existent dans l'espace infini de la Création, en vérité, vous tomberiez sur des formes que votre esprit même en très pleine lumière ne serait absolument pas capable de comprendre; car, si déjà vous, les hommes, avec les forces spirituelles très limitées qui sont à votre disposition, vous pouvez donner une variété considérable à vos créations laborieuses, Je serai bien Moi aussi capable d'être varié dans Mes immenses espaces de la Création, et à cet égard Ma grande imagination n'aura certainement pas besoin, comme peut-être certains de vos savants le croient, d'aller à l'école chez vous, ni il n'y aura pour elle nécessité de fréquenter tout bonnement quelque soi-disant cours d'esthétique. -20- Car, combien est riche d'imagination votre Créateur, vous en fournissent déjà la preuve toutes les plantes, les animaux et les minéraux de votre Terre, preuve qui certes en comparaison de tant d'autres est on ne peut plus misérable et maigre. Sur notre Saturne vous pourrez constater qu'il y a déjà quelque chose de plus varié, et plus encore, et même immensément plus, sur un Soleil; parce que si même sur Saturne les choses doivent vous apparaître extrêmement merveilleuses, que diriez-vous et quels yeux feriez-vous si Je vous accordais de jeter un regard sur le Soleil ? -21- Mais pour le moment nous nous trouvons encore sur Saturne, et ici il y a encore beaucoup à voir; quand vos yeux auront ici admiré à satiété, alors il sera d'abord laissé à votre fantaisie et à votre meilleure imagination de juger si elles seront capables de s'élever à quelque chose de supérieur encore. -22- Car, notez-le bien, nous avons commencé par Saturne qui représente donc pour nous le N° 1, et vous savez que J'offre toujours en dernier le vin le meilleur; et donc, non pas comme ont l'habitude de le faire chez vous les aubergistes malhonnêtes qui au premier verre de la fête grisent les hôtes assoiffés, et au dernier, au lieu d'un vin meilleur, servent de leur
vinaigre fortement arrosé; comprenez donc bien quelle signification ont Mes Paroles quand je vous dis: Nous avons commencé par le N° 1, et c'est pourquoi J'ajoute: -23- Quand nous serons prêts avec notre planète, alors 'on verra bien si votre fantaisie et votre meilleure imagination sont aptes à des vols plus élevés encore; étant donné qu'en ce qui concerne la progression de l'élevé au plus élevé encore il y a une gradation infinie qui n'a jamais de limite; pour Moi il n'existe en aucun lieu un troisième degré de comparaison, mais bien seulement le second, ce qui veut dire qu'une chose est toujours située plus en haut que l'autre, et qu'elle est dotée d'une plus grande splendeur que l'autre, et qu'en aucun lieu il n'existe quelque chose d'extrêmement magnifique, c'est-à-dire, à ne jamais pouvoir être dépassé en magnificence par quelque chose d'autre. -24- Car Moi Seul suis *L'Inatteignable * et le Suprême. Donc, quand vous aurez déjà admiré celui-ci et cette magnificence des corps de l'Univers, alors seulement il vous sera accordé de donner un très léger coup d’œil à Mon Ciel; et ce coup d’œil, malgré sa très brève durée, sera tel, qu'il anéantira complètement le retour à toutes les magnificences montrées sur les corps de l'Univers. Car si Mes Œuvres se révèlent de majesté si infinie déjà dans la matière rigide et morte, comment ne se révéleront-elles pas sublimes dans l'Esprit, là où tout est Lumière et Vie ? -25- Mais à présent revenons à notre planète, et consacrons-nous un peu à mesurer la profondeur des fleuves, des lacs et également celle des mers; et dans ce but il nous suffira partout d'une longueur de 500 de vos toises; là, presque également partout, la mer est profonde d'environ 500 toises, seulement la hauteur des eaux va régulièrement en diminuant au fur et à mesure que l'on s'approche de la terre. -26- Puis, en ce qui concerne les fleuves, dans le milieu de leur largeur la profondeur de l'eau est partout également de dix toises, et, naturellement diminue toujours plus en direction des rives; seulement près des embouchures les lits des fleuves vont lentement en s'abaissant jusqu'à atteindre le niveau général de la mer. -27- Par suite de l'uniformité et de la profondeur égale des lits des fleuves et des torrents, il arrive même ensuite que chaque fleuve ou torrent offre à l’œil émerveillé l'aspect d'un miroir presque parfaitement lisse dans lequel se reflètent de manière surprenante les images du paysage immédiatement proche, comme il arrive chez vous en quelques lacs aux eaux absolument tranquilles, c'est-à-dire que, en particulier la nuit, il offre un spectacle merveilleux au-delà de tout dire, quand tous les astres se mirent dans les eaux de ces fleuves qui en réverbèrent presque intégralement la lumière. -28- En ce qui concerne ensuite les quatre fleuves principaux, dont nous avons déjà dit qu'ils divisent ce pays en quatre parties en partant de la montagne centrale que nous connaissons, et précisément de sorte que si quelqu'un se trouve sur le sommet de cette montagne, en suivant de l’œil le cours des 4 fleuves principaux il peut ensuite voir même les extrêmes limites de ce grand pays. -29- Certes, avec vos yeux vous n'arriveriez pas à autant; mais pour les habitants de Saturne cela est très bien possible, étant donné que leurs yeux par eux-mêmes voient beaucoup mieux que les vôtres même armés de la plus puissante lunette, ce qui du reste leur est nécessaire, car si quelqu'un veut là surveiller ses possessions, il faut qu'il ait aussi de bons yeux capables, étant donné la pureté absolue de l'atmosphère, de balayer avec facilité sur un territoire grand comme tout votre empire, en se tenant sur une haute montagne de votre Terre, en admettant toujours qu'ici il y eut une semblable montage dans les conditions voulues. -30- Car pour ces êtres humains, leur plus grande potentialité, ils l'ont dans les yeux à peu près dans le rapport dans lequel la possède chez vous un aigle qui, bien qu'à une très
considérable hauteur peut distinguer avec facilité un petit insecte sur les feuilles de vos plantes. En ce qui concerne encore les autres particularités de ces fleuves et des lacs, ainsi que des mers, remettons la chose à une prochaine fois, et donc pour aujourd'hui: AMEN.
CHAPITRE 9 -1L'un de ces quatre fleuves principaux qui a son cours exactement en direction du Levant, est le plus large de tous et pour ainsi dire, aussi le plus grandement peuplé. Mais vous ne devez pas penser que sur ses rives sont construits des villes et des châteaux comme sur celles de vos fleuves; car on ne trouve quelque chose de semblable en aucun lieu sur l'ensemble de la planète Saturne. La meilleure demeure des habitants de cette planète est constituée au contraire par l'arbre que vous connaissez déjà bien, sous les très nombreuses branches et sous les rameaux duquel une famille entière trouve abri. -2Toutefois, les familles demeurent séparée à peu près comme chez vous, de sorte que, en partie, elles habitent les plaines, de préférence les rives des fleuves, tandis qu'une autre partie préfère les montagnes. Par conséquent, même les rives de ce fleuve qui court vers le Levant, sont, autant à droite qu'à gauche, occupées avec une particulière abondance par de semblables arbres sous lesquels est établie la demeure permanente de diverses familles. -3Je parle ici de demeure permanente pour la bonne raison que sur cette planète un arbre semblable ne meurt pas si facilement, mais bien plutôt continue à croître et à étendre ses branches de manière telle, qu'il peut offrir un abri à une famille qui, conjointement avec sa parenté collatérale, compte souvent de dix à vingt mille personnes. -4Les fleuves, mais particulièrement celui du Levant, représentent pour ces habitants une nécessité multiple, et ce, pour les raisons suivantes, que J'exposerai par ordre d'importance: En premier lieu tous les habitants de Saturne aiment extrêmement se baigner; ils ne sont pas rares ceux qui se lavent jusqu'à sept fois par jour; en second lieu la nage représente pour eux une distraction particulièrement salutaire, car dans ce domaine des exercices physiques ils sont tous sans exception, de vrais artistes, étant donné que non seulement ils peuvent agilement nager en surface, mais bien aussi, en cas de besoin, ils peuvent très facilement y marcher dessus. -5C'est pourquoi avec une d'autant plus grande facilité ils sont en mesure d'exécuter aussi tous les autres exercices d'habileté particuliers à la nage, comme par exemple: rester couchés sur le dos sur l'eau, ou y rester assis, ou bien faire des retournements à volonté. S'ils veulent s'enfoncer, ils peuvent le faire aussi; toutefois la chose ne leur réussit pas beaucoup mieux qu'elle ne peut réussir aux oies chez vous, étant considéré que par rapport à la densité de l'eau de Saturne leurs corps sont de 40% plus légers que les vôtres par rapport à la densité de vos eaux; de ce rapport vous avez déjà la confirmation de ce que, comme il vous l'a été dit précédemment, les habitants de Saturne peuvent avec une certaine facilité se soutenir librement dans l'air, particulièrement les jeunes; de toute façon même les vieux peuvent sauter depuis la plus grande hauteur sans préjudice pour leur intégrité physique; cependant ils ne se consacrent pas trop volontiers à cet exercice pour le motif qu'après une semblable excursion dans les airs ils sont d'habitude frappés d'une sorte de vertige peu agréable. -5En troisième lieu, ils demeurent de préférence au voisinage des cours d'eau, parce que, comme cela fut déjà mentionné, à la faveur de la nuit ceux-ci offrent un spectacle enchanteur par l'effet de la réflexion des diverses lumières; en quatrième lieu, des fleuves de Saturne il souffle un air engendrant une fraîcheur particulièrement agréable dont ces habitants se délectent extrêmement; et en cinquième lieu ils demeurent de préférence le long de ces fleuves, aussi à cause de leurs animaux domestiques - que nous apprendrons à connaître
seulement plus tard - afin que ceux-ci puissent être abreuvés ainsi avec une plus grande facilité. -7Sur les montagnes par contre, les espèces les plus grandes des animaux domestiques bien rarement peuvent être maintenues à cause du manque d'eau dans la quantité voulue, parce que les sources de ces fleuves se trouvent davantage vers le pied des montagnes, et ceux qui demeurent plus en haut doivent alors se contenter de l'arbre de la pluie et du fruit riche d'eau que vous connaissez déjà. A cet égard, il convient de noter que le plus grand d'entre les animaux domestiques de Saturne consomme en une journée, calculé selon votre mesure, souvent jusqu'à mille *startine* d'eau pour éteindre sa soif, ce qui devrait vous sembler quelque peu énigmatique; mais cette vache surpasse tant en taille vos éléphants, que ceux-ci se trouvant sur son dos pourraient sans autre assurer le rôle de parasites. -8Par suite de l'extraordinaire utilité de cet animal, justement les habitants de Saturne demeurent particulièrement volontiers le long des rives des torrents, des fleuves et des lacs, afin que ce précieux animal ne vienne pas à manquer de ce qui lui est le plus nécessaire, étant donné qu'il a la particularité de boire en volume cinq fois plus qu'il ne mange; ce dont on parlera avec une plus grande précision plus tard, c'est-à-dire quand nous passerons à traiter plus spécialement des animaux. -9Bien que les hommes ici ne construisent ni villes, ni maisons, ils savent toutefois avec tant d'art et de grâce disposer les plantations de l'arbre-paroi que vous connaissez déjà, que s'il vous était possible d'admirer un semblable lieu de demeure, il vous apparaîtrait incomparablement plus beau que la plus belle et la plus grande de vos villes; car, à le voir, votre première pensée serait que ces habitants construisent leurs murs en or poli. -1o- En sixième lieu enfin, ils vivent volontiers le long des rives des fleuves aussi à cause de la navigation qui leur plaît extrêmement; car, ils ne se consacrent pas tant à la navigation pour une question de profit, que par contre pour leur plaisir et pour des raisons de santé physique; et si quelqu'un d'entre eux désire visiter d'autres îles ou des pays voisins, qui pour vous naturellement paraîtraient très lointains, lui, préfère de manière absolue, à n'importe quelle autre, la voie d'eau. -11- Vous ici, vous vous demanderez: Quel besoin ont les habitants de Saturne de naviguer si, couci-couça, ils peuvent marcher sur la surface de l'eau ? La réponse relative satisfaisante n'est pas difficile à donner, étant donné qu'ils peuvent bien sûr se maintenir sur la surface de l'eau et marcher dessus, à condition qu'ils ne soient pas chargés de quelque poids; mais si par contre ils le sont, soit même faiblement, alors aussitôt ils s'enfoncent, car le rapport de densité entre l'eau et le corps humain est pour ainsi dire calculé à une minuscule fraction; en outre, bien qu'ils puissent marcher sur l'eau, ils le peuvent toutefois seulement lentement et d'une certaine façon même en procédant avec beaucoup de précaution; et une telle capacité est là partout acquise seulement après un entraînement beaucoup plus grand que celui qu'il faut ici à vous pour patiner sur la glace. -12- Par contre, sur leurs embarcations réunies l'une à l'autre ils glissent avec une très grande rapidité sur la surface de l'eau, et précisément de façon à parcourir en toute facilité de 30 à 50 milles en une de vos heures; et pourtant ils ne disposent ni de chaudières à vapeur, ni de roue à aubes, ni ne font usage de rames, mais bien plutôt la force motrice qui leur sert tient uniquement dans leur ferme volonté et dans leur foi inébranlable, raison pour laquelle ils disposent aussi le long des bords de leurs bateaux ces pointes végétales que vous connaissez déjà, lesquelles sont ensuite au moyen de leur volonté pour ainsi dire magnétisées; et elles tirent donc le bateau en cette direction où le navigateur a dirigé le pôle contraire de sa propre volonté.
-13- Et vous voyez, une semblable force motrice est sans aucun doute meilleure que vos horribles machines à vapeur qui constituent continuellement une menace pour la vie naturelle de l'homme; de sorte que, si Je ne prenais pas, Moi, des soins au moyen de Mes anges tutélaires, en vérité, en conséquence de l'eau réduite en vapeur, vous auriez à vous lamenter de malheurs beaucoup plus nombreux et plus graves que jusqu'à présent ! Il n'y a pas de chose plus stupide que celle où les hommes mettent à profit des forces naturelles qu'ils ne connaissent en rien; parce qu'il ne suffit pas seulement de connaître sur la base de l'expérience que la vapeur qui se dégage de l'eau possède une force immense d'expansion, mais il faut aussi savoir que c'est ce qui est caché à l'intérieur de la vapeur qui constitue sa réelle puissance. -14- Des forces mortes ne sont pas vraiment des forces, mais les forces qui agissent, sont dégagées et vivantes; or, qui connaît combien d'énergie est inhérente aux esprits qui constituent les vapeurs dans lesquelles l'eau est dissoute ? En vérité, s'il n'y avait pas les anges dont J'ai parlé pour les tenir en bride, les présomptueux partisans des machines à vapeur se persuaderaient bien vite à leurs dépens sur quel terrain très friable ils ont fondé tous leurs calculs; parce que les esprits de l'eau contenue dans un seul seau, qui seraient déchaînés, suffiraient pour transformer des chaînes entières de montages en poussière et en cendre en un seul instant; de cela, vous pouvez avec un esprit croyant relever avec beaucoup de facilité à quel degré il est nécessaire que soit exercée la tutelle céleste, afin que l'humanité tout entière ne tombe pas victime de ses propres entreprises stupides. -15- Vous voyez, toutes ces folies, les habitants de Saturne ne les connaissent absolument pas, et malgré cela ils sont incomparablement plus sages que tous vos supersavants admirateurs de la vapeur et que vos éclaireurs des mers, car eux, à côté de nombreux avantages, ont aussi celui inappréciable qu'eux souvent durant leur vie peuvent traiter avec Moi personnellement, et aussi avec les anges du ciel; par l'effet de quoi, même avec un seul entretien ils tirent avantage dans leur sphère en savoir et en connaissance plus que vous avec toutes vos exhibitions culturelles et de très haute science bien souvent pires que archistupides, ou bien - pour employer l'une de vos expressions - pas même dignes de la fosse à fumier. -16- Car vraiment, toutes les vieilleries rhétoriques et doctorales de cet acabit, si l'on veut les juger à leur contenu intérieur, ne sont ni aptes ni assez dignes pour être, du point de vue naturel, classées même parmi les excréments de porcs; parce que, là où un porc s'est délivré de ses impuretés, il s'y pose bien vite des mouches qui y trouvent encore toujours quelque chose de nourrissant, de vital qui leur convient, et cela est déjà quelque chose; tandis que ce qui, particulièrement dans le domaine de la philosophie, est produit dans les salles consacrées au rationalisme et préparé avec des airs d'importance comme un aliment saturé de vérité et riche d'éléments spirituels vitaux, cela en vérité se tient infiniment au-dessous d'un semblable excrément de porc. -17- Ici Je trouve aussi opportun de vous mentionner en passant, comment souvent des esprits de votre Terre viennent en contact avec les habitants de Saturne, ce qui leur est toujours accordé, particulièrement quand ils en ont un grand désir; dans ces occasions souventefois les habitants de Saturne ont de grands éclats de rire aux dépens de semblables esprits qui se prétendent des arches de science, et ils leur reprocheront leur très mauvaise foi par suite de laquelle eux n'ont même pas connaissance du fait que le Seigneur, en tant que Créateur du Ciel et de tous les mondes, est parfaitement un Homme. -18- Car ce fait, sur la Terre n'est certes connu que de très peu de gens et de même aussi que de très peu de chrétiens seulement, et la majeure partie d'entre eux Me représente de manière les plus ridicules et les plus insensées, étant donné que pour certains Je dois finir par
prendre toutes les figures possibles; pour un autre Je dois avoir l'aspect d'un dignitaire, d'autres au contraire Me font apparaître presque nu, assis sur une nuée et avec une croix en main, d'habitude à droite du Dignitaire; d'autres encore Me représentent comme une colombe volante, dans quel cas il Me revient de devoir planer au-dessus des deux Personnes citées plus haut, c'est-à-dire, sur le Dignitaire et sur le Christ nu portant la Croix. -19- Puis ne manquent pas ceux qui Me placent en toutes les trois Personnes en même temps; avec quoi J'en suis réduit à un absurde mathématicien; en premier lieu parce que Je suis représenté en trois personnes, dont deux seulement ont figure d'homme tandis que la troisième a forme d'animal, et ensuite parce que ces trois personnes différentes l'une de l'autre ne devraient constituer qu'une Personne Divine; pour ne pas parler des autres sottises en ce qui concerne Ma représentation, alors que sur la planète Saturne toute entière il n'y a pas un être humain qui se soit jamais fait de Moi une autre représentation que celle que Je suis complètement un Homme comme n'importe quel autre homme, avec l'unique différence que Je suis L'Homme absolument Parfait, c'est-à-dire un Homme en Qui demeure en Personne la plénitude, de la Divinité. -20- Ou bien si vous ne pouviez pas comprendre une semblable chose, il suffit que vous tourniez vos considérations vers la matière, et elle vous dira d'où elle vient et ce qu'elle est, et même elle vous l'a déjà dit; par conséquent il ne vous sera pas difficile de comprendre ce que veut dire qu'en Moi, en tant que l'Homme très Parfait, demeure en Personne la plénitude de la Divinité. -21- Pour qui ne Me connaît pas comme Je suis et Qui Je suis, pour celui-là il serait mieux qu'il ne sût rien de Moi; car en ce cas Je pourrais encore le rendre vivant là dans le Royaume des esprits; mais ceux qui sont ainsi se rendent incapables de Mon aide, étant donné qu'ils tuent en eux la vie par le fait qu'ils Me détruisent et par conséquent ME tuent aussi en eux-mêmes, et qu'ils sont comme des pampres détachés de la vigne. -22- Cependant Je vous dis ceci: "Je suis l'Unique et Eternel Dieu dans Ma nature Trine, c'est-à-dire, Père, pour ce qu'il y a en Moi de divin, Fils, pour ce qu'il y a en Moi de parfaitement humain, et Esprit, pour ce qui se résume en Moi de vie, d'action et de connaissance. Je suis depuis l'éternité l'Amour et la Sagesse en Personne. Jamais Je n'ai reçu quelque chose de quelqu'un, mais par contre tout ce qui est vient de MOI, et qui a quelque chose, l'a de MOI." -23- Il résulte donc évident que ce qui a été mentionné au passage concernant les vues les plus en vogue sur ce sujet, et offert à la considération, ne peut, ni ne doit s'entendre tourné contre la VRAIE Trinité de Dieu, mais seulement contre la fausse, entortillée et presque idolâtre. L'éditeur du présent écrit, il y a déjà dix ans passés, eut à reconnaître et à confesser comme aussi chaque jour il le reconnaît et le confesse par conviction de cœur et de l'esprit basée sur la sagesse de foi, conviction par conséquent intérieure et très claire, que la doctrine de l'Eglise eu égard à la Sainte Trinité du Dieu éternellement très Saint et uniquement UN, est la vérité principale et fondamentale non seulement du Christianisme dans l'ensemble de l'Eglise confessant CHRIST, mais bien aussi en même temps de tout ce qui dans le Ciel, sur la Terre et sur tous les mondes créés vit, existe et existera. -24- Et à ce propos il est nécessaire de bien faire ressortir qu’une telle conviction très importante par rapport à toute vie spirituelle et naturelle peut être acquise de la manière la plus sûre par quiconque est axai authentique de la vérité, de la certitude et de la sagesse, à condition que, avant tout, la Trinité du Père, du Fils et de l'Esprit Saint dogmatiquement confessée par l'Eglise avec et sous l'impression de *Personnes* puisse être comprise et pensée, non comme consistant en trois Personnes l'une à côté de l'autre, mais bien l'une dans
l'autre, c'est-à-dire dans un état d'insécabilité et d'indivisibilité spirituelle suprêmement vivant, éternel et infini. -25- Et une telle conviction, que l'on peut atteindre uniquement grâce à l'humilité et à l'amour de l'esprit et du cœur envers Notre Seigneur Jésus, dans la vivacité de quel sentiment la liberté de l'esprit est avec l'aide de la grâce et de la sagesse d'En-Haut de degré en degré reconnue et promue de la meilleure des façons ; une telle conviction, disons-nous, constitue dans sa vérité pleine et intérieurement épanouie, le premier et le plus haut résultat de la vraie foi en union avec l'amour et avec l'espérance. -25- A Lui, le Fils Unique incarné de Dieu, au Seigneur des seigneurs et au Roi des rois dans le Ciel et sur la Terre, qu'aillent donc toute louange, toute gloire et toute grâce, maintenant et toujours. AMEN !
CHAPITRE 10 -1Donc, vous voyez, quand les habitants de Saturne, en face d'un quelconque esprit présomptueux de cette Terre en viennent à un discours de semblable genre, il en reste scandalisé et se met en colère, et voudrait, pour se venger, se jeter sur ces habitants afin de leur inculquer par la violence une autre foi; mais les habitants de Saturne se révèlent alors aussitôt d'une si pleine humilité, mais en même temps aussi d'une foi si inébranlable, que les esprits de cette Terre par l'effet de leur orgueil s'en ressentent complètement dégoûtés, de sorte qu'il ne leur est plus possible de tenir à l'intérieur de la sphère des habitants de Saturne, ce qui pour ces derniers est immédiatement un sûr indice que ces hôtes indésirables prendront bien vite volontairement le large. -2Des scènes semblables qui se déroulent sur ce corps céleste Je Me réserve d'en présenter à vos yeux avec une certaine clarté seulement quand nous traiterons des régions des neiges et des glaciers du corps même ou principalement ont l'habitude de se tenir les esprits des habitants de Saturne. -3Car il est nécessaire que vous sachiez que les esprits de chaque planète, en particulier quand ils ne sont pas complètement purifiés, se tiennent généralement encore à l'intérieur de la sphère de la planète même sur laquelle ils ont vécu auparavant dans un corps de chair; mais en attendant nous abandonnerons ce sujet, et nous nous remettrons à considérer les fleuves de Saturne. -4Si vous voulez vous représenter vraiment bien un semblable fleuve, imaginezvous une surface liquide tranquille s'étendant en ligne droite à perte de vue jusqu'à la mer. Représentez-vous en plus un semblable fleuve courant dans une plaine très étendue, interrompue seulement ici et là par des groupes réguliers de montagnes que vous connaissez déjà. Tenez encore présente la merveilleuse et luxuriante fertilité de ces régions riveraines: des allées entières, très longues, de ce que l'on appelle les arbres-pyramides entre les montagnes, tous les jardins enchanteurs ornés d'allées d'arbres-miroirs, des bosquets entiers extrêmement vastes d'arbres-entonnoirs au long des rives de ces fleuves, et toutes les autres espèces d'arbres, d'arbustes et d'herbes d'une exubérance extraordinaire. -5Outre cela, pensez à la population animale très merveilleuse de ces fleuves et aux oiseaux aquatiques très beaux et de toutes les espèces, qui bien souvent voltigent en groupe au-dessus de la vaste surface de ces fleuves, dans toutes les directions, et qui sont tous, sans exception, assujettis à la volonté de l'homme; et, avec l'aide de votre imagination, cherchez à compléter le tableau en vous représentant en plus de tout cela, particulièrement auprès des familles qui demeurent le long des rives des fleuves, la présence fréquente de personnages célestes, c'est-à-dire d'anges du Ciel, et comme je l'ai dit, entre autre, aussi de Moi-Même. -6Si donc vous vous représentez tout cela ensemble dans votre esprit, vous pouvez déjà vous faire une bonne idée de la magnificence immense d'un semblable paysage le long d'un fleuve, et, comme déjà dit, une particulière attention à ce sujet doit être apportée au grand fleuve aux rives très vastes qui court vers l'Orient; toutefois, spécialement en ce qui concerne la végétation, vous ne devez pas vous figurer la chose comme peut-être un mélange chaotique, mais bien comme tout disposé selon un plan dans le plus grand et dans le plus bel ordre possible; parce que là il n'est pas pourvu seulement aux nécessités animales moyennant une végétation pour ainsi dire jetée là par hasard, nais bien plutôt de ma part il est déjà pourvu
de façon à tenir compte aussi de l'ordre le meilleur et de l'esthétique; ce dont vous pouvez vous être fait déjà une petite idée lorsqu'il a été traité des arbres et en général de la végétation de Saturne. -7Mais comme se présente ce fleuve qui coule vers l'Orient, d'une manière non différente se présentent aussi tous les trois autres; mais ils n'ont pas la largeur du premier, ils n'ont pas une population aussi dense; mais de toute façon, en ce qui concerne la magnificence, ils n'ont rien à envier au premier. -8Ce fleuve, qui porte ses eaux vers le Septentrion, a le plus souvent en lui, du point de vue du paysage, quelque chose de ce que vous appelez *ROMANTIQUE*, parce que la vallée à l'intérieur de laquelle il coule, étant ici et là resserrée par les montagnes, le spectacle aussi se présente comme quelque chose de rare, étant donné que tout au long du versant des monts l’œil découvre de très nombreux pics ou mieux des tours de rocher qui semblent s'élever jusqu'au ciel, d'une couleur d'un blanc éblouissant, tous qui souvent sont ornées de cette plante médicinale que Je vous ai décrite et qui justement là de préférence à sa patrie, bien qu'elle pousse aussi ailleurs, mais pas avec autant de fréquence. Ici aussi représentez-vous les rives animées et fournies de tout ce qui a été dit se trouver sur celles du fleuve coulant vers l'Orient, et vous aurez un tableau parfait de ce fleuve et de ses rives. -9Une exception doit être faite, à savoir, en ce qui concerne ce que l'on appelle les allées d'arbres-pyramides, car à cause du terrain un peu plus rocheux de semblables arbres ne prospèrent pas bien en ces régions. Le fleuve qui coule vers l'Occident est au contraire renommé pour ses nombreux oiseaux chanteurs qui sont de véritables artistes de la mélodie. -10- S'il vous était possible de passer une soirée en ces lieux, vous vous habitueriez si mal, qu'ensuite votre musique vous ferait à peu près la même impression que des coassements de grenouille dans une mare après un splendide concert ou une grande symphonie de quelque fameux musicien, comme par exemple d'un Haendel ou autre de même valeur. -11- Vous voyez, de cette façon sur cette planète Je suis pour les oiseaux aussi un maître de musique, et vous pouvez être certains que si vos meilleurs artistes de chant pouvaient entendre même une seule fois la voix d'un semblable chanteur à plumes, ils n'oseraient plus de tout le temps de leur vie émettre même une seule note. -12- N. B. Même auprès des habitants de cette planète la musique est une faculté prééminente; cependant ils ne disposent absolument pas d'instruments de musique, et à la place ils cultivent de préférence le chant où ils excellent, et avec le chant ils ME rendent aussi de très belle manière grâces et louanges durant leurs services divins; ce qui sera éclairé de façon plus précise quand nous parlerons avec de plus grands détails de l'homme sur la planète en question et des conditions en lesquelles il vit. -13- Le fleuve qui coule en direction du Midi est à son tour hautement renommé, et ce en raison de la splendeur de ses eaux ; car la surface liquide, en particulier de jour, brille continuellement, de sorte que pour vous elle apparaîtrait comme une étendue parsemée de gros diamants bien facettés, et cela est dû au fait que l'eau, particulièrement à la surface, est d'une pureté et d'une limpidité exceptionnelles. -14- Sur Saturne toutes les eaux sont en général beaucoup plus limpides que votre plus pure eau de source; cependant l'eau de ce fleuve est tellement claire que même là où elle est à sa plus grande profondeur on peut encore toujours apercevoir n'importe quel objet avec une précision non diminuée, et tout cela produit justement le phénomène que la surface, particulièrement quand elle est même seulement légèrement ridée, scintille et jette des lueurs telles que vous ne pourriez même pas vous en faire la plus petite idée, parce que, un arc-en-
ciel chez vous est en comparaison de ce spectacle, quelque chose d'extrêmement simple et piètre. -15- En ce qui concerne ensuite la population qui vit le long des rives de ce fleuve, il faut observer qu'elle est d'une certaine manière la plus pauvre de toutes, et ce pour le motif qu'en cette région la végétation ne prospère pas aussi bien qu'en d'autres régions, à cause de l'eau excessivement crue ; bien que, comme Je l'ai dit, l'eau soit là d'une limpidité absolument extraordinaire, elle est toutefois plus dure et plus crue que celle des autres fleuves, cas qui se rencontre d'ailleurs aussi sur votre Terre, où d'autant plus limpide et froide jaillit l'eau d'une source, d'autant plus elle est crue et insuffisante en énergie fécondatrice. -16- Vous ne devez cependant absolument pas penser que les rives de ce fleuve aient pour cette raison un aspect de désert, car au contraire malgré tout elles dépassent en opulence même les plus luxuriantes régions de votre Terre ; toutefois, en limitant la comparaison à cette planète, elles ne peuvent rivaliser en beauté avec d'autres pays, particulièrement avec ceux situés le long des rives du fleuve qui coule vers l'orient. -17- Ainsi désormais, du haut de notre montagne centrale, nous aurons eu une vision suffisante des quatre fleuves principaux. Vous ne devez d'ailleurs absolument pas imaginer que ceux que nous avons mentionnés jusqu'à présent soient les seuls territoires où il y ait de la vie sur cette planète; il est vrai au contraire que même les montagnes sont proportionnellement non moins peuplées, et de même aussi pour les rives de tous les autres fleuves qui en partie débouchent directement dans la mer après un cours plus ou moins diversement tortueux, mais le plus souvent, comme c'est le cas chez vous, se déversent ou bien dans les quatre fleuves principaux déjà nommés, ou bien même dans d'autres fleuves secondaires. -18- Et maintenant il ne nous reste à considérer que les nombreux et grands lacs de Saturne, en ce qui concerne les buts qui leur sont assignés, leur splendeur, ainsi que les conditions d'habitabilité de leurs bords qui ont une étendue grandiose; toutes choses que nous nous réservons de traiter à une prochaine occasion. Et pour aujourd'hui, AMEN.
CHAPITRE 11 -1En ce qui concerne les lacs dont nous avons parlé hier, Je dois vous dire avant tout qu'ils diffèrent beaucoup des lacs qui se trouvent sur votre corps terrestre et qui sont, en vérité, des bassins irrégulièrement profonds dans lesquels l'eau se rassemble; -2Certes, ce caractère, l'ont aussi les lacs de Saturne, où eux-aussi sont formé par les dépressions du terrain plat dans lesquelles se rassemblent les eaux de source coulant de tous les côtés vers le bas des montagnes ; mais ces lacs ont un lit beaucoup moins profond que celui des fleuves en général, et un lac de Saturne est rarement plus profond qu'au maximum de 4, 5 et même 6 toises, profondeur qui pour cette planète est à considérer comme insignifiante, et, en fait, chaque habitant de Saturne, étant donné la petite profondeur d'un semblable lac, peut très commodément le traverser à gué de sorte que l'eau lui arrive à grandpeine jusqu'à la moitié de la cuisse et parfois à peine jusqu'au genou ; mais malgré cela d'un autre côté l'eau est assez profonde pour rendre possible le flottement parfait des bateaux que vous connaissez déjà. -3A présent on demande ce que sont réellement les lacs sur cette planète ? – Voici : Tout bien considéré ils ne sont pas autre chose que ce que sont chez vous les canaux creusés artificiellement. Un semblable lac a souvent environ cent points de décharge ou canaux de sortie passablement larges vers divers autres fleuves, et de telle sorte précisément qu'avant tout en suivant la voie d'eau à travers de semblables lacs et leurs débouquements de décharge on peut en toute commodité arriver à tous les quatre fleuves principaux mentionnés auparavant. -4Le fait s'explique en ce que, si un quelconque lac de cette espèce se trouve par exemple entre le fleuve d'orient et celui du Midi, il est certain qu'il a un et même plusieurs débouquements dans le premier et également aussi dans le second fleuve ; et justement dans les mêmes conditions se trouve aussi un quelconque lac situé entre les fleuves du Midi et de l'Occident, entre ceux de l'Occident et du Septentrion, et respectivement du Septentrion et de l'Orient, de sorte que les communications par la voie d'eau sont rendues possibles non seulement dans une direction, mais plutôt en cent. -5Mais de même que la communication avec les fleuves principaux est établie au moyen de ces lacs, pareillement, et en second lieu tous ces fleuves aussi et des eaux moindres sont en communication entre eux, raison pour laquelle sur tout cet immense continent il n'existe presque pas de fleuve ou de lac auquel on ne puisse parvenir de tous les côtés en faisant usage de la voie d'eau. -6Ces lacs intérieurs sont bien souvent d'une étendue très notable, et même les moindres ont souvent une grandeur égale à celle de votre mer appelée Caspienne en Asie; mais il y en a même certains qui ont une grandeur de bien loin supérieure, et qui, quant à la surface, pourraient rivaliser avec votre mer Méditerranée. -7Toutefois de ces lacs très étendus il n'y en a pas vraiment beaucoup, et ils se trouvent de préférence seulement dans les régions situées plus près de la mer; mais des lacs intérieurs moindres, en particulier vers la partie centrale du continent, il y en a en grande quantité, car sur l'ensemble de ce très vaste continent il n'y a pas de plaine, si peu étendue soit-elle, au milieu de laquelle on ne trouve pas quelque lac important; et c'est pourquoi aussi le spectacle formé par ces lacs, si on le voit de quelque hauteur, est, pour employer une de vos
phrases, tellement pittoresque, que pour vous ici sur la Terre il est bien difficile que vous puissiez vous en faire une idée convenable. -8Ici chez vous, si même il y a des régions riches de lacs, ceux-ci sont avant tout de forme irrégulière et d'une certaine manière presque comme nés par hasard; et l'on peut en dire tout autant du paysage limitant les lacs, qui est constitué tantôt d'un rocher corrodé, tantôt d'un versant boisé de montagne, tantôt d'une plaine sale et d'autres formations irrégulières et ne signifiant pas grand-chose; par contre, tel n'est pas le cas dans les régions de lacs sur Saturne, parce que là, les lacs font toujours plus ou moins un circuit parfaitement ovale dont partent ensuite pour ainsi dire en éventail, dans toutes les directions, des dérivations débouchant soit dans d'autres lacs, soit dans des fleuves ou autres cours d'eau moindres. -9A présent imaginez-vous ainsi une surface liquide tranquille occupant un espace d'au moins 10 à 100, 100 à 1000, et même de 1000 à 3000 milles carrés selon vos mesures, et vous pourrez déjà vous faire une idée de la majesté d'un semblable lieu. -10- Figurez-vous ensuite les nombreux et larges débouchés généralement rectilignes, et la majesté d'un semblable lac vous apparaîtra encore augmentée, particulièrement si vous pensez que les débouchés eux-mêmes ont souvent 1, 2, 3 et même jusqu'à 40 milles de largeur, ce qui confère à son tour une plus grande splendeur au paysage; mais il n'y a pas seulement ces choses pour donner du grandiose à une semblable région de lacs, et à cela concourent aussi de manière prééminente les bords des lacs qui offrent demeure à une population très dense, ainsi que l'exceptionnelle magnificence de la végétation qui en aucun autre lieu ne fait autant parade d'elle comme justement dans les régions situées autour des lacs; en particulier poussent là les arbres-pyramides que vous connaissez déjà, et qui, au moins à votre point de vue relatif, souvent atteignent une hauteur fabuleuse, car ils surpassent parfois de leurs cimes des monts d'une assez bonne hauteur. -11- Dans le but d'embellir davantage les bords des lacs ces habitants cultivent très fréquemment, comme c'est naturel, la plante-embarcation que nous connaissons, et, derrière les vastes champs sur lesquels ces plantes poussent, sont plantés et bien soignés de préférence ce que l'on appelle les arbres-murs qui bien souvent se développent en hauteur pas mal audelà des plantes mentionnées auparavant, car en quelques régions proches des rives, la paroi dorée formée par de tels arbres arrive parfois à une hauteur de 500 toises depuis le sol. -12- Ce résultat est obtenu par ces habitants en recourant à un certain artifice consistant là aussi en une sorte de greffe; c'est-à-dire que, lorsque les arbres-parois ont poussé d'environ deux toises hors du sol, ils les coupent, et y ayant pratiqué des incisions, ils y greffent des branches du mène arbre-paroi en recouvrent les blessures avec de la terre, en suite de quoi, étant donné le développement naturel continuel, le tronc d'un semblable arbre se trouve allongé déjà d'une bonne moitié. -13- Une telle opération est répétée par eux souvent, autant qu'il est possible de le faire; et pour augmenter ainsi la majesté d'une semblable région des lacs, ils provoquent la croissance de ces arbres à la hauteur surprenante dont nous avons déjà parlé auparavant et qui surpasse de beaucoup celle normale correspondant à leur nature. -14- Derrière ces parois, de préférence est planté aussi celui que l'on appelle l'arbre de la variété à l'aspect de colonne que vous connaissez déjà, et qui, étant donné l'extraordinaire diversité de ses produits, ne contribue pas que peu à la magnificence toujours croissante du paysage sur les bords des lacs. -15- Et naturellement, ici aussi il n'y a presque pas d'autre habitation à l'usage des hommes en dehors du premier arbre principal que vous connaissez déjà; cela a déjà été suffisamment éclairé lorsqu'on a parlé de la population qui vit le long des rives du fleuve du
Midi, c'est-à-dire, quand Je vous ai dit qu'il n'existe là aucune ville, ni forteresse, ni un quelconque autre lieu de demeure qui ne soit cet arbre; seulement au sujet de cet arbre, lorsqu'il se trouve dans les régions autour des lacs, il faut encore observer qu'il dépasse en hauteur et en ampleur de beaucoup ses congénères du long des rives des fleuves et même ceux des montagnes; et par conséquent ils sont aussi aptes à offrir demeure et abri à des familles d'autant plus nombreuses. -16- Avec une non moindre attention cependant et avec ordre sont ici aussi soignées toutes les autres espèces d'arbres, d'arbustes, d'herbes et de végétaux en général, et ainsi arrive-t-il qu'un semblable paysage des lacs finit par apparaître, au sens le plus vrai du terme, comme un parfait paradis. -17- Il ne faut cependant pas que vous vous figuriez qu'en ces régions de lacs de semblables arbres formant presque l'unique demeure des hommes, on en trouve à chaque instant; mais bien plutôt de la façon que, si vous deviez vous rendre d'une habitation de ce genre jusqu'à la prochaine, vous emploieriez un temps passablement long pour accomplir le voyage; car, la plus petite distance d'un arbre à un autre comporte de 10 à 12 milles, mais parfois aussi de 50 à 100 milles, étant donné que, comme on l'a déjà noté au début, une simple pièce de terre est souvent là aussi vaste que tout votre empire. -18- Or sur un terrain de cette sorte pousse rarement plus d'un de ces semblables arbres, et, dans des cas exceptionnels, seulement de 5 à 10 au maximum; pour une nouvelle plantation, il est procédé seulement dans le cas où une famille ne trouve plus de place suffisante sous un même arbre, et dans une semblable éventualité, pour les dernières branches de la famille, un nouvel arbre est planté en quelque autre lieu sur le même terrain. -19- Par suite d'un tel établissement ailleurs des familles, peu à peu sont ainsi ensuite peuplées les régions montagneuses; ce à quoi cependant les habitants de Saturne ne se décident jamais trop volontiers; car avant que quelqu'un se résolve à planter son arbre sur une montagne, il fait tous les efforts possibles pour trouver un emplacement le long de quelque rive afin de pouvoir y ériger sa demeure d'arbre. -20- Ce n'est que lorsque cela n'a pas été possible, que l'immigration a lieu dans les montagnes; et même là on va à la recherche active de ces endroits de la montagne où il existe une ou plusieurs sources d'eau, ou bien où il y a au moins une possibilité pour l'arbre de la pluie et pour la plante irrigatrice de prospérer vigoureusement. -21- Certes, là sur les montagnes, ils ne peuvent plus garder aucune des grandes vaches de Saturne qui ordinairement leur fournissent un lait tiède et très doux et ils doivent se contenter du lait moins doux des chèvres domestiques qui sur les monts sont très nombreuses; si ensuite ils tiennent réellement à goûter le lait des grandes vaches, alors certes, il ne leur reste rien d'autre que d'aller chez leurs parents dans la plaine, et là, d'une certaine manière, d'acheter ou de gagner un semblable précieux lait, soit au moyen d'un échange avec des herbes salutaires de la montagne soit au moyen de quelque prestation de travail. -22- La besogne accomplie ou bien l'affaire conclue, ils remplissent leurs récipients dont vous connaissez déjà l'espèce, puis ils retournent en leurs demeures à pied ou bien en se servant de quelque moyen de transport. A ce sujet, il suffit que vous vous rappeliez de cette espèce de chariot que Je vous ai déjà mentionnée, chariot qui est préparé facilement en mettant à profit le fruit de la plante irrigatrice bien connue et qui par les habitants des plaines est souvent appelé le vaisseau de la montagne. -23- Mais, bien que ces arbres d'habitation soient situés, pour vous il s'entend bien, très éloignés les uns des autres, pour les habitants de Saturne, ils se trouvent par contre assez proches; car eux d'abord, en dépit de la grande distance, peuvent toujours très bien distinguer
l'arbre-habitation de leurs proches voisins, étant donné qu'ils possèdent une vue très aiguë; et en second lieu, leurs longues jambes les mettent en mesure de parcourir une distance par exemple de 10 milles environ, commodément dans le temps d'un quart d'heure; et si la demeure des voisins est située vraiment très loin, alors on fait recours à la voie d'eau et respectivement aux embarcations. -24- Avec quelle rapidité est accompli un semblable voyage plutôt long: cela a déjà été dit dans la communication d'hier. Il reste encore à faire mention si l'eau de ces lacs internes est stagnante ou si elle coule. -25- Déjà précédemment il a été fait mention que l'eau des lacs n'est pas une eau stagnante, mais bien courante; cependant elle ne court pas dans une seule direction, mais bien plutôt dans toutes les directions possibles, et une différence existe uniquement en ce que l'eau a un mouvement quelque peu plus lent que celle des fleuves et des torrents. Toutefois pour bien comprendre le courant de l'eau dans un semblable lac, vous devez l'imaginer ainsi: l'eau, depuis le centre du lac, va se déverser en éventail en autant de directions qu'il y a de débouchés du lac et de canaux qui partent de lui, canaux au moyen desquels ses eaux sont mises en communication avec celles d'autres lacs, fleuves et torrents; mais ici il est nécessaire de faire mention d'une autre différence. -26- Dans ces canaux au moyen desquels un lac est uni à un autre lac, l'eau coule de sorte que, par exemple, elle se déverse du lac A au lac B en suivant la rive gauche, et arrivée à ce dernier, elle se confond avec les eaux de celui-ci en formant comme un vaste tourbillon par l'effet duquel l'eau est poussée à nouveau avec un mouvement rétrograde le long de la rive gauche (gauche par rapport à la direction du canal B au canal A) du même canal. - De cette façon un navigateur peut par exemple arriver du lac A au lac B en direction du Levant en suivant le courant de gauche, tandis qu'un autre peut en même temps arriver du lac B au lac A en suivant le courant qui remonte le long de la rive droite. -27- Certes, produire un semblable mouvement de l'eau devrait être assez difficile même à vos meilleurs ingénieurs hydrauliciens; cependant dans les canaux qui se déversent d'un lac dans un fleuve ou un torrent, les eaux n'ont pas ce double mouvement, mais elles coulent ou bien d'un lac dans un fleuve, ou bien d'un fleuve dans un lac uniformément sur toute la largeur du canal, ce qui pourtant n'empêche absolument pas la navigation, étant donné que sur Saturne tous les mouvements des eaux sont très lents; et le courant le plus rapide ne parcourt jamais plus de 10 toises à la minute, tandis que les courants les plus lents n'atteignent bien souvent que 5 et même jusqu'à 1 toise à la minute. -28- D'ailleurs même le mouvement des eaux en soi-même n'est pas provoqué là aux fins de la navigation, mais bien plutôt afin que les eaux ne se putréfient pas et puissent grâce à ce mouvement lent diffuser alentour un souffle bénéfique de vie. -29- Ce qui confère ensuite une bien plus grande majesté encore à de semblables lacs, est constitué par les formations coniques de rochers blancs qui se dressent fréquemment surtout au milieu de tels bassins aqueux, et ce pour la raison que l'eau d'un lac est d'une certaine manière plus tranquille au milieu qu'en n'importe quel autre point; et donc aussi plus qu'en n'importe quel autre point elle serait portée à se putréfier. -30- Au moyen donc de ces rochers qui émergent des eaux il est pourvu d'excellente manière à remédier à un tel inconvénient car, pour si minime que soit le mouvement de l'eau, celle-ci, en heurtant les rochers produit un léger ressac, et par suite du frottement elle recouvre de la fraîcheur avec le réveil du fluide électrique inhérent à l'eau même. -31- De semblables formations coniques de rochers sont en outre souvent recouvertes de ces plantes salutaires que vous connaissez déjà, lesquelles avec leur exhalaison
vitale éthérée et avec leur extraordinaire parfum donnent à la surface d'un semblable lac une faculté réparatrice immense; et c'est pourquoi aussi assez fréquemment les habitants de Saturne se tiennent avec leurs embarcations au voisinage de ces îlots; un spectacle particulièrement magnifique est offert par ces rochers quand ils se présentent en groupes et même au nombre de quelques milliers. -32- Si vous pouviez les voir, très souvent il vous arriverait de penser que vous vous trouvez devant une ville immense construite sur l'eau, en comparaison de laquelle votre Venise ferait figure d'un jouet pour enfants; car une semblable formation rocheuse conique a souvent une circonférence à la base de 1, 2 et même 3 milles et une hauteur de 2, 3 et même 4000 toises, de sorte que, en tronquant le cane à une certaine hauteur, sur la superficie ainsi obtenue pourrait trouver une place suffisante une grande ville. -33- Imaginez-vous maintenant tout bonnement un groupe de semblables formations coniques, et ensuite vous pourrez déjà vous faire une idée de la taille d'une ville de ce genre émergeant des eaux d'un lac. -34- Les habitants de Saturne de leur côté ne marchandent pas leurs fatigues à cet égard, et à coups de burin ils rendent habitable l'un ou l'autre cône; ou bien ils y pratiquent des gradins jusqu'à la cime et aiment à passer des journées entières sur ces formations rocheuses ainsi ouvragées. Si les formations sont très grandes, à force de burin y sont pratiqués, carrément plusieurs plans qui sont habitables; l'accès aux plans supérieurs, est constitué par une sorte d'escalier en colimaçon construit extérieurement moyennant la taille de gradins dans le rocher, gradins par lesquels ensuite on monte aux plans supérieurs. -35- Cependant ces habitants adaptent ainsi en habitations seulement les formations dénuées de végétation; car si un rocher de cette espèce est muni de végétation, ils le considèrent comme une sorte de sanctuaire, et ils estimeraient sans aucun doute commettre un péché en y travaillant autour au burin, si de la part de quelque esprit angélique il ne leur était pas donné de temps en temps l'enseignement qu'une telle action n'est point un péché, mais bien plutôt une imprudence, c'est-à-dire, s'ils voulaient détruire avec leurs burins ces nobles plantes; en conséquence, en rendant hommage aux préceptes de modestie et de prudence, ils s'abstiennent de toucher de semblables formations rocheuses riches en végétation et émergeant des lacs. -36- Les sommets et en général l'extérieur des formations coniques rendues habitables sont ensuite, avec beaucoup de bon goût, ornés avec toutes sortes de feuillage et avec germes de drapeaux dont il vous a déjà été parlé. Et, ainsi un groupe de ces formations coniques au milieu d'un miroir d'eau tranquille prend aussi pour les mêmes habitants de Saturne un aspect majestueux au-delà de toute expression. Quant à vous, un semblable spectacle vous laisserait certainement pour longtemps incapables d'exprimer vos sensations. -37- Ce qui ensuite contribue davantage à augmenter l'enchantement d'une semblable région des lacs ou mieux d'une semblable ville de montagne au milieu de l'eau, c'est avant tout le nombre assez grand d'embarcations qui fréquentent ces lieux et l'animation qui en est provoquée dans les rapports entre les diverses familles, et en second lieu la quantité immense de gros oiseaux aquatiques aux plumes bariolées, qui, comme les cygnes chez vous, rendent très animés tous les canaux et les criques entre les divers îlots, et qui avec leur chant varié confèrent une particulière attraction à ces localités des lacs et sur un champ très étendu. -38- Vous ne devez cependant pas vous représenter ces oiseaux comme ayant la taille de vos cygnes; un tel oiseau sur Saturne a les dimensions d'un de vos petits navires; raison pour laquelle aussi souvent ces habitants montent par plaisir sur le dos de semblables oiseaux et se font porter ainsi alentour pendant quelque temps dans toutes les directions.
-39- Il arrive aussi souvent que les habitants de Saturne dressent cette espèce d'oiseaux comme animaux de trait sur l'eau; ils sont pour ainsi dire attelés à leurs bateaux; et ainsi le spectacle d'une embarcation traînée sur la surface liquide par quelques centaines d'oiseaux semblables ne pourrait pas ne pas susciter dans votre imagination la vision de quelque voyage dans un pays enchanté. -40- Toutefois une navigation de cette sorte appartient toujours seulement à la classe des distractions que ces habitants s'accordent, mais n'est jamais employée dans le domaine ordinaire des transports ou des communications; car les habitants de Saturne sont trop charitables envers n'importe quelle créature pour les astreindre à un quelconque travail dur, d'autant plus qu'avec la force de leur volonté et de leur foi ils obtiennent toujours et partout ce qui leur est nécessaire. -41- Et ainsi tout serait dit en ce qui concerne les lacs, sauf, bien entendu, le règne animal et particulièrement les animaux de l'eau aux formes très souvent merveilleuses, dont on commencera à traiter prochainement. Il suffira qu'ici aussi vous réveilliez un peu votre imagination, et, du prodigieux il vous sera donné d'en voir suffisamment. D'autres choses donc, comme Je l'ai dit, vous seront communiquées prochainement; pour aujourd'hui par conséquent: AMEN.
CHAPITRE 12 -1Étant donné que désormais nous avons pu nous faire une assez bonne idée du pays, en général, grâce à tout ce qui ce qui regarde la conformation du pays-même, ainsi que sa végétation et sa constitution hydrographique, et que nous avons pu nous convaincre comment tout cela tourne à son avantage, à présent nous détournerons notre attention du règne élémentaire des minéraux, des végétaux et des eaux qui constituent la première base du règne animal, pour la faire converger justement sur ce dernier règne. -2Mais avant que nous passions à considérer le règne animal proprement dit, il sera nécessaire encore de donner en passant un coup d’œil aux régions au long des rivages de la mer, demeure principale du règne animal le plus varié. -3Sur votre Terre, ce sont généralement les régions situées au long des rivages des mers - sauf rares exceptions - ces parties des divers pays qui ont la population la plus dense; et ce pour la raison que la mer et ses côtes s'offrent davantage à l'exercice du commerce et des trafics en général, à condition naturellement qu'il ne s'agisse pas de côtes parsemées de récifs sur toute leur étendue ou bien formées de bas-fonds sablonneux ou de vase. -4Par contre, telles ne sont pas les conditions des régions côtières sur la planète Saturne, où le terrain sur une zone large au moins de 40 milles - selon vos mesures - n'offre pas de possibilité de demeure à l'homme, et ce pour le motif qu'en ces régions basses du pays, jusqu'à 40 milles à l'intérieur de la terre, personne ne serait à l'abri d'une soudaine inondation, car, comme la mer sur votre Terre est sujette aux mouvements périodiques du flux et du reflux, d'autant plus ce phénomène se manifeste quand il s'agit d'une planète bien plus grande que la Terre ; et par conséquent sur elle le flux se manifeste en mesure proportionnellement d'autant plus grande, et parfois même davantage, qu'en proportion une planète avec tout ce qu'elle porte est plus grande que l'autre. -5Encore plus exactement dit, la périodicité du phénomène, en ce qui concerne la mesure, est irrégulière, car le flux sur cette planète n'atteint pas toujours la même hauteur. La raison de cela est à rechercher dans le fait que les sept lunes de la planète doivent évidemment exercer sur elle une influence considérable; et ainsi il arrive justement qu'en ces périodes où toutes les sept lunes, par suite de leur vitesse inégale, viennent à se trouver d'un même côté de la planète, les eaux en ce côté s'élèvent à une hauteur plus grande que d'habitude. -6Là où - comme c'est le cas chez vous - un seul satellite tourne autour d'une planète, ce ne serait certes pas chose trop sage que d'attribuer le flux et le reflux à l'action du satellite, malgré qu'une influence, pour insignifiante qu'elle soit, est aussi exercée par le satellite lui-même. -7De toute façon cette influence apporte à la marée sur la Terre à grand-peine un pouce de contribution, étant donné une élévation naturelle du niveau de la mer de 6 pieds, alors que dans le cas d'une planète comme Saturne l'influence de ses satellites contribue déjà de manière considérable à l'élévation naturelle du niveau de la mer; car, même en considérant l'élévation globale de 7 pouces correspondant à un pouce par satellite comme dans le cas de la Terre, vous devez vous représenter ce pouce dans la même proportion que n'importe quelle autre chose sur Saturne par rapport aux choses correspondantes sur la Terre; et alors vous arriverez immédiatement au résultat que les 7 pouces, après avoir défalqué l'effet de toute autre influence normale et régulière, se convertissent avec beaucoup de facilité dans une
augmentation du niveau de 70 toises; considérez maintenant en outre l'augmentation normale du niveau de la mer de Saturne au temps du flux évaluable à 60 toises, et vous ne tarderez pas à vous convaincre à quelle hauteur peuvent arriver parfois les eaux de la mer sur les plages de cette planète. -8Si l'anneau de la planète qui se trouve au-dessus de la mer n'exerçait pas une influence aussi bénéfique sur les eaux de celle-ci, en de semblables périodes de la haute marée, même les plaines jusqu'à quelques milliers de milles à l'intérieur de la terre courraient le danger d'être inondées; mais au contraire par l'effet de la force d'attraction de l'anneau, dans les périodes de flux, le notable phénomène se manifeste que la mer ne pénètre que de rares fois à plus de 40 milles à l'intérieur de la terre; car en de telles périodes les eaux soumises à l'influence de l'anneau s'accumulent en formant de vraies montagnes liquides, de sorte qu'elles se rassemblent en de tels amas au lieu de se déverser plus à l'intérieur en inondant le pays. -9Ces montagnes liquides ont une grande ressemblance avec vos trombes marines, avec la différence seulement que, par suite de l'attraction de l'anneau, elles arrivent souvent à la spectaculaire hauteur de cent milles et dans ces conditions certes toute navigation est rendue impossible durant ces périodes de flux; car si un bateau a le mauvais sort d'être attiré par une montagne liquide de cette espèce, en voie de formation, il est soulevé avec une violence et une rapidité incroyables, et, arrivé au sommet de la masse liquide roulante, il est, par l'effet de la force centrifuge expédié d'un côté ou de l'autre ; et alors il est bien plus que difficile d'espérer en un retour, et encore bien moins dans un état d'intégrité. -10- De temps en temps il arrive qu'en certains lieux l'entassement des eaux prend des proportions si terribles, que la montagne liquide arrive presque jusqu'à l'anneau; mais ce phénomène ne se manifeste que de très rares fois seulement ; malgré cela même les moins volumineux et les moins violents entassements d'eau sont déjà très dangereux pour ces navigateurs, étant donné que les montagnes liquides de cette espèce sont animées par un mouvement rotatoire d'une rapidité pour vous incroyable. -11- S'il arrive à quelqu'un, monté sur une embarcation, d'être attiré à l'intérieur du cercle d'une semblable montagne liquide tournante, il est au commencement simplement soulevé là où le mouvement tourbillonnant est encore lent, mais ensuite, étant donné que plus l'eau monte, d'autant plus s'accentue le mouvement rotatoire, il arrive que le bateau ainsi saisi par le tourbillon est expédié au loin, quand il n'est pas broyé par la violence des flots tournoyants. -12- A ce propos il faut noter que le diamètre d'une montagne liquide de cette sorte, même seulement de moyenne grandeur, comporte à la base souvent de 20 à 50 milles, à la moitié de la hauteur bien souvent encore de 10 à 20 milles, et au sommet de 1 à 2 milles. -13- Mais la rotation de l'eau à mi-hauteur est déjà tellement violente, que le tour est accompli en 4 ou 5 minutes et au sommet tout bonnement en une minute ou une minute et demie. Sur la base de ces données vous pouvez bien déjà vous faire une idée de la puissance de lancement d'une semblable montagne liquide. -14- Quand un bateau vient à se trouver sur la surface de la mer en un quelconque lieu où au-dessous commence précisément à se former le sommet d'une montagne d'eau, alors c'est vraiment le cas que le bateau vient à être soulevé à une hauteur épouvantable, c'est-à-dire au point où par la force centrifuge écrasante il est avec une violence inouïe lancé à grande distance. -15- A présent écoutez : Il était nécessaire qu'il fût fait précéder avec cela à la description du règne animal, car en premier lieu paraissent ainsi claires les raisons pour lesquelles les rivages des mers de Saturne ne sont pas habitables, mais en second lieu, en ce
grandiose évènement naturel est exposée la première production du règne animal; car de cette manière s'accomplit en des proportions énormes une fonction d'accouplement en suite de laquelle les petits animaux atomiques de l'éther sont accueillis dans l'eau, où ils se reproduisent en évoluant de classe en classe jusqu'à ce qu'ils arrivent à ce degré que vous sur la Terre, vous appelez des amphibies. -16- Or cette classe d'animaux représente aussi sur la planète Saturne, comme sur votre Terre, le moment ordonné de transition entre les animaux des eaux et ceux de la terre ferme ; et ainsi les territoires au long des côtes des mers constituent d'une certaine manière le premier degré sur lequel, sur la base de la progression graduelle, les animaux de la mer sont transférés des eaux-mêmes sur la terre ferme ; mais si nous voulons faire du règne animal un objet d'observation, il convient évidemment que nous commencions de manière ordonnée là ou il tire proprement ses origines. -17- L'eau de la mer est donc la première demeure des animaux. Eh bien, quels sont les animaux de ce corps de l'univers qui doivent avant tout attirer notre attention ? Voici : là aussi, comme sur cette Terre, le même ordre est en vigueur. -18- La première espèce d'animaux est constituée par une quantité innombrable de vermisseaux blancs extraordinairement petits, qui sont vraiment si petits que dans une très ordinaire goutte d'eau ils peuvent commodément y trouver place par millions. -19- La seconde espèce est formée par une classe supérieure de vers plus grands qui sont déjà pourvus de deux bras et qui sont déjà visibles aux yeux des habitants de Saturne. Un semblable petit animal selon l'espèce dévore en une seconde de nombreux milliers de ceux de la première espèce et ainsi assimile leur vie à la sienne. La troisième catégorie consiste en une sorte de ver quelque peu allongé, de couleur grise, de la taille environ de vos vibrions du vinaigre. -20- Cette espèce est très vorace, et se nourrit des deux espèces inférieures en s'assimilant ainsi leur vie. La quatrième catégorie est formée d'une qualité de vers pourvus de deux têtes qui ont déjà la taille d'une ligne et qui sont plus gros vers la moitié du corps, ce qui leur donne l'aspect d'un minuscule petit pain à lunette. -21- Cet animal dévore toutes les espèces précédant la sienne. L'espèce suivante commence déjà à se distinguer suivant le sexe, alors que dans les espèces déjà mentionnées il n'y a pas encore une telle distinction. Cependant cet animal de la quatrième catégorie, en conséquence de ses deux têtes est déjà conformé de sorte qu'en lui se trouvent réunis d'une certaine manière tant l'être mâle, que la femelle, ce qui justement résulte du fait qu'il a deux têtes. -22- La classe suivante est constituée déjà d'une espèce de minuscule cafard, de couleur rougeâtre, pourvu de quatre pattes. Cet animal des eaux de Saturne a déjà les dimensions visibles d'environ deux lignes en longueur et une ligne et demie en largeur. Le petit animal de cette catégorie se nourrit de manière très variée, parce qu'il dévore toutes les espèces précédant la sienne, en très grande quantité, en s'assimilant ainsi leur vie. Et ainsi, en montant par mille degrés l'être passe d'une espèce à l'autre jusqu'à ce que, une vie croissante en puissance se rassemble dans la classe des crustacés et des coquillages. -23- La classe des animaux à coquille est pareillement riche d'espèces, et d'abord font leur apparition les coquillages et puis ensuite les limaces. Parmi les coquillages des mers de Saturne mérite une particulière considération la coquille géante bleue, qui souvent se présente avec des dimensions telles que, si elle se trouvait dans une mer quelconque de votre Terre, elle pourrait sans autre être prise pour une île ayant la superficie d'un mille et même d'un mille et demi.
-24- Cependant cette coquille constitue le dernier degré de la classe ; sa mort est provoquée par une quantité de petites limaces qui, lorsqu'elles sont poussées par la faim, pénètrent dans l'intérieur du coquillage et commencent à ronger de tous les côtés le corps du pauvre animal. Lorsque le coquillage est entièrement dévoré, l'enveloppe est ensuite à l'occasion souvent jetée sur quelque petite île, ou bien aussi sur les plages déjà connues de quelque continent par l'effet du flux et du reflux des eaux, où parfois de semblables enveloppes sont découvertes par les habitants de Saturne qui, en tant que chose précieuse pour eux, les ramassent et les transportent sur les lieux de leur demeure. -25- Ces coquilles sont ensuite placées dans un creux du terrain, de façon qu'entre deux coquilles, ou mieux entre les deux valves d'une coquille, soient plantées divers exemplaires de l'arbre de la pluie que Je vous ai déjà décrits, et ainsi en ces amples bassins formés par la coquille est récoltée de la manière la plus opportune et la plus économique l'eau qui filtre de l'arbre. -26- La partie externe d'une semblable coquille géante n'a rien de particulièrement beau ; mais par contre d'autant plus imposant se présente l'intérieur, car l'intérieur de la coquille se présente précisément comme si vous recouvriez une surface d'or bruni avec une mince couche d'une belle teinte bleue; par conséquent, quand un bassin de cette espèce est rempli de l'eau de l'arbre de la pluie, il a un aspect absolument majestueux, et c'est spécialement dans cette eau que les habitants de Saturne prennent de préférence leurs bains; en premier lieu parce que cette eau est limpide et pure au plus haut degré, et en second lieu parce qu'elle est saturée d'un parfum éthéré, à peu près comme votre huile de nard, qui sur votre Terre compte parmi les parfums les plus suaves. -27- Vous vous demanderez certainement comment font les habitants de Saturne pour déplacer et transporter une coquille aux semblables dimensions ? - Ce travail est accompli là d'une manière assez simple; d'abord la coquille en elle-même n'est pas aussi pesante que vous pourriez vous l'imaginer, car dans les zones situées au-dessous de l'anneau les objets, en général, ne sont pas aussi lourds que dans une quelconque autre région de cette planète, située plus au nord ou plus au midi; et par conséquent il arrive aussi que lorsque les habitants de cette planète découvrent une coquille de ce genre, ils se rassemblent ensuite de nombreux côtés munis de coins et de leviers, l'ouvrent, la nettoient en ôtant avec soin ce qui se trouve d'immonde à l'intérieur, la ferment à nouveau et enfin bouchent avec soin tout autour la ligne d'adhésion des deux valves en se servant d'une qualité spéciale d'éteule marine. -23- Puis sur leurs embarcations ils attendent la bonne occasion d'un flux de la mer qui soulève la coquille; celle-ci est attachée avec de solides cordes à la poupe d'un bateau ; après quoi on commence le remorquage sur un quelconque fleuve à l'intérieur de la terre avec une rapidité dont il vous serait extrêmement difficile de vous faire une idée. -29- Car c'est justement en de semblables occasions que les habitants de Saturne mettent à profit toute la puissance de leur volonté ; par conséquent vous ne devez pas vous étonner s'ils réussissent bien souvent à transporter d'un lieu à un autre des objets dont la grandeur et le poids vous feraient frissonner à la pensée d'en devoir, vous, effectuer le transport ; chose dont nous aurons l'occasion de parler ensuite avec une plus grande précision plus tard. Prochainement nous continuerons nos considérations autour du règne animal ; pour aujourd'hui donc : AMEN !
CHAPITRE 13 -1Après ce coquillage géant que nous avons décrit naguère, viennent comme nous l'avons déjà dit, les diverses espèces d'escargots, et à savoir avant tout, ceux qui vivent dans les eaux, et ensuite seulement ceux qui, déjà plus complètement formés en ce qui concerne le corps proprement dit, se trouvent sur la terre ferme. Et même des escargots, il faut observer que dans l'eau on en rencontre un millier d'espèces qui sont aussi ordonnées dans une série, de sorte qu'au point de vue métaphysique, pour employer votre expression scientifique, l'une tire son origine de l'autre. Mais au contraire, il serait mieux de dire : au point de vue de la vie en puissance. -2En ce qui concerne les premières espèces de la série, ces escargots sont avant tout trop peu intéressants pour apaiser votre curiosité, bien que sur chaque espèce on pourrait écrire des volumes en très grand nombre ; et en second lieu, même en s'arrêtant peu sur chacune, on n'en viendrait pas à bout avec une description, étant donné la très grande quantité. C'est pourquoi nous tournerons notre attention vers ces dernières espèces de la série qui peuvent être pour vous d'un intérêt particulier; il suffira donc de faire quelques mentions plus détaillées des cinq dernières espèces qui par leur merveilleuse conformation sont capables de susciter vraiment un intérêt. -3La première de ces dernières cinq espèces est celle des escargots-perche, et elle est particulièrement intéressante parce que la spirale de la coquille respective ressemble énormément à une longue vis, et la coquille elle-même se présente à peu près corme si vous faisiez transformer une perche longue de 10 toises en une vis, ou bien, encore mieux décrit, comme si vous vouliez enrouler une longue corde autour de cette perche, de manière que les spires soient du haut en bas étroitement ajustées l'une à l'autre; mais vous ne devez pas vous figurer cette perche comme très fine, mais bien plutôt comme ayant à la base, c'est-à-dire à la partie la plus grosse, un diamètre qui comporte 5 pieds et qui aille ensuite progressivement en se réduisant jusqu'à l'autre extrémité, tandis qu'en même temps la spirale aussi se fait en proportion plus fine. -4Sur votre Terre, un escargot de cette espèce, vous pourriez même l'appeler un obélisque à spirale; mais ici on lui donne le nom d'escargot-perche pour la raison qu'il est justement appelé ainsi par les habitants de Saturne. -5La couleur de la coquille à l'extérieur est d'une beauté vraiment merveilleuse; car à la base, là où la coquille est la plus grosse, elle est d'un beau rose, à peu près parfaitement comme si vous vous mettiez à recouvrir une plaque d'argent bien polie avec une légère couche justement de cette couleur. Vers la pointe, la coquille se fait au contraire d'un rouge toujours plus sombre mais en conservant l'éclat métallique ; de sorte qu'au long de la perche on peut voir toutes les gradations du rouge depuis la teinte la plus pâle jusqu'à la plus sombre. -6Cependant non seulement la couleur constitue la magnificence d'une semblable coquille, mais bien aussi les ornements de la spirale, parce que le relief de cette même spirale est sur toute sa longueur extérieure comme si vous aviez enchâssé dans un très bel ordre des perles de grosseur toujours croissante, tandis que sur la partie interne le creux entre une spire et l'autre court sur toute la longueur comme un ruban d'or qui en outre porte sur lui comme gravés des dessins ou mieux encore des arabesques d'un très bel effet, pour employer un terme qui vous est commun. Ainsi se présente donc la demeure de ce limaçon.
-7L'animal respectif est beaucoup moins intéressant, car il n'est autre qu'un ver de grandes proportions, comme un polype pourvu de quatre tentacules aux fins de nutrition. Il se nourrit d'autres escargots plus petits ou même de petits crustacés d'espèces diverses, que l'animal saisit avec le tentacule sis le plus en bas ; puis il les broie, et enfin place la nourriture broyée à l'intérieur du tentacule ou trompe qui plus spécialement fait fonction de bouche. -8Les deux autres tentacules servent à l'animal simplement d'organes tactiles avec lesquels il est continuellement en train d'explorer tout à l'entour à la recherche de nourriture, et pour sentir en même temps si ne sont pas en train de s'approcher d'autres êtres animés d'intentions hostiles, -9Dans un cas semblable, cet animal se retire immédiatement à l'intérieur de sa splendide demeure et en ferme l'accès avec un diaphragme ou croûte de couleur blanchâtre; mais parfois cette précaution ne lui sert point, parce que ses ennemis consistent en une espèce de homards-épée, que nous décrirons plus tard, lesquels en peu de temps perforent la croûte, et pénètrent ensuite comme autant de voleurs dans la maison de cet animal et dévorent peu à peu le malheureux locataire jusqu'à la dernière miette. Cependant les homards en question deviennent ensuite à leur tour la proie d'une autre espèce d'escargots dont nous viendrons à parler d'ici peu. -10- Les habitants de Saturne recueillent les coquilles de ces escargots-perche et souvent en font usage pour orner leurs jardins ; mais parfois les coquilles elles-mêmes sont employées pour disposer des conduites d'eau. Là où il y a une eau qui jaillit d'une quelconque hauteur, ils fixent à terre l'une de ces coquilles avec l'embouchure tournée vers le haut et ils en coupent la pointe à l'autre extrémité, de sorte que, naturellement, l'eau qui coule dans la coquille se déverse avec une grande violence hors de cette espèce d'entonnoir. -11- Sous ce débouquement est ensuite placée, avec la grande ouverture vers le haut une seconde coquille pour y recueillir l'eau qui jaillit de la première, et ainsi de suite, jusqu'à ce que l'eau soit de cette manière acheminée, bien souvent à de nombreux milles de distance, dans une quelconque localité de la plaine, au gré des constructeurs. Qu'un aqueduc de ce genre ne soit pas à voir sans intérêt, vous pouvez facilement vous l'imaginer. -12- L'espèce suivante des escargots est celle que l'on appelle l'escargot-pyramide ; sa couleur est uniformément *herbe verte dorée* et la ceinture à la base est ornée de surfaces ovales d'une blancheur de neige et relativement grandes, dont les bords apparaissent ourlés comme si vous vouliez insérer une semblable table ovale d'albâtre dans un cadre d'or correspondant bien poli. -13- Cet escargot est très grand, et si vous pouviez en placer un avec sa partie large en bas dans un point quelconque de votre Terre, en fait de hauteur votre Schlossberg serait de beaucoup surpassé. L'animal qui demeure à l'intérieur de cette coquille, quant à la couleur est entièrement gris sombre et il a, comme un éléphant de proportions gigantesques, une très robuste trompe avec laquelle il peut embrasser tout autour, et des deux côtés de cette trompe l'animal dispose de deux autres trompes ou antennes plus petites munies à l'extrémité d'un œil très aigu ; enfin vraiment au-dessous du corps, dans le cas où s'avère nécessaire un déplacement sur la surface de la mer, pend une paire de robustes nageoires de couleur blanchâtre au moyen desquelles l'animal peut se mouvoir en nageant avec une passable rapidité. Quand cet escargot se déplace sur la mer, il tient sa coquille vers le haut appuyant avec la partie large sur la surface, de manière qu'à une certaine distance il semble une pyramide flottante. -14- Cet escargot est de nature plutôt méchante, et il attaque même l'homme ; si celui-ci est saisi par sa trompe, il est immédiatement broyé et jeté dans sa large gueule. Mais
les habitants de Saturne connaissent très bien les habitudes de l'animal, et c'est pourquoi ils sont complètement armés contre toute surprise quand ils s'en vont à la chasse. En ce cas ils sont munis d'un long lasso et ils attendent que l'animal qui s'est avancé vers eux assez rapidement arrive à portée ; alors le lasso est jeté autour de la trompe qui se tend bien en avant, et avec une saccade elle est fortement serrée, de sorte que pour l'animal ç'en est aussi fini, étant donné que cette espèce d'escargot est sur Saturne déjà un animal pourvu de poumons et qu'il respire à travers la trompe; quand il ne lui est donc plus possible de respirer, l'animal meurt bien vite. -15- Ces habitants connaissent que l'animal est tout à fait mort lorsque de sa gueule commence à couler une humeur blanchâtre, car c'est un signe indubitable que la décomposition a déjà commencé. Les habitants de Saturne recueillent avec beaucoup de soin cette humeur à cause de l'extraordinaire parfum qui s'en exhale et qui est incomparablement supérieur à votre ambre. -16- Puis, quand un semblable escargot a cessé d'émettre son humeur, alors ils l'abandonnent à son sort et bien vite il se trouve d'autres animaux marins en grande quantité qui en quelques jours le dévorent complètement, bien entendu, à l'exception de la coquille très rare qui en cette espèce d'escargots est massive et extrêmement solide, et qui à la base où elle a sa large ouverture, mesure souvent de 4 à 5 toises en grosseur. Donc, quand la coquille est ainsi déblayée, les habitants de Saturne l'enlèvent de l'eau et la tirent sur le rivage à l'époque du reflux, pour être ensuite transportée au lieu de destination de la même manière que le grand coquillage dont on a parlé auparavant. -17- Cet escargot se nourrit principalement des homards-épée déjà mentionnés, dont il y a là en grande quantité et de très diverses tailles; cependant aucun n'est plus grand que votre homard de mer comme vous l'appelez; et au contraire on rencontre cet animal très fréquemment en exemplaires plus petits qui arrivent parfois à peine à la taille de votre locuste. -18- Or, quand cette seconde espèce d'escargots, c'est-à-dire l'escargot-pyramide réussit-il à faire une bombance capitale de ces homards-épée ? Eh bien, cela se manifeste quand ces homards sont justement plus que jamais affairés à dévorer un escargot-perche dont vous avez déjà fait connaissance. Quand l'escargot-pyramide tombe ainsi sur une coquille de son consort-perche rempli de semblables homards, il le saisit avec sa trompe, le traîne sur quelque rivage et le place avec la partie large hors de l'eau; quand alors les homards se sentent ainsi tirés hors de leur élément, ils commencent un à la fois à abandonner cette demeure ; en quelle occasion précisément ils sont dévorés l'un après l'autre. -19- Ces homards constituent donc d'une certaine façon une classe d'animaux représentant un degré intermédiaire de recueil de la vie, en suite de quoi la vie d'un escargot passe augmentée dans la vie d'un autre escargot; et ainsi entre chaque espèce plus grande d'animaux existe une espèce plus petite qui se comporte en ennemie envers une précédente espèce plus grande, mais qui sert ensuite à son tour de nourriture de choix à une espèce suivante plus grande. -20- La troisième classe d'escargots marins vivant sur Saturne est formée par ce que l'on appelle l'escargot-disque. Cet escargot a beaucoup de ressemblance avec le coquillage que vous appelez *nautilus*; mais naturellement votre nautilus est avant tout incomparablement plus petit, et ensuite en ce qui concerne sa superficie, il est beaucoup plus gros que cet escargot-disque de Saturne, toujours par rapport à la superficie respective. Le disque de cet escargot a souvent un diamètre de 100 à 120 toises. Il vit, particulièrement au temps du flux, au fond de la mer ; à l'époque du reflux par contre il se tient toujours en surface et il se déplace à la surface.
-21- Quand il se trouve au fond de la mer il allonge sa trompe jusqu'au delà de la surface pour respirer, et de cette façon aussi il est facile d'établir le point où il se trouve; c'est précisément l'occasion où la chasse est donnée à l'animal. Il va de soi que cela se manifeste seulement aux époques où le flux est de moyennes proportions; car durant le flux qui se produit aux périodes de tempête aucun habitant de Saturne ne se risque à prendre la mer. -22- Vous allez peut-être penser à la raison qui fait que l'on ne donne pas la chasse à cet escargot tandis que dure le reflux, c'est-à-dire quand il nage à la surface ; mais en de telles époques il n'est absolument pas possible de le capturer, en premier lieu pour la raison que cet escargot se déplace sur l'eau avec une extraordinaire rapidité, au point qu'il n'est absolument pas facile de l'atteindre, et en second lieu, même s'il pouvait être atteint, personne ne serait capable de le faire prisonnier, étant donné que l'animal, de par soi est de caractère doux; à peine est-il même légèrement touché, qu'il retire immédiatement à l'intérieur de sa coquille toutes ses extrémités et au moyen d'une nageoire qu'il plonge dans l'eau il se met à tourner sur lui-même horizontalement avec tant de rapidité, que personne ne se hasarde à s'approcher d'un semblable disque tournant. -23- Quel aspect a donc vraiment cet escargot qui réellement pour vous est on ne peut plus digne d'être noté ? A ce sujet, en vérité Je vous dis : Quand bien même vous voudriez exciter votre imagination pour concevoir des formes merveilleuses, malgré cela ce serait pour vous une impossibilité absolue que de vous faire même de loin un tableau de la beauté de cet escargot ; motif pour lequel aussi les habitants de Saturne, défiant souvent de très graves périls cherchent par tout moyen possible à s'emparer d'une semblable merveille de la nature. -24- Pour cet escargot, en ce qui concerne sa coquille, vue d'en haut elle se présente comme un cercle parfait; car l'ouverture va en se perdant ainsi lentement le long de la surface plate du premier tour de la spirale, au point d'occuper presque un tiers de tout le cercle, et l'ouverture elle-même, à partir de laquelle l'animal respectif se penche hors de son corps et avec ses merveilleuses extrémités, est haute à grand-peine d'un peu plus d'une demi-toise, tandis que le bord en entonnoir de cette ouverture extrêmement allongée est en chacun de ses points si bien et si finement arrondi, que non seulement il ne gâte rien du côté esthétique, mais il contribue au contraire à un haut degré à augmenter la magnificence de la demeure d'un semblable animal. -25- Alors, quel aspect a donc la demeure en question ? Ecoutez et en même temps étonnez-vous ! Cette demeure a, extérieurement, un aspect comme si le plus fameux bijoutier y avait enchâssé avec un ordre parfait les espèces les plus variées de pierres précieuses ; et ainsi on peut y voir en premier lieu tout autour comme une série de diamants d'un poids d'une livre l'un ; une seconde série disposée parallèlement à la première consiste, en presque tout autant de rubis d'un poids égal ; suit ensuite une autre série d'émeraudes et ainsi de suite à travers tous les douze échelons des pierres précieuses principales. -26- Entre les unes et les autres de ces bordures en pierres précieuses il y a une zone libre qui fait l'effet comme si l'on y avait étendu dessus un large ruban d'or ; et sur ce ruban apparaissent comme imprimés en forme très noble les plus merveilleux dessins qui d'une certaine façon représentent avec une fidélité absolue toute la série des espèces précédentes des animaux dont la vie se trouve rassemblée en cette classe d'escargots. -27- La construction de cette maison d'escargot se termine avec une espèce de galerie comme formée de petites colonnes d'or verticales hautes d'une toise, qui a un aspect tel, qu'il semble qu'un très habile sculpteur ait disposé autour de cette roue, c'est-à-dire tout autour de cette plate-forme circulaire, une balustrade de ce genre, dont les petites colonnes
consisteraient en tout autant d'escargots-perche relativement petits sculptés artificiellement et unis entre eux à la partie supérieure moyennant un arc à entrelacs finement ouvragé. -28- Les petites colonnes ont la même teinte dorée que l'escargot-perche lui-même, et les arches entre une petite colonne et l'autre semblent faites d'or; et même Je peux vous dire que ce matériau se présente plus beau que l'or le plus pur et poli à la perfection. En chaque arche apparaît en outre artistiquement fixée, la forme en des proportions minuscules d'un escargot-pyramide dans sa couleur originaire caractéristique. La balustrade dont nous avons parlé auparavant va graduellement en décroissant de hauteur seulement là où commence l'ouverture de la coquille, et cesse totalement en ce point ou l'animal a l'habitude de pencher ses extrémités principales, c'est-à-dire, sans interruption sur une longueur de 5 toises. -29- La partie supérieure de cet escargot se présente donc ainsi. La paroi de côté qui, comme on l'a déjà fait observer, est grosse - ou si l'on veut large ou haute - 3 toises, se présente précisément comme une colonnade circulaire haute de 2 toises. Les colonnes sont entièrement d'un blanc éblouissant, et n'ont absolument ni socles, ni chapiteaux, mais sont bien plutôt des cylindres parfaits appuyant sur la surface inférieure et arrivant jusqu'à celle supérieure. Cependant le fond de cette espèce de galerie, derrière les colonnes est d'une teinte assez claire et parfaitement semblable à un arc-en-ciel. -30- Le canal, ou mieux, l'ouverture allongée de l'escargot, est complètement de couleur rouge, comme chez vous apparaissent parfois quelques nuages à la lumière crépusculaire; et il a en outre une luminosité phosphorescente particulière qui, particulièrement de nuit, produit un effet surprenant, comme celui d'un petit nuage illuminé par les derniers rayon du soleil. -31- Quel aspect ont ensuite les extrémités de cet escargot ? D'abord il peut ouvrir, comme votre paon quand il fait la roue, une espèce de voile ronde qui lui sert, quand souffle le vent sur la surface de la mer, pour se faire pousser avec une extraordinaire rapidité. Si par contre règne une accalmie de vent, alors l'animal se met à mouvoir rapidement cette grande voile comme une roue en forme d'éventail, avec quoi de la même façon il peut se déplacer avec rapidité sur la surface de la mer; rapidité qui en outre est augmentée de beaucoup dès lors que l'animal fait usage des autres extrémités qui peuvent être plongées dans l'eau. -32- Cette roue ainsi ouverte est quelque chose de vraiment merveilleux. Sa couleur est d'un violet pâle, et sur les bords elle apparaît bordée de rouge vif presque lumineux comme les petits nuages du soir. La roue entière est régulièrement divisée en secteurs comme un éventail dont chaque secteur porte comme décoration un très beau dessin de l'escargotperche, mais avec le sommet tourné vers le bas ; l'envers par contre de cet éventail est parsemé en entier et régulièrement de minuscules dessins et ensuite progressivement plus grands représentant des homards-épée déjà mentionnés auparavant, qui apparaissent reproduits en une brillante couleur rouge carmin. -33- Chaque section de l'éventail se termine au bord avec un réel arc, sur la partie antérieure duquel est reproduite fidèlement l'image de ce même escargot-disque, tandis que sur le revers figure l'image de l'escargot-pyramide sur fond bleu-clair. Le bord extrême est dans sa partie postérieure, parfaitement blanc, et il est doté d'une luminosité propre de la même façon que celle sur la partie antérieure, mais ce dernier est d'un beau rouge vif crépusculaire. La longue trompe qui sert à l'escargot pour respirer est, elle aussi, parfaitement blanche ; cependant tout autour elle est munie d'une bande rouge en spirale sur la ligne médiane de laquelle sont comme imprimées des petites étoiles de couleur vert pâle doré. -34- Cette trompe sert en même temps de bras à l'animal pour cueillir sa propre nourriture consistant en une espèce d'herbe marine qui pousse très souvent dans la mer au
voisinage des plages; sur cette herbe se tiennent collés en grande quantité des petits vers dorés qui servent eux-aussi de nourriture à cet escargot, qui moyennant cette nourriture s'assimile d'une manière déjà plus surnaturelle la vie de toutes les autres espèces d'animaux qui le précèdent. -35- Cet escargot possède en outre déjà un propre instinct très prononcé qui parfois révèle tant de sagesse, qu'en certains pays s'est déjà manifesté le cas où quelques-uns se trouvèrent poussés à lui rendre des honneurs divins; ce qui semble avoir sa raison en ce que justement cet escargot, s'il n'est pas irrité ou poursuivi, contribue au sauvetage de ce qui est tombé accidentellement en mer, que ce soit un objet, un animal ou bien un homme. -36- Tout ce qu'il rencontre, se trouvant en danger sur la surface de la mer, il le saisit immédiatement de sa robuste trompe, le dépose sur la belle et spacieuse plate-forme de sa coquille, se dirige sans retard vers quelque plage, et l'ayant à nouveau saisi avec sa trompe, l'y dépose au sec ; et en conséquence de cela, ce très bel habitant de la mer est appelé par les gens de Saturne de diverses façons selon les différents pays. Certains l'appellent le balayeur des mers, en raison du fait qu'il ne peut rien tolérer flottant près de lui ; d'autres lui donnent le nom de sauveur de la vie ; d'autres encore, le luminaire des mers; en outre il est appelé le bateau vivant, ou même la roue miraculeuse ; et ainsi de suite, de très diverses façons est encore appelé cet animal. -37- En dehors de l'homme, cet escargot n'a presque absolument pas d'ennemis, et ordinairement il meurt de vieillesse quand il a atteint un âge déterminé; cependant quand l'animal est mort, sa belle demeure perd beaucoup de sa splendeur; par conséquent les habitants de Saturne cherchent à le capturer vivant afin que sa magnifique coquille n'ait rien à perdre de ses merveilleuses caractéristiques. Lorsque l'animal est tué, il flotte sur la surface, et alors les Saturniens s'empressent sur leurs navires de le tirer en remorque vers leur pays en remontant l'un des fleuves. -38- Lorsqu'ils sont arrivés, le corps de l'escargot est tiré avec beaucoup de précaution et une grande habileté hors de la coquille afin que l'éventail dont nous avons parlé ne soit pas endommagé. Celui-ci, après avoir été détaché du corps avec beaucoup de soin, est étendu afin qu'il sèche; et quand il est parfaitement sec, on le frotte bien soigneusement avec des huiles balsamiques ; et après une telle opération cet éventail redevient doux et très souple. -39- Un semblable éventail de l'escargot-disque sert ensuite à confectionner une sorte de manteau, manteau qui cependant sur Saturne, et en particulier sur ce continent, est d'habitude porté uniquement par ces personnalités qui jouissent d'une certaine considération patriarcale. Un éventail de ce genre conserve bien sûr toutes ses couleurs et ses dessins, mais la luminosité qui lui est propre, quand l'animal est vivant, disparaît. -40- Le reste du corps de cet escargot, qui consiste presque exclusivement en graisse, est ensuite mis à bouillir ; la graisse est ensuite mélangée avec des herbes aromatiques et sert aux habitants de Saturne, pour préparer un onguent très précieux à l'usage des patriarches seulement. -41- Mais qu'arrive-t-il ensuite de la belle demeure de l'escargot-disque ? Elle est transportée à terre avec prudence, et là elle est placée et fixée, appuyant sur la base, ou bien comme vous avez l'habitude de dire, vous, horizontalement, sur un terre-plein construit exprès, de préférence dans le jardin de l'un ou de l'autre des patriarches, où ensuite les gens aiment à l'admirer, ou parfois, dans des occasions extraordinaires, à y monter même dessus et à se promener autour ; cependant, ce dernier cas, comme on a dit, se vérifie seulement de très rares fois, car un semblable patriarche tient en très grand compte un tel embellissement de son
jardin ; et ce, parce que sur la planète Saturne le degré de l'éventuelle richesse d'une famille est estimé uniquement sur la base de la somptuosité du jardin respectif. -42- Mais afin d'augmenter ce faste, d'habitude, à côté d'un de ces escargots-disque, est placée aussi la coquille d'un des escargots-pyramide déjà décrits, de sorte que, bien souvent il arrive qu'un semblable patriarche se trouve avoir dans son propre jardin même 100 de ces ornements disposés en une ligne droite, tant d'une espèce que de l'autre. -43- En plus de cela donc, il n'est pas nécessaire que Je dise quelque chose d'autre, sinon ceci : Réveillez ici aussi votre imagination intérieure, et tâchez de faire une petite promenade dans un jardin de ce genre, et vous pouvez être plus que certains que non seulement un empereur ou un roi sur la Terre, mais tous autant qu'ils sont, pris ensemble, ne seraient en mesure d'embellir leur jardin avec autant de faste ; car, déjà une série de diamants égaux à celui qui semble enchâssé sur la coquille de cet escargot aurait pour vous une valeur plus grande que tout un empire ; pour ne pas parler ensuite des autres perles de grand or brillant et des autres très nombreuses magnificences de ces jardins des patriarches sur Saturne. Des deux espèces restantes d'escargots nous parlerons une prochaine fois. Donc pour aujourd'hui, AMEN.
CHAPITRE 14 -1En ce qui concerne la quatrième espèce d'escargots, il faut avant tout observer qu'en fait de beauté, elle reste pas mal en arrière par rapport à celle des escargots-disque déjà décrite ; cependant d'un autre côté - considérée du côté de la taille - elle est de beaucoup supérieure à la précédente. Les habitants de ce pays appellent communément cet escargot, *Le grand escargot septuple*, non pas pour indiquer peut-être qu'en une semblable énorme coquille demeurent sept escargots particuliers, mais bien plutôt pour la raison que l'édifice de cet escargot tourné vers le haut consiste en sept excroissances qui s'élèvent comme des tours au-dessus de la véritable demeure de forme ovale de l'escargot même. -2La coquille principale de cet escargot est parfaitement arrondie comme un œuf, dont la partie pointue reste constamment immergée dans l'eau, tandis que la partie la plus obtuse est tournée vers le haut. La spirale de la coquille n'est pas visible et se développe seulement dans l'intérieur de la dite coquille; toutefois à chaque tour accompli correspond à l'extérieur une semblable excroissance en forme de tour, de manière que la partie supérieure de la coquille vient à se présenter de telle sorte que du milieu parait s'élever la tour la plus haute et tout autour ensuite les autres tours par ordre décroissant. -3Chacune de ces excroissances ressemble à un grand exemplaire de l'escargotperche que vous connaissez déjà, mais naturellement avec la différence que l'excroissance est en réalité beaucoup plus longue que l'escargot en question, et qui, en bas, là où elle se réunit avec la coquille, est cependant de diamètre considérablement plus grand. L'ouverture de cet escargot est parfaitement ronde et de taille proportionnée aux autres dimensions gigantesques de la coquille. -4Le corps véritable de l'animal remplit naturellement tout le restant de la coquille de façon telle que même les excroissances peuvent être dans leur cavité occupées à volonté par le corps ; car, lorsque l'escargot veut s'enfoncer complètement, il remplit ces excroissances, et s'il veut au contraire se maintenir à la surface, alors il retire le corps des excroissances et se retire vers le centre de sa demeure, et ainsi il remonte à la surface. Son corps, qu'il tend hors de l'ouverture quand il se trouve à la surface, est complètement blanc ; il n'est du reste pas trop dissemblable de celui de vos escargots, mais cet escargot de Saturne, entre ses quatre grandes antennes faisant saillie sur le devant de la tête, porte lui-aussi une grosse et longue trompe, qu'il peut manœuvrer avec une très grande rapidité dans le but de se procurer de la nourriture. -5Cette dernière consiste en toutes sortes d'herbes marines, mais entre autre aussi de gros polypes de mer qu'il arrache avec force du fond, et qu'il introduit ensuite dans sa gueule ; à la pointe des deux antennes supérieures il est pourvu de deux yeux dotés d'une grande et vive puissance qui peuvent être tournés ici et là de tous les côtés. Quand il découvre en quelque lieu une proie, il se dirige rapidement de ce côté et s'empare aussitôt soit de l'herbe, soit du polype ; le mouvement rapide qu'il peut imprimer à son corps et respectivement à sa coquille, est dû à deux robustes nageoires, ou bras, si l'on veut les appeler ainsi, placées au-dessous de l'ouverture, moyennant lesquelles il avance en nageant. -6Quelle est maintenant la taille de cet escargot ? Il mesure un diamètre de 500 de vos toises ; en proportion, donc une des excroissances même de grandeur moyenne, est déjà plus haute que le plus grand clocher sur la Terre ; à la base elle a souvent un diamètre de 20 à 30 toises, et en haut se termine en une pointe en forme de pyramide. La couleur de la
coquille est à peu près d'une teinte intermédiaire entre le vert et le bleu ; de l'excroissance médiane cependant partent comme des bandes d'un bleu-blanchâtre clair qui se diffusent ensuite sur la coquille en conférant ainsi à l'animal l'aspect d'un énorme corps strié. -7Quant au reste cet escargot n'a aucun autre ornement, et pour ce qui regarde les excroissances connues, elles ressemblent, comme déjà dit au commencement, précisément à des escargots-perche ; cependant les ouvertures respectives sont de couleur rouge pourpre. -8Cet escargot est aussi estimé par ces habitants, comme digne de fatigues pour être capturé ; car, lorsque la coquille est libérée de la chair de l'animal, elle est, comme on l'a déjà mentionné en parlant des autres espèces d'escargots, transportée par voie d'eau à l'intérieur de la terre, et là, dans un lieu convenant, elle est enfoncée du côté pointu dans un terrain sec, et dans ces conditions une semblable coquille est utilisée comme dépôt de graines de fruits. -9D'autres fois on pratique dans une semblable coquille d'escargot des ouvertures de tous les côtés, et la coquille elle-même est pavée à l'intérieur de quelque manière ; et ainsi une maison naturelle de cette espèce est affectée comme demeure de luxe pour les enfants, et ce spécialement pour la raison qu'un semblable milieu étant à l'intérieur parfaitement poli, peut être maintenu avec facilité dans un état de très grande propreté. Le pavement consiste simplement en une couche de sable ; c'est-à-dire que dans la coquille il est déposé du sable complètement sec, presque jusqu'au niveau de l'ouverture ; et seulement ensuite on a l'habitude de placer dessus des pierres blanches lisses en forme de carreaux, qui en ce pays se trouvent fréquemment, et ce toujours dans l'ordre le plus parfait. -10- Le pavement ainsi disposé, l'habitation est ainsi alors déjà bel et bien prête et ressemble à un vaste salon à voûtes sur lequel s'élèvent les tours que vous connaissez déjà, dont les sommets sont cependant sciés dans le but de laisser d'abord libre passage à la lumière, et ensuite pour donner passage aux exhalaisons et éventuellement à la fumée qui peuvent se développer à l'intérieur d'une semblable habitation. -11- Toutefois des exemplaires de cette espèce d'escargots, on n'en trouve pas trop souvent ; par conséquent d'habitude seuls les patriarches qui demeurent dans les plaines disposent de semblables habitations particulières ; et ce aussi pour une autre raison, c'est-àdire, parce que étant donné la taille et la grosseur extraordinaires d'une telle coquille d'escargot, même pour les habitants de Saturne doués d'une stature et d'une vigueur gigantesques, c'est une entreprise ardue que de la transporter ainsi à l'intérieur du pays. Car, pour ce qui concerne la grosseur, les parois de la coquille ont presque partout une épaisseur de 4 à 5 toises. -12- Il suffit que vous prêtiez attention à cela, et vous pourrez aussitôt vous faire une idée du poids d'un semblable escargot. Si sur cette planète le rapport de gravitation était identique à celui de la Terre, le transport d'une coquille de ce genre représenterait certainement une impossibilité absolue, même pour des forces beaucoup plus considérables que celles à la disposition des habitants de Saturne. -13- Mais ce qui pour vous pèse un quintal, a là, à cause de l'influence exercée par l'anneau, bien souvent à grand-peine le poids d'une livre ; et même celui-ci peut être diminué encore moyennant des raréfactions internes d'air qui sont adroitement provoquées par les habitants de Saturne : ce qui arrive en particulier quand il s'agit de transporter la coquille d'un semblable escargot. -14- En de tels cas ils allument des branches sèches de l'arbre-pyramide que vous connaissez déjà, branches qui ont un riche contenu de résine, et ainsi allumées ils les introduisent dans l'ouverture de la coquille ; avec quoi, l'air à l'intérieur de cette coquille est
tellement raréfié, que le transport peut ensuite suivre avec une beaucoup plus grande facilité ; car, en ce qui concerne l'aérostatique, justement les habitants de Saturne sont les meilleurs maîtres, ce dont il sera fait mention ultérieure en son temps. -15- Ceci, voyez-vous, est ce qu'il y a d'intéressant qui mérite d'être dit au sujet d'une telle espèce d'escargot ; excitez aussi ici un peu votre imagination intérieure, et à votre grand étonnement, vous pourrez vous-mêmes contempler cet animal, de même que vous pourrez vous rendre compte de l'emploi que font ces habitants de la coquille respective. Votre étonnement se fera ensuite plus grand encore, si j'ajoute qu'un édifice de cette espèce est d'une solidité et d'une consistance absolument à toute épreuve, et même à tel point que se trouvent là des exemplaires qui remontent à des époques où votre Terre n'était pas encore habitée ; car pour une semblable maison, plus elle est vieille, d'autant plus elle devient solide ; et pour cette raison les plus vieilles sont aussi les plus grandement appréciées. -16- Si par ailleurs vous êtes portés à vous étonner à cause de cela, pensez, ce faisant, que même ces formes gigantesques d'animaux de Saturne ne sont à leur tour rien autre que de petits ouvrages en miniature en comparaison de diverses autres espèces d'animaux vivant, tant sur cette même planète, qu'en des proportions plus grandes encore sur la planète Jupiter, et incomparablement plus grandes enfin sur le Soleil. Réfléchissez donc sur ce qui vous a été raconté aujourd'hui, et attendez-vous à d'autres choses pour la prochaine fois ; pour aujourd'hui donc, AMEN !
CHAPITRE 15 -1En ce qui concerne ensuite le cinquième escargot, il représente la dernière classe parmi celles des escargots et c'est en même temps la plus grande, ainsi que, sous certains aspects, la plus extraordinaire et la plus intéressante. Cet animal porte le nom d'escargot rayonnant; il est le plus grand de tous les escargots qui peuplent les mers de Saturne, mais en même temps c'est aussi le plus rare, car il n'est vu par ces habitants que dans les périodes précédant les terribles tempêtes marines dont vous avez déjà entendu parler. Sa structure est en soi et de par soi ce que vous pourriez imaginer de plus grandiose. Sur votre Terre il n'existe absolument pas quelque chose de semblable pour servir même approximativement de comparaison. -2Toutefois, afin que vous puissiez vous en faire une idée, imaginez-vous une immense et brillante surface taillée en facettes; car cet escargot se présente précisément ainsi taillé en facettes et plus plat à la partie supérieure, tandis que celle inférieure est plus pointue. Les arêtes des faces dont la partie supérieure seulement compte plusieurs milliers disposés dans le plus bel ordre et formant autant de triangles, ressemblent à des bandes d'or poli larges d'une demi-toise, qui incluent, ou mieux, limitent toujours une surface triangulaire équilatérale parfaite. -3Les faces triangulaires ainsi formées mesurent trois toises de côté, et toutes sont parfaitement égales ; dans le milieu de la coquille seulement on trouve une figure qui a une plus grande surface, mais qui n' n'est pas un triangle, mais bien plutôt est à 32 angles et ressemble en tout à ce que vous appelez une rose des vents; et même les bords de cette grande figure sont marqués avec les larges bandes d'or dont on a parlé plus haut. -4Ces tableaux triangulaires ont une transparence égale à celle de l'un de vos diamants bien travaillés, et ne sont pas moins compacts et durs que celui-ci. La différence consiste seulement en ce que ces surfaces ont la faculté d'absorber la lumière du soleil et des étoiles, et de l'irradier réfractée en toutes les directions possibles lorsque l'obscurité est venue. -5Quelle taille a vraiment cet escargot ? Quand il se déplace sur la mer, sur sa coquille il y aurait certainement un espace suffisant pour y placer dessus toutes les maisons de votre capitale, tout en maintenant telles qu'elles sont les routes et les places. La coquille a partout une épaisseur d'environ dix toises, et la hauteur, du sommet du dos jusqu'à la pointe inférieure comporte 300 toises; en ce qui concerne la largeur, le diamètre en est souvent de plus d'un mille allemand. -6L'ouverture de cet escargot, de profil rond un peu allongé, a un diamètre de 70 toises ; à travers cette ouverture l'animal tend sa tête massive qui ressemble quelque peu à celle de votre cheval marin, et il la soulève, particulièrement en périodes de tempête, bien souvent si haut sur la surface de la mer, que s'il se trouvait sur votre Terre il pourrait regarder avec une grande facilité au-delà de montagnes même passablement hautes. Toutefois, malgré ses proportions colossales, cet escargot est de nature très douce, et il ne fait de mal à personne. -7Sa nourriture est de trois sortes. La première est constituée aussi en ce cas de grandes herbes qui se trouvent en grande abondance dans la mer ; la seconde, de gros vers marins, et enfin la troisième aussi d'oiseaux de mer qui pour cet animal sont en même temps un morceau de roi ; cependant, ce dernier genre de nourriture, il ne le prend que dans les
occasions où de grands ouragans font fureur, étant donné que par temps calme cet escargot vit d'habitude dans les profondeurs de la mer. -8Cette espèce d'escargot n'est pas capturée par l'homme ; en premier lieu parce que, avec le beau temps, il ne se montre jamais à la surface ; en second lieu, parce que la coquille respective serait trop pesante pour la transporter à terre dans un but quelconque. D'habitude cet escargot atteint un âge avancé, et bien souvent il vit même jusqu'à 30 années années de Saturne bien entendu -. Quand il meurt, bien vite aussi toute la coquille se désagrège, et avec le temps se dissout et se corrompt tout ensemble. Le vrai corps de l'animal est ensuite dévoré par une espèce de poissons assez semblable à celle des requins de vos mers, mais qui davantage encore ressemble à celle de vos crocodiles. -9Par nuit ténébreuse et orageuse, un seul de ces escargots émergeant de l'eau diffuse souvent tant de lumière, qu'il peut très bien éclairer une zone de mer dans un rayon de 100 milles carrés. Imaginez-vous maintenant, tandis que sévit sur la mer une semblable bourrasque, les nombreuses montagnes liquides qui semblent arriver jusqu'au ciel ; transportez-vous avec votre imagination sur une hauteur à partir de laquelle l’œil peut balayer sur quelques milliers de milles carrés de la surface de la mer, quand ici et là sont en train d'émerger de ces escargots rayonnants ; alors vous pourrez vous faire uni pâle idée du merveilleux spectacle que tout cela offre sur cette planète. -10- Particulièrement imposante se présente cette scène quand nombre de ces escargots viennent en surface par groupes et avec leurs longs cous se dressant très haut sur l'eau donnent la chasse aux oiseaux des tempêtes qui, en ces occasions, volent nombreux dans l'air ; en vérité, un spectacle semblable serait à vos yeux - pour employer l'une de vos expressions - ce qui peut être imaginé de plus terriblement beau. -11- C'est donc là, au sujet-de cet escargot, tout ce qui mérite d'être mentionné. Ici aussi, forcez un peu votre imagination, et avec l'aide de ces fidèles indications vous pourrez vous en faire un tableau assez vivant. La prochaine fois nous passerons à la troisième espèce d'animaux à coquille, - précisément aux tortues - et vous aurez l'occasion encore de vous émerveiller plus que durant la description des coquillages et des escargots ; pour aujourd'hui dcnc, AMEN.
CHAPITRE 16 -1Etant considéré qu'à la suite des communications précédentes au sujet de la planète Saturne, en ce qui concerne sa structure et ses particularités, ainsi que ses continents, les plantes et les divers animaux, déjà tant de choses ont été expliquées, et qu'en parlant des animaux il est arrivé une interruption après avoir terminé la brève description de l'espèce la plus intéressante des escargots, nous reprendrons le plus succinctement et le plus clairement possible notre description en partant de ce point. - Toutefois, nous ne nous arrêterons pas aussi longuement sur les diverses espèces de créatures ; et c'est pourquoi nous mettrons partout en relief seulement ce qui excelle le plus en chaque domaine, en faisant tout le reste simplement l'objet de considérations générales. -2En conséquence, déjà à partir de maintenant, en ce qui concerne aussi les autres habitants des eaux, nous traiterons sommairement le sujet et nous passerons ensuite aux habitants de l'air auxquels nous nous réservons de consacrer une brève attention; nous en ferons tout autant ensuite en ce qui concerne les animaux de la terre ferme, pour pouvoir ensuite dès que possible nous trouver face aux êtres humains de ce corps de l'univers. Et maintenant revenons à nos habitants de l'eau. -3Vous savez déjà de quelles grandes eaux en général et de quelles mers est riche cette planète, et, d'un autre côté il vous est connu comment aussi sur la Terre, justement dans l'élément liquide, demeurent les animaux les plus grands et les plus puissants. Un tel rapport est aussi complètement de règle sur Saturne ; seulement là, comme il est naturel, les qualités et les espèces sont beaucoup plus variées et n'ont que peu de ressemblance, ou même absolument aucune, avec celles de votre corps terrestre. Ici nous ferons mention seulement de quelques espèces, c'est-à-dire, avant tout de celles qui font partie du règne immensément nombreux et varié des poissons. -4Le plus grand de tous les poissons de cette planète est le *Bisorhiohiohio*, comme il est appelé là ; ce poisson occupe sur Saturne à peu près le rang occupé sur votre Terre par votre baleine, cependant en ce qui concerne la forme elle est extraordinairement différente de celle-ci. Avant tout il convient de noter que ce poisson a une tête longue d'environ cent de vos toises, tête qui est parfaitement ronde et qui par conséquent a l'aspect d'un ballon de cent toises de diamètre qui pourrait s'ouvrir par le milieu sur toute sa largeur; et donc comme un semblable ballon pourrait s'ouvrir par le milieu, c'est exactement le cas de la tête de ce poisson. Il n'a ni dents ni fanons, et à la place, tant la partie inférieure que celle supérieure de cette bouche gigantesque sont formées d'un disque parfaitement plan et très dur muni au fond, c'est-à-dire à l'embouchure du vaste œsophage, d'une double langue très longue et très mobile qui sert à ce poisson pour envoyer en bas la nourriture d'abord broyée et écrasée entre les deux disques de la gueule. -5Cette tête est attachée immédiatement au véritable corps du poisson. Chez un poisson vraiment adulte de cette espèce le corps est souvent long de presque 3000 toises, haut d'environ 1500 toises du ventre à l’échine, et, là où il atteint le plus grand développement, il mesure bien souvent presque mille toises de diamètre. Au corps fait encore suite une queue longue d'environ un millier de toises, qui sert à ce poisson en premier lieu à se déplacer et à tourner. Sur le dos il est pourvu de nageoires extrêmement robustes longues souvent de plus de 100 toises, tandis que sur le ventre il porte deux véritables bras pour nager, à peu près comme vos phoques et vos morses.
-6Si vous cherchez à vous représenter un peu ce poisson avec votre imagination, il doit sans aucun doute vous apparaître clair que, s'il était possible de le transporter en quelque lieu au sec sur votre Terre, et de lui faire en plus étendre ses nageoires, il pourrait rivaliser avec les plus hautes montagnes de votre planète ; d'ailleurs les habitants de Saturne eux-mêmes; l'appellent en certains lieux, tantôt la montagne flottante, tantôt l'Île flottante; d'autres enfin lui donnent tout bonnement le nom de planète des eaux. ' -7Vous vous demandez certainement si sur Saturne on se consacre à la pêche de cet habitant des mers ? - Mais Je vous réponds aussitôt, non. Chaque habitant de Saturne a le plus grand respect pour ce poisson, car lorsqu'il aperçoit sur la surface de la mer quelque chose qui est en train de s'approcher de lui, il ouvre immédiatement son énorme tête, se lance avec une grande rapidité sur le corps qu'il voit flotter, et aussitôt que cela est arrivé dans sa gueule, il ferme avec violence la tête et l'écrase pour l'engloutir ensuite. -8Mais par grand bonheur ce poisson demeure en général seulement dans les régions polaires de cette planète, qui par suite des neiges et des glaces perpétuelles sont pour les habitants de Saturne beaucoup plus inaccessibles encore que ne le sont les calottes polaires terrestres pour les habitants de la Terre; c'est pourquoi il arrive seulement rarement pour les habitants de Saturne, que se présente l'occasion de voir en quelque lieu un exemplaire de cette espèce. Mais quand l'un ou l'autre des habitants de cette planète en voit occasionnellement un dans les parties les plus septentrionales ou il vit habituellement, alors cela est toujours considéré comme un très mauvais présage; et qui a vu le poisson s'empresse de se retirer dans l'intérieur du pays et le plus loin possible de la côte ; parce qu'ils croient que ce poisson leur a été envoyé en ce lieu par les plus méchants des esprits des glaces, pour faire, comme vous le dites, vous, une seule bouchée de leur pays. -9Et sur le lieu où a été vu un poisson de cette espèce, pendant longtemps il n'y a plus d'habitant de Saturne qui se hasarde à y mettre pied. Pour cette raison aussi il arrive que les régions septentrionales de Saturne, c'est-à-dire les continents, ne sont naturellement habités que de très rares fois, et même, ne le sont généralement pas du tout. -10- Ici vous ne manquerez certainement pas de demander à nouveau : Quelle est vraiment en nature la mission de ce poisson ? Voilà : ce poisson est l'ultime organe récepteur de tous les êtres vivant dans les eaux et à partir de lui, la vie se subdivise à son tour en toutes sortes d'habitants de l'air ; car en cet organe, non seulement va se former, en ce qui concerne la partie spirituelle essentielle, une future espèce d'habitants de l'air, mais bien plutôt, ce que l'on appelle les classes de la gent ailée sur cette planète naissent à partir de son être, sans qu'il ait pour cela besoin de mourir. -11- - Sous cet aspect il est plutôt semblable à une petite planète qu'à un animal, qui cependant est un organe permanent au moyen duquel peuvent mûrir et se former, bien distinctes les unes des autres, d'innombrables espèces spirituelles. -12- Le même cas se vérifie certes avec votre baleine, mais en ce qui concerne la sphère d'action, notre *bisorhiohiohio* la dépasse de bien loin; car, tandis que la baleine terrestre engendre animiquement seulement les espèces d'oiseaux qui vivent dans les régions polaires, cette énorme baleine de Saturne pourvoit au contraire aux habitants de l'air de la planète respective toute entière, ce qui revient à dire qu'en elle advient le passage des formes animiques des êtres demeurant dans les eaux aux formes animiques des très diverses espèces des habitants de l'air. -13- Ce poisson est donc le plus grand et en même temps le plus digne de remarque de toute la planète ; cependant, à côté de celui-là, il y a encore des quantités innombrables de poissons et d'amphibies de toutes les espèces imaginables, qui sont bien distinctes les unes des
autres, quant aux dimensions, aux formes et aux propriétés. Ainsi, à côté de ce poisson géant, il existe encore environ une centaine d'espèces qui en fait de taille peuvent sans aucun doute rivaliser toutes avec votre baleine ; mais, en faire une revue détaillée une par une, aux fins pour lesquelles Je suis en train de vous révéler cette planète, en premier lieu nous emmènerait trop loin, et en second lieu ne serait justement pour cette raison pas d'une particulière utilité; nais quand vous serez vous-mêmes davantage réveillés en l'esprit, alors même sans cela, ce sera chose facile que de vous rendre compte aussi des plus petits détails de tout ce qui existe, non seulement sur Saturne, mais bien encore sur d'autres planètes. -14- Laissons donc vivre en paix les animaux des eaux de cette planète et passons à considérer les habitants de l'atmosphère saturnienne qui vous intéresseront beaucoup plus que toutes les espèces d'habitants des eaux dont on a parlé jusqu'à présent. -15- Si, vous, sur la Terre, vous regardez un peu autour de vous, il ne pourra pas vous échapper, qu'en plus des nombreuses espèces d' oiseaux, il existe en nombre de bien loin plus grand encore les espèces de ces minuscules petits animaux ailés qui, pour vous, sont tous ensemble connus sous le nom général d'insectes volants. De semblables êtres, il y en a aussi sur Saturne en quantité énorme et dans les espèces les plus diverses, et parmi celles-ci, comme il arrive sur votre Terre où elle représente une partie principale, il y a la mouche. -16- Celle-ci est ensuite aussi l'unique petit animal parfaitement semblable en tout à son congénère vivant dans l'atmosphère de votre Terre; ce n'est seulement qu'ici et là, à proximité des lacs et des fleuves que l'on rencontre souvent en abondance une espèce plus grande de mouches. De jour, cette mouche apparaît de couleur blanc-bleu clair ; par contre, après le coucher du soleil, c'est-à-dire, lorsque d'habitude elle déploie la plus grande activité, elle devient brillante comme une petite étoile, à peu près à la façon dont reluisent chez vous les vers-luisants - mais avec une beaucoup plus grande intensité - ou bien comme en Amérique et en d'autres pays tropicaux, ce que l'on appelle *les porte-lanterne*. -17- Toutes ces espèces cependant, en ce qui concerne la luminosité, sont surpassées par notre mouche de Saturne, précisément par le fait que sa lumière est parfaitement blanche, et que la mouche elle-même dépasse en taille tout autre insecte volant sur votre Terre. Les habitants de Saturne prennent bien souvent assez de plaisir à contempler, quand il fait nuit, le vol vivace de ces petits animaux qui par milliers se croisent dans toutes les directions dans l'atmosphère de la planète. -18- Ce serait donc l'un des petits animaux dignes de remarques qui peuvent être dénombrés parmi les habitants-de l'air. Une autre espèce d'insecte qui vit sur Saturne, mais qui ne trouve d'égal sur aucune autre planète, est celle que l'on appelle l'étoile volante. Ce petit animal aussi ne développe manifestement son activité vitale que seulement par temps de nuit; alors que de jour il se tient au contraire sous les arbres-pyramide que vous connaissez déjà ; par conséquent, durant la nuit, et même déjà sitôt après le coucher du soleil, le spectacle des essaims de semblables étoiles brillantes prenant leur vol depuis les branches des arbres dans la lumière crépusculaire constitue pour les habitants de Saturne quelque chose d'extraordinairement attrayant. -19- Mais pourquoi cet animal est-il appelé du nom d'étoile vivante? Voilà : Un tel nom dérive du fait que lui, de chaque côté de son corps allongé et cylindrique, possède trois ailes pointues en forme de pyramides dotées d'une assez grande luminosité, ailes qui, lorsqu'elles sont ouvertes, confèrent à ce petit animal l’aspect d'une étoile à six rayons. -20- Lorsque le petit animal est complètement adulte, il mesure environ un empan en grosseur, et, étant donné que ses ailes durant le vol acquièrent une luminosité particulièrement forte et que le petit animal lui-même, quand il vole, ne s'éloigne pas
beaucoup de sa demeure habituelle, ces arbres gigantesques prennent aux yeux des habitants de Saturne un aspect on ne peut plus imposant par l'effet du continuel essaimage des milliers de ces étoiles tout à l'entour tant que dure l'obscurité. -21- Outre cet insecte lumineux il y a encore un grand nombre d'autres espèces qui, de nuit, émanent elles-aussi une lumière diversement colorée; cependant cette lumière n'est pas aussi intense et les petits animaux eux-mêmes sont beaucoup plus petits que les autres; par conséquent ils n'attirent pas l'attention particulière des habitants de cette planète, et ce d'autant moins que là il y a diverses espèces d'oiseaux assez grands dont les plumes émanent de nuit une lumière très claire, particulièrement quand ils volent. -22- Étant considéré donc, que dans le règne des insectes il n'y en a plus beaucoup qui puissent avoir un particulier intérêt, nous passerons sans autre au règne des oiseaux, en nous limitant à considérer durant de passage seulement quelques papillons dont il y en a beaucoup qui, comme déjà sur la Terre, déploient au soleil leurs ailes merveilleusement colorées et artistiquement chamarrées ; tout autant et même beaucoup plus variés dans les espèces et splendides dans leurs couleurs, on les trouve sur la planète Saturne. Le plus-grand et en même temps le plus majestueux papillon de ce corps de l'univers est celui qui, là, est généralement connu sous le nom de *COM*; ailes étendues, sur votre Terre, il arriverait à couvrir assez bien un bon quart de joch de terrain (1300 m2 environ). -23- Son corps atteint souvent les 20 toises de longueur, tandis que le diamètre en est presque d'une toise; il a des pattes robustes, plus que celles d'un éléphant terrestre, tandis que chaque pied est pourvu de six articulations, et est ainsi disposé, qu'en cas de besoin, il peut être allongé considérablement ou bien aussi conformément raccourci. Ses antennes ont un aspect précis, comme si sur sa tête étaient fixés deux hauts peupliers ; mais les ramifications respectives à droite et à gauche sont droites et régulièrement disposées, à peu près comme les feuilles pointues d'un conifère. -24- Sa trompe est plus longue et plus robuste que celle de votre éléphant, de sorte que ce papillon, à en juger par sa corpulence, on pourrait le supposer être un animal doué d'une vigueur physique assez grande, ce qui cependant ne correspond pas le moins du monde à la réalité; pour cette raison aussi ce papillon évite d'autant plus qu'il le peut la présence des hommes, et il faut beaucoup avant de pouvoir en capturer un quelconque exemplaire. -25- Cette difficulté est rendue plus grande par son vol extraordinairement rapide, et qui peut là avec une certaine probabilité de succès se risquer à une semblable chasse ce sont généralement les jeunes filles, étant donné que leur corps est plus léger que celui des hommes et qu'elles peuvent pour cette raison avec une plus grande facilité que ceux-ci se soutenir dans l'air. A cette fin ces jeunes filles se munissent parfois d'une paire d'ailes artificielles avec les quelles elles se mettent à suivre au vol en grande hâte notre papillon. Si ensuite il arrive qu'elles réussissent à faire un prisonnier dans l'air, alors l'évènement prend pour elles le caractère d'une fête très importante; car de ce papillon tout est utilisé pour l'ornement des enfants; et presque sur aucune planète comme sur Saturne la femme tient autant à paraître gracieusement vêtue, en particulier dans ses jeunes années. -26-. Mais afin que vous puissiez vous faire une idée de la raison pour laquelle ce papillon représente à leurs yeux un tel prix, il sera bien nécessaire de passer un peu en revue toutes ses magnificences. Cependant on ne peut cacher qu'il sera plutôt difficile de présenter, avec une précision suffisante pour votre esprit, la beauté presque immatérielle de cet animal. Ses ailes sont parfaitement quadrangulaires, seulement, tant celle de droite que celle de gauche ont aux extrémités un prolongement tourné vers la tête, prolongement qui est long
d'une toise et demie environ et qui a une assez bonne ressemblance avec une épée qui serait quelque peu large. -27- Mais ensuite de quelle couleur sont les ailes et quels dessins portent-elles ? - La partie supérieure des ailes apparaît comme recouverte d'une teinte or pur mélangée à une couleur rouge argent ; de cette surface d'or pendent - ou mieux y sont fixées dessus - une grande quantité de très belles plumes, dont chacune a toutes les couleurs possibles. Ces couleurs d'un brillant parfaitement métallique varient aussi au moindre mouvement des plumes, de sorte que, en tournant et en retournant une plume, en chaque point on peut apercevoir toutes les couleurs possibles et imaginables. -28- Ces plumes poussent sur la surface de l'aile dans un ordre déterminé, par suite de quoi sont formés sur l'aile des dessins et de merveilleuses décorations, qui cependant n'ont pas une forme constante comme celle des ailes de vos papillons; mais cet ordre est ainsi établi, qu'à chaque mouvement de l'aile, avec le changement des couleurs, se présentent aussi à l’œil des formes toujours nouvelles et toujours de nouveaux dessins. Les bords des ailes sont ornés de plumes à peu près semblables à celles de la queue de votre paon, mais elles sont plus grandes que celles-ci, et les couleurs en sont beaucoup plus vivaces et plus brillantes. -29- La surface inférieure des ailes ressemble par contre à une feuille d'or bien polie qui serait recouverte d'une fine teinte verte. Les pieds de cet animal sont eux-aussi pourvus de magnifiques plumes, et de même aussi tout le reste du corps. -30- Les antennes constituent ensuite ce qu'il y a de plus précieux en cet animal ; l'arbre principal de l'antenne est extrêmement léger et apparaît comme fait d'or pur transparent - autant qu'il est possible pour vous d'imaginer une substance semblable - et étale lui aussi chaque fois qu'il se tourne toute la gamme des couleurs à peu près comme s'il était une lance de diamant taillé munie de tous les côtés de plumes semblables à celles qui ornent les bords des ailes. -31- La trompe est de couleur blanc éblouissant, et elle est ornée comme d'un ruban en spirale d'un pas très large, et qui, en ce qui concerne la splendeur des couleurs, peut sans aucun doute rivaliser avec l'arc-en-ciel. Enfin les yeux de l'animal - quand il est en vie - sont la chose la plus merveilleuse qui soit. C'est-à-dire que leur splendeur est tellement intense que les regarder, serait pour vous presque tout aussi difficile que regarder le soleil à son lever ou à son coucher. -32- Cependant, quand l'animal est mort, toute cette splendeur des yeux disparaît ; par conséquent l’œil ne représente aucune valeur particulière ; toutefois il est soigneusement enlevé de la tête et vidé de l'humeur qu'il contient ; et ensuite, moyennant une habile manipulation les femmes se confectionnent une sorte de petite bourse ou de poche, qui, en raison d'une assez bonne transparence et de sa durée, en vient à être pour les élégantes de cette planète à peu près ce que l'on appelle *un réticule* pour vos femmes. En somme, du corps de cet animal on ne jette rien en dehors de la chair proprement dite et des viscères, tandis que tout le reste est utilisé pour en faire des ornements d'un genre absolument extraordinaire. -33- Mais ensuite, pourquoi ces ornements sont-ils tenus en si grande estime ? Voilà, pour une triple raison : la première, est que cet animal est très rare, et en tant que tel, très difficile à capturer ; la seconde, que toutes ces couleurs sont de très longue durée, et même tant que les habitants de Saturne les tiennent pour indestructibles ; et la troisième enfin, parce que les pennes et les plumes sont d'une extrême légèreté et maintiennent toujours également leur magnificence. -34- Sur cette planète il y a aussi une espèce d'oiseaux dont les plumes ressemblent à celles de ce papillon, et souvent il arrive que certains spéculateurs de Saturne tentent de faire
passer des plumes d'oiseau pour d'authentiques plumes de papillon ; mais il y a là des connaisseurs extrêmement experts, qui savent distinguer les plumes d'ornement vraies des fausses, comme vos joailliers sont en mesure de juger si une pierre précieuse est ou non authentique. -35- Mais gare si un filou de cette espèce tombe entre les mains de femmes qui lui ont acheté des plumes fausses pour des bonnes ; car en ce cas justement avec les mêmes fausses plumes, dont le petit canon très rigide est bien taillé, les femmes se mettent à le griffer dans tous les sens de façon telle, que pour l'avenir toute envie lui passe de tenter d'embobiner quelqu'un en lui refilant de la marchandise fausse, sans compter en plus, que d'un négociant ainsi traité tous se refusent ensuite à lui acheter quelque chose. -36- Vous voyez, c'est tout ce que l'on peut dire au sujet de notre fameux papillon, et de la façon dont il est capturé et utilisé. Il est presque inutile de mentionner ici comment les femmes de Saturne utilisent ces ornements ; cependant, au passage, il peut être intéressant de savoir que certaines femmes très vaines se couvrent parfois tout le corps avec le produit des ailes de ce papillon, de manière telle, qu'à la fin on peut presque les prendre elles-mêmes pour des papillons. -37- Mais cela suffit, parce qu'il est tout à fait inutile d'en apprendre plus sur ce sujet, qui ne Me plait absolument pas, ni sur Saturne, ni sur la Terre. Qu'ensuite après ce papillon il y en ait aussi d'autres en quantités presque innombrables de toutes les espèces, de toutes les couleurs et de toutes les tailles, vous pouvez facilement le déduire, à condition que vous vous mettiez à considérer l'extrême variété de tout ce qui existe sur cette planète. -38- Cependant avant de passer à examiner les véritables oiseaux, nous donnerons un petit-coup d’œil à ces espèces d'animaux volants qui, sur votre Terre, sont classés parmi ce que l'on appelle les chauves-souris, et à quelques autres encore comprenant des animaux semblables pourvus d'ailes à membrane. Des animaux de cette espèce, y en a-t-il aussi sur notre planète ? Certes oui, et même en nombre beaucoup plus grand que sur votre Terre. Mais il ne s'agit pas réellement de chauves-souris comme vous les connaissez, vous ; au contraire il existe là en grande quantité d'autres animaux munis d'ailes à peu près comme celles de vos chauves-souris. Toutefois si nous voulions nous consacrer à observer séparément chaque espèce de semblables animaux, il faudrait plus de 10.000 feuilles de papier seulement pour en enregistrer les noms. -39- Or ce serait certainement une chose inutile; c'est pourquoi, comme nous l'avons fait précédemment, nous choisirons seulement deux espèces parmi cette classe d'animaux de Saturne pour les examiner un peu mieux, tandis que nous nous limiterons ensuite à donner un simple coup d’œil général aux autres. Un exemplaire particulièrement remarquable de cette classe d'animaux est dénommé par les habitants de Saturne, la vache volante ; cet animal est d'une surprenante beauté, et il a à peu près la taille de l'un de vos bœufs déjà bien développé ; seulement, vers la queue, il est plus long que votre bœuf à peu près d'une demi-toise. -40- Cet animal est lui-aussi pourvu de quatre pieds, chacun se terminant par un sabot d'une couleur d'un blanc éblouissant ; le dos est rouge et le ventre de couleur vert clair; puis la peau est en général recouverte d'un duvet court et brillant, au point de ressembler à un velours de soie très fin de chez vous. La tête de cet animal a une certaine ressemblance avec celle du chien lévrier, comme vous l'appelez, mais la couleur en est, naturellement, très différente de celle de la partie correspondante du corps de votre lévrier ; car, en commençant par le cou, la tête est de couleur d'un bleu-clair, avec une face rouge au milieu, qui commence au dos et finit à la racine du nez.
-41- Par contre, à la partie inférieure de la tête la couleur bleue devient graduellement plus sombre. Aux alentours de la partie antérieure du corps, partent de celui-ci deux longs bras qui, lorsqu'ils sont étendus, mesurent environ 6 toises. Ensuite, entre ces bras et les jambes postérieures, l'animal est pourvu d'une robuste membrane qui, naturellement se tend seulement quand il veut voler ; car, si l'animal ne vole pas il replie les deux bras, et précisément en trois sections ; et alors ces bras s'adaptent si bien au corps, que déjà à petite distance ils s'aperçoivent à grand-peine. -42- Mais quand cet animal étend ses deux bras pour voler, alors c'est aussi le bon moment où l'on peut l'admirer dans toute sa beauté ; car la membrane en question est elleaussi d'une couleur d'un blanc éblouissant, et chaque bras est en soi muni à son extrémité de quatre doigts bien formés qui, dans le but de saisir, sont à leur tour pourvus de robustes griffes pointues. La membrane qui sert au vol a parfaitement l'aspect d'une feuille d'or très pur ornée de bandes et de points de couleur rouge clair disposés régulièrement et alternativement. -43- Ensuite les bords de ces ailes-membranes sont rayés de teintes brillant comme un arc-en-ciel, et la zone colorée se perd vers l'intérieur de l'aile en de très nombreux fils d'un blanc éblouissant longs de plus d'une brasse, et qui brillent à peu près de manière égale à ce que l'on appelle les fils de verre qui reluisent aussi plus que de la soie très fine ! Les yeux de cet animal sont dotés d'une vue très aiguë et d'une vivacité si extraordinaire que le soir ils commencent à briller comme des diamants ; le museau est d'une couleur rouge sombre et la bouche est aussi rouge, mais tendant plutôt à un rosé délicat, et les dents, qui sont nombreuses, semblent faites de pur cristal. -44- La langue est elle aussi d'un rouge vif et elle est relativement longue, de sorte que l'animal peut s'en servir à diverses fins, comme par exemple à se laver le museau, et en général pour la propreté de tout le reste du corps, étant donné que son corps est extrêmement souple. -45- En outre cet animal peut se servir de sa langue, comme vos chiens, pour boire; et quand il l'enroule, comme il peut le faire, dans le sens de la longueur, en poussant le souffle à travers les petits canaux qui viennent ainsi à se former, il peut émettre un sifflement très aigu qui est entendu tout à l'entour ; et l'animal siffle de cette façon quand il est sur le point de prendre son vol. -46- Mais pourquoi donc un semblable animal est-il appelé la vache volante ? Il est ainsi appelé parce que, entre les deux pattes postérieures il est pourvu d'une mamelle parfaitement formée, laquelle, au temps de faire des petits et quand l'animal a mis bas, se remplit d'un lait à la saveur très agréable. -47- C'est pourquoi cet animal est souvent capturé par les habitants de Saturne, et en quelques endroits il est même domestiqué, ce qui s'avère là d'autant plus facile que l'animal lui-même est de nature très douce. Quand les petits viennent au monde, pour six femelles il y a seulement un mâle ; celui-ci, quand il a terminé de grandir, se différencie des femellesseulement en ce que - comme on le rencontre à peu près chez votre mouton - au lieu de la mamelle de la femelle, il a ce que l'on nomme le scrotum, et sur la tête, entre les deux oreilles blanches pendantes, il porte une minuscule corne aussi toute blanche et légèrement pliée vers l'arrière. -48- Donc, pour un peu que vous éveilliez votre imagination, il ne vous sera certainement pas difficile d'imaginer la beauté de cet animal ; cependant il est vrai que vous pourrez penser et vous demander aussi : Mais pourquoi donc cet animal a-t-il été fait aussi beau, et quel but a-t-on voulu atteindre en le faisant ainsi ? Et Moi, Je Me limite à vous répondre : Il suffit que vous considériez un peu la beauté de beaucoup de fleurs parmi les
vôtres, et la multiplicité de leurs admirables formes ; ceci ne devrait-il pas aussi vous amener à demander : Quel besoin les fleurs ont-elles d'être aussi belles ? -49- Pour produire de très simples petites graines de semence, des fleurs beaucoup moins voyantes ne seraient-elles pas suffisantes ? Vous voyez, les réponses à de semblables questions ne sont pas encore mûres pour vous ; car, en ce qui concerne la beauté de tels êtres, il est impossible pour le moment que vous réussissiez à en comprendre la raison, étant donné que celle-ci se trouve dans le cercle de Ma Lumière ou bien de Ma Sagesse. -50- C'est pourquoi on doit se contenter de considérer la chose d'un point de vue général, et accepter, comme cause universelle de tous les phénomènes de cette espèce le fait que Moi, le Créateur immensément bon et suprêmement sage de toutes les choses, Je dois très bien avoir connaissance des buts pour lesquels J'ai formé les choses et les êtres de telle ou telle façon déterminée. -51- Et puisque maintenant nous avons fini d'observer cet animal, nous passerons à donner un coup d’œil à un autre animal, capable aussi de voler, et de même catégorie. Cet animal est appelé par les habitants de Saturne le*ruban volant* ou parfois aussi la *corde volante*, mais comment est-il arrivé qu'ait été imposé un semblable nom à cet animal ? Voilà : Quand nous l'aurons un peu examiné, l'explication du nom viendra de soi. Vous voyez, en ce qui concerne le corps, cet animal a une assez bonne ressemblance avec un singe terrestre bien conformé. Quand il se déplace sur le terrain il utilise ses pattes postérieures comme un homme ; il se sert ensuite des pattes antérieures comme le singe des siennes ; seulement ces pattes sont très longues et servent de support elles aussi à une membrane pour le vol, laquelle membrane est soudée pareillement à peu près à la moitié des pattes postérieures. -52- Quand cet animal se tient droit, il a une hauteur de trois toises, mais par contre, quand il se tient tapi, alors naturellement il apparaît moins long encore de moitié. Le corps de cet animal n'a en soi rien de particulier en dehors de ce que son ventre est de couleur bleu-pâle et que sur le sommet du dos, il est pourvu d'un poil roussâtre semblable à de la laine. Mais qu'est-ce donc vraiment qui rend particulièrement intéressant cet animal ? Voilà, cette chose est sa queue, que cet animal déploie seulement lorsqu'il vole ; quand par contre il se déplace sur le terrain, il enroule sa queue avec tant de dextérité que celle-ci vient s'installer à l'extrémité postérieure du corps au point de sembler un rouleau parfait d'une étoffe qui lui aurait été pendu par quelqu'un en ce point du corps. -53- Chez un animal déjà adulte, comme le serait celui dont nous nous sommes occupés jusqu'à présent, cette queue a souvent une longueur de 90 à 100 de vos toises, et une largeur d'environ une brasse ; cependant malgré tout cela, en forme de ruban comme elle est, elle est si fine, que quand elle est complètement enroulée, elle forme un rouleau à grand-peine de deux empans de diamètre. L'enroulement se fait au moyen de filaments musculaires disposés intérieurement au long de la queue tout entière ; car celle-ci n'a absolument pas d'articulations, mais bien plutôt il faut la considérer uniquement comme un prolongement de la peau du dos. -54- En ce qui concerne la couleur, cette queue représente un très clair arc-en-ciel, et dessous elle est pourvue d'un très fin duvet très court comme un velours de soie rasé court, rassemblé par petits groupes sur le fond, au point de former comme de petits boutons laineux en très grand nombre et scintillants. Et voilà que désormais vous pouvez déjà vous-mêmes répondre à la question : pourquoi cet animal est-il appelé le *ruban volant*. -55- Cependant il arrive que, particulièrement dans les régions très peuplées, de rares fois seulement cet animal se trouve en possession de toute sa queue ; car les habitants de Saturne lui donnent très souvent la chasse, et d'autant plus que de jour, c'est-à-dire durant le
temps où cet animal ne vole jamais, la capture en est on ne peut plus facile. Quand l'animal est pris, il ne lui arrive vraiment rien de grave, mais en n'importe quel cas il y perd la queue, car celle-ci lui est immédiatement coupée totalement justement là où se termine l'échine, et elle finit par devenir un ornement particulier des personnalités importantes du pays respectif. -56- En particulier, aussi dans ce cas, ce sont les femmes qui ambitionnent d'en faire pour elles un ornement après l'avoir rendue flexible et résistante, ainsi que durable comme votre cuir, moyennant des frictions avec certaines huiles parfumées. D'habitude cette queue est employée pour s'en ceindre le front, ou bien on la porte corne ceinture à la hauteur des reins. Cet animal est donc pour les habitants de Saturne un hôte toujours bienvenu ; et comme, après avoir été coupée, la queue recommence à pousser progressivement, en certains pays il est même domestiqué et élevé pour ainsi dire à la maison. -57- A un semblable élevage se consacrent de préférence ces marchands d'articles de luxe que vous connaissez déjà un peu ; et étant donné que la valeur de ces queues dépend avant tout de la longueur, il arrive bien souvent qu'ils attachent ensemble deux, et en certains cas même, trois queues plus courtes, et qu'ils vont ensuite les écouler pour une queue entière. Mais si la supercherie est découverte, alors un tel marchand de Saturne a beaucoup à faire pour se tirer des mains des femmes, qui se chargent de lui infliger une punition qui en réalité n'est pas que peu sensible, étant donné que sur cette planète les femmes exercent d'une certaine manière la juridiction sur le sexe fort. -58- Cela s'explique par le fait que sur Saturne, ordinairement, l'homme est, comme vous avez l'habitude de dire, amoureux à mort de la femme, et pour ce motif il est aussi trop accommodant, et par excessif amour il se laisse souvent mener par le bout du nez par la femme comme il plait à celle-ci; d'autre part, il ne faut pas passer sous silence que les femmes de Saturne en comparaison de celles de la Terre sont incomparablement plus distinguées : et plus ménagères, ce qui contribue énormément à leur rendre extrêmement attachés les hommes qui sont volontiers disposés à accorder à leurs femmes plus d'un privilège. Mais à cet égard nous aurons assez le temps de faire les considérations voulues et les plus amples, quand nous en viendrons à traiter des habitants de Saturne ; par conséquent, demain, nous reviendrons à notre règne animal ; pour aujourd'hui, AMEN !
CHAPITRE 17 -1Comme déjà au début de cette communication, au sujet des animaux volants, il fut fait mention crie ceux-ci existent là en quantité immense, de même Je peux vous dire aussi maintenant que déjà le nombre des espèces et sous-espèces sur cette planète est tellement grande, que dix mille feuilles seraient à grand-peine suffisantes pour en enregistrer seulement les noms ; et cependant, ce qu'il y a réellement de plus merveilleux, ce n'est pas tant la quantité que les formes très diverses ; car, presque tous les quadrupèdes de cette planète, de même que de très nombre des espèces de poissons ont en ces habitants de l'air, d'une certaine façon, un représentant ailé ; et là il arrive précisément, comme si sur votre Terre, il existait aussi de toutes les espèces d'animaux domestiques et sauvages, de tous les amphibies et de la plupart des poissons, des exemplaires pourvus d'ailes comme une chauve-souris ; et que par suite il y eut chez vous des éléphants, des chevaux, des bœufs, des lions, des tigres et des hyènes, ailés ; et ainsi de suite, à travers tout le règne animal. -2Mais ce qui, par rapport à la Terre, est cité comme un simple exemple, sur Saturne, se vérifie vraiment littéralement ; seulement, les animaux volants sont beaucoup plus petits que ceux dont ils reproduisent le type, et ils ne sont pas munis d'ailes tandis que ceux-ci sont au contraire de bien loin plus grands, plus robustes et plus puissants, qu'ils soient habitants de la terre ou bien des eaux de cette planète. -3Désormais, vous pourrez donc déjà vous faire une idée de combien de mouvement et de combien de vivacité il doit y régner; et ce d'autant plus, si vous voulez considérer la chose du côté très plaisant que ces animaux sont souvent de caractère assez doux, et que les habitants de Saturne, par l'effet de leur puissance de volonté, sont continuellement maîtres tant des éléments, que - et d'autant plus - de presque toutes les espèces d'animaux, tandis que les exceptions sont vraiment particulières et concernent seulement des animaux de proportions telles que le sont celles du grand poisson dont nous avons déjà fait la connaissance. -4Après avoir ainsi considéré nos animaux volants sur la planète Saturne, et précisément ces classes qui se soulèvent dans l'air sans être pourvues de véritables ailes et s'y meuvent à leur gré, et après avoir constaté leur grand nombre et la variété des espèces, il n'est pas exclu que les pensées suscitées en vous puissent se terminer dans la modeste question suivante : Mais si sur cette planète vivent en si grand nombre ces hôtes de l'air, qui donc peut y vivre encore à côté ? L'air doit certainement devenir opaque, s'il y a tant d'animaux qui y volent ; et quand ensuite tous descendent à nouveau sur terre, il doit être bien difficile que reste libre un quelconque espace, pour que quelqu'un puisse, en cas de besoin, y poser le pied ? -5Mais cette préoccupation de votre part, en ce qui concerne cette grande planète, est absolument vaine ; car il faut avant tout prêter attention au fait que la planète elle-même est plus de mille fois plus grande que la Terre, et qu'elle possède, comme vous le savez déjà soixante dix grands continents, dont certain ont une étendue égale à celle de la Terre, en calculant que toutes les mers et toutes les autres eaux de celle-ci fussent de la terre ferme. -6Mais comme sur la Terre personne n'est excessivement tourmenté par la présence des animaux, sur Saturne il n'en arrive pas autrement ; et pour ces habitants les animaux ne sont pas plus gênants que les animaux terrestres par rapport à vous; car il règne là un ordre parfait, et bien qu'y demeurent de si nombreuses et de si étranges variétés d'animaux,
ceux-ci sont à l'état libre beaucoup moins vus que pas mal d'animaux sur votre planète sur laquelle en général tout se déplace à l'intérieur de cercles plus restreints que sur Saturne. -7Mais afin que vous puissiez vous faire au moins une maigre idée de l'étendue où là tout est conformé en chaque domaine, il suffira d'attirer votre attention sur ce à quoi J'ai eu l'occasion de faire allusion dans une précédente occasion, et précisément sitôt au commencement des révélations sur ce corps de l'univers, c'est-à-dire, quand il vous a été dit que les demeures des habitants de Saturne sont - et ce considéré selon l'ampleur de vos pas assez distantes les unes des autres. Mais tel qu'est le rapport de distance entre les diverses demeures, tel est le rapport en ce qui concerne toute autre chose ; de sorte que tout trouve là une place plus que suffisante, et pour cette raison aussi sur cette planète un litige pour une question de limite est une chose absolument inconnue. -8Voilà, il suffisait de clarifier cela au préalable, pour éviter que, pan suite de la description des autres habitants de l'air ainsi que de ceux qui se déplacent exclusivement sur la terre, vous soyez frappés de vertiges ou peut-être d'incrédulité quand vous entendez parler de la quantité immense des animaux qui restent encore à vars décrire. Et maintenant revenons à nos oiseaux. -9Vous savez combien variée est déjà cette classe d'animaux sur votre petite planète ; et si vous vouliez procéder à une énumération en commençant par la gigantesque autruche jusqu'au minuscule colibri, la tache serait pour vous quelque peu lourde. Mais qu'est cette minutie en comparaison de l'étendue qu'ont toutes les choses sur Saturne ; sur cette planète, on peut dire qu'il existe mille fois autant d'espèces de ces animaux qu'il en vit sur la Terre. S'il vous intéresse de connaître avec précision le nombre de ces espèces, Je peux vous dire que, si sur Saturne, il n'y avait de chaque espèce qu'un mâle et qu'une femelle, cela formerait déjà deux cent quarante millions d'oiseaux. -10- Certes, toutes les espèces ne vivent pas dans un même pays, mais bien plutôt en chaque pays on trouve des variétés qui ne vivent pas dans un autre pays ; et même dans le même pays, les sous-espèces sont réparties diversement ; en conséquence ne se ressemblent même pas les individus de ces espèces qui habitent en partie la région méridionale et en partie celle septentrionale d'un même continent ; et ainsi arrive-t-il, par exemple, qu'une poule d'eau - oiseau qui sur Saturne est très renommé - dans les eaux méridionales d'un continent, se différencie beaucoup de celle qui vit dans les eaux septentrionales du même continent ; et ainsi toutes les espèces d'oiseaux, tant ceux domestiques que ceux vivant à l'état libre, varient dans la forme, dans les couleurs, ainsi que dans leurs propriétés, selon qu'ils vivent au nord ou au sud, au levant ou au couchant, dans un même pays. -11- Donc, d'après ce qui a été dit, vous pouvez déjà révéler qu'il serait absolument impossible pour vous, même en y employant toute votre vie, d'achever même le simple travail d'enregistrement des noms de ces animaux ; avec une d'autant plus grande facilité encore vous pourrez vous convaincre qu'il serait plus impossible encore de vous faire la description de chaque oiseau en particulier en ce qui concerne ses fonctions, sa forme et les buts pour lesquels il existe. -12- C'est pourquoi, vu l'évidence de tout ceci, nous nous mettrons à passer un peu en revue le règne des oiseaux, en nous limitant à nous arrêter quelque peu seulement sur ceux qui sont parmi les plus dignes de remarques, et nous commencerons tout bonnement à donner en passant un coup d’œil à celui qui est le premier et le plus grand. -13- Le non de cet oiseau est : BEHCR, c'est-à-dire, le bateau aérien. Vous pouvez sans autre croire que, s'il se trouvait sur la Terre, il occuperait certainement plus d'espace que votre plus grand vaisseau de ligne, même sans qu'il lui soit besoin d'ouvrir les ailes. Quand cet
oiseau vole ou étend simplement ses ailes, les pointes des pennes extérieures sont à distance, selon vos mesures, d'une bonne heure de marche l'une de l'autre; les petits tuyau des pennes des ailes ont un diamètre plus grand que celui de vos plus gros chênes, et chaque penne est souvent long d'environ 800 toises de la racine à l'extrémité. -14- Cet oiseau est pourvu de pattes très longues et robustes, de sorte que, quand il se tient debout, les pattes semblent presque un peu trop larges pour l'animal, comme c'est le cas avec l'oiseau terrestre que vous appelez héron. Mais pourquoi cet oiseau a-t-il les pattes si longues de manière si disproportionnée ? Parce que c'est un oiseau aquatique, et c'est pourquoi on le voit toujours sur la mer à proximité des côtes où il se nourrit de poisson ; on ne le voit jamais sur la terre ferme, mais bien toujours seulement sur l'eau, ou nageant sur la surface, ou bien volant mais pas à grande hauteur ; et pour cette raison aussi il est appelé le vaisseau volant. -15- Cet oiseau est-il beau peut-être ? - Non, cet animal n'a rien de particulièrement beau, et si avec votre imagination vous pouvez vous représenter un héron aux proportions comme celles indiquées avant, vous vous serez fait une assez bonne idée de la façon dont se présente au regard notre vaisseau de l'air. Il est complètement de couleur d'un gris cendré et ici et là d'un brun sombre ; il a un bec à peu près comme l'a votre oie, et même la tête en général est conformée presque comme celle de l'oie, naturellement en proportions beaucoup plus grandes. -16- En effet, un poisson qui dans les eaux de Saturne a la taille d'un bon gros requin de vos mers…. cet oiseau l'engloutit avec la même facilité que vous mangez une fraise ! Et ainsi vous auriez, représenté devant vous, cet oiseau de la manière la plus concise et la plus exacte possible ; seulement, certains pourraient ici demander si ce géant de l'air est peut-être un voisin dangereux pour les habitants de Saturne ? -17- Non, il n'est absolument pas dangereux, car par sa nature il est extrêmement timide et fuit la présence de l'homme, et même celle d'un enfant. Sa grandeur est plutôt apparente et il n'y a rien en lui qui révèle une force réelle correspondante, car ce sont uniquement ses grandes plumes longues très étendues qui le font paraître aussi grand ; et s'il était dépouillé de celles-ci, il ne pèserait pas même ce que pèse sur cette planète une très faible femme. -18- Ainsi donc nous aurions fait la connaissance d'un des oiseaux de Saturne, et précisèrent du plus grand. Cet oiseau se différencie aussi beaucoup, tant en ce qui concerne la taille, que la couleur et la silhouette, selon les mers où il vit. Et maintenant, puisque vous avez entendu sur cet animal tout ce qui pourrait vous intéresser, nous passerons à considérer une autre espèce. -19- Après cette classe d’oiseau, celui qui, sur Saturne est le plus digne de notes parmi les habitants de l'air, est celui que l'on appelle le messager céleste. Cet oiseau est parfaitement semblable à votre très blanche colombe, mais naturellement, il est par rapport à celle-ci environ 500 fois plus grand. Pour les habitants de Sature, il court sur le compte de cet oiseau comme une légende, selon laquelle il se maintiendrait dans l'air en volant continuellement, étant donné que jamais encore personne ne l'a vu poser les pieds à terre. -23- Sous certains aspects ces habitants ont certes raison, car, vraiment sur la terre ferme il ne se pose en aucun lieu, mais bien plutôt il vole majestueusement continuellement alentour, tantôt en haut tantôt en bas ; mais cependant quand il se sent fatigué, il porte alors son vol immédiatement avec une grande rapidité en direction de quelque région de la côte, où il se cache dans les endroits les plus isolés, et là il cherche sa nourriture consistant en une espèce de mousse grasse qui pousse sur les écueils.
-21- Quand après peu de temps il s'est ainsi rassasié, et qu'il se sent donc ragaillardi, alors il s'élève à nouveau dans l'air à très haute altitude, et de la, il reprend sa promenade aérienne au-dessus de la terre ferme ; en particulier il a l'habitude de se consacrer à de telles excursions le matin avant le lever du soleil, raison pour laquelle aussi en quelques pays il est appelé par les habitants respectifs, l'annonciateur du soleil. Tandis qu'il vole, cet oiseau fait entendre un chant beaucoup plus varié et beaucoup plus limpide et plus parfait que celui de votre rossignol ; pour ce motif, souvent il est appelé aussi le joyeux chanteur matinal, en particulier par les femmes. -22- Bien que l'occasion ne manque absolument pas de voir ce genre d'oiseaux et d'en entendre le chant, spécialement dans les régions les plus proches de la mer, les habitants de Sature interrompent cependant toujours leurs occupations pour en admirer le vol, et ils ne se lassent pas de suivre ces oiseaux du regard tant qu'ils ne les ont pas perdus de vue ; car ces habitants restent parfois pénétrés de tant d'admiration en contemplant leur vol, qu'ils seraient presque portés à leur rendre des honneurs divins si cela était accordé par les esprits angéliques préposés au gouvernement de la planète ; mais afin qu'une chose semblable n'ait pas à se manifester, il a été fait en sorte que de semblables oiseaux soient guidés par un instinct prononcé qui leur est absolument propre, par l'effet duquel il n'y a rien qu'ils n'évitent avec autant de soin que le regard de l'homme. -23- C'est pourquoi un habitant de Saturne n'a qu'à se mettre à regarder un peu intensément un oiseau de cette sorte, et il peut compter aussitôt qu'il se soustraira bien vite à sa curiosité admirative. Et toujours pour la même raison, cet oiseau se pose uniquement en ces lieux, où les regards humains ne peuvent en aucune façon le découvrir. La propriété la plus remarquable chez cet oiseau est que parfois dans son vol il avance avec une vitesse tellement extraordinaire, qu'il n'est pas facile que vous puissiez vous en faire une idée ; car lorsqu'il a bien pris le départ, il peut avec beaucoup d'aisance parcourir en une heure un millier de vos milles. -24- Lorsque cet oiseau vole de nuit, il apparaît comme resplendissant d'une lumière blanche, de sorte que durant son très rapide vol il provoque à peu près le même phénomène visuel que sur votre Terre ce que l'on appelle un cerf-volant. Au-dessus de la terre ferme il vole de préférence seulement de nuit, et alors cela constitue pour les habitants de Saturne un spectacle absolument de premier ordre ; et même, certains sont si enthousiastes pour de semblables apparitions lumineuses, que dans les localités le plus sauvent fréquentées par cet oiseau, ils choisissent quelque colline dépouillée d'arbres, et ils s'y étendent tout bonnement à terre sur le dos, afin de pouvoir avec d'autant plus d'aise et de liberté rassasier réellement leur désir impatient d'en admirer le vol. -25- Une autre chose mérite encore d'être notée au sujet de cette classe de la gent ailée, c'est-à-dire que lorsque 2, 3 ou même plus de ces individus se trouvent à voler de plein élan en ligne droite, il arrive d'habitude que par suite du fait de fendre violemment l'atmosphère de Saturne, il se produit un son d'une assez grande pureté. -26- Et s'il arrive que plusieurs de semblables oiseaux soient en train de voler ensemble rapidement dans une même direction, alors presque chacun d'eux engendre en fendant l'air un son propre différent ; et ces tons se combinent ensuite bien souvent en formant ce que vous, dans votre jargon musical, appelez un accord, qui passe d'un pianissimo à un fortissimo, s'évanouissant à la fin comme s'évanouit un son ou un accord frappé sur un piano. -27- Comme vous voyez, en particulier pour les habitants de Saturne, cet oiseau possède des attraits extraordinaires, étant donné qu'ils se délectent intensément du chant et tout à fait spécialement des sons harmonieux, bien qu'eux-mêmes n'aient pas réellement d'aptitudes excessives pour la musique ; en effet ils ne disposent que d'instruments musicaux
absolument misérables et primitifs ; cependant, d'un autre côté, ils possèdent des voix d'autant plus pures pour chanter, et en ces cas ordinairement les femmes chantent tandis que les hommes préfèrent les accords ; et il arrive bien souvent qu'ils se délectent pendant des journées entières avec un unique accord heureusement découvert, car si celui-ci est négligé et oublié, il faut ensuite bien souvent une belle fatigue avant que - comme vous dites - par hasard, ils arrivent à en découvrir un autre pour leur satisfaction. -2e- De toute façon, en ce qui concerne les autres circonstances de semblable genre ayant une relation avec la vie des habitants de Saturne, tout cela sera plus clairement exposé au moment voulu ; considérant donc que sur le compte de notre messager du ciel, ou bien annonciateur de l'aurore, ou bien chanteur matinal, comme on veut l'appeler, il n'y a plus rien de remarquable à rapporter, nous tournerons donc à présent notre attention vers une autre espèce des porteurs de plumes habitants de l'air. -29- L'espèce des oiseaux que nous nous apprêtons à décrire est celle des chanteurs des fleuves et des lacs. De cette espèce il a déjà été fait mention une fois, au sujet du délicieux chant ; malgré cela nous lui consacrerons encore quelque peu d'attention, et avant tout nous verrons quelle est la silhouette et la taille du dit animal. Eh ce qui concerne la forme, cet oiseau n'offre vraiment rien de particulier et ressemble assez bien à votre cygne, seulement il est de 20 à 30 bonnes fois plus grand que le cygne terrestre, et en proportion, le cou n'est pas aussi long ; mais à la place il est beaucoup plus gros, et de même, la tête est en proportion plus grande que celle de votre cygne. -30- Ces oiseaux sont pourvus d'un larynx extrêmement adaptable et flexible, avec lequel est en relation une langue elle-même aussi très flexible ; et en rapport avec les dimensions du corps ils possèdent des poumons très grands, élastiques et capables d'un volume d'air considérable. Cette classe d'oiseaux constitue vraiment la classe des musiciens sur cette planète, et ils sont à cet égard de vrais kaléidoscopes ; car un oiseau de cette espèce a la particularité qu'il ne se répète jamais dans son chant, et même après qu'il ait chanté des années, ce n'est jamais le cas d'entendre à nouveau une mélodie déjà entendue une fois. -31- Toutefois, pas même cela n'est la chose qui surprend le plus en cet ciseau, et celle ci consiste au contraire en ce que - et c'est même comme cela arrive d'habitude - si plusieurs de ces oiseaux commencent à se produire ensemble avec leurs chants, il est exclu que l'oreille soit blessée par une quelconque dissonance, car, lorsque l'un des oiseaux entonne son chant, alors aussitôt un second, un troisième, un quatrième, etc... se mettent aussi à chanter, mais cependant jamais la même mélodie ; par contre, il arrive que chaque oiseau soit freiné par son propre sens musical très aigu, et tenu à l'intérieur des limites des règles harmoniques, de sorte que, d'après le chant du compagnon qui le précéda, il va développer sa mélodie particulière, et par conséquent il n'entre jamais avec lui dans un conflit harmonique. -32- Ce cas se vérifie aussi si, pour chanter, 30 ou plus d'oiseaux semblables se trouvent réunis. Qui aimerait des fugues musicales comme vous les appelez, d'un style le plus correct et le plus parfait, celui-là pourrait, sur Saturne, en jouir toute l'année sans trêve; parce que là, non seulement naissent toujours des idées musicales et des idées qui s'harmonisent entre elles, mais bien aussi même ces idées musicales sont si modulées, et les changements de tonalité se succèdent de manière si surprenante, que le plus fameux compositeur de votre Terre ne pourra jamais s'en former même la plus vague idée. -33- En plus, imaginez-vous ensuite les voix d'une pureté extraordinaire en comparaison desquelles le ton le plus limpide sorti de la gorge de votre meilleur artiste de chant ne peut que sembler des coassements ; et ainsi vous pouvez déjà vous faire une petite idée du plaisir qu'éprouvent les habitants de Saturne dans l'audition de semblables productions musicales, d'autant plus que déjà depuis la naissance ce sont des enthousiastes de l'art des
sons. Je peux vous dire que s'il vous était possible d'entendre seulement trois sons sortis de la gorge d'un semblable chanteur aquatique, en vérité, toute la musique de votre Terre vous deviendrait insupportable pour toujours. -34- Cependant, en mène temps, ces chanteurs ailés sont aussi la cause pour laquelle les habitants de Saturne, bien que très amateurs de la musique, ne s'y consacrent directement et personnellement que peu, car ils raisonnent ainsi : Nos gorges en comparaison de celles de nos chanteurs aquatiques paraissent faites de bois brut, et les sons que nous pouvons éventuellement combiner ne sont pas, même de loin, à comparer aux leurs ; donc tant que le Grand Esprit des esprits laisse auprès de nous ces chanteurs, nous, de la musique, nous en avons à foison et du genre le plus sublime. -35- Par conséquent, spécialement de la part de ces habitants de Saturne qui sont établis au voisinage de semblables lacs, la musique n'est presque absolument pas cultivée, tandis que s'y consacrent au contraire ceux qui demeurent plus loin des eaux fréquentées par ces oiseaux, parmi lesquels sont plus généralement à entendre les habitants des montagnes. -36- A présent on demandera : ces oiseaux peuvent-ils être tenus en prison et être apprivoisés ? Certes, cela peut se faire; mais quand un oiseau de cette espèce est tenu prisonnier, alors il ne chante plus même s'il vient à se trouver en très nombreuse compagnie. Mais dès qu'il est remis en liberté et qu'il est laissé libre de ses mouvements sur son élément liquide habituel, sa virtuosité reparaît presque immédiatement. -37- Voilà, telle serait l'espèce d'oiseaux chanteurs dont il a déjà été fait mention auparavant. Par ailleurs à ce sujet aussi pourrait ensuite être soulevée la question : si ces chanteurs ailés vivent sur tous les nombreux et grands continents de cette planète, et en quelles régions d'un même continent ils vivent de préférence ; est-ce plutôt en celles méridionales, septentrionales, orientales ou occidentales ? A ce sujet, Je peux vous dire que, en premier lieu, cette espèce d'oiseaux, on la trouve presque en tous les grands continents de Saturne, mais, eu égard à un même continent ils prospèrent généralement dans les régions méridionales. -38 Les régions septentrionales sont donc pour la plus grande partie seulement maigrement pourvues de ce genre de chanteurs ; mais en compensation les habitants des régions nordiques ont auprès d'eux urne autre espèce d'oiseaux qui, d'une certaine façon, leur rend assez facile le renoncement à la compagnie la plus choisie de chanteurs, cependant ces chanteurs ailés du nord ne sont pas des révélateurs de mélodies, et à la place ils chantent à plusieurs ensemble en obtenant le même effet que les cordes d'une harpe que fait vibrer le vent. -39- Certes, de rares fois seulement il arrive que ces musiciens beaucoup plus faibles arrivent à combiner leurs voix au point de produire un accord harmonieux ; mais de toute façon pour l'habitant de Saturne qui n'a jamais eu encore l'occasion d'entendre les autres chanteurs plus parfaits, même cette musique est toujours quelque chose de noble et de beau. -40- Cependant, bien que ces oiseaux ne soient pas en fait de chant de grands artistes, ils sont d'un autre côté d'autant plus apprivoisés, et en ce qui concerne ensuite la forme, ils constituent sans aucun doute de bien loin la plus splendide et la plus admirable espèce d'oiseaux. Et à ce sujet, nous nous réservons d'apprendre quelque chose de plus précis encore la prochaine fois ; considérons donc comme terminée pour aujourd'hui cette communication autour de nos renommés chanteurs ; par conséquent pour aujourd'hui, Amen !
CHAPITRE 18 -1Quel aspect ont donc ces oiseaux ? Il faut avouer qu'il sera un peu difficile de représenter de manière assez précise et satisfaisante comment se présentent à l’œil ces oiseaux, étant donné que sur la Terre il n'existe pas d'espèce que l'on puisse comparer à ceux de Saturne ; néanmoins nous tenterons de les décrire, de manière que vous puissiez vous faire au moins une vague idée de leur conformation. Ecoutez donc : -2Cet oiseau, quant à la taille, atteint les dimensions de l’un de vos bœuf bien adulte ; tout le corps est recouvert de plumes d'un vert doré, plumes qui se présentent plutôt laineuses que lisses ; les plumes plus petites qui ornent le bord supérieur des ailes au point où celles-ci s'attachent au corps jusqu'à leur extrémité, paraissent comme faite d'un or très brillant, couvert avec une légère couche de couleur d'un rouge carmin ardent ; les plumes maîtresses des ailes ont une teinte d'un bleu clair, mais avec les bords d'une couleur dorée un peu pâle ; les petits tubes des plumes sont d'un blanc éblouissant et ils possèdent une irisation ressemblant à celle de votre nacre. -3La queue se compose de plumes très longues partagés en deux groupes à peu près comme chez l'hirondelle ; seulement ces ailes ne sont pas revêtues de plumes rigides, mais bien plutôt d'un duvet moelleux à filaments longs et fuyants. Ce duvet a à peu près les mêmes couleurs que celles des plumes de la queue de votre paon. Des bords de chaque plume pend tout bonnement une crinière en touffes de ces filaments flottants de plume, filants qui parfois atteignent la longueur de trois brasses ; mais malgré cela ils sont si légers, que placé sur une de vos balances, le duvet de toutes ces touffes résulterait ne même pas peser, un demi quintal. -4Ce duvet a toutes les couleurs possibles, et selon que l'on se tourne d'un côté ou de l'autre, il semble paraître d'une autre couleur ; les pieds de cet oiseau sont parfaitement blancs et très bien formés, c'est-à-dire pas comme ceux des oiseaux terrestres qui d'habitude ont les pattes nues et extrêmement minces ; les pattes des oiseaux sur Saturne sont beaucoup plus charnues et recouvertes jusqu'aux griffes de très belles plumes qui sont toujours semblables aux plumes du ventre, mais qui ont généralement une teinte un peu plus claire que ces dernières. -5Ce que l'on appelle les griffes d'oiseau, ou plus proprement dit, les doigts du pied de l'oiseau, sont chez les oiseaux de Saturne presque généralement conformés comme les doigts d'un singe terrestre bien développé ; mais en l'espèce, s'agissant de cet oiseau, il faut dire que son pied a vraiment la forme d'une main humaine, excepté que tout le pied réellement jusqu'aux griffes est recouvert de légères plumes très belles. -6Tel serait donc l'aspect de cet oiseau, en ce qui concerne le corps, à l'exclusion cependant de la tête, et ce pour le motif que justement la tête est la partie la plus merveilleuse de cet oiseau. On demandera pourquoi ? Voilà : cet oiseau a proprement deux têtes, mais non pas comme peut-être vous vous figurez déjà, mais bien plutôt ces deux têtes se tiennent l'une sur l'autre à peu près comme si une femme avait, s'élevant sur le sommet de la tête et comme pour ainsi dire en prolongation de celle-ci, encore un cou de cygne avec la tête respective ; la tête inférieure est plutôt ronde et haute d'environ deux pieds, tandis que la largeur est d'un pied et demi. -7Cette tête a vraiment un visage humain féminin, à peu près comme l'ont sur votre Terre ces êtres un peu rares que vous appelez sirènes ; et elle est recouverte d'une
abondante chevelure de couleur bleue sombre ; sur cette tête s'élève ensuite encore un cou long de trois brasses qui finit avec une autre tête ; cette dernière n'est pas dissemblable de celle de vos cygnes, cou et tête que cet oiseau utilisera comme le fait l'éléphant avec sa trompe. -8Au moyen de cette seconde tête, l'oiseau ne prend pas de nourriture, ni ne peut en prendre, étant donné que le cou respectif n'est pas pourvu d'une gorge ; néanmoins cette tête a aussi ses deux yeux, et vu que le second cou est très flexible, l'oiseau peut avec ces yeux de la tête supérieure regarder et voir en toutes ces directions vers lesquelles il ne peut tourner les yeux de la tête inférieure ; mais ces derniers sont doués d'une vue très perçante, au point de pouvoir distinguer par contre exactement toute chose même à de grandes distances. -9La face de la tête inférieure n'est pas, comme on pourrait le croire, nue, mais elle est bien plutôt recouverte de petites plumes de couleur rose pâle ; les lèvres sont dégagées, de même que les trous du nez qui est un peu aplati. Tout le reste du corps est recouvert de plumes. Les yeux de la tête inférieure sont grands et d'un bleu clair, et le front, là où il s'unit au cou supérieur, est d'une couleur violet pâle, tandis que la tête est de couleur d'un rouge ardent ; enfin le bec de la tête supérieure est d'un blanc bleuâtre, et il est bâti de marnière à pouvoir tenir serré avec beaucoup de vigueur ce qu'il arrive à saisir. -10- Donc comment se nourrit cet oiseau ? Et comment fait-il pour boire ? - Cela arrive d'une manière très simple : il détache avec le bec de sa tête supérieure les fruits des arbres et les porte à la bouche de sa tète inférieure, qui naturellement les saisit avec ses dents robustes, comme le font vos singes. Ensuite, si l'oiseau veut boire, alors la bouche de la tête supérieure lui sert comme de coupe ; c'est-à-dire, qu'avec cette bouche il puise l'eau et la verse ensuite dans la cavité plutôt grande de la bouche de la tête inférieure. -11- Vous voyez, vous pouvez ainsi vous faire une idée de ce second oiseau chanteur, certes quelque peu plus imparfait que le premier, étant donné que son gosier n'est apte à émettre qu'un seul ton ; toutefois ce ton est si beau et si harmonieux que, en dépit de sa simplicité, il devrait produire sans aucun doute à votre oreille un effet plus grand que celui d'un orchestre terrestre complet ; car vous pouvez Me croire si je vous dis que même la musique du Ciel, quand elle résonne le plus délicieusement, ne consiste pas en un conflit de nombreux sons, mais bien plutôt dans un très parfait et très simple son ; cette musique est la plus émouvante et la plus efficace. -12- D'ailleurs il suffit que vous vous interrogiez vous-mêmes au sujet de ce que vous préférez : soit une seule note mais très limpide sortie de la gorge d'un chanteur, que ce soit un homme ou une femme, ou bien un strident accord instrumental ? Le pouvoir émotif de la musique ne réside donc pas dans la multiplicité des sons, mais bien plutôt dans la qualité et la pureté expressive de chaque son ; car un son parfait est certainement déjà en soi-même l'harmonie la plus pure ; étant donné qu'il ne se manifeste pas comme phénomène perceptible de par lui seul en particulier, mais bien plutôt que dans sa propre manifestation comme ton fondamental il inclue déjà en lui dans un juste rapport de résonance, les tons qui lui correspondent et ceux qui dérivent de lui, à peu près comme il arrive avec le son d'une cloche d'un pur éclat. -13- Et c'est ainsi que vous devez vous représenter aussi le ton émis par ce second chanteur de Saturne que vous connaissez désormais, ton qui cependant se trouve encore un octave plus grave que votre octave bas avec le sol, le la et le si. De cette façon vous arriverez à vous faire une certaine idée du chant de cet oiseau. Quand il se met à chanter, il commence avec un pianissimo, et ensuite sans altérer le moins du monde la qualité du ton, il le renforce progressivement jusqu'au point d'obtenir le même effet qu'une cloche qui sonnerait et près de
laquelle on pourrait tenir l'oreille vraiment à côté; avec cette intensité le ton persiste pendant deux secondes, et ensuite progressivement il diminue, jusqu'à disparaître complètement. -14- Lorsque viennent à se trouver ensemble deux, trois ou bien quatre de ces oiseaux qui sont, *par hasard* comme vous avez l'habitude de dire, d'un gosier bien accordé, il en résulte souvent un accord d'une beauté surprenante qui représente toujours pour les habitants de Saturne une immense jouissance. Certes, il s'agit toujours d'un même et invariable accord, et donc cette espèce de musique est de très loin inférieure à celle de nos chanteurs principaux que nous connaissons déjà ; toutefois cette musique très simple ne manque jamais son but. -15- Deux habitants de Saturne pourraient se trouver l'un en face de l'autre dans un état de très grande exacerbation : - ce qui sur cette planète arrive souvent ici et là - mais en ce cas il est suffisant que se fasse entendre un semblable simple chant, et immédiatement toute colère s'évanouit, et les deux ennemis deviennent des amis très intimes ; c'est le motif pour lequel ces oiseaux sont appelés des promoteurs de paix, et c'est ainsi le motif pour lequel ils sont même apprivoisés et gardés comme animaux de luxe, représentant ce que sont les paons dans vos parcs et vos jardins ; de toute façon, on en trouve aussi en grande quantité à l'état libre. -16- Ceux qui sont apprivoisés possèdent une voix bien plus robuste, mais d'habitude un peu rustre ; tandis que ceux qui vivent en liberté ont un ton d'une pureté exquise. Les apprivoisés, portés quelquefois comme raretés dans les régions méridionales, perdent bien vite leur voix par suite d'une nourriture différente, puis ils dépérissent et tombent malades, et d'habitude ils ne vivent pas très longtemps ; par conséquent les habitants des régions septentrionales, qui sont très attachés à ces oiseaux, se décident difficilement à en céder quelques-uns. -17- En ce qui concerne la procréation de ces animaux, il faut noter que la femelle met au monde les petits déjà vivants et les nourrit à une mamelle bien remplie qui pend sous le cou de la tête inférieure, et est recouverte de très légères plumes. -18- Voilà, c'est tout ce que l'on peut dire pour la description de cet oiseau, après lequel nous passerons à considérer encore quelques volatiles domestiques, pour nous tourner ensuite aussitôt vers les animaux terrestres et enfin vers les êtres humains eux-mêmes. Et pour aujourd’hui, Amen.
CHAPITRE 19 -1Comme chez vous sur la Terre, ainsi sur cette planète la place principale parmi les volatiles domestiques est tenue par la poule. Toutefois la poule de Saturne se différencie beaucoup dans son aspect de celle que vous élevez dans vos poulaillers. D'ailleurs, déjà sur la Terre, il y a autant d'espèces de volailles qu'il y a de parties du monde et qu'il y a de régions diverses; et cela se vérifie tout aussi bien sur Saturne ; malgré cela il existe une espèce qui est presque partout semblable, à laquelle on donne le nom de poule. -2Comment se présente donc ce volatile ? - Avant tout il est au moins cent fois plus grand que celui terrestre; et en second lieu, il n'y a aucune différence de couleur d'un animal à l'autre. Les ailes sont d'un bleu intense, le dos est parfaitement blanc; la queue passe du blanc à un rouge très vif; par contre le ventre de cette poule a les plumes d'une irisation qui est semblable à celle du coquillage que vous appelez du nacre. -3Les pieds ont une teinte rouge pâle, tandis que le cou est d'une couleur vert clair à commencer par la tête jusqu'en bas là où les pattes se réunissent au corps ; en ce qui concerne les pattes de cette poule il faut noter qu'elles sont situées presque vraiment là où finit le cou ; de sorte que la partie de bien loin la plus grande du corps vient à se trouver derrière les pattes. -4Voilà donc l'aspect de ce volatile en ce qui concerne la couleur. Mais quelle en est ensuite la forme ? - Mais ici aussi il sera quelque peu difficile de vous le décrire avec une exactitude certaine, étant donné que sur la surface de votre Terre il n'y a pas d'oiseau qui puisse ressembler à cette poule de Saturne. C'est pourquoi nous devrons nous étendre déjà plus sur les détails, et alors il vous sera ainsi plus facile de vous représenter l'aspect du volatile entier. -5Sa tête est très grande, et en proportion du reste du corps, elle est même beaucoup plus grande que celle de votre chouette (toujours dans les proportions voulues). Des deux côtés de la tête elle a deux oreilles blanches semblables pour la forme à celles de votre éléphant, seulement elles ne sont pas aussi pendantes. Entre les deux oreilles sent situés deux yeux relativement grands et doués d'une vue perçante, qui sont séparés l'un de l'autre par une bande de plumes de couleur vert-sombre. Un peu sous les yeux fait saillie un bec robuste, un peu émoussé et de couleur grise, duquel pend, entre les deux narines, une sorte de trompe, comme c'est le cas de vos dindons, seulement elle dépend de la volonté de l'animal ; sa couleur est rouge-sang. -6Cette tête ainsi formée est unie au reste du corps moyennant un cou plutôt long, mais relativement gros. Ensuite, le véritable corps de cette poule, si l'on ne considère pas les ailes et les pattes, apparaît de forme parfaitement ovale. En proportion les ailes sont courtes, et au lieu de plumes principales aptes au vol, elles sont pourvues de petits tubes portant des plumes longues et molles ; puis, cette partie des ailes qui est tournée vers la tête, ou bien si cela vous est plus intelligible, le bord supérieur de l'aile, est recouvert sur toute sa longueur de plumes semblables à celles de votre autruche. -7Par suite de cette variante des ailes, cet oiseau n'est pas apte au vol ; mais comme l'animal est pourvu de pattes très longues et robustes, il peut courir sur le terrain avec tant de rapidité, que l'homme de Saturne ne peut tenir derrière lui. C'est pourquoi, quand il veut s'emparer d'une semblable poule qui se trouve en liberté, il le fait toujours en recourant à la force de sa propre volonté, comme nous aurons plus tard une autre occasion de l'apprendre.
-8La queue de cet oiseau est en roue, cependant elle n'est pas faite comme celle de vos dindons, mais bien plutôt comme celle de vos paons. Et maintenant reconstituez-vous en esprit cet oiseau en vous servant des diverses parties qui vous ont été décrites, et vous pourrez ainsi vous faire une idée assez précise de l'aspect qu'a cette poule sur Saturne ; il faudra seulement que vous vous imaginiez cependant toutes les couleurs qui vous ont été indiquées, non pas pâles et mates, mais bien plutôt resplendissantes, d'un beau brillant métallique; et vous pourrez admirer ce volatile au complet. -9Le mâle se distingue de la femelle uniquement par sa taille et par son chant strident qui bien souvent n'est pas trop agréable, tandis que la femelle n'émet que des sons tronqués qui n'ont pas non plus quelque chose de plaisant ; raison pour laquelle il est d'usage commun parmi les habitants de Saturne cette façon de dire: *Arrête de chanter, parce que ta voix est plus grossière que celle d'une poule !* quand ils veulent signifier qu'un chant est peu agréable. -10- Maintenant, quel avantage retire l'habitant de Saturne de ce volatile ? Eh bien, presque le même que vous retirez, vous, de vos poules, c’est-à-dire: les œufs très grands qu'ils déposent, qui sont gobés crus, car leur contenu est comparable pour la douceur de leur saveur, à votre meilleur lait de vache, et parce que, en fait de saveur en général, ils les apprécient plus que le lait de leurs colossales vaches. -11- La coquille de l’œuf, qui est assez solide, est coupée nettement à la partie pointue, et elle sert ensuite comme tasse pour boire, non pas pour l'eau, mais bien plutôt pour les sucs plus nobles dont l'habitant de Saturne a l'habitude de dire qu'il en prend par gouttes, bien qu'un semblable œuf ainsi vidé puisse contenir cinq bons *émeris*, selon vos mesures. -12- Pour ces volatiles les habitants de Saturne construisent habituellement un poulailler vif, c'est-à-dire qu'ils plantent dans ce but des arbres-parois dont vous avez déjà fait la connaissance, de façon à obtenir un jardin de forme ronde-oblongue, qui souvent a une surface d'un demi-mille carré ; en ce poulailler sont semées des herbes de toutes sortes et d'autres plantes, entre autres aussi quelques arbres de la pluie que vous connaissez déjà ; et dans un semblable poulailler, quand il s'agit de familles nombreuses, vivent ensemble parfois plusieurs milliers de ces volatiles, qui constituent naturellement une richesse considérable pour les possesseurs respectifs. -13- Cependant, vu que ces volatiles sont pour ainsi dire des exclusifs et qu'ils ne tolèrent à côté d'eux aucun hôte étranger, il arrive qu'un semblable poulailler est aménagé d'habitude uniquement pour leur espèce. Toutefois le poulailler-même est édifié toujours à une assez bonne distance de l'agglomération, en raison du fait que leur chant désagréable ne doit pas apporter de dérangement pour les habitants. -14- Outre cette espèce, il existe sur Saturne encore diverses autres espèces de volatiles domestiques, qui cependant ne sont pas d'autant d'utilité ; car de cette première espèce que nous avons connue, tout est employé utilement ; la chair sert comme nourriture, et les plumes sont, comme chez vous, utilisées pour en faire des couchettes assez douces ; tandis que des autres volatiles domestiques bien peu de choses sont utilisées, de sorte qu'ils sont élevés plutôt pour la distraction et aux fins d'ornement ; et certains habitants de Saturne plus riches, gardent souvent dans leurs propriétés toutes les espèces possibles de volatiles domestiques. Et maintenant nous donnerons au passage un coup d’œil encore à une paire de quelques espèces des volatiles en question. -15- L'une, celle des *boules dorées*, comme on les appelle, est constituée par ces volatiles qui sont de préférence gardés dans les jardins, comme un très fastueux ornement, à cause de la splendeur extraordinaire de leurs plumes. Cet oiseau a précisément l'aspect d'une
sphère d'au moins 12 toises de diamètre, pourvue au-dessous de deux robustes pattes qui semblent des colonnes se terminant en un pied avec des doigts disposés en éventail. -16- Cela peut suffire pour se représenter la forme complète de ce volatile, bien entendu quand il a les ailes fermées. Il n'a presque pas de tête, mais à la partie antérieure il montre un bec large mais très court, qui, selon vos mesures a au plus un demi-bras de longueur, mais environ quatre bras en largeur, et il est de couleur rouge sombre; sur le bec il porte deux yeux ovales hauts de plus d'une toise, et larges de trois-quarts de toise. La couleur des plumes de ce volatile est une parfaite couleur jaune-or, et seulement là où commencent les pattes elle passe au vert pour finir ensuite au rouge. -17- Tout l'ensemble des plumes, y compris celle des ailes, a exactement la même longueur, et ces plumes forment une surface parfaitement lisse comme si elles étaient d'or très finement bruni. De jour, les habitants de Saturne, bien souvent, ne peuvent presque pas regarder ces oiseaux à cause de la splendeur de leurs plumes, et de tels animaux vous sembleraient de vrais ballons dorés automoteurs. -18- De cet oiseau, quand il meurt, il n'est rien utilisé en dehors de la peau que les hommes savent lui enlever avec beaucoup de soin et d'habileté. Mais qu'en font-ils ensuite ? Ces peaux avec leurs plumes respectives servent à confectionner une sorte d'étole pour les femmes qui s'en parent en des occasions solennelles en faisant ressortir, davantage la beauté parfaite de leurs bras. Les œufs de cet oiseau sont conservés pour être couvés; cependant il faut observer qu'ordinairement, sur les vingt œufs, un à peine donne un fruit vivant. -19- Ceci est donc tout ce qu'il y a de remarquable dans un semblable oiseau pour lequel les habitants de Saturne ont une prédilection comme volatile de luxe et comme ornement pour leurs parcs. Assez souvent ensuite ils élèvent une autre espèce encore de volatile. En ce qui concerne la forme, cet oiseau ressemble à une gigantesque oie ; cependant, ceci n'est pas sa caractéristique principale, laquelle consiste au contraire dans son cou, long de manière insolite, car, du point où il s'unit au corps jusqu'à la tête de l'amiral, ce cou mesure souvent de trente à quarante toises de longueur. -23- Le corps est, en général, de couleur d'un bleu grisâtre clair, tandis que les pattes sont d'un noir intense, chose qui pour cette planète constitue une grande rareté. La couleur du cou est rouge cinabre, et n'est donc pas une couleur pâle, mais bien d'un brillant métallique très marqué ; la tête est elle-aussi semblable à celle de votre oie, naturellement plus grande, en proportion du reste du corps que l'on peut évaluer quant au volume à trois fois celui de votre éléphant ; quant à la queue, ce volatile n'a pas une vraie queue d'oiseau, mais bien plutôt une sorte de queue de cheval dont les crins sont souvent longs de cinq toises. Enfin, on peut dire qu'en proportion les pattes sont plutôt longues que courtes et qu'elles sont très robustes. -21- Et avec cela serait achevée la description de ce qu'il y a de plus remarquable en cet oiseau. Mais pourquoi est-il tenu comme animal domestique ? Pour la raison que nous avons dite auparavant, c'est-à-dire par amour du faste ; presque sous aucun autre aspect cet oiseau n'offre quelque chose qui puisse être utilisé par les habitants de Saturne ; en certains endroits on a l'habitude de recueillir seulement les crins de la queue, avec lesquels sont tressées des cordes et des ficelles qui cependant ne sont pas très résistantes. -22- Quant aux plumes et aux duvets, ils ne sont utilisés à rien. Il est à remarquer enfin que cette espèce d'oiseaux est élevée exclusivement sur les bords des lacs et des fleuves, étant donné que c'est un oiseau aquatique qui le plus souvent se nourrit de vers qui vivent dans les eaux, raison pour laquelle aussi il est pourvu d'un cou aussi long pour se servir avec le bec dans les eaux, quand il va à la recherche d'une nourriture qui convienne à sa nature et
qu'il engloutit dès que trouvée. Le mâle se distingue de la femelle uniquement par la queue aux crins plus abondants. -23- Cet oiseau dépose ses œufs dans l'eau et laisse que pendant quelque temps l'eau les transporte ici et là, jusqu'à ce que son instinct l'avertisse qu'ils sont complètement refroidis ; plus il étend ses ailes sur un ou plus des œufs qu'il a déposés, et avec eux il nage vers l'un ou l'autre endroit où l'eau est tranquille et où la couvaison se poursuit sous sa surveillance de manière zélée et sûre. -24- Quand cet oiseau est occupé à cette fonction, il n'est absolument pas à conseiller de s'approcher trop du lieu de la couvaison ; car, dans un cas semblable, l'animal lance son long cou avec la rapidité d'une flèche contre l'indiscret, et lui applique avec son bec très robuste un coup terrible, si bien qu'à n'importe qui doit passer pour toujours l'envie d'aller une seconde fois déranger ce volatile domestique alors qu'il est occupé à sa mission la plus importante. -25- Et ainsi nous aurons fini d'exposer ce qu'il y avait de plus remarquable à dire au sujet de ces oiseaux de Saturne ; cependant des milliers d'espèces existent encore dans les différentes régions, et même dans les plus différentes espèces et sous-espèces. Mais à présent nous tournerons notre attention vers les mammifères sauvages et ceux à l'état domestique.
CHAPITRE 20 -1Ici aussi nous suivrons le même procédé, et nous bornerons à faire mention seulement des principaux, étant donné la quantité énorme des espèces et sous-espèces. *MUD* est le non de cet animal, le plus grand d'entre tous les quadrupèdes vivant sur Saturne ; mais il se trouve seulement en quelques endroits de cette planète, et même en ceuxci, pas en grand nombre; si bien que tous comptes faits on arrive peut-être à dix mille exemplaires. -2Ces continents, sur lesquels il demeure, sont très peuplés; car, en raison des proportions colossales et de la grande voracité de cet animal, à côté de lui ne trouvent place pas beaucoup d'autres êtres ; et quant à se risquer au combat avec un semblable gigantesque quadrupède, il n'y a pas d'habitant de Saturne qui en ait le courage. C'est pourquoi les Saturniens, sans se perdre en de vaines considérations, abandonnent complètement à ces animaux les régions dans lesquelles demeurent ces derniers, régions qui sont appelées par eux *inhabitables terres du mud*. -3Sur les continents principaux cet animal ne vit pas; cependant à côté de ceuxci, tant dans la partie méridionale, que dans celle septentrionale, il existe encore d'immenses îles, et celles-ci justement sont généralement laissées à la disposition de cette espèce, ainsi qu'à celle de nombreuses autres espèces d'animaux; mais de toute façon il n'y a pas de région sur Saturne qui soit évitée avec autant de soin par ces habitants qu'une semblable terre habitée par Mud. -4- Et maintenant, quel aspect a donc cet animal ? Existe-t-il sur votre Terre quelque chose de semblable ? - Certes, il existe quelque chose de semblable, mais qui cependant a une part bien peu importante; tandis que sur Saturne il se trouve sur le degré le plus élevé et le plus terrible de l'échelle des animaux, à tous égards, tant en ce qui concerne la masse du corps, que la férocité et la voracité. -5A quel animal donc de votre Terre ressemble ce géant de Saturne ? - Eh bien, au cochon; mais, quant à la taille, le vôtre aurait à peine les dimensions nécessaires pour servir de parasite sur le corps de ce porc de Saturne. Et même, les habitants de Saturne, qui ont pourtant une stature respectable, viennent à se trouver comme de minuscules nains en face de cet animal gigantesque. Je vous dis que, si cet animal se trouvait sur votre Terre derrière une haute montagne, comme ce pourrait être, par exemple, votre *Choralpe*, vous devriez tourner votre regard pas mal vers le haut encore pour en voir le sommet du dos. -6Cet animal monstrueux, toujours de votre point de vue, est justement aussi vorace que l'est votre porc, toujours dans les proportions voulues ; ce n'est absolument pas un glouton délicat, mais bien plutôt, la première chose qui tombe à portée de sa gueule, que ce soit, herbe, quelque arbre, ou un animal d'une autre espèce, aquatique ou terrestre, que ce soit enfin même un être humain, est toujours la bienvenue et est indifféremment dévorée en quelques instants avec un appétit toujours égal. -7Mais étant donné que cet animal dispose d'une force physique proportionnée à sera énorme masse, il est aussi parfaitement vain de se risquer dans un combat avec lui. En d'autres temps quelques audacieux habitants de Saturne avaient bien sûr fait une tentative d'attaque contre l'un ou l'autre de ces animaux, en se servant de piques très longues et acérées fixées sur des perches longues de plus de cent toises et en tendant au maximum leur force de volonté ; mais cette fois l'entreprise finit de manière désastreuse.
-8L'animal subit bien sûr des blessures sur diverses parties du corps; mais comme elles n'étaient pas graves au point de pouvoir lui ôter la vie, l'animal devint furieux en raison de la douleur et il se précipita vers un fleuve assez large afin de calmer dans l'eau sa souffrance occasionnée par les blessures. Puis lorsque la douleur fut adoucie, l'animal se releva tout en restant dans le fleuve; il puisa avec sa bouche un grand volume d'eau avec de grandes quantités de pierres qui se trouvaient au fond, et il vomit tout le contenu de son immense gueule avec violence contre ses persécuteurs qui se croyaient déjà triomphants ; de sorte qu'à la suite de la répétition de cette manœuvre, ils en sortirent en si piteux état que peu seulement réussirent à faire retour dans leur propre pays. -9Nombreux par contre sont ceux qui y laissèrent la vie, parce que l'animal, qui était soudain remonté sur terre, les dévora complètement en quelques bouchées, jusqu'au dernier petit os comme vous avez l'habitude de le dire. Mais, afin que vous puissiez vous faire une vague idée de la capacité d'une semblable bouche, Je vous dis que, sur cette planète il y avait des noix encore un peu plus grandes que votre *Schlossberg*, une noix de cette sorte ne serait réellement pas trop grosse pour une dent de cet animal, et elle serait totalement broyée à la première pression des mâchoires. -10- Donc, lorsque cet amiral remplit sa bouche d'eau et de pierres et crache ainsi sur le sol, en vérité, s'il agissait ainsi en se trouvant sur votre Terre, par exemple dans les hautes régions de votre pays, un seul vomissement de cette espèce occasionnerait dans les parties les plus basses une telle inondation qu'elle pourrait submerger les plus hauts clochers de votre cité. -11- Si donc vous considérez un peu la chose, une éventuelle question, à savoir, si les habitants de Saturne répétaient des tentatives de ce genre, trouvera d'elle-même une réponse dans le sens le plus énergiquement négatif. En effet, de mémoire d'homme, du côté des Saturniens ne furent faites que trois tentatives de ce genre qui se sont toujours soldées de manière désastreuse ; mais à présent toute velléité de recommencer leur a passé, et leurs sages décrètent ainsi à ce sujet : -12- *L'homme peut beaucoup avec sa force; toutefois, les Lunes, le grand anneau lumineux, les fleuves, les tempêtes de la mer, le grand poisson et le mud, l'homme ne peut les dompter avec sa force, par conséquent, que l'homme emploie cette force là où elle est applicable, mais qu'il s'abstienne par contre de toute autre chose ou entreprise supérieure à sa puissance limitée.* Puis il y a une autre maxime des sages de cette planète, qui dit ainsi : -13- *Ecoutez, ô vous les hommes ! Le Grand Esprit nous a donné à habiter un grand monde dont nous ne savons pas où il commence et où il finit ; mais dans le pays où nous sommes nés, nous connaissons les choses et les êtres tels qu'ils sont dans les eaux, sur la terre ferme et dans l'air, et nous savons et nous avons toujours fait l'expérience que les unes et les autres sont soumis à l'intérieur des limites de notre force; mais nous savons aussi que le MUD a toujours pu avec une grande facilité dédaigner notre force, lorsque nous nous sommes proposés de le soumettre; et ainsi il apparaît clair, comme l'est le Soleil qui nous illumine, que le Grand Esprit, au-delà de notre force, a trouvé opportun de disposer pour qu'il y ait d'autres forces encore, non destinées à nous servir, forces que nous ne devons pas tenter de tourner à notre profit ; restons donc à l'intérieur des limites assignées à notre force et laissons les autres grandes forces agir comme les a placées le Grand Esprit et là où Il les a placées. -11- *C'est pourquoi : que soit loin de nous de vouloir chercher à connaître ce qu'est le grand cercle lumineux sur le firmament, ce que sont les Lunes, et que nos pieds ne se posent plus pour tous les temps sur une terre habitée par le Mud.*
Si vous considérez un peu une telle maxime de la sagesse de Saturne, certainement il vous sera plus évident encore quel aspect ont les choses eu égard à la masse spectaculaire et à la force physique de cet animal. -15- Il serait inutile d'aller plus avant dans la description d'un semblable géant, et donc qu'il soit remis à la fantaisie et à la force d'imagination de chacun de vous de se représenter cet animal de la meilleure façon possible. -16- Arrive-t-il souvent que les habitants de Saturne réussissent à voir certain de ces animaux ? - Oh non; le cas se manifeste très rarement ; et les quelques fois que cela arrive on le doit au fait que ces habitants, ou bien entreprennent parfois de longs voyages et en ces occasions aperçoivent éventuellement quelques-uns de ces animaux, ou bien qu'ils viennent à se trouvier par hasard sur les contreforts montagneux d'un continent principal pas trop éloigné d'une semblable terre du Mud, dans quel cas ils peuvent en apercevoir quelques-uns. -17- S'approcher à l'excès d'une terre de cette sorte n'est jamais réellement à conseiller ; car, si cet animal s'aperçoit qu'à peu de distance de sa terre il y a quelque chose qui flotte, il fait quelques pas gigantesques dans l'eau, et si la mer n'est pas vraiment très profonde, il arrive vite à atteindre ce quelque chose et à le faire disparaître dans son énorme gueule. -18- Ce qui inspire ensuite une particulière épouvante à l'habitant de Saturne et le fait s'horrifier, c'est le grognement de cet animal ; et en fait vous ne pourriez jamais vous en faire une idée appropriée. Mais à ce propos je peux vous dire cela : si l'un de ces animaux se trouvait, par exemple, à la frontière de la Hongrie, et qu'il se mette à grogner plusieurs fois, l'effet de ces grognements serait tel que jusqu'ici chez vous et plus au-delà encore, le sol commencerait à trembler ; et non seulement toutes les maisons de votre ville s'écrouleraient par suite de la terrible secousse, mais bien aussi quelques montagnes voisines y perdraient leurs cimes, si celles-ci n'étaient pas vraiment tout à fait solides. -19- - Ces brèves indications seront suffisantes pour vous éclairer un peu sur la raison pour laquelle les habitants de Saturne n'aiment pas excessivement un semblable chant un peu trop tonitruant. Quant au reste, cet animal, en dépit de l'énormité de son corps est doté de sens très aigus ; particulièrement sensibles sont ensuite l'odorat et l'ouie, si bien que déjà à grande distance il perçoit si sur la surface de l'eau est en train de s'approcher quelque chose convenant à son palais. -20- Aussi en fait de propreté il a beaucoup de points à son avantage par rapport au porc terrestre ; et même en ce qui concerne le dépôt de ses propres immondices, il surpasse en propreté presque tous les animaux que vous connaissez sur votre Terre ; car, avant de s'apprêter à cette fonction naturelle, il creuse dans le sol un trou très profond, qui pour vous représenterait tout bonnement un cratère d'un périmètre d'environ une demi-heure de marche et bien souvent profond de plusieurs centaines de toises. -21- La fosse une fois creusée, l'animal se tourne, y laisse tomber dedans les immondices de son propre corps qui n'ont absolument pas la prétention d'être très parfumées ; et enfin, en grattant avec les pieds il recouvre le tout avec la terre qu'il avait enlevée auparavant ; avec cela, avant tout il maintient net son territoire particulier de résidence, et en outre il le fume on ne peut plus opportunément aux fins d'une croissance successive de l'herbe ; herbe qui en ces terres du Mud représente d'habitude beaucoup plus que les plus épais taillis sur votre Terre. -22- Et maintenant il resterait encore à se poser une question, à savoir : à quoi sert vraiment sur cette planète, ou même sur une autre, un animal de proportions aussi colossales ? Mais la réponse, vous pouvez la trouver là où l'on a déjà parlé du grand poisson. Comme ce
dernier il constitue un pont de passage général entre les habitants des eaux et ceux des airs, de même celui-ci aussi représente un semblable pont destiné au passage de tous les degrés du règne animal et du règne végétal à une espèce d'animaux plus noble et plus proche de l'homme. Eh attendant, la prochaine fois, nous nous réservons d'étendre nos considérations autour des quadrupèdes, auxquels nous consacrerons encore, un peu sommairement, notre attention.
CHAPITRE 21 -1L'animal que nous nous mettrons à considérer après le Mud, porte le nom de Sisterkihi. Maintenant, quel rang occupe cette espèce d'animal sur cette planète ? - Voilà: il représente sur ce corps de l'univers réellement ce qu'est l'éléphant sur votre Terre ; cependant il est à tous égards inférieur au Mud. Sa taille a en importance seulement la centième partie de celui-ci; mais, en ce qui concerne la forme, il n'y a absolument aucune ressemblance entre les deux. -2Cet animal a quelques affinités avec votre éléphant ; mais non pas autant que divers autres animaux qui vous seront présentés par la suite. Cet animal se présente à peu près comme votre éléphant : il a quatre pattes colossales, en proportion naturellement avec sa masse; toutefois son pied n'est pas formé comme celui de votre éléphant, mais bien plutôt à peu près comme celui d'un lion, et il est muni de griffes extraordinairement robustes. -3Son corps a une circonférence assez grande, et lorsqu'un semblable animal est complètement développé, il ne mesure pas moins de soixante dix à quatre vingt toises du point le plus bas du ventre au sommet du dos. La queue est longue en proportion du corps de cet animal; il a un cou massif et pourvu de crins très forts qui poussent presque jusque là où les pattes antérieures s'attachent au corps. La tête ressemble à celle d'un cheval, mais le front est en proportion très large. -4Du front, entre les deux oreilles, part une trompe longue et flexible, qui peut être allongée par l'animal jusqu'à quarante toises, mais d'un autre côté, raccourcie aussi jusqu'à un tiers de sa longueur. En cette trompe l'animal possède une force extraordinaire, et avec un tel bras très flexible il arrive à déraciner des arbres même de considérable grosseur. -5- Au moyen de cette trompe, cet animal, en n'importe quel lieu qu'il se trouve, arrache aux arbres des branches entières qu'il dévore souvent avec les fruits, en particulier quand la faim le stimule de manière excessive. La couleur du corps est d'un gris clair, tandis que la trompe par contre est d'un gris plus sombre ; les crins sur le cou ont une tendance au bleu, et la touffe de la queue a une teinte grisâtre claire. -6Les yeux quelque peu torves sont de couleur d'un brun très sombre. Cet animal est aussi pourvu d'une bouche très grande année de formidables dents très blanches ; au fond de la bouche il possède cependant des molaires puissantes qui ne sont pas réellement des dents, mais de vraies saillies des os maxillaires tant supérieurs qu'inférieurs. Avec cette espèce de meule l'animal peut avec la plus grande facilité triturer des pierres même très dures et de grosses branches, au point de les réduire dans sa bouche à une bouillie. -7Cet animal est bien sûr herbivore, mais s'il est trop assailli par la faim, il n'épargne pas les animaux, et, en cas d'extrême besoin pas même l'homme ; pour cette raison aussi, les habitants de Saturne ne nourrissent pas une excessive amitié pour cette espèce d'animaux. De toute façon, en ces lieux où demeure cet animal, les habitants peuvent l'affronter avec des probabilités de succès, bien que les difficultés et les dangers joints à l'entreprise soient grands. -8A présent nous verrons de quelle manière les habitants donnent la chasse à cet animal. Donc, avec la force il est absolument exclu qu'ils atteignent leur but, parce que cet animal aussi a déjà dans sa trompe tant de force qu'il peut s'opposer même à mille des plus robustes hommes de Saturne pris ensemble ; par conséquent ils doivent avoir recours à la ruse.
-9Mais avant tout vous devez savoir que cet animal se tient de préférence en ces lieux où il y a de grands bois d'arbres-pyramide que vous connaissez déjà, arbres auxquels il apporte des dommages assez conséquents en arrachant les branches jusqu'où il peut arriver avec sa trompe. Donc, lorsque dans un pays quelconque les habitants s'aperçoivent que cet arbre gigantesque, qui pousse en presque tous les continents de Saturne, se trouve privé de ses branches, ceci est pour eux un signe certain qu'en un semblable bois sont en train d'errer un ou plusieurs de ces animaux. -10- Mais que font alors ces habitants ? Ils entourent le bois de tous les côtés munis de flambeaux et ils mettent le feu aux arbres tout autour. Etant donné que cet animal ne craint rien tant que le feu et la fumée, il s'enfuit immédiatement, ou mieux, va chercher tout autour une sortie libre, laquelle cependant débouche d'habitude seulement là où il y a de l'eau, un large fleuve par exemple, un lac, ou tout bonnement la mer. -11- Une fois que l'animal a trouvé une semblable voie de salut, il n'hésite pas à s'aventurer dans l'eau ; mais en cet élément il perd toute énergie et erre comme égaré ici et là en tenant droite en haut sa trompe qui, dans des conditions normales, est au contraire continuellement en mouvement. Les habitants de Saturne laissent que l'animal s'éloigne toujours plus de la rive, et même, montés sur leurs canots, ils l'y incitent en l'épouvantant avec des feux fixés sur de longues perches. -12- Lorsque l'animal est arrivé dans l'eau à une profondeur telle, qu'il se trouve immergé jusqu'au cou, les habitants s'avancent, et avec leurs longues haches affilées ils lui coupent la trompe vraiment à la base. Mais quand l'animal a perdu son bras, c'est comme s'il avait perdu la vie; il s'affaisse bien vite dans l'eau et son corps, ou bien y pourrit, ou bien devient la proie des nombreux animaux affamés des eaux. -13- Mais qu'arrive-t-il par contre si, malheureusement, un semblable bois ne confine pas d'un côté ou de l'autre avec quelque point d'eau important ? En ce cas, l'entreprise devient certes un peu plus ardue et périlleuse. Si le feu a bien pris de tous les côtés, de sorte qu'un ou plus de ces animaux se trouvant dans le milieu d'un semblable bois incendié soient surpris, ou mieux, atteints par les flammes, et qu'ils ne trouvent en aucun point une voie de sortie, alors au milieu d'une épouvantable et furieuse agitation ils sont étouffés par la fumée, ou bien si l'incendie est très violent, ils restent en grande partie aussi brûlés. -14- Cependant, si le feu n'a pas fait bonne prise, un semblable animal se précipite comme un fou vers l'endroit le moins dangereux et furieux fait irruption à l'air libre ; mais alors malheur à l'être vivant qui vient à surgir devant lui ! Que ce soit homme ou animal, il est immédiatement saisi par sa trompe et, ou bien lancé en l'air, ou jeté à terre avec tant de violence, que de l'être, il reste à grand-peine une trace quelconque ; car la véhémence du lancer exécuté par cet animal au moyen de sa trompe, quand il est au comble de sa fureur, dépasse sans aucun doute celle d'un projectile tiré par un canon. -15- Si cet animal se trouvait par hasard sur votre Terre et voulait donner une preuve de l'énorme force de sa trompe, il pourrait avec beaucoup de facilité lancer une pierre de cent quintaux à vingt milles de distance, et précisément avec tant de violence, que la pierre devrait parcourir cette distance en quelques secondes ; si par contre il la flanquait par terre, vous pouvez être sûrs que la pierre s'enfoncerait dans le sol de plus de cent toises de profondeur. -16- De cette courte exposition vous pouvez donc facilement vous faire une idée de combien les habitants de Saturne cherchent à se tenir loin de cet animal, et quelle sensation fait sur tout un grand continent la constatation que l'un de ces animaux, ou tout bonnement même plus, aient échappé à une semblable chasse avec le feu.
-17- Cependant, avant de se risquer à une entreprise de ce genre, le bois respectif est soigneusement examiné pour s'assurer qu'il se trouve réellement totalement isolé à l'intérieur de la terre ferme, ou bien si l'un ou l'autre point touche à quelque point d'eau important. -18- S'il est isolé, le problème est étudié avec attention et l'on délibère pour savoir s'il faut se risquer à incendier et quand ; si l'on se trouve en état de garantir une facile propagation du feu, alors sans autre l'incendie est mis en route ; mais si tel n'est pas le cas, on préfère abandonner le bois à l'animal; cependant auparavant on va accumuler du bois sec de tous les côtés, bois avec lequel on construit un vrai bastion tout autour du bois. -19- Celui-ci est ensuite allumé seulement quand les arbres formant le bois sont devenus suffisamment secs, ce qui d'habitude se manifeste quand la région respective s'est trouvée déjà depuis pas mal de temps dans la zone d'ombre projetée par l'anneau de la planète ; arbre qui, lorsqu'elle commence à envahir un pays donné, y reste toujours le temps de plusieurs de vos années terrestres ; et justement en ces époques, comme il arrive aussi chez vous durant l'hiver, les arbres sont généralement très pauvres en humeurs. -20- Alors, à ce bastion, il est mis le feu en tous ses points en même temps, et puis les chargés de la besogne s'éloignent le plus vite possible de la place. Voilà, c'est tout ce qui mérite d'être rapporté sur le compte de cet animal, qui est parmi les principaux de Saturne. Sur toute la planète cependant, les continents encore sur lesquels demeurent des hôtes de cette espèce devraient être à grand-peine au nombre de dix, et mène, là où ces animaux se trouvent, ils sont très peu nombreux. -21- En ce qui concerne l'utilité de cet animal, elle est, du point de vue physique, identique à celle du mud et du grand poisson que vous connaissez déjà, mais en mesure plus limitée. Cet animal cependant n'atteint pas le but qu'a le mud, ou le grand poisson, comme condition pour la conservation et la concentration des autres êtres ; mais bien plutôt les passages de la vie animique peuvent s'effectuer sans aucun inconvénient par d'autres degrés aussi ; et pour cette raison, aucun pays ne perd quelque chose, même si de semblables espèces d'animaux énormes et dangereux pair l'homme, s'éteignent.
CHAPITRE 22 -1Et maintenant nous tournerons notre attention vers quelques autres animaux encore, qui bien que pas aussi colossaux, sont cependant extrêmement dignes d'être notés. En cette classe d'animaux la panière place revient à celui que l'on appelle IHUR, ou bien, traduit en votre langage : L'ours bleu. Lorsque cet animal est complètement adulte, il est presque aussi grand qu'un homme de Saturne, bien entendu, quand il se dresse sur ses deux pattes postérieures et marche ainsi comme un homme. -2Le nom vous dit déjà par lui-même quelle est la couleur de cet animal, c'est-àdire, complètement bleu-clair. Et maintenant on demandera : quant à la forme, quel aspect a-til ? - Voilà, sauf la tête, il ressemble assez bien à votre ours ; par contre, la tête est conformée tout à fait autrement. Comment se présente donc cette tête ? Ici, il sera à nouveau quelque peu difficile de vous la représenter comme il faut, étant donné que vous ne connaissez sur la Terre aucun animal qui ait une tête semblable à celle de notre ours de Saturne. -3Malgré cela d'ailleurs, nous essayerons de concevoir une forme au moyen de laquelle il vous sera possible de vous faire un critère de la tête de cet animal. Imaginez-vous une pelote assez arrondie d'un diamètre d'environ une toise et demie, des deux côtés de laquelle, plutôt dans le milieu de cette pelote, se dressent droites deux oreilles très grandes qui mesurent chacune deux toises et demie en longueur et une bonne toise en largeur. -4Figurez-vous ensuite encore sur la partie supérieure de cette pelote deux cornes distantes d'environ une demi-toise l'une de l'autre, longues d'environ trois toises, retournées et d'un aspect comme si elles étaient d'or non lustré, deux yeux, relativement grands et de forme identique à celle de l’œil humain, situés à environ 5/6 de toise sous les cornes, et sous les yeux un museau de lion, en proportion plutôt grand; cette tête enfin est unie au reste du corps au moyen d'un cou relativement gros, long et massif. -5Imaginez-vous en outre une crinière de couleur plutôt bleue sombre, longue de deux à trois toises et tombant des deux côtés du cou en commençant derrière les cornes ; ainsi vous avez toute la silhouette de cet animal. Les poils de la queue par contre sont un peu plus longs et d'un bleu plus sombre encore. Si vous regroupez tous ces détails, et si vous considérez que cet animal mesure souvent, des cornes jusque là où se terminent les pattes postérieures, une cinquantaine de vos toises ; que, s'il se tient avec les quatre pattes à terre, il a jusqu'au sommet du dos presque vingt toises de hauteur, et que chaque patte mesure quant à elle environ six toises et a une circonférence semblable à un tonneau de dix émeris : alors vous avez la représentation complète de l'animal. -6En ce qui concerne les pattes, elles ont la même forme que celles de votre ours, forme proportionnée à la masse de l’animal et la couleur en est pareillement bleue comme le reste du corps. Habituellement cet animal est de nature douce ; seulement il ne faut pas l'irriter et le poursuivre. Mais s'il est agacé et irrité, alors son caractère pacifique disparaît et il devient féroce et très furieux ; dans quel état il n'épargne plus rien ; tout ce qui se présente devant lui est immédiatement assailli avec violence et réduit en miettes. -7Car cet animal, bien qu'il ne soit pas plus grand qu'un homme, - toujours de Saturne, il s'entend - a toutefois dans son corps massif une force qui égale celle de dix hommes; et si un téméraire veut éventuellement entrer en conflit avec l'un de ces animaux, quand il est furieux, il finit toujours par avoir la mauvaise part. Et bien que l'animal soit par
lui-même de nature douce, les habitants l'esquivent en cherchant par tout moyen à l'épouvanter afin qu'il s'éloigne des régions habitées. -8De quoi se nourrit-il ? - Sa nourriture consiste en herbes, racines, jeunes rameaux d'arbres et d'arbustes ; il ne mange absolument pas de viande, pas même en cas d'extrême nécessité. Mais s'il est irrité, dans sa furie il met en pièces homme ou animal indifféremment ; mais ensuite il laisse parfaitement intacts les restes et s'éloigne du champ de bataille. Le côté le plus remarquable en cet animal est qu'il a une crainte tout à fait spéciale de sa propre colère, et par suite, guidé par l'instinct, il esquive autant qu'il est possible avec beaucoup de soin toute occasion où il pourrait se sentir poussé à s'irriter. -9Un instinct de cette espèce ne serait vraiment pas superflu non plus, à plus d'un individu de votre Terre ; en particulier à certains ambitieux querelleurs et belliqueux héros de bas aloi, qui ne cherchent rien autre que l'occasion de se bagarrer de quelque manière ; cependant, nous ne nous arrêterons pas davantage sur ce sujet, mais nous reviendrons bien plutôt encore un peu sur notre Ihur afin de voir à quoi il sert. -10- Cet animal peut, de plein droit, être appelé le défricheur des régions sauvages ; car, avec ses griffes d'une robustesse extraordinaire, il creuse et raie sur de bons morceaux le sol de Saturne avec tant d'habileté, que les habitants de Saturne eux-mêmes, même munis de leurs bons instruments, ne sont pas en mesure d'obtenir des résultats identiques. Mais que fait ensuite l'animal quand il a ainsi remué et défriché un terrain ? -11- Voilà; il s'en va en des lieux où il y a de la végétation, y choisit des plantes à racines, espèces de celles dont il a l'habitude de se nourrir, les porte sur le nouvel emplacement et les place dans les sillons qu'il a creusés ; mais pour cet animal, le travail qu'il a fait d'instinct, n'est pas pour s'installer un domaine, mais bien pour son usage et sa consommation, afin d'accumuler une quantité de provisions ; de toute façon les plantes mises en place dans les sillons très souvent restent et croissent ensuite vigoureusement. -12- De sorte que, une localité presque déserte totalement auparavant, est ensuite transformée en une fertile campagne, et ce d'autant plus que lorsque cet animal a rempli comme il faut sa réserve, il n'abandonne pas si facilement un semblable poste, avant qu'il ne se soit aperçu que ses provisions devraient être presque épuisées. Mais tant qu'il y trouve encore quelque chose à manger, il se tient continuellement sur le même emplacement ; de sorte qu'il arrive que l'animal se donne du bon temps en maître dans de semblables lieux même pendant plusieurs années. -13- Puis lorsque par suite de la migration, les gens viennent à se trouver sur un nouveau continent et qu'arrivés sur des sites de cette espèce, ils s'aperçoivent immédiatement qu'ils se trouvent au voisinage d'un semblable animal, alors ils attendent pendant un temps assez long, dans le but de voir si un occupant de ce genre ne fait éventuellement plus usage de son champ ; si pendant pas mal de temps il n'arrive rien de nouveau, c'est un signe certain que l'animal a abandonné ce terrain ; alors sans plus attendre ils en prennent possession. -14- Mais si, en dépit de l'attente, il arrive parfois qu'un semblable animal revient visiter ce même terrain pour y faire une récolte de racines, alors ces habitants, ou bien doivent se résigner à rester à regarder tranquillement comment ce cultivateur à quatre pattes se met à nouveau à remuer leur terrain en apportant souvent des dégâts à leurs propres plantations, ou bien doivent s'opposer par la force en attaquant l'hôte indésirable ; dans ce cas la lutte se présente toujours assez préoccupante ; car alors l'animal veut faire valoir ses droits usuels de priorité sur le terrain, et il ne s'en laisse pas trop facilement chasser ; et d'un autre côté les habitants ne s'abandonnent pas facilement à évacuer à nouveau les champs fertiles auxquels ils ont consacrer leurs peines.
-15- Cependant si un semblable animal est vaincu, les habitants se trouvent ensuite complètement à l'abri de toute revendication future de sa part. Si même ils ne réussissent pas vraiment à le tuer, à force de l'agacer et de le provoquer ils amènent l'animal à un point tel, qu'il s'aperçoit qu'on veut l'irriter. Cependant tant que l'animal est tranquille, il craint sa propre colère, si bien qu'alors il s'éloigne et ne revient plus au lieu où on a cherché à le provoquer. Avec cela donc, nous aurons dit tout ce qui méritait d'être relevé sur le compte de cet animal ; et donc à présent tournons notre attention vers un autre.
CHAPITRE 23 -1L'animal suivant que nous nous mettrons à considérer, un peu en passant, porte le nom de HORUD. Quelle place revient à Horud parmi les animaux de Saturne ? Il suffit que vous tourniez votre pensée vers votre lion; ce que cet animal représente sur votre Terre, le Horud le représente aussi sur Saturne. Mais quant à la forme, ressemble-t-il à votre lion? -2A cette question on ne peut répondre ni dans un sens complètement affirmatif, ni dans un sens complètement négatif; car en cet animal il y a pas mal de semblable, mais d'un autre côté aussi pas mal de non semblable au lion terrestre. De toute façon la description qui suivra mettra en relief ce qu'il y a en lui d'analogue et ce qu'il y a de non analogue avec votre lion en ce qui concerne la forme. -3Comment se présente donc cet animal ? En fait de dimensions, il a la même taille que l'ours bleu dont vous avez déjà fait connaissance ; quant à la couleur par contre, son poil a des teintes diverses selon les différentes parties du corps. -4Ainsi, par exemple, le dos, presque jusqu'à la moitié du ventre, est d'un rouge vif ; la partie de l’échine proche du cou est d'un vert pâle, et de même pour les pattes, tant antérieures que postérieures ; le ventre, par contre, a une couleur d'un vert plus chargé, ou, comme vous avez l'habitude de dire, d'un vert herbe fraîche. Sa queue est blanche, à l'extrémité elle est munie d'une touffe de couleur rouge claire ; se détachent ensuite des taches rouges disposées régulièrement ; les pattes sont munies de griffes pareillement blanches ornées d'une bande rouge qui court le long du bord supérieur. -5Telles seraient donc les couleurs de la peau de 1'animal; en ce qui concerne ensuite la forme de son corps, elle tout à fait semblable à celle du lion terrestre, sauf le cou et la tête. Et sur la Terre il n'existe pas d'animal qui ait une tête semblable ; quel aspect a donc la tête de cet animal ? -6Cet animal a une tête presque quadrangulaire, à peu près comme un dé un peu arrondi aux angles, tête qui se tient précisément au cou avec sa surface postérieure, tandis que la surface antérieure fait saillie comme une mâchoire pour environ un tiers en dehors du cou. Des deux côtés, c'est-à-dire à gauche et à droite sont situés deux pavillons d'oreille semicirculaires, qui, du point où ils partent, jusqu'à celui extrême de la courbure, ont chacun une dimension de plus d'une toise ; et quant à la couleur, ils ressemblent à un arc-en-ciel aux teintes pâles. -7Au-dessus sur la tête se trouve une corne longue de presque une demi-toise, en forme de cône, et complètement de couleur noire ; cependant elle est entourée d'un relief qui tourne autour d'elle en spirale, avec un brillant fortement métallique. A la base de cette corne, il y a une couronne de poils longs de couleur azur clair qui pousse de manière à faire paraître la corne elle-même comme jaillissant en forme de colonne hors de cette épaisse fourrure. A la partie postérieure de la tête, là où celle-ci s'unit au cou, le poil se fait toujours plus épais, tandis que vers le front au contraire, il se fait toujours plus court et plus bouclé. -8A la partie antérieure de la tête, en deux orbites proportionnellement creuses, l'animal possède deux yeux que, par rapport à ses autres dimensions, on peut vraiment appeler grands; c'est-à-dire qu'ils ont un diamètre d'une demi-toise chacun, bien entendu toujours en parlant de l’œil proprement dit ; parce que, l'ouverture de l’œil, calculée d'une extrémité à l'autre, devrait mesurer presque une toise entière.
-9Les paupières sont d'une couleur rouge très sombre, et sur les paupières cet animal a, comme l'homme, des sourcils très grands et très marqués, qui sont aussi frisés que le poil autour de la corne déjà décrite, spécialement du côté du front. Mais à présent vient la partie vraiment la plus remarquable du corps de cet animal, c'est-à-dire, sa bouche. -10- Vous aurez certainement déjà plusieurs fois entendu parler du griffon, l'oiseau légendaire. Eh bien, sauf les ailes qui manquent, il y a une assez bonne ressemblance aussi entre le Horud de Saturne et le griffon; car, au lieu de l'habituelle bouche des quadrupèdes, cet animal possède un bec comme un milan, bec d'une robustesse extraordinaire et qui est de couleur identique à la corne ; seulement il est entouré avec des bords en forme de disque, et non en spirale, et ils se suivent en grandeur décroissante de la base du bec jusqu'à son extrémité. La partie supérieure du bec est cause chez tous les oiseaux que vous connaissez sur votre Terre, c'est-à-dire, fixe ; la partie inférieure au contraire, en compagnie de la surface inférieure de la tête cubiforme, est mobile jusqu'à la région du cou. -11- Là où se termine le bec, cet animal a dans sa gueule de puissantes molaires, et pour suppléer aux canines et aux incisives qui lui manquent, il utilise avec un grand avantage son formidable bec qui fait saillie à presque une toise et demie de la face, et qui est presque aussi large que celle-ci. Cet animal est aussi pourvu d'une langue très flexible et qui peut s'allonger ; langue qui peut faire fonction d'une certaine manière de trompe, de sorte que l'animal peut saisir diverses choses et les tirer à l'intérieur de sa gueule. Le bec à sa racine est pareillement garni de poils frisés de couleur bleu-clair, qui vers le cou passe plutôt au verdâtre. -12- Mais quelle est, en général, la couleur de la tête ? D'ordinaire la couleur de la tête est d'un gris-cendre clair, et sous les yeux, ainsi que sur le front, la tête est ornée de trois petits cercles situés l'un sur l'autre, de couleur rouge-vif. Pour ce qui concerne les autres surfaces principales de la tête, on ne voit de celles-ci que les deux parties latérales munies des oreilles, qui sont elles-aussi de couleur cendrée, mais sans aucun ornement ; la surface postérieure par contre, comme vous le savez déjà, à commencer par la partie supérieure est pourvue de longs poils de couleur bleue, bleu qui se fait toujours plus vif au fur et à mesure que l'on approche du cou. -13- Le cou est relativement massif, et il est aussi long que le reste du corps, c'est-àdire depuis les épaules, à la hauteur des pattes antérieures, jusque là où commence la queue, et il est totalement recouvert d'une abondante crinière de couleur azur brillant. Voilà, tel est l'aspect de cet animal. Et maintenant, à quoi sert-il, de quelle nature est-il, où le rencontre-t-on communément et en quels rapports est-il avec les habitants de Saturne ? - A cette quadruple question, nous nous limiterons à donner une réponse succincte. Cet animal, qui d'habitude est de nature extrêmement douce, est souvent gardé par les habitants de Saturne comme animal domestique, en partie à cause de la magnificence de son aspect et en partie en raison de son activité s'il est bien dressé. -14- En quels travaux est-il employé ? - Ordinairement on le dresse à la chasse de divers autres animaux plus petits qui sont cependant parfois aussi de nature nocive. Outre cela, cet animal, durant les périodes d'arbre, est employé pour la coupe du bois; car avec son bec il peut trancher net d'un seul coup des branches assez grosses, en particulier de l'arbrepyramide sur lequel il grimpe avec la plus grande facilité jusqu'à la cime. A cet égard, vous devez vous représenter ces branches souvent si grosses qu'à grand-peine cinq hommes terrestres suffiraient pour en tenir une embrassée ; et vous pouvez compter qu'une branche de
cette espèce se comporte sous la morsure de cet animal précisément comme une tendre pomme sous la morsure de vos dents. -15- Quand il a détaché d'un arbre des branches en quantité suffisante, lui, à un signal donné les saisit avec son bec et les transporte jusqu'aux demeures de ces habitants, où, toujours de la même façon ensuite, il les réduit en morceaux plus petits, qui sont ensuite utilisés comme bois à brûler. Ainsi cet animal est employé aussi dans d'autres travaux de coupe et de transport ; seulement il doit être capturé jeune si l'on veut le dresser de cette manière. -16- Mais quant à faire prisonnier un animal de cette espèce déjà adulte, en premier lieu il ne s'adapterait à aucun dressage, sans compter ensuite qu'il fuit au voisinage de l'homme, s'il n'est pas provoqué ; mais s'il est entouré par les hommes, et qu'il ne trouve pas de voie de sortie, alors c'est le moment le plus dangereux, car alors il commence à creuser avec furie le terrain au moyen de ses très robustes griffes, et c'est aussi le moment le plus opportun pour les chasseurs de prendre le large en vitesse s'ils ne veulent pas voir l'animal faire des sauts formidables, et se jeter en rugissant contre ses éventuels ennemis ; dans un tel cas, qui est rejoint doit se résigner à goûter la puissance de son bec et à être traité à la manière d'une branche d'arbre. -17- Par conséquent ainsi quand les chasseurs aperçoivent cet animal dans une attitude ainsi suspect, ils s'éloignent en toute hâte. Mais étant donné de semblables circonstances, on se demandera alors comment ils peuvent capturer ces animaux quand ils sont encore petits ? Eh bien, pour faire cela on recourt à la ruse ; car les habitants de ces régions où vit ordinairement cet animal, savent très bien qu'il est grandement porté sur les boissons spiritueuses et enivrantes, mais seulement à l'époque où il a ses petits, et cela soit dit, tant en ce qui concerne le mâle, qu'en ce qui concerne la femelle, qui se distingue du premier seulement par la forme des parties génitales. -18- En de semblables occasions les chasseurs de Saturne apportent une certaine quantité de ces boissons spiritueuses à l'intérieur de récipients d'une assez bonne capacité, au voisinage de ces lieux où ces animaux ont l'habitude de se tenir, de sorte que, sans avoir à attendre beaucoup, étant donné que l'animal est attiré par l'appât très facilement, on le voit apparaître bien vite; et une fois qu'il a vidé les récipients, il retourne ensuite pacifiquement là où se trouvent ses petits qui d'habitude viennent au monde au nombre de deux, trois et même quatre. Cependant, arrivé à sa tanière, il se couche immédiatement à terre surpris par un sommeil si profond, qu'il ne s'aperçoit absolument pas du vol de ses petits qui entre-temps sont apportés dans les demeures des habitants, et là, dressés au travail en raison de leur capacité. Tandis que les adultes sont laissés en vie aux fins de la reproduction ultérieure. -19- Voilà, ceci est tout ce qui concerne l'animal que vous avez eu l'occasion de connaître à l'instant ; seulement vous ne savez pas encore en quelles régions il vit. Et à cela on répondra en disant qu'il demeure seulement dans les parties méridionales de Saturne, et aussi là, seulement en ces continents qui ne s'étendent pas au-delà du 45 ème degré de latitude méridionale ; car, cet animal aime vivre seulement dans les régions proches de la mer, mais en celles-ci on ne le trouve que là où le pays ne dépasse pas ledit degré de latitude, et où, là aussi il y a la température suffisante qui lui convient ; mais si au contraire le pays s'étend en mesure considérable au-delà du 45ème degré, dans les régions qui confinent à la mer il y fait naturellement plus froid ; par conséquent il n'est plus apte à offrir des conditions de vie favorables à cet animal ; car il a un propre instinct par suite duquel il ne veut demeurer ni dans les régions au Levant, ni dans celles au Couchant d'un pays donné ; mais s'il n'en est pas ainsi, alors dans un semblable pays il ne peut absolument pas prospérer, ni son espèce ne peut se conserver ; par conséquent, on ne le rencontre jamais dans les régions internes d'un pays, et
si même il y est parfois apporté comme une rareté, il dépérit immanquablement, et meurt après quelque temps. -20- Et avec cela vous avez réellement tout ce que cet animal offre de remarquable; par conséquent nous passerons à en considérer un autre, qui constitue une spécialité exclusive de la planète Saturne.
CHAPITRE 24 -1ZIGST, ou bien dans votre langage, *pied pointu*, ainsi s'appelle l'animal auquel nous consacrerons maintenant notre attention ; animal qui est, comme on l'a déjà dit, une particularité exclusive de cette planète. Cet animal se trouve, sur la planète Saturne, à peu près au même degré que celui qu'occupe l'antilope sur votre Terre ; car ce Zigst de Saturne vit lui aussi uniquement sur les montagnes les plus hautes. -2Mais en vérité, pourquoi l'appelle-t-on pied pointu ? Vous ne devez pas déjà vous imaginer que cet animal a peut-être carrément quatre pieds taillés en pointe au lieu des pattes ordinaires pourvues de jointures, et donc qui peuvent relativement plier ; mais il est appelé *pied pointu* pour la raison que ses pattes antérieures, à l'extrémité, là où les quadrupèdes ont communément la dernière jointure se terminant en une patte avec un sabot, cet animal est dépourvu de cette dernière articulation - et à la place, immédiatement depuis la région du genou, part une prolongation cornée droite constituant comme un sabot très solide, plutôt pointu là où il finit; les pattes postérieures sont par contre régulières comme celles de n'importe quel autre animal ; seulement les sabots ne sont pas fendus et finissent aussi passablement en pointe. -3Telle serait donc l'explication voulue pour justifier le nom de cet animal. Mais quant au reste, comment se présente-t-il ? Sur votre Terre, parmi les animaux de gosse taille, il n'y en a aucun auquel on puisse le comparer, mais bien plutôt partiellement parmi les petits. Ainsi la partie médiane du corps est en tout semblable à la partie correspondante d'une loutre, cet animal que vous connaissez bien. La queue par contre semblable à celle de votre bœuf ; le cou et la tête par contre se présentent plutôt comme ceux de votre tigre ; les mâchoires cependant sont pourvues, non de la denture spéciale des carnivores, mais bien plutôt de celle des herbivores. Sur le sommet de la tête enfin, l'animal porte une seule corne quelque peu pliée vers l'arrière ; ainsi on aurait décrit cet animal au complet, exception faite de la taille et de la couleur. -4Donc, quelle taille a-t-il ? Si vous voulez vous en faire une idée en prenant pour base les mesures de votre Terre, certes celle-ci ne pourrait trouver sur sa surface un autre animal capable de soutenir la comparaison ; mais sur Saturne, où tous les rapports sont centuplés, et parfois même beaucoup plus que centuplés, notre *pied pointu* est à classer seulement parmi les petits animaux. -5Et maintenant, de quel couleur est-il ? La couleur principale de son corps est d'un blanc éblouissant; mais, en commençant par la tête, et jusqu'à la queue, court comme une bande relativement large de couleur bleu-clair ; vers le ventre de l'animal il y a une teinte d'un jaune doré, et aux pattes au contraire une teinte qui tire presque sur le rouge, mais ceci seulement jusqu'aux sabots pointus, qui sont complètement noirs, de même que la corne qui se trouve sur la tête. Le cou ensuite, pour la partie de dessous naturellement, de la mâchoire inférieure jusqu'au poitrail, apparaît strié, et précisément de couleur rouge sombre. -6Et avec ces détails vous avez ainsi la représentation complète de cet animal qui, dans son espèce et dans sa forme, ne vit sur aucune autre planète. Mais quelle est ensuite son utilité ? Comment se nourrit-il, et les habitants de Saturne ont-ils souvent l'occasion ou la possibilité de s'en emparer ? -7En ce qui concerne l'utilité qu'en peuvent retirer les habitants, elle est nulle, comme le sont pour vous, habitants de la Terre, le chamois et l'antilope. En dépit de cela par
ailleurs, dans le grand ordre des choses, il occupe la place qui lui revient, et inconsciemment remplit lui aussi la mission qui lui est confiée aux fins de l'utilité générale. Or, qui de vous voit à quoi sert, par exemple, votre chamois ; et qui peut se rendre compte de la raison pour laquelle cet animal saute de rocher en rocher ? Mais à qui est disposé à croire, Moi, Je peux aussi lui dire cette raison. -8Vous savez qu'aux fins de dissolution de la roche, sur les hautes montagnes poussent toutes sortes de mousses et de petites plantes, et de même vous n'ignorez pas que, tant les mousses que les diverses espèces de plantes, ne sont rien autre que *des produits de puissances spirituelles et d'intelligences spirituelles*. Mais s'ils sont des produits de ce genre, il doit certainement apparaître clair, qu'en eux a commencé à se manifester une quelconque vie intelligente. Mais quand une vie a commencé à se manifester, elle ne se manifeste pas déjà pour retomber ensuite dans la mort, et dans l'anéantissement, mais bien plutôt pour se développer dans une forme et se fortifier, pour ensuite abandonner la forme elle-même et passer dans une autre de classe supérieure. - Or, quelle est la forme manifestant vie qui existe sur les montages, placée au-dessus des petites formes animées de la mousse, de l'herbe et des autres petites plantes alpestres similaires ? -9Voilà, il suffit que vous prêtiez attention aux animaux des montagnes ; ce sont justement les formes supérieures de la vie dans lesquelles passe la vie végétale qui se manifeste sur de telles hautes montages. Que cela corresponde parfaitement au vrai, vous pouvez facilement le déduire de ce que la vie de ces animaux est maintenue justement dès lors qu'ils s'assimilent la vie de ces végétaux. *Donc le fait que l'animal se nourrit moyennant un aliment qui convient à son être ne signifie rien d'autre que : accueillir en lui la vie dispersée des puissances moindres et inférieures, la rassembler pour former une vie plus parfaite*, ou bien aussi, dit de manière plus claire encore pour vous : -10- *Se nourrir signifie : Recevoir la Vie qui émane sans cesse de MOI, la recueillir comme à l'intérieur d'un vase, afin qu'Elle, montant de degré en degré, s'intensifie et se perfectionne sur le chemin du retour à la Source Première, dont elle a jailli un jour. (N. B. de l'éditeur : "Ô naturalistes, et vous, chers lecteurs, ne dédaignez pas de méditer, arrêtez-vous ici un instant en silence, et considérez cette indication du Seigneur sur le caractère essentiel et sur la vie des êtres dans l'Univers !") -11- Or, ce que vous avez compris, appliquez aussi à cet animal au pied pointu la même capacité, et vous aurez alors tout ce qu'il vous est nécessaire de savoir sur ce point, c'est-à-dire sur la fonction qu'est appelé à remplir cet animal. -12- Et maintenant il ne nous resterait qu'à répondre à une question encore, c'est-àdire, si de la part des habitants de Saturne il est donné la chasse à cet animal ? Mais je peux vous dire que le cas n'est pas rare où certains parmi les habitants de cette planète se risquent à ce genre de chasse, mais que très rare est le cas par contre où ils réussissent à s'emparer d'un semblable animal ; parce qu'il est si agile et si adroit pour grimer jusque sur les plus hauts rochers de ces montagnes, qu'il n'y a pas d'habitant de Saturne capable de tenir derrière lui. -13- Etant donné la forme pointue de ses sabots, cet animal peut se tenir en parfait équilibre sur une surface large comme votre main ; mais là où les rochers sont de nature telle à avoir la forme de pointes, alors là, pour nos habitants de Saturne à la grande stature, il n'y a plus possibilité d'insister pour donner la chasse à un animal de cette espèce. Seulement lorsque arrive le cas très rare où un semblable animal tombe de quelque pic élevé et abrupt, et que par conséquent il tombe mal, et qu'en outre il aille tomber dans un endroit encore accessible à l'homme, alors seulement il est possible de s'en emparer, mais certes avec le corps
mort. Vivant par contre, aucun habitant de Saturne n'a jamais réussi à capturer un exemplaire de cette espèce. Et ici viendra spontanément la question : -14- "Mais si cet animal est si difficile à capturer, pourquoi donc les habitants se donnent-ils tant de mal à lui donner la chasse ?" - Voyez-vous, ils sont poussés à cela par une sorte de superstition ; mais celle-ci se relie à l'idée de ce que vous appelez la médecine de charlatan. Les habitants de Saturne raisonnent ainsi : Etant donné que cet animal se nourrit d'herbes parmi les plus salutaires et les plus parfumées, sa chair doit être quelque chose de tellement sain que, si quelqu'un en mange, ne serait-ce même une quantité minime, il ne lui est plus possible de mourir. C'est donc là le motif pour lequel la chasse est donnée à cet animal, bien que l'on connaisse la difficulté extrême de pouvoir s'en emparer. Mais au fond, et eu égard à la foi en une semblable panacée, pour les habitants de Saturne cela ne va pas mieux que cela ne va à plus d'un parmi les habitants de votre Terre, qui ont aussi connaissance de très divers moyens et de panacées avec lesquels ils s'imaginent perpétuer la vie du corps ; mais l'expérience se charge chaque jour d'enseigner qu'en ce qui concerne la mort du corps, il n'y a absolument pas la possibilité de la tenir en laisse. -15- Mais à quelles excuses s'accrochent ensuite de semblables vendeurs de fumée, en dépit des expériences de chaque jour qui viennent continuellement discréditer leurs moyens ? Ils cachent ces moyens à l'intérieur de voiles très mystérieux imaginés par leur ardente et trompeuse pseudo-sagesse, et disent : *Ce remède doit être pris exactement à minuit, et précisément aux très exactes doses prescrites ; un seul millième de gramme en moins ou en plus rend le remède inefficace. Si ce procédé médical rusé ne suffit pas, pour rendre la manipulation plus compliquée encore et plus difficile à réussir, on fait recours à l'influence des astres. -16- Alors, dans des cas semblables, le médecin de la vie enveloppé dans un mysticisme de cette espèce, faisant étalage d'une éloquence passablement grande, mais on ne peut plus incompréhensible, s'efforce d'expliquer en quel point du firmament doit se trouver la lune, en quelle phase, ainsi qu'en quelle constellation doit passer le soleil, et tout cela à minuit précise. Si par exemple le soleil ne passe pas exactement à minuit dans la constellation du Lion, la lune dans celle du Capricorne, et ainsi de suite, une planète en celle-ci, une autre en cette autre constellation, et tout cela en même temps, alors le remède éternel pour prolonger la vie reste sans force et sans effet. De sorte que l'on trouve toujours ensuite des gens crédules prêts à prêter foi à ces mystiques prédicateurs de sagesse, et à acheter toujours à prix très cher un semblable remède éternel pour la vie ; et lorsqu'ils en sont en possession, ils commencent à consulter, pour ainsi dire jusqu'à en perdre la vue, à coups de consultation de calendriers, afin de ne pas laisser s'échapper l'occasion où la lune, le soleil et toutes les autres planètes pourraient venir à se trouver dans les constellations indiquées, à minuit précise. -17- Mais comme, même à vous-même, sans connaissances mathématiques profondes, il doit apparaître facilement clair que, de semblables occasions astronomiques, en ce qui concerne la position des astres et le passage d'une constellation à l'autre, peuvent se vérifier approximativement à grand-peine une fois seulement en un ou même plusieurs millions d'années, ou éventuellement même jamais plus, et que par conséquent l'efficacité d'un tel moyen extraordinaire imaginé par la sagesse mystico-spéculatrice d'un pourvoyeur de la vie éternelle terrestre de cette sorte s'élimine parfaitement de soi. Cependant le spéculateur se soustrait à toute responsabilité quelle qu'elle soit, étant donné qu'il peut toujours soutenir que toutes les circonstances requises n'ont pas été en place. -18- Voilà précisément ce qu'il arrive sur la planète Saturne avec la viande utilisée de cet animal ; cependant les pseudo-médecins s'excusent de la manière suivante et disent : *Si un remède de cette espèce n'a pas obtenu l'effet stipulé, cela dépend du fait que la
personne qui s'en est servi a commis une grave imprudence en prenant peut-être le n --: e non pas à l'époque de l'arbre projetée par l'anneau, mais bien en celle de la pleine lumière solaire ; dans quelles conditions il ne peut avoir d'efficacité*. Et si ensuite un parent du défunt fait à un semblable conservateur de la vie, l'observation que le défunt lui-même a vraiment avalé le remède à l'ombre de l'anneau, alors le médicastre demande immédiatement quelle position avaient eu les lunes en cette occasion ? -19- Si l'interpellé est en mesure de donner une réponse précise, la position des lunes est, de la part du conservateur des vies, toujours naturellement qualifiée d'extrêmement défavorable à son remède, et ce avec un grand étalage d'éloquence. Mais si l'interpellé déclare n'en savoir que peu ou même rien, alors c'est de l’eau pour le moulin de notre éternel apporteur de vie. Cependant il arrive parfois qu'un parent d'un tel mort en dépit de l'emploi de l'éternelle panacée, se tourne pour un conseil vers un autre apporteur de vie éternelle de même acabit, et lui demande pourquoi ce remède a manqué son but ? -20- Or, vous pourrez vous-mêmes aisément vous imaginer quel genre d'informations donnera cet autre préservateur de la vie sur le compte du malheureux remède offert par son collègue ; à savoir, qu'il parlera comme suit : "Pourquoi n'avez-vous pas eu recours à moi ? C'est un fait connu de n'importe qui, que cet individu travaille avec des genres sophistiqués." Et dans le but de convaincre celui qui demande, que le remède en question ne devait certainement pas avoir été pur, il lui montre aussitôt un autre remède d'une couleur différente de celle du remède incriminé; et c'est pour l'autre intéressé une explication suffisante de l'insuccès du remède conseillé par le premier pseudo médecin. -21- Alors, dans de semblables circonstances, le cas n'est pas rare que le parent du défunt aille de nouveau vers le premier apporteur de la vie qu'il considère désormais comme un escroc. Mais comment celui-ci s'en tire-t-il ? Eh bien, il conduit immédiatement notre réclamant chez son voisin - de même sentiment et déjà instruit comme il faut - et, naturellement, il dit au réclamant : "Regarde, celui-ci et cet autre ont employé mon remède vraiment comme il fallait le faire; à présent, demande seulement à quel âge ils sont arrivés." Puis, quand l'intéressé, à cette invitation, s'adresse à l'un ou l'autre *miraculé* en lui demandant quel âge il a, il s'entend d'habitude mentionner une époque si reculée qu'il en reste tout bonnement stupéfié. -22- Mais d'habitude, celui qui est interrogé n'indique jamais le nombre des années qu'il a ; bien plutôt, pour preuve de sa longévité, il cite des évènements extraordinaires auxquels il aurait déjà assisté. Ainsi par exemple, l'un affirme très bien se souvenir du temps où telle ou telle autre montagne n'existait encore absolument pas. Un autre par contre montre la zone blanche et lumineuse sur le firmament, et soutient avoir vu comment cet anneau avait été en son temps placé dans le ciel par la main du Grand Esprit. -23- Mais un troisième se souvient très bien tout bonnement de l'époque où il n'existait encore absolument pas de lunes sur le firmament ; et ainsi arrive-t-il que chacun de ces gens-là sait citer des faits encore plus stupéfiants que ceux de son prédécesseur, pour preuve de son propre grand âge. Et après que notre réclamant ait écouté plusieurs de ces affirmations, ordinairement il se déclare satisfait, et en outre, il achète pour son compte le merveilleux spécifique du médicastre, lui aussi en rien plus jeune que ses voisins, et ainsi pourvu, il s'en va et retourne joyeusement chez lui. -24- Voilà; c'est tout ce qu'il valait la peine d'ajouter et d'intégrer à la description de cet animal, et pour que vous vous rendiez compte qu'il y a aussi des sots sur cette merveilleuse planète, comme d'ailleurs sur n'importe quel autre corps de l'univers. C'est pourquoi maintenant, après cela nous passerons à considérer encore un animal non
domestique de cette planète, et ensuite nous porterons notre attention sur quelques-uns des animaux domestiques.
CHAPITRE 25 -1L'animal que nous nous disposons maintenant à observer, ne se rencontre que dans de très rares endroits seulement. Sur les continents c'est un être complètement étranger, et on peut le trouver uniquement sur quelques-unes des grandes îles de l'hémisphère méridional. Mais là où demeure cet animal, là les habitants ont l'habitude de faire tout aussi peu de visites qu'ils n'en font sur les îles où demeure le Mud. La suite de la description en dira la raison. -2Le nom qui est donné à cet animal est *BAUOR* ce qui, traduit dans votre langue voudrait dire à peu près, monoculaire, c'est-à-dire, l’œil unique. Et d'abord nous voulons voir comment se justifie ce nom. En vérité cet animal a comme n'importe quel autre animal deux yeux pour voir ; mais sur son large front, plus haut que les deux yeux et précisément au milieu, il possède encore un œil qui lui sert comme une arme, et c'est de cet œil très dangereux que cet animal tire son non. -3Cependant auparavant nous nous mettrons à examiner tout l'animal en ce qui concerne sa forme et la couleur de sa peau, et puis nous consacrerons une attention particulière à cet œil extraordinaire. - Quel aspect a donc cet animal ? Quelle est sa taille et quelle est sa couleur ? - Sauf le cou et la queue, cet animal ressemble beaucoup à votre cheval ; mais certes, quant au corps, vous devez l'imaginer cent fois plus grand. En ce qui concerne ensuite la queue, celle-ci est semblable à un serpent dont la tête a été coupée; et elle a souvent une longueur de cent vingt à cent trente toises, et là où elle se rattache à la partie postérieure du corps elle est grosse d'une toise et demie, selon vos mesures. -4A son extrémité la queue est pourvue de trois robustes griffes en forme d'hameçon ou de bras d'ancre. Sa plus grande force, cet animal l'a justement dans la queue, et il se sert de celle-ci pour chercher sa nourriture dans l'eau, raison pour laquelle aussi il se tient constamment au long des rivages de la mer ; et avec la queue plongée dans l'eau il va partout, explorant pour voir à accrocher quelque poisson ou quelque autre animal marin afin de calmer son appétit. Dans ce genre de pêche l'animal possède une très grande habileté ; car, dès qu'il flaire en quelque coin sous-marin du rivage quelque chose de vivant et convenant à son estomac, il lance avec une rapidité foudroyante sa queue sous l'eau vers ce point, et ce avec tant de sûreté que la proie ne peut lui échapper. -5Et ainsi, nous aurons décrit la queue de cet animal. Mais ensuite, comment se présente la tête ? La tête de cet animal a un aspect très étrange; elle appuie sur un cou long et robuste, et quant à la forme elle est presque totalement semblable à celle de votre phoque. -6Et maintenant nous verrons, en ce qui concerne cet œil arme, de quoi il s'agit vraiment ! Cet œil voyez-vous, n 'a rien à faire avec l'habituel organe de la vue ; mais il s'agit bien au contraire d'un œil qui fixe ou qui fascine. Normalement cet œil est toujours fermé, mais dès que s'approche de cet animal quelque chose qu'il estime ennemi, l'œil s'ouvre immédiatement et il en jaillit un rayon de lanière rouge d'une telle intensité, qu'il est plus facile de regarder le soleil quand il est dans sa pleine splendeur qu'un œil semblable. -7Quand ensuite ce rayon est dirigé vers un être vivant quelconque, ce dernier est frappé instantanément d'une sensation de faiblesse et d'effroi contre laquelle il n'y a pas de possibilité de réaction ; il se sent comme cloué à la place où il se trouve, et ne peut absolument pas se déplacer de l'endroit où il a été frappé par le rayon fatal. Puis, quand l'animal s'aperçoit que l'ennemi ainsi frappé par la lumière rouge est fixé comme il faut à sa
place, il s'approche de lui à pas lents jusqu'à une distance qui peut permettre à sa puissante queue de l'atteindre : distance sur laquelle l'animal ne se trompe jamais ; puis, avec une rapidité foudroyante il lance sa queue contre l'animal, l'accroche, puis le porte jusqu'à sa large gueule, où il est broyé par ses puissantes dents et enfin englouti. -8Que dans ce cas il s'agisse d'un corps humain ou d'un corps animal, il n'y a pas d'être vivant qui soit épargné ; soit qu'il s'agisse d'un habitant de l'air, de la terre ou de l'eau, tout est dévoré. Et maintenant, avec ce que nous avons dit jusqu'à présent, serait épuisé ainsi tout ce que peut offrir de remarquable cet animal, sauf la couleur de sa peau. -9Donc, la couleur du ventre est bleu-clair ; cependant, proprement au milieu, dans le sens de la longueur, le ventre est sillonné d'une bande sombre et assez large. Le dos par contre a une teinte rose-clair et striée de jaune, et les bandes, en ce qui concerne la forme, ressemblent à celles de vos zèbres. Les pattes, au point où elles partent du corps, sont de couleur jaune-orangé, tandis que les sabots sont complètement noirs ; le poil du corps est relativement très court, et pour cette raison aussi il fut un temps où beaucoup parmi les habitants de Saturne croyaient que cet animal avait la peau tout à fait à nu ; toutefois leur opinion se démontra erronée quand ils réussirent à se rendre maîtres de quelques exemplaires. -10- Mais une semblable capture a toujours coûté encore plutôt cher à ces habitants ; car, lorsqu'ils veulent lui donner la chasse, il est nécessaire que d'abord il lui soit sacrifié abondamment en mettant à sa merci une assez bonne quantité de grands animaux domestiques ; et lorsqu'il se trouve bien rassasié, alors seulement il se couche en quelque lieu près de l'eau, affaibli et somnolent, enroule sa queue et se met à digérer l'abondant repas ; et lorsque les chasseurs voient que l'animal s'est endormi, il faut qu'ils se hâtent pour mettre hors combat la queue, but qu'ils atteignent ordinairement en la détachant du corps d'un coup violent. -11- Cette opération achevée, il est nécessaire qu'avec tout autant de rapidité ils s'éloignent de la place, parce que la queue, même détachée du corps de l'animal, continue à vivre pendant un bon bout de temps encore, et se jette ici et là au milieu d'horribles contorsions; puis l'animal lui-même, rendu furieux par la douleur se lance avec violence donnant des coups de pieds de tous les côtés, de sorte qu'il n'est absolument pas à conseiller de rester dans son voisinage après que la queue ait été coupée. Ceci est bien connu des habitants de Saturne ; c'est pourquoi ils s'éloignent immédiatement, et, à bord de leurs bateaux ils attendent, tant que l'animal ne s'est pas affaissé à terre exténué et immobile, et que la queue ne s'est pas figée après ses contorsions spasmodiques. -12- Ces conditions remplies, les chasseurs s'approchent à nouveau du rivage avec leurs bateaux, coupent encore la queue en plusieurs morceaux ; en quelle occasion chaque morceau se remet à se contorsionner pendant pas mal de temps encore. Puis les hommes s'approchent du corps de l'animal, et, moyennant des piqûres dans l'échine tâchent de voir s'il y a encore quelque trace de vie. Si, malgré les piqûres, le corps ne réagit absolument pas, on procède sans retard à le dépouiller de sa superbe fourrure ; mais d'abord la tête est détachée du corps et jetée en toute hâte à la mer, parce que ces chasseurs pensent que durant l'écorchement l'animal pourrait par hasard ouvrir le terrible œil, et alors ils en seraient tous empoisonnés ; mais cela ne pourrait jamais être le cas étant donné que, en premier lieu, l’œil fatal ne contient aucun poison, et qu'en second lieu, l'intense lumière rouge qui jaillit de l’œil disparaît totalement dès que l'animal a perdu toute son énergie vitale. -13- Une fois que la peau est enlevée du corps et transportée sur les bateaux, le reste est laissé sur place où il se décompose ; mais afin qu'un tel processus s'accélère, à cela pourvoient très bien les nombreux hôtes affamés de divers genres qui sont très prompts à
intervenir, hôtes qui avant tout se rassasient et puis aussi parfois épanchent leur instinct de vengeance sur la dépouille de leur ennemi commun bien connu. -14- Mais que font les habitants de Saturne d'une semblable peau acquise au prix de tant de fatigues ? - Eh bien, la peau est très bien frottée avec de l'huile afin qu'elle devienne douce et souple, et ne puisse plus devenir raide. Puis, suite à cette opération la peau est coupée et l'on en confectionne enfin une sorte de manteau assez court. Ensuite, un semblable ornement, placé sur les épaules d'une personne, a sur Saturne une signification plus grande que tout un empire sur votre Terre ; car il est admis là comme règle proverbiale le dicton suivant : *Le Bauor fait le prince*, c'est-à-dire qu'il confère seulement au plus éminent patriarche du pays partout cette dignité qui doit lui être propre. -15- Cependant il ne faut pas oublier que, pour les habitants de Saturne, la chasse à un semblable animal représente sérieusement une des entreprises les plus grandes et les plus osées auxquelles ils puissent se risquer. Qui donc a conquis un manteau de ce genre, peut montrer à tous ses semblables de combien de courage il est animé. Or, ce témoignage a pour les habitants la plus grande valeur, car un chef ou un guide dénué de courage ne leur sert absolument pas. -16- Outre cela un semblable manteau fournit aussi la preuve des lourds sacrifices auxquels le possesseur respectif a dû se soumettre ; et alors les habitants de Saturne en déduisent qu'un tel possesseur d'un manteau de Bauor, en plus d'être doué de beaucoup de valeur, doit être aussi une personne très libérale, étant donné que, pour le bien de ses propres frères, il n'a pas hésité à s'engager dans de considérables sacrifices ; et puis enfin, de la possession d'un semblable manteau ils déduisent que le possesseur respectif doit être une personne on ne peut plus avisée, étant donné qu'il a su tout disposer avec tant de sagesse pour réussir à se rendre maître du monstrueux animal, qui jouit auprès des habitants de Saturne une renommée plus terrible et plus épouvantable que chez vous le légendaire dragon. -17- Si donc un homme a été en mesure de triompher d'un semblable animal, même en n'importe quelle autre occasion, il sera certainement en mesure de mener à bonne fin une entreprise avec une grande perspicacité et avec sagesse ; par conséquent, ce manteau de peau du bauor confère toujours inévitablement à un homme de Saturne la dignité de grand patriarche, même s'il est de trois à quatre fois plus jeune qu'un quelconque autre petit patriarche. Et tant que le manteau dure, dure aussi le grand patriarche. -18- Or, du fait qu'à la possession d'un semblable manteau est toujours jointe la dignité de grand patriarche, il arrive que de rien on ne fait un usage aussi méticuleusement prudent, et l'on ne veille rien à conserver avec autant de soin, qu'un manteau de cette espèce ; par conséquent même un semblable grand patriarche l'endosse uniquement dans des occasions tout à fait extraordinaires. Si l'on considère cependant que sur cette planète ainsi il arrive partout des petites manigances, on ne doit pas s'étonner si quelque chose de semblable arrive aussi en ce qui concerne la durée d'un tel manteau, durée réputée là presque éternelle, alors que parfois le manteau déjà depuis longtemps parfaitement usé a été remplacé avec un autre travaillé avec des peaux d'autres animaux, et qui est ensuite fait passer pour un authentique manteau de peau de bauor. -19- La dignité de grand patriarche ainsi acquise par l'effet de la possession d'un manteau de bauor reste héréditaire et passe aux fils et aux petits-fils du grand patriarche tant que l'existence du manteau peut être tangiblement démontrée. Seulement si quelqu'un, suite à une nouvelle entreprise couronnée de succès arrive en possession d'un nouveau manteau, et en prouve l'existence dans tout le pays, alors seulement l'ancien patriarche déchoit de sa dignité. -20-
Mangé cela il continue à être considéré par le peuple carme une personne de
grande considération ; dans ce cas, même un infime lambeau d'un semblable manteau de bauor conserve pleinement son prestige, pour ainsi dire, en tant que diplôme de noblesse, et le possesseur respectif jouit de privilèges en conséquence de cela, privilèges qui lui reviennent tant qu'il peut démontrer l'existence même d'un tout petit morceau d'un manteau de cette espèce. Mais, que quelques mites bien intentionnées aient fini de ronger cet ultime lambeau, et elles ont ainsi ramené à néant de la même manière la dignité d'un semblable ancien patriarche, à qui il ne reste réellement plus rien d'autre que le vain souvenir de sa gloire passée. -21- Toutefois nous ne nous entretiendrons pas davantage sur ce sujet qui en vérité concerne les institutions politiques sur Saturne, étant donné que nous ne sommes pas encore arrivés à l'homme avec notre exposition ; mais bien plutôt nous nous remettrons à traiter de la faune.
CHAPITRE 26 -1Cependant, avant de passer à considérer les animaux domestiques, nous donnerons encore un coup d’œil rétrospectif général à tout le règne des animaux de Saturne qui vivent à l'état sauvage. -2Comme il vous est déjà connu, nous allons maintenant faire l'objet de notre observation seulement les animaux de chaque espèce particulière, qui se distinguent par quelques caractéristiques spéciales ; et par conséquent, sur la base de ce que l'on a dit jusqu'à présent, vous aurez connaissance de quels animaux extraordinaires sont propres à cette planète. Cependant, de la description de ces animaux extraordinaires, vous aurez aussi relevé que le plus souvent ils sont de nature telle qu'aucun n'est réellement tout à fait ressemblant à quelque animal, tant de votre Terre, que d'une autre planète. Mais entre une planète et une autre il y a d'un autre côté toujours une incessante harmonie en tout, sans laquelle deux corps de l'univers, bien que même infiniment distants l'un de l'autre, ne pourraient subsister. -3Maintenant, pour que vous puissiez comprendre cela de la manière la plus juste et la plus précise possible, je dois d'abord attirer votre attention sur le fait qu'il y a harmonie et qu'il ne peut y avoir harmonie que là seulement où l'effet est la conséquence de la seule et même cause. Si vous, par exemple, vous tendez une corde harmonique sur une planche de bois, et que vous la pinciez, la corde rendra un son d'une hauteur ou d'une profondeur déterminée ; et plus vous tendez la corde, plus le son se fera intense ou aigu ; si, par contre, vous desserrez la corde, le son se fera en proportion plus profond, bas ou grave. -4Mais quelle est ensuite la cause de la résonance ? Voilà : vous pouvez chercher autant que vous voulez, mais vous ne seriez pas capables d'en trouver une autre en dehors de la planche de bois et de la corde qui est tendue dessus ; chaque fois que vous ferez agir cette cause à travers une secousse ou un frottenent, il se produira toujours le même effet, laissant de côté les modifications du ton en hauteur ou en profondeur, où ils n'y sont pour rien. Cependant vous serez portés à demander : mais qu'est-ce qui produit vraiment le son, la planche polie du bois, ou bien la corde ? Et je vous réponds : -5Ni la planche à elle seule, ni la corde à elle seule ; mais bien plutôt on a ce phénomène, parce que tous les deux concourent en commun à le produire ; de sorte que, la planche de bois polie a dans son intégralité constamment prêtes toutes les formes et mesures imaginables pour la production du son, tandis que la corde vibrant sur la planche suscite et rend manifestes ces formes de manière bien distincte les unes des autres ; et ainsi, la planche rabotée résulte être l'organe dépositaire de toutes les formes sonores que peut contenir sa structure, et la corde qui est tendue dessus, l'instrument apte à réveiller de telles formes et à les rendre perceptibles aux sens ; mais afin que cela soit possible, il est évident qu'entre la planche rabotée et la corde il doit exister un indéniable rapport d'harmonie. -6Peut-être quelqu'un serait-il disposé à admettre que l'air aussi constitue un moyen pour la formation du son ; mais à ce propos il est nécessaire de considérer en premier lieu que pour produire un tel effet, jamais au grand jamais ne peuvent concourir plus de causes de polarité contraires entrant réciproquement en conflit ; le moyen cependant ne peut jamais être considéré comme une cause, mais bien uniquement comme une voie par laquelle l'effet obtenu par les deux polarités se rend manifeste. -7Prenez comme exemple le fluide magnétique ; celui-ci ne peut-il se trouver dans sa polarité caractéristique que lorsque quelque bâton de fer s'en est saturé, ou bien, n'est-
il pas plutôt en lui-même librement agissant avec une telle polarité qui est sienne, en tout l'infini ? Vous voyez donc que le bâton de fer n'est évidemment qu'une voie, par laquelle ce fluide est mis en mesure de se manifester de manière perceptible à vos sens ; tandis qu'il n'est pas possible de considérer le bâton en lui-même comme une cause engendrant le fluide magnétique. Ou bien, l'air, ou l'éther, qui remplissent l'espace entre le soleil et une planète, sont-ils peut-être cet élément qui produit la lumière, ou ne sont-ils pas plutôt simplement la voie par laquelle la lumière émanée d'un soleil arrive jusqu'à une planète, dès lors que celle-ci est constituée de manière à pouvoir accueillir la lumière ? -8Par conséquent, en ce qui concerne la formation de notre ton, nous ne considérons pas l'air comme un moyen produisant le ton mème, mais bien seulement comme une voie par laquelle les formes sonores, telles qu'elles sont obtenues par la corde en communication par tension avec la planche rabotée, peuvent être perçues par l'oreille. En général, sous le terme *ton*, vous ne devez pas entendre le son en lui-même, mais bien uniquement une forme arrachée à une quelconque surface lisse et élastique moyennant des vibrations d'un degré déterminé. -9Le son en lui-mène est seulement un témoignage que, par l'effet des vibrations régulières d'un corps apte à vibrer, les formes d'un autre corps placé à sa base, se sont développées et rendues manifestes. Bien que vous soyez experts dans l'art des sons, Je vous dis toutefois que, presque en aucune branche de l'art et de la science, vous n'êtes aussi peu experts que justement dans l'art des sons et en acoustique ; car vous n'y comprenez rien de plus que n'y comprennent les vers rongeurs qui rongent l'écorce morte d'un arbre. -10- Regardez : vous entassez bien ensemble divers tons dans leurs différentes hauteurs, c'est-à-dire aigus et graves, et certes vous vous délectez de cette musique ; cependant ce plaisir ne se différencie en rien de celui qu'éprouvent les chenilles quand elles rongent l'écorce morte de l'arbre. Et en effet, à qui de vous est-il jamais venu à l'esprit que le ton (en tant que note particulière) est au contraire l'une des formes les plus merveilleuses qui existent. -11- Si vous émettez, voyez-vous, avec votre gorge une note quelconque, ou la produisez avec un instrument de musique, de la note elle-même vous ne saurez rien dire d'autre que : cette note est un DO, ou un FA, et se trouve sur telle ou telle autre octave, et vous pouvez tout au plus établir encore par quel instrument elle a été émise. Considérez bien la chose, et avouez ensuite si, du ton, vous savez beaucoup plus au-delà de ce que vous pouvez en évaluer avec votre oreille la qualité et juger du rapport réciproque entre un ton et un autre, s'il y a consonance ou dissonance ; et ainsi, quand vous avez fait cela, pour vous est parfaitement épuisée votre possibilité de jugement en ce qui concerne le ton. Mais afin que vous vous convainquiez plus profondément comment en aucun autre art vous êtes aussi peu experts qu'en celui des sons, Je Me limiterai à vous dire en passant seulement quelque chose au sujet du ton même. -12- Vous savez que sur une même planche peuvent être tendues plusieurs cordes différentes, dont chacune, selon le degré de tension, donnera un ton plus ou moins aigu ou plus ou moins grave, et tout cela sur la mène planche. Mais si, sur cette seule et mène planche peuvent être produits autant de tons possibles en toutes leurs nuances en nombre aussi varié, il faut évidemment conclure que sur cette seule et même planche doit se trouver présent un nombre presque infini de formes, car celles-ci peuvent se manifester de manière parfaitement perceptible par suite de tous les degrés possibles et imaginables de tension des cordes-mêmes. -13- Si vous examinez la planche avec une corde tendue dessus comme elle se présente à vos yeux, qu'y apercevez-vous ? Rien autre qu'un fil uniforme et élastique de boyau d'animal, ou bien métallique, et la planche déjà mentionnée ; de sorte que, en dehors des deux
uniformités d'aucune apparence, vous ne trouverez devant vous rien qui puisse donner un point d'appui à quelque dissertation philosophique ; et pourtant en ces deux uniformités en rien voyantes se tient cachée une *multiformité* si variée, que tous les musiciens pris ensemble, des temps de David à cette époque, en dépit de leurs nombreuses compositions n'en ont tiré au-dehors pas même encore la milliardième partie, bien que correspondent ces tons extérieurs en eux et par eux-mêmes, en rapport avec le véritable ton, simplement en ce que l'écorce morte d'un arbre est en rapport avec la vie spirituelle intérieure invisible de l'arbre même. -14- Donc, qu'est-ce que le ton ? Le ton n'est autre qu'une manifestation des formes spirituelles harmoniques aux variétés infinies, telles qu'elles sont inhérentes à la matière ou au moins se cachent en elle. Par conséquent la planche, ou la caisse harmonique d'un instrument de musique est un monde infini rempli de formes spirituelles ; et quand vous, par exemple, avez tiré d'un instrument un Do ou bien un La, moyennant ce simple son, s'est manifestée à votre oreille, de manière uniforme et bien précise, ni plus ni moins qu'une création entière avec tout un ensemble d'êtres de toutes sortes en nombre incalculable de toute éternité. -15- Mais vous restez attachés seulement à ce que votre oreille rudimentaire a perçu, mais ne faites pas attention à ce qui se cache derrière ce qui est perçu ; et bien qu'après avoir entendu divers sons successifs dans une série harmonique s'insinuant en vous des grands pressentiments, et que les vivantes formes spirituelles vous empoignent de tout côté, vous, vous restez cependant encore aveugles, et vous continuez au contraire à ronger l'écorce sans y faire aucunement attention, et sans entendre ce que chaque son vous dit : à savoir, que justement par l'effet du ton perceptible d'un seul MOT, sont nées toutes les choses qui remplissent entièrement l'Infini tout entier. (La Parole de Dieu en toute Sa tonalité est Musique. ) -16- De tout ce qui a été dit vous pouvez donc déjà vous faire une idée relative de ce qu'est vraiment un ton, et combien différente est sa signification de celle du simple et uniforme son que vous appelez ton. Mais vu qu'avant nous avons pris les mouvements des rapports harmoniques, et que nous avons expliqué comment entre une planche polie et une corde tendue dessus il existe une constante harmonie, et comment justement de cette harmonie tirent origine extérieurement les mènes effets, nous pouvons aussi sur la base de cela, confronter à présent pleinement notre première thèse qui soutenait qu'il devait exister une constante harmonie aussi entre deux corps de l'univers, bien que soit grande la distance qui les sépare l'un de l'autre. -17- Mais pourquoi cela ? Imaginez-vous que le Soleil soit la planche ou la caisse harmonique, et que les planètes de leur côté représentent les cordes qui sont tendues dessus. Quand ensuite ces cordes planétaires circulant autour de la caisse de résonance du soleil sont faites vibrer au moyen de la lumière émanant de celui-ci, les cordes planétaires elles-mènes accueillent de cette façon toutes les formes qui ont déjà dans le soleil la raison de leur existence, pour les avoir reçues à travers sa lumière, au point de les rendre perceptibles dans leur caractère essentiel formel. -18- Si après cela vous considérez que la corde de la planète Saturne est tendue sur le même soleil sur lequel est tendue aussi la corde de la Terre que vous habitez, il doit aussi vous apparaître clair et évident que cette même cause qui agit sur votre Terre et sur celle-ci fait jaillir perceptiblement ses propres formes, pourquoi les mêmes effets, comme elle les produit sur la Terre, ne devraient-ils pas être produits aussi sur Saturne ? -19- Si vous par exemple, vous prenez un pianoforte à sept octaves et en même temps un de cinq, personne ne pourra nier que le pianoforte au clavier le plus large pourra certes donner des notes plus basses et plus hautes que celui au clavier réduit. Mais à l'intérieur
des limites de l'étendue du pianoforte le plus petit, celui qui est grand se trouvera aussi à l'unisson avec le premier à commencer par la note la plus grave jusqu'à la note la plus aiguë de celui-ci, naturellement à condition qu'il y ait synchronisme dans le mouvement des touches ; d'un autre côté il est aussi certain que les sons de l'instrument le plus grand auront une plus grande intensité et une plus grande résonance, et seront plus parfaits que ceux du petit instrument. -20- Comme vous voyez, maintenant nous avons vraiment déjà tout ce qu'il nous faut. Déjà au commencement J'ai dit que nous aurions donné un coup d’œil général à toute la faune de Saturne, faune vivant à l'état sauvage, avant de passer à la description en particulier des animaux domestiques de cette planète, et Je peux vous dire qu'un semblable coup d’œil général, nous l'avons déjà donné ; car cette représentation anatomique de la force productive du soleil, il était nécessaire de la faire précéder, afin que ce qui reste encore à dire n'apparaisse pas comme une divagation ou une description imposée des choses sur cette planète, au point d'amener à la conclusion que Celui qui révèle cela, avait perdu le fil de son imagination, et qu'en conséquence de cela il eut recours aux buts de l'explication pour ce que la Terre, en tant que planète, offre en fait d'apparitions formelles, en disant : Toute la faune terrestre, sauf quelques variantes, se trouve aussi sur cette planète ; mais là, tout est en proportion plus grand, plus fort, et de couleurs plus vives, par suite de la subdivision de la lumière solaire déjà plus accentuée. -21- Mais puisque nous avons fait précéder cette représentation disséquée des rapports harmoniques, personne, qui soit de cœur fidèle, ne trouvera à objecter quelque chose si je dis : De votre plus grand éléphant primitif jusqu'à la minuscule souris, tous ces animaux, sans aucune exception, vivent aussi sur la surface de Saturne ; seulement, ils sont en proportion plus grands et plus robustes, et les couleurs de leur peau varient entre le bleu azur, le vert, le rouge, le blanc et le noir, alors que les animaux sur la Terre apparaissent rarement de manière aussi marqués dans leurs couleurs, pour la raison que les rayons du soleil tombent sur la Terre à l'état d'une excessive intensité, et par conséquent sont encore peu divisés. -22- La coloration est certes un effet de la lumière ; et vos fleurs sont bien sûr ellesaussi colorées de manière très variée, mais à vos couleurs il manque toutefois toujours cette certaine vivacité et cette splendeur par lesquelles justement toutes les fleurs de Saturne apparaissent si pleines de vie ; et l'on peut en dire tout autant des couleurs que portent les animaux, comme d’ailleurs l'homme lui-même aussi. -23- Ce qui a été dit maintenant suffit donc à compléter le coup d’œil général que nous avons voulu donner aux quadrupèdes et aussi au reste du monde animal de cette planète. Par conséquent, à présent nous nous mettrons à considérer d'un peu plus près, seulement quelques animaux domestiques, que le clavier à cinq octaves du pianoforte terrestre ne contient pas.
CHAPITRE 27 -1Le délicat animal auquel nous consacrerons avant tout notre attention est la grande vache domestique des habitants de Saturne, qu'ils appellent BUKA. Vous serez probablement, tôt ou tard, amenés à la réflexion suivante : Mais pourquoi la vache doit-elle être considérée la première, et non pas au contraire le taureau ? Mais ici il ne s'agit pas de passer en revue le monde animal selon un critère scientifique, c'est-à-dire, selon cet ordre établi par les soi-lisant zoologues qui prescrivent presque toujours que le mâle doive venir d'abord et seulement ensuite la femelle ; tandis qu'ici il s'agit de faire simplement la description des animaux de cette planète selon le rang qu'ils occupent en fait d'utilité, et donc, selon leur importance. Etant donné donc que sur Saturne la vache est un animal beaucoup plus utile, et par conséquent aussi beaucoup plus important, ainsi, fidèles à notre bon ordre, nous la laisserons passer avant le mâle, c'est-à-dire, le taureau. -2Quelle espèce d'animal est donc cette Buka ? Comment se présente-t-elle, quelle taille a-t-elle et en quelles régions vit-elle ordinairement ? - La buka, ou vache de Saturne, est un animal aux proportions colossales ; toutefois, malgré son corps gigantesque, elle est extrêmement douce, et par rapport à ses dimensions elle n'a besoin que d'assez peu de fourrage, mais il lui faut par contre d'autant plus absorber d'eau. Parmi les animaux de cette planète, celui-ci est incontestablement le plus utile; et avec son lait très abondant, très savoureux et d'une couleur tendant au jaunâtre, il fournit aux habitants de Saturne un aliment absolument de premier ordre. -3Il vous intéressera certainement de savoir combien de lait une semblable vache peut fournir selon vos mesures, en une journée de Saturne il s'entend. Eh bien, étant donné qu'une journée de Saturne, dans ses rapports avec la Terre, ne diffère pas beaucoup d'une journée terrestre, il ne faut pas réellement vous étonner si je vous dis que cette vache - en supposant une traite parfaite et régulière - fournit souvent en une journée jusqu'à mille de vos *émeris* de lait. Notez bien que posséder une vache de ce genre, certainement plus d'un de vos barons de l'industrie agricole sur votre Terre aspirerait à le pouvoir, à condition naturellement qu'il ne fallut pas pour la nourrir beaucoup plus de fourrage que n'en consomme l'une des vôtres sur la Terre, et que l'animal put avoir en outre à sa disposition de l'eau à boire en quantité et à son gré. -4Mais vu le sens aigu du gain qui anime cette race, il n'y a pas de danger que leur économie spirituelle soit excessivement troublée par la possession d'une semblable vache ; par conséquent laissons cet animal comme il est, plutôt sur Saturne, mais il ne Me serait réellement pas impossible de créer aussi sur la Terre une vache du genre de celle de Saturne. -5Donc, comment se présente sur Saturne une semblable vache ? Quant à la forme, elle a une assez bonne ressemblance avec la femelle de ce que l'on appelle l'aurochs ; mais quant à la taille, il n'y a avec celle-ci pas de comparaison possible, parce qu'elle est si grande, qu'une vache terrestre ordinaire placée sur son dos, ne ferait pas meilleure figure qu'une mouche sur le dos de l'une de vos vaches. Le mâle, ou bien le taureau, est après le Mud, presque le plus grand animal de cette planète. La femelle cependant est considérablement plus petite que le mâle. -6Si une semblable vache de Saturne se trouvait ici sur votre Terre, en montant sur son dos vous pourriez balayer de l’œil sur un territoire de bien loin plus vaste que si vous
vous trouviez sur la cime de votre Plawutsch; il faut cependant observer que même sur Saturne elle-même la taille de ces vaches varie beaucoup d'une région à l'autre. L'espèce la plus grande vit en cet immense continent dont il a été fait mention déjà au début de la présente révélation. En ce continent donc une semblable vache arrive souvent à quatre cents toises de hauteur, et elle est longue environ du double de la tête à la queue. -7Son corps est soutenu par quatre pattes solides en conséquence, qui, par rapport au reste du corps sont toutefois plus courtes que celles de la vache terrestre. Entre les pattes postérieures pend une mamelle extraordinairement grande pourvue de huit trayons relativement longs, mais qui cependant sont presque toujours encore à une distance de plus de quarante toises du sol quand l'animal est sur pieds. -8Et comment est traite une vache de ce genre ? Non pas comme chez vous, parce que cet animal fournit le lait spontanément, et compte tenu de la construction spéciale de son organise, donner ou retenir le lait dépendent toujours de son instinctive volonté. Mais comment les habitants de Saturne savent-ils quand la vache veut se délivrer de son lait ? Eh bien, ils s'en aperçoivent d'abord à la turgescence de la mamelle, et puis à ce que l'animal se consacre de lui-même au repos après avoir bu habituellement une grande quantité d'eau. -9Donc quand la vache s'est ainsi couchée à terre pour se reposer, alors les habitants s'empressent de venir, munis de ces grands récipients tirés de la plante de la courge que vous connaissez déjà ; ils en placent les larges ouvertures sous les trayons, et ils y recueillent ensuite avec beaucoup de soin le lait que la vache laisse couler spontanément. Lorsque la vache est délivrée de son lait, elle le fait comprendre en émettant un formidable meuglement. Mais après avoir entendu le meuglement, les récolteurs de lait se hâtent avec leurs récipients remplis de sortir de dessous le ventre de la vache, pour que, lorsque celle-ci commence à se déplacer, quelqu'un ne soit pas heurté ou foulé par les pieds colossaux et très lourds de notre buka. -10- Lorsqu'on a à faire avec un animal qui a déjà pas mal d'années, un semblable danger n'est jamais à craindre, parce qu'il évite de faire un seul pas tant qu'il sent se trouver sous son ventre ne serait-ce même qu'une seule personne ; par contre, avec une jeune vache qui naturellement est beaucoup plus vive, il est nécessaire d'user d'une prudence beaucoup plus grande. Comment les habitants de Saturne emploient-ils ensuite ce lait qui est très exquis ? - Précisément presque comme vous ; seulement pour l'ajouter au café, ils ne l'emploient presque pas, pour la raison que ces habitants ne connaissent absolument pas d'aliments fous et extraordinairement dangereux de ce genre ; eux-aussi cuisent certes quelques-uns de leurs aliments ; mais quant à l'extrait d'un fruit carbonisé ils le fuient comme la peste étant donné qu'ils savent très bien comment tous les aliments sont sains et nourrissants plus que de toute autre manière, précisément comme Je les ai préparés dans la nature et cuits au pur feu de Mon soleil. -11- Mais ces habitants obtiennent comme vous, du lait, du beurre et du fromage, et tout cela constitue leur nourriture préférée, en particulier le fromage enduit de beurre et de miel, lequel miel par ailleurs sur Saturne n'est pas le produit d'une espèce quelconque d'abeilles, mais bien plutôt provient d'une qualité de fleurs au parfum exquis, pourvues de calices très grands, qui sont à moitié pleins d'un tel miel. Voila donc, expliqué en peu de mots, comment les habitants de Saturne emploient leur lait ; par conséquent il ne nous reste rien d'autre à voir que la couleur de la peau de cette vache. -12- Son corps est de couleur gris-bleuâtre sur le dos et sur les flancs, le ventre est complètement blanc ; les pattes, en commençant du corps, prennent progressivement une
teinte bleue toujours plus sombre, et que cela soit dit tant des pattes antérieures que de celles postérieures. La queue de cet animal est, elle aussi, de couleur plus sombre que celle du corps, et se termine avec une abondante touffe de poils de couleur rouge vermillon ; le cou est en proportion plutôt élancé que massif, et il est, à commencer par la tête, jusqu'aux pattes antérieures, pourvu d'une crinière tombant des deux côtés, elle aussi de couleur rouge vermillon si forte et si longue, que certains poils atteignent bien souvent la longueur de cinq cents toises. -13- La tête par contre, par rapport au reste du corps est plutôt petite et dépourvue de cornes. Seul le mâle a deux petites cornes faisant saillie verticalement et courbées vers l'arrière, comme celles de votre chamois. En ce qui concerne encore la tête de cette vache, quelque chose de remarquable ce sont ses deux oreilles, dont chacune mesure souvent de trente à quarante de vos toises en longueur et en correspondance environ un tiers en largeur. Ces oreilles sont parfaitement blanches ; le front de l'animal est par contre de couleur d'un bleu grisâtre clair, couleur qui se fait un peu plus sombre seulement au voisinage des yeux qui sont relativement plutôt grands. -14- Le museau de cette vache ne diffère pas de celui de votre vache terrestre ; il est nu lui-aussi et d'une teinte grisâtre. Tout le reste du corps ressemble à tous égards aux parties correspondantes d'un aurochs femelle de votre Terre, comme nous avons déjà eu l'occasion de le mentionner. -15- Vous pourriez demander si on tient peut-être cette vache dans une étable ? Certes non ! Cet animal est trop grand pour être logé comme il convient dans une étable. Mais à la place il est tenu dans un jardin vivant, qui ne consiste en rien autre qu'en un vaste morceau de prairie entouré de ce que l'on appelle les arbres-mur ; or cette vache, en dépit de ses dimensions colossales, ne peut franchir l'enceinte, car, en premier lieu elle a les pattes, en proportion avec son corps tout entier, plutôt courtes, et en second lieu, quand elle marche, elle ne peut jamais les soulever de plus de cinq toises de la terre. Mais il ne faut pas oublier qu'un pré clôturé de cette espèce, est souvent vaste comme trois fois votre patrie. -16- Et combien de vaches peut posséder un habitant de Saturne ? A cet égard, je peux vous dire que le possesseur de dix vaches de cette espèce, et en outre de deux taureaux, est estimé là déjà comme une personne très riche ; mais ordinairement le nombre reste limité à une. Or c'est là tout ce qu'il faut signaler de notable à notre attention au sujet de cet animal, et c'est pourquoi nous passerons maintenant de celui-ci à un autre animal domestique tout aussi utile, c'est-à-dire à ce que l'on appelle la chèvre bleue que nous nous réservons d'examiner plus attentivement à la prochaine occasion.
CHAPITRE 28 -1Donc, quel genre d'animal est cette chèvre bleue dont nous avons fait mention la fois précédente ? Avant tout il faut noter que, spécialement pour la partie la moins aisée de la population de cette planète, elle est un animal extrêmement utile, et même indispensable ; elle l'est ensuite, de manière tout à fait particulière, pour les habitants qui demeurent sur les montagnes, ou la grande vache que vous connaissez ne peut absolument pas trouver de conditions favorables de vie, étant donné qu'en ces régions le fourrage se fait rare, et - ce qui est le plus important encore - que l'eau n'est pas suffisante pour satisfaire l'extraordinaire soif de cet animal. -2Maintenant, pour en revenir à la chèvre bleue, comment se présente physiquement cet animal ? Peut-être comme une chèvre de votre Terre ? - Oh, absolument pas ! Mais bien plutôt comme un renne, qui sur votre Terre demeure dans les régions les plus septentrionales de vos continents ; mais il va de soi que, quant à la taille, elle est une centaine de fois plus grande que votre renne terrestre. -3Cette chèvre bleue porte entre les deux pattes postérieures une mamelle très grande par rapport au reste du corps, mamelle qui est pourvue de six trayons ; et les habitants de Saturne, dans de bonnes conditions de traite, peuvent en retirer facilement de dix à vingt *émeris* de lait par jour. -4Ce lait n'est pas aussi doux que celui de la grande vache, mais pour compenser une telle déficience, il est plus parfumé ou, comme vous avez l'habitude de dire, plus nourrissant. C'est aussi pourquoi il arrive souvent que les montagnards portent en bas dans la plaine les excellents produits de leur lait pour les échanger contre d'autres choses indispensables ; car sur cette planète il n'existe pas d'autre moyen auxiliaire dans le commerce, que le libre échange qui tourne au grand avantage des montagnards, étant donné que ces chèvres ne vivent absolument pas dans les vallées et moins encore dans les plaines ; mais par contre elles prospèrent d'autant mieux sur les hauteurs, où souvent elles vont chercher leur nourriture en creusant sous la neige avec leurs cornes incurvées vers l'avant et façonnées en forme de pelle. Car il est nécessaire que vous sachiez comment sur la planète Saturne aussi, d'une manière analogue à ce qui arrive sur la Terre, les cimes les plus hautes des montagnes sont recouvertes de neige et de glace, en particulier là où l'anneau projette son ombre. -5Cet animal est quelque peu timide de nature ; mais si les gens le traitent bien il devient si doux et si apprivoisé, qu'il court presque partout derrière les personnes comme un chien fidèle sur votre Terre ; c'est pourquoi aussi quand celles-ci sont obligées de s'éloigner temporairement de leurs maisons, elles doivent attacher à un arbre quelconque au moyen d'une corde longue et robuste tressée avec des brins d'herbe, afin de le garder. -6Les habitants de Saturne, et en particulier ceux qui demeurent sur les montagnes, ont même l'habitude de célébrer une fois l'an une fête dans le but de rendre grâces au Grand Esprit pour leur avoir accordé cet animal très utile. A cette fête il est amené une quantité de ces chèvres, choisies parmi les plus belles, et qui ont les mamelles pleines ; arrivées sur place, elles sont disposées en ligne circulaire, et l'on procède aussitôt à la traite du lait dans des récipients très beaux et soigneusement nettoyés ; puis les animaux sont guidés vers un bassin qui se trouve toujours au voisinage immédiat du lieu de la fête, bassin qui est toujours rempli de l'eau produite par l'arbre de la pluie ; et avec cette eau exquise et
extrêmement pure, ils sont abreuvés, comme pour leur montrer le cœur reconnaissant de ces habitants ; enfin ils sont laissés en liberté afin qu'ils puissent paître à leur gré avec l'herbe luxuriante des prés qui se trouvent toujours autour d'un semblable bassin de l'arbre de la pluie. -7Les participants à la fête retournent ensuite à l'endroit où les attend le lait fraîchement trait; chacun prend son récipient et le porte au temple établi exprès aux fins de cette fête, temple qui d'habitude consiste en un morceau de terrain entouré d'arbres-éventail, si ceux-ci prospèrent en ce lieu. A cet égard, il est bon de noter que sur cette planète tous les temples consacrés au service divin consistent exclusivement en arbres, parmi les plus beaux ; mais il n'est pas dit par là qu'il s'agit de plateaux de bois superposés les uns sur les autres, comme il arrive chez vous, mais bien plutôt d'arbres effectivement vivants ; seulement ceux-ci sont d'abord plantés en bon ordre les uns à côté des autres, comme chez vous les arbres de vos jardins, et ensuite régulièrement et artistiquement taillés, de sorte que, lorsqu'un semblable temple a complètement poussé, il acquiert un aspect si prodigieusement beau, et en particulier à l'époque de la floraison, que vous sur la Terre, vous n'arriverez jamais à vous en faire une idée. -8En outre il ne faut pas oublier qu'un temple de cette sorte est habituellement si grand, qu'il vous faudrait presque une journée entière de marche pour arriver de l'entrée jusqu'au portail, sacré de sortie situé du côté opposé. Donc, lorsque les participants ont tous fini de transporter dans le temple leurs récipients remplis de lait, d'abord ils rendent grâce au Grand Esprit pour le don de ce très utile animal domestique, et puis aussi pour le lait qu'il fournit. -9Après quoi l'ancien se lève au milieu d'eux et invite les assistants si dévotement rassemblés à se prosterner le visage contre terre ; Lui par contre lève le regard vers le haut et supplie le Grand Esprit de bien vouloir avoir l'obligeance de lui envoyer un esprit de la Lumière afin de manifester ce qu'il plairait au Grand Esprit qu'il soit fait par l'assemblée dans le sanctuaire ; et comme les habitants de Saturne, en particulier ceux demeurant sur les hauteurs, sont presque sans cesse en communication avec les esprits de leur Ciel, ainsi arrivet-il qu'après une telle invocation d'un ancien, apparaît à celui-ci toujours un esprit resplendissant sous forme humaine, esprit qui lui manifeste de quelle façon le peuple doit se comporter. -10- Lorsque cette manifestation s'est produite, le peuple se relève de terre et l'ancien communique alors à l'assemblée ce qu'il a appris de l'esprit. Après un semblable sermon, a lieu à nouveau une action de grâces au Grand Esprit. Quand cette cérémonie s'est ainsi déroulée au milieu de la dévotion vraiment grande de tous les présents, les participants des deux sexes s'empressent à nouveau vers leurs récipients remplis de lait et les portent à l'ancien pour qu'il y donne la bénédiction du Grand Esprit ; puis ils retournent dans le temple avec leurs récipients, mais non sans avoir auparavant embrassé l'ancien ; puis l'un invite l'autre à prendre place à côté de son propre récipient, près duquel naturellement l'invitant respectif a eu soin de placer aussi une quantité suffisante de provisions de bouche. -11- Ainsi le repas est consommé dans l'enceinte du temple au milieu de conversations instructives. Quand ensuite vers la fin de la journée les provisions sont presque épuisées, les participants à la fête rendent grâces une fois encore au Grand Esprit, et cherchent à conférer une plus grande solennité à cet acte moyennant le chant de ces oiseaux que vous connaissez déjà, à condition qu'il soit possible d'en avoir à disposition sur place; ici naturellement on parle non pas des chanteurs principaux, mais bien plutôt de ces autres de la seconde espèce. Après ce dernier remerciement, tous sortent du temple, mais bien entendu jamais par le portail sacré antérieur, mais bien plutôt par la sortie opposée destinée au peuple, alors que la première est destinée exclusivement à l'ancien et aux esprits de la Lumière.
-12- Quand les participants sont sortis du temple, ils appellent leurs chèvres qui paissent encore pacifiquement autour du bassin de l'arbre de la pluie, et celles-ci obéissent aussitôt à l'appel et suivent docilement leurs maîtres. -13- Vous voyez, c'est la fête la plus ordinaire qui est célébrée par les habitants de Saturne ; mais en ce qui concerne les fêtes principales et les solennités du service divin, tout cela vous sera fait connaître seulement quand nous en viendrons à parler vraiment des êtres humains qui peuplent cette planète. Une fois que ces habitants sont de retour en leurs demeures en compagnie de leurs animaux, ceux-ci sont traits encore une fois, et ensuite ils sont laissés en liberté ; car pour ces animaux on ne construit absolument pas d'étables, et d'un autre côté, personne n'avance jamais de prétention en fait de propriété absolue de l'un ou l'autre de ces animaux ; mais bien plutôt quand l'animal se sent la mamelle remplie, il revient toujours à la demeure de l'homme ; il est aussitôt trait et puis de nouveau laissé libre. -14- Il n'est pas nécessaire que quelqu'un se préoccupe de la fourniture de fourrage pour ces animaux, ni de leur garde ; car, en premier lieu, ils se procurent eux-mêmes le fourrage, et en second lieu ils sont si apprivoisés, doux et affectueux, qu'ils reviennent toujours en temps voulu aux demeures des hommes ; et en troisième lieu, il n'y a aucun besoin de garde, ni de surveillance, pour la raison que sur Saturne, en général, et en particulier sur les montagnes il n'y a absolument pas ce que l'on appelle des bêtes de proie. -15- En ce qui concerne les animaux non apprivoisables, vivant à l'état sauvage et de nature quelque peu hostile - animaux que l'on a déjà fait connaître - d'habitude ils vivent seulement dans des régions qui se trouvent très éloignés des grands continents habités par l'homme et sont isolés de ceux-ci par des mers, ou bien, bien que demeurant sur les continents, ils ne vivent qu'en ces territoires qui ne sont soit absolument pas habités par l'homme ou qui le sont seulement occasionnellement, ou bien qui sont visités uniquement de temps en temps par l'homme quand celui-ci y est poussé par la curiosité, par le désir d'aventures ou souvent aussi par une espèce d'avidité. -16- Cependant, sur les hauteurs, on ne trouve que de très rares fois un quelconque animal non domestique, en dehors de notre bien connu *pied pointu*, craintif et aux propriétés médicamenteuses. -17- De ce que nous avons dit jusqu'ici, vous n'aurez aucune difficulté à comprendre comment pour l'habitant de Saturne, il est facile de garder des animaux de cette espèce, et de combien d'utilité ils sont. Mais avec cela nous avons aussi dit tout ce qui mérite d'être relevé au sujet de cet animal. -18- Il ne sera certainement pas difficile de comprendre le nom que porte cette chèvre bleue, pour indiquer aussi la couleur de l'animal. Et comme vos chèvres, outre le lait savoureux, il fournit aussi une laine très fine et abondante, avec laquelle les habitants de Saturne, en particulier les montagnards, se confectionnent toutes sortes de vêtements appropriés en particulier pour saison rigoureuse, c'est-à-dire quand les pays respectifs viennent à se trouver dans la zone d'ombre de l'anneau. La laine est d'abord nettoyée, puis filée uniformément et ensuite tissée au moyen d'engins de divers genres très ingénieusement combinés. -19- Mais qu'advient-il de l'animal quand il meurt ? Eh bien, la peau est enlevée, tandis que la chair est enterrée dans une fosse profonde. Ce qui est intéressant à savoir, c'est que les habitants de Saturne ne mangent presque jamais de viande. -20- C'est tout ce que l'on peut raconter de cet animal ; et donc, la prochaine fois, nous passerons à considérer encore un autre animal domestique très intéressant.
CHAPITRE 29 -1En ce qui concerne cet animal, son nom doit être entendu par rapport à son utilité, alors que le précédent avait pris le nom de la couleur de sa peau. Cependant le nom de cet animal, vous le trouverez de vous--mêmes dès que vous aurez considéré un peu cet animal domestique très utile du point de vue de son intense activité. -2Que fait donc cet animal ? - Eh bien, il rend aux habitants de Saturne presque tous les services que sur la Terre rend à ses propres maîtres un serviteur de maison très fidèle et diligent. Bref, cet animal exécute avec une grande ponctualité et avec exactitude presque tous ces travaux qui sont par vous classés comme pesants, comme par exemple, travailler quelque champ, pourvoir la maison en eau, ramasser du bois et le transporter pour l'usage domestique aux demeures de l'homme, soigner les terrains cultivables, donner éventuellement la chasse aux animaux sauvages et nocifs, surveiller durant la nuit les lieux habités... en un mot tous les lourds travaux de semblable genre. Par conséquent, par suite de sa multiple façon de se rendre utile, cet animal est appelé par les habitants de Saturne: Le FUR, c'est-à-dire : le fidèle serviteur. -3Maintenant quel aspect a-t-il ? Eh bien, sur la Terre vivent en quantité assez grande de semblables animaux subdivisés en plusieurs classes ; mais sur la Terre, ces animaux vivent tous à l'état sauvage, tandis que sur Saturne se manifeste le cas parfaitement contraire, partout sur cette planète justement cette espèce d'animaux appartient à ceux domestiques que l'on peut facilement dresser, et qu'en peu de temps on peut exercer et employer à toutes sortes de travaux manuels. -4Donc comment s'appelle sur votre Terre cet animal qui, en vertu de sa disposition structurelle naturelle physique, pourrait lui-aussi être employé pour expédier la partie la plus lourde des travaux, dès lors que les terrestres sussent d'abord le domestiquer, et puis l'exercer aux plus divers travaux ? - Vous voyez, cette espèce d'animaux sur votre Terre est celle des singes, et en particulier la sous-espèce que vous connaissez sous le nom de Orang-outang. -5Comme déjà dit, ces animaux représentent sur Saturne l'espèce absolument la plus utile et la mieux adaptable à n'importe quel travail, parmi toutes les espèces vivant sur cette planète. Aussi en ce qui concerne leur entretien, il n'est absolument pas coûteux ; et même il ne serait pas possible de trouver de la main d’œuvre à de meilleures conditions, car ils ne demandent en échange de leurs services rien autre en dehors d'un bon traitement et de quelques fruits offerts de temps en temps par la main de l'homme. -6Mais c'est aussi tout ce que ces travailleurs prétendent de leurs maîtres. Seulement s'il arrive qu'ils soient traités par quelqu'un plusieurs fois de manière brute et dure, alors d'habitude ils se vengent, de sorte qu'ils se rendent infidèles et quittent totalement sa maison; mais si quelqu'un veut les retenir par la force, il doit s'engager dans une lutte bien rude, dont ces animaux sont presque toujours vainqueurs. Mais si l'homme qui a de quelque manière offensé l'un de ces animaux, au moment où celui-ci fait mine de vouloir s'en aller, va à sa rencontre en tenant en mains quelques fruits comme pour les lui offrir, et presque comme pour lui montrer du remords pour l'erreur commise et sa bonne volonté d'y remédier, alors l'animal offensé revient aussitôt et redevient le fidèle serviteur de son maître. -7En quoi consiste d'ordinaire la nourriture de cet utile animal domestique ? La nourriture habituelle de cet animal consiste en toutes sortes de fruits d'arbres et d'arbustes de
classe inférieure, dont les hommes se nourrissent seulement de rares fois et les plus aisés absolument pas. De ce qui est dit, vous pouvez donc facilement relever combien peu coûte à leurs maîtres cette espèce de domestiques de maison. Si vous considérez en outre, en premier lieu, que de ces fruits que l'homme ne mange pas il y en a en très grande quantité, et en second lieu que c'est lui qui fournis les habits indestructibles de ces travailleurs, ce qui est exposé ci-dessus doit vous être d'autant plus clair encore ; c'est-à-dire pour quel minime salaire les habitants de Saturne peuvent se procurer des serviteurs. -8Mais étant donné que nous avons désormais déjà pas mal parlé de l'utilité de ces animaux, nous verrons maintenant aussi quelle en est la forme. Antérieurement J'ai certes signalé que ces animaux ont une grande ressemblance avec vos singes ; cependant, vu que sur cette planète tout est d'une certaine manière mieux fermé et plus parfait, de même les fidèles serviteurs en question se présentent aussi, en ce qui concerne la structure physique, beaucoup mieux formés que votre orang-outang. Ces animaux ont donc, comparés à l'homme de Saturne, presque la même ressemblance qu'ont sur la Terre ceux que l'on appelle *les Boschimans* si on les compare à un habitant bien conformé d'Europe ou bien de la partie occidentale de l'Asie : seulement en ce qui concerne la peau, celle-ci est aussi chez les orangoutang (nous les appellerons ainsi) de Saturne est couverte d'un poil épais, à l'exception de la paume des mains et d'une partie de la face. -9Les mains et les pieds (je crois que l'on veut indiquer les bras et les jambes) sont cependant, en règle générale, beaucoup plus effilés et donc moins charnus que ceux de l'homme, lequel est sans exceptions toujours d'une structure physique parfaite ; et, sauf la tête et les parties génitales, il a le corps absolument dénué de poils et l'épiderme souvent d'une couleur blanche éblouissante qui tourne légèrement vers le rose-brun, seulement chez les habitants des plaines ; tandis que le poil de cet animal est, soit de couleur bleue claire, ou bien même gris clair ; les parties nues de cet animal ont par contre toujours une couleur rose-pâle. -10- Quelle taille a cet animal ? Il est à peu près grand comme une femme de Saturne ; mais grand comme l'homme déjà adulte, on n'en a encore jaunis vu. Ensuite, où demeure en général cet animal sur cette planète ? Si vous considérez que sur Saturne tous les continents se trouvent à une même latitude, vous ne pourrez pas vous étonner si Je vous dis que cet animal vit presque sur tous les continents, mais de préférence auprès des habitants des montagnes, et précisément partout avec de minimes variantes de forme et de couleur. -11- Toutefois celle-ci n'est pas la seule espèce de singes vivant sur Saturne ; et même il y a là partout une quantité pour vous presque innombrable de sous-espèces de tels animaux, mais qui ne sont pas toutes domestiquées et vivent par conséquent à l'état sauvage. En certains continents cette population d'animaux est si nombreuse, que souvent elle se retire en bandes vers les montagnes, où plus d'un fruit noble reste alors exposé à pas mal de dangers ; mais c'est justement dans de semblables occasions que nos gardiens rendent un service particulièrement précieux à ces habitants ; car dès qu'ils aperçoivent une horde de ce genre s'approcher de quelque côté des arbres fruitiers, ils cessent à l'instant tout autre travail, et furieusement se jettent contre ces parasites et ces hôtes indésirables. -12- Malheur alors à cet animal importun qui, ayant tardé à prendre la fuite, tombe entre les mains du gardien, mains qui ont une force extraordinaire; car il est certain qu'il y laisse la vie, en étant réduit en peu de temps en petits morceaux. Mais comme toutes les espèces mineures de ces animaux connaissent d'instinct l'accueil point amical que leur réservent les représentants de leur espèce plus grande, ces tentatives se manifestent donc très rarement, et seulement lorsqu'ils s'y sentent poussés par une extrême nécessité.
-13- Toutefois une tentative semblable n'est jamais faite de jour, mais bien plutôt toujours de nuit, et quand une région déterminée se trouve en outre plongée dans l'ombre de l'anneau ; ce qui pour les habitants de Saturne équivaut à peu près à l'hiver pour vous. Avec cela, nous serions ainsi au courant de tout ce qu'il peut être dit d'intéressant au sujet de cet animal ; et donc, nous tournerons notre attention encore vers un seul animal domestique, lequel jouit d'une grande considération auprès des habitants de Saturne, en particulier auprès de ceux qui peuplent les plaines et les vallées. -14- Mais de quel animal s'agit-il donc ? De rien autre que d'un animal semblable à votre chien domestique. En ce qui concerne son utilité, étant donné sa force physique et son agilité, il est employé en tous les travaux pour lesquels vous vous servez du cheval, exception faite uniquement que de le monter ; car un habitant de cette planète estimerait avant tout que c'est un exercice très au-dessous de sa dignité humaine que de monter avec sa noble forme sur la croupe de forme non noble d'un animal, et ensuite aussi parce que d'aucune autre manière il ne peut se déplacer avec une plus grande rapidité qu'avec ses propres jambes. -15- De cet animal il existe aussi sur Saturne des sous-espèces et des races diverses, qui varient justement selon les continents où ils vivent, et on les fait presque tous servir à un même but, à l'exception de quelques races très petites. On ne peut pas dire ces animaux réellement beaux ; leurs couleurs sont certes généralement à peu près celles des autres animaux, mais elles sont toujours plutôt pas bien définies et moins vivaces. -16- Donc, entre ceux-ci et vos chiens terrestres il n'y a presque pas d'autre différence en dehors de celle de la taille, qui dans les races les plus grandes de Saturne arrive à 500 fois celle des plus grandes races terrestres. Mais quant au reste, ils servent à assurer la garde de leurs demeures. Seulement ils n'aboient pas et à la place ils émettent une espèce de mugissement assez fort et tout à fait particulier. Naturellement, dans les races les plus grandes ce mugissement est plus fort, et plus imposant que dans les races plus petites. -17- Et ainsi, ici aussi serait épuisé tout ce que cet animal peut offrir d'intéressant. Mais si vous étiez ensuite tentés éventuellement de demander : Mais sur Saturne n'y a-t-il aucun animal qui ressemble à notre noble cheval ? Je vous réponds déjà maintenant : Oui, une espèce de chevaux existe aussi sur Saturne, mais ceux-ci ne sont en aucun lieu apprivoisés ; ils appartiennent bien plutôt partout aux classes des animaux- sauvages. -18- N'y a-t-il pas peut-être des brebis sur Saturne ? - Oh, oui ; toutefois, celles-ci ne vivent en aucun lieu à l'état domestique et sont considérées comme des animaux sauvages auxquels il est souvent donné la chasse pour s'emparer de leur peau qui est assez belle et douce ; et ainsi il y a sur cette planète une quantité d'autres espèces d'animaux encore semblables à celles qui vivent chez vous à l'état domestique, mais qui là au contraire se trouvent partout à l'état sauvage. -19- Voilà que désormais nous aurons exposé dans les grandes lignes tout ce qui concerne l'ensemble du règne animal. Il suffit que vous réveilliez seulement un peu votre imagination, et alors sur la foi de cette exposition très évidente il vous sera facile de vous représenter presque chacun des animaux décrits ici individuellement, et de les voir pour ainsi dire tels qu'ils vivent à l'état naturel sur cette planète. -20- La grande variété des espèces vous servira d'ultérieure documentation sur la merveilleuse richesse de Mes œuvres infiniment nombreuses; et étant donné que celles-ci, déjà pour une seule planète apparaissent avec tant de grande diversité et de beauté, combien plus grandioses et plus merveilleuses ne devront-elles pas être ensuite celles qui existent sur les immenses étendues d'un soleil ? Et à quelles indicibles hauteurs ne devront pas s'élever la variété et le grandiose prodigieux de Mes œuvres dans le monde de l'Esprit, en comparaison
desquelles un monde matériel naturel représente à grand-peine l'écorce extérieure morte de l'arbre comparée à la vie de l'arbre même ? Toutefois, ces choses, ainsi que beaucoup d'autres, Je vous les ferai connaître par comparaison, seulement quand nous passerons à traiter des êtres humains de Saturne ; et par conséquent en attendant nous nous arrêtons ici.
CHAPITRE 30 -1En ce qui concerne l'homme de Saturne, vous avez déjà eu l'occasion d'apprendre plus d'une chose ; toutefois plus d'une chose au sujet du seigneur de ce corps de l'univers reste encore à dire, afin que de tout l'ensemble vous puissiez vous faire un critère sur quel ordre vient à se trouver la planète elle-même et de quel esprit elle est fille. -2Cependant, comme un bon ordre est toujours et partout encore la base de tout savoir, ainsi aussi nous nous mettrons à considérer ici l'homme selon un ordre bien déterminé, et précisément en nous inspirant de celui-ci ; et d'abord nous examinerons l'homme dans son caractère essentiel, dans sa forme physique extérieure, et seulement ensuite en ce qui concerne son caractère spirituel, et avec tout ce qui rentre dans un tel domaine, comme par exemple la constitution sociale économique, son activité, et enfin aussi sa foi, et son culte divin; par conséquent, apprêtons-nous à considérer la forme physique naturelle. -3A-t-il été créé aussi sur Saturne à l'origine seulement un couple humain, ou bien naquirent-ils au contraire en divers lieux divers couples en même temps ? - A cet égard le principe appliqué sur votre Terre vaut pour toutes les planètes en général ; par conséquent tous les êtres humains encore vivants sur Saturne descendent d'un unique couple humain ; avec la seule différence que l'histoire de l'humanité de Saturne se différencie avec un million d'années terrestres d'avance par rapport au début de l'histoire de l'humanité de la Terre. -4Mais, si l'on considère qu'un homme de Saturne durant toute sa vie engendre rarement avec sa propre épouse plus de quatre enfants, ainsi il ne faut pas vous étonner si Je vous dis que cette planète, par rapport à la Terre que vous habitez, est beaucoup moins peuplée ; par conséquent même sur les grands continents, dont les uns ou les autres ont bien souvent une plus grande étendue que votre Asie, votre Afrique et votre Europe réunies, est bien rare le cas qu'il y ait entre les familles des rapports de voisinage, au point qu'un regroupement de demeures comme ce serait par exemple l'un de vos villages, constitue sur Saturne une rareté absolue. -5En outre les demeures des humains sont là si distantes les unes des autres, que pour vous, s'il vous était possible de vous transférer avec votre corps sur l'un de ces continents, vous devriez vous engager à dix et même douze jours de voyage au moins pour vous rendre d'une demeure à une autre, la plus proche. Ce grand rapport de distance entre une habitation et une autre, sur les montagnes de cette planète, on le trouve maintenu presque constamment; seulement dans les régions situées plus en bas, régions qui s'étendent le long des grands lacs et des fleuves, les demeures des hommes sont un peu plus rapprochées les unes des autres. Cependant il est à noter que là où est établie une quelconque demeure, vivent ensemble non pas quelques personnes seulement, mais bien plutôt une famille complète et nombreuse qui arrive souvent à mille et même cinq mille personnes. -6Quel aspect ont donc les habitations qui donnent abri à tant de gens, et comme on le sait, tous de grande taille ? - Car ici il convient avant tout de faire mention du fait que les habitants de Saturne aiment extrêmement avoir à leur disposition beaucoup d'espace. En ce qui concerne ces habitations, on en a parlé déjà au commencement quand on a traité du premier d'entre les arbres principaux de cette planète, arbre dont on a dit que justement c'est lui qui fournit à ces habitants la demeure la plus agréable. -7Il est donc superflu que Je vous décrive encore une fois la structure très remarquable de cet arbre extraordinairement riche en branches puissantes et larges partant du
tronc presque toujours en ligne horizontale, sur lesquelles les gens érigent leurs propres habitations. Et même il faut dire tout bonnement que sur Saturne un arbre de ce genre compte autant que sur votre Terre une petite ville, et pas vraiment des plus petites. -8Là, par le patriarche ancien, les différentes branches principales avec celles secondaires respectives sont attribuées en propriété à chaque famille, comme les maisons en ville. La différence tient uniquement en ce que là, partout un semblable arbre-ville est habité seulement par des consanguins, tandis que dans vos villes, n'importe quel étranger qui dispose de moyens peut s'acheter une maison après l'autre là où il veut. -9En y réfléchissant vous serez peut être portés à demander : Et comment font ces habitants pour se coucher, pour éviter de tomber de la branche, au cas où en dormant il leur arrive de se retourner sur leurs couchettes ? Là, voyez-vous, il y a encore moins de possibilité qu'une chose semblable arrive, qu'il ne peut y en avoir pour vous de tomber à bas du lit dès lors qu'il arrive que vous vous tourniez d'un autre côté durant votre sommeil ; parce que, en premier lieu, ces branches qui partent du tronc horizontalement sont si grosses que vous, sur chaque branche vous pourriez placer une grande maison de votre ville, et malgré cela il y aurait encore - s'agissant de vos personnes - un espace suffisant pour aller en voiture. En outre, aux bords très larges de chaque branche principale font saillie horizontalement et parallèles les unes aux autres des branches secondaires en grand nombre, branches qui sont les vraies porteuses des fruits de cet arbre; et en particulier là où elles se détachent de la branche principale, elles sont si robustes que même si une personne, en marchant, en s'arrêtant ou en se couchant, venait à se trouver au-delà des bords de la branche principale, il ne lui serait toutefois pas possible de tomber. -10- Mais admettons aussi le cas où il arrivât à quelqu'un le malheur de trop s'avancer par imprudence sur les branches secondaires, au point de tomber ou sur le terrain ou sur une branche plus basse, pas même en ce cas il n'en subirait la plus petite lésion, pour la raison que le phénomène de gravité dans une chute n'a sur cette planète absolument pas d'importance, car sur Saturne rien ne peut tomber avec cette violence, tel que cela arrive sur votre Terre. La chose s'explique en ce que la réciproque attraction entre la planète proprement dite et l'anneau abaisse considérablement le poids spécifique de chaque corps, et par conséquent aussi celui du corps humain. -11- Mais étant donné que désormais vous connaissez cela, vous pouvez à cet égard être tranquilles, et vous Me croirez certainement si Je vous dis que sur cette planète, depuis qu'elle fut habitable, jamais personne ne s'est rompu une jambe ou un bras, jamais personne ne s'est fait un quelconque trou à la tête en tombant, ce qui par contre n'est malheureusement point le cas sur votre Terre. Et maintenant on demande si cet arbre constitue la seule et unique demeure, c'est-à-dire la propre maison d'habitation de ces gens ? Oh non, car, outre ces demeures principales sur cet arbre, ces habitants disposent aussi de nombreuses maisons d'habitation qui leur servent de demeure au cours de la saison froide de l'ombre de l'anneau. -12- Les maisons sont construites de diverse façon : certaines sont faites de bois pris aux robustes branches du grand arbre-pyramide que vous connaissez déjà ; d'autres par contre sont naturelles et formées d'arbres d'espèce plus petite. Les maisons naturelles - ou vivantes sont meilleures que celles de bois ; cependant, entre une demeure vivante et l'autre, sont construites aussi celles de bois, parce que celles-ci servent en premier lieu de réserves pour garder les provisions, et en second lieu, parce que c'est exclusivement en ces maisons qu'est allumé le feu sur lequel ces habitants ont l'habitude de cuire leurs divers aliments ; il faut cependant noter que la cuisson des aliments ne se fait pas selon les règles de votre art culinaire raffiné ; mais bien plutôt le tout se limite à ce que serait pour vous de mettre au four
une pomme, de faire bouillir des poires ou bien l'une ou l'autre des herbes ou des racines assaisonnées et comestibles. -13- Voilà, c'est en cela que consiste tout l'art de la cuisine pour les habitants de Saturne. Et c'est justement en ces maisons de bois que sont gardés les produits du lait, ainsi que les jus des diverses baies de noble espèce conservés dans les récipients que vous connaissez déjà. Cependant les repas ne sont jamais pris dans les maisons de bois, et celles-ci ne sont pas non plus affectées comme dortoirs ; mais à de telles fins sont utilisées toujours exclusivement les maisons naturelles vivantes ; car pour les habitants de Saturne, il est absolument intolérable de rester sans nécessité auprès d'une maison morte. Par conséquent, ils utilisent aussi ces maisons de bois comme dépôts ou débarras, tandis que les demeures véritables doivent être totalement vivantes. -14- Il vous intéressera peut-être de savoir quelle taille a une semblable maison de bois et quel en est l'aspect ? - Je peux satisfaire immédiatement votre désir en vous disant que ces maisons sont construites à peu près comme celles de vos paysans, à la différence qu'elles n'ont pas de toit, mais qu'elles sont au-dessus complètements ouvertes ; car une maison ayant une couverture qui la séparerait du ciel, serait considérée par ces habitants comme l'une des plus grandes abominations. Ils disent que tout ce qui descend d'en haut sur le sol est une bénédiction du Ciel qui ne peut être qu'un avantage, quel que soit le monde sur lequel cela tombe ; mais étant donné qu'eux aussi se trouvent sur un monde, pourquoi donc devraient-ils se soustraire et se cacher de la bénédiction du Ciel ? Bien au contraire, étant donné qu'ils sont vivants, ils ont donc plus que d'autres besoin de la bénédiction céleste, et celle-ci leur sera d'un plus grand avantage que le sol de leur monde qui par rapport à eux, hommes, est en soi et de soi, mort ! -15- Maintenant, de ces maisons, il ne nous manquerait que de connaître leur forme et leur taille. En ce qui concerne la forme, elles sont d'ordinaire construites en forme d'étoile, à peu près comme chez vous est faite ce que vous appelez une rose des vents, quelquefois avec huit ou même seize pointes, et bien souvent même avec trente deux pointes, dont chacune sert de réservoir pour une catégorie particulière de provisions. Sur l'espace circulaire et vaste qui reste disponible au milieu, est dressé le foyer de forme ronde sur lequel est allumé le feu. On comprend de soi que la taille d'un semblable foyer est proportionnée à celle des habitants; mais comment est donc grande une maison de bois de ce genre en forme d'étoile ? -16- Eh bien, une semblable maison a, selon vos possibilités structurales humaines, une dimension telle que vous, pour parcourir avec vos jambes la distance se trouvant entre l'une et l'autre étoile, c'est-à-dire d'une pointe à l'autre, il vous faudrait une bonne heure de marche, et en avançant même d'un bon pas. Et quelle hauteur a enfin une maison de ce genre ? Elle est si haute que toute personne se trouvant debout à côté du mur, peut commodément regarder au-delà. -17- Dans la construction de ces maisons veille-t-on peut-être en quelque façon aussi à l'esthétique ? - En vérité on ne peut parler de cela, si l'on excepte que ces habitants recouvrent les arbres coupés formant la construction avec des feuillages de toutes sortes. Ce serait donc là tout ce qui concerne ces maisons ; et donc la prochaine fois nous passerons à quelque chose d'autre. -18- Etant donné qu'en considérant ces maisons de bois nous aurions fait la connaissance d'un peu plus près seulement vraiment avec les constructions relatives à l'économie domestique de ces habitants, nous nous mettrons à présent à observer aussi d'un peu plus près leurs demeures vivantes. Donc, leur forme extérieure est parfaitement ronde, et elles sont pourvues d'une seule entrée située du côté du Levant.
-19- A la construction de ces demeures sont employées seulement deux qualités d'arbres ; les plus belles et les plus luxueuses consistent en une espèce d'arbre-miroir, que vous connaissez déjà, arbres poussant très près les uns des autres ; tandis que pour celles plus modestes on recourt à une espèce noble de l'arbre-paroi que vous connaissez déjà aussi. A l'intérieur du périmètre de ces maisons le terrain est exactement aplani et nivelé, et dessus on y sème des graines desquelles pousse ensuite une herbe très courte, mais extrêmement dense ; cette herbe a l'apparence d'un velours et elle est si élastique que, même en y marchant dessus, elle se redresse immédiatement après chaque pas dans toute sa fraîcheur comme si elle n'avait jamais été foulée. -20- Dans le milieu de ces demeures est aussi construit un foyer rond, grand et relativement haut, qui lui-aussi est tout autour couvert d'herbe de l'espèce mentionnée plus haut. Mais afin que vous puissiez vous faire à peu près une idée un peu plus précise de la taille, du périmètre et de la hauteur d'un semblable foyer, Je vous dirai qu'il a toujours un diamètre correspondant à quatre hauteurs d'homme de Saturne, et qu'il est haut au point d'arriver quelque peu au-dessus du genou d'un homme, donc environ jusqu'à la moitié de la cuisse, et pour une femme par contre plus qu'à la moitié du corps. -21- Quelle fonction a vraiment ce foyer chez les habitants de Saturne ? -Précisément celle que chez vous ont vos tables ; c'est-à-dire qu'il sert à y déposer dessus les aliments et les boissons. Derrière ce foyer, à une distance d'environ deux hauteurs d'homme, se dresse une surélévation en forme de cône tronqué en sa partie supérieure, cône dont la base parfaitement ronde a certainement un diamètre de trois fois celui du foyer. Toutefois là où le cône est tronqué, la surface n'est pas plus grande qu'il ne convient pour un homme pour s'y tenir commodément debout. Cette surélévation conique arrive exactement à la hauteur d'un homme, et elle est aussi couverte de l'herbe que nous connaissons, et elle sert de chaire au patriarche. -22- Celui-ci, qui est le membre ancien de toute une famille, y monte dessus tous les jours avant le coucher du soleil ; et ensuite la famille entière se rassemble autour pour apprendre de la bouche du patriarche la volonté du Grand Esprit pour toute la nuit et pour le jour suivant. -23- Quels autres aménagements existent encore dans une semblable demeure ? Vers le fond et exactement en face du lever du soleil, se dresse un autre terre-plein de forme circulaire, et recouvert toujours de la même espèce d'herbe ; cependant il est de bien loin moins haut que la chaire érigée presque au centre de la demeure, et il est par contre d'autant plus vaste et en même temps pourvu de cavités en éventail. Ce troisième terre-plein sert de couchette commune ou de lieu de repos pour les habitants et les membres de la famille de stature considérable. -24- Quand ils vont se coucher, ils munissent leur cavité respective de doux coussins du côté de la tête, et puis ils s'y allongent à l'intérieur chacun pour soi. Les hommes occupent les places qui sont tournées vers l'Orient, et les femmes celles tournées vers l'Occident; quand enfin ils se sont couchés, ils forment avec leur couchette par rapport au plan du terrain une inclinaison de trente degrés ; alors ils s'endorment et en cette position reposent presque jusqu'à l'aube. -25- A cet égard il convient de noter qu'ils s'aperçoivent quand il fait jour, mais si la localité où ils se trouvent reste à l'intérieur de la zone d'ombre projetée par l'anneau, parce que celui-ci n'arrive jamais à couvrir assez le soleil pour que l'on ne puisse même pas en voir un petit bout ; et même s'il arrive de temps en temps, là où l'anneau apparaît parfois plus large, que le soleil en soit complètement couvert, cette éclipse totale dure au maximum une demi-
journée ; après quoi le bord du disque solaire, même si ce n'est seulement qu'un peu, devient à nouveau immédiatement visible. -26- Eh bien, c'est là tout ce que l'on peut dire de la disposition intérieure d'une semblable maison qui sert de demeure aux habitants de Saturne durant les périodes de l'ombre. Ensuite, quelle étendue a une demeure de ce genre par rapport à la maison-ferme ? En prenant pour base le diamètre, c'est une bonne fois et demie plus grand. Est-ce que dans une semblable maison habitent tous les occupants de l'arbre gigantesque que nous connaissons déjà ? - Oh non, mais bien plutôt une seule famille composée du père, de la mère, des enfants et petits-enfants en première lignée, ainsi qu'ils vivent ensemble sur une branche de l'arbre dans les périodes sans ombre. -27- Donc, autant il y a de branches habitées dans un semblable arbre, autant il se trouve autour du même arbre de demeures du genre décrit. Un semblable regroupement de demeures autour d'un arbre de cette espèce occupe souvent une superficie plus grande que celle de votre patrie. Mais comme vous le savez déjà, ces demeures sont toutefois très éloignées l'une de l'autre, de sorte que, pour parcourir la distance entre ces regroupements, de l'une à l'autre maison, il vous faudrait de nombreuses journées de marche, étant considéré que, naturellement, tout autour d'une semblable demeure à l'usage de plusieurs familles il y a seulement les terrains cultivés et les pâturages pour les animaux domestiques que vous connaissez déjà, pâturages et terrains qui doivent avoir une étendue suffisamment grande pour produire tous les besoins indispensables à l'entretien de nos habitants de Saturne, ainsi que de leurs nombreux animaux domestiques. -28- En outre il convient de tenir compte aussi des bois bien souvent très étendus des arbres-entonnoir qui se trouvent en particulier aux confins des possessions de ces grosses communautés, et dans les vastes plaines, en particulier de la partie septentrionale des grands lacs ; il y a ensuite les bois des arbres-pyramides qui souvent occupent de deux à trois milles carrés de surface, sans parler des autres immenses étendues couvertes d'arbustes de grosse espèce. -29- Nous serions ainsi au courant de la façon dont les habitants de Saturne sont organisés en ce qui concerne l'habitation, en particulier ceux établis dans les régions les plus hautes, mais nous ne connaissons pas encore leur organisation familiale ; mais étant considéré que déjà en ce qui concerne les habitations, nos observations ont commencé par celles qui se trouvent plutôt en régions montagneuses, de même ici, avant de passer aux habitants des plaines, nous nous réservons d'examiner la prochaine fois les institutions familiales des montagnards. Pour aujourd'hui donc, nous mettons un point.
CHAPITRE 31 -1Qui en ces lieux est donc le doyen ou le chef suprême d'une semblable famille ou, mieux dit, d'un semblable regroupement de familles parfois très nombreuses ? Ici et là il arrive parfois qu'un patriarche soit encore en vie, un patriarche au vrai sens du mot ; en ce cas, tant qu'il vit, il fait fonction de chef et en même temps de prêtre de la collectivité familiale. Quand il vient à mourir, alors succède le second cas c'est-à-dire, celui où le fils le plus âgé du patriarche est immédiatement élu comme chef avec juridiction tant en ligne civile qu'en celle spirituelle. -2Si celui-ci meurt aussi, alors que l'un ou l'autre de ses frères est encore en vie, la dignité de chef passe toujours au plus ancien d'entre eux. Celui-là aussi mort, la direction de la famille est assurée par le mâle premier-né de ce frère qui, immédiatement après le patriarche, avait pris le gouvernement de la famille en tant que membre ancien. -3Parfois, si la famille est trop nombreuse, cela arrive seulement après au cinquième degré ; mais si une famille est moins nombreuse, un tel passage de la dignité de chef de famille se prolonge jusqu'au septième et parfois même jusqu'au dixième degré ; cependant après il arrive une division, de sorte que deux ou trois des anciens déposent cette charge de chef suprême dans les mains de ceux qui, après eux, se trouvent être les plus anciens ; cependant les deux moins anciens rassemblent au contraire les membres de leurs propres familles, prennent en consigne le bagage qui leur est fourni par le frère qui reste, et ensuite avec leurs affaires s'en vont ou à droite ou à gauche en quête d'un arbre semblable encore inhabité, pour s'y établir. -4Une fois qu'ils l'ont trouvé, ils adressent ensemble, assistés par l'ancien parmi eux, une prière de remerciement au Grand Esprit, et L'invoquent afin qu'il Lui plaise de bénir la nouvelle demeure vivante et de maintenir sur celle-ci et sur eux-mêmes Sa Grâce. Après cette prière en commun, l'ancien se retire de plusieurs pas et fait oraison lui seul en suppliant le Grand Esprit de permettre que, comme déjà accordé à ses pères, vienne sur lui un esprit de la Lumière, pour lui annoncer toujours la volonté du Grand Esprit. -5En même temps tous les autres membres de la famille se prosternent la face contre terre, et l'ancien ne renonce pas à ses invocations tant que le Grand Esprit ne lui a pas envoyé l'esprit de la Lanière désiré. Et quand l'esprit de la Lumière s'est présenté à l'ancien, celui-ci le prie de bien vouloir au Nom du Grand Esprit donner la bénédiction au nouvel arbre encore non habité, et de bien vouloir le conduire d'abord lui-même à cet arbre et de lui indiquer la place où lui, en tant que chef et guide de la famille, il aura à prendre demeure. -6Ceci arrivé, l'ancien, en présence de l'esprit exprime au Grand Esprit sa propre gratitude pour l'immense grâce obtenue ; mais aussitôt ensuite il se fait reconduire par l'esprit de la Lumière jusqu'à cet endroit où ce dernier lui était apparu; et là l'esprit prend congé de l'ancien après en avoir fortifié la volonté. Quand ensuite l'ancien ainsi fortifié dans son propre esprit revient vers la famille encore prosternée, il lance un fort appel; alors aussitôt tous se relèvent de terre et louent et glorifient le Grand Esprit pour leur avoir fait l'honneur d'une semblable grâce, c'est-à-dire de leur avoir donné un vrai patriarche illuminé. -7Cette action de grâces et de louanges ainsi terminée, l'ancien assigne alors immédiatement à chaque père de famille sa propre branche, dont il est pris aussitôt possession d'un cœur reconnaissant ; la branche ainsi occupée est sans autre nettoyée avec soin et aménagée en habitation.
-8De semblables occasions sur cette planète se présentent certes plutôt rarement; toutefois pour les habitants intéressés la vie prend une allure beaucoup plus joyeuse et vive. Quand l'arbre est complètement habité, il manque ensuite les demeures vivantes et les dépôts pour les provisions ; cependant la première journée n'est pas consacrée au travail mais on l'emploie à tenir conseil pour étudier la situation et concrétiser les projets, naturellement toujours sous la constante direction de l'ancien, car sans son approbation personne ne fait un pas. -9A l'aube du jour suivant cependant, on passe sans retard aux mesures ; les morceaux de terrain destinés aux constructions sont aussitôt bénits par l'ancien, et ensuite on procède en bon ordre aux semailles de ces arbres qui sont aptes à former les demeures vivantes. Ce travail achevé - travail qui en général exige rarement plus d'une journée - le jour suivant, on met la main en quelque bois voisin à la coupe du bois nécessaire pour la construction des dépôts à provisions ; en quelle occasion les animaux domestiques que vous connaissez déjà rendent des services considérables ; c'est-à-dire qu'à la coupe du bois concourt cet animal à demi sauvage et à demi apprivoisé dont nous avons déjà parlé, et qui, d'un coup de son formidable bec coupe des branches même très grosses de l'arbre-pyramide. -10- Au transport du bois pourvoient ensuite les serviteurs de maison saturniens que nous connaissons, qui en assurent rapidement le transport sur le lieu de la construction selon les indications des habitants. Ainsi rassemblés au cours de quelques jours les troncs nécessaires et à l'emplacement voulu, ceux-ci sont rapidement dépouillés et travaillés, et l'on procède ensuite sans autre à la construction des édifices destinés à servir de réserves. Quand ce travail est aussi terminé, on met la main à planter les remises et les jardins dont on a déjà parlé, et l'on choisit l'un ou l'autre arbre de la pluie autour duquel est élevée une digue passablement large dans le but d'empêcher la dispersion de l'eau suintant de l'arbre, eau qui est ainsi obligée de former un étang. -11- S'il y a des sources de montagnes à disposition, on construit les aqueducs dont nous avons dit un mot et qui servent à amener l'eau jusqu'au voisinage immédiat de la demeure principale. Pour la construction de ces aqueducs on se sert des coquilles des escargots-perche que vous connaissez déjà, ou bien, à défaut de celles-ci, on emploie ces fruits de l'arbre-entonnoir, qui sont aussi déjà connus de vous. Ces travaux à peine achevés, on procède à la mesure et à la destination des autres terrains. -12- Si, durant ces opérations, on constate que l'un ou l'autre bois d'arbres-entonnoir, pour être par hasard trop proche se trouve être un obstacle à la distribution régulière du terrain, on le coupe autant qu'il convient pour que le fonds ait l'étendue conforme aux projets; et aussi dans une semblable occasion, aux animaux que nous connaissons, il revient à nouveau un travail assez important. Le bois ainsi obtenu par la coupe des arbres est transporté et empilé sur les bords des propriétés appartenant à chaque famille pour qu'il y sèche ; et ensuite il est employé comme bois à brûler. -13- Ce travail ainsi achevé, les terrains sont bénits par l'ancien et ensuite il est aussitôt procédé aux semailles de toutes sortes de plantes à fruits, semailles qui sur cette planète sont communément faites seulement une fois chaque période de dix ans. Cependant, là où les terrains sont plus gras, un seul ensemencement est suffisant pour toujours, parce que les racines de toute la végétation de Saturne ne meurent pas si facilement, mais continuent bien plutôt à se maintenir vivantes dans le sol comme il arrive chez vous pour les racines de divers arbustes et de plantes à bulbe. Quand ce travail - le dernier de caractère domestique économique - est ainsi terminé, toute la communauté rend à nouveau grâces au Grand Esprit et Lui adresse aussi la prière très fervente de bien vouloir accorder son agrément au développement de toutes les graines et au bon résultat, en général, de tous les travaux.
-14- Sitôt après que de tels actes de grâces et une telle prière sont accomplis, il est procédé au travail le plus important d'entre tous pour les habitants de Saturne, c'est-à-dire à la plantation d'un temple, dans lequel seulement il est permis d'offrir au Grand Esprit un sacrifice qui Lui soit agréable. Mais en vérité c'est seulement le chef de la communauté qui est chargé d'un semblable travail, et avec lui les deux plus anciens après lui, tandis qu'aucun autre n'est autorisé à participer à un travail sacré de ce genre. Donc, comment se déroule cette cérémonie? -15- Eh bien voici : En cette occasion aussi l'ancien se rend à l'endroit où pour la première fois lui était apparu l'esprit de la Lumière ; et là, il adresse de ferventes suppliques au Grand Esprit afin qu'il plaise à Celui-ci de lui indiquer au moyen de l'esprit de la Lumière le lieu où il lui serait agréable que Lui fut édifié un temple. Si l'ancien, après avoir prié suffisamment longtemps, ne voit apparaître aucun esprit, alors, à la construction du temple est affecté ce lieu où justement l'esprit lui était apparu la première fois; si par contre, comme il arrive le plus souvent, l'esprit se manifeste, alors, ou bien celui-ci conduit l'ancien à un lieu où devra se dresser le temple, ou bien il apparaît à l'ancien tout bonnement déjà sur l'emplacement destiné. -16- Alors l'ancien se rend aussitôt à cet emplacement où l'esprit l'attend, et ce dernier lui montre le vrai tracé du temple ; mais au point précis où l'esprit est en attente, est placée une marque indiquant où devra se dresser ce rehaussement de terrain à l'intérieur du périmètre du temple, dont en premier lieu il reviendra à l'ancien la charge de faire fonction de maître de la famille ; mais en même temps il est aussi indiqué à l'ancien un emplacement vers la partie reculée et sacrée du temple, où lui, après l'invocation voulue au Grand Esprit, apprendra toujours Sa volonté au moyen de ce même esprit qui lui aura indiqué un semblable emplacement dans le temple. -17- Une fois ces instructions données, l'esprit se rend immédiatement invisible; l'ancien fait ensuite un signe qui est passé, pour ainsi dire, d'homme à homme aux membres de la communauté qui sont disposés en chaîne à une certaine distance l'un de l'autre jusqu'à l'arbre affecté à l'habitation, signe au moyen duquel il fait part d'avoir obtenu du Grand Esprit la permission d'ériger un temple en ce lieu; et puis il les invite tous à s'unir à lui dans un remerciement au Grand Esprit pour une telle grâce, en y ajoutant aussi la prière pour le développement le plus rapide possible des semailles du temple, afin que le Grand Esprit puisse dans le temple-même les trouver toujours dignes d'apprendre de Lui Sa sainte volonté. -18- Cette cérémonie étant ainsi accomplie avec une grande solennité, l'ancien appelle à lui les deux ou trois anciens après lui, et il distribue entre eux les graines sur lesquelles l'esprit de la Lumière a au préalable soufflé dessus ; ceux-ci se mettent ensuite sans retard à l'ouvrage, et, avec une grande dévotion et la plus grande confiance, ils déposent dans le terrain les graines des espèces d'arbres les plus nobles et les plus belles. Les deux ou trois qu'il peut y avoir après 1'ancien, plantent la partie antérieure du temple qui est destinée au peuple, tandis que le chef ancien assure la semence du sanctuaire du temple qui généralement est constitué d'arbres-auréole ; par contre les autres parties du temple sont d'habitude formées exclusivement d'arbres-miroir. -19- Cependant, extérieurement à ce temple de forme ovale-elliptique, est élevée à la distance voulue tout autour comme une muraille circulaire formée d'arbres-paroi de l'espèce la plus noble qui se distingue de celle ordinaire en ce que, comme vous le savez déjà, l'écorce de cette derrière espèce se présente à l’œil comme si elle était faite d'or très brillant. Tandis que l'espèce la plus noble apparaît au contraire, comme si vous placiez divers arcs-en-ciel l'un sur l'autre et que les couleurs eussent en même temps un éclat métallique très prononcé. Les feuilles qui poussent sur l'arête supérieure de l'arbre ont presque la forme de celles de votre
aloès, avec la différence seulement que - comme toute autre chose sur cette planète - elles sont eu proportion beaucoup plus grandes ; et même, souvent on rencontre des feuilles d'une ampleur telle, que vous pourriez y placer commodément dessus un régiment tout entier de vos soldats. La couleur des feuilles est parfaitement blanche ; les fleurs par contre sont tout à fait semblables à celles de l'arbre-paroi ordinaire, seulement elles ont un aspect plus délicat et émanent une odeur très agréable. -20- Et vous voyez, quand nos constructeurs du temple ont terminé un tel travail, alors ils remercient à nouveau le Grand Esprit pour la force et le bon-sens avec lesquels il leur a été donné de commencer la construction; et puis ils Le prient de bien vouloir accorder Sa puissante aide afin que le temple puisse naître à partir des graines confiées au sol, au complet, dans le temps le plus court possible. Après une telle action de grâces et une telle prière, avec les marques de la plus grande déférence, ils quittent le lieu où ils ont soigné la plantation du temple, et, en marchant à reculons ils s'éloignent jusqu'à plus de la moitié de la distance qui les sépare de l'arbre fixé pour la demeure; ensuite seulement, après avoir fait une profonde inclination, ils se tournent et font directement retour auprès de leurs familles. -21- Arrivés près de leur demeure, ils invitent tous les autres à se relever de terre et à monter, chaque famille pour soi, sur la branche respective qui leur a été assignée comme habitation; et là aussitôt tous se restaurent après que les aliments et les boissons aient été bénits par l'ancien, car, tant que dure l'opération de semailles du temple, qui, pour les habitants de Saturne, constitue quelque chose de suprêmement solennel et édifiant, personne ne touche ni nourriture ni boissons. -22- Le repas terminé, repas qui d'habitude dans des occasions semblables, de même que dans d'autres journées spéciales qualifiées comme spirituelles, sont toujours consommés seulement le soir, l'ancien exhorte tous les membres de la communauté à bien vouloir unir intimement leur volonté avec la volonté du Grand Esprit tel qu'Il la leur manifeste, et à exclure de leur volonté n'importe quelle autre chose qui ne soit pas le développement le plus merveilleusement rapide possible des semailles du temple. -23- A une telle exhortation, chaque habitant de la communauté tend au plus haut degré possible sa propre volonté, et avec celle-ci engraisse pour ainsi dire le terrain où le temple est semé ; et vous pouvez Me croire si Je vous dis qu'en de semblables occasions les choses prospèrent toujours de manière vraiment prodigieuse, et même tant, que souvent déjà le matin suivant un semblable temple planté un jour auparavant, apparaît déjà totalement achevé et en toute sa magnificence, certes pour vous inconcevable. -24- Mais quand les membres de la grande famille se trouvent devant le spectacle grandiose du nouveau temple, alors leur pieux enthousiasme semble ne plus vouloir finir; et de telles manifestations de joie, de louange et de glorification au Grand Esprit se prolongent souvent pendant plusieurs jours et plusieurs nuits. -25- Mais pour quelles raisons ces habitants de Saturne se sentent-ils envahis de tant d'allégresse en constatant la rapide croissance et la parfaite réussite de leur temple ? Les raisons sont vraiment multiples ; La première et la principale est que de cela ils puisent la Conviction que le Grand Esprit est avec eux dans la nouvelle demeure comme Il l'était avant dans la vieille ; une seconde raison est qu'avec cela ils ont à nouveau un lieu où il leur est permis de s'approcher du Grand Esprit au moyen de leur ancien, une troisième raison est que justement, moyennant un semblable temple, la famille nouvellement constituée apparaît ainsi manifesteront agréable au Grand Esprit; et une autre raison encore, qui cependant rejoint la troisième, est que la nouvelle communauté reconnaît à cela que leur demeure est aussi une possession légitime et donc aussi durable ; car si le temple ne prospérait pas aussi rapidement, ce serait un signe indiquant que la propriété ne serait pas estimé légitime, et donc on devrait
toujours se ternir prêts à restituer les terrains occupés et à chercher une autre demeure, dès lors que quelqu'un vint et déclarât que ces terrains constituant déjà la propriété d'un autre. -26- Mais dès l'instant où le temple existe dans son intégralité, un éventuel propriétaire d'avant perd immédiatement tout droit sur ces mêmes terrains, et même, à la vue d'un semblable temple jailli récemment, il n'oserait même pas avancer la plus minime prétention sur ces propriétés, et pas non plus en exiger la restitution; car l'une des principales lois en vigueur parmi les habitants de Saturne, dit ceci : -27- *Ce que le Grand Esprit a donné à quelqu'un, cela appartient totalement à celui qui l'a reçu du Grand Esprit ; et aucun être du Ciel, ni aucun esprit de la Lumière, ni aucune créature humaine du monde n'a plus le droit de lui contester la possession du don reçu de la Partie Suprême. Pour qui se rendrait coupable d'une semblable chose, il conviendrait qu'il fût immédiatement chassé et confiné en ces régions là où ne l'attendent rien d'autre que la glace éternelle et la neige éternelle.* -28- Cette loi particulière est à la connaissance de chaque habitant de Saturne qui n'attribue, si l'on peut dire, à aucune autre loi autant de respect qu'à celle-ci ; raison pour laquelle aussi, en particulier parmi les montagnards, il est exclu que puissent naître des litiges pour des questions de propriété, étant donné qu'entre eux est continuellement observé l'ordre le plus parfait. En ce qui concerne les rapports de voisinage, jamais personne ne songe à tracer des limites ; et par conséquent si quelqu'un arrive, il se trouve absolument à son aise comme dans sa propre maison ; car chaque être humain porte déjà en lui le témoignage du Grand Esprit, et c'est là un passeport suffisant pour voyager sur cette grandiose planète toute entière. -29- Donc, dès lors qu'il arrive que quelque continent se trouve peuplé à l'excès, alors plusieurs familles se rassemblent, et ainsi en groupe se transfèrent sur un autre continent en se servant des bateaux que vous connaissez déjà. Lorsqu'ils y sont arrivés, ils vont aussitôt à la recherche de quelque lieu approprié ; et une fois qu'ils l'ont trouvé, il leur revient immédiatement le droit d'y rester durant une année entière et d'en utiliser ce que produit le sol. -30- Si la croissance du temple progresse, soit de la manière merveilleuse, comme précédemment décrit, soit progressivement de manière naturelle, à condition toutefois que la famille immigrée puisse montrer lors d'une éventuelle requête d'un envoyé des indigènes, le site où a été semé le temple, et si l'envoyé lui-même peut constater que les arbres qui constituent le temple sont en plein développement; alors elle est sans autre reconnue comme légitime propriétaire des terrains qu'elle a occupés ; et le précédent possesseur ne peut plus revendiquer aucun droit sur ce qui est désormais passé en propriété aux nouveaux arrivés, à l'exception de l'amitié qui n'est absolument jamais refusée à l'autre par un habitant de Saturne. -31- Ceci a pour conséquence ensuite que l'un fait avec l'autre cause commune, et, comme dans notre cas, alors l'ancien des nouveaux venus, parle ainsi à l'indigène: "O frère dans le Grand Esprit, regarde, comme tes yeux me voient et n'aperçoivent en moi rien que je voulusse leur tenir caché de ma personne, ainsi même ton cœur ne trouvera jamais dans le mien, rien qui voulût te refuser quelque chose dont tu pourrais avoir besoin, étant donné que tu es mon frère dans notre Grand Esprit". Après quoi ils s'embrassent, et cette accolade reste comme une permanente attestation de la parfaite communauté de biens des deux familles respectives. -32- Puis l'envoyé invite aussitôt toute la famille des nouveaux arrivés à accepter une hospitalité provisoire dans sa propre habitation, tant que la nouvelle propriété n'est pas à tous égards prête à l'accueillir ; alors, l'invitation est acceptée d'un cœur reconnaissant, et les nouveaux arrivés suivent sans retard l'envoyé - qui d'habitude est lui-même un ancien jusqu'à la demeure de celui-ci.
-33- Un semblable évènement est ensuite toujours conjugué avec de grandes manifestations de joie ; car pour les humains de Saturne, il n'existe presque rien de plus grand et de plus édifiant que de se rencontrer sur un autre continent avec un frère dans le Grand Esprit ; car c'est ainsi que sur cette planète les karmas ont l'habitude de s'appeler réciproquement. Mais s'il arrive que le nouvel arrivé, à l'occasion de la visite faite à la demeure de l'autre ancien, se soit convaincu que les conditions de ce dernier sont telles qu'elles peuvent lui permettre de vivre seulement misérablement, alors il lui offre immédiatement ses services pour défricher les terrains et agrandir les cultures; offre qui est toujours accueillie amicalement et d'un cœur reconnaissant, et qui est aussi partagée de cœur. -34- Si le nouvel arrivé lui dit au contraire: "O mon frère dans le Grand Esprit, je me suis désormais persuadé que même tes conditions ne sont point florissantes ; il est donc dans mon intention de remettre en ta possession ta propriété d'avant et de chercher demeure pour moi en quelque autre lieu."- A cette proposition l'autre ancien réplique ainsi: "O mon frère dans le Grand Esprit, je préfère abandonner ma propre vie et me souhaiter de ne pas exister, plutôt que de te voir laisser la place qu'avec l'agrément du Grand Esprit tu as occupée; tu sais déjà que ce n'est pas le terrain, mais bien uniquement le Grand Esprit, Celui qui fournit les moyens pour vivre. Et donc les terrains sur lesquels nous nous trouvons sont assez vastes pour entretenir dix et même plus de nos familles. -35- Quand ensuite, comme il arrive d'ordinaire, le nouvel arrivé abandonne son projet, alors l'évènement est à nouveau fêté au milieu de grandes manifestations de joie, et l'habitant indigène prend le plus grand soin possible à lier pour toujours à son propre sœur le nouvel arrivé, frère dans le Grand Esprit. Et pour aujourd'hui, que soit suffisant ce qui a été dit ; la prochaine fois nous poursuivrons notre examen sur les institutions sociales et familiales des habitants des montagnes.
CHAPITRE 32 -1Après avoir constaté que sur cette planète, et en particulier chez les habitants des montagnes, il n'existe absolument aucune délimitation restreinte de la propriété, et comment le visage d'un homme est plus que suffisant pour tous les habitants de Saturne pour témoigner que de la part du Grand Esprit lui est conféré indiscutablement le droit de prendre possession, en n'importe quel point de toute la planète, de ce qu'il lui faut pour satisfaire ses propres besoins, nous tournerons à nouveau notre attention vers la famille qui s'est constituée en unité séparée sous la conduite du nouvel ancien. -2Nous avons assisté à la plantation du temple, et nous avons aussi constaté la possibilité qu'à la suite de telles semailles sanctifiées jaillissent du terrain de cette planète le temple lui-même avec une rapidité prodigieuse, de même que nous avons vu comment les habitants procèdent à la construction de tous leurs autres édifices. Nous aurons ainsi eu le loisir d'assister d'une manière détaillée à la naissance d'une nouvelle colonie, et il ne nous manquerait plus que de connaître sa *constitution sociale*; tandis que chez vous elle est appelée *constitution politique*, ici, il n'est pas possible de l'appeler ainsi, parce qu'elle ne se base pas sur le mensonge, comme chez vous, mais bien plutôt sur la vérité. En quoi donc consiste-t-elle ? -3Eh bien là, une telle constitution sociale est extrêmement concise, et on peut la résumer en quelques mots ; car sa règle fondamentale consiste uniquement en ce qu'il n'est permis à aucun membre de la communauté familiale de faire quelque chose - et effectivement il ne le fait jamais - sans la volonté du Grand Esprit, volonté qui lui est annoncée par le chef, l'ancien de la famille. -4Mais, quand quelqu'un a appris la volonté du Grand Esprit par la bouche de l'ancien, il ne doit pas mettre la main à un travail quel qu'il soit, avant d'avoir adressé au Grand Esprit les plus fervents remerciements pour lui avoir manifesté Sa volonté, et après le remerciement, avant qu'il n'ait prié à nouveau le Gand Esprit pour la bonne réussite de l'œuvre à entreprendre. -5On peut donc peut-être appeler *constitution politique* cette règle fondamentale qui donne le ton à toute la *constitution sociale* - ainsi la nommerons-nous des habitants de Saturne. Sur cette maxime chacun conforme son mode d'action, et ensuite on ne se soucie absolument de rien autre sinon que de voir comment, l’œuvre accomplie, on pourra présenter au Grand Esprit ses propres remerciements. -6Vous pouvez Me croire à la lettre si je vous dis que cette courte maxime inclue en elle toute chose possible et imaginable; car celui qui œuvre selon *Ma Volonté*, celui-là œuvre toujours bien ; c'est pourquoi aussi, il n'existe là ni commentaires, ni règles explicatives en relation avec cette succincte loi sociale que, même un petit enfant peut bien se graver dans l'esprit après l'avoir entendue au maximum trois fois ; cette courte loi n'est pas non plus accompagnée d'un quelconque code pénal aux fins d'une correction sociale, mais bien plutôt son expression est : *J'agis selon la volonté connue du Grand Esprit*; c'est, pour chaque habitant de Saturne, le document le plus valide fournissant la preuve de la légitimité de sa façon d'agir, de sorte qu'il n'est cause de préjudice pour personne. -7Mais s'il arrive toutefois - comme c'est certainement très rarement le cas - que quelqu'un des plaines monte chez les habitants des montagnes, et se consacre là en quelque lieu à des affaires à son propre avantage, sans avoir consulté auparavant l'ancien de l'une ou
l'autre famille, et que le chef de famille vienne directement à lui, et lui demande : *Par la volonté de qui es-tu en train de faire cela ?*. Et si celui qui est interrogé répond : *J'agis selon la volonté du Grand Esprit*, il est laissé en paix à son travail. Mais si la réponse est : *J'ai senti le besoin d'entreprendre ceci ou cela pour en tirer un profit*, alors l'ancien l'avertit aussitôt en lui disant : *Ecoute, ô mon frère dans le Grand Esprit ! Comment est-il donc possible qu'au-delà du besoin qui se détermine uniquement dans la volonté du Grand Esprit, tu puisses avoir un autre besoin encore qui soit quelque chose de différent et de séparé du besoin selon la volonté du Grand-Esprit ? -8*C'est pourquoi, en vrai frère pour toi dans le Grand Esprit, comme je me sens, je te conseille : Abandonne immédiatement l’œuvre entreprise, afin que le malheur ne te surprenne pas tandis que tu seras en train d'y donner exécution. Si tu es dans le besoin et n'as pas de demeure, eh bien, notre habitation est assez spacieuse pour accueillir non seulement toi, mais bien encore cent autres de tes pairs. Mais si tu t'es attelé à ce travail, poussé par quelque secret intérêt pour toi, prosterne-toi immédiatement sur la face, et, repenti, supplie avec toute ta ferveur le Grand Esprit afin qu'Il t'épargne la punition que tu as méritée ; car le Grand Esprit est immensément bon avec les bons, mais aussi extrêmement sévère et juste avec qui œuvre contre Sa volonté sainte par-dessus tout !* -9Sur un semblable avertissement, ordinairement l'étranger de cette espèce agissant de sa propre initiative, abandonne aussitôt le travail commencé ; mais s'il avait l'intention de s'y opposer, l'ancien qui l'a averti se limite à lui dire : *Alors, fais comme tu veux ; pour ma part cela t'est accordé pour tous les temps, afin que ton péché ne paraisse pas plus grave encore aux yeux du Grand Esprit ; mais fais bien attention que la punition ne t'atteigne pas tandis que tu exécutes ton œuvre !*- Après quoi il lui tend la main et s'éloigne, le laissant continuer son travail. -10- Mais arrivé chez lui que fait l'ancien ? Certains d'entre vous pourront peut-être croire que sa première pensée sera celle d'envoyer un groupe de ses gens, armés et pourvus de cordes, comme on a l'habitude chez vous, pour faire prisonnier le criminel ou bien le voleur, et le traduire devant des juges pour être puni selon la rigueur des lois ? Oh, non, voyez-vous; auprès des habitants de cette planète ce n'est point le cas, et encore moins quand il s'agit des habitants des montagnes. -11- Dans une semblable occasion, au contraire, l'ancien avertit immédiatement tous les membres de la famille de ce qui est en train d'arriver, et puis il les invite à s'unir tous dans une très fervente prière au Grand Esprit pour que Celui-ci veuille user de grâce et de miséricorde envers ce frère qui s'est fourvoyé en ayant voulu agir contre Sa volonté, et pour qu'il Lui plaise de le ramener à cette vraie compréhension selon laquelle l'homme n'a besoin de rien autre que de la volonté du Grand Esprit. Quand toute la famille a ainsi prié avec ferveur pendant quelque temps, l'ancien se recueille ensuite et invoque l'esprit de la Lumière qui est toujours le conseiller de la famille, afin qu'il lui fasse connaître la volonté du Grand Esprit pour le bien durable du respectif frère égaré. -12- Dans des cas semblables l'esprit indique aussi toujours à l'ancien quelle attitude il faut avoir. Si le transgresseur est un égoïste intéressé très endurci et entêté, l'ancien est de règle chargé de faire prisonnier l'intrus et de le ramener sur la hauteur où se trouve la demeure de la famille. Là, il lui est offert avant tout à manger et à boire ; puis on commence à l'instruire dans la connaissance du Grand Esprit, et une telle instruction dure sept jours. Passé les sept jours, il est conduit dans le temple où il est tenu de promettre solennellement du plus profond de son être une obéissance pleine de bonne volonté au Grand Esprit, avec quoi il s'engage à ne faire et à n'entreprendre jamais rien dans l'avenir sans la volonté du Grand Esprit.
-13- Tout cela accompli, si le pécheur s'est converti, après l'action de grâces, il est abondamment pourvu de vivres et accompagné par trois personnes jusqu'en bas dans la plaine où il a dit que se trouve sa demeure. Si cela correspond à la vérité, tout le processus est terminé ; seulement les trois accompagnateurs estimant de leur devoir de l'inviter encore une fois fraternellement, mais avec beaucoup de sérieux, à tenir la promesse faite et à se montrer reconnaissant envers le Grand Esprit. -14- S'il résulte par contre que l'étranger a sa propre demeure trop éloignée des montagnes ou bien qu'il n'a absolument pas de demeure - ce qui justement chez les habitants des plaines arrive parfois - alors, dans le premier cas, il est certes congédié dès que la vallée est atteinte, agis avec des paroles très sérieuses il est invité à ne jamais plus manquer à la promesse faite; puis aussitôt après lui avoir donné la bénédiction, il est laissé en liberté. -15- Mais si d'une certaine façon c'est un vagabond, et qu'il n'a pas une habitation propre, bien qu'il ait affirmé le contraire, alors, dans un cas semblable, qui se vérifie certes de rares fois seulement, il est certes relâché, mais il lui est signifié solennellement que, ce faisant, ce n'est pas eux, c'est-à-dire les habitants des montagnes, qu'il a trompés, mais bien Celui de Qui ils sont toujours en train d'accomplir la volonté. Mais c'est là le manquement le plus grave qu'un homme puisse commettre ; c'est pourquoi il convient qu'il veille avec beaucoup de soin à la façon dont il pourra se comporter en face de Celui à Qui toutes les pensées sont connues encore avant qu'elles ne soient pensées. -16- Ils lui exposent les conséquences terribles d'une semblable action, conséquences qui sont connues sur la base de l'expérience, et ils le laissent ensuite sans l'avoir béni ; car celui qui a péché contre eux, ils le bénissent afin qu'il soit amené à se tourner à nouveau vers le Grand Esprit. Mais qui a péché contre le Grand Esprit, nul ne se hasarde à le bénir avant qu'il n'ait acquis la conviction qu'il se trouve encore en état de grâce auprès du Grand Esprit. -17- Si tel est le cas, alors ses semblables lui accordent aussi à nouveau leur bénédiction ; mais si par contre, comme il arrive fréquemment, la punition du Grand Esprit vient bien vite sur lui, alors les habitants de Saturne s'unissent presque chaque jour dans la prière au Grand Esprit, prière visant à obtenir le pardon du péché commis contre Lui ; mais, comme déjà dit, personne n'ose accorder à nouveau sa propre bénédiction à un semblable coupable, avant qu'il ne soit venu à sa connaissance, de manière naturelle ou par des voies spirituelles, que le Grand Esprit a commencé à adoucir la peine décrétée contre lui. -18- Ceci est donc le procédé en usage dans les cas où un semblable pécheur se montre obstiné dans son erreur. Mais par contre, si le pécheur n'est pas un endurci, alors l'ancien charge trois membres de la famille d'aller, abondamment pourvus de fruits, sur le lieu où le coupable se trouve encore attelé au travail. Lorsqu'ils sont arrivés près de lui, ils lui imposent au Nom du Grand Esprit de renoncer immédiatement à l’œuvre entreprise ; ils l'enseignent ensuite sur la volonté du Grand Esprit, lui pardonnent son erreur, le prennent au milieu d'eux et le conduisent jusqu'au lieu où il a dit que se trouve sa demeure. -19- Arrivés là, ils lui offrent en cadeau les fruits qu'ils ont apportés avec eux, et lui parlent ainsi : "O frère ! Afin qu'à partir de maintenant tu n'aies plus à pécher contre nous ni, bien moins encore, contre la volonté du Grand Esprit, nous te laissons la liberté de venir chez nous quand tu veux, et tu ne retourneras jamais les mains vides en ta maison, étant donné que nous savons que cela est conforme à la volonté du Grand Esprit. Mais si tu osais pécher à nouveau comme cette fois, la punition de la part du Grand Esprit ne manquera certainement pas de t'atteindre au premier faux pas." Puis ils lui serrent la main, le bénissent, l'exhortent à la gratitude envers le Grand Esprit et enfin le laissent aller. Voilà, c'est là tout le pénible
processus judiciaire - comme vous dites - dans les cas d'erreurs de ce genre de la part des habitants de Saturne. -20- Dans le cercle des ordonnances sociales familiales rentrent en outre les règles qu'il faut observer dans la production des nécessaires outils de métal qu'ils emploient pour abattre les arbres, pour la fabrication des ustensiles et du mobilier à usage domestique pour défricher et travailler le terrain et pour couper les aliments ou d'autres choses. Mais où sont préparés ces outils et qui est chargé du travail ? En ce but sur cette planète, voyez-vous, spécialement au pied des montagnes, il existe des fabriques appropriées où sont produites toutes sortes de semblables outils, en employant un métal tout aussi utile et très semblable à votre fer. -21- Et qui sont les fabricants de ces produits ? Eh bien, pour avoir le droit de prélever de la fabrique de tels produits dans la mesure de ses propres besoins, chacune des familles qui composent la communauté doit aussi envoyer à tour de rôle un nombre déterminé d'ouvriers à la fabrique pour travailler le métal sous la direction d'un ancien qui fait fonction de maître d’œuvre. Toutefois le métal n'est pas transformé en outils déjà dans une semblable fabrique, mais il est simplement extrait de la montagne et soumis à un traitement préliminaire, comme chez vous est produit le fer en lingots, fer qui est ensuite employé pour divers usages. -22- Quand l'un ou l'autre des ouvriers a accompli la durée convenu de cent jours de travail dans la fabrique, en admettant que celle-ci ait, par exemple, cent ouvriers, alors la quantité de métal retiré est elle-aussi divisée en cent parts, et, la période achevée, chaque ouvrier qui quitte le travail reçoit la juste part de métal qui lui revient, et il la porte promptement là où la communauté a sa demeure, comme un bien appartenant à quiconque de la famille en a besoin. -23- Qu'arrive-t-il ensuite d'une semblable portion de métal, qui souvent, selon vos mesures, arrive à vingt et même trente mille quintaux ? S'il existe encore suffisamment d'outils dans les dépôts, alors le métal est enveloppé dans une couche de feuilles et consigné à l'ancien de la famille pour sa garde ; si par contre, les outils existants sont déjà très usés, alors, selon les dispositions de l'ancien, on procède à la fabrication d'outils nouveaux. Et de quelle manière se déroule l'opération ? Peut-être pensez-vous que là-aussi on a recours au feu d'une forge ? Eh bien, rien de tout cela ; sur Saturne on suit une méthode beaucoup plus étonnante et en même temps beaucoup plus simple. -24- Sur cette planète les habitants disposent d'un fruit en forme de courge, qui, à sa surface inférieure est très régulièrement creuse, et la concavité de celle-ci atteint bien souvent un diamètre de vingt à trente toises. L'écorce extérieure de cette espèce de courge, et en particulier la partie inférieure concave, est naturellement lisse et brillante, autant que votre acier le plus parfait et le plus pur. Et vous voyez, sur cette partie inférieure du fruit les habitants recueillent les rayons du soleil et dirigent le feu de ce miroir concave sur la grosse barre de métal qu'ils veulent travailler; et il ne faut pas plus de quelques instants pour porter une partie considérable de la barre à l'état d'incandescence. -25- La partie incandescente est ensuite coupée selon la nécessité et transformée pour l'un ou l'autre usage, en la travaillant au marteau sur une enclume qui d'habitude consiste en un bloc de pierre spéciale dure comme le diamant et très lisse. Il faut observer en outre que si un forgeron emploie chez vous une demi-heure pour fabriquer une faux, un homme de Saturne peut dans le même temps en produire au moins dix, bien qu'une faux complète sur Saturne pèse souvent jusqu'à dix quintaux. -26- Il suffit que vous réfléchissiez un peu là-dessus, et vous n'aurez pas de difficulté à vous persuader de la grande habileté dont un semblable forgeron fait montre en
son art ! Il reste encore à voir qui exerce cet art sur cette planète ? Mais la réponse n'est pas difficile, et la chose sera bientôt éclairée si je vous dis que chez ces hommes est en vigueur une règle familiale selon laquelle chaque individu est tenu d'apprendre tous les métiers, afin qu'il n'y ait aucune distinction d'état de personne à personne, et que nul ne puisse dire à l'autre : *Je suis plus nécessaire que toi, et mes produits sont plus importants que les tiens". Mais bien plutôt chacun sait faire ce que sait son propre frère, de sorte que l'un peut aider l'autre et lui être utile en n'importe quelle circonstance; et dans l'éventualité que l'un ou l'autre soit appelé à faire fonction d'ancien et de chef de famille, il est aussi en mesure de surveiller et de diriger la famille elle-même en tous les domaines de son activité. -27- Mais vu que tous sont experts en n'importe quel travail nécessaire de la vie, se trouve ainsi superflu tout petit commerce, en particulier chez les habitants des montagnes. Pour ce motif ils ne produisent eux-aussi jamais une chose qui ne leur est pas nécessaire, aux fins de vente ou d'échange avec quelque voisin ; mais certes la quantité de leurs produits est toujours réglée selon les besoins de la famille. Mais si malgré tout se présente un jour un voisin pour demander quelque chose qui lui manque, étant donné qu'il n'est pas aussi aisé que l'autre, alors on ne lui demande point ce qu'il entend offrir en échange de ce qu'il lui faut ; mais bien plutôt dans une semblable occasion, on lui demande uniquement le prix de la volonté de la part du Grand Esprit. -28- S'il dispose de ce témoignage, qui sur Saturne est le seul valide, c'est-à-dire, l'unique monnaie courante sur cette planète, alors il lui est immédiatement consigné en son absolue propriété ce dont il a affirmé avoir besoin, et il ne vient à l'idée de personne d'exiger une rétribution ou un dédommagement pour ce qu'il a fait ou donné ; et ce précisément par suite d'une loi sociale en vigueur entre eux, loi qui est de la teneur suivante : *Qui est jamais plus que le Grand Esprit ? Que Lui avons-nous donné en compensation pour le fait qu'Il nous a attribué un monde ainsi grand pour y vivre et nous a dotés de tant d'abondance. -29- *Il est donc juste que nous soyons reconnaissants envers le Grand Esprit pour chaque don qu'Il nous fait; mais si nous acceptions de notre frère même un seul remerciement, quelle figure ferait-on au regard du Grand Esprit en demandant de nos frères ce qui revient uniquement à Lui ? Donc, malheur à celui qui prétendrait de son propre frère un remerciement pour un don qui lui a été fait, alors que c'est plutôt à lui-même de devoir remercier le Grand Esprit pour l'avoir estimé digne de rendre service à un frère.* -30- Par conséquent, puisque l'habitant de Saturne, pour cette excellente raison, sciemment n'accepte pas de son prochain - pas mène de loin - un remerciement, d'autant moins encore acceptera-t-il une quelconque compensation d'un autre genre ; de sorte qu'est ainsi réglé tout rapport commercial entre ces habitants. Il n'existe là en aucun lieu, ni boutiques de changeur, ni bureaux de douane, ni cours des prix des marchandises, ni étalages, et l'usure est parfaitement étrangère à tous les gens de Saturne, et en particulier aux habitants des montagnes. -31- Un instrument dont on fait un grand usage sur votre Terre est la balance ; tandis que de celle-ci les habitants de Saturne ne savent absolument rien, parce qu'ils ne connaissent pas d'autre balance en dehors et seulement de la volonté du Grand Esprit en premier lieu, ainsi que du besoin de leur propre frère en second lieu, ils ne connaissent pas d'autres systèmes de mesure, sinon que la parole du frère selon la volonté du Grand Esprit, avec laquelle on mesure à l'un ou à l'autre frère ce dont il a besoin et ce qu'il demande. -32- (Nota bene): Une semblable manière de traiter les affaires serait aussi sur votre Terre bien meilleure que les lois inhumaines sur la vente du blé, et bien meilleure aussi que toutes vos bourses, banques, boutiques de changeur et négoces en tout genre ; car déjà votre pauvre intellect, pour peu pur qu'il soit, devrait vous suggérer : *Qu'avons-nous jamais donné,
nous, à Dieu pour tous les produits de la Terre, et quel prix Lui avons-nous payé pour la Terre elle-même pour que puisse paraître justifiée notre manière possessive de procéder, comme si nous étions, nous, les propriétaires directs de la Terre ? -33- A une semblable question, en admettant même seulement une miette de saine intelligence en vous, devrait s'imposer en vous sans autre et devrait briller très clairement, ce qu'il y a d'injuste dans toute votre façon d'agir, vis à vis de Moi, sur ce terrain qui est Mien, puisque J'ai été Seul pour le créer et l'organiser pour tous également ; ce qu'il y a d'injuste, dis-Je, à vous disputer tous ses produits qui au fond sont l’œuvre de Mon Amour ; alors que dans la majorité on souffre injustice et faim. -34- Mais en attendant, laissons toutes ces choses de la Terre qui crient vengeance et revenons sur Saturne, où les êtres humains sont encore en possession de tels trésors que la rouille ne ronge pas, et que les mites ne détruisent pas.
CHAPITRE 33 -1Nous avons observé à l'instant ces habitants dans leur fonction de forgerons, et nous avons vu comment, en cas de besoin, ils se prodiguent envers leur prochain avec amour et désintéressement, et comment leur code social, qui n'est absolument pas étendu, se trouve entièrement écrit dans leurs cœurs ; mais à présent nous passerons à les observer dans leur qualité de fabricants d'étoffes. -2Etant donné que de la description tant du règne végétal que du règne animal, nous avons constaté que sur Saturne il y a des plantes qui sont pourvues d'une espèce de poils très longs qui font saillie spécialement sur les fleurs et aussi sur les feuilles, et nous avons aussi vu que le corps de nombre d'entre les animaux est abondamment couvert de laine, ou que de leur cou pend une épaisse et longue crinière ; ceci considéré, il apparaît donc naturel et très clair que tout cela soit mis à profit par les habitants de Saturne. -3Mais comment est utilisé ce matériau ? - Eh bien, à cet égard, il n'y a pas beaucoup de différence entre vous et les habitants de cette planète. Le matériau est filé, et le fil qui en résulte est certes un peu plus robuste que n'importe quelle corde plutôt grosse chez vous; mais malgré cela il est relativement souple pour pouvoir en obtenir un tissu qui s'adapte très bien à la taille gigantesque de ces habitants. -4Ensuite qui est-ce qui s'occupe de la filature et du tissage des étoffes ? - Sur Saturne, voyez-vous, c'est une fonction qui est confiée exclusivement aux femmes ; cependant cela ne se passe pas comme chez vous qui employez des métiers à tisser, mais bien plutôt à peu près comme pour vos femmes qui ont l'habitude de confectionner les chaussettes en se servant de ce que l'on appelle les aiguilles à tricoter. De cette façon sont tricotés tout bonnement des vêtements complets, et précisément toujours en se servant à la place des aiguilles de deux longues baguettes de bois. Les femmes de Saturne sont très habiles en ce travail, et même tant, qu'une femme arrive dans une journée à préparer une bande d'étoffe longue de plus de cent brasses et large de cinq à six. -5Et cette étoffe est-elle ensuite teinte ? Non, sur cette planète, personne ne fait une chose semblable ; car, à ce sujet, il existe une autre loi sociale familiale tendant à freiner certaines impulsions à la vanité qui percent parfois dans les plaines ; et cette loi dit : *Vouloir rendre une chose meilleure, plus belle et plus parfaite que ne l'a déjà faite le Grand Esprit, est à considérer canne un acte sacrilège ; c'est pourquoi, malheur à toi si tu veux faire rouge ce que le Grand Esprit a destiné à être blanc ; malheur à toi, si tu veux redresser ce à quoi le Grand Esprit a donné une forme courbe ; malheur à toi, si tu veux rendre un aliment plus savoureux que ne l'a déjà préparé pour toi le Grand Esprit ! -6*Qui agira au contraire de ce qui est correspondant à la volonté du Grand Esprit, celui-là sera regardé par Ce Dernier avec un œil de colère et il verra venir sur son corps un mal après l'autre, comme cela a l'habitude d'arriver dans les plaines, où les hommes ne prêtent pas attention au fait que le Grand Esprit a tout disposé avec bienveillance, et avec la plus grande sagesse, de manière que l'homme n'ait rien besoin d'y changer ; et au contraire il n'a qu'à accepter telle quelle et d'un cœur reconnaissant la douce main que le Grand Esprit lui tend. -7*Nous ne sommes ici que pour jouir de ce que le Grand Esprit nous offre, et non pas pour que l'on ait à améliorer ou embellir Ses dons avant d'en faire usage. Le Seigneur a seulement placé à l'état brut dans la terre, le métal, et nous devons d'abord le cuire et ensuite
l'utiliser ; mais cela, nous pouvons le faire car ce fut le Grand Esprit qui nous l'enseigna. Egalement en conformité avec Sa Volonté nous pouvons cuire au feu quelques fruits pour les rendre plus doux ; nous pouvons couper les branches des arbres pour construire nos magasins. Cela, Il nous l'a enseigné Lui-même ; mais que l'on doive donner une autre couleur et un autre aspect à une chose, cela Il ne nous l'a jamais enseigné. -8*Etant donné qu'entre nous nous ne sommes rien autre que frères et sœurs dans le Grand Esprit, sans aucune distinction, et donc qu'à Son regard nous sommes aussi tous égaux, pourquoi donc devrions-nous nous distinguer l'un de l'autre moyennant la coloration des vêtements ? Que ce soit donc le tablier qui ceigne vos flancs et qu'il arrive jusqu'aux genoux, toujours bleu comme est naturellement bleue la laine qui nous sert à le confectionner; que notre tunique reste par contre de couleur rouge comme la crinière de l'animal qui nous en fournit le matériau ; et enfin que notre manteau reste de couleur toujours verte comme est verte la laine que nous tirons de divers arbres et de diverses plantes. -9*Puis les femmes à leur tour, qu'elles se contentent elles-aussi invariablement de leur ample chemise bleue, alors qu'elles peuvent mettre à profit les belles feuilles de l'arbre qui nous sert de demeure pour se confectionner des tuniques, de même qu'elles peuvent employer pour leur ornementation diverses autres choses encore que le Grand Esprit fait croître pour elles tant sur les arbres et sur les arbustes que sur les animaux. Mais que soit bien loin d'elles l'excessive passion pour le luxe comme elle est cultivée par les femmes demeurant sur les rives des grands fleuves et des lacs, femmes qui aiment orner leurs corps habitués à la mollesse, avec toutes sortes de fanfreluches. Par contre, notre devoir, ici sur les montagnes sacrées, est d'être constants en toute chose et fidèles à la volonté du Grand Esprit.* -10- Voilà, c'est là une règle familiale un peu allongée pour ce qui concerne l'habillement, sa confection et la façon dont il doit être porté. Même en ce qui concerne de tels vêtements, les habitants des montagnes sont, comme en toute autre point, également généreux ; si, par exemple, il se présente à eux n'importe qui vêtu de mauvaise façon, au point de montrer presque sa nudité, déjà cela constitue en soi un témoignage très valide du Grand Esprit ; en suite de quoi, quiconque dispose d'une réserve d'habits est tenu de l'offrir sans retard à ce malheureux pour qu'il se couvre. Qui s'y refuserait, devrait s'attendre à l'exil pour une, deux ou mène trois années, afin d'apprendre dans un semblable état d'isolement ce qu'il en coûte de devoir errer presque nu. -11- En vous peut-être jaillira, la pensée : Mais comment une personne peut-elle réduire en une, deux ou trois années ses vêtements à telle condition, au point d'aller presque nu ? Je Me limiterai à vous rappeler qu'une année de Saturne équivaut presque à trente années terrestres ; donc, si vous calculez en proportion la durée réelle d'un exil, il doit vous apparaître très clairement qu'un vêtement ne puisse pas se trouver en des conditions excessivement bonnes s'il est porté jour et nuit. -12- En ce qui concerne les autres règles familiales, elles aussi très remarquables, nous nous réservons de les passer brièvement en revue seulement après avoir fait d'un peu plus près la connaissance de la structure physique des habitants de Saturne, tant du sexe masculin, que de celui féminin; si bien que nous poserons tout bonnement la question ; Comment se présente physiquement les gens de cette planète ? -13- Etant donné que jusqu'à présent nous avons toujours commencé par considérer le moins parfait pour passer ensuite au plus parfait, nous resterons fidèles à cette règle ; et c'est aussi pourquoi ici nous considérerons d'abord la femme et seulement ensuite l'homme. Quel aspect a donc la femme sur cette planète ? - Avant tout Je vous dirai que - comme vous avez déjà eu l'occasion de le constater - sur Saturne presque toutes les choses sont plus
parfaites, plus imposantes et plus belles que sur la Terre ; par conséquent, c'est d'autant plus le cas quand il s'agit du genre humain. -14- Il s'ensuit donc que la femme de Saturne, en ce qui concerne son aspect extérieur, est une créature extrêmement parfaite et belle, au-delà de tous vos concepts. Bien qu'à vos yeux elle dût apparaître comme une figure gigantesque, si elle se trouvait sur cette Terre, à la vue de sa beauté, votre cœur éprouverait une émotion indicible ; car son corps est en tout point comme l'expression idéale de la ligne courbe; les membres sont proportionnés à la perfection, et en tout son être il ne serait en rien possible de découvrir quelque chose qui trahisse rudesse et dureté; sa peau est blanche comme neige exposée aux rayons du soleil, et seulement ici et là, où la peau est d'ordinaire plus délicate, transparaît une pâle couleur rose. -15- Mais en dépit de la taille du corps, la femme de Saturne a l'épiderme plus fin et plus doux que la châtelaine la plus délicate sur votre Terre. Seuls les ongles des mains et des pieds diffèrent quelque peu de ceux de vos mains et de vos pieds ; c'est-à-dire qu'ils ont un aspect comme si vous vouliez étendre sur une lame d'or brillant une légère couche de couleur carmin ; mais là où les ongles poussent avec la chair des doigts, ils prennent toutes les couleurs de l'iris, de sorte qu'une femme de Saturne a déjà par l'effet de la nature ses propres doigts ornés mieux que vos femmes, même quand celles-ci y enfilent les anneaux les plus précieux. -16- Le sein de la femme de Saturne est plein, extrêmement souple et à l'épiderme tendant plutôt au rosé ; mais en même temps il apparaît presque non plus comme matière, mais comme une substance éthérée, de façon telle que le sein de vos femmes, même de structure la plus délicate, on devrait le juger, en comparaison, fait de dur silex. Les bras sont pleins et d'une ligne parfaite qui n'est interrompue par aucune partie anguleuse, jusqu'à l'extrémité des doigts ; les pieds sont aussi d'une forme très pure. -17- Quant au cou, on ne peut le dire ni trop long, ni trop court, mais il s'élève audessus des épaules, admirablement proportionné ; et sur ce cou, sauf de très rares exceptions, repose toujours vous pouvez le croire, une tête d'une beauté vraiment céleste. Le front est de moyenne hauteur et d'une blancheur éblouissante ; le nez est droit, à la ligne noble et douce, et tendre en toutes ses parties ; les yeux sont en général typiquement grands, les pupilles d'un noir profond, et l'iris parfaitement bleu-pâle ; le reste du globe de l’œil est très blanc. -18- Les cils sont toujours très épais et d'une couleur d'un blond doré sombre ; les cheveux sont très doux, de la même couleur que les cils et ils arrivent souvent au-delà du genou ; la bouche est relativement petite et les lèvres d'un beau rouge carmin cachent deux rangées de dents qui semblent tout autant de perles enchâssées dans les deux mâchoires. Le menton est un peu proéminent et il est, comme les joues, légèrement coloré ; par rapport à la tête, on peut dire que les oreilles sont plutôt petites que grandes, et elles sont aussi légèrement colorées. -19- Et voilà, vous auriez ainsi maintenant la description parfaite de l'aspect extérieur d'une femme de Saturne; cependant vous ne devez pas penser que peut-être en ce qui concerne la physionomie une femme soit semblable à l'autre ; bien plutôt, comme il arrive sur votre Terre, il en arrive tout autant sur Saturne, c'est-à-dire, que parmi dix mille visages il n'y en a pas deux que l'on peut dire identiques ; et malgré cela, comme vous avez l'habitude de dire, chaque visage est plus beau que l'autre. -20- Si maintenant vous imaginez cette figure qui vous a été décrite, à l'intérieur des vêtements dont nous avons parlé avant, vous pourrez, avec l'aide de votre imagination, vous faire une assez bonne représentation d'une semblable ferme de Saturne. - Et ainsi nous aurons
terminé la description de la femme ; et donc, nous passerons aussitôt à considérer l'homme du point de vue physique. -21- Quel aspect a donc l'homme ? - En premier lieu, comme cela vous est déjà à peu près connu, l'homme est passablement plus grand que la femme ; mais ceci est un fait qui ne se manifeste pas si facilement sur la Terre ; tandis que sur Saturne l'homme est d'habitude de quinze à vingt pieds plus grand que la femme. D'emblée cela vous semblera certainement un peu étrange si vous pensez que la femme sur Saturne, par rapport à l'homme, est précisément ce que chez vous représente une jeune enfant de dix à douze ans à côté d'un homme déjà adulte et robuste. Mais d'un autre côté, si vous considérez que sur cette planète la procréation du genre humain n'arrive pas comme sur votre Terre, bien vite aussi ce rapport vous apparaîtra être un rapport équilibré et juste. -22- Et du moment que nous avons touché le sujet de la génération, nous voulons nous arrêter un peu sur celui-ci, avant de reprendre la description de l'homme. Donc, comment se passe la procréation sur Saturne ? - Eh bien, elle arrive comme elle aurait pu arriver aussi sur la Terre, si l'homme ne s'était pas détourné de Moi avant que je ne l'aie béni, c'est-à-dire, seulement par l'effet de l'amour et au moyen de la ferme volonté. -23- Donc, quand l’homme de Saturne veut procéder à un acte générateur, il se présente à l'ancien en compagnie de sa propre épouse, et l'ancien le bénit au Nom du Grand Esprit ; après quoi les deux conjoints se prosternent et prient avec une grande ferveur le Grand Esprit, afin qu'Il veuille susciter dans le giron maternel le fruit vivant désiré ; la prière terminée, l'homme prend la femme dans ses bras, l'étreint sur son cœur et l'embrasse d'abord sur le front, puis sur la bouche et enfin sur le sein. En dernier il lui pose la main sur le ventre et la fixe avec sa volonté ; et en cela se réside aussi tout l'acte de la génération, durant lequel, tant l'homme que la femme éprouvent une sensation très pure d'un délice vraiment céleste qui les maintient pendant longtemps dans un état d'allégresse enthousiaste. -24- Cet acte accompli, tous les deux se prosternent à nouveau, rendent grâces au Grand Esprit et en même temps invoquent de Lui la bénédiction pour le développement du fruit. Ensuite les deux retournent auprès de l'ancien, et alors la femme reçoit sa bénédiction et seulement ensuite celle de son propre mari. La grossesse sur Saturne dure seulement le quart d'une année, et un tel état se manifeste extérieurement chez la femme uniquement en ce que la teinte légèrement rosée du sein s'accentue quelque peu ; ensuite l'accouchement est complètement indolore. -25- Quand les enfants viennent au monde ils sont à grand-peine grands comme les vôtres à leur cinquième année ; mais ils grandissent très rapidement, et dans le temps de trois de vos années ils arrivent bien souvent à douze toises de hauteur et parfois même à quinze. Les petits enfants, durant leurs premières années, sont si légers qu'ils peuvent rester suspendus dans l'air comme des plumes, et le poids spécifique de leur corps augmente seulement quand ils sont sevrés du sein maternel et qu'ils commencent à se nourrir d'éléments plus solides ; c'est aussi le motif pour lequel sur Saturne on n'a jamais entendu dire qu'un enfant soit tombé à terre d'une quelconque hauteur. -26- Si donc vous considérez ce qui vous a été dit à l'instant, il vous sera d'autant plus facile de comprendre pourquoi la femme par rapport à l'homme est presque d'un tiers plus petite et en correspondance aussi plus faible. L’homme est donc parfaitement Mon image ; sa stature rend témoignage qu'il est le seigneur de la nature de cette planète, et son aspect en général équivaut à l'énonciation suivante : *C'est la juste forme de l'homme qui ne doit apparaître ni rude ni dure comme une roche, et d'un autre côté pas non plus si tendre comme le sein d'une femme ; mais il doit être pleinement à l'image de Celui qui l'a créé, c'est-
à-dire, comprenant en lui toute perfection de la force, de la puissance, de la robustesse, de la fermeté de volonté et de la magnificence et de la beauté de ses formes. -27- Mais si vous voulez vous représenter la forme d'un homme de Saturne, vous devez vous imaginer un jeune homme de votre Terre formé physiquement de manière impeccable, chez qui la musculature ne soit pas encore excessivement accentuée, mais qui apparaisse en voie de formation ; revêtez maintenant de cette parfaite forme humaine masculine l'homme de Saturne, certes avec ses dimensions, et vous aurez exactement sa silhouette ; il faut noter seulement que l'homme sur Saturne a l'épiderme beaucoup plus fin qu'un semblable jeune homme de la Terre. -28- Le menton est orné d'une barbe relativement grande, et la tête d'une chevelure bouclée tombant jusqu'à mi-corps et de couleur le plus souvent blond clair ; mais la barbe, et plus particulièrement les sourcils, sont toujours un peu plus sombres que les cheveux. Toutes les parties du corps sont en parfaite proportion entre elles et harmonieusement développés, et il faut noter encore que les parties du corps, comme les joues, la poitrine, ainsi que les bras ont l'épiderme coloré plus vivement chez l'homme que chez la femme. -29- Peut-être qu'entre vous, vous vous poserez secrètement la question : Ces hommes de Saturne n'ont-ils pas eux-aussi des organes génitaux particuliers comme nous les avons nous ? Oh, certes oui ; seulement, en proportion ils ne sont pas aussi grands, ni aussi typiquement développés, étant donné que leur corps en est pourvu pour un but seulement. Représentez-vous à présent un semblable homme de Saturne, et considérez-le dans sa grandeur et dans sa dignité humaine, et vous ne pourrez faire à moins que de lui rendre ce témoignage que dans sa forme est représentée dans toute sa noblesse la magnificence de Celui qui constitue la Cause Première de toutes les choses. -30- Même si la femme domine par sa beauté par suite de l'harmonie et de la délicatesse des formes, de vraiment beau et tout à fait parfait à tous égards, il n'y a que l'homme. Tous les habitants de Saturne savent cela, et c'est aussi pourquoi ils manifestent toujours leur gratitude au Grand Esprit pour la forme noble et parfaitement semblable à la Sienne qui leur a été conférée ; ce qui pour vous, par contre, ne vous est absolument pas venu à l'esprit.
CHAPITRE 34 -1Mais comment les habitants de Saturne savent-ils que leur forme est une image du Grand Esprit ? - Cela, ils le savent moyennant le Grand Esprit Lui-même qui maintes fois Se révèle à eux ; et que l'ancien d'une famille n'ait pas vu au moins une fois de ses propres yeux le Grand Esprit, est un cas très rare. Ils ne connaissent donc Dieu pas sous d'autre forme que celle d'un Homme Parfait ; et c'est pourquoi aussi, en ce qui concerne la doctrine du Grand Esprit, leur maxime suprême est celle-ci : Dieu est un Homme à l'état de perfection absolue. -2Il a des mains et des pieds et un corps comme nous, et Sa tête est semblable à la nôtre ; toutefois Il ne travaille pas avec les mains et ne marche pas avec les pieds, mais bien plutôt toute Sa puissance infinie tient dans Sa volonté, et avec la force infinie de Sa sagesse Il crée et gouverne toutes les choses. Et vous voyez, comme les habitants de Saturne ont de Moi une semblable idée exacte, ainsi arrivent-ils aussi d'autant plus tôt et avec d'autant plus de facilité à se connaître eux-mêmes, et dans leur esprit ils savent qu'ils ne sont pas seulement des formes fugaces, mais bien plutôt en esprit des formes éternellement permanentes et parfaitement semblables à Celui qui les a créés et formés à Son image. -3Les habitants de Saturne aiment-ils eux-aussi le Grand Esprit ? Certes, ils L'aiment eux-aussi; cependant, plutôt qu'amour, leur sentiment est celui d'une immense vénération jointe à l'aspiration constante de s'approcher toujours plus du Grand Esprit et de devenir à la fin Un avec Lui. Toutefois ils savent aussi très bien - car à ce sujet ils sont instruits par les esprits que le Grand Esprit s'est fait Homme sur une petite planète proche du Soleil, et qu'Il à pris ici un corps de chair et de sang; et qu'en outre Il a été reconnu des habitants de ce petit monde et tué dans Son corps ; tout cela, ils le savent très bien par suite de la révélation de la part des esprits. -4Il est cependant difficile de leur faire comprendre une chose seulement, c'est-àdire, comment a-t-il donc été possible que ces êtres humains n'aient pas été en mesure de Le reconnaître ; et aux esprits qui viennent à eux, ils ne font que demander, avec insistance, quel est le comportement actuel des gens de ce corps de l'univers, et s'ils ont finalement reconnu le Grand Esprit. Mais quand à de telles demandes ils obtiennent malheureusement en général des réponses négatives, alors ils deviennent très tristes, et dans leurs temples très souvent et avec beaucoup de ferveur ils élèvent des prières vers le Ciel, afin que l'humanité d'un semblable monde si incommensurablement préféré veuille finalement reconnaître Celui Qui lui a accordé une grâce tellement grande, qu'eux, à cette seule pensée, se sentent frissonner ; et après une longue méditation, ils finissent par s'écrier enflammés d'enthousiasme: "Oh, si nous avions été, nous, estimés dignes de cette grâce qu'il eût plu au Grand Esprit de se revêtir de notre chair et de notre sang sur notre monde, en vérité, nous resplendirions plus qu'un groupe de mille soleils réunis !" -5Ce sont les expressions dont se servent les habitants de Saturne quand ils entendent parler de la Terre. Ils nourrissent toujours une grande envie de voir cette planète, et si même la chose n'est pas faisable du point de vue physique matériel, il n'y a toutefois presque pas un seul esprit humain de Saturne qui, une fois déposée sa dépouille mortelle, ne désire pas se rendre sur la Terre. Mais, vu que l'esprit ne peut tolérer ce qui est matériel, il se met à contempler la Terre spirituelle. Mais une fois qu'il est arrivé à connaître l'humanité de celle-ci, une grande tristesse le prend et il quitte sans retard cette planète, avec beaucoup de découragement.
-6Quand plus tard nous en viendrons à parler de la foi spirituelle des habitants de Saturne, nous aurons l'occasion d'apprendre diverses autres chose encore à ce sujet. Maintenant nous nous remettrons à considérer encore quelques-unes des organisations sociales sur cette planète. Donc à quoi se réfèrent ces organisations ? Il ne s'agit, voyez-vous, de rien d'autre que de ceci : à savoir qu'à personne il n'est permis de se vanter en quelque façon de sa propre beauté et de sa majesté physiques. Mais afin qu'un semblable important commandement soit toujours scrupuleusement observé, déjà aux enfants d'âge tendre on commence à rendre familière l'idée qu'ils sont très petits, et que toutes les grandeurs mondaines ne sont qu'un absolu néant aux yeux du Grand Esprit ; par conséquent pas même un patriarche ou un ancien - pour ne pas parler non plus d'un autre membre de la famille n'ose penser de grandes choses de lui-même. -7En ce qui concerne ensuite la beauté du corps, ils ont coutume de dire : Nous sommes tous, autant que nous sommes, également beaux, étant donné que nous sommes à l'image du Grand Esprit ; mais qui croirait et soutiendrait être beau par son propre mérite, et être en position de privilège par rapport à un autre, celui-là se rendrait de cette façon immédiatement dissemblable du Prototype éternel, et pour cette raison se ferait plus grossier que le plus répugnant d'entre les animaux. -8A rendre cette loi plus efficace contribuent certes aussi les esprits des défunts : car s'il arrive que quelqu'un fait mine de se laisser vaincre par la vanité, il n'est pas exclu que l'on voit soudain apparaître devant quelque horrible face convulsée et ricanante. Celui qui de cette façon a été piqué une fois, prend sûrement à l'instant congé de toute vanité ; car les habitants de Saturne savent très bien qu'avec les esprits il n'y a jamais à plaisanter ni à demi, ni en entier ; mais bien plutôt quand ils se manifestent d'une manière ou d'une autre, la chose est toujours prise absolument sérieusement. -9Ceci, voyez-vous, est une éducation sociale qui est observée par tous, grands et petits, jeunes et vieux ; en ce qui concerne ensuite l'idée de grandeur, cette règle est telle qu'elle ne se limite pas seulement au sens naturel matériel, mais elle s'étend aussi comme une considération spirituelle permanente et pour tous les temps, de sorte qu'ils se considèrent aussi à cet égard le plus petit possible. Pour cette raison aussi, c'est une question passablement ardue pour les esprits de Saturne, que celle de communiquer avec les esprits de cette Terre, chez qui au contraire est prédominante l'idée de leur présumée grandeur. -10- Une autre loi encore est celle qui tient à cœur l'entretien de la propreté ; par conséquent il est chose on ne peut plus rare de trouver sur Saturne une personne sale soit dans le corps, soit dans le vêtement. Mais malgré cela on enseigne comme règle capitale de ne pas donner par contre toute l'importance au corps, étant donné qu'il est mortel, et de donner à la place la plus grande importance à l'esprit qui est immortel. Et cela explique aussi pourquoi l'habitant de Saturne fuit toutes les choses mortes, et, comme vous l'avez déjà appris, il veut que même sa demeure soit quelque chose de vivant et ne soit pas faite avec du matériau mort; et moins encore il ne doit y avoir quelque chose de mort dans un temple consacré à Dieu. Mais de toute façon on doit avoir soin en toute chose de la plus scrupuleuse propreté, spécialement dans le corps qui est considéré comme une demeure de l'esprit immortel. -11- C'est donc là une autre règle sociale familiale. Qu'arrive-t-il ensuite des dépouilles mortelles des défunts sur Saturne ? Là, voyez-vous, les corps ne sont pas ensevelis comme chez vous, ni ne sont brûlés comme c'est la coutume dans divers pays de votre Terre ; mais ils sont portés en quelque lieu où ordinairement se trouve un bois d'arbres-pyramide ; arrivés sur l'emplacement, le cadavre est couché la face contre terre et couvert avec des branches détachées du même arbre. Les cadavres des femmes par contre sont attachés par les
pieds et suspendus à une branche de l'arbre d'habitude vraiment à côté du tronc, de manière que la tête vienne presque à toucher le sol. -12- En apprenant ces choses, votre première pensée sera certainement celle que, lorsque ces corps gigantesques commencent à se décomposer, ils doivent nécessairement diffuser tout à l'entour une terrible puanteur. Mais sur cette planète ce n'est absolument pas le cas, et il arrive même le contraire ; car, ces corps étant formés d'une matière plus légère et plus fluide ou éthérée que celle de votre grossière dépouille extérieure, ils se dissolvent aussi en peu de temps après la mort, et une telle rapide disparition procure même une sensation délicieuse à l'odorat de qui vient à se trouver dans les environs. -13- S'il arrive qu'une telle exhalaison parvienne aux narines d'un habitant de Saturne, celui-ci se prosterne aussitôt face contre terre, et, rempli de gratitude envers le grand Esprit, il Le supplie d'accorder que l'esprit de celui dont le parfum du corps a frappé en cet instant son odorat, puisse se manifester à lui, afin d'entonner avec lui une hymne de louange au Grand Esprit pour la rédemption de la prison de la chair ; celui-ci se manifeste aussi toujours, en particulier si le suppliant est animé d'un parfait sérieux. -14- Vous vous demanderez peut-être si ces habitants portent le deuil ou s'ils éprouvent de la souffrance quand quelqu'un meurt ? - Non absolument pas, mais bien plutôt, si par exemple meurt l'ancien de la famille, le plus ancien parmi les survivants lui succède immédiatement dans la charge. Celui-ci invite alors tous les membres de la famille à se prosterner et d'abord à remercier le Grand Esprit pour avoir usé envers le patriarche de la grâce immense de l'appeler à la vie éternelle ; et puis ils doivent prier le Grand Esprit qu'il Lui plaise d'accorder en grâce que l'esprit du défunt apparaisse aussitôt au nouvel ancien, et le conduise dans le sanctuaire du temple pour le bénir là et le consacrer au très noble service du Grand Esprit. -15- Et ceci effectivement arrive aussi toujours de manière visible pour toute la famille ; l'esprit se présente aussitôt dans sa gloire, ou réalité spirituelle, et, avec de claires paroles il invite le nouvel ancien à le suivre dans le sanctuaire du temple, et tout le restant de la famille seulement jusqu'à la partie du temple destinée au peuple. Arrivés là, l'esprit installe l'ancien, en présence du peuple, dans sa charge de chef de famille en le conduisant sur la chaire ; là il le bénit et puis il annonce à toute la famille, comment le grand Esprit a accordé Son agrément à l'engagement de la part du nouvel ancien à l'office sacré ; raison pour laquelle tous sont aussi tenus de lui prêter obéissance en n'importe quelle occasion et d'apporter une scrupuleuse attention à chacune de ses paroles. -16- Puis il recommande aux homes de la famille d'assurer le transport de sa dépouille mortelle selon la coutume ; il bénit toute la famille et promet de rester, conformément à la volonté du Grand Esprit, conseiller et guide de toute la famille, tant qu'il plaira au Grand Esprit de laisser comme chef de la même famille le nouveau patriarche intronisé. Puis l'esprit disparaît, et le nouvel ancien se prosterne alors en compagnie de la famille et tous rendent grâce au Grand Esprit. Une fois terminée l'action de grâces, tous se lèvent et en silence ils font retour à leurs demeures et procèdent aussitôt au transport de la dépouille mortelle vers le lieu qui a déjà été indiqué antérieurement. -17- Si par contre une femme meurt, on invoque certes aussi l'apparition de son esprit ; cependant après l'apparition, la cérémonie se limite à une action de grâces qui est accomplie dans la demeure même ; après quoi la dépouille mortelle est immédiatement transportée au lieu destiné. Il est à observer à cet égard que la dépouille mortelle de la femme se dissout beaucoup plus rapidement encore que celle de l'homme; et même si rapidement que, dans des circonstances favorables, bien souvent déjà le dixième jour après on n'en trouve plus aucune trace, pas même des ossements, en raison du fait que la décomposition rapide du
cadavre arrive au moyen de l'absorption par l'électricité de l'énorme conifère auquel il est suspendu ; mais lorsque d'un corps naturel l'électricité s'est complètement éloignée à travers les innombrables pointes de la plante elle-même, le corps lui-même disparaît comme s'il avait été consumé par le feu. -18- Vous voyez, ces règles constituent aussi une loi sociale familiale, qu'il faut toujours observer de manière rigoureuse et exacte. Vient ensuite une autre loi très remarquable, c'est-à-dire, celle de l'union en mariage. Sur la base de cette loi, chaque homme, lorsqu'il a atteint l'âge raisonnable de trente à quarante ans, est rigoureusement tenu de prendre une épouse selon son choix et son propre gré. Cependant il ne doit pas faire une telle annonce directement à l'élue, mais bien seulement par l'entremise de l'ancien. Celui-ci fait alors appeler à lui les parents de l'épouse sur laquelle est tombé le choix et il leur fait connaître la nécessité et la volonté de l'époux. -19- Cette annonce est alors, avec un cœur reconnaissant, considéré comme l'expression de la volonté du Grand Esprit ; et donc là-aussi il n'arrive jamais, comme chez vous, que l'aspirant à la main de l'épouse risque de se trouver en face d'un refus, ce qui à Mes yeux est une chose on ne peut plus odieuse ! Alors l'ancien conduit l'épouse à l'époux, prend la main droite de celle-ci et la droite de celui-ci, et les unit ; et ainsi serrés par la main les époux doivent suivre l'ancien jusqu'au temple, devant le sanctuaire ; et là ils doivent se tenir avec leurs visages appuyés à l'imposant autel de forme conique, tandis que l'ancien dans le sanctuaire invoque l'esprit ; en de semblables occasions celui-ci apparaît avec le visage voilé ; alors l'ancien invite le couple d'époux à se relever. -20- Après quoi l'ancien adresse aux époux de nobles paroles et leur indique les devoirs que le mariage impose, devoirs qui en substance se résument en toutes ces règles familiales dont il a déjà été parlé et en quelques autres encore dont nous ferons connaissance plus tard. Ce discours terminé, l'ancien descend de sa chaire, et fait un mouvement comme pour séparer les mains des deux époux ; cependant, ce n'est là, depuis les temps antiques, seulement qu'un geste symbolique avec lequel on veut signifier qu'ils ne doivent se laisser séparer par aucune chose sur leur monde. -21- Après cette cérémonie l'ancien se retire de côté ; et alors l'esprit découvre son visage, bénit les époux, puis s'approche d'eux et sépare leurs mains. Mais cet acte signifie que seule la mort a le pouvoir de séparer et de diviser les conjoints ; mais même pour celle-ci, seulement en ce qui concerne la matière, et non l'esprit. Après quoi, l'esprit disparaît et le mariage est conclu. -22- Enfin a lieu une action de grâces au Grand-Esprit, et est réitérée la prière qu'il Lui plaise de bénir les époux en leur accordant une descendance qui Lui soit agréable, et de les guider selon Sa très sainte volonté. Cet office étant ainsi achevé, tant l'ancien, que le nouveau couple se lèvent aussitôt, et pénétrés d'un grand respect ils reviennent en leur demeure, où ordinairement la famille toute entière se rassemble en un banquet ; et, en cette occasion, le Grand Esprit est à nouveau loué et glorifié. -23- Le jour suivant on laisse le choix aux nouveaux époux, c'est-à-dire d'établir leur domicile là où ils se trouvent, ou bien de chercher ailleurs un lieu où ériger leur propre demeure. S'ils consentent à rester au sein de la grande famille, il leur est aussitôt assigné leur propre branche pour y habiter, et l'on met sans retard la main pour leur aménager une demeure nouvelle, une cuisine nouvelle et les réserves nécessaires. -24- Si par contre, comme il arrive parfois à cause du manque d'espace, ils préfèrent se séparer de la famille, ils sont aussitôt pourvus de toutes les choses possibles, et ils peuvent emmener avec eux aussi leurs parents et d'autres proches parents. Comment ensuite il est
procédé à un tel déménagement, cela nous l'avons déjà appris. Voilà, telle serait donc une autre des règles sociales familiales. -25- Pour aujourd'hui donc, arrêtons-nous ici ; prochainement nous passerons en revue encore quelques règles, et puis nous nous mettrons à considérer l'éducation spirituelle des habitants de Saturne.
CHAPITRE 35 -1Il arrive parfois que l'une ou l'autre famille résidant en quelque vallée ou bien en quelque plaine, décide de se rendre sur les montagnes pour des raisons de santé ; pour de telles éventualités il existe auprès des habitants des montagnes une règle selon laquelle il est réservé à ces chercheurs de santé le plus affectueux accueil, et tous sont tenus à leur donner ou à leur procurer tout ce qui est estimé utile à leur santé. -2Cependant, si les nouveaux arrivés entendent prendre une demeure fixe sur les hauteurs, alors l'ancien d'une des familles de montagnards désigne immédiatement un membre de la famille pour servir de conseiller et de guide à ces gens provenant de la plaine et désireux de s'établir sur les montagnes jusqu'à ce que tout soit arrangé, et, le cas échéant, si les nouveaux arrivés expriment le désir de l'avoir pour guide aussi pour l'avenir, il a le devoir de consentir à un tel désir. -3S'il est déjà marié, il se sépare d'eux seulement le temps nécessaire pour aller à son ancienne demeure prendre son épouse et éventuellement ses enfants, et en même temps pour recevoir de son propre ancien la bénédiction d'occasion, vu la nouvelle charge qui l'attend. Toutes ces choses étant ainsi en ordre, il prend congé, et en compagnie de sa famille, ainsi que pourvu de ce qui lui est nécessaire, il s'en va vers la nouvelle famille qui s'est établie là-haut et commence sa mission de guide en l'instruisant d'abord dans les diverses lois et dans les coutumes des habitants des montagnes, en l'encourageant à édifier le temple, de même que les demeures vivantes et les dépôts à provisions selon ses besoins. -4Ceci, voyez-vous est aussi l'une des règles que les habitants des montagnes sont tenus à observer. - Quelquefois il arrive cependant que les gens des vallées ou bien des plaines entreprennent de monter sur les hautes montagnes dans le seul but de jouir de la belle vue. Quand les excursionnistes de cette espèce tombent sur l'une ou l'autre famille de montagnards, ils sont arrêtés, et sur un ton amical mais en même temps sérieux, il leur est demandé avec quelles intentions ils sont venus là-haut. -5Quand ensuite ils ont exposé - d'habitude toujours sous forme très aimable - la raison de leur venue, c'est-à-dire celle de monter sur tel un tel sommet de montagne afin de jouir de l'incomparable spectacle, alors l'ancien attire d'abord leur attention sur les dangers qui en général vont de pair avec une ascension ; et puis il passe à considérer les difficultés plus ou moins graves qu'offre tel ou tel sommet. Si la montagne choisie est réellement impraticable, les excursionnistes sont affectueusement déconseillés de se risquer, et on leur expose exactement tous les dangers à la rencontre desquels ils iraient s'ils insistaient dans leur projet; après quoi ces alpinistes renoncent aussi à l'ascension projetée et ils retournent donc chez eux. -6Mais si l'un ou l'autre sommet est accessible sans dangers, alors, à une telle compagnie d'amis de la montagne, il est assigné aussitôt un guide. Il incombe ensuite à celuici un triple devoir ; en premier lieu il doit conduire la compagnie par la voie la meilleure et la plus sûre, puis il doit pourvoir à la nourriture pour tous, et dans ces cas les provisions sont transportées par ces serviteurs de maison que vous connaissez déjà ; et enfin il est tenu de fournir aux excursionnistes toutes les informations estimées nécessaires, mais en n'oubliant pas en toute circonstance de faire tourner leur pensée vers le Grand Esprit. -7Cependant, malgré tous ses égards et ses peines, il ne lui est rien permis de demander en dehors de ceci : c'est-à-dire, qu'un semblable groupe, après avoir ainsi contemplé et admiré la magnificence immense du Grand Esprit, ait à lui permettre solennellement de
rester toujours en toute occasion attachés à Lui, et de ne jamais rien entreprendre sans Sa Volonté expresse. -8Ayant eu cette assurance, le guide leur rappelle ensuite que chaque chose est accompagnée d'une grâce du Grand Esprit seulement, et qu'en même temps la prière doit Lui être adressée pour qu'il Lui plaise d'accorder qu'ils puissent retourner heureusement chez eux. Ces exhortations ainsi terminées, la descente commence, et le guide accompagne à nouveau le groupe jusqu'à son habitation ; là, il est offert à tous, nourriture et boissons, et quand ils sont ainsi restaurés, il leur est doucement rappelé encore une fois le devoir de gratitude envers le Grand et Saint Donateur ; puis l'ancien les salue et les bénit ; après quoi ils peuvent sans autre retourner dans la plaine. -9Ici et là, dans l'un ou l'autre coin des montagnes, demeurent ces espèces de médecins dont il a déjà été parlé, médecins qui pratiquent des soins en se servant de la chair de l'animal appelé *pied pointu*. En de semblables occasions les gens de la plaine sont avertis par les habitants de la montagne d'avoir à se garder de tels individus, et il leur est expliqué comment ceux-ci ne sont autre que des déserteurs de la plaine venus s'établir là-haut absolument de leur propre initiative par un vain désir de lucre, et que par conséquent les habitants de la plaine sont toujours exposés au danger de ces gens-là qui tentent frauduleusement de leur céder des remèdes qui n'ont aucune efficacité ; de sorte qu'ils mettent en garde les habitants de la plaine, d'ordinaire crédules, et ils leur disent : -10- "Pour la conservation de notre santé physique le Grand Esprit a placé dans le terrain de très diverses espèces d'herbes et de fruits salutaires ; Il a créé partout sur le monde une eau pure, ainsi que l'arbre de la pluie extrêmement bénéfique ; en outre Il a fait pousser sur le sol des arbres gigantesques dans le but d'absorber toutes les exhalaisons nocives et de les transformer en air parfumé et très pur. -11- "De même le Grand Esprit qui est immensément bon dans toute Son infinie puissance, a placé sur le firmament un splendide Soleil, dont les rayons éveillent dans le lis des roches une énergie Salutaire si puissante, au point d'arriver jusque là où arrivent les rayons du Soleil ; et le Grand Artisan a aussi divisé le firmament moyennant cette zone lumineuse et blanche qui, lorsque le Soleil est couché éclaire si agréablement la nuit, au point de nous la rendre presque tout aussi agréable que le jour ; et grâce aux rayons puissants de ce ruban tendu à travers le ciel, nous sommes ragaillardis même quand le soleil est couché. -12- "Pareillement le Grand Artisan a placé à côté de ce ruban sept grands luminaires, dont toujours plus d'un alternativement nous réjouit de nuit même dans les périodes d'ombre complète. Si l'on considère donc que le Grand Esprit, avec tant de grâce et avec cœur, a pris avec tant de bienveillance tous les soins envers nous, nous ici sur les montagnes, nous reconnaissons toujours bien, sur la base de l'expérience, que c'est vraiment ici, car nous n'avons jamais su ce qu'est une maladie ; et si quelqu'un meurt, il ne meurt jamais par suite d'un mal physique, mais bien toujours suite au degré convenable de maturation atteint par son esprit qui de toute éternité ne meurt jamais, mais continue à vivre perpétuellement, comme nous pouvons le témoigner devant vous à toute heure du jour. -13- "Si l'on considère tout cela, il ne peut pas ne pas paraître clair que c'est une sottise immense, que de vouloir se procurer un remède apte à perpétuer la vie par quelqu'un dans les yeux de qui on peut lire la tromperie étant donné que lui-même est loin de la vie de l'éternel esprit, et d'estimer insuffisants les moyens que le Grand Esprit nous offre partout, et donc aussi de n'en pas faire usage selon Sa volonté. Je vous dis donc, ô chers frères des plaines : à partir de maintenant n'allez plus jamais chercher la santé auprès des charlatans, mais bien plutôt cherchez celle-ci toujours avec beaucoup de sérieux dans la volonté du Grand Esprit ; ainsi vous resterez sains jusqu'à la complète maturité de votre esprit.
-14- "Mais quand celui-ci se sera fait complètement mûr et parfaitement maître de la Vie dans la volonté du Grand Esprit, alors vous ne goûterez jamais plus la mort, et par contre vous pourrez sortir librement hors de votre chair et de votre sang sans aucune douleur et conscients de manière tout à fait claire ; et, immensément reconnaissants envers le Grand Esprit, vous déposerez ce pesant fardeau matériel." -15- En quelques régions des plaines et des vallées, spécialement sur la rive des lacs et des fleuves, vit aussi une espèce de païens qui estiment que l'anneau blanc, placé en travers du firmament, est la Divinité ; d'autres par contre croient que l'anneau est la voie sur laquelle le Grand Esprit marche pour observer ce que les hommes sont en train de faire en bas sur le monde. Ces semi-païens habitent eux-aussi souvent sur les montagnes, en pensant pouvoir ainsi être plus proches de l'anneau blanc, ou même arriver éventuellement tout bonnement sur l'anneau. -16- Envers une semblable espèce de pèlerins, incombe ainsi aux habitants des montagnes le devoir d'amour de les ramener sur le bon chemin et de leur enseigner ce qu'est l'anneau, ce que sont les lunes et quelles sont les fonctions assignées à l'anneau ainsi qu'aux satellites ; but qu'ils atteignent au moyen de la force de volonté, en amenant ces fourvoyés dans une espèce d'état de clairvoyance, en quel état ceux-ci peuvent ensuite contempler aussi bien l'anneau que les lunes. -17- Après avoir observé tout cela, eux généralement reconnaissent d'eux-mêmes leur opinion gravement erronée d'avant, et alors seulement ils sont instruits affectueusement, mais en même temps sur un ton inspiré d'un sage sérieux, dans la connaissance vrai du Grand Esprit et de Sa volonté ; de sorte que certains décident de s'établir sur les hauteurs, tandis que d'autres retournent dans leurs vallées ou leurs plaines. S'ils se décident pour la montagne, on pourvoit aussitôt pour leur habitation ; si par contre ils préfèrent retourner en bas, ils sont bénis, pourvus de vivres pour le voyage et enfin congédiés au, Nom du Grand Esprit. -18- Toutefois, tant que quelqu'un ne reconnaît pas sa propre erreur, il ne peut se faire absolument aucune illusion de pouvoir s'échapper des robustes mains des habitants des montagnes. Mais si quelqu'un est d'esprit rebelle et veut à tout prix s'en aller, ou bien carrément faire du mal à qui veut le retenir, un esprit évangélique est toujours prêt, au commencement en fonction de réprobateur, et puis si cela ne suffit pas, en fonction vraiment de punisseur qui avec les moyens les plus simples se charge de faire comprendre à un semblable obstiné à quels maigres résultats il peut parvenir avec son obstination. -19- Après une telle apparition le rebelle s'améliore presque toujours sans condition; cependant, s'il persiste dans son obstination, alors il arrive aussi qu'un semblable ange punisseur lui inflige effectivement un châtiment, soit au moyen de lourdes douleurs physiques, soit au moyen - dans des cas réellement extraordinaires - de l'anéantissement instantané ; cette dernière punition entraîne comme conséquence que l'esprit puni est contraint pendant un temps bien long à faire fonction de gardien de la nuit la plus profonde et du plus terrible froid. C'est là une des règles les plus importantes pour les habitants des montagnes. -20- S'il arrive que dans une famille il y ait plus de filles que de garçons, ou viceversa, alors l'excédent des hommes est libre de se chercher femmes près de l'un ou l'autre des voisins ; s'ils n'en trouvent pas, ils sont autorisés à se tourner vers les plaines. Si même ici il ne leur est rien possible de trouver, ils peuvent entreprendre un voyage vers d'autres pays ; et ainsi il arrive parfois qu'un homme doit visiter un, deux, et même trois continents pour trouver femme. -21- Lorsqu'il l'a obtenue dans l'un de ces pays - ce qui d'ordinaire arrive sans difficultés, à condition que dans le lieu en question le nombre des femmes dépasse celui des
hommes - alors il lui est laissé le choix, soit de s'établir là où il a trouvé l'épouse, ce qui arrive généralement aussi, ou bien de retourner avec sa propre épouse dans sa patrie, toutefois toujours avec l'obligation de venir tous les trois ans rendre visite aux parents de l'épouse, et ce tant que les parents de l'épouse vivent. Ceux-ci morts, une telle obligation cesse complètement. -22- Mais, si dans une famille il y a plus de femmes que d'hommes, alors il est donné connaissance de ce fait à diverses familles du voisinage, moyennant un, deux ou bien même trois messagers; et dans une semblable occasion, d'ordinaire, un ou plusieurs aspirants s'annoncent. En un tel cas, l'ancien invoque l'esprit pour connaître quelle est la volonté du Grand Esprit, et quel est parmi les aspirants celui qui par Celui-ci est estimé le plus digne. La chose a immédiatement la suite désirée, et celui qui a été choisi, après le déroulement de la cérémonie du mariage que nous connaissons, conduit l’épouse en sa maison ; si par contre, dans une famille il y a un excédant de plusieurs femmes à marier, et qu'il ne se présente qu'un seul aspirant, alors l'ancien invoque l'esprit pour qu'il lui indique laquelle d'entre les femmes est la plus digne d'être mariée. -23- En ce cas aussi, après que la cérémonie coutumière du mariage ait été accomplie, l'époux conduit en sa propre demeure l'épouse qui lui a été confiée. Entre autre, il peut arriver que le nombre en excédent des jeunes filles à marier soit égal à celui des aspirants ; en ce cas il revient à chaque aspirant le droit du choix. Lorsque tous se sont accordés, la chose doit être immédiatement portée à la connaissance de l'ancien ; ce dernier prend conseil ensuite auprès de l'esprit qu'il aura entre-temps invoqué, pour s'assurer si le choix qui a été fait est estimé au regard du Grand Esprit, et apte à rencontrer Son agrément. -24- Cela étant confirmé, la cérémonie a lieu sans autre. - Si, par contre, un tel choix n'est pas approuvé par l'esprit, l'ancien prie celui-ci de se prononcer au Nom du Grand Esprit au sujet de la façon dont le choix doit être fait pour être considéré bon, ce qui arrive aussi à l'instant ; et au nouveau choix les aspirants consentent ; aussitôt d'un cœur très reconnaissant. Les mariages sont aussitôt célébrés, et ensuite chaque époux est autorisé à conduire son épouse respective en sa propre demeure. Il va de soi que tout cela se déroule selon les règles établies pour le mariage, comme vous le connaissez déjà. -25- A côté de ces règles familiales il y en a certes encore quelques-unes qui concernent l'économie domestique, mais elles sont toutes de peu d'importance ; et pour vous il ne serait ni utile, ni important de les connaître ; donc, la prochaine fois nous passerons à considérer la question de l'éducation spirituelle.
CHAPITRE 36 -1En ce qui concerne l'éducation spirituelle, il faut d'abord observer qu'en elle on rencontre bien peu de traces d'une pompe et d'un cérémonial extérieurs ; mais d'autant plus grande en est par contre la substance intérieure. En ce qui concerne le caractère extérieur du cérémonial, celui-ci consiste, comme vous le savez déjà, en premier lieu en un temple vivant bien organisé, en lequel à chaque occasion importante sont élevées des prières au Grand Esprit, et où ont lieu les actions de grâces. -2Quant au reste, chez les habitants de Saturne les nombres 7, 14, 21, et ainsi de suite, ainsi que tous les nombres divisibles exactement par sept, sont aussi estimés être des nombres sacrés ; et de même là-aussi une période de sept jours se termine avec le septième jour, qui justement pour cette raison est aussi pour eux un jour de fête. L'observance de ce jour de fête constitue la seconde partie du cérémonial, et là se résume aussi toute cérémonie extérieure du jour de fête, car la première partie vous est désormais déjà connue. -3Mais la cérémonie du jour de fête consiste en ce que la famille presque toute entière se rend au temple déjà de bon matin, encore avant le lever du soleil, les hommes avançant en tête du cortège, les femmes venant ensuite. Entrés dans le temple, les hommes se placent à droite et les femmes à gauche; l'ancien fait une première oraison, et puis tous autour entonnent un chœur de louange au Grand Esprit en Le remerciant en même temps pour tous les bienfaits reçus ; ces actions de grâces et ces louanges sont toujours empreintes de la plus sincère et de la plus grande émotion des cœurs, tant chez les hommes que chez les femmes. -4Une fois que le soleil est levé, chacun sort du temple et se réjouit à la vue du jour qui se lève, ainsi qu'en admirant les paysages vastes et extrêmement beaux de ce corps de l'univers. Quand ensuite le soleil est déjà assez haut sur l'horizon, alors tous rentrent dans le temple afin de remercier le Grand Esprit pour avoir ramené le jour ; et si quelqu'un a un petit enfant nouveau-né, il doit l'amener immédiatement près du sanctuaire ; l'ancien impose les mains à l'enfant et prononce les paroles suivantes : -5"Comme tu es venu sur ce monde, en hôte faible et lié en toutes tes forces selon la volonté du Grand Esprit, Qui est saint, très saint, fort et puissant au-delà de toute puissance et de toute force et extrêmement fidèle et constant en chacune de Ses paroles et en chacune de Ses promesses, et Qui est l'unique, le parfait et suprême Seigneur de toutes les choses dont ce monde est rempli ainsi que du firmament infini - raison pour laquelle aussi Sa volonté est sainte, très sainte, et comme Il est saint Lui-même - ainsi aussi dois-tu vivre sur ce monde jusqu'à la fin, de façon tout à fait conforme à cette volonté sur la base de laquelle tu es venu en ce monde, afin de pouvoir ensuite comme un vrai homme, sortir de ce monde dans toute la plus franche dignité et la noblesse de la parfaite vertu. -6"Moi donc, ici dans le sanctuaire je te bénis au Nom du Grand Esprit, Qui a créé aussi bien moi que tes parents ; en cette bénédiction, grandis, et crois continuellement moyennant la très stricte observance de Sa très sainte volonté. Ainsi soit-il toujours, maintenant et éternellement. Et tel que tu es petit maintenant, reste ainsi dans ton esprit au regard du Grand Esprit et devant nous, tes pères et frères ainsi que devant toi-même. Qu’il en soit ainsi aussi toujours en cette vie et dans l'autre vie. Amen." -7Ces paroles prononcées, l'ancien souffle sur le petit enfant, le confie à nouveau aux parents pour qu'ils le bénissent eux-aussi, et le fait ramener à la maison. De sorte que les parents du petit ne sont plus tenus à retourner dans le temple dans une journée de fête de cette
espèce ; mais bien plutôt il leur est laissé toute liberté de rester chez eux afin de soigner leur enfant désormais béni ; mais si malgré cela ils désirent rester dans le temple, ils le peuvent certes. S'il n'est présenté aucun nouveau-né pour la bénédiction, alors a lieu tout bonnement le petit déjeuner, pour lequel - de même que pour le dîner et le souper - les habitants de Saturne s'en vont déjà de bonne heure au temple et apportent les provisions nécessaires en quantité appropriée. -8Il va de soi, qu'avant et après chaque repas, il est présenté un remerciement au Grand Esprit. Le petit déjeuner terminé, l'ancien monte sur la chaire, et tient un sermon à toute la famille qui est toujours très nombreuse - famille qui cependant sur les montagnes dépasse très rarement les cent personnes, alors que dans les plaines, on trouve parfois dans une famille plusieurs milliers de personnes. -9Mais qu'expose donc l'orateur à ses auditeurs ? A cet égard, je peux vous dire qu'il ne vient jamais à se trouver dans l'embarras, car en une semblable occasion comme en tant d'autres, l'esprit l'assiste toujours, lui suggère ce qu'il doit dire ; ordinairement cette espèce de conférence cette espèce de conférence a pour objet l'indication de méthodes merveilleuses adoptées par le Grand Esprit pour faire naître sur cette planète, déjà à l'origine le genre humain, et jusqu'au temps actuel, selon Sa très sage et sainte volonté. -10- En de telles occasions l'ancien raconte souvent l'une ou l'autre histoire des temps très anciens. Parfois il en vient à leur expliquer la constitution de leur planète, ou de l'anneau ou bien des divers satellites ; d'autres fois encore il se met à considérer telle ou telle étoile, et explique à ses auditeurs les systèmes de guide établis sur ces astres par le Grand Esprit tout-puissant ; et c'est en de semblables occasions que lui de temps en temps fait aussi allusion durant son discours à votre Terre ; et quand il est fait mention de la Terre, toute l'assemblée se prosterne immédiatement sur le sol, non pas par déférence extrême pour entendre nommer cette planète, mais bien plutôt parce que en relation avec cette même planète, il leur est toujours donné d'entendre quelque chose au sujet de l'amour infini du Grand Esprit. Car l'amour du Grand Esprit et le fait que Lui est appelé par les habitants de la Terre : Père, et invoqué comme Tel, sont pour les habitants de Saturne quelque chose de si indiciblement sacré, qu'à en entendre parler, ils sont toujours saisis comme par un frisson de fièvre, et en particulier si l'ancien leur rappelle en outre l'ingratitude démontrée par l'humanité de la Terre. -11- En une autre occasion il donne aux assistants des explications au sujet du monde de l'esprit et de la vie dans les Cieux; et après chaque prédication de cette espèce - en particulier si elle a eu pour objet la constitution de leur planète, de l'anneau, des satellites et des autres planètes - il suscite en un nombre tantôt plus grand, tantôt moindre de ses auditeurs, également la vision intérieure, de sorte que ces derniers réussissent à voir clairement toutes ces choses comme si elles étaient partout physiquement présentes. -12- Mais c'est aussi la raison pour laquelle les habitants de Saturne, spécialement ceux qui demeurent sur les montagnes, sont des gens très sages et doués de très nombreuses connaissances et même de tant, que même le plus fameux de vos savants viendrait à se trouver mal en point s'il voulait s'engager dans une discussion scientifique soit même avec un tout petit d'entre les habitants de Saturne ; car en premier lieu ils connaissent avec exactitude - en ce qui leur est nécessaire et utile - non seulement leur planète, mais bien encore d'autres corps de l'univers leur sont plus connus que ne vous sont connues les îles des océans de votre Terre. -13- En second lieu, ils sont parfaitement versés dans l'histoire de leur monde, comme dans celle de divers autres mondes ; également, aucun langage ne leur est étranger, et par conséquent ils comprennent immédiatement tout autre esprit, quel que soit le corps de l'univers dont il provient, en dépit que chaque esprit emporte avec lui-rêne dans l'au-delà plus
ou moins les particularités du langage de ce monde sur lequel il a vécu corporellement ; ce qui par exemple, quand il s'agit des esprits de votre Terre, n'est par contre pas le cas tant qu'ils ne sont pas complètement régénérés en l'esprit et rendus mûrs pour le Ciel. -14- IL arrive souvent qu'après le trépas, des esprits de cette Terre se rencontrent avec des esprits de Saturne ; les esprits de Saturne alors comprennent immédiatement ceux de la Terre ; tandis qu'est très rare le cas où il arrive la même chose aussi vice versa ; et quand il s'agit d'esprits encore non mûrs, ce cas ne se vérifie jamais. Ainsi également les esprits de la Terre ne peuvent pas voir ceux de Saturne avant que ceux-ci ne veuillent se montrer à eux ; la raison de cela est elle-aussi à rechercher dans la grande et réelle sagesse intérieure des esprits de Saturne. Et ce sont là les fruits des sermons et des enseignements que notre prédicateur donne à la famille dans le temple, après que le repas ait été terminé. - Mais qu'arrive-t-il ensuite après la prédication ? -15- Eh bien voici : le peuple rend grâce au Grand Esprit pour la sagesse accordée à leur ancien qui remercie lui-aussi; et après l'action de grâces il bénit toute l'assemblée ; puis tous sortent du temple, font en commun des promenades sur les belles hauteurs et ils s'entretiennent, soit sur l'objet de la récente prédication, soit en faisant toutes sortes de considérations sur l'un ou l'autre phénomène naturel qui leur tombe sous les yeux ; et tous sont animés d'une grande cordialité les uns envers les autres et prennent réciproquement une vive part à quoi que ce soit que l'un ou l'autre réussisse à trouver d'intéressant, en en tirant toujours un argument pour louer et glorifier le Grand Esprit. -16- Ainsi par exemple, l'un attire l'attention de l'autre sur la construction d'une fleur, un autre sur le mouvement d'un petit nuage, un troisième sur un animal ou bien sur le vol d'un oiseau ; puis quelqu'un entend le premier le chant de quelque chanteur ailé et attire là-dessus l'attention de ses propres voisins ; ou bien quelqu'un d'autre aperçoit à distance le scintillement d'un lac ou d'un fleuve ; en somme sont innombrables les phénomènes et les objets sur lesquels en de semblables occasions les habitants de Saturne arrêtent leur attention et, ce faisant, ils sont portés à s'exclamer presque comme eut à s'exclamer autrefois l'homme selon mon cœur après avoir contemplé Mes œuvres. -17- Certes, Moi aussi Je vous dis : "Qui regarde avec de tels yeux Mes œuvres, celui-là en retire sans faute un plaisir immense ; mais qui les regarde par contre seulement avec un œil de critique et de savant, ferait mieux de rester allongé sur sa litière sans rien regarder, plutôt que de tourmenter Mes œuvres de son œil impur et profanateur. Mais laissons de côté ces considérations et revenons à nos habitants de Saturne qui sont en train de se promener. -18- Combien de temps donc dure cette promenade au grand air ? Elle se prolonge jusqu'à midi ; après quoi tous rentrent dans le temple ; là a lieu à nouveau une action de grâce au Grand Esprit, et ensuite dans les vestibules du temple-même est consommé le repas. Celuici terminé, le remerciement est renouvelé, mais personne ne s'éloigne plus. Certains vont se promener par les très belles avenues du temple en prenant plaisir à la vue des fleurs splendides et variées dont sont riches les magnifiques parterres plantés en ces vastes vestibules et le long des avenues du temple. -19- Les femmes s'occupent affectueusement de leur mari et de leurs enfants, et de leur voix très douce racontent tout ce qu'elles ont appris de bon, de vrai, de beau et de noble durant le sermon de l'ancien, de même que durant la promenade au grand air. Parfois, dans de semblables occasions, à ces conversations s'associent visiblement aussi des esprits et des anges, qui s'entretiennent avec chacun en causant de choses qui concernent le Grand Esprit. Mais dans des occasions de cette sorte quelquefois apparaît parmi eux même le Seigneur en Personne, généralement sous l'apparence d'un ange.
-20- Tant qu'Il demeure avec eux et qu'Il s'entretient tantôt avec l'un, tantôt avec l'autre, nul ne sait, pas même l'ancien, se trouver en la présence du Seigneur. Seulement quand Il veut mettre fin à Sa présence visible parmi ceux qui sont assemblés, alors seulement Il se fait reconnaître, mais ensuite Il disparaît immédiatement ; car les habitants de Saturne ne seraient pas en mesure de supporter plus longtemps la présence reconnue du Seigneur, étant donné que leur vénération pour Lui est si grande, que nul n'oserait jamais prononcer Son Nom en restant debout; car le commandement : *Ne pas prononcer en vain le Nom de Dieu*, bien que non donné littéralement à eux, est observé sur Saturne de la manière la plus exacte. -21- Jusqu'à quand se prolonge cette conversation dans les vestibules du Temple ? -Jusqu'au coucher du Soleil ; après quoi, tous retournent dans le temple, et un chœur de louange et de glorification au Grand Esprit y est entonné. Puis l'ancien monte à nouveau en chaire, rappelle aux assistants tous les innombrables bienfaits de cette journée, les bénit, et avec cela la cérémonie de fête prend fin ; et chacun, le cœur rempli de gratitude et de joie, revient en sa demeure. Si du repas sont restées encore quelques provisions, celles-ci sont fraternellement partagées et consommées dans l'enceinte du temple ; si par contre il n'est rien resté, le souper est pris dans les demeures respectives et ensuite a lieu une action générale de grâces au Seigneur. -22- Ainsi se termine le jour de fête, et avec cela aussi toute cérémonie, car en réalité cela ne consiste en rien autre qu'en ce que vous avez appris à l'instant. Et voilà que pour aujourd'hui notre tâche est achevée ; la prochaine fois nous nous réservons de traiter la partie typiquement spirituelle.
CHAPITRE 37 -1Etant donné que l'autre fois nous avons appris à connaître le cérémonial en ce qu'il a un rapport avec l'éducation spirituelle des habitants de Saturne, comme déjà établi antérieurement nous passerons à considérer la partie vraiment spirituelle en dehors du cérémonial. -2Si vous avez suivi avec l'attention voulue la description du cérémonial, vous devez de toute façon avoir déjà formulé en vous la pensée suivante : Cette cérémonie qui, autant qu'elle dure est honorée de la présence d'esprits angéliques, et même bien souvent du Seigneur en Personne, qui s'entretiennent directement avec les participants, est déjà en soi tellement spirituelle, que nous ne saurions en vérité imaginer plus de spirituel. En effet, quoi de plus spirituel pourrait-il y avoir encore ? -3Mais Je vous dis : Restez tranquilles pour le moment, parce que la suite vous enseignera comment en quelque chose de déjà spirituel peut toujours se cacher quelque chose de plus spirituel encore. Mais afin que déjà dès maintenant vous puissiez au moins relativement vous faire une idée de la façon dont cela est très bien compréhensible et donc possible, Je vous en ferai une démonstration moyennant un exemple naturel. -4Admettons que vous preniez un récipient rempli de vin assez bon ; qui de vous pourra ne pas comprendre immédiatement et se convaincre avec son propre palais que ce vin est certainement très spiritueux, et même en mesure extraordinairement particulière ? Mais pour ce motif le vin n'a-t-il pas en lui réellement aucune autre chose qui soit plus primordialement spiritueuse encore que le vin lui-même ? -15- Eh bien, il suffit que vous en parliez au premier pharmacien que vous rencontrerez, et il vous répondra : Par suite de la distillation, on peut retirer de ce vin le plus excellent éther ; et à son tour on peut le rectifier même plusieurs fois ; de sorte qu'un tel esprit finit par se rendre si volatilisable qu'une goutte versée hors du récipient laissée tomber même d'une seule demi-toise de hauteur, disparaît complètement avant d'avoir atteint le sol. -6Eh bien, vous voyez maintenant combien de gradations du spirituel, et chacune plus spirituelle que l'autre, sont déjà contenues dans le vin de par lui éminemment spirituel ? – Mais si un fait se manifeste déjà dans la matière naturelle visible, d'autant plus se manifesterat-il déjà dans la nature typique et particulière de l'esprit lui-même. Il n'en arrive pas autrement, par exemple, de la lumière. Vous voyez certes que la Terre est éclairée par les rayons du Soleil mais êtes-vous capables de voir en ces rayons l'énergie vivifiante et les innombrables formes qui toutes existent dans la lumière ? -7En vérité, vous ne distinguez même pas la simple force agissante du rayon, et beaucoup n'en savent pas plus que ce que leur enseigne l'expérience journalière, c'est-à-dire que le rayon n'est apte à obtenir aucun autre effet calorifique supérieur en dehors de celui qu'il a provoqué jour après jour. Mais que dira ensuite quelqu'un en constatant l'action des rayons, quand ceux-ci moyennant un grand miroir ardent sont concentrés en un point, et qu'ils se révèlent avec tant de puissance au point de dissoudre en un instant même un diamant très dur ! -8Certes, un semblable profane, qui ne sait que peu ou rien des effets de la lumière, se prendra la tête entre les mains et dira : "Oh, qui aurait jamais pu même imaginer que derrière les rayons solaires qui chaque jour nous accordent leur douce tiédeur, puisse se cacher une semblable puissance vraiment incompréhensible !" Vous voyez, il n'en va pas
autrement des choses relatives à l'éducation spirituelle de nos habitants de Saturne, choses que désormais vous connaissez déjà. -9Bien que cette éducation apparaisse déjà en soi faite de tant de spiritualité, il y a cependant encore caché à l'intérieur un éther d'extraordinaire importance, qui moyennant la concentration de ses substantiels rayons de lumière obtient des effets intérieurs d'une force à grand-peine compréhensible pour vous ; et ainsi nous pouvons maintenant sans autre sérieusement poser la question et demander : En quoi donc consiste le vrai spirituel en ce spirituel déjà existant ? -10- Le spirituel véritable en ce spirituel que vous connaissez déjà, se trouve dans la connaissance intérieure, vivante, du Grand Esprit, de mêm que dans celle de toutes les gradations, les rapports et les relations conformes à l'ordre qui unissent très étroitement et très intimement l'être humain libre avec les Cieux et avec le Grand Esprit Lui-même, et vice versa. -11- Comment ces êtres humains connaissent-ils donc le Grand Esprit ? D'abord ils sont instruits grâce à l'enseignement extérieur, c'est-à-dire, moyennant les paroles de Sa Doctrine de Vérité ; puis ils sont guidés vers la connaissance de la Volonté du Grand Esprit ; et enfin à l'application de la volonté reconnue; vous voyez, tout cela constitue encore une éducation spirituelle extérieure, qui est seulement la voie qui conduit à la Vraie Vie spirituelle intérieure, ou bien, autrement dit, est en soi déjà un vin spiritueux, c'est-à-dire une lumière solaire non encore concentrée. -12- Par suite, l'exercice de la volonté reconnue du Grand Esprit est semblable à la distillation et à la rectification de l'esprit de vin effectuées par le pharmacien, et est encore semblable à la concentration des rayons solaires moyennant un grand miroir ardent, ou bien, dit en d'autres termes : c'est le processus de libération vraie, et opérant indépendamment, du véritable être spirituel primordial, de la matière qui l'enveloppe. -13- Commencez-vous maintenant à entrevoir en quoi consiste réellement la véritable éducation spirituelle de nos habitants de Saturne ? A ce propos, je ne vous dirai qu'une seule parole, mais elle sera suffisante pour vous ouvrir d'un coup le seuil de la lumière; or cette parole c'est : La Régénération de l'esprit ! Vous voyez, cela nécessite qu'elle se manifeste chez les habitants de Saturne tout autant que chez vous ; sans cette régénération, l'habitant de Saturne ne peut pas non plus comprendre - comme vous ne le pouvez pas vous non plus - ce qui est de l'esprit, ni tous les rapports et les relations qui existent entre lui, les Cieux et le Grand Esprit. -14- Aux fins de la régénération de l'esprit il ne suffit absolument pas de posséder uniquement la faculté de voir les esprits, comme le cas n'est pas rare sur votre Terre où l'un ou l'autre a de ces apparitions - et pour certains même inspirant angoisse et épouvante - mais desquelles on ne comprend jamais plus qu'un aveugle ne peut comprendre les couleurs. Cependant pour la complète et vraie régénération il ne faut pas tellement la vision formelle, que la claire certitude que chaque action est empreinte précisément de ces caractéristiques qu'elle avait quand à l'origine elle fut fondée dans l'ordre et la sagesse de Dieu. -15- Or, comment et quand peut-on vérifier cela ? Seulement lorsque l'esprit, par l'exacte marche sur les voies de Dieu prescrites, s'est d'abord rectifié à partir de la matière, et s'est ensuite retrouvé lui-même en se concentrant comme en un point focal, et enfin, comme une entité complète et parfaite existant désormais en soi, est totalement sorti du royaume des sens de la matière, et a tout à fait résolument et parfaitement ouvert ses nouveaux sens aux impressions et aux rapports de ce monde dont il est lui-même en particulier un habitant primordial.
-16- Lorsque l'homme a atteint ce degré, en tout son être commence à se manifester une autre activité ; sa vision se fait différente, de même que son audition et ses sensations; toutes ses pensées se modèlent en des formes qu'il peut contempler, et sa volonté devient fait accompli ; ses paroles se font positives et précises et s'unissent à la pensée et à la volonté; l'espace n'a plus rien à faire avec lui, et le temps a battu pour lui l'ultime seconde ; car dans l'existence libre spirituelle il entend, voit, sent, perçoit, pense, veut, œuvre et parle au-delà et en dehors du temps et de l'espace, c'est-à-dire que pour lui il n'existe qu'un immense présent à l'intérieur duquel un passé éternel et un éternel avenir se tendent amicalement la main ; et pour son œil une chose qui du point de vue du sens se trouve même infiniment loin, est au contraire aussi proche qu'est proche sa propre pensée. -17- Vous voyez, à cet état spirituel chaque habitant de Saturne aspire et tend de toutes ses forces ; cependant il ne l'atteint pas avant d'avoir complètement accompli en lui toutes les conditions de la vie. Mais pour l'accomplissement parfait il n'est pas suffisant seulement de faire violence à sa propre nature, mais bien plutôt il convient que toutes ces conditions de la vie connues de lui s'élèvent à un degré d'habileté et d'aisance tout à fait propre et particulier. -18- Seulement quand il s'est fait maître parfait en toute chose, alors il est en luimême libre, et toute sa puissance vitale peut jaillir unie hors de son royaume des sens. Cet acte de renaissance accompli hors des sens, est alors en lui remplacé automatiquement par cet état que vous connaissez déjà sous l'expression : Régénération de l'esprit. Par conséquent le fidèle et continuel exercice en toutes les conditions de la vie est justement ce qui a relation avec la partie spirituelle éducative de nos habitants de Saturne. -19- Vous comprendrez à présent déjà un peu mieux quelle signification peut avoir l'éducation spirituelle auprès des habitants de ce monde, et comment elle se distingue de l'éducation littérale. Vous voyez donc, derrière l'éducation spirituelle littérale se cache le service de l'esprit qui est ininterrompu, alors que l'éducation spirituelle n'a lieu qu'en certaines périodes de temps. Mais puisque précisément cette partie éducative de nos habitants de Saturne est pour vous-mêmes de la plus grande importance, Je veux vous fournir encore un exemple évident moyennant lequel vous pourrez distinguer clairement l'une et l'autre de ces deux espèces d'éducation. -20- Considérez par exemple le cas d'un garçon qui voudrait apprendre l'un ou l'autre art - mettons la musique - pour devenir un parfait virtuose; comment vous comporteriez-vous s'il s'adressait à vous ? Certainement, vous l'examineriez pour en constater les dispositions et la capacité d'oreille, vous l'enverriez ensuite en quelque bonne école et vous lui feriez état des nécessaires conditions ainsi que des sacrifices pour devenir un musicien expérimenté ! Mais que fera alors l'élève qui aspire sérieusement à devenir un virtuose ? -21- Pour s'acquitter de cette tâche il consacrera toute sa diligence naturelle extérieure unie à sa volonté intérieure, il s'exercera chaque jour, cinq, six oui sept heures conformément aux prescriptions, achèvera de A à Z toutes les études et abandonnera tout autre exercice ou toute autre distraction qui ne soit pas parmi ceux qui lui ont été indiqués carme les seuls aptes à lui faire atteindre son but. -22- Mais quand de cette manière, l'élève, après plusieurs années d'infatigable travail, sera devenu un artiste parfait, vous-aussi vous pourrez lui rendre l'agréable témoignage qu'en lui s'est effectivement mûri le virtuose, étant donné que désormais il sera en état de maîtriser son instrument aussi bien mécaniquement que spirituellement de manière parfaite en tous les degrés de la technique musicale et du sentiment. Vous voyez, avec cela nous avons déjà ce qu'il nous faut.
-23- Que représente donc l'exercice prescrit pour l'obtention de la perfection technique ? Eh bien, il ne représente rien d'autre que la partie pratique bien ordonnée de sa culture artistique. Mais s'est-il peut-être exercé sans interruption jour et nuit ? - Certes non, mais bien seulement durant le temps journalier prescrit ; mais quel caractère avaient à cet égard sa volonté et ses aspirations ? - Etaient-elles peut-être aussi partagées en périodes ? Oh, absolument pas ; celles-ci étaient au contraire actives de manière ininterrompue dans son organisme naturel et spirituel, comme un excellent ressort toujours sous tension. -24- Or ce ressort, ou cette impulsion, constitue justement le sentiment inspirateur culturel et artistique de notre élève musicien, par l'effet duquel seulement il devient vraiment et réellement ce qu'il s'était proposé de devenir. Mais devenu un vrai et parfait artiste, de quelle vie vit-il ensuite ? Celle de l'élève, certes non, mais bien celle du maître libre ! Et alors se pose-t-il peut-être en ennemi de sa première vie d'élève ? Jamais de la vie, mais bien plutôt, en grand maître qu'il est devenu, il fait toujours encore avec un véritable plaisir ce qu'il faisait quand il était simple élève ; c’est-à-dire, qu'il joue toujours avec diligence les diverses gammes et répète tous les exercices du temps où il étudiait seulement ; mais avec quelle différence ! -25- Ce que, auparavant, comme élève, il avait fait péniblement, avec de la fatigue et avec l'emploi énorme d'énergie, il le fait maintenant avec beaucoup de facilité, de souplesse, de précision et avec une parfaite expression intérieure spirituelle. En élève il jouait certes les gammes, mais sans savoir quelle signification elles pouvaient avoir ; en tant que maître par contre, il aperçoit dans les mêmes gammes une quantité innombrable de nouvelles formes dont auparavant il n'avait aucun sentiment. Et ainsi arrive-t-il qu'en maître régénéré, il s'exerce certes lui-ainsi à un culte artistique et technique ; mais ce culte pour lui maintenant correspond non à une seule technique, mais à entendre, à voir, à percevoir, à penser et à vouloir, d'une manière tout à fait différente; et c'est là *l'esprit rectifié*, et en même temps *le point focal* où convergent les rayons de son esprit ; et *point focal* dissolvant tout ce qu'il y a de matériel, de lourd et de sensuel ; mais par la suite, considéré en soi-même c'est un *Amateur purement spirituel*. -26- Appliquez maintenant ce qui a été dit, il y a peu, à la propre vie de l'homme, que ce soit un habitant de la Terre, de Saturne, de Jupiter ou du Soleil, et l'on verra que pour lui il y a toujours et partout ces deux espèces de service divin, qui se tiennent en rapport entre eux, comme la route se trouve au but en possibilité d'être atteinte par la route elle-même. -27- Qui a parcouru tout le chemin avec une grande ténacité, celui-là est aussi arrivé au but; mais une fois qu'il est arrivé au but, le souvenir du chemin parcouru lui restera toujours présent et ne s'effacera pas de sa mémoire ; et même, quand il sera arrivé au but, il aura dans son esprit la vision parfaite du chemin parcouru, ainsi que de tous les tournants et des rapports du chemin lui-même. -28- Vous savez quel est le but principal que nos habitants de Saturne se sont proposés en s'acheminant par leur voie, but qui n'est constitué par rien autre que le Grand Esprit Même, afin de pouvoir devenir parfaitement UN avec Sa Volonté. Une fois qu'ils ont atteint ce but, moyennant leur diligent exercice, même la culture éducative spirituelle se trouve achevée ; et à partir de ce moment la véritable impulsion vers l'unification avec la volonté du Grand Esprit cesse, et à cette impulsion fait place par contre la grande et inébranlable aspiration à Lui rester toujours fidèles ; et ce désir constant et inébranlable et précis constitue ensuite en chaque habitant régénéré de Saturne, le service divin le plus profond de l'espèce spirituelle la plus parfaite. A ce très haut état de perfection peuvent parvenir tous les êtres humaine de n'importe quel âge, et ceci est en même temps tout ce qu'il y a à dire au sujet de la partie éducative spirituelle des habitants de Saturne.
-29- Si l'on considère donc que de cette façon nous aurions vu tout ce qu'il était nécessaire de voir sur les montagnes, nous passerons brièvement en revue aussi les choses qui concernent les plaines ; et ensuite nous donnerons un coup d’œil aux régions polaires de cette planète, à son anneau et à ses sept lunes ; de sorte que pour aujourd'hui nous mettons un point !
CHAPITRE 38 -1Pour ce qui concerne la plaine, ou mieux, les régions les plus plates de Saturne, déjà en plusieurs occasions nous avons appris l'un ou l'autre fait se rapportant à la teneur de vie de ces habitants ; par conséquent il ne nous restera que peu de choses encore à mentionner. -2Des vraies villes comme il y en a chez vous, sur cette planète il n'y en a en aucun lieu ; malgré cela, ici et là, en particulier dans les régions proches des lacs et des fleuves de moindre importance, les familles demeurent plus près les unes des autres que sur les hauteurs, spécialement dans les parties méridionales de certains continents ; seulement, elles ne demeurent pas ensemble aussi nombreuses dans une même habitation comme sur les hauteurs, parce que là toute une famille consiste d'ordinaire en deux parents et leurs enfants, tandis que les aïeuls et les bisaïeuls vivent ordinairement seuls en compagnie de quelques personnes de service. En outre ces habitants demeurent rarement sur l'un ou l'autre des arbres que vous connaissez déjà, mais bien plutôt leurs demeures consistent en général en une espèce de campement fait d'arbres appuyés les uns sur les autres, et en particulier de la manière suivante : -3Les arbres sont ainsi disposés pour former une pyramide à base circulaire, et ensuite, en commençant de la terre jusqu'au sommet, ils sont tenus solidement au moyen de bardeaux tout autour. Ces bardeaux sont enfin recouverts de toutes sortes de feuillage, tant à l'extérieur qu'à l'intérieur ; vers l'Orient on laisse libre une surface appropriée de cette paroi voûtée pour entrer et sortir ; après quoi la demeure est déjà belle et bien prête. En ce qui concerne la capacité, en une semblable demeure ne peuvent certes pas trouver refuge autant de gens que sur l'un des arbres-habitation des montagnards que nous connaissons ; cependant une tente de cette espèce - nous l'appellerons ainsi - a cependant tant de capacité que vous pourriez en faire un logement assez commode pour dix régiments de vos soldats. -4La disposition interne de ces demeures est parfaitement identique à celle des demeures vivantes sur les montagnes, c'est-à-dire, qu'elles sont pourvues d'une couchette commune en forme de pyramide graduée à large base avec devant un rehaussement circulaire qui sert de table ; et c'est là toute la disposition interne de la demeure. En ce qui concerne ensuite les autres choses à usage domestique, comme : outils, ustensiles, vaisselle, vêtements et provisions de bouche, tout cela est conservé et gardé dans des magasins affectés à ce but, magasins qui dans les plaines sont aussi construits de la même manière que sur les montagnes. -5Les temples sont eux-aussi édifiés exactement comme sur les montagnes, seulement ils ne présentent pas cette magnificence particulière aux temples des hauteurs ; en outre dans les plaines le temple est en commun pour plusieurs familles. Tel serait donc là tout ce qui a une relation avec l'architecture dans les plaines, sauf encore quelques jardins d’ornementation qui d'ordinaire sont la propriété de quelques patriarches privilégiés. Comment sont ornés ces jardins, vous l'aurez déjà appris quand on parla des animaux pourvus de coquille, et en particulier des escargots. Ici et là, il y a aussi dans les jardins des maisons faites avec ces coquilles d'escargots, à l'intérieur desquelles les enfants demeurent pour leur amusement. -6A qui revient ordinairement dans les plaines la charge de patriarche, cela aussi vous a déjà été expliqué ; il suffit que vous reveniez en pensée à ce que vous avez déjà entendu, au sujet de l'animal que nous connaissons avec la queue en forme de serpent et à
l’œil de feu, et vous vous trouverez devant le patriarche, c'est-à-dire devant le héros orné du manteau confectionné avec la peau de l'animal en question. -7Cependant, qu'un patriarche semblable, proclamé tel à la suite d'une entreprise héroïque de cette espèce, jouisse auprès du Grand Esprit de beaucoup moins de considération qu'un patriarche des hauteurs, il n'est pas nécessaire d'y réfléchir beaucoup dessus pour le comprendre ; d'un autre côté il n'est pas difficile de comprendre pourquoi les esprits angéliques n'ont absolument pas de rapports trop intimes, ni point fréquents avec un semblable patriarche endossant le fameux manteau ; et par conséquent il ne devra pas non plus vous sembler étrange si je vous dis que chez les habitants des plaines le sens du monde est beaucoup plus accentué parmi eux que chez ceux qui demeurent sur les montagnes sacrées. -8Ils sont, certes, de braves et bons frères, leur langage est bien souvent très sage, et c'est pourquoi ils s'estiment beaucoup plus éclairés et plus avisés que les habitants des montagnes ; mais lorsque, en dépit de toute leur sagesse, les choses commencent à aller mal, ils ne dédaignent pas d'entreprendre des excursions, ou mieux des pèlerinages sur les montagnes, où, comme vous le savez déjà, il leur est fait prendre qu'ils ne se trouvent pas sur la bonne voie. Et ainsi s'explique aussi le fait que, dans les plaines, on sache bien peu et très rarement quelque chose d'une révélation supérieure, exception faite seulement de ceux qui vraiment et tout à fait fidèlement ont puisé leur sagesse à l'école des montagnes. -9Dans les plaines, en particulier dans les régions des lacs et le long des grands fleuves, il est pratiqué avec diverses choses une espèce de commerce d'échange ; en général il s'agit d'objets d'ornementation que, comme vous l'avez appris, les femmes portent très volontiers. Parfois, il arrive aussi que l'un ou l'autre des marchands tente de recourir à des supercheries ; mais gare à lui si l'escroquerie est découverte. -10- D'abord il est mis mal en point par les femmes qui se mettent à l'égratigner dans tous les sens au moyen de toutes sortes d'objets pointus; et si après une leçon de cette espèce il est encore une fois taxé de la même faute, alors on équipe immédiatement un bateau, et le filou en compagnie de sa famille est relégué en quelque localité très éloignée où il est contraint de rester pendant un temps déterminé ; ou bien, selon la gravité de la seconde escroquerie, alors éventuellement même pour toujours. Ce genre de punition est appelé là : PURAK, c'est-à-dire, l'exil perpétuel. -11- A celui qui a été condamné seulement à l'exil temporaire, quand il part, il lui est permis d'apporter avec lui quelques graines de l'arbre à fruit en forme d'embarcation, afin qu'il puisse, une fois arrivé au lieu de l'exil, immédiatement semer, et avec le temps, le fruit étant mûr, apprêter son embarcation ; par contre, au condamné à l'exil perpétuel, il n'est pas accordé d'emporter avec lui de ces graines. -12- Toutefois, en ce qui concerne ces exilés à vie, il arrive d'ordinaire que les habitants des montagnes de l'un ou l'autre pays, moyennant les esprits, arrivent à la connaissance de leur misérable état ; alors, eux, au reçu d'une semblable nouvelle, se rendent immédiatement sur le lieu de l'exil, délivrent ces relégués et les amènent avec eux sur les hauteurs en en faisant souvent des gens excellents à tout point de vue ; et le cas n'est pas rare qu'il soit assigné à ces libérés tout bonnement en don l'une ou l'autre demeure sur les hauteurs. -13- Il arrive ensuite parfois que justement ces personnes qui les avaient condamnés à l'exil perpétuel, se mettent en voyage et arrivent sur les hauteurs où ils trouvent asile, ainsi qu'un accueil très amical, où ils sont aussi enseignés avec une juste éducation spirituelle. Et s'il arrive que, dans les amis qui les accueillent, ils reconnaissent ceux qu'ils avaient envoyés en exil, alors l'étonnement suscité par une telle constatation semble ne plus vouloir finir, étant
donné qu'ils ne réussissent absolument pas à comprendre comment, ceux qui maintenant leur offrent l'hospitalité, ont pu arriver jusque là-haut depuis le lieu où ils avaient été relégués. -14- Puis en de semblables occasions, il est aussitôt fait connaître à ceux qui se sont étonnés, comment au Grand Esprit sont possibles de très nombreuses choses, auxquelles la sagesse des habitants des régions des lacs et des fleuves a jusqu'à présent bien peu eu l'occasion de songer. Et ceux qui interrogent, en apprenant de semblables choses, pénétrés d'un profond étonnement, finissent d'ordinaire par se frapper la poitrine et par déplorer profondément les diverses idées stupides et folles qui, dans les plaines, sont prises pour sagesse ; après quoi ils sont à nouveau instruits et, avec beaucoup de sérieux, exhortés à bien vouloir, à leur retour dans les plaines, contribuer énergiquement à combattre et à extirper les nombreuses et diverses sottises ayant cours là-bas. Moyennant cette propagande, en plus d'un grand continent il est aussi déjà arrivé que les plaines se sont faites tout à fait semblables aux hauteurs ; malgré cela, ici et là, il y a encore toujours de nombreux pays qui se différencient de façon marquée des hauteurs. -15- En ce qui concerne ensuite le travail en général, les métiers et les industries, les procédés sont les mêmes des deux côtés, exception faite pour certains articles de luxe, qui certes ne sont pas produits sur les montagnes, où, même teindre artificiellement un fil est considéré comme un péché. -16- Le système nutritif est - sauf le lait de la grande vache - presque identique ; seules quelques familles des patriarches qui se font aménager leur villégiature de la manière que vous connaissez déjà, sur les grands rochers blancs qui font saillie hors des lacs, seules celles-ci pour leur amusement, prennent parfois plaisir en quelques gourmandises qui exigent certaines préparations spéciales et que réclame un peu plus le palais ; toutefois ces spécialités finissent d'ordinaire par produire des effets pas trop bons ; et c'est pourquoi il arrive aussi qu'ensuite plus d'un médecin à la langue savante viennent à se trouver extraordinairement occupés. -17- Nota bene : Il en arrive tout autant chez vous ; si vous adoptiez des systèmes de vie simples et conformes à la nature, et si vous mangiez les fruits de la terre, comme Je les ai préparés pour vous, à l'exception de quelques-uns qui peuvent être rendus plus doux moyennant la simple cuisson, de sorte que votre langage se trouverait de quatre mots plus pauvre, c'est-à-dire qu'il ne saurait rien d'un médecin, ni moins encore d'un médicament ou bien d'un pharmacien; et la non-connaissance de ces trois mots serait justifiée par ce qu'il n'aurait pu connaître le quatrième mot auquel revient vraiment la première place et qui est : la maladie. -18- Chez vous par contre jouissent d'une renommée les cuisiniers avec tous leurs artifices, et ceux-ci ne sont rien d'autre que des fabricants privilégiés de maladies. Après les cuisiniers viennent aussitôt derrière les médecins, puis les pharmacies qui sont des cuisines plus artificielles encore, et à partir de celles-ci, on produit des remèdes aptes à fixer la maladie, comme hôte permanent dans le corps d'un malade. - C'est donc, mais à un degré pas aussi élevé que chez vous, aussi le cas dans les plaines de Saturne ; et cela sert à expliquer pourquoi les habitants des plaines n'atteignent pas, et de bien loin, l'âge des habitants des montagnes. -19- En ce qui concerne la sépulture des dépouilles mortelles humaines, dans les plaines on suit deux procédés. Auprès de la meilleure partie des populations la sépulture arrive comme sur les hauteurs ; par contre, auprès des peuples qui ici et là ont une certaine croyance païenne, et qui estiment que l'anneau brillant de la planète est une espèce de divinité, la
sépulture revêt un caractère tout à fait différent. Ils chargent leurs morts sur leurs bateaux et avec ceux-ci s'avancent d'ordinaire en haute mer, en particulier si celle-ci n'est pas très éloignée de leur demeure. Arrivés au large, les corps des défunts sont simplement jetés dans l'eau sans autre cérémonie, et en de semblables occasions on trouve toujours immédiatement quelque tombeau vivant prêt à accueillir les cadavres avec une grande convoitise ; ce travail d'ensevelissement terminé, nos fossoyeurs refont sans retard leur chemin, et avec le retour chez eux toute la solennité funèbre prend fin. -20- En ce qui concerne les mariages, dans les plaines ceux-ci sont aussi célébrés devant le patriarche, seulement parfois avec quelque peu plus de faste extérieur. La procréation arrive parfaitement comme sur les montagnes ; il peut arriver cependant que parfois l'homme de la plaine ne possède pas à cet égard le degré nécessaire de foi et de puissance de volonté ; alors d'ordinaire il entreprend en compagnie de sa femme un voyage sur les montagnes afin de pouvoir là se fortifier dans la foi et dans la volonté. -21- La raison de cela, il n'y a pas besoin que Je vous l'explique davantage. Et telles seraient aussi, en ce qui concerne les habitants des vallées et des plaines de Saturne, les choses les plus remarquables et les plus dignes d'être mentionnées, sur la base des communications occasionnelles que vous avez eues et que vous connaissez déjà. Par conséquent nous laissons maintenant les pays vraiment habités de Saturne, et après avoir observé en passant les régions des neiges et des glaces éternelles de cette planète, nous nous élèverons un peu jusqu'à son anneau. -22- Déjà au commencement de ces communications il vous a été indiqué comment sur cette planète il n'y a rigoureusement que deux climats seulement, c'est-à-dire, l'un absolument tempéré, dont la zone inclue toutes les régions habitables, et embrasse dans l'ensemble beaucoup plus d'un tiers de la distance polaire. Cette zone des continents habitables est ensuite, tant dans l'hémisphère septentrional qu'en celui méridional, limitée de manière ininterrompue par 1'océan, duquel émergent, mais à de grandes distances des principaux continents, quelques terres du Mud, dont les extrêmes parties septentrionales, respectivement méridionales, sont d'ordinaire déjà recouvertes de glaces éternelles. -23- Naturellement il faut entendre la chose en ce qui concerne l'hémisphère septentrional, c'est-à-dire Nord et dans l'hémisphère méridional en la partie Sud ; comme il arrive sur votre Terre, où les régions polaires constituent le royaume des neiges et des glaces éternelles. Quel aspect ont donc ces régions polaires de Saturne ? A cet égard je peux vous dire qu'aucune imagination humaine, et pas même la plus grande puissance d'imagination d'un homme ne pourra jamais se faire même la plus petite idée de la façon dont ces régions polaires devraient se présenter à l’œil et aux sens naturels. -24- Le froid de ces régions polaires est tellement intense, qu'en comparaison de celui des régions polaires terrestres, il faudrait considérer ce dernier tout bonnement comme une température torride. Là, non seulement l'eau gèle au point de devenir dure comme le diamant, mais l'air même, quand le froid atteint son plus haut degré, se transforme en barres de glace qui bien souvent se dressent comme des tours pendant des milles dans l'éther ; par suite d'une telle énorme pression, très souvent en ces régions, l'air atmosphérique s'enflamme, si bien que sur des bandes de plusieurs milles le paysage apparaît comme enflammé, et le phénomène s'accentue toujours plus jusqu'à se transformer en explosions effectives très violentes. -25- Mais comme, en raison du froid intense, par suite d'une telle inflammation de l'air, il est soutiré à celui-ci en mesure plus grande encore son électricité, il arrive que le froid va aussi continuellement en augmentant, et ce durant une période de quinze années terrestres de suite ; durant la période la plus rude, qui dure le temps de huit années terrestres, les
explosions ne se manifestent plus pour la raison que l'air atmosphérique déjà avant s'est transformé en une masse parfaitement solide. -26- Passé cette période, la lumière du soleil recommence à produire ses effets et dissout progressivement l'air solidifié qui - lorsque le processus de dissolution est déjà un peu avancé - commence aussitôt à s'enflammer à nouveau ; et par l'effet de cet allumage et des explosions qui s'ensuivent, la dissolution de l'air congelé progresse toujours plus dans les régions de l'un ou l'autre pôle. -27- Ces régions épouvantables sont-elles peut-être aussi habitées ? Du point de vue naturel, absolument pas ; mais par contre d'autant plus de celui spirituel ; car la neige et la glace représentent ordinairement la prison d'esprits en quelque sorte agités ; donc, quand le froid est plus intense, derrière la manifestation naturelle extérieure du froid se cache l'action des esprits pacifiques pour abaisser l'excessive agitation des esprits du feu en calmant leur immense ardeur destructrice; par conséquent, chez vous quand le froid commence à s'intensifier, vous pouvez toujours en déduire que dans les respectives régions terrestres est aussi en train de se dérouler une action de la part des esprits de la paix, tendant à tempérer et à apaiser l'ardente agitation destructrice des esprits du feu. -28- Que ces esprits soient vraiment portés à tout enflammer et à tout détruire, vous pouvez le relever des fréquentes combustions de l'air dans les régions polaires ; cependant, d'autant plus de semblables esprits tendent à s'enflammer, avec une d'autant plus grande obstination ils sont comprimés et retenus prisonniers par les esprits de la paix ; et donc, d'autant plus le froid s'intensifie, d'autant plus étroite se fait aussi la prison de ces désastreux esprits du feu qui - après avoir expérimenté pendant plusieurs millénaires une prison de ce genre - finissent par se rendre et par donner congé à leur zèle enflammé, comme un nuage saturé d'électricité lorsque des vents froids viennent transformer son feu électrique en grêle, certes bien souvent nuisible. -29- Mais qui sont ces esprits polaires du feu sur Saturne ? - Vous ne devez pas penser qu'il s'agit peut-être d'esprits de défunts, mais il s'agit bien simplement d'esprits encore à l'état primordial avec lesquels est formée vraiment la planète toute entière, et qui, selon l'ordre exactement établi par le Grand Esprit, passent progressivement à l'existence libre jusqu'à atteindre la forme humaine. -30- Certes, il arrive parfois que des esprits de défunts - dès lors que durant le temps de leur vie naturelle ils aient donné des preuves d'être très vindicatifs - soient ramenés à un tel état naturel polaire. Mais une chose semblable sur Saturne se manifeste seulement de très rares fois ; alors qu'au contraire ce n'est pas si rare sur votre Terre. Toutefois, la différence entre ces deux espèces d'esprits tient uniquement en ce que les esprits des trépassés soumis à une telle discipline ne retournent plus à la vie naturelle à l'intérieur d'un corps ; tandis que c'est toujours le cas dès lors qu'il s'agit d'esprits encore à l'état primordial, qui doivent se revêtir complètement du naturel jusqu'à se rendre seulement ensuite aptes à passer dans une vie libre, indépendante, et avec cela aussi absolue ou bien séparée et distincte. Les esprits primordiaux de la planète Saturne sont précisément de nature telle, qu'ils tendent plus que d'autres à tout détruire ; raison pour laquelle plus d'un voyant antique de votre Terre eut à affirmer même que la planète Saturne mange ses propres enfants. -31- Par conséquent, ces esprits primordiaux doivent aussi, avec une d'autant plus grande ténacité et avec énergie être préparés par les esprits de la paix, qui eux ne sont plus des esprits primordiaux, avant qu'ils puissent passer à une vie à tous égards libre ; car si une telle mesure de précaution n'était pas observée, aucun soleil et aucune planète en tout l'univers ne seraient à l'abri de leur envie destructrice.
-32- Et pour ce motif la planète Saturne est aussi située loin du Soleil, afin que ses rayons ne puissent jamais engendrer sur elle une chaleur telle que l'on puisse la comparer à celle produite sur les planètes Jupiter, Terre, Vénus et tout à fait particulièrement sur Mercure, dont les habitants, même sur les calottes polaires respectives qui sont presque les seules peuplées, sont exposés à une chaleur presque de fournaise ; alors que sur Saturne, comme vous le savez déjà, là où elle est habitée il ne règne partout qu'un climat tempéré - et même ce climat déjà tempéré est en outre sauvegardé contre un excessif réchauffement moyennant l'ombre constamment projetée par l'anneau. -33- Bien que les habitants de Saturne ne posent jamais les pieds sur ces régions de glace, étant donné que rien ne leur inspire autant de crainte que la neige et la glace, crainte qui a généralement ses racines dans le vague souvenir de l'état spirituel primordial de leur être ; et malgré cela, eux, et en particulier les habitants des montagnes qui sont d'esprit plus éveillé, connaissent exactement les conditions de ces zones désolées. -34- Toutefois même les plus éveillés ne se réjouissent pas trop en considérant et en se représentant ces régions ; par contre, d'autant plus se réjouissent-ils, quand il s'agit de considérer l'anneau. La raison de cela vous apparaîtra clairement d'elle-même, quand prochainement nous parlerons justement de l'anneau. Par conséquent en ce qui concerne les régions polaires de Saturne il n'y aurait rien autre de particulier à mentionner, excepté peutêtre la circonstance que pour la Terre, lorsqu'elle se trouve à la plus grande proximité de cette planète les années sont d'ordinaire très mauvaises ; et ce, précisément pour le motif que le froid excessif aux pôles de ce corps de l'univers influe, métaphysiquement parlant, parfois jusqu'à plusieurs centaines de millions de milles de ce même corps de l'univers, comme une queue invisible de comète ; car, à l'intérieur de l'espace immense d'un système solaire, en fait de comètes, le nombre de bien loin le plus grand est celui des comètes négatives, lesquelles consument de manière si absolue tous les rayons qui tombent sur elles, que n'est réfléchi ni laissé passer pas même un tout petit atome. -35- De telles comètes se rendent visibles seulement lorsqu'elles sont progressivement déjà plus rassasiées ou saturées, et ont commencé à parcourir une orbite déjà plus régulière. Ces comètes sont très fréquemment les hôtes des diverses planètes, et elles se donnent à reconnaître à certaines époques et pour quelques instants seulement sous forme d'étoiles filantes, comme elles sont appelées. -36- Pour ce qui concerne ces comètes négatives, nous nous réservons de les étudier de plus près en une autre occasion, comme ce pourra être quand on parlera des soleils ; alors qu'ici nous en avons fait mention seulement en ce qu'il vous est donné ainsi la possibilité de relever jusqu'à quelle distance se fait sentir parfois l'influence du froid polaire de Saturne. -37- Ainsi donc nous en aurions désormais terminé avec la planète proprement dite ; et donc la prochaine fois nous tournerons notre attention vers l'anneau de la planète ellemême. En ce qui concerne la forme, la taille et la subdivision de l'anneau, il en a déjà été parlé au commencement de cette communication; il ne nous restera donc qu'à considérer les buts et la nature.
CHAPITRE 39 -1L'anneau est de par lui-même un corps de l'univers absolument compact et solide qui, du point de vue de la superficie dépasse de nombreuses fois la planète proprement dite ; et comme sa superficie est plus grande que celle de la planète, de même son volume est plusieurs fois plus grand. -2Sa superficie est-elle peut-être complètement plane, ou bien présente-t-elle au contraire des dénivellations en quelques endroits? L'anneau est-il, lui aussi, pourvu d'eaux et d'air atmosphérique ? - Eh bien voici : l'anneau possède à cet égard toutes les caractéristiques d'une planète; c’est-à-dire qu'il a des montagnes très hautes; il a même des grands lacs et des fleuves, et il est partout entouré d'air atmosphérique ; seulement, tant l'eau que l'air, sont sur l'anneau beaucoup plus légers et plus subtiles que sur la véritable planète. -3Pareillement il a aussi un mouvement de rotation sur son propre axe autour d'un centre qui coïncide avec le centre de la planète ; toutefois en ce qui concerne la vitesse, ce mouvement diffère de celui de la planète. Pour y voir plus clair, il faut comprendre ainsi : Dans le temps où la planète tourne presque deux fois autour de son propre axe, l'anneau interne qui consiste en vérité en deux anneaux tenus ensemble avec des sphéroïdes de section elliptique, accomplit à grand-peine un seul tour. L'anneau médian est animé d'un mouvement plus lent encore ; l'anneau externe ensuite, qui est aussi le plus grand, emploie pour tourner une fois autour de son propre axe presque sept jours de Saturne. -4Ici certes, pour qui ne connaît pas les lois physiques, il serait porté à demander : Mais pourquoi une telle différence de rapidité dans la rotation ? - Pourquoi tous les anneaux ne tournent-ils pas avec la même rapidité, et pourquoi, en général, n'ont-ils pas une vitesse de rotation égale à celle de la planète elle-même ? - Il suffit que vous considériez les diamètres des divers anneaux qui sont l'un plus grand que l'autre, et avec facilité il vous apparaîtra clairement pourquoi chaque anneau doit avoir une autre vitesse. -5Si par exemple l'anneau interne, avec son diamètre beaucoup plus grand que celui de la planète, avait la même vitesse que cette dernière, une telle vitesse devrait évidement le réduire en morceaux par suite de la force centrifuge qui se développe. De la même façon, si le second anneau, dans son mouvement de rotation, avait la vitesse du premier ou tout bonnement celle de la planète, lui-aussi serait envoyé en morceaux ; et d'autant plus ce sort devrait toucher l'anneau extérieur, c'est-à-dire le plus grand. -6Par conséquent la vitesse de rotation est calculée avec une exactitude mathématique, et chaque anneau tourne à une vitesse mesurée, afin qu'aucun morceau des anneaux ne puisse se détacher et se précipiter sur la planète par l'effet de la force de projection continuellement agissante ; mais d'un autre côté cette vitesse est tout aussi exactement calculée afin qu'aucune partie, ni de l'un, ni de l'autre anneau ne puisse être lancée tangentiellement à l'extérieur ; de sorte que, suite justement à une telle vitesse exactement établie, il est maintenu entre la force de projection et la force d'attraction propre à chaque anneau un constant rapport d'équilibre. -7C'est donc, parmi les nouveaux côtés dont peut être considéré l'anneau, celui qui se trouve sur le degré le plus bas, c'est-à-dire, le côté naturel. Et maintenant se présente la seconde question: En quoi cet anneau est-il utile à la planète ? - S'agit-il peut-être, comme divers savants l'ont affirmé, seulement d'une fantaisie du Créateur, ou bien, pire encore, d'un gros caprice de la prodigieuse nature ? Ou bien, l'anneau est-il peut-être la conséquence d'une
déficience soudaine de ressources chez le Créateur, Qui, dans l'acte de création de la planète a dû éventuellement interrompre Son travail tendant à la formation d'un monde spectaculaire, en le laissant ainsi inachevé, sauf à reprendre l’œuvre en des temps meilleurs ? -8Si l'une ou l'autre de ces versions a un fondement... ce que nous ferons suivre vous le démontrera aussitôt. - Dans le cours de la dernière communication vous avez déjà appris à quelle espèce appartiennent les esprits primordiaux de Saturne. S'il n'y avait pas l'anneau pour projeter sa propre ombre adoucissant continuellement la chaleur, alternativement, tantôt plus au nord, tantôt plus au sud, précisément sur ces parties de la planète où nécessairement devrait se former la zone torride, Je vous dis, Moi, qu'en peu de temps, tout un système solaire, et même à la fin tout un système enveloppe stellaire pourrait rendre témoignage de quel genre sont les esprits primordiaux justement de cette planète, et quelle puissance, quelle force et quelle violence leur sont propres. -9Que ce soit vraiment le cas, vous pouvez le déduire aussi du fait que chez les habitants de Saturne eux-mêmes doit être continuellement maintenu éveillé le sentiment du plus grand respect pour le Grand Esprit et de la plus grande obéissance envers Lui, et pour la même raison aussi en ce qui concerne l'amour, il ne leur est pas beaucoup prêché, mais bien seulement ce qui est nécessaire pour qu'ils le connaissent, mais en même temps ils sont éduqués pour la vénération suprême de l'amour. -10- Pour le même motif, sur Saturne aussi, l'amour conjugal et la procréation sont contenus à l'intérieur de certaines limites, de manière à éviter que l'esprit des individus ne vienne à se trouver dans un état de violente excitation ; tout est réglé au contraire et aplani au moyen de la plus grande humilité possible, choses que vous aurez déjà eu l'occasion de noter quand on parla de l'homme de Saturne. -11- Eh bien, vous voyez donc avec quelle exactitude a été placé l'amour en question autour de cette planète, et précisément au-dessus de son équateur ! D'un autre côté vous avez déjà admire la création entière sur la planète elle-même, depuis le règne végétal jusqu'à l'homme, et vous avez constaté comment toute la vie est enfermée à l'intérieur de corps gigantesques. Par conséquent, à l'esprit de plus d'un pourrait - et même devrait - se présenter la question : Est-ce que cela est réellement vrai ? - Mais s'il en est ainsi, dans quel but de semblables corps énormément grands, quand on sait que même l'Esprit Très-Haut a, certainement conformément à Son propre ordre, trouvé une place suffisante dans le corps de JESUS ? - Pourquoi donc les esprits des habitants de Saturne ont-ils des corps aussi grands ? -12- Ces corps gigantesques sont donnés, voyez-vous, justement à ces esprits pour le motif qu'ils ne doivent absolument être soumis à aucune pression interne de la part de la matière, qui pourrait faire pression sur eux depuis l'extérieur sur l'intérieur avec le danger de les exciter et de les enflammer. Pour cette raison aussi leur ont été donné des corps extraordinairement légers afin que leur esprit, facilement excitable, ne puisse rien trouver d'apte à opprimer leur nature et à les exciter, comme ce serait facilement possible, jusqu'à la combustion. -13- Imaginez-vous maintenant ces corps colossaux - et considérés en eux aussi relativement pesants - qui, par suite du volume énorme de la planète elle-même et de la force conséquente d'attraction beaucoup plus grande, devraient être beaucoup plus pesants encore par rapport à leur planète que des corps d'égale grandeur par rapport à la forte d'attraction de votre Terre, de bien loin plus petite ; mais serait-il de quelque utilité pour cette espèce d'esprits, s'ils étaient laissés dans leurs corps à un état d'énorme lourdeur ? -14- Vous voyez alors que Ma science est aussi placée un petit peu plus haut que celle de vos savants, et a précisément imaginé cet anneau, au moyen duquel la forte
d'attraction est tellement adoucie, que ces corps colossaux par rapport à leur planète se trouvent être presque cent fois plus légers que les vôtres par rapport à votre Terre de bien loin plus petite. -15- Eh bien, c'est encore un but extraordinairement important de l'anneau de Saturne, qui, bien qu'il puisse même sembler petit à l’œil armé d'un télescope, a cependant une importance tellement grande, qu'il peut être considéré non seulement comme un cercle jeté autour d'une planète, mais bien tout bonnement comme une robuste enceinte placée sur l'univers. -16- Et maintenant on demande : Ceci est-il le seul but, ou est-ce déjà le dernier but de cet anneau ? - Oh, certes non ! Nous aurons bientôt l'occasion de faire la connaissance d'une autre fonction confiée à l'anneau, fonction qui est de bien loin plus significative et plus importante que les premières. - Mais avant de passer à considérer en lui-même ce but principal, nous devons nous poser la question si cet anneau est habité ? -17- Et Moi, Je dis ceci : Si l'on attend que de cela ait à résulter un tel but principal, la réponse ne peut être qu'affirmative ; mais comment et par qui l'anneau est habité, c'est une tout autre question. Mais avant de résoudre ce nouveau problème, il convient que Je vous cite un exemple tiré de l'activité industrielle sur votre Terre, et précisément de celle de la production du verre. -18- Quand la matière première apte à produire le verre est dûment triturée et mélangée à la quantité appropriée de sel nécessaire, elle est déposée dans le creuset, et là, au moyen d'un degré convenable de chaleur, elle est réduite à l'état fluide. -19- Considérez maintenant la matière vitreuse fondue et brûlante ! Vous voyez, cet état est semblable à celui de l'homme de Saturne, alors qu'il se trouve vivre dans son propre corps sur cette planète. Qu'arrive-t-il ensuite de cette masse quand elle s'est faite suffisamment liquide ? Comme vous le savez certainement avec cette masse vitreuse sont fabriqués toutes sortes de récipients, et précisément moyennant le souffle des ouvriers à qui un tel travail est confié. -20- Et maintenant revenons de nouveau à l'homme de Saturne, et considérons-le à son stade suivant, c'est-à-dire, à celui d'être humain raffiné, transparent et spirituel, qui, par l'effet de la régénération réalisée, a déposé, on peut le dire, totalement son être matériel, en ce que son esprit a déjà pris une forme concrète. Quand le vase de verre, suite au soufflage, est achevé, il est détaché du tube auquel il est encore attaché, et dans un autre creuset il est porté dans le refroidisseur et il y est laissé pendant quelque temps. Mais voilà qu'ici nous trouvons déjà un point de contact avec notre anneau. -21- Quand l'homme de Saturne meurt, cet acte correspond d'une certaine façon à sa séparation du tube soufflant du Grand Verrier, et ensuite à l'intérieur d'un autre creuset l'homme lui-même est porté dans le refroidisseur. Eh bien, ce milieu réfrigérant est constitué justement par l'anneau! - Le premier anneau sert pour adoucir la chaleur initiale intense, le second pour continuer et compléter le processus de refroidissement, et le troisième et dernier pour accoutumer l'être au nouvel état, après quoi seulement chaque esprit humain de cette planète, s'étant ainsi rendu libre, devient apte à accueillir l'amour. -22- Je crois qu'après cet exemple il n'y aura plus besoin d'explications, étant donné qu'il est si évident qu'on peut le saisir avec la main ; seulement ici et là certains pourraient demander encore : Dans quel but pour de tels esprits un autre lieu de demeure matérielle ? Répondre à cette question est très facile ; parce que lorsque les esprits des humains de Saturne déposent le premier corps, ils ne se trouvent pas immédiatement en état de pureté spirituelle, ce qui peut se déduire aussi de la facilité avec laquelle ils réapparaissent, et aussi de la rapide
décomposition de leurs corps. Par conséquent de tels esprits à leur passage sur le grand anneau ont encore une espèce de corps matériel, qui certes est cependant beaucoup plus léger, plus subtil et plus pur que le corps qu'ils avaient auparavant sur la planète ; et même ce corps va se faire encore toujours plus pur et plus spirituel au fur et à mesure qu'il va monter aux sphères supérieures de l'anneau. -23- Ces habitants de l'anneau mangent et boivent eux-aussi, et vivent dans l'anneau précisément comme ils avaient vécu avant sur la planète ; seulement, tous les produits y sont plus délicats, plus subtils et plus substantiels, comme le sont aussi dans le même rapport les êtres humains eux-mêmes qui y parviennent. La différence entre la planète et l'anneau consiste donc uniquement en ce que sur ce dernier monde il n'existe plus d'animaux, mais seulement des arbres fruitiers, qui tous cependant ne portent pas de graines pour la propagation, mais bien plutôt poussent à partir du terrain, à peu près comme chez vous poussent les champignons. -24- Que de semblables habitants de l'anneau consentent à l'intime désir des habitants de la planète à pouvoir se rendre en personne pendant un court moment sur la planète-même, et même avec une rapidité déjà spirituelle, cela est démontré déjà par leurs multiples apparitions aux habitants de ladite planète. -Mais étant donné que les demeures et les conditions de vie des hommes-esprits sur l'anneau sont incomparablement plus splendides, plus nobles et plus agréables, il arrive que les esprits ne nourrissent jamais aucun désir de rester sur la planète plus longtemps qu'il n'est nécessaire conformément à la volonté du Grand Esprit ; et donc ils sont toujours infiniment heureux quand ils peuvent faire retour sur l'anneau. -25- Et avec cela vous connaissez maintenant tout ce qu'il est le plus nécessaire de savoir et qui le mérite, au sujet de l'anneau. La prochaine fois nous donnerons encore un coup d’œil aux satellites de ce corps de l'univers ; avec quoi les présentes communications concernant la planète Saturne sont finies.
CHAPITRE 40 -1En ce qui concerne les Lunes de Saturne, il doit d'abord être dit que la relation entre celles-ci et leur planète est presque identique à celle existant entre votre Lune et la Terre ; seulement là, il existe entre les diverses Lunes une certaine gradation que naturellement il ne peut y avoir chez vous, étant donné que la Terre n'a qu'une Lune. -2En ce qui concerne le mouvement de ces satellites, il est à noter que, eux non plus, n'ont pas un mouvement de rotation sur leur propre axe, mais qu'ils rentrent toujours la même face à leur planète. En conséquence de quoi leur habitabilité se présente aussi sous deux aspects, l'un naturel et l'autre spirituel. Il en résulte donc que chaque satellite, sur l'hémisphère constamment opposé de la planète est habité par des êtres humains et par des animaux, possède une végétation, de l'eau, de l'air atmosphérique et en général tout ce qui est nécessaire à la vie naturelle. -3Les êtres humains qui sur les satellites vivent de vie naturelle, sont certes beaucoup plus petits que ceux qui demeurent sur la planète ; et sur les satellites plus petits ils atteignent à grand-peine la taille que vous avez, vous. Certes, sur les trois derniers satellites, c'est-à-dire les plus éloignés et qui sont aussi les plus grands, les êtres humains sont plus grands que vous. -4Ces êtres naturels des satellites sont en continuelle relation spirituelle avec les véritables habitants de Saturne; et s'ils se trouvent maintenant sur les Lunes c'est pour le fait qu'ils n'étaient pas dignes d'être transférés immédiatement sur l'anneau ; de sorte qu'avant, ils doivent passer une certaine période sur l'un ou l'autre satellite convenant à leur constitution et à leur tempérament, ou même sur plus d'un, avant de pouvoir être accueillis sur l'anneau de rang le plus bas. -5Que font-ils sur les Lunes de Saturne ? - Et qui est-ce, qui est vraiment transféré ? - Sur les Lunes on fait émigrer les esprits affectés d'égoïsme et les païens, qui vivant sur la planète ont adoré et vénéré l'anneaux comme une divinité. Mais sur chaque Lune où ils commencent le nouveau stade de leur vie, en commençant toujours du côté naturel de la Lune elle-même, et au moyen et à travers les corps des humains naturels demeurant là, ils voient le naturel sur le satellite, de sorte qu'ils n'ont plus aucune vision de l'anneau qui auparavant avait été leur idole. -6Lorsque, par l'effet de cela, ils ont pour ainsi dire perdu l'habitude de la contemplation de l'anneau, et qu'ils ont donné congé même à l'idée de leur planète, alors seulement ils passent sur la face du satellite tournée vers la planète, d'où ils peuvent ensuite voir la planète ainsi que l'anneau qui leur apparaissent presque comme un seul corps. -7Seulement ainsi il commence pour eux à apparaître progressivement toujours plus clairement - et à cela contribue aussi l'enseignement de la part d'autres esprits supérieurs qui dans ce but se mettent en communication avec eux - comment l'anneau n'est en rien une quelconque espèce de divinité, ou le siège de quelque divinité, ou bien la voie sur laquelle avance le Grand Esprit dans les Cieux ; mais bien plutôt ils peuvent voir, de leurs propres yeux, qu'il s'agit seulement d'un corps de l'univers placé autour de la véritable planète, tout aussi matériel et solide que la planète elle-même, corps qui a été créé par le Grand Esprit afin que les esprits des êtres humains morts sur la planète puissent être préparés là à une vie supérieure, dont, à leur départ de la planète ils n'ont encore aucun pressentiment.
-8Quand ensuite de semblables esprits se sont convaincus de cela, soit à la suite des enseignements reçus, soit au moyen de leur propre expérience, ils répudient bien vite complètement leur erreur et s'informent avec beaucoup de sollicitude de la demeure du Grand Esprit. En ces occasions, il leur est cependant signifié, qu'à ce propos, ils obtiendront toute information sur l'anneau seulement quand ils se seront parfaitement approchés de l'état spirituel pur et qu'ils auront ensuite enfin fait complètement passage à un tel état. -9Alors naît en eux une grande envie de parvenir sur l'anneau et plus encore de passer à l'état spirituel pur ; puis, si des prémisses de cette sorte se manifestent, eux-aussi sont transférés immédiatement sur cet anneau. - Voilà que maintenant vous savez aussi cela. Cependant avec le temps pourrait se présenter à votre esprit la question suivante : "Pourquoi doit-il y avoir vraiment sept Lunes à cette fin ? -10- "Pour répondre à une semblable exigence, une seule Lune ne pourrait-elle pas suffire ?" - En ce cas Je devrais répondre ainsi : Certes, pour des esprits qui fussent d'une autre nature, il suffirait sans aucun doute d'une seule Lune ; mais pour les esprits de Saturne par contre qui dans le Grand Homme-esprit ont leur siège sous un genou, ceci n'est pas suffisant ; car les pieds, et respectivement les jambes sont le fondement de la vie du corps, et en ces membres ensuite, en particulier les articulations. -11- Si le corps est affecté, mettons dans un bras, ou bien si dans une quelconque partie du corps est lésé l'épiderme, le corps peut toujours se tenir encore debout, se déplacer et ainsi aller à la recherche d'aide ; mais si par contre il y a lésion grave à l'un ou l'autre pied ou bien à une jambe, et spécialement à l'une ou l'autre jointure, tout le corps en est comme paralysé ; il s'affaisse, et ne pouvant se déplacer, il ne peut même pas aller à la recherche d'aide ; et pour cette raison les pieds et les jambes ont dans le corps humain une structure plus robuste et plus solide que celle de n'importe quelle autre partie du corps. -12- Donc, étant donné que les habitants de Saturne constituent une partie très importante, c'est-à-dire, une partie d'une jambe du grand homme-esprit, partie située précisément sous le genou, comme vous en avez entendu parler plus en détails en diverses autres occasions, il est nécessaire justement pour ce motif, s'agissant des esprits des hommes de Saturne et en considérant chacun d'eux par rapport aux *sept espèces d'esprits*, il est nécessaire, dis-Je, de bien faire attention à quelle espèce d'esprit parmi les sept constituant chaque esprit particulier, vient à se manifester *la plus dangereuse* ; et si cette planète est pourvue de sept Lunes, c'est justement afin que dans l'un ou l'autre satellite, l'une ou l'autre espèce dangereuse d'entre les esprits dans un esprit puisse être réduite à la tranquillité et ramenée à l'ordre correspondant avec les six autres esprits. De ce qui vous est dit là, vous pourrez donc très bien vous rendre compte de la raison pour laquelle il a été assigné sept Lunes à Saturne. -13- Et maintenant vous êtes aussi au courant de tout ce qu'il est nécessaire de savoir au sujet des satellites. Les distances et leurs dimensions vous ont déjà été indiquées lors du début de cette communication ; par conséquent à ce propos il ne reste rien d'autre à dire. Et puisque nous avons appris à connaître aussi bien la planète que l'anneau, ainsi que les Lunes en dernier, on peut désormais considérer cette communication comme terminée. -14- Certes, quelqu'un doté d'une vue pas trop aiguë pourra ici demander : *A quoi vraiment peuvent être utiles de semblables communications sur la planète Saturne ?* - Mais à celui-là Je Me bornerai à répondre : En premier lieu, quiconque les a lues, qu'il voit comment les habitants de cette planète respectent Ma Volonté bien autrement que ne La respectent les humains de la Terre, et qu'il en prenne bon exemple ; en second lieu, que de l'ensemble de ces communications il se persuade combien Ma Sagesse, Mon Amour, Ma Puissance et Mes soins
paternels arrivent bien au-delà de ce que votre présomptueux intellect humain s'est même jamais sottement imaginé. -15- Et en troisième lieu, après avoir bien pesé ce qu'il a eu l'occasion d'apprendre, qu'il voit - et tous les humains de votre Terre aussi - si ce n'est pas le cas de se décider à la vraie et pleine humilité, à partir de laquelle il pourra relever clairement qui il est, lui, et QUI Je suis, MOI, son Dieu, Créateur et Père; et qu'il se frappe ensuite la poitrine et qu'il pense vraiment bien à quelle immense grâce et à quelle miséricorde il a été rendu participant en ce que Moi, l'Unique Seigneur et Créateur de semblables œuvres merveilleuses, Je Me sois ensuite complu à choisir la TERRE, cette minuscule et sale planète, pour lieu de naissance de Mon Amour infini, de Ma Miséricorde et de Ma Grâce ; et ainsi aussi enfin de toute la plénitude de Mon Être Divin ! -16- C'est pourquoi aussi Je Me réserve de vous décrire encore le Soleil et quelques autres planètes, peut-être pas avec autant de détails, mais cependant de manière claire et suffisamment concise ; et avec cette promesse que Je vous ai maintenant faite, que soit conclue aussi cette communication. QUE MA BENEDICTION, MON AMOUR, MA GRACE ET MA MISERICORDE L'ACCOMPAGNENT !
AMEN! ****************
Fin de traduction de l'Allemand en Italien, le 5/10/1932 - Salvatore Piacentini. Fin de traduction de l'Italien en Français, le 26/01/1990 - Noël Reynaud.