GRH Et Rse [PDF]

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Zitiervorschau

Gestion des ressources humaines et responsabilité sociale des entreprises  : éclairer des évolutions nouvelles à la lumière de questionnements anciens par Benjamin Dubrion3 Résumé L’objet de cet article est d’interroger les pratiques récentes croisant GRH et RSE. Nous montrons d’abord que les questionnements actuels autour de la «  gestion responsable des ressources humaines  » ne sont pas fondamentalement nouveaux, faisant écho aux interrogations menées il y a plus d’un siècle par certains auteurs américains. C’est alors à la lumière de ces interrogations que nous éclairons dans un deuxième temps la logique des pratiques actuelles de RSE instaurées en direction des salariés. Abstract The aim of this paper is to question the recent practices combining human resource management and corporate social responsibility. Firstly, we show that the current debates about “responsible human resource management” are not basically new, echoing the questions asked more than one century ago by certain American authors. Then, in the light of these questions, we try to shed light on the current practices of corporate social responsibility instituted toward employees.

Depuis quelques années, des recoupements prennent corps entre la gestion des ressources humaines (GRH) et la responsabilité sociale des entreprises (RSE). Au sein des entreprises, certaines firmes mettent en place des pratiques RH présentées comme «  socialement responsables  » et touchant les grands domaines classiques de la GRH. Ainsi que le soulignent Beaupré et alii (2008, p. 129), ni la communauté scientifique, ni les professionnels de l’entreprise n’ont encore cherché à relier de manière systématique GRH et RSE. Néanmoins, il semble que ces dernières années ont vu se multiplier les études visant à clarifier les relations qu’entretiennent ces deux champs d’analyse4. De nombreux travaux cherchent à identifier et analyser les pratiques actuelles de RSE relatives aux ressources humaines, regroupant ces pratiques en catégories qui peuvent certes être présentées différemment selon les auteurs, mais dont le contenu est sensiblement le même d’une étude à l’autre. A titre d’illustration, Fuentes-Garcia 3. Benjamin Dubrion, Maître de Conférences à l’IEP de Lyon, LEFI, Université Lyon 2, [email protected] 4. Voir par exemple et entre autres, Saulquin, (2004), Vuontisjarvi (2006), Fuentes-Garcia et alii, (2008) ou le numéro spécial de la Revue Internationale de Psychosociologie (2008).

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et alii (2008) identifient quatre catégories de pratiques : (1) celles renvoyant à la question du respect des droits humains au travail  ; (2) les mesures visant à améliorer la qualité de vie au travail, à stabiliser les emplois, ou trouver un meilleur équilibre entre travail et vie personnelle ; (3) les pratiques en direction des salariés des sous-traitants ; et (4) les actions cherchant à atténuer les effets négatifs des restructurations subis par les salariés. Le développement des pratiques des entreprises croisant GRH et RSE est tel que certains auteurs parlent aujourd’hui de pratiques de « gestion responsable des ressources humaines » ou « responsabilité sociale de l’entreprise envers ses employés » (Ramboarisata et alii, 2008, p.  226) consistant, pour les entreprises, à «  se préoccuper des attentes de leurs salariés et des enjeux les concernant (par exemple, la santé et la sécurité, le développement professionnel, la diversité de la main d’œuvre, etc) » (ibid.). Dans cette optique, il s’agit de partir de la RSE pour voir comment celle-ci peut, du point de vue des idées qu’elle porte, permettre de repenser la conceptualisation de la GRH et, du point de vue des pratiques, favoriser la mise en œuvre d’outils ou de dispositifs servant les intérêts de l’entreprise et pouvant dépasser la fonction instrumentale de la GRH pour mieux répondre aux attentes des salariés. L’objet de la présente contribution est justement de questionner la logique des pratiques de RSE à l’intention des salariés. Nous chercherons à éclairer les relations entre GRH et RSE à la lumière d’une grille d’analyse « institutionnaliste » – en référence à un groupe d’auteurs américains du début du XXème siècle – mettant au cœur de son raisonnement la question du conflit d’intérêt existant entre les membres de la relation d’emploi, et de manière plus générale entre le capital et le travail. Cette question est d’autant plus importante qu’elle est au centre des premières réflexions aux sources de la GRH d’une part, et en lien fort avec la littérature sur la RSE d’autre part. L’étude du conflit entre capital et travail structure tout particulièrement les premiers développements portant sur l’encadrement de la relation d’emploi qui sont à l’origine de la grille d’analyse que nous mobiliserons dans cet article  : l’étude des labor problems (Adams et Sumner, 1905). Les auteurs analysant les labor problems plaçaient au centre de leurs réflexions l’opposition d’intérêt entre capital et travail, et s’interrogeaient sur la manière de résoudre les conflits existant entre les membres de la relation d’emploi. Portées au départ par des réformistes sociaux et des révolutionnaires socialistes, les études sur les labor problems ont constitué des attaques importantes à l’encontre de la théorie économique classique qui cherchait à montrer que l’instauration d’un marché dérégulé du travail pouvaient constituer une solution efficace au conflit entre travailleurs et employeurs. La prise en compte du conflit capital-travail est aussi au cœur de l’objectif que s’est donnée à l’origine l’association académique de référence en management, 32

Gestion des ressources humaines et responsabilité sociale des entreprises : éclairer des évolutions nouvelles à la lumière de questionnements anciens l’Academy of Management (AOM). Dans la préface du premier numéro du Journal of the Academy of Management, l’éditeur en chef de la revue soulignait que le premier objectif de l’AOM est d’élaborer une « philosophie du management qui rendra possible l’atteinte des objectifs économiques et sociaux d’une société industrielle avec une plus grande efficience et efficacité  : l’intérêt général doit être fondamental dans une telle philosophie, mais une considération juste doit être portée aux intérêts légitimes du capital et du travail » (Dauten, 1958, p. 5-6). Or, plus de 50 ans après cette annonce, il semble bien que les ambitions sociales de l’AOM sont loin d’avoir été réalisées. C’est ce que montrent Walsh et alii (2003), soulignant que les études menées par les chercheurs mettent dans leur grande majorité l’accent sur la seule performance économique des entreprises, la dimension sociale n’étant vue que comme secondaire. Ils appellent alors les chercheurs à réintégrer le bien-être social dans leurs analyses (bringing social welfare back in) pour mettre fin à la l’idée selon laquelle « le champ [du management en tant que discipline académique] serait dominé par une impulsion à servir les intérêts du capital […], une simplification excessive qui paraît toutefois valide sous certains angles » (Walsh et alii, 2003, p. 861). Le développement de la littérature sur la RSE ces vingt dernières années constitue alors selon eux un moyen pour revenir aux aspirations initiales de l’AOM. Notre analyse des liens entre GRH et RSE sera ainsi traversée par la question du conflit au sein de la relation d’emploi et des moyens de résoudre les problèmes posés par celui-ci. Dans ce travail, nous procéderons en deux temps. D’abord, nous présenterons le cadre d’analyse des débats qui ont eu lieu au début du XXème siècle sur les labor problems dans la mesure où comme nous le verrons, les questions posées par plusieurs auteurs à l’époque font écho à celles abordées aujourd’hui autour de la RSE. C’est à la lumière de ce cadre que nous questionnerons alors, dans un deuxième temps, la logique des pratiques actuelles de RSE instaurées en direction des salariés.

1. RSE et labor problems : un « détour » par l’histoire Les débats qui ont eu lieu dès la fin du XIXème sur les modalités d’encadrement de la relation d’emploi ont largement été portés par des auteurs associés au courant institutionnaliste américain. Au croisement de plusieurs champs disciplinaires – notamment l’économie, l’histoire et le droit –, ce courant, qualifié aussi très souvent d’« ancien »5 institutionnalisme, a surtout été représenté par Thorstein Veblen et John Roger Commons. En réaction à la pensée économique classique, il se focalise sur l’analyse des institutions comme éléments orientant les comportements des individus et participant de la dynamique du capitalisme. En ce qui concerne l’étude de la relation d’emploi, les travaux de Commons 5. On parle d’« ancien » institutionnalisme, en opposition aux néo-institutionalismes que l’on peut repérer aujourd’hui en économie à la suite des travaux de Williamson, et en sociologie à la suite des travaux de Meyer et Royan. Pour une synthèse sur l’ancien institutionnalisme américain et son évolution, voir Hodgson (2004).

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constituent aujourd’hui une référence, notamment dans le cadre des débats portant sur les labor problems. A cet égard, du point de vue politique, les réflexions de Commons ont beaucoup inspiré les mesures de politique de l’emploi prises par Roosevelt dans les années 30, suite à la grande crise. Par ailleurs, du point de vue académique, les travaux de l’auteur ont largement contribué à la constitution du champ des « relations industrielles » – associé à des auteurs comme Dunlop, Lester, Myers et Reynolds – qui a culminé dans les années 1950 (Kaufman, 1993). C’est d’ailleurs dans la lignée des débats initiaux sur les labor problems que l’on peut situer les complémentarités et oppositions qui existent aujourd’hui entre les champs de la gestion des ressources humaines et des relations industrielles6. Retracer dans notre travail le contexte et les débats qui ont eu lieu il y a un siècle sur les labor problems repose sur un postulat : le recours à l’histoire – en particulier ici des idées – peut être bénéfique pour mieux comprendre et donner un sens à certaines transformations actuelles. En effet, les relations qu’entretiennent aujourd’hui GRH et RSE ne sont pas sans rappeler des discussions anciennes sur certaines transformations rencontrées aux Etats-Unis à partir de la fin du XIXème siècle. D’une part, la période qualifiée aux Etats-Unis de Progressive Era – s’étalant de la fin des années 1880 à la fin des années 1920 – est importante à cet égard. C’est en effet à la fin de celle-ci que plusieurs grands patrons américains ont proposé des pistes visant à prendre en compte l’intérêt général dans la conduite des affaires économiques (Heald, 1961). D’autre part, c’est tout au long de cette période que s’est développée l’idée de responsabilité sociale des entreprises envers les salariés, idée largement avancée par les auteurs du courant économique institutionnaliste américain étudiant la relation d’emploi7. Ainsi, si on considère généralement l’ouvrage de l’économiste H.  R.  Bowen (1953), Social Responsabilities of the Businessman, comme le travail séminal sur la RSE, il semble que la question de la responsabilité sociale des entreprises à l’égard des travailleurs soit bien antérieure aux années 1950, comme nous allons le montrer maintenant.

1.1. De la responsabilité individuelle à la responsabilité sociale des entreprises vis-à-vis des salariés Dans un article révélateur des changements que connaissent les Etats-Unis du début du XXème siècle, l’économiste institutionnaliste J. M. Clark (1916) identifie les grands traits d’une forme nouvelle de responsabilité qu’il voit émerger dans le monde économique8. Il constate un déplacement d’une responsabilité individuelle étroite vers un sens de la solidarité et de la prise en compte des autres, une évolution allant, pour reprendre ses termes, «  de l’individualisme 6. Voir à ce titre le numéro spécial de la Human Resource Management Review (2001). 7. Dans son « regard historique » sur la RSE, Pasquero (2005) identifie justement l’« économie critique dite institutionnaliste » (p. 83) comme participant aux origines américaines du concept de RSE, sans toutefois creuser amplement l’argument. 8. John Maurice Clark, souvent moins connu que son père, est le fils de John Bates Clark qui a beaucoup œuvré au développement du marginalisme aux Etats-Unis. Le parcours plus hétérodoxe du fils s’explique pour une large part par l’influence des travaux de Veblen, qu’il a eu comme professeur.

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Gestion des ressources humaines et responsabilité sociale des entreprises : éclairer des évolutions nouvelles à la lumière de questionnements anciens vers le contrôle public, de la responsabilité personnelle vers la responsabilité sociale » (1916, p. 210). Cette « nouvelle idée de responsabilité », « encore en enfance  » (p.  210), prend sens en opposition aux thèses libérales du laissez faire qui ont dominé le XIXème siècle. En séparant artificiellement les affaires économiques du reste de la société, celles-ci ont véhiculé l’idée que l’échange marchand entre deux individus n’a pas ou peu d’effets sur les autres individus. Contre cette affirmation qu’il dénonce comme aboutissant à une véritable « économie de l’irresponsabilité » (p. 218), Clark cherche à identifier les causes des changements en cours et s’interroge sur la capacité de l’Etat, via le droit, à réguler à lui seul les situations dans lesquelles les entreprises font prévaloir leurs intérêts propres aux dépens de la société. Soulignons d’emblée que la nouvelle forme de responsabilité que Clark voit émerger n’est pas strictement définie dans son travail. Il constate plus qu’il n’analyse son développement au sein du monde économique, posant notamment la question – que l’on retrouve au demeurant aujourd’hui chez de nombreux analystes de la RSE – de la confiance à accorder aux entreprises qui proclament prendre en compte l’intérêt général dans la conduite de leurs activités. Ainsi qu’il s’interroge : « Si seulement nous pouvions croire en de telles entités pour agir vraiment dans l’intérêt général, et non simplement pour éliminer la concurrence pour leur propre bénéfice […] ! » (Clark, 1916, p. 227). Notons par ailleurs que la responsabilité sociale des entreprises sur laquelle Clark se focalise est éminemment plus restrictive que celle que l’on rencontre aujourd’hui dans la littérature. Son approche, tout comme celle de nombreux auteurs de l’époque, reste principalement limitée à la responsabilité sociale des entreprises vis-à-vis de leurs salariés. C’est donc la question de la relation entre employeurs et employés qui est au centre de ses interrogations. Ceci apparaît clairement à travers les exemples qu’il donne pour illustrer les évolutions en cours, au niveau sociétal mais aussi interne aux firmes en matière de responsabilité des entreprises. Au premier niveau, il mentionne la responsabilité de ces dernières par rapport aux accidents du travail, aux retraites et au chômage. Au niveau de l’encadrement de la relation d’emploi interne aux entreprises, il fait référence aux pratiques de gestion des salariés, et en particulier aux pratiques d’embauche, de promotion, de rémunération/sanction et de licenciement. Celles-ci étaient selon lui auparavant largement arbitraires, brutales, et aux seules mains de contremaîtres autocrates. Il constate qu’elles sont de plus en plus mises en œuvre par des spécialistes qui, dans leurs décisions de gestion, sont amenés à traiter avec des syndicats. Ces problèmes sont aussi abordés par Commons (1919) qui s’interroge plus généralement sur le sens des nouvelles pratiques de gestion des salariés portées notamment par le développement du « management scientifique ». Le point de départ plus général des réflexions des économistes institutionnalistes sur la responsabilité sociale des entreprises à l’égard des salariés est l’étude de 35

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ce que les auteurs appelaient à la fin du XIXème siècle les labor problems. C’est le cadre d’analyse de ces problèmes que nous allons maintenant présenter dans la mesure où il éclaire, comme nous le verrons, le sens des pratiques actuelles de RSE mises en œuvre à l’intention des salariés.

1.2. Débats autour des labor problems 1.2.1. L’étude des labor problems Dans l’histoire des entreprises, la fin du XIXème siècle est marquée aux EtatsUnis par un développement industriel sans précédent, porté d’une part par la constitution de vastes firmes dominant certains secteurs clés de l’économie, et d’autre part par une vague de fusions très importante. Les grosses firmes ont un pouvoir tel que, se sentant menacé, le pouvoir politique va chercher à limiter leur concentration (cf. le Sherman Anti-Trust Act, 1890). C’est dans ce contexte que le syndicalisme va fortement se développer aux Etats-Unis, dénonçant le développement de conditions de travail exécrables et la responsabilité des entreprises à cet égard. Dans le monde universitaire, des études et enquêtes vont alors être menées pour rendre compte de ces situations et voir comment elles peuvent être solutionnées, dans le cadre de ce que les auteurs appellent le ou les labor problems (Barns, 1886). L’étude des labor problems repose sur le postulat d’existence d’un « sinistre antagonisme » (Waterworth, 1886, p. 17) entre capital et travail, l’enjeu étant de trouver les moyens/dispositifs visant à résoudre le conflit d’intérêt supposé inhérent au capitalisme entre employés et employeurs, et améliorer les conditions dans lesquelles la grande majorité des travailleurs exercent. Des cours sur les labor problems sont ainsi instaurés dès la fin du XIXème siècle dans plusieurs universités américaines (Kaufman, 2000), donnant lieu à la publication de différents ouvrages. La référence incontournable sur la question est le manuel de Adams et Sumner (1905)9. Perçu au début du siècle comme « l’une des plus importantes contributions récentes à la littérature économique américaine  » (Seager, 1905, p.  565), cet ouvrage définit les labor problems comme «  le problème d’amélioration des conditions d’emploi de la classe salariale » (Adams et Sumner, 1905, p.  3) qui prend sa source dans trois «  institutions  »  : (1) le système salarial lui-même, qui fait de chaque travailleur un « marchand » de ses propres compétences  ; (2) le système de la manufacture (factory system), qui est directement responsable du développement des labor problems  ; et (3) la permanence ou l’invariabilité du statut de salarié, qui fait qu’un « salarié restera toujours un salarié » (p. 5) et qu’il est quasiment impossible pour lui de sortir de cette situation (ibid., p. 3-6). 9. Mc Nulty (1980) compare l’importance qu’a eu, au début du XXème siècle, l’ouvrage de Adams et Sumner Labor Problems : A Text Book, à celle de l’ouvrage de référence de Samuelson en économie générale : « Aucun manuel dans le champ d’étude du travail n’a eu d’impact aussi fort que celui de Adams et Sumner. Le manuel de Adams et Sumner a été à l’étude du travail au cours des années 1920 ce que celui de Samuelson a été depuis les années 1950 à l’introduction à l’économie. Beaucoup ont cherché à faire de même, mais aucun n’est parvenu à le remplacer » (p. 151).

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Gestion des ressources humaines et responsabilité sociale des entreprises : éclairer des évolutions nouvelles à la lumière de questionnements anciens Même si la question de la responsabilité sociale des entreprises telle qu’elle peut être appréhendée aujourd’hui sous ses trois grandes dimensions économique, sociale et environnementale ne constitue pas un objet d’étude en soi pour les analystes des labor problems, elle est toutefois abordée quand il s’agit d’analyser la responsabilité des entreprises vis-à-vis de leurs salariés. Les entreprises étant le lieu où naissent les labor problems, le problème de leur responsabilité dans le traitement des travailleurs qu’elles emploient est pleinement posé. La liste des labor problems identifiés par les auteurs du début du siècle est toujours sensiblement la même, mais présentée de différentes manières dans les ouvrages traitant de la question (Adams et Sumner, 1905 ; Watkins, 1922). Adams et Sumner (1905) identifient quatre grands labor problems, très peu éloignés des thématiques que cherchent justement à traiter les pratiques actuelles de GRH dites responsables : (1) le problème du travail des femmes et des discriminations qu’elles peuvent rencontrer relativement aux hommes, ainsi que le travail des enfants, (2) le problème de la discrimination au travail des personnes immigrées, (3) le problème de l’exploitation (sweating system) de la main d’œuvre et enfin, (4) celui de la précarité de l’emploi et du chômage. Ces quatre problèmes sont analysés séparément dans les quatre chapitres de la première partie de l’ouvrage, la seconde partie traitant des solutions à ces problèmes. 1.2.2. Quelles solutions aux labor problems ? La résolution des labor problems fera l’objet de nombreux débats jusque dans les années 1930. Parmi les contributeurs à ces débats, un groupe d’économistes institutionnalistes, réunis autour de J. R. Commons à l’Université du Wisconsin, a joué un rôle fondamental à deux niveaux : au niveau de l’analyse empirique des labor problems d’une part – de nombreuses enquêtes de terrain ayant été menées (cf. par ex. Commons, 1921) –, et au niveau des propositions politiques de leur résolution d’autre part – Commons ayant fait partie de nombreuses commissions d’experts et de groupes rédacteurs de lois sur le travail. A côté des universitaires, des praticiens du monde de l’entreprise participaient eux aussi aux débats. Il pouvait s’agir de consultants en « administration du personnel » comme Tead et Metcalf (1920) ou d’ingénieurs de production, comme par exemple Taylor (1895)10. Les solutions aux labor problems sont nombreuses et discutées. Adams et Sumner (1905) en repèrent sept (la possibilité de grèves et boycotts, le syndicalisation des travailleurs et des employeurs, l’intervention d’agences privées ou publiques de conciliation comme des tribunaux spécifiques, les méthodes de partage du profit, la mise en place de coopératives, la formation des travailleurs et la loi). Les débats ayant eu lieu au début du siècle font émerger un consensus à la fin 10. Dans l’un de ses premiers articles, justement intitulé « A Piece Rate System, Being a Step toward Partial Solution of the Labor Problem », Taylor (1895) cherche à montrer en quoi le système de paiement à la pièce peut apparaître comme un dispositif spécifique, internes aux entreprises, de résolution partielle des labor problems.

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des années 1920, consensus portant sur trois grandes catégories de solutions (Kaufman, 2000). La première catégorie défend la nécessité du syndicalisme et de la négociation collective. Dans cette voie, qui repose sur la reconnaissance de l’inégalité de pouvoir de négociation entre employeur et employé, les salariés doivent s’unir pour négocier collectivement leur salaire et conditions de travail. La seconde approche défend l’idée que c’est à l’Etat d’intervenir, par des lois protectrices des travailleurs et par l’instauration d’un système de protection sociale. Enfin, la dernière perspective tend à évacuer l’importance donnée aux syndicats et à l’Etat au profit de la mise en place discrétionnaire, par l’employeur, de règles spécifiques de gestion des salariés et de méthodes de travail particulières. C’est dans la lignée de cette approche que vont se constituer progressivement les services d’« administration du personnel » et que va s’autonomiser du point de vue académique la « gestion des ressources humaines » – « administration du personnel » à l’époque – comme discipline à part entière. Dans l’ensemble de ces propositions, deux groupes d’individus ont eu tendance à s’opposer, les «  internalistes  » de la Personnel Management School, et les «  externalistes  » de la Institutional Labor Economics School (Kaufman, 1993). Les membres de la Personnel Management School, surtout des consultants et ingénieurs, défendaient un point de vue «  internaliste  » au sens où pour eux, les solutions efficaces sont celles qui sont mises en oeuvre en interne, au sein des entreprises, par leurs membres eux-mêmes et sans qu’un tiers ne vienne interférer sur leur choix. Ces praticiens de l’entreprise voyaient dans les méthodes de gestion du personnel et d’organisation de la production qui se mettaient en place au début du XXème siècle un moyen efficace de résoudre les labor problems et de créer une unité d’intérêt entre travailleurs et employeurs. Ils avaient tendance à rejeter la négociation collective et les interventions de l’Etat, prônant une démarche non pas politique mais scientifique de résolution des problèmes. L’alignement des intérêts du capital et du travail et, au sein de la relation d’emploi, des employeurs et des travailleurs, était possible dans leur optique. Il suffisait de trouver les bonnes pratiques de gestion. De l’autre côté, les économistes de la Institutional Labor Economics School portaient un point de vue mettant plus en avant l’importance du conflit employeursemployés, celui-ci étant vu comme consubstantiel à la relation d’emploi. Leur approche était plus « externaliste » au sens où les solutions aux labor problems ne proviennent pas de l’intérieur de l’organisation mais de l’extérieur, en particulier par l’intervention de l’Etat. Les employeurs ayant par nature un pouvoir sur les salariés, l’objectif est alors de rééquilibrer la relation, surtout via les syndicats et la loi. La solution majeure avancée par ces économistes consistait, pour reprendre la formule de Kaufman (2003, p. 5), à remplacer les « rules by men » par des « rules of law ». Ceci ne signifie toutefois pas qu’ils étaient forcément contre les solutions managériales aux labor problems. La position de Commons a quant à elle évolué au cours du temps, avec notamment une « parenthèse » dans les 38

Gestion des ressources humaines et responsabilité sociale des entreprises : éclairer des évolutions nouvelles à la lumière de questionnements anciens années 1920, années durant lesquelles justement, plusieurs chefs d’entreprises ont proposé des pistes à la construction d’une doctrine sur la RSE (Heald, 1961). Lors de cette décennie, suite à plusieurs enquêtes et visites d’entreprises, Commons apparaît comme un promoteur de l’approche « internaliste » défendue par les praticiens d’entreprise (Commons, 1919, 1921)11. Mais dans les années 1910 et celles suivant la crise de 1929, il sera au contraire un réel défenseur des syndicats, de la négociation collective et de l’intervention de l’Etat, évacuant le rôle des solutions managériales (Kaufman, 2003).

2. Donner un sens aux pratiques de RSE l’égard des salariés : éclairage à partir des labor problems Les débats sur la résolution des labor problems nous semblent pouvoir être mobilisés pour éclairer les interrogations suscitées par le développement actuel de pratiques RH présentées comme « socialement responsables ». Cet éclairage sera fait ici en deux temps. Nous nous focaliserons d’abord sur la question du conflit d’intérêt existant entre les membres de la relation d’emploi. Nous limiterons alors notre raisonnement à la question de la réconciliation possible des intérêts des seuls employeurs et salarié qui pourrait être permises par les pratiques de gestion responsable des ressources humaines. Puis, dans un second temps, l’intégration des effets de la prise en compte d’autres parties prenantes sera développée dans une optique non exclusivement centrée sur les relations entre employeur et employé. C’est alors la question du caractère régulatoire de la RSE qui sera posé, à partir de l’opposition entre solutions internalistes et solutions externalistes traversant les débats sur les labors problems.

2.1. Les pratiques de RSE à l’égard des salariés : une solution au conflit d’intérêt des membres de la relation d’emploi ? En écho aux débats opposant les membres de la Personnel Management School et de la Institutional Labor Economics School, plusieurs observateurs contemporains des pratiques de RSE envisagent celles-ci comme un moyen de réconcilier les intérêts des différentes parties prenantes. Ainsi, pour certains, le développement des pratiques de RSE à l’égard des salariés conduirait à un jeu à somme positive, une stratégie « gagnant-gagnant » pour l’employeur et le salarié. Dans son bilan des discours et pratiques de GRH en lien avec la RSE, Saulquin (2004) rejoint cette conception. Il souligne en effet que la mise en place de telles pratiques n’est pas simple. Mais, selon lui, « on ne peut l’envisager qu’en abandonnant l’idée d’une opposition radicale entre l’économique et le social. Il s’agit […] d’éviter les tensions entre des partenaires aux intérêts en apparence 11. Le lecteur intéressé pourra consulter l’étonnant chapitre intitulé « L’opportunité du management », issu d’un travail collectif mené sous la direction de Commons (1921) et au sein duquel l’auteur apparaît comme défenseur des pratiques managériales comme solutions efficaces aux labor problems. Il écrit notamment : « ce n’est pas grâce à la force aveugle supposée par les socialistes ni grâce à l’impuissante confrontation de l’offre et de la demande que le capitalisme peut se soigner lui-même ; c’est grâce au management » (Commons, 1921, p. 272).

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conflictuels »12, ajoutant plus loin que « contrairement à une idée assez répandue, la maximisation de la richesse de l’actionnaire n’est pas contradictoire avec la satisfaction des autres partenaires, les salariés notamment » (p. 2481). On retrouve cette «  philosophie fédératrice  » (Saulquin, 2004, p.  2480) chez plusieurs dirigeants d’entreprise (Barthélémy et Douënel, 2008). Pour eux, dans les conflits opposant, selon leurs termes, les intérêts du capital à ceux du travail, ou les intérêts des dirigeants – au service des actionnaires – à ceux des salariés, l’économique doit primer sur le social au moins au départ. C’est en effet une question de viabilité pour l’entreprise. Mais par la suite, les politiques de RSE vont permettre de réconcilier ces oppositions. Franck Riboud, PDG de Danone, note à cet égard : « Moi, je ne veux pas devenir l’abbé Pierre ou une ONG […]. Je ne fais pas d’humanitaire, je ne fais pas de charité, je ne suis pas Saint Franck » (ibid., p.  121). Mais il souligne que «  parce que l’entreprise est basiquement l’endroit où ils [les salariés] passent le plus de temps dans leur vie, je trouve normal de se donner pour mission leur épanouissement dans l’entreprise  » (p. 112). Les pratiques de RSE envers les salariés s’avèrent selon lui répondre en partie à cet objectif, dans un sens qui, pour reprendre une de ses expressions, « est à l’opposé de la lutte des classes » (ibid., p. 118). L’idée selon laquelle les pratiques de RSE à l’égard des salariés auraient tendance à réconcilier les intérêts de l’entreprise et de ses travailleurs et à faire émerger des solutions profitables à tous n’est pas neutre. L’opposition vue précédemment entre les types de solutions aux labor problems débattues au début du XXème siècle en témoigne. Appliquée à la question de la relation d’emploi, l’idée d’une réconciliation possible des intérêts des employeurs et des employés tend à amoindrir, sinon à occulter, l’existence de conflits entre les membres de cette relation. Elle fait bien écho à la remarque précédente du PDG de Danone sur l’existence d’une lutte des classes, mais entre en contradiction avec celle d’un syndicaliste avançant au sujet de la RSE : « pour nous, la responsabilité, c’est de reconnaître que le conflit est naturel » (Barthélémy et Douënel, 2008, p. 271). Par ailleurs, cette croyance n’est pas dénuée d’idéologie. D’un point de vue historique, l’expansion importante de la thématique RSE depuis la seconde guerre mondiale n’est pas indépendante de valeurs idéologiques portées par certains hommes d’affaires et relayées au sein d’écoles et d’instituts de formation au management (Spector, 2008). Ces éléments expliquent en partie le développement, surtout dans la littérature gestionnaire anglo-saxone, de travaux visant à tester les liens existant entre les politiques de RSE et les performances économiques des entreprises, afin de justifier l’intérêt de telles pratiques pour ces dernières, mais aussi pour les salariés eux-mêmes. En effet, montrer que les politiques de RSE peuvent avoir un impact positif sur la profitabilité de firmes permettrait de mieux asseoir leur rôle et validerait les ������������������� . Nous ���������������� soulignons.

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Gestion des ressources humaines et responsabilité sociale des entreprises : éclairer des évolutions nouvelles à la lumière de questionnements anciens croyances de leurs promoteurs. Appliquée à la relation d’emploi, ces politiques justifieraient ainsi l’amélioration du traitement des salariés par la mise en place des pratiques « responsables » de GRH, tout en faisant en même temps progresser les performances économiques de l’entreprise : la solution, en quelque sorte, au problème de conflit des membres de la relation d’emploi. Il existe aujourd’hui un nombre très conséquent de travaux visant à tester la nature des liens existant entre RSE et profitabilité. Gond et Igalens (2008) évaluent à plus de 160 leur nombre et soulignent que sur les études menées entre 1972 et 2002, environ une étude sur deux montre une relation causale positive entre la corporate social performance et la financial performance. Par son ambivalence, ce résultat éclaire peu la capacité des études à montrer effectivement que les politiques RH dites responsables ont un effet positif sur les performances économiques des firmes. Ceci est d’autant plus vrai que dans leur manière de « mesurer la RSE », les études le font très différemment entre elles – ce qui rend difficile leur comparaison –, mais surtout, elles ne se focalisent pas sur la seule dimension RH, bien au contraire. Elles semblent plutôt privilégier des critères sociétaux et environnementaux, justement aux dépens des critères RH. Ainsi que le notent Allouche et alii (2005, p. 187), « ce qui devrait faire l’objet initial sinon principal des préoccupations en termes de Responsabilité Sociale des Entreprises [à savoir la prise en compte de critères RH] est pour ainsi dire laissé hors du champ de la mesure et le screening des investisseurs socialement responsables est détournée vers le reste : critères moraux d’exclusion, critères environnementaux, critères sociétaux, etc ! ». Dans ce cadre, les perspectives qui consistent à présenter les pratiques de RSE à l’égard des salariés comme des moyens efficaces d’atténuer l’opposition d’intérêt existant entre les membres de la relation d’emploi paraissent discutables. Si certains travaux récents ne valident qu’en partie l’existence d’un véritable business case pour la RSE, la question selon laquelle ils ne font finalement qu’apporter un « vernis scientifique » à des problèmes qui sont d’abord et avant tout politiques reste posée. Cette question, que nous allons plus amplement aborder, entre en résonance forte avec les débats ayant eu lieu au début du XXème siècle sur les labor problems. En effet, les membres de la Personnel Management School avaient tendance à rejeter les solutions politiques, au profit de celles présentées comme scientifiques. Cette problématique ressurgit et est amplifiée lorsque l’on dépasse le niveau d’analyse des seuls intérêts des employeurs et salariés pour intégrer d’autres parties prenantes et poser la question plus générale de la dimension régulatoire de la RSE. C’est ce qu’il nous faut voir maintenant, notamment à la lumière du cadre théorique contemporain proposé par Tsoukas (1999).

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2.2. La RSE en tension entre solutions « internalistes » et solutions « externalistes » Nous l’avons vu, deux grands types d’approches pouvaient être distingués au début du XXème siècle pour résoudre les labor problems, le point de vue «  internaliste  » d’une part, celui «  externaliste  » d’autre part. Analysant les grandes évolutions de la littérature portant sur la relation d’emploi depuis les années 1960, Mitchell (2001) a récemment montré en quoi ces deux vues sont d’une actualité forte pour rendre compte des oppositions structurantes entre différents champs d’analyse, en particulier l’étude des relations industrielles et la GRH. Cet auteur définit alors l’approche internaliste comme celle qui « décrit les problèmes de la relation d’emploi ainsi que ses solutions comme des éléments générés à l’intérieur de l’organisation », en opposition à l’approche externaliste qui « tend au contraire à se focaliser sur les forces externes – les marchés, la politique gouvernementale, les normes sociales – comme éléments de départ, […] les solutions envisagées relev[ant] des domaines de la politique de régulation publique » (Mitchell, 2001, p. 376). Cette distinction peut être utilisée pour situer les pratiques de RSE mises en place en direction des salariés dans un cadre plus large que celui de l’étude du conflit d’intérêt entre employeur et salarié vu précédemment. Nous soulevons donc plutôt ici la question du caractère régulatoire de la RSE dans un contexte qui a beaucoup évolué ces quarante dernières années. En effet, le délitement du « compromis fordiste » s’est réalisé sous l’effet de plusieurs éléments qu’il nous faut présenter ici pour mieux contextualiser le problème. Trois transformations importantes peuvent être mises en avant. D’abord, le modèle-type de l’entreprise multinationale a beaucoup évolué avec la mondialisation. La multinationale-type des décennies d’après-guerre, caractérisée par un fort degré de centralisation et de contrôle des opérations des filiales, a été progressivement remplacée par une firme multinationale qualifiée de « globale » ou «  mondialisée  » et marquée par un degré moindre de centralisation et un contrôle beaucoup plus diffus. Murray et Trudeau (2004, p. 17) identifient différents facteurs expliquant ces changements comme l’intégration accrue des marchés régionaux nationaux comme l’ALENA ou l’Union Européenne, la diminution des droits de douanes encouragée par l’OMC, le développement des investissements directs à l’étranger, un libre accès facilité et une mobilité accélérée du capital, l’effet des nouvelles technologies de l’information en matière de circulation du savoir. En matière productive ensuite, le processus de désintégration verticale qui s’est étendu à partir des années 1980 a conduit à l’émergence de formes d’organisations productives dites « en réseau » et pour lesquelles les frontières des firmes sont devenues de plus en plus floues (Bartlett et Ghoshal, 2002). Ce phénomène 42

Gestion des ressources humaines et responsabilité sociale des entreprises : éclairer des évolutions nouvelles à la lumière de questionnements anciens pose alors la question de la responsabilité individuelle des firmes multinationales au regard, par exemple, de conditions de travail et de rémunération des salariés de leurs fournisseurs et sous-traitants étrangers. Enfin, la période récente est marquée par la montée d’acteurs aux pouvoirs d’influence non négligeables sur le comportement des firmes dans un contexte au sein duquel la mondialisation a justement atténué le rôle des Etats et des partenaires sociaux par rapport à la période fordiste. La montée des «  nouveaux mouvements sociaux  » (Gendron, 2006) – les organisations non gouvernementales (ONG) – et leur capacité à modifier certaines pratiques des entreprises grâce à des actions médiatiques fortes pose justement la question des formes de régulations portées par la RSE. Notre hypothèse est que des pressions « externalistes » se développent depuis quelques années pour orienter le comportement des entreprises dans une direction visant à les inciter à se détacher de leur seul intérêt privé au profit de l’intérêt général. Toutefois, le sens des orientations actuelles reste largement indéterminé à ce jour dans la mesure où les firmes elles-mêmes ont plutôt tendance à vouloir imposer leurs propres solutions – perspective « internaliste ». Le cadre théorique proposé par Tsoukas (1999) pour analyser en quoi l’« économie des signes » – et en particulier des risques – constitue un champ au sein duquel les organisations sont en concurrence pour imposer leur point de vue peut être mobilisé pour étayer notre analyse. Pour Tsoukas (1999), dans les économies contemporaines fondées sur la connaissance et marquées par le risque, la production symbolique constitue, à côté de la production économique classique, un domaine dans lequel les organisations marchandes et non marchandes sont aujourd’hui en concurrence pour légitimer leur action. Les organisations ont un « pouvoir symbolique » (p. 506) qu’elles vont chercher à exploiter au mieux pour influencer l’opinion publique – notamment grâce au poids croissant des médias – a un point tel que les plus petites organisations sont susceptibles aujourd’hui de faire plier dans leurs décisions des organisations économiquement très puissantes. Les organisations qui se prévalent alors de défendre l’intérêt général peuvent parvenir à imposer leur point de vue sans forcément passer par les institutions traditionnelles sur lesquelles reposent les démocraties. Dès lors, ainsi que le note Tsoukas (1999, p. 524), « les institutions politiques formelles tendent à perdre leur droit quasiexclusif à définir ce qui est du ‘domaine de l’intérêt public’, celui-ci pouvant au contraire être défini par un ‘nœud global de responsabilité’ […] incluant des ONG, des groupes de citoyens et des consommateurs individuels ». Le pouvoir de conviction des organisations ne repose alors pas tant sur la rationalité des arguments avancés – en particulier la rationalité scientifique lorsqu’il s’agit de traiter certains risques environnementaux (Helland et alii, 2008) – que sur des valeurs dans lesquelles se retrouve l’opinion publique. 43

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Appliqué au cas de l’encadrement de la relation d’emploi, le cadre théorique de Tsoukas (1999) fait écho aux tensions existant au début du XXème siècle entre les solutions internalistes présentées comme scientifiques par les auteurs de la Personnel Management School et les solutions externalistes, plus politiques, avancées par les auteurs de la Institutional Labor Economics School. On retrouve selon nous cette tension aujourd’hui avec le développement des pratiques de gestion responsable des ressources humaines, et ceci à au moins deux niveaux. Au niveau des relations professionnelles, on constate depuis quelques années que même dans les pays au sein desquels l’encadrement de la relation d’emploi est très institutionnalisé et régulé par l’intervention publique – majoritairement les pays européens –, de plus en plus d’entreprises déclarent mettre en place des politiques de responsabilité sociale à l’égard des salariés. Ces pratiques sont présentées comme volontaires et constituent des solutions instaurées par les firmes elles-mêmes, les syndicats pouvant dans certains cas participer à leur mise en œuvre dans le cadre des accords cadres internationaux (Bourque, 2008). Les diverses chartes et codes de conduites qui, depuis quelques années, se développent dans les grandes firmes multinationales sont représentatifs de ces solutions qui apparaissent « internalistes » au sens vu précédemment. Leurs promoteurs, en premier lieu les entreprises elles-mêmes, les représentants patronaux, mais aussi certaines organisations internationales comme l’OCDE ou l’ONU revendiquent la pertinence de ces outils. Ils jugent crédibles les engagements des entreprises à cet égard dans un contexte où, toutefois, rien n’oblige juridiquement ces dernières à respecter leurs engagements, ce qui reste éminemment problématique ainsi que le montrent certains juristes (Gaudu, 2009). Si les promesses faites n’engagent effectivement que ceux qui y croient, les lendemains de la RSE risquent d’être décevants en termes de résultats. Dans cette optique, de nombreux juristes en droit social, des syndicalistes, des ONG en appellent à une conception moins unilatérale de la RSE dans laquelle les dispositifs mis en place auraient force de loi ou à défaut, pourraient être portés devant des tribunaux (Baker, 2003). C’est en fait une conception « externaliste » de la RSE qui est revendiquée ici. La question de la tension entre solutions internalistes et externalistes se pose aussi au niveau de la capacité réelle des nouveaux mouvements sociaux à faire céder les firmes dans leur choix en matière de gestion des ressources humaines mais plus largement de stratégie globale. On trouve en effet dans la littérature plusieurs études analysant comment certaines ONG ont finalement réussi à faire reculer des multinationales sur des questions touchant à la GRH (travail des enfants, conditions de travail indignes, etc) ou à l’environnement. Le travail de Tsoukas (1999) s’appuie justement sur l’étude d’un conflit ayant eu lieu entre Shell et Greenpeace au milieu des années 1990. Si l’auteur montre bien en quoi une petite organisation est susceptible, dans un contexte donné, d’inciter une 44

Gestion des ressources humaines et responsabilité sociale des entreprises : éclairer des évolutions nouvelles à la lumière de questionnements anciens multinationale à revenir en arrière par rapport à certains choix stratégiques, il insiste sur l’idée que le résultat n’est jamais garanti d’avance. Ainsi qu’il le note, «  personne n’aurait pu prévoir l’aboutissement de la controverse [entre Shell et Greenpeace], les conflits de ce type étant inévitablement structurés par des contingences imprévisibles […]. Les processus de réception, d’appropriation et d’élaboration discursive de formes symboliques sont liés par l’indétermination (bound to be indeterminate) […]. L’incertitude, la fragilité et l’imprévisibilité sont des caractéristiques inhérentes aux sociétés basées sur la connaissance » (Tsoukas, 1999, p. 522). Dès lors, il serait erroné de penser que les mouvements portés par la société civile auraient toujours la capacité de contraindre les firmes à adopter telles ou telles politiques, même portés par des campagnes de communication bien ciblées en direction de l’opinion publique. Par ailleurs, comme le souligne Banerjee (2008), même si les ONG peuvent jouer un contrepoids, leur position reste ambiguë dans la mesure où elles s’appuient souvent sur des principes construits par des institutions internationales voire des Etats qui ne sont euxmêmes pas forcément favorables à un véritable encadrement juridique des pratiques des entreprises. Selon nous, la question de la dimension internaliste/externaliste de la RSE se pose d’autant plus qu’avec la mondialisation, les relations qu’entretiennent acteurs privés et acteurs publics sont de plus en plus ambiguës, et les autorités publiques, traditionnellement vues comme les régulateurs centraux, se trouvent justement dans une position délicate. En effet, au niveau mondial, l’intervention des Etats reste très limitée du fait de l’internationalisation des économies. Cette position contraste avec celle des firmes «  globales  » et des ONG qui ont en commun de pouvoir agir d’emblée au niveau international, grâce à des organisations horizontales, de type réticulaire, pouvant s’adapter rapidement aux changements de contexte. Mais si les ONG ont les moyens d’agir sur le comportement des firmes, ces dernières disposent elles-aussi de moyens d’action. D’une part, il ne faut pas sous-estimer leur capacité à influencer l’environnement politique. Oliver et Holzinger (2008) ont bien montré que l’on pouvait repérer diverses stratégies politiques par lesquelles les entreprises cherchent à agir auprès des gouvernements pour maintenir ou faire évoluer certaines règles à leur avantage. D’autre part, par les politiques de RSE qu’elles mettent en place, les firmes transforment les règles existantes ou créent des règles nouvelles là où elles n’existaient pas ou peu, c’est-à-dire là où les autorités publiques n’ont pas, volontairement ou non, cherché à encadrer les comportements des agents. Face au jeu de chacun des acteurs précédents, les autorités publiques se trouvent devant un dilemme (Cochoy, 2007)  : elles ne sont pas dupes du fait que les firmes agissent dans leur intérêt lorsqu’elles décident d’instaurer leurs pratiques de RSE, mais elles savent qu’il est difficile de proposer des règles plus appropriées dans le contexte de la mondialisation. Elles laissent donc faire dans un premier temps, et tentent ensuite d’encadrer en s’inspirant des initiatives 45

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privées pour généraliser les normes à tous les acteurs. Nous ne sommes donc pas ici, en tout cas à première vue, dans une situation dans laquelle les firmes chercheraient à contourner l’action publique. Ce sont plutôt les Etats eux-mêmes qui avalisent les normes promues initialement dans un cadre privé. Ce processus est a priori bénéfique dans la mesure où il crée de la régulation là où il en manquait. Il reste que la pertinence de cette forme de régulation peut être discutable lorsqu’elle est portée au départ par les seules entreprises. Ce cadre régulatoire paraît alors fragile. Il entretient l’incertitude dans la mesure où personne ne sait réellement où l’on va, aucune direction politique n’étant tracé dès le départ par les autorités publiques. Ainsi que le souligne Cochoy (2007, p. 101), la RSE apparaît alors « comme un étrange jeu de rôles et de masques, où les acteurs privés et publics se miment les uns les autres […] sans qu’il soit possible, à ce stade, de savoir s’il s’agit d’un jeu de dupes ou d’une expérimentation collective porteuse à terme d’un nouvel ordre juridique et économique mondial ». Comme le défend Tsoukas (1999), rien n’est joué d’avance. En Europe, les positions prises par la Commission Européenne ces dernières années sont éloquentes. En effet, si certains pouvaient espérer au début des années 2000 qu’un véritable cadre juridique de la RSE allait voir le jour, il semble bien que cet espoir se soit éloigné (Dorssemont, 2008 ; Daugareilh, 2009). En matière d’encadrement de la relation d’emploi, cela annonce plutôt de beaux jours pour les pratiques de gestion responsable des ressources humaines, repoussant l’institutionnalisation d’une perspective plus « externaliste » de la RSE. Conclusion  : pour une reconnaissance de la dimension politique de la RSE Depuis quelques années, les domaines de la GRH et de la RSE s’entrecroisent en de nombreux points. Mais au-delà de ces évolutions récentes, un « détour » par certaines questions soulevées il y a un siècle aux Etats-Unis permet de nuancer le caractère « novateur » des liens actuels entre ces deux domaines. Le traitement des problèmes de GRH dans une optique RSE n’a en effet rien d’original par rapport à celui fait un siècle plus tôt par les auteurs étudiant les labor problems. A l’époque, les auteurs analysaient – déjà – les problèmes relatifs à la discrimination au travail (notamment de genre et raciale), au travail des enfants, à l’exploitation de la main d’œuvre et à la précarité de l’emploi et du chômage. Au point où elles en sont aujourd’hui, les pratiques de RSE à l’intention des salariés apparaissent surtout comme une stratégie des entreprises qui, dans la lignée des idées avancées par la Personnel Management School au début du XXème siècle, consiste à défendre des solutions « internalistes » au problème d’encadrement de la relation d’emploi, dans un contexte de concurrence mondialisée où les autorités publiques restent hésitantes sur le niveau de régulation qu’elles doivent apporter. Sur le fond, l’idée selon laquelle employeurs comme salariés auraient

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Gestion des ressources humaines et responsabilité sociale des entreprises : éclairer des évolutions nouvelles à la lumière de questionnements anciens tous deux à gagner à la mise en œuvre de pratiques socialement responsables reste encore à démontrer. Les réflexions menées par Commons dans la première moitié du XXème siècle étaient conduites par la volonté de « sauver le capitalisme en le rendant bon  » (to save capitalism by making it good). Cet auteur a beaucoup œuvré pour montrer que les modalités institutionnelles d’encadrement de la relation d’emploi – la reconnaissance des syndicats, le développement de la négociation collective, l’instauration d’un droit social par l’Etat – allaient dans ce sens. Si la RSE est souvent présentée comme un moyen de rendre le capitalisme meilleur, les analyses des pratiques qui la soutiennent insistent assez peu sur les trois éléments précédents et de manière générale, sur la dimension politique de la RSE. Or, «  les décisions des entreprises ne sont pas désintéressées (valuefree) ou apolitiques comme on pourrait le penser au départ  ; dans la mesure où elles affectent sérieusement la société, celle-ci devrait avoir son mot à dire sur ce qui est décidé  » (Tsoukas, 1999, p.  518). C’est dans ce cadre qu’à la lumière de débats sur les labor problems, nous avons tenté d’éclairer ici les questions relatives d’une part à la profondeur du conflit d’intérêt des membres de la relation d’emploi, et d’autre part à l’opposition entre solutions « internalistes » et « externalistes » aux problèmes posés par ce conflit. Même si notre contribution avait pour objectif principal d’interroger et d’éclairer d’un point de vue théorique la logique des pratiques actuelles de RSE à l’égard des salariés, certaines recommandations managériales peuvent être émises à partir des réflexions menées. Nous avancerons ici deux recommandations, chacune en lien avec les éléments sur lesquels nous avons focalisé notre attention, à savoir la question du conflit d’intérêt existant entre les membres de la relation d’emploi, puis celle du caractère régulatoire de la RSE dans une perspective internaliste et/ou externaliste. La première s’adresse plutôt aux DRH, la seconde aux directions générales. Le problème du conflit d’intérêt entre employeur et salarié est, dans la pratique des grandes entreprises, très souvent géré par les DRH. Ceux-ci sont en effet constamment pris en tension entre d’un côté les attentes des directions générales et de l’autre celles des salariés (O’Higgins et Kelleher, 2005, p. 277). Dans ce cadre, dans le contexte récent qui, avec la remise en cause de la norme fordienne d’emploi, n’atténue pas forcément les conflits relatifs à la relation d’emploi (Béroud et alii, 2007), les DRH se doivent de développer leur capacité de négociation afin que les questions problématiques touchant la relation d’emploi soient gérées dans de bonnes conditions. Nous rejoignons ainsi ici l’idée selon laquelle le « DRH de demain » devra être un « garant des équilibres sociaux » (Scouarnec, 2005). Ainsi que le note Scouarnec (2005, p. 130), le DRH sera tenu d’« imaginer de nouvelles façons de concevoir le dialogue avec les partenaires sociaux et de

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développer les compétences en négociation des équipes RH ». A cet effet, deux pistes concrètes peuvent être tracées ici. Sur la question des modes de renouvellement du dialogue social, l’approche en termes d’« agenda social » développée récemment par un groupe de travail associant des directions de ressources humaines et des représentants syndicaux dans le cadre des réflexions de l’Observatoire sur la RSE (Orse, 2009) constitue une voie intéressante relativement aux réflexions menées dans notre article. De manière générale, il s’agit de définir un agenda social à horizon semestriel, annuel ou pluriannuel visant à faire travailler les DRH, les représentants syndicaux voire les managers opérationnels sur les thèmes de négociation à venir et à repérer en amont les questions les plus conflictuelles pour commencer à réfléchir à leurs solutions. L’objectif est la construction d’un « diagnostic partagé » entre DRH et représentants du personnel afin justement de faciliter la négociation. Ceci nous conduit à une seconde recommandation en lien cette fois-ci avec les compétences requises des équipes RH, mais pas seulement, en matière de négociation sociale. Car en effet, l’une des conditions nécessaire au bon déroulement des négociations sociales est justement que ceux qui y participent disposent d’outils mais aussi de grilles de lecture plus théoriques visant à éclairer les enjeux des processus de négociation. De ce point de vue, la mise en place d’actions de formation à la négociation à l’intention des acteurs de la fonction RH travaillant dans le champ des relations sociales doit être développée. Même si relativement aux pays anglo-saxons, la formation à la négociation est encore peu développée en France (Bourque et Thuderoz, 2002), les choses évoluent depuis la deuxième moitié des années 2000, avec notamment la création de formations universitaires diplômantes de troisième cycle en ressources humaines, exclusivement dédiées à la négociation sociale. A notre sens, ces formations diplômantes ne doivent pas concerner uniquement les acteurs de la fonction RH. En effet, dans le contexte récent de modification des règles de représentativité des représentants salariés – loi du 20 aout 2008 portant rénovation de la démocratie sociale –, les DRH qui veulent s’assurer que le dialogue social se passe au mieux auront tout intérêt à favoriser le développement de ce type de formation aux représentants du personnel pour deux raisons au moins. Cela permettra d’une part d’accompagner la reconversion professionnelle de responsables syndicaux, et d’autre part de préparer ceux qui prendront leur place. Une telle démarche touchant à la fois les acteurs – surtout des cadres – de la fonction RH et les représentants du personnel devrait justement fournir aux parties négociatrices des bases communes susceptibles d’être mobilisées pour traiter les conflits qui les opposent. Les conflits relatifs à la relation d’emploi seront, nous semble-t-il, d’autant mieux gérés que ceux qui sont censés les régler ont été formés à et ont réfléchi en amont sur la manière de les traiter.

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Gestion des ressources humaines et responsabilité sociale des entreprises : éclairer des évolutions nouvelles à la lumière de questionnements anciens Pour finir, à l’intention des directions générales et en lien avec les arguments que nous avons développés sur le caractère régulatoire de la RSE, il nous paraît important de souligner que pour convaincre les salariés et plus largement l’ensemble des parties prenantes que les décisions qui sont prises par les directions sont justes et pertinentes, il faut en amont, autant que faire se peut, communiquer largement sur les orientations futures stratégiques de l’entreprise mais surtout tenter de faire participer ces parties à la prise de décision. Ainsi que nous avons essayé de le montrer dans cet article, la délibération collective – c’est-à-dire la politique – nous semble être le meilleur moyen pour diminuer au final le risque de voir certaines entreprises revenir sur leurs décisions sous la pression d’acteurs percevant ces dernières comme trop unilatérales. Bibliographie Adams T. S. et Sumner H. L. (1905), Labor Problems  : A Text Book, The MacMillan Company, New York. Allouche J., Huault I. et Schmidt G. (2005), «  La responsabilité sociale de l’entreprise (RSE) : discours lénifiant et intériorisation libérale, une nouvelle pression institutionnelle », in Le Roy F. et Marchesnay M., La responsabilité sociale de l’entreprise, Editions EMS, Paris, p. 177-188. Baker J. (2003), « La responsabilité sociale de l’entreprise », L’Economie Politique, n° 18, p. 105-112. Banerjee S. B. (2008), « Corporate Social Responsibility: The Good, the Bad, the Ugly », Critical Sociology, vol. 34, n° 1, p. 51-79. Barns W. E. (ed.) (1886), The Labor Problem : Plain Questions and Practical Answers, Harper and Brothers, New York. Barthélémy A. et Douënel C. (2008), Vivre l’entreprise responsable, Editions Autrement, Paris. Bartlett C. et Ghoshal S. (2002), Managing Across Borders : The Transnational Solution, Harvard Business Scool Press, Boston. Beaupré D., Cloutier J., Gendron C., Jiménez A. et Morin D. (2008), «  Gestion des ressources humaines, développement durable et responsabilité sociale  », Revue Internationale de Psychosociologie, vol. 14, n° 33, p. 79-140. Béroud S., Denis J. M., Desage G., Giraud B. et Pélisse J., (2007), « Le changement de visage de la conflictualité en entreprise. Quelques éléments statistiques », Les Mondes du travail, n° 3-4, p. 37-49. Bourque R. (2008), «  Contribution des codes de conduite et des accords cadres internationaux à la responsabilité sociale des entreprises », Revue de l’IRES, n° 57, p. 2353. Bourque R. et Thuderoz C. (2002), Sociologie de la négociation, La découverte, Paris. Clark J. M. (1916), « The Changing Basis of Economic Responsibility », Journal of Political Economy, vol. 24, n° 3, p. 209-229. Cochoy F. (2007), « La responsabilité sociale de l’entreprise comme « représentation » de l’économie et du droit », Droit et Société, n° 65, p. 91-101. Commons J. R. (1919), Industrial Goodwill, McGraaw-Hill Book Company. New York. Commons J. R. (dir.) (1921), Industrial Government, The MacMillan Company, New York. Daugareilh I. (2009), « La responsabilité sociale des entreprises : un projet européen en panne », Sociologie du Travail, vol. 55, p. 499-517. Dauten P. (1958), «  Preface  », Journal of the Academy of Management, vol. 1, n°  1, p. 5-6. 49

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