Un modele d'accompagnement professionnel d'un changement : Pour un leadership novateur 2760515907, 9782760515901 [PDF]


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Table of contents :
PRÉFACE......Page 7
REMERCIEMENTS......Page 11
TABLE DES MATIÈRES......Page 13
INTRODUCTION......Page 23
Partie 1 : PRÉMISSESÀ L’ÉLABORATION DU MODÈLE D’ACCOMPAGNEMENT PROFESSIONNEL D’UN CHANGEMENT......Page 29
1 FONDEMENTS ET CONCEPTS LIÉS AU MODÈLE D’ACCOMPAGNEMENT......Page 31
2 VISÉE ET ORIENTATIONS DE L’ACCOMPAGNEMENT......Page 49
3 ACCOMPAGNEMENT-RECHERCHE-FORMATION POUR LA MISE EN OEUVRE D’UN CHANGEMENT......Page 79
4 ORGANISATION DE L’ACCOMPAGNEMENT......Page 91
5 SÉQUENCE DE TRAVAIL LORS D’UNE RENCONTRE INSCRITE DANS UNE DÉMARCHE D’ACCOMPAGNEMENT......Page 105
6 PRATIQUE RÉFLEXIVE......Page 131
7 MOYENS FACILITANT L’ACCOMPAGNEMENT ET LA PRATIQUE RÉFLEXIVE......Page 143
Partie 2 : LE MODÈLE D’ACCOMPAGNEMENT PROFESSIONNEL ISSU D’UNE EXPÉRIENCE......Page 155
8 CONDITIONS FAVORISANT L’ACCOMPAGNEMENT D’UN CHANGEMENT......Page 157
9 LA MODÉLISATION DE L’ACCOMPAGNEMENT PROFESSIONNEL D’UN CHANGEMENT......Page 183
10 RÉPERCUSSIONS......Page 223
CONCLUSION......Page 243
Annexe 1 : FICHES DE SUIVI DES RENCONTRES......Page 245
Annexe 2 : FICHES UTILISÉES POUR LES BILANS......Page 249
BIBLIOGRAPHIE......Page 257
NOTICE BIOGRAPHIQUE......Page 263
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Un modele d'accompagnement professionnel d'un changement : Pour un leadership novateur
 2760515907, 9782760515901 [PDF]

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Collection

FUSION La collection Fusion des Presses de l’Université du Québec est issue de constatations et de préoccupations associées aux besoins d’innovation, à la possibilité de transposer des idées de formation et à la nécessité d’implanter des changements, et ce, dans plusieurs domaines. Cette collection, dirigée par Louise Lafortune, propose des ouvrages à portée générale qui, axés sur la formation et l’accompagnement, visent à approfondir un thème, une théorie, une réflexion ou une perspective théorique ou pratique.

Un modèle

d’accompagnement professionnel d’un changement

Collection

FUSION Compétences professionnelles pour l’accompagnement d’un changement un référentiel Louise Lafortune 2008, 226 pages, isbn 978-2-7605-1578-9

Guide pour l’accompagnement professionnel d’un changement Louise Lafortune 2008, 112 pages, isbn 978-2-7605-1592-5

Presses de l’Université du Québec Le Delta I, 2875, boulevard Laurier, bureau 450 Québec (Québec) G1V 2M2 Téléphone : (418) 657-4399 • Télécopieur : (418) 657-2096 Courriel : [email protected] • Internet : www.puq.ca Diffusion / Distribution : CANADA et autres pays

Prologue inc. 1650, boulevard Lionel-Bertrand Boisbriand (Québec) J7H 1N7 Téléphone : (450) 434-0306 / 1 800 363-2864 FRANCE AFPU-Diffusion Sodis

Belgique Patrimoine SPRL 168, rue du Noyer 1030 Bruxelles Belgique

SUISSE Servidis SA 5, rue des Chaudronniers CH-1211 Genève 3 Suisse

La Loi sur le droit d’auteur interdit la reproduction des œuvres sans autorisation des titulaires de droits. Or, la photocopie non autorisée – le « photocopillage » – s’est généralisée, provoquant une baisse des ventes de livres et compromettant la rédaction et la production de nouveaux ouvrages par des professionnels. L’objet du logo apparaissant ci-contre est d’alerter le lecteur sur la menace que représente pour l’avenir de l’écrit le développement massif du « photocopillage ».

Un modèle

d’accompagnement professionnel d’un changement Pour un leadership novateur Louise Lafortune Avec la collaboration de Chantale Lepage, Franca Persechino et Kathleen Bélanger

Préface de Sylvie

Turcotte Rioux-Dolan

Postface de Margaret

Avec la participation de Avril Aitken, Nicole Boisvert, Karine Boisvert-Grenier, Bernard Cotnoir, Bérénice Fiset, Sylvie Fréchette, Grant Hawley, Carine Lachapelle, Nathalie Lafranchise, Reinelde Landry, Carrole Lebel, France Plouffe et Gilbert Smith

2008 Presses de l’Université du Québec Le Delta I, 2875, boul. Laurier, bur. 450 Québec (Québec) Canada  G1V 2M2

Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives nationales du Québec et Bibliothèque et Archives Canada Lafortune, Louise, 1951 Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement : pour un leadership novateur (Fusion) Comprend des réf. bibliogr. ISBN 978-2-7605-1590-1 1. Accompagnement en entreprise. 2. Changement organisationnel. 3. Analyse des pratiques professionnelles. 4. Accompagnement en entreprise – Québec (Province) – Cas, Études de. I. Titre. HF5549.5.C53L33 2008

658.3’124

C2008-941610-4

Nous reconnaissons l’aide financière du gouvernement du Canada par l’entremise du Programme d’aide au développement de l’industrie de l’édition (PADIE) pour nos activités d’édition. La publication de cet ouvrage a été rendue possible grâce à l’aide financière de la Société de développement des entreprises culturelles (SODEC).

Mise en pages : Infoscan Collette-Québec Couverture : Richard Hodgson

1 2 3 4 5 6 7 8 9 PUQ 2008 9 8 7 6 5 4 3 2 1 Tous droits de reproduction, de traduction et d’adaptation réservés © 2008 Presses de l’Université du Québec Dépôt légal – 3e trimestre 2008 Bibliothèque et Archives nationales du Québec / Bibliothèque et Archives Canada Imprimé au Canada

PRÉFACE

Un projet ambitieux et structurant En 2002, la constitution d’une équipe accompagnatrice provinciale québécoise donnait le coup d’envoi à un projet d’accompagnementrecherche-formation pour la mise en œuvre du Programme de formation de l’école québécoise, dont l’implantation, qui a débuté en 1998, se poursuivra jusqu’en 2010. Il s’agissait d’un partenariat entre le ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport, pour lequel j’ai eu le privilège d’agir à titre de gestionnaire du projet, les organismes scolaires publics et privés et l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR). Offert à l’ensemble du réseau scolaire québécois, ce projet s’est poursuivi pendant six années, soit de 2002 à 2008. Il visait principalement à développer, dans le contexte de la mise en œuvre du renouveau pédagogique, l’expertise en accompagnement de directions d’établissement, de conseillères et de conseillers pédagogiques et d’enseignantes et d’enseignants qui ont le mandat d’accompagner et de soutenir ce changement dans leur milieu. Pour ce faire, il s’agissait non seulement de former et même d’accompagner ces personnes, mais également de les amener à une plus grande autonomie et confiance professionnelle, et ce, en les incitant notamment à oser des actions dans leur milieu et à créer des réseaux de partage sur

viii

Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

les plans provincial, régional et local de manière à faire progresser, en équipe, la mise en œuvre de ce renouveau. En effet, une fois formées, ces personnes étaient appelées à devenir des ressources importantes puisqu’elles avaient comme rôle d’accompagner et de soutenir des intervenantes et intervenants de leur milieu respectif afin que les répercussions de cet accompagnement se fassent sentir jusqu’à la classe. De 2002 à 2008, les personnes qui ont participé à ce projet, à un moment ou à un autre de son existence, provenaient de toutes les régions du Québec, soit de près de 60 commissions scolaires francophones et anglophones, et des institutions d’enseignement privé (plus de 60 institutions et une association anglophone du secteur privé). L’ensemble de ces groupes a permis qu’au fil des années, plus de 1000 personnes, principalement des conseillers et conseillères pédagogiques (plus de la moitié), mais aussi des directions d’établissement et des enseignantes et enseignants, ont été rejointes. Quant à l’équipe accompagnatrice provinciale du projet, elle a nécessité la participation d’une vingtaine de personnes, soit la professeure-chercheure de l’UQTR responsable du projet, des intervenantes et des intervenants du réseau scolaire en prêt de service au ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport, ainsi que des professionnelles et des assistantes et assistants de recherche provenant de l’UQTR. Une autre visée était l’identification d’un modèle structuré et structurant d’accompagnement professionnel d’intervenantes et d’intervenants appelés non seulement à mettre en œuvre un changement majeur qui requiert une transformation des pratiques de ces personnes, mais également le développement d’une plus grande autonomie professionnelle. Tels que présentés dans ce livre, ce modèle au sens large ainsi que ses composantes constituent à mon avis une première, en ce sens qu’aucun autre projet d’accompagnement d’un changement éducatif n’a jusqu’ici, au Québec, fait l’objet d’un suivi aussi systématique, et cela, grâce à l’engagement constant, à l’expertise et à la rigueur de l’équipe du projet sous la direction de Louise Lafortune. Évidemment, il ne s’agit pas d’un livre de recettes et bien malheureux serait le lecteur ou la lectrice qui s’attendrait à trouver toutes les réponses ou toutes les solutions à la complexité des jalons et des actions à poser pour un véritable accompagnement d’un changement. Je suis cependant convaincue que la richesse des concepts développés dans cet ouvrage, ainsi que les descriptions concrètes des pratiques et des conditions favorisant un accompagnement professionnel de qualité auprès de personnes qui sont des partenaires des changements que l’on souhaite

Préface

ix

mettre en œuvre, apportent un nombre considérable de pistes de réflexion et d’action qui vont au-delà de l’intervention dans le seul milieu scolaire, bien qu’elles en soient issues. La mise en œuvre de ce projet, compte tenu du nombre de personnes interpellées par ce changement éducatif en cours au Québec, a permis de fixer des ancrages qui continueront, je l’espère, de structurer l’intervention éducative pendant plusieurs années encore. Je souhaite que ce livre, ainsi que celui portant sur les compétences professionnelles à l’accompagnement, puissent y contribuer. C’est pourquoi le ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport les met à la disposition du réseau scolaire afin que l’expertise développée au cours de ces années ait une vie au-delà de la fin du projet. Par son modèle d’accompagnement professionnel, ce projet aura incité différents personnels scolaires à s’engager dans un processus de changement, à se former à l’accompagnement d’un changement et à exercer un leadership d’accompagnement. Cette entreprise aura également permis de comprendre et de travailler en tenant compte des questionnements et des résistances. Enfin, elle aura contribué à explorer et à développer de nouveaux concepts et à poser des ancrages pour d’autres leaders qui prendront le relais de l’accompagnement dans les milieux. Et ce sont toutes ces personnes qui, ensemble, auront mis l’épaule à la roue pour rendre l’école québécoise encore meilleure et pour faire en sorte que les adultes et les jeunes qui s’y retrouvent, qu’ils soient élèves ou personnes intervenantes, développent leur plein potentiel. Sylvie Turcotte1 Directrice de la formation et de la titularisation du personnel scolaire Ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport

1.

Sylvie Turcotte a été directrice de la formation et de la titularisation du personnel scolaire tout au long de la réalisation de ce projet.

REMERCIEMENTS

L’accompagnement-recherche-formation de la mise en œuvre du Programme de formation de l’école québécoise est un projet d’envergure étalé sur six années (2002-2008) qui suppose un changement majeur en éducation. Ce projet a exigé un appui financier important et la collaboration d’un grand nombre de personnes. Je tiens particulièrement à remercier le ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport pour son appui financier, mais aussi pour avoir permis à plusieurs personnes œuvrant dans le milieu scolaire d’agir comme personnes accompagnatrices au plan provincial de groupes répartis à travers le Québec. Je remercie messieurs Robert Bisaillon, sous-ministre adjoint au début de ce projet, et Pierre Bergevin, son successeur, d’avoir autorisé sa réalisation. Je remercie également mesdames Sylvie Turcotte et Margaret Rioux-Dolan, représentantes du Ministère, pour leur soutien et leur encouragement indéfectible. Un merci particulier au personnel de la direction de la formation et de la titularisation des personnels scolaires et à sa directrice, Sylvie Turcotte, pour avoir mis des ressources essentielles à la disposition de l’équipe du projet, pour son implication régulière lors des rencontres et pour ses commentaires toujours pertinents. Je remercie l’Université du Québec à Trois-Rivières d’avoir encouragé ce partenariat et d’avoir mis à ma disposition et à celle de l’équipe du projet les ressources matérielles et humaines nécessaires à sa bonne marche et à sa réalisation dans un contexte facilitant.

xii

Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

De nombreuses personnes ont participé à la réalisation de ce modèle d’accompagnement professionnel d’un changement. Leur contribution a mené à l’élaboration d’un modèle et à sa validation. Je remercie particulièrement Chantale Lepage, Franca Persechino et Kathleen Bélanger, qui ont collaboré étroitement avec moi pour élaborer la structure et le contenu de ce modèle à partir des données de recherche, des rencontres de discussion de l’équipe accompagnatrice et de rencontres de discussion entre nous pour tenir compte des commentaires et des réflexions des participantes et participants. Je remercie les membres de mon équipe accompagnatrice qui ont terminé ce projet et qui ont pu commenter et critiquer de façon constructive les dernières versions de ce modèle. Leur apport s’est révélé essentiel à la réalisation de ce projet. Je pense alors à Avril Aitken, Nicole Boisvert, Grant Hawley, Carrole Lebel, France Plouffe et Gilbert Smith. Je remercie également les autres personnes accompagnatrices qui ont contribué à un moment ou à un autre à notre réflexion. Il s’agit de Simone Bettinger, Bernard Cotnoir, Ginette Dubé, Jean-Marc Jean, Reinelde Landry et Doris Simard. Des remerciements s’adressent aussi aux professionnelles et professionnels, assistantes et assistants ou auxiliaires de recherche qui ont contribué de façon particulière et régulière au projet accompagnementrecherche-formation : à Karine Boisvert-Grenier, Bérénice Fiset, Sylvie Fréchette, Carine Lachapelle et Nathalie Lafranchise ; ou de façon plus sporadique : à Karine Benoît, Lysane Blanchette-Lamothe, Marie-Pier Boucher, Marie-Ève Cotton, Moussadak Ettayebi, Élise Girard, Lysanne Grimard-Léveillé, Marie-Claude Héroux, David Lafortune, Bernard Massé, Vicki Massicotte, Geneviève Milot, Jean Paul Ndoreraho, Andrée Robertson et Caroline Turgeon. Enfin, tout au long de ce projet, j’ai éprouvé un immense plaisir à travailler avec les intervenantes et intervenants du milieu scolaire à savoir des directions d’établissement, des conseillères et conseillers pédagogiques, des enseignantes et enseignants… qui se sont engagés dans un processus de coconstruction permettant, entre autres, de concevoir ce modèle d’accompagnement professionnel d’un changement. Toutes ces personnes ont su partager leur expertise pour me faire réfléchir, m’amener à clarifier ma pensée, mais aussi à faire cheminer l’équipe accompagnatrice provinciale. Je sais pertinemment que ce projet n’aurait pu voir le jour sans leur participation et leur engagement. Je tiens à les remercier chaleureusement. Louise Lafortune

TABLE DES MATIÈRES

Préface ....................................................................................................

vii

Remerciements ......................................................................................

xi

Introduction ...........................................................................................

1

PARTIE 1 Prémisses à l’élaboration du modèle d’accompagnement professionnel d’un changement CHAPITRE 1 Fondements et concepts liés au modèle d’accompagnement .......

9

Contenu associé au changement ...............................................

9

Accompagnement.........................................................................

10

Socioconstructivisme ...................................................................

13

Compétences et développement de compétences ....................

17

xiv

Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

Métacognition et pratique réflexive .......................................... Métacognition ..................................................................... Pratique réflexive ...............................................................

19 20 22

Leadership d’accompagnement ..................................................

24

CHAPITRE 2 Visée et orientations de l’accompagnement ....................................

27

Visée : l’accompagnement de la mise en œuvre d’un changement prescrit et orienté .........................................

27

Première orientation : le développement d’un leadership d’accompagnement ...................................................................... Mettre en place un accompagnement professionnel ..... Développer des compétences professionnelles pour l’accompagnement d’un changement ..................... Deuxième orientation : l’engagement dans une pratique réflexive-interactive .................................................................... S’engager dans le changement ......................................... Encourager la création de réseaux favorables à la formation de communautés réflexives de pratique et d’apprentissage .............................................................. Troisième orientation : la collaboration professionnelle ........ Soutenir le travail en équipe de collègues...................... Quatrième orientation : le développement du jugement professionnel ................................................................................ Accompagner l’évaluation dans une perspective d’aide au développement de compétences .......................

30 32 33 39 39

40 42 43 46 47

Cinquième orientation : l’enrichissement de la culture associée au domaine visé par le changement .......................... Établir des liens étroits entre théorie et pratique..........

48 50

Sixième orientation : le passage à l’action dans une perspective réflexive-interactive ........................................ Accompagner des projets d’action ..............................

51 53

Table des matières

xv

CHAPITRE 3 Accompagnement-recherche-formation pour la mise en œuvre d’un changement ..................................................................................

57

Accompagnement-formation......................................................

58

Accompagnement-recherche ......................................................

60

Intégrer accompagnement, recherche et formation ................

62

Animation, formation, accompagnement et recherche ..........

63

Théorisation émergente ...............................................................

63

CHAPITRE 4 Organisation de l’accompagnement ..................................................

69

De grandes actions à réaliser .....................................................

69

Structure organisationnelle souple et rigoureuse ....................

73

Réalisation d’un accompagnement qui modèle l’esprit du changement ............................................................................. Des interventions préparées selon le cheminement des groupes accompagnés ................................................. Une collaboration professionnelle dans l’organisation des interventions ................................................................ Des interventions en dyade ............................................... CHAPITRE 5 Séquence de travail lors d’une rencontre inscrite dans une démarche d’accompagnement .......................................... Avant l’action : préparation d’une rencontre inscrite dans une démarche d’accompagnement ................................... Tâches préliminaires.......................................................... Rédaction d’un plan de travail général ....................... Rédaction d’un plan de travail détaillé ....................... Anticipation ........................................................................ Élaboration de fiches de travail ou de fiches réflexives .......................................................

79 79 80 81

83 84 84 85 85 86 87

xvi

Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

Conception et élaboration de situations d’accompagnement ..................................................... Support visuel ........................................................... Préparation individuelle ou en équipe ............................ Discussions avec des collègues lors de la préparation........................................................

88 88 89 89

En cours d’action : respect de l’esprit de l’accompagnement 90 Accorder de l’importance à l’accueil ............................... 90 Se mettre en action rapidement .................................. 91 Intention personnelle et moments de réflexion .............. 91 Fiches de travail et fiches réflexives ............................... 92 Rythme et enchaînement de tâches variés ...................... 97 Pratique de la synthèse ..................................................... 97 Reformulation ..................................................................... 98 Regards sur tous les aspects de l’interaction ................. 98 Présentations d’expériences d’accompagnement vécues ou à vivre et rétroaction ....................................... 98 Interactions ......................................................................... 100 En cours d’action et à la fin : pour favoriser la réflexion et les ajustements......................................................................... Retour réflexif ..................................................................... Amorce de réflexion sur un nouveau sujet..................... Moments d’écoute à la fin d’une session .................... Des « traces de son développement professionnel » vers une « écriture réflexive ».............................................

101 101 101 101 102

À la fin et après l’action : réflexion sur l’action ..................... 104 Réflexion après l’accompagnement : des traces à garder ....... Plan de travail détaillé, tel que réalisé ........................... Résumé de la rencontre ..................................................... Rédaction d’un rapport d’accompagnement ...................

105 105 105 106

Table des matières

xvii

Actions entre deux sessions d’accompagnement : un suivi à réaliser ........................................................................ 106 Suivi ..................................................................................... 106 Actions de formation ......................................................... 107 CHAPITRE 6 Pratique réflexive ................................................................................. 109 Sens de la pratique réflexive...................................................... 110 Fonctions de la pratique réflexive............................................. 111 Composantes de la pratique réflexive ....................................... Première composante : réfléchir sur sa pratique et l’analyser ........................................................................ Deuxième composante : transposer les apprentissages et faire des retours sur les expériences ........................... Troisième composante : développer son modèle de pratique en constante évolution .................................

112 112 114 115

Distanciation par rapport à sa pratique.................................... 117 Contexte facilitant la réflexion vers un changement des pratiques ................................................................................. 118 CHAPITRE 7 Moyens facilitant l’accompagnement et la pratique réflexive .... 121 Tâches, situations d’accompagnement et familles de situations .............................................................. 121 Développement d’un site Internet.............................................. 122 Journal d’accompagnement........................................................ 123 Questionnement ........................................................................... 126 Autoévaluation ............................................................................. 127 Modelage ....................................................................................... 128 Soutien pour l’analyse des pratiques ........................................ 129 Modélisation ................................................................................. 130

xviii

Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

PARTIE 2 Le modèle d’accompagnement professionnel issu d’une expérience CHAPITRE 8 Conditions favorisant l’accompagnement d’un changement ....... 135 Contexte conceptuel lié aux conditions favorisant l’accompagnement d’un changement..................... Accompagnement socioconstructiviste ............................ Compétence professionnelle pour l’accompagnement ... Leadership d’accompagnement ......................................... Démarche d’accompagnement .......................................... Mettre en place un accompagnement socioconstructiviste ... S’assurer de susciter des interactions dans la démarche d’accompagnement ............................. Fournir un accompagnement qui modèle ce que les personnes accompagnées auront à réaliser dans leur propre accompagnement .................................. Fournir un accompagnement qui assure continuité et suivi ........................................... Préparer des rencontres d’accompagnement qui comprennent des anticipations.................................. Intégrer l’animation et la formation à l’accompagnement .......................................................... Considérer l’accompagnement dans une formation continue ..................................................... Soutenir les déséquilibres (au plan cognitif) sécurisants (au plan affectif) ........................................... Faire des liens entre la théorie et la pratique ............... Garder des traces ............................................................... Considérer l’évaluation du processus de changement ... Inscrire la collaboration professionnelle dans la démarche d’accompagnement .............................

136 136 137 137 138 138 139

139 140 141 142 143 143 144 145 145 146

Table des matières

Cheminer vers une pratique réflexive ....................................... Considérer la pratique réflexive comme une composante de l’accompagnement ........................... Réfléchir sur sa pratique et cheminer vers son analyse ................................................................. S’assurer d’un passage à l’action .................................... Faire cheminer vers la modélisation de sa pratique en évolution .............................................. Envisager le modelage d’une pratique réflexive............. Viser le développement de compétences professionnelles pour l’accompagnement d’un changement .............................. Faire réfléchir aux compétences professionnelles à développer pour accompagner un changement........... Faire développer des compétences professionnelles pour l’accompagnement chez les personnels engagés dans le processus de changement pour qu’ils interviennent à leur tour auprès d’autres personnels dans l’organisation ......................... Comme personne accompagnatrice, développer une posture qui démontre qu’on est engagé dans un cheminement pour développer des compétences professionnelles pour l’accompagnement d’un changement ................................................................ Cheminer vers l’exercice d’un leadership d’accompagnement ...................................................................... Susciter le passage à l’action dans le sens du changement ................................................................... S’assurer d’une cohésion, d’une cohérence et d’une compréhension partagée du changement ............. Développer une culture professionnelle associée à celle du changement ....................................................... Viser l’établissement d’un partenariat ............................ Encourager la formation de communautés d’apprentissage et de pratique ou la formation de réseaux ............................................... Prendre en compte la dimension affective dans le changement ...........................................................

xix 147 148 148 149 149 150 151 151

152

153 153 154 154 155 156

157 158

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

CHAPITRE 9 La modélisation de l’accompagnement professionnel d’un changement .................................................................................. 161 Représentation d’un modèle ....................................................... 161 Utilisation d’un schéma .............................................................. 162 Autour de l’idée de modèle ........................................................ 164 Modèle d’accompagnement professionnel d’un changement ......................................................................... Interaction : dynamique, rôles et fonctions .................... Caractéristiques de l’accompagnement ........................... Moyens utilisés dans l’accompagnement ........................

164 168 183 190

CHAPITRE 10 Répercussions : développement professionnel au regard d’un changement à mettre en œuvre dans une organisation ..... 201 Contribution à la structuration de l’identité professionnelle Développement d’un sentiment de compétence professionnelle .................................................................... Appropriation et compréhension du changement ......... Clarification du rôle et du mandat .................................. Reconnaissance de l’importance de la collaboration professionnelle .................................................................... Renouvellement des pratiques au regard du changement ..... Prise de risques et innovation .......................................... Cheminement professionnel et développement de compétences professionnelles pour l’accompagnement d’un changement ..................... Renouvellement des formations pour aller au-delà de formations ponctuelles................................... Évolution des modèles de pratique .................................. Rayonnement du modèle dans les milieux accompagnés ....................................................................... Changements apportés à la structure organisationnelle des milieux accompagnés ...................

202 202 203 204 204 206 206

207 208 209 210 210

Table des matières

xxi

Passage à l’action......................................................................... 211 De l’attente à l’action ........................................................ 211 Amélioration de sa manière d’intervenir ........................ 212 Prises de conscience ou constats ............................................... De l’étincelle à l’intégration des prises de conscience.. Cheminement vers l’exercice d’un leadership d’accompagnement socioconstructiviste .......................... Prise de conscience de la nécessité et de l’utilité de la collaboration professionnelle .................................. Évolution en vue de se donner du temps........................ Cheminement en vue de conserver des traces de l’accompagnement.........................................................

212 213 215 216 216 217

Influence sur la mise en œuvre du changement ..................... 218 Conclusion .............................................................................................. 221 ANNEXE 1 Fiches de suivi des rencontres ........................................................... 223 ANNEXE 2 Fiches utilisées pour les bilans .......................................................... 227 Postface ................................................................................................... 231 Bibliographie.......................................................................................... 235 Notice biographique ............................................................................. 241

INTRODUCTION

Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement est le résultat d’un projet d’accompagnement-recherche réalisé en éducation dans le contexte de la réforme scolaire québécoise. En s’appuyant sur les résultats et les retombées d’un projet visant le renouvellement des pratiques pédagogiques et professionnelles, ce livre saura inspirer les personnes, groupes, institutions, organisations ou entreprises qui désirent mettre en place un changement orienté et comportant des éléments de prescription. Pour l’accompagnement professionnel des personnels qui ont à faire face à un changement majeur de leurs pratiques professionnelles, ce livre est un incontournable. Dans certains contextes, le modèle proposé se révèle un allié nécessaire à la mise en œuvre d’un changement. C’est le cas lorsqu’un grand nombre de personnes sont visées par le changement, car l’accompagnement permet de les rejoindre dans leur milieu afin de leur offrir un soutien favorisant le renouvellement de leurs pratiques professionnelles. Pour progresser dans le sens d’un changement majeur, il importe de viser une certaine cohérence entre les diverses équipes de travail. L’accompagnement suscite des échanges et la confrontation des représentations du changement et, ce faisant, participe à la construction d’une vision partagée du changement à mettre en œuvre. Le modèle devient alors un outil de référence pour la réflexion,

2

Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

la mise en œuvre, l’analyse et l’évaluation d’une démarche d’accompagnement professionnel qui facilite l’approfondissement de divers aspects ou concepts liés au développement de compétences professionnelles pour l’accompagnement de ce changement (pour un complément, voir le référentiel de compétences professionnelles pour l’accompagnement d’un changement, Lafortune, 2008). Les perspectives d’internationalisation, l’avènement de nouvelles technologies viennent bousculer l’ordre établi et entraînent souvent dans leur sillage de grands bouleversements qui demandent aux personnels de s’adapter rapidement à de nouvelles situations. Un changement majeur qui comporte des éléments de prescription ne se fait pas en criant « changement » et encore moins s’il implique un grand nombre de personnes. Une réflexion sur les changements de pratique favorise la mise en œuvre du changement et augmente les chances de réussite, car les personnels engagés dans la voie du changement, même s’ils peuvent être en faveur du changement et qu’ils peuvent le comprendre, cherchent toujours à préserver un certain équilibre entre les pratiques antérieures et celles qui respectent les fondements du changement. Même si les organisations forment leurs personnels en fonction des fondements du changement ou qu’elles leur offrent les outils nécessaires à sa mise en œuvre, la juxtaposition de formations et l’accessibilité à des outils pertinents ne sont pas nécessairement garants d’un changement durable. Le projet qui a inspiré ce livre a montré la nécessité d’un accompagnement où les pratiques professionnelles sont réfléchies dans une perspective de remise en question des pratiques antérieures. Le choix d’accompagner un processus de changement favorise la cohérence, mais aussi le réinvestissement et l’adhésion vers une pérennité du changement associée à l’autonomie des personnes accompagnées. Ce type d’accompagnement transforme la perspective de la formation continue qui passe de formations ponctuelles, c’est-à-dire de moments où une personne apporte une expertise particulière pour un temps défini et relativement court (de quelques heures à quelques journées) à un accompagnement qui se veut un soutien à plus ou moins long terme (plusieurs journées pendant plus d’une année). L’accompagnement comprend également des aspects relatifs à la formation des personnels, mais assure aussi le soutien et le suivi des personnels et leur progression dans le processus de changement. Le modèle d’accompagnement professionnel proposé dans ce livre est tiré de l’expérience acquise dans le cadre d’un projet qui a contribué à la mise en œuvre d’un changement majeur en éducation au Québec. Il

Introduction

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est fondé sur une approche systémique, dynamique et plurielle, avec des visées de cohérence, associée à la mise en place d’un changement majeur, orienté, qui comporte des éléments de prescription.

ORIGINALITÉ DU PROJET À LA BASE DU MODÈLE À l’origine, le projet a été offert à l’ensemble du réseau scolaire et ses activités se sont tenues de 2002 à 2008. Il a servi d’inspiration à l’élaboration d’un modèle d’accompagnement professionnel qui peut aujourd’hui être adapté à différents contextes d’accompagnement d’un processus de changement. Le modèle est issu d’un projet comportant plusieurs caractéristiques qui lui confèrent une originalité, mais aussi des assises solides. Selon le contexte et les organisations, certaines caractéristiques peuvent cependant différer. Sans toutefois faire l’économie des conditions minimales d’application du modèle, celui-ci peut facilement être transposé. Rappelons qu’il est issu d’un partenariat entre l’organisme à la base du changement (un ministère), celui qui apporte une expertise de recherche et de formation (une université) et d’autres organismes qui se sont associés volontairement au projet par leurs personnels qui jouent un rôle d’accompagnement dans leur milieu (institutions scolaires, commissions scolaires, écoles). Échelonné sur six années (2002-2008), ce projet comprend tant un volet d’accompagnement-formation qu’un volet d’accompagnement-recherche. Il a été offert à l’ensemble du réseau scolaire et les personnes et les groupes qui ont décidé d’y participer se sont engagés sur une base volontaire. Ce projet est digne d’intérêt, car il a suscité l’engagement de personnes accompagnatrices issues de divers milieux scolaires partout dans la province. Cette équipe a travaillé en collégialité avec plusieurs équipes réparties dans plusieurs régions du Québec. La collaboration professionnelle qui en résulte représente tout un défi. La dimension de recherche est intégrée à celle de l’accompagnement-formation. Ainsi, les outils de formation servent d’instruments de recherche et inversement, les données de recherche sont réinvesties dans la formation. La visée d’un « réseautage » est au cœur des réflexions et des actions entreprises au cours de l’accompagnement qui se vit simultanément dans différentes régions du Québec. Les groupes empruntent des parcours différents, choisissent une porte d’entrée qui n’est pas nécessairement la même que celle des autres régions et influencent, par leur choix, l’enchaînement de la séquence d’accompagnement en fonction de leurs besoins et attentes, mais aussi en fonction des ressources disponibles qui comprennent également la formation et l’expertise des professionnels de la région. Ces parcours diversifiés amènent l’équipe à examiner l’émergence

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

d’un modèle qui se construit à partir d’une expérience menée auprès de plusieurs groupes. On peut dire de ce modèle qu’il est à la fois pédagogique et professionnel. Un modèle d’accompagnement pédagogique puisque les personnes discutent « pédagogie » et qu’elles posent des gestes qui sont liés à la pédagogie et dont la visée est de se rendre jusqu’à la classe et un modèle d’accompagnement professionnel puisqu’au cours de la démarche, elles développent des compétences professionnelles pour l’accompagnement (voir Lafortune, 2008). Ce modèle représente une réalité complexe qui comprend un ensemble de composantes (productions, actions, décisions, ressources, etc.) qui sont continuellement en relation les unes par rapport aux autres. Ces composantes évoluent sous l’effet de cette interaction constante. Un site Internet du projet1 a été construit principalement comme instrument d’information, de dépôt de documents, de suivi au projet et de diffusion des actions ou des événements qui s’y déroulent. Il comprend des outils et du matériel d’accompagnement qui ont été rendu accessibles non seulement à l’ensemble du réseau de personnes accompagnées mais aussi à la communauté élargie (groupes qui ne font pas partie du projet). Ce site facilite le partage et la libre circulation de documents qui incitent au changement par leur pertinence ainsi que de renseignements précieux destinés aux personnes qui accompagnent des personnels dans le processus d’un changement. Selon le milieu accompagné, le matériel nécessitera des ajustements plus ou moins importants. Cependant, l’esprit du modèle peut être compris et transposé en considérant la cohérence des orientations et des actions à privilégier. L’accompagnement d’un changement prescrit ou comportant des éléments de prescription diffère de celui qui consiste à aider une ou des personnes à tenter une expérience professionnelle intéressante. Il s’agit plutôt d’accompagner les personnels dans leur mandat de mettre en œuvre le changement, ce qui suppose des orientations à l’égard du changement envisagé. Ce changement vise le renouvellement des pratiques et exige le développement de compétences professionnelles pour l’accompagnement d’un changement. Cela s’inscrit dans une logique où les personnels sont appelés à mobiliser un ensemble de ressources qu’ils construisent en situation et en étant placés en interaction avec d’autres professionnels et professionnelles. Dans ce contexte, l’accompagnement cherche à établir une cohérence entre les pratiques proposées par le changement et les pratiques du milieu de travail accompagné. Il s’agit d’amener les personnes à se donner une vision partagée du changement et de les aider à établir une 1.

Adresse du site : .

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Introduction

cohérence entre cette vision et les gestes professionnels posés. Cela ne veut pas dire qu’elles peuvent interpréter ce changement comme elles le veulent, mais plutôt qu’elles vont y réfléchir collectivement pour s’en donner une compréhension partagée, pour le confronter aux pratiques en place afin de tendre vers une cohérence entre croyances et pratiques, pensées et actions, tout en considérant les fondements et les visées de ce changement.

ß ß ß Le premier chapitre du livre présente et explicite brièvement les principaux concepts associés aux fondements sur lesquels repose le modèle d’accompagnement professionnel, dont l’accompagnement, le socioconstructivisme, le développement de compétences, la pratique réflexive, la métacognition et le leadership d’accompagnement. Le deuxième chapitre expose la visée et les orientations du projet qui ont inspiré le modèle telles que le développement d’un leadership d’accompagnement ; l’engagement dans une démarche de pratique réflexive-interactive ; la collaboration professionnelle ; le développement du jugement professionnel ; l’enrichissement de la culture associée aux fondements du changement ; le passage à l’action ainsi que les actions professionnelles qui en découlent. Quant au troisième chapitre, il démontre la complémentarité de l’accompagnementrecherche-formation et situe l’importance de les travailler de manière intégrée à l’intérieur du modèle. Les chapitres 4 et 5 abordent l’organisation de l’accompagnement. Le premier situe les grandes actions à réaliser pour amener des personnels à changer et traite de la souplesse et de la rigueur dans la structure organisationnelle, mais aussi de l’importance d’un accompagnement qui est cohérent avec l’esprit du changement à mettre en œuvre, alors que le chapitre 5 décrit la séquence de travail associée à une rencontre ainsi que le processus privilégié par les équipes accompagnatrices, en examinant ce qui se fait avant, pendant, à la fin ou après l’action (entre deux rencontres). En plus de s’inscrire dans une perspective socioconstructiviste, le modèle incite les personnes accompagnées à porter un regard sur leurs pratiques et à développer une posture réflexive. Considérant l’importance de la pratique réflexive dans le modèle, le sixième chapitre lui est consacré. On y aborde notamment la définition, la fonction et les composantes de la pratique réflexive, la distanciation de sa pratique, mais aussi du contexte facilitant la réflexion vers un changement de ses pratiques. Le chapitre 7 traite de différents moyens qui facilitent l’accompagnement et la pratique réflexive tels que les tâches, situations et familles de situations, le questionnement, le modelage, etc.

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

Les conditions nécessaires à l’accompagnement d’un changement prescrit ou qui comporte des éléments de prescription et les répercussions auxquelles on peut s’attendre si on utilise ce modèle pour accompagner des personnels dans un processus de changement sont présentées dans les chapitres 8 et 9. Les conditions visent à favoriser la progression des personnes accompagnées vers un renouvellement durable des pratiques professionnelles et assurent une réussite du changement dans les organisations alors que les répercussions ont clairement été relevées et précisées par les personnels du projet qui a inspiré la construction du modèle. Enfin, le dernier chapitre du livre expose le modèle d’accompagnement professionnel d’un changement tel qu’il a été généralisé à la suite du projet accompagnement-recherche-formation. Rappelons qu’à l’origine du modèle, il y avait un projet visant l’accompagnement de personnels scolaires dans un processus de changement majeur en éducation. Inspiré d’une situation réelle d’accompagnement, le modèle permet de comprendre la nature et l’évolution d’un processus complexe à mettre en œuvre pour apporter des changements dans les organisations. L’analyse de cette expérience a favorisé l’émergence d’un modèle qui met de l’avant des façons de faire novatrices ; il peut facilement être transposé à d’autres contextes d’accompagnement professionnel d’un changement.

PARTIE

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PRÉMISSES À L’ÉLABORATION DU MODÈLE D’ACCOMPAGNEMENT PROFESSIONNEL D’UN CHANGEMENT

CHAPITRE

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FONDEMENTS ET CONCEPTS LIÉS AU MODÈLE D’ACCOMPAGNEMENT

Les fondements associés à l’élaboration du modèle d’accompagnement professionnel proposé dans ce livre reposent sur plusieurs concepts. Les principaux sont abordés dans ce premier chapitre. Il s’agit du contenu associé au changement ; de l’accompagnement comme étant l’action principale de ce modèle ; du socioconstructivisme comme théorie de l’apprentissage ; des compétences et du développement de compétences comme logique inhérente à l’action ; de la pratique réflexive et de la métacognition guidant la réflexion sur la pratique et le regard à porter sur le processus d’apprentissage ; du leadership d’accompagnement qui se veut un processus pour soutenir le changement, mais aussi l’engagement dans le changement. Chacun de ces concepts sera repris et explicité brièvement dans le texte qui suit.

CONTENU ASSOCIÉ AU CHANGEMENT L’accompagnement ne peut se faire dans l’absolu. Il faut qu’il y ait un « sujet » à accompagner à propos d’un objet. L’accompagnement suppose donc une ou des intentions à poursuivre et c’est à partir de cette intention que se fera le choix des actions à poser. En clair, chaque

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

changement demande certaines précisions. Par exemple, le changement traité dans cet ouvrage est lié à la formation ainsi qu’au développement de compétences professionnelles pour l’accompagnement d’un changement tant chez les personnes accompagnatrices que chez les personnes accompagnées. Dans ce modèle, il est présupposé que la mise en œuvre d’un changement passe par le renouvellement des pratiques professionnelles des personnes qui ont à appliquer ce changement. En plus du renouvellement des pratiques professionnelles, tous les efforts qui seraient faits pour développer des compétences seraient vains si les pratiques d’accompagnement n’étaient pas, elles aussi, soumises à la réflexion et à l’analyse collectives pour se demander en quoi elles développent des compétences professionnelles, celles qui permettent d’appliquer le changement. Une application de techniques ou de procédures proposées – et sûrement pas imposées – ne peut assurer la mise en œuvre d’un changement majeur et complexe. Le contenu et l’intention poursuivie expliquent le choix d’accompagner dans le cadre d’une formation à l’accompagnement des personnels qui ont, à leur tour, la fonction d’accompagner les personnels visés par le changement.

ACCOMPAGNEMENT Lorsqu’il s’agit de mettre en œuvre un changement majeur et orienté, qu’il comporte ou non des éléments de prescription, l’accompagnement ne peut s’improviser ni se faire n’importe comment en adoptant toutes sortes de formes. L’accompagnement privilégié dans ce modèle favorise la réflexion dans et sur l’action pour une continuité et une cohérence avec les orientations du changement à mettre en œuvre. Il est enrichi d’une formation et peut être soutenu par la recherche tout en ayant un suivi et une continuité. Ce continuum dans le temps permet de couvrir les différentes phases d’un cycle complet de travail (un peu plus d’une année) à l’intérieur d’une organisation. Si nous prenons comme exemple le milieu scolaire, on remarque que l’année est ponctuée par différentes étapes récurrentes telles que la rentrée scolaire, les fins d’étapes, les bulletins, les journées pédagogiques, l’attribution de postes qui modifie la composition du personnel et génère parfois des mouvements importants de personnels. Peu importe le milieu de travail, la réalisation d’un projet échelonné sur plus d’une année permet de franchir ces étapes importantes et de s’ajuster face à d’autres événements moins prévisibles tels que des congés de maternité, de maladie ou des départs à la retraite et d’avoir un portrait plus réaliste de la situation d’accompagnement à l’intérieur d’une organisation.

Chapitre 1 — Fondements et concepts liés au modèle d’accompagnement

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L’accompagnement d’un changement majeur suppose une compréhension exhaustive des idées et des grands concepts qui sous-tendent ses visées et ses orientations ainsi que des moyens à déployer pour le mettre en œuvre. Voici comment est défini l’accompagnement socioconstructiviste (le socioconstructivisme sera présenté dans la prochaine section) tel que préconisé dans le modèle d’accompagnement professionnel proposé. L’« accompagnement socioconstructiviste est [une mesure de soutien axée] sur la construction des connaissances des personnes accompagnées en interaction avec les pairs. Ce type d’accompagnement suppose un suivi et une continuité. Dans une optique métacognitive et réflexive, [Il] vise à susciter l’activation des expériences antérieures afin de favoriser la construction des connaissances, à susciter des conflits sociocogni tifs et à profiter de ceux qui émergent des discussions, à coconstruire dans l’action, à mettre en évidence les conceptions […] et à profiter des prises de conscience de certaines constructions. Il présuppose une interaction entre la personne accompagnatrice et [celles qui sont accompagnées] » (Lafortune et Deaudelin, 2001a, p. 200). Les différents rôles qu’elles y tiennent viennent enrichir la démarche qui s’instaure alors sous l’égide d’un véritable partenariat. L’accompagnement socioconstructiviste suppose la mise en œuvre d’une certaine culture […] qui se manifeste à travers cinq composantes : les attitudes, les connaissances, les stratégies, les habiletés et les expériences (Lafortune et Martin, 2004) mais aussi par le développement de compétences professionnelles à l’accompagnement s’inscrivant dans l’exercice d’un leadership […] d’accompagnement (Lafortune, 2008, p. 16).

Cette conception de l’accompagnement n’est pas nécessairement celle qui est véhiculée par tous les auteurs et auteures. Cependant, l’idée d’offrir un soutien important dans la mise en œuvre d’un changement majeur rejoint les préoccupations exprimées dans la littérature. Cette conception tient compte de l’ampleur des changements à réaliser et du fait que le concept d’accompagnement prend une place importante dans divers domaines pour répondre à la nécessité d’un suivi et d’un soutien pendant une période suffisamment longue. Plusieurs publications récentes en font foi (L’Hostie et Boucher, 2004 ; Lafortune et Deaudelin, 2001 ; Pelletier, 2004 ; Paul, 2004) et il y a un intérêt grandissant pour ce type de suivi auprès des personnes mandatées pour la mise en œuvre d’un renouveau. Paul (2004) a effectué une recension des textes et fournit une liste de références commentées concernant le lien entre l’accompagnement et différents concepts comme le coaching, le counseling, la consultance, le tutorat, le mentorat, la médiation, le compagnonnage et le parrainage. Selon cette auteure, « accompagner c’est se joindre à quelqu’un pour aller où il va en même temps que lui » (Paul, 2004, p. 308) ; c’est un processus qui engage deux personnes, l’une accompagnatrice et

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

l’autre accompagnée (Paul, 2004). Cette conception est celle qui est souvent diffusée dans la littérature et celle qui est exprimée dans divers milieux ; elle ne semble pas toujours supposer une formation alliant théorie et pratique. Cependant, plusieurs auteurs (Charlier, Dejean et Donnay, 2004 ; Dionne, 2004 ; Boucher et Jenkins, 2004 ; Gather Thurler, 2004 ; Lafortune et Deaudelin, 2001 ; Lafortune et Martin, 2004 ; SavoieZajc, 2004), proposent une autre conception de l’accompagnement qui s’adresse plutôt à un groupe de personnes. Cette conception suppose la possibilité d’accompagner plusieurs personnes dans un processus de changement en tant que groupe et non pas sous forme de rencontres individuelles. Cet accompagnement s’inscrit dans une perspective socioconstructiviste s’il se veut un « soutien axé sur la construction des connaissances [et le développement de compétences] des personnes accompagnées en interaction [et réflexion] avec les pairs » (Lafortune et

Processus de l’accompagnement socioconstructiviste

Connaissances antérieures Expertise professionnelle

Processus d’accompagnement

Prises de conscience

Dans l’action

La personne accompagnatrice s’engage dans la démarche d’accompagnement avec ses croyances à propos des fondements, visées et orientations du changement en lien avec ses pratiques professionnelles

Planification Anticipation Observation Analyse Évaluation Ajustements

Selon l’analyse de sa démarche d’accompagnement, la personne accompagnatrice ajuste ses croyances et ses pratiques

Le processus de l’accompagnement socioconstructiviste amène la personne accompagnatrice à poursuivre cette démarche ou à en entreprendre une autre à partir d’une prise de conscience de ses constructions personnelles ou à partir des interactions avec les personnes accompagnées.

Source : Lafortune et Martin, 2004, p. 53, inspiré de Lafortune et St-Pierre, 1996.

Chapitre 1 — Fondements et concepts liés au modèle d’accompagnement

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Deaudelin, 2001, p. 200). Une telle conception nécessite un suivi du groupe de personnes accompagnées pendant une certaine période qui peut s’étendre sur plusieurs mois et parfois même au-delà d’une année (Lafortune et Lepage, 2007). Un tel accompagnement tient compte des interactions à créer, des conflits sociocognitifs suscités par un changement et des conceptions et pratiques pédagogiques et professionnelles antérieures à changer. Un tel accompagnement suppose une démarche de pratique réflexive et une optique métacognitive comme fil conducteur de l’accompagnement. Il est généralement réalisé, si possible, en dyade (s’il est réalisé par une personne, il peut être préparé en équipe) auprès de groupes pour susciter des interactions vers des réflexions et remises en question. Il suppose un suivi pour assurer des actions et des réflexions dans et sur l’action pour une continuité et une cohérence. Enfin, cet accompagnement est associé à la formation/animation et à la recherche pour une intégration de la théorie et de la pratique, pour susciter un dynamisme et un engagement et pour garder des traces de la démarche afin d’en faire une analyse et d’apporter des ajustements.

SOCIOCONSTRUCTIVISME La dimension de l’accompagnement est un ensemble plutôt complexe, ne serait-ce que dans le fait de bien saisir la signification de l’option en faveur de l’accompagnement comme mode de formation, plutôt que de maintenir la formation au sens habituel du terme (activités plus ou moins ponctuelles de ressourcement/perfectionnement en rapport avec des thèmes, problématiques, pratiques, etc., liées au changement) comme principal mode d’appropriation et de mise en œuvre du changement. On peut mieux comprendre le passage de la formation à l’accompagnement en prenant en considération la perspective socioconstructiviste. Celle-ci suppose une préparation des interventions avec l’intention de susciter des conflits sociocognitifs. Outre cette préparation, il s’agit de pouvoir les reconnaître dans l’action, mais aussi d’en tirer parti. Cette mise à profit suppose que les personnes accompagnées prennent conscience de ce qui se passe au cours de l’action tout en prenant une certaine distance au regard de l’action. Au début, cette mise à distance est créée par la personne accompagnatrice qui guide les personnes qui prennent peu à peu le relais en intériorisant cette façon de faire et en l’effectuant avec de plus en plus d’autonomie. Cette mise à distance permet de voir l’action en train de se faire et sensibilise les personnes aux moyens utilisés pour transposer cette action dans leurs propres gestes d’accompagnement. Un accompagnement socioconstructiviste suppose également un processus

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

COCONSTRUCTION

de coconstruction permettant à chaque personne, à partir de son propre modèle, qu’il soit conscient ou non, de participer au développement du modèle collectif qui sera reconstruit individuellement et utilisé ultérieurement différemment par chaque personne (adapté de Lafortune et Deaudelin, 2001). La coconstruction sous-tend la séquence suivante :

Confrontations, déconstructions avec celles de collègues et aussi avec celles des auteures et des auteurs ou d’autres modèles théoriques

Reconstruction individuelle

Construction individuelle

Partage des constructions

Construction individuelle

Participation à d’autres équipes

Construction collective d’un modèle

Reconstruction individuelle

Source : adapté de Lafortune et Deaudelin, 2001, et de Lafortune, 2004d.

La perspective socioconstructiviste adoptée sous-tend une démarche comprenant des réflexions partagées, des interactions, des actions analysées collectivement pouvant conduire à des régulations avant de passer à d’autres actions. Le modèle d’accompagnement professionnel proposé met en évidence que les connaissances se construisent en interaction avec les autres et le milieu où les personnes évoluent. La perspective socioconstructiviste adoptée suppose que la personne apprenante structure ses connaissances de façon active en interaction avec les autres. Cette [perspective prend] en compte différentes dimensions de la personne (cognitive, métacognitive, affective et sociale). [… En ce sens,] les concepts, les savoirs, les habiletés et les

Chapitre 1 — Fondements et concepts liés au modèle d’accompagnement

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compétences ne peuvent être construits que dans des situations ayant du sens et [en présupposant que] le processus de pensée individuel et collectif influence et modifie l’enseignement et l’apprentissage. Selon cette conception [du socioconstructivisme], il s’agit de favoriser l’expression des processus d’apprentissage dans différentes situations. Dans ce contexte, les personnes apprenantes peuvent se rendre compte des ressemblances et des différences entre diverses façons de faire et, ainsi, construire leurs stratégies en améliorant leurs idées grâce aux idées des autres (dimension métacognitive). Les échanges sur les façons de faire montrent le niveau de compréhension et d’intégration, mais aussi les types de constructions élaborés (dimension cognitive). Cette [conception] vise à rendre les personnes apprenantes cognitivement actives en provoquant des conflits cognitifs, mais aussi en suscitant des prises de conscience des constructions. Cette démarche stimule l’apprentissage, car l’esprit réfléchit, pose des questions, donne du sens aux apprentissages et cherche à comprendre. Cette activité favorise une augmentation de la confiance en soi, l’apprentissage n’étant pas uniquement centré sur la recherche de réponse mais aussi et surtout sur le processus (procédure, démarche, façon de faire…) chaque personne peut ainsi plus facilement approfondir sa façon d’apprendre et accepter les limites de ses constructions, de même que celles des autres (dimension affective). Enfin, dans cette approche, on suscite des interactions significatives, par exemple des conflits sociocognitifs, qui peuvent faire évoluer les conceptions, tout comme les croyances et les préjugés (dimension sociale) (Lafortune, 2004b, p. 191-192).

Selon cette perspective, les dimensions sociale, réflexive et interactive sont intrinsèquement liées. Elles mettent en relief une relation dialectique entre les personnes accompagnées, les personnes accompagnatrices et le contexte dans lequel elles interagissent, d’une part, et entre ces personnes, ainsi que le développement de leurs compétences et d’une culture associée aux fondements du changement, d’autre part. Dans le modèle proposé, la réflexion individuelle et collective occupe une grande place associée à la construction collective, aux interactions dans, sur et après l’action ainsi qu’à l’élaboration, l’expérimentation et la production de matériel d’accompagnement. Ce matériel soutient des équipes accompagnatrices d’un même milieu de travail ou de différents milieux ou celles qui sont désignées pour réaliser l’accompagnement. Ces équipes accompagnatrices peuvent aussi provenir de l’extérieur de l’établissement, de l’entreprise ou de l’organisation. L’ensemble de la démarche est réalisée à travers l’élaboration, la mise à l’essai, l’analyse, la régulation et la production de tâches et de situations d’accompagnement.

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

Dans l’élaboration du matériel d’accompagnement comme de tous les autres moyens d’accompagnement, l’écriture vise à respecter la perspective socioconstructiviste adoptée. Un des obstacles qui peut être rencontré lors de l’écriture d’un matériel d’accompagnement socioconstructiviste consiste à traduire sur le support papier le caractère dynamique de la perspective socioconstructiviste de l’accompagnement en cours dans un milieu donné. De façon générale l’écriture impose un cadre figé et statique qui ne reflète pas le caractère interactif de l’intervention, car les tâches sont inévitablement placées selon un déroulement chronologique. Relativement à cet obstacle, quelques questions se posent : ß Comment faire en sorte que l’écriture du matériel puisse laisser transparaître (ou puisse traduire) les actions et les processus mis en œuvre pour favoriser l’interaction des personnes afin de les amener à construire avec d’autres des connaissances à propos du changement et à examiner leurs pratiques ? ß Comment faire en sorte que les propositions restent ouvertes en offrant aux personnes utilisatrices des choix susceptibles de modifier ou d’adapter le déroulement d’une situation, selon les intentions ciblées, le fil conducteur et les tâches retenus par ces derniers ? ß Comment laisser suffisamment de souplesse pour s’approprier la proposition, l’aménager, l’adapter ou la transposer selon le contexte ou la situation d’accompagnement ? ß Comment écrire du matériel respectant l’autonomie et le jugement professionnel des personnes utilisatrices ? ß Comment écrire du matériel avec une intention de développement de compétences professionnelles ? ß Comment éviter les « pièges d’un manuel ou d’un guide » qui dit quoi faire en proposant une seule voie (ou voix), celle des auteurs ou auteures ? ß Comment s’y prendre pour mieux traduire la perspective socioconstructiviste en examinant les forces et les limites de l’outil de diffusion (guides, activités…) ? L’expérience d’écriture de situations d’accompagnement qui tente de refléter la dynamique de l’interaction associée au socioconstructivisme a fait émerger des caractéristiques de l’écriture de situations pour accompagner un changement selon cette perspective. ß Rendre les intentions explicites : les clarifier pour la personne qui accompagne mais aussi pour celle qui est accompagnée particulièrement pour qu’elles soient connues et comprises de cette dernière.

Chapitre 1 — Fondements et concepts liés au modèle d’accompagnement

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ß Amener les personnes accompagnées à réfléchir à partir de questionnements, de textes ou de capsules de réflexion. La réflexion peut porter sur des aspects : ß cognitifs (activation des connaissances antérieures). ß métacognitifs (description de son processus d’apprentissage, de ses stratégies, doutes, remises en question, changements de stratégies). ß affectifs (attitudes face au changement, face à une tâche, plaisirs, frustrations, découragements, etc.). ß Aller au-delà de la présentation d’une solution, amener la personne accompagnée à apporter des éléments d’explicitation, partager et comparer sa solution avec d’autres, aller chercher d’autres points de vue, etc. ß Partager et confronter ses idées, ses stratégies, ses moyens, ses outils, etc. ß Fournir des choix de démarches à réaliser afin de mener les personnes accompagnatrices à créer leurs propres situations d’accompagnement, à réfléchir à la séquence de tâches à réaliser, à discuter avec des collègues de la séquence à choisir…

COMPÉTENCES ET DÉVELOPPEMENT DE COMPÉTENCES Il convient maintenant d’ouvrir une parenthèse pour clarifier le concept de développement de compétences. D’emblée, mentionnons qu’une compétence n’est jamais entièrement maîtrisée chez une personne peu importe son âge, ses connaissances, ses habiletés ou son expérience. En effet, une compétence peut se développer à chaque fois que se présente un nouveau contexte qui exige une action originale. Cette vision des compétences en développement repose sur l’impossibilité de déterminer tous les contextes d’utilisation que le développement d’une compétence peut exiger. En contrepartie, une personne peut mobiliser correctement et à bon escient certains des éléments qui font partie des composantes d’une compétence. Dans ce cas, on peut penser que cette personne maîtrise jusqu’à un certain degré la compétence en cause. En conséquence, afin de faire ressortir l’aspect dynamique de l’appropriation d’une compétence, il est approprié de parler de compétence en développement. Une compétence est en développement lorsqu’il y a progression dans la maîtrise de ses composantes d’une compétence et que le degré de complexité des composantes sollicitées est croissant selon l’aspect inédit de la situation.

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

Le développement d’une compétence consiste à mobiliser des ressources, comme des connaissances et des habiletés, plus ou moins maîtrisées. Si des éléments de composantes sont relativement maîtrisés, cela veut dire que les individus sont au stade d’utilisation d’une compétence pour en compléter la maîtrise. L’utilisation d’une compétence peut se définir comme l’application de connaissances construites et d’habiletés « maîtrisées » permettant de réaliser une tâche ou une production, tandis que le développement d’une compétence fait référence à l’idée de progression dans l’appropriation de celle-ci. Dans le cadre de la mise en œuvre d’un changement, les personnes visées progressent vers l’appropriation d’une compétence et explorent un terrain qui est nouveau pour elles, de sorte que le développement d’une compétence revêt un niveau de difficulté plus grand que son utilisation. Ainsi, dans le contexte où le développement d’une compétence n’est jamais entièrement complété puisque toujours en progression, l’utilisation d’une compétence donnée fait référence à son degré d’appropriation tout en considérant la prise de conscience de ses forces et difficultés au regard de celle-ci. Le développement de compétences est stimulé par des déséquilibres cognitifs ou des obstacles qui sèment des doutes, des questionnements et mènent à des essais. De plus, ce développement se fait dans l’action pour faire face à diverses situations, ce qui accroît l’autonomie des personnes accompagnées (Lafortune, 2004d). Utiliser des compétences déjà passablement maîtrisées contribue à les consolider et à accroître le sentiment d’efficacité aux plans personnel et professionnel. Toutefois, pour permettre aux personnes accompagnées de cheminer dans l’appropriation d’une compétence, il importe de penser à leur intention et de leur proposer des interventions précises à cet effet. Il ne suffit pas de placer les personnes dans des contextes propices au développement de compétences. Cela exige aussi de prendre en compte le niveau de développement de cette compétence ainsi que le passage à l’action qui permet de progresser dans l’appropriation de cette compétence. Demander par exemple à des personnes accompagnées de présenter oralement la description d’une tâche à réaliser dans leur travail quotidien place ces personnes en situation d’explicitation de leur action. Pour mener à la réflexion sur ses pratiques, ces présentations peuvent être suivies de questions de clarification ou de rétroactions portant sur les forces et les aspects à améliorer dans les pratiques pour mieux répondre aux orientations du changement. Dans un autre exemple portant sur la compétence à résoudre un problème, des personnes accompagnées sont invitées à expliquer leur solution aux autres, à présenter leur démarche et leurs processus cognitifs tels que des remises en question, des ajustements et

Chapitre 1 — Fondements et concepts liés au modèle d’accompagnement

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des interrogations, et à comparer leur solution à celles d’autres personnes. Dans ces deux exemples, il peut y avoir confrontation ; c’est-à-dire remise en question des pratiques exigeant des explications qui précisent en quoi ces pratiques s’inscrivent dans les orientations du changement.

CYCLE DE COMPÉTENCES EN DÉVELOPPEMENT

Cette réfl exion portant sur les concepts de développement et d’utilisation des compétences est fondamentale. En effet, elle mène à repenser la façon d’élaborer des situations d’accompagnement et de les utiliser dans l’action. La figure ci-dessous, qui illustre le cycle que l’on peut observer lorsque des compétences sont en développement, met en lumière l’articulation de l’utilisation et du développement des compétences (Lafortune, 2004d, p. 290).

Pour développer des compétences

Utiliser des compétences déjà développées ou maîtrisées

Intentions de la personne accompagnatrice Prises de conscience des personnes accompagnées

Développer des compétences à partir de compétences déjà construites

Une fois développées • Application • Prise de conscience des compétences qui sont utiles • Prise de conscience de celles à développer

Suppose la métacognition

• Degré de complexité • Degré de déséquilibre cognitif • Aspect inédit

Vers l’autonomie dans l’apprentissage

Source : Lafortune, 2004d, p. 290.

MÉTACOGNITION ET PRATIQUE RÉFLEXIVE La dynamique réflexive-interactive du modèle d’accompagnement professionnel proposé vise à rendre les personnes participantes actives cognitivement, sur le plan métacognitif et sur le plan réflexif. L’individu actif sur le plan cognitif :

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement désigne la personne qui, dans le cadre d’activités d’apprentissage conçues à cette fin, met en œuvre des processus intellectuels. Ces processus peuvent être de niveaux de complexité différents : de la description à l’explication et à l’analyse ainsi qu’à la modélisation (Lafortune et Deaudelin, 2001, p. 203).

Elle vise également à susciter des conflits sociocognitifs qui sont « un état de déséquilibre cognitif provoqué chez l’individu par des interactions sociales qui le mettent en contact avec une conception ou une construction différente, voire difficilement compatible avec la sienne » (Lafortune et Deaudelin, 2001, p. 201). Ces accompagnements réflexifsinteractifs peuvent en outre susciter des prises de conscience qui résultent d’une démarche interne ou d’une intervention externe et qui supposent une reconnaissance (verbalisée ou non) de l’issue de la démarche pour soi, soit par une réflexion personnelle ou une interaction avec d’autres (Lafortune, 2006). Ces prises de conscience sont essentielles à une démarche d’apprentissage visant le développement d’habiletés de pensée complexes et d’habiletés métacognitives. Enfin, ces accompagnements réflexifs-interactifs peuvent habiliter les personnes accompagnées à porter plus d’un regard sur les démarches d’apprentissage : « ce que j’apprends », « comment je l’apprends », « ce qui m’a permis de l’apprendre », « la façon dont je pourrais utiliser cet apprentissage dans un autre contexte »… (Lafortune et Martin, 2004).

Métacognition Même si le concept de métacognition n’est pas toujours abordé explicitement dans les formations visant l’accompagnement d’un changement axé sur le renouvellement des pratiques professionnelles, dans le modèle proposé, la métacognition est sous-jacente à plusieurs actions. En ce sens, il est souvent question de porter un regard sur son processus d’apprentissage, sur sa démarche mentale ; d’exercer une mise à distance pour mieux analyser une situation ; de se poser des questions sur ce qui se passe, mais surtout sur comment cela se déroule, sur ce qui explique le déroulement, sur ce qui pourrait être fait autrement, sur les réflexions faites en cours d’action, sur les régulations réalisées à partir de constatations… Dans ce modèle, la métacognition fait référence au regard qu’une personne porte sur sa démarche mentale dans un but d’action afin de planifier, évaluer, ajuster, vérifier et évaluer son processus d’apprentissage (Lafortune et St-Pierre, 1994a et b, 1996 ; Lafortune et Deaudelin, 2001). Ce processus d’apprentissage est lié à ce qu’une personne apprend lorsque des formations lui sont offertes ou imposées pour la mise en

Chapitre 1 — Fondements et concepts liés au modèle d’accompagnement

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œuvre d’un changement. En tant que personne accompagnatrice, pour aider ces apprentissages, il est possible de favoriser les prises de conscience du cheminement. La métacognition est associée à trois composantes : les connaissances métacognitives, la gestion de l’activité mentale et la prise de conscience de son processus mental. La prise en compte de ces trois composantes mène au développement d’habiletés métacognitives. Les connaissances métacognitives sont des connaissances et des croyances au sujet des phénomènes reliés à la cognition. Elles peuvent porter sur les personnes (connaître ses forces et ses faiblesses et les comparer avec celles des autres), les tâches à effectuer (évaluer la difficulté ou la facilité d’une tâche) ou les stratégies pour les effectuer (quoi utiliser, quand et comment les utiliser). Les connaissances métacognitives, déduites des expériences métacognitives, sont relativement stables, verbalisables, mais peuvent être plus ou moins justes. La gestion de l’activité mentale fait référence aux activités mises en branle par l’individu pour contrôler et gérer sa propre pensée. On y inclut des activités de planification (anticiper le résultat), de contrôle (évaluer sa démarche en cours de processus) et de régulation (ajuster ses stratégies selon l’évaluation effectuée). Cette gestion de l’activité mentale est plus difficile à verbaliser et dépend de la tâche et du contexte de réalisation (voir Bouffard-Bouchard, Parent et Larivée, 1991 ; Brown, 1987 ; Chouinard, 1998 ; Doudin et Martin, 1992 ; Flavell, 1979, 1987 ; Lafortune, 1998 ; Lafortune et Deaudelin, 2001 ; Lafortune et St-Pierre, 1994a et b, 1996 ; Martin, Doudin et Albanese, 1999 ; Noël, Romainville et Wolfs, 1995 ; Romainville, 1998). Prendre conscience de ses processus mentaux enrichit les connaissances métacognitives et influence la gestion de l’activité mentale lors de la réalisation d’une tâche ultérieure. Ce caractère conscient de la métacognition revêt une grande importance dans son développement, particulièrement, dans une situation d’apprentissage (Lafortune et St-Pierre, 1994 a et b, 1996 ; Lafortune et Deaudelin, 2001). Le caractère conscient de la métacognition permet une meilleure verbalisation des processus mentaux, ce qui incite à de meilleurs échanges avec les autres dans un but d’amélioration. Un individu métacognitif se connaît par rapport à ses façons d’apprendre et, en comparaison avec celles des autres, peut reconnaître ses compétences vis-à-vis d’une tâche à réaliser et les stratégies pertinentes pour réaliser cette tâche. L’individu métacognitif porte un regard sur ses façons d’apprendre, c’est-à-dire sur les processus mentaux qu’il

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

met en action en situation d’apprentissage dans le but d’agir, de se contrôler, de s’ajuster, de se vérifier et de s’analyser comme personne apprenante (Lafortune et Deaudelin, 2001). Pour devenir un individu métacognitif, une personne passe par différentes phases. Lorsqu’elle commence à développer des habiletés métacognitives, elle est capable de reconnaître et de nommer les connaissances métacognitives qu’elle a à propos d’elle-même, de la tâche à réaliser et des stratégies pour la mener à terme. Par exemple, une personne pourra savoir que l’apprentissage d’une langue est difficile pour elle et qu’elle a besoin de temps pour intégrer la structure d’une langue. Une personne qui est rendue plus loin dans son évolution pour devenir un individu métacognitif est capable d’expliquer pourquoi, par exemple, l’apprentissage d’une langue est difficile pour elle. Elle sera alors en mesure de nommer les expériences antérieures qui contribuent à cette difficulté et à préciser en quoi cela lui cause des problèmes. Enfin, un individu métacognitif est capable d’analyser son processus d’apprentissage, d’évaluer et d’ajuster ses façons de faire dans l’action. Cette personne pourra alors préciser ce qui peut, par exemple, l’aider dans l’apprentissage d’une langue, saura comment elle peut ajuster ses stratégies d’apprentissage et évaluer l’ensemble de sa démarche. L’analyse de sa démarche mentale lui permettra de faire de meilleures prises de conscience et d’aborder une nouvelle situation d’apprentissage en ayant amélioré ses connaissances métacognitives et en tirant profit d’une meilleure gestion de son activité mentale. Un tel individu est en position de mieux construire des compétences.

Pratique réflexive Le modèle d’accompagnement professionnel préconisé dans ce livre favorise une pratique réflexive. En ce sens, il suscite un regard critique, des remises en question, des interactions, des gestes professionnels cohérents avec le changement et une analyse de ces gestes. Comme il s’inscrit dans une perspective socioconstructiviste, il suppose des réflexionsinteractions qui confrontent les pratiques ainsi que les croyances (conceptions et convictions) et suscitent des conflits sociocognitifs, lesquels permettent lorsqu’ils sont résolus d’avoir plus de cohérence ou de prendre conscience de ses incohérences, de les verbaliser, de les partager et de les discuter.

Chapitre 1 — Fondements et concepts liés au modèle d’accompagnement

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Cette pratique réflexive comporte trois composantes : 1) réfléchir sur sa pratique et l’analyser ; 2) transposer les apprentissages faits dans des actions futures et des retours sur les expériences ; 3) développer son modèle de pratique en constante évolution. 1 La réflexion sur sa pratique et l’analyse de celle-ci ne peuvent se limiter à discuter de ce qui est fait dans son travail ou avec un groupe de personnes accompagnées. Une telle réflexion et une telle analyse présupposent une intention de changement des pratiques sinon, elles ne s’avéreraient pas utile. La réflexion sur sa pratique permet à la personne d’être ensuite en mesure de décrire sa pratique de sorte que les autres puissent comprendre ce qui est réalisé au point de pouvoir utiliser des idées à partir de cette description. L’analyse suppose des mises en relation, des comparaisons, des justifications ou explications tout en acceptant les questionnements, les remises en question, les confrontations des autres. 2 Le passage à l’action est nécessaire pour montrer le niveau de réflexion et la pertinence de l’analyse. Le passage à l’action suppose des prises de conscience assez approfondies – à l’opposé de prises de conscience superficielles – au point de susciter des changements qui perdurent, qui empêchent de revenir en arrière. Ce passage à l’action est lié au processus de transposition issu de la réflexion et de l’analyse et mène à des retours sur les actions, autant individuellement que collectivement, afin de susciter des interactions, des confrontations (et non des affrontements) et des régulations pour des actions ultérieures. 3 Le développement de son modèle de pratique qui présente la conception de la formation ou de l’accompagnement de personnes formatrices ou accompagnatrices est issu de ce processus de réflexion, de confrontation, d’analyse et de remise en question. (Lorsque ce modèle se dessine clairement dans la tête de la personne, celle-ci peut en faire état et le verbaliser devant des collègues.) Ce modèle n’est jamais réellement terminé, il continue d’évoluer au fil du cheminement professionnel. Pour arriver à réaliser un tel accompagnement, il est nécessaire que les personnes accompagnatrices soient elles-mêmes ouvertes au changement de leurs pratiques et qu’elles démontrent un engagement dans une démarche de pratique réflexive. Le modelage1 effectué par les personnes accompagnatrices suppose qu’elles sont aussi capables de se remettre en question, qu’elles peuvent s’autoévaluer et s’auto-observer. Cela veut dire 1.

Pour des explications, voir p. 126.

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

qu’elles savent aussi comment mettre les personnes accompagnées dans une telle posture (Lafortune, 2007a). D’ailleurs, peut-on demander à d’autres de changer, de se remettre en question sans démontrer soi-même une capacité à le faire ? Face à une attitude de fermeture, les personnes accompagnées peuvent vivre un sentiment de frustration et retirer leur confiance à la personne accompagnatrice qui n’aurait pas, dans ce cas, beaucoup de crédibilité auprès du groupe accompagné. Le passage de la formation à l’accompagnement s’avère un processus complexe qui exige d’avoir des intentions et des orientations qui méritent d’être précisées auprès des personnes accompagnées (Lafortune et Lepage, 2007). Le chapitre 6 permettra d’approfondir le concept de pratique réflexive et de mesurer l’importance qu’elle occupe dans le modèle.

LEADERSHIP D’ACCOMPAGNEMENT Pour mettre en place un changement, surtout s’il est majeur et orienté, il s’agit que ce changement vise des pratiques professionnelles de façon approfondie et intégrée. Cela suppose d’exercer une influence sur le niveau d’engagement, qui va plus loin que la simple verbalisation de son adhésion. Il ne suffit pas de dire qu’on adhère au changement. Il est nécessaire de se donner les moyens de passer à l’action pour traduire cette adhésion par des gestes, des actions ou des projets concrets. Le leadership à exercer suscite l’innovation et l’initiative jusqu’à favoriser un leadership semblable auprès de ses collègues. Cela suppose une certaine forme de collégialité, des pouvoirs et des responsabilités partagés avec les différents personnels accompagnés. Tout membre d’une organisation ou entreprise qui veut implanter un renouveau devrait connaître les aspects fondamentaux du changement à mettre en œuvre. Qu’est-ce que ce changement veut dire ? Qu’est-ce qui s’avère essentiel dans la mise en applicaton de ce changement ? S’il n’y avait qu’un seul aspect à évaluer pour s’assurer que le changement soit mis en œuvre, que devrait-on prioriser ? Jusqu’à présent, le leadership a été associé au fait d’exercer une influence. Cela va dans le sens de Langlois et Lapointe (2002). S’il est une influence, le leadership ne se décrète pas, il se développe en interaction avec les personnels accompagnés. Il s’exerce par la reconnaissance que les autres accordent au leadership. On le reconnaît à travers des réalisations, à sa relation avec une équipe de travail ou avec les personnels d’une organisation ou d’une entreprise. Même si certaines personnalités peuvent être charismatiques, le ou la leader a besoin de temps et de réalisations pour se faire connaître auprès de personnels avant qu’ils lui

Chapitre 1 — Fondements et concepts liés au modèle d’accompagnement

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accordent sa confiance. Si le leadership d’une personne se construit dans le temps, celle-ci devra établir des contacts et achever des réalisations avant d’être reconnue ou d’obtenir la confiance des autres. Plus qu’une influence, le leadership peut être considéré comme un processus d’influence qui se construit en interaction avec les personnes accompagnées. Reconnaître et partager sa conception du changement, du travail et de la collaboration, c’est déjà faire preuve d’une posture de leader. Dans le modèle d’accompagnement professionnel proposé, pour tenir compte de la perspective socioconstructiviste adoptée et pour considérer la nécessité de s’engager soi-même dans une pratique réflexive pour faciliter cet engagement chez les autres, il est convenu de parler de « leadership d’accompagnement ». Le leadership d’accompagnement se veut un processus d’influence menant à un changement qui se fera sentir jusque dans les pratiques professionnelles. Il s’exerce et se développe par la réflexion individuelle et collective et par l’interaction avec les personnels accompagnés pour susciter des prises de conscience menant à des changements dans l’action. Ce processus s’inscrit dans une pratique réflexive où la réflexion et l’analyse des pratiques mènent au développement de compétences professionnelles pour l’accompagnement (Lafortune, 2007b, 2008). Le développement du leadership d’accompagnement se situe dans le contexte où même si on pouvait espérer que le changement soit voulu par tous les personnels visés, la diversité chez les êtres humains fait en sorte – et cela est préférable – que le changement n’est pas toujours apprécié. Dans le contexte où le changement est prescrit et qu’il donne une orientation, au-delà de l’adhésion, il s’agit de susciter l’engagement. L’accompagnement d’un tel changement peut susciter une grande ouverture, un certain scepticisme, des questionnements ou un refus (voir Lafortune 2006). Il suppose des interactions, des réflexions collectives, des actions, des analyses collectives, des régulations… La personne qui exerce un leadership qui s’inscrit dans une démarche d’accompagnement de différents personnels se reconnaît par les caractéristiques suivantes : une certaine culture, un agir éthique, la prise en compte de la dimension affective et, comme il a déjà été souligné, l’engagement dans une pratique réflexive. La vaste portée de la définition du leadership d’accompagnement confirme que de nouvelles compétences professionnelles sont à développer pour assurer la mise en place d’un changement majeur. Il semble impossible de se limiter à des ajouts aux pratiques antérieures. Cela exige de miser sur le développement d’une créativité au plan professionnel afin

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

de modifier les pratiques. Comme il est souligné tout au long de ce texte, une démarche de réflexion sur les pratiques réalisée tant individuellement qu’avec des collègues ou des personnes accompagnées démontre un souci de cohérence avec le changement souhaité (Lafortune, 2008).

CHAPITRE

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VISÉE ET ORIENTATIONS DE L’ACCOMPAGNEMENT

Considérant le modèle d’accompagnement professionnel proposé dans ce livre, les finalités d’un projet de mise en œuvre d’un changement se partagent en une visée générale explicitée par des orientations qui se concrétisent en actions. L’encadré de la page suivante résume de façon synthétique cette visée, ces orientations et ces actions.

VISÉE : L’ACCOMPAGNEMENT DE LA MISE EN ŒUVRE D’UN CHANGEMENT PRESCRIT ET ORIENTÉ Le modèle proposé s’inscrit dans la perspective de mettre en œuvre un changement orienté, prescrit ou qui comporte des éléments de prescription. Selon cette visée, l’accompagnement d’un processus de changement suppose un soutien apporté par des personnes accompagnatrices qui offrent un modèle de pratique – qui peut différer d’une personne accompagnatrice à l’autre – mais qui respecte les fondements du changement. En ce sens, une personne accompagnatrice d’un changement orienté a une représentation du changement qu’elle accepte de partager et de discuter et même de modifier. Cette personne connaît les fondements, les visées et les orientations du changement qu’elle a intégrés ou

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

Visée : L’accompagnement de la mise en œuvre d’un changement prescrit, orienté Orientations et actions Le développement d’un leadership d’accompagnement • Mettre en place un accompagnement professionnel • Développer des compétences professionnelles pour l’accompagnement L’engagement dans une pratique réflexive-interactive • S’engager dans le changement • Encourager la création de réseaux favorables à la formation de communautés réflexives de pratique et d’apprentissage La collaboration professionnelle • Soutenir le travail en équipe de collègues Le développement du jugement professionnel • Accompagner l’évaluation dans une perspective d’aide au développement de compétences L’enrichissement de la culture associée au domaine visé par le changement • Établir des liens étroits entre théorie et pratique Le passage à l’action dans une perspective réflexive-interactive • Accompagner des projets d’action

qu’elle est en voie d’intégrer à son modèle de pratique. Le modèle de pratique guide l’ensemble des décisions qu’elle prend et des gestes professionnels qu’elle accomplit en situation d’accompagnement. Pour atteindre cette visée générale, la mise en œuvre d’une démarche d’accompagnement socioconstructiviste du renouvellement des pratiques professionnelles et du développement de compétences professionnelles, il est nécessaire de mettre en place un certain nombre de conditions pour l’organisation du travail. Cela suppose : ß Des moments de rencontre d’un groupe de personnes (un groupe de 8 à 24 personnes semble convenir le mieux à ce type d’accompagnement) répartis sur plus d’une année. ß Un nombre et une durée des rencontres à déterminer. L’expérience montre l’importance de rencontrer les personnes pour l’équivalent de 4 à 8 journées durant l’année, en bloc de deux jours. Ici, une nuance peut être apportée. Ce qui est proposé est issu de ce qui a été vécu dans un projet particulier. Des ajustements peuvent être faits mais, pour ne pas perdre de vue la perspective de l’accompagnement associée à ce modèle, on peut penser que les blocs de deux

Chapitre 2 — Visées et orientations de l’accompagnement

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jours peuvent être transformés en un bloc de deux jours pour amorcer la démarche et suivis de rencontres d’une journée ou d’une demi-journée selon la fréquence et l’éloignement des rencontres. Par exemple, un projet de trois rencontres (et même jusqu’à cinq) de 2 ou 3 heures ne peuvent être considérées comme un accompagnement d’un changement axé sur le renouvellement des pratiques professionnelles. Il ne suffit pas de 6 à 15 heures pour assurer un tel changement. L’expérience vécue laisse penser qu’un minimum de 6 à 8 journées, cette durée pouvant être augmentée à 12 ou même 16 jours pendant plus d’une année, permet d’assurer une intégration du processus et du contenu. Considérer un projet étalé sur plus d’une année permet de réaliser un accompagnement dans le passage d’une année à l’autre avec la prise en compte des mouvements de personnel. ß Entre les rencontres, des suivis permettant d’approfondir ce qui a été abordé lors des rencontres peuvent être organisés. Ces suivis plutôt personnalisés prennent la forme soit de rencontres de sousgroupes, soit de courriels élaborés, soit de rendez-vous téléphoniques. Ces suivis servent soit à clarifier des idées déjà abordées lors des rencontres, à poursuivre la planification de moyens d’action, ou à échanger des documents. Ils sont intimement liés aux contenus des rencontres, mais aussi à l’engagement du passage à l’action et à la mise en œuvre de projets réalisés dans le milieu entre les rencontres. Ces suivis deviennent souvent des moments de rétroaction à partir d’expériences à tenter ou déjà amorcées. ß Des personnes peuvent s’ajouter à l’équipe accompagnatrice en cours d’accompagnement pour contribuer à la réflexion, pour rétroagir aux plans des rencontres, pour plus de formation et pour devenir elles-mêmes accompagnatrices et, ainsi, favoriser le réinvestissement dans leur milieu. ß Fournir un accompagnement en dyade est un moyen qui aide à assurer une mise à profit de la complémentarité des expertises et une continuité lors des départs. Ici aussi, des nuances peuvent être apportées. Le travail en dyade est important, mais il peut se faire lors de la préparation des rencontres et non pas nécessairement pendant les rencontres. Ce choix peut être un moyen de tenir compte de restrictions dans les ressources autant humaines que financières. Cependant, c’est la nécessité de favoriser la collaboration autant avant qu’après les rencontres et si possible pendant l’animation qu’il importe de retenir.

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

ß Décider préalablement de la forme, de la structure et de la perspective de l’accompagnement qui seront privilégiées. En informer les personnes afin de ne pas leur donner l’impression qu’il s’agit d’une formation ponctuelle ou de formations juxtaposées auxquelles elles pourront choisir de participer ou non selon le contenu abordé. Dès la première rencontre, il importe qu’elles aient l’intention de s’engager dans une démarche qui se déroule sur un continuum qui s’échelonne dans le temps. La juxtaposition de rencontres va à l’encontre de la perspective d’accompagnement préconisée dans ce modèle. Sur le plan du contenu, l’accompagnement veut allier théorie et pratique, réflexion et action, de façon intégrée et complémentaire. Cet accompagnement vise à susciter l’activation de connaissances ou d’expériences antérieures et l’expertise des personnes accompagnées afin de favoriser la construction et le développement d’une culture associée aux fondements du changement, à susciter des conflits sociocognitifs et à profiter de ceux qui émergent au cours de la réflexion et de la discussion, à coconstuire dans l’action, à mettre en évidence les conceptions et à tirer profit des prises de conscience de certaines constructions. Cet accompagnement présuppose une interaction entre la personne accompagnatrice et celle qui est accompagnée mais aussi entre les personnes qui sont accompagnées (voir également Lafortune et Deaudelin, 2001a). La visée « L’accompagnement de la mise en œuvre d’un changement prescrit et orienté » se définit à travers différentes orientations et les actions qui en découlent. Elles sont présentées dans les sections qui suivent.

PREMIÈRE ORIENTATION : LE DÉVELOPPEMENT D’UN LEADERSHIP D’ACCOMPAGNEMENT Dans la mise en œuvre d’un changement, la notion de leadership peut s’imposer au départ, mais elle peut aussi émerger en cours d’implantation du changement. Ce leadership peut également se transformer. C’est ce qui est arrivé dans le projet à l’origine de ce livre. Il y a eu passage d’un leadership pédagogique à un leadership d’accompagnement. Ce dernier était sous-jacent aux actions posées dans le projet, car il est difficile d’envisager mettre en œuvre un changement sans penser qu’il sera nécessaire de développer et d’exercer un leadership. Mais de quel leadership

Chapitre 2 — Visées et orientations de l’accompagnement

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s’agit-il ? C’est la notion de leadership d’accompagnement qui a été coconstruite à partir des discussions des différentes équipes accompagnatrices et accompagnées. Ce leadership d’accompagnement se veut un processus d’influence des pratiques professionnelles dans le sens des orientations à donner au changement. Il s’exerce et se développe par la réflexion individuelle et collective et en interaction avec les personnels visés par le changement. Ce type de leadership suscite des prises de conscience menant à des actions qui sont élaborées, réalisées, analysées, évaluées, ajustées, réinvesties dans une perspective de collaboration professionnelle. Ce processus s’inscrit dans une pratique réflexive où la réflexion et l’analyse des pratiques mènent au développement de son modèle de pratique et de ses compétences professionnelles à l’accompagnement (Lafortune, 2008). Les concepts de leadership et d’accompagnement sont ici associés pour montrer que le processus d’influence qui mène à un changement des pratiques professionnelles exige la mise en place d’une démarche de réflexion individuelle et collective. Cet aspect collectif de la réflexion suppose des interactions qui peuvent mener à des remises en question, à des confrontations, à des conflits sociocognitifs. Cette dimension réflexive-interactive s’inscrit dans une perspective socioconstructiviste considérant que les personnes accompagnées structurent leurs connaissances et compétences en interaction avec les autres à partir de leurs représentations du changement. Ce leadership d’accompagnement dans une perspective socioconstructiviste suppose un passage à l’action, des liens entre la théorie et la pratique, ainsi que le développement d’une pratique réflexive et d’une culture associée aux fondements du changement, et enfin l’établissement de réseaux. Il s’agit également de s’assurer que les personnes accompagnées réinvestissent les résultats des discussions ou les éléments de formation, et ce, pendant une période assez longue pour démontrer une intégration des changements et de nouvelles façons de faire. En ce sens, réflexion et action sont considérées en complémentarité. Deux actions contribuent principalement à la première orientation « Le développement d’un leadership d’accompagnement » : ß mettre en place un accompagnement professionnel ; ß développer des compétences professionnelles pour l’accompagnement.

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

Mettre en place un accompagnement professionnel La première orientation se traduit par un accompagnement professionnel qui se veut un soutien, qui suppose une cohérence entre ce qui est réalisé par les personnes accompagnatrices auprès des personnes accompagnées et ce que l’on voudrait que ces dernières fassent auprès des personnes qu’elles accompagneront à leur tour. En d’autres mots, cela veut dire que l’on vise à modeler (se donner en modèle) ce qui serait à transposer dans l’accompagnement des milieux. Cet accompagnement est dit « professionnel », car il vise la professionnalisation des personnes qui contribueront à l’implantation du changement auprès d’un personnel ciblé. En somme, cet accompagnement professionnel vise les personnes qui ont à mettre en œuvre un changement exigeant des changements de pratiques professionnelles, ce qui suppose des remises en question, des craintes, des incertitudes, des ambiguïtés, des prises de risques. Cet accompagnement nécessite l’engagement dans une pratique réflexive autant des personnes accompagnatrices qu’accompagnées. Ce type d’accompagnement se réalise en collaboration avec les milieux accompagnés. Chaque groupe décide de son propre cheminement qui se précise au regard des besoins exprimés pour l’accompagnement d’un changement, mais aussi en fonction des ressources et de l’expertise du milieu. Tout en respectant les fondements du changement, les thématiques et les processus sont choisis en concertation avec l’équipe ou la personne accompagnatrice et le groupe ou les personnes accompagnées. Les choix tiennent compte de ce qui se fait déjà dans le milieu, des expertises des personnes, de la visée et des orientations du changement. Les personnes accompagnées transposent le modèle d’accompagnement professionnel en adaptant la démarche à leur contexte d’intervention. Pour ce faire, elles sont invitées à garder des traces de leur démarche d’accompagnement ainsi que des expériences réalisées dans leur milieu de travail. Cette façon de faire aide à suivre l’évolution des personnes et des groupes accompagnés et permet à ces derniers de reconnaître leur propre démarche. On peut donc dire que l’accompagnement professionnel sous-tend un travail en collégialité qui peut se transformer, avec le temps, en collaboration professionnelle. Cette collaboration professionnelle suppose une coordination d’efforts collectifs, des discussions qui mènent à des prises de décision collectives et à des interventions concertées. Ces interventions sont analysées et régulées collégialement. Cela mène à une responsabilité partagée de l’accompagnement de collègues jusqu’au développement de compétences, les siennes et celles des personnes accompagnées.

Chapitre 2 — Visées et orientations de l’accompagnement

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Développer des compétences professionnelles pour l’accompagnement d’un changement Le développement de compétences professionnelles pour un accompagnement socioconstructiviste permet aux personnes accompagnatrices et accompagnées de cheminer vers une autonomie intellectuelle dans les gestes professionnels à mettre de l’avant pour assurer une mise en œuvre efficace d’un changement orienté. Les huit compétences professionnelles1 pour l’accompagnement d’un changement qu’il importe de développer afin d’aller dans le sens des orientations du modèle d’accompagnement proposé dans ce livre sont : ß Compétence 1 Adopter une posture visant à réaliser une démarche d’accompagnement d’un changement ß Compétence 2 Modeler une pratique réflexive dans l’accompagnement d’un changement ß Compétence 3 Prendre en compte la dimension affective dans l’accompagnement d’un changement ß Compétence 4 Maintenir une communication réflexiveinteractive dans la préparation et l’animation du processus de changement ß Compétence 5 Mettre en place une collaboration professionnelle pour cheminer dans un processus de changement ß Compétence 6 Mettre en place des projets d’action pour accompagner un processus de changement ß Compétence 7 Mettre à profit des pratiques évaluatives dans un processus de changement ß Compétence 8 Exercer un jugement professionnel en agissant de manière éthique et critique

1.

Pour des explications complètes des huit compétences professionnelles pour l’accompagnement d’un changement, voir Lafortune (2008), qui présente le référentiel.

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

La compétence 1 « Adopter une posture visant à réaliser une démarche d’accompagnement d’un changement » se concrétise par les gestes professionnels suivants : ß s’engager dans une démarche d’accompagnement socioconstructiviste ; ß comprendre les fondements associés au changement ; ß adopter une posture critique et réflexive à propos du changement ; ß construire, expliciter et justifier une vision du changement ; ß mobiliser et enrichir sa culture en fonction des fondements du changement. On peut dire que cette compétence est essentielle, car on ne peut penser accompagner un changement sans qu’une démarche, réfléchie et structurée, soit mise en application. Cela implique des habiletés à développer, des gestes professionnels à poser et des conditions à mettre en place. Cela suppose une compréhension du changement, une adhésion tout en gardant un sens critique ainsi que des actions qui respectent les exigences et les orientations fondamentales de ce changement. La compétence 2 « Modeler une pratique réflexive dans l’accompagnement d’un changement » se concrétise par les gestes professionnels suivants : ß adopter et susciter une pensée et une posture réflexives ; ß intégrer la pratique réflexive à son modèle de pratique ; ß dégager son modèle de pratique. Cette compétence s’avère nécessaire pour deux raisons principales. D’abord demander à des personnes accompagnées de s’engager dans une pratique réflexive sans le faire soi-même comporte un risque d’incohérence, car il peut y avoir un écart entre ce que la personne pense et ce qu’elle fait alors cela finit par transparaître dans les gestes professionnels qu’elle pose. Cela signifie qu’il est nécessaire de se donner en modèle en s’engageant soi-même dans une pratique réflexive. Ensuite, ce modelage permet d’accompagner l’engagement dans une pratique réflexive des personnes accompagnées, de les soutenir dans la réflexion, dans le passage à l’action et dans l’analyse, mais aussi dans l’élaboration du modèle de pratique de chaque personne accompagnée, en respectant leur cheminement, leurs pensées et actions différentes des siennes tout en questionnant les pratiques en fonction des orientations du changement qui comporte des éléments de prescription.

Chapitre 2 — Visées et orientations de l’accompagnement

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La compétence 3 « Prendre en compte la dimension affective dans l’accompagnement d’un changement » se concrétise par les gestes professionnels suivants : ß agir en tenant compte de la dimension affective dans une perspective cognitive ; ß se connaître sur le plan affectif en situation d’accompagnement ; ß reconnaître les réactions affectives en cours d’action ; ß comprendre le rôle de la dimension affective et amener les autres à le comprendre ; ß mettre en œuvre des stratégies liées à la compréhension du rôle de la dimension affective en situation d’accompagnement ; ß s’engager dans une pratique réflexive liée à la dimension affective de l’accompagnement. Dans un processus de changement, les personnes accompagnatrices sont souvent confrontées aux effets de la dimension affective dans l’accompagnement. Elles transigent avec leurs réactions, mais aussi avec celles des personnes accompagnées. Ces situations s’avèrent souvent déstabilisantes, mais elles ne peuvent cependant pas être ignorées, car elles finissent toujours par influencer, positivement ou négativement, le cheminement des personnes dans la démarche d’accompagnement. En ce sens, le développement de cette compétence professionnelle s’avère essentiel, surtout dans le cas d’un changement prescrit et orienté. La compétence 4 « Maintenir une communication réflexive-interactive dans la préparation et l’animation du processus de changement » se concrétise par les gestes professionnels suivants : ß diffuser les orientations, les fondements, les enjeux et les effets du changement ; ß manifester une attention soutenue aux personnels engagés dans le processus de changement ; ß utiliser des moyens réflexifs-interactifs selon une perspective socioconstructiviste de la communication ; ß s’exprimer clairement en utilisant la terminologie associée au changement. Pour la mise en œuvre d’un changement majeur comportant des éléments de prescription, il devient nécessaire d’en parler, de viser à le comprendre et à saisir les enjeux et les effets de ce changement sur les pratiques. Cette visée de compréhension suppose le développement de

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cette compétence pour éviter les jugements hâtifs ou les interprétations qui limitent les échanges. Une telle communication suppose l’acceptation des confrontations, des remises en question, mais aussi un regard critique sur ses croyances et pratiques et sur celles des autres. La compétence 5 « Mettre en place une collaboration professionnelle pour cheminer dans un processus de changement » se concrétise par les gestes professionnels suivants : ß créer un partenariat avec les personnels engagés dans un processus de changement ; ß s’engager dans un esprit de collaboration, de coopération et de concertation ; ß développer individuellement et collectivement des compétences professionnelles à l’accompagnement ; ß construire une vision partagée du changement ; ß faire connaître les ressources, actions et contributions au sein du milieu ; ß développer des réseaux de partage et de communication entre les personnels engagés dans le processus de changement. La réflexion au regard de la mise en œuvre d’un changement soulève toute l’importance et la pertinence du travail en équipe de collègues, ce qui suppose le développement de cette compétence professionnelle pour l’accompagnement. Travailler en équipes de collègues favorise les interactions, suscite des réflexions, invite à réaliser des mises à l’essai collectives, offre des lieux d’échanges pour des rétroactions et des analyses de pratiques et d’expériences. En ce sens, la mise en place d’équipes de collègues s’inscrit dans la visée d’établir une collaboration professionnelle entre différents partenaires. Ce processus complexe ne va pas nécessairement de soi et dépasse largement la signature d’un contrat entre deux parties. Cette relation se construit avec le temps et s’appuie sur la confiance et le respect mutuels des parties. Elle exige une compréhension des exigences de l’accompagnement à réaliser et ne repose pas sur une relation d’autorité. Elle mise plutôt sur les échanges, la souplesse et la réciprocité. Elle se construit avec les forces et les limites des partenaires, mais aussi par la multiplication de réalisations collectives. La compétence 6 « Mettre en place des projets d’action pour accompagner un processus de changement » se concrétise par les gestes professionnels suivants : ß discuter de la nature du changement dans une perspective d’action ;

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ß préparer des tâches ou des situations d’accompagnement visant à mettre en œuvre le changement ; ß favoriser la mobilisation et le développement d’une culture liée au champ d’expertise des milieux accompagnés ; ß choisir des processus, des contenus, des moyens, des outils ou du matériel d’accompagnement qui facilitent une posture de développement professionnel ; ß cibler des approches ou des pratiques cohérentes avec la mise en œuvre du changement ; ß soutenir l’élaboration, la mise en action, l’analyse et la régulation de projets d’action. Sans passage à l’action, on ne peut dire qu’un changement est mis en œuvre ; c’est pourquoi le développement de cette compétence est essentiel. Il peut arriver qu’au début de la mise en œuvre d’un changement, les personnes accompagnatrices s’approprient le changement, modifient leurs pratiques, les analysent et les régulent, s’engagent dans un processus de développement professionnel. Cependant, elles ne peuvent en rester à cette étape. Dans un deuxième temps, c’est le passage à l’action qui importe : ses propres actions et l’accompagnement des actions des personnes accompagnées. L’accompagnement exige donc deux niveaux d’action. La compétence 7 « Mettre à profit des pratiques évaluatives dans un processus de changement » se concrétise par les gestes professionnels suivants : ß questionner les personnels sur leur perception du changement et sa progression dans le milieu ; ß observer l’évolution du changement ; ß analyser l’évolution du changement et son degré de mise en œuvre ; ß réguler son action au cours de l’intervention ; ß faire des bilans analytiques de son action et de celle des personnels accompagnés. Accompagner la mise en œuvre d’un changement suppose une évaluation autant en cours d’action qu’après l’action, autant pour aider au cheminement professionnel que pour évaluer l’évolution ou l’incidence du changement. Cela signifie que le développement de cette compétence s’avère nécessaire pour aider les personnes accompagnatrices et

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accompagnées à reconnaître l’évolution des pratiques, mais aussi l’influence ou l’incidence du changement sur l’organisation, sur le développement des compétences des personnels accompagnés, sur la clientèle auprès de qui ces personnels interviennent. La compétence 8 « Exercer un jugement professionnel en agissant de manière éthique et critique » se concrétise par les gestes professionnels suivants : ß connaître son modèle de pratique et être en mesure de l’expliquer ; ß faire preuve d’une ouverture dans l’exercice d’un jugement critique ; ß justifier ses prises de décision et ses actions ; ß reconnaître et respecter les valeurs et les représentations ; ß éviter toute forme de discrimination, de jugements hâtifs, de paroles ou de gestes inappropriés en milieu professionnel ; ß adopter un fonctionnement démocratique ; ß connaître et utiliser judicieusement le cadre dans lequel s’inscrit le changement ; ß lier le jugement professionnel, critique et éthique pour la prise en compte des dimensions cognitive, métacognitive, affective et sociale. Cette compétence s’inscrit dans la perspective que le jugement professionnel rigoureux, transparent et cohérent nécessite autant la concertation et la consultation de collègues que certaines confrontations (remises en question qui peuvent se faire sans affrontement). Cela suppose l’accompagnement d’une pratique réflexive pour favoriser l’acceptation d’une telle perspective afin d’en arriver à rechercher l’expertise de collègues pour s’aider à prendre des décisions éclairées qui peuvent avoir des conséquences importantes sur le cheminement des personnes accompagnées et sur la mise en œuvre du changement. En ce sens, le développement du jugement professionnel mène à une autonomie que l’on nomme réflexive-interactive. Une telle autonomie sous-tend des interactions plutôt que de travailler seul pour prendre ses décisions ; elle suppose l’acceptation du regard de l’autre sur ses pratiques jusqu’à les remettre en question tout en demeurant soi-même responsable de ses gestes professionnels. Enfin, accompagner des personnels scolaires dans un processus de changement, de renouvellement des pratiques professionnelles et de développement de compétences professionnelles requiert : ß un engagement ; ß une connaissance approfondie du changement ;

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ß une culture associée aux fondements du changement ; ß une vision et une représentation du changement que l’on est en mesure d’expliquer ; ß des pratiques d’accompagnement qui servent de modèle pour aider à comprendre le sens du changement.

DEUXIÈME ORIENTATION : L’ENGAGEMENT DANS UNE PRATIQUE RÉFLEXIVE-INTERACTIVE La mise en œuvre d’un changement majeur axé sur le développement des compétences des personnels d’un établissement, d’une organisation ou d’une entreprise passe par un renouvellement des pratiques. C’est en considérant cette situation que l’engagement dans une pratique réflexive-interactive s’impose. Changer ses pratiques et les remettre en question veut dire réfléchir, analyser et réguler ses pratiques en se demandant si elles respectent les fondements et orientations du changement visé. Comme l’accompagnement proposé dans ce modèle est collectif, même s’il peut se réaliser individuellement, la réflexion sur les pratiques suppose un travail collectif, effectué en collaboration avec des collègues, ce qui explique le volet interactif de la pratique réflexive et l’encouragement à la formation de réseaux.

S’engager dans le changement Cette deuxième orientation suppose un engagement dans une pratique réflexive-interactive. Les personnes accompagnatrices ainsi que celles qui sont accompagnées s’engagent à réfléchir à leurs pratiques, mais aussi à celles qui ont cours dans leur milieu pour les soumettre à la discussion au regard des pratiques associées au changement visé. Dans un tel processus de changement, il devient nécessaire que les partenaires s’engagent pour que l’interaction soit productive. Des collègues échangent parfois des idées, mais peuvent avoir plus de difficulté à soumettre à la discussion leurs actions professionnelles dans le but de réguler leurs pratiques. L’accompagnement proposé dans le présent modèle va au-delà d’une formation où les échanges procèdent d’un rapport hiérarchique entre la personne accompagnatrice-formatrice et celles qui sont accompagnées-formées. Pour ce faire, il importe que la personne accompagnatrice-formatrice soit prête à dévoiler et à analyser ses façons de faire pour éventuellement elle-même changer ou améliorer ses pratiques professionnelles.

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Ainsi, les personnes réfléchissent et examinent leurs pratiques, les confrontent à celles des autres, mais aussi à celles qui sont associées aux fondements du changement à effectuer. Cette réflexion vient nécessairement remettre en question certaines façons de faire et peut même aller jusqu’à modifier celles tant des personnes accompagnées que celles des personnes accompagnatrices ou les amener à ajuster leur modèle de pratique. Les régulations se font souvent graduellement, par touches successives, puisque le modèle évolue au fil de la réflexion qui se construit avec d’autres, mais aussi à l’aide des adaptations réalisées par les personnes entre la démarche d’accompagnement et les actions qu’elles posent dans leur milieu entre les rencontres. Elles peuvent ainsi expérimenter, analyser et ajuster certains aspects associés à l’accompagnement de la mise en œuvre du changement. Elles sont en mesure d’observer et de discuter des problématiques et des questions posées et peuvent ainsi s’approprier davantage le changement pour mieux accompagner le milieu visé. En développant une pratique réflexive-interactive, elles en arrivent à des prises de conscience qui font évoluer leur modèle, qui l’améliorent de telle sorte que leur pratique s’en trouve généralement transformée. L’engagement dans une pratique réflexive-interactive devient un moyen privilégié pour favoriser un changement de pratiques. De plus, même si les aspects théoriques ne semblent pas toujours appréciés, ils sont essentiels pour favoriser une réflexion sur sa pratique. Selon Bodergat (2005, p. 47), les références théoriques « valent […] par le pouvoir d’intelligibilité qu’elles apportent et par l’avancée décisive de la démarche qu’elles autorisent ». De plus, selon cet auteur, la théorie est nécessaire pour éviter les pièges de l’intuition, elle fournit des instruments d’analyse et donne du sens à la complexité. L’apport de la théorie montre l’importance du développement d’une culture associée aux fondements du changement à mettre en œuvre.

Encourager la création de réseaux favorables à la formation de communautés réflexives de pratique et d’apprentissage L’accompagnement de groupes de personnes, tel que conçu dans le présent modèle, suppose l’intention de créer un réseau de personnes engagées dans le changement ou dans l’accompagnement de ce changement. Différents moyens sont proposés pour créer un contexte favorable à la formation de ce réseau.

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ß Accompagner des groupes et non des individus pour 1) favoriser la connaissance de ce qui se passe dans d’autres milieux que le sien ou d’autres équipes de travail ; 2) susciter l’interaction, des remises en question et des confrontations. ß Utiliser ce qui se fait dans une équipe pour ensuite s’en servir de façon améliorée avec un autre groupe et même, faire part de ces améliorations aux groupes en les explicitant ou en les justifiant. ß Éviter de comparer les groupes entre eux, mais montrer la nécessité de la contribution de différentes formes d’engagement ; faire ressortir comment cette contribution peut être utile à l’ensemble de la collectivité. ß Concevoir un site Internet et l’utiliser pour 1) présenter un résumé de ce qui se passe dans chacun des groupes, 2) fournir un calendrier indiquant la date des rencontres qui se tiendront à travers l’ensemble des équipes accompagnées, 3) déposer des documents qui montrent la contribution des groupes à la théorie qui émerge des rencontres ou du projet, 4) inciter à rétroagir sur les idées ou documents fournis de façon virtuelle, sur le site ou par courriel, pour continuer à réfléchir, pour enrichir les contenus, etc. ß Organiser des rencontres plus globales et réflexives-interactives sur des sujets qui émergent de l’accompagnement et qui peuvent intéresser des personnes non engagées directement dans ce projet afin de faire connaître le changement et ainsi, provoquer des retombées. Cela peut susciter la curiosité par rapport à ce qui se fait dans les groupes accompagnés et ce qui est expérimenté dans le travail quotidien. ß Organiser des rencontres de groupe qui permettent de partager (par exemple sous la forme de témoignages) les éléments du cheminement pour encourager le changement, pour montrer son réalisme et l’enthousiasme des personnes ou de certaines équipes. Ces moyens contribuent à un apprentissage collectif et favorisent la création de communautés d’apprentissage où il devient possible d’apprendre des autres et avec les autres ; de plus, les réflexions collectives sur les pratiques suscitent l’établissement de communautés de pratique (pour partager les pratiques professionnelles, les discuter et les remettre en question). La création d’un réseau entre les personnes accompagnatrices et accompagnées et entre les différents groupes engagés dans la démarche est un apport indéniable. Cependant, la seule volonté d’y arriver ne suffit

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pas. Ce réseau s’instaure avec le temps, avec les interactions créées, avec le réinvestissement de ce qui se fait dans un groupe ou dans un autre groupe, avec l’organisation de rencontres comprenant des personnes de divers groupes, avec un site Internet qui permet de savoir ce qui se passe ailleurs, avec un matériel d’accompagnement qui explique les réactions des personnes accompagnées lors de son utilisation, etc. La préoccupation de créer un réseau est essentielle dès le début d’un projet même si les résultats ou les retombées de cette décision ne se manifesteront qu’après plusieurs mois, voire 1, 2 ou 3 ans. Il est cependant nécessaire de persévérer en continuant d’alimenter le réseau. Il constitue également un outil intéressant pour poursuivre les échanges et les partages après la réalisation d’un projet d’accompagnement du changement. Pour que ce genre de réseau fonctionne, les personnes sont invitées à manifester de l’ouverture et à changer leurs habitudes de cloisonnement. Selon l’ampleur du projet d’accompagnement du changement, il peut s’avérer nécessaire et utile d’établir un partenariat. Cela aide à tirer profit des expertises et à développer un esprit de collaboration inscrit dans un climat de confiance mutuelle. Ce partenariat exige un engagement et une compréhension des différents rôles qui peuvent aussi être complémentaires. Par exemple, le milieu de la pratique est amené à comprendre les liens entre pratique et théorie, alors que le milieu scientifique a comme tâche de s’appliquer à trouver des moyens d’intégrer la théorie et la pratique en évitant de les traiter comme deux entités distinctes ou qui évoluent en vase clos. De plus, le milieu scientifique ou de la recherche a avantage à comprendre la pratique pour s’y adapter plutôt que d’exiger que la pratique corresponde à certains impératifs de recherche qui ne tiennent pas toujours compte de la réalité de la pratique. Le partenariat est complexe à mettre en place ; il ne va pas nécessairement de soi et dépasse largement la signature d’un contrat entre deux parties. Un partenariat se construit avec le temps, dans le respect mutuel des parties et la compréhension des exigences de l’accompagnement à réaliser. Il se développe en considérant les forces et les limites des partenaires mais aussi à force de réalisations collectives.

TROISIÈME ORIENTATION : LA COLLABORATION PROFESSIONNELLE La collaboration professionnelle est intimement liée à la création de réseaux. Elle met en place des interactions qui supposent une coordination d’efforts collectifs, des discussions qui encouragent les prises de

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décision collectives et les interventions concertées. Ces interventions sont analysées et régulées collectivement. Cela mène à une responsabilité partagée de l’accompagnement de collègues jusqu’au développement des compétences de ces mêmes collègues, mais aussi de ses propres compétences. Cette collaboration professionnelle se manifeste dans le soutien au travail en équipe de collègues et suppose des actions particulières.

Soutenir le travail en équipe de collègues Plusieurs niveaux de collaboration professionnelle peuvent se développer compte tenu de l’organisation de l’accompagnement. Certaines actions peuvent favoriser cette collaboration. ß Même s’il n’est pas toujours facile de coanimer les rencontres d’accompagnement, des dyades d’accompagnement montrent 1) les avantages de la complémentarité des expertises, 2) la nécessité de la continuité (partage de l’expertise) lors de mouvements de personnel, 3) la dynamique créée par une équipe animatrice-formatriceaccompagnatrice à partir de diverses façons de faire et d’être. Ces dyades favorisent également les interactions lors de la préparation des rencontres (planification et anticipation). ß La direction de l’établissement, de l’organisation ou de l’entreprise ou la personne responsable de l’accompagnement peut jouer divers rôles dans l’équipe, ce qui permet de démontrer la nécessité d’une souplesse et d’une participation active à tous les niveaux de l’accompagnement du changement en tant que membres de l’équipe et ces personnes peuvent mieux comprendre les diverses tâches à réaliser. Cela s’effectue par 1) l’accompagnement des dyades et de la préparation des rencontres, incluant des rétroactions réflexivesinteractives, 2) la création de liens entre les différentes équipes même si elles jouent des rôles différents, 3) l’animation des premières rencontres auxquelles l’équipe d’accompagnement qui prendra le relais assiste dans un but de formation, 4) des rencontres régulières de l’équipe accompagnatrice à laquelle peuvent s’ajouter d’autres personnes qui se font remarquer par leur engagement ou par leur expertise et qui peuvent servir de relève, 5) des animations régulières dans les équipes par la direction de l’accompagnement pour lui permettre de bien saisir la dynamique des groupes ou des personnes accompagnés.

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ß La création d’une équipe accompagnatrice qui intègre les fondements du changement visé. Cette équipe peut être réunie au début de la mise en place d’un projet d’accompagnement, mais elle devient vraiment une équipe lorsque les rencontres deviennent indispensables pour partager des expériences, pour préparer des rencontres, pour revoir les tentatives plus ou moins productives. Au début, c’est souvent l’équipe de direction accompagnatrice qui crée le lien entre les différentes personnes accompagnatrices ou entre les différentes équipes de travail. Au fil du temps, les équipes peuvent devenir indispensables l’une à l’autre tout en développant de plus en plus d’autonomie. Ces deux aspects ne sont pas contradictoires car l’autonomie professionnelle suppose l’acceptation du regard et de la critique de l’autre ou des autres, mais aussi l’acceptation du recours à l’autre pour des échanges, des expertises, des conseils, des rétroactions… ß Pendant les rencontres liées à l’accompagnement, le travail en équipe est souvent utilisé pour faire émerger des problématiques, pour résoudre des problèmes, pour discuter de mises en situation, pour réaliser des synthèses… Les personnes présentes se regroupent parfois selon leurs affinités ou selon leurs tâches professionnelles ; cependant, à d’autres occasions, elles seront invitées à se regrouper différemment afin de connaître d’autres façons de faire et de s’informer de ce qui se fait dans d’autres milieux ou équipes de travail. ß La mise en place du travail en équipe de collègues tire sa source dans la perspective dans laquelle le projet s’est développé. Il s’agit d’une « offre de partenariat » où le projet a certaines exigences Ces dernières se situent au plan organisationnel sur : le nombre de rencontres par année, la durée des rencontres ; le contenu qui s’inscrit dans une perspective réflexive-interactive et qui porte sur la mise en œuvre du changement avec ses orientations, sur le renouvellement des pratiques professionnelles, sur le développement de compétences…. Cependant, les milieux ont aussi leurs exigences. L’expression de ces exigences permet d’amorcer une discussion afin d’arrimer l’offre aux demandes des partenaires. Des apprentissages sont réalisés autant par les personnes accompagnatrices qu’accompagnées et tout est mis en place dans les situations d’accompagnement proposées pour qu’il y ait des éléments de formation mutuels. Les fondements du travail en équipe de collègues tel qu’il est pensé dans l’accompagnement d’un changement s’inscrit dans une perspective socioconstructiviste qui suppose une collaboration et un travail de coconstruction, de coformation et d’interformation entre les membres de l’équipe

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ainsi que la prise en compte de la dimension affective. Dans ce cadre, travailler en équipe de collègues signifie : 1) coordonner ses efforts pour favoriser le développement de compétences professionnelles, et 2) exercer collectivement un contrôle et une régulation des décisions à prendre et des actions à poser (Lafortune, 2004d). Ce type de travail permet de tirer profit d’un regard externe sur son travail et sur le développement de son jugement professionnel. Cependant, il suppose une acceptation de ce regard de l’autre, du fait qu’un collègue puisse rétroagir à ses actions jusqu’à les remettre en question. Cela veut dire permettre à l’autre d’avoir accès, en quelque sorte, à son « intimité professionnelle ». En ce sens, les membres d’une équipe de collègues sont appelés à développer des qualités dont la principale est le respect des autres, qui mène à une confiance mutuelle ainsi qu’à une sécurité personnelle qui permettent de participer à des débats et à des expériences qui peuvent mener à des confrontations d’idées. Cela suppose un engagement dans des expériences collectives. L’idée de travail en équipe de collègues est souvent associée à la recherche d’un but commun, d’une vision commune ou d’une compréhension commune. Dans le cadre du modèle d’accompagnement proposé, considérant une perspective socioconstructiviste, il apparaît difficile d’obtenir une vision ou une compréhension qui soient communes parce que les personnes construisent leurs représentations à partir de leurs expériences, de leurs acquis antérieurs et des compétences qu’elles ont développées préalablement, mais aussi parce qu’elles n’ont pas nécessairement le même cheminement ni la même expertise que leurs collègues. Ces différences sont parfois difficiles à accepter, mais elles peuvent aussi contribuer au développement des autres ; c’est pourquoi, il devient nécessaire de rester ouvert à la vision des autres. Cette ouverture permet souvent de mieux comprendre pourquoi des dissensions peuvent s’installer à l’intérieur de certains groupes, mais elle permet surtout de faire valoir la force collective d’un groupe. L’accompagnement socioconstructiviste privilégie une vision ou une compréhension partagée. Une vision partagée suppose un échange à propos des conceptions du changement, des débats d’idées qui peuvent susciter des confrontations, car les idées peuvent être différentes voire même parfois dérangeantes pour soi ou pour les autres. Confronter ne veut pas dire affronter, mais reconnaître que les échanges avec d’autres influencent les croyances et les pratiques. Dans l’action, la description des pratiques, les siennes et celles des autres, amène les personnes à examiner ou à se construire une vision de leur modèle d’intervention, à trouver les justifications nécessaires à sa présentation. Cet exercice n’est pas toujours facile à réaliser, mais il aide la ou les personnes à mieux comprendre leur action professionnelle. Il permet d’établir une certaine cohérence entre ce qu’une personne pense et ce qu’elle

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fait. Elle peut ainsi garder un équilibre entre pensée et action pour rester en accord avec ses pratiques, mais s’ouvrir aussi à celles des autres pour mieux comprendre leurs gestes et leurs choix.

QUATRIÈME ORIENTATION : LE DÉVELOPPEMENT DU JUGEMENT PROFESSIONNEL Dans la mise en œuvre d’un changement, l’évaluation occupe généralement une place importante. L’évaluation peut porter sur le degré d’application du changement à différents moments ; elle peut porter sur l’efficacité des moyens choisis pour appliquer le changement ; cela peut aider à reconnaître le cheminement des personnels visés par le changement ; enfin, elle peut porter sur l’efficacité ou la valeur des visées du changement. Une avenue pouvant être privilégiée dans le processus évaluatif du changement de pratiques professionnelles consiste à exercer et à développer un jugement professionnel dans diverses situations de prises de décisions dont l’évaluation fait partie. Cette avenue considère que le jugement professionnel peut s’exercer seul devant une décision à prendre ou devant une production, mais il se développe aussi en équipe en tirant profit du regard de l’autre. Le jugement professionnel est particulièrement essentiel à aborder dans le contexte du développement de compétences professionnelles. En ce sens, les professionnels et professionnelles de divers domaines font face à des problématiques complexes, inhabituelles, voire inédites. Ces problématiques ne peuvent donc pas être résolues à l’aide de procédures, de recettes ou de techniques préalablement éprouvées et pouvant être utilisées telles que proposées. Ce contexte oblige les professionnels et professionnelles à faire appel à leurs expertises (expériences et formation), à rechercher des solutions qui méritent d’être soumises à la discussion pour être validées, remises en question, améliorées…, ce qui aide à développer un sentiment de compétences relativement à ces solutions et ainsi, à pouvoir, lorsque cela est nécessaire, s’ajuster dans l’action en faisant référence aux commentaires de collègues. Il est également nécessaire de préciser que l’exercice du jugement professionnel ne se limite pas à l’évaluation de productions, mais fait aussi référence à plusieurs gestes professionnels qui exigent des prises de décision. Ces dernières peuvent porter sur la façon d’aborder une personne pour lui communiquer des résultats difficiles à comprendre ou à accepter, la justification des moyens choisis pour favoriser le développement de compétences, l’explication de la mise à profit de pratiques professionnelles particulières, nouvelles ou innovatrices. Dans le présent

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modèle, l’évaluation est considérée selon deux perspectives : une première considère l’évaluation comme aide au développement de compétences et l’autre est associée à la reconnaissance de ces compétences, ce qui exige une évaluation à partir de critères connus par les personnes évaluées. En ce sens, le jugement porté ne peut se faire à partir d’un cumul ou d’une juxtaposition de jugements (MELS, 2006). Il exige une réflexion sur la mise en relation des ressources (dont les connaissances) dans des situations réelles, en cours d’action. Dans le présent modèle, le jugement professionnel ne se limite pas à l’évaluation des compétences, il traverse l’ensemble des gestes professionnels des personnels visés par le changement.

Accompagner l’évaluation dans une perspective d’aide au développement de compétences Lorsqu’un changement est mis en œuvre, l’évaluation est souvent le premier aspect soulevé par les personnes qui ont à le mettre en œuvre. Que ce soit parce qu’on est d’accord avec les fondements du changement préconisé ou que ce soit parce que l’on a des réserves, l’évaluation de ce qu’apporte le changement devient une préoccupation. Dans le modèle d’accompagnement professionnel proposé ici, l’accompagnement agissant comme soutien pour évaluer le changement est centré sur l’évaluation comme aide au développement de compétences professionnelles. L’évaluation considérée comme reconnaissance des compétences développées est prise en considération sans oublier que le développement de compétences se fait dans le temps, qu’il exige une mise en relation de ressources et que son évaluation se fait en situation lorsque la personne accompagnée applique les compétences selon son niveau de développement. Dans ce contexte, l’évaluation ne peut être abordée sans tenir compte du jugement professionnel et du travail en équipes de collègues. Les actions d’accompagnement concernant l’évaluation sont basées sur le fait que l’évaluation de compétences professionnelles est un processus complexe. Cette complexité est attribuable à plusieurs facteurs. L’évaluation est souvent vue comme une tâche professionnelle à réaliser individuellement, sans nécessairement laisser les autres porter un regard sur ses jugements d’évaluation et sans nécessairement prendre en compte les autres personnes concernées par l’évaluation (la direction, les collègues, l’environnement des personnels…). Le temps est un facteur important. Il est difficile d’envisager l’évaluation de compétences sur un court laps de temps, quelques semaines ou quelques mois. Évaluer des compétences se fait pendant une période plus ou moins longue (souvent plus

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d’une année) même si à certains moments, il est possible de porter un regard sur l’évolution des compétences. Cela peut permettre des ajustements, mais en apportant une attention particulière aux remises en question complètes des fondements du changement. Cela est souvent tentant, car le changement cause des déséquilibres cognitifs, il peut déstabiliser jusqu’à mener à vouloir freiner le changement. C’est en ce sens que l’équipe prend tout son sens. Les moments de découragement peuvent être vus différemment par d’autres. Les commentaires des membres d’une équipe aident à porter un autre regard sur l’ensemble et non pas sur un aspect trop pointu ou sur un événement particulier. Dans le cadre d’un changement important, un accompagnement de la mise en œuvre du changement, mais aussi de son évaluation s’avère utile, sinon essentiel. Des pratiques évaluatives antérieures sont passablement remises en question, alors que d’autres sont à revoir afin de les inscrire davantage dans la perspective du changement. Dans ce modèle, l’évaluation peut paraître complexe. Elle suppose un travail collectif qui assure des jugements pensés collectivement, qui vont dans le sens du changement prescrit. Elle aide au développement de compétences et assure rigueur, cohérence et transparence pour une équité à laquelle les personnels sont en droit de s’attendre. Lorsqu’il s’agit de mettre en œuvre un changement prescrit, l’accompagnement ne peut pas prendre n’importe quelle forme ; il vise à favoriser la réflexion dans et sur l’action pour une continuité et une cohérence avec les orientations du changement à réaliser. Cet accompagnement est enrichi d’une formation, mais aussi d’un suivi qui lui assure une continuité dans le temps. Ainsi, les personnes accompagnées peuvent à leur tour accompagner d’autres personnels ou les soutenir dans la mise en œuvre du changement, mais aussi de son évaluation. Par ailleurs, « ne pas tout accepter » est un réel défi pour l’accompagnement du changement des pratiques en particulier celles qui concernent l’évaluation.

CINQUIÈME ORIENTATION : L’ENRICHISSEMENT DE LA CULTURE ASSOCIÉE AU DOMAINE VISÉ PAR LE CHANGEMENT Dans le cadre d’un changement, un enrichissement de la culture professionnelle est souvent nécessaire surtout s’il s’agit d’améliorer les pratiques professionnelles. Le terme de « culture associée aux domaines visés par le changement » fait référence à celui de « culture générale »

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lorsque l’on n’est pas dans un contexte particulier. Dans la mise en œuvre d’un changement, la culture à développer ressort, car les personnes accompagnatrices ressentent la nécessité d’enrichir leurs connaissances et ressources pour développer leurs compétences professionnelles pour l’accompagnement. Affirmer la nécessité de développer une culture associée aux fondements du changement afin d’aider à assurer une cohérence, une pertinence et des assises théoriques à une démarche d’accompagnement est une idée nouvelle, particulièrement en éducation. Des questions se posent toutefois sur l’étendue et la profondeur à donner à cette culture. Selon Lafortune et Martin (2004), cette culture ne se limite pas à un répertoire de connaissances. C’est un ensemble constitué d’attitudes, de connaissances, de stratégies, d’habiletés, de compétences et d’expériences qui permettent de développer le sens critique, la créativité, le regard réfléchissant et l’assurance des personnes accompagnatrices, mais aussi accompagnées. Cette culture est active dans le sens où la personne accompagnatrice mobilise ses ressources et son répertoire d’exemples dans la démarche d’accompagnement et que ces ressources et exemples se modifient en cours d’accompagnement et d’intervention. Cela suppose qu’il existe des liens entre les différentes propositions d’action et les fondements théoriques mis de l’avant (adapté de Lafortune et Martin, 2004). L’enrichissement d’une culture associée au domaine visé par le changement permet d’offrir un accompagnement qui comprend des éléments de formation nécessaires à la compréhension des fondements qui ont guidé ce renouvellement et de pouvoir ainsi partager avec le milieu de travail une lecture plus éclairée du changement en se donnant la possibilité de formuler des arguments crédibles à présenter à ceux et à celles qui manifestent encore de la résistance. Il ne s’agit pas de convertir les personnes accompagnées de la pertinence du changement, mais il importe de les faire réfléchir aux objets et à la portée du changement ainsi qu’aux raisons ayant favorisé la révision de ses fondements pour faire cheminer la pensée des personnes accompagnées au-delà des moments de rencontre en les amenant à changer graduellement. Le rehaussement culturel aide à exercer un jugement critique à propos des différentes approches qui sont proposées au milieu visé par le changement. Les personnes peuvent ainsi mieux comprendre et aider à comprendre le changement prescrit et développer un discours et une argumentation qui viendront alimenter les échanges lors des discussions.

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En formant les personnes au regard des fondements, des visées et des constituantes du renouveau à mettre en œuvre, elles continuent à développer et à enrichir leur culture professionnelle. Le rehaussement de cette culture donne de l’assurance aux personnes accompagnatrices, elle leur permet d’avoir une petite longueur d’avance sur les personnes accompagnées. Elles s’habilitent ainsi à mieux intervenir auprès des personnels, car elles participent à l’accompagnement d’une « formation à l’accompagnement » en expérimentant une « expérience d’accompagnement ». Elles sont amenées à prendre conscience des réinvestissements possibles de la démarche en s’auto-observant en situation, en réfléchissant de manière interactive avec leurs collègues et en se préparant à intervenir dans le milieu. En s’engageant dans ce type de démarche, elles s’aperçoivent que l’accompagnement nécessite certaines compétences qu’elles ont le souci de développer en situation.

Établir des liens étroits entre théorie et pratique Dans le cadre de la mise en œuvre d’un changement, les personnes accompagnées veulent souvent avoir des moyens précis, concrets ou même des procédures à réaliser pour appliquer le changement ou les moyens dans leur pratique. Il est parfois difficile de cerner ce que les gens entendent par les vocables « concrets » ou « pratiques », car à l’intérieur d’une même rencontre où des éléments conceptuels et pratiques sont abordés, certaines personnes accompagnées peuvent qualifier les idées apportées de concrètes alors que d’autres diront qu’elles sont conceptuelles ou théoriques. Cependant, si on essaie de leur faire clarifier ce qu’elles entendent par « moyens précis ou concrets ou procédures », il semble que le sens donné à ces expressions diffère d’une personne à l’autre. Des discussions sur le sens donné à ces expressions mènent à penser que « les moyens sont concrets » si les personnes accompagnées perçoivent comment les transposer dans leur pratique. Deux éléments d’une formation peuvent expliquer cette perception : 1) les personnes accompagnées avaient les préalables à une telle formation et étaient prêtes à une réflexion conceptuelle, et 2) les exemples apportés étaient nombreux et ils permettaient de faire des liens entre la théorie et la pratique. L’établissement d’un dialogue entre la théorie et la pratique favorise l’émergence d’éléments de théorisation chez les personnes accompagnées. Il permet d’enrichir et de soutenir les pratiques en offrant certaines assises théoriques à l’action professionnelle. La théorie et la pratique entretiennent un rapport de réciprocité, car la théorie s’enrichit également de la pratique. Ainsi, on pourrait dire que dans l’accompagnement tel que

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conçu dans ce modèle, la théorie et la pratique sont complémentaires. Pour maintenir un certain équilibre entre les deux, il s’agit de faire des liens constants entre la théorie et la pratique et ainsi, favoriser un rehaussement de la culture professionnelle. Associer un volet de recherche à un projet d’accompagnement de la mise en œuvre d’un changement fait en sorte que la clarification et la définition des concepts utilisés deviennent encore plus importantes ; elles contribuent à favoriser des liens entre la théorie et la pratique professionnelle. Ces concepts sont parfois familiers alors que d’autres le sont moins, car ils sont associés à l’accompagnement d’un renouveau. La définition de concepts permet aux personnes d’orienter leur intervention et de progresser dans leur compréhension du changement. En confrontant les représentations qu’elles ont à propos de certains concepts avec celles de leurs collègues, les personnes accompagnées sont amenées à les préciser davantage. En discutant des concepts associés au changement, les personnes en viennent parfois à reconsidérer les représentations qu’elles en ont, car celles-ci peuvent être remises en question lorsqu’elles sont confrontées à celles de leurs collègues ou à celles des personnes accompagnatrices. Les représentations peuvent aussi être confrontées à celles de différents auteurs ou auteures dans le domaine concerné par le changement ou encore avec des auteurs ou auteures qui appartiennent à d’autres champs d’expertise. L’accompagnement, le concept de compétence, les compétences et le développement des compétences, l’évaluation des compétences, la pratique réflexive, la métacognition, le leadership, le travail en équipe de collègues, le socioconstructivisme, la dimension affective dans l’accompagnement, le jugement professionnel, le questionnement, la rétroaction, la synthèse… sont quelques exemples de concepts pouvant être abordés dans l’accompagnement d’un changement axé sur le renouvellement des pratiques professionnelles.

SIXIÈME ORIENTATION : LE PASSAGE À L’ACTION DANS UNE PERSPECTIVE RÉFLEXIVE-INTERACTIVE Dans la mise en œuvre d’un changement, le passage à l’action est une étape charnière, souvent difficile à réaliser, car l’arrivée d’un changement, surtout s’il est majeur, oblige les personnes à apporter des ajustements à leur modèle de pratique. Ces ajustements sont plus ou moins majeurs selon les individus, car certains iront même jusqu’à remettre en question leurs pratiques professionnelles. Et lorsqu’il se fait, le passage

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

à l’action passe par l’adaptation d’actions ou de gestes professionnels pour graduellement progresser vers une transposition de la démarche d’accompagnement, des outils ou du matériel à différents contextes d’accompagnement. Le passage à l’action est essentiel pour s’assurer de la mise en place de pratiques associées aux fondements du changement prescrit. Ce passage à l’action passe par deux phases principales : 1) des récits ou témoignages de pratiques ou d’expériences qui bénéficient de rétroactions réflexives-interactives pour connaître ce qui se fait dans les milieux, pour s’en inspirer et pour apprendre à rétroagir à des expériences ; 2) l’accompagnement de projets d’action en groupes plus ou moins grands. Ces phases servent à inciter les personnes à tenter des actions ou des expériences qui vont dans le sens du changement ou de son accompagnement et de soutenir le processus d’accompagnement du changement. L’ensemble des propos qui précèdent suppose de prendre du temps pour réaliser des moments de réflexion et envisager des façons de passer à l’action ou de poser des actions et d’y réfléchir par la suite. Beaucoup d’interrogations émergent lorsqu’il s’agit de parler de prendre du temps pour réfléchir. « Prendre du temps » ou « se donner du temps » pour réfléchir méritent de remplacer des expressions comme « perdre du temps » à cause de la réflexion. Réfléchir avant d’agir, sans que la réflexion soit un frein à l’action. De plus, toute action engagée sans réflexion préalable ne peut donner les résultats escomptés, car les ajustements en cours d’action (toujours nécessaires) ne peuvent s’inscrire facilement selon une cohérence décidée et réfléchie précédemment. La réflexion mène à l’action, l’action est issue de la réflexion, la réflexion se réalise en cours d’action et elle a également cours après l’action. Action et réflexion s’inscrivent en complémentarité pour plus d’interactions et de cohérence. Cette complémentarité entre action et réflexion est en lien avec la mise en œuvre d’un changement axé sur le développement des compétences. On peut considérer que pour développer un savoir-agir qui permet de mobiliser des ressources (de divers ordres), de les mettre en relation, de les utiliser efficacement dans différentes situations plus ou moins inédites, de faire des ajustements pour d’autres situations et de réinvestir ce savoir-agir dans la perspective de devenir un être plus compétent ou de démontrer son degré de compétence, des moments d’arrêt, de réflexion, de recul, de distanciation, d’échanges et de discussions, individuellement ou collectivement, sont nécessaires. L’accompagnement a été un moyen pour assurer la complémentarité entre action et réflexion, mais aussi pour en faire comprendre l’utilité et la nécessité.

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Accompagner des projets d’action Le passage à l’action nécessite l’élaboration de projets d’action pour la mise en œuvre du changement. Ces projets d’action supposent une démarche où l’on retrouverait des aspects tels que : 1) un projet pensé collectivement ; 2) une mise en commun des compétences qui sous-tend une prise en compte des croyances et pratiques ainsi que des remises en question vers un changement ; 3) une structure ; 4) un passage à l’action ; 5) une continuité ; c’est-à-dire un étalement dans le temps ; 6) un suivi ; 7) une analyse ; 8) des ajustements ; 9) des traces à garder. 1 Un projet pensé collectivement permet d’approfondir les concepts de compétence, de développement de compétences et d’évaluation du développement de compétences dans une perspective d’aide au cheminement dans le changement. Un tel projet élaboré dans un climat de collaboration et de concertation professionnelles. Cela implique une analyse des différentes facettes de la mise en œuvre du changement et de l’accompagnement qui sera exigé. Un projet pensé collectivement signifie qu’il importe de travailler dans une perspective d’équipe de collègues pour poursuivre l’élaboration d’un projet d’action lié à une problématique du milieu au regard de la mise en œuvre du changement. 2 Une mise en commun des compétences qui sous-tend une prise en compte des croyances et pratiques ainsi que des remises en question vers un changement signifie que chaque personne qui participe au projet d’action se doit d’être engagée dans une démarche de pratique réflexive afin de pouvoir collaborer activement tant au plan des idées qu’au plan des actions à entreprendre. Adopter une posture et une pensée réflexives permet cette mise à distance nécessaire à toute action qui se vit dans une intention de réflexion sur ses pratiques professionnelles et dans une intention de changement et de renouvellement des pratiques. 3 Une structure souple et rigoureuse favorise les ajustements tout au long du processus de création et aussi plus tard lors de la mise en œuvre du projet d’action. Souplesse et rigueur ne sont pas souvent associées. Dans l’accompagnement d’un changement, il est nécessaire de faire preuve de souplesse, car les êtres humains accompagnés ont des réactions affectives vis-à-vis des modifications à faire dans leurs pratiques. Il est également nécessaire de faire preuve de rigueur afin de structurer l’accompagnement pour assurer un cheminement vers le changement souhaité, mais aussi de pouvoir évaluer les répercussions de l’accompagnement.

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

4 Un passage à l’action qui assure la mise en place de toutes les facettes importantes du projet et qui prend en compte l’engagement de toutes les personnes participantes. Sans passage à l’action selon les orientations du changement, on ne peut penser qu’un changement sera effectivement réalisé. 5 Une continuité, c’est-à-dire un étalement dans le temps, assure au projet de prendre vie mais aussi de « vivre » avec tout ce que cela comprend de haut et de bas. Un accompagnement sur une période trop courte apporte des changements superficiels qui peuvent sembler importants, mais qui peuvent aussi ne pas être intégrés dans les pratiques à plus ou moins long terme. 6 Un suivi qui permet de garder contact avec ce qui se fait, comment cela se fait et d’accompagner les personnes lorsqu’elles s’engagent dans d’autres projets s’il y a lieu. Ce suivi est une caractéristique de l’accompagnement qui, contrairement à une formation ponctuelle, considère que chaque rencontre n’est qu’une étape d’une démarche. 7 Une analyse s’impose à plusieurs moments du projet. À la phase d’élaboration, elle permet de s’assurer de la cohérence entre le projet d’action et la problématique concernée, pour s’assurer que les intentions sont respectées. Pendant la mise en œuvre, elle aide à porter un regard critique sur ce qui se fait et comment cela se fait. À la fin du projet, elle permet de vérifier si les intentions ont été rejointes, si les outils ou façons de faire ont été adéquats, si des dimensions restent à améliorer et d’anticiper comment une suite pourrait apporter d’autres retombées. 8 Réaliser un projet d’action demande de prévoir que des ajustements seront apportés à divers moments dans le déroulement du projet. Il est important de garder un œil critique tant sur les actions posées par les personnes accompagnées dans le cadre du projet que sur les retombées du projet. Des ajustements en cours d’action permettent tantôt d’ajuster le tir, tantôt de rendre encore plus tangibles les répercussions anticipées de la mise en œuvre du projet. 9 Des traces à garder aux différents moments du projet d’action, dès les premiers instants aident à s’assurer de la cohérence dans les idées et les actions à entreprendre. Pendant les différents moments de l’élaboration du projet d’action cela aide à s’assurer de garder le fil conducteur. Pendant la mise en œuvre du projet d’action, les traces permettent de pouvoir revenir sur des aspects déjà discutés, mis en place, pour souligner les répercussions visibles et celles qui le sont moins. Enfin, tout au long du projet, ces traces

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aident à noter les conditions qui sont favorables et qui méritent d’être reprises et maintenues, sans oublier de noter aussi toutes les situations difficiles qu’il faudra éviter ou améliorer une prochaine fois. Garder des traces permet de faire un retour réflexif sur son cheminement dans le projet et sur ses propres pratiques.

CHAPITRE

3

ACCOMPAGNEMENTRECHERCHE-FORMATION POUR LA MISE EN ŒUVRE D’UN CHANGEMENT

Dans la mise en œuvre d’un changement majeur, que ce soit dans une institution, une organisation ou une entreprise, il apparaît nécessaire de s’assurer de pouvoir faire une évaluation du processus de changement, une évaluation du degré d’application du changement. Pour y arriver, il est important de garder des traces de la démarche. Cependant, garder des traces sans porter un regard analytique sur ces traces n’est pas très utile. C’est pourquoi, les traces peuvent être examinées dans une perspective de retour sur les actions, mais aussi dans une perspective de réaliser une recherche et de pouvoir produire un rapport faisant état de la démarche. En ce sens, on peut parler d’accompagnementrecherche-formation. Dans le concept d’accompagnement-rechercheformation, c’est le trait d’union (-) qui est important. Ce petit signe montre l’importance de la complémentarité entre accompagnement, recherche et formation. C’est une façon : ß de favoriser une continuité des effets d’une recherche au-delà de la collecte de données, de faire en sorte que les instruments de recherche servent d’outils de formation et inversement ;

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

ß de favoriser des adaptations dans différentes activités d’accompagnement et de formation pour des réinvestissements et un passage à l’action, mais aussi de garder des traces de ces démarches et processus pour analyse, conceptualisation et modélisation (voir Lafortune, 2004b). Dans le même sens, Charlier (2006) considère que l’articulation entre pratiques de formation et pratiques de recherche aide les praticiens et praticiennes à mieux comprendre leurs observations ou leurs expériences lorsqu’ils sont confrontés à des incertitudes dans la réalisation d’actions ou lors d’interventions. Cela est particulièrement vrai dans le cas de la mise en œuvre d’un changement prescrit ou comportant des éléments de prescription. Cette idée est donc applicable à divers changements lorsque l’articulation entre l’accompagnement et la formation ainsi que la recherche permet de conserver des traces analysées, théorisées et modélisées tout au long du processus, ce qui peut être conçu comme une construction professionnelle. Cette construction, autant individuelle que collective et réalisée avec et par des praticiennes et praticiens confrontés à de multiples situations souvent inédites et complexes, aide à mettre en œuvre un changement majeur. Accepter que l’accompagnement s’inscrive dans l’accompagnementrecherche-formation, c’est introduire un double volet à l’accompagnement : un volet d’accompagnement-formation et un autre d’accompagnementrecherche. Ces deux volets donnent une cohérence aux actions et gestes professionnels posés et à poser tout au long du déroulement de l’accompagnement d’un changement. Les trois mots « accompagnement », « recherche » et « formation » sont associés en paires : accompagnementformation et accompagnement-recherche. Ces associations sont explicitées dans ce qui suit.

ACCOMPAGNEMENT-FORMATION L’accompagnement-formation vise à susciter une dynamique réflexive-interactive, insufflée par l’équipe de direction ou l’équipe accompagnatrice ou la personne accompagnatrice1, pour accompagner, former et outiller des personnes accompagnatrices lesquelles accompagnent et forment à l’accompagnement d’autres personnes accompagnatrices dans

1.

Intégrer un volet de recherche à un projet suppose qu’il y ait dans l’équipe au moins une personne ayant une expertise en recherche.

Chapitre 3 — Accompagnement-recherche-formation

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la mise en œuvre du changement. Il ne s’agit pas d’intervenir « sur » les personnes de façon hiérarchique, mais de comprendre la dynamique de l’interaction qui existe entre les personnes accompagnées et celles qu’elles accompagnent. C’est en considérant cette recherche de compréhension que l’équipe d’accompagnement ne peut se contenter d’accompagner et de former des personnes accompagnatrices, mais qu’elle s’engage grandement dans le processus en intervenant dans tous les groupes accompagnés, toutes les équipes de travail, et ce, de façon régulière. C’est une façon de s’imprégner de la dynamique réflexiveinteractive de l’accompagnement. Dans le même sens, les membres de l’équipe de direction accompagnatrice, après avoir développé des compétences et pris de l’expérience, peuvent s’engager dans ce que l’on appelle un suivi élaboré où des rencontres plus personnalisées de sousgroupes qui favorisent le soutien du passage à l’action par l’accompagnement de l’élaboration et de la mise en œuvre de projets d’action. Cet aspect peut s’accentuer à mesure que le changement est compris et que les perspectives d’action se concrétisent. La conception de l’accompagnement sous-jacente à ce modèle considère que la formation est intégrée à l’accompagnement. Cela favorise des liens entre la théorie et la pratique, et inversement. Cela signifie qu’on ne peut dire qu’il y a des rencontres de formation et d’autres d’accompagnement ; cela veut plutôt dire que les éléments conceptuels ou théoriques nécessaires ou utiles sont intégrés au moment opportun en prenant diverses formes : des explications conceptuelles ou théoriques apportées lorsque certaines questions se posent ; des présentations entrecoupées de liens avec les préoccupations liées à l’accompagnement ; des apports pratiques ou des expériences relatées auxquels s’ajoutent de brèves présentations plus conceptuelles ou théoriques pour favoriser les liens théorie-pratique. Cette façons de concevoir les liens théorie-pratique suppose de fournir des exemples, des explications et des comparaisons ; suppose d’apporter des éléments d’analyse faisant des liens avec la théorie. Elle incite à tenter des expériences à partir de fondements et à élaborer du matériel rigoureux. Elle permet la compréhension d’une variété d’approches de travail. Par ailleurs, la formation s’effectue également en faisant référence à diverses stratégies associées à l’animation en considérant des adaptations en cohérence avec la perspective d’accompagnement adoptée. On admet facilement que la formation à l’accompagnement socioconstructiviste, intégrant de la formation utilise l’animation autant pour susciter une dynamique que pour favoriser l’engagement.

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

Cette formation associée à une démarche d’accompagnement vise à ce que les personnes accompagnatrices développent des habiletés d’adaptation et de transposition de ce qui est vécu dans les rencontres pour des situations et des contextes différents. En d’autres mots, le développement de l’autonomie professionnelle dans l’accompagnement pour des répercussions à long terme de l’application d’un changement dont les fondements sont grandement différents de ce qui était fait auparavant devient une préoccupation majeure.

ACCOMPAGNEMENT-RECHERCHE De façon générale, les personnes accompagnées ne saisissent pas toujours la pertinence ni l’utilité d’intégrer un volet « recherche » à une démarche d’accompagnement. Il peut parfois être difficile de comprendre l’effet dynamique exercé par la recherche dans le développement et l’évolution professionnelle des personnes engagées dans ce genre de démarche. Par contre, en examinant le rôle de la recherche, on se rend compte à quel point celle-ci peut exercer une influence déterminante dans l’accompagnement d’un changement majeur. Dans l’action et avec le temps, on peut se rendre compte que les résultats d’une collecte et d’une analyse de données, recueillies auprès de plusieurs personnes qui participent activement à la formation de personnes accompagnatrices ou accompagnées contribuent à la construction d’une vision partagée du changement puisqu’ils sont en quelque sorte la mémoire de la démarche qui témoigne des échanges, de la réflexion et du cheminement de l’ensemble des personnes engagées dans cette démarche. De plus, la recherche permet aux personnes accompagnatrices et accompagnées de confronter leurs perceptions, croyances ou encore de les conforter et d’assurer ainsi un cheminement vers une autonomie intellectuelle. En ce sens, le volet de recherche ne peut se résumer à la passation de questionnaires dont les résultats sont compilés, analysés et interprétés par une équipe de recherche universitaire avec peu de retour auprès des personnes et groupes participants. Dans un projet d’accompagnement, la recherche exige une concertation afin que les partenaires collaborent autant aux ajustements des instruments de collecte de données qu’à l’interprétation des résultats. Au début de l’expérience à la base du modèle relaté dans ce livre, la recherche et l’accompagnement étaient plutôt perçus comme étant deux entités juxtaposées. Les interventions pour préciser que la recherche

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et l’accompagnement étaient complémentaires et non dissociables pouvaient difficilement changer les perceptions. C’est en cours de projet que les conceptions se sont lentement modifiées. En comprenant ce que la recherche pouvait apporter à l’accompagnement, la recherche et l’accompagnement ont, petit à petit, été perçus comme utiles l’un à l’autre, ce qui veut dire complémentaires, mais aussi intiment associés. En établissant un dialogue productif entre la théorie et la pratique, la recherche participe aussi au développement et à l’enrichissement d’une culture associée au changement, ce qui favorise la compréhension du changement. Le réinvestissement des données de la recherche auprès des différents groupes confirme également l’importance d’établir un réseau. Les échanges et le partage des données de recherche et des instruments de collectes incitent les personnes à faire elles aussi certains échanges avec des personnes d’autres groupes qui sont généralement engagées dans le même projet, mais aussi avec des personnes qui le connaissent peu et qui désirent le connaître et éventuellement, y prendre part. Dans ce cadre, la recherche contribue : 1) à garantir rigueur et souplesse dans l’accompagnement ; elle permet, d’une certaine façon, des ajustements à des réalités évolutives des différentes équipes ou milieux ; 2) à s’adapter et à cheminer grâce à l’ouverture est aux interactions entre diverses personnes et partenaires ; 3) à conserver les traces de la démarche afin de témoigner des expériences réalisées dans les milieux accompagnés. La documentation de la démarche effectuée permet le développement de matériel d’accompagnement. En considérant l’expérience vécue, ce matériel fournit des explications de ce qui s’est passé dans l’action, une analyse des réactions, des précautions à prendre lors d’une prochaine expérience, des suggestions d’ajustements… Une partie de ce matériel sert à l’élaboration d’autres tâches, de situations ou de familles de situations d’accompagnement adaptées aux formations ou accompagnements à réaliser. Le matériel développé pour soutenir l’accompagnement peut également se retrouver sous forme de documents de présentation, de fiches diverses, de schémas et de synthèses portant sur différentes problématiques ou processus abordés dans l’un ou l’autre des groupes accompagnés. 4) La recherche favorise aussi l’émergence et l’explication de conditions favorisant la mise en œuvre du changement et 5) l’élaboration de moyens d’interventions déposés pour consultation sur un site Internet.

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

INTÉGRER ACCOMPAGNEMENT, RECHERCHE ET FORMATION En conclusion, intégrer accompagnement, formation et recherche permet : ß de favoriser le développement de compétences professionnelles où les personnes accompagnées passent de l’apprivoisement, à l’appropriation, à l’approfondissement et à l’autonomie professionnelle quant à la mise en œuvre du changement car la recherche aide à reconnaître l’évolution des personnes et du groupe ; ß de favoriser la rigueur dans la démarche, car la recherche exige une structuration des interventions et des outils de formation qui permettent de garder des traces et de recueillir des données de façon organisée et cohérente ; ß de mettre en évidence la nécessité d’une continuité dans l’accompagnement, qui devient nécessaire en raison du temps à prendre pour favoriser le cheminement dans le changement des personnes accompagnatrices et accompagnées ; ß de souligner l’importance d’un suivi en raison de l’exigence d’effectuer l’accompagnement pendant une certaine période de temps et de prévoir des actions à réaliser entre les rencontres pour assurer la cohérence de l’entreprise ; ß de favoriser une démarche d’analyse, d’évaluation et d’interprétation vers une conceptualisation, une théorisation et une modélisation ; ß de s’assurer que les répercussions d’un projet ne reposent pas uniquement sur des intuitions. Tout au long de la démarche, l’accompagnement, la recherche et la formation sont intimement liés. L’accompagnement vise une formation à l’accompagnement pour la mise en œuvre du changement, ce qui suppose un approfondissement des fondements du changement et des moyens pour les mettre en œuvre. La formation fournit des assises théoriques et développe des habiletés d’adaptation et de transformation de ce qui est vécu dans l’accompagnement. La recherche permet de recueillir des données pour conceptualiser l’expérience et de dégager un modèle d’accompagnement professionnel du changement. La recherche permet également de fournir du matériel d’accompagnement expérimenté et ajusté selon les commentaires et les expériences vécues. Le volet de recherche s’inscrit en complémentarité avec la démarche de réflexion et de changement des pratiques liée à l’accompagnement-formation.

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L’articulation accompagnement, recherche et formation constitue une voie originale 1) sur le plan professionnel avec un positionnement clair pour un soutien aux personnels accompagnés et 2) sur le plan de la formation tout au long de la vie où l’accent porte sur le développement de compétences professionnelles.

ANIMATION, FORMATION, ACCOMPAGNEMENT ET RECHERCHE Dans le modèle proposé, l’accompagnement suppose qu’il y ait de l’animation et de la formation. Accompagnement et formation ne peuvent être dissociés. L’accompagnement est un processus qui suppose un soutien à plus ou moins long terme qui aide à lier théorie et pratique et à passer à l’action avec cohérence. Le volet de recherche assure plus de rigueur à la démarche, aide à son évaluation et à reconnaître les réinvestissements. On peut probablement concevoir une démarche d’accompagnement sans qu’un volet de recherche formel y soit associé. Mais considérer le fait de garder des traces apparaît incontournable. Les caractéristiques de l’animation, de la formation, de l’accompagnement et de la recherche sont résumées dans le tableau 3.1. Le passage de la formation à l’accompagnement et l’intégration de l’accompagnement, de la formation/animation et de la recherche s’avèrent un processus complexe. Si la recherche se veut scientifique et rigoureuse, la démarche exige l’utilisation d’une méthode de recherche qui, dans le sens du modèle proposé, est axée sur la théorisation émergente.

THÉORISATION ÉMERGENTE La conception de la recherche sous-jacente au modèle d’accompagnement professionnel proposé comporte les caractéristiques suivantes. Si ce qui est adopté se limite à garder des traces tout au long de la démarche, les caractéristiques de la recherche peuvent être adaptées selon la situation. ß La recherche est un processus rigoureux, cohérent et transparent qui se construit en partenariat avec différents interlocuteurs : établissement, organisation, entreprise (par exemple, université, ministère, commissions scolaires, écoles).

L’accompagnement suppose : † suivi, † soutien, † continuité, † approfondissement, † incitation à un leadership d’accompagnement, † respect relatif des rythmes et des besoins considérant la nécessité du changement, † incitation à l’engagement, † meilleure connaissance de soi et des personnes accompagnées, † développement d’un lien affectif.

Une préoccupation d’animation vise : † le dynamisme, † l’enthousiasme, † l’interaction, † l’écoute, † la capacité de synthèse pour relancer, † l’utilisation de techniques d’animation, † la gestion de la discussion (l’expertise associée au sujet abordé appartient aux participants et participantes). Selon les perspectives adoptées, l’accompagnement peut prendre différentes formes. Dans le cadre d’un projet inscrit dans une perspective d’accompagnement socioconstructiviste, cela suppose : † une démarche de coconstruction ; † un souci de susciter des conflits sociocognitifs ; † une préoccupation de former des praticiennes et praticiens réflexifs et des individus métacognitifs.

Accompagnement

Formation

Une formation peut être ponctuelle ou échelonnée dans le temps ; selon son degré d’étalement, elle permet de : † développer des aspects théoriques et pratiques, † faire des liens entre théories et pratiques, † fournir des exemples, des explications et des comparaisons, † apporter des éléments d’analyse, † inciter à tenter des expériences, † inciter à l’élaboration de matériel, † expliquer et favoriser la compréhension d’une variété d’approches professionnelles du travail et de perspectives théoriques.

Animation

Elle exige : † souci de rigueur, † créativité, † regard critique, † observation, réflexion, questionnement, † souci éthique.

La recherche suppose : † méthode de recherche : instruments de recherche (outils de formation), † validation, analyse, interprétation, † ajustement des actions, † sens des répercussions, leur explication (comment, pourquoi), † recueil de traces, collecte de données, † théorisation émergente, † diffusion, réinvestissement, † dépassement des intuitions et des perceptions, † développement de modèles.

Recherche

Caractéristiques associées à l’animation, à la formation, à l’accompagnement et à la recherche

Tableau 3.1

64 Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

Chapitre 3 — Accompagnement-recherche-formation

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ß La recherche fait une place importante aux personnes afin qu’elles puissent s’engager pleinement dans le changement orienté et prescrit. ß La recherche prend en compte toutes les personnes accompagnées au regard de la problématique du changement. ß La recherche a des visées pratiques. Elle vise une utilisation des résultats par les milieux concernés par la recherche. Elle a des bases théoriques, mais considère comme étant utile et importante la coconstruction de théories qui émergent des réflexions-interactions. ß La recherche permet d’orienter les actions favorables à la mise en œuvre du changement ; d’utiliser les résultats et d’innover dans le domaine visé par le changement ; de rendre viable des savoirs conceptualisés par la démarche d’accompagnement-recherche ; de développer un modèle qui peut ensuite être transposé dans divers milieux. ß La recherche vise un changement des pratiques autant des personnes accompagnatrices que de celles qui sont accompagnées. ß La recherche suppose un engagement de la ou des personnes responsables du volet de recherche à l’intérieur du volet de l’accompagnement-formation. ß La recherche favorise le développement d’un modèle qui peut être transposé dans divers milieux. Cette conception de la recherche peut trouver des racines dans la littérature. Ainsi, Paillé (1994) traite du concept de « recherche-actionformation » où la dimension recherche est liée à la démarche scientifique et vise l’avancement des connaissances. La dimension « action » est le terme central où chercheurs et sujets sont associés à une démarche commune. La dimension de formation débouche sur un renouvellement des pratiques en créant un lieu de réflexion associant théorie et pratique pour mener à des changements durables de certaines croyances et pratiques éducatives. Tochon et Miron (2004) utilisent l’expression « rechercheintervention » qui met en relief la complémentarité entre différents axes qui permettent une évaluation – ce qui suppose une analyse de la situation – tout en impliquant les sujets dans une recherche-action, ce qui confère à la démarche une dimension conscientisante. Les liens théoriepratique ne sont pas particulièrement soulignés. Anadon et Couture (2007) utilisent l’expression « recherches participatives » englobant la recherche-action, la recherche-collaboration et la recherche-formation.

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement Ces approches répondent ainsi à l’exigence d’établir un lien entre la recherche et l’action, entre la théorie et la pratique, entre la logique du chercheur et celle des praticiens. Elles envisagent le sujet (la personne ou la communauté) dans son contexte et tentent de comprendre la signification et les implications du problème de recherche et de sa solution pour la communauté. Des éléments particuliers contribuent au processus et aux résultats de ce type de recherche, dont : le choix des méthodes qui privilégient l’interaction avec les acteurs sociaux, les apports réciproques entre chercheurs et participants de même que la dynamique en la réflexion et l’action. La force de ce type de recherche se situe dans sa faculté d’influencer positivement la pratique, tout en recueillant systématiquement des données (Anadon et Couture, 2007, p. 3).

Lafortune (2004d) parle de « recherche-formation-intervention » ce qui suppose trois dimensions : la rigueur de la recherche scientifique, la formation des personnes participantes et l’intervention dans le milieu de travail en vue de changer des pratiques. De ces auteurs et auteures, on retiendra l’idée d’associer la recherche à différentes formes d’interventions ou d’actions, y compris la formation. Il est essentiel de concevoir un projet de recherche en alliance avec une formation associant théorie et pratique, surtout dans le cas où le milieu de travail est associé à la démarche de recherche. Cela est d’autant plus nécessaire dans le cas de la mise en œuvre d’un changement dont les fondements confrontent des croyances et supposent un changement des pratiques. Une formation sur le mode de l’accompagnement intégrant de la formation et de la recherche apparaît hautement approprié et prometteur. L’accompagnement, la recherche et la formation deviennent les trois principales composantes de la méthode de recherche utilisée. Celle-ci comprend une analyse qualitative auprès des personnes engagées dans un processus de changement, qui acceptent de se former en réfléchissant sur leur pratique dans une perspective d’accompagnement pour devenir à leur tour des personnes accompagnatrices dans leur milieu respectif. Ainsi, ces milieux deviennent des terrains fertiles où les instruments de recherche sont en même temps des outils de formation. La méthode de recherche se raffine dans l’action et en interaction avec les différentes équipes accompagnées. Cette ouverture à des contenus et des parcours variables favorise des ajustements en cours d’intervention, encourage une régulation constante du processus d’accompagnement et un plus grand engagement des personnes. Bien que l’équipe accompagnatrice exerce un leadership d’accompagnement en proposant certaines balises importantes pour cheminer vers la mise en œuvre du changement, le contenu des rencontres et l’organisation de la séquence des interventions

Chapitre 3 — Accompagnement-recherche-formation

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sont ouverts et relativement différents pour chacun des groupes accompagnés. Ils sont choisis en concertation avec le milieu, en fonction du contexte, de l’expertise et du ou des projets d’action du milieu. Les données sont étudiées selon un principe de théorisation émergente : […] la théorisation émergente est une démarche permettant de faire des découvertes théoriques principalement à partir de l’action du milieu étudié qui agit dans sa propre étude. Le milieu contribue à mieux se comprendre et à mieux être compris. Il peut proposer une problématique, réorienter la recherche et l’intervention dans une voie plus féconde ainsi que critiquer et valider les résultats de la recherche. La théorisation émergente est le fruit de l’interaction, des coconstructions des personnes du milieu et de l’équipe de recherche. Elle représente un moyen de coconstruire une théorie portant sur un nouveau concept […], car elle utilise comme énoncés les éléments construits en groupe et retournés au groupe pour confrontation et amélioration tout en s’inspirant de théories existantes. (Lafortune, 2004c, p. 297-298).

Des énoncés émergents servent à la modélisation, qui se veut un processus de représentation d’une situation réelle ou possible servant à mieux comprendre sa nature et son évolution. Ce processus peut servir à faire l’analyse d’un système existant ou à en concevoir un autre (Legendre, 2005). Enfin, les grilles d’observation et d’auto-observation qui émergent de cette démarche permettent de se représenter de façon plus objective le niveau d’engagement des personnes concernées à l’égard du changement et dans la mise en œuvre de ce changement. Dans le cadre du projet à la base du modèle présenté dans ce livre, la théorisation émergente prend diverses formes comme : ß Deux livres principaux qui présentent un référentiel de compétences professionnelles pour l’accompagnement d’un changement (Lafortune, 2008) et un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement (le présent livre). ß Des situations d’accompagnement qui proviennent d’activités, de tâches et de situations expérimentées dans le cadre du projet. Ces situations ne se limitent pas à présenter ce qui devrait ou pourrait être expérimenté, mais apporte des éléments de réflexion sur des précautions à prendre, des adaptations à envisager et surtout une synthèse des réactions des groupes accompagnés en lien avec des éléments théoriques. Cela représente une analyse de ce qui s’est déroulé durant le projet.

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

ß Des documents portant sur divers sujets abordés dans le projet, mettant en lien des propos tenus lors des rencontres ou des traces écrites de discussions ou de synthèses avec des éléments théoriques. Ces documents portent sur l’accompagnement, la collaboration professionnelle, la pratique réflexive, la culture professionnelle… ß Une série de fascicules portant sur l’accompagnement de l’évaluation qui ont été élaborés pour répondre à la demande d’aborder l’évaluation de façon approfondie. L’autonomie professionnelle dans l’accompagnement d’un changement peut s’expliquer comme suit. Être autonome pour accompagner le changement, qu’il soit prescrit ou non, c’est savoir agir et décider de manière consciente, réflexive et créative en mobilisant et en mettant en relation ses ressources professionnelles (ressources internes : compétences, attitudes, stratégies, culture pédagogique, etc.), qui continuent de se développer, mais aussi celles auxquelles la personne accompagnatrice a accès (ressources externes) pour les intégrer à son action et à sa pratique professionnelles dans une démarche d’accompagnement. Une telle autonomie suppose de prendre en considération la contribution des autres, en confrontant les ressources mobilisées, les siennes et celles des autres, (personnes accompagnées, auteurs, etc.) et de justifier les actions au regard d’intentions et de contextes d’accompagnement dans le but d’amener d’autres à devenir autonomes et à progresser, avec eux, dans l’innovation proposée en constituant une communauté de pratique. Il y a également une possibilité de triangulation à partir de différentes sources de données (différents instruments) et différentes personnes engagées dans la démarche qui fournissent des éléments à propos de mêmes aspects du projet : conditions, répercussions et matériel. Ces personnes sont des personnes accompagnatrices responsables de la mise en œuvre du changement.

CHAPITRE

4

ORGANISATION DE L’ACCOMPAGNEMENT

Au début d’une démarche d’accompagnement d’un changement, les groupes accompagnés ont généralement un cheminement semblable, mais petit à petit les groupes commencent à se distinguer, tant en fonction des personnes accompagnatrices, des personnes accompagnées que des problématiques soulevées pour lesquelles les personnes accompagnatrices soutiennent les réflexions-interactions. En cours d’accompagnement du changement, de nouvelles personnes peuvent même se joindre au groupe alors que d’autres quittent (nouvelles affectations, départs à la retraite, etc.) et des demandes particulières sont formulées. Ce sont autant de raisons qui font que les cheminements d’un groupe à l’autre évoluent de façon différente.

DE GRANDES ACTIONS À RÉALISER Pour organiser l’accompagnement de grandes actions peuvent être réalisées. En voici une liste1 qu’on pourra adapter au contexte et aux situations. 1.

Rappelons que ces étapes sont tirées d’un projet qui s’est déroulé sur plusieurs années auprès de plusieurs groupes issus de différentes régions du Québec. Elles pourraient différer selon le contexte d’accompagnement ou la transposition apportée au modèle.

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

ß Présenter un projet d’accompagnement du changement qui laisse place à des ajustements à partir des discussions avec les groupes accompagnés (l’expliquer, réfléchir collectivement aux questions, envisager et proposer des ajustements, entrevoir des modifications, mêmes majeures…). ß Annoncer la forme d’accompagnement proposé et discuter des ajustements à faire pour les différents groupes. ß Former des équipes accompagnatrices, selon les besoins. ß Poser les actions nécessaires pour s’assurer du bon déroulement de la démarche d’accompagnement au plan des ressources humaines (former les personnes accompagnatrices, former le personnel de recherche, si nécessaire) et matérielles (élaborer des premières ébauches du matériel d’accompagnement nécessaire au travail dans les groupes, rassembler les documents théoriques pertinents). ß Se donner les moyens d’évaluer l’accompagnement de la mise en œuvre du changement et de son degré d’application. ß Commencer à mettre en place des conditions qui favorisent l’accompagnement du changement. ß Tenter de comprendre l’ouverture au changement et les résistances. ß Reconnaître et anticiper certaines répercussions de la démarche d’accompagnement. ß Commencer à comprendre et à préciser les compétences nécessaires à l’accompagnement. ß S’assurer que les personnes accompagnatrices développent et consolident leurs compétences et qu’elles aient une certaine longueur d’avance sur les groupes qu’elles forment à l’accompagnement ou qu’elles accompagnent. ß Tirer profit de la synergie des équipes accompagnatrices et accompagnées et en faire bénéficier les personnes visées par le changement. ß S’assurer qu’une pratique réflexive s’est concrétisée ou a été mise en œuvre. ß Aider les personnes accompagnatrices à prendre conscience du rôle qu’elles jouent. ß Commencer à évaluer l’accompagnement de la mise en œuvre du changement et le degré d’application du changement.

Chapitre 4 — Organisation de l’accompagnement

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ß Entrevoir des moyens de diffusion et de rayonnement de la démarche d’accompagnement, mais aussi de certaines répercussions du changement. ß Montrer certains éléments du développement des compétences professionnelles pour l’accompagnement du changement, mais aussi du renouvellement des pratiques professionnelles. ß Cheminer vers un modèle d’accompagnement partagé où des personnes accompagnatrices en viennent à se joindre à l’équipe qui prépare l’accompagnement du changement pour collaborer à la préparation des interventions, participer activement à l’animation, exercer et développer leurs compétences professionnelles pour l’accompagnement et contribuer à la réflexion plus globale sur le changement et son accompagnement. ß Dès les premières rencontres, susciter des témoignages et des partages d’expériences pour mieux connaître les personnes accompagnées, pour apprendre ce qui se fait dans le milieu de travail, mais aussi pour ajuster le contenu des rencontres afin d’être en continuité et en complémentarité avec les préoccupations des personnes accompagnées. ß Pendant les rencontres, prendre en note les sujets, thèmes ou problématiques qui émergent afin de soutenir le plus adéquatement possible les personnes accompagnées dans leurs questionnements et leurs problématiques lors de prochaines rencontres. ß Donner une priorité au passage à l’action, à des actions qui vont dans le sens des fondements du changement visé. ß Reconnaître l’évolution de l’engagement des personnes accompagnées et les soutenir dans la mise en œuvre de projets d’action qui correspondent aux attentes de leur milieu professionnel. ß Organiser des rencontres de suivi pour approfondir des sujets abordés dans les rencontres d’accompagnement ou pour soutenir l’élaboration et la mise en œuvre de projets d’action. Ces suivis deviennent personnalisés (voir les explications ci-après). ß Faire en sorte que de nouveaux groupes soient graduellement accompagnés. ß Organiser des présentations réflexives-interactives, en y associant plusieurs groupes, afin d’aider les différents groupes à mieux comprendre le cheminement théorique du changement.

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

ß Partager avec les différents groupes accompagnés les éléments de réflexion ou de théorisation émergente qui se construisent. ß Prendre conscience de l’autonomie qui se développe en rapport avec le changement et amener les personnes accompagnées à en prendre conscience. ß Peaufiner le matériel d’accompagnement à partir de ce qui se passe dans le milieu et des réactions aux activités réalisées. ß Considérer attentivement les répercussions du projet en faisant porter son regard au-delà des personnes visées directement par l’équipe accompagnatrice. Deux éléments ressortent de cette liste et méritent des explications : il s’agit des suivis personnalisés et de l’autonomie réflexive-interactive. Suivis personnalisés : Un suivi personnalisé est un processus dynamique et interactif qui suppose un soutien de petits groupes de personnes accompagnées dans leur réflexion sur une problématique issue de leur travail dans leur milieu professionnel, dans un but d’action en lien avec les fondements du changement. Accorder un suivi personnalisé suppose une participation à un groupe accompagné depuis un certain temps pour favoriser l’interaction avec d’autres personnes et une connaissance des actions d’autres personnes ou d’autres groupes. Autonomie réflexive-interactive : L’autonomie réflexive-interactive s’observe à partir de certaines manifestations : ß Savoir quand et comment susciter des interactions ; ß Accepter que les autres puissent rétroagir à ses idées, à ses actions ; ß Pouvoir présenter les justifications de ses idées, de ses actions. ß Reconnaître les moments où : ß la réflexion individuelle est nécessaire ; ß les autres peuvent contribuer à sa réflexion ; ß la compréhension théorie-pratique est utile, voire essentielle ; ß la réflexion collective est nécessaire pour innover. L’évolution des personnes accompagnées vers une autonomie réflexive-interactive est liée à la connaissance des fondements du changement visé, mais aussi à leur compréhension qui devient de plus en plus approfondie selon les types de formation fournie à la suite des discussions entre pairs ou personnes expertes.

Chapitre 4 — Organisation de l’accompagnement

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STRUCTURE ORGANISATIONNELLE SOUPLE ET RIGOUREUSE La souplesse dans la structure organisationnelle d’un projet d’accompagnement professionnel met en évidence une façon d’apprivoiser des facteurs tels que la grande variété de personnes, les milieux de travail des différents groupes…, sans oublier le temps qui semble manquer à tous et à toutes dans une période de changements importants. La mise en synergie d’expériences variées de personnes œuvrant dans un même domaine favorise l’émergence de pistes de solutions favorables à la mise en œuvre d’un changement. D’autant plus que les pistes de solution sont intimement liées aux problématiques de chaque milieu concerné. Cette prise en charge progressive par les personnes de chaque groupe accompagné instaure efficacité et cohérence dans les gestes posés tant par les personnes accompagnées, par les personnes accompagnatrices que par toutes les personnes qui suivent de près ou de loin le cheminement de l’accompagnement du changement. Comme on l’a déjà souligné, l’accompagnement se réalise en collaboration professionnelle avec les milieux accompagnés. Chaque groupe possède son propre cheminement qui se dessine au regard des besoins exprimés et anticipés, tout en exerçant un leadership. Les thématiques et les processus sont choisis par le groupe et l’équipe de personnes accompagnatrices. Les choix tiennent compte de ce qui se fait dans le milieu de travail, des expertises des personnes accompagnatrices et des orientations du changement. Ce qui suit illustre de façon abrégée des aspects importants de la structure organisationnelle souple mais rigoureuse d’une rencontre de deux jours intégrée à une démarche d’accompagnement d’un changement. Cette proposition, qui permet de structurer une rencontre, se déploie aussi à l’image des personnes accompagnatrices et des personnes qu’elles accompagnent. 1 Planification (ouverte, souple) pouvant comporter plus d’une façon d’aborder les thématiques, sujets ou processus lors de la rencontre afin de pouvoir faire des ajustements en cours d’action ; 2 Choix éclairés de tâches, de situations d’accompagnement, de familles de situations et mises en liens interdisciplinaires qui permettent plus de cohérence entre les idées et les actions ; 3 Fiches permettant de favoriser la réflexion, la discussion, mais aussi la prise de notes et la conservation de traces ;

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

4 Préparation d’éléments conceptuels ou théoriques pour « en savoir plus », « développer une expertise » et « avoir une longueur d’avance » et ainsi, enrichir la culture associée aux fondements du changement ; 5 Préparation d’exemples ou d’idées de transposition dans la pratique ; 6 Validation du plan de travail avec la direction de l’accompagnement et/ou l’équipe de personnes accompagnatrices ; 7 Invitation aux personnes accompagnées à présenter à leurs collègues des expériences réalisées ou à réaliser pour obtenir des commentaires critiques et une rétroaction ; 8 Incitation à réaliser des expériences dans son milieu entre les rencontres et à en témoigner auprès de ses collègues ; 9 Incitation à élaborer des projets d’action, partage de certains aspects de ces projets, rétroactions et préparation des actions ; 10 Mise en action de processus d’accompagnement (faire des synthèses, réaliser des rétroactions, simuler des entretiens, observer le questionnement, etc.) ; 11 Participation à des moments de réflexion individuelle ou collective (seul, en petits groupes et en grand groupe) ; 12 Amorce d’un sujet en guise de préparation à une prochaine rencontre ; 13 Préparation collective du contenu du plan de travail de la prochaine rencontre ; 14 Consignation de fiches de réflexion à propos des apprentissages réalisés, des défis ou des expériences à tenter avant une prochaine rencontre ; 15 Réflexion à propos des apprentissages réalisés, des défis ou des expériences à tenter avant une prochaine rencontre ou sur les conditions qui facilitent l’accompagnement et les répercussions de l’accompagnement (ces fiches peuvent également être complétées en cours de rencontre) ; 16 Partage des commentaires portant sur l’un ou l’autre des aspects abordés aux cours des journées de rencontre. 17 Plan de travail des rencontres acheminé aux membres du groupe accompagné une ou deux semaines avant la rencontre.

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Chapitre 4 — Organisation de l’accompagnement

Le tableau suivant décrit une structure type de deux journées de rencontre. Cette structure sert de balise et peut être ajustée selon le groupe accompagné. 1re journée

Processus

2e journée

Avant-midi

Introduction de la rencontre.

Retour sur le jour 1.

Introduction du thème théorique ou conceptuel choisi à l’aide de :

Poursuite du travail en lien avec le thème théorique ou conceptuel. Réalisation de synthèses.

Réflexions individuelles et collectives. Travail d’équipe. Mises en commun. Synthèses ou amorces de synthèses.

Après-midi Moment réservé aux partages d’expériences, aux témoignages, au travail sur les plans d’action. Réalisation de jeux de rôles, réflexions et travail en équipe sur des mises en situation. Idées de transposition, réflexions sur les réinvestissements. Prise en compte de sujets ou thématiques qui émergent tout au long de cette première journée. Synthèse, retour sur le déroulement de la journée ou apport théorique, s’il y a lieu.

De façon transversale, prise en compte d’un processus comme le questionnement, la rétroaction, la synthèse, l’observation…

Avant-midi

Ou Poursuite du travail portant sur le passage à l’action sous diverses formes.

Après-midi Amorce d’un sujet qui émerge de l’élaboration des projets d’action pour une prochaine rencontre. Retour sur la rencontre, synthèse, ou apport théorique, s’il y a lieu. Réflexion sur les apprentissages réalisés et les défis à relever entre les rencontres. Regard sur les thématiques ou sujets possibles pour la prochaine rencontre. Tour de table à propos de réflexions issues de la rencontre

Voici des dimensions importantes à prendre en compte lors de la préparation et de la réalisation d’une rencontre.

À garder à l’esprit ß S’assurer d’une communication réflexive-interactive qui favorise la réflexion, l’action, l’interaction et le cheminement des personnels accompagnés. ß Promouvoir le travail en collégialité, la collaboration professionnelle.

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

ß Susciter et reconnaître les conflits sociocognitifs et en tirer profit. ß Susciter des prises de conscience tout au long du processus. ß Prendre en compte la dimension affective. ß Anticiper certaines réactions ou répercussions ; mettre en place des conditions favorables à l’accompagnement. ß Prévoir des régulations et ajustements en cours d’intervention. ß Modeler une pratique réflexive. ß Agir de manière éthique et critique.

Pour prendre en compte la complexité ß Construire pour soi (sa compréhension du contenu théorique ou conceptuel) tout en accompagnant un groupe de personnes qui tentent de construire leur compréhension. ß Amener les personnes à évoluer, à développer des compétences sans imposer sa vision, mais plutôt en favorisant le développement de leurs modèles pour accompagner la mise en œuvre du changement visé. ß Tenir compte des mouvements de personnel dans les équipes de travail, mais aussi dans les groupes accompagnés, ainsi que dans l’équipe accompagnatrice ou de direction. ß Même si les personnes accompagnées sont souvent placées en situation de déséquilibre cognitif au début ou en cours de rencontre, s’assurer de « boucler la boucle » ou une partie de cette « boucle » avant la fin de la rencontre pour favoriser l’évolution des idées au-delà du moment de la fin de la rencontre. ß S’interroger sur le leadership exercé comme personne accompagnatrice tout au long des rencontres, pendant l’ensemble des rencontres et sur la pertinence et la cohérence des actions à mettre en place auprès des personnes accompagnées.

Chapitre 4 — Organisation de l’accompagnement

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Pour réfléchir sur son expérience professionnelle et faire réfléchir les personnes accompagnées ß Utiliser une écriture réflexive et professionnalisante (fiches à propos des apprentissages réalisés et des défis à relever à l’annexe I) : ß pour que les personnes se distancient de l’action pour poser différents regards sur ce qui s’est passé, sur comment cela s’est passé, sur pourquoi cela s’est passé de telle façon, sur comment cette action peut être transposée dans une autre situation ; ß pour préciser les défis que les personnes se donnent pour assurer le passage à l’action et pour favoriser un approfondissement vers l’autonomie. ß Passer de l’action de raconter (ou de se raconter), à la description et à l’explicitation (justification) de pratiques (expériences dans le milieu) en incluant la rétroaction. ß Remettre des documents avec des intentions de lecture précises comprenant un retour réflexif sur la lecture. ß Questionner sur le sens des actions, le comment et le pourquoi des actions, les effets ou conséquences des actions, les solutions envisagées pour une prochaine fois. ß Anticiper des réactions aux tâches et situations proposées pour apprivoiser un changement, éveiller la créativité. ß Démontrer sa crédibilité en tant que personne accompagnatrice au plan de sa culture professionnelle pour appuyer ou remettre en question des intuitions ou des réflexions. ß Partager des problématiques réelles liées à la mise en œuvre du changement. Présenter ces problématiques et les discuter dans une perspective de collaboration professionnelle – autant les personnes accompagnatrices que celles qui sont accompagnées peuvent contribuer à la réflexion et à l’interformation.

Pour réaliser un projet d’accompagnement structuré et structurant ß S’assurer de la formation-accompagnement de la personne ou de l’équipe accompagnatrice responsable ou de direction auprès des personnes accompagnatrices qui en accompagnent d’autres. ß Fournir des moments de formation de la personne ou de l’équipe responsable dans les équipes de travail accompagnées. ß Prévoir un certain nombre de jours et des modalités de travail :

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement ß

ß ß

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ß

prévoir 8 à 12 jours de rencontres étalés sur deux années. Cela peut vouloir dire qu’il y aura possibilité d’une rencontre de deux jours pour amorcer la démarche et des rencontres d’une journée ou de demi-journées avec un bilan pouvant durer 1 ou 2 jours à la fin ; ß structurer les rencontres de façon à : s favoriser la participation active, réflexive et interactive, s prévoir du temps pour du modelage, s susciter des présentations d’expériences et de rétroactions, s donner du temps pour des moments d’écriture réflexive et « professionnalisante », s prévoir un enregistrement des commentaires ou des discussions si un volet de recherche est prévu. Planifier en utilisant plusieurs regards et en prévoyant des ajustements en cours d’action ; Associer les actions à une perspective socioconstructiviste – qui ne veut pas du tout dire un « laisser-aller » – mais plutôt des moments de coconstruction où les synthèses allient théorie et pratique. Allier théorie et pratique vers l’action. S’assurer d’inclure la formation à la démarche d’accompagnement. Recueillir des commentaires comprenant des explications, des justifications, des échanges, des questionnements, des perspectives de régulation. Structurer des tâches et des situations : réflexion, interaction, retour, réinvestissement. Se donner des intentions claires et un fil conducteur défini et cohérent. Travailler avec les personnes accompagnatrices en vue de l’organisation d’un réseau. Développer une pratique réflexive-interactive tant chez les personnes accompagnées que chez les personnes accompagnatrices. Mettre en place une écriture réflexive pour aider à structurer la pensée et à faire des retours qui profitent tant à la personne qui exerce une écriture réflexive qu’aux personnes avec qui elle partage ses réflexions. Conserver des traces à un degré plus ou moins important selon la place accordée à la recherche : ß rapport écrit de chaque rencontre par les personnes ou dyades accompagnatrices,

Chapitre 4 — Organisation de l’accompagnement

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ß

notes prises lors des interventions, ß enregistrement et écoute pour prise de notes élaborées afin d’analyser les effets de l’accompagnement et ainsi, faire des retours pertinents avec les personnes accompagnées, ß notes retournées aux personnes accompagnées pour leur permettre de se reconnaître dans leur cheminement. ß Favoriser la réalisation de synthèses dans l’action tant par les personnes accompagnatrices que par les personnes accompagnées.

RÉALISATION D’UN ACCOMPAGNEMENT QUI MODÈLE L’ESPRIT DU CHANGEMENT Au sein d’une équipe accompagnatrice se trouvent des personnes accompagnatrices qui travaillent en concertation, en collaboration avec l’équipe responsable de la mise en œuvre du changement. Lorsque les rencontres s’organisent, se planifient, ce sont ces instances qui sont interpellées. Puisqu’on est dans une perspective socioconstructiviste, il est important d’envisager ce modèle d’accompagnement dans un contexte d’environnement décloisonné où le travail en collégialité est valorisé. Ce type de travail ne se décrète pas et ne s’impose pas, il se construit à l’aide d’expériences partagées, d’interactions, de coconstructions avec d’autres. Il se développe dans le temps à travers la confiance, l’écoute, le respect, etc.

Des interventions préparées selon le cheminement des groupes accompagnés Le modèle d’accompagnement professionnel développé dans le présent livre prend appui sur l’idée que les personnes accompagnées ont déjà une expertise dans leur travail ; il met de l’avant un accompagnement qui les soutiendra dans le développement de compétences déjà existantes, dans le développement de compétences professionnelles pour l’accompagnement d’un renouvellement ou d’un changement des pratiques professionnelles tel que prescrit par les orientations du changement. Il est entendu que cette vision de l’accompagnement requiert une démarche à long terme, une organisation, une planification du temps et des tâches qui vont au-delà des rencontres ponctuelles de travail. A contrario, elle suppose une articulation rigoureuse, souple et réaliste de

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

l’acte d’accompagner qui permet à un plus grand nombre de personnes de s’y retrouver et d’adhérer autant à l’accompagnement proposé qu’au changement demandé. Selon Lafortune et Martin (2004), l’accompagnement socioconstructiviste qui est privilégié dans ce projet exige que Dans l’action, la personne accompagnatrice met en branle un processus d’accompagnement comprenant des aspects de planification, [d’anticipation], d’observation (auto-observation), d’évaluation (autoévaluation) et d’ajustement (régulation). Après l’action, selon l’analyse de sa démarche d’accompagnement et de sa perception des résultats, la personne accompagnatrice ajuste ses croyances et ses pratiques (Lafortune et Martin, 2004, p. 52).

La nature même des sujets, des thèmes et des façons de les aborder facilite la communicabilité, la transposition et la viabilité de ce modèle d’accompagnement. De par sa perspective socioconstructiviste, ce modèle est un exemple d’ouverture, de prise en compte de la diversité. Chaque intervention est planifiée, réfléchie, conçue, développée et préparée en fonction du groupe de personnes accompagnées qui aura à la vivre. Le modèle allie pratique et théorie, conjugue processus et produit, anticipe des moments de réflexion personnels et des moments d’interaction pour permettre aux personnes accompagnées de faire des liens, de comparer ou encore de préciser leurs pensées par la verbalisation.

Une collaboration professionnelle dans l’organisation des interventions Réaliser un accompagnement en collaboration avec d’autres peut être une manière favorable de soutenir des personnes. Lafortune et Martin (2004, p. 59), proposent de réaliser un « accompagnement en équipe », surtout lors des premières expériences d’accompagnement, [car] un accompagnement en équipe permet une mise en commun d’habiletés et d’attitudes et l’utilisation de connaissances et d’activités complémentaires. C’est une façon efficace d’assurer un accompagnement dynamique, mais aussi un processus d’interformation des personnes accompagnatrices. Cette démarche de formation réciproque favorise le développement d’une culture pédagogique active.

Cela concourt à la coconstruction de compétences professionnelles pour l’accompagnement. De plus, il est important de prendre en compte les contraintes particulières qui se retrouvent dans un accompagnement

Chapitre 4 — Organisation de l’accompagnement

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en équipe et « il est souhaitable de constituer des équipes de personnes accompagnatrices composées de […] personnes ayant des ressources et des compétences complémentaires » (Lafortune et Martin, 2004, p. 69). Au fur et à mesure que l’accompagnement se déroule, une place de plus en plus importante peut être laissée aux personnes accompagnées. Ce qui favorise tant l’engagement des personnes dans les tâches à accomplir que le développement d’un agir compétent en situation professionnelle. St-Arnaud (2003, p. 185) « affirme que plus l’acteur et l’interlocuteur agiront comme des individus autonomes, capables de faire des choix et de prendre leurs responsabilités, plus ils seront disposés à entretenir des rapports de coopération ». Des façons de faire propres à chaque groupe se dessinent ainsi au fur et à mesure que l’accompagnement se poursuit ; celles-ci sont écoutées et mises à l’essai. Bien sûr tout cela exige de la part des personnes accompagnatrices une interprétation fine, éclairée des gestes et expressions des personnes qu’elles accompagnent et, pour les personnes accompagnées, une écoute favorable aux besoins exprimés par leurs pairs. D’un groupe à l’autre les choses ne s’expriment pas nécessairement de la même façon et les solutions peuvent varier, même si le changement à réaliser est une réalité pour tous et toutes. Celui-ci se vit différemment selon les personnes et le contexte.

Des interventions en dyade Le projet à la base de ce modèle a favorisé l’animation-formationaccompagnement en dyade. Il n’est pas toujours facile ni même possible de mettre en place une dyade compte tenu des contextes ou des milieux d’accompagnement. Pour respecter en partie le modèle proposé, il est par contre possible de soumettre la préparation d’une rencontre ou ses interrogations à ce sujet à des collègues qui peuvent rétroagir et tenir compte de ces rétroactions dans le travail d’accompagnement. Cependant, le modèle d’accompagnement professionnel proposé privilégie le travail en dyade, car il poursuit plusieurs buts : assurer une continuité, travailler en complémentarité, profiter d’une culture élargie par les connaissances antérieures de deux personnes, mettre à profit un soutien mutuel (dimension affective), s’encourager, utiliser un regard externe pour des analyses, des commentaires, des critiques, partager des tâches, aider à la discussion pour les choix de contenus, sur les manières d’intervenir et enfin, sur les stratégies à mettre de l’avant.

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

Ce travail en dyade est une forme de travail en collégialité, de collaboration professionnelle. Cette façon de travailler des personnes accompagnatrices permet davantage de saisir, de comprendre le modèle et d’exercer son rôle de personne accompagnatrice. Le travail en dyade offre aussi un « filet de protection » aux personnes ; cela leur donne une confiance supplémentaire. Le travail en dyade favorise également le partage de bases théoriques, ce qui vient enrichir la culture de l’équipe. C’est un travail en collaboration dynamique qui aide chaque personne de la dyade à participer à la construction, à la justification ainsi qu’à la consolidation de son propre modèle d’intervention, l’encourageant ainsi à porter un regard éclairé sur l’accompagnement en général et le travail en équipe. Cette façon de faire concourt pour chaque partenaire au développement de ses compétences professionnelles dans l’exercice et le développement de son leadership d’accompagnement. On peut dire que cette façon de faire favorise le partage des idées, facilite les décisions et le partage des responsabilités ou des aspects à promouvoir dans le changement à réaliser. Une structure en dyade souple soutient les prises de décision au regard des gestes et actions à mettre de l’avant lors des interventions professionnelles. Elle est de plus porteuse de principes inhérents au modèle qui orientent les actions : l’interaction, la collaboration professionnelle, la prise en compte du dynamisme de personnes appartenant à un contexte d’accompagnement et de l’influence que ces différents systèmes exercent entre eux.

CHAPITRE

5

SÉQUENCE DE TRAVAIL LORS D’UNE RENCONTRE INSCRITE DANS UNE DÉMARCHE D’ACCOMPAGNEMENT La séquence de travail proposée pour une rencontre inscrite dans une démarche d’accompagnement d’un changement est conçue dans une dynamique d’accompagnement-formation réflexif-interactif autant des personnes accompagnatrices que des personnes accompagnées. Cette séquence de travail représente un processus qui exige de traiter différents aspects choisis de façon itérative. Elle implique aussi une continuité dans le travail de la personne ou de l’équipe accompagnée. Ce chapitre a été tiré d’un guide destiné au soutien des personnes accompagnatrices qui ont travaillé en dyade lors des rencontres du projet associé à ce modèle. La séquence illustrée reflète le processus que les équipes accompagnatrices ont privilégié au cours de la démarche d’accompagnement : avant l’action ; pendant ou en cours d’action ; à la fin et après l’action et enfin, entre deux sessions d’accompagnement.

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

AVANT L’ACTION : PRÉPARATION D’UNE RENCONTRE INSCRITE DANS UNE DÉMARCHE D’ACCOMPAGNEMENT Dans le cadre de l’accompagnement d’un changement, les personnes accompagnatrices sont appelées à développer des séquences d’interventions, des plans d’accompagnement ou encore des projets d’action en lien avec une ou des problématiques qui se vivent dans leur milieu au regard de la mise en œuvre du changement. Dans ce contexte, les personnes accompagnatrices veulent s’assurer que les interventions projetées soient cohérentes et pertinentes et qu’elles mènent à des actions selon les orientations du changement. La tâche est complexe, car il est nécessaire de : prendre en compte plusieurs dimensions à la fois ; bousculer certaines idées établies ; questionner certaines façons de faire ; prendre du temps pour la réflexion ; remettre en question des pratiques ; demander de justifier des réponses ; construire collectivement des concepts ou des actions… Les personnes accompagnatrices s’assurent que les actions réalisées ou à réaliser ou les projets d’action répondent aux exigences du processus d’accompagnement qui vise la mise en œuvre du changement. Ce chapitre est le résultat d’un travail qui s’est poursuivi sur plus de cinq années d’accompagnement d’un changement en éducation auprès de plusieurs groupes. Ces résultats se sont développés au fil des rencontres d’accompagnement, à partir d’un processus d’analyse de données recueillies à l’aide de différents instruments de collecte. Selon le contexte d’application du modèle, certaines actions peuvent être ajustées, modifiées ou transposées. Il ne s’agit pas d’accomplir systématiquement toutes ces actions, mais plutôt de s’en inspirer pour améliorer son intervention.

Tâches préliminaires Dans le travail de planification d’une rencontre, différentes actions peuvent être posées par les personnes accompagnatrices. Voici quelques exemples de ces actions : ß Appels téléphoniques et envoi de courriels aux personnes accompagnées pour confirmer leur participation aux rencontres. ß Tâches administratives telles que la réservation des locaux, la reprographie des documents pour la rencontre, complétion du dossier de la rencontre pour une collègue qui a à réaliser un travail semblable au nôtre, vérification de l’état de l’enregistrement audio (si celui-ci est prévu dans le cadre d’une recherche), etc.

Chapitre 5 — Rencontre inscrite dans une démarche d’accompagnement

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ß Recherche documentaire et lectures pour se préparer à la rencontre. ß Envoi de souhaits de bienvenue aux nouvelles personnes accompagnées par courriel ou appels téléphoniques, s’il y a lieu. ß Acheminement par courriel de certains documents relatifs aux rencontres antérieures ou ceux qui pourrait servir à la préparation d’une prochaine rencontre. ß Rencontres en vue de la préparation du plan de travail avec une ou un collègue, rétroaction vers la validation du plan de travail par la direction de l’accompagnement et par les pairs. ß Anticipation de thématiques qui pourraient être demandées, de réactions, de réponses à certaines questions. ß Préparation de la personne accompagnatrice au regard des thématiques qui seront abordées, à la synthèse qui pourra être réalisée, à la rétroaction qui pourra être donnée.

Rédaction d’un plan de travail général Un plan de travail général structure la rencontre, annonce le travail qui sera réalisé et ses éléments récurrents fournissent un encadrement sécurisant qui permet d’apporter un contrepoids aux déséquilibres possibles qui peuvent déstabiliser les personnes au cours d’une rencontre. C’est aussi un outil qui garde des traces générales d’une rencontre à une autre. Ce plan général est envoyé aux personnes accompagnées une ou deux semaines avant la rencontre. Il est assez ouvert et souple afin de faciliter des ajustements avant et en cours d’action. On remarque que certains aspects sont récurrents et reviennent d’une rencontre à l’autre : le ou les thèmes de la rencontre, les processus abordés en filigrane, le fil conducteur, la présentation des expériences, la fiche d’écriture réflexive, une ou des suggestions pour une prochaine rencontre, des commentaires sur la session ainsi que les dates de la prochaine rencontre.

Rédaction d’un plan de travail détaillé Un plan détaillé comporte un déroulement assez précis des actions à poser pendant la rencontre dans le sens qu’une personne extérieure à la planification pourrait facilement le suivre. Ce plan a toute sa légitimité, car il

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

favorise des échanges plus productifs, constructifs et critiques pour les personnes qui accompagnent en équipe. Il permet entre autres choses d’être sur la même longueur d’ondes et de favoriser, par les interactions qu’il suscite, la mise en place d’un mode de fonctionnement d’équipe qui demande souvent un temps d’appropriation appréciable avant de connaître l’autre personne accompagnatrice (ses manières de faire, ses forces et ses limites dans l’animation, etc.). Le plan détaillé permet de pouvoir reproduire certaines actions si on désire les partager avec d’autres, favorisant ainsi une mise en réseau et une accessibilité des interventions. Il est un outil, un moyen de laisser des traces assez précises tant des contenus que des processus qui s’entrecroiseront tout au long d’un accompagnement, ce qui est très utile à la recherche. Cette façon de faire souligne toute la pertinence de garder des traces lorsqu’on réalise un accompagnement dans une perspective socioconstructiviste. Des circonstances font que quelquefois des ajustements sont nécessaires dans le feu de l’action. Il peut s’avérer très utile d’y avoir songé lors de la préparation de la session. Avoir un « plan A » c’est bien, mais garder, dans son « sac à dos virtuel de stratégies », un « plan B » c’est encore mieux. À ce moment-là, on peut y recourir sans rupture trop évidente en cours d’action. Cela permet aussi de se sentir plus à l’aise et à l’écoute des personnes accompagnées surtout si ce plan permet d’ajuster la situation au contexte d’accompagnement. Il est toutefois important de garder une cohérence dans le traitement des idées malgré des ajustements qui peuvent paraître majeurs, de s’assurer que les liens sont logiques et que les éléments s’enchaînent bien. Garder aussi en tête le fil conducteur de la rencontre, que le groupe connaît, permet de s’approprier les changements apportés.

Anticipation Dans la préparation d’une rencontre, il est généralement nécessaire d’anticiper des réponses, des réactions, des questions, des interactions… La pratique a montré que l’anticipation ne semble pas toujours faire partie de l’étape de préparation. Dans une démarche d’accompagnement, l’anticipation prend une importance plus grande que lors d’une formation ponctuelle puisque dans l’action, la personne accompagnatrice est appelée à faire des ajustements parfois assez rapidement. Sans anticipation, les ajustements peuvent parfois difficilement se réaliser en cohérence avec le fil conducteur. Plus la personne accompagnatrice accorde une place importante à l’interaction et à la réflexion collective, plus il devient nécessaire d’anticiper des questions et des réactions chez les personnes

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accompagnées. Déjà répondre soi-même aux questions que l’on se prépare à poser est un moyen d’anticiper. Cela peut également vouloir dire se mettre à la place des personnes accompagnées et se demander comment l’on recevrait une telle tâche à réaliser. L’anticipation permet en quelque sorte de « prévoir l’imprévu ». Lorsque des moments de déséquilibre sont provoqués, il est nécessaire de les avoir préalablement planifiés avec soin en anticipant les réactions possibles des personnes, et ce, afin d’éviter de provoquer un trop grand déséquilibre. Un déséquilibre important peut avoir pour effet de provoquer un sentiment d’incompétence au point où les personnes accompagnées peuvent se refermer sur elles-mêmes ou se désengager. De plus, un manque d’anticipation ou trop de spontanéité peut mener à une difficulté à réagir ou à réguler certains gestes ou certaines interventions en cours d’action. Les personnes accompagnées peuvent aussi percevoir un manque de préparation, ce qui peut nuire à la crédibilité de l’accompagnement.

Élaboration de fiches de travail ou de fiches réflexives Comme il a déjà été souligné, une démarche d’accompagnement ne peut être évaluée que si des traces sont gardées. Une façon d’allier la formation à l’analyse et à l’évaluation des actions consiste à utiliser des fiches de travail qui aident à consigner des idées et des fiches réflexives qui favorisent la réflexion sur ses apprentissages, ses pratiques et sur les défis à relever entre deux rencontres. La préparation de ces fiches encourage la consignation. L’élaboration de fiches de travail favorise une harmonisation, une cohérence et une constance dans la présentation visuelle des actions posées pendant une rencontre d’accompagnement. Cette façon de faire permet de gagner en clarté et alimente les échanges entre les personnes accompagnatrices et accompagnées, ce qui a aussi pour effet de minimiser la perte de temps et d’en faciliter l’utilisation (reproduction et modifications). Ces fiches sont facilement reproductibles lorsque les besoins exigent de suggérer des stratégies, des moyens, des outils d’accompagnement aux personnes. De plus, elles peuvent servir d’inspiration à des actions inédites. Ces fiches permettent aussi de faire des adaptations d’une équipe à l’autre. Ces équipes peuvent confronter ou comparer leurs propositions d’actions ou de gestes professionnels. Elles sont une façon de garder des traces de ce qui se fait et aussi une source importante pour la conception d’un

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matériel d’accompagnement socioconstructiviste. Ces fiches permettent en quelque sorte de garder des traces de l’accompagnement pour soi, pour l’analyse et l’évaluation de la démarche (et possiblement pour la recherche), pour guider la démarche et pour ajuster l’intervention des personnes ou équipes accompagnatrices, mais aussi pour alimenter les réflexions des membres de l’équipe accompagnatrice responsable ou l’équipe de direction, qui peuvent ainsi tirer profit de ce qui se passe dans des groupes où ils n’interviennent pas. Enfin, certaines fiches servent à des fins de compilation et, une fois transcrites, elles peuvent être retournées aux personnes accompagnées pour contribuer à leur cheminement et à leur formation.

Conception et élaboration de situations d’accompagnement Pour faire preuve de rigueur, de jugement, de créativité dans la conception et l’élaboration détaillées des différentes situations d’accompagnement, les personnes accompagnatrices se servent de ce qui est déjà à leur disposition1 et adaptent, s’il y a lieu, ou créent des tâches qui s’insèrent dans des situations d’accompagnement liées directement à une problématique, un sujet, un thème ou un concept qui est au cœur des préoccupations du groupe qui est accompagné. Ce cheminement est accompagné par la direction de l’accompagnement-formation. Cette façon de faire permet d’avoir une vision critique et aide à apporter des ajustements qui enrichissent les futures actions à poser.

Support visuel Le support visuel, qui prend la forme de séries de « transparents », assure des éléments de théorie, exerce un effet structurant et offre des outils qui sont faciles à réutiliser. Cela contribue à la création et à l’enrichissement du modèle d’intervention des personnes accompagnatrices qui peuvent s’en inspirer en tout temps selon les besoins. Les séries de « transparents » aident les personnes accompagnatrices à structurer leur pensée surtout si elles se servent de la fonction « pages de commentaires » pour y intégrer leurs idées. Dans l’action, ces séries ne sont généralement pas toutes utilisées, les diapos ne sont pas toujours présentées dans l’ordre dans lequel elles sont préparées. Il peut même arriver qu’elles ne soient pas utilisées. 1.

Au début du projet à la base de ce livre, les premières situations d’accompagnement ont été réalisées à partir d’expériences antérieures de la chercheure (Louise Lafortune). Elles ont constitué la base des premières interventions.

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Elles servent alors de document de référence que les personnes accompagnées peuvent consulter pour revoir ce qui a été réalisé en équipe. De façon générale, il est suggéré d’utiliser un modèle pour la série de transparents qui demeure le même tout au long de la démarche afin de favoriser la construction d’une autre série à partir de plusieurs séries. Utiliser le même modèle permet aussi d’éviter une perte de temps lors de la mise en page.

Préparation individuelle ou en équipe La préparation individuelle peut varier légèrement d’une personne à l’autre, mais il y a des constantes : lectures personnelles sur des sujets choisis, échanges avec le ou la partenaire de la dyade ou de l’équipe, révision seule ou avec d’autres avant la rencontre, relecture attentive du plan détaillé pour avoir en tête une représentation la plus précise possible du déroulement ce qui facilite des ajustements en cours d’action et permet de s’imprégner du fil conducteur tout en se rassurant quant déroulement global de la rencontre. Cette préparation individuelle ou en équipe est importante pour les personnes accompagnatrices qui se sentent ainsi davantage dans l’exercice de leurs compétences et de leur pouvoir d’action.

Discussions avec des collègues lors de la préparation Apprendre, s’exercer à rétroagir, à faire des synthèses, profiter et accepter le regard et la critique des autres, présenter ses préparations à ses collègues pour avoir de la rétroaction ; voilà des dimensions importantes de l’accompagnement. Cette façon de faire permet d’être critique face à ce qui est présenté dans le but de s’assurer de la pertinence et de la cohérence des actions proposées. Il s’agit de poser des regards différents qui permettent de vérifier la cohérence logique des idées avancées par les autres personnes accompagnatrices, de cerner le cœur (l’essentiel) du sujet, de répondre aux exigences des personnes accompagnées, de constater si les aspects à développer sont bien servis. Il s’agit aussi de porter un regard sur la forme de l’accompagnement, c’est-à-dire faire preuve, autant que faire se peut, d’originalité dans les présentations, dans les tâches proposées et dans les gestes et actions à poser. Les discussions autour des préparations permettent de poser un regard sur le choix des contenus, d’assurer une continuité avec une ou des rencontres antérieures et de poser un regard externe sur le fi l

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conducteur. Ces rencontres permettent d’enrichir la proposition de déroulement, de le questionner, d’assurer un lien entre les personnes accompagnatrices, de favoriser continuité et cohérence entre les groupes engagés. Cela permet aussi aux personnes accompagnatrices de tirer profit de ce qui se passe ailleurs dans d’autres groupes. Ces regards externes permettent également, de recentrer l’intervention, de l’inscrire dans une trajectoire d’accompagnement qui tient compte d’orientations et d’intentions particulières au groupe accompagné. Ce qui a l’avantage de recadrer l’action, d’ajuster les interventions, d’apporter des aspects liées à l’enrichissement de la culture associée aux fondements du changement visé, d’assurer un dynamisme dans les rencontres en proposant un équilibre entre l’action et la réflexion (théorie-pratique), en questionnant et en proposant des gestes professionnels pour soutenir le rythme de l’animation et aussi pour éviter certains dérapages qui ne sont pas en lien avec un accompagnement socioconstructiviste ou en accord avec les orientations du changement ou encore qui n’entendent pas favoriser sa mise en œuvre. Ces regards externes font que l’on évite des digressions et des pertes de temps. Ils amènent les personnes à mieux structurer leurs interventions, à poser des questions de clarification pour mieux comprendre l’intervention et à justifier les actions à poser. Les personnes accompagnatrices s’ouvrent aussi à des discussions ou présentations réflexives-interactives en y invitant des personnes exerçant différentes fonctions dans le milieu de travail. Ces ressources, plus ou moins externes, contribuent à la réflexion collective. Elles participent à la construction des connaissances et à la construction de nouveaux réseaux d’échanges (Lafortune et Lepage, 2007).

EN COURS D’ACTION : RESPECT DE L’ESPRIT DE L’ACCOMPAGNEMENT La préparation d’une rencontre d’accompagnement-formation suppose qu’il y aura une rencontre. Au cours de la rencontre, en plus de réaliser le plan de travail prévu même s’il y aura des ajustements, d’autres aspects seront pris en considération.

Accorder de l’importance à l’accueil L’accueil est un temps très important. On profitera des moments qui précèdent le début de l’intervention pour faire des mises au point, accueillir les personnes, se présenter aux nouvelles personnes, s’il y a

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lieu, rappeler le fil conducteur de l’année, reformuler ou recadrer les intentions de la session. Enfin, l’accueil sert aussi à prendre en compte tous les aspects organisationnels. Il est important de soigner ce moment privilégié de l’accompagnement. Arriver avant le début de la rencontre (une trentaine de minutes) aide à entrer en communication avec le groupe, à répondre aux questions, à se mettre dans l’esprit de la rencontre, mais aussi dans celui des personnes accompagnées. Entendre des propos qui se disent entre collègues, sans indiscrétion, aide à connaître le groupe et à reconnaître les situations de tension ou de plaisir qui ont eu cours dans un passé rapproché pour en tenir compte dans la rencontre à venir.

Se mettre en action rapidement Se mettre en action rapidement signifie d’éviter de se lancer dans de longues présentations Power Point, par exemple, ou de prendre trop de temps à parler de ce qu’il y aura dans la rencontre ou de présenter longuement des aspects conceptuels. Se mettre en action rapidement signifie mettre en action les personnes accompagnées par une réflexion, par un moment d’activation des connaissances ou expériences antérieures, par une discussion… C’est une façon de faire favorable à l’engagement des personnes accompagnées. Se mettre en action le plus rapidement possible assure un dynamisme chez les personnes accompagnatrices ainsi que chez les personnes qu’elles accompagnent. L’esprit est rapidement engagé dans une réflexion, une tâche, un questionnement. Le manque de temps, cet ennemi tant de fois évoqué, ne risque pas de s’immiscer dans la dynamique d’accompagnement en cours.

Intention personnelle et moments de réflexion Au début de la session, on peut inviter les personnes à prendre un moment de réflexion pour dégager une intention personnelle qui donnera du sens aux actions qui seront posées tout au long de l’accompagnement. Cette intention est en cohérence avec le fil conducteur et les thèmes abordés pendant la rencontre. Lors des moments de réflexion les personnes peuvent modifier, ajuster leur intention personnelle après des remises en question ou poursuivre leur intention de départ. Les moments de réflexion sont des pauses données aux personnes accompagnées afin de leur permettre d’activer des connaissances antérieures, de se remémorer des expériences, d’intégrer des apprentissages, de s’interroger sur différents sujets… Ces pauses réflexives permettent de s’interroger sur le développement de

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leurs compétences professionnelles à l’accompagnement, suscitent des prises de conscience, favorisent le processus d’intégration. Ces pauses aident à prendre du recul par rapport à sa démarche, à en prendre conscience ou à porter un regard métacognitif et réflexif. Elles soutiennent les réflexions individuelles et collectives sur un ou des aspects de l’accompagnement ou de l’apprentissage. L’intégration « naturelle » de questions servant de moments de réflexion permet à chaque personne de se recentrer et de réfléchir sur le cheminement qu’elle a réalisé, de préciser un questionnement en suspens ou encore d’écrire quelques idées ou commentaires utiles lors d’une mise en commun.

Fiches de travail et fiches réflexives Faire compléter des fiches de travail ou des fiches réflexives en cours d’action aide à garder des traces et encourage les personnes accompagnées à le faire. Ces traces permettent de cerner l’évolution du groupe, de s’en servir pour évoluer soi-même, mais aussi pour refléter au groupe leur propre évolution. En ce sens, si les personnes accompagnées, après plusieurs mois, un an ou deux de travail collégial, en viennent à dire « on faisait déjà cela avant » ou « cela n’a rien changé », en tant que personne accompagnatrice, on peut montrer le cheminement à partir d’exemples « concrets » qui proviennent de ce que les individus ou le groupe a vécu et a écrit. Pour en arriver à susciter ces prises de conscience, plusieurs moyens peuvent être utilisés comme des fiches de travail ou des fiches réflexives complétées par toutes les personnes accompagnées. Deux types de fiches peuvent être principalement utilisées : 1) des fiches de travail (au début, pendant ou à la fin des rencontres) portant particulièrement sur le contenu à approfondir ; 2) des fiches réflexives prenant deux formes. a) des fiches servant de moments de réflexion en cours d’action et b) des fiches, plutôt utilisées à la fin des rencontres, portant sur les apprentissages réalisés, les défis ou actions entrevus, les conditions favorisant l’accompagnement ou les répercussions de cet accompagnement. Les premières ont principalement un but de réflexion dans l’action d’accompagnement-formation (elles ne sont généralement pas recueillies) ; les deuxièmes servent dans l’accompagnement-recherche et ont un but de collecte de données et de prise de conscience de l’évolution de sa démarche (elles sont recueillies). Cela veut dire que l’écriture plus ou moins réflexive, plus ou moins professionnalisante fait partie intégrante de la perspective d’accompagnement sous-jacente à ce modèle.

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Fiches de travail individuelles et collectives dans et sur l’action Dans le cadre d’une démarche d’accompagnement-formation, la prise en compte des connaissances et expériences antérieures est facilitée par les fiches qui suscitent une réflexion individuelle avant un partage en petits ou grands groupes. On peut poser des questions comme : « quelles sont les deux ou trois stratégies que vous considérez comme étant plutôt efficaces pour tenir compte de la dimension affective dans le changement ? » ou encore : « qu’est-ce qui vous aide à cheminer lorsque vous recevez une rétroaction à partir d’une action professionnelle que vous avez posée ? ». C’est une façon de mettre sur papier ses idées avant de les partager et de les discuter. C’est une façon de cerner sa pensée pour mieux pouvoir la communiquer, la justifier, la comparer avec celle des autres et, ainsi, l’enrichir. En plus d’activer les connaissances et les expériences antérieures, de telles fiches peuvent servir à mettre en commun un travail d’équipe à partir de questions et de consignes fournies sur papier. Par exemple, cela peut prendre la forme d’une analyse de questions réflexives déjà fournies, pour demander de reformuler les questions afin de les rendre plus réflexives et de justifier en quoi ces nouvelles questions suscitent davantage la réflexion que les questions initiales. La collecte des réponses à ces questions et des justifications permet de concevoir une nouvelle fiche avec les questions et les justifications des personnes participantes pour les leur soumettre sous une autre forme lors d’une rencontre ultérieure. Enfin, ces fiches peuvent servir d’amorce à un sujet à aborder lors de la prochaine rencontre. Cela peut prendre la forme d’un remue-méninges réalisé en équipe, recueilli par la personne accompagnatrice pour une compilation, structuration des réponses et retour aux personnes accompagnées afin de poursuivre la réflexion théorique ou pratique lors de la rencontre suivante. Comme on peut le constater, ces fiches réflexives alimentent les moments de réflexion au début, pendant ou à la fin de l’action, en partant des individus ou de petits groupes autant pour contribuer à la construction collective que pour favoriser les liens pratique-théorie. Ces fiches sont une façon de garder des traces de ce qui se fait, de ce qui est pensé et discuté, mais elles sont aussi une source importante pour la conception d’un matériel d’accompagnement qui pourra être adapté et utilisé dans d’autres contextes. Ces fiches permettent en quelque sorte de garder des traces de l’accompagnement pour soi, pour guider la démarche et pour ajuster l’intervention, mais aussi pour alimenter les réflexions des membres de l’équipe accompagnatrice ou de direction qui peuvent tirer profit de ce qui s’est passé dans divers groupes où ils n’interviennent pas. Enfin, certaines fiches servent à des fins de compilation et, une fois transcrites et synthétisées,

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peuvent être retournées aux personnes accompagnées pour contribuer à leur cheminement et à leur formation. Elles peuvent aussi être un apport à la recherche.

Fiches réflexives servant lors de pauses Ce type de fiches peut prendre la forme de moments de réflexion pour s’interroger sur le développement de ses compétences professionnelles pour l’accompagnement, pour susciter des prises de conscience ou pour favoriser le processus d’intégration. Ces pauses peuvent être réalisées pour prendre du recul par rapport à sa démarche, en prendre conscience ou porter un regard métacognitif et réflexif. Plus ou moins courts, les moments de réflexion permettent aux personnes de réfléchir, seules ou en petits groupes, à partir de situations précises et en contexte, à partir de mises en situation, sur un ou des aspects de l’accompagnement ou de l’apprentissage. La réflexion peut être soutenue par une question ou une consigne qui précise le cadre à l’intérieur duquel on souhaite canaliser la réflexion et le partage. L’intégration « naturelle » de moments de réflexion permet à chaque personne de se recentrer et de réfléchir sur le cheminement qu’elle a réalisé, de préciser un questionnement en suspens ou encore d’écrire quelques idées ou commentaires utiles lors d’une mise en commun, par exemple. Ces moments de réflexion peuvent être pensés préalablement, mais ils peuvent également être proposés spontanément au cours de la formation.

Fiches réflexives individuelles de prise de conscience de sa démarche et, si nécessaire, de collecte de données de recherche Ce type de fiches contribue à la démarche professionnelle, mais aussi à garder des traces pour évaluer la démarche plutôt professionnalisante ou plutôt axée sur la recherche ou les deux. Ces fiches sont souvent associées à un retour sur ses apprentissages, sur les réinvestissements prévus ainsi que sur les conditions qui facilitent l’accompagnement d’un changement et les répercussions observées ou prévisibles de l’accompagnement du changement. Dans une démarche d’accompagnement, différentes étapes peuvent être envisagées. 1re étape : À la fin de chaque rencontre, les personnes participantes accompagnées peuvent compléter une fiche appelée « apprentissages et défis » dont le nombre de questions peut augmenter selon le nombre de

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jours (ou de rencontres) d’accompagnement-formation réalisé (voir des exemples de questions et leur évolution, placés en annexe 1). Le temps accordé pour les compléter dépend du nombre de questions, de la durée de la rencontre, mais aussi du nombre de rencontres réalisées, car plus on avance dans le modèle, plus les personnes deviennent réflexives. Pour une rencontre de deux jours, on peut aller jusqu’à 30 ou même 40 minutes. Pour une rencontre d’une demi-journée 10 à 15 minutes suffisent. Il est important de prendre note du nom des personnes et de leur adresse de courriel pour pouvoir retourner, si cela s’avère utile, les fiches aux personnes accompagnées à un moment donné ou à un autre de la démarche. Pour favoriser le suivi entre deux rencontres, pour aider à garder soimême des traces de la démarche et pour un éventuel retour sur le contenu de ces fiches, elles peuvent être transcrites électroniquement et retournées par courriel. Une autre façon de procéder peut être de faire des copies des fiches pour que les personnes accompagnées en gardent une copie. Si on décide d’envoyer les fiches par courriel, il est important que la confidentialité soit respectée et que chaque personne ne reçoive que la fiche qu’elle a complétée. Dans un contexte de recherche, c’est une mise en commun des données de tous les groupes qui est réalisée. Les commentaires reçus des participantes et participants indiquent que recevoir sa propre fiche donne l’impression d’être suivi et soutenu, mais surtout, aide à se rappeler des défis que chaque personne s’était donnée. Il semble que le seul fait de garder cette fiche dans son dossier de la rencontre n’ait pas le même effet, car trop souvent les notes d’une rencontre ne sont revues qu’au moment de la rencontre suivante. De plus, après avoir complété les fiches, les personnes peuvent faire un retour sur la rencontre où elles expriment un commentaire ; il peut être intéressant qu’un grand nombre de personnes s’expriment et le fassent en une ou deux phrases (un apprentissage, un plaisir, une demande, une satisfaction, un intérêt, une frustration…). Le fait d’avoir écrit auparavant favorise l’introspection et permet aux personnes d’apporter une contribution pertinente à la démarche du groupe. S’exprimer devant les autres après l’écrit sert à se rendre compte des idées des autres, à relativiser ses impressions en rapport avec la rencontre et, à certains moments, à inciter au passage à l’action. C’est aussi, parfois, le moment où la personne accompagnatrice peut le mieux évaluer la pertinence de son travail et ainsi, se retirer en ayant des impressions alimentées de celles des autres pour contribuer à une meilleure analyse a posteriori. 2e étape : Au cours de la démarche d’accompagnement-recherche, il a été constaté que les personnes accompagnées, malgré le sérieux qu’elles apportent à la démarche, n’ont pas toujours le temps ou l’esprit

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suffisamment libre pour compléter ces fiches alors qu’elles sont parfois épuisées après une ou deux journées de rencontre. De plus, si la rencontre se déroule sur deux jours, il n’est pas facile de revenir sur tous les apprentissages réalisés. Elles oublient souvent ce qui s’est passé la première journée et parlent plus facilement de la deuxième journée. Écrire « à la course » ne favorise pas une posture d’écriture réflexive. Certaines questions peuvent limiter la réflexion à une énumération d’apprentissages réalisés tout en considérant que cela peut être utile pour prendre l’habitude d’écrire à propos de ses apprentissages. Considérant ces constatations et l’expérience réalisée, on peut faire le choix de remettre les fiches au début de la rencontre ou au cours de la première demi-journée et ainsi susciter le processus d’écriture réflexive au cours de la démarche en planifiant des moments pour le faire. Il importe de laisser place à la spontanéité ; les personnes peuvent alors décider à quel moment elles prendront une pause pour écrire à propos de leurs apprentissages et de la démarche. Cette décision a influencé considérablement la production écrite des personnes accompagnées. En effet, la quantité de textes produits sur les fiches a augmenté et on a remarqué un approfondissement des idées. Cette façon de procéder a mené à modifier les questions posées sur les fiches (voir l’annexe 1 pour l’évolution des questions proposées sur les fiches). 3e étape : Dans le projet dont s’inspire le modèle présenté, à deux reprises au cours de l’accompagnement-recherche-formation, chaque personne accompagnatrice (certaines personnes ont pu réaliser cette démarche à deux reprises et d’autres une seule fois) a reçu un dossier contenant les fiches qu’elle avait complétées au cours d’une ou de deux années antérieures. Deux intentions de formation étaient sous-jacentes : 1) faire un retour réflexif (individuel et collectif) sur sa démarche et son évolution comme personne accompagnée ou accompagnatrice, et 2) faire un retour sur le processus d’écriture et son influence sur ses pratiques professionnelles (voir l’annexe 2 pour les deux types de fiches utilisées). Au plan de la recherche, deux objectifs étaient poursuivis : 1) contribuer à la collecte de données relative aux répercussions du projet, et 2) contribuer aux résultats en documentant la pertinence de garder des traces lors d’une démarche d’accompagnement. Chaque personne a alors eu l’occasion de lire ou de relire ses propres fiches pour en discuter et noter les répercussions de la démarche. Cela a permis de constater la pertinence de garder des traces, mais surtout de revenir sur ces traces pour susciter des prises de conscience.

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Rythme et enchaînement de tâches variés Dans l’enchaînement des tâches, il est important de garder un rythme qui convient aux personnes accompagnées, afin de favoriser leur engagement dans les diverses propositions de tâches. Il est tout aussi important de s’assurer de ne pas travailler toujours de la même façon, avec les mêmes types de tâches. Varier tant les types de tâches (conceptuels, présentations d’expériences, moments de réflexion, transposition dans la pratique) que l’organisation des groupes de travail brise la monotonie et redonne de la vitalité dans la réflexion et dans les échanges. En faisant preuve d’une observation précise et d’une bonne connaissance des personnes accompagnées, on peut choisir des stratégies de fonctionnement favorables à la bonne conduite de l’accompagnement. Pour ce faire, on tient compte du degré de concentration, de réceptivité cognitive et affective des personnes participantes.

Pratique de la synthèse La pratique de la synthèse aux moments opportuns assure des liens avec le fil conducteur que le groupe s’est donné. Cette pratique peut aussi permettre à chaque personne de faire des mises en relation entre des idées émises et ses propres idées. Elle est à faire tant par les personnes accompagnatrices que par les personnes accompagnées. En situation d’accompagnement, la personne accompagnatrice est souvent amenée à réaliser des synthèses. Il est intéressant de considérer la synthèse comme un moyen au service tant des personnes accompagnatrices que des personnes accompagnées. Faire une synthèse permet aux personnes d’organiser tantôt des informations tantôt des éléments de connaissance en construction. La réalisation d’une synthèse exige d’entrée de jeu la reconnaissance d’un fil conducteur qui permet de tisser des liens avec l’ensemble. Il est important de garder en mémoire que faire une synthèse n’est pas la même chose que faire un résumé. Un résumé rapporte, plus ou moins brièvement, la teneur du propos. Des éléments d’une synthèse peuvent être préparés à l’avance ou encore, avec de l’expérience, la synthèse peut être faite en cours d’action. Il s’agit alors d’anticiper certains aspects, l’organisation de ceux-ci et, par l’écoute attentive et l’interprétation minutieuse que l’on fait de ce qui se dit ou se vit, réussir une construction intéressante qui respecte les propos du groupe. La synthèse en cours d’action peut cependant représenter un défi pour les personnes qui n’en ont pas l’habitude.

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Reformulation À certains moments, en cours de session, il peut s’avérer pertinent de reformuler une pensée, un questionnement ; cela permet de recadrer, de s’assurer que l’on comprend bien les idées émises, les interprétations qui sont faites. En reformulant les idées d’une personne ou du groupe, la personne accompagnatrice peut ainsi mieux départager ses idées de celles qui appartiennent aux autres personnes. Les réactions à ses reformulations l’aident à mieux connaître les personnes participantes et à se rendre compte si son intervention considère les idées des personnes accompagnées et pas seulement les siennes.

Regards sur tous les aspects de l’interaction Dans l’accompagnement d’un changement, les tâches à réaliser ou les situations proposées peuvent susciter des apprentissages (dimension cognitive), peuvent inciter à examiner son processus d’apprentissage (dimension métacognitive) ou à renouveler des pratiques (pratique réflexive), peuvent mener à ressentir une certaine tension ou peuvent susciter des réactions affectives (dimension affective). Cela veut dire que la personne accompagnatrice a au moins deux regards à garder à l’esprit : ce qu’elle a à réaliser et comment cela se passe dans l’action, c’est-à-dire les interactions. À ces deux regards, on peut ajouter une observation et une écoute des réactions affectives afin de réagir en tenant compte de ce qui se passe, des réactions observées, des causes et conséquences de ces réactions, mais aussi des solutions à mettre en œuvre en cours d’action. Cela exige de la vigilance, de la diplomatie et du doigté afin de désamorcer toute situation plutôt délicate.

Présentations d’expériences d’accompagnement vécues ou à vivre et rétroaction Les personnes participantes sont les mieux placées pour rendre compte de leur pratique. Une invitation est faite à toutes les personnes lors de chaque rencontre afin de réfléchir sur une ou des pratiques ou expériences en particulier à partager avec les collègues. Cette façon de faire permet à la personne qui présente de réfléchir sur des aspects de sa pratique alors qu’elle permet au groupe de réfléchir, de questionner, de saisir les nuances, de s’exercer à la rétroaction. L’exercice devient un élément de formation et permet de recueillir des traces intéressantes pour l’émergence d’une théorisation sur les pratiques et les changements en cours.

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Il est très important et même indispensable, comme le mentionne Wolfs (2005, p. 27), lorsque l’on invite une personne à décrire ou à analyser son expérience vécue (que ce soit à des fins de recherche ou de formation), de définir clairement le but de la démarche visée, le « statut » accordé à ses déclarations ainsi que le dispositif méthodologique à mettre en place pour les recueillir.

Lors des présentations d’expériences, il importe d’être à l’écoute de la ou des personnes qui présentent afin de saisir le contenu mais aussi de cerner rapidement la structure de ce qui est présenté et de pouvoir rétroagir dans l’action, tant au sujet du contenu que du processus. Il est important de soigner la rétroaction que l’on fera, car les personnes qui s’expriment devant leurs pairs peuvent être relativement mal à l’aise et réticentes à dévoiler ainsi des gestes professionnels à des collègues. Il est bon de les soutenir par des questions ou des commentaires qui permettent de mieux comprendre l’expérience proprement dite. Généralement, on fixe un moment précis pendant les deux jours où l’on invite une personne accompagnée à présenter son expérience ; les personnes accompagnatrices et les personnes accompagnées choisissent ensemble un moment qui convient au groupe. Dans ces moments, la rétroaction constitue un moyen d’intervention qui vise à susciter l’échange entre deux personnes, soit une personne accompagnatrice et une personne accompagnée, ou encore entre une personne accompagnatrice et un groupe de personnes. Dans une rétroaction, la personne accompagnatrice agit, par ses commentaires, comme catalyseur de la réflexion dans le but de motiver et de favoriser l’émergence de prises de conscience qui mèneront au changement. Souvent utilisée dans les interventions d’accompagnement, de formation et d’animation, la rétroaction se voudra de type réflexif-interactif. Toutefois, on constatera qu’elle est parfois de type plus ou moins réflexif-interactif, surtout dans un contexte d’apprivoisement et d’appropriation. Elle est plus réflexive-interactive lorsqu’elle se présente sous la forme de commentaires et de questions qui guident la personne dans sa réflexion et qui l’amènent à s’interroger sur sa façon de faire, pavant ainsi la voie à l’émergence de prises de conscience qui conduisent à l’action. Elle est moins réflexive-interactive lorsqu’elle donne une information plutôt directive (à sens unique) qui peut aller jusqu’à orienter le changement souhaité. La rétroaction réflexive-interactive a plus de chance d’inciter à un changement intégré et durable puisqu’elle est construite par la personne et qu’elle émerge de la réflexion qu’elle a été amenée à faire.

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

Les initiatives et la poursuite des actions entreprises par le milieu sont fortement encouragées et l’équipe accompagnatrice soutient et alimente les groupes accompagnés en partageant avec eux certains aspects développés ou discutés dans l’ensemble des groupes accompagnés. Cette expertise témoigne de la diversité des voies qu’il est possible d’emprunter pour cheminer et progresser dans le processus de changement. Ainsi, la démarche d’accompagnement est construite avec les équipes accompagnatrices participantes, d’où l’importance d’établir une relation basée sur le respect mutuel et la confiance qui engendre un réel engagement des différents partenaires. Pour en assurer la réussite, l’équipe accompagnatrice part de ce qui se fait déjà dans les différents milieux de travail accompagnés. Elle est appelée à : ß connaître ce qui se fait dans le milieu ; ß encourager, soutenir et guider les initiatives particulières des différents groupes ; ß soutenir le relais des activités d’accompagnement en mettant les personnes accompagnées en position de poursuivre leur démarche tout en favorisant le processus de changement ; ß susciter un déséquilibre (cognitif) sécurisant (affectivement) qui confronte les participantes et participants à certaines de leurs convictions ; ß créer un réseau en encourageant des activités de maillage (utilisation de productions développées dans un groupe en les adaptant à une autre réalité, partage d’informations sur le site Internet, etc.) ; ß réaliser des suivis approfondis pour soutenir des projets d’action.

Interactions Les partages de réflexions, les confrontations d’idées et les échanges pendant la session d’accompagnement sont favorisés et encouragés. Les personnes accompagnatrices mettent en évidence la coconstruction qui est faite lors de ces échanges tant en petits groupes qu’en grand groupe. La mise en place de stratégies qui encouragent les interactions entre pairs favorise un engagement vers une analyse critique des pratiques d’accompagnement auprès des personnels accompagnés. Le soutien apporté par un pair dans la reconnaissance de ses propres difficultés facilite la prise de conscience des aspects à modifier, à changer ou à adopter pour que la personne assume pleinement son rôle de professionnel ou de professionnelle autonome.

Chapitre 5 — Rencontre inscrite dans une démarche d’accompagnement

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EN COURS D’ACTION ET À LA FIN : POUR FAVORISER LA RÉFLEXION ET LES AJUSTEMENTS Il y a d’autres actions qui peuvent être posées pendant le travail d’interaction ou encore à la fin d’une rencontre. Par exemple, même si on parle de retour réflexif et que cela semble une action à poser à la fin d’une rencontre, cela peut se faire à la fin d’une activité particulière ou à la fin d’une partie importante à l’intérieur d’une rencontre.

Retour réflexif Le retour réflexif est une action importante qui aide les personnes à se recentrer sur le fil conducteur, sur les idées qui ont émergé, pour faire des mises en relation entre théorie et pratique, tout en permettant la régulation de certaines des actions à poser. Lorsque la rencontre d’accompagnement-formation se déroule sur deux jours ou plus, un retour réflexif peut se faire soit à la fin de la première journée ou/et au début de la deuxième journée. Un temps peut être réservé à cet effet avant de reprendre le travail, après un repas ou au début d’une deuxième journée. Les personnes accompagnatrices feront preuve de vigilance et de perspicacité afin de s’assurer de « boucler des boucles » au regard d’un contenu, d’un processus, lorsque nécessaire afin de ne pas laisser les personnes dans des moments de déséquilibre trop longs.

Amorce de réflexion sur un nouveau sujet L’expérience a montré que les personnes accompagnatrices apprécient l’idée d’amorcer un sujet nouveau à la fin d’une rencontre et de le poursuivre à une prochaine rencontre. Ces sujets ou thématiques émergent du groupe, de leurs problématiques, de leurs projets d’action. Cette façon de faire permet d’engager les personnes à poursuivre leurs réflexions entre deux rencontres et d’ouvrir sur des perspectives nouvelles, en plus de souligner la cohérence de l’accompagnement offert.

Moments d’écoute à la fin d’une session À la fin d’une session d’accompagnement-formation, prendre du temps pour écouter les commentaires et les réflexions des personnes participantes permet de mieux saisir l’ampleur de ce qui a été fait pendant

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

l’intervention, de s’assurer de « l’état affectif » des personnes accompagnées, d’avoir une idée claire des voies à privilégier pour un suivi ou pour une prochaine rencontre. C’est une manière de boucler la rencontre. Voici quelques exemples d’actions de fin de journée qui peuvent servir à se rapprocher davantage des personnes que l’on accompagne : ß Rencontres de travail avec des personnes accompagnées sur des problématiques ou des questionnements liés à leur situation professionnelle. Ces rencontres peuvent avoir lieu après la première journée de la session ou encore pendant un repas où l’on discute d’un aspect, d’une expérience, d’une problématique, etc. ß Rencontres de travail avec un collègue après la première journée de la session d’accompagnement (qui se déroule sur deux jours) pour faire le point, pour valider la suite du plan de travail, pour échanger différents regards et points de vue relatifs au déroulement de la session. ß Propositions d’ajustements dans le déroulement de la rencontre à la suite des réflexions et échanges des personnes participantes concernant le contexte, des idées émises pendant le déroulement, les limites de temps, etc. ß Consignation de notes ou de données importantes dès la première journée de la session, car elles peuvent influer sur la suite de la rencontre. ß Concertation afin de trouver des façons de faire qui permettent de rejoindre des personnes participantes plus ou moins engagées.

Des « traces de son développement professionnel » vers une « écriture réflexive » Au tout début d’une démarche d’accompagnement d’un changement, les personnes sont invitées à prendre du temps pour écrire une description des apprentissages réalisés et des défis à relever entre deux rencontres. Les personnes s’expriment librement et des questions sont formulées pour les soutenir dans cette écriture. Petit à petit ces moments d’écriture évoluent et deviennent des moments d’écriture réflexive. Les personnes réfléchissent à leurs pratiques à la lumière de ce qui est fait pendant la rencontre et déposent sur papier leurs réflexions, idées, commentaires, questionnements.

Chapitre 5 — Rencontre inscrite dans une démarche d’accompagnement

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L’écriture réflexive est un dispositif structurant qui utilise l’écriture pour réfléchir sur sa pratique professionnelle et l’analyser a posteriori. Elle est source de construction de connaissances, de développement de compétences, mais aussi de formation et d’autoformation. L’action associée à l’écriture réflexive vise la modélisation de la pratique professionnelle ; elle encourage donc la conceptualisation à partir d’un regard sur l’action (une mise à distance) même si celui-ci tire profit du regard posé en cours d’action (Lafortune, à paraître). L’écriture réflexive se distingue de l’écriture narrative où il est question de raconter une histoire, de faire part d’une anecdote, de communiquer des faits d’histoire, des expériences, des pratiques… de préciser des aspects contextuels, affectifs, etc. Une écriture réflexive émerge d’expériences contextualisées potentiellement transposables. Cette écriture réflexive peut être comprise comme source de construction de connaissances et source de formation ; elle a un effet structurant. La personne qui pratique une écriture réflexive entre dans une boucle où à la fois elle construit ses connaissances, se forme et pose des gestes professionnels. Dans l’action d’écriture et dans les suites de cette action, elle conceptualise sa pratique et met en pratique cette conceptualisation – en lien avec le développement de la praticienne ou du praticien réflexif qui crée son modèle de pratique. La personne se distancie de l’action, elle prend un recul, elle se décentre, elle décontextualise l’action. Elle peut même en venir à faire émerger une théorie, généralisable, communicable… Ce n’est plus le « je » personnel qui écrit mais le « je » professionnel. La personne écrit pour réfléchir sur le développement de ses compétences professionnelles, pour éventuellement en discuter avec d’autres et ainsi améliorer sa pratique. Le développement de ses compétences professionnelles devient objet de réflexion ; cela peut devenir un processus d’autoformation. L’exercice de l’écriture réflexive comporte un aspect professionnalisant en contribuant au développement d’une identité professionnelle, à la construction de savoirs d’expérience, etc. L’écriture réflexive n’est pas innée ; elle suppose un apprentissage, une bonne dose d’humilité, de confiance en soi et aux autres. C’est aussi une reconnaissance de l’erreur comme source de formation. Contrairement à une écriture « libre », l’écriture réflexive, dans l’accompagnement socioconstructiviste, s’exerce à partir d’éléments ou de critères prédéterminés (Lafortune, à paraître).

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

À LA FIN ET APRÈS L’ACTION : RÉFLEXION SUR L’ACTION La réflexion sur l’action peut se dérouler à la fin de l’intervention avec les personnes accompagnées, mais elle est le plus souvent le prolongement d’une réflexion déjà amorcée dans le vif de l’action même si elle n’est pas toujours réalisée de manière affirmée ou consciente. Pour qu’elle se fasse à la fin de l’action et de façon collective, il est nécessaire de prévoir du temps à cet effet. Il n’est pas facile d’y arriver ; pourtant, garder du temps en fin de rencontre pour faire un retour collectif est essentiel pour reconnaître les compétences développées, pour donner ou recevoir de la rétroaction et pour entrevoir la suite, car un accompagnement n’est pas une activité ponctuelle et suppose des actions entre les rencontres. Dans une perspective de motivation, Wlodkowski (1988) considère très important ce moment, à la fin de l’action. Selon cet auteur, les fins de formation ou de rencontre se terminent souvent trop abruptement pour inciter les personnes présentes à poursuivre leur réflexion au-delà du moment où la rencontre se termine. Pour Perrenoud (2004) la réflexion sur l’action qui se passe après la rencontre suppose que la praticienne ou le praticien réflexif ait « une capacité de mettre en mémoire des observations, des questions, des doutes, des ébauches de raisonnements qu’il n’a pas le temps d’approfondir dans l’instant, mais qu’il envisage de reprendre à […] tête reposée » (p. 42). Réfléchir sur l’action c’est prendre sa propre action comme objet de réflexion pour la comparer avec ce qui a déjà été fait, pour se demander ce qu’on aurait pu faire autrement, pour se l’expliquer ou en faire la critique. Cela peut se faire collectivement, à la fin de l’intervention, ou seul ou avec des collègues après l’action. La réflexion sur l’action conduit les personnes à faire un retour sur leurs interventions, à reconnaître leurs forces et leurs limites, à se questionner sur leurs pratiques et sur les façons de faire de différents milieux de travail, à se remettre en question et à valider leurs actions afin d’améliorer leur propre façon d’accompagner. Ainsi, cette forme de réflexion permet de prendre du recul sur les actions réalisées. On pourrait donc affirmer que la réflexion à la fin et en dehors de l’action relie le passé et l’avenir, c’est-à-dire qu’elle est à la fois une rétrospective et une prospective. Elle est d’abord une rétrospective parce que la personne porte un regard sur l’action accomplie dans le but de dresser un bilan et de comprendre ce qui a plus ou moins bien fonctionné. Elle est aussi une prospective parce qu’elle permet d’affronter ultérieurement des situations analogues et d’accueillir les imprévus. En somme, elle devient une forme

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d’apprentissage pour l’individu puisque ce dernier pourra reprendre l’expérience vécue et « la transformer en savoirs susceptibles d’être réinvestis dans d’autres circonstances [semblables] » (Perrenoud, 2003, p. 36).

RÉFLEXION APRÈS L’ACCOMPAGNEMENT : DES TRACES À GARDER Une fois la rencontre réalisée, il est nécessaire de prendre du temps pour réfléchir a posteriori sur ce qui s’est passé, sur ce que l’on a réalisé comme personne accompagnatrice, sur sa perception de ce que les autres ont pu retirer au plan conceptuel, au plan des pratiques ou au regard de tout autre aspect en lien avec le changement à mettre en œuvre.

Plan de travail détaillé, tel que réalisé Après la session d’accompagnement, c’est le moment de prendre du temps pour revoir le plan détaillé et de le compléter avec ce qui a réellement été fait. Cela permet de garder en mémoire de façon exhaustive le déroulement de la session d’accompagnement et d’y faire référence au besoin. Ce plan de travail pourra aussi être consulté par une autre personne accompagnatrice, qui pourrait s’en inspirer dans un contexte d’accompagnement similaire.

Résumé de la rencontre La rédaction d’un résumé de la rencontre est un autre moyen de garder des traces. C’est une façon intéressante de porter un regard sur ce qui a été fait et comment cela a été fait. Ce résumé livre un portrait du cheminement d’un groupe. Dans le modèle proposé, les résumés sont déposés sur un site afin que toutes les personnes participantes puissent y accéder librement2. Après un certain nombre de rencontres, cela aide à revoir le cheminement du groupe. Il est également possible d’examiner le cheminement d’autres groupes.

2.

Pour un exemple de résumés, voir .

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

Rédaction d’un rapport d’accompagnement La rédaction du rapport d’accompagnement se fait le plus tôt possible pendant que tout est encore frais à la mémoire. S’il y a eu des enregistrements audio au cours de la rencontre, ils peuvent servir à la consignation de traces. Leurs contenus servent autant à la rédaction du rapport qu’à la poursuite de l’accompagnement, aux suivis à faire ou au volet de recherche, s’il y a lieu. Cette écriture permet de mettre en mots les aspects abordés, les questionnements, les commentaires, les éléments de théorisation émergente, etc. Les textes produits servent de base à la poursuite de l’accompagnement pour le groupe et ils peuvent aussi enrichir l’accompagnement d’autres groupes.

ACTIONS ENTRE DEUX SESSIONS D’ACCOMPAGNEMENT : UN SUIVI À RÉALISER Dans une perspective d’accompagnement, le moment qui sépare deux rencontres est également important pour assurer le suivi, le soutien et sa propre formation

Suivi Faire des suivis entre les sessions d’accompagnement permet de garder le contact avec les personnes accompagnées, de soutenir l’engagement et de répondre à des besoins ponctuels. Il peut s’agir de messages téléphoniques, d’envois de courriels, d’envois de documents demandés ou souhaités, de visites entre les rencontres, de propositions de lecture, de sites Internet à consulter, etc. Ce peut être aussi l’acheminement par courriel de certains documents sur la rencontre aux personnes absentes et aux nouvelles personnes. Ces suivis facultatifs peuvent aller de la participation à des comités de travail pour les groupes accompagnés à des visites de milieux de travail avec un apport d’éléments de formation, à l’utilisation du site Internet à des fins de validation interactive de documents en construction, à la compilation et au retour de fiches de réflexion, à la rétroaction à des journaux d’accompagnement ou de réflexion et à aider des petits groupes de personnes à se mettre à jour si elles veulent se joindre à divers groupes. On peut faire un suivi au regard de l’élaboration

Chapitre 5 — Rencontre inscrite dans une démarche d’accompagnement

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et de la mise en œuvre d’un projet d’action ou d’un plan d’accompagnement avec un groupe de personnes qui participent au processus d’accompagnement du changement. En plus de garder le contact avec les personnes accompagnées, le suivi peut relancer un engagement par une ou des suggestions d’actions à poser dans un temps choisi par les personnes accompagnatrices et accompagnées. Les suivis aident à analyser les pratiques et à transposer dans l’action professionnelle, les apprentissages faits au regard des visées du changement, de ses constituantes, de l’accompagnement des personnels ou du renouvellement des pratiques.

Actions de formation Entre les rencontres les personnes accompagnatrices peuvent avoir à se documenter, à éclaircir certains points, à rechercher certaines pistes de réponses, à consulter des personnes expertes, des collègues… Elles peuvent aussi être appelées à travailler avec des personnes accompagnées d’un groupe, avec certaines personnes-ressources ou encore avec des directions sur le suivi des rencontres, des informations concernant les thématiques prévues pour les prochaines rencontres et des actions à poser pour le recrutement de nouvelles personnes dans le projet. Elles peuvent également avoir des communications téléphoniques à effectuer relativement à l’ajout de nouvelles personnes au sein du groupe et au suivi de certaines personnes accompagnées de leur région. De ces actions résultent des moments qui s’apparentent aux suivis et d’autres qui sont plus près d’actions de formation pour soi en tant que personne qui accompagne des milieux variés. Pour conclure ce chapitre, rappelons que la séquence de travail proposée ici pour l’organisation des rencontres inscrites dans une démarche d’accompagnement s’inspire d’un ensemble d’actions qui se sont poursuivies pendant plusieurs années avec des groupes différents. Selon le contexte d’utilisation du modèle, les actions peuvent être ajustées, modifiées ou transposées.

CHAPITRE

6

PRATIQUE RÉFLEXIVE

Dans le modèle d’accompagnement professionnel proposé ici, la démarche d’accompagnement privilégiée s’inscrit dans une perspective socioconstructiviste et favorise une pratique réflexive. Le modèle offre aux personnes accompagnées des moments de réflexion leur permettant de porter un regard sur leur pratique et de développer une posture réflexive. Considérant l’importance de la pratique réflexive dans le modèle d’accompagnement professionnel, ce chapitre lui est consacré. Dans une pratique réflexive, l’interaction et plus particulièrement la réflexion collective occupent une grande place car elles facilitent l’analyse de ses actions et décisions prises en cours d’action grâce aux questions des autres, à leurs commentaires et aux discussions. Le regard de collègues sur les actions posées est utile puisqu’il permet à la personne de confronter sa vision de sa propre pratique avec celles de ses collègues, de connaître d’autres pratiques ainsi que d’autres façons d’analyser des pratiques de travail. Cela favorise aussi des remises en question, des ajustements, conduisant à des changements de pratiques ou à une validation de ses actions pour contribuer aux changements. Si ces interactions sont particulièrement dirigées vers la mise en œuvre du changement prescrit, elles ont alors une importance capitale dans l’implantation de ce changement.

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

SENS DE LA PRATIQUE RÉFLEXIVE Plusieurs expressions sont utilisées pour désigner une réflexion sur sa pratique et une analyse de celle-ci. Donnay et Charlier (2006) semblent utiliser les expressions « analyse de pratiques », « démarche réflexive » et « pratique réflexive » dans le même sens. Perrenoud (2003) utilise quant à lui l’expression « pratique réflexive ». Dans certains milieux comme celui de l’éducation, une même expression semble avoir différents sens et deux expressions différentes peuvent être utilisées dans des sens assez semblables. Il n’est donc pas facile de s’y retrouver. Dans le présent texte, c’est l’expression « pratique réflexive » qui est privilégiée ; c’est celle qui apparaît la mieux définie dans les écrits (Lafortune et Deaudelin, 2001 ; Perrenoud, 2003 ; Schön, 1994 ; St-Arnaud, 1992) et qui représente le mieux ce qui est visé par le modèle proposé ici. Elle comporte trois composantes : une composante de réflexion et d’analyse de sa pratique, une autre liée au passage à l’action et enfin, une dernière faisant référence à la construction de son modèle de pratique en évolution (la première et la troisième composantes proviennent de Lafortune et Deaudelin, 2001). La deuxième est issue de la théorisation émergente réalisée dans l’accompagnement-recherche. Ces trois composantes exigent des actions ou expériences et des ajustements issus des analyses individuelles et collectives. Pour Lafortune (2005, 2007a), une pratique réflexive suppose une mise à distance et un regard critique sur son propre fonctionnement, mais aussi une analyse tant individuelle que collective des actions et décisions prises en cours d’action. Ce regard critique suppose des prises de conscience de ses cohérences et incohérences, de ses pensées et actions, de ses croyances et pratiques. Des personnes accompagnées qui se considèrent engagées dans une pratique réflexive, mentionnent qu’elles prennent une distance vis-à-vis de ce qui se passe dans leur travail d’accompagnement et qu’elles portent davantage un regard critique sur leur pratique ou sur leur rôle de personne accompagnatrice. Le regard sur sa pratique peut porter sur : ce qui se passe, comment cela se passe, pourquoi cela se passe ainsi et ce qui pourrait être fait différemment. Ce type de démarche renvoie également à la capacité de pouvoir se donner une représentation de sa pratique même lorsqu’elle évolue. La pratique réflexive n’est donc pas arrêtée dans le temps. La représentation que la personne se fait de sa pratique change au fil du temps ; elle évolue au cours des démarches ou des processus expérimentés. Cela veut donc dire que cette représentation devra peut-être être revue en cours d’accompagnement, en cours de processus. Pour ce faire, apprendre à réfléchir sur sa pratique, mais aussi savoir la soumettre aux regards des autres à des fins de rétroaction

Chapitre 6 — Pratique réflexive

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devient un défi à relever. Cela peut se traduire par : « je regarde mon processus en action et j’accepte que d’autres puissent y avoir accès pour rétroagir et me permettre de m’ajuster. Un cheminement dans une pratique réflexive se développe tout au long de la pratique professionnelle et à travers différentes expériences vécues. Un tel cheminement suppose une progression professionnelle par une évaluation constante de ses intentions, de ses objectifs, de ses buts, de ses croyances, de ses valeurs… Cela suppose d’entrer dans une boucle continue en théorisant sa pratique individuellement ou en interaction avec une équipe (inspiré de Perrenoud, 2003). En fait, la réflexion devient partie intégrante de la pratique professionnelle des personnels qui en acceptent les principes. En résumé, la pratique réflexive comporte trois composantes : 1) une réflexion sur sa pratique et une analyse de celle-ci ; 2) un passage à l’action et 3) une modélisation de sa pratique en évolution. Elle suppose une mise à distance et un regard critique sur son propre cheminement. Le regard sur sa pratique peut porter sur quatre niveaux : 1) ce qui se passe, 2) comment cela se passe, 3) pourquoi cela se passe ainsi et 4) ce qui peut être fait pour améliorer cette pratique. Une praticienne ou un praticien réflexif réfléchit de façon critique et constructive (Perrenoud, 2001) en ce sens qu’il est appelé à se distancier de la situation pour la comprendre et parce qu’il apprend de ses expériences ; il construit des savoirs pouvant être à leur tour réinvestis, confrontés et adaptés à la pratique. Il « met ses pratiques à distance avec des mots qui permettent déjà une conceptualisation facilitant la diffusion, la communication du savoir créé » (Donnay et Charlier, 2006, p. 69). La praticienne ou le praticien réflexif est « capable, d’une part, de décrire et d’analyser sa pratique ainsi que d’en examiner l’efficacité et, d’autre part, de construire ou d’adapter ses propres modèles de pratique en tirant profit des modèles existants (modèles d’intervention ou d’accompagnement) afin de rendre sa pratique plus efficace » (Lafortune et Deaudelin, 2001, p. 205).

FONCTIONS DE LA PRATIQUE RÉFLEXIVE Donnay et Charlier (2006), qui parlent principalement d’analyse de pratiques, en proposent trois fonctions : 1) comprendre sa pratique, 2) changer sa pratique, et 3) accroître la professionnalité. Pour ces auteurs, l’analyse des pratiques permet de comprendre sa pratique car elle favorise

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

la construction de connaissances théoriques et pratiques à partir de différentes situations vécues afin d’être en mesure d’expliquer le sens de ses actions. Elle permet aussi de changer sa pratique puisqu’à la suite d’une analyse des situations vécues et d’une confrontation avec des collègues, la personne concernée ajuste ses actions ou prend des décisions différentes pour une prochaine fois. D’ailleurs, lorsqu’on demande aux personnes accompagnées ce qui leur permet de penser qu’elles sont engagées dans une démarche réflexive, elles répondent : « j’entrevois certains changements de pratique dans mon accompagnement » ; « je cherche toujours à améliorer mes pratiques » ; « ma façon d’aborder les problèmes et les pistes de solution que j’envisage sont différentes de mes habitudes ». Certaines personnes vont même jusqu’à dire : « il y a un changement dans ma façon de penser ». Une telle analyse contribue à accroître le processus de professionnalisation des personnels engagés dans un changement axé sur le renouvellement des pratiques parce qu’elle leur offre « une meilleure prise sur les situations de travail [… et] l’analyse réflexive [de leur] pratique [rend] possible […] le transfert de l’expérience acquise à d’autres situations » (Donnay et Charlier, 2006, p. 88).

COMPOSANTES DE LA PRATIQUE RÉFLEXIVE Dans ce modèle, trois composantes sont associées à la pratique réflexive : 1) réfléchir sur sa pratique et l’analyser ; 2) transposer les apprentissages pour des actions et des retours sur les expériences ; 3) développer son modèle de pratique en constante évolution.

Première composante : réfléchir sur sa pratique et l’analyser Réfléchir sur sa pratique et l’analyser ne peut se limiter à discuter de ce qui est fait dans son travail avec des collègues ou avec un groupe de personnes accompagnées. Une telle réflexion et une telle analyse présupposent une intention de changer ses pratiques, sinon elles ne s’avéreraient pas utiles. La réflexion sur sa pratique et l’analyse de celle-ci permettent d’en arriver à pouvoir décrire sa pratique de telle sorte que les autres puissent comprendre ce qui est réalisé au point de pouvoir utiliser des idées à partir de cette description. Il s’agit d’examiner les différents aspects de sa pratique, c’est-à-dire les actions posées antérieurement ou à poser

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(interventions, approches, stratégies, etc.), les compétences et habiletés développées, les connaissances construites et les attitudes adoptées. Cela veut également dire qu’il est nécessaire de faire des liens entre ces aspects. Par exemple, des liens peuvent être faits, mais aussi discutés, entre les différentes approches dans la réalisation de son travail. Il s’agit également de comprendre ces liens en tentant de décrire ces approches, les raisons faisant en sorte qu’on choisit telle approche plutôt qu’une autre et la façon dont on les met en œuvre soi-même, de pouvoir préciser ce que cela apporte, d’envisager des répercussions et d’autres façons de faire. Cela peut aussi consister à cerner et expliquer les difficultés rencontrées tout autant que les réussites. Ainsi, cette réflexion et cette analyse supposent des comparaisons, des justifications ou explications tout en acceptant les questionnements et les remises en question. Enfin, on pourrait ajouter que la réflexion sur sa pratique ainsi que son analyse ont avantage à être réalisées avec des collègues afin d’en confronter les résultats, de connaître d’autres façons de faire ainsi que d’autres manières d’analyser sa pratique. Toutes ces actions permettent de construire son modèle de pratique, mais aussi de s’en donner une représentation dans une visée de cohérence entre croyances et pratiques, entre pensées et actions (Lafortune et Fennema, 2003 ; Lafortune, 2004a ; Thagard, 2000). Réfléchir et analyser ses actions conduisent à un changement de pratique et, dans le modèle proposé ici, c’est un changement de pratique lié aux fondements du changement à mettre en œuvre qui est privilégié. Analyser ne se limite pas à se demander ce qui a été réalisé, mais consiste aussi à examiner comment cela s’est passé, quelles réactions ont été observées, pourquoi il y a eu ces réactions, quels ont été les apprentissages réalisés, ce qui pourrait être fait une prochaine fois, pourquoi faire ces changements… Il importe de garder des traces rassemblées peu de temps après l’action afin que l’analyse se fasse à partir d’éléments qui reflètent le plus possible ce qui s’est passé. Une analyse suppose l’examen d’un objet ou d’un sujet en le décomposant en ses éléments essentiels afin de comprendre les liens, les manifestations, les causes, les conséquences, les difficultés, les réussites et de pouvoir se donner un schéma de l’ensemble (partir du tout et le décomposer). Appliquer les principes de l’analyse à sa pratique professionnelle consiste à examiner ses actions (interventions, approches, stratégies, formations…), ses compétences, habiletés, connaissances, attitudes, valeurs… pour comprendre les liens, les manifestations, les causes, les conséquences, les difficultés, les réussites… et pouvoir se donner une représentation de sa pratique dans une visée de cohérence. Analyser sa pratique est une

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habileté de pensée complexe qui va au-delà d’une description ou d’un échange de pratiques. Dans une démarche d’accompagnement, il peut être intéressant d’analyser des pratiques par des mises en situation, par exemple, afin de se dégager de sa propre pratique et de pouvoir porter un regard critique sur des pratiques proposées.

Deuxième composante : transposer les apprentissages et faire des retours sur les expériences Les réflexions et analyses à propos de sa pratique amènent la personne à se poser des questions sur ses pratiques antérieures et à envisager des changements qui pourraient se traduire par des actions lors de sa prochaine intervention. Plusieurs en viennent à dire : « je ne peux pas croire que je n’ai pas fait cela auparavant » ou « je vais utiliser ce qui a été fait ou élaboré aujourd’hui en le transposant dans ma pratique ». Cependant, dans la pratique, les impératifs du moment font oublier ce qui était prévu et les réflexions et analyses ne se traduisent pas toujours en action. Certaines prises de conscience se traduisent en changements dans les actions à court terme, mais ne sont pas viables à plus ou moins long terme. Le passage à l’action est nécessaire pour montrer le niveau de réflexion et la pertinence de l’analyse. Le passage à l’action suppose des prises de conscience assez approfondies pour susciter des changements qui perdurent. Ce passage à l’action est lié au processus de transposition issu de la réflexion et de l’analyse et mène à des retours sur les actions autant individuellement que collectivement afin de susciter des interactions, des confrontations (et non des affrontements) et des régulations pour des actions ultérieures. On a maintes fois constaté, lors de l’accompagnement d’une pratique réflexive, combien il est nécessaire de prévoir des actions et surtout des retours sur ces actions. C’est une façon de se donner des défis réalistes, de les réaliser et de s’interroger sur ces réalisations. De plus, si les actions n’ont pu être réalisées, cela aide à examiner les facteurs qui ont empêché de passer à l’action. Cependant, il importe aussi de ne pas juger les actions prévues et encore moins le fait qu’elles n’ont pu être effectuées.

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Dans la pratique, c’est l’aspect du passage à l’action qui est particulièrement difficile à réaliser. Même si, conceptuellement, le passage à l’action peut sembler évident, il n’est pas simple d’amener les personnes accompagnées à réinvestir les apprentissages réalisés dans leurs actions quotidiennes. Pour intervenir dans son milieu, la personne pose bien des gestes dans sa pratique quotidienne, mais les actions que l’accompagnement veut susciter supposent des changements de pratiques issus de prises de conscience exprimées à partir de propos du type « Ah oui ! C’est vrai que cela pourrait aider à être plus efficace dans mon travail ; cela pourrait aider à cheminer vers le changement souhaité… ». Si ces prises de conscience ne mènent pas à des actions, on peut dire qu’elles sont plutôt superficielles. C’est par un accompagnement soutenu, des projets d’actions ou des accompagnements personnalisés qu’elles pourront être intégrées et permettre à la personne de changer ses habitudes dans sa pratique (Lafortune, 2007). Cela signifie qu’un changement ne peut se faire rapidement, surtout lorsqu’il s’agit d’un changement majeur et prescrit, lié au renouvellement des pratiques. En résumé, dans la mise en œuvre d’un changement, le passage à l’action est une étape charnière, souvent difficile à réaliser car l’arrivée d’un changement, surtout s’il est majeur, oblige les personnes à apporter des ajustements à leur modèle de travail. Ces ajustements sont plus ou moins substantiels selon les individus ; certains iront même jusqu’à remettre en question leurs pratiques professionnelles. Et lorsqu’il se fait, le passage à l’action passe par l’adaptation d’actions ou de gestes professionnels pour graduellement progresser vers une transposition de la démarche d’accompagnement, des outils ou du matériel à différents contextes d’accompagnement.

Troisième composante : développer son modèle de pratique en constante évolution La pratique réflexive consiste aussi à construire ou à adapter son propre modèle de pratique (voir Lafortune et Deaudelin, 2001). Cette construction ou adaptation comprend trois éléments : 1) concevoir et élaborer une description et une explicitation de sa pratique ; 2) pouvoir présenter les aspects théoriques et pratiques menant à des actions particulières ; 3) s’inspirer de modèles existants et les adapter pour les réorganiser dans une représentation cohérente (texte, schéma, tableau, dessin, catégorisation,

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énumération de caractéristiques, de principes, etc.). Ce modèle évolue au fil du cheminement professionnel en étant réexaminé à différents moments pour analyse, remise en question et régulation, si nécessaire. Ce type de travail de construction et de représentation exige une réflexion approfondie sur sa pratique ainsi qu’une analyse de ses croyances (conceptions et convictions) qui soient en lien avec les actions posées. L’aspect inhabituel de ce processus exige un accompagnement de groupe et un engagement de la part de la personne accompagnatrice à effectuer elle-même un tel processus et à développer une expertise pour une telle forme d’accompagnement (Lafortune, 2005, 2007a). La réalisation de cette composante de la pratique réflexive suppose de s’imprégner des éléments d’une situation (une forme d’engagement s’impose pour y arriver) ; de s’engager dans l’exploration (ce qui sous-tend l’acceptation de certains déséquilibres cognitifs) et l’adoption d’un fonctionnement souple. On peut donc dire que « développer son modèle de pratique » suppose d’accepter le risque et l’inconnu, d’être réceptif à de nouvelles idées, d’exploiter de nouvelles idées et d’explorer de nouvelles stratégies. Cet ensemble, rassemblé dans une organisation cohérente, aide la personne à comprendre son fonctionnement dans l’action et même son processus d’apprentissage pour mieux reconnaître ensuite les démarches et processus des personnes accompagnées (Lafortune, 2005, 2007a). La description des pratiques, les siennes et celles des autres, amène les personnes à examiner ou à se construire une vision de leur modèle de pratique professionnelle, à trouver les justifications nécessaires à sa présentation. L’exercice n’est pas toujours facile à réaliser, mais il aide à mieux comprendre ses actions professionnelles. Il permet d’établir une certaine cohérence entre ce qu’une personne pense et ce qu’elle fait. Elle peut ainsi garder un équilibre entre pensées et actions pour rester en accord avec ses pratiques mais s’ouvrir aussi à celles des autres pour mieux comprendre leurs gestes et leurs choix (Lafortune et Lepage, 2007). La réussite de la mise en place d’une pratique réflexive est influencée par plusieurs facteurs liés aux personnes accompagnées, à la ou aux personnes accompagnatrices et aux circonstances particulières de l’accompagnement. En ce qui concerne les personnes accompagnées, il s’agit de : leur degré d’engagement, leur intention de passer à l’action, leur façon d’envisager le changement de leurs pratiques ; leurs priorités personnelles ou professionnelles, etc.

Chapitre 6 — Pratique réflexive

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Relativement aux personnes accompagnatrices, il s’agit de : leur propre engagement dans une pratique réflexive, leur façon de mener l’accompagnement, leurs attitudes vis-à-vis des personnes accompagnées, leur vision de leur pratique et du changement, les situations d’accompagnement choisies, etc. Lors de circonstances particulières, il s’agit : d’exigences de la direction de l’établissement, de l’entreprise, de l’organisation ; d’exigences des personnes accompagnées ; de situations ou dispositions personnelles d’ordre affectif, social, professionnel, etc. des personnes accompagnées ; de priorités institutionnelles ; de structures organisationnelles ; de ressources matérielles et humaines ; du temps accordé à la pratique réflexive ; etc. L’ensemble de ces facteurs mérite d’être examiné avec les personnes accompagnées dans l’accompagnement d’une pratique réflexive.

DISTANCIATION PAR RAPPORT À SA PRATIQUE Favoriser une pratique réflexive aide les personnes accompagnées à s’observer et à réfléchir sur leurs façons d’accompagner d’autres personnes tout en portant un regard critique sur leur façon de le faire. Pour elles, les rencontres d’accompagnement-formation sont des moments de réflexion, des temps d’arrêt nécessaires pour permettre une analyse de leur pratique ou de leur rôle de personne accompagnatrice tout en considérant certaines de leurs interventions dans le but de les ajuster ou de les enrichir. Avec la pratique réflexive, les personnes apprennent à anticiper leur accompagnement et à réfléchir avant l’action, pendant l’action et au sujet de l’action. Dans un projet d’accompagnement, il devient généralement difficile d’affirmer que les personnes accompagnées sont toutes engagées au même degré dans une pratique réflexive qui renvoie à la réflexion, à l’analyse et à la modélisation de sa pratique. Lors de l’expérience réalisée pour dégager le présent modèle, on a pu observer que plusieurs personnes accompagnées ont tendance à associer la pratique réflexive à la réflexion sur sa pratique plutôt qu’à une analyse où il y a une distanciation par rapport à ses actions sur le plan professionnel pour comprendre leurs effets sur soi-même et sur son environnement et pour adapter sa pratique tout en anticipant les répercussions pour porter un regard autocritique et accepter la critique des autres.

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

Pour résumer, l’engagement dans une pratique réflexive suppose une mise à distance et un regard critique sur son propre fonctionnement, mais aussi une analyse tant individuelle que collective des actions et des décisions prises en cours d’action. Ce regard critique suppose des prises de conscience de ses cohérences et incohérences, de ses pensées et actions, de ses croyances et pratiques. L’engagement des personnes accompagnatrices et accompagnées dans une pratique réflexive s’avère important, voire essentiel pour s’assurer de la mise en œuvre d’un changement viable à long terme et intégré dans les organisations.

CONTEXTE FACILITANT LA RÉFLEXION VERS UN CHANGEMENT DES PRATIQUES Autant la conception de l’accompagnement est particulière au modèle proposé ici, autant la pratique réflexive est essentielle pour s’assurer de la mise en œuvre d’un changement axé sur le renouvellement de pratiques professionnelles. Mettre les personnes accompagnées dans une situation de pratique réflexive suppose un certain contexte qui facilite la réflexion vers un changement des pratiques. ß S’assurer que la formation à l’accompagnement et l’accompagnement se fassent sur une période de temps assez longue. Cela permet aux personnes accompagnatrices d’intégrer le sens du changement préconisé, de réfléchir à leurs pratiques dans une perspective de changement, de mettre en action des changements de leurs pratiques et d’analyser les répercussions de leurs actions pendant leur démarche de formation. ß S’assurer que les personnes accompagnatrices puissent réaliser une démarche d’accompagnement dans leur milieu de travail. On constate trop souvent que les personnes formées à l’accompagnement ne peuvent soutenir, guider et former un groupe de personnes pendant une période de temps assez longue et par des rencontres qui permettent la réflexion, la confrontation, l’action et l’analyse collective de ces actions. ß Respecter le temps exigé par le processus de changement de tout professionnel ou de toute professionnelle. Avant de penser au changement des autres, les personnes accompagnatrices commencent par changer leurs propres façons de faire et de penser.

Chapitre 6 — Pratique réflexive

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ß Mettre en action un changement dans l’esprit dans lequel il a été conçu. Cela exige un accompagnement qui permet d’éviter des interprétations trop diversifiées des fondements du changement prescrit. Cela permet d’assurer une cohésion dans le discours véhiculé autour du changement. ß Fournir un matériel d’accompagnement expérimenté dans divers milieux et ajusté selon les réactions des personnes accompagnées. Cela permet de répondre davantage à l’esprit du changement et de susciter le changement de sorte qu’il soit proposé de façon réaliste. ß Approfondir différents aspects théoriques tout en sachant que les personnes formées à l’accompagnement aimeraient bien avoir des outils utilisables rapidement et directement dans leur travail. Selon l’expérience vécue, après au moins une année sinon 2 ou 3 années d’accompagnement-formation, les personnes accompagnées en viennent à désirer approfondir les éléments abordés. Elles comprennent qu’une compréhension superficielle de différents concepts et façons de faire ne leur permet pas d’accompagner des groupes de façon à créer des moments de coconstruction qui favorisent un approfondissement des concepts et des stratégies. ß Si une évaluation est prévue, s’assurer que le processus d’évaluation se fasse dans le même esprit que celui qui est prôné dans le cadre du changement visé. Adopter une telle perspective permet de connaître les répercussions, mais surtout de les comprendre pour pouvoir adapter ou transposer la démarche d’accompagnement à d’autres contextes. Pour conclure, la démarche d’accompagnement proposée dans le modèle favorise une réflexion sur ses pratiques qui, confrontées à celles des autres ou à celles associées au changement, peuvent être remises en question. Ces confrontations peuvent contribuer largement à l’implantation ou à l’accompagnement de nouvelles pratiques dans les organisations. Particulièrement si ces dernières respectent les fondements du changement à mettre en œuvre.

CHAPITRE

7

MOYENS FACILITANT L’ACCOMPAGNEMENT ET LA PRATIQUE RÉFLEXIVE

Les moyens intégrés à l’accompagnement tiennent compte de deux regards qui se croisent. On retrouve le regard de la personne accompagnée qui se préoccupe de sa pratique professionnelle. Ensuite, il y a le regard de la personne accompagnatrice qui s’interroge sur les concepts, principes, façons de faire qui peuvent se transposer en connaissances à construire et coconstruire dans les milieux. La tâche de la personne accompagnatrice est complexe, car en plus de s’interroger sur les actions qu’elle pose, elle a à reconnaître, à nommer des obstacles (de nature épistémologique, psychologique, cognitive, métacognitive, affective…) à surmonter pour favoriser la construction des connaissances et le développement de compétences, à préciser des façons de faire, à en mettre en œuvre et à intégrer le tout en complémentarité, sans oublier sa responsabilité éthique.

TÂCHES, SITUATIONS D’ACCOMPAGNEMENT ET FAMILLES DE SITUATIONS Les tâches, situations et familles de situations d’accompagnement sont complexes et demandent de la part des personnes accompagnatrices, une habileté à intervenir dans une perspective d’accompagnement

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

socioconstructiviste. Il importe de faire preuve de vigilance dans la manière d’utiliser ces situations pour préserver la perspective socioconstructiviste. Le retour à un mode basé sur la transmission peut être tentant surtout lorsqu’on pense « sauver du temps », mais si la construction reste superficielle, elle n’assure pas le changement et le renouvellement des pratiques. Élaborées et utilisées dans une perspective d’accompagnement socioconstructiviste, des situations d’accompagnement gagnent à être utilisées dans un esprit d’ouverture et de transpositions. À cet effet, il est nécessaire de se les approprier pour pouvoir les modifier, les transformer en fonction des problématiques rencontrées. Les tâches, situations ou familles de situations envisagées dans une perspective d’accompagnement constituent ce qui guide la personne accompagnatrice pour développer des compétences professionnelles à l’accompagnement (les siennes et celles des personnes accompagnées) pour l’exercice d’un leadership d’accompagnement. Le choix de ces tâches se réalise sur la base des intentions d’accompagnement-formation ou des besoins dans l’accompagnement des personnels vers le changement. Les situations amènent la personne accompagnatrice à mobiliser ses ressources et à développer des compétences pour réaliser la tâche qui lui est demandée. Une famille de situations, dans l’esprit de l’accompagnement, désigne un ensemble de situations ayant des caractéristiques communes. Ces caratéristiques peuvent porter sur un thème particulier pour que les situations soient utilisées en continuité, pour proposer des idées de séquences de situations qui font cheminer…

DÉVELOPPEMENT D’UN SITE INTERNET Pour accompagner la mise en œuvre d’un changement majeur, le développement d’un site Internet s’avère un moyen intéressant et parfois, essentiel. Il facilite les échanges, la circulation et le partage de l’information. Il contribue à la construction des connaissances que les personnes se font à propos du changement et aide à la formation d’un réseau en rassemblant tous les participants. Il peut contenir des informations générales sur l’accompagnement, des outils et du matériel d’accompagnement, des informations sur les groupes accompagnés et leur cheminement, des moyens réflexifs-interactifs à intégrer à l’accompagnement, un glossaire, une bibliographie thématique, des liens intéressants et d’autres rubriques à ajouter selon les besoins ou le contexte d’accompagnement. Il s’adresse à l’ensemble des personnels visés par

Chapitre 7 — Moyens facilitant l’accompagnement et la pratique réflexive

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le changement et peut-être même au-delà. Bien entendu, le contenu du site reflète les visées et les orientations du changement à mettre en œuvre. Le matériel d’accompagnement et les outils déposés sur le site sont le reflet d’une démarche en cours de réalisation et de validation. Ils constituent une invitation à l’action, à la réflexion et au changement. Ce contenu est mis à la disposition des équipes accompagnatrices à des fins de soutien à l’accompagnement. Les personnes qui utilisent ce matériel et ces outils peuvent être invitées à les adapter, à les ajuster, à les enrichir et à se les approprier pour ainsi en poursuivre la validation. Elles peuvent aussi être invitées à informer les personnes responsables de l’accompagnement de leurs découvertes et de leurs bons coups en indiquant les modifications apportées à ce matériel ou à ces outils ou en proposant de nouvelles pistes.

JOURNAL D’ACCOMPAGNEMENT Dans le cadre d’un projet d’accompagnement-recherche-formation, il peut être intéressant et même nécessaire de garder des traces à l’aide d’un journal d’accompagnement. Plusieurs auteurs font mention d’un journal de bord. Cependant, comme la notion d’accompagnement est maintenant entrée dans les pratiques de formation et d’intervention, l’idée de parler d’un journal d’accompagnement commence à émerger. Selon le modèle, un journal d’accompagnement est un outil d’accompagnement, de formation et de recherche permettant de consigner des éléments d’observation et des réflexions personnelles utiles à la compréhension de l’évolution du processus de changement. Son contenu peut autant traiter des étapes de l’accompagnement réalisé que de l’évolution de la personne dans cette démarche. Il comporte généralement plusieurs sections qui peuvent être regroupées comme suit : les apprentissages réalisés (connaissances, compétences, attitudes, etc.), le cheminement réalisé (évolution, prise de conscience, questionnement), les traces liées à un projet d’action ou d’accompagnement (par exemple : conditions favorables, éléments du modèle, répercussions, éléments de théorisation émergente) et autres informations (notes de lectures, réflexions personnelles, observations ou réflexions après des rencontres avec le milieu accompagné). Au plan organisationnel, les informations contenues dans le journal d’accompagnement peuvent être réparties en trois grandes parties : la démarche d’accompagnement, les résultats attendus et des réflexions relativement à sa démarche professionnelle dans l’accompagnement.

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

La première partie du journal, qui porte sur la démarche d’accompagnement peut comprendre : ce qui a été fait au plan de l’accompagnement (aspect descriptif) ; la perception des réactions des personnes accompagnées (observation, manifestations) ; une analyse et une interprétation des réactions (le pourquoi) ; des ajustements pour une prochaine fois incluant les raisons de ces changements (régulation). La partie du journal qui porte sur les résultats attendus peut comporter une modélisation de la démarche d’accompagnement entreprise : par exemple, les éléments de la démarche d’accompagnement d’un groupe particulier, d’un établissement, d’une organisation ou d’une entreprise particulière (caractéristiques, principes, aspects généraux…). Ils peuvent également présenter les conditions qui facilitent l’accompagnement. Lesquelles ? Pourquoi ? Enfin, ces résultats peuvent contenir une exploration des répercussions auprès des personnes accompagnées ou concernant la personne accompagnatrice, celle qui complète un journal d’accompagnement. Le journal d’accompagnement est complété par la ou les personnes accompagnatrices ; celles qui sont accompagnées peuvent rédiger un journal de réflexion. Dans le projet qui a mené au présent modèle, il n’y a pas eu de journal de réflexion proprement dit, mais des fiches de réflexion qui sont devenues des fiches d’écriture réflexive et même professionnalisante, dans certains cas. Elles auraient pu faire partie d’un journal de réflexion ou d’un cahier de notes réflexives. Enfin, le journal d’accompagnement peut comporter des réflexions relativement à la démarche professionnelle dans l’accompagnement. En ce sens, le journal peut faire état des apprentissages de la personne ; faire état de l’évolution de sa démarche professionnelle ; faire état de ses réflexions relativement à des changements de pratiques ; faire état de ses défis professionnels dans l’accompagnement. Les personnes accompagnatrices qui complètent un journal choisissent les aspects qu’elles veulent plus particulièrement partager ; cependant, une attention particulière est accordée à l’analyse (explication, justification, critique…). Au regard d’un retour réflexif sur sa pratique, le journal suppose l’écriture comme un moyen de communication. Ce moyen permet non seulement de garder des traces des idées, des expériences et des réflexions, mais aussi de revenir sur ce qui s’est passé ou ce qui a été pensé. De plus, diverses expériences nous laissent supposer que le processus d’écriture exige une organisation de la pensée, ce qui exige des prises de conscience et oblige à faire un retour réflexif sur ses actions (Lafortune et Cyr, 2004, p. 250).

Chapitre 7 — Moyens facilitant l’accompagnement et la pratique réflexive

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En définitive, « tenir son journal consiste à rassembler, au jour le jour, dans un cahier (ou de nos jours sur son traitement de textes) ses observations, descriptions de situations vécues, rencontres, lectures, réflexions, analyses, impressions… » (Hess, 1998, p. 3). Dans un tel contexte, « l’écriture est un instrument de création et le journal est en soi une création. Il faut donc qu’il reflète celui qui le crée. Le journal est essentiellement un miroir où l’on se trouve et se retrouve » (Paré, 1984, p. 27). Dans le projet déjà réalisé, des personnes accompagnées ont rempli un journal d’accompagnement lié à leur expérience d’accompagnement. Ce dernier était retourné par courriel à une personne responsable de l’accompagnement. Dans ce cas, le journal est un outil d’accompagnement, de formation et même de recherche, car il permet de consigner des éléments d’observations et des réflexions utiles pour la compréhension de l’évolution du processus de mise en œuvre du changement, mais aussi des éléments de réflexion autant à propos de l’évolution de l’accompagnement réalisé que des éléments sur l’évolution individuelle des personnes à l’intérieur de cette démarche. On peut s’attendre à une grande diversité dans la forme que prendront ces journaux. Il est difficile de faire ressortir une structure fixe qui serait valable et facilement utilisable par des personnes qui ont des façons différentes d’exprimer leur cheminement, leurs expériences, leurs prises de conscience, leurs questionnements. Une lecture des journaux reçus fait toutefois ressortir les aspects suivants. ß Remarques à propos de sa propre expertise, de ses compétences : ß Ses découvertes ; ß Ses prises de conscience. ß Remarques à propos de rencontres, d’entretiens avec son milieu de travail : ß Ses découvertes ; ß Ses prises de conscience. ß Remarques à propos de ses défis et de son plan de travail pour la suite du travail relativement à : ß l’observation de soi ; ß l’observation des personnes accompagnées ; ß des actions à entreprendre ; ß son engagement dans la pratique réflexive.

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

Des rétroactions fournies par courriel permettent de maintenir la communication, mais surtout d’interagir avec les personnes en leur apportant des commentaires, des réflexions qui pourraient aller jusqu’à une remise en question des pratiques.

QUESTIONNEMENT Le questionnement est un processus qui consiste à poser un ensemble organisé de questions. Il devient réflexif s’il mène les personnes accompagnées à réfléchir sur leur pratique pédagogique à propos de leurs stratégies [d’accompagnement] ou sur les processus mis en œuvre dans la réalisation d’une tâche (Lafortune, Martin et Doudin, 2004, p. 11).

Dans une pratique réflexive, le questionnement invite à la prise de parole, à susciter des prises de conscience par rapport aux pratiques, à remettre en question sans susciter trop de résistance tout en n’obligeant pas les personnes à tout accepter. Dans cette perspective, une personne utilise le questionnement pour susciter la réflexion. Elle crée ainsi un déséquilibre qui favorise la remise en question. Le questionnement représente tout en défi, car il a comme rôle et utilité de susciter la réflexion approfondie, de favoriser l’émergence de conflits sociocognitifs, de stimuler les interactions et de mener à des prises de conscience et à une autonomie réflexive-interactive. Ce type d’autonomie se veut une façon d’être où la personne accompagnée ou accompagnatrice réfléchit sur sa pratique, prépare et fait un retour sur ses interventions en se posant des questions ou en consultant les autres dans une perspective d’ajustements de ses pratiques et de confrontation et de remise en questions de ses façons de faire (Lafortune, Martin et Doudin, 2004, p. 15).

Dans l’accompagnement d’une pratique réflexive, le questionnement exige une préparation de questions, mais aussi une réflexion à propos de la valeur de ces questions, qui consiste à anticiper les réponses possibles et à les soumettre aux regards de ses collègues avant de les utiliser. On peut aussi examiner les types de questions posées et s’interroger sur le degré de réflexion exigé par ces questions pour tenter par la suite de les reformuler afin qu’elles exigent un engagement réflexif plus grand. Selon sa pertinence, le questionnement peut favoriser l’engagement réflexif des personnes accompagnées surtout s’il fait émerger des prises de conscience qui alimentent la réflexion et qui mènent à l’action.

Chapitre 7 — Moyens facilitant l’accompagnement et la pratique réflexive

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Le questionnement peut devenir un moyen pour susciter la pratique réflexive. En ce sens, le questionnement lié à une démarche d’accompagnement est grandement lié à la rétroaction fournie sur la planification de l’intervention, sur le déroulement de l’action et sur l’analyse a posteriori de l’action. Cette rétroaction, qu’elle prenne la forme d’un commentaire, d’une communication d’informations, d’un bilan ou d’un questionnement, peut avoir un sens plus large et susciter des réflexions, confrontations ou prises de conscience qui exigent un recadrage, une remise en question ou une régulation dans un but de changement, d’avancement, d’évolution ou d’explication. Elle devient alors réflexive-interactive si elle incite la personne accompagnée à réfléchir sur ses actions, ses productions, ses attitudes ou ses comportements et à envisager une solution pour en discuter avec d’autres afin de recevoir des commentaires critiques ou de répondre à des questions qui suscitent l’approfondissement et l’explicitation (Lafortune et Martin, 2004, p. 15).

AUTOÉVALUATION Dans une pratique réflexive, l’autoévaluation se veut un processus où le praticien ou la praticienne reconnaît ses forces et les aspects à améliorer dans sa façon de préparer, réaliser, analyser et ajuster une intervention ainsi que dans sa façon d’amener les personnes accompagnées à le faire. L’autoévaluation est « une appréciation ou […] réflexion critique sur la valeur d’idées, de travaux, de situations, de démarches, de cheminements, de processus, d’habiletés, de connaissances en termes qualitatifs à partir de critères déterminés par la personne apprenante » (Paquette, 1988, cité dans Lafortune et Deaudelin, 2001, p. 201). Pour que l’autoévaluation prenne un sens et soit susceptible de mener à des changements de pratique, utiliser un journal de réflexion ou d’accompagnement pour clarifier son processus autoévaluatif et en partager des éléments avec des collègues s’avèrent des moyens d’approfondir la pratique réflexive On peut également exploiter la discussion de cas – simulés, réels ou vécus – en groupe, la discussion en dyade sur une intervention et l’analyse d’une démarche ou d’une production […] pour développer le jugement critique nécessaire à l’autoévaluation. Il suffit d’alimenter la réflexion et les échanges par des phrases à compléter ou des questions aussi simples que : « Qu’est-ce que je visais ? Qu’est-ce que j’ai fait dans la pratique ? Pourquoi je l’ai fait ? Quelles conditions ou éléments de contexte ont facilité ou entravé la réalisation de l’intervention ou de la production ? », ou autres questions de même nature (St-Pierre, 2004, p. 37-38).

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

Les personnes peuvent aussi s’autoévaluer avant de s’observer en action, c’est-à-dire qu’elles peuvent indiquer comment elles jugent leurs habiletés à réaliser une tâche, par exemple. Une fois la tâche réalisée, il s’agit de revenir sur son autoévaluation pour vérifier si la perception qu’on avait de soi était juste. Bref, l’autoévaluation est pertinente dans le cadre d’une démarche d’accompagnement parce qu’elle permet de poser un regard sur la façon de se préparer, de passer à l’action ou d’agir dans l’action et de faire la synthèse ou la rétroaction après l’action. En résumé, l’autoévaluation sert à porter un jugement sur le travail que la personne a réalisé. Elle peut être effectuée individuellement, mais elle peut aussi être combinée à une coévaluation afin d’obtenir une rétroaction de ses collègues ou de la personne accompagnatrice. L’autoévaluation peut être faite à partir de fiches à compléter à différents moments au cours de l’intervention ou de l’accompagnement. Ces fiches peuvent comporter des questions portant sur les connaissances construites, les compétences développées, le déroulement d’une intervention, l’anticipation d’une expérience… Les questions utilisées dans de telles fiches peuvent être ouvertes ou comporter des cases à cocher (« pas du tout », « un peu », « moyennement », « beaucoup »). Pour que la réflexion soit la plus complète possible, des justifications peuvent être demandées. L’autoévaluation peut avoir lieu avant l’action ; par exemple, indiquer comment on juge ses habiletés à réaliser une tâche. Une fois la tâche réalisée, revenir sur son autoévaluation permet de comparer ses perceptions initiales et finales.

MODELAGE Faire un modelage consiste à faire comme on voudrait que cela soit fait dans une démarche d’accompagnement, dans le milieu de travail, dans le travail de tous les jours. Le modelage signifie se donner en exemple et non pas donner un exemple (Lafortune et St-Pierre, 1996). Par exemple, si on désire développer la pratique réflexive auprès des personnes accompagnées, il ne s’agit pas seulement d’expliquer ce qu’est une pratique réflexive, mais de faire vivre cette démarche en l’intégrant soi-même à sa manière d’intervenir et en faisant ressortir avec les personnes en quoi tel geste ou action fait partie de la pratique réflexive. Ainsi, le modelage est plus près de la démonstration d’un processus en action que d’une procédure proposant des étapes à suivre. Comme personne accompagnatrice cela signifie que l’on accepte soi-même de changer ses propres pratiques, de démontrer qu’on est soi-même engagé dans une pratique réflexive. Un tel modelage suppose : savoir se remettre en

Chapitre 7 — Moyens facilitant l’accompagnement et la pratique réflexive

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question, s’autoévaluer et s’auto-observer ; savoir mettre les personnes accompagnées dans une telle posture. Demander aux autres de changer, de se remettre en question sans démontrer une ouverture à le faire peut mener à de la frustration ou à un manque de confiance de la part des personnes accompagnées. En résumé, le modelage peut s’avérer un moyen privilégié pour développer des compétences professionnelles lorsqu’il est associé à la mise en œuvre d’un changement axé sur le renouvellement des pratiques. C’est un moyen de démontrer une cohérence entre pensées et actions, entre croyances et pratiques. Cette cohérence est essentielle pour la formation, pour l’accompagnement, pour la crédibilité et pour l’engagement. Le questionnement sert à réfléchir sur sa pratique, à la décrire, à l’analyser, à penser à des ajustements, à fournir une rétroaction, à susciter un engagement et des prises de conscience, à faire penser à des actions… L’autoévaluation sert à se connaître, à comprendre ses actions et à atteindre une autonomie pour réfléchir seul, mais aussi avec d’autres.

SOUTIEN POUR L’ANALYSE DES PRATIQUES Si la description de sa pratique est inhabituelle, l’analyse de celle-ci l’est encore plus. Elle peut se faire seule, mais elle apparaît plus riche et fructueuse si elle est réalisée avec des collègues. L’étape de la description s’avère essentielle, mais celle de l’analyse l’est encore plus si on veut cheminer vers un changement (Lafortune, 2005). Apporter un soutien peut amener les personnes à être attentives aux effets des gestes qu’elles posent et à établir par la suite « des liens entre les gestes posés et les théories qui les sous-tendent » (Lafortune et Deaudelin, 2001, p. 47). La personne accompagnatrice peut également proposer des tâches permettant de soutenir l’analyse des pratiques telles que la description et l’analyse des expériences d’accompagnement et de coconstruction ainsi que la modélisation ou la mise en modèle de sa pratique. Ce soutien est associé à la première et à la dernière composante de la pratique réflexive. Il s’avère essentiel d’encourager des tâches ou situations d’accompagnement au cours desquelles les personnes accompagnées ont à décrire des expériences de travail ou d’accompagnement. Ces descriptions deviennent de plus en plus signifiantes dans la mesure où les personnes se connaissent, le climat de confiance se crée, les contenus théoriques et les processus approfondis dans la démarche d’accompagnement sont réinvestis dans la pratique. Les moments de partage permettent d’enrichir son répertoire de pratiques, de structurer sa pensée pour décrire et expliquer sa pratique,

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

mais aussi de se donner un vocabulaire de mieux en mieux compris et partagé par les collègues. Ces partages favorisent la construction collective, ce qui alimente la créativité, car ils fournissent des idées auxquelles on n’aurait pas pensé et complètent les pensées par les ajouts des collègues. Ils aident pour l’acceptation de certains risques professionnels et la réflexion sur sa pratique, mais aussi sur les pratiques (Lafortune, 2005).

MODÉLISATION Proposer des activités de modélisation, c’est-à-dire des moments où les personnes accompagnées dégagent leur modèle de pratique à partir de modèles existants ou d’éléments de divers modèles, permet aux personnes accompagnées de faire des constats de leurs pratiques et d’en dégager un modèle conceptuel. La modélisation émerge ainsi de constats, qui « prennent la forme d’énoncés mettant en relation un contexte, une action posée et l’effet de cette action » (Lafortune et Deaudelin, 2001, p. 47). Les personnes sont ensuite appelées à mettre ces constats ou énoncés en relation. Cette deuxième étape exige à tout le moins un soutien pour faire ressortir les éléments à mettre en relation, mais aussi pour rétroagir à l’égard des relations proposées qui, si elles ne sont pas interrogées et confrontées, peuvent être minimales et difficiles à comprendre pour une personne autre que celle qui a pensé à ces relations (Lafortune, 2005). La modélisation d’une pratique réflexive se concrétise dans des gestes professionnels comme les suivants : 1 Adopter et susciter une pensée et une posture réflexives en discutant, en questionnant, en confrontant, en remettant en question, etc. 2 Intégrer la pratique réflexive à son modèle d’intervention pédagogique ou professionnelle (observation, réflexion, autoréflexion, action, analyse, régulation). 3 Interroger et s’interroger au sujet des pratiques observées, en réfléchissant et en discutant avec d’autres dans une perspective de changement. 4 Confronter, questionner les croyances (conceptions et convictions) et les pratiques associées au changement. 5 Favoriser et susciter la pratique réflexive et l’engagement des personnes accompagnées.

Chapitre 7 — Moyens facilitant l’accompagnement et la pratique réflexive

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6 Susciter des conflits sociocognitifs ou des dialogues cognitifs, les reconnaître dans l’action et savoir en tirer parti pour nourrir la réflexion et l’action associées au changement. 7 Analyser sa pratique et les pratiques pour les comprendre et cheminer dans le changement. 8 Dégager son propre modèle d’intervention pour agir en conservant une cohérence entre pensées et actions. Le passage de la description et de l’analyse des pratiques à la modélisation n’est pas simple surtout s’il n’a pas été prévu dès le départ. Et il n’est pas facile de le prévoir, car les personnes accompagnées en sont généralement à leur première participation à une pratique réflexive. Elles peuvent difficilement envisager une mise en modèle de leur pratique. Il devient alors difficile de tenter d’avoir une certaine représentation de sa pratique lorsque s’amorce la démarche d’accompagnement. Les personnes accompagnées n’en voient pas toujours l’utilité. Elles perçoivent souvent le temps pris pour faire émerger cette représentation comme une perte de temps. De plus, représenter de façon conceptuelle sa pratique n’est pas simple à réaliser. La personne accompagnatrice peut à la fois faciliter la tâche de la personne accompagnée et la sienne, en accordant des pauses réflexives et en encourageant de façon régulière et dans un langage accessible des rétroactions de même que des synthèses sur le processus en cours d’action.

PARTIE

2

LE MODÈLE D’ACCOMPAGNEMENT PROFESSIONNEL ISSU D’UNE EXPÉRIENCE

CHAPITRE

8

CONDITIONS FAVORISANT L’ACCOMPAGNEMENT D’UN CHANGEMENT

Pour transposer dans d’autres contextes le modèle d’accompagnement d’un changement proposé ici, il s’agit de mettre en place des conditions favorisant la progression des individus et des groupes dans un processus de changement pour assurer un renouvellement durable des pratiques professionnelles. Un préalable aux conditions présentées dans ce chapitre est associé au contexte d’accompagnement décrit dans les chapitres précédents. L’expérience réalisée a montré qu’un changement, surtout s’il est majeur, orienté, prescrit ou s’il comporte des éléments de prescription, nécessite un accompagnement particulier. Pour assurer la bonne marche du changement, les établissements, organisations ou entreprises se posent des questions sur les conditions de sa mise en œuvre jusqu’à son implantation. Dans le cadre du modèle décrit ici, certaines conditions sont liées à l’accompagnement, mais d’autres sont associées à la pratique réflexive, au développement de compétences professionnelles ou à l’exercice d’un leadership. Les conditions présentées ici sont issues d’un processus de théorisation émergente réalisé dans le cadre d’un projet d’accompagnement-rechercheformation de la mise en œuvre d’un changement dans le domaine de l’éducation. Il s’agit donc d’une analyse de contenu des données recueillies (voir le chapitre 3) en utilisant divers instruments de collecte de données.

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

Plusieurs des fiches réflexives complétées demandaient explicitement de décrire les conditions qui facilitent le changement. D’autres conditions sont issues d’autres sources qui portent plus ou moins explicitement sur les conditions comme : des rapports de rencontres d’accompagnement, l’enregistrement des discussions autant lors des rencontres d’accompagnement que des rencontres de l’équipe accompagnatrice de la démarche. Avant d’aborder les conditions proprement dites, il faut présenter le contexte conceptuel lié aux conditions favorisant l’accompagnement d’un changement.

CONTEXTE CONCEPTUEL LIÉ AUX CONDITIONS FAVORISANT L’ACCOMPAGNEMENT D’UN CHANGEMENT Le contexte conceptuel lié aux conditions favorisant l’accompagnement d’un changement apporte des explications à propos de l’accompagnement et du leadership qui lui est associé. Ce contexte est associé à un changement prescrit ou qui comporte des éléments de prescription, axé sur le renouvellement des pratiques professionnelles. Il s’inscrit dans une proposition orientée de modifications à apporter aux actions professionnelles posées dans un contexte de travail. Un tel changement comporte des fondements qui lui donnent une cohérence pour aider les personnes visées à respecter les différentes facettes du changement. L’idée de changement prescrit sous-tend une certaine obligation. Tout en sachant qu’il y a prescription, le travail avec des êtres humains considérés comme étant des professionnels et professionnelles exige une souplesse, même si une certaine rigueur est nécessaire. La souplesse s’oppose à la rigidité et l’équilibre entre la souplesse et la rigueur explique la nécessité d’un accompagnement.

Accompagnement socioconstructiviste Cet accompagnement est une mesure de soutien visant la construction des connaissances des personnes accompagnées en interaction avec les pairs. Ce type d’accompagnement suppose un suivi et une continuité. Dans une optique métacognitive et réflexive, ce type d’accompagnement vise à susciter l’activation des expériences antérieures afin de favoriser la construction des connaissances, le développement des compétences et d’une culture particulière au domaine associé au changement, à susciter des conflits sociocognitifs et à tirer profit de ceux qui émergent des réflexions et discussions, à coconstruire dans l’action, à mettre en

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évidence les croyances (conceptions et convictions) et à profiter des prises de conscience de certaines constructions. Il présuppose une interaction entre la personne accompagnatrice et celles qui sont accompagnées. Les différents rôles qu’elles y tiennent viennent enrichir la démarche qui s’instaure sous l’égide d’un véritable partenariat. Cet accompagnement prend en compte différentes dimensions de l’individu : cognitive, métacognitive, affective et sociale. Sur le plan du contenu, l’accompagnement allie théorie et pratique, réflexion et action, de façon intégrée et complémentaire. L’accompagnement socioconstructiviste suppose la mise en œuvre d’une certaine culture associée aux fondements du changement visé, qui se manifeste à travers cinq composantes : les attitudes, les connaissances, les stratégies, les habiletés et les expériences, mais aussi par le développement et l’exercice de compétences professionnelles associées à l’exercice d’un leadership d’accompagnement (voir Lafortune et Deaudelin, 2001 ; Lafortune et Martin, 2004 ; Lafortune, 2008).

Compétence professionnelle pour l’accompagnement Adopter une posture visant à réaliser une démarche d’accompagnement d’un changement suppose des gestes professionnels et des actions. Certains gestes professionnels permettent de mieux circonscrire cette compétence tels que s’engager dans une démarche d’accompagnement socioconstructiviste ; comprendre les fondements associés au changement ; adopter une posture critique et réflexive à propos du changement ; construire, expliciter et justifier une vision du changement et mobiliser et enrichir sa culture en fonction des fondements du changement (pour des explications, voir Lafortune, 2008).

Leadership d’accompagnement Cet accompagnement exige le développement et l’exercice d’un leadership d’accompagnement qui se veut un processus d’influence des pratiques professionnelles dans le sens des orientations à donner au changement. Il s’exerce et se développe par la réflexion individuelle et collective en interaction avec les personnels visés par le changement. Ce type de leadership suscite des prises de conscience menant à des actions qui sont élaborées, réalisées, analysées, évaluées, ajustées, réinvesties dans une perspective de collaboration professionnelle. Ce processus s’inscrit dans une pratique réflexive où la réflexion et l’analyse des pratiques mènent au développement de son modèle de pratique et de ses compétences professionnelles pour l’accompagnement.

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Démarche d’accompagnement Cet accompagnement et le leadership qui lui est associé mènent à une démarche d’accompagnement inscrite dans un processus dynamique qui incite à l’action et conduit au changement. Il met en œuvre un ensemble de gestes professionnels et d’actions qui sont planifiés et structurés dans une perspective socioconstructiviste, selon une intention ciblée et en fonction d’un partenariat avec un milieu donné. Dans l’action, la démarche comprend des stratégies relatives à l’animation, à la formation et à l’accompagnement et fait appel à différents processus et moyens (coconstruction, modelage, questionnement, interaction, réflexion, synthèse, etc.). Il s’agit d’une mesure d’aide, de soutien et de médiation qui vise le cheminement des individus dans un groupe et le développement de leur autonomie professionnelle en prenant en considération les dimensions cognitive, métacognitive, affective et sociale. La durée et la continuité de la démarche favorisent le changement, donc l’intégration durable de ses fondements, de ses orientations et de ses contenus. De manière globale, la démarche incite aux activités de maillage pour la formation de réseaux basés sur l’entraide, la collaboration professionnelle et la communication du changement. Ce contexte conceptuel lié aux conditions de l’accompagnement d’un changement se traduit par quatre conditions générales, explicitées par des conditions particulières. ß Mettre en place un accompagnement socioconstructiviste. ß Cheminer vers une pratique réflexive. ß Viser le développement de compétences professionnelles pour accompagner un changement. ß Cheminer vers l’exercice d’un leadership d’accompagnement. Ces conditions sont énoncées et explicitées sous l’angle de la personne ou de l’équipe accompagnatrice qui se donne ces conditions ou qui agit dans un contexte où ces conditions peuvent être actualisées.

METTRE EN PLACE UN ACCOMPAGNEMENT SOCIOCONSTRUCTIVISTE L’accompagnement à mettre en place pour appliquer le modèle est largement explicité dans les chapitres précédents. Cet accompagnement s’inscrit dans une perspective socioconstructiviste qui suppose que les

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personnes accompagnées structurent leurs connaissances en interaction avec les pairs, les collègues. Il s’agit ici de reprendre certaines caractéristiques de l’accompagnement socioconstructiviste et d’entrevoir des questions à se poser pour revoir une démarche d’accompagnement en cours d’élaboration.

S’assurer de susciter des interactions dans la démarche d’accompagnement Un accompagnement qui s’inscrit dans une perspective socioconstructiviste suppose des interactions entre les personnes accompagnatrices et accompagnées. Cela veut dire que les rencontres d’accompagnement sont préparées en tenant compte de cette exigence. Lorsqu’il y a des interactions, il peut y avoir des confrontations de points de vue, des remises en question, des changements d’idées ou même de conceptions… La personne ou l’équipe accompagnatrice a donc comme rôle de susciter des conflits sociocognitifs, d’écouter les échanges et de poser des questions pour faire réfléchir et réagir… Susciter des interactions veut également dire que tout ne peut être accepté tel que dit et que tout ne peut être accepté comme étant tout à fait en lien avec les fondements et visées du changement. QUESTIONS

En quoi la rencontre d’accompagnement comporte-t-elle des actions qui suscitent des interactions ? Qu’est-ce qui peut favoriser des remises en question, des confrontations, des conflits sociocognitifs ?

Fournir un accompagnement qui modèle ce que les personnes accompagnées auront à réaliser dans leur propre accompagnement Réaliser l’accompagnement d’un changement, particulièrement s’il se situe dans une perspective socioconstructiviste, ne peut se faire sous la forme d’une transmission de façons de faire et d’explications des fondements et visées du changement. L’expérience à la base du modèle proposé a fait ressortir l’importance du modelage, c’est-à-dire fournir

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un accompagnement qui se donne en modèle aux personnes accompagnées quant à la façon de réaliser leur propre accompagnement. C’est une façon d’assurer une cohérence entre pensées et actions, entre théorie et pratique. Cela veut dire qu’il s’agit de se demander ce que les personnes accompagnées auront à réaliser et de préparer la démarche d’accompagnement en en tenant compte. Cela ne veut pas dire que les personnes accompagnées ont à tout faire exactement de la même façon que ce qu’elles feront dans leur milieu ; ce qui importe, c’est que la posture réflexive-interactive soit présente. QUESTIONS

En quoi l’accompagnement fourni offre-t-il un modelage de ce que les personnes accompagnées auront à réaliser dans leur milieu de travail ? Quelles sont les cohérences et les incohérences entre le modèle visé et les actions posées ?

Fournir un accompagnement qui assure continuité et suivi L’accompagnement d’un changement orienté, prescrit suppose que certaines personnes adhèrent facilement au changement, mais que d’autres ne peuvent l’accepter d’emblée et que d’autres le refusent. Cela veut dire que l’accompagnement de ce changement exige du temps si on veut que les personnes qui ont à le mettre en place et à renouveler leurs pratiques intègrent les fondements du changement, mais aussi comprennent comment l’appliquer. L’expérience réalisée montre que l’accompagnement devrait se réaliser sur une période assez longue, peut-être plus d’une année pour tenir compte des mouvements de personnel et de tous les types d’événements qui se passent dans une année. De plus, quelques heures de rencontre ne peuvent être considérées comme un accompagnement dans l’esprit du présent modèle. On peut penser à des journées (6 à 8) réparties sur une année et à une rencontre de 1 à 2 jours pour amorcer la démarche d’accompagnement. De plus, entre les rencontres, différentes formes de suivi sont à prévoir afin de soutenir les actions posées ou à poser, de favoriser l’engagement et de fournir des rétroactions pour des ajustements.

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QUESTIONS

Qu’est-ce qui est prévu dans la démarche d’accompagnement pour assurer continuité et suivi ? En quoi ce qui est prévu assure-t-il la mise en œuvre du changement et le respect de l’intégration du changement par les personnes accompagnées ?

Préparer des rencontres d’accompagnement qui comprennent des anticipations Dans le projet réalisé à la base du modèle proposé, un élément important est ressorti en lien avec la préparation des rencontres. Au-delà du fait de prévoir le déroulement d’une rencontre, de préparer le matériel nécessaire, de se préparer au plan du contenu, etc., il ressort l’importance d’anticiper les réactions des personnes accompagnées. Cette étape dans la préparation semble être trop souvent négligée, car le temps manque ou l’on pense que dans l’action, l’expérience fera qu’il sera simple de s’ajuster. Dans la mise en œuvre d’un changement majeur, qui en est aussi un pour les personnes accompagnatrices, il ne semble pas que ce soit toujours le cas. Il devient donc important d’anticiper des réponses possibles aux questions que l’on se prépare à poser, d’anticiper les réactions aux activités, tâches et situations qui seront proposées, de prévoir des ajustements selon le temps disponible par rapport au temps qu’exigera la réalisation de ce qui est proposé et surtout, de prévoir les deuils à faire quant aux activités, tâches et situations préparées qui ne pourront être réalisées. Tenter de tout faire ce qui a été préparé peut créer une surcharge, une démotivation et même une résistance au changement. QUESTIONS

Quelles sont les réactions anticipées des personnes accompagnées ? Quels ajustements et « deuils » sont prévus pour la rencontre d’accompagnement ?

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Intégrer l’animation et la formation à l’accompagnement Dans le modèle proposé, l’accompagnement suppose qu’il y a de l’animation et de la formation. En ce sens, accompagnement et formation ne peuvent être dissociés. Cela veut dire que l’on ne peut dire qu’une rencontre en est une d’accompagnement parce que les personnes accompagnées sont placées en situation de réflexion et qu’une autre en est une de formation parce qu’il y a des présentations relativement conceptuelles ou théoriques. Le fait que la formation soit intégrée à l’accompagnement suppose que des éléments de contenu théorique sont prévus pour la rencontre et qu’ils sont utilisés au moment opportun, soit lors des moments de réflexion ou de synthèse pour faire des liens, soit lorsque des questions sont posées en rapport avec des éléments théoriques. Cela n’exclut pas des présentations utilisant la technologie Power Point, mais si c’est le cas, ces présentations sont préparées pour activer les connaissances antérieures, pour faire réfléchir, pour susciter la discussion tout en apportant des éléments conceptuels. Pour y arriver, cela exige des lectures préalables et une culture professionnelle associée au contenu du changement à mettre en œuvre. Dans le projet réalisé, la recherche a été intégrée à l’accompagnement-formation. Le volet de recherche assure une rigueur à la démarche, aide à son évaluation et permet de reconnaître les réinvestissements. Cependant, on peut entrevoir une démarche d’accompagnement sans qu’un volet de recherche formel y soit associé. Mais considérer le fait de garder des traces apparaît incontournable. QUESTIONS

Quels éléments de formation prévoit-on intégrer à la démarche d’accompagnement ? Comment les éléments de formation seront-ils intégrés à la démarche d’accompagnement ? Qu’est-ce qui est prévu pour se former ou s’autoformer en lien avec les contenus théoriques à aborder ?

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Considérer l’accompagnement dans une formation continue Le type d’accompagnement préconisé par le modèle transforme la perspective de la formation continue, qui passe de formations ponctuelles (moments où une expertise particulière est apportée pour un temps défini et relativement court, de quelques heures à quelques journées), à un accompagnement qui se veut un soutien à plus ou moins long terme. Il s’agit d’accompagner pendant une période assez longue pour qu’une intégration des changements et des nouvelles façons de faire soit perceptible : plusieurs jours de rencontres répartis sur plus d’une année, au moins deux jours pour amorcer la démarche, suivis de rencontres d’une ou de demijournées et d’une journée ou plus pour conclure la séquence d’accompagnement en effectuant un bilan. L’accompagnement comprend des aspects relatifs à la formation des personnels, mais assure aussi leur soutien, leur suivi et leur progression dans le processus de changement. Cela suppose trouver des moyens pour que l’accompagnement se transforme en une culture de formation continue où les personnes accompagnées choisissent les éléments de formation qui augmentent leur expertise en fonction de leurs compétences et de celles à développer. Cela peut se faire par des cours universitaires, par des formations offertes par des consultants et consultantes, par des congrès ou colloques scientifiques ou professionnels, par des rencontres de discussions entre collègues, par des lectures… QUESTIONS

Dans la démarche d’accompagnement envisagée, qu’est-ce qui est prévu pour favoriser une culture de formation continue ? Dans l’accompagnement, comment l’importance de développer une culture de formation continue est-elle démontrée ?

Soutenir les déséquilibres (au plan cognitif) sécurisants (au plan affectif) Un changement suppose des remises en question, ce qui peut susciter des déséquilibres au plan cognitif ou des craintes. Partir de ce qui se fait déjà dans les milieux accompagnés aide à soutenir les personnes qui vivent des moments d’insécurité et encourage les initiatives particulières des individus et des groupes. Cela suppose de mettre les personnes accompagnées

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en position de poursuivre leur démarche tout en favorisant le processus de changement ; mais aussi de susciter des déséquilibres (au plan cognitif) sécurisants (au plan affectif). Cela peut susciter des confrontations entre les diverses convictions. Malgré le fait que certaines résistances peuvent se manifester, on ne peut sous-estimer l’expertise des personnels accompagnés ni leur intérêt pour le changement surtout si ce dernier vise une amélioration des pratiques, une meilleure organisation du travail ou qu’il améliore le rendement. Les personnels sont généralement prêts à changer, s’ils comprennent le sens du changement ou s’ils peuvent mesurer les effets positifs que ce dernier aura sur leur environnement de travail. QUESTIONS

Quels moyens sont utilisés pour susciter et soutenir les déséquilibres au plan cognitif ? Qu’est-ce qui est fait pour respecter la dimension affective tout en suscitant des déséquilibres au plan cognitif ?

Faire des liens entre la théorie et la pratique Approfondir différents aspects théoriques et faire des liens entre la théorie et la pratique en sachant que les personnes formées à l’accompagnement aiment bien avoir des outils qu’elles peuvent réinvestir rapidement et directement dans leur travail est un défi de taille. Cependant, se préoccuper de ce lien donne non seulement un sens à la théorie, mais permet aussi de la nourrir en la confrontant à la pratique. Un changement majeur a souvent des effets importants dans l’organisation du travail et des ajustements sont à prévoir entre ce qui est proposé et ce qui peut se faire compte tenu du contexte dans lequel le changement se déroule. Les ajustements ne se font pas toujours à sens unique et la théorie comme la pratique s’influencent mutuellement pour le renouvellement des pratiques associées au changement. Cette relation croisée favorise l’adhésion et permet la construction d’une vision partagée du changement. QUESTIONS

De quelle manière a-t-on prévu de faire des liens entre la théorie et la pratique ?

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Comment la personne accompagnatrice se formera-t-elle au plan conceptuel ou théorique afin de faire des liens avec la pratique au moment opportun ?

Garder des traces L’accompagnement exige de garder des traces, mais selon la place accordée à la recherche, le type et la quantité de traces peuvent varier considérablement. Voici quelques exemples : rapport écrit à la suite des interventions, prise de notes pendant ou après l’intervention, enregistrement et écoute pour prise de notes élaborées afin d’analyser les effets de l’accompagnement et ainsi, faire des retours pertinents avec les personnes accompagnées. Les fiches ou notes consignées par les personnes peuvent être compilées avant d’être retournées aux personnes accompagnées. Ces dernières peuvent ainsi suivre leur propre cheminement. Garder des traces et choisir, de façon concertée, les traces à conserver permet de suivre l’évolution du groupe, de s’en servir pour évoluer soi-même et ajuster son intervention, mais aussi pour refléter au groupe sa propre évolution. En ce sens, si les personnes accompagnées, après un an ou deux de travail, en viennent à dire « on faisait déjà cela avant » ou « cela n’a rien changé » ; en tant que personne accompagnatrice, on peut montrer le cheminement à partir d’exemples « concrets » qui proviennent des traces consignées par les individus ou le groupe. QUESTIONS

Comment procédera-t-on pour garder des traces de la démarche d’accompagnement et de l’évolution des personnes accompagnatrices et accompagnées ? Comment ces traces seront-elles utilisées pour susciter des prises de conscience chez les personnes accompagnatrices et accompagnées quant à leur développement professionnel et au renouvellement de leurs pratiques ?

Considérer l’évaluation du processus de changement Un processus de changement et son accompagnement supposent d’avoir prévu une certaine forme d’évaluation. Cela peut être l’évaluation de la démarche d’accompagnement, du degré de mise en œuvre du changement,

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de l’évolution des compétences professionnelles ou de l’évolution du renouvellement des pratiques. Cependant, pour faire une évaluation, il est important de garder des traces tout au long de la démarche. Le type de traces dépend des visées de l’évaluation. Néanmoins, garder des traces sans porter un regard analytique sur ces traces n’est pas très utile. C’est pourquoi, les traces peuvent être examinées dans une perspective de retour sur les actions, mais aussi en vue de réaliser une analyse qui peut prendre la forme d’une recherche ou de pouvoir témoigner de la démarche (faire un rapport). Le fait de « documenter » l’action réalisée favorise une continuité des effets de l’accompagnement au-delà de la collecte de traces ou de données et fait en sorte que les outils de formation peuvent être utilisés comme instruments de recherche. Cette façon d’envisager l’évaluation facilite la conceptualisation et la modélisation d’une démarche d’accompagnement. QUESTIONS

Que veut-on évaluer dans la démarche d’accompagnement ? Quelles actions sont prévues pour évaluer certains aspects de la démarche d’accompagnement ?

Inscrire la collaboration professionnelle dans la démarche d’accompagnement Inscrire la collaboration professionnelle dans la démarche d’accompagnement signifie que chaque fois que c’est possible on fera en sorte de travailler en collaboration avec ses collègues, par exemple pour préparer les rencontres, les animer, discuter de cette planification, demander à des collègues de travailler avec soi ou de rétroagir à la préparation, à l’animation, partager ses interrogations avec eux, rétroagir aux propositions des autres, etc. Le travail en dyade ou en équipe de collègues poursuit plusieurs buts : assurer une continuité ; travailler en complémentarité ; profiter d’une culture élargie par les connaissances antérieures des personnes ; se soutenir mutuellement (dimension affective) ; s’encourager dans les moments difficiles ; utiliser un regard externe pour des analyses, des commentaires, des critiques ; partager des tâches ; aider à la discussion pour les choix de contenus, les manières d’intervenir, mais aussi les actions

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et les stratégies à mettre de l’avant. Dans la collaboration professionnelle, il y a l’idée de collaborer comme personne accompagnatrice, mais aussi celle d’amener les personnes accompagnées à collaborer. QUESTIONS

Quelles stratégies sont envisagées pour favoriser la collaboration professionnelle ? Comment formera-t-on à accompagner de sorte que la collaboration professionnelle fasse partie des priorités ?

CHEMINER VERS UNE PRATIQUE RÉFLEXIVE La condition intitulée « cheminer vers une pratique réflexive » signifie que l’accompagnement d’un changement lié à un renouvellement des pratiques suppose une pratique réflexive qui ne peut être imposée. Cette pratique réflexive peut graduellement être mise en action. Le degré d’engagement peut varier d’un individu à l’autre, d’un groupe à l’autre. Selon l’expérience réalisée, la profondeur de l’engagement n’a pas nécessairement besoin d’être de la même intensité pour les personnes accompagnatrices et accompagnées. Avec une amorce de pratique réflexive, des changements dans les pratiques peuvent être perçus. Cependant, l’utilisation de divers moyens aide à découvrir les apports d’une pratique réflexive soutenue. Cela invite à un plus grand engagement des personnels visés par le changement. Pour changer, les personnes accompagnées s’engagent dans une réflexion et une analyse de leurs pratiques. L’ensemble du modèle repose sur cette pratique réflexive qui favorise une mise à distance et un regard critique sur son propre fonctionnement, mais aussi une analyse tant individuelle que collective des actions et décisions prises en cours d’action. Ce regard critique suppose des prises de conscience de ses cohérences et incohérences, de ses pensées et actions, de ses croyances et pratiques. La pratique réflexive comporte trois composantes : une composante de réflexion et d’analyse de sa pratique, une autre liée au passage à l’action et enfin, une dernière faisant référence à la construction de son modèle de pratique en évolution (voir également Lafortune et Deaudelin, 2001, pour les composantes 1 et 3).

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Considérer la pratique réflexive comme une composante de l’accompagnement Le cheminement vers la pratique réflexive signifie que la direction ou l’équipe accompagnatrice donne une orientation à l’accompagnement où la pratique réflexive est pensée comme une visée à plus ou moins long terme. Cela veut dire que les personnes accompagnées perçoivent que, dans un premier temps, leurs pratiques sont partagées et soumises à la discussion. Ce n’est que dans une autre étape que les pratiques sont des objets de réflexion et qu’elles sont analysées autant individuellement que collectivement. Cette étape sera réalisée au moment opportun, choisi par les personnes accompagnatrices, mais aussi avec les personnes accompagnées. QUESTIONS

En quoi les personnes accompagnées peuvent-elles comprendre que leurs pratiques font partie intégrante de la démarche d’accompagnement ? Qu’est-ce qui est fait pour reconnaître le moment où les personnes accompagnées sont prêtes à réfléchir à leurs pratiques et à les analyser collectivement ?

Réfléchir sur sa pratique et cheminer vers son analyse Réfléchir sur sa pratique professionnelle nécessite que l’on réserve des moments où les personnes accompagnées se posent des questions sur ce qu’elles font pour mettre en œuvre le changement ; elles peuvent aussi se faire poser des questions par les personnes accompagnatrices. Cette réflexion pour mener à un changement exige une analyse autant individuelle que collective qui rend nécessaire d’expliquer et de justifier les choix de pratiques. Cela veut dire qu’elles peuvent être remises en question. On en est alors à un niveau d’approfondissement des pratiques, mais aussi d’acceptation qu’elles ne répondent pas nécessairement aux exigences du changement. Cela explique que la condition minimale consiste à réfléchir sur sa pratique, mais que l’analyse de sa pratique est un processus complexe et évolutif qui exige un bon degré d’acceptation du changement. L’analyse ne peut donc venir qu’en cours d’accompagnement et seulement s’il a été possible de développer un climat d’échange propice aux interactions et aux remises en question.

Chapitre 8 — Conditions favorisant l’accompagnement d’un changement

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QUESTIONS

Quelles actions sont prévues pour susciter la réflexion sur sa pratique ? Quels moyens sont envisagés pour faire cheminer vers l’analyse de sa pratique ?

S’assurer d’un passage à l’action Une des composantes de la pratique réflexive suppose un passage à l’action, c’est-à-dire tenter des expériences qui reflètent ce qui ressort des réflexions et analyses des pratiques. Sans ce passage à l’action, il ne peut y avoir de réflexions et de discussions à propos des modifications dans les pratiques, des réussites et des difficultés afin de faire des ajustements pour d’autres situations. Un tel passage à l’action est suivi de partages d’expériences pour des interactions et rétroactions. Encore ici, la création d’un climat de respect mutuel est essentielle pour que la démarche se poursuive au-delà des rencontres initiées par les personnes accompagnatrices, pour que se développe l’autonomie des personnes accompagnées, qui décident alors d’organiser elles-mêmes des rencontres afin de poursuivre les échanges. QUESTIONS

Comment le passage à l’action est-il préparé ? Qu’est-ce qui est prévu pour initier les retours sur les expériences et la poursuite des échanges au-delà des rencontres prévues par la démarche d’accompagnement ?

Faire cheminer vers la modélisation de sa pratique en évolution La modélisation de sa pratique en évolution n’est pas en soi une exigence au renouvellement des pratiques pour la mise en œuvre d’un changement. Cependant, il est nécessaire de garder à l’esprit que l’on peut aider à cheminer vers cette modélisation. Cela veut dire que la direction ou les personnes accompagnatrices peuvent elles-mêmes présenter leur modèle

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de pratique, rendre explicite ce qui les anime dans leur façon de procéder et ce qui leur fait apprécier les changements à mettre en œuvre. Elles montrent alors un degré de conceptualisation et aident les personnes accompagnées à structurer leur pensée. Même si toutes les personnes accompagnées ne présentent pas explicitement leur modèle de pratique, certaines peuvent y arriver au cours de la démarche d’accompagnement et peuvent en aider d’autres à poser la base de leur propre modèle. QUESTIONS

Quelles stratégies sont utilisées pour montrer qu’il est possible d’expliciter son propre modèle de pratique ? Quels moyens de réflexion sont envisagés pour montrer que l’explicitation de son modèle de pratique aide à se connaître au plan professionnel ?

Envisager le modelage d’une pratique réflexive Accompagner une pratique réflexive dans l’accompagnement d’un changement suppose des gestes professionnels qui démontrent une cohérence entre ce qui est demandé pour réfléchir sur sa pratique et l’analyser et ce que les personnes accompagnatrices réalisent à propos de leur propre pratique. C’est ce que l’on peut appeler le modelage d’une pratique réflexive, c’est-à-dire se donner en exemple en tant que personne qui exerce une pratique réflexive. Dans l’accompagnement d’un changement qui fait cheminer vers une pratique réflexive, il est difficile de demander aux personnes accompagnées un engagement dans une pratique réflexive sans un même engagement de la part des personnes accompagnatrices. QUESTIONS

En quoi y a-t-il cohérence entre ce qui est demandé relativement à la pratique réflexive et ce qui est réalisé par la direction ou l’équipe accompagnatrice ? Qu’est-ce qui permet de reconnaître le degré d’engagement dans la pratique réflexive ?

Chapitre 8 — Conditions favorisant l’accompagnement d’un changement

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VISER LE DÉVELOPPEMENT DE COMPÉTENCES PROFESSIONNELLES POUR L’ACCOMPAGNEMENT D’UN CHANGEMENT Dans la mise en œuvre d’un changement, on peut être tenté de penser que les personnes choisies pour former une équipe d’accompagnement d’un changement ont préalablement développé des compétences professionnelles pour le faire. Dans la réalité, l’expérience a montré que le degré de compétences développées est très variable. De plus, plusieurs personnes accompagnatrices se rendent compte elles-mêmes qu’elles peuvent grandement s’améliorer. Cela fait en sorte que les personnes accompagnatrices cheminent en même temps que les personnes accompagnées.

Faire réfléchir aux compétences professionnelles à développer pour accompagner un changement Lors de la réalisation du projet au cours duquel a émergé le modèle proposé dans ce livre, les personnes accompagnées (qui sont aussi accompagnatrices dans leur milieu) ont été amenées à réfléchir aux compétences qu’elles possédaient et à celles qu’elles pourraient développer pour accompagner le changement. C’est ce travail collectif qui a mené à la conception d’un référentiel de compétences professionnelles pour l’accompagnement d’un changement (Lafortune, 2008). Ce travail pourrait être réalisé par toute équipe qui s’engage dans une démarche d’accompagnement des personnels d’une institution, organisation ou entreprise. Garder un premier travail et y revenir en cours de démarche aident à prendre conscience du cheminement parcouru et à le poursuivre. QUESTIONS

Quels moyens sont prévus pour faire réfléchir aux compétences professionnelles à développer pour accompagner un changement ? Quelles stratégies sont envisagées pour faire réfléchir aux modifications apportées à ces compétences à mesure qu’il y a reconnaissance de la complexité de la réalisation de la démarche d’accompagnement ?

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

Faire développer des compétences professionnelles pour l’accompagnement chez les personnels engagés dans le processus de changement afin qu’ils interviennent à leur tour auprès d’autres personnels dans l’organisation Dans le même projet, huit compétences professionnelles pour l’accompagnement ont été jugées nécessaires pour accompagner le changement. Ces compétences à développer sont : 1) adopter une posture visant à réaliser une démarche d’accompagnement d’un changement ; 2) modeler une pratique réflexive dans l’accompagnement d’un changement ; 3) prendre en compte la dimension affective dans l’accompagnement d’un changement ; 4) maintenir une communication réflexive-interactive dans la préparation et l’animation du processus de changement ; 5) mettre en place une collaboration professionnelle pour cheminer dans un processus de changement ; 6) mettre en place des projets d’action pour accompagner un processus de changement ; 7) mettre à profit des pratiques évaluatives dans un processus de changement, et 8) exercer un jugement professionnel en agissant de manière éthique et critique. Comme ces compétences s’exercent en situation, en interaction avec d’autres et en fonction d’un milieu qui a une culture professionnelle et des habitudes, il devient important de créer des situations qui facilitent le développement de telles compétences. Il est vrai que, dans l’intervention, elles se manifestent de manière intégrée et complémentaire compte tenu du modèle de pratique de la personne accompagnatrice, tout en considérant les adaptations que cette personne apporte à son propre modèle selon son interprétation des compétences à développer. Cependant, des discussions peuvent aider à se rendre compte des interprétations qui vont dans le sens des fondements du changement et des autres qui font bifurquer la démarche et qui éloigne de l’esprit du changement. QUESTIONS

Qu’est-ce qui est prévu pour aider à comprendre les compétences professionnelles à développer pour accompagner le changement ? Quelles actions sont planifiées pour faire réfléchir aux compétences que des personnes accompagnées pensent avoir développées sans que ce soit nécessairement le cas ?

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Comme personne accompagnatrice, développer une posture qui démontre qu’on est engagé dans un cheminement visant à développer des compétences professionnelles pour l’accompagnement d’un changement Le développement de compétences professionnelles pour l’accompagnement d’un changement suppose l’adoption d’une posture que la personne accompagnatrice démontre par des gestes et des actions professionnelles associés aux différentes compétences. Ces gestes et actions professionnelles sont intégrés à la démarche d’accompagnement et les compétences constituent un système où réflexions et interactions influencent le contexte d’intervention qui vise à actualiser le changement. QUESTIONS

Que font la ou les personnes accompagnatrices pour démontrer leur propre posture de développement de compétences professionnelles ? Comment la ou les personnes accompagnatrices démontrent-elles qu’elles acceptent les remises en question, qu’elles tolèrent les ambiguïtés et qu’elles prennent des risques ?

CHEMINER VERS L’EXERCICE D’UN LEADERSHIP D’ACCOMPAGNEMENT Comme on l’a rappelé à différentes reprises dans les chapitres précédents, la mise en œuvre d’un changement majeur, surtout s’il est prescrit et orienté, ne peut se réaliser sans une forme d’accompagnement, mais aussi sans l’exercice d’un leadership particulier. Quel que soit le milieu de travail, ce sont des êtres humains qui sont visés par le changement et il n’est pas possible d’imposer des actions et gestes professionnels. Cependant, il peut y avoir un cheminement vers le changement ; cela exige le développement d’un processus d’influence, qui se veut un leadership et qui suppose de : susciter le passage à l’action dans le sens du changement ; s’assurer d’une cohésion, cohérence et compréhension partagée du changement ; développer une culture professionnelle associée à celle du changement ; viser l’établissement d’un partenariat ; encourager

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

la formation de communautés d’apprentissage et de pratiques ou la formation de réseaux. Finalement, il s’agit de prendre en compte la dimension affective dans le changement.

Susciter le passage à l’action dans le sens du changement Dans l’exercice d’un leadership pour la mise en œuvre d’un changement, c’est particulièrement le passage à l’action qui est important. On ne pourrait parler de l’implantation d’un changement si les personnes accompagnées discutent du changement, comprennent les fondements du changement, en voient la pertinence, mais ne posent pas des actions qui respectent les visées du changement. Ce passage à l’action peut, par exemple, se concrétiser par l’élaboration de projets d’action par les personnes accompagnatrices. Ces projets d’action supposent une démarche où l’on retrouverait des aspects tels que 1) un projet pensé collectivement, 2) une mise en commun des compétences et leur reconnaissance collective, 3) une structure souple et rigoureuse du projet, 4) des actions à réaliser, 5) des caractéristiques pour une continuité et un étalement dans le temps, 6) des moyens d’assurer un suivi, 7) un processus d’analyse, 8) des ajustements possibles et prévus, 9) des moyens de garder des traces. QUESTIONS

Quels moyens seront en mesure de susciter le passage à l’action ? Quels types de projets d’action peuvent être acceptables tout en respectant les orientations du changement ?

S’assurer d’une cohésion, d’une cohérence et d’une compréhension partagée du changement Il s’avère difficile de mettre en œuvre un changement tant qu’il n’a pas été confronté aux réactions du milieu accompagné et aux diverses réalités que vivent les personnes accompagnées. L’accompagnement peut prévenir certaines dérives ou interprétations diverses, mais il peut être difficile d’éviter toutes les confusions. Cependant, si l’accompagnement est réalisé dans le sens du modèle proposé, il permet d’assurer une cohésion dans le discours utilisé pour parler du changement et peut contribuer à la

Chapitre 8 — Conditions favorisant l’accompagnement d’un changement

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construction d’une vision partagée du changement puisque les personnels s’approprient et utilisent le même vocabulaire pour parler de ce changement et qu’ils examinent, discutent et analysent les mêmes concepts. Pour chercher à établir une cohérence entre ce que le changement propose et ce qui se fait dans le milieu de travail accompagné, il importe d’amener les personnes à partager une vision de ce changement. Cela ne veut pas dire qu’elles peuvent interpréter ce changement comme elles le veulent, mais plutôt qu’elles vont y réfléchir collectivement pour s’en donner une compréhension partagée, pour le confronter aux pratiques en place afin de tendre vers une cohérence entre croyances et pratiques, pensées et actions, tout en considérant les fondements du changement. Pour favoriser cette cohérence, l’accompagnement du changement suppose une compréhension exhaustive des idées et des grands concepts qui sous-tendent ses visées et ses orientations ainsi que les moyens à déployer pour le mettre en œuvre. Si la cohérence totale n’est pas toujours possible, elle peut cependant être associée à une prise de conscience des incohérences. Cela fait en sorte que ce que l’on désire peut être ajusté à la réalité. Le souhait peut être cohérent, mais la réalité peut exiger des ajustements et mener à quelques incohérences inévitables, mais qui peuvent être explicitées. Si une évaluation est prévue, s’assurer que le processus d’évaluation se fasse dans le même esprit que celui qui est prôné dans le processus de changement. Cette perspective permet de connaître les répercussions, mais surtout de les comprendre pour pouvoir adapter ou transposer la démarche d’accompagnement à d’autres contextes (Lafortune, 2007a). QUESTIONS

Comment prévoit-on discuter des différentes conceptions du changement ? Qu’est-ce qui est prévu pour développer une compréhension partagée des orientations du changement ?

Développer une culture professionnelle associée à celle du changement Le développement d’une culture professionnelle associée à celle du changement exige de savoir de quoi on parle, de comprendre les fondements et les visées du changement, d’avoir une longueur d’avance sur les

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

personnes accompagnées, d’avoir lu sur le sujet, d’en avoir discuté avec d’autres… pour approfondir et enrichir la compréhension qu’on se fait du changement. Cela signifie aller plus loin que les discussions qui se limitent au contenu théorique connu des personnes accompagnées. Pour arriver à développer une culture professionnelle associée à celle du changement, la formation pour l’accompagnement et l’accompagnement d’un changement se font sur une base volontaire et pendant une période de temps assez longue pour que les personnes accompagnatrices formées intègrent le sens du changement préconisé, réfléchissent à leurs pratiques dans une perspective de changement, mettent en action des changements de leurs pratiques et analysent les répercussions de leurs actions. Il s’avère trop souvent que les personnes formées pour l’accompagnement ne travaillent pas dans des conditions favorables pour soutenir, guider et former un groupe de personnes pendant une période de temps assez longue et par des rencontres qui permettent la réflexion, la confrontation, l’action et l’analyse collective de ces actions. Cela n’aide pas à développer une culture professionnelle approfondie qui permet d’intégrer les fondements du changement visé. Le respect du temps exigé par le processus de changement de tout professionnel ou de toute professionnelle est nécessaire, car avant de penser au changement des autres, les personnes accompagnatrices commencent par changer leurs propres façons de faire et de penser. QUESTIONS

Quels moyens sont mis en place pour développer une culture professionnelle associée à celle du changement ? Comment peut-on accorder le temps exigé pour le renouvellement des pratiques autant pour les personnes accompagnatrices que celles accompagnées ?

Viser l’établissement d’un partenariat L’organisation (ministère, institution, entreprise…) peut travailler en partenariat avec les personnes ou groupes qui apportent une expertise de recherche et de formation tels qu’une université, une firme de consultation ou de formation ou d’autres organismes qui sont associés au projet d’accompagnement, mais ce qu’il est important de considérer ce n’est pas tant le partenariat entre les organisations ou institutions, c’est plutôt le fait que les personnes accompagnatrices et accompagnées sont des partenaires

Chapitre 8 — Conditions favorisant l’accompagnement d’un changement

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possédant des expertises différentes. En ce sens, les personnes accompagnatrices peuvent apprendre de celles qui sont accompagnées. Cela suppose l’exercice d’un leadership qui mise sur la collaboration plutôt que sur la hiérarchie. Il est vrai que le début de l’élaboration d’un projet peut se faire entre personnes responsables qui peuvent se sentir des partenaires, mais le projet devrait comporter assez de souplesse et d’éléments pouvant être modifiés et ajustés pour que les personnes accompagnées (qui peuvent aussi être accompagnatrices dans leur milieu) se sentent petit à petit partenaires du projet et qu’elles finissent par le faire leur. QUESTIONS

Comment la perspective d’un partenariat à développer est-elle préparée ? Qu’est-ce qu’il est possible de modifier dans le projet pour permettre des ajustements à partir des propositions des personnes accompagnées ?

Encourager la formation de communautés d’apprentissage et de pratique ou la formation de réseaux Les actions liées au modèle d’accompagnement peuvent conduire à l’établissement de communautés d’apprentissage ou de pratique ou à la formation de réseaux. Pour inciter la formation de communautés ou de réseaux, il importe d’encourager des activités de maillage (utilisation de productions développées dans un groupe en les adaptant à une autre réalité, partage d’informations, d’outils, d’expertises, de ressources, etc.). À cet effet, un site Internet peut servir de relais pour informer et communiquer avec les personnels accompagnés. Il permet la diffusion du matériel d’accompagnement (outils, moyens, situations), des situations d’accompagnement associées au changement. On peut y faire transiter des documents, effectuer des suivis auprès de l’ensemble des personnes ou des groupes qui font partie du réseau en permettant à la communauté élargie d’avoir accès aux informations archivées sur le site et d’en tirer profit. Elle pourrait également exploiter davantage les possibilités de l’outil en l’utilisant à des fins autres que celle de l’archivage. Tous les aspects liés à la collaboration professionnelle, à la dimension réflexiveinteractive, aux analyses collectives, aux conflits sociocognitifs, aux échanges, discussions et partages… sont autant d’aspects abordés tout

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

au long de la présentation du modèle qui peuvent mener à la création de communautés d’apprentissage et de pratique ou à la formation de réseaux. QUESTIONS

Comment sera-t-il possible de reconnaître la formation de communautés d’apprentissage et de pratique ? Si un site Internet est prévu, que peut-il comporter pour contribuer à la formation de réseaux ? Qu’est-ce qui est réaliste ? Qu’est-ce qui peut intéresser les personnes accompagnées ?

Prendre en compte la dimension affective dans le changement Tout changement provoque des réactions affectives chez les personnes visées par le changement. Certaines réactions peuvent être plutôt positives comme l’enthousiasme et le plaisir. On oublie souvent de les reconnaître. D’autres peuvent susciter le retrait, la frustration, la résistance. Ces réactions peuvent provenir de craintes de l’inconnu, d’un manque de tolérance à l’incertitude, à l’ambiguïté, d’un sentiment d’incompétence ou tout simplement d’un manque de connaissances relatives au changement. Nier que des réactions affectives émergent lors de la mise en œuvre d’un changement, c’est nier que ce sont des êtres humains qui l’appliquent. En ce sens, il importe de tenir compte de ces réactions, de pouvoir nommer ces réactions affectives, les manifestations, les causes et conséquences de ces réactions et d’entrevoir des solutions possibles. QUESTIONS

Qu’est-ce qui est prévu pour prendre en compte la dimension affective dans le changement ? Quelles réactions peut-on prévoir en lien avec la dimension affective ?

ß ß ß En conclusion, il importe de rappeler que la mise en place de certaines conditions est essentielle à l’optimisation du modèle. Si les organisations ne se donnent pas les conditions nécessaires à l’accompagnement d’un

Chapitre 8 — Conditions favorisant l’accompagnement d’un changement

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changement, il serait illusoire de croire à l’application du modèle explicité dans le chapitre 9 et à l’atteinte des répercussions décrites dans le chapitre 10. Une organisation qui voudrait s’inspirer du modèle en ne considérant pas que l’accompagnement se fait dans la durée et la continuité ne pourrait pas s’attendre aux mêmes résultats que ceux qui ont pu être observés au cours du projet qui a été à l’origine de ce modèle d’accompagnement professionnel du changement. Même si le terme « accompagnement » est relativement nouveau dans le sens d’accompagnement professionnel, il est déjà galvaudé. Ainsi, un milieu qui planifierait deux ou trois rencontres ou des journées de formation ponctuelles n’irait pas dans le sens du modèle d’accompagnement tel qu’il a été décrit dans ce livre ainsi que dans Compétences professionnelles pour l’accompagnement d’un changement. Un référentiel (Lafortune, 2008). Rappelons que l’accompagnement socioconstructiviste d’un changement comportant des éléments de prescription et axé sur le renouvellement des pratiques professionnelles suppose la construction des connaissances des personnes accompagnées en interaction avec les pairs. Dans une optique métacognitive et réflexive, ce type d’accompagnement vise à susciter l’activation des expériences antérieures afin de favoriser la construction des connaissances, le développement des compétences et d’une culture particulière au domaine associé au changement, à susciter des conflits sociocognitifs et à profiter de ceux qui émergent des réflexions et discussions, à coconstruire dans l’action, à mettre en évidence les croyances (conceptions et convictions) et à tirer profit des prises de conscience de certaines constructions. Les différents rôles enrichissent la démarche qui vise à s’instaurer sous l’égide d’un véritable partenariat. L’accompagnement allie théorie et pratique, réflexion et action, de façon intégrée et complémentaire. L’accompagnement socioconstructiviste suppose la mise en œuvre d’une certaine culture associée aux fondements du changement visé qui se manifeste à travers cinq composantes : les attitudes, les connaissances, les stratégies, les habiletés et les expériences, mais aussi par le développement et l’exercice de compétences professionnelles associées à l’exercice d’un leadership d’accompagnement (voir également Lafortune et Deaudelin, 2001 ; Lafortune et Martin, 2004).

CHAPITRE

9

LA MODÉLISATION DE L’ACCOMPAGNEMENT PROFESSIONNEL D’UN CHANGEMENT

Ce chapitre présente la schématisation d’un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement tel qu’il a été inspiré par une expérience d’accompagnement d’un changement en éducation. Avant d’aborder cette schématisation, quelques mots explicitent ce qu’est la modélisation et précisent en quoi la représentation d’un modèle facilite sa communication et sa diffusion afin qu’il puisse être transposé dans d’autres contextes d’accompagnement professionnel, dans d’autres types d’organisations, ou dans divers domaines de travail.

REPRÉSENTATION D’UN MODÈLE La modélisation est un processus de représentation d’une situation réelle ou possible qui permet de mieux comprendre sa nature et son évolution. Ce processus peut servir à faire l’analyse d’un système existant ou à en concevoir un autre (Legendre, 2005). Associé à un changement majeur qui comprend des éléments de prescription, le projet qui est à l’origine de ce modèle s’appuie sur des façons de faire novatrices. La modélisation permet de comprendre la nature et l’évolution de cette expérience qui s’est déroulée sur un continuum de plusieurs années (entre

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

2 et 5 ans, selon les groupes) auprès de plusieurs groupes et d’extraire un modèle qui pourrait inspirer d’autres organisations qui se préparent à mettre en œuvre un processus de changement complexe, orienté, prescrit ou qui comporte des éléments de prescription. Le processus de modélisation s’est engagé dès le début du projet et il n’a cessé de se développer et d’évoluer au cours des six années de son existence. Certains aspects du modèle étaient déjà là dès ses premiers balbutiements alors que d’autres se sont affirmés ou sont apparus au cours du projet. À l’image de la démarche utilisée dans le modèle, ce dernier s’est graduellement dessiné en étant confronté à différentes personnes, à différents groupes ainsi qu’à leurs expertises professionnelles qui en ont permis une régulation continue. À la croisée du changement, des pratiques qu’il propose et de celles qui ont cours dans les milieux, l’expérience a été un véritable carrefour où les personnes se sont interrogées sur le sens à donner au changement proposé, sur les actions et les gestes professionnels nécessaires à l’accompagnement de sa mise en œuvre. En ce sens, la théorisation émergente a favorisé l’élaboration et la caractérisation d’un modèle d’accompagnement professionnel novateur en utilisant des éléments construits par des individus et des groupes qui les confrontaient à la théorie ayant cours dans un champ d’expertise donné. Des éléments de théorisation ont émergé des questionnements et de la réflexion générée par le changement. Soumis aux personnes, ces éléments ont été discutés, confrontés, examinés, améliorés et validés en étant comparés à la théorie existante et à la pratique du milieu accompagné.

UTILISATION D’UN SCHÉMA On utilise souvent un schéma pour représenter un modèle, mais il s’avère parfois difficile de traduire la complexité de certains modèles en illustrant toutes ses dimensions ainsi que l’ensemble des facteurs et des variables qui lui rendent justice. L’élaboration de plusieurs schémas peut probablement mieux traduire la représentation d’un modèle d’envergure. Même s’il essaie de traduire une réalité complexe, il n’en demeure pas moins que le schéma représente une vision globale et synthétique d’une expérience qui est aussi influencée par la représentation de la personne qui l’a réalisé, par la lecture qu’elle fait de l’expérience. En réponse à ce préambule, certaines considérations s’imposent et certaines interrogations ont inspiré l’élaboration du modèle et sa représentation, que ce soit à l’aide d’un ou de plusieurs schémas. Voici les questions qui ont guidé la réflexion :

Chapitre 9 — La modélisation de l’accompagnement professionnel

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ß Comment représenter la complexité du modèle à l’intérieur d’un schéma sans évacuer certaines dimensions importantes ? Certaines omissions pourraient nuire à l’illustration, à la compréhension et à la transposition du modèle ou pourraient le banaliser. Une surcharge de concepts et d’idées peut compliquer le modèle et ainsi, le rendre illisible, incompréhensible, perçu inaccessible et irréaliste. ß Comment s’assurer que le ou les schémas soient représentatifs (fassent sens) pour les personnes qui les analysent, particulièrement si ces dernières n’ont pas participé au projet qui a initialement inspiré le modèle ? ß En quoi le schéma sera-t-il efficace ou aidant advenant sa transposition dans un autre contexte de travail, une autre organisation ou un autre domaine professionnel ? ß Le modèle peut-il se concevoir de manière autonome et faire l’objet d’une généralisation qui favorise sa transposition ? En clair, ce modèle a-t-il une vie en dehors du projet initial ? Si oui, comment faire ressortir les éléments du modèle qui permettent de le transposer à d’autres contextes d’accompagnement professionnel d’un changement ? Une réflexion sur le modèle vise non seulement à développer un apport théorique, mais aussi et surtout à apporter une contribution aux pratiques professionnelles d’un milieu et à en faire éventuellement profiter d’autres milieux en généralisant l’expérience. Par différentes représentations, on peut s’attendre à une meilleure prise sur les caractéristiques du projet qui sont directement liées aux pratiques du milieu tant au plan de l’implication d’un accompagnement professionnel que des actions à poser pour réaliser un tel accompagnement de la mise en œuvre d’un changement, de la complémentarité des rôles et des actions transposables. L’utilisation de plusieurs schémas pour traduire la modélisation d’une expérience permet aussi de rendre compte de la complexité du processus de changement à mettre en œuvre et de son accompagnement, car les personnes visées par ce changement sont aussi en processus de changement. Plusieurs schémas permettent de mettre l’accent sur l’une ou l’autre dimension, ce qui aide à les comprendre séparément, mais saisir la place de cette dimension dans le modèle contribue à cerner la perspective globale. Le processus de modélisation présenté confirme l’idée qu’il ne peut y avoir de cohérence dans un projet d’accompagnement d’envergure sans une articulation fine des fondements, des principes et des moyens associés

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

au changement. En ce sens, l’engagement des personnes, les caractéristiques de l’accompagnement, les actions et les gestes professionnels des personnels et les moyens déployés devraient traduire cette cohérence dans la mise en œuvre du changement.

AUTOUR DE L’IDÉE DE MODÈLE Quelles sont les caractéristiques d’un modèle ? Qu’est-ce qu’on entend par modèle ? Les explications peuvent varier d’un auteur ou d’une auteure à l’autre, mais on peut dire que le modèle est une réponse à la complexité d’un changement et aux problématiques qui se vivent dans un contexte de renouvellement des pratiques professionnelles. L’écriture, la description et la schématisation du modèle sont importantes, car elles permettent de l’expliciter, de le communiquer, de le diffuser et de le transposer à des contextes de travail variés. Le rendre intelligible permet à d’autres professionnels et professionnelles de se l’approprier pour accompagner d’autres personnels dans un processus de changement et de faire du modèle proposé un modèle inspirant pour d’autres milieux en le généralisant. Le modèle reflète et précise les composantes de l’accompagnement du processus de changement, la relation et le fonctionnement de ces diverses composantes telles que, par exemple, l’interaction entre l’accompagnement, la recherche et la formation. La complexité d’un projet riche en interactions et en retombées conduit inévitablement à l’explicitation et à la schématisation de son modèle. L’explicitation du modèle favorise la représentation de cette réalité et l’exploration de ses multiples facettes en considérant l’ensemble de ses composantes, mais aussi les ressources (connaissances, compétences, moyens, outils, stratégies) déployées pour mettre en œuvre ce processus de changement et accompagner les personnels sur un continuum afin d’assurer leur autonomie professionnelle.

MODÈLE D’ACCOMPAGNEMENT PROFESSIONNEL D’UN CHANGEMENT Le modèle d’accompagnement professionnel proposé vise l’implantation d’un changement dans un établissement, une organisation, une entreprise. Son articulation témoigne cependant d’un dynamisme, d’une rigueur et d’une souplesse, mais aussi de la prise en compte des personnels

Chapitre 9 — La modélisation de l’accompagnement professionnel

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qui sont appelés à mettre en œuvre ce changement. Ces considérations sont importantes parce qu’elles facilitent la transposition du modèle à différentes types d’organisations, domaines ou secteurs d’activités. Le modèle se veut un instrument utile à l’accompagnement professionnel de personnels confrontés à la mise en œuvre et à l’implantation d’un changement majeur, particulièrement s’il comporte des éléments prescriptifs. Il peut s’appliquer à une grande échelle, mais peut aussi s’adapter à de plus petites organisations de travail ou des groupes restreints. Ce modèle mise sur la construction d’une vision partagée du changement. Pour élaborer une vision collective, les personnes s’engagent dans une pratique réflexive, interagissent avec d’autres personnes pour construire cette vision et la valider en la mesurant aux connaissances théoriques et à la réalité du milieu qui met en œuvre le changement. Piloter un changement majeur est une réalité complexe. Ce modèle aide à mieux la comprendre et, pour mieux agir sur cette réalité, il est assez souple et ouvert pour faire l’objet d’adaptations. Ce modèle suppose le développement d’une véritable culture de l’accompagnement pour briser l’isolement des personnels et pour aider à désamorcer les résistances associées à l’arrivée d’un changement dans un milieu de travail, dans une organisation. Les personnes accompagnatrices pourront s’inspirer de la pluralité et de la richesse des moyens, stratégies, outils, gestes professionnels proposés par le modèle. Elles peuvent y puiser et réorganiser ses diverses composantes afin de répondre adéquatement aux besoins des personnes et du milieu qu’elles accompagnent. On peut décider, proposer, prescrire ou accompagner un changement, mais on ne peut pas prévoir toutes les ramifications de sa réelle application dans un milieu. Les personnes ou les organisations ne pourraient pas le faire, car le processus de changement emprunte parfois des voies insoupçonnées qui n’ont pas nécessairement été planifiées par ses concepteurs ou conceptrices. Ce scénario ne cause pas nécessairement des difficultés insurmontables puisque le milieu possède et met en branle des ressources qui débouchent parfois sur des solutions inédites qui, autrement, n’auraient jamais été formulées. Heureusement, certaines idées qui émergent du milieu dépassent ce qui avait d’abord été anticipé lors de la conception du projet en explorant diverses avenues ou en allant beaucoup plus loin que l’intention première. Dans une perspective socioconstructiviste, le changement subira certaines modifications ou empruntera d’autres chemins que ceux qu’on croit être les meilleurs. Certains itinéraires offriront parfois des raccourcis alors que d’autres comporteront peutêtre des détours qui se révéleront souvent nécessaires. Les composantes

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

du changement seront confrontées aux conceptions et aux convictions des personnes, soumises à la culture d’un milieu donné, mises à l’épreuve par les pratiques et la réalité quotidienne des personnes qui seront appelées à vivre avec le changement et à le faire. Les actions entreprises pour l’accompagner peuvent guider, soutenir les personnes en les aidant à établir des liens de cohérence entre les ajustements apportés au cours du processus, en ne perdant cependant pas de vue les fondements et les visées du changement. Pour y parvenir, il est utile d’apprécier et de reconnaître la qualité du travail et l’expertise du milieu accompagné en s’engageant à titre de partenaire avec les personnels, et cela, même si on n’est pas toujours en accord avec toutes les décisions ou les actions posées parce qu’elles diffèrent de celles qu’on croyait nécessaires à sa mise en œuvre. Les personnes accompagnatrices peuvent apprendre beaucoup des personnes accompagnées en autant qu’elles restent ouvertes aux échanges, car ces derniers sont propices à la construction d’une vision partagée. Rester à l’écoute ne veut pas dire accepter le statu quo, mais plutôt clarifier qu’il n’est plus recevable compte tenu du monde qui évolue constamment et de la nécessité pour les organisations de s’adapter. Pour changer, il devient nécessaire d’offrir des outils et du matériel d’accompagnement utiles à la compréhension du changement proposé afin de saisir l’importance et la portée de ce changement pour mieux comprendre les raisons qui le justifient. Le modèle d’accompagnement professionnel d’un changement proposé dans ce livre émerge d’une pratique d’accompagnement. Il peut facilement être transposé à d’autres contextes d’accompagnement et permettre à des personnels de progresser dans un processus de changement dans différents types d’organisation. Le modèle suppose que les personnels vont graduellement s’engager dans une pratique réflexive en examinant et en analysant leurs pratiques professionnelles au regard de celles qui sont inhérentes au changement dans le but d’examiner comment ils peuvent modifier, ajuster ou actualiser leurs pratiques pour aller dans le sens du changement proposé. C’est la pierre angulaire du modèle ; la mise en œuvre du changement repose sur l’engagement des personnels dans cette pratique réflexive. Sans elle, le changement risque d’être superficiel, voire peu ou tout simplement pas mis en action. Une pratique réflexive est une mise à distance et un regard critique sur son propre fonctionnement, mais aussi une analyse tant individuelle que collective des actions et décisions prises en cours d’action. Ce regard critique suppose des prises de conscience de ses cohérences et incohérences, de ses pensées et actions, de ses croyances et pratiques. Comme il a été longuement explicité au chapitre 6, la pratique réflexive

Chapitre 9 — La modélisation de l’accompagnement professionnel

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comporte trois composantes : une composante de réflexion et d’analyse de sa pratique, une autre liée au passage à l’action et enfin, une dernière faisant référence à la construction de son modèle de pratique en évolution. En plus d’évaluer leurs pratiques professionnelles, les personnels vont également être amenés à observer leur progression dans le processus de changement. Dans l’accompagnement, l’évaluation est une démarche complexe qui consiste à avoir un regard et une réflexion critiques sur ses pratiques professionnelles pour porter un jugement sur la valeur de sa progression ainsi que sur celle des personnels accompagnés dans un processus de changement ou de développement de compétences professionnelles pour l’accompagnement d’un changement. Les pratiques évaluatives ont une fonction d’aide et de soutien à l’accompagnement d’un changement ; elles se font dans une perspective de cheminement et de développement professionnel en considérant les éléments de prescription et les orientations du changement à mettre en œuvre dans un milieu de travail. L’évaluation se fait à partir de données recueillies auprès des personnels accompagnés, selon des critères explicitement énoncés. Une fois analysées et interprétées ces données sont discutées avec les personnels qui peuvent ainsi mesurer et valider le renouvellement des pratiques ou le développement de leurs compétences professionnelles pour l’accompagnement d’un changement. Les pratiques évaluatives aident à guider le choix d’actions futures et à décider des mesures à prendre pour poursuivre un cheminement professionnel et pour continuer à progresser dans un processus de changement. Dans l’accompagnement, l’évaluation est réflexive-interactive c’est-à-dire qu’elle accorde une place importante à la réflexion, à la contribution ainsi qu’à l’engagement des personnels accompagnés en prenant en considération leurs idées, leurs valeurs, leurs points de vue, leur expertise et leur jugement professionnel. Dans le modèle proposé, la pratique réflexive traverse l’ensemble du modèle. Elle est liée autant à l’analyse des pratiques qu’à l’évaluation du processus de changement. Le modèle comporte trois dimensions complémentaires et en interrelation. Ces trois dimensions sont : ß l’interaction dans l’accompagnement : dynamique, rôles et fonctions ; ß les caractéristiques de l’accompagnement ; ß les moyens utilisés dans l’accompagnement. Pour faciliter la lecture et les liens avec le premier schéma, il sera repris en montrant que le texte met l’accent sur une dimension particulière et sur la façon dont elle se déploie dans le modèle. Cela aide à comprendre les explications fournies à propos de chacune des dimensions du modèle.

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

PRATIQUE RÉFLEXIVE

Schéma 1

MODÈLE D’ACCOMPAGNEMENT PROFESSIONNEL D’UN CHANGEMENT 1 Pour un leadership novateur

Interaction: dynamique, rôles et fonctions

Caractéristiques de l’accompagnement

Moyens utilisés dans l’accompagnement

1. Le texte suivant chaque schéma traite des éléments inscrits dans les cases mises en évidence.

Interaction : dynamique, rôles et fonctions Dans le modèle proposé, l’interaction est une dimension importante ; elle aide à montrer qu’il ne s’agit pas d’un modèle qui prône une relation hiérarchique. L’interaction met en relation les personnes accompagnatrices et accompagnées ; elles apprennent l’une de l’autre ; elles cheminent grâce aux partages, échanges, discussions, rétroactions, confrontations… qui prennent différentes formes et qui se font dans divers sens. L’interaction suppose une dynamique et dépend des rôles et fonctions des personnels engagés dans l’accompagnement.

Dynamique de l’interaction L’interaction guide la qualité des échanges, le développement de compétences professionnelles à l’accompagnement, le renouvellement des pratiques et le cheminement vers le changement. Bien que le schéma 2 illustre une séquence qui pourrait laisser croire à un lien hiérarchique, ce n’est pas l’intention poursuivie par le modèle.

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Chapitre 9 — La modélisation de l’accompagnement professionnel

Schéma 2 Dynamique de l’interaction dans l’accompagnement Comprendre l’interaction. Faciliter l’accompagnement. Connaître et reconnaître les personnes accompagnées des deux niveaux. Comprendre l’interaction. Faciliter l’accompagnement. Connaître et reconnaître les personnes accompagnées des deux niveaux.

I PERSONNE OU ÉQUIPE ACCOMPAGNATRICE (de l’interne ou de l’externe) ou équipe de direction

II

III Personne ou équipe accompagnées pouvant jouer un rôle de personnes accompagnatrices

Personne ou équipe accompagnées pouvant jouer un rôle de personnes accompagnatrices

IV PERSONNE ACCOMPAGNÉE

INTERACTION Interformation Coformation

Discussion Échange

Confrontation ...

C’est plutôt l’interaction entre les personnes et les groupes qui compte, car elle est favorable à la coconstruction qui se fait à différents moments de la démarche et au passage du statut de personne accompagnée à celui de personne accompagnatrice. Que les personnes soient accompagnatrices ou accompagnées, elles participent à la coconstruction. Certaines personnes passent effectivement d’un statut à un autre à l’intérieur du modèle parce qu’elle sont appelées à être soit une personne accompagnatrice, une personne accompagnée ou les deux à la fois selon qu’elles sont en processus de changement, en train de se former à l’accompagnement ou d’intervenir auprès de personnels en les accompagnant dans le processus de changement. Il ne s’agit pas pour un groupe de personnes d’intervenir sur un autre groupe de personnes, mais plutôt de miser sur la qualité et la multiplicité des interactions que ces personnes entretiennent au cours de la démarche d’accompagnement pour construire une vision du changement dans l’action en interagissant les unes avec les autres. Il s’agit d’exploiter les interactions de ces personnes peu importe leur rôle ou leur fonction.

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

C’est pour assurer une cohérence dans ce passage d’une fonction à l’autre que les personnes accompagnatrices agissent avec les personnes accompagnées comme si ces dernières devaient accompagner d’autres personnels parce qu’elles auront à le faire assez rapidement en exerçant à leur tour un leadership d’accompagnement socioconstructiviste. L’exemple suivant aidera à mieux faire comprendre cette idée, même si le nombre des équipes peut varier selon l’envergure des organisations et l’ampleur du changement à implanter. Pour mettre en place une démarche d’accompagnement d’équipes de travail, il apparaît nécessaire de constituer ou de former une équipe accompagnatrice pouvant être composée d’une direction ou une équipe de direction, d’une personne ou équipe accompagnatrice (provenant de l’intérieur ou de l’extérieur de l’organisation). Cette équipe accompagnatrice travaille en partenariat avec des personnes qui vont également intervenir auprès d’autres personnels. Dans ce modèle, les équipes accompagnatrices considèrent le travail d’accompagnement que les équipes accompagnées auront à réaliser auprès de leurs collègues, car ces équipes vont transposer le modèle qu’elles auront graduellement intégré à leur modèle de pratique au cours de l’accompagnement et elles feront de même auprès des personnes qu’elles accompagneront dans leur milieu de travail respectif. L’intervention de la première équipe accompagnatrice ne se fait pas uniquement auprès de personnes du deuxième groupe qui peuvent représenter différentes équipes de collègues, des services ou des secteurs de l’organisation, mais elle tient compte de ce qui se passe ou se passera entre ces personnes et celles qu’elles accompagnent dans leur milieu. Cela peut vouloir dire que la première équipe accompagnatrice se rendra dans les groupes accompagnés pour comprendre les interactions, faciliter l’accompagnement, connaître et reconnaître les personnes accompagnées des deux groupes et les enjeux du processus de changement dans l’organisation du travail. Cette façon de faire permet aussi d’entendre ce qui se dit lors des interactions, car elle suppose qu’il y a interinfluence, interformation, coformation, coconstruction, discussion, échange, partage, confrontation… et que ces multiples allers et retours d’un groupe à l’autre participent à l’élaboration d’une vision partagée du changement. Cette présence permet également de suivre la progression du processus de changement au sein de l’organisation et d’ajuster la démarche en cours ou le contenu de la séquence afin de répondre aux besoins d’accompagnement. Dans un établissement, une organisation ou une entreprise, une équipe de direction peut aussi accompagner les responsables qui accompagnent pour leur part des individus ou des équipes de travail. Par

Chapitre 9 — La modélisation de l’accompagnement professionnel

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ailleurs, l’équipe de direction peut aussi être remplacée par une personne externe experte ou être accompagnée par cette personne. Avec le type d’accompagnement préconisé, l’équipe de direction ou la personne externe assistera à quelques rencontres entre les personnes accompagnatrices et les équipes accompagnées dans le but de comprendre la dynamique de l’interaction et favoriser l’accompagnement du processus de changement. Et, comme il a été dit précédemment, selon la taille de l’organisation, le nombre des équipes, le niveau et la fréquence des interactions peuvent varier.

Interaction : rôles et fonctions Comme on vient de le voir, les personnes peuvent jouer plus d’un rôle et occuper différentes fonctions à l’intérieur d’une démarche d’accompagnement. En effet, certaines personnes accompagnent (personnes accompagnatrices) d’autres personnes (personnes accompagnées), mais ces dernières sont aussi appelées à accompagner d’autres personnels… Selon leurs rôles et fonctions, les personnes sont amenées à : 1) s’engager dans un processus de changement ; 2) se former à l’accompagnement d’un changement et, enfin ; 3) exercer un leadership d’accompagnement (schéma 3). Lorsque les personnes s’engagent dans un processus de changement, elles ont à s’approprier les fondements, les orientations et les visées de ce changement. Selon le modèle proposé ici, ces personnes sont progressivement amenées à accompagner aussi la mise en œuvre du changement en se formant à l’accompagnement d’un processus de changement. Ce double rôle ajoute à la complexité, car ces personnes font non seulement face au changement, mais elles sont elles-mêmes confrontées à leurs propres résistances, à leurs propres déséquilibres cognitifs. Elles vivent de l’insécurité face au rôle et au mandat qu’on leur confie en leur demandant d’accompagner ce changement en exerçant un leadership auprès d’autres personnels alors qu’elles sont aussi en processus de changement. Cette situation ajoute à l’insécurité, mais elle souligne aussi l’importance de prendre en considération les dimensions humaines et le temps nécessaire à l’accompagnement d’un processus de changement. Pour changer, les personnes accompagnatrices ont à se concerter et à se donner une représentation partagée du changement à mettre en œuvre. La redéfinition de leur rôle ou l’adaptation de leur modèle d’intervention peut sembler difficile, mais c’est aussi ce qui confère une crédibilité à la démarche, car face au changement, ces personnes, à l’image des personnes qu’elles accompagnent, sont placées elles-mêmes dans une

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

Schéma 3 RÔLES ET FONCTIONS DES PERSONNELS DANS L’ACCOMPAGNEMENT PROFESSIONNEL D’UN CHANGEMENT

Personne ou équipe accompagnatrice

Changer en étant soi-même personne acommagnée ou accompagnatrice

Personnes ou équipes accompagnées pouvant jouer un rôle de personnes accompagnatrices

Personnes accompagnées

S’engager dans un processus de changement

Se former pour l’accompagnement d’un changement

Exercer un leadership d’accompagnement

posture d’ouverture et d’apprentissage. Les personnes accompagnatrices évoluent au contact des personnes qu’elles accompagnent et profitent aussi de la dynamique de l’interaction. En ce sens, Lafortune (2004a) souligne qu’un groupe est presque toujours en changement. Plusieurs membres modifient leurs objectifs en fonction des idées et des actions des autres membres ; certaines ententes sont discutées et négociées sur une base plus pragmatique pour éviter la scission de l’équipe. On verra même des sous-équipes se former, sur une base temporaire, pour poursuivre une ou plusieurs pistes qui ne font pas nécessairement l’unanimité ; ces sous-équipes pourront rejoindre l’équipe principale pour confronter son apport aux pensées des autres membres (Lafortune, 2004a, p. 22).

Le renouvellement des pratiques professionnelles en période de changement demande du temps pour s’approprier et comprendre le changement, mais aussi pour développer les compétences professionnelles

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Chapitre 9 — La modélisation de l’accompagnement professionnel

nécessaires à l’accompagnement d’un changement. Rappelons que, selon leur rôle, les personnes jouent diverses fonctions et réalisent différentes tâches. Ces rôles et fonctions influencent la dynamique de l’interaction où les personnels : ß s’engagent dans un processus de changement ; ß se forment pour l’accompagnement d’un changement ; ß exercent un leadership d’accompagnement. Ces actions jalonnent la progression des personnels vers le changement. Les actions associées à ces rôles sont parfois itératives ; elles peuvent aussi être plus ou moins présentes ou varier selon le degré d’approfondissement ou l’évolution des personnes dans le modèle. Il s’agit certes d’un grand découpage, mais il peut néanmoins aider à se faire une représentation des différents rôles joués par les personnes en considérant les orientations du modèle.

Schéma 4

PRATIQUE

RÉFLEXIVE

MODÈLE D’ACCOMPAGNEMENT PROFESSIONNEL D’UN CHANGEMENT Pour un leadership novateur

Interaction: dynamique, rôles et fonctions

S’engager dans un processus de changement

S’ouvrir au changement

Se former pour l’accompagnement d’un changement

S’approprier et comprendre le changement

Caractéristiques de l’accompagnement

Moyens utilisées dans l’accompagnement

Exercer un leadership d’accompagnement

Analyser ses pratiques au regard de celles associées au changement

Intégrer de nouvelles pratiques à son modèle

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

S’ENGAGER DANS UN PROCESSUS DE CHANGEMENT S’engager dans un processus de changement demande du temps. La prise en compte du temps s’est révélée un facteur déterminant dans l’engagement des personnels. Pour amener d’autres personnes à adhérer au changement, le modèle a fait émerger quatre moments importants ou phases au regard de l’engagement dans un processus de changement : ß S’ouvrir au changement ; ß S’approprier et comprendre les fondements et visées associés au changement ; ß Analyser ses pratiques au regard de celles associées au changement ; ß Intégrer de nouvelles pratiques (renouvellement des pratiques) à son modèle. S’ouvrir au changement S’engager dans un processus de changement suppose d’amener les personnes à s’ouvrir et à rester réceptives au changement. Devant l’instabilité provoquée par une situation de changement, certaines personnes manifestent un intérêt pour la nouveauté ; elles ont le goût d’en savoir plus alors que d’autres vont carrément refuser le changement avant même de savoir de quoi il s’agit. Elles se ferment à toute éventualité de changement et ne désirent pas changer. Parmi ces personnes, certaines vont nier le changement en disant qu’elles faisaient déjà cela avant… ou refusent carrément d’examiner tout ce qui est associé de près ou de loin au changement. Heureusement, la plupart des personnes sont généralement intéressées par le changement surtout si elles savent pourquoi il est nécessaire de changer et si elles se sentent accompagnées dans ce processus complexe. Peu importe leur degré d’ouverture, s’engager dans un processus de changement est déstabilisant : les personnes vivent des déséquilibres cognitifs importants et ressentent souvent une insécurité ou ont des craintes face à l’inconnu. Le changement remet en question certaines pratiques et fait émerger différentes réactions affectives qui ne sont pas toujours faciles à assumer. Certaines personnes vont même jusqu’à éprouver un sentiment d’incompétence face au changement proposé parce que leurs repères professionnels ne sont plus les mêmes. Elles redoutent le jugement des autres ou ont peur d’être évaluées par leurs collègues ou par les directions de l’institution, de l’entreprise ou de l’organisation. Elles appréhendent d’avoir à fournir un plus grand engagement, d’avoir à investir du temps alors qu’elles en possèdent peu, d’avoir à fournir davantage de travail en plus de toutes les tâches qu’elles ont déjà à

Chapitre 9 — La modélisation de l’accompagnement professionnel

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accomplir et de l’énergie qu’elles demandent, etc. Pour dépasser ces perceptions négatives, laisser du temps et en prendre pour changer devient essentiel, sans pour autant étirer indûment la durée à accorder au processus de changement. Ce temps aide à examiner les manifestations et les causes des résistances au changement. Donner du temps facilite l’appropriation et la compréhension du changement. Ne pas s’ouvrir au changement est certainement un frein à l’engagement des personnels. S’approprier et comprendre le changement Dans cette phase, l’appropriation et la compréhension des fondements et des visées du changement suscitent de plus en plus d’intérêt et une plus grande ouverture au changement. Réfléchir à ses pratiques et les examiner au regard de celles associées au changement aident à prendre conscience des enjeux, des aspects positifs ou problématiques du changement, des défis qu’il pose aux milieux accompagnés, des ajustements ou des modifications que les personnels devront apporter graduellement à leurs pratiques professionnelles, de l’engagement (individuel et collectif) nécessaire à la mise en œuvre du changement. Les personnels se rendent compte également de la nécessité de développer des compétences professionnelles pour accompagner le processus de changement. Une meilleure compréhension du changement favorise l’amorce d’un processus de coconstruction et la mise à l’essai d’expériences collectives analysées en équipe de collègues. L’appropriation des concepts aide les personnels à se donner une meilleure compréhension du changement. Discuter de ces concepts, les analyser avec ses collègues favorise la construction d’une vision partagée du changement. Une vision collective donne plus d’assurance et permet de développer sa confiance en soi tout en faisant davantage confiance à ses collègues. La démarche d’accompagnement permet également aux personnes de mieux comprendre leur rôle et le mandat qui leur a été confié : c’est-à-dire changer, se former à l’accompagnement d’un changement et exercer un leadership en accompagnant le changement dans leur milieu. Analyser ses pratiques au regard de celles associées au changement L’examen et l’analyse de ses pratiques au regard de celles associées au changement participent à sa mise en œuvre. Le fait d’approfondir sa compréhension du changement, de s’engager dans une pratique réflexive, de construire avec d’autres une vision partagée du changement, de présenter à des collègues des expériences qui vont dans le sens du changement pour les analyser dans le but de les mettre à l’essai ou de rétroagir

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

aux expériences des autres favorise l’intégration et le réinvestissement de nouvelles pratiques et, par conséquent, un passage à l’action. Ainsi, les personnes modifient graduellement leur modèle de pratiques en cherchant à intégrer des pratiques qui vont dans le sens du changement. Elles prennent des décisions individuelles et collectives pour amorcer ce passage vers l’action. Elles choisissent, préparent et réalisent des actions ou des projets d’action en collaboration avec des collègues. Elles s’engagent de plus en plus professionnellement et évoluent dans le sens du changement. Elles développent aussi leurs compétences professionnelles pour l’accompagnement d’un changement, etc. La création d’un climat d’engagement réflexif suscite une prise de conscience des aspects positifs liés aux déséquilibres sociocognitifs (vécus ensemble) ; ceux-ci permettent notamment de créer, d’innover collectivement et même d’avoir du plaisir à travailler ensemble. Intégrer de nouvelles pratiques à son modèle L’expérimentation et le réinvestissement de nouvelles pratiques et leur intégration à son modèle de pratique facilitent le passage à l’action qui s’affirme de plus en plus. Partager une vision du changement, une expertise, des expériences, des responsabilités, des moyens, des outils et développer des compétences professionnelles pour l’accompagnement procurent un sentiment de compétence professionnelle qui est renforcé par la coordination des efforts collectifs déployés pour faire face au changement ainsi qu’à son accompagnement. L’engagement dans un processus de changement balise la trajectoire des personnels qui évoluent à l’intérieur du processus et facilite leur adhésion au changement proposé. Pour soutenir et guider les personnels, différents moyens tels que le questionnement, l’interaction, la réflexion, la rétroaction font partie intégrante du modèle d’accompagnement professionnel proposé.

SE FORMER À L’ACCOMPAGNEMENT D’UN CHANGEMENT Dans la dynamique de l’interaction, les personnes s’engagent dans un processus de changement, mais elles se forment également pour l’accompagnement du changement et exercent un leadership d’accompagnement. Se former pour accompagner un changement passe par l’enrichissement de sa culture professionnelle et le développement de compétences professionnelles pour l’accompagnement.

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Chapitre 9 — La modélisation de l’accompagnement professionnel

PRATIQUE RÉFLEXIVE

Schéma 5 MODÈLE D’ACCOMPAGNEMENT PROFESSIONNEL D’UN CHANGEMENT Pour un leadership novateur

Interaction: dynamique, rôles et fonctions

S’engager dans un processus de changement

Se former pour l’accompagnement d’un changement

Enrichir sa culture professionnelle

Caractéristiques de l’accompagnement

Moyens utilisées dans l’accompagnement

Exercer un leadership d’accompagnement

Développer des compétences professionnelles pour l’accompagnement

Enrichir sa culture professionnelle L’enrichissement de sa culture professionnelle suppose que les personnels possèdent une culture professionnelle et un modèle de pratique (formation initiale, formation continue, lectures, colloques, congrès, expériences, etc.) puisqu’elles sont déjà en exercice dans leur milieu de travail. Cependant, le modèle de chaque personne n’est pas toujours explicite, organisé ou même conscient. En s’engageant dans un processus de changement, ces personnes s’approprient les fondements et les visées du changement, mais pour enrichir leur culture professionnelle, elles examinent et discutent les concepts associés au changement. Elles apprennent à les situer et à les maîtriser pour parler du changement en les intégrant graduellement à leur discours professionnel ainsi qu’aux pratiques associées à leur modèle en construction et en évolution.

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

Les personnes font de plus en plus de liens entre les concepts qu’elles approfondissent dans la perspective d’accompagner le changement. Elles se donnent ainsi une longueur d’avance en s’assurant de les comprendre pour amener éventuellement d’autres personnels à le faire. Elles creusent les concepts, car elles constatent rapidement la différence entre « comprendre un concept pour soi » et « avoir à comprendre un concept dans le but de le discuter ou d’amener d’autres personnels à le comprendre », comme si l’intégration du changement passait par cette appropriation du discours associé au renouvellement des pratiques. Sa maîtrise procure une assurance et un sentiment de compétence professionnelle. Elle permet la multiplication de liens entre la théorie et la pratique puisque les personnes effectuent constamment des allers et des retours entre les deux en apportant des régulations successives à leurs apprentissages. Interroger les concepts et les confronter à la pratique aident à mieux saisir les liens qui peuvent être faits entre la théorie et la pratique professionnelle, mais les personnes font également des prises de conscience qui permettent de mesurer les écarts entre les pratiques associées au changement et celles qui ont cours dans le milieu. Les ajustements apportés deviennent des points d’ancrage nécessaires à la progression des personnels dans le processus de changement. Ces régulations successives sont souvent accompagnées de mises à l’essai ou d’expérimentations où les personnels s’habilitent à accompagner le changement, mais aussi à « l’opérationnaliser » à l’aide d’exemples qui sont de plus en plus adaptés au changement à mettre en œuvre. Développer des compétences professionnelles pour l’accompagnement d’un changement Au regard des rôles et du mandat qui leur est confié, les personnels constatent rapidement que pour accompagner un processus de changement, elles doivent non seulement s’engager dans un processus de changement, mais aussi développer des compétences professionnelles pour l’accompagnement de ce changement. Peut-on demander aux autres de changer, si on ne change pas soi-même ? Dans le cadre du projet qui a inspiré le présent modèle, les personnes ont été amenées à réfléchir aux compétences, aux gestes professionnels et aux actions à poser comme personnes accompagnatrices ou pour agir auprès des personnes lorsqu’elles les accompagnent dans un processus de changement (Lafortune, 2008). Le référentiel qui a émergé a été généralisé de manière à ce qu’il puisse être utilisé dans d’autres contextes que celui pour lequel il a été créé initialement. Dans un autre contexte d’accompagnement, les personnels pourraient être amenés à réfléchir sur la manière d’adapter le référentiel à leur contexte d’accompagnement en particularisant davantage les compétences pour tenir compte de leur réalité professionnelle.

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Chapitre 9 — La modélisation de l’accompagnement professionnel

E XERCER UN LEADERSHIP D’ACCOMPAGNEMENT L’exercice d’un leadership d’accompagnement implique le partage d’un pouvoir d’influence avec d’autres collègues, mais aussi avec les différents partenaires engagés dans la mise en œuvre de ce processus de changement. La personne accompagnatrice met ses compétences professionnelles au service d’un groupe avec qui elle partage ses connaissances à propos d’un changement, mais aussi celles relatives à l’accompagnement de ce processus de changement auprès d’autres personnes appelées à examiner et à changer leurs pratiques professionnelles. La dimension collective importe puisqu’elle permet aux personnes non seulement de mettre en commun les expertises d’un milieu, mais également de s’offrir un soutien mutuel. Elles vont alors favoriser la construction avec d’autres d’une vision partagée du changement à mettre en œuvre, se partager les tâches et les responsabilités liées au processus de changement.

Schéma 6

PRATIQUE

RÉFLEXIVE

MODÈLE D’ACCOMPAGNEMENT PROFESSIONNEL D’UN CHANGEMENT Pour un leadership novateur

Interaction: dynamique, rôles et fonctions

S’engager dans un processus de changement

Se former pour l’accompagnement d’un changement

Mener à un passage à l’action

Caractéristiques de l’accompagnement

Moyens utilisées dans l’accompagnement

Exercer un leadership d’accompagnement

Susciter la collaboration professionnelle

Favoriser l’engagement

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

Dans le modèle d’accompagnement professionnel d’un changement, l’exercice d’un leadership d’accompagnement consiste à mener d’autres personnels à effectuer un passage à l’action, à susciter la collaboration professionnelle et à favoriser l’engagement professionnel de personnels dans le processus de changement. Mener à un passage à l’action Le passage à l’action est un seuil critique qui s’avère parfois difficile à franchir car les personnes sont très souvent déstabilisées par un changement qu’elles doivent mettre en œuvre incessamment. Certaines personnes cherchent à comprendre le changement en s’ouvrant graduellement à de nouvelles pratiques professionnelles alors que d’autres essaient de résister à cette vague déferlante en s’accrochant à leur modèle de pratique qui représente un havre sécurisant. Confrontées à un changement majeur, la plupart des personnes vivent des moments d’insécurité professionnelle, elles ont le sentiment de perdre leurs repères et de ne plus être compétentes au regard des nouvelles pratiques liées au changement. Même s’il apparaît déstabilisant, le déséquilibre cognitif est nécessaire au changement, mais il importe cependant de l’accompagner dans un cadre qui soit sécurisant au plan affectif. S’il est trop insécurisant, les personnes vont s’accrocher à leurs résistances ou pire encore, elles vont carrément décrocher professionnellement. Pour changer, elles doivent en quelque sorte « apprivoiser » le changement, se l’approprier pour mieux le comprendre, l’apprécier pour éventuellement y adhérer. L’intégration de nouvelles pratiques professionnelles exige du temps ainsi qu’un certain degré d’engagement personnel et professionnel. La progression de ce processus peut varier selon la nature et la complexité du changement à mettre en œuvre, et cela, sans compter que les personnes n’évoluent pas nécessairement toutes au même rythme. La progression du changement peut dépendre de la résistance manifestée, de l’écart à combler entre le modèle de pratique des personnels et celui proposé par le changement, de l’engagement et de la collaboration professionnelle des personnels, mais aussi de la formation, du soutien et des suivis qui leur sont offerts pour favoriser la mise en œuvre du changement. Avant d’effectuer un passage à l’action en préparant et en réalisant des projets d’action dans leur milieu, les personnes vont faire des mises à l’essai ou des amorces d’expérimentation. Elles discutent de leurs expériences avec leurs collègues dans la perspective d’améliorer l’accompagnement du processus de changement. La discussion porte plus sur le processus de mise en œuvre pour accompagner le changement que sur les contenus. Plus elles progressent dans le processus de changement plus les personnes se sentent à l’aise pour échanger avec leurs collègues ou rétroagir aux

Chapitre 9 — La modélisation de l’accompagnement professionnel

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expériences des autres. Elles bénéficient des retombées de ces échanges où les expertises du groupe sont mises à contribution pour le développement professionnel des personnels. La préparation comprend l’anticipation des réactions et des commentaires des personnels accompagnés. La préparation, la réalisation et l’accompagnement se font en cohérence avec le changement proposé. Les fondements et les visées du changement à mettre en œuvre guident les actions et les gestes professionnels des personnes accompagnatrices. C’est pourquoi, il importe que les personnes aient atteint un certain niveau de progression dans la démarche afin d’en connaître un peu plus sur le changement à mettre en œuvre, mais aussi quant à la manière de l’accompagner. Pour ces raisons, le passage à l’action ne se fait pas toujours aussi rapidement que les directions ou les personnes accompagnatrices le souhaiteraient, mais en accordant du temps aux personnes, elles acquièrent graduellement un degré de confiance qui les aide à le faire. Le passage à l’action suppose l’élaboration de projets d’action pour la mise en œuvre d’un changement dans l’entreprise ou dans l’organisation. Ces projets d’action supposent une démarche comportant : une structure ; une continuité ; un passage à l’action ; un suivi ; une analyse ; des ajustements ; un étalement dans le temps ; un projet pensé collectivement ; une mise en commun des compétences ; une prise en compte de croyances et des pratiques ; et des remises en question vers un changement. Susciter la collaboration professionnelle La collaboration professionnelle suppose une coordination d’efforts collectifs, des discussions qui mènent à des prises de décision collectives et à des interventions concertées. Ces interventions sont analysées et régulées régulièrement et collectivement. Cela mène à une responsabilité partagée dans le travail en équipe de collègues pour accompagner la mise en œuvre du changement. Cette collaboration est dite « professionnelle » pour tenir compte du regard que les collègues portent sur les différentes pratiques jusqu’à les discuter et les remettre en question dans un climat de respect et de confiance mutuelle. Cela peut vouloir dire partager une certaine « intimité professionnelle ». Dans ce modèle, la collaboration professionnelle fait partie des compétences professionnelles pour l’accompagnement d’un changement (Lafortune, 2008). Les gestes professionnels associés à cette compétence sont : ß Créer un partenariat avec les personnels engagés dans un processus de changement.

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

ß S’engager dans un esprit de collaboration, de coopération et de concertation. ß Développer individuellement et collectivement des compétences professionnelles pour l’accompagnement. ß Construire une vision partagée du changement. ß Faire connaître les ressources, actions et contributions au sein du milieu. ß Développer des réseaux de partage et de communication entre les personnels engagés dans le processus de changement. Le travail en équipe et la collaboration professionnelle aident au passage à l’action, car les personnes se partagent les tâches, les responsabilités et profitent ainsi du soutien et des expertises des autres personnels engagés tout comme elles dans la mise en œuvre d’un changement. L’exercice d’un leadership d’accompagnement exige cependant d’inscrire cette collaboration professionnelle à l’intérieur de la démarche d’accompagnement afin d’amener les personnes à profiter de la synergie et de la complémentarité des individus qui constituent une communauté professionnelle. Faire vivre des expériences d’accompagnement aide les personnes à apprécier, à partager et à faire appel à la contribution des autres. Ces expériences et les échanges qu’elles génèrent peuvent se faire dans différents contextes tels que la planification de rencontres, d’échanges pendant ou après des interventions ou lors de rétroactions. Les personnes peuvent ainsi bénéficier de la richesse d’expertises complémentaires et diversifiées. Favoriser l’engagement Changer est un processus qui demande du temps. Accorder du temps ne veut pas dire ne pas inciter les personnes à faire un passage à l’action, ne pas favoriser leur engagement professionnel. S’engager et favoriser l’engagement font partie du modèle d’accompagnement professionnel d’un changement. Sans engagement, l’interaction reste superficielle et la construction avec d’autres s’avère difficile à réaliser. Sans l’engagement, il est difficile de construire une vision partagée du changement à mettre en œuvre. Développer et soutenir l’engagement nécessite cependant un accompagnement car certaines personnes posent des actions sans pour autant être engagées ou en étant peu engagées dans le processus de changement. Face au changement, elles adoptent parfois une attitude fataliste en disant : « il faut que je le fasse, donc je vais le faire ». Accompagner l’autre, c’est tenter de comprendre pourquoi l’autre s’engage ou ne s’engage pas dans une relation d’accompagnement en procédant

Chapitre 9 — La modélisation de l’accompagnement professionnel

183

à une analyse réflexive, en portant un regard sur soi en tant que personne ainsi que sur ses pratiques et ses croyances. Pour s’engager, la personne doit pouvoir donner un sens à ce qu’elle fait. L’obligation ou la contrainte ne suscitent pas l’engagement. Les personnes ont le choix de s’engager ou non ; elles le font de manière volontaire. L’engagement professionnel peut correspondre à l’interprétation que les personnels se font des buts et des valeurs associés à l’organisation, à la profession, à ses pratiques ou au changement proposé (adapté de Pauchant et coll., 1996, rapporté dans Duchesne, 2004). Dans un modèle d’accompagnement professionnel, le développement et le maintien de l’engagement exigent la mise en place de conditions liées aux attitudes des personnes, aux gestes professionnels qu’elles posent et à l’établissement d’un climat de travail sécurisant qui repose sur la confiance, le respect mutuel des individus, la création de réseaux, le partenariat, le soutien et l’encouragement des collègues et des partenaires. Pour développer et maintenir cet engagement, il est important de discuter du changement, de prévoir des moments de réflexion ; de prendre en considération la culture du milieu ; d’anticiper des réponses aux questions et aux réactions ; de modeler une pratique professionnelle ; de mettre en place des conditions qui favorisent un accompagnement socioconstructiviste, d’avoir des intentions et une posture professionnelle. Dans le cadre d’un changement majeur, l’exercice d’un leadership d’accompagnement exige d’aller dans le sens du changement en intégrant les composantes du changement aux caractéristiques de la démarche d’accompagnement. Le passage à l’action, la collaboration professionnelle et l’engagement professionnel sont des gestes professionnels qui nécessitent un accompagnement professionnel. L’exercice d’un leadership d’accompagnement suppose donc de faire des suivis et des bilans. Ces derniers permettent d’apporter un soutien aux groupes accompagnés, de suivre leur cheminement et leur progression dans le processus de changement, d’apporter des ajustements ou des modifications à la séquence d’accompagnement, d’amener les personnels à prendre conscience de leur progression individuelle et collective.

Caractéristiques de l’accompagnement Pour assurer la progression d’un changement dans une organisation, le modèle d’accompagnement professionnel propose l’exercice d’un leadership novateur qui privilégie certaines caractéristiques de l’accompagnement.

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

PRATIQUE RÉFLEXIVE

Schéma 7 MODÈLE D’ACCOMPAGNEMENT PROFESSIONNEL D’UN CHANGEMENT Pour un leadership novateur

Interaction: dynamique, rôles et fonctions

Partenariat avec le milieu

Animation, formation et recherche

Caractéristiques de l’accompagnement

Liens théorie et pratique

Perspective socioconstructiviste

Adaptation, ouverture et souplesse

Moyens utilisées dans l’accompagnement

Cohérence avec fondements et visées du changement

Collaboration professionnelle

Partenariat avec le milieu Travailler en partenariat avec le milieu pourrait aller jusqu’à favoriser la rencontre de personnes ayant des expertises diverses en provenance de différents secteurs ou milieux. Il s’agit de miser sur la collaboration professionnelle plutôt que la hiérarchie afin de mettre à contribution toutes les ressources nécessaires à la mise en œuvre d’un changement dans une organisation. L’accompagnement proposé est un accompagnement de groupe, même si certaines interventions peuvent s’adresser à une personne ou à de plus petits groupes, il n’en demeure pas moins que c’est un collectif qui est visé et que le travail se fait en fonction des forces et du dynamisme d’individus qui font partie d’un collectif qui travaille à la coconstruction d’une vision partagée du changement. Prendre en compte ce qui se fait dans les milieux, c’est reconnaître les actions, les besoins, les attentes, les représentations, les croyances, les pratiques, les ressources et les expertises du milieu accompagné tout en considérant des remises en question à provoquer et des déséquilibres cognitifs à soutenir. Ainsi, les personnes accompagnatrices incitent les

Chapitre 9 — La modélisation de l’accompagnement professionnel

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personnes accompagnées à prendre le relais des situations d’accompagnement de manière à poursuivre la démarche auprès des personnels qu’elles vont à leur tour accompagner. Cela signifie être à l’écoute du milieu et respecter ses choix et ses actions s’ils vont dans le sens du changement ou du renouvellement de pratiques, mais aussi poser des questions si ces choix et actions sont plus ou moins en cohérence avec les orientations du changement. Même s’il fait preuve de rigueur, le modèle montre également de la souplesse pour s’adapter à l’environnement professionnel en exploitant davantage les ressources disponibles. S’il y a un volet recherche, les résultats sont réinvestis dans le milieu, permettant ainsi de développer des façons de faire cohérentes avec les idées qui émergent du modèle.

Animation-formation-recherche L’accompagnement professionnel proposé dans ce modèle comprend l’animation, la formation et la recherche. L’animation renvoie principalement au dynamisme déployé au cours de l’accompagnement ainsi qu’aux attitudes, habiletés, techniques et moyens utilisés pour soutenir et guider un groupe alors que la formation se rapporte aux apprentissages que les personnes ont à faire à propos du changement ou de l’accompagnement de ce changement ainsi qu’aux moyens et outils qu’elles entendent mettre en œuvre pour faire progresser la vision du changement dans leur milieu et adapter par conséquent leur propre modèle de pratique. Pour pouvoir comprendre l’influence d’une démarche d’accompagnement-formation, il s’avère utile d’y associer une démarche de recherche puisqu’elle permet de faire émerger des données qui constituent les traces du cheminement réalisé, de documenter les décisions et les expériences réalisées, mais aussi la vision qui se construit à l’intérieur de l’organisation. Dans cette recherche, il s’agit de garder à l’esprit : l’ampleur et la complexité de la démarche ; le fait qu’un bassin important de données de recherche sont à analyser ; le fait que la durée de l’accompagnement et le suivi offert aux personnes favorisent l’ajustement des instruments de collecte de données, qui servent à la fois d’outils de formation, de réflexion ou d’évaluation. Tout en visant la rigueur de la démarche, l’accompagnement-recherche offre un cadre d’intervention souple où il est possible, en examinant et en réinvestissant les données de recherche, d’apporter des ajustements à la démarche en cours. Les outils et le matériel d’accompagnement construits avec et pour les personnes accompagnatrices visent la prise en compte de l’évolution des moyens développés par les milieux pour faire face au changement.

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

Liens théorie et pratique À l’intérieur du modèle les liens entre la théorie et la pratique se font continuellement. D’une part, il y a les multiples allers et retours que les personnes font entre la théorie associée au changement ou à son accompagnement et leur pratique professionnelle. Ces liens se font en situation d’accompagnement lorsque les personnes interagissent (échangent, discutent, confrontent) ou qu’elles réfléchissent avec les personnes accompagnatrices, mais aussi avec leurs collègues. D’autre part, ces liens se développent aussi entre les rencontres lorsque les personnes retournent dans leur milieu respectif et qu’elles continuent à s’interroger sur le changement en confrontant les éléments abordés au cours de la démarche à leur propre pratique professionnelle. Les questions, les prises de conscience ou les constats sont souvent ramenés à la rencontre suivante pour être discutés ou examinés en groupe. Ces allers et retours se font aussi lorsque les personnes réinvestissent certains aspects de la démarche ou qu’elles réalisent un ou des projets d’action dans leur milieu. Ces multiples allers et retours entre la théorie et la pratique participent grandement à la construction et à l’enrichissement d’une vision partagée du changement ainsi qu’à l’adhésion des personnels au changement.

Perspective socioconstructiviste L’accompagnement privilégié à l’intérieur du modèle s’inscrit dans une perspective socioconstructiviste. À l’origine, cette perspective faisait partie des fondements du projet qui a inspiré le modèle, mais elle est rapidement devenue une caractéristique importante du modèle d’accompagnement considérant l’importance et la place accordée aux interactions ainsi qu’à la contribution des autres pour l’élaboration d’une vision partagée du changement. Le développement de cette posture exige toutefois d’avoir une bonne compréhension de son rôle, de son mandat et du changement à mettre en œuvre. Elle demande également de prendre en considération plusieurs dimensions de la personne : cognitive, affective, métacognitive, etc.

Adaptation, ouverture et souplesse La continuité, la durée et le temps distinguent l’accompagnement des formations qui sont habituellement offertes aux organisations. Ponctuelles, ces formations sont offertes pour une durée déterminée, généralement de quelques heures à une ou deux journées. Conçues de manière autonome par des consultants ou consultantes ou des firmes différentes d’une

Chapitre 9 — La modélisation de l’accompagnement professionnel

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formation à l’autre, elles ne peuvent pas toujours prendre en considération les acquis antérieurs des personnels et le temps manque pour faire des suivis. Avec le modèle, la formation est pensée pour tenir compte des visées du changement, mais aussi des aspirations et intentions d’un groupe de personnes qui sont appelées à jouer un rôle dynamique dans un processus de changement. L’accompagnement a lieu sur un continuum de plusieurs rencontres réparties sur plus d’une année. Les rencontres alternent avec un retour dans le milieu où se font des essais et des expérimentations ainsi que des suivis avec les équipes. Un fil conducteur oriente les rencontres. Contrairement à des blocs de formation autonomes les uns des autres et standardisés qui sont à toutes fins pratiques répétés d’un groupe ou d’un milieu à l’autre, l’accompagnement cherche plutôt à s’adapter à des problématiques variées et à miser sur les ressources et les expertises du milieu. Cet accompagnement vise l’autonomie professionnelle des personnes qui sont non seulement formées aux composantes du changement, mais à l’accompagnement professionnel de ce processus complexe. En plus de s’engager dans un processus de changement, les personnes développent leurs compétences pour l’accompagnement de personnels. Elles pourront donc à leur tour accompagner d’autres personnels dans ce même processus et, par le fait même, assurer le rayonnement et la progression du changement dans l’organisation. L’accompagnement se fait sur un continuum afin d’assurer un meilleur ancrage aux changements proposés et un suivi au renouvellement des pratiques qui continuent à évoluer entre les rencontres. Le temps continue de faire son œuvre entre deux rencontres et la progression du processus poursuit sa lancée. En retournant dans leur milieu, les personnes font des essais, continuent de réfléchir à leur pratique, sont confrontées à de nouvelles problématiques qu’elles peuvent ramener lors de la prochaine rencontre afin de les discuter avec d’autres personnes qui sont elles aussi confrontées à des réalités semblables. L’ouverture et la souplesse du modèle se traduisent par l’adaptation des équipes accompagnatrices au cheminement des groupes et par la possibilité d’aborder le processus de changement par diverses portes d’entrée. Et même si certaines problématiques, processus ou contenus de formation associés au changement ou à l’accompagnement d’un changement peuvent revenir d’un groupe à l’autre, les choix des personnels ou l’expertise du milieu vont influencer la séquence d’accompagnement, qui peut considérablement varier d’un groupe à l’autre. La diversité des parcours à l’intérieur du modèle passe par la prise en compte et la compréhension des interventions d’accompagnement dans différents groupes et des conditions favorables à la mise en œuvre

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

du changement. On constate que des cheminements diversifiés émergent quand les interventions répondent adéquatement aux problématiques d’un groupe de personnes accompagnées. Lorsque l’accompagnement se poursuit pendant une période plus ou moins longue et que les personnes sont confrontées à de nouvelles problématiques soulevées par le changement, elles tentent d’y répondre en s’engageant dans l’action, en mettant en jeu leur créativité et leur savoir-faire. Elles cheminent alors vers une autonomie professionnelle et conséquemment vers le renouvellement de certaines façons de faire qui s’étaient stabilisées avant d’être remises en question par le changement ou l’accompagnement dans le processus de changement. Le modèle suppose que le cheminement des groupes peut être variable, s’il y a plus d’un groupe. Ainsi les groupes n’empruntent pas nécessairement le même parcours lorsqu’ils évoluent dans le processus de changement. Même en considérant les fondements et les visées du changement, le processus se fait en concertation entre les personnes accompagnatrices et accompagnées. Chaque groupe effectue un parcours adapté à sa situation puisqu’il prend en considération la composition des groupes, le milieu dans lequel ils évoluent et les choix qu’ils feront pour progresser dans le processus de changement en fonction des équipes de collègues, des actions déjà entreprises dans le milieu, des projets d’action qu’ils entendent réaliser, des problématiques et des besoins présents et anticipés, de l’expertise des personnes accompagnatrices et accompagnées, etc.

Cohérence avec les fondements et les visées du changement Être en cohérence avec le changement suppose une compréhension des idées et des grands concepts associés aux fondements, aux visées et aux orientations du changement à mettre en œuvre. Si la cohérence n’est pas toujours facile à atteindre surtout au début du processus, être conscient des incohérences (les siennes et celles des groupes accompagnés) mène à s’ajuster pour progresser dans le sens du changement. Une telle cohérence se répercute aussi sur la démarche d’accompagnement du changement. Viser la cohérence se traduit par une démarche d’accompagnement dont la réalisation permet de montrer de quelle façon on voudrait que les personnes accompagnées en accompagnent d’autres ou qu’elles agissent pour mettre en œuvre le changement en respectant ses fondements et ses visées.

Chapitre 9 — La modélisation de l’accompagnement professionnel

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Collaboration professionnelle Comme on l’a déjà souligné, la collaboration professionnelle suppose une coordination d’efforts collectifs, des discussions qui mènent à des prises de décision collectives et à des interventions concertées. Cette collaboration est dite « professionnelle » car elle fait une place au regard que les collègues portent sur les différentes pratiques jusqu’à les discuter et les remettre en question pour tenir compte des fondements du changement, tout en considérant la dimension affective qui suppose un climat de respect et de confiance mutuelle. La perspective socioconstructiviste inhérente au modèle suppose le travail en équipe, la concertation, le travail en collégialité et la collaboration professionnelle. Travailler avec d’autres, rétroagir à leur travail, faire des choix collectifs, échanger avec d’autres, partager des réussites favorisent une perception positive du travail en équipe de collègues. Dans l’accompagnement, placer les personnes en situation de collaboration professionnelle les aide à décider ensemble, à s’entraider, à se soutenir mutuellement, à faire des choix et à réaliser des projets collectifs, à partager les responsabilités, à contribuer à des réussites collectives et à profiter de l’expertise des collègues. Adoptant ce point de vue, il peut être justifié de considérer que le groupe de personnes qui s’engagent dans une démarche d’accompagnement et de mise en œuvre d’un changement devient, avec le temps, une communauté d’apprentissage et de pratique puisque plusieurs caractéristiques d’une telle communauté s’y retrouvent (Wenger, 2005). Les personnes accompagnatrices et les personnes accompagnées ont une vision partagée du projet. Au cœur de celle-ci, il y a un partage d’expertises pour la viabilité du projet d’accompagnement auquel adhèrent les personnes accompagnatrices et plusieurs personnes accompagnées. Il y a une interaction et une concertation continues entre ces personnes qui mettent en commun des idées, des forces ou encore une culture professionnelle qui peut varier d’un individu à l’autre ou d’un milieu à l’autre. Lors des rencontres entre les personnes accompagnatrices ou lors des interventions d’accompagnement les idées émergent et se confrontent les unes aux autres, les façons de faire sont partagées, les solutions sont discutées ensemble et mises à la disposition du groupe. Cette façon de faire est favorable au développement de compétences professionnelles pour l’accompagnement. Cette construction progressive d’une communauté tout à la fois d’apprentissage et de pratique peut être rendue possible par de nombreux échanges réflexifs-interactifs entre les personnes accompagnatrices et avec les personnes accompagnées. Il semble fort pertinent d’adapter les quatre caractéristiques propres aux communautés professionnelles

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

(Lafortune, 2004d) pour initier une réflexion sur l’émergence d’une communauté d’apprentissage et de pratique dans le cheminement de personnes accompagnées. 1 Adhérer au changement préconisé. Il semble important que, pour l’équipe de personnes accompagnatrices, les fondements du changement soient au centre de leurs préoccupations et qu’ils jouent un rôle prépondérant dans le développement de compétences professionnelles pour l’accompagnement. 2 Coordonner les efforts afin de favoriser le développement de compétences professionnelles pour l’accompagnement. Cette caractéristique suppose un travail collectif axé sur le développement de compétences où le travail en collaboration est privilégié. 3 Contrôler collectivement les décisions importantes qui affectent les orientations du changement. Pour exercer collectivement ce contrôle, les personnes accompagnées se donnent les moyens de discuter de ces orientations, d’accepter les confrontations d’idées pour se connaître, d’essayer de comprendre les autres et de s’assurer de l’application des décisions prises collectivement. 4 Réaliser un apprentissage professionnel en collaboration. Ce type d’activité relève d’un processus d’interformation et de coformation. Des collègues peuvent former d’autres collègues (interformation). Une équipe peut se donner une visée de formation et se partager les expertises à développer pour contribuer à la formation de l’équipe (coformation).

Moyens utilisés dans l’accompagnement Plusieurs moyens sont utiles, voire nécessaires à l’accompagnement d’un changement majeur, qu’il comporte ou non des éléments de prescription. Parmi les principaux moyens (schémas 8 et 9) retenus et utilisés à l’intérieur du modèle, certains visent la réflexion et/ou l’interaction alors que d’autres contribuent plus particulièrement à la théorisation émergente. Par ailleurs, selon le contexte d’accompagnement, les personnes accompagnatrices font également appel à d’autres moyens comme le journal d’accompagnement, l’autoévaluation, etc. qui ont été présentés dans le chapitre « Moyens qui facilitent l’accompagnement de la pratique réflexive » (chapitre 7). Les personnes accompagnatrices font appel à ces moyens lorsqu’elles planifient leurs situations d’accompagnement et lorsqu’elles interviennent auprès des groupes. En se formant à l’accompagnement

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Chapitre 9 — La modélisation de l’accompagnement professionnel

d’un changement, elles observent la ou les personnes accompagnatrices qui utilisent ces moyens en les modelant au cours de l’accompagnement puis elles intègrent peu à peu ces moyens à leur pratique professionnelle en faisant des essais à l’intérieur du groupe avant de les expérimenter dans leur milieu.

PRATIQUE RÉFLEXIVE

Schéma 8 MODÈLE D’ACCOMPAGNEMENT PROFESSIONNEL D’UN CHANGEMENT Pour un leadership novateur

Interaction: dynamique, rôles et fonctions

Caractéristiques de l’accompagnement

Moyens utilisées dans l’accompagnement

Moyens réflexifs-interactifs

Questionnement

Interaction

Théorisation émergente

Réflexion

Rétroaction

Modelage

Moyens réflexifs-interactifs Questionner, interagir, réfléchir, rétroagir aident à faire émerger une vision à propos du changement, favorisent les échanges, la confrontation des idées et la communication réflexive-interactive. Les prises de conscience suscitées par le questionnement, l’interaction, la réflexion et la rétroaction incitent les personnels à progresser dans le processus de changement en passant à l’action et en modifiant leur modèle de pratique lorsqu’ils les intègrent à leurs pratiques professionnelles.

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

QUESTIONNEMENT Le questionnement consiste à poser un ensemble de questions de manière à susciter la prise de parole, les échanges, le partage, la réflexion, les conflits cognitifs, les remises en question, etc. Il est réflexif s’il mène les personnes à réfléchir à leur pratique professionnelle, à penser aux stratégies ou aux processus mis en œuvre dans la réalisation d’une tâche ou de gestes professionnels. Il est socioconstructiviste s’il favorise la construction des connaissances et des compétences, s’il suscite les interactions et s’il provoque des conflits sociocognitifs (adapté de Lafortune, Martin et Doudin, 2004). Il incite les personnes accompagnées à verbaliser ce qu’elles pensent, ce qu’elles font, comment elles le font, comment elles pourraient le faire, comment elles pourraient susciter des prises de conscience chez les personnes accompagnées ou les encourager à passer à l’action. Le questionnement peut aussi amener les personnes accompagnées à s’interroger sur l’accompagnement du processus de changement ; elles sont alors incitées à transposer ce qu’elles vivent dans leur pratique d’accompagnement.

INTERACTION L’interaction entre les personnes favorise les échanges, le partage, la discussion et la confrontation des idées. Elle est favorable à la coconstruction, c’est pourquoi il importe de miser sur la qualité et la multiplicité des interactions entre les personnes. C’est en interagissant les unes avec les autres que les personnes, peu importe leur rôle ou leur statut dans l’organisation, finissent par construire une vision partagée du changement à mettre en œuvre. L’interaction suscite le questionnement individuel et collectif, les remises en question, les prises de conscience, les ajustements, les régulations, les analyses, les évaluations, les constats, etc. Le modèle cherche à exploiter ces interactions pour amener les personnels à progresser dans le sens du changement en renouvelant leurs pratiques professionnelles ou en adaptant leur modèle de pratique.

RÉFLEXION La réflexion permet d’activer des connaissances, expériences ou compétences antérieures, d’intégrer des apprentissages, de s’interroger sur différents aspects du changement ou de son accompagnement. Elle est essentielle aux prises de conscience ainsi qu’au processus d’intégration du changement ou au développement de compétences professionnelles pour l’accompagnement. Les moments de réflexion impliquent d’être à l’aise avec les silences. Accepter les silences et en susciter permet de créer

Chapitre 9 — La modélisation de l’accompagnement professionnel

193

des moments propices à la réflexion et à l’émergence de nouvelles idées ainsi qu’à leur approfondissement. Une réponse réfléchie est souvent plus nuancée, car les idées sont approfondies et évaluées avant d’être livrées aux autres. Les moments de réflexion sont appréciés par les personnes accompagnées, car elles constatent rapidement leur importance et leur utilité. Inciter à prendre un temps pour répondre, s’engager et chercher une réponse favorise la réflexion, l’appropriation, l’approfondissement et l’intégration du changement vers une autonomie professionnelle. Les moments de réflexion sont nécessaires, mais ils prennent davantage de sens s’ils sont expliqués ou creusés et si les personnes accompagnées peuvent partager ce qu’elles en retirent.

RÉTROACTION Pour Wlodkowski et Ginsberg (1995) la rétroaction est une information fournie à l’apprenant à propos de la qualité de son travail. Elle est probablement le meilleur moyen pour influencer les compétences des personnes en situation d’apprentissage, car elle suscite un recadrage, une remise en question ou une régulation dans un but de changement, d’avancement, d’évolution ou d’explication. Elle a pour but d’informer plutôt que de contrôler, mais on doit favoriser une rétroaction qui encourage l’efficacité accrue, la créativité et l’autonomie des personnels. La rétroaction semble avoir une influence sur la motivation des personnes apprenantes, car celles-ci peuvent mieux évaluer leurs progrès, comprendre leur performance, maintenir leurs efforts et recevoir des encouragements (Wlodkowski et Ginsberg, 1995). Dans l’accompagnement, la rétroaction peut servir de tremplin à la discussion, à l’analyse d’une situation, aider à communiquer de l’information ou à faire un bilan. Elle peut avoir un sens plutôt restreint et faire référence à une information fournie à une personne ou peut avoir un sens plus large et faire référence à des réflexions, à des confrontations ou à des prises de conscience qui suscitent un recadrage, une remise en question ou une régulation dans un but de changement, d’avancement, d’évolution ou d’explication. Les rétroactions privilégiées dans la démarche d’accompagnement se situent sur un continuum qui va des rétroactions peu réflexives à des rétroactions très réflexives, c’est-à-dire des rétroactions qui suscitent de plus en plus la réflexion. La rétroaction réflexive-interactive […] peut comporter un degré plus ou moins grand de réflexivité et être plus ou moins réflexive-interactive. Lorsqu’elle n’est pas réflexive-interactive ou très peu réflexive-interactive, elle fournit des informations à propos d’actions, de productions, d’attitudes ou de comportements en apportant des commentaires ou

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement une évaluation de la situation et en donnant des solutions. Si elle est plutôt réflexive-interactive, elle amène la personne qui reçoit la rétroaction à réfléchir sur ses actions, ses productions, ses attitudes ou ses comportements et à penser à une solution et à en discuter (Lafortune 2004a, p. 296-297).

Utiliser la rétroaction dans le contexte d’un changement prescrit représente un défi pour la personne accompagnatrice qui ne peut accepter toutes les expériences et toutes les idées comme étant conformes au changement à mettre en œuvre. Réaliser une rétroaction dans un contexte de changement exige d’avoir en tête les intentions suivantes : 1) situer les fondements du changement ; 2) s’assurer de la cohérence de l’ensemble des éléments ; 3) accepter de poser un regard critique qui suppose des remises en question ; 4) tenir compte de la dimension affective, tout en considérant le changement et la relation professionnelle en cause. La personne accompagnatrice qui guide l’action apprend à reconnaître les forces et les défis d’une proposition et à soutenir les personnes pour les aider à cheminer dans leur rôle et à développer leurs compétences professionnelles. La rétroaction peut être facilitée par des stratégies comme les suivantes : 1) écouter la présentation d’une expérience ou d’une proposition en prenant en note quelques mots-clés ; 2) construire à partir des mots ou expressions utilisés ; 3) questionner de manière à ce que l’ensemble du groupe se sente interpellé – éviter les dialogues ou les apartés ; 4) limiter le temps qui est accordé à un témoignage ou à une description d’expérience.

MODELAGE Dans l’accompagnement, le modelage suppose que les personnes accompagnées observent la conduite de la personne accompagnatrice qui, par sa manière d’intervenir, « se donne en exemple ». Elle actualise, en paroles et en actions, son modèle de pratique. Lorsqu’elle verbalise son modèle de pratique ou souligne certaines actions aux personnes qu’elle accompagne, la personne accompagnatrice fait du modelage, elle se donne en modèle, en exemple. Pour le faire, elle réfléchit à voix haute dans l’action, se pose des questions, annonce ses intentions, motive ses décisions, ses choix, ses gestes professionnels, les moyens et les outils utilisés, etc. Elle rend son modèle visible pour en favoriser la compréhension, mais aussi pour éventuellement inciter d’autres personnes à le suivre ou à intégrer ces composantes à leur propre modèle de pratique. Enfin, elle aide les personnes accompagnées à voir comment le modèle peut se transposer à de nouvelles situations d’accompagnement ou avec différents personnels visés par le changement.

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Chapitre 9 — La modélisation de l’accompagnement professionnel

Idéalement, la modélisation de sa pratique (créer son modèle de pratique) aurait avantage à être antérieure au modelage, car pour « se donner en exemple », il est préférable d’avoir préalablement construit son modèle de pratique ou être en voie de le faire ou d’avoir minimalement intégré les gestes professionnels en développant les compétences et la culture liée à son champ d’expertise. Dans les faits, le modèle de pratique n’est pas toujours précisé ou au clair pour les personnes qui forment ou accompagnent des groupes. Ce genre de situation peut alors générer de la confusion ou certaines incompréhensions, car il peut y avoir des incohérences ou un écart entre ce que la personne pense, ce qu’elle dit ou ce qu’elle donne à voir en exemple, c’est-à-dire ce qu’elle fait. Grâce à sa perspective réflexive et interactive, la démarche d’accompagnement favorise la construction ou les ajustements d’un modèle de pratique en action. La confrontation, les questions et réactions des personnes accompagnées amènent les personnes à faire des prises de

PRATIQUE RÉFLEXIVE

Schéma 9 MODÈLE D’ACCOMPAGNEMENT PROFESSIONNEL D’UN CHANGEMENT Pour un leadership novateur

Interaction: dynamique, rôles et fonctions

Caractéristiques de l’accompagnement

Moyens utilisées dans l’accompagnement

Moyens réflexifs-interactifs

Coconstruction

Théorisation émergente

Synthèse

Interinfluence

Traces

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

conscience, à voir les écarts entre leur discours et leurs gestes professionnels. Elles peuvent ainsi évaluer ce qui peut être fait pour assurer un arrimage entre ce qu’elles pensent, ce qu’elles disent et ce qu’elles font. En cherchant à comprendre le modèle de pratique de la personne accompagnatrice – celle par qui arrive le changement – le groupe agit comme un miroir réfléchissant.

Théorisation émergente La pratique réflexive amène les personnes à mieux comprendre et à s’approprier les fondements du changement, ses visées et à évaluer ses effets dans leur milieu. Selon le modèle, les personnes réfléchissent au changement, en arrivent à certaines prises de conscience, font des liens et des constats, etc. Les éléments de théorisation témoignent de l’expérience, à condition que des traces soient recueillies, conservées, examinées, comparées, etc. Soumises à un processus d’analyse et d’interprétation, ces traces peuvent conduire à la formulation d’énoncés théoriques (définition de concepts associés au changement ou à l’accompagnement d’un changement) ou à la modélisation d’une expérience (modèle d’accompagnement professionnel d’un changement) ou d’une pratique (référentiel de compétences professionnelles pour l’accompagnement d’un changement).

COCONSTRUCTION Une personne construit ses connaissances à propos du changement à partir de son propre modèle de pratique qui, dans l’accompagnement, est soumis à une série de régulations successives au fur et à mesure que la personne fait de nouveaux apprentissages ou qu’elle progresse dans le processus de changement où elle fait, là aussi, de nouveaux apprentissages. Au cours d’un accompagnement socioconstructiviste, elle va confronter cette construction à celles d’autres personnes qui sont également engagées dans une démarche semblable. Ces personnes valident ainsi leurs constructions au regard de celles d’auteurs et d’auteures ou de celles proposées par des modèles théoriques. Les constructions individuelles sont alors façonnées au contact de ces diverses influences qui provoquent des confrontations d’idées et des remises en question. Elles contribuent à l’élaboration d’une vision partagée du changement, d’une construction collective d’un modèle de pratique associé au changement. Les personnels se réapproprient cette construction collective et l’intègrent à leur propre modèle en continuant à la confronter à d’autres idées ou à l’éprouver au contact de leur réalité professionnelle et quotidienne. Au cours de ce processus long et complexe, ils effectuent de multiples allers

Chapitre 9 — La modélisation de l’accompagnement professionnel

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et retours entre la théorie et la pratique. Ils partagent et discutent de leurs représentations avec d’autres, ils profitent de l’expertise individuelle et collective du groupe avant de recommencer un nouveau cycle avec d’autres personnes ou d’autres groupes (adapté de Lafortune, 2004c et d, Lafortune et Deaudelin, 2001).

SYNTHÈSE La confrontation dans une perspective de partage des représentations au regard d’un même objet, c’est-à-dire la remise en question et non l’affrontement, nécessite des moments d’interaction et de coconstruction. On peut penser que ces moments de confrontation peuvent rendre difficile la construction d’une synthèse puisque des idées différentes, voire parfois opposées, émergent. Une synthèse construite à partir de ce qui est formulé dans un groupe en interaction peut représenter l’idée ou les valeurs de ce groupe, mais peut-être pas l’idée ou les valeurs de chacun des individus qui le composent. Le résultat d’une synthèse n’est pas nécessairement utilisé comme un élément à intégrer dans la démarche, mais peut servir au questionnement collectif et à susciter des prises de conscience. Issue de la confrontation d’idées, la synthèse est une lecture effectuée par une ou plusieurs personnes à l’intérieur d’un groupe à partir de réflexions individuelles et collectives. Cette lecture s’inspire et rend compte d’une diversité de points de vue, mais pas nécessairement de tous les points de vue. La personne qui fait la synthèse, choisit certaines idées, fait des liens, les associe, hiérarchise et organise l’information selon sa compréhension et la lecture qu’elle fait des aspects discutés. Enfin, la personne peut aussi choisir d’éliminer certaines idées qui ne cadrent pas avec la proposition ou d’en ajouter de nouvelles pour la clarifier. Les aspects traités sont fortement influencés par le modèle de pratique (formations et expériences) de la personne qui produit la synthèse, en fournissant une grille de lecture. Son modèle fait partie des ressources dont elle dispose et à partir desquelles la personne va construire de nouvelles connaissances à propos du changement. La synthèse permet d’organiser l’information à un certain moment de la démarche, d’expliciter ou de représenter sa compréhension d’une situation, d’un processus ou d’un objet, de situer où l’on est, ce qu’on pense, ce qu’on comprend ou connaît d’une situation. Elle peut aussi permettre aux personnes accompagnatrices de mieux connaître les personnes ou le groupe qu’elles accompagnent, de voir où elles se situent et ce qu’elles comprennent du changement et les liens qu’elles font avec leur pratique professionnelle.

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

GARDER DES TRACES La conservation de traces est importante pour comprendre l’évolution de la démarche, mais aussi pour repérer les éléments facilitants et les difficultés rencontrées. Elle favorise les ajustements et l’amélioration de la démarche d’accompagnement. La conservation de traces contribue à la réflexion et à l’analyse des pratiques. Ces traces sont également utiles pour effectuer des retours sur les apprentissages réalisés au cours de la démarche ou lors de la préparation des bilans. Dans l’élaboration de projets d’action, la personne accompagnatrice planifie le genre de traces qu’elle entend conserver et la manière dont elle prévoit s’y prendre pour en faire la collecte ou l’exploitation. Ces traces balisent la démarche d’accompagnement et peuvent être réinvesties à différents moments de l’accompagnement. Elles servent à faire des amorces, des retours, à mesurer le cheminement parcouru, le parcours emprunté, à faire la synthèse de sa démarche, à faire des liens entre les rencontres ou lors de bilans, etc.

INTERINFLUENCE Le principe de l’interinfluence est lié à l’interaction et au fait que, dans l’accompagnement socioconstructiviste, il ne peut être question d’une juxtaposition de formations, de situations d’accompagnement, de connaissances… Autant les personnes s’interinfluencent par leurs idées, leurs façons de penser et de faire, leurs pratiques, leurs connaissances… autant elles utilisent des moyens qui servent à montrer cette influence mutuelle. Par exemple, le résultat de la coconstruction montre que collectivement, il est possible de réaliser une production qui soit, non pas l’aboutissement d’un consensus, mais bien une élaboration discutée qui alimente les constructions individuelles pour que chaque personne en sorte influencée par le travail réalisé. La synthèse n’est pas une présentation de l’accumulation de toutes les idées, mais une production cohérente qui puisse être expliquée par la personne qui la réalise. Enfin, le fait de garder des traces peut témoigner des résultats des coconstructions et des synthèses et ainsi, contribuer à la théorisation émergente pour la suite d’un projet.

ß ß ß Pour conclure ce chapitre portant sur la modélisation d’une expérience d’accompagnement, rappelons que le modèle d’accompagnement professionnel d’un changement vise la mise en œuvre d’un changement majeur, orienté, prescrit. Pour favoriser l’implantation de ce changement, les personnels construisent une vision partagée du changement en s’engageant dans un processus de changement, en se formant à l’accompagnement

Chapitre 9 — La modélisation de l’accompagnement professionnel

199

d’un changement et en exerçant un leadership d’accompagnement novateur qui intègre les fondements, les visées et les orientations du changement à un modèle de pratique professionnelle. Ce faisant, les personnels développent une autonomie professionnelle dans l’accompagnement d’un processus de changement puisqu’elles passent du statut de personne accompagnée à celui de personne accompagnatrice en réinvestissant les composantes, les caractéristiques et les moyens associés au modèle. Les personnels changent ou adaptent graduellement leur modèle de pratique et intègrent à leurs activités un modèle d’accompagnement professionnel visant à mettre en œuvre un changement majeur dans une organisation.

CHAPITRE

10

RÉPERCUSSIONS DÉVELOPPEMENT PROFESSIONNEL AU REGARD D’UN CHANGEMENT À METTRE EN ŒUVRE DANS UNE ORGANISATION

Après avoir examiné les conditions nécessaires à la réussite de l’accompagnement d’un changement et avoir présenté la modélisation de la démarche d’accompagnement d’un changement, voici les répercussions auxquelles on peut s’attendre si on utilise le modèle pour accompagner les individus et les groupes dans ce processus complexe. Ces répercussions ont été cernées par les personnels qui ont participé au projet qui a inspiré la construction du modèle. Certaines répercussions sont directement associées à la mise en place de conditions pour l’application du modèle. En regard des répercussions dégagées, on peut énoncer que le modèle amène les personnes accompagnées : à structurer leur identité professionnelle ; à renouveler leurs pratiques professionnelles en lien avec le changement à mettre en œuvre en faisant de nouveaux apprentissages au plan des connaissances, des habiletés, des stratégies et des compétences professionnelles à développer ; à effectuer un réinvestissement du modèle et des moyens d’accompagnement en passant à l’action ; à faire des prises de conscience ou des constats au regard de l’accompagnement d’un changement majeur et à avoir une influence sur la mise en œuvre du changement et sur ses visées.

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

CONTRIBUTION À LA STRUCTURATION DE L’IDENTITÉ PROFESSIONNELLE Gohier, Anadon, Bouchard, Charbonneau et Chevrier (2001, cité dans Savoie-Zajc, Landry et Lafortune, 2007) présentent l’identité professionnelle des enseignants et enseignantes comme une représentation qu’ils se font d’eux-mêmes comme personne enseignante. Elle est influencée par la représentation que l’enseignante ou l’enseignant a de lui-même, celle qu’il a de son rapport aux collègues et celle qu’il a de la profession. Cette représentation se rapporte aux connaissances, aux croyances, aux attitudes, aux valeurs, aux conduites, aux habiletés, aux buts et aux projets auxquels la personne enseignante s’identifie. La personne construit son identité en étant confrontée à différents types de situations ou en cheminant à travers diverses expériences professionnelles. (Érikson, 1973, 1982 ; Gohier, Anadon, Bouchard, Charbonneau et Chevrier, 2001 rapportés dans Savoie-Zajc, Landry et Lafortune, 2007). L’engagement à appliquer le modèle a favorisé le développement et la consolidation de certaines connaissances, attitudes, habiletés, stratégies et compétences professionnelles. Les personnes disent qu’elles sont plus ouvertes au changement et aux autres, qu’elles sont aussi plus créatives ou audacieuses. Elles disent également avoir une plus grande confiance en elles, mais aussi envers leurs collègues. Elles affirment avoir développé un sentiment de compétence professionnelle, une meilleure compréhension du changement, une définition plus claire de leur rôle dans l’accompagnement et des compétences à développer pour accompagner ce changement. Elles reconnaissent l’importance des autres et de la collaboration professionnelle qui ont contribué à la structuration de leur identité.

Développement d’un sentiment de compétence professionnelle En parlant du sentiment de compétence professionnelle, les personnes disent que ce sentiment s’est affirmé parce que le modèle favorise l’apprentissage de nouvelles connaissances à propos du changement et qu’il a permis l’enrichissement d’une culture professionnelle, culture associée aux fondements du changement visé. L’apport d’éléments de théorie (capsules théoriques, lectures, colloques, etc.) est significatif dans la construction des connaissances que les personnes accompagnées ont à propos du changement. Il permet d’avoir une longueur d’avance : les personnes se disent rassurées, car elles ont le sentiment d’offrir un

Chapitre 10 — Répercussions

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meilleur accompagnement. Elles se rendent compte de l’importance d’enrichir leur culture professionnelle pour accompagner avec efficacité et être en cohérence avec les fondements et les orientations du changement. L’enrichissement de cette culture favorise également le développement d’un esprit critique. L’application du modèle les a également amenées à développer et à approfondir des compétences professionnelles pour l’accompagnement, à exercer un leadership d’accompagnement en réfléchissant (pratique réflexive) aux gestes professionnels, aux pratiques et au genre de soutien (posture d’accompagnement, communication réflexive-interactive, dimension affective, jugement professionnel) à apporter aux personnels accompagnés, en étant conscientes de la pertinence d’un accompagnement socioconstructiviste, en étant confrontées à des situations d’accompagnement variées et inédites, en étant amenées à en produire pour passer à l’action ou en développant une plus grande habileté à rétroagir en situation (collaboration professionnelle).

Appropriation et compréhension du changement En appliquant le modèle, les personnes s’approprient le changement, mais elles incitent aussi d’autres personnes à changer en le réinvestissant dans leur milieu respectif. En discutant des fondements (concepts centraux), des orientations du changement et de ses enjeux avec d’autres personnes qui sont elles-mêmes confrontées au processus de changement, elles profitent de l’expertise des autres pour faire avancer la réflexion sur le changement. Une compréhension partagée de ces aspects et une connaissance du milieu accompagné favorisent l’établissement de liens entre la théorie et la pratique au regard du changement visé. Avec l’application du modèle, les personnes construisent une vision éclairée et partagée du changement, réfléchissent aux pratiques, aux actions et aux gestes professionnels à mettre en œuvre pour accompagner le changement. Elles s’évaluent et évaluent leurs pratiques. Elles analysent et régulent leurs interventions pour les modifier s’il y a lieu afin d’être en cohérence avec le changement. Enfin, elles élaborent des pistes de solution et de réflexion adaptées au milieu qu’elles accompagnent. Les milieux accompagnés constituent des contextes signifiants permettant aux personnels de s’engager dans un renouvellement de leurs pratiques. Après une, deux ou trois années d’accompagnement-formation, les personnes accompagnées désirent revenir sur certains éléments abordés pour mieux les approfondir. Elles constatent qu’une compréhension

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

superficielle de différents concepts et façons de faire ne leur permet pas d’accompagner des groupes de manière à en arriver à créer des moments où elles amènent d’autres personnes à coconstruire une vision du changement à mettre en œuvre.

Clarification du rôle et du mandat Avec le modèle, les personnes développent une plus grande conscience de leur rôle, qu’elles associent au leadership à exercer, mais aussi des responsabilités et des gestes professionnels nécessaires à la réalisation de leur mandat. Comprendre son rôle et apprendre à se situer comme personne accompagnatrice les amènent également à s’interroger sur les compétences professionnelles à développer pour exercer un leadership d’accompagnement qui aura une influence sur les pratiques de leur milieu. Les personnes peuvent se projeter en action à l’intérieur de situations d’accompagnement complexes et variées et elles sont plus aptes à nommer les ressources qu’elles mobilisent pour accompagner d’autres personnes dans le processus de changement. L’expertise développée dans le contexte du modèle aide à planifier l’accompagnement d’un changement, à le mettre en œuvre en passant à l’action. Le modèle assure une meilleure gestion du changement et favorise le cheminement des personnes vers la professionnalisation et l’autonomie. La structuration d’une identité professionnelle aide les personnes à mieux concilier les attentes du milieu et à les inscrire davantage dans la perspective du changement.

Reconnaissance de l’importance de la collaboration professionnelle En plus de permettre la formation et le développement d’un réseau en créant des liens professionnels, l’application du modèle a révélé l’importance de la collaboration professionnelle, l’utilité du travail d’équipe, ce qu’il rapporte aux individus, aux organisations, mais également sa contribution au plan de l’intervention. Partager son expertise, faire avec d’autres, enrichir l’action professionnelle, l’ajuster, la modifier et la réguler sont des initiatives qui influencent positivement la structuration de l’identité professionnelle des personnels accompagnés dans un processus de changement. Un accompagnement professionnel sous-tend un travail en collégialité qui peut se transformer, avec le temps, en collaboration professionnelle. Cette collaboration professionnelle suppose une coordination

Chapitre 10 — Répercussions

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d’efforts collectifs, des discussions qui mènent à des prises de décision collectives et à des interventions concertées. Ces interventions sont analysées et régulées collégialement. Cela mène à une responsabilité partagée de l’accompagnement de collègues jusqu’au développement de compétences, les siennes et celles des personnes accompagnées.

Partager une expertise En partageant leurs expertises, les personnes accompagnées confrontent leurs idées, leurs croyances et leurs pratiques à celles des autres. Elles accèdent ainsi à une ou des expertises ou des représentations différentes des leurs. Partager et soumettre au regard de l’autre ses réflexions, ses expériences, ses questionnements, sa manière d’intervenir, ses moyens, ses outils, ses stratégies favorisent la progression des personnes dans le processus de changement. En même temps qu’elles cheminent, les personnes font cheminer les autres.

Faire avec d’autres En brisant l’isolement professionnel, les personnes réalisent qu’elles ne sont pas seules à vivre les mêmes choses ce qui facilite les échanges, le partage et la concertation avec les collègues. La collaboration professionnelle donne le goût d’entreprendre des actions dans son milieu surtout si l’on peut compter sur la synergie d’une équipe de collègues et sur la complémentarité des personnes qui en font partie. Le simple fait de voir et d’entendre les exemples, les expériences et les bons coups des autres donne des idées de réinvestissements et de transpositions dans l’action. La collaboration professionnelle facilite aussi l’intégration de nouvelles personnes, car ces dernières sont accueillies et soutenues par une équipe qui a déjà quelques réalisations ou réussites à son actif.

Enrichir les actions, les interventions et les stratégies professionnelles La collaboration professionnelle permet d’aller chercher des idées nouvelles, des éclairages différents, de nuancer les propos, d’approfondir la réflexion, de modifier les croyances, les représentations, de renouveler les pratiques, d’ouvrir de nouvelles pistes de solutions, de faire progresser le changement… Elle permet aussi d’enrichir son répertoire d’actions professionnelles en prenant connaissance de différents types d’interventions, de manières différentes d’intervenir en considérant des réalités ou

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

des contextes d’accompagnement différents. Des solutions originales ont été trouvées pour répondre de manière personnalisée à différents besoins d’accompagnement. Cette façon de faire incite à l’engagement individuel et collectif. Elle donne le goût d’en faire plus, de s’investir et de collaborer davantage. La collaboration peut aussi ouvrir la voie à la création de communautés d’apprentissage et de pratique.

Ajuster, modifier et réguler l’action professionnelle En travaillant avec des collègues, il est plus facile de valider ses idées, ses pratiques, ses outils, ses actions et ses gestes professionnels. La collaboration aide à les relativiser, à faire certaines mises à distance, à prendre du recul. Toutes ces actions offrent un filet de sécurité qui s’avère rassurant au plan professionnel. Les actions entreprises ou planifiées sont examinées collectivement dans le but de les améliorer et de garder une cohérence avec les intentions d’accompagnement que les personnes se donnent. Enfin, la collaboration professionnelle mène à repenser les façons de travailler ensemble, d’organiser le travail, de partager autrement les responsabilités. L’ampleur du changement exige souvent une mobilisation des personnels dans un esprit de collaboration professionnelle. Dans l’exercice d’application du modèle, la collaboration professionnelle a permis de constater la faisabilité du changement, de faire face au changement avec d’autres, mais aussi de mieux orienter les interventions futures et de faire des choix conséquents avec le changement.

RENOUVELLEMENT DES PRATIQUES EN LIEN AVEC LE CHANGEMENT À travers le modèle, les personnels orientent leur regard vers ce que chacun ou chacune peut faire pour changer des choses plutôt qu’attendre que les choses changent à partir d’une commande qui vient d’en haut. Ils s’ouvrent à d’autres manières d’aborder des problématiques liées à l’accompagnement d’un changement.

Prise de risques et innovation Les personnes osent, prennent des risques, innovent en essayant de nouvelles façons de faire, de nouveaux moyens, de nouvelles stratégies. Elles disent que le modèle est inspirant et sécurisant. Tout le contraire du

Chapitre 10 — Répercussions

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changement qui est très souvent perçu comme étant insécurisant, dérangeant et qui suscite des résistances. Le modèle insuffle un second souffle à leur manière d’intervenir qui est devenue graduellement plus réflexive et interactive. Le modèle favorise l’engagement, mais aussi la persévérance dans l’engagement des personnels accompagnés. Les gens disent qu’ils ne sont plus de simples spectateurs ; ils désirent être des acteurs en étant placés au cœur de la démarche. Ils apprécient les interactions, le travail en équipe de collègues et le fait de partager le leadership d’accompagnement, mais aussi les responsabilités qui s’ensuivent. Cette responsabilité collective invite à une organisation du travail qui se fait « ensemble » au lieu de privilégier une répartition de tâches réalisées par des personnes différentes, sans réelle concertation. Les interactions, les actions et les gestes professionnels posés, la participation active, les expériences partagées et les réalisations collectives témoignent de l’engagement des personnels dans un processus de renouvellement des pratiques qui vont dans le sens du changement. Les personnes éprouvent beaucoup de satisfaction liée à l’expérimentation de la perspective socioconstructiviste. Pour elles, il importe de s’inscrire dans cette perspective puisqu’elles auront à faire travailler d’autres personnels en la considérant.

Cheminement professionnel et développement de compétences professionnelles pour l’accompagnement d’un changement Le modèle incite la personne à examiner son cheminement professionnel comme personne accompagnatrice du changement, mais aussi comme personne qui fait cheminer d’autres personnes dans ce processus. Au cours de la démarche, les personnes font des apprentissages ; elles construisent de nouvelles connaissances à propos du changement (concept de compétence, métacognition, travail en équipe-cycle, résistance au changement, etc.) ; elles développent de nouvelles attitudes (ouverture, audace, goût d’innover, engagement, écoute, respect, etc.) et de nouvelles habiletés (susciter la confrontation, rétroagir en action, faire des synthèses, inciter à faire réfléchir davantage les personnes qu’elles accompagnent à propos de leurs apprentissages et de leurs pratiques, modéliser sa démarche d’accompagnement, réaliser des entretiens d’accompagnement, etc.) pour permettre à d’autres d’avoir aussi une réflexion sur leur pratique afin de progresser dans le processus de changement.

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

Placées devant l’imminence de la tâche (mettre en œuvre un changement), du mandat qui leur a été confié et compte tenu du caractère novateur du modèle, elles ont dû réfléchir aux compétences professionnelles nécessaires pour l’accompagnement d’un changement majeur en éducation, tout en se formant pour accompagner des personnels qui devaient s’engager dans le même processus. Pour certaines personnes, il s’agissait de développer de nouvelles compétences alors que d’autres continuaient à les approfondir. La réflexion menée dans le cadre de l’expérience réalisée a donné lieu à un référentiel de compétences professionnelles pour l’accompagnement (Lafortune, 2008). Ce type de répercussions (changer, se former à l’accompagnement d’un changement, développer un référentiel de compétences professionnelles pour l’accompagnement d’un changement) demande beaucoup de temps. On oublie trop souvent que les personnes accompagnatrices ont non seulement à s’approprier et à comprendre les fondements du changement visé, mais qu’elles font aussi face à leurs propres conceptions et résistances en situation de changement. Le développement de compétences professionnelles pour l’accompagnement incite à l’action ou à la mise en place de projets d’action parce qu’il permet : de se familiariser avec les objets du changement ; de mettre en œuvre des actions concrètes pour s’approprier le changement ; de reconnaître les conditions qui favorisent la réussite de l’accompagnement du changement ainsi que les stratégies, moyens et outils pour faciliter son implantation ; d’expérimenter, de se risquer à faire des choses et à innover dans un esprit de recherche et de formation professionnelle ; d’élaborer du matériel pour accompagner des personnels et enfin, d’adopter une posture active à l’égard du changement. L’élaboration d’un référentiel de compétences professionnelles pour l’accompagnement d’un changement a été une répercussion importante de projet (Lafortune, 2008). Dans un autre contexte d’accompagnement, une répercussion associée à l’utilisation du modèle pourrait être l’appropriation des compétences professionnelles du référentiel ou l’adaptation du référentiel à un nouveau contexte d’accompagnement.

Renouvellement des formations pour aller au-delà de formations ponctuelles Lorsqu’elles accompagnent, les personnes disent prendre ou accorder plus de temps à la préparation de l’accompagnement : la planification et l’élaboration des plans de travail et de l’animation, l’anticipation des

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réactions, la création d’outils et de matériel d’accompagnement socioconstructiviste. Elles renouvellent leurs pratiques parce que le modèle les incite à entretenir un climat favorable aux interactions, car les moments de réflexion, la confrontation des idées, les constructions individuelles et collectives, la conservation de traces, les synthèses, l’élaboration d’outils et de matériel d’accompagnement ainsi que la validation d’expériences participent à la construction d’une vision partagée du changement au sein des équipes. Tout en étant rigoureuse, la démarche est cependant assez souple pour faire émerger des dispositifs variés d’accompagnement dans les milieux accompagnés. Cette façon de faire amène les personnels à s’interroger sur la pertinence des formations ponctuelles, car une fois terminées, les réinvestissements escomptés des formations ne sont pas toujours au rendez-vous. Pour aller au-delà des formations ponctuelles, l’accompagnement inclut des aspects liés à la formation, des liens entre la théorie et les pratiques, et il se réalise dans la durée et la continuité. Ces actions permettent de mesurer la progression du changement, de faire des suivis et des bilans en cours de démarche.

Évolution des modèles de pratique Au cours de la démarche, les personnes accompagnées font une analyse des pratiques et de leurs pratiques en fonction du changement à mettre en œuvre. La construction d’une grille de lecture et d’analyse socioconstructiviste permet de dégager un modèle pratique d’accompagnement en faisant appel aux différents moyens et outils utilisés lorsqu’elles planifient ou interviennent auprès des personnes qu’elles accompagnent comme la réflexion, l’interaction, le questionnement, la rétroaction. Avec le modèle, les personnes intègrent graduellement cette grille de lecture et d’analyse qui peut les aider à ajuster leur modèle de pratique. Elles reproduisent et modélisent cette démarche en réinvestissant des actions associées aux fondements du modèle. Ce ne sont pas toutes les personnes qui en viennent à dégager leur modèle de pratique de façon organisée et consciente. Celles qui y arrivent démontrent un investissement majeur et surtout, sont demeurées engagées dans le projet d’accompagnement pendant plusieurs journées (plus de 20). L’évolution de son modèle de pratique est liée à une des trois composantes de la pratique réflexive : réfléchir à sa pratique et l’analyser ; passer à l’action ; créer ou adapter son modèle de pratique (voir Lafortune et Deaudelin, 2001). Cette construction ou adaptation comprend trois éléments : 1) concevoir et élaborer une description et une explicitation de sa pratique ; 2) pouvoir présenter les aspects théoriques et pratiques

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

menant à des actions particulières ; 3) s’inspirer de modèles existants et les adapter pour les réorganiser dans une représentation cohérente (texte, schéma, tableau, dessin, catégorisation, énumération de caractéristiques, de principes, etc.). Le modèle évolue au cours du cheminement professionnel d’une personne qui est amenée à le réexaminer ou à l’analyser à différents moments de sa carrière et à y apporter certaines modifications ou ajustements s’il y a lieu. Dans un contexte de changement, les personnes sont appelées à réexaminer leur modèle de pratique (même si elles ne le nomment pas « un modèle ») et à l’inscrire dans le sens du changement.

Rayonnement du modèle dans les milieux accompagnés Plusieurs nouvelles personnes se sont intégrées au groupe grâce au rayonnement de personnes engagées dans le projet, qui ont apprécié le modèle et qui ont contribué à la popularité du projet auprès des milieux accompagnés. Ces personnes ont rallié le groupe à la suite d’une présentation du modèle par des collègues ou parce que certaines réflexions des personnes qui participaient au projet avaient piqué leur curiosité et suscité leur intérêt. Certaines regrettent de ne pas être venues avant alors que d’autres, qui n’avaient pas été officiellement désignées et qui étaient venues en qualité de substituts, font une demande de libération pour participer aux autres rencontres. À la fin du projet, plusieurs personnes manifestent le désir de poursuivre la démarche qu’elles trouvent « aidante » dans l’accomplissement de leur travail. Cela ne veut pas dire qu’elles n’ont pas développé d’autonomie professionnelle, mais elles se rendent compte que, dans le processus de changement, le renouvellement des pratiques est important, qu’il a besoin d’être soutenu surtout lorsque les pratiques antérieures sont fortement ancrées et différentes des orientations du changement.

Changements apportés à la structure organisationnelle des milieux accompagnés Les milieux accompagnés manifestent un intérêt pour le travail en équipe de collègues et l’accompagnement en coanimation (dyade). Certains milieux procèdent à des aménagements ou à des libérations du personnel pour favoriser les rencontres entre collègues ou cherchent des façons de créer des réseaux ou de mettre en réseau les personnes en favorisant les

Chapitre 10 — Répercussions

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activités de maillage. Les milieux constatent que certains changements dans les manières de faire peuvent être apportés. Certains changements peuvent même modifier l’organisation du travail. Il y a aussi parfois des freins à certains changements qui pourraient être apportés compte tenu du contexte et de la réalité du milieu. Il est généralement difficile d’entrevoir des changements qui aideraient, mais qui exigeraient des changements majeurs. Il n’en demeure pas moins que certains changements sont envisagés alors que d’autres sont effectivement réalisés.

PASSAGE À L’ACTION Le passage à l’action est une répercussion très importante et elle est associée à la condition qui incite au passage à l’action. Le passage à l’action comprend les différents réinvestissements et les multiples essais que les personnes font au cours de la démarche avant de passer à la préparation et à l’animation de projets d’action.

De l’attente à l’action Avec le modèle, les personnes accompagnées passent d’une posture d’attente à une posture d’intention, puis progressent graduellement vers un passage à l’action ou la mise en branle de projets d’action. Ce passage à l’action se manifeste par un changement de posture, des ajustements ou des modifications de pratiques d’accompagnement et les réinvestissements réalisés dans les milieux par les personnes. La continuité dans la démarche les incite à voir ces possibilités de réinvestissements, à les revisiter, à transposer certains moyens, outils ou situations d’accompagnement et à persévérer dans leur engagement vis-àvis du processus de changement. Elles sont motivées par le désir d’expérimenter des actions, des gestes qui sont associés au changement. Elles acceptent de prendre des risques, d’innover dans un esprit de recherche. Elles ont le goût de réinvestir ou de transposer le modèle d’accompagnement en actions dans leur milieu : ce qui a été travaillé au cours de la démarche comme l’élaboration de situations concrètes, les moyens et les outils qu’elles adaptent à la réalité du milieu qu’elles accompagnent. Pour le faire, elles mobilisent les connaissances qu’elles construisent à propos du changement, les attitudes, les habiletés et les compétences professionnelles que le modèle les amène à développer ou à approfondir en action. Bref, elles transforment, de façon importante, leur modèle de pratique professionnelle.

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

Amélioration de sa manière d’intervenir Le modèle a favorisé, chez les personnes accompagnées, une meilleure préparation des interventions ou de l’accompagnement réalisé dans leurs milieux. Elles accordent plus de temps à la préparation (planification et anticipation) des rencontres ; elles sont plus conscientes de l’importance de l’intention, du fil conducteur ; elles apprennent à s’ajuster en situation (régulation) et à anticiper ce qui va se passer dans l’action en réfléchissant aux réponses et aux réactions des personnes qu’elles accompagnent. Une meilleure préparation donne le sentiment d’une plus grande compétence permet de montrer plus d’assurance lors de l’accompagnement, car les personnels anticipent ce qui peut se produire en lien avec l’intention et le but poursuivi, ce qui assure une cohérence à leur manière d’intervenir. Dans la pratique réflexive, le passage à l’action est nécessaire pour montrer le niveau de réflexion et la pertinence de l’analyse. Le passage à l’action suppose des prises de conscience assez approfondies, au point de susciter des changements durables. Ce passage à l’action est lié au processus de transposition issu de la réflexion et de l’analyse et mène à des retours sur les actions. Même si le passage à l’action semble évident, il s’agit d’une étape difficile à franchir pour les personnes. Réinvestir les apprentissages réalisés dans l’action quotidienne et les gestes professionnels suppose des changements de pratiques qui ont été précédés par des prises de conscience individuelles et collectives. Si ces prises de conscience ne conduisent pas à des actions, on peut dire qu’elles sont superficielles. Elles seront intégrées aux pratiques par un accompagnement soutenu, particulièrement pour des projets d’action. C’est pourquoi la progression d’un changement, surtout s’il est majeur et orienté, ne peut se faire rapidement.

PRISES DE CONSCIENCE OU CONSTATS Les prises de consciences précèdent généralement le passage à l’action quoique certaines actions puissent aussi susciter de nouvelles prises de conscience. En s’inscrivant dans la continuité et la durée (temps), l’accompagnement va toutefois favoriser, guider et soutenir ce passage vers l’action. Autrement, il n’y a pas toujours de réinvestissements et certaines prises de conscience tombent dans l’oubli et ne sont pas ou sont peu exploitées.

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Certains sujets ont été traités en lien avec les répercussions décrites précédemment, mais ils ont été abordés en termes de passage à l’action ou de changement alors qu’ils sont ici traités en termes de prise de conscience. En effectuant des prises de conscience, les personnes se rendent compte de ce qui peut ou doit être changé chez elles, chez les autres ou dans l’organisation du travail. Parfois, elles entrevoient ou constatent la nécessité du changement sans nécessairement passer à l’action ou faire des changements majeurs, d’où l’importance de continuer à cheminer et de poursuivre l’accompagnement.

De l’étincelle à l’intégration des prises de conscience Selon Lafortune (2007c), Piaget (1974) considère la prise de conscience comme étant un processus de conceptualisation qui, selon lui, est une reconstruction qui mène à faire des liaisons logiques pour favoriser la compréhension, alors que Channouf (2000) considère la prise de conscience comme étant un processus de conceptualisation résultant d’une reconstruction à partir d’une démarche interne ou d’une intervention externe. Elle suppose une reconnaissance (verbalisée ou non) de l’issue de sa propre démarche soit par une réflexion personnelle ou en étant en interaction avec d’autres. L’expérience du projet à l’origine du modèle permet de constater que certaines prises de conscience sont plutôt superficielles. Ainsi, la personne accompagnée se rend compte que ce qu’elle pensait est plus ou moins juste ou que ses pratiques ne sont pas en cohérence avec ses croyances, ou elle réalise qu’elle doit ajuster la construction de ses connaissances ou de ses compétences en fonction du changement préconisé. Cependant, ces prises de conscience ne sont souvent que des « étincelles de conscience » qui émergent de façon ponctuelle sans toutefois susciter de réels changements. S’il y a des changements, ils ne sont pas intégrés de façon durable à la manière d’intervenir. Piaget (1974) n’utilise pas l’expression « étincelle de conscience » ; cependant, selon lui, certaines prises de conscience se rapportent à des automatismes et sont reliées aux actions présentes. Une prise de conscience plus approfondie suppose une conceptualisation à l’égard de l’action ultérieure. Cet auteur parle du passage de l’éclairage à l’assimilation, ce qui renvoie au passage d’aspects pratiques à conceptuels et signifie qu’une telle prise de conscience mène à des ajustements des actions dans divers contextes.

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

Dans le contexte d’un changement, il apparaît important que les « étincelles de conscience » mènent à une intégration de nouvelles idées, de pratiques novatrices ou au développement de compétences plus efficaces. En ce sens, il importe de susciter une « attention consciente » ou de créer des conflits cognitifs (déséquilibres cognitifs) qui font en sorte que la personne intervenante soit ébranlée, se pose des questions, remette en question ses croyances ou pratiques et passe à l’action. Le passage de l’étincelle à l’intégration des prises de conscience dans l’action ne se fait pas toujours aisément ni de façon systématique. Dans le cadre d’un modèle d’accompagnement socioconstructiviste, susciter des prises de conscience exige de poser des gestes planifiés, d’anticiper les réactions, de reconnaître les prises de conscience dans l’action afin d’en tirer profit et d’inciter à une meilleure intégration de ces prises de conscience dans l’action. Cependant, malgré les actions posées par les personnes intervenantes, il peut arriver que les « étincelles de conscience » ne conduisent pas à des actions concrètes ou à des changements qui sont intégrés à la façon de faire de la personne qui a fait la prise de conscience. Des gestes sont à poser pour passer de l’étincelle à l’intégration des prises de conscience et pour en arriver à un changement durable. Lafortune (2007c) propose six étapes à franchir : 1 Une prise de conscience comme élément déclencheur : une discussion, un questionnaire ou une intervention particulière peuvent déclencher une prise de conscience. 2 Une pensée de vouloir agir : une prise de conscience peut déclencher un désir de passer à l’action, un désir de changer (par exemple, se dire qu’il serait important d’intégrer l’autoévaluation dans ses pratiques). 3 Une interrogation sur le comment faire selon différents contextes : le désir de passer à l’action peut mener à se poser des questions sur le comment faire, sur le comment agir pour que la prise de conscience mène à un changement (par exemple, discuter de moyens d’intégrer l’autoévaluation à ses pratiques). 4 Le passage à l’action : la prise de conscience mène alors à poser des gestes en lien avec les prises de conscience réalisées (par exemple, poser des gestes pour que les personnes accompagnées autoévaluent leurs actions et leurs apprentissages). 5 Un regard sur l’action : les expériences réalisées peuvent mener à un regard critique et analytique sur les actions posées, à propos des répercussions sur les personnes accompagnées (par exemple, discuter en équipe des observations réalisées alors que des moments d’intervention servent à l’autoévaluation).

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6 Une modélisation : conceptualisation ou des liens théoriques à partir de la démarche réalisée. Cette modélisation permet de réinvestir le résultat de la réflexion et des analyses effectuées (par exemple, faire des liens avec le sens de l’autoévaluation ou se donner un modèle d’intervention où l’autoévaluation occupe une place importante). Ces six étapes montrent qu’une « étincelle de conscience » ou une prise de conscience superficielle ne mène pas nécessairement à l’action et à l’analyse de l’action. Une prise de conscience approfondie suppose l’intégration dans sa pratique du résultat des réflexions, ce qui favorise un changement des pratiques ou un changement conceptuel (dans la façon de concevoir ses pratiques ou son modèle de pratiques). L’actualisation des prises de conscience dans le contexte du développement de la pensée réflexive devrait mener à plus de cohérence entre pensées et actions. Selon cette perspective, le modèle d’accompagnement professionnel d’un changement a suscité plusieurs prises de conscience ou constats tels que l’importance de cheminer vers l’exercice d’un leadership d’accompagnement socioconstructiviste en développant des compétences professionnelles pour l’accompagnement ; de collaborer professionnellement avec ses collègues ; de la nécessité de se donner du temps (pour changer et accompagner le changement) et de conserver des traces de l’accompagnement.

Cheminement vers l’exercice d’un leadership d’accompagnement socioconstructiviste Pour les personnes, le modèle correspond à une réponse à un besoin de formation nécessaire à la mise en œuvre d’un changement. Lorsqu’elles accompagnent à leur tour, leurs interventions s’inscrivent davantage dans la perspective d’un accompagnement socioconstructiviste. Le développement de cette posture professionnelle exige toutefois d’avoir une meilleure compréhension de son rôle, de son mandat et du changement à mettre en œuvre. Pour améliorer leur manière d’intervenir, les personnes sont plus conscientes des compétences professionnelles à développer pour accompagner un processus de changement et portent un regard sur le développement de ces compétences parce qu’elles les aident à exercer un leadership d’accompagnement. En participant au projet qui a inspiré le modèle, les personnels se rendent compte que l’accompagnement d’un changement est un processus complexe et que la démarche demande de la rigueur et du temps. Elles prennent aussi conscience de l’importance

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

de la préparation de leurs interventions. Après leur expérience, elles précisent leur ou leurs intentions d’accompagnement et les considèrent dans le déroulement d’une situation ou d’une séquence d’accompagnement. Elles se rendent compte aussi de l’importance et de l’utilité du fil conducteur pour comprendre la démarche et se situer dans la progression de l’accompagnement du changement. Enfin, les personnes constatent que la qualité et le niveau d’engagement influencent grandement la réussite du changement.

Prise de conscience de la nécessité et de l’utilité de la collaboration professionnelle Avec le modèle, les personnes prennent conscience de la nécessité et de l’utilité de travailler en collaboration. Au cours du projet, le travail d’équipe est devenu une expérience enrichissante et stimulante, plus que ce qui était vécu habituellement. Les interactions avec des collègues semblent contribuer au cheminement professionnel. La perception du travail en équipe a considérablement changé : les personnes accompagnées ont le sentiment d’être plus enthousiastes à l’idée de travailler avec d’autres, elles considèrent qu’elles sont plus ouvertes aux idées des autres et plus réceptives au changement. Avec le modèle, elles apprennent à faire davantage confiance aux autres ainsi qu’à leur propre potentiel. Pour certaines personnes, la collaboration professionnelle est intégrée alors que pour d’autres, elle se situe à un niveau de prise de conscience. L’intégration peut venir avec le temps, mais cela n’est pas nécessairement acquis. C’est le temps et la poursuite de réalisations et de réussites collectives qui va changer leurs perceptions du travail en équipe.

Évolution en vue de se donner du temps S’engager dans un processus de changement demande du temps. Du temps pour réfléchir sur les orientations, les fondements et les enjeux du changement, pour s’en parler et pour discuter des effets du changement sur les pratiques. Du temps pour se donner une compréhension et une vision partagées du changement. Du temps pour construire des connaissances à propos du changement, pour examiner ce qui dans les pratiques va dans le sens du changement et ce qu’il faut améliorer pour progresser dans ce sens. Du temps pour lire, structurer sa pensée, revoir son modèle de pratique en comparant ses pratiques à celles qui sont associées au

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changement. Et du temps pour préparer et planifier l’accompagnement du changement. La question du temps (continuité et durée) est primordiale dans l’accompagnement d’un changement surtout s’il est majeur, orienté ou qu’il comporte des éléments de prescription. Cette question revient continuellement au cours des échanges avec les personnels accompagnés, à différents moments de la démarche. Elle suscite de nombreux tiraillements parce que les personnes et les organisations s’accordent difficilement du temps pour faire les choses ; elles sont généralement plus préoccupées par l’idée de ne pas perdre de temps. Avec le modèle, elles se rendent compte que prendre du temps ne veut pas dire perdre son temps. Au-delà de cette prise de conscience, on peut dire qu’en choisissant un modèle d’accompagnement professionnel du changement, les personnes sont passées à l’action en « s’accordant du temps ».

Cheminement en vue de conserver des traces de l’accompagnement Le modèle a plus d’une fois confirmé l’utilité et la nécessité de garder des traces de la démarche, des observations réalisées en cours d’accompagnement, du cheminement des personnes, de leurs moments de réflexion (individuelle ou collective), des discussions de groupe, etc. La conservation de traces permet de réinvestir des aspects de la démarche auprès des personnes accompagnées, de faire des retours, de planifier des suivis et de faire des bilans à différentes étapes de la démarche. En revenant sur leurs traces les personnes observent le chemin parcouru et décident de ce qu’elles voudraient faire pour continuer à progresser dans le processus de changement ou pour poursuivre leur cheminement professionnel.

Reconnaître l’importance et l’utilité de garder des traces Avec le modèle, les personnes se rendent compte de l’importance de garder des traces de leur pratique : elles consignent leurs observations, décrivent leurs interventions (rapport, matériel d’accompagnement), prennent conscience de leur cheminement comme personne qui doit à la fois changer (moments de réflexion, bilans, fiches, journaux d’accompagnement), mais aussi accompagner un changement. Enfin, elles entrevoient la possibilité de transposer cette pratique auprès des personnes qu’elles accompagnent dans le milieu en adaptant le modèle à leur réalité. Cette répercussion est associée à la nécessité de garder des traces.

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

Développer du matériel d’accompagnement Le projet qui a inspiré le modèle a généré beaucoup de matériel tel que des tâches et des situations d’accompagnement, mais aussi différents outils (tâches, grilles, questionnaires). Les personnes se rendent compte qu’elles ont accès à différentes propositions d’accompagnement qu’elles peuvent transposer ou adapter à des dispositifs ou des contextes variés d’accompagnement. Ce matériel peut être consulté sur le site Internet du projet1. S’il y a une aussi grande quantité de matériel disponible, c’est parce que le modèle avait comme condition de conserver des traces de l’accompagnement (rapport d’accompagnement, consignation des situations d’accompagnement telles que réalisées, fusion des situations réalisées d’un groupe à l’autre avec propositions d’adaptations, de transpositions, etc.). Toutes les situations ont été conservées et améliorées dans la perspective de produire du matériel d’accompagnement pour : accompagner de nouveaux groupes ; témoigner de la démarche réalisée d’un groupe à l’autre ou pour l’ensemble des groupes ; réaliser un modèle d’accompagnement professionnel du changement. La première version d’une situation a souvent été écrite sommairement avant d’être revue et enrichie à la suite des interventions menées auprès d’un ou de plusieurs groupes, par des personnes accompagnatrices différentes. La version initiale s’est grandement raffinée au fil des expériences.

INFLUENCE SUR LA MISE EN ŒUVRE DU CHANGEMENT Pour bien comprendre cette dernière répercussion, il est difficile de se détacher du projet d’accompagnement-recherche-formation qui est à l’origine du modèle proposé dans le présent livre. C’est donc en faisant référence à l’éducation que cette dernière répercussion est présentée et explicitée. Lorsque le projet d’accompagnement a débuté, il était clair que l’équipe accompagnatrice voulait que des répercussions se fassent sentir rapidement auprès des élèves, dans la classe. Cependant, même si de telles répercussions ont pu être dégagées, elles ne peuvent être précisées explicitement dans la description des répercussions actuelles compte tenu des personnes visées par le projet (des personnes qui accompagnent des 1.

Le site du projet contient le matériel élaboré dans le cadre du projet à partir duquel a émergé le modèle proposé dans le présent livre : .

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enseignants et enseignantes) qui n’interviennent généralement pas directement auprès d’élèves, mais aussi en considérant le cheminement professionnel qu’ont dû réaliser les personnes accompagnatrices relativement à leur compréhension du changement mais aussi de la nécessité que ces personnes cheminent au plan professionnel considérant la forme que prenait l’accompagnement dans le projet. C’est donc dans ce contexte que des répercussions sont énumérées dans ce qui suit, avec de brèves explications. Plusieurs projets d’action ont été réalisés pour susciter des répercussions pouvant se rendre jusqu’aux élèves. Il s’agit de : ß Développer une perspective de l’évaluation et des outils d’évaluation en respectant les fondements du changement. ß Se préoccuper de l’insertion professionnelle afin que les nouveaux personnels comprennent le sens qui est donné aux actions pour respecter les orientations du changement et pour s’intégrer aux autres personnels dans la même perspective. ß Poser des actions afin de développer une communauté de pratique afin de cheminer vers la collaboration professionnelle. ß Former des dyades ou des triades afin d’accompagner des équipes d’enseignants ou d’enseignantes, par exemple, dans le développement d’un cahier métacognitif à utiliser auprès des élèves pour réaliser une recherche en action et ainsi, pouvoir comparer des interventions qui n’utilisent pas cet outil. ß Transposer de façon assez directe plusieurs dimensions du modèle d’accompagnement professionnel pour des directions d’établissements scolaires et leur personnel enseignant. ß Entrevoir que plusieurs groupes de développement professionnel se forment en respectant plusieurs dimensions du modèle. ß Faire en sorte que des directions des services éducatifs de commissions scolaires s’engagent dans l’accompagnement de leur personnel et ainsi, favorisent l’engagement dans le changement. ß Accompagner divers projets relatifs à l’évaluation comme soutenir l’encadrement en évaluation ou guider l’élaboration de situations d’apprentissage et d’évaluation. ß Faire réfléchir aux croyances et pratiques afin de reconnaître ce qui va ou non dans le sens du changement pour mieux entrevoir le renouvellement des pratiques.

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

ß Développer une autonomie chez plusieurs groupes qui peuvent se prendre en main pour développer leurs propres projets d’accompagnement. ß Faire réfléchir des groupes qui avaient déjà des projets d’accompagnement amorcés, mais qui se rendent compte de changements à apporter pour mieux rejoindre le personnel enseignant et les élèves. ß Donner un nouveau sens à la supervision pédagogique à travers des entretiens d’accompagnement, ce qui aide à la réflexion et au développement d’un leadership associé à l’accompagnement d’un changement. La supervision pédagogique devient un accompagnement pédagogique ß Donner un nouveau sens à la « conseillance » pédagogique pour une fonction à définir en tenant compte de l’accompagnement selon le modèle proposé. Cette liste ne peut être exhaustive principalement parce que tous les projets réalisés ne sont pas connus compte tenu des équipes qui ont participé au projet pendant 6, 8, 10, 20… jours sur une possibilité de 8, 12, 20, 30 jours. Il n’était pas prévu de suivre les équipes accompagnatrices au-delà du moment où elles participaient au projet. Cependant, plusieurs données de recherche qui relatent des perspectives de projets à réaliser, amorcés ou en cours montrent des répercussions qui pourraient être relatées dans un ou deux ans, après une collecte de données réalisées lors d’un suivi du projet.

ß ß ß Pour conclure ce chapitre, rappelons que les répercussions ont été ciblées par les personnes qui ont participé au projet qui a inspiré ce modèle. Certaines répercussions se rapportent à certaines conditions qui favorisent le changement et ne seraient probablement pas ressorties si ces conditions n’avaient pas été mises en place préalablement. Une organisation qui ne mettrait pas en œuvre ces conditions ne pourrait pas s’attendre à de telles répercussions.

CONCLUSION

Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement saura inspirer les personnes et les organisations qui ont à mettre en œuvre un changement orienté, prescrit ou qui comporte des éléments de prescription. Selon l’ampleur et la complexité du changement, selon le type d’institution, d’entreprise ou d’organisation, l’accompagnement de personnels peut constituer un véritable défi. En cherchant à introduire un changement majeur, les organisations rencontrent toutes sortes de résistances et ont à composer avec la grande insécurité des personnels face au changement. L’expérience a montré que le changement ne s’impose pas et qu’il est nécessaire de donner aux personnes le temps de s’approprier le changement pour mieux le comprendre. Le modèle proposé permet de rejoindre un grand nombre de personnes et de les soutenir en travaillant directement avec ceux et celles qui seront appelés à vivre et à accompagner le changement et assurer son rayonnement dans le milieu. Les personnes s’engagent alors dans le processus de changement en examinant et en réfléchissant à leurs pratiques professionnelles au regard de celles qui devraient être préconisées. Sinon, elles peuvent très bien concevoir l’utilité du changement sans pour autant vouloir changer. Elles cherchent à préserver le modèle de pratique qu’elles se sont appliquées à élaborer au cours de leur vie professionnelle. Bien que le modèle facilite la compréhension

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

et l’approfondissement des aspects liés au changement et le développement de compétences professionnelles pour l’accompagnement de ce processus, c’est surtout la remise en question de pratiques antérieures dans une perspective de renouvellement qui va assurer la progression et la pérennité du changement dans un établissement, une organisation ou une entreprise. Par contre, la confrontation et la remise en question de pratiques s’avèrent un exercice difficile et déstabilisant, mais aussi dérangeant. Accepter les effets positifs du changement demande du temps et la démarche comporte une large part d’inconnu pour les personnels, d’où l’importance de les accompagner dans leur cheminement pour suivre leur évolution. On peut toujours décréter le changement, mais décret n’égale pourtant pas changement. Sans accompagnement et suivi, le changement risque d’être superficiel. Et on peut se demander si les nouvelles pratiques vont continuer à se faire dans les milieux de travail. Comment assurer l’intégration durable de ces pratiques si les personnels ne donnent pas un sens au changement demandé, s’ils n’en partagent pas une vision avec leurs collègues, s’ils ne prennent pas de décisions, ne posent pas d’actions ou de gestes professionnels qui vont dans le sens du changement à mettre en œuvre ? S’il n’y a pas une réelle volonté de mettre en place les conditions nécessaires à sa réussite. En ce qui a trait aux perspectives découlant de ce modèle d’accompagnement professionnel d’un changement, certaines concernent la recherche et d’autres l’accompagnement-formation. Au plan de la recherche, il serait intéressant de valider le modèle dans divers domaines et d’entrevoir les adaptations à faire selon le type d’organisation et selon l’ampleur et le type de changement à réaliser. Au plan de l’accompagnement-formation, il pourrait être envisagé d’utiliser le référentiel de compétences professionnelles pour l’accompagnement d’un changement (Lafortune, 2008) et le modèle avec des personnes accompagnatrices qui préparent l’accompagnement dans leur milieu. Ce serait intéressant de les aider à développer une autonomie réflexive-interactive alors qu’elles utiliseraient ces documents. Elles auraient alors à autoévaluer leurs compétences et leur cheminement professionnel dans la démarche, mais aussi à entrevoir la collaboration à réaliser pour démontrer leur autonomie et leur capacité d’accepter le regard des autres pour mieux cheminer. Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement a été écrit pour rendre compte des résultats d’une expérience tout en visant la transposition dans divers domaines, contextes et situations de changement. C’est dans cette perspective de transposition que le modèle est proposé en lien avec Compétences professionnelles pour l’accompagnement d’un changement. Un référentiel (Lafortune, 2008).

ANNEXE

1

FICHES DE SUIVI DES RENCONTRES FICHES COMPLÉTÉES LORS DES RENCONTRES FAISANT RÉFÉRENCE AUX APPRENTISSAGES RÉALISÉS ET AUX DÉFIS ENVISAGÉS PAR LES PERSONNES ACCOMPAGNÉES Au début du projet, les fiches étaient distribuées à la fin de la deuxième journée de la rencontre. À partir de 2005-2006, certaines personnes accompagnatrices ont commencé à donner la fiche aux personnes accompagnées à la fin de la première journée afin de leur donner plus de temps pour y répondre. Cette façon de faire permettait de ne pas perdre des informations relatives à la première journée au profit de la deuxième journée parce que le processus et les contenus abordés étaient plus présents à la mémoire des personnes. Puis, de 2006 à 2008, la fiche a été distribuée dès le début de la première journée, ainsi les personnes pouvaient compléter les fiches lorsqu’elles le désiraient ou à des moments particuliers de la rencontre.

QUESTIONS DE LA FICHE, RENCONTRES 1 ET 2 ß Quels apprentissages croyez-vous avoir faits au cours de ces deux journées de formation ? ß Expérience(s) ou défi(s) à réaliser d’ici la prochaine rencontre.

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

QUESTIONS DE LA FICHE, RENCONTRES 3-4 ß Quels apprentissages croyez-vous avoir faits au cours de ces deux journées de formation ? ß Qu’est-ce qui semble avoir favorisé ces apprentissages ? ß Expérience(s) ou défi(s) à réaliser d’ici la prochaine rencontre.

QUESTIONS DE LA FICHE, RENCONTRES 5-6 ß Quels apprentissages croyez-vous avoir faits au cours de ces deux journées de formation ? ß Comment croyez-vous pouvoir réinvestir ces apprentissages auprès des personnes que vous accompagnez ? ß Expérience(s) ou défi(s) à réaliser d’ici la prochaine rencontre. ß Quelles conditions facilitent la réalisation de cette (ces) expérience(s) ?

QUESTIONS DE LA FICHE, RENCONTRES 7-8 ß Quels apprentissages croyez-vous avoir faits au cours de ces deux journées de formation ? ß Comment croyez-vous pouvoir réinvestir ces apprentissages auprès des personnes que vous accompagnez ? ß Quelle(s) expérience(s) comptez-vous réaliser d’ici la prochaine rencontre ? (Préciser le thème, le contexte, les conditions ou autres éléments qui aident à comprendre cette expérience.) ß En quoi les apprentissages, réflexions et actions réalisés dans le cadre du projet accompagnement-recherche-formation et dans votre milieu favorisent-ils l’actualisation du Programme de formation de l’école québécoise ?

QUESTIONS DE LA FICHE, RENCONTRES 9-10 ß Quels apprentissages croyez-vous avoir faits au cours de ces deux journées de formation ? ß Comment croyez-vous pouvoir réinvestir ces apprentissages auprès des personnes que vous accompagnez ? ß Quelle(s) expérience(s) comptez-vous réaliser d’ici la prochaine rencontre ? (Préciser le thème, le contexte, les conditions ou autres éléments qui aident à comprendre cette expérience)

Annexe 1 — Fiches de suivi des rencontres

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ß En quoi les apprentissages, réflexions et actions réalisés dans le cadre du projet accompagnement-recherche-formation et dans votre milieu favorisent-ils l’actualisation du Programme de formation de l’école québécoise ?

QUESTIONS DE LA FICHE, RENCONTRES 11-12 ß Quels apprentissages visez-vous au regard du développement de vos compétences pour l’accompagnement, au cours de ces deux journées ? ß Quels apprentissages croyez-vous avoir faits ? ß Qu’est-ce que vous croyez changer dans votre pratique d’accompagnement ? ß Par quelles actions, expériences ces changements vont-ils se traduire, se réaliser ? (Préciser le thème, l’intention, les conditions ou autres éléments qui aident à comprendre cette action ou expérience) ß En quoi les apprentissages, réflexions, actions ou expériences réalisées ou à réaliser dans le cadre du projet accompagnementrecherche-formation et dans votre milieu favorisent-ils la mise en oeuvre du PFEQ ? ß Quel est votre degré de satisfaction au regard de l’intention d’apprentissage que vous vous étiez donnée ? En quoi s’est-elle confirmée, précisée ou modifiée ?

QUESTIONS DE LA FICHE 2007-2008 ß Au regard du développement de mes compétences professionnelles à l’accompagnement : a) Mes intentions d’apprentissage sont… b) Les apprentissages que je réalise sont… c) Les conditions que je considère favorables au développement de mes compétences professionnelles à l’accompagnement sont… ß Au regard de mon projet d’action : a) Les actions que j’ai posées sont… b) Les actions que je prévois poser sont…

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

ß Au regard des actions professionnelles de mon accompagnement : a) Les répercussions que je perçois dans mon cheminement professionnel sont… b) Les répercussions que je perçois dans le cheminement professionnel des personnes accompagnées sont… c) Les conditions que je considère favorables pour l’accompagnement sont… ß Mes constats, réflexions, prises de conscience, etc. sont…

ANNEXE

2

FICHES UTILISÉES POUR LES BILANS

Lors des bilans, les personnes effectuaient un retour sur les fiches (voir annexe 1) qu’elles avaient complétées au fil des rencontres pendant la dernière année. Après avoir examiné la série de fiches, elles complétaient les fiches utilisées pour les bilans, ce qui les amenait à faire un retour sur leur cheminement, leur rôle et les répercussions de la démarche dans leur milieu (fiche 1), sur l’importance et l’utilité de conserver les traces de cet accompagnement (fiche 2) et les perspectives du travail d’intervention souhaité pour l’année suivante (fiche 3).

Fiches utilisées en 2005 FICHE 1 (CHEMINEMENT DE LA PERSONNE ACCOMPAGNÉE) ß À la suite de la lecture des fiches complétées tout au long des rencontres, écrire trois énoncés qui résument votre cheminement dans le projet accompagnement-recherche-formation. ß Quels éléments de la démarche ont le plus contribué à votre rôle de personne accompagnatrice ?

228

Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

ß Quelles répercussions associez-vous à cette démarche et aux actions posées dans votre milieu pour mettre en œuvre le Programme de formation de l’école québécoise ?

FICHE 2 (GARDER DES TRACES) ß En quoi le fait de garder des traces peut-il être utile à l’accompagnement ? ß De quelles manières ces fiches et cette façon de procéder pourraientelles être réinvesties avec les personnes que vous accompagnez ? ß Comment pourrait-on inciter les personnes accompagnées à garder des traces de leurs interventions pour les années 4 et 5 du projet (2005-2007) ?

FICHE 3 (PERSPECTIVES POUR 2005-2007) ß Pour la suite du projet accompagnement-recherche-formation, quel type d’intervention souhaiteriez-vous de la part de l’équipe accompagnatrice provinciale ? ß Selon vous, en quoi ce type d’intervention peut-il rejoindre les visées du projet accompagnement-recherche-formation ? ß En quoi et comment ce type d’intervention favorise t-il l’accompagnement de l’actualisation du Programme de formation de l’école québécoise dans votre milieu ?

Fiches utilisées en 2007 FICHE 1 (CHEMINEMENT DE LA PERSONNE ACCOMPAGNÉE) ß Après la lecture des fiches complétées tout au long des rencontres, quels aspects de votre cheminement dans le projet accompagnementrecherche-formation sont le plus à souligner ? (apprentissages réalisés, pratique réflexive, questionnement, auto-observation, actions, éléments en lien avec la mise en œuvre du Programme de formation de l’école québécoise (PFEQ) et avec votre pratique). ß Quels aspects (contenu, processus) du projet accompagnementrecherche-formation ont le plus contribué à développer : a) votre rôle de personne accompagnatrice ? b) votre leadership d’accompagnement ?

Annexe 2 — Fiches utilisées pour les bilans

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ß Décrire des actions qui ont été réalisées ou qui seront réalisées ou des changements que vous percevez dans votre milieu au regard de la mise en œuvre du PFEQ et que vous associez à votre rôle de personne accompagnatrice ou à votre leadership d’accompagnement.

FICHE 2 (GARDER DES TRACES) ß En quoi le fait de garder des traces a) vous a-t-il été utile ? b) a-t-il été utile aux personnes que vous accompagnez ? ß En quoi, le fait de garder des traces peut-il être utile à l’accompagnement ? ß De quelles manières ces fiches et cette façon de procéder pourraientelles être réinvesties avec les personnes que vous accompagnez ? ß Comment pourrait-on inciter les personnes accompagnées à garder des traces de leurs interventions ?

POSTFACE

Vers l’élaboration de son propre modèle Il faut une bonne dose de lucidité pour aller au-delà de la croyance ethnocentrique sur l’universalité de nos pratiques, surtout lorsqu’il s’agit d’aider les autres à changer. Les gestionnaires et conseillers devant assurer l’évolution de pratiques adaptées à des exigences nouvelles ainsi que leur encadrement doivent prendre conscience que le changement peut aussi être requis dans leurs propres pratiques. L’effort en vaut cependant la peine, surtout quand l’intensité du changement est forte et le nombre de personnes visées, important. C’est présentement le cas dans bien des domaines, notamment en éducation. L’importance des défis qui confrontent le milieu scolaire dans cette période intensive de renouvellement pédagogique et le besoin de précisions sur les modalités permettant de leur faire face justifient la publication de Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement, document complémentaire à celui intitulé Compétences professionnelles pour l’accompagnement d’un changement.

232

Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

Comprendre et adhérer à un changement sont des conditions essentielles mais insuffisantes à la modification réelle des façons de faire : la ou les personnes concernées doivent d’abord retrouver une sécurité professionnelle dans les nouvelles pratiques. C’est pourquoi l’accompagnement rassurant d’une tierce personne est si utile. Cet accompagnement permet de faciliter la transition entre, d’une part, des méthodes intégrées mais possiblement non adaptées aux défis contemporains et, d’autre part, de nouvelles façons de faire prometteuses mais pas encore maîtrisées. Avec cette deuxième publication, l’équipe de recherche de madame Louise Lafortune nous offre un complément au premier ouvrage issu de la recherche-formation menée à la grandeur du Québec sur la mise en œuvre des changements afférents au renouvellement du curriculum du préscolaire à la fin du secondaire. Bien que dans 10 des 11 régions administratives engagées l’évolution des démarches se soit faite de façons différentes, il a été possible de dégager des éléments communs à la base du modèle proposé dans le présent ouvrage. Cela démontre qu’au-delà des aspects anecdotiques des pratiques d’accompagnement se trouvent des stratégies et des principes communs transférables dans d’autres contextes. L’intérêt de ce livre est donc d’offrir un modèle à la fois théorique et pratique à des milieux ayant des caractéristiques diversifiées et faisant face à des défis de changement variés. Le titre de l’ouvrage annonce un MODÈLE. Sa lecture nous permet de bien cerner les forces d’un modèle de référence souple et adaptable au contexte. Il incite à accompagner les personnes dans l’action, dans leur milieu, et ce, pour une période de temps suffisante au développement de nouvelles pratiques. Il rappelle l’importance de cultiver la cohérence par la construction d’une vision partagée dans une équipe de travail, mais aussi par un réseautage plus large avec des milieux cherchant à relever les mêmes défis. La cohérence est un mot clé dans ce modèle car elle est à la fois le but visé et un élément important du mécanisme de changement. C’est par l’analyse de la cohérence entre l’intention de changement et les pratiques en cours que peuvent émerger de nouvelles pratiques. Il ne s’agit pas de faire table rase des pratiques antérieures, mais de les faire évoluer en cohérence avec des intentions nouvelles. Pour les personnes accompagnées c’est l’objectif d’intervention qui est l’objet principal de métacognition alors que, pour les accompagnateurs, ce sont les mécanismes mêmes du changement qui doivent retenir l’attention. Ce document présente donc un modèle d’organisation et de structuration de l’accompagnement à l’aide d’exemples, d’outils et de stratégies. Cette dimension pratique en fait une ressource essentielle pour qui

233

Postface

veut passer à l’action et soutenir des changements. De plus, un site Internet1 conçu comme lieu de partage de l’information rend accessibles non seulement à l’ensemble du réseau de personnes accompagnées, mais aussi à la communauté élargie, des réflexions, des outils et du matériel d’accompagnement. En somme, ce livre est un excellent support à une réflexion sur le changement, et une banque de ressources pratiques sur la manière de l’accompagner. Il devrait contribuer à une meilleure compréhension du changement, de ses effets et des défis auxquels sont confrontées les personnes et les organisations. Il est ainsi un excellent modèle d’une recherche-accompagnement-formation duquel on a su tirer des leçons pour en faire bénéficier un public plus large œuvrant dans divers contextes. Il reste à chaque lecteur à préciser sa conception du changement et de l’accompagnement pour particulariser son propre modèle. Il pourra ensuite continuer à réinvestir dans le développement de ce modèle le fruit de ses expériences en se rappelant que le partenariat est l’ingrédient essentiel d’une vision partagée du changement. Margaret Rioux-Dolan Ancienne directrice générale Direction générale de la formation des jeunes (DGFJ) Ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport

1.

Adresse du site : .

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

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NOTICE BIOGRAPHIQUE

Louise Lafortune, Ph. D., est professeure titulaire au Département des sciences de l’éducation de l’Université du Québec à Trois-Rivières. Elle est auteure de plusieurs articles et livres portant sur l’affectivité et la métacognition dans l’apprentissage, la problématique Femmes et maths, sciences et technos, la pédagogie interculturelle, la perspective d’une équité sociopédagogique, la philosophie pour enfants adaptée aux mathématiques, la formation continue, l’accompagnement socioconstructiviste d’une réforme en éducation ou d’un changement, la pensée réflexive, le travail en équipe-cycle ou en équipe de collègues et le jugement professionnel. Ses expertises particulières sont axées sur la dimension affective de l’apprentissage en général et celui des mathématiques et sur l’accompagnement socioconstructiviste d’un changement orienté ou prescrit. Elle vient de terminer un projet d’accompagnement-rechercheformation de la mise en œuvre du Programme de formation de l’école québécoise (MELS-UQTR, 2002-2008). Les ouvrages publiés à partir de ce projet sont : Compétences professionnelles pour l’accompagnement d’un changement. Un référentiel et Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement. Pour un leadership novateur (Lafortune, 2008).

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Un modèle d’accompagnement professionnel d’un changement

Elle prépare actuellement des livres portant sur : la dimension affective de l’accompagnement, une écriture professionnelle et professionnalisante pour cheminer dans le changement, la pratique réflexiveinteractive, les méthodes de recherche adaptées à la recherche-action. [email protected].