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Tube de Pitot Le tube de Pitot et l'antenne de Prandtl sont des dispositifs identiques de mesure de vitesse des fluides. Ils sont surtout utilisés pour l'anémométrie en aéronautique.
Catégories : Capteur - Composant électronique - Mécanique des fluides - Instrument de pilotage
Tube de Pitot
Le tube de Pitot et l'antenne de Prandtl sont des dispositifs identiques de mesure de vitesse des fluides. Ils sont surtout utilisés pour l'anémométrie en aéronautique. Il doit son nom au physicien français Henri Pitot qui propose en 1732, un système de mesure des eaux courantes et de la vitesse des bateaux. Ce premier appareil de mesure est ensuite perfectionné par Henry Darcy puis par Ludwig Prandtl.
Historique Le tube de Pitot doit son nom au physicien français Henri Pitot (1695-1771) qui fut le premier en 1732 à proposer une «machine pour mesurer la vitesse des eaux courantes et le sillage des vaisseaux»[1][2]. Le concept est repris et perfectionné par l'ingénieur français Henry Darcy[3] puis par Ludwig Prandtl qui pense à utiliser le tube dans une canalisation pour mesurer les vitesses locales d'écoulement des fluides. En aéronautique, du point de vue technologique, il est le successeur du dispositif Etévé. Le tube de Pitot est un élément constitutif du système anémobarométrique.
Principe
Nomenclature des tubes de Pitot. Le tube de Pitot simple mesure la pression totale ; la sonde statique mesure la pression statique ; la version combinée est l'antenne ou tube de Prandtl ou tube de Pitot statique qui permet la mesure de la pression dynamique.
Schéma d'une antenne de Prandtl standardisée.
Un tube de Pitot-statique ou tube de Prandtl (ou antenne de Prandtl) est constitué de deux tubes coudés concentriques dont les orifices, en communication avec le fluide dont on veut mesurer la vitesse, sont disposés de façon spécifique :
Le tube extérieur s'ouvre perpendiculairement à l'écoulement du fluide. La pression au sein de ce tube est par conséquent égale à la pression ambiante ou pression statique ; Le tube intérieur est parallèle à l'écoulement du fluide, et est ouvert en son bout, face au flux. La pression au sein de ce dernier est par conséquent la pression totale, somme de la pression statique et de la pression dynamique. Un manomètre mesure la différence de pression entre les deux tubes, c'est-à-dire la pression dynamique, et permet par conséquent de calculer la vitesse d'écoulement du fluide autour du tube. Cette vitesse correspond au vent relatif et est , en aéronautique, une des informations essentielles pour le pilote qui doit toujours maintenir son appareil au-dessus de sa vitesse de décrochage, et au-dessous de sa vitesse maximale. Elle permet en outre, connaissant la vitesse du vent, de calculer la vitesse sol et la consommation de l'aéronef.
Calcul de la vitesse Cas de l'écoulement incompressible
Principe de fonctionnement de l'antenne de Prandtl : le tube de Pitot sur le front de l'écoulement apporte la pression totale Pt, une prise localisée latéralement apporte la pression statique ; un manomètre différentiel apporte la différence des deux, c'est-à-dire la pression dynamique.
Dans le cas d'un écoulement incompressible (c'est-à-dire en régime subsonique pour un nombre de Mach inférieur à 0, 4), le calcul de la vitesse est effectué par application du théorème de Bernoulli. On néglige alors le terme z pour avoir une relation directe entre la vitesse et la pression dynamique pt -ps qu'on mesure avec un capteur de pression ou un simple manomètre.
v = vitesse
ps = pression statique pt = pression totale ρ = masse volumique du fluide
Terminologie L'utilisation du terme de pression dynamique mérite d'être explicitée. Le tube de Pitot mesure deux pressions. L'une est une pression statique qui est la pression atmosphérique au sens habituel du terme, et qui dépend de l'altitude. L'autre est une pression totale, qui comprend un terme appelé dynamique (égal à ½·ρ·v² dans les conditions du théorème de Bernoulli), homogène à une pression mais qui dépend de l'écoulement et non de la pression atmosphérique. Ce terme correspond à l'énergie cinétique de la particule de fluide de volume unitaire animée de la vitesse v.
Cas de l'écoulement compressible Dans le cas d'un écoulement compressible (nombre de Mach supérieur à 0, 4), il faut utiliser la formulation du théorème de Bernoulli étendue aux écoulements compressibles. En négligeant la différence d'altitude z, la relation suivante est utilisée pour calculer le nombre de Mach :
(pour M < 1) M = nombre de Mach pt = pression totale ps = pression statique γ = rapport des capacités calorifiques du fluide Cp/Cv. En pratique, on ne s'intéresse plus à la mesure de la pression dynamique définie comme pt - ps ; les dispositifs conçus pour cette gamme de vitesse mesurent les pressions statique et totale scindément et communiquent les valeurs à un calculateur.
Écoulement supersonique Dans le cas de l'écoulement supersonique (nombre de Mach supérieur à 1), la pression dynamique n'a plus d'interprétation physique simple. Il faut inverser la formule de Rayleigh pour obtenir le nombre de Mach :
(pour M > 1) Les symboles ont la même signification que dans les formules plus haut.
Applications Marine
Le tube de Pitot est un des dispositifs de loch utilisé sur les navires. Il est fréquemment positionné sous la quille et est calibré lors d'un essai de vitesse [4]. La mesure de la vitesse d'un bateau utilisant une mesure de pression peut remonter aux expériences de Charles Grant, vicomte de Vaux (1807), plus tard perfectionné par le révérend Edward Lyon Berthon (1849), qui combine dans un seul dispositif la mesure statique et dynamique.
Aéronautique
Tube de Pitot localisé sur un avion commercial. Ce dernier est combiné avec un détecteur d'angle d'attaque.
En aéronautique, le dispositif Pitot-statique (antenne de Prandtl, mesurant la différence de pression entre la prise statique et la prise dynamique) est utilisé pour les appareils dont la vitesse est particulièrement inférieure à la vitesse du son à leur altitude. Pour les appareils se déplaçant à un nombre de Mach s'approchant de 1, les deux prises de pression sont scindées (tube de Pitot d'une part et prise statique d'autre part) et transmettent leurs informations à l'ADC. Les tubes de Pitot sont localisés soit sur le nez de l'appareil (en particulier pour les avions de chasse), soit sous les ailes.
Designs spécifiques
Tube de Pitot élargi à son nez équipant un McDonnell Douglas F/A-18 Hornet.
Dans le cas des avions de chasse, les vitesses élevées et les angles auxquels l'avion peut se déplacer font que des formes spéciales de tubes ont été développées, soit présentant plusieurs ouvertures, soit présentant un tube élargi et un tube plus fin au centre, ce dernier uniquement permettant de la mesure de la pression dynamique. Par principe, les dispositifs à tubes de Pitot ne fournissent de mesure que s'ils sont positionnés en face de l'écoulement. Pour les cas où la vitesse perpendiculaire au plan de l'appareil doit être mesurée, des sondes anémoclinométriques peuvent être utilisées ; certains modèles sont basées sur un tube de Pitot, présentant plusieurs ouvertures (5 ou
7). La comparaison des pressions provenant de chaque tube sert à déterminer l'angle et la vitesse de l'écoulement.
Automobile
Véhicule de Formule 1 de modèle Renault R25, équipé d'un tube de Pitot.
Le tube de Pitot est utilisé dans l'automobile, dans les cas où la vitesse ne peut pas être déduite seulement de la vitesse de rotation des pneus.
Autres applications Article détaillé : anémomètre.
Anémomètre basé sur un tube de Pitot.
Le tube de Pitot est parfois utilisé comme anémomètre, pour application à la météorologie. En effet, sa mesure est en réalité celle du vent relatif. Si le système est fixe, il mesure alors la vitesse du vent. Le tube de Pitot présente en outre l'avantage d'être un dispositif particulièrement robuste, comportant peu de pièces mécaniques en mouvement susceptibles d'être endommagées.
Erreurs de mesure et défauts de fonctionnement Tube de Pitot bouché Quand un tube de Pitot (mesurant la pression totale) est bloqué, la mesure de vitesse du véhicule n'est plus envisageable[5]. La conséquence immédiate d'un blocage du tube de Pitot bouché est une mesure erronée d'une vitesse en augmentation tandis que l'avion prend de l'altitude [6].
L'obstruction du tube de Pitot sur un avion est le plus fréquemment causée par l'eau, la glace ou les insectes. Pour la prévenir, les règlements de l'aviation prévoient une inspection du ou des tubes de Pitot préalable au vol [7]. En outre, de nombreux systèmes à tubes de Pitot sont équipés d'un dispositif de dégivrage (ce dernier étant requis pour les appareils certifiés pour le vol aux instruments) [5]. À cause des nombreux cas envisageables de défaillance, les avions importants comportent fréquemment un dispositif redondant de plusieurs sondes Pitot, le plus souvent au moins 3. Ainsi, si l'une des sondes se met à donner des résultats trop différents des autres, alors on peut inférer qu'elle est défectueuse et ignorer ses indications [8]. (S'il n'y en avait que 2, on ne pourrait alors pas savoir laquelle est en panne, puisqu'une défaillance peut provoquer la lecture d'une vitesse supérieure ou inférieure suivant le cas). Qui plus est , certains avions sont équipés d'une sonde Pitot rétractable supplémentaire, utilisable en cas de besoin.
Prise de pression statique bouchée Quand la prise de pression statique est bouchée, l'ensemble des instruments basés sur le dispositif de Pitot sont affectés : l'altimètre reste à une valeur constante, la vitesse verticale reste nulle, la vitesse de l'appareil sera erronée, selon une erreur inverse au cas du tube de Pitot bouché : l'indication de vitesse semblera diminuer lorsque l'avion monte en altitude. Les appareils dont la cabine n'est pas pressurisée disposent fréquemment d'une sonde statique de secours qui peut être connectée depuis l'intérieur du cockpit [5].
Défauts intrinsèques
Erreurs de densité. Ces erreurs affectent les mesures de vitesse et d'altitude. Cette erreur est due aux variations de pression de l'atmosphère qui ne sont pas liées à l'altitude (météorologie).
Erreur de compressibilité. Ces erreurs de mesure surviennent quand l'approximation du régime incompressible ne peut plus être faite et que la formule calculant la vitesse ne s'applique plus. Cette erreur intrinsèque se produit surtout aux altitudes élevées, où la vitesse du son est inférieure à sa valeur au niveau de la mer. Ces erreurs deviennent significatives pour des altitudes supérieures à 10 000 pieds et pour des vitesses supérieures à 200 nœuds. Dans ces conditions, l'indicateur de vitesse rapporte une vitesse inférieure à la vitesse réelle de l'appareil.
Hystérésis mécanique due aux propriétés de la capsule anéroïde contenue dans l'instrument de mesure. Cet effet d'hystérésis peut être causé par un changement anormal dans l'inclinaison de l'appareil. Cette erreur se définit par une valeur momentanément fausse dans la mesure de l'inclinaison, puis lors du renversement d'hystérésis, dans la mesure d'altitude et la mesure de la vitesse verticale.
Erreur de position. Cette erreur se présente quand la pression statique mesurée par le tube est différente de la pression atmosphérique réelle loin de l'appareil, surtout quand l'écoulement de l'air autour de l'appareil n'est pas égale à la vitesse réelle de l'appareil. Cela peut être causé par un ou plusieurs facteurs : l'angle d'attaque, poids de l'appareil, accélération... et , dans le cas des hélicoptères, au flux d'air créé par le mouvement des pales. L'erreur de lecture peut être positive ou négative selon les facteurs en cause. Les erreurs de positions peuvent être une valeur fixe (qui ne dépend que du modèle de l'appareil et peut par conséquent être calibrée) et les erreurs variables qui peuvent provenir de déformations mécaniques changeant localement l'écoulement de l'air, ou des situations de vol spécifiques.
Accidents aériens dus à un problème sur un tube de Pitot Si ces tubes sont encrassés par du givre, des débris, des insectes, une mesure incorrecte de vitesse est apportée aux pilotes ainsi qu'aux instruments de bord de l'avion. Une mesure erronée de vitesse sur des tubes de Pitot a été mise en cause dans plusieurs catastrophes aériennes :
vol Northwest Orient Airlines 6231 (décembre 1974, oubli de connexion du dispositif de dégivrage du tube de Pitot[9]) ; avion de chasse expérimental Rockwell-MBB X-31 (19 janvier 1995, au nord de la Base d'Edwards, Californie). vol 301 Birgenair (février 1996, suspicion de présence de nids d'insectes dans les tubes) ; Vol Æroperú 603 (es) (octobre 1996, obstruction des tubes suite à une erreur humaine) ; vol Austral Líneas Aéreas 2553 (octobre 1997, givrage des tubes lors d'un passage dans un nuage) ; Le 8 janvier 2004 à 18h26, une patrouille de deux Mirage 2000 D ayant pour indicatif «Condé 336» décolle du terrain de Nancy-Ochey pour une mission d'entraînement à la pénétration basse altitude, comprenant un transit en haute altitude pour rejoindre un ravitailleur. Au cours du transit vers le ravitailleur, une descente est effectuée vers un niveau inférieur sur ordre du contrôle aérien. Durant cette phase, l'équipage d'un des Mirage 2000 D remarque une diminution continue de la vitesse qui lui semble incohérente avec la position de la manette des gaz. Le pilote stabilise le Mirage à 26.000 pieds. L'équipage ressent immédiatement des oscillations sur l'axe de tangage, qui persistent après coupure du pilote automatique. Quand le pilote met pleins gaz sec afin d'accélérer, les oscillations s'augmentent et l'avion devient alors incontrôlable. L'appareil s'écrase près des gorges du Tarn dans une zone inhabitée et les deux membres d'équipage sont un peu blessés lors de l'éjection. L'enquête du BEAD-air[10] conclura que l'indication de vitesse lue par le pilote était erronée à cause de l'obstruction de l'ensemble des sondes de Pitot et ce à cause du givrage et des opérations de maintenance. Le pilote ne disposant pas de suffisamment de temps pour identifier la panne a alors conclu que la faible vitesse affichée était la vitesse réelle de l'avion. Son action sur les gaz a ensuite contribué à déstabiliser l'appareil[11]. C'est aussi l'une des hypothèses envisagées par les média dans les jours ayant suivi la catastrophe du vol 447 Air France (juin 2009) [12]. Une douzaine d'incidents impliquant les sondes de marque Thalès auraient touché les A330 de la compagnie Northwest Airlines, le dernier datant du 23 juin 2009 [13][14].
Notes et références 1. 2. 3. 4. 5. 6.
↑ Henri Pitot, «Description d'une machine pour mesurer la vitesse des eaux courantes et le sillage des vaisseaux», dans Histoire de l'Académie royale des sciences avec les mémoires de mathématique et de physique tirés des registres de cette Académie, 1732, p. 363-376 [[pdf] texte intégral (page consultée le 19/06/2009) ] ↑ Pierre Humbert, «L'œuvre mathématique d'Henri Pitot», dans Revue d'histoire des sciences et de leurs applications, no 6, 1953, p. 322-328 [[pdf] (page consultée le 19/06/2009) ] ↑ Henry Darcy, «Note relative à quelques modifications à introduire dans le tube de Pitot», dans Annales des Ponts et Chaussées, 1858, p. 351-359 [[pdf] texte intégral (page consultée le 31/07/2009) ] ↑ C. Tupper, Introduction to naval architecture, page 209.2004 (ISBN 9780750665544) lire en ligne Flight Instruments - Level 3 - Pitot-Static System and Instruments ↑ La raison physique est la suivante : la mesure d'altitude est correctement réalisée par la prise de pression statique ; la pression statique baisse avec l'altitude. Pendant ce temps, la pression totale mesurée
7. 8. 9.
10. 11. 12. 13. 14.
reste constante, parce que la prise de pression dynamique est bouchée. La différence des deux donne une augmentation apparente de la pression dynamique, d'où une vitesse erronément plus importante. ↑ [pdf] Pilot Handbook - Chapters 6 through 9 ↑ Sylvain Mouillard, «Air France a-t-il tardé à remplacer les sondes Pitot ?», Libération, 9 juin 2009. ↑ Aviation-safety, citant le [pdf] rapport d'enquête officiel (page numérotée 21, 24 e page du document PDF) : «The stall was precipated by the flight crew's improper reaction to erroneous airspeed and Mach indications which had resulted from a blockage of the pitot heads by atmospheric icing. Contrary to standard operational procedures, the flightcrew had not activated the pitot head heaters. » (Le décrochage fut précipité par une réaction incorrecte de l'équipage due aux indications erronées de la vitesse à cause de l'obstruction des tubes de pitot par du givre. Contrairement aux procédures habituelles, l'équipage n'avait pas activé les dégivreurs de tubes de pitot) ↑ Le BEAD-air : activité d'enquête Le BEAD-air ↑ BEAD-air :Rapport publique d'enquête ↑ Airbus : l'enquête se focalise sur une défaillance des capteurs de vitesse , nouvelle AFP datée du 6 juin 2009. ↑ (en) Airspeed Systems Failed on U. S. Jets, NY Times, 7 août 2009 ↑ USA : au moins une douzaine d'incidents avec la vitesse sur des Airbus équipés de sondes Thales depuis deux mois, AP, 08/08/09
Liens externes
(en) Pitot@NASA démonstration des formules de vitesse en régime transsonique et supersonique , sur le site de l'EPFL. Une vidéo explicative sur le tube de Pitot
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