Faut Il Supprimer Le Service Public [PDF]

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Zitiervorschau

Faut-il supprimer le service public ? Entrée en matière : Un ancien ministre des finances (D. Strauss Kahn) rappelait qu’en 1998, à l’occasion d’une conférence de presse, Bill Gates, à qui avait été posée la question de savoir s’il aurait pu créer Microsoft en Europe en dépit du poids des charges sociales et des réglementations, avait répondu que « la qualité du système éducatif et des infrastructures lui importait plus que le niveau des charges » C’est le même raisonnement qui avait justifié le choix des dirigeants de Toyota d’implanter la dernière usine de leur groupe créée en Europe à Valenciennes. Pourtant, le poids des charges publiques et l’inefficience réelle ou supposée de l’Etat fait que le service public, notamment en France où il a une importance particulière, tant quantitative que « qualitative » est régulièrement remis en cause. Définitions et dimension du sujet (+ histo-géo) : Au plan purement juridique, dont il faudra s’écarter bien vite, le concept de service public a plusieurs niveaux de signification. C’est une réalité institutionnelle qui recouvre les diverses activités et structures placées sous la dépendance directe ou indirecte de l’Etat. C’est également un régime juridique particulier qui confère à ceux qu’il régit des obligations et des privilèges exorbitants du droit commun. Le service public, notamment dans notre pays, est critiqué par nos partenaires européens et notamment par la commission européenne et nous faisons souvent valoir la spécificité de nos institutions. A l’heure où l’intégration dans l’Union européenne est un débat omniprésent mais où parallèlement, l’opinion publique française reste majoritairement attachée à un modèle de société où la puissance publique intervient fortement, la question est centrale. Nous allons donc pour l’essentiel axer notre réflexion sur le service public dans notre pays, en soulignant que tant l’Etat que les collectivités territoriales ont un rôle central à tenir et sans ignorer les exemples étrangers. Le sujet est posé de façon quelque peu caricaturale (même si ceux qui estiment que cette suppression serait « vitale » sont plus nombreux qu’on ne le croie) et le « Faut-il » nous obligera à porter un jugement de valeur et à donner notre position sur la nécessité ou non de « supprimer » le service public. Le correcteur d’un concours administratif serait sans doute surpris que vous répondiez par l’affirmative, mais il ne le sera pas de vous voir poser les vrais termes du débat. Problème posé, idée générale : Pour diverses raisons qu’il conviendra d’analyser, il y a sans doute lieu de rénover ou de « réinventer » le service public dans notre pays mais certainement pas de le supprimer car on voit mal comment pourrait être mis à bas une architecture administrative aussi développée et surtout bien plus efficace que ce que prétendent ses délateurs. Rappelons d’ailleurs que les « services publics » existent partout dans le monde et qu’en Angleterre par exemple, le délabrement de certaines infrastructures, notamment le transport ferroviaire, du à la période du Thatchérisme reconduite voire amplifiée par Tony Blair et ceux qui l’ont suivi, porte atteinte prioritairement aux plus démunis et a pour conséquence que la question même de la pertinence d’une politique de « tout privatisation » y est à nouveau posée. *** Annonce de plan : La tradition française d’un fort interventionnisme public s’est traduite par la mise en place d’un service public spécifique important dont le poids jugé parfois excessif appelle non pas sa suppression mais la redéfinition de son rôle.

*** Phrase titre I / : Les contours du service public ont très largement évolués au point que son poids économique et budgétaire pose désormais problème dans un contexte nouveau. « Chapeau » 2 sous-parties (A et B) : Le maintien du service public important qui a été mis en place dans notre pays se heurte désormais, au delà de la seule question de son financement, à des priorités et des contraintes nouvelles. Phrase titre 1ère sous-partie (I/A/) : Le service public est le reflet en France de la tradition d’un Etat fort, considéré comme le seul garant des équilibres de la société. Annonce structure sous-partie : L’élargissement du champ d’intervention de l’Etat, jamais remis en cause jusqu’à présent, pose désormais problème en terme budgétaire. Développement I/A/ : C’est essentiellement à compter du XXème siècle que le service public s’est développé dans notre pays, en élargissant son champ de compétence des seules fonctions régaliennes, armée, police, justice, impôts au domaine social, dont l’école, et au domaine industriel et commercial, en passant de l’idée de pouvoir, d’ordre et d’autorité à l’idée de prestations et de services. Pour autant, le service public a longtemps constitué, même dans ses nouvelles fonctions de prestataire de service, une source de pouvoir plus que d’obligation pour l’administration. D’où l’existence en droit de la notion de « privilège du préalable », c’est à dire la présomption de légalité de l’acte public. L’extension du champ d’intervention du service public n’a en définitive jamais été remis en cause par aucune idéologie jusqu’à une époque récente, l’idée étant partagée par la quasi unanimité des partis politiques, au moins dans les faits et au delà des discours, que seul l’Etat était à même de garantir l’égalité et la justice par la mise en place d’un service public fort. Ce service public a fait la preuve de ses qualités et il est souvent cité en exemple par les autres démocraties qui bénéficient rarement d’un tel niveau de prestations notamment en ce qui concerne la santé publique ou l’éducation. Il en est résulté cependant et incontestablement, un secteur public dont le poids économique et budgétaire a fini par poser question dans un contexte de crise économique et de remise en cause de la « toute puissance étatique » et de la centralisation. Rappeler les grandes lignes du budget : déficit public (Etat, sécurité sociales, collectivités locales) 8 % du PIB pour 138 Mds d’euros, endettement public 80 % du PIB pour 1 500 Mds d’euros, taux de PO/PIB 42 %. S’y est ajouté au tournant des années 80 la décentralisation qui s’est accompagnée d’une extension des missions des collectivités territoriales, de leurs moyens propres et donc de leurs effectifs mais également d’un poids budgétaire accru. Conclusion partielle + transition : Le constat du poids que le secteur public représente dans notre société traditionnellement très dépendante de l’interventionnisme public, s’il ne doit pas faire oublier la qualité des services rendus, se double du constat que de nouvelles obligations pèsent sur lui. *

Phrase titre 2ème sous-partie (I/B) : Au delà de la seule analyse néo-libérale, force est de reconnaître que des raisons existent qui font que le service public doit au moins être repensé. Annonce structure sous-partie : Aux critiques néo-libérales s’ajoutent désormais les réalités d’un monde nouveau. Développement I/B/ : La volonté de réduire la « périphérie » du service public s’est inspirée des analyses néo-libérales émises dès le début des années soixante-dix lesquelles ont trouvé leur première mise en oeuvre dans la politique des Etats-Unis à l’époque de Ronald Reagan puis sous l’ère Bush. Notre pays n’a pas suivi entièrement ce mouvement mais comme en toute chose et avec un certain retard, un changement s’est opéré dans le courant des années quatre-vingt avec une remise en cause de l’Etat et désormais des collectivités locales accusés d’interventionnisme excessif, soit par la manière dont ils accompliraient leurs tâches, soit par une organisation déficiente. D’autres raisons font que désormais les pouvoirs publics ne peuvent faire l’économie d’une réflexion sur le service public : -

La « mondialisation de l’économie », a pour conséquence, ce qui n’est pas toujours à notre désavantage d’ailleurs (voir intro) que les entreprises comparent les sites de production potentiels afin de localiser leurs investissements, non seulement là où l’impôt et les charges sociales sont les moins lourds mais aussi où la qualité des services publics est la meilleure. Elles établissent souvent un bilan coût-avantage leur permettant d’attirer leurs cadres et de favoriser leur mobilité géographique.

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Le « mieux d’Etat » a succédé au « plus » ou au « moins » d’Etat et est devenu une obligation, tant pour des usagers de l’administration qui sont bien souvent désormais, sauf pour certaines fonctions régaliennes, des « clients », qu’en raison même de la mondialisation des échanges et de la volatilité des entreprises qui n’hésitent plus désormais à délocaliser, phénomène certes condamnable au plan éthique mais incontournable et contre lequel seule la qualité des services offerts peu lutter.

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Les besoins des agents publics, d’un niveau intellectuel et de diplôme en constante augmentation et qui souhaitent, comme dans toute organisation, un cadre d’emploi moins hiérarchisé, plus innovant et surtout plus valorisant dans un discours ambiant très démagogique sur la prétendue inefficacité de nos services publics.

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La contrainte budgétaire et la double nécessité de la maîtrise de la dépense publique et de la réduction des déficits dans le cadre de l’intégration européenne et du pacte de stabilité monétaire. D’où l’expression (très provocatrice) de Guy Sorman, écrivain, « il est nécessaire de privatiser pour que l’Etat puisse se concentrer sur ses tâches »

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La libéralisation de l’économie européenne : depuis une quinzaine d’années, l’Union européenne s’est engagée dans une politique volontariste de libéralisation des services publics marchands en Europe, dans le domaine des transports, des télécommunications, de la poste, de l’énergie.

Conclusion partielle + transition : Il ne saurait être question de contester les critiques fondées dont le service public fait l’objet. Cependant, loin de devoir être supprimé, le service public doit être repensé.

*** Phrase titre II/ : Les français sont toujours très attachés à leur service public et à des intervenants publics qui devront dans l’avenir être plus le garant des grands équilibres de la société que des « gestionnaires » « Chapeau » 2 sous-parties (A et B) : «Si l’Etat est fort, il nous écrase, s’il est faible nous périssons». Dans un contexte de libéralisation des marchés, les citoyens sont plus que jamais sensibles à la protection que peut leur apporter la puissance publique dont les missions doivent toutefois être redéfinies. Phrase titre 1ère sous-partie (II/A/) et annonce structure sous-partie : Le libéralisme ne saurait signifier la fin des services rendus au public. Développement II/A/ : Le service public est une notion à laquelle nos concitoyens sont attachés par tradition et habitude, au demeurant confortable. Si le poids des finances publiques est en effet critiqué, il n’en demeure pas moins que la demande d’intervention publique reste prégnante. En témoigne les réactions aux catastrophes naturelles, et les demandes en termes de sécurité ou de solidarité qui ont encore récemment remis la puissance publique au centre de la problématique. Ainsi, les citoyens, contradictoires par nature, font assez facilement leurs les propos de Paul Valéry : «Si l’Etat est fort, il nous écrase, s’il est faible nous périssons» L’égalité reste toujours une valeur qui prime et ainsi, dans la sphère économique, plus de la moitié des français estiment que l’Etat n’intervient pas assez (source ministère de la solidarité 2008) L’idéologie du « tout marché » pose elle aussi problème. On a cité l’exemple de la Grande Bretagne et de ses errements mais on pourra également évoquer la nécessaire prise en compte d’une éthique au moins minimale dans des domaines tels que la Bourse, la concurrence, les télécommunications, l’audiovisuel, l’électricité, le nucléaire qui a conduit des pays comme les Etats-Unis a développer de nouvelles régulations. Le récent exemple de la crise financière et de ses conséquences sur les finances publiques des Etats vient une fois encore de le rappeler. La libéralisation des marchés, la mondialisation et la crise économique font que nos concitoyens n’ont pas envie de sortir d’un système qui fonctionne imparfaitement mais qui assure une certaine cohésion et un service égalitaire. Conclusion partielle + transition : S’il est donc nécessaire de ne pas adopter sur la question du service public, une position par trop dogmatique, ceci ne signifie pas cependant que le service public, confronté aux difficultés et nécessités rappelées plus haut, n’a pas besoin d’être redéfini. * Phrase titre 2ème sous-partie (II/B/) et annonce structure sous-partie : Les fonctions «vitales» du service public doivent être mieux affirmées et l’Etat doit surtout rester un arbitre, le « Maître des horloges » pour reprendre le titre de l’ouvrage de Jean Picq, Conseiller à la Cour des Comptes, paru en 1991 ( éditions Odile Jacob ) On peut appliquer cette formule aux collectivités territoriales.

Développement II/B/ : Il faut que le service public serve pour l’essentiel à assurer les fonctions premières d’un Etat souverain, celles que l’on qualifie de régaliennes et que tout un panel d’activités soit décentralisé ou laissé à d’autres : les fonctions essentielles déjà citées et un développement sur la décentralisation en précisant notamment le rôle des départements en matière d’aide sociale. Ajouter que l’avenir réaffirmera sans doute le rôle de la puissance publique « protectrice » des plus faibles avec une fonction essentielle qui est celle de la redistribution des richesses comme facteur crucial de cohésion sociale. Il faut surtout établir le constat que tant l’Etat que les collectivités locales sont meilleurs garants que gérants. Il convient ainsi d’inventer un nouveau rôle de la puissance publique qui par ses services publics devra à l’avenir être moins un agent économique direct qu’un stratège, régulateur au niveau macro-économique d’ensemble et toujours garant des règles du jeu à définir entre les différents acteurs de l’économie. Au demeurant, il faut rappeler que la conception et la mise en œuvre de règles du jeu stables et claires sont inséparables de l’économie de marché. Les secteurs appartenant aux industries de réseaux tels que l’électricité, le gaz, les télécommunications, le transport ferroviaire et aérien ou l’audiovisuel, qui se caractérisent dans notre pays par la présence d’entreprises publiques disposant encore d’un monopole légal sur tout ou partie de l’activité, s’ouvrent d’ores et déjà de manière croissante à la concurrence en provenance d’opérateurs privés. Mais cela ne peut signifier la disparition de la mission de service public qui est accolée à ces secteurs et l’Etat et au plan local les acteurs de la décentralisation doivent là aussi réguler et contrôler que cette mission soit assurée par les intervenants futurs, publics comme privés. A l’inverse, et pour reprendre les propos de Yves-Thibault de Silguy, qui fut membre de la commission européenne, « l’évolution récente a mis en lumière de nouveaux domaines dans lesquels l’intervention régulatrice de l’Etat est requise…./…Par exemple, la lutte contre le blanchiment d’argent n’est possible que si la puissance publique …/…autorise la levée du secret bancaire. Il en va de même dans d’autres secteurs tels que la concurrence par exemple. Conclusion partielle : Le service public, qui est le seul outil rationnel dont nous disposons pour faire face aux besoins des citoyens, pourrait en outre à nos yeux être plus développé afin d’assurer le rôle d’arbitre et de régulateur que la puissance publique doit jouer de plus en plus dans une société libérale. *** Conclusion et ouverture : Loin de devoir être supprimé, le service public est au contraire une spécificité dont nous prétendons qu’elle devra à terme être reprise par certains de nos partenaires européens. Il n’est certes pas contestable que des pans entiers de l’interventionnisme étatique notamment sont en train d’être abandonnés mais la fin d’un Etat gestionnaire ne signifie pas la fin d’un Etat garant. C’est donc bien d’une modification et d’une évolution de son rôle dont on doit parler s’agissant du service public français et non d’une suppression dont on perçoit bien le caractère démagogique de la proposition. Un ouvrage à conseiller sur le sujet : Quelle modernisation des services publics ? Philippe Warin. Recherches – La Découverte.