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SUPPORT DE COURS RAPPORT TECHNIQUE (rédigé en novembre 2014 par P. Perchet, d’après les notes de G. Duchemin)
I.
QUAND FAIRE UN RAPPORT TECHNIQUE ?
A partir du moment où les conséquences de l’avarie touchent à : - La sécurité (au sens large) ou à - L’environnement (pollution…) ou à - L’exploitation commerciale (retard…) ou au - Budget prévu (chemise supplémentaire à changer, produit onéreux à commander…) II.
QUE DOIT ON TROUVER DANS UN RAPPORT TECHNIQUE ?
Le rapport technique n’est pas un rapport officiel - à la différence du rapport de mer – c’est un rapport informatif. Il informe le service technique de l’avarie (déroulement, chronologie, découverte, causes éventuelles, moyens employés pour remédier au défaut, propositions éventuelles de modification ou d’amélioration permettant de réduire le risque de renouvellement de l’avarie). Il sert de support technique à l’établissement juridique d’éventuelles responsabilités (les experts s’appuieront sur ce rapport pour établir leurs conclusions). Une bonne connaissance des contrats d’assurance, des contrats de travaux ou de garantie, est une aide à la rédaction du rapport. Le rapport commence par une courte lettre d’accompagnement qui est un résumé et dans laquelle on doit trouver : -
Les principales circonstances, L’avarie elle-même, Les causes (si connues) et les conséquences (si possible).
Cette introduction sert à retrouver le dossier facilement car le traitement par la compagnie de navigation peut être long (contentieux avec assurance par exemple). On trouve ensuite le développement, très souvent chronologique, qui reprend le résumé en le détaillant. Le rapport doit indiquer les faits constatés, les mesures prises en premier lieu pour minimiser les conséquences de l’avarie, les recherches entreprises, les travaux effectuées ou les décisions prises en attendant de pouvoir remédier à la situation, en essayant à chaque fois de justifier ce qui est fait. Le rapport peut être utile pour défendre les intérêts du service technique (par exemple, travaux non effectués lors de l’arrêt technique pour gain de temps à la demande du service commercial, mais ayant entrainé une avarie par la suite). La conclusion est l’occasion de faire des propositions (procédure à améliorer, matériel à modifier,…). Le code ISM impose une obligation de revue des procédures pour vérifier que celles-ci sont correctes, ce qui ne peut se faire que par les propositions du bord, et le code ISM est géré à terre.
III.
QUELQUES REGLES ET METHODES DE REDACTION
Lire le sujet pour noter les points importants afin de se faire une représentation mentale du matériel et de la situation. Faire l’arborescence des causes ; en fonction des circonstances, on élimine un certain nombre de causes car elles sont incohérentes ou incompatibles avec la nécessité de faire un rapport. On applique le même raisonnement pour l’arbre des conséquences à court, moyen et long terme (ex : black out = court terme, retard à l’arrivée = moyen terme, immobilisation pour arrêt technique = long terme). Essayer de trouver la ou les causes du défaut (vétusté, mauvais choix du type de maintenance, matériel non approuvé par constructeur, défaut dans une pièce…). Il peut y avoir des recours possibles : service contentieux de la compagnie. Etablir les liaisons cohérentes entre la cause choisie et les conséquences. La rédaction devient alors possible. Etre le plus précis possible techniquement : un tuyau percé est une description insuffisante : l’est il au niveau d’une bride, d’un coude, d’une soudure, dans un coude, … ? Eviter les marques (que l’on peut néanmoins citer) utilisées en tant que nom propre : exemple : « graviner » ; pour un mécanicien, c’est forcément le détecteur de brouillard d’huile. Pour l’assureur, il tapera « Graviner » sur internet et aura accès à toute la gamme de produits de ce fabricant… Etre le plus neutre possible en terme d’implication fautive du personnel : ce signalement peut faire l’objet d’une notation à part envoyée à l’armateur quant à l’incompétence révélée de certains membres de l’équipage. Ne pas être catégorique sur des causes alors qu’elles ne sont que probables mais pas certaines. Ne pas oublier que le rapport est envoyé à des personnes qui ne connaissent pas forcément bien le navire ni le matériel du bord : bien expliquer, si besoin, ajouter croquis, photos, schémas. (Notamment, le correcteur ne connaît pas le navire virtuel sur lequel vous êtes !) Si les avaries touchent à la propulsion ou un appareil critique du bord sans redondance ou marche possible en secours, il faut avertir la société de classification. Les pièces de rechange ont un n° pour leur traçabilité, il doit être indiqué dans le PV de travaux (et le rapport), ce qui permet à la société de classification de vérifier que les pièces sont agréées par le constructeur. Soigner l’orthographe ! Un rapport bien rédigé, bien orthographié, donne l’impression de sérieux et aura davantage de crédit qu’un texte mal présenté et plein de fôtes ! (vous trouvez sur votre bureau en embarquant : « à changé : le philttre » : fait, pas fait ??!!).
IV.
LES REGLES DE PRESENTATION
En-tête : émetteur, date d’établissement du rapport, lieu. Destinataire : un seul destinataire principal (pour action), le plus souvent il s’agit du chef du service technique ou superintendant ou capitaine du navire, les autres destinataires sont en copie. Copie : les autres destinataires qui peuvent être intéressés (capitaine, chef mécanicien des sister ships, assureur, service commercial, société de classification…). Objet : c’est l’avarie elle-même (et pas l’alarme qui s’est déclenchée) : exemple : « usure anormale coussinet inférieur palier n°1 moteur principal bâbord » et pas « alarme détection brouillard d’huile ». Références : à des télex, courriels, textes réglementaires, notices…Mettre « néant » si aucune référence (ce qui montre que vous n’avez pas oublié cette rubrique) Pièces jointes : indiquer le détail, la dénomination, le nombre de photos (ce qui permet au destinataire de vérifier qu’il a bien tout reçu) ; mettre « néant » si aucune pièce n’est jointe Puis la lettre d’accompagnement, Puis le développement. Les références (constructeur et code ISM) des procédures de démontages et remontages peuvent être indiquées : cela montre, outre que les travaux ont été faits dans les règles de l’art, que ces procédures ont été appliquées. Puis la conclusion.
Exemple d’extrait d’un rapport de voyage qui pourrait être la base d’un rapport d’avarie : Moteur de propulsion : avarie au cylindre n°5 A la mer, le 7 mars, au cours de la ronde du matin, nous avons découvert au témoin une fuite importante d’eau de réfrigération de ce piston. Le démontage des tubes de réfrigération du piston a montré la disparition de l’embout de la lance d’arrivée d’eau de réfrigération. L’état de la mer ne permettant pas le remplacement du piston, le navire a fait route à 90tr/min, la pompe à combustible du cylindre concerné ayant été désamorcée et le graissage de ce cylindre augmenté. La réfrigération de ce cylindre a été conservée. Une relâche à Ponta Delgada a permis au bord de procéder au remplacement de ce piston. Les tubes fixes d’entrée et de sortie d’eau ont été changés. La traversée Ponta Delgada / Savannah s’est faite sans piston de rechange. La visite du piston avarié à Savannah, sous direction Sulzer, a fait découvrir qu’une partie du diffuseur du tube fixe d’entrée était retombée sur son tube, l’autre partie étant allée se sertir sur le tube mobile de sortie. D’autre part, nous avons constaté qu’un goujon de la tête de piston n’était pas serré et que le filetage de la lance mobile d’entrée était détérioré. Ce piston ayant fait l’objet d’un démontage pour remplacer sa jupe lors de l’arrêt technique, un procès-verbal de garantie des travaux a été exécuté. L’examen de la jupe, fourniture DMI, a montré des défauts de fonderie.