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LA SEMAINE DE
L’ENTRETIEN 11 Francis Huster et Michel Leeb Des « Pigeons » de haut vol
L’AIR DU TEMPS 15 Colette L’amorale est sauve
CULTURE 18 Art. Bowie entre au musée 20 Musique. Maneskin La vie rock’n’Rome
22 Cinéma. Lily James Toujours de l’audace !
23 Danse. Dans les pas de José Martinez
24 Livres. Sonia Mabrouk Rendez-nous le sacré !
25 Christine Orban À l’ombre d’un génie
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PERSONNALITÉS
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POUVOIRS DESSIN
34 Joann Sfar
ROCK STARS VERSION 2023 Maneskin, les gagnants de l’Eurovision 2021, reviennent avec « Rush ! », un troisième album aussi rock que pop. Rencontre. (Page 20) Crédits photo : P. 8 : DR. P. 10 à 13 : M. Lagos Cid, DR. P. 18 : M. Sukita © Sukita / The David Bowie Archives, M. Placek, T. Garnier / Château de Versailles. P. 20 : DR. P. 22 : C. Gray, DR. P. 23 : J. Benhamou. P. 24 : A. Isard, DR. P. 25 : E. Garault / Pasco & Co, DR.
PARIS MATCH DU 9 AU 15 MARS 2023
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L’ENTRETIEN
FRANCIS HUSTER MICHEL LEEB DES « PIGEONS » DE HAUT VOL Dans des rôles de semi-ratés, le duo fait des étincelles. Une rencontre aussi joyeuse qu’inattendue. Interview Catherine Schwaab / Photos Manuel Lagos Cid Drôle d’attelage que ces deux acteurs a priori peu compatibles. Pendant la prise de vue, ils se chambrent non-stop, se balancent des vérités féroces, très drôles : l’un a « du bide », l’autre se prend « pour Cary Grant ». L’un a choisi un veston brillant, l’autre une cravate assortie à ses yeux myosotis. À 75 ans chacun, ils ont quelque chose de touchant, d’enfantin. En interview, Michel garde une timidité, une réserve. Bizarrement, ce showman qui a passé sa vie à être seul en scène ne s’impose pas dans une conversation. Face à un Francis Huster lyrique et habitué à haranguer le journaliste – «J’ai fait entrer Molière au Panthéon ! » –, Leeb est à l’écoute, pensif, soucieux de la vérité. Il avoue avoir beaucoup douté en rédigeant sa pièce, il en a dix versions. Francis, l’archétype du « grand acteur », fait volontiers de ses souffrances un spectacle, tandis que Michel, patriarche heureux dans une famille de saltimbanques, se montre discret, comme s’il craignait que son bonheur se sauve. Pour l’un comme pour l’autre, le bonheur a le même nom : la scène.
Paris Match. Votre association est une drôle de complémentarité ! Michel Leeb. Pendant des années, on était à l’opposé l’un de l’autre. Francis Huster. Oh oui ! Moi c’était la Comédie-Française, lui le music-hall… M.L. Un mot qui n’existe plus, notez ! Il traduisait ce mélange des genres : sketch, chanson, gag, parodie, danse. Aujourd’hui, l’humoriste raconte sa vie, sa femme, son voisin, son boucher, c’est le “stand-up” !
C’est pour ça que vous avez décidé d’arrêter le one-man-show, Michel ? M.L. En quelque sorte. Je me suis rendu compte que l’autoroute était encombrée. Et le one-man-show, c’est épuisant. Alors je me suis tourné vers le théâtre, mon premier métier dans les années 1960. J’avais été formé par Solange Sicard, rue Blanche, avec Philippe Khorsand, Alexandre Arcady, Jean-Michel Ribes…
Francis, vous qui défendez farouchement le répertoire classique, vous vous engagez dans du boulevard moderne, écrit par un acteur à [SUITE PAGE 12] l’opposé de vous. Qu’est-ce qui vous a pris ? DU 9 AU 15 MARS 2023 PARIS MATCH
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LA SEMAINE DE
F.H. Eh bien, tout simplement, j’ai trouvé le texte magnifique. Comme Giraudoux avait écrit “L’impromptu de Paris” pour Jouvet, Michel a accouché d’un “Impromptu” taillé sur mesure ! M.L. Quand Francis est arrivé, qu’il a lu le texte, qu’il l’a répété, incarné, j’ai vu la dimension qu’il apportait à ma pièce : une densité, une fantaisie inattendues. Il entre dans un monde qu’il n’a pas l’habitude de côtoyer. Et là, je découvre un Francis très différent. Vous l’avez écrite pendant le confinement, après avoir été passablement attaqué, taxé de racisme, de sexisme… F.H. [Il interrompt…] Ridicule ! Alors on ne peut plus jouer “Le marchand de Venise” avec Shylock qu’on traite de sale Juif ! Michel s’est retrouvé l’âme déchirée. On l’avait tellement attaqué, critiqué… Il ne savait plus qui il était. Au lieu de se glisser dans une pièce américaine qu’il aurait pu facilement trouver, eh bien, il s’est lancé dans une histoire où coexiste deux Michel Leeb : l’ancien qui fait rire, qui fait l’escargot, tout ça ; et l’acteur méchant, dingue, aigri. On le voit passer du séducteur à un type bouleversant. Je crois que c’est le tournant de sa vie. M.L. Le regard de Francis m’a apporté tant de choses. Je ne m’y attendais pas. Sa vision, son enthousiasme, son énergie permanente. Il réfléchit à tout, chaque minute. C’est plus qu’un acteur, c’est un homme, un ami. C’est rare dans ce métier où on est toujours en train de s’épier. Je n’aurais jamais pensé que ce soit si fort. Il m’améliore chaque jour.
Ce métier vous a-t-il épanoui ? M.L. Oui, et plus encore, il m’a tout apporté. J’ai commencé le music-hall, les sketchs, sans être du tout sûr de moi. J’avais peur. Mais j’avais une folle envie de me produire devant un public. Je voulais chanter, faire rire, occuper la scène de mille manières.
Vous étiez prof de philo ; l’enseignement, c’est une sorte de show… M.L. Oui… enfin, j’étais un prof atypique. Je n’avais qu’une maîtrise, mais avec le grand Jankélévitch ! J’enseignais dans un cours privé. Et j’imitais les accents de tous les philosophes que j’aimais, Platon, Heidegger, Kierkegaard, Husserl, Kant, Hegel… En les parodiant, j’essayais de donner envie aux élèves. Je mettais un peu la pagaille. Quand le proviseur a appris que je faisais le show avec Kant, il m’a dit : “C’est pas possible. Vous devriez tester vos talents ailleurs.”
Francis, le métier semble vous faire souffrir beaucoup plus que Michel. F.H. Je suis son contraire ! J’ai été conditionné par mes maîtres : Jean-Louis Barrault, Pierre Dux, Jean Marais, Robert Hirsch, Jean Piat, François Florent et René Simon, mes profs, et Antoine Vitez. Je me suis toujours senti missionné, alors je me suis mis une pression infernale. J’ai l’impression qu’on attend tellement de moi que je dois être à 200 %. À chaque fois, j’escalade un Everest.
Qu’est-ce qui vous a aidé, vous a poussé ? F.H. Les femmes. Je suis tombé amoureux de tant d’actrices. Elles
Aujourd’hui, le métier est-il plus ouvert ? F.H. Il est toujours aussi hypocrite, lâche, traître. C’est le spectateur
m’ont toutes donné une confiance folle. Nina Companeez, Fanny Ardant, Isabelle Adjani, Ludmila Mikaël, Isabelle Nanty…
qui a changé. On l’a longtemps méprisé, prétendant que le boulevard, c’est pour tel public et le drame pour tel autre… M.L. … Mais c’est le public et personne d’autre qui décide. F.H. On va être imités par beaucoup d’acteurs qui n’auraient pas eu l’idée de s’associer. Pourquoi n’y a-t-il jamais eu Dussollier face à Clavier ? Ou Debbouze face à Arestrup ?
Vous, Michel, vous êtes l’homme d’une seule femme… M.L. Oui, depuis quarante-deux ans. Mon épouse, Béatrice Malicet, est tout pour moi : mon agent, mon producteur universel, mon amante, mon copain et la mère de nos trois enfants. Elle me critique, elle me balise, elle négocie mes cachets. Gérard Louvin a été mon mentor pendant vingt ans. Quand on s’est séparés (il voulait que je reste dans le one-man-show), c’est Béatrice qui a pris le relais. Elle est toute ma vie.
Pour l’entourage, la célébrité, c’est envahissant, non ? M.L. C’est une habitude. J’ai fait 200 galas par an pendant presque vingt ans. Et dans la famille tout le monde participait à tout. J’étais peu présent, mais quand j’étais avec eux, j’y étais à fond. J’ai eu le même âge que mes enfants depuis leurs 5 ans ! Je grandissais avec eux.
Francis, la passion du métier vous a un peu séparé de vos amoureuses… F.H. Oui. Elles étaient en concurrence avec cette passion. Je rentrais à 2 heures du matin, je travaillais la nuit, je partais en tournée, en
« Nos jeunes envient ce qu’on a vécu dans les années 1970-1980. C’était génial : les femmes étaient bien habillées, les mecs étaient classe » Michel Leeb
DES CABOTS DÉSENCHANTÉS Deux comédiens de seconde zone se rencontrent dans l’antichambre d’un casting. Ils égrènent des souvenirs hilarants, en vieux cabotins sans illusions, se racontent et n’hésitent pas à s’inventer des vécus fantaisistes. Ce télescopage nous installe dans un boulevard très drôle, aux répliques qui claquent. Quant au jeu fluide et complice de Michel Leeb et de Francis Huster, il prouve que leurs deux tempéraments sont parfaitement complémentaires. Soudain tout bascule avec l’entrée en scène de Chloé Lambert et de Philippe Vieux. Un coup de théâtre qui permet aux personnages de prendre leur envol. Bravo à la mise en scène de Jean-Louis Benoit qui change de tempo tout en offrant une réflexion sur le métier d’acteur. Une excellente distribution, un texte dans l’esprit des Grands Boulevards… tous les ingrédients du succès sont au rendez-vous. C.S.
« Les pigeons », au théâtre des Nouveautés à Paris, du mercredi au dimanche, jusqu’au 14 mai.
« On va être imités par beaucoup d’acteurs qui n’auraient pas eu l’idée de s’associer. Pourquoi n’y a-t-il jamais eu Dussollier face à Clavier ? » Francis Huster tournage. Quand je jouais avec elles, c’était le bonheur. Mais quand on était éloignés, la rupture était inévitable. Films, pièces, je suis toujours tombé amoureux d’une partenaire.
Quelle relation avez-vous avec vos deux filles, Élisa et Toscane ? F.H. Je n’ai jamais eu un rapport père-filles. Comme Michel, à chaque étape de leur vie, j’ai eu le même âge qu’elles. Je suis un père copain. Mais en admiration devant mes filles.
Comment voyez-vous la jeune génération ? F.H. Contrairement à nous, ils sont totalement libérés des parents. Ils savent prendre leurs distances. Mes filles n’ont pas suivi mes traces. Toscane est plasticienne et Élisa est une scientifique. Et moi, je veux qu’elles soient heureuses. M.L. Chez nous, ils sont tous attirés par la scène. Mon fils est comédien et chanteur. Pour prendre ses distances par rapport à moi et ne plus être comparé, il est parti vivre sept ans aux États-Unis. Là-bas, il s’est forgé un métier, chant, danse, comédie, et il est revenu avec un bagage à l’américaine. Fanny, l’aînée, chante et compose. Elle va très bien maintenant [elle a vaincu un cancer, NDLR]. Et Elsa est productrice de films et auteur. Ils ont fait ce qu’ils ont voulu. Et moi aussi je suis leur copain !
Les jeunes prennent en main leur carrière très tôt, ils évoluent vite, se mettent à écrire, produire… F.H. Ils n’acceptent plus les maîtres. C’est pareil en politique ou en sport. Ils vont prendre le pouvoir et rejeter les vieilles générations sans états d’âme. M.L. Je les vois aussi avoir la nostalgie de notre époque où il y avait des points de repère, des maîtres. Nos jeunes envient ce qu’on a vécu dans les années 1970-1980. C’était génial quand on
y pense : il y avait plein d’ouvertures pour démarrer, il y avait des valeurs, les femmes étaient bien habillées, les mecs étaient classe. Ils regrettent cette période. F.H. Moi, avec la distance, je trouve qu’elle étouffait la personnalité. On s’habillait, on se coiffait tous de la même façon. Tout le monde devait penser la même chose. Il y avait peu d’opposants. Et s’ils l’étaient, c’était violent : les Stones, Gainsbourg, Godard, même Lelouch ! Des trublions. Alors qu’aujourd’hui tout le monde est autorisé à jouer son jeu perso. Sans imiter personne, sans référence. Tu penses et tu t’habilles comme tu veux. Je trouve cette époque beaucoup plus stimulante que la nôtre, qui était presque… militaire !
C’était un temps où il y avait des “emplois” selon le physique… F.H. Quand un acteur arrivait dans un cours, on le jugeait : tu es trop moche, pas classique, pas la bonne voix pour la tragédie, tu as une gueule à jouer les comiques. On était cassant, borné. Notre époque était celle du mensonge, du masque, de la falsification. Je préfère notre période arc-en-ciel.
La nôtre est souvent vue comme froide et implacable. M.L. Ben, c’est pas non plus l’idéal. Tu n’avances que par ta force personnelle. Je trouve que c’est plus dur de s’imposer et de tenir. Il y a tant de concurrence. Ce métier est trop encombré. F.H. Mais maintenant il y a dix fois plus de public ! À notre époque, pour passer à la télé, tu avais trois chaînes, point. Aujourd’hui, il y a des millions de téléspectateurs partout, et sur les réseaux sociaux. Michel, c’est parce qu’on est en 2023 que tu peux faire cette pièce. Il y a trente ans, on t’aurait renvoyé à ta catégorie !
Interview Catherine Schwaab DU 9 AU 15 MARS 2023 PARIS MATCH
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LA SEMAINE DE
Pour les 150 ans de sa naissance, en 1873, la Pléiade sort un tirage spécial des principaux livres de Colette. Un plongeon en pleine Belle Époque quand Paris laissait le monde rêveur. Rien à voir avec la France de 2023 où on recommande de mener une vie sans gras, sans sel, sans alcool, sans tabac, sans stress, sans sexe et, surtout, sans incongruités – en somme, une vie sans vie. Pour Colette, les choses étaient simples : puisqu’on était libres, il fallait en profiter. Ce n’était pas le genre à s’acheter une Porsche pour rouler à 30 km/h. Faites-lui confiance : elle a mordu à toutes les grappes. Personne ne l’a assignée à résidence. Le roman, la presse, la scène, le music-hall, les hommes, les femmes, les tendrons, les vieillards… Elle aura goûté de tout en se régalant. À côté d’elle, Yourcenar et Duras ont l’air tristes comme le sérieux. C’est d’ailleurs elle la gagnante. À la fin, avec ses châles, ses chats, ses sulfures, ses cheveux en salade frisés, crêpés, embrouillés et emmêlés, elle pouvait bien avoir l’air d’une diseuse de bonne aventure, Mme Irma aura eu droit à des funérailles nationales. Rien de surprenant. Colette, c’était comme la Merteuil autrefois, ou Brigitte Bardot aujourd’hui : une certaine idée de la France. Et un hymne à la liberté. Elle n’a jamais songé à choquer le bourgeois. Elle était juste amorale avec naturel. Le retour actuel à la vertu, aux interdits, aux normes, au bien, à la censure, à la morale, au contexte, à l’idéologie, à l’autocensure et autres marottes de la dictature woke lui couperaient le sifflet. Elle n’aurait eu que faire de l’hypersensibilité invoquée à tout bout de champ par les hyper-censeurs. Elle détestait les chapeaux à plumes, les idées générales, les poses littéraires et la bien-pensance. Quand on feuillette ses romans, on sent une odeur de terre mouillée, de basilic foulé aux pieds et d’herbe coupée avec un léger souffle d’étable, mais c’est le parfum de soufre qui domine. Les choix faits pour la Pléiade par Antoine Compagnon n’en laissent échapper aucune émanation. Ça commence dès « Claudine à l’école », son premier livre. Oubliez les hussards noirs de la République.
Par Gilles Martin-Chauffier Elle a vite fait de désanctuariser l’école laïque. Sourire aux lèvres, elle ramène ses fameux profs à la maison, petits-bourgeois maniaques, surveillants vétilleux, maîtres guindés, pédagogues solennels… Avec ça, portés sur la chose. On est loin de Jules Ferry et de Charles Péguy. Sa directrice d’école a des tendresses lascives pour la maîtresse des petites classes qui a elle-même des frelons sous le jupon et se laisse conter fleurette par une élève. Stylo à la main, Colette est elle-même : languissante, provocante, souple, dissolue, lumineuse, railleuse, canaille, spontanée, onctueuse, fraîche, polissonne, animale, joyeuse, insouciante… Le devoir ne lui inspire rien, les dignités convenues lui passent par-dessus la tête. Elle ne cessera jamais d’aggraver son cas. Dans « Mitsou », la Grande Guerre se retrouve affublée de tenues de music-hall et, au passage, elle envoie balader l’idée d’union nationale sacrée. Sorti des tranchées, passé les transports de la nuit, l’amoureux redevient un fils de famille qui juge infréquentable la jeune chanteuse qui trahit ses origines par ses meubles de cocotte, ses manières et sa façon de laisser la petite cuillère dans la tasse. Et c’est pire dans les livres suivants. Dans « Gigi », une courtisane se régale du spectacle d’un enfant de 15 ans. Dans « Chéri » et « Le blé en herbe », des femmes mûres s’enflamment les pupilles au spectacle des muscles lisses, tendres et souples d’adolescents. Le pire, c’est qu’elle décrit le fils de son mari. Peu importe : elle revient sans cesse sur les mèches qui lui tombent sur le front, s’attarde sur ses cuisses, s’émeut du duvet de velours au-dessus des lèvres, admire l’ombre de ses cils, caresse ses cheveux lustrés comme un chat, tombe amoureuse de ses silences intimidés… Et pas de littérature pour s’excuser. Les choses les plus difficiles à expliquer sont les plus simples à comprendre. Il suffit de les montrer sans commentaires. Pour cela, Colette est la reine. Et tant pis pour les états d’âme qui, aujourd’hui, soulèveraient la tempête. Elle n’est pas scabreuse, elle est humaine, amoureuse et sincère. Le plus exquis, c’est que cela passait comme une lettre à la poste. À l’époque, la Belle, la France était délurée et joyeuse. C’était le bon temps.
L’A MORALE EST SAUVE Colette nous rappelle que la France et la littérature pétillent lorsqu’elles oublient le bon ton
DU 9 AU 15 MARS 2023 PARIS MATCH
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CULTURE
LA SEMAINE DE
L’INCONTOURNABLE
BOWIE ENTRE AU MUSÉE Le Victoria and Albert Museum s’apprête à rendre publiques les archives de la star. C’est une sacrée collection. Plus de 80 000 pièces ayant jalonné la carrière de David Bowie, des années 1960 à sa mort, vont être réunies dans un seul et même espace. Le Victoria and Albert Museum, en partenariat avec le David Bowie Estate, la Blavatnik Family Foundation et Warner Music Group, ouvrira ainsi en 2025 le David Bowie Center for the Study of Performing Arts, à Londres. Le public y découvrira des textes de chansons écrits de la main de l’artiste, des lettres et carnets intimes, des partitions, des costumes mais aussi des dizaines de milliers de clichés des plus grands photographes (Terry O’Neill, Helmut Newton…), des films, des clips, des récompenses… Parmi les objets phares : les ensembles de Ziggy Stardust, conçus par Freddie Burretti (1972), les créations de Kansai Yamamoto (photo) pour la tournée « Aladdin Sane » (1973) et le manteau Union Jack pensé par Bowie et Alexander McQueen pour la pochette de l’album « Earthling » (1997). On trouvera également les paroles manuscrites de « Fame » ou « Ashes to Ashes », le synthétiseur EMS de Brian Eno (présent sur les disques « Low » et « Heroes ») et un stylophone ayant servi à l’enregistrement original de « Space Oddity ». De véritables trésors, à voir absolument.
BOBBI JENE SMITH UNE AMÉRICAINE À L’OPÉRA DE PARIS La danseuse et chorégraphe sera la sensation du printemps avec « Pit », une création mondiale pour le Ballet de l’Opéra de Paris (du 17 au 30 mars). Cette pièce, cosignée avec Or Schraiber, devrait éclairer son talent. « J’aime trouver et créer un espace où nous pouvons rejoindre les spectateurs. Et travailler avec le temps : le modifier, l’étirer », décrit Smith. Après ses études, c’est auprès de Ohad Naharin et de sa compagnie, la Batsheva, qu’elle a fait ses gammes, dès 2005. En 2014, elle devient chorégraphe. Elle crée alors des pièces pour la Martha Graham Dance Company, le Royal Danish Ballet et est invitée par Benjamin Millepied sur son L.A. Dance Project. À 39 ans, Bobbi Jene Smith touche déjà les étoiles.
UN
CHIFFRE ET DES
DANSE
Le château de Versailles fête son 400e anniversaire. L’occasion d’une rénovation complète de l’ancienne galerie d’histoire, qui rouvrira ses portes en septembre prochain. PARIS MATCH DU 9 AU 15 MARS 2023
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Coordination Clémence Duranton
CLARENDELLE
INSPIRÉ PAR HAUT-BRION
RÉALISÉ PAR DOMAINE CLARENCE DILLON
AVEC ROUGE, BLANC, ROSÉ
PROCHAINEMENT SUR VOS TABLES
L’ABUS D’ALCOOL EST DANGEREUX POUR LA SANTÉ, À CONSOMMER AVEC MODÉRATION
MANESKIN LA VIE ROCK’N’ROME Ils sont sexy, doués et débordants d’énergie. Rencontre le groupe italien le plus connu au monde. Par Clémence Duranton On a tendance à croire que les groupies ont disparu, que les rock stars n’existent plus que dans les vieux clichés en noir et blanc et que les chambres des fillettes ne sont plus tapissées de posters. Alors, en arrivant au pied de l’hôtel parisien où est descendu le groupe Maneskin, en cette fraîche matinée de février, la surprise est grande d’apercevoir une horde de jeunes filles prêtes à bondir au moindre mouvement. Ce qu’elles ignorent, et qui les décevra sans doute autant que nous, c’est que Damiano, le beau gosse chanteur du groupe, est reparti dans son pays. Vol direct pour l’Italie. « Malade », selon les équipes. Nous voici De g. à dr., Thomas Raggi, Damiano David, donc un samedi matin, à attendre Victoria De Angelis et Ethan Torchio. les deux tiers de Maneskin. Les rescapés sont au nombre de trois – Victoria, Ethan et Thomas – très agréables, souriants, pas aussi en retard qu’on Découverte grâce à « X Factor », Global Citizen Festival après Elton John, les l’aurait imaginé et, surtout, la joyeuse bande a beau- Stones les ont convoqués pour ouvrir leur très habitués à l’exercice de coup fait parler d’elle lors de tournée, Baz Luhrmann leur a fait confiance la promo. Dès les premières l’Eurovision 2021. Au coude-à- pour la bande originale de son blockbuster questions, le discours semble coude avec notre représentante mondial « Elvis ». Et leur album « Rush ! », se dérouler de lui-même. « On frenchie, Barbara Pravi, ils ont sorti cette année, est une nouvelle pépite qui chante en anglais et en italien raflé la coupe juste après avoir vient s’ajouter à leur caverne aux trésors. parce que, même si l’anglais été pris en flag, se penchant sur Chaque morceau se révèle un tube en puisest naturel pour nous, notre une table comme pour « reni- sance, chaque clip est un bijou visuel sacrémusique est devenue inter- « Rush ! » (Epic). fler » ce qui était posé dessus. ment bien pensé. Maneskin a séduit par son Maneskin nie encore ce geste rock qui tire vers la pop, son énergie folle nationale et on a eu envie de En concert le 13 mars qui a choqué la ménagère devant et son image soigneusement travaillée : ils réaffirmer nos racines. » Ou à l’Accor Arena (Paris). son petit écran et les haters sur ont quelque chose de trash sans être crades, encore : « On a choisi d’avoir chacun notre morceau pour montrer que Twitter. Aujourd’hui, quand on évoque le ils sont désinvoltes mais pas blasés, agités nos personnalités sont différentes. » Ces concours, le quatuor partage sa fierté d’avoir mais bosseurs, rock mais ponctuels, fun mais deux phrases nous seront répétées au mot gagné, comprend que sa victoire ait pu sur- bon communicants. Bref, des rock stars verprès quelques jours plus tard, au télé- prendre sachant qu’ils étaient « très différents sion 2023. phone, par Damiano. Dommage. La frus- des autres candidats, sans danseurs ni mise tration est d’autant plus grande que l’envie en scène particulière » et balaye le scandale est dévorante d’en savoir plus sur la défer- d’un revers de main. Depuis et malgré tout ça, Maneskin s’est envolé. On les a vus au lante musicale.
MUSIQUE
Les fans sont déçus, Damiano, le chanteur beau gosse, est reparti en Italie. « Malade », selon les équipes
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« Et l’amour dans tout ça ? », en salle actuellement.
LILY JAMES TOUJOURS DE L’AUDACE ! La star de « Mamma Mia ! » se frotte à la comédie romantique made in England avec « Et l’amour dans tout ça ? ».
CINÉMA
Par Fabrice Leclerc / Photo Charlie Gray Blonde ou brune, Cendrillon ou Pamela Anderson, Beatles ou Abba… Compliqué de cerner Lily James tant qu’on ne prend pas le temps de discuter avec elle. On découvre une jeune femme passionnante, déterminée et sans filtre. En dix ans, la comédienne a bâti une carrière culottée, de « Downton Abbey » à « Baby Driver », de « Mamma Mia ! » à la « Cendrillon » de Disney. Sans parler de Tchekhov qu’elle a joué au théâtre ou de « Guerre et paix » pour la BBC. « Je n’ai jamais voulu être enfermée dans un carcan, mais je suis une femme et cela relève souvent de l’impossible », se lamente-t-elle. Cette fois-ci, on la retrouve dans « Et l’amour dans tout ça ? » de Shekhar Kapur, une comédie romantique dans la veine de « Notting Hill » et de « Quatre mariages et un enterrement ». « J’adore les “rom com” ! » sourit-elle. Elle y incarne Zoe, documentariste accro aux applis de rencontres, qui s’apprête à filmer le mariage arrangé de son ami d’enfance pakistanais. « J’ai été séduite par cette peinture du multiculturalisme à l’anglaise mais aussi des pratiques amoureuses des jeunes d’aujourd’hui. » L’amour virtuel, très peu pour elle, pourtant. « Rien ne remplacera la découverte de l’autre autour d’un verre. C’est vieux jeu mais je ne veux pas remettre ma vie à des algorithmes. » Ils ont cependant
rythmé son accession à la célébrité, Lily James étant devenue une cible des réseaux sociaux, comme des tabloïds. Elle qui s’est montrée impressionnante dans la minisérie « Pam & Tommy » (sur Hulu) estime que travailler le personnage de Pamela Anderson lui a permis de comprendre beaucoup de choses. « Je sais ce qu’est le sexisme, les commentaires haineux, la manipulation des médias, ce rugissement constant contre vous. » Emma Thompson, qui incarne sa mère dans « Et l’amour dans tout ça ? », l’a prise sous son aile. « Elle m’a aidée à affronter la pression quand j’en avais besoin. » Comment aimerait-elle qu’on la voie ? « Comme une actrice déterminée mais authentique. J’essaie de ne plus rechercher forcément l’approbation des autres afin d’être en paix avec moi-même. » Star très jeune, Lily James semble à 33 ans vouloir passer un cap. Elle dit tenir cette détermination de sa grand-mère française, Marinette, et souhaiterait apprendre notre langue, mieux saisir les nuances des films français qui l’ont fait vibrer ado. Sur le moment, elle ne souvient plus du nom du film de cette réalisatrice qui l’a pourtant marquée… « Je vais le retrouver et je vous enverrai un e-mail ! » promet-elle. Qu’on recevra dans l’heure : « “Cléo de 5 à 7” d’Agnès Varda ! Quel chef-d’œuvre, écrit Lily. Comment ai-je pu l’oublier ? »
« Rien ne remplacera la découverte de l’autre autour d’un verre »
CRITIQUES EN PLEIN FEU De Quentin Reynaud Avec Alex Lutz, André Dussollier… Après l’original « 5e set », Quentin Reynaud se frotte à l’exercice peu commun en France du pur film de genre, enrôlant André Dussollier et Alex Lutz, un père et son fils pris au piège d’un énorme incendie de forêt dans les Landes. Sujet prémonitoire (le film a été tourné en 2021) pour un long-métrage visuellement impeccable mais privilégiant d’un coup le huis clos aux dépens du grand spectacle. C’est justement là que le bât blesse. Les traumas intimes des personnages, cousus de fil blanc, deviennent alors l’étincelle d’un récit qui ne sait plus trop où il va. Loin, trop loin de son intrigant postulat de départ. Fa.L.
SAGE-HOMME De Jennifer Devoldere Avec Karin Viard, Melvin Boomer… Sous ses faux airs de « Baby boom » version grand écran, le film mosaïque de Jennifer Devoldere (« Jusqu’à toi ») évoque les coulisses d’un métier sacerdoce, autant qu’il interroge la masculinité dans un univers féminin. Tendre, profond, sans refuser un soupçon de légèreté bienvenue, voilà le portrait finement écrit d’un jeune étudiant sage-femme à la découverte de la vie qui commence et des femmes qui l’entourent. Karin Viard, toujours impeccable, laisse éclore le grand talent de Melvin Boomer (JoeyStarr dans la série « Le monde de demain »). Une naissance sous les meilleurs auspices. Fa.L.
En salle actuellement. Sortie le 15 mars.
LA SEMAINE DE Dans son bureau de l’Opéra Garnier.
Par Philippe Noisette / Photos Julien Benhamou « Vous voulez passer la journée avec moi ? vous n’allez pas être déçu ! » s’amuse José Martinez, le nouveau directeur de la danse, avant de s’éclipser dans un couloir du palais Garnier à Paris. Une urgence l’appelle. Le matin même, Martinez, ancien danseur vedette de la troupe, avait remplacé un répétiteur absent. La vie d’un manager de ballet est un tourbillon sans fin. Nommé pour succéder à Aurélie Dupont, il a pris ses marques en décembre dernier après un intérim de quatre mois assuré par Sabrina Mallem. Il a rencontré plus de 70 danseurs depuis son arrivée, a assisté à toutes les distributions du « Lac des cygnes » cet hiver. « Je veux être à l’écoute, assure le plus Parisien des Espagnols. Ce que souhaitent les interprètes dans la maison, c’est danser plus. Certains ont envie d’être accompagnés, d’autres m’ont fait part du stress engendré par le concours. Mais je sens une réelle motivation de tous les côtés, et le désir d’un répertoire varié. » José Martinez n’est pas là pour tout renverser, sachant que le fragile équilibre de la compagnie doit être ménagé. Il fera avec les deux saisons à venir construites par Aurélie Dupont, qu’il a à peine retouchées. « Il y a des choses que j’aurais pu programmer sans mal. » Le svelte cinquantenaire a été bien accueilli en interne. « Je sais pertinemment que la lune de miel ne va pas durer indéfiniment ! » José Martinez a tâté de la direction d’une troupe, à Madrid, avec la Compagnie nationale de danse de 2011 à 2019. Avec l’Opéra
de Paris, il passe à une autre échelle. « Je suis épaulé par 38 personnes ici. » Après son expérience madrilène, il a repris une carrière de chorégraphe indépendant. Postuler pour le Ballet de l’Opéra de Paris n’était pas dans ses plans initiaux. « C’est également un choix de vie, car je sais que je dois me consacrer exclusivement à la troupe. Je ne voulais pas avoir de regrets plus tard sans avoir tenté ma chance. » Il promet de se ménager quelques pauses dans les semaines à venir, mais pour aujourd’hui ce sera plutôt la course-poursuite. « Dès que je sors du bureau, on me demande quelque chose ! » Dans une salle de répétition, notre homme est paradoxalement plus tranquille, comme ici au studio Lifar avec les étoiles, Valentine Colasante, Paul Marque et Marc Moreau alors encore premier danseur. José est attentif à tout, parle avec douceur, retrouvant en un instant l’instinct de l’interprète qu’il a été. « Cela n’a rien d’exhibitionniste ; simplement c’est la meilleure façon d’expliquer et de corriger. »
« Ce que souhaitent les interprètes dans la maison, c’est danser plus »
DANS LES PAS DE JOSÉ MARTINEZ Le nouveau directeur de la danse de l’Opéra de Paris partage avec nous son quotidien.
Répétition avec les étoiles, Marc Moreau et Valentine Colasante. À dr., le danseur étoile Paul Marque.
DANSE Un observateur de la maison fait remarquer que les répétitions sont beaucoup plus détendues depuis son arrivée. Ce qui n’empêche pas le sérieux du travail. Au gala en hommage à Patrick Dupond il y a peu, la troupe semblait sur un nuage. José Martinez peut passer d’une réunion avec des mécènes aux ateliers costumes. Il faut s’assurer que les costumes de « Giselle » pour la tournée en Corée sont bien partis. Il ne s’agit pas de se mêler de tout, plutôt de faire acte de présence. Il raconte cette anecdote. Un soir, assistant à une représentation du « Lac » en coulisse, il perçoit un léger défaut dans un éclairage. Et s’adresse à un technicien. Ce dernier lui répond alors : « Mais qui êtes-vous ? – Je suis le nouveau directeur ! » « Depuis, lorsque nous nous croisons, il y en a toujours un de nous deux qui lâche : alors toujours en poste ? » Dans son bureau, sobre, il a à peine le temps d’admirer une jolie représentation de l’Opéra qu’on vient de lui offrir. Les dossiers s’accumulent. Il arrive avant 10 heures mais ne sait pas à quel moment il partira. « Après 17 heures, ma seconde journée de travail commence. Il faut faire le point sur ce qui s’est passé. » Le 29 mars, il défendra la nouvelle saison signée de sa prédécesseur. Et a le temps d’ici là de sonder le Ballet. « On n’est pas directeur pour être aimé par tout le monde. Je veux apporter pas mal de choses à la compagnie », glisse-t-il dans un souffle. Avant de filer. DU 9 AU 15 MARS 2023 PARIS MATCH
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défunt jusqu’à sa dernière demeure. Cela dépassait l’entendement. Comment se fait-il qu’il n’y ait pas eu un mouvement d’opposition claire à ces règles absurdes et déshumanisantes ?
Vous ironisez sur le match de foot devenu symbole du sacré. Je me sens mal à l’aise dans une société qui sacralise une finale de Coupe de monde. Moi, je vois le sacré dans les hauts lieux de mémoire nationale, le Mont-Valérien par exemple. Quand il a été récemment tagué, Emmanuel Macron a dit : “Souiller ce lieu sacré de la République, c’est porter atteinte à ce qui nous unit.” Autre exemple plus personnel, quand je suis devant la cathédrale Saint-Louis en Tunisie, je me sens devant une présence réconfortante. Une église en terre d’Islam c’est un peu comme la neige en plein été.
ESSAI
Deux points font polémique dans votre ouvrage : vous soutenez Erdogan qui a converti la basilique Sainte-Sophie en mosquée. Pourquoi ?
SONIA MABROUK RENDEZ-NOUS LE SACRÉ ! Dans son nouveau livre, la journaliste fustige une société qui n’a plus qu’une vision comptable de l’existence. Interview Benjamin Locoge / Photo Alexandre Isard Paris Match. Vous dites avoir rencontré le sacré en décembre 1994 en Tunisie, dans la cathédrale de Carthage. Comment cela s’est-il passé ? Sonia Mabrouk. Ce fut quelque chose d’instinctif, presque charnel. Aujourd’hui, il y a un malaise quand on parle de sacré. Ce mot charrie beaucoup de préjugés, comme s’il était frappé par la foudre de l’illégitimité. Ce qui n’est pas totalement faux, car il exige des efforts – puisque, selon Régis Debray, c’est “ce qui interdit le sacrilège et légitime le sacrifice”. On peut y arriver si on lève un malentendu : le sacré et le religieux ne sont pas la même chose. Il existe le sacré religieux, La Mecque, le mur des Lamentations, et le sacré républicain comme l’Arc de triomphe. Mais désormais, en Occident, on met le sacré en dehors de notre vie.
Contrairement à l’Orient qui, selon vous, le place au centre de ses préoccupations ? Ici, on a du mal à fabriquer de l’universel. En Orient, certes gangrené par les extrémismes et au prix d’énormes difficultés, il y a encore un attachement viscéral au sacré. Je pense notamment aux rites funéraires que la société occidentale a sortis de son champ visuel et lexical puisqu’elle vit dans un monde du zéro risque… En Orient, la mort est la quintessence de la sacralité, elle fait partie de la vie. Vous en parlez ici, on vous taxe de ringard.
Le Covid, écrivez-vous, a remis cette question au centre. Ça a été une double peine. La douleur du deuil d’un côté et la froideur de la lame qu’on vous fait bouger dans le ventre : celle de ne pas pouvoir accompagner un PARIS MATCH DU 9 AU 15 MARS 2023
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Si on se place du point de vue d’Erdogan, c’est sacrément habile. Et de notre côté, c’est terriblement inquiétant. Il ne fait plus de doute qu’il écrit un récit, et je trouve qu’il l’écrit bien. Lui ne fait pas l’économie du religieux, c’est évident, mais plus généralement du sacré. Il s’approprie des symboles universels, et on le laisse faire. Le sacré légitime la notion de sacrifice : pour qui ou pour quoi êtesvous encore capables de vous sacrifier ? De vous manifester, donc de prendre des coups ? C’est une forme de paresse de la part du monde occidental, de lâcheté que de ne pas le faire.
Vous soutenez aussi le retour de la messe en latin. Je n’ai jamais compris pourquoi le conservatisme serait une forme de nostalgie. Être conservateur, c’est vouloir que certaines choses demeurent. Il y a une phrase que je trouve magnifique – que j’ai lue sur une bouteille de Chartreuse : “La croix demeure pendant que le monde tourne”. La messe en latin, par sa musicalité, me semble plus conforme à ce qu’on connaît des messes.
Le latin a disparu de la plupart des parcours scolaires… Je sais bien, mais je n’y vois pas un signe de décadence. Alors qu’uriner sur la tombe du soldat inconnu, c’en est un. Et c’est puni par la loi. Faire ça, c’est profaner.
L’Occident doit-il s’inventer un sacré commun ? Quand je demande aux politiques ce qui peut nous être encore commun, beaucoup me répondent : “Les valeurs” – et cela m’agace. Et on me rappelle le triptyque “Liberté, Égalité, Fraternité”. Mais si vous donnez un coup de canif à la fraternité, on ne va pas venir vous arrêter. Or, pour créer du commun, il faut que votre transgression soit punie. Moi, je ne sifflerai jamais la “Marseillaise”.
Le monde politique s’intéresse-t-il au sujet ? Il n’a plus qu’un rapport aux chiffres. À la virgule près, quelles conséquences la réforme qu’ils proposent aura sur nos vies ? Qu’on soit croyant ou non, on a un rapport avec ce qui habite le ciel. Tout cet aspect-là de la vie, ce qui vous prend aux tripes, vous l’entendez tous les matins ou tous les soirs chez les politiques ? On ne peut pas sans cesse parler comme un tableau Excel… Car, finalement, vous n’offrez plus rien, vous êtes desséchés de l’intérieur et de l’extérieur.
“De ce que vous avez aimé, que restera-t-il ?”, interrogez-vous à la fin de votre ouvrage. C’est une question que vous vous posez tous les jours ? Non, mais c’est la seule qui vaille. Mon sacré intime, c’est le souvenir de ma mère le soir dans ma chambre qui passait sa main dans mes cheveux. À cet instant, j’avais le sentiment que ce qui habite le ciel était penché sur mon lit. Et si ma mère n’est plus là, je sens éternellement la chaleur de sa main qui a plus de puissance que tous les livres religieux. Le sacré, c’est la force qui résiste à la mort.
« Reconquérir le sacré », de Sonia Mabrouk, éd. de L’Observatoire, 134 pages, 19 euros.
LA SEMAINE DE
CHRISTINE ORBAN À L’OMBRE D’UN GÉNIE Dans « Soumise », la romancière raconte le destin oublié de la sœur adorée, et méconnue, de Blaise Pascal.
Par Gilles Martin-Chauffier « Le cœur a ses raisons que la raison ignore », « Vérité en deçà des Pyrénées, erreur au-delà », « Qui veut faire l’ange fait la bête », « Le nez de Cléopâtre, s’il eût été plus court, la face de la Terre aurait changé »… Comme Shakespeare en Angleterre, Blaise Pascal fut en France une vraie machine à fabriquer des maximes passées dans le langage courant. La plus connue est sans doute que « Tout le malheur du monde vient que l’homme est incapable de rester en repos dans sa chambre ». Elle semblait coller au personnage malade, toujours perdu dans ses pensées métaphysiques et scientifiques. La physique des fluides, la théorie des probabilités, la nature du vide… Toutes ses recherches illustraient la nature de son génie. Et très vite tout Paris
LIVRES « Soumise », de Christine Orban, éd. Albin Michel, 304 pages, 20,90 euros.
le sut. Au point qu’il s’en flatta fort et sortit volontiers en ville pour jouir de cette gloire. Et là, faites confiance à Christine Orban : elle saute sur l’occasion pour ressusciter la famille Pascal en actrice de la vie parisienne. Dans ce but, elle se cache derrière la petite sœur de Blaise, Jacqueline. Gracieuse, aussi douée pour les lettres que son frère pour les sciences, elle entre dès l’adolescence dans le cercle de la reine Anne d’Autriche, charmée par sa façon d’écrire et de dire les vers. Elle va même séduire Richelieu. Au point que le cardinal, par affection pour elle, offrira un office rémunérateur à son père tombé en disgrâce pour s’être opposé à la réforme fiscale. Soudain, on voit ce clan de grenouilles de bénitier sous un autre jour. Blaise, tout génie qu’il fut, fréquentera pendant des années le salon du duc de Roannez, aura des mots tendres pour sa fille et saura sourire à la duchesse d’Aiguillon comme à la marquise de Sévigné. Ses fameuses « Provinciales », pamphlet violent contre les jésuites, sont d’ailleurs écrites dans un style d’homme du monde, moqueur et piquant, à mille lieues des sermons lugubres de la secte janséniste, chère à son cœur. Heureusement ou pas, Dieu va remettre tout en place, transformer Jacqueline en folle de Dieu et ramener Blaise à la foi la plus austère et la plus sectaire. Sauf que, racontée par Christine Orban, cette conversion se mue en passion ardente, fusionnelle et presque incestueuse. Et en tableau fervent d’un XVIIe siècle où les sentiments étaient plus grands que nature.
CRITIQUE
PAUL SAINT BRIS UN LIFTING POUR MONNA LISA Bienvenue au Louvre. Il y a foule. Des milliers de tableaux et de dessins, des centaines de sculptures, des armées de visiteurs. C’est le paradis aux heures de pointe. Peu importe à la nouvelle directrice : au lieu de dix millions de visiteurs, elle en aimerait douze ou treize. Mais le musée éclate déjà. Inutile de dire que conservateurs et directeurs de départements traînent des pieds. Résultat : elle fait appel à un cabinet de conseil et obtient ce qu’elle veut : pour relancer l’ancêtre, il faut rendre ses couleurs à « La Joconde ». Panique à bord. Aucun de ces mandarins ne s’est encore remis de la métamorphose de la chapelle Sixtine en décor de boîte de nuit. Au lieu d’une jolie femme aperçue dans la pénombre, ils s’attendent à
« L’allègement des vernis », de Paul Saint Bris, éd. Philippe Rey, 352 pages, 22 euros.
retrouver une pépée ambiguë sur fond de contrastes flashy. La tâche échoue donc entre les mains d’un historien d’art charmant, livré avec tous les articles de la bonne éducation parisienne. Il marche sur des œufs et ménage tout le monde mais, tout compte fait, arrange son affaire avec une élégance de dandy. Nous, lecteurs, on va et on vient entre restaurateurs, critiques d’art, ministres et jolies femmes. On passe à Florence, on fait un saut à Londres et on observe les mœurs sauvages mais divinement civilisées de la haute culture. Au passage, on en apprend long sur les ateliers du musée. Et sur les arcanes du monde de l’art. Ce livre est le plus vivant des cours d’histoire. Évidemment, ça finit mal. Mais pas pour la directrice. Les chiffres, eux, sont bons. Les lettres aussi, si on juge par ce livre. G.M.-C. DU 9 AU 15 MARS 2023 PARIS MATCH
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PERSONNALITÉS
LA SEMAINE DE
TOUT LE MONDE EN PARLE
JAMEL DEBBOUZE ET MÉLISSA THEURIAU PAUSE HIVERNALE C’est en famille, accompagné de son épouse, Mélissa Theuriau, et de leurs deux enfants, Léon et Lila, que Jamel Debbouzze a profité de vacances aux sports d’hiver à l’Alpe-d’Huez. Monsieur sur des skis, madame sur un snowboard, lors d’une halte sur les pistes, ont posté une story sur Instagram. Jamel vient d’ouvrir, avec Laurent de Gourcuff, un restaurant au sein de l’Institut du monde arabe de Paris, Dar Mima, en hommage à sa mère, Fatima. Loin du monde du spectacle pour l’instant, l’humoriste réfléchit à un éventuel retour sur scène. L’ancienne présentatrice de « Zone interdite » continue, elle, de monter des documentaires au sein de 416, sa société de production. Quatorze ans après leur mariage, Jamel et Mélissa ont dérogé à la règle de ne pas montrer leurs enfants, chacun publiant sur ses réseaux sociaux respectifs de rares images de ce week-end en famille un peu exceptionnel…
BONNE ACTION DAVE GROHL RESTAURATEUR DE CŒUR Il a passé seize heures derrière les fourneaux ! Le 1er mars, Dave Grohl, le leader des Foo Fighters et ex-batteur de Nirvana, s’est rendu au centre de charité Hope the Mission de Los Angeles et a cuisiné pour les sans-abri. Héros d’un jour et pour toujours ! PARIS MATCH DU 9 AU 15 MARS 2023
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GWYNETH PALTROW ET CHRIS MARTIN LES MEILLEURS EX AU MONDE C’est elle qui a choisi de publier sur Instagram un joli selfie en compagnie de son ancien mari. Gwyneth Paltrow a profité de l’anniversaire Chris Martin pour lui adresser un doux COMPLICES de message : « Joyeux anniversaire au plus tendre des pères et des amis. » L’actrice et le leader de Coldplay ont été mariés entre 2003 et 2016 et sont les parents d’Apple, née en 2004, et de Moses, né en 2006.
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POUVOIRS Le 2 mars, le sénateur LR Bruno Retailleau pendant l’examen du texte.
RETRAITES AU TOUR DU SÉNAT Après un débat avorté à l’Assemblée, les députés LR et de la majorité scrutent les discussions à la chambre haute. Par Florent Buisson La « mère des réformes » ne méritet-elle pas l’attention du Parlement français tout entier ? Depuis l’arrivée du texte sur les retraites au Sénat, les députés de droite et ceux de la majorité présidentielle, alliés de circonstance pour le faire passer, ont installé leurs collaborateurs devant Public Sénat pour noter les déclarations susceptibles de faire bouger les lignes. « Je regarde dès que je peux et mes collaborateurs aussi, abonde la rapporteure du texte, la députée Renaissance Stéphanie Rist. Mais ce sont surtout les modifications de la réforme que nous suivons, avant la commission mixte paritaire [CMP]...» La fameuse CMP se réunira mi-mars, à l’issue des débats au palais du Luxembourg. Elle sera composée de sept députés (dont Stéphanie Rist) et de sept sénateurs chargés de trouver un accord sur le texte. « L’objectif premier, c’est l’équilibre budgétaire. On regarde donc au fur et à mesure ce qui pourra être accepté par la CMP que je présiderai », ajoute Fadila Khattabi (Renaissance), présidente de la commission des affaires sociales au Palais-Bourbon, qui ressent une certaine
frustration de voir le texte débattu sur le fond au Sénat. « On se sent dépossédés, car nous n’avons pas pu le faire à cause de l’obstruction de la Nupes… » À la chambre haute, elle peut compter sur un soutien de poids, le président du groupe macroniste, François Patriat, vieux complice dont elle fut la vice-présidente quand il dirigeait la région Bourgogne. À droite, on vante une fluidité de travail retrouvée entre députés et sénateurs. Olivier Marleix, président du groupe LR à l’Assemblée, et Bruno Retailleau, son homologue du Sénat, dialoguent quasi quotidiennement, beaucoup par SMS. « Vendredi dernier, c’était au sujet d’un chiffrage du gouvernement montrant que la mesure sur les carrières longues – quarante-trois ans de cotisation au maximum – défendue par les députés LR ne coûte pas si cher, confie un proche du premier. Ça a rassuré Retailleau, pas emballé par la mesure et pour qui l’équilibre budgétaire est primordial. » Les députés de droite sont par nature méfiants à l’égard de ce qui se passe au Sénat. Ils ruminent encore l’épisode de la loi sur les énergies renouve-
PARLEMENTAIRES
PARIS MATCH DU 9 AU 15 MARS 2023
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lables, à laquelle ils étaient opposés, et finalement votée avec le soutien des sénateurs LR le mois dernier ! Alors, sur les retraites, c’est déminage à tous les étages. Une réunion entre le président du Sénat, Gérard Larcher, Bruno Retailleau, Olivier Marleix et Éric Ciotti a été organisée le 7 mars, pour trouver une position commune sur la future CMP. Le patron du parti (et député), Éric Ciotti, n’a pas perdu une miette des échanges au Sénat, que cinq ou six salariés du mouvement sont chargés de suivre. Un groupe WhatsApp sur le thème a été créé. « On y trouve les déclarations d’untel ou untel, des tweets, des vidéos, afin qu’Éric soit constamment informé et puisse anticiper », insiste son entourage. Le débat à l’Assemblée a laissé des traces à droite, où l’on cherche à éviter le spectacle de la désunion. Le mouvement organisera en juin des états généraux, et rassemblera de cette façon militants et élus tous les deux ou trois mois, autour d’un thème précis. « Comme au temps du RPR », annonce-t-on rue de Vaugirard. Celui du mois de juin pourrait tourner autour de l’autorité, de la liberté et de l’identité.
Le député Éric Ciotti, patron des LR, n’a pas perdu une miette des échanges au Sénat
LA SEMAINE DE
LES FEMMES DANS LES SCIENCES Les filières scientifiques sont désertées par les étudiantes. Mais le gouvernement entend « redoubler d’efforts ». Objectif : la parité d’ici à 2027. Par Émilie Cabot « Pour construire le futur, la science a besoin de femmes ! Aucune discipline, aucun domaine n’est la chasse gardée des hommes. » Vendredi 10 février, alors que la réforme des retraites accapare le débat public depuis des semaines, Élisabeth Borne s’offre une parenthèse avec la remise du prix Irène-Joliot-Curie, en l’honneur de femmes scientifiques. Si la cheffe du gouvernement, elle-même ingénieure, monte au créneau, c’est pour mobiliser autour de la place des femmes dans les sciences. Ces filières sont désertées par les jeunes filles. Les chiffres sont sans appel. À l’université, elles représentent 60 % des étudiants, mais seulement 31 % en sciences fondamentales. La part des diplômées d’un titre d’ingénieure en 2020 était – toutes formations confondues – seulement de 28 %. Composé de nombreuses scientifiques, le gouvernement promet de « redoubler d’efforts » dans le primaire et le secondaire pour veiller à « la mixité des filières ». Un des objectifs ? La parité d’ici à 2027 dans les mathématiques et en physique-chimie. Ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, la physicienne Sylvie Retailleau s’est d’abord rêvée « chirurgien sans frontières », puis un temps professeure de maths, avant de se passionner pour la physique et de prendre pour modèle Marie Curie. Avec les ministres Pap Ndiaye ( Éducation nationale) et Isabelle Rome (Égalité femmes-hommes), elle a lancé des assises autour de la place des femmes dans
les sciences. « Un plan national » devrait voir le jour avant l’été. La parité n’est pas un objectif vide de sens. « C’est d’abord utiliser tout le potentiel du monde entier, explique la ministre. Par exemple, on dit souvent que les femmes sont frileuses. Seulement, les climatisations sont réglées sur la température de l’homme qui est différente. » Dans le domaine automobile, les premiers crash-tests étaient réalisés avec des mannequins sur le modèle d’un homme. Sans poitrine, donc, avec un poids et des mensurations différentes. Quand les mannequins femmes sont apparus, ils ont d’abord pris place sur le siège passager… Des exemples comme ceux-ci, Sylvie Retailleau pourrait en donner plusieurs encore. « S’il n’y a pas un équilibre entre femme et homme dans la conception des choses, dans la programmation, on retrouve ces biais et on les reproduit, développe-telle. Avec des femmes, on aura un monde qui n’est pas le même. » Elle peut compter sur le soutien de Sophie Adenot, deuxième spationaute française. Celle qui rêvait de l’espace depuis toute petite sera assurément un modèle pour de nombreuses enfants. « Il ne faut surtout pas se mettre de barrière parce qu’on se sent moins légitime, martèle la quadragénaire. Les sciences et les technologies n’ont pas de genre. » Après la Journée internationale des femmes, le 8 mars, il est utile de rappeler que l’avenir des mathématiques, de l’informatique, de la physique s’accorde aussi bien au féminin qu’au masculin.
ÉDUCATION
Élisabeth Borne et Sylvie Retailleau (à dr.), à la rencontre de jeunes étudiantes scientifiques le 10 février à Paris.
Päl Sarkozy, père de l’ancien président de la République.
NICOLAS SARKOZY EN DEUIL Päl Sarkozy de NagyBocsa s’est éteint à 94 ans à Neuilly-sur-Seine, entouré des siens. Il était très affaibli depuis plusieurs jours. C’est Carla Bruni, épouse de Nicolas Sarkozy DÉCÈS (membre du conseil d’administration du groupe Lagardère), qui l’a annoncé en premier sur son compte Instagram. Né en 1928 à Budapest, Päl Sarkozy avait quitté la Hongrie à 20 ans pour fuir le communisme avant de s’installer à Paris, où il a exercé le métier de publicitaire puis d’artiste peintre. Marié quatre fois et père de cinq enfants, dont Guillaume, Nicolas et François Sarkozy, il avait confié à Paris Match sa volonté de leur transmettre « la valeur du travail et l’esprit d’indépendance ». Il fut un père très absent mais, après des années de relations compliquées, l’ancien chef de l’État s’en est beaucoup occupé ces derniers mois. Ses obsèques ont eu lieu le jeudi 9 mars en l’église Saint Jean-Baptiste de Neuilly-sur-Seine. Il a été inhumé dans l’intimité familiale, dans le cimetière ancien de la ville. DU 9 AU 15 MARS 2023 PARIS MATCH
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LA SEMAINE DE
UNE EMBELLIE AVANT LA TEMPÊTE ? Emmanuel Macron
Élisabeth Borne
PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE
PREMIÈRE MINISTRE
LE MATCH DE L’EXÉCUTIF Approuvez-vous ou désapprouvez-vous leur action à leurs postes respectifs ? MARS 2023
ÉVOLUTION/ FÉVRIER 2023
37 % 63 %
+3 –3
–
–
MARS 2023
ÉVOLUTION/ FÉVRIER 2023
Approuvent
31 %
N’approuvent pas
69 %
= =
Ne se prononcent pas
–
–
Pour chacune des appréciations suivantes, dites-moi si elle correspond à l’idée que vous vous faites des personnalités ci-dessus à leur poste*. MARS 2023
ÉVOLUTION/ FÉV. 2023
ÉVOLUTION/ MARS FÉV. 2023 2023
Défend bien les intérêts de la France à l’étranger 46
–3
–1
40 Dirige bien l’action de son gouvernement
Est capable de réformer le pays 39
+1
–2
34 Est capable de réformer le pays
A une vision pour l’avenir des Français 35
–1
+1
31 Vous inspire confiance
Mène une bonne politique économique 32
–4
+2
29 Est une femme de dialogue
Est proche des préoccupations des Français 27
+3
–2
24 Est proche des préoccupations des Français
LES FRANÇAIS EN PARLENT Pour chacun des sujets suivants, dites-moi s’il a animé, cette semaine, vos conversations avec vos proches, chez vous ou au travail. * 77 73 69 60 60 57 56 48 37 35 33 27 25 23 22 20 9
L’inflation générale des prix (énergie, alimentation, etc.). La réforme des retraites. L’accident de voiture causé par Pierre Palmade. Le meurtre d’une enseignante dans un lycée à Saint-Jean-de-Luz. La sécheresse que connaît la France depuis plusieurs semaines. La journée de mobilisation du 7 mars contre la réforme des retraites. Les séismes en Turquie et en Syrie. Les difficultés à obtenir un rendez-vous avec un médecin. Le premier anniversaire de la guerre en Ukraine. La tenue du Salon international de l’agriculture à Paris. L’accident de train en Grèce qui a fait plusieurs dizaines de morts. La démission de Noël Le Graët de la présidence de la Fédération française de football. L’épidémie de Covid-19 en France. Le tournoi de rugby des Six-Nations. Le décès de l’ancien attaquant de l’équipe de France de football Just Fontaine. La visite de Joe Biden en Ukraine. La mort du dessinateur japonais Leiji Matsumoto, le créateur d’« Albator ».
* Les résultats sont exprimés en pourcentage.
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Par Frédéric Dabi Un (timide) rayon de soleil dans un ciel social périlleux et incertain ? Emmanuel Macron bénéficie d’une embellie dans notre tableau de bord. Avec 37 % d’approbation de son action, sa cote remonte de 3 points. C’est la première fois depuis septembre. Tout se passe comme si le chef de l’État bénéficiait, en ces derniers jours de vacances d’hiver, d’une atténuation de l’effet dévastateur de la réforme des retraites sur sa cote d’action. Moins présente dans un agenda médiatique souvent saturé par l’affaire Palmade (69 % des interviewés en ont discuté), la réforme des retraites s’est éloignée du cœur des conversations des Français (73 %, – 9 points par rapport à février) et se trouve de nouveau devancée par la question brûlante du pouvoir d’achat et de l’inflation (77 %). Dans ce contexte de relative décrispation, le président voit sa cote d’approbation progresser chez les retraités (49 %, + 6 points), catégorie désormais cœur de cible du macronisme, comme chez les sympathisants de gauche (32 %, + 7), segment très hostile à la réforme. Parallèlement, le socle de son électorat présidentiel du 10 avril lui garde un soutien quasi entier (88 %, +2 points). Pour autant, à la veille de la journée du 7 mars, la pérennité de ce « retour en grâce » dans l’opinion reste posée. Et ce d’autant plus que le rebond enregistré dans cette enquête est fragile. Le président demeure en premier lieu impopulaire et minoritaire dans tous les segments sociodémographiques de la population. En outre, il éprouve des difficultés à capitaliser sur son action à l’échelle internationale. Ainsi, seuls 46 % des Français estiment qu’il défend bien les intérêts de la France à l’étranger. Enfin, le couple qu’il forme avec la Première ministre semble déséquilibré. Élisabeth Borne est encalminée, comme en février, à 31 %. Devancée de 6 points par le président sur sa cote d’action globale, et même de 3 points sur la proximité avec les préoccupations des Français, pourtant point faible de l’image présidentielle, elle continue de payer le prix dans l’opinion de cette réforme des retraites. L’enquête Ifop-Fiducial pour Match et Sud Radio a été réalisée sur un échantillon de 1 002 personnes, représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus. La représentativité a été assurée par la méthode des quotas (sexe, âge, profession, niveau d’éducation), après stratification par régions et catégories d’agglomération. Les interviews ont eu lieu par questionnaire autoadministré en ligne les 2 et 3 mars 2023.
FRANCE-ALLEMAGNE LA BATAILLE DE L’ÉNERGIE À la Commission européenne, à Bruxelles, le couple franco-allemand s’affronte en coulisse sur deux réformes majeures : la refonte du marché de l’électricité et la relance du nucléaire. Par Laurence Ferrari Le prix de l’énergie est l’épicentre du tsunami d’inflation qui cisaille le pouvoir d’achat des Français et des Européens. « L’énergie est la mère de toutes les inflations, martèle Nicolas Meilhan, ingénieur et spécialiste de l’énergie. Nos TPE et PME sont au bord du gouffre, avec des factures d’électricité qui explosent malgré les amortisseurs proposés par le gouvernement, qui ne protègent que les plus petites structures et les plus grandes. » Pour Loïk Le Floch-Prigent, ancien patron de Gaz de France, le remède le plus radical et le plus rapide serait de sortir du marché électrique européen, en obtenant, comme l’Espagne et le Portugal, une dérogation temporaire qui permette de subventionner le prix du gaz utilisé pour fabriquer l’électricité. Impossible, répond la ministre de la Transition énergétique, Agnès Pannier-Runacher, taxant même de « plaisantins » ceux qui osent imaginer la même chose pour la France.
« Pourquoi ne pourrions-nous pas demander une mesure similaire ? rétorque Nicolas Meilhan. Cela ne signifierait en rien la fin des interconnexions, qui existaient avant le marché européen, c’est-à-dire avant 1990. » Selon Étienne Beeker, conseiller scientifique à France Stratégie, « on ne peut pas se retirer comme l’Espagne et le Portugal du marché, car ce sont des pays qui ont peu d’interconnexions. La France et encore plus l’Allemagne sont géographiquement au centre de l’Europe. Nous sommes très dépendants les uns des autres, nous avons importé de l’électricité en décembre. Il y a toujours eu de la coopération entre les électriciens européens. » À court terme, la solution consisterait à revenir à un mécanisme de régulation national tout en gardant une coordination au niveau de l’UE. Chaque pays pourrait négocier des contrats de fourniture d’électricité à long terme pour
STRATÉGIE
l’industrie et les consommateurs, en évitant le yoyo des prix et en créant un cadre favorable aux investissements en moyens de production décarbonés. Concrètement, la France a bien mis la réforme du marché sur la table et la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, promet une proposition d’ici la mi-mars. Mais il s’agit d’une réforme « ciblée » pour réduire le degré de dépendance des factures d’électricité vis-àvis du prix du gaz, dont les sources d’approvisionnement sont à 85 % hors de l’UE (70 % avec la Norvège qui n’est pas membre) et qui n’aura d’impact réel qu’à partir de 2024 ! Paris souhaite abandonner le système absurde de tarification au « coût marginal », qui fait que nous payons notre électricité six fois plus cher, à 280 euros par mégawattheure, contre un coût de production à 50 euros. Or l’Allemagne, hostile au nucléaire, et suivie par le Danemark, l’Estonie, le Luxembourg, la Lettonie et les Pays-Bas, souhaite attendre les élections européennes de 2024 pour agir. Un piège politique que refuse la France, consciente que la montée en puissance des populistes pourrait être un obstacle à la réforme en profondeur qu’elle envisage. « L’Allemagne freine, car le marché actuel est adapté à un parc de production fondé sur les énergies renouvelables et le gaz. Le nucléaire, lui, a besoin de long terme, de planification, soit des contrats d’écart compensatoires (qui permettent de combler l’écart entre un prix contractuel prédéterminé et le prix réel du marché) comme pour le super-réacteur EPR de Hinkley Point en Grande-Bretagne. Les Allemands tiennent donc à garder leur système. La bagarre est là-dessus », explique Étienne Beeker. En effet, notre industrie nucléaire reste aux yeux des Allemands un réel avantage pour les entreprises françaises. Pannier-Runacher, qui vient d’annoncer la relocalisation au Creusot de la production de cuves nucléaires par Framatome, a lancé une « alliance du nucléaire », le 28 février à Stockholm. Onze États, dont la Pologne, la Finlande ou la Croatie, prônent la relance de l’atome pour produire de l’hydrogène « vert » décarboné. La bataille s’annonce explosive à Bruxelles.
Chaque pays européen pourrait négocier des contrats de fourniture d’électricité à long terme
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LA SEMAINE DE
Mathilde Boulachin, la fondatrice de la maison Pierre Chavin.
INDUSTRIE LES USINES AU RALENTI
PIERRE CHAVIN QU’IMPORTE LE FLACON Cette PME de l’Hérault revendique la place de numéro un français du vin sans alcool. Par Loïc Grasset « Sans alcool, la fête est plus folle », assure l’antienne. Pourtant, l’immense majorité des bons vivants a longtemps peiné à s’en convaincre. Des écueils gustatifs (l’alcool donne la structure au vin en bouche) et surtout culturels (« Le bonheur vient aux hommes qui naissent là où l’on trouve de bons vins », assurait déjà Léonard de Vinci voilà plus de cinq cents ans) ont sanctifié le vin en France. Du kil au grand cru classé, le jaja fait partie de notre patrimoine national. Pas touche. Toutefois, ces dernières années, le vin à 0 % d’alcool séduit de plus en plus de consommateurs, pendant les périodes de disette (comme le désormais culte « dry january ») mais aussi toute l’année durant, y compris sur les tables de restaurants étoilés. C’est en anticipant cette tendance que Mathilde Boulachin a créé, en 2010, Pierre Chavin – un nom inventé de toutes pièces – pour produire des vins sans alcool. Champenoise d’origine, ayant beaucoup séjourné en Scandinavie, un territoire qui promeut la boisson responsable, elle prend conscience, durant l’une de ses grossesses, que « ce serait bien d’avoir une alternative sympa au Perrier tranche pour les gens qui ne boivent pas d’alcool ». À l ’ é p o q u e, l e m a rc h é e s t presque inexistant. Premier obstacle : convaincre les producteurs
d’Occitanie, où elle vit, de lui vendre leur raisin pour produire un vin alcoolisé. Deuxième gageure, trouver un processus pour désalcooliser le vin. Dans l’industrie, il existe plusieurs techniques : l’osmose inverse, où le vin est mis sous pression dans un circuit fermé jusqu’à une certaine température, puis dans un filtre à nanoparticules pour séparer les molécules légères des molécules lourdes ; la distillation ou l’évaporation sous vide, un processus où l’alcool et les arômes sont séparés puis ajoutés dans le vin distillé pour éviter une perte de goût. Si les méchantes langues assurent que ce qu’on obtient alors est plus proche du jus de raisin finement élaboré que du vin, Mathilde Boulachin s’insurge : « Nos produits ont du goût, du sens, et sont “instagramables”. Très populaires chez les seniors, les sportifs et les gens qui ne consomment pas d’alcool pour raison religieuse. Et un Pierre Chavin, rosé, blanc, rouge ou effervescent, est bu dans le même verre qu’un grand cru. » Si le chiffre d’affaires reste modeste (18 millions d’euros), la PME exporte déjà dans plus de 60 pays et entend grandir en même temps que ce nouveau segment, le « no/low », qui représente 0,5 % du marché du vin. Pour Mathilde Boulachin, qui apprécie autant un bon champagne que son fleuron, le Pierre Zéro effervescent, « vouloir opposer le vin à son cousin sans alcool est ridicule ». Car les clientèles sont complémentaires.
En janvier, la production manu facturière a chuté de 1,8 %, après une hausse de 0,2 % le mois précédent, selon les données publiées par l’Insee. L’ensemble de l’industrie recule de 1,9 %, après avoir bondi de 1,5 % en décembre. Toutefois, la production de l’industrie manufacturière entre novembre 2022 et janvier 2023 est de 2,2 % à celle des CRISE supérieure trois mêmes mois un an plus tôt. Sur cette période, l’automobile (+ 13 %) est moins affectée que les industries extractives, l’énergie et l’eau (– 11 %). Les industries chimiques et du bois papier enregistrent des reculs de 9,3 % et 5,6 %, le caoutchouc plastique se replie de 4,3 %. L.G.
ÉCONOMIE
La société exporte déjà dans plus de 60 pays
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CMA CGM CHAMPION DU BÉNÉFICE L’armateur français a réalisé 23,5 milliards d’euros de bénéfices en 2022. Un record. Jamais aucune société tricolore, que ce soit LVMH ou TotalEnergies, n’avait enregistré pareil profit. CMA CGM a bénéficié d’une hausse du trafic maritime avec les confinements et la forte demande de conteneurs, dont les tarifs se sont envolés. La société présidée par Rodolphe Saadé (photo) a bâti un empire, dix ans après avoir frôlé la banqueroute. Le Marseillais actionnaire d’Air France, propriétaire de « La Provence », pourrait devenir le nouveau sponsor de l’Olympique de Marseille et va investir même dans le spatial en acquérant 10 % du capital de l’opérateur de satellites Eutelsat. L.G.
Éric Bacheré, le directeur général, à Saint-Sever (Landes), le 17 février.
PYRENEX ILLa marque ÉTAIT UNE OIE de doudounes, couettes et oreillers à base de plumes d’oie et de canard, née en 1859, exporte ses produits dans le monde entier. Par Audrey Levy / Photo Vlada Krassilnikova Elles arrivent chaque jour par milliers – jusqu’à 15 tonnes en haute saison –, après avoir été sélectionnées dans les fermes du Sud-Ouest. Mais à l’état brut : ternes et couvertes de graisse. Avant de garnir doudounes, couettes et oreillers, ces plumes de canards et d’oies élevés en plein air seront triées, lavées, séchées, stérilisées… Dans l’usine située à Saint-Sever, dans les Landes, 4 884 habitants, on les voit tournoyer sur 6 mètres de haut dans d’anciennes trieuses pilotées par ordinateur. « Ce sont là les déchets de l’industrie agroalimentaire que nous avons récupérés pour donner à cette matière un nouvel usage à forte valeur ajoutée », explique Éric Bacheré, le directeur général de Pyrenex, qui pilote l’entreprise aux côtés d’Édouard Crabos, le président, représentant la cinquième génération. Ici, rien ne se jette, tout est réutilisé. Y compris les grosses plumes qui, contenant de la kératine, sont destinées à l’industrie cosmétique et servent d’engrais aux agriculteurs. Chez Pyrenex, on appelle cela l’« upcycling », un savoir-faire qui se transmet de génération en génération depuis 1859. Collecter et embellir les plumes, c’était la première activité d’Abel Crabos, l’arrière-arrière-grand-père d’Édouard, avant même que la marque soit déposée, en 1968, et que le premier atelier soit créé, en 1960, par son père, André, alors dévolu aux articles de literie. Même si, en 1942, un premier modèle avait déjà vu le jour : « Une doudoune solidaire, pour protéger du froid les prisonniers envoyés au STO en Allemagne », raconte Éric Bacheré. C’est en 1970 que la marque fera appel à l’alpiniste et pyrénéiste Louis Audoubert pour lancer ses premières doudounes haut de gamme. « Destinées aux sportifs, elles devaient résister aux conditions climatiques les plus extrêmes, dit-il. Depuis, on a sans cesse amélioré le processus de fabrication pour rendre nos doudounes (de 250 à 850 euros) ultra-légères et isolantes. »
Si la plupart des marques de textile ont délocalisé leur production en Asie, Pyrenex a maintenu la majeure partie de sa fabrication en France, à l’exception de l’assemblage des doudounes (Tunisie, Bulgarie). À ce dessein, elle réinvestit sans cesse dans l’outil de production. Y compris pendant l’épidémie de Covid ou de grippe aviaire, qui a engendré des pénuries de plumes. À côté des machines semi-automatiques dont elle s’est équipée pour fabriquer couettes et oreillers en série, la société a lancé en 2019 un nouvel atelier pour mettre au point de petites lignes de doudounes 100 % made in Saint-Sever. « Pour rester compétitif, tout en proposant des prix raisonnables, on a développé une nouvelle technique de tissage », explique-t-il en nous montrant une toile prépiquée qu’il suffit de remplir de plumes. Dans l’atelier, les petites mains agiles coupent et piquent déjà les prochains prototypes. Le best-seller ? La Mythic, un classique des années 1970 revisité, dont raffolent Anglais, Allemands, Belges et Italiens. « Avec le made in France, le marché est plus restreint, mais nous n’avons aucun complexe à exporter », assure le directeur général. Les ventes à l’étranger représentent 60 % du chiffre d’affaires (34 millions d’euros en 2022). Pour la literie, la société est présente dans 1 700 points de vente à travers le monde, où elle écoule 800 000 oreillers et 200 000 couettes par an. Et pour ses 200 000 doudounes, qui représentent 55 % de son activité, elle en compte 1 500, à côté de 7 boutiques en France. « Nous nous renforcerons sur les marchés les plus porteurs », annonce Éric Bacheré. Et pas seulement en Europe, mais aussi Japon et aux ÉtatsUnis, où Pyrenex s’est implanté. La concurrence est rude, mais la marque aux fibres plus naturelles que celles d’Uniqlo, plus accessible que la branchée Moncler et plus généraliste que la très outdoor North Face réunit tous les atouts.
EXCELLENCE FRANÇAISE
Le best-seller ? La Mythic, un classique revisité, dont raffolent les étrangers
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DESSIN DE JOANN SFAR
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ACTUALITÉ
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LE CHOC DES PHOTOS Blanche neige est de retour
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MOURIR POUR BAKHMOUT Par Charles Emptaz
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LESLIE ET KEVIN LES AMANTS MAUDITS Par Arnaud Bizot
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MURIEL ROBIN L’AMITIÉ À L’ÉPREUVE Par Caroline Mangez
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GUY SAVOY « J’AI PERDU UNE ÉTOILE MAIS PAS LE MATCH » Par Aurélie Chaigneau
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OLIVIA GRÉGOIRE UNE MINISTRE AUX PETITS SOINS Par Laurence Ferrari
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MAËL : MON FILS, MA BATAILLE Par Nicolas-Charles Torrent
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MH 370 UN MYSTÈRE ENTIER Le 8 mars 2014, le vol 370 de la Malaysia Airlines (MH 370) disparaissait des radars civils trente minutes après son décollage de Kuala Lumpur. Depuis, le mystère n’a jamais été résolu. Ghyslain Wattrelos a perdu sa femme et deux de ses trois enfants lors du drame et continue de se battre pour obtenir la vérité. Neuf ans plus tard, il se confie à Paris Match. Par Gaëlle Legenne
WILL SMITH OPÉRATION RÉDEMPTION Par Jean-Mathieu Pernin
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KARL LAGERFELD UNE SÉRIE COUSUE MAIN Par Clémence Duranton
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LES HÉROS DE LA PLANÈTE NEMONTE NENQUIMO LA JUSTICIÈRE DE L’AMAZONIE Interview Caroline Fontaine
Crédits photo : P. 26 : DR, The Hope Mission, Instagram Gwyneth Paltrow. P. 28 à 33 : MaxPPP, E. Tchaen/Abaca, P. Petit, DR, Bestimage, D. Plichon, S. Zaidi, Réa, V. Krassilnikova. P. 35 : P. Petit. P. 36 et 37 : R. Chiu/Sopaimages/Sipa. P. 38 à 45 : S. Gratacap. P. 46 et 47 : DR, MaxPPP. P. 48 et 49 : DR. P. 50 et 51 : P. Rostain, A. Bizot. P. 52 et 53 : DR. P. 54 et 55 : Bestimage, T. Da Silva/C. Moreau/Bestimage. P. 56 et 57 : DR. P. 58 à 65 : J. Faure. P. 66 à 69 : V. Capman. P. 70 et 71 : F. Lafargue. P. 72 et 73 : F. Lafargue, DR. P. 74 et 75 : Walter/Bestimage, B. Snyders/Reuters, Mega/KCS. P. 78 et 79 : J. Pavlovsky/Sygma via Getty Images, M. Lagos Cid. P. 80 et 81 : M. Lagos Cid. P. 82 et 83 : M. Lagos Cid, J. C. Sauer. P. 84 et 85 : V. Clavières. P. 86 et 87 : M. Anderson/Amazon Frontlines, D. Ochoa/AP. P. 88 et 89 : M. Anderson/Amazon Frontlines, J. Acero/Amazon Frontlines, D. Plichon. P. 90 et 91 : V. Clavières.
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LE CHOC DES PHOTOS
BLANCHE NEIGE EST DE RETOUR Après des années de sécheresse et d’incendies ravageurs, des tempêtes hivernales se sont abattues sur la Californie. Un scénario catastrophe qui va remplir les réservoirs et promet un futur blockbuster. Photo Ringo Chiu
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À 1 kilomètre à l’ouest de Bakhmout, dans une zone encore tenue par les forces ukrainiennes, le 3 mars. Cette voiture va permettre à une dizaine de soldats et à notre photographe d’échapper à des tirs de mortier russes provenant du nord et du sud.
Les Russes veulent une victoire à tout prix. Pour les Ukrainiens, l’enjeu est de se replier en bon ordre. Témoignages venus de la première ligne
Enlisés dans un conflit sanglant, harcelés par les missiles ennemis, ils refusent de s’avouer vaincus. Depuis l’été, le Kremlin s’acharne à prendre cette forteresse du Donetsk à la valeur stratégique pourtant limitée. Bakhmout est devenu l’épicentre de la guerre, et chaque camp se bat pour en faire un symbole. Notre photographe est l’un des derniers à avoir approché la ligne de front alors que les combats s’intensifiaient et que les hommes de Wagner gagnaient du terrain au nord. Coup de com musclé ou bras de fer avec Poutine, le 5 mars, le mercenaire en chef Prigojine menaçait Moscou de retirer ses troupes. Et réclamait les lauriers de la bataille avant même son issue. REPORTAGE SAMUEL GRATACAP / RÉCIT CHARLES EMPTAZ
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Sur le front de la ville symbole, des vétérans et des pères de famille pour défendre leur Ukraine
Le 21 février, dans le centre-ville de Bakhmout, à 900 mètres des positions russes à l’est et au sud.
Ils forment le dernier rempart de cette ville qui comptait 70 000 habitants, désormais ravagée et quasiment déserte. Parmi les combattants mobilisés, les hommes de la 93e brigade mécanisée, unité d’élite de l’armée créée en 1943, sont rompus à la guerre et déterminés. Ils ont servi en 2014, ont reconquis Izioum en septembre et font depuis partie des forces engagées à Bakhmout. Alors que les soldats d’infanterie russes font office de chair à canon, le commandant adjoint de la Garde nationale Volodymyr Nazarenko résume la mission des forces ukrainiennes : « Infliger autant de pertes que possible à l’ennemi. Chaque mètre de notre terre lui coûte des centaines de vies. »
3 1. Oleksander Babenko, 24 ans, photographe ukrainien, fixeur et ami de notre photographe. 2. Le 3 mars, Zhenia, soldat de la 93e brigade, dans les environs de Bakhmout. 3. Le combattant DJ, son nom de guerre, repère un drone russe utilisé pour ajuster les tirs.
À bout de forces et d’épuisement, les combattants voient la mâchoire russe se refermer sur eux Les défenseurs de Bakhmout touchés par les tirs russes affluent dans cet hôpital de campagne. Une équipe médicale est mobilisée sans relâche pour sauver des vies et soigner les blessures de guerre, souvent provoquées par des éclats de mortier. Le 5 mars, Volodymyr Zelensky a rendu « un hommage spécial à la bravoure, à la force et à la résilience des soldats qui combattent dans le Donbass ». Le lendemain, Kiev annonçait son intention de renforcer ses positions à Bakhmout. À défaut de faire reculer les Russes, résister est la plus grande des victoires.
Blessé à la main et aux jambes, ce soldat souffre aussi de contusions cérébrales causées par les tirs d’artillerie. À une dizaine de kilomètres du front, le 28 février.
ACTUALITÉ
« Drone russe là-haut ! Foutons le camp », crie DJ en tapant le rebord du Mitsubishi comme un Cosaque sur les flancs de son cheval Propos recueillis par Charles Emptaz e matin, il fait beau à Bakhmout. Sur le toit d’un immeuble de la partie russe de la ville, un homme mûr s’adresse à la caméra. Casqué, en uniforme, c’est Evgueni Prigojine, le patron de la milice Wagner, à l’œuvre depuis le mois d’août dans ce nouveau Stalingrad. « Donnez à vos soldats une chance de quitter la ville, elle est presque encerclée, il ne reste plus qu’une route, les pinces sont en train de se resserrer. » Nous sommes le vendredi 3 mars, la situation est critique. Pour emprunter la route qui relie l’Ukraine à Bakhmout, dernière ligne de vie, il faut passer l’ultime check point de Tchassiv Yar, bourgade de l’oblast de Donetsk où se massent quelques soldats
ukrainiens. « On ne sait pas si vous pourrez entrer, il paraît qu’ils ont défoncé le pont », lâche le plus jeune, bandeau vert sur le casque. La voie d’Ivanivske, qui partait du sud, est impraticable, pilonnée depuis l’été par les Russes. Il faut contourner par le nord, à découvert et à toute berzingue pendant quinze longues minutes à travers les champs de tournesols noircis par l’hiver. Passé un vieux cimetière à mi-chemin, d’autres soldats apparaissent derrière un abri d’autobus. Parmi eux, deux snipers, chargés de prévenir les incursions des saboteurs de Wagner : « Ils ont réussi à avancer un char depuis Yahidne, au nord, et ont fait sauter le petit pont cette nuit vers 2 heures, mais faut voir, peut-être que vous pourrez passer. » À l’entrée du faubourg de Kromove, le boum-boum des tirs de mortier « entrants » est incessant. Explosions à répétition, bientôt suivies des répliques
ukrainiennes « partantes », au bruit plus sourd. Le pont est bien pulvérisé, hors d’usage. À quelques mètres, une trace noire. C’est là que gisaient, une semaine auparavant, un minibus carbonisé et deux cadavres emballés dans des « body bags ». S’agissait-il de dépouilles de volontaires ? Ces civils ukrainiens risquent leur vie chaque jour pour tenter de ravitailler en eau et en nourriture les derniers habitants de Bakhmout. Autrefois au nombre de 71 000, ils ne seraient plus que 3 000 à présent. « Cette route, c’est la loterie, tu ne sais jamais ce qui va te tomber dessus », répète-t-on ici. Des soldats nous font des signes, il faut rebrousser chemin. De retour à Tchassiv Yar, les hommes de la 93e brigade nous accueillent. Considérés comme l’élite des soldats ukrainiens, ils sont aux avant-postes de cette bataille cruelle. « On était déjà là en 2014, ce conflit ne date Des soldats ukrainiens évacués de la ligne de front à Bakhmout, le 26 février.
Un bâtiment touché par un missile Grad russe dans les environs de Bakhmout, le 28 février.
pas d’hier ! » fulmine DJ qui, malgré ce nom de guerre, ressemble davantage à un vieux corsaire qu’à un fan de techno. « On prend à travers champs, c’est le seul moyen de contourner le pont », ajoute-t-il. Direction le sud, cette fois, dans la terre noire et molle. Après un long détour, nous essayons à nouveau d’approcher de Bakhmout, mais une première voiture cale, bientôt suivie par deux autres, prisonnières de la glaise. Deux heures de vaines manipulations ne suffiront pas à les libérer de leur gaine de boue. Enseveli sous sa barbe blanche, l’un des hommes de la 93e vient de recevoir une mauvaise nouvelle d’un pilote de drone ukrainien. « Les Russes nous ont repérés et s’activent, ça va taper dans deux minutes », prévient-il. Il faut vite trouver un trou, une anfractuosité dans le champ, avant que les premières salves n’éclatent. Tirs croisés en provenance de Kromove et d’Ivanivske. Du nord, du sud, la mâchoire russe se referme. La visée, pas encore ajustée, nous laisse le temps de trouver refuge dans un sous-bois. « Toi, enlève tout de suite ta veste grise, tu vas nous faire repérer », hurle un soldat. Un autre, cagoulé, ordonne : « Dispersez-vous, si un mortier tape au mauvais endroit, vous ne serez pas tous morts. » Silence dans la faction, chacun tend l’oreille. En face, les hommes de Wagner ont calibré leurs frappes. Elles s’abattent et, toutes les vingt secondes, la terre vole en grosses gerbes. Les visages et les corps se crispent. C’est le temps du feu qui s’étire et se dilate. Les cœurs battent plus lentement. « Dégageons d’ici », lâche DJ, le pirate édenté. Une seule voiture n’est pas enlisée. Tiendrons-nous à dix ? Un homme part sous le feu, il faut le suivre sur ce chemin des morts au pas de course. Tout est jeté par-dessus bord pour dégager de la place. « On aurait dû moins manger, la voiture ne
Ce van qui transportait des blessés a été criblé de balles. Dans l’enceinte d’un hôpital de campagne à Bakhmout abandonné par les Ukrainiens, le 21 février.
va jamais démarrer », lâche DJ. Mais alors que le moteur se fait entendre, ses yeux bleu délavé scrutent le ciel, écarquillés : « Drone russe là-haut ! Da-vaï ! [Allons-y] », crie-t-il en tapant les flancs d’acier du Mitsubishi comme un Cosaque sur ceux de son cheval. Nous progressons au creux de la vallée en direction du cimetière. « Regarde, le drone nous suit ! » Un des hommes de la 93e entame une prière : « Dieu, sors-nous d’ici. » Pour ne pas basculer dans le vide, les soldats se tiennent les uns aux autres. Pop, un autre vieux bravache, tente de nous rassurer : « T’inquiète pas, un jour tu nous verras marcher sur la place Rouge. » Rires de canailles dans les rangs, quelques kilomètres plus loin, c’est Tchassiv Yar. La délivrance. « Quand tu sors d’un merdier pareil, tu renais, tu deviens ukrainien », conclut Pop. Une heure plus tard, sa troupe repart au front. Une semaine auparavant, quand le pont tenait encore, nous avions pu pénétrer dans la ville fantôme. Première pause sous le tunnel de la gare de Bakhmout. Des soldats rentrent du front, esseulés : « On a morflé, mais en face, c’est encore pire pour eux, ils perdent dix fois plus d’hommes ! » Plus l’on approche du centre-ville, plus les passants se font rares. Une vieille dame en manteau rouge semble égarée. « Où est le supermarché ? » demande-t-elle. Il n’y a plus aucun magasin ouvert, seul un centre de volontaires, à proximité de la gare, sert encore du thé chaud et des biscuits. Une cinquantaine de civils s’y massent autour du poêle à bois. Les mots se bousculent dans la bouche de Valeri, venu chercher ici une connexion Internet : « Celui qui prendra Bakhmout aura remporté une grande victoire symbolique. Mais que vaut un symbole détruit ? Nous n’avons plus rien chez nous. » Parmi les soldats ukrainiens, il se murmure que les civils qui ont
Les frappes de Wagner s’abattent toutes les vingt secondes
décidé de rester à Bakhmout attendent l’arrivée de Russes. Cette cité, comme beaucoup d’autres de l’oblast de Donetsk, comporte de nombreuses populations russophones. Et probablement autant de russophiles… Nikolaï, engagé dans l’armée ukrainienne au début du conflit, fulmine : « Je suis fatigué, on se bat pour notre pays, mais aussi pour eux, pour leur ville, et ils nous crachent à la figure. Est-ce que ça vaut le coup de mourir pour ça ? » Dehors, le décor est apocalyptique. Des ogives de missiles Grad ou Merch fracturent le sol. Ceux-là n’ont pas explosé, mais plus loin, des véhicules éventrés témoignent que les projectiles ennemis atteignent souvent leurs cibles. À l’arrivée sur la grand-place, le jaune et le bleu du drapeau ukrainien tranchent sur le bâtiment de la mairie noirci par les explosions. La ville que nous avions traversée en juillet n’est plus que l’ombre de ce qu’elle fut, métamorphosée, marquée à jamais par la volonté féroce des armées russes d’emporter une victoire à tout prix. Seul sur la place, un soldat des services de renseignement ukrainiens semble surpris de nous croiser. Équipé d’une antenne de télécommunication, il précise que « les Russes sont là, à 900 mètres, sur la rivière Bakhmouta ». Les hommes de Poutine sont postés sur la rive est, tandis que ceux de Zelensky campent à l’ouest, en rotation tous les trois jours dans ces tranchées infernales qui bordent le cours d’eau. Un peu en retrait, leurs frères d’armes tirent par-dessus têtes au mortier de 120. Leurs canons et leurs missiles sont postés hors de la ville, à 10 kilomètres de là. Sur le chemin du retour, des chiens errants cherchent leurs maîtres disparus. Bakhmout semble désormais abandonné aux combattants et aux corbeaux. Ceux-là ne daignent même plus battre de l’aile au son des bombardements, indifférents au fracas de la guerre. Et à l’issue des combats. DU 9 AU 15 MARS 2023 PARIS MATCH
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Leslie Hoorelbeke, 22 ans, et Kevin Trompat, 21 ans, sortaient ensemble depuis trois semaines.
LESLIE ET KEVIN LES AMANTS MAUDITS
Jusqu’au bout, on a voulu croire à une fugue. La découverte de leurs corps signe un crime lié à la drogue
Les gendarmes et leurs enquêteurs de l’IRCGN dans un bois de Virson (Charente-Maritime) au hameau des Haies, où le corps de Leslie a été retrouvé le 4 mars.
Dans l’obscurité de ces bois, les derniers espoirs se sont évanouis. Après trois mois de recherches, les aveux des suspects ont mené les gendarmes aux dépouilles. Deux jeunes d’un peu plus de 20 ans ont été écroués et mis en examen pour « assassinats », un troisième pour « enlèvement et séquestration ». Ce dernier, Tom, censé héberger le couple le soir fatidique, était lié à Kevin par le trafic de drogue. Une importante somme en liquide, une dette à rembourser, et Leslie qui lui avait préféré son associé et rival… Tom l’avait annoncé à des amis : « un truc de dingue » allait arriver à Kevin. PHOTO XAVIER LÉOTY / ENQUÊTE ARNAUD BIZOT
« De bons et vrais amis » : Tom Trouillet (en haut) poste cette photo sur Facebook en juin 2020. Leslie (en sweat noir), lui répond par trois petits cœurs.
De notre envoyé spécial Arnaud Bizot
« Curieux que les sangliers n’aient pas fait leur œuvre, s’étonne le propriétaire du terrain. Même si ce pauvre gamin a été recouvert de chaux, ils auraient dû le flairer »
lat comme la main, le paysage de la plaine d’Aunis traîne et va s’abaissant jusqu’au littoral atlantique. À la sortie du petit village de Puyravault (Vendée), propre comme un sou neuf, siège de la dernière Commanderie de Templiers et où Louis XI vint se réconcilier avec son frère qui ne pensait qu’à comploter contre lui, des champs en jachère à perte de vue, sans haies, sans frontières. Vendredi 3 mars, une quinzaine de véhicules de gendarmerie ont déboulé chemin des Roquetis, au bout du village. Quinze heures durant, des enquêteurs ont battu cette terre céréalière que survolait leur drone. Derrière un monticule, ils ont découvert le corps de Kevin Trompat, 21 ans. Les gendarmes ont « nettoyé » la zone, mais de ce monticule s’échappe encore clairement une odeur de mort. Partout, des bauges. « Curieux que les sangliers n’aient pas fait leur œuvre, s’étonne le propriétaire du terrain. Même si ce pauvre gamin a été recouvert de chaux, ils auraient dû le flairer. » Cinq kilomètres plus loin, par la minuscule D108 direction La Rochelle, on gagne Virson (Charente-Maritime), 700 habitants, fief des familles seigneuriales du XVe siècle. Samedi 4 mars, les mêmes gendarmes ont investi un endroit qu’au village on appelle le bois de l’Encens, les Roulières ou Saint-Vincent. « Il n’a pas de nom », résume le petit-fils du propriétaire qu’on croise le lendemain sur son vélo. C’est lui qui a entretenu le minuscule et
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ACTUALITÉ
Leslie (en rouge), ses copines et ses chiens Onyx et Baïko.
ravissant pavillon de chasse en pierre, planté au milieu d’un champ, derrière les frondaisons. Là encore, de tous les traqueurs et piqueux qui chassent ici chevreuils, lièvres et sangliers, personne n’a vu, ni leurs chiens senti, le corps de Leslie Hoorelbeke, 22 ans. La violence des crimes l’emporte sur la poésie des lieux. La mort en bordure d’un chemin, la mort dans un bois glacé, cette nuit du 25 au 26 novembre 2022, par un temps de cimetière : il fallait tout de même évoquer ces deux dernières demeures qu’un nombre considérable de locaux ont arpenté, à pied ou en voiture, certains même avec leurs enfants étonnés, tout au long du weekend, « pour se recueillir », à les entendre. Kevin, gamin, chassait dans ces coins-là avec son père. C’est la seule activité qui l’apaisait vraiment, avec la pêche. Il avait un temps envisagé de se former aux métiers de la forêt et, pourquoi pas, devenir garde-chasse. Mais les écarts judiciaires de son père, condamné en 2007 pour trafic de stupéfiants et accusé de menaces de mort, ont entraîné la mise sous tutelle de Kevin. Il accumule les petits boulots sur les marchés, vend de la ferraille et, à ses 18 ans, Véronique, la patronne du Nulle Part Ailleurs, l’unique restaurant de Prahecq, le prend en apprentissage. « Il n’a pas été élevé dans la soie, il savait se défendre », ditelle. Mais « les cinq têtes de tueurs », comme il les décrivit à son père par SMS, qui ont ralenti devant lui, en ville, en début de soirée ce 25 novembre, lui ont fichu une sacrée trouille. « J’ai eu peur, papa.
Je ne sais pas qui sont ces mecs-là. » Sont-ils venus de Niort pour menacer ou régler quelques comptes ? Capitale des assureurs et ville de « l’angélique », l’herbe des anges supposée rendre heureux et soigner à peu près tous les maux et qu’on cultiva ici en masse, après la peste de 1603, Niort est en passe de devenir un « hub » pour des substances moins licites. Le Poitou, zone inattendue de transit pour les mules guyanaises : depuis un an, une vingtaine de dossiers sont en cours au tribunal correctionnel. Les mules atterrissent à Orly et sautent dans le premier TGV pour Niort. Un kilo trois cents de gélules de cocaïne saisies en mai dernier ; 3 kilos d’héroïne et 48 de cannabis en novembre, au moment des faits. Nous sommes dans le deuxième département français en matières de saisies de cocaïne. Elle inonde la région comme antan le golfe marin du Poitou inondait les plaines de sa vase. Quelques semaines après la disparition de Leslie, c’est à Niort et dans cet univers qu’ont enquêté, au risque de mal finir, le père de Leslie, Patrick Hoorelbeke, et sa compagne, Émilie Cardré. À juste titre, ils se sont interrogés sur le nouveau petit ami de Leslie, une jeune fille cash, nature, un peu naïve, qui enverra ce [SUITE PAGE 50]
Niort est en passe de devenir un « hub » pour substances illicites
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La place de l’Église à Prahecq (Deux-Sèvres), où Kevin aurait eu rendez-vous dans la soirée du 25 novembre, quelques heures avant sa disparition.
texto à 2 h 56 : « Je viens de vomir mes tripes plein de sang dès que je rentre je me pose. » L’un des trois très jeunes personnages que Kevin et Leslie ont croisés en novembre a été interpellé en 2019 pour trafic. Nathan Badji, 22 ans. Gentil, déconneur mais impulsif, soigné pour des troubles psychiatriques, c’est près de chez lui, dans un conteneur, qu’on retrouva en nombre, le 8 décembre, des affaires de Kevin et Leslie dont la liste a sûrement entamé l’espoir de leurs parents : papiers d’identité, chaussures, jogging, sweats, trousse de toilette, brosse à cheveux… Nathan est mis en examen pour « assassinats », « modification de l’état des lieux d’un crime », « enlèvement et séquestration ». Idem pour son ami Enzo C., 23 ans, incarcéré le week-end dernier. Kevin et Leslie devaient passer la nuit du 25 au 26 chez le troisième de la bande, Tom Trouillet, 22 ans. Le juge
L’enquête ne s’est pas faite en claquant des doigts : 120 auditions, mises sur écoute...
de Poitiers l’a incarcéré pour « enlèvement et séquestration ». Lors de la disparition des amoureux, Tom dit s’être rendu à un « apéro-son », une fête techno sous un pont d’autoroute, et avoir pris un « buvard » de LSD. Il participa aux recherches, criant haut et fort que Kevin et Leslie « avaient la patate : on rigolait bien ». Des paroles qui font bondir des proches de Leslie : « Tom était encore très amoureux d’elle. » « L’enquête ne s’est pas faite en claquant des doigts », explique fièrement un gendarme : 120 auditions, téléphonie, mises sur écoute, elle a mobilisé la section de recherches de Poitiers et le groupement des Deux-Sèvres à Niort. Les « amis » sillonnaient la région à bord de leurs véhicules bricolés. À Puyravault et à Prahecq, depuis la découverte des corps, tout le monde évoque la drogue, anciens compris, comme cet agriculteur de Prahecq qui entretient les abords de sa ruelle menant au monument aux morts. Celui-là, comme les autres de la région, célèbre les marins tombés aux deux guerres. Ici, la mer se respire et l’on s’attend, dans cette campagne d’huile, à la voir surgir à chaque tournant. Les châteaux d’eau ont la pureté des phares côtiers. Mais ce sont aujourd’hui deux villages en deuil, des proches qui ne parlent plus, ou alors si peu, des mères, des amis qui n’osent imaginer ce que vivent les familles de Kevin et Leslie, terrées chez elles depuis qu’ils savent. Mais que dire lorsque l’espoir est mort et que l’on vous a pris, comme le formule la restauratrice de Prahecq, « la chair de votre chair » ? Arnaud Bizot
ACTUALITÉ
Drogues : petites villes, gros trafic
Le tertre derrière lequel le corps de Kevin a été découvert, à Puyravault (Vendée), la commune d’origine d’un des suspects. L’un des rares souvenirs qu’ils ont eu le temps de se faire. Avec Onyx, disparu lui aussi.
Par Frédéric Ploquin a disparition de Leslie, 22 ans, et de Kevin, 21 ans, dont les corps ont été découverts entre La Rochelle et Niort, est-elle à mettre sur le dos du chaos criminel engendré par le trafic de stupéfiants ? C’est une piste suggérée par l’un des suspects, selon lequel l’enlèvement et la séquestration des deux jeunes seraient liés à une dette contractée sur le marché de la drogue. Écran de fumée ou véritable aveu ? L’hypothèse est prise au sérieux, tant les violences liées au trafic se sont répandues dans le secteur. Niort, préfecture du département des Deux-Sèvres, 60 000 habitants, est même considéré comme l’un des nouveaux chaudrons de la drogue en France. Cette ville moyenne où il fait (normalement) bon vivre est le lieu où l’on vient s’approvisionner en cocaïne, une poudre bon marché et de qualité en provenance directe de la Guyane, transportée par les mules qui irriguent le territoire métropolitain, en ciblant les villes encore peu quadrillées par la mafia des stupéfiants. De quoi générer une criminalité jusque-là réservée aux quartiers nord de Marseille, aux cités de Grenoble ou à celles de la région parisienne : enlèvements, menaces, coups et blessures, et pourquoi pas règlements de comptes. Un autre cas (inédit) survenu cette fois à Bourges, une ville moyenne de la région Centre, 66 500 habitants, retient l’attention de la police judiciaire. Dans la nuit du 2 mars, vers 23 heures, trois hommes ont enlevé en pleine rue un certain K., 16 ans, et l’ont transféré à bord d’une Clio jusqu’à PierreBénite, dans la banlieue de Lyon. S’apercevant qu’ils l’avaient confondu avec un ami prénommé Y., 16 ans lui aussi, ils l’ont ramené le lendemain à Bourges. Une équipée musclée, puisqu’ils étaient une dizaine lorsqu’ils se sont présentés chez celui qu’ils recherchaient… pour une dette de stupéfiants d’un montant de 6 000 euros. Cagoulés, bombes lacrymogènes en main, les membres de la bande enfoncent la porte. Leur cible s’enfuit par le balcon, avant d’être retrouvée chez des voisins et embarquée sous la contrainte en même temps qu’un autre garçon, A., 14 ans. Un couteau a été retrouvé sur place, mais les assaillants disposaient aussi d’une arme de poing… Originaire de l’Essonne, Y. avait envoyé le jour même des messages inquiétants à la cousine qui le logeait, via Snapchat, où il disait que des gens voulaient le « tuer ». Les enquêteurs ont rapidement acquis la certitude qu’il avait été recruté sur les réseaux sociaux pour aller vendre des stupéfiants à… Marseille. Une ville dont les trafiquants seraient en passe d’exporter leurs méthodes expéditives jusque dans la moindre bourgade. Et où l’on exécute désormais pour quelques milliers d’euros. DU 9 AU 15 MARS 2023 PARIS MATCH
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Elle se rend à l’avant-première du film de Lisa Azuelos dans lequel elle joue, mais n’aura pas la force d’y assister. « La chambre des merveilles » raconte l’histoire d’un enfant fauché lors d’un grave accident de la route… Pour décrire son amitié de trente ans avec l’humoriste en disgrâce, elle confiait à Paris Match en 2016 : « Il est l’homme de ma vie. J’ai développé un instinct maternel avec lui. Il a été mon fils et il aurait pu me faire ce qu’il voulait, j’aurais toujours été là. » Désormais, c’est la tristesse et l’indignation qui l’emportent. Le silence aussi. En attendant de savoir si l’état de santé de Pierre Palmade permettra sa détention, Muriel Robin a choisi de prendre ses distances. RÉCIT CAROLINE MANGEZ
Elle avait toujours tout pardonné à Pierre Palmade, mais désormais lui garder son affection tourne au cas de conscience Faire front avec les proches. Muriel Robin et sa femme, Anne Le Nen, entre Nicole Sonneville (à g.) et Nathalie Toulza-Madar, devant le cinéma Pathé Wepler, à Paris, le 6 mars.
Aux Victoires de la musique en 1991.
Pour le spectacle « Elles se croient toutes Joly » mis en scène par Pierre Palmade, au Théâtre de Paris en 2015.
Au Fouquet’s pour les 47 ans de Pierre Palmade en 2015. Avec, à gauche, Catherine Lara et Liane Foly.
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Ils se sont tant aimés. Mais, malgré leur amitié, Palmade est arrivé au bout d’une vie gangrenée par ses mauvais choix Par Caroline Mangez epuis le 10 février elle est passée par tous les affres, toute la palette des sentiments. Cette fois, il n’y a plus de quoi rire, pas même de quoi sourire. Avant le drame, Pierre Palmade était pour elle, il lui est en tout cas arrivé de le dire, comme un fils spirituel. Un ami de trente ans, que mille fois elle a tenté de le détourner de ses démons, en l’aidant à se recentrer sur son travail, son talent, en essayant de le raisonner, de le comprendre. Mais cette fois-ci, que penser ? Que faire ? Au soir de l’accident, Muriel Robin s’est précipitée au chevet de Pierre Palmade à l’hôpital du Kremlin-Bicêtre où il venait d’être transféré. Anne, sa compagne, était à ses côtés. C’était une réaction presque instinctive, la comédienne ne savait pas encore ce qui s’était réellement passé avant l’accident, ni ce qui l’avait provoqué, ni même si son ami, blessé et qu’on avait mis tant de temps à extraire de la voiture, s’en sortirait. Le lendemain, samedi, et encore le dimanche, elles sont revenues le visiter en réanimation dans sa chambre au deuxième étage de l’hôpital. Des informations avaient filtré, désormais elles en savaient davantage. Il ne s’agissait plus de le veiller, mais de comprendre, de trouver des réponses à des interrogations insupportables. Essayer d’en avoir le cœur net, et donc se confronter à la peine. Au détour des couloirs, la comédienne a croisé la famille que son ami a brisée. Elle a fondu en larmes dans leurs bras, partageant leur peine, se sentant presque coupable de ne pas avoir pu leur éviter ce drame. Après cela, comment pardonner ? La colère, comme une lame de fond, a tout balayé. Et Muriel a décidé de ne plus aller
voir Pierre. C’était pourtant encore possible au terme de sa garde à vue et de sa mise en examen pour homicide et blessures involontaires par conducteur ayant fait usage de produits stupéfiants en état de récidive légale : la juge d’application des peines avait choisi d’envoyer l’humoriste en cure de désintoxication dans le service d’addictologie de l’hôpital Paul-Brousse de Villejuif plutôt qu’en prison. Sous bracelet électronique, il pouvait alors encore correspondre avec ses proches et son avocate, mais à Muriel il avait choisi de ne plus donner de nouvelles. Après l’appel du parquet de Melun requérant la mise en détention, en préventive, dans une cellule de Fresnes, il était de retour au KremlinBicêtre le 27 février. Devant la porte de sa chambre d’hôpital, deux policiers 24 heures sur 24. Toujours pas de nouvelles, et peut-être est-ce mieux ainsi. Ensuite, il y a eu l’AVC. Le transfert dans un autre hôpital pour subir une intervention. Muriel s’est demandé s’il allait mourir, et certains bons souvenirs des moments heureux sont remontés. Leurs éclats de rire, oui, il y en avait eu. Fallait-il les renier ? Ensemble et rejoints par Michèle Laroque, ils ont monté trois pièces dont la dernière version, « Ils s’aiment… enfin presque ! » sera un téléfilm de Muriel diffusé sur TF1. En juin 2022, ils avaient tous deux ressuscité « Numéro 1 », l’émission de Maritie et Gilbert Carpentier, ce rendez-vous incontournable pour les téléspectateurs des années 1970. « Rien de tout cela ne serait possible sans Muriel », disait alors Pierre. Elle est l’une des personnes qui a été le plus proche de lui durant sa carrière. Plus qu’une coauteure ou qu’une sparring partner, une sorte de tutrice pour ce type à la dérive. Elle l’appelait son « petit frère ». Lui était fan de cette héritière de Jacqueline Maillan depuis ses 15 ans. Débarquant
Enregistrement de l’émission « La fine équipe » en juin 2022.
À l’hôpital, elle fond en larmes dans les bras de la famille qu’il a brisée
à Paris de sa province, il l’avait cherchée partout, mais c’est finalement elle qui lui avait fait signe la première, en mai 1988, après l’avoir vu sur scène au café-théâtre Tintamarre, avec Chantal Ladesou. Il y a des rencontres incontournables. Eux s’étaient reconnus et n’en revenaient pas de leur chance. Il suffisait que Palmade lance une idée pour que Robin rebondisse, la développe. En avril 2022, il confiait : « Moi qui me suis senti seul toute ma vie, je l’ai été un peu moins le jour où j’ai rencontré Muriel. » La fragilité, le doute, le désespoir en embuscade, tous deux connaissent. [SUITE PAGE 56] DU 9 AU 15 MARS 2023 PARIS MATCH
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Muriel a elle aussi été en rupture de ban dans une famille qui ne la reconnaissait pas et un monde du cinéma qui parfois la fait attendre. Elle a connu la dépression, un burn-out, une embolie pulmonaire. Elle aussi doit se protéger. Et puis il y a eu ces terribles soupçons de pédophilie. Anne et Muriel en ont été bouleversées. Un mal de chien. Avaient-elles été aveugles à ce point ? Elles y ont presque cru, comme toute France, avant qu’un juge n’écarte ces allégations. Ensemble elles sont parties dans le sud de la France. Loin du bruit, de la déferlante infernale des informations retraçant l’affaire. C’est comme ça quand on ne sait plus à quel saint se vouer. Dans leur bande de potes, le doute et le tourment se sont installés. Le temps était-il venu de laisser tomber Pierre, de l’abandonner à la noirceur de son sort ? Au téléphone, certains lui ont dit que, s’il allait en prison, ils iraient lui rendre visite. Muriel, elle, n’en avait pas envie. Pourtant, quand, le 4 mars, elle a appris qu’il allait subir une opération du cœur, le sien s’est serré. Le chagrin est revenu. Deux jours plus tard avait lieu la première projection du film de Lisa Azuelos, « La chambre des merveilles », au Pathé Wepler, place de Clichy à Paris. L’histoire d’un enfant de 12 ans, Louis, renversé par un camion et plongé dans le coma. Alexandra Lamy interprète sa mère. Muriel joue le rôle de la grand-mère. Une leçon de vie faisant dramatiquement écho à l’affaire. Comment ne pas penser à Devrim, le petit garçon de 6 ans, et à son père, Yuksel, le conducteur de la voiture percutée ? Si les jours de Devrim ne sont plus comptés, il n’a toujours pas dit un mot depuis le drame. Grièvement blessé au visage, il gardera des séquelles à vie. La jeune femme de 27 ans, enceinte, qui a perdu son enfant dans le choc, était la passagère. Elle devait accoucher le 14 mai. Une césarienne en urgence a été réalisée, en vain. Alors, dans l’obscurité de la salle,
devant les images du film de Lisa Azuelos, comment Muriel aurait-elle pu s’abstraire de l’insoutenable tragédie qui la hante ? Elle et Anne sont discrètement sorties du cinéma au moment où démarrait la projection. Depuis l’affaire, les rencontres, les regards sont plus difficiles à soutenir. Après la fin du film, elles ont rejoint les comédiens pour partager un pot informel mais se sont éclipsées rapidement. Dans le même temps, Muriel apprenait que la remise en liberté de Pierre avait été acceptée pour raison médicale, puis aussitôt suspendue par un appel du parquet. Pierre est, quoi qu’il arrive, condamné, et plus rien ne sera jamais comme avant. Une évidence qu’elle redécouvrait chaque jour, avec un même coup de poignard au cœur. Muriel s’est souvenue des mots qu’elle lui avait lus le troisième jour au Kremlin-Bicêtre. Cette lettre où elle exprimait sa colère, le terrible état des victimes, « de sa faute, que de sa faute ! ». Palmade est arrivé au bout de cette vie gangrenée par des habitudes destructrices et des mauvais choix, malgré tous les conseils qu’elle lui a prodigués. Ils se seront tant aimés. Quand elle a eu connaissance des résultats des examens toxicologiques de son ami, Muriel Robin s’est dite « écœurée ». Dans cette affaire qui fait tant de bruit, même le silence est suspect. Quoi qu’elle fasse à présent, la comédienne est mal à l’aise. Si elle le soutient, elle sera suspectée de manquer d’empathie envers ses victimes. Si elle coupe les ponts, on l’accusera de trahir une vieille amitié. « Il est soi-disant malade… mais il n’a jamais voulu vraiment se soigner. » Muriel, Anne et des amis très proches ont tout essayé. De cure avortée en cure avortée, de serments bafoués en promesses trahies. Muriel, elle, a choisi de se taire. Par respect pour les victimes de la famille brisée. Et en mémoire de cette amitié qu’elle pensait indestructible.
Elle s’est dite « écœurée » par les résultats des examens toxicologiques
La fragilité, le doute, le désespoir en embuscade, elle aussi, elle les a connus PARIS MATCH DU 9 AU 15 MARS 2023
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Pierre Palmade est transféré sous bonne garde de l’hôpital du Kremlin-Bicêtre à celui du Plessis-Robinson, le 5 mars.
Depuis vingt et un ans, il avait trois macarons. Le « Guide Michelin » vient de lui en retirer un. Il contre-attaque À la Monnaie de Paris, le restaurant de Guy Savoy, où le chef marie l’art de cuisiner et de recevoir. Le 3 mars, trois jours après avoir reçu la sentence du « Michelin ».
Touché mais pas coulé. Depuis deux décennies, Guy Savoy, l’insubmersible, fait la course en tête dans la gastronomie française. Et le « Guide Michelin », la pluie et le beau temps des « bonnes tables » depuis plus d’un siècle… En 2019 et 2020, les inspecteurs anonymes du guide rouge avaient rétrogradé les restaurants de Marc Veyrat et de Paul Bocuse. Perdre une étoile, c’est difficile à avaler, « mais il y a plus grave », veut relativiser le chef du prestigieux établissement du quai de Conti. Loin de se laisser décourager, l’ancien rugbyman de Bourgoin-Jallieu, en Isère, adopte l’attitude des bons joueurs : garder le sourire et continuer de se retrousser les manches pour le bonheur de ses convives. PHOTOS JULIEN FAURE RÉCIT AURÉLIE CHAIGNEAU
Loin du « Cauchemar en cuisine », chaque vendredi matin, la brigade s’offre un fastueux petit déjeuner Il a l’esprit d’équipe chevillé au corps et une devise : « On est plus forts ensemble. » Aux fourneaux règnent bonne humeur et culture de l’excellence. Présidents, stars du showbiz ou simples gourmets, tous se pâment devant ses œuvres olfactives et visuelles comme la soupe d’artichaut à la truffe noire ou les huîtres en nage glacée. Et en novembre, pour la sixième année d’affilée, Guy Savoy est arrivé en tête du classement La Liste, qui récompense, parmi mille adresses, les meilleurs restaurants du monde. Une longévité inégalée.
Dégustation pour bien commencer la journée. Chaque membre de l’équipe a préparé une de ses spécialités. À la Monnaie de Paris, le 3 mars.
ACTUALITÉ
Le chef nous livre sa réaction en exclusivité
« Depuis dix jours, j’ai l’impression de recevoir des messages d’hommage posthume alors que je suis bien vivant » Par Guy Savoy e lundi 27 février 2023, je suis attablé avec des amis dans un restaurant dans les Alpes. Nous sommes arrivés au deuxième service, l’ambiance est joyeuse. Nous venons de terminer nos entrées. Il est 15 h 15. Mon téléphone vibre. C’est une personne du « Guide Michelin ». En entendant le bruit ambiant, mon interlocuteur m’invite à m’isoler. Je m’attends à ses instructions pour la cérémonie du 6 mars, à Strasbourg. Je suis loin d’imaginer ce qu’il s’apprête à m’apprendre. « Vous n’apparaîtrez qu’avec 2 étoiles dans notre édition 2023. » Je me rappelle précisément la première question que je lui ai adressée à l’annonce de ce déclassement : « Est-ce un carton jaune ou un carton rouge ? » Les trente-six heures suivantes, je n’ai pas pu avaler la moindre miette. Heureusement, j’ai des réserves… ou plutôt de la réserve. Mon premier plat a été un fromage blanc. Bien frais, bien froid. J’ai rejoint la piste aux étoiles à 23 ans. La première, je l’ai décrochée en 1977, à La Barrière de Clichy, la table de Claude Verger où je succédais à mon fidèle ami et complice Bernard Loiseau. Un an après avoir ouvert un restaurant à mon nom en 1980, rue Duret dans le XVIe arrondissement de Paris, j’ai accroché une étoile, une deuxième en 1985 avant la troisième, dix-sept ans plus tard, en 2002, rue Troyon dans le XVIIe arrondissement. Dix-sept ans, c’est long. Très long. Mais je n’ai jamais baissé les bras, grâce à la fidélité de mes convives. Accepter de gagner un match, c’est aussi accepter de le perdre. En découvrant le retrait de cette troisième étoile, obtenue il y a vingt et un ans, je me suis dit qu’à mon âge, presque 70 ans, il y avait des nouvelles plus graves. L’incendie survenu la nuit du 2 au 3 novembre 1993, dans mon établissement, par exemple. Quand, à 6 heures du matin, j’ai mesuré les ravages provoqués par le feu, j’ai cru que je ne rouvrirais jamais. Quelques minutes plus tard, j’avais déjà retrouvé dans les gravats PARIS MATCH DU 9 AU 15 MARS 2023
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le grand livre de réservations en partie brûlé par les flammes et détrempé par l’eau des lances des pompiers. C’est face à ce parchemin que j’ai pris conscience de la gravité de la situation : je n’arrivais même pas à en déchiffrer les pages pour décommander les convives des prochains jours. L’énergie et la volonté sont plus fortes que tout. Dès 7 heures, j’avais pris contact avec mon architecte, Jean-Pierre Hanki, qui appelait dans la foulée son électricien afin qu’il envoie le plus vite possible chez moi ses ouvriers pour remettre la lumière. À 9 heures, l’éclairage de chantier fonctionnait. Le reste s’est enchaîné à grande vitesse. Alors que l’assurance prévoyait trois mois de travaux, je redémarrais mon activité quatre semaines plus tard. Les hôtes étaient une fois de plus au rendez-vous. Je suis le président, le capitaine et l’entraîneur-entraînant d’une équipe. Le parallèle s’impose avec le rugby, sport que j’ai pratiqué dès l’enfance dans le club de Bourgoin-Jallieu, terre de l’ovalie en Isère. J’y ai appris une leçon de vie : qu’on est plus fort ensemble et qu’une équipe homogène se compose de personnalités très différentes. Une quintessence et une complémentarité transposables au monde du restaurant : les avants sont en cuisine, les trois-quarts en salle et chaque table est une action de jeu où l’on se mesure deux fois par jour à chaque convive. Imaginez les combinaisons possibles ! J’ai décidé que je serais cuisinier ou rien le jeudi 24 juillet 1958. Le jour mes 5 ans. J’ai eu le déclic en voyant ma mère, Léonie, mélanger du sel, du sucre, du beurre, du blanc d’œuf et de la farine pour confectionner des langues de chat. Après quelques minutes au four, la préparation s’était aplatie, avait bruni et croustillait. C’était magique de mesurer qu’un produit comestible puisse provoquer un tel état de bonheur. De la gourmandise à l’état pur prolongée par les tartes aux myrtilles et les gratins de potiron de maman. Cuisinier ou rien. Je n’ai jamais changé d’avis. Soixante ans plus tard, je ne regrette pas d’avoir embrassé mon métier de manière instinctive. Pourtant, je me souviens qu’à mes débuts de chef patron, en 1980, il fallait mettre les bouchées doubles avec, en prime, des moments d’angoisse pour tenir les échéances de fin de mois. Je passais la nuit au marché de Rungis ; la journée et la soirée au restaurant. Si douze heures par jour ne suffisaient pas, alors j’en faisais quatorze, et si les quatorze ne suffisaient
Avec la brigade cuisine et l’équipe de salle, avant le service de midi.
encore pas, alors j’en faisais seize. Cela fait cinquante-cinq ans que j’exerce le métier de cuisinier, ou plutôt cent dix ans puisque l’on fait deux journées en une. Ce n’est pas une complainte, simplement le vécu d’un engagement. Je suis convaincu d’être en permanence dans le concret. Le concret des ingrédients, le concret des gestes, le concret de la naissance d’un plat… et en même temps, dans la salle à manger, des hôtes dégustent, donc ingèrent ce que l’on vient de préparer. Quelle confiance ! Citez-moi une seule profession où les cinq sens sont simultanément sollicités ? Je clame en permanence que la cuisine est l’art de transformer instantanément en joie des produits chargés d’histoire, une devise qui s’affiche dès l’entrée de ma maison car je considère les restaurants parmi les derniers lieux civilisés de la planète. J’ai toujours associé l’instantanéité de la cuisine au cycle naturel des produits. Mon père, Louis, jardinier municipal à Bourgoin-Jallieu, m’a inculqué qu’il fallait huit semaines pour faire pousser une carotte, plusieurs mois pour élever une volaille et plusieurs années pour affiner des huîtres alors qu’il faut simplement quelques minutes pour qu’ils deviennent une source de plaisir. Je veux rendre ici hommage à mes fournisseurs, ces hommes et ces femmes que j’ai pris l’habitude de baptiser « mes artisans de la terre et de la mer ». Ces maraîchers, ces agriculteurs, ces éleveurs, ces pêcheurs, ces vignerons… qui me confient le fruit de leur labeur. C’est grâce à leur travail et à leur capacité d’observation au plus près de la nature que la France est si singulière. Alors que tous les pays du monde possèdent une tradition culinaire, le nôtre concentre un ensemble de savoir-faire qui fait sa complexité, sa diversité et le rend unique : la boulangerie, la charcuterie, la boucherie, la fromagerie, la pâtisserie, la chocolaterie, la confiserie… La France est le phare de la gastronomie. Dans mes cuisines de la Monnaie, à Paris, près de quinze nationalités sont réunies. Toute la planète nous envie et rêve de nous ressembler. Ce n’est pas un hasard si notre pays est le plus visité au monde. Les touristes étrangers viennent s’imprégner du fameux art de vivre à la française. Celui célébré par l’Unesco qui a classé au patrimoine culturel immatériel de l’humanité le « repas gastronomique des Français »
en 2010, les « climats du vignoble de Bourgogne » et les « coteaux, maisons et caves de Champagne » en 2015 et enfin la « baguette de pain française » en 2022. L’avis d’un seul guide est forcément subjectif et pourrait sembler anachronique dans notre époque moderne où la pluralité est reine. J’en veux pour preuve l’initiative de La Liste. Un algorithme qui, grâce à des coefficients de confiance, additionne les notes attribuées par plus de 970 guides gastronomiques, sites d'avis en ligne et publications pour révéler le classement des 1 000 meilleures tables du monde. Les convives sont le dernier maillon de cette chaîne de vie formidable. Dans ma maison du 11, quai de Conti, dont la vue donne sur la Seine, sur l’Académie française, le pont des Arts, le Pont-Neuf et le Louvre, nous sommes une équipe de 65 personnes dont 15 apprentis et stagiaires – dans notre « industrie », la transmission donc la formation sont primordiales – concentrés à tout mettre en œuvre pour que les 50 hôtes du midi et les 65 du soir soient bien accueillis, parfaitement assis. Au cours du repas, nous veillons à ce qu’ils ne manquent de rien, qu’ils soient dans un état de bien-être total. Notre espoir : réussir à rendre l’éphémère inoubliable. Je remercie toutes celles et tous ceux qui s’attablent depuis plus de quatre décennies chez l’aubergiste indépendantiste et autonomiste que je suis. Comme après l’incendie de mon restaurant, comme après les deux fermetures dues au Covid, les convives répondent présent au-delà de mes espérances. Ma passion et mon enthousiasme sont amplifiés. Entre les e-mails, les SMS et les appels téléphoniques, j’ai l’impression de recevoir, depuis dix jours, des messages d’hommage posthume alors que je suis bel et bien vivant. Ces témoignages d’amour sont les plus belles récompenses et nous transportent, mes équipes et moi. Je sors de la mêlée plus que jamais déterminé à marquer l’essai. Je laisse les supporteurs envahir le terrain.
« À 5 ans, j’ai décidé d’être cuisinier ou rien. Je n’ai jamais changé d’avis »
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ACTUALITÉ
Notre reporter a rencontré le patron du « Guide Michelin »
Gwendal Poullennec « Que vous soyez héritier d’une auberge ou d’un palace, il n’y a pas de traitement de faveur » Par Aurélie Chaigneau
Gwendal Poullennec, directeur des guides gastronomiques Michelin depuis 2018, à Strasbourg, le 6 mars.
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empête sous les toques. Lundi 6 mars, à l’issue de la cérémonie annuelle qui récompense et déclasse les meilleures tables du pays, le Bibendum a rendu son verdict devant plus de 500 chefs cuisiniers venus de toute la France. Parmi les grands gagnants du cru 2023, Alexandre Couillon, du restaurant La Marine, sur l’île de Noirmoutier, est le seul à avoir décroché trois étoiles. Mais cette année, c’est un autre nom qui retient l’attention. Celui de Guy Savoy. Son restaurant de la Monnaie de Paris se voit confisquer la distinction suprême après vingt et un ans de règne trois étoiles. L’émoi est grand, comme toujours après ce genre d’événement. En 2016, le fameux guide rouge avait déjà touché à un restaurant historique en supprimant la troisième étoile du Relais Bernard Loiseau, treize ans après le suicide de son chef créateur. En 2020, c’était au tour du restaurant Paul Bocuse, à Collonges-au-Mont-d’Or, de faire le deuil de cinquante-cinq années de trois étoiles. Paul Bocuse avait disparu deux ans plus tôt. Guy Savoy, référence de la gastronomie française, modèle pour toute une génération de cuisiniers et chef bien-aimé des gourmets, doit à son tour encaisser le choc et surmonter l’épreuve. Dans le paysage gastronomique, « Michelin » est à la fois craint et désiré, aimé et décrié. Les chefs qui participent à la course aux étoiles le redoutent autant qu’ils respectent. Pour les clients, un restaurant figurant dans le guide rouge est toujours un
Sur la scène du Palais de la musique et des congrès de Strasbourg, les nouveaux lauréats. À l’écran, Alexandre Couillon, seul chef à avoir décroché une troisième étoile.
gage de qualité. Une réputation qui permet à la fourchette Michelin d’être présente dans quarante pays. Si son classement est scruté, et suivi, dans le monde entier, les règles et le cadre de travail du guide restent méconnus. « Nous tenons à notre indépendance et à notre liberté éditoriale totale », explique Gwendal Poullennec, directeur du « Michelin » depuis 2018. « Notre méthode de notation est unique. Nos décisions en sont l’illustration. Que vous soyez héritier, chef d’une auberge, d’un palace ou d’une institution, il n’y a pas de traitement de faveur. Nous sommes conscients de l’aura de Guy Savoy et de l’impact que représente la perte de cette troisième étoile, mais notre mission est de rendre le meilleur service possible à tous les amateurs de bonnes tables grâce à nos recommandations. » La méthode est connue. Il s’agit pour les inspecteurs anonymes du guide rouge de vivre la même expérience que le client. « Tous nos inspecteurs sont salariés du “Guide” mais nous ne communiquons pas leur nombre, décrypte Gwendal Poullennec. Ils représentent 20 nationalités et font plus de 300 repas par an dans des restaurants à travers le monde. Un même lieu est visité plusieurs fois chaque année par différents inspecteurs, jamais les mêmes. À la fin, l’ensemble de ces expériences est mis en commun et la décision de retirer une étoile, de ne pas bouger ou d’en décerner une est collégiale. Si les inspecteurs n’arrivent pas à se mettre d’accord, d’autres repartent sur le terrain afin d’éliminer les doutes. Ils paient leur addition, s’attablent souvent à plusieurs,
rarement seuls. » De quoi égratigner l’image du critique gastronomique solitaire et (re) connu de tous dans le film « Ratatouille »… Quelle place l’émotion tient-elle dans la décision finale du « Michelin » ? « Il n’y a pas de cases à cocher, explique le directeur. Pour les trois-étoiles au Japon, par exemple, où il y a peu de cuissons, le service est rapide. À l’inverse, certaines grandes tables traditionnelles en France nécessitent plus de temps. On compte 142 trois-macarons dans le monde. Et chacun a sa façon de faire. Pour les inspecteurs, il y a un cadre donné mais ils ont la liberté de dire ce qu’ils ont ressenti. » Un certain nombre de critères doivent cependant être absolument respectés, dont cinq considérés comme « universels », valables sur les tous les continents : le choix et la qualité des produits, qu’ils soient nobles ou simples, « du moment qu’ils sont frais, de saison et bien choisis » ; la maîtrise des techniques culinaires ; l’expérience gustative – jeux de textures, contrastes de saveurs, harmonie des goûts et cohérence par rapport au reste du repas ; la personnalité du chef, exprimée dans l’assiette qui fait sa signature. Et enfin la régularité, « dans le temps et sur la qualité des plats de la carte ». Il existe un mythe autour des inspecteurs et inspectrices qui distribuent et confisquent des étoiles… À défaut de connaître leur identité, il est tout de même possible de faire un portrait-type. « Ce sont des femmes et des hommes passionnés qui ont choisi d’en faire leur vie, explique Gwendal Poullennec. Ils viennent tous du métier de la restauration,
« Nos inspecteurs font plus de 300 repas par an, paient leur addition et s’attablent souvent à plusieurs »
ont souvent été en poste dans des restaurants pendant plusieurs années avant d’être recrutés. Ils sont ensuite formés auprès d’autres inspecteurs pendant trois ans, ce qui représente un bon millier de repas, afin de pouvoir être capables d’évaluer une table. Ils voyagent, connaissent la gastronomie de tous les pays, les différentes influences. La valeur de nos étoiles doit être la même partout. Tous appliquent donc la même méthode pour recommander la qualité des tables. Un processus inchangé depuis cent ans. » Une machine bien rodée qui a fait du chemin depuis sa création, en 1900, par deux frères, André et Édouard Michelin, fondateurs de la manufacture du même nom. À l’époque, ils lancent un livret publicitaire gratuit, offert à leurs clients, qui recense de nombreuses informations pratiques : une liste des stations-service et de garages, des adresses de médecins sur la route, des cartes routières et des plans de villes. Il serait devenu payant vingt ans plus tard, après qu’André a découvert qu’un revendeur utilisait ses guides pour caler son établi. La même année, restaurants et hôtels apparaissent dans le livre. En 1926, la première étoile est décernée. La deuxième et la troisième font leur apparition en 1931. « Ce sont elles qui font vibrer les chefs et les clients. Si elles inspirent confiance aux banquiers, elles sont surtout un encouragement et un passeport pour la liberté », conclut Gwendal Poullennec. Quand elles sont confisquées, c’est un monde qui s’écroule. Et pourtant on continuera d’aller chez Savoy comme on se rend chez Bocuse, Robuchon, Gagnaire, Guérard ou Alléno… des noms qui scintillent au-delà des étoiles. DU 9 AU 15 MARS 2023 PARIS MATCH
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OLIVIA GR GOIRE UNE MINISTRE AUX PETITS SOINS « J’ai voulu plus que tout avoir un enfant et j’ai aussi rêvé d’être ministre, nous confiait-elle il y a un an. Finalement, tout est arrivé en même temps. » Pas de quoi stresser la quadragénaire surdiplômée, une macroniste de la première heure qui a l’habitude de mener de front combats privés et politiques. Celle qui revendique le statut de « nana normale » emmène sa fille à la crèche à 8 heures et refuse les dîners en ville pour préserver sa vie de famille. C’est en faisant elle-même son marché qu’elle a constaté l’augmentation des prix. Lui est alors venue l’idée du « panier anti-inflation »... peu apprécié par la grande distribution. PHOTOS VINCENT CAPMAN / PORTRAIT LAURENCE FERRARI
Chargée des PME et de l’Artisanat, elle se bat pour ceux qui se lèvent tôt. Avec toujours de l’énergie et parfois des résultats
Olivia Grégoire, 44 ans, nous présente Romy, sa fille de 14 mois, premier bébé du gouvernement Castex. Dans sa cuisine, à Paris, le 15 février.
Au supermarché en bas de chez elle. Faire ses courses lui permet de rester connectée à la réalité.
Olivia Grégoire « Moi, je ne suis pas une techno. En tant qu’entrepreneuse, je sais lire un bilan et comment on paie ses charges » Par Laurence Ferrari n ce matin froid d’hiver, elle arrive tout de blanc vêtue à la rédaction de Paris Match. Avançant à grandes enjambées, façon bulldozer, la détermination accrochée en bandoulière. L’heure est aux confidences. Elle est venue pour tout dire : qui elle est, comment elle est arrivée là et pourquoi elle comprend mieux que quiconque ces gens modestes qui font la tournée des supermarchés pour trouver la bonne promo, celle qui permet de donner de la viande aux enfants au moins une fois par semaine. « Vous savez pourquoi je suis l’une des rares qui n’a pas de fiches pour parler de l’inflation ou des pénuries ? Eh bien, parce que je fais mes courses, et les packs d’eau Mont Roucous, recommandés pour les bébés, je les achète chaque semaine pour Romy, ma fille de 14 mois ! J’ai alerté mes collaborateurs au début des pénuries, car on ne trouvait plus cette eau dans les grands magasins alors que les négociations commerciales se tendaient. C’est l’avantage d’avoir les pieds ancrés dans le réel ! » clame-t-elle, forte de cette connexion au quotidien dont les élites PARIS MATCH DU 9 AU 15 MARS 2023
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politiques sont censées être si éloignées. Pourtant le parcours d’Olivia Grégoire n’a, a priori, rien de celui de Cosette : née à Paris, scolarisée au lycée Sainte-Marie de Neuilly, passée par Sciences po Paris puis l’Essec. Devenue chef d’entreprise, elle est élue députée en 2017, dans le XVe arrondissement, sous la bannière En marche ! après des années de militantisme à droite, aux côtés d’Alain Madelin ou au cabinet de Xavier Bertrand. Pas franchement l’itinéraire d’une jeunesse défavorisée. Mais ce matin-là, elle livre un pan plus sombre de l’histoire. Celle d’une petite fille à l’enfance taciturne dont le père se plante à moto alors qu’elle n’a que 7 ans. « Il a été très abîmé et est devenu lourdement handicapé. Puis, à mes 12 ans, on lui a diagnostiqué un premier cancer, la maladie de Hodgkin. Il a été mis en aplasie dans une bulle à l’hôpital SaintLouis. C’est compliqué, la bulle, quand tu veux faire un câlin à ton papa et que tu es habillée comme une cosmonaute, protégée de la tête aux pieds. J’y ai perdu mon insouciance », confie-t-elle les larmes aux yeux. L’émotion n’est pas feinte. Olivia Grégoire vit à fond ce qu’elle dit, comme ceux qui ont traversé des drames et savent qu’en un
instant tout peut s’arrêter. Emmanuelle, son amie de lycée à Neuilly, évoque son caractère fort mais enjoué : « Elle n’avait pas une situation familiale très sereine. Mais elle n’en faisait pas état auprès des autres, elle était déjà travailleuse, entière et combative. » Le calvaire familial se poursuit lorsque son père, séparé de sa mère, fait un premier AVC. « J’étais alors au cabinet du ministre de la Santé, Xavier Bertrand, se souvient-elle. Je préparais une conférence de presse quand le téléphone a sonné : les pompiers disaient qu’un homme en pyjama, assis sur un banc à Paris, affirmait être mon père et qu’il ne se rappelait rien d’autre. J’ai tout planté pour me consacrer à lui, pour lui réapprendre à parler. Cela m’a sans doute coûté mon poste. Pas facile d’être aidante quand on a une carrière… » Après un second AVC, il développe un cancer profond qui finit par l’emporter. « Ils avaient écrit “Survivor” sur son dossier médical, dit-elle. Quand il a fallu gérer ses derniers jours, j’ai eu un sursaut. Vu les souffrances endurées, je lui avais promis d’être à ses côtés jusqu’à la dernière seconde. Alors, remuant ciel et terre pour lui trouver une place dans l’établissement de soins palliatifs Jeanne-Garnier, je l’ai accompagné
ACTUALITÉ En route pour la crèche… quand son agenda le lui permet. Sinon, c’est son mari qui emmène Romy.
jusqu’au bout. » En sortant de cette épreuve, en 2016, la colère monte : « J’étais la plus triste du monde, mais je me disais que c’était injuste que tant de gens ne puissent pas faire comme moi, faute des bons contacts ! » Olivia Grégoire décide d’envoyer des propositions sur le thème de l’accompagnement des malades à plusieurs partis politiques. Pas de réponse du PS ni de l’équipe d’Alain Juppé, alors en piste pour la primaire de l’élection présidentielle. En revanche, on la rappelle depuis le QG de l’outsider, Emmanuel Macron. « Voulez-vous bosser dans le groupe santé avec quelqu’un qui s’appelle Jérôme Salomon ? » Banco ! Elle franchira les obstacles un à un, sans jamais abdiquer son côté « grande gueule ». Mais le malheur frappe à nouveau. En 2018, elle perd brutalement sa mère adorée. « Elle avait un mauvais rhume, je l’ai amenée à l’hôpital du Perpétuel secours, à Levallois-Perret, pensant venir la chercher le lendemain. Et à 7 h 10, j’avais quatorze appels de l’hôpital… Elle était partie dans la nuit. » Olivia Grégoire encaisse le choc. Et continue à avancer. « C’est une femme pugnace et habitée par des valeurs solides. Elle n’a pas toujours eu la vie facile, ce qui lui donne un certain recul sur les choses. Elle sait qu’il y a une vie après la politique, ce qui est très sain », note l’essayiste Mathieu Laine qui a rédigé une lettre de recommandation pour sa candidature aux législatives et poussé pour qu’elle entre au gouvernement. « Elle a un parcours atypique dans la classe politique où
beaucoup ont une logique d’apparatchiks, très peu viennent de la société civile. Elle apporte vraiment quelque chose de plus », confirme Mathias Vicherat, l’actuel directeur de Sciences po, qui l’a rencontrée sur les bancs de ce même établissement. « C’est vrai que je me sens libre. Cela peut déranger, bousculer. Mais aucun carcan ne m’enferme. C’est peut-être aussi pour cette liberté que je suis au gouvernement », se marre-t-elle. Elle en fera les frais au moment de sa brève idylle, en avril 2018, avec le Premier ministre de l’époque, Manuel Valls. « Je n’avais pas anticipé la violence de l’exposition médiatique », assume-t-elle. Aujourd’hui, de l’eau a coulé sous les ponts. La maternité l’a adoucie : « Mon seul plan caché, c’était d’être maman. C’était le but de ma vie, moi qui ai perdu mes proches si rapidement. J’ai un mari génial et une fille que j’ai eue à 43 ans. La politique, c’est important car elle permet de changer la vie des gens. Le fait d’être maman et d’être une femme normale me préserve de ses écueils, de tout enfermement dans la bulle de la cour. » Ce ton « cash » ose-t-elle l’employer face au président ? « On échange simplement et beaucoup par SMS, confie-t-elle. Je lui dis les choses telles qu’elles sont vécues et ressenties sur le terrain. Je l’ai alerté très tôt sur la situation des boulangers, par exemple. J’échange aussi avec la première dame, qui a une grande sensibilité et qui connaît bien mon parcours. Elle m’a beaucoup soutenue quand j’attendais Romy. » Sibeth Ndiaye se rappelle les conseils prodigués à Olivia Grégoire lorsque celle-ci lui a succédé au porte-parolat du gouvernement. « Sois toi-même, car le naturel revient au galop. Tu as un timbre de voix, une tessiture particulière, ne t’habille pas différemment. Moi, j’ai beaucoup souffert de cela, des commentaires sur mes cheveux, mes rondeurs. Et je lui ai dit d’apprendre de mes propres erreurs : c’est super d’être cash mais c’est une arme à manier avec précaution, surtout avec… les journalistes », révèlet-elle dans un grand éclat de rire. « Mais au fond, enchaîne-t-elle, être porte-parole, c’est frustrant car vous n’êtes pas dans le “faire”. Avec son caractère, Olivia est beaucoup plus heureuse lorsqu’elle aide les boulangers. » Ces derniers n’en finissent d’ailleurs pas de se rappeler à son bon souvenir, en manifestant leur colère contre l’explosion de leurs dépenses d’énergie. « Je ne suis pas
« Je me sens libre. Cela peut déranger, bousculer. Mais aucun carcan ne m’enferme »
Des dossiers brûlants : aides aux factures d’électricité en faveur des TPE-PME et dispositif anti-inflation. À Bercy, le 15 février.
une techno, réplique-t-elle. Quand on a été entrepreneur, on sait ce qu’est un bilan, un découvert, une trésorerie tendue et les charges qu’on a du mal à payer quand on embauche. Alors, quand les factures proposées à certains petits entrepreneurs pour 2023 ont commencé à monter à l’automne 2022, j’ai tout de suite senti le danger que cela pouvait représenter pour leur activité ! Je ne suis pas quelqu’un qui se planque. » Et de rappeler les dispositifs mis en place par Bercy : le bouclier tarifaire, plafonnant la hausse des tarifs de l’électricité à 15 % pour les petites structures, et le système d’amortisseur électricité. « Il y a encore des factures trop élevées, concède-t-elle. Mais à chaque dossier on réagit, on est vigilants. On fait du cas par cas et on suit dans la durée. » Reste l’essentiel, ce panier anti-inflation d’une cinquantaine de produits du quotidien qu’elle souhaitait mettre en place avant de se heurter au mur d’une grande distribution arc-boutée sur ses propres offres promotionnelles et rétive à toute contrainte sur ses prix. « Cette idée avait du sens. Grâce à cette proposition, il y a des paniers anti-inflation désormais proposés par les distributeurs. Nous avons obtenu, avec Bruno Le Maire, un engagement collectif pour qu’ils proposent, pendant un trimestre, des produits qui ne sont pas uniquement du premier prix, ce qui rejoint ce que j’avais en tête. Donc cette idée a permis de faire bouger les lignes et baisser le prix à la caisse : c’est la seule chose qui compte, c’était mon objectif pour les consommateurs français. » Malgré ce revers, elle ne veut pas se contenter de mener les seuls combats qu’elle peut gagner : « Je suis une guerrière. Très tôt, j’ai dû me battre. J’ai en tête cette phrase lue dans “Vivre avec nos morts”, le livre de Delphine Horvilleur : “On ne peut pas être réduite à son histoire ou à son destin.” Cela résonne très fort en moi. Je suis le fruit de mon histoire. Elle permet de comprendre mon engagement sincère en politique et c’est pour cela que je vous en parle, mais je dois aussi, comme nombre d’entre nous, m’en émanciper. » Une histoire de résilience et d’ambition mêlées.
Depuis trois ans, Maël était victime de harcèlement. L’école ne réagissait pas. Jusqu’à ce que son père exprime sa colère dans les médias
MON FILS, MA BATAILLE Dans son regard, les mois d’inquiétude et de combat pour protéger son enfant… de l’école. Maël y recevait des coups, des insultes, et dépérissait à vue d’œil. Confronté à l’immobilisme de l’institution, Mickaël devra en appeler aux plus hautes instances et déscolariser son fils. Le calvaire de Maël est loin d’être isolé. Un élève sur dix sera victime de harcèlement lors de son parcours scolaire. Face à un phénomène ancien et massif qui pousse certains jusqu’au suicide, les pouvoirs publics commencent seulement à réagir. PHOTO FRÉDÉRIC LAFARGUE RÉCIT NICOLAS-CHARLES TORRENT
Mickaël Gauthier et son fils, Maël, chez eux, en Saône-et-Loire, le 4 mars.
ACTUALITÉ
Par Nicolas-Charles Torrent es Bizots, commune de Saône-etLoire, 468 habitants selon le dernier recensement, son église, son restaurant, Le Petit Campagnard, qui fait aussi office d’épicerie, et son école, où sont scolarisés une cinquantaine d’élèves, dont Maël* et sa petite sœur. Mickaël, leur père, les dépose tous les matins avant d’aller travailler – il est technicien qualité chez Michelin – et les récupère tous les soirs à l’arrêt du car scolaire. Une fin d’après-midi de novembre 2021, le petit garçon de 9 ans a l’air particulièrement abattu. Quand son père, soucieux, le questionne, il répond simplement : « Il n’y a rien papa. T’inquiète pas, ça va aller. » La scène va se répéter sur plusieurs jours. Chaque fois, Maël reste muet. Jusqu’à ce que, un matin, sa petite sœur, assise à l’arrière, prenne la parole : « Papa, Maël se fait taper à la récréation. » Mickaël serre les dents. Le petit garçon finit par se confier. Il désigne un camarade
de classe. « Il m’embête, il m’insulte et me tape », souffle-t-il. Dans cette école, tout le monde se connaît. Alors Mickaël décide de s’adresser directement au père de l’élève. « On est à la limite du harcèlement », lui expliquet-il. Il prend aussi contact avec la professeure. Il ne s’agit peut-être que de chamailleries d’enfants, mais on lui promet une vigilance accrue. Au retour des vacances de Noël, les parents sont aux aguets. Chaque soir, Mickaël demande un compte rendu de la journée. Maël n’est pas très bavard, mais la situation semble s’être apaisée. Il assure que, désormais, tout va bien. Les semaines passent, tout le monde respire. Un soir de mars 2022, devant l’école, Mickaël est surpris par un petit garçon qui lui court après : « Monsieur, monsieur. Ça recommence. Maël, il se fait taper à la récréation. » À la maison, calmement, son père essaie à nouveau de démêler les fils. « Pourquoi tu ne m’as rien dit ? » demande-t-il à son fils. En pleurs, le petit garçon explique avoir reçu des menaces de la part de son agresseur :
Mickaël, le père « On parle d’un enfant de 9 ans qui dit vouloir mourir. Qu’attendaient les maîtresses pour m’avertir ? »
L’arrêt où Maël montait chaque matin dans le car scolaire… pour retrouver son harceleur en classe.
« Si tu le dis à tes parents, je te frappe encore plus fort. » Le lendemain matin, Mickaël est arrêté par le père de l’élève qui l’avait interpellé la veille : « Il faut que je te dise quelque chose. Hier, devant toute la classe, Maël a dit qu’il voulait mourir pour que ça s’arrête. Ce sont ses mots. » Mickaël, tétanisé, fulmine d’avoir été si naïf. Il en veut aussi à l’institutrice et à la directrice de l’école de ne pas l’avoir alerté. Aussitôt, il compose le 3020, le numéro gratuit d’aide aux victimes de harcèlement scolaire. Un référent académiqu e est dépêché sur place, une réunion est organisée en présence de la directrice, de l’enseignante, ainsi que de deux autres familles dont les enfants se disent victimes du même agresseur. Mais le ton monocorde de la conversation fait sortir Mickaël de ses gonds. « On parle d’un enfant de 9 ans qui dit vouloir mourir, tempête-t-il. Elles attendaient quoi pour m’en parler ? On m’aurait dit quoi si j’avais retrouvé mon gosse pendu dans sa chambre ? » L’histoire de Maël fait écho à celle de Lucas, 13 ans, qui, après des mois de moqueries et d’insultes en raison de son homosexualité, mettait fin à ses jours, le 7 janvier dernier. Deux semaines auparavant, le jour de Noël, Ambre, 11 ans, se jetait du quatrième étage. Les drames se succèdent et le sentiment d’impuissance grandit. Pour Sylvie Amici, présidente de l’Association des psychologues de l’Éducation nationale, un métier qu’elle exerce depuis plus de trente ans, l’arrivée des réseaux sociaux a amplifié le phénomène. « Avant, le harcèlement s’arrêtait à la porte du foyer, explique-t-elle. Désormais, les victimes sont poursuivies jour et nuit, jusque dans leur chambre. Et le plus navrant, c’est que les groupes formés sur ces plateformes vont au-delà de l’enceinte de l’établissement. Même si on le change d’école, un enfant peut être à nouveau harcelé dans son nouvel établissement. » Sur cet aspect en ligne du harcèlement scolaire, l’Assemblée nationale a adopté le 2 mars une proposition de loi visant à obliger les réseaux sociaux, comme TikTok ou Snapchat, à vérifier l’accord des parents pour les mineurs de moins de 15 ans. De l’avis de tous, ce texte va dans le bon sens… mais semble difficilement applicable. Il y a tout juste un an, le 2 mars 2022, était voté un texte faisant du harcèlement scolaire un délit pénal puni jusqu’à dix ans de prison et 150 000 euros d’amende en cas de suicide ou de tentative de suicide. Là encore, l’intention était louable. Mais la qualification du délit s’apparente à un véritable parcours
Persécuté en raison de son homosexualité, Lucas, 13 ans, s’est donné la mort le 7 janvier. En 2013, le suicide de Marion Fraisse, une élève de quatrième, avait alerté l’opinion sur le harcèlement scolaire.
du combattant, lent et laborieux. Une langueur administrative en décalage total avec le sentiment d’urgence qu’éprouvent les familles. Après que son fils eut évoqué en classe son envie de mourir, Mickaël est resté sans nouvelles de l’équipe pédagogique. En revanche, l’école l’appellait plusieurs fois par semaine, car le petit se plaignait de douleurs au ventre. « Mais dès qu’on arrivait à la maison, elles cessaient », soupire Mickaël. Au printemps, les parents ont décidé de faire suivre Maël par un psychologue. Enfin, les grandes vacances arrivent et Maël retrouve le sommeil. Les parents reprennent des forces. Mais dès le premier jour de la rentrée, le cauchemar reprend. Le soir même, Mickaël récupère Maël complètement replié sur lui-même. « Ça recommence, sanglote-t-il. En plus, il est assis juste devant moi. » Pendant deux mois encore, Mickaël va remuer ciel et terre pour faire avancer le dossier. En vain, ou presque. En novembre 2022, lors d’une réunion avec les parents de l’enfant mis en cause, en présence de l’équipe enseignante et des services de la mairie, le harcèlement de Maël est enfin reconnu. Et puis… plus rien ! Deux semaines après cette réunion, Mickaël sollicite un rendez-vous avec la directrice académique des services de l’Éducation nationale. « Il faut exclure cet enfant ! » s’emporte-t-il. Impossible sans l’accord des parents. « Changez votre fils d’école, lui suggère-t-on, et portez plainte. » Porter plainte, d’accord. Mais quitter son école, ses copains… pour l’instant, Maël préférerait que les adultes trouvent une autre solution. Fin novembre, l’angoisse tient le petit garçon éveillé toute une nuit. En discutant patiemment avec lui, Mickaël et son épouse découvrent que l’élève harceleur a
convaincu les autres enfants de ne plus jouer avec Maël. « J’ai vu mon fils craquer, pleurer et trembler de tout son corps. » Mickaël l’emmène chez le médecin, qui prescrit neuf jours de repos. Le 15 décembre, à la suite de la plainte déposée par son papa, Maël est auditionné par les gendarmes. Il explique que son calvaire a commencé au milieu de son année de CE1. « Trois ans qu’il subissait ça ! On était loin du compte ! » souffle Mickaël. Comment une petite école de campagne a-t-elle pu devenir le théâtre d’un tel supplice ? « Les petites structures avec très peu d’élèves ne sont pas sans inconvénients, explique Sylvie Amici. Parfois, les enfants se voient assigner des rôles dont ils ne peuvent plus s’extraire : le bouc émissaire, le gros bras, la midinette… Comme il y a peu de classes, les rôles se perpétuent à chaque rentrée. » Sur les conseils du médecin, Maël va désormais rester à la maison. En lieu sûr. « De toute façon, il ne voulait plus y retourner. Il a fallu faire l’école à domicile », confie Mickaël. De guerre lasse, écœuré par l’immobilisme des institutions, le père en colère décide de rendre son histoire publique. « Je voulais montrer à la France entière que l’Éducation nationale ne fait rien pour lutter contre le harcèlement scolaire », tempêtet-il. Au même moment, Marie Mercier, la sénatrice LR de Saône-et-Loire à qui l’on doit la loi de juillet 2020 qui impose le contrôle de l’âge sur les sites pornographiques (toujours pas appliquée), présente une proposition de loi pour que ce soit l’auteur du harcèlement qui change d’établissement plutôt que sa victime. Pour appuyer son propos, elle prend l’exemple de Maël. Problème, l’exclusion
d’un élève du premier degré n’est pas prévue dans le Code de l’éducation. « Entre la fin de l’école maternelle et le début du collège, on ne peut pas punir un enfant, soupire la sénatrice. C’est pourtant un âge auquel il faut apprendre à différencier le bien et le mal. » À première vue, une telle loi tombe sous le sens. Mais pour Sylvie Amici, l’éloignement de l’agresseur se heurte à plusieurs obstacles. Le premier est structurel. « Certaines mesures d’éloignement sont parfois inapplicables à cause du manque de places dans les écoles alentour. » La deuxième difficulté est d’ordre psychologique, et sur ce point, tout le monde tombe d’accord : l’enfant harceleur est lui-même en souffrance. « Le déplacer ne règle pas le problème, soupire la psychologue. L’école est aussi là pour apprendre aux enfants à surmonter les premières difficultés de la vie en société. » En attendant que le monde des adultes trouve la meilleure solution, mercredi 1er mars, Mickaël recevait enfin une bonne nouvelle de la part du rectorat. Les parents de l’élève mis en cause ont accepté de changer leur fils d’école, au moins jusqu’au jugement. Après des mois de souffrance, Maël pousse un cri de joie : il va enfin retrouver ses copains. Et peutêtre même s’en faire un nouveau : touché par son histoire, l’attaquant des Bleus Olivier Giroud l’a invité à assister à un match de son club, l’AC Milan. De son côté, Mickaël a sollicité un rendez-vous avec Brigitte Macron. « Des enfants comme Maël, il y en a partout, souligne-t-il. Il faut les aider. » C’est devenu son combat.
Le harceleur va changer d’école jusqu’au jugement
* Le prénom a été changé . DU 9 AU 15 MARS 2023 PARIS MATCH
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Avec Jada Pinkett Smith, sa femme, pour la première du film « Emancipation », le 30 novembre, deux jours avant sa sortie en salle. À Los Angeles.
Un retour en haut de l’affiche. Après le scandale en mondovision des Oscars 2022, Hollywood ne donnait pas cher de la carrière de celui qui fut pourtant l’une de ses vedettes les plus « bankable ». Pour renouer avec le public, l’ancien rappeur s’est imposé une discrétion médiatique inédite. Un profil bas savamment mis en scène par le couple Smith, spécialiste de la communication pensée au millimètre. Pendant ce temps, Will Smith se jetait à corps perdu dans le rôle de Gordon, un rescapé de l’esclavage sauvé par une foi sans faille et par l’amour des siens. Toute ressemblance avec un happy end… RÉCIT JEAN-MATHIEU PERNIN
Un an après la fameuse gifle à l’humoriste Chris Rock lors des Oscars, l’acteur revient en grâce avec son dernier film, « Emancipation ».
ACTUALITÉ
L’événement fut un tel traumatisme que les Oscars ont créé une cellule de crise en cas de « séquences inattendues » « Enlève le nom de ma femme de ta putain de bouche ! » Le 27 mars 2022, Will Smith monte sur la scène des Oscars et frappe Chris Rock. La claque de sa vie.
Par Jean-Mathieu Pernin epuis fin février, une vidéo fait le tour des réseaux sociaux. L’écran est coupé en deux. À droite, une influenceuse s’improvise coach en bien-être, affirmant qu’il suffit d’observer n’importe quel objet pour savoir ce qu’il pense de vous. À gauche de l’écran, Will Smith. Le comédien semble acquiescer au discours de la jeune femme. Au bout de quelques secondes, il se penche sur la droite, saisit son Oscar, puis le regarde avec insistance comme pour connaître l’opinion du trophée à son égard. Sur TikTok, ce montage vidéo, posté sur le compte de Will Smith, a suscité près de 3 millions de vues. Un an après l’épisode de la claque, lors de la 94e cérémonie des Oscars, l’ex-« prince de Bel-Air » s’autorise à en rire. Humour, excuses et confessions, la sainte trinité à laquelle s’est vouée la star hollywoodienne pour préparer son retour au premier plan. Une opération où rien ne fut laissé au PARIS MATCH DU 9 AU 15 MARS 2023
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hasard afin de sauver la carrière d’une des plus grandes vedettes du box-office international. Retour à la nuit du 27 mars 2022. Au Wallis Annenberg Center de Beverly Hills, la fête bat son plein. Les verres tintent, les flashs crépitent, le petit monde du cinéma américain se détend après une longue séance de récompenses suivie par près de 16 millions de téléspectateurs. Sourires de rigueur devant les caméras. On parle d’une soirée fantastique, d’une nuit comme seul Los Angeles peut en offrir. Mais dehors, dans le coin fumeur, c’est une tout autre ambiance. Les élégants palmiers sont nimbés de chuchotements. Rares sont ceux qui évoquent la victoire de « Coda », remake américain de « La famille Bélier », comme meilleur film de l’année. Un nom est sur toutes les lèvres : Will Smith. Quelques heures plus tôt, au beau milieu de la cérémonie des Oscars, le comédien s’est levé de son siège pour gifler Chris Rock. En direct à la télévision, l’improbable s’est produit. Will Smith n’a pas supporté une blague sur sa femme et n’a pas hésité à régler son compte à l’humoriste, prenant le monde entier à témoin. Peu après, un Will Smith en sueur décroche la statuette de meilleur comédien pour son rôle dans « La méthode Williams », film dans lequel il incarne le père des futures championnes de tennis Venus et Serena Williams. Son discours de remerciement, mi-bravache, mi-contrit, est confus. Il paraît exténué, perdu, comme bloqué entre deux étages d’un ascenseur émotionnel. À la fin de la cérémonie, le comédien et sa femme, Jada Pinkett Smith, se rendent au Wallis Annenberg Center comme si de rien n’était. Oscar à la main, l’ancien rappeur prend la direction du dancefloor et encourage les invités à lui emboîter le pas. Le lendemain, la gueule de bois sera sévère. Dans les jours qui suivent, le nom de Will Smith est associé à 8 milliards d’occurrences sur Google. Dans l’histoire des Academy Awards, la cérémonie de 2022 est désormais celle de « la baffe ». Le 29 mars, Will Smith présente ses excuses via un message sur Instagram, se désole de sa perte de contrôle et annonce démissionner de l’Académie des Oscars. Il dit accepter toute sanction qui lui sera infligée. Cette dernière ne tarde pas à tomber. Les organisateurs des récompenses du cinéma américain bannissent Will Smith de toute cérémonie pour dix ans. Hollywood, ton univers impitoyable. On ne donne désormais plus cher de la peau du « man in black ». Certains studios, par peur de la mauvaise publicité, commencent à s’interroger. Netflix annonce prendre ses distances avec le comédien. Sony, qui avait produit « Bad Boys 4 » avec Smith, se fait discret. « Emancipation », film sur l’esclavage dans lequel Will Smith tient le premier rôle, n’a plus de date de sortie. Le producteur Apple+ serait en pleine réflexion. D’oscarisé à ostracisé, Will Smith voit sa carrière menacée. Le 7e art n’aime rien tant que dévorer ses propres enfants, il faut frapper vite et fort afin de montrer que l’on est toujours en vie. D’autant que Will Smith a bien plus à sauver que sa réputation. La star pèserait près de 200 millions de dollars. Depuis une vingtaine d’années, il a investi dans des restaurants à Washington, une équipe de basket à Philadelphie, ainsi que dans de nombreux projets immobiliers. Le Monopoly (de luxe), voilà la grande passion du clan Smith. Début 2022, Will et Jada se sont offert une nouvelle maison à Hidden Hills, dans la région de Los Angeles, pour 10 millions d’euros. Avec piscine à débordement et vue sur la vallée de San Fernando, s’il vous plaît. Un investissement à ajouter aux huit autres villas que le couple possède déjà aux États-Unis. L’épisode de la claque pourrait mettre à mal ce patrimoine et tous les placements réalisés sur le nom de Smith. Afin de sauver son empire, l’abonné
des blockbusters n’a pas le choix, il doit revenir en grâce auprès du public. Son arme secrète ? Un storytelling usé jusqu’à la corde mais diablement efficace : le chemin de croix. L’opération « rédemption » est lancée dès avril 2022. Le média américain « Entertainment Tonight », spécialisé dans les news people, révèle que Will Smith suivrait, dans une clinique, une thérapie pour apprendre à dompter ses coups de sang. À peine l’info divulguée, les internautes découvrent que le comédien est en voyage en Inde. Des photographes l’ont repéré dans un aéroport privé de Bombay. Les clichés se retrouvent opportunément sur le Web. Le message est clair : Will Smith entame sa pénitence au pays du yoga. Dans sa déclaration d’excuses post-gifle, l’acteur n’avait-il pas promis qu’il allait travailler sur lui-même ? L’Inde et les séances de méditation sont là pour servir sa cause. Au même moment, une femme se démène pour le réhabiliter. Meredith O’Sullivan fait partie des nababs de Hollywood. Elle dirige The Lede Company, l’un des plus importants groupes de relations publiques du pays. Ses clients ont pour nom Pharrell Williams, Rihanna ou Penélope Cruz. Depuis une dizaine d’années, elle s’occupe également de Will Smith. C’est elle qui, le soir de la gifle, a déminé la situation avec la direction de l’Académie des Oscars. C’est encore elle qui, selon le « Washington Post », serait à l’initiative de la lettre d’excuses de Smith. De la piteuse séquence avec Chris Rock, Meredith O’Sullivan ne dit mot. La femme d’affaires préfère agir en coulisses, pour plaider la cause de celui qui paie très cher ses services. Le soir de la 94e cérémonie des Oscars, elle a entendu de nombreux agents d’artistes se gausser : « Dieu merci, il [Will Smith] n’est pas mon client. » Mais elle sait qu’aucun cas n’est absolument désespéré. Le plan est en marche. Finie la thérapie, place à l’autocritique. Quatre mois après son dernier post Instagram, Will Smith revient sur le même réseau social pour répondre aux questions de ses fans. Après cinq longues minutes d’autoflagellation, Smith termine son numéro en promettant de se « consacrer à nouveau à mettre de la joie et de la lumière dans le monde ». Une démarche suffisante pour espérer l’absolution ? Pas vraiment. Un sondage publié à la fin de l’été par le magazine « Variety » douche les espoirs du clan Smith. La popularité du comédien est en berne, il ne figure plus parmi les acteurs préférés des Américains. L’implication de Jada Pinkett Smith n’aura pas changé la donne. Malgré ses appels à la réconciliation entre son mari et Chris Rock, rien à faire. L’humoriste refuse le calumet de la paix. L’acteur américain si cool sur les écrans, si triomphal à la fin des années 1990, celui dont le seul rival, disait-on, était Tom Cruise va-t-il être oublié comme d’autres étoiles déchues avant lui ? La première lueur d’espoir viendra d’Apple. La société de production de la marque à la pomme annonce qu’elle lancera bien « Emancipation » en salle aux États-Unis et sur sa plateforme Apple TV+. L’histoire de cet esclave en fuite a tout du rôle taillé pour les Oscars. Will Smith va alors profiter de la promo de ce long-métrage pour achever sa tournée d’excuses. Une interview dans le « Daily Show », de Trevor Noah, marque les esprits. Will Smith s’y raconte à cœur ouvert : sa rage interne, l’enfant qu’il était, paralysé face à la violence de son père… L’inquiétude, aussi, pour l’équipe du film « Emancipation », dont le travail a manqué de finir à la poubelle à cause de son comportement. Au même instant, Smith inonde son compte Instagram de photos du tournage. Elles montrent à quel point le film d’Antoine Fuqua fut une épreuve physique de chaque instant pour sa
Une productrice, une amie, une conseillère. Avec sa femme, Jada, le 13 août 2022 à Malibu.
tête d’affiche. On parle d’un nouvel Oscar, il n’en sera rien. Ni le comédien ni le film ne seront nommés cette année. En revanche, l’opération « retour en grâce » semble avoir porté ses fruits puisque Will Smith a annoncé qu’il sera à l’affiche de « Bad Boys 4 » et de « Je suis une légende 2 », deux gros projets qui n’ont pas hésité à miser sur son nom. « Des films qui le positionneront à nouveau comme le drôle et charmant Will Smith que le public appréciait », estime Kim Masters, rédactrice en chef du « Hollywood Reporter ». Seule ombre au tableau, la brouille avec Chris Rock reste entière. Dans son dernier spectacle diffusé en direct sur Netflix le 4 mars, l’humoriste remet le couvert sur le camouflet dont il a été victime. Le ton est parfois violent, souvent acide. « Les gens [me] demandent : “Ça fait mal ?” Ça fait encore mal, ironise-t-il. Will Smith a joué le rôle de Mohamed Ali dans un film. Vous pensez que j’ai auditionné pour ça ? » Un jour, peut-être, leur rivalité fera l’objet d’un film. C’est connu, à Hollywood, tout finit toujours sur un écran.
Chris Rock refuse le calumet de la paix
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Séance d’essayage pour Daniel Brühl : le Lagerfeld qu’il incarne n’a pas encore de catogan ni de col montant.
En exclusivité, Disney+ nous dévoile les coulisses de « Kaiser Karl », une fiction qui révèle un visage inédit du couturier Le créateur chez lui, à Paris, en 1976.
Derrière le génie de la coupe, un homme solitaire et secret. L’interpréter relève du défi. Mais Daniel Brühl n’a jamais craint de se mettre en danger. Après avoir été Niki Lauda dans « Rush », l’acteur de « Good Bye Lenin ! » et des Marvel grand public s’attaque à la légende Lagerfeld. Quatre ans après la mort du couturier, la série retrace une période précise de son parcours, les années 1970. Celles du combat pour la notoriété ; celles de la rivalité exacerbée avec Yves Saint Laurent. Porté par un casting haute couture, le tournage vient de débuter. REPORTAGE CLÉMENCE DURANTON ET MANUEL LAGOS CID
Plus contemporains que les robes à crinoline et les chemises à jabot, les costumes de cette série d’époque n’en sont pas moins spectaculaires. Ceux portés par les personnages principaux – Karl Lagerfeld, Yves Saint Laurent, Pierre Bergé, Jacques de Bascher, Gaby Aghion – ont tous été recréés sur mesure. Des heures de travail pour un résultat époustouflant, sous la houlette de la costumière Pascaline Chavanne, dont la créativité sur les films « Renoir » et « J’accuse » a déjà été récompensée par les César. Trois mille costumes ont ainsi été conçus, dont 160 par les ateliers de couture de la série. Une collection digne des plus folles fashion weeks.
Vestes, accessoires, chapeaux d’époque… pas de faute de goût qui aurait pu choquer l’empereur Karl
Sous les yeux de Jacques de Bascher (photo noir et blanc), broches, lunettes et boutons de manchette. À Saint-Denis, le 14 février.
Sur les portants et les étagères, le vestiaire d’une époque.
Épinglés au mur, les looks des années 1972 à 1978.
Daniel Brühl en Karl Lagerfeld à 40 ans.
ACTUALITÉ
Karl et Daniel ont en commun des racines allemandes, un français impeccable et un véritable attrait pour la haute couture Par Clémence Duranton e bâtiment, situé en banlieue nord de Paris, ressemble à un vieux hangar désaffecté. Sur les plateaux déserts, des câbles pendent des plafonds, éclairés par la lumière blanchâtre de néons grésillants. Quel drôle de lieu pour préparer la série la plus glamour de l’année… Une jeune femme pressée, carnet à la main, écouteurs rivés aux oreilles, nous sort de notre torpeur. « Venez, l’essayage a commencé. » Après un dédale de couloirs lugubres parcourus au pas de course, elle ouvre une porte sur un autre monde. Des dizaines de petites mains s’affairent au son des machines à coudre, mesurent et coupent du tissu au milieu de portants débordant de vêtements. Sur chaque cintre, des étiquettes : Mme Pompidou, Marlene Dietrich, Paloma Picasso… Dans le fond de la salle, lui aussi envahi d’habits, les figurants défilent en pantalon pattes d’éléphant, minirobe ou sous-pull à motifs. « Tu es sur quelle scène, déjà, toi ? Et comment tu épelles ton nom ? » interroge une habilleuse autoritaire en tendant un couvre-chef à un grand gaillard intimidé. « Tout ce que vous voyez là a été loué, nous précise-t-elle. Même les friperies n’ont plus rien qui date des années 1970 ; le vintage, c’est tendance. » Les costumes des personnages principaux ont, eux, été conçus sur mesure. Trop rares ou trop chères sont les pièces de luxe portées par les grands noms de la mode, il y a cinquante ans. « Le jean est d’enfer. » En quelques enjambées, nous avons pénétré l’antre de Pascaline Chavanne, costumière doublement césarisée. Chignon en bataille, lunettes posées sur le bout du nez, elle se penche vers une table à repasser où trônent des broches aux initiales KL, des lunettes de soleil noires, des boutons de manchette. Elle en attrape une PARIS MATCH DU 9 AU 15 MARS 2023
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poignée, choisit une cravate parmi les très nombreuses pendues sur la porte, met la main sur un des foulards entassés dans un bac, avant de retourner à sa salle d’essayage de fortune. Derrière un paravent en carton, Daniel Brühl est entouré de quatre habilleuses. L’acteur de « Good Bye Lenin ! », de « Rush » et des films Marvel se tient là, fier, dans un costume pas tout à fait fini et des bottes de mousquetaire. « Vous me découvrez dans la tenue la plus sexy ! » lance, enjoué, celui qui sera Karl Lagerfeld dans le « Kaiser Karl » de Disney+. Pour ces six premiers épisodes, la plateforme a choisi de raconter Lagerfeld dans sa quarantaine. Pas question, donc, de cheveux blancs comme neige ni de son éternel uniforme noir et blanc, le Karl des seventies avait un penchant pour la couleur. « Cette chemise bleue avec un motif violet, tu es sûre ? C’est très violent ! » s’exclame une habilleuse. « Karl l’a fait, donc nous aussi », tranche la patronne des lieux, avant de nous glisser : « C’est fou de se dire qu’il a porté ce genre de choses. Tous ces accessoires, ces motifs mélangés pourraient être ridicules, mais ça ne l’était jamais. Et ça n’a pas vieilli. » Pour guider le stylisme, un énorme book recense toutes les tenues portées par le génie de la mode. Le parcourir offre un formidable voyage dans le temps. Et dans ce que racontera « Kaiser Karl ». De ses créations pour Chloé, où il a œuvré pendant vingt ans et rencontré son amie Gaby Aghion (qui sera jouée par Agnès Jaoui), la fondatrice de la maison, à son travail chez Fendi. Mais aussi et surtout sa rivalité avec Yves Saint Laurent (Arnaud Valois) et ce terrible carré amoureux que les deux éternels rivaux formaient avec le dandy Jacques de Bascher (Théodore Pellerin) et l’homme d’affaires Pierre Bergé (Alex Lutz). « J’adore cette relation amour-haine
que Karl entretenait avec Saint Laurent, confie Daniel Brühl entre deux ourlets. Je crois sincèrement que cette compétition les a tous les deux rendus plus forts. » Le comédien voue une admiration démesurée à celui qu’il s’apprête à incarner. Il se souvient comme si c’était hier de leur première (et seule) rencontre, il y a une vingtaine d’années, sur un festival de cinéma. Karl devait photographier la nouvelle génération d’acteurs pour une couverture de magazine. Brühl s’était refusé, à l’inverse de tous ses camarades, à jouer des coudes pour apparaître sur l’image. « Mon côté espagnol, fier, a pris le dessus et je me suis mis en retrait. Et je crois – du moins, c’est mon interprétation, mais il a raconté tellement de légendes que je peux me permettre de le faire aussi – que Karl a vu ma retenue. Il m’a adressé un signe de tête approbateur. » Si Karl s’est tenu à distance des autres toute sa vie, Daniel est son extrême opposé : rieur, volubile dans toutes les langues qu’il pratique (allemand, espagnol, anglais et français, au minimum). Pendant que les équipes s’agitent autour de lui, il partage des anecdotes savoureuses sur son personnage, de ses passions éclectiques à son aversion pour la pilosité. Son envie d’entrer dans la peau du Kaiser ruisselle, sa fascination pour cet éternel curieux, immense bosseur, déborde de toutes parts. « Pardon, je parle trop… », s’excuse-t-il, gêné. Si leurs ressemblances physique et de caractère ne sont pas évidentes, Karl et lui ont en commun ces racines allemandes (l’acteur est germano-espagnol), ce français impeccable, cet accent si particulier et un véritable attrait pour la haute couture. Le conseiller de choix de Daniel Brühl pour les cérémonies et autres événements mondains est Alessandro Sartori, directeur artistique de la marque de luxe italienne Zegna. Rien que ça.
« Je ne veux pas être sa copie mais en donner mon interprétation », dit Daniel Brühl
Séance de travail avec la costumière Pascaline Chavanne. Karl Lagerfeld dans sa villa L’Amorosa, qui surplombe la baie de Monte-Carlo, à Monaco, en octobre 1988.
Mais il faut plus qu’un œil aiguisé pour devenir Karl. Brühl a dû avaler tous les ouvrages à son propos, regarder les documentaires, écouter ses interviews. Des mois de travail et de recherches. « En grandissant, je l’ai beaucoup vu dans les médias allemands. Il était aimé, respecté et craint. Il nous semblait inaccessible parce qu’il était devenu tellement francophile, à en oublier même qu’il était allemand. Bien qu’il n’ait jamais perdu son sens de l’humour très tranché, bien de chez nous. » Perché sur des bottines à talons, trop hautes, selon lui, pour son « confort de marche », Daniel Brühl narre, telle une odyssée, ses longues balades dans le quartier de Saint-Germain-des-Prés en imaginant ce que le couturier avait pu ressentir en faisant de même, quelques années en arrière. Il décrit avec fougue ce
Café de Flore où son double aimait tant s’asseoir. Près de la porte, toujours. « Aller là où il allait me permet de me sentir plus proche de lui. Je ne veux pas être sa copie mais en donner mon interprétation. » Un défi délicat, aucune fiction ne s’était encore attaquée à la vie et à l’œuvre de Karl Lagerfeld. Trop de mystère autour d’un homme qui a fermé son intimité à double tour ; trop d’admiration pour ce qu’il a représenté, aussi. « Il était célèbre dans le monde entier, mais personne ne sait qui il était vraiment, constate Daniel Brühl. C’est l’une des ambitions de la série, montrer l’homme derrière l’image, faire connaître ses amis, comprendre ce à quoi il pensait quand il était seul. Parce qu’on sait désormais qu’il était très seul. » Les réalisateurs Jérôme Salle (« Totems ») et Audrey Estrougo (« Suprêmes »)
se sont réparti les épisodes. Et Disney a vu les choses en grand : le tournage se déroule actuellement en France, à Monaco et en Italie. Le casting et plus de 2000 figurants évolueront dans quarante décors spectaculaires. « On a reproduit les appartements de Karl à l’identique », nous confie un membre de la production. Les défilés démesurés, les soirées mondaines et même le mariage de Paloma Picasso (interprétée par Jeanne Damas) et Rafael Lopez Sanchez, qui avait réuni tout le bottin parisien en 1978, ont été entièrement reconstitués. Quant à la question qui brûle les lèvres de tout le monde, à savoir : la prise de poids du couturier sera-t-elle visible dans « Kaiser Karl » ?, la réponse est affirmative. Les équipes ont créé un faux ventre pour Daniel Brühl. Ce dernier, habitué à être grimé, multiplie les astuces pour paraître plus en chair : « Que pensez-vous d’un col très haut qu’on fermerait, pour créer un double menton ? » Idée aussitôt testée et approuvée. Quand il se place devant l’étroit miroir dans son jean bleu, sa veste noire et ses cuissardes rouges en cuir, pour son dernier essayage de la journée, la petite équipe devient silencieuse. « Ah, voici la tenue phare », souffle Pascaline Chavanne, en souriant. C’est dans cet ensemble haut en couleur que les abonnés de Disney+ devraient découvrir la nouvelle version de Lagerfeld pour la première fois. Karl n’a jamais été aussi vivant. DU 9 AU 15 MARS 2023 PARIS MATCH
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Sur tous les continents, des hommes et des femmes luttent pour l’environnement. Match a rencontré, en Équateur, cette Indienne qui défie devant les tribunaux les compagnies pétrolières
La justicière de l’Amazonie « Ils ont contaminé nos poissons, nos rivières, nos esprits, notre peuple… » Si elle dresse la liste des méfaits déjà commis, pas question de baisser les bras. Pendue à son cou, une dent de jaguar signale son rang de leader et symbolise l’énergie du combat. À 37 ans, l’activiste waorani a déjà remporté des victoires majeures qui lui ont valu, entre autres, le prix Goldman, l’équivalent d’un Nobel pour l’environnement. Cette gardienne des traditions est aussi une militante du XXIe siècle : elle fédère les peuples autochtones et rassemble sur Internet autour du slogan « Notre forêt n’est pas à vendre ». PHOTOS VIRGINIE CLAVIÈRES / REPORTAGE CAROLINE FONTAINE
Elle connaît tous les secrets de son territoire, comme cette feuille qui, repliée, sert de gourde. Dans le parc ethnobotanique Omaere, près de Puyo, le 28 novembre 2022.
En même temps que les machines défrichent la forêt, la pollution arrive et, avec elle, de nouvelles maladies Le sous-sol regorge d’or noir. Une manne pour l’Équateur, ce petit pays resté longtemps sousdéveloppé, dont la superficie représente la moitié de celle de la France. Depuis la découverte des premiers gisements, dans les années 1960, le PIB par habitant a été multiplié par 18. Mais, dans les zones d’exploitation, la pollution aux hydrocarbures fait aussi grimper le nombre de cancers et de malformations congénitales. Ici, comme au Brésil, c’est l’Amazonie qu’on empoisonne. Et ses habitants. Un cours d’eau transformé en cloaque, près d’un champ pétrolier de la province de Sucumbios, en 2014.
De haut en bas : le parc national Yasuni, déclaré réserve de la biosphère par l’Unesco, compte près de 10 000 kilomètres carrés. Nemonte Nenquimo (au premier plan) avec des leaders des peuples Siona et A’i Cofan, face à un pipeline dans le nord de l’Équateur, en 2018. Comme une marée noire… dans une des zones les plus riches en biodiversité de la planète.
À Puyo, Nemonte Nenquimo et des centaines de Waorani manifestent après avoir porté plainte contre le gouvernement équatorien, en avril 2019.
Par Caroline Fontaine lle nous a donné rendez-vous au parc ethnobotanique Omaere, un lieu hors du monde créé par des passionnées de la forêt équatorienne, à Puyo, la capitale de la province de Pastaza. L’endroit est à un jour de pirogue de sa communauté. Nemonte Nenquimo porte sa couronne de plumes et la jupe traditionnelle tissée avec l’écorce de llanchama. Elle attrape la graine d’un achiote, un arbre sud-américain, qu’elle utilise pour se peindre soigneusement le visage. En espagnol, elle nous raconte son histoire. Parfois, sa voix douce prend des accents virulents : cette nouvelle génération de leaders autochtones est plus radicale que la précédente. Mais Nemonte n’a plus le choix : l’urgence est là, et elle, qui sait si bien lire la nature, ressent quotidiennement les terribles effets du réchauffement climatique. « Sa voix vient de loin, confie Omanca, une grand-mère waorani. Car elle porte celles de nos ancêtres. » Pendant des millénaires, les Waorani ont vécu à l’écart du bruit et de la fureur du monde occidental, dans la partie équatorienne de la forêt amazonienne. Des petits groupes de chasseurs-cueilleurs, équipés de lances et de sarbacanes, vivant en autarcie, se déplaçant
régulièrement, remontant les rivières à la nage (ils ne connaissaient pas l’art de fabriquer des embarcations), dormant sous des huttes ou dans les arbres et parlant le wao terero, une langue unique, sans lien avec aucune famille linguistique connue. Leur territoire, alors immense, abritait l’une des plus grandes réserves de biodiversité au monde. Ce peuple de guerriers a vécu en symbiose avec la nature, jusqu’en 1958, date de leur premier contact avec les Occidentaux – les Waorani sont les dernières tribus connues à avoir été « découvertes ». C’était l’époque où les missionnaires évangélisaient les indigènes. En 1986, près de trente ans après ce contact qui a ouvert la voie à l’extraction pétrolière et à son afflux de colons et de dollars, Nemonte Nenquimo naît dans le village de Nemonpare, terre de ses ancêtres, au bord du fleuve Curaray, dernière et unique fille d’une fratrie de dix enfants. L’intégration des Waorani dans l’économie de marché a bouleversé leur démographie, leur culture, leur système de valeurs. Témoin de la fin d’une histoire plurimillénaire, Nemonte, alors adolescente, choisit de se consacrer à la défense de son peuple. En 2012, le gouvernement équatorien met en vente le « bloc 22 », 180 000 hectares de forêt non encore exploités, habitat des Waorani. Pour obtenir leur accord (ils sont propriétaires de la terre, mais le sous-sol appartient à l’État), un Secrétariat d’hydrocarbures de l’Équateur, emmené par un ballet d’hélicoptères remplis de cadeaux, leur fait signer un document engageant le gouvernement à protéger la forêt. Leur signature sera utilisée pour prouver la vente de leurs terres. D’assemblées
Le wao terero, leur dialecte, n’a de lien avec aucune autre langue
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ACTUALITÉ
Avec sa grand-mère de combat, Omanca Enquiri, au siège européen des Nations unies, où elles sont venues défendre les droits des peuples autochtones, à Genève en juin 2019.
« La forêt est notre maison. Elle nous donne tout : l’eau, l’air pur, un abri, des médicaments, du bonheur, un sens à nos vies » Nemonte Nenquimo de village en assemblées de village, Nemonte Nenquimo alerte sur les dangers de l’opération. En 2015, alors âgée de 29 ans, elle cofonde l’Alianza Ceibo réunissant les figures de quatre peuples autochtones luttant pour la préservation de leur culture et de la forêt. Deux ans plus tard, elle devient la première présidente de l’organisation politique des Waorani de Pastaza. Elle démontre la tromperie du document signé et, en 2019, un tribunal équatorien interdit définitivement l’exploitation pétrolière dans le bloc 22. En créant un précédent juridique, le jugement a contribué à bloquer la mise aux enchères de seize autres blocs pétroliers couvrant près de 3 millions d’hectares
de forêt primaire. Ce jour-là, « Nemo », comme l’appellent ses proches, entre dans l’Histoire. En 2020, elle intègre le classement « Time » des 100 personnalités les plus influentes et reçoit le prix Goldman, l’équivalent du Nobel pour les défenseurs de l’environnement. Si son combat a d’abord été celui de ce sauvetage désespéré, il est indissociable de la lutte contre le réchauffement climatique. Dans sa langue, Nemonte signifie étoile. Peut-être faut-il enfin nous laisser guider par sa voix, celle de ce peuple indigène et, pour une fois, entendre ce qu’il a à nous dire. [SUITE PAGE 90]
LES WAORANI, UN PEUPLE DÉVASTÉ Guyana Guy ana Guyane
COL COLOMBIE OLOMBIE OMBIE
80 % de sa population vit sur 10 % de son territoire ancestral
Vene Venezuel Vene enezuel zuela zuel
Quito
Ils ne sont plus qu’entre
3 000 et 5 000 selon les estimations
68 % de leurs terres ancestrales sont aux mains de l’industrie pétrolière
Colombie Col ombie
Territoire des Waorani
Guyane Guy ane française Suriname française
ÉQUATEUR ÉQUATEUR TEUR
9 494 km2 de végétation ont été rayées de la carte en Amazonie en 2022
100 km
Brésil Pérou Pér ou
PÉROU PÉROU es.
L’Amazonie abrite 10 % des espèces sauvages de la Terre et 34 millions de personnes
AMAZONIE
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Bolivie
ACTUALITÉ Avec son frère, Opi, et Omanca. Leur communauté est située à une journée de pirogue de la ville de Puyo.
« Le pétrole promettait éducation, santé, richesse. On a eu microbes, pollution et pauvreté » Interview Caroline Fontaine Paris Match. Qui êtes-vous, Nemonte Nenquimo ? Nemonte Nenquimo. Je suis une femme waorani, une mère et une dirigeante de mon peuple. La forêt est notre maison. Elle nous donne tout : l’eau, l’air pur, la nourriture, un abri, des médicaments, le bonheur, du sens. Elle nous apporte la sagesse et une très forte connexion avec nos ancêtres, avec les esprits. Pendant des milliers d’années, nous y avons vécu avec dignité. Cela s’est terminé dans les années 1950, quand les premiers missionnaires américains sont arrivés pour nous “civiliser”. Avec eux, la peur s’est installée. Mon père me racontait qu’on leur disait : “Si vous ne changez pas, vous serez punis.” Cette peur nous a déstabilisés, elle a entraîné le début des bouleversements dans notre culture. Une partie des Waorani (les Tagaeri et Taromenani) ont décidé de s’enfoncer plus profondément dans la forêt. Ils y sont toujours. Mais la plupart sont restés. Puis sont arrivés les pétroliers pour exploiter notre territoire.
Que s’est-il passé ensuite ? Leurs machines ont défriché, construit des routes, remplacé la forêt primaire par des cultures ou des champs pour le bétail. On nous a apporté des biens de consommation dont nous n’avions pas besoin, on a scolarisé de force nos enfants. De nouvelles maladies sont apparues – et des milliers de Waorani sont morts de la polio. Mon peuple, qui jusqu’alors était nomade, s’est sédentarisé. Petite, j’observais cette époque de conquête, cet entre-deux-mondes. J’écoutais les sages, les grands-parents qui chantaient, qui tentaient de défendre leur culture face à celle qu’on voulait leur imposer. Or, si les peuples PARIS MATCH DU 9 AU 15 MARS 2023
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autochtones se mettent à rêver comme les habitants du monde occidental, ils perdent leurs précieuses connexions avec la nature, et ils risquent alors de disparaître. Ce danger nous menace.
Qu’est-ce qui vous a décidé à lutter ? J’étais dans un pensionnat religieux, loin des miens, je rêvais beaucoup. Mes ancêtres m’interpellaient : “Mais que fais-tu ?” J’avais 15 ans, je me suis échappée. Je ne suis jamais revenue. Il fallait que je trouve la manière d’aider mon peuple à qui on faisait miroiter l’éducation, la santé, la richesse. Mais le pétrole ne nous a pas apporté le développement promis, plutôt les microbes, la pollution, la pauvreté, la fin de notre culture et de notre langue comme de notre mode de vie. Nous vivions de la chasse, nous étions autonomes, nos décisions étaient collectives, désormais nous dépendons du monde extérieur. Et ce monde, le monde capitaliste, nous a menti : là où il est, il n’y a pas de bonheur. Quand je vais à New York, le bruit est assourdissant, l’air est pollué, les gens meurent dans la rue, ils se sont coupés de ce qui est important. C’est un monde perdu. Regardez où nous en sommes depuis que vous nous avez imposé votre civilisation : pandémie mondiale, crise climatique, extinction des espèces et pauvreté spirituelle généralisée. J’ai senti qu’il fallait résister, qu’il fallait lutter collectivement et faire l’unité avec d’autres peuples autochtones. C’est comme ça qu’en 2014 l’Alianza Ceibo est née.
Qu’est-ce que vous avez entrepris pour défendre votre terre ? J’ai d’abord travaillé avec les femmes waorani, je les ai écoutées. On a commencé par des projets d’eau potable. Puis on a compris que la mémoire de nos territoires
était en train de se perdre. Les cartes de notre forêt, faites par les Occidentaux, étaient presque vides : ils n’avaient noté que les lieux de l’exploitation pétrolière, les mines d’or, les villages, les rivières, les écoles, les routes – l’espace de vie fondamental à leur culture. Alors on a entrepris de tout cartographier, pour ne pas oublier le savoir des anciens, pour récupérer notre dignité, dire au reste du monde ce qui était important à nos yeux et leur rappeler que nous étions là. Nous avons montré la richesse de la faune et de la flore, les habitats des espèces rares, les fleurs médicinales. On a inscrit nos lieux sacrés, ceux de reproduction des animaux, les chemins de chasse. On a interrogé les anciens, utilisé des GPS, des satellites, installé des caméras sur les routes des bêtes sauvages, on s’est enfoncés profondément dans la forêt pour tout noter. C’était un processus de cartographie participative de seize communautés waorani.
Que vous a apporté ce processus ? Si, avant, on résolvait nos problèmes avec une lance, aujourd’hui on sait qu’il faut lutter autrement. Ces cartes ont permis de construire une voix unifiée, d’organiser la résistance et de prouver que notre territoire était vivant. On s’est battus devant les tribunaux et on a gagné. Depuis 2019, le bloc 22 ne peut plus être exploité. Cela a créé un précédent crucial dans la lutte pour le respect des droits des peuples autochtones et de la nature. C’est une victoire historique.
Depuis, vous êtes reconnue internationalement pour votre combat. Qu’avez-vous appris ? J’ai voyagé dans le monde occidental. Je sais à quel point il est dangereux pour nous, à quel point le système capitaliste,
Nemonte, son mari, Mitch Anderson, avec qui elle a fondé l’ONG Amazon Frontlines, et leur fille, Daime (arc-en-ciel en langue wao terero), devant une fosse à déchets toxiques en 2018.
en continuant à exploiter les ressources de l’Amazonie – des sommes colossales sont en jeu –, va nous anéantir. J’ai vu des habitants des mégalopoles et des villes qui ne comprennent plus la nature et qui sont en train de la détruire. Quand une personne fait un plein d’essence, elle ne sait pas qu’elle ampute une partie de la forêt. Tout est fait pour que nous achetions – regardez les milliards de bouteilles d’eau produites chaque année qui sont mal ou pas recyclées. La consommation est une aliénation. Or, la terre, c’est notre mère. Elle est violée, elle est dévorée par les hommes, elle souffre. Elle n’attend pas qu’on la sauve mais qu’on la respecte. Je le sens de manière très forte. Nous devons tous nous unir face au réchauffement climatique qui nous menace. Cette unité est mon combat de femme autochtone.
on se rend compte combien tout change très vite. Les pluies sont plus nombreuses et plus intenses qu’avant, des inondations très importantes ont emporté une grande partie de nos cultures, nos enfants souffrent de malnutrition, les animaux sont amaigris, malades. La terre a mal, elle n’est pas bien équilibrée, elle n’arrive plus à respirer.
Quelles sont les solutions ? Je rencontre des tas de personnes de l’extérieur, qui parlent beaucoup mais ne font pas grand-chose. Parce nous vivons depuis des millénaires en harmonie avec la nature, nous, les peuples autochtones, avons les solutions. À condition de travailler avec nous, on s’en sortira collectivement. L’éducation est le chemin pour retrouver cette connexion essentielle avec la Terre mère.
« La terre n’attend pas qu’on la sauve mais qu’on la respecte »
Ce combat a-t-il été rendu plus difficile par le fait que vous êtes une femme ? On a beaucoup travaillé pour renforcer le leadership des femmes. C’est grâce à elles que nous avons pu nous battre. J’ai vu la faiblesse des hommes, prompts à se vendre pour de l’argent, pour de l’alcool. Dans nos communautés, ils se faisaient souvent manipuler par le gouvernement, par les pétroliers. Quand j’ai compris que la survie viendrait des femmes, cela m’a donné énormément de confiance, de pouvoir et d’espoir.
Comment s’adapter au réchauffement climatique ? Nous n’avons plus de temps à perdre. Contrairement aux gens de la ville, dans la forêt, on lit le réchauffement au quotidien : nous sommes les plus proches de la terre et les premiers à entendre ses cris. En observant les plantes et le chant des animaux,
Comment vous sentez-vous ? Parfois je suis très fatiguée, parfois je me sens seule et inquiète pour mon peuple, pour la forêt, pour les humains. Le gouvernement équatorien ne nous voit pas comme une solution mais comme des ennemis. Il autorise les compagnies pétrolières et les entreprises minières à entrer dans les territoires, à les piller, les détruire, en toute impunité. De nombreux activistes ont été assassinés. Tout cela m’affecte, j’en souffre et je ne trouve pas toujours la paix. Dans mes rêves, je demande de l’aide aux esprits de mes ancêtres. Heureusement, notre territoire est encore sain et nos anciens nous guident.
Quel avenir pour la forêt ? Nous vivons des temps très dangereux, mais je n’ai pas peur, je suis une guerrière. Mes ancêtres sont enterrés dans la terre, elle est sacrée, on ne la vendra pas. Dans
le monde, les gens sont inquiets de ce qu’il se passe, du réchauffement climatique, ils disent que l’Amazonie est le poumon vert du monde, et pourtant ils continuent d’exploiter et d’exploiter, sans penser aux générations futures. Je me dédie désormais à cette lutte : que les gens qui font les lois nous entendent et les changent.
Vous êtes en train d’écrire un livre, “Nous ne serons pas sauvés”. Pourquoi ce titre ? Notre culture est celle de l’oralité. Si des travaux ont été entrepris sur les Waorani, ils l’ont été par des anthropologues, des missionnaires… jamais par nous. Ce livre permettra de raconter mon histoire, celle de mon peuple, pour les générations futures qui n’auront pas accès à la même chose que moi. J’y raconte aussi des expériences personnelles, des réflexions sur le choc des cultures – je le connais bien, mon mari est américain. Ce titre m’est apparu lors d’une cérémonie où j’ai bu de l’ayahuasca [une préparation hallucinogène propre aux cultures indigènes et propice aux visions] : j’ai rencontré la mère du jaguar [selon la légende, les Waorani descendent de cet animal] qui m’a annoncé que, pour sauver notre planète, les humains devaient tous s’unir. Ce livre est donc un manuel d’éducation, une lettre au monde. Je rêve souvent que mon fils, Nenkemo Michael Anderson Nenquimo, continuera de résister parce qu’il vient de cultures différentes, qu’il a le sang de la forêt et ce nom de Nenkemo qui signifie le visage du soleil. Tous les Nenquimo ont l’énergie du soleil. Mon fils et ma fille seront plus forts que moi, ils prendront la relève.
Plus d’information sur son ONG : amazonfrontlines.org. DU 9 AU 15 MARS 2023 PARIS MATCH
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VIVRE
JEUX 93 Superfléché
MODE 94 Tout beau tout show
DESIGN 102 Coquillages et crustacés sur la plage revisitée
BEAUTÉ 104 L’art en flacon
SAVEURS 106 Délices à contretemps
VOYAGE 108 Une renaissance mauricienne
AVENIR 110 Bientôt le tourisme spatial en ballon
AUTO 112 Hyundai Ioniq 6 Courant de rupture
ARGENT 113 SCPI : des rendements en hausse pour 2023
ÇA C’EST PARIS ! Les fidèles de la mode sont au rendez-vous. Jusqu’au 7 mars, les collections prêt-à-porter féminin des plus grandes maisons, mais aussi de jeunes créateurs, font vibrer la capitale. Au menu cette semaine : tendances majeures et pépites d’élégance. Voici le premier volet de nos coups de cœur pour l’hiver prochain. (Pages 94 à 100) Crédits photo : P. 92 : Courtesy Dior. P. 94 à 100 : Imaxtree/Launchmetrics, M. Dortomb pour Paco Rabanne, Maxppp, Sipa, Courtesy Dries Van Noten, Courtesy Jacquemus, DR. P. 102 et 103 : Courtesy Scale, Lucile Viaud, Malakio, P. Boularron, DR. P. 104 : E. Degrange, DR. P. 106 : E. Garault. P. 108 et 110 : DR. P. 112 : DR. P. 113 et 114 : Getty Images, DR. P. 117 : Agence Ferguso /Icon sport. P. 118 et 119 : P. Le Tellier, Presse sport. P. 120 et 121 : Y. Forestier/Starface, P. Le Tellier, Guibaud/Panorami /Bestimage. P. 123 : DR.
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SANTÉ 114 Régime ou jeûne Conséquences et bénéfices
ARCHIVES 117 Just Fontaine, l’invincible « Monsieur 13 buts »
JEUX 122 Mots croisés et Sudoku
C’EST LA VIE 123 Jupe pour homme
SUPERFLÉCHÉ
Par Michel Duguet
INTIME QUAND ELLE N’EST PAS AUX PIÈCES
GRANDS DE CE MONDE
IL N’EST PAS DÉBORDÉ !
S’EXHIBE SEINS NUS
NE CRACHE PAS LE MORCEAU
CHOUX FRISÉS
Problème N° 3853
ELLE A UNE DURÉE INDÉTERMINÉE
FAÇON DE PARLER
PETIT PARIGOT
COUVERTURE
ARRIVÉ UNE DEUXIÈME FOIS
PÉRIODES CHAUDES
SUIT LA MARIÉE
VENDEUR DE TAPIS UN DANGER QUI PLANE CIGARILLO
METTRE EN MORCEAUX
AFFAIBLIR
MONNAIE DU CAMBODGE VEUT NOTRE BIEN LES ÉCHECS FOCALISANT SUR SES GARDES
PETIT SINGE
AVIS FAVORABLE
DANS L’EN-BUT
PIC DE FIÈVRE
RÉALISÉ
À LA MODE DE CHEZ EUX
PRONOM
BEL ARBRE
FAÇON DE PARLER
BRUIT DE PORTE
EMPLOI STABLE
IL PORTE LE COSTUME
REMIS AU FREEZER
ÇA FAIT BEAUCOUP PETIT ROULEAU
SANS LE MOINDRE DOUTE
SUJET DE PHILO
PARÉS À TOUTE ÉVENTUALITÉ
FRAGMENT HUMAIN
IRIDESCENT
MAUVAIS ÉLÈVE
ROUE DE SECOURS
CAPSULE INGÉRABLE
C’ÉTAIT UNE LUMIÈRE !
SKETCH
OUTIL DE GRAVEUR
DIX ANS OU PLUS
ATTEINT DANS SA CHAIR
DE TEMPS À AUTRE
À PÂQUES OU À LA TRINITÉ
PIÈCE DE SOUTIEN
PROBLÈME CAPILLAIRE
SUPERPOSER
IL RÉPÈTE TOUT
UNE ÉTOILE SUR LA BANNIÈRE CORPS-À- CORPS
PARMI LES MEILLEURS
AVERSION
BONNE EXCUSE
RESTÉE LONGTEMPS AU SOLEIL
JOUENT LES PREMIERS RÔLES
PASSE LA MAIN
TOUT DOUX LEURS MÂLES SONT DES COUREURS
DU SPART
COMPACT
UNE GRECQUE
DE NÎMES OU D’UZÈS
POSSIBILITÉ
ARROSER COPIEUSEMENT
FILET À ÉCREVISSES
EN PELOTE
FAIT COURT
UN DÉBUT À TOUT
STYLO
EN SERVICE
SOLUTION DU N° 3852 PAR NICOLAS MARCEAU HORIZONTALEMENT VERTICALEMENT 1. Anticonformiste. Être. 2. Routinier. Incitation. 3. Cérame. Tenter. Aronde. 4. Huilerie. Oasis. Mn. Er. A. Archiduchesse. Tracts. B. Nœud . Saine. Odieuse. C. Turion. Tiares. Gale. D. Italianisant. Nager. E. Cimentier. 5. Idoine. Rami. Bisons. 6. Naturel. Néottie. Sa. 7. Us. Nixon. Relue. Dan. 8. Carie. Utah. Fi. Benoît. 9. Hi. Sr. Éosine. Dot. F. Onéreux. UU. Entama. G. Ni. Roulottes. Rasés. H. Fêtèrent. Hase. Fer. LS. I. Ore. Al. Amer. SPA. Muselée. Aune. 10. Enta. Bohême. Longuets. 11. Seine. Tare. Fané. Tee. 12. Atouts. Saur. Tri. Td. 13. EOR. Osée. J. Nom. Rhumes. Acétate. K. Mitaine. Se. Abris. nT. L. Inès. Elfe. Fuites. Têt. M. Scribouillard. Saga. Suées. Bide. Allée. 14. Déni. Part. Notée. 15. Tisane. Faciès. Restes. 16. Ré. Genre. Essaims. Tri. 17. Auge. N. Ti. Site. Eon. En. Iules. O. Eta. St. Benêt. Orme. Co. P. Armoire. Ratés. Bon. Q. Étonné. Nautiles. CERN. R. Tin. Tarot. Gué. Crin. 18. . Santal. Beige. 19. Tel. Omelette. Écornée. 20. Entassée. Tisonnées. Douée. Lettrine. S. Rôde. Sainteté. Érigée. T. Énervantes. Dessinées. DU 9 AU 15 MARS 2023 PARIS MATCH
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VIVRE
TOUT BEAU TOUT SHOW La semaine de la mode parisienne dessine une silhouette
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audacieuse, entre clin d’œil à l’élégance passée, défilés hommages et une bonne dose d’avant-garde. L’hiver 2023-2024 aura fière allure ! Par Tiphaine Menon
Flower power Édith Piaf, Juliette Gréco et Catherine Dior : cette saison les héroïnes de Maria Grazia Chiuri sont les icônes des années 1950. Entre les motifs floraux chers à M. Dior façon peinture abstraite, jupes corolles et tops brodés « Je ne regrette rien », le mythique new look de la maison française n’a pas pris une ride.
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VIVRE
PACO RABANNE
PACO RABANNE
L’âge d’or OFF-WHITE
Très attendu, le premier défilé Paco Rabanne depuis la disparition de son fondateur, en février, marquait aussi les 10 ans au sein de la maison du directeur artistique Julien Dossena. La collection fait triompher la matière. Look tailleur en fausse fourrure (clin d’œil à la sculpture de l’artiste suisse Meret Oppenheim), robes-chandeliers, baskets et jupe à paillettes associées pour mieux briller. Autres chefs-d’œuvre : quatre robes-tableaux, réalisées en collaboration avec la Fondation Dali, célébraient l’amitié entre le couturier d’origine basque espagnole et l’artiste surréaliste. Pour clore ce défilé spectaculaire, six robes métalliques, sorties des archives, jouent la carte de l’émotion. La robe en carrés et rectangles d’aluminium vue sur Joanna Shimkus dans le film de Robert Enrico « Les aventuriers » en 1967, la mini-robe portée par Françoise Hardy en 1966, ou encore celle de l’actrice française Michèle Mercier dans « Une veuve en or », de Michel Audiard, en 1969. Tout à la fois emblématiques d’une époque, et intemporelles, des petits bijoux de modernité.
NAOMI A MARCHÉ SUR LA LUNE Chez Off-White, le directeur artistique Ibrahim Kamara, nommé pour succéder au regretté Virgil Abloh, relève le défi avec brio. Dans un décor lunaire, la panthère Naomi Campbell fait une apparition cinématographique dans une robe bomber. Divinité futuriste.
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COUP DE SOLEIL Un sac Bambino géant, des parasols et un grille-pain pour accueillir les clients d’un grand magasin ? Vous l’aurez deviné, Simon Porte Jacquemus s’empare des Galeries Lafayette Paris Haussmann et y dévoile ses obsessions. Mention spéciale pour le café Fleurs situé devant le magasin de l’homme qui, comme son nom l’indique, proposera boissons chaudes et bouquets printaniers (jusqu’au 14 mars). Une carte blanche résolument solaire.
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Jacquemus aux Galeries Lafayette jusqu’au 2 avril.
COURRÈGES
THÉÂTRAL La recommandation du designer belge Dries Van Noten pour sublimer les robes longues l’hiver prochain ? Adopter une attitude de diva, ajouter une veste en patchwork de brocart et laisser tomber la fourrure. Ou comment booster une silhouette sans avoir peur d’en faire trop !
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Repéré à la librairie 7L, « Paradise Now » de William Middleton met en lumière l’insaisissable Kaiser… On attend avec impatience la traduction !
C’EST CADEAU ! La jeune designer belge Marie Adam-Leenaerdt fait partie des nouvelles têtes qui défilent à Paris. Diplômée de l’école de La Cambre en 2020, elle est passée par le studio Balenciaga avant de lancer sa griffe. Un nom à retenir !
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POUR RUGIR Chez Celine, Hedi Slimane dessine des escarpins lamés imprimés léopard à petits talons… Un motif aux accents rock’n’roll et la bonne hauteur pour les femmes pressées. À mettre dans la liste des classiques qui nous font de l’œil.
Le diable s’habille chez Undercover Le créateur japonais Jun Takahashi fusionne les millefeuilles de tulle, formes sportswear et influences musicales. Silhouettes à damier, bicolores et inspirées par le graphisme des années ska, costumes à trois boutons avec dos brodé style rude boy et cagoules à oreilles façon manga donnent le ton d’un vestiaire aux allures de conte fantastique.
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Malakio L’entreprise bretonne crée des composites de coquilles concassées, à partir de moules, d’huîtres… PARIS MATCH DU 9 AU 15 MARS 2023
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Par Sixtine Dubly Ils ont la mer pour muse et la coquille pour matière. Leurs objets sont composés d’écailles de poisson et de conques. Ce nouvel onirisme iodé était encore impensable il y a deux ou trois ans. Le fait que la faune marine étouffe sous le plastique que nous rejetons à la mer a certainement accéléré les paris les plus fous, comme celui d’Erik de Laurens, formé au Royal College of Art de Londres. Lorsqu’il s’intéresse aux rebuts de l’industrie alimentaire, le designer découvre que les mareyeurs se débarrassent chaque jour de milliards d’écailles. Après quatre ans de développement, la marque Scale naît en 2018 pour développer un matériau inédit, appelé Scalite, composé uniquement d’écailles séchées, broyées, puis compressées à froid grâce au collagène, un liant naturel. Réalisée sans colle ni adjuvant, résistante au feu et entièrement recyclable, l’invention affiche un certain panache et offre une véritable alternative déco. Ces plaques à l’effet marbré, comme traversées d’écume, séduisent les architectes d’intérieur. Les designers peuvent la sculpter avec de simples outils à bois. « Saumon d’élevage ou sardine de pêche, la texture varie », précise Édouard de Dreuzy, 48 ans, cofondateur de Scale, qui teste actuellement le bar. « Cette matière est étrangement inconnue, poursuit-il. Nous menons en parallèle une thèse à la chaire Manta du campus de Pau avec le CNRS, afin de percer les secrets de cette ressource disponible à foison, dans le monde entier. » Morgan Guyader, 26 ans, designer et fondateur de Malakio, avance le chiffre de 150 000 tonnes par an en France pour les déchets coquilliers. « Pendant le confinement lié au Covid, je me suis enfermé dans le garage de La lampe MA01 d’Ammo et Malakio est pensée écolo : noyer français et palet de coquilles Saint-Jacques de restaurateurs du Finistère. Le tout est assemblé sans colle ni vis, réparable et reprenable en seconde main chez l’éditeur (750 euros).
VIVRE
Cette créatrice appartient à la jeune garde éco-responsable, recherchant de nouvelles solutions esthétiques.
Lucile Viaud Collection « Coquille » produite à la main, à Rennes. Coupelles en plâtre de mer à partir de déchets coquilliers bretons et de cire d’un apiculteur de la vallée du Léguer. Prix sur demande.
mes parents avec une douzaine d’huîtres et un marteau », explique-t-il. En septembre 2020, Malakio naît à Nantes et compte aujourd’hui sept personnes. Des concassés de saint-jacques, d’ormeaux, de moules et d’huîtres forment des composites qui font écho au style rocaille. Ces cabinets de curiosités constellés de pierres et de coquilles fascinaient les puissants de la Renaissance en pleine conquête des voies maritimes. Outre les panneaux décoratifs, Malakio vient de signer avec les designers bretons Ammo une lampe inspirée du phare des Pierres Noires, dans le Finistère. Un objet démontable et réparable, précise Morgan Guyader. La recherche est au cœur de cette révolution, comme le prouve le travail de Lucile Viaud, créatrice d’Ostraco et d’un plâtre de mer qu’elle édite à la demande sous forme de bols aux pastels de ciel depuis 2014. Le plus baroque de ces chercheurs poètes est sans aucun doute Paul Bonlarron, qui célèbre la création, le crustacé et l’ivresse iodée mais refuse toute pollution. Ce jeune designer de 28 ans, formé à l’ENSCI-Les Ateliers et lauréat 2022 du prix Mobilier national de la prestigieuse Villa Noailles, a imaginé tout un paysage qui interroge la place de la coquille dans les arts décoratifs. Il revisite les techniques anciennes, comme celle de la gravure à l’acide employée autrefois par les mosaïstes de la rocaille. Lui grave au vinaigre des coquillages chinés sur Leboncoin pour en faire des lampes. Il crée sans chimie des murs entiers de nacres de capiz miroitantes, cette coquille phare des luminaires des années 1970, grâce à un procédé thermique qu’il gardera secret. Pour habiter ce décor, il a également convié la jeune garde des créateurs qui ont la coquille pour sujet, dans un esprit d’écologie participative. Il résume son geste en une phrase : « Nous sommes tous engagés pour la sauvegarde de la mer et la beauté du monde. » Sixtine Dubly
Paul Bonlarron « La Toilette aux coquillages » : rideau de capiz en nacre et coiffeuse rocaille sur laquelle est posé un éventail en couteaux réalisé avec Amélie Orhant.
Un onirisme iodé, tel un hymne à la sauvegarde de la mer
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BEAUTÉ
VIVRE
L’ART EN FLACON Tantôt somptueux, tantôt avant-gardistes, les écrins des fragrances ont marqué l’histoire de la parfumerie moderne. Une tradition qui se poursuit aujourd’hui. Par Aurélia Hermange
Eau du Soir, eau de parfum, édition originale Sydney Albertini, Sisley, 226 €.
Eau de parfum Jasmin Bonheur, Flacon aux abeilles Guerlain x Maison Matisse, 16 000 €, édition limitée à 14 pièces uniques de 1 litre.
Si l’histoire de la parfumerie remonte à l’Antiquité, ce n’est qu’au XIXe siècle qu’elle devient accessible au plus grand nombre et commence à s’industrialiser sous l’impulsion des premières maisons, Guerlain, L.T. Piver, Molinard, puis Coty. Mais lorsque Pierre-François-Pascal Guerlain ouvre sa boutique en 1828, il réalise très rapidement, face à la multiplication de l’offre, que le contenant est aussi important que le contenu. À l’époque, les fragrances sont conditionnées dans des flacons bouillottes cylindriques avec une simple étiquette. Le parfumeur décide alors de se démarquer en faisant appel à des artistes, comme Louise Abbéma, pionnière du féminisme, pour créer les décors de la boutique, les premiers poudriers et étuis de rouges à lèvres, mais aussi des fioles à parfum originales. Quand la fièvre de l’Art nouveau enflamme le XXe siècle, le flacon est promu au rang d’œuvre d’art. Parfumeur visionnaire, François Coty s’empare aussitôt de la tendance et collabore d’abord avec la cristallerie Baccarat pour ses bouteilles originales, puis s’associe au maître verrier et joaillier René Lalique pour la création du modèle contenant le jus L’Effleurt, suivi en 1907 par celui d’Ambre antique, devenu iconique. Depuis, les flacons repoussent les limites de la technique pour inventer de nouveaux contenants-sculptures toujours plus audacieux, de l’étoile mythique d’Angel de Thierry Mugler à la pomme de Lolita Lempicka en passant par le buste corseté du Classique de Jean Paul Gaultier ou le robot de Phantom de Paco Rabanne. Afin de se distinguer, le parfum, devenu art à part entière, doit donc plus que jamais faire appel à ses pairs, peintres, sculpteurs ou dessinateurs, pour sublimer ses flacons le temps d’exceptionnelles éditions limitées qui font le bonheur des amateurs éclairés (et fortunés).
Guerlain est le premier à faire appel à des artistes pour créer ses bouteilles
Eau de parfum Spell on You, Louis Vuitton x Yayoi Kusama, 320 €.
2023 LES PIÈCES D’EXCEPTION « En 2005, Guerlain a imaginé son concept de haute parfumerie, raconte Ann Caroline Prazan, directrice art, culture et patrimoine de la prestigieuse maison. Les pièces d’exception permettent de réaffirmer notre vocation de mécène et de dénicheur de talents par la commande de modèles réalisés en éditions très limités et numérotés à des artistes et artisans d’art. » Dernier-né de cette collection unique, Jasmin Bonheur et son Flacon aux abeilles, édition Maison Matisse, inspiré du maître de l’art moderne. Même volonté de célébrer l’art chez Louis Vuitton, qui s’offre une nouvelle collaboration avec l’artiste japonaise Yayoi Kusama. Les flacons Spell on You, L’Immensité et Attrape-Rêves se parent pour l’occasion des motifs signature de la plasticienne le temps d’éditions limitées pop et colorées. De son côté, Christine d’Ornano a invité la peintre et sculptrice new-yorkaise Sydney Albertini à décorer le flacon de l’Eau du Soir, fragrance emblématique de Sisley. La puissance des lignes et de la couleur, oscillant entre abstraction et figuration, est au service d’une création éphémère qui abolit une fois de plus la frontière entre l’art et le parfum. PARIS MATCH DU 9 AU 15 MARS 2023
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Eau de parfum L’Original, Lolita Lempicka, 91 € les 50 ml. Eau de toilette Classique, Jean Paul Gaultier, 89 € les 50 ml. Eau de parfum Angel, Mugler, 126 € les 50 ml. Eau de toilette Phantom, Paco Rabanne, 76 € les 50 ml.
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SAVEURS
VIVRE
Autour d’Arabelle Reille (chemisier blanc) et Péri Cochin (en rouge), de g. à dr., au dernier rang : Denise Vilgrain, en charge de VIP France d’Art Basel, Kamel Mennour, galeriste, Antoni Calmon, médecin esthétique, le chef Guy Krenzer, Élie Top, joaillier, Ariel Wizman, Alain Prost, P-DG de Ginori 1735. Au centre, Nathalie Bellon-Szabo, directrice générale de Sodexo Live ! Assises : Joyce Jonathan, chanteuse, et Sophie Boudre, réalisatrice.
À CONTRETEMPS DÉLICES Chaque mois, Paris Match et Waww La Table convient artistes et personnalités à se retrouver autour d’un grand chef afin de célébrer le repas gastronomique des Français, inscrit au patrimoine culturel de l’humanité par l’Unesco. Cette fois-ci, rendez-vous avec le chef Guy Krenzer. Par Caroline Mangez / Photos Éric Garault Avant d’être baignées de Château Smith Haut Lafitte rosé, blanc ou rouge servis en magnums, les petites boules colorées des verres Mabouls, dessinés par India Mahdavi pour Waww LaTable, font des clins d’œil aux assiettes. Choisie par Arabelle Reille et Péri Cochin, nos expertes en art de recevoir, la vaisselle de la sublime collection Oriente de Ginori 1735 se décline en différentes couleurs pastel. Dans la cale de la Barge Liberty, entre les ponts de Grenelle et de Mirabeau, le chef Guy Krenzer, doublement meilleur ouvrier de France, directeur de la création de la maison Lenôtre, s’agite aux fourneaux avec sa garde rapprochée. Bientôt, il viendra déposer dans chaque assiette un incroyable repas tout en trompe-l’œil. Sur le pont, Nathalie BellonSzabo, sa « patronne préférée », aux commandes de Sodexo Live !, marque du leader de la restauration regroupant l’expertise du groupe, l’événementiel et le sport, rayonne.
Comme des plaisirs de ce dîner virant à la Les hôtes de ce soir sont des champions dans leurs disciplines. Antoni Calmon, médecin réunion de famille, au moment du dessert, esthétique, pique toute la planète mode et enfin, de l’entrée : dans des coquilles SaintJacques, les noix ont été reconstituées avec cinéma, mais refuse de lâcher des noms. En entrée, le café – double consommé et une poire pochée à la crème d’amandes et au royale de foie gras – est servi dans une tasse. jus passion. Assis à côté de sa femme, Osnath Roux et parfait, le sucre en trompe-l’œil à Assayag, chercheuse en physique, le journabase de tofu émerveille le galeriste Kamel liste Ariel Wizman, également comédien, Mennour. Sous des dehors d’œuf à la neige, DJ et homme d’affaires, captive la table en le dessert qui suit est en fait un tartare de racontant sa rencontre récente avec Patrick langoustines sauce curry et avoine. Puis Sébastien, dans les coulisses des « Grosses vient l’immense roue de brie qui ne recèle têtes ». À l’en croire, l’animateur prépare aucun fromage mais une délicate mousse pour l’été quelques tubes corsés. Élie Top de turbot, entrecoupée d’une fine purée s’en réjouit, saluant au passage en Wizman de champignons qui lui donne une allure l’inventeur de « la chenille à quatre pattes » truffée. Tout est surréaliste ce soir-là. Joyce qui leur a valu quelques soirées mémorables. Jonathan se présente en « chanteuse prisée » Le joaillier vient de dessiner une collection de bijoux fantaisie qui s’arau gagnant du concours Waww, rache chez Zara et planche sur commissaire-priseur à Versailles. une « collab » pour le tandem La veille, elle chantait à Bussy- Aujourd’hui la de Waww La Table, « peut-être Saint-Georges les titres de son propriété de Kering, des photophores ». On se quitte dernier album, « Les p’tites jolies Ginori 1735 est la en saluant le talent du chef qui choses ». Un « petit miracle », le marque de la plus a suspendu le temps avec son film de sa voisine de table, la belle et de la plus menu à l’envers. Une folie culiréalisatrice Sophie Boudre, qui ancienne porcelaine retrace la cohabitation entre les italienne. L’architecte naire sur mesure, accessible sur commande chez Lenôtre. enfants d’une école primaire et designer Gio Ponti les pensionnaires d’une maison en a été le directeur de retraite, est du même ordre : se artistique pendant dix Tous les détails et la vidéo de cette soirée réjouir des choses simples. ans de 1923 à 1933. sur parismatch.com et waww.fr.
LUXE ITALIEN
Noix de Saint-Jacques reconstituées avec une poire pochée à la crème d’amandes et au jus passion.
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Nutricia Nutrition Clinique 451 229 306 R.C.S. Nanterre. Crédit photo : Getty Images.
Et si la nutrition médicale pouvait nous aider à retrouver l’appétit de la vie ?
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VOYAGE
VIVRE Vue aérienne du Long Beach. Ci-dessous : toutes les chambres donnent sur la plage. Avec la perspective sur l’océan depuis un des bars.
UNE RENAISSANCE MAURICIENNE Pionnier de l’hôtellerie sur l’île Maurice, SunLife s’est réinventé. Il a changé de nom, modernisé ses quatre resorts, mais gardé le charme d’une destination toujours accueillante. Par Romain Clergeat Quand le tourisme sur l’île Maurice balbutiait à peine, Sun Resorts était déjà là. Quarante-sept ans plus tard, le désir de donner un nouveau souffle au groupe hôtelier était légitime. La pandémie de 2020 (et la baisse de la fréquentation) lui a offert une occasion idéale : changer… en restant fidèle aux recettes de son succès. Un nouveau nom, SunLife, mais surtout un nouvel état d’esprit, celui du lifestyle à la mauricienne. « Des vacances peuvent transformer des vies, note François Eynaud, le dirigeant de la marque. Nous devions évoluer pour nous adapter aux dernières tendances du voyage. » L’immuable est resté. L’île Maurice, ses plages infiniment douces, sa mer chaude et son hospitalité quasi unique dans le monde, mais aussi l’offre variée de SunLife, adaptée à tous les goûts et à toutes les bourses. Ceux qui aiment les vacances un peu « roots » pourront séjourner à Ambre, dont le nom évoque la couleur des couchers de soleil mauriciens. Ils vivront une expérience à la Robinson Crusoé, version luxe. Chaque chambre a été imaginée pour rappeler une petite cabine personnelle, donnant sur l’océan. D’autres préféreront La Pirogue, l’établissement historique de l’île, dont la recette gagnante a été modernisée : bungalows sur la plage, toits de chaume, volupté et farniente, au cœur d’un jardin exotique de 14 hectares. La décoration simple des chambres, bois et rotin, procure une évasion sans chichis. Côté gastronomie, là, Sur l’île aux Cerfs, inhabitée, on peut dormir dans des « bulles ».
c’est la profusion, avec pas moins de cinq restaurants, proposant des cuisines d’inspiration indienne, africaine, européenne, chinoise et créole. La jeune génération bénéficie du changement le plus spectaculaire. À Long Beach, tout a été pensé pour contenter les voyageurs impatients de découvertes. Conçu comme une maison de plage contemporaine, au cœur d’un environnement tropical de 60 hectares, cet hôtel s’articule autour d’une place centrale d’où tout part. Le spa Cinq Mondes pour madame, le Sun Kid’s Club pour les enfants et la plage de 1,3 kilomètre de long bordant le lagon pour tout le monde. Imaginées pour les familles, les chambres sont vastes, la plus petite mesurant 60 mètres carrés. Cet hiver, le Sugar Beach, joyau du groupe, a été choisi pour la fête inaugurale. Ce cinq-étoiles fait partie des plus beaux hôtels de tout Maurice. Le luxe et l’élégance y règnent en maîtres. Alliant tradition et modernité, les chambres sont réparties entre la Manor House et les villas au bord de la plage de Flic-en-Flac. Toutes ont vue sur les eaux cristallines du lagon. La conscience environnementale est omniprésente. Sans plastique, bien sûr, et à travers des programmes de régénération de coraux. Pour les plus motivés, l’Energy Gym permet de produire de l’électricité en pédalant. La plage, toujours proche, invite à récupérer après l’effort…
L’immuable est resté : les plages douces, la mer chaude et l’hospitalité légendaire
25 KILOMÈTRES
AVENIR
VIVRE
D’ALTITUDE
4 H DE VOL
2 h d’ascension 1 h dans l’espace 1 h de descente
Prix du ticket
180 000 DOLLARS BIENTÔT LE TOURISME SPATIAL EN BALLON Une start-up japonaise va proposer, dès cette
Par Romain Clergeat
année,un vol expérimental dans une capsule pour observer la courbure de la Terre. D’autres projets similaires en France et aux États-Unis sont en cours. L’accès à l’espace pour tous approche…
On peut partir dans l’espace avec SpaceX à bord d’une fusée, mais ça coûte… 55 millions de dollars. C’est ce qu’ont fait trois « privés » l’année dernière. Pour les moins fortunés, la solution la plus raisonnable dans un futur proche réside dans un survol au milieu de la stratosphère (entre 10 et 50 kilomètres d’altitude). En France, Zephalto, Stratoflight et Expleo et, aux ÉtatsUnis, World View Enterprise travaillent sur ce type de vol spatial. Avantages : un moindre coût et une ingénierie beaucoup moins complexe que celle d’une fusée, puisque l’ascension s’effectue en ballon. Pour autant, il a fallu dix ans à Keisuke Iwaya pour concevoir son projet. À l’origine, ce passionné d’espace lançait des ballons équipés d’une GoPro, simplement pour réaliser des clichés « depuis là-haut ». Puis l’idée d’y aller lui-même a germé. Basée à Sapporo, sa société Iwaya Giken a travaillé avec peu de moyens (dont ceux de JTB, une agence de voyages japonaise) afin de concevoir une cabine biplace, président fondateur d’Iwaya Giken T-10 Earther, pouvant résister à la pression et au froid à cette altitude. Certes, on sera loin de la frontière officielle de l’espace (100 kilomètres), mais assez pour pouvoir nettement distinguer la courbure de la Terre (peut-être une réduction sur le billet pour les « platistes » ?), ainsi que la séparation entre notre couche atmosphérique protectrice et le noir du vide sidéral. Contrairement à un ballon à air chaud, le vaisseau d’Iwaya Giken sera soulevé par de l’hélium, donc facilement réutilisable. Si le premier vol commercial (qui emportera un passager et un pilote) se déroule comme prévu, l’entreprise compte procéder ensuite à un lancement par semaine et, à terme, quotidien. Afin de diviser par dix le prix du ticket qui reste encore « stratosphérique » pour une bourse lambda…
« Les passagers n’auront pas besoin d’être milliardaires pour monter à bord » KEISUKE IWAYA,
MÈTRE
diamètre de la cabine PARIS MATCH DU 9 AU 15 MARS 2023
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LA VENTE EN NUE-PROPRIÉTÉ, POUR MONÉTISER VOTRE LOGEMENT DE FACON SÉCURISÉE Après 70 ans, la plupart des retraités veulent continuer à faire des projets et à profiter de la vie mais les moyens dont ils disposent sont souvent limités. Pourtant, ils sont majoritairement propriétaires de leur logement, qui constitue un capital souvent très important. Une solution existe pour mobiliser ce capital dormant tout en continuant à profiter de son logement : la e d’un bien récupère une grosse somme d’argent qu’il peut utiliser pour compléter ses revenus, donner un coup de pouce à ses enfants, faire des travaux, financer la dépendance d’un conjoint, etc … Moins risquée et plus éthique que la vente en viager, la vente en nue-propriété a tout pour plaire.
RÉCUPÉRER UN CAPITAL IMPORTANT TOUT EN CONTINUANT À VIVRE CHEZ SOI Le code civil prévoit la possibilité de séparer la propriété d’un bien immobilier en deux. D’un côté l’usufruit, qui donne le droit d’habiter le bien ou de le louer à un tiers. De l’autre la nue-propriété, c’est-à-dire les murs, qui peuvent être vendus à un épargnant désireux d’investir dans un bien occupé et de devenir plein propriétaire uniquement dans le futur. En vendant la nue-propriété, le vendeur encaisse donc un capital tout en conservant l’usage de son bien. Pour déterminer le prix de vente, il suffit alors de soustraire de la valeur de son bien la valeur de l’usage qu’il conserve. En fonction de son âge et de son espérance de vie, le vendeur peut ainsi raisonnablement toucher entre 40% et 75% de la valeur de son bien. LES AVANTAGES PAR RAPPORT À LA VENTE EN VIAGER La vente en nue-propriété est beaucoup moins risquée pour le vendeur que la vente en viager car il ne fait pas crédit à l’acheteur. Au lieu d’être payé sous forme de rentes, étalées sur des années, il encaisse 100% du prix de la nue-propriété immédiatement. Il est payé comptant. Par ailleurs, il conserve un usufruit, ce qui lui permet de louer son logement et d’encaisser ainsi des loyers si jamais il doit le quitter un jour.
Enfin, cerise sur le gâteau, le produit de la vente est totalement exonéré d’impôts s’il s’agit de la résidence principale. EN QUOI LE CONTRAT MONETIVIA ESTIL ENCORE PLUS SÉCURISÉ ? La vente en nue-propriété classique, si elle est moins risquée que la vente en viager, ne supprime pas totalement le risque de vendre son bien en dessous de sa valeur en cas de décès prématuré. C’est pourquoi la société Monetivia a développé une solution de vente en nue-propriété pour les familles qui veulent limiter les risques au maximum : le Contrat Monetivia. Ce dispositif est encore plus sécurisé pour le vendeur car il permet de fixer le prix de vente de la nue-propriété en fonction de la durée réelle pendant laquelle il va continuer à occuper son logement, au lieu de fixer ce prix à partir de son espérance de vie statistique, par définition hypothétique. Comme dans le dispositif classique, le vendeur perçoit au départ un capital. Mais à la différence du dispositif classique, cela ne s’arrête pas là. En cas de décès prématuré, le prix de vente est revu à la hausse et un capital complémentaire est versé à ses héritiers. De son côté, l’acheteur est lui aussi protégé grâce à une assurance souscrite auprès de l’assureur Allianz s’il n’a pas pu prendre
Tirez profit de votre immobilier en toute sécurité
possession du bien au-delà d’une certaine durée. En résumé, c’est une vente à prix ajusté qui permet de supprimer l’aléa de longévité pour les deux parties et garantit une transaction équilibrée. LE CONTRAT MONETIVIA, UNE TRANSACTION VRAIMENT ÉTHIQUE Le Contrat Monetivia se veut aussi résolument éthique. En effet, dans cette formule, l’acheteur ne parie plus sur le décès du vendeur. Il cherche simplement à acheter un bien occupé et accepte fort logiquement de le payer plus cher s’il le récupère plus rapidement. Car Monetivia l’a bien compris : la plupart des investisseurs en immobilier sont tout simplement des êtres rationnels, qui ne souhaitent pas le décès rapide de leur prochain.
Le Contrat Monetivia permet d’ajuster le prix de vente en fonction de la durée réelle d’occupation du bien par le vendeur. C’est une solution sécurisée et éthique.
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d’électriques, la grande berline coréenne fait de l’efficience énergétique sa ligne de conduite… quitte à rompre avec les codes du design. Par Lionel Robert
Ne vous fiez pas à sa clé de contact semblant sortie du coffre à jouets d’un enfant : la Ioniq 6 s’adresse bien aux adultes, et même aux plus matures d’entre eux. Ceux capables d’endurer les moqueries que ne manque pas de susciter le physique déroutant de cette longue berline (4,85 m) à la poupe plongeante et à l’aérodynamique époustouflante (Cx de 0,21). Se détourner du SUV, il fallait oser… et Hyundai l’a fait, avec l’objectif atteint de devenir la voiture électrique la plus performante du moment en matière de consommation. Si la fluidité de sa silhouette lui permet d’afficher une sobriété record, la coréenne peut aussi compter sur ses rétroviseurs caméras, son chauffage par pompe à chaleur, les cinq modes du système de récupération d’énergie au freinage et la belle capacité de sa batterie (77 kWh) pour affronter les longs parcours. Dotée d’une technologie 800 V, comme Porsche et Audi, lui offrant une puissance de charge maxi de 239 kW, elle récupère jusqu’à 350 kilomètres d’autonomie en un quart d’heure ! Tonique et dynamique, cette Ioniq fait vite oublier son gabarit. Moins prévenante pour les lombaires, elle sait recevoir (dalle numérique géante pour le conducteur, habitabilité royale aux places arrière) et fait largement appel à des matériaux biosourcés comme la canne à sucre, le colza ou le bambou. Le coffre peu pratique (401 litres) et l’alerte de dépassement de vitesse autorisée, qui se déclenche au premier km/h dépassé, ne parviennent pas à gâcher la fête… provoquée par le déplacement télécommandé de la voiture à distance via la fameuse clé. C’est l’engin le plus clivant du moment. PARIS MATCH DU 9 AU 15 MARS 2023
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BMW I7 DU GRAND (7e) ART
La première vraie limousine 100 % électrique, c’est elle. Si elle en a le gabarit (5,39 m), la BMW i7 en offre les prestations mécaniques via ses deux moteurs cumulant 544 ch, son énorme batterie de 101,7 kWh, son autonomie supérieure à 600 kilomètres et le luxe escompté d’un tel carrosse. L’ouverture électrique des portières et les courts déplacements sans personne au volant, on connaissait, mais un tel écran (31,3 pouces) aux places arrière, c’est du jamais-vu. À l’abri des regards derrière les stores latéraux, la tête lovée dans le coussin d’appui-tête, les jambes soutenues par l’assise rallongée, le passager se sent comme au cinéma. La coquetterie et ses 39 HP ne vous coûteront « que » 11 800 € de plus.
À partir de 139 900 €, 0 € (bonus), 544 ch, vitesse max. 240 km/h, 4,7 s (0 à 100 km/h), 18,4 kWh/100 km, 625 km (autonomie WLTP).
SCPI DES RENDEMENTS EN HAUSSE POUR 2023 L’indexation des loyers sur l’inflation devrait favoriser une appréciation des dividendes servis. Quatre millions d’épargnants ont choisi ces placements. Les sociétés civiles de placement immobilier (SCPI) ont enregistré des rendements stables, voire en légère hausse, en 2022. Le taux de distribution, indicateur qui permet de mesurer la rentabilité de ces fonds immobiliers sur l’année écoulée, s’est établi à 4,53 % en moyenne, contre 4,49 % en 2021, selon l’Aspim, l’Association française des sociétés de placement immobilier et de l’Institut de l’épargne immobilière et foncière (IEIF). « Hors fiscalité étrangère payée pour le compte des associés, les SCPI ont affiché un rendement de l’ordre de 4,40 %, assez conforme à celui des années précédentes, observe Pierre Garin, d i re c t e u r d u p ô l e immobilier de Linxea. Le taux de rendement sur les loyers perçus est d’environ 4 %, le solde correspondant à des distributions de plusvalues. D’un côté, on pourrait regretter que les SCPI soient obligées de vendre des actifs pour maintenir des performances correctes, mais de l’autre on peut se féliciter que les gérants soient proactifs dans la gestion de leur parc, 2022 ayant été une bonne année pour acter des plus-values. » Pour JeanChristophe Antoine, président d’Atland Voisin, les épargnants doivent se plonger dans les comptes des SCPI avant de souscrire des parts, afin de déterminer leur capacité de distribution. « Il faut analyser ce qui relève des plus-values et du résultat courant, plaidet-il. Une SCPI achète des immeubles, perçoit des loyers, paye des charges pour votre compte. Combien ce loyer net de charges vous rapporte-t-il ? » Prime à la diversification Comme en 2021, les SCPI diversifiées ont servi les meilleurs rendements, avec un taux de distribution moyen de 5,63 %. « Le choix des gérants de mener une stratégie oppor-
Coordination Loïc Grasset
tuniste sur plusieurs territoires, plusieurs catégories d’actifs et plusieurs secteurs d’activité porte ses fruits », analyse Pierre Garin. Les quatre millions d’épargnants détenteurs de parts de SCPI n’ont pas encore pleinement profité de la protection offerte contre l’inflation sur les revenus servis, les loyers étant indexés sur l’inflation. « Cet effet a plutôt joué en fin d’année et il dépend du taux d’occupation de chaque SCPI, avertit Jean-Christophe Antoine. Si celui-ci décline, vous percevrez moins de revenus. » « L’indexation sur l’inflation va se traduire dans les revenus encaissés par les SCPI en 2023, et elle sera visible
« LES STRATÉGIES DIVERSIFIÉES SUR PLUSIEURS TERRITOIRES ET SECTEURS D’ACTIVITÉ PORTENT LEURS FRUITS » PIERRE GARIN, directeur pôle immobilier de Linxea dans les dividendes distribués », annonce Jean-Marc Coly, président de l’Aspim. Ajustements de prix En revanche, Jean-Marc Coly se montre plus prudent sur la valorisation des SCPI, dans un contexte de remontée des taux d’intérêt. « Des ajustements de valeurs ont déjà eu lieu fin 2022, constate-t-il. Certains secteurs sont protégés des ajustements de prix, comme la santé ou le tourisme. La situation est plus compliquée pour des immeubles de bureaux situés dans des zones peu porteuses. » Les SCPI disposent toutefois de marges de manœuvre : « Les trois quarts sont décotées, elles présentent des valeurs de reconstitution [montant nécessaire pour reconstituer la SCPI à l’identique] supérieures aux prix de part, explique Pierre Garin. Si les valeurs d’expertise devaient baisser de 0 % à 2 %, elles ne seraient pas dans l’obligation d’ajuster leur prix de part. »
FONDS IMMOBILIERS PERFORMANCES CONTRASTÉES
PLACEMENT
VIVRE
Les sociétés civiles souscrites en tant que supports en unités de compte immobilières dans le cadre de l’assurance-vie et des plans d’épargne retraite ont affiché une performance globale de 3,7 % en moyenne en 2022, comparable à celle de 2021 (3,8 %), d’après l’Aspim et l’IEIF. En revanche, celle des organismes de placement collectif immobilier grand public s’établit à –3,48 % (contre +4,4 %), pénalisée par la contribution négative des actifs financiers et des foncières cotées en Bourse.
CROWDFUNDING IMMOBILIER PROFITS SUPÉRIEURS À 9 % C’est une forme de financement participatif qui contribue au financement d’opérations de marchands de biens (achatrevente) et de promotion immobilière. Le crowdfunding a affiché un rendement annualisé de 9,4 % en 2022, contre 9,1 % en 2021, sachant que la durée moyenne des placements est de 21,4 mois, selon le baromètre annuel établi par Financement participatif France et Mazars. Les plateformes ont collecté un montant record de 1,607 milliard d’euros en 2022, en hausse de 40,2 % par rapport à 2021.
LIVRET A
9,27 MILLIARDS D’EUROS Selon la Caisse des dépôts et consignations, les Français ont mis de côté 9,27 milliards d’euros sur leur livret A en janvier, juste avant la revalorisation du taux de rémunération de 2 % à 3 % au 1er février. C’est le montant mensuel le plus élevé jamais constaté depuis 2009, année de la libéralisation du marché du livret A à l’ensemble des banques. En incluant le livret de développement durable et solidaire, le montant déposé culmine à 11,22 milliards d’euros. . DU 9 AU 15 MARS 2023 PARIS MATCH
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SANTÉ
VIVRE
« IL EST IMPORTANT D’ÊTRE EN PHASE AVEC SON HORLOGE INTERNE ET DE RESPECTER LES HORAIRES DES REPAS DANS LA PARTIE LA PLUS ACTIVE DE LA JOURNÉE » David Jacobi, professeur en nutrition à l’Institut du thorax, service d’endocrinologie, diabétologie et nutrition, hôpital Nord-Laennec, CHU de Nantes
RÉGIME OU JEÛNE CONSÉQUENCES ET BÉNÉFICES Quelles sont les différences entre la restriction calorique et le jeûne intermittent, aujourd’hui à la mode ? Explications. Par le docteur Philippe Gorny Paris Match. Que se passe-t-il physiologiquement en cas de restriction calorique absolue ? Pr David Jacobi. Diverses adaptations indispensables à la survie se mettent en place pour apporter de l’énergie aux cellules. 1. Le glucose, premier carburant, est d’abord libéré par le foie à partir du glycogène. Cette petite réserve (200 grammes) s’épuise en un jour, obligeant le recours à d’autres sources. 2. Une synthèse de glucose (néoglucogenèse), principalement hépatique, apparaît dès la douzième heure. Elle utilise les réserves en graisses, mais aussi les acides aminés des protéines, ce qui entraîne une fonte musculaire. 3. Du fait de la pénurie en glucose, le taux d’insuline diminue et la consommation des graisses (lipolyse) s’accélère. Elles sont un réservoir d’énergie considérable (plus de 10 kilos, même chez une personne mince). Dans le foie et les muscles, les acides gras deviennent des corps cétoniques, un carburant de substitution pour l’organisme, surtout pour le cerveau, qui permet d’épargner le glucose restant. La dépense énergétique de repos parvient alors à se stabiliser à 60 % de sa valeur de départ. Une personne bien hydratée et en bonne santé peut ainsi survivre à une restriction calorique stricte et continue pendant quarante jours en moyenne, une capacité héritée de nos plus lointains ancêtres qui devaient parfois rester plusieurs jours sans manger.
Quelles sont les différences entre restriction partielle et jeûne intermittent ? L’impact sur la santé d’une restriction partielle de 20 % à 40 % des apports quotidiens, tout en évitant la dénutrition, a été testé. Chez l’animal, elle entraîne une perte de poids, améliore le métabolisme et augmente PARIS MATCH DU 9 AU 15 MARS 2023
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la longévité de certains modèles observables en laboratoire (souris, mouches, nématodes). Chez l’homme, les plus longues études ne dépassent pas deux ans. L’une d’elles, très récente et de qualité, avec plus de 200 participants (publiée dans “Science”), a montré qu’une restriction de 14 % produit des effets anti-inflammatoires, régénérateurs et stimulateurs de l’immunité, positifs sur les marqueurs du risque cardio-vasculaire, une perte de poids et une baisse du stress oxydant sur l’ADN. Cependant, chez l’humain, elle stimule l’appétit et reste quasi intenable sur la durée, expliquant les habituels échecs des régimes dont l’objectif est une perte de poids (rebonds, effets yoyo). D’où l’idée très à la mode du jeûne intermittent de douze heures, seize heures par jour (rarement davantage car il s’agit ici d’augmenter la durée du jeûne nocturne), qui est une restriction totale transitoire et non plus partielle et continue. Des études soulignent l’importance d’être en phase avec son horloge interne et de respecter les horaires des repas, ce qui n’oppose pas restriction partielle et jeûne intermittent qui, dans ce cadre, peuvent être complémentaires. Exemple : la restriction calorique seule accroît la longévité des souris de 10 % et de 35 % si elle est associée au jeûne intermittent. Chez les personnes en surpoids, la prise d’un petit déjeuner vers 9 heures optimise la régulation des hormones de l’appétit (incrétines, ghréline, peptide YY du tube digestif, leptine du tissu graisseux) et améliore leur profil métabolique. Une bonne répartition temporelle des repas – petit déjeuner matinal, déjeuner vers 12-13 heures, dîner terminé au moins deux heures avant l’endormissement – est plus bénéfique sur le plan métabolique qu’une prise plus tardive des trois repas.
STATINES RISQUE D’HÉMORRAGIE CÉRÉBRALE RÉDUIT Une étude danoise a comparé plus de 2 000 sujets des deux sexes âgés de 55 ans et plus victimes d’une hémorragie cérébrale à des témoins d’âges semblables. Une dose modérée de statine (prescontre l’hyperchoPRÉVENTION crite lestérolémie) a réduit le risque d’hémorragie de 11 % à 12 % au bout d’un an et de 33 % à 38 % au bout de cinq ans, plus ou moins nettement selon les traitements associés (anticoagulants, antihypertenseurs). Une dose forte de statine n’ajoute rien.
COVID 19 LE VACCIN POUR TOUS N’EST PLUS UTILE Selon la Haute Autorité de santé, la population générale n’aurait plus besoin de rappels qui ne restent recommandés que pour les personnes vulnérables : les plus de 65 ans, les femmes enceintes et les porteurs de comorbidités quel que soit leur âge.
Quel serait l’impact de la restriction sur la longévité humaine ? Aucune étude de ce type n’est réalisable chez l’humain. Nous savons seulement que : 1. Certaines populations (Okinawa, Japon, par exemple), dont l’alimentation est peu calorique, comptent de nombreux centenaires et ont une incidence réduite de cancers et de maladies cardio-vasculaires. 2. L’autophagie, processus naturel de régénération et de protection des cellules contre le stress (Christian de Duve, Prix Nobel de médecine 1974), est activée par le jeûne mais aussi par le respect des rythmes circadiens. 3. Une défaillance de ce mécanisme (Yoshinori Ohsumi, Prix Nobel de médecine 2016) favorise l’apparition de maladies (cancer, diabète, neurodégénérescences...). Voilà où nous en sommes.
C’EST LE MOMENT DE PENSER À FAIRE LE DÉPISTAGE DU CANCER COLORECTAL. Détecté tôt, c’est-à-dire avant tout symptôme, le cancer colorectal se guérit 9 fois sur 10. Alors n’attendez pas pour faire ce dépistage. Vous vous en remercierez. Le dépistage du cancer colorectal, c’est tous les 2 ans pour les hommes et les femmes de 50 à 74 ans.
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LES ARCHIVES DE
Son record, 13 buts marqués lors de la Coupe du monde de football en 1958, reste inégalé. Meilleur buteur de l’histoire du Stade de Reims, Just Fontaine, décédé le 1er mars à l’âge de 89 ans, entraînera brièvement l’équipe de France puis le PSG avant de diriger la sélection nationale du Maroc, où il était né en 1933. Sa carrière de joueur aura duré une décennie, mais ses performances ont fait de lui un mythe. En marquant treize fois en seulement six matchs lors de la Coupe du monde 1958 en Suède, où la France finira troisième, l’attaquant a battu le record absolu pour une seule édition.
Just Fontaine L’INVINCIBLE « MONSIEUR 13 BUTS »
Le 19 juin 1958, dans la ville suédoise de Norrkoping, l’équipe de France vient de remporter le quart de finale de la Coupe du monde face à l’Irlande du Nord. Raymond Kopa, Roger Piantoni et Just Fontaine sont portés en triomphe.
Pour Pelé, il était « Justo, le meilleur joueur », un grand frère d’armes Just Fontaine, Raymond Kopa et Roger Piantoni, une attaque de rêve. Si Kopa a été élu Ballon d’or et meilleur joueur du tournoi, c’est bien Fontaine qui a marqué l’histoire de cette Coupe du monde.
L’attaquant en pleine action pendant le match amical Autriche-France, joué le 5 octobre 1958 à Vienne, et que la France gagna 2-1.
LES ARCHIVES DE Le 9 juin 1960, lors du Tournoi de Paris, Pelé dédicace le plâtre de Just Fontaine, victime le 20 mars de la même année d’une double fracture à la jambe gauche lors d’un match contre Sochaux.
Sélectionné 21 fois en équipe de France, il remportera quatre titres de champion de France entre 1956 et 1962, un avec l’OGC Nice puis trois avec le Stade de Reims, dont il restera un joueur emblématique.
Just Fontaine avec sa compagne, lors de la Coupe du monde 1958.
Le 15 juin 1958, avec le défenseur André Lerond (à dr.), dans les vestiaires, après la victoire de la France contre l’Écosse.
Chez lui, le 18 décembre 2001, avec le numéro 481 de Paris Match publié le 28 juin 1958, dont la couverture lui est consacrée. À dr., avec son « double » de carton.
Pendant trentecinq ans, il se retire chez lui, au numéro 13 d’une petite rue de Toulouse Le 17 juin 1958, durant la Coupe du monde en Suède, Just profite d’une journée de repos pour se rendre à la pêche.
Par Patrick Mahé Offrant son éternel sourire et pointant l’index vers Just Fontaine, Pelé s’exclame de sa voix de bronze : « Aucun autre joueur ne marquera autant de buts que lui lors d’une Coupe du monde ! » Nous sommes à l’embarquement d’un vol Air Austral qui nous ramène de Mar del Plata vers Buenos Aires, pendant la Coupe du monde 1978. Si l’équipe de France de Michel Platini a ouvert le score, elle est tout de même sortie battue (2-1) par l’Italie de Paolo Rossi. Aussi, devant les quelques Français cheminant, tête basse, sur le tarmac, Pelé, idole universelle et consolateur du jour, répète à l’envi : « Justo, o melhor jogador » (Justo, le meilleur joueur). Le serrant dans ses bras, il lui offre une accolade digne des grands frères d’armes. Vingt ans plus tôt, en Suède, Fontaine avait marqué 13 buts dont 1 à la Seleção des Didi, Vava, Garrincha et du jeune Pelé (17 ans), qui n’oubliera jamais le dribble victorieux du Français sur le gardien Gilmar, aussi réputé pour sa main de fer que pour ses solides appuis. Alors reporter au « Journal du dimanche », Dominique Grimault, mon voisin de cabine, s’empressa de griffonner la prédiction du « roi ». Quarante-quatre ans et onze Mondiaux plus tard, elle n’a toujours pas été démentie. Pourquoi ? Si d’autres noms brillent au sommet des meilleurs buteurs, ils doivent leurs records à l’addition de plusieurs participations, comme pour l’Allemand Klose, avec 16 buts en quatre poules finales, ou pour le Portugais Ronaldo, qui aligna 15 buts mais en quatre Mondiaux. Comme l’avait soutenu Pelé, seul Fontaine aura pu revendiquer l’invincible record, soit 13 buts en une seule Coupe du monde ! Ironie de l’Histoire, Justo, dont le « 13 » restera gravé au cœur, n’aurait pas dû disputer ce tournoi. Sans les blessures de Cisowski, attaquant du Racing Club de Paris, et de Bliard, qu’il avait rejoint de Nice à Reims, Fontaine n’aurait tenu qu’un second rôle dans une sélection à laquelle la Fédération (FFF) elle-même ne croyait pas. Signe des temps, il dut même emprunter les chaussures à crampons d’un remplaçant, Bruey, et porter un numéro de queue
LES ARCHIVES DE
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de peloton, le 17, à la place du 9 traditionnel de l’avant-centre. Pour les Français, après ses trois buts face au Paraguay et deux passes décisives pour Kopa – un récital –, cette Coupe du monde ne démarre qu’à partir des quarts de finale. On ne compte alors que 1 million de téléviseurs en France et les amateurs de foot se massent devant les vitrines des marchands de télévisions. Impossible, dans ces conditions, de savourer les commentaires de Jacques Sallebert, la voix de la RTF, s’époumonant pour saluer les deux buts de Justo face à l’Irlande du Nord. Fontaine fait un retour en fanfare, invité à pousser la chansonnette sur 45-tours. D’une voix de velours, il interprète alors un ardent « Vas-y, Fontaine ». Mais l’ombre guette derrière la lumière. Lors d’un Reims-Sochaux en 1960, il est victime d’un « véritable attentat », crampons en avant, et termine avec une double fracture tibia-péroné. Rebelote huit mois plus tard, à Limoges, et nouvelle fracture. Ainsi, le rideau se referme-t-il, brutalement, sur sa carrière. À 27 ans seulement ! Au-delà des buts par dizaines, des sélections et des titres par poignées en club, il entraîne brièvement l’équipe de France en 1967, avant de faire monter le Paris Saint-Germain en première division. Pendant trente-cinq ans, il se retire chez lui, au numéro 13 – chiffre mythique pour le « 13 fois Juste », comme le qualifiera Daniel Picouly* – d’une petite rue de Toulouse. En 2016, la ville d’adoption de ce natif de Marrakech (à l’époque du protectorat français) donnera son nom à une tribune du Stadium. Son ancrage en Occitanie doit tout à Arlette, son épouse, originaire de la région – soixante-deux ans de mariage. Au matin du décès de Justo, elle révéla à Jean-Claude Darmon, l’ex-argentier du foot français : « Son dernier chagrin remonte au 29 décembre 2022. Il venait d’apprendre la mort de Pelé ! »
* Daniel Picouly, « Le 13e but », éd. Hoëbeke. Pour toute question sur nos archives ou pour vous procurer d’anciens numéros, contactez-nous : [email protected].
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DU 9 AU 15 MARS 2023 PARIS MATCH
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JEUX
MOTS CROISÉS
SUDOKU
Par David Magnani
PROBLÈME N° 3853 1
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13
NIVEAU : DIFFICILE
Complétez la grille avec les chiffres de 1 à 9 de façon à ce qu’ils n’apparaissent qu’une seule fois dans chaque rangée, chaque colonne et chaque carré de neuf cases.
I
COUP DE POUCE
II
Une grille assez compliquée. On inscrit les 4 et 5 ainsi que les 2 et 3. Les 7 s’offrent en partie et les 6 sont à répartir, d’ailleurs on en libère quelques-uns. Les 1 et 9 vont suivre. On s’occupe maintenant des 8 ce qui libérera des 7 et des 3. On libère les chiffres isolés de la grille, une fois celle-ci complétée de tous ses chiffres. C’est la clef du succès.
III IV V VI VII VIII IX
HORIZONTALEMENT I. Fait du commerce par la voie des airs. II. Baie de Malaga. Poudre à éternuer. III. Ont donc été bien notés. Zèbre à deux pattes. Porteurs de cadavres. IV. Margarita antillaise. Mal dans la peau. V. Marque un but. Finale du premier groupe. Charge de cartouche. VI. Prendre des engagements. Mine de pierres précieuses. VII. Incitation à se mettre en grève. Finit bêtement une histoire d’amour. Coin de l’œil. VIII. Solaire ou dans l’air selon l’accent. Peaux à poils. IX. Il tourne en rond dans sa cage. Invitation à passer à table. VERTICALEMENT 1. Pas sur la liste rouge. 2. L’intelligence d’une puce. Des œufs au citron. 3. De l’or qui peut s’imposer. 4. Bavarois proche des religieuses. C dans l’air en Angleterre. Répété par un enfant. 5. A cours en Belgique et en France. Monnaie courante au Cambodge. 6. Au cœur de l’Etna. A subi quelques frottements bénéfiques. 7. Niveau à bulle. Espace entre deux lisières. 8. Chapeaux de pailles. Faut être bête pour crier comme ça. 9. Pressent le citron. 10. Représente une distance astronomique. Postes d’écoute. 11. Homme de la terre en Bretagne. Bœuf avant la charrue. 12. Avoir une autre éruption de boutons. 13. Très prises par les affaires.
SOLUTION DU PROBLÈME N° 3851 HORIZONTALEMENT I. Poste d’essence. II. Aspirateur. IP. III. RFI. Ex. Indu. IV.Coi. Cétoine. V. Huns. Sels. Yes. VI. Waterproof. Va. VII. Ôte. OE. Gluten. VIII. Ré. Ébrouement. IX. Kérosène. Epte. VERTICALEMENT 1. Patchwork. 2. Os. Ouatée. 3. Sprinte. 4. Tif. S.E. EO. 5. Éric. Robs. 6. Da. Espère. 7. Étêter. On. 8. Sexologue. 9. Su. Isolé. 10. Érin. Fume. 11. Ney. TEP. 12. Cid. Évent. 13. Épuisante.
Solution dans notre prochain numéro impair. PARIS MATCH DU 9 AU 15 MARS 2023
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Solution de cette grille sous notre prochain sudoku.
7 1 2 8 5
3 6 5 3
8 2 9 4 1 5 9 2 4 6 3 7 2 1 5 8 2
SOLUTION DU SUDOKU PRÉCÉDENT
5 1 9 3 6 4 7 8 2
8 6 7 2 9 1 4 5 3
2 3 4 5 7 8 9 6 1
4 9 8 6 1 3 5 2 7
1 7 2 9 8 5 3 4 6
6 5 3 4 2 7 1 9 8
7 2 1 8 5 9 6 3 4
3 8 5 1 4 6 2 7 9
9 4 6 7 3 2 8 1 5
SOLUTION DES ANACROISÉS N° 1099 HORIZONTALEMENT : 1. Thermale 2. Squares 3. Chahuter 4. Revoir 5. Tréteau 6. Arasera 7. Sicilien 8. Liftiers 9. Olfactif 10. Dirigeât (digérait) 11. Transis (nissart) 12. Etêtage 13. Chenapan 14. Variance 15. Zarabes (abrasez) 16. Tantième 17. Encavées 18. Egalera 19. Suspect 20. Réunion 21. Gondoler 22. Inspecté (pectines) 23. Rhénanes 24. Saucer (causer, creusa, écuras, récusa, sucera) 25. Agonie 26. Insuccès 27. Bénéfice 28. Indexé 29. Duettos 30. Gîterai (tigerai) 31. Snobées 32. Eutocies 33. Tuantes (sautent, tunâtes) 34. Gamelle 35. Sismique 36. Osselet 37. Aérobie 38. Ubuesque 39. Peaufiner 40. Dravera 41. Ursuline 42. Pulseras 43. Tripper 44. Guibolle 45. Sédums 46. Penderies (dépensier) 47. Cavistes 48. Kassites 49. Notation 50. Niaméyen 51. Lessiveur (livreuses) 52. Obvenir 53. Liements 54. Terroirs 55. Arénacés (acensera) 56. Slovaque 57. Hanoïens 58. Lusitain (insultai, lutinais) 59. Rieuse 60. Rodoir 61. Essuyage 62. Tissâtes 63. Vénéneux. VERTICALEMENT : 64. Trapèzes 65. Abrivado 66. Pelisse (plissée) 67. Héritage 68. Geôlier 69. Gémellés 70. Evasera 71. Ionisera (noierais) 72. Unissons 73. Talonnés 74. Ovoïdes 75. Abessif 76. Imberbe 77. Arroger 78. Peignoir 79. Alésage 80. Deadline 81. Octette 82. Aléoute 83. Tractant 84. Semestre 85. Richarde 86. Extenso 87. Inanité (niaient) 88. Acterait (écartait) 89. Eteint (entité, teinte, tétine, tintée) 90. Lendits 91. Epiaison 92. Faiseuse 93. Votions 94. Peureux 95. Sibyllin 96. Quidams 97. Quasis 98. Cinéparc 99. Nouement 100. Hexoses 101. Envasée 102. Livèches 103. Quassier 104. Exigent 105. Déboursé (brodeuse) 106. Aqueuses 107. Diminué 108. Navarin (nirvana) 109. Ululeras 110. Tavèlent 111. Péplum 112. Réussite (resitués, tireuses, trieuses) 113. Skeleton 114. Haïtien (hiaient) 115. Bougeant 116. Anisade (naïades, saadien) 117. Frasils 118. Statuer (stature, tâteurs) 119. Simonie (émiions, ionisme, nîmoise) 120. Inconnus 121. Imprimer 122. Thèses 123. Ecobilan 124. Patinée 125. Artériel (râtelier) 126. Elément 127. Ressaie (arisées) 128. Resserrer 129. Session (sissone).
Ça devait arriver. Avec la tendance transgenre, travesti, pansexuel et toutes les déclinaisons du sexe et du sexy, la jupe se convertit à toutes les religions. Surtout la religion masculine. Où l’on s’aperçoit que la jupe crayon, emblème traditionnel de l’érotisme féminin en stilettos, eh bien, ce tube étudié pour mouler les hanches, flatter la jambe et la cambrure peut dégager quelque chose de furieusement viril. Sans les rondeurs, sans les jeux de courbes mais avec des angles, des aspérités, une sorte de rudesse musculeuse sous le fourreau. La jupe plissée ? Même sensation. Cette tenue si classique, fi nement promue par Dior et Prada « faussebourgeoise-grenouille-de-bénitier », eh bien, couvrez des hanches mâles de son plombant, et la voilà soudain qui clignote d’un je-ne-sais-quoi de cachotteries coquines. Voyez le kilt écossais, à la fois guilleret et majestueux. Ainsi drapé, même « King Charles » en devient sexy. Oui, rien de plus excitant que ces plis lourds protégeant on ne sait quelle lingerie – ou aucune lingerie, that is the question – d’un assaut dans les Highlands. D’ailleurs, depuis la série
Par Catherine Schwaab
« Outlander », le charme de Sam Heughan lui doit beaucoup. Sam ? En bon Scotsman, il porte la jupe depuis des années. Son triomphe dans la série ne lui a pas seulement permis de lancer sa propre marque de whisky Sassenach, il a consacré ses kilts comme tenue incontournable qui s’adapte à toute circonstance, et pas seulement au combat sur son fringant destrier : sérieuse pour les duels au bureau, élégante en attaque aux soirées, solennelle aux mariages et aux enterrements. Et, bien sûr, ce blagueur irrésistible de Sam laisse planer le doute sur ce qu’il porte « under the garment ». Plus françaises que le kilt, il y a les jupes à pans, les jupes portefeuille, assez longues et couvrantes, comme chez Gucci et Fendi cette saison qui en imposent autant qu’elles en promettent. S’en dégage une sorte de force tranquille qui méprise l’épilation. Oui, l’idée n’est pas de singer les femmes, on l’a compris. Sachons virilité garder. Et cultiver le sous-entendu : la jupe en jette bien plus qu’un vulgaire jean moulant. Certains audacieux ont récemment osé la jupe boule. Il faut en avoir pour se le permettre ! Car, pour le coup, la rondeur souligne le décalage : ça fait barboteuse. Une émancipation radicale. Ils vous le disent tous (enfin, ceux qui aiment s’habiller) : ras le bol de la standardisation des fringues pour homme. Peu de couleurs, pas de fantaisie. Pour élargir le choix, éduquer le regard, rien de tel qu’une jupe. Pour tester son entourage aussi. Lisez les blogs des mecs en jupe, c’est passionnant. Où l’on découvre que les plus bornés, les plus intolérants sont les plus jeunes qui critiquent et ricanent. Tandis que les quadras, quinquas, octos... apprécient sans préjugé. Plutôt bluffés. Car, ne nous cachons pas la vérité : il existe un tabou autour de la jambe masculine. Et, bizarrement, arborer ainsi ses jambes semble plus impudique que sortir en caleçon. Au passage, montrer le début de la raie des fesses (poilues) en jean « bumster » ne semble pas gêner grand monde.
JUPE POUR HOMME
Sam Heughan dans la série « Outlander ».
DU 9 AU 15 MARS 2023 PARIS MATCH
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UNE AUTRE EXPÉRIENCE DE LA BANQUE PRIVÉE
A n n e cy I Antib es I Biarritz I B orde aux I Cannes I Grenob le I L il le Lyon I Marseil le I Montp el lier I Nantes I Neuil ly I Ni ce I P a ris R oue n I S aint- R aphaël I Str asb our g I Toulous e I Versa il les
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