Voler Comme Un Artiste (French Edition) by Austin Kleon [PDF]

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Zitiervorschau

À Boom — aussitôt que Boom sera là

TOUS LES CONSEILS SONT AUTOBIOGRAPHIQUES Selon moi, les gens qui nous prodiguent des conseils ne font rien d’autre que parler à la personne qu’ils étaient naguère. Dans ce livre, je m’adresse à une version antérieure de moi-même. J’y traite de ce que j’ai appris depuis près de dix ans sur la création artistique. Il s’est passé quelque chose d’amusant quand j’ai voulu transmettre mes constatations aux autres: j’ai compris qu’elles ne concernaient pas que les artistes. Elles touchent tout le monde. Ces idées intéresseront quiconque veut introduire un peu de créativité dans sa vie et dans son travail. (Nous tous, en fait.) En d’autres termes: ce livre est pour vous. Qui que vous soyez, quoi que vous fassiez. Allez, hop! C’est parti.

1. VOLEZ COMME UN ARTISTE

COMMENT OBSERVER LE MONDE (AVEC LES YEUX D’UN ARTISTE) Tous les artistes se font tôt ou tard poser cette question: «Où prenez-vous vos idées?»

S’il est honnête, l’artiste répond: «Je les vole.»

Quel regard un artiste pose-t-il sur le monde? D’abord, il faut savoir ce qui mérite d’être volé. Ensuite, on passe à l’étape suivante. C’est à peu près tout. Quand vous observez le monde de cette façon, vous ne vous demandez plus si c’est «bon» ou «mauvais», seulement si ça mérite – ou non – d’être volé. On peut tout voler. Si, aujourd’hui, vous ne trouvez rien qui en vaille la peine, vous trouverez quelque chose demain, dans un mois ou dans un an.

RIEN N’EST ORIGINAL Selon l’écrivain Jonathan Lethem, neuf fois sur dix, les gens qui qualifient une chose d’«originale» n’en connaissent ni la source ni les références. Un bon artiste sait que rien ne sourd de nulle part. Toute œuvre de création s’appuie sur ce qui l’a précédée. Rien n’est absolument original. C’est même dit dans la Bible: «Il n’y a rien de nouveau sous le soleil.» (Ecclésiaste 1,9) Cette idée, qui en démoralise plus d’un, me remplit d’espoir. Ainsi que l’affirme l’écrivain français André Gide: «Toutes choses sont dites déjà; mais comme personne n’écoute, il faut toujours recommencer.» Quand on se libère du fardeau de l’originalité absolue, on peut cesser de créer quelque chose à partir de rien et accepter de subir des influences au lieu de s’y soustraire.

LA GÉNÉALOGIE DES IDÉES Toute idée nouvelle est le résultat d’un collage ou d’un remixage d’idées anciennes. Dans cette devinette qu’on nous enseigne aux Beaux-Arts, il faut tracer deux lignes parallèles sur une feuille de papier:

Combien y a-t-il de lignes? Il y a la première ligne et la deuxième, mais aussi une troisième ligne en négatif située entre les deux premières. La voyez-vous? 1 + 1 = 3.

La génétique nous fournit un bon exemple de ce qui précède. Vous avez une mère et un père. Vous avez hérité certains traits de l’une et de l’autre, mais le tout que vous formez est plus grand que la somme de leurs parties. Vous êtes le produit du remixage de votre mère, de votre père et de tous vos ancêtres. Vous n’avez pas qu’une généalogie familiale, vous avez aussi une généalogie d’idées. Vous ne choisissez pas vos parents, mais vous pouvez choisir vos maîtres, vos amis, la musique que vous écoutez, les livres que vous lisez et les films que vous visionnez. À vrai dire, vous êtes un collage composé de tout ce que vous intégrez à votre vie. Vous êtes la somme des influences que vous

subissez. L’écrivain allemand Goethe a dit: «Ce que l’on aime nous façonne et nous modèle.»

TELLES ENTRÉES, TELLE SORTIE L’artiste est un collectionneur. Attention, je n’ai pas dit un amasseur. Il y a une différence: les amasseurs accumulent tout et n’importe quoi, les artistes choisissent ce qu’ils collectionnent. Ils ne gardent que ce qu’ils aiment vraiment. Une théorie économique veut que si l’on fait la moyenne des revenus de nos cinq meilleurs amis, le résultat sera très proche de notre propre revenu. Je crois que cette théorie s’applique aussi aux récoltes d’idées. On ne vaut pas mieux que ce dont on s’entoure. Ma mère me disait toujours «On récolte ce qu’on a semé», l’équivalent, pour sa génération, de l’axiome informatique GIGO, qui signifie «Telles entrées, telle sortie». Ça me mettait hors de moi. Maintenant, je comprends ce qu’elle voulait dire. Votre rôle consiste à collectionner de bonnes idées. Plus vous en aurez collectionné, plus vous pourrez choisir celles qui vous influenceront.

GRIMPEZ DANS VOTRE ARBRE GÉNÉALOGIQUE Marcel Duchamp a dit: «Je ne crois pas à l’art. Je crois aux artistes.» C’est là une excellente façon d’apprendre, car si vous essayez d’absorber en une seule fois la totalité de votre discipline, vous mourrez d’asphyxie. Faites-vous plutôt les dents sur un penseur, un écrivain, un artiste, un militant, un modèle de comportement, bref un maître que vous aimez beaucoup. Apprenez tout ce que vous pourrez découvrir sur lui. Ensuite, identifiez trois personnes que ce maître estimait et apprenez tout ce que vous pourrez découvrir sur elles. Refaites cet exercice aussi souvent que possible. Grimpez jusqu’au sommet de l’arbre. Quand vous aurez atteint son dernier rameau, faites pousser le vôtre.

Lorsqu’on s’assimile à une lignée de créateurs, on se sent moins seul au moment d’entreprendre une œuvre personnelle. J’ai suspendu aux murs de mon atelier les photos de mes artistes préférés. Penché sur mon bureau, j’ai parfois l’impression que ces fantômes bienveillants me poussent dans le dos. Les maîtres décédés ou vivant à distance ont ceci de bon qu’ils ne peuvent pas vous refuser comme apprenti. Puisez en eux tout ce qui vous intéresse. Leur plan de cours est inhérent à leur œuvre.

VOYEZ À VOTRE ÉDUCATION L’école est une chose. L’éducation en est une autre. Les deux ne coïncident pas toujours. Que vous fréquentiez ou non une institution d’enseignement, c’est toujours à vous qu’incombe la responsabilité de votre éducation. Vous devez vous intéresser au monde qui vous entoure. Renseignez-vous. Vérifiez la moindre référence. Fouillez toujours plus que tout le monde. C’est la seule façon de progresser. Googlez tout. Absolument tout. Googlez vos rêves. Googlez vos problèmes. Ne posez aucune question avant de l’avoir googlée. Si vous ne trouvez pas la réponse, vous trouverez une meilleure question. Lisez tout le temps. Fréquentez la bibliothèque. Être entouré de livres a quelque chose de magique. Furetez parmi les rayons. Consultez des bibliographies. Le plus important n’est pas le livre de départ, mais les autres livres auxquels il vous conduit. Collectionnez les livres, même si vous ne prévoyez pas les lire tout de suite. Le cinéaste John Waters a dit: «Rien n’est plus important qu’une bibliothèque de livres qu’on n’a pas lus.» Ne vous laissez pas intimider par la recherche. Contentez-vous de chercher.

CONSIGNEZ VOS RAPINES OUR USAGE FUTUR Munissez-vous en tout temps d’un carnet de notes. Prenez l’habitude de transcrire les idées qui vous viennent et vos observations. Copiez des passages de livres que vous aimez. Rapportez des conversations entendues au hasard. Griffonnez en parlant au téléphone. Faites l’impossible pour toujours avoir du papier sur vous. L’artiste David Hockney a fait adapter les poches intérieures de ses vestons au format d’un carnet à dessins. Le compositeur et musicien Arthur Russell aimait que ses chemises aient deux poches sur le devant, car il les remplissait de fragments de papier à musique. Créez un fichier de rapines. Vous avez bien lu: un fichier où vous conservez la trace de ce que vous avez dérobé aux autres. Fichier numérique ou fichier analogique? Peu importe, du moment qu’il fonctionne. Ce peut être un album dans lequel vous collez des images ou un fichier de votre phototéléphone. Vous apercevez quelque chose qui vaut la peine d’être volé? Glissez-le dans le fichier de rapines. Vous avez besoin d’inspiration? Ouvrez votre fichier de rapines. Les journalistes appellent ça une «morgue» (ou un «frigo»). C’est encore mieux. La morgue est l’endroit où vous entreposez les choses mortes que vous ressusciterez plus tard dans votre œuvre.

2. N’ATTENDEZ PAS DE SAVOIR QUI VOUS ÊTES POUR COMMENCER

CRÉE, ET CONNAIS-TOI TOIMÊME Si j’avais attendu, pour «être créatif», de savoir qui je suis ou ce qui me motive, eh bien, je serais encore là à me décortiquer au lieu de mettre des choses au monde. Selon mon expérience, c’est dans la création et le travail que l’on découvre qui l’on est. Vous êtes prêt. Commencez à faire des trucs.

Vous avez sans doute peur de vous lancer. C’est normal. Les personnes instruites souffrent d’un mal très réel et très répandu: le «syndrome de l’imposteur». D’un point de vue clinique, ce syndrome est un phénomène psychologique qui pousse certaines personnes à nier la propriété de leurs accomplissements personnels. Autrement dit, vous avez l’impression d’être un charlatan, d’improviser, de ne pas vraiment savoir ce que vous faites. Figurez-vous qu’aucun de nous ne sait ce qu’il fait. Posez la question à n’importe quel créateur et il vous dira l’exacte vérité: il ignore d’où ça vient. Tout ce qu’il sait, c’est qu’il s’attelle à la tâche. Chaque jour.

FAITES SEMBLANT JUSQU’À CE QUE VOUS RÉUSSISSIEZ Savez-vous ce qu’est la dramaturgie? Ce mot savant désigne ce que William Shakespeare a expliqué il y a 400 ans dans sa pièce Comme il vous plaira: Le monde entier est un théâtre Où tous – les hommes, les femmes – sont de simples acteurs. Ils y ont leurs entrées, leurs sorties, et chacun Joue bon nombre de rôles dans sa vie.

Autrement dit: Faites semblant jusqu’à ce que vous réussissiez. J’adore cette phrase. On peut la lire de deux façons: 1. Feignez d’être ce que vous n’êtes pas encore jusqu’à ce que vous le deveniez – faites semblant jusqu’à ce vous ayez du succès, jusqu’à ce que chacun vous perçoive tel que vous souhaitez être perçu; ou 2. Feignez d’accoucher de quelque chose jusqu’à ce que vous en accouchiez pour vrai. J’aime chacune de ces interprétations: il faut enfiler le costume du personnage que l’on veut être et non pas celui du personnage que l’on est, et il faut entreprendre tout de suite le travail auquel on aspire. J’aime aussi le livre pour enfants de la musicienne Patti Smith, Just Kids. Il raconte l’histoire de deux amis partis vivre à New York parce qu’ils veulent devenir artistes. Savez-vous comment ils s’y prennent?

Ils font semblant de l’être. Dans ma scène préférée, celle qui donne son titre au livre, Patti Smith et son ami, le photographe Robert Mapplethorpe, enfilent leurs fringues au look le plus romantique et bohême qui soit et vont flâner au parc Washington Square, le rendez-vous de l’avant-garde artistique. Un vieux couple de touristes les regarde comme des bêtes curieuses. La femme dit à son mari: «Prends-les en photo. Ce sont sûrement des artistes.» Le mari n’est pas d’accord: «Mais non. Ce ne sont que des enfants.» Je veux dire par là que le monde entier est un théâtre. Le travail créateur est une forme de théâtre dont votre atelier, votre bureau ou votre poste de travail est la scène. Les vêtements que vous portez sont votre costume: votre salopette de peintre, votre costumecravate ou ce curieux chapeau qui vous aide à penser. Vos

matériaux, vos outils, vos instruments sont vos accessoires. Le temps qui passe est votre scénario. Une heure par-ci, une heure par-là – le temps qui permet aux choses de se réaliser. Faites semblant jusqu’à ce que vous réussissiez.

COMMENCEZ À IMITER Personne ne naît avec un style et une voix déjà formés. Nous ne savons pas qui nous sommes en naissant. Nous commençons notre apprentissage en imitant nos idoles. Nous apprenons en copiant. C’est d’entraînement qu’il s’agit, non de plagiat. Le plagiaire veut faire passer pour sien le travail de quelqu’un d’autre, tandis que la copie est une forme de rétroingéniérie: imaginez un mécanicien qui démantèle une voiture pour savoir comment elle fonctionne.

Nous apprenons à écrire en copiant l’alphabet. Les musiciens apprennent à jouer en faisant des gammes. Les peintres apprennent à peindre en reproduisant les œuvres des grands maîtres. N’oubliez pas ceci: même les Beatles ont commencé leur carrière en tant que groupe de reprise. Paul McCartney a dit: «J’imitais Buddy Holly, Little Richard, Jerry Lee Lewis et Elvis. C’est ce que nous faisions tous.» McCartney et son partenaire John Lennon sont devenus l’une des plus grandes équipes d’auteurs-compositeurs de l’histoire, mais ainsi que nous le rappelle McCartney, ils ont commencé à écrire leurs propres chansons «pour éviter que d’autres groupes leur piquent leur répertoire». «Ceux qui n’imitent rien ne produisent rien», affirme Salvador Dalí. Il faut d’abord choisir qui imiter. Ensuite, on choisit ce qu’on copiera. Choisir qui imiter est facile. On imite ses idoles – les gens qu’on estime, ceux qui nous inspirent, ceux que l’on voudrait être. «On commence par récrire le catalogue des œuvres de notre idole», dit l’auteur-compositeur Nick Lowe. On ne se contente pas de chaparder le matériel de nos modèles, mais celui de tous les autres aussi. Selon l’écrivain Wilson Milzner, copier un seul auteur est du plagiat, mais en copier plusieurs est de la recherche. J’ai un jour entendu le bédéiste Gary Panter dire ceci: «Si vous vous imbibez de l’influence d’Untel, tout le monde verra en vous le prochain Untel. Mais si vous piquez les œuvres de cent personnes, tout le monde vantera votre originalité!» Que copier? C’est un peu plus délicat. Faites plus qu’imiter un style. Puisez aussi dans la pensée qui lui a donné naissance. L’important n’est pas de ressembler à votre idole, mais d’adopter son point de vue.

Copiez votre idole et son style pour parvenir à lire un peu dans ses pensées. Intériorisez sa façon de voir la vie. Si vous vous contentez de pasticher les aspects extérieurs d’une œuvre sans savoir ce qui a motivé son créateur, votre travail ne sera rien de plus qu’une contrefaçon de bas de gamme.

IMITER N’EST PAS HONORER

Il faudra qu’un jour vous cessiez d’imiter vos idoles pour devenir leur émule. Imiter, c’est copier. Être l’émule de quelqu’un, c’est faire un pas de plus et s’engager dans sa propre voie. «Aucune action n’est nouvelle.» L’étoile du basketball Kobe Bryant a admis avoir étudié des enregistrements de ses idoles pour décortiquer leurs actions et les leur voler. Mais il a compris dès le départ que ces actions ne serviraient pas parfaitement son jeu puisque son physique était différent de celui de ses maîtres. Pour s’approprier leur technique de jeu, il a dû l’adapter à sa morphologie. Conan O’Brien a déclaré que les humoristes qui se font les émules de leurs idoles ratent d’abord leur cible, puis en viennent ainsi à trouver leur propre personnalité. Johnny Carson s’est efforcé d’être Jack Benny, mais il est devenu Johnny Carson. David Letterman s’est efforcé d’être Johnny Carson, mais il est devenu David Letterman. Et Conan O’Brien s’est efforcé d’être David Letterman, mais il est devenu Conan O’Brien. «Notre échec à devenir ce que

nous croyons être notre moi idéal est, au bout du compte, ce qui nous définit et nous confère notre individualité», dit O’Brien. Heureusement!

Les être humains ont un défaut magnifique: ils sont incapables de copies parfaites. Quand nous échouons à imiter parfaitement nos idoles, nous découvrons notre propre chemin. C’est ce qui nous permet d’évoluer. Conclusion: imitez vos idoles. Identifiez ce en quoi vous ne les valez pas. Qu’est-ce qui vous différencie? Accentuez cette différence, transformez-la, faites-en votre œuvre. Au bout du compte, vous ne faites pas honneur à vos idoles quand vous vous limitez à les copier. Pour leur faire honneur, il vous faut transformer leur œuvre en votre œuvre personnelle, offrir au monde ce que vous seul pouvez lui donner.

3. ÉCRIVEZ LE LIVRE QUE VOUS AVEZ ENVIE DE LIRE

ÉCRIVEZ SUR CE QUE VOUS CONNAISSEZ AFFECTIONNEZ Le film Jurassik Park est sorti sur les écrans le jour de mon dixième anniversaire. J’ai adoré. À peine sorti du cinéma, je rêvais déjà d’une suite si bien que, le lendemain, je me suis assis devant notre vieux PC et j’en ai écrit une. Dans ma version, le fils du garde-chasse que les vélociraptors ont dévoré retourne dans l’île en compagnie de la petite-fille du concepteur du parc d’attraction. L’un d’eux veut détruire ce qui reste de ce parc, et l’autre veut le conserver. Évidemment, ils tombent amoureux l’un de l’autre et vivent toutes sortes d’aventures. Je ne savais pas encore, à cette époque, que j’écrivais ce qu’il est convenu de désigner par l’anglicisme fanfiction (ou fanfic), c’est-àdire un récit basé sur des personnages qu’on affectionne et qui existent déjà. Le garçon de dix ans que j’étais a sauvegardé son scénario sur le disque dur. Quelques années plus tard, Le Monde perdu: Jurassic Park est enfin sorti. C’était nul. La vraie suite est toujours nulle quand on la compare à celle qu’on avait imaginée. Tous les écrivains en herbe se posent tôt ou tard la question suivante: «Qu’est-ce que je devrais écrire?» La réponse convenue est: «Écrivez sur ce que vous connaissez.» Ce conseil débouche toujours sur des histoires ineptes où il ne se passe rien d’intéressant.

Nous faisons de l’art parce que nous aimons l’art. Nous sommes attirés par certaines formes de création parce que quelques-uns des artistes qui les pratiquent nous inspirent. Tout est fiction. En fait, tout est fanfiction. Le meilleur conseil que je puisse vous donner est celui-ci: n’écrivez pas sur ce que vous connaissez, écrivez ce que vous aimez. Écrivez le genre d’histoire que vous préférez, écrivez l’histoire que vous avez envie de lire. Le même principe s’applique à votre vie et à votre carrière: quand vous ne savez plus trop quelle direction prendre, posez-vous la question suivante: «Qu’est-ce qui ferait une meilleure histoire?» Bradford Cox, un des membres du groupe Deerhunter, n’avait pas accès à Internet quand il était petit, si bien qu’il devait attendre la sortie officielle du nouvel album de son groupe préféré pour pouvoir l’écouter. Entre-temps, il jouait à ce jeu: il enregistrait une «fausse» version de la musique qu’il désirait entendre. À la sortie de l’album de son groupe fétiche, il comparait les chansons du groupe à ses propres versions. Eh bien, curieusement, plusieurs des imitations de Cox ont été intégrées au répertoire de Deerhunter.

Quand nous aimons quelque chose, nous en voulons toujours plus. Nous attendons impatiemment la suite. Pourquoi ne pas transformer ce désir en quelque chose de productif? Réfléchissez à votre œuvre préférée et à vos idoles. Qu’est-ce qui leur a échappé? Qu’est-ce qu’elles n’ont pas fait? Qu’est-ce qu’elles auraient pu faire de mieux? Si elles vivaient encore, qu’est-ce qu’elles feraient aujourd’hui? Si toutes vos idoles se réunissaient et collaboraient à une œuvre sous votre direction, quelle serait cette œuvre? Mettez-vous au travail.

Le manifeste est le suivant: tracez le dessin que vous avez envie de voir, lancez l’entreprise que vous avez envie de diriger, jouez la musique que vous avez envie d’entendre, écrivez les livres que vous avez envie de lire, fabriquez les produits que vous avez envie d’utiliser, bref, créez ce que vous avez envie de voir créé.

4. SERVEZ-VOUS DE VOS MAINS

ÉLOIGNEZ-VOUS DE L’ÉCRAN Ma bédéiste préférée, Lynda Barry, a cette maxime: «À l’ère du digital, servez-vous de vos doigts!» Vos mains sont le tout premier système digital de l’histoire. Sachez vous en servir. J’aime mon ordinateur, mais je crois que les ordinateurs nous privent de la sensation de créer. Nous tapons sur un clavier, nous cliquons sur des boutons de souris, et c’est pourquoi le travail intellectuel semble si abstrait. Pour l’artiste Stanley Donwood, qui a réalisé le graphisme des albums du groupe Radiohead, travailler à l’ordinateur est aliénant: une vitre nous sépare toujours de ce qui se passe. «Pour avoir un contact tactile avec notre travail, il faut l’imprimer», dit Donwood. Observez une personne devant son ordinateur. Elle est immobile, elle ne bouge pas. Nul besoin d’une étude scientifique (il en existe pourtant quelques-unes) pour comprendre que de rester ainsi assis toute la journée devant un ordinateur peut nous tuer et asphyxier ce que nous faisons. Nous avons besoin de bouger, d’avoir la sensation de créer avec le corps. Pas seulement avec la tête. Un travail purement cérébral ne vaut rien. Regardez un grand musicien en concert. Regardez un grand chef d’État haranguer les foules. Vous comprendrez ce que je veux dire. Il faut faire en sorte que le corps participe à la tâche. Le système nerveux ne fonctionne pas à sens unique. Le corps commande au cerveau tout autant que le cerveau commande au corps. L’expression «faire comme si» traduit très bien cet aspect du travail créateur. On commence par faire comme si on jouait de la guitare, comme si on déplaçait des séquences notées sur des autocollants,

comme si on pétrissait de la glaise, et ce geste machinal met le cerveau en route. Le cerveau entame sa réflexion.

Quand je participais à des ateliers d’écriture à l’université, tous nos textes devaient être imprimés à double interligne en Times New Roman. Mes travaux étaient épouvantablement mauvais. Je ne prenais plus aucun plaisir à écrire. «Autrefois, dit la poétesse Kay Ryan, avant l’invention des cours de création littéraire, un atelier était souvent un coin du sous-sol où l’on sciait, clouait, perçait ou sablait quelque chose.» Pour sa part, l’écrivain Brian Kiteley fait en sorte que ses ateliers restent fidèles au sens étymologique du terme: «Une pièce spacieuse et lumineuse remplie d’outils et de matériaux, où l’on privilégie les travaux pratiques.» J’ai retrouvé le goût d’écrire et j’ai fait de réels progrès lorsque j’ai réintroduit des outils traditionnels dans mon travail. Mon premier livre, Newspaper Blackout, a été écrit en mode pratico-pratique. Pour chaque poème du recueil, je me suis servi d’un article de journal et d’un marqueur indélébile. Cette façon de faire engageait presque tous mes sens: la sensation du papier journal au toucher, la vue des mots qui disparaissaient sous mes ratures, le léger grincement du feutre, l’odeur de l’encre… c’était presque magique. Écrire ces poèmes n’a pas été un travail pour moi, mais un jeu. L’ordinateur est un excellent outil lorsqu’on doit réviser et préparer la copie d’un texte pour publication, mais il n’est pas très efficace quand il s’agit de générer des idées. Appuyer sur la touche de suppression est trop facile. L’ordinateur fait ressortir le perfectionniste crispé qui se cache en nous: il nous incite à censurer nos idées avant même de les avoir eues. Le bédéiste Tom Gauld dit fuir son ordinateur tant qu’il n’a pas une idée précise de sa bédé, car dès l’instant où l’ordinateur intervient, «c’est inévitable, le dessin va tout droit à son achèvement, tandis que les possibilités du carnet de croquis sont infinies». Lorsqu’est venu pour moi le temps d’agencer la matière de Newspaper Blackout, j’ai numérisé chaque poème et je l’ai imprimé

sur un quart de feuille de papier format lettre. Ensuite, j’ai éparpillé ces feuilles dans mon bureau, j’en ai fait plusieurs piles, puis une seule, et j’ai replacé dans ce nouvel ordre les poèmes sauvegardés sur le disque dur. C’est ainsi que le recueil est né: manuellement, puis à l’ordinateur, puis re-manuellement, et encore à l’ordinateur, dans une sorte de boucle analogico-informatique.

Depuis, c’est comme ça que je travaille. J’ai deux zones de travail: une table «analogique» et une table «informatique». Sur la table analogique il n’y a que des marqueurs, des stylos, des crayons, du papier, des fiches, des journaux. Aucun appareil électronique n’y est autorisé. C’est là que j’accouche de presque tout mon travail. Les traces, les rebuts, les résidus de cet accouchement sont partout présents. Contrairement au disque dur, le papier ne tombe jamais en panne. Sur ma table de travail informatique, on trouve l’ordinateur

portable, l’écran, le lecteur optique et la tablette graphique. C’est là que je révise et publie mon travail. Faites l’essai de ce système. Si vous avez assez de place, planifiez deux postes de travail, un poste analogique et un poste informatique. Bannissez tout appareil électronique du poste analogique. Munissez-vous d’un billet de 10 $ et achetez du papier, des stylos et des autocollants dans l’allée des fournitures scolaires du magasin du coin. De retour chez vous, faites comme si vous participiez à un cours de bricolage. Griffonnez des idées sur des feuilles de papier, découpez ces feuilles, recollez-en les morceaux. Travaillez debout. Punaisez ces bouts de papier au mur. Recherchez-y des motifs. Éparpillez vos idées sur la surface de travail et triez-les. Quand vous aurez mis de l’ordre dans vos idées, assoyez-vous devant l’ordinateur de l’aire de travail informatique pour les finaliser et les imprimer. Chaque fois que vous manquez d’inspiration, revenez à votre table de travail analogique et amusez-vous.

5. L’IMPORTANCE DES ACTIVITÉS PARALLÈLES ET DES VIOLONS D’INGRES

LA PROCRASTINATION PRODUCTIVE Si j’ai appris une chose au cours de ma brève carrière, c’est que les activités parallèles sont celles qui décollent vraiment. Les activités parallèles sont ces à-côtés qui, selon vous, ne sont que des pertes de temps. Des distractions. Mais c’est tout le contraire. Quand vous êtes pris par ces activités, des miracles se produisent. Il est bon, selon moi, de mener de front plusieurs projets, car on peut ainsi gambader de l’un à l’autre. On se fatigue de l’un? Alors, on passe à un autre. Et quand celui-ci en vient aussi à nous barber, on reprend celui qu’on avait laissé en plan. C’est ce que j’appelle la procrastination productive.

Prenez le temps de vous ennuyer. Un de mes collègues a dit un jour: «Quand je suis très occupé, je deviens idiot.» N’est-ce pas vrai? Les créateurs ont besoin de temps en temps de rester assis à ne rien faire. Mes meilleures idées me viennent quand je m’ennuie, et c’est pour cette raison que je ne confie jamais mes chemises au nettoyeur. J’aime les repasser moi-même. C’est si rasoir que j’en récolte presque toujours des idées lumineuses. Si vous manquez d’inspiration, faites la vaisselle ou une très longue promenade. Fixez le plus longtemps possible une tache sur le mur. «C’est quand j’évite de travailler que je peux le mieux me concentrer», a dit l’artiste Maira Kalman. Prenez le temps de perdre votre temps. Évadez-vous. Errez à l’aventure. Vous ne pourrez jamais deviner où ça vous conduira.

NE GASPILLEZ AUCUN ASPECT DE VOUS-MÊME Si vous vous passionnez pour deux ou trois choses différentes, ne vous sentez pas obligé d’en choisir une. Ne jetez rien. Conservez toutes vos passions. Cette leçon me vient du dramaturge Steven Tomlinson.

Tomlinson suggère de vous occuper à toutes les activités que vous aimez. «Laissez-les se parler entre elles. Il en sortira forcément quelque chose.» C’est vrai qu’on peut toujours s’amputer de quelques passions pour se concentrer sur une seule, mais au bout d’un certain temps, la douleur du membre fantôme ne nous épargne pas. À l’adolescence, écrire des chansons et jouer dans des groupes était pour moi une véritable obsession. Mais j’ai décidé de me concentrer sur l’écriture, si bien que je n’ai pas fait de musique pendant plus de cinq ans. La douleur illusionnelle est peu à peu devenue intolérable.

J’ai recommencé à jouer dans un groupe il y a environ un an, et je suis maintenant en voie de guérison. Curieusement, loin de nuire à mon écriture, la musique interagit avec elle et l’enrichit. Je sens que de nouvelles connexions se forment entre mes neurones, que les synapses s’activent. La moitié des gens avec qui je travaille sont des musiciens (cette situation est courante à Austin, au Texas), bien qu’ils ne soient pas tous des «créateurs» professionnels. Certains sont courtiers, d’autres sont promoteurs, et ainsi de suite. Mais tous vous diront la même chose: la musique nourrit leur travail. Il est très important d’avoir un violon d’Ingres. Un violon d’Ingres est une activité créatrice tout à fait intime. Son but n’est pas de nous faire gagner de l’argent ou de nous rendre célèbres, mais de nous rendre heureux. Un violon d’Ingres nous donne tout et ne nous prend rien. J’exerce publiquement la profession d’écrivain, mais je fais de la musique en privé, avec mes amis. Nous nous réunissons tous les dimanches pour faire du bruit ensemble. Sans pression, sans projets. C’est régénérateur. Comme la religion. Ne gaspillez aucun aspect de vous-même. Oubliez le contexte et la vision d’ensemble. Ne vous souciez pas d’être cohérent. Ce qui unifie les fragments de votre œuvre est le fait que vous en êtes le créateur. Un jour, avec le recul, vous verrez que tout cela a du sens.

6. LE SECRET: FAITES DU BON TRAVAIL ET DIFFUSEZLE

AU COMMENCEMENT, L’ANONYMAT EST UNE BONNE CHOSE Je reçois beaucoup de courriels de jeunes qui me demandent ce qu’il faut faire pour que leur talent soit reconnu. Je compatis. La fin des études s’accompagne d’un certain nombre de retombées. Une salle de cours est un endroit merveilleux, mais artificiel: le professeur est payé pour s’intéresser à nos idées, et nos camarades de cours paient pour s’intéresser à nos idées. Nous n’aurons jamais plus un auditoire aussi attentif. Peu après, on découvre que le reste du monde est indifférent à ce que l’on pense. Je sais, cette vérité est brutale. Ainsi que le dit l’écrivain Steven Pressfield: «Ce n’est pas parce que les gens sont méchants ou cruels, c’est parce qu’ils sont occupés.» À vrai dire, c’est une bonne chose, car il est souhaitable de ne pas attirer l’attention avant d’avoir fait du très bon travail. Il n’y a aucune pression dans l’anonymat. On est libre d’agir à sa guise. D’essayer des trucs. De s’amuser. Si personne ne nous connaît, rien ne nous distrait quand on essaie de faire des progrès. On n’a pas à soigner son image auprès du public. On ne risque pas de perdre des sommes importantes. On n’a personne à contenter. Notre imprésario ne nous bombarde pas de courriels. On n’est pas entouré de parasites. Vous ne retrouverez jamais une telle liberté quand le public commencera à s’intéresser à vous et, plus particulièrement, quand on vous paiera pour faire ce que vous faites.

Profitez de votre anonymat tant qu’il durera. Servez-vous-en.

UN SECRET PAS SECRET DU TOUT S’il existait un secret pour se faire connaître, je vous le révélerais. Mais il n’y a selon moi qu’un secret pour cela, et il n’est pas secret du tout: faire du bon travail et le diffuser. C’est un processus en deux étapes. Primo, «faire du bon travail» est incroyablement difficile. Il n’y a pas de raccourci. Accomplissez quelque chose chaque jour. Sachez que, pendant quelque temps, tout ce que vous réaliserez sera mauvais. Échouez. Faites des progrès. Secundo, «diffuser» ce travail était très difficile jusqu’à il y a environ dix ans. Aujourd’hui, c’est très simple: «Publiez-le dans Internet.» Quand je dis cela, on me demande: «Qu’est-ce qu’Internet a de si spécial?»

Primo: Émerveillez-vous. Secundo: Invitez les autres à partager votre émerveillement. Il faut vous émerveiller de ce qui n’enchante personne. Si tout le monde se passionne pour les pommes, passionnez-vous pour les oranges. Plus vous partagerez ouvertement vos passions, plus votre travail touchera les autres. Il n’en va pas des artistes comme des magiciens: ils ne courent aucun risque à dévoiler leurs secrets. Croyez-le ou non, des gens tels que Bob Ross et Martha Stewart m’inspirent beaucoup. Vous souvenez-vous de Bob Ross? Le peintre de la chaîne PBS à la coupe afro et aux bienheureux petits arbres? Bob Ross enseignait à peindre. Il dévoilait ses secrets. Martha Stewart nous apprend comment transformer notre maison et notre vie. Elle nous dévoile ses secrets. Les gens adorent que nous

leur dévoilions nos secrets et, parfois, si nous sommes futés, ils achètent nos produits pour nous récompenser. En révélant aux autres votre marche à suivre et en leur étant disponible, vous apprenez d’eux. J’ai beaucoup appris des gens qui me soumettent des poèmes pour publication sur mon site Newspaper Blackout. Je trouve aussi des tas d’idées à piller dans leurs soumissions. Ça me profite autant qu’à eux. On ne s’affiche pas en ligne uniquement quand on a quelque chose à dire. On peut s’afficher en ligne quand on cherche quelque chose à dire. Internet est beaucoup plus que le lieu de diffusion de vos idées achevées. Vous pouvez en faire un incubateur pour des idées encore embryonnaires, une chambre de naissance pour les œuvres en gestation. Beaucoup d’artistes craignent qu’une présence assidue en ligne les rendra moins productifs, mais je constate au contraire que cette activité me stimule et me donne un bon coup de pied au derrière. La plupart des sites Web et des blogues affichent les articles antichronologiquement, soit en commençant par le plus récent, ce qui signifie que votre succès se mesure à votre plus récent texte. Cela vous tient en éveil et vous oblige à penser à votre prochain billet. Quand on a un contenant, on veut le remplir. Quand je suis désorienté, je jette un coup d’œil à mon site Web en me demandant ce que je pourrais bien y mettre.

Apprenez à programmer, à créer un site Web, à bloguer. Maîtrisez Twitter, les différents médias sociaux et ainsi de suite. Explorez Internet pour trouver des gens qui partagent vos passions, entrez en communication avec eux et faites-leur connaître votre travail. N’étalez pas tout. Il est de beaucoup préférable de ne pas tout transmettre à vos correspondants. Ne leur montrez que des fragments de votre travail: un croquis, un gribouillis, une bribe. Ne leur en livrez qu’un petit aperçu. Réfléchissez à ce qui pourrait leur être utile. Partagez une astuce que vous avez découverte ou un lien vers un article intéressant. Mentionnez le bon livre que vous êtes en train de lire.

Si l’idée de divulguer vos secrets vous inquiète, affichez les points à relier, mais ne les reliez pas. C’est vous qui appuyez sur le bouton «Partager». Vous gardez le contrôle de ce que vous désirez révéler aux autres.

7. NOUS NE SOMMES PLUS PRISONNIERS DE LA GÉOGRAPHIE

CONSTRUISEZ VOTRE PROPRE UNIVERS J’ai grandi dans un champ de maïs du sud de l’Ohio. Quand j’étais petit, je n’avais qu’une envie: aller là où il se passe quelque chose. J’habite maintenant à Austin, au Texas. C’est un lieu assez branché où vivent des tas d’artistes et de créateurs. Mais, si vous voulez savoir, je dirais que 90 pour 100 des gens qui m’inspirent ne sont pas à Austin, au Texas. Ils sont partout. Je les ai connus grâce à Internet. Autrement dit, la plupart de mes conversations et de mes échanges d’idées sur l’art ont lieu en ligne. Plutôt que de vivre dans un monde artistique concret et géographique, j’utilise Twitter et, jusqu’à tout récemment, Google Reader. Il est parfaitement possible de rester où vous êtes tout en accédant à l’univers qui vous intéresse. Si vous vous sentez prisonnier parce que vous êtes trop jeune, trop vieux, trop pauvre ou incapable de partir, ne vous découragez pas. Il y a en ligne une vaste collectivité de gens avec qui communiquer. Entre-temps, si le monde où vous vivez ne vous convient pas, construisez-en un autre. (Le moment serait bien choisi de mettre un casque et d’écouter les Beach Boys chanter In My Room.) Entourezvous de livres et d’objets que vous aimez. Punaisez des trucs au mur. Créez votre propre univers. Franz Kafka a écrit: «Nul besoin de sortir de chez toi. Reste à ta table de travail et écoute. Ou plutôt, n’écoute pas, contente-toi d’attendre. Non, n’attends rien, reste paisible et seul. Le monde

viendra vers toi de lui-même.» Kafka, rappelons-le, est né un siècle avant Internet!

On n’a besoin que d’un peu d’espace et d’un peu de temps – un endroit pour travailler et un peu de temps pour y parvenir; un peu de solitude choisie, une captivité provisoire. Si votre situation ne vous alloue pas cette solitude et cette captivité, cherchez-les dans la nature. Quand j’étais petit, ma mère me traînait avec elle au centre commercial. Mais avant de faire ses emplettes, elles m’amenait à la librairie et m’achetait le livre que je voulais. Pendant qu’elle furetait dans les boutiques, je m’assoyais sur une chaise et je lisais. Ce manège a duré des années. J’ai beaucoup lu. Maintenant, j’ai une voiture et un téléphone cellulaire. Je suis toujours branché, jamais seul, jamais prisonnier. Pour cette raison, je

me rends au travail et j’en reviens en autobus même si cela rallonge mon trajet de quelque vingt minutes. Je me fais couper les cheveux dans un salon de barbier sans rendez-vous, sans Wi-Fi, et toujours si occupé qu’il faut attendre son tour pendant des heures. Je n’allume jamais mon ordinateur portable dans les aéroports. Je fréquente la bibliothèque. J’ai toujours un livre, un stylo et un carnet de notes sur moi, et je savoure toujours ma solitude et ma captivité temporaires.

PARTEZ DE CHEZ VOUS

Ne plus être prisonniers de la géographie ne signifie pas que les lieux n’ont plus d’importance. L’endroit où nous choisissons de vivre influence grandement notre travail. Un jour, quand c’est possible, il faut partir de chez soi. On peut toujours y revenir. Mais il faut s’en éloigner au moins une fois. Le cerveau s’endort s’il reste dans son milieu habituel. Il faut le secouer. Il faut séjourner quelque temps dans un pays étranger, au milieu de gens qui ont d’autres habitudes de vie. Les voyages donnent au monde un regain de jeunesse, et quand le monde qui nous entoure paraît plus jeune, notre cerveau est plus actif. J’ai eu le bonheur de vivre en Italie et en Angleterre à 19 et 20 ans, et ces voyages ont changé ma vie. Mais il n’est pas nécessaire de franchir l’océan ou même une simple frontière pour être confronté à une culture différente de la nôtre. Pour la plupart des gens auprès desquels j’ai grandi, le Texas serait une autre planète. (Je vis moimême depuis un certain temps au Texas. Il y a des moments où l’on se croirait sur Mars.)

Nous savons que nous devons partir de chez nous, mais où aller? Où vivre? Il faut tenir compte de plusieurs facteurs, tous liés à nos préférences personnelles. Pour ma part, je pense que le mauvais temps favorise la création. On n’a pas envie de sortir, on reste à l’intérieur et on travaille. Quand je vivais à Cleveland, j’ai beaucoup produit pendant les rudes mois de l’hiver. Ici, au Texas, c’est en été, qui est torride, que je crée le plus. (L’hiver de Cleveland et l’été du Texas durent tous les deux quelque six mois.)

Vivre au milieu de gens passionnants est un plus, même si ces personnes ont des intérêts différents des nôtres. Puisque je me sens toujours un peu incestueux quand je ne fréquente que des écrivains et des artistes, je recherche aussi la compagnie des cinéastes, des musiciens et des fanas d’informatique qui habitent à Austin. Et la

bouffe. Il faut que la bouffe soit bonne. Il faut vivre dans un lieu qui nourrit notre créativité, notre vie sociale, notre spiritualité et notre estomac. Même quand vous aurez emménagé dans un nouveau décor, il vous faudra vous en éloigner de temps à autre, voire l’abandonner pour aller vivre ailleurs. Ce qu’il y a de bien, aujourd’hui, c’est que la plupart des vos collègues resteront exactement où vous les aurez laissés: dans Internet.

8. SOYEZ AIMABLE (LA PLANÈTE EST PETITE)

FAITES-VOUS DES AMIS, IGNOREZ VOS ENNEMIS Je suis ici pour une raison précise: me faire des amis.

La règle d’or est encore plus importante dans notre univers hyperbranché. Il importe de ne jamais oublier ceci: si vous parlez de qui que ce soit dans Internet, cette personne le saura. Rares sont ceux qui ne sont pas inscrits aux Alertes Google. Quel est le meilleur moyen de triompher de ses ennemis dans Internet? Dire du bien d’eux.

RECHERCHEZ LE TALENT

Vous souvenez-vous des expressions «On récolte ce qu’on a semé» et «Telles entrées, telle sortie»? En voici une autre: «Dis-moi qui tu fréquentes, je te dirai qui tu es.» Dans le cyberespace, cela signifie s’intéresser à la crème de la crème, à des gens beaucoup plus intelligents et accomplis que soi, à des gens qui font des choses vraiment intéressantes. Portez attention à leurs propos, à leurs œuvres, aux hyperliens qu’ils partagent.

Harold Ramis, l’acteur et metteur en scène connu des gens de ma génération principalement pour son personnage d’Egon dans le film SOS Fantômes (Ghostbusters), a formulé ainsi sa règle personnelle du succès: «Identifiez, parmi les personnes présentes, celle qui a le plus de talent. Si ce n’est pas vous, allez la trouver. Fréquentez-la. Rendez-vous utile.» Ramis a eu de la chance. La personne présente la plus talentueuse était son ami Bill Murray. Si la plus douée des personnes présentes, c’est vous, allez ailleurs.

«ARRÊTE DE RÂLER ET FAIS QUELQUE CHOSE DE VALABLE» La bêtise est partout. Vous aurez souvent envie de remédier à la situation. Un soir que je n’arrivais pas à éteindre mon ordinateur, ma femme m’a lancé: «Arrête de râler dans Twitter et fais quelque chose de valable!» Elle avait raison. Mais j’avoue que la colère est une des choses qui stimulent le plus ma créativité. Henry Rollins a dit que la colère et la curiosité le poussaient à agir. Certains matins, je n’arrive pas à me lever. Je reste couché à fureter dans mes courriels et dans Twitter jusqu’à ce que la colère me fasse bondir hors du lit. Mais au lieu de perdre cette énergie à me plaindre et à m’en prendre aux autres, je m’efforce de la canaliser dans l’écriture et le dessin.

ÉCRIVEZ DES LETTRES D’ADMIRATEUR Plus jeune, j’ai écrit des tonnes de lettres à mes idoles et j’ai eu la chance de recevoir des réponses de plusieurs d’entre elles. Mais j’ai compris qu’une lettre d’admirateur a ceci de mauvais qu’elle force en quelque sorte le destinataire à répondre malgré lui. Le plus souvent, l’expéditeur est motivé par un besoin d’approbation ou d’affirmation. «La meilleure façon d’obtenir l’approbation d’autrui est de ne pas en ressentir le besoin», dit mon ami Hugh MacLeod. Si vous admirez sincèrement le travail de quelqu’un, sa réponse ne vous est pas indispensable. (Mais si la personne à qui vous avez envie d’écrire est morte depuis cent ans, alors là, vous manquez vraiment de pot.) Mon conseil: formulez votre admiration en public. Internet est parfait pour ça. Rédigez un blogue au sujet d’une personne dont vous admirez le travail et insérez-y un lien vers son site. Créez une œuvre et dédiez-la à votre idole. Répondez à une de ses questions, solutionnez un de ses problèmes, améliorez ce qu’elle a réalisé et partagez votre contribution en ligne. Votre idole verra ou non votre travail. Elle y réagira ou non. L’important est que vous lui manifestiez votre admiration sans rien attendre d’elle en retour, et que cette admiration vous porte à créer de nouvelles choses.

NE MENDIEZ PAS DES ÉLOGES

Le travail créateur a un aspect très fâcheux: quand les gens finissent par reconnaître la valeur du travail que l’on fait, on est a) complètement blasé ou b) complètement mort. On ne peut pas compter sur la reconnaissance des autres. Quand on a mis une œuvre au monde, la réaction du public ne nous appartient plus. Curieusement, une œuvre excellente semble avoir été réalisée sans effort. Les gens qui disent «Pourquoi n’y ai-je pas pensé?» ne voient pas les années de dur labeur que cette œuvre a exigées. Il y en a qui ne comprendront jamais. On se méprendra sur vous ou sur vos intentions. On vous insultera peut-être. Acceptez dès maintenant d’être incompris, dénigré ou ignoré. Le secret, c’est d’être trop occupé pour avoir le temps de vous en inquiéter.

MONTEZ UN DOSSIER D’ÉLOGES On se sent souvent seul, découragé et rejeté. S’il n’est pas correct de mendier des éloges, quel coup de pouce quand quelqu’un apprécie ce qu’on fait! J’ai parfois en ligne des succès qui me valent pendant quelques jours des Tweets et des courriels chaleureux de la part de gens qui découvrent mon œuvre. C’est formidable. Étourdissant. Un vol plané. Mais je sais que, tôt ou tard, il me faudra revenir sur terre et que, peu après, je m’enfoncerai dans un gouffre de déprime, j’aurai envie de capituler, et je me demanderai pourquoi diable j’ai choisi ce métier.

C’est pourquoi je classe dans un dossier spécial tous les courriels vraiment sympathiques qui me parviennent (je supprime les courriels détestables sur-le-champ). Quand surviennent des jours sombres, quand j’ai besoin d’un tonique, j’ouvre ce dossier et je lis deux ou trois courriels. Ensuite, je me remets au boulot. Essayez: au lieu d’un dossier de rejets, gardez un dossier d’éloges – à consulter avec modération, car mieux vaut ne pas vous asseoir sur vos lauriers. Gardez-le à portée de la main pour les jours où vous ressentez le besoin de vous remonter le moral.

9. SOYEZ ENNUYEUX (IL N’Y A PAS D’AUTRE FAÇON DE PRODUIRE)

PRENEZ SOIN DE VOUS Je suis un type ennuyeux qui trime de neuf heures à dix-sept heures et qui vit dans un quartier paisible avec sa femme et son chien. La vision très romantique du génie créateur accro des drogues et baiseur invétéré est révolue. C’est une vie de surhomme, une vie pour ceux qui veulent mourir jeunes. À vrai dire, la créativité exige beaucoup d’énergie. Vous en avez besoin: ne la gaspillez pas à autre chose. Vous feriez bien de croire que vous en avez pour un bon bout de temps à vivre. (C’est la raison pour laquelle Patti Smith conseille aux jeunes artistes de consulter leur dentiste.) Ne sautez pas le petitdéjeuner. Faites des flexions-extensions des bras. Allez marcher. Dormez beaucoup. Une des chansons de Neil Young disait à peu près qu’il vaut mieux mourir d’épuisement que d’ennui («It’s better to burn out than to fade away»). Moi, je dis qu’il vaut mieux se consumer avec lenteur et connaître nos petits-enfants.

NE VOUS ENDETTEZ PAS La plupart des gens que je connais détestent penser à l’argent. Mais, un conseil: apprenez à gérer votre argent le plus tôt possible. Mon grand-père avait coutume de répéter à mon père: «Mon garçon, l’important n’est pas l’argent qu’on gagne, mais celui qu’on garde.» Faites un budget. Ne vivez pas au-dessus de vos moyens. Apportez votre lunch au travail. Comptez vos sous. Économisez le plus possible. Payez peu pour les formations que vous devez suivre. Pour garder son argent il faut dire non à la société de consommation – refuser les repas pour emporter, refuser les latte à 4 $, refuser ce nouvel ordinateur rutilant quand l’ancien fonctionne encore très bien.

N’ABANDONNEZ PAS VOTRE BOULOT À vrai dire, même si vous avez un jour la chance de pouvoir gagner votre vie en faisant ce que vous aimez vraiment, vous n’y arriverez pas du jour au lendemain. Jusque-là, vous aurez besoin d’un boulot. Travailler vous procure un salaire, vous met en contact avec les autres et programme votre vie. L’absence de soucis financiers est aussi synonyme de liberté créatrice. «Tant que vous ne prenez pas leur argent, ils ne peuvent pas vous dire quoi faire», dit le photographe Bill Cunningham. Un emploi vous met en contact avec d’autres. Apprenez d’eux. Piquez-leur des trucs. Je me suis toujours efforcé de bosser là où je peux apprendre des choses qui enrichiront mon travail créateur: j’ai appris à faire de la recherche en travaillant dans une bibliothèque, j’ai appris à créer des sites Web en travaillant dans la conception Web, et j’ai appris à me servir des mots pour vendre en travaillant comme rédacteur publicitaire. Le pire aspect d’un emploi stable est qu’il nous bouffe du temps. En revanche, il structure le quotidien et nous donne la possibilité de consacrer une plage horaire définie au travail créateur. Il est sans doute plus important d’obéir à une routine que d’avoir beaucoup de temps à soi. L’inertie tue la créativité. Il faut rester dans le bain. Quand on en sort, le travail nous fait peur, car on sait qu’on ne fera rien qui vaille tant qu’on ne se sera pas remis en train. La solution est simple: réservez-vous un moment de la journée, arrachez-le à votre emploi du temps et restez-lui fidèle. Travaillez chaque jour, quoi qu’il arrive. Pas de vacances, pas de congés de

maladie. Ne vous arrêtez pas. Vous constaterez sans doute que la loi de Parkinson a un corollaire: un travail donné peut être accompli dans le temps qui lui est imparti. Je ne dis pas que ce sera agréable. Vous aurez souvent l’impression de vivre une double vie. Selon le poète Philip Larkin, la meilleure solution consiste à «adopter une attitude parfaitement schizoïde et à envisager chacune de nos deux personnalités comme étant le refuge de l’autre.» Ce qu’il vous faut, c’est un emploi stable qui vous procure un salaire décent, qui ne vous donne pas envie de vomir et qui vous laisse assez d’énergie pour occuper vos temps libres à créer. Ce n’est pas forcément facile à trouver, mais ça existe.

PROCUREZ-VOUS UN CALENDRIER Pour créer un corpus d’œuvres ou pour construire une carrière, il faut multiplier lentement un grand nombre de petits efforts. Écrire une page par jour, ça n’a l’air de rien, mais si vous le faites 365 fois, vous avez assez de matière pour un roman. Appâter un nouveau client est une petite victoire, mais en appâter quelques douzaines peut vous valoir une promotion. Un calendrier vous permet de planifier votre travail, de vous fixer des objectifs concrets et d’éviter les distractions. Le comédien Jerry Seinfeld a un calendrier qui l’aide à écrire des blagues chaque jour. Il suggère de vous procurer un grand calendrier annuel à fixer au mur. Subdivisez ensuite votre travail en tâches quotidiennes. Chaque jour, quand vous en avez terminé, tracez un grand X sur la date correspondante. Ainsi, votre but de la journée n’est plus de travailler, mais de marquer d’un X une case du calendrier. «Au bout de quelque temps, dit Seinfeld, vous obtenez une chaîne. Persévérez et cette chaîne s’allongera de jour en jour. Quelques semaines plus tard, elle sera très agréable à l’œil. Votre responsabilité consistera à ne pas l’interrompre.»

Procurez-vous un calendrier. Remplissez les cases. Ne cassez pas la chaîne.

TENEZ UN JOURNAL DE BORD On a autant besoin d’une carte du passé que d’un plan pour le futur. Un journal de bord n’est pas aussi exigeant qu’un journal intime. Il suffit d’y noter ce que l’on fait chaque jour: les projets auxquels on a travaillé, le restaurant où l’on a lunché, le film qu’on a vu. C’est beaucoup plus facile que de tenir un journal intime détaillé. Vous serez surpris de l’utilité d’un tel registre, surtout au bout de quelques années. Les petits détails vous aident à vous souvenir des grands. Le journal de bord était autrefois le livre dans lequel les marins rendaient compte de ce qui se passait à bord et de la distance parcourue. Vous ferez exactement la même chose: vous noterez la distance parcourue.

TROUVEZ UN BON PARTI Qui épouser: voilà la plus importante décision que vous ayez à prendre. Un «bon parti» ne désigne pas seulement votre compagne ou votre compagnon de vie, mais aussi la personne avec qui vous faites des affaires, celle avec qui vous partagez une amitié profonde, celle dont vous choisissez la compagnie. S’il est très difficile d’être en couple, il faut énormément de courage pour vivre avec un créateur. Il faut alors être domestique, chef de cuisine, conférencier motivateur, maman, réviseur… tout cela en même temps. Un bon conjoint nous aide à garder les pieds sur terre. Un ami a dit un jour à ma femme que la présence d’un artiste dans la maison devait être inspirant pour elle. Elle a répliqué, en plaisantant: «Ben, oui. C’est comme vivre avec da Vinci.» Je l’adore.

10. CRÉER, C’EST SOUSTRAIRE

CE QU’IL FAUT METTRE DE CÔTÉ En cette ère de surdose et d’avalanche d’information, ceux qui réussissent sont ceux qui savent quoi mettre de côté pour mieux se concentrer sur ce qui compte vraiment. Rien n’est plus paralysant qu’avoir devant soi des possibilités infinies. Croire qu’on peut tout faire est absolument terrifiant. Pour surmonter l’angoisse de la page blanche ou tout autre blocage créatif, il suffit de s’imposer des contraintes. Cela peut paraître contradictoire, mais dans tout travail créateur les limites sont libératrices. Écrivez une chanson pendant la pause-midi. Peignez avec une seule couleur. Démarrez une entreprise sans financement. Tournez un film avec quelques amis et un iPhone. Construisez un machin quelconque en n’utilisant que des pièces de rechange. Ne trouvez pas toutes sortes d’excuses pour éviter de vous mettre au travail, mais créez quelque chose avec le temps, l’espace et les matériaux à votre disposition. De telles contraintes, si elles sont bien choisies, pourraient donner naissance à ce que vous ferez de mieux. Voulez-vous que je vous cite mon exemple favori de cette réalité? Pour écrire Le Chat chapeauté (The Cat in the Hat), Dr Seuss n’a utilisé que 236 mots différents. Sachant cela, son éditeur l’a mis au défi d’écrire un conte avec un vocabulaire de 50 mots, pas plus. Dr Seuss a surmonté ce défi de façon magistrale. Cela a donné Les Œufs verts au jambon (Green Eggs and Ham), un des plus grands succès de la littérature enfantine de tous les temps.

«Ce qui nous touche dans une œuvre d’art est d’y percevoir la lutte que l’artiste a menée pour triompher de ses limites», a dit le peintre Saul Steinberg. Ce que l’artiste choisit d’omettre est souvent ce qui rend son œuvre intéressante. Ce qu’il cache, plutôt que ce qu’il montre. De la même manière, ce qui rend un individu intéressant n’est pas seulement ce qu’il a vécu, mais aussi ce dont il n’a jamais

fait l’expérience. Il en va de même du travail créateur: le créateur doit assumer ses limites et aller de l’avant. Au bout du compte, l’œuvre créatrice se compose autant de ce qu’on a choisi d’omettre que de ce qu’on a choisi d’inclure. Faites des choix sages. Et amusez-vous.

ALLEZ FAIRE UNE PROMENADE CRÉEZ UN FICHIER DE RAPINES ALLEZ À LA BIBLIOTHÈQUE PROCUREZ-VOUS UN CARNET DE NOTEs ET SERVEZ-VOUS-EN

PROCUREZ-VOUS UN CALENDRIER COMMENCEZ À TENIR UN JOURNAL DE BORD OFFREZ CE LIVRE EN CADEAU À QUELQU’UN ÉCRIVEZ UN BLOGUE FAITES LA SIESTE

Lynda Barry, WHAT IT IS Hugh MacLeod, IGNORE EVERYBODY Jason Fried + David Heinemeier Hansson, REWORK Lewis Hyde, THE GIFT

Jonathan Lethem, THE ECSTASY OF INFLUENCE David Shields, REALITY HUNGER Scott McCloud, UNDERSTANDING COMICS Anne Lamott, BIRD BY BIRD Mihaly Csikszentmihalyi, FLOW Ed Emberley, MAKE A WORLD

TROP CONSEILLER NUIT. PRENEZ ICI CE QU’IL VOUS FAUT ET OUBLIEZ LE RESTE. IL N’Y A PAS DE RÈGLES. FAITES-MOI PART DE VOS IMPRESSIONS

OU VENEZ ME DIRE BONJOUR À: WWW.AUSTINKLEON.COM

MERCI À ma femme, Meghan – ma première lectrice, ma première en tout. À mon agent, Ted Weinstein, à mon réviseur, Bruce Tracy, à ma graphiste, Lidija Tomas, et à toute l’équipe formidable de chez Workman. Vous m’impressionnez vachement! À tous ceux à qui j’ai piqué des idées, incluant (entre autres): Lynda Barry, Ed Emberley, Hugh MacLeod, John T. Unger, Jessica Hagy, Kirby Ferguson, Maureen McHugh, Richard Nash, David Shields, Jonathan Lethem, et enfin à Chris Glass et à l’équipe de wireandwine.com qui m’ont permis de reproduire leur t-shirt «Here to Make Friends». À mes parents, Sally et Scott Kleon. À Amy Gash, pour son œil de lynx. À ma famille et à mes merveilleux amis, en ligne ou non, qui ont diffusé dans Internet le blogue à l’origine de ce livre et m’ont transmis des sources et des citations inspirantes. Enfin, un grand merci aux gens du Broome Community College. Si vous ne m’aviez pas invité à prononcer une allocution, je n’aurais sans doute jamais eu l’idée de cette liste.

AUSTIN KLEON est un artiste visuel, auteur, entre autres, du recueil de poèmes par soustraction Newspaper Blackout. Son œuvre a été diffusée à l’émission radiophonique Morning Edition de la NPR (National Public Radio), au journal télévisé NewsHour de la chaîne

PBS, dans le Wall Street Journal et sur le site Web consacré aux arts plastiques 20X200.com. Il vit à Austin (Texas) et en ligne (www.austinkleon.com).

Design graphique: Lidija Tomas Couverture: Austin Kleon Correction: Joëlle Bouchard Ce document numérique a été réalisé par claudebergeron.com

Données de catalogage disponibles auprès de Bibliothèque et Archives nationales du Québec

08-14 © 2014, Austin Kleon Traduction française © 2014, Les Éditions de l’Homme, division du Groupe Sogides inc., filiale de Québecor Média inc. (Montréal, Québec) L’ouvrage original a été publié par Workman Publishing Company, Inc. sous le titre Steal Like an Artist Tous droits réservés Dépôt légal: 2014 Bibliothèque et Archives nationales du Québec ISBN 978-2-7619-4332-1

DISTRIBUTEURS EXCLUSIFS: Pour le Canada et les États-Unis: MESSAGERIES ADP inc.* 2315, rue de la Province Longueuil, Québec J4G 1G4 Téléphone: 450-640-1237 Télécopieur: 450-674-6237 Internet: www.messageries-adp.com * filiale du Groupe Sogides inc., filiale de Québecor Média inc. Pour la France et les autres pays: INTERFORUM editis Immeuble Paryseine, 3, allée de la Seine 94854 Ivry CEDEX Téléphone: 33 (0) 1 49 59 11 56/91 Télécopieur: 33 (0) 1 49 59 11 33 Service commandes France Métropolitaine Téléphone: 33 (0) 2 38 32 71 00 Télécopieur: 33 (0) 2 38 32 71 28

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Nous remercions le Conseil des Arts du Canada de l’aide accordée à notre programme de publication. Nous remercions le gouvernement du Canada de son soutien financier pour nos activités de traduction dans le cadre du Programme national de traduction pour l’édition du livre. Nous reconnaissons l’aide financière du gouvernement du Canada par l’entremise du Fonds du livre du Canada pour nos activités d’édition.

1. VOLEZ COMME UN ARTISTE 2. N’ATTENDEZ PAS DE SAVOIR QUI VOUS ÊTES POUR COMMENCER 3. ÉCRIVEZ LE LIVRE QUE VOUS AVEZ ENVIE DE LIRE 4. SERVEZ-VOUS DE VOS MAINS 5. L’IMPORTANCE DES ACTIVITÉS PARALLÈLES ET DES VIOLONS D’INGRES 6. LE SECRET: FAITES DU BON TRAVAIL ET DIFFUSEZ-LE 7. NOUS NE SOMMES PLUS PRISONNIERS DE LA GÉOGRAPHIE 8. SOYEZ AIMABLE (LA PLANÈTE EST PETITE)

9. SOYEZ ENNUYEUX (IL N’Y A PAS D’AUTRE FAÇON DE PRODUIRE)

10. CRÉER, C’EST SOUSTRAIRE