Tal 1983 Voilà Ce Qui Est Arrivé Bayân Mâ Waqa A D'al Ḥâǧǧ Umar Al-Fûti Plaidoyer Pour Une Guerre Sainte en Afrique de L'ouest Au XIXe Siècle [PDF]

  • 0 0 0
  • Gefällt Ihnen dieses papier und der download? Sie können Ihre eigene PDF-Datei in wenigen Minuten kostenlos online veröffentlichen! Anmelden
Datei wird geladen, bitte warten...
Zitiervorschau

Voilà ce qui est arrivé Bayân mâ waqa"a d'al-I:lâgg cumar al-Fûtî Plaidoyer pour une guerre sainte en Afrique de l'Ouest au XIX" siècle

UNION ACADÉMIQUE INTERNATIONALE INTERNATIONAL ACADEMIC UNION

FONTES HISTORIAE AFRICANAE SERIES ARABICA VIII

Collection publiée sous la direction de J.O. HUNWICK avec l'assistance éditoriale de V. MONTEIL, Y.F. HASAN et M. ZOUBER

Publié sur la recommandation du Conseil International de la Philosophie et des Sciences Humaines avec le concours financier de l'UNESCO

CENTRE RÉGIONAL DE PUBLICATION DE PARIS

Sidi Mohamed MAHIBOU

Jean-Louis TRIAUD



,

Voilà ce qui est arrive Bayân mâ waqaca d'al-ijâgg cumar al-Fûtî Plaidoyer pour une guerre sainte en Afrique de l'Ouest au XIXe siècle

Publié avec le concours de la Maison des Sciences de l'Homme - Paris

ÉDITIONS DU CENTRE NATIONAL DE LA RECHERCH E SCIENTIFIQUE 15, quai Anatole-France - 75700 Paris 1983





Institut de Recherche et d'Histoire des Textes Ouvrage réalisé par le Centre Régional de Publication de Paris Maquette de couverture réalisée par MEDHAT METWALLI ©Centre National de la Recherche Scientifique, Paris, 1983 ISBN - 2-222-032 16-4

e

A V ANT-PROPOS

Ce travail est né d'une double préoccupation : -

attirer l'attention sur les documents ouest-africains en langue arabe qui figurent dans les fo nds parisiens ; prendre quelque distance par rapport aux nombreux discours sur l'Islam , et retrouver, à travers l'étude d'un cas, un exemple de discours islamique original. Ces deux préoccupations ont conservé, nous semble-t-il, toute leur validité.

Cependant, une telle démarche de retour aux sources et aux dépôts d'archives, aussi familière soit-elle à l'historien, pourrait être perçue par certains comme le retour à un orientalisme aujourd'hui discuté et contesté 1 . Et, il est vrai, la primauté conférée au document écrit et les tentations du commentaire littéraliste et philologique peuvent enfermer l'analyse dans un champ clos : nous en verrons quelques illustrations à propos du Bayân. Mais ces risques étant clairement admis et mesurés, nous pensons que la richesse des matériaux laissés en friche doit être plus attentivement considérée 2 • Pour des raisons qui tiennent à :a genèse de l'islamologie et de !'africanisme en France (comme dans d'autres pays) , les fonds africains de langue arabe se sont trouvés dans une sorte de no man's land scientifique - également abandonné& par l'une et l'autre partie pour des raisons qui leur sont propres 3 . Ce retour aux :onds «en sommeil» s'impose donc comme une nécessité évidente. C'est dans une telle perspec: ive que nous voudrions inscrire, en premier lieu , notre travail. Mais, choisir le Bayân parmi plusieurs dizain(fs de do cuments originaux n'est pas un geste innocent , et ce choix doit, lui aussi être justifié.' Nous avons préféré un texte idéologique à d 'autres documents d'intérêt économique ou sociologique, comme en recèlent ces mêmes fonds :;>arisiens. Il y a à cela des raisons techniques qui tiennent d'abord à la nature et à la structure du document (longueur, cohérence interne, importance du texte et du contexte, etc.). Il nous a semblé surtout que le discours islamique devait être retrouvé dans son langage, son mouvement et sa problématique propres avant d'être soumis à des lectures réductrices. Cette approche d'un cadre culturel et d'un mode de pensée souvent dévalués, mais pas toujours ex.ac1ement évalués, nous a paru utile et féconde pour une compréhension en profondeur du fait islamique en Afrique de l'Ouest. Cette publication est le résultat d'une recherche commune engagée il y a près de trois ans. Le travail a commencé par une traduction progressive du manuscrit. Nous avons uni à cet effet nos moyens linguistiques 4 : la compréhension du texte arabe revient à S.M. Mahibou , la rédar :!on du tex te français à J .-L. Triaud. Le dépouillement bibliographique qui a accompagné la 7

CAMPAGNES

LES

-- -

/

--

HAGG

.

D'AL

(1851-1862 ).

--- -- - - -e KAS,t J BAS AO A • BASA KA .

AL N ÜR · NIORO



8 Àa e o1a UN.

,.

SANFAGA· S ANPAK A •

Q A L LAYWANl · LÉWA • KU L LUMINA • KOLOMINA

'

e TYÉF I ·

"É~~~~ Ü SA•

K _

I

I

R

A

1

A KARI A

QDUB B AL · OOU ~ /

e l A00AMAN I • LAKAMA NE

I

-

v

/

AL- SA\J\I OA6\ Nt - K AR\A _ _

S AB USI R E · SABOUSSERE

e FARAB ANN A · FA RAB AN A

/

e GANGUNTE · DIANGIRDE

::i

/

\

14° 1----i,___ _.__ _ _ _ _~---''-----~-~~--~~-+-~~c:,;..;.;..:..::..::'-'-'~;..::.;::-'-'-~-"...--P''---------4-~e MAR IKL:-~

-

V

SULU G l · e SOLO

--- --

-- \

/ \

, 2°.______,______

1

T

B

A

\ 0

50km \

8

/

/

""' r- -

et sites de batailles

de lieux

50

mentionnés dans le 40

Bayan

/

_,,,,,

_,,,-

/

:;_;::;'- 1• DOUGO UNÎ

:'~-l · KOLI

---

/

I

I

/ ,. , 1969, p. 229, n. 56. 320. A.H. Ba et J. Daget, 1962, p. 193. 321. Mungo Park, Travels, Dent, 1954, p. 150. 322. Voir ci-dessus, p. 30. 323. Voir Ch. Monteil, (1924), 1977, pp. 331-340. 324. cU!Jnân b. Fûdî cité par cumar, fol. 12 recto. 325. Cf B.G. Martin, 1976, p. 90, « During their attacks on Bambara towns in Karta and Segu, cumar's forces continually suffered considerable casualties ». 326. Fol. 4 verso. 327. Voir fol. 6 recto et 6 verso. 328. Pour un approfondissement des positions traditionnelles du marxisme sur les rapports entre l'idéologique et le social. Voir M. Godelier, «La part idéelle du réel. Essai sur l'idéologie», L 11omme,juillet-décembre 1978, pp. 155-188. 329. Voir C. Meillassoux, «Rôle de l'esclavage dans l'histoire de l'Afrique occidentale» , Anthropologie et Société, Québec, 1978, vol. 2, n° 1, pp. 117-148. 330. Des dispositions particulières s'appliquent au Musulman apostat et à sa famille : selon al-Magîlî, « quiconque commet des actions portant à l'infidélité doit être invité à se convertir. S'il se convertit, qu'on le laisse tranquille ; s'il ne se repent pas, qu'on le tue pour infidélité. Qu'on ne réduise pas ses enfants en esclavage, mais qu'on les oblige à (suivre) l'Islam. Quant à la vente des mères de ces enfants, lesquelles relèvent des possessions du trésor public, je ne vois aucun mal (à la faire), même si les enfants n'étaient pas réduits en esclavage», J. Cuoq, 1975, p. 412. 331. Il resterait à expliquer pourquoi cette guerre de capture, suscitée par un élargissement du marché des esclaves soudanais (cf C. Meillassoux, Loc. cit.) est porteuse d'un discours islamique et prend les traits d'un gihâd, et non d'un retour en force du paganisme à la manière d'autres pouvoirs guerriers dans la même zone à différentes époques : groupes tyeddo et suninké en Sénégambie, hégémonies bambara à l'ouest du Niger. Des éléments de réponse existent : le caractère trans-ethnique de l'Islam par exemple (cf. le passage du Bayân sur la fraternité par la foi supérieure aux liens du sang, fol. 16 verso-17 recto), mais est-ce bien là une réponse suffisante ?

70

332. L'édition de Mu~arnmad al-l:lâfi?' est conçue explicitement dans un tel but. 333. « Both sides were eager to establish their positions upon strictly legal grounds, and hence avoid the appearance of illegality and disown the responsability for the military engagements», J.R. Willis, Ph. D., 1970, p. 215. 334. Cet espoir n'empêche pas cumar de reconstituer ses fo rces et de se préparer au combat. 335. Une brève allusion : fol. 9 verso, et une protestation contre les persécutions de Tigânî : fol. 26 verso. 336. Mais on observe chez cu!mân b. Fûdî une égale discrétion en matière de références qâdirî au sens strict (c'est-à-dire relatives au taf(lwwuf). Cf N. Tapiéro, Revue des Études Islamiques, 1963, p. 86: «on est également frappé par la rareté d'autorités s'inscrivant nettement dans la rarîqa qaairiyya. Le fondateur de cette confrérie, Sîdî cAbd al-Qâdir al-Jîlânî,ne ïigure pas une seule fois parmi les autorités citées dans les douze ouvrages de cuthmân que nous avons examinés». 337. Nous ne tenons pas compte ici du ralliement éventuel de Mu!).ammad Bello à la Tigâniyya. Sur cette prétention contestable, émise par certains milieux tigânî, voir D.M. Last, 1977, pp. XLI et 215-219. 338. Ce patronage lui confère en retour un prestige incontestable - sans que les appartenances confrériques soient en cause. 339. C'est à A!J.mad al-Bakkây que l'on doit une dénonciation de cumar comme hérétique et faux-prophète (cf. B.N. Paris, ms. arabe n° 5716). 340. Cf. D. Robinson, /.J.A .H.S., 1973, p. 653: « I find that the pilgrirn leader (cUmar) was rather selective in his stress on initial affiliation with the Tijaniyya order... He stressed the carnpaign against non-Muslims and nominal Muslims and the creation of a « true lslamic state ».The new recruits apparently became Tijaniyya in the course of their participation, not before ». 341. Cf. J.R. Willis, Ph. D., 1970, p. 326: « The conflict with Mâsina cannot be viewed principally as a Qâdirî-Tijânî confrontation. There is no convincing evidence to suggest that the Shaykh held any inherent disl.ike of Qadiris per se. Indeed his own works reflect the high esteem in which he held Shaykh al-Mukhtâr al-Kunti, Shaykh cutmân b. Fûdî, Shaykh Mu!).arnmad Bello and Seku Ahmadu Lobbo. He could praise these men in spite of their affüiation to the Qâdiriyya, and commend them for the one aspiration which they shared in common - that is, the active prosecution and advocating of jihâd, both spiritual and temporal». (Texte repris dansStudies in West African Jslamic History, (l), 1979, p. 181). 342. Voir fol. 7 recto, 7 verso, 8 recto et 8 verso. 343. Fol. 7 verso-8 recto et 14 verso-15 recto. 344. Fol. 28 verso.

345.Jbid. 346. Formule de prière figurant dans le rituel tijâni (cf. fol. 26 verso, trad., note infra). 347. Fol. 26 verso. 348. Fol. 27 recto. 349. Astagfuu Allâh : « J'implore le pardon de Dieu». 350. Ces trois formules qui îigurent dans le rituel tiiânî (cf. fol. 26 verso) attestent aux yeux de cumar la qualité de Musulmans de ses disciples du Mâsina. 351. Son nom exact est al-Mu!,itâr b. Yirkoy Talfi (ou, al-Muhtâr b. Wadicat Allâh). L'usage s'est établi, dans un certain nombre de textes, de le désigner par le seul nom de son père: Yirkoy Talfi. Sur ce personnage, voir J .R. Willis, 1979, pp. 177 sq. 352. La vocalisation de ce nom a donné lieu à une multitude de transcriptions: on trouve ainsi Yéro N'Gouye Talfi, Yoro Kui Talfi (ou Talfé) (A. Samb, 1970, pp. 58, 86, 97, 370, 372); Yurka Talaf (F. Dumont, 1974, p. 147); Yarki Talfi (B.G. Martin, 1976, p. 76) et Yéro Koïdolfi (H. Gaden, dans M.A. Tyam, 1935, pp. 197 et 202). En fait, il faut lire« Yirkoy Talfi »,ce qui, en langue songhay, signifie « donné à Dieu » ( nous devons cette précision à S.M. Mahibou). Yirkoy Talfi est donc l'équivalent songhay du nom arabe sous lequel ce savant est également connu : al-Mu!).târ b. Wadicat Allâh (Wadicat A1lâh : « confié à la garde de Dieu » ). 353. Cf. J.R. Willis, Ph. O., 1970, pp. 197-198, ap. L. Tauxier, 1937, p. 188 (citant le capitaine Menvielle). Tidjani est ici un nom propre. 354. « On doit savoir que ce maître faisait partie des disciples de Cheikh El Hadji comar dans le Macina. Il était qâdrite puis il fut converti à l'ordre tigânite par El Hadji comar... Ce maître était originaire d'une grande ville du Mâsina appelée Ata... près de Tombouctou e tc. ». (Il descendait par son père et par sa mère de deux familles peul spécialisées dans l'étude). (Moussa Kamara, dans A. Samb (trad.), 1970, pp. 377-380). 355. B.G. Martin, 1976, p. 76. 356. Moussa Kamara, dans A. Samb (trad.), 1970, p. 86. 357. Les gens du wird, c'est-à-dire les Tij:ânî. 358. B.N. Paris, ms. arabe n° 5519, fol. 50. Cité par J.R. Willis, Ph. D., 1970, p. 339. 359. Cf. W.A. Brown, 1969, pp. 149-150. 360. B.N. Paris, ms. arabe n° 55 19, fol. 97. Cf J.R. Willis, Ph. D., 1970, pp. 81 et 260-261.

71

361. On notera le décalage entre l'attitude du Mâsina, et celle d'al-Bakkây et de ses partisans : Ahmad 1 interdit la pratique du wird tigânî (pour des raisons qui tiennent sans doute à l'unité intérieure de la communauté), les Kunta mettent en cause la nouvelle confrérie en tant que telle et la dénoncent comme hérétique. Ce sont les Kunta, beaucoup plus que le Mâsina, qui sont préoccupés par le problème tiiânî et qui présentent la lutte contre cumar en termes confrériques. 362. LM. Ouane est lui-même un arrière petit-fils d'al-Hâgg cumar. 363. LM. Ouane, 1952, p. 183. 364. Le Fittuga est la région de Saraféré, à l'est de Niafounké et au sud de Goundam. 365. LM. Ouane, 1953, pp. 183-184. 366. Le Fittuga semble avoir été un bastion tiiânî. Son qâdî dirige la délégation chargée d'accueillir cumar à Hamdallahi. Yirkoy Talfi est lui-même l'auteur d'un Ta 'rî!J. Fittûga qui fournit une chronologie des évènements du xme siècle/fin XVIIIe-début XIXe dans la boucle du Niger. Un exemplaire de ce Ta 'rîfJ figure à l'Institut de France (Fonds de Gironcourt, ms. 2406, pièce no 75), un autre à l'I.F .A.N., Dakar (Fonds Vieillard, Macina, cahier no 3) . Enfin, c'est au Fittuga que cumar envoie chercher les trois leaders du parti lorsque le Mâsina se soulève. 367. M. Sissoko, nO 97, 1937, p. 138. Voir aussi Moussa Kamara, dans A. Samb, Bulletin de l'I.F.A.N., 1970, p. 138. 368. W.A . Brown a recueilli le nom de six dirigeants du parti tigânî au Mâsina : outre Ahmad, qâ!!I

Al;mad b. Séîd a dit la même chose dans son Muf;ta$ar lkmâl al-Ikmâl. S'il est vrai que l'on juge un pays d'après son sultan, il est clair que nous devions entrer dans cene ville, et il ne fait pas de doute , pour tout esprit sensé qui connait ce pays, que cette ville est bien une des villes de Ségou, que l'autorité de Ségou s'exerce sur elle, que le sultan de Ségou Y agit de la même manière que dans tous les villages qui dépendent de lui et que cette ville apparEient à Ségou depuis son origine. Si la ville était vraiment sous l'autorité de cet Al).mad b. Abmad, :es relations entre lui et elle ne seraient pas de cette nature. Et même en admettant qu'elle soit sous son autorité comme il le dit, nous y sommes quand même entrés et (nous y avons trouvé) son chef en état d'infidélité. En effet, lorsque nous sommes entrés à Sansandi et que les envoyés de cet Al)mad b. A~1mad sont venus nous y trouver avec cette lettre, nous leur avons montré les idoles qui étaient dans le palais du chef, et que celui-ci adorait à la place de Dieu. Nous les avons sorties (du palais) pour que les gens présents puissent les voir. Si l'on admet, comme cet Al).mad b . Al).mad le prétend, que les habitants de cette ville ne sont pas des sujets de Ségou, nous les avons pourtant trouvés dans cet état (d'infidélité) en entrant dans leur ville. Si l'on admet, par contre, que la ville dépend de Ségou et est placée sous l'autorité de celle-ci, ses habitants sont des Infidèles aussi dans ce cas. Or, selon le commandement de Dieu Puissant et Grand, il ne nous est défendu d'entrer dans cette ville dans aucun des deux cas. Outre que la prétention d'A]Jmad à avoir placé les habitants de Sansandi sous son autorité est un mensonge pur et simple, la Loi (farc) et la tradition locale (câda) lui apportent un démenti. Car, il n'est pas possible qu'il s'agisse d'une ville placée dans son obédience (bayca) si les règles qui caractérisent une telle obédience (aJ:ikâm tilka al-bayca) ne s'exercent pas sur elle. On dit que par l'acte d'obédience en question, (ses habitants avaient fait) leur soumission aux Musulmans ; or la ville en question se trouve au milieu des Polythéistes, et ne s'exerce d'autre autorité Umkm) sur elle que celle du Polythéiste qui est sultan de ce pays. Comment peuvent donc s'exercer ensemble l'autorité de l'Islam et celle de l'infidélité sur une même ville ? On ne peut pas croire que cette ville soit dans l'obédience de cet Al)mad b. Al;mad sans une enquête sur les habitants (pour déterminer) s' ils sont Musulmans ou Infidèles. Comment (peut-il affirmer de telles choses), alors qu'il n'est jamais entré dans cette ville, ni lui-même, ni aucun de ses envoyés, ni personne que l'on dise de ses adeptes ? / 12 recto / Toutes les fois qu'Al)mad a cherché, lui ou son armée, à entrer dans cette ville, les habitants de celle-ci s'y sont opposés et ont livré bataille 171 . Dans tous les cas, notre entrée dans cette ville est une obligation, qu'elle soit (sous l'autorité) de cet Al)mad b. Anmad comme il le prétend ou qu'elle appartienne à Ségou. Et çette obligation résulte de l'infidélité totale de ses habitants et de la manière qu'ils ont de mêler les œuvres du polythéisme à celles de l'Islam. En effet. ils se réclament de l'Islam en parole 172 mais ils se livrent en fait aux œuvres du polythéisme. Il est clair que la nécessité s'impose de combattre celui qui est dans un tel état. car c'est un Infidèle sans l'ombre d'un doute. 97

Dans les « Agwibat Askiyâ » et dans le « Misbâ}J. al-Arwâb-fi U~l al-Falâ}J. » qui sont tous deux des ouvrages d'al-Magîli, figure la réponse à la question concernant les gens qui prétendent être musulmans et qui vénèrent des lieux, « des arbres et des pierres en faisant auprès d'eux des sacrifices, des dons ($adaqa) (. ..) ; ils recherchent ainsi l'assistance des devins et des sorciers ». Quiconque se trouve dans cet état est un Infidèle sans aucun doute. (Al-Magîlî) déclare : « Car il y a trois catégories d'infidèles : - la première est composée de tout Infidèle formel par origine, comme les Chrétiens (. . .) les Magûs 173 , et ceux qui sont comme eux, qui ont hérité l'infidélité formelle de leurs pères ; - la deuxième comprend celui qui fut musulman puis apostasia ostensiblement, déclarant sortir de la religion musulmane pour entrer dans une des religions de l'infidélité ; - la troisième est composée de qui se prétend musulman, et sur qui nous avons porté un jugement d'infidélité parce que son comportement extérieur ne peut procéder que d'un infidèle, ainsi que vous l'avez indiqué vous-même au sujet de Sun cAli et tous ses collaborateurs » 174 . Al-Magîlî avait précisé auparavant que l'accusation d'« infidélité » (contre quelqu'un) porte sur l'un des trois points suivants : Premièrement: si · sa croyance en elle-même est une infidélité 175 comme la négation du Créateur (. .. ) Deuxièmement : tout ce qui ne peut provenir que d 'un infidèle, même s 'il n'y a pas infidélité formelle, comme permettre la boisson du vin, les spoliations des biens, l'abandon des obligations religieuses, le meurtre, la fornication, l'adoration des idoles, le manque de considération pour les envoyés de Dieu, le rejet de quelque chose du Coran ( ..) Troisièmement : quiconque dit des paroles manifestant qu'elles proviennent seulement de quelqu'un qui ignore Dieu, (. ..J sur ce point subsistent (cependant) des divergences (entre les culamâ')1 76 • Plus loin, (l'auteur) dit (encore) : « Si vous savez bien cela, il vous apparait clairement que ce que vous avez signalé au sujet de Sun cAli 177 et tous ses collaborateurs est signe, sans aucun doute, d'infidélité; s'il fut tel que vous l'avez décrit, il est (évidemment) un infidèle. De même en est-il pour qui s'est comporté comme lui. Bien plus, il faut accuser d'infidélité pour moins que cela »178 Le fay'1 cu!mân b. Fûdî, dans le Sirâg al-ff}wân, au chapitre quatri~me, sur la question de savoir comment on peut juger les gens qui prononcent la formule de la Sahâda et qui accomplissent les œuvres de l'Islam mais les mêlent aux œuvres de l'infidélité, déclare ceci : «Le gihâd contre ces gens-là est une obligation (wâgib) selon l'avis unanime de toutes les autorités (igmâc ), car ce sont des Infidèles (kuffâr) selon l'avis unanime de ces mêmes autorités. En effet, l'Islam, s'il est mêlé au polythéisme, ne peut être pris en considération ». On pourrait admettre (les reproches d'A}J.mad) si nous étions entrés dans cette ville (qu'il prétend sienne) sans l'accord de ses habitants, mais comme ce sont eux qui nous ont annoncé leur conversion (tawba) ainsi que leur passage sous (notre) autorité (bayca) - et si l'on ajoute à cela le fait que tout le monde sait bien que les habitants (de Sansandi) étaient les sujets de Ségou, et de personne d'autre - alors, il n'y a pas de discussion possible. Quand AJ:unad dit dans cette lettre : «Le fait que tu te mettes à provoquer les discordes (fitan) et à ranimer l'erreur"rbâ!il) » ... , cette parole, à l'évidence , se retourne contre lui-même, car il n'y a pas d'incitation plus grave à la discorde que celle qui consiste à faire prêter, par les Musulmans, assistance aux Polythéistes en vue de combattre leurs propres frères musulmans/ 12 verso/. Et il n'y a pas de plus sûr moyen de 98

~

ranimer l'erreur que de vouloir maintenir l'Etat polythéiste alors que la victoire est proche et que cet Etat est« sur le bord d'une berge rongée » 179 • Car l'erreur c'est le polythéisme. Il est clair que la flèche (qu'il a envoyée) lui est revenue en (pleine) poitrine et que ses abominations proviennent de l'habileté (nukr) avec laquelle il utilise la citation du verset suivant : «Qu 'ils portent leur faix complètement, etc. 180 Il est clair qu'il a trompé ceux des Musulmans qui le suivent sans qu'ils le sachent, au point de les conduire dans le Feu, dans ce monde ci comme dans l'autre. Il en est de même pour les }JadîJ qu'il a invoqués comme argument, ainsi que nous l'avons démontré plus haut. La deuxième question est celle du Bagûna. Voici comment elle se présente : (les habitants de) ce pays, depuis qu'il existe, se divisent en trois groupes : - le premier se compose de Banbara (banâbira) infidèles et polythéistes qui adorent les idoles à la place de Dieu ; - le second se compose de MulJâribûn 181 qui coupent les routes, perçoivent des taxes illégales (mula1s), cherchent à faire passer pour licites les choses défendues et prennent les biens des Polythéistes comme ceux des Musulmans. Et pourtant ceux-là disent : « Lâ ilâha il/a Allâh ». Ils n'ont jamais été sous l'autorité d'AI:imad depuis qu'ils habitent le pays jusqu'aux jours où nous sommes entrés chez eux ; - le troisième se compose de tribus musulmanes pauvres et opprimées (mustacj.cafûn) qui sont prisonnières entre les mains des Polythéistes, Banbara et autres. Tel est ce pays (de Bâguna) qui rassemble ces différentes catégories de populations. Celui qui considère que l'on juge (de la religion d'un pays) d'après celle de la majorité de ses habitants en conclura à la nécessité de combattre ceux-ci, dans leur ensemble. Et celui qui considère que l'on juge (de la religion) d'un pays d'après celle de son chef en conclura aussi à la nécessité de les combattre, car ce chef est soit un Infidèle manifeste, soit un Mul:zârib, soit quelqu'un qui se rattache à l'une de ces deux (catégories) et prétend (abusivement) appartenir à l'Islam. L'état dans lequel nous avons trouvé ce pays était conforme à cette description. Il n'échappe (ainsi) ni à vous, ni à182 personne (d'autre) que nous devions effectivement mener le gihâd contre les habitants de ce pays à ce moment là. S'agissant de l'infidèle manifeste, l'obligation de le combattre s'impose avec évidence à l'ensemble des Musulmans, (comme) Dieu le Très Haut (l') a dit : « Combattez les Associateurs ( musrikîn) totalement comme ils vous combattent totalement » 183 • Et le temps de l'impératif désigne ici une obligation (absolue) (qui reste valable) aussi longtemps que l'acte de sirk 184 existe. Les commentateurs du Coran (mufassirûn), à propos de cette Parole de Dieu le Très Haut : «Combattez les jusqu'à ce qu'il n '.Y ait plus de persécution (fitna), » 185 ont expliqué que cela voulait dire : jusqu'à ce qu'il n'y ait plus de sirk. Il en est ainsi dans le Tafsîr al-Galâlayn dans le Tafsîr d'al-ijâzin, dans al-Sirâg al-Munir, dans le Madârik al-Tanzîl de Nasafî, dans le Tafsîr d'al-Bayçlâwi, dans al-.l)ahâb al-Ibrîz , et dans le l)iyâ' al-Tawîl. Le texte même du verset (mantûq al-âya), dans la Parole de (Dieu), précise : (Combattez/es jusqu 'à ce) « que le Culte en enÙer soit (rendu) à Allah » 186 . Concernant cet autre verset : ... «après que la guerre aura déposé son faix » 187 , toutes les autorités se sont accordées (pour reconnaître) que cela voulait dire : jusqu'à ce qu'il ne reste plus que des Musulmans et des gens pacifiques. Et il est aussi écrit dans le hadît : « le gihâd restera actuel (mâdin) dans Ma communauté (ummatî) jusqu'au jour du Jugem~nt ~ 188 . · S'agissant du Mul]ârib, l'obligation de le combattre lui aussi, est également claire, et cela dès qu'il se livre à un acte de ~irâba 189 , même si, (par ailleurs), il ne commet aucun acte d'infi99

délité. Mais, que doit-on alors penser de lui s'il se livre à la fois (à des actes de l}.irâba et d'infidélité)? On (doit) le combattre (d'abord) parce qu'il est infidèle, puisqu'il commet des actes d'infidélité, et (aussi) parce que c'est un MufJ,ârib puisqu'il coupe les routes aux Musulmans. Ibn al-l:lâgib a dit dans son Mubta~ar al-Farcî « de l'avis unanime, il est permis de les combattre». Et dans le commentaire d'al-Ughûrî, qui est un commentaire du Mul]ta~ar, (on trouve ceci :)

« On tient de Ibn Sâs, dans son livre Al-Ôawâhir : « On ne doit pas renoncer au gihâd par peur des brigands qui pillent (mutala$~i~în), car il est très important de les combattre » » / 13 recto/ Et, plus loin , (al-Ughûrî) poursuit : « Ibn Sébân a dit : « Ceux qui coupent les routes en semant la terreur sur les chemins méritent davantage le gihâd que les Byzantins ( al-Rûm), ce qui veut dire que, en général, les méfaits des premiers sont durables, et non ceux des Infidèles » ». Ibn Nâgî, dans son Sar}J. al-Risâla rapporte les mêmes propos d 'Ibn sacbân. Et dans la Jfâsiya (gloses) qu'Al-Bannânî a écrites en marge du Tawcfîlf de cAbd al-Bâqî al-Zurqâni , il est dit : « Dans la Mudawwana, le gihâd contre les Mu:tiâribîn est un (vrai) gihâd ». Et dans la cutbiyya on trouve :

« Ce gihâd (contre les Mul).âribîn) est un des gihâd les plus importants, et qui rapporte le plus de mérites ». Chez Mâlik (b. Anas) - que Dieu ait pitié de lui! - au sujet des Bédouins (é râb) qui coupaient les routes, on trouve ce propos : « le gihâd contre eux est, pour moi, préférable au gihâd contre les Rûm », et, de même, dans le Kabîr de Bahrâm, commentaire du Mu!Jt~ar, où il est dit : « Ibn Sacbân soutient que le gihâd contre les Mul).âribîn est supérieur au gihâd contre les Infidèles ». Une opinion à peu près identique est exprimée dans lac Utbiyya. Ashab fait une citation de Mâlik (b. Anâs) qui exprime une opinion à peu près identique, et il dit : « le sens évident des positions (kalâm) des savants du maghab (malikite), c'est qu 'il n '.Y a pas de différence entre la lutte contre eux et celle contre les Infidèles ». Et dans le Magmuc al-Amîr: « il faut que le gihâd soit mené (d'abord) sur le front le plus important mais il est également nécessaire de protéger tous les (autres fronts) selon les possibilités ; on commence par les Mutlâribîn sauf si le danger que ceux-ci font courir, (dans le gihâd), devient grand, (auquel cas), selon l'usage, (il convient de) choisir le moindre des deux maux ». Et dans la J:fâsiya d'al-Bannânî, qui est un commentaire de cAbd al-Bâqi (al-Zurqâni) , on trouve ce qui suit :

« Le délit de l).irâba existe dans tous les cas, que l'acte soit grave ou léger ». L'auteur de la Mudawwana dit : « on doit juger de la même manière tout Mul}.ârib, qu'il ait pillé une petite ou une grande quantité de biens, et cela même s'il a pris moins d'un quart de dînâr. Bien plus, la condamnation d'un acte de l}.irâba s'impose dès que son auteur a effrayé (ses victimes), même s'il n'a rien pris; qui plus est, elle s'impose dès que ce dernier a fait une sortie dans ce but, même s'il (n'est pas allé jusqu'à) effrayer (les gens). Regarde ... » 190 L'origine d'une telle position (kalâm) se trouve chez le foyl.J Mu~tafâ al-Rammâ~ 191 , dans sa Jfâsiya (gloses) des commentaires du Mu[ua~ar. (Ce fayfj.) dit dans un autre (ouvrage) 192 : «Et tout cela, c'est la doctrine (madhab) contenue dans la Mudawwana : il y est écrit en effet : « il en est de même s'il 193 en pren-d seulement le chemin 194 , même s'il n'effraie (personne) » ». Tout cela ne concerne que le Mu~1ârib musulman ; (à plus forte raison) s'il s'agit d'un Infidèle qui considère comme licites les choses interdites (mul1arram), comme (le font) les Mu!J.âribûn 100

d u Bâguna, il n'y a pas besoin de discussion sur un tel sujet. Ce que nous avons exposé ci-dessus constitue, entre autres raisons, l'un des motifs de notre guerre contre les gens du Bâguna. Je voudrais bien savoir comment une personne sensée pourrait admettre la validité d'une soumission (bayca) à l'Islam, comme celle dont Al).mad prétend être l'auteur et le bénéficiaire (~â}J.ib), et q u'il prétend aussi être générale, s'agissant d'un pays d'infidélité complète et de tyrannie extrême sur lequel aucune autorité (légitime) (l}ukm) ne s'est exercée. Les prétentions d'Al].mad n'ont pas d'autre effet que la guerre que lui font les gens du Bâguna et que lui-même mène contre eux (réciproquement), ou alors les flatteries que les plus faibles d'entre eux lui adressent pour en obtenir quelques largesses. Par Dieu, c'est vraiment étonnant. Comment (peut-on parler ainsi) quand Al-Bu~îrî dit : « Les prétentions que l'on ne peut justifier donnent des fruits illégitimes ». La troisième question est la suivante : c'est la question de la conversion (tawba) des Infidèles de Ségou entre les mains d'Ahmad et de l'acte de soumission (qu'ils auraient prononcé) devant lui. Pour répondre à cette questi~n, comme aux deux questions précédentes, et aux deux lettres mentionnées ci-dessus, ainsi qu'à cette lettre-ci, il suffit (de lire) la lettre que cet Al).mad b. Al).mad et son 'Say!:J al-Fâhim Sulaymân nous ont fait parvenir à Ségou195 , et dont le texte (est le suivant). Après la formule de louange (al-~amdu) 196 , « Sache ceci, ô sayg (c Umar) / 13 verso / : s'agissant des conclusions que notre élève AIJ,mad b. A~mad (croit pouvoir) tirer de tout ce qu'on raconte au sujet de Sanbunni 197 , Bâguna et Sansandi, je lui ai indiqué qu'il n '.Y avait pas là matière ( dalîl) à justifier l'envoi de troupes contre vous. Car ce que l'on entend dire (gabar) n'est jamais comme ce que l'on voit. Et celui qui prétend détenir un bon argument ( dalîl) pour justifier l'envoi de troupes contre toi, en invoquant ce qu'on raconte au sujet de $anbunni, de Sansandi, de Bâguna, de Karta et de Ségou , qu'il me montre cet argument. Jamais je n'ai entendu dire à propos de ces cinq cas ( aqsâm) quoi que ce soit qui puisse justifier l'envoi de troupes contre toi-même , pas même la plus petite remarque». 198 Ici s'arrête la citation que nous voulions faire de cette lettre. Au bas de cette lettre, cet Al)mad b. AJ:tmad a écrit ce qui suit : «Salut et respect de la part de l'élève du fayg Sulaymân, AIJ,mad fils de l'amîr al-mu 'minîn AIJ,mad, fils du fayJ:! Ahmad b. Mul:zammad au fayg cumar b. Séîd: sache que la lettre (barâ'a) de mon fayl_} , c'est (comme sic 'était) la mienne. Salut ». Ici s'arrête ce que cet Al).mad b. Al)mad a écrit. La vérité, c'est ce dont les ennemis (euxmêmes) portent témoignage. La quatrième lettre d'AJ:imad est celle que nous avaient fait parvenir les envoyés qu'il nous avait dépêchés, et ceux-ci raccompagnaient les envoyés que nous avions (nous mêmes) dépêchés , à Sansandi. Cette lettre est en elle-même la plus grande preuve Ozugga) qui (puisse) exister contre lui, car tous les arguments qu'il invoque dans cette lettre sont empruntés au Sirâg al-I!Jwân du foy!:J cutmân b. Fûdî et aux propos de lbrâhîm al-Laqâni dans son commentaire (sarfl) intitulé cUmdat al-Murîd. Les propos en question sont véridiques, exacts et incontestables, et bien des auteurs les ont cités. Mais il n'y a rien là-dedans qui puisse servir d'argument (/Jugga) à cet AJ:tmad b. A.Qmad. Au contraire, cela se retourne contre lui (IJugga calayh). Parmi les arguments qu'il invoque dans cette lettre figure le IJ.adî{ suivant : « On m'a commandé de combattre les gens jusqu'à ce qu'ils attestent qu'il n'y a de dieu que Dieu etc. » 199 Cette citation se retourne contre lui ; en effet, quand (le Prophète) dit : «on m'a demandé de combattre (les gens) », il s'agit là d'une expression dépourvue de toute ambiguïté selon laquelle celui qui combat (al-muqâtil bi'l-kasr) 200 , et qui combat jusqu'à ce qu'il ait amené l'Infidèle à prononcer la fohâda, c'est lui qui a le droit de s'occuper de cet Infidèle qui a été ainsi 101

contraint de prononcer la sahâda. Et quand le (Prophète) dit encore : «ils ont prémuni (leurs vies et leurs biens) face à moi »201 , cela veut dire que, si l'infidèle embrasse l'Islam, c'est celui qui l'a combattu qui doit s'arrêter lui-même de le combattre afin d'obéir au commandement de Dieu le Très Haut et de Son envoyé - que Dieu le bénisse et lui accorde le salut ! -, si (du moins) c'est quelqu'un de savant et qu'il agisse conformément à ce qu'il sait. Et il doit empêcher ses sujets de combattre cet Infidèle du moment que (icjâ) celui qui combat a atteint la limite permise d'une telle lutte, et cette limite est soulignée par l'expression « jusqu'à la limite » (hattâ al-gâya) qui est contenue dans le verset : « combattez-les jusqu 'à ce qu'il n'y ait plus de persécution (fitna) »202 ; or cela n'est réalisable et possible qu'après avoir obtenu la victoire. Et ce que nous faisons, grâce à Dieu , nous le faisons en suivant l'exemple du Prophète - que Dieu le bénisse et lui accorde le salut ! : ainsi, nous sommes entrés dans la capitale des Infidèles en célébrant (le nom de Dieu) et en ruinant leurs vanités, en brisant leurs idoles (a$nâmahum wa awtânahum) 203 et en les détruisant toutes de fond en comble, tout cela en leur présence. Nous les avons soumis au Dieu unique dans tous leurs actes jusqu'à ce qu'il n'y ait plus de persécution (des Musulmans) (fitna) et que la religion soit toute entière dédiée à Dieu. Les deux foylj (Buhârî et Muslim) rapportent, d'après Ibn cumar, que l'Envoyé de Dieu - que Dieu le bénisse et lui accorde le salut ! -, lorsqu'il entra à la Mecque et (qu'il vit) autour de la Maison (bayt) 204 trois cent soixante idoles, se mit à les frapper avec le bâton qu'il avait dans la main et fit la déclaration suivante : «La vérité est venue et le mensonge s'est évanoui » 205 (Si l'on considère) le pronom personnel dans (l'expression) « on m'a demandé de combattre » et la hamza de ce deuxième verbe 206 , et (si l'on considère aussi) le pronom personnel qui est un complément indirect (magrûr) après la préposition « face à » (min) dans l'expression « ils ont prémuni face à moi » ..., la signification de ces (différents éléments) est évidente pour quiconque car ce sont des pronoms personnels de la première personne et le /:tadî; doit (ici) être lu littéralement (cala cumûm). En effet, il n'y a rien dans ce }J.adîf qui indique que la négociation entre (les Infidèles) et ceux qui les ont combattus puisse être menée par quelqu'un d'autre, resté étranger à la lutte et éloigné de celle-ci. A plus forte raison (n'y a-t-il rien non plus qui indique) / 14 recto / que cette parole (du Prophète) (puisse) s'appliquer à une telle personne. Et tout cela, en admettant que (ces Infidèles) aient bien confessé la fohâda et se soient convertis, mais c'est là une supposition erronée qui ne correspond vraiment à aucun évènement réel. (Al:tmad) a également avancé comme argument ce propos selon lequel « il serait défendu de chercher à connaître leurs pensées profondes et à semer le doute dans leurs croyances ». C'est un argument qui n'est pas valable ; c'est comme un coup (de marteau) sur du fer qui n'a pas été chauffé. Car cette (interdiction) ne s'applique qu'à celui qui sème le doute dans les croyances des gens, alors que celles-ci sont devenues correctes aux yeux de tous et que ces gens sont déjà connus comme Musulmans. Le jugement que l'on porte sur une chose dépend de la représentation que l'on s'en fait soi-même. Comment (pourrait-on accepter un tel argument) alors que ces gens n'étaient pas du tout connus alors pour (se conformer à) la moindre des pratiques extérieures de l'Islam ? En vérité , cet Al).mad b. Ahmad a eu peur de leur demander de pratiquer publiquement l'Islam - qui est (le seul moyen de) sauvegarder la vie et les biens de celui qui pratique - uniquement parce qu'il répugnait à rendre leurs refus officiel. Le reste des propos d'al-Laqâni et des autres se retourne tout à fait contre lui. 0 Dieu ! Comment quelqu'un qui se prétend musulman peut-il demander la protection (ci~ma) des vies, des biens et de l'honneur des Polythéistes et invoquer pour cela les !JadîJ ? (Al:imad b. Al).mad) verse le sang des Musulmans, pille leurs biens, ruine leur honneur, et cela en toute impunité, et il considère ces actions comme licites sans aucune raison valable . Il est écrit dans les (l}adîl) que faire sortir un seul Musulman de l'Islam est plus lourd de conséquences que 102

d'y faire entrer mille infidèles. Ce (qu'Al).mad fait), par Dieu, est vraiment extraordinaire. Dans toutes les parties du monde musulman, on a toujours su que la protection des Infidèles, de leur vie, de leurs biens et de leur honneu1 (n'était pas garantie) tant qu'ils ne se convertissaient pas à l'Islam, (et ceci est attesté) par toutes les autorités unanimes. De même, toutes les autorités sont d'accord pour dire que le plus grand des péchés, après le polythéisme c'est de tuer un être humain - chose que Dieu a interdite à moins d'une raison valable. L'inviolabilité des biens et de l'honneur du Musulman, c'est cela qui est clair. Mais le Très Haut a dit : «Ainsi, nous avons paré (de fausses apparences) les actes de chaque communauté »207 . Il n'y a de puissance et de force qu'en Dieu, le Très Haut, le Très Grand. Sa cinquième lettre, c'est celle qu'Al:tmad nous a envoyée et qui nous est arrivée après que son armée se soit mêlée à l'armée des Polythéistes et que ces deux armées se soient mises en position d'un commun accord, au bord du Fleuve. Nous, nous étions alors à Sansandi, et cela venait après qu'il eût préparé ses troupes contre nous au bord du Fleuve, auprès duquel nous étions nous même installés : à ce moment, il croyait être à l'apogée de sa puissance bien que par là il fût déjà (sur le chemin) de sa propre perte. Cette lettre ne parlait pas de la question·des Polythéistes, sauf à la fin. En résumé , elle comportait deux questions : la première concernait l'ordre qu'Al:tmad nous avait donné d'entrer dans son allégeance ou sinon de quitter le pays du polythéisme, et cela après que Dieu nous eût donné de venir à bout de ce pays et qu'il n'en restât plus que la capitale (qâc ida); dans la seconde, nous étions informés que, si nous n'acceptions aucun des deux ordres mentionnés ci-dessus, il n'y aurait plus d'autre solution entre nous et lui que le combat. C'est ce qu'A]Jmad a annoncé clairement quand il dit : «Si ma lettre te parvient, choisis pour toi ce qui te convient: de deux choses l'une, ou bien tu entres dans notre allégeance, ainsi qu'il t'incombe de le faire , car, selon l'avis unanime des docteurs (igmacan), il n'est pas permis d'avoir plusieurs dirigeants, à une même époque, dans un même pays ou dans des pays voisins», et ainsi de suite de cette manière jusqu'à «sinon tu dois quitter ce pays et partir combattre les ennemis de Dieu, car cela vaut mieux pour toi que de provoquer le désordre (fitna) ». Al).mad avance alors comme argument les hadîf que l'on cite quand il y a des dissensions entre les Musulmans. Puis il dit : «si tu choisis de t 'obstiner dans ton désir de division, nous suivrons à ton égard le commandement du Prophète - que Dieu le bénisse et lui accorde le salut ! - ». Celui-ci ordonne en effet de combattre les gens de ton espèce, dans le f:zadî! déjà cité , en ces termes : « Celui que vous voyez se séparer de la collectivité (des Croyants) (gamâca) ou qui veut diviser la communauté (umma) de Muhammad - que Dieu le bénisse et lui accorde le salut! - tuez-le, quel qu'il soit » 208 • Et, plus loin Al).mad déclare / 14 verso / : « Si nous te combattons, ce n'est donc pas pour notre plaisir (hawan), mais pour suivre le commandement de notre Prophète ». Plus loin, encore : « Et sache que si tu ne fais pas le choix que je t'ai indiqué ci-dessus, il n'y aura entre nous d'autre solution que le combat ordonné par le Prophète - que Dieu le bénisse et lui accorde le salut! - »,et ainsi de suite jusqu'à la fin de son propos. Le reste de la lettre est sans intérêt : quand il dit d'abord par exemple : «La raison qui me pousse à t 'écrire, c'est le souci de te faire savoir que l'obstination que tu mets dans ton désir de diviser l'Islam est formellement proscrite (mu.Q.arram) par toutes les autorités unanimes (bi'ligmâc) » ou encore quand il dit à la fin de sa lettre : « Cela ne doit pas nous obliger à nous insulter ni à nous moquer l'un de l'autre ». Quand il prétend nous obliger à nous soumettre à son (autorité), il suffit de lui répondre ce que son 'SayLz Al)mad al-Bakkây lui avait répondu lorsqu'il lui avait demandé de se soumettre à son autorité. Voici, en effet, ce que AJ:lmad al-Bakkây lui avait répondu : « Je ne te prêterai pas le serment d'allégeance car tu n 'a ppartiens pas à la communauté (umma) de Mul1amnzad - que Dieu le bénisse et lui accorde le salut ! -. Il avait dit également : «Non, par Dieu, je n 'accepte pas que 103

l'autorité de Notre Seigneur (Mawlânâ) le farîf2° 9 cAbd al-RafJmân, ni celle du Sultan des Turcs cAbd al-Magîd s'exercent sur moi210 , ni sur ceux qui sont avec moi, à plus forte raison l'autorité du nègre (sûdânî) peul (fulânî) A"f:zmad b. Af].mad. (Si je faisais cela) « je m'égarerais alors et ne serais pas parmi ceux qui sont dans la bonne direction »2 11 . «Nous forgerons un mensonge contre Allah, si nous retournons à votre religion (milla) après qu'Allah nous a sauvés d'elle. n ne nous appartiendra de retourner à (votre religion) qu 'autant qu'Allah notre Seigneur (le) voudra » 2 12 • (Al-Bakkây) avait (encore) dit : « Je ne t'accepte que comme mon élève, ou à défaut comme un ami lointain ( agnabî}2 13 ou sinon comme un ennemi lointain. Comment ( pourrais)-je te suivre alors que les Banbaru infidèles ont fait reproche à ton cousin paternel (ibn cammik) Ba Lubbu de te suivre 214 : s'ils n'ont pas accepté cela de lui, comment veux-tu que je l'accepte pour moi ? En vérité je ne (peux) suivre qu'un Saint (walî), savant, agissant (selon sa science) et parfait, et un Pôle ( qu~b) comme mon père et mon grand-père, sinon il n'en est pas question ».

(Al-Bakkây) avait (encore) dit : « Pour ce qui est de t'obéir, plutôt le Feu (de /'Enfer), le déshonneur et ses peines, la mort et ses affres. Même si tu étais /'imâm 54bd al-Qâdir al-Futâwî avec son âge et sa science, je ne le ferais pas. Mais comment! Tu (n ')es ( qu '}AfJ.mad b. A~1mad. N'espère donc pas cela de moi. Ne vois-tu pas que tu ne gouvernes en ce moment qu'aux Peul (Fullân) ? » (Al-Bakkây) avait encore dit : « Et puis tu n 'espérais assurément point que je t'obéisse. Mais (tu m'as dit cela) par insolence et impudence, en te souciant peu des paroles de reproche 215 que cela te vaudrait de ma part. C'est pourquoi j'ai fait en quelque sorte le contraire de ce que tu croyais que je ferai: en effet, je me tais devant toi par égard pour tes aïeux. Je te cite ce que disait un de ces vagabonds arabes216 : « (On juge) les gens d'après ceux qui les gouvernent et les Arabes dont les gouvernants sont des non-Arabes n e connaîtront pas le succès, car ces d erniers ne sont pas cultivés, n'ont pas d'ascendance noble (l:tasab)2 17 ; ils ne tiennent pas leurs promesses ni leurs engagements». (Al-Bakkây) avait (encore) dit : «Sur ma vie, je (ne) connais (pas) d'autorité dans ce monde ni dans l'autre qui pourrait me contraindre à ce que tu me demandes, sauf si j'apprenais que je ne pourrais pas entrer au paradis ni échapper à l'enfer en ne te suivant pas ». Et plus loin : « N'importe quel mal vaut mieux que de te suivre et toute bonne action devient mauvaise en te suivant. Car tu écartes les grands (savants) (kubarâ') et tu t'en remets aux médiocres ( ~ugarâ'); tu éloignes les fuqahâ' et tu t'entoures d'insensés, tu élèves les enfants et tu abaisses les parents, tu exaltes les enfants des prostituées (bagâyâ) et tu humilies les enfants des femmes de vertu (mazâyâ). Comment pourrais-je me soumettre à ton autorité alors que ceux qui y sont assujettis la détestent ? » (Al-Bakkây) avait (encore dit) : « Je ne (te) suivrai pas et (il n'est pas dit) que s'exercera sur moi l'autorité de gens qui ne parlent pas l'arabe et qui ne connaissent rien 2 18 • Car si quelqu'un parmi eux prétendait parler avec Dieu le Très Haut, ils ne le traiteraient pas de menteur, si quelqu'un leur disait que le Mahdî 219 est parmi eux, ils le croiraient / 15 recto / , si quelqu'un leur disait que le douzième calife quraysite 220 est parmi eux, ils le croiraient. fls sont, en effet , comme une fille de vingt ans sans raison (caq]) ni religion. D'ailleurs, même si j'acceptais (tes propositions) - que Dieu m'en préserve ! - la Sarîca m'en empêcherait. Comment pourrais-je faire quelque chose qui est interdit dans ma Sarîca et qui répugne à ma nature ? Et de même, il n'est pas permis à un membre de la communauté (umma) de notre Prophète Mu}J.ammad - que Dieu le bénisse et lui accorde le salut ! - de se soumettre à quelqu'un qui n'appartient pas à cette communauté » etc. (Al-Bakkây) avait dit ensuite : «En résumé, renoncez à vos (prétentions) à exercer l'autorité (sur nous), répudiez les paroles que vous avez prononcées, chassez vos désirs, ceux que 11ous consi104

dérez licites (}J.alâl) comme ceux que vous considérez illicites (l).arâm): la bonne entente entre nous est à ce prix. Faites comprendre cela à votre imâm221 car il ne comprend que vos paroles ». Ici s'arrête la citation que nous avons voulu faire de cette lettre. Que le lecteur équitable regarde cela dans cette lettre d'(al-Bakkây) à (Al:imad) ! D'autre part, pour répondre aux propos d'A}J.mad, il suffit d'utiliser les termes qu'il avait lui-même employés dans sa seconde missive, que nous avons déjà citée, quand il dit : « la démission de l'imâm est une chose illicite (harâm), de l'avis unanime de toutes les autorités (igmacan) ». La réponse aux propos d'AQ.mad ressort clairement des propres paroles de celui-ci et de celles de son 'Say!J Al).màd al-Bakkây. Plus loin, nous verrons une (autre) réponse à cette question t elle qu'elle est réitérée dans les propos mêmes d'Al,lmad et dans ceux de son second iaylJ 222 al-Fâhim Sulaymân. Quant aux propos d'al-Laqânî qu'AI:imad invoque comme argument, à savoir qu'« il n'est pas licite d'avoir plusieurs imâm dans un même pays etc. »,cela ne constitue pas une preuve (valable) car Al).mad a demandé leur soumission aux Infidèles de Ségou avant que nous ne déclenchions le gihâd contre eux et il n'a pas été capable de l'obtenir. Comment (peut-il donc avancer de telles prétentions) alors que le pays de Ségou est un pays indépendant et que ni ce pays ni un autre (du même genre) ne sont (au nombre) de ceux que l'on peut annexer (comme cela) au pays d'Al).mad? Il aurait mieux valu qu'il applique cet argument, dans sa lettre et dans ses propos, aux gens du lfawsa 223 , car il y a moins d'un jour de marche entre leur pays et le sien. Mais Al).mad n'a pas osé leur dire cela. Par contre le pays de Ségou est un pays vaste et indépendant. Quand Al).mad prétend que !'Envoyé de Dieu - que Dieu le bénisse et lui accorde le salut ! - a ordonné de nous combattre, et qu'il rappelle cela deux fois dans cette lettre, cela n'ajoute rien (à sa démonstration). Tout au plus cela montre-t-il à l'évidence qu'il considère comme licite de nous combattre. Or le fait de considérer comme licite de combattre un Musulman constitue une infidélité, à quoi il convient d'ajouter une seconde infidélité : celle qu'il commet quand il traite d'infidèle le Prince des choses créées (sayyid al-wugûd) 224 - que Dieu le bénisse et lui accorde le salut ! - en lui faisant dire qu'il a donné la permission de combattre des Musulmans. Il n'y a de puissance et de force qu'en Dieu le Très Haut , le Très Grand. Quant aux IJadîJ qui parlent du combat entre Musulmans, tous se retournent contre lui car ils s'appliquent à celui qui cherche un tel combat et non à celui qui combat les Polythéistes. Celui qui 225 a fait prononcer ces (l]adîf) à AI:imad c'est celui qui connait les secrets et les choses les plus cachées. « Si quelqu'un dans ses paroles n'entoure pas de discrétion ses propres fautes, il est méprisable » 226 . A la fin de sa lettre, (Al).mad) ajoute ceci en po3t-scriptum : « Et puis, sache que les Banbara se sont repentis et se sont tournés ( tâbû) vers Dieu, qu'ils ont brisé les idoles et construit des mosquées; ce faisant, ils ont accompli ce que Dieu leur demandait. Et c'est Dieu lui-même qui nous avait ordonné de les combattre dans ce but, comme tout le monde le sait. Et (/à-dessus), salut ! ». Cette information contient un mensonge et est le fait d'un menteur. Car il reste des preuves qui (permettent) de réfuter ce qu'il a dit. En effet, voici leurs idoles qui sont (toujours) là et (qui), grâce à Dieu, constituent une preuve (iqâma) permettant de démontrer qu'il a menti. Et voici leur pays : quand il est passé entre les mains de Dieu, de son Envoyé et des Croyants, il n'y avait pas de mosquée dedans227 • Ce que Dieu attend d'(Al).mad), Dieu lui-même l'a exposé dans Son Livre, mais Il a rendu (Al).mad) aveugle l'empêchant de comprendre ce qu'il y a dans ce Livre et à qui ce dernier était adressé228 • Ou bien, (Al).mad) a fait exprès de négliger ce qui ~st exposé dans le Livre, alors que c'est une chose évidente pour tout autre Musulman que lui. De toutes façons, pour cela comme pour (tout) ce qu'il nous a écrit du début /15 verso / de l'affaire jusqu'à la fin , il suffit de lui (retourner) ce que lui-même et son 'Sayl:J al-Fâhim Sulaymân nous ont écrit dans la dernière lettre qu'ils nous ont adressée à Ségou. 105



Cette lettre commence ainsi : « Les salutations complètes de la part du fils de celui qui est connu sous le nom de 8ayb Sâg, et qui a été nommé Sulaymân par son père 229 , au 'Sayb cumar b. Sacîd. Sache, ô fayl}, que la dernière lettre qui t'a été adressée ne contient rien qui puisse t'accuser: c'est là une chose évidente pour un étranger 230 comme moi. Comment pourrait-on en arriver à démontrer qu'il faudrait chasser des gens qui viennent de conquérir (fatahû) la plus grande partie de Ségou par la force, et qui aspirent à venir à bout de ce qui reste ? D'ailleurs, en ce qui concerne Ségou et les autres (pays), on a falsifié (la vérité) et ces falsifications ne correspondent pas à la réalité ». Dans le reste de sa lettre, (Sulaymân) évoque des choses que nous avons déjà citées à la fin de notre réponse à la troisième lettre d'AZimad. Et cet Atunad b. AJ:imad a écrit ce qui suit au bas de la lettre (de Sulaymân) : « Salut et respect de la part de l'élève du sayh Sulaymân, Afzmad, fils de l'amîr al-mu'minîn A}Jmad, fils du sayg Ahmad b. Muhammad, au $ayp cUmar b. Sacîd. (Ahmad) te dit : sache que la lettre (barâ'a) de mon fay!]., c'est (comme si c'était) la mienne. Salut ». L'adversaire a avoué, la controverse est donc terminée231 • Car « la vérité, c'est ce dont les ennemis eux-mêmes portent témoignage »232 • Et si tu réfléchis au contenu de cette lettre, tu sauras que cet Al_unad b. Al}mad a confessé lui-même les mensonges que contiennent toutes les lettres qu'il nous a adressées, toutes les prétentions qu'il a formulées à notre endroit, ainsi que tous les arguments qu'il a utilisés contre nous du début jusqu'à la fin de cette affaire. La réfutation de ses propos résulte de la réfutation qu'il en a faite lui-même. Il a reconnu la fausseté de ses propres prétentions en laissant entendre qu'il y renonçait 2 33 et en confessant lui-même le caractère mauvais (fasâd) de tous ses actes. Louange à Dieu, Maître de l'univers !

106

DEUXIEME PARTIE

(Voici maintenant) la deuxième partie : elle comprend une présentation de la véritable nature d'(Alµnad), des causes qui l'ont conduit à nous faire la guerre, au point d'équiper des troupes contre nous, d'attenter à nos vies, à notre honneur et à nos biens, en considérant tout cela comme licite. Elle comprend (enfin) un exposé de tous ces événements. « 0 mes deux compagnons, voici le campement de cAzza, tenez en bride vos montures et pleurez à l'endroit ou cAzza habita! » 234 Sâche, ô lecteur équitable, que cet Al).mad b. AJ:unad, dans ses rapports avec nous, a désobéi aux commandements que Dieu a adressés à Ses Amis (awliyâ') les Croyants, et qu'il s'est écarté, en toute occasion, face à nous, de (l'exemple donné par nos) ancêtres vénérables et pieux (alsalaf al-~âlif;.în al-muttaqîn) parmi les Musulmans235 . Nous avons clairement expliqué dans ce qui précède, en introduction, la manière dont les incidents ont commencé entre nous, du début jusqu'à la fin de l'affaire. Depuis que Dieu nous a remis le soin de mener le gihâd contre Ses ennemis polythéistes, (Al)mad) cherchait des raisons de nous combattre et des circonstances qui lui évitent de se rapprocher de nous. Pour cela, il voulait trouver une justification dans la Sarîca de MuJ:iammad - que Dieu le bénisse et lui accorde le salut ! -, mais il n'en a pas vu. Il a dénoué les liens de la (Sarîca) et il a atteint le sommet de l'infidélité236 • En effet, il nous a combattus et il a agi avec nous en considérant comme licites les choses formellement défendues (ma/:zârim) par Dieu. Et il a pris comme frères les ennemis de Dieu et de l'ensemble des Musulmans, qui sont nos ennemis à nous, ses ennemis à lui, ennemis de ses pères, et il les a traités en amis, leur a prêté assistance et protection contre nous. Tous les gens sensés savent qu'il y a trois (sortes) d'amis : l'ami (proprement dit) ; l'ami de l'ami / 16 recto/ et l'ennemi de l'ennemi, et que, de la même manière, les ennemis sont au nombre de trois : l'ennemi (proprement dit) ; l'ami de l'ennemi et l'ennemi de l'ami. Tout ce que (nous avons expliqué) a conduit (Al}lnad) à lever des armées pour combattre les Musulmans occupés à mener le gihâd contre les criminels ennemis de Dieu. En effet les armées (d'AI:imad) se sont mêlées aux armées (des ennemis de Dieu), cheval contre cheval, fantassin contre fantassin, et ceci dans le but de protéger, de renforcer et d'exalter les Polythéistes qui sont les ennemis de Dieu, et (au contraire) d'affaiblir et d'abaisser les Musulmans (ah! al-islam)' et la profession de foi (kalima) : «il n y a de dieu que Dieu ». Et voilà! Nous te montrons comment Al).mad, de tout son être (a#an wa ra'san), a abandonné l'Islam 237• et ceci conformément aux déclarations de toute sorte238 faites par Dieu, par Son Envoyé et par les premières générations (tâbicûn) (de Musulmans) (qui constituent) la communauté (umma) de ce dernier. Et nous disons, s'agissant du devoir de solidarité (muwâlât) avec les 107

Musulmans, tel qu'il ressort des (textes) ci-dessus (mentionnés) : sache qu'il incombe à quiconque pratique la religion de Dieu et agit conformément à la Sunna de Son Envoyé - que Dieu le bénisse et lui accorde le salut ! - de rester solidaire (muwâlât) des Musulmans, de leur prêter assistance et soutien contre leurs ennemis polythéistes, conformément au Livre, à la Sunna, et à l'igma--c. Le Très Haut a dit : «Allah est le patron (walî) de ceux qui croient. n les fait sortir des Ténèbres vers la Lumière. Ceux qui sont infidèles ont pour patrons les Taghout 240 les faisant sortir de la Lumière vers les Ténèbres »241 . Les commentateurs du Coran expliquent que walî signifie le défenseur (n~ir) et celui qui prête assistance (mu cîn). Le Très Haut a dit : « Mettez-vous hors de péril en vous attachant à la protection d'Allah (l).abl AllahJ242 , en totalité, et ne vous divisez pas! (lâ tafarraqû) » 243 (L'auteur) d'al-Sirâg al-Munir déclare : « L'expression « lfabl Allah » désigne la religion ( dîn) de Dieu, qui est la religion de l'Islam, et l'expression « lâ tafarraqû » signifie que vous ne (devez pas) vous diviser, après avoir embrassé l1slam, par des querelles survenant entre vous, comme le font les gens du Livre et comme vous le faisiez à l'époque de la gâhiliyya, quand vous vous tourniez le dos et que chacun se faisait l'ennemi de son voisin et lui faisait la guerre ». Le Très Haut a dit : «Allah est le patron (walî) des Croyants » 244 , c'est-à-dire qu'il est leur défenseur. Les plus grands docteurs (ah! al-isâra) déclarent que ce dernier verset atteste le devoir de solidarité (tawallî) des Croyants entre eux. En effet, si un roi dit « je suis le walî 245 de telle personne » , il ne fait pas de doute que ce roi fera la guerre à celui qui est l'ennemi de cette personne, et si quelqu'un veut suivre ce roi, il sera solidaire (yatawallâ) de celui dont le roi est le walî ( tawallâhu). A plus forte raison , devons-nous être solidaires de celui-ci dont le Roi véritable est le walî (wâlâhu) et être l'ennemi de celui dont Il est l'ennemi. Le Très Haut a dit : « Votre patron ( waliyyukum) (est) seulement Allah, Son Apôtre et ceux qui croient, ceux qui accomplissent la Prière, qui donnent !'Aumône et qui s'inclinent. Quiconque prend pour Patron (et alliés) Allah (man yatawalla Allah), Son Apôtre et ceux qui croient .. . , car la Faction d'Allah forme les Vainqueurs » 246 . (L'auteur) d'al-Sirâg al-Munir déclare à propos de ce verset : «« (Dieu) a dit waliyyukum, il n'a pas dit awliyâ'247 ».pour bien montrer que le patronage (wilâya) de Dieu est premier, alors que celui de Son Envoyé vient seulement en second lieu. Car le sens virtuel (du verset) est: votre patron est seulement Allah et, de même (kaç!â), Son Apôtre et les Croyants. Si l'on avait dit : vos patrons sont seulement Allah, Son Apôtre et ceux qui croient, on ne distinguerait pas dans l'énoncé de la parole ce qui est l'origine et ce qui est la conséquence » . (L'auteur d'al-Sirâg al-Munir) ajoute : «(là où la Parole de Dieu dit) « man yatawalla Allah etc. »248 , cela signifie : quiconque prend pour patrons (awliyâ') Allah, etc., mais il y en a qui disent (que cela signifie): quiconque prête assistance et soutien à ceux-ci (Dieu 249 , Son Envoyé et ceux qui croient) ». (Le même auteur) déclare: «(quand.Dieu dit):« car la Faction d'Allah forme les Vainqueurs», S'fl répète le substantif (Allah) au lieu de mettre un (simple) pronom personnel250 , c'est pour bien montrer comment Il distingue (/es Croyants) (du commun des mortels), c'est pour leur faire désirer Son patronage (wilâya) et pour leur conférer la distinction qui s'attache à Son nom. C'est comme si on avait dit : quiconque prend ceux-ci 251 pour patron(s), lui (et ceux qui font comme lui) forment une Faction (J:i.izb), et « la Faction d'Allah forme les Vainqueurs ». 108

(S'il répète le substantif Allah), c'est (aussi) pour suggérer que celui qui prend pour patron(s) / 16 verso/ d'autres que ceux-ci251 , lui (et ceux qui font comme lui) forment la Faction (hizb) de Satan, c'est-à-dire le parti (~â'ifa) de ce dernier». On trouve à peu près (le même commentaire) chez al-Bayc;iâwî. Dans (l'ouvrage intitulé) Lubâb al-Tâwîl, l'auteur, après avoir énuméré les différentes opinions qui ont été exprimées concernant les motifs de la révélation de ce verset, écrit : « on dit que ce verset s'applique à tous les Croyants, car « les Croyants sont des affiliés (awliyâ') les uns pour les autres »25 2 et selon cette (opinion), quand Dieu dit: « Ceux qui accomplissent la Prière etc. », cela veut dire que ce sont là des signes distinctifs (sifa) de tout Croyant». Plus loin , il ajoute : « Il vaut mieux donner une valeur universelle (cumûm) à cette parole (de Dieu)». Il dit encore : « ce qui renforce (cette opinion), c'est ce (propos) que l'on tient de cAbd al-Malik b. Sulaymân : « J'ai demandé à Abû Gacfar MuI:iammad b. Alî al-Bâqir : dans le verset, « Votre patron est seulement Allah, Son Apôtre et ceux qui croient», qui sont ces derniers? Il m'a répondu : ce sont les Croyants. Alors, je lui ai dit : certaines personnes prétendent qu'il s'agit de cAlî b. Abî Tâlib. Il m'a répondu:« cAlî fait partie de ceux qui croient». Le Très Haut a dit : « Les Croyants et les Croyantes (au contraire) sont des affiliés les uns pour les autres »253 . (L'auteur d')al-Sirâg al-Munfr déclare : «Ils sont des affiliés les uns pour les autres à travers (fî) la religion, la bonne entente (ittifâq al-kalima), l'assistance et le soutien mutuels ». Le Très Haut a dit : « Soyez pieux envers Allah ! Etablissez la concorde entre vous ! »254 Pour les commentateurs du Coran, cela veut dire : améliorez vos relations par l'amour en renonçant à vos disputes et obéissez à Dieu et à Son envoyé dans ce qu'il vous a commandé, comme dans ce qu'il vous a défendu, si vous êtes vraiment des Croyants, car c'est ce que la foi exige. Médite cette parole (de Dieu) : «Si vous êtes Croyants». Elle montre bien que parmi les conditions de la foi complète et véritable (figure le devoir) d'établir la concorde entre (les Croyants). C'est un devoir indiscutable. Le Très Haut a dit : «Ne soyez pas en contestation sans quoi vous mollirez et le vent favorable tournera ! » 255 • Les plus grands docteurs (ah! al-isâra) déclarent à ce propos : Dieu a défendu aux Croyants de se disputer et Il leur a donné obligation de faire ce qui est sous-entendu par cette interdiction, c'est-à-dire de s'entendre entre eux, d'être des affiliés les uns pour les autres (muwâlât) 256 • Car les disputes ne devraient se produire qu'entre gens qui ont des principes (a~l) différents. Or les Croyants sont tous d'accord sur le (même) principe. Et ce (principe), c'est l'Islam. Celui qui conteste l'une des applications pratiques tirées (furû c) (des principes) de l'Islam, on doit craindre pour lui. En effet, les Musulmans ont une même profession de foi (kalima) et les Polythéistes ont (eux aussi) une même profession de foi ; et des disputes ne sont concevables qu'entre gens qui ont des principes différents. Le Très Haut a dit : «Il vous a tracé, à/ 'égard du culte ( dîn), ce qu'il a commandé à Noé, et ce que Nous t'avons révélé ainsi que ce que Nous avons commandé à Abraham, à Moïse et à Jésus, à savoir: « Acquittez-vous du culte ! Ne vous divisez pas à son propos ! » 257 Ce verset renforce ce qui précède. Les commentateurs du Coran déclarent à ce propos : Dieu puissant et grand a ordonné à cette communauté258 , et à celles qui l'ont précédée , de célébrer le culte islamique (dîn al-islâm), dans l'unité (bi'l-igtimâc) et dans la bonne entente. Ensuite Il nous 109

a indiqué ce qu'il faut comprendre par là, et Il l'a énoncé clairement. En effet, Il nous a défendu de nous diviser et (Il nous a ordonné) d'obéir aux deux commandements (mentionnés ci-dessus) , en faisant (ce qui est dit) en premier et en écartant (ce qui est interdit) en second 259 . Tels sont les devoirs qu'il nous a imposés. Le Très Haut a dit : « Les Croyants sont seulement des frères » 2 60 . (L'auteur d')al-Sirâg al-Munîr commente en ces termes ce verset : «« Les Croyants» - c'està-dire tous les Croyants, mêmes 'ils sont éloignés par la parenté ( ansâb) et par la distance 261 - sont «frères », parce que, par la religion ( dîn), ils remontent (intisâb) à une même origine 262 , et que (cette origine), c'est la foi {îmân) » . Plus loin, il ajoute : « On tient d 'A bû c UJmân al-Gabrî263 (/es paroles suivantes) : « La fraternité par la religion est plus constante que la fraternité par le sang : en effet la fraternité par le sang peut être rompue par la différence de religion, alors que la fraternité par la religion ne peut être rompue par la différence de sang ». Le verset du Coran qui précède celui que Ue viens) de citer pousse encore plus loin dans le sens de la bonne entente (entre les Musulmans) et insiste encore plus sur la (nécessité pour eux de) répudier la division. Pense à la manière dont notre Maître/ 17 recto/ Puissant et Grand répète, dans ce verset, les mots « établissez la concorde » (fa a~li!Jû) quand Il dit : «si deux partis de Croyants se combattent, rétablissez entre eux la concorde ! », puis, plus loin, ... «s'il (le parti rebelle) s'incline, établissez la concorde entre eux, avec justice » 264 , et encore « Les Croyants sont seulement des frères. Etablissez donc la concorde entre vos frères »265 . (Dieu) a répété trois fois dans le même passage la forme impérative « Etablissez la concorde entre eux ». Tout cela souligne la sollicitude dont (Dieu) entoure ses serviteurs (cibâd), le désir qu'il a de les voir unis et la répulsion qu'Il éprouve devant leurs divisions. Il est clair qu'il s'agit là d'une forme impérative qui entraine l'obligation (amr li'l wugûb) 266 et que, par conséquent, le devoir, pour les Musulmans, d'être des affiliés les uns pour les autres est sans équivoque . Quant à la Sunna, il suffit de (citer) les (JadîJ (suivants) : - « Le Musulman est le frère du Musulman » 267 . C'est ce qu'ont rapporté (a!:Jraga) AJ:imad (b. J:Ianbal), Abû Dâwûd et al-Jiâkim qui le tenaient de cuqba b. CAmir. - « Le Musulman est le frère du Musulman, il ne l'opprime pas et il ne le livre pas à qui (pourrait) l'opprimer ». C'est ce qu'ont rapporté les deux sayt! 268 , Ahmad (b. ijanbal) 269 et Al-Nasâ'î, qui le tenaient de Ibn cumar. . - «Le Musulman est le frère du Musulman, l'eau et (le fruit de) l'arbre 270 sont pour eux deux. Ils s'entraident pour résister à tout fauteur de troubles». C'est ce qu'a rapporté Abû Dâwûd qui le tenait de ~afiyya. - « Le Musulman est le frère du Musulman, il ne lui fait pas honte, il ne lui ment pas et il ne l'abandonne pas dans le besoin. Pour tout Musulman, l'honneur, les biens et le sang d'un (autre) Musulman sont J:iarâm 271 . La crainte de Dieu est «ici » et (en disant cela, le Prophète) a montré son cœur. Le mal commence pour un homme dès qu'il témoigne du mépris à son frère musulman »272 . C'est ce qu'a rapporté al-TirmiQî, qui le tenait de Abû Hurayra. - «Les Musulmans sont égaux par le sang273 ; celui d'entre eux qui est présent (adnâhum) peut prendre une responsabilité à leur tête, et celui d'entre eux qui est éloigné (aq~âhum) peut prendre une décision qui les engage. Les Musulmans sont comme (/es doigts d'une même) main contre les autres». C'est ce qu'ont rapporté Abû Dâwûd et Ibn Mâga, qui le tenaient de cAbd Allâh b. cAmr b. al-cAsi. C'est (aussi) ce qu'ont rapporté Al-Nasâ'î et al-Hâkim, qui le tenaient de cAlî. · · 110

- « Le Croyant est le frère du Croyant» . C'est ce qu'a rapporté Muslim, qui le tenait de "'Lqba b . cAmir274 • - « Aucun de vous n'est croyant s'il n'aime pas pour son frère croyant ce qu'il aime pour l!.ii-même »275 . C'est ce qu'ont rapporté les deux say!J. qui le tenaient de Anas b. Mâlik. - « Tu vois les sentiments de compassion (tarâl).umihim), d'affection (tawâdudihim), et d 'inclination bienveillante (tacâtufihim) que les Croyants éprouvent les uns envers les autres. fls sont comme un corps dont un membre souffrirait: tout le corps serait alors atteint d'insomnie et 'e fièvre »276 . C'est ce qu'a rapporté al-Bu]J.ârî, qui le tenait d'al-Nucmân b. Basîr. Ibn Abî Gamra a dit : « Quand (le Prophète) dit : fi tarâl).umihim (sentiments de compassion), cela signifie que la compassion (raJ:i.ma) qui existe dans le cœur des Croyants, les uns pour les autres, provient de la fraternité propre à la foi, et non d'une simple passion humaine (walû), ni de la charité, ni d'une fautre) raison, contraire à la foi (îmân). Tel est le fondement véritable (de ce sentiment) ». Il a écrit ensuite : « (L'expression) tawâdudihim (sentiments d'affection) veut dire : les relations (d 'affection) qu'ils entretiennent entre eux et la manière dont ils les mettent en pratique. Leur f ondement est également la foi». Il dit aussi : «Quant à (l'expression) al-tacâtuf (inclination bienveillante), elle désigne le fait (pour les Croyants) de se réconforter les uns les autres, à la façon d'un vêtement dont l'extrémité reste indissolublement attachée à celui-ci». Ces propos sont du même genre que ce que (Dieu) dit dans sa parole : « Entr'aidez-vous dans la bonté pieuse (birr) et la piété » 277 , .c ar le fondement de la foi, en vérité, c'est ce qui incline (ca.tafa) le cœur (des S:royants) les uns envers les autres. Si l'on prend maintenant I'igmâc 278 comme référence, (on sait que) les sunnites (ah! alsunna) - que Dieu soit satisfait d'eux ! - sont d'accord quant à l'obligation pour les Croyants d'être des affiliés (muwâlât) les uns pour les autres. Ibn Abî Zayd a écrit dans sa Risâla : « fl faut que le Croyant demande le pardon de Dieu pour ses parents croyants et qu'il soit un affilié et un bon conseiller pour les Croyants». Alafrawî, le commentateur de cette (Risâla), dans son (ouvrage) al-Fawâkih al-Dawânî, déclare : « ce qu '(Ibn Ab î Zayd) veut dire en employant le terme muwâlât, c'est que les (Croyants) doivent être solidaires les uns des autres ( al-igtimâc calayhim), se témoigner ouvertement de l'affection les uns pour les autres, et éviter entre eux ce qui provoque les dissensions, telles la fraude (gill)2 79 et l'envie». Plus loin, il dit encore : «ce qui est sous-entendu quand (Ibn Abî Zayd) écrit : «les Croyants » (al-mûminîn), c'est qu'il n 'est pas permis d'être des affiliés avec les Infidèles dans le sens en question, mais que, au contraire, on doit les traiter durement et les combattre / 17 verso / s'ils se montrent belliqueux. Et s'il s'agit des .Q.immî 280 , on ne_ doit pas leur faire de mal sauf dans les limites nécessaires, car il est défendu (1).unna) de leur causer du tort ». Si ce devoir de muwâlât entre les Musulmans te parait clair, tu auras (donc) compris que cet Al).mad l'a entièrement rejeté281 , l'a condamné à l'oubli le plus total282 , et qu'il a eu recours, pour se protéger, à un moyen dont le caractère illicite (taf]rîm) et l'accusation d'infidélité (takfir) qu'il entraine sont tout à fait évidents. Et ce moyen, c'est l'acte de muwâlât avec les Infidèles contre les Musulmans, dans le but d'affaiblir les Musulmans et de renforcer les criminels. Si l'on considère l'acte de muwâlât (d'AJ:i.mad) avec les Infidèles, c'est là une affaire claire, qui n'échappe à personne. «Rien ne va plus si l'on a besoin de prouver (l'existence) du jour » 283 . Tu sais bien que le fait d'abandonner le (devoir) de muwâlât envers les Musulmans est un péché grave et un manquement (l:Jüjlân) à la Sarîca. Ah ! Si cet AJ:l.mad b. AJ:imad s'était contenté de ce 11 1

.,

péché, si ce fléau lui avait suffi , et s'il avait évité de tomber dans des actes de muwâlât avec les Infidèles qui rendent vaines les pratiques (religieuses) et déracine l'Islam ! Malheureusement, cela ne lui a pas suffi et il est allé jusqu'à oser affronter Dieu et Son Envoyé, détournant (les gens) de la voie (de Dieu), prenant la défense des Polythéistes malgré leur polythéisme, et protégeant ceuxci contre les Croyants en les mêlant à sa propre armée. Et il a conduit les Musulmans qui sont avec lui sur une voie qui se trouve entre la vérité et l'erreur (sab îl bayna 'l-IJ.aqq wa 'l-bâ!il). Car il les a égarés hors de leur religion (dîn) par ses abominations (fu~zs), et sa fourberie (giss). « Celui qui marche dans les petits sentiers de montagne en se trompant de chemin et en s'exposant à la mort prend peur et perd le sens (yagfa) » 284 . « n a fait croire mensongèrement (autour de lui) à la conversion des Idolâtres, et il a proclamé cette (conversion) »285 • Mais Dieu « réalise la vérité par Son arrêt, en dépit des coupables » 286 . Quant à ce qui est dit de l'interdiction de l'acte de muwâlât avec les Infidèles, et du jugement d'infidélité (tafkîr) prononcé contre les obstinés et les transgresseurs qui le commettent, cela est parfaitement évident. Sache que Dieu - qu'Il soit glorifié ! - nous a interdit , pour commencer, à nous, Communauté de Mul}.ammad - que Dieu le Très Haut le bénisse et lui accorde le salut ! - de nous livrer à des actes d'infidélité. Il nous a également interdit d'être des affiliés (natawallâ) avec quelque sorte d'infidèle que ce soit. Il n'a fait d'exception pour aucun individu ni pour aucune catégorie, et Il nous a appris que celui qui est affilié (tawallâ) avec un Infidèle est lui-même infidèle , et que celui qui nie l'infidélité de ceux qui sont des affiliés avec les (Infidèles) (man tawallâhum) est lui-même un infidèle. Car un tel (homme) a enfreint (tak>. 494. LIX, 11. 495. LIX, 12. 496. L'édition de Mul,tammad al·J;Iâfq: le nomme « al-Mahdi » au lieu de« al-Mahdawî ». 497. Formule proverbiale qui signifie :je sais qui tu es, alors prends garde. 498. '4.Jar (pl. : A!âr) : le terme, d'abord synonyme de fzadîJ, s'est spécialisé pour désigner les traditions relatives aux actes et aux paroles des Compagnons. 499. IV , 93. Le verset complet est le suivant : « Quiconque tue un Croyant volontairement, aura pour récompense la Géhenne où, immortel, il restera ».

155

SOO. Ce hadît, cité par Ahmad dans ses trois premières lettres, iigure ici pour la troisième fois dans l'exposé de CUmar. Voir supra, folios 6verso et 11 recto. SOL

AI-B~î,

1378/19S8, vol. 1, t. 1 (Kitâb al-lmân), p. lS. lfadîf déjà cité (voir supra, fol. 11 recto).

S02. Proverbe dont l'équivalent, en français, est bien connu (la paille et la poutre). S03. liâ'a : l'auteur a utilisé la forme iiâ'a, qui n'est pas correcte, pour masî'a (qui signifie: vouloir, volonté). S04. Gibt et Tt1/rût: idoles des QuraySites mentionnées dans le Coran (notamment IV, Sl ; II, 256 et 257). Le terme !âKût a déjà été employé à deux reprises: voir supra, lolios IO verso et 16 recto. Par extension les termes désignent un faux dieu, le Tentateur, le Démon. (Voir T.P. Hughes, A Dictionary of Islam , London, 1885, art. Jibt et 'fâghût). SOS. Amanû : «Ceux qui croient», mieux que « ceux qui se disent croyants» (trad. R. Blachère).

S06. IV, S 1-S2. S07. L'édition de Muhammad al-Hâfiz comporte une bénédiction finale, qui ne figure ni dans le manuscrit de Paris, ni dans celui de Tombouctou. · · · « Louange à Dieu ! Que Dieu bénisse notre seigneur Muhammad et sa famille et leur accorde le salut ! Nous demandons à Dieu le pardon, la santé eJ la protection contre le Feu dans ce "monde et dans l'autre. Que Dieu ait pitié de tous, qu'il nous pardonne et leur pardonne ! Amîn ».

156

INDEX

ET

NOTICES

Les renvois font référence aux folios du manuscrit.

INDEX DES PERSONNES

Les noms propres sont présentés selon l'ordre alphabétique, en respectant l'orthographe et l'usage du texte.

cAbd Allâh b. Abî Bakr b. Hama~lahà 1

2v.

Un des généraux d'Ahmad b. Ahmad. Son père , Abû Bakr ·b. Hama~iâla:tia2 , neveu ou cousin germain d'Ahmad 1, fut le premier am îr du Mâsinaj (1810-1843). C'est c Abd Allâh qui commandait la colonne armée envoyée par Al).mad b. Al).mad contre cumar dans le Bâguna. Cette colonne fut battue par les forces cumariennes à Kasakayri (1272/ 1856). Le cap. Menvielle ( 1896), qui mentionne l'expédition, connait c Abd Allâh sous le nom de Abdoulaye (ou Allai) Boukari Raman Salah4 • Après la chute de Hamdallahi, c Abd Allâh devint amîr du Mâsina à son tour, sous al-J:Iâgg cumar. Mais il prit le parti de Ba Lobbo, le chef des Masinanké insurgés, et devint l'un de ses chefs de guerre. Il fut battu, fait prisonnier et mis à mort par Tigâni (Tidjani), le neveu de cumar, en 1280/ l 864. Bibliogr.

Menvielle (Cap.) : notice surie Massina (1896), dans L. Taux.ier, 1937, pp. 179 et 201. Ch. Monteil, (1932), 1971, pp. 101, 105 et 112. A.H. Ba et J. Daget, 1962, pp. 36, 68, 76, 77, 195, 251et263. M. Sissoko,L 'éducation Africaine, 1937, n° 96, pp. 8 et 16; n° 97, p. 143. M.A. Tyam, 1935, p. 91 (note de H. Gaden: «Les Peuls (à Kasakayri) étaient commandés par Abdoullahi Bôkar Hamat Sâla, fils de l'Amîru Manngal ou chef de guerre de Chei.khou Amadou »). W.A. Brown, 1969, pp. 133 et 206 (note 57).

1. Hama~~a est la contraction de Muvammad b. ~alil}. 2. Ch. Monteil le nomme Bokar (Abû Bakr) Amma Sala Dja (1971 , pp. 101 et 112); Ba et Daget, Bori Hamsala ou Bokari Hammadoun Sala et L. Tauxier, Bokar Ahmad Sala (1937, pp. 165 et 174). 3. li s'agit ici du Mâsina au sens strict, canton peul originellement situé à l'ouest du Diaka, et qui constituait une province de la Dina. Son chef-lieu, sous la Dina, était Tenenkou. 4. Ch. Monteil l'appelle Abdoullahi Dja (ibid., p. 101), Ba et Daget le citent une fois sous le nom de Allay Bori (cAbd Allâb b. Abî Bakr) (ibid., p. 68), Sissoko le nomme Abdoulaye Bori Am'Sala (1937, pp. 8, 16 et 143) et H. Caden, Abdoullahi Bôkar Hamât Sâla (1935, p. 91).

159

c Abd Allâh b. cAmr b. al-c A~i

17 r. Compagnon du Prophète, réputé pour sa science. Il est connu pour avoir transmis de nombreux }J.adît. Il mourut en 65/684-685. Il était le fils de cAmr b. al-cA~i (ou : al-cAs), Compagnon du Prophète, qui conquit l'Egypte et en devint le gouverneur. Selon la tradition, le fils, qui n'avait que 12 ans d'écart avec son père, s'étah: converti à l'Islam avant celui-ci. Bibliogr.

Ibn J;Iagar : Kitâb

al-l~âba... ,

tome Il, 1876, p. 852.

c Abd Allâh b. Fûdî 10 V., 22 r., 23 r., 25 r. Ouvrage mentionné : I)iyâ' al-Suliân. c Abd Allâh b. Muhammad Fûdî. Frère cadet de cutmân b. Fûdî, né en 1178/1764 ou 1180/ 1766, mort en l 253/l S37. Un des principaux dirigeant'S du gihâd de Sokoto. Chef de guerre de talent, il conduisit un certain nombre d'opérations militaires du gihâd , dont il a laissé par ailleurs une description très vivante dans Tazyîn al-waraqât. Juriste de valeur, il rédigea dès les débuts du gihâd un ouvrage intitulé I)iyâ' al-Hukkâm qui devait devenir la principale charte juridique du mouvement, puis du nouvel Etat. Il occupa de hautes fonctions dans l'empire. Premier Wazîr (vizir) de son frère, il reçut à partir de 1227/ 1812 le commandement des provinces de l'ouest, dont le siège fut fixé un peu plus tard à Gwandu. Il espérait très probablement succéder à son frère, mais fut devancé par Mul).ammad Bello. Il s'ensuivit une brouille de quelques années, à l'issue de laquelle cAbd Allâh reconnut l'autorité de son neveu et se retira de toute charge politique pour se consacrer à l'enseignement et à la rédaction d'ouvrages. Fin lettré, il composa plus de 80 ouvrages ou opuscules dans des genres variés. c Abd Allâh occupe cependant dans l'histoire du califat de Sokoto une place à part. Il fut souvent très critique devant l'évolution « mondaine » du califat. Il eut aussi avec cu!mân b. Fûdî et MuJ;iammad Bello des divergences d'ordre doctrinal. Parmi celles-ci, la question de la muwâlât avec les Infidèles : c Abd Allâh, contrairement à cu!mân, n'y voyait pas un cas de kufr (infidélité), mais seulement une faute grave. _ Bibliogr.

cAbd Allâh b. Fûdî : ldâcal- nusû!J. man ab.agtu canhu min al-Suyûg, éd. et trad. (anglaise) par M. Hiskett, Bulletin of the S.O.A.S., XIX, 3, 1957. D. Murray Last (1967), 1977 . M. Hiskett, 1973.

c Abd al- cAzîz

24

V.

Ouvrage mentionné : Al-Durar al-Multaqata. CJzz al-Dîn Abû MuJ:iammad CAbd al-CAzîz b. AJ:imad b. sacîd al-Dîrînî al-Damîrî al-Dahrî , sûfî égyptien, né en 612/ 1215, mort en 607/ 1297. Bibliogr.

G.A.L., 1, 451452 et supp. 1, 810-811.

c Abd al- cAzîz b. Abî Ruwâd 20 v. c Abd al-cAzîz b. cutmân b. Gabala b. Abî Ruwâd al-Azdî. Né en 145/762-763, mort en 221 /835-836 ou 225/ 839-840. Transmetteur de l:zadîf. Bibliogr.

Ibn I:Iagar: T~~îb

al-TaJ:i~îb,

1968, tome 6, p. 349. 160

c Abd al-Bâqî al-Zurqânî

13 r., 22 V.

Ouvrage mentionné : Tawqîl}.. c Abd al-Bâqî b. Yûsuf al-Zurqânî, auteur égyptien, spécialiste defiqh , malikite, né au Caire en 1020/1611, mort en 1099/1688. Bibliogr.

G.A.L., II, 318 et supp. II, 438.

c Abd al-Magîd

14 v.

cAbd al-Magîd 1, trente et unième sultan ottoman. Il a régné de 1255/ 1839 à 1277/1861. Attaqué en 1853 par les Russes, il bénéficia du soutien franco-anglais (guerre de Crimée). c Abd al-Mâlik b. Sulaymân

16 V.

Transmetteur de l1adîJ. c Abd al-Qâdir al-Futâwî (lmâm)

14 V . cAbd al-Qâdir Kan (Abdul Kader Kan), premier Imâm (Almamy) du Futa-Toro, né en i 141/ 1728-29. C'est après la mort de Sulayrnan Bal, l'initiateur de la « révolution islamique » que c Abd al-Qâdir fut désigné comme Imâm par les habitants du pays. Il entra en fonctions en 1190/ 1775-76 et mourut à l'âge de 81 ans, après un règne de 30 ans, en 1221/1806. La nisba « Futâwî » (originaire du Futa) n'est pas habituelle. On trouve plus souvent la forme « Fûtî ». Dans un autre manuscrit du « Fonds Archinard » (B .N. Paris, ms. arabe n° 5259), al-l:lâgg curnar lui-même est successivement désigné comme« al-Futâwî » (67 verso) et « al-Fûtî (68 recto) 1 .

Bibliogr.

Siré Abbâs Soh, 1913, pp. 40 à 60. D. Robinson,l.JA.H.S. , 1973. D. Robinson, 1975, pp. 13 à 19, 165-166 et al., et 1978. B.N. Paris, ms. arabe n° 5259 (pour la nisba « Futâwî »). Voir aussi H. Barth (1858, t. V, p. 72): « The Futâwi Ismacn, who from his knowledge of colonial life in St. Louis or Ndér, afforded me ... etc. ».

1. Sidi Mohamed Mahibou.

c Abd al-Rahmân

14 v.

cAbd al-Ral).mân b. Hisâm. Sultan du Maroc (1238/ 1822 - 1276/ 1859), né en 1204/1789-90, mort à Meknès en 1276/1859. Durant la conquête de l'Algérie par la France, il soutint cAbd alQâdir (Abd el Kader) mais fut vaincu par Bugeaud à la bataille de l'lsly (1844). Un tableau de Delacroix, au musée de Toulouse, le représente. En sa qualité de descendant du Prophète , il prétendait au califat. cAbd al-Ral.1mân b. Sahuc Originaire de Tilimsân (Tlemcen). Mul).ammad Bello le mentionne parmi les autorit és qui auraient approuvé la position d'al-Magîlî sur le problème de la muwâlât. Ce personnage est en fait 161

l'un de ceux qui, selon le Nay! al-Ibtihâg d'A}J.mad Bâbâ auquel l'information est empruntée, ont « répondu à la question » posée par al-Magîlî sur les Juifs du Tuwât. On ignore si cette réponse fut favorable. Bibliogr.

AJ:unad Bâbâ : Nayl al-Ibtihâg (notice biographique d'al-Magîlî), 13 29/ 19 ll , p. 33. Voir aussi Batrân, Journal of African History , 1973, pp. 381-394 (qui donne des précisions sur les autres autorités citées, mais non sur CAbd al-Ralµnân b . Sabuc).

c Abdûn

b. SâCiq Nom d'un ministre chrétien cité par al-I:Iasan al-Yûsî dans sesMul].âcjarât.

24v.

Abû Bakr 7 V. Membre de la tribu de Qurays, premier calife (11 / 632 - 13/634). Beau-père du Prophète, principal conseiller et successeur immédiat de celui-ci, il a été célébré par la communauté musulmane comme un homme simple et honnête (d'où son surnom de « al-~iddîq » : le véridique, l'honnête). Abû Dâwûd 17 r. Abû Dâwûd (ou Dâ'ûd) al-Sigistânî : disciple d'Alµnad b. I:Ianbal, traditionniste. Né en 202/817, mort en 275/ 889, il vécut principalement à Ba~ra. Il est l'auteur d'un Kitâb al-Sunan , qui constitue l'un des six recueils canoniques de f!adîf.. Bibliogr.

E .I. 2 .

Abû Gacfar Mu}_lammad b. c Alî al-Bâqir 16 v. Abû Gacfar Mu}J.ammad b. cAlî b. al-J:lusayn b. c Alî b. Abî Tâlib al-Bâqir. Né en 56/6 75676, mort en 114/732-733 . Petit-fils de al-J:lusayn par son père et de al-.f:lasan par sa mère, il fut honoré comme Imâm, de son vivant, par une partie des Sîcites. Il figure en cinquième position dans la lignée des douze Imâm reconnus par les Sîcites duodécimains. Cependant, il vécut continuellement à Médine où il ne joua aucun rôle politique. Spécialiste reconnu des traditions et transmetteur de nombreux l}.adî! , il reçut le titre honorifique d'al-Bâqir (le chercheur qui va au fond des choses) en raison de l'étendue de ses connaissances. Bibliogr.

E.I. 1 : art. Muhammad b . CAfî. Ibn I:Iagar: Tal;igîb al-Tal).Çîb ., 1968, t . 9, pp. 350-352.

17 r. Abû Hurayra Abû Hurayra al-Dawsî al-Yamânî. Compagnon du Prophète, mort à Médine en 57 ou 58/ 676-678 à l'âge de 78 ans. Ce fut un transmetteur très prolifique de traditions de la vie du Prophète. On évalue à 3 500 le nombre des traditions transmises par lui, mais une grande partie lui en est faussement attribuée. Bibliogr.

E .I. 1 et

2.

162

Abû cU!mân al-Ôabrî

16 V.

Transmetteur de traditions. Abû Y 3-Qyâ Zakâriyyâ' al-An~rî 24 r. Ouvrage mentionné : Fat}) al-Ral).mân. Zayn al-Dîn Abû Yal).yâ Zakariyyâ' b. Muhammad al-An~ârî al-Sumaykî al-Sâffî. Né en 826/ 1422 près du Caire, mort en 916/1511 ou 926/1520. Spécialiste dufiqh , il fut l'un des principaux docteurs de l'école juridique Sâffite. Bibliogr.

G.A.L., II, 99-100 et supp. II, 117-118.

7

Abû Y azîd al-Bisµ mî

V.

Abû Yazîd Tayfûr b. clsâ b. SuruSân al-Bistâmî. Un des plus célèbres mystiques de l'Islam. Mort en 261/874, ou 234/857, il passa la majeure partie de sa vie à Bistâm, dans la province persane du Hurâsân. Il n'a laissé aucun écrit. Ses propos, transmis par son entourage, expriment, sur l'union ~ystique avec la Personne Divine, des positions qui suscitèrent l'opposition des théologiens orthodoxes. Bibliogr.

G.A.L., supp. 1, 353 et E.I. 2 .

c Adî b. f.lâtim

8 V.

Compagnon du Prophète. Ancien Chrétien, converti à l'Islam en 9/ 630-31. Mort en 68/ 687688. Bibliogr.

Ibn ~agar: Kitâb al-l~âba ... , t. II (1876), pp. 1115-1118.

A)J.mad (Ibn I:Ianbal)

17 r. Al).mad b. ~anbal. Célèbre théologien, jurisconsulte et traditionniste (164/241 - 780/855). Fondateur de l'une des quatre grandes écoles sunnites - le maghab hanbalite. Il est l'auteur d'un recueil de traditions, le Musnad, où les traditions sont classées, non par matières comme dans les ~al}îl} de Bugârî et de Muslim, mais sous le nom du garant qui les a rapportées le premier. Bibliogr.

E.I. 2 (H. Laoust): art. Al:rmad b. ~anbal. H. Laoust, 1965,pp. 114-118.

A1).mad (Sayl})

4 r., 7 r., 13 V., 15 V. Désigné comme A~mad I pour le distinguer de ses successeurs, généralement connu sous le nom de « Cheikou Amadou », ou « Seku Amadu ». Fondateur de l'Etat islamique (Dina) du Mâsina. Al).mad b. Mul).ammad b . Abî Bakr b. Sa1.:îd Lobbo - ou, de façon condensée, Al:imad Lubbu (Lobbo) - naquit en 1189/1775-1776 dans une famille cléricale de rang modeste. Son yetrode (nom d'honneur . nom de clan) était Sangaré Bari. 163

Il adopta plus tard celui de Sise (Cissé), dyamu d'origine soninké porté par des lignages maraboutiques réputés. Contrairement à certaines traditions, AJ:tmad fit ses études dans sa région d'origine, ne quitta jamais le Mâsina et n'eut donc pas l'occasion de combattre aux côtés de cU!man b. Fûdî. Il enseigna pendant une vingtaine d'années et entra en conflit avec les pouvoirs établis, dénonçant tout à la fois la soumission des chefs peuls (ardo) à l'égard des Bambara, le laxisme religieux d'une partie des Musulmans et la situation inférieure de l'Islam. C'est autour de 1816 qu'il se prépare au gihâd. En peu de temps, il réunit un grand nombre de partisans, sur des bases à la fois religieuses et ethniques, renverse la dynastie peul des ardo, repousse les Bambara de Ségou et s'empare de Djenné. La bataille décisive contre ses adversaires païens - Peul et Bambara coalisés - a lieu à Noukouma en 1233/ 1818. Ahmad organise alors un Etat islamique, créé une nouvelle capitale ( 1821) : Hamdallahi (« Gloire à Dieu ») et prend le titre califal d'amîr al-mu'minîn. Il impose la forîca dans tout le pays et instaure une censure sévère sur les mœurs. Au commencement du gihâd, il avait recherché la reconnaissance de Sokoto, qui lui avait conféré en retour le titre de foy"I], mais il s'efforce ensuite de rejeter toute forme d'allégeance. Pour consolider sa position « internationale », il établit des relations officielles avec le sultan ottoman. AI:tmad partageait le pouvoir avec un conseil de quarante culamâ '. Lui-même n'était pas un grand savant et l'on n'a gardé de lui qu'un petit ouvrage: al-ldtirâr, quelques notices et des lettres. L'effort d'organisation économique caractérise fortement le nouveau pouvoir. L'Etat contrôle en effet de façon minutieuse l'ensemble de la vie économique et sociale , accélère la sédentarisation et réalise une concentration des moyens sur une grande échelle. L'Etat détient une partie des terres et des troupeaux et y fait travailler ses propres esclaves ; il perçoit des impôts fixes et des taxes sur la production et les échanges 1 . Al:tmad I meurt en 1845 2 après avoir désigné, à l'encontre des régles traditionnelles, son fils Al)mad pour lui succéder. Bibliogr.

A.H. Ba et J. Daget, L'empire Peul du Macina, t. I, Paris, 196 2. W.A. Brown, The Caliphate ofHamdallahi ..., Madison, Ph. D., 1969. M. Johnson, The Economie Foundations of an lslamic Theocracy: the case of Masina, Journal of African History, 1976, pp. 481-495. E.I. 2 : Maxime Rodinson: art. Al).madu Lobbo. Voir aussi la mise au point de D.M. Last, dans J.F.A. Ajayi et M. Ci;.owder: History of West Africa (vol. 2), London, Longman, 1974, pp. 14-17, et celle de V. Monteil, 2eme éd., 1971, pp. 93-96.

1. Pour Brown (1969), le Mâsina représente l'accession au pouvoir d'une classe de lettrés ruraux qui organise la défense des pasteurs et des agriculteurs contre les calamités naturelles, les luttes de clans et les ennemis extérieurs. Johnson (1976) insiste sur la prise en main de l'appareil de production par l'Etat, l'importance du secteur pastoral, la médiocrité relative du commerce et des échanges et l'allure d' « économie de guerre » de l'ensemble. Meillassoux (1978 : • Rôle de l'esclavage dans l'histoire de l'Afrique occidentale », Anthropologie et Société, Québec) présente l'Etat du Mâsina comme un appareil de défense contre les raids bambara et une construction politique issue de l'alliance des marchands et des savants islamiques (l'opposant ainsi à l'hégémonie cumarienne prédatrice et guerrière). 2. Sur ces date, cf. Brown, 1969, p. 26: « Traditionists hold that Shaykh Ahmad died in 126 1 (1844-45 AD) after having reigned for 28 years. Barth cited 1262 H (1845-46) and the Tarikh Fittuga lists 1260 H (1843-1844 AD). lt is likely that the traditionists are correct ».

13 V., 15 V. Désigné comme « Ahmad II », généralement connu sous le nom d' « Amadou-Cheikou » ou « Amadu-Seku ».Deuxième souverain du Mâsina (1845-1853) 1 • Fils de5aylz Al_lmad (Al}mad I). il fut désigné par celui-ci pour lui succéder, contrairement au système traditionnel qui faisait prévaloir les héritiers collatéraux, frères et cousins : 4

164

L,

7

L,

« Si Ba Lobbo 2 était connu de tous par sa bravoure et ses largesses proverbiales, Amadou Cheikou avait pour lui la science, la dévotion, la finesse, et surtout le mépris des plaisirs de la vie », (A.H. Ba et J. Daget, 1962, p. 248). A l'avénement d'Ahmad II, les habitants de Tombouctou rejetèrent la domination du Mâsina, mais AJ:unad II réussit à rétablir son autorité grâce à un accord négocié avec AJ:unad al-Bakkây, en 1846 : tous les dirigeants de la cité seraient désormais songhay, à l'exception du collecteur d'impôts qui, lui, serait un Peul. Bibliogr.

A.H. Ba et J. Daget, 1962. W.A. Brown, 1969.

1. Cf A.H. Ba et J. Daget : « Amadou Cheik.ou mourut le 18 dioumadou 1er 1269 (27 février 1853) », (1962, p. 285). Voir aussi W.A. Brown: « Tradition holds that the Caliph Ahmad U