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Rhéologie des fluides non newtoniens et viscoélasticité 1 Introduction Le mot rheology (en anglais) a été introduit en 1928 par Eugene Bingham, professeur à l'université Lehigh aux États-Unis. La rhéologie a pour objet d'étudier la déformation et l'écoulement de la matière sous l'effet d'une contrainte appliquée. Elle permet en particulier de décrire le comportement linéaire ou non linéaire des matériaux dits complexes dont le comportement relève à la fois d’un solide (seuil d’écoulement, élasticité) et d’un fluide visqueux (viscosité). Une catégorie importante de ces matériaux sont appelés fluides viscoélastiques. Les applications liées aux écoulements de cette catégorie de fluides sont nombreuses et variées de telle sorte que leur modélisation a suscité un vif intérêt de la communauté scientifique. L'objectif était, et est encore, d'arriver à une meilleure compréhension des phénomènes viscoélastiques. Les physico-chimistes ont élaboré plusieurs modèles rhéologiques permettant de bien représenter le comportement de ces fluides. De leur côté, les numériciens ont développé des méthodes plus ou moins efficaces pour résoudre numériquement les équations liées à ces modèles. Certains phénomènes viscoélastiques spectaculaires, observés avec des polymères fluides, ne peuvent
être décrits par les équations de Navier-Stokes. Ces effets sont
caractérisés, entre autres, par une dépendance des propriétés élongationelles et des effets de mémoire associés à l’élasticité du matériau. Ces effets peuvent être très importants lors de la mise en forme des matériaux polymères : les instabilités d’écoulement, par exemple, limitent le taux de production lors de nombreuses opérations telles que l’extrusion des fibres. Des instabilités sont observées à très faible nombre de Reynolds, alors qu’un écoulement newtonien correspondant, est stable. La relation entre la contrainte et le taux de cisaillement d’un matériau peut être linéaire (fluide newtonien) ce qui peut décrire, dans certaines conditions, des fluides composés de molécules simples comme l’eau ou certaines huiles. Pour d’autres matériaux cette relation peut être non-linéaire et/ou dépendante du temps (fluides non-newtoniens ou complexes) ce qui décrit le comportement, sous écoulement, d’un grand nombre de matériaux courants comme les dispersions des particules ou les polymères en solution. La description de ces comportements, leur modélisation et leur interprétation en relation avec leur structure microscopique (ou mésoscopique) constitue la rhéologie des fluides complexes ou fluides structurés.
2 Comportement linéaire (Fluides Newtoniens) Un
fluide
est
dit
à
comportement
linéaire
ou
newtonien
lorsque
les contraintes visqueuses sont des fonctions linéaires des taux de déformation. Le facteur de proportionnalité se nomme viscosité ߤݏ.
Considérons la situation représentée dans la figure (2.1), un matériau est considéré
comme un ensemble de couches de particules parallèles emprisonnées entre 2 plans parallèles de surface S séparés d’une distance h. Un des plans est fixe, et le second est mis en mouvement par une force F appliquée à la plaque supérieure. La force nécessaire par unité de surface pour tirer la plaque est à l’origine de la contrainte (τ = F / S). Sous l’effet de la force tangentielle, la première couche de particules se déplace à la même vitesse que la plaque supérieure. Les couches inférieures vont se mouvoir dans la même direction mais avec des vitesses de plus en plus petites. Il se crée entre les deux plans un gradient de vitesse. y
S F
U h
x Figure 2.1: Représentation schématique d’un écoulement de cisaillement simple induit par une force F, le fluide confiné entre deux plaques de surface S, qui se trouvent à une distance y, la plaque supérieure se déplace à une vitesse U.
Le fluide est soumis à une force de cisaillement F. La force F par unité de section est définie comme suit (en cisaillement simple):
En posant : On obtient :
ୗ
ୢ୳
= μୱ ୢ୷
τ= ୗ et
(2.1) u du U y dy h
τ= μୱߛሶ
(2.2)
où u est la composante de vitesse instantanée dans la direction x. Dans le cas d’un fluide newtonien, le coefficient de proportionnalité reliant le gradient de vitesse à la contrainte est la viscosité μୱ du fluide, qui est définie par : ߬ ߤ௦ = ߛሶ
Tel que : τ est la contrainte de cisaillement de dimension [N.m-2], ߛሶest le taux de cisaillement de dimension [s-1].
- la grandeur ߤ௦qui est définie comme étant le rapport entre la contrainte de cisaillement et
le taux de cisaillement est appelé la viscosité newtonienne ou bien plus communément la viscosité dynamique, et qui est de dimension [kg .m-1 .s-1]. - la viscosité dynamique notée ߤ௦, elle est constante et indépendante de la contrainte de
cisaillement et du taux de cisaillement, et dépend des propriétés du fluide et/ou de la pression et/ou de la température. - L’équation (2.2) exprime la relation entre la contrainte de cisaillement et le taux de cisaillement, cette dernière (équation 2.2) est appelée loi constitutive du fluide newtonien. Plus généralement, s 2 s D où s est le tenseur des contraintes visqueuses et D le tenseur des taux de déformations. Ici le tenseur s est un déviateur de contraintes. - la loi constitutive des fluides newtoniens est la plus simple qui puisse exister, mais l’utilisation de cette loi dans l’étude des écoulements de fluides réels (industriels, biologiques, agroalimentaires...) est impossible, dès lors l’introduction de lois plus complexes s’avère nécessaire.
3 Comportement non linéaire (Fluides non newtoniens) Un fluide est dit non newtonien lorsque les contraintes visqueuses ne sont pas des fonctions linéaires des taux de déformation (équation 2.2), Autrement dit, lorsque sa vitesse de déformation (par exemple le taux de cisaillement) n’est pas directement proportionnelle à la force qu'on lui applique. Le modèle non newtonien décrit l’écoulement des fluides comportant des molécules de tailles importantes (polymères). Parmi les fluides non-newtoniens existants, on peut citer les fluides non-newtoniens purement visqueux et les fluides non-newtoniens viscoélastiques. À titre d’exemple des fluides non-newtoniens : les solutions de polymères, les polymères fondus, les suspensions, les pattes, les émulsions et les fluides biologiques.
3.1 Fluides non newtoniens purement visqueux Contrairement aux fluides newtoniens, la viscosité apparente ( ) pour ces fluides nonnewtoniens est fonction du taux de cisaillement [5,19,20,22]. Il existe différentes
expressions reliant la contrainte de cisaillement au taux de cisaillement, nous citerons deux : celle des fluides dits en loi de puissance et ceux décrit par la loi de Cross.
3.1.1 Fluides en loi de puissance et fluides à seuil Une classe importante de fluides non newtoniens purement visqueux est décrite par la loi en puissance dite aussi loi d’Ostwald-De Waele [2,3,5,17,19,22,..] Figure 3.1, et qui s’écrit :
k n1 Où k est la consistance du matériau (en Pa sn ) et n l’indice de fluidité (ou de plasticité) (n=1 pour un fluide newtonien ; n=0 pour un corps rigide plastique) [5,17,19,22].
Figure 3.1 : Courbes des viscosités dépendantes du taux de cisaillement (a) Fluide rho-fluidifiant, (b) Fluide newtonien, (c) Fluide rhéo-épaississant, (d) Fluide à seuil (Bingham,Casson,Skelland…).
On constate que les viscosités correspondantes aux cas (a, c et d) ne sont plus constantes mais dépendent du taux de cisaillement. On peut les classer dans trois catégories : a) Fluides rhéo-fluidifiant (n