Parlons nepali
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Zitiervorschau

Collection Parlons dirigée par Michel Malherbe Déjà parus: Parlons coréen, 1986, M. MALHERBE, O. TELLIER, CHOE JUNG WHA. Parlons hongrois, 1988, CAVALIEROS, M. MALHERBE. Parlons wolof, 1989, M. MALHERBE, CHEIKH SALL. Parlons rou111llin, 1991, G. FABRE. Parlons swahili, 1992, A. CROZON, A. POLOMACK. Parlons kinyarwanda-kirundi, 1992, E. GASARABWE. Parlons ourdou, 1993, M. ASLAM YOUSUF, M. MALHERBE.

Parlons estonien, 1993, F.

DE SIVERS.

Parlons birman. 1993, M. H. CARDINAUD,YIN XIN MYINT. Parlons lao, 1994, C. NORINDR. Parlons tsigane, 1994, M. KOCHANOWSKI Parlons bengali, 1994, J. CLÉMENT. Parlons pashto, 1994, L. DESSART.

Parlons telougou, 1994, O. et D. BossÉ. Parlons Parlons Parlons

ukrainien, 1995, V. KOPTILOV euskara, 1995, T. PEILLEN bulgare, 1995, M. V ASSILEVA.

À paraître: Parlons soninké, mongol, lapon, letton, malgache, ingouche,géorgien, indonésien, albanais, kurde etc.

PARLONS NÉP ALI

La transcription du népali suit les conventions en usage. Ex.: «u »pour «ou ». Pour rendre plus fluide la lecture des termes courants, les noms de régions ou de villes, les noms des ethnies, les noms des personnages historiques..., les signes diacritiques n'ont pas été utilisés (sauf en cas de nécessité) dans les parties qui traitent des généralités. Les mots d'origine népali n'ont pas été accordés en genre et en nombre. Ex.: les Gurung, la langue népali.

Remerciements:

Nous remercions Dilli Ra) Uprety pour la relecture du texte en népali, Dilip Mehta pour son aide informatique et Minakshi Mani pour la calligraphie.

Calligraphie de couverture réalisée par An)u Musafir. Extrait du poème de Lakshmi Devkota : fatri

(Ç)L'HARMATTAN, 1996 ISBN: 2-7384-3991-8

Pascal et Evelyne CHAZOT

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PARLONS NEP ALI

Editions L'Harmattan 5-7, rue de l'Ecole Polytechnique 75005 Paris

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EN GUISE D'INTRODUCTION

Par monts et par villes, des noms qui parlent...

Himalaya signifie la demeure des neiges ». Everest: appelé localement Chomolungma fut baptisé en 1865 par les Anglais du nom de Sir George Everest, qui en avait déterminé l'altitude et la situation. Le gouvernement népalais plus récemment (( mère du ciel ». lui donna le nom de Sagarmatha, (( Annapurna (8091 m) : déesse nourricière» fut le premier 8000 vaincu en 1950 par Maurice Herzog. Machapuchare (6993 m) : queue de poisson )', nom donné à l'un des sommets du massif de l'Annapurna en raison de sa forme. Pokhara (880 m) : au pied de ce dernier, signifie (( lac» justifié par sa situation au bord du lac de Phewa tal. (( Ville de Katmandou: anciennement Kantipur, splendeur ». (( Ville jolie» Patan : anciennement Lalitpattana, devenu tout simplement Patan ou Lalitpur. Bhaktapur Ville de foi, de dévotion », anciennement Bhadgaon. Kirtipur : Ville de renommée, de gloire ». Bagmati : rivière qui traverse Katmandou et la vallée porte le nom évocateur de la Parlante ». Swayambhunath : le célèbre stupa bouddhiste est le Seigneur (nath) issu de lui-même ». Bodnath : l'autre stupa de la vallée se dénomme le Seigneur Bouddha ». ((

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Pashupatinath : un des hauts lieux de l'hindouisme du Népal porte un des noms de Shiva, le Seigneur des Animaux.

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LE NÉPAL AUJOURD'HUI GÉOGRAPHIE

ncadré au nord par le Tibet et au sud, à l'est et à l'ouest par l'Inde, le Népal a une superficie d'environ 150 000 km2. Il s'étend le long de l'Himalaya sur 885 km d'est en ouest et une largeur variable d'environ 200 km du nord au sud. Il est constitué de trois régions bien distinctes: le TéraÏ, les collines et les vallées du moyen Himalaya et le haut Himalaya. Le Téraï au sud, extension de la plaine gangétique indienne, regroupe la plus grande partie des terres fertiles et des forêts denses du pays. 40% de sa surface est cultivée. On y trouve une grande diversité de cultures: riz, maïs, blé, canne à sucre, légumes, tabac... 46,7% de la population totale du Népal vit dans cette région et a le taux démographique le plus élevé du pays (recensement de 1991). Le moyen Himalaya, la plus vaste région, est situé entre le Téraï et le haut Himalaya. Il est constitué de collines allant de 600 à 4800 m d'altitude, entrecoupées de vallées ou de bassins: Katmandou, Pokhara, Hetauda... Seule 10% de sa surface est cultivée, principalement des céréales. Sa population représente 46% du total. Le haut Himalaya enfin, dont dix sommets culminent à plus de 8000 m. L'Everest, appelé Sagarmatha au Népal, atteint 8848 m. Bien que représentant un tiers de la superficie du pays, 2% seulement en est cultivable pour des raisons aisées à comprendre. 7% de la population totale du Népal vit malgré tout dans ces régions de très

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haute altitude, leurs yaks.

à plus de 4500 m, en compagnie

ADMINISTRATION

de

DU PAYS

Le Népal était récemment encore une monarchie absolue de droit divin. Les réformes démocratiques introduites par le roi actuel, Sa Majesté Birendra Bir Bikram Shah Dev, à la suite de violentes manifestations durant la seconde moitié des années 80, ont gardé au souverain de nombreux pouvoirs. Le pays est divisé administrativement en 5 zones, subdivisées en 75 districts. Chaque district est supervisé par un "Chief District Officer" (COO) qui s'assure du respect des lois et a la .responsabilité de l'application des directives ministérielles. L'unité la plus petite est le comité de village appelé Gaon Panchayat. Pour les communes plus grandes, se sont les Municipalités. Il y avait 3995 comités de village et 36 Municipalités en 1993. Au niveau politique international, le Népal adhère à la charte des Nations Unies et est membre fondateur du Mouvement des Non Alignés. Le roi actuel a annoncé la volonté, au moment de son couronnement en 1975, de donner au pays le statut de Zone de Paix qui est reconnu en 1988 par 86 pays (dont la France et les États-Unis) à l'exception de l'U.R.S.s. et l'Inde. Il devient membre du groupement des pays d'Asie du sud (Inde, Népal, Pakistan, Bangladesh, Bhoutan, Maldives et Sri Lanka) appelé "South Asia Association for Regional Coopération" 10

(SAARC), créé en 1985 et dont Katmandou depuis 1986.

le Secrétariat

siège à

DÉMOGRAPHIE

Avec 19,3 millions d'habitants en 1993, la démographie est, comme dans beaucoup de pays comparables, le problème majeur. Il y avait 13 millions d'habitants en 1975 et 8 millions seulement en 1952. La population est à 90% rurale. Évolution de la population de 1952 à 1991 (en millions d'habitants)

20 15 10 5

o 1952

1961

1971

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1981

1991

RELIGIONS

Les statistiquesl concernant les religions doivent être analysées prudemment pour différentes raisons: modalités de définition et de classification lors du recensement, volonté politique de diminuer l'importance des minorités, etc... Les chiffres donnent cependant une indication générale. La religion largement dominante, 86,5% de la population, est l'hindouisme (si toutefois celui-ci peut être considéré comme une seule religion). C'est la religion officielle du pays, le seul au monde à être dans ce cas. La popula tion bouddhiste, bien que quantitativement moindre avec 8%, soit 1,5 million d'âmes, est extrêmement présente et active. Les musulmans représentent 3,5% de la population et sont surtout présents dans le sud. Il y aurait 31 280 chrétiens sur tout le pays, soit O,17°!c.,.Pour le reste, une communauté assez importante de kirati (2%) et environ 7500 jaïn. o HindouIsb!s Il B ou.d.dhkb!s

Il Musulnans (;] Autns

ID'après "National Planning Commission 12

Secrétariat", 1993.

18000 indiqué interrogées Le moins l'athéisme

personnes seulement (0,1%) n'ont pas de religion, lorsqu'elles ont été à l'occasion du recensement de 1991. que l'on puisse dire, c'est qu'au Népal n'est pas roi. AcrIVITÉS

ET RESSOURCES

Le PNB par habitant était de 180 US $ en 1993, à comparer avec celui de la France: 20.600 $. Le taux d'inflation est de l'ordre de 15 à 20% par an. La monnaie, qui s'échangeait à moins de 2 roupies népalaises pour 1 franc dans le début des années 80 s'échange depuis le milieu des années 90 à 10 roupies environ pour 1 franc. L'occupation principale reste, très largement, l'agriculture: plus de 6 millions de fermiers, éleveurs, pêcheurs ou journaliers sur une population active estimée à 7,5 millions de personnes. Le rendement agricole s'est intensifié au fil des années, avec certaines productions presque doublées entre 1982 et 1992 (riz, maïs, millet...) ou en forte progression (canne à sucre avec + 50%, pommes de terre + 40%, blé + 20%...), alors que les surfaces cultivées n'ont que peu augmenté (de 10 à 20% en moyenne). La quantité d'engrais chimiques importés a également doublé sur cette période. Durant ces années, la production a en général été supérieure à la consommation, à l'exception de 1982, 1986 et, dans une moindre mesure, 1989 2. 2 Source: "Marketing Services Division, Dept. of Agriculture". 13

Le tourisme constitue également une activité importante. Le nombre d'étrangers qui visitent le Népal chaque année est passé de 175.000 en 1982 à près de 300.000 en 1991, malgré une petite stagnation entre 1988 et 1990. Les Français y sont parmi les plus nombreux (15 à 20.000), avec les Américains, les Anglais, les Allemands et les Japonais. Les Indiens restent bien entendu largement majoritaires (plus de 90.000 en 1991)3, Les arrivées sont bien réparties sur l'année, avec toutefois un pic en octobre et une partie de novembre. Le mois de mars est aussi spécialement prisé. Le "trekking" reste évidemment une attraction très pratiquée parmi les touristes. Plus de 40.000 "trekkers" se déversent chaque année sur les pentes himalayennes, principalement autour de l'Annapurna. Parmi les ressources naturelles, l'eau est sans doute la plus importante, avec environ 6000 rivières s'écoulant sur 45000 km. Elles sont alimentées par les nombreux glaciers et la fonte des neiges. De plus, chaque année, en juillet et août, la mousson déverse des quantités colossales d'eau. Par contre, si plusieurs variétés de minéraux existent bien dans le sous-sol népalais (cuivre, fer...), ils ne sont pas ou très peu exploités, par manque de moyens. Les forêts fournissent quant à elles 90% du combustible domestique, ce qui ne manque pas de créer de nombreux problèmes de déforestation, en dépit des tentatives de reboisement réalisées par les autorités. 3 Source: "Department of Tourism", 14

ÉDUCATION

Le taux d'alphabétisation reste faible malgré les efforts de scolarisation. Les chiffres les plus optimistes donnent deux tiers d'analphabètes. La population féminine est la plus touchée par ce problème: moins de 2 millions de femmes savent lire et écrire pour 4 millions d'hommes environ. Le nombre d'écoles primaires est passé de 11.000 en 1981, scolarisant moins de 1,5 million d'enfants, à 19.000 en 1991, avec près de 3 millions d'écoliers. Le nombre de ses enseignants a parallèlement doublé. Pendant la même période, le nombre d'écoles secondaires passait de 4.000 à plus de 6.000, avec un accroissement concomitant de ses effectifs d'enseignants et plus du doublement des étudiants inscrits (de 370.000 à 775.000). Les chiffres pour l'enseignement supérieur montrent que les effectifs d'étudiants, là aussi, se sont multipliés par deux sur dix ans (de 52.000 étudiants en 1981 à 110.000 en 1991, tous niveaux et types d'études confondus). SANTÉ

L'espérance de vie est de 56 ans (alors qu'en France elle est de 77 ans). Les enfants sont vaccinés automatiquement et systématiquement dans les maternités depuis plusieurs années. Parmi les raisons d'hospitalisation les plus répandues, les cas de gastro-entérites viennent en tête: de un tiers à trois quarts (!) selon les années. Notons d'autres causes d'hospitalisation fréquentes mais nettement moins endémiques: 15

hépatites (première raison de mortalité dans les hôpitaux), fièvres, dysenteries, plusieurs cas de tétanos. Des épidémies de méningites mortelles ont frappé entre 1983 et 1986. Les chiffres concernant les structures médicales sont éloquents. Le nombre de médecins "allopathes" est passé d'un peu moins de 700 en 1982 à près de 1500 en 1992. Le nombre d'infirmières par contre est resté stationnaire aux environs de 500 à 700. Les docteurs ayurvédiques (pratiquant le système de médecine traditionnelle indien), après avoir diminué à 200 praticiens environ durant les années 80, ont vu leur nombre progresser lentement à partir de 1988 pour atteindre 350 actuellement.

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Népal, Népal... Le mot Népal désignait jusqu'au XVIIIème siècle exclusivement la vallée de Katmandou. Prithvi Narayan Shah, roi de Gorkha, en 1769 s'empare de la vallée, devient "roi du Népal" et attribue l'appellation prestigieuse aux autres territoires conquis. Les premières traces du mot "Népal" pourraient remonter au Hème siècle de notre ère, dans l'un des "Contes du Vampire" et dans le traité de théâtre "Bharata". Toutefois, il faut attendre la fin du IVème siècle pour trouver la plus ancienne mention écrite de ce nom sur un document daté, dans le panégyrique posthume de l'empereur Samundra Gupta (335-376) gravé sur un pilier d'Allahabad. Selon le Pashupati Purana, un ermite nommé Ne Muni ou Nemi, de l'époque protohistorique, serait l'éponyme de Népal. D'après d'autres hypothèses, le mot viendrait du tibétain "ne" (-gnas-), "lieu de séjour", par extension" lieu sacré" ; "pal" (en tibétain -bal-) signifierait la laine, le pays de la laine. Pour Dharma Guruji, éminent prêtre tantrique néwar (1896-1990), Népal serait: "le gardien de la Règle" (ou de la Loi) de "niyam" = règle et "pal" = gardien. A la suite de la découverte récente par le Dr Kamal Prakash MalIa, dans la localité de Tistung, d'une inscription ancienne contenant la mention "swasti naipalebhya", une bénédiction en sanscrit que l'on peut traduire par "Salut aux Naipala", K.P. MalIa en déduit que Népal viendrait du nom d'un sous-groupe des Abhira. Le manuel d'histoire des écoles népalaises signale les travaux d'un autre chercheur, Gyan Mani Nepal, qui situe l'origine du mot dans le nom d'une peuplade de l'ouest appelée Nipa, venue de l'Inde par les montagnes et ayant traversé la rivière Gandaki. Cette hypothèse n'est confirmée par aucun document épigraphique et l'étymologie du mot Népal reste encore une énigme.

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UN PEU D'HISTOIRE oute l'histoire ancienne, de par la conception très népalaise du déroulement du temps, préfère au répertoire chronologique des évènements, des légendes et des contes merveilleux nombreux et colorés.

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Au COMMENCEMENT

ÉTAIT UN LAC

La vallée du Népal, dont la géographie et la croyance populaire et religieuse laissent à penser qu'elle fut aux origines un lac, vit ses terres fertiles et ses pentes forestières parcourues par des peuplades de bergers. A 1300 mètres d'altitude en pays tropical, au cœur du pays, protégée des rigueurs de l'hiver himalayen et baignée des pluies estivales de mousson, la belle vallée qui donna son nom au pays tout entier fut convoitée et connut des vagues successives d'immigration. Les plus anciennes, colonisant les bergers aborigènes, furent des populations mongoloïdes descendues du Nord, vraisemblablement ancêtres des Néwar. A l'est du pays, les tribus redoutées des Kirat (ou Kirant) sont les premiers à laisser leur nom à l'histoire politique, mentionnés dans les épopées indiennes du Mahabharata et du Ramayana, connus très tôt des Chinois et des Grecs. Sur des territoires habités par des populations aborigènes, ayant des affinités raciales et linguistiques avec les tribus anciennes de l'Assam et de l'est de l'Inde, ces migrants mongoloïdes fondent du début de notre ère jusqu'au Hème siècle, un royaume allant 18

jusqu'au delta du Gange et s'emparent de la vallée de Katmandou. Aujourd'hui, les ethnies du Népal oriental: les Raï et les Limbu sont encore appelées collectivement Kirant. Au sud du pays, dans la plaine du Téraï tournée vers l'Inde, deux royaumes sont le lieu de naissance d'êtres d'exception. A une époque mythique, Janakpur, la capitale de Videha voit naître Sita, l'héroïne du Ramayana, une des deux grandes épopées de l'Inde. En 560 avo J.-c., à Lumbini la reine Mayadevi donne naissance au prince Gautama, qui deviendra Bouddha, l'Éveillé. Le bouddhisme se répand en Inde et l'empereur Maurya Ashoka (269-232 avo J.-C.) s'y convertit et se rend à Lurn bini.

-

LES LICCHA VI (VÈME MILIEU DU VIIIÈME SIÈCLE)

Le processus de pénétration (ethnique, culturelle et religieuse) de l'Inde se précise avec la dynastie des Licchavi. A l'époque du Bouddha, les Licchavi auraient régné sur Vaisali (près de Muzzafarpur), dans la plaine du Gange. Plus tard, ils auraient aidé les Gupta à s'établir dans le nord de l'Inde, avant de s'installer eux-mêmes dans la vallée du Népal au premier ou au deuxième siècle. A partir du Vème siècle, l'apparition de sources écrites sous forme d'inscriptions, toutes en sanscrit gravées dans la pierre (140 retrouvées), permet de mieux connaître l'histoire de la dynastie régnante jusqu'au VIIIème siècle. On ignore la langue de la population indigène mais les trois 19

quarts des noms de lieux de la vallée cités ne sont pas d'origine sanscrite et s'apparentent à la famille des langues tibéto-birmanes. Les anciens nomades venus du Nord, mongoloïdes de la première vague d'immigration, semblent cohabiter pacifiquement avec les nouveaux venus de l'Inde, et intégrer les valeurs culturelles et artistiques nouvelles. Les Licchavi implantent les cultes hindous de Vishnou et de Shiva, l'hindouisme devient la religion dominante. Le roi est une incarnation terrestre du dieu Vishnou. Aujourd'hui encore il est considéré comme tel. Le bouddhisme aussi a trouvé une terre d'accueil. Les monastères bouddhistes sont nombreux comme le mentionne l'inscription d'Harigaon (en 608) qui signale l'existence de deux mille moines dans les monastères de la vallée. Patan, probable capitale des Licchavi, construit au centre et aux quatre portes de la ville les stupa (dits d'Ashoka) préservés jusqu'à ce jour dans leur forme primitive, de même qu'à Swayambhunath s'élève le célèbre stupa, dont la forme première dut être vraisemblablement du même type archaïque. Les sculptures licchavi sur pierre et en bronze (plus rares) témoignent d'une influence très présente de l'art Gupta, compris et développé avec un remarquable sens esthétique par les artistes népalais. La colline de Changu Narayan, la plus ancienne fondation de la vallée de Katmandou, entre Shankhu et Bhaktapur offre au regard d'admirables stèles de Vishnou Narayan, exécutées dans le plus pur style Gupta. Avec les Licchavi, l'art de la statuaire pénètre au Népal pour ne plus le quitter.

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De l'Inde encore, ils s'inspirent structurant la société en quatre classes (varna) : Brahmanes (prêtres), Ksatriya (gouvernants, famille royale, guerriers), Vaishya (marchands et paysans), Shudra (artisans) divisées elles-mêmes en castes (ja ti). Au VIIème siècle, Amsuvarman, prince Rajput, maire du palais du roi Licchavi Shiva Deva, fonde à la mort de celui-ci une nouvelle dynastie, celle des Thakuri. Il fut un grand administrateur et accorda sa protection et son patronage aux différents cultes religieux hindous et bouddhistes. Il entrera dans la mémoire tibétaine, donnant en mariage sa fille Brikuti au roi tibétain Song Tsen Gampo. C'est elle, divinisée sous le nom de Tara verte, qui avec la deuxième épouse chinoise, Tara Blanche, contribuera à favoriser l'expansion du bouddhisme au Tibet. La succession d'Amsuvarman est troublée, mais grâce à l'intervention des Tibétains dont il reconnaît la suzeraineté, Narendra Deva (641-680) maintient la splendeur passée. Dévot, il aurait introduit le culte de Matsyendranath, "le Seigneur des Poissons", venu d'Assam, qui jusqu'à nos jours est encore chez les Néwar de Patan honoré d'une grande fête annuelle. Il fut également le premier à recevoir des ambassades chinoises comme celle conduite par Wang Hiuen-ts'e, qui transita par son pays pour rendre visite au grand roi Harsha de l'Inde. Mais un usurpateur avait détrôné Harsha et l'escorte de Wang Hiuen-ts'e avait été massacrée, Narendra Deva fournit 7000 cavaliers qui, avec les soldats de Song tsen Gampo accomplirent avec succès une expédition punitive et capturèrent l'usurpateur, emmené en Chine. De 21

ce roi raffiné, les témoignages chinois louent unanimement les qualités. Ainsi entre l'Inde, l'Assam, le Tibet et au delà la Chine, la vallée du Népal tisse un réseau de relations économiques et s'enrichit d'échanges humains, religieux et culturels. Du MILIEU DU VIIIÈME AU XIIIÈME SIÈCLE

La dynastie Licchavi laisse le pouvoir à celle des Thakuri mais faute de traces écrites -la dernière inscription Licchavi est de 756- jusqu'à la fin du Xème siècle, il est très difficile de suivre l'évolution politique. Cependant la tradition populaire et des chroniques plus tardives nous rapportent la légende de l'avènement d'une nouvelle ère népalaise en l'an 879 (20 octobre). On raconte que grâce aux dieux et à l'astrologue Siddhivanta qui permit d'en connaître les desseins, le sable se transforma en or, les trésors royaux de la vallée se renflouèrent et on décida de commémorer la prospérité retrouvée en inaugurant l'ère dite de Népal Sambat, qui date la plupart des sources écrites jusqu'à l'arrivée des Gorkha en 1769. Calendrier que les Néwar ont conservé à ce jour. Un autre indice de prospérité se manifeste avec la fondation de Katmandou au Xème siècle par un des rois Thakuri Gunakamadeva. Cette période, malgré les querelles dynastiques, semble avoir connu une ère de paix et de rayonnement religieux avec le développement du Mahayana et du Vajrayana ou tantrisme bouddhiste ainsi que du tantrisme shivaïte, avec la

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secte des Nath dont le fondateur, Gorakhnath aurait donné son nom à la ville de Gorkha. A la fin du Xème siècle, réapparaissent les sources épigraphiques sanscrites avec une inscription en 987 et des colophons datés. La sculpture de la pierre et l'art du bronze autant hindous que bouddhistes s'imprègnent du rayonnement artistique des Pal a (milieu VIIIème milieu XIIème siècle) et des Sena (XIème - XIIème siècle) du Bengale ainsi que celui du royaume de Mithila dont la capitale est Simraongarh dans le Téraï voisin. LES MAttA (1200 - 1769) À partir de 1200, les rois de la vallée du Népal se font appeler Malla, prétendant eux aussi à une origine indienne, descendants des Rajput et hindous. Gouvernés par les Malla, les Néwar qui peuplent en majorité la vallée imposent une culture originale et leur langue d'origine tibétobirmane: le néwari, remplace le sanscrit dans les manuscrits et les inscriptions. Les artisans néwar, commandités par les rois, les monastères, les temples, les riches dévots de la foi hindouiste ou bouddhiste développent une maîtrise parfaite dans la sculpture de la pierre, du bronze, du bois, l'architecture des pagodes ou la peintures des thankas ou des manuscrits. Ils jouissent d'une réputation telle que le grand Koubilaï Khan, demande à une équipe de dix-huit artistes népalais, conduite par Arniko (1245-1306), de venir participer à la construction d'un stupa au Tibet, puis à Arniko lui-même d'entrer en 1262 à son service à Pékin, où il deviendra chef des 23

bronziers et contrôleur des manufactures impériales. En raison de son rayonnement artistique et culturel, de sa prospérité, la vallée du Népal fait l'objet d'incursions étrangères qui mettent en péril la stabilité politique. Les Khas Malla de l'ouest pendant les XIIIème et XIVème siècles pillent la vallée à plusieurs reprises. Le dernier des rois du Mithila, au sud, Hari Singha Deva chassé par l'invasion musulmane amène avec lui ses prêtres, sa culture et sa langue, le maithili, le culte de la déesse Taleju en 1326. Et enfin les musulmans eux-mêmes en 1349 avec à leur tête le sultan du Bengale dévastent la vallée. Toutefois, le Népal servira toujours de refuge aux artisans et aux intellectuels fuyant le danger musulman, et bénéficiera du même coup des courants culturels et artistiques du Mithila ou du Bengale voisins. En 1382, le roi Malla Jayastithi MaHa, descendant d'Hari Singha Deva, en épousant la princesse héritière de Bhadgaon, où il établit sa capitale, apporte un renouveau politique et réorganise la société en la divisant selon la pure orthodoxie hindoue en 64 castes. En partageant le royaume entre ses trois fils, à sa mort en 1482, le grand roi Jaya Yaksa MalIa fragilise le pouvoir. Si les rivalités entre les rois de Kantipur (Katmandou), Pa tan et Bhadgaon affaiblissent politiquement les MalIa, en revanche elles sont sur un plan artistique une source de création et d'émulation. Les villes s'embellissent de pagodes, de temples, de palais. Pratap Malla (1641-1674), roi de Katmandou, laisse au XVIIème siècle une image de grandeur 24

- parfois

donnant dans l'exubérancequi fait penser à notre Roi-Soleil. Il s'attribue le titre de Kavindra, le dieu des poètes, écrit des pièces de théâtre en maithili et en bengali qu'il fait jouer à la cour, imité d'ailleurs par ses royaux voisins de Patan et de Bhadgaon. Tous se revendiquent hommes de culture, esprits ouverts, les inscriptions dans des langues différentes se multiplient. L'amateur de rébus peut encore à ce jour tenter de déchiffrer l'énigmatique et longue "inscription encore encastrée dans la façade du palais de Katmandou, qui porte une prière à la déesse Kalika, montre des spécimens de quinze écritures que Pratap Malla se flattait de connaître, entre autre l'écriture phiringi qui vient la dernière aussitôt après la kaspiri (cachemirienne). Le spécimen de l'écriture phiringi consiste en ces trois mots: Automne, WinterLhivert "4. Au-delà de l'histoire anecdotique de ces deux mots français gravés au XVIIème siècle, une autre inscription, celle de Rani Pokhari (Rani Pokhari Silalekha) datant de 1670 est rédigée en partie en un népali proche de la langue moderne. Elle explique comment le roi Pratap Malla fit creuser cet étang (pokhari) de la reine (rani), encore aujourd'hui au coeur de la cité de Katmandou, puis le fit remplir des eaux sacrées du Gange et de différentes rivières. Ce qui laisse à penser que cent ans avant la conquête Gorkha, les Néwar de la vallée étaient à même de comprendre le parler des Khas.

4 Sylvain Lévi, "Le Népal".

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LES KHAS

Les Khas, venus probablement du nord-ouest de l'Inde, peut-être dès le VIIème siècle, s'établirent dans l'ouest himalayen. Au XIIème siècle, ils fondent un vaste empire, conquis d'une part sur l'ouest du Tibet, et d'autre part le Kumaon et le Garhwal (Inde actuelle) et le bassin de la Karnali dans l'ouest du Népal. Unique par son étendue géographique, il l'est aussi par sa diversité culturelle. Les monarques fixent leurs capitales d'été et d'hiver près de Jumla efprennent le nom de MalIa comme ceux de la vallée de Katmandou. En dépit de leur origine indienne et de l'influence de l'hindouisme, les premiers souverains Khas Malla s'intéressent au bouddhisme lamaïque tibétain. Ils font venir à leur cour des artistes tibétains ou néwar, peintres ou fondeurs de bronzes qui dirigent sans doute les ateliers locaux, et à la demande royale ou privée produisent des statues. L'empire des Khas MalIa laissera sur le terrain peu de vestiges, quelques temples de pierre que l'on peut encore voir dans la région de Jumla, de style nord-indien (shikara), quelques sculptures sur pierre, des bronzes méconnus en tant que tels et longtemps attribués par erreur soit aux Néwar soit aux Tibétains, et des inscri ptions. La plus ancienne inscription Khas MaHa, trouvée au temple de Baleshvar au Kumaon date de 1223, époque du roi Krachalla. Ces épigraphes sont rédigées traditionnellement en sanscrit ou -fait nouveau-

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dans la langue des Khas. Cette langue venue de l'Inde, appartient à la famille des langues indoaryennes. Elle apparaît pour la première fois à l'histoire népalaise et elle est considérée comme l'ancêtre du népali. Elle possède un alphabet qui lui est propre: la devanagari. La plus ancienne inscription en népali-devanagari archaïque serait celle gravée sur un ex-voto en cuivre (tamrapatra) daté d'Ashoka Challa (1245) 5. On peut également noter que l'art des Khas Malla porte les plus anciennes inscriptions sanscrites en devanagari de la tradition bouddhiste du sous-continent indien6. La fascination qu'exercent les royaumes de la vallée de Katmandou sur les souverains Khas Malla est telle qu'elle ne se limite pas aux échanges pacifiques. Par sept fois de 1287 à 1336, les Khas MalIa mettront à sac les palais et les temples de la vallée. A la fin du XIVème siècle, l'arrivée des hautes castes brahmaniques et Rajput venues de l'Inde, fuyant l'invasion musulmane, revivifie l'hindouisme et accélère la chute du vieil empire Khas. En s'effritant, l'empire des Khas MalIa, dans sa partie népalaise éclate en "Vingt-deux" royaumes unis en une confédération, tandis que les territoires tibétains retournent sous tutelle tibétaine. La population déjà trop nombreuse se déverse alors vers l'est. Les émigrants Khas pénètrent et colonisent le Népal central et ses populations Magar, Tamang et Gurung. Avec eux, la technique agricole de culture du riz basée sur l'irrigation et du blé sur les terres non irriguées 5 D'après Michael Hutt, elle fut découverte par M. P. Khanal en 1977 et publiée partiellement dans un journal, le Gorkha Patra, de la même année. 6 Ian Alsop, "Orientations" juin 1994. 27

gagne les collines. Leur religion hindouiste -toujours côtoyée par le bouddhismecohabite avec le chamanisme local quand elle ne s'y substitue pas. Le parler des Khas s'impose en raison du nombre majoritaire de ses locuteurs et sert de langue véhiculaire entre des populations autochtones voisines, aux dialectes pourtant d'origine commune tibéto-birmane, mais qui ne se comprennent pas entre elles. Peuplés des vagues successives d'immigrants, les royaumes du moyen pays central forment une autre confédération, celle de "Vingt-quatre" dont le dernier-né est l'état de Gorlilla fondé au milieu du XVlème siècle. Leurs chefs se prétendent des Rajput ayant fui l'invasion musulmane en Inde et paient un tribut annuel au roi de Jumla. Les Parbatya (ou peuple des collines), mixés aux descendants des Khas et aux populations chassées par les musulmans, vivent pauvrement des cultures de riz, blé ou éleusine, de l'élevage, d'un mode de vie qu'on peut imaginer en traversant le pays encore aujourd'hui, loin des fastes de la vallée. On a peu de traces de ce que furent ces petites principautés. LA FONDATION DE L'ÉTAT NÉPALAIS. PRITHVI NARAYAN SHAH

L'une de ces principautés, à 70 km de la vallée de Katmandou, perchée sur une éminence rocheuse, Gorkha, se sent à l'étroit, dépourvue de terres dans la plaine. Un de ses princes, Prithvi Narayan Shah, par son remarquable sens politique

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des alliances, une stratégie guerrière qui n'hésite pas à s'équiper d'armes modernes -à feu- et une volonté tenace, mènera un combat impitoyable de près de vingt ans pour repousser les frontières bien au-delà de ce dont ses prédécesseurs ont pu rêver. Il fera tomber les forteresses protégeant les routes commerciales vers le Tibet ou l'Inde, la dernière étant celle de Kirtipur en 1766, tristement célèbre puisqu'à sa reddition, tous ses habitants mâles eurent le nez coupé. Encerclant la vallée de Katmandou, mettant en déroute l'armée anglaise du capitaine Kinloch appelée par les rois Malla en 1767, il s'empare de Katmandou le jour d'Indra Jatra le 25 septembre 1768, Patan peu après et Bhaktapur en novembre 1769. C'est de 1782 à 1790, durant le règne de son petit-fils que tout l'ouest est conquis et que sont vaincus les chefs des royaumes des confédérations des "Vingt-deux" et des "Vingt-quatre". Seuls ceux qui se rendirent sans se battre gardèrent leur titre de roi jusqu'en 1960. La conquête de l'ouest continue jusqu'à l'annexion de royaumes aujourd'hui situés en territoire indien, tels le Kumaon (1790), le Garhwal jusqu'à Kangra en 1809. Les armées Gorkha à l'est conquièrent le Sikkim en 1793. Si les successeurs de Prithvi Narayan n'ont pas su mener une politique intérieure stable, ils ont cependant, cond ui ts par la même ambition, pratiqué une politique de conquête et ont poursuivi le projet ambitieux de constituer un État fort face à leurs voisins indiens et anglais ainsi qu'à leurs voisins chinois et tibétains. Les

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frontières du grand Népal se dessinent peu à peu, non sans avancées et reculs. En territoire tibétain, les Népalais après avoir mené des offensives victorieuses se voient refoulés jusqu'aux portes de Katmandou par les Chinois qui, en 1792, les destituent de tous leurs acquis et délimitent définitivement la frontière du nord. Jusqu'en 1908, ils enverront tous les cinq ans un tribu à Pékin. En 1814, la guerre contre les Anglais, plus précisément la Compagnie orientale des Indes, porte sur la question du Téraï. Le ministre népalais Bhimsen Thapa refuse de payer l'impôt sur le Téraï dû à la Compagnie, qui continuait à l'exiger en tant qu'héritière de l'ancien empire moghol. Malgré les remarquables qualités militaires des armées gorkhali, force fut faite aux Népalais de signer le traité de Segauli qui impose un Résident anglais à Katmandou, la perte des territoires conquis depuis 1790 à l'ouest de la Mahakali, au sud dans le Téraï et à l'est le Sikkim, seuls quatre districts du Téraï seront rendus en 1858 par la Compagnie des Indes. Malgré tout, la présence d'un Résident anglais -très surveillé- sera la seule entaille faite à la sacrosainte indépendance du Népal qui depuis Prithvi Narayan prévalait, interdisant toute intrusion étrangère dans le pays; ni comptoirs, ni détachements militaires britanniques sur le sol népalais.

Le népali, privilégié par la dynastie Gorkha est devenu langue officielle et administrative du Népal dès la fin du XVlIIème siècle. Au rêve visionnaire de Prithvi Narayan Shah, de créer sur 30

fond d'hindouisme, un état himalayen unique, le grand Népal, Maha Népal, en place de la mosaïque de principautés, s'ajouta avec les progrès de la conquête, la volonté de cimenter la conscience nationale des divers groupes ethniques, par le biais d'une langue, celle des Gorkha, le gorkhali qui prendra plus tard le nom de népali. Son assimilation rapide par les divers groupes ethniques s'expli-.}ue par le rôle important qu'elle jouait déjà dans les échanges entre les multiples principautés. LES RANA (1846

-1951)

Malgré le pouvoir absolu attribué au roi, les successeurs de Prithvi Narayan, rois ou régents (seuls le fils et le petit-fils de Prithvi Narayan accèdent au trône à leur majorité), plus préoccupés par la politique extérieure, se montrent incapables de gérer les affaires du royaume. En 1800, est créé un poste de Premier ministre: Bhimsen Thapa en assurera la fonction avec brio de 1806 à 1837, achevant l'unification du Népal. A son emprisonnement par ses rivaux et son "suicide" en prison, les intrigues se multiplient, les luttes de pouvoir entre les grandes familles s'intensifient. En 1846, Jang Bahadur Rana frappe un grand coup: le 15 septembre, il convoque tous les notables de l'opposition, dans la cour de "Kot" près du Palais royal et les fait massacrer. Il établit l'hérédité du poste de Premier Ministre qui sera transmis du frère aîné aux cadets avant de passer aux enfants de ceux-ci. Le roi reste en place, à titre honorifique.

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Le Népal se ferme définitivement aux influences étrangères bien que les Rana soient fascinés par les cours d'Europe. Jang Bahadur se rend à Londres sur l'invitation de l'impératrice des Indes, la Reine Victoria et est l'hôte du Prince Napoléon à Paris d'août à octobre 1850. Les palais sont construits selon le goût victorien, les Rana font venir des statues équestres grandeur nature d'Angleterre. Jang Bahadur et Chandra Shamsher (19011929) sont des législateurs qui font du Népal l'Hindousthan, un royaume hindou renforçant la séparation entre les castes et les châtiments (danda) en cas de sacrilège. Toutefois sous l'influence anglaise, dès 1920 et officiellement en 1935, il sera interdit aux veuves de subir le sacrifice de sati, c'est-à-dire dire d'être brûlées vives à la mort de leur mari. L'esclavage est aboli. En 1931 est accordé un jour férié par semaine. Les cent années de gouvernement Rana sont pour le pays une période de stabilité, sans conflit avec les états voisins. Leur politique habile permet de sauvegarder l'indépendance nationale, à la différence de certains états indiens. Malheureusement l'autoritarisme et les répressions sanglantes sont des facteurs déterminants qui mènent à la chute de leur régime, par ailleurs précipitée par l'indépendance de l'Inde en 1948. En 1950, le roi Tribhuvan se réfugie à l'ambassade indienne de Katmandou, s'exile à Delhi et de là soutient six mois de rébellion populaire qui aura raison des Rana. Certains Rana fuient en exil, d'autres acceptent de se soumettre.

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La dynastie des Shah, mise en veilleuse pendant cent ans, reprend les rênes du pouvoir. LES SHAH

Le Roi Tribhuvan Bir Bikhram rentre à Katmandou soutenu par la quasi-totalité. des partis, qu'ils soient d'opposition ou non, de l'extrême droite au communisme en passant par le parti du Congrès autour de B.P. Koirala. Sa politique se veut démocratique mais est encore très hésitante quand la mort l'enlève à l'âge de 48 ans en 1955. Son fils Mahendra Bir Bikram Shah (19201972) lui succède et dans la voie tracée par son père instaure une monarchie constitutionnelle en 1959 avec élections au suffrage universel, pour la première fois dans l'histoire du pays, d'un Parlement. Pour la première fois aussi, le statut légal de la langue népali est abordé. La controverse éclate entre partisans du népali et ceux de l'hindi -comme B.P. Koirala- au moins pour le TéraÏ. Le roi Mahendra tranche: une clause de la Constitution, datée de Bikram Sambat 2015 (1958), stipule que le népali est désormais la langue nationale. Le parti du Congrès est le grand vainqueur des élections et en tant que Premier Ministre, B.P.Koirala, celui qu'on appellera le Nehru du Népal, tente de mettre en place un certain nombre de réformes qui inquiètent la classe possédante. A la suite de révoltes populaires violentes, le roi décide de fermer la parenthèse démocratique, 33

reprenant le pouvoir, interdisant les partis politiques et emprisonnant les chefs des partis dont B.P .Koirala et tous les opposants. En 1962, il promulgue une nouvelle constitution qui met sur pied le système des Panchayat. "Panch", le conseil des Cinq, est une institution déjà mentionnée dans les lois de Manou et sous les Licchavi. Renouant ainsi avec la tradition hindoue, le roi instaure un Parlement où sont élus au suffrage indirect des représentants du peuple. Les panchayat des villages, les seuls élus au suffrage universel, choisissent les Panchayat de district, votant à leur tour pour les Panchayat de zone, lesquels élisent les 90 membres du Panchayat National. L'absolutisme royal est rétabli, le Parlement n'a qu'un rôle consultatif. Le roi nomme le gouvernement, a le pouvoir législatif et commande les armées. En 1963, un nouveau code du droit abolit le système des castes, établit l'égalité de tout citoyen devant la loi et une réforme agraire qui prévoit entre autres la redistribution des terres en surplus aux paysans sans terre. Politique de modernisation qui reste très théorique et a peu d'effet au niveau pratique dans un pays où les privilégiés sont les maîtres absolus. Toutefois l'ouverture aux pays étrangers permet la création et le financement d'un réseau routier et l'installation de barrages. En 1973, Birendra Bir Bikram à l'âge de 28 ans succède à son père. La reine Aiswarya Rajya Lakshmi est d'origine Rana. Il est couronné en 1975. Le progrès (bikas) est un des grands thèmes de son action. Par une intelligente politique étrangère 34

de neutralité, il s'efforce d'ouvrir ce pays enclavé, sans accès à la mer, dont le développement économique dépend beaucoup du bon vouloir de ses deux voisins géants et de l'aide internationale. Pour favoriser la scolarisation et l'alphabétisation, des écoles ont été ouvertes dans tout le pays. Mais l'éducation des masses entraîne une aspiration à la liberté d'expression, notamment la liberté de presse, le droit à la manifestation, le droit à la grève. Les Népalais et les intellectuels en particulier, avec l'ouverture des frontières, le contact avec l'étranger par la voie des touristes et des média -la télévision fait son apparition en 1984- affirment peu à peu leur exigence d'un régime démocratique. LA DÉMOCRATIE

PARLEMENTAIRE

(1990..,)

En 1980, à la suite d'agitations politiques et de manifestations étudiantes, le roi propose un référendum: multipartisme ou maintien du système des Panchayat. 54% des voix soutiennent le système des Panchayat. L'économie népalaise, malgré l'aide internationale, se porte de plus en plus mal en raison de la dépendance monétaire avec la roupie indienne et de difficultés de gestion. Le 23 mai 1988 à la suite de manifestations: 1000 arrestations. Le 20 juin, à Katmandou, 5 bombes font 7 morts. La crise avec l'Inde sert de détonateur au réveil des revendications. Le gouvernement a acheté en effet en 1988 à la Chine, de l'armement que l'Inde refusait de lui fournir depuis des années. En représailles et prétextant la violation

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du traité commercial entre les deux pays, l'Inde, dirigée par Rajiv Gandhi, décide le blocus économique le 23 mars 1989 et ferme ses frontières au Népal. Pénurie d'essence, de médicaments, montée des prix du riz, du sucre, files d'attente où on a tout loisir de communiquer et de commenter son mécontentement, marché noir. Le printemps 1990 connaît à nouveau des émeutes, des arrestations, des morts. Les partis politiques, le Congrès népalais avec à sa tête Ganesh Man Singh, compagnon de prison de B.P. Koirala, et les divers partis communistes, malgré leur illégalité, appellent à une grande manifestation en faveur de la démocratie (prajatantra). Le 6 avril 1990, 200.000 personnes se pressent en face du Palais royal. C'est la première fois qu'il y a au Népal une telle concentration populaire pour raison politique. Que se passe-t-il alors derrière les murs du palais? Colère, panique, confusion? L'armée reçoit l'ordre de tirer sur la foule. On dira du côté officiel 22 à 50 morts dont 3 étrangers. La révolution a ses martyrs, le roi cède aux revendications et annonce l'instauration du multipartisme. Le leader Krishna Prasad Bhattarai qui a passé 14 années en prison devient Premier ministre, à la tête d'un gouvernement provisoire. Malgré la levée du blocus indien, les affrontements font à plusieurs reprises encore des morts, on craint la police, l'armée, les vengeances personnelles. En novembre 1990, le Roi accepte la nouvelle Constitution qui établit une monarchie constitutionnelle où le pouvoir législatif 36

appartient désormais au Parlement. 205 députés sont élus pour cinq ans au suffrage universel, les murs des villages et des villes se couvrent de soleils, montres, arbres, vaches, autant de symboles permettant à la population analphabète de distinguer les différents candidats d'une campagne électorale. En mai 1991, le grand gagnant des élections est le parti du Congrès avec 110 députés. Les 14 partis communistes, dont le plus important est le U.M.L, (Union marxiste-léniniste) obtiennent 69 représentants. Le nouveau gouvernement a à sa tête un autre opposant célèbre en la personne de Girija Prasad Koirala (frère de B.P. Koirala mort en 1983), secrétaire général du parti du Congrès népalais. La presse devient plus libre. Le grand quotidien gouvernemental presque centenaire, le Gorkha Patra, fondé en 1901 et sa version en anglais, le Rising Nepal, se voient concurrencés désormais par la parution d'un nombre grandissant de nouveaux journaux. Les publications se multiplient d'une façon spectaculaire, laissant entrevoir les richesses en ressources humaines et intellectuelles du pays Lors des élections anticipées du 15 novembre 1994, deux ans avant la date prévue, dues à la mise en minorité du Premier Ministre Koirala, contraint de dissoudre le Parlement, les électeurs népalais retirent leur confiance au Parti du Congrès, en proie ces dernières années à des rivalités grandissantes. Par l'exercice trop personnel du pouvoir - pour ne pas dire détourné en leur faveur- les grandes personnalités du parti

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ont perdu le charisme que leur avaient donné les années de prison et de lutte dans l'opposition et une politique pro-indienne a fait le jeu des adversaires. Les communistes sortent vainqueurs obtenant à la chambre des Représentants 88 élus (C.P.N. Communist Party Nepal) devançant d'une courte majorité le Parti du Congrès (N.C.) 83 élus, le Rastriya Prajatantra royaliste 20 membres, le Nepal Workers and Peasants Party de gauche 4 membres et le Nepal Sabhavana Party 3 membres. Man Mohan Adhikari devient Premier Ministre et bien que ce gouvernement soit pour la première fois dans l'histoire du pays et communiste et minoritaire, il obtient à l'unanimité le vote de confiance du Parlement fin décembre 1994. Support conditionnel qui exige le maintien d'une politique démocratique par le renforcement des droits de l'homme et la poursuite d'une économie libérale avec une décentralisation du pouvoir. Toutefois cette position minoritaire le conduit dès 95 à démissionner et prévoir de nouvelles élections anticipées. Ces difficultés ressemblent à s'y méprendre à celles de notre IVème République. La nation népalaise fait aujourd'hui l'expérience du jeu démocratique qui, il faut le souhaiter, répondra à ses aspirations et ses besoins.

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MAIS D'OÙ VIENT CETTE LANGUE? LA LANGUE OUI VENAIT DE LA MONTAGNE

Le népali est la dénomination récente d'une langue connue depuis plus de 700 ans sous des appellations diverses. Le khas-kura, le parler des Khas, témoigne d'une forme archaïque de népali et partage beaucoup de traits communs avec le népali moderne. Les Khas, qui furent à l'origine de la diffusion de l'orthodoxie brahmanique (sans cri tisa tion) au Népal, constituent aujourd'hui le groupe ethnique dominant (51% de la population). Ils se répartissent surtout dans les collines moyennes, et le Téraï depuis l'éradication du paludisme. Leurs voisins aux langues de famille tibéto-birmane prirent l'habitude de désigner leur langue sous nom de khas-kura. Le terme de parbatya -langue de la montagnefut aussi couramment employé au XIXème siècle, par opposition à celle de la vallée de Katmandou: népal-bhasa ou néwari7. L'appellation de pahari (montagnard) semblait plus usitée par les gens des plaines du sud pour désigner leurs voisins des collines. Les linguistes ont aussi attribué le nom de pahari oriental au népali en raison de sa parenté évidente avec une série de parlers himalayens allant du Cachemire au Népal, comme le souligne très justement Renou. 7 L'appellation

de "nepal

bhasa"

(bhasa

= langage)

s'applique

à la

langue des Néwar. Le mot "népal" lui-même est une variante du mot "néwar", il est difficile de déterminer avec certitude lequel des deux procède de l'autre. Des glissements entre le "w" et le "p" et entre le "r" et le ''l'' sont des phénomènes fréquents. 39

Mais l'utilisation la plus fréquente dans les milieux officiels et éduqués jusqu'en 1920 fut celle de gorkhali. C'est à partir de 1930 que le terme de népali lui est donné, vraisemblablement par les voisins anglais en Inde, adopté par le gouvernement népalais Rana, qui rebaptise le Gorkha Bhasa Prakasini Samiti en Népali Bhasa Prakasini Samiti. Il faut toutefois préciser que dans le langage populaire et particulièrement de ceux qui ont une autre langue maternelle, le terme parbatya ou gorkhali ou même khas-kura est encore d'usage pour désigner le népali. L'Académie Royale du Népal fut créée en 1957, destinée à promouvoir et uniformiser l'emploi du népali. Elle publia en 1973 un dictionnaire de synonymes entre le népali et 14 langues vernaculaires du Népal. LES RACINES INDO-IRANIENNES

ndo-aryenne, la langue népali appartient à la branche orientale du groupe indo-iranien, représentée dans sa forme ancienne par le sanscrit, védique puis classique. L'indo-iranien (ou aryen) est un sous-ensemble de la grande famille des langues indo-européennes qui englobe également les langues romanes. Il existe donc un cousinage entre le français et le népali. Un survol du népali montre un nombre élevé de concordances avec le français: au niveau des

I

chiffres

(sat = sept, ath = huit, nau = neuf, das =

dix), des verbes

(dinu = donner),

du vocabulaire

usuel (ama = mère, sarpa = serpent), religieux (deuta = déité, deva = divinité, dieu) ou de notions

40

fondamen tales

(m:tityu

= mort, juwan =

jouvence). INFLUENCES

Comme dans l'histoire de toute langue, de multiples apports ont contribué à son enrichissement, sans modifier sa structure. Le premier est sans doute celui du tibétobirman. Renou n'hésite pas à dire, en évoquant les similitudes existant entre les différents parlers pahari, que celles-ci proviennent aussi, pour une part, d'un commun substrat tibéto-birman. Dans le cas du népali, cette influence a été renforcée par la présence des Néwar. Si Turner, et à sa suite Hutt, estiment que celle-ci a pu être exagérée par certains, il est impossible de nier l'importance des Néwar sur le plan culturel qui ne peut rester sans conséquences linguistiques. Par exemple, un mot aussi courant que fenêtre est d'origine néwar (jhyal). Par les divers mouvements de populations, les langues qui existaient en Inde avant l'invasion aryenne -dravidiennes et munda (austroasiatiques)- ont également pénétré le népali. De nombreux mots persans et arabes, venus de l'ourdou

(kitab

= livre, kalam = stylo, malik =

maître, muluk = pays, khabar = les nouvelles) sont employés couramment en népali, spécialement dans le vocabulaire juridique. L'hindi a accentué son empreinte ces dernières décennies à cause de l'influence grandissante des média (particulièrement du cinéma). Enfin tout un vocabulaire anglais se glisse dans la conversation népalaise ainsi que dans la langue 41

écrite. Les mots y apparaissent parfois en alphabet latin ou y sont orthographiés dans une phonétique approximative en devanagari: myujik (music), myujiyam (muséum), aphis (office). Pour tenter de lutter contre ce phénomène, ressenti par certains comme un envahissement de mots étrangers, un mouvement tend à introduire en guise d'antidote des mots sanscrits n'appartenant pas au langage usuel, dans la presse par exemple, qui en regorge. Ce phénomène de régénérescence à partir de sa propre source sanscrite a existé à toutes les époques. Le sanscrit est donc non seulement à la racine du népali, mais il a aussi accompagné la langue tout au long de son évolution. Une langue est un organisme vivant, constitué "d'une myriade d'éléments qui naissent, évoluent puis meurent à leur propre rythme. EXTENSION.

Parlée aujourd'hui par plus de 53% de la population, (9 302 000 personnes en 1991), dont elle est la langue maternelle et comprise par la quasi totalité des Népalais, elle est la langue nationale qui permet une certaine cohésion au pays qui compte par ailleurs onze autres langues et plus de trente dialectes. Elle est aussi la langue d'environ trois millions d'Indiens. Népalais d'origine, ils ont émigré au cours du siècle dernier vers le nord-est de l'Inde. Ils se sont établis dans la région de Darjeeling, au Nord de l'état du Bengale, qui partage avec le Sikkim le parler népali et la culture népalaise. Ils se sont installés également dans 42

l'Uttar Pradesh, l'Himachal Pradesh et le Punjab. A ce titre, le gouvernement indien reconnaît officiellement en 1993 le népali comme langue nationale (rastriya bhasa) au même titre que l'hindi, le bengali, l'ourdou... Par contre dans le sud du Bhoutan, où les Népalais s'installèrent il y a plus de 150 ans pour cultiver le thé, une politique ethnique xénophobe du gouvernement bhoutanais a chassé plus de 100.000 personnes en 1992, réfugiées encore à ce jour dans des camps de misère à Jhapa, à l'Est du Népal. LANGUE OFFICIELLE D'UNE NATION

Le népali est, avec l'hindouisme et la monarchie, l'un des piliers de l'État et de la nation népalaise. La géographie du Népal ne prédisposait guère à la formation d'un État, un réseau hydrographique nord-sud entaillant les collines du centre, isolant les communautés et entravant la circulation est-ouest. De fait les échanges latéraux à l'intérieur du Népal ont toujours été très réduits. Dans un pays pluri-ethnique comme le Népal, le nationalisme n'a jamais été présent. L'unité nationale a été le résultat d'une série de composantes: - la force de l'expansion gorkhali - la centralisation du pouvoir royal installé à Katmandou - le sentiment d'appartenance à un milieu géographique différent de la plaine indienne - et surtout l'extension du népali.

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L'emploi du népali s'est accru progressivement aux dépens des langues qui n'avaient pas de tradition écrite (magar, gurung...) ou qui ont été mises en veilleuse délibérément par les gouvernements malgré l'existence d'une littérature riche (néwari). Ces populations aux langues maternelles diverses parlent souvent un népali simplifié. Ce phénomène reste vrai même s'il tend à être moins marqué ces dernières années pour différentes raisons: - l'utilisation systématique de cette langue dans le système d'éducation, de l'école primaire à l'Université (si le nombre d'analphabètes reste élevé, il diminue toutefois fortement) - l'exode rural et la concentration de population dans les grandes villes, où le népali devient la langue de communication principale - la large audience de la station de radio nationale "radio Népal" - et surtout, récemment, l'implantation et la large diffusion des programmes télévisés (les premiers postes de télévision ont fait leur apparition à Katmandou durant la deuxième moitié des années 80). La politique, la scolarisation et les média ont donné un rôle grandissant au népali. De plus, des écrivains et des poètes de génie et de talent, dès la fin du XIXème siècle, ont contribué à lui forger des racines et une âme. C'est une langue pleine de vitalité qui a acquis aujourd'hui son statut moderne de langue nationale, adéquate pour répondre aux besoins d'un peuple.

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LA LANGUE

Dans l'apprentissage de toute langue vivante, il est indispensable que l'apprenant entende et écoute le plus possible la langue qu'il souhaite apprendre. En effet, une langue est avant tout un assemblage de sons, ce qui est trop souvent oublié dans les processus d'apprentissage. Nous avons appris notre langue maternelle en l'entendant tout d'abord sans la comprendre. C'est au fil des situations diverses et renouvelées que petit à petit ces sons ont pris un sens, aidé dans notre compréhension par tous les éléments non verbaux: geste tendre ou menaçant, bisou ou froncement de sourcil réprobateur, etc... C'est pourquoi nous ne pouvons que recommander ici avec la plus grande insistance d'entendre du népali, d'écouter du népali et d'écouter encore du népali si l'on a décidé d'apprendre cette langue. Peu importe si l'incompréhension semble totale au début. Il est essentiel de se baigner dans la langue, de se familiariser avec les sons nouveaux qui se chargeront de sens petit à petit sans même que l'on n'y prenne garde. Les chapitres qui suivent n'ont pas la prétention de constituer une méthode d'apprentissage de la langue népalaise. Une méthode doit être constituée d'éléments visuels (écrits, dessinés, coloriés), auditifs, complétés idéalement par des éléments odorants, gustatifs et palpables. Ceux-ci doivent former un ensemble utilisable par un animateur avec un groupe et lui permettre de mettre en place une dynamique à l'intérieur de ce groupe qui impliquera les apprenants dans des situations de la vie reconstruites à l'échelle du laboratoire que constitue la classe. 47

Compte tenu du support choisi et des limitations inhérentes à ce support, notre seule ambition ici est de donner un aperçu des structures de la langue et de ses mécanismes, en illustrant les explications d'un maximum d'exemples. POUR COMMENCER AVEC LA LANGUE Un élément doit conforter tout nouvel apprenant de cette langue: nombre de natifs du Népal qui l'utilisent emploient des formes grammaticales simplifiées et un vocabulaire assez réduit. En effet, dans les familles, la langue maternelle, c'est-à-dire celle de l'ethnie, reste prédominante. Ainsi le népali, bien que largement utilisé dans les échanges et bien accepté par tous, est pour près de la moitié de la population, la deuxième langue. Ceci permet au débutant de trouver facilement des interlocuteurs employant naturellement une syntaxe et une grammaire simplifiée et à même de bien accepter un langage approximatif. Enfin, il ne faudrait pas terminer cette introduction sans mentionner les 4 mots ou expressions incontournables: namasté (bonjour, au revoir, salut) ramro cha (c'est bien, c'est beau) kahâ jane ( signifie littéralement: où allezvous? A rapprocher du "comment allez-vous") et, à ne pas oublier: bistarai... (lentement)

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Jin 1"ffifl'r ko lagi est plus couramment utilisé mais est moins correct, certains auteurs le considérant même comme incorrect. ëJ>1~ ko nimti, appartient à un registre de langue plus soutenu. 65

~41 (~'h5 '() ~ nepaliharÜ

tsIIo-U'1

hatle khanchan

Les Népalais mangent avec leurs doigts (lit. : avec la main) ~ m 3TfTFf) ~ ~ "f! maile yo aphno â'khale dekheko chu

J'ai vu ça de mes propres propres yeux).

yeux (lit. avec mes

b) Noms, participes ou noms verbaux dénotant la cause:

~~~ SIta dukhale

maryo

Sita est morte de chagrin.

~

~I~ICPI~w:r ~

oM

thakai lagekole ram sutna gayo Ram est allé se coucher parce qu'il était fatigué.

tfFtT~~~tP pam parnale sabai bhijeko cha Tout est mouillé à cause de la pluie Le génitif (possessiO:

Il s'agit du cas indiquant l'appartenance, marqué en français par la préposition "de". Pour les pronoms et les adjectifs, il correspond aux possessifs. Il indique également la matière dans laquelle est fabriqué un objet (marqué en français par la préposition "en" : en or, en bois...). En népali, le génitif est caractérisé par le suffixe ëp) ko. Théoriquement, au féminin, le suffixe

66

devient ~ kT et au pluriel ëpTka. Toutefois, il n'est pas rare d'entendre (ou de lire) ëp) ko quelque soit le genre ou le nombre. ~tR hariko

.ffIdl c61 ~ sI takI chorI

ghar

La fille de Sita

La maison de Hari.

CPlo~h~NëpT~1~~'(1 kapnaclauka mancheharii Les habitants de Katmandou13

~ "Jfrffi phülko mala

~~

Un collier de fleurs

Une chaîne en or

sunko sikri

L'ablatif: Il indique qu'un nom sert de point de départ, d'origine à l'action. Il peut s'agir d'un lieu ou d'un moment. Ce cas est généralement marqué par l'un des

suffixes, au choix, iITC bata ou

~

dekhi

point d'origine est spatial et uniquement lorsqu'il est temporel.

quand le

~

dekhi

13Noter comment s'écrit et se prononce Katmandou: q)To1TI\S"1' ka!hmaqâu avec deux rétroflexes et la diphtongue finale nasalisée. Un Q rétroflexe est parfois inséré avant la dernière syllabe: q)To+nU\S"1' kathmaI}qâu. L'orthographe francisée, reprise des Anglais, est assez éloignée du nom original. Etymologiquement, le nom de la capitale du Népal vient du sanscrit q)ffi ka'tha (bois) ~ maq4apa (temple), le temple de bois. Une très belle légende raconte comment l'arbre de paradis, venu assister à une fête, a été emprisonné par un habitant de la ville qui l'avait reconnu. Celui-ci souhaitait construire un temple entier en utIlisant le bois d'un seul arbre. Il n'a été libéré ,\ue contre la promesse de procurer cet arbre merveilleux. Ce temple, qw a donné son nom à la ville, est situé au sud de la place de l'ancien palais royal. 67

a) L'origine est un lieu: !.pixi Ellè 3fl(:I)

)

phransbata ayo OU

)

) Elle/il arrive de France. )

M>ixi ~ f{g 3fl(:I)

phransdekhi

)

ayo

b) L'origine est temporelle: ~~~I,

Datif ~~~~pour

lui Ablatif venant

de

lui

\JijTC

\j..fl~'(16ITC

ubata

uiUharÜbata

usma-

uruharÜma

Locatif

~\j..fl ~'(14-11

en lui ën~T wahâ manière

(elle/il,forme

polie)

régulière, sans forme

simplement

se décline

les suffixes: Pluriel

Nominatif

ë16T ~waha

wahaharu

Accusatif

q~i{,)l~

q~i~'(1

wahalaT

wahaharulaT

etc...

etc...

etc...

Quelques 1r(i5& ~ malar deu

exemples

{,)I~

d'utilisation: -sRT"iWIT 51 mero cas ma ho

Ce sont mes lunettes.

76

de

oblique, en ajoutant

Singulier

Donne-moi.

lagi

~~tGff~fq~ taparle malar das rupiya dinubhayo VOUS m'avez donné dix roupies.

~

!51~-tÎ1 t9 ' ~ gl...tako pasal cha

J'ai une maison.

Gita a un magasin.

~tRt9

~ mero

~Cf>\1j-11

uWt t9

ekjana

chort

cha

J'ai une fille.

~

Ejuq15'!ëpf'1~

t9

?

\WPT~ t9 ? usko sabai cha ! Il a tout (ce qu'il faut, ce dont il a besoin...) !

tapaIko biralo cha ?

Vous avez un chat?

23 L'adjectif interrogatif complété par la postposition sur les marqueurs)

sltako

katiwata

la phrase

Cf)fçrkati (combien) peut également être dite "de classification" (voir la chapitre devenant

kitc1b cha ?

95

alors : ~

~

~

-g ?

b) Toutefois, si la chose possédée est portée par le possesseur, la phrase peut-être du type: cet objet est avec moi (pour dire: j'ai cet objet). Cette forme, assez courante, est notamment très utilisée

à Darjeeling. "Avec" est indiqué par le suffixe ~T[ saga. Le suffixe ftrft sita a la même valeur et est parfois utilisé: ~

fcmmru

masanga

kitab cha

J'ai un livre (dans ma poche ou ma main).

~

tRrru

usanga paisa cha Il a de l'argent (sur lui).

~RRkl~~U harisita ek mohar cha Hari a une pièce de 1 mohar (cinquante

paisas)24.

B - L'auxiliaire U cha est également employé dans des phrases contenant une notion de lieu, d'une chose ou d'un être se trouvant quelque part: ~~U rI ta gharma

- cha

Rita est à la maison (est chez elle). ~'1~~ '1 W1T ~ ~ ..:> baccako luga mailo cha

Le vêtement

de l'enfant est sale.

1Nr ~~ct>I'< ~

-.,. - .,.~ Mon tailleur est pauvre mero sUClkar ganb cha

(il ne peut pas être riche partout ...) Certaines expressions utilisent

~ cha:

ëftq)~ th"fk cha

Ça va.

A ne pas oublier, l'expression utilisée plusieurs fois par jour et sans laquelle le népali ne serait pas le népali :

xm't~

ramro cha C'est bien (c'est beau, etc.)

97

Négatif de '9" :

Le négatif de l'auxiliaire théoriquement Toutefois, véritablement cas général hunuhunna.

g cha se conjugue

à toutes les personnes. formes les deux seules utilisées sont \tif chaina dans le et la forme de politesse '11,..;:r

"

~~tfffit@r~ masariga ek paisa pani chaina

(je n'ai pas

Je n'ai pas un seul centime sur moi d'argent du tout).

~

ëf)(i511

usariga

~

kalam

chaina

Il n'a pas de stylo. m 4'{1~~13fl\jf qtf

~

yo pasalma aja dhüp chaina Il n'y a pas d'encens dans ce magasin

aujourd'hui.

~~ uha hunuhunna

11/elle n'est pas là (forme polie). Et, à ne surtout pas oublier:

mir~ ramro chaina Ce n'est pas bien (ce n'est pas beau, etc.)

98

A titre informatif, pour les rares fois où elles se présentent, voici le tableau de toutes les formes du

négatif de U cha: -qëPëfiA Sin ulier

~ëfiR Pluriel

\nïl1

chaina

chaina

~~2ème ers.

chainas

chaina u

chaina

chainan

)l~~

3ème

ers.

Forme de polltesse I

U

~1ère ers.

9."1~"' hunuhunna

I

99

I

L'auxiliaire

gt ho25

~CRR

~CRR

Sin ulier \TIf1f ~1ère ers. 2ème

ers.

3ème

ers.

Pluriel

hü ~~~W hos ~~~W ho

haü W hau I~ hun

La seule forme vraiment employée est celle de la troisième personne du singulier m ho. Elle sert à toutes les personnes du singulier et du pluriel dans le langage commun. La troisième personne du pluriel est parfois, mais rarement, employée. Cet auxiliaire m est essentiellement utilisé pour définir les choses ou les personnes:

m~m

mrJ>m? yo ke ho? Qu'est ce que c'est?

yo cakku ho C'est un couteau.

mënTm?

m~m

yo ram ho C'est Ram.

yo ko ho? Qui est-ce?

25 Contrairement à l'auxiliaire -g cha dont la racine ne peut être confondue avec aucune autre, l'auxiliaire 6) ho est construit sur la même

racine

que l'infinitif

du verbe

être

SJ

hunu

mais possède

des

formes conjuguées qui lui sont particulières. Certaines de ces formes sont très proches de celles du subjonctif du verbe SJ hunu mais ont un sens totalement différent.

100

- -

dLjI~CP'1 'Wf ëf> m

tapalko

-,wr "Wf ~ m ? mero mm syam ho Mon nom est Shyam

?

nam ke ho ?

Quel est votre nom?

'dprr~ ~

m

yo manche chetri ho Cette personne est Chetri (qui appartient des Kshatriya).

à la caste

Il existe de nombreux emplois de l'auxiliaire ~) ho qui se confondent avec ceux de l'auxiliaire U chao Dans les exemples qui suivent, l'utilisation de l'un ou l'autre des deux auxiliaires est courante et le sens est le même dans les deux cas. (L'emploi de U cha est peut-être un peu plus répandu). ~ "410)U ou khana mlJl10cha I La nourriture est bonne.

m~mITU"

~~m khana mltho ho

ou m~mITm

yo manche ramro cha I yo manche ramro ho Cette personne est très bien (gentille, bonne...) dLjI~CP'1 ~

~

U"

tapa1'ko khet thulo cha ou dLjI~CPÎ~ m tapa1'ko khet thulo ho Votre champ (rizière)

~

est

vaste.

Négatif de en ho:

De même l'auxiliaire

que pour

U" ch a, le négatif m ho se conjugue théoriquement 101

de à

toutes les personnes, mais la seule forme couramment utilisée est ~ hoina (prononcer en séparant le i du 0, hoïna, ou en écrivant phonétiquement lIoyena") m ~ ~, 31cPT~jQh1. ~ yo kitab hoina, arko dinuhos na26 Pas ce livre-là, donnez-moi l'autre. Un sens courant

~

de

hoina est:

non! En

effet, le népali ne possède pas d'adverbe de négation et cette fonction est remplie généralement en reprenant dans la réponse la forme négative du verbe de la question: lfiffi XCRtT ~

? ft)fu g'Ita raks'I piücha? piüdaina Gita boit de l'alcool (de riz) ? Elle n'en boit pas. Mais

il est également

simplement

lfiffi

XCRtT

par

~

~

hoina

de répondre

:

~

?

hoina

g'Ita raks'I piücha? Gita boit de l'alcool?

Ou encore,

courant

~

Non

hoina est inséré de manière

emphatique: lfiffi ~

~ ? g'Ita raksl piücha? Gita boit de l'alcool?

~,~ hoina, piüdaina Non, elle n'en boit pas.

26 La particule ';f na est un phatème.

102

A titre informatif

voici le tableau de toutes les

formes du négatif de m ho: ~~~~Sin ulier

~~~1èreers. lfèZIl1 ~~~2ème rs.

Pluriel

hoina

hoinâ U

hoinas

hoinau

hoina

hoinan

1;l~

~~~3èmeers.

Le présent-futur L'un des temps les plus couramment utilisés est le présent qui est formé par suffixation à la racine verbale de la forme conjuguée de l'auxiliaire U" chao Les verbes se conjugueront légèrement différemment selon que leur racine se termine par une consonne ou une voyelle.

Formation - La racine se termine par une consonne: C'est le cas le plus simple. La formation est la suivante: Racine verbale + auxiliaire

Exemple:

le verbe 1f1 garnu (faire)

103

ITcha

~~EI1l

~Sin ulier \TIfI1

~-=t

Pluriel

~1ère ers.

garehu

garehaü

l=J~ 2ème

ers.

garehas

~~~~1J garehau

3ème pers.

gareha

~~~if. garchan

~11.1l=J

- La racine

se termine par une voyelle:

La formation est semblable au cas précédent, mais de plus une nasale est insérée entre la racine et l'a uxiliaire : Racine verbale + nasale + auxiliaire Exemple:

le verbe UT"! khanu ~q=q;:r

FI cha

(manger) EI1l q=q;:r

Singulier

Pluriel

\TIfI1 1ère ers.

~U'T~ khanchu

U'Y-;' khanehaü

2ème

ers.

khanehas

U'T-;' khanehau

ers.

~U'T-;'1J khaneha

U'Y-;'~ khanehan

~~U'J';-tRt..

>f~p:f

3ème

La nasale est généralement écrite de manière distincte, comme dans l'exemple cité: kha-n-cha ~ / ja-n-cha \JfFff...

104

Toutefois,

par

3ffij

dans le cas où la racine se termine

au, c'est la dernière voyelle, c'est à dire \3"u,

qui est nasalisée: aücha 3ffiTI9, paücha ~

...

c) Forme de politesse:

Elle est invariable et est formée par l'adjonction de s~g huncha au verbe à l'infinitif : Infinitif Exemple:

+ ~;:u huncha

le verbe"\1lT1 janu (aller) :

Forme depoiitesse

VTT"1~rg januhuncha

I

I

Emploi a) Le présent habituelles.

marque

en général

des actions

~~

ma khanchu

Je mange (selon le contexte: jours à midi par exemple générale, j'en mange...).

je mange - tous les - ou, de manière

cm VTR9 tyo jancha

Il part (ou: il y va...)

m~~~~ yo aphis das baje khulcha Ce bureau ouvre à dix heures (tous les jours). 105

~ 1ffij ~ syam masu khancha

Shyam mange de la viande n'est pas végétarien). 61~Î6,() ~41(,)~1 ~ haDÙharU nepalma

baschaü

Nous habitons

au Népal.

~

?

~

Eltjs~

( dans le sens de : il

tapaI kaha basnuhuncha ? Où est-ce que vous habitez?

b) De plus, en népali comme en français, ce temps peut également avoir une valeur de futur. .~ ct>lo~li1 ~ bholi kathmac!aü janchu

Je vais à Katmandou demain. Négatif Formation Les verbes se conjuguent théoriquement à toutes les personnes du singulier et du pluriel. Toutefois, ici encore, et peut-être plus encore, la seule forme couramment employée par le locuteur moyen est celle de la troisième personne du singulier. a) La forme la plus commune de négatif est constituée de la racine verbale à laquelle est ajouté le suffixe

~

daina

:

Racine + t dai + rr na 106

~ gardaina

I{Sjl '~ '1 kholdaina

III elle ne fait pas

III elle n'ouvre

\Jfr~-;::r jandaina

~

III elle ne part pas (n'y va pas...)

Ce n'est pas la peine.

pas

pardaina

Les désinences varient normalement avec le genre et le nombre. Ces variations ne sont pas respectées par tous les locuteurs, mais voici malgré tout le tableau de conjugaison donnant toutes les formes (noter ~ di au lieu de ~ dai à la première personne du singulier) :

,......-

1ère pers.

~CffR Singulier ~~Tffcf-;::r gardina . ......

~CffR Pluriel ~' gardainaü m....._

gardai~.~~ ~~-;::r gardaina

gardainau

.,~~

~~~f--'~ 2è.~e pe!~~ >f~ 3ème pers.

~~..............

gardainan

De même que pour l'affirmatif, les racines verbales se terminant par une voyelle ont une formation légèrement différente: la voyelle finale est nasalisée:

~

~-;::r khâ' daina

hûdaina

il! elle ne (n'en) mange pas.

107

On ne peut pas, ne doit pas...

Toutefois, si la racine se termine par une consonne sourde (voir tableau de l'alphabet

devanagari),

~ dai doit être remplacé par (f tai :

~

~ bastaina 11/elle ne reste pas.

uthtaina

Il/elle ne se lève pas.

b) Il existe une autre forme ayant exactement la même valeur mais employée plus rarement et seulement pour des verbes d'usage commun dont la racine se termine par une voyelle. Elle est formée par ajout à la racine de la nasale n et du

"'l

suffixe de négation Tl na : Racine + nasale + rr na Exemples: "&Fr khanna

\rlT...,

s~

janna

hunna

Je ne mange pas.

Je ne vais pas. Je ne suis pas

Seules les formes (identiques) de la première et de la troisième personne du singulier sont couramment utilisées: ~êfiFf Sin ulier \TIf1=[ 1ère ers.

11~ 1J~ ....1.~!!'~!.!~.:..~....

~2P1

3ème ers.

~\JfT~

.-anna

"GTFTf( ja~ ~\jff~

.-anna

108

~êfiFf Pluriel \jffn:ft

.-annau-

\jffn:ft

.-annau

\11T4

.-annan

c) Forme de politesse: Elle

est

invariable

l'adjonction de

~

et

hunna

Infinitif Exemple:

est

formée

par

au verbe à l'infinitif : + s"f hunna

le verbe \1ffj janu (aller) :

Forme de politesse

\iJT~ i"'" januhunna

I

I

Emploi ~

31T\Jf3j flb'~

1fGëf .,--;:fxniT t9

arÜlaI madat

garna ramro

C'est bien d'aider \iWf 1-FGf~ jana bhanda

cha

son prochain.

ïh1 basna bes.

Il est préférable

de rester plutôt que de partir.

~~ ~ql\j'1 31f11TëPT ~ m baccalaI khuwauna amako kartabya ho. Nourrir son enfant est le devoir d'une

Dans les exemples

ci dessus,

mère.

l'infinitif

en j nu

peut être utilisé à la place de l'infinitif en ., na sans

113

altérer le sens28. Ainsi, il est aussi correct, bien que moins fréquent, de dire: x=Mm ~ ' ek (un) peut jouer le rôle de l'article: ~CP~:!I~Ieka desma (dans un pays), l'équivalent de notre "il était une fois" des contes de fée. 151

cj').-{jI(,,)I~

>

Gl'l

~it33 ketI fille

Mais il Y a de nombreuses exceptions:

(chapeau), nationalités

cTcft

topI

11~ mantrT (ministre), les noms de qui se terminent par t1... par exemple

ne sont pas féminins, alors que ~

sasu

(belle-

mère) et 3Tfl1T ama (mère) le sont. De plus, le t r long final du féminin, comme de fait le I long en général, n'est pas toujours respecté et peut être remplacé par un : ~ i court.

t

La formation des noms féminins par rapport aux noms masculins, bien qu'irrégulière, respecte assez souvent l'une des deux possibilités de déclinaisons: a) substitution 33Tumer écrit avec un i court.

~

de la voyelle finale par un

t T:

keli, comme de nombreux autres noms féminins,

152

urn

>

~ chorT fille

>

ëpTqft kaki tante paternelle

>

~

chora fils ëpfëpf

kaka oncle paternel cgBR kumar jeune garçon

~ bürha vieux

kumart je une fille

~

>

bürlÙ vieille

b) Dans de nombreux cas, on ajoute simplement le suffixe ;fi nT au nom masculin. C'est notamment le cas pour la plupart des noms de castes et d'ethnies ou de professions:

~

>

-iqlx.fI

- ,.

newar

newanu

un Néwar

une Néwar

-

~

>

jyapu caste de fermier Néwar

~;fi ,. . Jyapurn femme de cette caste

~

>

~

nokar serviteur

nokanù servante

153

Les

mots

masculins

transforment cette voyelle d'adjoindre le suffixe rft ni :

~

se terminant en t r en ~ i court avant

~ dhobin'I blanchisseuse

>

dhob'I blanchisseur

Parfois la syllabe qui précède le suffixe rft ni est altérée:

~

:!~34.0...

.

gunm un Gurung

gunmnu femme de cette ethnie

~

~

bhoJe

bhopn'I une Tibétaine

un Tibétain35

Certains mots, contrairement à ces forma tions "régulières", forment leur féminin totalement indépendamment du masculin: TIR thuIT grande

grand xrnT

-

------->

XTIft

ramro

ramn

beau

belle

l:fNt ~papl...

------->

pêcheur

...

- . ... papInI pécheresse

Certains adjectifs forment leur féminin en transformant leur voyelle finale en 3TI ;. Ceci s'applique notamment aux adjectifs dont le masculin singulier se termine par un 31 a accentué (en opposition à ceux, nombreux, qui sont muets).

~ pa bitra

sacré

>

~ pabitra sacrée 155

D'autres

pluriels

a) Cas général. Comme de nombreux exemples l'ont montré, le pluriel des noms et des pronoms est généralement formé par suffixation de ~ haro. Ce suffixe est souvent omis lorsqu'il n'y a pas d'ambiguïté sur le fait qu'il s'agit d'un pluriel. Par contre, ce suffixe peut également indiquer

un groupe,

un ensemble.

Ainsi, ~X'ï

ramharü

signifie généralement non pas plusieurs personnes du nom de Ram, mais la famille de Ram, ou le groupe associé à Ram. De même, TIxëJ)TtI"5X'ïtarkarrharü signifiera souvent non seulement les différentes sortes de légumes, mais aussi les différentes variétés de nourriture. b) Adjectifs. Le pluriel des adjectifs se différencie du masculin singulier, uniquement pour ceux se terminant par 31"T 0 ou par ï3"u. La finale est alors remplacée par 3TI'it.

~

thülo grand

>

~ thüla grands

Un moyen courant de marquer de répéter l'adjectif deux fois:

le pluriel

est

41è'1l1lxrnTxrnT~ tFl patanma ramra ramra gharharo chan A Pa tan, il y a plein de belles maisons.

c) Autres cas. Les interrogatifs et les relatifs forment également leur pluriel par répétition, 156

avec intonation montante sur la première énonciation et descendante sur la répétition. Ici aussi, le pluriel, facultatif, insiste sur la quantité: m~mm~t9 yo gharma kati kati c'Ijcha

Combien de choses y a-t-il dans cette maison! ~ ën1 ën1 t9 ? tyahâ ko ko cha ?

Quelles sont toutes les personnes

présentes

là-bas?

L'adverbe L'adverbe n'est pas décliné. Il est en général avant le mot qu'il modifie, le plus près possible: -141~~1 ftR) 3j1'dj5Îtt nepalma chito aunuhos

Venez vite au Népal. Plusieurs ont déjà été rencontrés dans les pages précédentes (adverbes pronominaux par exemple). Nombre d'adverbes sont des mots indépendants et à ce titre une question lexicale. Toutefois, il est également possible d'utiliser la plupart des mots et expressions de manière adverbiale en utilisant certains suffixes. - Les suffixes ~ sanga et ftRf sita, parfaitement équivalents, sont les plus utilisés: ,

' 3j1'1~ ~ d 6Itj51'