39 0 96KB
UCAD / ESP / CEPECS
ECONOMIE GENERALE Année universitaire 2020-2021 Professeur : Dr. Mor GASSAMA
LES GRANDES THEORIES DU COMMERCE INTERNATIONAL Les théories du commerce international présentent un double visage : une grande diversité tenant aux oppositions irréductibles entre les différents courants et donc au statut spécifique de la science économique (une nouvelle application ne rend pas nécessairement caduques les anciennes), associé à un fond commun qui se manifeste par la similarité des questions traitées.
I.
Le mercantilisme
Le mercantilisme est une doctrine économique qui associe puissance économique et puissance politique et qui considère que l’échange international est un « jeu à somme nulle » entre les nations : ce que les unes gagnent, les autres le perdent. Au XVIe et XVIIe siècle en Espagne, les mercantilistes considèrent
que la puissance économique se mesure au stock d’or et d’argent que détient un pays, l’accroissement de ce stock exige un développement des exportations et une limitation des importations. De son côté, la Grande Bretagne adopte une politique protectionniste dans le cadre de l’Acte de Navigation (1651), imposant l’usage de ses navires pour ses échanges avec l’Asie, l’Afrique et l’Amérique. En France, l’adoption de politique mercantiliste conduira l’Etat à intervenir pour le développement de l’industrie par la création de manufactures royales et par le relèvement des droits de douanes, notamment sous l’impulsion de J.-B. Colbert (1619-1683).
II.
L’approche classique
Adam Smith et la théorie de l’avantage absolu A. Smith (1723-1790), critique les conceptions mercantilistes considérées comme favorisant les monopoles du commerce (« commerce exclusif ») et le protectionnisme. Pour Smith, la spécialisation et l’échange commercial entre Etats font du commerce international un jeu à somme positive et, parallèlement, un instrument de pacification des rapports internationaux. Chaque Etat a intérêt à se spécialiser dans la production et l’exportation de produits pour lesquels il dispose d’avantages absolus, c’est-à-dire de coûts de production plus faibles qu’à l’étranger.
DSECG3 A & C
2014-2015
Dr. Mor GASSAMA
1/5
David Ricardo et l’avantage comparatif D. Ricardo (1772-1823), comme A. Smith, considère que le commerce international est un jeu à somme positive. Selon lui, le libre-échange et la spécialisation permettent de retarder l’évolution de l’évolution de l’économie vers un état stationnaire. L’importation de biens de subsistance moins coûteux fait baisser le taux de salaire (« prix naturel du salaire »), et donc favorise les profits et la croissance. Pour D. Ricardo, la spécialisation s’explique, non pas par l’avantage absolu mais par l’avantage relatif. Il montre que le commerce international s’explique, non par des différences de coûts absolus, mais par les coûts relatifs, mesurés en temps de travail (raisonnement en termes de valeur travail évaluée en homme/année). Considérons, à titre d’exemple, qu’il faut au Portugal 90 hommes et en Angleterre 100 hommes pour fabriquer X quantités de drap, et que, parallèlement, il faut au Portugal 80 hommes et en Angleterre 120 homme pour produire y quantités de vin. Dans une telle situation, selon la théorie de l’avantage absolu d’A. Smith, il n’y aurait aucun intérêt à pratiquer le commerce international, le Portugal disposant l’avantage absolu dans la production des deux biens. Or, Ricardo montre qu’il peut exister un avantage mutuel à se spécialiser dans le produit pour lequel on dispose d’un avantage relatif (ou avantage comparatif). Dans l’exemple donné, l’Angleterre devrait se spécialiser dans la fabrication de drap et le Portugal dans la production de vin. De cette spécialisation, il résultera un accroissement total de la production de vin et de drap et un avantage mutuel pour les deux partenaires. En effet, le Portugal retirera 90 hommes de l’activité textile, lui permettant de produire 1,125 unité supplémentaire de vin (90/80) ; de même, l’Angleterre disposera, par son désengagement du secteur viticole, de 1,2 unité de drap supplémentaire. Le raisonnement de D. Ricardo repose sur les hypothèses suivantes : • • • •
Les coûts de transports sont nuls ou négligeables ; Les facteurs sont immobiles au plan international et parfaitement mobiles à l’intérieur des pays ; Les coûts relatifs sont (90/80 au Portugal ; 120/100 en Angleterre) à l’intérieur de chaque pays avant ouverture au commerce international ; Il ya une parfait mobilité internationale des biens produits.
Le protectionnisme éducateur La création en 1834 du « Zollverein », union douanière entre les provinces allemandes et sa renégociation en 1841 sera marquée par des débats sur la nécessité de se protéger des échanges extérieurs et ce, notamment par l’instauration d’un tarif douanier commun. Dans ces débats, F. List (1789-1846) s’oppose à l’Ecole anglaise libre-échangiste et se fait le porte-parole des industriels allemands. Pour lui, il ya nécessité, dans un contexte de développement économique, de protéger les industries naissantes en raison notamment : • D’économies d’échelle insuffisantes ; • De l’inexistence d’une main d’œuvre qualifiée ; DSECG3 A & C
2014-2015
Dr. Mor GASSAMA
2/5
•
De l’inexistence également, d’habitudes prises par le consommateur vis-à-vis des nouveaux produits nationaux.
F. List n’est en aucun cas contre le libre-échange, mais celui-ci doit être régulé en fonction du degré de développement des économies. Les mesures protectionnistes ne sont que « des béquilles pour apprendre à marcher » dans le cadre d’un objectif « d’éducation industrielle de la nation » concernée.
III. L’approche néo-classique Le modèle HOS Les analyses de E. Heckscher (1879) et B. Ohlin (1899-1979), prix Nobel (1977), s’intéressent principalement aux fondements de l’échange en reformulant la théorie ricardienne, sans référence à la valeur travail. L’intégration des pays dans les échanges internationaux s’opèrent suivant le théorème de l’avantage comparatif, (Heckscher-Ohlin). Selon ce théorème, les différences de rareté relative des facteurs de production déterminent des différences de prix relatif. Les prix des produits nécessitant l’utilisant intensive d’un facteur de production abondant seront relativement moins élevés que celui d’un produit nécessitant la mise en œuvre d’un facteur de production rare. Puisqu’un pays a tendance à se spécialiser dans la production marquée par une combinaison productive qui lui donne un maximum d’avantages ; il en résulte qu’il aura intérêt à exporter des produits intensifs en en facteur de production abondant et à importer ceux qui sont intensifs en facteur de production rare. Par la suite, P. Samuelson (prix Nobel 1970) apporte une contribution supplémentaire : le
libre-échange conduit à une égalisation internationale des prix des facteurs de production (théorème HOS – Heckscher-Ohlin-Samuelson) Le modèle HOS repose sur les hypothèses suivantes : • Existence d’une économie réduite à deux bien (non substituables, pas de différenciation des produits) et à deux facteurs de production (travail et capital, divisibles et substituables mais non mobiles entre pays) ; • Existence de fonction de production à rendements d’échelle constants ; fonction de production identique dans les deux pays pour chaque produit ; • Absence de coûts de transport ou de droit de douane ; • Existence d’un plein emploi des facteurs de production ; • Existence d’une concurrence pure et parfaite sur le marché des biens er des facteurs de production. Le paradoxe de Leontief W. Leontief (1906-1999) a cherché une vérification empirique du modèle HOS à partir de l’analyse des échanges commerciaux des États-Unis. Partant de l’hypothèse que les EtatsUnis disposent d’une abondance de facteur capital et d’une relative rareté du facteur travail, les exportations américaines devraient être relativement plus intensives en facteur capital qu’en facteur travail. Or, Leontief montre que les exportations des États-Unis utilisent davantage de facteur travail que de facteur capital, ce qui semble contradictoire avec le DSECG3 A & C
2014-2015
Dr. Mor GASSAMA
3/5
théorème de l’avantage comparatif (paradoxe de Leontief). Leontief ne réfute pour autant le modèle HOS, au contraire, il considère que la mesure en dotation de facteur de productivité du travail aux Etats-Unis, à intensité capitalistique identique, est beaucoup plus élevée que dans le reste du monde. Il en résulte que le facteur réellement abondant est le travail et non le capital.
IV.
Nouvelles théories du commerce international
Les théories néo-factorielles de l’échange international Ces théories s’inscrivent dans le prolongement du modèle HOS, en cherchant à mieux prendre en compte la dotation en facteurs de production des produits importés et exportés. Elles intègrent un autre facteur, les ressources naturelles, et l’existence de différentes catégories de travail. L’échange international peut être compris comme un commerce de disponibilité relative de chaque type de travail. Par exemple, des études ont montré que les Etats-Unis possèdent un avantage dans les industries caractérisées par un pourcentage élevés de personnel qualifié. Les avantages technologiques Le courant néo-technologique s’intéresse au coût et à la facilité d’accès à la technologie dans le cadre des marchés oligopolistiques. A ma fin des années 1950, M. Porter souligne qu’une économie nationale dotée d’un taux d’investissement élevé, est en mesure de mettre en œuvre de nouveaux procédés de fabrication qui conduisent à des situations de monopole. Ces écarts technologiques constituent de véritables barrières à l’entrée pour les concurrents. L’analyse néo-technologique peut justifier une intervention des pouvoirs publics en faveur de la Recherche/Développement dans la mesure où celle-ci conduit les firmes à disposer, pour une durée certes limitée, d’un avantage absolu. La R&D a une influence décisive sur les flux commerciaux. P. Krugman relève que « dans beaucoup d’industries, l’avantage compétitif semble être déterminé ni par les caractéristiques nationales ni par les avantages statiques de production sur grande échelle, mais plutôt par les connaissances engendrées par les firmes au travers de la R&D et l’expérience »
V.
Commerce international et concurrence imparfaite
Depuis le début des années 1970, les études statistiques soulignent l’importance croissante des échanges « intra-branches », c’est-à-dire l’échange croisé de produits similaires. Cette croissance s’explique par l’existence d’un certain nombre de marchés de type oligopolistique (automobile, aviation, …) qui nécessitent de forts investissements de départ. La rentabilisation de la production passe alors par des effets d’apprentissage et des économies d’échelle, en d’autres termes par un accroissement des quantités produites. Cela explique l’intérêt de l’échange croisé de produits similaires dans le cadre d’une concurrence axée sur la différenciation des produits plutôt que la compétitivité-prix. DSECG3 A & C
2014-2015
Dr. Mor GASSAMA
4/5
La prise en compte du caractère imparfait du marché international a été développée, au début des années 80, dans le cadre du modèle de J. Brander et de B. Spencer, justifiant le principe de « politiques commerciales stratégiques », de soutien et d’aide aux entreprises sur les marchés oligopolistiques.
DSECG3 A & C
2014-2015
Dr. Mor GASSAMA
5/5