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LE TRAITÉ DES DIVERGENCES DU ḤADĪṮ D’IBN QUTAYBA Chapitre III. Des ḥadīṯ-s offrant [prétendûment] des contradictions internes [ou des affirmations contestables] ; des ḥadīṯ-s [prétendûment] en contradiction avec le coran. des ḥadīṯ-s [prétendûment] infirmés par la spéculation (Naẓar), le raisonnement (ḥuğğat al-‘aql), [l’expérience (‘iyān), la tradition historique (ḫabar), le consensus (iğmā’), le raisonnement analogique (qiyās)]1 p. 99-382 TEXTE NOTES TEXTE INTÉGRAL
I. — EXEMPLE DE ḤADĪṮ EN CONTRADICTION AVEC LE CORAN 1 On a complété les sous-titres en fonction des divers critères utilisés dans ce chapitre. Voir notre (...) 2 ḤAN. I, 272 ; VI, 441 ; cf. III, 127 ; V, 135. 1125. — Proposition : Vous enseignez que Dieu passa la main sur le dos d’Adam, en fit sortir sa descendance jusqu’au jour du Jugement, tels des fourmis, et leur fit porter témoignage contre eux-mêmes [en demandant :] « Ne suis-Je pas votre Seigneur ? » ; ils répondirent : « Que si ! »2.
3 Coran, VII, 172. 2Or ceci est en contradiction avec le Coran, où il est dit : « …ton Seigneur tira une descendance du dos des fils d’Adam et les fit témoigner à l’encontre d’eux-mêmes : — Ne suis-Je point votre Seigneur ? Ils répondirent : — Que si ! »3. En effet, le ḥadīṯ affirme que Dieu tira la descendance du dos d’Adam, alors que le Coran dit qu’il la tira du dos des fils d’Adam. 3126. — Réponse : Il n’en est point comme ils l’imaginent. // Le sens des deux textes concorde, grâce à Dieu, et tous deux sont justes. En effet, le Coran fournit des développements que 1
le ḥadīṯ passe sous silence, mais il peut aussi présenter des raccourcis que développe la Sunna. Il est clair que lorsque Dieu passa la main sur le dos d’Adam comme le dit le ḥadīṯ, et en fit sortir sa descendance, tels des fourmis, jusqu’au jour du Jugement, cette descendance comprenait les fils, les petits-fils et leur descendance jusqu’au jour du Jugement. S’il conclut le Pacte avec tous ceux-là et leur fit porter témoignage contre euxmêmes, c’est donc du dos de tous les fils d’Adam sans exception qu’il tira une descendance, et c’est eux tous qu’il fit témoigner.
4 Coran, VII, 11. 4126 a. — On comparera le verset : « Nous vous avons créés, puis Nous vous avons formés, puis Nous avons dit aux anges : — Prosternez-vous « Prosternez-vous
devant
Adam ! »4.
devant
Il
Adam ! »
dit
aux
après
anges :
avoir
dit :
« Nous vous avons créés, puis nous vous avons formés », ce qui veut dire : « Nous avons créé Adam, puis nous l’avons formé », puis Nous avons dit aux anges : « Prosternez-vous devant Adam ! » C’est parfaitement admissible, car lorsqu’il a créé Adam, Il nous a tous créés dans ses reins, et nous a façonnés à Sa guise. Lorsqu’il a créé Adam, Il nous a donc créés, puisque nous descendons de lui. 5126 b. — Il en est de même lorsque un homme reçoit en cadeau de toi un couple de moutons, mâle et femelle, et que tu lui dis : « Je te donne là beaucoup de moutons ! » Tu veux dire : « En te faisant cadeau d’un couple de moutons, je te donne aussi les nombreux petits qui naîtront d’eux ».
5 Voir Ši‘r, 592-593 où cette anecdote est développée. 6126 c. — ‘Umar b. ‘Abd al-‘Azīz // donna mille dirhems à Dukayn, le rāğiz. Dukayn acheta avec cette somme un certain nombre
de
chameaux.
Dieu
les 2
bénit,
et
ils
crûrent
et
multiplièrent Dukayn disait : « Je les dois à la générosité de ‘Umar b. ‘Abd al-‘Azīz ! » Or tous ne lui avaient pas été donnés en gratification. ‘Umar ne lui avait donné que les pères et les mères, mais il les attribuait tous à ‘Umar, car ils étaient le produit de ceux qu’il lui avait donnés5. 7126 d. — On constatera une analogie avec les vers d’al-‘Abbās b. ‘Abd al-Muṭṭalib sur le Prophète : « Avant nous, tu étais bienheureux à l’ombre, et dans le dépôt où furent cousues les feuilles » 8c’est-à-dire : « Tu étais bienheureux à l’ombre » du paradis terrestre ; « dans le dépôt », l’endroit où il était à l’abri ; « où furent cousues les feuilles », celles qu’Adam et Ève cousirent entre elles pour s’en revêtir ». En d’autres termes : Il était à ce momentlà bienheureux dans les reins d’Adam. 9Le poète ajoute :
6 Allusion à Coran, XXIII, 13-14. « Puis
tu
es
descendu
sur
terre,
ni
homme,
ni chair, ni caillot »6 10c’est-à-dire
qu’Adam
descendit
sur
terre,
et
que
« tu
descendis » dans ses reins, mais tu n’étais alors « ni homme, ni chair, ni sang ». 11Le poète continue : //
7 Allusion à Coran, LXXI, notamment 23 et 25. « Puis tu devins semence qui monta dans l’Arche, alors que le Déluge engloutissait Nasr et ses fidèles »7 12c’est-à-dire : Tu étais semence dans les reins de Noé, lorsqu’il monta dans son navire. 13Puis : 3
« Tu
fus
transmis
lorsque
disparaissait
de
un monde,
rein
en
apparaissait
entrailles ; une
nouvelle
[génération » 14c’est-à-dire : Il était transmis des reins des hommes aux entrailles des femmes. Le poète représente donc le Prophète bienheureux, puis descendant sur la terre, enfin montant dans l’Arche avant d’être créé, faisant simplement allusion par là à tous ses ancêtres, qui le contenaient virtuellement dans leurs reins. ***
II. — EXEMPLE DE DEUX ḤADĪṮ-S CONTRADICTOIRES 8 BUḪ. 4, 12, 14 = HM I ; 69, 70 ; ḤAN. III, 12, 13 ; V, 300, etc… 15127. — Proposition : Vous enseignez que le Prophète a dit : « Ne vous tournez pas vers la qibla pour faire vos défécations ou uriner »8.
9 BUḪ. 4, 11 = HM I, 69 ; 8, 29 = HM I, 149 ; 57, 4 = HM II, 386. 16D’autre part, vous transmettez d’après ‘Isā b. Yūnus — Abū ‘Uwāna — Ḫālid al-Ḥaḏḏa’ — ‘Irāk b. Mālik — ‘Ā’iša : « On raconta au Prophète que certaines gens évitaient de se tourner vers la qibla pour faire leurs défécations ou uriner. Alors le Prophète fit apporter sa tinette et se plaça en direction de la qibla »9. Il y a là contradiction. //
10 Amr wa nahy, c’est-à-dire de l’éthique bien plus que du droit proprement dit. 17128. — Réponse : Nous dirons qu’il est licite de considérer l’un de ces deux ḥadīṭ-s comme abrogeant l’autre ; il s’agit en effet d’une affaire relevant de l’ordre et de l’interdiction10. Comment
4
n’ont-ils pas pensé que l’un de ces deux ḥadīṯ-s était abrogeant, et l’autre abrogé, même si leur véritable sens leur échappait ? 18Toutefois, pour nous, ils ne sont ni abrogeants, ni abrogés, mais chacun doit être utilisé en son heu et place. Il n’est pas licite de se tourner vers la qibla pour aller à la selle ou pour uriner lorsqu’on se trouve dans une plaine ou un lieu découvert. En effet, lorsque les contemporains du Prophète mettaient pied à terre au cours de leurs voyages et se mettaient en devoir d’accomplir la Prière, certains se tournaient vers la qibla pour la Prière, mais d’autres se tournaient vers elle pour aller à la selle ou uriner. Alors, le Prophète leur interdit de se tourner vers la qibla pour satisfaire à ces besoins, par respect pour la qibla et pour éviter les souillures [pouvant compromettre la validité de] la Prière. Or certains pensèrent que cela était également répréhensible dans les maisons, et pour les latrines creusées à même le sol. Alors le Prophète fit apporter sa tinette, et on la lui orienta vers la qibla. Il voulait ainsi leur montrer que cela n’est pas répréhensible dans les maisons, ni pour les excavations creusées dans le sol et destinées à recevoir les immondices, ni pour les lieux d’aisance, à condition que ce fût dans un lieu où la Prière n’est pas licite. ***
III. — EXEMPLE DE DEUX ḤADĪṮ-S CONTRADICTOIRES 11 BUḪ. 77, 40 = HM IV, 113 ; ḤAN. I, 321, etc… 19129. — Proposition : Vous rapportez d’après Wakī‘ — al-A‘maš — Abū Ṣāliḥ — Abū Hurayra que le Prophète // a dit : Lorsque la courroie d’une sandale se casse, il ne faut pas marcher avec une seule sandale »11.
12 TIR, 22, 35. 20D’autre part, vous rapportez d’après Mindal — Layṯ — ‘Abd alRaḥmān b. al-Qāsim — son père que ‘Ā’iša a dit : « Il est arrivé 5
que la courroie de sandale du Prophète se rompît. Il marchait alors avec une seule jusqu’à ce que l’autre fût séparée »12. Il y a là contradiction. 21130. — Réponse : Pour nous, nous prétendons qu’il n’y a là aucune contradiction, grâce à Dieu. En effet, il pouvait arriver que quelqu’un vît sa courroie de sandale se rompre, qu’il l’ôtât, la prît à la main et marchât avec une seule sandale jusqu’à ce qu’il trouvât une autre courroie. Ce procédé est incorrect et indécent en ce qui concerne les sandales, les chaussures, et toutes les pièces de vêtement qui vont par paire, si l’on n’en utilise qu’une pièce en abandonnant l’autre. De même pour le vêtement qu’on jette sur une épaule sans utiliser l’autre. Par contre, si une courroie se rompt et que l’on fait un, deux ou trois pas en attendant qu’elle soit réparée, ceci n’a rien de répréhensible ni d’indécent. La qualification juridique d’un acte est souvent différente selon qu’il est accompli un petit nombre ou un grand nombre de fois. // 22130 a. — On n’ignore pas que l’homme en Prière peut fort bien faire un ou deux pas, voire plusieurs, en position d’inclination, jusqu’à la rangée qui est devant lui. Mais il n’est pas licite de parcourir dans cette position cent ou deux cents coudées. Il est licite de replacer son manteau sur les deux épaules lorsqu’il a glissé, mais il est illicite de rouler son vêtement au cours de la Prière, ou de faire quoi que ce soit qui dure longtemps. De même, la Prière n’est pas annulée si l’on sourit, mais elle l’est si l’on éclate de rire. ***
IV. — EXEMPLE DE DEUX ḤADĪṮ-S CONTRADICTOIRES 13 ḤAN. IV, 196 ; VI, 136, 192, 213.
6
23131. — Proposition : Vous enseignez que ‘Ā’iša disait : « Le Prophète n’a jamais uriné debout »13.
14 BUḪ. 4, 60-62 = HM I, 91 ; 46, 27 = HM II, 151 ; ḤAN. IV, 246 ; V, 382, 394, etc… 24D’autre part vous rapportez d’après Ḥuḏayfa que [le Prophète] urinait debout14. Il y a là contradiction. 25132.
—
Réponse :
Nous
affirmons
qu’il
n’y
a
pas
là
contradiction, grâce à Dieu. Il n’a jamais uriné debout dans sa demeure, ni là où ‘Ā’iša se tenait. Mais il urinait debout dans les endroits inconfortables, soit que le terrain fût boueux, argileux ou sale. Ainsi, l’endroit // où Ḥuḏayfa vit le Prophète uriner debout était le dépôt d’immondices d’une tribu. Il ne pouvait donc s’accroupir, en raison du manque de confort. La qualification juridique des actes accomplis en cas de force majeure est différente de celle des actes accomplis après libre choix.
15 Ibid.
16 Lisān, IX, 181 = Tāğ, V, 149 : subāṭa = dépôt d’ordures ménagères, de balayures. 26132 a. — Abū Muḥammad dit : D’après Muḥammad b. Ziyād alZiyādī — ‘Isā b. Yūnus — al-A‘maš — Abū Wā’il, Ḥuḏayfa dit : « Je vis le Prophète se diriger vers le dépôt d’ordures d’une tribu et y uriner debout. Je m’éloignai, mais il me dit : — Approche ! Je m’approchai jusqu’à me trouver debout derrière lui. Alors il fit ses ablutions, et frotta ses chaussures »15. Le mot subāṭa (dépôt d’ordure)
est
synonyme
de mazbala, de
même
que kusāḥa et qumāma16. *** V. — EXEMPLE DE ḤADĪṮ EN CONTRADICTION AVEC LE CORAN 7
17 Lisān, XI, 151 (où ce ḥadīṯ est reproduit) : ‘asīb, « salarié de basse classe », ou « esclave ». 27133. — Proposition : Vous rapportez d’après Sufyān b. ‘Uyayna — al-Zuhrī — ‘Ubayd Allāh b. ‘Abd Allāh b. ‘Utba — Abū Hurayra, Zayd b. Ḫālid et Šibl : « Un homme se rendit auprès du Prophète et lui dit : — Envoyé de Dieu, je t’en conjure par Dieu, ne veux-tu pas trancher entre nous conformément au Livre de Dieu ? Son adversaire — qui était plus versé dans le fiqh — se leva et dit : — Il a raison ! Juge notre affaire conformément au Livre de Dieu, et permets-moi de parler. Le Prophète lui donna la parole. — Mon fils était journalier17 chez cet homme, et il a forniqué avec sa femme. J’ai versé une amende compensatoire de cent moutons et // un serviteur. Puis j’ai interrogé les docteurs, et ils m’ont appris que mon fils devait recevoir cent coups de verges et être banni pendant un an ; quant à la femme, elle devait être lapidée. Le Prophète dit : — Par Celui qui tient mon âme entre ses mains, je jugerai votre affaire conformément au Livre de Dieu : Les cent moutons et le serviteur te seront rendus ; ton fils recevra cent coups de verges, et sera banni pour un an ; la femme sera lapidée. Va, Unays, vers cette femme ; si elle avoue, lapide-la. L’homme se rendit auprès de la femme, elle avoua et fut lapidée ». 28Abū Muḥammad dit : Ce ḥadīṯ m’a été rapporté dans ces termes par Muḥammad b. ‘Ubayd — Ibn ‘Uyayna. 29Or ceci serait en contradiction avec le Coran. En effet, l’homme demanda au Prophète de juger leur affaire conformément au Coran. Le Prophète dit : « Par Celui qui tient mon âme entre Ses mains, je jugerai votre affaire conformément au Livre de Dieu ! » puis il ordonna la lapidation et le bannissement. Or la lapidation et le bannissement ne figurent pas dans le Coran. Ou bien ce ḥadīṯ est faux, ou il est exact ; dans ce dernier cas, il manque
8
dans le Coran [le passage relatif] à la lapidation et au bannissement.
18 Coran, IV, 24.
19 Coran, II, 178.
20 Coran, IV, 77.
21 Coran, V, 45. 30134. — Réponse : Lorsqu’il disait : « Je jugerai conformément au Livre de Dieu », le Prophète ne visait pas le Coran. Il voulait seulement — // — dire : « Je jugerai votre affaire conformément à la prescription (ḥukm) de Dieu ». Le mot « livre » (kitāb) peut être compris de plusieurs manières, par exemple dans le sens de « décret », ou d’« obligation » (farḍ). Ainsi dans le verset : « Prescription (kitāb) de Dieu pour vous ! Il vous est licite de rechercher des épouses en dehors de cela… »18. Kitāb veut dire ici « obligation ». De même : « La loi du talion vous est prescrite (kutiba) »19,
c’est-à-dire
« obligatoire ».
De
même :
« Ils
s’écrient : — Seigneur, pourquoi nous as-tu prescrit ( katabta) de combattre ? »20, c’est-à-dire « imposé ». De même : « Nous avons prescrit (katabnā) pour eux : — Ame pour âme !… »21, c’est-à-dire : « Nous avons décrété et imposé ». 31Al-Nābiġa al-Ğa’dī dit :
22 ḤAN. II, 151 ; V, 409 ; VI, 162. « Les
liens
de
clientèle
ont
fait
[noblesse
rejaillir
sur
vous
notre (?),
or ce n’est pas cela que Dieu a dit lorsqu’il a prescrit [(yaktubu) »22
9
32c’est-à-dire : « La parenté a attiré sur vous notre noblesse ancestrale ; or ce n’est pas cela que Dieu a imposé dans ses décrets ». *** VI. — EXEMPLE DE ḤADĪṮ INFIRMÉ PAR LE CONSENSUS 33135. — Proposition : Vous rapportez d’après al-Zuhrī — ‘Urwa, — ‘Ā’iša qu’une femme empruntait des bijoux dans d’autres familles et les vendait. Le Prophète en fut averti et il lui fit couper la main. // 34[Nos adversaires]
disent : Or les
Musulmans
s’accordent
(ağma‘a) sur le fait qu’on ne saurait condamner l’emprunteur à l’amputation car il est considéré comme dépositaire (mu’taman). 35136. — Réponse : Nous considérons que ce ḥadīṯ est sain, mais // que toutefois il n’emporte pas obligation, car on n’y dit pas que l’amputation eut effectivement lieu. Il y est seulement dit que le Prophète ordonna l’amputation. On peut admettre que l’ordre n’ait pas été suivi d’exécution. Les imām-s peuvent éventuellement se permettre cela, à titre d’avertissement et de leçon, sans que cela implique l’exécution de la sentence.
23 ḤAN. V, 11, 12, 18, 19.
24 ABŪ DĀ’ŪD, 38, 7 ; MĀLIK, 43, 3 ; cf. aussi ḤAN. V, 19.
25 Ibid., et TIR. 14, 16. 36136 a. — On comparera le ḥadīṯ rapporté par al-Ḥasan — Samura b. Ğundab, d’après lequel le Prophète a dit : « Celui qui tue son esclave, nous le tuons ; celui qui mutile son esclave, nous le mutilons »23. Or tout le monde est d’accord sur le fait qu’on ne tue pas un homme [libre] pour le meurtre de son esclave24, et qu’on n’exerce pas contre lui le talion pour sévices envers son 10
esclave25. Le Prophète a seulement voulu effrayer le maître et l’avertir d’avoir à ne pas tuer son esclave, ou encore se servir de son cas comme exemple ; mais il n’a pas voulu l’exécution.
26 ḤAN. II, 136, 166, 191, 211, 214, ; IV, 93, 95, etc…
27 BUḪ. 86, 4 = HM IV, 376 ; cf. ḤAN. I, 125, 130. 37136 b. — La sentence n’aurait été exécutoire qu’au cas où il eût été dit dans le ḥadīṯ : « Le Prophète a tué un homme pour meurtre de son esclave, ou appliqué le talion à quelqu’un pour sévices envers son esclave ». Mais puisqu’il s’est contenté de dire : « Celui qui agit ainsi, nous agissons ainsi envers lui », c’est-à-dire d’avertissement et de leçon. De même lorsqu’il a dit : « Si quelqu’un boit du vin, flagellez-le ; s’il récidive, flagellez-le ; s’il récidive, flagellez-le ; s’il récidive encore, exécutez-le ! »26. Il s’agit là d’effrayer les coupables pour qu’ils ne récidivent pas. La preuve en est qu’on lui amena un buveur récidiviste pour la quatrième fois, et qu’il le flagella sans l’exécuter27.
28 Cf. ḤAN. V, 325. 38Ainsi, nous affirmons que toute espèce de menace peut être mise à exécution ou non en vertu du ḥadīṯ du Prophète rapporté par Abū Hurayra : // « Si Dieu a promis à quelqu’un une récompense pour un acte, Il remplit Sa promesse ; mais s’il a menacé quelqu’un d’une sanction, Il reste libre de l’appliquer ou non »28. ***
VII. — EXEMPLE DE ḤADĪṮ INFIRMÉ PAR LA SPÉCULATION ET LE RAISONNEMENT 29 BUḪ. 60, 11 = HM II, 486 ; ḤAN. II, 326.
30 BUḪ., ibid. et 60, 19 = HM II, 491 ; ḤAN. II, 326, 332, 350. 11
31 BUḪ. 60, 11 = HM II, 486. 39137. — Proposition : Vous rapportez d’après al-Zuhrī — Abū Salama — Abū Hurayra que le Prophète a dit : « Je suis encore plus sujet au doute que mon père Abraham ! »29 ; « Dieu aurait eu pitié de Loth s’il avait trouvé refuge auprès d’un soutien puissant ! »30 ; « Si j’avais été sollicité comme le fut Joseph, j’aurais cédé ! »31. 40Ils déclarent : Ce sont là des attaques contre Abraham, contre Loth et contre lui-même.
32 Coran, II, 260. 41138. — Réponse : Nous prétendons qu’il n’en est rien, grâce à Dieu. Le Prophète a dit : « Je suis encore plus sujet au doute que mon père Abraham » lorsque fut révélé le verset : « Abraham dit : — Seigneur, fais-moi voir comment Tu fais revivre les morts ! Le Seigneur lui répondit : — Eh quoi ! Ne croirais-tu point ? — Si ! répondit
Abraham,
tranquille ! »32.
Or
mais
c’est
pour
des
gens
qui
que
mon
entendirent
cœur ce
soit
verset
affirmèrent : « Abraham a douté, mais notre Prophète n’a pas douté ! » Le Prophète dit alors // : « Je suis encore plus sujet au doute que mon père Abraham ! » par humilité, et pour montrer la prééminence d’Abraham par rapport à lui-même. Il voulait dire : « Nous-même ne doutons pas, et nous valons moins que lui. Comment aurait-il pu douter ? » 42L’interprétation des paroles d’Abraham : « …mais c’est pour que mon cœur soit tranquille ! » est la suivante : « C’est pour que mon
cœur
soit
tranquillisé
par
constatation de visu ».
33 ḤAN. I, 215, 271.
34 Cf. Exode, 32, 1-20. 12
la
certitude
due
à
la
43138 a. — Il y a deux sortes de certitude : l’une est la certitude due à la constatation de visu, et l’autre est la certitude acquise par témoignage auditif. La première est la plus noble, c’est pourquoi le Prophète a dit, en parlant du peuple de Moïse adorant le veau d’or : « Un fait rapporté ne vaut pas un fait constaté »33. Dieu ayant appris à Moïse que son peuple adorait le veau d’or, il ne jeta pas encore les Tables ; mais lorsqu’il les vit de ses yeux ainsi occupés, il jeta les Tables, qui se brisèrent34. 44De même, les hommes qui croient en la résurrection, le jugement, le paradis et l’enfer ont la certitude que tout cela est vrai ; mais au moment de la résurrection, lorsqu’ils verront et observeront de leurs yeux, leur certitude sera encore plus forte. 45Abraham voulait donc tranquilliser son cœur par la constatation visuelle, qui apporte la certitude la plus noble.
35 Coran, XI, 80.
36 Cf. Coran, XI, 77 sqq. 46138 b. — Lorsqu’il disait : « Dieu aurait eu pitié de Loth, s’il avait trouvé refuge auprès d’un soutien puissant » //, il faisait allusion aux paroles de Loth à son peuple : « Ah ! si j’étais de force contre vous ! Ah ! si j’avais refuge auprès d’un soutien puissant ! »35. Le Prophète voulait parler de la perplexité de Loth, de son embarras et de son tourment à l’occasion des menaces de son peuple36, qui le firent s’écrier : « Ah ! si j’avais refuge auprès d’un soutien puissant ! », alors même qu’il se réfugiait auprès de Dieu, qui est le plus puissant des soutiens.
37 Qui pussent lui apporter leur appui le cas échéant. 47[Les gens du ḥadīṯ] disent : Par la suite, Dieu n’envoya plus de prophète après Loth qu’au sein d’un groupe de gens de son peuple37. 13
38 Cf. Coran, XII, 31. 48138 c. — Lorsqu’il dit : « Si j’avais été sollicité comme le fut Joseph, j’aurais cédé ! », il s’agit du jour où Joseph fut invité à sortir de prison, après une longue peine. Il dit au messager : « Retourne auprès de ton maître et demande-lui : — Qu’avaient ces femmes à se taillader les mains ? »38, et il ne sortit pas de sa prison sur le champ. Il voulait montrer la patience et la résignation de Joseph, en disant : « Si j’avais été à sa place, et que j’eusse été invité à sortir de prison comme lui, j’aurais accepté, et je n’aurais pas tergiversé. C’est encore là un aspect de son humilité. Il ne s’agissait pas de montrer qu’il y aurait eu faiblesse ou crime de la part du Prophète s’il se fût empressé de sortir à la place de Joseph, ou de la part de // Joseph s’il fût sorti de prison avec le messager. Il voulait seulement dire que Joseph ne trouvait pas dure l’épreuve imposée par Dieu, au point de s’empresser de sortir immédiatement, mais qu’il était résigné et escomptait la récompense divine. ***
VIII. — EXEMPLE DE ḤADĪṮ INFIRMÉ PAR L’EXPÉRIENCE 39 ḤAN. III, 322, 345, 379, 384. 40 On rappelle ici que le K. Muḫtalif al-ḫadiṯ a été rédigé entre 256/869 et 270/883. 49139. — Proposition : Vous rapportez d’après Abū Sa‘īd al- Ḫidrī, d’après Ğābir b. ‘Abd Allāh et d’après Anas b. Mālik que le Prophète a dit en parlant de l’année 100 : « Il ne restera plus sur terre ce jour-là âme qui vive »39. Ceci est visiblement faux, car nous sommes en plein IIIe siècle40 et il y a beaucoup plus d’hommes qu’à ce moment-là !
14
50140. — Réponse : Nous prétendons que les transmetteurs ont omis un mot dans ce ḥadīṯ, soit qu’ils l’aient oublié, ou que le Prophète l’ait sous-entendu — auquel cas ils n’ont donc pu le transmettre. A notre avis, on ne peut douter qu’il ait voulu dire : « Il ne restera sur terre ce jour-là, d’entre vous, âme qui vive », c’est-à-dire d’entre ceux qui étaient présents à cette réunion, ou encore d’entre les Compagnons en général. Le transmetteur a omis : « d’entre vous ».
41 Cf. supra, § 40 g 37 e. 51140 a. — Ceci rappelle la phrase d’Ibn Mas‘ūd sur la nuit des Génies : « Personne d’entre nous n’y a assisté, sauf moi », dans laquelle le transmetteur a omis : // « sauf moi »41.
42 Aḥtā’at istuka l-ḥafra… Métaphore triviale pour dire : « Tu n’y as rien compris ! »
43 L’éd. signale trois leçons : rağā’ (espérance) ; raḥā’ (vie aisée) ; dağğāl (Antéchrist). On a rete (...) 52Comme preuve de ce que j’avance, je rapporterai d’après Abū Kudayna — Muṭarrif — al-Minhāl b. ‘Amr que ‘Alī dit à Ibn Mas‘ūd : « Tu donnes des consultations juridiques aux gens ? — Parfaitement ! Je leur apprends que ce qui vient en dernier est mauvais ! — Alors, dis-moi, as-tu entendu cela de la bouche [du Prophète] ? — Je l’ai entendu dire : Les gens ne verront pas l’année 100, et il n’y aura pas sur la terre [à ce moment] un œil pour cligner ». ‘Alī s’écria : « Tu es tombé à côté !42. Le Prophète n’a dit cela un jour que pour les gens qui étaient autour de lui. Pourquoi n’y aurait-il rien à espérer après l’année 100 ? »43.
44 On n’a pas retrouvé cette variante du ḥadīṯ de l’année cent. 53140 b. — Autre exemple de ḥadīṯ comportant une erreur matérielle : J’ai entendu d’après Muḥammad b. Ḫālid b. Ḫidāš — 15
son père — Ḥammad b. Zayd — Ayyūb — al-Ḥasan — Ṣaḫr b. Qudāma al-‘Uqaylī : Le Prophète a dit : // « Après l’année 100, il ne naîtra pas un enfant dont Dieu ait besoin »44. Je rencontrai Sahr, et l’interrogeai sur ce ḥadīṯ ; il me répondit : « Je ne le connais pas ! » 54Abū Muḥammad dit : C’est le même ḥadīṯ dans lequel s’était glissée une erreur, et qui comporte des versions différentes. ***
IX. — EXEMPLE DE ḤADĪṮ INFIRMÉ PAR LA SPÉCULATION ET LE RAISONNEMENT 45 BUḪ. 59, 4 = HM II, 425. 55141. — Proposition : Vous transmettez d’après ‘Abd al-‘Azīz b. al-Muḫtār al-Anṣārī — ‘Abd Allāh al-Dānāğ : J’ai vu Abū Salama b. ‘Abd al-Raḥmān dans la mosquée de Baṣra ; vint al-Ḥasan, qui s’assit auprès de lui. Abū Salama déclara que le Prophète avait dit : « Le soleil et la lune seront deux taureaux enveloppés de feu »45. Alors al-Ḥasan demanda : « Quel crime ont-ils donc commis ? » Et l’autre répliqua : « Je ne fais que te rapporter les paroles du Prophète ! ». Et al-Ḥasan se tut.
46 En l’occurrence informateur d’Abū Salama. 56Al-Ḥasan avait raison ! Quel crime ont-ils donc commis ? Ces paroles // d’al-Ḥasan constituent une attaque contre [le Prophète] ou contre Abū Hurayra46.
47 Cf. ḤAN. II, 207.
48 On n’a pas retrouvé ce ḥadīṯ. On soupçonne qu’il serait possible de le découvrir dans la rubrique n (...)
49 BUḪ. 9, 9 = HM I, 190 ; ḤAN. II, 229, 266 ; III, 52, etc…
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57142. — Réponse : Nous prétendons que le soleil et la lune n’ont pas été précipités au Feu en punition de quelque crime qui pût leur être imputé. Ils ont été créés de feu et ont été rendus au feu. Le Prophète n’a-t-il pas dit à propos du soleil couchant : « C’est le feu ardent de Dieu ! N’était que la volonté de Dieu le retient, il détruirait tout ce qui est sur la terre ! »47. Il a dit aussi : « Au fur et à mesure que le soleil s’élève d’un degré dans le ciel, une porte de l’enfer s’ouvre devant lui. Lorsqu’arrive l’heure de midi, toutes les portes sont ouvertes »48. Ceci montre bien qu’il tire toute sa chaleur de la fournaise infernale. C’est pourquoi le Prophète a dit : « Remettez la Prière [de midi] aux heures fraîches, car cette chaleur ardente émane de la fournaise de l’enfer »49.
50 Allusion à Coran LII, 6. On peut se demander s’il convient ici d’adopter la trad. BLACHÈRE (« la me (...)
51 Coran, II, 24 ; cf. aussi LXVI, 6. 58Si quelque chose provient du feu, puis lui est rendu, on ne saurait dire qu’il subit une punition. Une chose condamnée à accomplir une fonction déterminée et exclusive comme le feu, ou le ciel qui est condamné à tourner, // la mer à se gonfler50, etc., ne saurait subir de sanction ni recevoir de récompense. Il serait aussi absurde de dire, à propos du verset : « Préservez-vous du Feu, dont l’aliment est constitué par les hommes, et les pierres… »51 : « Quel est donc le crime des pierres ? » ***
X. — EXEMPLE DE DEUX ḤADĪT-S CONTRADICTOIRES 52 BUḪ. 76, 19, 43, 54 = HM IV, 62, 82, 89 ; ḤAN. I, 174, 180… ; II, 152, etc… 53 En effet, la plupart des ḥadīṯ-s disent : « Qui (man) a infecté le premier ? ». Notamment BuḪ. 76, (...)
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59143. — Proposition : Vous enseignez que le Prophète a dit : « Pas de contagion, et pas de superstition ! »52. On lui dit alors : « Lorsque les premières traces de gale apparaissent sur le museau d’un chameau, c’est alors que tout le troupeau attrape la gale ! » Il répliqua : « En ce cas, qu’est-ce qui a infecté le premier ? ». Si tels ne sont pas là ses propres termes, c’était au moins le sens de ses paroles53.
54 BUḪ. 76, 53, 54 — HM IV, 88, 89 reproduit une discussion entre Abū Salama et Abū Hurayra qui citait (...)
55 BUḪ. 76, 19 = HM IV, 69 ; ḤAN. II, 443.
56 BUḪ. 56, 47 = HM II, 302 ; 67, 18 = HM III, 554 ; 76, 43 = HM IV, 82 ; ḤAN. I, 174, 180 ; II, 8, 36 (...) 60D’autre part, vous rapportez : « On ne met pas un individu sain en contact avec un individu malade »54 ; « Fuyez celui qui est atteint d’éléphantiasis comme vous fuyez le lion ! »55. Un homme atteint de ce mal vient lui prêter le serment d’allégeance. Il lui envoya sa bay‘a, et lui ordonna de s’en aller, sans le recevoir. Il dit encore : « La femme, la maison et la bête de selle sont de mauvais augure »56. 61Tout cela est incohérent et ne concorde pas. 62144. — Réponse : Nous affirmons qu’il n’y a là aucune contradiction. Chacune de ces sentences s’applique en temps et lieu. Si on les utilise à bon escient, il n’y a plus de contradiction. 63Il y a deux sortes de maladies contagieuses : La première est l’éléphantiasis. Celui // qui en est atteint exhale une odeur forte, dangereuse pour quiconque reste longtemps en présence du malade, ou mange en sa compagnie. De même, la femme qui doit le subir ou coucher dans le même linge peut se voir communiquer
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le mal, et souffrir ensuite d’éléphantiasis ; son enfant est aussi dans ce cas : ils ont beaucoup d’affinités avec lui. 64On peut en dire autant de quiconque est atteint de phtisie, de consomption ou de gale. Les médecins prescrivent de ne pas se tenir en compagnie du phtisique ou de l’éléphantiasique. Ils ne pensent pas tant à la contagion qu’à la mauvaise odeur, car elle peut incommoder quiconque la respire trop longtemps. Or les médecins sont les gens les moins enclins à la superstition, bonne ou mauvaise. 65De même, lorsqu’un chameau est atteint de gale — il s’agit de la gale purulente —, et qu’il entre en contact avec le reste du troupeau, se frotte à ses congénères et s’installe dans le même parc, il leur communique une maladie analogue à cause du mucus et du pus qui s’écoulent de lui. C’est pourquoi le Prophète a dit : « On ne met pas un individu sain avec un individu malade ». Il craignait que l’individu malade ne fréquentât l’individu indemne et ne lui communiquât une maladie analogue à cause du pus et du contact. // 66Certains pensent que le Prophète n’a pas voulu qu’on croie à la culpabilité du propriétaire des chameaux contaminés. Abū Muḥammad dit : Ceci est exclu, car ce que je viens d’exposer peut être constaté de visu. 67144 a. — L’autre type de maladie contagieuse est la peste, qui s’installe dans un pays d’où les gens s’enfuient par peur de la contagion. 68Abū Muḥammad dit : Sahl b. Muḥammad m’a rapporté d’après al-Aṣma‘ī qu’un Basrien fuyant la peste monta sur un âne et se rendit dans sa famille à Safawān. Il entendit alors un chamelier chanter derrière lui ces vers :
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« On ni La
ne
dépasse sur
mort
pas un
vient
Dieu
sur
un
âne,
coursier au
moment
rapide. prescrit ;
Dieu passe parfois devant celui qui s’en va ».
57 BUḪ. 76, 30, 36 = HM IV, 74, 76 ; 90, 13 = HM IV, 445 ; ḤAN. 173 ; IV, 177 ; V, 200. 69Le Prophète a dit : « Lorsque elle (la peste) sévit dans le pays où vous vous trouvez, n’en sortez pas ». Il a dit encore : « Lorsqu’elle sévit dans un pays, n’y entrez pas »57. La première phrase signifie // qu’il est vain d’imaginer qu’en fuyant [l’endroit où se manifeste] le décret de Dieu, vous échapperez à Dieu Lui-même ; et la seconde phrase que si vous restez là où la peste ne sévit pas, vous serez plus tranquilles et vivrez plus agréablement. 70Il faut classer dans la même rubrique le caractère pernicieux de la femme ou de la maison, qui peuvent attirer sur l’homme désagréments ou calamités. Il dit alors : « Elle m’a contaminé par son mauvais œil ! » et c’est là la contamination à laquelle le Prophète faisait allusion en disant : « Pas de contagion ! ».
58 BUḪ. 76, 53 = HM IV, 88. Il semble que les trois ḥadīṯ-s sur la gale des chameaux, la promiscuité d (...) 71144 b. — Le ḥadīt-s transmis par Abū Hurayra, où le Prophète dit : « La femme, la maison et la bête de selle sont de mauvais augure » est suspect d’avoir été transmis de façon erronée par Abū Hurayra58. Il a dû entendre de la bouche du Prophète quelque chose qu’il n’a pas compris.
59 Coran, LVII, 22. 72Abū Muḥammad dit : J’ai entendu Muḥammad b. Yaḥyā al-Qaṭ‘ī d’après ‘Abd al-A‘lā — Qatāda — Abū Ḥassān : « Deux hommes entrèrent chez ‘Ā’iša et lui dirent : — Abū Hurayra raconte que le 20
Prophète a dit : — La femme, // la bête de selle et la maison sont de mauvais augure ! Elle bondit avec un air de commisération puis s’écria : — Par Celui qui a révélé le Coran à Abū l-Qāsim, il en a menti, l’homme qui attribue de telles paroles au Prophète ! Le Prophète n’a pas dit autre chose que : — Les gens de la Ğahiliyya disaient : La bête de selle, la femme et la maison sont de mauvais augure ! Puis elle récita : « Nul coup du sort n’atteint la terre et vos personnes, qui ne soit consigné dans un Écrit, avant que nous ne les ayons créés »59.
60 ABŪ DĀWŪD, 27, 24 ; MĀLIK, 54, 23. 73144 c. — J’ai entendu Aḥmad b. al-Ḫalīl — Mūsā b. Mas‘ūd alNahdī — ‘Ikrima b. ‘Ammār — Isḥāq — Ibn ‘Abd Allāh b. Abī Ṭalḥa — Anas b. Mālik : L’un de nous alla trouver le Prophète et dit : « O Envoyé de Dieu, nous nous sommes installés dans une maison et nous y avons prospéré en nombre et en richesse ; puis nous avons déménagé, et dans cette nouvelle demeure nos richesses et notre nombre ont diminué ». Le Prophète dit : « Allez-vous en de cette maison et abandonnez-la : elle est funeste »60. 74144 d. — Abū Muḥammad dit : Ceci ne contredit pas plus le premier ḥadīṯ que le premier ne contredit celui-ci. Le Prophète ne leur a conseillé de déménager que parce qu’ils y demeuraient dans une atmosphère pesante, et que tous les malheurs qu’ils y enduraient les rendaient moroses //. Il leur a donc conseillé de déménager. Dieu a ainsi fait l’instinct et le tempérament de l’homme que ce dernier prend en grippe l’endroit où il a souffert, même s’il n’y a aucune relation de cause à effet, qu’il s’attache à quiconque lui fait du bien, même involontairement, et qu’il déteste quiconque lui fait du mal, même involontairement. Comment le Prophète aurait-il pu être superstitieux, puisque la superstition relève de la magie ? Beaucoup de gens, avant l’Islam, la dédaignaient, et louaient ceux qui la stigmatisaient. 21
75Le poète dit dans un panégyrique :
61 Ces vers seraient dûs à AL-RAQQĀS
AL-KALBĪ ; Tāğ, X,
397.
« Il n’a pas d’appréhension lorsqu’il se prépare au départ, et ne dit pas : — Aujourd’hui, j’ai été en butte à l’hostilité [du
pivert
Mais alors
et
du
il que
l’homme
corbeau !
agit superstitieux
résolument,
cherche
à
se
garer
de
[ces sornettes »61.
62 Lisān, IV, 236 = Tāğ, X, 397 ; wāq = surad. Cf. Tarbī’, s. surad. 76Abū
Muḥammad
dit :
mot ḫuṯārim désigne
Le
superstitieux ; Wāq désigne le pivert
l’homme
(ṣurad)62 et // ḥātim le
corbeau. Al-Muraqqiš a dit :
63 Tāğ, X, 397, où ces vers sont également attribués à ALMURAQQIŠ. « Je
suis
[après
parti,
avoir
alors vu]
que
un
je
pivert
ne
partais
ou
un
jamais corbeau.
Mais voilà que le mauvais augure est comme le bon augure, et Ainsi,
le
bon aucun
augure
comme
bien
ni
le aucun
mauvais… mal
ne durent éternellement pour personne »63.
64 Ce ḥadīṯ ne paraît pas avoir été retenu par les compilateurs. 77144 e. — J’ai entendu Isḥāq b. Rāhawayh — ‘Abd al-Razzāq — Ma‘mar — Ismā’īl b. Umayya : Le Prophète a dit : « Il est trois choses auxquelles personne n’échappe : la superstition, le doute et l’envie ». On lui demanda : « Mais comment s’en délivrer ? » Il répondit : « Si tu as cédé à une superstition, n’y reviens pas ; si tu es en proie au doute, ne cherche pas à acquérir la certitude ; si tu
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es en proie à l’envie, ne cherche pas à nuire ! » Telles furent à peu près ses paroles64. 78144 f. — J’ai entendu Abū Ḥātim — al-Aṣma‘ī — Sa‘īd b. Muslim : Le père de ce dernier // s’étonnait des gens qui croyaient aux augures et leur faisait de vifs reproches. Il dit : « Une de nos chamelles s’éloigna pour mettre bas alors que j’étais à Ṭaff. Je me mis en route sur sa trace, et je rencontrai Hāni’ b. ‘Ubayd, des Banū Wā’il, qui se hâtait et disait : « Le mal fréquente le haut des collines ». 79Puis je rencontrai un autre homme de la même tribu qui disait : « Et
si
tu
nous
envoyais
des
chercheurs,
les chercheurs ne nous trouveraient pas ». 80Puis nous poussâmes jusqu’à un jeune garçon qui, dans son enfance, était tombé dans le feu et avait été brûlé. Son visage était laid et abîmé. Je lui demandai : — Aurais-tu entendu parler d’une chamelle isolée (fāriq) ? Il répondit : — Il y a là un groupe de bédouins ; va voir ! J’y allai, et j’y retrouvai la chamelle qui avait mis bas. Je la récupérai, avec son chamelon. 81Abū Muḥammad dit : La chamelle dite fāriq (isolée) est celle qui est pleine et quitte ses congénères. 82144 g. — ‘Ikrima dit : « Nous étions assis chez Ibn ‘Abbās, lorsqu’un oiseau passa en criant. L’une des personnes présentes dit : — Tant mieux ! Tant mieux ! Ibn ‘Abbās répliqua : — Ni tant mieux, // ni tant pis ! »
65 Cf. BUḪ. 78, 107 sqq. = HM IV, 201 sqq. Sur le fa‘l, cf. BUḪ. 76, 43, 44 = HM IV, 82, 83 ; ḤAN. I, (...) 83Toutefois, le Prophète préférait les noms agréables et les présages favorables65.
66 Ce mot, qui signifie « en bonne santé », est aussi un nom propre courant. 23
67 Ce mot, signifiant « celui qui trouve », est l’un des noms de Dieu (Lisān, IV, 408), ce qui paraît (...) 84144 h. — J’ai entendu al-Raqāši rapporter d’après al-Aṣma‘ī que ce dernier interrogea Ibn ‘Awn sur le présage favorable, et qu’il répondit : « C’est d’être malade et d’entendre dire : — O Sālim66, ou d’être en train de chercher quelque chose et d’entendre dire : — O Wāğid67. 85144 i. — Abū Muḥammad dit : Dieu a donc fait que les hommes aiment et apprécient instinctivement les présages heureux ; de même, Il a fait en sorte qu’ils profèrent des salutations à base de salām, qu’ils se répandent en souhaits et en congratulations. C’est ainsi que les Arabes disent : « Sois à l’aise et en bonne santé ! » ou « Sois à l’aise ce matin ! », ou que les Persans disent : « Puisses-tu vivre mille nouvelles années ! » Quiconque entend ces formules sait fort bien que cela ne saurait rien avancer ni rien retarder, rien augmenter ni rien diminuer, mais Dieu a mis au cœur de l’homme l’amour de ce qui est bon, et l’euphorie en présence d’une bonne nouvelle, d’un spectacle agréable, d’un beau visage ou d’un nom léger à porter. Un homme peut passer devant un jardin en fleurs et s’en trouver réjoui sans qu’il lui profite en rien, devant de l’eau limpide et être émerveillé sans // en boire ni même avoir des velléités de le faire.
68 Cf. BUḪ. 70, 30 = HM III, 669 ; ḤAN. IV, 397, etc… ; SUYŪṬĪ, Ğāmi‘, 119.
69 SUYŪṬĪ, Ğāmi‘, 119.
70 Le ḥadīt se trouve dans Tāğ, X, 282, et dans SUYŪṬĪ, Ğāmi‘, 118.
71 Fils du Feu.
72 Fils des Incendiaires ( ?) 24
73 Fils de l’Adultère.
74 Fils de la Tristesse. Cf. BUḪ. 78, 107 = HM IV, 201. 86Le ḥadīṯ dit que le Prophète aimait le cédrat68, les pigeons rouges69 et la fāġiya, qui est la fleur du henné70. On peut rapprocher ces faits de sa prédilection pour les beaux noms et des bons présages, et de son aversion pour les noms péjoratifs comme Banū l-Nār71, Banū Ḥurrāq72, Banū Zinya73, Banū Ḥuzn74, etc… // *** XI. — EXEMPLE DE DEUX ḤADĪṮ-S CONTRADICTOIRES 87145. — Proposition : Vous enseignez que Ḫabbāb b. al-Aratt dit : « Nous nous plaignions auprès du Prophète de la torridité de l’air, mais il ne nous écouta pas ». En d’autres termes, ils se plaignaient de la chaleur intense et des inconvénients de la torridité de l’air, et ils demandaient au Prophète de repousser la Prière aux heures fraîches, mais il ne les écouta pas, c’est-à-dire qu’il n’accepta pas de repousser l’heure de la Prière.
75 BUḪ. 9, 9 = HM I, 190 ; ḤAN. II, 229, 266 ; III, 52 etc… 88D’autre part, vous enseignez que le Prophète a dit : « Faites la Prière à une heure plus fraîche, car cette chaleur ardente émane de la fournaise infernale »75. Il y a là divergence évidente et contradiction.
76 Cf. Lisān, VIII, 35 ; Cf. BUḪ. 9, 11, 21 = HM I, 191, 199 ; 10, 104 = HM I, 256 ; ḤAN. I, 23, 210, (...) 89146. — Réponse : Nous affirmons qu’il n’y a là, grâce à Dieu, ni divergence, ni contradiction, car l’agrément de Dieu préside au début de la période [admise pour une Prière donnée], et Son indulgence à la fin de cette période. Or l’indulgence n’est 25
accordée qu’en raison d’un manquement. Le moment le plus proche du début [de la période] est plus impérieusement recommandé, et le moment le plus tardif n’est qu’une tolérance. Il n’était licite pour le Prophète de prendre sur lui que l’acte le plus recommandable, et le plus agréable à Dieu. Il ne pouvait s’autoriser à user de la tolérance qu’une ou deux fois, pour montrer aux Musulmans qu’elle était licite. Quant à faire la Prière en permanence dans les conditions les moins recommandables en délaissant les conditions les plus impératives et les meilleures, c’était là chose illicite. C’est pourquoi, lorsque ses Compagnons se plaignirent // auprès de lui d’être obligés de prier avec lui aux heures torrides, et voulurent qu’il repoussât la Prière jusqu’à ce que la chaleur fût tombée, il refusa précisément parce qu’ils étaient avec lui ; mais il donna ensuite l’autorisation de repousser la Prière aux heures fraîches pour les gens qui n’étaient pas présents à ses côtés, par mesure d’allègement et de simplification pour la Communauté. Il en fut de même pour la Prière de l’aube, qu’il accomplissait alors qu’il faisait encore noir ( taġlīs) en disant : « Mettez-vous en route à l’aube ! »76.
77 Ibid. 90D’autre part, il ressort d’un autre ḥadīṯ que le Prophète accomplissait la Prière de midi jusqu’au moment où le soleil commençait à décliner, sans la retarder davantage ; il s’agit du ḥadīṯ d’Ismā‘īl b. ‘Ulayya — ‘Awf — al-Minhāl — Abū Barza disant que le Prophète faisait la Prière de midi — celle qui se place à l’heure dite « la première » — lorsque le soleil baissait — c’està-dire déclinait77. ***
XII. — EXEMPLE DE DEUX ḤADĪṮ-S CONTRADICTOIRES 78 On n’a pas retrouvé ce ḥadīṯ. 26
79 BUḪ. 8, 1 = HM I, 133 ; 25, 76 = HM I, 527 ; 59, 6 = HM II, 428 ; 60, 5 = HM II, 467 ; 63, 42 = HM (...) 91147. — Proposition : Vous enseignez que le Prophète a dit : « Jamais aucun prophète n’a été infidèle envers Dieu »78. Vous dites que deux anges lui furent envoyés lorsqu’il était petit et lui ôtèrent du cœur un caillot. Puis ils lavèrent son cœur et le remirent à sa place79. 92D’autre part, vous enseignez qu’il observa la religion de sa tribu pendant quarante années, et qu’il donna ses deux filles en mariage respectivement à ‘Utba b. Abī Lahab et à Abū l-’Āṣ b. alRabī‘, qui étaient infidèles. 93Il y a là contradiction et divergence, et cela tend à diminuer le mérite du Prophète. //
80 Ibn Qutayba prend ici nettement position sur le problème de la généalogie yéménite. On sait qu’il e (...)
81 Sur certains de ces points, voir Lévitique, notamment 3, 12, 15, 20… Sur d’autres notamment la répu (...) 94148. — Réponse : Nous affirmons que grâce à Dieu, ce ḥadīṯ ne concerne personne [en particulier] et qu’il n’y a rien à en dire dès lors qu’on en comprend le sens. En effet, tous les Arabes (sauf les Yéménites)80 descendent
d’Ismaél,
fils
d’Abraham,
ils
ont
conservé des vestiges de la religion de leur ancêtre Abraham. Ainsi le pèlerinage et la visite de la maison de Dieu, la circoncision, le mariage, la répudiation à condition qu’elle soit prononcée trois fois, le droit de reprise du mari si elle n’a été prononcée qu’une ou deux fois, le prix du sang évalué à cent chameaux en cas d’homicide, l’ablution majeure après une souillure majeure, la qualification juridique de l’hermaphrodite d’après l’appareil urinaire, l’interdiction d’épouser les femmes si elles
sont
proches
parentes, 27
alliées,
ou
apparentées
généalogiquement81. Toutes ces choses étaient bien connues des [anciens Arabes]. Ils croyaient aussi aux deux anges comptables. 95Al-A‘šā, qui est un poète préislamique, a dit :
82 Ši‘r, 222, où Ibn Qutayba commente : « Le témoin de Dieu, c’est l’ange auquel il était confié ; cec (...) « Ne crois pas que je me montre infidèle envers toi par grâce pour ma langue, Témoin de Dieu, témoigne donc ! »82.
83 Ou en tout cas avant que l’Islam ne se fût implanté chez les Ġaṭafān, sa tribu d’adoption. EI, II, (...) 96Zuhayr b. Abī Sulmā, autre poète préislamique // qui ne connut pas l’Islam83, dit dans sa célèbre qaṣīda comptant au nombre des sept [Mu‘allaqāt] : « [Vos actions] vous seront retenues, inscrites dans un Livre,
84 Mu‘allaqa, vers 28. [et jusqu’au
mises jour
du
en
Jugement ;
ou
réserve
encore
il
vous
en
sera
[demandé compte en ce monde »84. 97Les Arabes disaient à propos de la baliyya, c’est-à-dire de la chamelle qu’on entravait sur la tombe de son maître, et qu’on laissait sans nourriture ni boisson jusqu’à ce qu’elle crève : « Son maître arrivera sur son dos au jour de la résurrection ! Car si ses proches n’agissaient pas ainsi, il arriverait sur ses jambes, et nupieds ! » Abū Zubayd en parle en ces termes : « …Comme
les balāyā, la
tête
offrant
vent
la
au
brûlant
dans
le
pommette
tapis de
de
leurs
selle, joues ».
Waliyya (pl. walāyā) est synonyme de barḏa‘a (pl. barāḏi‘).
85 Cf. Tarbī‘, ١١٨, s. baliyya. Lisān, XVIII, 92 = Tāğ X, 45 (où on lit māniğāt au lieu de māniḥāt, ce (...) 28
98Les Arabes découpaient une ouverture dans le tapis de selle, et y introduisaient le cou des chamelles en question85. 99Al-Nābiġa dit :
86 Panégyrique de ‘Amr b. al-Ḥāriṯ, vers 24. Dīwan, DERENBOURG, 1869. « Leur
séjour
est
la
Terre
de
Dieu,
et
leur
religion
est droite ; ils n’espèrent qu’en les fins dernières »86.
87 Le vers concerne les Banū Ğafna, Ğhassanides chrétiens. Cf. Ši‘r, 265, 565. 100Le poète veut dire par là : la récompense de leurs actions. Leur « séjour », c’est la Syrie87.
88 Coran, XCIII, 6-7. 101148 a. — Le Prophète // adhérait donc à la religion de son peuple, qui consistait à croire en Dieu, à respecter ses lois — circoncision, ablution majeure, pèlerinage — et à reconnaître la résurrection, le jugement et la récompense finale. Malgré cela, s’il ne s’attaquait pas [encore] à leurs idoles, il ne s’en approchait pas. Il disait : « Je les exècre ». Mais jusqu’au jour où Dieu lui envoya la révélation, il ne connut pas les obligations rituelles (farā’iḍ) ou légales (šarā’i‘) qu’il imposa ensuite à Ses fidèles par son truchement. C’est ainsi que Dieu dit : « Ne te trouva-t-il point orphelin si bien qu’il te donna un refuge ? Ne te trouva-t-Il point égaré si bien qu’il te guida ? »88. C’est-à-dire : « égaré pour ce qui est des points de détail du dogme de l’Islam, et des prescriptions légales, si bien qu’il te guida ».
89 Coran, XLII, 52. 102148 b. — De même, Dieu a dit : « Tu ne connaissais pas ce que sont l’Écriture et la foi, antérieurement »89, ce qui veut dire : « Tu ne savais ce qu’est le Coran, ni les prescriptions légales attachées 29
à la foi. Il ne s’agit pas là de la foi qui est adhésion du cœur, car ses ancêtres, morts dans // l’infidélité et le polythéisme connaissaient Dieu, croyaient en Lui et faisaient le pèlerinage en Son honneur, mais admettaient d’autres divinités que Lui ; ces divinités leur servaient d’intermédiaires pour se rapprocher de Lui, et, à ce qu’ils disaient, les rapprochaient effectivement de Lui. Ils redoutaient l’injustice et se gardaient des sanctions qu’elle appelle ; ils s’engageaient mutuellement par serment à ne se montrer ni oppresseurs, ni injustes envers quiconque. 103‘Abd al-Muṭṭalib déclara au roi des Abyssins qui lui demandait ce qu’il voulait : « Des chameaux à moi ont disparu ! ». [Le roi] s’étonna qu’il ne lui eût pas demandé de s’en aller loin de la Ka‘ba ; il répliqua : « Cette maison a Quelqu’un pour en interdire l’entrée ! » ou une phrase similaire. 104148 c. — Ils reconnaissaient donc l’existence de Dieu et croyaient en Lui ; comment le Bon et le Pur aurait-il pu ne pas croire en Lui avant la Révélation ? Ceci n’échappe à personne, et chacun comprend que lorsque Dieu dit : « Tu ne connaissais pas ce que sont l’Écriture et la foi, antérieurement », Il entend par « foi » les prescriptions légales relevant de la foi.
90 Coran, XIV, 36.
91 Cf. Coran, XI, 46. L’expression n’est que sous entendue dans le verset. 105148 d. — Abū Muḥammad dit : Le ḥadīṯ en question signifie que le Prophète adhérait à la religion d’Abraham et d’Ismaél, ainsi que sa tribu, mais non Abū Ğahl et les autres infidèles, car Dieu fait dire à Abraham : « Celui qui me suivra sera [issu] de moi, mais celui
qui
me
désobéira…
Car
Tu
es
absoluteur
et
miséricordieux »90. Il a dit à Noé : « Il n’est pas de ta famille »91, à propos de son fils, qui n’était pas de sa religion. // 30
106Lorsque le Prophète maria ses deux filles à des infidèles, cela relevait de prescriptions légales qu’il ne connaissait pas [encore]. Les actes ne sont considérés comme mauvais que du fait de leur interdiction, et ne sont considérés comme bons que lorsqu’ils sont déclarés autorisés et licites. Lorsqu’il maria ses filles à deux infidèles avant que la révélation ne fût intervenue, il n’y avait de sa part aucune infidélité envers Dieu. ***
XIII. — EXEMPLE DE DEUX ḤADĪṮ-S CONTRADICTOIRES 92 TIR. 41, 91. 107149. — Proposition : Vous enseignez que le Prophète a dit : « Ma communauté est comme la pluie : on ne sait si c’est le début ou la fin qui sera le meilleur »92.
93 ḤAN. I, 398 ; IV, 73.
94 ḤAN. V, 357 ; cf. BUḪ. 62, 1 = HM II, 582. 108D’autre part, vous dites que l’Islam a commencé « proscrit » et redeviendra « proscrit »93. Enfin, le Prophète aurait dit : « Le meilleur de ma communauté est le siècle dans lequel j’ai été envoyé »94. 109Il y a là contradiction et divergence.
95 Ibn Qutayba joue ici de l’ambiguïté du mot ģarīb qui signifie « étranger à son milieu », mais aussi (...)
96 Lisān, III, 42, où ce ḥadīṯ est reproduit. 110150. —
Réponse : Nous
prétendons
qu’il
n’y
a
là
ni
contradiction, ni divergence. En effet, lorsque le Prophète disait : « L’Islam a commencé proscrit et redeviendra proscrit », il voulait seulement dire que les Musulmans étaient peu nombreux lorsque l’Islam a commencé, et qu’ils seront également peu nombreux à la 31
fin des temps, mais de qualité95. J’en veux pour preuve le ḥadīṯ du Prophète, d’après Mu‘āwiya b. ‘Amr — Abū Isḥāq — alAwzā‘ī — Yaḥyā (ou ‘Urwa b. Ruwaym) : // « Les meilleurs de ma communauté sont venus au début et viendront à la fin. Entre les deux viendront le médiocre et le tortueux, qui ne Te sont rien et auxquels je ne suis rien » (Le mot ṯabağ signifie : milieu)96
97 Cf. ḤAN. II, 390.
98 Cf. ABŪ DĀWŪD, 36, 10.
99 Cf. TIR, 39, 16. 111On rapporte d’autres faits dans le même sens : Ainsi, parlant de la fin des temps, le Prophète dit : « Celui qui, ce jour-là, s’accrochera à sa religion sera comme celui qui tient à la main une braise »97 ; ou encore ce ḥadīṯ où il dit : « Le témoin parmi eux ce jour-là sera comme le martyr de Badr »98 ; ou cet autre où, interrogé sur les proscrits (ġurabā’), il dit : « Ils ressusciteront de ma Sunna ce que les autres en auront tué »99.
100 Ce ḥadīṯ figure dans Lisān, IX, 353.
101 Lisān précise : « outre neuve », loc. cit. 112150 a. — Le Prophète a dit : « Le meilleur de ma communauté est le siècle où j’ai été envoyé » ; en effet, il est impossible de douter que ses Compagnons étaient meilleurs que les gens qui viendront à la fin des temps, et que personne pût avoir les mêmes mérites que ceux qui leur étaient impartis. Lorsque le Prophète dit par ailleurs : « Ma communauté est comme la pluie : on ne sait si c’est le début ou la fin qui sera le meilleur », ce n’est que pour mettre en parallèle les hommes qui viendront à la fin et les Compagnons, tout comme lorsqu’on dit : « Je ne sais si c’est l’envers ou l’endroit de cette étoffe qui est le plus beau ». 32
L’endroit est plus beau, mais il s’agit seulement de les mettre en parallèle. De même, lorsqu’on dit : « Je ne sais si cette femme est plus belle de face ou de dos ». Elle est plus belle de face, mais il s’agit seulement de comparer la beauté du devant et celle du dos. On peut aussi comparer les paroles [du Prophète] sur la Tihāma disant : « Elle ressemble à du miel dans une outre neuve : on ne sait s’il est meilleur au début ou à la fin »100. Le mot badī‘ est synonyme de ziqq (outre)101. Lorsque le miel est // dans une outre, sa qualité ne s’altère pas comme s’altère celle du lait dans l’outre à lait ; en effet, le lait est meilleur au début qu’à la fin, alors que [pour le miel], la qualité du début est sensiblement la même qu’à la fin, et guère meilleure. ***
XIV. — EXEMPLE DE DEUX ḤADĪṮ-S CONTRADICTOIRES 102 BUḪ. 65, s. 6, v. 4 = HM III, 317 ; 65, s. 37 = HM III, 428 ; 97, 50 = HM IV, 643 ; ḤAN. I, 205, 24 (...) 113151. — Proposition : Vous enseignez que le Prophète a dit : « Ne me préférez pas à Jonas, fils de Mattā, et ne faites pas un choix parmi les prophètes ! »102.
103 ḤAN. I, 5 ; V, 388. 114D’autre part, vous enseignez qu’il a dit : « Je suis le chef des fils d’Adam ; quel honneur ! Je suis le premier pour lequel la terre se fendra ; quel honneur ! »103. 115Il y a là divergence et contradiction.
104 BUḪ. 60,8 = HM II, 473 ; 81, 53 = HM IV, 315 ; ḤAN. I, 235, 453 ; V, 50. 116152. — Réponse : Nous prétendons qu’il n’y a là ni divergence, ni contradiction. Il a seulement voulu dire qu’il serait le chef des fils d’Adam au jour du Jugement ; il sera ce jour-là l’Intercesseur 33
et le Témoin ; c’est lui qui tiendra l’étendard de la louange et de la vasque104 ; il est le premier pour lequel la terre se fendra. Par les mots : « Ne me préférez pas à Jonas », il a simplement voulu faire preuve de modestie. C’est pour la même raison qu’Abū Bakr a dit : « Je vous ai pris en charge, mais je ne suis pas le meilleur d’entre vous ». Le Prophète a choisi particulièrement Jonas, car celui-ci est mineur par rapport aux autres prophètes, comme Abraham, // Moïse ou Jésus. Il voulait dire : « Si je ne veux pas qu’on me préfère à Jonas, c’est qu’à plus forte raison [je ne veux pas qu’on me préfère] à d’autres prophètes supérieurs à Jonas ».
105 Coran, LXVIII, 48. 117Dieu a dit : « Supporte le décret de ton Seigneur ! Ne sois pas comme l’Homme au Poisson… »105, voulant dire par là que Jonas n’avait pas la résignation des autres Prophètes.
106 Ḥanīfiyya sahla ; on trouve aussi samḥa qui a le même sens : simple, libéral, par contraste avec le (...) 118152 a. — Ce même verset prouve d’ailleurs que le Prophète Muḥammad était meilleur que lui, puisqu’il dit : « Ne sois pas comme lui ». Il prouve aussi que le Prophète, dans le ḥadīṯ : « Ne me préférez pas à Jonas », voulait faire preuve de modestie. On peut aussi interpréter : « Ne me préférez pas à lui dans mes œuvres, car peut-être a-t-il œuvré plus que moi ; ni pour les épreuves et les peines, car il a souffert plus que moi ». Or si Dieu a accordé à notre Prophète au jour du Jugement une autorité et une supériorité sur les autres prophètes et envoyés, ce n’est pas en raison de ses œuvres, mais parce qu’il lui accorde Sa préférence et lui donne une place à part. De même, la communauté du Prophète est celle dont les épreuves sont les moins lourdes ; Dieu l’a envoyé vers elle pour lui enseigner une religion naturelle simple106, et Il a exempté [cette communauté] 34
des fardeaux et des entraves qui accablaient les Fils d’Israël dans leurs obligations rituelles. Elle n’est est pas moins la meilleure // Communauté qui ait été constituée, grâce à Dieu. ***
XV. — EXEMPLE DE DEUX ḤADĪṮ-S CONTRADICTOIRES 107 BUḪ. 81, 51 = HM IV, 309 ; 97, 36= HM IV, 626 ; cf. 97, 19, = HM IV, 591 ; ḤAN. I, 399, 412, 451 ; (...) 119153. — Proposition : Vous enseignez que le Prophète a dit : « Le paradis n’accueillera pas quiconque a dans le cœur le poids d’un
grain
de
sénevé
d’orgueil ;
l’enfer
n’accueillera
pas
quiconque a dans le cœur le poids d’un grain de sénevé de foi »107. 120D’autre part, vous dites : « Quiconque dit : — Il n’y a d’autre divinité que Dieu ! » entrera au paradis, même s’il a forniqué ou volé ! » Or le vol et la fornication sont plus graves aux yeux de Dieu qu’un grain de sénevé d’orgueil. Il y a là divergence.
108 C’est ainsi qu’il nous a paru pouvoir rendre le plus clairement le mot ḥukm en fonction du contexte (...)
109 Ibn Qutayba joue ici du double sens de kibr kibriyā’ : d’abord grandeur, sublimité, puis orgueil. 121154. — Réponse : Nous prétendons qu’il n’y a là aucune divergence. Cette sentence peut être expliquée du point de vue de la
qualification
(ḥukm)108.
Le
Prophète
veut
dire :
« La
qualification de celui qui a dans le cœur un grain de sénevé d’orgueil n’est pas d’entrer au paradis, et la qualification de celui qui a dans le cœur un grain de sénevé de foi n’est pas d’entrer en enfer », car la grandeur109 n’appartient qu’à Dieu, et non aux hommes. Si quelqu’un dispute à Dieu cette grandeur, sa qualification n’est pas d’entrer au paradis, mais pour ce qui est du reste, Dieu fait ce qu’Il veut. 35
122154 a. — De même lorsqu’on dit à propos d’une maison : « J’ai vu qu’elle était petite : un prince ne s’y installerait pas ! », on fait allusion à sa qualification et à la qualification des maisons analogues, qui est de ne pas // être propres à recevoir les princes ; mais rien n’empêche qu’ils s’y installent tout de même. 123De même lorsqu’on dit : « Un homme libre n’entrerait pas dans ce pays ! », pour dire : « La qualification de ce pays n’est pas que les hommes libres y entrent ». 124154 b. — Il en est de même lorsqu’on dit : « Quiconque jeûne constamment sera étouffé par la Géhenne, car il aura fait fi des dons et des aumônes de Dieu, et qu’il aura dédaigné Sa permission et Sa tolérance ». Or celui qui fait fi d’une tolérance est comme celui qui néglige délibérément un acte de rigueur : tous deux méritent d’être punis, si toutefois Dieu [décide de] les punir.
110 Coran, IV, 93. 125154 c. — De même, le verset : « Quiconque tue un Croyant volontairement aura pour récompense la Géhenne »110 signifie : sa qualification est d’être récompensé de cette façon ; mais au reste, Dieu fait ce qu’il veut.
111 Voir ḤAN. V, 325. 126154 d. — Ceci est conforme au ḥadīṯ d’Abū Hurayra : « Si Dieu a promis à quelqu’un une récompense pour un acte, Il tient Sa promesse ; mais s’il a menacé quelqu’un d’une sanction, Il reste libre de l’appliquer ou non »111.
112 Coran, IV, 48 = 116. 127154 e (= 114). — J’ai entendu Isḥaq b. Ibrāhīm b. Ḥabib b. alŠahīd rapporter l’anecdote suivante qu’il tenait de Qurayš b. Anas : ‘Amr b. ‘Ubayd déclara : « Au jour de la résurrection, on 36
m’amènera en face de Dieu qui me demandera : — Pourquoi as-tu dit que le meurtrier est destiné à l’enfer ? Je dirai : — C’est Toimême qui l’as dit dans le verset : « Quiconque tue un Croyant volontairement aura pour récompense la Géhenne, où il restera éternellement ». Je dis alors — j’étais le plus jeune de l’assemblée — : — As-tu réfléchi qu’il pourrait bien te rétorquer : — Mais J’ai dit aussi : « Dieu ne pardonne pas qu’il Lui soit donné des associés, alors qu’il pardonne // à qui Il veut des péchés autres que celui-là »112 ; comment sais-tu donc que Je ne veux pas pardonner [à celui qui a tué] ? ‘Amr b. ‘Ubayd fut incapable de me répondre ». ***
XVI. — EXEMPLE D’UN ḤADĪṮ-S INFIRMÉ PAR LE CORAN 113 BUḪ. 60, 54 = HM II, 532. 128155. — Proposition : Vous enseignez qu’un homme dit à ses fils : « Lorsque je serai mort, brûlez-moi et dispersez [mes cendres] dans la mer. De cette façon, peut-être égarerai-je Dieu ! » Ils agirent conformément à ses ordres, mais Dieu rassembla [ses cendres] et lui dit : « Qu’est-ce qui t’a poussé à faire cela ? » (c’est là au moins le sens de ce qu’il lui dit). Il répondit : « C’est la crainte de Toi, Seigneur ! » Alors, Dieu lui pardonna113. 129Ils disent : Cet homme était un infidèle. Dieu ne pardonne pas aux infidèles : c’est dans le Coran.
114 Coran, XX, 52. 130156. — Réponse : Nous disons que l’expression « j’égarerai Dieu » signifie ici « j’échapperai à Dieu ». On peut employer ce verbe à la première et à la quatrième forme (ḍalla et aḍalla). Ainsi le verset : « …dans une Écriture que le Seigneur n’égare ni n’oublie »114, c’est-à-dire qui n’échappe pas au Seigneur. 37
115 L’Omnipotence (qudra). 131C’était là un homme croyant, reconnaissant l’existence de Dieu et Le craignant, mais qui ignorait l’un de Ses attributs115. Il pensait qu’une fois brûlé et dispersé aux vents, il échapperait à Dieu. Dieu lui pardonna d’ignorer cet attribut parce qu’il connaissait Sa réprimande et craignait Son châtiment.
116 Allusion à Coran IX, 106. Cf. index, s. Murği’ite. 132Il arrive que certains Musulmans se trompent au sujet des attributs ; // on ne les déclare pas voués à l’enfer pour autant : on renvoie116 leur affaire à Qui les connaît mieux, eux et leur intention. ***
XVII. — EXEMPLE D’UN ḤADĪṮ INFIRMÉ PAR LE CORAN 117 ḤAN. I, 230 ; cf. BUḪ. 59, 15 = HM II, 455 ; 65, s. 77 = HM III, 493.
118 Coran, IV, 31. 133157. — Proposition : Vous enseignez que le Prophète a dit : « Quiconque refuse de tuer les serpents par crainte de la vengeance est un infidèle »117. Dieu dit d’autre part : « Si vous évitez ceux des grands péchés qui vous ont été interdits, Nous effacerons pour vous vos mauvaises actions »118. Or si c’est là un péché, c’est un péché véniel. Comment Dieu ne lui effacerait-Il pas (ses mauvaises actions) ?
119 Cf. BUḪ. 3, 49 = HM I, 62 ; 59, 11 = HM II, 451 ; 60, 47 = HM II, 516 ; 88, 3 = HM IV, 426 ; ḤAN. I (...) 134D’autre part, vous dites : « Quiconque fornique et vole, s’il déclare : — Il n’y a d’autre divinité que Dieu ! est un Croyant et
38
entrera au paradis »119. Et vous seriez des infidèles en ne tuant pas les serpents ? Il y a là divergence et contradiction. 135158. — Nous prétendons qu’il n’y a là ni divergence, ni contradiction. Il ne s’agit pas de montrer que quiconque ne tue pas les serpents commet un grand péché qui range son auteur au nombre des infidèles ; le grand péché est de ne pas les tuer par
crainte de la vengeance. 136C’était là un trait de mœurs de la Ğāhiliyya. Les Arabes disaient que les génies poursuivaient la vengeance de celui d’entre eux qui avait été tué, et faisaient parfois mourir le meurtrier, ou lui infligeaient une infirmité quelconque ; il leur arrivait aussi de faire mourir son enfant. Le Prophète leur enseigna // que cela était faux, et leur dit : « Quiconque croit cela est un infidèle », c’est-àdire : Quiconque croit en ces choses fausses. 137158 a. — L’infidélité, selon nous, a deux degrés : La première est l’infidélité touchant les dogmes essentiels (aṣl), comme celle relative à Dieu, à Ses prophètes, à Ses anges, à Ses Livres, à la résurrection. Tels sont les dogmes essentiels ; quiconque fait preuve d’infidélité à l’égard d’un de ces dogmes se place en dehors de la communauté des Musulmans. S’il meurt, aucun de ses proches parents musulmans ne peut hériter de lui, et on ne peut faire sur lui la prière des morts. 138L’autre secondaires
sorte (far‘),
d’infidélité dans
la
est
celle
mesure
où
relative ils
aux
sont
points
sujets
à
interprétation ; ainsi, l’infidélité relative au Qadar (sic), ou le refus de pratiquer la friction des chaussures, ou de ne considérer comme valide qu’une répudiation par trois fois, etc… De telles dérogations n’excluent pas le Musulman de la Communauté, et on ne traite pas d’infidèle celui qui rejette une de ces doctrines [secondaires], tout comme on qualifie l’hypocrite d’ āmin (fidèle) et non de mu’min (croyant). 39
***
XVIII. — EXEMPLE DE ḤADĪṮ INFIRMÉ PAR LA SPÉCULATION, L’EXPÉRIENCE, LA TRADITION HISTORIQUE ET LE CORAN 120 Tur‘a. Lisān, IX, 381 et Tāğ, V, 289 rapportent le ḥadīṯ et discutent abondamment le sens de ce mot (...)
121 ḤAN. II, 360, 406, 450… ; III, 389 ; IV, 41 etc… Cf. BUḪ. 20, 5 = HM I, 384, où toutefois le mot tu (...)
122 Coran, LIII, 14-15. Nous ne pouvons naturellement pas suivre ici la trad. Blachère, qui voit dans a (...)
123 Coran, III, 133 ; cf. LVII, 21. 139159. — Proposition : Vous enseignez que le Prophète a dit : « Mon minbar que
voici
se
trouve
au-dessus
d’une
des
entrées120 du paradis ; entre mon tombeau et mon minbar se trouve un des jardins du paradis »121. Or Dieu dit : « …le jujubier de la Limite, près duquel est le jardin de la Retraite »122. // Il dit encore : « …un Jardin aussi large que les cieux et la terre, préparé pour les gens pieux »123.
124 Voir les nombreux excursus de la littérature ancienne sur sidrat al-muntahā, notamment les commenta (...) 140D’autre part, vous rapportez dans plus d’un ḥadīṯ que le paradis se trouve au septième ciel124. 141Il y a là divergence et contradiction. 142160. — Réponse : Nous affirmons qu’il n’y a là ni divergence, ni contradiction. Lorsqu’il disait : « Entre mon tombeau et mon minbar se trouve un des jardins du paradis », il ne l’entendait pas au sens propre, mais il voulait dire que la Prière et le ḏikr en cet endroit conduisent au paradis ; c’est donc un morceau du paradis. 40
143Dans « Mon minbar que voici se trouve au-dessus d’une des entrées du paradis », le mot tur‘a désigne l’entrée du canal d’adduction de l’abreuvoir. Ce ḥadīṯ signifie donc : « C’est une porte d’accès au paradis ».
125 Lisān et Tāğ ; loc. cit. 144160 a. — Abū Muḥammad dit : J’ai entendu Abū l-Ḫaṭṭāb — Bišr b. al-Mufaḍḍal — ‘Umar b. ‘Abd Allāh, mawlā de Ġufra — Ayyūb b. Ḫālid al-Anṣārī — Ǧābir b. ‘Abd Allāh al-Anṣārī : Le Prophète sortit pour nous rejoindre et dit : « Profitez de l’abondance des jardins du paradis ! » Ils dirent : « Mais où sont les jardins du paradis, ô envoyé de Dieu ? » Il répondit : « Ce sont les endroits où l’on s’assemble pour le ḏikr »125.
126 Cf. ḤAN. I, 81, 91 et surtout Lisān et Tāğ, loc. cit. ; Lisān, X, 411 : maḫrafa = allée entre deux (...) 145160 b. — On comparera cet autre ḥadīṯ qui dit : « Celui qui visite
un
malade
est
sur
les
allées, maḫarif, sing. maḫrafa, sont
allées les
du
paradis »126 (les
chemins
— turuq ; //
‘Umar b. al-Ḫaṭṭāb a dit : « Je vous ai laissés comme sur l’allée — maḫrafa — des délices », c’est-à-dire sur le chemin des délices). Le Prophète voulait dire que la visite des malades conduit au paradis, et qu’elle en est comme le chemin. De même, les séances de ḏikr conduisent aux jardins du paradis, et elles en font en quelque sorte partie.
127 BUḪ. 56, 22, 112, 156 = HM II, 292, 336, 355. 146De même les mots de ‘Ammār b. Yāsir : « Le paradis est sous le flamboyant », c’est-à-dire le sabre : « Le paradis est à l’ombre des sabres », ce qui veut dire : La guerre sainte mène au paradis, c’est donc comme si le paradis dépendait d’elle127.
41
147160 c. — Certains pensent que l’espace situé entre son tombeau et son minbar est « en face » d’un des jardins du paradis, et que son minbar est « en face » d’une des entrées du paradis ; il aurait considéré ces deux endroits comme une partie du paradis parce que, sur terre, ils se trouvaient vis-à-vis des deux
endroits
du
ciel
correspondants.
Mais
la
première
explication est à mon avis meilleure. Dieu seul connaît la vérité. ***
XIX. — EXEMPLE DE DEUX ḤADĪṮ-S CONTRADICTOIRES 128 ḤAN. III, 129, 183 ; IV, 421. 129 La saqīfa est l’endroit où se déroula l’une des phases de l’élection d’Abū Bakr. BUḪ. 86, 31 = HM I (...) 148161. — Proposition : Vous enseignez que le Prophète a dit : « Les imām-s sont de Qurayš »128. Vous rapportez qu’Abū Bakr se réclame de ce ḥadīṯ contre les Anṣār le jour de la saqīfa des Banū Sā‘ida129.
130 ḤAN. VI, 201. 149160 D’autre part, vous rapportez que ‘Umar dit au moment de mourir :
« Si
Šālim, mawlā d’Abū
Ḥuḏayfa,
était
vivant,
je
n’hésiterais point à son sujet ». Or, Šālim n’était pas mawlā d’Abū Ḥuḏayfa, mais bien mawlā d’une femme des Anṣār, qui // l’avait affranchi et élevé130. Il n’était attaché à Abū Ḥuḏayfa que par le serment d’alliance (ḥilf). 150Vous
considérez
donc
que
l’imāmat peut
revenir
à
un mawlā des Anṣār ; si au moins il avait été mawlā de Qurayš, vous auriez pu prétendre que le mawlā d’une tribu fait partie à la fois de cette tribu et de sa tribu d’origine. Il y a là divergence et contradiction.
42
151162. — Réponse : Nous prétendons qu’il n’y a là aucune contradiction. Il y aurait eu contradiction si ‘Umar avait dit : « Si Šālim avait été vivant, je n’aurais point eu de doute sur sa désignation comme votre chef, ou votre émir ». Mais comme il a dit : « Je n’aurais point eu de doute à son sujet », cela peut s’interpréter autrement qu’ils ne l’ont fait. Comment peut-on supposer que ‘Umar ne se fût pas arrêté aux meilleurs des Émigrés, et à ceux auxquels le Prophète avait promis le paradis, et n’eût point choisi parmi eux, alors même qu’il remettait la chose à leur conseil ? Comment n’aurait-il pas douté de l’opportunité de désigner Šālim comme leur chef ? Cela aurait été un lapsus et une erreur de jugement. Mais en remettant l’affaire à l’appréciation [des Émigrés et des promis au paradis], il chercha quelqu’un pour diriger la Prière, jusqu’à ce qu’ils eussent choisi un imām parmi eux ; il les pressa de choisir par trois fois, et leur fit porter ses ordres par son fils ‘Abd Allāh. C’est alors qu’il parla de Šālim et dit : « S’il avait été vivant, je n’aurais pas eu de doute à son sujet ». // Il parla aussi d’al-Ğārūd al-‘Abdī et dit : « Si U‘aymiš, des Banū ‘Abd al-Qays, avait été vivant, je l’aurais mis en avant ». Les mots : « je l’aurais mis en avant » montrent bien qu’il ne songeait pas à autre chose, pour Sālim comme pour ce dernier, qu’à les placer au premier rang pour diriger la Prière. Par la suite, on se mit d’accord sur la personnalité de Suhayb al-Rūmī, et ‘Umar lui ordonna de diriger la Prière jusqu’à ce qu’un membre de la communauté fût élu. ***
XX. — EXEMPLE D’UN ḤADĪṮ INFIRMÉ PAR LA SPÉCULATION ET LA TRADITION HISTORIQUE 131 ḤAN. II, 13, 19, 24, 106, 210 ; IV, 349.
43
152163. — Proposition : Vous enseignez que le Prophète a dit : « Le soleil monte à l’horizon entre les deux cornes du Démon. Ne faites donc pas la Prière lorsqu’il monte »131.
132 BUḪ. 33, 8, 11, 12 = HM I, 646, 648 ; 93, 21 = HM IV, 510 ; ḤAN. III, 156, 285, 309 ; VI, 337. 153Vous attribuez au Démon des cornes qui atteignent le ciel et vous prétendez que le soleil, qui est beaucoup plus gros que la terre, court entre ses cornes. Vous n’en affirmez pas moins que le Démon circule dans l’homme comme le sang132. Il serait dans ce dernier cas plus ténu que tout, et dans le premier cas plus gros que tout. 154Vous dites que la raison pour laquelle il convient de ne pas faire la Prière au lever du soleil est qu’il monte entre les cornes du Démon. L’homme en Prière n’est tenu de rien envers Dieu si le soleil court entre les cornes du Démon, et il n’y a rien là qui empêche de prier Dieu. // 155164. — Réponse : Nous affirmons que s’ils nient ce ḥadīṯ, c’est parce qu’ils ne croient pas que Dieu a créé les démons et les génies, et leur a donné la faculté de changer d’état, et de prendre tantôt l’aspect d’un vieillard, tantôt d’un jeune homme, d’un feu, d’un chien, d’un génie même, et de se manifester tantôt au ciel, tantôt dans le cœur, voire de courir dans les veines comme le sang.
133 Allusion à Coran, XXXVII, 8.
134 Coran, IV, 119. 156Ils sont d’ailleurs mis en échec par le Coran, par toutes les traditions
historiques
concordantes
relatives
au
Prophète
Muḥammad et aux prophètes antérieurs, par les anciens Livres divins, et par tous les peuples disparus. En effet, Dieu nous 44
enseigne dans son Livre que les démons occupent au ciel des postes d’écoute, et qu’ils sont lapidés avec des étoiles133. Dieu nous enseigne que Satan a dit : « Je les égarerai ; je les bernerai de désirs ; je leur ordonnerai de fendre les oreilles des [bêtes de] troupeaux ; je leur ordonnerai de changer la création de Dieu ! »134. Or le Démon ne nous apparaît pas. Comment pourrait-il nous ordonner toutes ces choses si Dieu ne lui avait donné le pouvoir de s’introduire dans les cœurs, pour suggérer les mauvaises pensées, faire miroiter les choses et insuffler le désir comme Dieu le dit ?
135 Cf. Tarbī‘, 36 s.v. aš-Šayḫ an-Nağdī, avec toutes les références. On n’a pas trouvé de tradition re (...)
136 Coran, LXXII, 6.
137 Coran, LV, 56 = 74. 157154 On rapporte aussi dans le ḥadīṯ que [le Démon] a été vu tantôt sous l’aspect d’un vieillard // du Nağd, tantôt d’une grenouille135, tantôt d’un génie. Dieu a d’ailleurs appelé certains génies des « mâles », tout comme Il parle des « mâles » parmi les humains. Il a dit : « Des mâles parmi les humains cherchaient refuge auprès des mâles parmi les génies »136. Il a dit sur les vierges [du paradis] : « Ni homme, ni génie ne les aura déflorées avant eux »137, ce qui montre que les génies ont le pouvoir de déflorer, tout comme les humains. La défloration ( tamṯ) est le coït accompagné de saignement. 158164 a. — Abū Muḥammad dit : Dans ce livre, notre intention n’est pas de réfuter les zindīq-s, ni les gens qui nient les signes de Dieu et les signes de Ses Envoyés. Nous voulons seulement répondre à ceux qui voient à tort dans le ḥadīṯ des contradictions, des incohérences et des non-sens, bien qu’ils se réclament de l’Islam. 45
159Si la raison pour laquelle quelqu’un rejette ce ḥadīṯ est qu’il est incapable de le concevoir, et qu’il ne voit pas de sens à l’interdiction d’accomplir la Prière parce que le soleil se lève entre les cornes du Démon, nous allons lui en montrer le sens, afin qu’il parvienne à le comprendre — avec la permission de Dieu — et qu’il lui apparaisse recevable et digne d’être examiné. 160164 b. — Le Prophète ne nous a ordonné de renoncer à la Prière au lever du soleil que parce que c’était là le moment où les adorateurs du soleil se prosternaient pour le vénérer. //
138 Coran, XXVII, 24. 161Beaucoup de peuples anciens vécurent en adorant le soleil et en se prosternant devant lui. Par exemple, Dieu fait dire à la huppe, dans l’histoire de la reine de Saba : « Je l’ai trouvée, elle et son peuple, se prosternant devant le soleil à l’exclusion de Dieu. Le
Diable
a
paré
pour
eux
leurs
actions
de
fausses
apparences »138. 162Il y avait parmi les Arabes des gens qui adoraient le soleil, le vénéraient et l’appelaient « la Déesse ». Al-A‘šā dit : « Je ne connus point la crainte jusqu’à ce que je me fusse incliné devant la Déesse, tout près ». 163Il s’agit du soleil.
139 Coran, VII, 127 ; la Vulgate dit : ālihataka, « tes dieux » ; la lecture en question est « ilāhatak (...) 164Certain Lecteur lit : « Laisserez-vous Moïse et son peuple semer le scandale sur la terre et te délaisser (Pharaon), ainsi que ta Déesse ? », c’est-à-dire : Toi, ainsi que le Soleil que tu adores ? 139. 165164 c. — Le Prophète répugnait donc à ce que nous fissions la Prière au moment où les adorateurs du soleil se prosternaient 46
devant lui. Il nous enseigne que les démons, ou Satan lui-même, se trouvent à ce moment-là dans la direction du Levant, et qu’en se prosternant en l’honneur du soleil, ils se prosternaient aussi devant le Démon, et en faisaient l’objet de leur adoration. 166164 d. — Par le mot « corne » (qarn), il n’entendait pas — comme ils l’imaginent — quelque chose d’analogue aux cornes des vaches ou des moutons. Le mot corne désigne ici le côté de la tête. La tête a deux « cornes », // c’est-à-dire deux côtés, deux bords. Je pense que la « corne » qui pousse à cet endroit n’a été appelée ainsi qu’en raison du nom de l’endroit lui-même. C’est ainsi que les Arabes appellent une chose du nom de l’endroit où elle se manifeste, ou avec lequel elle a un certain rapport. Ils disent par exemple « rafa‘a ‘aqīratahu » (lever le jarret), pour « élever la voix » : en effet, un homme eut le pied coupé et leva la jambe en criant à l’aide ; depuis, on dit pour « élever la voix », « lever le jarret ». Il y a bien d’autres exemples de ce genre en arabe. 167C’est pourquoi l’on dit à propos du Levant : « C’est là que monte la corne du Démon », non pas dans le sens de « corne de vache », comme l’auditeur se l’imagine, mais pour dire : « C’est là que monte la tête du Démon ». 168164 e. — Wahb b. Munabbih disait à propos de Dū l-Qarnayn (l’homme aux deux cornes) que c’était un homme d’Alexandrie nommé Alexandre. Il avait rêvé qu’il s’approchait du soleil et attrapait ses deux cornes, à l’Orient et à l’Occident. Il raconta son rêve à son entourage, et c’est ainsi qu’on l’appela « l’homme aux deux cornes ». Lorsque Wahb disait qu’il avait attrapé les deux « cornes » du soleil, il voulait dire les deux côtés. 169164 f. — Les « cornes » désignent aussi les mèches de cheveux. Chaque mèche peut être appelée « corne ». C’est pourquoi on appelle les Byzantins « les hommes cornus » (ḏāt al47
qurūn), car ils gardent les cheveux longs. Le Prophète a donc voulu nous apprendre que lorsque le soleil se lève et que ses adorateurs se prosternent en son honneur, le Démon se déplace en même temps que // le soleil et le soleil court près de sa tête. Il nous a donc ordonné de ne pas faire la Prière au moment où ces gens se livraient à l’idolâtrie, et priaient en l’honneur du soleil et du Démon. C’est là d’ailleurs une chose mystérieuse pour nous, et nous n’en savons que ce qui nous en a été appris. Les explications que je viens de te donner constituent une interprétation admissible et irréprochable. Mais Dieu sait le mieux les choses. 170164 g. — Si les sceptiques produisent de tels arguments et d’autres analogues, c’est uniquement parce qu’ils réduisent tout ce qui leur échappe à des éléments sensibles, ramènent tout à ce qu’ils
savent
d’eux-mêmes,
des
animaux
et
des
choses
inanimées, et appliquent aux êtres spirituels les normes des êtres corporels. Lorsqu’ils entendent parler des anges qui portent sur leurs épaules le Trône, et ont les pieds sur la terre inférieure, ils regimbent, car cela est contraire au témoignage de leurs yeux. Ils disent : Comment les corps de ces êtres peuvent-ils traverser les cieux, la terre, les espaces situés au-dessus d’eux et entre les deux, sans que nous y voyions rien ? Comment une créature peutelle être aussi grande ? Comment peut-il s’agir d’esprits, puisqu’ils ont des épaules, et des pieds ? 171Lorsqu’on leur dit que Gabriel se manifesta au Prophète tantôt sous l’aspect d’un bédouin, tantôt de Diḥya al-Kalbī, tantôt d’un jeune homme, et tantôt qu’il recouvrait de ses ailes tout l’espace qui sépare le Levant du Couchant, ils disent : Comment pouvait-il se métamorphoser // ainsi ? Comment peut-il être tantôt si petit, tantôt si grand, sans que rien soit ajouté à son volume, ni à son corps, ni à ses attributs ? C’est qu’ils ne peuvent voir que ce qui est doué de ces attributs. 48
172Lorsqu’on leur dit que Satan se fraye un chemin jusqu’au cœur de l’homme pour y semer le trouble et les pensées mauvaises, ils disent : Par où entre-t-il ? Est-il possible que deux esprits cœxistent dans un même corps ? Comment peut-il circuler comme le sang ? 173164 h. — Abū Muḥammad dit : S’ils considéraient ce qui leur échappe à la lumière des manifestations sensibles de la toute puissance de Dieu, ils comprendraient que Celui qui fait s’écouler vers la mer depuis la création toutes les eaux de la terre sans en ajouter ni en retirer, et qui pourrait, en déviant le cours d’un grand fleuve comme le Tigre, l’Euphrate ou le Nil, et en le faisant passer pendant un mois sur les villes et les villages, les monuments et les ruines, supprimer toute trace de vie à la surface de la terre, a aussi le pouvoir de faire ce qu’ils nient. Ils comprendraient que Celui qui a le pouvoir de faire trembler cette terre malgré son énormité, son épaisseur, ses mers, ses montagnes, ses neuves, au point de faire s’entrechoquer les montagnes, tarir les eaux, ou de déplacer les montagnes, // peut aussi être bon envers l’objet de son décret. Ils comprendraient que Celui qui a donné à l’œil humain, si petit et si fragile, assez de portée pour percevoir la moitié du firmament, malgré son immensité, pour voir à la fois une étoile à l’Orient et celle qui lui fait vis-à-vis à l’Occident, ainsi que toutes celles qui les séparent, de sorte que son regard accomplit ainsi un voyage de cinq cents années, a aussi bien pu créer un ange ayant entre le lobe de l’oreille et l’épaule une distance de cinq cents années. Y a-t-il tant de différence entre ce qu’il nie et ce qu’il connaît, entre ce qu’il voit et ce qu’il ne voit pas ? 174Gloire à Dieu, le meilleur des Créateurs. *** XXI. — EXEMPLE DE DEUX ḤADĪṮ-S CONTRADICTOIRES 49
140 BUḪ. 23, 80, 93 = HM I, 437, 446 ; 65, s. 30 = HM III, 413 ; 82, 3 = HM IV, 320 ; ḤAN. II, 233 etc… 175165. — Proposition : Vous prétendez que le Prophète a dit : « Tout enfant naît dans la religion naturelle ; ce sont ses parents qui en font un Juif ou un Chrétien »140.
141 Cf. BUḪ. 82. 1 = HM IV, 320.
142 BUḪ. 59, 6 = HM II, 431 ; 82, 1 = HM IV, 319 ; ḤAN. I, 374‘ 382, etc…
143 ḤAN. V, 239. 176Vous
rapportez
d’autre
part :
« Le
bienheureux
est
bienheureux dès le sein de sa mère ; le réprouvé est réprouvé dès le sein de sa mère »141 ; « Lorsque la goutte de sperme se coagule, Dieu lui envoie un ange qui inscrit son terme et son lot, ainsi que le mot bienheureux ou réprouvé »142 ; « Dieu frotta le dos d’Adam, prit une poignée [du limon dont il l’avait créé], et dit : — Au paradis, par Ma miséricorde. Puis Il en prit une autre et dit : — En enfer ; Je M’en désintéresse ! »143. 177Il y a là contradiction et divergence. Cela divise les Musulmans, en fournissant des arguments aux gens du Qadar comme à ceux qui affirment l’existence des attributs (iṯbāt). 178166. — Réponse : Nous prétendons
qu’il
n’y
a là ni
contradiction ni // divergence, grâce à Dieu. Si les Mu‘tazilites comprenaient bien ce dont il s’agit, et s’il n’existait d’autre cause de malentendu que ce ḥadīṯ, ils ne se sépareraient pas de ceux qui affirment l’existence des attributs.
144 Coran, XXXV, 1 ; cf. VI, 14 et XIV, 10.
145 Coran, XXX. 30.
146 Cf. Coran, VII, 172. 50
179Le mot fiṭra signifie ici « commencement », « création ». C’est en ce sens que Dieu dit : « Louange à Dieu, créateur (fāṭir) des cieux et de la terre »144, c’est-à-dire « Celui qui les a fait commencer ». De même le verset : « La conception originelle (fiṭra) selon laquelle il a conçu (faṭara) les hommes »145, c’est-àdire « la constitution naturelle selon laquelle il a constitué les hommes ». Par la phrase : « Tout enfant naît dans la fiṭra », il faisait allusion au pacte que Dieu impose aux hommes dans les reins de leurs parents, et au témoignage qu’il leur demande de porter à l’en-contre d’eux-mêmes : « Ne suis-je pas votre Seigneur ? » et ils répondent : « Si ! »146.
147 Coran, XLIII, 87. 180166 a. — Je ne connais personne qui n’avoue avoir un créateur et un régent (mudabbir), même s’il ne L’appelle pas par Son nom ou adore autre chose que Lui qui puisse — du moins le croit-il — le rapprocher de Lui, ou même s’il Lui accorde d’autres attributs que les Siens, ou s’il Lui attribue des qualités fortement incompatibles avec Sa majesté. Dieu a dit : « Si tu leur demandes qui les a créés, ils répondent : — Dieu ! »147.
148 ḤAN. IV, 126. 181Donc, tout nouveau né, dans le monde, est astreint à ce pacte et à cet aveu, qui constituent la ḥanīfiyya. Elle existait au commencement de la création, et régnait dans tous les esprits créés. Le Prophète a dit : « Dieu dit : — J’ai fait des ḥanīf-s de toutes mes créatures. Ce sont les démons qui les ont détournés de leur religion, si bien que les Juifs font de leurs fils des Juifs, et que les Mages font de leurs fils des Mages »148, c’est-à-dire qu’ils leur enseignent // leur religion. Or la première profession de foi n’entraîne pas le statut [définitif] ni la récompense [finale]. On sait que l’enfant de polythéistes, tant qu’il est parmi ses 51
parents, a un statut conforme à sa religion, et n’a pas droit à la Prière des morts ; mais lorsqu’il échappe à l’emprise de sa famille et passe aux mains d’un maître musulman, il reçoit le statut conforme à la religion de son maître, et on fait sur lui la prière des morts. Derrière tout cela est l’Omniscience de Dieu s’appliquant à lui. 182166 b. — La différence entre les partisans de l’iṭbāt et les gens du Qadar à propos de ce ḥadīṯ est que pour les gens du Qadar, fiṭra est synonyme d’Islam, en sorte que pour eux les deux ḥadīṯ-s sont contradictoires, alors que pour les partisans du déterminisme, ce mot désigne le pacte qui lui a été imposé à leur création. 183Ces deux ḥadīṯ-s sont donc parfaitement compatibles et ne divergent nullement. Mais chacun d’eux doit être appliqué en ses lieu et place. ***
XXII. — EXEMPLE DE ḤADĪT DONT LE DÉBUT INFIRME LA FIN 149 BUḪ. 4, 26 = HM I, 74 ; ḤAN. II, 241, 253, etc… 184167. — Proposition : Vous enseignez que le Prophète a dit : « Lorsque quelqu’un d’entre vous se lève après le sommeil, qu’il ne plonge pas sa main dans le pot à eau avant de l’avoir lavée trois fois, car il ne sait pas où était sa main pendant la nuit »149.
150 ḤAN. VI, 95. 185Ce ḥadīṯ serait valable, n’était la fin : « …car il ne sait pas où était sa main pendant la nuit ». Il n’est personne qui ne sache que sa main était là où était son corps, où étaient ses jambes, son oreille, son nez, et le reste de ses membres. Le plus grave serait que sa main // eût touché ses parties pendant le sommeil. Or si quelqu’un touche ses parties en état de veille, cela ne détruit pas 52
la pureté légale150 ; comment serait-elle détruite lorsqu’il les touche en étant inconscient ? Dieu ne saurait reprocher aux hommes [ce qu’ils font] lorsqu’ils sont inconscients. Il peut arriver que quelqu’un délire dans son sommeil, et répudie, blasphème, profère des mensonges, rêve à la femme de son voisin et fornique pendant son sommeil ; mais aucune loi humaine ni divine ne saurait lui reprocher cela.
151 ḤAN. II, 223, 333, etc…
152 Les compilateurs semblent avoir retenu surtout le ḥadīṯ contraire : « Il mangea de la viande, et pr (...) 186168. — Réponse : Nous prétendons que cet ergoteur sait des choses, mais en ignore d’autres. Ne sait-il pas que beaucoup de spécialistes
du fiqh pensent
que
l’ablution
est
obligatoire
lorsqu’on a touché les parties, que ce soit dans le sommeil ou à l’état de veille, [justement à cause] de ce ḥadīṯ, et aussi de cet autre : « Quiconque touche ses parties doit faire l’ablution »151 ? Toutefois, nous ne sommes pas de cet avis, et nous considérons que l’ablution imposée lorsqu’on a touché les parties consiste à se laver la main. En effet, les parties sont l’exutoire des excréments et des impuretés. De même, l’ablution imposée après avoir [touché des aliments] cuits au feu consiste à se laver la main de la crasse, des résidus de cuisine et de rôti152. Nous avons exposé cela en plus d’un endroit, et nous en avons administré les preuves. // 187Puisque l’ablution imposée après qu’on ait touché les parties consiste à se laver les deux mains, il est évident que si le Prophète a ordonné à l’individu qui se réveille de laver sa main avant de la plonger dans le pot à eau car il ne sait pas où était sa main pendant la nuit, c’était pour signifier que pendant le sommeil, il peut toucher avec la main ses parties ou son anus, risquant ainsi 53
de recevoir sur la main une goutte d’urine ou une trace de sperme s’il a coïté avant de s’endormir ; s’il plonge alors sa main dans le pot à eau sans la laver, l’eau se salit et se gâte. Il a parlé en particulier de l’homme endormi à ce propos, parce que l’homme endormi peut mettre inconsciemment la main à cet endroit ou sur son anus. Quant à l’homme en état de veille, s’il touche quelqu’une de ces parties et que sa main en subisse quelque souillure dont il soit conscient, il ne doit pas le négliger, mais laver sa main avant de la plonger dans le vase, de manger ou de serrer une main. ***
XXIII. — EXEMPLE DE ḤADĪṮ DONT LE DÉBUT INFIRME LA FIN 153 ḤAN. IV, 85, 86. 188169. — Proposition : Vous enseignez que le Prophète a interdit la Prière dans les enclos (a‘ṭān) des chameaux, car ceux-ci ont été créés à partir des démons153. 189Cette interdiction de faire la Prière dans les enclos des chameaux ne peut être // outrepassée : elle est admise dans la pratique rituelle. Mais lorsque vous y ajoutez que les chameaux ont été créés à partir des démons, il est évident que le Prophète savait que les chameaux naissent des chameaux, comme les bovins naissent des bovins, les chevaux des chevaux, les lions des lions et les mouches des mouches ! 190170. — Réponse : Nous affirmons que le Prophète — comme tout un chacun — savait que le chameau est engendré par la chamelle, et qu’il est impossible qu’un démon femelle engendre un chameau, ou qu’une chamelle engendre un démon. Il a seulement voulu nous laisser entendre qu’à l’origine de la
54
création, les chameaux ont été créés à partir d’une espèce dont sont également issus les démons.
154 A‘nān- Tāğ, IX, 282 = aḫlāq (mœurs) ou nawāḥī (côtés). 191J’en veux pour preuve cet autre ḥadīṯ où le Prophète déclare que
les
chameaux
ont
été
créés
à
partir
des a‘nān des
démons154, c’est-à-dire de leurs côtés, de leurs environs. On dit : « Untel a atteint les a‘nān du ciel », c’est-à-dire ses côtés, ses environs. S’ils avaient été créés de la même race, il aurait dit : Ils ont été créés de la même race, des mêmes entrailles, des mêmes reins, ou autres termes analogues.
155 Cf. Tarbī‘, ١٣٣ s. ḥūš. 192Les Arabes ont toujours qualifié une certaine espèce de chameaux
de
« sauvage »
(ḥūš.) Ils
disent :
Une
chamelle
« sauvage », des chameaux « sauvages ». Ce sont les chameaux les plus rétifs, les plus difficiles. Ils affirment // que les génies ont des troupeaux dans le pays des ḥūš155, que ces bêtes se sont mêlées au bétail des hommes, et qu’il en est résulté ces chameaux « sauvages » (ḥūšiyya). 193Ru’ba a dit : « Notre troupeau est accouru du pays des hūš ». 194Il est possible, de ce point de vue, que les chameaux soient le produit des animaux des génies, et non des génies eux-mêmes. C’est
pourquoi
le
Prophète
a
employé
l’expression :
« des a‘nān des démons », c’est-à-dire de leurs côtés. Seuls pourraient le nier ceux qui nient l’existence des génies et les démons eux-mêmes, et ne croient qu’en ce que voient leurs yeux et perçoivent leurs sens. Or ce trait est particulier à la doctrine des zindīq-s et des faylasūf-s que l’on qualifie de dahriyya. Ce n’est pas un dogme musulman. 55
***
XXIV. — EXEMPLE D’UN ḤADĪṮ COMPORTANT UNE CONTRADICTION INTERNE 156 ḤAN. IV, 85 ; V, 54, etc…
157 On n’a pas retrouvé ce ḥadīṯ. 195171. — Proposition : Vous enseignez que le Prophète a dit : « Si
les
chiens
ne
constituaient
pas
une
communauté
(umma), j’ordonnerais qu’on les tue ; toutefois, tuez ceux qui sont entièrement noirs »156. Il a dit encore : // « Le [chien] noir est un démon »157. 196Ils disent : Tout se passe comme s’il avait ordonné de les tuer parce qu’ils étaient noirs, ou parce que c’étaient des démons, bien qu’il recommandât d’épargner les chiens en général parce qu’ils constituaient une communauté. Or le fait que [les chiens] constituent une communauté n’est pas [en soi] une raison qui empêche ou impose de les tuer. 197Vous dites par ailleurs qu’il a ordonné de tuer les chiens jusqu’à ce qu’il n’en restât plus un seul à Médine. Comment a-t-il pu donner cet ordre, puisqu’ils constituent une communauté ? Cela ne l’a-t-il pas retenu de les tuer ? 198[En somme, la raison pour laquelle il leur a accordé l’immunité est aussi celle pour laquelle il [a ordonné] de les tuer !
158 Coran, VI, 38.
159 Coran, VI, 130. 199172. — Réponse : Nous affirmons que toute espèce d’animaux créés par Dieu constitue une communauté, que ce soient chiens, lions, bovidés, moutons, fourmis, sauterelles, etc., au même titre que les humains. De même, les génies sont aussi un peuple. Dieu 56
a dit : « Il n’est bête sur la terre, ni oiseau volant de ses ailes qui ne forment des communautés semblables à vous »158. Il veut dire : Semblable à nous en ce qui concerne la recherche des aliments de midi et du soir, de la subsistance ( rizq), et la protection contre les périls. En outre, Dieu s’adresse aux génies tout comme aux hommes, lorsqu’il dit : « O assemblée des génies et des humains ! Des Apôtres sortis de vous ne sont-ils pas venus à vous ? »159.
160 Coran), V, 4. 200Donc, si le Prophète avait ordonné de tuer les chiens en // toute circonstance, il aurait provoqué la disparition d’une communauté, et réduit à néant son rôle sur terre. Or les chiens sont utiles aux hommes ; ils gardent leurs demeures, ils surveillent leurs troupeaux et leurs champs, et en outre servent d’auxiliaires aux hommes à la chasse. Beaucoup de bédouins et d’habitants du désert n’auraient ni nourriture, ni subsistance sans les chiens. Dieu a dit : « Mangez de ce qu’ils prennent pour vous »160. Ceci prouve que Dieu les a créés pour nous être utiles. 201172 a. — Abū ‘Ubayda raconte que deux hommes partirent en voyage. L’un d’eux avait un chien. Ils furent assaillis par les brigands. L’un d’eux lutta jusqu’à ce que, vaincu, il fût pris et enterré de façon que sa tête sortît de terre. Alors arrivèrent les corbeaux et les oiseaux de proie qui planèrent autour de lui pour le mordre et lui arracher les yeux. Le chien qui accompagnait l’homme, voyant cela, ne cessa de creuser la terre pour le dégager jusqu’à ce qu’il l’eût sauvé. Or auparavant, son compagnon s’était enfui, sans lui apporter aucune aide. Un poète dit à ce propos : « Son
voisin,
son
compagnon
de
route
s’enfuit,
mais son chien creuse la terre pour le dégager, bien qu’il [l’eût frappé ». 57
202Aucun animal ne défend les siens comme le chien ; aucun ne leur est aussi dévoué // même s’ils le maltraitent, le chassent ou le frappent. 203Les
anecdotes
sur
les
chiens
sont
nombreuses
et
authentiques, mais nous ne voulons pas les multiplier.
161 Cf. Tarbī‘, ١٣٢ s. ḥinn.
162 Allusion au mauvais œil. 204Les chiens ne sauraient être autre chose qu’une communauté de fauves, ou qu’une communauté de génies. Ibn ‘Abbās a dit : « Les chiens sont une communauté de ḥinn-s » lesquels sont des génies inférieurs161. « S’ils se présentent à vous lorsque vous mangez, jetez-leur de la nourriture, car ils ont des âmes », c’està-dire des yeux avec lesquels ils frappent162. Nafs (âme) et ‘ayn (œil) sont synonymes. On dit : « Untel a été victime du nafs », c’est-à-dire du [mauvais] œil.
163 Cf. Tarbī‘, ١٩٧ s. misḫ. 205Ibn ‘Abbās a dit encore : « Les ğānn-s sont les avatars des génies tout comme les singes sont les avatars des Israélites163 ; il n’est pas impossible que les chiens soient dans le même cas ». 206172 b. — Ce sont là choses rebelles à la spéculation, à l’analogie et au raisonnement. On en revient toujours à leur sujet à ce qu’en a dit le Prophète, ou les gens qui l’ont vu et entendu. Ceux-là ne portent de jugement sur ces choses qu’en fonction de ce qu’ils lui ont entendu dire, ou de ce qu’ils ont entendu dire aux gens
qui
l’avaient
écouté,
ou
d’une
tradition
historique
authentique figurant dans les anciens livres. // Il ne s’agit pas là d’affaires touchant aux prescriptions juridiques ou aux traditions normatives, et cela ne nous entache ni ne nous diminue en rien
58
que les chiens soient des fauves, des génies ou le produit d’une métamorphose. 207Si ce sont des fauves, le Prophète a ordonné de tuer les noirs en disant « Ce sont des démons » parce que les noirs unis sont les plus nuisibles et les plus féroces, et ils attrapent la rage plus facilement que les autres. En outre, ils sont les moins utiles et les plus mauvais gardiens, les moins aptes à la chasse, les plus paresseux. Il a dit : « Ce sont des démons » pour dire : Ce sont les plus mauvais, tout comme on dit : « Untel est un démon » ou « C’est un vrai démon rebelle » ou « C’est un vrai lion de ‘Ād », ou « un vrai loup de ‘Ād », c’est-à-dire : il est comparable à… 208Si les chiens sont des génies ou sont le produit de leur métamorphose, il a voulu dire seulement que les noirs sont des démons, et qu’il faut les tuer parce qu’ils sont nuisibles. En effet, un démon est un génie rebelle ; les ḥinn-s sont faibles, [et en tout cas] inférieurs aux génies.
164 Cf. BUḪ. 59, 7 = HM II, 435 ; ḤAN. VI, 143, 330, etc… 209172 c. — S’il a ordonné de tuer les chiens de Médine, cela ne contredit nullement son autre propos : « Si les chiens ne constituaient pas une communauté, j’ordonnerais qu’on les tue ». En effet, à son époque, Médine était le lieu // où la révélation descendit par l’intermédiaire des anges ; or les anges ne pénètrent pas dans une maison où il y a un chien ou une représentation figurée, comme l’a dit le Prophète : d’après Muḥammad b. Ḫālid b. Ḥidāš — Salm b. Qutayba — Yūnus b. Abī Isḥāq — Muğāhid — Abū Hurayra, le Prophète a dit : « Gabriel me déclara : — Ce qui m’a empêché de venir à toi hier, c’est seulement que tu avais à la porte de ta maison un rideau avec des dessins figurés, et qu’il y avait avec toi dans la pièce un chien ; fais-le sortir ! »164. Or ce chien était un chiot appartenant à alḤasan et à al-Ḥusayn, [et qui se tenait] sous leur lit. Ceci prouve 59
que les anges ont horreur des chiens dans les grandes villes comme ils en ont horreur dans les maisons. Le Prophète ordonna donc de les tuer, ou d’en réduire le nombre dans les endroits proches de [Médine], alors qu’il s’abstint de donner cet ordre pour les endroits éloignés du lieu où descendaient les anges, et de l’endroit de la révélation. 210Abū Muḥammad dit : Le mot naḍd veut dire « ht », car on entasse (naḍada) du linge dessus. ***
XXV. — EXEMPLE D’UN ḤADĪṮ DONT LE DÉBUT INFIRME LA FIN 165 BUḪ. 28, 7 = HM I, 588 ; 59, 16 = HM II, 456 ; ḤAN. I, 257 ; II, 52 ; III, 3. — Il est à noter que (...) 211173. — Proposition : Vous enseignez que le Prophète a dit : « Il est cinq animaux pervers (fāsiq) qu’on peut tuer en territoire sacré ou non : le corbeau, le vautour, le chien, le serpent et la souris »165. 212S’il avait dit : « Tuez ces cinq animaux, et cinq autres avec », // cela aurait pu passer en tant que pratique rituelle. Mais les tuer sous prétexte qu’ils sont pervers est illicite, car la perversité ni la rectitude ne peuvent s’appliquer à aucun de ces objets ; les petits carnassiers (hawāmm), les fauves ou les oiseaux ne sont ni des démons, ni des génies, ni des humains, auxquels on peut seuls appliquer les termes de perversité et de rectitude.
166 Coran, XXVII, 20-21. 213174. — Réponse : Nous prétendons que quiconque croit que les reptiles, les fauves et les oiseaux sont en dehors de toute obéissance ou désobéissance est en contradiction avec le Coran, les prophètes et les envoyés de Dieu, ainsi qu’avec les Livres divins antérieurs. En effet, Dieu nous enseigne que Son prophète 60
Salomon inspectait les oiseaux : « Il dit : — Pourquoi ne vois-je pas la huppe ? Serait-elle absente ? Certes, je la tourmenterai cruellement ou l’egorgerai à moins qu’elle ne m’apporte une justification explicite ! »166, c’est-à-dire : une excuse valable et une justification de son absence. Il n’était pas licite qu’il la punît, sauf en cas de péché ou de désobéissance. Or les péchés et les désobéissances constituent justement des « perversions » (fusūq). Quiconque peut à juste titre être qualifié de désobéissant peut donc être aussi bien appelé pervers.
167 Texte : an lā ; Vulgate : allā. BAYḌĀWĪ, 502 : al-Kisā’i et Ya‘qūb b. Isḥāq lisent alā, avec le sen (...)
168 Coran, XXVII, 22-25. 214Puis Dieu poursuit l’histoire de la huppe, après qu’elle se fût excusée auprès de Salomon en ces termes : « J’embrasse en ma connaissance ce que tu n’embrasses point, et je t’apporte sur les Saba’ une nouvelle sûre. J’ai trouvé qu’une femme est leur reine, que de toute chose elle a été comblée // et qu’elle a un trône magnifique. Je l’ai trouvée, elle et son peuple, se prosternant devant le soleil, à l’exclusion de Dieu. Le Démon a paré pour eux leurs actions de fausses apparences, les a détournés du Chemin, et ils ne sont pas dans la bonne direction, de sorte qu’ils ne167 se prosternent pas devant Dieu qui fait sortir ce qui est latent, dans le ciel et sur la terre, et qui sait ce que vous cachez et ce que vous divulguez ! »168. Si cela n’était qu’un propos de sage, ou même de prophète, ce serait [déja] une belle parole, une exhortation efficace et une preuve évidente. Comment dès lors les termes d’obéissant et de désobéissant, de pervers ou de bien guidé ne pourraient-ils être appliqués à ces objets ?
169 Coran, XXVII, 16.
170 Coran, XXVII, 18. 61
171 Coran, XVII, 44. 215174 a. — Dieu a en outre fait parler les fourmis dans la même sourate : « Salomon hérita de David et dit : — Hommes, on nous a enseigné le langage des oiseaux »169 — il fait ici parler les oiseaux, tout comme les hommes — puis plus loin : « Quand enfin elles arrivèrent à la vallée des fourmis, l’une d’elles dit : — O Fourmis… » etc.170, et les fourmis de parler comme les humains. Il dit encore : « Il n’est aucune chose qui n’exalte Sa louange, mais vous ne comprenez pas leur exaltation ( tasbīḥ) »171, et ailleurs : « O montagnes, reprenez avec lui (ses hymnes) et vous aussi, oiseaux ! »,
où awwibī (reprenez
ses
hymnes)
équivaut
à sabbiḥī (exaltez).
172 C’est la trad. à peine abrégée de Gen. VIII, 6-12. Seul le dernier trait n’est pas biblique. Sur ce (...) 216174 b. — Abū Muḥammad dit : J’ai lu dans la Thora que Noé, au bout de quarante jours, ouvrit la lucarne qu’il avait faite à l’Arche // puis lâcha le corbeau, qui sortit et ne revint pas. Puis l’eau baissa sur la face de la terre, et il lâcha la colombe à plusieurs reprises. Elle revint le soir, ayant dans son bec une feuille d’olivier. Il sut alors que l’eau avait diminué sur la terre. Alors Noé invoqua Dieu pour qu’il mît un collier au cou de la colombe, et lui colorât les pattes172.
173 Texte : ḥīna tawarraka l-nahār. L’expression est si insolite qu’on est en droit de suspecter le tex (...)
174 Gen. II, 16-17 puis III, 1-19. On a indiqué les principales omissions par des points de suspension. (...) 217Abū Muḥammad dit : J’ai encore lu dans la Thora que Dieu dit à Adam après l’avoir créé : « Mange ce que tu veux dans les arbres du Jardin, mais ne mange pas de l’arbre de la connaissance du bien et du mal, car le jour où tu en mangeras, tu mourras… » 62
c’est-à-dire : Tu recevras la condition des mortels. « Or le serpent était le plus rusé de tous les animaux terrestres. Il dit à la femme… : — Vous ne mourrez point si vous en mangez, mais vos yeux s’ouvriront et vous serez comme des dieux, connaissant le bien et le mal… La femme prit de son fruit et en mangea ; elle en fit manger à son époux… Leurs yeux s’ouvrirent, ils connurent qu’ils étaient nus, et ayant réuni des feuilles de figuier, ils en firent des pagnes (izār). Alors ils entendirent la voix de Dieu tandis que le jour tombait173 ; Adam et sa femme se cachèrent dans les arbres du Jardin. Mais Dieu les appela et Adam dit : — J’ai entendu Ta voix dans // le jardin, et je me suis vu nu, et je me suis caché à Ta vue. Dieu dit : — Qui t’a appris que tu es nu ? Astu mangé de l’arbre que je t’avais défendu ? Il dit : — C’est la femme qui m’en a donné à manger !… La femme dit que le serpent l’y avait contrainte. Dieu dit au serpent : — Puisque tu as fait cela, tu seras maudit… Tu marcheras sur ton ventre et tu mangeras de la poussière… Je mettrai inimitié entre toi, la femme, et ses enfants : ils t’écraseront la tête et toi, tu les mordras au talon. Il dit à la femme : — Quant à toi, j’augmenterai tes souffrances et tes grossesses ; tu enfanteras dans la douleur ; tu viendras à ton mari, mais il dominera sur toi. Il dit à Adam : — … Maudit sera le sol à cause de toi. Il te produira des ronces et des épines, et tu en tireras ta nourriture à force de peine et à la sueur de ton front, et tu reviendras à la poussière, car tu es poussière »174. 218174 c. — Abū Muḥammad dit : Qui ne voit que le serpent s’est montré tyrannique et perfide, si bien que Dieu l’a maudit, a modifié sa constitution, et a fait de la terre sa subsistance ? Ne peut-on à bon droit // qualifier cet animal de pervers et de désobéissant ? De même le corbeau, qui désobéit à Noé ?
175 Cf. Tarbī‘, 174 s. ‘anqā’. Tāğ, I, 410, est le seul à rapporter une opinion intéressante… et courag (...) 63
219Les partisans de la spéculation pensent qu’il fut nommé « corbeau de la séparation » (ġurāb al-bayn) uniquement parce qu’il abandonna Noé et s’en alla. C’est pourquoi ils voient en lui un mauvais présage, et prétendent que son croassement annonce la séparation et Péloignement ; ils font dériver de son nom le mot ġurba (l’absence). Ils disent : « L’absence (ġurba) l’a jeté au loin » ; ou « Voici des moutons étranges (muġrib) », ou « un griffon étrange (‘anqa’ muġrib) »175, c’est-à-dire : venant de loin, pour désigner l’aigle. Tout cela dériverait du nom du corbeau, parce qu’il abandonna Noé et s’éloigna de lui. 220174 d. — Abū Muḥammad dit : J’en veux pour preuve aussi le ḥadīṯ de Muḥammad b. Sinān al-‘Awfī — ‘Abd Allāh b. al-Ḥāriṯ b. Abzā al-Makkī — sa mère Rā’iṭa bint Muslim — son père : « J’étais avec le Prophète à Ḥunayn, et il me dit : — Quel est ton nom ? — Ġurāb. — Tu seras désormais Muslim ! » Il ne voulait pas qu’il s’appelât Gurāb, parce que le corbeau (ġurāb) est pervers, et désobéissant. Il l’appela Muslim, qui était dans son esprit l’antonyme de Ġurāb, car le corbeau est désobéissant, et le Musulman (Muslim) est soumis : ce mot dérive en effet de l’istislām, qui signifie : « action de se laisser guider et d’obéir ». 221Le Prophète aimait les beaux noms et détestait les noms péjoratifs, // comme nous l’avons dit plus haut.
176 Coran, XVIII, 50.
177 Ibn Dāya semble être pour Ibn Qutayba de la même racine que dā’. Or les dictionnaires ne rangent pa (...) 222Mais pour le cas où nous renoncerions à la conception des Musulmans, qui appliquent l’obéissance et la désobéissance au serpent, au corbeau ou à la souris, pour nous en tenir aux ressources de la langue et du vocabulaire arabes, nous pourrions rappeler que fisq est [à l’origine] synonyme de ḫurūğ (sortie) 64
effectuée contre quelqu’un pour chercher à lui nuire. On dit : « La datte fraîche fasaqat » lorsqu’elle « sort » de son enveloppe. Tout ce qui « sort » de quelque chose peut être appelé fāsiq. Dieu a dit : « …Iblīs était un génie qui était sorti de l’ordre de Dieu »176, c’est-à-dire : qui s’est dégagé de l’ordre de son Seigneur, et de l’obéissance qu’il Lui devait. C’est ainsi que le serpent sort de son trou pour nuire aux hommes, en gâtant leur nourriture, en les mordant, en buvant leur boisson et en y déversant son venin. C’est ainsi que la souris sort de son trou pour gâter leurs aliments, pour grignoter leurs vêtements, et pour mettre le feu à leur maison avec la mèche de la lampe : aucune des bestioles de la terre n’est plus nuisible que la souris. Quant au corbeau, il se jette sur le mal du chameau appelé dabar (abcès) et le becquette jusqu’à ce qu’il en crève ; c’est pourquoi les Arabes l’appellent Ibn // Dāya177 ; il ne fait rien de bon et dérobe la nourriture des hommes. Le chien, de son côté, blesse et mord, tout comme les bêtes féroces. Tous ces animaux peuvent donc être qualifiés de pervers, car ils « sortent » contre les hommes, et leur nuisent par leurs méfaits. 223Ils étaient loin de la solution, ceux qui répugnaient à appliquer l’obéissance ou la désobéissance à l’un ou l’autre de ces animaux ! ***
XXVI. — EXEMPLE DE ḤADĪṮ INFIRMÉ PAR LA SPÉCULATION 178 BUḪ. 34, 14, 33, 88 = HM II, 10, 18, 44 ; 48, 2, 5 = HM II, 164, 165, etc… ḤAN. I, 300 ; VI, 42, 16 (...) 179 bayyāḍ : terres « blanches », c. à.d. incultes. Cf. Tāğ, V, 15 : arḍ bayḍā’≠ sawdā’ (qui porte des (...)
65
224175. — Proposition : Vous enseignez que lorsque le Prophète mourut, il avait mis sa cotte de mailles en gage chez un Juif pour quelques mesures d’orge178. Grand Dieu ! n’y avait-il donc parmi les Musulmans aucun remède, aucun bienfaiteur ou aucun prêteur ? Dieu avait pourtant multiplié leurs richesses ; Il leur avait permis de conquérir bien des pays, et ils bénéficiaient du revenu des impôts des confins du Yémen jusqu’aux confins du Baḥrayn et du ‘Umān, sans compter les terres blanches179 du Nağd et du Ḥiğāz ; il y avait en outre la fortune personnelle des Compagnons comme ‘Uṯmān, ‘Abd al-Raḥmān, et tant d’autres. Où étaient-ils donc ?
180 ḤAN. III, 316, 353, etc. ; cf. III, 292, 304, 318, 335, etc…
181 La ‘umrat al-qaḍā’ (de la convention) eut lieu un an après la tentative manquée de Ḥudaybiyya.
182 Ḥawā’it : vergers, enclos plantés de palmiers ; Lisān, IX, 149. 225C’est là un mensonge, et celui qui l’a proféré voulait louer l’ascétisme et la pauvreté du Prophète. Ce n’est pas ainsi qu’on loue les prophètes ! Comment pourrait-il avoir faim, celui qui équipe des armées, qui sacrifie des centaines de victimes en offrande, et auquel Dieu a accordé à titre de butin des terres comme Fadak et autres ? Mālik b. Anas rapporte // d’après Abū lZuhayr — Ğābir : Le Prophète égorgea à Ḥudaybiyya soixante-dix chamelles, chacune au nom de sept personnes180. Au cours de la ‘umrat al-qaḍā’181, en compensation de la ‘umra que les Polythéistes l’avaient empêché d’accomplir, il offrit soixante chamelles. Comment aurait-il pu avoir faim, celui qui érigea en bien de mainmorte sept vergers dans la ‘Āliya182, au point de mettre en gage sa cotte de mailles, ne trouvant personne pour lui prêter quelques mesures d’orge ? 66
183 ḤAN. VI, 293, 314. 226176. — Réponse : Nous prétendons qu’il n’y a pas là de quoi jeter les hauts cris ou s’offusquer, car le Prophète se privait de la meilleure part de ses biens, et la distribuait aux plus méritants de ses Compagnons, aux pauvres et aux malheureux, ainsi que lors des périodes néfastes aux Musulmans. Il ne repoussait jamais un mendiant, et lorsque l’occasion se présentait, il ne lésinait pas pour donner. Il n’entassait pas les dirhems. Umm Salama lui dit un jour : « O Prophète, je te vois le visage défait ; serais-tu malade ? » Il répondit : « Non ! C’est à cause des sept dinars qu’on nous a apportés hier. Je les ai oubliés au coin du fit // et j’ai passé la nuit sans les distribuer ! »183.
184 Cf. BUḪ. 70, 23 = HM III, 666.
185 Coran, LIX, 9. 227176 a. — ‘Ā’iša disait en le pleurant : « Par mon père ! Il n’a jamais dormi dans un lit bien doux, et il ne s’est jamais rassasié de pain d’orge ! »184. Cette phrase ne saurait s’expliquer que d’une des deux manières suivantes : Ou bien il distribuait ce qu’il possédait au point de n’avoir plus de quoi manger à sa faim — c’était là une de ses qualités ; Dieu ne dit-Il pas : « A eux-mêmes ils les préféreront, même si la pénurie existe chez eux »185 —, ou bien il ne mangeait jamais de pain d’orge ni autre chose à satiété, parce qu’il détestait avoir trop mangé : beaucoup d’hommes vertueux et de muğtakid-s détestaient cela, et il est le plus méritant et le plus éminent d’entre eux.
186 ḤAN. IV, 132. 228176 b. — J’ai entendu Abū l-Ḫaṭṭāb — Abū ‘Āṣim ‘Ubayd Allāh b. ‘Abd Allāh — al-Muḥarrar b. Hārūn — Abū Yazīd al-Madanī — ‘Abd al-Raḥmān b. al-Muraqqi‘ : Le Prophète a dit : « Dieu n’a 67
créé aucun récipient plus plein de mal // que le ventre. Si c’est indispensable, mettez-y un tiers de nourriture, un tiers de boisson, et un tiers de vent »186. 229Mālik
b.
Dīnār
a
dit :
« Le
Croyant
est
comme
la
brebis ma’būra », c’est-à-dire celle qui a avalé une aiguille dans son fourrage, et à laquelle le peu qu’elle en mange ne profite plus guère.
187 Lisān, XVI, 239 : « ce n’est pas un mot arabe ». 230Comme
on
parlait
à
Ibn
‘Umar
du
remède
gastrique
dit ğawrišn187, il dit : « Qu’ai-je à en faire, puisque je n’ai pas mangé à ma faim depuis tant de temps ? » Il voulait dire qu’il avait négligé de s’alimenter alors qu’il en avait grand besoin. 231Al-Ḥasan dit à un homme qui entrait auprès de lui en mangeant : « Mange ! » L’autre répondit : « J’ai fini ! Je n’ai plus envie de rien ! » Al-Ḥasan s’écria : « Grand Dieu ! Comment peuton manger jusqu’à ne plus avoir envie de rien ? ». 232Mālik b. Dīnār — ou un autre — a dit : « Je voudrais pouvoir me sustenter en suçant des cailloux ! J’ai honte que Dieu me voie entrer si souvent au cabinet ! ».
188 C. à. d. des aliments dépourvus de graisse. 233Bakr b. ‘Abd Allāh a dit : « Je n’ai trouvé de goût à la vie qu’à partir du moment où j’ai remplacé la satiété par la faim, où j’ai cessé de mettre des vêtements dont j’étais l’esclave, et où je me suis mis à manger des aliments qui ne m’obligeaient pas à me laver les mains ! »188. // 234‘Ā’iša disait donc en le pleurant : « Par mon père, il ne se rassasiait jamais de pain d’orge ». C’est qu’il lui arrivait de manger du pain de froment ou d’orge, mais sans s’en rassasier, pour l’une ou l’autre des raisons exposées plus haut. Et si elle 68
citait en exemple la nourriture la plus grossière, c’était pour laisser entendre que si le Prophète ne s’en rassasiait pas, à plus forte raison ne l’eût-il pas fait avec autre chose.
189 ṣināb : condiment composé de moutarde et de raisins secs ; Lisān, II, 19.
190 Coran, XLVI, 20. 235‘Umar a dit : « Si je voulais, je me ferais apporter du rôti, du ṣināb189, de la poitrine et de la bosse ! » Il dit encore : « Si je voulais, je me ferais apporter une jeune bête qu’on égorgerait, de la semoule qu’on bluterait, du raisin sec qu’on ferait revenir dans la graisse jusqu’à ce que cela ressemblât à du sang de gazelle, et bien d’autres choses encore. Mais Dieu a dit à des gens : — Vous avez dissipé // vos biens excellents durant votre vie terrestre et en avez joui. Aujourd’hui, vous en êtes récompensés par le tourment de l’humiliation ! »190. 236176 c. — Le riche avare peut être victime de circonstances où il n’a à sa disposition aucune richesse, bien qu’il ait fermes, meubles et créances, et où il lui faut emprunter et engager. A plus forte raison est-ce le cas de l’homme auquel il ne reste pas un dirhem, et auquel ses libéralités et ses malheurs n’ont pas laissé de quoi vivre. Comment les Musulmans et ses Compagnons aisés auraient-ils pu savoir qu’il manquait de nourriture, puisqu’il ne le leur disait pas et ne les importunait pas ? Nous constatons parfois ce phénomène chez nous-mêmes ou chez nos semblables : on voit des gens dans le besoin ne pas importuner leurs enfants, leur famille ou leurs voisins, et vendre ce qu’ils ont de précieux ou emprunter à un étranger ou à quelqu’un qui ne leur est rien.
191 ḤAN. I, 21. 237176 d. — Le Prophète engagea sa cotte de mailles chez un Juif pour la simple raison qu’à cette époque, c’étaient les Juifs qui 69
vendaient la nourriture : les Musulmans n’en vendaient pas parce que le Prophète leur avait interdit d’accaparer191.
192 Al-A‘maš est le transmetteur du ḥadīṯ en question. Il figure dans les isnād-s, aux réf. de la note (...) 238Que lui reprochent-ils donc ? Pourquoi s’étonnent-ils à ce point, et pourquoi un hérétique accuse-t-il // al-A‘maš de mensonge à ce propos ?192. ***
XXVII. — EXEMPLE D’UN ḤADĪṮ INFIRMÉ PAR LE RAISONNEMENT ANALOGIQUE 193 ḤAN. II, 187. 239177. — Proposition : Vous enseignez que le Prophète ordonna à ‘Amr b. al-‘Āṣ de rendre un jugement, et que ‘Amr lui dit : « Je jugerais en ta présence, ô Prophète ? » Le Prophète répondit : « Fais-le ! Si tu juges sainement, il te sera compté dix bonnes actions ; si tu te trompes, il t’en sera compté une seule ! »193. 240Une telle sentence ne saurait être imputée à Dieu. En effet, l’effort personnel (iğtihād) de ‘Amr pouvait aussi bien aboutir à un jugement sain qu’à un jugement erroné. Il n’était pas tenu de juger sainement, mais seulement de s’y efforcer. Le travail, la résolution, le zèle et la peine qui auraient été son lot pour juger sainement ne différaient en rien de ce qu’un autre aurait enduré pour aboutir à un jugement erroné. Quel sens cela a-t-il de lui compter dix bonnes actions dans un cas, et une seule dans l’autre ? 241178. — Réponse : Nous prétendons que l’effort personnel pour aboutir à une réussite n’est pas identique à l’effort personnel conduisant à l’échec. Si ce principe était valable, les Juifs, les Chrétiens, les Mages et les Musulmans se vaudraient. Les partisans des diverses doctrines auraient droit à la même 70
récompense pour leur effort personnel, et leurs personnes comme leurs doctrines se vaudraient ; leur raison // les persuaderait qu’ils sont dans le vrai, et que leurs adversaires sont dans l’erreur. 242Abū Muḥammad dit : Mais nous affirmons que derrière l’effort personnel de chaque individu se cache l’assistance de Dieu. Il y aurait beaucoup à dire sur ce sujet, mais ce n’en est pas le lieu. 243Supposons qu’un individu envoie deux messagers à la recherche d’une bête égarée lui appartenant, en leur ordonnant de faire effort et de mettre tout en œuvre pour la retrouver, et en leur promettant une récompense en cas de réussite. L’un d’eux parcourt cinquante parasanges à sa recherche, se fatigue, veille et revient bredouille ; l’autre marche tranquillement un parasange, et revient avec l’animal. Celui qui a retrouvé l’animal mérite la plus grosse récompense et le cadeau le plus précieux, bien que l’autre ait enduré plus de peine et de difficulté que lui. A plus forte raison s’ils ont déployé le même effort. Or il arrive que les actes des hommes se valent, mais Dieu n’en donne pas moins la préférence à qui Il veut. En effet, Il n’a de dette envers personne, et personne n’a de droits sur Lui.
194 Matt. XX, 1-16. La première moitié de la citation est rigoureusement littérale. Les points de suspe (...) 244178 a. — Abū Muḥammad dit : J’ai lu dans l’Évangile que le Messie // dit aux Apôtres : « Il en est du Royaume des cieux comme d’un homme qui sortit avant l’aube afin de louer des ouvriers pour sa vigne. Il convint avec eux d’un denier par jour et les envoya à sa vigne. Vers la troisième heure, quand il sortit…, il en vit d’autres qui restaient oisifs sur la place et leur dit : — Allez vous aussi à ma vigne, et ce qui sera juste, je vous le donnerai. Ils y allèrent. Il sortit encore à la sixième, à la neuvième… et à la onzième heure et fit de même… Le soir venu, le maître dit à son 71
intendant : — Donne aux ouvriers leur salaire ; commence par les derniers jusqu’à ce que tu arrives au premier. Il les paya et leur donna même salaire. Lorsqu’ils eurent perçu leur dû, ils furent en colère contre le maître de la vigne et dirent : — Ces derniers ont travaillé une seule heure, et tu leur donnes même salaire qu’à nous ? Il dit : — Je ne vous ai pas fait de tort. Je vous ai donné le prix convenu et je me suis montré généreux pour ceux-là. L’argent est à moi, j’en fais ce que je veux. Ainsi, les premiers seront les derniers et les derniers seront les premiers »194. ***
XXVIII. — EXEMPLE DE DEUX ḤADĪṮ-S CONTRADICTOIRES 195 ḤAN. I, 279, 310 ; II, 234, etc… 245179. — Proposition : Vous enseignez que le Prophète a dit : « Quiconque médite une bonne action et ne l’exécute pas se verra compter une seule bonne action. // S’il l’exécute, il s’en verra compter dix »195.
196 Il paraît s’agir d’une interprétation un peu sollicitée de la tradition célèbre : « Les actes ne va (...) 246D’autre part vous enseignez que l’intention, chez l’homme, vaut mieux que l’acte196. 247Donc, dans le premier ḥadīṯ, l’intention vaut moins que l’acte, et dans le second, elle vaut mieux. Il y a contradiction et divergence. 248180. — Nous prétendons qu’il n’y a là aucune contradiction, grâce à Dieu. Celui qui médite une bonne action sans l’accomplir est à l’opposite de celui qui l’accomplit, car celui qui médite n’agit pas, tandis que celui qui accomplit l’acte n’agit pas sans l’avoir médité au préalable.
72
249Quant au ḥadīṯ du Prophète : « L’intention vaut mieux que l’acte », [on peut en dire] que Dieu accorde au Croyant l’éternité du paradis pour ses intentions, et non pour ses actes. Si le Croyant était récompensé pour ses actes, ceci n’impliquerait pas l’éternité, car on n’agit que pendant quelques années en nombre limité, et la récompense ne saurait intervenir que pendant une période analogue ou un multiple de [cette période]. Dieu ne saurait accorder l’Éternité que pour les intentions, car s’il avait fait vivre le Croyant éternellement, celui-ci aurait nourri éternellement l’intention d’obéir à Dieu. Puisqu’il le fait mourir sans préjudice de son intention, c’est qu’il le récompense pour cette intention. 250De même, en ce qui concerne l’infidèle, son intention est plus mauvaise que ses actes, car si Dieu l’avait fait vivre éternellement, il aurait nourri éternellement l’intention d’être infidèle. Puisque Dieu l’a fait mourir sans préjudice de l’intention, c’est qu’il le récompense pour cette intention. ***
XXIX. — EXEMPLE DE ḤADĪṮ INFIRMÉ PAR LE CORAN ET LA SPÉCULATION 197 BUḪ. 64, 8, 12 = HM III, 76, 77, 90 ; ḤAN. I, 26 ; II, 31, 131 ; III, 104, 145, etc... 251181. — Proposition : Vous rapportez que // le Prophète se mit debout au bord de la fosse de Badr et dit : « ‘Utba b. Rabī‘a, Šayba b. Rabī‘a, Untel et Untel, voyez-vous [maintenant] si ce que votre Seigneur vous a promis est vrai ? Pour nous, nous voyons que ce que notre Seigneur nous a promis est vrai ! » Comme on lui faisait une observation, il répliqua : « Par Celui qui détient mon âme en Sa main, en vérité ils entendent comme vous entendez ! »197.
198 Coran, XXXV, 22.
199 Coran, XXVII, 80 ; cf. XXX, 52. 73
252Or Dieu a dit : « Tu ne peux faire entendre ceux qui sont dans les tombes ! »198 ; Il a dit ailleurs : « Tu ne saurais faire entendre les morts ! »199.
200 On n’a pas retrouvé cette expression. 253D’autre part, vous enseignez que le Prophète a dit le jour des Factions : « Seigneur, Dieu des corps périssables et des esprits consumables… ! »200. 254Vous dites aussi qu’on demanda à Ibn ‘Abbās où passent les esprits lorsqu’ils se séparent des corps, et où vont les corps lorsqu’ils se consument. Il répondit : « Où va la [lumière de la] lampe, lorsqu’elle s’éteint ? Où va le regard lorsqu’on devient aveugle ? Où va la chair de l’homme en bonne santé lorsqu’il tombe malade ? » On lui répondit alors : « Il n’y a pas d’où ! » — « Eh bien ! il en est de même pour les esprits qui se séparent des corps ! ».
201 P. ex. BUḪ. 3, 24 = HM III, 46 ; 16, 7 = III, 345 ; ḤAN. I, 26, etc… 255Tout cela ne ressemble guère au propos du Prophète : « Ils entendent comme vous entendez ! » ni à tout ce que vous rapportez au sujet du châtiment de la tombe201. // 256182. — Réponse : Nous prétendons que s’il est parfaitement conforme à la raison, à la spéculation, au Coran et à la tradition historique que Dieu ressuscite ceux qui sont dans la tombe après qu’ils auront été des corps consumés et des os vermoulus, il est tout aussi conforme à la raison, à la spéculation, au Coran et à la tradition historique qu’ils soient tourmentés après la mort sur le barzaḫ.
202 Coran, XL, 46.
203 Coran, III, 169-170. 74
204 Yataṯannawn : se laissant plier. 257Pour ce qui est du Coran, Dieu a dit : « Au Feu ils seront offerts matin et soir, et au jour où se dressera l’Heure, [on criera] : — Introduisez
la
famille
de
Pharaon
au
plus
intense
tourment ! »202. Il a dit ailleurs : « Et ne crois point que sont morts ceux qui ont été tués dans le chemin de Dieu ! Au contraire, ils sont vivants auprès de leur Seigneur, pourvus de leur subsistance, joyeux de la faveur que Dieu leur a accordée et, à l’égard de ceux qui, après eux, ne les ont pas encore rejoints, ils se réjouissent à l’idée que ceux-ci n’éprouveront aucune crainte et ne seront pas attristés »203. Il s’agit d’une faveur que Dieu a accordée aux martyrs de Badr — qu’il les ait en Sa miséricorde ! — lesquels, lorsqu’on creusa le canal, furent exhumés dans toute leur fraîcheur, les membres souples204, si bien que // quelqu’un dit : « Nous ne nierons plus rien après cela ! ». 258182 a. — J’ai entendu Muḥammad b. ‘Ubayd — Ibn ‘Uyayna — Abū l-Zubayr — Ğābir rapporter : Lorsque Mu‘āwiya voulut canaliser la source qu’il avait creusée — Sufyān affirme qu’il s’agit du ‘Ayn Abī Ziyād, à Médine — on invita ceux des Médinois qui avaient eu un parent tué [à Badr] à emporter leurs morts. Ğābir dit : Alors on les fit venir, et on exhuma les cadavres. La pelle ayant heurté l’un d’eux, il sortit du sang de la plaie. C’est alors qu’Abū Sa‘īd al-Ḫidrī déclara : « Personne ne peut plus rien nier après cela ! ». 259‘Ā’iša bint Ṭalḥa vit en rêve son père qui lui dit : « Ma petite fille, ôte-moi de ce lieu, car je souffre de l’humidité ! » Elle l’exhuma, environ trente ans après sa mort, et l’enleva de cet endroit humide. Il était dans toute sa fraîcheur, et rien n’était altéré en lui. Il fut enterré aux Hiğriyyīn, à Basra. Ce fut ‘Abd alRaḥmān b. Salama al-Taymī qui se chargea de l’exhumation.
205 Allusion à Coran III, 169-170, déjà cité. 75
260Ce sont là des faits si connus qu’ils valent des témoignages visuels. // Dès lors qu’il est possible que ces martyrs soient « vivants auprès de leur Seigneur, pourvus de leur subsistance », qu’ils soient « joyeux » et « se réjouissent »205, pourquoi seraitil impossible que leurs ennemis qui les ont combattus et tués fussent vivants et tourmentés en enfer ? Et s’il est possible qu’ils soient vivants, pourquoi serait-il impossible qu’ils fussent en mesure d’entendre ? Notre Prophète l’a dit, et il a nécessairement raison.
206 BUḪ. 62, 10 = HM II, 611 ; cf. ḤAN. II, 413 ; TIR. 46, 29. 261182 b. — Pour ce qui est de la tradition historique, on peut rappeler que le Prophète a dit à propos de Ğa‘far b. Abī Ṭālib qu’il volait au paradis avec les anges ; il l’a appelé : « L’homme aux deux ailes »206.
207 ḤAN. II, 288 ; BUḪ. 80, 38 = HM IV, 257.
208 BUḪ. 96, 26 = HM IV, 495 ; ḤAN. II, 185, 288, 414, etc…
209 BUḪ. 56, 25 = HM IV, 293 ; 80, 37 = HM IV, 256 ; ḤAN. II, 185, 288 etc… 262On connaît aussi toutes les traditions rapportées au sujet de Munkar et de Nakīr, du tourment de la tombe, au sujet de l’invocation : « Je me réfugie auprès de Toi contre la séduction de la vie et de la mort »207 ou « Je me réfugie auprès de Toi contre le tourment de la tombe »208 et « contre la séduction de l’Antéchrist »209. Toutes ces traditions sont authentiques, et il n’est pas permis de s’interroger à leur sujet. Si de telles traditions sont fausses, rien n’est vrai dans notre religion. Mais rien n’est plus vrai que les traditions historiques émanant de notre Prophète.
210 Coran, XXXV, 19 = XL, 58 ; cf. VI, 50 = XIII, 16. 76
211 Coran, XIII, 16 = XXXV, 20.
212 Coran, XXXV, 21.
213 Coran, XXXV, 22. 263182 c. — Quant aux versets : « Tu ne peux faire entendre ceux qui sont dans les tombes » et « Tu ne saurais faire entendre les morts », ils n’ont rien à voir dans cette affaire, car le mot « morts » désigne ici les « ignorants », qui sont [déjà] dans la tombe. Le sens est : Tu serais incapable // de faire comprendre quoi que ce soit aux gens que Dieu a créés ignorants, et tu ne saurais faire entendre ceux que Dieu a créés sourds à l’égard de la bonne doctrine. Au sein même de ces versets, nous trouvons la preuve de ce que nous avançons, car Dieu a dit : « L’aveugle ne saurait être égalé au clairvoyant »210 ; l’aveugle désigne ici l’infidèle, et le clairvoyant le croyant. Dans le verset : « Ni les ténèbres à la lumière »211, Il veut dire : Ni l’infidélité à la foi. Dans : « Ni l’ombre à la chaleur »212, il veut dire : Ni le paradis à l’enfer.
Dans :
« Les
morts
ne
sauraient
être
égalés
aux
vivants »213 il fait allusion à ceux qui comprennent et aux ignares. Il dit ensuite : « Dieu fait entendre qui Il veut, mais tu ne peux faire entendre ceux qui sont dans les tombes », ce qui signifie : « Tu ne peux faire entendre les ignares, qui sont tels des morts dans leurs tombes ». On trouve de nombreux passages analogues dans le Coran. 264[En tout cas], les « morts » dont il parlait par métaphore pour les « ignorants » ne sont en aucun cas les martyrs de Badr, et nos adversaires sont mal venus d’en tirer argument contre nous : ces martyrs sont vivants, comme Dieu le dit. 265182 d. — Lorsqu’il disait : « Seigneur, Dieu des corps périssables et des esprits consumables », il parlait de choses connues de chacun et constatables de visu. Lorsque les hommes 77
perdent quelque chose, // cette chose est pour eux anéantie et disparue. Mais pour Dieu, elle ne disparaît pas : Il sait ce qu’elle est devenue. 266On sait qu’un homme gros et gras lorsqu’il est en bonne santé peut perdre la moitié ou les deux tiers de son poids après avoir été malade un ou deux jours ; nous ne savons pas où est allée toute cette chair. Pour nous, elle est disparue, consumée, mais Dieu, Lui, sait où elle est allée et ce qu’elle est devenue. Si on laisse séjourner de l’eau dans un grand récipient de verre plusieurs jours, l’eau disparaît en partie, ou en totalité si l’on prolonge l’expérience, à cause de la chaleur. Or le verre ne saurait absorber l’eau, car il n’est pas poreux. Nous ne savons pas où est allé le contenu du récipient. Dieu, Lui, le sait. Si nous soufflons sur une lampe, sa lumière s’éteint et disparaît. Pour nous, elle est évanouie, et nous ne savons pas où elle est partie. Mais Dieu sait où et comment elle est partie.
214 ḥawṣāla, pl. ḥawāṣil, « gésier ». Lisān, XIII, 163 = Tāğ, VII, 279. Voir ḤAN. I, 266.
215 ‘illiyūn, Tāğ, X, 251. Voir aussi BLACHÈRE, trad., p. 642.
216 Lisān, XVII, 65 ; Tāğ, X, 251. D’après Tāğ, ‘illiyyūn et siğğīn se font vis-à-vis.
217 ḤAN. III, 455, 456. 267Il en est de même pour les esprits : pour nous, ils se consument, mais comme l’a dit le Prophète, ils sont « dans le jabot d’oiseaux verts »214, ou bien ils se trouvent « dans les régions supérieures du ciel »215, ou « dans la vallée de l’enfer »216, ou encore « ils planent dans l’air »217, etc… // *** XXX. — EXEMPLE DE DEUX ḤADĪṮ-S CONTRADICTOIRES 78
218 Cf. ḤAN. III, 24, 34, 36 ; IV, 118, 121, etc…
219 Cf. ḤAN. III, 399 (première partie seulement). 268183. — Proposition : Vous enseignez que le Prophète a dit : « Que les meilleurs d’entre vous vous servent d’imām-s : ils seront votre délégation vers le paradis »218 ; « Votre Prière est votre offrande : ne mettez en avant de vous que les meilleurs d’entre vous »219.
220 Cf. BUḪ. 10, 56 = I, 235 ; ḤAN. V, 159. 269D’autre part, vous dites : « Faites la Prière derrière n’importe quel individu, qu’il soit homme de bien ou impie »220. Il y a là divergence et contradiction. 270184. — Réponse : Nous affirmons qu’il n’y a là, grâce à Dieu, ni divergence, ni contradiction. Le premier ḥadīṯ comme le second doivent être employés en temps et lieu. Si chacun d’eux est considéré dans son contexte, il n’y a plus de contradiction.
221 Cf. ḤAN. III, 24, 34, 84, 163, etc… 271Lorsqu’il disait : « Que les meilleurs d’entre vous vous servent d’imām-s, ils seront votre délégation vers le paradis ; ne mettez en avant de vous que les meilleurs d’entre vous », il pensait aux imām-s des mosquées, dans les tribus et les campements. [Il voulait dire] : « Ne mettez en avant que le meilleur d’entre vous, l’homme craignant Dieu et récitant le Coran ; ne choisissez pas l’impie analphabète »221. 272184 a. — Mais lorsqu’il disait : « Faites la Prière derrière n’importe quel individu, homme de bien ou pervers. Un imām est indispensable, qu’il soit homme de bien ou pervers », il pensait au souverain, ciment de la communauté, qui dirige les gens aux Prières du Vendredi et pendant les fêtes. // [Il voulait dire] : « Ne 79
vous soulevez pas contre lui, n’entrez pas en rébellion, ne vous séparez pas de la communauté des Musulmans, même si votre chef est pervers, car un imām est indispensable, qu’il soit homme de bien ou pervers. Les hommes ne se tiendront bien et ne vivront dans la discipline qu’à cette condition ».
222 Ce ḥadīṯ figure dans Lisān, X, 270 et Tāğ, V, 540. 273On comparera le propos d’al-Ḥasan : « Les hommes ne peuvent
se
passer
de
tuteurs
(waza‘a) »,
c’est-à-dire
de
souverains qui les empêchent de se nuire, de se montrer gravement injustes, de verser le sang et de s’approprier des biens abusivement222. ***
XXXI. — EXEMPLE DE DEUX ḤADĪṮ-S CONTRADICTOIRES 223 BUḪ. 46, 33 = HM II, 153 ; ḤAN. I, 79, 188 ; II, 163, 193, etc… 274185. — Proposition : Vous enseignez que le Prophète a dit : « Quiconque est tué en défendant son bien est un martyr »223.
224 ḤAN. IV, 226 ; cf. BUḪ. 92, 9 = HM IV, 481.
225 Cf. BUḪ. 87, 2 = HM IV, 407 ; cf. aussi Ḥan. II, 100. 275D’autre part, vous dites : « Reste dans ta maison ; si l’on vient t’y trouver, entre dans ton cabinet ; si l’on force ta porte, dis : — Expie mon péché et le tien ! »224 ; « Sois ‘Abd Allāh qui est tué, et non ‘Abd Allāh qui tue : Dieu vous a donné en exemple les deux fils d’Adam ; choisissez la meilleure [attitude] et laissez la plus
mauvaise »225.
Ce ḥadīṯ est
le ḥadīṯ précédent. //
80
incompatible
avec
276186. — Réponse : Nous affirmons que chacun des deux ḥadīṯs a un emploi différent. S’ils sont employés chacun à leur lieu et place, il n’y a pas d’incompatibilité.
226 On n’a pas retrouvé ce ḥadīṯ. 277En disant : « Quiconque est tué en défendant son bien est un martyr », il entendait : « Quiconque combat des brigands qui en veulent à ses biens, et est tué chez lui ou au cours de ses voyages ». C’est pourquoi un autre ḥadīṯ dit : « Si tu trouves un individu dans ta maison, ne sois pas le plus poltron des deux »226, ce qui signifie : Affronte-le l’arme à la main. Telle est l’application du premier ḥadīṯ.
227 BUḪ. 87, 2 = HM IV, 407 ; 92, 10 = HM IV, 481 ; ḤAN. IV, 401. 278En disant : « Reste dans ta maison, etc… », il entendait : Fais cela en période de troubles, de divergence d’opinions entre les hommes ou de rivalité entre deux souverains, chacun d’eux réclamant le pouvoir et prétendant y avoir droit pour telle ou telle raison. Ce ḥadīṯ veut dire : « Reste chez toi, à ce moment, ne tire pas le sabre et ne tue personne, car tu ne sais laquelle des deux factions est dans son droit et laquelle est dans son tort ; mets [aussi] ton propre sang à l’abri de l’une comme de l’autre ». D’ailleurs, à propos de telles périodes, il a dit : « Celui qui tue et celui qui est tué sont destinés à l’enfer »227.
228 Coran, XLIX, 9. 279186 a. — Il y a bien le verset : « Si deux partis de Croyants se combattent, rétablissez entre eux la concorde. Si // l’un d’eux persiste en sa rébellion contre l’autre, combattez le parti rebelle jusqu’à ce qu’il s’incline devant l’ordre de Dieu ! »228. Mais cet ordre est valable pour l’ensemble [des Musulmans] après la tentative de réconciliation, et si l’un d’eux a fait acte de rébellion. 81
Lorsqu’il s’agit d’un, deux ou trois individus et que la grande masse des gens ne se rassemble pas pour réconcilier les deux groupes, il nous est ordonné de rester chez nous, et de protéger notre religion, en y dévouant nos personnes et nos biens. ***
XXXII. — EXEMPLE D’UN ḤADĪṮ INFIRMÉ PAR LA SPÉCULATION ET LA TRADITION HISTORIQUE 229 ḤAN. I, 111 ; Cf. I, 83, 88, 136, 146, 156. 280187. — Proposition : Vous enseignez d’après al-A‘maš — ‘Amr b. Murra — Abū l-Baḫtarī que ‘Alī a dit : « Le Prophète m’envoya au Yémen pour y rendre la justice. Je lui objectai : — Je n’ai aucune expérience du métier de juge ! Alors il frappa ma poitrine de sa main en disant : — Seigneur ! Guide son cœur et raffermis sa langue ! Depuis lors, je n’ai jamais hésité dans un jugement à rendre jusqu’à ce que je m’assoie parmi vous ! »229.
230 Voir l’index, s. ğadd.
231 BUḪ. 88, 2 = HM IV, 425 ; ḤAN. I, 217, etc… Cf. ḤAN. I, 247.
232 Cette anecdote ne figure pas dans le ḥadīṯ. 281D’autre part, vous rapportez qu’il rendit des jugements différents sur les umm walad ; il disait une chose, puis revenait sur sa décision ; il rendit des jugements différents sur le statut du grand père ; tout cela bien qu’il ait dit : « Quiconque veut pénétrer au tréfonds de la Géhenne n’a qu’à rendre des jugements sur le statut du grand-père ! »230. Il se repentit d’avoir condamné des renégats au bûcher après avoir entendu parler de la fatwā d’Ibn ‘Abbās231 ; il fit administrer quatre-vingts coups de verges à un ivrogne qui en mourut : il paya alors le prix du sang en disant : « J’ai payé le prix du sang, car c’est une règle // que nous avons 82
établie entre Musulmans » ; or il avait préconisé à ‘Umar une sanction de quatre-vingts coups de verges pour consommation de vin. Il avait décidé de lapider l’affranchie ( mawlāt) d’un marchand de bois ; or il entendit dire à ‘Uṯmān : « Il ne faut appliquer les sanctions canoniques qu’à ceux qui les connaissent : cette femme ne les connaît pas ! » ; en effet, c’était une persane. Il se conforma à l’avis de ‘Utmān232. Il eut une discussion avec Zayd b. Ṯābit à propos de l’esclave qui se rachète (mukātab) et Zayd le réduisit au silence. A propos de l’affaire des deux arbitres, il dit : « J’ai Je
fait
serai
un plus
faux
pas
habile
dont à
je
l’avenir,
ne
me et
je
relèverai
pas !
persévérerai !
Je rassemblerai les opinions éparses et dispersées ! »
233 Il paraît s’agir ici de la formule de répudiation triple prononcée en une seule fois — ce qui est u (...) 282187 a. — Dāwūd b. Abī Hind rapporte d’après al-Ša‘bī que ‘Alī revint sur son opinion considérant comme interdit le fait de bloquer les trois répudiations en une seule233, ainsi que ses opinions concernant l’amputation de la main à la racine des doigts, et le fait de frotter les doigts des enfants coupables de vol.
234 Coran, LXV, 2.
235 Coran, II, 282.
236 On sait qu’une révélation (Coran, III, 123) intervint pour reprocher au Prophète d’avoir fait du qu (...)
237 Il s’agissait du cas d’un homme ayant tué une femme : le talion fut appliqué, mais la diya de la fe (...)
238 En vertu du même principe que ci-dessus, celui d’une péréquation entre talion et prix du sang.
239 La question de savoir si les Prières des Fêtes doivent avoir lieu au muṣallā ou à la mosquée est tr (...) 83
283Il admit le témoignage des enfants les uns sur les autres ; or Dieu a dit : « Requérez témoignage de deux personnes intègres parmi vous »234 et ailleurs : « …ceux que vous agréerez comme témoins »235. Au cours du qunūt du matin, il proféra à voix haute des noms d’hommes236. Il préleva la moitié du prix du sang d’un homme sur les ayants-droit du mort237. Il préleva la moitié du prix du sang relatif à un œil sur une personne qui exerçait le talion sur un borgne238. Alors que l’imām se rendait au muṣallā pour la Prière de la fête, il chargea un homme de guider la Prière des impotents dans la grande mosquée239. // 284Tous ces faits contredisent l’ensemble des juristes, des juges et des gouverneurs, ses émules, et ne sont guère conformes à ses paroles : « Je n’ai jamais hésité pour rendre un jugement jusqu’à ce que je me trouve assis parmi vous ». Ils ne confirment guère davantage l’invocation du Prophète : « Seigneur, raffermis sa langue et son cœur ». Tout se passe comme s’il avait dit le contraire dans son invocation ! 285188. — Réponse : Nous prétendons que lorsque le Prophète demanda à Dieu de raffermir sa langue et son cœur, il n’entendait pas qu’il ne fît jamais un faux pas, qu’il n’omît ou ne négligeât jamais rien ou qu’il ne se trompât en aucune circonstance, car ces qualités n’existent chez aucune créature. Ce sont des qualités propres au Créateur. Le Prophète connaissait trop bien Dieu, ainsi que ce que l’on peut attendre ou ne pas attendre de Lui, pour Lui demander [par exemple] de ne pas faire mourir telle ou telle personne, puisque Dieu a décrété la mort pour toutes Ses créatures ; ou pour Lui demander de ne pas faire vieillir telle ou telle personne devenue très âgée, puisqu’il a fait de la décrépitude une des constituantes et l’un des fondements de la nature humaine.
240 Coran, LXXXVII, 6. 84
286Comment le Prophète aurait-il pu demander en faveur de ‘Alī [cette infaillibilité] en invoquant Dieu // puisque lui-même pouvait à l’occasion omettre ou oublier quelque chose du Coran ; d’ailleurs, Dieu a dit : « Nous te ferons réciter de telle sorte que tu n’oublieras pas »240.
241 Coran, VIII, 68. La « révélation précédente » pose un problème. R. BLACHÈRE suppose qu’il peut s’ag (...)
242 ḤAN. I, 30, 32. 287Il admit la rançon des captifs le jour de Badr, et le verset suivant fut révélé : « N’était une prescription de Dieu venue précédemment, un tourment immense vous aurait touchés à propos de ce que vous avez pris »241. Et le Prophète dit : « Si un tourment vous frappait, seul ‘Umar y échapperait ! », car ‘Umar avait proposé de renoncer à la rançon et de mettre [les captifs] à mort242.
243 Coran, XVII, 74-75. 288188 a. — Le jour des Factions, il voulut se prémunir contre les Polythéistes [en leur livrant] une partie de la récolte de Médine, si bien qu’un Anṣārī dut protester. Il faillit accepter la demande des Polythéistes pour se les concilier, mais Dieu révéla : « Si nous ne t’avions pas confirmé, tu aurais certes failli d’incliner vers eux quelque peu. Nous t’aurions alors fait goûter le double de la vie et le double de la mort. Ensuite, tu n’aurais plus trouvé de secours contre Nous »243. 289Les
prophètes
antérieurs
étaient
également
sujets
à
l’inadvertance et à l’oubli. Il serait trop long d’énumérer tous ces faits. Ils sont d’ailleurs bien connus des gens avertis.
85
290188 b. — Le Prophète a donc invoqué Dieu en faveur de ‘Alī uniquement pour qu’il tombe juste le plus souvent possible, et qu’il juge selon la vérité dans le plus grand nombre de cas.
244 Coran, XIX, 13. BLACHÈRE : « tendresse ». Ce mot ne paraît pas offrir de difficulté.
245 Coran, IX, 114 = XI, 75. BLACHÈRE : « longanime ».
246 Coran, LXIX, 36. BLACHÈRE, transcrit en supposant qu’il s’agit d’un nom étranger de sens obscur. Mu (...)
247 Coran, XVIII, 9. BLACHÈRE transcrit. Ce peut être un nom propre attribué soit au chien des sept dor (...) 291On peut comparer l’invocation qu’il fit en faveur d’Ibn ‘Abbās, pour que Dieu lui enseigne l’exégèse ( ta’wīl) et le rende savant en matière de religion. Or Ibn ‘Abbās, malgré cette intervention, ne connaissait pas tout le Coran. // Il disait : « Je ne sais ce que signifient ḥanān244,
ni awwāh245,
ni ġislīn246,
ni al-
raqīm »247. On lui prête des sentences juridiques inacceptables et délaissées, comme celles qu’il émit sur la mut’a, l’échange (ṣarf,) le [mariage] avec deux sœurs esclaves.
248 BUḪ. 23, 81 = HM I, 438 ; 63, 40 = HM III, 36 ; cf. BUḪ. 81, 51 = HM III, 310.
249 Coran, IX, 113.
250 Coran, XXVIII, 56. 292En outre, toutes les demandes que les prophètes ont pu faire dans leurs invocations n’ont pas été exaucées. Notre Prophète avait invoqué Dieu en faveur d’Abū Ṭālib et avait demandé la rémission de ses fautes248, mais le verset suivant fut révélé : « Il n’est ni du Prophète, ni des Croyants de demander pardon à Dieu pour les Polythéistes, fussent-ils leurs proches, après qu’il s’est 86
avéré qu’ils sont promis à l’enfer »249. Il disait aussi : « Seigneur, guide mon peuple ! », et c’est pourquoi Dieu révéla : « Tu ne conduis point qui tu aimes, mais Dieu conduit qui Il veut »250. 293188 c. — Enfin, les opinions exprimées par ‘Alî et mentionnées ci-dessus ne sont pas toutes condamnées, et leur auteur ne doit pas être taxé d’erreur pour autant. Parmi les plus fautives, il faut citer la question de la vente des umm walad : on les vendait à l’époque du Prophète et sous le califat d’Abū Bakr en cas de dette ou de nécessité. Ce fut ‘Umar qui interdit cette pratique par égard pour leurs enfants, afin qu’ils ne soient pas en butte à la réprobation et que la honte ne rejaillisse pas sur eux pour de nombreuses raisons inhérentes à leurs mères // qui ne sont pas libres. Tout le monde est d’accord sur le fait qu’une esclave ne saurait sortir du patrimoine de son maître que par vente, donation ou affranchissement. Or, l’umm walad n’encourt aucun de ces risques, et le statut des femmes esclaves lui est appliqué jusqu’à la mort du maître. Pour quelle raison son enfant constituerait-il un empêchement à la vente ? C’est là un principe que ‘Umar a établi par appréciation subjective, en considération du sort des enfants. 294Il va de soi que nous ne prenons point ce raisonnement à notre compte, car il ne constitue pas notre doctrine ; nous avons voulu attirer l’attention sur l’argument dont pouvait se prévaloir ‘Alī — tout comme ses prédécesseurs — pour préconiser ce procédé et négliger l’interdiction qui avait pu en être faite.
251 Cf. ḤAN. IV, 373, 374. 295188 d. — Ces gens sont loin des remarquables jugements de ‘Alī, si pénétrants dans leur complexité, si subtils qu’aucun grand compagnon n’aurait été capable de les rendre, tels sa sentence sur l’œil lésé ou crevé, ou atteint de telle sorte que l’acuité visuelle s’en trouve diminuée en raison des rayures de la cornée ; 87
ou sa sentence sur la langue coupée qui diminue la faculté d’élocution, // et qu’il rendit en tenant compte des sons séparés, ou sa sentence sur la pinceuse, la sauteuse et la briseuse de cou ; c’étaient trois petites filles qui jouaient ; la première monta sur les épaules d’une de ses compagnes, et la troisième pinça cette dernière. Celle qui servait de monture sursauta, celle qui était montée tomba et brisa le cou de la troisième. ‘Alī ordonna alors le partage du prix du sang en trois, mais supprima la part de celle qui était montée, car elle avait cherché ce qui lui était arrivé ; ou comme sa sentence au sujet de deux hommes qui se disputaient le fils d’une femme avec laquelle ils avaient tous deux eu des rapports pendant la même période intermenstruelle, prétendant tous deux qu’il était leur fils. ‘Alī décida qu’il hériterait des deux hommes, qui devaient lui léguer tous deux leurs biens, mais qu’il appartiendrait au dernier vivant251. 296Ḥammād rapporte d’après Ibrāhīm que ‘Umar rendit le même jugement et qu’il se trouva en accord avec lui sur ce point.
252 Sakīna. Ce membre de phrase confirme la trad. BLACHÈRE par « présence divine ». Cf. trad. BLACHÈRE, (...)
253 BUḪ. 62, 6 = HM II, 597 ; ḤAN. II, 339 ; VI, 55. 297188 e. — ‘Umar rendait des jugements dignes du Coran ; le moindre mot sorti de sa bouche effarouchait le Diable ; la présence divine252 se manifestait par sa bouche. ‘Ā’iša déclarait à propos de lui : « Par Dieu, c’était un homme habile, sans rival, qui avait l’art d’équilibrer les choses », c’est-à-dire // habile politique. Al-Mugīra parle de lui en ces termes : « Par Dieu, il dédaignait d’avoir recours à la tromperie, et il était trop avisé pour être trompé ». Al-Aḥnaf b. Qays dit à son sujet : « Par Dieu, il connaît mieux ce qui sera que nous ne connaissons ce qui a été ! » Il voulait dire qu’il savait choisir dans ses options et ne se 88
trompait pas. Le Prophète a dit de lui : « Chaque communauté a ses inspirés et ses perspicaces. S’il en est un dans notre communauté, c’est bien ‘Umar ! »253. 298Il cria à Sāriya b. Zunaym al-Du’alī, qui était en première ligne, face à l’ennemi : « Sāriya ! la montagne ! la montagne ! » Et Sāriya, comprenant ce qu’il voulait dire, s’adossa à la montagne et combattit l’ennemi sur un seul front.
254 Abū Ḥasan = ici ‘Alī. Habituellement : Abū l-Ḥasan. 299Néanmoins, ‘Umar déclarait à propos d’une affaire où il avait été conseillé par ‘Alī : « Sans l’avis de ‘Alī, ‘Umar aurait péri ». Il disait encore : « Que Dieu me préserve de toute affaire grave qu’Abū Hasan ne sait résoudre »254.
255 Coran, XLVI, 15.
256 Coran, II, 233. 300J’ai entendu al-Zivādī — ‘Abd al-Wāriṯ — Yūnus — al-Ḥasan dire que l’on amena à ‘Umar une femme qui avait accouché à six mois, et sur laquelle on murmurait. ‘Alī lui dit : « Cela peut arriver ; Dieu a dit : — Du [début de] la gestation jusqu’au sevrage, [il y a] trente mois255. Il a dit en outre : — Les mères // allaitent leurs enfants deux années entières »256. ***
XXXIII. — EXEMPLE DE DEUX ḤADĪṮ-S CONTRADICTOIRES 257 MĀLIK, 54, 35 ; Ḥan. II, 186, 214. 301189. — Proposition : Vous enseignez que le Prophète a dit : « Dans le voyageur solitaire, il y a un démon ; dans deux voyageurs, il y a deux démons ; trois voyageurs constituent [déjà] une caravane (rakb) »257.
258 Voir p. ex. ABŪ DĀWŪD, 11, 96. 89
259 Voir p. ex. BUḪ. 61, 25 = HM II, 570. 302D’autre part, vous dites que le Prophète dépêchait un courrier tout seul258 et que lorsqu’il émigra, il partit avec Abū Bakr259. 303Comment un voyageur solitaire peut-il être un démon ? En effet, il est exclu qu’il ait voulu dire autre chose que « le voyageur solitaire doit être considéré comme un démon » ; ou « devient un démon ». Voilà qui est impossible ! 304190. — Réponse : Nous prétendons qu’en disant : « Dans le voyageur solitaire, il y a un démon », il songeait à l’isolement et à la désolation, car le Démon menace [les isolés] tout comme les voleurs ou les fauves. Lorsqu’un individu part seul, il s’expose [aux entreprises] du Démon, tout comme [à celles] de n’importe quel ennemi, bête féroce ou brigand, auquel le Démon est assimilable. 305Il a dit : « Dans deux voyageurs, il y a deux démons » car chacun d’eux est [personnellement] exposé à tous ces dangers ; ce sont donc deux démons. Mais dès qu’ils se réunissent à trois, on ne peut plus parler de solitude, mais de compagnie, si bien que personne ne les menace plus.
260 Coran, V, 75.
261 Coran, XXV, 7. 306La langue // arabe est toute en démonstrations, en allusions et en comparaisons. On dit : « Untel est long du baudrier » (c’est la courroie qui maintient le sabre), même si cet homme n’a jamais porté un sabre de sa vie ; pour dire : Il est de haute taille. On fait allusion à sa taille par la longueur de son baudrier, car un baudrier court ne convient pas à un homme grand. Les Arabes disent encore : « Untel possède un gros tas de cendres », même s’il n’y a pas de cendre chez lui, ni à sa porte. Ils veulent dire : Il a 90
l’hospitalité facile et son feu brûle en permanence. Or si l’on allume beaucoup de feu, il y a beaucoup de cendre. Dieu dit dans le Coran : « Le Messie, fils de Marie, n’est qu’un Apôtre avant lequel les apôtres antérieurs ont passé. Sa mère était une sainte. Ils prenaient de la nourriture »260. Dans le fait de prendre de la nourriture, il est fait allusion à la rupture de la pureté (ḥadaṯ), car quiconque mange doit nécessairement rompre sa pureté. Dieu fait dire aux Polythéistes à propos du Prophète : « Qu’a donc ce [prétendu] Envoyé à prendre de la nourriture et à aller dans les marchés ? »261. Il est fait allusion ici, par le fait d’aller dans les marchés, aux nécessités qui assaillent les hommes et les obligent à fréquenter
les
marchés.
Les Polythéistes
étaient
censés
s’imaginer que le Prophète, envoyé de Dieu sur terre, était exempté par Lui d’avoir recours à ses semblables et n’avait pas besoin d’eux. 307190. — Ils disent : « Il dépêchait un courrier tout seul ». Il s’agit du messager qu’on envoie // de ville en ville pour échanger de la correspondance. On l’appelle aussi fayğ. On l’envoyait de ville en ville tout seul, mais on lui conseillait de se joindre en cours de route à des compagnons qui lui seraient une société. Ceci se pratique en tout temps. Quiconque veut écrire une lettre et la faire parvenir par courrier à une ville éloignée n’est pas tenu de louer les services de trois hommes en vertu de la phrase du Prophète : « Un seul homme est un démon, deux hommes sont deux démons, mais trois sont une caravane ». Mais le messager est tenu, lorsqu’il part, de se chercher une compagnie et d’éviter la solitude. 308190 b. — En ce qui concerne le départ du Prophète avec Abū Bakr lors de leur émigration, ils redoutaient à ce moment là les entreprises des Polythéistes contre leur vie, et ils furent contraints de s’en aller. On peut penser qu’ils souhaitèrent s’intégrer à une caravane, tout comme l’homme qui quitte sa maison tout seul 91
espère trouver des compagnons de route. Dès qu’il leur fut possible de rechercher de la société, Abū Bakr loua les services d’un guide des Banū l-Dīl, et s’adjoignit la compagnie de ‘Āmir // b. Fuhayra, son mawlā. Ils entrèrent à Médine à quatre ou cinq. ***
XXXIV. — EXEMPLE DE DEUX ḤADĪṮ-S CONTRADICTOIRES 262 BUḪ. 86, 7 = HM IV, 377. 309191. — Proposition : Vous enseignez que le Prophète a dit : « Que Dieu maudisse le voleur ! S’il vole un œuf, on lui coupera la main ; s’il vole une corde, on lui coupera la main ! »262.
263 BUḪ. 86, 13 = HM IV, 380. 310Vous enseignez d’autre part qu’il a dit : « Pas d’amputation pour [un vol inférieur à] un quart de dinar »263. 311Le
premier ḥadīṯ sert
d’argument
aux
Ḫāriğites,
car
ils
déclarent : « L’amputation pour vol vaut pour un petit larcin comme pour un grand ».
264 Coran, V, 38. 312192. — Réponse : Nous affirmons que lorsque Dieu révéla le verset : « Au voleur et à la voleuse, tranchez les mains en récompense de ce qu’ils se seront acquis et en châtiment de Dieu »264 ; le Prophète dit : « Que Dieu maudisse le voleur ! S’il vole un œuf, on lui coupera la main ; etc… » conformément à la lettre de la révélation à ce moment. Puis Dieu lui inspira que l’amputation ne pouvait avoir lieu pour moins d’un quart de dinar. Or le Prophète ne connaissait des sentences de Dieu que ce qu’il lui enseignait, et Dieu ne lui enseignait pas cela en bloc, mais Il le lui révélait petit à petit.
265 DĀRIMĪ, intr., 48. 92
313Gabriel
lui
transmettait
les
traditions
normatives
tout
comme // il lui transmettait le Coran. C’est pourquoi il a dit : « Le Coran me fut apporté, ainsi que des choses analogues »265, c’est-à-dire les traditions normatives.
266 BUḪ. 56, 152 = HM II, 352 ; ḤAN. III, 107, 163, etc… 314On sait qu’au début de l’Islam, il coupa les mains et les pieds des gens de ‘Urayna, leur brûla les yeux et les abandonna dans le désert de rocaille jusqu’à ce que mort s’ensuivît266. Par la suite, il interdit la mutilation (muṯla) parce que les peines légales ne lui avaient pas encore été révélées à ce moment. Ainsi, il leur infligea le talion le plus dur pour leur trahison et leur ingratitude ; il les fit exécuter par ses gardiens de troupeaux et leur ordonna de ramener leurs chameaux. Par la suite, les peines légales furent révélées et il interdit la mutilation.
267 Sur idāwa, voir Tāğ, X, 12, s.v. et II, 163, s. saṭīḥ. 315192
a.
—
Il
est
des
juristes
pour
prétendre
que
le
mot bayḍa (œuf) désigne dans ce ḥadīṯ le casque de fer qui protège la tête des combattants et que le mot ḥabl (corde) désigne les câbles de marine, car chacun de ces deux articles coûte de nombreux dinars. Cette interprétation est irrecevable pour qui connaît bien sa langue, et les modes d’expression des Arabes. En effet, il ne s’agit pas ici d’insister sur la valeur considérable de l’objet volé ni de mettre l’accent sur un « œuf » valant plusieurs dinars, ou sur une « corde » énorme qu’un voleur ne saurait emporter. En effet, il n’est pas dans les habitudes de langage des Arabes ni des Persans de dire : « Que Dieu enlaidisse Untel, qui s’est exposé // à la bastonnade pour un collier de perles, ou qui s’est exposé à être jeté aux fers pour un sac de musc ». Ils disent bien plutôt dans ce cas : « Que Dieu le
93
maudisse, car il s’est exposé à l’amputation de la main pour une vieille corde, ou une pelote de laine, ou une outre usée »267.
268 En d’autres termes, les Arabes — et semble-t-il aussi les Persans — n’hésitent pas à proférer les i (...) 316Plus l’objet [volé] est insignifiant, plus l’expression porte268. ***
XXXV. — EXEMPLE DE DEUX ḤADĪṮ-S CONTRADICTOIRES 269 Ḥan. III, 453. 317193. — Proposition : Vous enseignez que le Prophète demanda à Dieu de le préserver de la pauvreté et dit : « Je Te demande de me faire riche, et de faire riche mon mawlā ! »269.
270 Ce ḥadīṯ se retrouve dans Lisān, XVII, 79 = Tāğ, IX, 237.
271 Ce ḥadīṯ se trouve dans Tāğ, III, 387, s. ‘iḏār. 318Vous enseignez d’autre part qu’il a dit : « Seigneur, fais-moi vivre misérable (miskīn), fais-moi mourir misérable et ressuscitemoi au nombre des misérables »270. Il a dit encore : « La pauvreté, pour le Croyant, vaut mieux qu’une bonne longe sur la joue du cheval »271. 319Il y a là contradiction et divergence.
272 Tāğ, IX, 238.
273 Voir Lisān, XVII, 80.
274 Voir Lisān, XVII, 80, où tout ce passage figure presque dans les mêmes termes. 320194. — Réponse : Nous prétendons qu’il n’y a là, grâce à Dieu, aucune divergence. Ils se sont trompés dans leur interprétation et ont confondu malencontreusement. Ils ont confondu « pauvreté » 94
et « misère », qui sont deux choses différentes. S’il avait dit : « Seigneur, fais-moi vivre pauvre, fais-moi mourir pauvre et ressuscite-moi contradiction,
au
nombre
comme
ils
le
des
pauvres ! »,
prétendent.
Dans
il
y
aurait
l’expression
« ressuscite-moi au nombre des misérables », la « misère » // représente l’humilité et l’abaissement. Tout se passe comme s’il demandait à Dieu de ne pas le compter au nombre des oppresseurs et des orgueilleux et de ne pas le ressusciter dans leur
lot.
Le
mot maskana (misère)
dérive
de sukūn (calme,
douceur). On dit tamaskana dans le sens d’être doux, modeste, humble, soumis. C’est en ce sens que le Prophète a dit à celui qui fait la Prière : « Soumets-toi, sois humble (tamaskan) et baisse la tête ! »272, c’est-à-dire : fais preuve d’humilité et de modestie devant Dieu. Les Arabes disent : « C’est sur moi, malheureux, qu’est descendu l’ordre ! »273 ; il ne s’agit pas de « pauvreté » mais d’« abaissement » et de « faiblesse ». De même lorsque le Prophète dit à Qayla : « O misérable (miskīna) », il ne voulait pas dire : O pauvresse ! mais il faisait allusion à sa faiblesse274.
275 Coran, XCIII, 6-8. 321La preuve de ce que j’avance, c’est que si le Prophète avait demandé à Dieu la « pauvreté », Dieu la lui aurait refusée, puisqu’il le rappela à Lui riche et aisé, après l’avoir comblé, bien qu’il n’eût jamais cherché à entasser les dirhems. Lorsqu’un homme laisse des vergers comme ceux que le Prophète laissa à Médine, des propriétés comme les siennes — notamment Fadak —, on ne saurait dire qu’il est mort « pauvre ». Dieu a dit : « Ne te trouva-t-il point orphelin // si bien qu’il te donna un refuge ? Ne te trouva-t-Il point égaré si bien qu’il te guida ? Ne te trouva-t-Il point pauvre, si bien qu’il t’enrichit ? »275. Le mot ‘ā’il signifie « pauvre », qu’on ait des personnes à charge ou non. La situation du Prophète au début de son apostolat et sa situation à sa mort 95
confirment les paroles de Dieu, car il débuta pauvre et mourut riche. Cela prouve aussi que la « misère » qu’il demandait à Dieu n’était pas la « pauvreté ». 322194 a. — Lorsque le Prophète a dit que la pauvreté vaut mieux pour le Croyant qu’une bonne longe sur la joue d’un cheval, c’est que la pauvreté est un des pires fléaux de ce monde, et une épreuve douloureuse. Lorsque quelqu’un supporte patiemment les malheurs pour plaire à Dieu et se contente de son lot, Dieu lui confère par là une auréole en ce monde et lui réserve une grande récompense dans l’autre. La pauvreté et la richesse sont comparables à la maladie et à la santé : Celui que Dieu éprouve par la maladie et qui prend son mal en patience est comme celui qui subit la pauvreté avec résignation. La récompense que Dieu attache à cette attitude ne nous empêche d’ailleurs pas de lui demander la santé ni de le prier de nous accorder l’immunité. 323Certains, préférant la pauvreté à la richesse, pensent // qu’il demandait à Dieu de le préserver de la pauvreté d’âme. Ils arguent de l’expression « Untel est pauvre d’âme » même lorsqu’il est en bonne condition et « Untel est riche d’âme » même lorsqu’il est en mauvaise condition. Mais c’est là une erreur.
276 Allusion à Coran, VI, 152 ; XVI, 125 ; XXIII, 97 ; XXIX, 44 ; XLI, 33.
277 Coran, XXI, 35. 324Je ne sache pas qu’aucun prophète, ni aucun compagnon de prophète, ni aucun fidèle, ni aucun muğtahid ait jamais dit : « Seigneur, rends-moi pauvre » ou « fais-moi tomber malade ! ». Dieu n’a jamais exigé qu’on l’adorât de cette façon, mais bien plutôt en disant : « Seigneur, accorde-moi ma subsistance ! Seigneur,
accorde-moi
la
santé ! »
Les
hommes
disaient :
« Seigneur, éprouve-moi de la manière la meilleure ! »276 ; c’est96
à-dire : ne nous mets à l’épreuve que par le bien, et non par le mal ; en effet, Dieu peut éprouver Ses serviteurs par l’un ou par l’autre, afin de connaître soit leur gratitude, soit leur résignation. Dieu a dit : « Nous vous éprouvons par le mal et par le bien en manière de tentation »277, c’est-à-dire d’épreuve. Mutarrif disait : « J’aime mieux être épargné et manifester ma gratitude que d’être éprouvé et de manifester ma résignation ». 325Abū Muḥammad dit : J’ai parlé de cela dans mon livre sur le Ġarīb
al-ḥadīt-s avec un commentaire plus développé. Toutefois, il convenait d’y faire allusion également dans le présent ouvrage afin de ne rien omettre de ce qui concerne la matière traitée ici. ***
XXXVI. — EXEMPLE DE DEUX ḤADĪṮ-S CONTRADICTOIRES 278 BUḪ. 46, 30, = HM II, 151 ; 74, 1 = HM IV, 86 ; 86, 1 = HM IV, 375 ; 86, 6 = HM IV, 377. 326195. — Proposition : Vous enseignez que le Prophète // a dit : « Le fornicateur, au moment où il fornique, n’est plus Croyant ; le voleur, au moment où il commet le vol, n’est plus Croyant »278.
279 BUḪ. 60, 47 = HM II, 516 ; ḤAN. III, 135, 224. 327D’autre part, vous enseignez qu’il a dit : « Quiconque proclame qu’il n’y a d’autre divinité que Dieu est promis au paradis, même s’il commet l’adultère et le vol »279. 328Il y a là contradiction et divergence.
280 Coran, XII, 17. 329196. — Réponse : Nous prétendons qu’il n’y a là ni contradiction ni divergence, car la « foi » (imān) en arabe désigne le fait d’« ajouter foi » (taṣdīq). Dieu dit : « Tu ne vas pas avoir foi en nous, bien que nous soyons sincères »280 ; c’est-à-dire : tu 97
ne vas pas ajouter foi à nos paroles. C’est ainsi qu’on dit couramment : « Je n’ai foi en rien de ce que tu dis », pour dire : je n’y ajoute pas foi.
281 Coran, LXIII, 3.
282 Coran, II, 62 ; cf. XXII, 17. On notera que le texte porte à deux reprises : « man āmana minhum bil (...)
283 Il semble qu’il faille compléter le texte ainsi ; à moins de supposer que la négation lā est de tro (...) 330196 a. — Les gens qu’on qualifie de « croyants » se divisent en trois catégories : d’abord, ceux qui croient de la langue, mais non du cœur, comme les Hypocrites, et qui disent : « Nous avons cru ». Dieu a dit au sujet des Hypocrites : « Ils ont cru en effet, puis ont été infidèles »281 ; Il a dit ailleurs : « Ceux qui croient, ceux qui pratiquent le Judaïsme, les Chrétiens et les Sabéens », puis « ceux qui croient en Dieu et au Dernier Jour »282, car [les gens de cette première catégorie] ne croient ni en Dieu ni au Dernier Jour. S’il avait voulu désigner les Musulmans par l’expression : « ceux qui croient », Il n’aurait pas dit : « ceux qui croient en Dieu et au Dernier Jour », car ce sont [les autres] qui ne croient pas en Dieu ni au Dernier // Jour283. Il s’agit donc en fait des Hypocrites, qui croient de la langue, de ceux qui pratiquent le Judaïsme et des Chrétiens.
284 Irhāṣ = iṯbāt ; Tāğ, IV, 400. 331Les gens de cette catégorie, de même que les Hypocrites, ne sont pas pour nous des « Croyants », même si nous disons : « Ils ont cru », car leur « croyance » ne résulte ni d’une adhésion, ni d’une intention. De même, nous disons de celui qui désobéit aux prophètes : « Il a désobéi, il s’est égaré », mais nous n’employons pas à leur égard les participes « désobéissant » et « égaré », car sa 98
faute ne procède ni d’une affirmation284, ni d’une adhésion, comme c’est le cas pour les ennemis de Dieu. 332196 b. — Il y a ensuite les gens qui croient de la langue et du cœur, mais qui, bien qu’ils se souillent par le péché et qu’il y ait des failles dans leur soumission, ne persévèrent pas [dans l’erreur]. Nous disons : « Ils croient, et ce sont des Croyants » tant qu’ils se tiennent à l’écart des péchés graves. Mais lorsqu’ils y succombent, ils ne sont plus des Croyants — c’est-à-dire de ceux qui ont une foi parfaite — au moment où ils commettent de tels péchés. 333On voit que le Prophète a dit : « Le fornicateur, au moment où il fornique, n’est plus croyant », entendant par là le moment exact où il commet sa faute, car auparavant, ce n’était pas un pécheur endurci et on pouvait le qualifier de « Croyant », et après la faute, ce n’est pas davantage un pécheur endurci, et on peut le qualifier de « Croyant repentant ».
285 BUḪ. 86, 20 = HM IV, 384. 334Un autre ḥadīṯ éclaire encore mieux cette question. Le voici : « Lorsque l’individu adultère fornique, il est privé de la foi ; lorsqu’il se repent, il en est de nouveau revêtu »285. 335196 c. — Une troisième catégorie est celle des gens qui croient de la langue et du cœur, accomplissent les devoirs rituels et évitent // les péchés graves : ce sont là les vrais Croyants qui remplissent les conditions de la foi.
286 BUḪ. 78, 29 = HM IV, 151 ; ḤAN. I, 387 ; II, 288, 336, etc… 336Le Prophète a dit : « Il n’est pas croyant, celui dont le voisin n’est pas à l’abri de ses méchancetés »286, c’est-à-dire : ce n’est pas un croyant accompli.
287 ḤAN. III, 154. 99
337Il a dit encore : « Il n’est pas croyant, celui dont la langue et la main n’épargnent pas les Musulmans »287, c’est-à-dire : ce n’est pas un croyant accompli.
288 Cf. BUḪ. 2, 21 = HM I, 19. 338Il a dit encore : « Il n’est pas croyant, celui qui passe la nuit rassasié tandis que son voisin dort le ventre creux »288, c’est-àdire : ce n’est pas un croyant accompli.
289 ḤAN. II, 418 ; V, 381 ; VI, 382. 339On peut comparer le ḥadīṯ : « Il n’y a pas d’ablution pour quiconque ne mentionne pas le nom de Dieu en la faisant »289, ce qui signifie : il n’y a pas d’ablution parfaite, ni méritoire.
290 Cf. BUḪ. 2, 1 = HM I, 11, où une sentence analogue est attribuée à ‘Umar b. ‘Abd al-‘Azīz. 340C’est dans le même sens que ‘Umar a dit : « Quiconque n’accomplit pas le pèlerinage n’a pas la foi »290, c’est-à-dire : une foi parfaite. 341Enfin, on dit : « Untel n’a pas de raison » pour dire : il n’a pas beaucoup de raison ; ou « Untel n’a pas de religion » pour dire : il n’a pas une religion parfaite. 342196 d. — Le ḥadīṯ : « Quiconque déclare : Il n’y a d’autre divinité que Dieu, est promis au paradis, même s’il commet l’adultère et le vol » suppose l’une ou l’autre des deux explications suivantes : 1) il peut avoir dit cela en considération des conséquences ; c’est-à-dire : la conséquence de sa conduite sera le paradis, même s’il est puni pour avoir forniqué et volé ; 2) ou encore il peut bénéficier de la miséricorde divine et de l’intercession du Prophète, et entrer au paradis grâce au témoignage qu’il n’y a d’autre divinité // que Dieu.
100
291 Cette sentence ne paraît pas avoir été retenue par les compilateurs. 343196 e. — J’ai entendu Isḥāq b. Ibrāhīm b. Ḥabīb b. al-Šahīd — son père — son grand père — al-Ḥasan dire que la formule : Il n’y a d’autre divinité que Dieu est le prix du paradis291.
292 Cf. TIR. 34, 27. 344J’ai entendu Muḥammad b. Yaḥyā al-Qaṭa’ī — ‘Umar b. ‘Alī — Mūsā b. al-Musayyab al-Ṯaqafī — Sālim b. Abī l-Ğa’d — al-Ma’rūr b. Suwayd — Abū Ḏarr : Le Prophète a dit : Votre Seigneur a dit : — Fils d’Adam, m’apporter l’équivalent de la terre serait une erreur ; si seulement tu ne M’associes personne, je t’accorderai son équivalent en pardon ; sans M’occuper du reste »292.
293 ḤAN. II, 75 ; IV, 404… ; V, 232, etc… 345J’ai entendu Abū Mas‘ūd al-Dārimī, descendant de Ḫirāš — son grand père — Anas b. Mālik : Le Prophète a dit : « Il m’a été donné de choisir entre [la faculté] d’intercession et l’admission [d’office] de la moitié de ma communauté au paradis. J’ai choisi l’intercession, car elle est plus générale et plus large. Peut-être pensez-vous qu’elle est réservée à ceux qui craignent Dieu ? Pas du tout : elle concerne tous ceux qui sont entachés de péchés »293.
XXXVII. — EXEMPLE DE DEUX ḤADĪṮ-S CONTRADICTOIRES 294 ḤAN. VI, 35, 43, 67, etc... 346197. — Proposition : Vous enseignez d’après Ḥammād — Ibrāhīm — al-Aswad — que ‘Ā’iša a dit : « Je frottais le sperme qui tachait le vêtement du Prophète afin qu’il puisse le revêtir pour prier »294. // Certains en ont déduit qu’il était licite de frotter le sperme sur le vêtement et de prier dans ce vêtement. Ils en ont fait une Sunna. 101
295 BUḪ. 4, 64, 65 = HM I, 92, 93 ; ḤAN. III, 485 ; VI, 47. 347D’autre part, vous rapportez d’après ‘Amr b. Maymūn b. Mihrān — Sulaymān b. Yasār : J’ai entendu ‘Ā’iša dire qu’elle lavait les traces de sperme [restées] sur le vêtement du Prophète. Elle aurait dit cela, puis lui aurait montré un ou plusieurs endroits sur le vêtement en question295. 348Certains se sont réclamés de cette tradition pour refuser de frotter les traces de sperme, et ne considèrent comme licite que le lavage du vêtement dans lequel on veut faire la Prière. Il y a là divergence et contradiction. 349198. — Réponse : Nous prétendons qu’il n’y a là ni divergence, ni contradiction. En effet, ‘Ā’iša opérait par frottement lorsque le sperme était sec (on ne peut enlever par frottement 350que ce qui est sec). En effet, du sperme restait parfois sur son sous-vêtement jusqu’à ce qu’il fût sec (le sperme sèche vite, surtout l’été). Mais elle le lavait lorsqu’elle constatait qu’il était encore humide : il est impossible d’ôter par frottement ce qui est humide. Il n’y a donc pas d’inconvénient à le laisser sécher, puis à l’ôter par frottement. 351217 J’ai appris d’Isḥāq b. Ibrāhim, dit Ibn Rāhawayh que la Sunna a fait une pratique courante de l’enlèvement du sperme par frottement. // ***
XXXVIII. — EXEMPLE DE DEUX ḤADĪṮ-S CONTRADICTOIRES 296 BUḪ. 72, 30 = HM IV, 20 ; ḤAN. I, 227, etc… 352199. — Proposition : Vous enseignez que le Prophète a dit : « Toute peau brute devient pure après tannage ». Il passa près d’une brebis morte et dit : « N’allez-vous pas vous servir de sa 102
peau ? »296. Certains juristes ont adopté cette façon de voir et ont rendu leurs consultations en ce sens.
297 ḤAN., IV, 310, 311. 353D’autre part, vous enseignez qu’il a dit : « Ne vous servez ni de la peau ni des nerfs d’une bête non égorgée rituellement »297. Certains juristes ont admis cela et ont jugé en conséquence. Il y a là contradiction et divergence.
298 Tāğ, I, 152, précise qu’il s’agissait de peaux « en cours de tannage » (fī dibāġihā) ; = Lisān, I, (...) 354200. — Réponse : Nous prétendons qu’il n’y a là grâce à Dieu ni contradiction, ni divergence, car le mot ihāb en arabe désigne toute peau qui n’a pas été tannée. Lorsqu’elle est tannée, ce mot devient impropre. Le ḥadīṯ dit que ‘Umar entra [un jour] chez le Prophète, dans la maison duquel se trouvaient des peaux brutes nauséabondes
—
c’est-à-dire
des
peaux
non
tannées
et
puantes298.
299 Cf. Lisān, I, 211. 355’Ā’iša a dit à propos de son père : « Il laissa des têtes sur les épaules et empêcha des peaux de se vider de leur sang »299, c’est-à-dire des corps. Elle utilisa donc le mot ihāb (peau) pour désigner des corps. Si le mot ihāb avait désigné des peaux tannées, elle n’aurait pu utiliser cette métaphore. 356218 Al-Nabiġa al-Ğa‘dī dit au sujet d’une vache sauvage qui s’était // éloignée de son petit, puis en revenant l’avait trouvé dévoré par un loup :
300 Ši‘r, 95. Texte : wa-lāqat ; Ši‘r : fa-lāqat. « Elle
trouva
comme
preuve
au
premier
coup
une peau et des débris d’entrailles sanguinolents »300. 103
d’œil
357Le Prophète a dit : « Toute peau brute devient pure après tannage ». Passant devant une brebis morte, il demanda : « Ses propriétaires ne se sont-ils pas servi de sa peau ? » Il voulait dire : Ne l’ont-ils pas tannée et utilisée ? 358Par la suite, il prescrivit : « Ne vous servez pas de la peau ni des nerfs d’une bête non égorgée rituellement », c’est-à-dire : Ne vous en servez pas tant qu’elle est brute, tant qu’elle n’est pas tannée. J’en veux pour preuve l’allusion faite aux nerfs, car les nerfs ne se tannent pas. Or il les a associés à la peau brute, non tannée.
301 ḤAN. I, 227. 359Ceci ressort clairement du ḥadīṯ : rapporté par Ibn ‘Uyayna — al-Zuhrī — ‘Ubayd Allāh b. ‘Abd Allāh — Ibn ‘Abbās et déclarant que le Prophète, passant auprès d’une brebis [morte] appartenant à une affranchie de Maymūna, demanda : « N’ont-ils pas pris sa peau pour la tanner et s’en servir ? »301. ***
XXXIX. — EXEMPLE DE DEUX ḤADĪṮ-S CONTRADICTOIRES 302 ḤAN. VI, 101. 360201. — Proposition : Vous rapportez d’après al-Aš‘at — Muḥammad b. Sīrīn — ‘Abd Allāh b. Šaqīq — que ‘Ā’iša dit : « Le Prophète ne faisat pas la Prière dans notre linge de corps ni dans nos draps »302.
303 Tāğ, V, 221 : vêtement léger de laine, de soie ou de lin servant d’izār. Tāğ ajoute que dans ce ḥad (...)
304 Cf. BUḪ. 6, 4, 21, 22 = HM I, 111, 119, 120, où l’héroïne de cette histoire est Zaynab, et non ‘Ā’i (...)
104
361Par ailleurs, vous rapportez d’après Wakī‘ — Ṭalḥa b. Yaḥyā — // ‘Ubayd Allāh b. ‘Abd Allāh b. ‘Utba que ‘Ā’iša a dit : « Le Prophète faisait la Prière la nuit à mes côtés. J’avais mes menstrues, et j’étais recouverte d’un mirṭ303 qui le recouvrait en partie aussi »304. 362Il y a là contradiction et divergence.
305 BUḪ. 64, 56 = HM III, 196 ; ḤAN. II, 419, etc… 363202. — Réponse : Nous prétendons qu’il n’y a entre ces deux ḥadīṯ-s ni divergence ni incompatibilité. En effet, il est dit dans le premier ḥadīṯ : Il ne faisait pas la Prière dans nos šu‘ur. Le mot šu‘ur est le pluriel de ši‘ār qui désigne tout linge de corps. On ne peut appeler ši‘ār que le linge qui est en contact avec le corps. J’en veux pour preuve la phrase du Prophète aux Anṣār : « Vous êtes pour moi un ši‘ār, et les [autres] hommes sont mon diṯār »305. Il voulait dire : « Vous êtes les hommes les plus proches de moi, tout comme le ši‘ār qui est en contact avec le corps ; les autres sont mon diṯār, c’est-à-dire qu’ils sont plus loin de moi, tout comme le diṯār se met par dessus le ši‘ār ». C’est le ši‘ār qui reçoit le sperme, la transpiration, l’humidité, lorsque l’individu
a
encore
une
goutte
d’urine
ou
se
souille
accidentellement. 364Donc, il ne faisait pas la Prière dans le linge de corps de ses femmes, qui pouvait avoir subi quelque souillure après le coït, ou si elles étaient enceintes ou avaient leurs menstrues. 365202 a. — Il est dit // dans le second ḥadīṯ : « Il faisait la Prière la nuit à mon côté, alors que j’étais recouverte d’un mirṭ qui le recouvrait aussi en partie ». Le mirṭ n’est pas une pièce de linge de corps, comme l’izār, par exemple. C’est un vêtement de laine, de poil ou de soie. Il se jette par dessus l’izār.
306 MUS. 44, 61 ; cf. ḤAN. VI, 99, 199. 105
307 Lisān, XIII, 295. On appellerait muraḥḥal tout vêtement sur lequel serait figuré un raḥl (selle). O (...) 366202 b. — Abū Muḥammad dit : Un autre ḥadīṯ nous éclaire sur ce point. Il est transmis par ‘Abda b. ‘Abd Allāh — Muḥammad b. Bišr al-‘Abdī — Zakariyā b. Abī Zā’ida — Muṣ‘ab b. Šayba — Ṣafiyya bint Šayba — ‘Ā’iša : Le Prophète sortit un matin vêtu d’un mirṭ muraḥḥal en poil noir306. Muraḥḥal signifie brodé. On appelle ce genre de travail le tarḥīl307. Imru’ al-Qays dit en parlant de sa femme : « Je elle
l’emmenai traînait
derrière
en elle,
sur
marchant ; nos
pas,
le
pan
d’un mirṭ muraḥḥal ». 367Ce qui montre bien que le mirṭ n’était pas un vêtement de corps de ‘Ā’iša, c’est qu’elle dit : « Il faisait la Prière ayant sur lui une
partie
du mirṭ qui
me
recouvrait ».
Si
le mirṭ était
un ši‘ār, elle se serait trouvée découverte, car le ši‘ār est un vêtement léger impropre à recouvrir le Prophète pendant sa Prière tout en enveloppant ‘Ā’iša. ***
XL. — EXEMPLE D’UN ḤADĪṮ INFIRMÉ PAR LE RAISONNEMENT ET LA SPÉCULATION 308 Ḏū Arwān ou Ḏarwān. Lisān, XVII, 52 et Tāğ, IX 231 ne savent de ce puits que ce qu’en dit Ibn Qutay (...)
309 BUḪ. 59, 11 = HM II, 446 ; 76, 47 = HM IV, 85, etc… ; ḤAN. VI, 57 ; cf. ḤAN. IV, 367, etc…
310 Coran, XLI, 42.
311 Coran, LXXII, 26-27. 368203. — Proposition : Vous enseignez // que le Prophète fut l’objet d’une pratique de sorcellerie, et que l’instrument de cette 106
pratique fut jeté dans le puits de Ḏū Arwān308. ‘Alī le récupéra, et chaque fois qu’il en dénouait un nœud, le Prophète retrouvait [un peu] d’énergie. Enfin, le Prophète se leva comme si on lui avait ôté des entraves309. Ceci est incompatible avec la qualité de Prophète de Dieu, car la sorcellerie est de l’infidélité, et, à ce que l’on dit, œuvre démoniaque. Comment le Démon aurait-il pu se frayer un chemin jusqu’au Prophète, malgré la protection que Dieu lui accordait, malgré les anges qui le guidaient en Son nom, et malgré le soin avec lequel Il préservait la révélation contre l’œuvre du Démon ? Dieu a dit dans le Coran : « Le Faux ne s’y glisse ni par devant, ni par derrière »310 ; vous prétendez que « le Faux » désigne ici le Démon. Le Coran dit encore : « Il sait l’inconnaissable
et
il
ne
met
personne
au
fait
de
cet
inconnaissable, excepté ceux qu’il agrée comme émissaires et ceux qui cheminent, gardés par devant et par derrière »311, ce qui signifie : Il place devant lui et derrière lui une escorte d’anges qui le protègent // et préserve la révélation des éléments étrangers que le Démon pourrait y introduire.
312 Texte : tamā’im (amulettes) ; l’éd. signale une leçon namā’im qu’on a adoptée car d’une part le mot (...) 369203 a. — [Les rationalistes] pensent que la « sorcellerie » [n’est autre] qu’une ruse amenant l’homme à se détourner de son frère, et le mari à éviter sa femme, de la même nature que les entreprises calomnieuses312 et le mensonge. Ils disent : C’est là du sortilège, et c’est aussi du sortilège que relève la drogue administrée à un homme pour l’éloigner des femmes, changer sa nature et faire tomber ses cheveux et sa barbe.
313 Coran, XX, 66. 370Ils pensent que les magiciens de Pharaon firent voir à Moïse des choses imaginaires, et disent : Lorsque par exemple on prend 107
du mercure, qu’on l’introduit dans une enveloppe ayant la forme d’un serpent et qu’on l’expose à la chaleur, l’objet rampe comme un serpent. Ils en voient une preuve évidente dans le verset : « Et voici qu’il lui sembla que, du fait de leur sortilège, les cordes et les bâtons qu’ils tenaient rampaient »313. Pour eux, ce n’est là que de l’illusionnisme, sans rien de réel.
314 Coran, II, 102.
315 BAYḌĀWĪ ne signale pas cette lecture. Il signale toutefois « malikayn » (les deux rois). D’autre pa (...)
316 Il s’agissait donc pour les Mu‘tazilites de ramener ce verset à une interprétation matérialiste. 371Pour
ce
qui
est
du
verset :
« Ils
ont
suivi
ce
que
communiquaient les démons, sous le règne de Salomon. Salomon ne fut pas infidèle, mais les démons furent infidèles. Ils enseignaient aux hommes la sorcellerie et ce qu’on avait fait descendre, à Babylone, sur les deux anges Hārūt et Mārūt »314,
unzila (ce qu’on avait fait descendre), mā // est une négation, et que l’expression signifierait « on n’a pas fait descendre ». Ils Usent en outre almilkayn, avec la voyelle i315. Ils rapportent qu’al-Ḥasan lisait ce verset de cette façon et disait : « Il s’agit de deux esclaves blancs de Babylone »316. ils
prétendent
que
dans mā
372204. — Réponse : Nous affirmons que leur opinion sur ce sujet s’oppose à celle des Musulmans, des Juifs, des Chrétiens et de tous les gens du Livre, et à celle de tous les peuples : Hindous — les plus férus de magie —, Byzantins et Arabes d’avant l’Islam ; elle est en outre contraire au Coran et en opposition avec lui, sans équivoque.
317 Coran, CXIII, 1-4.
108
373En effet, Dieu a dit à son Prophète : « Dis : — Je me réfugie auprès du Seigneur de l’aube, contre le mal de ce qu’il créa, contre le mal d’une obscurité quand elle s’étend, contre le mal de celles qui soufflent sur des nœuds »317. Il nous a donc révélé que les sorcières soufflaient sur des nœuds qu’elles avaient noués, tout comme crachent le sorcier et le faiseur d’amulettes. Les Qurayš appelaient la sorcellerie ‘iḍah. Le Prophète a maudit la ‘āḍiha et la musta‘ḍiha, c’est-à-dire la jeteuse de sorts et celle qui a recours à ses offices. // Le poète a dit : « Je me réfugie auprès de mon Seigneur contre celles qui soufflent dans les nœuds du sorcier menteur », c’est-à-dire les sorcières.
318 EI, s.v. Zakariyā, IV, 1270. Le Zacharie de l’Évangile est visiblement confondu avec le petit proph (...)
319 EI, s.v. Yaḥyā, IV, 1211. C’est une réminiscence de l’épisode d’Hérodias, Matt., 14 ; Marc, 6, 17 s (...)
320 Coran, IV, 157 ; les commentaires sont formels : šubbiha lahum fait allusion à une substitution. P. (...) 374204 a. — Ibn Numayr rapporte d’après Hišām b. ‘Urwa — son père — ‘Ā’iša (ce qui constitue un isnād sans reproche) que le Prophète déclara lorsqu’il fut victime du sortilège : « Deux hommes vinrent me trouver, dont l’un s’assit près de ma tête et l’autre près de mes pieds. L’un d’eux dit : — De quoi souffre ce pied ? — Il est ensorcelé ! — Qui l’a ensorcelé ? — Labīd b. alA’sam. — De quoi s’est-il servi ? — D’un peigne et de peignures, et d’un spathe de palmier mâle. — Et où est ce charme ? — Au puits de Ḏū Arwān… » Il n’y a rien là qui puisse profiter ni attirer des désagréments à quiconque, ni appeler sur le Prophète // faveurs ou louanges ; les transmetteurs de ce ḥadīṯ ne sont ni menteurs, ni suspects, ni hostiles au Prophète. On ne saurait nier que Labīd b. al-A‘ṣam, ce Juif, ait ensorcelé le Prophète : les Juifs 109
n’avaient-ils pas déjà tué Zacharie, fils d’Āḏan en sciant l’arbre dans lequel il se trouvait [caché] ? Wahb b. Munabbih ou un autre raconte que lorsque la scie lui entama les côtes, il gémit, et Dieu lui révéla : « Ou tu cesses de gémir, ou Je fais périr la terre et ses habitants ! »318. Ils ont ensuite tué son fils Jean sur les racontars et les menées tortueuses d’une mauvaise femme319. Ils ont encore prétendu avoir tué et crucifié le Messie. N’était que Dieu a dit : « Ils ne l’ont ni tué, ni crucifié, ce n’était qu’un sosie »320, nous ne saurions pas, pour notre part, que ce n’était qu’une apparence, car les Juifs étaient ses ennemis. Or les Juifs prétendent [l’avoir effectivement tué], et les Chrétiens, ses adeptes, les suivent sur ce terrain. Ils ont donc tué des prophètes, ils en ont fait bouillir, et ils en ont tourmenté de toutes les manières. Si Dieu avait voulu, Il les aurait protégés contre eux.
321 BUḪ. 58, 7 = HM II, 412 ; 64, 41 = HM III, 171 ; ḤAN. II, 451.
322 BUḪ. 64, 83 = HM III, 238. Cf. muškil, 118.
323 Texte : ‘alā l-nabiyyīn, qui est incompatible avec ce qui précède. Il faut lire : ‘alā-l-nabī. 375204 b. — Le Prophète fut intoxiqué par un gigot de mouton rôti qu’une Juive avait empoisonné. Le poison ne cessa de le tourmenter périodiquement jusqu’à sa // mort321. Il disait : « Le repas de Ḫaybar n’a cessé de me tourmenter périodiquement ; voici le moment où va s’arrêter mon artère »322. Dieu a donc permis à cette Juive de trouver un moyen de tuer le Prophète. Auparavant, Il ne leur avait pas donné le moyen de nuire au Prophète323. 376Or jeter un sort est une affaire plus facile que de tuer, de faire bouillir ou de tourmenter quelqu’un.
324 Coran, XXII, 52. 110
325 Cette anecdote est [relatée en détail dans BAYḌĀWĪ, 447, après le commentaire du verset. Il s’agit (...)
326 Coran, XXII, 52, suite.
327 Coran, XXII, 53. 377Si [les rationalistes] contestent cela sous le seul prétexte que Dieu n’a pas permis au Démon de se frayer un chemin jusqu’au Prophète Muḥammad ou jusqu’aux autres prophètes, ils peuvent néanmoins lire dans le Coran : « Avant toi, Nous n’avons envoyé nul Apôtre et nul prophète sans que le Démon jetât [l’impureté] dans leur souhait lorsqu’ils le formulaient »324, c’est-à-dire : jetât l’impureté dans leur prédication. [Ce verset était destiné] à consoler le Prophète des incongruités que le Démon lui avait fait proférer lorsqu’il récita au cours de la Prière : « Ce sont les Déesses sublimes, et leur intercession est espérée »325. Or il lui est impossible d’ajouter ou de retrancher quoi que ce soit à la [révélation]. Dieu n’a-t-Il pas dit ensuite : « Dieu abrogera donc ce que le Démon jette [dans la révélation], puis Il confirmera ses signes »326, puis « [Dieu en a décidé ainsi] afin de faire de ce que jette le Démon une tentation pour ceux au cœur desquels est un mal »327. Ainsi en est-il du verset : // « Le faux ne s’y glisse ni par devant, ni par derrière », qui signifie : « Le Démon ne peut ajouter à [la révélation] ni au début, ni à la fin ».
328 Coran, II, 255, dont les vertus prophylactiques sont célèbres. Cf. BUḪ., 59, 11 = HM II, 447 ; 40, (...) 378204 c. — Abū Muḥammad dit : J’ai entendu Abū l-Ḫaṭṭāb — Bišr b. al-Mufaḍḍal — Yūnus — al-Ḥasan dire : Le Prophète a dit : « Gabriel vint à moi et me dit : — Un rebelle (’ifrīt) parmi les génies te guette. Lorsque tu te rends à ton lit, dis : « Dieu — nulle divinité excepté Lui — est le Vivant, le Subsistant… » et ainsi de suite jusqu’à la fin du verset du Trône328. 111
329 Coran, XXXVIII, 41. 379Dieu fait dire à Job : « Le Démon m’a touché d’une peine et d’un tourment »329. 380204 d. — Abū Muḥammad dit : Ils disent, à propos du tour de sorcellerie dont Moïse fut témoin, que c’était de l’illusionnisme et que cela n’avait rien de réel. Nous ne le nions pas et nous ne refusons pas [de l’admettre], car nous savons que si toutes les créatures rassemblaient leurs efforts pour créer un moustique, elles ne le pourraient pas. Mais nous ne saurions dire si ce tour consistait à mettre du mercure dans des peaux pour les faire ramper ou à employer un autre système. Seul un sorcier ou une personne mise dans le secret par les sorciers pourrait connaître la réalité des faits. //
330 Texte : laysa hāḏā bi-munkar min ta’wīlātihim ; var. signalée par l’éd. : laysa hāḏā bi-awwali ta’w (...) 381204
e.
—
Dans
le
verset
« Et
ils
suivirent
ce
que
communiquaient les démons… Ils enseignaient aux hommes la sorcellerie… etc. », ils prétendent qu’il faut comprendre (au lieu de : « ce qu’on avait fait descendre, à Babylone, sur les deux anges) : « on n’avait pas fait descendre, à Babylone, sur les deux anges ». Ceci est bien dans le style330 de leurs interprétations impossibles et à contre sens. Car si une telle révélation n’est pas descendue sur les deux anges Hārūt et Mārūt à Babylone, la phrase est superflue et n’a pas de sens. Une telle interprétation ne serait admissible que si quelqu’un avait prétendu que la sorcellerie fut révélée aux deux anges, et qu’il y ait été fait mention ou allusion plus haut ; Dieu aurait alors pu dire : « Ils ont suivi cela, mais cela n’a pas été révélé aux deux anges », comme ils le suggèrent.
112
382Supposons que quelqu’un dise d’emblée : « J’ai enseigné le Coran à cet homme, et ce qui ( mā) a été révélé à Moïse ». En entendant cela, personne n’imaginerait que l’on veut dire « Le Coran n’a pas été révélé à Moïse », car nul n’avait dit auparavant que le Coran a été révélé à Moïse. Chacun comprendrait : « Je lui ai enseigné le Coran et la Thora ». 383L’interprétation de ce verset devient claire, selon nous, dès lors qu’on connaît l’anecdote historique relatée à son sujet.
331 Allusion à Coran, XXXVIII, 34 où les commentateurs expliquent que le « fantôme » (ğasad) était un d (...)
332 Allusion à Coran, XXXVIII, 36-37. 384204 f. — Bref, d’après Ibn ‘Abbās, lorsque Salomon // fut puni et que le Démon prit sa place sur le trône331, les [autres] démons furent enterrés dans son trésor et dans son oratoire par sortilège, magie et charme. Lorsque Salomon mourut, les démons vinrent chez les hommes et leur dirent : « Ne [voulez-vous pas que] nous vous montrions le charme par lequel le vent et les génies furent soumis à Salomon332, et grâce auquel les hommes lui obéirent ? » Ils acceptèrent. Alors ils vinrent à son oratoire et au lieu de son trône, et en retirèrent le charme en question. Les docteurs d’Israël dirent : « Cela est incompatible avec la religion de Dieu : Salomon n’était pas un sorcier ! » Mais le vulgaire dit : « Salomon était bien plus savant que nous ! Nous agirons comme il l’a fait ! » C’est pourquoi Dieu a dit : « Ils ont suivi ce que communiquaient les démons sous le règne de Salomon », ce qui signifie : Les Juifs suivirent ce que rapportaient les démons. Les mots tilāwa (communication) et riwāya (rapport) sont synonymes. Dieu dit ensuite : « Salomon ne fut point infidèle, mais les démons furent infidèles. Ils enseignèrent aux hommes la sorcellerie et ce qu’on avait fait descendre sur les deux anges ». 113
333 Légende célèbre, sur laquelle voir Tarbī‘, 46, d’après EI, IV, 1309 (HARTNER). 385204 g. — Il s’agit de deux anges qui furent envoyés sur la terre // lorsque les fils d’Adam eurent désobéi, afin de juger entre les hommes. L’amour des femmes fut jeté en leur cœur, mais il leur fut ordonné de ne pas forniquer, de ne pas tuer et de ne pas boire du vin. Alors Vénus vint se plaindre à eux, et elle leur plut. Ils la désirèrent, mais elle se refusa à eux jusqu’à ce qu’ils lui eussent enseigné le nom grâce auquel ils [avaient le pouvoir] de monter au ciel. Ils le lui révélèrent donc, mais elle se refusa encore jusqu’à ce qu’ils eussent bu du vin. Ils en burent, et obtinrent ce qu’ils désiraient. En la quittant, ils rencontrèrent un homme et le tuèrent ; pensant qu’il les avait surpris. C’est alors que Vénus prononça le nom, monta au ciel et disparut. Dieu la métamorphosa en astre, et fut irrité contre les deux anges. Il les appela Hārūt et Mārūt, et leur donna le choix entre le tourment de la terre et le tourment de l’autre monde. Ils choisirent le tourment de la terre ; ce sont eux qui enseignent aux hommes le moyen d’éloigner le mari de sa femme333. A ce que croient les partisans de la spéculation (mais Dieu seul le sait), ce que Dieu fit « descendre sur les deux anges », c’est le Nom suprême qui permit à Vénus de monter au ciel et qui, avant que Dieu ne s’irritât contre eux, le leur permettait à eux-mêmes. Elle le révéla aux démons, qui l’enseignent à leur tour à leurs adeptes, en même temps que la sorcellerie. // On entend dire parfois que tel ou tel sorcier prononce certaines paroles qui [lui permettent] de voler entre ciel et terre et de marcher sur les eaux.
334 C.-à-d. probablement : changez de méthode ! 386204 h. — Abū Muḥammad dit : J’ai entendu Zayd b. Aḫzam alṬā’ī — ‘Abd al-Ṣamad — Hammām — Yaḥyā b. Katīr dire que le gouverneur du ‘Umān écrivit à ‘Umar b. ‘Abd al-‘Azīz : « On nous 114
a amené une sorcière ; nous l’avons jetée à l’eau, mais elle a surnagé ». Alors ‘Umar b. ‘Abd al-‘Azīz lui répondit : « Si la preuve testimoniale est établie, nous n’avons rien à voir avec l’eau !334. Sinon, relâchez-la ! » 387J’ai entendu Zayd b. Aḫzam al-Ṭā’ī — ‘Abd al-Ṣamad — Zayd b. Abī Laylā — ‘Umayra b. Šukayr dire : « Nous étions avec Sinān b. Salamā au Baḥrayn. On lui amena une sorcière. Il la fit jeter à l’eau, mais elle flotta ; il ordonna de la crucifier, mais elle nous tint à distance. Alors arriva son mari, semblable à une broche rongée par le feu. [Sinān] lui dit : — Ordonne-lui de se délivrer de moi ! L’homme dit alors : — Délivre-toi de lui ! Elle répondit : — Soit ! mais il me faut une porte et du fil. Elle s’assit sur la porte, et se livra à des pratiques de sorcellerie en nouant le fil. Alors, la porte s’éleva en l’air. // On chercha à la retenir à droite et à gauche, mais sans succès.
335 Variante : Muḥammad b. Muslim b. Sālim al-Ṭā’ī. 388J’ai entendu Abū Ḥātim — al-Aṣma‘ī — Muḥammad b. Muslim b. Sawsan al-Ṭā’ifī335 déclarer dans un ḥadīṯ que les démons ne peuvent pas changer leur nature physique, mais qu’ils [modifient leur aspect] par des sortilèges. 389J’ai entendu Abū Ḥātim — al-Aṣma‘ī — Abū ‘Amr b. al-‘Alā’ dire que les ġūl-s sont des génies sorciers.
336 BUḪ. 60, 50 = HM II, 521. 390J’ai entendu Abū l-Ḫaṭṭāb — al-Mu‘tamir b. Sulaymān — Mansūr — Rib‘ī b. Ḫirāš — Ḥuḏayfa rapporter que le Prophète a dit : « Je sais fort bien les circonstances qui accompagneront l’Antéchrist : il est accompagné d’un feu dévorant et d’un fleuve d’eau froide. Celui d’entre vous qui le verra, qu’il ne périsse point pour autant. Qu’il ferme les yeux et se précipite dans ce qui lui
115
semblera être un feu, car ce sera en réalité un fleuve d’eau froide »336.
337 Cf. EI, II, 289, s. Hārūt et Mārūt (WENSINCK), qui signale que d’après QAZWĪNĪ (‘Ağā’ib al-maḫlūqāt (...) 391204 i. — J’ai entendu Abū Ḥātim — al-Aṣma‘ī — Abū l-Zanād dire : Une femme vint demander une consultation. Elle constata que le Prophète était déjà mort et ne trouva // qu’une de ses femmes, qui, paraît-il, était ‘Ā’iša. Elle lui dit : « Mère des Croyants, une femme m’a demandé : — Veux-tu que je t’aide à attirer sur toi l’attention de ton époux ? » Je crois que le narrateur a ajouté : Elle apporta deux chiens. Elle monta sur l’un d’eux et moi sur l’autre. Nous allâmes ainsi un moment, puis elle dit : — Sais-tu que tu es à Babylone ? » La femme entra alors chez un homme (ou deux hommes) qui lui dirent : « Urine dans cette cendre ! » Elle ajouta : « Je me rendis à l’écart, mais n’urinai pas ; puis je revins. Les deux hommes me demandèrent ce que j’avais vu. Je dis : — Je n’ai rien vu ! Alors ils insistèrent : — C’est de toi que cela dépend ! Alors je m’éloignai encore et fis effort pour uriner. Je réussis, et il sortit de moi quelque chose qui ressemblait à un cavalier voilé qui monta vers le ciel. Je revins vers eux et ils me demandèrent encore ce que j’avais vu. Je le leur racontai. Ils dirent : — C’est ta foi qui t’a abandonnée. Je sortis alors pour rejoindre cette femme et je lui dis : Ma foi ! Je n’ai rien vu ; ils ne m’ont rien appris et ils ne m’ont pas dit comment faire. Elle me demanda : — Qu’as-tu vu ? Je lui rapportai l’affaire et elle s’exclama : — Tu es la plus douée pour le sortilège qui soit parmi les Arabes ! Agis et fais des vœux ! » La narratrice ajouta : « Alors elle traversa des ruisseaux [d’irrigation ?] en disant : — Qu’il y ait des champs ! Et voilà que des céréales se mirent à onduler. Elle dit : // — Qu’il soit mûr et bon à battre ! Et les grains séchèrent. Elle en prit, les frotta et m’en donna en disant : — Mouds cela, 116
fais-en une bouillie (sawīq) et fais-la absorber à ton mari. Je n’en fis rien et les choses en restèrent là. Puis-je espérer revenir dans le droit chemin ? » En disant cela, elle vit un homme de Ḫuzā‘a lui demeurait à Amağ. Elle dit : « Mère des Croyants, cet homme ressemble trait pour trait à Hārūt et Mārūt »337. 392Abū Muḥammad dit : Cette histoire est rapportée par Ibn Ğurayğ — Ibn Abī Mulayka — ‘Ā’iša. 393204 j. — Abū Muḥammad dit : Ce sont là choses auxquelles nous ne croyons pas, ni en vertu de l’analogie, ni en vertu du raisonnement. Nous y croyons seulement à cause des Livres [révélés] et des traditions historiques relatives aux prophètes, et parce que les peuples de tous les temps sont d’accord là-dessus, à l’exception de ces gens qui ne croient qu’en ce que leurs yeux voient, en vertu de la spéculation et de l’analogie. 394En ce qui concerne l’opinion d’al-Ḥasan prétendant qu’il s’agissait
de
deux
esclaves
blancs
de
Babylone
et
lisant milkayn avec la voyelle i, il est le seul lecteur à être de cet avis, et à ce que je sais le seul // exégète. C’est une des lectures les plus suspectes et les moins spontanées. Comment se pourrait-il que soit révélé à deux esclaves blancs une chose leur permettant de désunir le mari et la femme ? ***
XLI. — EXEMPLE DE DEUX ḤADĪṮ-S INCOMPATIBLES ET CONTRADICTOIRES 338 Cf. ḤAN. I, 184 et surtout ḤAN. II, 182, 212. 395205. — Proposition : Vous enseignez que le Prophète a dit : « Pas de prophète après moi, et pas de communauté après la mienne ; le ḥalāl est ce que Dieu a déclaré licite par ma bouche, et ceci jusqu’au jour du Jugement ; le ḥarām est ce que Dieu a
117
déclaré interdit par ma bouche, et ceci jusqu’au jour du Jugement »338.
339 BUḪ. 34, 102 = HM II, 51 ; 46, 31 = HM II, 152 ; ḤAN. II, — 240 etc…
340 Cf. BUḪ. 61, 18 = HM II, 548 ; 65, s. 17, n. 5 = HM III, 364. 396D’autre part, vous déclarez que le Messie descendra, tuera le porc, brisera la croix et augmentera ce qui est licite339. Vous rapportez que ‘Ā’iša a dit : « Dites en parlant du Prophète : — Le sceau des prophètes. Ne dites pas : — Il n’y aura pas de Prophète après lui »340. 397Il y a là contradiction.
341 Coran, XLIII, 61. Ce passage paraît confirmer la lecture ‘alam — au lieu de ‘ilm de la Vulgate — si (...)
342 Il est difficile de déterminer le jeu de ‘alam - ‘ilm dans ce passage. L’éd. a cru pouvoir vocalise (...) 398206. — Réponse : Nous prétendons qu’il n’y a là ni divergence ni contradiction, car le Messie est un prophète antérieur que Dieu a élu, et qu’il fera descendre à la fin des temps comme signal (‘alam) de l’Heure. Dieu a dit : « C’est un signal de l’Heure. Ne contestez
pas celle-ci ! »341. Un « lecteur » lit : ‘alam (ou
‘ilm)342. Lorsque le Messie descendra, rien de ce qui a été révélé à Muḥammad ne sera abrogé. // L’imām de sa communauté ne se mettra pas en avant, mais il le mettra en avant et fera la Prière derrière lui. 399Pour l’expression « et il augmentera ce qui est licite », je rappellerai qu’un homme ayant dit à Abū Hurayra : « En fait de licite, il n’augmentera que [le nombre] des femmes ! », Abū Hurayra s’exclama : « Tiens ! » puis se mit à rire. 118
343 Ibn Qutayba fait ici d’une pierre deux coups. En réfutant les Mu‘-tazilites, il réfute aussi le dog (...) 400206 a. — Abū Muḥammad dit : L’expression « il augmentera ce qui est licite » ne signifie nullement qu’il autorisera l’homme à épouser cinq ou six femmes. Elle signifie seulement que le Messie n’avait épousé aucune femme jusqu’à ce que Dieu le rappelât à Lui. Mais lorsqu’il l’enverra sur terre, il épousera une femme et augmentera ce que Dieu a rendu licite pour lui, c’est-à-dire qu’il y ajoutera quelque chose. Il ne restera alors personne parmi les gens du Livre qui ne sache que le Messie est un serviteur de Dieu et ne soit convaincu que c’est un être humain343. 401206 b. — Lorsque ‘Ā’iša disait : « Dites qu’il est le sceau des prophètes, mais ne dites pas qu’il n’y aura pas de prophète après lui ! », elle pensait à la descente ( nuzūl) de Jésus ; ceci n’est nullement incompatible avec les paroles du Prophète : « Pas de prophète après moi », qui signifient : « Il n’y aura pas après moi de prophète pour abroger ce que j’ai révélé, comme les [anciens] prophètes
qui
étaient
envoyés
pour
abroger
[les
textes
antérieurs] ». ‘Ā’iša voulait dire : « Ne dites pas que le Messie ne viendra pas après lui ». // ***
XLII. — EXEMPLE DE DEUX ḤADĪṮ-S INCOMPATIBLES ET CONTRADICTOIRES 344 BUḪ. 38, 3 = HM II, 74 ; 39, 3 = HM II, 77, etc… ḤAN. II, 290, 380, etc… 402207. — Proposition : Vous enseignez que le Prophète ne faisait pas la Prière des morts sur un débiteur qui n’avait pas laissé de quoi honorer sa dette344.
345 BUḪ. 65, s. 33, ch. 1 = HM III, 416 ; 69, 15 = HM III, 652 ; ḤAN. II, 287, 290, etc… 119
346 BUḪ. 69, 15 = HM III, 652. 403D’autre part, vous enseignez qu’il a dit : « Quiconque laisse de l’argent, c’est pour sa famille ; quiconque laisse une dette, je la prends à ma charge »345. Un autre ḥadīṯ dit : « Si quelqu’un laisse des personnes à charge (kall), [elles passent à la charge] de Dieu et de son Prophète »346. Par « personnes à charge », il faut entendre une famille pauvre, des enfants sans tuteur. Comment pouvait-il refuser de faire la Prière sur une personne dont il prenait les dettes à sa charge, ainsi que les enfants et la famille, après sa mort ? Il y a là contradiction. 404208. — Réponse : Nous prétendons qu’il n’y a pas là contradiction, grâce à Dieu. En effet, il refusait de faire la Prière sur un débiteur qui n’avait pas laissé de quoi régler sa dette au début de l’Islam, avant que les conquêtes ne se développassent et que l’argent n’affluât. Il voulait que les gens ne traitassent point une dette trop à la légère et n’empruntassent point de l’argent qu’ils eussent été incapables de rembourser. Mais lorsque Dieu accorda du butin, lorsque les conquêtes s’étendirent et que l’argent afflua, il réserva une part du butin aux pauvres, et pour que les descendants pussent prélever le montant des dettes du Musulman décédé.// ***
XLIII. — EXEMPLE DE DEUX ḤADĪṮ-S INCOMPATIBLES ET CONTRADICTOIRES 347 ḤAN. III, 61. 348 C.-à-d. 4 fois, puisque quatre témoins à charge sont requis. Cf. WENSINCK, Hwb., 826, s. Zinā’. 405209. — Proposition : Vous enseignez que le Prophète ne lapida pas Māiz avant qu’il n’ait avoué devant lui par quatre fois être coupable d’adultère. Il se détournait à chaque fois, puis il le lapida 120
à la quatrième347. Certains de vos jurisconsultes ont adopté cette procédure et disent : « Nous ne décrétons pas la lapidation tant qu’il n’y a pas eu aveu autant de fois qu’il y a de témoins à charge348. Telle était la doctrine de ‘Alī b. Abī Ṭālib.
349 BUḪ. 53, 5 = HM II, 234 ; 54, 9 = HM II, 246 ; 83, 3 = HM IV, 331, etc… 406D’autre part, vous dites que deux hommes se présentèrent devant le Prophète et que l’un d’eux déclara : « Mon fils était journalier chez cet homme et il a forniqué avec sa femme. J’ai payé pour lui une amende compensatoire de cent moutons et d’un serviteur. Nous avons interrogé ensuite des docteurs qui ont décrété que mon fils devait recevoir cent coups de verges et être banni pendant un an. Quant à la femme, elle devait être lapidée ». Le Prophète dit : « Par Celui qui tient mon âme dans Sa main, je jugerai entre vous conformément au Livre de Dieu : les cent moutons et le serviteur te seront rendus ; ton fils recevra cent coups de verges et sera banni pendant un an ; la femme sera lapidée ». Il rendit donc cette sentence et dit : « Va, Unays, auprès de cette femme ; si elle avoue, lapide-la ! » Elle avoua et fut lapidée349. 407Mais nul n’a jamais dit qu’il ait ajouté « quatre fois » à telle // ou telle occasion. 408Ceci est en contradiction avec le ḥadīṯ relatif à Mā‘iz.
350 MĀLIK, 41, 12. 409210. — Réponse : Nous prétendons qu’il n’y a là, grâce à Dieu, ni divergence, ni contradiction. En effet, si le Prophète s’est détourné de Mā‘iz quatre fois de suite, c’est en réalité parce qu’il lui répugnait pour s’être accusé lui-même de fornication et avoir ainsi arraché le voile, et non parce qu’il voulait qu’il avouât quatre fois de suite. Il voulait aussi apaiser sa conscience dans cette 121
affaire, et savoir si c’était vrai, ou s’il était possédé d’un génie ; mais le résultat de sa tentative fut le même par quatre fois. S’il avait été le même deux, trois, cinq ou six fois, cela n’aurait pas constitué une preuve décisive. Je veux pour preuve de sa répugnance à l’aveu du fornicateur devant lui le ḥadīṯ rapporté par Mālik — Zayd b. Aslam au sujet d’un homme qui avoua être coupable d’adultère au temps du Prophète. Il le fit flageller, puis il déclara : « O gens ! Le temps est venu pour vous d’en finir avec les peines légales fixées par Dieu. Celui d’entre vous qui commettra cette malpropreté, qu’il se cache derrière le voile de Dieu ; car s’il en est un qui nous ouvre sa page, on lui appliquera [la sanction prévue par] le Livre de Dieu »350.
351 IBN MĀĞA, 21, 36. 410210 a. — Un autre ḥadīṯ de Yaḥyā b. // Sa‘īd — Hišām alDustuwa’ī — Yaḥyā b. Abī Kaṯīr — Abū Qilāba — Abū l-Muhallab — ‘Imrān b. Ḥuṣayn prouve aussi que l’aveu peut intervenir plus ou moins de quatre fois dans le cas où il est impossible de douter de la réalité des faits : « Nous étions avec le Prophète lorsqu’arriva une femme de Ğuhayna enceinte par adultère. Elle dit : O Envoyé de Dieu ! j’ai mérité la peine légale : applique-la moi ! Alors le Prophète fit appeler son tuteur et lui ordonna de la bien traiter et de la lui amener lorsqu’elle serait délivrée de son fardeau. Il la lui amena donc après l’accouchement, et le Prophète lui ordonna de nourrir son enfant, et de revenir après le sevrage. Le tuteur la lui amena le moment venu. Le Prophète fit déchirer ses vêtements et la fit lapider. Puis il récita sur elle la Prière des morts. Nul ne dit dans ce ḥadīṯ qu’elle avoua quatre fois351. 411C’est donc la confirmation du ḥadīṯ où le Prophète dit : « Unays, va vers cette femme et si elle avoue, lapide-la ! »
352 Ce dernier trait ne figure pas dans le ḥadīṯ de Mā‘iz, ḤAN. III, 61. Toutefois, voir un exemple de (...) 122
353 Tawqīt peut être synonyme de taqdīr sans aucune idée de temps. Cf. LAOUST, Qudāma, 255, note 1, qui (...) 412210 b. — J’en veux pour preuve aussi que lorsque Mā‘iz b. Mālik fut lapidé, il fut très déprimé et chercha à s’enfuir. On le lapida donc, puis on rapporta au Prophète qu’il avait été très déprimé. Le Prophète dit alors : « Pourquoi ne me l’avez-vous pas ramené afin que j’examine son cas ? »352. Si le fait d’avouer quatre fois était la condition nécessaire et suffisante pour l’application de la sanction, la phrase du Prophète : « Pourquoi ne me l’avez-vous pas ramené ? » n’aurait pas de raison d’être, car il venait de lui appliquer la sentence de Dieu et il n’aurait pas été licite, // après le quadruple aveu, d’admettre une rétractation éventuelle. Par contre, si l’aveu n’était assorti d’aucune définition légale353, il lui était loisible de se rétracter quand il le voulait et le Prophète pouvait l’admettre. *** [N.B. Les [trois] chapitres suivants contiennent des exemples de prises
de
position
(aḥkām)
bénéficiant
du consensus, mais
infirmées par le Coran et servant d’arguments aux Ḫāriğites.]
XLIV. — EXEMPLE D’UNE PRISE DE POSITION SUR LA LAPIDATION INFIRMÉE PAR LE CORAN 354 Coran, IV, 25. 413211. — Proposition : Vous enseignez que le Prophète pratiqua la lapidation, et que les imām-s postérieurs l’imitèrent sur ce point. Or Dieu a dit au sujet des femmes esclaves : « Si elles commettent une turpitude, elles subiront la moitié du châtiment encouru par les muḥṣana »354. Or la lapidation consiste dans l’anéantissement de la personne, et ne saurait être divisée. Comment peut-on en appliquer la moitié aux esclaves ?
123
414Ils croient que la muḥṣana est une femme en puissance de mari, et disent : C’est bien là la preuve que la muḥṣana ne peut subir que la flagellation. 415212. — Réponse : Nous prétendons que si les muḥṣana étaient en l’occurrence des femmes en puissance de mari, leur thèse serait juste et cet argument s’y appliquerait. Mais les muḥṣanas ici ne
sont
autres
que
les
femmes
libres.
On
les
appelle muḥṣana même si elles sont vierges, car l’iḥṣān leur appartient et leur est inhérent, alors qu’il n’est pas inhérent aux esclaves. Le verset signifie donc : « Elles subiront la moitié du tourment encouru par les femmes libres », // c’est-à-dire les vierges.
355 Allusion à Coran, II, 71, où tuṯīru a le sens de « remuer la terre ». 416Les Arabes appellent parfois la vache muṯīra, alors même qu’elle n’a nullement « soulevé » (aṯāra) la terre, [simplement] parce que le fait de « soulever » la terre est le propre des bovins, à l’exclusion des autres animaux domestiques355.
356 C’est le mot employé dans Coran, II, 196. 417Les
Arabes
appellent
pâturage : hady, parce
les
chameaux,
qu’ils
constituent
[même]
au
l’offrande
(hady)356 qu’on guide vers la Ka‘ba. On les appelle ainsi même s’ils ne sont point destinés à l’offrande.
357 Le verset se termine par « comme esclaves croyantes ».
358 Puisqu’elles sont opposées aux esclaves. 418Un autre passage du même verset témoigne en faveur de notre interprétation du mot muḥṣana dans le sens de « femme libre et vierge » : « Quiconque parmi vous ne peut épouser par ses moyens des muḥṣana-s croyantes, [qu’il épouse] celles que vous 124
détenez… »357. Les muḥṣana-s sont ici les femmes libres358 et ce ne saurait être les mariées, puisqu’on n’épouse pas de femmes mariées. ***
XLV. — EXEMPLE D’UNE PRISE DE POSITION SUR LES DISPOSITIONS TESTAMENTAIRES INFIRMÉE PAR LE CORAN 359 ḤAN. IV, 186, 238 ; V, 266. 419213. — Proposition : Vous enseignez que le Prophète a dit : « Pas de disposition testamentaire en faveur de l’héritier »359.
360 Coran, II, 180. 420Or Dieu a dit : « Quand la mort se présente à l’un de vous, s’il laisse un bien, à lui de tester en faveur de ses père et mère et des plus proches »360. Mais les père et mère héritent de toute façon, et personne ne saurait avoir priorité sur eux pour percevoir l’héritage. Cette tradition est en contradiction avec le Coran. //
361 En réalité plusieurs versets : IV, 7-12.
362 Coran, IV, 13-14. 421214. — Réponse : Nous prétendons que ce verset a été abrogé par le verset des « parts successorales »361. Si l’on demande ce qui, dans le verset des parts successorales, abroge [le premier verset] — puisqu’il est licite que les père et mère reçoivent leur part d’héritage, et qu’ils reçoivent également le legs qui pourrait leur être constitué — nous répondrons : ceci n’est nullement licite, car la part d’héritage que Dieu leur assigne consiste dans la quotité qu’il leur accorde en vertu de leur qualité d’héritiers légaux. Dieu dit, après le verset des parts successorales : « Voilà les lois de Dieu. Quiconque obéit à Dieu et à son Envoyé, Dieu le fera entrer en des jardins sous lesquels couleront des ruisseaux, 125
où il restera, immortel. C’est là le succès immense. Quiconque au contraire désobéit à Dieu et à Son Envoyé et transgresse Ses lois, Dieu le fera entrer dans un feu où il restera, immortel. Il aura un tourment avilissant »362. Donc, Dieu a promis la récompense suprême à qui respectera les parts successorales qu’il a définies, et Il a menacé du châtiment suprême quiconque ne les respectera pas. Nul ne peut donc transmettre à un héritier plus de bien que Dieu ne l’a déterminé impérativement. 422On dit aussi que ce verset est abrogé par le ḥadīṯ : « Pas de dispositions
testamentaires
en
faveur
de
l’héritier ».
Nous
exposerons plus loin des cas d’abrogation du Coran par la Sunna, si Dieu le permet. ***
XLVI. — EXEMPLE D’UNE PRISE DE POSITION RELATIVE AU MARIAGE INFIRMÉE PAR LE CORAN 363 BUḪ. 67, 28 = HM III, 560. 364 BUḪ. 52, 7 = HM III, 211 ; 67, 21, 117 = HM III, 555, 602… ḤAN. I, 275, 290, 329… ; IV, 4, 5, etc… 423215. — Proposition : Vous enseignez que // le Prophète a dit : « N’épousez pas une femme en même temps que sa tante paternelle ou que sa tante maternelle »363, et encore : « La parenté de lait est une cause d’interdiction au même titre que la parenté naturelle »364.
365 Coran, IV, 23.
366 Coran, IV, 23.
367 Coran, IV, 24. 424Dieu a dit : « Illicites sont pour vous vos mères et vos filles… » etc.365. Il n’a pas fait allusion à l’existence [sous un même toit] 126
d’une femme avec sa tante paternelle ou maternelle. En ce qui concerne l’allaitement, Il n’a déclaré comme illicites que la nourrice et la sœur de lait366. Puis Il a dit : « Licite est pour vous de rechercher [des épouses] en dehors de celles qui ont été énumérées »367. 425Donc, une femme peut cohabiter [en tant qu’épouse] avec sa tante paternelle ou maternelle, et les parentes par le lait à tous les degrés, hormis la nourrice et la sceur qui font partie de ce que Dieu a déclaré licite.
368 Coran, II, 106.
369 Les docteurs musulmans se plaisent à mettre l’accent sur l’allègement apporté par le Coran par rapp (...) 426216. — Réponse : Nous prétendons que Dieu éprouve ses serviteurs par le moyen des obligations légales afin de connaître leur
degré
d’obéissance
ou
de
désobéissance,
et
pour
récompenser celui qui agit bien ou mal sans qu’il existe à ce qu’il déclare licite ou interdit de cause intrinsèque entraînant la licéité ou l’interdiction. Tout ce qui est mauvais l’est parce que Dieu l’a interdit, et tout ce qui est bon l’est parce que Dieu l’ordonne, hormis certaines choses dont Dieu a voulu qu’elles fussent considérées
comme
mauvaises
instinctivement :
ainsi
le
mensonge, l’intrigue, la médisance, l’avarice, l’injustice, etc… S’il est possible que Dieu envoie un prophète révéler une loi religieuse destinée à être respectée pendant des années par des hommes qui, ce faisant, Lui obéissent, // puisqu’il envoie un autre prophète révéler une autre loi abrogeant la première à des gens qui, en la respectant, obéissent aussi à Dieu — ainsi en est-il du [repos du] samedi révélé par Moïse, et abrogé par le Messie ; de la circoncision du septième jour révélée par Moïse et également abrogée par le Messie — il est également admissible 127
qu’il impose une chose à ses fidèles à un moment, puisqu’il l’abroge à un autre moment, sous le même Prophète. Il a dit : « Dès que Nous abrogeons un verset ou le faisons oublier, Nous en apportons un meilleur ou un semblable »368. Par « meilleur », il faut entendre « plus facile [à observer] »369.
370 Par « Coran », il faut évidemment entendre ici « destiné à être récité ».
371 DĀRIMĪ, intr., 48. 427216 a. — S’il est admissible que le Coran soit abrogé par le Coran, il est également admissible que le Coran soit abrogé par la Sunna, car la Sunna a été apportée au Prophète par Gabriel, de la part de Dieu. Ainsi la Parole de Dieu qui est Coran peut se trouver abrogée par la révélation de Dieu qui n’est pas Coran370. C’est en ce sens que le Prophète a dit : « Le Coran me fut apporté, ainsi que des choses analogues »371, c’est-à-dire la Sunna.
372 Coran, LIX, 7. 428Dieu a dit : « Ce que l’Envoyé vous apporte, prenez-le ; ce qu’il vous interdit, abstenez-vous en ! »372. Dieu savait bien que les hommes admettraient aisément ce qui leur serait révélé de Sa parole ; mais il savait aussi qu’il abrogerait certains [textes] du Coran // par des révélations faites au Prophète, et que lorsque cela arriverait, cela choquerait certains cœurs et frapperait certaines consciences. C’est pourquoi Il nous dit : « Ce que l’Envoyé vous apporte, prenez-le », c’est-à-dire : Ce que Dieu vous apporte, même si ce n’est pas dans le Coran ou si cela abroge le Coran, admettez-le. 429216 b. — Abū Muḥammad dit : Les traditions normatives, pour nous, sont de trois sortes :
373 ḤAN. IV, 4, 5 ; cf. Ḥan. I, 432. C’est à dire : il faut un allaitement plus prolongé. 128
374 Cf. EI, I, 243, s. ‘āḳila. 4301) La Sunna transmise par Gabriel de la part de Dieu, comme la sentence : « Une femme ne peut être épousée en même temps que sa tante paternelle ou maternelle » ou « La parenté de lait est une cause d’interdiction au même titre que la parenté naturelle » ou « Une ou deux gorgées ne constituent pas une cause d’interdiction »373 ou « Le prix du sang est dû par les contributes solidaires de l’auteur de l’homicide ( ‘āqila) »374, et autres principes.
375 Très nombreux ḥadīṯs. Voir WENSINCK, Handbook, s. Clothes, p. 45. Notamment BUḪ. 51, 27 = HM II, 1 (...)
376 BUḪ. 56, 91 = HM II, 321 ; 77, 29 = HM IV, 108 ; ḤAN. III, 122, 180, etc…
377 BUḪ. 87, 8 = HM IV, 408. 431216 c. — 2) La Sunna que Dieu a permis au Prophète d’instituer en l’autorisant à faire preuve d’initiative personnelle (ra’y), et à propos de laquelle il avait la faculté d’établir des tolérances en faveur de qui il voulait pour une raison impérieuse ou un motif valable. C’est ainsi que le port de vêtements de soie fut interdit aux hommes375 mais que ‘Abd al-Raḥmān b. ‘Awf fut autorisé à en porter pour une raison impérieuse376. C’est aussi le cas des paroles qu’il prononça lors de la prise de la Mekke : « On n’en fauchera point l’herbe, et on n’en coupera point les arbres ». Alors al-‘Abbās b. ‘Abd al-Muṭṭalib dit : « Sauf l’iḏḫir, ô Prophète ! Il est destiné à nos artisans ! » Et le Prophète acquiesça : « Sauf l’iḏḫir ! »377. Si Dieu avait frappé d’interdit tous les arbres de la Mekke, il n’aurait pas fait d’exception pour l’iḏḫir comme le lui demandait // al-‘Abbās. Mais Dieu lui avait donné la faculté de mettre à part ce qu’il considèrerait comme 129
utile. Il fit donc une exception pour l’iḏḫhir en raison des services qu’il leur rendait.
378 BUḪ. 56, 94 = HM II, 376 ; cf. aussi 63, 45 = HM III, 44 et la note des trad. 432Son crieur annonça : « Plus d’Émigration après la conquête [de la Mekke] ». Al-‘Abbās vint alors intercéder en faveur du frère de Muğāši‘ b. Mas‘ūd, afin qu’il lui donne [le titre] d’Émigré après la conquête. Le Prophète dit alors : « J’accepte l’intercession de mon oncle, mais [au reste] plus d’Émigration »378. Si cette sentence avait fait l’objet d’une révélation, aucune intercession n’aurait été licite.
379 BUḪ. 41, 15 = HM II, 97 ; cf. ḤAN. III, 304, 327, 338, etc…
380 BUḪ. 25 ; 81 = HM I, 533, etc… C.-à-d. : « Je me désacraliserais maintenant » (la scène se passe ap (...) 433A cette catégorie appartiennent aussi les ḥadīṯ-s suivants : « Les vieilles terres sont à Dieu et à Son Envoyé ; puis elles sont à vous, venant de moi ; quiconque revivifie une terre morte en devient propriétaire »379 ; et celui-ci, relatif à la ‘umra : « Si je pouvais intervertir les choses, j’aurais pris l’ iḥrām pour la ‘umra ! »380.
381 Cf. BUḪ. 9, 24 = HM I, 199, etc… 434Il dit à propos de la Prière du ‘ išā’ : « N’était que cela est pénible pour ma communauté, je décréterais qu’il faut la faire en ce moment »381.
382 ḤAN. III, 237, 250.
383 Ibid.
384 Ibid. et IV, 406. 130
435Il avait interdit de conserver la viande des victimes au delà de trois [jours], de visiter les tombeaux et de boire du nabīḏ dans certains cas. Par la suite, il déclara : « Je vous ai interdit de conserver la viande des victimes au-delà de trois jours. Mais j’ai constaté que les gens [en] font cadeau à leur hôte et en mettent de côté // pour les absents. Alors, mangez et conservez ce que vous voulez ! »382 ; « Je vous ai interdit de visiter les tombeaux : visitez-les, mais ne proférez point d’indécences. Il m’est apparu que
cela
attendrit
le
cœur ! »383 ;
« Je
vous
ai
interdit
le nabīḏ dans certains cas : buvez-en, mais ne buvez pas de boissons enivrantes ! »384.
385 Ibid. et cf. BUḪ. 74, 3 = HM IV, 35. 436Abū Muḥammad dit : tout cela s’éclaire encore si l’on considère le ḥadīṯ rapporté par Muḥammad b. Ḫālid b. Ḫidāš — Muslim b. Qutayba — Yūnus — Mudrik b. ‘Umāra : Le Prophète pénétra dans la cour d’un homme des Anṣār, et vit un individu portant du nabīḏ dans un récipient fait d’un tronc de palmier creusé. Il lui dit : « Verse-le à terre ! » L’autre dit : « Me permetstu de le boire et de ne plus recommencer ? » Le Prophète dit : « Bois, et n’y reviens pas ! »385.
386 Index, s. kalāla.
387 Cf. ḤAN. IV, 295, 301.
388 Index, s. ẓihār.
389 On n’a retrouvé que des ḥadīt-s où au contraire le Prophète prend position. P. ex. ABŪ DĀWŪD 13, 17 437Tout cela montre que Dieu a donné au Prophète la faculté de prononcer des interdictions, puis d’accorder des tolérances à qui il voulait. Si cela avait été illicite dans les cas ci-dessus, il se serait abstenu, comme il le fit lorsqu’on l’interrogea sur la kalāla386 : il 131
dit à celui qui l’interrogeait : « C’est là ce que j’ai reçu, et je ne t’en dirai pas davantage tant que je n’en aurai pas reçu davantage »387. Il s’abstint aussi lorsqu’une femme en désaccord avec son mari vint l’interroger sur le ẓihār388. Il ne // lui répondit pas, mais dit : « C’est Dieu qui juge sur ce point ! »389.
390 BUḪ. 26, 10 = HM I, 573 ; cf. BUḪ. 25, 17 = HM I, 499. 438Un bédouin vint le trouver en état de sacralisation ; il était vêtu d’une ğubba de laine conservant un relent de parfum et lui demandait une consultation. Le Prophète ne lui répondit pas ; il s’enveloppa dans son vêtement et se mit à ronfler comme un cheval. Lorsqu’il fut réveillé, il lui donna sa consultation390.
391 Ce ḥadīṯ figure dans Lisān, IX, 260 : « Il a ordonné de faire passer le turban sous le menton (tala(...)
392 Le mot ğallāla s’applique aux animaux qui se nourrissent de détritus ou de fiente ; Lisān, XIII, 12 (...)
393 P. ex. BUḪ. 34, 25 = HM II, 15, etc…
394 BUḪ. 59, 20 = HM II, 406 ; 72, 28 = HM III, 18, etc…
395 BUḪ. 72, 28 = HM III, 19 ; 76, 57 = HM IV, 90 ; ḤAN. I, 147, 244, 326, III, 323, etc…
396 Coran, VI, 145.
397 Coran, V, 3. 439216 d. — 3) La troisième catégorie de tradition normative est la Sunna qu’il a établie pour nous corriger. Si nous en tenons compte, nous aurons du mérite, mais si nous n’en tenons pas compte, aucun crime ne nous sera imputé, s’il plaît à Dieu. Ainsi en est-il de la Sunna relative au port du turban sans le faire passer sous le menton391 ; à l’interdiction de manger la viande 132
des animaux dits ğallāla392, de tirer bénéfice de la pratique des saignées393 ; on peut en dire autant de l’interdiction frappant la viande des ânes domestiques394, de tous les animaux sauvages à canines et de tous les oiseaux porteurs de serres395 ; et ceci malgré le verset : « Dis : — Dans ce qui m’a été révélé, je ne trouve rien d’illicite pour qui se nourrit, sauf s’il s’agit d’une bête morte, ou d’un sang répandu, ou de viande de porc, car elle est impure, ou de ce qui a été consacré à un autre que Dieu »396. Il voulait dire [par ces ḥadīṯ-s] qu’au moment de la révélation, de cette sourate, il ne trouvait rien d’autre que cela à interdire. Mais par la suite fut révélée la sourate « La table servie », où sont déclarées illicites la chair « de la bête étouffée, de la bête tombée sous des coups, de la bête morte d’une chute ou d’un coup de corne, la chair de [la bête] dévorée par les fauves, sauf si vous l’avez purifiée »397. Dieu a donc augmenté [à cette occasion] les choses déclarées illicites par le Coran, et il y a encore ajouté par le truchement de Son Envoyé l’interdiction de manger les bêtes féroces, // les oiseaux [de proie] et les ânes domestiques.
398 Coran, IV, 101.
399 Notamment en voyage ; BUḪ. 18, 1, 5, 11 = HM I, 356, 358, 360 ; ḤAN. I, 30, 215, etc… 440On peut en dire autant [des ḥadīṯ-s autorisant] à abréger la Prière en période de sécurité, malgré le verset : « Il n’y a pas de grief à vous faire d’abréger la Prière, si vous craignez que les infidèles ne vous tourmentent »398. Ce verset nous enseignait qu’il n’y avait aucun crime de notre part d’abréger la Prière en cas de danger. Mais le Prophète nous a enseigné en outre de la part de Dieu qu’il n’y avait pas d’inconvénient à l’abréger aussi bien en période de sécurité399.
400 Coran, V, 6. Sur la friction des chaussures, très nombreux ḥadīṯ-s ; voir Handbook, s. wuḍū, 262. P (...) 133
441Il en est de même pour la madéfaction des chaussures, [prescrite] malgré le verset : « Lavez-vous le visage et les mains jusqu’au coude ! passez-vous la main sur la tête et les pieds jusqu’aux chevilles ! »400.
401 DĀRIMĪ, introd., 48. 442‘Isā b. Yūnus rapporte d’après al-Awzā‘ī que Yaḥyā b. Abī Kaṯīr a dit : « La Sunna l’emporte sur le Coran, mais le Coran ne l’emporte pas sur la Sunna »401. Il entendait par là qu’elle explicite le Coran et expose ce que Dieu a voulu dire dans Son Livre. ***
XLVII. — EXEMPLE DE ḤADĪṮ-S CONTRADICTOIRES SUR L’ABLUTION MAJEURE DU VENDREDI 402 Litt. : « qui a des pollutions » BUḪ. 10, 161 = HM I, 284, etc… ; ḤAN. III, 6, 30, etc… 443217. — Proposition : Vous enseignez d’après Mālik — Ṣafwān b. Salīm — ‘Aṭā’ b. Yasār — Abū Sa‘īd al-Ḫidrī que le Prophète a dit : « L’ablution majeure est obligatoire le vendredi pour tout individu pubère »402.
403 Cf. BUḪ. 11, 5 = HM I, 290 ; ḤAN. I, 29, 45 ; II, 424 etc… 444D’autre part, vous rapportez d’après Hammām — Qatāda — // al-Ḥasan — Samura que le Prophète a dit : « Faire l’ablution rituelle (wuḍū’) le vendredi, c’est beau et c’est excellent ; mais faire l’ablution majeure (ġusl), c’est encore mieux »403. 445Ce ḥadīṯ contredit le premier.
404 ḤAN. IV, 78.
405 P. ex. BUḪ. 5, 14 = HM I, 103, etc… Nombreux ḥadīṯs. Voir Handbook, 184, s. Perfumes. 134
406 Cf. BUḪ. 11, 7 = HM I, 291 ; ḤAN. III, 65, etc… 446218.
—
Réponse :
Nous
prétendons
que
la
phrase :
« L’ablution majeure est obligatoire (wāğib) le vendredi pour tout individu pubère » ne signifie pas qu’elle est d’obligation stricte (farḍ). C’est là une pratique que [le Prophète] a déclarée obligatoire pour les Musulmans — comme d’ailleurs l’ablution majeure des deux fêtes404 — en vertu d’une préférence et d’un choix, afin qu’ils assistent à l’assemblée avec des corps propres n’exhalant aucune odeur désagréable. Il a ordonné en outre de se parfumer405, de nettoyer son vêtement et de revêtir le vendredi deux vêtements qui ne soient pas deux vêtements de travail406. Tout cela est laissé au choix de l’intéressé, et est obligatoire en vertu d’une préférence, et non en vertu de l’obligation. 447218. — Il nous a enseigné en outre qu’il pouvait exister des malades, des gens occupés, ou qu’il pouvait s’agir d’une région très froide, où la pratique de l’ablution majeure est très pénible. C’est pourquoi il a dit : « Faire l’ablution rituelle, c’est très bien et c’est excellent », c’est-à-dire : c’est licite. Mais il a déclaré que l’ablution majeure valait mieux pour qui pouvait la pratiquer. C’est également pourquoi il a interdit de conserver plus de trois jours la viande des victimes, puis // a dit : « J’ai constaté que les gens en offrent à leurs hôtes et en mettent de côté pour les absents. Mangez et conservez ce que vous voulez ». C’est pourquoi encore il a interdit de visiter les tombeaux, puis a dit : « Il m’est apparu que cela attendrit le cœur : visitez-les, mais ne proférez point d’indécences ». ***
XLVIII. — EXEMPLE DE ḤADĪṮ INFIRMÉ PAR L’EXPÉRIENCE 407 DĀRIMĪ, 23, 1 ; Ḥan. IV, 151, IV, 151, etc…
135
448219. — Proposition : Vous enseignez d’après Ibn Lahī‘a — Mišraḥ b. Hā‘ān — ‘Uqba b. ‘Āmir : que le Prophète a dit : « Si le Coran était placé dans une peau (ihāb) puis jeté dans le feu, cela ne brûlerait pas »407. 449C’est là une tradition historique manifestement fausse, car on voit parfois des exemplaires du Coran brûler ou subir les mêmes vicissitudes que les autres objets ou livres.
408 Hāḏihi l-maṣāḥif : il peut s’agir des livres chrétiens ou juifs. Le mot muṣḥaf désigne habituelleme (...) 450220. — Réponse : Nous prétendons que cela peut s’interpréter d’une façon qui leur a échappé et qu’ils ignorent. J’ai entendu Yazīd b. ‘Amr rapporter l’interprétation qu’al-Aṣma‘ī en donne : Cela veut dire : « Si le Coran était placé // dans un homme, puis précipité au feu, il ne brûlerait pas ». Al-Aṣma‘ī voulait dire que le Musulman auquel Dieu a enseigné le Coran, et qui l’a retenu ne sera pas brûlé en enfer au jour du Jugement, s’il y est précipité pour ses fautes. C’est ainsi qu’Abū Umāma a dit : « Apprenez le Coran ; récitez le Coran ; ne soyez pas dupes de ces livres408, car Dieu ne condamne pas à l’enfer un cœur qui a servi de réceptacle au Coran ». Il considérait donc le corps humain comme un réceptacle du Coran, au même titre que la « peau » [dont il est question dans le ḥadīṯ].
409 Cf. supra. § 200. 451Le mot ihāb désigne la peau non tannée409. Si ce mot désignait la peau tannée, il ne servirait pas de métaphore pour désigner le corps humain. On comparera la phrase de ‘Ā’iša qui, parlant de son père dans une ḫuṭba, disait : « Il a laissé des têtes sur des épaules et il a empêché des peaux de se vider de leur sang », c’est-à-dire des corps.
136
410 Allusion probable aux miracles des prophètes antérieurs, notamment Jésus. Les Musulmans orthodoxes (...)
411 BUḪ. 62, 6 = HM II, 597.
412 ḤAN. IV, 172, 173.
413 BUḪ. 61, 25 = HM II, 61. Sur tous ces points, voir § 40 c 37 a. 452220 a. — Il existe aussi une autre opinion. Certains disent qu’au temps du Prophète, c’était là un signe de la prophétie, une preuve que le Coran est bien la Parole de Dieu et qu’il a bien été révélé de Sa part. Dieu en a administré la preuve par ce miracle à un moment donné, lorsqu’il était contesté par les Polythéistes. Après la disparition du Prophète, cela a cessé. Les miracles se produisent au // temps des prophètes — résurrection des morts410, loup qui parle411, chameau qui se plaint412, cadavre restitué par la terre413… — puis cessent après eux. 453220 b. — D’autres pensent que l’expression « ne brûle pas » s’applique au Coran, et non à la peau. Ce qui signifierait : Si le Coran est copié sur du parchemin et qu’on le jette au feu, le parchemin et l’encre brûlent, mais non le Coran lui-même. Tout se passe comme si Dieu l’ôtait et le préservait du feu.
414 Coran, LVI, 77-79,
415 BUḪ. 56, 129 = HM II, 343 ; ḤAN. II, 6, 10, 63, etc… 454220 c. — Pour nous, nous ne doutons pas que le Coran existe dans les muṣḥaf-s au sens propre, et non au sens figuré, alors que les gens du kalām prétendent que le contenu des muṣḥafs est le symbole (dalīl) du Coran, et non le Coran lui-même. Mais Dieu a dit : « Voici une prédication bienfaisante, contenue dans un écrit caché que seuls touchent les Purifiés »414. D’autre part, le 137
Prophète a dit : « N’emportez pas le Coran lorsque vous voyagez en terre ennemie »415 ; le « Coran » désigne ici le « muṣḥaf ». ***
XLIX. — EXEMPLE DE ḤADĪṮ INFIRMÉ PAR LE CORAN 416 Cf. BUḪ. 78, 12 = HM IV, 143. 455221. — Proposition : Vous enseignez que le Prophète a dit : « Le respect des liens utérins ajoute à la vie »416.
417 Coran, VII, 34 = X, 49 = XVI, 61. 456Or Dieu a dit : « Quand vient leur terme, ils ne peuvent le reculer ni l’avancer d’une heure »417. 457Comment le respect des liens utérins peut-il repousser une échéance qu’on ne peut « ni reculer, ni avancer » ? //
418 On n’a pas trouvé trace de cette anecdote. 458222. — Réponse : Nous prétendons que l’expression « ajoute à la vie » peut être comprise dans deux sens. Le premier est l’élargissement et l’accroissement des ressources matérielles et de la santé du corps. On dit parfois : « La pauvreté est la suprême mort ». Un ḥadīṯ dit : « Dieu fit savoir à Moïse qu’il ferait mourir son ennemi. Par la suite, Moïse vit l’ennemi en question tresser des feuilles de palmier ; il dit : — Seigneur, tu m’avais promis de le faire mourir ! Dieu répondit : — C’est ce que J’ai fait : Je l’ai rendu pauvre »418. Un poète a dit : « Quiconque
meurt
et
repose
n’est
pas
mort,
le [vrai] mort est celui qui est mort parmi les vivants ». C’est-àdire le pauvre. 459Puisqu’il est admis d’appeler la pauvreté « mort », et de la considérer comme une diminution de la vie, il est également
138
admissible d’appeler la richesse « vie » et de la considérer comme un accroissement de la vie. 460222 a. — L’autre acception possible de cette expression est la suivante : Dieu a fixé le terme extrême de [la vie] humaine à cent années. Il a conçu sa constitution physique, sa nature et son comportement pour vivre quatre-vingts ans ; mais s’il respecte les liens utérins, Dieu améliore sa constitution et sa nature physique, et comble la lacune. L’homme vit alors vingt ans de plus et parvient à cent ans, c’est-à-dire au terme extrême qu’il est impossible de reculer ou d’avancer. // ***
L. — EXEMPLE DE ḤADĪṮ INFIRMÉ PAR LE CORAN ET LE CONSENSUS 419 On n’a pas retrouvé ce ḥadīṯ. 461223. — Proposition : Vous enseignez que l’aumône légale repousse le décret fixé419.
420 Coran, XVI, 40. 462Or Dieu a dit : « Quand Nous voulons une chose, Notre unique parole à son propos est : — Sois ! et elle est »420.
421 Ce qui prouve à l’évidence que les Mu‘tazilites ne sont en rien partisans du libre arbitre. 463Enfin, tout le monde s’accorde sur le fait que rien ne peut repousser le décret [de Dieu], et que rien ne peut différer Sa sentence421.
422 TIR. 5, 28. 464224. — Réponse : En ce qui concerne l’interprétation de ce ḥadīṯ, nous prétendons qu’un homme, par ses fautes, peut avoir été l’objet d’un décret de châtiment ; mais s’il fait l’aumône, 139
il peut repousser [le châtiment] qu’il avait mérité en raison de ses fautes. J’en veux pour preuve la phrase du Prophète : « L’aumône faite en secret éteint la colère du Seigneur »422. Or on sait que quiconque a irrité Dieu s’expose à Son châtiment, et que si l’on éteint Sa colère par l’aumône, on éteint aussi Son châtiment. 465On peut comparer le cas d’un homme qu’on aurait lésé gravement, et dont on craindrait les entreprises vengeresses, et la riposte rapide. Si on lui fait alors un cadeau qui l’apaise, on peut dire : « Ce cadeau a repoussé le châtiment mérité ». ***
LI. — EXEMPLE D’UN ḤADĪṮ DONT LE DÉBUT ET LA FIN SONT INCOMPATIBLES 423 Cf. ḤAN. II, 161, 191, où le ḥadīṯ est plus précis, et confirme la réfutation du § 226. 466225. — Proposition : Vous rapportez le ḥadīṯ suivant : « Il y aura // à votre tête des imām-s tels que si vous leur obéissez, vous serez dans l’erreur, et que si vous leur désobéissez vous serez égarés »423. 467Cela est déraisonnable : Comment pourra-t-on être égaré en leur désobéissant, et dans l’erreur en leur obéissant ? 468226. — Réponse : Nous affirmons qu’il n’y a pas dans ce ḥadīṯ de contradiction interne si on l’interprète. A notre avis, il signifie que l’erreur consistera à leur obéir s’ils donnent l’ordre de désobéir à Dieu, d’opprimer le peuple et de verser le sang indûment, et que l’égarement consistera à leur désobéir, à se rebeller contre eux et à « briser le bâton » des Musulmans, comme l’ont fait les Ḫāriğites. Ce ḥadīṯ revient à dire qu’il ne faudra rien faire pour eux ni se rebeller contre eux. ***
140
LII. — EXEMPLE DE ḤADĪṮ INFIRMÉ PAR LE CORAN ET LE RAISONNEMENT 424 BUḪ. 97, 24 = HM IV, 598 sqq. ; Ḥan. IV, 360, etc… 469227. — Proposition : Vous enseignez que le Prophète a dit : « Vous verrez votre Seigneur au jour de la résurrection comme vous voyez la lune lorsqu’elle est pleine ; vous [n’aurez pas besoin] de vous rassembler pour Le voir »424.
425 Coran, VI, 103.
426 Coran, XLII, 11. 470Or Dieu dit : // « Les regards ne sauraient L’atteindre, alors qu’il peut atteindre les regards »425 et ailleurs : « Rien n’est à Sa ressemblance »426.
427 Coran, 143. 471Il est impossible de par le raisonnement que le Créateur ressemble à la créature par un quelconque de Ses attributs. Moïse a dit : « Seigneur ! montre-Toi à moi, que je Te regarde ! Le Seigneur répondit : — Tu ne Me verras point ! »427.
428 Coran, XXV, 45.
429 Coran II, 259 : « qāla a‘lamu anna-llāha… » (Vulgate) ; Texte du Muḫtalif : « a lam tara anna-llāha(...) 472Si
ce ḥadīṯ est
authentique,
le
verbe
« voir »
y
signifie
« connaître », comme dans les versets : « Ne vois-tu point comment ton Seigneur a fait mouvante l’ombre ? »428 ; « Ne vois-tu pas (a lam tara) que Dieu, sur toute chose, est omnipotent ?429.
430 Voir notamment IBN MĀĞA, 8, 9, 16 (sadaqat al-ibil albaqar) et DĀRIMĪ, 3, 4 (zakāt al-ġanam).
141
431 Zakāt al-nāḍḍ. Voir le ḥadīṯ dans Tāğ, V, 90 : « Le Prophète percevait la zakāt sur les espèces ». 473228. — Nous prétendons que ce ḥadīṯ est authentique, et qu’il n’est pas permis de suspecter un ḥadīṯ semblable, en raison de sa transmission ininterrompue par des chaînes d’autorités diverses. S’il se pouvait que de tels ḥadīṯ-s soient mensongers, il serait aussi licite de taxer de mensonge tous les éléments de notre religion régissant notre vie. Ainsi le tašahhud que nous ne connaissons que par tradition historique, l’aumône légale [payée] en bétail430, la zakāt [payée] en espèces431, la répudiation, l’affranchissement, et autres choses que nous n’avons apprises que par tradition historique, sans qu’elles fussent exposées dans le Coran. 474228 a. — En ce qui concerne le verset « Les regards ne sauraient l’atteindre, alors qu’il peut atteindre les regards » ainsi que les paroles de Moïse : « Seigneur, montre-Toi à moi que je Te regarde ! etc… », tout cela n’infirme en rien les paroles du Prophète : // « Vous verrez votre Seigneur au jour de la résurrection… » En effet, Dieu a voulu dire dans le Coran que les regards ne peuvent Le percevoir sur la terre. Il a voulu dire à Moïse qu’il ne Le verrait point sur la terre. En effet, Il s’est dérobé à la vue de toutes les créatures terrestres, mais Il se manifestera à elles au jour du règlement de comptes, de la récompense et du talion. Les Croyants Le verront alors comme ils voient la lune la nuit où elle est pleine, et il n’y aura plus de contestations entre eux à Son sujet, de même qu’il ne saurait y en avoir au sujet de la lune. La comparaison ne s’applique d’ailleurs pas à toutes les qualités de la lune : rondeur, mouvement, mansions, etc. La comparaison implique seulement que nous regarderons Dieu comme nous regardons la lune lorsqu’elle est pleine, et que tout le monde sera d’accord sur Lui comme on est d’accord sur la lune. 142
475Les Arabes se servent de métaphore où intervient la lune pour parler de notoriété ou d’évidence. Ils disent : « Cela est plus clair que le soleil ; que l’aurore » ; ou « plus apparent que la lune ». Ḏū l-Rumma a dit : « Elle brille de tout son éclat ; elle n’est cachée à personne, sauf à ceux qui ne savent pas voir la lune ». 476228 b. — L’expression « Vous n’aurez pas besoin de vous rassembler pour Le voir » est parfaitement explicite, car les gens se rassemblent au début du mois, pour guetter le premier quartier. Ils se réunissent, et l’on entend dire : « Le voici ! — Le voilà ! — Ce n’est pas lui ! » // Or tel n’est pas le cas pour la lune [dans son plein] car chacun peut la voir de l’endroit où il est et n’a pas besoin de se joindre à d’autres pour en guetter l’apparition.
432 Voir § 216d. 477228 c. — Le ḥadīṯ du Prophète l’emporte sur le Coran et l’explicite432. Lorsque Dieu dit : « Les regards ne L’atteignent point » et que l’on rapporte de la bouche du Prophète une tradition historique authentique telle que : « Vous verrez votre Seigneur au jour de la résurrection », il n’échappe à aucun homme doué d’entendement, de bon sens, de cœur et de discernement que chacune de ces phrases s’applique à des circonstances différentes.
433 Allusion aux entretiens de Moïse avec le Seigneur sur le Sinaï, Cf. notamment Coran, VII et XXVIII.
434 Allusion à Coran, XXVIII, 30.
435 C’est à dire la période au cours de laquelle Moïse séjourna au Sinaï et où Dieu se manifesta à lui.
436 Suite de Coran, VII, 143. Le contexte permet de corriger en ce sens la trad. BLACHÈRE : « si elle s (...) 143
437 Lisān, XVIII, 164 ; mais le verbe ğalā est également intransitif ; « se dévoiler ». 478228 d. — La phrase de Moïse : « Seigneur, montre-Toi à moi que je Te regarde ! » renferme la preuve la plus évidente qu’on Le verra au jour de la résurrection. Si Dieu ne pouvait être vu en aucune circonstance, et qu’il ne soit pas possible de Le contempler, Il ne se serait jamais manifesté à Moïse comme nul ne l’ignore433. En effet, à en croire [les gens du kalām], ceux qui disent que Dieu sera perçu par les regards // au jour de la résurrection Le définissent déjà ; or celui pour qui Dieu est défini l’assimile déjà aux créatures, et quiconque assimile Dieu aux créatures, selon eux, est un Infidèle. Dans ces conditions, considérant [l’expérience de] Moïse entre le moment où Dieu lui a révélé Son message et lui a parlé du haut de l’arbre434 et le moment où Moïse Lui a dit : « Seigneur, montre-Toi à moi, que je Te regarde »435, vont-ils le condamner sous prétexte qu’il faisait œuvre d’anthropomorphisme et définissait Dieu ? Certes non ! Jamais il n’aurait été possible que Moïse fît preuve d’une telle ignorance à propos de Dieu — en admettant leurs assertions. Au contraire, Moïse savait que Dieu serait visible au jour de la résurrection, et il demanda à Dieu de réaliser pour lui sur la terre ce qu’il a reporté au jour de la résurrection pour Ses prophètes et Ses fidèles. Dieu répondit donc à Moïse : « Tu ne me verras point » sur terre « mais regarde la montagne : Si elle ne bouge pas, tu Me verras »436 pour lui faire comprendre que la montagne ne saurait résister à Son apparition sans être réduite en poussière, et que si les montagnes ne peuvent y résister, qu’en serait-il alors des pauvres hommes ! Mais au jour de la résurrection, Dieu leur donnera la force de résister à Sa vision, et déchirera le voile qui Le dérobait à leurs regards pendant leur vie terrestre. Le mot tağallī (apparition) est synonyme de ẓuhūr. On dit, de la même racine ğalawtu l-‘arūs, j’ai dévoilé la mariée, 144
lorsqu’on l’a fait apparaître437 ; ou ğalawtu l-mir’āt, al-sayf, j’ai révélé le miroir, le sabre, lorsqu’on // les a fait apparaître en les dégageant de la rouille.
438 Cf. note 811. Ce passage laisse à penser qu’une lecture a‘lamu, primitivement -‘lam, inspirée par l (...) 479228 e. — Lorsqu’ils disent que « voir » dans l’expression « vous verrez votre Seigneur » signifie « connaître », comme dans le verset : « Ne vois-tu pas que Dieu est sur chaque chose omnipotent », où il faut entendre « ne sais-tu pas »438, cela est impossible, car nous Le connaissons aussi bien sur la terre. Quel serait l’intérêt de cette tradition si les choses étaient identiques au jour de la résurrection et dans la vie de ce bas monde ?
439 Matt. V, 7(8.
440 Coran, LXXV, 22-23.
441 Coran, LXXXIII, 15. 480228 f. — J’ai lu dans l’Évangile que lorsque le Messie proclama la révélation, il dit : « Bienheureux les miséricordieux, car ils obtiendront eux-mêmes miséricorde ; bienheureux ceux qui ont le cœur sincère, car ils verront Dieu »439. Dieu a dit : « Des visages, ce jour-là, seront éclatants, et regarderont vers leur Seigneur »440 ; Il a dit encore à propos des gens qui l’auront irrité : « Qu’ils prennent garde ! En vérité, ce jour-là, ils seront cachés à leur Seigneur ; ils seront ensuite exposés à la fournaise »441. N’y a-t-il pas dans ce verset la preuve que les « visages éclatants » qui « regarderont vers leur Seigneur » sont ceux devant lesquels il n’y aura aucun voile — si tant est qu’un voile tombe devant les visages [à cette occasion] ? 481228 g. — Si l’on nous demande le comment de cette vision, et le comment de son objet, nous répondrons : Nous ne prétendons 145
parvenir à la connaissance des attributs divins que dans la mesure extrême où le Prophète lui-même y est parvenu ; nous ne repoussons pas les propos authentiques du Prophète sous prétexte que cela n’est point conforme à notre imagination ni logique // à nos yeux. Nous y croyons sans nous en demander le comment ou la définition, et sans préjuger l’avenir en fonction du passé par analogie. Nous espérons que demain, cette façon de dire et de croire sera la voie du salut et de la sauvegarde contre toutes les passions, si Dieu le permet. ***
LIII. — EXEMPLE D’UN ḤADĪṮ SUR L’ANTHROPOMORPHISME INFIRMÉ PAR LE CORAN ET PAR LE RAISONNEMENT 442 ḤAN. II, 173 ; VI, 182, 251, 310. 482229. — Proposition : Vous enseignez que le cœur du Croyant est entre « deux doigts de la main de Dieu »442. Si vous entendez ici par « les doigts » : les grâces, et que le ḥadīṯ est authentique, c’est une façon de voir. Mais si vous entendez par là les « doigts » au sens propre, cela est impossible, car on ne saurait attribuer de membres à Dieu, qui ne saurait être assimilé aux créatures. 483(Ils pensent aux « grâces » pour interpréter le mot « doigts », parce que les Arabes disent : « Quel bon doigt Untel a sur ce qu’il possède ! », c’est-à-dire : quelle bonne influence ! Le Rā‘ī a dit, dans la description de ses chameaux :
443 Ši‘r, 591. « Il » représente le chamelier et « eux » les chameaux. « Le jarret maigre, les veines saillantes, tu constates qu’il a sur eux lorsque les gens sont dans la disette, un doigt »443 ce qui signifie : Tu constates qu’il a sur eux une bonne influence.) 146
484230.
—
Réponse :
Nous
prétendons
que
ce ḥadīṯ est
authentique // et que leur interprétation est incompatible avec [l’esprit] du ḥadīṯ, En effet, le Prophète invoqua Dieu en ces termes : « Ô Toi qui retournes les cœurs, raffermis mon cœur dans Ta religion ! » Une de ses épouses lui dit : « Crains-tu pour toi-même, ô Prophète ? » Il répondit : « Le cœur du Croyant est entre deux doigts de la main de Dieu ». Si, comme ils le suggèrent, le cœur est entre deux « grâces » de Dieu, elles sont là pour le protéger ; pourquoi donc aurait-il demandé à Dieu d’affermir son cœur, donnant ainsi à la femme qui lui demandait : « Crains-tu pour toi-même ? » une réponse affirmative ? Si le cœur est protégé par deux grâces, il n’avait rien à craindre.
444 BUḪ. 97, 16, 26, 36 = HM IV, 590 sqq. ; 609, 629.
445 Coran, XXXIX, 67. 485230 a. — Si on nous demande alors : Mais que représente ici le mot « doigt » ? nous répondrons en rappelant cet autre ḥadīṯ : « Il porte la terre sur un doigt » ou « telle chose sur deux doigts »444. Il est impossible que le mot doigts signifie ici « grâces ». Il en est de même pour le verset : « Ils n’ont point mesuré Dieu à Sa vraie mesure. La terre en totalité, au jour de la résurrection, sera une poignée en Sa main et les cieux seront ployés en Sa dextre »445, où cela est également impossible. 486Pour nous, il ne s’agit pas d’un doigt comme nos doigts, d’une main comme nos mains ni d’une poignée comme nos poignées, car tous ces termes, appliqués à Dieu, [désignent des choses] qui ne ressemblent pas à [ce qu’ils désignent] chez les humains. *** LIV. — EXEMPLE DE ḤADĪṮ ANTHROPOMORPHISTE
147
487231. — Proposition : Vous enseignez que « chacune de ses deux mains est une dextre ». // Or cela est impossible si vous entendez par là les deux membres. Comment peut-on concevoir deux mains dont chacune soit une dextre ? 488232. — Réponse : Nous affirmons que ce ḥadīṯ est authentique et qu’il n’a rien d’impossible. Le Prophète a voulu exprimer par là l’idée d’achèvement et de perfection, car en toute chose, les éléments de gauche sont inférieurs aux éléments de droite pour la force, le courage, la perfection. Les Arabes aimaient commencer par la droite et détestaient commencer par la gauche, en raison de la perfection inhérente au côté droit et de l’imperfection inhérente au côté gauche. C’est pourquoi ils opposent le présage favorable (yumn) au présage sinistre (šu’m) en disant : « Le yumn dérive de yumnā (la dextre) et le šu’m de šu’mā (la sénestre, c’est-àdire la main gauche) ». C’est là une explication claire. 489Il est possible aussi qu’il ait voulu faire allusion à l’expression « donner des deux mains », car la dextre est la main qui donne. Si les deux mains sont qualifiées de dextres, c’est parce qu’elles donnent toutes les deux.
446 BUḪ. 65, s. 11, ch. 2 = HM III, 344 ; ḤAN. II, 242, 313, 500. Sur saḥḥā’, voir Tāğ, II, 160 où ce ḥ(...) 490On rapporte dans un autre ḥadīṯ que le Prophète a dit : « La dextre de Dieu est une éternelle verseuse. // Rien ne la tarit la nuit ni le jour »446. Ce qui signifie : elle prodigue ses dons, mais ne se vide jamais. C’est en ce sens qu’al-Marrār a dit :
447 L’iwāna est un puits bien connu que Lisān, XVI, 183, et Tāğ, IX, 132 localisent tous deux en citant (...) l’Iwanā de
« A est
un
jeune
homme
dont
les
[dextres »447. 148
‘Uqayl deux
mains
sont
deux
***
LV. — EXEMPLE DE ḤADĪṮ ANTHROPOMORPHISTE 448 BUḪ. 63, 10 = HM III, 8, etc…
449 Ibid. et 56, 28 = HM II, 294. 491233. — Proposition : Vous enseignez que le Prophète a dit : « Votre Seigneur s’étonne de vos gémissements et de votre désespérance, et de Son empressement à vous exaucer »448 ; il a dit aussi : « Il a ri de ceci ou de cela »449. 492Seul peut s’étonner et rire quelqu’un qui ne connaissait pas, puis connaît [soudain] ; c’est alors qu’il rit et s’étonne.
450 Ibid. et MUS. 36, 172. 493234. — Nous prétendons que l’étonnement et le rire ne consistent point dans ce qu’ils croient. Il faut comprendre : Telle ou telle chose était de nature à l’étonner // ou à Le faire rire — en effet, on ne rit que d’une chose étonnante. C’est pourquoi le Prophète a dit à l’Anṣārī qui, recevant un hôte et n’ayant que juste assez de nourriture pour lui-même, ordonna à sa femme d’éteindre la lampe afin que l’invité ne s’aperçût point que son hôte ne mangeait pas : « Dieu s’est étonné de votre procédé d’hier »450. Ce qui signifie : Ce procédé était de nature à étonner n’importe qui.
451 Coran, XIII, 5. 494Dieu a dit à son Prophète : « Si tu dois t’étonner, étonnante est la parole des incrédules »451. Il ne voulait pas dire : Cela est étonnant à Mon avis, mais seulement : Cela est étonnant pour qui l’entend. *** LVI. — EXEMPLE DE ḤADĪṮ ANTHROPOMORPHISTE 149
452 Cf. ḤAN. II, 268, 409, 518. 495235. — Proposition : Vous enseignez que le Prophète a dit : « N’injuriez
pas
le
vent,
car
c’est
un
souffle
du
Miséricordieux »452. Ceci implique que le vent est pour vous une chose incréée, car rien de ce qui émane du Miséricordieux n’est créé.
453 Coran, XXXIII, 9.
454 On n’a pas retrouvé ce ḥadīṯ. Mais voir p. ex. BUḪ. 61, 2 = HM II, 536, où sont vantées les vertus (...) 496236. — Réponse : Nous prétendons que ce qu’il appelait « souffle » n’a rien de commun avec ce qu’ils croient. Il a seulement voulu dire que le vent est l’émanation du réconfort et de la sérénité du Miséricordieux. On dit : « Seigneur, dissipe (naffis) de moi le mal ! » Dieu a envoyé un vent pour soulager son Prophète // le jour des Factions. Il a dit : « Nous envoyâmes contre eux un vent et des légions invisibles pour vous »453. Enfin, le Prophète a dit : « Je trouve que le souffle de votre Seigneur vient du Yémen »454.
455 On sait que les Anṣār (Aws et Ḫazrağ) sont unanimement considérés comme de souche yéménite. Cf. EI, (...) 497Abū Muḥammad dit : C’était là une métaphore, car il voulait dire : « Les gens de la Mekke m’avaient causé difficultés, soucis et chagrins, mais Dieu m’a réconforté grâce aux Anṣār, qui sont originaires du Yémen »455. Donc le « souffle » est l’émanation du réconfort et de la sérénité de Dieu, tout comme les Anṣār étaient l’instrument de Son réconfort. 498Abū Muḥammad dit : J’ai exposé cela plus longuement dans mon livre sur le Ġarīb al-ḥadīṯ. Il était néanmoins indispensable d’en parler ici, afin que le présent ouvrage soit complet. 150
***
LVII. — EXEMPLE DE ḤADĪṮ ANTHROPOMORPHISTE 456 On a retenu la leçon du texte : tuḥabbabūn wa tubağğalūn, ignorée par les recueils de ḥadīṯ, qui ne (...) 499237. — Vous enseignez que le Prophète a dit à l’un des deux fils de sa fille : « Par Dieu, on vous aimera et on vous vénèrera ; vous êtes le parfum de Dieu. Le dernier pas que Dieu a fait sur la terre était à Wağğ »456.
457 BUḪ. 65, s. 44, ch. 3 = HM III, 441 ; ḤAN. I, 380, 431, 441. 500238. — Réponse : Nous prétendons que ce ḥadīṯ a une explication // satisfaisante qu’ont admise certains partisans de la spéculation et certains partisans du ḥadīṯ. Ils interprètent : La dernière défaite que Dieu infligea aux polythéistes eut lieu à Ṭā’if, et la dernière expédition entreprise par le Prophète eut lieu à Wağğ — Wağğ est une vallée aux environs de Ṭā’if. Telle était l’opinion de Sufyān b. ‘Uyayna, qui disait : On peut rapprocher ce ḥadīṯ de l’invocation du Prophète : « Seigneur, renforce Ton oppression contre Muḍar ; envoie-leur des années comme les années de Joseph »457. Alors la disette s’abattit sur eux pendant sept ans, au point qu’ils mangèrent la peau et les os des moutons. On dit couramment : L’oppression du souverain s’est appesantie sur ses sujets ; il les a piétinés lourdement, comme le ferait un homme enchaîné. Le poète a dit :
458 Ce vers serait de ZUHAYR ; Lisān, XVI, 89. « Tu
nous
a
piétinés
bel
et
bien
dans
comme l’homme entravé piétine le harm sec »458.
459 D’après KAZIMIRSKI : solsola imbricata.
151
ta
colère,
501En effet, un homme entravé a beaucoup de mal à fouler aux pieds, car il se déplace péniblement dans ses liens et pose ses deux pieds ensemble. Le harm est une plante fragile : si on la piétine, elle se brise et s’écrase459.
460 Al-Inğīl al-ṣaḥīḥ. On incline à voir là la traduction de l’expression : « le Saint Évangile » dans (...)
461 Matt. V, 33-37. Texte remarquable de fidélité à l’original. 502238 a. — Cette manière de voir est loin d’être détestable, et flatte le cœur, Mais je n’oserais affirmer que telle était l’intention du Prophète, car j’ai lu dans le Saint Évangile460 que le Messie a dit aux Apôtres : « N’avez-vous pas appris qu’il // a été dit aux anciens : — Ne vous parjurez point lorsque vous jurez par Dieu mais soyez fidèles. Mais moi, je vous dis de ne jurer aucunement, ni par le ciel parce que c’est le trône de Dieu, ni par la terre parce que c’est Son marchepied (mawṭi’), ni par Jérusalem, parce que c’est la ville du grand roi. Ne jure pas non plus par ta tête, parce que tu ne peux y ajouter un seul cheveu blanc ou noir. Que votre parole soit oui, oui, non, non ; ce qu’on y ajoute vient du Démon »461.
462 Ce ḥadīṯ se retrouve dans Tāğ, II, 110. 503238
b.
—
Abū
Muḥammad
dit :
J’y
ajouterai
un
autre ḥadīṯ rapporté par Yazīd b. ‘Amr — ‘Abd Allāh b. al-Zubayr al-Makkī — ‘Abd Allāh b. al-Ḥāriṯ — Abū Bakr b. ‘Abd al-Raḥmān — Ka‘b : « Wağğ est sacré ; c’est de là que le Seigneur monta au ciel après avoir décrété la création de la terre »462. ***
LVIII. — EXEMPLE DE ḤADĪṮ ANTHROPOMORPHISTE 463 On trouve plutôt ḏirā‘ al-ğabbār. Voir § 101. ḤAN. II, 334, 547. 152
504239. — Proposition : Vous enseignez que le Prophète a dit : « La dent de l’infidèle en enfer est de la taille du mont Uḥud, et l’épaisseur // de sa peau est de quarante coudées [mesurées] au bā‘ al-ğabbār »463.
464 Coran, L, 45. 505240. — Réponse : Nous prétendons que ce ḥadīṯ a une explication satisfaisante — si c’est du moins ce que le Prophète a voulu dire : le mot ğabbār ici signifie « roi ». Dieu a dit : « Tu n’es pas pour eux un ğabbār »464, c’est-à-dire un roi souverain. Les Ğabābira sont des rois. 506C’est ainsi que les gens disent : « Ceci mesure tant et tant de coudées [mesurées] à la coudée du roi », pour dire « à la grande coudée ». Je crois qu’il s’agit d’un roi des Persans qui avait le bras très développé et qui lui donna son nom. ***
LIX. — EXEMPLE DE ḤADĪṮ ANTHROPOMORPHISTE 465 SUYŪṬĪ, Ğāmi‘, 151. 507241. — Proposition : Vous enseignez qu’Ibn ‘Abbās a dit : « La Pierre Noire est la dextre de Dieu sur terre. Il donne la main à qui Il veut parmi les créatures »465.
466 Cette réflexion de ‘Ā’iša ne paraît pas avoir été retenue par les compilateurs de ḥadīṯ. 508242. — Réponse : Nous prétendons que cela est langage figuré et comparaison. A l’origine, lorsqu’un roi tendait la main à quelqu’un, c’était pour qu’on la lui baisât. Tout se passe comme si la Pierre Noire était la main de Dieu, que l’on touche et que l’on baise. Il m’est parvenu que ‘Ā’iša a dit : « Lorsque Dieu reçut // le pacte des fils d’Adam et que, leur demandant de porter témoignage à l’encontre d’eux-mêmes, en disant : — Ne suis-Je 153
pas votre Seigneur ? ils répondirent : — Que Si ! Il déposa [ce pacte] dans la Pierre Noire et dit : — Ne les entendez-vous pas dire lorsqu’ils l’embrassent : — C’est par foi en Toi et par fidélité envers Ton pacte ! » C’est-à-dire : — Nous respectons Ton pacte, c’est
Toi
notre
Seigneur.
Or
les
gens
de
la
Ğāhiliyya
l’embrassaient déjà bien qu’ils fussent polythéistes ; mais ils ne l’embrassaient
pas
pour
la
bonne
cause,
car
ils
étaient
infidèles466. ***
LX. — EXEMPLE DE ḤADĪṮ ANTHROPOMORPHISTE 467 ḤAN. V, 243 ; cf. IV, 66 ; V, 58. 509243. — Proposition : Vous enseignez que le Prophète a dit : « J’ai trouvé en mon Seigneur la plus belle des figures. Il a posé Sa paume entre mes omoplates, et j’ai senti le froid de Ses doigts entre mes pectoraux »467.
468 Coran, CII, 143. Toute cette argumentation fait double emploi avec celle du n° LII.
469 Coran, XVII, 60. 510244. — Réponse : Nous prétendons que Dieu ne peut être atteint par les regards, mais qu’il atteint les regards, au moins sur terre. Mais lorsque viendra le jour de la résurrection, les Croyants Le verront comme ils voient la lune lorsqu’elle est pleine. Moïse Lui demanda : « Seigneur ; montre-Toi à moi, que je Te voie ! »468 pour devancer le moment auquel Dieu a reporté Sa vision, tant pour Moïse que pour les autres hommes, amis de Dieu. Mais Il lui répondit : « Tu ne me verras point ! » C’est pourquoi certains disent que notre Prophète ne L’a jamais vu qu’en // rêve, lorsque l’Inspiration le visitait, et que la nuit de son Ascension, il voyagea en esprit, et non physiquement. On connaît 154
le verset : « Et Nous avons placé seulement en manière de tentation pour les hommes la vision que nous t’avons fait voir et l’arbre maudit dans la Prédication »469. La « vision » désigne ici ce qu’il lui montra la nuit où Il le fit monter au ciel. Le Prophète révéla cela, mais certains le nièrent en disant : « Comment auraitil pu aller à Jérusalem, puis monter au ciel, puis redescendre sur la terre en une nuit ? » Ils s’imaginaient qu’il prétendait avoir fait cette ascension corporellement. Abū Bakr fut de ceux qui crurent ses paroles et le soutinrent ; c’est pourquoi il fut surnommé « le Véridique ».
470 On n’a pas retrouvé ce trait, qui pourrait bien avoir été forgé pour la circonstance. 511On affirme qu’une de ses épouses a dit au sujet de la nuit de l’Ascension : « Nous n’avons point été privées de son corps »470.
471 Coran, LXXXI, 23.
472 BUḪ. 59, 7 = HM II, 436 ; 65, s. 53, ch. 2 sqq. = HM III, 456 ; ḤAN. I, 395, 460. Tous ces ḥadīṯ-s (...) 512244 a. — A propos du verset : « Certes, il l’a vu à l’horizon éclatant »471, j’ai entendu Abū l-Ḫaṭṭāb d’après Mālik b. Su‘ayr — al-A‘maš — al-Walīd b. al-‘Ayrār — Abū l-Aḥwaṣ dire : « Il vit Gabriel sous son apparence ; il avait sept cents ailes »472.
473 Cf. ḤAN. IV, 181. 513Ils disent : Un autre ḥadīṯ // constitue également une preuve. Il est rapporté par ‘Abd Allāh b. Wahb — ‘Amr b. al-Ḥāriṯ — Sa‘īd b. Abī Hilāl — Marwān b. ‘Uṯmān — ‘Umāra b. ‘Āmir — Umm alṬufayl, épouse d’Ubayy b. Ka‘b : « Cette dernière entendit le Prophète raconter qu’il avait vu le Seigneur pendant son sommeil sous la forme d’un jeune homme à la chevelure abondante
155
environné d’une lueur verte. Il avait sur son trône un tapis d’or et portait aux pieds des sandales d’or »473.
474 Coran, XVII, 1. 514244 b. — Nous n’avons d’ailleurs jamais dit que nous partagions l’opinion de ceux qui interprètent ce ḥadīṯ comme nous venons de le rapporter. Si nous l’avons fait, c’est pour que l’on sache que certains l’interprètent ainsi et arguent des deux ḥadīṯ-s que nous venons de citer. Comment peut-on admettre cette interprétation lorsque Dieu dit : // « Gloire à Celui qui a transporté Son serviteur, la nuit… » etc.474 ? 515Cette interprétation ne saurait être la bonne, et on ne peut arguer de tels ḥadīṯ-s pour l’imposer. Nous demandons à Dieu de nous préserver de tels errements, afin que nous interprétions toujours les révélations divines à l’avantage de Muḥammad.
475 Ẓāhir. Importante prise de position sur l’exégèse coranique. 516Nous admettons bien le ḥadīṯ, mais nous recevons le Coran avec son sens apparent475. ***
LXI. — EXEMPLE DE ḤADĪṮ ANTHROPOMORPHISTE 476 Cf. BUḪ. 79, 1 = HM IV, 214 ; ḤAN. II, 244, 251, 310. 517245. — Proposition : Vous enseignez après le Prophète que Dieu créa Adam à Son image476. Or Dieu, de par Sa majesté, ne saurait avoir ni image ni figure.
477 Coran, XLII, 11. On a ici quelque peu torturé le français afin de rendre intelligible la démonstrat (...)
478 En somme, il faudrait distinguer miṯl, qui n’est qu’une kināya désignant le sujet lui-même, et naẓī (...) 156
518246. — Réponse : Nous affirmons comme eux que la majesté de Dieu est incompatible avec une figure ou une image. Cependant, il est fréquent que les hommes soient habitués à une chose qu’ils connaissent bien, mais n’en disent rien et lui dénient toute ressemblance [avec autre chose]. On n’ignore pas que Dieu se décrit en ces termes : « Rien n’est comme son analogue ; Il est audient et clairvoyant »477. La lettre de ce verset signifie que ce qui Lui est analogue ne ressemble à rien d’autre. Or l’analogue de quelque chose est distinct de cette chose. D’après la lettre de ce verset, Dieu aurait donc un analogue. Or dans le langage [courant], le mot « analogue » (miṯl) ne désigne pas autre chose que la chose elle-même. On dit : « Un homme analogue à moi, on ne lui dit pas de telles choses ! » ou « Un homme analogue à moi, on ne fait rien sans son ordre ! » // Cela ne veut pas dire : « A mon semblable (naẓīrī), on ne lui dit pas cela » ou « Mon semblable, on ne fait rien en dehors de lui » mais « A moi-même, on ne dit pas cela » etc… De même, dans le verset en question, « Rien n’est comme son analogue » signifie « rien n’est comme Lui », ce qui correspond bien à la locution courante478. 519On peut aussi considérer que le kāf (comme) est explétif, comme dans l’expression : « Il m’a parlé avec une langue comme l’analogue d’un javelot », ou « Elle a des doigts comme l’analogue du ‘anam », ou encore dans le vers du rāğiz :
479 Le texte porte kakamā, où ka- fait évidemment double emploi avec -kamā. On admettra que cette tourn (...) « [Il ne reste que] les pierres du foyer, telles comme si elles étaient brûlées pour avoir servi »479. 520où il a accolé un kāf au kāf, qui est synonyme de miṯl. 521246 a. — Mais
les // gens sont perplexes quant à
l’interprétation de la parole du Prophète : « Il a créé Adam à Son image ». Certains adeptes du kalām prétendent qu’il a voulu dire : 157
« Il a créé Adam à l’image d’Adam », sans plus. Si tel était le sens du texte, il n’aurait aucun intérêt. Qui douterait que Dieu a créé l’homme à l’image de l’homme, les fauves à l’image des fauves et les animaux domestiques à l’image des animaux domestiques ? 522Certains
autres
prétendent
que
Dieu
a
créé
Adam
conformément à une image qu’il avait par devers Lui, mais ceci est impossible, car Dieu n’a pu créer ses créatures d’après un modèle. 523246 b. — S’agissant du ḥadīṯ : « N’enlaidissez pas le visage, car Dieu a créé l’homme à Son image » d’aucuns prétendent que Dieu a créé Adam à l’image du visage, mais cela, comme la première interprétation, n’a aucun intérêt. Les hommes savent bien que Dieu a créé Adam sous la même forme que ses descendants, et son visage sous la même forme que leur visage. 524246 c. — Certains ajoutent un commentaire au ḥadīṯ et déclarent que comme le Prophète passait auprès d’un homme qui en frappait un autre au visage, il dit : « Ne le frappe pas, car Dieu a créé Adam // à son image », c’est-à-dire à l’image de l’homme frappé. Cette opinion comporte le même vice que la première. En présence de ces interprétations suspectes, et des controverses qu’elles ont suscitées, certains, dans leur aveuglement, ont été portés à compléter le ḥadīṯ. Ils disent — d’après Ibn ‘Umar — que le Prophète a dit : « Dieu créa Adam à l’image du Miséricordieux », et ceci pour bien montrer que le pronom, dans « son image » se rapporte à Dieu, et que la phrase devient claire en remplaçant le pronom
par
« le
Miséricordieux »,
comme
pour
dire :
le
Miséricordieux a créé l’homme à Son image. Ils commettent ainsi une erreur déplorable, car il n’est pas permis de dire : « Dieu a créé le ciel par la volonté du Miséricordieux » ou « par le vouloir du Miséricordieux ». Cette façon de dire serait licite si le second nom désignait un objet distinct du premier ou si le ḥadīṯ disait : 158
« N’enlaidissez point le visage, car il a été créé à l’image du Miséricordieux ». Or dans leur version, tout se passe comme si le Miséricordieux était distinct de Dieu, et vice-versa. Si la version d’Ibn ‘Umar est exacte, il en est bien comme l’a dit le Prophète, et ce ḥadīṯ n’admet ni interprétation, ni controverse. //
480 Nūr, sic. 525246
d.
—
Abū
Muḥammad
dit :
Parmi
les
diverses
interprétations, je n’en connais pas de plus plausible et de moins contestable que celle d’un partisan de la spéculation qui disait à propos de ce ḥadīṯ : Il signifie : « Dieu a créé Adam au paradis à sa propre image sur la terre ». Tout se passe en ce cas comme si l’on affirmait qu’Adam avait au paradis telle taille, tel aspect, telle lumière480, tel parfum, pour distinguer ses caractéristiques au paradis de celles qu’il eut [ensuite] sur la terre. Le Prophète aurait ainsi voulu dire : « Dieu créa Adam (au paradis) à sa propre image (celle qu’il avait sur la terre) ».
481 Gen. I, 25 et II, 7. 526Je
n’affirmerai
pas
que
cette
explication
s’applique
à
ce ḥadīṯ, et je ne décréterai pas que telle était l’intention du Prophète à cette occasion, car j’ai lu dans la Thora que lorsque Dieu créa les cieux et la terre, Il dit : « Nous créerons une espèce humaine à Notre image ! Et Il créa Adam de la couche superficielle de la terre ; Il souffla dans son visage un souffle de vie »481. Voilà qui ne saurait autoriser l’interprétation en question.
482 Réminiscence d’Exode XVII, 6, épisode du rocher d’Horeb. 527246 e. — Il en est de même pour le ḥadīṯ d’Ibn ‘Abbās où il rapporte que lorsque Moïse frappa la pierre qui se fendit pour les fils d’Israël, il leur dit : « Buvez, ô ânes ! » Alors Dieu // lui révéla : « Tu es allé vers des hommes, Mes créatures que J’ai créées à Mon 159
image, et tu les as comparés à des ânes ! » Mais Moïse ne cessa point jusqu’à ce qu’il fût puni482. Ceci est conforme au sens du ḥadīṯ. 528246 f. — Abū Muḥammad dit : Pour moi (mais Dieu sait le mieux la vérité) le mot « image » n’a ici rien de plus insolite que les « mains », le « doigt » ou « l’œil ». Ces termes nous sont familiers parce qu’ils figurent dans le Coran, et le mot « image » ne nous paraît étrange que parce qu’il ne figure pas dans le Coran. 529En ce qui nous concerne donc, nous croyons à tout cela sans nous interroger en aucun cas sur ses modalités ( kayfiyya) ou sa délimitation (ḥadd). ***
LXII. — EXEMPLE DE ḤADĪṮ ANTHROPOMORPHISTE 483 ḤAN. IV, 11. 530247. — Proposition : Vous rapportez dans un ḥadīṯ d’Abū Razīn al-‘Aqīlī que Ḥammād b. Salama dit au Prophète : « Où était le Seigneur avant qu’il ne créât les deux et la terre ? » Il répondit : « Il était dans des ténètres, avec de l’air au-dessus et endessous ! »483. 531Cela est de la délimitation (taḥdīd) et de l’anthropomorphisme. 532248. — Réponse : Nous prétendons que l’on n’est pas d’accord sur le ḥadīṯ d’Abū Razīn en question. On le trouve, émanant d’une autre source, dans des termes également répréhensibles. Les transmetteurs en sont des bédouins. Le nommé Wakī‘ b. Ḥudus, de la bouche duquel on rapporte entre autres le ḥadīṯ de Ḥammād b. Salama, est un inconnu. Cependant, il y a sur l’interprétation de ce ḥadīṯ les propos // d’Abū ‘Ubayd al-Qāsim b. Sallām ; Aḥmad b.
Sa‘īd
al-Liḥyānī
rapporte
qu’il
a
dit :
« Les
ténèbres
(‘amā’) désignent un nuage ». Il apparaît que ceci est exact dans 160
la langue si la dernière lettre du mot est un alif long ; mais si c’est un alif bref, à savoir ‘imä (aveuglement), il veut dire qu’il se dérobait
à
la
connaissance
des
hommes,
comme
dans
l’expression : « Je suis aveugle dans cette affaire » (‘amiya, ya‘mā,
‘aman) qui signifie : elle est compliquée, on ne la connaît pas, on ignore ses tenants et ses aboutissants. De toute chose cachée, on peut dire qu’elle est dans les « ténèbres » (‘aman) par rapport à nous. 533Quant à l’expression : « avec de l’air au-dessus et audessous », certains y ajoutent la négation mā, et disent : « sans air au-dessus, ni au-dessous » pour éviter qu’on se représente de l’air au-dessus et au-dessous, et Dieu entre les deux. Or la version transmise est bien la première, et le caractère suspect du texte ne change pas en ajoutant une négation, car les expressions « au-dessus » et « au-dessous » demeurent. Mais Dieu sait mieux la vérité. ***
LXIII. — EXEMPLE DE ḤADĪṮ ANTHROPOMORPHISTE 484 MĀLIK, 56, 3. 534249. — Proposition : Vous enseignez que le Prophète a dit : « N’insultez pas le destin (dahr) car Dieu est Lui-même le destin »484. Vous rejoignez par là la thèse des Dahriyya. 535250. — Réponse : Pendant la période préislamique, les Arabes disaient : « Le destin m’a frappé dans mon bien de telle et telle manière ou « Je suis victime des calamités, ou des sévices, // ou des malheurs du destin ». Le vieillard disait : « Le destin m’a courbé ». Ils attribuaient au destin toutes les manifestations du décret de Dieu : mort, infirmité, perte des enfants, vieillesse, et disaient : « Que Dieu maudisse le destin ! » Ils l’appelaient al-
161
manūn, car c’est lui qui leur apportait la mort. Al-manūn est synonyme d’al-maniyya (la mort). Abū Ḏu’ayb a dit :
485 Il s’agit d’ABŪ ḎU’AYB lequel voir Ši‘r, 635-642.
AL-HUḎALĪ, ḪUWAYLID B. ḪĀLID,
sur
« Est-ce de la mort (manūn) et de son incertitude que tu souffres ? Le destin n’apaise pas celui qui s’afflige »485. 536Abū Muḥammad dit : C’est sous cette forme que je tiens ce vers d’al-Riyāšī — al-Aṣma‘ī — Ibn Abī Ṭarafa al-Huḏalī — Abū Ḏu’ayb. Certains le transmettent sous la forme : « wa raybihā » au
raybihi » (son incertitude). Ils assimilent grammaticalement manūn à maniyya. C’est une erreur, car le verbe « n’apaise pas » est au masculin. lieu
de
« wa
486 Coran, LII, 30.
487 Coran, XLV, 24. 537Dieu a dit : « Nous l’attendons lors de l’incertitude du trépas »486,
c’est-à-dire :
« l’incertitude
du
destin
et
ses
manifestations ». Ailleurs, Dieu fait parler les hommes d’avant l’Islam, qui attribuaient au destin les décrets // et les actes de Dieu : « Ils ont dit : — Il n’existe que cette vie immédiate. Nous mourons et nous vivons, et seul le destin nous fait périr. De cela ils n’ont aucune science ; ils ne font que conjecturer »487. Le Prophète a donc voulu dire : « N’insultez pas le destin lorsque vous êtes accablés par les malheurs. Ne les lui imputez pas, car c’est Dieu qui vous les envoie, non la fatalité. Si vous insultez l’agent, c’est Dieu que vous insultez ! » 538N’est-il pas évident que lorsqu’un homme est frappé d’une calamité ou d’un malheur dans ses biens, ses enfants ou sa
162
propre personne, et en insulte l’agent, c’est Dieu qu’il insulte par là même ? 539250 a. — Je vais tenter par un apologue de rendre plus accessible l’interprétation de ce propos — quoique elle soit déjà assez accessible, grâce à Dieu. Supposons un homme du nom de Zayd qui ordonnerait à un de ses esclaves nommé Fath de tuer quelqu’un. L’ordre exécuté, les gens insulteraient et maudiraient Fath. On pourrait alors leur dire : « N’insultez pas Fatḥ, car Fatḥ, c’est Zayd ! » C’est-à-dire : C’est Zayd le meurtrier, car c’est lui l’instigateur. La phrase voudrait donc dire : Le meurtrier est Zayd, et non Fatḥ. De même, le destin implique des malheurs et des catastrophes qui dépendent des décrets de Dieu. Les hommes insultent le destin parce que c’est lui qui implique ces malheurs et ces catastrophes, mais ce n’est pas lui le véritable agent. 540On peut donc dire : // « N’insultez pas le destin, car le destin, c’est Dieu ». ***
LXIV. — EXEMPLE DE ḤADĪT ANTHROPOMORPHISTE 488 BUḪ. 97, 50 = HM IV, 643 ; ḤAN. II, 251, 316, 413… ; III, 40, 127, etc… 541251. — Proposition : Vous enseignez d’après Abū Ḏarr et Abū Hurayra que le Prophète a dit : « Dieu dit : Quiconque s’approche de Moi d’un empan, Je M’approche de lui d’une coudée ; quiconque s’approche de Moi d’une coudée, Je M’approche de lui d’une brasse ; quiconque vient vers Moi au pas, Je viens vers lui en courant »488. 542252. — Réponse : Nous prétendons que cela est comparaison et langage figuré. Ces paroles veulent dire : « Quiconque M’obéit rapidement, Je le récompense encore plus rapidement ». Pour exprimer cela, Il a utilisé une métaphore à base de marche et de 163
course, tout comme lorsqu’on dit : « Untel marche rapidement dans l’égarement » (awḍa‘a veut dire : marcher rapidement). Cela ne veut pas dire qu’il y marche au sens propre, mais qu’il s’y précipite,
au
sens
figuré.
Dans
cette
métaphore,
la
racine WḌ‘ désigne donc la précipitation.
489 Coran, XXII, 51 = XXXIV, 5. 543Il
en
est
de
même
marchent (sa‘aw) contre
pour
nos
Signes
l’impuissance… »489. Sa‘y est marche
rapide.
Cela
ne
le
verset : pour
synonyme
veut
pas
« Ceux
nous
d’isrā‘, et
dire
qu’ils
qui
réduire
à
signifie : marchent
continuellement, mais qu’ils s’évertuent en intention et en actes. Mais Dieu sait le mieux la vérité. ***
LXV. — EXEMPLE DE ḤADĪṮ INFIRMÉ PAR LE CONSENSUS ET PAR LE CORAN 490 ḤAN. VI, 296. 544253. — Proposition : Vous rapportez que le fils d’Umm Maktūm demanda audience au Prophète // alors que celui-ci avait auprès de lui deux de ses femmes. Il leur ordonna de se voiler, mais elles dirent : « Ô Envoyé de Dieu, il est aveugle ! » Il répliqua : « Et vous, êtes-vous aveugles ? »490.
491 P. ex. BUḪ. 10, 163 = HM I, 287. 545Or tout le monde s’accorde sur le fait qu’il n’est pas illicite que les femmes regardent les hommes quand elles sont voilées. A l’époque du Prophète, elles allaient à la mosquée et faisaient la Prière avec les hommes491.
492 Coran, XXIV, 31.
493 C.-à-d. des yeux et des mains. 164
546A propos du verset : « …qu’elles ne montrent de leurs atours que ce qui en paraît »492, vous affirmez qu’il s’agit du kuḥl et de la bague493.
494 Coran, XXXIII, 53. 547254. — Réponse : Nous affirmons que Dieu a ordonné aux épouses du Prophète de se voiler, puisqu’il a imposé aux hommes de ne leur parler que de derrière un voile dans le verset : « Quand vous demandez quelque chose [aux épouses du Prophète], demandez-le de derrière un voile ! »494. Que ce fût un aveugle ou un clairvoyant qui entrait auprès d’elles sans qu’un voile les dérobât à sa vue, il désobéissait également à Dieu ; quant à elles, elles Lui désobéissaient également si elles l’autorisaient à entrer auprès d’elles. 548C’était là un privilège des épouses du Prophète, auxquelles il était
en
outre
spécialement
interdit
d’épouser
aucun
Musulman. // Mais lorsqu’elles sortaient pour accomplir le pèlerinage, ou toute autre obligation rituelle, ou en raison d’une affaire quelconque les obligeant à quitter leur maison, elles n’étaient plus tenues de se voiler ; en effet, en l’occurrence, personne n’entrait auprès d’elles. [Toutefois], elles étaient tenues de se voiler si elles partaient en voyage, mais cette obligation ne leur était imposée que dans les demeures où elles s’arrêtaient. ***
LXVI. — EXEMPLE DE DEUX ḤADĪṮ-S CONTRADICTOIRES 495 ḤAN. VI, 49, 208, 237. Le cas auquel s’applique cet adage est bien défini ici. 549255. — Vous enseignez que le Prophète a décrété : « Les revenus suivent le risque »495. Par exemple, un individu achète un esclave, l’emploie un moment, puis se rend compte qu’il a un vice rédhibitoire. Il le restitue alors en raison de ce vice, mais il ne 165
restitue pas le bénéfice qu’il en a tiré, ou ḫarāğ ; en effet, il en était responsable, et si l’esclave était mort, c’est son patrimoine qui en aurait subi le préjudice.
496 BUḪ. 34, 64 = HM II, 33 ; ḤAN. I, 430, 431 ; II, 248, 460, 481. 550D’autre part, vous enseignez que quiconque achète une brebis dite muṣarrāt conserve l’option pendant trois jours. S’il le désire, il la restitue, mais il y joint une mesure de nourriture496. Cela est contraire à la première sentence, car le lait tiré est un produit (ġalla), et [l’acheteur] était responsable [de la brebis] : si elle était morte, c’est son patrimoine qui aurait subi le préjudice. Ce cas est identique à celui du « revenu suivant le risque » et il n’y a aucune différence. 551256. — Réponse : Nous prétendons qu’il y a entre les deux une différence
évidente,
car
//
une
brebis muṣarrāt et
une
brebis muḥaffala sont une seule et même chose : c’est celle qui demeure pendant plusieurs jours sans être traite, si bien que le lait s’accumule dans son pis, qui devient énorme. Lorsque quelqu’un l’achète et la trait, il l’épuise en une ou deux traites. Puis quand le lait se trouve tari et que l’acheteur se rend compte qu’elle
était muḥaffala, il
la
restitue
avec
une
mesure
de
nourriture, car le lait qui était dans le pis était la propriété du vendeur, et non la sienne ; il lui restitue donc la valeur du lait. 552Mais en ce qui concerne l’esclave vendu avec un vice rédhibitoire,
dont
l’acheteur
ne
se
rend
pas
compte,
aucun
produit (ġalla) n’est vendu en même temps, si bien que tout bénéfice [procuré par cet esclave] rentre dans le patrimoine de l’acheteur, qui n’est pas tenu d’en restituer quoi que ce soit. *** LXVII. — EXEMPLE DE DEUX ḤADĪṮ-S CONTRADICTOIRES 166
497 BUḪ. 36, 2 = HM II, 60 ; ḤAN. VI, 10, 390.
498 ḤAN. IV, 388, 390 ; V, 8, 12, etc… 553257. — Proposition : Vous enseignez que ‘Amr b. al-Šarīd a entendu Abū Rāfi‘ rapporter de la bouche du Prophète : « Le voisin a droit de préemption sur le bien contigu »497. De plus, d’après Qatāda — al-Ḥasan — Samura — le Prophète a dit : « Le voisin de la maison a droit de priorité sur la maison du voisin »498.
499 BUḪ. 90, 14 = HM IV, 446. 554D’autre part, vous transmettez d’après al-Zuhrī — Abū Salama b. ‘Abd al-Raḥmān — Ǧābir que le Prophète a établi le droit de préemption uniquement sur tout bien indivis ; mais si un bornage est intervenu et que des chemins ont été tracés, il n’y a plus de droit de préemption499. 555Cela est en contradiction // avec le premier ḥadīṯ. 556258. — Réponse : Nous prétendons que rien ne prouve, dans ce second ḥadīṯ, que Ğābir a entendu ce qu’il rapporte de la bouche même du Prophète. On constate qu’il déclare : « Le Prophète a établi le droit de préemption sur tout bien indivis ». C’est donc là une sentence émanant de Ğābir lui-même, ou une présomption
de
sa
part,
ou
un
propos
qu’il
a
entendu
indirectement de la bouche du Prophète.
500 Texte : muttaṣilāni, wa ‘alā annahumā ; il faut supprimer wa. 557Les deux premiers ḥadīṯ-s sont connexes, car500 ils ont tous deux la même interprétation. Le premier veut dire : Le voisin est prioritaire quant aux éléments contigus de la maison de son voisin. Le mot ṣaqb désigne la proximité avec contiguité. Le poète a dit : 167
« Une
Koufienne
dont
le
quartier
est
éloigné,
dont la maison n’est ni vis-à-vis, ni contiguë ». 558Il veut dire dans le second hémistiche : « ni proche, ni contiguë ». 559Passons
au ḥadīṯ : « Le
Prophète
a
établi
le
droit
de
préemption uniquement sur tout bien indivis ; etc… » Supposons un endroit où dix familles auraient des maisons en indivis. Si l’un d’eux vend une part de ces maisons, tous les autres ont un droit de préemption sur cette part, // et chacun a droit à un neuvième. Mais
si
les
maisons
sont
divisées
avant
que
l’un
des
copropriétaires vende quoi que ce soit, chacun d’eux reçoit une maison donnée. Les autres n’ont plus le droit de préemption, et seul en bénéficie le voisin immédiat. 560Ce ḥadīṯ vise à montrer que lorsque le partage est effectué, les règles concernant la propriété indivise ne jouent plus. ***
LXVIII. — EXEMPLE D’UN ḤADĪT INFIRMÉ PAR LA SPÉCULATION 501 BUḪ. 59, 16, 17 = HM II, 456 sqq. ; 76, 58 = HM IV, 91 ; ḤAN. II, 229… ; III, 67. 561259. — Proposition : Vous enseignez que le Prophète a dit : « Si une mouche tombe dans un récipient vous appartenant, noyez-la, car une de ses ailes contient un poison et l’autre le remède. Elle met le poison en avant, et le remède en arrière »501. 562Comment peut-il exister dans un seul et même objet un poison et son remède ? Comment la mouche peut-elle savoir où se trouve ce poison, pour le mettre en avant, et celui où se trouve ce remède, pour le mettre en arrière ? 563260.
—
Réponse :
Nous
prétendons
que
ce ḥadīṯ est
authentique, car on le rapporte aussi en termes différents. 168
D’après Abū 1-Ḫaṭṭāb — Abū ‘Itāb — ‘Abd Allāh b. al-Muṯannā, Ṯumāma rapporte : « Une mouche tomba dans un récipient. Anas la saisit, la plongea dans l’eau et dit : — Au nom de Dieu ! // Il fit cela trois fois et dit : — Le Prophète leur a ordonné d’agir ainsi ; il a dit : Il y a dans une de ses ailes un poison, et dans l’autre un remède ».
502 Ce passage rappelle curieusement le Tarbī‘, qui pourrait bien être visé. 564260 a. — Abū Muḥammad dit : Nous prétendons que s’il est des gens pour rejeter l’Islam, et des négateurs, ce sont bien ceux qui subordonnent les affaires religieuses au témoignage des sens, nient que les bêtes parlent, que les oiseaux nagent, que les collines se plaignent à leur sœur, que les mouches connaissent l’endroit où elles portent un poison et un remède, s’opposent à ce qu’ils trouvent dans le ḥadīṯ dans la mesure où ils ne le comprennent pas, en demandant : Comment un qirāt peut-il être égal au mont Uḥud ? Comment Jérusalem peut-elle parler ? Comment le Démon peut-il manger ou boire de la main gauche, et de quelle main gauche s’agit-il ? Comment Adam a-t-il pu rencontrer Moïse, et s’entretenir avec lui sur le Qadar, alors que des générations les séparent ? Où eut lieu cette entrevue ? etc… 502.
503 Texte : yasta‘idd ; l’éd. propose yastatir, sans réf. à un manuscrit. On peut penser également à ya (...) 565Toutefois, les mêmes [sceptiques] ne manquent pas de puiser dans un arsenal503 de choses analogues, d’affirmations du même genre, et de semblables futilités ; ils tirent parti de semblables
controverses,
d’anecdotes
et
de
traditions
comparables, [à condition] que cela s’oppose à ce qu’a enseigné le Prophète, et aux règles de vie des meilleurs Compagnons et Suivants. 169
566260 b. — Quiconque taxe de mensonge une partie de ce qu’a enseigné le Prophète // est comme celui qui condamnerait le tout en bloc. S’il voulait répudier l’Islam pour adopter une religion dans laquelle on ne croie point à cela ou à des choses analogues, il ne saurait où s’adresser, car les Juifs, les Chrétiens, les Mages, les Sabéens et les Manichéens croient à de telles choses, et en trouvent mention dans leurs écritures. 567Je ne connais personne pour nier cela, sinon un groupe de Dahriyya, suivis en cela par certains adeptes du kalām et des Ğahmiyya. 568260 c. — Bref, rien n’empêche qu’une mouche renferme un poison et un remède, même si nous laissons de côté l’aspect religieux [des choses] et si nous nous référons à la falsafa. Où voit-on une différence entre la mouche et le serpent, dont la chair — au dire des médecins — constitue un antidote contre leur venin, au point qu’on en fait la thériaque majeure, efficace contre la piqûre du scorpion, la morsure des chiens enragés, la fièvre quarte, l’hémiplégie, la paralysie faciale, la chorée, l’épilepsie. Les médecins disent aussi que si l’on ouvre le ventre d’un scorpion et qu’on en frotte l’endroit de la piqûre, cela est efficace. Si on le calcine et qu’on en fait boire la cendre // à quelqu’un qui a des calculs, il fait effet également. Il arrive qu’un hémiplégique retrouve l’usage de ses membres après avoir été piqué par un scorpion. On peut aussi le faire macérer un moment dans la graisse, et cette graisse fait percer de gros abcès. Les anciens médecins prétendent que si l’on jette des mouches dans l’antimoine
et
qu’on
écrase
le
tout,
pour
s’en
servir
comme kuḥl, ce mélange augmente la luminosité du regard et raffermit la racine des cils au bord des paupières. Ils tiennent d’Aristote que certains peuples mangeaient des mouches et ne connaissaient pas la chassie. Ils disent que des mouches broyées 170
et posées à l’endroit de la morsure du scorpion apaisent la douleur. 569Mais ils disent que la personne mordue par un chien doit se couvrir le visage de telle sorte que les mouches ne s’y posent pas, car cela l’achèverait. Ce [dernier trait] prouve que les mouches ont une nature pernicieuse et venimeuse. 570260 d. — Abū Muḥammad dit : Pourquoi refuserions-nous l’intelligence aux animaux et aux insectes, même en laissant de côté le point de vue religieux, et en raisonnant en faylasūf, c’està-dire en fonction de ce que perçoivent nos yeux ? Nous voyons la fourmi accumuler l’été des provisions pour l’hiver ; si elle craint que le grain emmagasiné ne moisisse, elle le sort à la surface du sol et l’étale par les nuits de lune. Si elle craint que les grains ne germent, elle en perce // le milieu afin d’éviter cela. Ibn ‘Uyayna a dit : « Seuls font des provisions l’homme, la fourmi et la souris ». 571On constate que les corbeaux ne s’intéressent pas à un palmier chargé de fruits. Mais lorsque le palmier est émondé, ils se jettent dessus et en picorent la moelle, à l’endroit de la cicatrice. 572Les faylasūf-s prétendent que lorsqu’un chameau est mordu par un serpent, il mange des écrevisses. Ibn Māsawayh dit : « C’est pourquoi nous pensons que l’écrevisse est efficace contre les morsures [de serpent] ». Ils disent encore : Lorsque une tortue a mangé une vipère, elle s’administre du serpolet. Lorsque la belette a combattu un serpent, elle mange de la rue. Lorsque les chiens ont des vers, ils mangent des épis de blé. 573260 e. — Abū Muḥammad dit : Je constate donc qu’au dire même des faylasūf-s, les animaux en question font preuve d’intelligence et d’expérience thérapeutique. C’est pourtant beaucoup plus extraordinaire que la connaissance qu’a la mouche de l’endroit où elle détient un poison et un remède, dans ses ailes. Comment ne s’étonnent-ils pas que la pierre magnétique 171
attire le fer de loin, et le fait se déplacer en même temps qu’elle à droite ou à gauche ? // Comment peuvent-ils ajouter foi aux propos d’Aristote sur la pierre de sinfīl qui, attachée sur le ventre d’un hydropique, en absorbe l’eau ? Ce qui le prouve, c’est que si on pèse cette pierre après qu’elle ait été attachée sur le ventre du patient, on constate qu’elle a augmenté de poids. 574J’ai entretenu de cela Ayyūb, le médecin, — ou peut-être Ḥunayn, — et il était au courant. Il m’a dit : « Cette pierre est mentionnée dans la Thora » ou dans un autre livre révélé. 575Comment peuvent-ils ajouter foi aux affirmations d’Aristote sur une pierre qui nage dans le vinaigre comme un poisson ; sur une concrétion qui se forme dans les lombes d’une femme, de sorte qu’elle ne peut plus concevoir ; sur une pierre qui, placée au bord d’un four à pain, fait retomber toute la fournée ; sur une pierre qui, prise dans les mains, provoque l’expulsion de tout ce que l’on a dans le ventre ; sur l’acacia de Haute Égypte (sanṭa) qui se dessèche lorsqu’on dégaine un sabre devant lui en faisant mine de le couper. 576260 f. — Un de nos maîtres m’a rapporté d’après ‘Alī b. ’Āṣim, — Ḫālid al-Ḥaḏḏā’ que Muḥammad b. Sīrīn raconte : « Deux hommes se disputaient devant Šurayḥ. L’un d’eux dit : — J’ai confié un dépôt à cet homme, et il refuse de me le rendre ! Šurayḥ ordonna alors : — Rends à cet homme son dépôt ! L’autre déclara : C’est une pierre, Abū Umayya ; si une femme enceinte la voit, elle perd son enfant ; si elle tombe dans le vinaigre, elle se met à bouillonner ; si elle est mise dans un four à pain, il refroidit ! Alors Šurayḥ garda le silence // et ils s’en allèrent ». 577Ces faits — que Dieu te pardonne ! — sont absolument inconcevables, raisonnement
et
pour
analogique.
la
plupart
D’ailleurs,
172
sont si
rebelles
nous
à
tout
cherchions
à
énumérer tout ce que la création comporte de bizarreries de cette sorte, il y en aurait trop et nous n’en finirions pas. ***
LXIX. — EXEMPLE D’UN ḤADĪṮ DONT LES RĀFIḌITES TIRENT ARGUMENT POUR TAXER D’INFIDÉLITÉ LES COMPAGNONS DE MUḤAMMAD 504 BUḪ. 60, 8 = HM II, 473 ; 81, 53 = HM IV, 315 ; ḤAN. I, 235, 453 ; V. 50. 578261. — Proposition : Vous enseignez que le Prophète a dit : « En vérité, des gens viendront me retrouver à la Vasque, puis seront attirés ailleurs et se sépareront de moi. Je dirai alors : — Hélas,
Seigneur !
Mes
chers
Compagnons !
Mes
chers
Compagnons ! Il me répondra : — Tu ne sais donc pas ce qu’ils ont inventé après toi ! Ils n’ont pas cessé d’apostasier depuis que tu les as quittés ! »504. 579C’est là un argument qui plaide pour les Rāfiḍites, lorsqu’ils taxent d’infidélité les Compagnons du Prophète — sauf ‘Alī, Abū ḏarr, al-Miqdād, Salmān, ‘Ammār b. Yāsir et Ḥuḏayfa. 580262. — Réponse : Nous prétendons que s’ils examinaient ce ḥadīṯ et en comprenaient les termes, ils y trouveraient la preuve qu’il entendait ne désigner par là qu’un petit nombre de gens. J’en veux pour preuve qu’il a dit : « Des gens viendront me retrouver à la Vasque ». S’il avait voulu les désigner tous // — sauf les précités — il aurait dit : « Vous viendrez me retrouver… puis vous serez attirés ailleurs… » Il est clair que lorsqu’on dit : « J’ai reçu aujourd’hui des gens de Tamīm, ou des gens de Kūfa », il s’agit d’un petit groupe pris parmi un grand nombre. Si on voulait dire qu’on les a reçus tous, à l’exception de quelques unités, on dirait : « J’ai reçu les Banū Tamīm, ou « J’ai reçu les habitants de Kūfa ». On ne pourrait pas dire « des gens », car ce mot désignerait ceux qui ne sont pas venus. 173
581262 a. — J’en veux pour preuve également que dans l’expression : « Seigneur ! mes chers Compagnons », il a employé le diminutif (Uṣayḥābī), pour insister sur leur petit nombre, comme lorsqu’on dit : « Je suis passé près d’un petit groupe de maisons (ubayyāt) dispersées »
ou
« près
d’une
petite
assemblée (ğumayyi‘a) ».
505 Sur cette histoire, cf. Tarbī‘, s. ‘Uyayna… p. 44, et EI, IV, 874 — (VACCA), s. Ṭulayḥa. 582Nul
n’ignore
que parmi
ceux qui furent
témoins
des
événements en même temps que le prophète et qui participèrent avec lui aux expéditions de conquête, on trouvait des hypocrites qui ne cherchaient que leur profit, des tièdes, des sceptiques, des hésitants ; nous savons qu’il y eut des apostats après sa mort, tels ‘Uyayna b. Ḥiṣn qui apostasia, rejoignit le faux prophète Ṭulayḥa b. Ḫuwaylid et crut en lui. Lorsque Ṭulayḥa fut défait, il s’enfuit, mais fut repris par Ḫālid b. al-Walīd qui l’envoya chargé de fers à Abū Bakr. Il le fit amener à Médine, et les gamins de Médine se mirent à l’aiguillonner avec des branches de palmier pointues et à le frapper en disant : « Eh ! ennemi de Dieu ! tu es redevenu infidèle après avoir été croyant ! » Alors l’ennemi de Dieu répondait : « Je jure que je n’étais pas croyant ! » Puis lorsqu’il s’entretint avec Abū Bakr, il revint à l’Islam. Abū Bakr accepta sa résipiscence // et lui rédigea un acte de sauvegarde. Mais par la suite, il demeura un piètre croyant jusqu’à sa mort505. C’est lui qui attaqua les chameaux du Prophète dans la Ġāba. Al-Ḥārit b. ‘Awf lui dit : « Tu es bien ingrat envers Muḥammad ! Tu engraisses ton troupeau sur ses terres, puis tu l’attaques ! » Il répondit : « Comme tu dis ! » Le Prophète l’a traité d’« imbécile obéi ».
506 Coran, IX, 101.
507 Coran, XLVIII, 29. 174
508 Coran, XLVIII, 18. 583262 b. — ‘Uyayna b. Ḥiṣn eut des émules qui apostasièrent au moment de la rébellion des Arabes. Il en est qui vinrent à résipiscence et firent de bons Musulmans ; mais il en est qui s’endurcirent dans l’hypocrisie. Dieu dit : « Parmi ceux des bédouins qui sont autour de vous et parmi les habitants de Médine, il est des hypocrites qui sont endurcis dans l’hypocrisie. Vous ne les connaissez point, mais Nous, Nous les connaissons » etc…506. Tels sont ceux qui « seront attirés ailleurs ». Quant à l’ensemble des Compagnons, moins les six personnages en question, comment pourraient-ils être « attirés ailleurs » alors que le Coran dit : « Muḥammad est l’Envoyé de Dieu ? Ceux qui sont avec lui sont violents à l’égard des infidèles et compatissants entre eux » etc.. jusqu’à la fin de la sourate507, et ailleurs : « Dieu a été satisfait des Croyants quand // ils te prêtaient serment d’allégeance sous l’arbre »508.
509 BUḪ. 61, 25 = HM II, 557. 584262 c. — Abū Muḥammad dit : D’après Zayd b. Aḫzam al-Ṭā’ī — Abū Dāwūd — Nāqira b. Ḫālid — Qatāda demanda à Sa‘īd b. alMusayyab : « Combien étaient-ils à la bay‘a al-riḍwān ? » Il répondit : « Quinze cents ». Qatāda répliqua : « Mais Gābir b. ‘Abd Allāh a dit de son côté qu’ils étaient quatorze cents ! » Et l’autre déclara : « Il se trompe ! Que Dieu lui pardonne ! C’est lui-même qui m’a rapporté qu’ils étaient quinze cents ! »509.
510 L’expression n’est pas très claire. Il peut y avoir une allusion aux prophéties que les Musulmans p (...) 585Comment se peut-il que Dieu Se déclare satisfait de certaines gens, qu’Il les loue, qu’Il les cite en exemple510 dans la Thora et l’Évangile, tout en sachant qu’ils apostasieront après la mort du
175
Prophète ? Il faudrait alors supposer que Dieu n’en savait rien, ce qui serait la pire des infidélités ! ***
LXX. — EXEMPLE D’UN ḤADĪṮ RELATIF AU QADAR 511 Sur Moïse-Adam, BUḪ. 60, 31 = HM II, 504… ; ḤAN. II, 248 etc… Les traditionnistes ne paraissent pas (...) 586263. — Proposition : Vous enseignez que Moïse était qadarite. et qu’il argumenta avec Adam, qui eut le dernier mot ; vous enseignez qu’Abū Bakr // était qadarite, et qu’il argumenta avec ‘Umar, mais que ce dernier eut le dernier mot511. 587264. — Réponse : Nous prétendons que c’est là pure calomnie et mensonge à l’encontre de la tradition historique. Je ne sache pas qu’il soit affirmé nulle part dans le ḥadīṯ que Moïse était Qadarite, ou qu’Abū Bakr était Qadarite. 588D’après Abū l-Ḥaṭṭāb — Bišr b. al-Mufaḍḍal — Dāwūd b. Abī Hind — ‘Āmir — Abū Hurayra, le Prophète a dit : « Moïse rencontra Adam et lui dit : — C’est toi, Adam, père du genre humain, qui a apporté le malheur aux hommes en les faisant expulser du paradis ? — Oui ! Et toi, n’es-tu pas Moïse, que Dieu a élu parmi les hommes pour leur transmettre Son message et Sa parole ? — Oui ! Adam lui demanda alors : — N’est-il pas dit, dans la révélation qu’Il t’a faite, qu’Il me ferait sortir du paradis avant qu’Il ne m’y fît entrer ? — Si ! Alors Adam eut le dernier mot ».
512 Texte : na‘tadd (?). Nous lisons na‘tadī. 589264 a. — Abū Muḥammad dit : Dans ces propos, rien ne montre que Moïse fût Qadarite ; nous savons que tout arrive par la prédestination (qadar) et le décret (qaḍā’) de Dieu, ce qui ne ne nous empêche pas d’attribuer les actes à leurs auteurs, de louer celui qui fait le bien // pour le bien qu’il fait, de blâmer celui qui 176
fait le mal pour le mal qu’il fait, et de manifester notre réprobation512 à celui qui commet des fautes en raison de ses fautes. 590Lorsqu’ils disent qu’Abū Bakr était Qadarite, c’est aussi par détournement du sens, et par addition au ḥadīṯ. Si [Abū Bakr et ‘Umar] se sont disputés à propos du Qadar, c’est uniquement parce qu’ils ne savaient pas. Lorsqu’ils connurent la vérité, ils s’accordèrent sur une seule et même doctrine. De même, ils ignorèrent bien des choses sur la religion et l’unicité divine jusqu’à ce que le Prophète les leur eût enseignées, que le Coran fût révélé, et que les traditions normatives fussent établies. Ce n’est qu’après qu’ils surent.
513 Voir index, s.v. 591Il reste que le ḥadīṯ sur ‘Umar et Abū Bakr est faible aux yeux des gens du ḥadīṯ ; il est rapporté par Ismā’īl b. ‘Abd al-Salām — Zayd b. ‘Abd al-Raḥmān — ‘Amr b. Šu’ayb — son père — son grand père ; d’autre part, il est aussi transmis par des Ḫurāsāniens d’après Muqātil b. Ḥayyān — ‘Amr b. Šu’ayb. La plupart de ces gens sont des inconnus513. ***
LXXI. — EXEMPLE DE ḤADĪṮ INFIRMÉ PAR LA SPÉCULATION 514 BUḪ. 2, 15 = HM I, 17 ; ḤAN. II, 56, 147, 392, etc... 592265. — Proposition : Vous enseignez que le Prophète a dit : « La pudeur est une partie de la foi »514. 593Or la foi s’acquiert, alors que la pudeur est une qualité innée chez l’homme. Comment une qualité innée peut-elle être acquise ?//
515 Coran, IX, 103. 177
516 Coran, XXV, 77.
517 Coran, IX, 103. On peut se demander s’il n’y a pas ici une phrase recopiée deux fois à deux lignes (...)
518 Coran, XXIII, 56. 594266. — Nous affirmons que l’individu pudique se détache du péché par sa pudeur comme il s’en détache par la foi. Tout se passe donc comme si la pudeur était une partie de la foi. Les Arabes pratiquent la métonymie lorsque les mots désignent des choses analogues ou semblables, ou ayant un rapport de cause à effet. On sait qu’ils ont appelé l’inclination et la prosternation Prière (ṣalāt) alors qu’à l’origine, la prière est une invocation (du‘ā’). Ils ont aussi appelé l’invocation Prière, comme dans le verset : « Fais la prière sur eux ! »515, qui signifie : « Fais une invocation en leur faveur ; ou encore : « [Mon Seigneur ne se souciera pas de vous] sans votre invocation »516, c’est-à-dire : sans votre Prière. Ibn ‘Umar dit que lorsque le Prophète était invité à un repas, s’il était en rupture de jeûne, il mangeait, mais s’il était à jeûn, il faisait une prière — c’est-à-dire une invocation. La base de la Prière est l’invocation. Dieu a dit : « Fais la prière sur eux ; ta prière est pour eux un apaisement »517, c’est-à-dire : fais une invocation en leur faveur. Dieu a dit : « Dieu et Ses anges prient sur le Prophète. O vous qui croyez, priez sur le Prophète et appelez sur lui le salut »518 c’est-à-dire : invoquez [Dieu] en sa faveur.
519 Divers ḥadīṯ-s affirment que le prélèvement de la ṣadaqa ne diminue en rien le patrimoine, car il s (...) 595266 a. — Beaucoup de choses ont été dites à ce sujet. Lorsque l’invocation était contenue dans la prière, la prière était appelée « invocation ». Il en est de même pour la zakāt, qui est la purification et l’augmentation du patrimoine. Étant donné que 178
cette augmentation avait lieu par prélèvement de l’aumône légale (ṣadaqa) sur le patrimoine, on l’appela zakāt519. Il y a beaucoup de faits analogues.
520 BUḪ. 60, 54 = HM II, 533 ; ḤAN. IV, 121, 122 ; V, 273. 596302 D’après Abū l-Ḫaṭṭāb — al-Mu‘tamir b. Sulaymān — Layṯ // b. Abī Salīm — Wāṣil b. Ḥayyān — Abū Wā’il, Ibn Mas‘ūd a dit : « La dernière parole qui a été conservée de la Prophétie est la suivante : — Si tu n’as pas de pudeur, fais ce que tu veux ! »520. Ce qui veut dire que quiconque n’a pas de pudeur et est pervers [peut] commettre tous les scandales, se rendre coupable de toutes les vilenies, car rien ne le réfrène, ni religion, ni pudeur. 597On voit bien par là que la pudeur et la foi ont les mêmes effets, et que tout se passe comme si elles étaient une seule et même chose. ***
LXXII. — EXEMPLE DE ḤADĪṮ-S CONTRADICTOIRES SUR LA PRIERE 521 ḤAN. IV, 161. 598267. — Proposition : Vous rapportez d’après Šu‘ba — Yazīd b. ‘Aṭā’ — Ğābir b. Yazīd — al-Aswad que le père de ce dernier faisait un jour la Prière avec le Prophète ; mais deux hommes qui se trouvaient aux environs de la mosquée ne la firent pas. Le Prophète les appela, et ils arrivèrent, le cœur battant. Il leur dit : « Qu’est-ce qui vous empêche de faire la Prière avec nous ? » Ils déclarèrent : « Nous avons fait la Prière en chemin ! » Alors le Prophète dit : « Eh ! bien, ne le faites pas ! Si quelqu’un d’entre vous a fait la Prière en chemin, puis qu’il rencontre sur son chemin un imām qui n’ait pas encore terminé la Prière, qu’il prie avec lui : ce sera pour lui une œuvre surérogatoire »521.
179
599Vous rapportez aussi d’après Ma’n b. ‘Ῑsā — Sa‘īd b. al-Sā’ib al-Ṭā’ifī — Nūḥ b. Ṣa’ṣa’a que Yazīd b. // ‘Āmir a dit : « J’arrivai un jour alors que le Prophète était en Prière ; je m’assis sans me joindre au groupe. Lorsque le Prophète se retourna, il dit : — N’as-tu pas prononcé le salām, Yazīd ? Je répondis : — Si, ô Prophète ! Il me demanda : — Pourquoi t’es-tu abstenu de te joindre au groupe pendant la Prière ? Je répondis : — J’ai déjà fait la Prière chez moi, et je pensais que vous aviez déjà fini la vôtre.
522 ABŪ DĀWŪD, 2, 56 ; cf. ḤAN. V, 147. 600Alors le Prophète déclara : — Si tu viens pendant la Prière et que tu vois un groupe en train de prier, joins-toi à eux ; si tu as déjà fait une Prière, elle te sera comptée comme surérogatoire ; quant
à
celle-ci,
elle
comptera
comme
Prière
prescrite (maktūba) »522.
523 Ces paroles d’Ibn ‘Umar ne paraissent pas avoir été retenues. 601D’autre part, vous rapportez d’après Yazīd b. Zuray’ — Ḥusayn — ‘Amr b. Šu’ayb que Sulaymān, mawlā de Maymūna a dit : « Je passai près d’Ibn ‘Umar alors qu’il se tenait sur le dallage pendant la Prière. Je lui demandai s’il ne priait pas avec les autres. Il répondit : — J’ai déjà fait la Prière. N’as-tu pas entendu le Prophète dire : — Ne faites pas une Prière deux fois le même jour ! »523. 602Il y a là divergence et contradiction. Chacun de ces ḥadīṯ-
s impose un comportement différent. 603268. — Réponse : Nous prétendons qu’il n’y a dans ces ḥadīṯ-
s aucune divergence ni contradiction. Le premier ḥadīṯ dit : « Si l’un de vous a fait la Prière // en chemin, puis rencontre un imām qui n’ait pas encore terminé la Prière, qu’il prie avec lui : ce sera pour lui une œuvre surérogatoire ». Cela signifie que la 180
Prière faite avec l’imām sera une œuvre surérogatoire, et que c’est la première qui comptera comme Prière prescrite. En effet, [l’intéressé] avait alors formulé l’intention de faire la Prière [à l’heure prescrite à titre exécutoire] (adā’) et effectivement, cette Prière a été entièrement accomplie [à titre exécutoire, et non surérogatoire]. Or les actes valent par l’intention. 604268 a. — Le second ḥadīṯ dit : « Si tu viens pendant la Prière et que tu vois un groupe en train de prier, joins-toi à eux ; si tu as déjà fait une Prière, elle te sera comptée comme surérogatoire ; quant à celle-ci, elle comptera comme Prière prescrite ». Tout se passe comme s’il avait voulu dire : Cette prière-ci, accomplie avec l’imām, est surérogatoire, et cette autre que tu as accomplie chez toi est la Prière prescrite. Si, au lieu de « quant à celle-ci » il avait dit « quant à celle-là », le sens aurait été plus clair. Il n’y a aucune différence entre ces deux démonstratifs, mais l’expression est moins claire avec « celle-ci ». L’un des transmetteurs [doit avoir] omis « celle-ci » dans la première proposition, et avoir introduit ce pronom dans la seconde, à la place de « celle-là ». J’ai déjà cité des cas où un transmetteur a négligé telle ou telle particule ou tel ou tel élément insignifiant, altérant ainsi le sens. 605268 b. — Quant au troisième ḥadīṯ, où Ibn ‘Umar rappelle que le Prophète a interdit de faire une Prière deux fois dans la même journée, // il signifie : Ne faites pas deux fois dans la même journée une Prière obligatoire. Ainsi en serait-il si l’on faisait la Prière du ẓuhr chez soi une première fois, puis une seconde ; ou avec un imām, puis une seconde fois avec un autre imām.
524 Il semble que le sujet de cette phrase soit Sulaymān, s’adressant à Ibn ‘Umar dans le troisième ḥad (...) 606L’on
a
confondu
les
circonstances
d’application
de
ce ḥadīṯ avec celles du ḥadīṯ où le Prophète autorise un homme à recommencer une Prière en la considérant comme surérogatoire. 181
Peut-être d’ailleurs n’avait-il pas entendu ce dernier ḥadīṯ, ou ne lui était-il pas parvenu524. 607Quiconque accomplit à son domicile une Prière d’obligation et fait de nouveau la même prière avec un imām en la considérant comme surérogatoire n’a pas fait la même Prière deux fois dans la journée, car elles sont essentiellement différentes : l’une est d’obligation, l’autre est surérogatoire. ***
LXXIII. — EXEMPLE DE ḤADĪṮ-S CONTRADICTOIRES SUR L’ABLUTION PARTIELLE 525 Cf. BUḪ. 4, 75 = HM I, 97 ; ḤAN. II, 392 ; III, 55. 608269. — Proposition : Vous transmettez d’après Sufyān — alZuhrī — Abū Salama — ‘Ā’iša que lorsque le Prophète était en état d’impureté majeure et voulait dormir, il faisait la même ablution que pour la Prière525.
526 ABŪ DĀWŪD, 1, 88 ; cf. ḤAN. I, 16, 17, 44, etc… 609Vous rapportez encore d’après Šu‘ba — al-Ḥakam — Ibrāhīm — al-Aswad — ‘Ā’iša que lorsque le Prophète voulait manger ou dormir, il faisait l’ablution — c’est-à-dire quand il était en état d’impureté majeure526.
527 ḤAN. VI, 43. 610D’autre part, vous rapportez d’après Sufyān — Abū Isḥāq — alAswad // que ‘Ā’iša a dit : « Le Prophète dormait en état d’impureté majeure sans avoir touché l’eau »527. 611270.
—
Réponse :
Nous
prétendons
que
tous
ces
comportements sont licites. On peut, si l’on veut, après les relations sexuelles, faire la même ablution que pour la Prière avant de dormir ; on peut aussi laver [seulement] la main et la verge, puis dormir ; on peut enfin dormir sans toucher à l’eau. 182
Toutefois, il est préférable de faire l’ablution. Le Prophète agissait parfois ainsi pour indiquer que c’est préférable, et parfois autrement pour montrer qu’il y a une tolérance. Les gens peuvent se prévaloir de l’une ou l’autre attitude : celui qui veut adopter la meilleure méthode est libre, et libre aussi celui qui veut profiter de la tolérance. ***
LXXIV. — EXEMPLE DE DEUX ḤADĪṮ-S CONTRADICTOIRES 528 BUḪ. 4, 58 = HM I, 91 ; 78, 80 = HM IV, 181. 612271. — Proposition : Vous rapportez d’après Sufyān — al-Zuhrī — Sa‘īd b. al-Musayyab — Abū Hurayra qu’un bédouin ayant uriné dans la mosquée, le Prophète ordonna : « Qu’on verse dessus un grand seau (sağl) d’eau ». D’aucun emploient le mot ḏanūb528.
529 Cette version n’a pas été retenue par les compilateurs. 613Vous rapportez d’autre part d’après Ǧarīr b. Hāzim — ‘Abd alMalik b. ‘Umayr — ‘Abd Allāh b. Ma’qil b. Muqarrin que le Prophète a dit à cette occasion : « Qu’on prenne la terre sur laquelle il a uriné, // qu’on la jette et qu’on verse de l’eau à l’endroit où elle était »529. 614272. — Réponse : Nous prétendons qu’en l’occurrence, la contradiction est imputable au transmetteur. Le ḥadīṯ d’Abū Hurayra est plus sain, car il était présent et a été témoin. Quant à ‘Abd Allāh b. Ma‘qil b. Muqarrin, ce n’est pas un Compagnon, ni même un contemporain du Prophète. Nous ne saurions mettre sa parole en balance avec celle d’un témoin oculaire. Son père, Ma’qil b. Muqarrin Abū ‘Umara al-Muzanī a transmis directement de la bouche du Prophète. Quant à son fils ‘Abd Allāh, c’est pour nous un inconnu. *** 183
LXXV. — EXEMPLE DE DEUX ḤADĪṮ-S CONTRADICTOIRES SUR LE JEÛNE 530 BUḪ. 30, 33 = HM I, 621 ; ḤAN. VI, 46, 193, etc… 615273. — Proposition : Vous rapportez dans plus d’un ḥadīṯ que le Prophète, interrogé sur le jeûne pendant un voyage, déclara : « Jeûne si tu veux, mange si tu veux ! »530.
531 NASĀ’Ī, 22, 53. 616Vous rapportez d’autre part d’après ‘Ubayd Allāh b. Mūsā — Usāma b. Zayd — Ibn Šihāb — Abū Salama — son père que le Prophète a dit : « Le jeûne de Ramaḍān pendant un voyage équivaut à sa rupture dans la vie sédentaire »531. //
532 ḤAN. IV, 24, 426, 431, etc…
533 ḤAN. IV, 414. 617274. — Réponse : Nous affirmons que ce dernier propos du Prophète était destiné aux gens qui dédaignent la tolérance établie par Dieu, et les facilités qu’il a accordées aux voyageurs. Ils s’imposaient des peines et des difficultés, mais il leur enseigna qu’il était aussi coupable de jeûner en voyage que de ne pas jeûner dans la vie sédentaire. Dans un autre ḥadīṯ, il appelle ces gens des « désobéissants », car ils refusent d’accepter les grâces que Dieu leur accorde, et les allègements qu’il a établis. Quiconque dédaigne les facilités de Dieu est comme celui qui néglige Ses prescriptions de rigueur. C’est pourquoi le Prophète a dit à propos de celui qui jeûne continuellement : « Il n’a ni jeûné, ni rompu le jeûne »532 ; il a dit encore : « Quiconque jeûne continuellement, la Géhenne le tourmentera ! »533. 618Mais le jeûne n’a rien de pénible pour celui qui voyage par temps frais, dans les jours courts, ou dispose d’un abri, de ses aises et de serviteurs ; c’est à celui-là que Dieu a donné le choix 184
entre le jeûne et sa rupture en disant : « Jeûne si tu veux, mange si tu veux ! ». ***
LXXVI. — EXEMPLE DE DEUX ḤADĪṮ-S CONTRADICTOIRES SUR LE JEÛNE 534 P. ex. BUḪ. 30, 24 —= HM, I, 616. 619275. — Proposition : Vous enseignez dans plus d’un ḥadīṯ que le Prophète embrassait pendant le jeûne534.
535 Les compilateurs ne paraissent pas avoir retenu ce ḥadīṯ. 620Par ailleurs, vous rapportez d’après Abū Nu’aym — Isrā’īl — Zayd b. Ğubayr — // Abū Yazīd al-Ḍabbī — Maymūna bint Sa‘d, mawlāt du Prophète que ce dernier, interrogé sur un homme qui avait embrassé sa femme pendant le jeûne, déclara : « Il a rompu le jeûne ! »535.
536 BUḪ. 6, 5 = I, 112 ; 30, 23 = HM I, 615 ; ḤAN. VI, 40, 44, 98, 126, 156, etc… 621276. — Nous prétendons qu’un baiser donné par un homme en état de jeûne gâte son jeûne, car il excite le désir et provoque l’éjaculation. Nous en dirons autant des attouchements. Mais pour ce qui est du Prophète, il était impeccable, et lorsqu’il embrassait sa femme pendant le jeûne, c’était comme le père embrasse son fils, et le frère son frère. J’en veux pour preuve le propos de ‘Ā’iša : « Qui d’entre vous sait maîtriser son désir comme le Prophète sait maîtriser le sien ? »536.
537 BUḪ. 4, 5 = HM I, 67 ; 19, 16 = HM I, 372 ; 61, 24 = HM II, 554 ; ḤAN. I, 220, 278, etc… 622Nous dirons de même, en ce qui concerne le sommeil du Prophète, qu’il ne l’obligeait pas à pratiquer l’ablution, car il disait : « Mon œil dort, mais mon cœur ne dort pas »537. C’est 185
pourquoi il lui arrivait de dormir si profondément qu’on l’entendait ronfler, puis de faire la Prière sans pratiquer l’ablution. 623Les règles s’appliquant au Prophète // sont différentes en bien des cas de celles qui s’appliquent à sa communauté. ***
LXXVII. — EXEMPLE DE ḤADĪṮ INFIRMÉ PAR LA SPÉCULATION 538 On n’a pas retrouvé ce ḥadīṯ relatif aux chèvres. 624277. — Proposition : Vous enseignez que le Prophète a dit : « Je vous recommande les chèvres, car c’est un bétail doux, qui est du paradis »538. 625Comment sont-elles du paradis, puisqu’elles mettent bas parmi nous ? Et si les chèvres sont du paradis, il serait normal qu’il s’y trouvât aussi des vaches, des chameaux, des ânes et des chevaux !
539 Cf. ḤAN. V, 352 pour chevaux et chameaux ; II, 436 pour moutons. 626278. — Réponse : Nous prétendons que le Prophète n’a pas voulu dire par là que les chèvres [de ce monde] sont au paradis. Comment seraient-elles à la fois parmi nous et au paradis ? Il a seulement voulu dire qu’il y a des chèvres au paradis, et que Dieu en a créé sur terre à leur image. Il en est de même pour les moutons, les chameaux et les chevaux : tous ont leur réplique au paradis539. Seuls sont absents du paradis les animaux nuisibles, comme les singes, les porcs, les serpents et les scorpions.
540 Coran, LVI, 21. 627S’il est admissible qu’il existe au paradis de la viande, il est également admissible qu’il y ait des chèvres et des moutons. S’il est admissible qu’il y ait des oiseaux à manger, il est également 186
possible qu’il y ait du bétail à manger. Or Dieu a dit : « …avec de la chair d’oiseaux qu’ils convoiteront… »540 //
541 Le mot idām désigne toute nourriture ou condiment à manger avec du pain : Tāğ, VIII, 181, où se tro (...) 628278 a. — Abū Muḥammad dit : D’après Ahmad b. al-Ḫalīl — al-Aṣma‘ī — Abū Hilāl al-Rāsibī — ‘Abd Allāh b. Burayda — son père Burayda al-Aslamī, le Prophète a dit : « La reine des nourritures pour les hommes de ce monde et de l’autre est la viande ; le roi des parfums pour les hommes de ce monde et de l’autre est la fāġiya »541.
542 ḤAN. II, 436. 629Le ḥadīṯ suivant prouve ce que j’avance : « Essuyez le mucus de leur museau, car elles sont des bêtes du paradis »542 ; il signifie : elles font partie des bêtes créées au paradis. ***
LXXVIII. — EXEMPLE DE ḤADĪṮ INFIRMÉ PAR LE CORAN A DEUX TITRES 543 BUḪ. 23, 33 = HM I, 416 ; ḤAN. IV, 414, 437 ; VI, 39, 57 etc… 630279. — Proposition : Vous enseignez que le Prophète a dit : « Le mort sera tourmenté à cause des pleurs que le vivant versera sur lui »543.
544 Coran, VI, 164 = XVII, 15 = XXXV, 18 = XXXIX, 7 = LIII, 38.
545 Coran, XLV, 26.
546 Coran, XXIII, 12-16. 631Ceci est faux pour deux raisons : d’abord parce que Dieu a dit : « Nulle âme ne portera le faix d’une autre »544 ; ensuite 187
parce qu’il a dit : « Réponds-leur : — Dieu vous donne la vie. Ensuite Il vous fera mourir, puis Il vous réunira pour le jour indubitable de la Résurrection »545. Il a dit en outre, en parlant de la condition de la créature depuis le stade où elle était argile jusqu’à ce qu’il la ressuscite : « Nous avons créé l’homme d’une masse d’argile. Puis nous l’avons fait éjaculation dans un réceptacle solide. Puis nous avons fait l’éjaculation adhérence. Nous avons fait l’adhérence masse flasque. Nous avons fait la masse flasque ossature et Nous avons revêtu de chair l’ossature. Ensuite nous instituâmes une seconde création. Béni soit Dieu, le meilleur des créateurs. // Ensuite, en vérité, après cela vous serez des
morts,
puis
au
jour
de
la
résurrection,
vous
serez
rappelés »546. 632Dieu n’a jamais dit qu’il faisait revivre [les hommes] entre leur mort et la résurrection finale, ni qu’il tourmentait ou récompensait le mort soit lorsqu’il rassemble, soit lorsqu’il sépare [ses membres ?].
547 Coran, II, 185. 633280. — Réponse : Nous affirmons que le Coran use de la concision, du raccourci, de l’allusion et de l’indication. Il peut énoncer une qualité dans un cas et ne point l’énoncer dans un autre. On découvre la preuve qu’elle a été omise à un endroit dans le fait qu’elle apparaît à un autre. D’autre part, le ḥadīṯ du Prophète [peut] expliciter le Coran et montrer ce qu’il faut y entendre. Parmi les ellipses du style coranique, on peut citer celle du verset suivant : « Celui qui, parmi vous, sera malade ou en voyage, un nombre égal d’autres jours »547. Le sens apparent de ce passage est : « Celui d’entre vous qui est malade doit jeûner un nombre égal d’autres jours », même s’il a jeûné pendant le voyage, ou en étant malade ». Mais en réalité, il faut comprendre : « Celui d’entre vous qui est malade ou en voyage et rompt le 188
jeûne doit jeûner un nombre égal d’autres jours ». L’ellipse concerne « et rompt le jeûne ».
548 Il s’agit de la vermine, ou encore d’une blessure ; BAYḌĀWĪ, 43.
549 Coran, II, 196. 634De même, dans le verset : « A quiconque parmi vous sera malade ou atteint // d’un mal affectant sa tête548, incombera rachat par un jeûne, une aumône ou un sacrifice rituel »549. Le sens apparent de cette phrase est que le malade, ou celui qui attrape des poux est tenu du rachat. En réalité, le verset veut dire : Celui qui est malade ou est atteint d’un mal affectant sa tête et se rase les cheveux est tenu de se racheter par un jeûne, une aumône ou un sacrifice rituel. Les exemples de cet ordre sont nombreux.
550 Coran, LXV, 2.
551 Coran, II, 282. 635280 a. — Pour illustrer le cas où une qualité se trouve énoncée à un endroit, et non à un endroit analogue, le premier servant de référence pour le second, on citera la phrase : « Requérez alors le témoignage de gens intègres pris parmi vous »550 et la phrase « Requérez
témoignage
de
deux
témoins
pris
parmi
vos
hommes »551, où l’adjectif « intègre » ne figure pas, cette qualité étant énoncée dans le premier passage seulement.
552 Coran, IV, 93.
553 Coran, LVIII, 3. 636Le Coran dit en un endroit : « …la libération d’un esclave croyant »552 et ailleurs « …affranchissement d’un esclave avant
189
qu’ils n’aient eu commerce mutuel »553, où la qualité de croyant n’est point énoncée.
554 Les passages coraniques relatifs à ces matières sont en effet recoupés et complétés par le ḥadīṯ. N (...) 637280 b. — Quant aux cas où c’est le ḥadīṯ du Prophète qui sert à recouper [le Coran], on peut citer la description des Prières, la nature de l’inclination et de la prosternation, du tašahhud, leur nombre, le montant des aumônes et de la zakāt à prélever sur le patrimoine, le montant du vol entraînant l’amputation, les cas d’interdiction [du mariage] entraînés par l’allaitement, etc., etc… 554.
555 Coran, XL, 46.
556 Coran, XIX, 62.
557 Traduction conjecturale. Cette phrase comporte deux démonstratifs, hāḏā et ḏālika dont la valeur ne (...)
558 Ta’wīl muškil al-Qur’ān, Caire 1373/1954
559 Coran, LII, 47. 638280
c.
—
Dieu
nous
apprend
dans
le
Coran
qu’il
tourmentera // certaines gens avant le jour de la résurrection lorsqu’il dit : « Au Feu, ils seront exposés matin et soir et, au jour où se dressera l’Heure, [on criera] : — Introduisez la famille de Pharaon au plus intense tourment ! »555. Il est impossible que ces gens soient exposés au feu sur la terre, ni au jour du jugement, car Dieu dit dans ce verset « au jour où se dressera l’Heure », et que le jour où se dressera l’Heure n’aura ni matin, ni soir, si ce n’est par métaphore, comme dans la phrase : « …et ils y auront leur subsistance matin et soir »556. Cette [métaphore] est admissible dans ce cas, mais ne le serait pas dans le premier557. 190
J’en ai parlé dans mon livre intitulé Ta’wīl muškil al-Qur’ān558. Dieu a dit ailleurs après avoir parlé du jour du Jugement : « En vérité, à ceux qui auront été injustes revient un tourment en deçà de cela, mais la plupart ne le savent pas »559. 639280 d. — Beaucoup de traditions émanant du Prophète, transmises de toutes parts par des autorités sûres, rapportent à l’envi qu’il demandait à Dieu de le préserver du tourment de la tombe. En voici quelques-unes :
560 BUḪ. 92, 26 = HM IV, 495 ; ḤAN. II, 185, 288, 414 etc…
561 P. ex. BUḪ. 80, 38 = HM IV, 257. 640D’après Mālik — Abū l-Zubayr — Ṭāwūs — Ibn ‘Abbās, le Prophète disait : « Seigneur, je me réfugie auprès de Toi contre la séduction de l’Antéchrist »560 ; « Je me refugie auprès de Toi contre la séduction de la vie et de la mort, et contre le châtiment du tombeau »561.
562 P. ex. BUḪ. 80, 39 = HM IV, 257. 641D’après Šu‘ba — Budayl b. Maysara — ‘Abd // Allāh b. Šaqīq — Abū Hurayra, le Prophète disait : « Seigneur, je me réfugie auprès de Toi contre la séduction et le tourment de la tombe, et contre la séduction de l’Antéchrist »562.
563 P. ex. BUḪ. 80, 37 = HM IV, 256. Il semble au reste qu’il soit possible de trouver toutes sortes de (...) 642D’après Hišām — Qatāda — Anas, le Prophète disait : « Seigneur, je me réfugie auprès de Toi contre la séduction de la vie, contre la séduction de la mort, et contre le châtiment de la tombe »563.
564 ḤAN. III, 126, IV, 288.
191
643280 e. — Il existe aussi beaucoup d’autres traditions historiques sur Munkar et Nakīr, et leur interrogatoire. Ainsi, d’après Hammād b. Salama — ‘Āṣim — Zirr — ‘Abd Allāh b. ‘Abbās disait : « On fera asseoir de force l’un de vous dans son tombeau ; on lui dira : — Qui es-tu ? — Je suis l’esclave de Dieu, vivant ou mort. Je témoigne qu’il n’y a d’autre divinité que Dieu ; je témoigne que Muḥammad est Son esclave et Son Envoyé. On lui dira alors : — Tu as dit vrai. On lui donnera alors de l’espace dans son tombeau, et on lui fera voir la place qui lui est destinée au paradis. Quant à l’autre, on lui dira : — Qui es-tu ? — Je ne sais ! répondra-t-il. Alors on lui dira : — Eh ! bien, tu ne sauras point ! Et
on
rétrécira
son
tombeau
jusqu’à
ce
que
ses
côtes
éclatent »564. Ce sont là des choses que seul un Prophète peut connaître. ‘Abd Allāh n’aurait pu les rapporter s’il ne les avait entendues de la bouche même du Prophète.
565 BUḪ. 3, 24 = HM I, 46 ; 4, 37 = HM I, 80, etc… 644280 f. — D’après ‘Abbād b. Rāšid — Dāwūd b. Abī Hind — Abū Naḍḍara — Abū Sa‘īd al-Ḫidrī, le Prophète a // dit : « L’ange viendra auprès de l’esclave [de Dieu] lorsqu’il sera mis en terre. Si c’est un Infidèle ou un Hypocrite, on lui dira : — Que penses-tu de cet homme (à savoir Muḥammad) ? Il répondra : — Je ne sais. J’ai entendu les gens dire quelque chose, et je l’ai répété. L’ange dira : — Tu n’as point su, tu ne t’es point gardé, tu n’es point demeuré dans le droit chemin »565. Ces traditions historiques prouvent que le tourment de la tombe est réservé aux Infidèles.
566 Il ressort de ce passage que le mot wāzira ne désigne pas nécessairement l’âme pécheresse pour Ibn (...) 645[Nos adversaires] disent : Comment le mort pourrait-il être tourmenté à cause des pleurs des vivants, puisque Dieu a dit : « Nulle âme ne portera le fardeau d’une autre ». Nous pensons 192
également que le tourment est réservé à l’Infidèle, à cause des pleurs que sa famille versera sur lui566.
567 Cf. ḤAN. I, 26, 36, etc… 646De même, Ibn ‘Abbās déclare que le Prophète a dit, en passant près du tombeau d’un Juif : « Il sera tourmenté, et sa famille pleurera sur lui »567. S’il en est ainsi, il n’y a rien là d’extraordinaire, car l’Infidèle sera tourmenté de toute façon.
568 BUḪ. 23, 89 = HM I, 445 ; ḤAN. V, 39. Il s’agit de deux hommes enterrés côte à côte et dont le Prop (...) 647Si cela concerne seulement le Musulman piètre, comme celui dont le Prophète déclara qu’il était puni pour sa médisance ou sa façon d’uriner, la phrase « Nulle âme ne portera le fardeau d’une autre » ne s’applique qu’aux choses de ce monde568.
569 Cf. Coran, LIII, 38, et comparer VI, 164. Voir aussi tous les passages relatifs au châtiment de Sod (...)
570 Cf. ḤAN. III, 499 ; IV, 163, etc… 648280 g. — Les gens de la Ğāhiliyya poursuivaient la vengeance d’un homme assassiné ; on tuait son père, son frère, ou un parent utérin pour ce meurtre. Si l’on ne pouvait atteindre ni ‘aṣaba, ni parent utérin, on tuait un homme de son groupe tribal. Dieu révéla alors : « Nulle // âme ne peut porter le fardeau d’une autre ». Il nous a également enseigné que cela figurait dans la révélation faite à Abraham569. C’est pourquoi le Prophète dit à un homme qu’il voyait en compagnie de son fils : « Ne pèche pas contre lui, il ne pèchera pas contre toi ! »570.
571 Coran, VIII, 25.
572 Coran, XXX, 41.
193
649280 h. — Pour ce qui est de la punition de Dieu lorsqu’elle survient et englobe indistinctement celui qui fait le bien ou le mal, Dieu a dit : « Préservez-vous d’une tentation qui n’atteindra pas uniquement ceux qui parmi vous auront été injustes »571. Il veut dire que cette tentation englobera les injustes et les autres. Dieu a dit : « A cause de ce qu’ont accompli les mains des hommes, le scandale est apparu sur terre et sur mer, afin que Dieu leur fasse goûter [la punition] d’une partie de ce qu’ils ont fait »572.
573 On n’a pas retrouvé ce ḥadīṯ. 650Umm Salama a dit : « O Prophète, allons-nous périr, alors qu’il y a parmi nous des gens de bien ? » Il répondit : « Oui, si la corruption abonde »573.
574 BLACHÈRE, op. cit., s. Noé ; cf. notamment sourate Nūḥ, LXXI ; LIV, 9-7, etc…
575 BLACHÈRE, s. ‘Ād ; cf. LI, 41 ; LIV, 18-20 ; LXIX, 6, etc..
576 BLACHÈRE, s. Thamoud ; p. ex. LIV, 23-32.
577 BLACHÈRE, s. Loth, notamment LIV, 34.
578 Légende fort répandue dans l’Islam primitif. Voir notamment Tarbī‘, 197, s. misḫ ; Ibn Qutayba la r (...) 651[Le Prophète] a exposé que Dieu a englouti en entier le peuple de Noé ; bien qu’il y eût parmi eux des enfants et des animaux, et ceci en raison des fautes des adultes574 ; qu’il fit périr les ‘Ādites par un vent dévastateur575, les Ṯāmūdites par la foudre576 et les compagnons de Loth par une grêle de pierre577 ; qu’il métamorphosa les gens du Sabbat en singes et en porcs578, frappant les enfants du même châtiment.
579 Exode, XX, 5 = XXXIV, 7 ; cf. LECOMTE, Citations, 38.
194
652Un Kūfien m’a dit avoir lu dans les anciens livres révélés la phrase suivante : « Je suis le Dieu jaloux, qui punis les péchés des pères sur les pères »579.
580 Le Livre de Daniel ne paraît pas renfermer une phrase semblable. 653Ibn ‘Abbās rapporte que Daniel // a dit : « Il convient, fils d’Israël, que je sois tourmenté à cause de vos péchés »580. 654Anas b. Mālik dit que le lézard meurt d’épuisement dans son trou à cause des péchés des hommes.
581 Allusion à Coran, XII, 48 = Gen. XLI, 27 ; BUḪ. 65, s. 44, ch. 2 = HM III, 441, etc…
582 Aliment de fortune composé de sang cuit avec des poils d’animaux Lisān, VII, 248 = Tāğ, IV, 61.
583 Cf. BUḪ. 81, 17 = HM IV, 283 ; ḤAN. III, 44, 300. 655280 i. — Le Prophète fit une invocation contre Mudar, et dit : « Seigneur, renforce ton oppression contre Mudar et envoie-leur des années comme les années [prédites par] Joseph »581. Alors, la sècheresse et la disette les affligèrent pendant sept années sans interruption ; au point qu’ils mangèrent de la peau, des os et du ‘ilhiz582. Cette disette gagna le Prophète et ses Compagnons, qui furent donc punis à cause de son invocation, au point que lui et les Musulmans attachèrent des pierres sur leur estomac pour tromper leur faim583.
584 Qūmis : Région située au pied des monts du Tabaristan ; BARBIER DE MEYNARD, Dictionnaire de la Pers (...)
585 C’est évidemment ainsi qu’il faut lire. Le texte porte Mihriğān wa Qaḏaq. Mihriğān-Qaḏaq est une vi (...)
195
656280 j. — Abū Muḥammad dit : Nous avons d’ailleurs été témoins
de
faits
qui
rendent
superflues
les
informations
historiques. Que de pays où vivaient des hommes pieux et saints, où des enfants de tous âges ont été victimes de séismes qui firent périr l’homme pieux et le libertin, le bon et le méchant, l’enfant et l’adulte ! Ainsi en fut-il de Qūmas584, de Mihriğānqaḏaq585, de Rayy et de nombreuses villes // de Syrie et du Yémen. C’est là un point sur lequel s’accordent tous les fidèles de Dieu, quelle que soit leur religion et leurs divergences.
586 Il s’agit apparemment de ‘Ubayd Allāh. On n’a pas trouvé trace d’un fils du dernier calife umayyade (...) 657280 k. — Abū Muḥammad dit : Un historien m’a rapporté qu’une nuit d’insomnie, al-Manṣūr vint à parler des califes umayyades et de leur mode de vie. [On déclara] qu’ils demeurèrent dans le droit chemin tant que leur autorité ne passa pas aux mains de descendants corrompus par le luxe. La seule ambition de ces gens imbus de leur grandeur royale et de leur majesté fut de s’abandonner à leurs passions, de se livrer avec prédilection au plaisir, et de sombrer dans la désobéissance à l’égard de Dieu. Ils encoururent ainsi la colère de Dieu, parce qu’ils ignoraient qu’il les menait à leur perte, et se croyaient en sécurité contre Ses embûches. Alors, Il les priva de l’autorité et leur enleva Sa grâce. [A ce point de l’entretien], Ṣāliḥ b. ‘Ali dit au calife : « Prince des Croyants, // lorsque ‘Ubayd Allāh b. Marwān en fuite entra au pays de Nubie avec ses gens, le roi des Nubiens s’informa à leur sujet ; lorsqu’il fut renseigné, il se rendit à cheval auprès de ‘Ubayd Allāh et lui dit en ce sens des paroles que je n’ai point retenues, puis il l’expulsa de son royaume. Le Prince des Croyants veut-il le586 faire sortir de sa prison, le convoquer en notre présence et l’interroger sur cette histoire ? Al-Manṣūr ordonna donc qu’on l’amenât devant lui, et le questionna. Il répondit : 196
« Prince des Croyants, je suis entré au pays des Nubiens avec du mobilier que j’avais pu sauver. Je l’installai et m’établis pour trois jours. C’est alors qu’arriva le roi des Nubiens, qui avait été informé de nos affaires. Je vis entrer un homme de haute taille, au nez aquilin et au beau visage. Il s’assit à même le sol sans s’occuper des étoffes. Je lui demandai : — Pourquoi ne t’assiedstu pas sur nos étoffes ? Il répondit : — Je suis roi ; il convient que tout roi s’humilie devant la majesté divine, puisque c’est Dieu qui l’a élevé ! Puis il se tourna vers moi en disant : — Pourquoi buvezvous des boissons enivrantes, puisque votre Livre vous les interdit ? Je dis : — Ce sont nos esclaves et les inconscients parmi nous qui osent agir ainsi ! Il poursuivit : — Pourquoi piétinez-vous les champs ensemencés avec vos montures, puisque votre Livre vous interdit de détruire ? Je répondis : — Ce sont les ignorants parmi nous qui le font ! Il continua : — Pourquoi revêtez-vous les brocarts et la soie, et utilisez-vous l’or et l’argent, qui sont illicites pour vous ? Je dis : — Notre autorité s’est écroulée, nos fidèles se sont raréfiés, et nous avons appelé à l’aide un groupe d’étrangers (‘Ağam) // qui sont entrés dans notre religion. Ils ont revêtu ces atours malgré notre réprobation. Alors le roi baissa longtemps la tête, se mit à se tordre les mains et à graver des signes à terre, puis il dit : — Rien de ce que tu m’as dit n’est vrai. C’est vous, qui avez considéré comme licite ce qui était interdit, qui avez commis des actes répréhensibles, qui avez été des souverains injustes. Alors Dieu vous a frustrés, et vous a revêtus d’opprobre à cause de vos péchés. Dieu a une vengeance à exercer contre vous, qui n’est point encore consommée. Je crains que le châtiment ne s’abatte sur vous alors que vous êtes sur mes terres, et qu’il ne m’atteigne en même temps que vous. On n’est tenu à l’hospitalité que pendant trois jours. Munissez-vous pour la route de ce dont vous avez besoin, et quittez mon pays. Ce que je fis ». 197
587 Coran, XVIII, 82. 658280 l. — Dieu nous enseigne dans le Coran qu’il protège les fils en considération de leurs pères. Il dit : « Quant au mur, il appartient à deux adolescents de la ville. Sous ce mur est un trésor qui leur est destiné. Leur père était vertueux et ton Seigneur a voulu qu’ils atteignissent leur majorité et qu’ils découvrissent
[alors]
leur
trésor
par
une
bonté
de
ton
Seigneur »587.
588 BUḪ. 15, 3 = HM I, 331 ; 62, 11 = HM II, 611. 659Le jour où il invoqua le nom d’al-‘Abbās pour faire les rogations, ‘Umar dit dans son oraison : « Seigneur, nous nous recommandons à Toi de l’oncle de Ton Prophète, du reste de ses ancêtres et de ses grands Compagnons. Tu as dit — et Ta parole est véri-dique : — Quant au mur, il appartient à deux adolescents orphelins de la ville. Sous ce mur est un trésor qui leur est destiné. Leur père était vertueux et ton Seigneur a voulu qu’ils atteignissent leur majorité et qu’ils découvrissent [alors] leur trésor. Puisque Tu les a protégés en raison des vertus de leur père, Seigneur, protège // Ton Prophète en la personne de son oncle, car nous le prenons comme médiateur auprès de Toi, en demandant intercession et pardon »588. 660Puisque
Dieu
préserve
les
enfants
de
Ses
fidèles
en
considération de leurs pères, il est donc possible qu’il refuse de protéger les enfants de Ses ennemis à cause de leurs pères. Il fait ce qu’il veut.
589 Il s’agit du ḥadīṯ incriminé au début du chap. LXXVIII : « Le mort est tourmenté à cause des pleurs (...) 661280 m. — ‘Ā’iša rejetait ce ḥadīṯ et disait : « Quiconque en admet les termes est un libertin »589. C’était là une présomption et une interprétation de la part de ‘Ā’iša. Il n’est pas licite de 198
rejeter le ḥadīṯ du Prophète en raison de la présomption de ‘Ā’iša. Si elle avait rapporté de la bouche du Prophète quelque chose qui contredît
ce ḥadīṯ, on
aurait
pu
prendre
ses
paroles
en
considération. 662Si ‘Abd Allāh b. ‘Umar était seul à l’avoir transmis, on aurait pu supposer — comme elle le prétend — qu’il y a erreur. Mais il a été transmis par toute une série de Compagnons parmi lesquels figurent ‘Umar, ‘Imrān b. Ḥuṣayn, Ibn ‘Umar et Abū Mūsā l-Aš‘arī.
590 Coran, L, 29. 663S’ils disent : C’est injuste — alors que Dieu s’est défendu d’être injuste en disant : « Je ne serai point injuste envers Nos serviteurs »590 — nous leur répondrons par la bouche d’Iyās b. Mu’āwiya qui a dit : « J’ai demandé à quelqu’un : — Qu’est-ce que l’injustice, dans la langue des Arabes ? Il me répondit : — Elle consiste à prendre ce qui ne vous appartient pas ! Je m’écriai alors : Mais tout appartient à Dieu ! » ***
LXXIX. — EXEMPLE DE ḤADĪṮ INFIRMÉ PAR LA SPÉCULATION 591 ḤAN. V, 154, 161. 664281. — Proposition : Vous rapportez qu’Abū Ḏarr demanda au Prophète, à propos des rapports d’un homme avec sa femme : « Il prend du plaisir, // ô Prophète, et il sera récompensé ? » Le Prophète répondit : « A ton avis, si tu accomplis cet acte dans des conditions
illicites (ḥarām), n’es-tu
point
coupable ?
—
Si !
répondit-il. — Eh ! bien, si tu l’accomplis dans des conditions licites (ḥalāl), tu seras récompensé ! »591. 665Or l’acte accompli dans des conditions illicites est un péché, et l’acte accompli dans des conditions licites est juridiquement indifférent (ibāḥa). Comment peut-on être récompensé pour un 199
acte accompli dans des conditions indifférentes ? Si cela était possible, il serait également possible d’attendre une récompense pour avoir mangé quand on a faim et bu de l’eau quand on a soif ! 666Comment le Prophète a-t-il pu dire cela, lui qui, de toutes les créatures, connaît le mieux les subtilités du langage, et ce qui est admissible ou non ? 667282. — Réponse : Nous prétendons qu’un homme ayant une femme vieille et laide et en désirant une autre qui est illicite pour lui, mais qui s’offre à lui et est à sa portée, peut repousser la seconde par obéissance à Dieu. Il sera alors récompensé pour avoir choisi celle qui était licite pour lui, bien qu’il ne la désirât point. 668Un homme peut aussi avoir deux femmes, dont l’une est noire et difforme, et l’autre blanche et jolie. S’il fait part égale entre elles, alors qu’il n’en désire qu’une seule, et qu’il doit se forcer pour venir auprès de l’autre, il sera récompensé pour cela.
592 On n’a pas retrouvé ce ḥadīṯ. 669Si un homme mange du pain d’orge licite // et se prive d’un pain blanc illicite, alors qu’il pouvait s’en procurer, il sera récompensé — de l’avis de tout le monde — pour avoir mangé du pain d’orge. Bien plus, si quelqu’un affirme que le Croyant sera récompensé pour avoir bu, mangé et eu des rapports sexuels, en se basant sur les paroles du Prophète : « Le Croyant sera récompensé de toute chose, même d’avoir porté une bouchée à ses lèvres »592, à mon avis, il a raison. ***
LXXX. — EXEMPLE DE ḤADĪṮ INFIRMÉ PAR LA SPÉCULATION 593 Cf. BUḪ. 63, 27 = HM III, 24, etc…
200
594 Cf. § 211 sqq. 670283.
—
Proposition :
Vous
enseignez
que
des
singes
lapidèrent une guenon pour adultère593. Si les singes l’ont lapidée en état d’iḥṣān594, le ḥadīṯ est [encore] plus intéressant ! 671Conformément à l’analogie impliquée par ce ḥadīṯ, qui sait si les singes n’observent pas un grand nombre de prescriptions de la Thora, et si leur religion n’est pas encore le judaïsme ?
595 Cf. Tarbī‘, s. misḫ. 672Et si les singes sont juifs, peut-être les porcs sont-ils chrétiens ?595. 673284. — Réponse : En réponse à leurs railleries, nous affirmons que le ḥadīṯ sur les singes n’émane pas du Prophète ni de ses Compagnons. C’est en réalité une phrase proférée par ‘Amr b. Maymūn.
596 BUḪ. 63, 27 = HM III, 24, etc… 674D’après Muḥammad b. Ḫālid b. Ḫidāš — Muslim b. Qutayba — Hāšim — Ḥuṣayn, ‘Amr b. Maymūn aurait dit : « Une guenon se rendit
coupable
d’adultère,
avant
l’Islam.
Les
singes
la
lapidèrent, // et je les imitai »596. 675Abū Muḥammad dit : Il peut se faire qu’il ait vu des singes lapider une guenon, et ait présumé qu’ils la lapidaient parce qu’elle avait forniqué. Mais nul ne peut le savoir que par conjecture, car les singes ne disent rien sur eux-mêmes. Celui qui les voit s’accoupler ne sait s’ils sont adultères ou non. C’est une conjecture. Peut-être le vieil homme a-t-il su qu’elle commettait l’adultère en raison d’une preuve que nous ignorons. En effet, les singes sont les animaux les plus enclins à la fornication. Les Arabes en ont fait Un proverbe, et ils disent : « Plus fornicateur qu’un singe ». Or si leur penchant à la fornication n’était si 201
notoire, on n’en aurait point fait un proverbe, car aucun animal ne ressemble plus à l’homme que le singe pour ce qui est des habitudes matrimoniales et de la jalousie. Il arrive aux animaux de se battre, de s’affronter, de se châtier ; il en est qui mordent, il en est qui griffent ; il en est qui brisent et piétinent. Les singes, eux, lapident avec les mains que Dieu leur a données, tout comme aux hommes. Dans cette circonstance, il est fort possible qu’ils se soient lapidés pour tout autre chose que pour adultère, et que le vieil homme se soit imaginé que c’était pour adultère. Mais il est également plausible qu’il ait trouvé une preuve de l’adultère de cette guenon, car comme je l’ai dit, ce sont les animaux les plus enclins à la jalousie, et les plus comparables aux humains par l’intelligence. //
597 Coran, V, 60.
598 On ne voit pas à quel ḥadīṯ il est fait allusion ici. 676284 a. — Abū Muḥammad dit : Pour moi, je présume que les singes sont bien le produit d’une métamorphose, et que ce produit a crû et multiplié. J’en veux pour preuve le verset : « Vous donnerai-je avis de ceux dont la récompense sera pire que cela auprès de Dieu ? Ceux que Dieu a maudits, contre qui Il s’est courroucé, dont il a fait les singes et les porcs… »597. La présence de l’article défini dans « les singes et les porcs » est un signe de détermination, et prouve qu’il s’agit bien des singes que nous avons sous les yeux. S’Il avait voulu parler d’une chose passée et disparue, il aurait dit : « …dont Il a fait des singes et des
porcs »,
à
moins
que
le ḥadīṯ d’Umm
Ḥabība
sur
la
métamorphose ne soit authentique, et qu’il en soit comme le Prophète l’a dit598. 677284 b. — Nous ne prétendons point qu’ils ont agi ainsi pour se conformer aux prescriptions de la Thora, comme le déclare notre 202
railleur, mais nous affirmons qu’ils ont appliqué la lapidation soit pour adultère, soit pour tout autre chose, tout comme d’autres animaux griffent, mordent ou brisent, parce qu’ils ont des mains semblables à celles des humains. Or les humains n’ont d’autre moyen que la lapidation pour faire du mal à distance. 678Ce qui confirme que les singes sont bien le produit de la métamorphose en question, c’est que tout le monde est d’accord pour déclarer leur chair illicite au même titre que la chair humaine, en dehors de toute révélation et de toute tradition. // ***
LXXXI. — EXEMPLE DE ḤADĪṮ-S PROUVANT QUE LE CORAN EST CRÉÉ 599 Sourate XXXVI.
600 Sourate II.
601 Sourate III.
602 Cœur et bosse : ḤAN. V, 26 ; nuages, ombrages, vols d’oiseaux : ḤAN. IV, 183 ; V, 249, 361, etc… Pou (...)
603 Cf. ḤAN. IV, 183. 679285. — Proposition : Vous enseignez que le cœur du Coran est [la sourate] « Yā’ Sīn »599, que la bosse du Coran est [la sourate] « la Génisse »600 ; que les [sourates] « la Génisse » et « la famille de ‘Imrān »601 viendront, au jour de la résurrection, comme deux nuages, ou deux ombrages, ou deux vols d’oiseaux aux ailes étendues602 ; que le Coran viendra vers l’homme dans son tombeau et lui dira telle ou telle chose603.
203
680Tout cela prouve que le Coran est créé. Il est impossible que ce qui a un cœur, une bosse, ou ce qui est un nuage ou un ombrage soit incréé. 681286. — Réponse : Nous affirmons qu’il aurait convenu que ces gens, amateurs de kalām et de raisonnement analogique, se rendissent compte que le Coran n’est point un corps, et qu’il n’a ni limites, ni régions.
604 Cette phrase se rapporte au ḥadīṯ de la note précédente. Ce passage, ainsi que les lignes suivantes (...) 682Par l’expression « la bosse du Coran », il voulait dire seulement que // la sourate « la Génisse » en est le point culminant, tout comme la bosse du chameau en est le sommet. Par l’expression « le cœur du Coran est la sourate « Yā’ Sīn », il voulait dire que cette sourate est au Coran ce que le cœur est au corps. Par la phrase : « Les sourates la Génisse et la famille de ‘Imrān, viendront comme deux nuages », il a voulu dire que la récompense [inhérente à la récitation] de ces deux sourates viendra ombrager le récitant au jour de la résurrection. [Enfin], la récompense [inhérente à la lecture du Coran]604 viendra sur l’homme dans son tombeau. 683[Le Coran] viendra auprès de l’homme au jour de la résurrection afin de discuter son cas. On peut admettre que Dieu incarne [à ce moment] le Coran dans un être qui plaidera sa cause et le sauvera.
605 Cf. ḤAN. IV, 183 ; V, 249, 361 etc… 684286 a. — Abū Muḥammad dit : D’après Abū l- Ḫaṭṭâb Ziyād b. Yaḥyā — ‘Abd al-A’lā — Muḥammad b. Isḥāq — ‘Amr b. Šu‘ayb — son père — son grand-père, le Prophète a dit : « Au jour du jugement, le Coran sera incarné dans un homme. On fera alors comparaître l’être humain qui aura négligé les obligations 204
rituelles, [prévues par le Coran], outrepassé ses lois, refusé de s’y conformer et résolu de lui désobéir. [Le Coran] s’érigera alors en accusateur et dira : — Hélas, Seigneur ! Tu m’a confié à un mauvais porteur qui a négligé mes obligations, outrepassé mes lois, refusé de m’obéir et péché contre moi ! Il ne cessera de porter témoignage contre lui jusqu’à ce qu’on lui dise : — Alors, fais-en ce que tu veux ! // Et le Coran saisira l’homme par un bras et ne le lâchera que pour le précipiter la tête la première dans le Feu. [Puis] on amènera un homme qui aura respecté les lois coraniques, accompli les obligations rituelles, accepté de lui obéir et évité de pécher contre lui. [Le Coran] s’érigera en avocat et dira : — Seigneur, Tu m’as confié à un bon porteur. Il a respecté mes lois, accompli mes obligations, accepté de m’obéir et évité de pécher contre moi ! On lui dira : — Alors, fais-en ce que tu veux ! Et il le saisira par un bras et ne le lâchera pas avant de l’avoir revêtu d’une tunique de soie brodée d’or, d’avoir placé sur sa tête une couronne royale, et de l’avoir abreuvé avec la coupe de l’éternité »605. 685286 b. — N’y a-t-il pas, dans l’expression « le Coran sera incarné » une preuve qu’il lui sera donné une apparence, afin que l’homme qui l’aura suivi et respecté sache que c’est le Coran qui le sauve ? Le Coran en lui-même n’est ni un homme ni un corps matériel, et il ne parle pas, car il est lui-même la Parole. 686Si ces gens réfléchissaient attentivement et bénéficiaient d’un tant soit peu d’aide divine, ils sauraient qu’il est impossible d’admettre que le Coran est créé, car il est la Parole de Dieu. La Parole de Dieu est de Dieu, et ce qui est de Dieu ne saurait être créé. 687Considérons cela en nous référant à la parole humaine, qui leur est plus accessible. Notre parole n’est pas un acte qui nous est propre. Ce n’est qu’un bruit, des sons isolés, // et ni ce bruit, 205
ni ces sons ne sauraient être des actes qui nous sont propres, car ils sont tous créés par Dieu. La seule part de l’acte qui puisse nous être attribuée dans ces phénomènes est leur reproduction (adā’). C’est elle qui nous vaut la récompense divine. 688286 c. — On peut comparer le cas d’un homme auquel on aurait confié un bien, puis auquel on l’aurait réclamé et qui le restituerait de sa main. Ni le bien, ni la main ne justifieraient une récompense. La récompense serait due uniquement du fait de la restitution (adā’). 689Ainsi, la récompense n’est due à l’homme que pour avoir reproduit le Coran par la voix et en sons isolés. Mais sous la forme ordonnée et composée [que nous lui connaissons], le Coran est la Parole de Dieu, et c’est de Lui qu’il émane. Quiconque le reproduit reproduit la Parole de Dieu, mais cela ne lui ôte en rien la qualité de Récitant du Coran. Si quelqu’un rédige un discours ou compose un poème, puis qu’un autre transmette cela, la parole ou les vers ne sont pas le fait du transmetteur : l’œuvre poétique est due à l’auteur, et le transmetteur ne fait que la reproduire. ***
LXXXII. — EXEMPLE DE ḤADĪṮ-S INFIRMÉS PAR LE CONSENSUS 606 Les ḥadīṯ-s en ce sens que l’on a trouvés ne font pas mention de la friction du turban. Voir toutef (...)
607 TIR. 1, 75 ; ḤAN. IV, 135 ; V, 281, etc…
608 ABŪ DĀWŪD, 1, 60. 690287. — Proposition : Vous rapportez d’après Ayyūb — Ibn Sīrīn — ‘Amr b. Wahb al-Ṯaqafī — qu’al-Mugīra b. Šu‘ba dit : « Le Prophète étant sorti pour satisfaire à un besoin, je le suivis avec de l’eau. Il fit son ablution, pratiqua la friction du turban, puis fit 206
la Prière du matin »606. Vous rapportez d’après Abū Mu‘āwiya — // al-A‘maš — al-Ḥakam — ‘Abd al-Raḥmān b. Abī Laylā — Ka‘b b. ‘Ağra — Bilāl que le Prophète pratiquait la friction du voile de tête607. Vous rapportez d’après al-Walīd b. Muslim — alAwza‘ī — Yaḥyā b. Abī Kaṯīr — Abū Salama b. ‘Abd al-Raḥmān — que ‘Amr b. Umayya al-Ḍamrī dit : « J’ai vu le Prophète faire ses ablutions et pratiquer la friction du turban »608. 691Ce sont là d’après vous des isnād-s irréprochables, et cependant, vous avez renoncé à mettre ces ḥadīṯ-s en pratique sans qu’aucune tradition les abrogeât.
609 Cette importante affirmation est assez conforme à la position hanbalite. D’après H. Laoust, Ibn Tay (...)
610 Le problème est de savoir s’il convient de prononcer une seule formule de salutation après la Prièr (...) 692288. — Réponse : Nous prétendons que la vérité s’affirme chez nous par le consensus plus encore que par la tradition (riwāya)609. Le ḥadīṯ, en effet, est sujet à des accidents provoqués par l’omission ou la négligence. Il peut être sujet à caution, à interprétations ou à abrogation. Un transmetteur de confiance peut le recevoir d’un autre qui ne l’est pas. Il peut véhiculer deux prescriptions divergentes qui soient toutes deux licites — comme la taslīma unique ou les deux taslīma-s610. Un transmetteur peut aussi avoir été présent lorsque le Prophète donnait un ordre, et ne pas avoir été personnellement présent lorsqu’il donnait l’ordre contraire par la suite : il transmettra alors le premier, mais non le second // et pour cause.
611 Mālik est en effet un des grands docteurs du Ḥiğāz, et il est fondé à connaître des faits ignorés d (...)
612 Akṯar (?), ; on se demande s’il ne faut pas comprendre : « plus solide, plus sain ». En effet, l’iğ (...) 207
693Le consensus, lui, est à l’abri de ces vicissitudes. C’est pourquoi il arrive à Mālik de rapporter un ḥadīṯ, puis de déclarer : « Toutefois, l’usage dans notre pays est tel ou tel » pour une raison contraire à ce ḥadīṯ, car son pays est le pays du Prophète611. Et si, à son époque, l’usage était tel ou tel, il en est de même pour le siècle suivant, pour le troisième, le quatrième, et ainsi de suite. Il est impossible qu’un groupe humain abandonne un usage en vigueur dans son pays et à son époque pour en adopter un autre ; or [un usage transmis] d’une génération à une autre est plus fréquent612 que d’un individu à un autre.
613 ḤAN. I, 223, 283, etc… ; II, 33.
614 Cf. TIR. 2, 24.
615 Cf. MĀLIK,,9 4. 694288 a. — Il peut arriver aussi que des gens transmettent, avec une chaîne de garants ininterrompus des ḥadīṯ-s auxquels ils ont cessé de se conformer. Ainsi en est-il du ḥadīṯ de Sufyān et Ḥammad b. Zayd — ‘Amr b. Dīnār — Ğābir — Ibn ‘Abbās déclarant que le Prophète groupait les Prières du ẓuhr, du ‘aṣr, du maġrib et du ‘išā’ à Médine, même lorsqu’il était en sécurité et n’avait rien à redouter613. Or tous les juristes ont abandonné cet usage, soit parce qu’il a été abrogé614 ; soit parce qu’il agissait ainsi par nécessité — qu’il s’agît de pluie615 ou d’une occupation quelconque.
616 ḤAN. I, 221 ; ABŪ DĀWŪD, 18, 8.
617 Tout repose sur le rôle de huwa (lui-même), qui est à vrai dire rien moins que clair dans ce ḥadīṯ, (...)
618 On sait que le patron (mawlā) est le dernier sur la liste de la ‘aṣaba, c’est-à-dire des ayants dro (...)
208
695Ainsi en est-il également du ḥadīṯ de Sufyan — ‘Amr b. Dīnār — ‘Awsağa — Ibn ‘Abbās qui dit : « Un homme mourut du temps du Prophète sans laisser d’autre héritier // qu’un mawlā que luimême avait affranchi. Le Prophète lui donna son héritage616. Or les juristes sont opposés à cela soit parce qu’ils suspectent ‘Awsağa et que ce dernier est un individu qui ne saurait garantir l’authenticité d’une prescription ou d’une tradition normative, soit parce qu’ils altèrent l’interprétation du ḥadīṯ et comprennent : « Il ne
laissa
d’autre
héritier
qu’un mawlā qui
avait
lui-même
affranchi le mort617 » — conformément à cette interprétation, il est licite qu’il soit l’héritier, car il était le patron (mawlā) du mort618 —, soit en vertu d’une abrogation.
619 TIR. 2, 177 ; NAS. 12, 30. Cf. aussi EI, II, 1184, s. ḳunūt (WENSINCK). 696Ainsi enfin un ḥadīṯ de Šu‘ba — ‘Amr b. Murra — ‘Abd alRaḥmān b. Abi Laylā — al-Barā’ disant que le Prophète pratiquait le qunūt à la Prière du ṣubḥ et à celle du maġrib619. Or les Musulmans discutent sur le qunūt de la Prière du ṣubḥ, mais s’accordent pour le délaisser à la Prière du maġrib.
620 On n’a pas trouvé de ḥadīṯ où soient associés le toupet et le turban.
621 Coran, V, 6 : « Passez-vous la main sur la tête… » Il ne faut donc pas prendre ici le mot « toupet (...) 697288 b. — Les exemples de cet ordre sont nombreux, et il faut y ajouter la question de la friction du turban ou du voile. Les juristes sont d’accord pour délaisser cette pratique. S’ils la délaissent
bien
que
ce ḥadīṯ soit
transmis
par
une
voie
irréprochable à leurs yeux, ce ne peut être qu’en raison d’une abrogation, ou parce que le Prophète a été vu en train de pratiquer la friction du turban en même temps que celle de la tête 209
sous le turban. Le transmetteur a rapporté l’information la plus insolite, car si la friction de la tête n’est ni répréhensible, ni insolite — en effet, tout le monde la pratique —, celle du voile est [au contraire] une pratique insolite. Ils ont cherché un témoignage // pour justifier cette attitude dans un autre ḥadīṯ dû à al-Muġīra et transmis par al-Walīd b. Muslim — Ṯawr — Rağā’ b. Ḥaywa — Warrād : al-Muġīra y déclare que le Prophète frotta son toupet et son turban620. Or le fait de frotter le toupet est une obligation rituelle prévue par le Coran621 ; il ne saurait être rejeté en vertu d’un ḥadīṯ dont existent des versions différentes.
622 P. ex. ḤAN. IV, 252, où effectivement il n’y a qu’un seul ḥadīṯ. 698Il en est de même pour une version d’un ḥadīṯ déclarant que le Prophète pratiquait la friction des deux sandales, et une autre version déclarant qu’il frottait ses deux chaussettes. Or il frottait ses chaussettes à l’intérieur de ses sandales : chacun des deux transmetteurs a rapporté une moitié du ḥadīṯ622. ***
LXXXIII. — EXEMPLE DE DEUX ḤADĪṮ-S CONTRADICTOIRES RELATIFS AUX ENFANTS DES POLYTHÉISTES 623 MUS. 32, 28 ; ABŪ DĀWŪD, 15, 111. 699289. — Proposition : Vous enseignez qu’al-Ṣa‘b b. Ğuṯāma dit : « O Prophète, nos chevaux piétinent les enfants des Polythéistes dans les ténèbres de la nuit, lors des expéditions ». Il répondit : « Ils [sont sortis] de leurs pères ! »623.
624 Les compilateurs ne paraissent pas avoir retenu ce ḥadīṯ. 700D’autre part, vous rapportez que le Prophète envoya un corps expéditionnaire qui tua des femmes et des enfants ; il réprouva cela très énergiquement. Ils objectèrent : « O Prophète, ce sont 210
des enfants de Polythéistes ! » Mais il répliqua : « Les meilleurs d’entre vous ne sont-ils pas des enfants de Polythéistes ? »624. 701290.
—
Réponse :
Nous
affirmons
qu’il
n’y
a
nulle
contradiction entre ces deux ḥadīṯ-s, // car al-Ṣa‘b b. Ğutāma lui ayant appris que les chevaux des Musulmans les piétinaient la nuit pendant les expéditions, il répondit : « Ils sont [sortis] de leurs pères », ce qui veut dire que sur terre, ils ont le même statut que leurs pères. Si au cours d’une expédition nocturne, une occasion se présente d’attaquer les Polythéistes, ne vous abstenez pas à cause des enfants, car ils ont le même statut que leurs pères ; [toutefois], ne les massacrez pas délibérément. Mais dans le second ḥadīṯ, il reprocha aux troupes d’avoir tué des femmes et des enfants, car ils l’avaient fait exprès, sous prétexte que leurs pères étaient Polythéistes. C’est alors qu’il dit : « Les meilleurs d’entre vous ne sont-ils pas des enfants de Polythéistes ? » pour dire : « Il y en aura peut-être parmi eux qui deviendront de bons Musulmans lorsqu’ils seront adultes ». ***
LXXXIV. — EXEMPLE DE ḤADĪṮ COMPORTANT UNE CONTRADICTION INTERNE 625 Cf. BUḪ. 63, 12 = HM I, 10.
626 SUYŪṬĪ, Ğāmi‘, 132 (d’après Ṭabarāmī). 702291. — Proposition : Vous enseignez que le Prophète a dit à propos de Sa‘d b. Mu‘āḏ : « Le Trône fut ébranlé par sa mort. Soixante-dix mille anges se sont précipités pour faire sa dernière toilette ; j’ai failli ne pas pouvoir me frayer un chemin jusqu’à son brancard »625. Vous rapportez en outre qu’il a dit : « Si quelqu’un peut échapper au tourment du tombeau, c’est bien Sa‘d b. Mu‘āḏ ; il a subi une pression à en faire éclater ses côtes »626.
211
627 BUḪ. 16, 1, 13 = HM I, 342, 349 ; 59, 4 = HM II, 425 ; ḤAN. II, 109, 118 ; IV, 122, 245 ; VI, 168, (...)
628 BUḪ. 59, 4 = HM II, 425. 703Comment le Trône d’Allāh peut-il bouger à cause de la mort d’un homme ? Si cela était possible, il ne pourrait s’agir que des prophètes. Vous rapportez en effet que le Prophète a dit : // « Le soleil et la lune ne subissent point d’éclipse lorsque quelqu’un meurt ou vit »627. Si cela est vrai pour le soleil et la lune, qui sont — comme vous l’enseignez — deux taureaux entourés de feu628, comment [ne le serait-ce pas] pour le glorieux Trône ? Ajoutons que si le Trône bougeait, il entraînerait dans son mouvement les cieux et la terre. 704Comment le trône pourrait-il bouger en raison de la mort d’un homme que Dieu tourmente et oppresse dans son tombeau au point de faire éclater ses côtes ? Comment en outre peut-Il tourmenter un homme que soixante-dix mille anges sont venus laver, et dont le brancard n’a pu être approché par un prophète, en raison de la foule des anges qui se pressait autour de lui ? 705292. — Réponse : Nous prétendons que des gens ont cherché à interpréter ce ḥadīṯ, et ont pensé que l’ébranlement du Trône était un mouvement réel et physique, comme la vibration d’une lance ou d’un arbre agité par le vent. Si l’on interprète de cette manière, c’est un scandale, car les arguments de nos adversaires prennent toute leur valeur. 706D’autres ont dit : « Le mot ‘arš (trône) signifie ici sarīr (lit) ; il s’agit de la civière sur laquelle fut emporté Sa‘d b. Mu‘āḏ ; c’est donc cette civière qui bougea. // Si cette interprétation était la bonne, le ḥadīṯ en question ne conférerait aucun mérite à Sa‘d, et la phrase n’aurait aucun intérêt, car n’importe quelle civière sur laquelle est un mort bouge lorsqu’on la transporte ! 212
629 BUḪ. 63, 12 = HM I, 10. 707292 a. — Ensuite, comment le mot ‘arš pourrait-il désigner la civière sur laquelle fut emporté Sa‘d b. Mu‘āḏ, puisqu’un autre ḥadīṯ dit : « Le trône (‘arš) du Miséricordieux fut ébranlé à cause de sa mort »629. 708L’ébranlement ne saurait représenter le mouvement auquel certains pensent, pas plus que le trône [l’objet] auquel pensent les autres. 709L’« ébranlement » désigne l’émotion et la joie. On dit : « Untel est ébranlé par les bonnes actions », c’est-à-dire : en tire émotion et joie. On dit encore : « Lorsqu’on le loue, Untel est ébranlé ». Le sens est le même dans le proverbe : « Lorsqu’on l’invite, Untel est ébranlé ; lorsqu’on le sollicite, il reste barricadé ». L’expression est d’Abū l-Aswad al-Du’alī. Cela veut dire que lorsqu’on l’invite à manger, il est ému et joyeux, et que si on lui demande quelque chose, il reste sur ses positions et ne s’ouvre pas. Tel est le sens du mot « ébranlement » dans ce ḥadīṯ.
630 Coran, XLIV, 29.
631 Coran, XII, 82.
632 BUḪ. 96, 16 = HM IV, 566 ; ḤAN. III, 140, etc… 710Quant au mot ‘arš, il désigne bien le trône du Miséricordieux, comme il est dit dans le dernier ḥadīṯ. Son « ébranlement » est la joie des anges qui le portent et l’entourent, à cause de [l’arrivée] de l’âme de Sa‘d b. Mu‘āḏ. [Le Prophète] a employé le mot « trône » au heu de parler des anges qui le portent et l’entourent, // comme dans le verset : « Ni le ciel, ni la terre ne pleurèrent sur eux… »630, c’est-à-dire : Ni les habitants du ciel, ni ceux de la terre ne pleurèrent sur eux. « Le ciel » et « la terre » désignent ici leurs habitants. Dieu a dit ailleurs : « Interroge la 213
cité »631, c’est-à-dire : Interroge ses habitants. Le Prophète a dit à propos du mont Uḥud : « Ceci est un mont qui nous aime et que nous aimons »632 ; il voulait dire : Ses habitants — les Anṣār — nous aiment et nous aimons ses habitants. Pour la même raison, il a parlé du trône au heu de parler des anges qui le portent et qui se tiennent autour de lui.
633 Cf. p. ex. BUḪ. 59, 6 = HM II, 433, et ḤAN. II, 364, etc… 711On trouve dans le ḥadīṯ que les anges se réjouissent [de l’arrivée] de l’âme du croyant, et que chaque croyant dispose au ciel, d’une porte par laquelle ses œuvres passent lorsqu’elles montent, ainsi que sa subsistance lorsqu’elle descend, et par laquelle il apporte son âme à sa mort, puis est renvoyé633. 712Cette interprétation est confirmée par le propos du Prophète : « Soixante-dix mille anges se sont précipités pour faire sa toilette mortuaire ». Grâce à Dieu, cette interprétation est facile et immédiate ; tout se passe comme si le Prophète avait dit : Les porteurs du Trône et les [autres] anges se réjouirent autour de lui à cause de l’âme de Sa‘d. 713292 b. — Ils disent : Comment un homme vers lequel se sont précipités soixante-dix mille anges pour le laver peut-il avoir été tourmenté ? 714La mort, la Résurrection et le Jugement s’accompagnent de violents séismes et de terreurs // auxquels n’échappe aucun prophète, ni aucun ami de Dieu. J’en veux pour preuve que le Prophète demandait à Dieu de le protéger contre le tourment du tombeau. Si ces tourments avaient été inconcevables, il ne l’aurait pas fait. Mais il redoutait ce que Dieu a décrété dans cet ordre d’idées pour tous les hommes, en les laissant dans l’incertitude, de sorte que nul être humain ne peut vivre dans la sécurité et la tranquillité. 214
634 BUḪ. 97, 36 = HM IV, 627. 715J’en veux pour preuve également les paroles des prophètes au jour du Jugement : « Seigneur ! mon âme ! mon âme » et celles de notre
Prophète :
« Seigneur !
ma
communauté,
ma
communauté ! »634.
635 Coran, XIX, 71.
636 Cf. Coran, XIX, 72. 716J’en veux pour preuve enfin le verset : « Il n’est parmi vous personne qui n’arrive point à elle (= la Géhenne) ! C’est, pour ton Seigneur, un arrêt décidé » etc…635, où Il nous apprend qu’il n’est personne qui n’aborde l’enfer, mais que Dieu sauve ceux qui ont été pieux et y laisse les injustes agenouillés636.
637 BUḪ. 62, 6 = HM II, 598 ; ḤAN. III, 208, 218, 239… 717‘Umar b. al-Ḫaṭṭāb a dit : « Si j’avais gros comme la terre d’or, je m’en servirais pour me racheter des terreurs de l’autre monde ! »637. //
638 Coran, V, 109. 718A propos du verset : « Au jour où Dieu réunira les Prophètes et qu’il leur demandera : — Que vous a-t-il été répondu ?, ils diront : — Nulle science à nous, mais Toi, tu as toute connaissance des Inconnaissables »638, Ibn ‘Abbās a dit : « Ils seront stupéfiés par les terreurs du jour de la résurrection ». ***
LXXXV. — EXEMPLE DE ḤADĪṮ INFIRMÉ PAR LA SPÉCULATION 639 ḤAN. II, 5 ; cf. BUḪ. 51, 7 = HM II, 186 ; 70, 8 = HM III, 659, etc…
215
719293. — Proposition : Vous rapportez d’après ‘Abd Allāh b. Numayr — ‘Ubayd Allāh — Nāfi‘ — Ibn ‘Umar que le Prophète a dit à propos du lézard : « Je n’en mange pas, mais je ne l’interdis pas ; je ne le déclare ni licite, ni illicite »639. 720S’il n’en mange pas ni ne l’interdit pas, s’il ne le déclare ni licite, ni illicite, à qui se vouer alors pour connaître le licite et l’illicite ? Les bédouins mangent des lézards et s’en délectent. Abū Wā’il dit : « J’aime mieux un lézard plein d’œufs qu’une poule grasse ! » Ḫālid b. al-Walīd en mangeait avec lui, ainsi que ‘Umar. Il est impossible que ces derniers aient osé le faire dans l’équivoque.
640 ḤAN. I, 29. 721294. — Réponse : Nous prétendons que ce ḥadīṯ comporte une erreur due à l’inadvertance de la part d’un des transmetteurs. Le Prophète a dit : « Je n’en mange pas et je ne l’interdis pas » sans plus. // Mais le transmetteur a pensé qu’il ne le déclarait ni licite ni illicite, puisqu’il n’en mangeait pas et ne l’interdisait pas. Or il importe de ne pas confondre les deux attitudes, car le Prophète ne s’abstenait pas d’en manger en raison de son caractère illicite, mais il s’en abstenait tout simplement parce qu’il en avait un dégoût. Lorsqu’on servit un lézard à ‘Umar et qu’il porta la main aux filets de l’animal, il déclara : « Le Prophète ne l’a pas déclaré illicite, mais il lui inspirait du dégoût »640.
641 BUḪ. 95, 6 = HM IV, 543. 722Une autre anecdote nous éclaire également sur ce point : Wahb b. Ğarīr rapporte d’après Šu‘ba — Tawba al-Anbārī — al-Ša‘bī — Ibn ‘Umar qu’un groupe de Compagnons du Prophète, parmi lesquels Sa‘d b. Mālik, étaient en train de manger quelque chose, lorsqu’une des épouses du Prophète leur cria : « C’est du lézard ! » Sur quoi ils s’interrompirent ; mais le Prophète leur dit : 216
« Mangez ! ce mets est licite, et il n’y a pas d’inconvénient, mais ce n’est pas une nourriture de chez moi ! »641. Ce ḥadīṯ montre bien l’erreur de l’homme qui a transmis [le premier] de la bouche d’Ibn ‘Umar, car il est illicite de rapporter les deux ḥadīṯs ensemble, dès lors qu’ils sont contradictoires.
642 Cf. Coran, VI, 145-146. 723294 a. — Quant au fait que le Prophète refusait d’en manger quoiqu’il fût licite à ses yeux, [il s’explique si l’on considère] que tout ce qui est licite // n’est pas agréable ni convenable. Ainsi, Dieu a décrété que le mouton était licite pour nous, à l’exception de son sang répandu642. Or le Prophète en détestait la vessie, le ris, les tripes, les testicules et la rate.
643 P. ex. ḤAN. III, 31, 39, 45, 53. 724La tradition historique rapporte que le fœtus est considéré comme égorgé rituellement lorsque la mère l’a été643, mais nul ne le mange de bon cœur.
644 Il est bien difficile de déterminer les variétés de sauriens que désignent les différents mots empl (...)
645 Coran, VII, 157. 725Il est des choses qu’aucune révélation ni aucune tradition n’ont déclarées illicites ; en ce qui les concerne, les hommes s’en remettent à leur instinct et à leur nature. Ainsi en est-il de la chair humaine, de la viande de singe, de serpent, de gecko, de ‘izāya644, de souris, etc… Il n’est aucun de ces animaux que l’on ne déteste instinctivement. Allāh nous apprend dans son livre que le Prophète a déclarées illicites les [nourritures] immondes645. Or tous ces animaux sont immondes par nature. 726294 b. — Parmi les choses licites, mais inconvenantes, on peut citer le fait, pour un adulte, de courir dans la rue sans qu’il y ait 217
urgence, de se disputer à propos du douaire de la mère, de laisser tomber son manteau de ses épaules, de filer du coton sur la voie publique, de se parer // d’atours féminins, de manger dans les rues.
646 SUYŪṬĪ, Ğāmi‘, 123 (d’après Ṭabarānī). 727Abū Muḥammad dit : D’après Abū l-Ḫaṭṭāb — Abū ‘Itāb — Muḥammad b. al-Furāt — Sa‘īd b. Luqmān — ‘Abd al-Raḥmān alAnṣārī, Abū Hurayra a dit : « J’ai entendu le Prophète dire : — Manger dans les rues est laid ». Un ḥadīṯ déclare : « Dieu aime les choses élevées et déteste les choses basses »646. ***
LXXXVI. — EXEMPLE DE ḤADĪṮ ANTHROPOMORPHISTE INFIRMÉ PAR LE CORAN ET LE CONSENSUS 647 BUḪ. 80, 14 = HM IV, 245 ; ḤAN. IV, 16, etc…
648 Cf. ḤAN. III, 501.
649 ḤAN. VI, 176, 238. 728295. — Proposition : Vous enseignez que Dieu descend dans le ciel inférieur pendant le dernier tiers de la nuit et dit : « Quelqu’un m’invoque-t-il, afin que je l’exauce ? Quelqu’un se repent-il, pour que je lui pardonne ? »647 ; qu’il descend parmi les pèlerins, le soir de ‘Arafa648 ; qu’il descend la nuit de la mi-ša‘bān649.
650 Coran, LVIII, 7.
651 Coran, XLIII, 84. 729Cela est en contradiction avec le verset : « Il n’est conciliabule à trois où Il ne soit le quatrième — à cinq où Il ne soit le sixième, à moins ou à plus [de trois ou de cinq] où Il ne soit avec eux où
218
qu’ils se trouvent »650 et avec cet autre : « Il est Celui qui est Dieu dans le ciel et Dieu sur terre »651. 730Enfin, tout le monde s’accorde // sur le fait qu’il est en tout lieu et que ceci ne saurait le distraire de cela. 731296. — Réponse : Pour ce qui est du verset : « Il n’est conciliabule à trois où Il ne soit le quatrième… », nous prétendons qu’Il est avec eux par la seule connaissance de leurs faits et gestes. Ainsi en est-il d’un homme que tu enverrais dans un pays éloigné en lui confiant une affaire te concernant, et auquel tu dirais : « Garde-toi d’être négligent ou insouciant sur un point de l’affaire que je te confie, car je suis avec toi ! » Cela voudrait dire : Ni ta négligence, ni ton zèle ne m’échapperont, car je te surveille et je suis tes affaires ». Si cela est possible pour la créature qui ignore l’inconnaissable, à plus forte raison l’est-ce pour le Créateur, qui connaît l’inconnaissable.
652 Coran, XX, 4 ; cf. XXV, 59.
653 Coran, XXIII, 28.
654 Coran, XXXV, 10. 732De même, lorsqu’on dit : « Il est en tout lieu », on entend par là que rien ne Lui échappe de ce qui se passe en ces lieux. Il y est parce qu’il les englobe dans Sa connaissance. Comment est-il permis de dire qu’il est en tous lieux par incarnation (ḥulūl) alors qu’il a dit : « Le Miséricordieux se tient sur le Trône »652, c’està-dire « demeure » ; on comparera aussi le verset : « Et quand tu te tiendras sur l’arche, toi et ceux qui sont avec toi »653 où il faut comprendre « quand tu demeureras », sans parler du verset : « Vers Lui s’élève la parole excellente. Il élève les actions pies »654. Comment pourrait-il élever vers Lui une chose à
219
proximité de laquelle Il se trouve, ou élever // un acte s’Il est près de lui ?
655 Allusion aux ḥadīṯ-s du § 292 a.
656 Ma‘āriğ : allusion au titre de la sourate LXX. 733Comment les anges et les âmes pourraient-ils monter au jour de
la
résurrection655 ?
Le
verbe
‘arağa est
synonyme
de ṣa‘ida (monter). On dit « ‘arağa ilā-l-samā’ », c’est-à-dire : monter au ciel. Dieu est le maître des ma‘āriğ, c’est-à-dire des degrés656. Que seraient ces degrés et vers qui les anges apporteraient-ils les actes [des hommes] si Dieu, dans Son séjour supérieur, est identique (miṯl) à Lui-même dans Son séjour inférieur ?
657 Toutes ces formules sont des réminiscences coraniques.
658 Coran, XXI, 19-20.
659 Coran, III, 169.
660 Coran, XXI, 17. On ne peut évidemment suivre ici la trad. BLACHÈRE (min ladunnā = spontanément), ét (...) 734296 a. — Si [nos adversaires] faisaient un retour sur leur nature innée et sur la connaissance instinctive du Créateur qui est partie intégrante de leur nature, ils sauraient que Dieu est le TrèsHaut, le Sublime, qu’Il réside dans le Lieu suprême, que les cœurs s’élèvent vers Lui pendant le ḏikr, que les mains s’élèvent vers Lui pendant l’invocation, que c’est d’En-Haut que les hommes espèrent la consolation, attendent l’assistance et reçoivent la subsistance, que c’est là que se trouvent le Siège ( kursiyy), le Trône (‘arš), les Voiles (ḥuğub) et les anges657. Dieu a dit : « Ceux qui sont auprès de Lui ne se trouvant pas trop grands pour L’adorer, n’en soupirent point. Ils L’exaltent la nuit et le jour sans 220
se lasser »658. Il a dit à propos des martyrs : « Ils sont vivants auprès de leur Seigneur et pourvus de leur subsistance »659. On les appelle šuhadā’ parce qu’ils sont témoins de la majesté de Dieu.
Le
est šahīd, comme
singulier
‘alīm, pl.
‘ulamā’,
kafīl, pl. kufalā’. Dieu a dit : // « Si Nous avions voulu y prendre un plaisir, Nous l’aurions pris auprès de Nous »660, c’est-à-dire : Si Nous avions voulu prendre femme et enfants, Nous les aurions pris près de Nous, et non près de vous, car l’épouse et les enfants d’un homme sont près de lui et en sa présence, et non près d’un autre.
661 Cette étrange affirmation obscurantiste est d’autant plus stupéfiante que toute l’œuvre d’Ibn Qutay (...) 735Tous les peuples, arabes ou persans, confessent que Dieu est au ciel, dans la mesure où ils sont demeurés dans leurs dispositions naturelles (fiṭar) et n’en ont pas été arrachés par l’enseignement661.
662 Dans ḤAN. II, 291, etc… l’anecdote est encore beaucoup plus savoureuse, car l’esclave ne peut répon (...) 736296 b. — Un ḥadīṯ rapporte qu’un homme vint trouver le Prophète avec une servante persane, afin de l’affranchir. Le Prophète demanda à la servante : « Où est Dieu ? » — « Au ciel ! » — « Et qui suis-je ? » — « Tu es l’envoyé de Dieu ! » Le Prophète dit alors : « Elle est croyante ». Et il ordonna à son maître de l’affranchir. Telle est à peu près l’anecdote662. 737Umayya b. Abi l-Ṣalt dit : « Glorifiez Notre
Dieu ! Seigneur
Par
l’édifice
Il
a
Il du
suprême
établi
un
est
digne
ciel qui trône
221
est a
d’être
glorifié.
devenu
précédé au-dessus
les
grand hommes ;
du
ciel.
Un
trône
immense
que
n’atteint
pas
le
regard ;
On voit au-dessous les anges courbés ».
663 ABŪ DĀWŪD, 39, 18.
664 Cf. Lisān, VI, 145 = Tāğ III, 343, où un autre ḥadīṯ de ‘Ikrima vient étayer la définition : « Tous (...) 738Le mot ṣūr, pl. de aṣwar, signifie : « à la nuque penchée ». Le ḥadīṯ // dit aussi que les porteurs du trône sont « courbés » (ṣūr)663. On emploie également ce mot pour désigner quiconque porte une chose lourde sur son épaule ou sa hanche et doit garder le cou penché664.
665 Matt. V, 34.
666 Matt. VI, 14, 26. Sur ces citations voir LECOMTE, Citations. Le texte porte rabbukum (votre Seigneu (...) 739On ht dans le Saint Évangile que le Messie a dit : « Ne jurez pas par le ciel, car il est le trône de Dieu »665 ; il a dit à ses Apôtres : « Si vous pardonnez aux hommes leurs offenses, votre Père qui est au ciel vous pardonnera aussi vos offenses… » « Regardez les oiseaux du ciel : ils ne sèment ni ne moissonnent et ils n’amassent rien dans des greniers ; et votre Père céleste les nourrit. Ne valez-vous pas beaucoup plus qu’eux ? »666. 740On pourrait multiplier les citations, ce qui allongerait le présent ouvrage. 741296 c. — Quant au verset : « Il est Celui qui est Dieu dans le ciel et Dieu sur la terre », il ne renferme rien qui permette de conclure à l’incarnation dans un séjour ou dans l’autre. Il signifie qu’il est le Dieu du ciel et de ses habitants, et le Dieu de la terre et de ses habitants.
222
742Voici
un
exemple
analogue
dans
la
langue
courante :
Lorsqu’on dit : « Il est émir au Ḫurāsān et émir en Égypte » cela signifie qu’il cumule les fonctions d’émir dans ces deux provinces, et qu’il séjourne soit dans l’une, soit dans l’autre. Cela est clair et ne saurait échapper à personne. 743Si l’on nous demande comment il faut entendre le verbe « descendre » lorsqu’il s’agit de Dieu, nous répondrons : On ne saurait définir // en aucune façon l’action de descendre lorsqu’il s’agit de Dieu. Nous pouvons définir l’action de descendre lorsqu’il s’agit des hommes et les acceptions de ce verbe dans le langage, mais Dieu seul sait ce qu’Il a voulu dire. 744296 d. — Le verbe « descendre », pour les hommes a deux acceptions : 1. passer d’un lieu à un autre, comme dans l’expression « descendre de la montagne vers la vallée » ou « de la terrasse dans la maison » ; 2. aborder quelque chose en pensée et en intention. Il en est de même pour les mots hubṭ (montée), irtiqā’ (ascension), bulūġ (arrivée), maṣīr ( devenir) et autres expressions. 745Ainsi, si quelqu’un te demande où se trouve le campement d’une tribu nomade, sans avoir l’intention de s’y rendre, tu répondras : « Lorsque tu arrives au mont Untel, redescends-le et prends à droite ; après être parvenu à telle et telle vallée, descends dedans et prends à gauche ; quand tu as atteint tel et tel terrain, gravis le plateau, et tu arrives en un heu qui domine ce campement ». Tu n’entends par là en aucun cas « fais cela en chair et en os », mais seulement en intention et en pensée. On dit parfois « Tu t’es frayé un chemin jusqu’aux hommes libres pour les insulter » ou « Tu t’es rendu // chez les califes pour les attaquer » ou « Tu es venu à la science en en faisant peu de cas » 223
ou « Tu es descendu de la noblesse à la bassesse ». Dans aucun de ces cas il ne faut entendre un déplacement physique, mais seulement que l’on a visé à un but par la volonté, la décision et l’intention.
667 Coran, XVI, 128. 746Il en est de même dans le verset : « Dieu est avec ceux qui sont pieux et ceux qui sont bienfaisants »667. Il ne signifie point que Dieu est avec eux par Son incarnation, mais par Son aide, Son assistance et Sa sauvegarde.
668 BUḪ. 97, 50 = HM IV, 643 ; ḤAN. II, 251, 316, 413… ; III, 40, 127, etc… 747De même pour le ḥadīṯ : « Quiconque s’approche de Moi d’une coudée, Je M’approche de lui d’une brasse ; quiconque s’approche de Moi en marchant, Je viens à lui en courant »668. 748296 e. — Abū Muḥammad dit : D’après ‘Abd al-Mun‘im — son père — Wahb b. Munabbih, lorsque Moïse s’entendit appeler du buisson en ces termes : « ôte tes sandales ! », il s’empressa d’obéir et de rester à la disposition [de Dieu]. Il voulait se familiariser avec la Voix et l’écouter en silence. Il dit : « J’entends Ta voix et je sens Ton murmure, mais je ne vois pas où Tu es. Où es-Tu donc ? » Dieu dit : // « Je suis au-dessus de toi, devant toi, derrière toi, autour de toi et plus près de toi que toi-même ! » Ce qui veut dire : Je te connais mieux que tu ne te connais toi-même, car si tu regardes devant toi, tu ne peux voir ce qui est derrière toi ; si tu lèves les yeux en l’air, tu perds la connaissance de ce qui est au-dessous de toi. Or rien ne m’échappe de ce que tu caches, en aucune circonstance. 749296 f. — On comparera le propos de Rābi’a la Dévote : « Ils ont occupé leurs cœurs par l’amour du monde, en dehors de Dieu. S’ils avaient laissé leurs cœurs libres, ils auraient fait le tour du 224
royaume de Dieu et seraient revenus avec des connaissances passionnantes ». Elle n’entendait pas par là que les corps et les cœurs voguent au ciel sous une forme incarnée, mais qu’ils s’y rendent en esprit, en désir et en intention. 750De même pour le propos d’Abū Mahdiyya al-A‘rābī : « J’ai regardé l’enfer, et j’ai vu les poètes animés de convulsions », c’est-à-dire de contorsions. Il déclama :
669 Cf. Lisān, VIII, 253, où ce vers est attribué à IMRU’ QAYS. 751« Les
criquets
de
[cet
endroit ?]
gisent,
AL-
animés
de
convulsions », c’est-à-dire de contorsions669.
670 ḤAN. I, 234, 359, etc… où al-bulh est remplacé par alfuqarā’ ; BuḪ. 59, 8 = HM II, 439. 752A propos de la parole du Prophète : « Je suis monté pour voir le paradis, // et j’ai constaté que la plupart de ses habitants étaient des simples ; je suis monté pour voir l’enfer, et j’ai constaté
que
la
plupart
de
ses
habitants
étaient
des
femmes »670, la bonne interprétation consiste à dire que cette ascension eut heu en pensée et en intention. ***
LXXXVII. — EXEMPLE DE ḤADĪṮ INFIRMÉ PAR LA RÉFLEXION 671 On n’a pas retrouvé ce ḥadīṯ. 753297. — Proposition : Vous rapportez d’après Ḥammād b. Salamā — ‘Ammār b. Abī ‘Ammār — Abū Hurayra que le Prophète a dit : « Moïse frappa du poing l’ange de la mort et l’éborgna »671.
672 Matt. XXVI, 39 ; Marc, XIV, 36 ; Luc, XXII, 42.
225
754Si l’ange de la mort pouvait devenir borgne, il pourrait tout aussi bien devenir aveugle. Il est d’ailleurs possible que Jésus ait frappé l’autre œil, car Jésus, fils de Marie, détestait la mort encore plus que Moïse. N’a-t-il pas dit : « Seigneur, si [tant est que Tu puisses] détourner cette coupe d’un homme, détourne-la de moi »672. 755298. — Réponse : Nous prétendons que pour les gens du ḥadīṯ, l’isnād de celui-ci est solide. Je crois qu’il tire son origine d’anciennes traditions historiques. Il donne heu à une interprétation saine que ne saurait réfuter aucune spéculation.
673 Nisbat al-ḫilqa : cette expression paraît s’opposer à la relation de dépendance ou d’origine en -iy (...)
674 Coran, XXXV, 1. 756352 Notre opinion sur ce point est que les anges sont des être spirituels (rūḥāniyyūn). Rūḥāni est un terme de relation tiré de // rūḥ (esprit), en vertu de la relation de nature ( nisbat alḫilqa)673. Tout se passe en effet comme s’ils étaient des esprits sans corps perceptible aux regards, sans yeux comme les nôtres ni enveloppes corporelles comme les nôtres. Nous ignorons comment Dieu les a conçus, car nous ne connaissons que les choses visibles et dont nous voyons l’apparence. De même, les génies, les démons et les goules sont des esprits dont nous ignorons la modalité. La limite de nos connaissances en ce qui concerne leurs qualités est précisément celle que Dieu et son Prophète ont observée dans les descriptions qu’ils en ont faites. Dieu a dit : « …Il prend pour émissaires des anges munis d’ailes par deux, trois et quatre » puis à la suite : « Il ajoute à la création ce qu’il veut »674, comme s’Il ajoutait au nombre de ces ailes ce qu’il veut — de même d’ailleurs qu’à toute autre chose. Les
226
Arabes appelaient les anges des « génies », car ils sont « cachés » aux regards (iğtannū) tout comme les génies (ğinn). 757Al-A’šā a dit à propos de Salomon, fils de David : « Il a imposé corvée à des génies parmi les anges, au nombre [de
neuf,
qui sont debout devant lui et travaillent sans salaire ».
675 ḤAN. II, 107.
676 Cf. p. ex. BUḪ. 2, 37 = HM I, 28, où Gabriel se présente sous la forme d’un homme quelconque.
677 BUḪ. 59, 7 = HM II, 436 sqq. ; 65, s. 53, 1 sqq. = HM III, 456.
678 Coran, XIX, 17. 758298 a. — Dieu a donné aux anges la faculté de se manifester sous des formes diverses. Le Prophète reçut la visite de // Gabriel sous la forme de Diḥya al-Kalbī675, et sous la forme d’un bédouin676 ; enfin, il le vit une fois recouvrir de ses ailes l’espace entre les deux horizons677. De même, Il a accordé aux génies de se manifester et d’apparaître sous des formes diverses, comme Il l’a fait pour les anges. Dieu a dit : « Nous envoyâmes [à Marie] Notre Esprit et il se manifesta à elle sous la forme d’un mortel accompli »678.
679 Voir plus haut, section XX, § 163 sqq.
680 Coran, VII, 27.
681 Coran, VI, 8-9. 759Ils ne prennent pas successivement ces aspects différents en réalité, mais ce ne sont que des manifestations et des apparences qui leur permettent d’être perçus par les regards. La réahté de 227
leur nature créée consiste dans des esprits subtils qui circulent comme le sang, se frayent un chemin jusqu’aux cœurs, rentrent sous terre, se laissent apercevoir ou ne se laissent pas apercevoir679. Dieu a dit au sujet d’Iblīs : « Le Démon, ainsi que sa cohorte, vous voient d’où vous ne les voyez point »680, c’està-dire que nous ne les voyons pas sous leur aspect réel. Il a dit encore : « [Les Infidèles] ont dit : — Que n’a-t-on fait descendre un ange ! Si l’on avait fait descendre un ange sur lui, l’ordre eût été décrété » ; puis ensuite : « Si [de cet envoyé] Nous avions fait un ange, Nous aurions fait un homme de celui-ci »681 ; cela veut dire : Si Nous avions envoyé un ange, leurs sens ne l’auraient point perçu, car ils ne peuvent percevoir l’aspect réel des anges ; de sorte que Nous en aurions fait un homme comme eux pour qu’ils puissent le voir et comprendre ses paroles. 760298 b. — Ibn ‘Abbās rapporte comme suit l’histoire de Vénus : Lorsque Dieu fit descendre les deux anges sur terre, afin qu’ils jugent entre les hommes, Il les métamorphosa en hommes // et incorpora le désir des femmes dans leur nature. En effet, il était indispensable que jugeassent entre les hommes des êtres visibles et audibles, conformés comme eux et à leur ressemblance. 761En sorte que lorsque l’ange de la mort se manifesta à Moïse, ange de Dieu contre prophète de Dieu, et qu’ils luttèrent ensemble, Moïse le frappa d’un coup de poing qui lui fit perdre un œil ; mais cet œil n’était que simulacre et apparence, et non réahté. L’ange de la mort revint alors à sa nature véritable, celle d’un être spirituel, tout comme auparavant, sans qu’il lui manquât rien. ***
LXXXVIII. — EXEMPLE DE ḤADĪṮ INFIRMÉ PAR LA SPÉCULATION 682 Sur ‘ŪG, voir l’index. 228
762299. — Proposition : Vous enseignez que ‘Ûğ arracha une montagne d’une parasange sur une parasange, de la dimension de l’armée de Moïse, et la transporta sur sa tête pour la précipiter sur eux ; elle se transforma en un collier qui resta à son cou jusqu’à sa mort. [Vous racontez] que lorsqu’il se plongeait dans la mer, l’eau ne dépassait pas ses genoux ; qu’il pêchait des poissons dans les ondes, et qu’il les faisait rôtir dans l’orbite du soleil ; que lorsqu’il mourut, il tomba dans le Nil d’Égypte et fit le pont pendant un an, c’est-à-dire : servit de pont aux hommes pour qu’ils passent d’une rive à l’autre ; que la taille de Moïse était de dix coudées, que telle était également la longueur de son bâton, mais qu’il avait beau sauter d’autant pour le frapper, il n’atteignait pas à sa cheville682. 763Tout
cela
est
mensonge
flagrant,
et
ni
l’individu
raisonnable, // ni l’ignorant ne s’y trompent. Comment pouvait-il y avoir à l’époque de Moïse des êtres aussi différents de nos contemporains ? Comment se peut-ils qu’il se soit trouvé dans la descendance d’Adam des hommes présentant un tel contraste avec Adam ? Comment un être humain pourrait-il porter ainsi sur sa tête une montagne d’une parasange sur une parasange ? 764300. — Réponse : Nous prétendons que ce ḥadīṯ n’émane point du Prophète ni d’un de ses Compagnons. Ce n’est là qu’une tradition, une des vieilles anecdotes rapportées par les gens des religions révélées. Certains d’entre eux l’ont entendue jadis et l’ont racontée. 765300 a. — Le ḥadīṯ peut être mélangé et corrompu par trois facteurs : 7661°) les zindīq-s. Ils ourdissent des ruses contre l’Islam et le corrompent
en
des ḥadīṯ-s détestables
forgeant
et
invraisemblables ; tels sont les ḥadīṯ-s dont nous avons déjà parlé, relatifs à la sueur des chevaux, à la visite des anges, à la 229
cage d’or // sur un chameau gris, au duvet de la poitrine, à la lumière des deux bras et bien d’autres sornettes que les gens du ḥadīṯ connaissent bien. 767Parmi ces zindīq-s figurent Abū l-‘Awğā’, le Zindīq, et Ṣālih b. ‘Abd al-Qaddūs, le Dahrī. 768300 b. — 2°) les conteurs (quṣṣāṣ) de l’ancien temps. Ils attiraient l’attention des gens du peuple et les escroquaient avec des ḥadīṯ-s répréhensibles, insolites ou mensongers. Les gens du peuple ont pour habitude de rester d’autant plus volontiers auprès du conteur que son ḥadīṯ est insolite, sort du raisonnable et du naturel, ou est attendrissant, attriste les cœurs et fait monter les larmes, 769S’il parle du paradis, il dira : « On y trouve une vierge de musc ou de safran ayant une croupe d’un mille sur un mille ; Dieu installera Son serviteur dans un palais formé d’une perle blanche ; le palais renfermera soixante-dix mille boudoirs ; chaque boudoir renfermera soixante-dix mille alcôves ; chaque alcôve renfermera soixante-dix mille lits ; // sur chaque lit, il y aura soixante-dix mille ceci ou cela… » et il ne cessera d’aligner les soixante-dix mille comme s’il ne connaissait aucun nombre inférieur ou supérieur à celui-là. Il dira : « Le moindre des favorisés qui occuperont une place auprès de Dieu au paradis recevra de Dieu tant et tant de fois [la valeur] de ce bas monde ».
683 Sur les conteurs populaires et la réaction contre leurs affabulations, cf. GOLDZIHER, Etudes, 195 s (...)
684 Coran, III, 133.
685 Coran, XLI, 51. 770Plus il en ajoutera, plus l’émerveillement sera grand, plus longtemps on fera cercle autour de lui, plus facilement on lui fera 230
des cadeaux683. Or dans le Coran, Dieu nous renseigne sur ce qu’il
y
a
au
paradis
en
des
termes
qui
remplacent
avantageusement les racontars des conteurs (quṣṣāṣ) ou autres individus : décrivant le paradis, Il dit que le paradis a « la largeur du ciel et de la terre »684, c’est-à-dire leur étendue. Les Arabes se
servent
du
mot
‘arḍ (largeur)
comme
synonyme
de sa‘a (étendue), car lorsqu’une chose est étendue ( ittasa‘a), elle devient large (‘aruḍa), et lorsqu’elle est mince (daqqa) et longue (istatāla) elle devient étroite (ḍāqa). Ils disent : « La large terre — c’est-à-dire la terre étendue » — est devenue trop étroite pour moi » ; ou « Il y a un passage sur la large terre — c’est-à-dire la terre étendue ». Le Prophète dit aux Musulmans qui s’étaient enfuis le jour de Uhud : « Vous êtes partis au large ! » c’est-à-dire au loin. Dieu a dit : « Il est plein d’une large prière »685, c’est-àdire d’une prière abondante. 771Puisque le paradis est aussi « large » que le ciel et la terre, comment
Dieu
pourrait-Il
accorder
au
moindre
de
Ses
bienheureux plusieurs fois [la valeur] de ce bas monde ?
686 Coran, XLIII, 71.
687 Coran, LVI, 15-23.
688 Coran, LVI, 27-33.
689 Coran, XXII, 23 = XXXV, 33. 772Dieu dit // pour nous inspirer le désir du paradis : « Là est ce qui est désiré et dont les yeux se délectent »686. Il dit en parlant des Proches du Seigneur : « [Ils seront] sur des lits tressés s’accoudant et se faisant vis-à-vis, parmi eux circuleront des éphèbes immortels, avec des cratères, des aiguières et des coupes d’un limpide breuvage dont ils ne seront ni entêtés, ni enivrés, avec des fruits qu’ils choisiront, avec de la chair d’oiseaux qu’ils 231
convoiteront ; là seront des Houris aux grands yeux, semblables à la perle cachée »687. Il a dit plus loin à propos des Compagnons de la Droite : « Ils seront parmi des jujubiers sans épines et des acacias alignés, dans une ombre étendue, près d’une eau courante et de fruits abondants, ni coupés, ni défendus »688. Il a dit encore : « Ils seront parés de bracelets d’or et de perles, leurs vêtements seront de soie »689. Il y a beaucoup de passages de cette nature dans le Coran vénérable, et il n’est rien, dans ces passages, qui ne soit comparable à ce dont les hommes disposent sur la terre, et aux commodités dont jouissent les gens aisés, sinon certaines choses propres au paradis, notamment le caractère éternel de tout cela.
690 Coran, XXVII, 10 = XXVIII, 31.
691 Coran, VII, 107 = XXVI, 32. 773Lorsque les conteurs populaires décrivent Adam, ils disent : « Sa tête atteignait les nuages — ou le ciel — c’est pourquoi il fut atteint par la calvitie. Lorsqu’il descendit sur la terre, il pleura le paradis au point que ses larmes formèrent une mer où des bateaux purent naviguer ». Parlant de David, ils déclarent : « Il se prosterna devant Dieu // pendant quarante nuits et pleura si bien que ses larmes firent pousser de l’herbe. Puis il soupira au point de faire onduler toute cette végétation ». Parlant du bâton de Moïse, ils disent : « Son bois ressemblait à un grand palmier ; sa pointe était dévastatrice telle l’éclair ; son pommeau était tel ou tel » alors que Dieu dit : « Il ressemblait à un ğānn »690 ; or le ğānn est un serpent vif. Dieu dit encore ailleurs : « …et soudain, ce fut un serpent véritable »691.
692 Coran, IX, 69.
693 Coran, II, 247.
232
694 Coran, XXVI, 128-130.
695 Gén. V, 5 : neuf cent trente.
696 Gén. IX, 29 : sic.
697 Cf. Tarbi‘, s. Nasr (201). Le vautour est d’une longévité proverbiale. Ibn Qutayba lui attribue don (...)
698 Ces considérations désabusées n’empêchent pas Ibn Qutayba de se faire l’écho de ces histoires suspe (...) 774Lorsque le conteur populaire parle des hommes que Jonas vint trouver dans le mont Liban, il raconte que l’un d’eux faisait une rak‘a par an, à peu près autant de prosternations, et qu’il ne mangeait que tant et tant de fois ; or Dieu parle des hommes qui vécurent avant nous en ces termes : « Ils avaient plus de force, plus de biens et plus d’enfants »692. Il dit encore : « Il lui a donné plus de grandeur qu’à vous en ce qui touche la science et le corps »693. Et ailleurs : « Continuerez-vous à construire, sur chaque heu élevé, un édifice pour vous divertir et continuerezvous à fonder des châteaux ? Peut-être serez-vous immortels ! Quand vous êtes violents, vous êtes violents comme des géants »694. Il n’est rien, dans les descriptions que Dieu a données des hommes qui nous ont précédés qui approche de leurs
exagérations.
Nous
savons
certes
qu’ils
étaient
physiquement plus grands et plus forts que nous, mais l’écart n’est pas plus grand entre eux et nous dans ce domaine que dans le domaine de la durée de l’existence. Adam, père // du genre humain, vécut mille ans. Les traditions historiques concordent, et je l’ai lu dans la Thora695. Noé demeura au sein de son peuple neuf cent cinquante ans696. Après Noé, la durée de l’existence humaine diminua, sauf celle que les traditions historiques prêtent à Luqmān, l’homme aux vautours, [ainsi appelé] parce qu’il vécut 233
aussi longtemps que sept vautours, soit deux mille quatre cent cinquante et quelques années »697. C’est là une affaire ancienne, que n’enseigne aucun Livre révélé ni aucune autorité, et qui ne bénéficie de l’appui d’aucune chaîne de garants. Ces faits sont rapportés par ‘Abīd b. Šarya al-Ğurhumī et les généalogistes de son acabit. Il en est de même pour la durée de l’existence des anciens rois du Yémen et des rois de Perse698. Pour ce qui est des hommes qui ont vécu à des époques proches de la nôtre, la durée de leur existence n’est pas aussi différente de celle d’Adam ou de Noé — telle qu’elle apparaît certaine — que [le suggère] la différence de stature [dont parlent les conteurs].
699 Ši‘r, 345, reproduit cette anecdote dans les mêmes termes. 775D’après Abū Ḥātim — al-Aṣma‘ī — Abū ‘Amr b. al-‘Alā’, alMustawġir b. Rabī’a passa par le marché de ‘Ukāẓ en compagnie de son petit-fils qui radotait, // et qui se faisait guider par alMustawġir. Quelqu’un lui dit : « Homme, traite bien [ce vieillard] qui t’a si longtemps bien traité ! » Il répliqua : « Qui [crois-tu donc] qu’il est ? » — « Ton père, ou ton grand-père ! » — « Je te le jure, c’est mon petit-fils ! » L’autre déclara : « Ma foi, je n’ai jamais rien vu de tel. C’est un vrai Mustawġir b. Rabī‘a ! » — « AlMustawġir b. Rabī‘a, c’est moi ! » Abū ‘Amr ajoute : Al-Mustawġir b. Rabī‘a vécut trois cent vingt ans699. 776Abū Muḥammad dit : Dieu nous a donné matière à réflexion avec les vestiges qu’ils ont laissés sur terre, les villes et les citadelles qu’ils ont construites, les passages qu’ils ont creusés au cœur des montagnes et les gradins qu’ils ont taillés. Dans ce domaine, la différence de proportions est la même qu’entre la durée de leur vie et la nôtre : il en est de même pour la stature.
700 Un ms. dit Ḥafr al-Manāzik. Cf. index.
234
777Je crois n’avoir jamais entendu parler d’une anomalie de proportions plus extraordinaire que lorsqu’al-Riyāšī m’a rapporté l’anecdote suivante, d’après Muslim b. Ibrāhīm — Nūḥ b. Qays — ‘Abd al-Wāhid b. Nāfi‘. Ce dernier raconte : « Ḫālid b. ‘Abd Allāh me confia [l’administration] du Ḥafr al-Mubārak700. Les agents du fisc vinrent me trouver avec une molaire qui, vérification faite, pesait neuf livres. Nul ne sait si c’était une dent // d’homme, de chameau ou d’éléphant ! » 778D’après al-Riyāšī — ‘Abd Allāh b. Maslama — Anas b. ‘Iyāḍ — Zayd b. Aslam, on trouva, dans l’orbite [du crâne] d’un Amalécite, une hyène et ses petits. Le narrateur ajoute : « Il se peut que ce fût un crâne de chameau, ou de tout autre animal. Celui qui l’a trouvé a opté pour un crâne humain. D’ailleurs, si c’était un crâne humain, les proportions n’en eussent point été anormales, car l’orbite [du crâne] humain, quand elle est vide, est large, et d’autre part communique avec le crâne. Il n’est pas niable qu’eu égard aux dimensions du corps de nos ancêtres on ait pu trouver les [animaux] en question dans l’orbite et dans le crâne ».
701 Cf. Tarbī‘, ד١٣ , sv. ḍabb. 779300 c. — 3°) Le troisième mode de corruption du ḥadīṯ consiste dans les vieilles légendes que transmettaient les gens de la Ğāhiliyya, et qui ne le cèdent en rien aux ḥadīṯ-s de fantaisie (ḥurāfa). Par exemple, ils racontaient que le lézard était un Juif irrespectueux envers ses parents que Dieu métamorphosa en lézard. C’est pourquoi on dit couramment : « Plus ingrat qu’un lézard ». Or les Arabes ne disent pas « plus ingrat envers ses parents // qu’un lézard » pour cette raison, mais simplement parce qu’il dévore ses petits lorsqu’il a faim701. Le poète a dit : « Tu as mangé tes fils comme le fait le lézard, si bien que tu as laissé des fils en petit nombre ». 235
702 Cf. Tarbī‘, s. hudhud, ٢٠ד. 780Ils disaient encore, à propos de la huppe, que lorsque sa mère mourut, elle lui donna sa propre tête pour sépulture. C’est pourquoi son odeur est repoussante702. Umayya b. Abi l-Ṣalt y fait allusion en ces termes :
703 Ces vers figurent dans le Ši‘r, 430, avec quelques variantes. Celle du vers 1 : ayyāma kaffana / iḏ(...) « Nuages, Un
jour
Cherchant Alors
elle
ténèbres la un bâtit
huppe
encore
ensevelit
lieu un
et de
tombeau
[sa
mère]
repos
pour
dans
sa
nuque
nuages… et
partit,
l’enterrer. et
[le
aplanit terrain,
Cessant de ployer en marchant sous le poids du funèbre fardeau : le ḥadīṯ bien étayé n’est point en défaut ! »703 //
704 Cf. Tarbī‘, s. dīk ١, où l’on signale seulement que le coq est réputé garder une maison contre les (...) 781Les Arabes disaient aussi que le coq et le corbeau étaient compagnons de plaisir, et que lorsque leur boisson fut épuisée, le corbeau laissa le coq en gage chez le tavernier, s’en alla et ne revint pas. Le coq resta chez le tavernier comme gardien704. Umayya b. Abī l-Salt dit :
705 Ši‘r, 429. « Par
miracle,
toute
chose
se
leva
et
parla,
et le corbeau trahit la confiance du coq »705.
706 Voir les notes du § 15, et Tarbī‘, s. ğirrī, ١٣٣. 782Ils disent aussi que le chat est [le produit] de l’éternuement du lion, le porc [celui] de l’éternuement de l’éléphant, que la
236
langoustine
était
une
couturière
qui
vola
du
fil
et
fut
métamorphosée, que le ğirrī est aussi un Juif métamorphosé706. 783A notre avis, le ḥadīṯ relatif à ‘Ūğ est de cette catégorie. Ce qui est étrange, c’est que ce ‘Uğ, à les en croire, vivait à l’époque de Moïse, et avait cette taille extraordinaire, alors qu’à la même époque, Pharaon était au contraire de petite taille, d’après alḤasan : J’ai entendu Abū Ḥātim (ou un homme qui se trouvait chez lui) rapporter d’après le grammairien Abū Zayd al-Anṣārī — ‘Amr b. ‘Ubayd qu’al-Ḥasan déclara : « La taille // de Pharaon était d’une coudée, et sa barbe mesurait une coudée ». ***
LXXXIX. — EXEMPLE DE ḤADĪṮ-S CONTRADICTOIRES 707 ḤAN. III, 12 ; 21 ; 39. 784301. — Proposition : Vous rapportez d’après Humām — Zayd b. Aslam — ‘Aṭā’ b. Yasār — Abū Sa‘īd al-Ḫudrī que le Prophète a dit : « Ne transcrivez de moi rien d’autre que le Coran. Quiconque a transcrit de moi [autre] chose, qu’il l’efface ! »707.
708 Cf. ḤAN. II, 215, 403. 785D’autre part, vous rapportez d’après Ibn Ğurayğ — ‘Aṭā’ — ‘Abd Allāh b. ‘Amr dit au Prophète : « O Prophète, enregistrerai-je la
science ? »
demandait
ce
Il
répondit
que
affirmativement.
signifiait
Comme
« enregistrer »,
il
on
lui
répondit :
« Écrire ! »708.
709 ḤAN. II, 162, 192, 207. 786Enfin,
vous
rapportez
d’après
Ḥammād
b.
Salama
—
Muḥammad b. Isḥāq — ‘Amr b. Šu‘ayb — son père — son grandpère que ce dernier dit : « O Prophète, transcrirai-je tout ce que j’entends de ta bouche ? » Il répondit par l’affirmative. L’autre insista : « Que tu sois de bonne humeur ou en colère ? » Le 237
Prophète déclara alors : « Parfaitement ! D’ailleurs, je ne dis que la vérité dans les deux cas ! »709.
710 Voir sur cette question GOLDZIHER, Etudes, chap. VII, et notamment 245-6. 787Il y a divergence et contradiction710. 788302. — Réponse : Nous prétendons qu’il y a là deux hypothèses : 1. ou bien il s’agit d’un cas d’abrogation de la Sunna par la Sunna ; tout se passe comme si le Prophète avait au début interdit qu’on transcrivît ses paroles, puis par la suite, ayant compris que les traditions devenaient trop nombreuses pour être toutes retenues, avait jugé bon qu’on les transcrivît et les enregistrât ; 2.
711 Nous sommes loin du chiffre total d’une quarantaine de « secrétaires » auquel aboutit BLACHÈRE, Int (...) ou bien le Prophète a voulu réserver ce privilège à ‘Abd Allāh b. ‘Amr parce qu’il lisait les livres anciens et écrivait le syriaque et l’arabe, alors que les autres Compagnons étaient analphabètes, sauf un ou deux qui savaient écrire, mais bien imparfaitement et sans orthographe711. Redoutant qu’ils ne fissent des erreurs dans ce qu’ils transcrivaient, il le leur interdit. Mais ayant constaté la compétence de ‘Abd Allāh b. ‘Amr, il l’y autorisa.
712 Cf. BUḪ. 24, 9 = HM I, 459, etc… 789Abū Muḥammad dit : D’après Ishāq b. Rāhawayh — Wahb b. Ğarīr — son père — Yūnus — ‘Ubayd — al-Ḥasan — ‘Amr b. Taġlib, le Prophète a dit : « Voici plusieurs signes de l’Heure : l’argent abondera, le calame apparaîtra, les marchands se multiplieront »712. 238
713 Traduction conjecturale. Ce propos paraît signifier que les seuls hommes sachant écrire étaient les (...) 790‘Amr a dit : « Si l’on cherchait dans une grande agglomération un secrétaire, lorsque quelqu’un veut procéder à une vente, il dirait : — Attendez que je consulte le marchand des Banū Untel ! »713. ***
XC. — EXEMPLE DE DEUX ḤADĪṮ-S CONTRADICTOIRES 714 ḤAN. I, 307, 329, 373, etc… 791303. — Proposition : Vous rapportez d’après Ḥammād b. // Salama — ‘Aṭā’ b. al-Sā’ib — Sa‘īd b. Ğubayr qu’Ibn ‘Abbās a dit : « La pierre noire vient du paradis ; elle était plus blanche que la neige, mais les péchés des Polythéistes l’ont noircie »714. 792D’autre part, vous enseignez qu’Ibn al-Ḥanafiyya, interrogé sur la pierre noire, déclara : « En fait, elle provient d’une de nos vallées ! » 793Il y a là contradiction. 794D’ailleurs comment se peut-il que Dieu fasse descendre une pierre du paradis ? Y a-t-il des pierres au paradis ? Si ce sont les péchés qui l’ont noircie, elle aurait dû blanchir lorsque les hommes se sont faits Musulmans, et revenir à son état primitif ! 795304. — Réponse : Nous prétendons qu’il n’y a rien de condamnable à ce que Ibn al-Hanafiyya se trouve en contradiction avec Ibn ‘Abbās, ‘Alī avec ‘Umar et Zayd b. Ṯābit avec Ibn Mas‘ūd, en matière d’exégèse et de thèses juridiques ( aḥkam). La seule chose condamnable consiste à rapporter de la bouche du Prophète
deux
traditions
historiques
divergentes,
sans
en
chercher l’interprétation. Pour ce qui est des divergences entre de tels personnages, elles sont fréquentes. Il en est qui agissent 239
conformément à ce qu’ils ont entendu, d’autres qui font intervenir la conjecture (ẓann), d’autres qui suivent leur opinion personnelle, c’est pourquoi ils divergent dans l’exégèse coranique et dans la plupart des thèses juridiques. Quoi qu’il en soit, Ibn ‘Abbās n’a pu que rapporter // sur la pierre noire des propos qu’il avait entendus. Aucune autre hypothèse n’est admissible, car il est inconcevable qu’en disant : « Elle était blanche et provenait du paradis », il ait exprimé une opinion personnelle. Quant à Ibn alHanafiyya, il a parlé par conjecture, car il l’a mise sur le même plan que les autres piliers d’angle de la maison de Dieu, et a décrété qu’elle avait été prise là où les autres piliers avaient été pris.
715 ḤAN. I, 266 etc…
716 SUYŪṬĪ, Ğāmī, 151.
717 ḤAN. I, 307, 329, 373, etc… 796304 a. — Les traditions historiques confirmant le propos d’Ibn ‘Abbās, à savoir que la pierre provenait du paradis, sont légion. Par exemple : « Elle viendra au jour de la résurrection avec une langue et deux lèvres, et témoignera sincèrement en faveur de ceux qui l’auront baisée »715. Par exemple : « Elle est la dextre de Dieu sur terre, et avec elle Il donne la main à qui Il veut parmi Ses créatures »716. Nous avons déjà cité ce ḥadīṯ. Par exemple encore la déclaration de Wahb b. Munabbih disant qu’elle était blanche, mais fut noircie par les Polythéistes717.
718 Allusion à Coran, LVI, 15-22, et à maints traits du ḥadīṯ.
719 A notre connaissance, la distinction entre ces deux mots n’est faite que par Abū Mūsā al-Aš‘arī, ap (...)
720 Cette affirmation tendancieuse est le reflet de plusieurs ḥadīṯ-s où sont exaltées les vertus de la (...) 240
797304 b. — Ils demandent : « Y a-t-il donc des pierres au paradis ? » Qu’y a-t-il de contestable dans cette affirmation, puisqu’il y a des rubis — qui sont des pierres —, des émeraudes — qui sont des pierres —, de l’or et de l’argent — qui sont des minéraux ?718. Qu’y a-t-il de blâmable à ce que Dieu donne sa préférence à une pierre, au point qu’elle soit touchée et baisée, puisque Dieu impose à ses serviteurs tous les actes et toutes les paroles d’adoration qu’il Lui plaît et que [par ailleurs] il donne aussi la préférence à certaines des choses qu’il a créées, à l’exclusion des autres ? Ainsi, la nuit de la Prédestination est préférable à mille mois qui ne la renferment pas ; // le ciel vaut mieux que la terre ; le Siège (kursī) vaut mieux que le ciel ; le Trône (‘arš) vaut mieux que le Siège (kursī)719 ; la mosquée de la Mekke vaut mieux que la mosquée de Jérusalem ; la Syrie vaut mieux que l’Irak720. 798369 Tous ces principes ont été énoncés en vertu d’une simple préférence, et non en raison de faits particuliers inhérents à ces objets, ou d’un acte de soumission particulier. De même, la pierre noire vaut mieux que l’angle yéménite [de la Ka‘ba], l’angle yéménite vaut mieux que les autres angles de la maison de Dieu, la mosquée [de la Mekke] vaut mieux que l’ensemble du territoire sacré, et le territoire sacré vaut mieux que les collines de la Tihāma. 799304 c. — Ils disent : Si ce sont des péchés qui l’ont noircie, elle aurait dû blanchir lorsque les gens se sont convertis à l’Islam. Pourquoi une chose devrait-elle blanchir parce que des hommes se convertissent à l’Islam ? Si Dieu l’avait voulu, Il l’aurait fait sans nécessité. 800Bref, ce sont des amateurs d’analogie et de falsafa. Comment a-t-il pu leur échapper que le noir teint, mais ne se teint pas, et que le blanc se teint, mais ne teint pas ? 241
***
XCI. — EXEMPLE DE ḤADĪṮ-S CONTRADICTOIRES 721 Le mot dad est ignoré des Concordances. Toutefois, le ḥadīṯ figure dans Tāğ, II, 346.
722 ḤAN. II, 162, 192, 207. 801305. — Proposition : Vous enseignez que le Prophète a dit : « Je n’ai rien à voir avec le badinage, et le badinage rien à voir avec moi ! »721 ; que lorsque ‘Abd Allāh b. // ‘Amr lui dit : « Transcrirai-je tout ce que j’entends de ta bouche, que tu sois de bonne humeur ou en colère ? » il répondit : « Oui ! Je ne dis jamais que la vérité en toute occasion »722.
723 On n’a pas retrouvé cette anecdote. 802D’autre part, vous enseignez qu’il était enclin à la plaisanterie, et que, s’approchant d’un homme par derrière, il mit ses mains devant
ses
yeux
en
s’écriant :
« Qui
veut
m’acheter
cet
esclave ? »723.
724 BUḪ. 8, 69 = HM I, 165 ; 13, 2, 25 = HM I, 312, 324.
725 Lisān, XIII, 259 = Tāğ, VII, 322 connaissent ce ḥadīṯ, que les Concordances ignorent. D’après ces d (...) 803Il s’arrêta devant la députation des Abyssins et les regarda danser724. Il regarda aussi les danseurs de dirakla qui se livraient à leur jeu725.
726 ḤAN. VI, 39, 129, etc… 804Il lui arrivait de lutter de vitesse avec ‘Ā’iša ; tantôt il arrivait le premier, tantôt c’était elle726. 805306. — Réponse : Nous prétendons que Dieu envoya son Prophète révéler un ḥanīfisme indulgent ; Il exempta le Prophète 242
et son peuple des charges et des entraves qui paralysaient les fils d’Israël dans leur rehgion ; // ce fut là une grâce qu’il leur accorda et dont ils doivent Le remercier. 806Il n’est nul trait de caractère chez un homme dont on ne trouve l’opposé chez un autre : il est des gens qui se maîtrisent et des impulsifs ; des poltrons et des courageux, des chastes et des impudiques, des sereins et des sombres.
727 Curieux passage (= ‘Uyūn, II, 62) où il ne faut naturellement pas voir une citation biblique. Notre (...) 807306 a. — On lit dans la Thora que Dieu a dit : « Lorsque je créai Adam, Je composai son corps d’humidité, de sècheresse, de chaleur et de froid. En effet, Je l’ai créé de terre et d’eau, puis Je lui ai donné un souffle et un esprit. La sècheresse de tout corps créé procède de la terre, l’humidité de l’eau, la chaleur du souffle et le froid de l’esprit. Du souffle procèdent la vivacité, la légèreté, la passion et l’enjouement, le jeu, le rire, l’impudence, la tromperie, la dureté et la violence ; de l’esprit procèdent le flegme, la dignité, la retenue, la pudeur, l’intelhgence, la magnanimité, la sincérité, la patience727. 808On voit donc que le jeu et la gaîté font partie des instincts de l’homme, et que ces instincts ne se maîtrisent pas. Si l’homme les maîtrise en dominant le souffle, et en extirpant ce qui émerge, la nature ne tarde pas à reprendre le dessus. On disait : « La nature est la plus forte ». Le poète a dit : //
728 Vers de KUṮAYYIR, Ši‘r, 493. « Quiconque entreprend ce qui n’est pas dans la nature de [son devra
âme, abandonner :
la
nature
[dessus »728. 809Un autre a dit : 243
de
son
âme
prendra
le
729 Entre le texte et le Ši‘r, les éd. ne signalent pas moins de cinq variantes : aqṣād, iqṣār, idġāl, (...)
730 Vers de ‘ABD ALLĀH
AL-‘ARĞĪ Ši‘r, 557.
« O toi qui te pares de ce qui n’est pas dans ta nature, alors
que
dans
ton
tempérament
est
l’hypocrisie729 et
[la
flatterie,
Reviens à tes mœurs, elles te sont habituelles et familières ; les mœurs refusent de se laisser réformer »730. 810Un autre a dit : « Tout
homme
même
s’il
revient
se
Al-Riyāšī
crée
un
des
m’a
jour
mœurs
cité
pour
les
à
sa
un
temps ».
vers
nature, //
suivants :
« Ne t’attache pas à un homme pour sa noblesse ancestrale. J’ai constaté
que
les
vertus
ancestrales
étaient
[à Que
sujettes caution.
te
sert-il
un
père
noble
Mais
attache-toi
qu’on dans
à
lui
dise :
une pour
Il
génération ses
qualités
avait passée ? naturelles,
car toute âme vit selon sa nature ».
731 Coran, LXX, 19-21.
732 Coran, XXI, 37. 811306 b. — Dieu a dit : « En vérité, l’homme a été créé versatile, timide quand le malheur le touche, violent quand le bonheur le touche ! »731.
Il
a
dit
encore :
« L’homme
a
été
d’impatience »732.
733 Coran, XXXIII, 21.
734 Voir la note sur dirakla. On signale ici que la version du ḥadīṯ dans Lisān, loc. cit. porte ğuddū, (...) 244
créé
812Les hommes prenaient exemple sur le Prophète et se modelaient sur sa conduite et son comportement, car Dieu a dit : « Vous avez, dans l’Envoyé de Dieu, un bon exemple »733. Si le Prophète avait abandonné la voie de la gaîté, de la douceur et de la sérénité pour celle de la sévérité, de l’austérité et de la dignité hautaine, // les Musulmans en auraient fait autant, contrariant ainsi leur nature, au prix de quelles peines et de quelles difficultés ! Si le Prophète plaisantait, c’était pour qu’ils en fissent autant. Il s’arrêta donc auprès des danseurs de dirakla pendant leur jeu et dit : « Allez, fils d’Arfada ! Ainsi, les Juifs sauront que notre religion est large ! »734. 813Il pensait à toutes les cérémonies nuptiales destinées à donner de la publicité au mariage, et aux festins où l’on manifeste sa joie.
735 On n’a pas retrouvé cette anecdote dans les recueils de ḥadīṯ..
736 On n’a pas retrouvé cette anecdote. 814306 c. — Dans la phrase : « Je n’ai rien à voir avec le badinage ; et le badinage n’a rien à voir avec moi », le mot badinage (dad) est synonyme de lahw (jeu) et de bāṭil (frivolité). Il plaisantait, mais ne disait jamais que la vérité ; et s’il ne disait que la vérité, même en plaisantant, cette plaisanterie n’était ni badinage, ni frivolité. Ainsi, lorsqu’il déclara à une vieille femme : « Le paradis ne reçoit pas les vieilles ! »735, il voulait dire qu’elles redeviendraient jeunes. Il dit à une autre : « Ton époux a du blanc dans l’œil » ; il s’agissait du blanc de l’œil qui entoure la prunelle, mais elle s’imagina qu’il s’agissait d’une taie blanche, sur la prunelle736. Lorsqu’il surprit un homme par derrière en disant : « Qui veut m’acheter cet // esclave ? », il voulait dire qu’il était l’esclave de Dieu.
245
815Grâce à Dieu, notre religion est facile et ne comporte nulle contrainte. La meilleure des œuvres est celle qui est durable, même si elle est rare.
737 BUḪ. 77, 43 = HM IV, 114 ; cf. 19, 18 = HM I, 373. 816306 d. — Abū Muḥammad dit : D’après al-Ziyādī — ‘Abd al-‘Azīz al-Durāwardī — Muḥammad b. Taḥlā — Abū Salama b. ‘Abd al-Raḥmān — ‘Ā’iša, le Prophète a dit : « Entreprenez les œuvres dont vous êtes capables, car Dieu ne se lasse pas avant que vous ne vous lassiez ; la meilleure des œuvres est la plus durable, même si elle est rare »737.
738 BUḪ 2, 29 = HM I, 22. 817D’après Muḥammad b. Yaḥyā al-Qaṭ’ī — ‘Umar b. ‘Alī b. Muqaddam — Ma‘n al-Ġifārī — al-Maqbarī — Abū Hurayra, le Prophète a dit : « La religion est facile. Nul ne saurait s’attaquer à elle sans être vaincu. Donc dirigez [autrui] dans la bonne voie, soyez aimables et réjouissez-vous »738.
739 Ce ḥadīṯ ne paraît pas avoir été retenu sous cette forme. Cf. toutefois BUḪ. 30, 51 sqq. = HM I, 62 (...) 818D’après Muḥammad b. ‘Ubayd — Mu‘āwiya b. ‘Amr — Abū Isḥā — Ḫālid al-Ḥaddā’ — Abū Qulāba — Muslim b. Yasār, un groupe d’Aš‘arī-s étaient en voyage, et lorsqu’ils arrivèrent, ils dirent : « O Prophète, // après l’Envoyé de Dieu, nous n’avons vu personne de plus méritant qu’Untel, qui jeûne toute la journée. Lorsque nous nous arrêtons, il se met à prier jusqu’à ce que nous levions le camp ! » Le Prophète leur demanda : « Qui donc le servait, l’alimentait et travaillait pour lui ? » — « Nous ! » — « Eh ! bien, vous êtes tous meilleurs que lui ! »739. 819306 e. — Les saints et les hommes pieux ont vécu en conformité avec les mœurs du Prophète : ils souriaient, étaient 246
gais et plaisantaient avec des mots qui confinaient à la médisance, à l’injure ou au mensonge. ‘Alī était très facétieux et Ibn Sīrīn riait à en baver. 820Ğarīr a dit à propos d’al-Farazdaq :
740 ĞARĪR, Dīwān, 1353, p. 88. Variante : texte rumḥa stihi/ rišḥa stihi. On a retenu la première leçon « La
femme
d’al-Farzadaq
lui
est
devenue
rebelle ;
Si elle avait été satisfaite de sa verge, elle serait restée [tranquille ! »740 821Et al-Farzadaq a dit, repris par Ibn Sīrīn :
741 Ces vers ne figurent pas au Dīwān de FARAZDAQ. (éd. Ṣāwī), 1354/1936. « J’ai appris que la jeune fille que je demandais en mariage avait Ses
le dents
jarret sont
long au
comme nombre
de
un
jour
cent,
ou
sans une
pain. de
// plus,
et le reste de son corps ne vaut rien »741.
742 Coran, XXXIX, 42. 822377 378 Quelqu’un demanda au Prophète des nouvelles de Hišām b. Ḥassān, et il répondit : « Il a été rappelé hier. Ne le saistu pas ? » L’homme fut affligé et le lui fit répéter. Lorsque le Prophète vit son affliction, il récita : « Dieu rappelle les âmes au moment de leur mort, ainsi que celles qui ne meurent point durant leur sommeil »742. 823Zayd b. Ṯābit était le plus grave des hommes au dehors, et le plus amusant en privé. 824Abū l-Dardā’ a dit : « Je repose mon âme avec des futilités, de peur de la fatiguer en la surchargeant de choses sérieuses ». Surayh plaisantait au tribunal du juge. Al-Ša‘bī était un homme 247
des plus amusants. Šuhayb était un plaisantin invétéré, de même qu’Abū l-’Āliya. 825Tous ces hommes, lorsqu’ils plaisantaient, ne causaient pas de scandale, n’injuriaient personne, ne médisaient pas, ne mentaient pas. Les seules plaisanteries blâmables sont celles qui sont entachées de ces défauts // ou tout au moins de l’un d’eux.
743 Le ḥadīṯ est expliqué dans Lisān, XIV, 3. Ġirbāl est synonyme de duff (tambourin). BUḪ. 67, 49 = HM (...) 826306 f. — Quant aux divertissements, rien ne s’y oppose dans les festins. Le Prophète a dit : « Donnez de la publicité au mariage et jouez du ġirbāl à cette occasion »743. 827Abū Muḥammad dit : « D’après Abū l-Ḫaṭṭāb — Muslim b. Qutayba — Šarīk — Ğābir — ‘Ikrima— Ibn ‘Abbās, à l’occasion de la circoncision de ses fils, envoya [‘Ikrima] chercher des musiciens (la‘‘āb) ; ils jouèrent, et il leur donna quatre dirhams ». 828D’après Abū Ḥātim — al-Aṣma‘ī — Ibn Abī l-Zannād — son père raconte : « Je demandai à Ḫāriğa b. Zayd : — Pouvait-on chanter dans les cérémonies nuptiales ? Il répondit : — Cela s’est produit, mais le chant n’était pas prétexte à toutes sortes d’outrances comme aujourd’hui. Nos oncles, les Banū Nabīṭ, nous invitèrent à l’occasion d’une cérémonie qui avait lieu chez eux. Ḥassān b. Ṯābit était présent, ainsi que son fils ‘Abd al-Raḥmān. Deux esclaves se mirent à chanter : « Regarde,
ami,
à
la
porte
de
Ğilliq
si
elle
a d’autres compagnes qu’al-Balqā’ ». 829Alors Ḥassān, l’aveugle, se mit à pleurer, et ‘Abd al-Raḥmān se mit à leur faire des signes pour qu’elles continuent. Je ne sais pourquoi il lui plaisait qu’elles fissent pleurer son père ». 830D’après // Abū Ḥātim — al-Aṣma‘ī, Tuways chantait à un mariage. Al-Nu’mān b. Bašīr entra alors que Tuways disait : 248
« Est-il au
point
sérieux, qu’elle
nous
le
dédain
évite ?
Ou
son
de affaire
‘Amra, est-elle
la
[nôtre ? » 831Or ‘Amra était le nom de la mère d’al-Nu’mān. On lui dit : « Tais-toi ! Tais-toi ! » Mais al-Nu‘mān dit : « Il n’y a pas de mal ! Le [même poète ?] n’a-t-il pas dit : « ‘Amra
compte
parmi
les
femmes
nobles !
Ses manches exhalent une odeur de musc ! » ***
XCII. — EXEMPLE DE ḤADĪṮ-S CONTRADICTOIRES 744 ḤAN. II, 165, 187. 832307. — Proposition : Vous enseignez que le Prophète a dit : « Dieu aime le pudique, le timide, le chaste, et Dieu // déteste l’homme éloquent (balīġ) »744.
745 SUYŪṬĪ, Ğāmi’, 145 (d’après al-Ḥākim). 833Vous enseignez d’autre part qu’al-‘Abbās lui ayant demandé ce
qu’était
la
beauté,
il
déclara :
« [Elle
réside]
dans
la
langue »745.
746 BUḪ. 76, 51 = HM IV, 88, etc… ḤAN. I, 269, etc… 834Il a dit enfin : « Il y a dans le langage clair ( bayān) de la magie »746.
747 Coran, LV, 3-4. On a tenté de conserver un même terme pour tous les emplois de bayān et mubīn. 835Or Dieu a dit : « Il a créé l’homme ; il lui a enseigné le langage clair (bayān) »747. Il a donc répandu le langage clair comme une grâce.
748 Coran, XLIII, 18. 249
836Il attribue aux femmes peu de langage clair et dit : « [Elle] grandit parmi les colifichets et n’est pas douée de clarté dans le langage »748. Il veut ainsi montrer l’infériorité des femmes parce qu’elles ont peu de langage clair. 837Tous ces passages sont contradictoires. 838308. — Réponse : Nous prétendons qu’il n’y a là, grâce à Dieu, aucune contradiction. Chacun de ces ḥadīṯ-s a son emploi, et s’il est utilisé à bon escient, l’objection tombe. 839Lorsque le Prophète dit que Dieu aime le pudique, le timide et le réservé, il entend celui qui a le cœur sain, discute peu et a peu de besoins en raison d’une grande retenue. J’en veux pour preuve qu’il a dit à la suite : « …mais Il déteste l’impudent, l’ergoteur et l’ambitieux ». Ce sont là les antonymes des termes précédents. Dieu n’aime pas ses serviteurs lorsqu’ils ergotent trop, ont la langue trop longue et l’esprit retors ; même s’il y a là des avantages, et en certains cas une brillante [façade].
749 ḤAN. I, 234, 359, etc… BUḪ. 59, 8 = HM II, 439. 840Le ḥadīṯ dit : « La plupart des habitants du paradis sont des // simples »749, c’est-à-dire des gens dont le cœur est sain à l’égard de leurs semblables, et chez lesquels l’insouciance l’emporte. 841Nous avons entendu réciter les vers suivants d’al-Namir b. Tawlab : « Je
me
suis
joué
d’une
fillette
confiante
et simple qui m’a laissé deviner ses secrets ». 842308 a. — A propos d’une certaine époque, ‘Alī disait : « Les meilleurs de ce temps là étaient tous les effacés (nūma) », c’està-dire les gens incapables de mal faire (mayyit al-dā’). Ceux-là étaient les imām-s de la bonne voie, les lampes de la science ; ce 250
n’étaient point les impulsifs, qui répandent la semence à tous les vents.
750 IBN MĀĞA, 36, 16. 843Mu‘ād b. Ğabal rapporte du Prophète que Dieu aime les discrets, les pieux, les innocents qu’on ne regrette point lorsqu’ils sont
absents
et
qu’on
ne
connaît
point
lorsqu’ils
sont
présents750. 844‘Alī a dit dans un prône : « En vérité, Dieu a des serviteurs dont on dirait qu’ils ont la vision des hommes qui jouissent éternellement du paradis et des hommes qui sont torturés en enfer. [Leurs semblables] sont à l’abri de leurs méfaits ; leurs cœurs sont tristes ; leurs âmes sont pudiques ; leurs besoins sont légers. Ils patientent peu de jours // pour jouir ensuite d’un long repos. La nuit, ils mettent leurs pieds en rang, leurs larmes coulent sur leurs joues parce qu’ils supplient leur Seigneur : Seigneur ! Seigneur ! Le jour, ils sont maîtres d’eux-mêmes, savants, pieux, résignés comme s’ils étaient des flèches [pour le tirage au sort]. Quand on les voit, on dit : — Ils sont malades ! mais il n’est point chez eux de maladie. Ils ont l’esprit inquiet, car une grande affaire les occupe ». 845308 b. — Ibn ‘Abbās rapporte en ces termes les paroles du jeune homme qui parla à Job dans son épreuve : « O Job ! ne saistu pas que Dieu a des serviteurs qui ont été réduits au silence par la crainte de Dieu, sans qu’ils aient perdu la faculté de parole, ni soient muets ? Ils sont nobles, ils parlent, ils sont éloquents, ils connaissent Dieu et ses jours ; mais lorsqu’ils parlent de la majesté de Dieu, leurs cœurs se brisent, leurs langues se paralysent, leurs esprits s’étourdissent par crainte et par respect de Dieu ».
751 L’allusion à al-Ğāḥiẓ est transparente. Voir la notice sur Ğāḥiẓ, 251
752 ḤAN. II, 369 ; IV, 193. 846308 c. — Telles sont les vertus que Dieu aime, et qui conconduisent au salut dans l’autre monde. Nul ne nie d’ailleurs qu’il puisse y avoir de la beauté dans la langue, ni des qualités humaines dans le langage clair, ni qu’elle soit un ornement et un agrément de cette vie, tant qu’elle s’accompagne de modération et est animée par la raison, et que la faculté de parole n’aboutit pas à // diminuer ce qui est grand aux yeux de Dieu, et à grossir ce qui est petit, à défendre une cause, puis la cause adverse, comme le font ceux qui n’ont pas de religion751. Tel est l’homme « éloquent » détesté par Dieu, et à propos duquel le Prophète a dit : « Ceux que je hais le plus parmi vous sont les bavards, les emphatiques, les beaux parleurs »752. 847Les gens que Dieu déteste le plus sont ceux que leurs semblables craignent à cause de leur langue. [Lorsque le Prophète a dit] « Le langage expressif relève de la magie » Il voulait dire : elle est capable de rapprocher ce qui est éloigné, d’éloigner ce qui est proche, d’embellir ce qui est laid et de grandir ce qui est petit, tout comme la magie. Or tout ce qui fait office de magie, lui ressemble ou y ressortit est répréhensible, car la magie est interdite. 848308 d. — Abū Muḥammad dit : D’après Ḥusayn b. al-Ḥasan alMarwazi — ‘Abd Allāh b. al-Mubārak — Ma‘mar Yaḥyā b. Muḫtār, al-Ḥasan a dit : « Si tu le veux, tu lui trouves la peau claire et fine, l’œil vif, mais le cœur mort et les œuvres défuntes. Tu le vois mieux que lui-même ; tu vois des corps, et non des cœurs. Tu entends une voix, mais il n’est pas de compagnon plus fertile de langue et plus stérile de cœur ». *** XCIII. — EXEMPLE DE ḤADĪṮ INFIRMÉ PAR LE CORAN 252
753 BUḪ. 57, 1 = HM II, 381 sqq. 849309. — Proposition : Vous enseignez que le Prophète // a dit : « Nous autres prophètes, ne laissons point d’héritage ; ce que nous laissons est aumône »753.
754 Coran, XIX, 5-7.
755 Coran, XXVII, 16. 850Or ceci est en contradiction avec les propos que Dieu prête à Zacharie : « Je crains les miens après ma mort. Bien que ma femme soit stérile, accorde-moi un descendant venu de Toi, qui hérite de moi et de la famille de Jacob ; et fais, Seigneur, qu’il Te soit agréable ! — O Zacharie ! Nous t’annonçons un garçon dont le nom est Jean, à qui, dans le passé, Nous n’avons pas donné d’homonyme »754. C’est aussi contraire au passage : « Salomon hérita de David »755.
756 L’affaire est relatée par IBN SA‘D, Ṭabaqāt, VIII, 18. 851Fāṭima réclama à Abū Bakr l’héritage du Prophète son père, et comme il ne le lui accordait pas, elle jura de ne plus jamais lui adresser la parole. Elle recommanda qu’on l’enterrât de nuit pour qu’il n’assistât pas à ses obsèques ; ce qui fut fait756. 852‘Alī et al-‘Abbās eurent un litige devant Abū Bakr au sujet de l’héritage du Prophète.
757 Cf. Luc, I, 5. Voir aussi Ma‘ārif, 24, où le nom est Azan. Il peut s’agir d’une corruption d’Abia, (...) 853310. — Réponse : Nous prétendons que le ḥadīṯ : « Nous autres prophètes ne laissons point d’héritage » n’est nullement contraire aux paroles de Zacharie : « Accorde-moi un descendant venu de Toi, qui hérite de moi et de la famille de Jacob ». Zacharie ne voulait pas dire : « qui hérite de mes biens » — ce qui aurait 253
justifié // les allégations de [nos adversaires]. Quels biens Zacharie aurait-il pu vouloir mettre à l’abri de ses agnats ( ‘aṣaba) au point de demander à Dieu de lui accorder un fils qui hérite de lui ? Ces biens auraient-ils donc eu tant de prix et tant de valeur à ses yeux ? Aurait-il donc été aussi jaloux de ses biens que les mondains qui ne travaillent que pour l’argent et ne cherchent qu’à en gagner ? Zacharie fils d’Ādan était un simple menuisier et aussi un sacrificateur757 — ainsi parle Wahb b. Munabbih. Ces deux qualités montrent bien qu’il n’avait point de fortune. On sait aussi que Jean, comme Jésus n’avait ni biens, ni demeure. C’étaient d’éternels pèlerins. 854Une autre preuve que Jean n’avait rien hérité de [Zacharie] est qu’il arriva tout jeune à Jérusalem et y servit. Puis, se trouvant en grand danger, il se fit pèlerin, s’installa au sommet des montagnes et dans des grottes inaccessibles.
758 Coran, XIX, 12.
759 Coran, XIX, 14.
760 Cette étrange histoire est composée d’éléments forts disparates dont quelques-uns sont facilement d (...) 855310 a. — Abū Muḥammad dit : D’après al-Layṯ b. Sa‘d — Ibn Lahī‘a — Abū Qubayl — ‘Abd Allāh b. ‘Amr b. al-‘Āṣ, Jean, fils de // Zacharie, entra dans Jérusalem à huit ans. Il vit les adorateurs du Temple vêtus de cilices et de manteaux de laine. Il vit ceux d’entre eux qui priaient la nuit ; ils avaient percé des clavicules et y avaient introduit des chaînes qu’ils avaient attachées aux arcades du Temple. Il fut effrayé et revint auprès de ses parents. Il passa auprès d’enfants qui jouaient et lui dirent : — Jean, viens jouer ! Il répondit : — Je ne suis pas fait pour le jeu ! (Dieu dit à ce sujet : — Nous lui donnâmes l’Illumination en son enfance !758. Il revint donc chez ses parents et leur demanda de 254
le revêtir de calices, ce qu’ils firent ; puis il revint au Temple, où il servit le jour et pria la nuit jusqu’à l’âge de quinze ans. C’est alors qu’il fut pris de crainte et s’installa au sommet des montagnes dans des grottes inaccessibles. Ses parents partirent à sa recherche et le retrouvèrent en descendant des monts de Batanée, sur le lac du Jourdain. Il était assis sur le rivage du lac et trempait ses pieds dans l’eau, quasi mort de soif. Il disait : — Par Ta Majesté, je ne goûterai pas de boisson fraîche tant que je ne saurai pas ce que je suis pour Toi ! Ses parents lui dirent de manger une galette // d’orge qu’ils avaient sur eux et de boire de l’eau. Il obtempéra et devint parjure à son serment. On ne l’en loue pas moins pour sa piété. Dieu a dit : « Il était pieux envers ses parents et ne fut ni violent, ni désobéissant »759. Ses parents le ramenèrent à Jérusalem. Lorsqu’il se mettait en prière, il pleurait et Zacharie pleurait avec lui jusqu’à l’évanouissement. Il ne cessa d’agir ainsi jusqu’à ce que ses larmes creusassent un sillon dans ses joues. Sa mère lui dit : « Jean, si tu me le permets, je chercherai du feutre pour cacher ces sillons ». Il accepta. Alors elle se procura deux morceaux de feutre et les colla sur ses joues. Lorsqu’il pleurait, les larmes imbibaient les deux morceaux. Sa mère venait alors les essorer. Lorsqu’il voyait les larmes couler sur les bras de sa mère, il disait : « Seigneur, voici mes larmes et voici ma mère. Je suis Ton serviteur et Tu es le Miséricordieux »760.
761 Coran, XXI, 89-90. 856310 b. — D’après ce qu’on vient d’entendre, de quels biens Jean hérita-t-il ? Que lui légua Zacharie, qui n’était qu’un menuisier et un sacrificateur ? A propos du verset : « Accorde-moi un descendant venu de Toi, qui hérite de moi… » Ibn ‘Abbās a dit — d’après la version d’Abū Ṣāliḥ — : c’est-à-dire : qui hérite des fonctions de sacrificateur, puisque son père les remplissait ; « …et de la famille de Jacob », c’est-à-dire : qui hérite de la royauté, 255
puisqu’il était de la descendance de David, lui-même de la généalogie de Juda, fils de Jacob, fils d’Isaac, fils d’Abraham. Dieu l’exauça // en ce qui concerne l’héritage de l’office de sacrificateur, mais non en ce qui concerne l’héritage de la royauté. Zacharie redoutait que ses parents mâles (‘aṣaba) héritassent de cet [office] et priait Dieu de lui accorder un fils qui le remplaçât et héritât de sa science. Dieu a dit : « Lorsque Zacharie implora son Seigneur : — Seigneur, ne me laisse point seul, Toi qui es le meilleur de ceux qui donnent héritage ! Nous l’exauçâmes et Nous lui accordâmes Jean et rendîmes son épouse capable d’enfanter de lui »761. 857310 c. — Lorsque Dieu dit : « Salomon hérita de David », Il veut dire qu’il hérita de lui la royauté, la prophétie et la science. Tous deux furent prophètes et rois. Or la royauté consiste dans la souveraineté, la justice, le gouvernement, mais ce n’est point un bien. S’Il avait fait allusion à l’héritage des biens, cette information n’aurait eu aucun intérêt, car chacun sait que les fils héritent [toujours] des biens de leurs pères, mais nul ne sait si le fils sera digne du père dans la science, la royauté et la prophétie. 858Le Prophète ne pouvait évidemment rien léguer, car il n’avait [lui-même] bénéficié d’aucun héritage après le début de la révélation, ses parents lui ayant légué leurs biens auparavant.
762 Coran, LXXXIX, 17-20. 859310 d. — Abū Muḥammad dit : D’après Zayd b. Aḫzam al-Ṭā’ī — ‘Abd Allāh // b. Dāwūd, Umm Ayman faisait partie de l’héritage maternel du Prophète, et Šuqrān de son héritage paternel. Comment le Prophète aurait-il pu dilapider [son] héritage, alors que Dieu accusait des gens en ces termes : « Prenez garde ! Vous n’honorez pas l’orphelin ! Vous n’incitez pas à nourrir le pauvre ! Vous dévorez l’héritage [du faible] goulûment ! Vous aimez la richesse d’une passion sans borne ! »762 ? 256
763 On n’a pas retrouvé cette anecdote. 860D’après Isḥāq b. Rāhawayh — Wākī‘ — Mis‘ar — ‘Abd alRaḥmān b. al-Iṣbahānī — Muğāhīd b. Wirdān — ‘Urwa b. al-Zubayr — ‘Ā’iša, le Prophète intervint dans [l’attribution] de l’héritage d’un de ses affranchis qui était tombé d’un palmier. Il demanda : « A-t-il
laissé
un
fils ? »
Ils
répondirent
négativement.
Il
poursuivit : « A-t-il laissé un proche (ḥamīm) ? » — « Non ! » — « Alors, donnez-le à un homme de son village ! »763. Tout se passe comme s’il voulait éviter de dilapider [lui-même] l’héritage en question et l’attribuer par préférence à un homme du même village. 861Pour ce qui est du différend de Fāṭima avec Abū Bakr au sujet de l’héritage du Prophète, il n’y a rien là de condamnable, car elle ignorait ce qu’avait dit le Prophète et pensait qu’elle allait hériter de lui, comme n’importe quel enfant hérite de son père. Mais lorsqu’il l’informa des propos du Prophète, elle s’abstint.
764 Sur l’héritage d’Abū Bakr, voir IBN SA‘D, III/I, 136 sqq. 862310 e. — Comment peut-on imaginer // qu’Abū Bakr ait spolié Fāṭima de son droit à l’héritage de son père, lui qui accordait leur droit au rouge comme au noir ? Quel aurait été son but en l’en privant puisqu’il ne le prenait pas pour lui-même, ni pour ses enfants, ni pour personne de sa famille, et le transformait seulement en aumône ? Il était l’homme le plus enclin à respecter les droits de chacun. Comment aurait-il commis une telle faute, et déclaré licite ce qui appartenait à Fāṭima, lui qui restitua aux Musulmans le surplus de leurs biens qui était resté entre ses mains depuis son investiture ? Il ne prenait [cet argent] qu’à titre de salaire, et considérait leur entretien comme une aumône qui leur était due. Il dit à ‘Ā’iša : « Cherche, ma fille, ce qui est en surplus dans le patrimoine d’Abu 257
Bakr depuis qu’il a été investi du pouvoir, et restitue-le aux Musulmans. Par Dieu, nous n’avons prélevé sur leurs biens que la quantité de grosse semoule suffisant à notre nourriture ; parmi leurs vêtements, nous n’avons choisi que les plus grossiers ». Elle regarda, et trouva en tout et pour tout un vêtement, une couverture élimée ne valant pas cinq dirham-s et une chamelle noire. Lorsque le messager apporta cela à ‘Umar, il déclara : « Que Dieu ait pitié d’Abū Bakr ! Que de soucis il cause à ses successeurs ! »764. 863En outre, si la décision // d’Abū Bakr en l’occurrence constituait une injustice envers Fāṭima, ‘Alī en fit réparation aux enfants [de Fāṭima] lorsqu’il prit le pouvoir.
765 En effet, la fille reçoit la moitié du patrimoine lorsqu’il n’y a pas d’héritier mâle (BERGSTRÄSSER(...)
766 L’oncle du Prophète, fils de son grand-père paternel, ‘Abd al-Muṭṭalib, avait droit à la même part (...) 864310 f. — Quant à la dispute entre ‘Alī et al-‘Abbās devant Abū Bakr au sujet de l’héritage du Prophète, l’idée m’en semble bien suspecte. Comment auraient-ils pu se disputer une chose qui ne leur revenait pas, ou revendiqué le droit à une chose qui leur était interdite ? Il ne pouvait échapper à aucun d’eux que s’ils avaient eu quelque droit à cet héritage, il eût fallu d’abord indemniser les femmes [du Prophète] ; ‘Alī en aurait alors perçu la moitié en raison des droits de Fāṭima765, et al-‘Abbās la moitié, Fāṭima recevant l’autre moitié766. A quel propos se seraient-ils alors disputé, puisqu’ils eussent dû adopter une attitude commune contre Abū Bakr ?
767 Toute l’affaire de l’héritage du Prophète figure en détail dans le ḥadīṯ, notamment BuḪ. 57, 1 = HM (...)
258
865Ils soumirent aussi leur litige à ‘Umar, lorsqu’il leur confia la gestion de [l’héritage du Prophète]767, puis à ‘Uṯmān.
768 Ibn Qutayba n’est donc pas dupe de ce pseudo ḥadīṯ. Il est trop évident que cette polémique date de (...) 866Il s’agit d’ailleurs là d’une polémique intéressée et partiale. Que Dieu ait pitié d’eux tous768 ! ***
XCIV. — EXEMPLE DE ḤADĪṮ-S CONTRADICTOIRES 769 Cf. BUḪ. 67, 22 = HM III, 557. 770 En d’autres termes, la parenté de lait ne saurait être constituée artificiellement en allaitant un (...) 867311. — Proposition : Vous enseignez que le Prophète a dit : « Pas de parenté de lait après le sevrage »769, et aussi : « Attention à vos frères ! La parenté de lait [ne peut être établie] que par l’allaitement [destiné à] la nutrition »770 — il s’agit de ce que l’enfant tette // pour apaiser sa faim.
771 ḤAN. VI, 39, 356. 868D’autre part, vous rapportez d’après Ibn ‘Uyayna — ‘Abd alRaḥmān b. al-Qāsim — son père — ‘Ā’iša que Sahla bint Suhayl b. ‘Amr vint trouver le Prophète et lui dit : « Je vois sur le visage d’Abū Ḥuḏayfa qu’il n’aime pas voir Šālim entrer chez moi ! Il lui dit : — Eh ! bien, allaite-le ! Elle objecta : — Vais-je donc allaiter un adulte ? Le Prophète se mit à rire, et lui dit : — Ne sais-je pas mieux que tout autre que c’est un adulte ? »771.
772 Cf. BUḪ. 67, 22 = HM III, 557. 869Enfin, vous rapportez d’après Mālik — al-Zuhrī que ‘Ā’iša déclara toute sa vie que l’allaitement constitue un cas de
259
prohibition même après l’âge du sevrage772. Elle tirait les conséquences logiques du ḥadīṯ de Sālim. 870Il s’agit là pour vous d’un isnād valable et bien établi, qu’on ne saurait repousser ni rejeter. 871312. — Nous prétendons en effet que ce ḥadīṯ est sain, car Umm Salama et d’autres épouses du Prophète affirmaient que Sālim avait bénéficié d’une faveur. Toutefois, elles n’expliquaient pas en quel sens le Prophète avait accordé [cette faveur] à Sālim. Nous allons donner ci-dessous l’histoire d’Abū Ḥuḏayfa et de Sālim, et du lien qui les unissait, si Dieu le permet.
773 Texte : qīla ; il faut évidemment lire qutila.
774 Voir § 161 sq. 872Abū Ḥuḏayfa était le fils de ‘Utba b. Rabī‘a b. ‘Abd Šams b. ‘Abd Manāf. // Il émigra en Abyssinie à l’occasion des deux émigrations. Son fils, Muḥammad b. Abi Ḥuḏayfa, naquit dans ce pays. Il fut tué773 pendant le califat d’Abū Bakr, à la bataille de la Yamāma. Il n’a pas de descendance. Quant à Šālim, mawlā d’Abū Ḥuḏayfa, il était à Badr et le Prophète rétablit l’amitié entre Abū Bakr et lui. C’était un homme bon et vertueux. C’est pourquoi ‘Umar déclara sur son ht de mort : « Si Sālim était vivant, je n’hésiterais point à son sujet ! »774. Il voulait dire : Je l’aurais mis en avant pour qu’il guide la Prière des Musulmans, jusqu’à ce que les gens du Conseil se missent d’accord sur l’un d’entre eux. Il désigna donc Ṣuhayb. Sālim était l’esclave de l’épouse d’Abū Ḥuḏayfa, une femme des Anṣār. On n’est pas d’accord sur le nom de cette femme. Certains disent qu’il s’agit de Sulma, des Banū Ḫaṭma ; d’autres qu’elle avait nom Ṯubayta ; // mais tous s’accordent sur le fait qu’elle était des Anṣār. Elle l’affranchit, et il devint le mawlā d’Abū Ḥuḏayfa qui l’adopta pour fils. Dès lors, il fut rattaché à lui généalogiquement par le statut de mawlā. Sālim 260
tomba en martyr à la bataille de la Yamāma. La femme qui l’avait affranchi hérita de lui, car il n’avait pas de descendance, ni d’autre héritier qu’elle.
775 Mağbūb : émasculé radicalement (Lisān, I, 242).
776 Cf. index, s. muḫannaṯ.
777 Coran, XXIV, 31. BAYḌĀWĪ, 467, explique ainsi cette restriction : « Il convient que les femmes ne s (...)
778 Coran, XXIV, 31.
779 Ce qui impliquerait une assimilation ipso facto. 873395 Ce que je viens de dire montre bien la place privilégiée qu’Abū Ḥuḏayfa et Sālim occupent dans l’Islam ; leur grandeur, et la faveur dont ils jouissaient de la part du Prophète. Sahla bint Suhayl lui rapporta donc qu’Abū Ḥuḏayfa voyait d’un mauvais œil Sālim entrer chez elle, alors qu’il entrait chez sa mawlāt, celle qui l’avait affranchi, comme l’esclave qui a grandi dans la maison de son maître puis, lorsqu’il est affranchi, continue de la fréquenter par suite d’une vieille habitude et parce qu’il y a été élevé. Nul ne peut blâmer pour cela un homme comme Sālim, ni même quelqu’un de moins recommandable, car Dieu tolère que les femmes reçoivent les hommes dont elles sont la propriété, ainsi que les hommes qui n’ont pas de vues particulières sur les femmes, comme les vieillards, les enfants, les eunuques, les émasculés775, ou les insexués776. Il les assimile aux // hommes au degré de parenté prohibitif dans le verset : « Qu’elles montrent seulement leurs atours à leurs époux, ou à leurs pères, ou aux pères de leurs époux, ou à leurs fils, ou aux fils de leurs époux, ou à leurs frères, ou aux fils de leurs frères, ou aux fils de leurs sœurs, ou à leurs femmes » (à condition qu’elles soient Musulmanes)777 « ou à ce qui est leur propriété » (c’est-à-dire 261
leurs esclaves) « ou aux serviteurs mâles que n’habite pas le désir… »778, c’est-à-dire les hommes attachés à la personne de l’époux, et qui constituent son entourage immédiat comme le salarié, le mawlā, l’allié, et les gens assimilés. Or Sālim ne peut être considéré que comme un « serviteur mâle que n’habite pas le désir ». Peut-être faut-il songer à ce propos au fait qu’il n’avait pas de postérité779, ou qu’il avait été doué par Dieu de continence, de dévotion et de mérite, et qu’en raison de ces privilèges, le Prophète le jugea digne de l’amitié d’Abū Bakr et de sa propre confiance, indifférent aux femmes et à leurs appas. 874D’ailleurs, le Prophète a autorisé que les femmes se dévoilent lorsqu’elles doivent produire leur identité devant le juge, les témoins, et les voisins honnêtes. Il a également autorisé les femmes dites qawā‘id — c’est-à-dire celles qui sont avancées en âge — à déposer leurs voiles lorsqu’elles sont dépourvues de tout charme. 875312 a. — Donc, Sālim entrait chez elle, et elle voyait la réprobation sur le visage d’Abū Ḥuḍayfa ; mais si // cette fréquentation avait été illicite, il ne serait point entré, et Abū Ḥuḏayfa l’en aurait empêché. En raison de la situation de [cette femme] par rapport à [Sālim], de l’amitié qu’il voulait voir régner entre [Abū Ḥuḏayfa et Sālim], et pour éviter que ces deux personnages fussent en froid, le Prophète voulait faire tomber la réprobation d’Abū Ḥuḏayfa et le ramener à de bons sentiments à l’égard de Sālim lorsqu’il entrait chez cette femme. C’est alors qu’il lui dit : « Eh ! bien, allaite-le ! » Il ne voulait pas dire par là : Donne-lui le sein, comme on fait avec les enfants, mais simplement : Tire un peu de ton lait et donne-le lui à boire. Cette méthode était seule licite, car il était interdit à Sālim de voir ses seins pour boire son lait. Comment le Prophète aurait-il pu autoriser de sa part une pratique illicite qui pouvait susciter en lui le désir ? 262
876312
b.
—
La
suite
de
l’anecdote
prouve
que
cette
interprétation, est la bonne. La femme répondit : « O Prophète ! Vais-je l’allaiter, lui qui est un adulte ? » Alors il se mit à rire et dit : « Ne sais-je pas bien que c’est un adulte ? » Le fait qu’il ait ri à cette occasion montre bien qu’il voyait d’un bon œil cet « allaitement », parce qu’il voulait voir régner la bonne entente et cesser la froideur, sans pour autant conférer un caractère illicite aux fréquentation de Sālim, et sans que cet « allaitement » créât un précédent en posant comme licite une pratique interdite, ou en faisant de Sālim ipso facto le fils de cette femme.
780 ABŪ DĀWŪD, 38, 3. 877312 c. — Un autre exemple de la bienveillance du Prophète est rapporté par ‘Abd al-Wāḥid b. Ziyād — ‘Āṣim al-Aḥwal — alḤasan : Un homme lui // amena un autre individu qui avait tué un de ses parents. Le Prophète lui demanda : « Vas-tu accepter le prix du sang ? » Il refusa. Le Prophète poursuivit : « Veux-tu pardonner ? » — « Non ! » — « Eh ! bien, va-t-en et tue-le ! »780. Le narrateur ajoute : Lorsque l’homme fut passé devant lui, le Prophète dit : « S’il le tue, il sera dans le même cas que lui ! » L’homme fut informé de ce qu’avait dit le Prophète et laissa [en paix] sa victime. Puis il revint sur ses pas, une courroie au cou… Or le Prophète ne voulait pas dire que s’il le tuait son acte aurait le même caractère criminel et serait également passible de l’enfer. Comment aurait-il pu penser une telle chose, puisque Dieu a toléré le meurtre à titre de talion ? Il répugnait seulement à voir cet homme appliquer le talion et voulait qu’il pardonne. Il lui laissa alors supposer que s’il tuait son ennemi, il commettrait le même crime, pour l’inciter à pardonner. Or il voulait dire en réalité qu’ils auraient tous deux tué un homme, et qu’ils seraient tous deux des meurtriers, se trouvant ainsi « dans le même cas »
263
pour ce qui est du meurtre lui-même ; mais si l’un était un meurtre injuste, l’autre eût consisté dans l’application du tahon. ***
XCV. — EXEMPLE DE ḤADĪṮ-S INFIRMÉS PAR LE CORAN ET LE RAISONNEMENT 781 Nécessaires pour constituer la parenté de lait.
782 ḤAN. V, 131, 132, 183 ; VI, 269. 878398 313. — Proposition : Vous rapportez d’après Muḥammad b. Isḥāq — ‘Abd Allāh b. Abī Bakr — ‘Umara que ‘Ā’iša dit : « Le verset sur la lapidation et sur l’allaitement de l’adulte à dix reprises781, après sa révélation, figurait dans un cahier (ṣaḥifa) sous mon ht à la mort du Prophète. // Lorsqu’il mourut et que nous nous occupâmes de lui, une brebis du quartier entra et mangea ce cahier »782.
783 Coran, XLI, 41-42.
784 Coran, V, 3. 879Cela est en contradiction avec le verset : « En vérité, elle est certes une Écriture précieuse. Le Faux ne s’y glisse par aucun côté »783.
Comment
ce
texte
pouvait-il
être
précieux,
puisqu’une brebis l’a mangé, anéantissant ainsi ses prescriptions et détruisant la preuve ? N’importe qui ne peut-il détruire [le Coran], puisqu’une brebis l’a fait ? Comment a-t-il pu dire : « Aujourd’hui, J’ai parachevé votre religion »784, alors qu’il avait envoyé un animal manger [ce cahier] ? Comment pouvait-il exposer la révélation à être dévorée par une brebis, n’ayant pas ordonné de la protéger et de la mettre à l’abri ? Pourquoi enfin aurait-il révélé [ce passage] s’il ne désirait pas que les hommes s’y conformassent ?
264
880314. — Réponse : Nous prétendons que tout ce dont ils s’étonnent n’a rien d’extraordinaire, et que ce qu’ils trouvent si grave n’a rien de dramatique. S’ils s’étonnent de l’existence d’un « cahier », nous dirons que le « cahier » constituait à l’époque du Prophète le moyen le plus perfectionné de transcrire le Coran. En effet, ils écrivaient sur // des stipes de palmier, sur des pierres, des tessons, etc …
785 BUḪ. 65, s. 9, 20 ; ḤAN. V, 185. 881Zayd b. Ṯābit déclare : « Abū Bakr m’ordonna d’en faire une recension. Je me mis donc à en rechercher [les passages transcrits] sur des pièces de cuir, des stipes de palmier et des pierres plates »785. Le mot ‘asīb, pl. ‘usub signifie « palme » ; le mot laḫfa, pl. liḫāf, signifie « pierre plate ».
786 Cf. Lisān, XI, 207. 882Al-Zuhrī raconte : « Lorsque le Prophète mourut, le Coran était [transcrit] sur des pierres plates, des parchemins et des stipes de palmier »786. Le mot qaḍīm, pl. quḍum, désigne des « peaux » ; le mot kurnāfa, pl. karanīf, désigne la base épaisse des feuilles de palmier.
787 Pour en fabriquer. 883Ainsi, le Coran se trouvait dispersé parmi les Musulmans qui ne disposaient ni de livres, ni d’outillage787. J’en veux pour preuve que le Prophète correspondait avec les rois de la terre sur des bouts de parchemin.
788 Cf. BUḪ. 60, 48 = HM II, 519.
789 Coran, XX, 12. 884314 a. — S’ils s’étonnent du fait qu’elle avait placé ce cahier sous son lit, nous dirons que ses contemporains n’étaient point 265
des princes, pour avoir des armoires, des serrures ou des coffres d’ébène ou de teck. Lorsqu’ils voulaient préserver quelque chose ou le mettre à l’abri, ils le plaçaient sous leur lit pour éviter de le piétiner, et empêcher les enfants ou les animaux d’y toucher. Comment des gens qui n’avaient chez eux ni cachette, ni serrure, ni armoire, auraient-ils pu abriter leurs biens autrement que par les moyens simples dont ils disposaient ? La Prophétie elle-même s’accommode bien de peu de chose et de vieilleries. Le Prophète // rapiéçait ses vêtements, recousait ses sandales, raccommodait ses bottines, se faisait servir par sa famille et mangeait à même le sol en disant : « Je ne suis qu’un esclave ; je mange comme les esclaves »788. Ainsi faisaient les Prophètes. Salomon, qui avait été doté par Dieu d’un royaume sans précédent et tel qu’on n’en a jamais vu de semblable depuis lors, se vêtait de laine, et mangeait du pain d’orge, bien qu’il donnât à manger aux gens toutes sortes de nourritures. Lorsque Moïse s’entretint avec Dieu, il avait sur lui un cilice de poil ou de laine, et aux pieds des sandales en peau d’âne crevé. On lui dit : « ôte tes sandales ! Tu es dans la vallée sainte de Ṭuwā ! »789. Jean ceignait une corde de fibre de palmier. Les exemples sont innombrables, et trop célèbres pour que nous en encombrions ce livre.
790 Ḥubla : désigne soit la vigne, soit diverses plantes épineuses. Il semble qu’on soit fondé à reteni (...) 885314 b. — Si c’est la brebis qui les étonne, nous dirons que la brebis est le meilleur bétail. J’ai lu dans les conversations de ‘Uzayr avec son Seigneur qu’il dit : « Seigneur, tu as élu parmi les troupeaux la brebis, parmi les oiseaux le pigeon, parmi // les plantes la ḥubla790, parmi les villes Bakka et Ayliyā’, et dans Ayliyā’ le Temple ».
791 On n’a pas trouvé ce ḥadīṯ sous cette forme. Mais d’assez nombreux ḥadīṯ-s prescrivent de bien trai (...) 266
886Wakī‘ rapporte d’après al-Aswad b. ‘Abd al-Raḥmān — son père — son grand-père que le Prophète a dit : « Dieu n’a créé aucun animal qui lui fût plus cher que la brebis »791.
792 Toutes ces propositions font allusion à diverses légendes : déluge = histoire de Noé ; grenouilles (...) 887Pourquoi s’étonner de ce que la brebis ait mangé ce cahier ? La souris, qui est la pire des bestioles, grignote les exemplaires du Coran et urine dessus ; les termites les mangent. Si le cahier en question avait été détruit par le feu ou emporté par les hypocrites, ils se seraient moins étonnés. Lorsque Dieu veut anéantir une chose, Il choisit indifféremment de petits ou de grands moyens. Il a fait périr des gens par les fourmis comme Il en a fait périr par le déluge. Il a puni par les grenouilles comme il a puni par les pierres. Il a fait périr Nemrod par un moustique et a englouti le Yémen à cause d’une souris792.
793 BUḪ. 25, 67 = HM I, 524 etc… ḤAN. I, 3, 79, etc… 888314 c. — Ils disent : Comment la religion pouvait-elle « être parachevée », puisque Dieu a révélé des choses qu’il a anéanties [ensuite] ? Le verset en question fut révélé le jour du pèlerinage d’adieu,
lorsque
//
Dieu
raffermit
l’Islam,
condamna
le
polythéisme et expulsa les Polythéistes de la Mekke. Cette annéelà, seuls les Croyants firent le pèlerinage793. C’est ainsi que Dieu paracheva sa religion, et compléta les grâces qu’il avait accordées aux Musulmans. Le « parachèvement » de la religion représente ici l’apogée de sa puissance et de sa manifestation, ainsi que l’abaissement et l’effacement du polythéisme, mais non le « parachèvement » des prescriptions légales et des traditions normatives, qui ne cessèrent d’être révélées jusqu’à la mort du Prophète. Telle était l’opinion d’al-Ša‘bī sur ce verset.
267
889Il est possible aussi que le « parachèvement » de la religion désigne la suppression du principe d’abrogation à partir de ce moment.
794 BUḪ. 86, 30 = HM IV, 390 ; ḤAN. I, 23 ; etc…
795 Servant de couverture.
796 BUḪ. 67, 28 = HM III, 560.
797 BUḪ. 86, 13 = HM IV, 380.
798 ḤAN. I, 16, 22, 49.
799 ḤAN. I, 46.
800 BUḪ. 97, 50 = HM IV, 643 ; ḤAN. II, 251, 316, 413… ; III, 40, 127, etc…
801 DĀRIMĪ, intr., 48.
802 En somme, la seule différence entre la Sunna et le Coran est que ce dernier fait l’objet d’une réci (...) 890314 d. — Pour ce qui est de l’anéantissement de ce cahier, il est possible que Dieu l’ait révélé comme partie intégrante du Coran, puis qu’il ait exempté [les hommes] de le réciter tout en maintenant l’obhgation d’agir conformément à ce texte. Tel était du moins l’avis de ‘Umar à propos du verset de la lapidation794, et l’avis de plusieurs autres relativement à certains textes qui faisaient partie du Coran avant qu’il ne fût recueilli entre deux planchettes795, puis qui disparurent. S’il est admissible que le texte destiné à la récitation (tilāwa) demeure, et que la prescription soit annulée, il est également admissible que le texte soit annulé et que l’acte demeure obligatoire. Il est concevable que cela lui ait été révélé, tout comme d’autres choses concernant la religion, mais que cela n’ait point été [destiné à figurer dans] le 268
Coran. Ainsi en est-il de l’interdiction d’épouser la tante paternelle en même temps que la fille de son frère et la tante maternelle en même temps que la fille de sa sœur796 ; de l’interdiction
de
l’amputation
pour
moins
d’un
quart
de dīnār797 ; de l’interdiction d’apphquer le talion au père ou au maître798 ; de l’adage : Pas d’héritage pour le meurtrier799. Ainsi en est-il également des paroles du Prophète : // « Dieu dit : — J’ai créé tous Mes serviteurs ḥanīf-s ! » ; ou de celles-ci : « Dieu dit : — Quiconque s’approche de Moi d’un empan, Je M’approche de lui d’une coudée… »800, etc… Le Prophète a d’ailleurs dit : « On m’a apporté le Livre, et d’autres choses avec lui »801, à savoir les traditions normatives que Gabriel lui transmettait802. 891D’ailleurs, le Prophète a pratiqué la lapidation, les Musulmans l’ont imité ensuite, et les juristes ont entériné cet usage.
803 ḤAN. III, 61.
804 MUS. 18, 25. 892314 e. — En ce qui concerne le principe de « l’allaitement de l’adulte à dix reprises », nous constatons qu’il s’agit d’une erreur due à Muḥammad b. Isḥāq. Il n’est pas impossible non plus que [le texte relatif à] la lapidation, dont on prétend qu’il figurait dans ce cahier,
fût
faux,
car
le
Prophète
avait
lapidé
Mā‘iz
b.
Mālik803 ainsi que d’autres avant cette époque ; comment lui aurait-il été révélé une seconde fois ? D’autre part, Mālik b. Anas rapporte le même ḥadīṯ d’après ‘Abd Allāh b. Abi Bakr — ‘Umara sous la forme : « ‘Ā’iša dit : — La Révélation coranique prescrivait à l’origine que dix actes d’allaitement connus constituaient un cas de prohibition ; [ce texte] fut ensuite abrogé par la prescription de cinq [actes d’allaitement] connus pour aboutir au même résultat. Le Prophète mourut alors ; et c’est cette dernière [prescription] qui doit faire l’objet d’une récitation coranique »804. 269
805 Voir WENSINCK, Hwb., s. Raḍā‘.
806 ḤAN. II, 12, 23, etc… 893Ce ḥadīṯ a été exploité par certains // juristes, dont al-Šāfi’ī et Isḥāq. Ils ont adopté le chiffre cinq comme limite entre la quantité prohibitive et celle qui ne l’est pas805, de même qu’ils considèrent la valeur de deux cruches ( qulla) comme la limite entre la quantité d’eau qui peut devenir impure et celle qui ne le peut pas806.
807 Le caractère suspect des informations transmises par M. b. Isḥāq a été souvent relevé. Il remonte d (...) 894Les termes du ḥadīṯ de Mālik diffèrent de ceux du ḥadīṯ de Muḥammad b. Isḥāq, mais Mālik a plus de poids chez les gens du ḥadīṯ que Muḥammad b. Isḥaq. Abū Muḥammad dit : D’après Abū Ḥātim — al-Aṣma‘ī — Ma‘mar, le père de ce dernier lui dit : « N’écoute rien de Muḥammad b. Ishāq, c’est un menteur. Il transmettait des propos de Fāṭima bint al-Munḏir b. al-Zubayr, épouse de Hišām b. ‘Urwa ; ils parvinrent aux oreilles de Hišām qui protesta et dit : — Est-ce lui qui entrait chez ma femme, ou moi ? »807. 895314 f. — Quant au verset : « Le Faux ne s’y glisse par aucun côté », il ne signifie pas que les exemplaires du Coran ne sont point en butte aux mêmes accidents que les autres meubles ou objets ; il signifie que le Démon ne peut y introduire ce qui n’en fait point partie, ni avant, ni après la révélation. // ***
XCVI. — EXEMPLE D’UN ḤADĪṮ INFIRMÉ PAR LE CORAN ET LE RAISONNEMENT 808 ḤAN. III, 286 ; šaṭr al-ḥusn, au lieu de niṣf —.
270
896315. — Proposition : Vous enseignez que « Joseph reçut en partage la moitié de la beauté »808.
809 Coran, XII, 20. 897Or
Dieu
dit :
« Ils
s’en
défirent
à
vil
prix
—
quelques dirhams — car ils ne tenaient pas à le garder »809. Il est inconcevable que quelqu’un qui a reçu en partage la moitié de la beauté ait été vendu à vil prix, pour quelques dirhams qu’on pouvait compter, tant il y en avait peu, et que l’acheteur dans ces conditions en ait fait si peu de cas, à en juger par ce prix dérisoire.
810 Coran, XII, 58. 898Lorsque ses frères revinrent auprès de lui à plusieurs reprises, le Coran dit qu’il « les reconnut, mais qu’eux ne le reconnurent point »810. Comment ne pas reconnaître quelqu’un qui a reçu en partage la moitié de la beauté, et qui n’a pas son pareil au monde ? Il eût été plus normal qu’il ne les reconnût point, mais qu’eux le reconnussent. 899315. — Réponse : L’opinion courante, à propos de l’expression « la moitié de la beauté » accordée à Joseph, est que Dieu lui accorda la moitié de la beauté et l’autre moitié au reste du genre humain, en la partageant entre les hommes. C’est une erreur flagrante qui ne saurait échapper à un homme réfléchi, s’il a bien compris ce que nous avons dit. 900Mon avis personnel est que Dieu a fixé un maximum et une limite à la beauté [d’un être] et qu’il a attribué ce maximum à celles de Ses créatures qu’il Lui a plu — soit aux anges, // soit aux houris ; Joseph a reçu la moitié de cette beauté [idéale] et de cette perfection. Il est possible qu’il en ait attribué à certains êtres le tiers, à d’autres le quart, à d’autres encore le dixième, et peutêtre même à certains pas une parcelle. 271
901Il en est de même pour quelqu’un qui prétendrait avoir reçu en partage la moitié du courage. Il est inconcevable qu’il ait reçu la moitié du courage, et que l’autre moitié ait été répartie entre le reste des hommes. Si telle était l’idée, il conviendrait que l’individu qui aurait reçu en partage la moitié du courage se mesurât seul au reste de l’humanité ! Cette expression veut dire que le courage [individuel] a une limite que Dieu connaît, et qu’il accorde le maximum à celles de ses Créatures qu’il Lui plaît, et à d’autres la moitié de ce maximum, à d’autres encore le tiers, le quart, le dixième, etc… 902316 a. — Ils disent : Comment a-t-on pu l’acheter pour un prix dérisoire et en faire si peu de cas, malgré cette beauté ? La beauté de Joseph, si elle était bien telle que nous le pensons, n’était point aussi extraordinaire qu’ils le présument, mais devait approcher celle de maint autre beau visage. Wahb b. Munabbih rapporte que Joseph ressemblait pour la beauté à Sarah. C’est là // un témoignage qui confirme notre interprétation de l’expression : « la moitié de la beauté ».
811 Coran, XII, 31.
812 Coran, XII, 30.
813 Il paraît s’agir d’une sorte d’œuf brouillé à la viande, ou peut-être simplement d’œuf au plat, car (...) 903316 b. — Ils tirent argument du verset : « Ayant ouï leur artifice, la coupable dépêcha quelqu’un vers elles, leur fit préparer un repas et donna à chacune d’elles un couteau. — Entre après elles ! ordonna-t-elle à Joseph. Quand les femmes l’eurent aperçu, elles le trouvèrent si beau qu’elles se tailladèrent les mains et s’écrièrent : — A Dieu ne plaise ! Ce n’est pas un mortel, c’est un noble archange ! »811. Ils disent : Si elles se tailladèrent les mains en le voyant et si elles s’écrièrent « C’est un noble 272
archange ! », ce ne peut être qu’en raison de sa beauté surnaturelle, très supérieure à celle des autres hommes. Pour interpréter ce verset, il faut faire appel à ce qui précède : Lorsqu’elle entendit les ragots des femmes qui murmuraient : « La femme du Puissant a tenté de ses charmes son valet qui l’a percée d’amour pour lui. En vérité, nous la voyons certes dans un égarement évident »812 ; elle voulut leur démontrer qu’elle était excusable d’avoir été séduite par lui. Elle leur prépara un repas (muttaka’) — Certains lisent mutkan, c’est-à-dire une nourriture qui se coupe au couteau ; certains commentateurs affirment qu’il s’agit du cédrat, et certains autres du zumāward813. Quoi qu’il en soit, // on ne peut le manger sans le couper. L’origine de mutk et de butk est la même : ce sont des synonymes de qat’ (action de couper). Le passage du son B au son M est fréquent,
étant
donné
la
proximité
(sic) de
leur
point
d’articulation —. Elle dit donc à Joseph : « Entre auprès d’elles ! » Lorsqu’elles le virent, elles le trouvèrent beau — c’est-à-dire remarquable et admirable, et leur cœur fut rempli du même amour que le sien. Elles demeurèrent interdites et stupéfaites et ne purent en détacher leurs regards au point qu’elles se tailladèrent les mains avec les couteaux qui leur servaient à découper leur nourriture. Elles s’écrièrent : « Ce n’est pas un mortel, c’est un noble archange ! » Elles ne voulaient pas dire par là que c’était réellement un ange ; elles ne disaient cela que par métaphore, tout comme on dit d’un homme pour caractériser sa beauté : « C’est un soleil » ou « une lune », ou d’un autre pour caractériser son courage : « C’est un vrai lion ! » Comment auraient-elles pu vouloir dire qu’il était à la fois homme et ange, puisqu’elles désiraient de lui la même chose que l’épouse du Puissant, et demandaient qu’on l’emprisonnât. Or les anges ne cohabitent pas avec les femmes et ne se mettent point en prison. Il n’est rien d’étonnant // à ce qu’elles se soient tailladé les mains 273
en voyant un visage beau et rayonnant, car il faut tenir compte de l’amour et de la passion, ni qu’elles soient restées interdites et stupéfaites : bien des gens peuvent éprouver de tels sentiments, ou même pis. 904316 c. — ‘Urwa b. Ḥizām a dit :
814 Si‘r, 605 ; a‘dadtu au lieu de ‘addadtu. Variante indifférente. « Je
suis
qui
se
Si
pris glisse je
à
ton
entre
souvenir
ma
peau
la
d’un et
frisson
mes
voyais
os.
soudain,
je resterais interdit au point de ne pas pouvoir répondre. Je et
ne
verrais
j’oublierais
[les
plus
les
discours]
choses que
je
comme prépare
avant,
lorsqu’elle
[n’est pas là ! »814. 905Qays b. al-Mulawwaḥ, connu sous le nom de Mağnūn devint fou ; sa raison s’envola, et il erra avec les fauves sans plus rien comprendre que lorsqu’on lui parlait de Laylā. Il dit :
815 Si‘r, 548. « Malheur et
se
à
trouve
celui
auquel
désormais
la
ballotté
raison au
a
gré
été
des
ravie
vents.
//
Lorsqu’on me parle de Laylā, je retrouve la raison et je [retrouve les
merveilles
de
mon
esprit
grâce
à
une
passion
[multiforme »815. 906Lorsque son père l’emmena à la Mekke afin de se réfugier auprès de la maison [de Dieu] pour chercher à le guérir, il entendit à Minā quelqu’un qui disait : « O Laylā ! » Il tomba évanoui. Lorsqu’il revint à lui, il dit :
816 Si‘r, 550. 274
« Quelqu’un a appelé lorsque nous étions sur le versant de [Minā, et a ressuscité les chagrins de mon cœur sans le savoir. Il a appelé du nom de Laylā une autre qu’elle, et je crois qu’il
a
fait
s’envoler
un
oiseau
qui
était
dans
mon
[cœur »816. 907Des gens sont morts de chagrin sentimental, comme ‘Urwa b. Ḥizām et ‘Abd Allāh b. ‘Ağlān al-Nahdī. 908Abu Muḥammad dit : J’ai entendu Abd al-Rahmān b. ‘Abd Allāh b. Qurayb rapporter d’après son oncle al-Aṣma‘ī : « ‘Abd Allāh b. ‘Ağlān est l’un des amoureux arabes célèbres qui moururent d’amour. Un poète en parle en ces termes : //
817 Si‘r, 695, où le nom du poète ne figure pas davantage. « Si
je
meurs
d’amour,
Ibn ‘Ağlān en est mort avant moi ! »817. 909D’après Abū Ḥātim — al-Aṣma‘ī — ‘Abd al-‘Azīz b. Abī Salama — Ayyūb — Muḥammad b. Sīrīn, ‘Abd Allāh b. ‘Ağlān, l’amant de Hind, a dit : « En tu
vérité, es
devenu
Hind un
de
t’est ses
plus
devenue proches
illicite, parents.
//
Tu es maintenant comme celui dont l’arme est retournée au [fourreau, et qui retourne entre ses mains un arc et des flèches ».
818 Si’r, 695. 910Le narrateur ajoute : « Il prolongea la voix sur cette dernière syllabe, puis s’écroula et mourut »818. 911A en croire les informateurs, al-Ḥāriṯ b. Ḥilliza improvisa devant ‘Amr b. Hind son poème qui commence par : « Asmā’ nous a appris son départ… » 275
819 Si’r, 150. 912Ce poème était un véritable sermon, et le javelot sur lequel il s’appuyait pour parler se planta dans sa poitrine sans qu’il s’en rendît compte819.
820 Apparemment, la seule émotion poétique est responsable de l’accident. Cf. Aġānī, IX, 171-174. 913Tout cela est encore bien plus extraordinaire que de se taillader les mains ! Encore le motif pour lequel ces femmes se tailladèrent les mains était-il beaucoup plus impérieux que celui pour lequel le javelot se planta dans la poitrine d’al-Hārit b. Ḥilliza ! //820.
821 Texte : ištarawhu. Le Coran, dans le passage parallèle, dit šarawhu, que BLACHÈRE, Coran, 260, trad (...)
822 En effet, Gén. XXXVII, 12-36, parallèle à Coran, XII, 8-20. Il semble y avoir une certaine confusio (...) 914316 d. — En ce qui concerne le fait que les voyageurs le vendirent pour un prix dérisoire car ils en faisaient peu de cas ; [il convient de dire] qu’ils le revendirent821 au titre d’esclave en fuite indemne de tout défaut. Ils prétendirent l’avoir extrait d’un puits où ses maîtres l’avaient jeté en raison de fautes commises, et de crimes graves. En outre, ils stipulèrent [aux acheteurs ?] de l’entraver et de le ligoter jusqu’à ce qu’ils arrivassent en Égypte. Il en faut moins que cela pour faire baisser un prix, et pour que l’acheteur fasse peu de cas de la marchandise ! Cette aventure est rapportée dans la Thora822.
823 Cet adjectif (asīr) s’applique à un homme capturé par d’autres, mais non à un homme emmuré dans un (...) 915316 e. — Ils demandent : Comment ses frères ont-ils pu ne pas le reconnaître malgré la beauté qu’il avait reçue en partage ? 276
Or j’ai déjà exposé plus haut que la beauté accordée à Joseph, bien qu’elle fût supérieure à celle de la moyenne des humains, n’en était guère différente, et que s’il avait reçu « la moitié de la beauté », d’autres en reçoivent le tiers, le quart ou presque la moitié. L’écart n’est pas si grand. Ils l’avaient quitté enfant, ils le retrouvaient adulte. Ils l’avaient quitté captif823 et misérable, et le retrouvaient puissant et grand. Il faut moins de temps et des circonstances moins différentes // pour modifier la parure extérieure et l’aspect physique. ***
XCVII. — EXEMPLE DE ḤADĪṮ INFIRMÉ PAR LA SPÉCULATION 824 BUḪ. 34, 113 = HM II, 55 ; 37, 20 = HM II, 72 ; ḤAN. II, 287, 347, 382, etc… 916317.
—
Proposition :
Vous
rapportez
d’après
Šu‘ba
—
Muḥammad b. Ǧuḥāda — Abū Ḥāzim — Abū Hurayra : « Le Prophète a interdit le gain des servantes »824. 917Or le gain des servantes est hcite. Si un homme rémunère sa servante ou son esclave pour leur travail, leurs gains ne sont pas illicites, tout le monde est d’accord sur ce point. Comment le Prophète a-t-il pu l’interdire ?
825 Coran, XXIV, 33. 918318. — Réponse : Nous prétendons que le gain interdit par le Prophète était le salaire de la prostitution. Les hommes de la Ğāhiliyya ordonnaient à leurs esclaves de se prostituer et confisquaient leurs bénéfices. ‘Abd Allāh b. Ğiḏ’ān avait des esclaves qui se livraient au trafic de leur corps. C’était le chef des Taym. Alors Dieu révéla : « Ne forcez pas vos esclaves femmes à la prostitution alors qu’elles veulent // vivre en muḥsana »825. Le
277
Prophète a interdit le gain de la zammāra, c’est-à-dire de la zāniya, ou esclave femme exploitée par son maître.
826 Ce ḥadīṯ figure dans Tāğ, III, 240, qui signale une variante rammāza, sans la retenir. Détail piqua (...) 919Abū Muḥammad dit : D’après Abū l-Ḫaṭṭāb — Abū Baḥr — Ḥišām b. Ḥassān — Muḥammad b. Sīrīn, Abū Hurayra a dit : « La vente des chiens et le salaire de la zammāra constituent des profits illicites »826. ***
XCVIII. — EXEMPLE DE DEUX ḤADĪṮ-S CONTRADICTOIRES 827 On n’a pas retrouvé ce ḥadīṯ. 920319. — Proposition : Vous rapportez d’après Mālik — Sālim b. Abī l-Naḍr — Ibn Ğurhud — son père que le Prophète passa près de lui alors qu’il avait la cuisse découverte et lui dit : « Couvre-la, car la cuisse relève des parties honteuses (‘awra) »827.
828 Cf. ḤAN. I, 71. 921D’autre part, vous rapportez d’après Ismā‘īl b. Ğa’far — ‘ Muḥammad b. Abī Ḥarmala, // ‘Atā’ b. Yasār et Abū Salama b. Abd al-Raḥmān que ‘Ā’iša a dit : « Le Prophète était couché dans sa chambre, la cuisse découverte. Abū Bakr se fit annoncer et fut reçu alors qu’il était en cette posture. Puis ‘Umar se fit annoncer et fut reçu de même. Enfin, ce fut le tour de ‘Uṯmān. Alors, le Prophète s’assit et arrangea ses vêtements. Lorsque [’Uṯmān] sortit, ‘Ā’iša en fit la remarque au Prophète qui dit : — Pourquoi n’aurais-je pas honte devant cet homme ? Les anges eux-mêmes ont honte devant lui ! »828. 922Cela est contraire au premier ḥadīṯ.
278
923320. — Réponse : Nous prétendons qu’il n’y a pas là de contradiction. Chacun de ces deux ḥadīṯ-s a son usage propre. Si on l’emploie en temps et lieu, la prétendue contradiction cesse. 924Dans le ḥadīṯ de Ǧurhud, le Prophète le rencontra alors qu’il avait la cuisse découverte sur la voie publique et dans la foule. Le Prophète lui dit alors : « Cache ta cuisse, car elle relève des parties honteuses ». Il n’a pas dit en l’occurrence : « Car elle est une partie honteuse ». Les parties honteuses (‘awra) sont autre chose. 925Les parties honteuses // sont de deux sortes : 1. les parties sexuelles et anales de l’homme et de la femme. Ce sont là les parties honteuses proprement dites, qu’il faut cacher en tous lieux et en toutes circonstances ; 2. les parties du corps avoisinantes, cuisses et bas ventre. Ces parties sont dénommées « honteuses », car elles entourent et avoisinent les parties honteuses proprement dites. Ce sont elles que l’homme peut exhiber au bain, dans les endroits déserts, chez lui, auprès de ses femmes. Mais il est indécent de les montrer en public, dans les assemblées, dans les sūq-s. 926De même, il est licite de manger sur la voie publique, mais c’est laid. Il est licite qu’un homme ait des relations avec son esclave, mais il n’est pas permis de le faire devant quiconque.
829 On remarquera l’emploi très fréquent de l’imparfait (avec kān comme exposant temporel), signe infai (...)
830 Le mot wağs paraît désigner exclusivement cette sorte de bruit ; Tāğ, IV, 266. 927Ils réprouvaient829 le « bruit », c’est-à-dire les relations sexuelles avec une des femmes accomplies de telle sorte que l’autre perçoive le mouvement // et entende le bruit830.
831 On remarquera qu’Ibn Qutayba se garde de relever le fait que c’est la personne de ‘Uṯmān qui provoq (...) 279
928Le Prophète était donc dans sa chambre vide, et exhibait sa cuisse devant ses femmes. Un de ses familiers entra, et il ne la couvrit pas. Mais lorsqu’ils furent trois ensemble, il craignit que cela puisse être assimilé à l’attitude de Ǧurhud qui montrait sa cuisse en public, et se couvrit831. ***
XCIX. — EXEMPLE D’UN ḤADĪṮ INFIRMÉ PAR LE CONSENSUS ET LE CORAN 832 TIR. 7, 96. 929321. — Proposition : Vous transmettez d’après al-Ḥağğāğ alṢawwāf — Yaḥyā b. Abī Kaṯīr — ‘Ikrima — Ḥağğāğ b. ‘Amr alAnṣārī que le Prophète a dit : « Quiconque se brise [un membre] ou se fait une entorse est en rupture de sacralisation et doit faire un autre pèlerinage »832. Le transmetteur ajoute : « J’ai rapporté ce ḥadīṯ à Ibn ‘Abbàs et à Abū Hurayra qui m’ont dit : — C’est exact ! »
833 Coran, II, 196. 930Or les gens ne se conforment pas à ce ḥadīṯ, car Dieu a dit : « Faites entièrement le pèlerinage et la ‘umra, pour Dieu ! Si vous êtes empêchés, [libérez-vous] parce qu’il vous sera aisé [de sacrifier] comme offrande ! Ne vous rasez point la tête avant que l’offrande ait atteint le heu de son immolation ! »833. Il n’a donc pas laissé la possibihté de rompre la sacralisation avant d’être parvenu au moment de l’offrande et d’avoir sacrifié la victime.
834 Cf. index, s. ihlāl. 931322. — Réponse : Nous prétendons que le Prophète n’a édicté cette
prescription
que
pour
le
Mekkois
qui
prononce
l’ihlāl834 pour le pèlerinage au départ de cette ville, // fait la tournée rituelle, la course rituelle, puis se brise un membre, se 280
fait une entorse ou tombe malade et ne peut assister aux stations. Celui-là est en rupture de sacralisation ipso facto, et doit recommencer le pèlerinage plus tard, et offrir une victime. 932Il en est de même pour l’homme qui arrive à la Mekke pour accomplir la ‘umra pendant les mois du pèlerinage ; si, après avoir accomph la ‘umra, il prononce l’ihlāl pour le pèlerinage au départ de la Mekke puis se brise un membre ou est victime d’un accident qui lui interdit d’assister aux stations avec les autres [pèlerins], il est en rupture de sacrahsation et doit accomphr par la suite un autre pèlerinage et sacrifier une victime. 933Quant à ceux auxquels Dieu ordonne : « Si vous êtes empêchés, [libérez-vous] par ce qu’il vous sera aisé [de sacrifier] comme offrande ! Ne vous rasez point la tête avant que l’offrande ait atteint le heu de son immolation ! », ce sont les gens qui ont eu un empêchement avant d’arriver à la Mekke. La qualification juridique de ces derniers est différente de celle des habitants de la Mekke et des gens qui prononcent l’ ihlāl pour le pèlerinage au départ de cette ville. En effet, quiconque se brise un membre ou se fait une entorse en chemin et est incapable de voyager [par ses propres moyens], ou tombe malade après avoir prononcé l’ihlāl pour le pèlerinage, en vertu de sa qualification juridique, ne peut rompre la sacralisation que lorsqu’il est à la Mekke, et doit faire un autre pèlerinage l’année suivante. Quant à ceux qui se brisent un membre à la Mekke, ou ceux qui sont en tamattu‘ et résident à la Mekke ou près de la Ka‘ba, ils sont en rupture de sacrahsation et sont tenus d’un pèlerinage dans l’avenir. ***
C. — EXEMPLE DE ḤADĪṮ INFIRMÉ PAR LE RAISONNEMENT 835 ḤAN. II, 8, 33, etc…
281
934323. — Proposition : Vous enseignez que le Prophète a dit à un homme : « Mange avec ta main droite, car le // Démon mange avec la gauche ! »835. 935Or le Démon est un être spirituel, comme les anges. Comment peut-il manger et boire, et avoir une main pour prendre (les choses) ?
836 BUḪ. 4, 18, 19 = HM I, 71, etc… ; ḤAN. II, 247, 250. 936324. — Réponse : Nous prétendons que Dieu n’a créé nulle chose sans créer la chose contraire : ainsi, la lumière et les ténèbres, le blanc et le noir, la soumission et la désobéissance, le bien et le mal, la perfection et l’imperfection, la droite et la gauche, la justice et l’injustice. Tout ce qui relève du bien, de la perfection, de la justice, de la lumière doit être attribué à Dieu, car Il l’aime et l’a ordonné ; mais tout ce qui relève du mal, de l’imperfection, des ténèbres doit être attribué au Démon, car c’est lui qui y incite et y pousse. Dieu a réservé à la main droite la perfection et l’accomplissement ; Il l’a destinée à la nourriture et à la boisson, à la salutation et à la préhension. Il a mis dans la main gauche la faiblesse et l’imperfection, et l’a destinée à l’ablution après les selles (istinğā’), au curage du nez (istinṯār) et [en général] à l’enlèvement des saletés836. Le chemin du paradis est celui de la droite ; les gens du paradis sont les compagnons de la droite ; le chemin de l’enfer est celui de la gauche ; les gens de l’enfer sont les compagnons de la gauche. Dieu a mis le bon augure en rapport avec la dextre, et le mauvais augure en rapport avec la sénestre, c’est-à-dire la main gauche. On dit : « Untel est chanceux ou malchanceux (maymūn — maš’ūm) » et ces deux mots sont en rapport avec yamīn (droite) et šimāl (gauche). 937324 a. — Lorsqu’il dit que le Démon mange avec sa main gauche, cela ne peut s’expliquer // que par l’une des deux raisons suivantes : 282
837 Cf. Tarbī‘, s. ğadaf, et par. 76, où il apparaît qu’il s’agit des génies. Ğadaf désigne soit l’écum (...) 9381°) ou bien il mange réellement, et cet acte ne saurait avoir heu que par le flair et l’odorat, et non en mâchant et en avalant. Ceci est rapporté dans un ḥadīṯ où il est dit que « Leur nourriture est
la rimma —
c’est-à-dire
les
os
—
et
leur
boisson
le ğadaf — c’est-à-dire la mousse et l’écume »837. Or ils ne peuvent en percevoir que les odeurs, et cela leur tient lieu de la mastication et de l’ingestion des êtres de chair. 939De même, le Démon flaire du côté gauche, et c’est ainsi qu’il s’associe à ceux qui ne prononcent point le nom de Dieu au moment du repas, qui ne lavent point leur main, ou qui servent de la nourriture découverte, de sorte que son caractère bénéfique (baraka) et bienfaisant (ḫayr) s’en vont.
838 En d’autres termes, le démon ne peut agir qu’indirectement, par l’intermédiaire d’agents corporels. (...) 940[Dans le même ordre d’idées], le Démon s’associe [aux hommes] dans leurs biens lorsqu’ils les dépensent pour des achats illicites ; il s’associe à eux dans leur procréation à l’occasion de l’adultère838. 9412°) ou bien il s’agit d’une métaphore. Le fait, pour un homme, de manger // avec sa main gauche symbohserait alors les visées du Démon sur cet homme, et la séduction qu’il exerce sur lui. Lorsqu’on dit en parlant de celui qui mange de la main gauche : « Il mange comme le Démon », on ne veut pas dire par là que le Démon mange, mais en fait que c’est la manière de manger préférée par le Démon. De même, lorsqu’on dit que le rouge est la parure du Démon, cela ne signifie pas que le Démon s’habille de rouge et se pare de cette couleur, mais seulement que c’est une parure inspirée par le Démon. 283
942On rapporte de même à propos de l’iqtu‘āt, qui consiste à porter un turban sans le passer sous le menton, que c’est le port de turban du Démon ; cela ne signifie pas que le Démon porte un turban, mais que c’est le port de turban qu’il préfère et qu’il recommande.
839 ḤAN. VI, 439, 464. 943324 b. — De même, lorsque [le Prophète] dit que le flux de sang accidentel (mustaḥāḍa) est une impulsion du Démon839 — le mot rakḍa est synonyme de daf‘a, poussée —, cela ne saurait être interprété que dans l’un des deux sens suivants : 1.
840 BUḪ. 33, 8, 11, 12 = HM I, 646, 648 ; 93, 21 = HM IV, 510 ; ḤAN. III, 156, 285, 309 ; VI, 337. ou bien que le Démon donne une « impulsion » à la veine en question et provoque ce flux sanguin afin de rendre caduque la prière de la femme en supprimant sa pureté rituelle. Il n’y aurait rien d’étonnant à ce que celui qui « circule dans l’homme comme le sang »840 soit en mesure de donner l’impulsion nécessaire pour faire sortir ce sang ;
2. ou bien cette impulsion est un phénomène naturel qui a été imputé au Démon par le seul fait qu’il détruit la pureté rituelle, tout comme on associe au Démon // le fait de manger avec la main gauche, le port du turban sur la tête sans le faire passer sous le menton, et enfin la couleur rouge.
841 Cf. ḤAN. I, 105, 119, etc…
842 BUḪ. 77, 33 = HM IV, 111 ; ḤAN. I, 71, 81, etc… 944324 c. — Abū Muḥammad dit : D’après Ziyād b. Yaḥyā — Bišr b. al-Mufaḍḍal — Yūnus — al-Ḥasan, le Prophète a dit : « Le rouge est la parure du Démon »841. Le Démon aime le rouge, et c’est 284
pourquoi le Prophète détestait les vêtements teints au carthame pour les hommes842. 945Ibrāhīm dit : « Je porte des vêtements teints au carthame, bien que je sache que le rouge est l’ornement du Démon ; je porte une bague en fer, bien que je sache que c’est la parure des gens de l’enfer ». Il considérait donc le fer comme la parure des gens de l’enfer, alors que les gens de l’enfer ne portent pas de bijoux. Il voulait dire seulement qu’au lieu de bijoux, ils portent des chaînes, des entraves et des fers : le fer est donc leur parure.
843 Il paraît s’agir d’Ibrāhīm al-Naẓẓām. 946Ibrāhīm agissait ainsi pour se cacher et donner le change sur ses actes843. ***
CI. — EXEMPLE DE DEUX ḤADĪṮ-S CONTRADICTOIRES 844 ḤAN. IV, 249, 251, 252. 947325. — Proposition : Vous enseignez que le Prophète a dit : « Celui qui applique le cautère ou fait appel à la sorcellerie n’a pas confiance en Dieu ! »844.
845 BUḪ. 76, 4 = HM IV, 63. 948Par ailleurs, vous enseignez qu’il appliqua le cautère à As‘ad b. Zurāra en disant : « S’il y a quelque effet salutaire dans tous vos remèdes, c’est bien dans la scarification du barbier ou dans la pointe de feu ! »845. 949Ce ḥadīṯ est en contradiction avec le premier. // 950326. — Réponse : Nous prétendons qu’il n’y a pas là contradiction. Chaque ḥadīṯ a son emploi. S’il est employé à bon escient, il n’y a plus de divergence. 951Il y a deux sortes de cautérisation : 285
9521°) La cautérisation des tissus sains en vue de les immuniser. Elle est pratiquée par beaucoup de peuples étrangers ( ‘ağam) qui appliquent le cautère à leurs enfants et à leurs jeunes gens sans qu’ils soient malades. Ils considèrent que cette cautérisation conserve leur santé et les préserve des infirmités.
846 Cette anecdote personnelle prouve au moins que le Muḫtalif est postérieur à un séjour au Ḫurāsān. L (...) 953Abū Muḥammad dit : J’ai vu au Hurāsān un médecin turc réputé qui traitait par cautérisation. Il m’a déclaré — par le truchement d’un interprète — qu’il guérissait par cautérisation la fièvre, la pleurésie, les vers, la tuberculose, l’hémiplégie et autres maux graves. Il entreprenait le malade, l’emmaillotait étroitement pour contraindre le mal à se concentrer en un point du corps, puis appliquait le cautère à cet endroit et y pratiquait des pointes de feu. Il cautérisait également // l’individu sain pour le préserver des infirmités et faire durer sa bonne santé. En outre, il prétendait faire encore bien d’autres choses, comme provoquer la pluie, faire naître des nuages hors saison, provoquer le vent et autres mensonges et sottises particulièrement évidentes. Mais son entourage y croyait et se portait garant de la véracité de ses paroles. Nous l’avons mis à l’épreuve sur certaines des choses qu’il prétendait, mais il n’a voulu en démordre ni peu, ni prou846. 954Les Arabes avaient la même attitude pendant la Ğāhiliyya. Ils pratiquaient la même cautérisation sur des chameaux victimes de la gale (naqba, synonyme de ğarab) ou de l’ulcère de la face et des babines (‘urr). Ils prenaient le chameau et cautérisaient l’endroit de la gale ou de l’ulcère pour qu’il guérisse. 955Al-Nābiġa, s’adressant à al-Nu‘mān, y fait allusion en ces termes :
847 Ši‘r, 111, sic. 286
« Tu m’as chargé des péchés d’un autre, et lui, tu l’as laissé [en comme
paix, le
chameau
affligé
d’un
ulcère :
on
en
cautérise
[un autre et lui, on le laisse paître librement »847. //
848 C’est ainsi qu’on pense pouvoir interpréter ici le mot mawḍi’ (sujet, et non endroit), par référenc (...) 956Or c’est là la pratique que le Prophète condamne en disant : « Celui qui applique le cautère n’a pas confiance en Dieu ! », car celui-là pense qu’en appliquant le cautère et en effarouchant la nature alors que [les tissus] sont sains, il repoussera le décret de Dieu. S’il avait confiance en Dieu et était persuadé qu’on ne saurait échapper au décret divin, il ne soignerait pas [un chameau] en bonne santé et ne cautériserait pas un sujet sain pour guérir un malade848 !
849 Contre l’avis de l’éd., on pense pouvoir conserver le texte « kayyu ‘uḍwin qad qutïa aw ḥasmuhu. Le (...)
850 Saqy al-baṭn : hydropisie ; saqy al-badan : probablement dépôt de liquide séreux en n’importe quel (...) 957326 a. — 2°) La seconde sorte de cautérisation consiste à cautériser une blessure qui s’envenime et dont le sang coule sans arrêt, ou à cautériser un membre coupé, ou à en cautériser [les vaisseaux coupés]849, ainsi que la cautérisation des vaisseaux en cas d’hydropisie ou d’œdème850. 958Ibn Aḥmar raconte comment il a guéri en se soignant : //
851 Il s’agit d’Ibn Ahmar al-Bāhilī qui, atteint d’hydropisie, décrit ses souffrances et les soins qui (...) « J’ai bu de la šukā‘ā, et j’ai subi des instillations buccales, et j’ai livré l’extrémité de mes veines aux cautères »851.
852 BUḪ. 76, 1 ; ḤAN. I, 377, 413 ; III, 156 ; IV, 278, etc… 287
959C’est là le type de cautérisation dont le Prophète vantait l’effet salutaire. Il appliqua la cautérisation à As’ad b. Zurāra qui souffrait d’un mal dans la région du cou, et cela n’a rien de commun avec le premier type de cautérisation. Si quelqu’un se soigne lorsqu’il est atteint // d’une maladie, on ne dit pas qu’il n’a pas confiance en Dieu ! C’est pourquoi le Prophète a ordonné aux hommes de se soigner en disant : « Il y a un remède à chaque mal »852, non que le remède guérisse infailliblement, mais parce qu’on l’absorbe en espérant que Dieu rendra la santé par l’intermédiaire de ce remède ; en effet, Dieu a créé pour chaque chose une cause instrumentale (sabab).
853 Coran, XI, 6.
854 Précisément, le Coran ne contient nulle part le verset en question sous cette forme. Tous les verse (...) 960326 b. — On peut comparer le cas de la subsistance que Dieu garantit à ses serviteurs, puisqu’il dit : « Il n’est bête sur la terre dont la subsistance n’incombe à Dieu »853. Or le Prophète nous a ordonné de la rechercher et de la gagner en pratiquant un métier, car Dieu a dit : « Mangez des excellentes [nourritures] que Nous vous avons attribuées »854. 961On peut comparer encore les précautions que [les hommes] prennenta
contre
les
dangers,
tout
en
sachant
que
ces
précautions ne repoussent pas le décret divin ; ou encore la conservation des biens dans des coffres et derrière des serrures, alors qu’on sait que ce que Dieu garde ne saurait se perdre, et que ce que Dieu veut perdre ne saurait se garder. 962On pourrait citer bien d’autres exemples de cas où il ne faut pas examiner des éléments qui nous échappent, mais [néanmoins] agir avec résolution.
288
963Le Prophète a dit : « Sois sage et aie confiance [en Dieu] ! » A un homme qu’il avait entendu dire : « Dieu me suffit ! Je Lui présente mes excuses ! », il dit : « Si tu ne peux faire une chose, dis : — Dieu me suffit ! » //
855 ḤAN. II, 167, 223. 964326 c. — La thériaque est comparable au cautère sous ses deux formes. Le Prophète a dit : « Je ne veux pas savoir ce qui m’arriverait si je buvais une thériaque, si je m’attachais une amulette ou si je disais des vers que j’aurais composés ! »855. 965Les Arabes entendaient parler de la thériaque majeure, qui existait dans les trésors des rois de Perse et de Byzance, et qui est un remède des plus efficaces et des plus salutaires pour les maux graves. Ils décrétèrent que c’était une panacée infaillible, lui attribuèrent toutes les vertus, et décrétèrent même qu’elle repoussait la mort pour un temps ; allongeait la vie et préservait des calamités. Le poète dit en parlant du vin : // « Elle
m’a
versé
un
vin
clair,
une
thériaque,
qui finira bien par assouplir mes jointures ! » 966Il prend donc la thériaque comme symbole de la guérison, et veut dire : Elle m’a versé un vin capable de me guérir de tous mes maux, tel une thériaque. Les amants comparent la salive des femmes à la thériaque, pour dire qu’elle guérit du mal d’amour, comme une thériaque. 967Ce qui prouve [le caractère suspect de la thériaque majeure], c’est que le Prophète a assimilé l’absorption de la thériaque avec l’usage des amulettes. Les amulettes sont des verroteries (ḫaraz) multicolores que les hommes de la Ğāhiliyya se mettaient au cou et aux membres en leur attribuant un pouvoir magique. Ils pensaient qu’elles évitaient les calamités et prolongeaient la vie. Le poète a dit : 289
« S’il
meurt,
Muzayna
n’aura
plus
de
succès
après
lui !
Accroche-lui donc, ô Muzayn ! des amulettes ! » 968C’est-à-dire : Attache à son cou ces verroteries pour qu’elles le préservent de la mort ! ‘Urwa b. Ḥizām dit :
856 Ši‘r, 606. Texte : Nağd, variante signalée par l’éd. : Hağr, comme dans Si‘r. « J’ai et Ils ni
accordé au
voyant
n’ont aucun
crédit de
négligé
au
voyant
Ḥağr :
ils
aucun
sortilège
(salwa) qu’ils
calmant
ne ne
de
la
m’ont
Yamāma
point
qu’ils
guéri.
connussent,
m’eussent
fait
boire !
Ils ont dit : Que Dieu te guérisse ! Par Dieu, nous sommes désarmés
devant
le
fardeau
que
tes
côtes
doivent
sup-
[porter ! »856. 969Le mot salwa (soulagement) désigne des cailloux dont on disait que l’eau dans // laquelle ils avaient séjourné consolait et guérissait l’amoureux. 970Telle est la thériaque que réprouvait le Prophète, si on l’utilisait dans cette intention et si on lui accordait ces facultés. Mais si on la boit au même titre qu’un autre remède dont on espère l’utilité et dont on redoute les inconvénients, tout en demandant la guérison à Dieu, il n’y a aucun inconvénient, à condition toutefois que la thériaque ne contienne pas de chair de serpent. En effet, Ibn Sīrīn réprouvait la thériaque dans la mesure où elle contenait de la ḥuma, c’est-à-dire le venin qui existe dans la chair [des serpents].
857 ḤAN. V, 211. 971326 d. — Il existe d’ailleurs d’autres sortilèges. Sont répréhensibles ceux qui font appel à autre chose qu’à la langue arabe, aux noms de Dieu, au ḏikr de Dieu, à la parole de Dieu dans les Livres [révélés], et dont on croit l’efficacité certaine. Ce sont ces 290
procédés qu’il a voulu désigner en disant : « Celui qui fait appel à la sorcellerie n’a pas confiance en Dieu ! » Mais il ne faut pas rejeter tout ce qui ressortit à la prophylaxie par le Coran ou les noms de Dieu ; c’est pourquoi le Prophète a dit à l’un de ses Compagnons
qui
pratiquait
la
prophylaxie
par
le
Coran
moyennant finances : « Il en est qui perçoivent un salaire pour un sortilège de fausseté, mais toi, tu as perçu un salaire pour un sortilège de vérité ! »857. ***
CII — EXEMPLE DE DEUX ḤADĪṮ-S CONTRADICTOIRES SUR LA [MANIÈRE] DE BOIRE DE L’EAU (sic) 858 ḤAN. III, 277. 972327. — Proposition : Vous rapportez d’après // Ibn al-Mubārak — Ma‘mar — Qatāda — Anas que le Propdète a interdit à l’homme de boire debout. Anas lui demanda : « Et manger ? » Il répondit : « Manger à plus forte raison ! »858.
859 BUḪ. 74, 16 = HM IV, 43. 973Par ailleurs vous rapportez d’après ‘Abd al-Razzāq — Ma‘mar — Ayyūb — Nāfi’ — Ibn ‘Umar que le Prophète buvait debout859. 974Il y a là contradiction. 975328. — Réponse : Nous prétendons qu’il n’y a là aucune contradiction, car dans le premier ḥadīṯ, il a interdit que l’homme bût ou mangeât en marchant. En d’autres termes, il convient de boire et de manger en toute tranquilhté, et de ne pas boire en marchant, lorsqu’on est pressé, au cours d’un voyage ou d’une affaire quelconque : on pourrait être frappé de suffocation, ou d’une coagulation dans la poitrine provoquée par l’eau. Les Arabes disent : « Lève-toi pour notre affaire ! » non seulement pour dire « Mets-toi debout ! » mais aussi pour dire : « Marche, démène-toi pour notre affaire ! » C’est en ce sens qu’ai-A’šā dit : 291
« Il
se
dresse
en
justicier
dans
sa
tribu,
et pardonne s’il veut, ou bien se venge ! » // 976Par l’expression : Il se dresse en justicier, il veut dire : Il poursuit la vengeance et fait tous ses efforts pour la prendre. Il n’entend nullement : Il se lève et reste immobile.
860 Coran, III, 75. 977Cette expression est également illustrée par le verset : « Il en est qui, si tu leur confies un dīnār, ne te le rendent que lorsque tu les harcèles »860, c’est-à-dire lorsque tu continues à te rendre auprès d’eux, à réclamer et à exiger. Il ne faut pas comprendre « …à rester debout », sans plus. 978Quant au second ḥadīṯ : « Il buvait debout », il signifie : sans marcher ni courir. Il n’y a aucun inconvénient à cela, car on boit alors en toute tranquilhté, tout comme si l’on était assis. ***
CIII. — EXEMPLE DE DEUX ḤADĪṮ-S CONTRADICTOIRES SUR LA QUANTITÉ D’EAU QUI PEUT DEVENIR IMPURE 861 ABĀ DĀWŪD, 1, 34, 35 ; ḤAN. I, 235, etc… 979329. — Proposition : Vous enseignez que le Prophète a déclaré dans plus d’un ḥadīṯ : « Rien ne saurait rendre l’eau impure »861.
862 ḤAN. II, 12, 23, 26, etc… 980Par ailleurs, vous enseignez qu’il a dit : « Lorsque la quantité d’eau
atteint
deux
jarres (qulla),
elle
ne
peut
devenir
impure »862, ce qui signifie que si la quantité d’eau n’atteint pas deux
jarres,
elle
peut
fort
bien
devenir
impure.
Il
y
a
contradiction. 981330. — Réponse : Nous prétendons qu’il n’y a aucune contradiction. Le Prophète a dit : « Rien ne saurait rendre l’eau 292
impure » // d’une façon très générale et dans la plupart des cas, c’est-à-dire dans le cas des puits, et des étangs, lorsqu’il y a beaucoup d’eau. Il a exprimé cette sentence [générale] comme si elle était applicable à tous les cas particuliers. C’est comme lorsqu’on dit : « Rien n’arrête les torrents ! » ; or il en est qui sont arrêtés par un mur ! On veut dire en ce cas : les torrents abondants, et non les torrents de faible débit. On comparera aussi l’expression : « Rien ne résiste au feu ! » Il ne s’agit pas en ce cas de la flamme de la lampe, qu’un souffle suffit à éteindre, ni d’une étincelle, mais du feu de l’incendie. 982Après ce premier ḥadīṯ, parlant des deux jarres, il a distingué pour nous la quantité d’eau qui ne supporte pas l’impureté de celle qui est assez importante pour ne pas être souillée par quoi que ce soit. ***
CIV. — EXEMPLE DE DEUX ḤADĪṮ-S CONTRADICTOIRES SUR LE PÈLERINAGE 863 ABŪ DĀWŪD, 11, 23 ; ḤAN. I 280 ; II, 97. 983331. — Proposition : Vous rapportez d’après Ismā’īl b. ‘Ulayya — Ayyūb — ‘Abd Allāh b. Mulayka — al-Qāsim — que ‘Ā’iša a dit : « J’ai prononcé l’ihlāl pour le pèlerinage ! »863.
864 ABŪ DĀWŪD, 11, 23 (p. 285, milieu). 984‘Abd Allāh dit : « Mais ‘Urwa m’a rapporté qu’elle a dit : — J’ai prononcé l’ihlāl pour la ‘umra ! »864.
865 Ibid. ; cf. BUḪ. 25, 31, 33 = HM I, 505, 506.
866 BUḪ. 25, 33, 34 = HM I, 506 sqq. Le mot « offrande » désigne les victimes destinées au sacrifice.
293
985332. — Réponse : Nous prétendons que ces deux ḥadīṯ-s ont chacun leur explication, si toutefois il n’y a aucune erreur de la part d’al-Qāsim ou de ‘Urwa. En effet, les Compagnons du // Prophète
arrivèrent
à
la
Mekke
après
avoir
prononcé
la talbiya pour le pèlerinage. Le Prophète leur ordonna de faire la tournée et la course rituelles, puis de se désacraliser et d’en faire une ‘umra. Ainsi, les hommes se désacralisèrent et se trouvèrent en tamattu‘865. Le Prophète dit : « Si je n’avais avec moi [les bêtes destinées à] l’offrande, je me désacraliserais »866.
867 Cette affaire a donné lieu à une prolifération de ḥadīṯs, considérable dont on trouvera les référe (...) 986Abū Ḏarr disait : « Cela constitua la disjonction du pèlerinage, pour eux en particulier. » C’est ce que pensent beaucoup de juristes. On peut admettre que ‘Ā’iša ait d’abord prononcé l’ihlāl pour le pèlerinage, puis ait dit à al-Qāsim : « J’ai prononcé l’ihlāl pour le pèlerinage, puis je l’ai disjoint et en ai fait une ‘umra ! » Ainsi, elle aurait fort bien pu dire à ‘Urwa : « J’ai prononcé l’ihlāl pour la ‘umra ! » Elle aurait eu raison dans les deux cas, car le pèlerinage pour lequel elle avait prononcé l’ihlāl était devenu une ‘umra sur l’ordre du Prophète867. ***
CV. — EXEMPLE DE HADĪT INFIRMÉ PAR LE RAISONNEMENT 868 On n’a pas trouvé ce ḥadīṯ sous cette forme, mais il est question de la réalité du mauvais œil dans (...) 869 Cf. BUḪ. 76, 35 = HM IV, 78. 987333. — Proposition : Vous enseignez que le Prophète a dit : « Le mauvais œil va presque plus vite que le décret divin »868. En outre, on lui amena les deux fils de Ğa’far b. Abī Ṭālib, qui étaient malingres. Il demanda : « Pourquoi sont-ils si malingres ? » On lui 294
répondit : « Le mauvais œil s’est jeté sur eux ! » Il ordonna : « Désenvoûtez- // les ! »869. 988Or, dans plus d’un ḥadīṯ, il a interdit les pratiques de sorcellerie. Comment l’œil peut-il agir à distance, au point de rendre malade ou infirme ? Voilà qui est inimaginable et ne résiste pas à la réflexion ! 989334. — Réponse : Nous prétendons que cela est imaginable et résiste à la réflexion, tant du point de vue de la religion que du point de vue de la falsafa, dont ils se satisfont et à laquelle ils ramènent tout. 990Les hommes diffèrent par leur tempérament. Il en est dont l’œil est nuisible lorsqu’il frappe quelque chose, et il en est dont l’œil est inoffensif. Il en est dont la morsure est aussi nuisible que celle du chien enragé, ou que celle du serpent, qui sont fatales. Il en est qui ne souffrent pas d’une piqûre de scorpion : c’est le scorpion qui crève ! 991334 a. — On amena à al-Mutawakkil un nègre originaire du désert qui mangeait les vipères vivantes ; il commençait par les mordre du côté de la tête. Il mangeait aussi les belettes vivantes en commençant par les mordre // du côté de la tête. 992On lui amena un autre qui mangeait des braises ardentes, tout comme l’autruche mâle, sans que cela le piquât ou le brûlât.
870 Voir la note 1044.
871 Tarbī’, s.v., ١١٩, sorte d’aconit. L’éd. disposait de deux leçons : bīš (2 ms.) et tinnīn (dragon, (...) 993Les bédouins pauvres qui vivent loin des campagnes mangent des serpents et toutes sortes de bestioles qui rampent ou se traînent. Il en est qui mangent les geckos870, dont la chair est encore plus vénéneuse que celle des vipères, ainsi que du bīš871. 295
994Abū Zayd cite les vers suivants : « Par
Dieu,
si
je
lui
étais
sincèrement
soumis,
je serais un esclave qui mange des lézards ! » 995Il nous apprend dans ce vers que les esclaves [noirs] mangent du lézard. 996Comment n’existerait-il pas parmi les hommes des gens qui portent en eux quelque venin ou quelque vertu nuisible, et qui, lorsqu’ils portent les yeux sur un objet qui leur plaît, véhiculent par leur regard une vertu de cette // sorte ou un venin qui se fixe sur l’objet et le rend malade ? 997L’auteur de la Logique prétend qu’un homme ayant frappé un serpent avec un bâton, ce fut l’homme qui mourut. Il dit aussi qu’il existe des vipères qui tuent un homme rien qu’en le regardant ; et d’autres qui tuent un homme rien qu’en émettant un certain son. Telle est l’opinion des amateurs de falsafa ! 998En outre, on nous a rapporté d’après al-Naḍr b. Šumayl qu’Abū Ḫayra a dit : « Le serpent dit abtar est vif, bleu, a la queue tronquée et fuit tout le monde. Nul ne le voit sans en mourir ; toute femme enceinte qui le regarde perd son enfant. C’est le Démon des serpents ! » C’est là une description qui concorde avec celle de l’auteur de la Logique. Il est clair que si ce serpent tue à distance, c’est parce que son regard véhicule dans l’atmosphère un venin qui se fixe sur l’objet qu’il atteint. De même, celui qui tue rien qu’en émettant un son véhicule au moyen de sa voix un venin qui pénètre dans l’oreille et dont l’effet est mortel. 999334 b. — Al-Aṣma‘ī cite un cas analogue à propos du mauvais œil. On m’a rapporté directement de sa bouche // l’anecdote suivante : « Je connais un homme doué du mauvais œil. On invoqua [Dieu] contre lui, et il devint borgne. Il disait : — Lorsque
296
je vois un objet qui me plaît, je sens de la chaleur sortir de mon œil ! » 1000Il existe un phénomène analogue : c’est le cas de la femme indisposée qui s’approche d’un récipient de lait qu’elle veut battre. Elle a beau avoir nettoyé ses mains et ses vêtements, le lait tourne. Ceci est bien connu et ne saurait s’expliquer que par un effluve qui émane d’elle et atteint le lait. [Cette même femme], en pénétrant dans un verger, peut faire du tort à beaucoup de plantes qui s’y trouvent sans les toucher. Une pâte qui lève peut retomber dans une pièce où il y a un melon. Celui qui égrène une coloquinte, qui pile de la moutarde ou découpe des oignons a les yeux qui pleurent. Il arrive qu’un homme regarde un œil rouge, et que son œil à lui se mette à pleurer, voire à rougir. Cela ne saurait être imputable qu’à un effluve émanant de l’œil malade qui l’atteint en traversant l’atmosphère. // 1001Lorsqu’un homme baille, les autres baillent souvent aussi. Les Arabes disent : « Plus rapide qu’une épidémie de baillement ». Bien souvent, les sorciers circonviennent [leur client] en baillant : ils baillent eux-mêmes, et provoquent ainsi son baillement. A force de répéter ce stratagème, ils persuadent le malade que c’est l’effet du sortilège, et que cela libère la maladie.
872 On a déjà vu (§ 143 sqq.) que la contagion était incompatible avec le déterminisme. 1002Lorsque dans une maison où vivent plusieurs enfants l’un d’eux attrape la variole, il arrive que les autres l’attrapent également. La seule explication est que quelque chose se détache du malade et traverse l’atmosphère pour aller frapper l’individu non encore contaminé. Cela n’a rien de commun avec la contagion (‘adwā) : c’est un venin qui se transmet de l’un à l’autre et relève authentiquement du mauvais œil872.
297
873 C’est le jeteux de sort, qui est de tous les temps et de tous les pays. 1003Les bédouins prétendent que le possesseur du mauvais œil tue qui il veut, rend infirme qui il veut avec son œil ; et que s’il se poste sur le chemin qui conduit les troupeaux à l’abreuvoir, il peut frapper de son œil et tuer n’importe quelle bête873. Mais cela est faux. //
874 Coran, LXVIII, 51. Trad. BLACHÈRE : « te perceront de leur regard ». 1004A propos du verset : « En vérité, ceux qui sont incrédules, ayant entendu cette Édification, te feront glisser par leurs regards »874, al-Farrā’ affirme que cela signifie : Ils te jetteront le mauvais œil, c’est-à-dire : Ils te frapperont de leur œil, comme certains frappent les chameaux qui reviennent du point d’eau. A mon avis, son interprétation n’est pas la bonne. Le sens est : Ils te regarderont avec inimitié et hostilité, d’un regard qui te ferait presque faire un faux pas, tant il est mauvais. 1005J’en veux pour preuve les vers du poète :
875 On croit pouvoir adopter yuzillu au lieu de yuzīlu (de même à la ligne suivante), en raison du cont (...) « Ils échangent, lorsqu’ils se rencontrent dans un campement, un regard qui ferait glisser les pieds sur le sol ! »875. C’est-à-dire : qui ferait presque glisser les pieds sur le sol à cause de sa dureté et de sa méchanceté. C’est le regard de l’ennemi plein de haine.
876 Coran, XLVII, 20.
877 Coran, LXXV, 7. Toutefois, la Vulgate porte bariqa et justifie la trad. BLACHÈRE « Quand la vue ser (...) 1006On dit : « Il m’a regardé de travers » ou « Il m’a regardé // fixement » ou « Je lui ai lancé un regard perçant ». On comparera 298
le verset : « Ils
te regardent
comme s’ils
étaient
tombés
morts »876, parce que celui qui est tombé mort a le regard fixe et ne cille pas. Dieu a dit : « Quand le regard lancera des éclairs » — si on lit baraqa comme certains, c’est-à-dire que le regard sera éclatant877. 1007Si ce que les bédouins affirment dans cet ordre d’idées était exact, ils pourraient tuer ou rendre infirme qui bon leur semblerait. Or Dieu n’a donné ce pouvoir à personne.
878 L’éd. signale que ce paragraphe ne figure que dans un seul ms., et manque dans les autres. Il se po (...) 1008334 c. — Je crois savoir que l’individu doué du mauvais œil, et redoutant d’en frapper une personne qui lui plaît [doit ?] le faire accompagner de la formule de bénédiction et d’une invocation ; le Prophète a dit : « Si quelqu’un d’entre vous a de l’amitié pour son frère, qu’il prononce sur lui la formule de bénédiction »878. 1009Tout ce dont on est sûr à propos du mauvais œil est que celui qui en est doué a la faculté d’en frapper un objet qui lui plaît ou le charme, afin que cet objet lui appartienne de ce fait. C’est pourquoi on appelle [aussi] le mauvais œil // nqfs (âme), car il agit en relation avec l’âme.
879 HAN. III, 118 ; cf. BUḪ. 76, 17 = HM IV, 67. 1010Le ḥadīṯ dit : « Pas de sortilège, sauf contre le mauvais œil, les bêtes venimeuses, les furoncles et l’âme » — qui est donc synonyme de mauvais œil879. Le mot huma désigne les serpents, les scorpions et autres bêtes venimeuses. Le mot namla désigne des abcès qui sortent sur les flancs. 1011Le Prophète a dit au guérisseur (?) : « Enseigne donc à Hafsa le sortilège [contre] les furoncles, l’âme et le mauvais œil ».
880 Voir § 172 a. 299
1012Ibn ‘Abbās a dit : « Les chiens sont des ḥinn-s (c’est-à-dire des génies inférieurs) ; s’ils viennent à vous pendant le repas, jetez-leur à manger, car ils ont des âmes »880, c’est-à-dire : ils ont des yeux qui peuvent nuire aux gens qui mangent. // ***
CVI. — EXEMPLE DE DEUX ḤADĪṮ-S CONTRADICTOIRES SUR LES VENTES 881 BUḪ. 34, 108 = HM II, 53 ; ḤAN. III, 310, 380, etc… 1013335. — Proposition : Vous rapportez d’après Ḥammād — Qatāda — al-Ḥasan — Samura que le Prophète a interdit la vente à terme d’un animal pour un autre881.
882 On n’a pas retrouvé ce ḥadīṯ. 1014D’autre part, vous rapportez d’après Muḥammad b. Isḥāq — Yazīd b. Abī Ḥabīb — Muslim b. Ğubayr — Abū Sufyān — ‘Amr b. Ḥarīš — ‘Abd Allāh b. ‘Amr que le Prophète ordonna à ce dernier d’équiper une troupe. Les chameaux de l’aumône étant épuisés, il lui ordonna de réquisitionner (aḫada) un chameau pour deux à verser au troupeau de l’aumône882. 1015Cela est en contradiction avec le premier ḥadīṯ.
883 ḤAN. II, 189. 1016336. — Réponse : Nous prétendons qu’il n’y a aucune incompatibilité entre ces deux ḥadīṯ-s, grâce à Dieu. Le premier interdit la vente à terme d’un animal pour un autre. En effet, il est illicite d’acheter un objet qui n’est pas aux mains du vendeur, car le Prophète l’a interdit883. C’est ce qu’on appelle la vente sur description (muwāsafa). Or si l’on vend à terme un animal pour un autre, on verse le prix d’un objet qui n’est pas aux mains de l’autre partie ; c’est donc illicite.
300
1017336 a. — Dans le second ḥadīṯ, le Prophète ordonne de réquisitionner un chameau pour deux à verser au troupeau de l’aumône. Il s’agissait d’un prêt (salaf). // La Sunna relative au prêt (salaf) le définit comme le versement anticipé d’espèces, d’or ou d’animaux contre de la nourriture, des dattes ou des animaux dans des conditions déterminées et à terme préfixé, étant entendu
que
le
montant
du
remboursement
n’est
pas
actuellement aux mains de l’emprunteur, qui est tenu de le verser à l’échéance. Ainsi, la qualification juridique du prêt est différente de celle de la vente. En effet, si, lors de la vente, il est illicite d’acheter un objet qui n’est pas aux mains de l’autre partie au moment du contrat, en ce qui concerne le prêt, il était (sic) licite de verser le montant du prêt contre des valeurs ne se trouvant pas aux mains de l’autre partie au moment de l’emprunt.
884 Ḥiqq, pl. ḥiqāq : chamelle de trois ans révolus (Lisān, XI, 338) ; ğaḏā‘, pl. ğiḏā‘ : chamelle de q (...)
885 On peut se demander si telle est bien la question. En effet, le libellé du ḥadïṯ de la note 3, p. 3 (...) 1018Étant donné que les chameaux étaient épuisés, le Prophète ordonna [à ‘Abd Allāh b. ‘Amr] d’emprunter un chameau jeune, grand et fort pour deux chameaux de l’aumône, de quatre ou cinq ans884, impropres à la guerre et au voyage. Il se pouvait qu’un seul chameau jeune et fort valût mieux que deux, trois ou quatre chameaux de l’aumône885. ***
CVII. — EXEMPLE DE DEUX ḤADĪṮ-S CONTRADICTOIRES SUR LES MENSTRUES 886 BUḪ. 6, 5 = HM I, 112 ; BUḪ. dit fawr au lieu de fawḥ. Il semble qu’il faille distinguer la mubāšar (...)
301
1019337. — Proposition : Vous rapportez d’après Garīr — alŠaybānī — ‘Abd al-Raḥmān b. al-Aswad — son père que ‘Ā’iša // a dit : « Au plus fort de nos menstrues, le Prophète nous faisait revêtir un izār, puis nous approchait. Lequel d’entre vous est capable
de
maîtriser
son
désir
comme
le
faisait
le
Prophète ? »886.
887 Ce ḥadīṯ ne paraît pas avoir été retenu. 1020D’autre part, vous rapportez d’après ‘Abd al-‘Azīz b. Muḥammad — Abū l-Yamān — Umm Ḏarra que ‘Ā’iša a dit : « Lorsque j’avais mes menstrues, je descendais du lit et m’installais sur la natte. Nous n’approchions le Prophète ni de près, ni de loin avant d’être pures »887. 1021Il y a contradiction.
888 BUḪ. 6, 5 = HM I, 112 ; ḤAN. VI, 336, etc… 1022338. — Réponse : Nous prétendons que le premier hadït est le bon. Il est rapporté par Šu‘ba — Mansūr — Ibrāhim — al-Aswad — ‘Ā’iša. Elle déclare : « Lorsque l’une de nous avait ses menstrues, le Prophète lui ordonnait de revêtir l’ izār, puis il couchait avec elle »888. Cet isnād est différent de l’isnād Abū 1Yamān — Umm Darra — ‘Ā’iša. Il est inconcevable que ‘Ā’iša déclare tantôt « Je l’approchais pendant les menstrues », tantôt « Je ne l’approchais pas // pendant les menstrues, je descendais du lit, m’installais sur la natte et ne l’approchais pas avant d’être pure ». L’une de ces informations doit être un mensonge, et un menteur ne se démentit pas. Comment dès lors soupçonner une personne sincère, bonne et pure ? Il n’y a nul vice, nulle faiblesse et nulle contravention à une tradition normative ou à une prescription révélée dans la fréquentation d’une femme qui a ses menstrues, lorsqu’elle revêt l’izār.
302
1023Seuls les Mages réprouvent ce procédé de la part d’une femme qui a ses menstrues, ainsi que d’autres pratiques analogues. ***
CVIII. — EXEMPLE D’UN ḤADĪṮ INFIRMÉ PAR LE RAISONNEMENT 889 ḤAN. IV, 10. 1024339. — Proposition : Vous enseignez que le Prophète a dit : « Le rêve reste sur la patte d’un oiseau tant qu’il n’est pas interprété. Lorsqu’il est interprété, il se réalise »889. 1025Comment le rêve peut-il rester sur la patte d’un oiseau ? Comment peut-il être en retard sur l’événement qu’il annonce ou dont il avertit dans la mesure où son interprétation est elle-même en retard, et se réalise dès qu’il est interprété ? Ceci tendrait à prouver que si le rêve n’est pas interprété, il ne se réalise point. 1026340. — Réponse : Nous prétendons que c’est là une façon de parler chère aux Arabes. Lorsqu’une chose n’est pas fixée, ils disent qu’elle est « sur la patte d’un oiseau » ou « entre les griffes d’un oiseau » ou « sur la corne d’une gazelle », ce qui signifie que cette chose n’est // ni tranquille, ni stable. Quelqu’un a dit, parlant d’al-Ḥağğāğ b. Yūsuf : « On dirait que mon cœur est entre les griffes d’un oiseau planant Pour
bien éviter
haut un
dans homme
l’infini
du
dont
je
ciel,
effrayé,
savais
que
lorsqu’il menaçait de faire le mal, il disait vrai. » 1027Al-Marrār dit en parlant d’un désert qui faisait battre le cœur des guides, tant ils le redoutaient : « On
dirait
que
les
cœurs
des
guides
étaient attachés aux cornes des gazelles ! » 303
de
ce
désert
1028C’est-à-dire qu’ils sautaient et battaient comme s’ils avaient été attachés aux cornes des gazelles, car les gazelles ne sont jamais en repos, et donc ce qui est sur leurs cornes. 1029Imru’al-Qays a dit : « En vérité, c’est comme la journée que j’ai vécue à Qidār, où mes compagnons et moi avions l’impression d’être sur [la corne d’une gazelle grise. » // 1030C’est-à-dire : Nous n’étions ni stables, ni tranquilles, et on aurait dit que nous étions sur la corne d’une gazelle. 1031340 a. — Il en est de même pour le rêve. Lorsqu’on dit qu’il est sur la patte d’un oiseau tant qu’il n’est pas interprété, on veut dire qu’il plane dans l’atmosphère jusqu’à ce qu’on l’interprète ; dès qu’il est interprété, il se réalise.
890 Coran, XII, 43. 1032On
n’entend
d’ailleurs
point
par
là
qu’il
se
réahse
conformément à l’interprétation de n’importe qui. Il s’agit du spécialiste, de celui qui tombe juste avec l’assistance de Dieu. Comment le profane qui fournit des interprétations erronées pourrait-il être considéré comme un « interprète » des rêves, puisqu’il se trompe et reste bien loin [de la vérité] ? On ne saurait considérer comme « interprète » des rêves que celui qui ne se trompe pas. Dieu a dit : « …si vous interprétez les rêves »890, c’est-à-dire : Si vous êtes capable de les interpréter.
891 Ainsi pense-t-on pouvoir interpréter l’expression fi-l-ḥīn ba‘d al-ḥīn. On pense entre autres aux d (...) 1033Le Prophète n’a pas voulu dire non plus que n’importe quel rêve
s’exphque
ou
s’interprète,
car
la
plupart
sont
des
hallucinations. Il en est qui sont dus à l’emprise du tempérament, d’autres qui sont des entretiens intimes, d’autres enfin qui sont 304
inspirés par le Démon. Le seul rêve [constituant une vision] authentique est celui qu’apporte l’ange des visions et qui provient de l’Archétype de l’Écriture, et cela à plusieurs reprises891.
892 BUḪ. 91, 26 = HM IV, 461 ; ḤAN. II, 269, 395. 1034340 b. — Abū Muḥammad dit : D’après Yazīd b. ‘Amr b. alBarā’ — ‘Ubayd Allāh b. ‘Abd al-Mağīd al-Ḥanafi — Qurra b. Ḫālid — Muḥammad b. Sīrīn — Abū Hurayra, le Prophète a dit : « Il y a trois sortes de rêves : le rêve euphorique, qui vient de Dieu ; le cauchemar, // qui vient du Démon ; le rêve où l’homme se voit en train de s’entretenir seul à seul avec lui-même pendant son sommeil »892. 1035D’après Sahl b. Muḥammad — al-Aṣma‘ī — Abū l-Miqdām (ou Qurra b. Ḫālid) a dit : « J’étais en compagnie d’Ibn Sīrīn alors qu’on l’interrogeait sur les rêves. J’évalue à un sur quarante le nombre des rêves qu’il interprétait » — je ne sais plus s’il a dit aḥzūhu (je conjecture) ouaḥzūhu (j’évalue). 1036C’est donc bien le rêve [constituant une vision] authentique qui plane jusqu’à ce qu’il soit interprété par un homme expert en raisonnement
analogique
qui
connaît
bien
les
principes
méthodologiques (usūl) [régissant l’interprétation des songes] ; et qui bénéficie de l’assistance divine. Dès lors qu’il a été interprété par un [tel spécialiste], il se réalise conformément à son interprétation. ***
CIX. — EXEMPLE D’UN ḤADĪṮ INFIRMÉ PAR LA SPÉCULATION 893 BUḪ. 19, 18 = HM I, 373 ; 77, 43 = HM IV, 114. 1037341. — Proposition : Vous enseignez que le Prophète a dit : « Entreprenez les œuvres dont vous êtes capables, car Dieu ne se lasse pas tant que vous ne vous lassez pas »893. 305
1038Vous prétendez donc que Dieu se lasse lorsqu’ils se lassent ! Or Dieu ne saurait se lasser ni se fatiguer en aucun cas. 1039342. — Réponse : Nous prétendons que si l’interprétation qu’ils suggèrent était retenue, ce serait une grave et pernicieuse erreur. Mais le Prophète a voulu dire : Dieu ne se lasse pas lors
même que vous vous lassez ! On rapprochera de cela l’expression courante : // « Ce cheval ne faiblira pas tant que la cavalerie ne faiblira pas », ce qui ne signifie pas qu’il faiblira en même temps qu’elle. Si tel était le sens, le cheval en question n’aurait aucune supériorité sur [le reste de] la cavalerie, puisqu’il faiblirait en même temps qu’elle. Cela signifie en réalité que ce cheval ne faibht pas lors même que la cavalerie faiblit. 1040On dit de même à propos d’un homme éloquent, prolixe et intarissable :
« Untel
ne
s’interrompt
pas
tant
que
ses
contradicteurs ne s’interrompent pas », c’est-à-dire : Il ne s’interrompt pas lors même que les autres s’interrompent. Si l’on voulait dire qu’il s’interrompt en même temps qu’eux, cette expression ne lui confèrerait aucun mérite par rapport aux autres, et il ne serait digne d’aucune louange.
894 Cette notation est à ajouter au dossier de Ḫalaf al-Aḥmar, qui est déjà bien compromettant. Cf. BLA (...) 1041Une expression exactement semblable existe dans des vers attribués au neveu de Ta’abbata Šarran — bien que certains prétendent qu’ils sont dus à Halaf al-Ahmar894 : « Hudayl
a
enduré
les
entreprises
d’un
brave
qui ne se lassera pas de nuire tant qu’ils ne se lasseront [pas ! » 1042Il ne veut pas dire qu’il se lassera de nuire lorsqu’ils en seront las. Si tel était le sens, le héros n’aurait aucun mérite, puisqu’il
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serait sur le même pied qu’eux. Il veut dire en fait qu’ils se lasseraient de nuire, mais que lui ne s’en lasserait pas. NOTES 1 On a complété les sous-titres en fonction des divers critères utilisés dans ce chapitre. Voir notre Introduction. 2 ḤAN. I, 272 ; VI, 441 ; cf. III, 127 ; V, 135. 3 Coran, VII, 172. 4 Coran, VII, 11. 5 Voir Ši‘r, 592-593 où cette anecdote est développée. 6 Allusion à Coran, XXIII, 13-14. 7 Allusion à Coran, LXXI, notamment 23 et 25. 8 BUḪ. 4, 12, 14 = HM I ; 69, 70 ; ḤAN. III, 12, 13 ; V, 300, etc… 9 BUḪ. 4, 11 = HM I, 69 ; 8, 29 = HM I, 149 ; 57, 4 = HM II, 386. 10 Amr wa nahy, c’est-à-dire de l’éthique bien plus que du droit proprement dit. 11 BUḪ. 77, 40 = HM IV, 113 ; ḤAN. I, 321, etc… 12 TIR, 22, 35. 13 ḤAN. IV, 196 ; VI, 136, 192, 213. 14 BUḪ. 4, 60-62 = HM I, 91 ; 46, 27 = HM II, 151 ; ḤAN. IV, 246 ; V, 382, 394, etc… 15 Ibid. 16 Lisān, IX, 181 = Tāğ, V, 149 : subāṭa = dépôt d’ordures ménagères, de balayures. 307
17 Lisān, XI, 151 (où ce ḥadīṯ est reproduit) : ‘asīb, « salarié de basse classe », ou « esclave ». 18 Coran, IV, 24. 19 Coran, II, 178. 20 Coran, IV, 77. 21 Coran, V, 45. 22 ḤAN. II, 151 ; V, 409 ; VI, 162. 23 ḤAN. V, 11, 12, 18, 19. 24 ABŪ DĀ’ŪD, 38, 7 ; MĀLIK, 43, 3 ; cf. aussi ḤAN. V, 19. 25 Ibid., et TIR. 14, 16. 26 ḤAN. II, 136, 166, 191, 211, 214, ; IV, 93, 95, etc… 27 BUḪ. 86, 4 = HM IV, 376 ; cf. ḤAN. I, 125, 130. 28 Cf. ḤAN. V, 325. 29 BUḪ. 60, 11 = HM II, 486 ; ḤAN. II, 326. 30 BUḪ., ibid. et 60, 19 = HM II, 491 ; ḤAN. II, 326, 332, 350. 31 BUḪ. 60, 11 = HM II, 486. 32 Coran, II, 260. 33 ḤAN. I, 215, 271. 34 Cf. Exode, 32, 1-20. 35 Coran, XI, 80. 36 Cf. Coran, XI, 77 sqq. 308
37 Qui pussent lui apporter leur appui le cas échéant. 38 Cf. Coran, XII, 31. 39 ḤAN. III, 322, 345, 379, 384. 40 On rappelle ici que le K. Muḫtalif al-ḫadiṯ a été rédigé entre 256/869 et 270/883. 41 Cf. supra, § 40 g 37 e. 42 Aḥtā’at istuka l-ḥafra… Métaphore triviale pour dire : « Tu n’y as rien compris ! » 43 L’éd. signale trois leçons : rağā’ (espérance) ; raḥā’ (vie aisée) ; dağğāl (Antéchrist). On a retenu rağā’, que confirme ḤAN. I, 93. Toutefois ḤAN. I, 140 porte raḫâ’. Cf. aussi ḤAN. II, 88, 121, 131. 44 On n’a pas retrouvé cette variante du ḥadīṯ de l’année cent. 45 BUḪ. 59, 4 = HM II, 425. 46 En l’occurrence informateur d’Abū Salama. 47 Cf. ḤAN. II, 207. 48 On n’a pas retrouvé ce ḥadīṯ. On soupçonne qu’il serait possible de le découvrir dans la rubrique nār des Concordances
et Indices, dont malheureusement nous ne disposons pas. 49 BUḪ. 9, 9 = HM I, 190 ; ḤAN. II, 229, 266 ; III, 52, etc… 50 Allusion à Coran LII, 6. On peut se demander s’il convient ici d’adopter la trad. BLACHÈRE (« la mer portée à ébullition ») qui ne paraît pas convenir dans ce contexte. Le premier sens de masģūr signalé par BAYḌĀWĪ, 694, est mamlū’ (rempli »). Il
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semble y avoir une allusion aux phénomènes naturels permanents, peut-être tout simplement les marées. 51 Coran, II, 24 ; cf. aussi LXVI, 6. 52 BUḪ. 76, 19, 43, 54 = HM IV, 62, 82, 89 ; ḤAN. I, 174, 180… ; II, 152, etc… 53 En effet, la plupart des ḥadīṯ-s disent : « Qui (man) a infecté le premier ? ». Notamment BuḪ. 76, 25, 53 = HM IV, 72, 88 ; ḤAN. I, 269, II, 24. 54 BUḪ. 76, 53, 54 — HM IV, 88, 89 reproduit une discussion entre Abū Salama et Abū Hurayra qui citait justement des deux ḥadīṯ-s contradictoires. Ḥan. II, 406, 434, 455. 55 BUḪ. 76, 19 = HM IV, 69 ; ḤAN. II, 443. 56 BUḪ. 56, 47 = HM II, 302 ; 67, 18 = HM III, 554 ; 76, 43 = HM IV, 82 ; ḤAN. I, 174, 180 ; II, 8, 36, 85… ; V, 335, 338, etc… 57 BUḪ. 76, 30, 36 = HM IV, 74, 76 ; 90, 13 = HM IV, 445 ; ḤAN. 173 ; IV, 177 ; V, 200. 58 BUḪ. 76, 53 = HM IV, 88. Il semble que les trois ḥadīṯ-s sur la gale des chameaux, la promiscuité des individus sains et malades, et le caractère funeste de la femme, de la maison et des animaux de selle n’en font qu’un en réalité. Les deux premiers sont réputés transmis par Abū Salama d’après Abū Hurayra. Or Abū Salama ajoute après le second (et non après le troisième comme on pourrait l’attendre d’après ce passage d’Ibn Qutayba) : « Abū Hurayra renia alors le premier ḥadīṯ ; nous lui dîmes : N’es-tu pas transmis qu’il n’y a pas de contagion ? Alors, il se mit à baragouiner quelque chose en abyssin ». Abū Salama ajoute : « Je ne sache pas qu’Abū Hurayra ait jamais oublié un autre ḥadīṯ que celui-là ! ». 310
59 Coran, LVII, 22. 60 ABŪ DĀWŪD, 27, 24 ; MĀLIK, 54, 23. 61 Ces vers seraient dûs à AL-RAQQĀS
AL-KALBĪ ; Tāğ, X,
397.
62 Lisān, IV, 236 = Tāğ, X, 397 ; wāq = surad. Cf. Tarbī’, s.
surad. 63 Tāğ, X, 397, où ces vers sont également attribués à ALMURAQQIŠ. 64 Ce ḥadīṯ ne paraît pas avoir été retenu par les compilateurs. 65 Cf. BUḪ. 78, 107 sqq. = HM IV, 201 sqq. Sur le fa‘l, cf. BUḪ. 76, 43, 44 = HM IV, 82, 83 ; ḤAN. I, 257 ; III, 118 etc… 66 Ce mot, qui signifie « en bonne santé », est aussi un nom propre courant. 67 Ce mot, signifiant « celui qui trouve », est l’un des noms de Dieu (Lisān, IV, 408), ce qui paraît exclure son emploi comme nom de personne. On peut supposer que notre malade ou notre chercheur entend par hasard appeler un autre homme, ou invoquer Dieu. 68 Cf. BUḪ. 70, 30 = HM III, 669 ; ḤAN. IV, 397, etc… ; SUYŪṬĪ, Ğāmi‘, 119. 69 SUYŪṬĪ, Ğāmi‘, 119. 70 Le ḥadīt se trouve dans Tāğ, X, 282, et dans SUYŪṬĪ, Ğāmi‘, 118. 71 Fils du Feu. 72 Fils des Incendiaires ( ?)
311
73 Fils de l’Adultère. 74 Fils de la Tristesse. Cf. BUḪ. 78, 107 = HM IV, 201. 75 BUḪ. 9, 9 = HM I, 190 ; ḤAN. II, 229, 266 ; III, 52 etc… 76 Cf. Lisān, VIII, 35 ; Cf. BUḪ. 9, 11, 21 = HM I, 191, 199 ; 10, 104 = HM I, 256 ; ḤAN. I, 23, 210, III, 80, etc… 77 Ibid. 78 On n’a pas retrouvé ce ḥadīṯ. 79 BUḪ. 8, 1 = HM I, 133 ; 25, 76 = HM I, 527 ; 59, 6 = HM II, 428 ; 60, 5 = HM II, 467 ; 63, 42 = HM III, 37 ; 97, 37 = HM IV, 630 ; ḤAN. III, 121, 149, 288 ; IV, 207 ; V, 122, 139 etc… 80 Ibn Qutayba prend ici nettement position sur le problème de la généalogie yéménite. On sait qu’il est douteux que Qaḥṭān puisse être assimilé au Yaqṭan biblique. Voir EI, II, 669, s. Kaḥṭān. Cf. Tarbī‘, § 41, où le problème est posé. 81 Sur certains de ces points, voir Lévitique, notamment 3, 12, 15, 20… Sur d’autres notamment la répudiation, Ibn Qutayba semble annexer les dispositions de la loi hébraïque un peu à la légère. Cf. VIGOUROUX, Dictionnaire de la Bible, V, 1051. 82 Ši‘r, 222, où Ibn Qutayba commente : « Le témoin de Dieu, c’est l’ange auquel il était confié ; ceci montre la foi des Arabes dans les deux anges, résidu de la religion d’Ismaél ». 83 Ou en tout cas avant que l’Islam ne se fût implanté chez les Ġaṭafān, sa tribu d’adoption. EI, II, 153 s. Ghatafān (WEIR). 84 Mu‘allaqa, vers 28.
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85 Cf. Tarbī‘, ١١٨, s. baliyya. Lisān, XVIII, 92 = Tāğ X, 45 (où on lit māniğāt au lieu de māniḥāt, ce qui paraît peu satisfaisant). 86 Panégyrique de ‘Amr b. al-Ḥāriṯ, vers 24. Dīwan, DERENBOURG, 1869. 87 Le vers concerne les Banū Ğafna, Ğhassanides chrétiens. Cf. Ši‘r, 265, 565. 88 Coran, XCIII, 6-7. 89 Coran, XLII, 52. 90 Coran, XIV, 36. 91 Cf. Coran, XI, 46. L’expression n’est que sous entendue dans le verset. 92 TIR. 41, 91. 93 ḤAN. I, 398 ; IV, 73. 94 ḤAN. V, 357 ; cf. BUḪ. 62, 1 = HM II, 582. 95 Ibn Qutayba joue ici de l’ambiguïté du mot ģarīb qui signifie « étranger à son milieu », mais aussi « rare », comme dans l’expression ġarīb al-luġa. 96 Lisān, III, 42, où ce ḥadīṯ est reproduit. 97 Cf. ḤAN. II, 390. 98 Cf. ABŪ DĀWŪD, 36, 10. 99 Cf. TIR, 39, 16. 100 Ce ḥadīṯ figure dans Lisān, IX, 353. 101 Lisān précise : « outre neuve », loc. cit. 313
102 BUḪ. 65, s. 6, v. 4 = HM III, 317 ; 65, s. 37 = HM III, 428 ; 97, 50 = HM IV, 643 ; ḤAN. I, 205, 242, 440 ; II, 405, 451, 468. Il faut remarquer que tous ces ḥadīṯ-s disent : « Nul ne doit être préféré à… ». 103 ḤAN. I, 5 ; V, 388. 104 BUḪ. 60,8 = HM II, 473 ; 81, 53 = HM IV, 315 ; ḤAN. I, 235, 453 ; V, 50. 105 Coran, LXVIII, 48. 106 Ḥanīfiyya sahla ; on trouve aussi samḥa qui a le même sens : simple, libéral, par contraste avec les religions révélées aux lois draconiennes, notamment le Judaïsme. 107 BUḪ. 81, 51 = HM IV, 309 ; 97, 36= HM IV, 626 ; cf. 97, 19, = HM IV, 591 ; ḤAN. I, 399, 412, 451 ; cf. III, 94. 108 C’est ainsi qu’il nous a paru pouvoir rendre le plus clairement le mot ḥukm en fonction du contexte. Ce mot englobe un ensemble de notions dont on trouvera le détail dans l’index, s.v. 109 Ibn Qutayba joue ici du double sens de kibr -
kibriyā’ : d’abord grandeur, sublimité, puis orgueil. 110 Coran, IV, 93. 111 Voir ḤAN. V, 325. 112 Coran, IV, 48 = 116. 113 BUḪ. 60, 54 = HM II, 532. 114 Coran, XX, 52. 115 L’Omnipotence (qudra).
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116 Allusion à Coran IX, 106. Cf. index, s. Murği’ite. 117 ḤAN. I, 230 ; cf. BUḪ. 59, 15 = HM II, 455 ; 65, s. 77 = HM III, 493. 118 Coran, IV, 31. 119 Cf. BUḪ. 3, 49 = HM I, 62 ; 59, 11 = HM II, 451 ; 60, 47 = HM II, 516 ; 88, 3 = HM IV, 426 ; ḤAN. III, 135, 174. 120 Tur‘a. Lisān, IX, 381 et Tāğ, V, 289 rapportent le ḥadīṯ et discutent abondamment le sens de ce mot. Tous deux reproduisent d’ailleurs le commentaire d’Ibn Qutayba. Le mot tur‘a paraît être pris le plus souvent dans le sens de « canal d’adduction d’eau à un bassin ». 121 ḤAN. II, 360, 406, 450… ; III, 389 ; IV, 41 etc… Cf. BUḪ. 20, 5 = HM I, 384, où toutefois le mot tur‘a ne figure pas. 122 Coran, LIII, 14-15. Nous ne pouvons naturellement pas suivre ici la trad. Blachère, qui voit dans al-Muntahā et al-Ma’wā deux lieux dits. Il s’agit au contraire de montrer ici que le Paradis n’a rien de commun avec la terre. 123 Coran, III, 133 ; cf. LVII, 21. 124 Voir les nombreux excursus de la littérature ancienne sur sidrat al-muntahā, notamment les commentateurs et BUḪ. 8, 1 = HM I, 135 ; 60, 5 = HM II, 469 ; ḤAN. I, 422. 125 Lisān et Tāğ ; loc. cit. 126 Cf. ḤAN. I, 81, 91 et surtout Lisān et Tāğ, loc. cit. ; Lisān, X, 411 : maḫrafa = allée entre deux rangées de palmiers. 127 BUḪ. 56, 22, 112, 156 = HM II, 292, 336, 355.
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128 ḤAN. III, 129, 183 ; IV, 421. 129 La saqīfa est l’endroit où se déroula l’une des phases de l’élection d’Abū Bakr. BUḪ. 86, 31 = HM IV, 393 ; 93, 51 = HM IV, 527. 130 ḤAN. VI, 201. 131 ḤAN. II, 13, 19, 24, 106, 210 ; IV, 349. 132 BUḪ. 33, 8, 11, 12 = HM I, 646, 648 ; 93, 21 = HM IV, 510 ; ḤAN. III, 156, 285, 309 ; VI, 337. 133 Allusion à Coran, XXXVII, 8. 134 Coran, IV, 119. 135 Cf. Tarbī‘, 36 s.v. aš-Šayḫ an-Nağdī, avec toutes les références. On n’a pas trouvé de tradition relative au Démon se présentant sous la forme d’une grenouille. 136 Coran, LXXII, 6. 137 Coran, LV, 56 = 74. 138 Coran, XXVII, 24. 139 Coran, VII, 127 ; la Vulgate dit : ālihataka, « tes dieux » ; la lecture en question est « ilāhataka ». 140 BUḪ. 23, 80, 93 = HM I, 437, 446 ; 65, s. 30 = HM III, 413 ; 82, 3 = HM IV, 320 ; ḤAN. II, 233 etc… 141 Cf. BUḪ. 82. 1 = HM IV, 320. 142 BUḪ. 59, 6 = HM II, 431 ; 82, 1 = HM IV, 319 ; ḤAN. I, 374‘ 382, etc… 143 ḤAN. V, 239. 316
144 Coran, XXXV, 1 ; cf. VI, 14 et XIV, 10. 145 Coran, XXX. 30. 146 Cf. Coran, VII, 172. 147 Coran, XLIII, 87. 148 ḤAN. IV, 126. 149 BUḪ. 4, 26 = HM I, 74 ; ḤAN. II, 241, 253, etc… 150 ḤAN. VI, 95. 151 ḤAN. II, 223, 333, etc… 152 Les compilateurs semblent avoir retenu surtout le ḥadīṯ contraire : « Il mangea de la viande, et pria sans faire d’ablution ». Toutefois, voir ABŪ DĀWŪD, 1, 75 ; TIR. 1, 58. 153 ḤAN. IV, 85, 86. 154 A‘nān- Tāğ, IX, 282 = aḫlāq (mœurs) ou nawāḥī (côtés). 155 Cf. Tarbī‘, ١٣٣ s. ḥūš. 156 ḤAN. IV, 85 ; V, 54, etc… 157 On n’a pas retrouvé ce ḥadīṯ. 158 Coran, VI, 38. 159 Coran, VI, 130. 160 Coran), V, 4. 161 Cf. Tarbī‘, ١٣٢ s. ḥinn. 162 Allusion au mauvais œil.
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163 Cf. Tarbī‘, ١٩٧ s. misḫ. 164 Cf. BUḪ. 59, 7 = HM II, 435 ; ḤAN. VI, 143, 330, etc… 165 BUḪ. 28, 7 = HM I, 588 ; 59, 16 = HM II, 456 ; ḤAN. I, 257 ; II, 52 ; III, 3. — Il est à noter que la liste des animaux n’est pas la même partout. Certaines remplacent le serpent par le scorpion, et presque toutes précisent : « le chien méchant » (‘aqūr). 166 Coran, XXVII, 20-21. 167 Texte : an lā ; Vulgate : allā. BAYḌĀWĪ, 502 : al-Kisā’i et Ya‘qūb b. Isḥāq lisent alā, avec le sens exclamatif. C’est la version reçue par Blachère, dont nous modifions la traduction en conformité avec le texte d’Ibn Qutayba. 168 Coran, XXVII, 22-25. 169 Coran, XXVII, 16. 170 Coran, XXVII, 18. 171 Coran, XVII, 44. 172 C’est la trad. à peine abrégée de Gen. VIII, 6-12. Seul le dernier trait n’est pas biblique. Sur ce trait, voir Tarbī‘ ١٣ ٣ s. ṭawwaqa. 173 Texte : ḥīna tawarraka l-nahār. L’expression est si insolite qu’on est en droit de suspecter le texte. On notera qu’on retrouve ce même passage dans Ma‘ārif, 7, avec ḥīna būrika ( ?) l-nahār. Il est permis de se demander si l’original ne comportait pas une traduction littérale du mithallek biblique (= Dieu déambule dans le jardin) faisant appel au verbe tahallaka (se balancer en marchant). Autre hypothèse, peut-être encore plus 318
plausible : tawarraka pourrait être la corruption d’une trad. littérale de lerūḥa hayyōm (à la chute du jour), à savoir ḥīna
tarawwaḥa l-nahār. Le problème reste posé. 174 Gen. II, 16-17 puis III, 1-19. On a indiqué les principales omissions par des points de suspension. On n’a pas de peine à constater toutefois à quel point cette traduction arabe de la Thora est fidèle. 175 Cf. Tarbī‘, 174 s. ‘anqā’. Tāğ, I, 410, est le seul à rapporter une opinion intéressante… et courageuse : d’après Ibn Durayd, c’est un de ces clichés n’ayant pas de sens précis et qu’on a fini par utiliser à tort et à travers. 176 Coran, XVIII, 50. 177 Ibn Dāya semble être pour Ibn Qutayba de la même racine que dā’. Or les dictionnaires ne rangent pas ce vocable sous dw’, mais sous d’y. 178 BUḪ. 34, 14, 33, 88 = HM II, 10, 18, 44 ; 48, 2, 5 = HM II, 164, 165, etc… ḤAN. I, 300 ; VI, 42, 160, 230, etc… 179 bayyāḍ : terres « blanches », c. à.d. incultes. Cf. Tāğ, V, 15 : arḍ bayḍā’≠ sawdā’ (qui porte des fruits). 180 ḤAN. III, 316, 353, etc. ; cf. III, 292, 304, 318, 335, etc… 181 La ‘umrat al-qaḍā’ (de la convention) eut lieu un an après la tentative manquée de Ḥudaybiyya. 182 Ḥawā’it : vergers, enclos plantés de palmiers ; Lisān, IX, 149. 183 ḤAN. VI, 293, 314. 184 Cf. BUḪ. 70, 23 = HM III, 666. 185 Coran, LIX, 9. 319
186 ḤAN. IV, 132. 187 Lisān, XVI, 239 : « ce n’est pas un mot arabe ». 188 C. à. d. des aliments dépourvus de graisse. 189 ṣināb : condiment composé de moutarde et de raisins secs ; Lisān, II, 19. 190 Coran, XLVI, 20. 191 ḤAN. I, 21. 192 Al-A‘maš est le transmetteur du ḥadīṯ en question. Il figure dans les isnād-s, aux réf. de la note 2, p. 159. 193 ḤAN. II, 187. 194 Matt. XX, 1-16. La première moitié de la citation est rigoureusement littérale. Les points de suspension signalent les omissions. La seconde moitié n’est qu’un résumé. Cf. LECOMTE, Citations. 195 ḤAN. I, 279, 310 ; II, 234, etc… 196 Il paraît s’agir d’une interprétation un peu sollicitée de la tradition célèbre : « Les actes ne valent que par l’intention » (BUḪ. 1, 1 ; 2, 41, etc…), car nulle part ce ḥadīṯ ne figure sous cette forme. 197 BUḪ. 64, 8, 12 = HM III, 76, 77, 90 ; ḤAN. I, 26 ; II, 31, 131 ; III, 104, 145, etc... 198 Coran, XXXV, 22. 199 Coran, XXVII, 80 ; cf. XXX, 52. 200 On n’a pas retrouvé cette expression. 320
201 P. ex. BUḪ. 3, 24 = HM III, 46 ; 16, 7 = III, 345 ; ḤAN. I, 26, etc… 202 Coran, XL, 46. 203 Coran, III, 169-170. 204 Yataṯannawn : se laissant plier. 205 Allusion à Coran III, 169-170, déjà cité. 206 BUḪ. 62, 10 = HM II, 611 ; cf. ḤAN. II, 413 ; TIR. 46, 29. 207 ḤAN. II, 288 ; BUḪ. 80, 38 = HM IV, 257. 208 BUḪ. 96, 26 = HM IV, 495 ; ḤAN. II, 185, 288, 414, etc… 209 BUḪ. 56, 25 = HM IV, 293 ; 80, 37 = HM IV, 256 ; ḤAN. II, 185, 288 etc… 210 Coran, XXXV, 19 = XL, 58 ; cf. VI, 50 = XIII, 16. 211 Coran, XIII, 16 = XXXV, 20. 212 Coran, XXXV, 21. 213 Coran, XXXV, 22. 214 ḥawṣāla, pl. ḥawāṣil, « gésier ». Lisān, XIII, 163 = Tāğ, VII, 279. Voir ḤAN. I, 266. 215 ‘illiyūn, Tāğ, X, 251. Voir aussi BLACHÈRE, trad., p. 642. 216 Lisān, XVII, 65 ; Tāğ, X, 251. D’après Tāğ,
‘illiyyūn et siğğīn se font vis-à-vis. 217 ḤAN. III, 455, 456. 218 Cf. ḤAN. III, 24, 34, 36 ; IV, 118, 121, etc… 321
219 Cf. ḤAN. III, 399 (première partie seulement). 220 Cf. BUḪ. 10, 56 = I, 235 ; ḤAN. V, 159. 221 Cf. ḤAN. III, 24, 34, 84, 163, etc… 222 Ce ḥadīṯ figure dans Lisān, X, 270 et Tāğ, V, 540. 223 BUḪ. 46, 33 = HM II, 153 ; ḤAN. I, 79, 188 ; II, 163, 193, etc… 224 ḤAN. IV, 226 ; cf. BUḪ. 92, 9 = HM IV, 481. 225 Cf. BUḪ. 87, 2 = HM IV, 407 ; cf. aussi Ḥan. II, 100. 226 On n’a pas retrouvé ce ḥadīṯ. 227 BUḪ. 87, 2 = HM IV, 407 ; 92, 10 = HM IV, 481 ; ḤAN. IV, 401. 228 Coran, XLIX, 9. 229 ḤAN. I, 111 ; Cf. I, 83, 88, 136, 146, 156. 230 Voir l’index, s. ğadd. 231 BUḪ. 88, 2 = HM IV, 425 ; ḤAN. I, 217, etc… Cf. ḤAN. I, 247. 232 Cette anecdote ne figure pas dans le ḥadīṯ. 233 Il paraît s’agir ici de la formule de répudiation triple prononcée en une seule fois — ce qui est unanimement réprouvé : « Tu m’es désormais interdite (harām) ; [considère que j’ai prononcé la formule] trois fois ». Cf. BUḪ. 68, 7 = HM III, 612. 234 Coran, LXV, 2. 235 Coran, II, 282. 236 On sait qu’une révélation (Coran, III, 123) intervint pour reprocher au Prophète d’avoir fait du qunūt une formule de 322
malédiction à l’égard d’individus déterminés et cités nommément. Cf. EI, s. Ḳunūt. 237 Il s’agissait du cas d’un homme ayant tué une femme : le talion fut appliqué, mais la diya de la femme étant la moitié de celle de l’homme, les ayants-cause durent reverser la différence. 238 En vertu du même principe que ci-dessus, celui d’une péréquation entre talion et prix du sang. 239 La question de savoir si les Prières des Fêtes doivent avoir lieu au muṣallā ou à la mosquée est très controversée. Cf. EI, III, 797, s. Muṣallā — (WENSINCK). 240 Coran, LXXXVII, 6. 241 Coran, VIII, 68. La « révélation précédente » pose un problème. R. BLACHÈRE suppose qu’il peut s’agir d’un passage perdu (p. 210). 242 ḤAN. I, 30, 32. 243 Coran, XVII, 74-75. 244 Coran, XIX, 13. BLACHÈRE : « tendresse ». Ce mot ne paraît pas offrir de difficulté. 245 Coran, IX, 114 = XI, 75. BLACHÈRE : « longanime ». 246 Coran, LXIX, 36. BLACHÈRE, transcrit en supposant qu’il s’agit d’un nom étranger de sens obscur. Muškil, 48 : « c’est ce qui coule du corps des suppliciés de l’enfer ». 247 Coran, XVIII, 9. BLACHÈRE transcrit. Ce peut être un nom propre attribué soit au chien des sept dormants, soit à la cité où ils vivaient.
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248 BUḪ. 23, 81 = HM I, 438 ; 63, 40 = HM III, 36 ; cf. BUḪ. 81, 51 = HM III, 310. 249 Coran, IX, 113. 250 Coran, XXVIII, 56. 251 Cf. ḤAN. IV, 373, 374. 252 Sakīna. Ce membre de phrase confirme la trad. BLACHÈRE par « présence divine ». Cf. trad. BLACHÈRE, index, s.v. 253 BUḪ. 62, 6 = HM II, 597 ; ḤAN. II, 339 ; VI, 55. 254 Abū Ḥasan = ici ‘Alī. Habituellement : Abū l-Ḥasan. 255 Coran, XLVI, 15. 256 Coran, II, 233. 257 MĀLIK, 54, 35 ; Ḥan. II, 186, 214. 258 Voir p. ex. ABŪ DĀWŪD, 11, 96. 259 Voir p. ex. BUḪ. 61, 25 = HM II, 570. 260 Coran, V, 75. 261 Coran, XXV, 7. 262 BUḪ. 86, 7 = HM IV, 377. 263 BUḪ. 86, 13 = HM IV, 380. 264 Coran, V, 38. 265 DĀRIMĪ, intr., 48. 266 BUḪ. 56, 152 = HM II, 352 ; ḤAN. III, 107, 163, etc…
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267 Sur idāwa, voir Tāğ, X, 12, s.v. et II, 163, s. saṭīḥ. 268 En d’autres termes, les Arabes — et semble-t-il aussi les Persans — n’hésitent pas à proférer les imprécations les plus violentes pour les motifs les plus futiles. 269 Ḥan. III, 453. 270 Ce ḥadīṯ se retrouve dans Lisān, XVII, 79 = Tāğ, IX, 237. 271 Ce ḥadīṯ se trouve dans Tāğ, III, 387, s. ‘iḏār. 272 Tāğ, IX, 238. 273 Voir Lisān, XVII, 80. 274 Voir Lisān, XVII, 80, où tout ce passage figure presque dans les mêmes termes. 275 Coran, XCIII, 6-8. 276 Allusion à Coran, VI, 152 ; XVI, 125 ; XXIII, 97 ; XXIX, 44 ; XLI, 33. 277 Coran, XXI, 35. 278 BUḪ. 46, 30, = HM II, 151 ; 74, 1 = HM IV, 86 ; 86, 1 = HM IV, 375 ; 86, 6 = HM IV, 377. 279 BUḪ. 60, 47 = HM II, 516 ; ḤAN. III, 135, 224. 280 Coran, XII, 17. 281 Coran, LXIII, 3. 282 Coran, II, 62 ; cf. XXII, 17. On notera que le texte porte à deux reprises : « man āmana minhum billāh » ; or minhum ne figure pas dans la Vulgate. Il y a visiblement confusion avec II, 126, où figure minhum, mais non la première moitié du verset II, 325
62. Il est difficile de dire dans quelle mesure cette confusion est imputable à Ibn Qutayba. 283 Il semble qu’il faille compléter le texte ainsi ; à moins de supposer que la négation lā est de trop, ou simplement que le membre de phrase « li’an-nahum lā yu’minūna bi-llāh wa-l-yawm
al-aḫir » a été recopié une fois de trop à une ligne d’intervalle. 284 Irhāṣ = iṯbāt ; Tāğ, IV, 400. 285 BUḪ. 86, 20 = HM IV, 384. 286 BUḪ. 78, 29 = HM IV, 151 ; ḤAN. I, 387 ; II, 288, 336, etc… 287 ḤAN. III, 154. 288 Cf. BUḪ. 2, 21 = HM I, 19. 289 ḤAN. II, 418 ; V, 381 ; VI, 382. 290 Cf. BUḪ. 2, 1 = HM I, 11, où une sentence analogue est attribuée à ‘Umar b. ‘Abd al-‘Azīz. 291 Cette sentence ne paraît pas avoir été retenue par les compilateurs. 292 Cf. TIR. 34, 27. 293 ḤAN. II, 75 ; IV, 404… ; V, 232, etc… 294 ḤAN. VI, 35, 43, 67, etc... 295 BUḪ. 4, 64, 65 = HM I, 92, 93 ; ḤAN. III, 485 ; VI, 47. 296 BUḪ. 72, 30 = HM IV, 20 ; ḤAN. I, 227, etc… 297 ḤAN., IV, 310, 311.
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298 Tāğ, I, 152, précise qu’il s’agissait de peaux « en cours de tannage » (fī dibāġihā) ; = Lisān, I, 211. 299 Cf. Lisān, I, 211. 300 Ši‘r, 95. Texte : wa-lāqat ; Ši‘r : fa-lāqat. 301 ḤAN. I, 227. 302 ḤAN. VI, 101. 303 Tāğ, V, 221 : vêtement léger de laine, de soie ou de lin servant d’izār. Tāğ ajoute que dans ce ḥadīṯ, ‘Ā’iša l’emploie au figuré : il s’agirait ici d’un vêtement de laine quelconque. DOZY, s.v. : espèce de jupe traînante. 304 Cf. BUḪ. 6, 4, 21, 22 = HM I, 111, 119, 120, où l’héroïne de cette histoire est Zaynab, et non ‘Ā’iša. 305 BUḪ. 64, 56 = HM III, 196 ; ḤAN. II, 419, etc… 306 MUS. 44, 61 ; cf. ḤAN. VI, 99, 199. 307 Lisān, XIII, 295. On appellerait muraḥḥal tout vêtement sur lequel serait figuré un raḥl (selle). On préfère la définition d’Ibn Qutayba, un peu moins restrictive. 308 Ḏū Arwān ou Ḏarwān. Lisān, XVII, 52 et Tāğ, IX 231 ne savent de ce puits que ce qu’en dit Ibn Qutayba. C’est un puits de Médine « bien connu ». 309 BUḪ. 59, 11 = HM II, 446 ; 76, 47 = HM IV, 85, etc… ; ḤAN. VI, 57 ; cf. ḤAN. IV, 367, etc… 310 Coran, XLI, 42. 311 Coran, LXXII, 26-27.
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312 Texte : tamā’im (amulettes) ; l’éd. signale une leçon namā’im qu’on a adoptée car d’une part le mot est associé à kaḏib (mensonge) et d’autre part namīma est considéré par RĀZĪ comme une forme de siḥr (sortilège). Cf. Tarbī‘, ٢٠٥, et EI, s. Siḥr, IV, 431. 313 Coran, XX, 66. 314 Coran, II, 102. 315 BAYḌĀWĪ ne signale pas cette lecture. Il signale toutefois « malikayn » (les deux rois). D’autre part, il mentionne une autre interprétation de « malakayn » il s’agirait de deux hommes ainsi appelés pour leur sainteté (21 in fine). Sur Hārūt et Mārūt, cf. index. 316 Il s’agissait donc pour les Mu‘tazilites de ramener ce verset à une interprétation matérialiste. 317 Coran, CXIII, 1-4. 318 EI, s.v. Zakariyā, IV, 1270. Le Zacharie de l’Évangile est visiblement confondu avec le petit prophète de la Bible. 319 EI, s.v. Yaḥyā, IV, 1211. C’est une réminiscence de l’épisode d’Hérodias, Matt., 14 ; Marc, 6, 17 sqq. 320 Coran, IV, 157 ; les commentaires sont formels : šubbiha
lahum fait allusion à une substitution. P. ex. BAYḌĀWĪ, 135. 321 BUḪ. 58, 7 = HM II, 412 ; 64, 41 = HM III, 171 ; ḤAN. II, 451. 322 BUḪ. 64, 83 = HM III, 238. Cf. muškil, 118. 323 Texte : ‘alā l-nabiyyīn, qui est incompatible avec ce qui précède. Il faut lire : ‘alā-l-nabī.
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324 Coran, XXII, 52. 325 Cette anecdote est [relatée en détail dans BAYḌĀWĪ, 447, après le commentaire du verset. Il s’agit d’un verset supplémentaire (cf. trad. BLACHÈRE, p. 561, 20bis et 20ter) que le Démon aurait inspiré au Prophète récitant la sourate LIII (l’Étoile). 326 Coran, XXII, 52, suite. 327 Coran, XXII, 53. 328 Coran, II, 255, dont les vertus prophylactiques sont célèbres. Cf. BUḪ., 59, 11 = HM II, 447 ; 40, 10 = HM II, 87 ; 66, 10 = HM III, 529. — Cf. ḤAN. V, 128. 329 Coran, XXXVIII, 41. 330 Texte : laysa hāḏā bi-munkar min ta’wīlātihim ; var. signalée par l’éd. : laysa hāḏā bi-awwali ta’wīlātihim. La trad. proposée est conforme au sens, mais conjecturale en l’absence d’un texte sûr. Peut-être faut-il lire : bi-ankar min,. (ce n’est pas plus détestable, plus absurde que…). 331 Allusion à Coran, XXXVIII, 34 où les commentateurs expliquent que le « fantôme » (ğasad) était un démon. Cf. WENSINCK, Hwb. s. Sulaiman, 702 ; BAYḌĀWĪ, 603 ; BLACHÈRE, Coran, 485 note 33. 332 Allusion à Coran, XXXVIII, 36-37. 333 Légende célèbre, sur laquelle voir Tarbī‘, 46, d’après EI, IV, 1309 (HARTNER). 334 C.-à-d. probablement : changez de méthode ! 335 Variante : Muḥammad b. Muslim b. Sālim al-Ṭā’ī.
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336 BUḪ. 60, 50 = HM II, 521. 337 Cf. EI, II, 289, s. Hārūt et Mārūt (WENSINCK), qui signale que d’après QAZWĪNĪ (‘Ağā’ib al-maḫlūqāt, éd. Wüstenfeld, 1849) ces deux anges sont restés à Bābil après leur aventure avec Vénus pour y enseigner la magie ; SAMARKANDĪ (Bustān
al-‘ārifīn, Qazan 1298/1880, dans PELLAT, Tarbī‘, 46, s. azZuhara) dit seulement que H. et M. restèrent à Bābil, emprisonnés. La version de Qazwīnī est tout à fait conforme à l’anecdote fantastique d’Ibn Qutayba 338 Cf. ḤAN. I, 184 et surtout ḤAN. II, 182, 212. 339 BUḪ. 34, 102 = HM II, 51 ; 46, 31 = HM II, 152 ; ḤAN. II, — 240 etc… 340 Cf. BUḪ. 61, 18 = HM II, 548 ; 65, s. 17, n. 5 = HM III, 364. 341 Coran, XLIII, 61. Ce passage paraît confirmer la lecture ‘alam
— au lieu de ‘ilm de la Vulgate — signalée par BAYḌĀWĪ, 653, avec une certaine faveur, et reçue par BLACHÈRE, 523. 342 Il est difficile de déterminer le jeu de ‘alam - ‘ilm dans ce passage. L’éd. a cru pouvoir vocaliser partout ‘alam, sauf dans le verset. Si Ibn Qutayba lit ‘ilm (ce qui est rien moins que sûr), il est clair qu’il le prend dans le sens de ‘alam. 343 Ibn Qutayba fait ici d’une pierre deux coups. En réfutant les Mu‘-tazilites, il réfute aussi le dogme de la divinité du Christ. 344 BUḪ. 38, 3 = HM II, 74 ; 39, 3 = HM II, 77, etc… ḤAN. II, 290, 380, etc… 345 BUḪ. 65, s. 33, ch. 1 = HM III, 416 ; 69, 15 = HM III, 652 ; ḤAN. II, 287, 290, etc…
330
346 BUḪ. 69, 15 = HM III, 652. 347 ḤAN. III, 61. 348 C.-à-d. 4 fois, puisque quatre témoins à charge sont requis. Cf. WENSINCK, Hwb., 826, s. Zinā’. 349 BUḪ. 53, 5 = HM II, 234 ; 54, 9 = HM II, 246 ; 83, 3 = HM IV, 331, etc… 350 MĀLIK, 41, 12. 351 IBN MĀĞA, 21, 36. 352 Ce dernier trait ne figure pas dans le ḥadīṯ de Mā‘iz, ḤAN. III, 61. Toutefois, voir un exemple de la mansuétude du Prophète en cas de lapidation dans ḤAN. IV, 66. 353 Tawqīt peut être synonyme de taqdīr sans aucune idée de temps. Cf. LAOUST, Qudāma, 255, note 1, qui renvoie au Šarḥ al-
Muġnī, de ŠAMS AL-DĪN B. QUDĀMA, en marge du Muġnī de MUWAFFAQ AL-DĪN B. QUDĀMA, Caire 1341-1348 / 1922-1930, IX, 621, 625. 354 Coran, IV, 25. 355 Allusion à Coran, II, 71, où tuṯīru a le sens de « remuer la terre ». 356 C’est le mot employé dans Coran, II, 196. 357 Le verset se termine par « comme esclaves croyantes ». 358 Puisqu’elles sont opposées aux esclaves. 359 ḤAN. IV, 186, 238 ; V, 266. 360 Coran, II, 180. 331
361 En réalité plusieurs versets : IV, 7-12. 362 Coran, IV, 13-14. 363 BUḪ. 67, 28 = HM III, 560. 364 BUḪ. 52, 7 = HM III, 211 ; 67, 21, 117 = HM III, 555, 602… ḤAN. I, 275, 290, 329… ; IV, 4, 5, etc… 365 Coran, IV, 23. 366 Coran, IV, 23. 367 Coran, IV, 24. 368 Coran, II, 106. 369 Les docteurs musulmans se plaisent à mettre l’accent sur l’allègement apporté par le Coran par rapport aux prescriptions antérieures, notamment de la Bible. Cf. index, s. ḥanīfiyya. 370 Par « Coran », il faut évidemment entendre ici « destiné à être récité ». 371 DĀRIMĪ, intr., 48. 372 Coran, LIX, 7. 373 ḤAN. IV, 4, 5 ; cf. Ḥan. I, 432. C’est à dire : il faut un allaitement plus prolongé. 374 Cf. EI, I, 243, s. ‘āḳila. 375 Très nombreux ḥadīṯs. Voir WENSINCK, Handbook, s. Clothes, p. 45. Notamment BUḪ. 51, 27 = HM II, 198, etc… 376 BUḪ. 56, 91 = HM II, 321 ; 77, 29 = HM IV, 108 ; ḤAN. III, 122, 180, etc… 332
377 BUḪ. 87, 8 = HM IV, 408. 378 BUḪ. 56, 94 = HM II, 376 ; cf. aussi 63, 45 = HM III, 44 et la note des trad. 379 BUḪ. 41, 15 = HM II, 97 ; cf. ḤAN. III, 304, 327, 338, etc… 380 BUḪ. 25 ; 81 = HM I, 533, etc… C.-à-d. : « Je me désacraliserais maintenant » (la scène se passe après la ‘umra, avant d’entreprendre la visite à Minā et de sacrifier les victimes). Cf. index, s. ihlāl. 381 Cf. BUḪ. 9, 24 = HM I, 199, etc… 382 ḤAN. III, 237, 250. 383 Ibid. 384 Ibid. et IV, 406. 385 Ibid. et cf. BUḪ. 74, 3 = HM IV, 35. 386 Index, s. kalāla. 387 Cf. ḤAN. IV, 295, 301. 388 Index, s. ẓihār. 389 On n’a retrouvé que des ḥadīt-s où au contraire le Prophète prend position. P. ex. ABŪ DĀWŪD 13, 17. 390 BUḪ. 26, 10 = HM I, 573 ; cf. BUḪ. 25, 17 = HM I, 499. 391 Ce ḥadīṯ figure dans Lisān, IX, 260 : « Il a ordonné de faire passer le turban sous le menton (talaḥḥī) et non le contraire (iqti‘āṭ) ».
333
392 Le mot ğallāla s’applique aux animaux qui se nourrissent de détritus ou de fiente ; Lisān, XIII, 126. ḤAN. I, 219, 226, 241, etc…. 393 P. ex. BUḪ. 34, 25 = HM II, 15, etc… 394 BUḪ. 59, 20 = HM II, 406 ; 72, 28 = HM III, 18, etc… 395 BUḪ. 72, 28 = HM III, 19 ; 76, 57 = HM IV, 90 ; ḤAN. I, 147, 244, 326, III, 323, etc… 396 Coran, VI, 145. 397 Coran, V, 3. 398 Coran, IV, 101. 399 Notamment en voyage ; BUḪ. 18, 1, 5, 11 = HM I, 356, 358, 360 ; ḤAN. I, 30, 215, etc… 400 Coran, V, 6. Sur la friction des chaussures, très nombreux ḥadīṯ-s ; voir Handbook, s. wuḍū, 262. P. ex. BUḪ. 4, 48 = HM I, 86. 401 DĀRIMĪ, introd., 48. 402 Litt. : « qui a des pollutions » BUḪ. 10, 161 = HM I, 284, etc… ; ḤAN. III, 6, 30, etc… 403 Cf. BUḪ. 11, 5 = HM I, 290 ; ḤAN. I, 29, 45 ; II, 424 etc… 404 ḤAN. IV, 78. 405 P. ex. BUḪ. 5, 14 = HM I, 103, etc… Nombreux ḥadīṯs. Voir Handbook, 184, s. Perfumes. 406 Cf. BUḪ. 11, 7 = HM I, 291 ; ḤAN. III, 65, etc… 407 DĀRIMĪ, 23, 1 ; Ḥan. IV, 151, IV, 151, etc… 334
408 Hāḏihi l-maṣāḥif : il peut s’agir des livres chrétiens ou juifs. Le mot muṣḥaf désigne habituellement un livre révélé, mais parfois aussi toute espèce de livre. Au § 56, il désigne les ouvrages d’Aristote. 409 Cf. supra. § 200. 410 Allusion probable aux miracles des prophètes antérieurs, notamment Jésus. Les Musulmans orthodoxes ne paraissent pas avoir attribué à Muḥammad ce type de miracles. 411 BUḪ. 62, 6 = HM II, 597. 412 ḤAN. IV, 172, 173. 413 BUḪ. 61, 25 = HM II, 61. Sur tous ces points, voir § 40 c 37 a. 414 Coran, LVI, 77-79, 415 BUḪ. 56, 129 = HM II, 343 ; ḤAN. II, 6, 10, 63, etc… 416 Cf. BUḪ. 78, 12 = HM IV, 143. 417 Coran, VII, 34 = X, 49 = XVI, 61. 418 On n’a pas trouvé trace de cette anecdote. 419 On n’a pas retrouvé ce ḥadīṯ. 420 Coran, XVI, 40. 421 Ce qui prouve à l’évidence que les Mu‘tazilites ne sont en rien partisans du libre arbitre. 422 TIR. 5, 28. 423 Cf. ḤAN. II, 161, 191, où le ḥadīṯ est plus précis, et confirme la réfutation du § 226.
335
424 BUḪ. 97, 24 = HM IV, 598 sqq. ; Ḥan. IV, 360, etc… 425 Coran, VI, 103. 426 Coran, XLII, 11. 427 Coran, 143. 428 Coran, XXV, 45. 429 Coran II, 259 : « qāla a‘lamu anna-llāha… » (Vulgate) ; Texte du Muḫtalif : « a lam tara anna-llāha… » Sur cette importante variante, qui ne saurait être en aucune façon une erreur de copiste, puisque la démonstration d’Ibn Qutayba porte justement sur ra’ā / ‘alima, on prépare un article. 430 Voir notamment IBN MĀĞA, 8, 9, 16 (sadaqat al-ibil al-
baqar) et DĀRIMĪ, 3, 4 (zakāt al-ġanam). 431 Zakāt al-nāḍḍ. Voir le ḥadīṯ dans Tāğ, V, 90 : « Le Prophète percevait la zakāt sur les espèces ». 432 Voir § 216d. 433 Allusion aux entretiens de Moïse avec le Seigneur sur le Sinaï, Cf. notamment Coran, VII et XXVIII. 434 Allusion à Coran, XXVIII, 30. 435 C’est à dire la période au cours de laquelle Moïse séjourna au Sinaï et où Dieu se manifesta à lui. 436 Suite de Coran, VII, 143. Le contexte permet de corriger en ce sens la trad. BLACHÈRE : « si elle s’immobolise… ». En fait, istaqarra signifie ici « demeurer ferme sur sa base, ne pas bouger, ne pas être ému ».
336
437 Lisān, XVIII, 164 ; mais le verbe ğalā est également intransitif ; « se dévoiler ». 438 Cf. note 811. Ce passage laisse à penser qu’une lecture a‘lamu, primitivement -‘lam, inspirée par l’exégèse mu‘tazilite, a pu prévaloir sur une lecture a lam tara, plus orthodoxe. 439 Matt. V, 7(8. 440 Coran, LXXV, 22-23. 441 Coran, LXXXIII, 15. 442 ḤAN. II, 173 ; VI, 182, 251, 310. 443 Ši‘r, 591. « Il » représente le chamelier et « eux » les chameaux. 444 BUḪ. 97, 16, 26, 36 = HM IV, 590 sqq. ; 609, 629. 445 Coran, XXXIX, 67. 446 BUḪ. 65, s. 11, ch. 2 = HM III, 344 ; ḤAN. II, 242, 313, 500. Sur saḥḥā’, voir Tāğ, II, 160 où ce ḥadīṯ figure également. 447 L’iwāna est un puits bien connu que Lisān, XVI, 183, et Tāğ, IX, 132 localisent tous deux en citant le vers. 448 BUḪ. 63, 10 = HM III, 8, etc… 449 Ibid. et 56, 28 = HM II, 294. 450 Ibid. et MUS. 36, 172. 451 Coran, XIII, 5. 452 Cf. ḤAN. II, 268, 409, 518.
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453 Coran, XXXIII, 9. 454 On n’a pas retrouvé ce ḥadīṯ. Mais voir p. ex. BUḪ. 61, 2 = HM II, 536, où sont vantées les vertus du Yémen. 455 On sait que les Anṣār (Aws et Ḫazrağ) sont unanimement considérés comme de souche yéménite. Cf. EI, II, 993, s. Ḵhazraḏj. 456 On a retenu la leçon du texte : tuḥabbabūn wa
tubağğalūn, ignorée par les recueils de ḥadīṯ, qui ne connaissent que tağbunūn wa tabḫalūn (?). ḤAN. VI, 409 ; cf. ḤAN. IV, 172. 457 BUḪ. 65, s. 44, ch. 3 = HM III, 441 ; ḤAN. I, 380, 431, 441. 458 Ce vers serait de ZUHAYR ; Lisān, XVI, 89. 459 D’après KAZIMIRSKI : solsola imbricata. 460 Al-Inğīl al-ṣaḥīḥ. On incline à voir là la traduction de l’expression : « le Saint Évangile » dans le texte original d’où fut traduit l’exemplaire dont disposait Ibn Qutayba. Cf. LECOMTE, Citations, 44-45. 461 Matt. V, 33-37. Texte remarquable de fidélité à l’original. 462 Ce ḥadīṯ se retrouve dans Tāğ, II, 110. 463 On trouve plutôt ḏirā‘ al-ğabbār. Voir § 101. ḤAN. II, 334, 547. 464 Coran, L, 45. 465 SUYŪṬĪ, Ğāmi‘, 151. 466 Cette réflexion de ‘Ā’iša ne paraît pas avoir été retenue par les compilateurs de ḥadīṯ. 467 ḤAN. V, 243 ; cf. IV, 66 ; V, 58. 338
468 Coran, CII, 143. Toute cette argumentation fait double emploi avec celle du n° LII. 469 Coran, XVII, 60. 470 On n’a pas retrouvé ce trait, qui pourrait bien avoir été forgé pour la circonstance. 471 Coran, LXXXI, 23. 472 BUḪ. 59, 7 = HM II, 436 ; 65, s. 53, ch. 2 sqq. = HM III, 456 ; ḤAN. I, 395, 460. Tous ces ḥadīṯ-s attribuent à Gabriel six cents ailes seulement. 473 Cf. ḤAN. IV, 181. 474 Coran, XVII, 1. 475 Ẓāhir. Importante prise de position sur l’exégèse coranique. 476 Cf. BUḪ. 79, 1 = HM IV, 214 ; ḤAN. II, 244, 251, 310. 477 Coran, XLII, 11. On a ici quelque peu torturé le français afin de rendre intelligible la démonstration qui suit. 478 En somme, il faudrait distinguer miṯl, qui n’est qu’une kināya désignant le sujet lui-même, et naẓīr, qui désigne un « semblable », c’est-à-dire un « autre ». 479 Le texte porte kakamā, où ka- fait évidemment double emploi avec -kamā. On admettra que cette tournure est aussi insolite que la traduction qu’on lui donne ici pour les besoins de la cause. Le rāğiz serait AL-ḤAṬṬĀM AL-MUĞA-ŠI‘Ī. Pour le commentaire de ce vers, voir IBN HIŠĀM, Muġnī, avec le commentaire de DASŪQĪ, Caire 1358, 193. 480 Nūr, sic. 339
481 Gen. I, 25 et II, 7. 482 Réminiscence d’Exode XVII, 6, épisode du rocher d’Horeb. 483 ḤAN. IV, 11. 484 MĀLIK, 56, 3. 485 Il s’agit d’ABŪ ḎU’AYB
AL-HUḎALĪ, ḪUWAYLID B. ḪĀLID,
sur lequel
voir Ši‘r, 635-642. 486 Coran, LII, 30. 487 Coran, XLV, 24. 488 BUḪ. 97, 50 = HM IV, 643 ; ḤAN. II, 251, 316, 413… ; III, 40, 127, etc… 489 Coran, XXII, 51 = XXXIV, 5. 490 ḤAN. VI, 296. 491 P. ex. BUḪ. 10, 163 = HM I, 287. 492 Coran, XXIV, 31. 493 C.-à-d. des yeux et des mains. 494 Coran, XXXIII, 53. 495 ḤAN. VI, 49, 208, 237. Le cas auquel s’applique cet adage est bien défini ici. 496 BUḪ. 34, 64 = HM II, 33 ; ḤAN. I, 430, 431 ; II, 248, 460, 481. 497 BUḪ. 36, 2 = HM II, 60 ; ḤAN. VI, 10, 390. 498 ḤAN. IV, 388, 390 ; V, 8, 12, etc… 499 BUḪ. 90, 14 = HM IV, 446. 340
500 Texte : muttaṣilāni, wa ‘alā annahumā ; il faut supprimer wa. 501 BUḪ. 59, 16, 17 = HM II, 456 sqq. ; 76, 58 = HM IV, 91 ; ḤAN. II, 229… ; III, 67. 502 Ce passage rappelle curieusement le Tarbī‘, qui pourrait bien être visé. 503 Texte : yasta‘idd ; l’éd. propose yastatir, sans réf. à un manuscrit. On peut penser également à yastamidd, mais la leçon du texte est claire. 504 BUḪ. 60, 8 = HM II, 473 ; 81, 53 = HM IV, 315 ; ḤAN. I, 235, 453 ; V. 50. 505 Sur cette histoire, cf. Tarbī‘, s. ‘Uyayna… p. 44, et EI, IV, 874 — (VACCA), s. Ṭulayḥa. 506 Coran, IX, 101. 507 Coran, XLVIII, 29. 508 Coran, XLVIII, 18. 509 BUḪ. 61, 25 = HM II, 557. 510 L’expression n’est pas très claire. Il peut y avoir une allusion aux prophéties que les Musulmans prétendent découvrir dans les Écritures antérieures relativement aux personnages de l’Islam. P. ex. BUḪ. 34, 50 = HM II, 27. — On pourrait aussi interpréter : « qu’il leur trouve des termes de comparaison dans la Thora et l’Évangile ». Ce dernier sens serait confirmé par le § 41 ≠ 36 in
fine, où l’expression ḍaraba lahu maṯalan signifie nettement : « imaginer quelque chose à titre de démonstration ou d’exemple ».
341
511 Sur Moïse-Adam, BUḪ. 60, 31 = HM II, 504… ; ḤAN. II, 248 etc… Les traditionnistes ne paraissent pas avoir retenu une discussion sur ce sujet entre Abū Bakr et ‘Umar. 512 Texte : na‘tadd (?). Nous lisons na‘tadī. 513 Voir index, s.v. 514 BUḪ. 2, 15 = HM I, 17 ; ḤAN. II, 56, 147, 392, etc... 515 Coran, IX, 103. 516 Coran, XXV, 77. 517 Coran, IX, 103. On peut se demander s’il n’y a pas ici une phrase recopiée deux fois à deux lignes d’intervalle. 518 Coran, XXIII, 56. 519 Divers ḥadīṯ-s affirment que le prélèvement de la ṣadaqa ne diminue en rien le patrimoine, car il s’accroît d’autant dans l’autre monde ; ḤAN. II, 235, 438. 520 BUḪ. 60, 54 = HM II, 533 ; ḤAN. IV, 121, 122 ; V, 273. 521 ḤAN. IV, 161. 522 ABŪ DĀWŪD, 2, 56 ; cf. ḤAN. V, 147. 523 Ces paroles d’Ibn ‘Umar ne paraissent pas avoir été retenues. 524 Il semble que le sujet de cette phrase soit Sulaymān, s’adressant à Ibn ‘Umar dans le troisième ḥadīṯ. 525 Cf. BUḪ. 4, 75 = HM I, 97 ; ḤAN. II, 392 ; III, 55. 526 ABŪ DĀWŪD, 1, 88 ; cf. ḤAN. I, 16, 17, 44, etc… 527 ḤAN. VI, 43. 342
528 BUḪ. 4, 58 = HM I, 91 ; 78, 80 = HM IV, 181. 529 Cette version n’a pas été retenue par les compilateurs. 530 BUḪ. 30, 33 = HM I, 621 ; ḤAN. VI, 46, 193, etc… 531 NASĀ’Ī, 22, 53. 532 ḤAN. IV, 24, 426, 431, etc… 533 ḤAN. IV, 414. 534 P. ex. BUḪ. 30, 24 —= HM, I, 616. 535 Les compilateurs ne paraissent pas avoir retenu ce ḥadīṯ. 536 BUḪ. 6, 5 = I, 112 ; 30, 23 = HM I, 615 ; ḤAN. VI, 40, 44, 98, 126, 156, etc… 537 BUḪ. 4, 5 = HM I, 67 ; 19, 16 = HM I, 372 ; 61, 24 = HM II, 554 ; ḤAN. I, 220, 278, etc… 538 On n’a pas retrouvé ce ḥadīṯ relatif aux chèvres. 539 Cf. ḤAN. V, 352 pour chevaux et chameaux ; II, 436 pour moutons. 540 Coran, LVI, 21. 541 Le mot idām désigne toute nourriture ou condiment à manger avec du pain : Tāğ, VIII, 181, où se trouve la première partie du ḥadīṯ. La seconde se trouve dans Tāğ, X, 282, s. fāġiya. 542 ḤAN. II, 436. 543 BUḪ. 23, 33 = HM I, 416 ; ḤAN. IV, 414, 437 ; VI, 39, 57 etc… 544 Coran, VI, 164 = XVII, 15 = XXXV, 18 = XXXIX, 7 = LIII, 38. 545 Coran, XLV, 26. 343
546 Coran, XXIII, 12-16. 547 Coran, II, 185. 548 Il s’agit de la vermine, ou encore d’une blessure ; BAYḌĀWĪ, 43. 549 Coran, II, 196. 550 Coran, LXV, 2. 551 Coran, II, 282. 552 Coran, IV, 93. 553 Coran, LVIII, 3. 554 Les passages coraniques relatifs à ces matières sont en effet recoupés et complétés par le ḥadīṯ. Notamment en ce qui concerne le rituel de la Prière pour lequel le Coran est assez laconique, mais que le ḥadīṯ expose abondamment et minutieusement. Cf. WENSINCK, Hwb., s. Salāt, et le même, Handbooks. Prayer(s), où cette rubrique ne comporte pas moins de 15 colonnes (à titre de comparaison, la rubrique Ḳur’ān du même Handbook ne compte que 8 colonnes). 555 Coran, XL, 46. 556 Coran, XIX, 62. 557 Traduction conjecturale. Cette phrase comporte deux démonstratifs, hāḏā et ḏālika dont la valeur ne paraît pas respectée. 558 Ta’wīl muškil al-Qur’ān, Caire 1373/1954 559 Coran, LII, 47. 560 BUḪ. 92, 26 = HM IV, 495 ; ḤAN. II, 185, 288, 414 etc… 344
561 P. ex. BUḪ. 80, 38 = HM IV, 257. 562 P. ex. BUḪ. 80, 39 = HM IV, 257. 563 P. ex. BUḪ. 80, 37 = HM IV, 256. Il semble au reste qu’il soit possible de trouver toutes sortes de combinaisons de ces diverses formules. 564 ḤAN. III, 126, IV, 288. 565 BUḪ. 3, 24 = HM I, 46 ; 4, 37 = HM I, 80, etc… 566 Il ressort de ce passage que le mot wāzira ne désigne pas nécessairement l’âme pécheresse pour Ibn Qutayba. 567 Cf. ḤAN. I, 26, 36, etc… 568 BUḪ. 23, 89 = HM I, 445 ; ḤAN. V, 39. Il s’agit de deux hommes enterrés côte à côte et dont le Prophète déclare qu’ils sont punis l’un pour sa mauvaise langue (ġība), l’autre pour sa façon d’uriner malproprement (bawl). 569 Cf. Coran, LIII, 38, et comparer VI, 164. Voir aussi tous les passages relatifs au châtiment de Sodome et Gomorrhe, BLACHÈRE, Coran, index, s. Loth ; réminiscences de Gen. XVIII et XIX. 570 Cf. ḤAN. III, 499 ; IV, 163, etc… 571 Coran, VIII, 25. 572 Coran, XXX, 41. 573 On n’a pas retrouvé ce ḥadīṯ. 574 BLACHÈRE, op. cit., s. Noé ; cf. notamment sourate Nūḥ, LXXI ; LIV, 9-7, etc…
345
575 BLACHÈRE, s. ‘Ād ; cf. LI, 41 ; LIV, 18-20 ; LXIX, 6, etc.. 576 BLACHÈRE, s. Thamoud ; p. ex. LIV, 23-32. 577 BLACHÈRE, s. Loth, notamment LIV, 34. 578 Légende fort répandue dans l’Islam primitif. Voir notamment Tarbī‘, 197, s. misḫ ; Ibn Qutayba la reprend à son compte, § 172 a. 579 Exode, XX, 5 = XXXIV, 7 ; cf. LECOMTE, Citations, 38. 580 Le Livre de Daniel ne paraît pas renfermer une phrase semblable. 581 Allusion à Coran, XII, 48 = Gen. XLI, 27 ; BUḪ. 65, s. 44, ch. 2 = HM III, 441, etc… 582 Aliment de fortune composé de sang cuit avec des poils d’animaux Lisān, VII, 248 = Tāğ, IV, 61. 583 Cf. BUḪ. 81, 17 = HM IV, 283 ; ḤAN. III, 44, 300. 584 Qūmis : Région située au pied des monts du Tabaristan ; BARBIER
DE
MEYNARD, Dictionnaire de la Perse, 464.
L’éd. pense également à une région d’Andalousie, ce qui est hautement improbable, car Ibn Qutayba a toujours ignoré l’Occident. Cf. LECOMPTE, L’Occident et l’Ifriqiya dans l’œuvre d’Ibn
Qutayba, Cahiers de Tunisie, 1957, 253-255. 585 C’est évidemment ainsi qu’il faut lire. Le texte porte Mihriğān
wa Qaḏaq. Mihriğān-Qaḏaq est une ville et un district du Ǧabal, près de Saymar Cf. BARBIER DE MEYNARD, op. cit., 552. 586 Il s’agit apparemment de ‘Ubayd Allāh. On n’a pas trouvé trace d’un fils du dernier calife umayyade du nom de ‘Ubayd Allāh. Il s’agit probablement soit d’un diminutif, soit d’une 346
altération involontaire de ‘Abd Allāh fils de ce calife ayant joué un rôle non négligeable dans les événements ayant immédiatement précédé l’effondrement du calife umayyade, et mort en prison à Bagdad ; cf. Index, s.v. 587 Coran, XVIII, 82. 588 BUḪ. 15, 3 = HM I, 331 ; 62, 11 = HM II, 611. 589 Il s’agit du ḥadīṯ incriminé au début du chap. LXXVIII : « Le mort est tourmenté à cause des pleurs des vivants ». En effet, BUḪ. 23, 33 = HM I, 417, rapporte ce ḥadīṯ et signale que ‘Ā’iša en aurait minimisé la portée. 590 Coran, L, 29. 591 ḤAN. V, 154, 161. 592 On n’a pas retrouvé ce ḥadīṯ. 593 Cf. BUḪ. 63, 27 = HM III, 24, etc… 594 Cf. § 211 sqq. 595 Cf. Tarbī‘, s. misḫ. 596 BUḪ. 63, 27 = HM III, 24, etc… 597 Coran, V, 60. 598 On ne voit pas à quel ḥadīṯ il est fait allusion ici. 599 Sourate XXXVI. 600 Sourate II. 601 Sourate III.
347
602 Cœur et bosse : ḤAN. V, 26 ; nuages, ombrages, vols d’oiseaux : ḤAN. IV, 183 ; V, 249, 361, etc… Pour les « vols d’oiseaux », le texte dit ḫirq, et l’éd. signale une variante ḥizq. Les concordances ignorent ḫirq, et ne signalent que ḥizq, avec une variante firq. 603 Cf. ḤAN. IV, 183. 604 Cette phrase se rapporte au ḥadīṯ de la note précédente. Ce passage, ainsi que les lignes suivantes, paraissent abrégés. 605 Cf. ḤAN. IV, 183 ; V, 249, 361 etc… 606 Les ḥadīṯ-s en ce sens que l’on a trouvés ne font pas mention de la friction du turban. Voir toutefois ABŪ DĀWŪD, 1, 58. 607 TIR. 1, 75 ; ḤAN. IV, 135 ; V, 281, etc… 608 ABŪ DĀWŪD, 1, 60. 609 Cette importante affirmation est assez conforme à la position hanbalite. D’après H. Laoust, Ibn Taymiyya, 239, « l’iğmā‘ est une preuve catégorique qui ne comporte ni abrogation, ni interprétation allégorique. Il doit être pris en considération avant le Coran et la Sunna ». 610 Le problème est de savoir s’il convient de prononcer une seule formule de salutation après la Prière (ḤAN. VI, 236) ou deux (ḤAN. V, 59). 611 Mālik est en effet un des grands docteurs du Ḥiğāz, et il est fondé à connaître des faits ignorés des docteurs moins proches du berceau de l’Islam.
348
612 Akṯar (?), ; on se demande s’il ne faut pas comprendre : « plus solide, plus sain ». En effet, l’iğmā‘ a naturellement priorité sur le ḫabar aḥād dans la hiérarchie des critères méthodologiques. 613 ḤAN. I, 223, 283, etc… ; II, 33. 614 Cf. TIR. 2, 24. 615 Cf. MĀLIK,,9 4. 616 ḤAN. I, 221 ; ABŪ DĀWŪD, 18, 8. 617 Tout repose sur le rôle de huwa (lui-même), qui est à vrai dire rien moins que clair dans ce ḥadīṯ, et sur l’ambiguïté du mot mawlā, qui désigne aussi bien le patron que l’affranchi. 618 On sait que le patron (mawlā) est le dernier sur la liste de la ‘aṣaba, c’est-à-dire des ayants droit à l’héritage. Il a donc droit à l’héritage s’il n’existe pas d’ayants droit prioritaires (cf. Hwb, s. Mirāṯ). 619 TIR. 2, 177 ; NAS. 12, 30. Cf. aussi EI, II, 1184, s. ḳunūt (WENSINCK). 620 On n’a pas trouvé de ḥadīṯ où soient associés le toupet et le turban. 621 Coran, V, 6 : « Passez-vous la main sur la tête… » Il ne faut donc pas prendre ici le mot « toupet » au pied de la lettre. 622 P. ex. ḤAN. IV, 252, où effectivement il n’y a qu’un seul ḥadīṯ. 623 MUS. 32, 28 ; ABŪ DĀWŪD, 15, 111. 624 Les compilateurs ne paraissent pas avoir retenu ce ḥadīṯ. 625 Cf. BUḪ. 63, 12 = HM I, 10.
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626 SUYŪṬĪ, Ğāmi‘, 132 (d’après Ṭabarāmī). 627 BUḪ. 16, 1, 13 = HM I, 342, 349 ; 59, 4 = HM II, 425 ; ḤAN. II, 109, 118 ; IV, 122, 245 ; VI, 168, etc… 628 BUḪ. 59, 4 = HM II, 425. 629 BUḪ. 63, 12 = HM I, 10. 630 Coran, XLIV, 29. 631 Coran, XII, 82. 632 BUḪ. 96, 16 = HM IV, 566 ; ḤAN. III, 140, etc… 633 Cf. p. ex. BUḪ. 59, 6 = HM II, 433, et ḤAN. II, 364, etc… 634 BUḪ. 97, 36 = HM IV, 627. 635 Coran, XIX, 71. 636 Cf. Coran, XIX, 72. 637 BUḪ. 62, 6 = HM II, 598 ; ḤAN. III, 208, 218, 239… 638 Coran, V, 109. 639 ḤAN. II, 5 ; cf. BUḪ. 51, 7 = HM II, 186 ; 70, 8 = HM III, 659, etc… 640 ḤAN. I, 29. 641 BUḪ. 95, 6 = HM IV, 543. 642 Cf. Coran, VI, 145-146. 643 P. ex. ḤAN. III, 31, 39, 45, 53. 644 Il est bien difficile de déterminer les variétés de sauriens que désignent les différents mots employés par Ibn Qutayba. On a vu 350
déjà le mot wazaġa (gecko ?). Le mot burṣ, d’après WEHR, Arabisches Wörterbuch, désignerait aussi le gecko en arabe moderne. Dans Adab, 208, Ibn Qutayba semble considérer les deux mots comme synonymes (wazaġa = sāmm
abraṣ). Quant à ‘izā’ qui figure ici (collectif de ‘izāya du § 15), c’est un « lézard » d’une autre espèce. Voir aussi les notices du Tarbī‘, s. ‘iẓāya, ١٧٢, et wazaġa, 31. DOZY, II, 800 (d’après Voc. et Alc. : salamanquesa animal) traduit wazaġa par tarente. On peut se demander s’il ne convient pas de rapprocher la légende de la wazaġa crachant le feu et la vieille croyance occidentale (?) de l’immunité de la salamandre ; quant à la ‘iẓāya qui crache de l’eau, ce pourrait être une sorte de triton. 645 Coran, VII, 157. 646 SUYŪṬĪ, Ğāmi‘, 123 (d’après Ṭabarānī). 647 BUḪ. 80, 14 = HM IV, 245 ; ḤAN. IV, 16, etc… 648 Cf. ḤAN. III, 501. 649 ḤAN. VI, 176, 238. 650 Coran, LVIII, 7. 651 Coran, XLIII, 84. 652 Coran, XX, 4 ; cf. XXV, 59. 653 Coran, XXIII, 28. 654 Coran, XXXV, 10. 655 Allusion aux ḥadīṯ-s du § 292 a. 656 Ma‘āriğ : allusion au titre de la sourate LXX. 657 Toutes ces formules sont des réminiscences coraniques. 351
658 Coran, XXI, 19-20. 659 Coran, III, 169. 660 Coran, XXI, 17. On ne peut évidemment suivre ici la trad. BLACHÈRE (min ladunnā = spontanément), étant donné le commentaire qui suit. 661 Cette étrange affirmation obscurantiste est d’autant plus stupéfiante que toute l’œuvre d’Ibn Qutayba est une œuvre de pédagogue. Peut-être faut-il entendre « l’enseignement d’autres doctrines ». Quoi qu’il en soit, on a déjà noté par ailleurs (L’Introduction au K. Adab al-Kātib, 56) quelle méfiance Ibn Qutayba nourrissait à l’égard des études profanes. 662 Dans ḤAN. II, 291, etc… l’anecdote est encore beaucoup plus savoureuse, car l’esclave ne peut répondre que par gestes. 663 ABŪ DĀWŪD, 39, 18. 664 Cf. Lisān, VI, 145 = Tāğ III, 343, où un autre ḥadīṯ de ‘Ikrima vient étayer la définition : « Tous les porteurs du Trône sont sūr ». 665 Matt. V, 34. 666 Matt. VI, 14, 26. Sur ces citations voir LECOMTE, Citations. Le texte porte rabbukum (votre Seigneur) ; l’éd. signale une variante abūkum (votre Père) que l’on a retenue, car les citations des Évangiles dans l’œuvre d’Ibn Qutayba sont toujours remarquables de fidélité. 667 Coran, XVI, 128. 668 BUḪ. 97, 50 = HM IV, 643 ; ḤAN. II, 251, 316, 413… ; III, 40, 127, etc… 352
669 Cf. Lisān, VIII, 253, où ce vers est attribué à IMRU’
AL-QAYS.
670 ḤAN. I, 234, 359, etc… où al-bulh est remplacé par al-
fuqarā’ ; BuḪ. 59, 8 = HM II, 439. 671 On n’a pas retrouvé ce ḥadīṯ. 672 Matt. XXVI, 39 ; Marc, XIV, 36 ; Luc, XXII, 42. 673 Nisbat al-ḫilqa : cette expression paraît s’opposer à la relation de dépendance ou d’origine en -iyy, et désigner la nisba en -āniyy qui n’exprime jamais une relation d’origine. SĪBAWAYH ignore cette expression (communication de M. G. Troupeau). 674 Coran, XXXV, 1. 675 ḤAN. II, 107. 676 Cf. p. ex. BUḪ. 2, 37 = HM I, 28, où Gabriel se présente sous la forme d’un homme quelconque. 677 BUḪ. 59, 7 = HM II, 436 sqq. ; 65, s. 53, 1 sqq. = HM III, 456. 678 Coran, XIX, 17. 679 Voir plus haut, section XX, § 163 sqq. 680 Coran, VII, 27. 681 Coran, VI, 8-9. 682 Sur ‘ŪG, voir l’index. 683 Sur les conteurs populaires et la réaction contre leurs affabulations, cf. GOLDZIHER, Etudes, 195 sqq. 684 Coran, III, 133.
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685 Coran, XLI, 51. 686 Coran, XLIII, 71. 687 Coran, LVI, 15-23. 688 Coran, LVI, 27-33. 689 Coran, XXII, 23 = XXXV, 33. 690 Coran, XXVII, 10 = XXVIII, 31. 691 Coran, VII, 107 = XXVI, 32. 692 Coran, IX, 69. 693 Coran, II, 247. 694 Coran, XXVI, 128-130. 695 Gén. V, 5 : neuf cent trente. 696 Gén. IX, 29 : sic. 697 Cf. Tarbi‘, s. Nasr (201). Le vautour est d’une longévité proverbiale. Ibn Qutayba lui attribue donc plus de 350 ans d’existence. 698 Ces considérations désabusées n’empêchent pas Ibn Qutayba de se faire l’écho de ces histoires suspectes dans le K. al-
Ma‘ārif, 271 sqq., chap. sur « les rois du Yémen » et « les rois de Perse » (‘Ağam). 699 Ši‘r, 345, reproduit cette anecdote dans les mêmes termes. 700 Un ms. dit Ḥafr al-Manāzik. Cf. index. 701 Cf. Tarbī‘, ד١٣ , sv. ḍabb. 702 Cf. Tarbī‘, s. hudhud, ٢٠ד. 354
703 Ces vers figurent dans le Ši‘r, 430, avec quelques variantes. Celle du vers 1 : ayyāma kaffana / iḏ kāna kaffana est sans importance ; mais en comparant les deux versions, nous proposons pour le dernier vers : « Fa yazālu yadlahu (au lieu de yadlağu)… wa mā-htalafa l-ḥadītu (au lieu de ğadīdu, voire de ḥadītu, signalés par l’éd.) ». 704 Cf. Tarbī‘, s. dīk ١, où l’on signale seulement que le coq est réputé garder une maison contre les entreprises de Satan. 705 Ši‘r, 429. 706 Voir les notes du § 15, et Tarbī‘, s. ğirrī, ١٣٣. 707 ḤAN. III, 12 ; 21 ; 39. 708 Cf. ḤAN. II, 215, 403. 709 ḤAN. II, 162, 192, 207. 710 Voir sur cette question GOLDZIHER, Etudes, chap. VII, et notamment 245-6. 711 Nous sommes loin du chiffre total d’une quarantaine de « secrétaires » auquel aboutit BLACHÈRE, Introduction, 12, après confrontation des diverses listes et études critiques antérieures. 712 Cf. BUḪ. 24, 9 = HM I, 459, etc… 713 Traduction conjecturale. Ce propos paraît signifier que les seuls hommes sachant écrire étaient les marchands (?). 714 ḤAN. I, 307, 329, 373, etc… 715 ḤAN. I, 266 etc… 716 SUYŪṬĪ, Ğāmī, 151.
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717 ḤAN. I, 307, 329, 373, etc… 718 Allusion à Coran, LVI, 15-22, et à maints traits du ḥadīṯ. 719 A notre connaissance, la distinction entre ces deux mots n’est faite que par Abū Mūsā al-Aš‘arī, apud TABARĪ, Tafsīr, III, 7, qui entend par ‘arš un tabouret sur lequel Dieu poserait ses pieds lorsqu’il est sur le kursī. Les autres auteurs, notamment al-Ḥasan al-Baṣrī, ibid., considèrent les deux mots comme synonymes. Cf. aussi WENSINCK, Hwb, s. Kursī. 720 Cette affirmation tendancieuse est le reflet de plusieurs ḥadīṯ-s où sont exaltées les vertus de la Syrie (Ša’m). P. ex. ḤAN. IV, 110 ; V, 184 ; VI, 457, etc… 721 Le mot dad est ignoré des Concordances. Toutefois, le ḥadīṯ figure dans Tāğ, II, 346. 722 ḤAN. II, 162, 192, 207. 723 On n’a pas retrouvé cette anecdote. 724 BUḪ. 8, 69 = HM I, 165 ; 13, 2, 25 = HM I, 312, 324. 725 Lisān, XIII, 259 = Tāğ, VII, 322 connaissent ce ḥadīṯ, que les Concordances ignorent. D’après ces dictionnaires, la dirakla serait un jeu (danse ?) étranger, peut-être abyssin. Ce mot se prononcerait aussi diraqla. Par ailleurs, les recueils de ḥadīṯ-s connaissent une anecdote fort voisine, où les Abyssins jouent avec la lance et la daraqa (bouclier) (BUḪ. 56, 81 = HM II, 317). Ces faits laissent à penser que toute cette série de ḥadīṯ-s ne sont que des variantes anciennes d’un seul et unique récit, d’où il devait ressortir que le Prophète ne détestait pas les divertissements guerriers. 726 ḤAN. VI, 39, 129, etc… 356
727 Curieux passage (= ‘Uyūn, II, 62) où il ne faut naturellement pas voir une citation biblique. Notre auteur a dû se laisser abuser par un informateur philosophe… Cf. LECOMTE, Citations, p. 38. 728 Vers de KUṮAYYIR, Ši‘r, 493. 729 Entre le texte et le Ši‘r, les éd. ne signalent pas moins de cinq variantes : aqṣād, iqṣār, idġāl, ikṯār (?), aḥqād. On a retenu idġāl. 730 Vers de ‘ABD ALLĀH
AL-‘ARĞĪ Ši‘r, 557.
731 Coran, LXX, 19-21. 732 Coran, XXI, 37. 733 Coran, XXXIII, 21. 734 Voir la note sur dirakla. On signale ici que la version du ḥadīṯ dans Lisān, loc. cit. porte ğuddū, yā B. A. ; ici, on a ḫuḏū, qui n’est pas satisfaisant. Comme dans HM II, 317, on a interprété ğuddū par « allez, continuez ! » 735 On n’a pas retrouvé cette anecdote dans les recueils de ḥadīṯ.. 736 On n’a pas retrouvé cette anecdote. 737 BUḪ. 77, 43 = HM IV, 114 ; cf. 19, 18 = HM I, 373. 738 BUḪ 2, 29 = HM I, 22. 739 Ce ḥadīṯ ne paraît pas avoir été retenu sous cette forme. Cf. toutefois BUḪ. 30, 51 sqq. = HM I, 628 sqq. 740 ĞARĪR, Dīwān, 1353, p. 88. Variante : texte rumḥa stihi/ rišḥa
stihi. On a retenu la première leçon.
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741 Ces vers ne figurent pas au Dīwān de FARAZDAQ. (éd. Ṣāwī), 1354/1936. 742 Coran, XXXIX, 42. 743 Le ḥadīṯ est expliqué dans Lisān, XIV, 3. Ġirbāl est synonyme de duff (tambourin). BUḪ. 67, 49 = HM III, 572. 744 ḤAN. II, 165, 187. 745 SUYŪṬĪ, Ğāmi’, 145 (d’après al-Ḥākim). 746 BUḪ. 76, 51 = HM IV, 88, etc… ḤAN. I, 269, etc… 747 Coran, LV, 3-4. On a tenté de conserver un même terme pour tous les emplois de bayān et mubīn. 748 Coran, XLIII, 18. 749 ḤAN. I, 234, 359, etc… BUḪ. 59, 8 = HM II, 439. 750 IBN MĀĞA, 36, 16. 751 L’allusion à al-Ğāḥiẓ est transparente. Voir la notice sur Ğāḥiẓ, 752 ḤAN. II, 369 ; IV, 193. 753 BUḪ. 57, 1 = HM II, 381 sqq. 754 Coran, XIX, 5-7. 755 Coran, XXVII, 16. 756 L’affaire est relatée par IBN SA‘D, Ṭabaqāt, VIII, 18. 757 Cf. Luc, I, 5. Voir aussi Ma‘ārif, 24, où le nom est Azan. Il peut s’agir d’une corruption d’Abia, un des ancêtres de Zacharie, père de Jean-Baptiste, ou d’Addo/Iddo, grand-père de Zacharie, le petit Prophète. 358
758 Coran, XIX, 12. 759 Coran, XIX, 14. 760 Cette étrange histoire est composée d’éléments forts disparates dont quelques-uns sont facilement décelables : Évangiles de Matt., Marc, Luc, passim, et peut-être Jean, car la Baṯaniyya (habituellement la Batanée, ou Batan, cf. index) pourrait être simplement la Béthanie de Jean, I, 28 (voir une confusion semblable dans VIGOUROUX, Dictionnaire de la Bible, I, 1662) ; Coran, XIX ; variations de Wahb b. Munabbih. Pour le reste, ce sont des thèmes d’imagination qu’on n’a retrouvé nulle part. Tout ce passage est à verser au dossier des rapports entre la tradition islamique et la tradition judéo-chrétienne. Voir WENSINCK, Hwb, s. Yaḥyā, 805. 761 Coran, XXI, 89-90. 762 Coran, LXXXIX, 17-20. 763 On n’a pas retrouvé cette anecdote. 764 Sur l’héritage d’Abū Bakr, voir IBN SA‘D, III/I, 136 sqq. 765 En effet, la fille reçoit la moitié du patrimoine lorsqu’il n’y a pas d’héritier mâle (BERGSTRÄSSER, Grundzüge, 91). 766 L’oncle du Prophète, fils de son grand-père paternel, ‘Abd alMuṭṭalib, avait droit à la même part que la fille (BERGSTRÄSSER, op.
cit., 93). 767 Toute l’affaire de l’héritage du Prophète figure en détail dans le ḥadīṯ, notamment BuḪ. 57, 1 = HM II, 380 sqq. 768 Ibn Qutayba n’est donc pas dupe de ce pseudo ḥadīṯ. Il est trop évident que cette polémique date de la rivalité entre les 359
‘Alides et les ‘Abbāsides pour l’accession au califat. Voir à ce sujet GOLDZIHER, Études, 124-5. La dernière phrase signifie en fait : « Tous ces grands ancêtres sont innocents des propos qu’on leur prête ». 769 Cf. BUḪ. 67, 22 = HM III, 557. 770 En d’autres termes, la parenté de lait ne saurait être constituée artificiellement en allaitant un adulte sans nécessité. BUḪ. 52, 7 = HM II, 211 ; 67, 22 = HM III, 557. 771 ḤAN. VI, 39, 356. 772 Cf. BUḪ. 67, 22 = HM III, 557. 773 Texte : qīla ; il faut évidemment lire qutila. 774 Voir § 161 sq. 775 Mağbūb : émasculé radicalement (Lisān, I, 242). 776 Cf. index, s. muḫannaṯ. 777 Coran, XXIV, 31. BAYḌĀWĪ, 467, explique ainsi cette restriction : « Il convient que les femmes ne se dévoilent pas devant des femmes infidèles car celles-ci n’hésiteraient pas à aller les décrire à n’importe qui ! » Les commentateurs sont visiblement déconcertés par l’expression « wa nisā’ihinna », qui paraît désigner les suivantes de la maîtresse de maison. Il est curieux de constater que l’interprétation suivante, apparemment la plus simple, n’a pas été retenue : on peut penser que le mot banī est en annexion à la fois avec aḫawātihinna et avec nisā’ihinna, et qu’à l’origine, les enfants des suivantes pouvaient aller et venir dans la maison au même titre que les enfants des sœurs.
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778 Coran, XXIV, 31. 779 Ce qui impliquerait une assimilation ipso facto. 780 ABŪ DĀWŪD, 38, 3. 781 Nécessaires pour constituer la parenté de lait. 782 ḤAN. V, 131, 132, 183 ; VI, 269. 783 Coran, XLI, 41-42. 784 Coran, V, 3. 785 BUḪ. 65, s. 9, 20 ; ḤAN. V, 185. 786 Cf. Lisān, XI, 207. 787 Pour en fabriquer. 788 Cf. BUḪ. 60, 48 = HM II, 519. 789 Coran, XX, 12. 790 Ḥubla : désigne soit la vigne, soit diverses plantes épineuses. Il semble qu’on soit fondé à retenir la vigne. 791 On n’a pas trouvé ce ḥadīṯ sous cette forme. Mais d’assez nombreux ḥadīṯ-s prescrivent de bien traiter telle ou telle bête domestique. 792 Toutes ces propositions font allusion à diverses légendes : déluge = histoire de Noé ; grenouilles = histoire de Moïse ; pierres = histoire de Loth ; sur Nemrod, voir EI, III, 900 (HELLER) ; Yémen = histoire de la digue de Ma’rib. 793 BUḪ. 25, 67 = HM I, 524 etc… ḤAN. I, 3, 79, etc… 794 BUḪ. 86, 30 = HM IV, 390 ; ḤAN. I, 23 ; etc… 361
795 Servant de couverture. 796 BUḪ. 67, 28 = HM III, 560. 797 BUḪ. 86, 13 = HM IV, 380. 798 ḤAN. I, 16, 22, 49. 799 ḤAN. I, 46. 800 BUḪ. 97, 50 = HM IV, 643 ; ḤAN. II, 251, 316, 413… ; III, 40, 127, etc… 801 DĀRIMĪ, intr., 48. 802 En somme, la seule différence entre la Sunna et le Coran est que ce dernier fait l’objet d’une récitation liturgique. 803 ḤAN. III, 61. 804 MUS. 18, 25. 805 Voir WENSINCK, Hwb., s. Raḍā‘. 806 ḤAN. II, 12, 23, etc… 807 Le caractère suspect des informations transmises par M. b. Isḥāq a été souvent relevé. Il remonte d’ailleurs aux différends qui l’opposèrent au Ḥiğāz à Mālik b. Anas et aux autres traditionnistes. Cf. WENSINCK, Hwb., s. Ibn Isḥāḳ.. 808 ḤAN. III, 286 ; šaṭr al-ḥusn, au lieu de niṣf —. 809 Coran, XII, 20. 810 Coran, XII, 58. 811 Coran, XII, 31. 812 Coran, XII, 30. 362
813 Il paraît s’agir d’une sorte d’œuf brouillé à la viande, ou peut-être simplement d’œuf au plat, car le Qāmūs l’appelle : narğis al-mā’ida ! Sur cette variante, v. Muškil, 32. 814 Si‘r, 605 ; a‘dadtu au lieu de ‘addadtu. Variante indifférente. 815 Si‘r, 548. 816 Si‘r, 550. 817 Si‘r, 695, où le nom du poète ne figure pas davantage. 818 Si’r, 695. 819 Si’r, 150. 820 Apparemment, la seule émotion poétique est responsable de l’accident. Cf. Aġānī, IX, 171-174. 821 Texte : ištarawhu. Le Coran, dans le passage parallèle, dit šarawhu, que BLACHÈRE, Coran, 260, traduit par « ils se défirent de lui ». Coran, XII, 20. 822 En effet, Gén. XXXVII, 12-36, parallèle à Coran, XII, 8-20. Il semble y avoir une certaine confusion dans la version islamique, entretenue par l’ambiguïté du verbe šarā-ištarā. La Bible est formelle : Joseph fut d’abord vendu par ses frères à une
caravane, au moment où ils allaient l’abandonner dans le puits (Gén. XXXVII, 28), puis une seconde fois par la caravane à Putiphar (ibid., 36). Or le Coran peut soit admettre une interprétation parallèle à la version biblique (cf. BAYḌĀWĪ, 311, pour qui sarā peut signifier bā‘a, ou ištarā min iḫwatihi), soit une autre où les frères de Joseph ont déjà quitté la scène au moment où intervient la caravane. On se demande si, dans ce paragraphe,
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Ibn Qutayba a dans l’esprit la version coranique, ou la version biblique. 823 Cet adjectif (asīr) s’applique à un homme capturé par d’autres, mais non à un homme emmuré dans un puits (on dirait masğun, ou maḥbūs). C’est un autre argument en faveur de l’adoption par Ibn Qutayba de la version biblique. 824 BUḪ. 34, 113 = HM II, 55 ; 37, 20 = HM II, 72 ; ḤAN. II, 287, 347, 382, etc… 825 Coran, XXIV, 33. 826 Ce ḥadīṯ figure dans Tāğ, III, 240, qui signale une variante rammāza, sans la retenir. Détail piquant, Tāğ prétend que rammāza est dans ce ḥadīṯ la lecture d’« al-Qutaybi » (c.-à-d. Ibn Qutayba). Faut-il corriger le Muḫtalif en conséquence ? C’est sans intérêt, car le sens est le même. Zammāra est synonyme de zāniya ; rammāza, c’est « celle qui lance des œillades » ! 827 On n’a pas retrouvé ce ḥadīṯ. 828 Cf. ḤAN. I, 71. 829 On remarquera l’emploi très fréquent de l’imparfait (avec kān comme exposant temporel), signe infaillible de l’attachement à la tradition. 830 Le mot wağs paraît désigner exclusivement cette sorte de bruit ; Tāğ, IV, 266. 831 On remarquera qu’Ibn Qutayba se garde de relever le fait que c’est la personne de ‘Uṯmān qui provoque cet accès de pudeur. Le ḥadīṯ en question est bien davantage destiné à exalter les vertus de ‘Uṯmān que celles du Prophète.
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832 TIR. 7, 96. 833 Coran, II, 196. 834 Cf. index, s. ihlāl. 835 ḤAN. II, 8, 33, etc… 836 BUḪ. 4, 18, 19 = HM I, 71, etc… ; ḤAN. II, 247, 250. 837 Cf. Tarbī‘, s. ğadaf, et par. 76, où il apparaît qu’il s’agit des génies. Ğadaf désigne soit l’écume du vin (peut-être en fermentation), soit une plante sud-arabique (comme dans Lisān, X, 367). Ibn Qutayba opte apparemment pour la première définition. Rimma, Lisān, XV, 144, désigne les os en décomposition. 838 En d’autres termes, le démon ne peut agir qu’indirectement, par l’intermédiaire d’agents corporels. Cette doctrine est à rapprocher de celle de l’istiṭā‘a (voir § 54 et 55, et l’Introduction). 839 ḤAN. VI, 439, 464. 840 BUḪ. 33, 8, 11, 12 = HM I, 646, 648 ; 93, 21 = HM IV, 510 ; ḤAN. III, 156, 285, 309 ; VI, 337. 841 Cf. ḤAN. I, 105, 119, etc… 842 BUḪ. 77, 33 = HM IV, 111 ; ḤAN. I, 71, 81, etc… 843 Il paraît s’agir d’Ibrāhīm al-Naẓẓām. 844 ḤAN. IV, 249, 251, 252. 845 BUḪ. 76, 4 = HM IV, 63. 846 Cette anecdote personnelle prouve au moins que le Muḫtalif est postérieur à un séjour au Ḫurāsān. Les fonctions de 365
qādī qu’Ibn Qutayba occupa en Perse se terminent probablement à une date assez tardive. C’est un indice supplémentaire de la composition tardive de cet ouvrage. 847 Ši‘r, 111, sic. 848 C’est ainsi qu’on pense pouvoir interpréter ici le mot mawḍi’ (sujet, et non endroit), par référence à ĞĀḤIẒ, Hayawān, I, 9 = 16, cité par PELLAT, Tarbī’, ١٦٩ s. ‘urr. Cf. aussi Tarbī‘, s. kayy. 849 Contre l’avis de l’éd., on pense pouvoir conserver le texte « kayyu ‘uḍwin qad qutïa aw ḥasmuhu. Le ḥasm est la cautérisation de l’extrémité des vaisseaux coupés (Lisān, XVI, 23) ; le kayy ‘uḍw pourrait désigner la cautérisation de tout un moignon, ou simplement d’un endroit quelconque d’un membre. 850 Saqy al-baṭn : hydropisie ; saqy al-badan : probablement dépôt de liquide séreux en n’importe quel endroit du corps, d’où œdème. 851 Il s’agit d’Ibn Ahmar al-Bāhilī qui, atteint d’hydropisie, décrit ses souffrances et les soins qui lui furent prodigués dans une qaṣida d’où ce vers est extrait ; Ši‘r, 316-317. 852 BUḪ. 76, 1 ; ḤAN. I, 377, 413 ; III, 156 ; IV, 278, etc… 853 Coran, XI, 6. 854 Précisément, le Coran ne contient nulle part le verset en question sous cette forme. Tous les versets qui renferment l’impératif kulū portent : kulū min tayyibāti ma razaqnākum (II, 57, 172 ; VII, 160 ; XX, 81). Il paraît y avoir confusion avec II, 267 qui dit : « dépensez (anfiqū) les excellentes choses que vous avez gagnées (kasabtum) ». On peut penser qu’il y a là confusion de la part d’un scribe. Toutefois, il n’est pas interdit de penser que 366
cette version constitue bien la lecture d’Ibn Qutayba, car il s’agit bien dans le contexte de subsistance. 855 ḤAN. II, 167, 223. 856 Ši‘r, 606. Texte : Nağd, variante signalée par l’éd. : Hağr, comme dans Si‘r. 857 ḤAN. V, 211. 858 ḤAN. III, 277. 859 BUḪ. 74, 16 = HM IV, 43. 860 Coran, III, 75. 861 ABĀ DĀWŪD, 1, 34, 35 ; ḤAN. I, 235, etc… 862 ḤAN. II, 12, 23, 26, etc… 863 ABŪ DĀWŪD, 11, 23 ; ḤAN. I 280 ; II, 97. 864 ABŪ DĀWŪD, 11, 23 (p. 285, milieu). 865 Ibid. ; cf. BUḪ. 25, 31, 33 = HM I, 505, 506. 866 BUḪ. 25, 33, 34 = HM I, 506 sqq. Le mot « offrande » désigne les victimes destinées au sacrifice. 867 Cette affaire a donné lieu à une prolifération de ḥadīṯ-
s, considérable dont on trouvera les références dans WENSINCK, Hwb, s. ihrām (où le mot iḥlāl est orthographié tout au long iḥlāl, erreur typographique fâcheuse puisque les deux mots signifient pratiquement le contraire). Elle se résume en fait à savoir quelle formule de talbiya il convient de prononcer au moment de la prise de l’iḥrām, selon le type de pèlerinage qu’on a l’intention d’accomplir (hağğ, ‘umra ou tamattu’). La solution la
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plus commode est énoncée dans un ḥadīṯ rapporté par MUSLIM, 15, 129 : « labbayka » tout court. 868 On n’a pas trouvé ce ḥadīṯ sous cette forme, mais il est question de la réalité du mauvais œil dans ḤAN. I, 294 ; II, 222, etc… 869 Cf. BUḪ. 76, 35 = HM IV, 78. 870 Voir la note 1044. 871 Tarbī’, s.v., ١١٩, sorte d’aconit. L’éd. disposait de deux leçons : bīš (2 ms.) et tinnīn (dragon, 1 ms.). Il a adopté la seconde leçon. Nous pensons pouvoir adopter la première, car d’une part on accorde assez de bon sens à Ibn Qutayba pour rester ici dans le domaine des faits expérimentaux, et d’autre part parce que le bīš est associé au par. 79 du Tarbī, à toutes sortes d’animaux venimeux déjà cités (scorpions, serpents, etc.), alors qu’il fait allusion au tinnîn ailleurs, dans un tout autre contexte (par.78). Sur le tinnīn, voir Tarbī’, s.v., ١٢•. 872 On a déjà vu (§ 143 sqq.) que la contagion était incompatible avec le déterminisme. 873 C’est le jeteux de sort, qui est de tous les temps et de tous les pays. 874 Coran, LXVIII, 51. Trad. BLACHÈRE : « te perceront de leur regard ». 875 On croit pouvoir adopter yuzillu au lieu de yuzīlu (de même à la ligne suivante), en raison du contexte d’une part, et aussi en raison d’exemples analogues où le même thème est exposé avec le verbe zalla. Cf. p. ex. AŠĞA‘
AL-SULAMĪ, Ši‘r, 858.
876 Coran, XLVII, 20. 368
877 Coran, LXXV, 7. Toutefois, la Vulgate porte bariqa et justifie la trad. BLACHÈRE « Quand la vue sera éblouie ». BAYḌĀWĪ, 772, signale que baraqa est la lecture de Nāfi‘, et soit constitue une variante dialectale, soit a le sens de « lancer des éclairs ». 878 L’éd. signale que ce paragraphe ne figure que dans un seul ms., et manque dans les autres. Il se pourrait donc qu’il s’agisse d’une addition de copiste. C’est d’autant plus vraisemblable que ce ḥadīṯ ne figure pas dans les recueils. 879 HAN. III, 118 ; cf. BUḪ. 76, 17 = HM IV, 67. 880 Voir § 172 a. 881 BUḪ. 34, 108 = HM II, 53 ; ḤAN. III, 310, 380, etc… 882 On n’a pas retrouvé ce ḥadīṯ. 883 ḤAN. II, 189. 884 Ḥiqq, pl. ḥiqāq : chamelle de trois ans révolus (Lisān, XI, 338) ; ğaḏā‘, pl. ğiḏā‘ : chamelle de quatre ans (Lisān, IX, 394) ; cf. LAOUST, Qudāma, 52. 885 On peut se demander si telle est bien la question. En effet, le libellé du ḥadïṯ de la note 3, p. 376 laisse à penser qu’il ne s’agit pas en pratique d’un prêt remboursable, mais bien d’un versement anticipé de la ṣadaqa avec escompte. Il semble bien qu’on puisse interpréter les faits comme suit : Le Prophète demanda à ‘Abd Allāh de prélever immédiatement le montant de la ṣadaqa de deux chameaux due par un particulier, en lui faisant remise d’un chameau. Il est vrai que pratiquement, il n’y a pas de différence, le bénéfice étant toujours d’un chameau. On peut toutefois se demander si Ibn Qutayba n’assimile pas une avance à un prêt pour les besoins de la démonstration. 369
886 BUḪ. 6, 5 = HM I, 112 ; BUḪ. dit fawr au lieu de fawḥ. Il semble qu’il faille distinguer la mubāšara (qu’on a traduit ici par « approcher ») du ğimā‘ proprement dit. 887 Ce ḥadīṯ ne paraît pas avoir été retenu. 888 BUḪ. 6, 5 = HM I, 112 ; ḤAN. VI, 336, etc… 889 ḤAN. IV, 10. 890 Coran, XII, 43. 891 Ainsi pense-t-on pouvoir interpréter l’expression fi-l-ḥīn
ba‘d al-ḥīn. On pense entre autres aux deux songes successifs de Pharaon dans la Bible (Gén. XLI, 1-7), mais non dans le Coran, XII, 43 sqq., où Pharaon ne rêve qu’une fois. Ce ne serait pas la première fois que les connaissances d’Ibn Qutayba dans les Écritures judéo-chrétiennes interfèrent avec son interprétation de la tradition islamique. 892 BUḪ. 91, 26 = HM IV, 461 ; ḤAN. II, 269, 395. 893 BUḪ. 19, 18 = HM I, 373 ; 77, 43 = HM IV, 114. 894 Cette notation est à ajouter au dossier de Ḫalaf al-Aḥmar, qui est déjà bien compromettant. Cf. BLACHÈRE, Littérature, 105 sqq. ; PELLAT, Milieu, 139. © Presses de l’Ifpo, 1962 Conditions d’utilisation : http://www.openedition.org/6540 Cette publication numérique est issue d’un traitement automatique par reconnaissance optique de caractères.
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