La formation des composes nominaux du latin. Paris [PDF]

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Zitiervorschau

LA fORMATION DES COMPOSÊS NOMINAUX DU LATIN

FRANçoisE

BADER

LA FORMATION DES COMPOSES NOMINAUX DU LATIN

ANNALES LITTERAIRES DE L'UNIVERSITE DE 8ESANtDN Vol. 46

LES BELLES LETTRES 95. BOULEVARD RASPAIL

PARIS-V,e 1962

A mon maître, Monsieur M. Lejeune

AVANT-PROPOS

Cet ouvrage, où j'ai tenté de retracer les étapes de la formation d'une vieille catégorie nominale indo-européenne, est né d'une remarque de la Laleinische Grammalik de LEUMANN-HoFMANN (p. 248) : « Die Geschichte der idg. Nominalkomposition ist noch nicht geschrieben », Je n'ai pas voulu écrire autre chose qu'un chapitre de cette histoire, d'où les limites de mon étude. Ayant abordé les faits que je décris surtout en comparatiste, j'ai volontairement négligé les problèmes de style, ainsi que les aspects « philologiques» de la question, qu'on eût été en droit de s'attendre à voir traiter ici. J'ai essayé de dégager mes conclusions à partir de dépouillements aussi complets que possible - je n'ose croire qu'ils sont exhaustifs - jusqu'à Isidore de Séville, avec quelques sondages au-delà du VIe siècle. Mes relevés ont été faits à partir d'Index divers, du Thesaurus Linguae lalinae, des lexiques de BLAISE et de SOUTER, et, pour la partie non parue du Thesaurus, des dictionnaires de FREUND-THEIL, FORCELLINI, LEWIS-SHORT. Je donne en général les références des éditions que cite le Thesaurus (en particulier pour les grammairiens latins, cités dans l'édition KEIL, sauf mention spéciale). Je me contente souvent d'indiquer le nom du premier auteur chez qui apparaît le terme que je cite, sans donner la référence détaillée de l'œuvre où il se trouve, sauf en quelques cas, not.amment quand la forme est peu sûre, ou qu'il s'agit d'un terme qui n'est pas dans la partie parue du Thesaurus, et que j'ai eu du mal à retrouver dans une édition moderne (spécialement quand ce terme figure dans des gloses ou des inscriptions). Je n'ai pas fait figurer dans mon étude tous les termes que j'ai relevés : malgré des scrupules, amputer des listes peu instructives par elles-mêmes m'a paru plus pertinent que fatiguer le lecteur par des énumérations souvent fastidieuses. Et afin que cela ne fût pas préjudiciable à la doctrine que j'ai cherché à établir, j'ai sacrifié des mots appartenant à des séries connues, el mis en valeur des termes qui souvent se trouvent être peu littéraires, et 1-1

x

AVANT·PROPOS

que j'ai choisis pour leur archaïsme, leur rareté, ou Jeur caractère insolite : aussi un grand nombre de mes exemples sont-ils pris à des lexicographes. Jerne suis heurtée à une difficulté de principe : fallait-il citer comme composés des termes dont seules des analyses modernes souvent peu sûres font des composés? En fait, je me suis bornée à citer ces interprétations en note. Je tiens à exprimer toute ma gratitude à mes maîtres, qui m'ont donné le goût des études linguistiques, et m'ont inculqué la méthode qui me préparait à aborder celles-ci. Ce serait pour moi un grand plaisir si, malgré les imperfections qui déparent cet ouvrage, je n'avais pas trahi l'esprit de leur enseignement. Ma reconnaissance va tout particulièrement ici à M. Lejeune, qui depuis de nombreuses années m'a prodigué ses conseils avec une bienveillance et une sollicitude, dont j'ai maintes fois éprouvé les effets; et à M. A. Minard, qui a suivi chapitre par chapitre l'élaboration de cette thèse, si bien qu'il n'est presque aucune page qui n'ait bénéficié de ses observations. Qu'il me soit permis de les remercier chaleureusement ici, ainsi que M. J. André, dont les remarques sur de nombreux points de détail m'ont été précieuses; M. E. Laroche, à qui je dois la connaissance des faits hittites que j'ai utilisés; M. A. Martinet, qui m'a fait comprendre l'importance d'un classement des faits purement formel; M. E. Benveniste, dont les ouvrages et l'enseignement ont eu une influence profonde sur moi. Je serais bien ingrate si je taisais tout ce dont je suis redevable à M. le Doyen Lerat, qui a facilité l'impression de ce volume, en me faisant l'honneur de l'accueillir dans les Annales littéraires de l'Université de Besançon, et au Centre National de la Recherche Scientifique, grâce auquel il m'a été possible de mener ma tâche à son terme.

BIBLIOGRAPHIE

REMARQUES POUR L'UTILISATION DE LA BIBLIOGRAPHIE

Nous citons les ouvrages que nous avons uttlisès en les classant en cinq rubriques de matières. Dans cette bibliographie ne figurenl pas les articles consacrés à lei ou tel mot particulier: ceux-ci se trouvent dans les notes de bas de page, cités ù propos du mot auquel ils se réfèrent. Dans les notes de bas de page, on trouvera, outre notre bibliographie personnelle, la bibliographie indiquée par le dictionnaire de WALDEHOFMANN; en ce cas, nous n'indiquons que le nom des au leurs ci lés pur WALDE-HoFMANN, et le numéro de la page de ce dictionnaire où ils sont cités, sans mentionner celui de leur ouvrage auquel on se réfère : nous avons en ofTet désiré présenter un état des questions, en situant en gros l'époque d'où dale telle ou telle Interprétation, sans grossir démesurément nos notes en recopiant textuellement notre source d'information. On trouvera p. XXVI la lisle des abréviations que nous avons employées : abréviations des noms de revues; el, par ailleurs, ubrévialions qui consistent à donner un nom d'autour, parfois sous forme d'initiales, suivi seulement d'un numéro de page: ce numéro renvoie alors à l'une des œuvres de cet auteur, que nous n'indiquons pus explicitement dans les notes, quand nous la citons souvent.

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=

der

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XXVII

INTRODUCTION 1. CLASSIFICATION

1. Les caractéristiques de forme et d'emploi des composés nominaux ne sont pas toujours bien définies, et ne peuvent être dégagées qu'en termes de structure et d'histoire. La classification des composés est d'une grande importance : elle doit permettre d'établir une stratigraphie, et non répondre seulement à un besoin de clarté obtenue de façon artificielle. Cette classification peut s'ordonner selon des facteurs divers : veut-on tenir compte du sens? On aura des composés ésocenlriques, directs, où le sens du tout est égal à la somme du sens des éléments (omnipoiëns), et exocenlriques, indirects, qui se rapportent à un nom extérieur (mullicoior I' ; de l'ordre des membres? On distinguera entre composés régressifs (déterminant-l-déterminé : aequanimus) et progressifs (déterminè-l-déterminant : animaequus) ; des rapports syntaxiques internes? On répartira les composés, avec les grammairiens de l'Inde, entre composés par coordination (dans lesquels la relation entre les deux membres est autre que de déterminant il déterminé), âmredila ou composés itératifs (quisquis), ct dvandva ou composés copulatifs {dulcamârus ), et composés par subordination, où l'un des membres détermine l'autre : lalpurusa, adjectifs ou substantifs, dont les deux membres sont unis par un lien de caractère verbal (composés de dépendance, lalpurusa verbaux: agricola) , ou nominal (composés de détermination, lalpurusa nominaux: perenniseruus); bahuorîhi, ou composés possessi]«, dans lesquels le premier membre est épithète du second, et qui Ionctionnent globalement comme des adjectifs [mullicolor} : celte dernière classification se fonde à la fois sur le sens ct sur la syntaxe. (1) BRUGMANN, IF 18, 59-76, précise que, outre les bahuvrlhi, sont des composés exocentriques (ou hyposlasierend, ou hyposlalischen), les composés impératifs comme Vincemaiue, oerqiss-mein-nicht, et les composés comme poslprlncipia, pronepôs, nés selon lui par hypostase: il faudrait donc, à son avis, abandonner le terme « bohuurlhi • ou l'élargir en l'appliquant à tous les composés exocentriques.

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INTRODUCTION

1

On peut de plus parler de composés par contact, et à distance (ne... pas); de composés parasynthétiques [sans-culoilisme sur sans-culotte), etc.ë : en définitive, la classification adoptée dépend des auteurs", Aucune de ces classifications ne s'adapte aux faits latins sans artifice : la distinction entre composés éso- et exo- centriques semble avoir été motivée par le caractère particulier reconnu aux bahuvrIhi, et le relief spécial accordé à ces derniers est lié à une recherche doctrinale sur leur origine et leur genèse, à l'honneur à la fin du XIXe et au début du xxs siècles", et ne justifie pas l'application au latin d'un classement qui ne cadre pas avec les faits observables en cette langue. Le classement par composés progressifs et composés régressifs ne tient pas compte des données statistiques : les seconds forment la quasi-totalité des composés latins. La distinction entre composés par coordination et composés par subordination a le même défaut, puisque les composés coordonnants sont très rares en latin. Quant au classement de Pânini, dont SKUTSCH a bien marqué les défauts en latin", il donne l'impression que certaines classes de composés, que possèdent d'autres langues, sont absentes ou du moins très mal représentées en latin (ainsi, les âmredita, les dvandva). Mais il est arbitraire d'affirmer au départ que le latin a perdu certains types de composés, alors qu'on peut imaginer (2) Pour toutes ces dénominations, voir J. MAROUZEAU, Lexique, 54-55. (3) Ainsi BRUGMANN qui dans l'article précité parle de composés éso- et exo-ceniriques, distingue ailleurs (Grdr. IP, 56 sq.) entre Iteraiio-, Kopulaiiu-, oerbale Rekiions-komposita, uerbale Komposita mit aâu. {prâp., parl.} ats Vordergtied, prâpositloruüe Rekiionskomposita, determinative Nominatkomposita; DELBRUECK, Grdr, V, 139, entre copulaliîs, déterminatifs, composés de rection verbate; WUNDT, Votkerpsychotogie l, l, 604 sq., entre une « Komposition durch assoziatiue Koniaktioirkunq », type Trinkgetd, une «Komposition durch assoziative Femeuiirkunq », type Bluibuche ; DITTRICH, Z. Rom. Ph. 22, 324 sq., entre des Uebereinstimmunçsnamen (Trinkgeld), et des Abweichungsnamen (cerf-volanl); K. F. JOHANSSON, Nominalsammansâllnirujar i goliskan, Nordikastudier, 455 sq., entre Beiordnunq, Unterordnung, Bahuurlhl, dérivés; POLLACK, Zli Gy 59, 1908, 1059-1064, en « unmittelbaren Benennunçen », ou composés par apposition, qui naissent simultanément, et composés syntactiques qui comprennent toutes les connexions nées de liaisons syntaxiques entre les mots; SCHRŒDER, entre muiata, où le second membre perd sa nature de substantif, et immutata, où il dépend de la nature du second membre que le composé soit substantif ou adjectif; MEUNIER, Les composés syntactiques, entre composés syntactiques, conformes aux lois de la syntaxe, et composés asyntactiques. Pour le détail des cinq premières de ces classifications, nous renvoyons à POLLACK, IF 30, 58 sq. (4) Voir ch. VII, § 133 et n. 1. (5) F. SKUTSCH, De nominum iatinorum composilione quaestiones selectae. Mais le classement qu'offre lui-même l'auteur en immutata [copulaiioa ; determinativa), et mutata (copulativa; meiaphorica (= bahuvrIhi); praepositionalia) n'est pas très satisfaisant parce que le détail manque de rigueur.

1-2

3

PLAN

le contraire, et poser, au moins à titre d'hypothèse de travail, qu'en matière de composition nominale, le latin est conservateur, l'indien innovateur. Par ailleurs, chacune des classifications énumérées ne peut être employée de manière utile que conjointement il une ou plusieurs autres: s'il est possible parfois de les conserver, en particulier pour la commodité de l'expression (ainsi surtout pour les bahuvrïhi), ce n'est qu'à titre partiel ou accessoire. Il nous a semblé bon de prendre pour critères de classement des critères purement formels, sans nous borner pour autant à une morphologie descriptive, utile, mais déjà faite, du premier membre de composé (selon par exemple qu'on a affaire à des « Slamm-)) ou à des « Kasuskomposila ))6), du thème vocalique, consonantique, verbal, etc., du second membre, cette dernière se limitant souvent l'étude de suffixes". à

II. PLAN DE L'OUVRAGE

2. Nous avons tenté de dater la composition nominale d'abord par l'étude de la forme des premiers membres de composés, thèmes nominaux (ch. 1), ou particules et noms de nombre (eh. II) : un grand nombre des traits morphologiques qui opposent les premiers membres aux simples correspondants sont autant d'archaïsmes, qui permettent de faire remonter la composition il une époque préflexionnelle de l'indo-européen. Toute l'histoire des premiers membres de composés est dominée par l'influence grandissante dl' la forme libre. Si l'on classe les composés d'après leur second membre, la coupure se fait entre deux grandes classes. Dans les uns, le second membre diffère du terme libre par sa forme (ainsi -berbis dans imberbis Cil regard de barba), et sa valeur : (im)-berbis esL adjectif, barba substantif. Ce sont les composés dérivés (ch. III il XIII inclus). Les autres ont un second membre identique à un élément donné tel quel dans la langue {omnipolëns ; cf polëns J. Ce sont les (;omposés non-dérivés (ch. XIV à XXI). Cette terminologie a le mérite, à nos yeux, non seulement d'être plus explicitement Iormclle que les autres - bien qu'elle ne soit pas très éloignée de la division en mulaia et immuiaia de SCHROEDER (n. 3) et de SKUTSCH (n. G) - , mais encore d'éviter la discussion de problèmes que nous jugeons sans intérêt, tel que celui-ci : omnipoiêns est-il un composé dl' (6) Par exemple STOLZ-SCHMALZ, 236-244. (7) Cf F. STOLZ, Die laleinische Nominalkomposilion in formaler Il insicht, Innsbruck 1877.

4

INTRODUCTION

2·3

dépendance, parce qu'il est de sens verbal, ou de détermination, parce que son second membre existe à l'état isolé? Pour nous, il est sans conteste un composé non-dérivé. La division en ces deux classes de composés correspond en outre à une réalité historique : la formation des composés dérivés et celle des composés nondérivés représentent deux étapes successives dans l'histoire de la composition. 3. Les composés dérivés sont les plus anciens, mais ne constituent pas un ensemble unitaire: à l'époque historique, on y distingue deux groupes: des noms d'agent, à second membre formé sur un élément de sens verbal (= composés de dépendance, tatpurusa verbaux d'autres terminologies) ; et des adjectifs à sens possessif, à second membre bâti sur un substantif (= composés possessifs, bahuvrîhi ), Les noms d'agent se présentent avec des suffixes divers (zéro, -t-, -a- : ch. III et IV; voyelle thématique: ch. Vet VI), dont l'emploi n'est pas laissé au hasard : leur archaïsme se mesure au lien qui les unit à la structure de l'élément radical (-t- après sonante-voyelle (-sti-t-); -0- après degré zéro de racine terminée par un élément consonantique (*-sd-o-) ; etc.). Cependant, au stade le plus ancien de la composition nominale, rien ne permet de distinguer un nom d'agent d'un bahuvrîhi : bîmus a la même structure que nùlus : même degré zéro radical, même formation thématique (* bi-him-o-]" ni-sd-o-). C'est que les plus anciens composés nominaux datent d'avant la séparation du verbe et du nom (ch. VII). Si les procédés de formation des uns et des autres ont ensuite divergé, c'est simplement que, quand un substantif, doté d'un seul genre, se transformait au second membre de composé en adjectif, muni de deux ou trois genres, les nécessités du genre grammatical suscitaient des problèmes : ou le substantif de base est conservé tel qucl (triresmos), et se fléchit selon un schème connu d'adjectif (-us, a, um); ou, essentiellement quand il est féminin, accessoirement quand il est neutre, il reçoit un suffixe -i- (-formis); des échanges entre les deux solutions résultent les doublets -isl-us (ch. VIII et IX). Mais, autant que les bahuvrîhi, les noms d'agent sont adjectifs, comme le montre le degré zéro, propre aux adjectifs, de leur second membre (§ 108). Le caractère adjectif des noms d'agent l'end aussi compte de l'extension et des limites des types anciens parmi ces composés: d'une part, des oppositions se créent secondairement entre substantifs (noms-racines) et adjectifs (thématiques), du type -fex-J-fîcus (ch. X); d'autre part, le rapport syntaxique qui unit les deux membres du composé ne peut en aucun cas se confondre avec celui qui régit les deux termes d'un

3-4

PLAN

verbe comme amplificô ; et, lorsqu'il sc relâche, le second uu-mln:o du composé devient suffixe (d'adjectif) (ch. XI). Enfin, il existe bien des noms d'action composés, Iortuès ail moyen de suffixes aussi archaïques que ceux des noms d 'agen l. (ch. XII). Toutefois, ayant en général pour premier membre UII préverbe (comiiium ), les noms d'action sonL bûl.is il l'image t1I'S verbes composés, et appartiennent il une couche plus r{~("('IlLI' '1111' les noms d'agent: l'opposition anciennemenL reconnue (~I1LI't' I(OIl1S d'agent composés et noms d'action simples subsiste donc, Mais il fauL reconnaître qu'elle n'est qu'un aspect parl.iculicr de l'opposition plus générale entre adjectifs ct substantifs. EL, s'il sc crc.-, d{~jù Ù l'époque de la communauté, des substantifs composés, c'psL pal' un mécanisme qui s'oppose au mécanisme de composition dps noms d'agent (adjectifs) : noms d'action (requiês ), noms d'obj(d, (oppidum), désignations de personnes [pronepôs ), ces suhsl.nnl.if's seront. Lous des composés non-dérivés. D'après eux na îl.ro nl. d(~s atljpdifs composés non-dérivés, eux non plus (ch. XIII). 4. Alors, les plus anciennes Iorrnal.ions de COIIIJ)()S(',S seront. concurrencées par les formations non-dérivées. Dans 1111 g"ralld nombre de cas, aux noms d'agent sc substituent d('s Iortru-s où l'influence des déverbatifs se fait sentir [arcilrnens, uilisulor] (ch. XIV). Des composés, rarement possessi ls désor-mui«, sc Iormcut. sur des noms selon des procédés nouveaux, hypostas(~ (sëtlll/I/s) , captation suffixale [concorporeus sur cor/JllS d 'uprès corporcus ] (ch. XV). C'est qu'alors la valeur des ("OIllpOS(~S nouriuuux , adjl'divl', s'est oblitérée en raison de la concurrence 1l{~I~ du d(~veloppl'lIlI'IlL de nouveaux procédés syntaxiques, A CI' momcnl., la l'olldion syntaxique, adjective, clu composé l'st ou hliéc, cl, il Il'pst pills senti que comme une forme résultant dl' la Iusion d(~ dl'IIX {'I{'Jll(~IlLs de vocabulaire [arcilenêns = arcus + lenêns }, 1\ lors, 1a ('0111 posi l.iou s'étend hors du domaine nominal : deux ("(~Ill(~IILs qlll'l('Ollqlll's pourront se fondre en un composé avec rr'import.c «(llI'lle Iunr.l.iou , pour donner, non seulement des substantifs il ('ôlJ~ d('s adj('dil's anciens (caprifïcus) , mais aussi des prôposiLiolls (di'sl/li) , des adverbes (deinde), des conjonctions [anleqncun), dl's iIlLnj(~diolls (edepol) , des pronoms [alleruler ], et surtout dps vl'rb\~s (p/'(w/i·rii). Dans ces conditions, il sc constitue deux s('~I'i(~s dl' composés sans dérivation. Les uns, qui gardent pou\' la forme 1111 lien ;"ï'(~ les anciens composés, en cc que leur premier 1lI(~1JI1Jl'(~ J'l'sie nomi nnl [capriîicus}, sont mis en rapport avec les gTollpes nominuux : il r-sl. rare que ceux-ci, régis par des lois part.iculièrcs, «u C(~ '1 IIi 1'(JIl('I'rnl~ notamment l'ordre des mols (ch. XVI), do nncnl. dil'('I:II'IlII'nL 2

6

INTRODUCTION

4.6

naissance à ceux-là. Mais le latin a des composés qui équivalent à des groupes. Qu'un de leurs membres soit déterminé par l'autre (type caprificus: ch. XVII), ou que leurs deux membres soient coordonnés (type hircoceruus: ch. XVIII), ces formations, qui sont le plus souvent des substantifs, sont récentes. En particulier, l'expression du rapport de coordination se fait anciennement par des groupes asyndétiques [ûsus früclus) , et non par des composés coord onnants. L'autre série comprend des composés qui, paree qu'ils ont pour premier membre une particule, sont liés étroitement aux verbes composés: le verbe a pris de plus en plus de place dans la morphologie et la syntaxe latines, et l'influence des verbes composés sur les composés nominaux n'est qu'un aspect particulier de ce développement général. Elle a été favorisée par l'existence de composés nominaux à particules, antérieurs à l'univerbation d'où sont nés les verbes composés. Le rôle spécifique en composition nominale d'une particule est sensible dans certains cas de préfixalisation (in- privatif; per- intensif; etc.) (ch. XIX et XX). Ailleurs, la limite entre composés verbaux et composés nominaux n'est pas toujours nette : des déverbatifs composés naissent d'après les verbes [accommodus sur accommoda); de plus, il y a confusion des procédés verbaux et nominaux de composition: un inapporâliô « non-préparatiori » est une innovation (ch. XXI).

5. A ce moment est achevée la dégénérescence de la composition nominale à travers plusieurs successions de systèmes : le premier système, antérieur à toute flexion, est caractérisé par des composés formés sur un élément radical non encore actualisé en nom ou en verbe; dans le second, postérieur à la séparation du verbe et du nom, les composés s'ordonnent en composés formés sur un élément de sens verbal (noms d'agent), et sur un substantif (bahuvrîhi) ; dans le troisième enfin, qui commence après l'univerbation, les composés s'opposent en composés dérivés dont les uns s'apparentent aux groupes nominaux, et les autres aux verbes composés, deux domaines étrangers à la composition ancienne.".

6. Aussi croyons-nous que l'histoire des composés nominaux, par sa troisième étape au moins, justifie le parti que nous avons pris de tenir compte des noms composés à premier membre parti(8) Notre exposé ne respecte pas cependant la succession Je ces trois systèmes: cela supposerait inversée la démarche qui doit aller du connu à l'inconnu. Nous présentons le système que connaît le latin, fait de composés dérivés (noms d'agent et bahuvrIhi) qui coexistent avec des composés non-dérivés, en rapport avec des g-roupes et des verbes composés.

6-7

ARCHAÏSME DU LATIN

7

cule, tout autant que des autres, bien qu'en raison de leurs liens étroits avec les verbes, le statut dc vrais composés leur soit parfois dénié". Mais il nous a semblé arbitraire de parler d'agricola, et non d'incola, de la même couche chronologique, ct de no pas chercher à déterminer le moment et les circonstances où un nom muni d'une particule cesse d'être un composé pour être un dérivé déverbatif. Ayant donc accordé la plus grande compréhension possible au terme de « composition nominale >l, nous avons néanmoins laissé de côté tout ce qui, par sa fonction, n'est pas proprement nominal, pronoms, adverbes, etc. ; tout ce qui est composé selon un mode qui n'est pas, lui non plus, nominal: les locutions qui, soudées dans la graphie, n'ont pas été transformées par hypostase en composés ieccerê, etc.); les formes nominales de verbes même attestés sans forme personnelle (type dëruplus sans * dërumpô ), à moins qu'elles ne soient formées sur un substantif [dêcaudâlus ] ; les formes verbales issues d'une proposition, comme scilicei [scire licel); enfin les emprunts, surtout gaulois (ambaclus « esclave », Enn., Ann. 605; eporaedia « cavaliers ll, Plin. 13, 123; pelorrilum, nom de « chariot », Hor., Ep. 2,1,192), italiques (meddix, Enn., Ann. 605, nom de magistrat: osq. meddiss), grecs pour la plupart (diamelros, Vitr. 3, 5, 6; archimagïrus « chef des cuisiniers >l, Juv. 9, 109; philoloqus, Cic., Ali. 13, 12, 3; etc.), même lorsqu'ils ne sont pas attestés directement Cil grec : tel tympanolrïba « qui use le tambour », Pl., Truc. 611 ; ct d'autres noms d'origine étrangère latinisés, comme armiluusa, calliomarcus, etc. Cependant, la littérature latine étant il beaucoup Il 'égards l'obligée de la littérature grecque, nous avons cherché ù mesurer l'influence du grec (ch. XXII) : sous son impulsion se créenl. pal' calque de nombreux composés latins, mais elle est negligeable du point de vue de la forme, les hybrides entrant en général dans des séries de composés vivantes en latin (Chimaeri-fer, ctc.) ; qu'il crée des calques ou des hybrides, le latin est bien plus fidèle aux normes de formation de ses propres composés qu'à l'CS modèles grecs. III. ARCHAÏSME DU LATIN 7. Ainsi, le latin a ingénieusement mis en œuvre les ressources de la composition nominale, et offre le rare privilège d'aider à débrouiller les faits anciens relatifs à ce domaine de la morphologie (9) Voir F.

EDGERTON,

JAOS 75, 78; L.

RENOU,

BSL 62. 96.

8

INTRODUCTION

7

nominale, mieux que ne le feraient des langues plus riches en composés, comme l'indo-iranien ou le grec. Le paradoxe n'est qu'apparent: au fur et à mesure qu'elle devient vivante, producLive, une catégorie morphologique acquiert de l'indépendance. En contradiction avec les archaïsmes qui pouvaient entraver son développement, cette autonomie contribue à les éliminer : plus une catégorie morphologique est vivace dans un état de langue, plus l'enquête qui vise à déterminer les bases d'où elle est partie est difficile: avec les seules prépositions du français, on serait bien en peine de définir le rôle et la nature des prépositions inde-européennes. De ce point de vue, une langue comme l'indien est, en ce qui concerne les composés nominaux, aux antipodes du latin : les apports indo-européens y ont été recouverts par de riches et nombreux éléments nouveaux, qui donnent à la composition du sanskrit une allure plus jeune, dont témoigne en particulier le développement des t.atpurusa nominaux et des dvandva : les uns et les autres n'ont pu naître et croître qu'à l'époque où un composé était senti comme la somme de deux mots, avec une valeur stylistique particulière, mais non plus une fonction syntaxique spécifique. Plus riche en composés nominaux, un état de langue comme le sanskrit classique n'est pas plus fidèle à l'indo-européen, au contraire, qu'un état plus dépouillé comme le latin : ce qui est commun au sanskrit et au latin se trouve être ce que possède aussi le plus grand nombre de langues indo-européennes. Et, loin que la différence entre latin et sanskrit représente ce que le premier a perdu, le résultat de la soustraction donne ce qui est à mettre à l'actif du sanskrit, ce qu'il a créé de manière originale sans l'avoir hérité. Dès lors, le latin se révèle comme un dialecte conservateur en matière de composition nominale: la composition y végète 1 0 : elle n'a pas donné le jour à de nouvelles séries (le typo Conlerebromius à premier membre verbal régissant y est à peu près inconnu, ainsi que les composés copulatifs). De plus, les composés se montrent archaïques par leurs emplois aussi bien que leur forme: tout mode adjectival d'expression est ancien, et c'est au titre général d'adjectifs que les composés sont conservés par les langages volontiers archaïsants de la poésie et des techniques nobles (droit, religion). Il est probable que la croissance de la composition a été arrêtée par des facteurs internes à la langue d'une part, en particulier par (10) Aussi Quintilien peut-il conclure SOII exposé sur la composition lutine (l, '" 65-70) : res lola magis Graecos decel, nabis minus succedil, nec id [ieri nature pilla, sed alienis [auemus,

7-8

!J

CONCORDANCE TERMINOL(>GIQUE

la concurrence victorieuse des syntagmes verbaux (au conl.mir.-. en sanskrit, la prodigieuse expansion des composés Il 0 III ina ux va avec une préférence nette de la langue pour les procédés nominaux d'expression); d'autre part, des faits de civilisation onl. houleversé le système onomastique: après que le système onomusl.iquo indo-européen a été contaminé par l'étrusque, les noms propl'l's composés ont été abandonnés (§ 511). Ayant empêché la composition de s'enrichir (~11 Ial.in, (:es o1JsL;)('les ont contribué à maintenir son originalité. EL l'in ""l'a du lnl.i n , loin d'être mineur, comme l'indiqueraient ks appal'elll'('S, pOlIr l'étude de la composition nominale indo-europér-unn, ('si ;'1 la nu-sur« de l'archaïsme de ses composés.

8. ApPENDICE. Nous donnons ci-dessous une La!>II' df~ (:OJll:ordance terminologique, destinée à faciliter la lecl.ure de I'ouvruge. La colonne de gauche contient nos propres dénominations, accompagnées des numéros de chapitres (en chiffres romains) 011 de paragraphes (en chiffres arabes), où il est le plus purLiculiùrcmcul. question des composés qui y figurent; elles sont suivies, dans la colonne du centre, d'illustrations, et. dans celle de droil.e. des dé llnitions les plus courantes, terminologie qui est nôtre

1

illustrations

composés dérivés il second membre de sens verbal (III, IV,V, VI, XXI).

incola ; agricola

composés dérivés à second membre de sens nominal (VII, VIII, IX).

praecepsç ûnaniniis

composés non-dérivés (XIV il XXI indus).

arcilenêns,

couranl«

/(,1'''/I'S

corn pos(:s

d (: (lt"ponrlanec ; LaL(lIJ-

ru:;;a

ycrlla1lx.

co III pos{:s 1)()SSI'Si I s , h u h u v rl h i , composés eXO('I'IlLriq tH'S,

s

inimicus, praenunlius

corn pos{~s il c il ,',Lerrninn l.io n, Lalpurn~a

nOlJlinaux.

oaria :

composés à premier membre régissant: a) possessifs (208) b) verbaux (154-158) l') prépositionnels(XV) composés itératifs (396) composés coordonnants (XVIII).

anlmaequus Conierebromius exlëx feriferus hircoceruus

âmrcd il.a

dvanda

PREMIÈRE PARTIE

LE PREMIER

~IEMBRE

CHAPITRE PREMIER

FORME DES THÈMES NOMINAUX AU PREMIER MEMBRE DE COMPOSÉ

9. Les descriptions des premiers membres de com posé IlP manquent pas, et le problème ici traité visera il dùl.crmiuer la chronologie relative des diverses formes que peuL prendre un nom an premier membre de composé, et à définir ce qu'on peul. entendre par (( thème» en cette position. Nous nous contenterons de castypes'. 1. ÉLÉMENTS VARIÉS AU PHEMIEH

MEMBRE DE COMPOSÉ

10. Les éléments qui figurent au premier membre de composé sont normalement, en dehors des particules, le substantif eL l'adjectif: les composés dont le premier membre est autre (JlrOllolll, adverbe, verbe, etc.) apparaissent dans des conditions telles qu'on peut parler d'exclusion du premier membre de tout cc qui ir'cst. pas adjectif ou substantif. Des influences extérieures ù la langue, celle du grec au premier chef, font apparaître chez des lcxicograpln-s des composés il premier membre pronom (ipsipli'J~ = IXÙ't"07t't"ux't"oç ; idemloquium = 't"IXU't"O).,0Y[IX; etc.); quidquitlcadiae, Fest. :Wlj, H, n'est forgé que pour expliquer quiequiliae. Par ailleurs, la langue de la comédie, par un procédé qui cunsiste à créer pour faire rire des mots de structure insolite, apporte de" composés à premiers membres divers: verbe, sous forme de Lhèrne {Conierebromiue}, ou d'adjectif verbal (rieqaniinummiue, uersipellis) ; adverbe (Iolûiiloqueniia sur lolûlim ] ; interjection [buluu>

(1) Dans ce chaoitre, nous ne donnons pas les références (les termes duut parlons à un autre endroit (sur lequel on consultera l'Index).

110118

2-1

14

THÈMES NOMINAUX AU PREMIER MEMBRE

10-11

calus) ; forme déjà composée (lrisaeclisenex) (il faut qu'un composé soit bien vivant dans la langue pour figurer en premier membre d'un surcomposé: bipennifer) ; élément de phrase {lëdiqniloquidês, Quodsemelarripidës); formes casuelles. comme lariscolus , type agri-(cola). Lorsque le premier membre a plus de deux syllabes, on s'attend à voir conservée sa voyelle finale [Ahëno-borbus ). Mais la fréquence des premiers membres de composés dissyllabes terminés par un -i- d'origine morphologique (miini-) ou phonétique (agri-) a étendu cet -ià des termes où il ne se justifiait pas. C'est ainsi que des noms, qui ne sont pas des thèmes en -i-, présentent, par analogie, un -i- à la (10) On aurait un phénomène de samprasârana pour GUETZ, IF 41, 124. Cependant Rom. Jb 8, l, 155 sq., pose "uiti-perô, passé ensuite à uiiu- devant labiale. Voir WH, II 808. (11) E. BENVENISTE, Origines, 77. (12) Voir notre article, R Ph 34, 1960,236-247. SKUTSCU,

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-

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13-14

FORME DU THÈME

17

troisième syllabe [ahënipês ], à la quatrième (marqariiiïer), ou au-delà (scylalosagiltipelliger); -i- finit par être senti comme caractéristique des premiers membres de composés. Et (~'I's\' lui qui sera employé comme « voyelle de liaison » qUaJH\ ['adjom.Lio» d'un thème consonantique à un second membre de composé ù initiale également consonantique faisait difficulté [parl-i-ceps }. L'extension analogique de -i- confère donc au premier membre de composé une grande uniformité, qui empêche de distinguer (~e qui ôtait thème en -i- et thème en -0- (ou -a-) : doclo-, aula- duvinnnr-nt. dccii- (loquus), auli- (coqua).

14. Ainsi, quand le simple perd son suflixc en devenant premier membre de composé, il n'y a aucun moyen exterieur d(~ savoir si le premier membre est bâti sur un thème en -i-, ou SUI' IIIH' Iormc thématique : on connaît la fréquence des composés ù premier membre en -i- dans d'autres langues, où l'apoplronio 1I1~ joue pas. Ce premier membre peut alors représenter, soit UII ancien adjectif en *-i-, qui en composition, en sanskrit et en grec, SI' suhsl.il.ue facilement à un adjectif simple en * -1'0- (type XÜaLaVE:LplJ( (~II l'el-{ard de xüap6ç), soit un ancien neutre (type av. usli-aolah- « Iorcc dl's os )))13. Le latin n'a pas trace de la substitution du tyP(~ XÜaLaVE:LplJ( 1 xüap6ç, en dehors de âcipiier, où elle n'est pas sù re !", mais un premier membre de composé en -i- y apparaît en l'('I-{al'd d '1111 simple d'autre forme : adjectif comme arujuslus ('II r(~l-{ard dl' angiporlum (refait en angusliporlum d'après anquslus, CI. ] 1 ;j:~7, 20); neutre en -s-, comme uulnus qui en composition .leviunt. uulni- (ficus); {oedus, qui donne (oedi-(fragus), refait Cil [ocdrri(ragus; uulgus, qui apparaît sous forme uulqi-Luaqus } ; noul.rr: en -n- comme nômen, dont on a * nômi-cap- > * TH1I1CI'fJS, al.l.l'sli~ par le dénominatif nuncupôw (mais sanquisû qn peut ûl.n- fait SUI' sanguis, et non sanguen). Le masculin en -n- homôt n ) est en l:OlllpOsition homi-(clda). Dans ce dernier, le premier membre ne peut ètrc qu'un l.hcmu-

(13) E. BENVENISTE, l. c. 79. La substitution de -;- à -ro- en premier membre cll' composé avait été remarquée, mais non expliquee, par CALAi'Il, l,X 31, \W7; BARTHOLOMAE, IF 9, 259; \VACKERNAGEL, Verm. Iteilr, z; gr. SfJ/'IIl'lt/wI/IJe, 8 sq. ; IF 39, 140. (14) Sur le second membre de âcipiter, cf § 13H, ~ici- peut être IIU thème eu -iqui remplace l'adjectif en -ro- présent dans v. sI. jnslrr"ü, de même sens, IlIJ "jastn> lili- (sic STOLZ). La formation analogique est indiquée par EM. Voir WH, 1816. Il ne faut pas, comme le fait CHASE, lIaru. St. 11, 67, poser un "liiu- avec -u- représentant un « weak Ablaut » d'un suffixe -uo-. (43) LH,248. (44) WOELFFLIN, ALL 11,273. (45) EM j J. ANDRÉ, Lex., s. u. Mais WII, r 73, l'approche asse- de assus • brûlé J. (46) Tout se passe comme si le -e- de pellesulna résultait d'une ouverture de -idevant -r- ii-) devant sonores occlusives, liquides, nasales, est constamment vérifiée. Pos- >po- (à distinguer ë-

(35) Sur les formes de ab- en composition, voir NW, 826-856. (36) Dans operiô; oporlel, le préverbe se trouve en réalité devant -u- ('op-uerio, "op-uortei ). Obscûrus et obscënus sont peu clairs (cf § 100). (37) POlir ob- en composition, cf NW, 192-193. L'étymologie de ob n'est pas claire: de "o-bhi (I.ir. abhi, etc.), on attendrait ital. '0((1) : aussi un ancien opi est-il peut-être meilleur (WH, H 192-193). De cet opio, le op- à'opert», oporiei (cf n. 36) serait garant, tandis que ob- représenterait la forme libre, où -p se serait sonorisé, après la chute du -/- en finale absolue. r

45-46

RÉPARTITION DES DOUBLETS

43

du po- étudié § 52) n'est qu'une simplification de posf-8 8 devant nasale: -sln->-s(l)n->-n- : pane (poslne); pômeridiem, pomoerium (cf § 335)39. Mais le doublet anle-janii- est différent: le -i de l'adverbe anli devient -e en finale absolue, et à titre de forme libre vivante, anie s'introduit dans des composés (anlepolëns, etc.) à la place d'anli-, normal à l'intérieur (anlisles, anlicipô ). Entre l'état analogique (anle-) et l'état phonétique ancien (anli-), il y a eu des échanges et des confusions: pour anlisles, anlesles, Liv., 1,7, 14; 1,20,3; 1,45,6 (Paris.); anlipâgmenla, P. F., 8,1, et anliqeriô, P. F., 7, 23, formes archaïques, sont refaits en aniepüqmenia, Calo, R. R. 14,2 et 4; Vitr., 4, 6, 1 ; etc., et anieqerlô, Quint., 1,6, 40 ; 8, 3, 25 ; etc. 4 0 •

46. Des formes archaïques apparaissent dans de vieux mots : en-, forme ancienne de in-, peut-être dans enmanom, CIL P 4 (inscription de Duenos), si le mot est correctement coupé dans cc texte en graphie continue; et enubrô « inhibenti », P. F. 67, 10, o devant 1 vélaire. (44) Mais HITSCHL lit id ulraque. (45) Nous ne souscrivons pas au point de vue de NIEDERMANN, IF 10, 247-256, selon qui uë- aurait été tiré de uehemëns, dérivé de uehô analysé par les Latins en uëmëns, Si uehemëns est d'analyse difficile (participe en "alifs analogiques des composés : per-, Cés. (perfugium, PI.), lriins-, Cie. itrânsîuoiô, Pl. ; -fugium, Liv.) ; con-, Cod. Theod. (e,ïn{ugiwll, Ov.) ; re-, TerL. (refugium, Cie.) ; dë-, Prud. (dëfugiv, Pl.) ; pro{lIya (-fugio, Cic.) n'est attesté, et seulement comme variante dl' lJf'r{llga, que chez Apulée, Mel. 6,4, et Priscien, 11 121, G. 11 n'pst pas l'an, qu'on ne rencontre que le nom d'action dérivé du verb« {(~{-, suf-, dif-, subier-, super-fugium). Autres noms en -fugium, les noms de fêtes Populiîu qia, {ml/Il, CIL J2 p. 396, Varr., rëgifugium, P.F. 347, 10, « fêtes (,11 la mémoire de la fuite du peuple, du roi », qui sont peut-être des composés du type plênilunium (§ 337), cf Ov., Fasi. 2, 6Hrl, rl~!Jis [uq«, el 5, 728, fuga rëgis 1 01 • Quant au nom de plante [arîu qium (nr îi Y], Plin. 24, 135, il peut être issu d'un croisement de [arîerurn, de même sens, et febrifugia 1 02 •

75. Luerifuga a un contraire, lueripela, Pl., Mosl. UT'g. G, d la série en -peia se développe avec aqri-, Cic., hi;1'I,tli- 1 0 3 , Pcl.r., cornu-v", Gl. IV 325, 34, honôri-w», Apul., ctc., et des termes peu clairs comme oclopeia'vs, Petr, 35, 4, colopcia-v", Expos. (97) Voir B. ALAIMO, Anlonianum 31, 1956, 189-214. (98) Fait sur lrânsfu qa, d'après WH, 1 419. (99) Cf HERAEus, Spr, d. Pelr. 26 (= KI. Schr. ~)8 n. 2). (100) Cf LEUMANN, Cl 17, 10 sq.; WH, Il 170. (101) Rien ne prouve l'existence d'un Jupiter 'PopU{ugus 'lue suppose, pOlir e"pliquel' popUfugia, H. J. ROSE, CQ 2, 157 sq. D'nutros noms rI'actiou sOllt d"'l'Ïv"',; de noms d·agent. SUI' le sens du terme, voir Drcvo-ro, Alli Isl, Vell. ~)I), ]07;,-HG. (102) WH, 1 457. Ce n'est d'ailleurs pas la seule cxplication : voir J, AN uu (':, l.e.r., S. Il. (103) Voir LANDGRAF, ALL 12,456. (104) Cf NEIIRlNG, Cl i, 131. (105) Cf SINICO, ALL 14, 126. (106) NEHRING, 1. c., 127, sépare oclopecla, nom de cheval duns des ta hl",; de d""ixioIl d'Hadrumète (Audollen/, 378-395), et oclopela, Petr. (que certains 1i.-;llIlt oIIJfJclll), (Suite de lu noie 10(;, jJuye suioante ),

(107)

'xIXÀo1té't'"I)ç

(HERAEUS);

XIXÀCù1tOCLX't'IXÇ

(WOELFFLlN; N""IU;>;n) : WII, 1 H2.

76

NOMS n'AGENT COMPOSÉS ATHÉMATIQUES

75

mund. 32. Il n'y a pas ici de composés à préverbe: ils sont en -peso Officiperda n'existe pas (§ 128), et certains groupes sont peu fournis: germiniseca, Varr. 5, 137, n'est dû qu'à une mauvaise conjecture-v", et [ëniseca, CoL, est refait sur fënisex par l'intermédiaire de fënisicium; bûsequa « bouvier», Apul., est un autre terme agricole. Les autres composés restent isolés, comme lëgerupa, Pl., ou, plus tard, pulliprema, Aus., « pédéraste» (pullus « petit d'un animal »); equimulga, Sid., « qui trait les cavales»; cordipuga (cor), Gl. V 58, 39; Legi[sJcrepa, Gl. II 122, 2; aurîqa, Varr., n'est pas clair, avec son sens étrange « qui conduit par la bouche », son premier membre étant sans doute une graphie étymologisante pour os, oris 109, et son -ï- inexplicable dans un composé de aga (cf rëmex). Le sens empêche le mot d'entrer dans la série de bïga, etc., dont la forme peut cependant l'avoir influencé; et une étymologie par un mot de la famille de corrigia (§ 230) n'expliquerait pas le _ï_ 11 0 • Caliga, Cic., « chaussure de soldat », n'est pas clair non plus l l l . Hosticapas « hostium captor », P.F. 91, 15, est à mettre ici: comme dans parricides, une caractérisation de masculin a été ajoutée à l'a- final (§ 85). Ont un préverbe conuiua, Pl. i-uîuium, Pl.) 112, sur lequel est fait concëna, Gl. II 444, 38, etc., ainsi que les dérivés succuba, Apul., interpola [inlerpolô}, Ambrosiast., tandis que conlrâscriba, CIL XIII 5698, est fait sur scribav>. (Suife de la noie 100).

« qui

oculum petit », Mais un grand nombre d'auteurs, après BUECHELER, s'accordent pour lire chez Pétrone oc/opecta, dont les interprétations divergent d'ailleurs: '07':1..0mXL)('t'"Ilç (VENDRYES, HERAEus); oclo-+7':~)(:rf)ç (BAEHRENS); altération d"ocipeta< c::.XU7':~'t-iJç (H. LEHMANN) ou d"oclopeda (WEYRICH; LAMBERTZ), ou d"ocnopeta, cf IIxvuç (G. ALESSIO), ou d'un ital. 'ctupeta (RIBEZZO), etc. Voir WH, II 198-199. Oc/opeta serait issu phonétiquement en latin vulgaire de -pecia (THOMAS, Stud., 50). (108) Cf NIEDERMANN, Essais, 27 sq. (109) • Aus- pour MULLER; auro-, cf X€II't'OCUPOÇ, pour NAZARI ; cf ocùpm pour RlBEZZO ; aureae pour WH, 1 85. (110) Hariuga (harlga), Don., Phorm, 710, et arulga ne sont pas des composés, malgré les étymologies respectives' haru +aio (WALDE) et ad+' weig- (OSTHOFF) qui en ont été données: WH, 1 70-71. (Ill) Peut-être 'calco-liga, selon KENT, nSL 26, 1l0-112. Voir WH, 1 138. (112) Conuluium peut être en rapport avec conulua, conuluâre, et non tiré par étymologie populaire de combibium (comme le veut KELLER, 86). (113) Nous ne tenons pas compte des termes obscurs ou étrangers: andabata, cf skr. anâtuih (VENllRYES, MSL 20, 279) ; angobatae, cf '&yyool:hoc~ (6!yyoç) ? (KELLER, 125) ; gallidraga (J. ANDRÉ, Lex., s. u.); sandupila ('VH, II 474); lransenna (A. ERNOUT, BSL 30, 91 ; WH, II 700) ; ni des déformations, comme incilega (èyyu6~x'IJ ; KELLER, 82), ni des noms de sens et d'origine inconnus, comme calcatrippa, nom de plante (J. ANDRÉ, Lex., s. u.). luxta, malgré FAY, IF 33, 354, et JURET, MSL 16, 57 sq., n'est pas un ·yugi-stha-. Subalapa, Petr. 38, serait, s'il existait, un hybride en ·-ocl..oc7':iXç (&I..ocmiÇw); cf E. THOMAS, Slutl., 75 sq.

76

SUFFIXE

III.

NOMS

D'AGENT

77

·t·

A

SUFFIXE

-T-

76, Le suffixe * -t- est ajouté à un thème en voyelle. La voyelle est longue dans sacerdôs, Pl. (ù féminin récent sacerdôia, puis sacerda: cf § 217). Le second membre de ce "sakrodM-p14 est bâti sur le degré -0- de la racine *dheJ 1- (§ 13G); ce vieux composé a été refait en sacrificus sous l'inJ1uence de /,acitJ l1b • Voyelle longue encore, non plus dans une racine au d(~gTé plein mais dans des bases élargies en *-J-: pracqnàs, PL, « enceinte » (la graphie praeqnâns, fréquente, est analogique des parl.ioipcs présents; praeqniix, Fulg., My th. 2, 3, des adjectifs en -I;,T); le second membre remonte à *-gn-Jcl-1l6. Locuplës, Pl., « riche en terres »117, est refait en locuplëlus (§ 3]4). Ln seul nom d'action, en dehors des dérivés comme sacerdoiium, est ici manuplêlium, Gl. II 476, 38. Mânsuës, Ace., qui a, comme locuplês, un second membre passif (et est également refait en münsuëtus"", peutêtre déjà chez Plaute, As. 145: cf § 79), apparaît sans le *-dh- qu'on retrouve ailleurs (gr. ~eoÇ, etc.). Inversement, sur replëlus a éLé refait replês, Hala, Phil. 1, 11 (Bern.). C'est sur un thème III qu'est peut-être construit nepus « non purus », P.F, 163, 15, s'il a un -û- et est apparenté il skr. pûiàl) « purifié»; en ce cas, il représenterait * pW-J-t- et ne serait pas directement bâti sur la forme qui a donné pülusv»,

(114) La bonne étymologie en a été donnée par STOLZ, HG 1, 162; l'EIJ,mgEN, M8L 22, 5 sq; FRAENKEL, Nom. ag. I, 4; W, SCHULZE:, ](Z 28,281, ct a éliminé celle qui faisait du mot un composé de dare (BRUGMANN, 1 218, ctc.). (115) Selon WP, 11 551, eustôs serait un composé de même structure, en '-dh6-/(ou peut-être '-do-l-). Mais le mot est probablement un dérivé ('qudh-s-lod-, WH; 'qudh-lo-, DEBRUNNER, IF 1934, p. 218). WH, 1319.

(116) L'explication de praeqnâs par un nom radical, que nous adoptons, est proche de celle de BRÉAL, M8L 9, 41-2, et de BRUGMANN, IF 34, 100 rem., qui font du mot UII adjectif de "praeqnâri, Nous trouvons moins satisfaisantes les analyses par une hypostase de 'prae qnâli (LH, 232; WH, II 354), et par un composé possessif" die Gcbir t (' qnâii-) vor sich habend » (SCHWYZER, ](Z 56, 103). (117) Contrairement à l'opinion de MEISINGER et de E. VETTEn, selon laquelle -plës est actif (locup/ës « titulaire d'une place entière 'l, -plës vaut ici plënus (WII). Le mot appartient à la langue des paysans (E. VETTER ; J. 13. HOFMANN ; G. BONFANTI':, REL 15, 68 sq.). WH, 1817. (118) Sur les emplois du doublet mânsuëslmânsuëlus, cf NW, HiH-!). (119) BLUMENTHAL, 19. T. 43', analyse le mot en 'nepu(r)s, ct LINDSAY, Gl, ed, Ac. BrU. IV 283, ainsi que A. PARIENTE, Emerita Il,1943,84-90, Y voient une fausse lecture de Festus pour nepos. EM, s. u. nepus, admet la parenté de purus et de pu/us, mais la met en doute, s. u. puiâre. WH, II 163, pose nepus«; "ne-pui-s (cf puius, pullire), qu'il sépare de purus. 1-1

78

NOMS D'AGENT COMPOSÉS ATHÉMATIQUES

77

77" La voyelle est brève dans cornes, Pl. (com-i-t- sur le degré zéro de *ei- « aller »), où le -e- du nominatif (on attend *comis) doit venir de l'analogie d'eques. La ligne de démarcation entre les composés de * ei- et les dérivés en -es comme eques (cf bm6"t"-"f) lat. or; */ > lat. 0/), l'adjonction de *-t- n'a rien d'automatique: le latin a iecinis sans * -t-, là où l'ancienne sonante-voyelle est représentée par "en > in, en face de gr. 1Î7t-o(-1"Oç «*-Q-t-os), où, vocalisée en a, elle est suivie de -t-. Dans ces cas, le latin, qui (3)

SCHWYZER,

425'.

80-82

SUFFIXE

*·t·

83

ne vocalise totalement, au degré zéro, que -J- (* -sl-;)2-1- > -slal-), -i- (com-i-l-), et -u- (indu-lus), a d'autres formations où la sonanto n'est pas voyelle, puisque c'est le degré plein (ou apparemment tel: cf § 90) qu'il emploie: -cola, -gena; -îer (us). Ainsi s'explique qu'il n'y ait à peu près pas d'exemple de -1- dans des composés bâtis sur le degré zéro d'une racine terminée par une nasale (recenl-? repent- ?), ou une liquide (cf auscullâre, dénominatif d'un nom à suffixe -10- : § 313). Il n'empêche que, dans les composés du latin, *-1- apparaît toujours après une voyelle latine qui remonte à une sonantc préhistorique, -a- < *-()- (*-sla-l-), -i- (*com-i-l-), rarement -u- (inclulus: § 313, peut-être nepus: § 76), ou à une contraction préhistorique voyelle + sonan te. Mais, dans d'autres langues, où la sortante voyelle reste un centre syllabique, -1- suit tout aussi bien les nasales et les liquides. Le sanskrit en fait en cette position un large usage", après une nasale, normalement vocalisée en -a- (-na-l- de NAM-; -ha-Ide HAN-), comme après liquide (-kr-l-; -ur-l-; -sr-l-; -bhr-l-). Cela permet de définir encore plus étroitement les conditions d'apparition de -1- : -1- est employé après une ancienne sonante voyelle, quand celle-ci fonctionne comme centre de syllabe, pour permettre de joindre au thème des désinences (commençant par une voyelle) appartenant à la syllabe suivante: on a -sliilis en face de -felri. Cela est vrai de tous les suffixes en *-1-: -li- (§ 276 sq.), -lor- (§ 307), -10- (§ 313).

81. Mais là ne se bornent pas les conditions d'emploi de *-1- : l'utilisation du morphème est en rapport étroit, non seulement avec la structure de la racine, mais encore avec une certaine diathèse : *-1- sert essentiellement à former des noms d'agent actifs. Cette spécialisation peut d'ailleurs être secondaire : à côté de anlisles et de comes, actifs, on a mânsuës et locuplës, passifs. Mais une différenciation s'est opérée entre -1-, actif, et -10-, passif (§ 314). 82. Il ne semble pas que l'addition de *-1- à une son ante-voyelle finale de radical soit obligatoire, comme le montre le nom du {( témoin », leslis, Pl. (sur le premier membre duquel voir § 3G). C'est une formation difficile, parce qu'il n'est pas sûr que -i- y soit suffixe : la flexion en -i- peut résulter de la normalisation d'une flexion: nom. "lri-sla-s (*-sl-J 2-) > *le(r )sles, ace. leslem, gén. leslis : ce "tri-ela- a été thématisé en osque (trstus, nom. (4) Sur l'emploi de -1- en sanskrit, voir WACKERNAGEL-DEDRUNNER lI', pp. 1,6,7, 15, 17,25,41,44-47 (avec bibliographie pp. 46 et 47).

84

RÉPARTITION DES FORMATIONS SUFFIXALES

82·84

pl.). Le cas de poslis n'est pas forcément le même: le mot, généralement au pluriel, et indiqué par Ernout-Meillet comme féminin, est tantôt masculin tantôt féminin en latin, et a ailleurs des correspondants le plus souvent féminins: av. par-sii-, bret. post, v.h.a. pfost, néerl. vorst, « faîte de la maison », qui font poser un "por-sli-", avec peut-être un -i- de nom d'action féminin (cf § 275). Cependant, le gr. 7tiXO"'t'&C; ( -mï- (flll dl ilS J, et celui de ·(,l>en (tentus), ne sont pas du même ordre. Il se pourrait que la difTèrence de leur distribution syllabique eût des répercussions morphologiques.

90

1 -

oc~I__s_o_n_·~_-_-I

racine *-sed(obses) base

91.92

RÉPARTITION DES FORMATIONS SUFFIXALES

exul? -cen?

occl.

I

son.

.I

occ!.

11111111111 11111111111 11111111111 11111111111 11111111111 11111111111

*-ceu-d-? "-gen-éJr? "-sp-ek(incûs } (-gena) (-spex) 1

III

II

1

"-pl-eéJr (-pies)

1

1

*-di-k(-dic-)

I

son.

_

-l-

(comes) *-si-J 2(-sies)

Dans la discussion, nous ne ferons pas état des cas ambigus (-gena.' § 90), de formation incertaine (praesul, eœul : § 67) ou récente i-cen : § 66). Dans les exemples sûrs, si le thème II ne peut, par nature, se présenter sans élargissement radical, il est plus étrange de voir d'autres cases vides : au degré plein, il n'y a, avec certitude, de racines non élargies que terminées par une occlusive; inversement, au degré zéro, il n'y a de racines non élargies que terminées par une sonante. Autrement dit, sans élargissement radical, il ne se présente pas au second membre de composé de racine en sonante au degré plein ("-gen-), ni de racine en occlusive au degré zéro (*-sd-). Ces faits entrent dans un ensemble qui dépasse le cadre des noms-racines-- (§ 107).

92. Il Y a de cela un corollaire : c'est que, statistiquement, le degré plein (et le thème 1) sont beaucoup moins fréquents que le degré zéro, représenté tantôt par le thème II, tantôt par le thème III (ou la racine au degré zéro). Moins fréquent, il est aussi moins vivant : en latin on ne le voit fonctionner qu'avec préverbe (-pes,. -ses ; praecox ; incûs ), et sa productivité n'est pas assez assurée pour qu'il puisse donner naissance à des formations variées à premier membre nominal : pour celles-ci, sauf en de rares cas comme [ênisex, lucripes, possibles parce qu'ils sont mis en relation avec secô, peiô, la langue préfère d'autres solutions, secondaires, d'où des oppositions du type (com)pos/(caeli)polëns, etc. Au contraire, les thèmes II (-spex) , et surtout III, sont bien représentés en latin comme ailleurs : le grec a le plus souvent le thème II (-a!L'tJ't"-, -yvw't"-, etc.), sans "-i- quand la base a un élargissement ou en occlusive (-7tÀ~1;, -~Àw~, -xM~) ou parfois en * -éJ- (&.WP~'t"p~ç, 7toÀ,hÀocç); il a le thème 1II, sans * -i- non plus quand la racine est terminée par une sonante fournissant le point (21) Pour des exemples de noms radicaux en composition, voir 337-342.

STREITBERG,

IF 3,

92-93

91

PROBLÈMES CONCERNANT LE DEGRÉ RADICAL

d'appui vocalique nécessaire à la prononciation (7t'potx-, -~~-, cru~uY-, olv6cpÀuy-, etc.). Les noms-racines formés sur une racine au degré plein ou sur le thème 1 d'une base sont très rares (è7t'LTeç; -7t'~ç, -7t''YJyoc;). Si le sanskrit en a quelques-uns (-lij-, -sàd-, -yaj-, etc.), parfois suffixés en -i* 'J) (-jani-, -oani-, -svani-), il a rarement le thème II, et souvent le thème III, et cela à peu près dans les mêmes conditions que le grec: le thème JI apparaît quand l'élargissement radical contient un * -J- (-sLhti-, -énâlh-}, le degré zéro de la racine ou le thème II J de la base quand une sonante finale de racine ou de base peul servir de centre syllabique; si elle est finale de racine, et que l'élargissement soit en occlusive, il n'y a pas de suffixe -l- (-dfs-, -yuj-, -oùl-, -ij(YAJ-), -uidh- (VYADH-), etc.); si elle est finale d'une racine non élargie, ou d'une base dont elle est l'élargissement, le second membre de composé est suffixé en -L- (-ji-t-, -bhf-L-, -IJf-L-, -ga-l-, -na-l- (NAM-) -mr-l- -ha-l- (HAN-) -mi-l-' -slu-l- -ksi-l- -sri-l-érû-i-, etc.).

Xépv~o-,

«:

,

0

,

'

"

. ,

,

93. Quand la racine ou la base sont terminées par une occlusive, les thèmes II et III sont répartis en fonction des nécessités articulatoires: en ce cas, on n'a de thème II que lorsque la racine et son élargissement sont tous deux en occlusive, et qu'un thème II J serait imprononçable (-spek- pour *-spk-), ou lors quele composé est rattaché de façon vivante dans la langue à un verbe, sur lequel il peut avoir été formé (-pLës, cf plëre ; skr. -slhâ-, av. -sirï-, cf àsihûl), Le thème II, plus fréquent en grec quc dans les autres langues, y est généralisé dans un seul cas, celui où les racines soul, élargies par un * -'J- (-~À'YJ-T-, -YVW-'t'-, -~IJ-'YJ-"t"-, -XIJ-'YJ-T-, -7t'TW-T-, -TP'YJ-T-, -~pW-T-, etc.). Lorsque le radical comprend, dans la racine ou son élargissement, une sonante autre qu'un * -'J-, il sc présente au degré zéro, d'où la fréquence des vocalismes -i- et -u- dans ces composés (7t'potx-, &h~-, Xépv~o-; cru~uy-, ljJeucrLcrTuy-, 7t'p6crcpuy-, etc.); en dehors de ~aIJ--ap-T-, où -ap- , Cie., refait en primiqnus, (;J. IV 273, 14, etc. ; bignae « geminae dicuntur, quia bis una die natae sunt », P.F. 30, 22; mâlriqna « nouerca n, Canon. Migne G6, 891 A (cf GL L. Abba NV 26), a un sens inattendu, extrait de l'idée de « premier lit» de prîuiqnus, Le second membre de composé se suffixalise dans aprugnus < * apro-qnos, etc. (cf § 253). Manipulus, PL, a un premier membre apparenté à manus cl, peut-être à manal « gerbe »3; son second élément, peu clair, esl sans doute -plus (cf maniplârius, CIL X 3608, etc.), avec voyelle d'appui"; il doit être en rapport avec pleô (( qui remplit »}, comme peut-être populuss ; complus, GL IV 220, 4 (CI -us mentis desiderii sui completur l»), est tardif. (1) Non formé sur inqenium, comme le pensait TIIURNEYSEN [Thesaurus } : cr POKROWSKIJ, IF 31, 282. Comme les autres composés en -qnus, beni qnus contient le degré zéro de gen-, attesté par exemple encore dans gr. ve:oyv6c;, got. niuklahs « mineur », av. â-zna- "naturel", celt. (nom propre) Eni qnus, etc. : voir WII, 1 59U. (2) « Celui qui est né de l'un (des deux époux "), d'après BRf'AI., M8L 2, 48. Sur le prlulqnus des inscriptions, voir LH, 104. (3) PEDERSEN, V gl. Gr. d. k. Spr., 1 493. (4) Étymologie de VANICEK, BRUGMANN, etc. Mais, d'après Varron, 5, 88, SCIIIJI.ZE, HERAEUS, A. PARIENTE (Emerita 24, 135-145) analysent maniplus pur un diminutif "manucï u jlus de manus, transformé en -pulus sous l'influence de simplus ; etc. Pour l'anaptyxe de manipvlus, LH, 202, rapproche quadrupulus. Voir WH, II 29. (5) • Pa-pe/ala- ou •pa-pla-, cf pellere, pour BRUGMANN, LAGERKRANTZ; second membre apparenté à pleô, pour G. DEVOTO, S/ud. Elr, 6, 243 sq. ; Il '/cWe/cWla- «cercle

94

NOMS n'AGENT COMPOSÉS THÉMATIQUES

95

Les autres composés en -plus ont au premier membre un nom de nombre. En cela, ils sont parallèles aux composés en -plex, très anciens également 6 , et peut-être formés sur la même racine, au même degré, mais non élargie. De même sens, ils en diffèrent par l'emploi: les composés en -plus sont plus techniques que ceux en -plex, et, au contraire de ceux-ci, ils n'apparaissent pas dans la grande poésie. Mais, comme pour les composés en -plex, ce sont les quatre premiers noms de nombre qui sont le plus anciennement attestés: Plaute a simplus, duplus (déjà dans les XII Tables), lriplus, quadruplus (écrit -pulus, Truc. 762), d'où ociuplus, Cie., nôncu plus, Boet. (Mus. 2, 4; et nouemcupli, Mus. 2,3), au lieu de "nûnplus d'après decuplus, qulncuplus [qulnqui-, Itala, Gen. 43, 34 Lugd.), qulnquu plum; Gl. II 167, 37 [qulndupium, Gl. II 167, 30, d'après duplum), sexcuplus, Gl. II 301,59, etc. A ces composés, il faut peut-être joindre amplus", Les composés en -bus, formés sur la base * bheui-o- au degré zéro, devraient être des thèmes en vu- (cf skr. prabhü-). Thématisée, la formation serait en *-bhu-o-, soit lat. *-buus (cf patruus, etc.) ; il est difficile d'admettre que l'-u- radical s'est amuï devant un -0-. Un passage du thème en -Ll-: à la flexion thématique, à partir des cas directs du singulier, équivoques, est plus vraisemblable", Aussi bien, les adjectifs thèmes en -u- ont-ils disparu en latin (cf § 201). On a probus, PL, « de bon aloi», cf véd. prabhù« éminent», ombr. prufe « probe », osq. prUfatted « probauit », amprufid « improbe »9; superbus, superbia, Pl.; et, d'origines variées, albus!", Pl. (cf &ÀqJoç et les mots apparentés); galbus « vert pâle », Gl. II 32, 1, ctc., paraît proche; *dubus n'existe que dans dubô et son fréquentatif dubiiô , et peut-être addubânum, P.F. 20, 4. De ces adjectifs, il faut distinguer un vieux substantif italo-celtique, tribus, ûs, Varr., Cie., bâti sur le degré plein de la racine (*tri-bheu- pl, demeuré thème en -u- parce qu'il est substantif. Pro ber, Pl., « digne de reproche n, « reproché n, de * pro-bhr-o-s 1 2 de personnes )J, pour J. COUSIN, nEL 23, 66-69 (peu convaincant) ; nom d'action à vocalisme -0-, pour LII, 201. Voir WII, II 339-340. (6) Cf ombr. dupla (ace. fém.) « duplam )J, tripler (ab!.) « tri plo )J, got. lwei-fla-, ain(alps, v.h.a zwi-(al, gr. a~-1tÀ&cr~oç, 1t€-1tÀoç : voir 8RUGMANN, IF 38, 128 sq. (7) 'Am-plo- « plein des deux côtés », d'après WII; 'am(b)plos pour JURE'!', nHJ~ 16, 70. Voir WH, 1 42, et suppl, (8) F. SOMMER, IF 36, 207. (9) WIl, II 366. (la) OS'!'IIOFF, IF 8,6'1. (Il) Cf ornbr. trifu, v. ir!. ireb, etc. Le mot désignerait la troisième partie de la 'loulri pour WESTRUP, Nord. Tidskr. (. fil. 4, 129-145. Voir WJl, II 704. (12) El'>!; WIl, II 366.

95-97

RADICAUX TERMINÉS PAR UNE SONANTE

95

est une forme thématique sur le degré zéro de la racmc de [erû, avec absorption *-bhr(o)s > " -ber au nomiuul.if.

96. Du point de vue latin, il y a des composés qui sont encore moins analysables: un degré zéro radical est plus diflicilo h nrl.iculer quand la racine se termine par une occlusive, quo lorsqu'Pile se termine par une sonante. Alors le radical sc trouve souvent très altéré: nidus de *ni-sd-o- > "ni-zd-o-, cf v. irl. Il el, v.h.a, nesl, lit. lizdas, v. sI. qnèzdo-, arm. nisl, sk r. I1/(lû!t I 3, de la rnci nc "sed-vs ; uëscus « qui mange mal », Afran., LUI~il., pro hnhlcment (mais cf § 138) à analyser en *uë-(a)d-sko-, très ancien : il serait. un des rares noms à conserver le suffixe ":N), incertain, est plus sut.isl'uisuuf que l'analyse par '86- « semer" de ZIMMERMANN (cf \VII, 1 2(6). 1'0111' 1;. lJuMi·:ZII., Ideologie tripartie, 50, Cônsus est le « dieu du grain mis en réserve " [cnntlrre ], (19) "per-dh-lo- pour RASTELLI, AIV 109, 1-7. D'autrcs intcrprét.u tl uns ollt (,té proposées (dérivé de per- pour A. PARlENTE, Emerila 12, 33ü-:l:>0, ctc.). LeH syn t.urrnos pessum Ire, dare, garantissent que pessum vaut skr. pallum « ul ler. rlouner (co/lduil'e) à la chute », c'est-à-dire « à sa pc l'te ». (20) Substantif en -ti-, " uici-âtim, cf biiaqa-itih, pour IllllJlô~lANN; ruceourui dl' uicissâlim, adverbe en -âiim (Naev.) tiré de "uici-tltn- POlll' S"UIHI':~; "iticerrnsi m « qui va à son tour », avec haplologie, pour LAGERKRA;>:TZ : voir \VI l, Il 71'1. (21) 'gher-dhü" hervorstechender Trieb » ô'après WOOD: voi r WII, J fi,lIl. (22) BRUGMANN, BSGW 1908, 159 sq.

96

NOMS D'AGENT COMPOSÉS THÉMATIQUES

97-98

peut-être que uiiulorw ; procul, ancien neutre d'un adjectif "procilis (cf proculiunt, P.F. 298, 21), ou, mieux, proculus, attesté dans un nom propre (Proculus, P.F. 251, 14), peut être composé de pro-, et d'un second membre peu clair, qu'on rapproche de gal\. pell ({ loin », gr. "YiÀE: (éol. 7t1jÀu~) et 7tOCÀIX~, skr. caramàli ({ le dernier »24. Singulus n'est vraisemblablement pas issu d'une dissimilation, qui serait étrange dans son aboutissement, de "sin-qn-ulus, cf prïuignus, mais on compare son second élément à celui, peu clair lui-même, de got. ainakls ({ [J-E:[J-ov; piperoierârium «moulin à poivre », Gl. III 322, 14; pânicociâriue, Petr. Chrys., Serm. 99 c. 477 c (o, 1. -coclrix) ; lheoloquêlârius « théologien >J, Marculf. ; cêroîerârius « chandelier >J, Isid., existe à côté de cëreîerâlis, Greg. T. ; cêroîârium, Sacr. Gelas. p. 145, et Mirac. Steph. 2, 2, 4, peut en être une forme corrompue; parallèle cependant est cereofalum, Itin. Silu., auquel correspond un cereojorôleum, lus Cano ; il n'y a rien à tirer de ces formes de bas latin, pas plus que de la glose (II 570, 14) « blatiarius primicularius byrdistrae saxonice )J (primicubicularius , Lowe, GLN 24), ou de la glose (IV 423, 24) Enubrô

«

(35) Rapproché de got. qiban « dire» (CUNY, BEZZENBERGER) ; de paler (ZIMMERMANN) ; de baelere (NIEDERMANN). Voir WH, 162. (36) Selon BRUGMANN, OSTHOFF, SOMMER, etc. Une autre étymologie (WOELFFLIN), adoptée par WH, propose une hypostase de • prô spëre : WH, II 375 (et cf § 330). Pour prosper us à côté de prosper, voir NW, 6; SOMMER, 336. (37) Analysé en 'por-Iac(e)ros, cf laciô, par RIBEZZO; en 'pl-+un équivalent de skr, sreyas->pulchrior par JURET : voir WH, 1384. (38) -lûbrum a été rapproché à tort de liber, Voir BRUGMANN, 1107; SOMMER, IF Il, 326 sq, ; LH, 585. (39) Instar aurait subi une influence étrusque pour EM; serait un vieil adverbe en -1' pour E. BENVENISTE; un infinitif pour WOELFFLIN, etc. Voir WH, 1705; LH, 496. (40) Pour les attestations de ces deux adjectifs, voir NW, 159. (41) Rattaché à diêrecius, lui-même obscur, par RUDoRFF, Abhdl, d, berl. Ak, 1865, 280 sq,

224-225

195

ADJECTIFS COMPOSÉS A SUFFIXES EN ·[0-

eecûricûlârius « eo quod secures Iert » (V 610, 1 « qui secures fert >l) 42, ou de termes divers-", 225. En *-sli- sont ancîle, Enn., « bouclier sacré » (ex ulroque ... recisum, P.F. 117, 15), d'un "an-caed-sli-s" (cf ancaesa); sans doute incîlis « fossé d'évacuation », Cat. (( ex eo diclus quod incidaiur », Ulp., Dig. 43, 21, 1,5) < "en-caed-sli-w; exilis, LuciJ., Pl., peut-être de "ex-aç-sli-w ; et sublilie « efflanqué >l, Lucr., qu'on peut faire venir de * sub-Ieg-s-li-, à moins qu'il ne soit une hypostase de (quod) sub lêla (esl)47; maniële « essuie-mains », Ov., est un ancien "man-ierq-s-li-, s'il n'est pas tiré du plur. maniëlia (Varr., ctc.) de marüëliumss ; conqluuiâlis (Suet., Frg. p. 159, 1, -es dies in quibus quod anie inlermissum [uerai gerebalur) est obscur; însilia, Lucr. G, 1353, dont le sens est inconnu, vient peut-être d'une suffixation en -li- de "en-d-i-o- > "insuss". Le suffixe est complexe dans mulliîorâlilis, Apul., Flor, 3 (cf mulli(oris, -(orus). Les suffixes en -1- se rencontrent aussi sous forme thématique. Si le nom d'oiseau [îcêdula n'est pas un composé (cf § 253), on a *-010- avec voyelle d'appui après consonne dans discipulus, PL, peut-être composé de dis-s-capiô, cf praeceplor, disceptâre'", hien que le sentiment populaire le rapproche de disco. C'est sûrement un composé de capiô qu'on a dans mûscipula « souricière >l, Lucil, (-cipulum, Gl. II 131,53, etc. ; muscipulos laqueos, Gl. V 311,50); dans * concipilum supposé par concipilô « mettre en pièces >l, PI. (excipula, ôrum « vase pour recevoir » est un déverbatif) ; copula, Ace., « qui attache ensemble », est un "co-ap-vla [apiô ). Apparl.icnt.

(42) Peut-être secûriculârius est-il à corriger en -iulûrius, cf lull, (yrlÏ Ilulor t (43) Et obrenâârium n'est qu'un dérivé de obrô (pour obruô'; : WIl, II 1!J5. Quant à dardanârius« marchand de blé", que VASMER, Pro ling. Baudoin de Courtenay, 82 S'I., a analysé en • daruo-, cf. skr. dûroa- qui désigne une sorte de plante, "âard-, il pen t être une forme à redoublement "dandanârius : WH, 1 324. (44) Sans aucun doute bâti directement sur caeâô, et non, comme le pense M. LEI'MANN, -lis, 16-7, bahuvrlhi sur "caela, doublet de caelum, Sur ï'ancîte, voir G. DUM (.:ZIL, JMQ 234 sq. (45) Et non ~XOLÀOÇ, comme le dit KELLER, 100 et 258. (46) D'autres explications, moins probantes, ont été proposées, paree que d"e.eàq-sli-, on attend phonétiquement "ezôlis, cf examen, et non eœllls : par eqêre (CUNY, MULLER); par fila (aio, voir SOMMER, 217. (75) Sur cette voyelle longue dans des substantifs, voir "1EILLET, A/S/. !l, Sf,-f,7. (76) Susplciô est formé SUI' suspicere avec allongement de -f- d'a pres conlüqium : tango, etc., pour C. D. BUCK, A J Ph 17, 270. Il Y aurai t eu passage dialectal de if li l selon SOLMSEN, KZ 34,15; VENDRYES, 162-163; influence du-i- suivant pour MEII.LET, MSL 9, 55. C'est aussi par une influence dialectale que s'expliqueraient: oplniô, peu clair, mais qui, contrairement à ce que dit MEILLET, MSL 9, 56, ne doit pas être un * op-uëniô apparenté à gal. wens « espoir )J, etc. ; et conulcium, sans rlou te • liom-mekwiom, cf uox, pour lequel tout lien avec ulcus 011 avec ui ncô est à rcjcter. Voir WII, II 637. (77) Peut-être à lire chez Sex. Plac., de Mid. 2, 18 ((ungi, balnea, 'Julie sunl internecia ), (78) E. B. MAYER, J Ph 8, 265-269 ; A. ERNOUT, Phil. II, Hj7-16!l. (79) Sur relliqiô, voir BEDNARA, ALL 14, 330; NORDEN, Enn. 11. Verq., ,,1 n. l.

234

NOMS D'ACTION COMPOSÉS

274·275

est à rattacher à liqâre ({ action de lier» envers les dieux), ou à legere, la seconde de ces étymologies ayant pour elle Cie., N.D. 28, 72: sunl dicti religiosi ex relegendo, ut elegantes ex elegendo, tanquam a diligendo diligentes, ex intellegendo intellegentes: his enim in uerbis omnibus inest uis legendi eadem, quae in reliqiosov". III. STRUCTURE ET EMPLOI DES SUFFIXES DE NOMS D'ACTION EN *-T-

275. Les suffixes en *-i- (-ia-, -ië-, -iôn-, -io-) fonctionnent dans des noms d'action bâtis sur un radical terminé par un élément consonantique (pernic-iës, reliq-iô, etc.). Lorsque le radical est terminé par une son ante voyelle, il est, en tant que tel, élargi par "*'leslom>*'-tël>-tel, pour BRUGMAN:", IF 4,224. (8) Voir STOLZ, W St 26, 318 sq.; déformation de *BOpe:Lye:I/e:Lt; ou -YOI/OL pour GEFFCKEN, Gl I , 42 sq., et P. KRETSCHMER, Gl 20, 199 (non admis par CICHORIUS, PW l, 106-7). (9) L'étymologie de Varron est refusée par SCHULZE, EN 541, et le Thesaurus rapproche AmWTlllS, etr. am6ni, Alfaterni, etc. Voir BATTI5TI, SI. Etr. l, 18 sq.; J. ANDRÉ, BSL 51 (C. R.), 57, fait remarquer que -ernus, -erna est une finale fréquente dans les noms de villes et de peuples. (10) LH, 254. (11) WACKERNAGEL, IF 31, 252 n. 1 ; LH, 197.

328-329

HYPOSTASES DE LOCUTIONS PRÉPOSITIONNELLES

277

Vict. VI 14, 21 ; peremne, Cie. (cf Fest. 284, 22, peremne dicilur auspicaris, qui amnem ... auspicalo lransi!). Le composé peut être formé sur un adjectif substantivé, comme adsimilis, Cat., « à peu près semblable à », encore é(~rit en deux mots chez Plaute, Mere, 957, etc. (au neutre adsimiles->, ou, Ù 1 autre bout de la latinité, anlenouissimus « pénultième », Mar. Vict. VI 218, 25 ; subdluum « plein air », Tert. i-dluus, Gl. Il 463, Il, et.o.).

329. Les hypostases de ce type, qui sc caractérisent par UJW simple conversion, à toutes les formes dc la flexion, d'une locution jusque-là limitée à une formc casuelle (per noclem > perruir; pernoclis, etc.), s'accompagnent parfois d'unc préflxalisal.ion (er ch. XX) : en abandonnant sa faculté de rection, la préposition perd son statut de préposition, et le nom qu'elle précède cesse de prendre le cas qu'elle demanderait. En cette fonction se rencontrent le plus souvent, ct par ordre chronologique, sub-, prô-, ex- : sub- fournit à Plaute des formations plaisantes, comme Subballiô « qui est sous les ordres de Ballion »)13, et des noms comme subcuslôs, supprômus « sous-échanson », qui annoncent les nombreux noms de fonctionnaires « cn second » (er nos « sous-préfets », etc.), comme subcenluriii, Liv., Iréqucnl.s surtout à basse époque (subadiuua « sous-aide », et.c.], d spécialement dans les inecriptions- s. Ces termes fournissent en arithmétique des désignations de nombres contenus dans un autre (subduplex, subsêsquiierlius, subsuperparliculâris, etc.), chez Boèce et Marl.ianus Capella. Hors de ces séries, les hypostases en sub- ne connaissent guère de succès. Tertullien a Subnerô (cf Subballiôï ; SU/!iSCllS, qui désigne une bourse de cuir, et doit être proprement un « souspanier» est chez Festus, cf P.F. 403, 11, sufTiscus [olllculus Leslium arielinorum, quo ulebanlur pro marsuppio, a fisci similiiudine diclus 10.

Pro- apparaît dans des termes variés: prôporllô, Cic., tiré de prô porliône, employé surtout à l'ablatif et à l'accusatif: I'exisl.cnco du nominatif n'est pas sûre prônômen, Varr. 8, 45, d'après &V1"WVUfLOç17. La préposition n'a sa valeur locale que dans des termes -v ;

(12) SKUTSCH, ALL 12, 13. (13) Succrotilla (uox), Titin., Afran. (Fest. 390, 1), pourrait appurtenir ù la même formation, mais n'est pas clair. On en rapproche crotatum « castagnet.te » (WII, II (21).

(14) Les inscriptions ont sub-condilor, -cornicuiârius, -hërës, -maqister, -optiô (( aille de l'optio »] -paedâqôqus, -praeîecius, -prlnceps, -prôcûrâlor, -uitticus. (15) Peut-être narce que le scrotum du bélier a été dit par plaisanterie « der durunter befindliche Geldsack » ? (WH, 1 506). (16) PLASBERG, Rh M 53, 74-713. (17) Prônômen peut prendre à l'époque classique le sens lie « surnom" : Il. DI';L1,HAYE, ALMA 1927,28-9.

278

PROCÉDÉS RÉCENTS DE COMPOSITION SUR DES NOMS

329-330

tardifs, comme prôlimen « parvis », Hier.!". Les noms de fonctionnaires sont rarement anciens: prôcûrâlor, PJ.19; prôçubernâlor, P. Lent. ap. Cic., Fam. 21, 15 ; à basse époque, sauf prôherês, Papin., ils se présentent en général dans des inscriptions (pramagister, profliimen) : la plupart gardent leur forme de groupes (pra praelôre, Cie., Div. 2, 36, 76, etc. ; pra praefeclïs, Cod. Theod. 6, 26, 4, etc., et ainsi de suite). Il y a peu de noms d'action: prôlûiêla, Ulp. et Paul. dig. (pra lûiôre, Ulp.), prôlepôe « remplaçant de l'agrément », not. tir. 48, 74 a. Dans des hypostases de groupes prépositionnels, ex- se préfixalise au sens de « ancien », par l'intermédiaire du sens « au sortir de » : 1'« ex-général » est celui qui n'est plus général, étant sorti de son ancienne charge. Plaute a aliquem exhërëdem facere « déshériter » qui semble une contamination de ex hêrêdibus excipere, et hêrêdem [aceres". Les noms de fonctionnaires apparaissent très tard (excenturia, excônsul, exprinceps , ctc.}, car ce sont les locutions analytiques qui restent vivantes (ex cênsule, ex dûce, ex prôcônsule, ex presbuierô, ex lribûnis, ex praefeclïs, ex labellâriîs «ex-messager »21). Les noms d'action sont parfois plus anciens (exquaeslüra, Cod. Theod.) que les noms d'agent (exquaestor, Rust.). La formation par hypostase s'étend à expaeniiëns « ancien pénitent », Gelas., exilluslris « anciennement illustre », Rust. Help.

330. Dans les composés à premier membre régissant, les formations suffixales sont les mêmes que dans les bahuvrîhi, Passent à la flexion de bonus les adjectifs formés sur uia, d'abord à partir d'adverbes: obuiam (ob uiam), Enn., dont le sens originel « devant le chemin » est encore sensible par exemple chez Plaute, Amp. 985 (qui obuiam obsistat mihi P>, d'où obuius, Cic., d'après peruius, Pl., « accessible », fait sur peruiam, Pl., et praeuius « qui guide », Cie., sur obuiusw, etc. (cf les bahuvrlhi in-, bi-, lri-, quadri-uius). Le procédé a été mis en œuvre de bonne heure. Cela n'est pas sûr, il est vrai, pour des noms comme ïnfula « bandelette »24,

(18) Mais superllmen « linteau» est écrit en deux mots dans l'éd. MAYHOFF chez Pline, 29, 83. (19) prô-, Ov., Ars 1,587. (20) LH, 254. (21) Ex tabeüâriis est écrit eœtabellûrils, CIL V11l12625: OLCOTT, Formation, 185. (22) WH, 11 197. (23) LH, 254. (24) Étymologie' in [alô « qui est sur la tête» (VANICEK ; von PLANTA; F. MULLER) ; interprétations par des dérivés, en '-dhla de 'em-, cf redimô (SAUSSURE) ; en '-ta de • nedh- (' tuih-} (von PLANTA; etc.) : voir WH, 1 699.

330-331

HYPOSTASES AVEC EMPLOI DE SUFFIXES

(-0-, -io-ï

279

însula, Pl., expliqué dans l'antiquité par "en salos, cf È',/&À W ç 26 ; prôprius, Pl., Ace., qui est peut-être issu de *prr) prîuôê", «à til.re particulier »27; prosper, Naev., si l'étymologie hoc l'si priJ sTJI' (Non. 171, 25) est la bonne (cf § 224 11. 36), ainsi peut-être qur-

seuêrus (§ 100 n. 42). La flexion de bonus est celle d'hypostases comme To'o/il/lIls « non encore consacré» parce que « en avant de I'cnocintc ))28, profeslus « en dehors des jours de fête » (festum), qui Cil est peut-être analogiques", sêdulus « appliqué», Pl., bâti sur se dulüao, sëcûrus, Cie. (se cûrâ }, subrûmus, Varr., à la mamelle» [rûma }, subuesperus, Vitr., « vent du couchant ))31. Le procédé fournil dpI' noms de villes, comme Anlemnae, Varr. (( quod ante se haheanl amnos », P.F. 16,6), Inleramna, Varr. (appelée I nleramnium, FIor. 3, ~l, 17). A très basse époque, on a incoria, Oribas., de il! coriô « Ù la surf'acc ». Il y a des adverbes en -im (type slalim) : cônîeelim, Naov., issu de "corn [esii « à la hâte »32; pedeleniim, Pl., Lucil., avec ses diverses graphies -iemiim, -lemplim, -lenlimr", est tiré de petl« ienli) « cn allongeant le pied»; sur lui est fait pedepressim (pelle pressô ], Non., « en retenant le pied ». Car il arrive que ces hypostases nicnL un premier terme nominal: opecônsiua (dies), Varr., est fait sur le nom de divinité Ops Cônsiuia ; pedeplûnus, de pede plânô, Hala, désigne le « rez-de-chaussée», Les noms dt: villes comme Caesarauqusia sont nombreux. c(

331. D'autres groupes sont adjectivés au moyen de -io- I? !J 1'1'qië, Enn., et ëqreqius, Ter. (e grege); subrimius, de môme sens que (25) Étymologie reprise par VANICEK, BEzzENIJEnr.ER. 1.. .\\EYEn. On li nusxi rapproché v7jcroç (BURY, STOLZ, SCHULZE, Eè\I), en posant '(Jslü (voir WII, \ 707-H), qui est phonétiquement difficile. Aussi SKOK, CI 2::>. 21 ï sq., oonsiûùrc-t-il le mot comme emprunté à V7)cr[81X, osq. nlsida. La parenté, proposee par V. PISANI. C121i, 277, avec le nom du « nez" parce que les caps sont parfois appelés « nez », j'''I'0sI' SIII' 1111 calembour. (26) BRÉAL, MSL 5, 29; étymologie "pro-pirius, cf p(a)lrius proposée l'ar SClIlJI.ZE, WACKERNAGEL (et reprise par LH, 207) : WH, 11373-4. (27) Analyse invraisemblable d'intl/mlls (Lnfim us ) par • in [tnnô (in ""/1/1)) dwz V. Pisani, Gl 20, 277 sq. (28) Cf BRÉAL, MSL 6, 29; WAGENWOORT, Mnem, ,1 a, ser. II (I\H\I), :1I!J-.i32, pour qui la valeur ancienne n'a jamais été oubliée, si bien que proîânüre « proruner ", et proîânâre « sacrifieare » ne sont en réalité qu'un seul et même verbe. Voir Cil dp.rllil!r lieu, E. BENVENISTE, Hommages Dumézil (Coll. Latomus 40), p. 4li. (29) BRÉAL, MSL 6,219. (30) Étymologie invraisemblable par sedëre, cf skr. sâdara- "rcspectllellx., "'lez WOOD, Lg 7, 138. (31) Nous ne tenons pas compte de formations comme Subûra, Succusânus (pÜY"S) , dont le caractère latin n'est pas certain (WH, II 621). (32) WH, 1 259. (33) NW, 569.

280

PROCÉDÉS RÉCENTS DE COMPOSITION SUR DES NOMS

331-332

subrûmus {rûma ), P.P. 333, 6 ; subiugia (lora) « sous le joug», CaL, au n. pluriel, peut aussi bien être un thème en -i- H • Ambilrëbius, CIL XI 1147, est le nom d'un bourg à côté de la Trebbieê", La formation est peu vivante ensuite: anielûciô « avant le jour », Apul. ; conlubernius, CIL XIII 10017, 13 a; subphrygius, Boet.., nom d'un mode de musique « sous-phrygien» ; subcinerius « sous la cendre», Vit. Bath. (M. 87 c. 669 B). Le suffixe -ion- apparaît dans circumcelliô; Aug. (cf circelliô, « quia circum cellas uagantur », Aug., in Ps. 132, 3). L'emploi de -io- dans des hypostases doit être ancien: le grec a èvtXÀw, sans rapport avec moenia. Lu formation est encore productive en bas latin (subsannium « intérieur d'un navire, Hist. apoi. 38, etc., bâti sur criXVLÇ « pont de navire» ; ctc.]. Les autres prépositions sont rares: super- ieuperpondium « excédent de poids », Apul. ; etc.) ; anle- (anfe-cënium ct -lûdium, ApuJ.) ; (M. della CORTE). A. ERNOUT, Phil. l, 23, Y voit un mot étrusque. De toute façon le vocalisme est difficile: tandis que BRUGMANN voit dans le -e· l'aboutissement phouétique de -oi- devant -1'-, SOLMSEN, et SOMMER considèrent qu'il s'agit d'une graphie ancienne conservée dans une expression juridico-religieuse : WH, II 334. (45) HERAEUS, ALL 10, 516, lit pomêrium, (46) pro- et prae-rlpium (-riipium) peuvent être formés soit sur rlpu, soit sur rû pës, De toute façon pro et prae- sont confondus à cette époque dans 11) langage populaire (ROENSCH, Coll., 153-4). (47) BIELER, Rh M 85,247-253. (48) Traduction de 8t(XJ..oyoç : STOLZ, ALL 13, 110. (49) EM. Pour LH, 210, prôcesiria est bien une hypostase de l'l'Ô caslris, (50) Prômuniurium (avec u- d'après JACOBSOHN, Hermes 4H, 311, L. i\I UEI.WII, WACKERNAGEL) peut être dérivé de prômineô, et rattaché secondairement Il môns (KELLER, 24; HOFFMANN-HEINICIIEN). L'étymologie par munqere, due ù la /{raphie isolée -munel-, Serv., En. 3, 121, et proposée par ROENSCII et ZIMMERMANN, est moins convaincante. Promunciôrium, GI. II 419, 8, doit être dù à un croisement de rrpo[1-ux-r1)ptOV et ëmunciôrium : WH, II 109. (51) SVENNUNG, Wortsl., 112. (52) LINDSTROEM, Eranos 13, 206 sq.

284

PROCÉDÉS RÉCENTS DE COMPOSITION SUR DES NOMS

335·337

amb(iJ- iamburbium. « sacrifice dans lequel on portait la victime autour de la ville », Serv.). Il y a quelques hybrides: epiraedium « attelage n, hybride gréco-gaulois », et epiioqium « casaque à mettre par-dessus la toge », Quint., 1,5,68; calamodicë, Rust., «dans une certaine mesure» (xlX"t'a -s-modicê ; cf cala modicum, Anthim. 77) ; mais la glose cala moniem eaeli aspeciur, IV 490, 47 (-men-J,

V 273, 14, etc., reste inexpliquée. Il est rare que le suffixe soit autre que -io- : à côté de prësêpium « enclos» existe prësëpiiiriums", Itala, Ezech, 41, 20; de subsellium, subseliiirium « place des magistrats au théâtre », CIL 1 1341.

336. Un substantif peut naître également par suffixation en -iod'un groupe à premier terme nominal. Le phénomène n'est pas restreint au latin. Il existe en sanskrit, où il peut s'accompagner d'une vrddhi initiale (ksaitrapaiqa- < k~elrasya pali- J, en germanique (got. filuwaurdei « TIoÀUÀOY[IX» le Ù ee111i de « loi faite pour ou contre un particulier" (BRÉAL, MSL 2, 17), (56) BUECHELER; GRIEGENBERGER : voir WH, 1 832. (57) BUECHELER. Pour d'autres explications, par silex ('silicrnillm d'après leclisterniurn ), par un dérivé "silicris de siliqua, par sileô; par étr. 'zita-ni, etc. voir WII, II 536-537. (58) WHARTON; BUECHELER : WH, II 686. (59) A. GRAUR, Consonnes géminées, 2IO. (60) HERAEUS, ALL 12, 66; WH, II 353.

286

PROCÉDÉS RÉCENTS DE COMPOSITION SUR DES NOMS

337-338

olair?". Appartiennent à des zones d'emploi vulgaires lerrimôiium, aquae- et aqui-ductium (§ 368), sôliuersium; Gl. III 555, 30, etc., nom vulgaire du cyclamen.

338. Le rapport entre les deux membres de quelques substantifs composés en -ium est de coordination: les deux éléments du composé se trouvent sur le même plan. Ces composés coordonnants à suffixe -io-, rares, sont tardifs, à l'exception de saccipêrium, Pl., Rud. 548 i-përiô ap, Non. 531, 15), du reste sans doute emprunté à 0"Q(xX07t~pQ(62, et qui désigne un « sac ll, une « besace» (mais saxipêrium « fronde JJ, Ps. Fulg., a au premier membre saxum). Dans quelques composés chacun des deux membres s'apparente pour le sens à l'autre : dexirochêrium, Lucif., synonyme de dexlrâlia « bracelet )J, semble formé de dextra au sens de « main II (l'idée de « droite» ayant disparu) et de Xdp ; sans suffixe, lacernobirrus a de même un premier membre lacerna (( sorte de manteau J»), de même sens que le second, birrus, par lequel il est expliqué dans une scholie de Perse, 1, 54 6 8 • Cette composition tautologique de deux mots de même sens a des équivalents ailleurs 64, qui sont nés indépendamment dans les différentes langues : gr. 0""t'pE, PL, ljp même sens qu'exanimis, et sur lequel est fait sans doute ëmorluûlie?s, PI. ; cônîinâlis, Cassiod. (-fïniiilis, GL V 627, 28, cl.c.], cf cônîînis ; côtr[ormâlis « qui a la même forme», Hala (cf cônîormis, [ormûlisst", Con- fournit de nombreux termes, tels que cônîâlülis « qui a III même destin», Cic.; concorporâlis, Hala 78; corulenlâlis « (J"uyyeyop.q?dënuô 5 4 , Pl.; *i(n) s(I)Locô(d) >UiC0 6 6 , Pl.; lupî cauda > lupicûda, nom d'une plante « queue de loup», Gl. 1II 590,57 (§ 373); les successeurs d'aquae manâle « aiguière »66, Varr. ap. Non. 547, 7, posent des problèmes: qu'il s'agisse d'aquiminüle, Paul., Dig. 33, 10, 3, etc., ou d'aquiman!le, Paul., Sent. 3, G, 5,G, etc., l'étymologie par manus est difficile, et celle par mânârcs?

(51) A moins qu'il ne s'agisse d'un adverbe composé de in+cassum qu'on rencontre en fonction d'adverbe, et qui est le participe de careo: cf HAVET, MSL 6, IOH109. (52) Pour obiier, voir § 253, n. 22. (53) Naturellement, nous ne tiendrons pas compte ici des hypothèses comme celles qui font de eaprônae « cheveux qui tombent sur le front " ou de cussilirem ft paresseux» un "caput-prônae, un "cossim in lira. Voir 'YB, 1 162. (54) Recomposé en dë nouô, Hala, Ioh, 3, 4, etc. De J'adverbe a peut-être tiré nit adjectif dênuus, Cassiod. : voir WH, 1 342. (55) Parfois écrit illico par rapprochement avec illico (56) Dont JORDAN, Hermes 7, 368, a montré qu'il était écrit en deux mots (urceolum aquae manale uocamus, eo aqua in trulleum elTundatur). (57) La première étymologie, qui part de man (u tâlis (BOEMER, Gl 26, 1 Bq.), est phonétiquement difficile. WH, II 31, adopte, avec réserves, celle par mânâre : UliS aquae mânâlis « récipient à eau courante» serait devenu aquaemanale d'après aquaelicium. Cependant des locutions comme celles qu'on rencontre dans les ~Ioses (aqua manibus ) ou les inscriptions (aqua in manus à Herculanum: VAANANEN, 181) sont en faveur d'une hypostase d'un groupe comprenant aqua et manus. Aussi hien -llis ct -âlis sont-ils des suffixes employés dans les hypostases (cf suouelaurltia ; palmôpeüâlisv.

304

COMPOSÉS, GROUPES ET JUXTAPOSÉS

364

laisse le vocalisme i inexpliqué : aquiminâle serait-il alors une forme transmise sans réalité dans la langue 5 S ? Des syncopes apparaissent à l'intérieur du mot entre deux consonnes: dans corqô « assurément », s'il vient de * cam reqô (ou *roga)59, et erga < *ë roga (cf regere) ; impraeeenliârum. « pour le moment», Cat. (sur lequel Pétrone fait dëpraesentiiirum) , ancien "in praeseniiii rêrumsv ; iûqlâns « noix» < louis gliins 61, Varr. ; portia, attesté d'abord à l'ablatif porliône (Cie., etc.), qui doit être un ancien * pro r( a)tiane > p (r [orliône, avec dissimilation du premier _r_ 6 2 ; praesiô « sous la main», Pl., si on voit dans son second membre autre chose que la racine de slâre": Une voyelle finale de premier terme peut s'élider devant voyelle initiale du second: ainsi, magnopere, Pl., Pers a 241, à côté de magna opere, Pl., Truc. 937, magna hic opere... , Cic., lnv. 2, 1; operemagna, Pl., Cas. pral. 21 6 4 ; quaniôcius « au plus vite», Mamert., laniôcius, Gl. IV 181, 40, etc.; paeninsula, Liv., à côté de paene insula, Cés.; paenuliimus, Gell.; la voyelle de ne- s'élide par exemple dans nan 65, nullus, à côté de formes comme neutiquam, neuter, etc. 6 6 • (58) WH, II 31. (59) WH, 1273. EM pose "co-erqô, avec contraction. Le rapprochement avec ~pyov, (' co-uierqô, JURET, Domin., 228) et celui avec skr. kar-hi « quand» (PERSSON, Stud., 87) son t à éliminer. (60) Établi par CORSSEN, WOELFFLIN. L'explication par 'in praesentiâ hârum (BRUGMANN) est difficile à admettre en raison de l'ellipse immotivée de rërum ; cf WH, 1685. On a in praeseniiâ rërum, Schol. Cic., Bob. p. 119, 18, cf praesentiâ rêrum, Tert., Scorp. 1 p. 146, 10. (61) 'diou (e)s-gl-> ' iou (z)-gl->iü-gl-, à moins qu'on ne parte directement de iûd'après Iûpiter, comme STOLZ, JACOBSOHN : WH, 1 727. (62) Explication de MEILLET, BSL 28,40, et de YON, Ratio, 254 sq. Mais WALDE, IF 39, 93 et LH, 240, Y voient un 'pro pariiône (' pariiô étant à pars ce que mentlô est à mens), devenu pro porlione par assimilation (repris par WH, 11258-9). (63) "praesiiô, BRÉAL, VANlèEK; "praeksitëd, CIARDI-DuPRÉ; apparenté à praes, du type praecô selon SKUTSCH; à pra estes suivant SOLMSEN; "pral istô d pour KRETSCHMER ; cas figé d'un' prae-sio- pour PERSSON, MERINGER : voir WH, II 356. L'explication de WACKERNAGEL "pral heslô, cf skr, hâsta- «main" (46 Jb, Schweiz. Gymn., 168 sq.), se heurte au fait que la forme la plus ancienne de praestô est praestû : cf § 281. (64) Pour le détail de l'emploi de ces formes chez Cicéron, voir NW, 607-8. Minimopere, donné dans des dictionnaires, doit être lu minima opere dans l'unique exemple qu'on en a, Prisco II 243, 2 (mais mlnopere, not. tir. 25, 26 a), et nlmiopere, Cic., Par. 5, 2, doit peut-être être lu en deux mots, comme dans Verr. 6, 59. (65) Selon PLANTA, BRUGMANN, SOMMER. Mais THURNEYSEN, KRBTSCHMER, J. SCHMIDT, SOLMSEN partent de "neoinom > noinom; la monoph tongaison de la diphtongue à premier élément long fait cependant difficulté. Voir WH, II 174. (66) nul/us < 'n (e) oin (0 )/os, nom de l'unité, avec même suffixe que dans sinqulus : WH, II 186. Sur le traitement de ne devant mot à initiale vocalique, voir BRUGMANN, IF 6, 80 sq. : ne s'élidant normalement, neutiquam, sans' utiquam, doit contenir' ne,

365-366

ALTÉRATIONS PHONÉTIQUES

365. La chute de -u- à l'intervocalique devant -0- amène dos altérations dans les composés en -uorsum, -uoreuss", ainsi des hiatus: deorsum, Pl. (deorsus, Cic.), qui continue à évoluer, en deosum avr-e chute du r devant s, Cat., Agr. 162, l, etc. 6 8 , puis diosum, Hain, Luc. 4, 9 (cod. d), etc., et, avec assimilation dy- > y-, iusum, Macr., Somn. 2, 5, 25, etc. ; iosu, Chiron 593, iosso, Diosc. [""J, 121, etc. L'hiatus ainsi formé peut être éliminé par crase: tlôrsum, Sent. Minuc. (CIL V 7749) 9,21 6 9 , sôrsum, Pl., As. 362, etc. De plus, los graphies par se- et de- doivent dissimuler une crase, quand le mot est scandé avec synizèse, ce qui semble être la règle pOlir Plaute et Térence, Lucilius gardant la diérèse, et Lucrèce observant il cet égard la plus grande liberté. La première voyelle en hiatus pr-ul s'élider après la chute du u, par exemple dans s(e)ursum > sursum, Pl.70 (sursumuorsum, sursuorsum, susouorsum, CIL l 199, Il. is, 15, 7, respectivement), sursus, Cie. ; le groupe consonantique peut. alors se simplifier par chute du r: de rursum (*reuorswn), on Il des formes comme rusum, Pl., Mil. 525, etc., russum, PL, Ra. 1t1ü, rusus, Naev., Gom. 89, etc. Lorsque le second terme du juxtaposé est un ablatif en -0, le plus souvent les deux voyelles en hiatus se contractent: de prôuorsus, Pl., Ps. 955 (Lorenz), on a des formes comme prôrsus, Ter., Ad. 550, prôrsum, Pl., cu. 700, prôssus, Cic., Tuse. 1,6,11 (Gud.), prôsus, a, um, Pl.; laelrôt r leum, P.F. 104, 13, et longilro(r)sus, P.F. 107, Il, sont analogiques pour la forme dl' dextrorsum, sinistrôrsum 71. 366. D'autres changements phonétiques interviennent ; chute, devant voyelle, de -m-, et, éventuellement, de la voyelle qui le précède, dans circuiius, circuiliô, à côté de circumitus, circumiiiôt", et circuilor, circiior, à côté de circumiiorïv ; dissimilation dans non ' ne (cf. nëqulquam, nëquâquams, avec ensuite le même abrègerneut 'Ille duns deorsum, seorsum; ce serait la même chose pour neuler, trisyllabique duns la poésie ancienne, à moins qu'il n'ait au premier membre' nei > nT. (67) Voir NW, 743-751. (68) deôsum a un -6-, assuré par I's simple (alors que 1'-0- de -unrsum est bref), sans doute par analogie de aliôrsum, inirôrsum : cf NIEDERMANN, Mnem. 3, 26l:l. (69) Mais l'étymologie par "dë-orsum du nom du «dos» est probablement populaire: voir WH, 1 372. SOMMER, 258, pose "drt-som, cf v. irl, druimm « dos s ; E. LEWY, IF 32, 158, rapproche v.h.a. zers «penis» lett. diisa « derrière " ce qui va moins bien pour le sens. (70) Mais sursum viendrait de 'subs-uorsom selon CURTIUS, VANléEK, WH (II 63&). De fait Plaute distingue sursum, Mil. 1150. etc., sorsum, Epid. 402, de seorsum, Rud, 1314 ap. Non., 151, 10 (la tradition ms. du texte de Plante donne sorsus), etc. (71) Sur laetrôrsum, cf LH, 194. (72) Voir NW, 826. (73) Mais pour WH, 1 221, circitor serait dérivé de circus d'après iünitor, parti/or, ou de circâre d'après domitor: domâre, -iiâre.

306

COMPOSÉS, GROUPES ET JUXTAPOSÉS

366.367

•mediei dië > * medeidië > meridië, peut-être sous l'influence de merus'< ; simplification de groupes de consonnes dans Uico (§ 364) ; pômeridiem, Quint. 9, 4,39 ( < pos tmerïdiem). Certains termes ne s'expliquent que par des « écrasements», assez éloignés des lois de la phonétique ordinaire; ainsi, idenlidem, qui contient deux fois idem, mais dont le -t- fait difficulté 75; maclus, dans la formule macle esta « sois honoré », s'il est un ancien magis aucius, comme le dit P. Festus, 112, 13. L'analyse de eirempsë « semblable», Pl., Amp. 73 (slremps, P.F. 467, 5), est des plus incertaines?", 367. Les noms de monnaies à premier élément nom de nombre sont également victimes de changements phonétiques. Le plus employé est sêslertius 77 : quod duobus semis additur... ab semis lerlius sestertius dicitur, Varr. 5,173, sur lequel est fait sêmisquarlus, Varr. Dans d'autres, les altérations sont irrégulières: as y est représenté par -(SS)iS 7 B , qui, étant donné le sens « deux as», « trois as», etc., est plutôt une évolution irrégulière de as, qu'une dérivation de ce dernier. Ils sont attestés essentiellement chez Varron, 5, 169 et 170 (bicessis, attesté sous forme uicessis chez Prise., en 111416, 17; decussis, etc.), et Priscien, 1II,416,17 (dussis, tressis, quadrassis, etc.), et sont rares dans les textes: cenlussis, Lucil., etc., ociussis, Hor., etc. ; certains sont fractionnaires: sëmis « demi-as »79, Rh. Her., et « moitié», Varr., etc., « demi-pied», Plin., Col., parfois indéclinable (Vitr. 4, 1, diametros ocio semis) ; bës, bessisê", Varr., « 2/3 d'as », et par suite, d'un objet quelconque; de la même façon, la forme voisine lriëns, Varr., Cic., désigne le « 1/3 d'un as» ou de n'importe quoi. On a des formes abrégées de celles-là dans decus, centus, etc., Comput. Carth. 2, 17. C'est peut-être aes, plur. aera, aussi bien que ils (du reste formé sur lui) qu'ont pour second élément les termes suivants, sans doute anciens juxtaposés : duodeciaere (dodrantes eodem modo compuiali duodeciaere efficiunt, Metrol. II 68, 13) ; ûndeciaere, id. (v. i. undeciaes); quatiuordeciaere, II 68, 19; quindecimaere, II 68, (74) STOWASSER, ALL l, Z73-Z77, discuté par HINTER: voir WH, 11 77. (75) 'idem et idem, WALDE; 'idem item idem, J. B. HOFMANN; moins sûrement 'idem itidem, LINDSAy-NoIIL : voir WH, 1 671. (76) "sei-dem-pse, LH, lZ8; 'sisem+pse, BUECIIELER; 'sis (si uls j-s-em-pse, STOLZ; sic rem empsisse, LAGERKRANTz : voir WH, 11547. (77) Né à partir du génitif plur, milia ... sestertium : voir KUEIINER-STEGMANN, 1 1036; SKUTSCH, KI. Schr., Zl ; E. FRAENKEL, IF 59, 139 sq, (78) Voir STOLZ, HG 1 389 sq, (79) Sur semis, sêmissis a été fait analogiquement trëmissis : voir \VB, II 701. (80) Sur l'évolution phonétique de duo ass(is) à bessis, voir WH, 1 101-10Z (après JURET, MS'" ZO, 155) ; sur la forme dialectale des, Varr., 5, 17Z; ERNOUT, 15Z.

367-369

CHANGEMENTS MORPHOLOGIQUES

22, etc., (deunx quoque ac sicilicus sedecies ducli quindecimaerc ciunl).

307

('fTi-

368. Des changements morphologiqucs ont pu faire du juxtaposé un composé. L'analogie des composés à premier membre terminé par -i- entraîne aquiduclus, CIL XII 4355, etc., (sur aquiducia cf § 485), au lieu de aquae ductus, Front. ; lerrirnôlium, App, Probi p. 198 K., comme forme vulgaire de lerrae molus (Ierrae motus, non lerrimolium). Le -i- de composition prend la place de toul.es sortes de désinences casuelles au premier terme : aequùlislâne, Hyg., Grom. 129, 20, vient probablement de aNJUC disliins (d Ps. Cens., Frg. 2,1), comme sans doute aequislàns, M. Cap. 8, 817, qui, plutôt qu'un aeque stans, doit en être une forme syncopée. La série la plus productive est ici celle des adverbes en -modis, juxtaposés, comme le montrent les hésitations de la tradition : ainsi mirimodïs, écrit mirîs modis dans certains mss., PI., 'l'ri. U31, etc. 81; omnibmodîs, Pl., Slich, 684, graphie de l'Ambrosiarl/ls pour omnibus modis, corrigée par Scaliger en omnimodis (qu'on rencontre depuis Lucrèce). En latin populaire, le suffixe du second élément de juxtaposé peut être remplacé par un suffixe de composition: -ium, largement employé dans les substantifs (cf § 334), prend la place de -lu- dans lerrimôlium et aquaeducliums», CIL VII 142 8 3 ; le changement y cst analogique, sans quoi on attendrait ici, en regard de môlus et ductus simples, -môliô et -ducliô en composition 84. 369. Par ailleurs, un groupe au pluriel peut donner, sans dérivation, un composé singulier. De cette hypostase courante, on peut donner quelques exemples typiques: le nom de constellation Sepiemlriônës « les Sept Bœufs du labour », dont les éléments sont (SI) Le passage de mullls, mlrls modls à multi-, mlri-modls, sous J'Influence des premiers membres de composés en -i- s'est peut-être errectué par un Inl.ermédinire phonétique "mulil-, mlrl-modls : voir WH, II 124; LH, 251. Sur les emploisdelllllllfs modls, mullimodls, multimodê, voir NW, 609-610. (S2) JORDAN, Hermes 7, 367-36S: « Ausdriickcr der Buuerlateins : aqua ilnciium, lerrimotium », (S3) Parfois écrit aqueductium, dans lequel, selon STOLZ, 17, -e- peut être III1C graphie simplifiée pour ae, ou représenter l'ouverture i "> e du latin populaire. Voir BUECHELER, KI. Schr., 51; GRIEGENBERGER, IF 19, 148. On retrouve celle ouvcrturu par exemple dans lumemulia < "lumimolium (cf ~ 337). Mais on ne pout assurer qu'elle figure dans le nom de plante miulessudia, l's. Diosc., 4, If)2, pour lequel une explication par muliisûdia est hypothétique: cf J. ANDRÉ, l.e.c., s. Il. (S·!) On aura remarqué en cours d'exposé que certains des chuuuements sigllalés peuvent affecter simultanément une même forme (lupictïda, terrimôlium, otc.). Nous ne citons pas les formes dont l'origine n'est pas éclaircie, uinsi CI/lOCI/lis, peut-être L1ôfol'mation de calli oculus (J. ANDRÉ, Lex., s. u.), etc.

308

COMPOSÉS, GROUPES ET JUXTAPOSÉS

369-370

encore indépendants par exemple chez Cicéron, N.D. 2, 41, 10à, s'emploie au singulier pour désigner le Nord, sous forme Seplemiriô etdans la tmèse seplem subiecla lriônl, Vg., G. 3, 381, sep lem qualifie un singulier-w. Des noms de magistrats sont tirés par régression d'un groupe nom de nombre+uiri. Nous n'en donnerons qu'une illustration: le groupe duo uiri, CIL 1 1607, etc., évolue vers un composé à premier terme invariable: duo uirôs, CIL XI 1421, etc., avec un duo archaïque à l'accusatif, et surtout, avec duo étendu indûment au datif-ablatif, duo uireis, CIL 12 590, 14; sur l'ancien génitif pluriel duuni uirum, qui n'a plus été comprise", se forme un singulier duumuir, CIL IX 1540, etc., sur lequel est refaite une flexion: duumuiri; Cic., Ali. 14, 21, 2 ; duumuir est concurrencé par duouir, CIL J2 788, etc., qui, lui aussi, donne naissance à une flexion 87. Un dérivé semble avoir servi d'intermédiaire entre le groupe et le composé qui en est né par hypostase, duumuirâlis dans une inscription, CIL 1 698 (Ile s. av. J.-C.) ; les autres noms en -uir sont nombreuxv-. Une hypostase analogue est à l'origine de primipllus, issu de la locution [cenluriô ) primï plli (cf Liv, 7, 41, 5, cenlurio ... quem nunc primipili appellanl). Le composé a pu naître d'abord à l'ablatif (cf Cés., B.G. 3, 5, primipile P. Sexiio Baculo: v. l. primo pilo) ; les inscriptions ont souvent primopil. (CIL V 1838), primop . (CIL XIV 2523, etc.). Les dérivés qui ont. pu servir d'intermédiaires entre le groupe et le composé ê", sont tantôt prîmipllâris (Suet., Cal. 37. 38; CIL V 6007, etc.), tantôt prîmôpllâris (CIL X 3757)00. D'autres hypostases semblables sont primiscrlnius < primus scriniiv! « le premier des scrlniârii, chef du secrétariat», Cod. lust., et peut-être prîmôrês « qui sont ail premier rang», s'il est issu de prîmô ôre, ou de primâ ôrâ, et n'est pas seulement dérivé de prîmuss», liT. GROUPES A ORDRE DÉTERMINÉ+DÉTERMINANT

370. Le passage d'un groupe à l'état de composé peut donc s'accomplir plus ou moins complètement (§ 363). Mais il y a des groupes qui ne deviennent jamais des composés, sinon exccp(85) Voir EM. (86) Voir ch. II, n, 3. (87) Sur les formes duo-, duum-uir, cf LE, 196 ; WII, 1 383. (88) Voir WOELFFLlN, ALL 9, 16. (89) Voir LH, 251, et notre § 359. (90) Sur primipllârius et -ûris, voir NW, 160; sur prlmiplltiris, M. -lis, 36. (91) LE,252. (92) Voir LE, 251 ; WH, II 362. La flexion est défective: NW, 357.

I.EUMANN,

370-371

GROUPES NE DONNANT PAS NAISSANCE A DES COMPOSÉS

3ml

tionnellement (de l'OS marinus (> fr. romarin), on a un gén. rôs marini; Casso Fel. p. 12, 5, etc.). Ils se distinguent des précédents non seulement par leur graphie discontinue, mais surtout par l'ordre de leurs termes, déterminé-l-déterminant. La list« de ces groupes n'est pas bien délimitée: comme la graphie n'est mêrno plus ici un indice, et qu'on les voit se former peu à peu, il est difficile de dire à quel moment les deux éléments d Il syntagme nominal sont encore groupés occasionnellement, à quel moment ils présentent l'unité d'un juxtaposé: nâuis Longa est-il lin juxtaposé? un groupe nominal quelconque? De l 'ineorl.itude de la réponse naît le caractère arbitraire des exemples donnés,

371. Dans certains syntagmes de détermination, le second terme est un génitif : caplâliô beneuolenliae, cauum aediumv», compos animl, curricuLum uilae, cursus honôrum, môs maiôrum, orbis lerrârum (lerrae) , paler (mater) familias, praeîeclus equilum, etc. Certains sont des noms de plantes (feL lerrae, [ûmus lerrae }, ou des noms de villes [Fânum Forlûnae; Forum Iulii, LOcus Ferôniae, Porlus Veneris, Caslra Herculis, etc.). Il y a de nombreux syntagmes substantif-l-adjccl.if"! : aalilës cereâlês, aerârium mililâre, ager pûblicus, annâlês muximi, annus magnus, arbor itt[êliœ au sens de « potence», ars qrammaticn, iis lîbrârius, campus Marlius, carmen saeculâre, cas Ira aesliua, OÏSIIS rëclus, cella uinâria, ciuis rômânus, cloâca maxima, cohors praelôria, cônsul dësiqnôius, crimen capilâle, dei immoriâlës, tlië quarli (-l', -0 )95, [ënum graecum 96, fliimen diâlis, forum boârium, [urmellûris?", GalLia cisalpina, genus humânum, homo cônsuliiris, iqni« sacer, imperium riimânum, iüs cîuile, Lac serpiciumv», Lapis nif/l'T', (93) Cauum aedium « cour intérieure d'une maison )J, groupe de deux termes dont le premier se Iléehi t chez Varron et Vitruve, apparalt sous forme de composé cauaediunt (pal' élision de -um au sing., -a au plur.) chez Plin., Ep. 2, 17, 1, G. Mais cc n'est pas, comme le pense A. GRENIER, 103, un composé du type lâtiîunüium, Voir de plus WH, 1 191. (94) Pour abréger cette liste fastidieuse, nous ne donnons qu'un exemple IHI/' substantif: au lieu de acs qraue, acs rude, acs aliënum, acs mûluum, IICS horde/irium, cte., nous ne citons, à titre d'exemple, que acs mûluum, (95) Sur les attestations des locutions faites de dië+un ordinal, voir NW, ÜG2. (96) [nenum qraccum, Calo, Aqr. 27, etc. (graccum [aenum, l'lin. 22, 123, ctc.) ; au masculin, faenus qraecus, Oribas., Syn. 4, 31, etc. A basse époque, le mol devient composé: f(a)enugr(a)ecum, f(a)enogr(a)ecum, Chiron., Marcel l., C. Aur., 'I'heorl , Prisc., souvent au masculin dans les gloses (cf faenus qraecus, Oribus., SlIn. 'l, 31, etc.) ; [ënoqrecus, Gl. III 596, 7; fënegr(a)ecus, Gl. III 586, 27; [êneçrequs, III ;)86, 2H: fënigr(a)ecus, III 622; 45, etc. (97) Si le terme est issu de [ûr mellâris, comme le pensent DITTMAN;>; cl ZAVATTAHI : voir WH, 1 570. (98) lac-i-sirplcium, dérivé de sirpe (Pl., Rud. 630, sirpe el laser piciumi, devenu tasserplcium, coupé en la (s)ser (employé comme simple) et plcium par rapprochement avec piœ, Voir WH, 1767.

310

COMPOSÉS, GROUPES ET JUXTAPOSÉS

371-372

lâr [amiliâris, lëx aqrâria, liber memoriâlis, lupus [ëmina'», mâlum pûnicum'v", nâuis onerâria-?', mûsarâneus ; nômen rômânum, nônae [ebruiiriae, nummus sêslerlius; pax romana, pecûnia pûblica, poena capiiàlis, pontifex maxumus, populus rômiinus; praeior urbânus, quaesiiô perpetua, rês pûblica, rêx sacrificus, ealacaccabia'v>, saxum Tarpeium, sella curûlis, sënsus commûnls, sermô quoiùliânus, sol oriens, sors peregrïna, toga uirîlis, tri büni mililârës, tri bûs urbânae, uâs argenteum 103, ullla pûblica, uir bonus, uila rûstica, uitulus marinus, etc. La disproportion numérique entre les exemples à second élément génitif, et ceux dont le second terme est un adjectif (cïuis rômânus }, est inverse dans les juxtaposés à premier élément adjectif {lôlus clau us), et à premier élément génitif (agrï culiûra}. Ce fait reste à expliquer (§ 373). IV. INTERPRÉTATION DES FAITS

372. Si certains groupes peuvent devenir des composés, il en est d'autres qui s'écartent des composés par l'ordre de leurs membres. Ces faits peuvent recevoir diverses explications. L'une d'entre elles est d'ordre stylistique-ve. Dans les groupes adjectif +substantif, seul l'adjectif déterminatif, c'est-à-dire celui qui « apporte un élément de définition au lieu d'énoncer une simple qualité »105, peut, au contraire du qualificatif qui, par sa valeur affective, expressive, etc., est d'emploi occasionnel, se lier assez étroitement au substantif pour former avec lui un juxtaposé. Or, c'est dans le cas de l'adjectif déterminatif que la place de l'adjectif nous apparaît comme le plus rigoureusement déterminée... : «

10 Normalement, l'adjectif dit déterminatif se place après son substantif... 2 0 Exceptionnellement, il sc placera devant, s'il y a lieu de le mettre en relief. (99) Le type lupus [êmina est très ancien: SPECIIT, HZ 55, 13-18. panicum est le nom de la « grenade» : E. de S.\INT-DENIS, Mém, Él. LaI., 71. (101) Sur nâuis onerâria, voir 'VOELFFLIN, ALL 9, 286-7. (102) Ce serait un juxtaposé sala (plur. de salumi-s-caccabia, adjectif formé sur raccabus, d'après STOLZ, 24. (103) Ulis arqenleum devient composé (abl. uâsarçentelsi : LB, 252; 1-lERAEUS, W ta Ph 1917, 708; HAVERS, Cl 16, 119; NIEDERMANN, Mél. Bally (19391, p. 432, etc. (104) Le terme" stylistique» est ici commode, bien qu'un peu étroi t, pour caractériser la position selon laquelle un certain ordre de mots est normal, et prend une valeur expressive quand il est inversé. (lOf,) J. !\IAROlJ7.EAl:, t-oue, 328. (100) mâlum

372-373

ORDRE CROISSANT DES TERMES D'UN GROUPE

311

3° Si l'adjectif cesse d'être déterminatif pour prendre ... une valeur qualificative, il occupe la place du qualificatif, c'est-à-dire devant le substantif» 106. Cela semble être ancien: « im idg. scheint das AdjekLiv habituelle nachgestellt... Ais Regel darf gelten : objektiv bcstimmende (intellektuel-sachliche) Adjektiv stehen habituell nach [iûs ciuîle wie iûs cîuium, populus rômânus ... ), qualifizierenc!e (uffcktischr-) treten unter der Wirkung der Betonung voran »107. Mais quand le déterminant du groupe nominal est un g-ùniLif, la situation est plus confuse, et la place habituelle du génitif a Hé donnée, selon les auteurs, comme postposée lOS, indifTérenb,109, ou préposée 110 : de fait, on a plëbis sciium, mais pater [amiliûs, Mais l'apparente liberté de place du génitif, qui empêche de définir l'ordre « normal» des éléments du syntagme nominal à déterminant, génitif, n'est pas une liberté d'indifTérence.

373. Il ·semble en efTet que jouent des facteurs rythmiques. Ceux de ces syntagmes qui ont été donnés en exemples (§ 371) ont en commun un second terme d'un nombre de syllabes ou égal ou supérieur à celui de leur premier élément, le déterminé. Dans les exceptions, très peu nombreuses (curriculum uîlae, iribûnus plëbis ), l'ordre syntaxique (§ 374) l'a emporté sur l'ordre rythmique. Inversement, quand le génitif est le premier terme du g-roupe, il se trouve être d'une longueur égale ou inférieure à celle du second terme. Ici encore les exceptions, quoique un peu plus nombreuses, sont rares proportionnellement: populiscilum. est dû il l'analogie de plëbisciium ; aceeplilâtiô s'explique par l'existence de composés en -liô comme aequilâiâiiô ; le corporis cuslôs des inscriptions coexiste avec cuslôs corporis, Enn., Scaen. 255, etc. Quant il I'ordre de honoris causa, il est consécutif à l'emploi de causa en fonction figée de postposition. L'ordre croissant des termes d'un groupe nominal esl. ()galemeIlL net dans les groupes substantit-l-adject.if', où l'adjectif est post.posè. S'il l'est de manière plus fréquente et plus régulière que le g-{mitif, c'est que les adjectifs sont souvent affectés d'un suffixe encombrant qui les rend plus longs que les substantifs. Ici encore, les exceptions sont négligeables: on a quindecimprimi car l'antéposition des numéraux est générale dans la langue. Nous n'avons pas relevé d'autre exception dans la série des groupes a adjectif postposé (dans poslridië, etc., -dië est dissyllabique). (106) Id., 32S-9. (107) LH, 616. (lOS) Id., 617. (109) BERGAIGNE, MSL 7, 1 sq. (110) B. ROSENKRANZ, IF 51, 131-9.

312

COMPOSÉS, GROUPES ET JUXTAP~)SÉS

373·374

Le rôle joué par ce facteur rythmique se vérifie par l'indifférence de la place respective des deux termes d'un groupe quand ils sont syllabiquement égaux : forënsis opera, Cic., Ac. 2, 2, mais opera pûblica, 2, 6 ; columna rosiriila, Liv. 42, 20, 1, mais rosirâta corona, Vg., En. 8,684; lupicüda (§364) se dit aussi cauda lUppll; à l'époque de Plaute, on peut dire maœimô opere, et opere maœimô, etc. Inversement, certaines oppositions de couples montrent bien que l'ordre des termes est fonction de leur longueur respective. Si on dit indifférernment homo nouus et nouus homo, on a curûlis maqislriitus, mais sella curülis ; summum bonum, mais bonum pûblicum ; lëgës annâlês, mais annâlës maximï; nouae tabulae, mais rës nouae; loca pûblica, mais pûblica commoda, etc. La loi des deux membres croissants, établie par BEHAGEL 1 12 , et reprise pour le védique, l'avestique, le lituanien et le vieil islandais par KRAUSE 11 3 , vaut donc pour le latin également: des deux termes d'un syntagme nominal de détermination, que le déterminant soit un adjectif ou un génitif, c'est le plus court qui précède. Cette loi ne s'applique pas pour autant aux deux membres d'un composé: des exemples comme dëlënijicus, laurifer, misericors sacerdôs, sont loin d'être l'exception. Il y a cependant un cas notable où les composés se conforment aux mêmes règles rythmiquess que les groupes: dans les dvandva, en latin comme dans les autres langues, c'est le plus court des termes qui vient en tête (patrës cônscripii, M ilrâuàrunii, etc.). Mais, comme on le verra (§ 405), ces termes ne constituent qu'une illustration particulière du comportement des groupes, et ne contredisent pas l'opposition de structure entre groupes et composés.

374. Il reste cependant qu'une évolution est apparue : « das Adjektiv wie auch sonst die weiteren Bestimmungen eines Nomen ursprünglich nach dem Substantiv gestanden haben, dass sich aber frühzeitig schon in idg. Zeit die Voranstellung cntwickelt hat, so dass beide Stellungen môglich wâre » 114. Quelle est la cause de cette évolution? L'ordre des éléments d'un groupe, que nous avons vu dépendre de considérations rythmiques, obéit aussi à des règles syntaxiques: dans un groupe, non seulernent le terme le plus court précède le terme le plus long, mais, de plus, les éléments se succèdent selon l'ordre déterminé -l-dèterminant.P". Cependant, la constance de cet (Ill) Sur ce nom de plante, voir

BERTüLDI,

n'uS 11, 13, et J.

ANDRÉ,

R Ph 28, 5\!.

(112) IF 25,10.

(113) W. KRAUSE, KZ 50 (1922), 74-129. (114) HIRT, VIl p. 243. (115) Id., 228 : « ursprünglich das bestimmenùe Element hinter dem bestimmten stand, im Laufe der Zeit aber immer mehr VOl' dusselbe tritt »,

374-375

OPPOSITION ENTRE GROUPES ET COMPOSÉS

313

ordre syntaxique est moins rigoureuse que celle de l'ordre rythmique. Cette marge entre l'ordre rythmique, quasi régulier, et l'ordre syntaxique, plus flottant, tient à ce que l'un et l'autre ne se recouvrent pas. Il y a même conflit entre les deux toutes les fois que le déterminé qui, en cette qualité, doit être en tête, est le terme le plus long du groupe, et, par là, doit venir en second. A priori, la difficulté pouvait recevoir indifféremment une solution syntaxique ou une solution rythmique. En fait, c'est cette dernière qui a prévalu. Et c'est ainsi que des groupes déterminant-l-déterminé , contraires à l'ordre syntaxique normal, sont nés sous l'influence de facteurs rythmiques, et qu'a été amorcée l'évolution évoquée. Elle a pu se généraliser dans les groupes dont les deux termes avaient une longueur égale: on a pu dire aussi bien columna roslrâla, et rostrâla columna. C'est alors que certains juxtaposés ont pu présenter le même ordre que les composés.

375. En effet, si les groupes sont disposés selon l'ordre déterminé déterminant, c'est exactement l'inverse qui se produit pour les composés, qui ont normalement au premier membre le déterminant, au second, le déterminé (cf § 158). L'ordre des éléments d'un groupe et celui des membres d'un composé sont opposés, si bien que chaque fois qu'un composé présente l'ordre déterminé-l-dèterminant, on peut se demander s'il n'est pas issu d'un groupe, par hypostase, ou par juxtaposition : l'ordre est normal dans uiuerâdiœ, mais non dans lasserpîcium (déterminé déterminant), né du groupe lac serpicium ; dans dûribuccius , bahuvrîhi à premier membre adjectif, mais non dans ôrùlûrius, bahuvrïhi où l'adjectif déterminant vient en second (§ 208). Cette opposition entre les deux modes d'expression, grollp(~s ct composés, partout patente, permet de délimiter le rôle des groupes dans la genèse des composés nominaux: lorsqu'au troisième stade de la composition (§ 5) un composé peut équivaloir à un groupe, le groupe ne peut donner naissance au composé qu'à une condition: c'est que, sauf exception, la loi des membres croissants permette au déterminant d'un groupe de venir en tête. Autrement, l'ordre syntaxique des éléments, qui diffère selon que l'on a affaire à un composé ou à un groupe, empêche tout passage de celui-ci à celui-là: les groupes obéissent à des lois rythmiques complètement étrangères aux composés.

+

+

CHAPITRE XVII

COMPOSÉS SUBORDONNANTS NON DÉRIVÉS ÉQUIVALANT A DES GROUPES 376, Arrivés au stade de leur évolution où leur valeur adjective ou substantive est celle du simple sur lequel ils sont bâtis, 1.'1' composés nominaux équivalent à des groupes comprenant deux substantifs ou deux adjectifs, ou un substantif et un adjectif : leur diversité est celle même des formes nominales de LOIILl's SOI'I('SI, et l'ordre de leurs éléments peut varier: dans Ic troisième système de composés (cf § 5), l'opposition n'est plus entre adjcct.ifs (noms d'agent) composés et substantifs (noms d'action) simples ou dérivés de composés, mais entre composés adjectifs et composés substantifs. La structure des composés a changé. Ce n'est qu'à cc niveau Ik la composition qu'un composé peut être formé sur lin group". Le caractère secondaire des nouveaux composés ainsi formés SI' marque dans le fait qu'ils constituent un groupe disparate, et JW se répartissent qu'exceptionnellement en petits gronpcs cohérents.

(1) De là vienlle grand nombre des essais d'explication de mols obscurs l'al' des composés de ce lype. Parfois ingénieux, les efforts tentés dans celle voie sont voués à l'échec, car ces mots difficiles seraient seuls à témoigner de l'ancienneté de celle série de composés, toujours récents dans les cas clairs. Nous relevons quelques-uns des termes qui ont été ainsi, avec plus ou moins de vraisemblance, interprétés comme des composés, et pour lesquels nous renvoyons à WH: 'aerusca, base du dénominatif aeruscô «mendier»; agaso « palefrenier v ; capillus; capilôlium ; qemursa «clurillolJ au petit orteil" ; Larunda, nom d'une nymphe; medulIa; omnillo; sapplnus ; uërâlrunt « ellébore s ; ou encore alacer; asllus « taon s: carrâqë «barricade formée avec des fourgons" ; Iacrima; polieô « uIteriore " ; secespiia « couteau pour les sacrifices" ; etc. Les Anciens n'ont pas reculé non plus devant ce genre d'explication: cf P. F. 131, 4, « murqisonem dixerunt a mora et decisione ", etc. On est trop souvent obligé de faire appel à des formes qui n'existent pas en latin, pour que ces hypothèses comportent un commencement de preuve.

316

COMPOSÉS SUBORDONNANTS NON DÉRIVÉS

377-378

I. SUBSTANTIFS COMPOSÉS A DÉTERMINANT SUBSTANTIF (type caprificus)

377. Les déterminants, dans les composés substantifs, sont ceux des substantifs en général, tantôt des substantifs à valeur de génitif, tantôt des adjectifs à valeur d'épithètes. Parmi les premiers, il y en a qui s'appliquent à des personnes. Le seul ancien, uililêna, Pl., Most. 213, est douteux>. Ils peuvent être issus de groupes, tels sans doute les noms d'esclaves en -por (Cai-, Lûci-, Marci-, Pübli-, Quïnti-por, cf Fest. 257, 20; P. F. 307, 6, etc.), qu'on explique à partir du vocatif * Merci pouer > * Marcipor > Marciporë ; tels encore les noms en -magister : lûdimaqisier, Cie. ; choromaqisier«, CIL VIII 22643 (cf la transcription chorodidascalus, Hier.); uïcomaqieier (uïcus ), Curios, NoL Urb.s ; des noms en -cuslôs : armicusiôs, CIL XI 67, X 3409, etc. nociecusiôs « vuX't'6 • la question rf'sll' ouverte 9. Omnipaier, Prud., est fait d'après les composés Cil omni-?". Priscien a des composés obscurs: -ux syllaba finiia omnia producuniur, ul Pollux '" pullinuruœ, crucinurua-) , 111526,5; et ] II G24, ;), -ur syllaba terminala breuianlur, ul sapifur, lelifur {o. 1. leciiîur j. On ne peut en rapprocher pullifura, nom de plante, Ps. Diosc. 3, 123, lui-même obscur, et mal attesté [corr, pullicrûra ). Végèco crée la série des noms se rapportant à l'art vétérinaire mûlomedicus?", -medicina. Aububulcus, Gl. V 346, 39, est glosé dl' manière incompréhensible par paslor bouum (ou: bouium) ; aussi bouum a-t-il été corrigé en ouium, et au- analysé Cil aui- avec; auis = ouis, cf P.F. 14,7, auillas agnus recenlis parius-? ; en ce cas, le mot serait une contamination d'un • au-bulcus, et de bu-bulcus , pris tout entier comme second membre!". Des composés onl un premier membre ordinal: Sexiodalrnâlae, Not. imp., nom d'un corps de la cavalerie impériale (( les Dalmates de la sixième légion l) ?) ; prôlominisler « premier diacre »16, Gild.; prôlonoiârius, l Iad r., « grand chancelier », ô-

:

379" Certains noms d'action et d'objets peuvent êlre faits SIII' un simple correspondant, sans que ce soit sûr: nucilrarujibulum, PL, Ba. 598, « casse-noix»; et denlifrangibulus « brise-dents )), Ba. 596 et 605, qui en est proche, fonctionne à la place d'un nom d'agent en -fragus, et est formé d'après [ranqibulum, hien que "[ranqibulus n'existe pas. Même suffixe dans uesiibulum, Pl., bâl.i sur slabuluni s'il est un "uero-slabulum, « emplacement de la porte ", cf. ombr. uerof-e, venû-e « in portam ))16; nauslibulum ( alueum

(9) Malgré la ressemblance extérieure, on voit mal, à cause du sens, (l'ICI pourrait être le rapport d'opiler avec Cestio). (34) Les groupes occasionnels sont souvent en effet au pluriel: cf, outre ceux qui sont donnés n. 24, uorsa sparsa, Pl., Pseudo 164; tenebrae latebrae, Poen, 835; aequl boni, Cie., Ait. 7, 7, 4; opibus ulribus, Tuse. 3, 36; equiiës peditës, Sail., J. 97, 5; nauiârum mllitum, Liv. 21, 28, 2; etc. En regard de pactum eonuenlum, Or. pari. 37, 130, Cicéron emploie paeta conuenta, de Or. 2, 24, 100, etc. Voir aussi note 18. (35) Les explications anciennes de suouetauritia sont celles de NIEDERMANN, B Ph W 1913, 1652; PRELLWITZ, BB 26, 46; réplXç 76; G. MEYER, HZ 22, 18 sq.; BRUGMANN, III, 99-100. Mais voir note 38. (36) De suouelaurllia est tiré suoueiaurium, Serv., En. 9, 624. Le composé est refait en solitaurllia, peut-être d'après sollus (ou, selon KELLER, 43, selon une approximation de "souitaurlliai.

403

LE PROBLÈME DES DVANDVA LATINS

:HI

sacrificia ad arbores fulguritas faciebant a ferto sciliccl. quo dam sacrificii genere »), qui désigne celui qui sacrifie au moyen de slruës et de fer(c)fa, gâteaux sacrès ê", Mais s'agit-il là de véritables dvandva ? La forme s'y oppose. D'une part, cc sont des formations d'adjectifs, alors que les dvandva sont substantifs; ù'autre part, une analyse plus précise, sinon de slruîerlârius, qui n'apprend rien, du moins de suouelaurilia, montre que les divers éléments du composé sont, non des thèmes, mais des formes casuelles, plus précisément des ahlatifs (instrumentaux). Suouelaurilia est « obtenu en suffixant -ilia à la séquence • su oue laurô (facere)), "sû abl. étant « légitimé par le pluriel sûbus »38. Vsûîrûcluârius, Gaius dig., est, de même, mais plus clairement encore, une hypostase de groupe (asa t-aaa]. Le même sufllxe -ârius sert aussi à dériver de groupes abecedârius (A, H, C, 1l), cl, plus tard, carrocarpenlârius, nom du conducteur d'une voilure qui tient du carrus et du carpenfum (mais mûlocisiârius, ainsi donné par FORCELLI NI, est un composé-fantôme : ce qui ~IOHI' XiXpOUX&pwç (G!. II 338, 61) est en fait mulio cisiuriuss. D'autres suffixes sont employés : -fo-, sinon dans elcmenlum, dont la dérivation à partir de L, M, N, est des moins sûres 3 U, du moins dans lrâcioqalâlus, Apic. 5, 188, et lrâclomelitus, Apic. 8,375 [« accommodé avec de la pâte {lrâcla} et du lait )J, Il du mid ») ; saria iëcla donne naissance à sarlilëclor « charpen Licr », Isid .. d'après le rapport iëclus : tëcior ; deiuirilis, Conc. Rom. (= OEiXVap~x~), et eleqoiambicus (sans ·ÈÀeyo~iXfLo~x6ç attesté en grec), Schol. Hor., doivent leur finale aux simples uirilis, iambicus,

(37) L'analyse par un dérivé d'un composé "slruferlum. (STOLZ, IF l, 333), purultèle à flari{erlum (WH, 1 486) n'est pas convaincante. L'explication de fl6ri{erlum par UII dvandva est des moins sûres, ainsi que l'existence d'un composé "slruîertum, Le point de départ est en tout cas le groupe siruës [erlum, même si la forme casuelle qui a donné naissance à l'hypostase est incertaine. On aimerait poser un "slrû (er/li r{ucere) , parallèle à "sû oue laura. Mais "strû ne peut appartenir à la Ilexion de slruês, Entre les deux hypothèses proposées par STOLZ, 1. c., syncope de la voyelle posttoniquo de "sirui-, ou forme analogique d'après slru-is : su-is, la seconde est préréruble, puisque le -i- de composition n'a aucune raison d'être dans un groupe. C'est peut-être l'action de l'instrumenlal "sû qui a joué directement. En tout cas, il n'est pas nécessaire de faire intervenir une forme "slruœ, qui aurait la même gutturale que struxl, comme le fait CHASE, Harv. SI., Il, 70. (38) E. BENVENISTE, BSL 45, 76-77. (39) L'élymologie par LM N proposée par HEINsnoRF, ct suivie par HEITER, THURNEYSEN, etc., risque de n'être qu'un calembour. Elementum a aussi Hé expliqué par un emprunl à &'À cau/us, in/en/us (LINDSAY). (73) Ex/rilidus (homo), Gel!. 19, l , 6, sans simple correspondant, est peu sûr: il a été corrigé en eœluridus (Gronov.), expauidus (Heraeus).

423-426

PRÉFIXES A LA FOIS INTENSIFS ET PRIVATIFS

exeornes), discuté pour le sens et la forme 74 ; cxcon qruus « discordant », Symm., Or. 7, 6. Les autres privatifs sonL uniquement. chez des Glossateurs: exdignum : non diqnum », GI. L. A nsil. EX ;{ô7 ; exeffela (?) senex, uana uel uaeua, GI. 1... IV dub. Plac. E lt : ërudis qui, donné comme équivalent d'indoclus, inrudis, GI. JJ ~:32, 36, est le contraire d'ërudïlus; exodiësa « !l-E!l-~(Hl!l-év"(l», nI. II ôG, 27. Experllus est tantôt intensif (Cassiod., ll isi, 6, 28, p. lO4H B : (auus meus) arilhmelicae arlis ... experilus), tantôt privatif (P.F. 70, 2, experilos imperilos), de même qu'ëgelidus, privatif dlCZ Catulle,

Columelle, etc., et intensif (Manil., Vg., etc.), et êdûrus , habituellement intensif (Vg., G. 4, 145, etc.), qui est compris comme privatif par Servius, G. 2, 65 (edurae ... quasi non durae ).

424. Parmi les privatifs en ab-, absimilis « diffèrent» 75, 1;{~s., presque toujours employé en litote, est le seul sûr, car on ne 1)('111, savoir si les autres, alocâlis, Mar. Vict.; ad Jusl. Il C. 1006 H, PL agenilus, Prud., Apolh, 895, ont pour premier élément laL. (l1J :::-. fÏ devant sonore, ou sont des hybrides en &- privatif (agenilus (~sL IHW réfection de &yévv'Y)'ro.;;). Le second sens du préfixe ab- est plutôt comparatif qu'Intensif : abalbus, Diosc. 1, 6 (haee ila aqnoscilur quia abalba esl aul fragilior); abanquslus, Diosc. 4, 71 (-a [olia }, Lruducl.ion de a't"Evw't"EpOl 76.

III. PROBLÈMES DE DIACHRONIE CONCERNANT CERTAINS PRÉFIXES

425. Il Y a des préfixes d'adjectifs certainement hérités (in-; uë-; sans doute dis-] , d'autres qu'on voit se développer en LanL que préfixes en latin même, tard souvent (ab-, ob-, ete.). Mais il y a des cas où l'élément préposé à un adjectif qualifical.if pour exprimer le degré d'une qualité, son intensité, sa dimin Il Lion, sa privation, peut être hérité à titre de préfixe, ou sc préflxnliser en latin même. De ce problème, on donnera trois illusf.rations.

426. L'une réside dans la concurrence des préfixes intensifs per- et prae- : Cicéron, Sign. 109, 110, par exemple, parle de (74) BLAISE, S. u., indique « sans dents ou qui dévorent », Iutluencè POUt· j'explication du second sens par GEFFCHEN et ULARIA, qui comprennent" quue eœedunt ». Muls, comme l'indique le Thesaurus, le voisinage des privatifs eaunquês. excnrnës, 'lui sont coordonnés par el à notre terme, paratt exclure cette interprétnt.iou. (75) Cf WOELFFLlN, ALL 5, 512 et 518. (76) EM, s. u., voi t le point de départ de ce sens dans les compléments du comparatif qui, à l'époque impériale, ont pu être introduits par ri (type maior ii Pelrïi), 13

358

LES TYPES HÉRITÉS DE COMPOSÉJ A PARTICULE

426-427

simulacra perampla aique praeclara. La prédominance en latin de per- sur pree- a des causes phonétiques et sémantiques, et est une question surtout de date, prae- tendant à remplacer per- au début de l'époque impériale (cf note 27). Mais les formes anciennes en prae- étant peu nombreuses, on peut se demander si la concurrence de prae- et per-, deux formes d'une même famille en une même fonction, est un fait hérité ou récent. En fonction de préfixe intensif, * peri- 7 7 est la seule forme connue du grec (m:pL- J, du lituanien (per- J, du russe (pere-J, du v. slave (pre- J ; * Pî: est la seule forme employée en v. islandais et v. anglais (for- J ; * prai- est le seul à fournir au v. prussien un préfixe intensif (prei- J, et * pro- le seul en gallois (ro- J. Mais, de même que le latin a * peri- (per- J et * prai- (prae- J, le v. irlandais et le sanskrit ont à la fois * priJ- et * peri- : v. irl. romàr (( très gros» erschomil (( persimilis », skr. pra- et pari-, Il paraît donc n'y avoir qu'un seul préfixe de cette famille qui ait été employé en valeur intensive de manière assez générale : *peri-, Aussi le latin a-t-il pu hériter d'un per- déjà préfixe, au début de son histoire, sans qu'on ait besoin de poser que perintensif est sorti d'emplois purement latins de per- enclitique (tels que hau per bene> hau perbene) 78. Et les seules langues autres que le latin à user de deux préfixes de la famille de per-, le vieil irlandais et le sanskrit, ne connaissent en emploi préfixal que *pro- et *peri-, et non, comme le latin, "prai- et "peri-: lorsqu'une forme autre que * peri-, seul préfixe intensif hérité, se retrouve en ce sens en plusieurs langues, ce qui se produit pour * pro- en v. irlandais et en sanskrit, pour * prai- en v. prussien et en latin, cela doit résulter d'un développement indépendant dans chacune des langues. Aussi n'est-il pas étonnant que prae- intensif soit rare à époque ancienne: il s'est préfixalisé en latin même, comme le montre encore le fait que l'osee-ombrien, qui a des adjectifs du type per-acrin'en possède pas en * prai-, pre-. La différence originelle de sens entre per- et prae-ï» n'empêche pas, à l'époque historique, la concurrence entre les deux formes, développée au fur et à mesure que s'oblitérait le sentiment de leur distinction sémantique. 427. Le caractère récent de la préflxalisation fait encore moins de doute pour super- que pour prae-. Le parallélisme des adjectifs (77) Pour les formes de per- citées, voir WP, II 36. (78) Sic 1\1. LEUMANN, Antidiiron, Feslschr. Wackernaget, 339-343. (79) Per- signifie « qui va jusqu'au bout de sa réalisation» (cf § 438); proe«marque ... une pointe extrême », selon E. BENVENISTE, TCLC V, 1949, 183.

427-428

PROBLÈMES DE DIACHRONIE

359

intensifs du grec en um:p- et de ceux du latin en super- peut, en théorie, résulter, d'un héritage. En fait, les dates et la zone d'emploi des termes latins, qu'on trouve dans des textes techniques, comme les œuvres de Boèce, ou ecclésiastiques, montrent qu'ils sont nés en latin à l'imitation du grec: ce sont des calques, et on peut ù peine parler de préfixalisation latine pour super-, Ce qui est étonnant, c'est l'inutilité de cette créa Lion, puisque les adjectifs en per- exprimaient déjà la même nuance que ceux en super-. Sans doute le succès de super-, bien vivant dans les langues romanes (cf super-difficile, etc.), a-t-il eu plusieurs causes: super- forme couple avec sub-, alors que per- n'entre dans aUCUIl(~ corrélation de ce genre (les oppositions du type « oouli ." aut persicci aut subhumùli », Celso 3, 6, sont très rares). De plus, super« au-dessus» marque mieux le degré supérieur que per- Il rle part en part ». Enfin, super-, dissyllabe, a plus de volume : de même, en français, T': devant voyelle est supplanté par ré- (réanimation, etc.).

428. Sub- diminutif pose également un problème de diachronie. On enseignes", à propos des diminutifs en sub-, que Il ce type de formation est ancien, cf gr. un6Àeuxoç, V. irl. fodord (1 murmure» (en face de dord « vociférations ») », Le second de ces exemples au moins ne prouve pas grand chose sur l'ancienneté de subdiminutif en latin: il s'agit d'un substantif, où le préfixe peut être d'introduction récente, comme dans dênidor (§ 422) : le domaine des préfixes intensifs, diminutifs, privatifs sc trouve d'abord exclusivement dans des adjectifs. Quant à un6Àeuxoç, il nous ramène au même problème que super-, quoique de résolution plus difficile : les adjectifs latins en sub- sont-ils de création purement latine, ou ont-ils subi l'influence de leurs correspondants en uno- dont ils seraient alors des calques? La réponse ne peut être donnée en toute certitude. Ce qui nous incline à penser que les adjectifs en sub- sont, en latin, plutôt nés par calque de composés grecs en uno-, c'est qu'en grec ces composés se répartissent selon les mêmes groupements sémantiques que les adjectifs latins en sub-, Ce sont des termes se rapportant à des sensations diverses, dont le goût (un6-YÀuxuç)sl, à des particularités physiques de l'homme ou des objets (uno-nttLeÀoç, un6-m[J.oç), à des traits de caractère ou à des sentiments (uno-x(Xxo~6'1jç), à des couleurs ou à la lumière (un6-ô'1jÀoç, un6-YÀ(Xuxoç), à des

(80) Ainsi EM, s. u. sub. (81) Pour chaque groupe sémantique, nous ne donnons qu'un exemple.

360

LES TYPES HÉRITÉS DE COMPOSÉS A PARTICULE

428-429

qualifications péjoratives diverses (07tO-7tÀrX:YWC;) 82. Puisque les mêmes groupements sémantiques se retrouvent dans les deux langues, il paraît vraisemblable que la création latine en suba son point de départ en grec, même si, par la suite, elle a connu une extension proprement latine, et cela sans que tous les termes latins aient un équivalent grec exact.

429. Le latin connaît donc plusieurs étapes dans l'acquisition de ses préfixes. Dans les substantifs comme dans les adjectifs, les uns sont hérités (pro- dans les substantifs; in-, uë-, dis-, perdans les adjectifs), tandis que les autres se développent en latin même (ab-, ad-, con- dans les substantifs; prae-, ab-, dë-, ex-, obdans les adjectifs), parfois par calque du grec (super-, sans doute sub-). Il reste à voir selon quel mécanisme un premier membre de composé peut au cours de l'histoire du latin, se préfixaliser. (82) Sur l'emploi de U1to- au premier membre de composés grecs, notamment au sens diminutif, voir P. KRETSCHMER, Gl 21, 217-222, et F. SOMMER, IF 55, 229 sq., pour qui il n'est pas évident que le type diminutif en U1tO- ait etc hér-ité.

CHAPITRE XX LE PHÉNOMÈNE

DE

LA PRÉFIXALISATION

1. PRÉFIXATION ET PRÉFIXALISATION

430. Tout composé est en état d'équilibre instable : il n'upparatt. comme composé qu'au moment où ses deux éléments ont. fusionné en une unité sémantique, mais de telle sorte qu'ils doivent. en même temps être distingués par le sujet parlant: agricola est k concept unitaire d'«agriculteur», mais les deux notions de « eampagIlf~ » et d'« habiter» doivent demeurer distinctes. Deux mouvements sont donc en présence, l'un de fusion, l'autre de dissociul.inn. Que l'un s'accentue aux dépens de l'autre, et l'équilibre ('si, rompu: le composé n'existe plus alors en tant que tel que pour 1' ii- (amolia, etc.}, on n'a jamais autre chose que abmâierlera. De même, abpatruus est le seul composé où ab- précède -p- sans lui être assimilé.'. Il y a d'autres exemples où, parce qu'elle est un préfixe, une particule conserve dans le composé la forme qu'elle a à l'état libre, sans que Se produisent des phénomènes de sandhi interne 2 : exdignum, mais ëdeniô ; les recueils de synonymes", sinon toujours la tradition manuscrite, font une différence entre perlücidus « très brillant» et pellûcidus « transparent » (dérivé de pellûcëre < perlûcêres ; et, alors que Velius Longus, VII 65, 17, remarque que le sermo eleqanlior préfère pellicere à perlicere, per-, quand il est préfixe intensif, n'est pas assimilé à un 1suivant (on a une dizaine d'exemples du type perlaetus). La situation de sub- est également instructive. Alors que dans les composés le traitement le plus fréquent est l'assimilation devant -c- {succëdô}, -g- (suggera), -f- (suffîcia) , -rn- {summoueô ), -p[sup pônô }», sub- n'est pas assimilé dans les adjectifs et les adverbes où il est préfixe, ni devant -c- [subcrûdus } 6, ni devant -g(1) Voir NW, 842; 84:~. (2) A cet égard sont particulièrement frappants les exemples d'assimilation ou de non-assimilation d'une particule à l'initiale du nom devant lequel elle est placée en composition, choisis par DORSCII, Assimilation, et C. D. BUCK, CR 13, 116-119. (3) Voir BRÉAL, MST, l, 165. (4) La situation devant -t- n'enseigne rien: en regard de sustineô, on a subiimeô . (5) On a succrotil/us, mais c'est un terme peu clair (cf § 329, n. 13).

432-434

PARTICULARITÉS MORPHOLOGIQUES

363

(subgrandis) , -f- isubfueculus», subfliiuus, etc.), -m- isubmôrôsus", submoleslus, etc.), -p- (subpallidus, etc.)>. Cette absence de sandhi interne dans les mots préfixés a pour effet de laisser aux préfixes une autonomie qui les laisse distincts dans la forme des autres particules de composition.

433. De plus, dans les adjectifs préfixés, le second membre a, lui aussi, des particularités de forme. En particulier, il n'a jamais l'apophonie, bien que celle-ci soit attendue dans un composé à premier membre monosyllabique. Les cas d'apophonie, exceptionnels, concernent des adjectifs en -10-, qui ont subi l'influence ùes formes nominales de verbes composés, où l'apophonie était normale: perquirilâlus « recherché partout», Cl. Mam., Slal. an., Prae]. 1 [quaerilô}: praesulsus, Col. 6, 2, 7, qui, en regard de per-, subsalsus, peut s'expliquer par l'analogie d'ïnsulsus 9 ; et l'hésitation entre perlisum, Lucil., Frg. [ne. 7, et perlaesum, Cic., SaIL, etc. (cf P.F. 239, 9, perlisum pro periaesum dixerunl) , vient de ce que l'un est attiré dans la sphère des mots à préfixe, l'autre dans celle des formes nominales de verbes. Mais l'apophonie joue dans un groupe cohérent d'adjectifs à préfixe, les privatifs (inimïeus, iniquus ), sans que tous les privatifs en in- aient l'apophonie : inîacêlus se rencontre en face de inficëius (§ 419). Le passage de inîacëlus à înficêlus est le reflet ùu changement qui s'est opéré dans la nature de in- : in- a cessé d'être un premier membre de composés nominaux (dérivés: cf impos, imberbis), pour devenir un instrument de formation mécanique comme per- intensif, ou sub- diminutif, un préfixe. La préfixalisaLion de la particule se traduit morphologiquement par son adjonction directe à un nom (ordinairement un adjectif) tel qu'il existe à l'état libre, sans que celui-ci subisse de modification morphologique, ni phonétique : la préfixalisation de in- entraîne la non-dérivation et la non-apophonie du second membre du privatif. 434. D'autre part, parmi les adjectifs à préfixe, il y en a dont les éléments constituants sont susceptibles d'être disjoints par une tmèse-v : aenigma per hercle anliquum perque lepitlum, Gell. 12, 6, 1 ; per parce nimium, Ter., And. 393 11 ; per ecastor scîiu», 'I'cr., (6) Amm. 2, 6, 25; maissuffusCllS, Tac., Agr. 12; SIlf{IlSCll/US, Apul., Mel. 2, 1fi, p. Il !I. (7) Cie., de Or. 2,69,279; sum-, Guelf. 1 ; N\V, 914. (8) Noter cependant supp âr (§ 418), et sup parlle, dont le premier au lIIoins ne peut avoir subi l'influence de supporô; attesté depuis Térence. (9) J. ANDRÉ, REL 29, 150. (10) Sur le phénomène de la tmèse, voir WACKERNA(;EJ., II 171 sq.; VE~»lIn:s, M8L 17,342. (II) Ou faut-il lire perporcë (cf perparcus, Gl. II 470, 2i:l) '1

364

LE PHÉNOMÈNE DE LA PRÉFIXALISATION

434

And. 486; per enim maqni aestimo ... , Cie., Ali. 10, 1, 1 ; per fore accommodâlum tibi, Cic., Fam. 3, 5, 3 ; pergrâta perque iucunda, Cie., de Or. 1, 47, 205 (et Qu. fr. 3, 1, 4, pergrâtum perque iücundum); per enim absurdum est, Dig. 22, 3, 25; per mihi breuis, Cic., Glu. 2; Phaedon Socrati per fuit [amiliâris ; Gell. 2, 18, 1 ; per mihi, per, inquam, gralum feceris, Cic., Ail. 1, 20, 7 ; per, magister optime, exoplâlus ... uenis, Gell. 18, 4, 2; per autem inquit incônsequëns, Gell. 14, 1, 10 ; per mihi mîrum uisum est, Cie., de Or. 1, 214 ; per hercle rem mirarulom, Gell. 3, 6, 1. Deux remarques s'imposent. L'une, c'est que la tmèse est un tic d'auteur (Térence, Cicéron, A. Gelle); elle ne tire pas à conséquence. Il n'en est pas de même de l'autre: il n'y a pratiquement de tmèse qu'avec per-. Avec d'autres particules dans des formes nominales, in- privatif (inque soluiâlam, Vg., En. 9, 288 ; inque crueniâius, Ov., Mel. 12, 497), ou inler- (inlerque legendae, Vg., G., 2, 366; inter enim ieclasl, Lucr. 3, 859), elle présente des caractères différents: elle est exceptionnelle, poétique, et artificielle (Lucrèce, Virgile, Ovide) ; la particule n'est séparée du nom que par la copule -que, une seule fois par enim ; au contraire, dans les exemples de tmèse de per-, le ton est plus familier (ils appartiennent à Térence, à la correspondance de Cicéron), et la liberté plus grande (les éléments séparateurs sont toujours des enclitiques, mais plus variés: aulem, inquil ... ). Enfin, les exemples de tmèse de in- et inler- ne se présentent en fait qu'avec des formes nominales de verbes. Or les particules aptes à subir la tmèse sont beaucoup plus nombreuses dans les verbes que dans les noms : ob-, sub-, prae-, dë-, dis-, cum-, pOSI_12 : ob uos sacrô; sub uos placô, dans deux formules rituelles citées par Fcstus, 206, 17; dë më horlâlur, Enn., Ann. 401 ; dëque loiotuiii agros, Enn., Ann. 437; disque lulissenl, Pl., Tri. 833; cumque qlobâia, Lucr. 2, 154; disque supâlis, Lucr. 1, 651; posl omnia pôruis, Hor., Sai. 1, 1, 86. L'identité de fonctionnement de la tmèse dans le nom à préfixe et dans le verbe, et cependant les différences de l'un à l'autre dans les modalités de ce fonctionnement sont à retenir pour l'étude du mécanisme de la préfixalisation.

(12) Exemples empruntés à MV, § 843.

435-437

365

DIFFÉRENCES ENTRE INTENSIFS ET PRIVATIFS

III. MÉCANISME DE LA PRÉFIXALISATION DES PARTICULES

435. Toute particule de composition est en principe susceptible de se préfixaliser. En fait, la préfixalisation n'a pas lieu dans tous les cas, ni toujours au même degré (il y a des préfixes COmme ab- dont l'existence est à peine assurée). Il est évident, que plus une particule est fréquente en premier membre de composé, plus elle a de chances de se prèfixalisor. Mais la fréquence ou la rareté d'un premier membre de composé ne suffit pas à expliquer comment il passe à l'état de préfixe. 436. Il faut, pour rendre compte de ce mécanisme, séparer les préfixes intensifs (et diminutifs) des préfixes privatifs, pour des raisons qui sont à la fois générales, et morphologiques. D'une part en effet, le contraire de l'intensité est la diminution, et non la privation: intensité et diminution s'appliquent une action, ou à une qualité, tandis que l'on nie un concept; aussi peut-il y avoir des rapports entre noms à préfixe intensif, ou diminutif, et autres mots de la langue exprimant une action, c'est-à-dire surtout des verbes, tandis que les affinités des privatifs avec d'autres parties du discours sont plus vagues, et plus étendues. ù

437. D'autre part, nous avons déjà noté plusieurs différences formelles entre les noms à préfixes privatifs, et les noms à préflxcs intensifs (ou diminutifs) : 1 0 la non-apophonie est de rigueur dans les intensifs et diminutifs (peraequë, subsalsus ], sauf parfois quand l'adjectif est en -to-, mais non dans les privatifs {iniquus, difTicilis) (§ 133), d'où des oppositions telles que peraequëliniquus, peromicuslinimicus , perîacêius [inficëius, praefacilis [difficilis, subsalsus [insulsus, persa-

piënslinsipiëns ; 2 0 Si chaque préfixe intensif ou diminutif a la Iaculté de posseder exactement la même forme qu'à l'état libre, aucun des plus nncien« préfixes privatifs (in-, dis-, uë-) n'est préposition ou adverbe du point de vue latin (le rapport étymologique entre in- ct ne-, «tc., n'est plus senti). De plus, tous les préfixes privatifs Jlcllv(~nt fonctionner, et ont même commencé par le faire, dans dcs composés dérivés (uëcors, discors, inermis, expers, ctc.). Au contruire, lin préfixe n'apparaît jamais avec valeur intensive dans un composé dérivé; 3 0 Alors que l'assimilation à la jointure des deux éléments 13-1

366

LE PHÉNOMÈNE DE LA PRÉFIXALISATIû:'1

437-439

du nom à préfixe intensif ou diminutif n'a pas lieu en règle générale (subgrandis, etc.), les règles habituelles du sandhi interne sont suivies quand le préfixe est privatif (illepidus, etc.) ; 4 0 Les deux éléments du nom à préfixe sont susceptibles d'être disjoints par tmèse, tout comme ceux du verbe composé, quand le préfixe est intensif ou diminutif, au moins dans le cas (ancien) de per-, mais non quand le préfixe est privatif, sauf dans le cas factice, et relativement tardif des quelques formes nominales de verbes en in- (§ 434).

438. Pour éclairer l'origine des préfixes intensifs et diminutifs, il faut tenir compte des rapports entre l'expression de l'intensité dans le nom, et celle, ou plutôt une de celles, de l'aspect dans le verbe. En latin l'intensité s'exprime dans le nom notamment par des préfixes, et la notion d'aspect « achevé» peut être rendue dans le verbe par l'adjonction de préverbes: l'achèvement d'une qualité indiquée par un adjectif n'est autre que l'intensification de cette qualité, et dans les formes nominales en -to- du verbe achèvement et intensité se confondent: il n'y a pas de différence de nature entre perfectus « fait jusqu'au bout = qui va jusqu'au bout de sa réalisation », et pergrauis « qui va jusqu'au bout de la lourdeur = très lourd»; en conséquence, perdoctus peut s'interpréter, grâce à la notion (nominale) d'intensité, ou grâce à la notion (verbale) d'achèvement, les deux revenant au même; à perfalsus « tout à fait faux», on peut aussi bien appliquer l'exégèse « pour lequel on s'est égaré jusqu'au bout»; etc. C'est pourquoi nous avons séparé dans le relevé des formes les termes en -lus des autres: ils expriment indifféremment l'intensité ou l'achèvement. Mais si ces formes peuvent d'un point de vue synchronique recevoir une analyse de caractère verbal (par l'aspect achevé) ou nominal (par l'intensité), diachroniquement on est passé de la notion d'achèvement à celle d'intensité, en d'autres termes, les préfixes intensifs sont nés d'emplois préverbiaux de particules. 439. C'est facile à déceler en latin: tous les préfixes y naissent sous nos yeux, sauf per-, pour lequel cependant on peut donner la même explication 13, bien qu'à un niveau chronologique différent. De plus, dans le cas des formes en -lus, le passage de préverbe à préfixe se laisse bien observer: la double explication, verbale et nominale, donnée à propos de perdoctus, perfalsus peut se répéter (13) Voir WH, 11 285; BRUGMANN, II' 791, dit clairement: « Den Steigerungswert hat die Priiposition aus ihrer Verbindung mit der Verba bezogen ».

439.441

367

NAISSANCE DES PRÉFIXES

pour tous les termes en -ius cités § 415 et 416, au moins date ancienne : au fur et à mesure qu'on avance dans la latinité, la préfixalisation l'emporte, et on ne peut plus guère parler de préverbiation. Mais le cas des formes en -lus n'est pas si privilégié qu'on doive lui attribuer un rôle de premier plan dans la naissance des formes nominales à préfixe : s'il est vraisemblahle que \f~s participes en -lus ont souvent servi dintermédiairc, CP tr'esl. pas toujours le cas: à côté de cônslmilis, condignus, etc., il Il'Y a glli~re de participes intensifs (cf condecoriilus, Enn., Ann. 10), sans que pour autant le mécanisme soit changé. Un Don exemple do l'origine préverbiale des préfixes intensifs est apporté par les adjectifs en ex- (§ 423), dont tous les exemples anciens sont des dévorbatifs du type dïmidius (§ 453 sq.) : ils sont issus de verbes où le préverbe indiquait l'état achevé iexârescô « dessécher complètement », ctc.). En passant dans le composé nominal (exiiridus, ctc.), le préverbe a pris le sens intensif. Il est difficile d'imaginer pour sub-, seul préfixe diminutif, le même genre d'explication que pour les intensifs en per-, ex-, de. A supposer que la préfixalisation de la particule ne soit pas en latin le résultat d'un calque (§ 428), on peut en rendre compte par un phénomène de « Kontrârbildung : : la diminution étant le contraire de l'intensification, on aura eu subgrandis comme pergrandis, etc. à

440. Quant aux préfixes « explétifs », ils viennent aussi des verbes. Aduncus peut à la rigueur s'analyser en « recourbé {uncus ) vers [ad }» mais il est pratiquement l'équivalent de uncust» : il arrive souvent que le sens des préverbes s'affaiblisse à td point que le verbe composé devient l'équivalent du simple icommereô = mereô, etc.)u. Mais ce ne sont pas seulement les nombreux verbes où le préverbe a un sens évanescent qui ont servi de modèle aux noms, plus rares, à préfixe explétif. Oc plus, les déverba tifs du type dimidius, qui très souvent n'offrent pas de différence de sens appréciable avec le simple correspondant (§ 460), ont pu enl.ratncr des adjectifs, qui, pour n'avoir pas toujours de lien avec Ull vCI'IH', n'en ont pas moins un sens équivalent à celui du simple. Ainsi l'origine de la valeur intensive et explétive des préfixes nominaux se trouve dans les verbes, parfois par l'intermédiaire de leurs dérivés, 441. Naturellement, cette explication générale n'épuise pas les interprétations de détail qu'on peut donner de telle ou telle (14) Cf Ov., Met. 1, 293-294; cumba adunca désigne un bateau dont la proue est recourbée en arrière» (cf L. J. D. RICHARDSON, llermath. 55, 90). (15) Cf J. MAROUZEAU, Traité, 130.

368

LE PHÉNOMÈNE DE LA PRÉFIXALISATION

441-443

forme particulière; multiples, elles sont cependant annexes car elles ne suffisent pas à établir une théorie de la préfixalisation. En voici quelques exemples : « adpôlus cum dicimus et adprïmus et adprimë inienlio in his omnibus demonstratur», Gell. 6, 7, 7 ; applënë peut avoir été formé, à l'analogie de apprimë, approbë, sur ad plênum (e. g. Vit. Hilar. 42) ; l'origine en serait alors une sorte d'hypostase; de même pour excruenia (supplicia), Pass, Cyr., 279, qui peuvent être les supplices ex cruore, d'après incruenius, Effëcundus, qui glose effëta doit avoir été formé sur ce dernier qui est à l'origine un bahuvrîhi (tTIJÇ à -jormiânus, puis de celui-ci à -(l.Opq>tocvoc;. 480. Il s'en faut que les indices formels fournis par I(~ caract.ère hybride (§ 476), l'ordre des membres (§ 477), la nature du premier (2) Ce point particulier exigerait une étude que nous n'entreprendrons l'as iei. (3) Cf P. CHANTRAINE, Forma/ion, p. 197 rem.

400

CALQUES

480-482

membre (§ 478), ou le suffixe (§ 479) de tel terme s'appliquent à la totalité des calques. Mais le calque peut être sémantique aussi bien que morphologique (cf déjà indiclus, § 479). Le fait qu'un composé grec et un composé latin s'appliquent au même objet, à la même personne, garantit l'authenticité du calque : si nûdipedâlia, Tert., Apol. 40, etc., et YUfLvorrcx~a~x~ qualifient tous deux unc procession qu'on fait « pieds nus», si saxi(ica, Ov., lb. 555, et À~eorro~oç, À~eoEpY~Ç, s'appliquent à Méduse, Termaximus, Amm. 21, 14, 5, et Tp~crfLÉy~cr't"Oç à Hermès, primoplaslus, Prud., Cath. 9,17, etc., et rrpw't"orrÀcxcr't"oç à Adam, etc., il y a de fortes chances pour que le composé latin soit formé d'après le composé grec. Qu'un composé latin désigne une institution, plus particulièrement une institution grecque, et l'on peut être sûr qu'il a pris modèle en grec, comme c'est le cas de qulnquertium (§ 152), calqué sur rrÉv't"cxeÀov.

481. La syntaxe, aussi bien que le sens ou la forme fournit à l'occasion le moyen d'identifier un terme latin comme calque d'un composé grec. Dans ciliumbris, mot à mot « qui a de l'ombre grâce aux sourcils », qui calque ocppuocrxwç (BoeL, Top. Arisl. 6, 2, 4), les relations syntaxiques entre les deux membres de composé sont inusuelles : dans un composé possessif normal, le premier membre a valeur de déterminant du second (type multicolor) et non, comme ici, d'instrumenta!. Des faits du même ordre se retrouvent par exemple dans âlipës, Lucr. 6, 766, « qui a des pieds ailés », avec son premier membre substantif en fonction d'adjectif, ou l'ordre de ses membres inversé, comme rr't"Eporrouç ; sonipës, Luci!., Sat. 15, 15, « avec un pied (qui fait) du bruit», vaut xcxvcxx~rrouç; irujenilo qeniius (§ 319) a deux membres qui contrastent, comme &YEVVYl't"0YEV~Ç : il n'y a rien là qui soit habituel. 482. Mais en général le terme latin garde le sens de l'original sans que les deux formes soient superposables, et le calque reste fidèle pour la forme avant tout à la structure des composés latins, et non à son modèle. Aussi est-il rare que le composé grec ait laissé, dans le composé latin qui le calque, des signes formels de son influence. La souplesse du latin dans l'adaptation des composés grecs apparaît par exemple dans la manière dont sont calqués les privatifs du grec, très nuancée: oc- est rendu par in- dans de nombreux cas (cf indiclus, § 479), mais aussi par ë- quand il indique la privation (ëlinguis, cf &yÀwaaoç), etc. Le latin emploie ses particules avec une grande indépendance quand il calque le grec : dë- traduit OCrro- dans dêcubis (&rroxo~'t"oç), Gl. II 39. 7; c'est ëcaudis qui rend

482-485

INDÉPENDANCE DU LATIN DANS LA CRÉATION DES CALQUES

401

fLdoupoç, Diom. I, 500, 14; pro- vaut &\l1"t- dans prônôtnen (&\l1"W\lUfLOÇ, § 329), mais &\lrx- dans prôporliô (&\lrxÀoy[rx), Cic., Tim, 4, 13, nrxprx- dans prônubus (nrxp&\lufLV « qui louche») : ces noms, simples ou composés, avaient la particularité d'être « parlants », de signifier quelque chose. 511. Au lieu de ce nom unique, les Latins sont dénommés par deux, trois, quatre, ou, tardivement, encore davantage de noms. Il n'est peut-être pas impossible d'entrevoir ce qui s'est passé. Depuis SCHULZE 6 , on ne peut plus nier le caractère en grande partie étrusque de l'onomastique latine. Or, du système étrusque qui comportait deux noms, le latin a hérité l'usage constant du prénom et du gentilice; à côté de ce double nom, le cognomen latin fait étrange figure : d'une part, il est facultatif, puisqu'il peut ne pas apparaître dans les nomenclatures officielles jusqu'à Sylla; d'autre part, il est « parlant », comme les noms individuels inde-européens (Cicero comme I:"pIX06>V). Dans ces conditions, le cognomen peut apparaître comme une réminiscence du nom individuel indo-européen, et on peut se demander si les tria nomina traditionnels des Latins ne sont pas issus de la fusion de deux noms d'origine étrusque (prénom et gentilice), et du nom indoeuropéen, senti comme accessoire. Plutôt que d'une fusion de deux noms étrusques ajoutés à un nom inde-européen, il doit s'agir d'ailleurs d'une contamination. (5) SOLMSEN-FRAENKEL, lndogermanische Eigennamen, Heidelberg, 1922. (6) W. SCHULZE, Zur Geschichle laieinischer Eigennamen, Berlin, 1904.

611-612

ÉLIMINATION DES NOMS PROPRES COMPOSÉS EN LATIN

419

Les deux systèmes ont en effet un terme commun: le gentilice à l'étrusque a souvent en latin la forme d'un adjectif patronymique indo-européen (Cornëlius comme Te:ÀcxfLwVWÇ). Il a dû y avoir un croisement entre une expression de type inde-européen Cornëlius Scipiô (cr Arcxç Te:ÀcxfLWVWÇ) et une autre, de structure étrusque Lücius Cornélius d'où Lûcius Cornélius Scipiô, De là auraient découlé plusieurs conséquences, outre l'apparition des tria nomina. Non seulement le gentilice peut être un hyln-idc, à souche étrusque et à suffixe latin (indo-europècn) , mais surtout le patronyme indo-européen, qui variait pour les individus d'lJn(~ même famille de génération en génération, est devenu gCllLilic(~ immuable. A ce moment, dans la nomenclature, sont distingués le gentilice, qui garde une forme ancienne d'adjectif, ct le patronyme, indiqué par le génitif du nom du père, suivi de la mention f(llius) (ce qui est une innovation: § 513). Il n'est pas rare alors que le nom d'un personnage soit fait de quatre éléments: C. Ponlio C. f. Paeligno ... (CIL V 4348; etc.). Le système onomastique indo-européen n'est alors plus reconnaissable : les noms propres composés ont été abandonnés par suite d'une contamination de (;e système par le système étrusque.

512. Les nombreuses innovations faites par les langues, on particulier par le latin (qui est pourtant moins novateur qlw le sanskrit par exemple), ne sont cependant pas parvenues il éliminer tous les composés, ni même à masquer leur caractère archaïque. Celui-ci est patent, non seulement dans la forme de ces composés, où il n'apparaît que par le détour d'une analyse linguistique difficile, mais, de manière beaucoup plus curieuse, dans l'emploi qui en est fait. Il est banal de dire que les composés se trouvent dans les textes poétiques : de fait, Ennius, Lucrèce, Virgile, Ovide, Stace, Prudence, etc., créent de nombreux composés 7. Il ne l'est guère (7) Sur les composés des différents auteurs, voir STOLZ, 77 sCI. Ce n'est /.(uère plus qu'un classement par auteurs qu'on trouvera chez G. PUCCIONI, L'uso slilisiico dei composli nominali latini, Alli della Reale Accademia d'l/alia, Cl. d. SC. mor, e sim'. (Rome 1944) 371-481. Le caractère poétique depuis longtemps reconnu aux composés a multiplié les études de détail sur les composés qui se trouvent chez telle ou telle catégorie de poètes. Ainsi, Ch. J. ARMSTRONG, De epilhelis composiiis apud epiro» latinos, Haro. Diss, 1935-1936; A. CORDIER, De quelques procédés du slyle épique, R Ph 55 (1930), notamment 343-348; Cornelia C. COULTER, Compound Adjeciiues in earlq latin Poelrq, TAPA 47 (1916) 153 sq.; J. G. GLENN, Componnds in au quetan elegy and epie, Classical Weekly 29, 1936, 65-69, et 73-77, etc.

420

CONCLUSION

512·513

moins d'affirmer que les composés appartiennent aux vocabulaires techniques". Mais ici, il faut préciser : les techniques qui font le plus usage de composés sont des techniques nobles, celles de la religion (sacerdos, pontifex, etc.) et du droit (parricïda, manceps, etc.) - qui ne font qu'un en réalité, le droit ayant à l'origine un caractère religieux - , plus rarement de techniques plus modestes, en particulier agricole imânsuës, agricola, etc.), Mais cela n'est vrai que d'une catégorie de composés : les composés adjectifs. La distinction, structurale et historique, que nous avons cru devoir établir entre composés dérivés (adjectifs) et composés non-dérivés, a sa raison d'être également au niveau des emplois. La poésie et les langues de la religion ou du droit se servent des types anciens de composés, noms d'agent composés dérivés ou composés possessifs". Partout où l'ancien composé dérivé est supplanté par un composé non-dérivé, celui-ci n'apparaît en poésie que s'il fait fonction d'adjectif (type arquipoiëns : uïtisator et imbricitor sont épithètes dans les textes (poétiques) où ils sont employés: § 306 et cf § 325 et 392). De même, les composés coordonnants ne figurent dans des textes nobles que lorsqu ms sont adjectivés par dérivation (suoueiaurilia, slruîerclârius J. Au contraire, quand le composé fait fonction de substantif, il apparaît en prose. C'est le cas des anciens noms d'agent substantivés comme noms de métiers (type artifex : ch. X) et de tous les substantifs composés sans dérivation, qu'ils soient subordonnants (type uîuerâdix = § 392) ou coordonnants (tunicopallium). C'est vrai aussi de tous les composés formés sans dérivation sur des simples qui fonctionnent normalement dans la langue comme noms d'agent substantifs (type eônseruus : seruus « le serviteur », et non pas « servant» ; ou armifactor: factor y est « le fabricant», et non pas « faisant, qui fait», etc.), Les très nombreux composés qui n'apparaissent que dans des gloses, et nulle part ailleurs, sont en général des composés non-dérivés, et des composés substantifs.

513. Une fois ces distinctions d'emploi établies, on comprend mieux pourquoi les composés dérivés (adjectifs) apparaissent essentiellement dans les vocabulaires poétique, religieux, juridique. (8) Cf MEILLET, Communication du B8L 15 (1908), p. 8. (9) Il est facile de voir que l'emploi de ces composés est un véritable procédé de la langue poétique, qui en particulier aime les faire entrer dans des figures étymologiques (innumero numero, Lucr, 2, 1054, etc. : voir M. LEROY, 1. c. [no 4]), ou les accumuler. Ainsi dans cet exemple (entre beaucoup d'autres), OV., Tr, 4, 7, 15 sq. : Quadrupedesque homines cum pectore pectora iunctos Tergeminumque uirum tergeminumque canem Sphingaque et Harpyias serpentipedesque Gigantes Centimanumque Gyen sernibouemque uirum

513-514

CARACTÈRE ARCHAÏQUE DES COMPOSÉS

121

Ce qu'ont en effet de commun ces composés et ces vocabulaires, c'est leur caractère archaïque, ou, mieux, archaïsant. Dans d(·. nombreuses littératures, la poésie et le vocabulaire de la rnligion ou du droit cultivent volontiers l'archaïsme, non seulement parce que l'archaïsme est en lui-même un procédé cl'cxprl~ssion nohlr-, mais peut-être aussi parce que la poésie, le droit, la religion, qui se veulent réservés à des initiés, ont une ccrtaino volonté d 'hnrrnùtisme : tout moyen d'expression, qui s'oppose il un autre moyen d'expression, plus vivant et immédiatement clair, y sera favori. En termes purement linguistiques, il est possihle dl'. [Jl'él:isl'" davantage où est l'archaïsme. Il ne suffit pas de dire que III composé est archaïque parce que les expressions vivantes ct productives consistent dans la langue en syntagmes analytiques : c'I~I'I, 1;\ un effet, non une cause. En réalité, les anciens composés dérivés adjectifs participent, sans être les seuls à le faire, il un archaïsme de syntaxe. L'archaïsme de ces composés, partout employés en valeur d'épithètes (par exemple divines: itriderdipoiëns, imbricilor, etc.), ou de prédicats (type ... parricides eslôi, est celui mèrno de l'adjectif en général, dont WACKERNAGEL 1 0 a déjà montré qu'il constituait un mode d'expression très ancien, concurrencé pt éliminé par la suite par d'autres modes d'expression. Un parallèle, procédant de la même cause, peut être fourni, entre autres, il l'élimination des composés adjectifs par des groupes nominaux en latin : l'adjectif patronymique y est évincé par un groupe substantif (génitif du nom du père-l-Ia mention [Ilius : § Gll).

514. Il y a donc une concordance remarquable entre les divers emplois et les diverses formes de composés. Jusqu'aux plus tardives attestations de la langue se perpétue le souvenir de la plus ancienne valeur des composés: un clivage s'établit à tous les niveaux entre les composés archaïques, dérivés, adjectifs, employés par ceux des textes qui font le plus volontiers usage d'un style rechnrché nt archaïsant, et les composés plus récents, formés sans dérivation, substantifs, le plus souvent utilisés en prose et vivants dans la langue parlée: ces derniers sont les seuls à être bien attestés dans les langues romanes (§ 393). Avec ses archaïsmes, et ses innovations, le latin est richo d'enseignements pour la connaissance des formes, du rôle, de l'évolution des composés nominaux dans les lang\l('s inrloeuropéennes anciennes. (10)

WACKERNAGEL,

Genitiu und Adjektiu, Méi. Saussure, 123-1[;2.

15

APPENDICE 1 (liste des suffixes de composition ct des seconds

llIPJn!JI'CS)

Nous avions conçu et exécuté un Index inverse, d lIll Iurlr-x rail, d'après l'ordre alphabétique des seconds membres. POIII' d(~s raisons matérielles, ces Index n'ont pu êlrp pn hl iès in P;I:t{'flSO. Aussi les avons-nous en quelque sorte conjoints dans la 1 isl.o que nous donnons ci-dessous. Il s'agit d'une liste des « suffixes de composition », présentés selon L'ordre aLphabétique inverse, et accompagnés des numéros fk paragraphes où ils sont étudiés, ou plutôt de deux listes principules, l'une de suffixes d'adjectifs, l'autre de suffixes d'abstraits pt (I