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Section I : La performance sociale §I : définitions et concepts clés A.
Définition :
L’évaluation de la performance consiste en un ensemble de procédures systématiques destinées à juger des qualifications et les mérites de l’organisation. Cette définition met l’accent sur les qualifications et les mérites accordés à l’individu dans l’organisation. On peut dire aussi que l’évaluation de la performance est le processus par lequel on arrive à constituer des jugements sur la performance passée et présente ainsi que sur le potentiel futur d’un subordonné en regard de l’environnement de son travail1. On touche ici non seulement à la performance effective d’un individu, mais également à sa performance potentielle. Dans la pratique, il arrive parfois que certains aspects de la performance potentielle soient insérés dans l’évaluation de la performance présente. On peut utiliser un formulaire à part qui rende compte de l’évaluation du potentiel et, au besoin, les organisations le font, surtout celles de grande taille. Le but ainsi visé consiste éventuellement à augmenter les responsabilités d’un salarié, voire à lui accorder une promotion2. L’évaluation de la performance peut se définir aussi comme : « Un processus qui contribue à la gestion des salariés et les équipes de travail de façon à optimiser la performance de l’organisation en établissant une compréhension commune et partagée des objectifs à atteindre ainsi qu’en orientant et en supportant les individus qui feront en sorte qu’on atteigne ces objectifs3. » Autrement dit, l’évaluation de la performance a pour but d’aider les individus à comprendre comment ils contribuent à l’atteinte des objectifs organisationnels et à faire en sorte qu’ils consacrent leurs efforts à la réalisation d’activités qui auront un impact sur la performance organisationnelle. Ainsi définie, l’évaluation de la performance est en relation étroite avec le concept de gestion de la performance (performance management). Alors que le
1
Castetter W.B., cité dans Clermont Barnabé (1981), La gestion des ressources humaines en éducation, Montréal, Agence d’ARC, p.171. 2 Côté M. (février 1978), L’évaluation du rendement des cadres : une approche globale, Gestion, p.81. 3 Chartered Institute Of Personnel and Development (2009), op. cit., p.2.
rôle de l’évaluation consiste à documenter la performance à des fins administratives (décisions liées à la rémunération, aux promotions, au congédiement) et des fins de développement (formation), la gestion de la performance consiste plutôt à motiver les salariés à améliorer leur performance4.
B.
Bref historique : 1.
Au cours des siècles :
Diverses formes d’évaluation furent pratiquées sur des individus afin de découvrir le niveau d’excellence professionnelle de chacun. Pensons, par exemple, au chef d’œuvre que devait réaliser le compagnon au Moyen Age pour parvenir au titre de maitre5. Aujourd’hui, l’évaluation de la performance prend diverses formes et elle sert à toutes sortes de fins. Comme pour plusieurs autres pratiques de GRH, les outils utilisés ont évolué et plusieurs grandes organisations recourent maintenant à des logiciels sophistiqués pour automatiser bon nombre des activités inhérentes au processus d’évaluation6.
2.
Au XIXe siècle :
Pour contrer l’arbitraire lors de l’évaluation, les évaluateurs utilisèrent trois critères : L’œuvre, la qualité de la performance et le jugement des experts et ce, pour un nombre restreint de métiers considérés utilitaires du XIXe siècle. Par ailleurs, la plupart des salariés effectuaient des tâches simples et il était possible d’évaluer facilement leur performance dans leur poste7. Ainsi l’a compris Robert Owen dans les années 1840 en implantant des notions liées à l’évaluation de la performance dans une usine écossaise. Ces notions se sont traduites, entre autres, par l’utilisation de réglettes de diverses couleurs en vue de renseigner les salariés sur leur performance. La couleur déterminait la qualité de la performance, de pauvre à excellente8.
3. 4
A la fin du XIXe siècle :
DeNisi A.S. et Prichard R.D. (2006), Performance appraisal, performance management and improving individual performance: a motivational framework, Management and Organization Review, pp.253-277. 5 Muller P. et Silbener P. (1968), l’Homme en situation Industrielle, Paris, Payot, P.294. 6 Robb D. (2008), Appraising Appraisal Software, HR Magazine, 53(10), pp.65-70. 7 Tremblay R. (1976), L’appréciation du personnel par stimulation dans la sélection de cadres, Centre de formation et de consultation, Québec, Les presses de l’Université Naval, p.5. 8 Boone L.E., Kurtz D.L. (1987), Contemporary Business, Holt, Renhart and Winston Inc., USA, 5e edition (traduction française: l’entreprise d’aujourd’hui
L’introduction des machines à brouillé les cartes et il a fallu chercher d’autres modes d’évaluation. Taylor a constaté qu’on ne savait pas réellement en quoi consiste une «bonne journée de travail ». Ce constat l’amena à élaborer une théorie sur l’organisation scientifique du travail ; ainsi avança-t-il l’idée que l’évaluation de la performance devait être un instrument rationnel capable de détecter parmi les salariés ceux qui avaient les capacités physiques et intellectuelles pour occuper efficacement un poste donné9.
4.
Dès le XXe siècle :
Certaines techniques d’évaluation de la performance furent utilisées dans l’armée pendant la Première Guerre mondiale. Toutefois, c’est seulement à partir de la Deuxième Guerre mondiale que les psychologues ont vu la nécessité de consacrer du temps et du soin à développer des critères et des techniques pour évaluer le travail des individus. De nos jours, le monde professionnel insiste sur le dépassement de soi et la quête de l’excellence. La bonne performance s’impose en tant que condition sine qua non de la survie de toute organisation10. Par ricochet, les employeurs cherchent à observer et à déterminer la performance de leurs salariés. Il en découle que l’évaluation de la performance se pratique aujourd’hui dans la plupart des organisations, bien qu’avec des méthodes et des objectifs qui diffèrent selon les organisations. Ainsi, certaines organisations opteront pour des objectifs de documentation administrative (support à la prise de décisions). Des différences s’observent également dans la fréquence des évaluations, qui peut aller du simple entretien annuel jusqu’à un mode de feed-back continu11. Un constat qui se dégage depuis quelques années suggère qu’en matière d’évaluation de la performance, ce n’est pas tant le processus qui importe, que la façon dont on positionne dans l’organisation, les objectifs qu’il poursuit et la façon dont on l’exécute12.
C.
Raison d’être :
L’évaluation de la performance implique l’identification des forces et faiblesses des salariés dans une organisation, tant au niveau du savoir que du savoir-faire et du savoir-être.
9
Wormotte G., (Septembre, octobre 1979), Ressources Humaines : L’évaluation ligotée, Revue française de gestion, p.31. 10 Kaplan R. et Norton D. (2001). The Strategy-Focused Organization: How balanced scorecard companies thrive in the new business environment. Boston : Harvard Business school press. 11 Laumeyer, J.A., Performance management systems, SHRM white paper. 12 Chartered Institute of Personnel and development (2009)
Plusieurs éléments peuvent concourir à définir la raison d’être de l’évaluation de la performance, comme ceux-ci : Connaitre et préparer une relève adéquate à partir des talents disponibles dans l’organisation. Pour cela, l’organisation doit pouvoir mesurer les résultats atteints par rapport à ceux souhaités de façon à reconnaitre la performance de chaque salarié. Pouvoir contrôler mes coûts de la main d’œuvre et augmenter la productivité des salariés. On suppose ici la connaissance des techniques d’évaluation de la productivité et l’identification des variables susceptibles de l’accroitre. Obtenir des données qualitatives sur les capacités d’action des évalués, leurs dispositions réelles en vue d’utiliser tous leurs efforts pour développement de leur carrière et celui de l’organisation. Aider à la gestion prévisionnelle de l’ensemble des RH et établir éventuellement une rémunération au mérite, plus objective et donc plus équitable. Faciliter la supervision continuelle des actions nécessaires à la réalisation des activités déjà attribuées à chaque salarié. Justifier les décisions administratives possibles découlant des résultats obtenus par chaque salarié. Pour ce qui est des résultats obtenus lors de l’évaluation de la performance. Certaines études concluent13 qu’ils servent principalement à transmettre à l’évalué une rétroaction en ce qui concerne la façon dont il s’acquitte de son travail ; ils servent également à établir un lien entre sa performance, sa rémunération et son cheminement de carrière.
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Bretz