60 0 10MB
Urgences Réanimation Anesthésie 2e édition
Chez le même éditeur
Dans la même collection Cancérologie, par Y. Loriot et P. Mordant. 2010, 256 pages. Cardiologie, par D. Rosenbaum et M. Gautier. 2010, 404 pages. Chirurgie digestive – Chirurgie orthopédique, par I. Dagher, E. Dagher. 2007, 128 pages. Dermatologie, par M. Bergis. 2006, 232 pages. Gériatrie, par S. Moulias, O. Guérin, V. Peigne. 2008, 160 pages. Gynécologie – Obstétrique, par A.-C. Donnadieu, C. Firtion. 2006, 416 pages. Hématologie, par L. Karlin, T. Coman. 2009, 352 pages. Hépato-gastro-entérologie, par K. Aziz, D. Bonnet, J.-M. Péron. 2009, 496 pages. Maladies infectieuses et transmissibles, par L. Epelboin, J. Macey. 2009, 496 pages. Médecine légale – Médecine du travail – Pharmacologie, par M. Coffy, M. Bardou, F. Goirand, Ph. Lirussi. 2007, 272 pages. Néphrologie, par P. Housset, A. Lévy et C. Estournet. 2010, 168 pages. Neurologie, 2e édition, par A. Bertrand, S. Epelbaum. 2009, 464 pages. Ophtalmologie, par N. Pogorzalek, M. Labetoulle. 2008, 168 pages. ORL-Stomatologie, par B. Théoleyre. 2009, 208 pages Pédiatrie, par C. Adam, E. Ecochard, S. Allali, K. Bouchireb, A. Cuinet, C. Piquard, coordonné par V. Gajdos. 2009, 640 pages. Pneumologie, 2e édition, par D. Montani, C. Tcherakian. 2009, 408 pages. Psychiatrie – Pédopsychiatrie, par J. Thuile, F. Rouillon. 2008, 368 pages. Santé publique, 2e édition, par J. Rongère, M.-P. Tavolacci. 2009, 240 pages. Urologie, 2e édition, par l’Association Française des Urologues. 2010, 296 pages. Dans la collection Abrégés Connaissances et Pratique Réanimation et urgences, 3e édition, par le Collège National des Enseignants de Réanimation Médicale, 2009, 656 pages. Autres ouvrages Guide de thérapeutique, 5e édition, par L. Perlemuter, G. Perlemuter. 2008, 2 176 pages. Guide de thérapeutique – version ebook, par L. Perlemuter, G. Perlemuter. Document téléchargeable sur le site : www.masson.fr
Collection sous la direction de Gabriel PERLEMUTER
David MONTANI
Léon PERLEMUTER
Professeur des universités Praticien hospitalier Service d’hépatogastro-entérologie Hôpital Antoine-Béclère Faculté de médecine Paris-Sud – 11
Chef de clinique des universités Assistant hospitalier Service de pneumologie Hôpital Antoine-Béclère Faculté de médecine Paris-Sud – 11
Professeur des universités
Urgences Réanimation David OSMAN Réanimateur et praticien hospitalier Service de réanimation médicale Hôpital Bicêtre, Le Kremlin-Bicêtre
Anesthésie Marie-Pierre BONNET Chef de clinique-assistant en anesthésie-réanimation, AP-HP Hôpital Antoine-Béclère, Clamart
Koceila BOUFERRACHE Chef de clinique-assistant, service de réanimation, Hôpital Ambroise Paré, Boulogne-Billancourt
Julien JOSSERAND Anesthésiste-réanimateur Hôpital Beaujon, Clichy
2e édition
Ce logo a pour objet d’alerter le lecteur sur la menace que représente pour l’avenir de l’écrit, tout particulièrement dans le domaine universitaire, le développement massif du « photo-copillage ». Cette pratique qui s’est généralisée, notamment dans les établissements d’enseignement, provoque une baisse brutale des achats de livres, au point que la possibilité même pour les auteurs de créer des œuvres nouvelles et de les faire éditer correctement est aujourd’hui menacée. Nous rappelons donc que la reproduction et la vente sans autorisation, ainsi que le recel, sont passibles de poursuites. Les demandes d’autorisation de photocopier doivent être adressées à l’éditeur ou au Centre français d’exploitation du droit de copie : 20, rue des Grands-Augustins, 75006 Paris. Tél. 01 44 07 47 70.
Tous droits de traduction, d’adaptation et de reproduction par tous procédés, réservés pour tous pays. Toute reproduction ou représentation intégrale ou partielle, par quelque procédé que ce soit, des pages publiées dans le présent ouvrage, faite sans l’autorisation de l’éditeur est illicite et constitue une contrefaçon. Seules sont autorisées, d’une part, les reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, les courtes citations justifiées par le caractère scientifique ou d’information de l’œuvre dans laquelle elles sont incorporées (art. L. 122-4, L. 122-5 et L. 335-2 du Code de la propriété intellectuelle). © 2010, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés ISBN : 978-2-294-70884-8 Elsevier Masson SAS, 62, rue Camille-Desmoulins, 92442 Issy-les-Moulineaux Cedex www.elsevier-masson.fr
Avant-propos à la deuxième édition Cette collection destinée à la préparation aux épreuves classantes nationales (ECN) tient compte du programme de DCEM2-DCEM4. Les nouvelles éditions de cette collection ont été revues, augmentées et mises à jour. Cette collection suit un découpage par spécialité, chaque ouvrage traitant l’ensemble des items figurant au programme de la spécialité. Nous avons souhaité rendre ces ouvrages les plus synthétiques et les plus pratiques possibles, pour faciliter le travail de mémorisation de l’étudiant : – synthétiques : les auteurs, proches de la réalité des épreuves classantes nationales, ont privilégié un style et une structure qui permettent non seulement de lire et d’acquérir facilement les items mais aussi de retenir rapidement le contenu grâce à la fiche « Dernier tour » ; – pratiques : chaque chapitre commence systématiquement par un encadré qui récapitule les objectifs de l’item, les liens transversaux, les conférences de consensus, les sujets tombés avec leur date et le résumé des Annales. Par rapport aux ouvrages existants, des innovations originales ont été apportées : – Pour comprendre. Il s’agit d’une introduction expliquant les notions essentielles qui permettent de mieux appréhender l’item. – Les conférences de consensus ou d’experts. Elles font le point sur un problème d’actualité. Ces conférences sont importantes car elles font appel aux meilleurs spécialistes de la question, dont elles soulignent l’intérêt. Le consensus évite des attitudes différentes entre auteurs. La présence d’une conférence de consensus rend un sujet plus facilement « tombable » aux ECN car la correction est moins sujette à discussion. Les conférences sont référencées pour qu’on puisse les consulter à part. Un encadré de l’énoncé et du contenu des conférences permet de les repérer aisément. Ces conférences sont rappelées en début de chapitre et, s’il n’en existe aucune sur le sujet, cela est également précisé. – Les items « tombés » au concours de l’Internat ou aux ECN au cours des quinze dernières années sont signalés face au texte concerné mais sont résumés avec leur énoncé et leurs questions en début de chapitre. – Les liens transversaux renvoient aux
ITEM
qui traitent les mêmes sujets au sein du
programme mais sous un angle différent. Ils sont signalés dans le texte mais sont également récapitulés en début de chapitre.
V
Sujet tombé
Urgences – Réanimation – Anesthésie
– Les zéros marquent la note nulle obtenue à l’ensemble de la question dans le cadre des dossiers des ECN en cas d’oubli de la notion ainsi signalée. Ils figurent à deux endroits : dans la marge, en regard du texte concerné pour qu’on puisse facilement les repérer et les compter, ainsi que dans la fiche « Dernier tour ». – La fiche « Dernier tour » permet en un instant de se remémorer le contenu de l’item. Elle peut comporter un arbre décisionnel si cela est nécessaire. – Les images. Nous avons placé au fil du texte les images les plus caractéristiques, sachant qu’elles valent mieux qu’un long discours. Telle qu’elle est, cette collection est incontournable pour l’étudiant en médecine. Nous souhaitons qu’elle devienne une référence pour le médecin. Gabriel PERLEMUTER David MONTANI Léon PERLEMUTER
VI
Table des matières Avant-propos à la deuxième édition . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . V Abréviations de l’ouvrage . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .XI
Urgences Réanimation ITEM 104
Septicémie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3
I. Physiopathologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5 II. Causes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6 III. Diagnostic . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8 IV. Prise en charge . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11
ITEM 185
Arrêt cardio-circulatoire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21
I. Physiopathologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22 II. Causes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23 III. Diagnostic . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23 III. Prise en charge . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24
ITEM 193
Détresse respiratoire aiguë de l’adulte. Corps étranger des voies aériennes supérieures . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31
I. Physiopathologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 34 II. Causes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 36 III. Diagnostic . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 39 IV. Prise en charge . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 40
ITEM 200
État de choc . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 49
I. Physiopathologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 51 II. Causes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 54 III. Diagnostic . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 54 IV. Prise en charge . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 57
VII
Urgences – Réanimation – Anesthésie
ITEM 211
Œdème de Quincke et anaphylaxie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 65
I. Physiopathologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 66 II. Causes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 66 III. Diagnostic . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 67 IV. Prise en charge . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 70
ITEM 214
Principales intoxications aiguës . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 77
I. Diagnostic . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 78 II. Intoxication par psychotropes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 82 III. Intoxication par cardiotropes. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 84 IV. Intoxication par le monoxyde de carbone . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 85 V. Intoxication alcoolique aiguë (IAA) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 89 VI. Intoxication par antalgiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 92 VII. Prise en charge . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 94
ITEM 219
Troubles de l’équilibre acidobasique et désordres hydroélectrolytiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 101
Troubles de l’équilibre acido-basique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .105 I. Physiopathologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 105 II. Acidose métabolique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 107 III. Alcalose métabolique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 108 IV. Acidose respiratoire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 109 V. Alcalose respiratoire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 109 Dysnatrémies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .110 I. Physiopathologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 110 II. Hyponatrémies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 112 III. Hypernatrémies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 115 Dyskaliémies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .116 I. Physiopathologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 116 II. Hyperkaliémies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 117 III. Hypokaliémies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 119 Dyscalcémies. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .122 I. Physiopathologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 122 II. Hypercalcémies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 123 III. Hypocalcémies. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 126
ITEM 230
Coma non traumatique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 133
I. Physiopathologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 135 II. Causes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 135 III. Diagnostic . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 136 IV. Prise en charge . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 140 VIII
Table des matières
ITEM 252
Insuffisance rénale aiguë – Anurie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 145
I. Physiopathologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 147 II. Causes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 149 III. Diagnostic . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 154 IV. Prise en charge . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 158
ITEM 91
Infections nosocomiales . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 167
I. Infection nosocomiale en réanimation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 168 II. Infections urinaires sur sonde . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 177 III. Pneumopathies acquises sous ventilation mécanique (PAVM) . . . . . . . . . . . 179 IV. Infections liées aux cathéters veineux centraux (CVC) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 182 V. Infections du site opératoire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 187
Anesthésie ITEM 66
Thérapeutiques antalgiques médicamenteuses (P) et non médicamenteuses . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 197
I. Stratégie de prise en charge globale d’une douleur aiguë ou chronique. . . . 199 II. Traitements médicamenteux de la douleur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 199 III. Traitements non médicamenteux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 209 IV. Évaluation de l’efficacité du traitement antalgique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 211
ITEM 67
Anesthésie locale, locorégionale et générale . . . . . . . . . . . . . 215
I. Anesthésie générale (AG) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 216 II. Anesthésie locale et locorégionale (ALR) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 218 III. Obligations réglementaires à respecter avant une anesthésie . . . . . . . . . . . 221
ITEM 201
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 227
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces chez un brûlé. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .228 I. Épidémiologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 229 II. Étiologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 229 III. Physiopathologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 230 IV. Diagnostic positif . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 231 V. Prise en charge thérapeutique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 232 VI. Complications . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 234 Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces chez un polytraumatisé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .235 I. Prise en charge préhospitalière . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 236 II. Prise en charge hospitalière initiale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 238 IX
Urgences – Réanimation – Anesthésie
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces chez un traumatisé abdominal . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .242 I. Épidémiologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 243 II. Physiopathologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 243 III. Prise en charge diagnostique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 243 IV. Prise en charge thérapeutique. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 245 V. Traumatismes abdominaux : exemples. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 246 VI. Principales complications des traumatismes abdominaux . . . . . . . . . . . . . . 248 Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces chez un traumatisé crânien . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .249 I. Traumatisé crânien non grave adulte. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 250 II. Traumatisé crânien grave . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 251 Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces chez un traumatisé des membres . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .257 I. Généralités sur les fractures traumatiques des membres . . . . . . . . . . . . . . . . 258 II. Complications locales. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 262 III. Complications générales . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 265 IV. Autres complications . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 267 Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces chez un traumatisé du bassin . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .268 I. Mécanismes lésionnels . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 268 II. Prise en charge préhospitalière . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 269 III. Prise en charge hospitalière. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 269 Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces chez un traumatisé thoracique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .272 I. Physiopathologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 272 II. Examen clinique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 273 III. Examens complémentaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 274 IV. Prise en charge des lésions principales . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 275 Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces devant une plaie des parties molles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .281 I. Prise en charge diagnostique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 282 II. Prise en charge thérapeutique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 283 III. Spécificités et complications . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 284 Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces chez un traumatisé du rachis . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .287 I. Épidémiologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 288 II. Physiopathologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 289 III. Différents types de fractures et lésions rachidiennes . . . . . . . . . . . . . . . . . . 293 IV. Prise en charge préhospitalière . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 296 V. Prise en charge hospitalière . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 301 VI. Prise en charge thérapeutique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 306 VII. Complications. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 309
Abréviations autorisées aux ECN . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 325 Index . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 329
X
Abréviations de l’ouvrage ACSOS
agressions cérébrales secon-
EVS
échelle verbale simple
daires d’origine systémique
FC
fréquence cardiaque
AG
anesthésie générale
Fg
fibrinogène
AINS
anti-inflammatoire non
FR
fréquence respiratoire
stéroïdien
FV
fibrillation ventriculaire
AL
anesthésiques locaux
GCS
score de Glasgow
ALR
anesthésie locorégionale
GEM
glomérulonéphrite
ATP
adénosine triphosphate
AVP
accident de la voie publique
BGN
bacilles à Gram négatif
BGP
bacilles à Gram positif
HAD
hormone antidiurétique
BLSE
bêtalactamase à spectre élargi
Hb
hémoglobine
BMR
bactéries multirésistantes
HbCO
carboxyhémoglobine
BPCO
bronchopneumopathie chroni-
HEA
hydroxyéthylamidon
que obstructive
HED
hématome extra-dural
bpm
battements par minute
HSD
hématome sous-dural
BZP
benzodiazépines
HSF
hyalinose segmentaire et focale
C3G
céphalosporine de
HTIC
hypertension intracrânienne
3 génération
IAE
intoxication alcoolique aiguë
CGP
cocci à Gram positif
IAS
infection associée aux soins
CGR
concentrés érythrocytaires
IEC
inhibiteur de l’enzyme de
CIVD
coagulation intravasculaire
e
extramembraneuse GISA
Staphylococcus aureus résistant aux glycopeptides
conversion
disséminée
IPD
interphalangienne distale
CPK
créatine phosphokinase
IPP
interphalangienne proximale
cpm
cycles par minute
IRA
insuffisance rénale aiguë
CRP
C Reactive Protein
IVD
intraveineux direct
CVC
cathéter veineux central
IVSE
intraveineux à la seringue
DAE
défibrillation automatisée
électrique
externe
LCR
liquide céphalorachidien
DFG
débit de filtration glomérulaire
MCP
métacarpophalangienne
ECBU
examen cytobactériologique
MEOS
système microsomial d’oxydation
des urines
MS
mort subite
ECG
électrocardiogramme
NFS
numération-formule sanguine
EER
épuration extrarénale
NO
monoxyde d’azote
ENS
échelle numérique simple
NTA
nécrose tubulaire aiguë
EVA
échelle visuelle analogique
OAP
œdème aigu du poumon
XI
Urgences – Réanimation – Anesthésie
PA
pression artérielle
SEP
sclérose en plaques
PAF
Platelet-Activated Factor
SHR
syndrome hépatorénal
PAM
pression artérielle moyenne
SHU
syndrome hémolytique et
PAS
pression artérielle systolique
PAVM
pneumopathie acquise sous
urémique SIRS
syndrome de réponse inflammatoire systémique
ventilation mécanique PBR
ponction-biopsie rénale
SMR
segment mobile rachidien
PCA
Patient Controlled Analgesia
SpO2
saturation pulsée en oxygène
PCI
produits de contrastes iodés
SRAA
substance réticulée activatrice
PEP
pression expiratoire positive
PFC
plasmas frais congelé
PIC
pression intracrânienne
PL
ponction lombaire
PO
per os
PPC
pression de perfusion
SVM
segment vertébral moyen
cérébrale
TA
trou anionique
PTH
parathormone
TC
tronc cérébral
PTT
purpura thrombotique
TCA
temps de céphaline activé
thrombocytopénique
TCG
traumatisme crânien grave
RCP
réanimation cardiopulmonaire
TDM
tomodensitométrie
RP
radiographie pulmonaire
TNF
Tumor Necrosis Factor
SARM
Staphylococcus aureus résis-
TP
taux de prothrombine
tant à la méticilline
UFC
unité formant colonie
SCB
surface cutanée brûlée
VRE
entérocoque résistant à la
SDRA
syndrome de détresse respiratoire
XII
ascendante SSIH
syndrome de sécrétion inappropriée d’HAD
SSPI
salle de surveillance postinterventionnelle
vancomycine VS
vitesse de sédimentation
Urgences Réanimation David Osman
This page intentionally left blank
ITEM 104
Septicémie
OBJECTIFS ● Diagnostiquer une septicémie. ● Identifier les situations d’urgence et planifier leur prise en charge. ● Argumenter l’attitude thérapeutique et planifier le suivi du patient. LIENS TRANSVERSAUX ITEM 80
Endocardite infectieuse.
ITEM 105
Surveillance des porteurs de valve et de prothèse vasculaire.
ITEM 173
Prescription et surveillance des antibiotiques.
ITEM 200
État de choc.
ITEM 203
Fièvre aiguë chez l’enfant et chez l’adulte. Critères de gravité d’un syndrome infectieux.
Sujets tombés aux épreuves classantes nationales ●
Sujet tombé
2008, dossier 9 : Un homme de 23 ans, 60 kg, vivant en Île-de-France, sans antécédents particuliers, a présenté au retour d’un séjour dans le sud-ouest de la France, en tant que moniteur de colonie de vacances, une pharyngite érythémateuse, sans amygdalite, avec 38 °C de température, traitée en ville de manière symptomatique par paracétamol. Trois jours plus tard, la température est à 39 °C. Il est admis aux urgences de l’hôpital. Il est confus, obnubilé, somnolent. La température corporelle est à 39 °C, la fréquence cardiaque est à 100/min, la fréquence respiratoire est à 16 cycles/min, la tension artérielle est à 100/60 mmHg. L’examen clinique met en évidence au niveau des pieds des macules violacées qui ne s’effacent pas à la pression et une raideur méningée. 1) Quel diagnostic évoquez-vous ? Justifiez votre réponse. 2) Quels sont les examens complémentaires à visée diagnostique à effectuer en urgence, sans que cela retarde la mise en route du traitement, et quels résultats les plus probables en attendez-vous dans ce contexte, dans les heures et dans les jours suivants ? 3) Quel traitement urgent effectuez-vous, éventuellement, avant tout geste diagnostique ? 4) Quel agent infectieux le plus probable suspectez-vous dans ce contexte ? Quel est son habitat et quelle est la physiopathologie de cette infection ? Quels sont les éventuels facteurs favorisants innés ? 5) Quel est le suivi clinique et hématologique de ce patient compte tenu des manifestations cutanées ? 6) Quels sont les principes du traitement ? 7) Quelles sont les mesures préventives ? Quels en sont les critères de mise en œuvre ? 8) Sous traitement adapté, l’évolution est rapidement favorable : la fièvre baisse avec amélioration des signes cutanés et disparition des signes neurologiques. Au 9e jour de l’évolution du tableau clinique, le patient ressent brutalement une douleur précordiale aiguë. Il est à 38 °C de température et présente des gonalgies bilatérales. Quelle est l’interprétation de l’électrocardiogramme ci-joint ? 9) Quel est le mécanisme le plus probable de ces manifestations et quel est le traitement indiqué ?
3
ú
ITEM 104
CONSENSUS ● Antibiothérapie probabiliste des états septiques graves – Conférence d’experts – SFAR, SRLF, SPILF, 14 septembre 2004 (www.srlf.org). ● Prise en charge initiale des états septiques graves de l’adulte et de l’enfant – Expertise collective – Groupe transversal Sepsis : SRLF, SFAR, SPILF, 24 octobre 2006 (www.srlf.org). ● Prise en charge des candidoses et aspergilloses invasives de l’adulte – Conférence de consensus commune – SRLF, SFAR, SPILF, 13 mai 2004 (www.srlf.org).
POUR COMPRENDRE… ■
Le terme de « septicémie » n’est plus utilisé mais est remplacé par le terme de
« bactériémie ». ■
La bactériémie est la présence de bactéries viables dans le sang. On parle égale-
ment de virémie, fongémie et parasitémie. ■
Une bactériémie est soit asymptomatique, soit associée à un syndrome de
réponse inflammatoire systémique, à un sepsis sévère ou à un choc septique. ■
Le syndrome de réponse inflammatoire systémique (SIRS) est caractérisé par la
présence d’au moins deux des signes suivants : – température > 38,3 °C ou < 36 °C ; – pouls > 90 bpm ; – fréquence respiratoire > 20 cpm ou hyperventilation alvéolaire (PaCO2 < 32 mmHg) ; – glycémie > 7,7 mmol/L ; – leucocytes > 12 000/mm3 ou < 4 000/mm3 ou > 10 % de formes immatures ; – altération des fonctions supérieures ; – temps de recoloration capillaire > 2 s ; – lactatémie > 2 mmol/L. ■
La bactériémie y est en générale massive. Le SIRS n’est pas toujours d’origine
infectieuse (maladie systémique, hémopathie, polytraumatisme, pancréatite). ■
Le sepsis sévère et le choc septique représentent les formes les plus graves de SIRS
d’origine infectieuse. Deux définitions, plus descriptives que physiopathologiques, permettent de les distinguer au moyen d’éléments cliniques et biologiques simples : – le sepsis sévère est défini comme un sepsis associé à une hypotension répondant au remplissage vasculaire et/ou une hypoperfusion et/ou une dysfonction 4
Septicémie
d’au moins un organe : encéphalopathie septique, syndrome de détresse respiratoire aigu, oligurie < 1 mL/kg/h, acidose métabolique, hyperlactacidémie, coagulation intravasculaire disséminée ; – le choc septique est défini comme un sepsis avec une hypotension persistante malgré un remplissage vasculaire adéquat et/ou la nécessité d’utiliser des drogues vasoactives associées à une hypoperfusion et/ou une dysfonction d’au moins un organe. ■
Les cocci à Gram positif (CGP) sont en cause dans 50 % des septicémies, suivis
des bacilles à Gram négatif (BGN) (35 %) puis des champignons (levures) (5 %). ■
Les septicémies sont responsables de 1 à 2 % des hospitalisations et associées à
une mortalité globale de 20 %. ■
Toute défaillance d’organe supplémentaire augmente de 20 % le risque moyen de
mortalité chez les patients septicémiques. ■
47 % des bactériémies en France sont acquises en milieu hospitalier (on parle de
bactériémies nosocomiales).
I. PHYSIOPATHOLOGIE Une phase d’« invasion de l’hôte » est suivie d’une phase de « réponse de l’hôte », souvent responsable de la symptomatologie.
A. Invasion de l’hôte Trois mécanismes peuvent être à l’origine d’une septicémie. ■
Origine thrombophlébitique : les bactéries colonisent d’abord le réseau veineux
du tissu infecté. Un caillot se forme alors dans la lumière veineuse et les bactéries s’y multiplient. La fragmentation secondaire du caillot libère les bactéries dans la circulation veineuse. Des localisations infectieuses à distance (emboles septiques) sont alors possibles. Dans ce mécanisme de septicémie, la libération des bactéries dans la circulation sanguine est irrégulière. ■
Origine lymphatique : les bactéries colonisent d’abord le réseau lymphatique du
tissu infecté. Les bactéries qui s’y multiplient sont véhiculées dans le canal thoracique, puis libérées dans la circulation sanguine. Le risque de localisation secondaire est moindre. La libération des bactéries dans la circulation sanguine est régulière. ■
Origine endocarditique : les bactéries se multiplient au sein d’une lésion valvu-
laire : la végétation. Les bactéries sont libérées dans la circulation de façon assez constante tandis que des fragments de fibrine infectée provenant de la végétation sont libérés irrégulièrement dans la circulation. Le risque de localisation secondaire est élevé
ITEM 80
B. Réponse de l’hôte
. ITEM 200
La présence du micro-organisme dans le sang et/ou de ses toxines (acides téichoïques des CGP, lipopolysaccharides des BGN) entraîne une activation de l’immunité cellulaire et humorale. Au plan cellulaire, l’activation des polynucléaires, du système monocytomacrophagique, des plaquettes, des cellules endothéliales va être responsable de la sécrétion de nombreux médiateurs pro-inflammatoires : cytokines (TNF, 5
ITEM 104
IL1, IL6, IL8), eicosanoïdes (leucotriènes, prostaglandines, thromboxanes), PlateletActivated Factor (PAF), radicaux libres et monoxyde d’azote (NO), facteurs de la coagulation. Au plan humoral, on observe une activation des voies classiques et alternes du complément et une activation du système kallicréine-kinine. Parallèlement intervient la libération de cytokines anti-inflammatoires (IL4, IL10, TGF-b). La réponse systémique est le produit de l’équilibre entre le versant pro-inflammatoire et le versant anti-inflammatoire.
II. CAUSES A. Septicémie à staphylocoque ■
La porte d’entrée est : – souvent liée à un corps étranger implanté : cathéter, prothèse vasculaire, sonde de pace-maker, prothèse orthopédique ; – ou bien peut être cutanée, ORL ou gynécologique.
■
Dans 30 % des cas, la porte d’entrée n’est pas retrouvée.
■
Elle est parfois associée à une endocardite : une échographie est donc souvent
justifiée afin d’éliminer cette hypothèse. ■
En situation nosocomiale, la possibilité d’un staphylocoque résistant à la méticil-
line doit être évoquée. ■
Une forme particulière est le Toxic Shock Syndrome qui associe un sepsis et une
érythrodermie scarlatiniforme.
B. Septicémie à streptocoque La porte d’entrée peut être déterminée à partir de la classification de Lancefield : ■
cutanée : streptocoque du groupe A, rarement C ou G ;
■
digestive : entérocoque et streptocoque du groupe D (S. bovis, particulièrement),
imposant la réalisation d’une coloscopie ; ■
gynécologique : streptocoque du groupe B (S. agalactiae), imposant une consul-
tation spécialisée ; ■
urinaire : entérocoque et streptocoque du groupe B (S. agalactiae), nécessitant
une exploration de l’arbre urinaire (TDM) ; ■
ORL : streptocoque du groupe A ;
■
dentaire : streptocoques non groupables ;
■
pulmonaire : S. pneumoniae (streptocoque non groupable).
Les septicémies à streptocoques non groupables dentaires et S. bovis sont associées à une endocardite, imposant la réalisation d’une échocardiographie.
C. Septicémie à bacilles à Gram négatif La porte d’entrée est : ■
une infection urinaire ou digestive : entérobactéries (E. coli, Proteus sp.,
Klebsiella sp., Enterobacter sp., Serratia sp., Citrobacter sp.) ; ■
une infection nosocomiale urinaire, pulmonaire, du site opératoire ou d’un
cathéter vasculaire : entérobactéries et BGN non entérobactéries (Acinetobacter baumannii, Pseudomonas aeruginosa, Stenotrophomonas maltophilia). 6
Septicémie
D. Septicémie à anaérobies La porte d’entrée est : ■
cutanée (gangrène) : Clostridium perfringens ;
■
digestive (péritonite, cholécystite, abcès hépatique) : BGN (Bacteroides sp.,
Prevotella sp.) ou BGP (Clostridium sp.) ou CGP (Peptostreptococus sp.) ; ■
gynécologique : BGN (Bacteroides sp., Prevotella sp.) ou BGP (Clostridium perfrin-
gens) ou CGP (Peptostreptococus sp.) ; ■
pleuropulmonaire (abcès pulmonaire, pleurésie purulente) : BGN (Prevotella,
Fusobacterium) ; ■
cérébrale (abcès cérébraux, empyèmes sous-duraux) : coques (Peptostreptococcus,
Veillonella) et bacilles (Bacteroides, Prevotella, Fusobacterium) ; ■
dentaire, cervicofaciale, périnéale (gangrène de Fournier).
E. Candidémie ■
La porte d’entrée est : – digestive : les levures du genre Candida appartiennent à la flore digestive commensale. Les modifications de cette flore, lors d’une antibiothérapie par exemple, favorisent la croissance des Candida, qui colonisent alors les surfaces muqueuses. À partir d’une masse critique d’inoculum, si l’intégrité des surfaces muqueuses est compromise, une dissémination hématogène est possible. L’immunosuppression favorise la greffe du Candida à distance ; – vasculaire : infection nosocomiale sur cathéter (80 % des candidémies).
■
Candidémie et candidose systémique ont la même signification : la candidémie
est la situation où du Candida a été identifié par au moins une hémoculture, la candidose systémique est la situation où du Candida a été identifié dans plusieurs sites non contigus, impliquant une dissémination hématogène, même si les hémocultures sont négatives, ce qui est le cas dans 50 % des cas. ■
Leur mortalité est élevée, de l’ordre de 40 %.
■
Les facteurs prédisposants de candidose systémique sont ceux qui : – favorisent la colonisation (antibiothérapie à large spectre, nutrition parentérale, immunosuppression) ; – altèrent la barrière muqueuse (perforation digestive, chirurgie abdominale, chirurgie urologique, ischémie digestive, dispositifs vasculaires, brûlures) ; – altèrent l’immunité : neutropénie, chimiothérapie, âge avancé, diabète.
F. Aspergillose pulmonaire invasive ■
Il s’agit d’une infection grave due à Aspergillus, un champignon filamenteux
présent dans l’environnement sous forme de spores susceptibles d’être inhalés par l’individu. Suite à la colonisation de l’arbre tranchéobronchique, les spores germent et donnent naissance à des filaments mycéliens. Ces filaments aspergillaires pénètrent la muqueuse bronchique, puis le parenchyme pulmonaire et enfin les vaisseaux pulmonaires. Il est alors responsable de thromboses vasculaires et d’une nécrose ischémique du parenchyme pulmonaire, réalisant une pneumopathie nécrosante. À partir des vaisseaux pulmonaires, tous les organes peuvent être atteints par dissémination hématogène. On décrit notamment les atteintes 7
ITEM 104
cérébrale (abcès), cardiaque (endocardite aspergillaire, abcès myocardiques, péricardite), digestive (hémorragie, perforation, occlusion), et osseuse. ■
Les facteurs contribuant au risque d’infection aspergillaire sont les facteurs
environnementaux susceptibles d’augmenter la concentration de spores dans l’air ambiant (travaux de rénovation et de construction) et les facteurs locaux susceptibles de favoriser la colonisation de l’arbre respiratoire (séquelles de tuberculose, fibrose pulmonaire, bronchopneumopathie chronique obstructive…). ■
Les facteurs contribuant au risque d’infection aspergillaire invasive sont les fac-
teurs généraux susceptibles de diminuer les défenses immunitaires (neutropénie profonde et prolongée avant tout mais aussi greffe de moelle osseuse, traitements immunosuppresseurs, corticothérapie…). ■
La présentation clinique est celle d’une fièvre associée à des signes respiratoires
(toux, expectorations, douleur thoracique d’allure pleurale, hémoptysies). ■
Le scanner thoracique est un examen clé du diagnostic chez le patient neutro-
pénique, en mettant en évidence de façon précoce mais transitoire un signe du halo (nodule entouré d’une zone de verre dépoli correspondant à un infarctus pulmonaire entouré d’une extravasation hémorragique) puis un signe du croissant gazeux correspondant à la détersion du foyer infectieux lors de la sortie d’aplasie. ■
La mise en évidence de l’antigène galactomannane aspergillaire dans le sang est
un examen utile au diagnostic d’aspergillose pulmonaire invasive.
G. Cryptococcose ■
Il s’agit d’une infection grave, due à une levure capsulée (Cryptococcus neofor-
mans), survenant le plus souvent sur un terrain de déficit immunitaire (VIH, hémopathies lymphoïdes, transplantation d’organe). ■
La porte d’entrée est pulmonaire : des particules infectantes inhalées se main-
tiennent dans les macrophages alvéolaires jusqu’à l’apparition d’un déficit immunitaire qui leur permettrait de sortir de cette phase dormante, de se multiplier et de disséminer dans tous les organes après une fongémie. ■
L’infection se présente en général sous la forme d’une méningoencéphalite, à
l’occasion de laquelle sont souvent découvertes d’autres localisations : pulmonaire et cutanée, notamment. ■
L’examen direct des prélèvements est primordial et permet un diagnostic rapide.
Le diagnostic de cryptococcose méningée est ainsi fait par examen direct à l’encre de Chine du LCR, la culture sur milieu de Sabouraud, la détection de l’antigène capsulaire dans le sang ou le LCR.
III. DIAGNOSTIC A. Clinique Le diagnostic de bactériémie repose sur la positivité des hémocultures, mais il est suspecté si :
8
■
le tableau clinique est brutal ;
■
il existe un SIRS (tableau 104-1 ) ;
Septicémie
Tableau 104-1. Définition du sepsis, du sepsis sévère et du choc septique Réponse inflammatoire systémique (au moins deux des critères suivants)
– Température > 38,3 °C ou < 36 °C – Pouls > 90 bpm – Fréquence respiratoire > 20 cpm – Glycémie > 7,7 mmol/L – Leucocytes : • > 12 000/mm3 • ou < 4 000/mm3 • ou > 10 % de formes immatures – Altération des fonctions supérieures – Temps de recoloration capillaire > 2 s – Lactatémie > 2 mmol/L
Sepsis
Réponse inflammatoire systémique + infection présumée ou identifiée
Sepsis sévère
– Sepsis + lactates > 4 mmol/L – Ou hypotension artérielle avant remplissage – Ou dysfonction d’organe (une seule suffit) : • respiratoire : PaO2/FiO2 < 300 • rénale : créatininémie > 176 μmol/L • coagulation : INR > 1,5 • hépatique : INR > 4, bilirubine > 78 μmol/L • thrombocytopénie < 105/mm3 • fonctions supérieures : score de Glasgow < 13
Choc septique
Sepsis grave + hypotension artérielle malgré le remplissage vasculaire
■
il existe un point d’appel infectieux : – urinaire ; – cutané ; – pulmonaire ; – biliaire ; – péritonéal ; – endovasculaire (voie veineuse centrale ou périphérique, sondes de pacemaker, prothèse valvulaire)
ITEMS 80, 105
;
– ostéoarticulaire ; – neuroméningé ; ■
il existe des signes de choc : on distingue classiquement le sepsis grave et le
choc septique (tableau 104-1)
ITEM 203
.
B. Biologie 1. Hémocultures ■ Elles font le diagnostic de bactériémie, permettent l’identification du germe et l’adaptation du traitement antibiotique. ■
Elles sont réalisées par paires (un flacon avec milieu de culture pour germes
aérobies, un flacon pour germes anaérobies) : – la concentration des bactéries dans le sang étant souvent basse (< 1 UFC/mL chez l’adulte), il est important de bien remplir le flacon (10 mL de sang au minimum) ; – la réalisation de plus de 2 paires d’hémocultures au cours des 24 premières heures augmente peu la sensibilité mais augmente le risque de détecter des
9
ITEM 104
contaminants (micro-organismes commensaux : staphylocoques coagulase négative, corynébactéries, Propionibacterium acnes…). ■
Elles sont prélevées : – à 30 minutes d’intervalle. S’il est classique de prélever les hémocultures à l’acmé des pics fébriles ou lors des frissons, la bactériémie précède en réalité d’environ 1 heure le pic fébrile ; – dans des conditions d’asepsie stricte ; – avant toute antibiothérapie si possible.
■
Cependant, elles ne mettent en évidence un agent infectieux que dans 5 à 10 %
des cas. Le renouvellement des hémocultures au-delà de la 24e heure est généralement peu rentable. Néanmoins, la négativation des hémocultures fait le diagnostic de guérison. ■
La septicémie est affirmée si 2 hémocultures sont positives au même germe. Une
hémoculture suffit pour les pathogènes exclusifs qui ne peuvent coloniser l’organisme sans provoquer d’infection (salmonelle, par exemple).
■
En présence d’un cathéter veineux central, la responsabilité d’une infection
du cathéter peut être établie par la réalisation simultanée d’hémocultures sur le cathéter et en périphérie après mise en évidence d’un délai différentiel de positivation d’au moins 2 heures en faveur de l’hémoculture prélevée sur cathéter.
2. Autres prélèvements bactériologiques ■ Examen cytobactériologique des urines : il est réalisé classiquement après la mise en évidence de leucocytes et de nitrites sur la bandelette réactive urinaire. Il faut savoir cependant qu’un certain nombre de germes n’ont pas d’activité réductrice des nitrates (entérocoque, staphylocoque, Pseudomonas, Acinetobacter, levures). ■
Prélèvement cutané (bulles, phlyctènes), pulmonaire (lavage bronchoalvéolaire,
prélèvement distal protégé), coproculture, ponction lombaire, articulaire, ponction d’un abcès parenchymateux, ponction pleurale, ponction d’ascite : ils sont réalisés en fonction des investigations cliniques et paracliniques. ■
Antigène urinaire de Streptococcus pneumoniae et de Legionella pneumophila (séro-
type 1) : chez les patients présentant une pneumonie et des signes de gravité clinique.
3. Bilan biologique standard ■ Numération-formule sanguine : polynucléose à polynucléaires neutrophiles ou neutropénie, thrombocytose liée à l’inflammation ou thrombopénie dans le cadre d’une coagulation intravasculaire disséminée (CIVD) associée.
Définition de la CIVD biologique ■
D-dimères > 500 μg/L et présence : – d’un critère majeur : plaquettes < 50 g/L, TP < 50 % ; – ou de deux critères mineurs : 50 g/L < plaquettes < 100 g/L et 50 % < TP < 65 %, fibrinogène < 1 g/L.
10
Septicémie
■
Ionogramme sanguin et urinaire, glycémie, protidémie, urée, créatinine.
■
Bilan hépatique complet.
■
CPK et troponine Ic.
■
Gaz du sang et lactatémie.
■
Bilan d’hémostase : recherche d’une CIVD.
■
CRP : l’élévation de la CRP est plus précoce et plus spécifique que l’accélération
de la VS. ■
En contexte fébrile, la neutropénie est le meilleur critère prédictif de bactériémie.
C. Autres examens complémentaires ■
Radiographie thoracique.
■
Électrocardiogramme.
■
Recherche d’éventuelles localisations secondaires : – TDM cérébrale injectée ou IRM cérébrale en cas de signe de localisation (abcès) ; – IRM médullaire en cas de rachialgie d’horaire inflammatoire (spondylodiscite) ; – TDM abdominale (abcès hépatique ou splénique) ; – TDM thoracique (abcès pulmonaire) ; – échographie cardiaque par voie transœsophagienne dans les septicémies à cocci à Gram positif ou à levure (endocardite), ou lorsqu’un matériel endovasculaire est présent
ITEM 80
.
IV. PRISE EN CHARGE A. Identifier une situation d’urgence Les situations d’urgence sont essentiellement liées au terrain ou à l’existence de signes de gravité clinique : ■
selon le terrain : – neutropénique, immunodéprimé, asplénique ; – existence de comorbidités (diabète, cirrhose) ;
■
selon le tableau clinique : – présence d’un choc septique : • hypotension artérielle : pression artérielle systolique < 90 mmHg ou ≤ 30 % de la pression artérielle de référence ; • signes témoignant d’une hypoperfusion tissulaire : oligurie (diurèse < 0,5 mL/ kg/h), marbrures cutanées, froideur des téguments, cyanose des extrémités, allongement du temps de recoloration cutanée, troubles de conscience ; • signes témoignant des phénomènes d’adaptation (tachycardie, polypnée, sueurs) ; • signes témoignant du retentissement viscéral : rénal (insuffisance rénale fonctionnelle puis nécrose tubulaire aiguë), hépatique (foie hypoxique), cardiaque (altération de la contractilité et ischémie myocardique), pulmonaire (syndrome de détresse respiratoire aigu), digestif (ischémie mésentérique), cérébral (troubles neurologiques), hématologique (CIVD)
ITEM 200
; 11
ITEM 104
– présence d’un purpura aigu fébrile : doit faire redouter une méningococcémie et justifie une antibiothérapie immédiate par une céphalosporine de 3e génération, avant toute investigation bactériologique : céfotaxime (Claforan®), 1 g IVL chez l’adulte, 50 mg/kg chez le nourrisson et l’enfant, ou ceftriaxone (Rocéphine®), 1 à 2 g IVL ou IM, 50 à 100 mg/kg chez le nourrisson et l’enfant* ; – présence d’un syndrome méningé aigu fébrile justifiant une ponction lom-
*ECN 2008
baire immédiate et la mise en route d’une antibiothérapie avant les résultats de l’examen du LCR lorsque le liquide prélevé est purulent ; – présence d’une infection grave des parties molles nécessitant une antibiothérapie immédiate et un avis chirurgical urgent ; – toujours penser à la possibilité d’un accès palustre.
CONSENSUS Prise en charge initiale des états septiques graves de l’adulte et de l’enfant Expertise collective 2006 Un malade adulte suspect d’infection et présentant au moins deux des symptômes suivants doit être considéré à risque d’évolution rapide vers un sepsis grave : – température > 38,2 °C ; – tachypnée ≥ 30/min ; – tachycardie ≥ 120/min ; – pression artérielle systolique < 110 mmHg. Ces risques sont aggravés si l’infection est d’origine : ■
pulmonaire ;
■
intra-abdominale ;
■
lorsqu’il existe des signes directs d’infection grave (purpura, lésions nécroticobulleuses de
fasciite nécrosante, etc.). L’association aux signes précédents, ou l’apparition secondaire de : ■
thrombopénie < 150 000
■
et/ou natrémie > 145 mmol/L
■
et/ou bilirubine > 30 mmol/L
renforcent l’estimation du risque d’aggravation. En pratique, l’association d’au moins trois des dix signes précédents indique un risque relativement élevé d’aggravation dans les heures ou les jours suivants (15–20 %). La présence de quatre signes fait passer ce risque à 20–30 %, et de cinq signes ou plus à plus de 30 %. La notion de risque élevé de sepsis grave doit conduire à : ■
demander un avis spécialisé de réanimation si le malade est hospitalisé en dehors d’une
structure d’urgence ou de soins intensifs/réanimation ; ■
obtenir sans délai un dosage de lactatémie artérielle ;
■
prélever sans délai des hémocultures (2 paires rapidement espacées) et des prélèvements
locaux accessibles en fonction du (des) site(s) infectieux suspecté(s) ; ■
compléter et répéter le bilan biologique à la recherche de signes biologiques évolutifs
témoins de l’apparition de dysfonction d’organe (TP, plaquettes, créatinine, bilirubine) ; ■
demander les examens complémentaires d’imagerie utiles à la recherche de la source du
foyer infectieux ;
12
Septicémie
■
instaurer une surveillance rapprochée à la recherche de l’apparition de signes de dysfonc-
tion d’organe (pression artérielle, diurèse horaire) ; ■
en fonction des premiers résultats et de l’évolution des 3 à 6 premières heures, décider de
l’orientation et de la suite de la prise en charge en concertation avec le réanimateur.
B. Débuter rapidement l’antibiothérapie
ITEM 173
L’antibiothérapie est dans un premier temps probabiliste, fondée sur : ■
le foyer infectieux supposé ;
■
le caractère communautaire ou nosocomial de l’infection ;
■
l’épidémiologie de la résistance bactérienne ;
■
le terrain.
Elle doit être : ■
débutée immédiatement après les prélèvements bactériologiques ;
■
administrée d’abord par voie veineuse :
■
avec une association synergique et bactéricide en première intention.
1. En l’absence d’orientation, en présence d’un sepsis sévère ou d’un choc septique ■ En contexte communautaire, l’association d’une céphalosporine de 3e génération, d’un aminoside et de métronidazole est recommandée : par exemple, ceftriaxone (Rocéphine®), 2 g/j en IV + gentamycine (Gentalline®), 3 à 5 mg/kg/j + métronidazole (Flagyl®), 500 g × 3/j en IV. ■
En contexte nosocomial, l’association d’une bêtalactamine antipyocyanique (imi-
pénème ou pipéracilline-tazobactam ou ceftazidine), d’un aminoside et de métronidazole si la bêtalactamine n’a pas d’activité anti-anaérobie est recommandée : par exemple, pipéracilline-tazobactam (Tazilline®), 4 g × 4/j IV + amikacine (Amiklin®), 15 à 20 mg/kg/j. ■
Dans ces deux situations, l’utilisation systématique de métronidazole est
cependant discutable. Elle se justifie quand la porte d’entrée est digestive ou gynécologique. ■
L’aminoside est le plus souvent interrompu après 48 heures de traitement.
■
Si une origine staphylococcique est suspectée (corps étranger vasculaire notam-
ment), un traitement par glycopeptide (vancomycine) est associé : par exemple, vancomycine (Vancocine®), 1 g IV en dose de charge puis 30 mg/kg/j IVSE. ■
L’antibiothérapie probabiliste des états septiques graves a fait l’objet d’une
conférence d’experts récente.
2. Mise en évidence de la septicémie : réévaluation du traitement antibiotique ■ CGP type staphylocoque : association glycopeptide-aminoside, puis amoxicilline-acide clavulanique ou oxacilline s’il s’agit d’un staphylocoque sensible à la
13
ITEM 104
méticilline. Dans les infections à staphylocoque résistant à la méticilline, et à côté des glycopeptides, l’intérêt de nouvelles molécules antistaphylococciques (linézolide, daptomycine, quinupristine-dalfopristine) ayant parfois aussi une activité anti-BGN (tigécycline, ertapénem) reste à préciser. ■
CGP type streptocoque : amoxicilline (ou céphalosporine de 3e génération, sauf
si entérocoque) associée à un aminoside.
■
Lorsque le CGP n’est pas encore identifié, l’association glycopeptide-aminoside
efficace sur les staphylocoques et les streptocoques est utilisée. En contexte de pneumopathie cependant, la probabilité d’un pneumocoque justifie plutôt une antibiothérapie par amoxicilline ou céphalosporine de 3e génération.
■
BGN : association céphalosporine de 3e génération-fluoroquinolone ou céphalo-
sporine de 3e génération-aminoside, en contexte nosocomial : pipéracillinetazobactam-aminoside ou imipénème-aminoside. En contexte communautaire et nosocomial, le traitement des infections à entérobactérie productrice d’une bêtalactamase à spectre élargi repose sur l’imipénème. L’intérêt d’une nouvelle molécule comme l’ertapénem dans cette indication reste à préciser. ■
Candida : – toute candidémie, même isolée, doit être traitée ; – tout cathéter vasculaire présent lors du diagnostic doit être retiré ; – la durée du traitement est de 15 jours après la dernière hémoculture positive et la disparition des symptômes. Si la neutropénie persiste, le traitement est poursuivi une semaine après la correction de celle-ci. Le traitement est également poursuivi plusieurs semaines en cas de localisations secondaires ; – avant l’identification de l’espèce de Candida, le traitement initial peut faire appel à l’amphotéricine B IV, en l’absence d’insuffisance rénale ou de traitement néphrotoxique associé. En cas d’insuffisance rénale ou de traitement néphrotoxique associé, le traitement peut faire appel à l’amphotéricine B liposomale IV ou à la caspofungine IV. Chez les patients sévères, le traitement initial fait de plus en plus appel à la caspofungine IV. Après identification de la levure, le traitement est adapté et peut faire appel au fluconazole IV pour les espèces sensibles ou à l’amphotéricine B IV, l’amphotéricine B liposomale IV ou la caspofungine IV pour les espèces résistantes. Dans ces derniers cas, une insuffisance rénale et/ou la gravité du tableau font souvent préférer la caspofungine IV. Dès que l’infection est contrôlée, un relais par une forme orale est recommandé et fait alors appel au fluconazole per os pour les espèces sensibles et au voriconazole per os dans les autres cas.
■
Aspergillose pulmonaire invasive : le voriconazole constitue le traitement de pre-
mière intention. ■
Cryptocoque : le traitement repose sur l’association amphotéricine B et
5-fluorocytosine.
14
Septicémie
CONSENSUS Prise en charge des candidoses et aspergilloses invasives de l’adulte SFAR, SRLF, SPILF, 2004 ■
Les antifongiques disponibles et leurs effets indésirables respectifs sont résumés ici : Antifongique
Voie d’administration
Amphotéricine B
Hypokaliémie, hypomagnésémie, insuffisance rénale, fièvre, frissons lors de l’injection, cytopénie
IV Amphotéricine B liposomale (Ambisone®) Amphotéricine B lipid complex (Abelcet®)
Principaux effets indésirables
Mêmes complications que l’amphotéricine B, mais fréquence moindre ; tolérance supérieure pour l’amphotéricine B liposomale
IV
Fluconazole (Triflucan®) Voriconazole (Vfend )
IV/PO
Troubles digestifs, cytolyse hépatique, cholestase, réactions allergiques et cutanées
Caspofungine (Cancidas®)
IV
Peu fréquents et bénins
®
■
Troubles visuels réversibles
L’augmentation de l’incidence des Candida de sensibilité diminuée ou résistants aux azolés,
une neutropénie, une insuffisance rénale, la coprescription de médicaments néphrotoxiques, la prescription antérieure de traitements azolés interviennent dans le choix de l’antibiothérapie initiale (fig. 104-1). Créatininémie < 1,5 N
Neutropénique : recevant au moins 2 traitement néphrotoxiques ?
Oui
Non
Créatininémie > 1,5 N
Non neutropénique : ayant reçu un azolé ?
Non neutropénique : ayant reçu un azolé ?
Oui
Non
Amphotéricine B
Non
Amphotéricine B ou Fluconazole
Neutropénique
Oui
Fluconazole
Caspofungine ou Amphotéricine B liposomale
Fig. 104-1. Arbre décisionnel. ■
Dès que la levure responsable est identifiée, le traitement doit être adapté : les espèces sen-
sibles au fluconazole peuvent être traitées par fluconazole, les espèces résistantes au fluconazole peuvent être traitées par amphotéricine B, sauf en cas d’insuffisance rénale et de prise d’autres traitements néphrotoxiques : le choix se fait alors entre l’amphotéricine B liposomale et la caspofungine.
15
ITEM 104
CONSENSUS Antibiothérapie probabiliste des états septiques graves SFAR, SRLF, SPILF, 2004 Méningites communautaires
Si pupura fulminans : C3G IV immédiatement Si signes de localisation : C3G + vancomycine puis TDM cérébrale et PL Si examen direct du LCR positif : – CGP (pneumocoque) : C3G + vancomycine (40 à 60 mg/kg/j) – CGN (méningocoque) : C3G ou amoxicilline (200 mg/kg/j) – BGP (Listeria) : amoxicilline (200 mg/kg/j) + gentamicine (3 à 5 mg/kg/j) – BGN (H. influenzae) : C3G (céfotaxime : 200 à 300 mg/kg/j) Si examen direct du LCR négatif : – LCR trouble, glycorachie basse : C3G + vancomycine – LCR clair, lymphocytaire, glycorachie basse : amoxicilline + gentamicine + anti-BK – LCR lymphocytaire, glycorachie normale : aciclovir
Méningites nosocomiales et abcès cérébraux postopératoires
Méningite postopératoire Staphylocoques (dont S. epidermidis) et BGN (dont entérobactéries et P. aeruginosa) : céfotaxime + fosfomycine en première intention Méningite post-traumatique Pneumocoque : amoxicilline
Pneumopathies communautaires
Amoxicilline-acide clavulanique (2 g/8 h) ou céfotaxime (2 g/8 h) ou ceftriaxone (2 g/j) + érythromycine (1 g/8 h) ou ofloxacine (200 mg × 2/j) ou lévofloxacine (500 mg × 2/j) Si allergie prouvée aux bêtalactamines : glycopeptide + ofloxacine Si risque de P. aeruginosa (antibiothérapie fréquente, DDB, corticothérapie au long cours) : bêtalactamine anti-Pseudomonas + ciprofloxacine (400 mg/8 h)
Pneumopathies nosocomiales
Pneumopathie précoce (< 7 jours) acquise sous ventilation mécanique : bêtalactamine sans activité anti-Pseudomonas en monothérapie (céfotaxime ou ceftriaxone ou amoxicilline-acide clavulanique) Pneumopathie tardive acquise sous ventilation mécanique : bêtalactamine à activité anti-P. aeruginosa associée à un aminoside ou à la ciprofloxacine. La vancomycine ne sera associée que s’il existe des facteurs de risque de SARM
Infections urinaires communautaires et nosocomiales
Les entérobactéries (E. coli) sont les bactéries le plus souvent isolées. Les CGP sont retrouvés après 50 ans. Le caractère nosocomial et/ou les traitements antibiotiques antérieurs augmentent le risque de survenue d’une bactérie résistante, notamment : Pseudomonas sp., Enterobacter sp., Serratia sp., Citrobacter sp., CGP et Candida sp. Infection urinaire communautaire : – fluoroquinolones ou C3G (céfotaxime ou ceftriaxone) – bithérapie dans les formes graves avec hypotension : C3G + fluoroquinolones ou aminoside (nétilmicine ou gentamicine), fluoroquinolones + aminoside en cas d’allergie aux bêtalactamines – pendant la grossesse, les fluoroquinolones sont contreindiquées : amoxicilline-acide clavulanique + aminoside (surtout si entérocoque)
16
Septicémie
Infection urinaire nosocomiale : – discussion au cas par cas en fonction de la colonisation du patient, de l’écologie du service et de l’examen direct de l’ECBU – chez l’homme, des antibiotiques à forte diffusion prostatique doivent être proposés, en cas de prostatite : fluoroquinolones ou cotrimoxazole Infections intra-abdominales communautaires et nosocomiales
Péritonites communautaires : – amoxicilline-acide clavulanique (2 g/8 h) + aminoside (gentamicine ou nétilmicine : 5 mg/kg/j) – ticarcilline-acide clavulanique (5 g × 3/j) + aminoside – céfotaxime ou ceftriaxone + imidazolé – le rôle pathogène de l’entérocoque est reconnu, son traitement n’est pas consensuel Péritonites nosocomiales et postopératoires : – pipéracilline-tazobactam (4 g × 4/j) + amikacine (20 mg/kg/j) – imipénème (1 g × 3/j) + amikacine – ± vancomycine si SARM ou entérocoque résistant à l’amoxicilline – ± fluconazole (800 mg/j) Péritonites primaires du cirrhotique : – amoxicilline-acide clavulanique (1,2 g/6 h) – ou céfotaxime (2 g/8 h) – ou ceftriaxone (2 g/j) Pancréatite : – pas d’indication à l’antibioprophylaxie – antibiothérapie débutée après ponctions sous TDM ou prélèvements peropératoires – imipénème ou fluoroquinolones ou association céfotaxime/ métronidazole – en cas d’antibiothérapie préalable, d’hospitalisation prolongée, de manœuvres endoscopiques ou de nécrosectomie antérieure, le choix se porte sur l’association imipénème, vancomycine et fluconazole Angiocholites aiguës : – communautaires : amoxicilline-acide clavulanique + gentamicine ou nétilmicine, ticarcilline-acide clavulanique, pipéracilline + métronidazole, céfoxitime, céfotaxime ou ceftriaxone + métronidazole ; si signes de gravité, association de gentamicine ou nétilmicine – nosocomiales ou post-CPRE : facteur de risque d’infection à entérocoque (pipéracilline-tazobactam + amikacine, ou imipénème + amikacine ou ceftazidime + métronidazole + amikacine)
Infections cutanées et des tissus mous, gangrène et cellulite
Les dermohypodermites bactériennes nécrosantes et fasciites nécrosantes sont des urgences médicochirurgicales. Dans 40 à 80 % des cas, une flore mixte est retrouvée : anaérobies, entérobactéries, streptocoques, entérocoques et Staphylococcus aureus. Le traitement antibiotique n’est qu’un adjuvant du traitement chirurgical (excisions larges).L’oxygénothérapie hyperbare n’a pas montré son efficacité Atteinte des membres et de la région cervicofaciale : amoxicillineacide clavulanique (2 g × 3/j) + gentamicine ou nétilmicine (5 mg/kg/j) Gangrène périnéale communautaire : céfotaxime-ceftriaxone + métronidazole ou amoxicilline-acide clavulanique, associés avec de la gentamicine ou de la nétilmicine Gangrène postopératoire : pipéracilline-tazobactam (16 g/j) ou imipénème (1 g × 3/j) associé à de l’amikacine (20 mg/kg/j)
▲ 17
ITEM 104
▲ Endocardites
Valve native : – suspicion de staphylocoque communautaire : oxacilline (2 g/4 h) + gentamicine (3 mg/kg/j) – sans élément d’orientation : amoxicilline-acide clavulanique (2 g/4 h) + gentamicine (3 mg/kg/j) – allergie vraie aux pénicillines : vancomycine (30 mg/kg/j) + gentamicine (3 mg/kg/j) ou nétilmicine (6 mg/kg/j) Valve prothétique : – vancomycine (30 mg/kg/j) + rifampicine (600 mg/12 h) + gentamicine (3 mg/kg/j) ou nétilmicine (6 mg/kg/j) – échec ou contexte particulier : vancomycine (15 mg/kg/12 h) + ceftazidime (2 g/8 h) + gentamicine (3 mg/kg/j) ou nétilmicine (6 mg/kg/j)
Infections sur cathéter
Ablation du cathéter, culture quantitative du cathéter, réalisation d’hémocultures après ablation Antibiothérapie probabiliste si état septique grave et/ou immunodépression, présence d’une prothèse vasculaire ou articulaire : – vancomycine (30 mg/kg/j) + céfépime (2 g × 2) + gentamicine – vancomycine (30 mg/kg·j) + ceftazidime + amikacine – vancomycine + imipénème + amikacine – si facteurs de risque d’infection à levures : amphotéricine B
C. Poser l’indication d’un drainage ou d’une intervention chirurgicale ■
Drainage urinaire en cas de rétention d’urines purulentes sur obstacle : montée
de sonde urétérale par voie endoscopique ou néphrostomie percutanée en cas d’obstacle pyélo-urétéral, cathéter sus-pubien en cas d’obstacle sous-vésical. ■
Sphinctérotomie endoscopique ou drainage chirurgical en cas d’angiocholite.
■
Drainage pleural en cas de pleurésie purulente.
■
Drainage d’un empyème ou d’un abcès parenchymateux hépatique ou pulmonaire.
■
Laparotomie avec toilette péritonéale en cas de péritonite.
■
Parage chirurgical d’une cellulite nécrosante ou gangréneuse.
■
Lavage articulaire chirurgical d’une arthrite.
D. Évaluer l’efficacité de l’antibiothérapie
ITEM 173
Cette évaluation porte essentiellement sur la courbe thermique, la persistance d’une fièvre faisant suspecter : ■
une antibiothérapie inadaptée (dose insuffisante, diffusion insuffisante, germe
résistant) ; ■
une allergie aux antibiotiques ;
■
un foyer profond non drainé, un matériel étranger persistant ;
■
une infection nosocomiale ;
■
une maladie thromboembolique (thrombophlébite des membres inférieurs).
En dehors de la défervescence, la surveillance de l’antibiothérapie porte sur l’amélioration clinique, la régression du syndrome inflammatoire et notamment de la leucocytose et de la CRP, et la stérilisation des prélèvements bactériologiques, en l’occurrence ici des hémocultures. 18
Septicémie
Fiche
Dernier tour
Septicémie Le diagnostic de bactériémie repose sur la positivité de 2 hémocultures au même germe. ■ Il est suspecté devant : – un tableau clinique brutal ; – un SIRS, présent si existence de 2 des signes suivants : température > 38,3 °C ou < 36 °C, FC > 90 bpm, FR > 20 bpm ou hyperventilation alvéolaire (PaCO2 < 32 mmHg), glycémie > 7,7 mmol/L, leucocytes > 12 000/mm3 ou < 4 000/mm3, altération des fonctions supérieures, temps de recoloration capillaire > 2 s, lactatémie > 2 mmol/L ; – un point d’appel infectieux ; – un sepsis sévère : sepsis et hypotension répondant au remplissage vasculaire ; – un choc septique : sepsis sévère et hypotension persistante malgré un remplissage vasculaire adéquat et/ou la nécessité d’utiliser des drogues vasoactives. ■ Ces différents tableaux font pratiquer des hémocultures : – 2 paires (un flacon pour germes aérobies, un flacon pour anaérobies) ; – 10 mL de sang au minimum par flacon ; – prélevées à 30 minutes d’intervalle ; le plus proche possible du pic fébrile ; – dans des conditions d’asepsie stricte ; – avant toute antibiothérapie si possible. ■ Les germes retrouvés sont : – staphylocoques : prothèse vasculaire, infection cutanée, ORL ou gynécologique ; – streptocoques : infection cutanée ou digestive (entérocoque : S. bovis), gynécologique ou urinaire (entérocoque et streptocoque du groupe B), ORL, dentaire et pulmonaire (S. pneumoniae) ; – BGN : infection communautaire urinaire ou digestive (entérobactéries), nosocomiale urinaire, pulmonaire, du site opératoire ou d’un cathéter vasculaire (entérobactéries et BGN non entérobactéries) ; – bacilles anaérobies : infection cutanée, digestive, gynécologique, pleuropulmonaire, cérébrale, mais aussi dentaire, cervicofaciale, périnéale (gangrène de Fournier). ■ Il faut dans un premier temps identifier une situation d’urgence : – selon le terrain : immunosupression, comorbidités ; – selon le tableau clinique : choc septique, purpura fébrile (antibiothérapie immédiate par une C3G) , syndrome méningé fébrile (PL immédiate et antibiothérapie avant les résultats du LCR si le liquide est purulent) , infection des parties molles (antibiothérapie et avis chirurgical urgents) ; toujours penser à la possibilité d’un accès palustre . ■ On débutera l’antibiothérapie probabiliste : – immédiatement après les prélèvements bactériologiques ; – d’abord par voie veineuse ; – avec association synergique et bactéricide en première intention. ■ En l’absence d’orientation, en présence d’un sepsis sévère ou d’un choc septique : – en contexte communautaire : C3G + aminoside + métronidazole ; – en contexte nosocomial : imipénème ou pipéracilline-tazobactam ou ceftazidine + métronidazole + aminoside ; – l’aminoside est le plus souvent interrompu après 48 heures de traitement ; – si le staphylocoque est suspecté (corps étranger vasculaire), un traitement par glycopeptide (vancomycine) est associé ; – en cas de suspicion de candidémie : amphotéricine B (liposomale ou non) ou caspofungine ; – en cas de suspicion d’aspergillose pulmonaire invasive : voriconazole. ■
▲ 19
ITEM 104
Fiche ■
■ ■
20
Dernier tour
La mise en évidence de la septicémie permettra de réévaluer le traitement antibiotique : – CGP type staphylocoque : association glycopeptide-aminoside, puis amoxicillineacide clavulanique ou oxacilline si staphylocoque sensible à la méthicilline ; – CGP type streptocoque : amoxicilline (ou C3G) associée à un aminoside ; – lorsque le CGP n’est pas encore identifié, l’association glycopeptide-aminoside, efficace sur les staphylocoques et les streptocoques, est utilisée. En contexte de pneumopathie : amoxicilline ou C3G (pneumocoque) ; – BGN : association C3G-fluoroquinolone ou C3G-aminoside ; en contexte nosocomial : pipéracilline-tazobactam-aminoside ou imipénème-aminoside. On recherchera une indication à un drainage ou à une intervention chirurgicale. On évaluera l’efficacité de l’antibiothérapie, la persistance d’une fièvre faisant suspecter : – une antibiothérapie inadaptée (dose insuffisante, diffusion insuffisante, germe résistant) ; – une allergie aux antibiotiques ; – un foyer profond non drainé, un matériel étranger persistant ; – une infection nosocomiale ; – une maladie thromboembolique (thrombophlébite des membres inférieurs).
ITEM 185
Arrêt cardio-circulatoire
OBJECTIFS ● Diagnostiquer un arrêt cardio-circulatoire. ● Prise en charge immédiate (médicaments avec leur posologie). LIENS TRANSVERSAUX ITEM 132
Angine de poitrine et infarctus myocardique.
ITEM 200
État de choc.
CONSENSUS ● Prise en charge de l’arrêt cardio-circulatoire – Recommandations formalisées d’experts – SRLF, SFAR, octobre 2006 (www.srlf.org).
POUR COMPRENDRE… ■
La mort subite (MS) représente 700 000 décès par an en Europe. Lorsqu’une
réanimation est entreprise, la récupération d’une activité circulatoire est constatée dans 30 % des cas, mais la survie à la 24e heure ne dépasse pas 15 %. Enfin, seuls 3 à 5 % des patients sortiront de l’hôpital sans séquelles neurologiques. ■
L’objectif de la réanimation est double : récupération d’une activité circulatoire
et limitation des conséquences neurologiques, la privation d’oxygène entraînant des lésions neurologiques irréversibles au bout de quelques minutes. ■
Toute minute supplémentaire avant la mise en route d’une réanimation cardio-
pulmonaire (RCP) diminue la survie de 10 %. ■
La cause la plus fréquente d’arrêt cardiorespiratoire est la fibrillation ventricu-
laire (40 %). ■
En cas de fibrillation ventriculaire, une défibrillation immédiate permet la survie
dans 90 % des cas. En l’absence de défibrillation, la fibrillation se dégrade en asystolie. ■
Le diagnostic d’arrêt cardio-circulatoire étant rapidement fait, l’amélioration
du pronostic vital et neurologique passe par la connaissance des 4 maillons de la chaîne de survie, qui sont : – l’alerte ; 21
ITEM 185
– la réanimation cardio-pulmonaire (RCP) de base, première phase stéréotypée du traitement, réalisée souvent par les premiers secours ; – la défibrillation lorsqu’elle est indiquée ; – la RCP spécialisée. ■
À l’arrivée en réanimation se posent les problèmes de la prise en charge d’un
syndrome de défaillance multiviscérale faisant suite à l’arrêt cardiaque et du pronostic neurologique.
I. PHYSIOPATHOLOGIE Trois types d’anomalies électriques sont retrouvés : la fibrillation ventriculaire, l’asystolie et la dissociation électromécanique.
A. Fibrillation ventriculaire (FV) ■
C’est l’anomalie la plus fréquente et de meilleur pronostic.
■
Elle est constituée d’une succession d’ondes de morphologie variable, de fré-
quence extrême, et dont chacune n’est séparée de l’autre par aucune phase isoélectrique. L’amplitude des ondes s’amortit avec le temps, donnant au départ un aspect de FV à grandes mailles puis à petites mailles. La FV n’est jamais spontanément réversible (fig. 185-1). ■
Au cours de la FV à grandes mailles (dite tonique) peut persister une activité cir-
culatoire et les chances que la défibrillation soit efficace sont meilleures. ■
Au stade de FV à petites mailles (dite atonique) les chances d’efficacité de la
défibrillation s’amenuisent ; progressivement, l’aspect de FV laisse place à un aspect d’asystolie.
Fig. 185-1. Fibrillation ventriculaire. Source : Les troubles du rythme cardiaque dans la pratique médicale, L. De Roy, D. El Allaf, M. Renard, Masson, 2006, 4e édition, 224 p.
22
Arrêt cardio-circulatoire
B. Asystolie ■
L’électrocardiogramme est isoélectrique.
■
C’est la forme de plus mauvais pronostic.
C. Dissociation électromécanique (ou activité électrique sans pouls) ■
Il s’agit de l’anomalie la plus rare.
■
Elle est caractérisée par la persistance de complexes QRS (activité électrique) sans
aucun battement cardiaque et donc aucun pouls perceptible (activité mécanique). ■
Progressivement les complexes QRS s’élargissent et sont entrecoupés de pauses
de plus en plus longues. ■
Son pronostic est intermédiaire.
■
Elle est le plus souvent secondaire à une hypovolémie, une embolie pulmonaire,
une tamponnade ou un pneumothorax compressif.
II. CAUSES A. Causes cardiaques ■
Infarctus du myocarde
■
Troubles du rythme (FV), souvent dans un contexte d’ischémie myocardique.
■
Troubles de la conduction.
■
Tamponnade.
ITEM 132
.
B. Causes non cardiaques ■
Embolie pulmonaire.
■
Pneumothorax compressif.
■
Hypoxie.
■
Hypovolémie.
■
Métabolique : hypokaliémie, hyperkaliémie, acidose métabolique.
■
Hypothermie.
■
Médicamenteuses : intoxications par bêtabloquants, digitaliques, carbamates,
quinidiniques.
III. DIAGNOSTIC Le diagnostic doit être fait en moins de 30 secondes et repose sur la présence de 3 signes : ■
l’absence de réactivité ;
■
l’absence de respiration spontanée (ou la présence d’une respiration agoni-
que) ; ■
l’absence de pouls fémoral ou carotidien pendant 5 à 15 secondes.
L’état de mort apparente (absence de réactivité et absence de respiration spontanée) suffit au diagnostic d’arrêt cardiorespiratoire et la prise du pouls n’est pas systématiquement recommandée aux secouristes non professionnels car elle peut être difficile et retarder la prise en charge. La mydriase bilatérale aréactive est un signe d’apparition tardive lié à la souffrance neurologique. 23
ITEM 185
III. PRISE EN CHARGE (voir fig. 185-2, page 29 ) A. Donner l’alerte Même seul, un témoin doit d’abord donner l’alerte avant d’entreprendre la RCP.
B. Réanimation cardiopulmonaire de base La décision de commencer la RCP de base est prise devant une victime qui ne répond pas et qui ne respire pas normalement. Réalisée chez un patent en décubitus dorsal, sur un plan dur, elle comprend classiquement 4 étapes : A (Airway : libération des voies aériennes), B (Breathing : ventilation), C (Circulation : massage cardiaque externe), D (Défibrillation).
1. Libération des voies aériennes Elle est obtenue par une légère hyperextension de la tête et un soulèvement du menton avec 2 doigts, afin de décoller la base de la langue de la paroi postérieure du pharynx. En cas de doute sur un traumatisme du rachis cervical, on ne réalise qu’une subluxation prudente du maxillaire inférieur ; extraction des corps étrangers intrabuccaux.
2. Ventilation Elle est effectuée par la méthode du bouche-à-bouche, ou du bouche-à-nez ou à l’aide d’un masque raccordé à un ballon pour insufflation manuelle. Chaque insufflation est réalisée lentement (en 1 seconde) et doit être suivie d’une expiration passive complète (de 4 secondes environ). Ainsi on administre chez l’adulte environ 500 mL à une fréquence de 8 à 10 cycles par minute. Ces 2 insufflations sont suivies de 30 compressions thoraciques.
3. Massage cardiaque externe Les mains étant posées au centre du thorax, une dépression d’environ 5 cm est exercée, d’une durée égale à 50 % du cycle compression-relaxation passive et avec une fréquence de 100 par minute. Les 30 compressions sont suivies de 2 nouvelles insufflations, et ainsi de suite. Une fois intubé, le massage cardiaque est continu, au rythme de 100 compressions par minute. Le pouls fémoral ou carotidien est contrôlé après 5 cycles, puis toutes les 2 minutes environ. L’interruption de ces manœuvres doit être limitée au maximum et réservée aux épisodes de défibrillation, au contrôle du pouls (10 secondes au maximum), à l’intubation (30 secondes au maximum).
CONSENSUS Prise en charge de l’arrêt cardio-circulatoire SRLF, SFAR, 2006 ■
Le rapport compression/ventilation est de 30/2 pour toutes les victimes d’arrêt cardiaque.
■
Depuis les dernières recommandations, la RCP de base ne débute plus par 2 insufflations
mais par 30 compressions thoraciques, réalisées immédiatement après le diagnostic d’arrêt cardiaque. ■
Dès que les voies aériennes sont contrôlées (patient intubé), le massage cardiaque externe
est réalisé en continu.
24
Arrêt cardio-circulatoire
4. Défibrillation En cas de FV, la survie est directement liée à la précocité de la défibrillation. Une FV à grandes mailles prolongée se dégrade en FV à petites mailles, puis en asystolie. La dépolarisation induite par la défibrillation permet la resynchronisation de l’activité électrique myocardique. La défibrillation devrait être la première manœuvre (avant ABC) si le diagnostic d’arrêt cardiorespiratoire par FV a pu être fait immédiatement. Une brève réanimation cardiopulmonaire (ABC) est cependant recommandée avant défibrillation si la FV est prolongée. Le choc électrique doit être délivré en fin d’expiration, où l’impédance thoracique est la plus faible et où l’énergie nécessaire sera donc la plus faible. Une énergie trop forte peut léser le myocarde. Une énergie trop faible est inefficace. On commence avec une énergie relativement faible (150–200 J) puis on augmente à 360 J si 150–200 J ont été inefficaces. Si l’on utilise un défibrillateur monophasique (et non biphasique), on utilise une seule énergie de 360 J pour tous les chocs. Il faut poursuivre le massage cardiaque externe pendant la phase de chargement du défibrillateur. Chaque choc doit être suivi de la reprise de la réanimation cardiopulmonaire de base pendant 2 minutes (soit 5 cycles « 30/2 »).
CONSENSUS Prise en charge de l’arrêt cardio-circulatoire SRLF, SFAR, 2006 Un choc électrique unique, avec une énergie de 120 à 150 joules pour un défibrillateur biphasique et de 360 joules pour un défibrillateur monophasique, est délivré. Il est immédiatement suivi par 2 minutes de RCP ininterrompue, sans vérifier la disparition de la fibrillation ventriculaire (FV), le pouls ou l’apparition de signes de vie.
L’existence d’un défibrillateur pour défibrillation automatisée externe (DAE) peut réduire le délai avant défibrillation. Ce défibrillateur identifie par des électrodes thoraciques la fibrillation ventriculaire, détermine la charge à administrer et donne une instruction vocale pour que soit délivré le choc. La DAE est utilisée en France par les secouristes et devrait à l’avenir être implantée dans les hôpitaux pour être utilisée par des infirmières formées. Aux États-Unis, elle est à disposition du public dans certains lieux (centres commerciaux, casino, aéroports, stades…).
CONSENSUS Prise en charge de l’arrêt cardio-circulatoire SRLF, SFAR, 2006 Les interruptions des mesures de la RCP de base doivent être réduites au minimum. C’est pourquoi la RCP spécialisée n’est réalisée que dans un 2e temps, quand la RCP de base a été bien conduite.
25
ITEM 185
C. Réanimation cardio-pulmonaire spécialisée 1. Abord veineux Mise en place d’une ou deux voies veineuses périphériques ; la voie veineuse centrale n’est pas recommandée à ce stade car elle peut être à l’origine de complications (hématome, pneumothorax) et nécessiter l’interruption du massage cardiaque externe. La voie intra-osseuse est la première alternative proposée, en position malléolaire médiane chez l’adulte mais n’est pas encore d’utilisation fréquente en France. La voie intratrachéale est l’alternative de second choix.
2. Traitement pharmacologique a) Adrénaline ■ L’objectif essentiel de ce traitement est de restaurer la pression artérielle diastolique et donc la pression de perfusion coronaire. En cas d’asystolie ou de dissociation électromécanique, l’adrénaline est indiquée après la première séquence de la RCP. En cas de FV, du fait de son caractère proarythmogène, l’adrénaline est indiquée dès défibrillation, ou si la défibrillation échoue. ■
L’adrénaline présente des propriétés alphamimétiques (vasopressives) et bêta-
mimétiques (inotropes positives). ■
C’est le traitement de choix en l’absence de fibrillation ventriculaire car l’adré-
naline est arythmogène. ■
Ses modalités sont les suivantes : 1 mg IV toutes les 3 à 5 minutes puis en augmen-
tant à 3 puis à 5 mg en cas d’échec de la posologie précédente. Des doses plus élevées exposeraient à des complications ischémiques graves sans améliorer la survie. En l’absence de voie veineuse ou osseuse, la voie endotrachéale chez un patient intubé est possible : l’adrénaline diluée dans 10 mL d’eau pour préparation injectable est alors administrée à posologie double que celle qui serait employée par voie veineuse. ■
Enfin, l’adrénaline pourrait être utilisée en cas de fibrillation ventriculaire lors-
que des défibrillations itératives ont échouées.
CONSENSUS Prise en charge de l’arrêt cardio-circulatoire SRLF, SFAR, 2006 ■
En cas de FV ou de TV sans pouls persistant après 2 chocs, il faut injecter 1 mg d’adrénaline IV
et répéter l’injection toutes les 3 à 5 minutes. ■
Rythme sans pouls et asystolie : l’injection de 1 mg d’adrénaline IV sera pratiquée dès qu’une
voie veineuse est obtenue et répétée ensuite toutes les 3 à 5 minutes jusqu’à l’obtention d’une reprise d’activité cardiaque spontanée.
b) Atropine Traitement de la bradycardie et du syndrome vagal, l’atropine est également proposée au cours de l’arrêt cardiorespiratoire par asystolie ou de dissociation électromécanique, en association à l’adrénaline (1 mg IVD et jusqu’à 3 mg).
c) Vasopressine C’est un vasopresseur non catécholaminergique. La vasopressine ne serait donc pas arythmogène comme l’adrénaline et a donc été proposée dans la prise en 26
Arrêt cardio-circulatoire
charge de l’arrêt cardiorespiratoire comme alternative ou en association à l’adrénaline. L’analyse de la littérature ne permet pas cependant de la recommander à ce jour.
d) Amiodarone C’est le traitement de première intention en cas de FV : 300 mg (2 ampoules) IV, puis 150 mg IV et 900 mg/24 h si la FV persiste.
e) Xylocaïne C’est le traitement de second choix, qui n’a démontré son intérêt qu’en prévention de la fibrillation ventriculaire lors de l’infarctus du myocarde mais jamais au cours de l’arrêt cardiaque.
3. Remplissage vasculaire Les solutés cristalloïdes comme le sérum physiologique sont le plus souvent utilisés. L’emploi de bicarbonates (50 mL de bicarbonates molaires IV) doit être limité à l’existence d’une acidose métabolique sévère préexistante, d’une hyperkaliémie ou d’une intoxication par stabilisant de membrane. Ils peuvent en effet aggraver l’acidose intracellulaire, avoir un effet inotrope négatif, entraîner une charge osmolaire et sodée délétère pour le cerveau, déplacer vers la gauche la courbe de dissociation de l’hémoglobine.
4. Ventilation artificielle Dès que possible, l’intubation orotrachéale doit être effectuée pour l’oxygénation et la protection des voies aériennes mais son utilité doit être pesée face aux dégâts neurologiques potentiels d’un arrêt prolongé de la RCP. Elle doit donc être réalisée par un médecin expérimenté, et peut être précoce si la personne est apte à l’exécuter en un minimum de temps. Une fois intubés, les patients sont ventilés avec un volume courant d’environ 6 mL/kg et une fréquence respiratoire de 8 à 10 cycles/min.
5. Techniques alternatives au massage cardiaque externe manuel Dans le meilleur des cas, le massage cardiaque externe ne permet d’obtenir un débit cardiaque qu’égal à 25 % du débit normal. Plusieurs méthodes ont été développées pour améliorer son efficacité : ■
la compression-décompression active du thorax, où une ventouse appliquée
sur le thorax génère une pression intrathoracique négative en diastole permettant d’augmenter le retour veineux sanguin et le remplissage cardiaque ; ■
la compression automatisée du thorax (« planche à masser ») ;
■
la compression abdominale intermittente, où l’abdomen est comprimé en
alternance avec le thorax pour faciliter le retour veineux intrathoracique en diastole ; ■
le ballon d’occlusion intra-aortique, permettant d’augmenter le débit sanguin
cérébral et coronaire. Certaines de ces techniques sont encore au stade de l’évaluation. Le massage cardiaque interne, enfin, s’adresse aux situations particulières du patient au bloc opératoire pour lequel une thoracotomie a déjà été réalisée. 27
ITEM 185
D. Arrêt de la réanimation Les manœuvres de réanimation peuvent être arrêtées si une activité cardiaque spontanée n’est pas obtenue après environ 30 minutes d’asystolie persistante, malgré une réanimation cardiopulmonaire bien conduite. Lorsqu’une hypothermie profonde ou une intoxication sont à l’origine de l’arrêt cardio-respiratoire, une RCP plus longue est préconisée car ce sont des facteurs de protection cérébrale.
E. En réanimation 1. Prise en charge de la défaillance myocardique Au décours d’un arrêt cardiorespiratoire réanimé, il existe une dysfonction myocardique liée à une « sidération myocardique », pouvant être complètement réversible et pouvant bénéficier d’un traitement inotrope positif. Le syndrome coronarien aigu étant la cause la plus fréquente d’arrêt cardiaque extrahospitalier, la réalisation d’une coronarographie en urgence doit être réalisée si aucune autre cause évidente n’a été identifiée
ITEM 132
.
2. Prise en charge de la défaillance multiviscérale Au décours d’un arrêt cardiaque prolongé, le tableau clinique est celui d’un état de choc avec défaillance multiviscérale. Ce syndrome de « post-ressuscitation » a l’apparence d’un choc septique et en partage le traitement symptomatique
ITEM 200
.
3. Pronostic neurologique La protection du système nerveux central fait appel : ■
au maintien d’une pression de perfusion cérébrale satisfaisante par restauration
de la pression artérielle moyenne (à l’aide de vasopresseurs si besoin) ; ■
à la correction d’une hypoxie ou d’une hypercapnie ;
■
au maintien d’une hypocapnie modérée (35 mmHg) grâce aux modalités de
réglage de la ventilation mécanique ; ■
au contrôle de la glycémie et de la natrémie ;
■
à la lutte contre l’hyperthermie (vessies de glace, traitement antipyrétique) ; la
réalisation d’une hypothermie modérée (32–34 °C) par refroidissement externe pendant 12 à 24 heures est aujourd’hui recommandée. L’encéphalopathie postanoxique est le tableau clinique redouté au décours d’un arrêt cardio-circulatoire pour lequel une activité circulatoire a été récupérée. L’examen neurologique initial ne permet cependant pas d’établir le pronostic neurologique. L’examen neurologique au 3e jour et la réalisation de potentiels évoqués somesthésiques à cette date permettraient d’aider à distinguer les patients pour lesquels l’absence de réveil est fortement prévisible.
28
Arrêt cardio-circulatoire
Fiche
Dernier tour
Arrêt cardio-circulatoire Algorithme de la RCP de base La victime ne bouge pas et ne répond pas Demander de l'aide Libérer les voies aériennes Appeller le 15 Faire chercher un DAE La victime ne respire pas ou « gaspe » Absence de pouls
RCP 30 : 2 jusqu'à l'arrivée d'un DAE si DAE disponible
DAE analyse le rythme Choc non conseillé
Choc conseillé
Reprendre immédiatement RCP 30 : 2 pdt 2 min
1 CHOC 150-200 J biphasique
Reprendre immédiatement RCP 30 : 2 pdt 2 min
Continuer jusquà la reprise d'une ventilation spontanée efficace ou l'arrivée de l'équipe de réanimation
Algorithme de la RCP médicalisée Appliquer l'algorithme de RCP de base et/ou de la DAE RCP 30 : 2 Mettre en place le cardioscope et le défibrillateur
Analyser le rythme cardiaque Rythme choquable (FV/TV sans pouls)
Rythme non choquable (RCP, asystole) Réanimation médicalisée
Réaliser 1 choc 150-200 J
Reprendre immédiatement RCP 30 : 2 jusqu'à 2 min
• Contrôle des VA, ventilation en O2 pur • Mettre en place un abord vasculaire • Vérifier la position et le contact des électrodes • Traitement d'une cause réversible* • Réaliser les compressions thoraciques en continu dès que les voies aériennes sont contrôlées
Reprendre immédiatement RCP 30 : 2 pendant 2 min
• Injecter adrénaline 1 mg toutes les 3-5 min • Injecter cordarone 300 mg si FV * Hypoxémie Hypovolémie Hypo-hyperkaliémie Hypothermie
* Thrombose pulmonaire, coronaire Pneumothorax suffocant Tamponnade Intoxication
Fig. 185-2. Algorithme universel selon la conférence de consensus SRLF, SFAR, 2006.
29
This page intentionally left blank
ITEM 193
Détresse respiratoire aiguë de l’adulte. Corps étranger des voies aériennes supérieures
OBJECTIFS ● Diagnostiquer une détresse respiratoire aiguë du nourrisson, de l’enfant et de l’adulte. ● Diagnostiquer un corps étranger des voies aériennes supérieures. ● Identifier les situations d’urgence et planifier leur prise en charge. LIENS TRANSVERSAUX ITEM 86
Infections bronchopulmonaires du nourrisson, de l’enfant et de l’adulte.
ITEM 120
Pneumopathie interstitielle diffuse.
ITEM 135
Thrombose veineuse profonde et embolie pulmonaire.
ITEM 198
Dyspnée aiguë et chronique.
ITEM 211
Œdème de Quincke et anaphylaxie.
ITEM 226
Asthme de l’enfant et de l’adulte.
ITEM 227
Bronchopneumopathie chronique obstructive.
ITEM 250
Insuffisance cardiaque de l’adulte.
ITEM 254
Insuffisance respiratoire chronique.
ITEM 276
Pneumothorax.
ITEM 300
Constipation chez l’enfant et l’adulte.
Sujets tombés aux épreuves classantes nationales : 2004, 2006, 2008 et 2009 ●
Sujet tombé
2004, dossier 5 : Monsieur X, 68 ans, est adressé pour fièvre, dyspnée brutale et hyperleucocytose. Il a comme antécédents une hypertension artérielle traitée par un inhibiteur de l’enzyme de conversion, une hypercholestérolémie traitée par statine, une fracture de jambe (accident de ski) traitée chirurgicalement il y a 8 ans et une cholécystectomie pour lithiase il y a 3 ans. Depuis 2 ans, il est sujet à des sinusites et des angines à répétition. Sur le plan familial, son père a eu 2 infarctus du myocarde mais est toujours en vie. Sa mère a été opérée et traitée pour un cancer du sein et est en rémission depuis 5 ans. Il est fonctionnaire à la retraite, marié, père de 3 enfants en bonne santé. Il rapporte un tabagisme à 20 paquets-année mais ne consomme pas d’alcool. L’histoire actuelle est celle d’une fièvre entre 39 et 40 °C depuis 24 heures, apparue brutalement et qui s’accompagne d’une dyspnée au moindre effort. Il s’agit du troisième épisode fébrile depuis 3 mois,
31
ú
ITEM 193
traité par 3 jours de prednisone et 8 jours d’un macrolide. L’interrogatoire apprend qu’une augmentation des globules blancs avait été signalée lors de la cholécystectomie mais le patient n’y avait pas donné suite. Sur le plan clinique, l’état général est altéré. La température est de 39,6 °C. Il n’y a pas d’amaigrissement (poids de 72 kg pour 1,70 m). L’auscultation fait constater un foyer de crépitants à la base gauche, des adénopathies axillaires droite et gauche de 2 et 3 cm, et cervicales jugulaires internes bilatérales de 2 cm. Ces adénopathies sont mobiles et indolores. Il n’y a ni hépatomégalie ni splénomégalie. Il n’y a pas de syndrome hémorragique. La tension artérielle est de 120/70 mmHg, la fréquence cardiaque régulière à 115/min, la fréquence respiratoire de 21/min. L’examen est normal sur les plans digestif, cardiologique et neurologique. Il n’y a pas d’ictère ni d’anomalie des téguments, pas de douleur des membres inférieurs. Les examens demandés en urgence reviennent avec les résultats suivants : – hémogramme : GR = 2,85 T/L, Hb = 97 g/L, Hte = 28 %, VGM = 98,1 fL, TCMH = 34 pg, CCHM = 30 ; leucocytes = 45,1 G/L (PNN : 15 %, PNE : 0 %, PNB : 0 %, lymphocytes : 83 %, monocytes : 2 %) ; plaquettes = 153 G/L ; réticulocytes = 220 G/L ; ionogramme : Na = 135 mmol/L, K = 3,8 mmol/L, CI = 102 mmol/L, RA = 20 mmol/L, protéines totales = 68 g/L, phosphore = 1,02 mmol/L, urée = 5,6 mmol/L, créatinine = 82 mmol/L ; – gaz du sang : pH = 7,50, PO2 = 8,7 kPa (65 mmHg), PCO2 = 3,2 kPa (24 mmHg), biarbonates = 22 mmol/L, SaO2 = 92 % ; – bilan hépatique : ALAT = 23 U/L (N < 35), ASAT = 29 U/L (N < 35), bilirubine totale = 28 mmol/L (2-17), conjuguée = 2 mmol/L (1-6), gamma-GT = 56 U/L (0-41), phosphatases alcalines = 65 U/L (44-98), LDH = 350 U/L (< 290), haptoglobine plasmatique < 0,1 g/L ; – électrophorèse des protéines sériques : protides totaux = 68 g/L (albumine : 40 g/L, alpha-1 : 2 g/L, alpha-2 : 10 g/L, bêta : 12 g/L, gamma : 4 g/L). 1) Quel problème médical urgent identifiez-vous chez ce patient à partir des éléments cliniques et biologiques de l’observation ? Quels examens paracliniques supplémentaires demandez-vous pour le problème respiratoire ? 2) Une fois le problème d’urgence pris en charge, comment interprétez-vous les données cliniques et biologiques hématologiques ? Comment les confirmez-vous ? 3) Le diagnostic de leucémie lymphoïde chronique ayant été posé, quelle est la nature de l’anémie ? Argumentez sur les données de l’observation et précisez les examens nécessaires à définir l’étiologie. 4) Quelle anomalie biologique explique l’infection et à quels types d’infection prédispose-t-elle ? 5) À distance de l’épisode aigu, et sous traitement spécifique de la leucémie lymphoïde chronique, efficace, le patient présente une dyspnée d’effort progressive avec asthénie importante. Les examens demandés objectivent : GB = 3,8 G/L (PNN : 60 %, PNE : 0 %, PNB : 0 %, lymphocytes : 30 %, monocytes : 10 %), plaquettes = 180 G/L, Hb = 60 g/L, VGM = 84 fL, réticulocytes = 1 G/L (1 000/mm). Dans ce contexte, quelle est votre hypothèse diagnostique et comment la confirmer ? 6) Le patient est traité par corticothérapie à la dose de 1 mg/kg depuis 6 semaines. Il se présente aux urgences en raison d’une dyspnée d’aggravation rapide depuis 24 heures. À l’examen clinique, il présente une polypnée superficielle à 40/minute, une toux sèche non productive et des crépitants fins dans les deux champs pulmonaires. La température est mesurée à 38 °C. La radiographie pulmonaire objective un syndrome alvéolo-interstitiel bilatéral. Les gaz du sang montrent : PO2 = 6 kPa, PCO2 = 3 kPa, saturation O2 = 80 %, pH = 7,50. Il vous montre son ordonnance, qui comprend, outre la prednisone, du calcium, Didronel® 400 mg, 14 jours par mois tous les 3 mois, un pansement digestif, un comprimé de Diffu-K®. Quelle est la conduite à tenir sur les plans diagnostiques et thérapeutiques ? ●
ECN 2005, dossier 6 : Un homme de 65 ans est admis aux urgences pour un essoufflement d’aggravation rapide depuis environ 48 h. L’intolérance à l’effort est majeure puisque le patient ne peut effectuer que quelques mètres à pied avant d’être contraint à l’arrêt. Il se plaint de sueurs et de céphalées. Quarante-huit heures auparavant, le malade a ressenti à la marche une douleur thoracique droite d’apparition brutale, en coup de poignard, puis un essoufflement qui a fait passer cette douleur au second plan. L’examen clinique montre des lobes d’oreilles cyanosés, une distension thoracique et un hippocratisme digital. La température est à 38 °C. L’auscultation, rendue difficile par la polypnée mesurée à 35 cycles/min, trouve principalement des ronchi bilatéraux. La fréquence cardiaque est à 100 battements/min et la pression artérielle est de 190/110 mmHg. La radiographie du thorax est illustrée par la figure ci-jointe.
32
Détresse respiratoire aiguë de l’adulte
1) Analysez et hiérarchisez les informations cliniques et radiologiques contenues dans cette observation. Quel(s) diagnostic(s) et/ou syndrome(s) retenez-vous ? 2) Quelle conduite thérapeutique immédiate en déduisez-vous ? Justifiez votre réponse. ●
ECN 2008, dossier 3 : Voir item 219 (« Troubles hydroélectrolytiques »).
●
ECN 2009, dossier 2 : Un homme d’origine caucasienne, âgé de 27 ans, célibataire, en désinsertion familiale, vivant dans un squat, est amené par les pompiers aux urgences de l’hôpital. Cet ancien toxicomane se sait séropositif pour le VIH depuis plus de 10 ans. Il dit avoir reçu une bithérapie antirétrovirale dans les années 90 puis avoir perdu tout contact avec l’équipe qui le suivait. Il n’aurait présenté comme infection notable qu’un zona ophtalmique en automne 2003. À cette occasion, il a repris contact avec une équipe soignante « Médecins du monde ». Son taux de lymphocytes CD4+ circulants était à 48/mm3. Il n’a accepté comme traitement que de la méthadone et du Bactrim Forte® (triméthoprime-sulfaméthoxazole), 1 cp/j, qu’il dit prendre régulièrement. Depuis 4 mois, il se plaint d’asthénie, d’anorexie, d’amaigrissement sans que celui-ci soit chiffrable, ainsi que de toux, d’expectoration, qu’il qualifie de purulente, et d’épisodes hémoptoïques. Il se dit dyspnéique. Sa température est à 39 °C. Il est cachectique avec un poids de 38 kg pour 1,70 m. L’auscultation pulmonaire trouve des râles crépitants bilatéraux chez ce patient polypnéique. 1) Quels signes de gravité immédiate de cette pneumopathie recherchez-vous aux urgences dans les 5 premières minutes ? 2) Après la mise en route du traitement symptomatique adéquat, une radiographie thoracique est effectuée (ci-jointe). Quelles anomalies relevez-vous sur ce cliché ? 3) Quelles sont les deux hypothèses étiologiques que vous émettez prioritairement en dehors d’une pneumopathie à pneumocoque ou d’une légionellose ? Sur quels arguments ?
4) Le patient a une polypnée à 34/min avec tirage intercostal et sus-claviculaire. Les gaz du sang, sous 3 L/min d’oxygène nasal, montrent : pH = 7,40, PaO2 = 39 mmHg et PaCO2 = 51 mmHg. Quel(s) traitement(s) symptomatique(s) instaurez-vous ? 5) Quels médicaments prescrivez-vous pour chacune des deux hypothèses diagnostiques ? 6) Après échec du traitement symptomatique que vous avez mis en route, le patient épuisé doit être intubé. L’évolution est marquée par la découverte, à l’échographie, d’un épanchement péricardique circonférentiel modéré. Sur quels éléments, cliniques et paracliniques, surveillez-vous cet épanchement ? 7) Le patient s’est amélioré progressivement. Compte tenu d’une charge virale à 115 507 copies/mL et d’un taux de CD4+ circulants à 8/mm3, la mise sous antirétroviraux est évoquée. Quel(s) est (sont) le(s) argument(s) en faveur d’une mise immédiate sous antirétroviraux ? Quel(s) est (sont) l’(es) argument(s) en faveur d’une mise différée sous antirétroviraux ? 8) Quelles démarches de santé publique allez-vous mettre en œuvre ?
CONSENSUS Aucune conférence de consensus n’existe à ce jour sur ce thème.
POUR COMPRENDRE… ■
La détresse respiratoire aiguë est une cause fréquente de consultation dans les
services d’urgence.
33
ITEM 193
■
La mise en route d’un traitement symptomatique prime sur la pratique d’exa-
mens complémentaires à visée étiologique. ■
La respiration requiert : – des voies aériennes hautes et basses intègres ; – la mise en jeu de 5 fonctions : la fonction neuromusculaire respiratoire, la fonction d’échange gazeux pulmonaire à travers la membrane alvéolocapillaire, la fonction de transport gazeux jusqu’aux tissus, la fonction de transfert gazeux du sang aux tissus puis aux cellules et aux mitochondries.
■
L’insuffisance respiratoire aiguë est donc la conséquence de l’atteinte des voies
aériennes et/ou du dysfonctionnement d’une ou plusieurs de ces fonctions. ■
La détresse respiratoire aiguë représente la forme asphyxique de l’insuffisance
respiratoire aiguë. Il en résulte une impossibilité pour l’organisme de maintenir l’hématose (PaO2 et/ou PaCO2) à des valeurs physiologiques. ■
L’hypoxémie met rapidement en jeu le pronostic vital par la survenue d’une
hypoxie myocardique pouvant conduire à un arrêt cardiaque. Le traitement symptomatique de l’hypoxie est avant tout l’oxygénothérapie. ■
L’hypercapnie met généralement moins vite en jeu le pronostic vital, même si
elle peut être à l’origine d’une acidose respiratoire puis d’une hyperkaliémie et de troubles du rythme cardiaque. Le traitement symptomatique de l’hypercapnie, qui traduit l’atteinte de la fonction neuromusculaire respiratoire, est avant tout la ventilation mécanique. ■
La mesure de la fréquence respiratoire est un paramètre capital du diagnos-
tic d’insuffisance respiratoire aiguë mais aussi du suivi des mesures thérapeutiques.
I. PHYSIOPATHOLOGIE A. Fonction neuromusculaire respiratoire ■
Le thorax se comporte comme une « pompe respiratoire » qui renouvelle l’oxy-
gène alvéolaire et emporte le dioxyde de carbone alvéolaire. La ventilation varie de 6 L /min au repos à 100 L/min à l’effort maximal. ■
En situation physiologique, l’inspiration est quasi exclusivement assurée par le
diaphragme, qui s’abaisse et allonge la cavité thoracique. L’expiration est assurée passivement par l’élasticité thoracopulmonaire. ■
Lorsque le diaphragme est dépassé, les muscles respiratoires accessoires sont
mis en jeu et permettent soit une inspiration (muscles intercostaux externes, sternocléidomastoïdien, scalènes, qui provoquent une élévation des côtes et du sternum), soit une expiration active (muscles intercostaux internes, droit abdominal qui abaissent les côtes et le sternum et compriment le contenu abdominal contre le diaphragme). 34
Détresse respiratoire aiguë de l’adulte
■
La commande respiratoire est située dans le bulbe rachidien au niveau du tronc
cérébral. ■
Le diaphragme est innervé par le nerf phrénique, qui est constitué principale-
ment des rameaux issus des 3e et 4e racines cervicales. ■
Les muscles respiratoires du cou sont innervés par les branches motrices des
nerfs mixtes et des premières racines cervicales. Les muscles intercostaux sont innervés par les nerfs intercostaux issus des racines dorsales correspondantes. Les muscles de l’abdomen sont innervés par les cinq derniers nerfs intercostaux.
B. Fonction d’échanges gazeux ■
Les échanges gazeux se font entre l’alvéole pulmonaire et le capillaire pulmo-
naire au travers de la membrane alvéolocapillaire. ■
La diffusion de l’oxygène à travers la membrane alvéolocapillaire résulte du gra-
dient de pression existant entre l’alvéole (PAO2 = 100 mmHg) et le sang veineux mêlé dans l’artère pulmonaire (PvO2 = 20 à 40 mmHg). ■
L’atteinte de la fonction d’échanges gazeux peut être la conséquence d’un trou-
ble de la diffusion à travers la membrane alvéolocapillaire ou d’une altération des rapports entre la ventilation et la perfusion par effet shunt (zone perfusée non ventilée) ou espace mort (zone ventilée non perfusée).
C. Fonction de transport en oxygène ■
L’oxygène est présent dans le sang de façon majoritaire lié à l’hémoglobine, sous
la forme d’oxyhémoglobine (HbO2), et en très petite quantité sous forme dissoute. ■
La saturation en oxygène (SaO2 = HbO2/Hb totale) reflète la partie liée à
l’hémoglobine ; la PaO2 est le reflet de la partie dissoute. ■
Le transport en oxygène (TaO2) est donc essentiellement réalisé par
l’hémoglobine, les globules rouges étant eux transportés aux tissus par le débit cardiaque : TaO2 = CaO2 × IC, où : – IC = index cardiaque ; – CaO2 = contenu artériel en O2 = (SaO2 × 1,34 × Hb) + (PaO2 × 0,003) ; – 1,34 étant le coefficient d’affinité de l’hémoglobine pour l’oxygène ; – 0,003 étant le coefficient de solubilité de l’oxygène dans le plasma. ■
L’atteinte de la fonction de transport en oxygène est donc la conséquence d’une
diminution du contenu artériel en oxygène (par diminution de l’hémoglobine, ou de la saturation, ou de l’affinité de l’hémoglobine pour l’oxygène) et/ou d’une diminution du débit cardiaque.
D. Fonction de transfert de l’oxygène ■
Le transfert de l’oxygène aux tissus périphériques se fait par diffusion jusqu’aux
cellules et aux mitochondries, où se produit la respiration cellulaire. ■
La quantité d’oxygène extraite du sang artériel par les tissus est reflétée par
les différences de saturation en oxygène du sang artériel et veineux. Au repos, l’extraction globale est d’environ 25 % mais est très variable d’un organe à l’autre (l’extraction basale du myocarde est de 60 %, par exemple). ■
La fonction de transfert peut être atteinte au cours des situations associées à
une anomalie de l’extraction en oxygène. 35
ITEM 193
100 90 80
SQ (%)
70 60 50 40 30 20 10 0 0
20
40
60
80
100
120
140
PO2 (mmHg)
Fig. 193-1. Courbe de dissociation de l’hémoglobine.
E. Courbe de dissociation de l’hémoglobine (fig. 193-1) La relation entre la PO2 et la SO2 n’est pas linéaire mais sigmoïde. La partie supérieure droite est presque plate car pour des PO2 élevées (> 50 mmHg), l’affinité de l’hémoglobine pour l’oxygène est élevée. Ainsi au niveau pulmonaire, la captation de l’oxygène est forte. À l’inverse, la partie inférieure gauche est presque verticale car pour des PO2 basses (< 40 mmHg), l’affinité de l’hémoglobine pour l’oxygène est très réduite. Ainsi au niveau tissulaire, la libération de l’oxygène et sa diffusion vers les cellules sont possibles. On comprend également qu’en dessous du seuil de SaO2 de 90 %, la PaO2 chute dramatiquement. C’est la raison pour laquelle, en pratique clinique, l’objectif de l’oxygénothérapie est d’obtenir une SaO2 > 90 %, soit une PaO2 > 60 mmHg.
II. CAUSES L’insuffisance respiratoire aiguë est donc la conséquence de l’atteinte des voies aériennes et/ou du dysfonctionnement d’une ou plusieurs étapes de la respiration.
A. Atteinte des voies aériennes ■
Obstruction des voies aériennes supérieures : corps étranger, œdème de
Quincke, épiglottite, tumeur laryngée. ■
Obstruction des voies aériennes inférieures : crise d’asthme, exacerbation d’une
bronchopathie chronique
ITEM 226, 254
.
B. Atteinte de la fonction neuromusculaire respiratoire ■
Au niveau du tronc cérébral : – intoxication médicamenteuse : benzodiazépines, morphiniques – accident vasculaire cérébral ; – tumeur ; – abcès.
■
Au niveau de la moelle épinière, au-dessus du niveau C4 : – traumatisme du rachis cervical ; – thrombose vasculaire ;
36
ITEM 300
;
Détresse respiratoire aiguë de l’adulte
– tumeur ; – myélite. ■
Au niveau des afférences nerveuses : – poliomyélite antérieure aiguë ; – polyradiculonévrite aiguë ; – sclérose latérale amyotrophique.
■
Au niveau de la plaque motrice : myasthénie.
■
Au niveau de la musculature respiratoire : – myopathies par atteinte musculaire aiguë (polymyosite, dermatopolymyosite) ou par dystrophie musculaire lentement progressive (myopathie de Duchenne de Boulogne, myopathie de Steinert…) ; – épuisement respiratoire engendré par l’augmentation du travail respiratoire quelle que soit la cause initiale de la détresse respiratoire.
C. Atteinte de la fonction d’échanges gazeux ■
Trouble de la diffusion alvéolocapillaire : – œdème pulmonaire cardiogénique
ITEM 250
;
– œdème pulmonaire lésionnel aboutissant dans sa forme la plus sévère au syndrome de détresse respiratoire aigu (SDRA) ; – pneumopathie infiltrative du poumon et fibroses pulmonaires ■
ITEM 120
.
Effet shunt : – œdème pulmonaire cardiogénique ; – pneumopathie infectieuse aiguë*
ITEM 86
*ECN 2004
;
– hémorragie intra-alvéolaire ; – atélectasie ; – épanchement pleural liquidien ou gazeux, le parenchyme pulmonaire étant tassé en regard de l’épanchement. ■
Effet espace mort : embolie pulmonaire
ITEM 135
.
D. Atteinte de la fonction de transport gazeux ■
Par diminution de l’hémoglobine : anémies.
■
Par diminution de l’affinité de l’hémoglobine pour l’oxygène : intoxication au
monoxyde de carbone. ■
Par diminution du débit cardiaque : choc cardiogénique, choc hypovolémique.
E. Atteinte de l’utilisation cellulaire de l’oxygène ■
Choc septique.
■
Rares mitochondriopathies.
F. Syndrome de détresse respiratoire aiguë (SDRA) 1. Définition Le SDRA est un syndrome caractérisé par une inflammation de la membrane alvéolocapillaire et une augmentation de la perméabilité capillaire pulmonaire. Il est associé à une constellation d’anomalies cliniques, radiologiques et physiologiques qui ne peuvent être expliquées par une hypertension artérielle pulmonaire précapillaire ou une maladie pulmonaire chronique.
u 37
ITEM 193
u 2. Diagnostic Le diagnostic de SDRA est donc fondé sur une association de critères biologiques, cliniques et radiologiques, incluant : ■
un tableau brutal ;
■
des infiltrats radiologiques pulmonaires bilatéraux ;
■
la présence d’un rapport PaO2/FiO2 ≤ 200 mmHg ;
■
une pression artérielle pulmonaire d’occlusion ≤ 18 mmHg ou l’absence
d’évidence clinique d’insuffisance ventriculaire gauche.
3. Causes La cause du SDRA peut être respiratoire (l’agression initiale a lieu dans les poumons) ou extrarespiratoire (l’agression initiale est extrapulmonaire mais entraîne des lésions pulmonaires par l’activation de cascades inflammatoires) : ■
les causes respiratoires sont : la pneumopathie infectieuse, la pneumopathie
d’inhalation (syndrome de Mendelson), les pneumopathies infiltratives aiguës, la pneumopathie radique, la contusion pulmonaire, la noyade, l’inhalation de gaz toxiques, les embolies graisseuses et amniotiques ; ■
les causes extrarespiratoire sont : les états de choc (septique notamment),
la pancréatite aiguë, la péritonite, le polytraumatisme, les brûlures étendues, la transfusion massive, certaines intoxications par voie générale.
4. Physiopathologie Après agression de la membrane alvéolocapillaire, la physiopathologie est décrite en 3 phases : ■
phase exsudative : liée à la formation d’un œdème exsudatif alvéolo-interstitiel ;
■
phase de fibrose, caractérisée par la prolifération de fibroblastes ;
■
phase de réparation, marquée par la fin des phénomènes inflammatoires et
du processus de fibrose. La constitution progressive d’une fibrose pulmonaire est parfois responsable du décès ou de la constitution d’une insuffisance respiratoire séquellaire.
5. Pronostic La mortalité du SDRA est élevée, de l’ordre de 50 %. Elle survient soit précocement, et est alors liée à l’hypoxie, soit tardivement et est alors liée au syndrome de défaillance multiviscérale qui lui est associé ou aux complications d’une réanimation prolongée (infections nosocomiales, notamment). Chez la plupart des survivants, la fonction respiratoire redevient normale dans les 6 à 12 mois qui suivent l’agression pulmonaire.
6. Prise en charge En dehors du traitement spécifique de la cause, le traitement repose le plus souvent sur la ventilation mécanique, qui permet : ■
d’administrer un mélange gazeux riche en oxygène (jusqu’à FiO2 = 100 %) ;
■
d’appliquer une pression expiratoire positive (PEP) permettant de maintenir les
alvéoles ouvertes (recrutement alvéolaire) et de favoriser les échanges gazeux.
38
Détresse respiratoire aiguë de l’adulte
Des études récentes ont démontré le bénéfice de réaliser une ventilation « douce », dite également « protectrice », en employant un volume courant bas et en limitant les pressions insufflées de façon à ne pas surdistendre le poumon. Enfin plusieurs techniques sont actuellement utilisées pour améliorer encore l’oxygénation. Parmi ces techniques, on retient : ■
le positionnement en décubitus ventral, qui favorise le recrutement alvéolaire
des régions dorsales du poumon ; ■
le monoxyde d’azote qui, administré par voie inhalée, favorise la vasodilatation
des territoires ventilés (mais pas des territoires collabés), augmentant ainsi le rapport VA/Q, et diminuant par là même l’effet shunt.
III. DIAGNOSTIC A. Diagnostic d’insuffisance respiratoire aiguë ■
Le diagnostic d’insuffisance respiratoire aiguë est fondé sur la survenue bru-
tale ou rapidement progressive de signes respiratoires, au premier rang desquels la dyspnée
ITEM 198
et la polypnée, qu’il est indispensable de quantifier par la
mesure de la fréquence respiratoire. ■
Le diagnostic de détresse respiratoire aiguë repose sur la présence de signes de
gravité respiratoires, circulatoires et neurologiques (voir infra) associés à cette dyspnée.
B. Diagnostic de la cause Le diagnostic de la cause de la détresse respiratoire reposera, après mise en œuvre des mesures d’urgence, sur les étapes suivantes.
1. Interrogatoire Il recherche ou précise : ■
les modalités d’installation (début brutal ou progressif) ;
■
l’existence d’épisodes antérieurs ;
■
l’existence d’un handicap respiratoire ou d’une pathologie respiratoire préalable,
d’une pathologie cardiaque, neurologique, d’un terrain thromboembolique, d’une néoplasie, d’une immunodépression, d’un traumatisme, d’un contexte toxique ; ■
l’activité professionnelle, le contexte social.
2. Examen clinique Il recherche ou précise : ■
le type de la dyspnée (orthopnée, de type Cheyne-Stokes, de type Küssmaul) ITEM 198
■
;
des bruits respiratoires anormaux (sibilants, freinage expiratoire, crépitants,
ronchi, stridor, cornage…), un silence auscultatoire ; ■
une matité ou un tympanisme à la percussion thoracique ;
■
les caractères d’une éventuelle expectoration (mousseuse, purulente, hémoptoïque) ;
■
une dysphonie, une dysphagie, une hypersialorrhée ;
■
des signes d’insuffisance cardiaque droite ; 39
ITEM 193
■
un syndrome infectieux ;
■
un syndrome douloureux thoracique ;
■
des signes de phlébite.
3. Bilan complémentaire Il comporte : ■
radiographie thoracique : elle est souvent difficile à interpréter car mal inspirée
dans un contexte de détresse respiratoire aiguë et faite seulement de face en décubitus dorsal en position assise ou couchée ; ■
gaz du sang : ils permettent de juger de l’importance de l’hypoxie, de rechercher
une hypercapnie, de rechercher une acidose respiratoire ou métabolique, alors souvent d’origine lactique. On distingue classiquement deux tableaux : – l’effet shunt, défini par la présence d’une hypoxie sans hypercapnie, avec une somme PaO2 + PaCO2 < 120 mmHg en air ambiant ; – l’hypoventilation alvéolaire, définie par la présence d’une hypercapnie. La réalisation du premier gaz du sang en air ambiant permet de mieux juger de la gravité de l’hypoxémie et constitue un examen de référence ; ■
ionogramme sanguin, urée, créatinine, glycémie, protidémie ;
■
numération-formule sanguine ;
■
bilan hépatique ;
■
bilan d’hémostase ;
■
selon le contexte : prélèvements bactériologiques, CRP, procalcitonine, BNP ou
NT-proBNP, D-dimères ; ■
échocardiographie : elle permet d’apprécier la contractilité myocardique,
d’estimer les pressions de remplissage, de rechercher une anomalie de la cinétique segmentaire, une valvulopathie, un aspect de cœur pulmonaire, de mesurer la pression artérielle pulmonaire ; ■
selon le contexte : écho-Doppler des membres inférieurs, angioscanner thoraci-
que, cathéter artériel pulmonaire…
*ECN 2009
IV. PRISE EN CHARGE* A. Rechercher des signes de gravité La première étape consiste à rechercher des signes de gravité respiratoires, cardiovasculaires ou neurologiques, qui font le diagnostic de détresse respiratoire aiguë et motivent une prise en charge en réanimation.
1. Signes de gravité respiratoires ■ Polypnée > 25 cpm ou, plus grave, bradypnée < 10 cpm ou apnées. ■
Mise en jeu des muscles respiratoires accessoires (tirage sus-claviculaire, sus-
sternal et intercostal ou, plus grave, disparition des signes de lutte. ■
Épuisement diaphragmatique : respiration abdominale paradoxale (dépression
inspiratoire du creux épigastrique). ■
40
Dyspnée à la parole.
Détresse respiratoire aiguë de l’adulte
■
Cyanose (signe la présence d’une Hb réduite > 5 g/100 mL, majorée en cas de
polyglobulie, retardée en cas d’anémie). ■
Sueurs (liée à l’hypercapnie).
2. Signes de gravité cardiovasculaires ■ Tachycardie > 120 bpm. ■
Troubles du rythme supraventriculaires ou ventriculaires ou, plus graves, bra-
dycardie et autres troubles conductifs. ■
Signes d’insuffisance ventriculaire droite.
■
Signes de choc.
3. Signes de gravité neurologiques ■ Syndrome confusionnel. ■
Agitation (plutôt liée à l’hypoxie).
■
Troubles de la conscience (plutôt liés à l’hypercapnie).
B. Rechercher une étiologie imposant un geste salvateur particulier 1. Pneumothorax suffocant ■
ITEM 276
Une exsufflation à l’aiguille sur la ligne médioclaviculaire et au 2e espace inter-
costal permet, parce qu’elle met en communication la cavité pleurale où règne une pression élevée et l’atmosphère, d’établir une pression pleurale nulle. ■
Secondairement, un drain thoracique est mis en place, le plus souvent au *ECN 2005
6e espace intercostal sur la ligne axillaire moyenne*.
2. Œdème de Quincke ITEM 211 Son traitement en urgence repose sur l’administration d’un bolus d’adrénaline, par voie IM en l’absence de voie veineuse (0,5 mg), ou par voie IV (0,1 mg).
3. Corps étranger des voies aériennes supérieures ■
Rare chez l’adulte, l’incidence du corps étranger des voies aériennes supérieures
augmente avec l’âge. Il survient dans 3 types de circonstances : – au cours d’un repas, lors d’un événement perturbateur (fou rire, surprise) ou à l’occasion d’une attitude gloutonne (imprégnation éthylique, troubles psychiatriques, démence) ; – au cours d’activités de bricolage par inhalation d’un objet tenu dans la bouche ; – au cours de soins dentaires. ■
Il est favorisé par les troubles de déglutition (pathologie neurologique évolutive,
pathologie ORL). ■
Le tableau clinique initial du syndrome de pénétration associe brutalement
une toux quinteuse, intense, expulsive et un tableau d’angoisse et d’agitation. Secondairement, 4 situations peuvent être observées : – soit le corps étranger est expulsé et les signes respiratoires s’amendent complètement ; – soit le corps étranger est inhalé, migre le plus souvent dans l’arbre bronchique droit (rarement dans la trachée, qui est large) et les signes respiratoires s’atténuent tandis qu’apparaît un sifflement unilatéral ;
41
ITEM 193
– soit le corps étranger reste enclavé dans les voies aériennes supérieures mais n’est pas totalement obstructif et l’on observe une bradypnée inspiratoire, un cornage, une dysphonie ; – soit le corps étranger reste enclavé dans les voies aériennes supérieures et est totalement obstructif, entraînant un tableau d’asphyxie. ■
Les insuffisances respiratoires d’origine haute peuvent imposer un geste
immédiat de désobstruction, qui est un geste de sauvetage si l’obstacle est total. Ces gestes sont de réalisation difficile et dangereuse. En cas d’obstacle partiel, il est donc préférable de les faire réaliser par une équipe entraînée et dans l’attente éviter toute manœuvre, calmer le patient, administrer de l’oxygène. ■
Parmi les gestes de désobstruction, on retient : – l’ouverture forcée de la bouche : elle s’effectue à l’aide du pouce et de l’index, introduits au coin de la bouche, l’index prenant appui sur le maxillaire inférieur, le pouce sur le maxillaire supérieur. Un éventuel corps étranger est alors extrait au doigt ou à la pince de Magill ; – la manœuvre de Heimlich : le patient étant assis ou debout, on se positionne derrière lui et l’on enlace la partie haute de l’abdomen, les deux mains étant placées sous la xiphoïde. Une compression forte de l’abdomen est réalisée, orientée de bas en haut dans le but de provoquer une hyperpression dans les voies aériennes capable d’éjecter le corps étranger hors de celles-ci. Chez une victime inconsciente au sol, le sauveteur applique ses 2 mains sur l’épigastre et appuie fortement de bas en haut et d’avant en arrière. Cette manœuvre ne doit pas être pratiquée en cas d’occlusion partielle, car le corps étranger déplacé peut devenir complètement occlusif ; – l’intubation : elle est souvent très difficile dans ce contexte et parfois impossible ; – la cricothyroïdotomie ou la trachéotomie : possibles en milieu hospitalier, elles sont également réalisées par une équipe entraînée.
■
Secondairement, la bronchoscopie rigide au bloc opératoire permettra
l’extraction d’un corps étranger enclavé dans les voies aériennes supérieures ou les bronches.
C. Rechercher une indication à la mise sous ventilation mécanique ■
La mise en route de la ventilation mécanique (invasive après intubation ou non
invasive par l’intermédiaire d’un masque facial) est souvent nécessaire lorsque le patient présente des signes liés à une hypercapnie (sueurs, tachycardie, hypertension artérielle, astérixis, troubles de la conscience), l’hypercapnie signant l’atteinte de la musculature respiratoire. ■
L’intubation est extrêmement urgente si le patient présente : – une bradypnée ou des apnées qui précèdent l’arrêt respiratoire ; – des troubles du rythme graves, une bradycardie ou des troubles conductifs qui précèdent l’arrêt cardiaque.
42
Détresse respiratoire aiguë de l’adulte
D. Mise en condition dans toutes les situations ■
Le patient est laissé en position demi-assise.
■
La liberté des voies aériennes est vérifiée.
■
Un monitorage du rythme cardiaque et de l’oxymétrie de pouls est mis en place.
■
Une oxygénothérapie est débutée : – l’objectif de l’oxygénothérapie est d’augmenter la fraction inspirée en oxygène (FiO2) de 21 % en air ambiant jusqu’à 100 % (oxygène pur), de façon à corriger l’hypoxémie et in fine l’hypoxie tissulaire. La correction de l’hypoxie est un objectif prioritaire et le risque d’aggravation d’une hypercapnie chez un insuffisant respiratoire chronique n’est jamais une contre-indication à l’oxygénothérapie. Elle est indiquée dès lors que la SaO2 est inférieure à 92 % (90 % chez l’insuffisant respiratoire chronique). Il est en revanche nécessaire de diminuer les débits d’oxygène lorsque la SaO2 devient trop élevée chez l’insuffisant respiratoire chronique ; – les moyens disponibles pour administrer l’oxygène sont : • les lunettes nasales à oxygène, qui ne permettent d’obtenir que des FiO2 basses, le mélange gazeux inhalé étant contaminé par la ventilation buccale ; • la sonde nasale, qui permet d’obtenir des FiO2 plus élevées si son extrémité est bien positionnée au-dessus du plan glottique ; • le masque à haute concentration avec ballon réservoir permettant d’obtenir des FiO2 élevées (jusqu’à 100 %). Il faut savoir cependant que dans le ballon réservoir peut s’accumuler du CO2 expiré par le patient si les débits d’O2 utilisés sont faibles ou si la mécanique ventilatoire du patient est altérée. Le patient est alors susceptible d’inhaler ce mélange gazeux riche en CO2 (rebreathing) avec un risque d’hypercapnie ; – chez l’insuffisant respiratoire chronique, l’oxygénothérapie est susceptible d’aggraver l’hypercapnie. Ce risque, bien que classique, est limité et ne doit pas contre-indiquer la mise en route de l’oxygénothérapie lorsqu’il existe une hypoxie. Les mécanismes à l’origine de ce phénomène sont nombreux et complexes. La disparition du stimulus neurologique central à l’hypoxie est le plus souvent citée. C’est cependant un mécanisme transitoire probablement limité par la stimulation neurologique centrale quand la PaCO2 augmente. Les mécanismes les plus importants sont probablement : • la modification des rapports ventilation/perfusion avec augmentation de l’espace mort ; • l’effet Haldane, lié au fait que l’oxyhémoglobine a moins d’affinité pour le CO2 que l’hémoglobine réduite : la fraction dissoute en CO2 est alors augmentée et donc la PaCO2 est augmentée ; – l’objectif de l’oxygénothérapie est bien ici d’obtenir une SaO2 de 90 % sans dépasser ce seuil. L’aggravation d’une hypercapnie malgré une oxygénothérapie conduite selon ces conditions motive de toute façon la mise en route de la ventilation mécanique ;
43
ITEM 193
– la surveillance de l’oxygénothérapie repose sur la mesure des gaz du sang et surtout sur l’oxymètre de pouls, qui permet un monitorage continu de la SpO2 . Un capteur positionné au niveau d’un doigt en permet la mesure transcutanée par spectrophotométrie. ■
Une voie veineuse de bon calibre est posée.
■
Une sonde nasogastrique est souvent posée en raison de la fréquence des dilata-
tions gastriques aiguës accompagnant la détresse respiratoire. ■
Une sonde urinaire est mise en place, notamment si une surveillance de la
diurèse est indispensable.
E. Ventilation mécanique La principale fonction de la ventilation mécanique est de suppléer à la faillite des muscles respiratoires et donc de corriger l’hypercapnie et l’acidose. Elle permet aussi : ■
de corriger l’hypoxie, ce d’autant qu’une pression expiratoire positive permet-
tant de recruter des alvéoles fermés est appliquée ; ■
de protéger les voies aériennes, lorsqu’un coma est associé à la détresse respi-
ratoire, si elle est pratiquée par l’intermédiaire d’une intubation ; ■
de mettre en repos la musculature respiratoire et ainsi de réduire significative-
ment la demande en oxygène au cours d’un état de choc ; ■
de diminuer le retour veineux (et donc les pressions de remplissage du cœur)
par l’application d’une pression positive dans le thorax, cette propriété étant utilisée dans le cas particulier de l’œdème pulmonaire cardiogénique. La ventilation mécanique peut être pratiquée après intubation orotrachéale ou nasotrachéale du patient, ou de façon dite non invasive par l’intermédiaire d’un masque facial.
1. Intubation orotrachéale ou nasotrachéale par laryngoscopie directe ■
Positionnement du patient : le meilleur alignement des axes oral, pharyngé et
laryngé est obtenu après flexion du rachis cervical associée à une extension de la tête sur le cou. ■
Préoxygénation : par ventilation manuelle au masque, un ventilateur manuel
composé d’un ballon « autoremplisseur » raccordé à un masque facial étant utilisé. Le gaz insufflé est enrichi en oxygène. Les voies aériennes sont d’abord libérées de tout corps étranger, une canule de Guédel est posée. ■
Laryngoscopie directe : après anesthésie générale, l’extension de la tête est
accentuée. Le laryngoscope est introduit dans la bouche et la lame refoule la langue vers la gauche, offrant une vue directe du pharynx, tandis que le manche du laryngoscope est amené dans le plan médian. Lorsque la lame atteint la base de la langue, une traction exercée sur le laryngoscope vers le haut permet de voir l’extrémité supérieure de l’épiglotte. La pointe de la lame est avancée dans le sillon glosso-épiglottique. La traction du laryngoscope entraîne alors l’épiglotte vers l’avant et expose la glotte. ■
Intubation : la sonde endotrachéale à ballonnet est alors passée par la bouche
(plus rarement par le nez) au travers des cordes vocales. Une fois la sonde en place, on la raccorde au système de ventilation et on gonfle le ballonnet. 44
Détresse respiratoire aiguë de l’adulte
2. Ventilation non invasive ■
Au cours de la ventilation non invasive, le patient est ventilé non pas par
l’intermédiaire d’une sonde endotrachéale mais d’un masque facial. L’objectif est d’assurer un support ventilatoire en évitant le recours à une intubation et ses complications. ■
Les indications reconnues de la ventilation non invasive sont les situations où il
existe une acidose respiratoire : décompensation aiguë d’une insuffisance respiratoire chronique et œdème pulmonaire cardiogénique asphyxique. ■
La ventilation non invasive n’est pas une bonne indication lorsqu’il existe une hypoxie
isolée, sauf peut-être chez le patient immunodéprimé chez qui le risque de pneumopathie nosocomiale acquise sous ventilation mécanique après intubation est grand. ■
Les troubles de conscience sont la contre-indication majeure de la ventilation non
invasive, qui ne remplit pas, par définition, son rôle de protection des voies aériennes. ■
L’échec de la ventilation non invasive doit de tout façon être jugé rapidement
sur l’évolutivité clinique (fréquence respiratoire) et gazométrique et faire recourir à l’intubation.
F. Traitement spécifique de la cause Il est indispensable mais extrêmement variable d’une situation à l’autre. Ses grands principes sont rappelés pour les pathologies les plus fréquentes dans le tableau 193-1.
Tableau 193-1. Traitements spécifiques des pathologies les plus fréquentes Cause
Traitement spécifique
Œdème pulmonaire cardiogénique
– Traitement vasodilatateur par dérivés nitrés – Traitement diurétique par diurétiques de l’anse – Ventilation non invasive dans les formes asphyxiques (hypercapniques)
Asthme aigu
– Traitement bronchodilatateur par bêta-2-mimétiques nébulisés – Traitement anti-inflammatoire par corticoïdes par voie générale – Traitement bronchodilatateur par atropiniques nébulisés en cas d’inefficacité des bêta-2-mimétiques nébulisés – Traitement bronchodilatateur par bêta-2-mimétiques IVSE en 2e intention – Traitement bronchodilatateur par adrénaline IVSE en 3e intention
Insuffisance respiratoire aiguë des insuffisances respiratoires chroniques
– Traitement bronchodilatateur par bêta-2-mimétiques nébulisés (dont l’efficacité est ici modeste) – Traitement bronchodilatateur par atropiniques nébulisés en cas d’inefficacité des bêta-2-mimétiques nébulisés – Traitement anti-inflammatoire par corticoïdes par voie générale, dont l’efficacité est ici très discutée – Traitement antibiotique, dès lors qu’un facteur déclenchant infectieux est suspecté – Ventilation non invasive ici indiscutable
Embolie pulmonaire*
– Traitement anticoagulant par héparine non fractionnée IVSE, ou de bas poids moléculaire SC en l’absence de signe de gravité – Relais précoce par traitement anticoagulant anti-vitamine K dans tous les cas – Traitement thrombolytique par voie générale en cas de choc
*ECN 2008
Pneumopathie aiguë Traitement antibiotique probabiliste par une association couvrant communautaire le pneumocoque et les germes atypiques fréquents (Chlamydia et mycoplasme) 45
ITEM 193
Fiche
Dernier tour
Détresse respiratoire aiguë de l’adulte. Corps étranger des voies aériennes supérieures L’insuffisance respiratoire aiguë est la conséquence : – de l’obstruction des voies aériennes hautes (corps étranger, œdème de Quincke, épiglottite, tumeur laryngée) ou basses (asthme, BPCO) ; – et/ou d’un dysfonctionnement respiratoire au niveau neuromusculaire (intoxication médicamenteuse, traumatisme du rachis cervical, polyradiculonévrite, myasthénie, myopathie, épuisement respiratoire) et/ou des échanges gazeux (œdème pulmonaire cardiogénique, œdème pulmonaire lésionnel, hémorragie intra-alvéolaire, atélectasie, embolie pulmonaire) et/ou du transport gazeux (anémies, intoxication au CO, choc cardiogénique et hypovolémique) et/ou du transfert gazeux (choc septique). ■ Il en résulte une impossibilité pour l’organisme de maintenir l’hématose (PaO2 et/ou PaCO2) à des valeurs physiologiques : l’hypoxémie mettant rapidement en jeu le pronostic vital par la survenue d’une hypoxie myocardique pouvant conduire à un arrêt cardiaque, l’hypercapnie mettant généralement moins vite en jeu le pronostic vital, même si elle peut être à l’origine d’une acidose respiratoire puis d’une hyperkaliémie et de troubles du rythme cardiaque. ■ Le SDRA, motif fréquent d’admission en réanimation, est un œdème pulmonaire lésionnel défini par : – un tableau brutal ; – des infiltrats pulmonaires bilatéraux ; – un rapport PaO2/FiO2 ≤ 200 mmHg ; – une PAPO ≤ 18 mmHg ou l’absence d’évidence clinique d’insuffisance ventriculaire gauche. ■ Le diagnostic de détresse respiratoire aiguë repose sur la présence d’une dyspnée et de signes de gravité : – respiratoires : polypnée > 25 cpm, bradypnée < 10 cpm, signes de lutte (tirage susclaviculaire, sus-sternal, intercostal), disparition des signes de lutte, respiration abdominale paradoxale, dyspnée à la parole, cyanose, sueurs ; – cardiovasculaires : tachycardie > 120 bpm, troubles du rythme supraventriculaires ou ventriculaires, bradycardie, troubles conductifs, signes d’IVD, signes de choc ; – neurologiques : syndrome confusionnel, agitation, troubles de la conscience. ■ La mesure de la fréquence respiratoire est un paramètre capital du diagnostic d’insuffisance respiratoire aiguë mais aussi du suivi des mesures thérapeutiques . ■ Trois étiologies imposent un geste salvateur : – pneumothorax suffocant : exsufflation à l’aiguille sur la ligne médioclaviculaire au 2e espace intercostal ; – œdème de Quincke : bolus d’adrénaline, par voie IM : 0,5 mg, ou IV : 0,1 mg ; – corps étranger des voies aériennes supérieures : manœuvre de Heimlich (si obstacle complet) . ■ Dans tous les cas, le traitement associe : – positionnement demi-assis, libération des voies aériennes ; – monitorage du rythme cardiaque et de l’oxymétrie de pouls ; – oxygénothérapie si SpO2 < 92 % (même chez l’insuffisant respiratoire chronique, le risque d’aggravation d’une hypercapnie n’étant jamais une contre-indication à l’oxygénothérapie) ; – pose d’une voie veineuse de bon calibre ; – pose d’une sonde nasogastrique, d’une sonde urinaire. ■
u 46
Détresse respiratoire aiguë de l’adulte
Fiche
Dernier tour
L’intubation est extrêmement urgente, si : – bradypnée ou apnées (précèdent l’arrêt respiratoire) ; – troubles du rythme graves, bradycardie, troubles conductifs (précèdent l’arrêt cardiaque) . ■ La ventilation mécanique peut être pratiquée après intubation orotrachéale ou nasotrachéale, ou de façon dite non invasive par l’intermédiaire d’un masque facial. ■ La ventilation mécanique a pour principal objectif de corriger l’acidose respiratoire (en suppléant la faillite des muscles respiratoires) . Elle permet aussi de corriger l’hypoxie (recrutement alvéolaire par l’application d’une PEP), de protéger les voies aériennes en cas de coma associé (si intubation), de reposer la musculature respiratoire au cours d’un état de choc. ■ Le traitement spécifique de la cause, variable d’une situation à l’autre, est indispensable. ■
47
This page intentionally left blank
ITEM 200
État de choc
OBJECTIFS ● Diagnostiquer un état de choc. ● Prise en charge immédiate. LIENS TRANSVERSAUX ITEM 104
Septicémie.
ITEM 132
Angine de poitrine et infarctus du myocarde.
ITEM 201
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces chez un brûlé, chez un polytraumatisé, chez un traumatisé abdominal, chez un traumatisé craniofacial, chez un traumatisé des membres, chez un traumatisé thoracique, devant une plaie des parties molles. Identifier les situations d’urgence et planifier leur prise en charge.
ITEM 205
Hémorragie digestive.
ITEM 211
Œdème de Quincke et anaphylaxie.
ITEM 250
Insuffisance cardiaque de l’adulte.
ITEM 252
Insuffisance rénale aiguë.
Sujets tombés aux concours de l’Internat et aux ECN : 2000, 2009 ●
2000, interrégion Nord, dossier 8 : Un homme de 55 ans est hospitalisé aux urgences pour une hématémèse survenue 4 heures avant son arrivée. L’interrogatoire trouve une consommation excessive d’alcool depuis plus de 20 ans. Il n’a pas d’autres antécédents. L’examen clinique met en évidence une pression artérielle à 90/50 mmHg, la fréquence cardiaque est à 110/min. Le patient est pâle, couvert de sueur, il n’a pas d’ictère ; son abdomen est souple, indolore, il n’a pas d’ascite. Il existe une circulation veineuse collatérale, une hépatomégalie dure à bord inférieur tranchant. Le toucher rectal objective un méléna. La conscience est normale, il n’y a pas de flapping. 1) Quelles mesures thérapeutiques d’urgence préconisez-vous ? 2) Compte tenu du contexte, quelles sont les causes d’hémorragie les plus fréquentes à évoquer ? 3) Après stabilisation de l’état hémodynamique, une fibroscopie œso-gastro-duodénale est réalisée. Elle objective une varice œsophagienne en cours de saignement. Que faut-il faire ? 4) En dehors des mesures à visée hémostatique, quelles autres méthodes thérapeutiques doivent être envisagées dès maintenant ? 5) Dans quelles circonstances peut-on être amené à discuter l’indication d’une dérivation portocave ?
●
Sujet tombé
2009, dossier 3 : Un homme de 75 ans est hospitalisé pour un méléna apparu brutalement dans la matinée. Ses antécédents sont : – une hypertension artérielle habituellement équilibrée par Ténormine® (aténolol) et Prétérax® (périndopril et indapamide) ; – une phlébite sous plâtre du membre inférieur gauche survenue il y a 6 mois, traitée par un comprimé de Préviscan® (fluindione) par jour ;
49
ú
ITEM 200
– une arthrose de genou dont il souffre ; – un tabagisme à 40 paquets-années. – La créatininémie dosée il y a 6 mois était à 85 μmol/L, et l’hémoglobine était à 14 g/dL. À l’examen, vous trouvez une pâleur cutanéoconjonctivale intense, et la mesure des constantes vitales donne les résultats suivants : – tension artérielle : 95/75 mmHg (habituellement : 145/70 mmHg) ; – fréquence cardiaque : 92/min ; – fréquence respiratoire : 24/min ; – saturation pulsée en oxygène (SpO2) : 95 %. Le patient est anxieux, mais il n’a pas de trouble de conscience. L’interrogatoire trouve une recrudescence récente des gonalgies. L’abdomen est souple, l’auscultation cardiopulmonaire est normale, de même que la radiographie pulmonaire. Le toucher rectal trouve un méléna sur le doigtier. La biologie sanguine réalisée en urgence est la suivante : – NFS : Hb = 7,5 g/dL, GR = 2,8 T/L, GB =18 G/L, Hte = 24 %, VGM = 96 μ3 ; – ionogramme : Na = 138 mmol/L, K = 4,8 mmol/L, Cl = 105 mmol/L, Ca = 2,5 mmol/L, protéines = 65 g/L, glucose = 5,4 mmol/L, créatinine = 148 μmol/L, TP < 10 %, INR > 10. 1) En tenant compte du contexte, quel élément d’interrogatoire doit être recherché pour expliquer le trouble de l’hémostase ? 2) Analysez et interprétez l’ECG n° 1 dans ce contexte.
3) Quelles mesures diagnostiques et thérapeutiques doivent être prises immédiatement ? 4) Quelle(s) investigation(s) complémentaire(s) vous paraît(issent) nécessaire(s) à court terme pour la prise en charge de l’hémorragie digestive ? Sous quelle(s) condition(s) ? 5) Les troubles hémodynamiques se sont prolongés plusieurs heures. La diurèse ne reprend pas. Un nouvel ECG (ECG n° 2) et un nouveau ionogramme sont pratiqués : Na = 140 mmol/L, K = 7,5 mmol/L, Cl = 106 mmol/L, Ca = 2,3 mmol/L, glucose = 5,4 mmol/L, protéines = 60 g/L, créatininémie = 240 μmol/L. Interprétez l’ECG n° 2. Quel traitement d’urgence débutez-vous immédiatement ? Comment évaluez-vous son efficacité ?
6) En cas d’échec des mesures précédentes, quelle mesure thérapeutique complémentaire doit être entreprise rapidement ? 7) L’évolution est finalement favorable. Le diagnostic d’ulcère duodénal a été posé et l’Helicobacter pylori est en cours d’éradication. Quelle attitude avez-vous vis-à-vis du traitement par antivitamine K ?
50
État de choc
CONSENSUS ● Prise en charge hémodynamique du sepsis sévère – Conférence de consensus – SRLF, SFAR, 13 octobre 2005 (www.srlf.org). ● Antibiothérapie probabiliste des états septiques graves – Conférence d’experts – SFAR, SRLF, SPILF, 14 septembre 2004 (www.srlf.org). ● Coagulations intravasculaires disséminées en réanimation – Conférence de consensus – SRLF, SFAR, SFH, 10 octobre 2002 (www.srlf.org).
POUR COMPRENDRE… ■
L’état de choc est un syndrome regroupant les manifestations liées à une altéra-
tion aiguë et durable de l’oxygénation des tissus du fait d’une inadéquation entre apports et besoins tissulaires en oxygène. ■
Le métabolisme cellulaire est ainsi orienté de la voie aérobie vers la voie anaéro-
bie. Il existe alors un défaut de production d’adénosine triphosphate (ATP), principale source énergétique de la cellule. Le cycle de Krebs est donc interrompu et le pyruvate est transformé en lactate. ■
Quelle qu’en soit la cause, l’état de choc va être à l’origine d’un dysfonction-
nement des différents organes soumis à l’hypoxie : – la peau : marbrures cutanées, froideur des téguments, cyanose des extrémités, allongement du temps de recoloration cutanée ; – les muscles : rhabdomyolyse ; – les reins : insuffisance rénale fonctionnelle puis nécrose tubulaire aiguë ; – le foie : foie hypoxique, souvent appelé « foie de choc » ; – le cœur : altération de la contractilité (liée à la libération de médiateurs de l’inflammation) et ischémie myocardique (par baisse de la pression artérielle diastolique et diminution de la perfusion coronaire) ; – les poumons : syndrome de détresse respiratoire aigu (SDRA), par libération de médiateurs de l’inflammation ; – le tube digestif : ischémie de l’intestin grêle et/ou du côlon pouvant être responsable d’une migration de bactéries du tube digestif vers le sang (translocation bactérienne) ; – le cerveau : troubles neurologiques ; – l’endothélium vasculaire : coagulation intravasculaire disséminée (CIVD). ■
Malgré les progrès de la réanimation, la mortalité de l’état de choc reste élevée,
de 50 % environ toutes causes confondues. ■
La clé du pronostic est un diagnostic rapide et une prise en charge immédiate.
I. PHYSIOPATHOLOGIE À l’état stable, les besoins cellulaires sont égaux à la consommation d’oxygène (VO2), qui est le produit du transport artériel en oxygène (TaO2) par l’extraction tissulaire de l’oxygène (EO2). On distingue ainsi 2 types de chocs : 51
ITEM 200
■
les chocs liés à une diminution du transport artériel en oxygène (TaO2) vers les
tissus : chocs cardiogénique, hypovolémique et anaphylactique ; on parle ici de choc « quantitatif » ; ■
les chocs liés à une diminution de l’extraction de l’oxygène (EO2) par les tissus :
choc septique et anaphylactique ; on parle ici de choc « distributif ». Ces 2 mécanismes sont volontiers associés entre eux. Ainsi une diminution de l’extraction tissulaire de l’oxygène peut s’observer dans tout état de choc dès lors qu’il se prolonge.
A. État de choc hypovolémique La diminution du volume sanguin est responsable d’une diminution du retour veineux cardiaque. Il en résulte une baisse du débit cardiaque et donc du transport artériel de l’oxygène (TaO2) vers les tissus. L’organisme utilise 2 mécanismes pour préserver l’oxygénation des tissus : ■
la stimulation sympathique : – elle augmente le débit cardiaque (effets chronotrope et inotrope positifs) ; – elle entraîne une vasoconstriction qui tend à améliorer le retour veineux et à redistribuer le débit sanguin vers le cerveau et le cœur puisqu’elle se fait sélectivement dans les territoires musculocutané, hépatique et splanchnique ;
■
l’augmentation de l’extraction tissulaire de l’oxygène.
Cependant, si l’état de choc se prolonge, l’ischémie des différents tissus entraîne une libération dans la circulation de substances vasodilatatrices et inotropes négatives.
B. État de choc cardiogénique ■
L’altération de la fonction cardiaque et donc du débit cardiaque est responsable
d’une diminution du transport artériel en oxygène. ■
Les mêmes mécanismes compensateurs sont alors mis en jeu (stimulation sym-
pathique et augmentation de l’extraction tissulaire de l’oxygène). ■
L’insuffisance cardiaque gauche aiguë entraîne par ailleurs une élévation des
pressions de remplissage du ventricule gauche, une stase sanguine dans la circulation pulmonaire et un œdème pulmonaire aigu, dont la symptomatologie s’ajoute à celle de l’état de choc.
C. État de choc septique Un constituant du micro-organisme en cause (le mieux connu est l’endotoxine des bacilles à Gram négatif) entraîne une cascade inflammatoire. Cette cascade comporte 3 niveaux interagissant entre eux : ■
au niveau plasmatique, le système contact et le système du complément sont
activés, entraînant une activation de l’endothélium et de la coagulation. Il en résulte une distribution anormale du sang dans la microcirculation (on parle de choc « distributif ») et donc une ischémie tissulaire, aggravant les dysfonctions d’organe ; ■
au niveau vasculaire, la cascade inflammatoire se traduit par la sécrétion de
médiateurs qui favorise le recrutement des phagocytes, par la sécrétion de monoxyde d’azote qui induit une vasodilatation intense, et par des troubles de la perméabilité capillaire qui entraînent un œdème interstitiel ; 52
État de choc
Tableau 200-1. Définition des syndromes septiques Réponse inflammatoire systémique (au moins deux des critères suivants)
– Température > 38,3 °C ou < 36 °C – Pouls > 90 bpm – Fréquence respiratoire > 20 cpm – Glycémie > 7,7 mmol/L – Leucocytes : • > 12 000/mm3 • ou < 4 000/mm3 • ou > 10 % de formes immatures – Altération des fonctions supérieures – Temps de recoloration capillaire > 2 s – Lactatémie > 2 mmol/L
Sepsis
Réponse inflammatoire systémique + infection présumée ou identifiée
Sepsis sévère
– Sepsis + lactates > 4 mmol/L – Ou hypotension artérielle avant remplissage – Ou dysfonction d’organe (une seule suffit) : • respiratoire : PaO2/FiO2 < 300 • rénale : créatininémie > 176 μmol/L • coagulation : INR > 1,5 • hépatique : INR > 4, bilirubine > 78 μmol/L • thrombocytopénie < 105/mm3 • fonctions supérieures : score de Glasgow < 13
Choc septique
Sepsis grave + hypotension artérielle malgré le remplissage vasculaire
■
au niveau cellulaire, l’activation des macrophages et des polynucléaires conduit
à la libération de nombreux médiateurs, dont l’interleukine 1 (IL1) et le Tumor Necrosis Factor (TNF), qui amplifient la réaction inflammatoire. Selon l’importance de cette réaction inflammatoire, on définit 4 grands syndromes cliniques pouvant compliquer un processus infectieux (tableau 200-1). Il en résulte : ■
une vasodilatation importante et une hypovolémie relative ;
■
la mise en jeu d’un mécanisme compensateur : stimulation sympathique (effets
chronotrope et inotrope positifs, vasoconstriction) ; ■
une altération possible de la fonction contractile du myocarde, à l’origine d’une
insuffisance cardiaque associée ; ■
une diminution de l’extraction de l’oxygène par les tissus.
D. État de choc anaphylactique ■
ITEM 211
Un 1er contact préparant avec l’allergène entraîne la synthèse d’IgE spécifiques qui
restent fixées sur la membrane des polynucléaires basophiles circulants et des mastocytes tissulaires. Un nouveau contact (contact déclenchant) produit une dégranulation des basophiles et des mastocytes et la libération d’une importante quantité de médiateurs (allergie de type immédiat – type I de la classification de Gell et Coombs). ■
L’histamine est le principal médiateur, ainsi que les leucotriènes, le thromboxane A2
et le Platelet Activating Factor (PAF). En se fixant sur les récepteurs H1, l’histamine est responsable des symptômes de l’allergie et notamment d’une intense vasodilatation. ■
Il existe des chocs dit « anaphylactoïdes », n’impliquant pas de sensibilisation ini-
tiale et dont les mécanismes sont imparfaitement connus. 53
ITEM 200
■
Il en résulte : – une hypovolémie relative par vasoplégie massive et brutale et extravasation du plasma vers l’interstitium ; – une mise en jeu des mêmes mécanismes compensateurs : stimulation sympathique (effets inotrope et chronotrope positifs, vasoconstriction) et augmentation de l’extraction tissulaire de l’oxygène.
II. CAUSES A. De l’état de choc hypovolémique* ■ *Concours Internat 2000
Hémorragie aiguë : hémorragie digestive
ITEM 205
, traumatisme grave (avec
hémothorax et/ou hémopéritoine et/ou hématome profond)
ITEM 201
, chirurgie
lourde. ■
Déshydratation extracellulaire : pertes digestives, rénales ou cutanées.
B. De l’état de choc cardiogénique ■
Infarctus du myocarde
■
Décompensation aiguë d’une cardiopathie dilatée quelle que soit son origine :
ITEM 132
.
ischémique, hypertensive, valvulaire, alcoolique, toxique (anthracyclines), primitive
ITEM 150
.
■
Myocardite aiguë : infectieuse, systémique, toxique.
■
Cardiopathie valvulaire : insuffisance aortique aiguë, insuffisance mitrale aiguë, acci-
dent de prothèse valvulaire, décompensation aiguë d’une valvulopathie chronique. ■
Contusion myocardique.
■
Insuffisance cardiaque droite aiguë : embolie pulmonaire massive, infarctus du
ventricule droit, tamponnade péricardique, pneumothorax compressif.
C. De l’état de choc septique ■
Infection à bacilles Gram négatif : pyélonéphrite, cholécystite, angiocholite, péri-
tonite, pneumopathie nosocomiale. ■
Infection à cocci Gram positif : méningococcie, pneumococcie, cellulite, infec-
tion sur cathéter. ■
Infection à bactéries anaérobies : infection des parties molles, cholécystite gangréneuse.
■
Infection fungique : septicémie à Candida, aspergillose invasive.
D. De l’état de choc anaphylactique
ITEM 211
■
Allergènes protéiques (venin d’hyménoptères, latex, aliments, pollens).
■
Haptènes (anesthésiques, antibiotiques, produits de contraste).
■
Idiopathique.
III. DIAGNOSTIC A. Diagnostic de l’état de choc Le diagnostic d’un état de choc est clinique et comprend 3 types de signes.
1. Hypotension artérielle Hypotension artérielle = pression artérielle systolique < 90 mmHg ou ≤ 30 % de la pression artérielle de référence. 54
État de choc
L’hypotension peut manquer à la phase initiale du fait de la stimulation sympathique. Une pression artérielle jugée « normale » peut aussi représenter une hypotension déjà patente chez un patient habituellement hypertendu. Il faut savoir que la perfusion de la majorité des organes dépend de la pression artérielle moyenne (PAM = 1/3 PAS + 2/3 PAD). La baisse de pression artérielle différentielle (ou pression pulsée, PP = PAS – PAD) témoigne d’un abaissement du volume d’éjection systolique. La baisse de la pression artérielle diastolique, responsable d’un élargissement de la pression artérielle différentielle, témoigne, elle, d’une vasoplégie.
2. Signes témoignant d’une hypoperfusion tissulaire ■ Oligurie : diurèse < 0,5 mL/kg/h. ■
Marbrures cutanées, froideur des téguments, cyanose des extrémités, allonge-
ment du temps de recoloration cutanée. ■
Troubles de conscience.
Les signes cutanés sont le reflet d’une vasoconstriction liée à une réaction adrénergique. Ils sont particulièrement intenses dans les chocs avec bas débit cardiaque (choc cardiogénique, choc hypovolémique). Ils sont moins marqués dans les chocs avec vasoplégie (choc septique, choc anaphylactique).
3. Signes témoignant des phénomènes d’adaptation ■ Tachycardie. ■
Polypnée.
■
Sueurs.
B. Diagnostic du retentissement viscéral ■
Reins : insuffisance rénale fonctionnelle puis nécrose tubulaire aiguë
■
Foie : foie hypoxique, souvent appelé « foie de choc », avec cytolyse et/ou cholestase.
■
Cœur : altération de la contractilité (liée à la libération de médiateurs de
ITEM 252
.
l’inflammation) et ischémie myocardique (par baisse de la pression artérielle diastolique et diminution de la perfusion coronaire). ■
Poumons : syndrome de détresse respiratoire aiguë (SDRA) par libération de
médiateurs de l’inflammation. ■
Tube digestif : ischémie de l’intestin grêle et/ou du côlon pouvant être respon-
sable d’une migration de bactéries du tube digestif vers le sang (translocation bactérienne). ■
Cerveau : troubles neurologiques.
■
Endothélium vasculaire : CIVD.
C. Diagnostic de la cause ■
Choc hypovolémique non hémorragique : contexte de déshydratation (diar-
rhée, vomissements, syndrome occlusif avec constitution d’un 3e secteur, traitement diurétique, impossibilité d’accès à l’eau, signes cliniques et biologiques de déshydratation extracellulaire. Pression artérielle pincée. 55
ITEM 200
■
Choc hypovolémique hémorragique* : contexte d’hémorragie extériorisée
(hématémèse, méléna, rectorragies, ménométrorragie, hémorragie de la délivrance,
*ECN 2009
plaie du scalp) ou occulte (réalisation systématique des touchers pelviens, recherche de sang à l’aspiration du liquide gastrique et pratique d’une échographie abdominale), signes cliniques et biologiques d’anémie. Pression artérielle pincée. ■
Choc cardiogénique : contexte d’infarctus du myocarde le plus souvent, signes
associés d’insuffisance cardiaque gauche et/ou droite, mise en évidence de troubles conductifs ou de troubles du rythme. Pression artérielle pincée. ■
Choc septique : contexte clinique et biologique infectieux (pouvant manquer à
la phase initiale). Élargissement de la pression artérielle différentielle. ■
Choc anaphylactique : contexte d’exposition allergique, signes cutanéo-
muqueux (érythème, urticaire, œdème de Quincke), respiratoires (bronchospasme, rhinorrhée), gastro-intestinaux (hypersialorrhée, douleurs abdominales, diarrhée).
D. Examens complémentaires La réalisation d’examens complémentaires n’est pas utile au diagnostic d’état de choc mais peut aider à préciser sa cause, son retentissement et évaluer la réponse à une thérapeutique : ■
bilan biologique : – ionogramme sanguin et urinaire, protidémie, urée, créatinine ; – bilan hépatique complet à la recherche d’un « foie de choc » ; – CPK et troponine Ic ; – gaz du sang et lactatémie ; – numération-formule sanguine ; – bilan d’hémostase ; – CRP, procalcitonine ; – hémocultures , examen cytobactériologique des urines et autres prélèvements bactériologiques (ponction lombaire…) ;
■
radiographie thoracique ;
L’hyperlactatémie est le témoin direct de l’anaérobiose cellulaire. La régression de cette hyperlactatémie est un témoin majeur de réponse favorable au traitement. ■
électrocardiogramme.
E. Explorations hémodynamiques Elles permettent de préciser le mécanisme du choc.
1. Échographie cardiaque L’échographie cardiaque est un examen de première intention dans l’évaluation hémodynamique des états de choc. Elle permet au cours d’une analyse morphologique de rechercher une cause cardiaque au choc (akinésie segmentaire au cours d’un infarctus du myocarde, épanchement péricardique au cours d’une tamponnade, dilatation des cavités cardiaques droites au cours d’une embolie pulmonaire, pathologie valvulaire). Elle évalue également au cours d’une analyse 56
État de choc
fonctionnelle les fonctions systolique (fraction de raccourcissement et d’éjection) et diastolique (analyse du Doppler transmitral) du ventricule gauche, la pression artérielle pulmonaire, l’existence d’une dysfonction valvulaire. Elle évalue enfin les pressions de remplissage du ventricule gauche (analyse du Doppler transmitral).
2. Cathétérisme artériel pulmonaire dit de « Swan-Ganz » Placé par voie veineuse centrale et monté dans les cavités cardiaques droites puis dans l’artère pulmonaire, il permet la mesure du débit cardiaque, des pressions de remplissage du cœur, et de la pression artérielle pulmonaire d’occlusion. Un prélèvement simultané des gaz du sang au niveau de l’artère pulmonaire et au niveau artériel périphérique permet la mesure de la saturation veineuse en oxygène (SvO2), de l’extraction tissulaire en oxygène (EO2) et de la différence artérioveineuse, égale à la différence entre les contenus artériel et veineux en oxygène (DAV = CaO2 – CvO2). En condition physiologique, l’extraction de l’oxygène est de 25 %, correspondant à une SvO2 de 75 % si la SaO2 est normale. Le caractère septique de l’état de choc est apprécié par une SvO2 anormalement élevée du fait d’une EO2 et d’une DAV anormalement basses. La SvO2 est au contraire abaissée dans les états de choc avec bas débit cardiaque. Le tableau 200-2 résume les caractéristiques hémodynamiques des états de choc. L’utilisation du cathétérisme artériel pulmonaire est aujourd’hui très discutée. Certaines équipes l’utilisent d’emblée au cours des états de choc, d’autres l’utilisent en 2e ligne après échec d’un traitement hémodynamique institué sur les données cliniques et/ou échographiques, d’autres enfin ont définitivement abandonné son utilisation.
IV. PRISE EN CHARGE L’état de choc est une urgence thérapeutique. La rapidité avec laquelle un traitement est mis en place influence indiscutablement le pronostic, l’hypoperfusion prolongée des organes étant à l’origine d’une réponse inflammatoire systémique importante.
A. Mesures générales ■
Hospitalisation urgente en réanimation et surveillance continue des paramètres
vitaux. Tableau 200-2. Caractéristiques hémodynamiques des états de choc Choc hypovolémique
Choc anaphylactique
Index cardiaque
↑
↑
↓
↑
Pressions de remplissage du ventricule gauche
↓
↓
↑
↓
Résistances artérielles systémiques
↑
↓
↑
↓
Extraction périphérique ↑ en oxygène
↓
↑
↓
↓
↑
↓
↑
SvO2
Choc cardiogénique
Choc septique
57
ITEM 200
■
Pose de voies veineuses périphériques de bon calibre et d’une voie veineuse
centrale dès que possible si l’administration d’un traitement vasopresseur puissant est nécessaire. ■
Oxygénothérapie.
■
Ventilation mécanique après intubation trachéale en cas d’insuffisance respi-
ratoire et/ou de troubles de conscience. La ventilation mécanique, en mettant au repos les muscles respiratoires, entraîne par ailleurs une économie notable de la consommation en oxygène et constitue per se un traitement des états de choc sévères, parfois nécessaire même en l’absence de signes respiratoires. ■
Pose d’un cathéter artériel périphérique, dès lors qu’une catécholamine est utili-
sée, afin de mesurer de façon continue la pression artérielle et de permettre la réalisation itérative des prélèvements biologiques. ■
Pose d’une sonde urinaire pour surveillance continue de la diurèse.
B. Traitement hémodynamique 1. Moyens disponibles ■ Remplissage vasculaire : – utile dans tous les cas (sauf choc cardiogénique avec œdème pulmonaire), il doit être débuté le plus rapidement possible. Il fait appel aux cristalloïdes (sérum physiologique) ou aux colloïdes comme les solutés macromoléculaires de type hydroxyéthylamidon (HEA) ; – la supériorité des colloïdes sur les cristalloïdes n’est pas démontrée alors qu’ils exposent à des effets secondaires plus fréquents (troubles de l’hémostase avec HEA et dextrans, allergie avec les gélatines, insuffisance rénale avec les HEA) et sont d’un coût plus élevé. Le pouvoir d’expansion volémique plus faible des cristalloïdes par rapport aux colloïdes nécessite cependant des volumes de perfusion environ 3 fois plus importants pour un même résultat volémique ; – en première intention, le remplissage vasculaire s’effectue par séquences de 500 mL de sérum physiologique en 15 min. Ces séquences sont souvent répétées jusqu’à obtention d’une PAM satisfaisante ; – le remplissage peut également faire appel aux concentrés érythrocytaires en cas de choc hémorragique ou lorsque qu’une anémie est présente au cours des autres types d’état de choc. L’objectif est alors la restauration d’une concentration en hémoglobine de 8 g/dL (ou 10 g/dL chez le coronarien). L’albumine est réservée aux hypoprotidémies ≤ 35 g/dL. ■
Catécholamines : – la dobutamine est l’agent inotrope de choix en cas de choc cardiogénique : elle est le plus souvent débutée à la posologie de 5 μg. kg−1.min−1 IVSE, pouvant être augmentée jusqu’à 20 μg.kg−1.min−1 ; – la dopamine et la noradrénaline sont les traitements utilisés dans le choc septique. Le choix va de préférence à la noradrénaline, débutée le plus souvent à 0,2 μg.kg−1.min−1 IVSE, pouvant être augmentée par palier de 0,1 μg.kg−1.min−1 selon le tableau clinique jusqu’à des posologies parfois supérieures à 5 μg.kg−1.min−1. La
58
État de choc
Tableau 200-3. Effets hémodynamiques des substances vasoactives Dobutamine
Adrénaline
Dopamine
Noradrénaline
Fréquence cardiaque
↑
↑↑
↑↑
→
Débit cardiaque
↑
↑↑
↑
→ ou ↑
↑↑
↑↑
↑↑
Pression artérielle →
dopamine est une alternative initiale possible, ce d’autant qu’elle peut être perfusée sur une voie veineuse périphérique. Elle est le plus souvent débutée à la posologie de 10 μg.kg−1.min−1 IVSE, pouvant être augmentée jusqu’à 20 μg.kg−1.min−1 ; – l’adrénaline est le traitement vasopresseur de choix lors du choc anaphylactique ; – le tableau 200-3 résume les effets hémodynamiques des substances vasoactives.
2. Objectif hémodynamique Le premier objectif hémodynamique est la restauration d’une pression artérielle moyenne, qui est la pression de perfusion tissulaire. Cet objectif se situe autour de 60 mmHg, ou plus (70–80 mmHg) chez les patients âgés et/ou hypertendus.
3. Traitement selon la cause ■ Choc anaphylactique : – adrénaline : 0,1 mg en intraveineux, renouvelable toutes les minutes si le choc persiste, puis en perfusion continue ; – remplissage vasculaire par cristalloïdes, compte tenu du risque allergique des colloïdes, notamment des dextrans et des gélatines ; – les corticoïdes et les antihistaminiques, d’utilisation fréquente, n’ont pas fait la preuve de leur efficacité. ■
Choc hypovolémique : – remplissage vasculaire, transfusion de concentrés érythrocytaires en cas de choc hémorragique ; – dopamine ou noradrénaline si le remplissage est insuffisant.
■
Choc septique : – remplissage vasculaire ; – traitement vasopresseur si le remplissage est insuffisant. L’utilisation de la noradrénaline en première intention est de plus en plus fréquente ; la dopamine est utilisée en première intention en l’absence de voie veineuse centrale.
■
Choc cardiogénique : – dobutamine ; – traitement vasopresseur en association si une hypotension artérielle persiste ; – en cas d’insuffisance cardiaque droite, le remplissage vasculaire est la première mesure thérapeutique ; – la réalisation d’une assistance circulatoire par ballon de contre-pulsion aortique ou système de circulation extracorporelle est une technique exceptionnelle pouvant être discutée en cas de choc cardiogénique réfractaire. Ces assistances sont le plus souvent temporaires en attente de récupération de la fonction cardiaque ou en attente de transplantation cardiaque. 59
ITEM 200
C. Traitement de la cause Il doit être entrepris simultanément au traitement symptomatique : ■
choc anaphylactique : éviction de l’allergène ;
■
choc hémorragique : hémostase (par chirurgie, artériographie, traitement
endoscopique) ; ■
choc cardiogénique : revascularisation par angioplastie d’un infarctus du myo-
carde, chirurgie réparatrice en cas de valvulopathie aiguë, drainage d’une tamponnade ou d’un pneumothorax compressif, thrombolyse d’une embolie pulmonaire ; ■
choc septique : – traitement antibiotique, débuté immédiatement après la réalisation rapide des prélèvements microbiologiques. Dans le cas du purpura fulminans, l’administration de ceftriaxone est entreprise immédiatement. En l’absence d’orientation diagnostique initiale, on choisit une antibiothérapie parentérale, probabiliste, par association synergique bactéricide (lors d’une infection communautaire, par exemple : céphalosporine de 3e génération associée à un aminoside et à un traitement antianaérobie par métronidazole) ; – administration de protéine C activée recombinante humaine dès lors que le choc septique associe plus de deux défaillances d’organes et en l’absence de contre-indication (risque hémorragique). Ses propriétés anticoagulantes, antithrombotiques et profibrinolytiques répondent point par point aux désordres de l’hémostase engendrés par le sepsis ; – l’administration intraveineuse de faibles doses d’hydrocortisone (200 mg/j) pendant au moins 5 jours permettrait d’obtenir une résolution plus rapide du choc et pourrait réduire la mortalité du choc septique. Ce traitement, encore controversé, reste recommandé chez les patients restant peu répondeurs au remplissage vasculaire et à l’administration d’agents vasopresseurs.
D. Traitement des complications viscérales ■
Ventilation mécanique dite « protectrice » en cas de SDRA (limitation du volume
courant et des pressions d’insufflation). ■
Hémodialyse intermittente ou hémofiltration continue en cas d’insuffisance rénale.
■
Transfusion de concentrés plaquettaires et de plasma viro-inactivé en cas de
CIVD associée à un syndrome hémorragique (voir Conférence de consensus sur la prise en charge de la CIVD). ■
Résection digestive d’une ischémie mésentérique.
E. Surveillance initiale Elle repose sur la surveillance rapprochée de la pression artérielle et sur l’appréciation des perfusions régionales par :
60
■
l’examen clinique : état neurologique, état cutané, diurèse ;
■
la biologie : lactatémie, fonction rénale, bilan hépatique, hémostase.
État de choc
CONSENSUS Prise en charge hémodynamique du sepsis sévère SRLF, SFAR, 2005
90 minutes
1. Mesures d'urgences • Unité de surveillance • Objectifs : • PAM > 65 mmHg • Diurèse > 0,5 mL/kg/h
OUI • Monitorage • O2 pour SpO2 ≥ 95 % • Remplissage (sérum phy 500 mL/15n/min qsp PAM > 65 mmHg) • Prélèvements • Contrôle du foyer infectieux
• Normalisation hémodynamique • Pas de comorbidité • Pathologie infectueuse de bon pronostic • Lactates < 4 mmol/L
NON
2. Réanimation Moyens
6 heures
• KT central et artériel • Ventilation mécanique
N O N A T T E I N T S
• Poursuite remplissage • Noradrénaline • Transfusion qsp Hgb > 8 g/dL • Remplissage • Dobutamine
• Bilan sanguin (lactates, test ACTH) • Prélèvements microbiologiques
• Contrôle du foyer infectieux • Traitements
Objectifs A T T E I N T S
• Absence d'hypoperfusion périférique • PAM > 65 mmHg • Diurèse > 0,5 mL/kg/h • SvcO2 > 70 %
CONSENSUS CIVD en réanimation SRLF, SFAR, SPLIF, 2002 SYNDROME D'ACTIVATION SYSTÉMIQUE DE LA COAGULATION
Optimisation du traitement étiologique
CIVD BIOLOGIQUE : D-Dimères > 500 μg/L + 1 critère majeur : plaquettes < 50 G/L, TP < 50 % ou 2 critères mineurs : (50 G/L < plaquettes < 100 G/L, 50 % < TP < 65 %, fibrinogène < 1 g/L)
CIVD CLINIQUE : syndrome hémorragique ou thrombotique
CIVD COMPLIQUÉE : syndrome hémorragique ou thrombotique menaçant le pronostic vital ou fonctionnel
Symdrome thrombotique
Symdrome hémorragique, acte invasif
NON
OUI
Surveillance Répétition du bilan biologique
Traitement substitutif PFC si TP < 35 % Concentrés plaquettaires si plaquettes < 50 G/L Surveillance biologique
aucun traitement spécifique de la CIVD
61
ITEM 200
Fiche
Dernier tour
État de choc L’état de choc est un syndrome regroupant les manifestations liées à une altération de l’oxygénation tissulaire. Le diagnostic d’un état de choc est clinique et repose sur : ■ une hypotension artérielle (PAS < 90 mmg) ; ■ des signes et symptômes attestant d’une dysfonction d’organe : oligurie (diurèse < 0,5 mL/kg/h), marbrures cutanées, froideur des téguments, cyanose des extrémités, allongement du temps de recoloration cutanée, troubles de conscience ; ■ des signes témoignant des phénomènes d’adaptation : tachycardie, polypnée, sueurs. Les examens complémentaires contribuent à apprécier le retentissement viscéral : ■ insuffisance rénale fonctionnelle puis nécrose tubulaire aiguë ; ■ foie hypoxique (« foie de choc ») ; ■ altération de la contractilité cardiaque et ischémie myocardique ; ■ SDRA ; ■ ischémie de l’intestin grêle et/ou du côlon ; ■ troubles neurologiques ; ■ CIVD. L’état de choc est une urgence thérapeutique : ■ traitement symptomatique : – voies veineuses périphériques et voie veineuse centrale dès que possible si l’administration d’un traitement vasopresseur puissant est nécessaire ; – oxygénothérapie ou ventilation mécanique après intubation trachéale en cas d’insuffisance respiratoire et/ou de troubles de conscience ; – pose d’un cathéter artériel périphérique dès lors qu’une catécholamine est utilisée ; – traitement hémodynamique : • remplissage vasculaire : cristalloïdes (sérum physiologique) et/ou colloïdes (HEA). Concentré érythrocytaire en cas de choc hémorragique ou d’anémie associée (objectif : restauration d’une concentration en hémoglobine de 8 g/dL, ou 10 g/dL chez le coronarien) ; • catécholamines : dobutamine en cas de choc cardiogénique ; noradrénaline en cas de choc septique (la dopamine est une alternative initiale possible) ; adrénaline en cas de choc anaphylactique ; • objectif hémodynamique : restauration d’une pression artérielle moyenne autour de 60 mmHg , ou plus chez les patients âgés et/ou hypertendus ; – traitement selon la cause : • choc anaphylactique : adrénaline, 0,1 mg en intraveineux, renouvelable toutes les minutes si le choc persiste, puis en perfusion continue ; remplissage vasculaire par cristalloïdes ; • choc hypovolémique : remplissage vasculaire, transfusion de concentrés érythrocytaires en cas de choc hémorragique ou lors de tout choc accompagné d’une anémie ; dopamine ou noradrénaline si le remplissage est insuffisant ; • choc septique : remplissage vasculaire ; noradrénaline ou dopamine ; • choc cardiogénique : dobutamine ; traitement vasopresseur en association si une hypotension artérielle persiste. En cas d’insuffisance cardiaque droite, le remplissage vasculaire est la première mesure thérapeutique. ■ traitement de la cause (il doit être entrepris simultanément au traitement symptomatique) : – choc anaphylactique : éviction de l’allergène ; – choc hémorragique : hémostase ; – choc cardiogénique : revascularisation par angioplastie d’un infarctus du myocarde , drainage d’une tamponnade ou d’un pneumothorax compressif, thrombolyse d’une embolie pulmonaire ;
u 62
État de choc
Fiche
Dernier tour
– choc septique : traitement antibiotique débuté immédiatement après la réalisation rapide des prélèvements microbiologiques ; administration de protéine C activée recombinante humaine dès lors que le choc septique associe plus de deux défaillances d’organe ; administration intraveineuse de faibles doses d’hydrocortisone (200 mg/j) si insuffisance surrénalienne relative. ■ traitement des complications viscérales : – ventilation mécanique dite « protectrice » en cas de SDRA ; – hémodialyse en cas d’insuffisance rénale ; – transfusion de concentrés plaquettaires et de plasma viro-inactivé en cas de CIVD ; – résection digestive d’une ischémie mésentérique ; ■ surveillance initiale = surveillance rapprochée de la pression artérielle et appréciation des perfusions régionales par : – examen clinique : état neurologique, état cutané, diurèse ; – biologie : lactatémie , fonction rénale, bilan hépatique, hémostase.
63
This page intentionally left blank
ITEM 211
Œdème de Quincke et anaphylaxie
OBJECTIFS ● Diagnostiquer un œdème de Quincke et une anaphylaxie. ● Prise en charge immédiate (médicaments avec leur posologie). LIENS TRANSVERSAUX ITEM 113
Allergies et hypersensibilités chez l’enfant et l’adulte : aspects épidémiologiques, diagnostiques et principes de traitement.
ITEM 114
Allergies cutanéomuqueuses chez l’enfant et l’adulte. Urticaire, dermatites atopiques et de contact.
ITEM 115
Allergies respiratoires chez l’enfant et chez l’adulte.
ITEM 200
État de choc.
CONSENSUS ● Prévention du risque allergique peranesthésique – Recommandations pour la pratique clinique – SFAR, 2001 (www.sfar.org).
POUR COMPRENDRE… ■
L’anaphylaxie regroupe les manifestations cliniques les plus graves de la réac-
tion d’hypersensibilité immédiate. L’urticaire (atteinte dermique) et l’œdème de Quincke ou angio-œdème (atteinte hypodermique) en sont les présentations les plus courantes, le choc anaphylactique en est la présentation la plus sévère. ■
On estime le nombre de réactions anaphylactiques sévères à 50–100 par million
d’habitants en France, avec un taux de mortalité de 0,5 %. Les médicaments constituent la première cause d’accident anaphylactique (les bêtalactamines étant la première cause hospitalière, les curares la première cause peropératoire) et les aliments la seconde. Dans 10 à 20 % des cas, aucune cause n’est retrouvée.
65
ITEM 211
■
Dans ses formes sévères, l’anaphylaxie est une urgence vitale dont le traitement
repose sur l’adrénaline. Une rechute survenant dans 20 % des cas dans les 24 premières heures, une hospitalisation pour surveillance est toujours justifiée. ■
L’éducation des personnes est une mesure préventive indispensable.
I. PHYSIOPATHOLOGIE ■
ITEM 113
L’anaphylaxie est liée à une réaction d’hypersensibilité immédiate (du type I
de la classification de Gel et Coombs). Lors d’un premier contact avec l’allergène (contact préparant), des immunoglobulines de type E (IgE) sont synthétisées par les lymphocytes B et se fixent par leur fragment Fc à des récepteurs membranaires des polynucléaires basophiles circulants et des mastocytes tissulaires. Cette étape est cliniquement asymptomatique. ■
Après un intervalle libre nécessaire à la production de ces IgE, une réexposi-
tion à l’allergène (contact déclenchant) produit une dégranulation basophile et mastocytaire avec libération de nombreux médiateurs, au premier rang desquels l’histamine, mais également des facteurs chimiotactiques, des neutrophiles et éosinophiles, de la tryptase et d’autres enzymes, des leucotriènes, des prostaglandines, des facteurs d’activation plaquettaire (PAF), du thromboxane… ■
La stimulation des récepteurs H1 par l’histamine est responsable d’une
bronchoconstriction, d’une vasodilatation et d’une augmentation de la perméabilité capillaire, responsable d’une extravasation du plasma vers l’interstitium. La plupart des autres médiateurs libérés participent directement ou non à ces 3 phénomènes. ■
Il existe des manifestations anaphylactoïdes au cours desquelles il existe une
activation des mastocytes et basophiles et une histaminolibération non spécifique, c’est-à-dire non médiée par les IgE, mais soit liée à une action toxique directe de la substance sur la membrane basomastocytaire, soit liée à une activation mastocytaire par des facteurs du complément. Dans ce cas, la sensibilisation préalable n’est pas nécessaire. La symptomatologie clinique est comparable, bien que généralement moins sévère du fait d’une dégranulation moins massive.
II. CAUSES Dans 10 à 20 % des cas, aucune cause n’est retrouvée. Lorsque la cause est identifiée, elle est médicamenteuse dans 50 % des cas, alimentaire dans 25 % des cas, venimeuse dans 25 % des cas. On distingue les allergènes protéiques, polysaccharidiques et les haptènes.
A. Allergènes protéiques ■
Venins d’hyménoptères (abeilles, bourdons, guêpes, frelons).
■
Nombreux aliments : arachides et autres fruits secs, moutarde, crustacés et pois-
sons, lait, sésame, œufs, fruits (fraises, bananes, avocats, kiwis) et légumes.
66
■
Certains vaccins (anatoxines et vaccins préparés sur œuf).
■
Sérum d’origine animale.
Œdème de Quincke et anaphylaxie
■
Certaines hormones (insuline, ACTH), certaines enzymes (streptokinase, chymo-
trypsine). ■
Pollens.
■
Latex : il existe une sensibilisation croisée avec les bananes, les châtaignes, les
avocats, les kiwis.
B. Allergènes polysaccharidiques ■
Dextrans.
■
Hydroxyéthylamidons.
C. Haptènes Ce sont de petites molécules se liant à une protéine porteuse et la rendant immunogène : ■
antibiotiques (bêtalactamines notamment, sulfamides) ;
■
anti-inflammatoires non stéroïdiens ;
■
anesthésiques généraux ;
■
myorelaxants (responsables de 70 % des accidents anaphylactiques peropératoires) ;
■
produits de contraste iodés ;
■
vitamines (thiamine, acide folique) ;
■
antiseptique (chlorhexidine).
L’effort est une cause d’anaphylaxie. Il s’agit en fait en fait d’une anaphylaxie alimentaire se manifestant lors d’un effort physique.
III. DIAGNOSTIC A. Diagnostic clinique La symptomatologie clinique est variable, des formes les plus bénignes (conjonctivite, rhinite, érythème isolés) aux formes les plus graves (œdème de Quincke, asthme aigu grave, choc anaphylactique). Les signes cutanéomuqueux sont les plus fréquents, et orientent souvent le diagnostic face aux autres manifestations (respiratoires, cardiovasculaires, gastro-intestinales), surtout lorsqu’ils apparaissent dans les suites immédiates d’une exposition à une substance. Les signes cutanéomuqueux peuvent manquer s’il existe d’emblée un état de choc et n’apparaîtront que secondairement lors de la restauration hémodynamique.
1. Signes cutanéomuqueux ITEM 114 ■ Conjonctivite (hyperhémie conjonctivale, larmoiement). ■
Rhinite (rhinorrhée, sensation d’obstruction nasale).
■
Urticaire (atteinte dermique) : papules ou plaques érythémateuses, parfois plus
claires en leur centre, prurigineuses, évoluant par poussées, d’apparition brutale et de résolution rapide, d’abord localisées à la face, au cou et à la région antérieure du thorax, secondairement généralisées. ■
Œdème de Quincke (atteinte hypodermique) : tuméfaction non érythémateuse, non
prurigineuse mais responsable d’une sensation de tension touchant essentiellement la face et ses muqueuses (lèvres, langue, palais, pharynx, épiglotte, larynx). L’œdème laryngé est alors responsable d’une dyspnée inspiratoire avec cornage et stridor. 67
ITEM 211
2. Signes respiratoires ■ Toux.
ITEM 115
■
Dyspnée inspiratoire en rapport avec un œdème laryngé.
■
Dyspnée expiratoire en rapport avec un bronchospasme pouvant réaliser un
asthme aigu grave. ■
Œdème pulmonaire lésionnel rare.
3. Signes cardiovasculaires ITEM 200 ■ État de choc lié à une hypovolémie relative (vasoplégie massive et brutale et extravasation du plasma vers l’interstitium). Il existe au départ une stimulation sympathique compensatrice avec effets inotrope et chronotrope positifs mais la pérennisation du choc est responsable d’une libération dans la circulation de substances inotropes négatives, transformant un choc initialement hyperkinétique (haut débit cardiaque) en choc hypokinétique (bas débit cardiaque). ■
Une atteinte myocardique directe de l’anaphylaxie est évoquée notamment au
cours des accidents anesthésiques. ■
Si l’état de choc n’est pas rapidement traité, un syndrome de défaillance multi-
viscérale s’installe.
4. Signes gastro-intestinaux ■ Nausées et vomissements. ■
Douleurs abdominales.
■
Diarrhée parfois hémorragique.
B. Examens complémentaires 1. Bilan biologique Il dépend de la gravité du tableau clinique. Dans les tableaux les plus graves, il associe : ■
ionogramme sanguin et urinaire, urée, créatinine ;
■
bilan hépatique complet ;
■
CPK et troponine Ic ;
■
gaz du sang et lactatémie ;
■
numération et formule sanguine ;
■
bilan d’hémostase ;
■
CRP ;
■
hémocultures, examen cytobactériologique des urines ± autres prélèvements
bactériologiques.
2. Autres examens complémentaires ■ Radiographie thoracique. ■
Électrocardiogramme.
3. Bilan allergologique Le diagnostic du mécanisme de la réaction sera fondé sur un bilan allergologique immédiat ; le diagnostic de l’agent responsable sera porté à la suite d’un bilan allergologique secondaire. 68
Œdème de Quincke et anaphylaxie
a) Bilan allergologique immédiat Il repose sur le dosage de l’histamine et surtout de la tryptase plasmatique : ■
histamine plasmatique (sur plasma, tube EDTA) : l’histaminolibération s’accom-
pagne d’un pic en 5 minutes et d’une décroissance progressive en 1 heure. La mise en évidence de cette histaminolibération ne présage pas de son mécanisme anaphylactique ou anaphylactoïde. La méthyl-histamine, principal métabolite de l’histamine, peut être détectée dans les 24 premières heures suivant l’épisode mais ce dosage n’est pas assez spécifique pour être recommandé ; ■
tryptase sérique (sur sérum, tube sec) : pic 1 heure après la survenue de choc
puis diminution progressive en 10 heures. Son dosage est particulièrement intéressant car du fait d’une demi-vie longue, la tryptase est plus facilement détectable que l’histamine, et une augmentation franche est en faveur du mécanisme anaphylactique ; ■
IgE spécifiques (sur sérum, tube sec) : les IgE spécifiques de certains allergènes
(venins, latex, antibiotiques, agents anesthésiques) sont dosables par technique radio-immunologique (radio-allergo-sorbent test : RAST).
b) Bilan allergologique secondaire Il se fait, au moins un mois après l’épisode aigu, au cours d’une consultation allergologique, où un interrogatoire précis est réalisé, permettant d’orienter les investigations : ■
les tests cutanés épidermiques (prick-tests), intradermiques (IDR), ou par
contact (patch-tests) sont toujours réalisés en première intention ; ■
le dosage des IgE spécifiques sériques est proposé si le bilan cutané est négatif
et l’histoire clinique évocatrice d’une cause particulière ; ■
un test de provocation labial et/ou oral à l’aliment suspecté peut être proposé
si le bilan est négatif, le plus souvent alors en hospitalisation. Ce test comporte en effet un risque de récidive grave pour le patient. Son indication est donc discutable et doit être bien pesée dans les suites d’un accident anaphylactique grave.
C. Diagnostic différentiel 1. Des manifestations anaphylactiques ■ Accident anaphylactoïde : lié à une histaminolibération non médiée par les IgE. Les causes les plus fréquentes sont alimentaires (poisson cru, tomate, fraise, vin blanc, crustacé) ou médicamenteuses (vancomycine). ■
Œdème angioneurotique : déficit familial autosomique dominant quantita-
tif (type I) ou qualitatif (type II) en inhibiteur de la C1 estérase (C1Inh), ou maladie acquise liée à une consommation en C1Inh (type I : cancer solide, lymphome, certaines infections) ou à un auto-anticorps anti-C1Inh (type II : maladie autoimmune). Il se manifeste par un angio-œdème touchant la muqueuse respiratoire (dyspnée), digestive (douleurs abdominales) et urinaire (rétention aiguë d’urines), survenant spontanément ou après un stress, un traumatisme, une chirurgie, des menstruations, une grossesse, un accouchement, une prise médicamenteuse (œstroprogestatifs). Le dosage du complément montre une diminution de la fraction C4 (fractions C1q et C3 normales), associée à une altération qualitative ou 69
ITEM 211
quantitative du C1Inh. Les crises sévères justifient d’un traitement par concentré en C1Inh. Le traitement de fond en cas de crise fréquente et/ou grave ou avant toute intervention repose sur le Danazol®. ■
Syndrome carcinoïde.
2. Des manifestations respiratoires ■ Crise d’asthme. ■
Laryngite.
■
Épiglottite.
■
Inhalation d’un corps étranger.
3. Du choc anaphylactique ■ Choc septique. ■
Choc hémorragique.
■
Choc cardiogénique.
IV. PRISE EN CHARGE C’est une urgence thérapeutique comprenant notamment l’administration d’adrénaline en cas de choc ou d’œdème de Quincke. La rapidité avec laquelle un traitement est mis en place influence indiscutablement le pronostic des formes graves.
A. Mesures générales ■
Éviction de l’allergène.
■
Hospitalisation indispensable, les rechutes étant possibles 24 heures après
l’épisode initial.
B. En cas de choc anaphylactique
ITEM 200
■
Étendre le patient en décubitus dorsal et lui surélever les jambes.
■
Assurer la liberté des voies aériennes.
■
Oxygénothérapie au masque à haute concentration. L’intubation est rarement
nécessaire compte tenu de la réversibilité rapide des symptômes après traitement. ■
Mise en place d’une voie veineuse périphérique ne devant pas retarder l’admi-
nistration d’adrénaline. ■
Adrénaline : – elle s’oppose point par point aux effets systémiques induits par la libération des différents médiateurs : bronchodilatatrice (effet bêta-2), vasoconstrictrice (effet alpha), inotrope positive (effet bêta-1) et inhibe la dégranulation basophile et mastocytaire. Elle est indiquée dès que le patient est hypotendu ; – par voie IM d’abord en l’absence de voie veineuse : 0,5 mg (0,01 mg/kg chez l’enfant), renouvelable après quelques minutes selon l’évolution de la pression artérielle ; – par voie IV : bolus de 0,1 mg renouvelable toutes les minutes en fonction de l’évolution de la pression artérielle, puis perfusion continue si l’hypotension est
70
Œdème de Quincke et anaphylaxie
persistante. Un monitorage cardiovasculaire est indispensable car l’adrénaline peut s’accompagner d’hypertension artérielle, de troubles du rythme. ■
Chez la femme enceinte, l’éphédrine (bolus de 10 mg) serait préférable à l’adré-
naline, en diminuant le risque d’effondrement du débit utéroplacentaire. ■
Remplissage vasculaire : par cristalloïde compte tenu du risque allergique des
colloïdes et notamment des dextrans et des gélatines. ■
Les corticoïdes et les antihistaminiques H1 (± H2) n’ont pas fait la preuve
de leur efficacité en cas de choc. Leur utilisation, fréquente cependant, ne se justifie qu’en raison du risque d’évolution prolongée des manifestations anaphylactiques.
C. En cas de bronchospasme Bronchodilatateurs : aérosols bêta-2-mimétiques.
D. En cas d’œdème de Quincke ■
Oxygénothérapie au masque à haute concentration. L’intubation est rarement
nécessaire compte tenu de la réversibilité rapide des symptômes après traitement. ■
Mise en place d’une voie veineuse périphérique ne devant pas retarder l’admi-
nistration d’adrénaline. ■
Adrénaline : – par voie IM d’abord, en l’absence de voie veineuse : 0,5 mg (0,01 mg/kg chez l’enfant) ; – par voie IV : bolus de 0,1 mg. Un monitorage cardiovasculaire est indispensable car l’adrénaline peut s’accompagner d’hypertension artérielle, de troubles du rythme.
E. Prévention ■
Le patient est informé du diagnostic d’anaphylaxie, du produit suspecté d’en
avoir été responsable, du risque vital en cas de réexposition et de la nécessité de pratiquer un bilan allergologique 4 semaines plus tard. ■
Une liste de médicaments ou d’aliments susceptibles de contenir l’agent causal
doit être remise au patient. ■
Chez les patients ayant eu une manifestation sévère, une prescription d’adréna-
line en seringue prête à l’emploi (Anahelp® ou Anapen®) est faite et les modalités d’administration sont expliquées : injection sur la face antérolatérale de la cuisse en cas de malaise, de gêne pour avaler, de gêne pour parler, de sensation d’asphyxie. ■
En cas d’allergie médicamenteuse, un certificat médical signalant la sensibilisa-
tion et son niveau de sévérité doit être remis au patient. ■
En cas d’allergie par venin d’abeille ou de guêpe, le traitement repose sur la
désensibilisation spécifique et est indiqué si la manifestation anaphylactique a été sévère et si le bilan cutané ou biologique est positif. ■
Enfin, chez le sujet à risque de choc anaphylactique, le remplacement d’un éven-
tuel traitement bêtabloquant, parce qu’il diminue la réponse à l’adrénaline, doit être discuté. 71
ITEM 211
CONSENSUS Prise en charge d’un choc anaphylactique SFAR, 2001 Signes cliniques ■
Grade I : signes cutanéomuqueux généralisés (érythème, urticaire avec ou sans œdème
angioneurotique). ■
Grade II : atteinte multiviscérale modérée (signes cutanéomuqueux, hypotension, tachycar-
die, hyperréactivité bronchique). ■
Grade III : atteinte multiviscérale sévère menaçant la vie ; collapsus, tachycardie ou brady-
cardie, troubles du rythme cardiaque, bronchospasme. Les signes cutanés peuvent être absents ou n’apparaître qu’après la remontée tensionnelle. ■
Grade IV : arrêt circulatoire et/ou respiratoire.
Traitement ■
Arrêt si possible de l’injection du produit suspecté.
■
Information de l’équipe chirurgicale (abstention, simplification, accélération ou arrêt du
geste chirurgical). ■
Oxygène pur, voie veineuse efficace, contrôle rapide des voies aériennes.
■
Adrénaline IV par titration, toutes les 1 à 2 min, en fonction du grade : – grade I : pas d’adrénaline ; – grade II : bolus de 0,01 à 0,02 mg ; – grade III : bolus de 0,1 à 0,2 mg. La tachycardie ne contre-indique pas l’utilisation d’adrénaline. – grade IV (arrêt circulatoire) : • massage cardiaque externe ; • adrénaline : bolus de 1 mg toutes les 1 à 2 minutes puis 5 mg à partir de la 3e injection, à renouveler ; • relais par l’adrénaline en perfusion continue : 0,05 à 0,1 mg.kg−1.min−1.
■
Remplissage vasculaire concomitant : cristalloïdes isotoniques (30 mL.kg−1) puis amidons
(30 mL.kg−1). Cas particuliers ■
Bronchospasme : – salbutamol (Ventoline®) ; – si résistance ou si forme d’emblée sévère : salbutamol IV, bolus de 100 et 200 mg, puis perfusion continue (5 à 25 mg.min−1) ; – formes les plus graves : perfusion continue d’adrénaline ; – les corticoïdes ne représentent pas le traitement de première intention.
■
Femme enceinte : – éphédrine : 10 mg IVD toutes les 1 à 2 minutes (dose totale : 0,7 mg.kg−1) et décubitus latéral gauche ; – si inefficacité de l’éphédrine, donner rapidement de l’adrénaline.
■
Patient traité par bêtabloquants : – augmenter la posologie d’adrénaline ; – si inefficacité de l’adrénaline : glucagon, 1 à 2 mg IVD à renouveler toutes les 5 minutes ; – collapsus cardiovasculaire réfractaire à l’adrénaline : noradrénaline, 0,1 mg.kg−1.min−1).
Investigations allergologiques ■
Prélèvements immédiats : – quoi ? Dosage histamine, tryptase et IgE spécifiques (curares, latex, thiopental) ;
72
Œdème de Quincke et anaphylaxie
– quand ? 30 à 60 minutes après la réaction ; – comment ? 1 tube sec et 1 tube EDTA au laboratoire dans les 2 h ou stockage à 4 °C pendant 12 h au maximum. ■
Tests cutanés secondaires : – quand ? 4 à 6 semaines après ; – où ? Centre diagnostique d’allergoanesthésie ; – documents à joindre : résultats des prélèvements immédiats, feuille d’anesthésie ; – déclaration au centre régional de pharmacovigilance.
73
ITEM 211
Fiche
Dernier tour
Œdème de Quincke et anaphylaxie L’anaphylaxie est une réaction d’hypersensibilité immédiate : après un intervalle libre, une réexposition à l’allergène produit une dégranulation basomastocytaire avec libération de nombreux médiateurs (histamine ++), responsables : ■ d’une bronchoconstriction ; ■ d’une vasodilatation ; ■ d’une augmentation de la perméabilité capillaire ; Causes : ■ dans 10 à 20 % des cas, aucune cause n’est retrouvée ; ■ lorsque la cause est identifiée, elle est : – médicamenteuse dans 50 % des cas (antibiotiques, AINS, anesthésiques généraux, myorelaxants) ; – alimentaire dans 25 % des cas (arachides, crustacés, poissons, fruits) ; – venimeuse dans 25 % des cas (venins d’hyménoptères). Signes : ■ les signes cutanéomuqueux orientent vers la cause anaphylactique : – conjonctivite, rhinite ; – urticaire (atteinte dermique) ; – œdème de Quincke (atteinte hypodermique) : tuméfaction non érythémateuse, non prurigineuse, responsable d’une sensation de tension touchant essentiellement la face et ses muqueuses ; ■ signes respiratoires : – toux ; – dyspnée inspiratoire (œdème laryngé) ; – dyspnée expiratoire (bronchospasme) ; – œdème pulmonaire lésionnel ; ■ signes cardiovasculaires : état de choc ; ■ signes gastro-intestinaux : – nausées et vomissements ; – douleurs abdominales ; – diarrhée parfois hémorragique. L’œdème angioneurotique, déficit quantitatif ou qualitatif familial autosomique dominant en inhibiteur de la C1 estérase (C1Inh), ou consommation acquise en C1Inh (cancer solide, lymphome, infections, maladies auto-immunes), est le diagnostic différentiel principal. Bilan : ■ bilan allergologique immédiat : – histamine plasmatique : pic en 5 minutes, décroissance progressive en 1 heure. Ne distingue pas les mécanismes anaphylactiques ou anaphylactoïdes ; – tryptase sérique : pic en 1 heure, diminution progressive en 10 heures. Une augmentation franche est en faveur du mécanisme anaphylactique ; – IgE spécifiques : pour certains allergènes (venins, latex, antibiotiques) ; ■ bilan allergologique secondaire (au moins un mois après l’épisode aigu) : – test cutanés en première intention ; – IgE spécifiques si bilan cutané négatif ; – test de provocation labial et/ou oral discuté si le bilan est négatif (au cours d’une hospitalisation) ; – dosage du complément pour le diagnostic d’œdème angioneurotique : diminution de la fraction C4, fractions C1q et C3 normales, altération qualitative ou quantitative du C1Inh. Prise en charge : ■ urgence thérapeutique ;
▲
74
Œdème de Quincke et anaphylaxie
Fiche ■ ■ ■
■ ■
■
Dernier tour
éviction de l’allergène ; hospitalisation (rechutes fréquentes 24 heures après l’épisode initial) ; en cas de choc anaphylactique : – patient étendu en décubitus dorsal, jambes surélevées ; – assurer la liberté des voies aériennes ; – oxygénothérapie au masque à haute concentration ; l’intubation est rarement nécessaire (réversibilité rapide des symptômes après traitement) ; – pose d’une voie veineuse (ne doit pas retarder l’administration d’adrénaline) ; – adrénaline (indiquée dès que le patient est hypotendu) : par voie IM en l’absence de voie veineuse (0,5 mg), ou par voie IV (bolus de 0,1 mg renouvelable toutes les minutes) ; – monitorage cardiovasculaire (risque d’HTA, de troubles du rythme) ; – remplissage vasculaire : par cristalloïde (risque allergique des colloïdes) ; – les corticoïdes et les antihistaminiques H1 (± H2) n’ont pas fait la preuve de leur efficacité en cas de choc. Leur utilisation, fréquente cependant, ne se justifie qu’en raison du risque d’évolution prolongée des manifestations anaphylactiques ; en cas de bronchospasme : bronchodilatateurs (aérosols bêta-2-mimétiques) ; en cas d’œdème de Quincke : – oxygénothérapie au masque à haute concentration ; – pose d’une voie veineuse (ne doit pas retarder l’administration d’adrénaline) ; – adrénaline (voir supra) ; prévention : – patient informé du diagnostic d’anaphylaxie, du produit suspecté, du risque vital, de la nécessité de pratiquer un bilan allergologique à 1 mois ; – liste de médicaments ou d’aliments suspectés remise au patient ; – si manifestation sévère : prescription d’adrénaline en seringue prête à l’emploi (injection sur la face antérolatérale de la cuisse en cas de malaise, de gêne pour avaler, de gêne pour parler, de sensation d’asphyxie) ; – si allergie médicamenteuse : certificat médical (sensibilisation, sévérité) ; – si allergie par venin (abeille ou guêpe) : désensibilisation spécifique possible ; – remplacement d’un éventuel traitement bêtabloquant chez sujet à risque.
75
This page intentionally left blank
ITEM 214
Principales intoxications aiguës
OBJECTIFS ● Diagnostiquer une intoxication par les psychotropes, les médicaments cardiotropes, le CO, l’alcool. ● Identifier les situations d’urgence et planifier leur prise en charge. LIENS TRANSVERSAUX ITEM 44
Risque suicidaire de l’enfant et de l’adulte : identification et prise en charge.
ITEM 193
Détresse respiratoire aiguë.
ITEM 200
État de choc.
ITEM 230
Coma non traumatique.
CONSENSUS ● Intoxications graves – Recommandations d’experts – SRLF, octobre 2006 (www.srlf.org). ● Intoxication aiguë à la chloroquine – Conférence de consensus – SRLF, 13 novembre 1987 (www.slrf.org). ● Repérer et traiter les intoxucations oxycarbonées – Recommandations du Conseil supérieur d’hygiène publique de France, 18 mars 2005 (www.sante.gouv.fr). ● L’ivresse aiguë dans les services d’accueil des urgences – Actualisation de la conférence de consensus de 1992 – SFMU, 2006 (www.sfmu.org).
POUR COMPRENDRE… ■
L’intoxication est un motif fréquent d’admission aux urgences et en réanimation
dont la mortalité globale est faible, inférieure à 1 %, pouvant cependant atteindre 10 % pour certains toxiques cardiotropes. ■
La tentative de suicide est la cause d’intoxication la plus fréquente chez l’adulte
(90 %). Elle est le plus souvent liée à la prise de psychotropes (85 %) et est souvent polymédicamenteuse. ■
L’intoxication accidentelle domestique est la cause la plus fréquente chez
l’enfant (95 %). 77
ITEM 214
■
L’altération de la conscience est le symptôme le plus fréquent mais la gravité est
plus souvent liée à : – l’atteinte cardiovasculaire, lors de l’exposition à un traitement vasoplégiant et/ou inotrope négatif et/ou responsable de troubles conductifs ou rythmiques ; – l’atteinte respiratoire lorsque le coma se complique d’une pneumopathie d’inhalation ; – la rhabdomyolyse et ses conséquences (insuffisance rénale, hyperkaliémie) lorsque le coma a entraîné une immobilisation prolongée. ■
Comme dans tout bilan de coma, la recherche immédiate d’une hypoglycémie
par la réalisation d’une glycémie capillaire est indispensable. Une cause toxique au coma ne doit pas faire exclure une autre origine, traumatique notamment. ■
L’intoxication médicamenteuse volontaire justifie dans tous les cas une hospitali-
sation même si aucun signe de gravité n’est retenu car : – la symptomatologie peut être retardée ; – une évaluation psychiatrique du risque de récidive est indispensable. ■
L’intoxication oxycarbonée est une intoxication grave, responsable de centaines
de décès par an en Europe et aux États-Unis. Sa fréquence reste élevée du fait de l’utilisation de moyens de chauffage vétustes ou mal utilisés et du calfeutrage des habitations. À côté du risque de décès au cours de l’intoxication aiguë, les risques de séquelles neurologiques à long terme doivent être connus.
I. DIAGNOSTIC L’anamnèse est l’élément principal du diagnostic. L’analyse toxicologique est rarement utile lorsque l’enquête anamnestique a pu être bien conduite.
A. Anamnèse Elle doit permettre de déterminer : ■
les circonstances de l’intoxication : – la tentative de suicide : intoxication la plus fréquente chez l’adulte (femmes notamment), le plus souvent liée à l’ingestion de médicaments faisant partie du traitement de l’intoxiqué et/ou de son entourage ; – l’intoxication accidentelle domestique : intoxication la plus fréquente chez l’enfant. Chez l’adulte, elle est le plus souvent due à un produit ménager déconditionné ; – l’intoxication professionnelle : souvent liée à une erreur de manipulation d’un toxique connu ; – l’overdose : diagnostiquée chez un toxicomane connu, elle doit faire rechercher des traces d’injection cutanée ; – le surdosage médicamenteux involontaire : chez les enfants et les personnes âgées ; – enfin, très rarement l’intoxication peut être criminelle : l’analyse toxicologique a alors un intérêt médicolégal ;
■
l’ensemble des substances ingérées, injectées ou inhalées, les intoxications étant
le plus souvent polymédicamenteuses ; ■
78
la dose supposée à laquelle le patient est exposé pour chacune des substances ;
Principales intoxications aiguës
■
les modalités d’administration ;
■
l’heure de la prise et donc le délai entre l’intoxication et la prise en charge.
B. Symptômes 1. Température ■ Hypothermie chez un patient comateux exposé accidentellement au froid (intoxication alcoolique ou par psychotrope). ■
Hyperthermie liée au toxique lui-même (neuroleptique, médicament atropinique,
cocaïne, amphétamine, ecstasy, syndrome sérotoninergique) ou à une pneumopathie d’inhalation.
2. Symptômes neurologiques Ce sont les plus fréquents, 85 % des intoxications médicamenteuses étant liées à la prise de psychotropes : ■
ITEM 230
coma plus ou moins profond, sans autres signes de localisation, réversible (la
présence de signes de localisation ou l’absence de réveil complet doivent conduire à la réalisation d’une imagerie cérébrale). On distingue : – le coma calme : benzodiazépines et assimilés, barbituriques, carbamates, phénothiazines sédatives, opiacés, phénytoïne, valproate de sodium ; – le coma agité : antidépresseurs tricycliques, antihistaminiques, butyrophénones et phénothiazines pipérazinées, médicaments hypoglycémiants ; ■
autres signes neurologiques d’orientation : – hypotonie (benzodiazépines, barbituriques, carbamates) ; – hypertonie pyramidale (antidépresseurs, monoxyde de carbone, hypoglycémie) ou extrapyramidale (phénothiazines pipérazinées) ; – crises convulsives ou comitialité infraclinique : antidépresseurs tricycliques, phénothiazines, lithium, carbamazépine, théophylline, dextropropoxyphène, cocaïne, amphétamines, médicaments hypoglycémiants ; – myoclonies : antidépresseurs tricycliques, lithium, inhibiteurs spécifiques de la recapture de la sérotonine ; – myosis serré : opiacés ; – mydriase peu réactive : antidépresseurs tricycliques et autres médicaments ayant des propriétés atropiniques, cocaïne, amphétamines, inhibiteurs spécifiques de la recapture de la sérotonine ; – hallucinations : antihistaminiques, médicaments atropiniques, cannabis, LSD.
3. Symptômes respiratoires ITEM 193 ■ L’hypoventilation d’origine centrale (bradypnée, acidose respiratoire) doit être particulièrement recherchée car elle peut conduire à l’arrêt respiratoire. ■
Les signes respiratoires sont sinon liés à une atélectasie chez un patient immobi-
lisé longtemps au sol ou à une pneumopathie d’inhalation.
4. Symptômes cardiovasculaires On observe schématiquement
ITEM 200
:
■
une vasoplégie ;
■
et/ou une dépression myocardique ;
■
et/ou des troubles du rythme ou de la conduction. 79
ITEM 214
5. Signes cutanés Lésions de compression par immobilisation prolongée faisant craindre une rhabdomyolyse, traces d’injection intraveineuse.
C. Examens biologiques Ils orientent le diagnostic et permettent d’évaluer les complications : ■
hypoglycémie : insuline et hypoglycémiants oraux, alcool ;
■
hypokaliémie : chloroquine et théophylline ;
■
hyperkaliémie : digitaliques ;
■
trou osmolaire : se mesure par la différence entre l’osmolarité mesurée au labo-
ratoire par l’abaissement cryoscopique et l’osmolarité calculée. Cette différence est normalement inférieure à 10 mOsm.L−1. Un trou osmolaire élevé indique la présence dans le plasma d’une molécule osmotiquement active non dosée : intoxication par alcool éthylique, éthylène glycol (antigel) ou méthanol ; ■
créatine phosphokinase (CPK) : rhabdomyolyse liée à une immobilisation pro-
longée ; ■
insuffisance rénale : fonctionnelle (déshydratation) ou organique par nécrose
tubulaire (état de choc, rhabdomyolyse). Certains toxiques ont une néphrotoxicité directe (métaux lourds…) ; ■
hépatite cytolytique : intoxications par paracétamol ou lors d’un syndrome
phalloïdien. ■
Osmolarité calculée = 2 × 3 [Na+] + [Urée] + [Glucose]
■
Trou osmolaire = osmolarité mesurée – osmolarité calculée
D. Électrocardiogramme Sa réalisation doit être systématique (tableau 214-1).
E. Examens radiologiques ■
Radiographie thoracique : indispensable, à la recherche d’une pneumopathie
d’inhalation ou d’une atélectasie.
Tableau 214-1. Anomalies électriques observées au cours des intoxications Anomalie électrique
80
Toxidrome ou traitement responsable
Tachycardie
Syndrome atropinique, syndrome adrénergique
Bradycardie
Traitement bêtabloquant, traitement inhibiteur calcique, effet stabilisant de membrane, syndrome opioïde
Troubles du rythme ventriculaire
Syndrome adrénergique, traitement digitalique, effet stabilisant de membrane
Troubles de la conduction auriculoventriculaire
Traitement digitalique, effet stabilisant de membrane
Troubles de la conduction intraventriculaire
Effet stabilisant de membrane
Élargissement de l’intervalle QT et torsades de pointe
Cordarone®, effet stabilisant de membrane
Principales intoxications aiguës
■
Abdomen sans préparation chez un patient suspect d’être un body-packer, pour
recherche d’emballages de produits toxiques : cocaïne le plus souvent transportée sous forme de boulettes dans le tube digestif et dont la fissuration expose au risque d’intoxication aiguë très sévère. ■
Scanner cérébral : dès lors que le contexte toxicologique n’est pas bien établi ou
que le réveil est retardé.
F. Toxidrome Le diagnostic de l’intoxication repose essentiellement sur la mise en évidence d’un toxidrome, c’est-à-dire un ensemble de symptômes cliniques, biologiques et/ou électrocardiographiques évoquant une pathologie toxique : ■
syndrome de myorelaxation : coma calme, hypotonique, hyporéflexique, sans
signe de localisation, ± dépression respiratoire (benzodiazépines et apparentés, barbituriques, carbamates, certaines phénothiazines, alcool) ; ■
syndrome atropinique : syndrome confusionnel, hallucinations, dysarthrie,
tremblements, agitation, mydriase peu réactive, tachycardie sinusale, rétention aiguë d’urine, douleurs abdominales, constipation, soif et sécheresse cutanéomuqueuse (antidépresseurs tricycliques, phénothiazines et butyrophénones, quinidine, atropine, antihistaminiques, antiparkinsoniens, datura) ; ■
effet quinidine-like ou effet stabilisant de membrane : association de troubles
de la conduction intraventriculaire et de troubles hémodynamiques liés à un blocage du flux sodique entrant. Cet effet concerne toutes les cellules excitables pour lesquelles le potentiel d’action joue un rôle important, au premier rang desquelles la cellule myocardique (effet chronotrope, inotrope, dromotrope et bathmotrope négatif) et la cellule musculaire lisse vasculaire (vasoplégie) : antiarythmiques de classe I, certains bêtabloquants, antidépresseurs tricycliques, chloroquine et quinine, dextropropoxyphène, phénothiazines, carbamazépine, cocaïne ; ■
syndrome adrénergique : hyperthermie, agitation, convulsions, hypertension,
ischémie myocardique, tachycardie, hyperglycémie, hypokaliémie, hyperleucocytose (théophylline, amphétamines, cocaïne, LSD, éphédrine) ; ■
syndrome sérotoninergique : hyperthermie, agitation ou coma, hallucinations,
myoclonies, hyperréflexie, mydriase, hypersudation, frissons, tremblements, diarrhée (IMAO, ISRS, lithium, tricycliques, ecstasy) ; ■
syndrome d’hyperthermie maligne : hyperthermie > 40 °C, hypertonie, rhabdo-
myolyse (neuroleptiques, anesthésiques halogénés, ecstasy) ; ■
syndrome opioïde : trouble de la vigilance, bradypnée et apnées, myosis serré
bilatéral, nausées, vomissements, iléus, prurit, bradycardie, hypotension (opiacés).
G. Tests diagnostiques et/ou thérapeutiques : antidotes ■
Naloxone (Narcan®) : 0,1 mg IV toutes les 2 à 3 min jusqu’à obtention d’une ven-
tilation spontanée efficace, lors d’une intoxication par morphinique. Son seul effet secondaire est une levée brutale de l’analgésie chez un patient traité par morphinique ou un réveil explosif avec un risque de fuite chez le patient toxicomane. ■
Flumazénil (Anexate®) : 0,3 mg IV en 1 minute, suivi de doses additionnel-
les de 0,1 mg jusqu’à une dose cumulative de 2 mg, lors d’une intoxication par 81
ITEM 214
benzodiazépines. Son effet secondaire principal est le risque de convulsions chez le patient épileptique ou en cas d’intoxication polymédicamenteuse.
H. Électroencéphalogramme Il doit être réalisé s’il existe une prise de substances abaissant le seuil de comitialité (antidépresseurs tricycliques, neuroleptiques), à la recherche d’une comitialité infraclinique. S’il existe des convulsions, l’EEG ne servira qu’à évaluer l’efficacité du traitement antiépileptique lorsque ces convulsions auront disparu (persistance d’une comitialité infraclinique ?).
I. Analyse toxicologique ■
Elle n’a pas d’intérêt dans un contexte toxique évident car : – elle est souvent qualitative, ne permettant pas de distinguer un taux thérapeutique d’un surdosage ; – l’immunoanalyse manque souvent de spécificité et/ou de sensibilité ; – elle peut être gênée par les médicaments sédatifs administrés lors de la mise sous ventilation mécanique (benzodiazépines, morphiniques).
■
Son intérêt peut être médicolégal ou thérapeutique lorsque le taux du médica-
ment retrouvé conditionne la prise en charge (paracétamol, digitaliques, lithium). ■
Elle est réalisée par immunodosage (paracétamol, phénobarbital, acide valproï-
que, carbamazépine, digitaliques, lithium, salicylés, phénytoïne, théophylline, chromatographie (carbamate, méthanol, éthylène glycol) ou électrode sélective (lithium). Elle doit de toute façon être ciblée par le clinicien en fonction de l’anamnèse et des symptômes. Elle doit être effectuée préférentiellement dans le sang, l’analyse urinaire pouvant donner des informations complémentaires sur une consommation réalisée dans les 48 dernières heures ou en cas de toxique dont l’élimination sanguine est rapide. ■
Une attitude pragmatique consiste à réaliser une plasmathèque et une urothè-
que à l’admission, qui peuvent être ultérieurement utilisées si l’évolution n’est pas celle attendue ou si émerge un contexte médicolégal. Des méthodes séparatives complémentaires plus longues et coûteuses pourront être discutées secondairement dans les cas difficiles, qui sont rares cependant.
II. INTOXICATION PAR PSYCHOTROPES A. Benzodiazépines ■
Intoxication la plus fréquente en France, mais dont le pronostic est favorable.
■
Souvent potentialisée par l’ingestion concomitante d’alcool.
■
La durée du tableau clinique est variable d’un produit à l’autre (demi-vie :
3–70 heures). ■
Coma calme et hypotonique ; la dépression respiratoire est rare mais possible
(sujet âgé ou insuffisant respiratoire chronique). ■
En plus du traitement symptomatique, le traitement antidotique par flumazémil
(Anexate®) est possible sauf maladie épileptique ou prise concomitante d’un médicament épileptogène. Son action rapide mais brève consiste en une fixation compétitive sur les récepteurs ; son utilisation est essentiellement diagnostique, son 82
Principales intoxications aiguës
utilisation à titre thérapeutique en administration continue pour traiter un coma et/ou une hypoventilation alvéolaire étant plus discutable et imposant une surveillance en unité de surveillance continue, l’alternative étant alors la mise sous ventilation mécanique après intubation.
B. Antidépresseurs tricycliques ■
Intoxication devenue rare du fait de la prescription plus large aujourd’hui des
inhibiteurs de la recapture de la sérotonine. ■
Coma agité, signes d’irritation pyramidale, comitialité, syndrome atropinique.
■
La gravité est liée à l’atteinte cardiovasculaire : effet « quinidine-like ».
■
Traitement symptomatique : la gravité cardiovasculaire potentielle justifie une
prise en charge en réanimation et une décontamination digestive si elle peut être pratiquée tôt (3 heures après l’ingestion) ; les troubles conductifs peuvent bénéficier de l’administration de lactate ou de bicarbonates de sodium molaire intraveineux : 100 à 250 mL jusqu’à une dose totale de 750 mL, avec surveillance de la kaliémie, la correction du QRS et de l’hypotension étant les critères d’efficacité.
C. Barbituriques ■
Coma calme hypotonique parfois profond, dépression respiratoire, hypothermie,
rhabdomyolyse. ■
Le risque prolongé de coma et d’arrêt respiratoire d’apparition brutale (barbitu-
riques d’action rapide) justifie une prise en charge en réanimation. L’EEG peut montrer des épisodes de silence électrique mimant le diagnostic de mort encéphalique.
D. Carbamate ■
Coma calme hypotonique.
■
Le risque cardiovasculaire par vasoplégie et/ou effet inotrope négatif justifie une
prise en charge en réanimation.
E. Lithium On distingue 3 circonstances : l’intoxication aiguë en l’absence de traitement antérieur, l’intoxication aiguë du sujet préalablement traité et le surdosage du sujet traité lié à une déshydratation. ■
Manifestations neurologiques : agitation ou coma, tremblement et myoclonies,
convulsions. ■
Insuffisance rénale fonctionnelle, diabète insipide néphrogénique et tubulo-
pathie distale lors d’un traitement chronique. ■
La lithémie peut être très élevée en l’absence de signes cliniques chez le sujet
intoxiqué sans traitement préalable ou peu élevée en présence de manifestations sévères chez un sujet préalablement traité et donc « imprégné » ; dans ce cas, le dosage de la lithémie érythrocytaire peut avoir un intérêt. ■
Le risque neurologique chez un sujet préalablement traité justifie une prise en
charge en réanimation. ■
Le traitement repose sur l’hydratation abondante par sérum salé isotonique.
L’épuration extrarénale est réservée aux manifestations neurologiques graves (coma, convulsion), notamment chez les patients préalablement traités pour lesquels l’hydratation n’assure pas une clairance rénale suffisante du lithium. 83
ITEM 214
F. Neuroleptiques Ils appartiennent à des classes hétérogènes et sont donc responsables de tableaux variables : coma calme hypotonique (neuroleptiques sédatifs) ou coma agité avec hypertonie extrapyramidale (butyrophénones et phénothiazines pipérazinées). Les troubles conductifs sont possibles. Ils peuvent être responsables d’un syndrome malin des neuroleptiques : hyperthermie > 40 °C, hypertonie extrapyramidale, rhabdomyolyse.
III. INTOXICATION PAR CARDIOTROPES Les traitements cardiotropes peuvent être responsables : ■
d’une atteinte myocardique systolique par effet inotrope négatif (inhibiteurs
calciques, bêtabloquants, bloqueurs sodiques) ; ■
plus rarement d’une atteinte diastolique (digitaliques), de troubles de la conduc-
tion, de troubles du rythme.
A. Digitaliques Deux produits peuvent être en cause : la digitoxine, liposoluble, absorbée rapidement et complètement par le tube digestif, métabolisée par le foie et éliminée par la bile, de demi-vie longue, de 3 à 9 jours, et la digoxine, d’absorption digestive moins complète, d’élimination rénale, de demi-vie de 36 à 48 heures. ■
Troubles digestifs (nausées, vomissements, douleurs abdominales).
■
Signes neurosensoriels (troubles de la vigilance, dyschromatopsie, vision floue,
scotomes). ■
Signes cardiovasculaires faisant la gravité (troubles de la conduction, troubles
du rythme à l’étage ventriculaire). ■
Dans les formes graves, insuffisance rénale et hyperkaliémie.
■
L’analyse toxicologique confirme le diagnostic.
■
Le traitement est symptomatique, la gravité cardiovasculaire potentielle justifie
une décontamination digestive si elle peut être pratiquée tôt. ■
Le traitement antidotique par fragment FAB d’anticorps antidigitaliques (Digidot®)
est possible dans les formes graves, permettant d’éviter dans ces cas le recours à l’entraînement électrosystolique.
CONSENSUS Intoxications graves Recommandations d’experts, 2006 ■
Neutralisation équimolaire si un seul des facteurs suivants est présent : arythmie ven-
triculaire, bradycardie < 40 bpm résistante à l’administration de 1 mg d’atropine, kaliémie > 5,5 mmol/L, choc cardiogénique, infarctus mésentérique. ■
Neutralisation semi-molaire en présence d’au moins 3 des facteurs suivants : sexe masculin,
cardiopathie préexistante, âge > 55 ans, BAV, bradycardie < 50 bpm et résistante à 1 mg d’atropine, kaliémie > 4,5 mmol/L.
84
Principales intoxications aiguës
B. Chloroquine ■
Troubles de la conscience, signes neurosensoriels (flou visuel, acouphènes, ver-
tiges), convulsions, signes digestifs (nausées, vomissements, douleurs abdominales, diarrhée). La gravité est liée à l’effet stabilisant de membrane. ■
Le traitement repose sur une conférence de consensus ancienne qui n’a pas été
remise en question par la dernière conférence d’experts déterminant le traitement en fonction de la dose supposée ingérée (DSI), la pression artérielle systolique (PAS) et la durée du QRS.
CONSENSUS Intoxication à la chloroquine SRLF, 1987 Intoxication bénigne
Intoxication intermédiaire
Intoxication grave
– DSI < 2 g, et – 2 g < DSI < 4 g, et – PAS > 100 mmHg, et – PAS > 100 mmHg, et – QRS < 0,10 – QRS < 0,10
– DSI > 4 g, et/ou – PAS < 100 mmHg, et/ou – QRS > 0,10
Pas de traitement
– Remplissage : 500 à 1 000 mL – Adrénaline : 0,25 μg/kg/min à augmenter par paliers de 0,25 μg/kg/min pour PAS > 100 – Diazépam : 2 mg/kg sur 30 min puis 2 à 4 mg/kg/24 h – Intubation trachéale
Diazépam : 0,5 mg/kg IVSE en 30 min puis 1 mg/kg IVSE
C. Bêtabloquants ■
Chronotropes, inotropes, dromotropes et bathmotropes négatifs ; effet stabilisant
de membrane pour certains bêtabloquants ; allongement du QT pour le sotalol. ■
Troubles digestifs, respiratoires (bronchospasme), neurologiques (confusion,
hallucination). ■
En association au traitement hémodynamique, le glucagon peut être utilisé pré-
cocement : bolus de 5 ou 10 mg puis perfusion continue de 1 à 5 mg/h mais il ne doit pas constituer à lui seul le traitement des complications hémodynamiques de l’intoxication par bêtabloquant.
D. Inhibiteurs calciques ■
Inotropes négatifs et/ou vasoplégiants.
■
Traitement antidotique par insuline-glucose en complément d’autres thérapeu-
tiques : bolus de 10 UI d’insuline, suivi de la perfusion continue avec surveillance horaire de la glycémie et régulière de la kaliémie.
IV. INTOXICATION PAR LE MONOXYDE DE CARBONE L’intoxication par le monoxyde de carbone (CO), souvent accidentelle et très rarement volontaire, est la première cause de mortalité par intoxication dans le monde et est encore fréquente en France : 5 000 à 8 000 cas par an, dont 2 500 hospitalisations et 400 décès. 85
ITEM 214
A. Physiopathologie ■
Le CO est un gaz inodore, incolore, insipide, non irritant ni suffocant, responsa-
ble d’une intoxication souvent insidieuse ; c’est le produit de la combustion incomplète des hydrocarbures. ■
Le CO se fixe aux hémoprotéines, en premier lieu l’hémoglobine (responsable
de la formation de carboxyhémoglobine, HbCO), mais aussi la myoglobine, notamment myocardique, la cytochrome c-oxydase de la chaîne respiratoire, l’hydroperoxydase et le cytochrome P450. ■
Chez le sujet normal, le taux d’HbCO est de 1 à 3 %, il peut atteindre 15 % chez le
fumeur. ■
Le mécanisme physiopathologique majeur est l’hypoxie liée essentiellement à
un défaut de transport de l’oxygène, le CO ayant une affinité pour l’hémoglobine 240 fois supérieure à l’oxygène. ■
L’administration d’oxygène permet d’accélérer la dissociation de l’HbCO. La
demi-vie de l’HbCO est de 360 minutes en air ambiant, 90 minutes en oxygène pur normobare et 20 minutes en oxygénothérapie hyperbare à 2,5 ATA.
B. Causes ■
Intoxication accidentelle dans 95 % des cas, souvent alors domestique, col-
lective et hivernale (appareil de chauffage et de production d’eau chaude défectueux) ; les fumées d’incendie représentent également une cause d’intoxication au CO, souvent associée à une intoxication cyanhydrique par combustion de matières synthétiques. ■
Intoxication volontaire dans 5 % des cas (exposition aux gaz d’échappement
d’un véhicule automobile).
C. Symptômes immédiats ■
Neurologiques : céphalées, vertiges, perte de connaissance, altération des fonc-
tions cognitives, troubles de la conscience jusqu’au coma, syndrome pyramidal, comitialité. ■
Digestifs : nausées, vomissements, diarrhée plus rarement.
■
Cardiovasculaires : syndrome coronarien aigu, hypotension artérielle.
■
Dans le contexte d’exposition aux fumées d’incendie, un état de choc doit faire
suspecter une intoxication cyanhydrique associée. ■
Respiratoires : œdème pulmonaire cardiogénique (par atteinte myocardique)
ou œdème pulmonaire lésionnel (par toxicité pulmonaire directe), pneumopathie d’inhalation. ■
Cutanéomuqueux : classique teinte cochenille de la peau, en fait rare.
D. Symptômes à distance ■
Syndrome postintervallaire : signes neuropsychiatriques 7 à 21 jours après l’in-
toxication et après une récupération apparente. La récupération est possible dans 50 à 75 % des cas. ■
86
Syndrome séquellaire : persistance des signes neuropsychiatriques initiaux.
Principales intoxications aiguës
E. Bilan biologique ■
Carboxyhémoglobine (HbCO) : taux habituel de 1 à 3 %, jusqu’à 15 % chez le
fumeur. L’intoxication est donc suspectée si la carboxyhémoglobine est > 10 %, et certaine si elle est > 15 %. La symptomatologie, qui devrait théoriquement être corrélée au taux d’HbCO, l’est peu en pratique du fait de la durée de la prise en charge préhospitalière, de la pratique précoce d’une oxygénothérapie à la phase préhospitalière, de la possibilité d’une co-intoxication cyanhydrique. Les troubles neurologiques sont généralement associés à des taux > 25 %. L’intoxication est potentiellement mortelle au-delà de 60 %. L’oxygénothérapie mise en route par les premiers secours est cependant susceptible de faire diminuer le taux d’HbCO et un dosage bas à l’arrivée à l’hôpital n’est plus interprétable. ■
PaO2 : elle est habituellement normale à la phase initiale.
■
SaO2 : mesurée par un appareil pourvu d’un CO-oxymètre, elle est diminuée. Les
appareils à gaz du sang non pourvus de CO-oxymètre mesurent la PaO2 et en déduisent une SaO2 à partir d’abaques, qui sera alors faussement normale. ■
SpO2 : l’oxymètre de pouls ne distingue pas l’HbCO de l’HbO2. La SpO2 est donc
faussement normale. ■
Lactates sanguins : l’hyperlactatémie est le reflet de l’hypoxie tissulaire liée
au CO. Dans le cadre d’une exposition aux fumées d’incendie, une lactatémie > 10 mmol.L−1 doit faire suspecter une intoxication cyanhydrique associée.
F. Traitement C’est une urgence médicale. ■
Traitement symptomatique : soustraire la victime à l’ambiance toxique, prise en
charge symptomatique d’un coma, d’un état de choc, d’une détresse respiratoire. ■
Traitement spécifique : dans tous les cas, oxygénothérapie à haut débit (8 à 12 L/
min) le plus précocement possible ; l’oxygénothérapie hyperbare est discutée en cas de perte de connaissance initiale ou de troubles neurologiques persistants et semble indiscutable chez la femme enceinte, quel que soit le terme (le CO diffuse à travers la barrière fœtoplacentaire et l’hémoglobine fœtale a une affinité supérieure à l’hémoglobine de l’adulte pour le CO). ■
Traitement d’une intoxication cyanhydrique par hydroxocobalamine (vitamine B12),
5 g IV : traitement antidotique administré systématiquement sur les lieux de la prise en charge en cas d’exposition aux fumées d’incendie en présence de troubles de la conscience ou de troubles hémodynamiques, renouvelable une fois en l’absence de réponse. ■
À distance, le risque de récidives et les complications secondaires neuropsychi-
ques imposent d’établir un suivi de ces victimes. Pour éviter les récidives, il sera important d’identifier la cause de l’intoxication : – tentative de suicide (entretien psychiatrique), incendie (recours aux services sociaux) ; – intoxication professionnelle (certificat initial des lésions, déclaration d’accident du travail) ; – intoxication domestique (identification et correction de la cause organisée par la DDASS avant retour à domicile). 87
ITEM 214
■
Concernant le suivi médical, les victimes et leur médecin traitant doivent éga-
lement être informés du risque de manifestations neurologiques secondaires, en ayant conscience que l’information peut également influencer chez certains patients une pathologie subjective. ■
Il faut conseiller un avis spécialisé en cas d’apparition de manifestations
neurologiques. ■
Les femmes enceintes doivent bénéficier d’un examen obstétrical avec une écho-
graphie vérifiant la vitalité fœtale. Un suivi obstétrical et échographique rapproché et orienté s’impose jusqu’à l’accouchement. Le gynécologue obstétricien, le pédiatre et le médecin traitant doivent être prévenus de la possibilité de séquelles chez le nouveau-né.
CONSENSUS Repérer et traiter les intoxications oxycarbonées : prise en charge d’un patient intoxiqué au CO Conseil supérieur d’hygiène publique de France, 18 mars 2005 Évaluation ■
Signes vitaux : condition cardiorespiratoire.
■
État neurologique : – conscience ; – réponse motrice à la stimulation ; – réflectivité.
■
Examen clinique : – recherche de complications (ECG, radiographie du thorax…) ; – recherche d’un traumatisme ou d’une intoxication associés ; – recherche d’une maladie sous-jacente.
■
Examen de laboratoire : – carboxyhémoglobine ; – gaz du sang si nécessaire.
Diagnostic ■
Circonstances de l’intoxication.
■
Tableau clinique compatible.
■
Carboxyhémoglobinémie élevée (à interpréter en fonction de l’âge, du terrain, des habitudes
tabagiques, du délai entre dosage et éviction, de l’administration d’oxygène). ■
Optionnel : dosage de CO dans l’air expiré et dosage de CO dans l’atmosphère.
Traitement ■
Mesures thérapeutiques en urgence : – éviction immédiate de l’atmosphère toxique ; – réanimation cardiorespiratoire si nécessaire ; – oxygène par masque nasal ou ventilation contrôlée ; – arrêter la source de CO, aérér le local, rechercher d’autres victimes.
■
Traitement symptomatique, selon l’état du patient : – ventilation contrôlée avec FiO2 = 1 ; – remplissage vasculaire ; – drogue inotrope si nécessaire.
88
Principales intoxications aiguës
■
Oxygénothérapie : – oxygénothérapie hyperbare : contacter un centre hyperbare si le patient présente une symptomatologie patente (coma, perte de connaissance, signes cliniques objectifs) ou s’il s’agit d’une femme enceinte ; – oxygénothérapie normobare dans les autres cas au masque à haute concentration, à fort débit (12 à 15 L/min chez l’adulte pendant 12 h).
Prévention de la récidive ■
Éducation du patient et de son entourage vis-à-vis des risques liés au CO.
■
Enquête technique sur place.
Tableau 214-2. Organisation du suivi Objectifs Lutter contre la récidive
Diagnostiquer les complications secondaires
Moyens
Risques
Informer le patient et/ou sa famille du risque de récidive
Récidive
Obtenir son consentement éclairé à une enquête technique par le service santéenvironnement de la DDASS
Violation du secret médical
Alerter le service santéenvironnement de la DDASS
Risque médicolégal
Lettre au médecin traitant
Ne pas rapporter à l’intoxication les troubles secondaires
Inciter le patient à consulter en cas de troubles
Mauvaise évaluation de la morbidité Risque médicolégal
Reconnaître l’incapacité de travail
Faire un ECG de contrôle en cas d’anomalie initiale et chez les patients avec antécédents cardiovasculaires
Prescription d’un arrêt de travail
Méconnaître l’inaptitude fonctionnelle au travail
Rédiger le certificat initial des lésions (si accident de travail)
Risque médicolégal
Suivi ECG
Méconnaître l’anomalie éventuelle ou son aggravation
V. INTOXICATION ALCOOLIQUE AIGUË (IAA) ■
Intoxication la plus fréquente (10 à 15 % des admissions aux urgences), elle est
souvent banalisée. ■
Elle expose cependant à de nombreux pièges (traumatisme associé, intoxication
médicamenteuse associée, hypoglycémie associée), dont la méconnaissance peut s’avérer dramatique. Toute intoxication éthylique aiguë impose un examen médical complet et un bilan paraclinique simple. ■
Le décès lié directement à l’absorption d’éthanol est rare : les alcoolémies sont
alors généralement supérieures à 5 g/L. La mort est le plus souvent le fait d’une complication (hypoventilation alvéolaire, pneumopathie d’inhalation). 89
ITEM 214
A. Physiopathologie ■
L’éthanol est absorbé par diffusion passive au niveau gastrique (30 %) et surtout
au niveau duodénojéjunal (70 %). Absorbé à jeun, la concentration maximale est atteinte en environ 30 minutes. L’ingestion de nourriture ralentit la vidange gastrique et ainsi retarde et abaisse le pic plasmatique (atteint en 1 h environ). Après avoir atteint ce pic, le taux d’alcoolémie décroît, de 0,10 g/L/h à 0,20 g/L/h. ■
Quelle que soit la boisson alcoolisée, un « verre » représente à peu près la même
quantité d’alcool : 1 « demi » de bière (25 cL) = 0,15 g, 1 pastis (5 cL) = 0,14 g, 1 verre de vin (12 cL) = 0,25 g, 1 coupe de champagne (8 cL) = 0,15 g. ■
L’élimination de l’éthanol est essentiellement métabolique (95 %), les 5 % res-
tants étant éliminés sous forme inchangée par l’air expiré, l’urine, la sueur et le lait maternel. ■
Le métabolisme de l’éthanol est essentiellement hépatique (90 %) : – plusieurs systèmes enzymatiques participent d’abord à l’oxydation de l’éthanol en acétaldéhyde : • la voie principale de l’alcool déshydrogénase (plusieurs isoenzymes expliquent les variations cinétiques individuelles) ; • le système microsomial d’oxydation (MEOS) inductible par l’alcool ; • la voie de la catalase qui est accessoire, sauf chez l’alcoolique chronique ; – l’acétaldéhyde est ensuite oxydé en acétate par l’acétaldéhyde déshydrogénase en présence de NAD. Cette enzyme est polymorphe, un déficit conduit à l’accumulation d’acétaldéhyde et au syndrome de flushing ; – l’acétate est en partie transformé dans le foie en acétyl-coenzyme A, qui peut soit entrer dans le cycle de Krebs (production d’ATP), soit être utilisé pour la synthèse des lipides.
B. Diagnostic positif et diagnostic de gravité ■
On distingue deux tableaux cliniques : – l’ivresse simple, avec trois phases : • phase d’excitation psychomotrice (désinhibition, euphorie, atteintes cognitives) ; • phase d’incoordination (troubles de la vigilance, syndrome cérébelleux, troubles de la vision, syndrome vestibulaire, troubles vasomoteurs) ; • coma profond sans signe de localisation neurologique ; – l’ivresse pathologique : tableau prolongé, polymorphe (ivresse excitomotrice, hallucinatoire, délirante, avec troubles de l’humeur), souvent récidivant, marqué par une dangerosité potentielle majeure, survenant à l’occasion d’une absorption massive d’alcool ou d’alcoolisation peu importante chez des sujets à risque.
■
La réalisation d’une alcoolémie doit être systématique ; il n’existe pas de parallé-
lisme entre le tableau clinique et l’alcoolémie. Cependant une alcoolémie ≥ 3–4 g/L engage le pronostic vital. ■
La gravité est déterminée selon quatre tableaux : – intoxication avec manifestations psychiatriques liées à l’intoxication : troubles du comportement avec ivresse excitomotrice, troubles psychosensoriels avec ivresse hallucinatoire, troubles délirants, troubles de l’humeur ;
90
Principales intoxications aiguës
– intoxication avec complications : neurologiques (coma et crises comitiales, accident vasculaire cérébral), respiratoires (pneumopathie d’inhalation, hypoventilation, arrêt respiratoire), circulatoires (vasoplégie, arythmie, syndrome coronarien), métaboliques (hypoglycémie, acidocétose, trou osmolaire, hyponatrémie chez les buveurs de bière), digestives (Mallory-Weiss, hépatite alcoolique aiguë), musculaires (rhabdomyolyse ± insuffisance rénale aiguë et hyperkaliémie) ; – intoxication avec pathologie associée : traumatisme, autre intoxication (psychotrope) ; – intoxication chez l’enfant. ■
La gravité conditionne la prise en charge : hospitalisation en milieu spécialisé
si coma, pneumonie d’inhalation, crises convulsives, traumatisme crânien, enfant. Les autres IAA sont hospitalisées à l’unité de courte durée.
C. Traitement ■
Une surveillance simple est en général suffisante.
■
Le traitement est essentiellement symptomatique.
■
L’épuration extrarénale est exceptionnellement discutée dans les intoxications
les plus massives (alcoolémie > 6 g/L). ■
L’autorisation de sortie est une décision médicale fondée sur la disparition des
complications somatiques et la permanence des fonctions relationnelles.
CONSENSUS Ivresse éthylique aiguë dans les services d’accueil des urgences SFMU, 2006 ■
L’intoxication alcoolique aiguë (IAA) constitue un mésusage de l’alcool.
■
Après « dégrisement », il faut déterminer systématiquement le type de consommation, recher-
cher des facteurs aggravants, et engager une démarche thérapeutique adaptée. ■
Aux urgences, l’IAA est souvent asssociée à une autre pathologie : traumatismes, pathologies
médicales, affections psychiatriques, tentatives de suicide et violences. Critères cliniques et paracliniques d’IAA ■
Un faisceau d’arguments anamnestiques et cliniques permettent de porter le diagnostic posi-
tif et de gravité. L’alcoolémie doit être dosée mais est médiocrement corrélée aux signes cliniques et à la gravité. ■
On distingue : – l’IAA simple : excitation psychomotrice puis incoordination puis coma avec hyporéflexie, hypoesthésie et incontinence urinaire ; – l’IAA pathologique : tableau prolongé, polymorphe (ivresse excitomotrice, d’allure maniaque, dépressive, délirante, hallucinatoire) et potentiellement dangereux.
Critères de gravité d’une IAA ■
Liés à l’intoxication : coma, manifestations excitomotrices, délires/hallucinations.
■
IAA compliquée : inhalation, crise convulsive, hypothermie, troubles du rythme ou de la
conduction, hypoglycémie, acidocétose, gastrite, syndrome de Mallory-Weiss, hépatite alcoolique aiguë, AVC ischémique, rhabdomyolyse. ■
IAA associée : traumatisme crânien ou autre traumatisme, intoxication associée, pathologie
infectieuse, toute autre pathologie. ■
IAA de l’enfant.
u 91
ITEM 214
u Stratégie de surveillance ■
L’hospitalisation pour observation est systématique et peut nécessiter une « intervention
thérapeutique à laquelle le patient n’est pas à même de consentir ». ■
La sortie contre avis médical n’est pas possible.
■
Hospitalisation en réanimation si coma, inhalation, convulsions, TC, enfant.
■
Hospitalisation en unité d’hospitalisation de courte durée dans les autres cas.
■
Surveillance horaire et consignée par écrit jusqu’à rétablissement des fonctions supé-
rieures. ■
Contention physique ou chimique prescrite en cas d’agitation.
■
Sortie possible après rétablissement des fonctions relationnelles et disparition des signes
d’alcoolisation aiguë. ■
Un patient adressé par la police pour certificat de non-admission ne peut être rendu aux for-
ces de l’ordre qu’après s’être assuré de la permanence des fonctions relationnelles et dans la mesure où aucune thérapeutique sédative n’aura été administrée. Conduite thérapeutique ■
IAA simple : surveillance simple, soins d’hygiène et de confort, hydratation orale, dialogue
rassurant ; l’administration de thiamine par voie orale est proposée. ■
IAA avec agitation psychomotrice : traitement par benzodiazépine IV (diazépam ou clorazé-
pate) ; utilisation d’un neuroleptique en dernier recours (halopéridol). ■
Après dégrisement : évaluation de la consommation d’alcool (recherche d’un mésusage,
d’une alcoolodépendance) ; recherche des complications de l’alcoolisme ; intervention dite « ultrabrève » par l’équipe soignante pour information du patient (sur sa consommation d’alcool, la définition d’une consommation modérée, les aides possibles) ; information du médecin traitant selon la volonté du patient. ■
Avis psychiatrique et orientation vers une consultation psychiatrique en cas de comorbidité
psychiatrique aiguë ; orientation en addictologie en cas d’alcoolodépendance, d’addiction associée, de comorbidité somatique.
VI. INTOXICATION PAR ANTALGIQUES A. Intoxication au paracétamol ■
À dose thérapeutique, 90 % du paracétamol est métabolisé par le foie en dérivés
glycuro et sulfoconjugués éliminés dans les urines. Les 10 % restants sont métabolisés par le cytochrome P450 en N-acétyl-p-benzoquinonéimine (NAPQI), métabolite toxique inactivé par conjugaison avec le glutathion réduit. ■
En cas de surdosage (> 125 mg/kg), la voie métabolique principale étant saturée,
les réserves de glutathion étant épuisées, le paracétamol est transformé en NAPQI, entraînant une lyse hépatocellulaire et un risque d’hépatite fulminante (insuffisance hépatique aiguë compliquée d’encéphalopathie). ■
La paracétamolémie est le meilleur indicateur de gravité, réalisée au moins 4 heu-
res après l’ingestion et interprétée sur le normogramme de Rumack et Matthew : il faut cependant savoir que le seuil de toxicité du paracétamol est abaissé en cas de réduction de la réserve en glutathion (alcoolisme chronique, malnutrition, prises répétées de paracétamol), de traitements inducteurs enzymatiques du cytochrome
92
Principales intoxications aiguës
P450 (phénobarbital, phénytoïne, carbamazépine, isoniazide, rifampicine), de traitement entrant en compétition avec la glycuroconjugaison du paracétamol (triméthoprime-sulfaméthoxazole, zidovudine). ■
Si la date d’ingestion n’est pas connue, 2 dosages réalisés à 4 heures d’intervalle
permettent d’établir la demi-vie du paracétamol, qui est augmentée en cas d’intoxication. Une hépatite est probable quand la demi-vie dépasse 4 heures. ■
Le traitement repose sur : – l’évacuation gastrique précoce par lavage gastrique et ingestion de charbon activé ; – la N-acétylcystéine, précurseur du glutathion, justifiée si la dose ingérée est > 125 mg/kg ou si elle n’est pas connue. La paracétamolémie, interprétée à l’aide du normogramme de Rumack et Mathew en fonction du délai entre la prise de paracétamol et le prélèvement, permet ensuite de décider de la poursuite du traitement : • 150 mg/kg en 1 heure, puis 50 mg/kg en 4 heures, puis 100 mg/kg en 16 heures. En cas d’hépatite cytolytique, ce traitement est poursuivi à la dose de 300 mg/24 h jusqu’à guérison ; • en l’absence de vomissements ou d’utilisation de charbon activé, la voie orale peut être utilisée : 140 mg/kg puis 70 mg/kg toutes les 4 heures pendant 72 heures ; • la N-acétylcystéine peut être responsable d’une réaction anaphylactoïde.
■
Le transfert vers une unité de greffe hépatique est indiqué dès qu’il existe des
signes d’encéphalopathie et/ou que le TP est < 40 %.
B. Intoxication aux salicylés ■
Elle est peu fréquente et rarement grave. La dose toxique est de 10 g chez
l’adulte. ■
Cliniquement, elle peut entraîner : – des troubles neurosensoriels (acouphènes, hypoacousie, sensation vertigineuse, céphalées) ; – des troubles neurologiques dans les intoxications massives (coma et convulsions) ; – des troubles digestifs (épigastralgies, nausées, vomissements, rarement hémorragie digestive) ; – des troubles respiratoires (hyperventilation alvéolaire puis hypoventilation alvéolaire dans les formes graves) ; – une hyperthermie ; – des troubles acidobasiques (alcalose respiratoire puis acidose métabolique avec hyperlactatémie puis acidose mixte dans les formes les plus graves).
■
Le diagnostic repose sur la salicylémie.
■
Le traitement repose sur : – l’évacuation gastrique précoce par lavage gastrique et ingestion répétée de charbon activé ;
93
ITEM 214
– l’alcalinisation des urines, qui est proposée dans les intoxications graves pour augmenter la clairance urinaire des salicylés ; – l’épuration extrarénale, qui concerne les intoxications massives.
C. Intoxication aux morphiniques ■
Syndrome opioïde.
■
Traitement antidotique par naloxone, administré par voie IVL de 0,1 mg par
0,1 mg toutes les 2 minutes jusqu’à normalisation de la fréquence respiratoire (≥ 12/min). En cas d’échec après une dose cumulée de 2 mg, une autre cause doit être recherchée. Une antagonisation complète n’est pas recommandée du fait du risque de sevrage aux opiacés. La durée clinique de l’action antagoniste n’étant pas prévisible, une surveillance continue est indispensable après injection. S’il existe un risque de remorphinisation secondaire, une perfusion continue est recommandée.
VII. PRISE EN CHARGE A. Rechercher des signes de gravité ■
Liés au terrain : sujet âgé, lourdes comorbidités.
■
Liés au toxique : notamment s’il est susceptible d’entraîner des complications
cardiovasculaires (cardiotropes, carbamates, cocaïne). ■
Liés à la quantité de substance à laquelle le sujet a été exposé (notion de dose
supposée ingérée par exemple). ■
Liés à la pharmacocinétique du produit : demi-vie longue, métabolisme activa-
teur rendant possible une symptomatologie retardée ou prolongée. ■
Liés à l’association de toxiques (effets synergiques ou additifs).
■
Liés au tableau symptomatique : signes neurologiques, respiratoires, cardiovas-
culaires, métaboliques (dyskaliémie, rhabdomyolyse). Les intoxications graves doivent ainsi être admises en réanimation.
B. Hospitaliser L’intoxication médicamenteuse volontaire justifie dans tous les cas une hospitalisation, même si aucun signe de gravité n’est retenu lors de l’examen initial, compte tenu de la gravité potentielle, de la possibilité de récidive immédiate et de la nécessité médicolégale d’une évaluation par un psychiatre.
C. Procéder systématiquement aux mesures suivantes ■
Mise en place d’une voie veineuse périphérique.
■
Bilan biologique complet, plasmathèque et urothèque.
■
Radiographie thoracique.
■
Électrocardiogramme.
■
Monitoring des paramètres vitaux : FR, FC, PA, SpO2, diurèse.
■
En cas de troubles de la conscience : libération des voies aériennes, oxygénothé-
rapie, recherche d’une hypoglycémie, recherche d’un syndrome opioïde, recherche d’un traumatisme crânien associé.
94
Principales intoxications aiguës
D. Prise en charge des complications neurologiques
ITEM 230
■
Ne jamais exclure une origine traumatique au coma.
■
Apprécier la profondeur du coma par le score de Glasgow.
■
Rechercher une indication à un traitement par sérum glucosé (hypoglycémie),
flumazénil (intoxication par benzodiazépines) ou Anexate® (intoxication morphinique). ■
Protéger les voies aériennes par intubation en cas de coma profond.
■
Rechercher et traiter une comitialité (par benzodiazépines en 1re intention).
E. Prise en charge des complications respiratoires ■
ITEM 193
On distingue les insuffisances respiratoire par hypoxie, liées le plus souvent à
une pneumopathie d’inhalation, plus rarement à un œdème pulmonaire lésionnel (crack, héroïne), et les insuffisances respiratoires par hypoventilation alvéolaire, où l’assistance respiratoire doit être envisagée d’emblée. ■
Une bradypnée doit faire immédiatement rechercher un syndrome d’intoxication
morphinique et discuter l’administration de naloxone. ■
Le bilan clinique, radiologique et biologique doit faire rechercher une pneumo-
pathie d’inhalation, nécessitant la mise en route d’une antibiothérapie (amoxicilline-acide clavulanique).
F. Prise en charge des complications circulatoires ■
ITEM 200
Plusieurs mécanismes peuvent être à l’origine d’une défaillance circulatoire : – hypovolémie chez un patient volontiers déshydraté n’ayant pas eu accès à l’eau du fait des troubles de la vigilance ; – vasoplégie liée au toxique lui-même ou à un sepsis associé (pneumonie d’inhalation) ; – altération de la contractilité myocardique.
■
La compréhension du tableau hémodynamique peut nécessiter la réalisation
d’investigations hémodynamiques spécifiques (échocardiographie, cathétérisme artériel pulmonaire…). Ces investigations vont guider le traitement, qui peut associer un remplissage vasculaire, un traitement vasopresseur (noradrénaline, dopamine), un traitement inotrope positif (dobutamine, adrénaline) : – en cas de bradycardie sinusale ou de BAV : atropine IV (0,5 à 1 mg) en première intention ; en l’absence d’efficacité, on discute un traitement bêtamimétique (isoprénaline, dopamine) ou un entraînement électrosystolique ; – en cas de troubles conductifs intraventriculaires : administration de bicarbonates ou de lactates de sodium molaires (100 à 250 mL et jusqu’à 750 mL) ; – en cas de torsade de pointe : bolus de 2 g de sulfate de magnésium IVL puis 3 à 20 mg/min, isoprénaline et entraînement électrosystolique en cas de récidive ; – en cas d’intoxication digitalique avec trouble rythmique ou conductif grave : Fab. ■
En cas d’échec de ces thérapeutiques (choc persistant, arrêt cardiocirculatoire),
le recours à une assistance circulatoire, technique encore d’exception, doit être
u
95
ITEM 214
u
discuté. Elle a pour but le maintien de débits tissulaires périphériques en attendant la reprise d’une fonction cardiaque normale avec l’élimination du toxique. ■
L’arrêt cardiaque dans un contexte toxique est une situation au cours de laquelle
une réanimation prolongée est recommandée.
G. Prise en charge des complications hépatiques En cas d’hépatite fulminante (encéphalopathie, TP < 30 % avec facteur V < 30 %), la transplantation hépatique doit être discutée.
H. Décontamination digestive Elle ne trouve plus beaucoup d’indications : ■
les vomissements provoqués par le sirop d’ipéca sont aujourd’hui proscrits du
fait du risque d’inhalation ; ■
les laxatifs n’ont pas d’indication prouvée ;
■
le lavage gastrique n’est jamais très épurateur. Il peut être dangereux, à l’origine
d’inhalations. Il est ainsi contre-indiqué chez le patient comateux non intubé, en cas d’ingestion de caustiques, d’hydrocarbures pétroliers ou de produits moussants. Il reste recommandé en cas d’ingestion récente (< 1 heure) d’un toxique susceptible d’engager le pronostic vital (ayant une toxicité cardiovasculaire, en particulier) ; ■
le charbon activé administré par voie orale (Carbomix® : 50 g chez l’adulte et
1 g/kg chez l’enfant sans dépasser 50 g) n’est jamais très efficace. Il reste recommandé en cas d’ingestion récente (< 1 heure) d’un toxique susceptible d’engager le pronostic vital et carboabsorbable (antidépresseur tricyclique, carbamate, paracétamol, salicylés). Certains toxiques carboabsorbables dont la demi-vie est longue (carbamazépine, phénobarbital, digitoxine, chloroquine, théophylline, dapsone) peuvent bénéficier de l’administration répétée de charbon activé : 50 g initialement puis 25 g toutes les 2 à 3 heures.
I. Traitement épurateur ■
La diurèse forcée n’est jamais indiquée.
■
L’alcalinisation urinaire est justifiée dans les intoxications sévères par aspirine
et herbicides dichlorophénoxyl. ■
L’hémodialyse est validée dans les intoxications chroniques ou aiguës/chroni-
ques sévères par lithium, salicylés en cas d’acidose profonde non corrigée par le bicarbonate de sodium, le méthanol et l’éthylène glycol.
J. Antidotes Tableau 214-3. Antidotes Intoxication
96
Antidote
Remarque
Hypoglycémie
Sérum glucosé
Benzodiazépine (ou apparentée)
Flumazénil
Contre-indiqué en cas d’épilepsie ou d’intoxication polymédicamenteuse
Morphinique
Naloxone
Inefficace sur la buprénorphine (Temgésic® et Subutex®)
Paracétamol
N-acétylcystéine
Selon paracétamolémie
Principales intoxications aiguës
Digitaliques
Anticorps antidigitaliques
Dans les formes graves
Bêtabloquants
Glucagon
En association au traitement hémodynamique
Inhibiteurs calciques
Insuline-glucose
Syndrome cholinergique
Atropine
Intoxication cyanhydrique
Hydroxocobolamine
Systématique en cas de troubles de la conscience ou troubles hémodynamiques lors d’une exposition aux fumées d’incendie
Méthémoglobinémie
Bleu de méthylène
Si méthémoglobinémie ≥ 20 % ou associée à des signes d’hypoxie
Sulfamide hypoglycémiant
Octréotide
Si hypoglycémie réfractaire au resucrage
Isoniazide
Vitamine B6
Si convulsions ®
Chloroquine
Diazépam (Valium )
AVK
Vitamine K
Intoxication oxycarbonée
Oxygénothérapie
Si intoxication grave et en association à un traitement par adrénaline et ventilation artificielle
K. Mesures préventives ■
Consultation psychiatrique indispensable en cas d’intoxication médicamen-
teuse volontaire
ITEM 44
. Elle a pour objectifs une évaluation diagnostique et
une évaluation du risque de récidive. Si une récidive est prévisible, une hospitalisation spécialisée en service de psychiatrie est décidée dès que l’état organique le permet, si besoin après avoir eu recours à la loi du 27 juin 1990 sur les hospitalisations sous contrainte. S’il est déterminé l’absence de risque de récidive, une sortie est possible dès lors qu’il existe un entourage. Un suivi ambulatoire doit être alors organisé. ■
Déclaration d’accident du travail en cas d’intoxication professionnelle.
97
ITEM 214
Fiche
Dernier tour
Principales intoxications aiguës Le diagnostic d’intoxication repose sur : ■ l’anamnèse : substances et doses, voie d’administration, heure de prise ; ■ la mise en évidence d’un toxidrome : Toxidrome
Tableau clinique
Substances responsables
Syndrome de myorelaxation
Coma calme, hypotonique, hyporéflexique, sans localisation et dépression respiratoire
Benzodiazépines, barbituriques, carbamates, phénothiazines, alcool
Syndrome atropinique
Antidépresseurs Confusion, hallucination, dysarthrie, tricycliques, phénothiazines tremblements, agitation, mydriase peu réactive, tachycardie sinusale, rétention aiguë et butyrophénones d’urine, douleurs abdominales, constipation, soif et sécheresse cutanéomuqueuse
Effet stabilisant de membrane
Effet chronotrope, inotrope, dromotrope et bathmotrope négatifs, vasoplégie
Antiarythmiques de classe I, bêtabloquants, antidépresseurs tricycliques, chloroquine et quinine, phénothiazines, carbamazépine
Syndrome adrénergique
Hyperthermie, agitation, convulsions, hypertension, ischémie myocardique, tachycardie, hyperglycémie, hypokaliémie, hyperleucocytose
Théophylline, amphétamines, cocaïne, lSD, éphédrine
Syndrome sérotoninergique
Hyperthermie, agitation ou coma, hallucinations, myoclonies, hyperéflexie, mydriase, hypersudation, frissons, tremblements, diarrhée
IMAO, ISRS, lithium, tricycliques, ecstasy
Syndrome opioïde
Troubles de la vigilance, bradypnée et apnées, myosis serré bilatéral, nausées, vomissements, iléus, prurit, bradycardie, hypotension
Opiacés
Un test diagnostique peut parfois aussi être réalisé : – la naloxone doit être utilisée dans les intoxications morphiniques avec hypoventilation alvéolaire ; – l’anexate peut être utilisée dans les intoxications par benzodiazépines chez un patient non épileptique et en l’absence d’intoxication polymédicamenteuse. L’analyse toxicologique est rarement utile, sauf à titre médicolégal ou quand le dosage quantitatif conditionne la prise en charge (paracétamol, digitaliques, lithium). L’altération de la conscience est le symptôme le plus fréquent. La gravité est plus souvent liée à : ■ l’atteinte cardiovasculaire (vasoplégie et/ou effet inotrope négatif et/ou troubles conductifs ou rythmiques) ; ■ l’atteinte respiratoire (pneumopathie d’inhalation, hypoventilation alvéolaire) ; ■ la rhabdomyolyse et ses conséquences (insuffisance rénale, hyperkaliémie) lorsque le coma a entraîné une immobilisation prolongée. La prise en charge consiste à : ■ évaluer la gravité : liée au terrain, au toxique (cardiotropes), à la dose, à la cinétique du produit, aux associations, au tableau clinique (signes neurologiques, respiratoires, cardiovasculaires, métaboliques) ; ■ toujours hospitaliser : au minimum pour l’évaluation psychiatrique (risque de récidive) ; ■
▲
98
Principales intoxications aiguës
Fiche
Dernier tour
■ poser une voie veineuse périphérique, réaliser un bilan biologique complet, une plasmathèque et une urothèque, une radiographie thoracique, un ECG, monitorer les paramètres vitaux ; ■ prendre en charge les complications neurologiques : – ne jamais exclure une origine traumatique au coma : TDM au moindre doute ; – apprécier la profondeur du coma par le score de Glasgow ; – rechercher une indication à un traitement par sérum glucosé (hypoglycémie), flumazénil (benzodiazépines) ou anexate (morphinique) ; – protéger les voies aériennes par intubation en cas de coma profond ; – rechercher et traiter une comitialité (par benzodiazépines en 1re intention) ; ■ prendre en charge les complications respiratoires : – on distingue les insuffisances respiratoire par hypoxie (pneumopathie d’inhalation), plus rarement par œdème pulmonaire lésionnel (crack, héroïne) et les insuffisances respiratoires par hypoventilation alvéolaire (morphiniques), où l’assistance respiratoire doit être envisagée d’emblée ; – si bradypnée : rechercher un syndrome opioïde ± naloxone ; – rechercher une pneumopathie ± antibiothérapie (amoxicilline-acide clavulanique) ; ■ prendre en charge les complications circulatoires : – plusieurs mécanismes peuvent être à l’origine d’une défaillance circulatoire : hypovolémie chez un patient déshydraté, vasoplégie liée au toxique lui-même ou à un sepsis associé (pneumonie d’inhalation), altération de la contractilité myocardique ; – l’échocardiographie, le cathétérisme artériel pulmonaire peuvent guider le traitement : remplissage vasculaire et/ou traitement vasopresseur (noradrénaline, dopamine) et/ou traitement inotrope positif (dobutamine, adrénaline) ; – en cas de bradycardie sinusale ou de BAV : atropine IV (0,5 à 1 mg) ; en l’absence d’efficacité, traitement bêtamimétique (isoprénaline, dopamine) ou entraînement électrosystolique ; – en cas de troubles conductifs intraventriculaires : bicarbonate ou lactate de sodium molaire (100 à 250 mL et jusqu’à 750 mL) ; – en cas de torsade de pointe : bolus de 2 g de sulfate de magnésium IVL puis 3 à 20 mg/min, isoprénaline et entraînement électrosystolique en cas de récidive ; – en cas d’intoxication digitalique avec troubles rythmiques ou conductifs graves : Fab ; ■ rechercher l’indication d’une décontamination digestive : – lavage gastrique si ingestion récente (< 1 heure) d’un toxique susceptible d’engager le pronostic vital (toxicité cardiovasculaire) ; – charbon activé administré par voie orale (Carbomix® : 50 g chez l’adulte) si ingestion récente (< 1 heure) d’un toxique carboabsorbable (antidépresseur tricyclique, carbamate, paracétamol, salicylés) ; ■ rechercher l’indication d’un traitement épurateur : – alcalinisation urinaire si intoxication sévère par aspirine et herbicides ; – hémodialyse si intoxication sévère par lithium, salicylés, méthanol, éthylène glycol ; ■ rechercher l’indication d’un traitement antidotique : – sérum glucosé : hypoglycémie – flumazénil : benzodiazépine seule ; – naloxone : morphinique ; – N-acétylcystéine : paracétamol ; – anticorps antidigitaliques ; – glucagon : bêtabloquant ; – atropine : syndrome cholinergique ; – hydroxocobolamine : intoxication cyanhydrique ; – diazépam : intoxication grave par chloroquine en association à un traitement par adrénaline et ventilation artificielle ; – vitamine K : intoxication par AVK ; – oxygénothérapie : intoxication oxycarbonée.
99
This page intentionally left blank
ITEM 219
Troubles de l’équilibre acidobasique et désordres hydroélectrolytiques
OBJECTIFS ● Prescrire et interpréter un examen des gaz du sang et un ionogramme sanguin en fonction d’une situation clinique donnée. ● Savoir diagnostiquer et traiter une acidose métabolique une acidose ventilatoire, une dyskaliémie, une dysnatrémie, une dyscalcémie. LIENS TRANSVERSAUX ITEM 166
Myélome multiple des os.
ITEM 193
Détresse respiratoire aiguë du nourrisson, de l’enfant et de l’adulte.
ITEM 200
État de choc.
ITEM 227
Bronchopneumopathie chronique obstructive.
ITEM 233
Diabète sucré de type 1 et 2 de l’enfant et de l’adulte.
ITEM 252
Insuffisance rénale aiguë – Anurie.
ITEM 255
Insuffisance surrénale.
ITEM 302
Diarrhée aiguë chez l’enfant et chez l’adulte.
ITEM 345
Vomissements du nourrisson, de l’enfant et de l’adulte.
Sujets tombés aux concours de l’Internat et aux ECN : 1995, 1997, 1998, 2001, 2008 ●
Sujet tombé
1995, interrégion Nord, dossier 2 : Madame N., 85 ans, est atteinte de démence sénile de type Alzheimer. Elle est institutionnalisée en service de soins de longue durée. Depuis six mois, elle n’a pas posé de problème important. Elle semble bien adaptée à l’unité, est calme, mange bien (poids 66 kg pour 165 cm), dort bien, déambule peu. Il y a trois jours elle a fait une bronchite traitée par antibiotique. On vous appelle parce qu’elle est un peu somnolente, ne s’est pas levée, n’a pas vidé sa carafe d’eau de la veille. La température est à 37,5 °C, la TA est à 110– 75 mmHg (habituellement 140–80 mmHg), l’examen clinique est sans autre particularité, hormis une langue et un sillon gingivojugal secs. Le diagnostic de déshydratation est évoqué et un bilan biologique sanguin le confirme, en montrant : hématocrite 48 % ; sodium 155 mEq/L ; potassium 4,5 mEq/L ; chlore 117 mEq/L ; bicarbonates 25 mEq/L ; glucose 6 mmol/L ; urée 18 mmol/L ; créatinine 135 mmol/L ; protides totaux 82 g/L. 1) De quel type de déshydratation s’agit-il ? Justifiez brièvement votre réponse. 2) On décide de corriger cette déshydratation en environ 36 heures. Quelle quantité de liquide faut-il administrer ? Justifiez votre réponse. 3) La malade étant dans l’immédiat dans l’incapacité de boire, une perfusion intraveineuse est envisagée pour permettre la réhydratation. Par quels autres moyens pourrait-on également réaliser cette réhydratation ?
101
ú
ITEM 219
4) Si la voie veineuse est choisie, quel type de soluté prescrivez-vous ? Avec quel appoint éventuel d’électrolytes ? Justifiez votre réponse. 5) Outre la poursuite de l’antibiothérapie, proposez-vous d’autres traitements médicamenteux ? Lesquels et dans quels buts ? ●
1997, interrégion Nord, dossier 2 : Une femme de 22 ans, sans antécédent personnel ni familial, est hospitalisée pour altération récente de l’état général et troubles digestifs à type de nausées et anorexie. L’interrogatoire de l’entourage retrouve la notion d’un amaigrissement récent, d’une polyuropolydipsie. À l’examen, la pression artérielle est à 80/60 mmHg, la fréquence cardiaque à 100/min, la malade est apyrétique avec une fréquence respiratoire à 25/min. L’examen neurologique est normal. Les résultats des examens complémentaires sont les suivants : Dans le sang : pH = 7,10, PaCO2 = 10 mmHg, PaO2 = 120 mmHg (air ambiant), HCO3 = 6 mmol/L, SaO2 = 97 %, créatininémie = 350 mmol/L, urée = 22 mmol/L, Na+ = 118 mmol/L, K+ = 5,2 mmol/L, Cl- = 89 mmol/L, glycémie = 31 mmol/L, protides totaux = 83 g/L. Dans les urines : natriurèse = 3 mmol/L, urée urinaire = 260 mmol/L. 1) Interpréter l’anomalie de l’équilibre acido-basique observée chez cette malade. 2) Donner les formules et calculer le trou anionique et l’osmolarité plasmatique. Les valeurs obtenues sont-elles normales, basses ou élevées ? 3) Quel est le diagnostic le plus probable ? Quel examen biologique permettra formellement de l’affirmer ? 4) Quelles sont la nature et la cause de l’insuffisance rénale observée ? 5) Rédiger et justifier la prescription pour les 6 premières heures. 6) Comment interpréter le chiffre de la kaliémie ? Quelles en sont les conséquences pour la prescription thérapeutique ultérieure ?
●
1997, interrégion Nord, dossier 8 : Un homme de 64 ans consulte pour des douleurs de la charnière dorsolombaire, apparues depuis 3 mois, progressivement croissantes et nécessitant la prise quotidienne d’antalgiques. L’examen clinique objective une altération modérée de l’état général et une douleur à la percussion des épineuses de D7, D9 et D12. L’hémogramme révèle une anémie à 8,7 g/dL et le laboratoire signale la présence de rouleaux érythrocytaires. La VS est à 90 mm à la première heure. L’ionogramme montre une hyperprotidémie à 92 g/L et une hypercalcémie à 3,6 mmol/L (144 mg/L). La fonction rénale est normale. Vous évoquez un myélome multiple. 1) Quel traitement de l’hypercalcémie proposez-vous ? NB : les questions suivantes portaient spécifiquement sur le myélome.
●
1998, interrégion Nord, dossier 8 : Un patient de 30 ans est admis aux urgences après un accident sur la voie publique. La désincarcération de son véhicule a été longue et difficile et il présente un écrasement du membre inférieur droit. À l’examen, le membre inférieur est très œdématié, augmenté de volume, tendu et douloureux. Les pouls périphériques sont perçus et il n’y a pas de déficit sensitivomoteur important. La TA est à 130/70 mmHg, le pouls à 110/min. Il n’y a pas d’autre atteinte cliniquement évidente et les radiographies ne trouvent pas de lésion osseuse. Le bilan biologique est le suivant : Na+ = 136 mmol/L, pH = 7,32, K+ = 6,9 mmol/L, PaCO2 = 32 mmHg, RA = 17 mmol/L, urée = 52 mmol/L, créatinine = 625 mmol/L. 1) Quel diagnostic permet d’expliquer les anomalies biologiques observées ? 2) Quel est le mécanisme de cette lésion ? 3) Quels autres signes biologiques peut-on rechercher pour confirmer l’étiologie ? 4) Décrivez toutes les anomalies électriques que l’on observe en cas d’hyperkaliémie. 5) Quels sont les principes du traitement d’urgence et les éléments de surveillance ?
●
1998, interrégion Sud, dossier 2 : Un homme de 72 ans, sans antécédent particulier en dehors d’un tabagisme chiffré à 40 paquets/années, est hospitalisé pour troubles de la conscience et vomissements existant depuis plusieurs jours. Sa TA est à 150/70 mmHg (ce qui correspond aux valeurs habituelles). L’examen neurologique ne révèle ni déficit moteur, ni signe de localisation. Le bilan sanguin veineux donne les résultats suivants : Na+ = 120 mmol/L, K+ = 3,2 mmol/L, Ca++ = 3,2 mmol/L, phosphore = 0,8 mmol/L, Cl− = 90 mmol/L, glucose = 5 mmol/L, créatinine = 85 mmol/L, protides = 68 g/L, Ht = 42 % ; CO2 total = 23 mmol/L. Sur un échantillon d’urines, les résultats des examens sont les suivants : Na+ = 140 mmol/L, K+ = 70 mmol/L, Cl− = 108 mmol/L, urée = 380 mmol/L. 1) Quel est l’état d’hydratation du patient ? Justifiez votre réponse. 2) Les vomissements sont-ils responsables des troubles hydroélectrolytiques ? Justifiez votre réponse. 3) Quel est le mécanisme, qui explique les faits observés, probablement responsable du trouble hydroélectrolytique ? 4) Quelle est l’étiologie probable de ce mécanisme ? 5) Quel traitement symptomatique proposez-vous pour corriger l’hyponatrémie ?
●
2001, interrégion Sud, dossier 5 : Un homme de 70 ans, sans traitement préalable, se présente aux urgences pour vomissements (depuis plusieurs jours), altération de l’état général, polypnée. L’examen clinique retrouve une température normale, une pression artérielle à 90/60 mmHg, une fréquence cardiaque à 100/min, la persistance du pli cutané. L’examen de l’abdomen est sans particularité. Les orifices herniaires sont libres. Biologiquement - dans le sang : hématocrite = 52 %, protides = 75 g/L, urée = 25 mmol/L, créatinine = 220 mmol/L, Na+ = 128 mmol/L,
102
Troubles de l’équilibre acidobasique et désordres hydroélectrolytiques
K+ = 2,8 mmol/L, Cl− = 65 mmol/L, bicarbonates = 40 mmol/L, pH = 7,56, PCO2 = 45 mmHg, PO2 = 80 mmHg à l’air ambiant - dans les urines : K+ = 20 mmol/L, Na+ = 4 mmol/L, Cl− = 2 mmol/L, urée = 350 mmol/L. L’ECG ne note qu’une tachycardie sinusale. La radiographie pulmonaire est sans particularité. Les autres examens cliniques et biologiques standard sont sans anomalie. 1) Comment qualifier ce tableau clinique ? 2) Quel trouble acido-basique identifiez-vous ? Quelle en est la cause la plus probable ? 3) Comment interpréter les autres résultats biologiques ? 4) Quelles sont les thérapeutiques immédiates à envisager ? 5) Quel(s) examen(s) complémentaire(s) peut-on proposer pour avancer dans le diagnostic étiologique une fois le traitement urgent entrepris ? ●
2001, interrégion Sud, dossier 11 : Un patient de 65 ans est amené aux urgences par sa famille pour altération de l’état général et confusion. L’interrogatoire de son épouse révèle qu’il est diabétique, traité par Glucophage® et Diamicron®. Il présente depuis peu un syndrome pseudogrippal. L’examen clinique retrouve une confusion avec désorientation temporospatiale et une hyperpnée. La température est à 38 °C, l’hémodynamique est conservée, le pouls est à 100/minute. Les examens complémentaires montrent - gaz du sang : pH = 7,28, PO2 = 110 mmHg, PCO2 = 28 mmHg, HCO3 = 10 mmol/L, SaO2 = 99 % - ionogramme sanguin : Na+ =141 mmol/L, K+ = 5,5 mmol/L, CI− = 101 mmol/L, protides = 82 g/L, urée = 14 mmol/L, créatinine = 120 mmol/L, glycémie = 18 mmol/L - ECG normal en dehors d’une tachycardie sinusale. 1) Définissez avec précision le trouble de l’équilibre acido-basique dont souffre ce patient. Justifiez votre réponse. 2) Comment calculez-vous le trou anionique plasmatique ? Est-il normal, augmenté ou diminué ? 3) Citez les étiologies des acidoses métaboliques à trou anionique augmenté. 4) Chez ce patient en particulier, quels sont les deux diagnostics que vous suspectez d’emblée ? Comment les confirmez-vous ? 5) L’examen de la bandelette urinaire de ce patient vous montre : glycosurie = +++ ; cétonurie = ++++. Quel est votre diagnostic ? Quelles seront les modalités précises du traitement dans les premières heures ? 6) Par quel mécanisme physiopathologique l’hyperkaliémie de ce patient est-elle apparue ? Vous paraît-elle menaçante ? Pourquoi ?
●
2008, dossier 2 : Un homme âgé de 42 ans consulte pour des douleurs articulaires au niveau du genou gauche depuis quelques jours. Comme sa soeur, il a présenté, il y a 2 ans, une crise de colique néphrétique non explorée. Le patient ne prend aucun traitement. À l’examen clinique, le pouls est régulier à 68/min, la tension artérielle est de 130/75 mmHg. Le genou gauche est tuméfié, chaud. On note la présence d’un choc rotulien et un flessum de 10°. Il n’y a pas d’adénopathie inguinale droite ni gauche palpable. Il n’y a pas de déformation axiale des membres inférieurs. Les résultats des explorations biologiques demandées sont les suivants - Hémogramme : hématies = 5,2.106/mm3, leucocytes = 4 800/mm3, plaquettes = 360 000/mm3, Hb = 13,8 g/dL - VS = 35 mm (1re heure), CRP = 60 mg/L - Ionogramme sanguin : Na = 138 mmol/L, Cl = 118 mmol/L, K = 4,1 mmol/L, protidémie = 78 g/L, albuminémie = 40 g/L, calcémie = 118 mg/L (2,95 mmol/L), phosphorémie = 21,7 mg/L (0,70 mmol/L), créatininémie = 68 mmol/L. Une radiographie des genoux est pratiquée.
1) Interprétez la radiographie du genou gauche. 2) Quel est le diagnostic le plus probable des douleurs articulaires de ce patient ? Justifiez votre réponse. 3) Comment interprétez-vous le bilan phosphocalcique ? Quelles hypothèses diagnostiques pouvez-vous faire ? Quel(s) examen(s) biologique(s) demandez-vous pour confirmer l’hypothèse diagnostique la plus probable ? 4) Vous avez confirmé votre diagnostic et le patient a été efficacement traité. Deux ans plus tard, cet homme est adressé en urgence à l’hôpital pour malaise, de survenue assez brutale, avec perte de connaissance. Son épouse signale, qu’au cours des dernières semaines, il a eu plusieurs malaises résolutifs après la prise d’aliments sucrés. Par ailleurs, elle vous confirme que son mari ne prend aucun traitement. À l’examen clinique, le patient est en état de coma agité, sans signe de localisation. La glycémie capillaire faite aux urgences est de 1,94 mmol/L. Quel traitement immédiat pratiquez-vous ?
103
ú
ITEM 219
5) Selon vous, à quelle affection peut être rapporté ce coma ? Quels examens pratiquez-vous pour confirmer votre hypothèse diagnostique ? 6) Le présent coma et les manifestations présentées par le patient, il y a 2 ans, doivent faire évoquer un diagnostic, lequel ? Que recherchez-vous et quels examens pratiquez-vous pour explorer ce possible diagnostic ? ●
2008, dossier 3 : Une patiente de 68 ans est amenée aux urgences par sa famille pour lombalgies aiguës évoluant depuis 48 heures et faisant suite à une chute de sa hauteur. À l’interrogatoire de sa famille, vous apprenez qu’elle est suivie depuis 10 ans pour une hypertension artérielle essentielle et qu’elle prend du ramipril (Triatec®) depuis plusieurs années. La fréquence cardiaque est à 125/min, la tension artérielle est à 80/40 mmHg, la température à 38 °C. Le score de Glasgow est à 9, il n’existe pas de signes de localisation neurologique, il n’y a pas d’anomalie des réflexes pathologique, la nuque est souple. L’auscultation cardiaque et pulmonaire ne vous apporte rien de particulier. L’abdomen est météorisé, sensible à la palpation, sans défense, avec un tympanisme, il n’existe pas de bruits hydroaériques. L’examen du rachis trouve une douleur exquise à la palpation des épineuses L2 et L3. La mobilisation rachidienne active est impossible et la mobilisation passive entraîne une douleur intense. Les premiers examens biologiques effectués sont les suivants : Na = 146 mmol/L, K = 4,6 mmol/L, Cl = 90 mmol/L, Ca = 4,40 mmol/L, bicarbonates = 13 mmol/L, urée = 34 mmol/L, créatinine = 230 mmol/L, phosphore = 1,4 mmol/L (N = 0,8–3). 1) Quels diagnostics envisagez-vous pour expliquer les manifestations cliniques et biologiques de cette patiente ? 2) Quels examens demandez-vous ? 3) La famille de la patiente vous apporte la radiographie effectuée en ville il y a 48 heures, à la suite de sa chute. Décrivez la radiographie (iconographie jointe). Quel diagnostic évoquez-vous ? Quelle est votre prise en charge thérapeutique symptomatique ?
4) Vingt-quatre heures plus tard, l’état clinique de la patiente s’est amélioré, la malade est apyrétique, a une conscience normale, une pression artérielle normale. Elle se plaint tout de même de violentes lombalgies continues, insomniantes. Comment prenez-vous en charge sa douleur ? 5) Cinq jours après le début du traitement, la patiente a brutalement une douleur basithoracique droite avec dyspnée. La pression artérielle est à 140/80 mmHg, la fréquence cardiaque à 110/min, la fréquence respiratoire à 28/min. L’auscultation pulmonaire est normale. Elle a une température à 37,8 °C. La gazométrie artérielle en air ambiant trouve : pH = 7,49, PaO2 = 60 mmHg, PaCO2 = 28 mmHg, HCO3− = 22 mmol/L, SaO2 = 92 %. L’électrocardiogramme montre une tachycardie sinusale. La radiographie thoracique est normale. L’ionogramme plasmatique est normalisé mais l’urée et la créatinine sont toujours élevées (urée = 15 mmol/L, créatinine = 125 mmol/L). Quel diagnostic évoquez-vous ? Comment le mettrez-vous en évidence (en discutant le rapport bénéfice/risque des différents examens) ? 6) Quel est le traitement de cet épisode ? Indiquez les médicaments utilisés, la posologie, la durée du traitement, les modalités de sa surveillance et les conseils que vous donnez à la patiente. ●
2009, dossier 3 : Voir item 200 (« État de choc »).
CONSENSUS ● Aucune conférence de consensus n’existe à ce jour sur ce thème.
104
Troubles de l’équilibre acidobasique et désordres hydroélectrolytiques
Troubles de l’équilibre acido-basique POUR COMPRENDRE… ■
L’équilibre acido-basique se juge sur 3 paramètres : le pH, la PaCO2, les bicarbo-
nates plasmatiques (HCO−3). ■
Les quatre grandes perturbations acido-basiques sont l’acidose et l’alcalose
métabolique, l’acidose et l’alcalose respiratoire. ■
L’acidose métabolique est caractérisée par une diminution du pH, une diminution
des bicarbonates par consommation ou perte (phénomène primitif) et une diminution de la PaCO2 par hyperventilation alvéolaire (phénomène compensatoire). ■
L’alcalose métabolique est caractérisée par une augmentation du pH, une aug-
mentation des bicarbonates par perte d’ions H+ (phénomène primitif) et une augmentation de la PaCO2 par hypoventilation alvéolaire (phénomène compensatoire). ■
L’acidose respiratoire est caractérisée par une diminution du pH, une augmen-
tation de la PaCO2 par hypoventilation alvéolaire (phénomène primitif) et une augmentation des bicarbonates par diminution du seuil rénal de réabsorption des bicarbonates (phénomène compensatoire). ■
L’alcalose respiratoire est caractérisée par une augmentation du pH, une dimi-
nution de la PaCO2 par hyperventilation alvéolaire (phénomène primitif) et une diminution des bicarbonates par augmentation du seuil rénal de réabsorption des bicarbonates (phénomène compensatoire). ■
Les phénomènes de compensation nécessitent un délai. On peut ainsi distinguer
les situations chroniques, où la compensation est importante, des situations aiguës, où la compensation est modeste voire absente. La compensation respiratoire est plus rapide que la compensation rénale.
I. PHYSIOPATHOLOGIE A. Détermination du pH ■
Un acide est une molécule qui en solution libère un ion H+.
■
Une base est une molécule qui en solution capte un ion H+.
■
La concentration en ion H+ d’une solution s’exprime sous forme logarithmique :
pH = – log10[H+]
B. Systèmes tampons ■
De nombreux acides, dits acides faibles, sont partiellement dissociés et forment
avec la base conjuguée un couple acide/base : RCOOH (acide faible) ↔ RCOO− (base conjuguée) + H+ ■
Les ions H+ sont ainsi, dans un mélange équimolaire d’acide faible et de sa base
conjuguée, captés par la base et masqués : on parle de « système tampon », atténuant les variations d’ions H+ et donc de pH.
105
ITEM 219
C. Couple acide carbonique/bicarbonate, équation d’Henderson-Hasselbach ■
Parmi les systèmes tampons, le couple H2CO3/HCO3− est un système régulateur
essentiel du pH. L’acide carbonique (H2CO3) est transformé en CO2 par l’anhydrase carbonique, abondante dans les hématies. ■
Le CO2 est évacué dans les poumons.
■
La relation physique qui lie le pH aux bicarbonates et au dioxyde de carbone est
l’équation d’Henderson-Hasselbach : – pH = pK + log (HCO−3 /H2CO3) ; – pH = 6,1 + log (HCO−3 /0,003.PCO2) ; – 6,1 = pK de l’acide carbonique. ■
Les constituants de cette équation sont mesurables dans le sang et les valeurs
normales sont : – pH = 7,40 ± 0,05 ; – HCO−3 = 25 ± 3 mmol/L ; – PaCO2 = 40 ± 5 mmHg. ■
Le pH varie dans le sens du quotient HCO−3 /PCO2. En cas de variation pathologi-
que de PCO2 ou de HCO−3, l’organisme cherche à ramener le pH vers la normale en agissant sur l’autre terme du quotient HCO−3/PCO2.
D. Trou anionique (TA) ■
TA = [Na+] – ([Cl−] + [HCO 3−]).
■
Son calcul néglige d’autres cations (K+, Ca2+, Mg2+) ou anions (sulfates, phosphates).
■
Sa valeur normale est de 12 ± 4 mmol/L, correspondant aux anions protidiques
non facilement dosables. En cas d’hypoprotidémie et notamment d’hypoalbuminémie, le trou anionique est évidemment diminué. ■
Une augmentation du trou anionique est liée à la présence d’un acide (AH) dont
l’anion (A−) prend la place de HCO−3 , un acide envahissant l’organisme étant en effet tamponné par le couple bicarbonate/acide carbonique selon la réaction : AH + HCO3− → A− + H2CO3
E. Gaz du sang ■
Les trois paramètres indispensables à la détermination de l’équilibre acido-basi-
que (pH, PaCO2, HCO−3 ) sont mesurés sur un prélèvement artériel. ■
L’artère radiale est le site privilégié ; l’artère fémorale est réservée aux échecs de
ponction radiale. Une compression au-dessus du point de ponction est indispensable après retrait de l’aiguille. ■
Le prélèvement doit être envoyé immédiatement au laboratoire et l’analyse tient
compte de la température du patient (qui peut entraîner des corrections de PaO2 et de pH) et des conditions de ventilation (ventilation spontanée, ventilation mécanique, débit d’oxygénothérapie, FiO2) pour l’interprétation. ■
La ponction veineuse accidentelle ou volontaire est possible et l’interprétation
d’un gaz du sang veineux doit tenir compte de l’activité métabolique du membre concerné et éventuellement de l’ischémie induite par la mise en place d’un garrot. La PvO2 est évidemment franchement abaissée, tandis que le pH et les bicarbonates sont légèrement abaissés et la PvCO2 légèrement plus élevée. 106
Troubles de l’équilibre acidobasique et désordres hydroélectrolytiques
II. ACIDOSE MÉTABOLIQUE A. Causes de l’acidose métabolique* La mesure du trou anionique est indispensable au diagnostic de la cause de l’acidose.
1. Acidose métabolique à trou anionique normal ou peu augmenté ■ Par fuite digestive de bicarbonates (diarrhée, fistules digestives, fistules pancréatiques, urétéro-sigmoïdostomie) ■
ITEM 302
.
Rarement par anomalie des fonctions tubulaires d’acidification : acidose tubu-
laire rénale par défaut de sécrétion d’ions H+ dans le canal collecteur par le tubule proximal (type I), ou par défaut de réabsorption des bicarbonates par le tubule proximal (type II), ou par défaut de sécrétion urinaire d’ammonium (NH4+ ) (type IV). ■
Très rarement lors d’un traitement par inhibiteur de l’anhydrase carbonique.
■
Le calcul du TA urinaire (TAu = [Na+ + K+]u – [Cl−]u) permet de distinguer les
pertes rénales des pertes digestives. Il est normalement positif. En cas de perte digestive, il se négative du fait d’une sécrétion rénale accrue d’ammonium (NH4+) et d’une augmentation du chlore urinaire. En cas de perte rénale, il reste positif du fait d’une faible excrétion de NH4+.
2. Acidose métabolique à trou anionique augmenté ■ Accumulation d’un acide entraînant une consommation de bicarbonates (AH + HCO3− → A− + H2CO3 → CO2 [éliminé] + H2O) : – insuffisance rénale : accumulation d’ions H+ non éliminés par le rein – acidocétose diabétique : par accumulation d’acides cétoniques
ITEM 252
ITEM 233
;
;
– cétose de jeûne ; – cétose alcoolique ; – acidose lactique ■
ITEM 200
.
Accumulation d’acides au cours de certaines intoxications : intoxication méthy-
lique, intoxication par éthylène glycol, intoxication salicylée. Un trou osmolaire élevé est souvent associé. N.B. : La seule situation où il existe une perte de bicarbonate est la perte digestive, qui constitue donc la seule indication théorique à un traitement par bicarbonates.
B. Conséquences de l’acidose métabolique ■
Polypnée de Kussmaul = respiration à 4 temps : – inspiration ; – pause en inspiration ; – expiration ; – pause en expiration.
■
Tableau d’insuffisance respiratoire aiguë par épuisement respiratoire.
■
Hyperkaliémie.
■
Atteinte myocardique dans les cas les plus sévères : action inotrope négative,
troubles du rythme et de la conduction. 107
*Concours Internat 1997, 2001
ITEM 219
C. Traitement de l’acidose métabolique* Il est avant tout étiologique. La prise en charge spécifique peut aussi reposer sur : ■ *Concours Internat 2001
la ventilation mécanique, afin d’augmenter l’élimination du CO2, mais son utilisa-
tion reste limitée aux situations où il existe une indication associée : – détresse respiratoire ; – et/ou état de choc ; – et/ou troubles de la vigilance ; ■
la perfusion de bicarbonates en cas de pertes digestives (ou rarement rénales),
en cas d’hyperkaliémie associée (sauf acidocétose diabétique), en cas d’intoxication à un produit à effet stabilisant de membrane ; ■
l’épuration extrarénale notamment lorsqu’il existe une insuffisance rénale associée.
III. ALCALOSE MÉTABOLIQUE Le phénomène primitif est l’augmentation des bicarbonates dont la consommation est diminuée du fait d’une perte d’ions H+ : ■
H+ + HCO3− → H2CO3 → CO2 + H2O ;
■
donc CO2 + H2O – H+ → HCO3−.
A. Causes de l’alcalose métabolique La perte d’ions H+ est liée à : ■
un hyperaldostéronisme primaire ;
■
un hyperaldostéronisme secondaire (hypovolémie vraie ou relative) ;
■
une hypokaliémie profonde : stimule dans le canal collecteur un échange actif K+/H+ ;
■
des pertes digestives par vomissements ou aspirations gastriques avec perte de HCl ;
■
une hypercalcémie : par atteinte fonctionnelle tubulaire à l’origine d’une aug-
mentation de la réabsorption des bicarbonates. N.B. : à fonction rénale normale, le seuil d’élimination rénale des bicarbonates est augmenté, permettant une élimination rapide de l’excédent de bicarbonates. Ces mécanismes sont donc souvent associés à une déshydratation extracellulaire et à une insuffisance rénale fonctionnelle, l’ensemble expliquant l’alcalose métabolique.
B. Conséquences de l’alcalose métabolique sévère (pH > 7,55) ■
Hypopnée.
■
Troubles de la conscience.
■
Crampes.
■
Myoclonies.
■
Syndrome d’hyperexcitabilité musculaire (crises de tétanie).
■
Convulsions (rares).
■
Hypokaliémie.
C. Traitement de l’alcalose métabolique ■
108
Il est avant tout étiologique.
Troubles de l’équilibre acidobasique et désordres hydroélectrolytiques
■
Il repose aussi sur la correction des troubles métaboliques éventuellement asso-
ciés (déshydratation, hypokaliémie). ■
Dans les cas exceptionnels d’alcalose majeure (pH > 7,60, HCO3− > 60 mmol/L),
associée à des signes cliniques menaçants, et un traitement étiologique inefficace, la perfusion d’acide chlorhydrique peut être proposée.
IV. ACIDOSE RESPIRATOIRE
ITEM 193
A. Causes de l’acidose respiratoire ■
Pathologies respiratoires chroniques obstructives ou restrictives, évoluées ou
en décompensation (++) ■
ITEM 277
.
Atteinte de la fonction neuromusculaire respiratoire
ITEM 193
:
– au niveau du tronc cérébral : intoxication médicamenteuse, accident vasculaire cérébral, tumeur ; – au niveau de la moelle épinière et au-dessus de C4 : traumatisme du rachis cervical, myélite aiguë, thrombose vasculaire ; – au niveau des afférences nerveuses : poliomyélite antérieure aiguë, polyradiculonévrite aiguë, sclérose latérale amyotrophique ; – au niveau de la plaque motrice : myasthénie ; – au niveau des muscles respiratoires : myopathies et épuisement respiratoire. ■
Pathologies respiratoires évoluées obstructives ou restrictives.
B. Conséquences de l’acidose respiratoire ■
Céphalées.
■
Astérixis.
■
Syndrome confusionnel.
■
Coma.
■
Tachycardie, hypertension artérielle.
■
Sueurs.
■
Hyperkaliémie.
C. Traitement de l’acidose respiratoire Il est étiologique et repose dans la plupart des cas sur la ventilation artificielle ITEM 193
.
V. ALCALOSE RESPIRATOIRE A. Causes de l’alcalose respiratoire ■
Alcalose respiratoire d’origine neurologique : – hyperventilation psychogène ; – encéphalopathie hépatique ; – intoxication salicylée.
■
Alcalose respiratoire par stimulation hypoxique des centres respiratoires : – embolie pulmonaire ; – maladie pulmonaire hypoxémiante ; – séjour en altitude.
109
ITEM 219
B. Conséquences de l’alcalose respiratoire ■
Signes neuropsychiques : l’alcalose respiratoire entraîne des variations impor-
tantes des débits sanguins régionaux. Ainsi, le débit sanguin cérébral diminue de 2 % pour chaque diminution de PaCO2 de 1 mmHg : – vertiges ; – tremblements, tétanie ; – convulsions. ■
Hyperlactatémie modérée secondaire à une stimulation de la glycolyse anaéro-
bie (activation de la phosphofructokinase). ■
Hypokaliémie.
C. Traitement de l’alcalose respiratoire Le traitement est celui de la cause.
Dysnatrémies POUR COMPRENDRE… ■
Le sodium est le principal constituant de l’osmolarité plasmatique. Toute
modification de natrémie entraîne un mouvement d’eau entre les compartiments extracellulaire et intracellulaire, visant à égaliser les osmolalités des 2 compartiments. ■
Une hyponatrémie est toujours associée à une hyperhydratation intracellulaire.
■
Une hypernatrémie est toujours associée à une déshydratation intracellulaire.
■
Les conséquences de l’hyperhydratation intracellulaire sont surtout graves au
niveau cérébral, l’augmentation du contenu en eau du tissu cérébral étant directement responsable d’une hypertension intracrânienne.
I. PHYSIOPATHOLOGIE A. Sodium ■
Le sodium total de l’organisme est estimé à environ 4 000 mmol. La grande majo-
rité du sodium (98 %) est extracellulaire. Ainsi, dans le plasma, sa concentration normale est comprise entre 138 et 142 mmol/L. Le sodium est un cation intracellulaire accessoire dont la concentration n’est que de 10 à 15 mmol/L. Cette différence de concentration est responsable d’un gradient électrochimique ayant tendance à faire rentrer le sodium dans la cellule. ■
Le sodium est maintenu dans le secteur extracellulaire par un mécanisme actif,
une « pompe à sodium », faisant sortir de la cellule une quantité de sodium égale à celle que le gradient électrochimique fait pénétrer par diffusion. ■
Les entrées de sodium sont constituées exclusivement par les apports diges-
tifs. L’élimination digestive est négligeable (10 mmol/j) et les pertes sudorales sont 110
Troubles de l’équilibre acidobasique et désordres hydroélectrolytiques
très faibles (1 mmol/j). La principale voie d’élimination est urinaire. Le contrôle du bilan du sodium est assuré donc essentiellement par le rein.
B. Eau ■
L’eau totale représente 60 % du poids corporel chez l’homme, 50 % chez la femme.
■
La membrane cellulaire est librement perméable à l’eau et à certains solutés. Les
solutés non diffusibles sont responsables de la pression osmotique. Le passage de l’eau à travers la membrane cellulaire dépend de la concentration des solutés non diffusibles de part et d’autre, l’eau se distribuant de part et d’autre de la membrane cellulaire de telle sorte que les osmolarités extra et intracellulaires soient identiques. La répartition se fait ainsi pour 2/3 dans le secteur intracellulaire et 1/3 dans le secteur extracellulaire. ■
L’osmolalité est égale à la somme des concentrations de toutes les molé-
cules, diffusibles ou non, dissoutes dans 1 kg d’eau plasmatique. Elle est mesurée au laboratoire par l’abaissement du point de congélation du plasma (abaissement cryoscopique) et est normalement comprise entre 280 et 295 mosmol/ kg d’eau plasmatique. Elle peut être également mesurée = 2 × [Na+] + [urée] + [glucose]. Le facteur 2 est lié au fait que chaque cation Na+ s’accompagne d’un anion. ■
L’osmolarité est égale à la somme des concentrations de toutes les molécules,
diffusibles on non, dissoutes dans 1 L d’eau plasmatique. En pratique clinique, la différence entre osmolalité et osmolarité n’est pas significative. ■
L’osmolalité efficace, ou tonicité, est la somme des concentrations de toutes les
molécules non diffusibles dissoutes dans 1 L d’eau plasmatique. Les mouvements d’eau à travers la membrane cellulaire sont donc régis uniquement par l’osmolalité efficace. L’urée traverse librement la membrane cellulaire et ne participe donc pas à la tonicité sauf dans les situations de variations importantes et rapides (épuration extra-rénale). Le glucose, en présence d’insuline, traverse également la membrane cellulaire et ne participe donc pas à la tonicité sauf dans les situations de carence en insuline (céto-acidose diabétique). En dehors de ces situations, l’osmolalité efficace est estimée par le produit : 2 × [Na+]. ■
Osmolalité efficace = 2 × [Na+].
C. Régulation du bilan de l’eau et du sodium ■
L’hydratation du secteur extracellulaire dépend du capital sodé de ce secteur.
■
L’hydratation du secteur intracellulaire, en revanche, est fonction de la concen-
tration des électrolytes extracellulaires, le sodium essentiellement. La natrémie détermine donc l’hydratation intracellulaire. ■
Le contrôle du bilan de l’eau et du sodium fait intervenir 2 mécanismes diffé-
rents : la balance hydrique et la balance sodée : – la balance hydrique est contrôlée par l’osmostat hypothalamohypophysaire via le centre de la soif et le centre de sécrétion de l’hormone antidiurétique (HAD). L’HAD augmente la réabsorption d’eau au niveau du canal collecteur rénal. L’urine excrétée est alors de faible volume et est de forte osmolarité. La 111
ITEM 219
synthèse de l’HAD est déclenchée par la stimulation d’osmorécepteurs hypothalamiques lors de l’augmentation de l’osmolarité et/ou la stimulation de barorécepteurs carotidiens lors d’une diminution importante de la volémie ; – la balance sodée est régulée par plusieurs systèmes : le système rénine-angiotensine-aldostérone, qui lorsqu’il est stimulé augmente la réabsorption sodée au niveau des tubes contournés proximaux et distaux et du canal collecteur médullaire (l’urine excrétée est alors pauvre en sodium), et les peptides natriurétiques.
II. HYPONATRÉMIES Elles sont définies par [Na+] < 138 mmol/L.
A. Causes des hyponatrémies On distingue les hyponatrémies non hypotoniques, au cours desquelles l’hyponatrémie n’est pas associée à une diminution de l’osmolarité, des hyponatrémies hypotoniques.
1. Hyponatrémies non hypotoniques ■ Pseudohyponatrémie : la tonicité du plasma est normale (la concentration en sel par litre d’eau plasmatique est normale), mais le contenu en eau du sérum est diminué par augmentation de la phase solide. Une mesure par électrode spécifique directe (et non par spectrophotométrie de flamme ou électrode spécifique) permet de corriger cet artéfact. Cette situation s’observe au cours des : – hyperlipidémies majeures ; – hyperprotidémies importantes : dysglobulinémie, traitement par immunoglobuline polyvalente. ■
Hyponatrémie de redistribution : la tonicité du plasma est augmentée mais cette
augmentation n’est pas liée au sodium. Cette augmentation de la tonicité est à l’origine d’un transfert d’eau du secteur intracellulaire vers le secteur extracellulaire. Cette situation s’observe au cours des : – hyperglycémies ; – augmentations du trou osmolaire : le trou osmolaire, différence entre l’osmolalité plasmatique mesurée et l’osmolalité plasmatique calculée, est augmenté lorsqu’il est supérieur à 10 mosmol/L. Cette augmentation suggère la présence de substances osmotiquement actives mais non mesurées : alcool éthylique, éthylène glycol, méthanol.
2. Hyponatrémies hypotoniques a) Hyponatrémies de dilution ■ Intoxication par l’eau : l’élimination rénale d’eau dépend de la capacité de dilution maximale des reins et de la quantité d’osmoles devant être excrétée. Ainsi, l’osmolarité urinaire peut descendre jusqu’à 50 mosm/L. Ici, la capacité maximale de dilution des urines est dépassée. L’osmolarité urinaire est basse (OsmU < OsmP) et est dite adaptée. Cette situation s’observe dans les contextes suivants : – potomanie ; 112
Troubles de l’équilibre acidobasique et désordres hydroélectrolytiques
– syndrome des buveurs de bière ; – sujet âgé, dont la capacité de dilution des urines est réduite. ■
Sécrétion d’HAD : l’osmolarité urinaire est ici élevée (OsmU > OsmP), dite inadap-
tée. Cette situation s’observe dans les contextes suivants : – hypovolémie relative : insuffisance cardiaque, syndrome néphrotique, insuffisance hépatocellulaire, hypoalbuminémie ; – syndrome de sécrétion inappropriée d’HAD (SiHAD). ■
Traitement diurétique : l’osmolarité urinaire est élevée car la natriurèse est ici
augmentée. L’hyponatrémie n’est pas expliquée par une perte rénale en sodium mais par une synthèse d’HAD du fait de l’hypovolémie et une interférence avec le segment cortical de dilution des urines. ■
Hypokaliémie : en cas de perte rénale ou digestive de potassium, le potassium
intracellulaire sort vers le compartiment extracellulaire pour maintenir la kaliémie. L’entrée de sodium dans le compartiment intracellulaire permet de maintenir l’électroneutralité et peut provoquer une hyponatrémie. ■
Syndrome des membranes malades (sick cell syndrome) : entité dont l’existence
est controversée et correspondrait aux situations d’agression sévère, un dysfonctionnement cellulaire entraînant la sortie de solutés intracellulaires vers le secteur extracellulaire, à l’origine d’un transfert d’eau et d’une hyponatrémie.
b) Hyponatrémies de déplétion ■ Pertes rénales (natriurèse haute > 20 mmol/L) : – néphropathie tubulo-interstitielle ; – polyurie osmotique ; – insuffisance surrénale ■
ITEM 235
.
Pertes digestives (natriurèse basse < 20 mmol/L) : – diarrhée ;
ITEM 302
– vomissements ;
ITEM 345
– fistules digestives ; – 3e secteur. Il faut cependant noter que ces pertes rénales ou digestives sont souvent iso voire hypotoniques et ne peuvent expliquer à elles seules l’hyponatrémie, qui est liée au fait que le sujet compense ces pertes avec de l’eau sans reconstituer son capital sodé.
B. Manifestations de l’hyponatrémie ■
Les manifestations cliniques sont d’autant plus nettes que l’hyponatrémie est
d’installation brutale : – dégoût de l’eau ; – signes digestifs : nausées et vomissements ; – signes neurologiques : syndrome confusionnel, troubles du comportement, coma, comitialité. ■
Les conséquences de l’hyperhydratation intracellulaire sont surtout graves au
niveau cérébral, l’augmentation du contenu en eau du tissu cérébral étant directement responsable d’une hypertension intracrânienne. Les cellules cérébrales ont 113
ITEM 219
cependant un comportement de défense, consistant dans une première phase (immédiate) à diminuer leur contenu en électrolytes (Na+ et K+) et dans un second temps (retardé de plusieurs heures ou jours) à diminuer leur contenu en osmolites (polyols, méthylamines, acides aminés). Cette adaptation secondaire est la plus efficace, expliquant la mauvaise tolérance neurologique des hyponatrémies aiguës et la bonne tolérance neurologique des hyponatrémies chroniques. À l’inverse, on comprend aussi qu’une correction trop rapide de la natrémie en cas d’hyponatrémie chronique aboutit à une diminution rapide de l’eau intracellulaire tandis que le contenu cellulaire en osmoles ne se normalise qu’avec une certaine inertie, aboutissant à une rétraction des cellules cérébrales et à une surcharge ionique altérant leur fonctionnement. ■
La myélinolyse centropontine est le risque majeur d’une correction trop rapide de
l’hyponatrémie. Elle correspond à des lésions symétriques du centre de la protubérance, pouvant être mises en évidence à l’IRM. La symptomatologie apparaît après un intervalle libre de 1 à 6 jours et associe : une somnolence, une dysarthrie, une paralysie faciale bilatérale, une quadriparésie spastique. L’amplitude de correction dans les 24 premières heures (plus que la vitesse horaire de correction) détermine la survenue de la myélinolyse centropontine. Les objectifs thérapeutiques recommandés sont : une augmentation de la natrémie < 12 mmol/L en 24 heures ou < 18 mmol/L en 48 heures. Le pronostic est grave, avec une absence de récupération motrice dans 70 % des cas. Pour certains, la réinduction d’une hyponatrémie après une correction trop rapide est à même de faire disparaître les symptômes neurologiques. *Concours Internat 1998
C. Traitement de l’hyponatrémie* L’utilisation de formules mathématiques pour l’aide au traitement n’est plus recommandée.
1. En cas d’hyponatrémie aiguë (< 48 h) ■ Une correction rapide n’est pratiquée qu’en cas de symptômes neurologiques graves (coma, comitialité). ■
On utilise du sérum salé hypertonique à 3 % : 1 mmol/kg/h, interrompu dès la
disparition des symptômes, une faible augmentation de la natrémie pouvant faire disparaître les symptômes.
2. Traitement des hyponatrémies chroniques ou d’ancienneté indéterminée ■
La correction de la natrémie doit, dans cette situation, qui est la plus fréquente,
être lente : augmentation de la natrémie < 12 mmol/L en 24 heures ou < 18 mmol/L en 48 heures.
■
La restriction hydrique seule est souvent suffisante quand le volume extracellu-
laire est élevé ou normal. ■
L’apport de sérum physiologique seul est souvent suffisant quand le volume
extracellulaire est bas. ■
En cas de symptôme neurologique grave (coma, comitialité), une correction
rapide par sérum salé hypertonique sous stricte surveillance doit être discutée.
114
Troubles de l’équilibre acidobasique et désordres hydroélectrolytiques
III. HYPERNATRÉMIES Elles sont définies par [Na+] > 145 mmol/L.
A. Causes des hypernatrémies ■
Hypernatrémie par perte d’eau sans perte de sodium : – diabète insipide neurogénique ; – diabète insipide néphrogénique ; – pertes respiratoires (hyperventilation) ; – pertes cutanées (brûlures étendues, hypersudation) ; – hypodypsie du sujet âgé.
■
Hypernatrémie par perte d’eau et de sodium, le déficit hydrique excédant légère-
ment le déficit sodé (l’hypernatrémie y est moins prononcée) : – pertes cutanées ; – pertes digestives (vomissements, aspiration digestive, fistule digestive, diarrhées)
ITEM 302, 345
;
– pertes rénales (diurétiques de l’anse, diurèse osmotique, levée d’obstacle, reprise d’une diurèse après nécrose tibulaire). ■
Hypernatrémie par surcharge en sodium : perfusion de bicarbonates de
sodium.
B. Conséquences de l’hypernatrémie Les manifestations cliniques sont d’autant plus nettes que l’hypernatrémie est d’installation rapide : ■
soif ;
■
sécheresse des muqueuses ;
■
fièvre ;
■
signes neuropsychiques : syndrome confusionnel, coma, comitialité ;
■
hématomes sous-duraux chez l’enfant, thrombose vasculaire cérébrale. *Concours Internat 1995
C. Traitement de l’hypernatrémie* ■
L’utilisation de formules mathématiques pour l’aide au traitement n’est plus
recommandée. ■
Une correction trop rapide est potentiellement dangereuse car la diminution de
la natrémie peut être à l’origine d’un transfert d’eau du secteur extracellulaire vers le secteur intracellulaire et donc d’un œdème cérébral. ■
En cas de perte d’eau sans perte de sodium, le traitement consiste en l’adminis-
tration d’eau par voie entérale et/ou de solution glucosée à 5 %. ■
En cas de perte d’eau et de sodium, le traitement consiste à traiter en priorité
l’hypovolémie par l’administration de sérum salé. ■
Dans le cas particulier du diabète insipide neurogénique, le traitement
repose aussi sur l’administration d’un traitement substitutif par desmopressine (Minirin).
115
ITEM 219
Dyskaliémies POUR COMPRENDRE… ■
Le potassium est le principal cation intracellulaire et détermine le pouvoir osmo-
tique intracellulaire. ■
Le gradient transcellulaire de potassium est le principal déterminant du potentiel
de repos membranaire. Ainsi, le retentissement sur la polarisation de la membrane cellulaire myocardique fait toute la gravité des dyskaliémies, qui constituent des urgences thérapeutiques. ■
L’hyperkaliémie est un trouble hydroélectrolytique particulièrement grave, met-
tant en jeu le pronostic vital si la kaliémie est > 6,5 mmol/L. ■
Au cours des dyskaliémies, la réalisation d’un électrocardiogramme est indispen-
sable : il confirme souvent le diagnostic positif et fait le diagnostic de gravité.
I. PHYSIOPATHOLOGIE A. Potassium ■
L’organisme humain contient environ 3 500 mmol de potassium. La grande majo-
rité du potassium (98 %) est intracellulaire, où sa concentration (kalicytie) atteint 120 mmol/L. Ainsi dans le plasma, la concentration en potassium n’est que de 3,5 à 5 mmol/L. ■
Les échanges de potassium entre milieux intra et extracellulaires sont gouvernés
par différents mécanismes, en particulier l’activité de la pompe Na-K ATPase des membranes cellulaires, le métabolisme cellulaire, la formation des cations intracellulaires et le pH extracellulaire. ■
Dans la plupart des cas, une hypokaliémie correspond à une hypokalicytie pro-
fonde, sauf en cas d’acidose.
B. Régulation du stock potassique ■
Le bilan entrées-sorties du potassium est le résultat net d’une absorption diges-
tive et d’une élimination essentiellement rénale. ■
Les apports alimentaires quotidiens varient de 50 à 150 mmol. L’absorption
digestive du potassium est quasi complète. L’élimination se fait chez le sujet normal à raison de moins de 10 % par les selles et de 90 % par le rein. En cas d’insuffisance rénale chronique, l’élimination potassique augmente par voie digestive. De même, l’élimination digestive peut être multipliée par dix en cas de diarrhées. ■
L’absorption digestive du potassium est rapide. Il existe une lenteur rela-
tive d’élimination. Les excès de charge de potassium dans le milieu extracellulaire sont tamponnés grâce au transfert du milieu extracellulaire vers le milieu intracellulaire. ■
Ce transfert est sous l’influence de l’équilibre acido-basique, des catéchola-
mines et de l’insuline. Au cours d’une acidose métabolique, la plupart des protons qui s’accumulent sont tamponnés dans la cellule. Cette entrée de protons 116
Troubles de l’équilibre acidobasique et désordres hydroélectrolytiques
s’accompagne d’une sortie de Na+ et de K+ pour préserver l’électroneutralité. L’insuline augmente l’entrée du potassium dans les cellules en stimulant directement la Na-K ATPase membranaire. Les catécholamines ont également un rôle dans ce transfert de potassium en stimulant l’ATPase membranaire. ■
Le rein permet l’adaptation des sorties du potassium à ses entrées. Dans la
grande majorité des situations cliniques, la réabsorption du potassium est quasi complète (95 %) dans le tube contourné proximal et l’anse de Henlé. Le tube contourné distal tient sous sa dépendance l’extrusion de potassium par sécrétion. Cette sécrétion est multifactorielle. Elle dépend de la concentration plasmatique de potassium (une augmentation de la kaliémie de 0,5 mmol entraîne une multiplication par 10 de l’excrétion urinaire), et de l’aldostérone (et donc des apports sodés). ■
L’alcalose entraîne une hypokaliémie, par accroissement de l’influx du potassium
dans le milieu intracellulaire et par fuite urinaire. En revanche, l’acidose entraîne une hyperkaliémie sans modifier de façon notable l’élimination urinaire.
II. HYPERKALIÉMIES L’hyperkaliémie est définie par [K+] > 5 mmol/L. Il faut toujours penser à éliminer une fausse hyperkaliémie, liée à l’hémolyse du sang prélevé : garrot trop serré ou laissé trop longtemps, leucémie ou syndrome myélodysplasique avec une quantité importante de leucocytes ou de plaquettes fragiles.
A. Causes des hyperkaliémies 1. Excès d’apport exogène en K+ ■ Intraveineux (souvent iatrogénique). ■
Entéral (rarement à l’origine d’une hyperkaliémie, sauf en cas d’apports impor-
tants et rapides ou d’insuffisance rénale préalable).
2. Transfert cellulaire ■ Acidoses. ■
Déficit en insuline.
■
Lyse cellulaire (syndrome de lyse tumorale, rhabdomyolyse, hémolyse, brûlures
étendues) : situations à l’origine d’hyperkaliémies sévères et rapidement progres*Concours Internat 1998
sives*. ■
Médicaments : bêtabloquants, digitaliques.
■
Paralysie périodique hyperkaliémique.
3. Diminution de l’excrétion rénale ■ Insuffisance rénale aiguë et chronique ■
ITEM 252
.
Hypoaldostéronisme : – insuffisance surrénale aiguë et chronique
ITEM 255
; 117
ITEM 219
Fig. 219-1. Hyperkaliémie. Source : Les Troubles du rythme cardiaque dans la pratique médicale, L. De Roy, D. El Allaf, M. Renard, Masson, 2006, 4e édition, 224 p.
– syndrome hyporéninisme hypoaldostéronisme (néphropathie diabétique, néphropathies interstitielles) ; – médicaments : IEC, antagoniste des récepteurs de l’angiotensine II, ciclosporine, tacrolimus, héparine, diurétiques antikaliurétiques (spironolactone, amiloride, triamtérène), triméthoprime (effet amiloride-like), AINS.
B. Manifestations des hyperkaliémies ■
Toxicité cardiaque : – modifications électrocardiographiques diffuses, montrant progressivement : • ondes T, amples, pointues et symétriques ; • troubles de la conduction sinoauriculaire, auriculoventriculaire ; • troubles de la conduction intraventriculaire ; • troubles du rythme ventriculaire ; – l’hypocalcémie et l’acidose potentialisent la toxicité cardiaque de l’hyperkaliémie (fig. 219.1).
■
Troubles neuromusculaires rares, dans les hyperkaliémies sévères : – paresthésies buccales et des extrémités ; – paralysie flasque, avec parfois atteinte de la musculature respiratoire.
■
Troubles métaboliques : – acidose ; – hypoglycémie.
*ECN 2009
C. Traitement des hyperkaliémies* Il s’agit d’une urgence thérapeutique, nécessitant une prise en charge en unité de surveillance continue pour suivi scopique dès que la kaliémie est > 6,5 mmol/L et/ou qu’il existe des signes électrocardiographiques. En plus du traitement de la cause, le traitement symptomatique a plusieurs objectifs. 118
Troubles de l’équilibre acidobasique et désordres hydroélectrolytiques
1. Augmenter la pénétration cellulaire du potassium ■
Bicarbonate de sodium : – environ 1 meq/kg, soit 100 mL d’une solution semi-molaire (42 % ;) IVL sur voie veineuse périphérique ou 50 mL d’une solution molaire (84 % ;) IVL sur voie veineuse centrale ; – d’autant plus efficace qu’il existe une acidose.
■
Insuline : 10 UI dans 500 mL de G10 % ou 30 UI dans 500 mL de G30 %.
■
Bêtamimétiques : salbutamol, 10 mg en aérosol.
Ces 2 derniers traitements sont efficaces rapidement mais de façon transitoire.
2. Antagoniser les effets myocardiques du potassium Gluconate de Ca2+ à 10 %, 10 mL IV, pouvant être répétés : ■
efficace immédiatement mais pendant une durée brève (5 minutes) ;
■
contre-indiqué en cas d’intoxication digitalique.
3. Limiter l’absorption intestinale de potassium par l’utilisation d’une résine échangeuse d’ions Kayexalate® : ■
1 g échange 1 mEq de K+ contre 1 mEq de Na+ ;
■
30 à 60 g per os ou en lavement ;
■
effet maximal en 4 h.
4. Épurer le potassium : épuration extra-rénale ■ En cas d’hyperkaliémie menaçante (le traitement médical étant de toute façon réalisé, le temps de mettre en route cette épuration extra-rénale). ■
Ou en l’absence d’efficacité du traitement médical.
■
D’autant plus nécessaire que le patient est anurique.
III. HYPOKALIÉMIES L’hypokaliémie est définie par [K+] < 3,5 mmol/L.
A. Causes des hypokaliémies 1. Diminution des apports exogène en [K+] ■ Anorexie mentale. ■
Dénutrition majeure.
■
Alimentation parentérale mal équilibrée.
■
Apport excessif d’une résine échangeuse d’ions.
2. Transfert cellulaire ■ Alcalose. ■
Insulinothérapie.
■
Perfusion de solutés glucosés hypertoniques.
■
Traitement bêtamimétiques.
■
Paralysie périodique familiale hyperkaliémique. 119
ITEM 219
3. Augmentation des pertes rénales La kaliurèse est élevée (> 20 mmol/24 h). ■
Alcalose.
■
Diurétiques : diurétiques de l’anse, thiazidiques, acétazolamide.
■
Hyperaldostéronisme primaire : syndrome de Conn.
■
Hyperaldostéronisme secondaire : – avec HTA : sténose de l’artère rénale, HTA maligne, traitement œstroprogestatif, tumeur sécrétante de rénine ; – avec œdème : insuffisance cardiaque, syndrome néphrotique, insuffisance hépatocellulaire ; – sans HTA, ni œdème : syndrome de Bartter (hypercalciurique) et de Gitelman (hypocalciurique).
■
Hypercorticisme et corticothérapie.
■
Pseudohyperaldostéronisme : intoxication à l’acide glycyrrhizique (réglisses et
dérivés, pastis sans alcool), qui entraîne un blocage de la 11-bêta-hydroxystéroïde déshydrogénase et donc à un défaut du catabolisme du cortisol, qui, en excès, occupe les récepteurs minéralocorticoïdes. ■
Hyper-réninisme : sténose de l’artère rénale, HTA maligne.
■
Tubulopathie, notamment toxique (lithium, amphotéricine B, aminosides, cis-
platine).
4. Augmentation des pertes digestives La kaliurèse est basse (< 10 mmol/24 h) mais peut être normale ou élevée, stimulée par une alcalose métabolique et/ou une déshydratation extracellulaire avec hyperaldostéronisme secondaire. La chlorurie est basse (< 10 mmol/j). ■
Diarrhée (alors associée à une acidose hyperchlorémique par pertes digestives
de bicarbonates)
ITEM 302
.
■
Vomissements, aspirations digestives
■
Fistule digestive.
ITEM 345
.
B. Manifestations des hypokaliémies ■
Toxicité cardiaque : – modifications électrocardiographiques diffuses, montrant progressivement : • diminution de l’amplitude des ondes T, qui peuvent s’annuler ou se négativer ; • apparition d’une onde U ; • sous-décalage du segment ST ; • allongement du QT ; • troubles du rythme supraventriculaire (extrasystoles auriculaires, fibrillation atriale) ; • troubles du rythme ventriculaire (extrasystoles ventriculaires, torsades de pointe, fibrillation ventriculaire) ; – l’hypercalcémie, les digitaliques, les médicaments allongeant l’intervalle QT potentialisent la toxicité cardiaque (fig. 219.2).
120
Troubles de l’équilibre acidobasique et désordres hydroélectrolytiques
Fig. 219-2. Hypokaliémie. Source : Les Troubles du rythme cardiaque dans la pratique médicale, L. De Roy, D. El Allaf, M. Renard, Masson, 2006, 4e édition, 224 p.
■
Troubles neuromusculaires, surtout si kaliémie < 2,5 mmol/L : – disparition des réflexes ostéotendineux et de la contractilité idiomusculaire ; – paralysie flasque ascendante prédominant aux racines, avec parfois atteinte de la musculature respiratoire ; – rhabdomyolyse ; – iléus paralytique ; – rétention aiguë d’urine.
■
Troubles métaboliques : alcalose métabolique.
■
Néphropathie interstitielle chronique : lors des hypokaliémies chroniques très
prolongées.
C. Traitement des hypokaliémies ■
Il s’agit d’une urgence thérapeutique, nécessitant une prise en charge en unité
de surveillance continue pour suivi scopique dès que la kaliémie est < 2,5 mmol/L et/ou qu’il existe des signes électrocardiographiques. ■
En plus du traitement de la cause, le traitement symptomatique repose sur l’ad-
ministration de potassium. La quantité de potassium à administrer est cependant difficile à prédire, les variations de kaliémie n’étant pas le reflet des variations du stock potassique. ■
Il faut se souvenir que le danger d’une hyperkaliémie est plus grand que celui
d’une hypokaliémie et les sels de potassium doivent être administrés avec une vigilance particulière en cas d’insuffisance rénale associée. ■
Dans tous les cas il faudra donc contrôler régulièrement la kaliémie et adapter le
traitement en fonction des résultats.
121
ITEM 219
1. En cas d’hypokaliémie sévère Chlorure de potassium intraveineux (1 g KCL = 13 mmol de potassium-élément) : ■
0,5 g/h sur une voie veineuse périphérique IVSE ;
■
1 g/h sur une voie veineuse centrale IVSE ;
■
en moyenne 8 g/24 h ;
■
exceptionnellement jusqu’à 4 g/h sur une voie veineuse centrale en cas de trou-
ble du rythme ventriculaire.
2. En cas d’hypokaliémie peu sévère Chlorure ou gluconate de potassium per os : en moyenne, 4 g en 24 h, par prise n’excédant pas 2 g.
Dyscalcémies POUR COMPRENDRE… ■
Le calcium joue dans l’organisme un rôle de messager intracellulaire et de messa-
ger entre les compartiments intra et extracellulaires. ■
Le maintien d’une calcémie normale est donc un enjeu majeur, toute dyscalcémie
étant responsable de complications cardiovasculaires, digestives, rénales et surtout neurologiques. ■
L’hypercalcémie se définit comme une calcémie totale (corrigée) > 2,6 mmol/L ou
une calcémie ionisée > 1,6 mmol/L. L’hypercalcémie grave se définit par une calcémie totale (corrigée) > 3,5 mmol/L ou comme une hypercalcémie symptomatique quelle que soit sa valeur. ■
L’hypocalcémie se définit par une valeur de la calcémie totale (corrigée)
< 2,2 mmol/L ou par une calcémie ionisée < 1,1 mmol/L. ■
Au cours des dyscalcémies, la réalisation d’un électrocardiogramme est
indispensable. ■
La prise en charge d’une hypercalcémie sévère est une urgence vitale (risque car-
diovasculaire), associant de façon parallèle la thérapeutique et le diagnostic étiologique. L’axe thérapeutique repose sur la réhydratation (préambule obligatoire) et les biphosphonates, parfois assistés de la calcitonine en cas d’urgence vitale immédiate.
I. PHYSIOPATHOLOGIE A. Calcium ■
Plus de 98 % du calcium de l’organisme est stocké dans l’os. La forme circulante
plasmatique est sous forme ionisée à 50 %, sous forme liée aux protéines à 40 %, sous forme complexée à des anions (phosphates, citrates, bicarbonates) à 10 %. ■
122
La fraction ionisée est la fraction biologiquement active.
Troubles de l’équilibre acidobasique et désordres hydroélectrolytiques
■
La fraction liée aux protéines dépend directement du taux d’albumine (toute
modification de 10 g de la protidémie entraîne une modification de 0,25 mmol/L dans le même sens de la calcémie totale) et de l’équilibre acido-basique (l’acidose diminue la liaison aux protides et augmente le calcium ionisé). ■
La calcémie totale normale se situe entre 2,10 et 2,55 mmol/L et la calcémie ioni-
sée entre 1,15 et 1,30 mmol/L. ■
La calcémie totale corrigée peut être estimée en fonction de l’albuminémie selon
la formule : – Ca totale corrigée = Ca totale mesurée + 1/40 (40 – albuminémie) ; – Ca en mmol/L, albuminémie en g/L.
B. Régulation de la calcémie ■
L’homéostasie du calcium sanguin résulte des mouvements de l’ion au niveau
osseux, urinaire et intestinal. Trois hormones vont intervenir dans le contrôle de ces mouvements, la parathormone (PTH), la vitamine D et la calcitonine : – la PTH est produite par les parathyroïdes ; – la vitamine D, dont le métabolite actif est le calcitriol (1,25(OH)2D3), est synthétisée par le rein et le foie. La PTH stimule sa synthèse ; – la calcitonine est produite par les cellules C de la thyroïde. ■
Au plan digestif, l’absorption du calcium est stimulée par le calcitriol (et la PTH).
Les glucocorticoïdes ont un rôle plus flou, probablement de frein à l’absorption digestive. ■
Au plan rénal, 98 % du calcium est réabsorbé. La réabsorption est d’abord pas-
sive et suit celle du sodium. Elle est influencée par des facteurs non hormonaux (volume extracellulaire, équilibre acido-basique, kaliémie). La reabsoption est ensuite active stimulée par la PTH (et la vitamine D). ■
Au plan osseux, la régulation du calcium est sous dépendance hormonale avec
stimulation des ostéoclastes par la PTH et la vitamine D (mais aussi les glucocorticoïdes) et modulation par la calcitonine (et les œstrogènes). Sur ce stock osseux, 1 % est rapidement mobilisable vers le milieu extracellulaire.
II. HYPERCALCÉMIES A. Causes des hypercalcémies ■
Les étiologies des hypercalcémies sont représentées à 40 % par l’hyperparathy-
roïdie primaire et à 50 % par les hypercalcémies d’origine néoplasique. L’enquête étiologique, qui ne doit pas retarder le traitement symptomatique, comprend : – la recherche de prise médicamenteuse, d’altération de l’état général, d’antécédent néoplasique, de douleur osseuse… ; – la palpation des aires ganglionnaires et la recherche d’une organomégalie, la palpation des seins, le toucher rectal, la recherche de foyers douloureux osseux… ; – un bilan biologique complet avec notamment : bilan phosphocalcique sanguin et urinaire (calcémie, calcémie ionisée, phosphorémie, calciurie, phosphaturie, phosphatases alcalines, créatininurie des 24 h), dosage de la PTH et du 123
ITEM 219
calcitriol, électrophorèse des protéines plasmatiques et immunoélectrophorèse des protéines urinaires, VS et CRP ; – une radiographie thoracique ; – une scintigraphie osseuse et des radiographies osseuses en fonction des points d’appel clinique. ■
*ECN 2008
Hyperparathyroïdie* : – le profil biologique associe typiquement : une hypercalcémie, une hypercalciurie, une hypophosphorémie, une acidose métabolique avec hyperchlorémie, une PTH augmentée ou bien un taux de PTH inadapté en regard de la calcémie ; – primaire : adénome (90 % des cas ; parfois dans un contexte de néoplasie endocrinienne multiple) ; – familiale ; – secondaire : médicament (lithium), insuffisance rénale chronique.
■
Néoplasie : – hypercalcémie humorale maligne : liée à l’existence d’une tumeur maligne sécrétant la PTH related protein (PTH rp : hormone apparentée à la PTH native, ayant les mêmes effets biologiques) ; le cancer est le plus souvent pulmonaire, œsophagien, utérin, cutané ou glandulaire (rein, vessie, ovaire) ; hypercalcémie, hypercalciurie, hypophosphorémie, PTH intacte effondrée (adaptée à l’hypercalcémie), PTH related protein souvent augmentée. La PTH rp n’est pas toujours seule en cause et d’autres facteurs hormonaux peuvent être impliqués ; – ostéolyse métastatique directe : métastases de tumeurs solides (sein, rein, poumon, prostate, vessie), hémopathies (myélomes ou lymphomes). Le profil biologique associe hypercalcémie, PTH intacte et PTH rp diminuée
■
ITEM 154, 166
.
Granulomatose, par production de calcitriol par les cellules du granulome : – sarcoïdose ; – tuberculose ; – histoplasmose ; – coccydiodomycose.
■
Insuffisance rénale aiguë
■
Médicaments :
ITEM 252
.
– vitamine D, vitamine A ; – thiazidiques (diminution de l’excrétion urinaire du calcium) ; – buveurs de lait (syndrome de Burnett). ■
Endocrinopathies : – insuffisance surrénale ; – phéochromocytome ; – hyperparathyroïdie.
■
Maladie de Paget.
■
Immobilisation.
B. Manifestations des hypercalcémies La sévérité de la présentation clinique est en relation avec l’intensité de l’hypercalcémie et surtout avec sa rapidité d’installation. 124
Troubles de l’équilibre acidobasique et désordres hydroélectrolytiques
La réalisation d’un ECG doit être systématique. ■
Signes digestifs : – anorexie ; – nausées, vomissements
ITEM 345
;
– douleurs abdominales ; – iléus paralytique ; – pancréatite aiguë (rare). ■
Signes neurologiques : – syndrome confusionnel, troubles du comportement, agitation ; – coma ; – hypotonie, hyporéfléxie ; – rares crises comitiales.
■
Signes cardiovasculaires : – allongement du PR, élargissement du QRS, raccourcissement du QT ; – troubles du rythme ventriculaire (rares) ; – l’hypokamiémie augmente la toxicité myocardique de l’hypercalcémie – hypertension artérielle.
■
Signes urinaires : polyurie.
■
Déshydratation extracellulaire liée aux troubles digestifs et à la polyurie.
*Concours Internat 1997, ECN 2008
C. Traitement* La thérapeutique doit être envisagée en même temps que la mise en route du bilan étiologique et ce d’autant plus que la forme est sévère et symptomatique. L’hypercalcémie grave est une urgence thérapeutique devant être prise en charge en unité de surveillance continue pour suivi scopique. ■
Réhydratation : – par sérum physiologique : 3 à 6 L/24 h ; – la baisse de la calcémie assurée par réhydratation est d’environ 0,4 à 0,6 mmol/L.
■
Biphosphonates : – traitement de référence ; – activité antiostéoclastique intense en se liant aux cristaux d’hydroxyapatite et en diminuant la durée de vie des ostéoclastes ; – début d’action avant la 48e heure, nadir entre le 4e et le 9e jour ; – baisse de la calcémie généralement située entre 0,8 et 1 mmol/L ; – par voie intraveineuse en urgence : pamidromate (Aredia®), à la dose de 60 à 90 mg en perfusion unique de plus de 4 heures, zolédronate (Zometa®), à la dose de 4 mg en perfusion unique de 15 minutes. La dose doit être adaptée à la fonction rénale.
■
Calcitonine : – agit en inhibant la résorption osseuse et en favorisant l’excrétion urinaire ; – réponse rapide dès la 2e heure, nadir entre la 6e et la 9e heure ; – baisse de la calcémie proche de 0,5 mmol/L ; – réactions allergiques locales au point d’injection ou générales ; 125
ITEM 219
– efficacité transitoire et tachyphylaxie ; – réservée aux hypercalcémies très sévères en attente de l’efficacité des biphosphonates. ■
Corticoïdes : – dans les hypercalcémies néoplasiques ; – dans les atteintes granulomateuses ; – au cours des intoxications à la vitamine D.
■
Furosémide : ce traitement, dont le but est d’augmenter la diurèse (≈ 10 L/j) et
donc la calciurie, doit être aujourd’hui abandonné parce qu’il présente une efficacité modeste et que sa mise en œuvre dans un contexte de déshydratation doit être assortie de compensations de diurèse souvent difficiles. ■
Épuration extra-rénale : elle peut être réalisée de manière exceptionnelle et dans
les formes les plus graves.
III. HYPOCALCÉMIES A. Causes des hypocalcémies La présence d’une hypocalcémie résulte obligatoirement d’une insuffisance en sécrétion de PTH (hypoparathyroïdie) ou d’une résistance des organes cibles à la PTH.
1. Hypocalcémies parathyroïdiennes PTH basse, phosphorémie élevée, vitamine D diminuée, avec diminution de l’absorption digestive du calcium et diminution de la calciurie/24 h. ■
Hypoparathyroïdisme postchirurgical après chirurgie sur les parathyroïdes, la
thyroïde, chirurgie cervicale pour cancer. ■
Infiltration des parathyroïdes : amylose, hémochromatoses, maladie de Wilson,
cancer métastatique. ■
Hypoparathyroïdisme idiopathique : état auto-immun polyglandulaire (insuffi-
sance surrénale, hypothyroïdie). ■
Hypoparathyroïdisme congénital (syndrome de Di Georges).
■
Pseudohypoparathyroïdisme comme l’ostéodystrophie héréditaire d’Albright : hypo-
calcémie, hyperphosphorémie, mais PTH élevée (résistance à l’action de la PTH). ■
Déplétion sévère en magnésium : lorsque la magnésémie est < 0,5 mmol/L, une
hypocalcémie peut survenir du fait de la diminution de la sécrétion de PTH et de la résistance des organes cibles à la PTH. Les causes les plus fréquentes d’hypomagnésémie chronique sont l’alcoolisme, les malabsorptions, les traitements au cisplatine, diurétiques, aminoglycosides.
2. Déficits en vitamine D Calcémie basse, calciurie diminuée, PTH augmentée, phosphorémie abaissée, concentration de 1,25(OH)2D3 abaissée, entraînant une certaine résistance osseuse à la PTH. L’activité phosphatasique alcaline est élevée et l’hydoxyprolinurie est élevé dans la quasi-totalité des cas, témoins d’une activité métabolique osseuse élevée.
126
■
Carence d’apport alimentaire.
■
Défaut d’exposition solaire.
Troubles de l’équilibre acidobasique et désordres hydroélectrolytiques
■
Malabsorptions intestinales : entéropathies exsudatives, insuffisance pancréati-
que externe, résection gastro-intestinale. ■
Cholestase chronique.
■
Syndrome néphrotique : perte urinaire de la protéine transportant la vitamine D
et la 25(OH)D. ■
Affections familiales : diminution primitive de la production rénale de
1,25(OH)2D3 (rachitisme vitaminorésistant) ou résistance à l’action de la 1,25(OH)2D3.
3. Insuffisance rénale ■ Phosphorémie et PTH sont élevées, 1,25(OH)2D3 est abaissé. La diminution de production rénale de 1,25(OH)2D3 entraîne une diminution des entrées de calcium dans le plasma, une résistance osseuse à l’action de la PTH à l’origine en partie de l’hypocalcémie, et une diminution de la réabsorption tubulaire du calcium. ■
L’hyperplasie parathyroïdienne secondaire maintient longtemps la calcémie à un
taux normal. ■
Il existe une hypocalciurie, l’activité phosphatase alcaline est augmentée, la
phosphatémie est normale ou élevée en fonction du degré de réduction néphronique.
4. Transfert de calcium ionisé ■ Dans les tissus mous en contexte d’hyperphosphorémie : insuffisance rénale aiguë
ITEM 252
, lyse tumorale, rhabdomyolyse.
■
Dans l’abdomen au cours des pancréatites aiguës.
■
Dans les os au cours des métastases ostéocondensantes (cancer du sein, pros-
tate), ou du hungry bone syndrome après parathyroïdectomie pour hyperparathyroïdisme ou plus rarement thyroïdectomie. ■
Dans l’espace intravasculaire : au cours des transfusions de sang ou de plasma
citraté massives ou chez un insuffisant hépatique métabolisant mal le citrate au cours d’un traitement par foscarnet.
B. Manifestations de l’hypocalcémie Les manifestations cliniques sont en rapport avec l’intensité du trouble et surtout avec sa rapidité d’installation et sont observées pour des calcémies totales inférieures à 1,75 mmol/L. ■
Signes neuromusculaires : – paresthésies, fasciculations ; – tétanie ; – signe de Chvostek : contraction péribuccale par percussion du nerf facial en regard de l’arcade zygomatique, souvent présent mais peu spécifique ; – signe de Trousseau : un brassard gonflé au-dessus de la PAS induit une occlusion de l’artère brachiale avec secondairement flexion du poignet et des articulations métacarpophalangiennes ; – comitialité ; – manifestations psychiatriques : anxiété, dépression, manifestations psychotiques. 127
ITEM 219
■
Signes cardiovasculaires : – hypotension artérielle ; – allongement du QT ; – insuffisance cardiaque.
■
Manifestations cutanées des hypocalcémies chroniques : – peau sèche ; – chute des cheveux, ongles cassants ; – eczéma, hyperpigmentation ; – cataracte.
C. Traitement de l’hypocalcémie 1. Hypocalcémie modérée Traitement oral par sels de calcium : 2 g de calcium-élément en 3 ou 4 prises par jour.
2. Hypocalcémie sévère et symptomatique Traitement intraveineux ayant pour objectif de faire disparaître les signes neuromusculaires et de remonter la calcémie totale au-dessus de 2 mmol/L : ■
gluconate de calcium à 10 % (894 mg pour 100 mL), ampoules de 10 mL ;
■
chlorure de calcium à 10 % (1 830 mg pour 100 mL), ampoules de 10 mL ;
■
200 à 300 mg de calcium-élément IVL ;
■
perfusions répétées jusqu’à disparition des signes de gravité ;
■
suivie par des perfusions intraveineuses de 0,5 à 2 mg/kg/h de calcium-élément
pendant 6 à 8 heures et jusqu’à amélioration de la calcémie ; ■
recharge en magnésium en cas d’hypomagnésémie associée sévère (inférieure à
0,7 mmol/L).
3. Hypocalcémies chroniques Poursuite de la supplémentation orale du calcium en association avec un métabolite de la vitamine D.
128
Troubles de l’équilibre acidobasique et désordres hydroélectrolytiques
Fiche
Dernier tour
Troubles de l’équilibre acido-basique et désordres hydroélectrolytiques Troubles de l’équilibre acido-basique Valeurs normales ■ ■ ■ ■
pHa : 7,40 ± 0,05. HCO3− : 25 ± 3 mmol/L. PaCO2 : 40 ± 5 mmHg. Trou anionique (TA) = [Na+] – ([Cl−] + [HCO−3]) = 12 ± 4 mmol/L.
Acidose métabolique ↓ HCO3− (par consommation ou perte), ↑ PaCO2 (par hyperventilation compensatrice) : – fuites de bicarbonates (TA normal) : digestives (diarrhée), rénales (acidoses tubulaires) ; – accumulation d’un acide (TA élevé) : insuffisance rénale, acidocétose diabétique, cétose de jeûne ou alcoolique, acidose lactique, intoxication à trou osmolaire élevé. ■ Mesure du trou anionique indispensable au diagnostic de la cause . ■ Conséquences : – polypnée, épuisement respiratoire ; – hyperkaliémie . ■ Traitement : bicarbonates si pertes digestives ou rénales, hyperkaliémie, intoxication à stabilisant de membrane . ■
Alcalose métabolique ■
■
■
↑ HCO3− (par perte d’ions H+), ↑ PaCO2 (par hypoventilation compensatrice) : – hyperaldostéronisme primaire ou hyperaldostéronisme secondaire ; – hypokaliémie profonde ; – vomissements. Conséquences (si pH > 7,55) : – hypopnée ; – troubles de la conscience ; – crampes, myoclonies, tétanie, convulsions (rare) ; – hypokaliémie. Traitement : correction des troubles métaboliques (déshydratation, hypokaliémie).
Acidose respiratoire ■
■
■
↑ PaCO2, ↑ HCO3− par compensation rénale : – atteinte de la fonction neuromusculaire respiratoire ; – toutes autres pathologies respiratoires obstructives ou restrictives évoluées ou en décompensation. Conséquences : – céphalées, sueurs, astérixis, syndrome confusionnel, coma ; – tachycardie, hypertension artérielle ; – hyperkaliémie. Traitement : ventilation artificielle .
Alcalose respiratoire ■
■
■
↓ PaCO2, ↓ HCO3− par compensation rénale : – hyperventilation psychogène, encéphalopathie hépatique, intoxication salicylée ; – stimulation hypoxique des centres respiratoires. Conséquences : – vertiges, tremblements, tétanie, convulsions ; – hyperlactatémie (stimulation de la glycolyse anaérobie) ; – hypokaliémie. Traitement étiologique.
▲ 129
ITEM 219
Fiche
Dernier tour
Dysnatrémies Tonicité Osmolalité : somme des concentrations des molécules, diffusibles ou non, dissoutes dans 1 kg d’eau plasmatique = 2 × [Na+] + [urée] + [glucose] . ■ Osmolarité : somme des concentrations des molécules, diffusibles on non, dissoutes dans 1 L d’eau plasmatique (≠ osmolalité). ■ Osmolalité efficace ou tonicité : somme des concentrations de toutes les molécules non diffusibles dissoutes dans 1 L d’eau plasmatique = 2 × [Na+] . ■ La tonicité régit les mouvements d’eau à travers la membrane cellulaire. L’urée n’y participe pas (sauf situations de variations importantes et rapides : épuration extrarénale). Le glucose n’y participe pas (sauf situations de carence en insuline : cétoacidose diabétique). ■
Hyponatrémies ■
■
■
[Na+] < 138 mmol/L : – fausses hyponatrémies (hyponatrémies non hypotoniques) : hyperlipidémies, hyperprotidémies, hyperglycémies, augmentation du trou osmotique ; – hyponatrémie de dilution : intoxication par l’eau (potomanie, buveurs de bière, sujet âgé), sécrétion d’HAD (hypovolémie relative, syndrome de sécrétion inappropriée d’HAD), traitement diurétique, hypokaliémie, syndrome des membranes malades ; – hyponatrémie de déplétion : pertes rénales (NAu > 20 mmol/L : néphropathie tubulointerstitielle, polyurie osmotique, insuffisance surrénale) ou pertes digestives (NAu < 20 mmol/L : diarrhée, vomissements, fistules digestives, 3e secteur). Manifestations : – dégoût de l’eau et signes digestifs : nausées et vomissements ; – signes neurologiques (gravité ++) : confusion, coma, comitialité ; – myélinolyse centropontine : risque d’une correction trop rapide de l’hyponatrémie . Traitement : – objectif : élévation de [Na+] < 12 mmol/L en 24 h ou < 18 mmol/L en 48 h ; – hyponatrémie aiguë (< 48 h) : correction rapide si symptômes neurologiques graves ; sérum salé hypertonique à 3 % jusqu’à disparition des symptômes ; – hyponatrémies chroniques ou de durée indéterminée : restriction hydrique si volume extracellulaire élevé ou normal, sérum physiologique si volume extracellulaire bas.
Hypernatrémies ■
■
■
[Na+] < 138 mmol/L : – perte d’eau sans perte de sodium : diabète insipide neurogénique ou néphrogénique, pertes respiratoires ou cutanées, hypodypsie du sujet âgé ; – perte d’eau > perte de sodium : pertes cutanées, pertes digestives, pertes rénales ; – perfusion de bicarbonates de sodium. Conséquences : – soif, sécheresse des muqueuses, fièvre ; – signes neuropsychiques : syndrome confusionnel, coma, comitialité ; – hématomes sous-duraux chez l’enfant, thrombose vasculaire cérébrale. Traitement : – perte d’eau sans perte de sodium : eau par voie entérale et/ou glucosé à 5 % IV ; – perte d’eau et de sodium : sérum salé ; – diabète insipide neurogénique : traitement substitutif par desmopressine.
Dyskaliémies Hyperkaliémie ■
▲
130
[K+] > 5 mmol/L : – fausse hyperkaliémie : prélèvement hémolysé ;
Troubles de l’équilibre acidobasique et désordres hydroélectrolytiques
Fiche
■
■
Dernier tour
– excès d’apport en K+ : rare, sauf insuffisance rénale préalable ; – transfert cellulaire : acidoses, déficit en insuline, lyse cellulaire, digitaliques ; – diminution de l’excrétion rénale : insuffisance rénale, hypoaldostéronisme (insuffisance surrénale, IEC, ARA II, diurétiques hyperkaliémiants, triméthoprime, AINS). Manifestations : – cardiaques : ondes T amples, pointues et symétriques, troubles de conduction, troubles du rythme ventriculaire ; – neuromusculaires (hyperkaliémies sévères) : paresthésies, paralysie flasque ; – troubles métaboliques : acidose, hypoglycémie. Traitement : – urgence thérapeutique : prise en charge en unité de surveillance continue pour surveillance scopique si kaliémie > 6,5 mmol/L et/ou s’il existe des signes ECG ; – bicarbonate de sodium IVL : 100 mL d’une solution semi-molaire (42 % ;) sur voie périphérique ou 50 mL d’une solution molaire (84 % ;) sur voie centrale ; – insuline : 10 UI dans 500 mL de G10 % ou 30 UI dans 500 mL de G30 % ; – bêtamimétique : salbutamol, 10 mg en aérosol ; – gluconate de Ca2+ à 10 % : 10 mL IV pouvant être répétés ; – résine échangeuse d’ions : Kayexalate®, 30 à 60 g per os ou en lavement (efficacité retardée) ; – épuration extrarénale : si hyperkaliémie menaçante (le traitement médical étant réalisé, le temps de la mettre en route), si absence d’efficacité du traitement médical ; l’EER est d’autant plus nécessaire que le patient est anurique .
Hypokaliémie ■
■
■
[K+] < 3, 5 mmol/L : – diminution des apports : anorexie, dénutrition, apport excessif de Kayexalate® ; – transfert cellulaire : alcalose, insuline, perfusion de solutés glucosés hypertoniques ; – pertes rénales ([K+]u > 20 mmol/j) : alcalose, diurétiques, hyperaldostéronisme, hypercorticisme, intoxication à l’acide glycyrrhizique, tubulopathie toxique ; – pertes digestives ([Cl−]u < 10 mmol/j, [K+]u < 10 mmol/j sauf si alcalose métabolique et/ou déshydratation avec hyperaldostéronisme) : diarrhée, vomissements. Manifestations : – cardiaques : diminution des ondes T, onde U, sous-décalage de ST, allongement du QT, troubles du rythme supraventriculaire ou ventriculaire (torsades de pointe) ; – neuromusculaires (si [K+] < 2,5 mmol/L) : disparition des ROT, paralysie flasque, rhabdomyolyse, iléus paralytique, rétention aiguë d’urine ; – troubles métaboliques : alcalose métabolique ; – néphropathie interstitielle chronique lors des hypokaliémies chroniques très prolongées. Traitement : – urgence thérapeutique, prise en charge en unité de surveillance continue pour surveillance scopique si kaliémie < 2,5 mmol/L ou s’il existe des signes ECG ; – administration toujours prudente de potassium surtout si insuffisance rénale ; – si hypokaliémie sévère, KCl IVSE (1 g = 13 mmol de potassium-élément) : 8 g/jour en moyenne, 0,5 g/h sur voie périphérique, 1 g/h sur voie centrale. Jusqu’à 4 g/h sur voie centrale en cas de trouble du rythme ventriculaire ; – si hypokaliémie peu sévère, KCl ou gluconate de potassium per os : en moyenne 4 g/j, chaque prise n’excédant pas 2 g.
Dyscalcémies Hypercalcémie ■
▲
[Ca2+] > 2,6 mmol/L ou [Ca2+] ionisée > 1,6 mmol/L : – hyperparathyroïdie : primaire (adénome ++) ou secondaire (lithium, insuffisance rénale chronique) ;
131
ITEM 219
Fiche
■
■
Dernier tour
– néoplasie : hypercalcémie humorale (PTH rp) ou ostéolyse métastatique directe ; – granulomatose : sarcoïdose, tuberculose ; – insuffisance rénale aiguë ; – médicaments : vitamine D, vitamine A, thiazidiques, buveurs de lait (syndrome de Burnett) ; – endocrinopathies : insuffisance surrénale, phéochromocytome, thyrotoxicose ; – maladie de Paget, immobilisation. Manifestations : – signes digestifs : anorexie, nausées, vomissements, iléus, pancréatite aiguë (rare) ; – signes neurologiques : syndrome confusionnel, coma, signes de localisation ; – signes cardiovasculaires : allongement PR, élargissement QRS, raccourcissement QT, troubles du rythme ventriculaire (rares), hypertension artérielle ; – signes urinaires : polyurie ; – déshydratation extracellulaire liée aux troubles digestifs et à la polyurie ++. Traitement : – l’hypercalcémie grave est une urgence, prise en charge en unité de surveillance continue pour suivi scopique ; – réhydratation par sérum physiologique ++ ; – biphosphonates ++, agissent avant la 48e h, nadir entre le 4e et le 9e jour ; – calcitonine : agit dès la 2e h, nadir entre la 6e et la 9e h, réservée aux hypercalcémies très sévères en attente de l’efficacité des biphosphonates ; – corticoïdes : néoplasies, granulomatoses, intoxications à la vitamine D.
Hypocalcémie ■
■
■
132
[Ca2+] < 2,2 mmol/L ou [Ca2+] ionisée < 1,1 mmol/L : – hypoparathyroïdisme : postchirurgical surtout ; – déficits en vitamine D : carence d’apport, défaut d’exposition solaire, malabsorptions intestinales, syndrome néphrotique, affections familiales ; – insuffisance rénale chronique ; – dépôt de calcium : insuffisance rénale aiguë, lyse tumorale, rhabdomyolyse, pancréatites aiguës, métastases ostéocondensantes, hungry bone syndrome, transfusions massives de sang ou plasma citraté, foscarnet. Manifestations : – neuromusculaires : paresthésies, fasciculations, tétanie, signe de Chvostek, signe de Trousseau, comitialité ; – manifestations psychiatriques : anxiété, dépression, manifestations psychotiques ; – signes cardiovasculaires : hypotension, allongement QT, insuffisance cardiaque ; – manifestations cutanées (hypocalcémie chronique) : peau sèche, chute des cheveux, ongles cassants, eczéma, hyperpigmentation, cataracte. Traitement : – hypocalcémie modérée : sels de calcium per os, en moyenne 2 g/j ; – hypocalcémie sévère ou symptomatique : gluconate de calcium IV à 10 % (894 mg pour 100 mL) ou chlorure de calcium IV à 10 % (1 830 mg pour 100 mL) ; objectif : faire disparaître les signes neuromusculaires et remonter la calcémie au-dessus de 2 mmol/L ; en moyenne : 200 à 300 mg de calcium-élément IVL, puis 0,5 à 2 mg/kg/h de calcium-élément ; – hypocalcémie chronique : poursuite de la supplémentation orale du calcium en association avec un métabolite de la vitamine D.
ITEM 230
Coma non traumatique
OBJECTIFS ● Diagnostiquer un coma non traumatique. ● Identifier les situations d’urgence et planifier leur prise en charge. LIENS TRANSVERSAUX ITEM 96
Méningites et méningo-encéphalites.
ITEM 133
Accidents vasculaires cérébraux.
ITEM 199
État confusionnel et trouble de conscience.
ITEM 206
Hypoglycémie.
ITEM 214
Principales intoxications aiguës.
Sujets tombés aux épreuves classantes nationales : 2008 ●
Sujet tombé
2008, dossier 2 : Voir item 219 (troubles hydroélectrolytiques).
●
2008, dossier 8 : Un homme jeune est admis au déchoquage à la suite d’un accident de mobylette. À l’arrivée aux urgences, le patient est conscient mais le médecin du SMUR vous signale qu’il a eu une perte de connaissance initiale de 5 min. L’état hémodynamique, respiratoire et neurologique se dégrade rapidement avec une tension artérielle à 70/40 mmHg, une fréquence cardiaque à 145/min, une saturation pulsée en oxygène (SpO2) à 85 %, un score de Glasgow (CGS) à 7. Il existe un saignement buccal et nasal important. 1) Quelle est votre attitude immédiate devant cette aggravation ? 2) Le malade est maintenant intubé et stabilisé sur le plan hémodynamique. À l’inspection de la face, on note : un œdème facial noyant les contours du visage mais avec un aspect aplati et un recul sensible de l’arête nasale ; une béance buccale symétrique ; des ecchymoses en lunettes ; de multiples abrasions cutanées et une plaie du nez. À la palpation de la face, on note : un recul de la pyramide nasale qui présente en outre une importante mobilité ; un décalage du tiers interne des rebords orbitaires inférieurs alors que les contours supérieurs sont intacts ; une mobilité verticale et transversale de l’arcade dentaire supérieure ; un trouble de l’articulé dentaire avec béance verticale antérieure avec réduction impossible ; une fracture coronaire des deux incisives centrales supérieures et une plaie palatine médiane ; une plaie gingivale en regard des dents 42–43 avec mobilité des fragments mandibulaires. Il s’agit d’un fracas facial complexe. Quels sont les examens radiologiques que vous demandez ? 3) Quelles sont les fractures que vous trouvez chez ce patient ? Argumentez selon l’examen clinique et la TDM 3D ci-jointe ? 4) Quel(s) type(s) de fractures peu(ven)t expliquer cette béance ?
133
ú
ITEM 230
5) Lors du bilan radiologique, des coupes encéphaliques ont été réalisées. Commentez la coupe crânienne présentée.
6) Trois heures plus tard, l’état cardiorespiratoire du patient est normalisé avec pression artérielle à 160/100 mmHg, fréquence cardiaque à 53/min, SpO2 à 100 %, CGS à 3 (patient sédaté par benzodiazépine et morphinique). L’infirmière vous signale que le patient présente une mydriase bilatérale aréactive. Il a par ailleurs uriné 500 mL d’urines limpides au cours de la dernière heure. Quelle(s) complication(s) évoquez-vous ? Justifiez votre réponse. 7) Comment confirmez-vous cliniquement ce diagnostic ? 8) Vous évoquez la possibilité d’un don d’organe. Quelles conditions doivent être réunies pour pouvoir envisager cette possibilité ?
CONSENSUS ● Prise en charge des états de mal épileptique – Recommandations formalisées d’experts – SRLF, 2008 (www.srlf.org). ● Prise en charge du sujet en état de mort encéphalique – Conférence d’experts – SRLF, SFAR, 2005 (www.srlf.org).
POUR COMPRENDRE… ■
Le diagnostic de coma est clinique : altération de la vigilance (état de veille) et
de la conscience (connaissance de soi et de son environnement). ■
Le coma traduit une défaillance de la substance réticulée activatrice ascendante
et/ou des hémisphères cérébraux. ■
La prise en charge immédiate consiste à : – rechercher une défaillance respiratoire ou hémodynamique associée ; – assurer la liberté des voies aériennes supérieures ; – rechercher une hypoglycémie, qui justifierait l’administration immédiate de sérum glucosé à 30 %, le risque de séquelles neuropsychiques lourdes étant ici important ; – soupçonner une intoxication aux opiacés, justifiant l’administration immédiate de naloxone, le risque d’arrêt respiratoire étant ici important ; – rechercher un purpura, justifiant l’administration immédiate d’une céphalosporine de 3e génération, le risque vital ou de séquelles neuropsychiques lourdes étant important dans le purpura fulminans ; – reconnaître rapidement un engagement cérébral, justifiant une prise en charge neurochirurgicale urgente.
134
Coma non traumatique
I. PHYSIOPATHOLOGIE ■
La vigilance est un état de veille, évaluable par l’étude de l’ouverture des yeux
aux stimuli douloureux. Son support neurophysiologique est la substance réticulée activatrice ascendante (SRAA) du tronc cérébral. ■
La conscience est la connaissance de soi et de son environnement, évaluable
chez un sujet à la vigilance normale par l’analyse de la réponse verbale aux stimuli intellectuels et de la réponse motrice aux stimuli douloureux. Son support neurophysiologique est le cortex cérébral. ■
Physiologiquement, la formation réticulée a une fonction dite activatrice : elle
« bombarde » le cortex d’informations qui maintiennent éveillé. ■
Le coma résulte : – de lésions diffuses hémisphériques du cortex ou de la substance blanche, suffisantes pour léser les connexions entre cortex et formation réticulée : souffrance cérébrale diffuse fonctionnelle ou souffrance cérébrale focale sus-tentorielle étendue ; – et/ou d’une lésion focale sous-tentorielle du tronc cérébral lésant le système d’activation de la formation réticulée.
II. CAUSES À côté des causes traumatiques de coma (hématome extradural, hématome sousdural, hématome intracérébral, contusion cérébrale, embolie graisseuse), les causes de coma sont diverses et parfois intriquées : ■
coma toxique
ITEM 214
:
– médicaments sédatifs (benzodiazépines, barbituriques, carbamates, phénothiazines) ; – opiacés ; – alcool (l’intoxication pouvant être associée à une hypoglycémie et/ou un traumatisme crânien) ; ■
coma métabolique : – anoxie cérébrale ; – hypoglycémie : sueur, tachycardie, pâleur, signes d’irritation pyramidale, signes déficitaires localisés, comitialité ; – hyponatrémie ; – hyperosmolarité ; – hypercalcémie, hypophosphorémie profonde ; – alcalose métabolique ; – encéphalopathie hépatique ; – encéphalopathie rénale ; – encéphalopathie respiratoire ; – encéphalopathie de Gayet-Wernicke : par carence en vitamine B1, troubles de la vigilance avec paralysie oculomotrice, troubles de l’équilibre, syndrome cérébelleux. L’évolution vers le coma peut être précipitée par l’administration de sérum glucosé sans vitamine B1 ; 135
ITEM 230
■
coma endocrinien : – coma myxœdémateux ; – insuffisance surrénale aiguë ; – décompensation diabétique : acidocétose diabétique et coma hyperosmolaire ;
■
épilepsie : – état de mal épileptique infraclinique ; – coma postcritique ;
■
causes infectieuses
ITEM 96
:
– méningites ; – encéphalites ; – abcès cérébral et empyème ; – neuropaludisme ; – encéphalopathie des états septiques ; ■
causes vasculaires
ITEM 133
:
– hémorragie méningée ; – hémorragie cérébrale ; – infarctus cérébral ; – thrombophlébite cérébrale ; – vascularite cérébrale et microangiopathie thrombotique ; – encéphalopathie hypertensive ; ■
causes tumorales : – tumeur primitive ; – métastases.
III. DIAGNOSTIC A. Diagnostic de coma 1. Diagnostic positif ■ Altération de la vigilance (difficulté à l’ouverture des yeux). ■
Altération de la conscience (difficultés aux réponses motrices et verbales).
2. Examen de la profondeur du coma ■ Elle est appréciée le plus souvent par le score de Glasgow
(tableau 230-1),
échelle
allant de 3 à 15 (personne parfaitement consciente), et qui s’évalue sur trois critères : ouverture des yeux (O), réponse verbale (V), réponse motrice (M). ■
On parle de coma pour les scores ≤ 7.
■
L’évaluation est parfois rendue difficile par la présence de troubles phasiques ou
sensitivomoteurs. ■
La décortication, qui traduit une souffrance hémisphérique étendue souvent
bilatérale, ou une souffrance diencéphalique, se manifeste par un mouvement de triple flexion des membres supérieurs et d’extension-flexion plantaire des membres inférieurs. ■
La décérébration, qui traduit une souffrance du tronc cérébral à sa partie haute,
se manifeste par un mouvement de pronation-extension des membres supérieurs (enroulement) et d’extension-flexion plantaire des membres inférieurs. 136
Coma non traumatique
Tableau 230-1. Score de Glasgow O
V
M
4
Spontanée
5
Orientée
6
À la parole
3
Au bruit
4
Confuse
5
Orientée : un mouvement de flexion du bras cherche à faire disparaître la cause de la douleur
2
À la douleur
3
Inappropriée : les mots restent compréhensibles
4
D’évitement : retrait rapide, éloignement face au stimulus douloureux
1
Aucune
2
Incompréhensible
3
En décortication : réponse en flexion lente aux membres supérieurs, en extension aux membres inférieurs
1
Aucune
2
En décérébration : mouvement d’enroulement aux membres supérieurs, d’extension et flexion plantaire aux membres inférieurs
1
Aucune
B. Diagnostic de localisation et de gravité neurologiques 1. Examen des yeux Temps essentiel de l’examen neurologique, il permet de préciser le niveau lésionnel de l’atteinte neurologique et l’importance de la souffrance cérébrale : ■
clignement à la menace : traduit la persistance d’un certain degré d’activité
corticale ; ■
examen pupillaire : – myosis serré bilatéral : intoxications morphiniques, lésions protubérantielles ; – myosis modéré bilatéral réactif : encéphalopathies toxiques ou métaboliques, lésion diencéphalique ; – myosis unilatéral : souffrance du diencéphale (engagement central) ; – pupilles intermédiaires aréactives : souffrance mésencéphalique ; – mydriase bilatérale aréactive : souffrance irréversible du tronc cérébral (TC), encéphalopathie toxique ; – mydriase unilatérale aréactive : atteinte du III homolatérale (engagement temporal) ;
■
examen de la motricité oculaire : – position spontanée : strabisme externe (III), strabisme interne (VI), déviation oblique ou squew deviation (lésion du tronc cérébral), déviation conjuguée du regard (lésion hémisphérique : « le patient regarde sa lésion ») ; – mouvements spontanés : errance du regard (le déplacement lent et conjugué des globes dans un sens puis l’autre traduit l’intégrité de la protubérance et du mésencéphale), mouvements alternatifs horizontaux ou verticaux, ocular bobbing (abaissement rapide, pause puis élévation lente des globes, qui traduit une atteinte protubérantielle), opsoclonies (mouvements rapides et anarchiques des globes : « bille de flipper », traduit une souffrance du tronc cérébral ou du cervelet), déviation forcée des yeux vers le bas (atteinte thalamique ou sousthalamique) ; 137
ITEM 230
– mouvements réflexes : • réflexe oculocéphalique : réflexe normal (déplacement conjugué des globes en sens contraire d’un mouvement passif imprimé à la tête : phénomène des yeux de poupée). L’abolition du réflexe oculocéphalique horizontal traduit une lésion protubérantielle ou une atteinte fonctionnelle majeure (encéphalopathie toxique ou métabolique), l’abolition du réflexe oculocéphalique vertical traduit une lésion mésencéphalique ou une atteinte fonctionnelle majeure (encéphalopathie toxique ou métabolique) ; • réflexe vestibulo-oculaire : réflexe normal (déviation horizontale du regard à la stimulation ipsilatérale du conduit auditif externe par irrigation d’eau froide). Une stimulation bilatérale à l’eau froide entraîne un abaissement des globes, une stimulation bilatérale à l’eau chaude entraîne une élévation. L’analyse des réflexes vestibulo-oculaires apporte les mêmes informations que celle des réflexes oculocéphaliques ; • réflexe cornéen : réflexe normal (clignement de la paupière, le limbe cornéen étant effleuré). Son abolition unilatérale traduit une atteinte protubérantielle ipsilatérale. Son abolition bilatérale est un signe de profondeur du coma (dépression sévère du tronc cérébral) ; • réflexe cornéoptérygoïdien : mouvement de diduction de la mâchoire vers le côté opposé à la stimulation cornéenne. Il signe une souffrance de la partie haute du tronc cérébral.
2. Examen de la motricité ■ Force segmentaire des membres et de la face à la demande ou à la stimulation douloureuse (pression du lit unguéal et manœuvre de Pierre Marie et Foix : compression du nerf facial derrière les maxillaires inférieurs). ■
Tonus de repos (mobilisation passive des membres), tonus postural (recher-
che d’une hypotonie en laissant tomber le membre supérieur ou inférieur sur le plan du lit), tonus axial par mobilisation de la nuque (recherche d’un syndrome méningé).
3. Examen des réflexes ■ Ostéotendineux. ■
Cutanés plantaires (recherche du signe de Babinski).
■
Du tronc cérébral (tableau 230-2) ; leur disparition progressive est étagée : cilio-
spinal puis fronto-orbiculaire, oculocéphalique vertical, photomoteur, cornéen, massétérin, oculocéphalique horizontal, oculocardiaque. Parmi ces réflexes, 5 ont été retenus pour une cotation, permettant lorsqu’elle est additionnée au score de Glasgow de déterminer le score de Glasgow-Liège sur une échelle de 3 (Glasgow = 3 et aucun réflexe du tronc) à 20.
4. Autres signes à rechercher ■ Recherche de mouvements anormaux : – clonies des paupières (état de mal infraclinique) ;
138
Coma non traumatique
Tableau 230-2. Réflexes du tronc cérébral Huit réflexes physiologiques du tronc cérébral
Score de Liège
Ciliospinal
Dilatation pupillaire après stimulation sus-claviculaire
Fronto-orbiculaire
Fermeture palpébrale après percussion glabellaire
5
Oculocéphalique vertical
Mouvement conjugué des yeux dans le sens vertical, dans le sens inverse du mouvement imprimé de flexion/extension de la tête
4
Photomoteur
Contraction pupillaire par stimulation lumineuse
3
Cornéen
Fermeture de la paupière par stimulation cornéenne (arc réflexe V, VII)
Massétérin
Contraction du masséter par percussion mentonnière
Oculocéphalique horizontal
Mouvement conjugué des yeux dans le sens horizontal, 2 dans le sens inverse du mouvement imprimé de rotation de la tête
Oculocardiaque
Ralentissement cardiaque après compression des globes oculaires
1
Deux réflexes pathologiques du tronc cérébral Palmomentonnier
Contraction de la houpe du menton par stimulation de l’éminence thénar homolatérale
Cornéomandibulaire
Mouvement de diduction de la mandibule après stimulation de la cornée
– myoclonies (encéphalopathie postanoxique, médicamenteuse) ; – mouvements tonicocloniques. ■
Recherche d’un syndrome méningé.
5. Examen de la respiration ■ Dyspnée de Cheyne-Stockes (respiration périodique faisant alterner des phases de polypnée croissante puis décroissante puis d’apnée) : souffrance diencéphalique ou hémisphérique bilatérale. ■
Hyperventilation neurogène centrale : souffrance protubérantielle haute ou
mésencéphalique. ■
Respiration apneustique : pauses en inspiration traduisant une souffrance
protubérantielle. ■
Respiration ataxique : rythme irrégulier et pauses précédant les « gasps » et l’ar-
rêt respiratoire, et traduisant une souffrance bulbaire. ■
Syndrome d’ondine : perte complète de la respiration automatique traduisant
une souffrance bulbaire. ■
La dyspnée de Küssmaul (respiration à 4 temps : inspiration-pause en inspira-
tion-expiration-pause en expiration) s’observe dans les acidoses métaboliques et n’est pas particulièrement associée aux causes de coma en dehors de l’acidocétose diabétique.
6. Mort encéphalique* Cette démarche peut aboutir au diagnostic de mort encéphalique.
*ECN 2008
139
ITEM 230
CONSENSUS Prise en charge du sujet en état de mort encéphalique SRLF, SFAR, 2005 ■
La mort encéphalique est définie comme la destruction irréversible de l’ensemble des fonc-
tions cérébrales chez un sujet à cœur battant. ■
Elle est la conséquence d’un arrêt complet de la circulation cérébrale, qui supprime la com-
mande centrale de la respiration, la régulation de l’homéostasie circulatoire (tachycardie, vasoplégie, dysfonction myocardique), thermique (hypothermie) et endocrinienne (diabète insipide, hyperglycémie). ■
En l’absence de facteurs confondants (hypothermie < 35 °C, imprégnation médicamenteuse
ou toxique susceptible d’interférer avec l’examen clinique), le diagnostic repose sur : – un coma non réactif ; – une abolition des réflexes du tronc cérébral ; – l’absence de ventilation spontanée, vérifiée par une épreuve d’hypercapnie (mise en évidence de l’absence de mouvements respiratoires et d’une hypercapnie lors du débranchement du ventilateur). ■
Dans l’optique du don d’organe, le diagnostic clinique de ME doit être confirmé soit par
2 EEG nuls et non réactifs, effectués à 4 heures d’intervalle, soit par une angiographie cérébrale objectivant l’arrêt de perfusion des quatre axes. ■
En cas de ME clinique, les méthodes de réanimation doivent être adaptées sans délai et la
coordination hospitalière contactée, car ce patient est un « donneur potentiel ». ■
Un don d’organe est alors possible en l’absence de contre-indication générale (tumo-
rale, infectieuse) et en l’absence d’opposition du vivant du patient (notion de consentement présumé).
IV. PRISE EN CHARGE A. Procéder systématiquement aux premières mesures d’urgence ■
Libération des voies aériennes : nécessaire du fait d’une perte du tonus mus-
culaire, et des réflexes de toux et de déglutition. Les voies aériennes peuvent être obstruées par la langue, les mucosités, les aliments, les corps étrangers : – dégrafer les vêtements pouvant gêner la ventilation ; – basculer la tête en surélevant le menton ; – inspecter la cavité buccale et retirer les corps étrangers (aliments, prothèse dentaire) ; – mettre en position latérale de sécurité ; – l’intubation et la ventilation sont parfois nécessaires d’emblée. ■
Éliminer une hypoglycémie : mesure de la glycémie capillaire à la recherche
d’une hypoglycémie et le cas échéant administration de 20 mL de sérum glucosé à 30 % en IV (administration systématique en l’absence de moyens disponibles pour *ECN 2008
mesurer la glycémie capillaire)* ■
ITEM 206
.
Éliminer une intoxication aux opiacés : recherche de traces de piqûres et d’un
syndrome opioïde (bradypnée et apnées, myosis serré bilatéral, nausées, vomissements, iléus, prurit, bradycardie, hypotension), justifiant l’administration d’un traitement antagoniste par naloxone.
140
Coma non traumatique
■
Rechercher un purpura : fait suspecter le diagnostic de purpura fulminans et
justifie l’administration immédiate d’une céphalosporine de 3e génération. ■
Éliminer un traumatisme crânien : recherche systématique d’une plaie du scalp,
d’un traumatisme de la face (ecchymose, otorragie, rhinorrhée), d’un intervalle libre. Un scanner cérébral avec fenêtres osseuses est toujours justifié en cas de doute. ■
Traiter un état de mal épileptique.
CONSENSUS Prise en charge des états de mal épileptique (EME) SRLF, 2008 ■
EME = survenue sur 30 min de crises continues ou succession sur 30 min de crises dis-
continues sans amélioration de la conscience entre chacune. Une durée de 5 min suffit à poser le diagnostic d’EME si les manifestations sont des crises tonicocloniques généralisées. ■
Sur un plan clinique, on distingue les EME convulsifs et les EME non convulsifs (dont le dia-
gnostic nécessite la réalisation d’un EEG). ■
Sur le plan pronostique, on individualise les EME convulsifs généralisés tonicocloniques car
ils engagent le pronostic vital à court terme. ■
La recherche étiologique doit être effectuée rapidement sans retarder les manœuvres de
réanimation et la mise en œuvre du traitement antiépileptique : – la recherche de troubles métaboliques (hypoglycémie, hyponatrémie, hypocalcémie) est toujours incontournable ; – les indications de l’imagerie cérébrale en urgence (scanner cérébral sans et avec injection ou IRM) doivent rester larges et comprennent la présence de signes de localisation (en tenant compte de l’état neurologique antérieur), un début partiel, la décision de pratiquer une ponction lombaire, la notion de traumatisme crânien, de néoplasie ou d’immunodépression ; – une ponction lombaire est préconisée dans un contexte infectieux, en cas d’immunodépression et en cas de négativité de la recherche étiologique. En cas d’état de mal convulsif fébrile, lorsque la ponction lombaire ne peut être réalisée immédiatement, il est recommandé de débuter sans délai par voie veineuse un traitement antibiotique probabiliste et de l’aciclovir. ■
Le traitement d’un EME dont le diagnostic est évident doit débuter sans attendre l’EEG.
■
La prise en charge symptomatique de l’EME convulsif généralisé comprend : – des mesures immédiates : mise en position latérale de sécurité, maintien de la liberté des voies aériennes supérieures, oxygénation, voie veineuse périphérique, perfusion de sérum physiologique, mesure de la glycémie capillaire, correction d’une éventuelle hypoglycémie ; – une intubation avec ventilation mécanique en cas de recours à des agents anesthésiques, de détresse respiratoire aiguë ou d’altération profonde et prolongée de la vigilance ; – une injection de 100 mg de thiamine chez l’alcoolique connu ou suspecté.
■
Le traitement antiépileptique est administré en urgence devant des crises convulsives géné-
ralisées continues ou subintrantes persistant au moins 5 minutes : – prise en charge précoce (5 à 30 min après le début des convulsions) : benzodiazépine IV (clonazépam, 0,015 mg/kg, ou diazépam, 0,015 mg/kg) ; en cas de persistance après 5 min : 2e injection de benzodiazépine associée à un médicament antiépileptique IV (phénytoïne/ fosphénytoïne, 20 mg/kg, ou phénobarbital, 15 mg/kg) ;
u
141
ITEM 230
u – prise en charge plus tardive (30 min après le début des convulsions) : benzodiazépine IV (clonazépam, 0,015 mg/kg, ou diazépam, 0,015 mg/kg) d’emblée associée à un médicament antiépileptique IV (phénytoïne/fosphénytoïne, 20 mg/kg, ou phénobarbital, 15 mg/kg) ; en cas de persistance après 5 min : 2e injection de benzodiazépine ; – la phénytoïne/fosphénytoïne est contre-indiquée en cas de troubles de la conduction ou de cardiopathie sévère ; le phénobarbital est contre-indiqué chez l’insuffisant respiratoire sévère ; le valproate de sodium (25 mg/kg puis 1 à 4 mg/kg/h) peut être utilisé (hors AMM) à la place de ces derniers traitements en cas de contre-indication à la phénytoïne/fosphénytoïne et au phénobarbital ou en cas d’état de mal secondaire à un sevrage en valproate de sodium. Il est contre-indiqué en cas d’hépatopathie ; – en cas de persistance des convulsions, on aura recours au médicament antiépileptique non utilisé en première intention (phénobarbital après phénytoïne/fosphénytoïne, ou vice versa) ou à un traitement par thiopental ou midazolam ou propofol (sous assistance respiratoire) si l’EME évolue depuis plus de 60 min, si la probabilité de lésion cérébrale aiguë est forte, si les facteurs d’agression cérébrale (instabilité hémodynamique, hypoxie, hyperthermie) ne sont pas contrôlés. ■
Un EME est dit réfractaire s’il existe une résistance à 2 médicaments antiépileptiques dif-
férents. Son traitement fait appel aux barbituriques (thiopental : bolus de 2 mg/kg toutes les 5 min jusqu’à arrêt des convulsions, puis de 3 à 5 mg/kg/h), au propofol (bolus initial de 2 mg/kg puis 1 mg/kg toutes les 5 min jusqu’à arrêt des convulsions, puis 2 à 5 mg/kg/h) et au midazolam (bolus initial de 0,1 mg/kg puis 0,05 mg/kg toutes les 5 min jusqu’à arrêt des convulsions, puis 0,05 à 0,6 mg/kg/h). ■
Dans les cas d’EME réfractaires et résistant aux traitements usuels (barbituriques, propofol,
midazolam), il peut être utile de les associer entre eux. Le topiramate, le lévétiracétam, la kétamine, les anesthésiques inhalés peuvent être considérés. ■
Après le contrôle de l’état de mal, un relais par benzodiazépines par voie entérale (cloba-
zam : 5 à 10 mg × 3 ou clonazépam : 1 à 2 mg × 3) ou parentérale discontinue est indispensable. L’éventuelle instauration ou l’adaptation d’un traitement antiépileptique de fond est fait après avis spécialisé pour choisir l’antiépileptique le plus approprié.
B. Mettre le patient en condition ■
Oxygénothérapie.
■
Mise en place d’une voie veineuse (et administration de 100 mg de vitamine B1 IV
dans l’hypothèse d’une encéphalopathie de Wernicke). ■
Mise en place d’une sonde nasogastrique en aspiration douce.
■
Monitorage des constantes vitales.
■
Débuter tôt les mesures préventives : – des complications de décubitus : nursing, matelas anti-escarres, anticoagulation préventive ; – des complications cornéennes : soins des yeux ; – des complications buccales : soins de bouche ; – sondage urinaire, évacuation d’un fécalome ; – de l’ulcère de stress.
142
Coma non traumatique
C. Faire le diagnostic de la cause et la traiter spécifiquement ■
Bilan d’anamnèse poussé auprès de l’entourage (antécédents, circonstances,
mode d’installation). ■
Examen clinique général.
■
Examens biologiques : – ionogramme sanguin, urée et créatinine plasmatiques, glycémie, calcémie, phosphorémie, uricémie, CPK ; – gaz du sang et lactates artériels ; – numération-formule sanguine ; – alcoolémie, dosage de toxiques, de l’HbCO ; – ammoniémie ; – bilan thyroïdien, cortisolémie.
■
Bilan radiologique : – scanner cérébral : devant tout coma sans cause retrouvée, dès qu’il existe un doute sur un traumatisme, dès qu’il existe des signes de localisation, chez l’alcoolique dont l’état neurologique ne s’améliore pas ; – radiographie thoracique : à la recherche d’une pneumopathie d’inhalation.
■
Électroencéphalogramme : apprécie la profondeur du coma, recherche une
comitialité (pointes-ondes permanentes). Il oriente parfois le diagnostic étiologique : encéphalopathie métabolique ou médicamenteuse (ondes lentes diffuses), hépatique (éléments triphasiques périodiques), herpétique (pointes-ondes périodiques frontotemporales). Il fait le diagnostic de mort encéphalique (EEG plat). L’asymétrie fait suspecter une lésion focale. ■
Ponction lombaire : en cas de fièvre et/ou de syndrome méningé et/ou de signes
encéphalitiques préalables au coma. ■
Potentiels évoqués : peuvent avoir un intérêt pronostique notamment au cours
d’encéphalopathie postanoxique et du traumatisme crânien.
D. Rechercher un diagnostic différentiel ■
Locked-in syndrome ou syndrome de désafférentation motrice : quadriplégie
avec diplégie faciale, paralysie labio-glosso-laryngo-pharyngée et paralysie de la latéralité du regard. Il est lié à un infarctus protubérantiel : la partie haute du tronc cérébral est respectée, les mouvements de verticalité du regard et les mouvements d’ouverture des yeux sont conservés. Les hémisphères étant respectés, la vigilance et la conscience sont normales. ■
Aphasie.
■
Aréactivité psychogène : conversion hystérique, simulation, mélancolie, catatonie.
■
Syndrome de Gélineau : narcolepsie (accès de sommeil), catalepsie (chute du
tonus).
143
ITEM 230
Fiche
Dernier tour
Coma non traumatique Le diagnostic de coma est clinique : altération de la vigilance (état de veille : évalué par l’ouverture des yeux) et de la conscience (connaissance de soi et de son environnement : évaluée par les réponses verbales et motrices). ■ Les causes, en dehors du traumatisme crânien, sont : toxiques, métaboliques, endocriniennes, liées à une épilepsie, liées à une infection neuroméningée, vasculaires, tumorales. ■ Le bilan neurologique complet comprend : – la détermination du score de Glasgow ; ■
Tableau 230-3. Score de Glasgow Ouverture des yeux
Réponse verbale
Réponse motrice
4
spontanée
5
orientée
6
à la parole
3
au bruit
4
confuse
5
orientée
2
à la douleur
3
inappropriée
4
d’évitement
1
aucune
2
incompréhensible
3
en décortication
1
aucune
2
en décérébration
1
aucune
– l’examen pupillaire : mydriase unilatérale (engagement temporal), mydriase bilatérale (souffrance irréversible du TC), myosis serré bilatéral (intoxication morphinique) ; – la recherche d’une disparition des réflexes du tronc cérébral : d’abord ciliospinal puis fronto-orbiculaire, oculocéphalique vertical, photomoteur, cornéen, massétérin, oculocéphalique horizontal, oculocardiaque ; – l’examen du tonus, de la force motrice segmentaire testée par un stimulus douloureux (pression du lit unguéal et manœuvre de Pierre Marie et Foix), des réflexes, la recherche de mouvement anormaux ; – la recherche d’un syndrome méningé ; – l’examen de la respiration. ■ Ce bilan peut aboutir au diagnostic de mort encéphalique : coma non réactif, abolition des réflexes du tronc cérébral, absence de ventilation spontanée vérifiée par une épreuve d’hypercapnie, EEG plat. ■ Les mesures d’urgence comprennent : – la libération et la protection des voies aériennes ; – la recherche d’une hypoglycémie ± G30 % IV, 20 mL ; – la recherche d’une intoxication aux opiacés ± Naloxone® IV ; – la recherche d’un purpura ± C3G IV ; – la recherche d’un traumatisme crânien ± TDM cérébrale et avis neurochirurgical ; – la recherche d’un état de mal épileptique : BZP IV + antiépileptique IV (phénitoïne ou phénobarbital). ■ Les autres mesures sont : – oxygénothérapie ; – mise en place d’une voie veineuse et administration de 100 mg de vitamine B1 ; – mise en place d’une sonde nasogastrique, d’une sonde urinaire ; – monitorage des constantes vitales ; – prévention des complications de décubitus, cornéennes, de l’ulcère de stress. ■ Le bilan comprend : – une TDM cérébrale si coma sans cause retrouvée, doute sur un traumatisme, signes de localisation, chez un alcoolique dont l’état neurologique ne s’améliore pas ; – une radiographie thoracique : à la recherche d’une pneumopathie d’inhalation ; – un électroencéphalogramme : recherche surtout une comitialité infraclinique ; – une ponction lombaire en cas de fièvre et/ou de syndrome méningé .
144
ITEM 252
Insuffisance rénale aiguë – Anurie
OBJECTIFS ● Diagnostiquer une insuffisance rénale aiguë et une anurie. ● Identifier les situations d’urgence et planifier leur prise en charge. LIENS TRANSVERSAUX ITEM 200
État de choc.
ITEM 216
Rétention aiguë d’urine.
ITEM 218
Syndrome prééclamptique.
ITEM 219
Troubles de l’équilibre acido-basique et désordres hydroélectrolytiques.
ITEM 264
Néphropathie glomérulaire.
ITEM 310
Élévation de la créatininémie.
ITEM 328
Protéinurie et syndrome néphrotique chez l’enfant et chez l’adulte. Sujet tombé
Sujets tombés aux concours de l’Internat et aux ECN : 1995, 1996, 2004 ●
1995, interrégion Nord, dossier 9 : Un sujet de 66 ans présente l’histoire clinique suivante : - en 1974, découverte d’une hypertension artérielle (ses deux parents directs sont hypertendus) ; - cette même année, néphrectomie droite d’un rein atrophique alors que le rein gauche présente une jonction pyélo-urétérale dite « limite » avec un bassinet et des tiges calicielles dilatées : - résection en 1982 de cette jonction pyélo-urétérale, la créatinine plasmatique est alors à 96 μmol/L. L’hypertension artérielle persiste non modifiée par les deux interventions, elle est parfaitement corrigée par une association diurétique-bêtabloquant ; - en décembre 1994, le sujet se présente avec une tension artérielle qui n’est plus normalisée. La minima varie entre 100 et 105 mm de mercure. Le fond d’œil montre des signes importants de sclérose artérielle, des signes du croisement, sans
ú 145
ITEM 252
hémorragie ni exsudat. L’échographie montre l’absence de calcul rénal, une dilatation modérée du bassinet, l’absence de résidu vésical après miction. Le diamètre vertical du rein gauche est de 110 mm. La créatinine plasmatique est à 170 μmol/L ; clairance insuline : 50 mL/min ; clairance PAH : 210 mL/min ; fraction filtrée : 0,24. Une artériographie rénale est pratiquée le 18 décembre 1994 (l’iconographie était fournie). Des clichés tardifs visualisent la voie excrétrice. Le 10 janvier 1995, le sujet revient dans le service. La pression artérielle est à 130/72, le sujet reçoit depuis décembre 1994 furosémide (Lasilix®) 80 mg/j et énalapril (Rénitec®) 10 mg/j. La créatinine plasmatique est alors à 550 μmol/L, l’acide urique à 570 μmol/L, potassium 5,4, calcium 2,47, phosphore 1,29 mmol/L. 1) Quels sont les deux éléments du résumé d’observation qui pouvaient faire prévoir l’absence d’amélioration de la pression artérielle par la néphrectomie en 1974 ? 2) Quelles sont les causes anatomiques possibles de dégradation de la fonction rénale qui ont été recherchées en décembre 1994 par l’imagerie ? L’une de ces causes est-elle confirmée par cette imagerie ? 3) Quelles sont les causes possibles de dégradation de la fonction rénale entre décembre 1994 et janvier 1995 ? 4) Par quels moyens peut-on tenter de les mettre en évidence (en tenant compte du contexte) ? 5) En l’absence de réversibilité de l’insuffisance rénale, quelles sont les mesures générales à visée thérapeutique à entreprendre ? ●
1996, interrégion Sud, dossier 3 : Un patient âgé de 63 ans présente depuis plusieurs mois une détérioration de l’état général avec nausées fréquentes. Il se plaint également de douleurs osseuses principalement rachidiennes. Il ne prend aucun traitement particulier. Sa tension artérielle est à 140/80 mmHg. Le patient est légèrement déshydraté. Dans ce contexte, un bilan biologique est réalisé. Numération-formule sanguine : globules rouges 2,5 millions/ mm3, hémoglobine 8,2 g/dL, globules blancs 9 500/mm3, plaquettes sanguines 180 000/mm3. Ionogramme sanguin : kaliémie 4,7 mEq/L, natrémie 142 mEq/L. Créatininémie 486 μmol/L, urée sanguine 23,6 mmol/L, protidémie 80 g/L, albuminémie 42 g/L, calcémie 2,52 mmol/L, phosphorémie 1,78 mmol/L. Dans les urines : protéinurie des 24 heures 1,4 g/24 h. Radiographie de thorax : normale. 1) Que penser de la calcémie ? 2) Quel diagnostic évoquez-vous ? 3) Quels sont les examens à demander pour confirmer votre diagnostic ? 4) Quels sont les différents mécanismes possibles de l’atteinte rénale ? 5) Quelles sont les mesures thérapeutiques à prendre dans l’immédiat ?
●
2004 : dossier 8 : Patiente de 80 ans, apparition progressive d’œdèmes des membres inférieurs, prise de poids, pression artérielle à 100/65 mmHg ; pas de diabète, aucun médicament sauf furosémide depuis 8 jours. Échographie rénale : 2 reins de 14 cm de grand axe sans dilatation. Échographie cardiaque : discrète dilatation, fonction systolique normale. Examens biologiques : glucose = 4,4 mmol/L, Na = 129 mmol/L, K = 3,7 mmol/L, CI = 94 mmol/L, HC03 = 24 mmol/L, Ca = 1,84 mmol/L, P = 1,94 mmol/L, protéines = 60 g/L, albumine = 10 g/L, urée = 34 mmol/L, créatinine = 322 μmol/L, uricémie = 840 μmol/L, bilirubine totale = 15 μmol/L, ASAT = 27 UI/mL, ALAT = 15 UI/mL, phosphatases alcalines = 106 UI/mL, CPK = 24 UI/mL, CRP = 24 mg/L, cholestérol total = 11,5 mmol/L, triglycérides = 1,43 mmol/L. Dans les urines : protéinurie à 3,5 g/24 h, hématies = 3 000/mm3, leucocytes = 4 000/mm3. 1) Quel est le mécanisme des œdèmes dans ce cas ? 2) Quel diagnostic syndromique les anomalies du bilan biologique vous permettent-elles d’évoquer ? 3) Comment interpréter la calcémie ? 4) Interprétez l’électrophorèse des protéines urinaires et l’électrophorèse des protéines plasmatiques. 5) Quelle prescription médicamenteuse lui proposez-vous ? 6) Devant ces anomalies est réalisée une ponction-biopsie rénale. Quelles sont les contre-indications à rechercher et quelles complications peut-on en craindre ? 7) La biopsie rénale ne montre pas de prolifération cellulaire glomérulaire ou interstitielle, mais des dépôts intraglomérulaires et intra-artériels positifs pour le rouge Congo et la thioflavine. L’immunofluorescence met en évidence des dépôts de chaînes légères de type Lambda. Quel est le type histologique de l’atteinte rénale ? 8) Quelles sont les autres localisations possibles de cette affection ? 9) Quel traitement symptomatique proposez-vous ?
CONSENSUS ● Protection rénale péri-opératoire – Conférence de consensus – SFAR, 14 septembre 2004 (www.sfar.org). ● Prévention de l’insuffisance rénale induite par les produits de contraste iodés – Recommandations pour la pratique clinique – SFR, CIRTACI, 16 décembre 2004 (www. sfrnet.org).
146
Insuffisance rénale aiguë – Anurie
POUR COMPRENDRE… ■
L’insuffisance rénale aiguë (IRA) se définit comme l’incapacité brutale du rein à
éliminer des déchets métaboliques et à maintenir l’homéostasie hydroélectrolytique. En pratique, l’IRA est décrite comme la baisse brutale de la filtration glomérulaire. ■
L’IRA est une pathologie fréquente (1 % des admissions hospitalières, 20 % des
admissions en réanimation). Les sujets âgés y sont particulièrement susceptibles. La mortalité de l’IRA varie beaucoup selon le mécanisme à son origine. ■
On distingue 3 mécanismes d’IRA pouvant parfois être intriqués : – l’IRA prérénale, la plus fréquente (50 %), liée à une diminution du flux sanguin rénal sans lésion histologique ; – l’IRA rénale (45 %), liée à une atteinte organique : tubulaire, interstitielle, glomérulaire, vasculaire, l’atteinte tubulaire étant la plus fréquente ; – l’IRA postrénale (5 %), liée à une obstruction des voies urinaires.
■
Toute insuffisance rénale chronique peut être aggravée par un facteur de décom-
pensation prérénal, rénal ou postrénal. ■
La conduite à tenir est urgente et repose sur : – la recherche de signes de gravité (hyperkaliémie, acidose métabolique, œdème pulmonaire hydrostatique), pouvant justifier une admission en unité de soins intensifs et la réalisation d’une expuration extra-rénale (EER) immédiate ; – la recherche d’une obstruction, justifiant une évacuation urinaire rapide ; – la recherche d’arguments cliniques et biologiques pour une hypovolémie, justifiant une expansion volémique ; – la recherche d’arguments cliniques, biologiques et parfois histologiques pour une néphropathie, pour laquelle la mise en route d’un traitement spécifique en urgence diminue le risque d’évolution vers l’insuffisance rénale chronique.
■
Ces urgences étant éliminées, un interrogatoire minutieux doit rechercher
l’exposition à un traitement néphrotoxique, cause majeure d’IRA.
I. PHYSIOPATHOLOGIE Le débit de filtration glomérulaire (DFG) dépend : ■
de la différence de pression efficace entre le capillaire et la chambre urinaire du
glomérule ; ■
du coefficient de filtration glomérulaire (Kf), qui intègre la perméabilité et la sur-
face de la membrane glomérulaire. La relation entre ces paramètres est exprimée par : ■
DFG = Kf [(Pcap – Pu) – (πcap)] ;
■
où : Pcap = pression capillaire glomérulaire, Pu = pression de la chambre uri-
naire de Bowman, πcap = pression oncotique capillaire glomérulaire. Le capillaire glomérulaire est très particulier : situé entre 2 artérioles, la pression (Pcap) qui y règne dépend du débit sanguin rénal et de la différence de pression entre l’artériole afférente et l’artériole efférente. On distingue ainsi trois grands types d’IRA : prérénale, rénale et postrénale. 147
ITEM 252
A. IRA fonctionnelle ou prérénale ■
La diminution du DFG est liée à : – une diminution de la Pcap par diminution du débit sanguin rénal et/ou augmentation des résistances artériolaires afférentes et/ou diminution des résistances artériolaires efférentes ; – une augmentation de la πcap.
■
L’hypoperfusion capillaire glomérulaire qui en résulte active la sécrétion de
rénine par l’appareil juxtaglomérulaire (cellules myoépithéliales de l’artériole afférente). L’angiotensinogène (d’origine hépatique) est transformé en angiotensine I par la rénine. L’angiotensine I est convertie en angiotensine II par l’enzyme de conversion de l’angiotensine. L’angiotensine II stimule la sécrétion d’aldostérone par la corticosurrénale. ■
Parallèlement, l’hypotension artérielle et/ou l’hypovolémie, souvent présentes
dans ces situations, activent la libération d’hormone antidiurétique (ADH) par la posthypophyse. ■
L’urine est donc peu abondante, pauvre en sodium, riche en potassium et
acide, très concentrée en osmoles. La réabsorption d’eau par le tubule collecteur s’accompagne d’une réabsorption passive d’urée, expliquant l’augmentation plus importante de l’urée plasmatique que de la créatinininémie.
B. IRA obstructive ou postrénale ■
La diminution du DFG est liée à une augmentation de la Pu.
■
L’IRA apparaît pour un obstacle bilatéral ou unilatéral sur rein unique.
■
L’obstacle entraîne une anurie.
■
Une diurèse peut cependant persister du fait d’un obstacle incomplet ou plus
rarement d’un diabète insipide néphrogénique en cas d’obstacle incomplet chronique à l’origine d’une atteinte tubulaire distale.
C. IRA parenchymateuse ou intrarénale Elle est liée à des lésions anatomiques des différentes structures du rein : ■
nécrose tubulaire aiguë (NTA) : la réduction du DFG s’explique par diminution
de la Pcap (vasoconstriction des artérioles afférentes) et par une augmentation de la Pu (accumulation intratubulaire de débris cellulaires). La réduction du DFG est souvent majeure, responsable d’une anurie ; ■
néphropathie interstitielle aiguë : la réduction du DFG est liée à un œdème inter-
stitiel responsable d’une augmentation de la Pu, le rein étant situé dans un espace clos limité par une capsule ; ■
néphropathie glomérulaire aiguë : la réduction du DFG est liée à la réduction de
Kf (essentiellement par réduction de la surface de filtration) ; ■
néphropathie vasculaire aiguë : la réduction du DFG est liée à une diminution de
la Pcap par réduction du débit sanguin rénal.
148
Insuffisance rénale aiguë – Anurie
II. CAUSES A. Causes de l’IRA prérénale ■
ITEM 200
Hypovolémie vraie : hémorragie, pertes hydrosodées digestives, rénales, cuta-
nées, 3e secteur, hypoalbuminémie. ■
Hypovolémie relative (vasoplégie) : choc septique, choc anaphylactique, traite-
ments antihypertenseurs, traitements anesthésiques. ■
Diminution du débit cardiaque : insuffisance cardiaque, choc cardiogénique,
choc hypovolémique. ■
Vasoconstriction des artérioles afférentes : anti-inflammatoires non sté-
roïdiens (inhibant la production rénale des prostaglandines vasodilatatrices), ciclosporine, tacrolimus, produits de contraste iodés, amphotéricine B, syndrome hépatorénal.
Syndrome hépatorénal (SHR) ■
IRA fonctionnelle compliquant une cirrhose avec insuffisance hépatocellulaire et hypertension
portale, en l’absence d’état de choc, de pertes digestives ou rénales, de traitement néphrotoxique, et ne s’améliorant pas après expansion volémique. ■
Le mécanisme est une vasodilatation splanchnique induite par l’hypertension portale, respon-
sable d’une réponse neuro-hormonale vasoconstrictrice s’exprimant au niveau rénal. ■
On distingue 2 types de SHR : le SHR de type 1, défini par une IRA sévère et rapidement évo-
lutive (< 15 jours) et dont la médiane de survie spontanée est de 15 jours, et le SHR de type 2, caractérisé par une IRA moins sévère et d’évolution plus lente, dont la médiane de survie spontanée est de 6 mois. ■
Le seul traitement est la transplantation hépatique ; les autres thérapeutiques (épuration
extra-rénale, techniques de shunt portosystémiques pour réduire l’hypertension portale, traitement vasoconstricteur splanchnique par analogues de la vasopressine associé à une expansion volémique par albumine) sont des traitements d’attente. ■
Vasodilatation des artérioles efférentes : inhibiteurs de l’enzyme de conversion et antagonistes
des récepteurs de l’angiotensine par inhibition de la production d’aldostérone vasoconstrictrice ; une IRA se produit en cas de sténose bilatérale des artères rénales, de sténose unilatérale sur rein unique, de déshydratation préalable, d’utilisation concomitante d’anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS). ■
Augmentation de la pression oncotique capillaire : situation rare rencontrée lors de
l’administration de molécules osmotiquement actives (mannitol, macromolécules), et au cours du syndrome d’hyperviscosité du myélome. Les patients âgés sont particulièrement susceptibles à l’IRA fonctionnelle du fait d’une prédisposition à l’hypovolémie (diminution de la sensation de soif, diminution de l’accès à l’eau, traitement diurétique, régime sans sel) et de la fréquence élevée de l’athéromatose de l’artère rénale. L’utilisation de médicaments modifiant l’hémodynamique rénale doit être prudente chez eux.
Lorsqu’elle n’est pas prise en charge, l’IRA fonctionnelle évolue en IRA organique par nécrose tubulaire aiguë ischémique.
149
ITEM 252
B. Causes de l’IRA postrénale
ITEM 216
L’IRA est liée à une obstruction du système collecteur à n’importe quel niveau (bassinet, uretère, vessie, urètre), par : ■
une lithiase ;
■
un caillotage lors d’une hématurie ;
■
une tumeur : hypertrophie bénigne et cancer prostatique, cancer des voies uri-
naires, cancer colique, cancer génital chez la femme, adénopathies rétropéritonéales compressives ; ■
une fibrose rétropéritonéale, idiopathique ou secondaire : médicaments (dérivés
de l’ergot de seigle, bêtabloquant), néoplasie (carcinome colique, rectal, gastrique, mammaire, prostatique, tumeur carcinoïde du grêle), inflammation (anévrisme inflammatoire de l’aorte abdominale, colopathie inflammatoire), traumatisme rétropéritonéal, radiothérapie, infection (tuberculose, actinomycose, histoplasmose), maladie systémique (maladie de Wegener, polyarthrite rhumatoïde) ; ■
une nécrose papillaire : pyélonéphrite chez un diabétique, drépanocytose ;
■
une bilharziose ou une tuberculose des voies urinaires.
C. Causes de l’IRA intrarénale 1. Nécrose tubulaire aiguë Elle est le plus souvent ischémique mais peut être toxique : ■
ischémie : secondaire à une IRA fonctionnelle prolongée. Le flux sanguin rénal
représente 25 % du débit cardiaque et est principalement dirigé vers le cortex afin de préserver la filtration glomérulaire. Une baisse du flux sanguin rénal expose fortement la médullaire rénale à l’hypoxie ; ■
précipitation tubulaire de cristaux insolubles : – médicaments : produits de contraste, méthotrexate, aciclovir, sulfamides, indinavir, triamtérène ; – acide urique : syndrome de lyse tumorale ; – oxalate de calcium : intoxication à l’éthylène glycol ;
■
précipitation tubulaire de chaînes légères d’immunoglobulines : myélome ;
Insuffisance rénale au cours du myélome* ■
*Concours Internat 1997, ECN 2004
Prérénale, par déshydratation fréquente au cours du myélome : vomissements lors d’une
hypercalcémie, tubulopathie avec perte de sel (dont le syndrome de Toni-Debré-Fanconi), insuffisance surrénalienne par infiltration amyloïde des surrénales, syndrome d’hyperviscosité responsable d’une augmentation significative de la pression oncotique. ■
Rénale, essentiellement par : précipitation intratubulaire de cylindres myélomateux, composés
de chaînes légères d’immunoglobulines (kappa ou lambda) et de la protéine tubulaire de TammHorsfall, les conditions favorisantes étant l’hypovolémie, un pH urinaire acide, une hypercalciurie, l’injection de produits de contraste iodés ; plus rarement par : dépôt sur les membranes basales glomérulaires et tubulaires de chaînes légères et/ou de chaînes lourdes (maladie de Randall), amylose AL caractérisée par le dépôt glomérulaire extracellulaire d’agrégats de protéines insolubles organisés en feuillets δ-plissés, cryoglobulinémie de type II responsable d’une glomérulonéphrite membranoproliférative, syndrome de lyse tumorale.
150
Insuffisance rénale aiguë – Anurie
■
Postrénale : rares lithiases calciques.
■
La prévention et le traitement reposent sur la correction de toute hypovolémie, l’éviction des
médicaments néphrotoxiques, l’alcalinisation des urines et l’éviction des produits de contraste iodés en cas d’excrétion d’une protéinurie de Bence-Jones (protéine composée de monomères et de dimères de chaînes légères précipitant à 56 °C et se redissolvant à ébullition), la correction de l’hypercalcémie, l’épuration extra-rénale transitoire ou définitive, la prévention du syndrome de lyse tumorale. La dysfonction rénale n’altère pas la survie au cours du myélome.
■
précipitation tubulaire de pigments : – rhabdomyolyse : précipitation de myoglobine ; – hémolyse intravasculaire : précipitation d’hémoglobine ;
■
médicaments néphrotoxiques par lésions tubulaires directes : aminosides,
produits de contraste, amphotéricine B, méthotrexate, cisplatine, foscarnet, pentamidine, métaux lourds, immunoglobulines intraveineuses, inhibiteurs de la protéase du VIH ; ■
coagulation intravasculaire disséminée.
L’évolution habituelle de l’IRA par nécrose tubulaire, lorsque la cause a été traitée, est celle d’une reprise progressive de la fonction rénale après un délai de 1 à 3 semaines nécessaire à la restitution ad integrum de l’épithélium tubulaire. La créatininémie diminue alors progressivement pour revenir à sa valeur normale en 4 à 6 semaines. La phase de reprise de diurèse est souvent polyurique.
2. Néphropathie interstitielle aiguë ■ Immunoallergique : pénicilline, céphalosporine, allopurinol, anti-inflammatoires non stéroïdiens, sulfamides, diurétiques, rifampicine, ciprofloxacine, cimétidine, tétracycline, phénytoïne. ■
Infectieuse : pyélonéphrite bilatérale ou unilatérale sur rein unique, septicémie
avec greffe rénale, leptospirose, légionellose, infection à mycoplasme, brucellose, fièvre hémorragique (virus Hantaan), CMV, EBV. ■
Infiltrative : hémopathie, maladie de système.
3. Néphropathie glomérulaire aiguë ITEM 264 Les étiologies sont nombreuses. L’IRA au cours des glomérulopathies est surtout le fait des proliférations endocapillaires ou des dépôts endomembraneux (responsables d’un syndrome néphritique) et des proliférations extracapillaires (responsables d’un syndrome de glomérulonéphrite rapidement progressive). Les autres atteintes glomérulaires (à l’origine d’un syndrome néphrotique) sont plus rarement associées à une IRA (le syndrome néphrotique est alors dit impur).
a) Syndrome néphrotique impur Il associe un syndrome néphrotique (protéinurie > 3 g/24 h, hypoalbuminémie < 30 g/L, hypoprotidémie < 60 g/L) et un élément clinique définissant le caractère impur et pouvant être une IRA (mais aussi une HTA, une hématurie). Il est lié à des glomérulonéphrites non prolifératives : 151
ITEM 252
■
néphropathie à lésions glomérulaires minimes, le plus souvent primitive, rare-
ment secondaire à un contexte atopique, la maladie de Hodgkin, les AINS ; sa présentation classique est le syndrome néphrotique pur sans insuffisance rénale ; ■
hyalinose segmentaire et focale (HSF), le plus souvent primitive, rarement sec-
ondaire : VIH, héroïnomanie ; ■
glomérulonéphrite extramembraneuse (GEM), le plus souvent primitive, parfois
secondaire : néoplasie (poumon, côlon, sein, lymphome), infection (HBV, syphilis, filhariose, bilharzioze), inflammation (lupus), toxique (sels d’or, D-pénicillamine, captopril, lithium) ; ■ *ECN 2004
amylose rénale immunoglobulinique AL ou AA des maladies inflammatoires ou
infectieuses* ; ■
néphropathie diabétique ;
■
maladie de Berger (dépots mésengiaux d’IgA).
b) Syndrome néphritique Il est caractérisé par un début brutal, une IRA, une hypertension artérielle, des œdèmes périphériques, parfois un œdème pulmonaire hydrostatique et un œdème cérébral, et une protéinurie parfois néphrotique. Il est lié à des glomérulonéphrites avec prolifération endocapillaire : ■
glomérulonéphrite membranoproliférative primitive ou secondaire à une infec-
tion (HCV, endocardite bactérienne), une maladie systémique (lupus), une hémopathie (lymphome, leucémie lymphoïde chronique) ; ■
glomérulonéphrite aiguë postinfectieuse, le plus souvent post-infection ORL à
streptocoque β-hémolytique ; ■
lupus érythémateux systémique et autres connectivites ;
■
cryoglobulinémie mixte essentielle.
c) Syndrome de glomérulonéphrite rapidement progressif Il associe une hématurie macroscopique, l’absence habituelle d’hypertension artérielle, une insuffisance rénale d’aggravation rapide. C’est une urgence médicale, une indication impérative à la ponction-biopsie rénale (PBR), à la recherche d’une prolifération extracapillaire réalisant des croissants cellulaires. L’analyse en immunofluorescence oriente le diagnostic et permet de diagnostiquer : ■
le type I : glomérulonéphrite à dépôt linéaire d’immunoglobulines IgG (Ac anti-
membrane basale glomérulaire) ou syndrome de Goodpasture (syndrome pneumorénal associant une hémorragie intra-alvéolaire et une IRA) ; ■
le type II : dépôt granuleux d’immunoglobulines (IgG et C3), qui peut compliquer
une glomérulonéphrite postinfectieuse, lupique, un purpura rhumatoïde, une cryoglobulinémie, une glomérulonéphrite primitive (GEM, GMP, néphropathie à dépots mésangiaux d’IgA) ; ■
le type III (glomérulonéphrite pauci-immune) : – granulomatose de Wegener : atteinte des voies aériennes supérieures (sinusite, ulcérations de la muqueuse nasale, trachéite), pulmonaire (nodules excavés, infiltrats, hémoptysies). Présence de c-ANCA anti-PR3 (fluorescence cytoplasmique) ; – polyangéite microscopique : hémoptysies, IRA. Présence de p-ANCA anti-MPO (fluorescence périnucléaire).
152
Insuffisance rénale aiguë – Anurie
Insuffisance rénale aiguë et VIH ■
Néphropathie du VIH ou HIVAN (HIV-associated nephropathy) : maladie rénale progressive
du glomérule et du tissu tubulo-interstitiel affectant principalement les sujets masculins de race noire au stade Sida ; évolution en quelques semaines ou quelques mois vers l’insuffisance rénale terminale. La protéinurie est parfois néphrotique. L’échographie montre des reins d’échogénicité normale et de grande taille. La PBR confirme le diagnostic en montrant une forme sévère de hyalinose segmentaire et focale. Le traitement repose sur les IEC, les associations d’antirétroviraux et les corticoïdes. ■
Microangiopathie thrombotique : un syndrome hémolytique et urémique (SHU) peut survenir
chez des sujets profondément immunodéprimés, souvent associé à une infection à cytomégalovirus. ■
IRA médicamenteuse : nécrose tubulaire aiguë par toxicité tubulaire (aminosides, pent-
amidine, ténofovir ou aciclovir) ou cristallurie (sulfanomides, indinavir, aciclovir en bolus et ciclosporine), néphrite interstitielle (triméthoprime-sulfaméthoxazole). L’indinavir précipite dans les urines alcalines et la symptomatologie fonctionnelle de la cristallurie induite par l’indanavir est bruyante, à type d’obstacle urinaire.
4. Néphropathie vasculaire aiguë* Elle est liée à une atteinte des vaisseaux de gros calibre ou de moyen et petit
*Concours Internat 1995
calibre : ■
atteinte des vaisseaux de gros calibre : – thromboses et embolies des artères rénales (lombalgies, fièvre, HTA, hématurie) : embolies cruoriques, embolies de cholestérol, thrombose d’un anévrisme de l’aorte étendue aux artères rénales, dissection aortique étendue aux artères rénales ; – thrombose des veines rénales (lombalgies, gros rein douloureux, hématurie) : syndrome néphrotique, thrombophilie, glomérulonéphrite extramembraneuse, déshydratation aiguë du nourrisson ;
■
atteinte des vaisseaux de moyen et petit calibre : – microangiopathie thrombotique ; – crise aiguë sclérodermique ; – vascularite : PAN, Wegener.
Microangiopathies thrombotiques ■
Syndrome associant une anémie hémolytique mécanique, une thrombopénie périphérique et,
selon le tableau clinique, une insuffisance rénale et/ou des manifestations neurologiques. ■
On distingue essentiellement le purpura thrombotique thrombocytopénique (PTT) ou maladie
de Moschowitz, caractérisé par les manifestations neurologiques, et le syndrome hémolytique et urémique (SHU), caractérisé par l’insuffisance rénale. ■
L’éclampsie
ITEM 218
, le HELLP syndrome, l’hypertension artérielle maligne, la CIVD, le syn-
drome catastrophique des antiphospholipides, la thrombopénie immunoallergique à l’héparine, la maladie veino-occlusive sont également des microangiopathies thrombotiques. ■
Histologiquement, cette maladie est caractérisée par la formation de microthrombi pla-
quettaires au niveau des artérioles terminales et des capillaires, pouvant aboutir à une défaillance multiviscérale.
▲ 153
ITEM 252
▲ ■
Les physiopathologies du PTT et du SHU sont en fait distinctes : le PTT est associé à un déficit
en protéase du facteur Willebrand (ADAMTS 13), une protéine qui régule la taille du facteur Willebrand. Ce déficit est constitutionnel ou acquis (anticorps anti-ADAMTS 13). La physiopathologie du SHU est moins bien comprise : on distingue le SHU postdiarrhéique (E. coli 0157:H7, notamment) surtout chez l’enfant, lié à une shiga-toxine et le SHU dit atypique, associé à un déficit en une protéine régulatrice du complément, le facteur H, facteur I… ■
Les causes ou les facteurs déclenchants sont : les infections virales (VIH, CMV), bactériennes
(shigelle, E. coli, Yersinia, pneumocoque, légionelle, Listeria, Mycobacterium tuberculosis), les médicaments (ticlodipine, clopidogrel, cyclosporine A, tacrolimus, œstroprogestatifs, cisplatine, mitomycine C, bléomycine, gemcitabine), les causes néoplasiques (estomac, sein, poumon, prostate, pancréas, hémopathies), les maladies systémiques, les transplantations d’organe, les vaccinations, la grossesse. ■
Le traitement repose sur la perfusion de fortes doses de plasma viro-inactivé (qui apporte de
l’ADAMTS 13 dans le PTT) ou la réalisation d’échanges plasmatiques avec de fortes doses de plasma viro-inactivé (qui apporte de l’ADAMTS 13 et épurerait en anticorps anti-ADAMTS 13 dans le PTT).
III. DIAGNOSTIC A. Diagnostic de l’insuffisance rénale 1. Anurie ou oligurie ■ Anurie : diurèse < 100 mL/24 h. ■
Oligurie : diurèse < 400 mL/24 h.
■
La diurèse peut cependant être normale (insuffisance rénale aiguë à diurèse
conservée).
2. Syndrome biologique d’insuffisance rénale ■ La réduction du débit de filtration glomérulaire est quantifiée indirectement par : – une réduction de la clairance de la créatinine > 50 % par rapport à la valeur initiale ; – ou une augmentation de la créatinine plasmatique > 50 μmol/L par rapport à la valeur initiale. ■
La clairance de la créatinine (Clcréat) peut être mesurée par la formule : Clcréat
= Ucréat × V/Pcréat, où : – Ucréat = créatinine urinaire ; – Pcréat = créatinine plasmatique ; – V = volume urinaire des 24 heures. – le DFG est un peu surestimé du fait d’une faible sécrétion tubulaire distale de créatinine. ■
La clairance de la créatinine peut être estimée par la formule de Cockroft et Gault : – Clcréat (mL/min) = [(140 – âge en années) × poids (kg) × a]/Pcréat ; – a = 1,05 chez la femme et 1,25 chez l’homme.
■
Il existe une relation hyperbolique entre le DFG et la créatininémie. Ainsi une
réduction importante du DFG n’induit au départ qu’une augmentation faible de la créatininémie du fait de la diffusion de la créatinine dans son volume de distribution et d’une élimination intestinale de la créatinine. L’installation d’une IRA peut être reconnue à ce stade par la diminution du débit urinaire (sauf insuffisance rénale aiguë à diurèse conservée). 154
Insuffisance rénale aiguë – Anurie
Tableau 252-1. Critères en faveur du caractère aigu d’une insuffisance rénale – Chiffres antérieurs de créatinine normaux. – Reins de taille normale (sauf insuffisance rénale chronique à « gros reins »). – Absence d’anémie (sauf hémorragie et hémolyse). – Absence d’hypocalcémie (sauf rhabdomyolyse, pancréatite aiguë, intoxication à l’éthylène glycol). – Absence d’ostéodystrophie rénale. – Réversibilité de l’atteinte rénale.
3. Diagnostic du caractère aigu de cette insuffisance rénale ■ Les critères permettant d’affirmer le caractère aigu et non chronique de l’insuffisance rénale (tableau 252-1) sont : – une fonction rénale normale auparavant : critère majeur ; – des reins de taille normale, sauf insuffisance rénale chronique à « gros reins » (diabète, amylose, VIH, polykystose rénale, myélome, infiltration lymphomateuse) : critère majeur ; – l’absence d’anémie (sauf hémolyse ou choc hémorragique) ; – l’absence d’hypocalcémie (sauf rhabdomyolyse, pancréatite aiguë, intoxication à l’éthylène glycol) ; – l’absence d’ostéodystrophie rénale. ■
La réversibilité de l’atteinte rénale est un caractère rétrospectif majeur.
■
Enfin, toute insuffisance rénale chronique peut être aggravée par un facteur de
décompensation prérénal, rénal ou postrénal.
4. Diagnostic du caractère fonctionnel de l’IRA ■ Des indices urinaires sont proposés pour distinguer une IRA prérénale d’une IRA rénale (et en particulier de la NTA). Ces critères ont pour justification la conservation dans l’IRA fonctionnelle des fonctions tubulaires (réabsorption du sodium, concentration des urines), ce qui se traduit par une natriurèse basse et des rapports urinaires/plasmatiques (U/P) élevés pour l’osmolalité, l’urée et la créatinine. Parmi ces indices, la fraction excrétée du sodium (FENA) est le plus discriminatif. Il s’agit du rapport de la clairance du sodium sur la clairance de la créatinine, ce qui permet de corriger la concentration de sodium urinaire pour la réabsorption d’eau et la fonction rénale résiduelle : – FENA = (UNA × Pcréat)/(PNA × Ucréat) ; – UNA et Ucréat = concentrations urinaires en sodium et en créatinine ; – PNA et Pcréat = concentrations plasmatiques en sodium et en créatinine. ■
Ces critères (tableau 252-2) doivent être utilisés avec précaution. Il existe des situa-
tions d’interprétation difficile, par exemple : – dans les IRA fonctionnelles par perte urinaire de sel (traitement diurétique, hypoaldostéronisme), la natriurèse persiste ; – dans certaines glomérulonéphrites (rapidement progressives notamment) ou néphropathies interstitielles, la fonction tubulaire est normale au début, le profil urinaire étant alors celui d’une IRA fonctionnelle. 155
ITEM 252
Tableau 252-2. Critères permettant de distinguer IRA fonctionnelle et IRA par NTA Insuffisance rénale aiguë fonctionnelle
Insuffisance rénale aiguë par NTA
Osmolarité urinaire
> 500 mOsmol/L
< 350 mOsmol/L
Na urinaire
< 20 mmol/L
> 40 mmol/L
FeNa
1à2%
Na/K urinaire
1
U/P urée
>8
entre 3 et 8
U/P créatinine
> 40
< 20
U/P osmolaire
> 1,5
< 1,2
Urée/Créatinine plasmatique
> 100
50
Sédiment urinaire
Normal
Cylindres granuleux
B. Diagnostic de la cause de l’IRA 1. Examen clinique ■ L’anamnèse doit notamment préciser : – les conditions prédisposantes (HTA, diabète) ; – l’ensemble des traitements ; – l’éventuelle injection d’iode ; – les épisodes d’hypotension artérielle. ■
L’examen clinique doit notamment préciser la diurèse et rechercher : – des signes urologiques (examen lombo-abdomino-pelvien) ; – des signes de déshydratation extracellulaire ; – des signes d’insuffisance cardiaque ; – des signes d’insuffisance hépatocellulaire ; – une hypertension artérielle ; – des signes d’artériopathie ; – des signes extrarénaux (cutanés, articulaires, neurologiques, otorhinolaryngologiques, pulmonaires), évocateurs d’une pathologie systémique ; – des signes évocateurs d’une maladie des emboles de cholestérol.
■
La bandelette urinaire recherche une hématurie, une albuminurie, une leucocyturie.
2. Bilan biologique ■ Sanguin : – ionogramme sanguin, urée et créatinine plasmatique, calcémie, phosphorémie, uricémie, CPK ; – protidémie, albuminémie, électrophorèse des protéines plasmatiques ; – gaz du sang et lactates artériels ; – numération-formule sanguine ; – selon le contexte : • bilan d’hémolyse : LDH, bilirubines, haptoglobine, schizocytes ; • bilan immunologique : anticorps antinucléaires (FAN), anticorps anticytoplasme des polynucléaires (ANCA) et anticorps antimembrane basale glomérulaire (Ac anti-MBG), complément (C3, C4, CH50), anticorps antistreptolysine (ASLO), cryoglobulinémie. 156
Insuffisance rénale aiguë – Anurie
■
Urinaire : – ionogramme urinaire et protéinurie (sur échantillon et sur 24 h)
ITEM 328
;
– examen cytobactériologique des urines ; – recherche d’une éosinophilurie : néphrite interstitielle aiguë immunoallergique mais aussi embolies de cholestérol, pyélonéphrite bactérienne ; – recherche de cylindres : • érythrocytaires : glomérulonéphrite aiguë ou rapidement progressive ; • granuleux : nécrose tubulaire aiguë ; • leucocytaires : néphrite interstitielle aiguë (dont la pyélonéphrite) ; – analyse cristallurique parfois : cristaux d’acide urique, d’oxalate ou de phosphate de calcium, médicamenteux.
3. Bilan radiologique ■ Abdomen sans préparation : contour et taille des reins (normale = 11 à 13 cm, soit 3 vertèbres et demi), recherche d’une lithiase radio-opaque, recherche de calcifications vasculaires (athéromatose). ■
Échographie rénale : taille des reins, échogénicité, différenciation corticomédul-
laire, dilatation des cavités pyélocalicielles, globe vésical, cône d’ombre postérieur d’une lithiase, adénopathies rétropéritonéales. ■
Selon le contexte : – écho-Doppler des artères rénales, angio-IRM des artères rénales : recherche d’une sténose artérielle ; – scanner rénal non injecté : apporte une information plus précise que l’échographie sur l’origine d’un obstacle.
4. Fond d’œil Rétinopathie diabétique ou hypertensive (permet de déterminer le caractère éventuellement chronique de l’insuffisance rénale, de rechercher des signes d’HTA maligne), cristaux de cholestérol.
5. Ponction-biopsie rénale ■ Elle doit être pratiquée chaque fois que le tableau clinicobiologique diffère d’une IRA fonctionnelle, d’une NTA, d’une insuffisance rénale obstructive ou que le diagnostic de NTA est fait mais que l’on n’observe pas de récupération de la fonction rénale 4 à 5 semaines après l’apparition de l’insuffisance rénale aiguë. ■
Parmi les signes incitant à la ponction-biopsie rénale, on retient particulière-
ment : – la présence de signes extrarénaux orientant vers une pathologie systémique ; – la présence d’anomalies biologiques orientant vers une glomérulonéphrite (protéinurie et/ou hématurie) ou une néphropathie interstitielle (éosinophilie sanguine ou urinaire) ; – une microangiopathie (hémolyse intravasculaire, schizocytose) ou une maladie des emboles de cholestérol, bien que dans ces deux dernières situations la biopsie rénale ne soit pas systématique, le diagnostic étant alors fait sur un faisceau d’arguments. 157
ITEM 252
Indications de la ponction-biopsie rénale (PBR)* *ECN 2004
■
Pas de cause évidente à une IRA fonctionnelle, une nécrose tubulaire aiguë, une obstruction.
■
Symptômes extrarénaux orientant vers une pathologie systémique.
■
Anomalies biologiques évoquant une glomérulonéphrite (protéinurie > 1 g/24 h, hématurie).
■
Anomalies biologiques (éosinophilie, éosinophilurie) ou médicament orientant vers une néphropathie immunoallergique.
■
Suspicion de maladie des emboles de cholestérol*.
■
Suspicion de microangiopathie thrombotique*.
■
Oligurie ou anurie persistant au-delà de la 4e semaine.
* Dans ces situations la PBR n’est pas systématique.
■
Les contre-indications habituelles de la ponction-biopsie rénale percutanée sont : – les troubles de l’hémostase non corrigés ; – l’hypertension artérielle non contrôlée ; – la dilatation des cavités pyélocalicielles ; – l’infection urinaire ; – la tumeur rénale ; – le rein unique (fonctionnel ou anatomique) ou malformatif (en fer à cheval) ; – la mauvaise visualisation échographique.
■
Les complications de la ponction-biopsie rénale sont : – l’hématurie macroscopique et l’obstruction rénale par caillotage ; – l’hématome périrénal ou sous-capsulaire rénal ; – la plaie de la voie excrétrice ; – la plaie splénique, hépatique ou digestive ; – la fistule artérioveineuse ; – l’abcès du rein.
■
La présence de troubles de la coagulation peut justifier la réalisation d’une
ponction-biopsie rénale par voie transjugulaire : en cas d’hémorragie, la spoliation sanguine y est limitée (hémorragie intraveineuse et hémostase mécanique par la graisse périrénale).
IV. PRISE EN CHARGE Elle consiste essentiellement en : ■
la recherche de signes de gravité justifiant une épuration extra-rénale (EER)
urgente ; ■
l’appréciation des conséquences cliniques et biologiques de l’IRA ;
■
la recherche d’un obstacle et d’une hypovolémie ;
■
le traitement de la cause.
A. Recherche de signes de gravité Ces signes doivent faire discuter une admission en unité de soins intensifs et la réalisation urgente d’une EER.
158
Insuffisance rénale aiguë – Anurie
1. Hyperkaliémie ITEM 219 ■ Liée à la baisse de la sécrétion tubulaire du potassium, à l’acidose métabolique, à l’hypercatabolisme cellulaire. ■
Fréquente dans les formes anuriques et en cas de lyse cellulaire (lyse tumorale,
hémolyse, rhabdomyolyse), où son aggravation est souvent rapide. ■
Favorisée par la prise de certains médicaments : antialdostérone, IEC, antago-
niste des récepteurs de l’angiotensine, AINS, trimétoprime-sulfamétoxazole. ■
On parle d’hyperkaliémie menaçante lorsqu’elle est associée à des signes électro-
cardiographiques : ondes T amples, pointues et symétriques, troubles de la conduction. Le traitement de l’hyperkaliémie doit alors être immédiatement débuté, relayé par la réalisation d’une EER. ■
Il existe de rares hypokaliémies en cas de pertes digestives.
2. Acidose métabolique ■ Liée à l’accumulation de sulfates et de phosphates (responsable d’un trou anionique) et, en cas d’acidose tubulaire, à la diminution de l’acidurie. ■
Généralement modérée, elle peut être importante en cas de : – acidose lactique associée (état de choc) ; – céto-acidose associée (céto-acidose diabétique) ; – perte digestive de bicarbonate (diarrhée aiguë) ; – acidose oxalique associée (intoxication à l’éthylène glycol).
■
Les risques de l’acidose métabolique sont essentiellement liés à l’hyperkaliémie.
L’acidose métabolique a également comme conséquences propres une diminution de la contractilité myocardique, un effet arythmogène, le risque d’épuisement respiratoire par hyperventilation compensatrice. ■
Le traitement par bicarbonate de sodium n’est justifié qu’en cas d’hyperkaliémie
menaçante, de perte de bicarbonate (diarrhée), d’intoxication par molécule à effet stabilisant de membrane
ITEM 214
et est souvent suivi de la réalisation rapide
d’une épuration extra-rénale. ■
L’alcalose métabolique est possible en cas de vomissements abondants.
3. Œdème pulmonaire hydrostatique Le traitement fait appel aux diurétiques de l’anse lorsqu’il existe une diurèse, aux dérivés nitrés, et à l’épuration extra-rénale avec ultrafiltration.
B. Appréciation des conséquences cliniques et biologiques de l’IRA Elles font discuter la réalisation rapide d’une EER : ■
symptômes urémiques : – anorexie, nausées, vomissements ; – encéphalopathie ; – syndrome hémorragique (hémorragies digestives, notamment) ;
■
troubles métaboliques : – hyponatrémie : le plus souvent liée aux apports en eau ; – hyperuricémie : généralement asymptomatique (sauf syndrome de lyse tumorale) ;
159
ITEM 252
– hyperphosphorémie : surtout en cas de lyse tumorale ; – hypocalcémie : rapidement en cas de pancréatite aiguë, de rhabdomyolyse, d’intoxication à l’éthylène glycol, et après quelques jours dans les autres cas.
C. Rechercher une obstruction susceptible d’être levée en urgence par la réalisation d’une échographie rénale ITEM 216 ■
L’obstruction peut-être asymptomatique ou accompagnée de signes urologiques
évocateurs : lombalgies, dysurie, pollakiurie, cystalgie, hématurie macroscopique. ■
L’échographie rénale est l’examen essentiel : dilatation des cavités pyélocalicielles.
■
En cas d’obstruction très aiguë, de fibrose rétropéritonéale, de blindage pelvien,
la dilatation des cavités pyélocalicielles peut manquer. ■
Le traitement repose sur : – le sondage urinaire par sonde vésicale ou cathéter sus-pubien en cas d’obstacle vésical ou sous-vésical ; – le sondage par néphrostomie percutanée, sonde urétérale, sonde double-J en cas d’obstacle urétéral.
■
Le drainage peut être suivi d’un syndrome de levée d’obstacle (polyurie et natri-
urèse massive), qu’il faut dépister et traiter (compensation des pertes urinaires par un soluté adapté, en général : sérum physiologique supplémenté en potassium).
D. Rechercher des arguments pour une hypovolémie Sa présence motive la réalisation d’une expansion volémique : ■
au cours de l’IRA, quelle que soit sa cause, la volémie doit être appréciée et
toute hypovolémie doit être corrigée de façon à prévenir la constitution de lésions tubulaires supplémentaires ; ■
cette expansion volémique est le plus souvent réalisée par la perfusion de sérum
physiologique et/ou transfusion sanguine en cas d’hémorragie ■
ITEM 200
;
une hypovolémie est probable en cas de signes cliniques de déshydrata-
tion extracellulaire (soif, perte de poids, tachycardie, hypotension artérielle, pli cutané), de signes biologiques d’hémoconcentration.
E. Réaliser une nutrition satisfaisante ■
La diminution des apports protidiques dans le but de réduire la cinétique d’aug-
mentation de l’urée a un temps été proposée. ■
Cette pratique est aujourd’hui proscrite car un hypercatabolisme est souvent
associé à l’IRA. ■
Les apports protidiques doivent être maintenus et ne pas être inférieurs à
1 g/kg/24 h. ■
Le traitement d’une cinétique rapide d’augmentation de l’urée repose sur le rap-
prochement des séances de dialyse.
F. Prévenir l’ulcère de stress ■
Il existe un lien entre le degré d’IRA et le risque ulcéreux.
■
La prévention passe avant tout par la mise en route d’une alimentation entérale
dès que possible, pouvant être associée à un traitement antisécrétoire, ce d’autant qu’il existe d’autres facteurs de risque (intubation, coagulopathie, choc, coma, antécédents d’ulcère gastroduodénal, usage de corticoïdes ou d’AINS). 160
Insuffisance rénale aiguë – Anurie
G. Adapter les traitements médicamenteux ■
La posologie des médicaments à élimination rénale doit être adaptée.
■
Les médicaments néphrotoxiques doivent être évités.
H. Réaliser une EER L’épuration extra-rénale est le traitement symptomatique essentiel de l’IRA sévère.
1. Objectifs ■ Réduction des symptômes d’urémie. ■
Contrôle de la kaliémie.
■
Contrôle des troubles hydroélectrolytiques et acido-basiques.
■
Contrôle de l’équilibre phosphocalcique.
■
Maintien d’un état nutritionnel en permettant de respecter les besoins calo-
riques et protidiques.
2. Indications ■
Épuration extra-rénale urgente : – hyperkaliémie menaçante ; – acidose métabolique sévère ; – œdème pulmonaire hydrostatique ; – certaines intoxications : éthylène glycol, lithium.
■
Épuration extra-rénale rapide : – urée ≥ 35 mmol/L ; – signes d’urémie sévère.
3. Modalités ■ Dialyse conventionnelle : l’épuration extra-rénale se fait selon le principe de diffusion (c’est-à-dire selon un gradient de concentration entre le sang et le liquide de dialyse), au cours d’une séance de 4 à 6 heures répétée tous les jours ou tous les 2 jours tant que l’insuffisance rénale persiste. ■
Hémofiltration continue : l’épuration extra-rénale se fait selon le principe de
convection (c’est-à-dire selon un gradient de pression entre le sang et le liquide d’ultrafiltration), au cours d’une période continue se prolongeant tant que l’insuffisance rénale persiste. ■
Plus rarement, dialyse péritonéale.
Le principal avantage allégué de l’hémofiltration continue par rapport à la dialyse conventionnelle est sa meilleure tolérance hémodynamique, avantage pouvant être utile au cours de la prise en charge d’une IRA associée à un état de choc ; le choix de l’une ou l’autre des techniques reste une affaire de spécialiste.
I. Ne pas tenter de restituer une diurèse par un traitement diurétique ■
L’IRA à diurèse spontanément conservée présente un meilleur pronostic que
l’IRA anurique. ■
La restitution d’une diurèse par un traitement diurétique faciliterait la prise en
charge nutritionnelle du patient chez qui les apports énergétiques ne déséquilibrent pas le bilan entrées/sorties. 161
ITEM 252
■
Cependant, cette pratique n’a pas montré d’amélioration du pronostic dans
l’IRA. Surtout, le risque d’hypovolémie (et donc de retard à la reprise de la fonction rénale) lié au traitement diurétique doit la faire abandonner.
J. Ne pas traiter par dopamine à dose dopaminergique La dopamine à doses dites dopaminergiques (2 à 3 μg/kg/min) a été proposée par son effet sur les récepteurs dopaminergiques rénaux. Ce traitement, s’il entraîne une diurèse, n’améliore pas la fonction rénale, ni le pronostic vital : il est aujourd’hui proscrit.
K. Traiter la cause Certaines mesures spécifiques doivent être connues car leur application en urgence favorise la récupération de la fonction rénale. Parmi ces mesures, citons : ■
traitement hémodynamique d’un état de choc : une pression artérielle moyenne
de 60 mmHg (ou plus chez le patient hypertendu) est nécessaire à la perfusion rénale ; cet objectif doit être rapidement atteint en cas d’hypotension artérielle, par expansion volémique si hypovolémie et/ou traitement vasopresseur et/ou inotrope positif dans les états de choc ■
ITEM 200
;
éradication du foyer infectieux s’il est encore évolutif dans la glomérulonéphrite
postinfectieuse ; ■
corticoïdes, cyclophosphamide et échanges plasmatiques dans le syndrome de
Goodpasture ; ■
corticoïdes et cyclophosphamide dans la granulomatose de Wegener, la polyan-
géite microscopique, le lupus érythémateux systémique ; ■
perfusion de plasma frais congelé ou échanges plasmatiques dans la micro-
angiopathie thrombotique.
L. Prévention de l’IRA La prévention de la NTA passe par le maintien d’une volémie satisfaisante chez les patients à risque (sujets âgés, hypertendus, diabétiques, athéromateux, insuffisants rénaux chroniques) soumis à une chirurgie à risque (chirurgie cardiaque et aortique, notamment).
CONSENSUS Protection rénale péri-opératoire SFAR, 2004 ■
Une augmentation même modérée de la créatininémie postopératoire augmente significative-
ment la morbidité et la mortalité postopératoires. ■
Les facteurs prédictifs d’IRA postopératoire sont : l’insuffisance rénale chronique, l’âge
> 75 ans, le diabète, le régime sans sel, les diurétiques, les troubles digestifs, la fièvre, un jeûne préopératoire prolongé, l’insuffisance cardiaque, l’insuffisance hépatique. ■
Les molécules favorisant l’IRA postopératoire sont : les AINS, les aminosides (administrés de
façon prolongée), les produits de contraste iodés (dont l’administration doit être encadrée par des apports hydrosodés, l’intérêt de la protection rénale par N-acétylcystéine restant controversé), les IEC et les ARA II (qui doivent être interrompus transitoirement 48 h avant une intervention chirurgicale à risque).
162
Insuffisance rénale aiguë – Anurie
■
L’angiographie par voie aortique chez des patients âgés et souffrant d’athérosclérose expose
à un risque d’embolies rénales de cristaux de cholestérol menaçant le pronostic vital. ■
L’innocuité des solutés de remplissage type HEA de dernière génération n’a pas été affirmée.
■
Pour les patients à risque opérés d’une chirurgie exposant à l’IRA, la mesure invasive de la
pression artérielle est recommandée. La PAM doit être maintenue ≥ 70 mmHg. ■
La correction de l’hypovolémie relative inhérente aux techniques d’anesthésie générale ou
rachidienne est un prérequis obligatoire. ■
La normalisation glycémique en réanimation permet de diminuer l’incidence de l’IRA.
■
La noradrénaline ne peut être recommandée à titre systématique, en dehors des états de
choc. ■
La dopamine à faible dose, l’utilisation des diurétiques de l’anse, le mannitol, le facteur
atrial natriurétique, les antagonistes du thromboxane, de l’adénosine et des endothélines, les inhibiteurs calciques, les antagonistes du facteur d’activation plaquettaire, les scavengers des radicaux libres de l’oxygène, la N-acétylcystéine ne doivent pas être utilisés pour la protection rénale. ■
Concernant l’épuration extra-rénale, il existe un consensus pour affirmer que l’hémofiltration
continue est mieux tolérée par les patients dont l’hémodynamique est instable.
■
La prévention de la tubulopathie à l’iode a fait l’objet de recommandations
récentes.
CONSENSUS Prévention de l’IRA induite par les produits de contraste iodés SFR, CIRTACI, 2004 ■
L’IRA liée aux produits de contrastes iodés (PCI) est un événement rare en l’absence de fac-
teurs de risque mais concerne 20 % des patients présentant les facteurs de risque suivants : – insuffisance rénale préexistante : lorsque la clairance de la créatinine est < 30 mL/min et/ou la créatininémie > 200 μmol/L, l’injection de PCI est récusée en l’absence de nécessité absolue ; – diabète avec insuffisance rénale ; – hypoperfusion rénale (déshydratation, hypotension, hypovolémie, syndrome néphrotique, cirrhose décompensée, hémodynamique précaire, insuffisance cardiaque…) ; – prise de médicaments néphrotoxiques ou modifiant la fonction rénale (diurétiques, AINS, coxib, dérivés du platine…) ; – myélome avec protéinurie ; – injection de PCI dans les 3 jours précédents. ■
Un âge supérieur à 65 ans rend plus probable la présence de facteurs de risque.
■
Chez ces patients : dosage de la créatininémie (si non-disponibilité d’un dosage ≤ 3 mois)
avant l’injection de PCI et 2 à 3 jours après. En l’absence de ces facteurs de risque, le dosage de la créatininémie n’est pas nécessaire. ■
L’arrêt des médicaments néphrotoxiques est souhaitable quand il est possible. La metfor-
mine expose à l’acidose lactique par diminution de sa clairance rénale. Le traitement par les dérivés de la metformine doit être interrompu pour une durée de 48 heures après l’injection de PCI. Le traitement est réintroduit après vérification de l’absence de dégradation de la fonction rénale.
▲ 163
ITEM 252
▲
■
Un intervalle de 3 jours au minimum et si possible de 5 jours doit séparer 2 injections de PCI,
sauf nécessité spécifique. ■
L’hydratation, au mieux à composante salée et bicarbonatée, est recommandée pour tous les
patients : – soit per os : 2 litres d’eau riche en sodium et bicarbonates pendant les 24 heures précédant et suivant l’injection de PCI ; – soit parentérale : 100 mL/h de sérum salé isotonique ou de sérum bicarbonaté isotonique pendant les 12 h précédant et suivant l’injection de PCI. ■
En cas d’insuffisance cardiaque sévère, de cirrhose décompensée, de syndrome néphrotique,
les diurétiques peuvent être conservés pour maintenir la natriurèse, et l’hydratation doit être adaptée à la fonction cardiaque. ■
Le bénéfice de l’administration de N-acétylcystéine en cas de facteurs de risque est contro-
versé. Sa prescription ne dispense en aucun cas de l’hydratation. ■
L’utilisation de chélates de gadolinium en imagerie par rayons X à la place des PCI n’est pas
indiquée, car leur néphrotoxicité n’est pas moindre à pouvoir opacifiant égal, et la qualité de l’examen n’est pas meilleure à néphrotoxicité égale. ■
Chez les patients dialysés, l’injection de PCI est programmée indépendamment des séances
de dialyse, et il n’est pas nécessaire de prévoir une séance de dialyse supplémentaire, sauf indication spécifique en particulier d’ordre volémique et/ou cardiovasculaire.
■
La prescription d’un traitement par IEC ou ARA II doit être prudente chez les
patients âgés et/ou ayant des facteurs de risque cardiovasculaires, pratiquée après avoir recherché un souffle abdominal et une sténose des artères rénales au moindre doute, et suivie d’une surveillance de la fonction rénale.
164
Insuffisance rénale aiguë – Anurie
Fiche
Dernier tour
Insuffisance rénale aiguë L’IRA, baisse brutale de la filtration glomérulaire, est liée à 3 mécanismes : ■ fonctionnel (IRA prérénale), très fréquent, par diminution du flux sanguin rénal ; ■ organique (IRA rénale), par atteinte souvent tubulaire, plus rarement interstitielle, glomérulaire, ou vasculaire ; ■ obstructif (IRA postrénale) par obstruction des voies excrétrices. Le diagnostic associe : ■ un syndrome biologique d’insuffisance rénale : – réduction de la clairance de la créatinine > 50 % par rapport à la valeur initiale ; – ou augmentation de la créatinine plasmatique > 50 μmol/L par rapport à la valeur initiale ; ■ une anurie (diurèse < 100 mL/24 h) ou oligurie (diurèse < 400 mL/24 h), la diurèse pouvant cependant être normale ; ■ des critères permettant d’affirmer le caractère aigu : – chiffres antérieurs de créatinine normaux ; – reins de taille normale (sauf insuffisance rénale chronique à « gros reins ») ; – absence d’anémie (sauf hémorragie et hémolyse) ; – absence d’hypocalcémie (sauf rhabdomyolyse, pancréatite aiguë, intoxication à l’éthylène glycol) ; – absence d’ostéodystrophie rénale ; – réversibilité de l’atteinte rénale ; ■ des indices urinaires permettant de distinguer une IRA prérénale d’une NTA : Insuffisance rénale aiguë fonctionnelle
Insuffisance rénale aiguë par NTA
Osmolarité urinaire
> 500 mOsmol/L
< 350 mOsmol/L
Na urinaire
< 20 mmol/L
> 40 mmol/L
FeNa
1à2%
Na/K urinaire
1
U/P urée
>8
entre 3 et 8
U/P créatinine
> 40
< 20
U/P osmolaire
> 1,5
< 1,2
Urée/Créatinine plasmatique
> 100
50
Sédiment urinaire
Normal
Cylindres granuleux
La prise en charge consiste en : ■ rechercher des signes de gravité devant faire discuter une admission en unité de soins intensifs et la réalisation urgente d’une EER : – hyperkaliémie ; – acidose métabolique ; – œdème pulmonaire hydrostatique ; ■ apprécier les conséquences clinicobiologiques de l’IRA, faisant discuter la réalisation rapide d’une EER : – symptômes urémiques (anorexie, nausées, vomissements, encéphalopathie, syndrome hémorragique) ; – troubles métaboliques (hyponatrémie, hyperuricémie, hyperphosphorémie) ; ■ rechercher une obstruction susceptible d’être levée en urgence : – échographie rénale (dilatation des cavités pyélocalicielles ?) ; – le drainage peut être suivi d’un syndrome de levée d’obstacle (polyurie et natriurèse massive) ;
▲ 165
ITEM 252
Fiche
Dernier tour
rechercher des arguments pour une hypovolémie motivant une expansion volémique : hypotension motivant un traitement par expansion volémique et/ou catécholamines ; ■ réaliser une nutrition satisfaisante ; ■ prévenir l’ulcère de stress ; ■ adapter la posologie des médicaments à élimination rénale ■ éviter les médicaments néphrotoxiques ; ■ réaliser une EER : – motifs d’épuration extra-rénale urgente : • hyperkaliémie ; • acidose métabolique sévère ; • œdème pulmonaire hydrostatique ; • certaines intoxications : éthylène glycol, lithium ; – motifs d’épuration extra-rénale rapide : • urée ≥ 35 mmol/L ; • signes d’urémie sévère ; ■ chercher des arguments cliniques et biologiques motivant la réalisation d’une PBR : – pas de cause évidente à une IRA fonctionnelle, une nécrose tubulaire aiguë, une obstruction ; – symptômes extrarénaux orientant vers une pathologie systémique ; – anomalies biologiques évoquant une glomérulonéphrite (protéinurie > 1 g/24 h, hématurie) ; – anomalies biologiques (éosinophilie, éosinophilurie) ou médicament orientant vers une néphropathie immunoallergique ; – suspicion de maladie des emboles de cholestérol ; – suspicion de microangiopathie thrombotique ; – oligurie ou anurie persistant au-delà de la 4e semaine ; ■ les contre-indications habituelles de la ponction-biopsie rénale percutanée sont : – les troubles de l’hémostase ; – l’hypertension artérielle non contrôlée ; – la dilatation des cavités pyélocalicielles ; – l’infection urinaire ; – la tumeur rénale ; – le rein unique ou malformatif ; ■ on aura toujours à l’esprit la recherche d’arguments pour une microangiopathie thrombotique (hémolyse mécanique) ou une glomérulonéphrite rapidement progressive et notamment une maladie de Wegener et un syndrome de Goodpasture. ■
166
ITEM 91
Infections nosocomiales
Remarque : ce chapitre se focalise sur les infections nosocomiales rencontrées en réanimation.
OBJECTIFS ● Reconnaître le caractère nosocomial d’une infection. ● Savoir appliquer et expliquer les mesures de prévention des infections nosocomiales. LIENS TRANSVERSAUX ITEM 6
Le dossier médical. L’information du malade. Le secret médical.
ITEM 75
Épidémiologie et prévention des maladies transmissibles : méthodes de surveillance.
ITEM 86
Infections broncho-pulmonaires du nourrisson, de l’enfant et de l’adulte.
ITEM 93
Infections urinaires de l’enfant et de l’adulte. Leucocyturie.
ITEM 104
Septicémie.
ITEM 173
Prescription et surveillance des antibiotiques.
CONSENSUS ● Prévention des infections à bactéries multirésistantes en réanimation – Conférence de consensus – SRFL, SFISI, SPILF, 21 novembre 1996 (www.slf.org). ● Risque et maîtrise des infections nosocomiales en réanimation – Texte d’orientation pour la réanimation – SRLF, SFAR, 1er octobre 2004 (www.srlf.org). ● Infections liées aux cathéters veineux centraux en réanimation – Réactualisation de la 12e conférence de consensus de la SRLF – SRLF, décembre 2002 (www.srlf.org). ● Diagnostic des pneumopathies nosocomiales en réanimation – Conférence de consensus – SRLF, 13 octobre 1989 (www.srlf.org). ● Infections urinaires nosocomiales de l’adulte – Conférence de consensus – SPILF, AFU, 27 novembre 2002 (www.infectiologie.com). ● Actualisation de la définition des infections nosocomiales – Texte de recommandation – Comité technique des infections nosocomiales et des infections liées aux soins, 11 mai 2007 (www.sante.gouv.fr). ● 100 recommandations pour la surveillance et la prévention des infections nosocomiales – Texte de recommandation – Comité technique des infections nosocomiales et des infections liées aux soins, 1999 (www.sante.gouv.fr). ● Stratégie d’antibiothérapie et prévention des résistances bactériennes en établissement de santé – Recommandations professionnelles – HAS, juillet 2008 (www.has-sante.fr). 167
ú
ITEM 91
Prévention des infections nosocomiales en réanimation – Conférence de consensus – SFAR, SRLF, 20 novembre 2008 (www.srlf.org). ● Prévention de la transmission croisée : précautions complémentaires contact – Consensus formalisé d’experts – SFHH, avril 2009 (www.sfhh.net). ●
POUR COMPRENDRE… ■
L’infection nosocomiale est une infection acquise dans un établissement de soins.
■
L’infection nosocomiale est fréquente : son taux de prévalence est en moyenne
de 10 % et atteint environ 25 % dans les services de réanimation. ■
En réanimation, on observe par ordre décroissant : – les infections respiratoires ; – les infections urinaires ; – les bactériémies et les infections liées aux cathéters veineux centraux (CVC) ; – les infections du site opératoire.
■
Les micro-organismes responsables sont dans 60 % des cas des bacilles à Gram
négatif et dans 30 % des cas des cocci à Gram positif. Le taux de prévalence des bactéries multirésistantes (BMR : staphylocoque doré résistant à la méticilline, entérobactéries résistantes aux C3G, Acinetobacter et Pseudomonas résistants) est particulièrement élevé. ■
Les infections nosocomiales constituent un problème majeur de santé publique,
à l’origine d’un accroissement du risque de morbidité, d’un possible accroissement du risque de mortalité, d’une augmentation de la durée de séjour, d’un surcoût hospitalier. ■
La prise en charge se heurte à : – des difficultés diagnostiques : multiplicité des sources possibles, distinction entre colonisation et infection souvent complexe ; – des difficultés thérapeutiques : caractère peu prévisible des résistances aux antibiotiques.
■
La proportion d’infections d’origine manuportée est particulièrement impor-
tante du fait de la densité des soins. Le respect de l’hygiène des mains est donc une mesure majeure permettant de réduire significativement l’incidence des infections nosocomiales en réanimation.
I. INFECTION NOSOCOMIALE EN RÉANIMATION A. Définitions et notions fondamentales1 1. Infection associée aux soins (IAS) L’IAS désigne tout événement infectieux en rapport avec un processus, une structure ou une démarche de soins. Elle survient au cours ou au décours d’une prise
1
Actualisation de la définition des infections nosocomiales – Texte de recommandation – www.sante.
gouv.fr.
168
Infections nosocomiales
en charge diagnostique, thérapeutique, palliative, préventive ou éducative d’un patient.
2. Infection nosocomiale L’infection nosocomiale fait partie des IAS. Elle désigne une infection acquise dans un établissement de soins.
3. Délai nécessaire au diagnostic d’IAS Un délai de 48 heures (ou un délai supérieur à la période d’incubation) entre le début de la prise en charge et la survenue de l’infection est accepté pour définir une IAS. Toutefois, ce délai ne doit pas être appliqué sans reflexion et il est recommandé d’apprécier dans chaque cas la plausibilité de l’association entre la prise en charge et l’infection.
4. Contamination et colonisation ■ La contamination est un processus entraînant la présence de micro-organismes chez une personne sans provoquer de signes cliniques ou biologiques. ■
La colonisation est une multiplication localisée de micro-organismes, qui devien-
nent partie de la flore du sujet, sans entraîner de réaction tissulaire. ■
Ne sont pas considérées comme IAS : – les infections présentes ou en incubation lors du contact avec le système de santé ; – les contaminations ; – les colonisations asymptomatiques urinaires, sur cathéter, cutanées (sur cicatrice, escarre, ulcère) et bronchiques chez un malade ventilé ; – les infections maternofœtales, sauf dans certains cas (infection liée à un germe hospitalier, infection liée à une colonisation maternelle non traitée, entérocolite ulcéronécrotique épidémique).
5. Origine des infections nosocomiales ■ Cas sporadiques : la majorité des infections nosocomiales évoluent sur le mode « endémique ». Le mode de « transmission » dans ces cas est le plus souvent endogène : le malade s’infecte à partir de sa propre flore. Cette flore peut être la flore résidente normale ou une flore modifiée durant l’hospitalisation. L’infection se produit à l’occasion d’une réduction des défenses de l’organisme ou de la rupture des barrières de défense. Plus rarement la transmission est exogène, les micro-organismes ayant pour origine les autres malades (transmission croisée), l’environnement contaminé ou le personnel. ■
Cas épidémiques : la transmission est dans ces cas exogène.
B. Particularités de la réanimation Les infections nosocomiales sont particulièrement fréquentes chez les patients hospitalisés en réanimation, comparativement aux autres secteurs de soin. Plusieurs caractéristiques expliquent cette forte incidence.
1. Utilisation de techniques invasives L’utilisation fréquente de « techniques de suppléance » en réanimation pour pallier une défaillance vitale nécessite la mise en place de dispositifs invasifs court-circuitant les moyens de défense. Ces dispositifs sont : 169
ITEM 91
■
le tube endotrachéal, qui court-circuite les défenses de la sphère ORL ;
■
le sondage urinaire, qui court-circuite le sphincter vésical et l’urètre ;
■
les cathéters vasculaires, qui court-circuitent la peau.
2. Maladie initiale Toute affection aiguë grave s’accompagne d’une immunodépression transitoire dite « post-agressive ».
3. Origine des germes en cause Comme dans tout secteur de soins, deux voies de contamination sont possibles, la voie endogène et la voie exogène. ■
La voie endogène est à l’origine de la majorité des infections. Elle est liée à la
contamination puis à la colonisation de sites normalement stériles par la flore du patient à la faveur d’une diminution des défenses ou d’une rupture des barrières de défense. En réanimation, cette flore est souvent modifiée du fait des fréquentes prescriptions antibiotiques. On observe en particulier une augmentation de la fréquence des bactéries à Gram négatif résistantes et des staphylocoques dorés résistants à la méticilline. ■
La voie exogène est liée à la contamination puis à la colonisation du patient
par des bactéries provenant d’autres malades (transmissions croisées) et transmises essentiellement par manuportage, mais aussi des instruments de travail, du matériel médical, de l’eau, l’air, l’alimentation. En réanimation, cette voie est relativement plus importante qu’ailleurs compte tenu de la densité des soins et de la fréquence des procédures.
4. Résistance aux antibiotiques La grande fréquence de prescription d’antibiotiques en réanimation explique la fréquence des infections nosocomiales à bactéries résistantes ou multirésistantes (BMR). Parmi les BMR, on retient surtout : ■
les Staphylococcus aureus résistants à la méticilline (SARM) ;
■
les entérobactéries résistantes aux céphalosporines de 3e génération, selon deux
mécanismes : production de bêtalactamase à spectre élargi (BLSE) ou hyperproduction de céphalosporinases ; ■
les Pseudomonas aeruginosa résistants à la ceftazidime ;
■
les Pseudomonas aeruginosa présentant au moins deux mécanismes de résis-
tance dont une résistance à l’imipénème ; ■
les Acinetobacter baumanii résistants à l’imipénème ou sensibles uniquement à
l’imipénème. Et plus rarement : ■
les Staphylococcus aureus résistants aux glycopeptides (GISA) ;
■
les entérocoques résistants à la vancomycine (VRE).
5. Facteurs organisationnels Deux facteurs organisationnels contribuent au développement des infections nosocomiales en réanimation : ■
170
la densité des soins ;
Infections nosocomiales
■
le caractère urgent des soins, qui sont nombreux et non programmés, et ainsi
nécessairement effectués dans des conditions exposant à la rupture des procédures d’asepsie.
6. Difficultés de prise en charge La réanimation expose vis-à-vis des infections nosocomiales à des difficultés diagnostiques et thérapeutiques : ■
difficultés diagnostiques. Celles-ci sont liées au fait que : – les patients présentent souvent déjà de nombreux symptômes au moment où une infection nosocomiale est suspectée ; – il existe une grande variété de sources possibles d’infections nosocomiales ; – les procédures invasives exposent à une fréquente colonisation ; – la distinction entre simple colonisation et véritable infection est souvent complexe ;
■
difficultés thérapeutiques : elles sont essentiellement liées au caractère impré-
visible des résistances aux antibiotiques rendant complexe la prescription empirique d’antibiotiques pour une infection nosocomiale.
C. Prévention des infections nosocomiales2 Elle s’inscrit dans le cadre de la politique générale d’hygiène de tout établissement de soins. Elle repose sur : ■
l’application de mesures d’hygiène strictes : – hygiène des mains (utilisation de solutions hydroalcooliques) ; – procédures d’antisepsie ; – procédures de soins ; – procédures de désinfection du matériel médical ; – utilisation de matériel à usage unique ; – procédure d’élimination des déchets ;
■
l’adoption de conduites à tenir rigoureuses vis-à-vis des patients : – dépistage systématique de la colonisation nasale et rectale par écouvillonnage à l’admission en réanimation puis régulièrement ; – applications de précautions dites « standard » chez tous les patients ; – applications de procédures complémentaires : précautions dites « contact » chez les patients colonisés ou infectés à BMR, précautions dites « air » chez les patients pour qui il existe un risque de transmission aérienne (tuberculose), précautions dites « gouttelette » chez les patients pour qui il existe un risque de transmission par les sécrétions trachéobronchiques (virus grippaux, méningocoque), procédures d’isolement dit « protecteur » chez certains patients immunodéprimés et chez les grands brûlés ; – procédures d’isolement géographique spécifiques chez les patients colonisés ou infectés à BMR : chambre seule, regroupement des patients colonisés ou infectés et personnels dédiés en cas d’épidémie ;
2
Prévention des infections à bactéries multirésistantes en réanimation – Conférence de consensus
(SRLF, SFISI, SPILF), www.slf.org.
171
ITEM 91
– signalisation systématique des patients colonisés ou infectés à BMR ; – information au patient du risque nosocomial et de la survenue le cas échéant d’une colonisation ou d’une infection à BMR ■
ITEM 6
Un choix raisonné des antibiotiques prescrits
;
ITEM 173
:
– politique antibiotique d’établissement ; – stratégie réfléchie d’utilisation (durée, désescalade…) ; – équipe opérationnelle de conseils en antibiothérapie ; – prescription encadrée nominative par un médecin senior ; – suivi de la consommation en antibiotiques et corrélation avec les taux de BMR.
CONSENSUS Prévention de la transmission croisée Consensus formalisé d’experts, 2009 Recommandations concernant les précautions « standard » ■
Concernant l’hygiène des mains : – ne pas porter de bijoux ; – maintenir les ongles courts et sans vernis, ne pas porter de faux ongles ; – le fait d’entrer dans la chambre d’un patient ne constitue pas à lui seul une indication à la réalisation d’un geste d’hygiène des mains.
■
Concernant la friction hydroalcoolique (FHA) : – elle remplace le lavage des mains (sauf souillure visible des mains) ; – elle est précédée d’un lavage simple en présence de souillures visibles des mains ; – elle est réalisée : • immédiatement avant tout contact avec un patient, tout soin propre ou acte invasif ; • entre un soin contaminant et un soin propre ; • après le dernier contact direct ou soin auprès d’un patient ; • avant d’enfiler des gants et immédiatement après le retrait des gants ; • après tout contact accidentel avec des liquides biologiques ; dans cette situation, la FHA doit être précédée d’un lavage au savon doux ; • et après tout contact avec l’environnement du patient (mesure discutée).
■
Concernant le port de gants : – ne pas porter des gants lors des contacts avec la peau saine ; – porter des gants avant tout soin exposant au risque de contact avec des liquides biologiques ; – retirer les gants dès la fin du soin avant de toucher l’environnement ; – changer de gants entre chaque patient ; – retirer les gants lorsque chez un même patient l’on passe d’un site contaminé à un site propre ou d’un site contaminé à un autre site contaminé.
■
Concernant la tenue professionnelle : – utiliser une tenue à manches courtes ; – porter une protection de sa tenue lors de soins susceptibles d’être mouillants/souillants ou exposant aux liquides biologiques ;
■
Concernant la protection de la tenue professionnelle : – choisir un tablier plastique à usage unique lors des soins mouillants/souillants ou exposant aux liquides biologiques ;
172
Infections nosocomiales
– choisir une surblouse à manches longues et imperméable à usage unique en cas d’exposition majeure aux liquides biologiques ; – ne pas utiliser de surblouse réutilisable ; – ne pas utiliser de surchaussures quel que soit le secteur d’hospitalisation (sauf blocs opératoires). ■
Concernant le port d’un masque et de lunettes de protection : les porter lors de soins avec
risque de projection de liquide biologique. ■
Concernant les visiteurs : – réaliser une FHA avant et après une visite dans un secteur d’hospitalisation à risque (réanimation, soins intensifs, secteurs protégés) ; – ne pas porter une protection de leur tenue civile lors d’une visite chez des patients quel que soit le secteur d’hospitalisation (sauf isolement protecteur).
■
Concernant le matériel : – privilégier l’usage de matériels dédiés à un patient unique ; – limiter le stockage du matériel de soin et ne pas jeter lors de la sortie du patient le consommable non utilisé et stocké dans les chambres y compris le matériel à usage unique conservé sous emballage.
Recommandations concernant les précautions complémentaires « contact » ■
Recommandations générales : – les précautions de type « contact » viennent s’ajouter aux précautions « standard » ; – les précautions de type « contact » concernent la mise en évidence, lors d’une infection ou d’une colonisation, des bactéries suivantes : • Staphylococcus aureus résistant à la méticilline ; • Acinetobacter baumannii résistant à l’imipénème ou sensible qu’à l’imipénème ; • entérobactéries productrices de bêtalactamases à spectre étendu ; • entérobactéries hyperproductrices de céphalosporinases en néonatologie ; • Pseudomonas aeruginosa résistant à au moins deux antibiotiques dont l’imipénème ; • Pseudomonas aeruginosa résistant à la ceftazidine (discuté) ; – le laboratoire doit mentionner de façon explicite l’identification d’une de ces bactéries et une signalisation du patient porteur doit être effectuée ; – les précautions de type « contact » ne concernent pas : • staphylocoque à coagulase négative résistant à la méticilline ; • Acinetobacter baumannii « sauvage » ; • Acinetobacter baumannii résistant à la ticarcilline ou aux bêtalactamines à plus large spectre ; • entérobactérie hyperproductrice de céphalosporinase hors néonatologie ; • Pseudomonas aeruginosa « sauvage » ou avec résistance à l’imipénème isolée ; – les patients concernés par les précautions de type « contact » doivent être en chambre individuelle ; si plusieurs de ces patients sont porteurs du même micro-organisme, ils doivent être regroupés dans une chambre ou un secteur du service ; – le fait de fermer la chambre du patient n’intervient pas dans l’efficacité des précautions « contact ».
■
Concernant l’hygiène des mains : – elle s’effectue dans les mêmes conditions que lors des précautions « standard » ; – et après tout contact avec l’environnement du patient.
■
Concernant le port des gants, la tenue professionnelle : elles s’effectuent dans les mêmes
conditions que lors des précautions « standard ».
u
173
ITEM 91
u
■
Concernant la protection de la tenue : – elle s’effectue dans les mêmes conditions que lors des précautions « standard » ; – il est aussi recommandé de revêtir un tablier dès lors que s’engage un soin direct.
■
Concernant le port d’un masque : – il s’effectue dans les mêmes conditions que lors des précautions « standard » ; – et lors de la prise en charge d’un patient présentant une infection respiratoire impliquant un micro-organisme type « contact », notamment à SARM, et lorsque le soignant effectue un soin direct ou se trouve à proximité du patient.
D. Surveillance et signalement des infections nosocomiales3 ■
ITEM 75
La surveillance des infections nosocomiales est possible grâce à un dispositif de
lutte contre les infections nosocomiales comprenant : – au niveau des établissements de santé : un comité de lutte contre les infections nosocomiales (CLIN) et une équipe opérationnelle d’hygiène hospitalière (EOHH) ; – au niveau interrégional : un centre de coordination de lutte contre les infections nosocomiales (C.CLIN) ; – au niveau national : un Comité technique des infections nosocomiales et des infections liées aux soins (CTINILS). ■
La surveillance épidémiologique et la gestion des alertes nosocomiales sont
coordonnées au niveau national par le Réseau d’alerte, d’investigation et surveillance des infections nosocomiales (RAISIN), qui associe les 5 C.CLIN et l’Institut national de veille sanitaire (InVS). ■
Cette surveillance épidémiologique repose sur : – la surveillance standardisée au plan national des principales infections (infections du site opératoire, infections nosocomiales en réanimation, portage de BMR, bactériémies nosocomiales, accidents d’exposition au sang), permettant de déterminer : • les taux de prévalence : fréquence de tous les cas à un instant t, calculé en rapportant le nombre de patients infectés au nombre de patients présents ; • les taux d’incidence : fréquence d’apparition de nouveaux cas sur une période donnée rapportée à une durée d’hospitalisation ; – la surveillance de l’environnement (air, eau, surfaces, alimentation) ; – la réalisation d’enquêtes d’incidence longitudinale, sur une durée définie, permettant de déterminer : • la densité d’incidence : nombre de nouveaux cas rapportés au total des durées d’exposition ; • le taux d’attaque : nombre de nouveaux cas rapportés au nombre de patients admis pendant la même période (surtout utilisé en cas d’épidémie).
3
100 recommandations pour la surveillance et la prévention des infections nosocomiales – Texte de
recommandation – www.sante.gouv.fr.
174
Infections nosocomiales
■
La gestion des alertes des infections nosocomiales comprend : – les signalements internes au CLIN et à l’EOHH ; – les signalements externes au C.CLIN et à la DDASS, obligatoires en cas de : • décès lié à une infection nosocomiale ; • infection nosocomiale ayant un caractère particulier par sa nature, son profil de résistance, sa localisation, sa possible contamination par un dispositif médical ; • infection nosocomiale suspecte d’être causée par un germe de l’eau ou l’air environnant ; • infection nosocomiale par une maladie à déclaration obligatoire ; • épidémie.
■
Dans ces situations, la DDASS transmet le signalement à l’InVS pour une analyse
nationale des cas.
CONSENSUS Stratégie d’antibiothérapie et prévention des résistances bactériennes en établissement de santé HAS 2008 ■
Assurer une prescription des ATB conforme aux bonnes pratiques : – prescription nominative : datée, signée, mentionnant le nom du malade ; – prescription initiale inscrite dans le dossier ; – réévaluation de l’antibiothérapie (entre 24 et 72 h) inscrite dans le dossier ; – poursuite de l’antibiothérapie après 3 jours soumise à l’avis d’un médecin senior ; – la durée de l’antibiothérapie ne doit pas dépasser une semaine sauf justification.
■
Assurer une antibiothérapie curative conforme aux bonnes pratiques : – origine bactérienne (documentée ou probable) identifiable dans le dossier ; – antibiothérapie conforme au protocole de service ou aux recommandations ; – antibiothérapie prenant en compte les résultats microbiologiques ; – antibiothérapie débutée dans l’heure en cas de choc septique ; – durée prévisionnelle de l’antibiothérapie précisée ; – prolongation d’une association d’ATB au-delà de 3 jours justifiée dans le dossier ; – réalisation d’une désescalade thérapeutique si elle est possible.
■
Mettre en place une bonne organisation générale de la prescription antibiotique à l’hôpi-
tal – Commission des anti-infectieux (CAI) : – existence d’une CAI dans chaque établissement se réunissant au moins 3 fois par an ; – représentation à la CAI du CLIN et de la commission des médicaments et des dispositifs médicaux stériles (COMEDIMS) ; – rédaction d’une liste des anti-infectieux disponibles et à distribution contrôlée ; – désignation d’au moins un référent en antibiothérapie, membre de la CAI ; – désignation dans chaque service de correspondants locaux connus de la CAI ; ■
S’assurer que le laboratoire de microbiologie joue son rôle dans le bon usage des ATB : – procédures de contrôle de qualité des techniques de détection des résistances ; – implantation d’un système informatique permettant une surveillance épidémiologique ; – mise en place d’un système d’alerte capable de prévenir l’EOHH et les services cliniques en cas de phénomène épidémique et de profil de résistances particulier ; – échange permanent de données entre la pharmacie et le laboratoire de microbiologie permettant le suivi des ATB à dispensation contrôlée ; – présentation annuelle de surveillance des résistances à la CAI, au CLIN et aux services.
u 175
ITEM 91
u ■
S’assurer que la pharmacie joue son rôle dans le bon usage des ATB : – mise à disposition permanente des ATB admis par la CAI ; – validation des prescriptions nominatives (identification du patient, du prescripteur, date de la prescription) et de la conformité des prescriptions à dispensation contrôlée ; – consommation des ATB exprimée sous forme de DDJ/1 000 jours d’hospitalisation ; – consommation des ATB par secteur transmise à la CAI et aux services.
■
Organiser les acteurs hospitaliers dans le bon usage des ATB : – protocoles écrits d’antibiothérapie dans les principales situations cliniques et tenant compte des résistances locales (protocoles d’établissement ou spécifiques de services) ; – protocoles écrits de modalités d’administration des ATB ; – audits de conformité aux protocoles écrits ;
■
Informer et former : – information des nouveaux prescripteurs sur le bon usage des ATB ; – rencontre avec des représentants de l’industrie pharmaceutique au sein de la CAI en cas d’introduction d’un nouvel antibiotique.
E. Tableau de bord et indicateurs
ITEM 75
Chaque établissement de santé doit mettre en place un « tableau de bord » des infections nosocomiales. Ce tableau de bord, qui doit être mis à la disposition des usagers, comprend 5 indicateurs et un score agrégé : ■
ICALIN : indicateur composite d’activités de lutte contre les infections nosoco-
miales ; il est un reflet des actions menées par le CLIN et l’EOHH ; ■
ICSHA : indicateur de consommation de solutions hydroalcooliques (en litres
pour 1 000 jours d’hospitalisation) ; il est le reflet de la mise en œuvre de l’hygiène des mains ; ■
SURVISO : surveillance des infections du site opératoire ; il mesure l’incidence
des infections du site opératoire ; ■
ICATB : indice composite du bon usage des antibiotiques ; il est le reflet du
niveau d’engagement de l’établissement dans une stratégie de bonne prescription antibiotique ; ■
SARM : taux de staphylocoques dorés résistants à la méticilline ;
■
score agrégé : il permet de résumer les 4 indices du tableau de bord (sauf SARM)
avec la pondération suivante : ICALIN 40 %, ICSHA 30 %, ICATB 20 %, et SURVISO 10 %.
Lavage des mains par solutions hydroalcooliques ■
L’hygiène des mains constitue le moyen le plus efficace et le moins cher pour réduire les IAS. Il
est pourtant bien démontré que les soignants et les praticiens se lavent insuffisamment les mains. Les arguments les plus souvent cités pour expliquer ce défaut d’observance sont le manque de temps (en réanimation, par exemple, une infirmière est amenée à se laver les mains environ 20 fois par heure) et le risque de lésions cutanées ■
Les solutions hydroalcooliques constituent une avancée importante du fait de leur efficacité et
de leur acceptabilité. Elles sont composées en règle d’un alcool associé ou non à un antiseptique et à un émollient. Elles ont un spectre large et une efficacité microbiologique très supérieure aux
176
Infections nosocomiales
savons antiseptiques. Cette efficacité est cependant réduite en présence de matières organiques (mains macroscopiquement souillées). ■
Une friction hydroalcoolique des mains est ainsi préconisée dans toutes les circonstances où
une désinfection des mains est nécessaire. Ce geste ne peut être effectué que lorsque les mains sont visuellement propres et sèches et en l’absence de talc. ■
Le port des gants protégeant le personnel reste indispensable lors de tout contact avec du
sang ou un liquide biologique. Il est encadré par une friction hydroalcoolique.
II. INFECTIONS URINAIRES SUR SONDE4
ITEM 86
L’infection urinaire correspond à 40 % des infections nosocomiales mais à seulement 0,1 % des décès par infection nosocomiale.
A. Physiopathologie ■
La colonisation du patient sondé se fait par 3 portes d’entrée potentielles :
région péri-méatale, jonction entre la sonde urinaire et le collecteur, reflux dans le système collecteur. ■
La contamination du patient sondé se fait selon 2 voies : endoluminale par l’urine
contaminée (75 %) et transurétrale entre la muqueuse urétrale et la sonde urinaire.
B. Facteurs de risque 1. Facteurs de risque liés au patient ■ Âge avancé. ■
Sexe féminin.
■
Immunodépression.
■
Diabète.
■
Diarrhée.
2. Facteurs de risque liés à la prise en charge ■ Durée du sondage urinaire, instrumentation urovésicale. ■
Antibiothérapie préalable.
C. Germes responsables Par ordre décroissant de fréquence :
4
■
E. coli ;
■
entérocoques ;
■
Pseudomonas aeruginosa ;
■
Proteus sp. ;
■
Klebsiella sp. ;
■
Enterobacter sp. ;
■
Serratia sp. ;
■
Candida sp. ;
■
staphylocoques résistants à la méticilline.
Infections urinaires nosocomiales de l’adulte – Conférence de consensus (SPILF, AFU) – www.infectio
logie.com.
177
ITEM 91
D. Diagnostic ■
Fièvre et/ou signes fonctionnels urinaires.
■
Uroculture positive (≥ 105 UFC/mL), avec au plus 2 micro-organismes différents.
■
Sonde vésicale encore en place ou retirée dans la semaine précédente.
Remarques : ■
en l’absence de sonde urinaire, l’infection urinaire nosocomiale se définit par : – une fièvre et/ou la présence de signes fonctionnels urinaires ; – une leucocyturie (≥ 104/mL) et une uroculture positive (≥ 103 UFC/mL) avec au plus 2 micro-organismes différents ;
■
la bactériurie asymptomatique ne constitue pas une IAS et est définie par : – l’absence de signes cliniques ; – une uroculture positive (≥ 105 UFC/mL) en présence d’une sonde urinaire à demeure ou d’une sonde retirée dans la semaine précédente ou 2 urocultures positives (≥ 103 UFC/mL) en l’absence de sondage urinaire.
E. Prise en charge 1. Localiser l’infection La recherche d’une pyélonéphrite ou d’une prostatite se fait par : ■
un examen urologique ;
■
la réalisation d’une échographie rénale et/ou prostatique transvésicale en pre-
mière intention ; ■
la réalisation dès que possible d’un uro-scanner.
2. Mettre en route une antibiothérapie La bactériurie symptomatique qui définit l’infection urinaire nosocomiale justifie toujours d’une antibiothérapie. Le problème en réanimation est de mettre en évidence ce caractère symptomatique chez un patient souvent non communiquant et pouvant être fébrile pour de multiples raisons : ■
monothérapie par un antibiotique à élimination urinaire et diffusion prostatique
(quinolone le plus souvent) puis adaptée à l’antibiogramme pendant 10 jours chez la femme et 21 jours chez l’homme en raison d’une prostatite souvent associée ; ■
bithérapie en présence de signes de gravité et/ou en cas d’infection à
Acinetobacter sp., Pseudomonas sp. ou Enterobacter sp. par une bêtalactamine ayant une activité antipyocyanique (pipéracilline-tazobactam, ceftazidine, imipénène) et un aminoside, puis adaptée à l’antibiogramme. Remarques : ■
la bactériurie asymptomatique d’un patient sondé n’est pas traitée ;
■
la bactériurie asymptomatique d’un patient désondé impose la réalisation d’un
ECBU de contrôle 48 à 72 heures plus tard et la mise en route d’une antibiothérapie si celui-ci est encore positif ; ■
la bactériurie asymptomatique d’un patient non sondé impose un traitement
antibiotique chez la femme enceinte, le patient diabétique et le transplanté rénal.
F. Mesures préventives ■
178
Limiter les indications et la durée du sondage vésical.
Infections nosocomiales
■
Respecter une asepsie stricte lors de la pose de la sonde urinaire : – procédure de soin écrite ; – respect du lavage des mains ; – toilette génitale ; – désinfection périnéale par antiseptique ; – port de gants stériles.
■
Utiliser un système clos de drainage et respecter le drainage clos : ne jamais
déconnecter la sonde et le système collecteur, vidanger le système collecteur par le bas, prélever au niveau de la bague réservée à cet usage après l’avoir désinfectée.
III. PNEUMOPATHIES ACQUISES SOUS VENTILATION MÉCANIQUE (PAVM)5 ITEM 93 La pneumopathie nosocomiale touche jusqu’à 40 % des patients intubés. En l’absence d’intubation, la survenue d’une pneumopathie nosocomiale est plus rare mais possible, notamment chez les patients ayant des troubles de la vigilance ou des troubles de la déglutition. On exclut cependant de la définition les pneumonies d’inhalation favorisées par les troubles de vigilance ou de déglutition antérieurs à l’admission et non liés aux soins initiaux. En dehors de la réanimation, la pneumopathie nosocomiale est la première cause de décès par infection nosocomiale, avec une mortalité brute estimée entre 30 et 50 %. En réanimation, le risque attribuable de mortalité est plus discuté.
A. Physiopathologie Trois mécanismes contribuent au développement d’une PAVM : ■
la colonisation des voies aériennes inférieures est le mécanisme de loin le plus
fréquent : – elle est le plus souvent dite « endogène », c’est-à-dire secondaire à une inhalation dans les voies aériennes inférieures, à travers les plis du ballonnet de la sonde d’intubation, des sécrétions oropharyngées et gastriques qui sont rapidement contaminées chez le patient intubé ; – elle est rarement « exogène », secondaire à l’inhalation par la lumière de la sonde d’intubation de germes d’origine manuportée ou de l’environnement ; – elle est parfois secondaire à une colonisation trachéale directe chez le patient intubé ; ■
l’infection par contiguïté est rare ;
■
l’infection par voie hématogène à partir d’un autre foyer infecté est également
rare.
B. Facteurs de risque De nombreux facteurs de risque ont été individualisés. On en distingue plusieurs formes.
5
Diagnostic des pneumopathies nosocomiales de l’adulte – Conférence de consensus (SRLF) –
www.srlf.org.
179
ITEM 91
1. Facteurs de risque liés au patient ■ Âge avancé. ■
Immunodépression.
■
Pathologie respiratoire chronique.
■
Dénutrition.
■
Gravité clinique à l’admission : présence d’un état de choc, présence d’un syn-
drome de détresse respiratoire aiguë, présence d’un coma. ■
Contexte de traumatisme crânien ou de polytraumatisme.
■
Présence d’une sinusite (favorisée en réanimation par l’intubation nasotrachéale
et/ou la présence d’une sonde nasogastrique).
2. Facteurs de risque liés à la prise en charge ■ Durée de la ventilation mécanique, le risque augmentant de 1 à 3 % pour chaque jour de ventilation. ■
Position couchée à plat, par augmentation du risque de régurgitation gastrique.
■
Utilisation d’antiacide et d’anti-H2 (par diminution du pH gastrique et risque de
pullulation microbienne). ■
Sédation profonde et curarisation par diminution du réflexe de toux.
■
Sonde nasogastrique.
■
Transports fréquents en dehors du service.
■
Réintubation.
■
Changements trop fréquents des circuits de ventilateur.
C. Germes en cause Les germes en cause dépendent du délai de survenue.
1. Avant le 6e jour On parle de pneumopathie précoce (early-onset pneumonia). L’épidémiologie est alors proche des pneumopathies communautaires : pneumocoques, Haemophilus sp., entérobactéries sensibles, staphylocoque doré sensible à la méticilline.
2. Après le 6e jour On parle de pneumopathie tardive (late-onset pneumonia). Les germes responsables sont alors des bacilles à Gram négatif : Pseudomonas sp., Acinetobacter, entérobactéries résistantes (Klebsiella, Enterobacter, Serratia), ou des cocci à Gram positif : staphylocoque doré résistant à la méticilline.
D. Diagnostic de PAVM 1. Signes cliniques ■ Le diagnostic peut être suspecté cliniquement en présence : – d’une hyperthermie > 38,3 °C ; – d’une hypothermie < 36,5 °C ; – de la présence de sécrétions purulentes lors des aspirations trachéales ; – de l’apparition d’une image radiologique ou d’une aggravation des images antérieures ; – d’une hyperleucocytose.
180
Infections nosocomiales
■
Ces signes n’ont cependant qu’une médiocre spécificité dans le contexte de
réanimation.
2. Aspiration trachéale C’est un prélèvement simple et peu coûteux. Il est positif au seuil de 106 UFC/mL. Les sensibilité et spécificité de cet examen ont été cependant trouvées très variables d’une étude à une autre, le risque principal étant de faire le diagnostic de pneumopathie par excès chez un patient simplement colonisé.
3. Prélèvements perendoscopiques L’endoscopie bronchique permet la réalisation de prélèvements au niveau distal par brossage ou lavage bronchoalvéolaire : ■
brosse distale protégée : une brosse protégée au sein d’un double cathéter dont
l’extrémité distale est obturée par un bouchon de polyéthylène glycol est introduite dans le fibroscope dont l’extrémité est placée en distalité dans le territoire choisi. La brosse permet le prélèvement d’un volume calibré de sécrétions distales dans le territoire présumé de la pneumopathie. Un prélèvement est considéré comme positif quand il ramène ≥ 103 UFC/mL (sensibilité et spécificité de l’ordre de 70 %) ; ■
lavage bronchoalvéolaire : il est obtenu après instillation de 120 mL de sérum
physiologique après avoir bloqué le fibroscope dans une bronche segmentaire ou sous-segmentaire, puis aspiration du liquide qui sera analysé au laboratoire de bactériologie. L’examen direct est considéré comme positif quand plus de 5 % des cellules sont infectées. La culture est considérée comme positive à partir de 104 UFC/mL.
4. Démarche diagnostique Deux approches sont possibles pour faire le diagnostic de PAVM. Une approche « non invasive », utilisant une simple aspiration trachéale, permet d’identifier les malades atteints de PAVM en prenant le risque de traiter un certain nombre de malades par excès, qui ne seraient que colonisés. Cette approche n’étant pas compatible avec un contrôle rationnel de la prescription des antibiotiques, une stratégie microbiologique « invasive » fondée sur une antibiothérapie guidée par le résultat d’un examen direct d’un prélèvement perendocopique (brosse ou LBA) permet sûrement de limiter le nombre de malades traités par excès tout en adaptant la thérapeutique aux résultats des cultures.
E. Prise en charge Une antibiothérapie empirique doit être débutée le plustôt possible, dès réalisation des prélèvements. Elle tient compte du délai de survenue de la PAVM, des résultats de prélèvements microbiologiques antérieurs, de l’antibiothérapie préalable, de l’écologie microbienne locale et de la sévérité du tableau. Elle sera secondairement adaptée aux résultats des cultures des prélèvements réalisés et aux antibiogrammes. La durée de l’antibiothérapie peut être réduite à 8 jours, sauf pour les BGN non fermentants (Pseudomonas et Acinetobacter) où elle doit être de 14 jours.
181
ITEM 91
1. PAVM précoce sans antibiothérapie préalable Amoxicilline-acide clavulanique ou céphalosporine de 3e génération (céfotaxime, ceftriaxone).
2. PAVM tardive Bithérapie avec une bêtalactamine ayant une activité antipyocyanique (pipéracilline-tazobactam ou ceftazidine ou imipénème), associée pendant 3 à 5 jours à un aminoside ou une fluoroquinolone (ciprofloxacine, compte tenu de son activité antipyocyanique). Si le staphylocoque est suspecté (patient colonisé ou préalablement infecté, antibiothérapie préalable) ou si le tableau est grave, un traitement par glycopeptide est associé (vancomycine).
F. Mesures préventives La prévention comporte : ■
des mesures générales : – mesures habituelles d’hygiène hospitalière ; – sevrage le plus précoce possible de la ventilation ; – préférer la ventilation non invasive quand elle est possible ;
■
des mesures visant à limiter le risque infectieux exogène : – lavage des mains ; – port de gants lors des aspirations bronchiques et oropharyngées ; – utilisation d’eau stérile pour l’aérosolisation et l’humidification ; – utilisation de circuits de ventilation à usage unique ;
■
des mesures visant à limiter le risque infectieux endogène : – maintien en position semi-assise afin de diminuer le risque de reflux gastroœsophagien ; – maintien de la pression du ballonnet de la sonde d’intubation entre 25 et 30 cmH2O ; – éviter la sédation profonde qui inhibe la motilité gastrique et le réflexe de toux ; – utilisation de sondes gastriques de petite taille ; – toilette antiseptique régulière de l’oropharynx et du nasopharynx ; – aspirations bronchiques à la demande ; – bonne évaluation de l’indication d’une prophylaxie de l’ulcère de stress.
La réalisation d’une décontamination digestive sélective (administration d’un traitement comprenant une antibiothérapie parentérale à spectre étroit de courte durée et une association entérale d’antibiotiques et d’antifongiques non absorbables) est proposée, mais discutée compte tenu de son impact potentiel sur l’écologie microbienne du patient et de l’unité de soins.
IV. INFECTIONS LIÉES AUX CATHÉTERS VEINEUX CENTRAUX (CVC)6 ITEM 104 Elles représentent 10 % des infections nosocomiales en réanimation et sont à l’origine de 30 % des bactériémies en réanimation. Elles sont responsables en
6
Infections liées aux cathéters veineux centraux en réanimation – Conférence de consensus (SRLF) –
www.srlf.org.
182
Infections nosocomiales
réanimation d’une prolongation de la durée de séjour estimée entre 5 et 20 jours, et d’un risque de décès estimé à 20 %.
A. Physiopathologie Après sa mise en place, se forme autour du CVC un manchon de thrombine riche en fibrine et fibronectine facilitant l’adhésion des micro-organismes. Il existe 3 voies de contamination d’un CVC.
1. Voie extraluminale cutanée ■ La plus fréquente. ■
Survient lors de la pose du CVC ou lors de la colonisation secondaire du site
d’insertion. ■
Les bactéries migrent depuis le point d’entrée cutanée et remontent le long de la
surface externe du cathéter.
2. Voie endoluminale ■ Le plus souvent secondaire à une manipulation septique des raccords. ■
Exceptionnellement liée à la contamination du liquide de perfusion.
3. Voie hématogène ■ Rare. ■
Liée à la contamination du cathéter à partir d’un foyer à distance.
B. Facteurs de risque 1. Facteurs de risque liés au patient ■ Âge avancé. ■
Sexe masculin.
■
Immunodépression.
■
Neutropénie.
■
Grande densité en soins.
2. Facteurs de risque liés au site d’insertion du CVC ■ Les voies fémorale et jugulaire interne semblent associées à un risque d’infection similaire mais présentent un risque d’infection supérieur à la voie sous-clavière. ■
La voie sous-clavière devrait être donc préférée dès que la durée prévue de
cathétérisation dépasse 5–7 jours. ■
Le risque de pneumothorax ou de ponction accidentelle de l’artère non com-
pressible lors de la pose en voie sous-clavière doit cependant faire discuter son indication chez les patients de réanimation présentant une altération de l’état respiratoire et/ou hémodynamique et/ou des troubles de l’hémostase. ■
La tunnélisation, qui diminuerait le taux d’infection liée au CVC, est recomman-
dée pour les voies fémorale ou jugulaire interne, mais est en pratique peu réalisée en réanimation.
3. Facteurs liés à l’utilisation ■ Le risque augmente avec la durée de cathétérisation (l’incidence des infections de CVC est en moyenne de 7/1 000 jours de cathétérisme, l’incidence des bactériémies liées au CVC est d’environ 2/1 000 jours de cathétérisme). 183
ITEM 91
■
Le risque augmente avec le nombre de voies du cathéter.
■
Le risque augmente avec la fréquence des manipulations.
■
L’utilisation d’antibiotiques intraveineux et donc administrés sur le cathéter
réduit le risque d’infection. Mais l’utilisation prophylactique d’antibiotique dans cette indication n’est pas utile.
C. Germes en cause S. epidermidis (40 %) et S. aureus (10 %), bacilles à Gram négatif (10 %), entérocoques (5 %), champignons et levures (5 %).
D. Diagnostic 1. Techniques diagnostiques Le diagnostic d’infection liée au CVC repose sur la culture quantitative de l’extrémité du CVC (par la technique de Brun-Buisson) après son ablation. La constatation d’un taux élevé (75 %) d’ablations injustifiées a amené à proposer des techniques diagnostiques dites « cathéter en place ». Elles ne peuvent s’envisager qu’en l’absence d’état de choc : ■
la culture d’un prélèvement cutané au site de ponction a une bonne valeur pré-
dictive négative ; ■
le rapport du compte bactérien d’hémocultures quantitatives (rapport du nom-
bre de micro-organismes comptés sur une hémoculture prélevée sur le CVC/nombre de micro-organismes comptés sur une hémoculture prélevée en périphérique au même moment) est prédictif et spécifique de bactériémie liée au CVC quand il est > 5 ; ■
la mesure du délai différentiel de pousse d’hémocultures standard : la présence
d’un délai différentiel de positivation des hémocultures prélevées simultanément sur CVC et en périphérie > 2 heures en faveur de l’hémoculture prélevée sur cathéter est hautement prédictive de bactériémie liée au CVC (spécificité et sensibilité > 90 %).
2. Diagnostic À partir de ces différentes techniques, on peut distinguer la contamination, la colonisation et l’infection proprement dite du cathéter. ■
Contamination du CVC : culture quantitative de l’extrémité < 103 UFC/mL et
absence de signes locaux ou généraux d’infection. ■
Colonisation du CVC : culture quantitative significative ≥ 103 UFC/mL et absence
de signes locaux ou généraux d’infection attribuée au cathéter. ■
Infection liée au CVC : – en l’absence de bactériémie, le diagnostic d’infection liée au CVC repose sur : • une culture de CVC > 103 UFC/mL ; • une régression totale ou partielle des signes infectieux dans les 48 heures suivant l’ablation ou la présence de signes locaux (purulence de l’orifice d’entrée du cathéter, tunnelite) ou généraux ; – l’infection bactériémique liée au CVC est définie par : • une bactériémie survenant dans les 48 heures encadrant le retrait du CVC ;
184
Infections nosocomiales
• une culture positive du site d’insertion au même germe ou une culture du CVC > 103 UFC/mL au même germe ou un rapport hémoculture quantitative centrale/hémoculture périphérique > 5 ou un délai différentiel de positivité des hémocultures > 2 heures. ■
L’infection n’est pas liée au CVC si : – le CVC est stérile ; – la culture du CVC est positive, mais la souche est différente de celle isolée dans le sang, et le syndrome infectieux ne régresse pas à l’ablation du CVC.
E. Prise en charge Deux questions se posent initialement : l’indication d’une ablation du cathéter et l’indication d’une antibiothérapie.
1. Conduite à tenir vis-à-vis du CVC ■ L’ablation immédiate d’un cathéter présumé infecté s’impose : – en présence de signes de choc sans autre cause apparente ; – en présence de signes locaux francs (cellulite, tunnelite, collection purulente) ; – en cas de complications infectieuses : thrombophlébite suppurée, endocardite ; – en présence de germes « à haut risque » : Staphylococcus aureus, Pseudomonas ou Candida ; – en cas de bactériémie chez un malade porteur de prothèse endovasculaire, de valve cardiaque ou immunodéprimé. ■
En dehors de ces situations, plusieurs attitudes sont possibles, car la probabilité
d’enlever à tort un cathéter stérile est très élevée, et la nécessité d’implanter un nouveau cathéter sur un autre site expose toujours à des complications non négligeables : – le changement de cathéter sur guide est une solution temporaire permettant d’attendre 24 heures le retour de la culture du cathéter retiré. Si cette culture est positive, le cathéter posé sur guide sur le même site doit être retiré ; – la réalisation de prélèvements cutanés locaux du site d’insertion permet d’éliminer l’infection lorsqu’ils sont négatifs ; – la réalisation d’hémocultures prélevées en périphérie et par le CVC au même moment permet d’approcher le diagnostic.
2. Antibiothérapie et conduite thérapeutique initiale selon les résultats microbiologiques ■ L’indication initiale de l’antibiothérapie repose sur la sévérité du syndrome infectieux, la sévérité des signes locaux, la présence de complications infectieuses et l’existence d’une bactériémie. ■
En présence d’un état de choc, de complications infectieuses (thrombophlébite
suppurée, endocardite) ou de signes d’infection locale patents, une antibiothérapie probabiliste est immédiatement commencée, incluant au moins un antibiotique dirigé au minimum contre les cocci à Gram positif. La poursuite de l’antibiothérapie dépend du germe identifié : – S. aureus : poursuite du traitement pendant 10 à 14 jours. La réalisation d’une échocardiographie transœsophagienne et d’un Doppler veineux à la recherche 185
ITEM 91
d’une endocardite ou d’une thrombophlébite suppurée est ici recommandée. Leur mise en évidence doit faire prolonger le traitement ; – entérobactéries, Acinetobacter baumanii : poursuite du traitement pendant 10 à 14 jours (recommandée mais pour certains discutable dès lors que le CVC a été retiré) ; – staphylocoque à coagulase négative : l’arrêt de l’antibiothérapie est possible si une régression rapide du syndrome infectieux est observée après l’ablation du CVC. ■
En l’absence de bactériémie, de signes généraux de gravité et de germes à « haut
risque » (Staphylococcus aureus, Pseudomonas ou Candida) : – une infection locale du cathéter non compliquée nécessite le retrait du cathéter et un traitement local de désinfection ; – une antibiothérapie est justifiée en cas de signes généraux francs ou secondairement en cas d’aggravation clinique locale et/ou de réapparition de signes généraux dans les 48 heures suivant l’ablation du cathéter ; – si un changement sur guide a été effectué, le remplacement du cathéter par un nouveau cathéter sur un site différent est nécessaire lorsque la culture du premier cathéter montre une colonisation significative ; – lorsque le cathéter a été laissé en place, dans l’attente des résultats microbiologiques et en l’absence de suppuration locale, de bactériémie et de signes généraux de gravité, on surveille l’évolution locale et générale. L’antibiothérapie n’est pas recommandée. ■
La technique du « verrou antibiotique » par vancomycine peut permettre de laisser
en place un cathéter infecté « précieux ». Cette technique, utilisée parfois en hématologie, n’est efficace qu’en cas d’infection à staphylocoque à coagulase négative. ■
Choix de l’antibiothérapie : – staphylocoque à coagulase négative : oxacilline + aminoside ; – SARM : vancomycine + aminoside ; – streptocoque ou entérocoque : amoxicilline + aminoside ; – corynébactérie, bacillus : vancomycine ; – entérobactérie : biantibiothérapie avec bêtalactamine + aminoside ou quinolone ; – P. aeruginosa : bêtalactamine antipyocyanique + aminoside ou ciprofloxacine.
F. Mesures préventives ■
Limiter les indications et la durée du cathétérisme veineux central.
■
Avoir un protocole écrit de pose, d’entretien et de diagnostic des infections liées
aux CVC. ■
Poser tout CVC dans des conditions d’asepsie chirurgicale.
■
Respecter une asepsie rigoureuse lors du maniement des tubulures.
■
Préférer théoriquement l’abord sous-clavier, plutôt que jugulaire interne ou
fémoral. Le risque de pneumothorax lié au cathétérisme sous-clavier en limite cependant l’indication chez les patients de réanimation dont l’état respiratoire est souvent déjà altéré. ■
Utiliser un pansement semi-occlusif et transparent stérile et le changer toutes
les 72 heures ou chaque fois qu’il est souillé ou décollé. 186
Infections nosocomiales
■
Fixer efficacement le cathéter à la peau.
■
Changer stérilement les tubulures de perfusion toutes les 48 à 72 heures.
■
Préparer aseptiquement les solutés de perfusion.
Remarques ■
Cathéters imprégnés d’héparine : ils n’ont pas fait la preuve de leur efficacité chez l’adulte.
■
Cathéters imprégnés d’antibiotiques/antiseptiques : l’imprégnation par des agents anti-infec-
tieux réduit l’adhérence bactérienne sur les CVC. Cependant, l’utilisation de ce type de matériau pourrait favoriser l’émergence de bactéries résistantes aux antiseptiques et/ou aux antibiotiques. En conséquence, l’utilisation de cathéters imprégnés d’agents anti-infectieux n’est pas recommandée en première intention. L’utilisation de cathéters imprégnés de chlorhexidine/sulfadiazine argent est à réserver aux unités où l’incidence des ILC demeure élevée malgré les mesures préventives recommandées.
V. INFECTIONS DU SITE OPÉRATOIRE L’infection du site opératoire est la 3e cause d’infection nosocomiale et la 1re cause de morbidité et de mortalité en chirurgie. La mortalité attribuable est très variable selon le type de chirurgie et le terrain mais pourrait atteindre 5 %.
A. Physiopathologie ■
Les infections du site opératoire résultent de 2 types de contamination.
1. Contamination peropératoire ■ Le plus souvent. ■
À partir de bactéries endogènes d’un patient colonisé ou mal préparé, ou à par-
tir de bactéries exogènes par manuportage.
2. Contamination postopératoire ■ Très rarement. ■
À partir de bactéries exogènes, le plus souvent par manuportage lors des soins
postopératoires (pansement, drains).
B. Facteurs de risque 1. Facteurs de risque liés au patient ■ Âge avancé. ■
Immunodépression.
■
Diabète.
■
Obésité.
■
Tare associée.
■
État général du patient au moment de l’intervention défini par la classe ASA
(tableau 91-1).
2. Facteurs de risque liés à la prise en charge ■ Caractère d’urgence (non programmé) de la chirurgie. ■
Type de chirurgie défini selon la classification d’Altemeier (tableau 91-2).
■
Durée de séjour préopératoire. 187
ITEM 91
Tableau 91-1. Classe ASA (American Society of Anesthesiologists) Classe
Type de patient
ASA 1
Pas d’autre affection que celle nécessitant l’acte chirurgical
ASA 2
Perturbation modérée d’une grande fonction
ASA 3
Perturbation grave d’une grande fonction
ASA 4
Risque vital imminent
ASA 5
Patient moribond
Tableau 91-2. Classification d’Altemeier : risque infectieux en l’absence d’antibioprophylaxie Type de chirurgie
Critères de sélection
Chirurgie propre
Pas d’ouverture de viscères creux Pas de traumatisme ou d’inflammation Pas de rupture d’asepsie Risque infectieux de l’ordre de 1 à 2 %
Chirurgie propre contaminée
Ouverture de viscères creux avec contamination minime (oropharynx, tube digestif haut, voies biliaires, voies respiratoires, appareil urogénital Ou rupture d’asepsie minime Risque infectieux de l’ordre de 10 à 20 %
Chirurgie contaminée
Contamination importante par le contenu intestinal Rupture d’asepsie franche Traumatisme ouvert datant de moins de 4 heures Chirurgie des voies urinaires ou biliaires infectées Risque infectieux de l’ordre de 20 à 35 %
Chirurgie sale
Contamination fécale Traumatisme ouvert datant de plus de 4 heures et/ou tissus dévitalisés et/ou corps étranger Infection bactérienne au site opératoire Risque infectieux de l’ordre de 20 à 50 %
Tableau 91-3. Score NNISS Calcul du score NNISS Trois facteurs de risque indépendants sont retenus : – classe ASA 3, 4, ou 5 : 1 point – classe d’Altemeier III ou IV : 1 point – durée d’intervention > temps t prédéfini : 1 point Calcul du risque infectieux Score NISS (points)
Risque infectieux (%)
0
1,5
1
3,5 à 4
2
9 à 13
3
20 à 30
■
Qualité de préparation de l’opéré : hygiène corporelle, dépilation.
■
Qualité de l’intervention chirurgicale : expérience de l’équipe chirurgicale, durée
de l’intervention, qualité du champage, de l’hémostase, qualité du drainage. ■
Au total, l’évaluation du risque infectieux du site opératoire est possible par le
calcul du score NNISS (National Nosocomial Infections Survey System) (tableau 91-3). 188
Infections nosocomiales
C. Germes en cause Ils varient beaucoup selon le type de chirurgie, le site opératoire, l’antibioprophylaxie utilisée, l’écologie locale. Il s’agit souvent d’infections polymicrobiennes. En chirurgie ostéo-articulaire, cardio-vasculaire ou neurochirurgie, les staphylocoques sont largement majoritaires. Dans de nombreuses interventions de chirurgie abdominale, les entérobactéries et les anaérobies stricts sont majoritaires.
D. Diagnostic On distingue les infections superficielles et les infections profondes.
1. Infection superficielle ■ Infection survenant dans les 30 jours suivant l’intervention. ■
Elle affecte la peau ou les muqueuses, les tissus sous-cutanés ou les tissus situés
au-dessus de l’aponévrose de revêtement. ■
Elle est diagnostiquée par : – cas 1 : écoulement purulent de l’incision ; – cas 2 : isolement d’un micro-organisme associé à des polynucléaires neutrophiles à l’examen direct du liquide produit par l’incision ; – cas 3 : ouverture de l’incision par le chirurgien et présence de l’un des signes suivants : • douleur à la palpation ; • tuméfaction ; • rougeur ; • chaleur et isolement d’un micro-organisme.
2. Infection profonde ■ Infection survenant dans les 30 jours suivant l’intervention, ou dans l’année s’il y a eu mise en place d’un implant ou d’une prothèse ou d’un matériel prothétique. ■
Elle affecte les tissus ou organes ou espaces situés au niveau ou au-dessous de
l’aponévrose de revêtement. ■
Elle est diagnostiquée par : – cas 1 : écoulement purulent provenant d’un drain ; – cas 2 : déhiscence spontanée de l’incision ou ouverture par le chirurgien et au moins un des signes suivants : • fièvre > 38 °C ; • douleur à la palpation ; • isolement d’un micro-organisme à la culture obtenue de façon aseptique d’un prélèvement de l’organe ou du site ou de l’espace ; – cas 3 : abcès ou autres signes d’infection observés lors d’une réintervention chirurgicale, d’un examen histopathologique, d’un examen d’imagerie ou d’un acte de radiologie interventionnelle.
E. Prise en charge Elle est très variable selon le contexte clinique.
1. Prélèvements microbiologiques ■ Les prélèvements superficiels : plaie, mèche, lame, redon, drain sont à proscrire car le plus souvent contaminés par la flore cutanée. 189
ITEM 91
■
On privilégie les prélèvements profonds réalisés sous échographie ou sous scan-
ner ou lors d’une reprise chirurgicale.
2. Traitement antibiotique ■ En cas de signes généraux d’infection. ■
Ou en cas d’infection profonde.
■
Si possible après documentation bactériologique.
3. Reprise chirurgicale Systématique en présence de matériel étranger.
F. Prévention 1. En période préopératoire ■ Limitation de la durée de séjour préopératoire. ■
Dépistage et traitement des infections préexistantes.
■
Préparation cutanée : – procédure écrite ; – douche la veille et le jour de l’intervention ; – dépilation par tondeuse ou crème dépilatoire de la zone opératoire et non par un rasoir.
2. Au bloc opératoire ■ Lavage de la zone opératoire avec un savon antiseptique, puis rinçage. ■
2e application de l’antiseptique par le chirurgien.
■
Protocoles écrits de lavage chirurgical des mains et d’habillage.
■
Fiches techniques pour l’entretien de la salle et du matériel.
■
Contrôle régulier des installations de traitement de l’air avec vérification pério-
dique du niveau de contamination de l’air, des circuits, des surfaces. ■
Restriction des présences inutiles, des déplacements inopportuns et des
bavardages. ■
Protocoles écrits d’antibioprophylaxie.
3. En période postopératoire ■ Asepsie rigoureuse lors de la manipulation des drains.
190
■
Privilégier les systèmes d’aspiration clos.
■
Limiter la manipulation des drains.
■
Asepsie rigoureuse lors de la manipulation des pansements.
Infections nosocomiales
Fiche
Dernier tour
Infections nosocomiales Généralités ■ L’infection nosocomiale (IN) désigne une infection acquise dans un établissement de soins. ■ Si l’état infectieux n’est pas connu à l’admission, un délai de survenue ≥ 48 heures est nécessaire pour définir une IN. ■ Les IN entraînent une augmentation de la morbidité, de la mortalité, de la durée de séjour et un surcoût. ■ Les germes responsables sont endogènes (malade infecté à partir de sa flore à l’occasion d’une diminution des défenses), ou exogènes (manuportage, contamination d’un matériel médical ou de l’environnement). ■ La forte prévalence en réanimation est liée : – aux dispositifs invasifs ; – à la prise en charge de patients présentant une affection grave responsable d’une diminution des défenses immunitaires ; – à la densité des soins ; – au caractère d’urgence (risque de rupture d’asepsie). ■ La « pression antibiotique » en réanimation explique la fréquence des BMR : SARM, entérobactéries résistantes aux C3G (BLSE ou hyperproduction de céphalosporinases), P. aeruginosa résistants à la ceftazidime, A. baumanii résistants à la ticarcilline ou à l’imipénème, entérocoques résistants à la vancomycine (VRE), S. aureus résistants aux glycopeptides (GISA). ■ La proportion d’infections d’origine manuportée est importante en réanimation du fait de la densité des soins. L’hygiène des mains est une mesure majeure permettant de réduire significativement l’incidence des IN.
Prévention ■ Application de mesures d’hygiène strictes : lavage des mains, frictions hydroalcooliques. ■ Adoption de conduites à tenir rigoureuses : dépistage de la colonisation nasale et rectale, procédures d’isolement technique et géographique, signalisation des patients colonisés ou infectés à BMR. ■ Choix raisonné lors de la prescription d’antibiotiques .
Surveillance ■ Surveillance nationale des principales infections (calculs de prévalence et d’incidence). ■ Surveillance de l’environnement (eau, air, matériel, surfaces). ■ Réalisation d’enquête d’incidence sur une durée définie (calculs de densité d’incidence, de taux d’attaque). ■ Signalement interne au CLIN . ■ Signalement externe au C.CLIN et à la DDASS obligatoire en cas de décès, d’IN ayant un caractère particulier, d’IN suspecte d’être causée par un germe de l’eau ou l’air environnant, d’IN par une maladie à déclaration obligatoire, d’épidémie.
Infections urinaires sur sonde 40 % des infections nosocomiales et 0,1 % des décès par infection nosocomiale. Facteurs de risque : sondage vésical prolongé , antibiothérapie préalable . ■ Germes : E. coli , entérocoques, P. aeruginosa, Proteus sp., Klebsiella sp., Enterobacter sp., Serratia sp., Candida sp., SARM. ■ ■
u 191
ITEM 91
Fiche
Dernier tour
■ Diagnostic : fièvre et/ou signes fonctionnels urinaires et uroculture positive (≥ 105 UFC/mL) avec au plus 2 micro-organismes différents, la sonde vésicale étant en place ou retirée dans la semaine précédente. ■ Prise en charge : – rechercher une pyélonéphrite ou une prostatite (échographie, uro-scanner) ; (quinolone) ; en présence de signes de gravité et/ou – monothérapie antibiotique d’infection à Acinetobacter sp., Pseudomonas sp. ou Enterobacter sp. : bithérapie antibiotique par une bêtalactamine antipyocyanique (pipéracilline-tazobactam, ceftazidine, imipénène) et un aminoside ; – la bactériurie asymptomatique d’un patient sondé n’est pas traitée . ■ Prévention : – limiter les indications et la durée du sondage vésical ; – respecter une asepsie stricte lors de la pose de la sonde urinaire (procédure écrite) ; – utiliser un système clos de drainage .
Pneumopathies acquises sous ventilation mécanique (PAVM) 40 % des patients placés sous ventilation mécanique ; 1re cause de décès par infection nosocomiale (mortalité estimée entre 30 et 50 %). ■ Facteurs de risque : – ventilation mécanique prolongée ; – position couchée à plat . ■ Germes en cause : – ≤ 6 jours (PAVM précoce) : pneumocoques, Haemophilus spp., entérobactéries sensibles, SASM [0] ; – > 6 jours (PAVM tardive) : Pseudomonas spp., Acinetobacter, entérobactéries résistantes (Klebsiella, Enterobacter, Serratia), SARM . ■ Diagnostic : il repose sur la réalisation de prélèvements distaux perendoscopiques : – brosse distale protégée : culture ≥ 103 UFC/mL ; – lavage bronchoalvéolaire : direct ≥ 5 % des cellules infectées, culture ≥ 104 UFC/mL. ■ Prise en charge : antibiothérapie empirique débutée dès la réalisation des prélèvements : – PAVM précoce : amoxicilline-acide clavulanique ou C3G ; – PAVM tardive : bithérapie avec une bêtalactamine antipyocyanique associée pendant 3 à 5 jours à un aminoside ou ciprofloxacine. Si le staphylocoque est suspecté (colonisation, infection, antibiothérapie préalable) ou si le tableau est grave, un traitement par vancomycine est associé. ■ Prévention : – sevrer précocement de la ventilation ; – maintenir les patients en position demi-assise ; – éviter la sédation profonde ; – faire une toilette antiseptique régulière de l’oropharynx. ■
Infections liées aux cathéters veineux centraux (CVC) ■ ■
■ ■
10 % des IN en réanimation, 30 % des bactériémies en réanimation, risque de décès de 20 %. Facteurs de risque : – durée de cathétérisation ; – fréquence des manipulations du CVC . Germes : S. epidermidis et S. aureus, BGN, entérocoques, champignons et levures. Diagnostic : – en l’absence de bactériémie : culture de CVC > 103 UFC/mL et présence de signes locaux ou généraux ou régression des signes infectieux dans les 48 heures suivant l’ablation ;
u 192
Infections nosocomiales
Fiche
■
■
Dernier tour
– infection bactériémique liée au CVC : bactériémie survenant dans les 48 heures encadrant le retrait du CVC et culture positive du site d’insertion ou culture du CVC > 103 UFC/mL ou rapport du compte bactérien hémoculture centrale/hémoculture périphérique > 5 ou délai différentiel de positivité des hémocultures > 2 heures. Prise en charge : – ablation immédiate d’un CVC suspect si : état de choc , signes locaux francs (cellulite, tunnelite, collection purulente), complications infectieuses (thrombophlébite suppurée, endocardite), germes « à haut risque » (Staphylococcus aureus, Pseudomonas ou Candida), porteur de prothèse endovasculaire, de valve cardiaque, patient immunodéprimé ; – sinon réalisation d’hémocultures périphériques et sur CVC au même moment (calcul du rapport du compte bactérien ou mesure du délai différentiel de pose) ou réalisation de prélèvements cutanés locaux du site d’insertion (bonne valeur prédictive négative) ou changement sur guide (solution temporaire permettant d’attendre 24 heures la culture du cathéter retiré) ; – antibiothérapie en présence d’un état de choc, de complications infectieuses, de signes d’infection locale patents, de germes « à haut risque » (Staphylococcus aureus, Pseudomonas ou Candida) et probablement aussi si entérobactéries ou A. baumanii ; – l’antibiothérapie empirique est au minimum dirigée contre les cocci à Gram + (vancomycine + aminoside) et associe souvent une bêtalactamine antipyocyanique ; – en cas de staphylocoque à coagulase négative : l’arrêt de l’antibiothérapie est possible si une régression rapide du syndrome infectieux est observée après l’ablation du CVC ; – en cas de S. aureus : réalisation systématique d’une échocardiographie transœsophagienne et d’un Doppler veineux à la recherche d’une endocardite ou d’une thrombophlébite suppurée. Prévention : – limiter les indications du cathétérisme veineux central ; – avoir une procédure de pose (asepsie chirurgicale ) et d’entretien (pansement et changement stériles des tubulures/72 h) du CVC ; – respecter l’asepsie lors du maniement des tubulures et lors de la préparation des solutés de perfusion ; – préférer l’abord sous-clavier, plutôt que jugulaire interne ou fémoral.
Infection du site opératoire ■ ■
3e cause d’infection nosocomiale, la mortalité attribuable atteint 5 %. Facteurs de risque : – état général du patient (classe ASA) ; – type de chirurgie (classe d’Altemeier). Au total, l’évaluation du risque infectieux est possible par le calcul du score NNISS (National Nosocomial Infections Survey System). Calcul du score NNISS
Calcul du risque infectieux
Score NISS (points) Trois facteurs de risque indépendants sont retenus : 0 – classe ASA 3, 4 ou 5 : 1 1 point – classe d’Altemeier III ou 2 IV : 1 point 3 – durée d’intervention > à un temps t prédéfini : 1 point
Risque infectieux (%) 1,5 3,5 à 4 9 à 13 20 à 30
u
193
ITEM 91
Fiche
Dernier tour
Germes en cause : – chirurgie ostéoarticulaire, cardiovasculaire ou neurochirurgie : staphylocoques ++ ; – chirurgie abdominale : entérobactéries et anaérobies stricts ++. ■ Diagnostic (survenue dans les 30 jours suivant l’intervention, ou dans l’année si matériel étranger) : – infection superficielle : • affectant : peau ou muqueuses, tissus sous-cutanés, tissus au-dessus de l’aponévrose ; • avec un écoulement purulent de l’incision ou l’isolement d’un germe et de PNN sur le liquide produit par l’incision ou la présence d’un des signes suivants : douleur à la palpation, tuméfaction, rougeur, chaleur et isolement d’un germe lors de l’ouverture de l’incision par le chirurgien ; – infection profonde : • affectant : tissus ou organes ou espaces situés au-dessous de l’aponévrose ; • avec un écoulement purulent provenant d’un drain ou une déhiscence spontanée de l’incision ou l’ouverture par le chirurgien et au moins un des signes suivants : fièvre, douleur à la palpation et isolement d’un germe à la culture d’un prélèvement de l’organe ou de l’espace ou un abcès ou un autre signe d’infection observé lors d’une réintervention ou d’un examen d’imagerie. ■ Prise en charge : – prélèvements microbiologiques : • superficiels (plaie, mèche, lame, redon, drain) : à proscrire (contaminés par la flore cutanée) ; • profonds : réalisés sous échographie ou sous scanner ou lors d’une reprise chirurgicale ; – traitement antibiotique : en cas de signes généraux d’infection, ou en cas d’infection profonde ; – reprise chirurgicale : systématique en présence de matériel étranger. ■ Prévention : – en préopératoire : limiter la durée de séjour préopératoire , dépister et traiter les infections préexistantes , préparation cutanée : procédure écrite, douche la veille et le jour de l’intervention, dépilation par tondeuse ou crème dépilatoire de la zone opératoire et non par un rasoir ; – en peropératoire : lavage de la zone opératoire avec un savon antiseptique, 2e application par le chirurgien, protocoles écrits de lavage des mains et d’habillage, fiches techniques pour l’entretien de la salle et du matériel, contrôle régulier des installations de traitement de l’air et vérification périodique des contaminations, restriction des présences inutiles, des déplacements inopportuns et des bavardages, protocoles écrits d’antibioprophylaxie ; – en postopératoire : asepsie rigoureuse lors de la manipulation des drains, privilégier les systèmes d’aspiration clos, limiter la manipulation des drains, asepsie rigoureuse lors de la manipulation des pansements. ■
194
Anesthésie Marie-Pierre Bonnet Koceila Bouferrache Julien Josserand
This page intentionally left blank
ITEM 66
Thérapeutiques antalgiques médicamenteuses (P) et non médicamenteuses
OBJECTIFS ● Argumenter la stratégie de prise en charge globale d’une douleur aiguë ou chronique chez l’adulte. ● Prescrire les thérapeutiques antalgiques médicamenteuses et non médicamenteuses. ● Évaluer l’efficacité d’un traitement antalgique. LIENS TRANSVERSAUX ITEM 1
La relation médecin-malade. L’annonce d’une maladie grave. La formation du patient atteint de maladie chronique. La personnalisation de la prise en charge médicale.
ITEM 65
Bases neurophysiologiques et évaluation d’une douleur aiguë et chronique.
ITEM 68
Douleur chez l’enfant : sédation et traitements antalgiques.
ITEM 69
Soins palliatifs pluridisciplinaires chez un malade en fin de vie. Accompagnement d’un mourant et de son entourage.
ITEM 142
Prise en charge et accompagnement d’un malade cancéreux à tous les stades de la maladie. Traitements symptomatiques. Modalités de surveillance. Problèmes psychologiques, éthiques et sociaux.
ITEM 167
Thérapeutiques médicamenteuses et non médicamenteuses. Cadre réglementaire de la prescription thérapeutique et recommandations.
ITEM 168
Effet placebo et médicaments placebo.
ITEM 170
La décision thérapeutique personnalisée. Observance médicamenteuse.
ITEM 174
Prescription et surveillance des anti-inflammatoires stéroïdiens et non stéroïdiens.
ITEM 262
Migraine et algies de la face.
Sujets tombés aux concours de l’Internat et aux ECN : 1995, 1997, 2001, 2007, 2008, 2009 ●
Sujet tombé
1995, zone Nord : Homme de 60 ans, cancer du rectum, douleurs pelviennes, automédication par noramidopyrine (Baralgine®).
197
ú
ITEM 66
1) 2) 3) 4) ●
Jugement sur l’automédication. Accidents thérapeutiques possibles avec cette automédication. Symptomatologie des complications de la noramidopyrine. Prescription antalgique.
1997, zone Nord : Homme de 50 ans, cancer du poumon, douleurs à type de brûlure permanente au niveau de la face interne du bras et avant-bras droits jusqu’aux 2 dernières phalanges, non calmées par paracétamol + codéine. Deux adénopathies dures sus-claviculaires droites + Claude Bernard-Horner œil droit. 1) Argumenter une prescription de buprénorphine en association au paracétamol + codéine. 2) Causes des douleurs du membre supérieur droit. 3) Autres médicaments utiles pour traiter cette douleur en dehors des analgésiques purs.
●
2001, zone Sud : Homme de 65 ans, cancer du rectum, métastases multiples, douleurs pelviennes, automédication par paracétamol 500 mg PO à la demande, d’efficacité modeste. 1) Commentez le traitement. 2) Risque principal de cette automédication. 3) Traitement par Di-Antalvic® pendant 48 h, douleur inchangée. Rédigez l’ordonnance du nouveau traitement et expliquez-la au patient. 4) Durée de traitement sur l’ordonnance ? Expliquez. 5) Moyens d’évaluation de la douleur à la nouvelle consultation.
●
2007, dossier 4, question 7 : Évaluer l’intensité de la douleur. Traitements symptomatiques préconisés pour la douleur intense, non calmée après l’administration de 1 g de paracétamol.
●
2008, dossier 3, question 4 : Femme de 68 ans, myélome, violentes lombalgies insomniantes continues : prise en charge de la douleur.
●
2009, dossier 6, questions 2 et 3 : Homme de 50 ans, récidive de colique néphrétique. 1) Quel traitement antalgique proposez-vous ? 2) Quelles sont les complications iatrogènes les plus courantes envisageables chez ce patient avec le traitement de première intention que vous avez prescrit ?
CONSENSUS ● Anti-inflammatoires non stéroïdiens – ANAES, 1996. ● Prise en charge de la douleur postopératoire chez l’adulte et l’enfant – SFAR, ANAES, 1997. ● Prise en charge de la douleur chronique de l’adulte en médecine ambulatoire – ANAES, 1999. ● Standards, options et recommandations 2002 pour les traitements antalgiques médicamenteux des douleurs cancéreuses par excès de nociception chez l’adulte. Mise à jour du rapport original de 1996 (rapport abrégé) – Bull Cancer 2002 ; 89 (12) : 1067–74. ● Mise au point sur le bon usage des opioïdes forts dans le traitement des douleurs chroniques non cancéreuses – Recommandations pour la pratique clinique – Afssaps, 2004 (http://agmed.sante.gouv.fr/htm/10/opioide/mapopio.pdf). ● Prise en charge de la douleur postopératoire chez l’adulte et l’enfant. Recommandations formalisées d’experts 2008 - Comité douleur-anesthésie locorégionale et Comité des référentiels de la SFAR - Ann Fr Anesth Reanim 2008 ; 27 : 1035–41 (http://www.sfar. org/t/img/pdf/rfe_douleur08.pdf).
POUR COMPRENDRE… ■
L’analyse sémiologique fine de la douleur conditionne la qualité de sa prise en
charge thérapeutique. ■
La douleur persistante est une situation clinique fréquente, impliquant dans sa
genèse de nombreux facteurs et nécessitant une évaluation multifactorielle et une prise en charge multidisciplinaire, au mieux au sein d’une structure spécialisée. 198
Thérapeutiques antalgiques médicamenteuses (P) et non médicamenteuses
■
Une bonne gestion des traitements impose une parfaite connaissance des don-
nées physiopathologiques les plus récentes. La gestion des traitements médicamenteux doit être rigoureuse, méthodique et réévaluée régulièrement. ■
Le traitement chirurgical comporte des possibilités de plus en plus sélectives,
dont les résultats sont essentiellement liés à l’indication en fonction du type de douleur.
I. STRATÉGIE DE PRISE EN CHARGE GLOBALE D’UNE DOULEUR AIGUË OU CHRONIQUE ■
Le choix du traitement dépend : – de l’étiologie de la douleur, déterminée par l’examen clinique et éventuellement des examens complémentaires ; – de son mécanisme (par excès de nociception, neuropathique, psychogène ou mixte
ITEM 65
;
– de son caractère aigu ou chronique ; – de son intensité ; – de son évolution dans le temps. ■
Le traitement doit être multimodal : association de différentes thérapeutiques
antalgiques entre elles et du traitement étiologique. ■
Il faut favoriser les voies d’administration simples (voie orale +++).
■
Il faut utiliser des posologies adaptées.
■
L’administration des traitements antalgiques doit être systématique en période
douloureuse, le rythme dépendant des propriétés pharmacocinétiques de chaque médicament. ■
Il faut prévenir et traiter les effets secondaires usuels.
■
Le traitement sera remis en question régulièrement en fonction de son efficacité,
évaluée par des échelles spécifiques.
CONSENSUS Prise en charge de la douleur chronique de l’adulte en médecine ambulatoire ANAES, 1999 Le traitement antalgique fait partie d’une prise en charge globale du malade avec évaluation de sa personnalité, de la situation familiale et professionnelle, appréciation du retentissement de la douleur sur sa vie de relation ■
ITEM 170
.
La relation médecin-malade joue un rôle essentiel dans la prise en charge de la douleur.
L’adhésion du malade à son traitement permet d’en améliorer l’efficacité
ITEMS 1, 170
.
II. TRAITEMENTS MÉDICAMENTEUX DE LA DOULEUR A. Analgésiques 1. Analgésiques de palier 1 (classification OMS) Les indications sont les douleurs aiguës ou chroniques d’intensité faible. 199
ITEM 66
a) Acide acétylsalicylique (aspirine) ■ Action anti-inflammatoire directe périphérique sur le foyer lésionnel (inhibition de la synthèse des prostaglandines) et effet antiagrégant plaquettaire. ■
Pharmacologie : résorption rapide (pic de concentration 40 à 60 min après) et
presque complète ; forte liaison protéique (80 à 95 %) ; volume de distribution faible (0,16 L/kg) ; demi-vie de 15 à 30 min ; hydrolyse totale par les estérases plasmatiques en acide salicylique (demi-vie de 3 à 9 h), métabolite également actif et élimination rénale sous forme conjuguée. ■
Voie per os (PO) : – formes à libération rapide : Aspégic®, Catalgine®, Solupsan® ; – forme à libération prolongée : Aspirine pH 8® ; – les formes solubles ou effervescentes sont mieux et plus rapidement résorbées que les comprimés.
■
Voie intraveineuse (IV) : Aspégic®.
■
Posologie : 2 à 3 g/j.
■
Effet antiagrégant plaquettaire : 100-150 mg/j ; effet antalgique : 1–2 g/j ; effet anti-
inflammatoire : 3 g/j. ■
Effets secondaires nombreux : digestifs (nausées, douleurs abdominales, ulcè-
res, hémorragies), hématologiques (syndrome hémorragique), allergiques (hypersensibilité, œdème de Quincke), syndrome de Reye, neurologiques (céphalées, vertiges, baisse de l’acuité auditive, bourdonnements d’oreille), hyperuricémie.
b) Paracétamol* ■ Action centrale : métabolite actif de substances dérivées de la phénacétine et de
*Concours Internat 2001, ECN 2007
l’acétaminophène. ■
Activité analgésique comparable à celle de l’acétylsalicylique mais sans les effets
anti-inflammatoires et antiagrégants. ■
Pharmacologie : résorption digestive rapide et presque complète (pic de concen-
tration 30 à 90 min après) ; 80 % de biodisponibilité orale ; pas de liaison aux protéines plasmatiques (peu d’interférences médicamenteuses) ; volume de distribution de 0,9 L/kg ; demi-vie de 2 h, prolongée chez l’insuffisant hépatocellulaire et le nourrisson ; métabolisme hépatique principal en dérivés gluco et sulfoconjugués + voie secondaire par la N-acétyl-p-benzoquinone, responsable de nécrose hépatique en cas de surdosage massif. ■
Voie PO : Dafalgan®, Efferalgan®.
■
Voie IV : Perfalgan®.
■
Posologie : 0,5 à 1 g par prise, 1 à 4 g par 24 h, intervalle minimal de 4 h entre les
prises. ■
Bonne tolérance gastrique, allergie rare.
■
Toxicité hépatique avec insuffisance hépatique aiguë à partir de 10-15 g en dose
unique chez l’adulte et 150 mg/kg chez l’enfant. Facteurs favorisants : insuffisance hépatique préexistante, variabilité métabolique. Antidote : N-acétylcystéine.
200
Thérapeutiques antalgiques médicamenteuses (P) et non médicamenteuses
c) Anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS)* ITEM 174 ■ Action anti-inflammatoire, antipyrétique et antalgique par l’inhibition des cyclo-
*ECN 2009
oxygénases (COX-1 et 2) et de la lipo-oxygénase, inhibiteurs spécifiques de la COX-2 : célécoxib (Celebrex®). ■
Pharmacologie : résorption rapide et quasi complète, Cmax = 1-2 h, liaison pro-
téines à 90 %, métabolites hépatiques et surtout rénaux inactifs, élimination biliaire avec cycle entéro-hépatique (indométacine, diclofénac, piroxicam), demi-vie d’élimination variable d’une molécule à l’autre. ■
Voie PO, prise en cours de repas : kétoprofène (Bi-profénid®), 150 mg × 2/j,
Celebrex®, 100 à 200 mg × 1 à 2/j. ■
Voie rectale : morniflumate (Nifluril® suppositoires), 1 suppositoire × 2/j.
■
Voie IM : kétoprofène (Profénid®), 100 mg × 2-3/j.
■
Voie IV lente : kétoprofène (Profénid®), 100 mg × 2/j.
■
Voie cutanée : acide niflurique (Nifluril® pommade 3 %), 1 application × 3/j.
CONSENSUS Anti-inflammatoires non stéroïdiens Recommandations ANAES, 1996 Sujets > 70 ans : ■
réduire les doses en fonction du poids ;
■
éviter les molécules à demi-vie longue ;
■
éviter les indoliques qui augmentent le risque de chutes ;
■
s’assurer impérativement que la clairance de la créatinine est supérieure à 30 mL/min avant
de commencer le traitement ; ■
prescrire un protecteur gastroduodénal efficace (misoprostol) ;
■
surveiller la pression artérielle si le sujet est hypertendu, ainsi que la prise de poids et la
survenue d’œdèmes des membres inférieurs.
■
Indications en particulier dans le cadre des douleurs secondaires à des patholo-
gies inflammatoires. ■
Effets secondaires digestifs (nausées, douleurs abdominales, ulcère), allergi-
ques (rash, syndrome de Lyell), rénaux (insuffisance rénale aiguë fonctionnelle, troubles hydroélectrolytiques, néphropathies interstitielles), hématologiques (syndrome hémorragique), neurologiques (céphalées, vertiges), effets cardiovasculaires des coxibs.
d) Antalgiques en arrêt de commercialisation ■ Floctafénine : n’est plus commercialisée suite à des réactions allergiques graves (choc anaphylactique). ■
Noramidopyrine* : arrêt de commercialisation du fait de la survenue possible
d’agranulocytose immunoallergique indépendante de la dose, ainsi que de collapsus et bronchospasme.
201
*Concours Internat 1995
ITEM 66
2. Analgésiques de palier 2 : opioïdes faibles Les indications sont les douleurs aiguës ou chroniques, rebelles aux antalgiques non opioïdes, et en relais d’un traitement opioïde.
a) Codéine ■ Morphinique faible. ■
30 mg de codéine PO sont équianalgésiques à 650 mg d’aspirine.
■
Pharmacologie : absorption intestinale (70 %), métabolisme hépatique rapide
soit en dérivés glycuronés, soit en morphine (10 %), durée d’action de 4 h. ■
Voie orale uniquement : – en association avec le paracétamol : Efferalgan codéiné®, Dafalgan codéiné®,
*Concours Internat 1997
Codoliprane®* (1 à 6 cp/j). Il existe une synergie d’action potentialisatrice entre les 2 molécules en cas de dosage optimal (paracétamol 500 mg + codéine 30 mg). – formes orales LP : dihydrocodéine (Dicodin®) : 60 mg/12 h). ■
Effets secondaires fréquents : nausées, somnolence, constipation.
b) Dextropropoxyphène ■ Retrait progressif du marché en Europe sur 1 an à partir de juin 2009. Ne sera plus commercialisé en France à partir de 2010. Décision de l’Agence européenne du médicament (EMEA), suite à la constatation de décès par surdoses intentionnelles ou accidentelles. ■
Morphinique faible.
■
Pharmacologie : absorption par voie orale, durée d’action de 4 h, demi-vie de
8–10 h.
*Concours Internat 2001
■
En association au paracétamol par voie orale : Di-Antalvic®* (dextropropoxy-
phène 30 mg + paracétamol 400 mg). ■
Posologie : voie PO uniquement, 2 gélules/8 h au maximum.
■
Effets secondaires de type morphinique : nausées, vomissements, constipation,
somnolence, vertiges.
c) Tramadol ■ Action centrale avec un effet opioïde par fixation aux récepteurs m et un effet monoaminergique par inhibition du recaptage de la noradrénaline, ce dernier mécanisme étant impliqué dans le contrôle de la transmission nociceptive centrale (intérêt potentiel dans le traitement des douleurs neuropathiques). ■
Puissance : 1/6 de celle de la morphine, effets dépresseurs respiratoires et sur
le tractus gastro-intestinal plus faibles que ceux de la morphine, potentiel de tolérance et de dépendance plus faible. ■
Pharmacologie : absorption rapide (pic à 2 h), biodisponibilité de 70–90 %,
liaison protéique de 20 %, volume de distribution de 3–4 L/kg, demi-vie d’élimination de 5–7 h, 80 % de métabolisme hépatique et 20 % d’élimination rénale sous forme inchangée. ■
Voie PO à libération immédiate ou à libération prolongée et voie IV : Topalgic®,
Contramal®, Zamudol®. 202
Thérapeutiques antalgiques médicamenteuses (P) et non médicamenteuses
■
Posologie : – voie PO : 50–100 mg/4–6 h, 25–100 mg/12 h pour les formes LP, dose maximale de 400 mg/j ; – voie IV lente : 50–100 mg/4–6 h, dose maximale de 600 mg/j.
■
Effets secondaires fréquents : nausées, vomissements, somnolence, malaise,
constipation ; rares : douleurs abdominales, tachycardie, hypo ou hypertension ; très rares : convulsions, troubles psychiques, allergie, sevrage. Risque épileptogène avec tous les antidépresseurs et risque de syndrome sérotoninergique avec tous les sérotoninergiques.
d) Néfopam ■ Action centrale, absence d’effet morphinique, absence d’action antipyrétique ou anti-inflammatoire. ■
20 mg de néfopam équivalent à 12 mg de morphine.
■
Pharmacologie : mélange racémique, liaison protéique de 75 %, demi-vie plasma-
tique de 4 h, élimination urinaire. Délai d’action de 15 à 30 min, durée d’action de 4 à 6 h. ■
Voie IM profonde ou IV lente (15 à 30 min) : Acupan®.
■
Posologie : 20 mg par injection, 120 mg/j.
■
Effets indésirables : douleur à l’injection, sueurs, nausées, vomissements, malaise,
manifestations atropiniques (sécheresse buccale, tachycardie, vertiges, rétention d’urines). ■
Contre-indications : convulsions, troubles mictionnels, glaucome à angle fermé,
troubles du rythme, angor.
3. Analgésiques de palier 3 : opioïdes forts a) Agonistes morphiniques purs ■ Pas d’effet plafond, les doses peuvent être augmentées autant que nécessaire. ■
Règles de prescription des morphiniques, selon le Journal officiel de la République
française : – obligation d’ordonnance sécurisée, règle des 7, 14 ou 28 jours* (tableau 66-2) ; – prescription simultanée sur ordonnance bizone sécurisée (ALD) ; *Concours Internat 2001
– rédaction conformément aux articles R5194 et R5213 du Code de la santé publique. ■
Modalités d’administration particulières aux opioïdes : – titration : pour débuter un traitement morphinique. Débuter par 10 mg/4 h de morphine PO à libération immédiate. Puis ajuster le traitement par modification des doses de 30 à 50 % de la dose totale quotidienne par paliers de 24 h, mais pas par modification de l’intervalle. Une fois la dose déterminée, passer à une forme LP ; – administration autocontrôlée (PCA) : permet au patient d’adapter l’analgésie à ses besoins dans les limites autorisées par la programmation en déterminant la fréquence des réinjections. Après chaque injection programmée, l’appareil est réfractaire à toute nouvelle demande si celle-ci se produit avant l’intervalle 203
ITEM 66
de temps programmé. En général, sont prescrits des bolus de 1 mg IV avec une période réfractaire de 7 min (analgésie postopératoire) ; – rotation des opioïdes (concept discuté) : définie par le changement d’un opioïde par un autre en cas de diminution du rapport bénéfice/risque. Objectif : réduction des effets indésirables.
CONSENSUS Du bon usage des opïoides forts dans le traitement des douleurs chroniques non cancéreuses Afssaps, 2004 Traitements antalgiques médicamenteux des douleurs cancéreuses par excès de nociception chez l’adulte Standards, options et recommandations, 2002 Effets secondaires communs à tous les morphiniques : digestifs (nausées, vomissements, constipation), à prévenir systématiquement par la prescription d’antiémétiques et de laxatifs ; dépression respiratoire antagonisée par l’injection de naloxone, prurit, rétention aiguë d’urines. La dépendance psychologique reste exceptionnelle.
■
Morphine : – opioïde de 1re intention ; – pharmacologie : absorption rapide par voie orale, biodisponibilité de 30 %, résultant d’une importante inactivation lors du 1er passage hépatique. Métabolisme en morphine-3-glycuronide (M3G), métabolite actif, et morphine6-glycuronide (M6G), métabolite présentant des propriétés agonistes supérieures à celles de la morphine. Élimination sous forme de M3G et M6G, retardée en cas d’insuffisance rénale. Demi-vie de 2 à 4 h. Résorption complète par voie SC ou IM. Apparition des effets analgésiques en 10 min par voie IV, 20 min par voie IM et 30 à 60 min par voie PO. Durée d’action de 4 h ; – voies d’administration et posologie (tableau 66-1) : • voie PO à libération immédiate (6 prises par jour) : solution buvable de chlorhydrate de morphine (1 mg/mL), Sévrédol® (sulfate de morphine, cp de 10 et 20 mg), Actiskénan® (sulfate de morphine, gélules de 5, 10, 20 et 30 mg). Intérêt en interdose, à l’approche de stimulations douloureuses (soins…). Si un recours est très fréquent, réévaluer la dose totale ; • voie PO à libération différée (2 prises par jour) : Moscontin LP® (sulfate de morphine, cp de 10, 30, 60, 100, 200 mg), Skénan LP® (sulfate de morphine, microgranules en gélules de 10, 30, 60, 100 et 200 mg) ; • voie PO à libération prolongée (1 prise par jour) : Kapanol LP® (sulfate de morphine, gélules de 20, 50 et 100 mg) ; • voies IV, IM, SC : chlorhydrate de morphine. La voie IV peut être continue, discontinue, ou en mode PCA ; Tableau 66-1. Tableau d’équivalence Morphine
Équivalence (exemples) 204
IV PO/3 (20 mg/j)
SC PO/2 (5 mg × 6/j)
PO SC × 2, IV × 3 (10 mg × 6/j)
Thérapeutiques antalgiques médicamenteuses (P) et non médicamenteuses
– le traitement par morphine est arrêté progressivement après prescription prolongée pour éviter la survenue d’un syndrome de sevrage : diminution par paliers de 30 à 50 % de la dose par semaine. ■
Hydromorphone : – agoniste sélectif des récepteurs mu ; – 7,5 fois la puissance de la morphine ; – métabolite de la morphine et de la codéine ; – pharmacologie : biodisponibilité de 22–62 %, métabolisme et excrétion urinaires ; – voie PO : Sophidone LP® ; – indiquée dans les douleurs intenses d’origine cancéreuse en cas de résistance ou d’intolérance à la morphine ; – effets secondaires : dépendance, accoutumance, sevrage.
■
Oxycodone : – agoniste pur des récepteurs mu et kappa ; – 2 fois la puissance de la morphine ; – pharmacologie : délai d’action de 45–60 min, pic d’action de 2–4 h, durée d’action de 12 h ; – voie PO : Oxycontin LP® ; – indications : traitement des douleurs intenses d’origine cancéreuse, ou en cas de résistance ou d’intolérance à la morphine ; – contre-indiquée en cas d’insuffisance rénale ou hépatique sévère.
■
Fentanyl : – 25 mg de fentanyl correspondent à 60 mg de morphine ; – 3 voies d’administration : • voie parentérale en anesthésie générale et sédation en réanimation ; • patch transdermique : Durogésic® (2,5, 5, 7,5, 10 mg), 1 patch/72 h, début d’activité après 4 h, changer d’emplacement régulièrement. La dose peut être augmentée par paliers de 2,5 mg (correspondant à 25 mg/h de fentanyl). Il faut associer au patch des interdoses de morphiniques à courte durée d’action pour les gestes douloureux ; • dispositif pour application buccale de citrate de fentanyl : Actiq® (200, 400, 800, 1 200, 1 600 mg). Efficace en 5 à 10 min : interdoses.
b) Agonistes-antagonistes de la morphine Pas d’association avec les agonistes purs car risque de réversion de l’effet *Concours Internat 1997
analgésique*.
■
Nalbuphine : – activité kappa agoniste et mu antagoniste ; – puissance équivalente à la morphine ; – pharmacologie : délai d’action de 2 à 5 min par voie IV, 15 à 20 min par voie IM, durée d’action de 5 à 6 h ; – voies IV, IM, SC : Nubain® ; 205
ITEM 66
– posologie : 20 mg/kg/4–6 h ; – pas d’intérêt dans le cadre de la douleur chronique (effet plafond).
CONSENSUS Prise en charge de la douleur postopératoire chez l’adulte et l’enfant SFAR, Recommandations formalisées d’experts SFAR, 2008 Nalbuphine : indication dans le cadre de la douleur aiguë postopératoire de l’enfant
■
ITEM 68
.
Buprénorphine : – antagoniste partiel mu et kappa, affinité pour les récepteurs mu 50 fois supérieure à celle de la morphine ; – 30 fois plus puissant que la morphine ; – pharmacologie : • voie PO : délai d’action de 15 à 60 min, activité maximale obtenue en 2 h, durée d’action de 6–8 h ; • voie parentérale : délai d’action de 10–20 min ; – indiquée dans le cadre de la douleur chronique ; – intérêt de la galénique : Temgésic®, glossettes sub-linguales, 0,4 mg/4–6 h ; également IV, IM ou SC, 0,3 mg par dose ; – inconvénients : effet plafond, dépression respiratoire non antagonisée par la Naloxone®, somnolence.
CONSENSUS Traitements antalgiques médicamenteux des douleurs cancéreuses par excès de nociception chez l’adulte Standards, options et recommandations, 2002 Tableau 66-2. Durée de prescription des morphiniques Médicaments
Durée maximale de prescription
Morphine injectable
Amp. de 10, 20, 50, 100 mg Sans système actif pour perfuser
7 jours 28 jours
Morphine solution buvable
Amp. de 10, 20 mg Flacon préparé en officine
14 jours
Sévredol®
Cp de 10, 20 mg
14 jours
Actiskénan®
Gél. de 5, 10, 20, 30 mg
14 jours
Sophidone LP®
Gél. de 4, 8, 16, 24 mg
28 jours
Glossettes de 0,2 mg
28 jours
Cp de 10, 30, 60, 100, 200 mg
28 jours
Skénan LP®
Gél. de 10, 30, 60, 100 mg
28 jours
Kapanol LP®
Gél. de 20, 50, 100 mg
28 jours
Temgésic
®
Moscontin LP
Durogésic
206
Formes
ITEM 167
®
®
Patch de 25, 50, 100 μg/h
28 jours (14 × 2)
Thérapeutiques antalgiques médicamenteuses (P) et non médicamenteuses
B. Autres traitements médicamenteux 1. Antidépresseurs a) Mécanisme d’action ■ L’effet antalgique est indépendant des effets thymoanaleptiques : régression de la douleur plus précoce, même chez les patients non déprimés, non corrélée à une amélioration de l’humeur, et analgésie obtenue avec des doses plus faibles que pour l’effet antidépresseur. ■
Leur mécanisme d’action reste imparfaitement élucidé : action centrale par blo-
cage de la recapture de la sérotonine/noradrénaline ; autres mécanismes évoqués : action sur les systèmes opioïdes endogènes, effet antihistaminique, blocage des récepteurs NMDA, effet sur le métabolisme de la substance P. ■
L’analgésie est observée après 5 à 10 jours de traitement.
b) Choix de la molécule Les différentes spécialités, toutes de voie d’administration orale, sont présentées dans le tableau 66-3.
CONSENSUS Prise en charge de la douleur chronique de l’adulte en médecine ambulatoire ANAES, 1999 Tableau 66-3. Antidépresseurs utilisés dans le traitement de la douleur Classe Antidépresseurs tricycliques
Inhibiteurs de la recapture de la sérotonine
Médicament
Posologie (mg/j)
Amitriptyline (Laroxyl®) Clomipramine (Anafranil®) Imipramine (Tofranil®) Désipramine (Pertofran®)
75–150
Paroxétine (Deroxat®) Fluvoxamine (Floxyfral®) Citalopram (Seropram®) Sertraline (Zoloft®) Venlafaxine (Effexor®)
20–40 100–300 20–60 50–200 75–150
c) Indications ■ Douleurs neuropathiques (neuropathies diabétiques, postzostériennes). ■
Céphalées, migraines, céphalées de tension chroniques, algies vasculaires de la face.
■
Douleurs rhumatologiques (arthrites inflammatoires, fibromyalgies, douleurs
lombaires chroniques). ■
Douleurs cancéreuses.
d) Effets secondaires ■ Sédation, hypotension orthostatique, troubles du rythme, effets anticholinergiques. 2. Antiépileptiques a) Mécanismes d’action ■ Blocage des canaux sodiques avec effet stabilisant des membranes ; fixation sur les récepteurs GABA-ergiques (barbituriques et benzodiazépines) entraînant une 207
ITEM 66
modification de perméabilité des canaux sodiques ; facilitation du transport du GABA avec inhibition de la recapture ou augmentation de la libération du GABA (gabapentine), ou diminution du métabolisme du GABA par inhibition de la GABAtransaminase (vigabatrin). ■
Actifs en particulier sur la composante paroxystique de la douleur et l’allo-
dynie (sensation douloureuse secondaire à une stimulation normalement non douloureuse).
b) Choix de la molécule Les différentes spécialités, toutes de voie d’administration orale, sont présentées dans le tableau 66-4.
CONSENSUS Prise en charge de la douleur chronique de l’adulte en médecine ambulatoire ANAES, 1999 Tableau 66-4. Différents antiépileptiques indiqués dans le traitement de la douleur Médicament
Posologie
Modalités
Carbamazépine (Tégrétol®)
10 mg/kg/j
En demi-prise pour les formes LP, à atteindre par paliers de 2 à 5 jours
Clonazépam (Rivotril®)
0,05 à 0,1 mg/kg/j
À atteindre progressivement
Gabapentine (Neurontin )
Débuter à 300 mg/j
Monter par paliers à 1 200 mg en 1 à 2 semaines, jusqu’à si nécessaire un maximum de 3 600 mg/j
Prégabaline (Lyrica®)
Débuter à 150 mg/j
Monter à 300 mg/j après 3 à 7 jours, 600 mg au maximum, après 7 jours supplémentaires si besoin
®
c) Indications ■ Douleurs neuropathiques périphériques, névralgies du trijumeau (carbamazépine), névralgies postzostériennes (gabapentine), neuropathie diabétique. ■
Douleurs centrales et post-AVC.
■
Migraines.
d) Effets secondaires ■ Somnolence, troubles de l’équilibre. ■
Troubles hématologiques, hépatiques ou cardiovasculaires.
3. Autres traitements ■ Antimigraineux spécifiques ■
ITEM 262
.
Psychotropes : – sédatifs, anxiolytiques, tranquillisants, hypnotiques (Lexomil®, Urbanyl®, Tranxène®) ; – pas d’action antalgique propre ; – utiles pour traiter certains effets indirects de la douleur (anxiété, insomnie) ; – potentialisation des effets dépresseurs respiratoires et sédatifs des morphiniques.
208
Thérapeutiques antalgiques médicamenteuses (P) et non médicamenteuses
■
Myorelaxants et antispasmodiques : – traitement des contractures musculaires douloureuses : benzodiazépines (tétrazépam : Myolastan®, diazépam : Valium®) mais somnolence importante ; thiocolchicoside (Coltramyl®) ; – contractures spastiques de la SEP, des affections du SNC : baclofène (Liorésal®) ; – traitement des spasmes digestifs, utérins ou urinaires : phloroglucinol (Spasfon®).
■
Traitements divers : – biphosphonates (Clastoban®, Didronel®, Actonel®, Aredia®) : indiqués dans la maladie de Paget, l’ostéoporose, les hypercalcémies malignes, les métastases osseuses ; – calcitonine (Cibacalcine®, Calsyn®, Calcitar®) : indiquées dans les algodystrophies, l’ostéoporose, les hypercalcémies, les syndromes post-fracturaires ; – corticothérapie locale et générale +++.
III. TRAITEMENTS NON MÉDICAMENTEUX Ils sont beaucoup plus rarement employés.
A. Traitements neurochirurgicaux Indiqués dans les algies chroniques, rebelles aux traitements antalgiques usuels. Les techniques sont différentes selon la physiopathologie, en particulier en fonction de la distinction entre douleur par excès de nociception et douleur neuropathique.
1. Méthodes d’interruption des voies de la nociception Elles sont indiquées en cas de douleurs par excès de nociception, en général liées à une évolutivité néoplasique et mal contrôlée par les substances morphiniques : ■
interruption au niveau de la jonction radicellomédullaire : radicellotomie posté-
rieure sélective (section pluriétagée des fibres sensitives de petit calibre). Réalisée en cas d’algies cancéreuses limitées (exemple : syndrome de Pancoast-Tobias), où il convient de respecter la sensibilité profonde, nécessaire au fonctionnement moteur d’un membre ; ■
interruption au niveau du faisceau spinothalamique : cordotomie spinothalami-
que cervicale ou dorsale ou tractotomie pédonculaire stéréotaxique. Réalisée en cas de douleurs cancéreuses strictement unilatérales du fait du risque d’atteinte de la commande respiratoire centrale (ostéosarcome fémoral, cancer ORL) ; ■
interruption au niveau du nerf trijumeau : thermocoagulation du nerf trijumeau
par voie percutanée. Réalisée en cas de névralgie du trijumeau essentielle ou de névralgie symptomatique (SEP).
2. Méthodes augmentatives Elles sont indiquées en cas de douleurs neuropathiques exclusivement : ■
neurostimulation transcutanée à visée analgésique : – en cas de douleur de topographie limitée, mono ou biradiculaire ; 209
ITEM 66
– elle consiste en une stimulation à haute fréquence et faible intensité au moyen d’électrodes fixées sur la peau et reliées aux bornes d’un générateur, provoquant des paresthésies dans le territoire des douleurs ; ■
stimulation médullaire : – en cas d’algies neuropathiques sévères, secondaires à une lésion tronculaire ou radiculaire chronique, dans certaines douleurs postamputation ou certaines algies chroniques en rapport avec une dystrophie réflexe sympathique ; – elle consiste en l’implantation d’une électrode quadripolaire dans l’espace péridural postérieur, reliée à un pacemaker neurologique implanté au niveau du flanc et programmé par télémétrie ;
■
stimulation cérébrale profonde : – en cas de douleurs neuropathiques sévères ; – elle consiste en l’implantation stéréotaxique d’une électrode au contact du noyau ventro-postéro-latéral du thalamus, reliée à un pacemaker neurologique implanté en région sous-claviculaire ;
■
stimulation du gyrus moteur : elle consiste en l’implantation d’une électrode
dans l’espace extradural, immédiatement en regard du cortex moteur, reliée à un pacemaker neurologique.
3. Pharmacothérapie locale Elle consiste à apporter la substance antalgique directement au contact de ses récepteurs, afin d’augmenter l’action thérapeutique et de diminuer les effets secondaires : ■
morphinothérapie intrathécale : indiquée en cas de douleurs néoplasiques
intenses, en particulier intéressant la moitié inférieure du corps et rebelles à la morphine par voie orale à doses suffisantes, ou en cas d’effets secondaires indésirables majeurs ; ■
morphinothérapie intracérébroventriculaire : – indiquée en cas d’algies cervicofaciales diffuses, liées aux cancers de la sphère ORL et/ou stomatologiques ; – elle consiste à administrer la morphine au contact direct des récepteurs opioïdes périventriculaires, à la faveur d’un geste neurochirurgical simple.
B. Traitements non médicamenteux et non chirurgicaux Il s’agit de techniques utilisant un agent physique délivrant de l’énergie et des prises en charge psychothérapeutiques. Elles peuvent trouver leur place avant la pharmacologie ou à la suite d’une intervention chirurgicale ou en association à l’une de ces méthodes.
1. Thermothérapie C’est l’analgésie par la chaleur. Par exemple, enveloppement dans des serviettes chaudes, Fango, para-Fango, emplâtres, lampes à infrarouges, courants à ondes courtes ou ultrasons, faisant mieux pénétrer la chaleur en profondeur.
2. Cryothérapie C’est l’analgésie par le froid. Elle est utilisée dans les douleurs ostéoarticulaires (entorses, contusions). 210
Thérapeutiques antalgiques médicamenteuses (P) et non médicamenteuses
3. Vibrothérapie C’est l’analgésie par les vibrations électriques. Des ultrasons produits par des émetteurs piézoélectriques provoquent des vibrations mécaniques et agissent à la fois par leurs effets thermiques profonds et par les effets mécaniques des vibrations. Cette technique est utile dans les douleurs rhumatologiques.
4. Contrôle de la douleur par l’électricité C’est une méthode thérapeutique ancienne prise à nouveau en considération depuis la théorie du portillon de Wall et Melzach : stimulation à haute fréquence et de basse intensité. Le mécanisme d’action serait une activation des systèmes opiacés endogènes. Dans certains cas (rhumatismes articulaires, lombalgies, raideurs articulaires posttraumatiques douloureuses), des stimulations à basse fréquence et à forte intensité peuvent être pratiquées à distance de la zone douloureuse, au niveau des points d’acupuncture ou des zones gâchettes.
5. Prise en charge psychologique Il s’agit des thérapies classiques, mais aussi de techniques de relaxation soit hypnotiques, soit analytiques. L’indication sera posée par un spécialiste
ITEMS 69, 142
.
IV. ÉVALUATION DE L’EFFICACITÉ DU TRAITEMENT ANTALGIQUE ITEM 65 ■
Après instauration d’un traitement antalgique, il faudra s’assurer de son effi-
cacité, de sa bonne adaptation et de l’absence d’effets secondaires importants. L’efficacité du traitement antalgique devra être évaluée régulièrement et systématiquement, notamment après chaque modification du traitement antalgique, grâce aux mêmes outils que ceux utilisés pour l’évaluation de la douleur initiale* : – échelles unidimensionnelles, qui donnent une mesure de l’intensité : échelle verbale simple (EVS) (douleur absente, faible, modérée, forte, insupportable), échelle numérique simple (ENS) (de 0 à 10) et échelle visuelle analogique (EVA) (de 0 à 100 mm), cette dernière méthode étant la plus valide et reproductible ; – échelles multidimensionnelles : questionnaires d’adjectifs (Mac Gill Pain Questionnaire, questionnaire Douleur de Saint-Antoine) ; – échelles comportementales, indiquées lorsque la communication verbale est difficile : échelle comportementale de Bourhis, échelle de Comfort pour les enfants admis en réanimation. ■
La consommation d’antalgiques, notamment d’interdoses en cas de traitement
morphinique, est également un élément d’appréciation à prendre en compte dans l’évaluation de l’efficacité du traitement antalgique de fond. ■
Si la douleur persiste, il faudra s’assurer du dosage correct de l’antalgique, de
la compliance du malade au traitement
ITEM 170
et rechercher une évolution
du phénomène douloureux. Dans tous les cas, le passage au palier supérieur est nécessaire. Au contraire, si la douleur a totalement disparu, il s’agira de proposer une diminution du traitement antalgique par palier différent selon la nature du traitement antalgique prescrit. 211
*Concours Internat 1991, ECN 2007
ITEM 66
Fiche
Dernier tour
Thérapeutiques antalgiques médicamenteuses et non médicamenteuses Stratégie de prise en charge globale d’une douleur aiguë ou chronique : ■ le traitement antalgique dépend de l’étiologie, du mécanisme, du caractère aigu ou chronique, de l’intensité et de l’évolution dans le temps de la douleur ; ■ traitement multimodal, voie d’administration la plus simple possible (PO +++), posologies adaptées, administration systématique en période douloureuse ; ■ prévention des effets secondaires ; ■ réévaluation de l’efficacité régulièrement grâce aux échelles spécifiques ; ■ prise en charge globale et multidisciplinaire (relation médecin-malade +++). Traitements médicamenteux de la douleur : ■ analgésiques : – analgésiques de palier 1 (tableau 66-5) ; – analgésiques de palier 2 (tableau 66-6) ; – analgésiques de palier 3 (opioïdes forts) : • agonistes purs (tableau 66-7) ; • agonistes-antagonistes (tableau 66-8). ■ autres traitements médicamenteux : – antidépresseurs : • tricycliques ou inhibiteurs de la recapture de la sérotonine ; • indiqués pour les douleurs neuropathiques , les céphalées, les douleurs rhumatologiques et cancéreuses ; – antiépileptiques : • action sur les paroxysmes douloureux ; • indiqués dans les douleurs neuropathiques , les douleurs centrales, la migraine ; – autres : antimigraineux spécifiques, psychotropes (sédatifs, tranquillisants, hypnotiques), myorelaxants et antispasmodiques, traitements divers (corticothérapie). Traitements non médicamenteux : ■ traitements neurochirurgicaux : – méthodes d’interruption des voies de la nociception : radicellotomie postérieure sélective, cordotomie spinothalamique, thermocoagulation du trijumeau ; – méthodes augmentatives : neurostimulation transcutanée, stimulation médullaire, cérébrale profonde, ou du gyrus moteur ; – pharmacothérapies locales : morphinothérapie intrathécale ou intracérébroventriculaire ; ■ traitements non chirurgicaux : thermothérapie, cryothérapie, vibrothérapie, contrôle de la douleur par l’électricité, prise en charge psychologique. Évaluation de l’efficacité d’un traitement antalgique : ■ échelles unidimensionnelles (EVS, ENS, EVA ), multidimensionnelles (Mac Gill Pain Questionnaire, questionnaire Douleur Saint-Antoine), comportementales (échelle comportementale de Bourhis, échelle de Comfort) ; ■ évaluation de la compliance .
u
212
Thérapeutiques antalgiques médicamenteuses (P) et non médicamenteuses
Fiche
Dernier tour Tableau 66-5. Analgésiques de palier 1
Médicaments
Aspirine
Mécanisme d’action Antiinflammatoire Antiagrégant plaquettaire
Paracétamol
AINS
Voie d’administration
Nom commercial
Aspégic®, PO à libération Aspirine immédiate pH8® (LP) ou LP IV
Aspégic®
Action centrale
PO
Dafalgan®
IV
Perfalgan®
Antiinflammatoire Inhibition COX-1 et 2
PO
Nurofen®
IV
Profénid®
Posologie
Effets secondaires
1 g/8 h
Digestifs , hématologiques , allergiques , neurologiques
1 g/6 h
Insuffisance hépatique aiguë
400 mg/8 h
Digestifs , hématologiques , allergiques , 100–300 mg/j insuffisance rénale
Tableau 66-6. Analgésiques de palier 2 Médicaments
Mécanisme d’action
Voie d’administration PO à libération immédiate ou LP
Nom commercial Efferalgan codéiné®, Dicodin® (LP)
Posologie
30 à 180 mg/j
Effets secondaires Nausées, vomissements, constipation
Codéine
Morphinique faible Association au paracétamol
Dextropropoxyphène (retrait progressif du marché en 2009–2010)
Morphinique PO faible Association au paracétamol
Tramadol
Effet morphinique + effet monoaminergique
PO à libération immédiate ou LP IV
Topalgic®
50–100 mg/ Nausées, 4–6 h vomissements, (LP : 12 h) somnolence, malaise, constipation
Néfopam
Action centrale Pas d’effet morphinique
IM ou perfusion IV
Acupan®
20 mg/4 h
Di-Antalvic® 60 mg/8 h
Nausées, vomissements, constipation, somnolence, vertiges
Douleurs à l’injection, sueurs, nausées, vomissements, malaise, manifestations atropiniques
u
213
ITEM 66
Fiche
Dernier tour Tableau 66-7. Agonistes morphiniques purs
Médicaments
Puissance Voie morphid’adminisnique tration
Nom Posologie Indicommercial cations
Durée de prescription Ordonnance sécurisée
Morphine
1
PO à libération immédiate ou LP
Sévrédol®, Débuter Actià 10 mg/ skénan®, 4h Moscontin LP®, Skénan LP®
IM, IV, SC
Chlorhydrate de morphine
Douleur aiguë ou chronique, en titration, en PCA ou en traitement de fond
7 j IV, 28 j en l’absence de système de perfusion, 14 j PO, 28 j PO LP 28 j
Hydromorphone
7,5
PO
Sophidone LP®
Variable
Douleurs cancéreuses avec intolérance ou résistance à la morphine
Oxycodone
2
PO
Oxycontin LP®
Variable
28 j Douleurs cancéreuses avec intolérance ou résistance à la morphine
Fentanyl
100
IV
Fentanyl®
1 patch/ 72 h
Anesthésie
Patch transdermique
®
Durogésic
Application Actiq® buccale
28 j
Traitement de fond des douleurs chroniques Interdoses
Tableau 66-8. Agonistes-antagonistes morphiniques
214
Médicaments
Puissance morphinique
Voie d’administration
Nalbuphine
1
IM, IV, SC
Buprénorphine
30
Nom commercial
Posologie
Indications
10–20 μg/ kg/4–6 h
Douleur aiguë en pédiatrie
PO, Temgésic® glossette sub-linguale
0,4 mg/ 4–6 h
Douleur chronique (prescription pour 28 j)
IV, IM, SC
0,3 mg/4–6 h
Nubain®
ITEM 67
Anesthésie locale, locorégionale et générale
OBJECTIFS ● Argumenter les indications, les contre-indications et les risques d’une anesthésie locale, locorégionale ou générale. ● Préciser les obligations réglementaires à respecter avant une anesthésie. LIENS TRANSVERSAUX ITEM 4
Évaluation des examens complémentaires dans la démarche médicale : prescriptions utiles et inutiles.
ITEM 5
Indications et stratégies d’utilisation des principaux examens d’imagerie.
ITEM 6
Le dossier médical. L’information du malade. Le secret médical.
ITEM 171
Recherche d’un terrain à risque et adaptation thérapeutique. Interactions médicamenteuses.
ITEM 175
Prescription et surveillance d’un traitement antithrombotique.
ITEM 178
Transfusion sanguine et produits dérivés du sang : indications, complications. Hémovigilance.
Sujets tombés aux concours de l’Internat ●
Sujet tombé
2003, Zone Sud Femme de 82 ans, consultation aux urgences pour impotence du membre supérieur droit avec engourdissement des doigts après chute à domicile la veille au soir. Dernier repas à 6 h. Antécédents : chirurgie de la hanche avec boiterie persistante et marche avec canne, diabète équilibré. Radio : fracture du poignet droit type Goyrand-Smith. Comment envisagez-vous le traitement de cette fracture ? Justifiez votre proposition sur les plans anesthésiologique et clinique.
CONSENSUS ● Indications de la curarisation en anesthésie – SFAR, juillet 1999. ● Antibioprophylaxie de l’adulte en milieu chirurgical – SFAR, décembre 1992 – Actualisation, mars 1999. ● Organisation des unités de surveillance continue – Recommandations SFAR-SRLF, février 2005. ● Prévention de la maladie thromboembolique veineuse périopératoire et obstétricale – SFAR, 2005. ● Les blocs périphériques des membres chez l’adulte – SFAR, 2003. 215
ú
ITEM 67
Informations des patients. Recommandations destinées aux médecins – SFAR, mars 2000. ● Les examens préopératoires systématiques – SFAR, décembre 1998. ● Survey of anesthesia-related mortality in France. Lienhart A, Auroy Y, Pequignot F, Benhamou D, Warszawski J, Bovet M, Jougla E. Anesthesiology 2006 ; 105 (6) : 1087–97. ●
POUR COMPRENDRE… ■
On réalise 8 millions d’anesthésies par an en France, dont 20 % d’anesthésies
locorégionales. ■
Il existe une augmentation de la probabilité d’avoir une anesthésie avec l’âge
(30 % par an pour les hommes > 75 ans). ■
Objectif de l’anesthésie : permettre la réalisation d’actes douloureux ou
inconfortables. ■
L’anesthésie évite au malade de ressentir la douleur et de garder un souvenir de
l’acte. ■
Elle évite ou limite les réactions neuroendocriniennes réflexes liées à
l’agression. ■
Elle procure une immobilité et un relâchement musculaire nécessaires pour la
réalisation d’actes chirurgicaux. ■
On distingue l’anesthésie générale avec perte de conscience, et l’anesthésie
locale ou locorégionale avec disparition de la sensibilité douloureuse et immobilité d’une partie du corps. Les deux techniques peuvent être associées. ■
Il existe un risque anesthésique : complications graves mais extrêmement
rares. Une anesthésie peut provoquer de façon imprévisible le décès d’une personne considérée en bonne santé. On dénombre un décès ou accident grave (avec des séquelles neurologiques irréversibles) pour 10 000 anesthésies, soit 700 cas par an en France, 50 % des cas au moment du réveil et d’origine respiratoire. ■
Des efforts importants et des obligations légales ont été mis en œuvre pour
réduire la morbi-mortalité anesthésique (divisée par 10 entre 1982 et 1999).
I. ANESTHÉSIE GÉNÉRALE (AG) A. Généralités ■
L’AG consiste à provoquer une perte de conscience, associée à une analgésie et
une immobilité. ■
Elle comporte 3 phases :
■
l’induction : passage de l’état éveillé à l’état d’inconscience ;
■
l’entretien : de durée aussi longue que nécessaire en fonction de la chirurgie,
voire parfois au-delà ; ■
le réveil : récupération progressive des différentes fonctions, de façon plus ou
moins rapide suivant les médicaments injectés. 216
Anesthésie locale, locorégionale et générale
■
Il existe différentes profondeurs d’anesthésie : – l’AG proprement dite, avec perte totale de la conscience pour la chirurgie profonde ; – la sédation ou anesthésie vigile, avec conservation d’un certain degré de conscience, pour les procédures moins invasives.
■
L’anesthésie peut être précédée d’une prémédication visant à induire une séda-
tion pour calmer l’anxiété. ■
L’AG est provoquée grâce à l’administration de trois types de médicaments : – un hypnotique ou anesthésique général : • administration par voie intraveineuse (IV) : barbiturique (thiopental), ou non barbiturique (propofol, étomidate ou kétamine), utilisé pour l’induction et plus rarement pour l’entretien (propofol) ; • administration par voie inhalée : protoxyde d’azote et gaz halogénés (isoflurane, desflurane ou sévoflurane), utilisés pour l’entretien chez l’adulte et l’enfant et pour l’induction chez l’enfant et parfois l’adulte. • les benzodiazépines (midazolam) administrées par voie IV provoquent également une sédation plus ou moins importante et peuvent être associées aux précédents ou utilisées en prémédication ; – un analgésique central dérivé de la morphine : sufentanil, alfentanil, rémifentanil, drogues dérivées de la morphine, qui se différencient essentiellement par leur durée d’action ; – si nécessaire un curare pour augmenter le relâchement musculaire au moment de l’intubation orotrachéale et pendant le geste chirurgical. Les curares agissent en bloquant la transmission synaptique au niveau de la jonction neuromusculaire. On distingue les curares dépolarisants (succinylcholine) et les curares non dépolarisants (vécuronium, atracurium/cisatracurium, rocuronium, mivacuriun).
■
Les médicaments anesthésiques vont entraîner une dépression hémodynamique
(hypotension artérielle) et une dépression respiratoire plus ou moins importantes. En cas d’anesthésie générale (mais pas de sédation), la prise en charge artificielle de la ventilation est habituellement nécessaire (assistance ventilatoire avec masque laryngé ou intubation orotrachéale).
B. Indications Il s’agit de tout acte dont le caractère douloureux et désagréable est insupportable chez un sujet conscient : ■
chirurgie profonde ;
■
chirurgie superficielle (anesthésie de « confort ») ;
■
actes non chirurgicaux : examen clinique douloureux ou désagréable (pédiatrie),
endoscopies digestives, chocs électriques externes, sismothérapie, actes de radiologie interventionnelle ; ■
contre-indications à l’anesthésie locale ou locorégionale secondaires soit à la
nature de l’intervention (localisation anatomique, durée de l’intervention), soit au terrain du patient ; ■
refus du patient de l’anesthésie locorégionale. 217
ITEM 67
C. Contre-indications Il n’existe pas de contre-indication absolue, mais il faut toujours évaluer le rapport bénéfice/risque du geste chirurgical et de la technique anesthésique qu’il suppose.
D. Risques ■
On observe une diminution importante des risques de l’AG grâce à une meilleure
prise en charge péri-opératoire, reposant sur des principes d’organisation et de surveillance : – obligation de la consultation d’anesthésie, avec évaluation du risque et mise en place d’une stratégie anesthésique ; – amélioration de la prise en charge peropératoire avec l’amélioration des propriétés pharmacologiques des agents d’anesthésie et monitorage systématique ; – surveillance postopératoire obligatoire en salle de surveillance postinterventionnelle (SSPI ou salle de réveil). ■
La mortalité liée directement à l’anesthésie est de 1 pour 140 000 actes en
France, d’après l’enquête SFAR réalisée en 2003. ■
Il faut différencier les risques liés à la chirurgie (pertes sanguines, infection du
site opératoire, lâchage de suture, insuffisance d’organe secondaire à une résection importante) et les risques liés au terrain.
■
Les risques persistants sont les suivants : – risque d’hypoxie par impossibilité de ventilation et d’intubation, dépression respiratoire, inhalation du liquide digestif par dépression des réflexes protecteurs des voies aériennes au moment de l’induction, en particulier en cas d’anesthésie en urgence sans jeûne préalable (« estomac plein », induction dite en « séquence rapide », sans ventilation au masque) ou lors de la phase de réveil, ou par défaillance du respirateur. L’hypoxie peut entraîner le décès ou des séquelles neurologiques graves ; – choc anaphylactique, en particulier par allergie aux curares, au latex, ou aux antibiotiques, mais aussi aux anesthésiques généraux ou aux antalgiques (AINS) ; – décompensation d’une pathologie préexistante secondaire à l’AG, à la chirurgie ou à l’arrêt des traitements de fond, en particulier pulmonaire (asthme, BPCO) ou cardiaque (ischémie myocardique postopératoire, OAP) ; – hyperthermie maligne (exceptionnelle mais grave, et spécifique à l’anesthésie générale).
II. ANESTHÉSIE LOCALE ET LOCORÉGIONALE (ALR) A. Généralités L’anesthésie locale et l’ALR sont des techniques anesthésiques dont le but est de bloquer l’influx nerveux douloureux et moteur dans un territoire donné grâce à l’injection d’un produit anesthésique local d’action réversible, à proximité d’un plexus, d’un tronc nerveux ou d’un nerf. Elles préservent la conscience du patient et donc ne nécessitent pas de contrôle des voies aériennes supérieures ni d’assistance ventilatoire. 218
Anesthésie locale, locorégionale et générale
L’anesthésie locale et l’ALR peuvent être utilisées comme seule technique d’anesthésie ou être associées à une sédation, voire à une AG.
1. Anesthésiques locaux (AL) ■ Classification : – aminoamides : lidocaïne, mépivacaïne, bupivacaïne, étidocaïne, ropivacaïne, lévobupivacaine ; – aminoesters : procaïne, chloroprocaïne, tétracaïne. ■
Mécanisme d’action : les AL bloquent de façon temporaire et réversible la pro-
pagation et l’amplitude des potentiels d’action membranaires par inactivation des canaux sodiques. ■
Toxicité : – toxicité locale au niveau des fibres nerveuses, dépendante de la concentration et de la nature du produit (abandon de la lidocaïne par voie intrathécale) ; – toxicité systémique, lors d’une injection intravasculaire accidentelle ou d’un surdosage : toxicité neurologique centrale avec somnolence ou sensation ébrieuse, céphalées, acouphènes, logorrhée, goût métallique dans la bouche, paresthésies péribuccales, tremblements et convulsions généralisées tonicocloniques, jusqu’au coma aréactif ; – toxicité systémique cardiaque dose-dépendante : bradycardie sévère, troubles de conduction avec bloc auriculoventriculaire puis tachycardie ventriculaire et fibrillation ventriculaire. Les AL sont inotropes négatifs et peuvent entraîner un collapsus cardiovasculaire. La bupivacaïne est l’AL le plus cardiotoxique ; – allergie avec les aminoesters, rarissime avec les aminoamides, le plus souvent en relation avec les excipients.
■
Les AL de durée d’installation et de durée d’action différentes (lidocaïne < bupiva-
caïne = lévobupivacaïne = ropivacaïne) peuvent être associés entre eux dans le but d’accélérer l’installation et de prolonger l’action du bloc. Des adjuvants peuvent être ajoutés de façon à améliorer la qualité du bloc (adrénaline, morphiniques, clonidine). ■
Doses maximales à respecter : – lidocaïne : 5 mg/kg ; bupivacaïne : 2 mg/kg ; ropivacaïne : 2,5 mg/kg (150 à 200 mg) ; lévobupivacaïne : 150 mg ; – ces doses maximales sont à moduler selon l’importance de la résorption vasculaire, qui varie notamment en fonction du site d’injection et de l’adjonction ou non d’adrénaline à l’AL.
■
Il faut privilégier l’utilisation des énantiomères S (lévobupivacaïne et ropiva-
caïne), qui sont les moins toxiques.
2. Techniques d’ALR a) Blocs périmédullaires ou blocs centraux ■ Rachianesthésie : ponction au niveau d’un espace intervertébral (L3-L4 ou L4-L5) après repérage, injection intrathécale de l’AL après observation d’un reflux de LCR. ■
Anesthésie péridurale : ponction avec une aiguille de Tuohy, également au
niveau d’un espace intervertébral lombaire ou thoracique après repérage, identification de l’espace péridural entre le ligament jaune et la dure-mère par la 219
ITEM 67
technique de perte de résistance ; injection de l’AL dans cet espace entourant la dure-mère, dans l’aiguille ou à travers un cathéter mis en place. ■
Ces blocs induisent un bloc moteur et sensitif central bilatéral et symétrique qui
concerne les membres inférieurs et remonte plus ou moins haut au niveau de l’abdomen ou du thorax. Le bloc de la rachianesthésie, pour une quantité d’AL bien moindre (10 à 15 fois), entraîne une anesthésie plus intense et plus rapide que la péridurale. Les deux techniques induisent un bloc sympathique produisant une vasoplégie avec risque d’hypotension artérielle (plus intense dans le cas de la rachianesthésie).
b) Blocs périphériques CONSENSUS Les blocs périphériques des membres chez l’adulte SFAR, 2003 Blocs périplexiques (plexus brachial, plexus lombaire), ou péritronculaires (à proximité d’un tronc nerveux du membre supérieur ou inférieur, ou au niveau pariétal thoracique ou abdominal) : l’injection de l’AL est réalisée après repérage anatomique et localisation du plexus ou du tronc nerveux à bloquer grâce à une technique de neurostimulation ou par échographie.
c) Anesthésie locale par infiltration L’injection de l’AL est réalisée au niveau du site opératoire, en intradermique ou en sous-cutané, avec un effet quasi immédiat et une durée d’action différente selon la nature de l’AL. Le volume injecté dépend de la surface chirurgicale à anesthésier, tout en respectant les doses maximales autorisées. Un cathéter d’infiltration peut être mis en place au niveau de la cicatrice dans le but de prolonger la durée de l’analgésie postopératoire. Les solutions adrénalinées ne doivent pas être utilisées aux extrémités (doigts, orteils, verge) car il existe un risque de nécrose secondaire.
d) Anesthésie topique Application cutanée de crème EMLA® 90 minutes avant le geste, ou administration d’AL sous forme de collyre avant chirurgie ophtalmologique.
B. Indications L’indication d’une ALR dépend essentiellement de la localisation de la chirurgie, du terrain et des habitudes de l’anesthésiste responsable de sa réalisation. ■
Indications des blocs centraux : – rachianesthésie et anesthésie péridurale : toute chirurgie de niveau ≤ T10 et d’une durée < 3 h (chirurgie urologique, des membres inférieurs, vasculaire, pariétale abdominale, gynécologique, obstétricale) ; – la péridurale est actuellement surtout indiquée pour l’analgésie postopératoire et l’analgésie du travail obstétrical.
■
Indications des blocs périphériques : tout geste chirurgical strictement localisé
au territoire bloqué, d’une durée < 6 h. Ils concernent principalement la chirurgie orthopédique et la traumatologie. Ils présentent un intérêt particulier pour la prise en charge de la douleur postopératoire et la rééducation, notamment grâce à la mise en place de cathéters.
220
Anesthésie locale, locorégionale et générale
■
Indications des infiltrations : chirurgie superficielle et de plus en plus chirurgie
profonde. ■
Indications des anesthésies topiques : – EMLA® : ponction transcutanée ; – collyre : chirurgie de la cataracte.
C. Contre-indications ■
Communes à toutes les anesthésies locales et ALR : – refus du patient (après information éclairée) ; – infection au point de ponction ; – troubles de l’hémostase spontanés ou secondaires à un traitement anticoagulant et compression artérielle locale impossible, en particulier pour les blocs périmédullaires (risque d’hématome compressif) ; – contre-indications aux AL : allergie et certaines cardiopathies sévères (exceptionnelles) ; – troubles neurologiques suspects ou mal étiquetés.
■
Contre-indications spécifiques aux blocs périmédullaires : hypovolémie et insta-
bilité hémodynamique (aggravées par le bloc sympathique induit).
D. Risques ■
Échec et anesthésie insuffisante.
■
Lésions neurologiques : localisation nerveuse traumatisante ou injection intra-
neurale ou solution injectée toxique. ■
Toxicité systémique neurologique et cardiaque des AL.
■
Perforation d’organe (pneumothorax…).
■
Hématome et dissection artérielle, en particulier hématome périmédullaire
avec compression médullaire pour les blocs centraux. ■
Infection, en particulier méningite dans le cas de la rachianesthésie.
■
Risque d’arrêt cardiaque secondaire aux conséquences hémodynamiques des
blocs centraux.
III. OBLIGATIONS RÉGLEMENTAIRES À RESPECTER AVANT UNE ANESTHÉSIE L’anesthésie ne peut être pratiquée que par un médecin anesthésiste, éventuellement assisté par une infirmière anesthésiste diplômée d’État. La pratique de l’anesthésie est réglementée par le décret 94-050 du 5 décembre 1994.
A. Consultation d’anesthésie Elle doit être réalisée plusieurs jours avant une intervention programmée (≥ 48 h). Elle consiste en : ■
un interrogatoire, avec recueil des antécédents personnels et familiaux, notam-
ment d’accidents anesthésiques, des traitements habituels et de risques allergiques (curares, latex, antibiotiques)
ITEM 171
;
221
ITEM 67
■
un examen clinique obligatoire, avec recherche de critères d’intubation difficile,
notamment le degré d’ouverture de bouche (score de Mallampati), examen cardiovasculaire et pulmonaire ; ■
une évaluation du terrain selon la classification ASA (American Society of
Anesthesiology) : – ASA I : absence de maladie systémique ; – ASA II : présence de maladie(s) systémique(s) non invalidante(s) (par exemple, HTA contrôlée non compliquée) ; – ASA III : présence de pathologie(s) systémique(s) entravant la vie courante (par exemple, angor d’effort) ; – ASA IV : présence de pathologie(s) systémique(s) entravant gravement la vie courante avec risque vital permanent (par exemple, rupture d’anévrisme cérébral, insuffisance cardiaque ou respiratoire sévère) ; – ASA V : patient moribond ; ■
la prescription d’examens complémentaires en fonction de l’intervention prévue
et du terrain (RPC SFAR, décembre 1998) ■
ITEM 4, 5
;
la mise en place d’une stratégie anesthésique avec poursuite ou arrêt des traite-
ments habituels (gestion des traitements anticoagulants en particulier), évaluation du risque transfusionnel
ITEM 178
, jeûne préopératoire de 6 à 8 h au minimum pour
les solides et de 2 h pour les liquides clairs (eau, thé, café sans lait) afin de diminuer le risque d’inhalation, évaluation du risque de nausées et vomissements postopératoires afin de prescrire une prophylaxie éventuelle, prescription d’une prémédication et d’une antibioprophylaxie, choix entre AG et/ou ALR, indication d’un monitorage hémodynamique peropératoire spécifique en fonction du terrain (patient avec antécédents cardiovasculaires) et de la chirurgie (risque hémorragique), évaluation du risque thrombotique péri-opératoire (RPC SFAR, 2005)
ITEM 175
.
CONSENSUS Information des patients. Recommandations destinées aux médecins SFAR, mars 2000 L’anesthésiste doit donner des informations au patient sur le choix de la stratégie anesthésique et son déroulement, sur les risques liés à l’anesthésie et les suites postopératoires
ITEM 6
.
B. Visite préanesthésique Elle a lieu la veille ou dans les heures qui précèdent l’anesthésie. Il s’agit de revoir le patient afin de rechercher des modifications pathologiques, vérifier les modalités thérapeutiques et la bonne application des consignes préopératoires, notamment du jeûne et de la prémédication.
C. Préparation de la salle d’intervention en vue d’une anesthésie Il s’agit d’une préparation méthodique rigoureuse et systématique, avec des vérifications consignées sur un registre, datées et signées : vérification du bon fonctionnement du respirateur d’anesthésie, du matériel de monitorage, du matériel 222
Anesthésie locale, locorégionale et générale
d’intubation, de la préparation des produits anesthésiques et de la présence de médicaments d’urgence, des alarmes.
D. Monitorage peranesthésique Les agents anesthésiques modifient profondément la régulation des grandes fonctions vitales. L’anesthésie nécessite donc de suppléer transitoirement aux fonctions physiologiques perturbées et de contrôler l’administration des agents anesthésiques et leurs effets : ■
monitorage continu de l’électrocardiogramme (ECG) ;
■
mesures régulières et à intervalles rapprochés de la pression artérielle (PA),
voire monitorage continu invasif en cas de risque d’instabilité hémodynamique ; ■
monitorage continu de la saturation pulsée en oxygène (SpO2) ;
■
monitorage continu de la capnie (EtCO2) ;
■
monitorage continu de la concentration en oxygène et de la concentration des
agents anesthésiques inhalés dans le circuit d’anesthésie ; ■
monitorage de la curarisation par stimulation intermittente de certains muscles
(par exemple : adducteur du pouce) ; ■
monitorage de la température corporelle, continu en cas de réchauffement par
une couverture externe.
E. Surveillance postinterventionnelle
CONSENSUS Organisation des unités de surveillance continue SFAR-SRLF, février 2005 Prévention de la maladie thromboembolique veineuse péri-opératoire et obstétricale SFAR, 2005 ■
La surveillance postinterventionnelle est obligatoire après tout acte d’anesthésie.
■
Elle se situe en salle de surveillance postinterventionnelle (SSPI) et est réalisée par du
personnel médical formé. ■
Son déroulement et la durée du séjour sont déterminés par le terrain, la nature de la chirur-
gie et la survenue d’événements peropératoires. ■
La sortie de SSPI est autorisée uniquement après dissipation de l’effet des produits anesthé-
siques, en présence d’un patient stable hémodynamiquement et du point de vue respiratoire, conscient, non douloureux, réchauffé, ne présentant pas de nausées et vomissements ni de complications chirurgicales.
F. Cas particulier de l’anesthésie en urgence Les obligations réglementaires en cas d’anesthésie en urgence sont les mêmes qu’en dehors du contexte de l’urgence. Cependant les délais accordés ne sont pas les mêmes, en particulier, la consultation d’anesthésie peut avoir lieu immédiatement avant la chirurgie. La visite préanesthésique n’aura pas lieu d’être. La préparation de la salle en vue d’une anesthésie, le monitorage peropératoire et la surveillance postopératoire répondront aux mêmes obligations*. 223
*Concours Internat 2003
ITEM 67
Fiche
Dernier tour
Anesthésie locale, locorégionale et générale Anesthésie générale (AG) : ■ prémédication ; ■ 3 phases : induction, entretien, réveil ; ■ 3 types d’agents : hypnotique, analgésique, curare ; ■ dépressions hémodynamique et respiratoire secondaires : nécessité d’un contrôle des voies aériennes supérieures et d’une ventilation assistée. Anesthésie locale et locorégionale (ALR) : ■ les AL bloquent la propagation et l’amplitude des potentiels d’action par inactivation des canaux sodiques. Toxicité locale (nerf) et systémique (système nerveux central et cœur ), allergie exceptionnelle ; ■ il faut savoir différencier blocs centraux (rachianesthésie, anesthésie péridurale), blocs périphériques, infiltrations et anesthésies topiques. Indications
Contre-indications
Risques
AG
– Chirurgie profonde ou superficielle – Actes non chirurgicaux douloureux ou désagréables – Contre-indication à l’ALR – Refus du patient de l’ALR après information
Pas de contreindication absolue
– Mortalité de 1/140 000 – Hypoxie – Anaphylaxie – Décompensation de pathologies sousjacentes – Hyperthermie maligne
ALR
– Selon la localisation de la chirurgie, le terrain et l’anesthésiste : • rachianesthésie (et anesthésie péridurale) : toute chirurgie et analgésie postopératoire ≤ T10 et < 3 h • péridurale : analgésie postopératoire et analgésie du travail obstétrical • blocs périphériques : toute chirurgie localisée au territoire donné et < 6 h, analgésie postopératoire avec mise en place de cathéter • infiltrations : chirurgie superficielle et profonde
– Refus du patient après information – Infection au point de ponction – Troubles de l’hémostase et compression vasculaire impossible – Contre-indications aux AL – Atteintes neurologiques – Blocs centraux : instabilité hémodynamique
– Échec ou anesthésie insuffisante – Lésions neurologiques – Toxicité systémique des AL – Perforation d’organe – Blocs centraux : hématomes périmédullaires , méningites, arrêt cardiaque
u
224
Anesthésie locale, locorégionale et générale
Fiche
Dernier tour – anesthésies topiques : ponctions transcutanées pour l’EMLA® et chirurgie de la cataracte pour le collyre
Obligations réglementaires à respecter avant une anesthésie : ■ consultation d’anesthésie : – obligatoire , ≥ 48 h avant la chirurgie programmée ; – interrogatoire et examen clinique : recherche de risques anesthésiques (pathologies sous-jacentes, allergie , critères d’intubation difficile ) ; – score ASA ; – prescription d’examens complémentaires si nécessaire ; – mise en place d’une stratégie anesthésique ; – information éclairée au patient ; – prescription d’une période de jeûne préopératoire ; ■ visite préanesthésique ; ■ préparation de la salle d’intervention en vue d’une anesthésie : vérifications consignées sur un registre, datées et signées ; ■ monitorage peropératoire : ECG, PA, SpO2, EtCO2, concentrations en O2 et en gaz halogénés, curarisation, température ; ■ surveillance postinterventionnelle : obligatoire , en SSPI, par du personnel spécialisé.
225
This page intentionally left blank
ITEM 201
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces
OBJECTIF ● Identifier les situations d’urgence et planifier leur prise en charge. LIENS TRANSVERSAUX ITEM 101
Pathologie d’inoculation.
ITEM 103
Prévention du tétanos.
ITEM 178
Transfusion sanguine et produits dérivés du sang : indications, complications. Hémovigilance.
ITEM 192
Déficit neurologique récent.
ITEM 195
Douleurs abdominales et lombaires aiguës chez l’enfant et chez l’adulte.
ITEM 197
Douleur thoracique aiguë et chronique.
ITEM 198
Dyspnée aiguë et chronique.
ITEM 199
État confusionnel et trouble de conscience.
ITEM 200
État de choc.
ITEM 213
Piqûres et morsures. Prévention de la rage.
ITEM 214
Principales intoxications aiguës.
ITEM 238
Fracture de l’extrémité inférieure du radius chez l’adulte.
ITEM 239
Fracture de l’extrémité supérieure du fémur chez l’adulte.
ITEM 244
Hémorragie méningée.
ITEM 275
Péritonite aiguë.
ITEM 276
Pneumothorax.
ITEM 301
Déficit moteur et/ou sensitif des membres.
ITEM 312
Épanchement pleural.
ITEM 339
Troubles de l’hémostase et de la coagulation.
Sujets tombés aux concours de l’Internat
Sujet tombé
1996 : Plaie de main compliquée. 1998 : Écrasement de membre – « Crush » syndrome. 2000 : Plaie de main compliquée.
ú
227
ITEM 201
2002 : Traumatisme abdominal : contusion pancréatique. 2003 : Traumatisme crânien : hématome sous-dural. 2008 : Traumatisme craniofacial.
CONSENSUS ● Monitorage du patient traumatisé grave en préhospitalier – Conférence d’experts – SFAR, 2006. ● Prise en charge des traumatisés crâniens graves à la phase précoce – Recommandations pour la pratique clinique – ANAES, 1998. ● Réanimation du brûlé à la phase aiguë – Conférence d’actualisation – SFAR, 2001. ● Prise en charge des plaies aux urgences – Conférence de consensus – décembre 2005.
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces chez un brûlé OBJECTIF ● Identifier les situations d’urgence. LIENS TRANSVERSAUX ITEM 49
Évaluation clinique et fonctionnelle d’un handicap moteur, cognitif ou sensoriel.
ITEM 91
Infections nosocomiales.
ITEM 104
Septicémie.
ITEM 110
Besoins nutritionnels et apports alimentaires de l’adulte. Évaluation de l’état nutritionnel. Dénutrition.
ITEM 198
Dyspnée aiguë et chronique.
ITEM 199
État confusionnel et trouble de conscience.
ITEM 200
État de choc.
ITEM 214
Principales intoxications aiguës.
ITEM 219
Troubles de l’équilibre acido-basique et désordres hydroélectrolytiques.
ITEM 252
Insuffisance rénale aiguë – Anurie.
CONSENSUS ● Réanimation du brûlé à la phase aiguë – Conférence d’actualisation – SFAR, 2001.
228
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces
POUR COMPRENDRE… ■
La prise en charge diagnostique et thérapeutique initiale d’un brûlé conditionne
le pronostic vital, esthétique et fonctionnel ultérieur. ■
Le médecin accueillant un brûlé doit : – déterminer l’étiologie ; – déterminer la localisation et l’étendue de la brûlure ; – évaluer la gravité ; – rechercher les intoxications associées (monoxyde de carbone et cyanures) ; – débuter si besoin les manœuvres de réanimation ; – orienter le patient vers un centre de prise en charge spécialisé.
I. ÉPIDÉMIOLOGIE ■
500 000 personnes par an sont victimes de brûlures en France. Celles-ci entrent
principalement dans le cadre d’accidents domestiques, mais peuvent également être secondaires à des accidents de la voie publique (AVP) (voir « Prise en charge du polytraumatisé », p. 235). ■
La brûlure chez l’enfant est fréquente et le plus souvent secondaire aux acci-
dents domestiques par ébouillantement. Il s’agit le plus souvent de garçons âgés de 1 à 3 ans. ■
2 000 personnes sont hospitalisées chaque année dans un centre spécialisé.
■
1 000 personnes meurent de brûlures chaque année en France.
II. ÉTIOLOGIE A. Brûlures thermiques (90 %) ■
Liquidiennes : eau bouillante, huile chaude.
■
Solides : métal chaud (poêle, fer à repasser…).
■
Autres : feu, gaz chaud lors d’une explosion.
B. Brûlures électriques (5 %) Elles sont de 2 types : ■
arc électrique : le courant ne pénètre pas l’organisme et la brûlure est similaire à
une brûlure thermique ; ■
contact direct avec le conducteur : elles sont profondes, avec un point d’entrée
et un point de sortie qu’il faudra rechercher. Elles sont associées à une électrisation. Les conséquences sont cardiaques (troubles du rythme et de la conduction), rénales par nécrose tubulaire aiguë, et neurologiques.
C. Brûlures chimiques (5 %) ■
Il peut s’agir de brûlures dues à des produits d’entretien, de brûlures dans le
cadre de professions de l’industrie chimique, de radiations ionisantes. ■
Elles réalisent des lésions le plus souvent punctiformes. Il ne faut jamais cher-
cher à tamponner un acide ou une base. Le lavage à l’eau claire doit être abondant. 229
ITEM 201
III. PHYSIOPATHOLOGIE A. Profondeur des brûlures Profondeur er
Histologie
Clinique
Évolution
1 degré
Couche cornée de l’épiderme
Érythème « Coup de soleil »
Guérison en quelques jours sans séquelle
2e degré superficiel
Ensemble de l’épiderme
Phlyctènes Aspect rosé Exulcérations suintantes Douleur intense
Guérison en 15 jours sans séquelle
2e degré profond
Aspect blanc et rose Ensemble de Douleur moindre l’épiderme et de la couche de Malpighi du Hypoesthésie derme, pas d’atteinte des phanères
Cicatrisation longue Cicatrices hypertrophiques
3e degré
Ensemble de l’épiderme et du derme ± hypoderme
Pas de cicatrisation spontanée Greffe de peau
Aspect cartonné et induré de la peau Indolore, anesthésie complète
Fig. 201-1. Profondeur des brûlures. Source : Mécanismes de réépithélialisation des plaies cutanées : expression des protéines de stress chez la souris et analyse à l’aide d’un nouveau modèle tridimensionnel humain développé par génie tissulaire, par Alain Laplante. Thèse de doctorat de médecine, université Laval, Québec, 2002.
B. Étendue de la brûlure La règle des 9 de Wallace (fig. 201-2) permet le calcul de la surface brûlée par rapport à la surface corporelle totale : ■
tête : 9 % ;
■
tronc : 9 % × 4 ;
■
membres supérieurs : 9 %/membre ;
■
membres inférieurs : 18 %/membre ;
■
organes génitaux externes : 1 %.
C. Conséquences locales et générales La perte du revêtement cutané secondaire à la brûlure va entraîner : ■
une extravasation d’eau, d’électrolytes et de protéines en dehors du sect-
eur vasculaire, à l’origine d’une hypovolémie et, à l’extrême, d’un choc hypovolémique ; ■
une diminution de la pression oncotique, pouvant induire un œdème pulmonaire
et un œdème cérébral ; 230
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces
9%
9%
36 %
36 % 9%
9%
1%
1%
18 %
9%
1%
9%
1%
1%
18 %
18 %
1%
18 %
Fig. 201-2. Règle des 9 de Wallace. ■
une hyperactivité métabolique, à l’origine d’une dénutrition, elle-même favori-
sant les complications infectieuses ; ■
une contamination bactérienne et un risque infectieux.
D. Lésions associées ■
Traumatismes dans le cadre d’un AVP (voir « Prise en charge du polytraumatisé »,
p. 235). ■
Inhalation de suie et de fumée à l’origine d’un œdème pulmonaire lésionnel et de
brûlures des voies aériennes, pouvant évoluer jusqu’au SDRA. ■
Intoxications oxycarbonée et cyanhydrique.
ITEM 214
IV. DIAGNOSTIC POSITIF Il est principalement orienté vers la recherche de signes de gravité pouvant mettre en jeu le pronostic vital et fonctionnel.
A. Interrogatoire ■
Terrain : – âge ; – antécédents médicochirurgicaux ; – statut vaccinal antitétanique ; – traitement au long cours.
■
Mécanisme lésionnel : – circonstances de la brûlure, horaire ; – nature de l’agent responsable.
B. Examen clinique 1. Examen général ■ État de conscience, score de Glasgow. ■
Hémodynamique : fréquence cardiaque et pression artérielle.
■
Fréquence respiratoire et saturation en oxygène.
■
Température. 231
ITEM 201
■
Examen ophtalmologique en cas de projections chimiques.
■
Recherche de lésions associées et d’une intoxication au CO et cyanures
ITEM 214
.
2. Examen local réalisé en asepsie rigoureuse ■ Évaluation de la profondeur. ■
Surface corporelle brûlée (SCB) : règle des 9 de Wallace.
■
Siège.
3. Évaluation de la gravité Les critères de gravité sont les suivants : ■
polytraumatisme associé ;
■
intoxication oxycarbonée et cyanhydrique ;
■
2e degré profond et 3e degré ;
■
étendue de la brûlure > 20 % ;
■
atteintes des muqueuses, de la face, des voies aériennes supérieures et des
mains ; ■
brûlures circulaires du thorax (dyspnée) et des membres (ischémie aiguë).
CONSENSUS Scores pronostiques SFAR, 2001 Score UBS (unité de brûlure standard) : ■
= % de surface brûlée + 3 × % de surface brûlée au 3e degré ;
■
une brûlure est grave si UBS > 100 ;
■
mise en jeu du pronostic vital si UBS > 150.
Indice de Baux : ■
= âge + % de surface brûlée ;
■
une brûlure est grave si l’indice de Baux est > 50.
4. Bilan paraclinique ■ NFS, TP, TCA : recherche d’une hémoconcentration. ■
Groupe ABO, Rhésus, RAI.
■
Ionogramme sanguin, à la recherche de troubles hydroélectrolytiques (hypopro-
tidémie, insuffisance rénale aiguë). ■
Gaz du sang, HbCO, lactates artériels (intoxication CO et cyanure).
■
ECG (brûlures par électrisation).
■
Radiographie thoracique, à la recherche d’un œdème pulmonaire aigu.
■
Prélèvements bactériologiques multiples et répétés des surfaces brûlées.
V. PRISE EN CHARGE THÉRAPEUTIQUE A. Sur place
232
■
Extraction de l’agent causal.
■
Refroidissement cutané.
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces
■
Pansements occlusifs des zones atteintes.
■
Pose d’une voie veineuse de bon calibre et expansion volémique par Ringer-
lactate (RL). ■
Antalgiques : morphiniques.
B. Traitement hospitalier
CONSENSUS Traitement hospitalier du brûlé à la phase aiguë SFAR, 2001 Traitement général ■
Transfert et hospitalisation dans un centre de prise en charge spécialisé selon la gravité sus-
pectée de la brûlure. ■
Pose de 2 voies veineuses périphériques de bon calibre en zone saine.
■
Poursuite de l’expansion volémique par des cristalloïdes (le Ringer-lactate est le produit de
choix), selon le protocole de Percy : – 20 mL/kg la première heure ; – 2 mL/kg/% de surface cutanée brûlée (SCB) les 8 heures suivantes ; – 0,5 mL/kg/% de SCB + albumine : 0,5 mL/kg/% de surface brûlée les 16 heures suivantes si SCB > 50 % ; 1 mL/kg/% de SCB de Ringer-lactate si SCB < 30 %. ■
Correction des troubles hydroélectrolytiques.
■
Oxygénothérapie et si besoin intubation orotrachéale avec ventilation mécanique.
■
Prise en charge des intoxications associées : – CO : oxygénothérapie en FiO2 100 %, discuter l’oxygénothérapie hyperbare en fonction de la gravité ; – cyanure : hydroxocobalamine (Cyanokit®).
Traitement local ■
Refroidissement initial des brûlures.
■
Réchauffement du patient (lutte contre la déperdition thermique).
■
Cicatrisation dirigée avec détersion et nettoyage au moyen d’un savon antiseptique, mise à
plat des phlyctènes. ■
Pansements stériles quotidiens avec des topiques anti-infectieux, type Flammazine®.
■
Incisions de décharge en cas de brûlures circulaires.
■
À distance, greffes de peau à envisager, amputations.
Mesures associées ■
Antalgie/sédation : paracétamol, 1 g × 4/j, et antalgiques majeurs si besoin (morphiniques).
Pansements sous anesthésie générale si besoin. ■
Nutrition entérale ou parentérale hypercalorique.
■
Pas d’antibioprophylaxie systématique car elle peut être responsable de l’émergence de
germes multirésistants. Elle n’est justifiée qu’en cas de brûlures souillées, ou d’infections documentées (pénicilline en première intention). ■
SAT-VAT.
■
Anticoagulation préventive et prévention des complications de décubitus.
C. Surveillance clinique et biologique ■
Constantes vitales, poids.
■
Ionogramme sanguin, diurèse.
■
Prélèvements bactériologiques. 233
ITEM 201
VI. COMPLICATIONS La compréhension de la survenue de complications secondaires à une brûlure découle de la compréhension des mécanismes physiopathologiques associés au phénomène.
A. À court terme ■
Choc hypovolémique et troubles hydroélectrolytiques : liés à la perte du revête-
ment cutané, entraînant une fuite massive d’eau, d’électrolytes et de protéines en dehors du secteur vasculaire ■
ITEM 219
.
Insuffisance rénale aiguë : soit fonctionnelle secondaire à l’hypovolémie,
soit organique par nécrose tubulaire aiguë, secondaire à une rhabdomyolyse ITEM 252
■
.
Respiratoires : OAP lésionnel, SDRA, pneumopathie infectieuse. Le brûlé est
exposé au risque d’OAP lésionnel soit directement par l’inhalation de fumées, soit indirectement par la baisse de la pression oncotique ■
ITEM 198
.
Surinfection locale et choc septique, secondaires à l’effraction bactérienne
par perte du revêtement cutané et à un état d’immunodépression lié à la dénutrition
ITEM 104, 200
. Ces infections sont responsables de 60 % des décès. Elles sont
d’origine cutanée mais également respiratoire (pneumopathies), urinaire et au point de ponction des cathéters centraux. ■
Ischémie aiguë de membre et syndrome de loges : l’ischémie est le plus souvent
due à la survenue de rétractions et de brides cutanées qui devront être excisées (voir « Traumatisme des membres », p. 257). ■
Hypothermie.
■
Dénutrition par hypercatabolisme majeur
ITEM 110
: elle favorise le risque sep-
tique et retarde les processus de cicatrisation. Elle doit faire l’objet d’une prise en charge de renutrition agressive par alimentation entérale ou, le cas échéant, parentérale. ■
Complications de décubitus
■
Décès.
ITEM 50
.
B. À long terme ■
Séquelles esthétiques et fonctionnelles (cicatrisation et rétraction de membres,
amputations). Des cancers cutanés (épithélioma spinocellulaire) peuvent survenir secondairement.
234
■
Psychiatriques, par dépression secondaire au traumatisme.
■
Handicap social
ITEM 49
.
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces chez un polytraumatisé OBJECTIF ● Identifier les situations d’urgence. LIENS TRANSVERSAUX ITEM 178
Transfusion sanguine et produits dérivés du sang : indications, complications. Hémovigilance.
ITEM 200
État de choc.
CONSENSUS ● Choix des produits de remplissage vasculaire pour le traitement des hypovolémies de l’adulte : http://www.srlf.org/conferences/conf4.html. ● Monitorage du patient traumatisé grave en préhospitalier : http://www.sfar.org/s/IMG/ pdf/monitotraumaprehosp_cexp.pdf. ● Monitorage du patient traumatisé grave en préhospitalier (texte court) – Conférence d’experts : http://www.bmlweb.org/consensus_lien.html#Urgences. ● Prise en charge d’un blessé adulte présentant un traumatisme vertébromédullaire (texte court) – Conférence d’experts – SFAR, 2003 : http://www.sfar.org/s/IMG/pdf/ rachis_cexp.pdf.
POUR COMPRENDRE… ■
Un polytraumatisé, ou traumatisé grave, est un blessé qui présente au moins
deux lésions dont une engageant le pronostic vital. Un polytraumatisé est un patient qui a souffert d’un traumatisme violent, quelles que soient les lésions apparentes. ■
Les traumatismes sont la 3e cause de mortalité globale en France, et la 1re cause
de mortalité des adultes de moins de 40 ans. ■
Les traumatismes sont responsables de 48 000 décès par an en France.
■
L’organisation des secours en France comporte une 1re phase de réanimation pré-
hospitalière par les Smur, couplée à la régulation médicale des Samu. ■
La prise en charge hospitalière optimale ne peut être assurée que dans des struc-
tures spécifiques organisées pour l’accueil des blessés graves. Pathogénie Le traumatisme grave est une pathologie circonstancielle : ■
accidents de la voie publique ;
■
défenestrations ;
■
accidents du travail ;
■
plaies par arme blanche ; 235
ITEM 201
■
traumatisme balistique : – plaies par arme à feu ; – explosion.
Ces circonstances peuvent être intriquées.
I. PRISE EN CHARGE PRÉHOSPITALIÈRE Tout traumatisé grave ou suspecté ainsi doit être considéré comme à haut risque de lésion rachidienne instable et devra donc bénéficier d’une immobilisation de l’axe craniorachidien lors de toutes les procédures diagnostiques et thérapeutiques.
A. Analyse des circonstances de l’accident ■
Prise du bilan des premiers secours.
■
Examen des lieux de l’accident.
■
Nombre et gravité apparente des blessés.
B. Évaluation de la gravité de la situation ■
Neurologique : – score de Glasgow (tableau 201-2) ; – examen des pupilles et réflexe photomoteur ; – toucher rectal : recherche une atonie du sphincter anal faisant suspecter un traumatisme médullaire.
■
Hémodynamique : – plaie hémorragique (plaie du scalp) ou saignement extériorisé ; – fréquence cardiaque ; – pression artérielle.
■
Respiratoire : – fréquence respiratoire ; – signes de lutte ; – signes d’hypoxie ; – mesure de la SpO2.
Tableau 201-2. Score de Glasgow (GCS) Note
Ouverture des yeux
Réponse verbale
6
Réponse aux ordres
5
236
Réponse motrice
Cohérente, orientée
Adaptée, localise la douleur
4
Spontanée
Confuse
Évitement inadapté
3
À la demande
Inappropriée
Flexion-décortication
2
À la stimulation nociceptive
Inintelligible
Extension-décérébration
1
Absente
Absente
Absente
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces
C. Mise en condition simultanée ■
Immobilisation en rectitude craniorachidienne : – collier cervical rigide avec appui mentonnier et occipital ; – matelas à dépression (dit « coquille ») ; – mobilisation sur plan rigide ; – brancardage avec 4 opérateurs, médecin ou infirmière à la tête.
■
Mise en place de 2 abords veineux périphériques courts d’un calibre ≥ 16 G.
■
Électrocardioscope, pression artérielle non invasive automatisée, oxymétrie
pulsée. ■
Oxygénothérapie à fort débit au masque à réserve.
■
Mesure de la température tympanique et prévention de l’hypothermie (couver-
ture de survie). ■
Mesure de l’hémoglobine capillaire (Hemocue®).
D. Prise en charge des défaillances vitales immédiates 1. Neurologique ■ Intubation orotrachéale si GCS ≤ 8. ■
Sédation par un hypnotique (midazolam) et un morphinique (sufentanil) en per-
fusion continue. ■
Osmothérapie par mannitol IV en cas de mydriase unilatérale aréactive.
2. Hémodynamique ■ Hémostase des plaies hémorragiques, en particulier suture d’une plaie du scalp. ■
Traitement du choc hémorragique : – remplissage vasculaire par colloïdes ou cristalloïdes ; – perfusion de vasopresseurs (noradrénaline) IVSE ; – transfusion de produits sanguins
■
ITEM 178
:
Gonflage du pantalon antichoc devant un choc hémorragique avec suspicion
d’hématome rétropéritonéal, en l’absence de traumatisme thoracique grave.
Mémo : étiologies des états de choc traumatiques ■
Hémorragique.
■
Obstructif : – tamponnade gazeuse ; – tamponnade sur hémopéricarde ; – embolie graisseuse sur fracture du fémur.
■
Spinal : vasoplégie par sympatholyse sur des lésions médullaires.
■
Cardiogénique : contusion myocardique sévère.
3. Respiratoire ■ Oxygénothérapie à fort débit. ■
Intubation en séquence rapide et ventilation mécanique.
■
Exsufflation d’un pneumothorax compressif.
■
Le drainage pleural doit rester exceptionnel en préhospitalier. 237
ITEM 201
E. Bilan lésionnel secondaire et soins de deuxième ligne ■
Examen clinique : – étage craniofacial, examen dentaire ; – palpation et auscultation thoracique ; – électrocardiogramme ; – inspection et palpation abdominale ; – examen bilatéral et comparatif des 4 membres.
■
Analgésie : – titration de morphine IV ; – paracétamol IV systématiquement associé ; – mise en place d’une sédation continue si le patient est intubé-ventilé (midazolam et sufentanil IVSE).
■
Prévention de l’hypothermie : couverture de survie.
■
Réduction et immobilisation des fractures et/ou luxations.
■
Lavage à l’eau stérile, antisepsie et pansement des plaies.
F. Bilan à la régulation médicale du Samu-centre 15 Tout patient victime ou suspect d’un traumatisme grave doit bénéficier d’un transport médicalisé vers une structure hospitalière spécialisée entraînée à la prise en charge de ce type de pathologie.
II. PRISE EN CHARGE HOSPITALIÈRE INITIALE La conduite à tenir diagnostique et thérapeutique suivante doit être systématique, quel que soit l’état clinique du patient. En particulier, un examen clinique rassurant ou une hémodynamique « stable » ne dispenseront pas de cet algorithme.
A. Orientation ■
Réanimation chirurgicale.
■
Salle de réveil.
■
Salle d’accueil des urgences vitales du SAU.
■
Le médecin qui accepte d’accueillir le patient se charge de prévenir et coordonner : – les équipes chirurgicales ; – le radiologue ; – l’artériographiste ; – le centre de transfusion sanguine.
B. Prise en charge médicale ■
Transmissions par le médecin du Smur.
■
Mise en place d’un cathéter veineux central et d’un cathéter artériel, en pre-
mière intention par voie fémorale, pour le cas échéant : – administration de catécholamines ; – monitorage continu de la pression artérielle systémique ; – prélèvements sanguins itératifs. 238
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces
■
Prise en charge du choc hémorragique : – remplissage vasculaire par colloïdes ; – perfusion de vasopresseurs (noradrénaline) IVSE : pression artérielle moyenne cible > 80 mmHg si traumatisme crânien grave (TCG), > 50 mmHg dans les autres cas ; – transfusion de concentrés érythrocytaires (CGR) : • Hb cible : > 9 g/dL si TCG, > 7 g/dL dans les autres cas ; • adaptée au débit hémorragique ; • adaptée à l’hémodynamique ; – transfusion de plasmas frais congelés (PFC) : • dès le 1er CGR prescrit, en raison de la dilution prévisible des facteurs de coagulation ; • TP cible : > 50 % si TCG, > 30 % dans les autres cas ; – transfusion de culots plaquettaires : • en cas de thrombopénie : < 100 g/L si TCG, < 50 g/L sinon ; • ou d’emblée en cas d’hémorragie cataclysmique ; – prévention de la triade létale : • acidose : corriger toute hypoperfusion tissulaire ; • hypothermie : couverture chauffante, réchauffement des tubulures de transfusion ; • coagulopathie : prescription précoce de PFC.
■
Poursuite, voire renforcement de l’analgésie et de la sédation intraveineuse.
■
Vérification et mise à jour de la vaccination antitétanique.
■
Antibiothérapie prophylactique par amoxicilline-clavulanate, indiquée en cas de : – fracture ouverte ; – plaie pénétrante thoracique ; – plaie pénétrante abdominale ; – fracture de la base du crâne (risque de brèche dure-mérienne).
■
Suture des plaies hémorragiques (plaies du scalp), compression directe des
plaies vasculaires, tamponnement d’une épistaxis.
C. Prise en charge paramédicale ■
Installation du patient.
■
Mise en place du monitorage.
■
Sondage vésical après accord du médecin.
■
Examens biologiques systématiques : – hémogramme ; – TP, TCA, Fg ; – groupe ABO et Rhésus (2 déterminations), RAI ; – troponine I ; – ionogramme sanguin, urée, créatininémie ; – transaminases ; – lipasémie ; – gazométrie artérielle ; 239
ITEM 201
Tableau 201-3. Examens d’imagerie de première ligne Examen Radiographie du rachis cervical de profil Radiographie du thorax de face Radiographie du bassin de face Échographie : – abdominale – pleurale – péricardique
Objectif Dépistage d’une lésion instable Drainage d’un pneumothorax compressif Orientation vers l’artérioembolisation en cas d’instabilité hémodynamique Hémopéritoine ? Pneumothorax ? Hémothorax ? Tamponnade par hémopéricarde ?
– lactates artériels ; – dosage des ß-HCG chez la femme. ■
Les analyses toxicologiques de dépistage ne sont pas systématiques.
D. Examens d’imagerie de 1re ligne Ils sont réalisés au lit du malade, dès l’arrivée dans le service (tableau 201-3). Leur objectif est de diagnostiquer une lésion responsable d’une instabilité hémodynamique ou respiratoire dont le traitement prévaudra sur le reste du bilan lésionnel.
E. Bilan lésionnel complet ■
Scanner corps entier (body-scanner) dans le cas d’un patient stable ou stabilisé
du point de vue hémodynamique : – crâne sans injection ; – rachis cervicodorsolombaire avec reconstructions sagittales et frontales ; – après injection de produit de contraste : • thorax ; • abdomen ; • pelvis : bassin et organes pelviens. ■
Radiographies osseuses standard en fonction de l’examen clinique.
■
Examen clinique complémentaire systématique à la recherche de lésions pas-
sées inaperçues : – plaies : • mains ; • organes génitaux externes ; • dos ; – examen endobuccal à la recherche de lésions dentaires ; – examen articulaire complet bilatéral et comparatif.
F. Prise en charge thérapeutique spécifique ■
En fonction des lésions mises en évidence au bilan initial (voir sections suivan-
tes) : traitement médical et surveillance en réanimation chirurgicale, traitement chirurgical, artérioembolisation ; ■
Indications de « bloc direct » (sans bilan lésionnel complet) = instabilité hémody-
namique avec : – une lésion vasculaire non contrôlée ; 240
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces
– ou un hémothorax massif (1 500 mL d’emblée et débit > 150 mL/h) ; – ou un hémopéritoine abondant.
G. Surveillance ■
Clinique (continue en salle de réveil ou réanimation chirurgicale) : – monitorage continu des constantes hémodynamiques (FC, PA invasive) et respiratoires (FR, saturation en oxygène) ; – surveillance neurologique : conscience, GCS, pupilles, examens neurologiques répétés dans le cadre de suspicion de lésion médullaire ; – température toutes les 4 h ; – monitorage de la pression intracrânienne parfois (voir la prise en charge du traumatisé crânien, p. 249).
■
Paraclinique : – bilans biologiques répétés toutes les 4 heures pendant les 24 premières heures et tant que le patient n’est pas stabilisé : hémogramme, hémostase, gaz du sang artériels, lactates artériels ; – puis bilans plus espacés en l’absence d’aggravation (par 12 h puis par 24 h) ; – radiographies pulmonaires quotidiennes si le patient est intubé-ventilé ; – surveillance spécifique en fonction des lésions objectivées (voir sections correspondantes).
H. Gravité et complications ■
La gravité et les complications spécifiques à chaque organe sont traitées dans
les sections correspondantes. ■
Par définition, chez un polytraumatisé, le pronostic vital est potentiellement mis
en jeu. ■
La gravité d’un polytraumatisme dépend : – des lésions initiales, en particulier la présence d’un TCG pour le pronostic à plus long terme, et de l’association de ces lésions (par exemple, TCG et contusion pulmonaire hypoxémiante ou TCG et CIVD) ; – du terrain du patient ; – de la rapidité de mise en place des soins ; – de la présence d’un état de choc réfractaire.
■
Les complications sont : – à court terme : le décès par hémorragie cataclysmique ou lésion cérébrale ou médullaire gravissime (lésions létales d’emblée) ; – à moyen terme : décès par défaillance multiviscérale, complications infectieuses, thromboemboliques ; – à long terme : décès, invalidité, impotence fonctionnelle, séquelles psychologiques.
241
ITEM 201
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces chez un traumatisé abdominal OBJECTIF ● Identifier les situations d’urgence. LIENS TRANSVERSAUX ITEM 178
Transfusion sanguine et produits dérivés du sang : indications, complications. Hémovigilance.
ITEM 195
Douleurs abdominales et lombaires aiguës chez l’enfant et chez l’adulte.
ITEM 200
État de choc.
ITEM 268
Pancréatite aiguë.
ITEM 275
Péritonite aiguë.
Sujets tombés aux concours de l’Internat Sujet tombé
●
2002. Traumatisme abdominal : contusion pancréatique isolée secondaire à un AVP. 1) Argument cliniques et paracliniques plaidant pour une contusion pancréatique. 2) Examens d’imagerie à réaliser pour orienter le diagnostic. 3) Traitement et conduite à tenir (hospitalisation en USI, O2, réanimation hydroélectrolytique, jeûne, insulinothérapie, surveillance, prévention des complications de décubitus…). 4 et 5) Complications immédiates et à distance d’une contusion pancréatique (nécrose pancréatique, infection de nécrose, péritonite, choc hémorragique, diabète, complications de décubitus, faux kystes…).
CONSENSUS ● Monitorage du patient traumatisé grave en préhospitalier – Conférence d’experts – SFAR, 2006.
POUR COMPRENDRE… ■
Il convient de distinguer les contusions abdominales (traumatismes fermés de
l’abdomen) des traumatismes pénétrants abdominaux. ■
Les patients présentant un traumatisme abdominal sont à considérer
comme polytraumatisés : ces traumatismes peuvent être associés à des lésions extra-abdominales. Le pronostic vital est en jeu, le plus souvent par choc hémorragique. ■
La prise en charge initiale consiste à réaliser le bilan lésionnel, débuter la réani-
mation et coordonner les différents intervenants (anesthésistes-réanimateurs, chirurgiens, radiologues), avant de débuter le traitement spécifique du traumatisme abdominal.
242
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces
I. ÉPIDÉMIOLOGIE ■
Les contusions abdominales représentent 80 % des traumatismes abdominaux.
Elles sont dues principalement aux accidents de la voie publique (75 % des cas), suivis des chutes de grande hauteur. ■
Les traumatismes pénétrants sont responsables de 20 % des traumatismes
abdominaux. Les causes en sont les plaies par arme blanche et par arme à feu. ■
Les victimes sont en majorité des hommes jeunes.
■
La mortalité s’élève à 30 % et dépend : – du type de lésions (plus fréquentes en cas de contusion) ; – du type d’organe et du nombre de viscères atteints ; – de l’existence de traumatismes extra-abdominaux associés ; – des antécédents du patient.
II. PHYSIOPATHOLOGIE A. Contusions abdominales (traumatismes fermés) Au cours des AVP et des chutes, il se produit une décélération brutale. L’énergie cinétique libérée génère des ondes de choc à l’origine de forces d’écrasement, d’étirement et de cisaillement des organes intra-abdominaux. Ces forces entraînent principalement des lésions de rupture des organes pleins, de leurs pédicules vasculaires et de leurs mésos, à l’origine d’hémorragie intra-abdominale et à l’extrême d’un choc hémorragique. Cette hémorragie siège classiquement dans la cavité péritonéale. Dans 20 % des cas, elle peut être rétropéritonéale (traumatismes de la loge rénale ou des gros vaisseaux). Les lésions des organes creux sont plus rares. On les retrouve principalement lors de phénomènes de blast (ondes générées lors d’une explosion). De diagnostic plus difficile, elles peuvent être révélées à distance par une péritonite secondaire.
B. Traumatismes pénétrants Les lésions touchent principalement les organes creux. Elles apparaissent sur le trajet mais également à distance dans le cas des plaies par arme à feu (ondes de choc transmises).
III. PRISE EN CHARGE DIAGNOSTIQUE Tout traumatisé abdominal est un polytraumatisé jusqu’à preuve du contraire et tout polytraumatisé a un traumatisme abdominal jusqu’à preuve du contraire (voir la prise en charge diagnostique d’un patient polytraumatisé, p. 235).
A. Terrain et anamnèse ■
Antécédents.
■
Âge.
■
Traitements. 243
ITEM 201
■
Mécanisme lésionnel : point d’impact, cinétique, ceinture de sécurité, décéléra-
tion, airbag… ■
Nombre de victimes.
■
Prise en charge préhospitalière.
B. Examen clinique 1. Examen général ■ Recherche d’un choc : trouble de la conscience, tachycardie, hypotension artérielle, ventilation, soif et pâleur cutanéomuqueuse. ■
Recherche de lésions extra-abdominales : crâne, thorax, rachis, face, bassin et membres.
■
Hemocue®.
2. Examen abdominal Il peut être normal. ■
Inspection : – ecchymoses, hématomes, brûlures ; – plaies avec recherche des orifices d’entrée et de sortie, trajet ; – éviscération ; – distension abdominale.
■
Palpation : – défense, contracture ; – matité, météorisme ; – côtes flottantes et instabilité du bassin ; – touchers pelviens et examen des organes génitaux externes.
C. Examens paracliniques 1. Bilan sanguin ■ NFS, TP, TCA, fibrinogène.
*Concours Internat 2002
■
Groupe sanguin ABO, Rhésus et RAI.
■
Ionogramme sanguin, bilan hépatique et gaz du sang.
2. Imagerie* ■ Radiographie du rachis cervical de profil. ■
Radiographie de thorax : traumatisme thoracique associé et fractures des
dernières côtes. ■
Radiographie du bassin : fracture du bassin.
■
Échographie abdominale : – rapide et non invasive : – examen de choix en cas d’instabilité hémodynamique si elle est réalisée en salle de déchoquage ; – opérateur-dépendante ; – recherche un épanchement intrapéritonéal ; – recherche une lésion des organes pleins ; – peu performante en cas de lésion des organes creux.
■
244
Scanner abdominopelvien avec injection de produit de contraste :
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces
– réalisé chez un patient stable hémodynamiquement, dans le cadre d’un scanner corps entier ; – recherche un épanchement intrapéritonéal et un pneumopéritoine ; – recherche des lésions des organes pleins et creux ; – recherche des lésions vasculaires.
3. Ponction-lavage péritonéale ■ Ses indications sont limitées et sa pratique reste exceptionnelle en France. ■
Elle consiste à instiller 500 mL de sérum physiologique dans la cavité péritoné-
ale, puis à recueillir le liquide. L’examen du liquide recueilli met en évidence la présence ou non d’un hémopéritoine.
*Concours Internat 2002
IV. PRISE EN CHARGE THÉRAPEUTIQUE* L’examen clinique et la réponse aux mesures initiales de réanimation permettent de différencier les patients présentant : ■
un choc hémorragique non stabilisé : le patient doit bénéficier d’une hémo-
stase chirurgicale immédiate. Le bilan lésionnel n’a pas le temps d’être réalisé, à l’exception possible d’une échographie abdominale pour mettre en évidence un épanchement péritonéal et orienter le geste chirurgical ; ■
un état hémodynamique stable ou stabilisé : le bilan lésionnel est réalisé (écho-
graphie abdominale, scanner abdominopelvien, éventuellement artériographie).
A. Réanimation du choc hémorragique
ITEM 200
■
Hospitalisation en réanimation.
■
Surveillance cardioscopique.
■
Le but est de rétablir un apport en O2 adapté au besoin de l’organisme : oxygé-
nothérapie en ventilation spontanée ou mécanique après intubation orotrachéale en cas d’insuffisance respiratoire aiguë associée et/ou de troubles de la conscience (score de Glasgow ≤ 8). ■
Hémostase par compression, embolisation ou chirurgicale.
■
Compensation des pertes : – 2 voies veineuses périphériques de bon calibre ; – position de Trendelenburg ; – expansion volémique par cristalloïdes ou colloïdes ; – transfusion de concentrés globulaires iso-groupe iso-Rhésus, PFC, plaquettes, fibrinogène selon les seuils adaptés ; – l’utilisation de catécholamines ne doit en rien remplacer l’expansion volémique qui permet d’éviter la survenue d’un collapsus et d’un arrêt cardiaque par désamorçage.
■
Autres mesures : – lutte contre l’hypothermie ; – corrections des troubles hydroélectrolytiques : hyperkaliémie, hypocalcémie, hypomagnésémie.
B. Antibiothérapie ■
Nécessaire en cas de péritonite associée, ou de contusion abdominale grave. 245
ITEM 201
■
Efficace sur les bacilles Gram négatif et les anaérobies.
■
Elle comprend une pénicilline (amoxicilline + acide clavulanique) et un amino-
side (gentamycine).
C. Prise en charge chirurgicale ■
Laparotomie exploratrice à visée diagnostique et thérapeutique : – bilan lésionnel in situ organe par organe ; – hémostase chirurgicale : splénectomie d’hémostase, packing hépatique ; – sutures, résections, anastomoses, stomies des organes creux en fonction des lésions observées ; – drainages.
■
Traitement conservateur : il n’est envisageable qu’en cas de stabilité hémody-
namique, sous couvert d’une surveillance stricte en réanimation. ■
Artério-embolisation : – à visée diagnostique : localisation du saignement ; – à visée thérapeutique : embolisation sélective des artères responsables de l’hémorragie. Elle est principalement utilisée dans la prise en charge des hématomes rétropéritonéaux, en cas de traumatismes du bassin et des reins ; – elle ne doit en aucun cas retarder une prise en charge chirurgicale.
V. TRAUMATISMES ABDOMINAUX : EXEMPLES A. Traumatismes spléniques La rate est l’organe le plus fréquemment atteint dans les contusions abdominales (50 %).
1. Lésions spléniques (classification de Butain) ■ Stade 1 : lésions capsulaires ou hématome sous-capsulaire sans atteinte du parenchyme. ■
Stade 2 : hématome intraparenchymateux avec intégrité du hile.
■
Stade 3 : fracture splénique (fig. 201-3 ) avec atteinte du hile.
■
Stade 4 : éclatement de la rate ou rupture pédiculaire.
2. Traitement ■ Laparotomie exploratrice : – splénectomie d’hémostase en cas d’instabilité hémodynamique ou de lésion de type 3 ou 4 de la classification de Butain ; – traitement conservateur en cas de stabilité hémodynamique et de lésion de type 1 ou 2 de la classification de Butain. ■
Mesures associées en cas de splénectomie : – vaccination antipneumococcique et anti-Haemophilus ± antibioprophylaxie par pénicilline au long cours ; – éducation du patient splénectomisé avec port de carte et conduite à tenir en cas de syndrome infectieux.
3. Complications ■ Choc hémorragique. 246
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces
Fig. 201-3. Fracture de rate avec pseudo-anévrysme de l’artère splénique. Source : Imagerie des urgences, P. Taourel, Masson, 2e édition, 2004, 448 p.
■
Rupture en 2 temps d’un hématome sous-capsulaire.
■
Infection à germe encapsulé en cas de splénectomie.
■
Abcès sous-phrénique.
B. Traumatismes hépatiques Le foie est le 2e organe le plus touché après la rate.
1. Lésions hépatiques (classification de Moore) ■ Stade I : hématome sous-capsulaire < 10 % de la surface, rupture parenchymateuse < 1 cm de profondeur. ■
Stade II : hématome sous-capsulaire < 50 % de la surface, rupture parenchyma-
teuse < 3 cm de profondeur. ■
Stade III : hématome sous-capsulaire > 50 % de la surface ou rupture d’un
hématome sous-capsulaire, rupture parenchymateuse > 3 cm de profondeur (fig. 201-4). ■
Stade IV : destruction parenchymateuse avec destruction de 25 à 75 % d’un lobe.
■
Stade V : destruction > 75 % d’un lobe avec atteinte des veines sus-hépatiques
ou de la veine cave inférieure. ■
a
Stade VI : avulsion hépatique.
b
Fig. 201-4. a. Traumatisme fermé du foie. Scanner abdominal injecté. Contusions hépatiques. b. Même patient. Scanner injecté. Fuite de produit de contraste. Saignement actif. Hématome sous-capsulaire en voie de constitution. Source : Imagerie du foie, des voies biliaires et du pancréas, O. Ernst, Masson, 2005, 240 p.
247
ITEM 201
■
Traitement conservateur : – en cas de stabilité hémodynamique ; – surveillance clinique et paraclinique (échographie et scanner) en réanimation ; – prise en charge chirurgicale dans un second temps si nécessaire.
■
Traitement chirurgical d’emblée : – en cas d’instabilité hémodynamique ; – contrôle de l’hémostase par un packing périhépatique, une hémostase intrahépatique avec clampage du pédicule, ou une résection hépatique partielle.
2. Complications ■ Choc hémorragique. ■
Hémobilie (fistule artériobiliaire).
■
Abcès hépatique.
■
Fistule biliaire.
C. Traumatismes pénétrants Les organes les plus touchés sont le grêle et le côlon.
1. Prise en charge chirurgicale a) Exploration de la plaie ■ En cas de plaie non pénétrante (péritoine intact) : parage, suture et surveillance en milieu chirurgical ; ■
En cas de plaie pénétrante (péritoine ouvert) : – laparotomie exploratrice avec toilette péritonéale, résection-suture des plaies digestives, parage-suture de l’orifice d’entrée ; – en cas de plaie digestive : • plaie minime : suture digestive simple ; • plaie digestive délabrante : résection intestinale et anastomose ; • plaie avec contamination majeure : résection sans anastomose et confection de stomies.
b) Mesures associées ■ Antibioprophylaxie efficace sur les bacilles Gram négatif et les anaérobies. Elle comprend une pénicilline (amoxicilline + acide clavulanique) et un aminoside (gentamycine). ■
*Concours Internat 2002
SAT-VAT.
VI. PRINCIPALES COMPLICATIONS DES TRAUMATISMES ABDOMINAUX* ■
Immédiates : choc hémorragique, décès
■
Précoces :
ITEM 200
.
– infectieuses : péritonite secondaire par perforation d’organe creux ou par translocation, abcès de paroi, fistules digestives
ITEM 275
;
– rupture de rate en 2 temps d’un hématome sous-capsulaire pouvant être à l’origine d’un choc hémorragique dans les jours suivant le traumatisme. Elle nécessite une surveillance rapprochée du patient en cas de traitement conservateur ; 248
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces
– ischémie-nécrose digestive ; – hémobilie, fistule biliaire ; – pancréatite ■
ITEM 268
.
Tardives : – abcès sous-phréniques : • collection purulente sous-diaphragmatique survenant à distance d’une chirurgie abdominale ou d’un traumatisme abdominal ; • elle associe un syndrome infectieux, avec un abdomen chirurgical aigu plus ou moins des signes pleuropulmonaires (dyspnée et épanchement pleural). Le diagnostic est porté par l’échographie ou le scanner abdominal injecté ; • le traitement repose sur un drainage percutané ou chirurgical associé à une antibiothérapie active sur les bacilles Gram négatif (céphalosporines et aminosides) ; • l’abcès sous-phrénique peut se compliquer d’une péritonite, d’une pleurésie purulente, d’un syndrome occlusif ou d’un choc septique ; – faux kyste du pancréas en cas de traumatismes pancréatiques
ITEM 268
.
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces chez un traumatisé crânien OBJECTIF ● Identifier les situations d’urgence. LIENS TRANSVERSAUX ITEM 5
Indications et stratégies d’utilisation des principaux examens d’imagerie.
ITEM 192
Déficit neurologique récent.
CONSENSUS ● Prise en charge des traumatisés crâniens graves à la phase précoce : http : //www.srlf. org/s/article046a.html?id_article=273.
POUR COMPRENDRE… Traumatisé crânien non grave adulte ■
GCS ≥ 9 et évolution favorable du GCS.
■
Pas de contexte évocateur de polytraumatisme.
■
Motif fréquent de consultation au SAU.
249
ITEM 201
■
Deux questions se posent : – hospitalisation ou retour à domicile ; – prescription d’un scanner cérébral en urgence ou pas.
Traumatisé crânien grave ■
Un traumatisme crânien grave (TCG) se définit par un traumatisme crânien avec
un score de Glasgow ≤ 8. ■
Tout TCG est un polytraumatisé jusqu’à preuve du contraire (50 % des cas).
■
Tout TCG est un traumatisé du rachis cervical jusqu’à preuve du contraire.
■
Le traumatisme crânien détermine le pronostic du polytraumatisé en réanima-
tion une fois les défaillances respiratoires et hémodynamiques maîtrisées. ■
L’organisation de la prise en charge des TCG doit être parallèle à celle de tout
polytraumatisé.
I. TRAUMATISÉ CRÂNIEN NON GRAVE ADULTE A. Situation n° 1 1. Définition Perte de connaissance initiale (PCI) avec examen neurologique strictement normal au SAU.
2. Conduite à tenir ■ Hospitalisation en urgence en service de chirurgie. ■
Analgésie.
■
Laisser à jeun.
■
Surveillance neurologique : GCS, pupilles, motricité-sensibilité des 4 membres
toutes les 4 h pendant 24 h. ■
Scanner cérébral au moindre symptôme nouveau : – paresthésies ; – vomissements ; – diplopie ; – déficit moteur ; – baisse du GCS ; – anomalie pupillaire.
B. Situation n° 2 1. Définition Situation identique à la précédente, mais le patient présente une blessure périphérique nécessitant une intervention sous anesthésie générale.
2. Conduite à tenir Scanner cérébral en urgence car surveillance neurologique clinique impossible sous AG.
C. Situation n° 3 1. Définition Examen neurologique perturbé. 250
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces
2. Conduite à tenir ■ Hospitalisation. ■
Scanner cérébral en urgence.
D. Situation n° 4 1. Définition Pas de perte de connaissance initiale. Examen neurologique strictement normal. 2. Conduite à tenir ■ Surveillance d’une durée de 2 h au SAU. ■
La sortie est autorisée si les éléments suivants sont réunis : – présence d’une tierce personne auprès du patient pendant 24 h ; – domicile à proximité d’un service d’urgences ; – conduite automobile et de machines interdite pendant 24 h ; – ne prendre aucune décision importante pendant 24 h (crédit…) ; – bonne observance prévisible des consignes.
■
Consigne de consulter en urgence si : – somnolence ; – discours incohérent ; – troubles de la parole ; – mouvements anormaux ; – majoration des céphalées ; – troubles de la vision ; – faiblesse d’un membre ; – vomissements ; – devant tout symptôme nouveau, en particulier apparition de signes de localisation.
■
On remet une feuille récapitulant ces informations, signée par le patient, dont le
double est conservé dans le dossier médical.
II. TRAUMATISÉ CRÂNIEN GRAVE A. Physiopathologie 1. Lésions initiales Elles peuvent se présenter sous différentes formes : ■
des contusions hémorragiques ;
■
des hémorragies sous-durales ;
■
des hémorragies extra-durales ;
■
des hémorragies sous-arachnoïdiennes ;
■
des lésions axonales diffuses ;
■
des embarrures fermées ou ouvertes.
Elles peuvent être isolées ou associées entre elles.
2. Lésions secondaires ■ Elles ont comme aboutissement l’ischémie cérébrale et sont favorisées par les agressions cérébrales secondaires d’origine systémique (ACSOS) (fig. 201-5). 251
ITEM 201
Vasodilatation
PAM
PPC
Volume sanguin cérébral
PIC
Fig. 201-5. Cascade délétère de Rosner (1999).
■
La pression de perfusion cérébrale (PPC) = pression artérielle moyenne (PAM) –
pression intracrânienne (PIC). ■
Les ACSOS aggravent la cascade en augmentant la PIC ou en diminuant la PAM : – hypotension artérielle : PAS < 90 mmHg ; – hypoxémie : PaO2 < 60 mmHg ; – hypercapnie et hypocapnie ; – hyperthermie ; – hypoglycémie et hyperglycémie ; – hyponatrémie.
B. Prise en charge Tout TCG doit être considéré comme à haut risque de lésion rachidienne instable et devra donc bénéficier d’une immobilisation de l’axe craniorachidien lors de toutes les procédures diagnostiques et thérapeutiques. La mise en condition standard de tout polytraumatisé sera appliquée dans cette situation (voir la prise en charge du polytraumatisé, p. 235).
1. En préhospitalier a) Prise en charge neurologique ■ Score de Glasgow (GCS) (tableau
201-4)
: le score s’obtient par la somme des
meilleures réponses obtenues. Ainsi, l’état de vigilance et de conscience normal est coté Glasgow 15 alors que le coma le plus profond est coté Glasgow 3. Les stimulations nociceptives validées sont : la pression sus-orbitaire et la pression du lit unguéal. Les frottements/pincements cutanés sont à éviter. ■
Examen des pupilles, bilatéral et comparatif : – état de base : • diamètre : myosis, intermédiaire, mydriase ; • symétrie ; – réflexe photomoteur.
■
252
Recherche d’un déficit moteur aux 4 membres.
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces
Tableau 201-4. Score de Glasgow (GCS) Note
Ouverture des yeux
Réponse verbale
6
Réponse motrice Réponse aux ordres
5
Cohérente, orientée
Adaptée, localise la douleur
4
Spontanée
Confuse
Évitement inadapté
3
À la demande
Inappropriée
Flexion-décortication
2
À la stimulation nociceptive
Inintelligible
Extension-décérébration
1
Absente
Absente
Absente
■
Recherche des réflexes ostéotendineux.
■
Réflexe cutané plantaire.
■
Tonus anal au toucher rectal.
■
Thérapeutique : – en cas de mydriase aréactive, osmothérapie en urgence par mannitol 20 % : 250 mL IVL renouvelable 1 fois ; – contrôle des VAS par intubation orotrachéale après induction en séquence rapide puis ventilation mécanique sous anesthésie générale ; – pas de sonde nasogastrique (risque de brèche de la dure-mère) mais sonde orogastrique possible ; – maintien de la rectitude craniorachidienne pendant toute la procédure.
b) Prise en charge hémodynamique ■ Traitement d’un état de choc. ■
Maintien d’une PAM ≥ 85 mmHg pour préserver la PPC : – remplissage vasculaire par du sérum physiologique ; – perfusion de vasopresseurs : noradrénaline IVSE.
c) Prise en charge respiratoire ■ Ventilation mécanique avec monitorage du CO expiré. 2 ■
Réglage des paramètres du respirateur pour maintenir une normocapnie et une
SpO2 normale.
2. Dans la structure d’accueil ■ Un dogme : ne jamais oublier qu’un TCG est un polytraumatisé jusqu’à preuve du contraire. Il doit bénéficier de la même stratégie diagnostique et thérapeutique que tout polytraumatisé. ■
L’hémostase d’une lésion hémorragique menaçant le pronostic vital est prior-
itaire sur toute intervention neurochirurgicale. ■
Une obsession : ne pas méconnaître une lésion rachidienne instable.
■
Un examen clé : le scanner cérébral sans injection de produit de contraste en
urgence, qui recherche : – une fracture du crâne en fenêtre osseuse ; – une hyperdensité spontanée en fenêtre parenchymateuse, en faveur d’un saignement. ■
Réalisation d’un doppler transcrânien évaluant la perfusion cérébrale. 253
ITEM 201
a) Neuroréanimation ■ Lutte contre l’hypertension intracrânienne (HTIC) : – sédation suffisante par des benzodiazépines (midazolam) et des morphiniques (sufentanil) ; – positionnement demi-assis en l’absence de lésion rachidienne instable ; – tête dans l’axe pour libérer le retour veineux jugulaire ; – les corticoïdes n’ont aucune indication en traumatologie crânienne. ■
Prévention et traitement des ACSOS : – glycémie : insulinothérapie pour contrôle glycémique strict ; – traitement d’une fièvre : • paracétamol IV : 1 g × 4/j ; • refroidissement externe ; • traitement étiologique ; – traitement d’une hypoxémie, d’une hypercapnie : • réglage du respirateur ; • traitement d’une pneumonie d’inhalation par amoxicilline-clavulanate ; – maintien d’une PAM > 85 mmHg ; – soluté vecteur : NaCl à 0,9 % ; contre-indication aux solutés hypotoniques ; – maintien d’une Hb > 9 g/dL par transfusion de concentrés érythrocytaires et plaquettes. 100 000 m3 par transfusion de concentrés plaquettaires.
■
Correction des troubles de l’hémostase : contre-indication des anticoagulants
préventifs pendant 5 jours. ■
Prévention des convulsions précoces par acide valproïque (Dépakine®) pendant
7 jours. ■
Surveillance neurologique clinique régulière (GCS, pupilles, motricité des 4 mem-
bres), surveillance de la pression intracrânienne si nécessaire et réalisation d’un Doppler transcrânien deux fois par jour en phase aiguë. ■
Scanner cérébral de contrôle.
■
Prévention des complications de décubitus : escarres (matelas à flux, massage
des points d’appui) et complications thromboemboliques (bas de contention, puis le risque de resaignement passé, anticoagulation préventive par HBPM).
b) Indications neurochirurgicales en urgence Elles représentent moins de 5 % des hospitalisations pour TCG : ■
hématome extra-dural ;
■
hématome sous-dural aigu avec déviation de la ligne médiane > 5 mm ;
■
embarrure ouverte.
■
Hématome extra-dural (HED) : – la sémiologie est typique : • perte de connaissance initiale inconstante ; • retour à une vigilance normale ;
254
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces
• puis, après un intervalle libre, survenue d’un coma ; • le saignement est le plus souvent lié à la lésion d’une artère méningée ; – imagerie (fig. 201-6) :
Fig. 201-6. Scanner cérébral sans injection : hématome extra-dural hémisphérique gauche. Lentille biconvexe hyperdense. Engagement sous-factoriel. Hématome des parties molles en regard.
• lentille biconvexe hyperdense ; • effet de masse : déviation des structures médianes, disparition des sillons corticaux, effacement des ventricules latéraux, comblement des citernes de la base ; • en regard de l’HED, il faut rechercher : une fracture du crâne associée, un hématome des parties molles, voire un engagement (sous-falcoriel, central, temporal) ; • un HED peut masquer un HSD plus discret, diamétralement opposé, survenant par un mécanisme de contrecoup ; – traitement chirurgical : il s’agit d’une urgence neurochirurgicale : • incision puis évacuation de l’hématome ; • examen de la dure-mère en peropératoire ; – le pronostic dépend essentiellement de la rapidité de la prise en charge. ■
Hématome sous-dural aigu (HSD) : – imagerie (fig. 201-7) : • lentille biconcave hyperdense intracrânienne, extraparenchymateuse ; • fréquemment associée à des pétéchies hémorragiques intraparenchymateuses ; – indication neurochirurgicale en cas de déviation des structures médianes ≥ 5 mm ; – le pronostic dépend de la rapidité de la prise en charge et des contusions sous-jacentes.
u
255
ITEM 201
u
Fig. 201-7. Scanner cérébral : hématome sous-dural aigu hémisphérique gauche. Lentille biconcave. Déviation des structures médianes.
c) Soins paramédicaux ■ Surveillance hémodynamique. ■
Surveillance régulière et écrite, au mieux sur un document spécifique : – score de Glasgow ; – examen bilatéral et comparatif des pupilles et du réflexe photomoteur, horaire ; – motricité des 4 membres ; – monitorage de la pression intracrânienne continu en cas d’hypertension intracrânienne.
■
Nursing.
■
Prévention d’escarres.
■
Kinésithérapie motrice passive puis active.
■
Bas antithrombose.
C. Complications 1. Précoces ■ Engagement cérébral. ■
Mort encéphalique.
■
Arrêt cardiorespiratoire.
2. Tardives ■ Complications de réanimation : – infection nosocomiale ; – maladie thromboembolique ; – gastrite aiguë de stress ; – neuromyopathie de réanimation. ■
Méningite bactérienne sur brèche dure-mérienne : – souvent retardée de plusieurs mois après le traumatisme ; – ne justifie pas d’antibioprophylaxie au long cours ni de vaccination antipneumococcique.
256
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces
■
Complications fonctionnelles : – déficit moteur ; – déficit intellectuel ; – déficit praxique ; – état paucirelationnel ; – état végétatif.
■
Épilepsie séquellaire.
■
Syndrome subjectif des traumatisés crâniens.
■
Troubles neuropsychiques, voire psychiatriques.
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces chez un traumatisé des membres OBJECTIF ● Identifier les situations d’urgence. LIENS TRANSVERSAUX ITEM 103
Prévention du tétanos.
ITEM 192
Déficit neurologique récent.
ITEM 200
État de choc.
ITEM 208
Ischémie aiguë des membres.
ITEM 219
Troubles de l’équilibre acido-basique et désordres hydroélectrolytiques.
ITEM 238
Fracture de l’extrémité inférieure du radius chez l’adulte.
ITEM 239
Fracture de l’extrémité supérieure du fémur chez l’adulte.
ITEM 252
Insuffisance rénale aiguë – Anurie.
ITEM 283
Surveillance d’un malade sous plâtre.
ITEM 301
Déficit moteur et/ou sensitif des membres. Sujet tombé
Sujets tombés aux concours de l’Internat ●
1998 : Écrasement de membre – « Crush » syndrome. Patient présentant un volumineux membre inférieur tendu et douloureux dans les suites d’un AVP avec hyperkaliémie et insuffisance rénale aiguë. 1) Diagnostic suspecté. 2) Physiopathologie. 3) Signes biologiques associés. 4) Signes ECG d’hyperkaliémie. 5) Traitement symptomatique en urgence.
CONSENSUS Il n’existe à ce jour aucune conférence de consensus sur ce thème. 257
ITEM 201
POUR COMPRENDRE… ■
Le diagnostic et la prise en charge d’un traumatisé des membres sont relative-
ment aisés lorsque ce traumatisme est isolé. ■
À l’inverse, lorsqu’il s’intègre dans le cadre d’un polytraumatisme, le diagnostic
et la prise en charge d’un traumatisme de membre sont souvent négligés, et cette méconnaissance peut être à l’origine de séquelles fonctionnelles graves. ■
Un bilan des traumatismes de membres doit donc systématiquement être réalisé
dans les 24 h suivant l’arrivée du polytraumatisé.
I. GÉNÉRALITÉS SUR LES FRACTURES TRAUMATIQUES DES MEMBRES A. Épidémiologie Elles touchent le plus souvent l’homme jeune, dans un contexte d’AVP, de chute ou d’accident de sport.
B. Physiopathologie ■
Deux mécanismes peuvent être distingués : – traumatisme direct : la lésion se situe au niveau du point d’impact ; – traumatisme indirect : par torsion ou flexion. La lésion siège à distance du point d’impact.
■
Les fractures peuvent être classées selon
ITEMS 238, 239
:
– le trait de fracture : simple ou complexe ; – l’état cutané : ouvertes ou fermées ; – la localisation : le plus souvent diaphysaire ; – le déplacement : fractures non déplacées et déplacées.
C. Diagnostic Évident lorsque la fracture est isolée, il est plus difficile en cas de polytraumatisme ITEMS 238, 239
.
1. Terrain et anamnèse ■ Âge, antécédents, traitements. ■
Mécanisme lésionnel : point d’impact, traumatisme direct ou indirect, heure du
traumatisme. ■
Prise en charge préhospitalière.
2. Examen clinique ■ Douleur spontanée ou exquise à la palpation. ■
Impotence fonctionnelle totale du membre atteint.
■
Déformation.
■
Mobilité anormale.
■
Hématome.
3. Recherche de complications ■ Polytraumatisme (voir le bilan lésionnel du polytraumatisé, p. 235). 258
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces
■
Locorégionales : – fractures ouvertes ; – perte de substance ; – syndrome de loges ; – déficit sensitivomoteur par atteinte neurologique (compression, section nerveuse…) : examen neurologique ; – lésions vasculaires associées (compression, section artérielle) : palpation des pouls périphériques.
D. Bilan paraclinique La radiographie du membre concerné de face et de profil (fig. 201-8 et 201-9) permet l’étude : ■
du trait de fracture : simple (transversal, oblique ou spiroïde) ou complexe (bifo-
cal, comminutive) ; ■
du déplacement : angulation, translation, rotation.
Fig. 201-8. Radiographies de face et de profil montrant une fracture diaphysaire transverse des 2 os de la jambe. Source : « Traumatisme du genou et de la jambe », S. Zilber, J. Allain, Elsevier, EMC Urgences.
Fig. 201-9. Radiographie de face montrant une fracture diaphysaire des 2 os de l’avant-bras. Source : « Traumatisme de l’avant-bras et du poignet », J. Allain, S. Pannier, D. Goutallier, Elsevier, EMC Urgences, 2000.
259
ITEM 201
E. Prise en charge thérapeutique Les spécificités de prise en charge (type et durée d’immobilisation) dépendent du type de fracture rencontré et de sa localisation aux membres supérieurs ou inférieurs : ■
les fractures fermées, non déplacées et stables bénéficient d’un traitement
orthopédique ; ■
les fractures ouvertes, instables ou déplacées bénéficient d’un traitement chirurgical.
1. Traitement orthopédique Immobilisation par plâtre après réduction du foyer de fracture. 2. Traitement chirurgical ■ Réduction et ostéosynthèse sous anesthésie du foyer de fracture. ■
La technique d’ostéosynthèse dépendra du type de fracture et de la présence de
complications associées (fig. 201-10 à 201-12) : – broches, vis, plaque ; – enclouage centromédullaire ; – fixateur externe.
3. Mesures associées ■ Antalgiques : anti-inflammatoires non stéroïdiens, morphiniques, paracétamol. ■
Rééducation, kinésithérapie : mobilisation des doigts ou des orteils sous plâtre, puis
à distance récupération active de la force musculaire et des amplitudes articulaires. ■
Prophylaxie thromboembolique en cas de fracture du membre inférieur ou de
polytraumatisme. ■
Béquillage en cas de fracture du membre inférieur.
Fig. 201-10. Radiographies de face (a) et de profil (b) montrant un enclouage centromédullaire verrouillé d’une fracture de jambe. Source : « Traumatisme du genou et de la jambe », S. Zilber, J. Allain, Elsevier, EMC Urgences.
260
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces
Fig. 201-11. Radiographie de face et de profil montrant le traitement d’une fracture ouverte diaphysaire transverse des 2 os de la jambe par fixateur externe. Source : « Traumatisme du genou et de la jambe », S. Zilber, J. Allain, Elsevier, EMC Urgences.
Fig. 201-12. Radiographie montrant une fracture diaphysaire des 2 os de l’avant-bras. Ostéosynthèse par plaque vissée. Source : « Traumatisme de l’avant-bras et du poignet », J. Allain, S. Pannier, D. Goutallier, Elsevier, EMC Urgences, 2000.
4. Surveillance ■ Surveillance d’un malade sous plâtre
ITEM 283
.
■
Radiologique à J0, J2, J7, J15, J30, J45 : recherche d’un déplacement secondaire.
■
Complications des traumatismes des membres.
261
ITEM 201
II. COMPLICATIONS LOCALES A. Fractures ouvertes ■
Le diagnostic est clinique : abrasion, contusion, effraction cutanée, décollement,
délabrement. ■
On distingue 2 mécanismes lésionnels : – indirect : ouverture cutanée de dedans en dehors, à risque septique faible ; – direct : ouverture cutanée de dehors en dedans, souvent associée à des lésions plus délabrantes et à risque septique élevé.
1. Classification de Cauchoix-Duparc ■ Cauchoix I : plaie simple sans décollement ni contusion, suture possible sans tension. ■
Cauchoix II : plaie large avec contusion ou décollement sous-cutané, suture pos-
sible. Haut risque de nécrose secondaire. ■
Cauchoix III : perte de substance, suture impossible (fig. 201-13).
2. Traitement Il doit avoir lieu dans les 6 heures suivant la fracture ouverte : urgence thérapeutique. ■
Traitement local : – détersion, lavage ; – parage et suture sans tension ; – lambeau et greffe de peau à distance dans les fractures Cauchoix III.
■
Réduction du foyer de fracture : – Cauchoix I : traitement identique à une fracture fermée ; – Cauchoix II : l’ostéosynthèse dépendra du type de fracture et du délai de prise en charge ; – Cauchoix III : fixateur externe.
■
Mesures générales : – antibiothérapie parentérale, bactéricide : amoxicilline + acide clavulanique, 2 g en IVD puis 1 g × 3/jour avec relais per os, pendant 48 h ; – SAT, VAT ;
Fig. 201-13. Fracture ouverte de jambe stade III de la classification de Cauchoix avec brûlure et nécrose cutanéomusculaire après fixation externe. Source : « Traumatisme du genou et de la jambe », S. Zilber, J. Allain, Elsevier, EMC Urgences.
262
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces
– antalgiques ; – pansements antiseptiques ; – surveillance.
B. Syndrome des loges Il s’agit d’un syndrome ischémique lié à une hyperpression au sein des loges aponévrotiques
ITEM 283
.
1. Physiopathologie Il s’agit d’un cercle vicieux : ■
apparition d’un œdème dans les loges aponévrotiques ;
■
augmentation des pressions dans les loges aponévrotiques ;
■
diminution du retour veineux ;
■
majoration de l’œdème ;
■
au total : ischémie, nécrose musculaire et nerveuse en l’absence de traitement.
2. Clinique ■ Contexte de fracture (le plus souvent fracture fermée de jambe, plâtrée). ■
Survient dans les 24 h suivant le traumatisme.
■
Douleur intense.
■
Œdème.
■
Tension douloureuse des loges.
■
Déficit sensitivomoteur.
■
Persistance des pouls périphériques.
3. Traitement ■ Urgence thérapeutique, aucun examen ne doit retarder la prise en charge. ■
Ouverture et ablation du plâtre.
■
Aponévrotomie de décharge (fig. 201-14).
C. Complications artérielles ■
Elles sont au nombre de 3
ITEM 208
:
– plaie artérielle et section artérielle ; – compression ; – spasme artériel.
Fig. 201-14. Aponévrotomie pour syndrome de loge. Source : « Traumatisme du genou et de la jambe », S. Zilber, J. Allain, Elsevier, EMC Urgences.
263
ITEM 201
■
Clinique : – hémorragie : franche ou hématome expansif ; – ischémie : membre froid, blanc et douloureux avec abolition des pouls périphériques.
■
Paraclinique : – Doppler : diminution ou abolition du pouls distal ; – artériographie : fuite de produit de contraste, abolition du flux artériel.
■
Traitement : – compression manuelle en cas d’hémorragie extériorisée ; – réduction en urgence du foyer de fracture pouvant à elle seule lever une compression artérielle ; – suture, pontage artériel.
D. Complications nerveuses ■
Il existe 3 types de lésions nerveuses
ITEMS 192, 301
:
– la neurapraxis : sidération nerveuse simple, cas le plus fréquent, secondaire dans la plupart des cas à une compression ; – l’axonotmésis : section de l’axone ; – la neurotmésis : section nerveuse complète. ■
Clinique : – déficit sensitivomoteur dans le territoire correspondant ; – douleurs neurogènes (tardives).
■
Paraclinique : l’électromyogramme est peu utile au diagnostic mais servira de
référence pour l’évolution. ■
Traitement : – réduction du foyer de fracture ; – exploration chirurgicale et suture nerveuse ; – en cas de neurapraxis, la réduction du foyer de fracture suffit et la récupération est fréquente.
■
Surveillance par électromyogramme.
E. Infection ■
Cela peut aller de l’infection cutanée locale jusqu’à l’ostéite.
■
Elle survient le plus souvent sur fracture ouverte avec ischémie-nécrose
tissulaire. ■
Bactéries : – Staphylococcus aureus ; – Pseudomonas ; – Streptocoques β-hémolytiques du groupe A ; – anaérobies ; – Clostridium tetani (tétanos) ; – Clostridium perfringens (gangrène gazeuse).
■
Clinique : – SIRS ou sepsis ; – localement : cicatrice inflammatoire avec écoulement purulent.
264
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces
■
Examens paracliniques : – NFS, CRP ; – hémocultures ; – prélèvements bactériologiques locaux avec antibiogramme.
■
Traitement : – antibiothérapie double, bactéricide, adaptée aux résultats des prélèvements bactériologiques et à l’antibiogramme, à bonne pénétration osseuse si besoin, pour une durée de 3 à 6 mois ; – SAT-VAT ; – traitement chirurgical : • excision, lavage des tissus nécrosés ; • ablation du matériel d’ostéosynthèse.
III. COMPLICATIONS GÉNÉRALES A. Choc hémorragique ■
ITEM 200
Il doit faire rechercher une lésion thoracique ou abdominale associée (voir
« Polytraumatisme », p. 235). ■
De manière isolée, il peut s’agir : – d’une fracture fermée de la diaphyse fémorale ; – d’une fracture ouverte avec effraction vasculaire ; – d’un écrasement ou d’un arrachement de membre.
■
Le traitement repose sur la prise en charge du choc hémorragique, l’hémostase
locale et la prise en charge spécifique de la lésion de membre, avec si nécessaire suture vasculaire.
B. Crush syndrome* ■
ITEMS 219, 252
On l’observe au décours des écrasements de membres (ensevelissement, grand
délabrement…).
1. Physiopathologie Il s’agit d’un syndrome d’ischémie-reperfusion. a) Ischémie L’ischémie induite par l’écrasement va être à l’origine d’un déséquilibre de l’homéostasie cellulaire. Les conséquences en sont : ■
œdème local majorant l’ischémie et pouvant induire une hypovolémie ;
■
production de radicaux libres ;
■
libération du contenu intracellulaire : potassium, cytokines, myoglobine, CPK…
b) Reperfusion Lors du rétablissement d’un débit sanguin local, il existe une recirculation des radicaux libres, du potassium, des cytokines, de la myoglobine, à l’origine : ■
d’une majoration de la réaction inflammatoire locale entretenant le phénomène ;
■
de complications à type de : – troubles du rythme et arrêt cardiaque par hyperkaliémie ; 265
*Concours Internat 1998
ITEM 201
– insuffisance rénale aiguë par nécrose tubulaire aiguë secondaire à la précipitation de la myoglobine au sein des tubules rénaux. Elle est d’autant plus importante que le patient est hypovolémique ; – SDRA ; – CIVD.
2. Diagnostic positif ■ Clinique : – œdème local avec déficit sensitivomoteur inconstant ; – syndrome de défaillance multiviscérale associant à des degrés divers : • choc hypovolémique ; • troubles de la conscience ; • défaillance cardiogénique ; • défaillance respiratoire (SDRA) ; • insuffisance rénale aiguë oligoanurique avec urines « porto ». ■
Bilan biologique : – ionogramme sanguin : hyperkaliémie, insuffisance rénale aiguë, hyperuricémie, hypocalcémie ; – enzymes musculaires : élévation des CPK et de la myoglobine ; – myoglobinurie ; – gaz du sang : acidose métabolique ; – NFS, hémostase : CIVD.
■
ECG : signes d’hyperkaliémie.
3. Traitement ■ Hospitalisation en réanimation. ■
Traitement symptomatique : – expansion volémique : lutte contre l’hypovolémie et entretien d’une polyurie ; – correction des troubles hydroélectrolytiques, notamment hyperkaliémie ; – diurèse alcaline ; – épuration extra-rénale.
■
Traitement local : – parage ; – aponévrotomie de décharge ; – ostéosynthèse par fixateur externe.
■
Surveillance : – aspect cutané local ; – scope ; – diurèse ; – ionogramme sanguin, gaz du sang artériels, lactates artériels, hémostase et enzymes musculaires.
C. Embolie graisseuse Elle est observée dans les suites d’un polytraumatisme ou d’une fracture des os longs, le plus souvent fracture de la diaphyse fémorale. Elle touche l’adulte jeune. 266
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces
1. Physiopathologie On retrouve des microemboles de graisse au sein de la microcirculation, principalement pulmonaires et neurologiques, ayant 2 conséquences : ■
obstruction de la circulation d’aval, responsable de signes d’ischémie ;
■
libération d’acides gras libres (toxiques), à l’origine d’une agrégation pla-
quettaire et d’une activation de la cascade inflammatoire. Il en résulte un OAP lésionnel et une CIVD.
2. Diagnostic positif ■ Elle survient classiquement dans les 24-48 h après le traumatisme. ■
Elle associe : – début brutal ; – fièvre constante à 39 °C ; – atteinte respiratoire : SDRA ; – atteinte neurologique : troubles de la conscience et signes neurovégétatifs (hyperthermie, tachycardie) ; – atteintes cutanéomuqueuses : purpura et pétéchies cervicothoraciques ; – atteintes oculaires avec au fond d’œil : hémorragies rétiniennes, emboles graisseux.
3. Paraclinique ■ Radiographie thoracique : syndrome alvéolo-interstitiel. ■
NFS, hémostase : CIVD, anémie hémolytique.
■
Lavage bronchoalvéolaire, à la recherche d’emboles graisseux, cependant non
spécifique. ■
Scanner cérébral : élimine un diagnostic différentiel (hématome extradural).
4. Traitement ■ Il est avant tout préventif : immobilisation précoce du foyer de fracture. ■
Le traitement curatif est symptomatique et nécessite une prise en charge en
réanimation avec recours le plus souvent à la ventilation mécanique.
IV. AUTRES COMPLICATIONS Elles seront juste citées, ne faisant pas l’objet de cet item.
A. Précoces ■
Décompensation d’une pathologie chronique associée.
■
Complications de décubitus
■
Déplacement secondaire du foyer de fracture.
ITEM 50
.
B. Tardives ■
Retard de consolidation.
■
Cal vicieux.
■
Pseudarthrose.
■
Ostéite chronique.
■
Algodystrophie.
■
Troubles trophiques. 267
ITEM 201
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces chez un traumatisé du bassin OBJECTIF ● Identifier les situations d’urgence.
CONSENSUS ● Monitorage du patient traumatisé grave en préhospitalier – http : //www.sfar.org/s/ article.php3?id_article=4.
POUR COMPRENDRE… ■
Les traumatismes du bassin sont le plus souvent secondaires à un accident de la
voie publique ou à une chute de grande hauteur. ■
Le pronostic vital est engagé en raison de l’hématome rétropéritonéal de grande
abondance qui peut se constituer : le volume du saignement peut dépasser 5 litres. ■
Il s’agit d’une urgence diagnostique car une prise en charge spécialisée radio-
interventionnelle est nécessaire pour réaliser l’hémostase.
I. MÉCANISMES LÉSIONNELS ■
compression latérale : – les plus fréquents (50 % des cas) – circonstances : piéton ou deux-roues renversé ; – fractures : • aile iliaque ; • branche iliopubienne ; • branche ischiopubienne ;
■
compression antéropostérieure : – choc frontal ; – mécanisme dit en « livre ouvert » ; – lésions : • disjonction sacro-iliaque ; • disjonction pubienne ; • fracture du sacrum ;
■
cisaillement : – chute de grande hauteur ;
268
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces
– déplacements des pièces ostéoligamentaires dans le plan frontal ; – lésions complexes ; ■
traumatisme ouvert : – écrasement ou chute de grande hauteur ; – ouverture du foyer de fracture sur : • la peau ; • le rectum ; • le vagin ; – le risque est : • infectieux ; • fonctionnel ; • vital.
II. PRISE EN CHARGE PRÉHOSPITALIÈRE ■
Elle respecte les principes de la prise en charge de tout polytraumatisé. En par-
ticulier, il est nécessaire de pouvoir faire face à tout moment à la survenue d’un choc hémorragique rapidement évolutif. ■
Utilisation du pantalon anti-choc : – indication : choc hémorragique sévère avec forte suspicion de traumatisme du bassin ; – contre-indication formelle en cas de traumatisme thoracique grave ; – après sédation et analgésie efficaces.
■
Le patient doit être orienté vers un centre spécialisé dans l’accueil des trauma-
tisés graves et disposant d’un plateau technique de radiologie interventionnelle 24/24 h.
III. PRISE EN CHARGE HOSPITALIÈRE A. Examen physique ■
Inspection : – contusion ou hématome de la paroi pelvienne ; – état cutané ; – déformation, asymétrie du bassin ; – examen des organes génitaux externes : hématome, contusion.
■
Palpation : – douce et prudente ; – recherche une instabilité latérale ou antéropostérieure ; – recherche un globe vésical.
■
Touchers pelviens : – hémorragie : plaie vaginale ou rectale ; – palpation d’une esquille osseuse ; – atonie du sphincter anal, anesthésie périnéale : en faveur d’une lésion des racines de la queue de cheval par un traumatisme du sacrum. 269
ITEM 201
■
Percussion : – matité sus-pubienne ; – l’association d’un globe vésical avec une hématurie évoque fortement une lésion urétrale qui contre-indique le sondage vésical avant avis spécialisé d’un urologue. Dans l’attente, un cathéter sus-pubien sera mis en place.
B. Examens complémentaires 1. Biologie Bilan usuel de tout traumatisé grave. On recherche en particulier une anémie et une coagulopathie (CIVD et/ou fibrinolyse).
2. Imagerie ■ Radiographie du bassin de face au lit du malade (analyse bilatérale et comparative) (fig. 201-15) : – interlignes sacro-iliaques ; – trous de conjugaison sacrés ; – aile iliaque et branches ilio-ischiopubiennes ; – cotyle et extrémité supérieure du fémur ; – symphyse pubienne. ■
Scanner du bassin avec injection de produit de contraste : – réalisé sur un patient stable ou stabilisé sur le plan hémodynamique ; – précise les lésions ; – recherche des signes de gravité : • hématome rétropéritonéal (fig. 201-16) ; • « flaques » de produit de contraste (saignement actif).
C. Stratégie thérapeutique ■
Le pronostic vital immédiat est déterminé par la sévérité du saignement.
■
La réanimation classique du patient en état de choc hémorragique sera menée
parallèlement aux techniques d’hémostase. Elle nécessitera le plus souvent
Fig. 201-15. Fracture de l’aile iliaque droite, du cadre obturateur gauche – disjonction sacroiliaque droite.
270
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces
Fig. 201-16. Fracture du sacrum – hématome rétropéritonéal – fracture de l’aile iliaque droite.
une transfusion massive et précoce de concentrés érythrocytaires, plasma frais congelé et plaquettes qui anticipera les troubles de l’hémostase sans attendre les résultats des examens biologiques. ■
Si un pantalon anti-choc a été mis en place en préhospitalier, il ne sera dégonflé
qu’une fois le patient installé en salle de radiologie interventionnelle ou en salle d’opération pour fixation externe.
1. Artérioembolisation en urgence si l’hémorragie est non contrôlée ■ Diagnostic : – saignement actif : fuite de produit de contraste ; – topographique ; – vasospasme : vaisseau ayant saigné. ■
Thérapeutique : – embolisation sélective du ou des vaisseau(x) incriminé(s) ; – embolisation préventive de vaisseaux spasmés ; – désilet d’artériographie laissé en place 24 h dans l’éventualité d’une réintervention pour récidive hémorragique.
2. Fixateur externe en urgence ■ Permet de diminuer le débit hémorragique. ■
Solution d’attente, mise en œuvre au lit du malade.
■
Ne peut se substituer à l’artérioembolisation.
3. Chirurgie ? Il n’y a pas d’indication à l’abord chirurgical du rétropéritoine dans les traumatismes du bassin. En effet, l’augmentation de la pression dans cette cavité participe à l’hémostase. La levée de cette pression expose au risque de saignement cataclysmique inaccessible à l’hémostase chirurgicale.
271
ITEM 201
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces chez un traumatisé thoracique OBJECTIF ● Identifier les situations d’urgence. LIENS TRANSVERSAUX ITEM 193
Détresse respiratoire aiguë de l’adulte. Corps étranger des voies aériennes supérieures.
ITEM 198
Dyspnée aiguë et chronique.
ITEM 276
Pneumothorax.
ITEM 312
Épanchement pleural.
CONSENSUS ● Monitorage du patient traumatisé grave en préhospitalier – http : //www.sfar.org/s/ article.php3?id_article=4.
POUR COMPRENDRE… ■
Il s’agit dans 70 % des cas d’un accident de la voie publique.
■
Le traitement chirurgical est rarement nécessaire.
■
Le retentissement cardiorespiratoire de ce traumatisme aggrave le pronostic du
polytraumatisé lors de son séjour en réanimation. ■
On distingue 4 types de lésions : – les ruptures des gros vaisseaux intrathoraciques, létales d’emblée ; – les lésions pariéto-pleuro-parenchymateuses, à retentissement respiratoire ; – les lésions cardiovasculaires, à retentissement hémodynamique ; – les lésions rachidiennes, à ne pas méconnaître.
I. PHYSIOPATHOLOGIE A. Traumatisme fermé du thorax : AVP, chutes ■
Lésions de décélération : – gros vaisseaux : • rupture de l’isthme aortique ; • rupture/désinsertion des veines ou artères pulmonaires ;
272
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces
– cœur : • lésions valvulaires ; • rupture cardiaque ; • luxation cardiaque ; – plèvres : • pneumothorax ; • hémothorax ; • hémopneumothorax ; – diaphragme : déchirure de coupole diaphragmatique ; – arbre trachéobronchique : rupture trachéobronchique ; – rupture œsophagienne. ■
Lésions par transmission directe de l’onde de pression : – fractures de côtes : • hémothorax ; • hémopneumothorax ; • volet costal ; – fracture sternale ; – contusion myocardique ; – contusion pulmonaire.
B. Traumatisme thoracique pénétrant Balistique, arme blanche.
II. EXAMEN CLINIQUE A. Interrogatoire ■
Anamnèse du traumatisme.
■
Antécédents cardiaques.
■
Antécédents respiratoires.
B. Examen physique ■
Constantes : SpO2, FC, FR, PA.
■
Inspection : – ecchymose thoracique : ceinture de sécurité ; – plaie thoracique : • topographie : aire cardiaque ; • hémorragique ; • soufflante ; – ventilation : • asymétrie d’ampliation thoracique ; • dépression inspiratoire : volet thoracique.
■
Palpation : – déviation trachéale ; – emphysème sous-cutané ; – douleur exquise à la palpation costale.
273
ITEM 201
■
Percussion-auscultation : – épanchements ; – bruits du cœur ;
■
ECG : anomalie du segment ST (contusion myocardique).
III. EXAMENS COMPLÉMENTAIRES A. Imagerie 1. Examens de première ligne ■ Radiographie thoracique de face, qui analyse : – les parties molles ; – le rachis dorsal ; – le gril costal ; – les plèvres ; – le parenchyme pulmonaire et la trachée ; – le médiastin supérieur, moyen et inférieur. ■
Échographie pleurale, à la recherche d’un pneumothorax et/ou d’un hémo-
thorax. ■
Échographie péricardique, à la recherche d’un hémopéricarde.
2. Scanner thoracique avec injection de produit de contraste Comme pour le polytraumatisé, le scanner du traumatisé thoracique sera effectué sur un patient stabilisé et ne retardera pas la prise en charge d’une blessure thoracique mettant en jeu le pronostic vital. ■
Indications : – traumatisme thoracique dans le cadre d’un polytraumatisme ; – choc à forte cinétique ; – traumatisme pénétrant ; – anomalie radiographique et/ou échographique.
■
Structures analysées : – cadre osseux : • côtes ; • rachis dorsal ; • sternum ; • clavicules/scapula ; – plèvres ; – péricarde ; – médiastin ; – gros vaisseaux intrathoraciques : aorte thoracique avec injection ; – parenchyme pulmonaire.
B. Biologie Il s’agit de l’ensemble des examens du traumatisé grave. 274
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces
IV. PRISE EN CHARGE DES LÉSIONS PRINCIPALES Les mesures générales sont celles de la prise en charge de tout polytraumatisé : ■
mise en condition : voir « Prise en charge du polytraumatisé », p. 235 ;
■
oxygénothérapie à fort débit au masque à réserve.
A. Volet costal 1. Physiopathologie ■ Trait de fracture passant par plusieurs côtes voisines. ■
Désolidarisation d’un segment de paroi thoracique.
■
Ventilation paradoxale et douleur intense : atélectasies, hypoventilation alvéo-
laire = détresse respiratoire aiguë.
2. Examen clinique ■ Dyspnée, détresse respiratoire avec tirage inspiratoire. ■
Dépression inspiratoire du volet.
■
Douleur intense.
3. Imagerie thoracique ■ Trait de fracture sur le cliché de radiographie pulmonaire. ■
Volet sur le scanner thoracique.
4. Traitement ■ Assistance ventilatoire, non invasive voire invasive après intubation trachéale. ■
Analgésie efficace.
■
Traitement systémique : association d’antalgiques des paliers I, II et III de l’OMS.
■
Traitement locorégional : analgésie péridurale thoracique après contrôle de
l’hémostase. ■
Stabilisation chirurgicale : indications spécialisées.
B. Pneumothorax 1. Physiopathologie Lacération pulmonaire, par : ■
fractures costales ;
■
projectile ou arme blanche ;
■
rupture de la corticalité pulmonaire par décélération ;
■
surpression trachéobronchique à glotte fermée ;
■
choc direct (mécanisme contendant) ;
■
onde de pression (blast).
2. Diagnostic a) Clinique ■ Diminution de l’ampliation thoracique. ■
Emphysème sous-cutané (crépitements à la palpation).
■
Diminution de la transmission des vibrations vocales.
■
Diminution du murmure vésiculaire.
■
Voire tableau de tamponnade gazeuse : 275
ITEM 201
– clinique : • « état de choc à signes droits » ; • démasqué par la ventilation mécanique (rare en ventilation spontanée) ; – physiopathologie : • pneumothorax compressif ; • augmentation brutale et importante de la pression pleurale ; • favorisée par la ventilation mécanique en pression positive ; • collapsus des veines caves intrathoraciques ; • chute brutale du retour veineux ; • chute de la précharge ventriculaire droite ; • chute du débit cardiaque ; – traitement : • exsufflation pleurale en urgence à l’aiguille : au niveau du 2e espace intercostal, sur la ligne médioclaviculaire ; • suivie immédiatement par le drainage pleural ; • remplissage vasculaire simultané.
b) Paraclinique ■ Radiographie thoracique : risque de faux négatif en cas de pneumothorax antérieur (fig. 201-17). ■
Échographie pleurale.
■
Scanner thoracique en fenêtre parenchymateuse.
3. Traitement Il consiste en un drainage pleural percutané : ■
asepsie chirurgicale ;
■
repères : ligne axillaire moyenne, 4e ou 5e espace intercostal ;
Fig. 201-17. RP de face : pneumothorax gauche compressif, fractures de côtes, emphysème sous-cutané. 276
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces
■
anesthésie locale ;
■
incision cutanée ;
■
dissection des plans musculaires ;
■
pleurotomie au doigt ;
■
insertion du drain en direction apicale puis fixation ;
■
aspiration à – 20 cmH2O.
C. Hémothorax 1. Physiopathologie ■ Fractures costales. ■
Traumatisme des vaisseaux pleuraux.
■
Traumatisme des vaisseaux bronchiques.
■
Traumatisme des gros vaisseaux intrathoraciques.
2. Complications ■ Surinfection : empyème pleural. ■
Troubles de ventilation voire atélectasies.
■
Insuffisance respiratoire aiguë.
3. Traitement ■ Drainage pleural (voir supra) : le drain sera orienté en direction postérieure. ■
Thoracotomie d’hémostase en urgence, indiquée en cas de : – saignement ≥ 1 500 mL à la pleurotomie ; – et/ou débit de sang ≥ 150 mL/h.
■
Exceptionnellement, thoracotomie de sauvetage au lit du malade.
Diagnostic différentiel d’un hémothorax gauche = rupture diaphragmatique.
D. Rupture de l’isthme aortique Les lésions aortiques traumatiques siègent sur l’isthme chez 90 % des blessés qui arrivent vivants à l’hôpital.
1. Rappel anatomique Le bloc formé par le cœur, l’aorte ascendante et la crosse aortique en amont de l’artère sous-clavière gauche est mobile dans le médiastin alors que l’aorte thoracique descendante en aval de la sous-clavière gauche est fixée dans le médiastin postérieur.
2. Physiopathologie ■ Décélération brutale → mobilisation antérieure du bloc mobile. ■
Déchirure transversale de l’aorte au niveau de l’isthme.
■
Hématome médiastinal postérieur qui réalise une contre-pression provisoire face
au flux aortique.
3. Diagnostic ■ L’examen clinique est le plus souvent peu contributif, à la différence des dissections non traumatiques de l’aorte. 277
ITEM 201
■
Radiographie thoracique de face (fig. 201-18) : – hémothorax gauche de grande abondance ; – fracture des 2 premières côtes gauches ; – comblement de la fenêtre aortopulmonaire ; – disparition du bouton aortique ; – déviation vers le bas de la bronche souche gauche ; – élargissement du médiastin supérieur ; – élargissement de la bande paratrachéale droite.
■
Scanner thoracique injecté (fig. 201-19) : – flap intimal ou médial ; – faux chenal ; – asymétrie des contours de l’aorte ; – hématome médiastinal ; – peut être normal en cas de lésions mineures.
■
Échographie transœsophagienne : – valeur diagnostique identique à celle du scanner ; – meilleure sensibilité pour les hématomes médiastinaux et les lésions mineures.
Fig. 201-18. RP de face : rupture de l’isthme aortique. Élargissement du médiastin supérieur et de la bande paratrachéale droite.
Fig. 201-19. Scanner thoracique : rupture de l’isthme aortique, flap intraluminal – hémomédiastin. 278
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces
4. Traitement Les indications thérapeutiques sont du domaine de la spécialité : ■
traitement endovasculaire ;
■
ou traitement chirurgical : prothèse aortique mise en place sous circulation
extracorporelle.
E. Contusion myocardique ■
Clinique : hypotension artérielle.
■
ECG : troubles de la repolarisation, troubles du rythme.
■
Biologie : mise en circulation de troponine.
■
Traitement : surveillance électrocardioscopique et enzymatique.
F. Contusion pulmonaire 1. Physiopathologie Transmission de l’onde de choc au parenchyme pulmonaire par la paroi thoracique : ■
hémorragie intra-alvéolaire ;
■
anomalies du surfactant ;
■
inflammation péri-alvéolaire.
2. Clinique Signes d’hypoxémie et de détresse respiratoire aiguë. 3. Imagerie pulmonaire Le délai entre le traumatisme et l’apparition des signes radiologiques est de 4 à 6 heures : ■
infiltrats ;
■
bandes d’atélectasies ;
■
parfois bronchogramme aérien ;
■
pneumatocèles (clartés gazeuses) au scanner thoracique en fenêtre parenchy-
mateuse.
4. Complications ■ Encombrement bronchique. ■
Pneumopathies bactériennes.
■
Abcédation.
■
SDRA.
5. Traitement ■ Endoscopie bronchique : – bilan des lésions ; – évacuation des caillots. ■
Soins respiratoires : – kinésithérapie de drainage bronchique ; – oxygénothérapie ; – ventilation mécanique, non invasive voire invasive ; – analgésie. 279
ITEM 201
G. Rupture diaphragmatique (fig. 201-20 et 201-21) 1. Physiopathologie ■ Déchirure de coupole diaphragmatique, gauche > droite. ■
Ascension des viscères abdominaux.
2. Clinique ■ État de choc. ■
Détresse respiratoire aiguë.
■
BHA à l’auscultation thoracique.
3. Imagerie ■ RP de face : sonde gastrique intrathoracique. ■
Scanner thoracique : diagnostic de certitude.
4. Traitement Il est chirurgical.
Fig. 201-20. Hémopneumothorax gauche compressif. Emphysème sous-cutané. Fractures de côtes.
Fig. 201-21. Rupture diaphragmatique. 280
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces
H. Lésions plus rares ■
Luxation cardiaque.
■
Rupture cardiaque.
■
Désinsertion des veines pulmonaires.
■
Traumatisme pénétrant (plaie par arme à feu, blanche) : – avis du chirurgien thoracique : exploration chirurgicale ? – antibiothérapie prophylactique : amoxicilline-clavulanate pendant 24 h ; – VAT, SAT.
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces devant une plaie des parties molles OBJECTIF ● Identifier les situations d’urgence. LIENS TRANSVERSAUX ITEM 101
Pathologie d’inoculation.
ITEM 103
Prévention du tétanos.
ITEM 192
Déficit neurologique récent.
ITEM 213
Piqûres et morsures. Prévention de la rage.
ITEM 301
Déficit moteur et/ou sensitif des membres.
Sujets tombés aux concours de l’Internat : 1996, 2000 1996 : ●
Sujet tombé
Plaie de main compliquée 1) Énoncer les différentes lésions nerveuses et tendineuses en fonction de l’examen clinique et leur prise en charge. 2) Énoncer l’ensemble des lésions associées.
●
2000 : Plaie de main compliquée. Énoncer les différentes lésions nerveuses et tendineuses en fonction de l’examen clinique et leur prise en charge.
CONSENSUS ● Prise en charge des plaies aux urgences – Conférence de consensus – Société francophone de médecine d’urgence (SFMU), décembre 2005.
281
ITEM 201
POUR COMPRENDRE… ■
Motif de consultation fréquent aux urgences, la prise en charge d’une plaie des
parties molles doit être rigoureuse. En effet, une plaie des parties molles peut masquer des lésions plus profondes pouvant mettre en jeu le pronostic fonctionnel ou même vital. ■
Une plaie siégeant sur le crâne, le thorax ou l’abdomen, notamment en cas de
retentissement sur l’état de conscience, hémodynamique ou respiratoire, doit faire rechercher une atteinte des organes sous-jacents. Ces types de plaies font l’objet d’un paragraphe spécifique dans les sections des traumatismes abdominaux et thoraciques. ■
La prise en charge diagnostique et thérapeutique initiale d’une plaie des parties
molles conditionne le pronostic esthétique et fonctionnel ultérieur.
I. PRISE EN CHARGE DIAGNOSTIQUE A. Terrain ■
Âge.
■
Profession.
■
Antécédents médicaux pouvant interférer avec la cicatrisation (diabète, alcool,
corticothérapie). ■
Statut vaccinal antitétanique.
■
Main dominante (en cas de plaie siégeant sur les membres supérieurs).
B. Mécanisme lésionnel ■
Type d’accident.
■
Nature de l’objet contendant.
■
Souillure tellurique.
■
Plaie par morsure.
■
Site du traumatisme : toute plaie siégeant sur un axe vasculonerveux ou en
regard d’un organe vital comporte des risques spécifiques.
C. Examen clinique ■
Examen général : – recherche d’une atteinte organique sous-jacente ; – état de conscience ; – fréquence cardiaque et pression artérielle ; – fréquence respiratoire et saturation en oxygène ; – température.
■
Examen régional : – siège, profondeur apparente de la plaie ; – souillure ; – corps étranger ; – perte de substance ;
282
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces
– l’examen doit rechercher une atteinte des tissus nobles sous-jacents (nerfs, vaisseaux sanguins et tendons) : déficit sensitif et moteur, palpation des pouls, temps de recoloration cutanée, mobilité ; – tout déficit neurologique doit être consigné dans le dossier médical et le patient prévenu des séquelles neurologiques potentielles. ■
Exploration de la plaie : voir infra « Prise en charge thérapeutique ».
D. Examens paracliniques Ils ne sont pas systématiques : ■
exploration radiologique : – recherche de fractures ; – recherche d’un corps étranger ; – en cas de plaies siégeant sur le thorax et sur l’abdomen : radiographie thoracique, échographie abdominale et scanner thoracoabdominopelvien injecté (voir les traumatismes abdominaux et thoraciques, p. 242 et 272) ;
■
NFS, CRP, prélèvements bactériologiques.
II. PRISE EN CHARGE THÉRAPEUTIQUE L’examen clinique initial permet de classer les plaies des parties molles en 4 catégories : ■
plaies simples ;
■
plaies avec atteintes vasculonerveuses ou tendineuses sous-jacentes ;
■
plaies avec pertes de substance ;
■
plaies faisant suspecter une lésion organique plus profonde et nécessitant la
mise en place de mesures de réanimation et une prise en charge chirurgicale spécialisée (voir la prise en charge du polytraumatisé, p. 235).
CONSENSUS Prise en charge des plaies aux urgences SFMU, 2005 Les plaies suivantes doivent bénéficier d’une prise en charge chirurgicale : ■
plaies contuses ou souillées avec nécessité de parage étendue ;
■
pertes de substance ;
■
plaies avec suspicion d’atteintes d’éléments nobles sous-jacents ;
■
amputation.
A. Exploration de la plaie ■
Elle se fait sous anesthésie locale ou générale et dans des conditions d’asepsie
rigoureuse : – nettoyage et irrigation, ablation des corps étrangers ; – ostéosynthèse d’un foyer de fracture associé ; – recherche et suture microchirurgicale des lésions tendineuses, nerveuses et vasculaires ; – sutures plan par plan du revêtement cutané.
283
ITEM 201
■
Les plaies avec perte de substance nécessitent une prise en charge chirurgi-
cale plus complexe et bénéficient le plus souvent d’une cicatrisation dirigée avec réalisation de lambeau et de greffes cutanées. Plusieurs interventions chirurgicales sont souvent nécessaires.
B. Principes de la cicatrisation dirigée CONSENSUS Prise en charge des plaies aux urgences SFMU, 2005 ■
Détersion : lors du parage et améliorée par des pansements gras.
■
Bourgeonnement : grâce à l’utilisation de pansements occlusifs absorbants type hydrocolloïdes.
■
Épithélialisation : pansements occlusifs ou semi-occlusifs.
C. Mesures générales CONSENSUS Prise en charge des plaies aux urgences SFMU, 2005 ■
Antalgiques : de niveau 1 ou 3 selon l’EVA.
■
Antibiothérapie/antibioprophylaxie par bêtalactamines en l’absence d’allergie pour les
lésions avec risque infectieux élevé (souillures, morsures, signes généraux d’infection, fracture ouverte associée, plaies articulaires, vasculonerveuses ou tendineuses) : durée de 3–5 jours. ■
SAT, VAT
■
Prise en charge du risque rabique en cas de morsure
■
Rééducation.
ITEM 103
. ITEM 213
.
III. SPÉCIFICITÉS ET COMPLICATIONS A. Choc hémorragique ■
ITEM 200
Il doit faire rechercher une lésion thoracique ou abdominale associée (voir les
polytraumatismes, p. 235). ■
Il est exceptionnel en cas de plaie siégeant sur les membres et doit faire recher-
cher une lésion artérielle ou osseuse (fémorale, humérale…). ■
Le traitement repose sur la prise en charge du choc hémorragique, l’hémostase
locale et la prise en charge spécifique de la lésion de membre avec si nécessaire suture vasculaire. ■
Un cas particulier est celui de la plaie du cuir chevelu qui, à elle seule, peut être
très hémorragique et nécessiter une suture rapide par fils ou agrafes.
B. Plaies thoraciques et abdominales Elles menacent le pronostic vital à court terme. Ce sont des plaies par armes blanches ou armes à feu. Leur prise en charge est détaillée dans les sections des traumatismes thoraciques et abdominaux.
284
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces
C. Plaies de la face La peau, au niveau facial et cervical, recouvre de nombreux éléments nobles. Les complications peuvent être nombreuses et il convient d’orienter les patients vers un milieu chirurgical adapté : ■
plaies avec atteintes des branches du nerf trijumeau ou du nerf facial ;
■
atteintes des voies lacrymales, globes oculaires, paupières, canal de Sténon ;
■
plaies de l’oreille ;
■
plaies profondes des joues, de la langue et de la cavité buccale ;
■
plaie du cuir chevelu avec embarrure.
CONSENSUS Prise en charge des plaies aux urgences SFMU, 2005 ■
L’examen clinique d’une plaie de la face doit être détaillé et consigné par écrit, avec schéma
et photographies. ■
Le risque de séquelles esthétiques est important.
D. Plaies de la main* ■
Incidence élevée : près de 500 000/an en France.
■
Toute plaie d’allure banale doit bénéficier d’une exploration à la recherche de
lésions vasculaires, nerveuses et tendineuses sous-jacentes. ■
Il est nécessaire de connaître l’anatomie de la main et de l’ensemble du membre
supérieur pour comprendre les spécificités de l’exploration clinique d’une plaie de la main.
1. Examen clinique Réalisé avant toute anesthésie et consigné sur un schéma daté et signé, il sera complété par l’exploration chirurgicale. ■
Bilan cutané : – siège et profondeur des lésions ; – pertes de substance ; – présence d’un corps étranger ; – souillure.
■
Bilan vasculaire : chaleur, pouls capillaire, temps de recoloration.
■
Bilan neurologique : évaluation de la sensibilité et de la motricité dans les terri-
toires radial, médian et ulnaire. ■
Bilan tendineux : les lésions des tendons extenseurs sont les plus fréquentes.
Les aspects cliniques et les lésions correspondantes sont résumés dans le tableau 201-5. ■
Bilan ostéoarticulaire : – recherche d’une fracture ; – recherche d’une plaie articulaire.
285
*Concours Internat 1996 et 2000
ITEM 201
Tableau 201-5. Lésions tendineuses Lésions
Aspect
Appareil extenseur Tendon extenseur commun des doigts
Chute du doigt par flexion de la MCP
Bandelette médiane du tendon extenseur
Boutonnière : flexion de l’IPP et extension de l’IPD
Tendon terminal de l’extenseur
Mallet finger : déficit de l’extension de l’IPD avec flexion de l’IPD
Appareil fléchisseur Tendon fléchisseur commun superficiel
Flexion impossible de l’IPP après suppression de l’action du fléchisseur commun profond par blocage des autres doigts en extension
Tendon fléchisseur commun profond
Flexion impossible de l’IPD après blocage de l’IPP et MCP
Deux fléchisseurs
Déficit de l’extension de l’IPP et de l’IPD
IPP : interphalangienne proximale ; IPD : interphalangienne distale ; MCP : métacarpophalangienne.
2. Examen paraclinique Radiographie de la main ou du doigt concerné de face et de profil en cas de suspicion de fracture ou de corps étrangers.
3. Traitement ■ Traitement chirurgical : – débridement, lavage, parage et exploration sous anesthésie générale ou locale ; – traitement des lésions associées : • ostéosynthèse des foyers de fracture ; • sutures vasculaires ; • sutures tendineuses (cicatrisation en 6 semaines) ; • suture/greffe nerveuse ; • suture musculaire ; – fermeture plan par plan du revêtement cutané. ■
Mesures générales : – antalgiques : de niveau 1 à 3 selon l’EVA. – antibiothérapie/antibioprophylaxie par bêtalactamine en l’absence d’allergie pour les lésions avec risque infectieux élevé, de durée de 3–5 jours ; – SAT, VAT]
ITEM 103
;
– prise en charge du risque rabique en cas de morsure
ITEM 213
;
– immobilisation en cas de fractures ou de lésions tendineuses ; – rééducation.
4. Complications ■ Artérielles : – hémorragie : franche ou hématome expansif ; – ischémie : membre froid, blanc et douloureux avec abolition des pouls périphériques ; – traitement par suture de l’artère lors de l’exploration chirurgicale. 286
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces
■
Nerveuses : – déficit sensitivomoteur dans le territoire correspondant ; – douleurs neurogènes (tardives) ; – traitement par suture nerveuse lors de l’exploration chirurgicale.
■
Tendineuses : – examen (voir tableau 201-5) ; – suture tendineuse et immobilisation pendant 6 semaines.
■
Infectieuses : – le risque infectieux augmente avec : • un retard de prise en charge ; • plaie souillée (tétanos notamment) ; • morsures ; • plaie articulaire ; • déficit immunitaire et diabète ; – ce type de plaie doit bénéficier d’une prise en charge spécifique
■
ITEMS 101, 103, 213
.
Amputations : le segment amputé doit être lavé abondamment et conservé dans
un sachet en plastique, lui-même placé dans la glace. Tout contact direct avec la glace est proscrit. Le patient devra être orienté vers un centre spécialisé.
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces chez un traumatisé du rachis OBJECTIF ● Identifier les situations d’urgence. LIENS TRANSVERSAUX I
TEM 49
Évaluation clinique et fonctionnelle d’un handicap moteur, cognitif ou sensoriel.
ITEM 50
Complications de l’immobilité et du décubitus. Prévention et prise en charge.
ITEM 56
Ostéoporose.
ITEM 65
Bases neurophysiologiques et évaluation d’une douleur aiguë et chronique.
ITEM 66
Thérapeutiques antalgiques, médicamenteuses et non médicamenteuses.
ITEM 92
Infections ostéoarticulaires. Discospondylite.
ITEM 154
Tumeurs des os primitives et secondaires.
ITEM 192
Déficit neurologique récent.
ITEM 198
Dyspnée aiguë et chronique.
ITEM 200
État de choc.
ITEM 215
Rachialgie.
ú 287
ITEM 201
ITEM 231
Compression médullaire non traumatique et syndrome de la queue de cheval.
ITEM 279
Radiculalgie et syndrome canalaire.
ITEM 301
Déficit moteur et/ou sensitif des membres.
Sujets tombés aux concours de l’Internat et aux ECN Aucun sujet traitant d’une lésion traumatique du rachis n’est tombé à l’Internat ou aux ECN. En revanche, plusieurs sujets traitent de compressions médullaires non traumatiques (métastases osseuses, infection, hématome par surdosage en AVK…) ou des rachialgies (cervicalgies et lombalgies).
Sujet tombé
CONSENSUS ● Prise en charge d’un blessé adulte présentant un traumatisme vertébro-médullaire – Conférence d’experts – SFAR, 2003. ● Monitorage du patient traumatisé grave en préhospitalier – Conférence d’experts – SFAR, 2006.
POUR COMPRENDRE… ■
Les traumatismes vertébromédullaires sont fréquents, touchant environ 10 000 sujets
par an en France, principalement des sujets jeunes. ■
Ils sont responsables d’une morbi-mortalité importante.
■
La notion de lésions secondaires pouvant aggraver la lésion initiale nécessite une
prise en charge rigoureuse et coordonnée entre les différents acteurs. ■
Tout traumatisé doit bénéficier d’une immobilisation de l’axe craniorachidien
jusqu’à l’élimination formelle d’une lésion vertébromédullaire. ■
La prise en charge initiale, faisant intervenir urgentiste, orthopédiste et anesthé-
siste-réanimateur, vise : – à établir le bilan clinique et paraclinique du traumatisme médullaire ; – à en déterminer les conséquences neurologiques : niveau lésionnel, caractère complet ou non de la lésion ; – à dépister et traiter les complications ventilatoires et cardiovasculaires ; – à rechercher toute lésion associée dans le cadre d’un polytraumatisme. ■
Le scanner est l’examen de référence qui doit systématiquement compléter des
radiographies du rachis standard dès lors qu’une lésion du rachis est suspectée. ■
Le maintien d’une pression de perfusion médullaire et d’une oxygénation nor-
male a pour objectif de limiter l’ischémie médullaire. ■
L’existence d’un déficit neurologique et le caractère instable de la lésion rachi-
dienne conditionnent l’indication opératoire en urgence.
I. ÉPIDÉMIOLOGIE ■
Les traumatismes du rachis sont une pathologie fréquente, touchant environ
10 000 sujets par an en France. ■
Ils se compliquent dans environ 10 à 30 % des cas d’une atteinte médullaire.
■
On compte environ 1 000 à 2 000 sujets par an en France touchés par une lésion
médullaire traumatique. 288
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces
■
La population atteinte est à prédominance masculine (3–4 hommes pour 1 femme)
et jeune (âge moyen 15–30 ans). ■
Les accidents incriminés dans une lésion médullaire traumatique sont : – AVP ; – chutes de grande hauteur (défenestration) ; – accidents de sports (équitation, rugby, cyclisme, rollers…).
■
L’association à un polytraumatisme est fréquente : – 70 % des traumatisés du rachis ont une lésion menaçant le pronostic vital à court terme ; – 10 % des polytraumatisés ont une lésion rachidienne traumatique.
■
Plus rarement, les fractures surviennent sur un os pathologique et touchent le
sujet âgé (tumeur osseuse, métastase osseuse d’un cancer primitif, ostéoporose, cervicarthrose et infection)
ITEMS 56, 92, 154, 231
.
II. PHYSIOPATHOLOGIE A. Anatomie et notion de stabilité Schématiquement, le rachis peut être divisé en 3 segments verticaux et 2 segments horizontaux (fig. 201-22 et 201-23). ■
Les segments verticaux comprennent : – le segment vertébral antérieur : ligament commun vertébral antérieur, corps vertébral et disque ; – le segment vertébral moyen (SVM) : mur vertébral postérieur, pédicules, isthmes et surfaces articulaires ; – le segment postérieur : épineuses et ligament interépineux.
Antérieur
Postérieur Moyen
Fig. 201-22. Les 3 segments verticaux. Source : Imagerie musculosquelettique, Pathologies générales, par A. Cotten. Masson, collection « Imagerie médicale Précis », 2005. Illustratrice : Sophie Servain.
289
ITEM 201
Fig. 201-23. Biomécanique du rachis. Source : Prise en charge du rachis traumatique, par O. Langeron, B. Riou. EMC, Anesthésie-Réanimation.
■
Les segments horizontaux comprennent : – la vertèbre ; – le segment mobile rachidien (SMR), non osseux, comprenant l’ensemble des ligaments unissant deux vertèbres : ligament commun vertébral antérieur, disque intervertébral, ligament commun vertébral postérieur, ligament jaune, ligament interépineux et surfaces articulaires.
Toutes les lésions du SVM et du SMR entraînent un risque d’instabilité rachidienne et donc d’atteinte médullaire.
B. Lésions médullaires 1. Lésions primaires Elles constituent la lésion primitive liée au traumatisme et à l’impact initial. Il existe différents types de lésions primaires : ■
la commotion : atteinte médullaire simple avec récupération en quelques heures ;
■
la contusion : atteinte médullaire associant ecchymoses, microhémorragies
et œdème. Il s’agit d’une lésion définitive mais le tableau neurologique peut être incomplet ; ■
la section médullaire : lésion définitive par section de moelle ;
■
la compression médullaire : ischémie de moelle par compression extrinsèque
dont la levée permet d’envisager une éventuelle récupération.
2. Lésions secondaires (notions) Ces notions sont à mettre en parallèle avec la survenue de lésions secondaires au cours des traumatismes crâniens. ■
L’inflammation initiale au niveau de la lésion primaire va entraîner une perte de la
régulation du débit sanguin médullaire à l’origine d’une hypoperfusion médullaire. ■
Au niveau cellulaire, l’inflammation va entraîner la libération de nombreux médi-
ateurs de l’inflammation, d’acides aminés excitateurs (glutamate) et de radicaux libres à l’origine d’un syndrome d’ischémie-reperfusion. ■
Au total, il existe un risque d’extension de l’atteinte neurologique au-dessus ou
en dessous de la lésion initiale par des phénomènes d’apoptose et de lyse cellulaire touchant les neurones et les cellules gliales.
290
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces
■
Hypotension artérielle, hypoxie, hypercapnie, hyperglycémie sont des facteurs
d’agression secondaire.
C. Conséquences de l’atteinte médullaire 1. Conséquences neurologiques ITEMS 192, 279, 301 ■ Le syndrome lésionnel correspond au niveau de l’atteinte de la substance grise. Il est défini par la première racine motrice atteinte et correspond le plus souvent à la limite de disparition de la sensibilité. ■
Le syndrome sous-lésionnel correspond à l’interruption de la conduction
nerveuse par atteinte de la substance blanche. Selon la gravité de son atteinte, on distingue les syndromes médullaires complets et incomplets.
a) Syndromes médullaires complets ■ On parle de paraplégie lorsque le niveau lésionnel est situé sous C7 et de tétraplégie au-dessus de C7. ■
Le syndrome est complet lorsqu’il existe une interruption médullaire complète
(section médullaire). ■
Il constitue à la phase initiale le choc spinal, associant sous le niveau lésionnel : – paralysie flasque ; – abolition de tous les réflexes ostéotendineux ; – anesthésie à tous les modes ; – rétention aiguë d’urines, priapisme, atonie du sphincter anal, disparition du réflexe bulbocaverneux ; – atteinte respiratoire et cardiovasculaire selon le niveau lésionnel.
■
Il évolue par la suite en quelques semaines vers l’automatisme médullaire, associant : – syndrome pyramidal avec paralysie spasmodique ; – anesthésie à tous les modes ; – récupération des réflexes anal et bulbocaverneux.
b) Syndromes médullaires incomplets ■ Syndrome de Brown-Séquard :
ITEM 279
– il est dû à une lésion unilatérale de la moelle ; – il associe une hémiplégie et un déficit sensitif épicritique homolatéral avec déficit thermoalgique controlatéral. ■
Syndrome centromédullaire : – il touche principalement les personnes âgées cervicarthrosiques ; – il constitue une tétraplégie incomplète avec atteinte motrice prédominante notamment aux membres supérieurs.
■
Syndrome de contusion antérieure de la moelle : – il est lié à une compression par fragments osseux intracanalaires ou à une hernie discale ; – il constitue une atteinte motrice et thermoalgique avec respect de la sensibilité épicritique.
■
Syndrome de contusion postérieure de la moelle : il est responsable d’une
atteinte de la proprioception.
291
ITEM 201
■
Syndrome de la queue de cheval
ITEM 231
: il est responsable d’une atteinte
motrice et sensitive sciatique uni ou bilatérale avec anesthésie en selle et incontinence vésicale et anale.
2. Conséquences cardiovasculaires ITEM 200 ■ Les centres sympathiques responsables du contrôle de l’activité cardiovasculaire sont situés entre T1 et T6. ■
L’atteinte de ces centres va être à l’origine d’une altération de la balance sympa-
thovagale avec abolition de l’activité sympathique au profit du parasympathique. ■
Il en résulte : – une vasoplégie avec hypovolémie relative responsable d’une hypotension artérielle et à l’extrême d’un collapsus ; – une bradycardie avec à l’extrême arrêt cardiocirculatoire.
■
L’hypotension artérielle est responsable de l’apparition des lésions médullaires
secondaires.
3. Conséquences ventilatoires ITEM 198 Elles dépendent du niveau lésionnel : ■
pour des lésions de niveau supérieur à C4, il existe une paralysie diaphragma-
tique responsable d’une perte totale de l’autonomie respiratoire nécessitant une assistance ventilatoire ; ■
pour des lésions de niveau C4 à C7 et dorsales hautes, ce sont les muscles respi-
ratoires accessoires qui sont touchés, rendant l’autonomie respiratoire possible (pas d’atteinte diaphragmatique) mais précaire par diminution des volumes courants et de la capacité vitale et par l’absence de toux efficace (encombrement). L’assistance ventilatoire est souvent nécessaire à la phase initiale ; ■
pour des lésions thoraciques basses et lombaires, les conséquences ventila-
toires sont négligeables. L’hypoxie est responsable de l’apparition des lésions médullaires secondaires.
4. Conséquences digestives Les lésions médullaires sont responsables d’un iléus paralytique et d’une atonie gastrique.
5. Conséquences urinaires Rétention aiguë d’urine. 6. Conséquences thermiques La perte des phénomènes de régulation thermique associée à la vasodilatation par atteinte sympathique sont responsables de la survenue d’hypothermie.
D. Lésions associées Dogmes : ■
tout traumatisé crânien a une lésion du rachis cervical instable jusqu’à preuve
du contraire et tout traumatisé du rachis cervical est un traumatisé crânien jusqu’à preuve du contraire ;
292
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces
■
tout polytraumatisé possède une lésion du rachis instable jusqu’à preuve du
contraire ; ■
tout traumatisme du rachis doit faire rechercher une autre lésion (crânienne,
thoracique, abdominale, bassin et membres) menaçant le pronostic vital.
III. DIFFÉRENTS TYPES DE FRACTURES ET LÉSIONS RACHIDIENNES Il faut distinguer les lésions stables des lésions instables, à risque de déplacements secondaires. Deux éléments sont fondamentaux pour la stabilité du rachis : le SVM et le SMR. Toute atteinte de ces éléments va entraîner une instabilité rachidienne. Le risque est alors la survenue d’une compression médullaire et/ou radiculaire.
A. Lésions stables Lésions
Mécanisme
Aspect
Rachis cervical supérieur Fracture des arcs de C1
Compression axiale et/ou hyperextension
– Clinique : cervicalgies importantes – Radiographies : divergence des masses latérales de C1 par rapport à C2 et à l’odontoïde sur le cliché bouche ouverte – Le scanner fait le bilan des différents traits de fracture – Fracture de Jefferson : double fracture des arcs antérieurs et postérieurs de C1 (fig. 201-24)
Rachis cervical inférieur Entorses bénignes
Flexion/extension
– Clinique : • cervicalgies spontanées ou provoquées, céphalées • examen neurologique normal – Bilan radiologique (statique et dynamique) normal : le SMR est intact
Fractures des épineuses
Compression
– Clinique : cervicalgies – Radiographies : fracture d’une épineuse sur le cliché de profil
Fractures tassements antérieurs (fig. 201-25)
Flexion
– Clinique : cervicalgies – Radiographies : • tassement de la partie antérieure du corps vertébral • intégrité du mur postérieur Rachis dorsolombaire
Fracture tassement du corps vertébral
Compression antérieure
– Clinique : • dorsalgies ou lombalgies provoquées • examen neurologique normal – Radiographies : • tassement de la partie antérieure du corps vertébral • intégrité du mur postérieur
293
ITEM 201
a
b
Fig. 201-24. Fracture de Jefferson. a. Cliché de face bouche ouverte : on observe la disjonction des masses latérales de C1. b. Scanner d’une fracture de Jefferson typique. Source : Imagerie musculosquelettique, Pathologies générales, par A. Cotten. Masson, collection « Imagerie médicale Précis », 2005.
Fig. 201-25. Fracture tassement de C4. Source : Évaluation et orientation thérapeutique devant un traumatisme du rachis cervical, par C. Laporte, C. Samaha. EMC, AKOS, Encyclopédie pratique de Médecine, 2-0608.
B. Lésions instables Lésions
Mécanisme
Aspect
Rachis cervical supérieur Disjonction occipitocervicale (fig. 201-26)
294
Hyperflexion
– Rupture des structures ligamentaires entre C1 et l’occiput – Clinique : • décès • tétraplégie haute • atteinte des paires crâniennes – Scanner : perte des rapports normaux entre le trou occipital et l’odontoïde
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces
Fracture Hyperflexion et/ou de l’odontoïde de C2 hyperextension (fig. 201-27)
– Clinique : • atteinte neurologique variable chez 1/3 des patients • dysphagie – Radiographies standard : • trait de fracture : apex, horizontal, oblique en bas et en avant, oblique en bas et en arrière • déplacement antérieur ou postérieur – Scanner : reconstruction tridimensionnelle de l’odontoïde et de son déplacement
Entorse grave C1-C2
Hyperflexion
Radiographies standard : diastasis de C1 sur C2
Fracture de Hangmann
Hyperextension (pendaison)
– Lésions neurologiques insconstantes par déplacement centrifuge des fragments osseux – Radiographies : • fracture bipédiculaire de C2 le plus souvent (parfois bi-articulaires) • antélisthésis de C2 • recul de l’épineuse de C2
(fig. 201-28)
Rachis cervical inférieur Entorses graves
Hyperflexion
– Examen clinique normal ou déficit neurologique – Radiographies normales le plus souvent – Les clichés dynamiques réalisés à 10 jours retrouvent : • écart interépineux large • perte du parallélisme des plateaux vertébraux, angulation > 11° • décalage des surfaces articulaires • antélisthésis > 3,5 mm • tassement antérieur du corps vertébral
Flexion-rotation
– Clinique : • cervicalgie • atteinte médullaire inconstante • syndrome radiculaire fréquent – Radiographies : • décalage des épineuses • aspect de 3/4 de la vertèbre luxée sur le profil • trous de conjugaison asymétriques • antélisthésis de la vertèbre luxée • fracture du massif articulaire (supérieur ou postérieur)
Hyperflexion
– Clinique : atteinte médullaire fréquente – Charnière cervico-dorsale – Radiographies : translation antérieure de la vertèbre supérieure
Fracture comminutive du corps vertébral/ Burst fracture
Compression axiale
– Clinique : atteinte médullaire fréquente – Radiographies : • écrasement de la vertèbre • traits multiples au niveau du corps vertébral • rupture et recul du mur postérieur
Tear-drop fracture
Compression axiale-flexion
– Clinique : atteinte médullaire fréquente – Radiographies : • fracture corporéale antérieure • rupture du SMR (bâillement des articulaires et de l’espace interépineux) • recul du mur postérieur
(fig. 201-29)
Luxation unilatérale/ Fracture luxation (fig. 201-30)
Luxation bilatérale (fig. 201-31)
(fig. 201-32)
(Suite)
295
ITEM 201
Lésions
Mécanisme
Aspect
Rachis dorsolombaire Fracture comminutives/Burst fracture (fig. 201-33 et
Compression axiale
– Clinique : atteinte médullaire fréquente – Radiographies : • écrasement de la vertèbre • traits multiples au niveau du corps vertébral • rupture et recul du mur postérieur
Flexion-rotation
– Lésions du SMR – Clinique : atteinte neurologique fréquente – Radiographies : • décalage des épineuses • aspect de 3/4 de la vertèbre luxée sur le profil • trous de conjugaison asymétriques • antélisthésis de la vertèbre luxée • fracture du massif articulaire (supérieur ou postérieur)
201-34)
Luxation/Fracture luxation
Fig. 201-26. Rachis cervical supérieur de profil : disjonction occipitocervicale. Source : Imagerie musculosquelettique, Pathologies générales, par A. Cotten. Masson, collection « Imagerie médicale Précis », 2005.
IV. PRISE EN CHARGE PRÉHOSPITALIÈRE Les principes de la prise en charge du patient polytraumatisé sont détaillés dans le paragraphe correspondant. Schématiquement, le médecin urgentiste doit faire le bilan des lésions et assurer dans le même temps la prise en charge des défaillances vitales.
CONSENSUS Un principe : tout traumatisé grave ou suspecté ainsi doit être considéré comme à haut risque de lésion rachidienne instable et devra donc bénéficier d’une immobilisation de l’axe craniorachidien lors de toutes les procédures diagnostiques et thérapeutiques.
296
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces
Type A
Type B
Type C
a
b
c
Fig. 201-27. Fracture de l’odontoïde. a. Classification des fractures de l’odontoïde selon Roy-Camille. Type A : trait oblique en bas et en arrière. Type B : trait oblique en bas et en avant. Type C : trait horizontal. b. Fracture de l’odontoïde sur une radiographie de profil. c. Fracture de l’odontoïde (scanner). Source : Imagerie musculosquelettique, Pathologies générales, par A. Cotten. Masson, collection « Imagerie médicale Précis », 2005. Illustratrice de la figure a : Sophie Servain.
A. Analyse des circonstances de l’accident ■
Mécanismes, cinétique.
■
Nombre et gravité apparente des blessés.
B. Bilan lésionnel ■
Neurologique : – score de Glasgow ; – examen des pupilles et réflexe photomoteur ;
297
ITEM 201
Fig. 201-28. Fracture de Hangman avec antélisthésis de C2 et recul postérieur de l’épineuse. Source : Imagerie musculosquelettique, Pathologies générales, par A. Cotten. Masson, collection « Imagerie médicale Précis », 2005.
b
a
a
b
Fig. 201-29. Entorse grave du rachis cervical inférieur. a. Entorse grave : antélisthésis > 3,5 mm (a), angulation > 11° (b), décalage des surfaces articulaires, écart interépineux large. b. Entorse grave C5-C6 avec fracture tassement du coin antérosupérieur de C6. Source : Imagerie musculosquelettique, Pathologies générales, par A. Cotten. Masson, collection « Imagerie médicale Précis », 2005. Illustratrice de la figure a : Sophie Servain.
Fig. 201-30. Luxation unilatérale C6-C7. Source : Évaluation et orientation thérapeutique devant un traumatisme du rachis cervical, par C. Laporte, C. Samaha. EMC, AKOS, Encyclopédie pratique de Médecine.
298
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces
Fig. 201-31. Luxation biarticulaire de C5 sur C6. Source : Évaluation et orientation thérapeutique devant un traumatisme du rachis cervical, par C. Laporte, C. Samaha. EMC, AKOS, Encyclopédie pratique de Médecine.
C5
C6
Fig. 201-32. Tear-drop fracture de C5. Source : Imagerie musculosquelettique, Pathologies générales, par A. Cotten. Masson, collection « Imagerie médicale Précis », 2005. Illustratrice : Sophie Servain.
Fig. 201-33. Fracture comminutive de L2 avec recul du mur postérieur. Source : Traumatismes du rachis, par E. Rolland, J.Y. Lazennec, G. Saillant. EMC, Médecine d’urgence.
299
ITEM 201
a
b
Fig. 201-34. Fracture comminutive du rachis lombaire avec recul du mur postérieur (scanner). Source : Imagerie musculosquelettique, Pathologies générales, par A. Cotten. Masson, collection « Imagerie médicale Précis », 2005.
– toucher rectal ; – examen neurologique avec recherche d’une douleur rachidienne et d’un déficit sensitivomoteur et études des réflexes ostéotendineux. ■
Hémodynamique : – fréquence cardiaque ; – pression artérielle ; – mesure de l’hémoglobine capillaire (Hemocue®).
■
Respiratoire : – fréquence respiratoire ; – signes de lutte ; – signes d’hypoxie ; – mesure de la SpO2.
■
Recherche de lésions associées : craniofaciales, abdomen, thorax, fractures des
membres, du bassin.
C. Prise en charge des défaillances vitales immédiates Le maintien des paramètres hémodynamiques et ventilatoires influence une grande part du pronostic, limitant l’apparition de lésions secondaires.
1. Mise en condition ■ Immobilisation en rectitude craniorachidienne : – collier cervical rigide avec appui mentonnier et occipital ; – matelas à dépression (dit « coquille ») ; – mobilisation sur plan rigide ; – brancardage avec 4 opérateurs, médecin ou IDE à la tête.
300
■
Mise en place de 2 abords veineux périphériques courts d’un calibre ≥ 16 G.
■
Électrocardioscope, pression artérielle non invasive automatisée, oxymétrie pulsée.
■
Oxygénothérapie à fort débit au masque à réserve.
■
Analgésie.
■
Prévention de l’hypothermie.
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces
2. Neurologique ■ Intubation orotrachéale si CGS ≤ 8. ■
Sédation par un hypnotique (midazolam) et un morphinique (sufentanil) en per-
fusion continue.
3. Hémodynamique Maintien d’une pression artérielle moyenne supérieure à 80 mmHg avec si besoin : ■
remplissage vasculaire par colloïdes ou cristalloïdes (sérum physiologique) ;
■
perfusion de vasopresseurs (noradrénaline) IVSE ;
■
atropine en cas de bradycardie.
4. Respiratoire ■
Oxygénothérapie à fort débit.
■
Intubation en séquence rapide et ventilation mécanique en cas de détresse
respiratoire aiguë. L’intubation doit respecter les principes de l’immobilisation rachidienne.
5. Bilan à la régulation médicale du Samu – Centre 15 CONSENSUS L’orientation d’un blessé vertébromédullaire suspecté ou avéré doit s’effectuer vers une structure hospitalière entraînée à la prise en charge de ce type de pathologie.
V. PRISE EN CHARGE HOSPITALIÈRE Le traumatisé vertébromédullaire se présente la plupart du temps comme un monotraumatisé du rachis. Il peut s’inscrire également dans le cas d’un polytraumatisme. Dans cette dernière situation, la prise en charge du traumatisme vertébromédullaire doit se faire conjointement à la prise en charge du polytraumatisme (voir paragraphe correspondant).
A. Diagnostic positif L’examen du patient victime d’un traumatisme vertébromédullaire doit se faire après immobilisation stricte et respect de l’axe craniorachidien. Toute manipulation doit être prudente.
1. Terrain et anamnèse ■ Antécédents. ■
Âge.
■
Traitements.
■
Horaire de l’accident.
■
Mécanisme lésionnel : point d’impact, cinétique, ceinture de sécurité, décéléra-
tion, airbag… ■
Nombre de victimes.
■
Prise en charge préhospitalière. 301
ITEM 201
2. Examen clinique a) Examen général ■ Recherche d’une défaillance vitale : – score de Glasgow ; – cardiocirculatoire : tachycardie et/ou bradycardie, hypotension artérielle, collapsus ; – respiratoire : détresse respiratoire aiguë par atteinte des centres ventilatoires. ■
Recherche de lésions extrarachidiennes : craniofaciales, thorax, abdomen, bas-
sin et membres. ■
Mesure de l’hémoglobine capillaire (Hemocue®).
b) Examen vertébromédullaire ■ Interrogatoire : – douleurs rachidiennes spontanées ; – paresthésies ; – faiblesses musculaires. ■
Inspection : – ecchymoses ; – déformation.
■
Palpation : – douleur reproductible à la palpation des épineuses ; – contracture des muscles paravertébraux.
c) Examen neurologique L’examen neurologique doit être complet, consigné sur un schéma daté et répété afin d’apprécier l’évolution d’un éventuel déficit. ■
Syndrome médullaire : recherche du niveau lésionnel (déficit moteur et/ou sen-
sitif) (tableaux 201-6 et 201-7). Tableau 201-6. Niveau lésionnel et atteinte motrice C5
Flexion du coude
C6
Extension du poignet
C7
Extension du coude
C8
Flexion des doigts
T1
Abduction du 5e doigt
L2
Flexion de la hanche
L3
Extension du genou
L4
Flexion dorsale de cheville
L5
Extension du gros orteil
S1
Flexion plantaire de cheville
Tableau 201-7. Niveau lésionnel et atteinte sensitive (exemple)
302
T4
Mamelon
T6
Xyphoïde
T10
Ombilic
T12
Pli de l’aine
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces
■
Recherche d’un syndrome sous-lésionnel. À la phase initiale, il constitue le choc
spinal et associe sous le niveau lésionnel : – paralysie flasque ; – anesthésie à tous les modes ; – absence de réflexes ostéotendineux ; – rétention aiguë d’urine ; – priapisme ; – atonie du sphincter anal, abolition du réflexe bulbocaverneux. ■
Examen du périnée : – sensibilité périnéale ; – tonus du sphincter anal ; – réflexe bulbocaverneux ; – priapisme ; – rétention aiguë d’urine.
L’existence d’une atteinte périnéale, notamment atonie du sphincter anal et priapisme, signe le caractère complet de l’atteinte médullaire et est de mauvais pronostic. ■
Caractère complet ou incomplet : il est étudié par le score de Frankel, sous le
niveau lésionnel. – A : déficit moteur et sensitif complet. – B : déficit moteur complet avec sensibilité préservée. – C : motricité conservée avec score moteur < 3. – D : motricité conservée avec score moteur ≥ 3. – E : motricité et sensibilité normales. ■
Recherche d’un syndrome radiculaire par atteinte d’une racine rachidienne.
■
Recherche d’un syndrome de la queue de cheval.
L’ensemble de cet examen est consigné grâce au score ASIA (fig. 201-35) et doit être répété.
B. Bilan paraclinique 1. Radiographies standard ■ Rachis cervical de face et de profil en dégageant C7. ■
Rachis dorsolombaire de face et de profil.
■
Cliché de face bouche ouverte : étude de l’odontoïde.
■
Cliché de 3/4 si besoin.
On étudie : ■
l’alignement des bords antérieurs et postérieurs des vertèbres ;
■
l’alignement des bords latéraux des vertèbres ;
■
l’alignement des épineuses ;
■
les pédicules ;
■
la hauteur des disques ;
■
l’écart interépineux ;
■
les parties molles prévertébrales. 303
ITEM 201
Évaluation motrice D
G
C2 C3 C4 C5 C6 C7 C8 T1 T2 T3 T4 T5 T6 T7 T8 T9 T10 T11 T12 L1 L2 L3 L4 L5 S1 S2 S3 S4-5
Date de l’examen
__ __ ____
Flexion du coude Extension du poignet Extension du coude Flexion du médius (P3) Abduction du 5e doigt
Niveau neurologique* Sensitif
Lésion médullaire** :
D
G
C2 C3 C4 C5 C6 C7 C8 T1 T2 T3 T4 T5 T6 T7 T8 T9 T10 T11 T12 L1 L2 L3 L4 L5 S1 S2 S3 S4-5
Complète ou Incomplète
** Caractère incomplet défini par une motricité ou une sensibilité du territoire S4-S5
Échelle d’anomalie ASIA :
A
B
C
D
E
A = complète : aucune motricité ou sensibilité dans le territoire S4-S5 B = incomplète : la sensibilité mais pas la motricité est préservée au-dessous du niveau lésionnel, en particulier dans le territoire S4-S5 C = incomplète : la motricité est préservée au-dessous du niveau lésionnel et plus de la moitié des muscles testés au-dessous de ce niveau a un score < 3 D = incomplète : la motricité est préservée au-dessous du niveau lésionnel et au moins la moitié des muscles testés au-dessous du niveau a un score 3 E = normale : la sensibilité et la motricité sont normales
Flexion de la hanche Extension du genou Dorsiflexion de cheville Extension du gros orteil Flexion plantaire de cheville
G
gauche gauche
*Segment le plus caudal ayant une fonction normale
Score « motricité » : /100 Contraction anale : oui/non
D
droite droite
Moteur
0 = paralysie totale 1 = contraction visible ou palpable 2 = mouvement actif sans pesanteur 3 = mouvement actif contre pesanteur 4 = mouvement actif contre résistance 5 = mouvement normal NT, non testable
Évaluation sensitive Toucher Piqûre C2 C3 C4 C5 C6 C7 C8 T1 T2 T3 T4 T5 T6 T7 T8 T9 T10 T11 T12 L1 L2 L3 L4 L5 S1 S2 S3 S4-5
Identité du patient 19
Score ASIA
Préservation partielle***
Sensitif Moteur
droite droite
gauche gauche
*** Extension caudale des segments partiellement innervés
Syndrome clinique :
Centromédullaire Brown-Sequard Moelle antérieure Cône terminal
Score « toucher » : /112 Score « piqûre » : /112 Sensibilité anale : oui/non
C C
3
C4 C5
C2
C3
T
C4
C
T
T3 T4 T5 T6 T7 T8 T9 T10 T11 T12
T1
C5
T1
C7 C8 S3
L1
C8 C 7
L1
L2
S4-5
C
L2
C8
C8 C6
L2
S
L3
C7
S
L3
C6 C7
L3
L
L4
0 = absente 1 = diminuée 2 = normale NT, non testable
L5
L4 L4
L
L
L5
S1 S1
S1
S1 S1
Fig. 201-35. Score ASIA. Source : Prise en charge d’un blessé adulte présentant un traumatisme vertébro-médullaire – Conférence d’experts – SFAR, 2003.
On recherche : ■
lésions osseuses : – traits de fracture ; – déplacement avec recul du mur postérieur ;
304
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces
■
lésions discoligamentaires : – pincement discal ; – antélisthésis ; – bâillement des espaces interépineux ;
■
signes indirects : épaississement des parties molles (hématome) prévertébrales.
Les clichés dynamiques sont réalisés à distance, à la recherche d’arguments pour une entorse grave en présence d’un médecin et en l’absence de signes neurologiques. Ils ne sont pas recommandés dans le contexte de l’urgence.
CONSENSUS Une imagerie du rachis cervical doit être obtenue chez tous les traumatisés sauf lorsque tous les critères suivants sont réunis : ■
absence de douleur cervicale spontanée ou provoquée des épineuses ;
■
absence d’intoxication ;
■
absence d’altération de la conscience (GCS < 14, désorientation temporospatiale, amnésie
des faits) ; ■
absence de syndrome déficitaire neurologique ;
■
absence de lésions douloureuses à distance du rachis pouvant masquer une douleur
rachidienne.
2. Scanner du rachis ■ C’est l’examen de référence dans les cas suivants : – forte suspicion clinique de lésions rachidiennes (traumatisme crânien, déficit neurologique…) ; – devant toute anomalie des clichés standard ; – chez le polytraumatisé. ■
Il est réalisé sans injection de produit de contraste avec reconstruction sagittale,
frontale et tridimensionnelle. ■
On recherche : – une lésion ostéoligamentaire : fracture vertébrale, pédicules, épineuses, apophyses transverses, disque intervertébral ; – un recul du mur postérieur, diamètre du canal rachidien ;
■
Il permet une étude plus précise du SVM et du SMR que les clichés standard.
■
Il permet en outre, par l’injection de produit de contraste, une étude des vaisseaux
du cou lorsqu’une lésion vasculaire est suspectée (dissection des artères vertébrales).
3. IRM médullaire (fig. 201-36) ■ Elle est indiquée en cas de suspicion de lésion médullaire ou de déficit neurologique sans anomalie radiologique ou scanographique (SCIWORA : Spinal Cord Injury Without Radiographic Abnormality). ■
On recherche : – lésions discoligamentaires ; – compression médullaire (disque intervertébral, hématome…) ; – lésion médullaire (hypersignal en T2). 305
ITEM 201
Fig. 201-36. IRM du rachis cervical. Luxation spontanément réduite. L’IRM montre une hernie discale C4-C5 avec compression médullaire, un hypersignal postérieur témoin de la déchirure ligamentaire et un hématome intramédullaire. L’examen neurologique retrouve une tétraplégie alors que les clichés standard sont normaux. Source : Évaluation et orientation thérapeutique devant un traumatisme du rachis cervical, par C. Laporte, C. Samaha. EMC, AKOS, Encyclopédie pratique de Médecine.
4. Bilan sanguin ■ NFS, TP, TCA, fibrinogène. ■
Groupe sanguin, Rhésus et RAI.
■
Ionogramme sanguin, bilan hépatique et gaz du sang selon le contexte.
5. Bilan des lésions associées dans le cadre du patient polytraumatisé ITEM 201 ■ Radiographie de thorax : traumatisme thoracique associé et fractures des dernières côtes. ■
Radiographie du bassin : fracture du bassin.
■
Échographie abdominale.
■
Scanner corps entier (body-scanner) sans, puis avec injection de produit de
contraste.
VI. PRISE EN CHARGE THÉRAPEUTIQUE A. Mise en condition ■
Transfert et hospitalisation dans une structure hospitalière spécialisée en fonc-
tion des lésions associées. ■
Immobilisation en rectitude craniorachidienne : – collier cervical rigide avec appui mentonnier et occipital ; – matelas à dépression (dit « coquille ») ; – mobilisation sur plan rigide ; – brancardage avec 4 opérateurs, médecin ou IDE à la tête.
■
Mise en place de 2 abords veineux périphériques courts d’un calibre ≥ 16 G.
■
Électrocardioscope, pression artérielle non invasive automatisée, oxymétrie pulsée.
■
Oxygénothérapie.
■
Prévention de l’hypothermie.
■
Prise en charge des lésions associées dans le cadre du polytraumatisme (voir
p. 235). 306
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces
B. Mesures générales Elles ont pour but principal de limiter l’apparition des lésions secondaires.
1. Maintien d’une pression artérielle moyenne ≥ 80 mmHg ■ Perfusion de soluté isotonique (sérum physiologique) ; les solutés hypotoniques sont contre-indiqués. ■
Remplissage par cristalloïdes ou colloïdes.
■
Perfusion de vasopresseurs (noradrénaline) le cas échéant.
■
Le monitorage en continu de la PA par la mise en place d’un cathéter artériel
peut être recommandé. ■
Atropine en cas de bradycardie.
2. Lutte contre l’hypoxie et assistance ventilatoire ■ Oxygénothérapie. ■
Intubation orotrachéale et ventilation mécanique en cas : – de détresse respiratoire aiguë liée au traumatisme médullaire ; – de trouble de la conscience (GCS ≤ 8).
■
Monitorage du CO2 expiré, l’objectif étant la normocapnie, chez le patient ventilé.
■
Trachéotomie : – en fonction du niveau lésionnel, le patient peut avoir besoin ou non d’une assistance ventilatoire ; – celle-ci sera partielle, dans un objectif de sevrage et d’autonomisation ventilatoire ou permanente.
3. Équilibre glycémique strict ■ Insulinothérapie adaptée pour une normoglycémie. ■
L’hyperglycémie entraverait la régénération axonale.
4. Corticothérapie ■ Longtemps considérée comme un traitement de référence, la conférence d’experts ne recommande pas son utilisation. ■
Les effets secondaires sont supérieurs aux bénéfices observés.
■
D’autres molécules sont actuellement à l’étude en matière de médulloprotection
(antagonistes des récepteurs NMDA, érythropoïétine). Les données actuelles sont trop peu nombreuses pour en recommander l’utilisation en pratique courante.
C. Traitement chirurgical 1. Principes a) Traitement orthopédique ■ Immobilisation sur plan dur. ■
Réduction par traction du rachis cervical par halo.
■
Minerve cervicale avec appui occipitomentonnier ou corset plâtré pour le rachis
dorsolombaire.
b) Traitement chirurgical ■ Abord antérieur ou postérieur selon le type de fracture. ■
Réduction du foyer de fracture. 307
ITEM 201
■
Libération du canal médullaire.
■
Stabilisation par ostéosynthèse ± arthrodèse.
■
Immobilisation par minerve ou corset.
2. Indications chirurgicales Elles sont l’affaire du spécialiste. ■
Schématiquement : – lésions stables, sans déficit neurologique : traitement orthopédique ; – lésions instables ou avec déficit neurologique : traitement chirurgical.
■
Délai pour le recours à la chirurgie : – aucune intervention du rachis ne doit précéder un traitement de lésions engageant le pronostic vital (thoracotomie ou laparotomie d’hémostase, artérioembolisation, évacuation d’un hématome intracrânien) dans le cas du patient polytraumatisé ; – indication opératoire dans les 6 à 8 heures des patients avec déficit neurologique incomplet ou déficit évolutif ; – indication opératoire dans les 48 heures au maximum des déficits neurologiques complets.
D. Mesures associées ■
Immobilisation et repos au lit strict.
■
Antalgiques
ITEM 66
:
– paracétamol 1g × 4/j ; – AINS ; – morphine ; – pris en charge des douleurs neurogènes survenant dans les semaines après le traumatisme : amitriptyline (Laroxyl®), clomipramide (Anafranil®), gabapentine (Neurontin®). ■
SAT-VAT le cas échéant.
■
Anticoagulation préventive et prévention des complications de décubitus.
■
Rééducation, kinésithérapie : – muscles extenseurs et fléchisseurs du rachis à distance du traumatisme ; – membres supérieurs et inférieurs avec lutte contre la spasticité ; – kinésithérapie respiratoire : lutte contre l’encombrement, expectoration forcée, aspiration.
■
Lutte contre la spasticité qui apparaît à distance du traumatisme : baclofène
(Liorésal®). ■
Sondage vésical à demeure puis apprentissage de l’autosondage.
■
Arrêt de travail.
■
Psychothérapie de soutien.
E. Surveillance
308
■
Paramètres vitaux.
■
Examen neurologique consigné selon le score ASIA.
■
Déplacement secondaire (radiographies standard).
■
Complications de décubitus.
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces
CONSENSUS L’objectif de la prise en charge du traumatisé médullaire est de l’amener vers l’autonomisation lorsque celle-ci est possible. Elle nécessite une équipe médicale et paramédicale entraînée avec des structures d’accueil d’urgence puis de réadaptation spécialisées.
VII. COMPLICATIONS A. Complications à court terme 1. Décès ■ Lésions associées. ■
Détresse ventilatoire.
■
Troubles cardiovasculaires.
2. Neurologiques ITEMS 192, 279 ■ Elles sont détaillées ci-dessus. ■
Tout traumatisé du rachis doit bénéficier d’un examen neurologique à la recher-
che d’un déficit sensitivomoteur, d’un syndrome médullaire ou radiculaire.
3. Ventilatoires ITEM 198 ■ Elles sont avec les complications cardiovasculaires au premier rang de la mortalité du traumatisé vertébromédullaire. ■
Bilan des complications respiratoires : – score ASIA, niveau lésionnel ; – mesure répétée de la capacité vitale ; – gazométrie artérielle.
■
Pour des lésions de niveau supérieur à C4, il existe une paralysie diaphragma-
tique responsable d’une perte totale de l’autonomie respiratoire nécessitant une assistance ventilatoire. La trachéotomie est à envisager de manière précoce. ■
Pour des lésions de niveau C4 à C7 et dorsales hautes, ce sont les muscles
respiratoires accessoires qui sont touchés. Il existe une diminution de la capacité vitale et des volumes de réserve inspiratoire et expiratoire. L’assistance ventilatoire est souvent nécessaire à la phase initiale. L’autonomie respiratoire est possible. La kinésithérapie respiratoire est essentielle dans cette phase de réadaptation. ■
Pour des lésions thoraciques basses et lombaires, les conséquences ventila-
toires sont négligeables.
4. Cardiovasculaires ITEM 200 Elles sont liées à l’atteinte du système sympathique : ■
hypotension artérielle et collapsus par vasoplégie et hypovolémie relative ;
■
bradycardie sévère, arrêt cardiaque lors de stimulations vagales (mobilisations,
aspirations bronchiques).
5. Rétention aiguë d’urines Sondage vésical à demeure puis auto/hétérosondage intermittent. 309
ITEM 201
6. Lésions associées ITEM 201 Dans le cadre des patients polytraumatisés.
B. Complications à moyen et long termes 1. Complications de décubitus ITEM 50 ■ Escarres (talons, sacrum, occiput). ■
Infections : urinaires, pneumopathies.
■
Thromboses veineuses profondes.
■
Troubles du transit, ulcère de stress.
■
Hypercalcémie.
■
Enraidissements articulaires.
2. Orthopédiques ■ Déficit neurologique secondaire par déplacement secondaire d’une lésion instable. ■
Infection de matériel d’ostéosynthèse.
■
Brèche dure-mérienne et méningites postopératoires.
■
Cals vicieux.
■
Pseudarthroses.
3. Souffrance psychique ■ Dépression et anxiété sont fréquentes (plus de 60 % des patients) et précoces. Un traitement antidépresseur et anxiolytique peut s’avérer nécessaire. ■
Elle est liée à la perte du contrôle de sa vie et de son corps, avec perte de
l’autonomie et des liens socioprofessionnels.
4. Douleurs ITEMS 65, 66 ■ Nociceptives : liées au traumatisme ou à l’intervention chirurgicale. Elles sont sus-lésionnelles. Elles sont prises en charge par des antalgiques classiques (paracétamol, AINS et morphiniques). ■
Neurogènes : à type de décharges ou de brûlures, prédominant au dos et aux
membres inférieurs. Elles sont sus ou sous-lésionnelle. Ce sont des douleurs centrales dues à des mécanismes de déafférentation. Le traitement repose sur certains antidépresseurs tricycliques et anticonvulsivants : amitriptyline (Laroxyl®), clomipramide (Anafranil®), gabapentine (Neurontin®).
5. Spasticité Elle apparaît dans les jours suivant le traumatisme. Elle peut être responsable d’une gêne voire de douleurs pour le patient. Son traitement repose sur la kinésithérapie et sur l’administration de baclofène (Liorésal®) en association éventuelle aux benzodiazépines.
310
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces
Fiche
Dernier tour
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces chez un brûlé Étiologie : ■ brûlures thermiques (90 %) ; ■ brûlures électriques (5 %) ; ■ brûlures chimiques (5 %). Physiopathologie : ■ profondeur des brûlures : Profondeur
Histologie
Clinique
1 degré
Couche cornée de l’épiderme
Érythème « Coup de soleil »
Guérison en quelques jours sans séquelle
2e degré superficiel
Ensemble de l’épiderme
Phlyctènes Aspect rosé Exulcérations suintantes Douleur +++
Guérison en 15 jours sans séquelle
2e degré profond
Ensemble de l’épiderme et de la couche de Malpighi du derme, pas d’atteinte des phanères
Aspect blanc et rose Douleur moindre Hypoesthésie
Cicatrisation longue Cicatrices hypertrophiques
3e degré
Ensemble de l’épiderme Aspect cartonné et du derme ± hypoderme et induré de la peau Indolore, anesthésie complète
er
Évolution
Pas de cicatrisation spontanée Greffe de peau
■ étendue de la brûlure : règle des 9 de Wallace = calcul de la surface brûlée par rapport à la surface corporelle totale : – tête : 9 % ; – tronc : 9 % × 4 ; – membres supérieurs : 9 %/membre ; – membres inférieurs : 18 % × 2 ; – organes génitaux externes : 1 %. Conséquences locales et générales : ■ hypovolémie et choc hypovolémique ; ■ œdème pulmonaire et œdème cérébral ; ■ dénutrition favorisant les complications infectieuses ; ■ contamination bactérienne et risque infectieux. Lésions associées : ■ traumatismes associés ; ■ inhalation de suie et de fumée ; ■ intoxications oxycarbonée et cyanhydrique . Diagnostic positif : ■ mécanisme lésionnel : circonstances de la brûlure et nature de l’agent responsable .
u
311
ITEM 201
Fiche
Dernier tour
examen général : – score de Glasgow ; – paramètres vitaux : FC, PA, FR, SpO2, température ; – recherche de lésions associées et d’une intoxication au CO et cyanures . ■ examen local réalisé en asepsie rigoureuse : évaluation de la profondeur l’étendue (règle des 9 de Wallace) et du siège des brûlures. ■ bilan paraclinique : – NFS, TP, TCA ; – Groupe ABO, Rhésus, RAI ; – ionogramme sanguin , gaz du sang, HbCO ; – ECG (brûlures par électrisation) ; – radiographie thoracique ; – prélèvements bactériologiques . Prise en charge thérapeutique : ■ traitement général : – expansion volémique par Ringer-lactate ; – oxygénothérapie ; – prise en charge des intoxications associées ; – hospitalisation dans un centre de prise en charge spécialisée. ■ traitement local : – initialement : • extraction de l’agent causal ; • refroidissement des brûlures ; • puis réchauffement du patient ; – dans une structure spécialisée : • cicatrisation dirigée ; • pansements stériles quotidiens ; • incisions de décharge ; • greffes de peau ; • amputation. ■ mesures associées : – antalgie/sédation ; – nutrition hypercalorique ; – pas d’indication à une antibioprophylaxie systématique ; – SAT/VAT ; – anticoagulation préventive et prévention des complications de décubitus ; – surveillance. ■
, de
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces chez un polytraumatisé Les traumatismes graves sont la 1re cause de mortalité des moins de 40 ans en France. ■ La prise en charge optimale en France s’appuie sur : – la régulation médicale du Samu ; – la médicalisation préhospitalière par les Smur ; – l’organisation de structures hospitalières spécialisées et pluridisciplinaires. ■ L’évaluation clinique repose sur le diagnostic et le traitement des défaillances : – neurologique : score de Glasgow , examen des pupilles et réflexe photomoteur , toucher rectal (traumatisme médullaire) ; – hémodynamique ; – ventilatoire. ■ La prise en charge extra et intrahospitalière doit être systématique et rapide, fondée sur des protocoles de soins. ■
u 312
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces
Fiche
Dernier tour
■ Tout traumatisé grave doit bénéficier d’une immobilisation en rectitude craniorachidienne par collier cervical rigide et matelas à dépression . ■ Aucun examen ne doit retarder l’hémostase d’une lésion hémorragique, radiovasculaire ou chirurgicale. ■ L’état de choc hémorragique est responsable de l’essentiel de la mortalité au cours des premières heures. ■ Il existe trois sites de saignement non extériorisé : – thorax ; – péritoine ; – rétropéritoine. ■ La triade délétère du choc hémorragique est la suivante : – acidose ; – hypothermie ; – coagulopathie. ■ Étiologies des états de choc traumatique : – hémorragique ; – obstructif ; – tamponnade gazeuse ; – tamponnade sur hémopéricarde ; – embolie graisseuse sur fracture du fémur ; – spinal : vasoplégie par sympatholyse sur des lésions médullaires ; – cardiogénique : contusion myocardique sévère. ■ Examens de première intention :
Examen Radiographie du rachis cervical de profil Radiographie du thorax de face Radiographie du bassin de face Échographie : – abdominale – pleurale – péricardique
Objectif Dépistage d’une lésion instable Drainage d’un pneumothorax compressif Orientation vers l’artérioembolisation en cas d’instabilité hémodynamique Hémopéritoine ? Pneumothorax ? Hémothorax ? Tamponnade par hémopéricarde ?
Scanner corps entier (body-scanner) : examen incontournable dans la prise en charge des traumatisés graves . ■ Bilan prétransfusionnel : groupe ABO et Rhésus (2 déterminations), RAI . ■ Vérification et mise à jour de la vaccination antitétanique, voire séroprophylaxie antitétanique . ■ Dosage des ß-HCG chez la femme . ■ Indications de « bloc direct » (sans bilan lésionnel complet) = instabilité hémodynamique avec : – une lésion vasculaire non contrôlée ; – ou un hémothorax massif (1 500 mL d’emblée et débit > 150 mL/h) ; – ou un hémopéritoine massif rapidement progressif. ■ La prise en charge thérapeutique consiste en une surveillance rapprochée en salle de réveil les premières heures puis en réanimation chirurgicale. Le traitement spécifique dépendra des lésions objectivées et de leur association : traitement chirurgical et/ou artérioembolisation, prise en charge médicale en réanimation. ■ Surveillance clinique (FC, PA invasive, SpO2, FR, température, surveillance neurologique +++) et paraclinique (hémogramme, hémostase, gaz du sang artériels, lactates artériels, radiographie pulmonaire). ■
u 313
ITEM 201
Fiche
Dernier tour
■ La gravité dépend des lésions, du terrain, de la rapidité de la prise en charge et de la présence d’un état de choc réfractaire. ■ Les complications sont le décès, qui peut se produire à court (lésions létales d’emblée, état de choc hémorragique gravissime), moyen (défaillance multiviscérale) ou long terme, les surinfections, les complications thromboemboliques, l’invalidité, l’impotence fonctionnelle et les séquelles psychologiques.
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces chez un traumatisé abdominal Épidémiologie : ■ contusions abdominales dans 80 % des cas : – accidents de la voie publique ; – chutes de grande hauteur. ■ traumatismes pénétrants dans 20 % des cas : plaies par arme blanche et arme à feu. ■ les victimes sont en majorité des hommes jeunes. ■ la mortalité s’élève à 30 %. Physiopathologie : ■ tout traumatisme thoracique et/ou du bassin doit faire rechercher une lésion abdominale. ■ contusions abdominales (traumatismes fermés) : – rupture des organes pleins, de leurs pédicules vasculaires et de leurs mésos ; – hémorragie intra-abdominale et choc hémorragique ; – plus rarement, lésions des organes creux ; ■ traumatismes pénétrants : lésions des organes creux. Prise en charge diagnostique : ■ une règle : tout traumatisé abdominal est un polytraumatisé jusqu’à preuve du contraire et tout polytraumatisé a un traumatisme abdominal jusqu’à preuve du contraire . ■ mécanisme lésionnel : point d’impact, cinétique, ceinture de sécurité, airbag…. ■ examen général : – recherche d’un état de choc ; – recherche de lésions extra-abdominales ; – Hemocue® . ■ examen abdominal : – ecchymoses, hématomes ; – plaies, éviscération ; – distension abdominale ; – défense, contracture ; – matité, météorisme ; – côtes flottantes et instabilité du bassin. ■ touchers pelviens et examen des organes génitaux externes . ■ bilan sanguin : – NFS , TP, TCA, fibrinogène ; – groupe sanguin ABO, Rhésus et RAI ; – ionogramme sanguin, bilan hépatique et gaz du sang. ■ imagerie : – radiographie de thorax ; – radiographie du bassin ; – échographie abdominale : épanchement intrapéritonéal, recherche d’une lésion des organes pleins ; – scanner abdominopelvien , réalisé sur un patient stable hémodynamiquement, dans le cadre d’un body-scanner : • épanchement intrapéritonéal, pneumopéritoine ;
u 314
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces
Fiche
Dernier tour
• lésions des organes pleins et creux ; • lésions vasculaires. Prise en charge thérapeutique : ■ on distingue deux situations : – choc hémorragique avec instabilité hémodynamique : le patient doit bénéficier d’une hémostase chirurgicale immédiate ; – état hémodynamique stable ou stabilisé : un bilan lésionnel est réalisé (échographie abdominale, scanner abdominopelvien, éventuellement artériographie). ITEM 200 ■ réanimation du choc hémorragique. ■ antibiothérapie (en cas de péritonite ou de contusion grave) : – efficace sur les bacilles Gram négatif et les anaérobies ; – pénicilline + aminoside. ■ laparotomie exploratrice à visée diagnostique et thérapeutique : – bilan lésionnel ; – hémostase chirurgicale : splénectomie d’hémostase, packing hépatique ; – sutures ou résections, anastomoses associées à la confection de stomies. ■ traitement conservateur : chez un patient stable hémodynamiquement, sous couvert d’une surveillance stricte en réanimation. ■ artério-embolisation : – à visée diagnostique et thérapeutique ; – embolisation sélective des artères responsables de l’hémorragie. ■ mesures associées en cas de splénectomie : – vaccination antipneumococcique et anti-Haemophilus ± antibioprophylaxie par pénicilline au long cours ; – éducation du patient splénectomisé.
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces chez un traumatisé crânien Traumatisé crânien non grave adulte : PCI
Pas de PCI
Examen normal
Hospitalisation, surveillance
Sortie, surveillance
Examen perturbé
TDM
TDM
Anesthésie générale
TDM
TDM
Traumatisé crânien grave (TCG) : ■ tout TCG doit bénéficier d’une immobilisation en rectitude craniorachidienne par collier cervical rigide et matelas à dépression . ■ la prise en charge d’un TCG a pour objectif de prévenir l’ischémie cérébrale secondaire à l’hypertension intracrânienne. ■ la prévention et le traitement des agressions cérébrales secondaires d’origine systémique (ACSOS) doivent débuter dès la phase préhospitalière : – hypotension artérielle < 90 mmHg de PAS ; – hypoxémie < 60 mmHg de PaO2 ; – hypercapnie et hypocapnie ; – hyperthermie ; – hypoglycémie et hyperglycémie ; – hyponatrémie. ■ la stratégie diagnostique repose sur : – l’examen neurologique : GCS, pupilles, motricité ; – le Doppler transcrânien ; – le scanner encéphalique non injecté.
u 315
ITEM 201
Fiche
Dernier tour
la stratégie thérapeutique repose sur : – la réanimation hémodynamique et respiratoire : maintien d’une pression artérielle moyenne > 90 mmHg ; – le traitement de l’HTIC ; – l’osmothérapie par mannitol en cas de mydriase aréactive ; – le contrôle des ACSOS ; – la chirurgie, parfois. ■ le sondage nasogastrique est contre-indiqué ainsi que les solutés hypotoniques . ■ les anticoagulants préventifs sont contre-indiqués pendant 5 jours . ■ le pronostic d’un polytraumatisé est aggravé en présence d’un traumatisme crânien grave. ■
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces chez un traumatisé des membres Généralités sur les fractures traumatiques des membres : ■ elles touchent le plus souvent l’homme jeune, dans un contexte d’AVP, de chute ou d’accident de sport. ■ le diagnostic est aisé, lorsque le traumatisme est isolé ; plus complexe, dans le cadre d’un polytraumatisme, avec risque de séquelles fonctionnelles. ■ un bilan de ces lésions doit donc systématiquement être réalisé dans les 24 h suivant l’arrivée du polytraumatisé . ■ on distingue deux mécanismes : – traumatisme direct ; – traumatisme indirect. ■ les fractures peuvent être classées selon : – le trait de fracture : simple ou complexe ; – l’état cutané : ouverte ou fermée ; – localisation : le plus souvent diaphysaire ; – le déplacement : fracture non déplacée ou déplacée. ■ diagnostic : – examen clinique : • mécanisme lésionnel : point d’impact, traumatisme direct ou indirect ; • douleur spontanée ou exquise à la palpation ; • impotence fonctionnelle totale du membre atteint ; • déformation, hématome ; – recherche de complications : • polytraumatisme ; • locorégionales : fractures ouvertes, syndrome de loges, déficit sensitivomoteur, lésions vasculaires. ■ bilan paraclinique : radiographie de membre de face et de profil . ■ prise en charge thérapeutique = en fonction du type de fracture : – traitement orthopédique : immobilisation par plâtre après réduction du foyer de fracture ; – traitement chirurgical : réduction et ostéosynthèse sous anesthésie générale du foyer de fracture ; – mesures associées : • antalgiques ; • rééducation ; • prophylaxie thromboembolique en cas de fracture du membre inférieur ; • béquillage en cas de fracture du membre inférieur ; • surveillance d’un malade sous plâtre .
u
316
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces
Fiche
Dernier tour
Complications : ■ fractures ouvertes (urgence thérapeutique ≤ 6 heures après le traumatisme) : – classification de Cauchoix-Duparc : • Cauchoix I : plaie simple sans décollement ni contusion, suturable sans tension ; • Cauchoix II : plaie large avec contusion ou décollement sous-cutané, suturable. Haut risque de nécrose secondaire ; • Cauchoix III : perte de substance. – traitement : • détersion, lavage, parage et suture sans tension ; • lambeau et greffe de peau à distance dans les fractures Cauchoix III ; • réduction du foyer de fracture : Cauchoix I = traitement identique à une fracture fermée ; Cauchoix II = l’ostéosynthèse dépendra du type de fracture et du délai de prise en charge ; Cauchoix III : fixateur externe ; • mesures associées : antibiothérapie , SAT, VAT , pansements antiseptiques, antalgiques, prophylaxie thromboembolique. ■ syndrome des loges : – syndrome ischémique lié à une hyperpression au sein des loges aponévrotiques ; – clinique : • survient dans les 24 h suivant le traumatisme ; • douleurs majeures ; • œdème avec tension douloureuse des loges ; • déficit sensitivomoteur ; • persistance des pouls périphériques ; – traitement : • urgence thérapeutique ; • ouverture et ablation du plâtre ; • aponévrotomie de décharge . ■ autres complications : – locales : • précoces : ischémie de membre par lésions artérielles, lésions nerveuses, infection, déplacement secondaire du foyer de fracture ; • tardives : retard de consolidation, cal vicieux, pseudarthrose, ostéite chronique, algodystrophie, troubles trophiques ; – générales : • choc hémorragique ; • Crush syndrome ; • embolie graisseuse ; • décompensation d’une pathologie chronique associée ; • complications de décubitus ITEM 50 .
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces chez un traumatisé du bassin Pronostic vital engagé par le risque de choc hémorragique cataclysmique sur hématome rétropéritonéal. ■ Mécanismes lésionnels : – compression latérale (fracture de l’aile iliaque, de la branche ischiopubienne et/ou iliopubienne) ; – compression antéropostérieure (disjonction sacro-iliaque, disjonction pubienne, fracture du sacrum) ; – cisaillement (lésions complexes) ; – traumatisme ouvert (risque infectieux). ■
u
317
ITEM 201
Fiche ■
■
Dernier tour
Prise en charge préhospitalière : – voir les principes de la prise en charge de tout polytraumatisé ; – utilisation du pantalon antichoc en cas de choc hémorragique sévère avec forte suspicion de traumatisme du bassin, contre-indication formelle en cas de traumatisme thoracique grave , après sédation et analgésie efficaces. Prise en charge hospitalière : – particularités de l’examen clinique : • touchers pelviens ; • percussion, recherche d’une matité sus-pubienne ; • l’association d’un globe vésical avec une hématurie évoque fortement une lésion urétrale qui contre-indique le sondage vésical avant l’avis spécialisé d’un urologue. Dans l’attente, un cathéter sus-pubien sera mis en place ; – examens complémentaires : • bilan usuel de tout traumatisé grave. On recherche en particulier une anémie et une coagulopathie (CIVD et/ou fibrinolyse) ; • radiographie du bassin de face ; • scanner du bassin avec injection de produit de contraste ; – stratégie thérapeutique : • réanimation du choc hémorragique ; • hémostase radio-interventionnelle rapide ; • fixation des fractures ; • pas d’indication à l’abord chirurgical du rétropéritoine dans les traumatismes du bassin.
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces chez un traumatisé thoracique Les traumatisés du thorax sont des polytraumatisés jusqu’à preuve du contraire. ■ Deux types de lésions mettent en jeu le pronostic vital : – cœur et gros vaisseaux : rupture de l’isthme aortique ; – tamponnade gazeuse. ■ Trois diagnostics parfois difficiles qu’il faut savoir évoquer : – déchirure de coupole diaphragmatique ; – contusion myocardique ; – pneumothorax antérieur : radio de face souvent normale. Physiopathologie : ■ traumatisme fermé du thorax (AVP, chutes) : – lésions de décélération ; – lésions par transmission directe de l’onde de pression ; ■ traumatisme thoracique pénétrant : arme à feu, arme blanche. Examen clinique : ■ voir le polytraumatisé ; ■ les traumatisés du thorax sont des polytraumatisés jusqu’à preuve du contraire. Examens complémentaires : ■ imagerie : – examens de première ligne : • radiographie thoracique de face (diagnostic de lésions nécessitant un traitement urgent de sauvetage) ; • examen du médiastin antérieur ; • échographie pleurale et péricardique ; – scanner thoracique avec injection de produit de contraste : • indispensable pour éliminer une lésion d’un gros vaisseau intrathoracique ; ■
u
318
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces
Fiche
Dernier tour
• comme pour le polytraumatisé, le scanner du traumatisé thoracique sera effectué sur un patient stabilisé et ne retardera pas la prise en charge d’une blessure thoracique mettant en jeu le pronostic vital. ■ biologie : ensemble des examens du traumatisé grave (voir la section correspondante). Prise en charge des lésions principales : ■ les mesures générales sont celles de la prise en charge de tout polytraumatisé ; ■ la prise en charge repose sur le traitement des défaillances : – respiratoires : • oxygénothérapie ; • ventilation mécanique ; • kinésithérapie respiratoire ; • analgésie efficace ; • systémique et locorégionale ; – hémodynamiques : • correction du choc hémorragique ; • évacuation des épanchements ; • hémostase chirurgicale ou radio-interventionnelle ; ■ contre-indication du pantalon anti-choc ; ■ antibiothérapie prophylactique si traumatisme pénétrant du thorax ; ■ volet costal : – trait de fracture passant par plusieurs côtes voisines ; – désolidarisation d’un segment de paroi thoracique ; – risque d’atélectasie et de détresse respiratoire aiguë ; – traitement : assistance ventilatoire non invasive, voire invasive, analgésie efficace, stabilisation chirurgicale (indications spécialisées) ; ■ pneumothorax : – au maximum, tamponnade gazeuse ; – traitement : drainage pleural percutané ; ■ hémothorax : – risque de surinfection (empyème pleural), de troubles de ventilation voire atélectasies et d’insuffisance respiratoire aiguë ; – traitement : drainage pleural, thoracotomie d’hémostase en urgence si saignement ≥ 1 500 mL à la pleurotomie, ou débit de sang ≥ 150 mL/h ; – diagnostic différentiel d’un hémothorax gauche : rupture diaphragmatique ; ■ rupture de l’isthme aortique : – les lésions aortiques traumatiques siègent sur l’isthme chez 90 % des blessés qui arrivent vivants à l’hôpital ; – physiopathologie : décélération brutale ; – clinique peu contributive ; – radiographie thoracique de face ; – scanner thoracique injecté : flap intimal ou médial, faux chenal, asymétrie des contours de l’aorte, hématome médiastinal ; peut être normal en cas de lésions mineures ; – échographie transœsophagienne : valeur diagnostique identique au scanner ; ■ contusion myocardique ; ■ contusion pulmonaire : – clinique : signes d’hypoxémie ; – imagerie pulmonaire : infiltrats, bandes d’atélectasies, parfois bronchogramme aérien, pneumatocèles au scanner thoracique en fenêtre parenchymateuse ; – complications : encombrement bronchique, pneumopathies bactériennes, abcédation ; – traitement : endoscopie bronchique, kinésithérapie de drainage bronchique, oxygénothérapie, ventilation mécanique, non invasive voire invasive, analgésie ;
u
319
ITEM 201
Fiche ■
■
Dernier tour
rupture diaphragmatique : – gauche > droite ; – ascension des viscères abdominaux ; – clinique : état de choc, détresse respiratoire aiguë, BHA à l’auscultation thoracique ; – RP de face : sonde gastrique intrathoracique ; – scanner thoracique : diagnostic de certitude ; – traitement : chirurgical ; lésions plus rares : – luxation cardiaque ; – rupture cardiaque ; – désinsertion des veines pulmonaires.
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces devant une plaie des parties molles ■
■
■
■
Prise en charge diagnostique : – terrain ; – mécanisme lésionnel ; – examen général ; – examen régional : • siège, profondeur apparente de la plaie, perte de substance ; • recherche d’une atteinte des tissus nobles sous-jacents ; – examens complémentaires non systématiques (radiographie, NFS, CRP, prélèvements bactériologiques). Quatre types de plaies : – plaies simples ; – plaies avec atteintes vasculonerveuses ou tendineuses sous-jacentes ; – plaies avec pertes de substance ; – plaies révélant une lésion organique nécessitant la mise en place de mesures de réanimation et une prise en charge chirurgicale. Prise en charge thérapeutique : – exploration de la plaie : • sous anesthésie et dans des conditions d’asepsie rigoureuse ; • nettoyage et irrigation ; • recherche et suture microchirurgicale des lésions tendineuses, nerveuses et vasculaires ; – mesures générales : • antalgiques : de niveau 1 à 3 selon l’EVA ; • antibiothérapie/antibioprophylaxie par bêtalactamines en l’absence d’allergie pour les lésions avec risque infectieux élevé (souillures, morsures, signes généraux d’infection, fracture ouverte associée, plaies articulaires, vasculonerveuses ou tendineuses), de durée de 3–5 jours ; • SAT, VAT ; ITEM 103 • prise en charge du risque rabique en cas de morsure ; ITEM 213 • rééducation. Complications : – artérielles : traitement par suture de l’artère lors de l’exploration chirurgicale ; – nerveuses : traitement par suture nerveuse lors de l’exploration chirurgicale ; – tendineuses : suture tendineuse et immobilisation pendant 6 semaines ; – infectieuses : ce type de plaies doit bénéficier d’une prise en charge spécifique ; ITEMS 101, 103, 213
– amputations : le segment amputé doit être lavé abondamment et conservé dans un sachet en plastique, lui-même placé dans la glace. Tout contact direct avec la glace est proscrit.
u 320
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces
Fiche
Dernier tour
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces chez un traumatisé du rachis Épidémiologie ■ Pathologie fréquente avec 10 à 30 % d’atteinte médullaire. ■ 1 000 à 2 000 sujets par an en France touchés par une lésion médullaire traumatique. ■ Population masculine et jeune. ■ Mécanismes : AVP, chutes de grande hauteur, accidents de sports. ■ Association fréquente à un polytraumatisme. Physiopathologie ■ Toute lésion du SVM et du SMR = instabilité rachidienne = risque d’atteinte médullaire . ■ Lésion primaire : directement liée au traumatisme. ■ Notion de lésion secondaire : aggravant la lésion initiale. ■ Hypotension artérielle, hypoxie, hypercapnie, hyperglycémie sont des facteurs d’agression secondaire. ITEMS 192, 279, 301 ■ Conséquences neurologiques : Syndrome lésionnel : première racine motrice atteinte, limite de disparition de la sensibilité. Syndrome sous-lésionnel : – syndromes médullaires complets : • choc spinal, initial : paralysie flasque, abolition de tous les réflexes ostéotendineux, anesthésie à tous les modes, rétention aiguë d’urines, priapisme, atonie du sphincter anal, disparition du réflexe bulbocaverneux, atteintes respiratoire et cardiovasculaire ; • évolution vers l’automatisme médullaire : syndrome pyramidal avec paralysie spasmodique, anesthésie à tous les modes, récupération des réflexes anal et bulbocaverneux ; – syndromes médullaires incomplets ITEM 279 : • syndrome de Brown-Séquard ; • syndrome centromédullaire ; • syndrome de contusion antérieure de la moelle ; • syndrome de contusion postérieure de la moelle ; • syndrome de la queue de cheval ITEM 231 . ITEM 200 ■ Conséquences cardiovasculaires : – abolition de l’activité sympathique au profit du parasympathique ; – vasoplégie, hypovolémie relative, hypotension artérielle, bradycardie, arrêt cardiocirculatoire. ITEM 198 ■ Conséquences ventilatoires : – niveau supérieur à C4 : paralysie diaphragmatique avec perte totale de l’autonomie respiratoire ; – de C5 à dorsales hautes : autonomie respiratoire possible mais précaire (encombrement) ; – niveau thoracique bas et lombaire : conséquences ventilatoires négligeables. ■ Autres : iléus paralytique, rétention aiguë d’urine, hypothermie. ■ Lésions associées. Dogmes : ■ tout traumatisé crânien a une lésion du rachis cervical instable jusqu’à preuve du contraire et tout traumatisé du rachis cervical est un traumatisé crânien jusqu’à preuve du contraire ; ■ tout polytraumatisé possède une lésion du rachis instable jusqu’à preuve du contraire ; ■ tout traumatisme du rachis doit faire rechercher une autre lésion (crânienne, thoracique, abdominale, bassin et membres) menaçant le pronostic vital.
u 321
ITEM 201
Fiche
Dernier tour
Prise en charge préhospitalière Un principe : tout traumatisé grave est à haut risque de lésion rachidienne instable et doit bénéficier d’une immobilisation de l’axe craniorachidien durant toute la prise en charge . ■ Circonstances de l’accident et bilan clinique lésionnel. ■ Prise en charge des défaillances vitales (voir la prise en charge du patient polytraumatisé). ■ Orientation dans un centre de prise en charge spécialisé. Prise en charge hospitalière ■ Terrain et anamnèse. ■ Mécanisme lésionnel . ■ Examen clinique : – recherche d’une défaillance vitale et Hemocue® ; – examen vertébromédullaire : douleur spontanée ou provoquée à la palpation, déformation, contractures des muscles paravertébraux ; – examen neurologique complet, consigné sur un schéma (classification ASIA) daté et répété : • recherche d’un syndrome médullaire avec niveau lésionnel et syndrome souslésionnel ; • examen du périnée , syndrome de la queue de cheval ; • caractère complet ou incomplet ; • syndrome radiculaire. ■ Radiographies standard : rachis face, profil (dégageant C7 en cervical) ± 3/4, bouche ouverte. ■ Scanner du rachis : examen de référence chez le polytraumatisé, devant toute anomalie des clichés standard et en cas de forte suspicion clinique de lésions rachidiennes. ■ IRM médullaire : en cas de suspicion de lésion médullaire ou de déficit neurologique sans anomalie radiologique ou scanographique. ■ Bilan sanguin : – NFS , TP, TCA, fibrinogène ; – groupe sanguin, Rhésus et RAI ; – ionogramme sanguin, bilan hépatique et gaz du sang selon le contexte. ■ Bilan des lésions associées dans le cadre du patient polytraumatisé . Prise en charge thérapeutique ■ Transfert et hospitalisation dans une structure hospitalière spécialisée en fonction des lésions associées. ■ Immobilisation en rectitude craniorachidienne . ■ Deux voies veineuses périphériques de bon calibre. ■ Monitorage standard ± pression invasive. ■ Prévention de l’hypothermie. ■ Maintien d’une pression artérielle moyenne ≥ 80 mmHg : contre-indication des solutés hypotoniques . ■ Lutte contre l’hypoxie et assistance ventilatoire : – oxygénothérapie ; – intubation orotrachéale et ventilation mécanique en cas : • de détresse respiratoire aiguë liée au traumatisme médullaire ; • de trouble de la conscience (GCS ≤ 8) ; – monitorage du CO2 expiré, objectif = normocapnie. ■ Équilibre glycémique strict. ■ Corticothérapie : non recommandée.
u
322
Évaluation de la gravité et recherche des complications précoces
Fiche
Dernier tour
Traitement orthopédique ou traitement chirurgical : – dans tous les cas, immobilisation par minerve (rachis cervical) ou corset (rachis dorsolombaire) ; – les indications chirurgicales sont l’affaire du spécialiste, elles dépendent de l’existence d’une instabilité et d’un déficit neurologique. ■ Mesures associées : – immobilisation et repos au lit strict ; ITEM 66 – antalgiques ; – SAT-VAT le cas échéant ; – anticoagulation préventive et prévention des complications de décubitus ; – rééducation, kinésithérapie motrice et respiratoire ; – lutte contre la spasticité ; – sondage vésical à demeure puis apprentissage de l’autosondage ; – arrêt de travail ; – psychothérapie de soutien ; – surveillance clinique répétée (neurologique), radiologique. – l’objectif de la prise en charge du traumatisé médullaire est de l’amener vers l’autonomisation lorsque celle-ci est possible. Elle nécessite une équipe médicale et paramédicale entraînée avec des structures d’accueil d’urgence puis de réadaptation spécialisées. Complications ■
A court terme (voir « Physiopathologie ») – Décès – Neurologiques ITEMS 192, 279 – Ventilatoires ITEM 198 – Cardiovasculaires ITEM 200 – Rétention aiguë d’urines – Lésions associées dans le cadre des patients polytraumatisés
A moyen et long termes – Complications de décubitus ITEM 50 – Orthopédiques : • déficit neurologique secondaire, déplacement secondaire • infection de matériel d’ostéosynthèse • brèche dure-mérienne et méningites postopératoires • cals vicieux • pseudarthrose – Souffrance psychique – Douleurs ITEMS 65, 66 : • nociceptives : antalgiques classiques (niveau I à III) • neurogènes : antidépresseurs tricycliques et anticonvulsivants – Spasticité
323
This page intentionally left blank
Abréviations autorisées aux ECN* ACE
antigène carcino-embryonnaire
ACTH
adrenocorticotropic hormone
ADH
aVf, aVL, aVr
dérivations électrographiques unipolaires
(corticotrophine, hormone cor-
AVK
anti-vitamine K
ticotrope hypophysaire)
BCG
bacille de Calmette et Guérin
antidiuretic hormone (hormone
BK
bacille de Koch
antidiurétique, vasopressine)
BPCO
bronchopneumopathie chroni-
ADN
acide désoxyribonucléique
AINS
anti-inflammatoire
que obstructive CCMH
non stéroidien
concentration corpusculaire moyenne en hémoglobine
ALAT
alanine aminotransferase (TGP)
CEC
circulation extracorporelle
ALD
affection de longue durée
CGMH
concentration globulaire
AMM
autorisation de mise sur le marché
AMP
moyenne en hémoglobine CIVD
acide adénosine-
coagulation intra-vasculaire disséminée
monophosphérique
CK
créatine kinase
AMPc
AMP cyclique
CMV
cytomégalovirus
ANCA
antineutrophyloc cytoplasmic
CO
monoxyde de carbone
antibody (anticorps anti cyto-
CO2
dioxyde de carbone
plasme des polynucléaires)
CPK
créatine phosphokinase
american pediatric groos
CPK-BB
créatine phosphokinase
APGAR
assessment record APUD
amine precursor uptake and
iso enzyme BB CPK-MB
decarboxylation (groupe de cellules captant et décarboxy-
créatine phosphokinase iso enzyme MB
CPK-MM
lant des précurseurs d’amines)
créatine phosphokinase iso enzyme MM
ARN
acide ribonucléique
ARNm
ARN messager
mone (hormone de libération
ASA
classification du risque opéra-
de l’hormone corticotrope)
toire de l’American Society of
CRH
CRP
Anesthesiologist ASAT
aspartate aminotransférase
corticotropin releasing hor-
C reactive protein (protéine C réactive)
DCI
(TGO)
dénomination commune internationale
ASLO
antistreptolysine O
DHEA
déhydroépiandrostérone
ATP
adénosine triphosphate
DOPA
dihydroxyphénylalanine
AVC
accident vasculaire cérébral
EBNA
Epstein-Barr nuclear antigen
* Liste revue par le Conseil Scientifique de Médecine du CNCI le 16/12/2004.
325
Urgences – Réanimation – Anesthésie
EBV
Epstein-Barr virus
IDR
intradermoréaction
ECBU
examen cytobactériologique
IEC
inhibiteur de l’enzyme de conversion
des urines ECG
électrocardiogramme
ECHO virus enteric cytopathogenic human
Ig
immunoglobulines
IGF
insulin-like growth factor (somatomédine)
orphan virus EEG
électroencéphalogramme
EFR
épreuve fonctionnelle
ELISA
IMAO
inhibiteur de la monoamine oxydase
respiratoire
INR
international normalized ratio
enzyme-linked immunosorbent
IRM
imagerie par résonance magnétique
assay EMG
électromyographie
ITT
incapacité temporaire totale
FiO2
fraction inspirée d’oxygène
IV
intraveineuse
FSH
follicle stimulating hormone
LCR
liquide céphalorachidien
(hormone folliculostimulante)
LDH
lactate déshydrogénase
gamma-GT gamma-glutamyl transférase
LDL
low density lipoprotein (lipo-
GB
globule blanc
GH
growth hormone (hormone
protéine de faible densité) LH
(hormone lutéinisante)
somatotrope-hormone de croissance) GH-RH
LHRH MALT
mucous associated lymphoid
de l’hormone de croissance)
tissue (tissu lymphoïde associé
GR
globule rouge
aux muqueuses)
GVH
graft versus host (réaction
MNI
mononucléose infectieuse
du greffon contre l’hôte)
MST
maladie sexuellement transmissible
Hb
hémoglobine
HbA1C
hémoglobine glyquée
NFS
numération formule sanguine
HbO2
oxyhémoglobine
NK
natural killer (lymphocyte)
HBPM
héparine de bas poids
OAP
œdème aigu du poumon
moléculaire
OMS
Organisation mondiale
HCG
HDL
de la santé
human chorionic gonadotrophin (gonadotrophine
ORL
oto-rhino-laryngologie
chorionique)
PAN
périartérite noueuse
high density lipoproteins (lipo-
PaO2
pression artérielle partielle
protéines de haute densité) HELLP
hemolysis + elevated liver
en oxygène PaCO2
enzymes + low platelets HLA
326
luteinizing hormone releasing hormone (gonadolibérine)
GH-releasing hormone (hormone activatrice
luteinizing hormone
pression artérielle partielle en dioxyde de carbone
human leucocyte antigen (anti-
PCR
polymerase chain-reaction
gène d’histocompatibilité)
PDF
produits de dégradation
HPV
human papillomavirus
HTLV
human T cell leukemia/lym-
de la fibrine PDGF
platelet-derived growth factor
phoma virus (virus humain T
(facteur de croissance des
lymphotropique)
plaquettes)
Liste des abréviations autorisées aux ECN
PMI
protection maternelle
TGMH
teneur globulaire moyenne en hémoglobine
et infantile TGO
transaminase glutamo-
PNB
polynucléaires basophiles
PNE
polynucléaires éosinophiles
PNN
polynucléaires neutrophiles
PSA
prostatic specific antigen
QI
quotient intellectuel
QRS
complexe QRS
metastasis (tumeur primitive,
QSP
quantité suffisante pour
adénopathies régionales,
QT
segment QT
métastases)
RAST
radio allergo sorbent test
TP
taux de prothrombine
(dosage radio immunologique
TPHA
treponema pallidum haemag-
oxaloacétique TGP
pyruvique TNM
Rh
rhésus
RMN
résonance magnétique
TRH
SRAS
thyrotropin releasing hormone (protiréline)
TSH
thyroïd stimulating hormone (thyréostimuline)
nucléaire SIDA
classification tumor nodes
glutination assay
des IgE spécifiques d’un allergène)
transaminase glutamo-
syndrome d’immunodéficience
UI
unité internationale
acquise
UIV
urographie intraveineuse
syndrome respiratoire aigu
VDRL
veneral disease research labo-
sévère
ratory (réaction d’agglutination
T3
triiodothyronine
syphilitique)
T4
thyroxine, tétraiodothyronine
TCA
temps de céphaline
VEMS
volume expiratoire maximum par seconde
activée
VGM
volume globulaire moyen
TCK
temps de céphaline kaolin
VIH
virus de l’immunodéficience
TCMH
teneur corpusculaire moyenne en hémoglobine
humaine (HIV, virus du SIDA) VLDL
very low density lipoproteins
TDM
tomodensitométrie
(lipoprotéines de très faible
TEP
tomographie par émission
densité)
de positon
VS
vitesse de sédimentation
327
This page intentionally left blank
Index
A Abcès, 248 Acide acétylsalicylique (aspirine), 200 Acidose – métabolique, 105, 107, 159 – respiratoire, 105, 109 Actiq, 205 Actiskénan, 204 Acupan, 203 Adrénaline, 26, 59, 70, 71 Agression cérébrale secondaire d’origine systémique (ACSOS), 251, 254 Alcalinisation urinaire, 96 Alcalose – métabolique, 105, 108 – respiratoire, 105, 109 Alcoolémie, 90 Alfentanil, 217 Algie vasculaire de la face, 207 Algodystrophie, 267 Allergène, 66 Aminoamide – bupivacaïne, 219 – étidocaïne, 219 – lidocaïne, 219 – mépivacaïne, 219 – ropivacaïne, 219 Aminoester – chloroprocaïne, 219 – procaïne, 219 – tétracaïne, 219 Amputation, 287 Anaérobie, 7 Analgésie péridurale, 275 Analgésique, 217 Analyse toxicologique, 82 Anesthésie – aiguille de Tuohy, 219 – locale et locorégionale (ALR), 218 – péridurale, 219, 220 Anexate, 82
Antibiothérapie, 13, 18 Antidépresseurs tricycliques, 83 Antidote, 81 Anti-inflammatoire non stéroïdien (AINS), 201 Anurie, 154 Aponévrotomie de décharge, 263, 266 Arc électrique, 229 Arrêt cardio-circulatoire, 21 Artérioembolisation, 240, 271 Aspégic, 200 Aspergillose pulmonaire invasive, 7, 14 Aspirine pH 8, 200 Asthme aigu, 45 Asystolie, 23 Atropine, 97 Automatisme médullaire, 291 Avulsion hépatique, 247 Axonotmésis, 264
B Bacilles à Gram négatif (BGN), 6, 14 Baclofène (Liorésal), 209 Bactéries multirésistantes (BMR), 170 Barbituriques, 83 Bas de contention, 254 Bassin, 268 Benzodiazépine, 82 Bêtabloquants, 85 Bêtalactamase à spectre élargi (BLSE), 170 Biphosphonate, 209 Bi-profénid, 201 Blast, 243, 275 Brèche dure-mérienne, 256 Brosse distale protégée, 181 Brûlure, 229 – chimique, 229 – électrique, 229 – profondeur, 230 – thermique, 229 329
Urgences – Réanimation – Anesthésie
Bupivacaïne, 219 Buprénorphine, 206
C Cal vicieux, 267 Calcitonine, 209 Candida, 14 Candidémie, 7 Carbamate, 83 Carboxyhémoglobine, 86, 87 Catalgine, 200 Catécholamine, 58 Cathéter – artériel, 238 – pulmonaire, 57 – veineux central, 238 Celebrex, 201 Céphalée, 207 Charbon activé, 96 Chloroquine, 85 Choc, 54, 237 – anaphylactique, 53, 54, 56, 59, 60, 70, 218 – cardiogénique, 52, 54, 56, 59, 60, 237 – hémorragique, 60, 237, 239 – hypovolémique, 52, 54, 55, 59 – obstructif, 237 – septique, 9, 52, 54, 56, 59, 60 – spinal, 237 Clairance de la créatinine, 154 Classification – ASA, 187, 222 – d’Altemeier, 188 – de Butain, 246 – de Cauchoix-Duparc, 262 – de Moore, 247 Coagulation intravasculaire disséminée (CIVD), 10, 55, 151, 266, 267 Codoliprane, 202 Coma, 79, 133, 136 Complication de décubitus, 254, 267 Conscience, 135 Consultation d’anesthésie, 221 Contramal, 202 Contusion – abdominale, 242, 243 – myocardique, 279 – pulmonaire, 273
330
Cordotomie spinothalamique, 209 Corps étranger des voies aériennes supérieures, 31, 41 Corticothérapie, 209 Coxibs, 201 Crises convulsives, 79 Cryothérapie, 210 Cryptocoque, 8, 14 Curare, 217 – dépolarisant (succinylcholine), 217 – non dépolarisant (vécuronium, atracurium/cisatracurium, rocuronium, mivacuriun), 217
D Dafalgan, 200 – codéiné, 202 Débit de filtration glomérulaire (DFG), 147, 154 Décérébration, 136 Décontamination digestive, 83, 96 Décortication, 136 Décubitus ventral, 39 Défibrillation, 25 – automatisée externe (DAE), 25 Désordres hydroélectrolytiques, 101 Détresse respiratoire aiguë, 31 Dialyse conventionnelle, 161 Di-antalvic, 202 Diazépam (Valium), 209 Dicodin, 202 Digitaliques, 84 Dissociation électromécanique, 23 Diurèse alcaline, 266 Dobutamine, 58 Dopamine, 58 Doppler transcrânien, 253 Douleur neuropathique, 207 – périphérique, 208 Drainage pleural, 276 Durogésic, 205 Dyspnée, 39 – de Cheyne-Stockes, 139 – de Küssmaul, 139
E Échelle – comportementale de Bourhis, 211 – de Comfort pour les enfants, 211
Index
– numérique simple (ENS), 211 – verbale simple (EVS), 211 – visuelle analogique (EVA), 211 Échographie – abdominale, 245 – cardiaque transthoracique, 56 Efferalgan, 200 – codéiné, 202 Effet – quinidine-like, 81, 83 – stabilisant de membrane, 81, 85 Électroencéphalogramme (EEG), 82, 83, 140, 143 Électromyogramme, 264 Embarrure, 251, 254 Embolie graisseuse, 237, 266 EMLA, 220 Emphysème sous-cutané, 273 Encéphalopathie de Wernicke, 142 Enclouage centromédullaire, 260 End-tidal CO2, 223 Entorse – bénigne, 293 – grave, 295 Entretien, 216 Équation d’Henderson-Hasselbach, 106 Escarres, 254 État de choc, 49 État de mal épileptique (EME), 141 Étomidate, 217 Exposition aux fumées d’incendie, 86
F Faux kyste du pancréas, 249 Fentanyl, 205 Fibrillation ventriculaire (FV), 22 Fibrose rétropéritonéale, 150 Fistule biliaire, 248, 249 Fixateur externe, 260 Flap – intimal, 278 – intra-luminal – hémomédiastin, 278 Floctafénine, 201 Flumazénil, 81, 96 Foie de choc, 55 Fracture – Burst, 295 – de l’odontoïde de C2, 295 – ouverte, 262
– splénique, 246 – Tear-drop, 295 Fragment FAB d’anticorps antidigitaliques, 84
G Gaz du sang, 40, 106 Gaz halogéné – desflurane, 217 – isoflurane, 217 – sévoflurane, 217 Glomérulonéphrite rapidement progressive, 152 Glucagon, 97
H Hématome – périmédullaire, 221 – rétropéritonéal, 237, 246, 268 – sous-dural aigu (HSD), 254, 255 Hémobilie, 248 Hémoculture, 9 Hémodialyse, 96 – intermittente, 60 Hémofiltration continue, 60, 161 Hémopéricarde, 237 Hémopéritoine, 241 Hémorragie – extra-durale, 251 – sous-arachnoïdienne, 251 – sous-durale, 251 Hémothorax, 241, 277, 278 Hépatite fulminante, 92, 96 Histamine, 69 HIV-associated nephropathy (HIVAN), 153 Hormone antidiurétique, 111 Hydrocolloïde, 284 Hydromorphone, 205 Hydroxocobalamine, 87 Hypercalcémie, 123 Hyperkaliémie, 117, 159 Hyperlactatémie, 56 Hypernatrémie, 115 Hypertension intracrânienne (HTIC), 254 Hyperthermie maligne, 218 Hypnotique, 217 Hypocalcémie, 126 Hypoglycémie, 140
331
Urgences – Réanimation – Anesthésie
Hypokaliémie, 119 Hyponatrémie, 112
I Indice de Baux, 232 Induction, 216 Infection – associée aux soins (IAS), 168 – du site opératoire, 187 – liée aux cathéters veineux centraux, 182 – nosocomiale, 167, 169 – urinaire, 177 Inhibiteur calcique, 85 Insuffisance rénale aiguë (IRA) – anurie, 145 – fonctionnelle, 55, 148 – obstructive, 148 – parenchymateuse, 148 Insuffisance respiratoire aiguë, 31, 45 Intoxication – à l’acide glycyrrhizique, 120 – aiguë, 77 – alcoolique aiguë (IAE), 89 – au paracétamol, 92 – aux salicylés, 93 – cyanhydrique, 86, 87, 231 – oxycarbonée, 231 – par antalgiques, 92 – par cardiotropes, 84 – par le monoxyde de carbone, 85 – par psychotropes, 82 Intubation, 44 Ischémie aiguë de membre, 234
J Jeûne, 222 – préopératoire, 222
K Kapanol LP, 204 Kétamine, 217
L Laparotomie exploratrice, 246, 248 Lavage – bronchoalvéolaire, 181 – des mains, 171, 176 – gastrique, 96 Lésion axonale diffuse, 251 332
Lexomil, 208 Libération des voies aériennes, 140 Lidocaïne, 219 Lithium, 83
M Manœuvre de Heimlich, 42 Massage cardiaque externe, 24 Matelas à flux, 254 Méningite, 221 Microangiopathie thrombotique, 153, 154 Migraine, 207, 208 Monitorage peranesthésique, 223 Monoxyde d’azote, 39 Morphine – morphine-3-glycuronide, 204 – morphine-6-glycuronide, 204 Morphinothérapie – intracérébroventriculaire, 210 – intrathécale, 210 Mort encéphalique, 139 Moscontin LP, 204 Mydriase aréactive, 253 Myélinolyse centropontine, 114 Myélome, 150 Myoglobine, 266 Myoglobinurie, 266
N N-acétylcystéine, 93, 96, 200 Nalbuphine, 205 Naloxone, 81, 94, 96, 140 Nécrose tubulaire aiguë, 55, 150, 234, 266 Néphropathie – glomérulaire aiguë, 151 – interstitielle aiguë, 151 – vasculaire aiguë, 153 Neurapraxis, 264 Neuroleptiques, 84 Neuromyopathie de réanimation, 256 Neuropathie diabétique, 208 Neuropmésis, 264 Neurostimulation transcutanée, 209 Névralgie – du trijumeau, 208, 209 – postzostérienne, 208 Nifluril, 201 Noradrénaline, 58, 237 Noramidopyrine, 201
Index
Normogramme de Rumack et Matthew, 92 Nubain, 205
O Œdème – aigu du poumon lésionnel, 234, 267 – angioneurotique, 69 – de Quincke, 41, 67, 71 – pulmonaire, 45 Oligurie, 154 Ordonnance sécurisée, 203 Osmolalité, 111 Osmolarité, 80, 111 Osmothérapie, 253 Ostéite, 264 – chronique, 267 Ostéosynthèse, 261, 266 Oxycodone, 205 Oxycontin LP, 205 Oxygénothérapie, 43, 87 – hyperbare, 87
P Packing hépatique, 246 Pantalon anti-choc, 237, 269 Paracétamol, 200 PCA, 203 Perfalgan, 200 Péritonite, 245, 248, 249 Phloroglucinol (Spasfon), 209 Plaie – de la face, 285 – de la main, 285 – des parties molles, 281 Pleurésie, 249 Pneumatocèle, 279 Pneumopathie – acquise sous ventilation mécanique (PAVM), 179, 180 – aiguë communautaire, 45 Pneumothorax, 41, 273, 275 Polypnée de Kussmaul, 107 Polytraumatisé, 235 Ponction-biopsie rénale, 157, 158 Ponction-lavage péritonéale, 245 Prémédication, 217, 222 Pression – de perfusion cérébrale (PPC), 252 – intracrânienne (PIC), 252
Pression – artérielle – – diastolique, 55 – – différentielle, 55 – – moyenne, 55, 59 – – pulsée, 55 – expiratoire positive (PEP), 38 Profénid, 201 Prophylaxie thromboembolique, 260 Propofol, 217 Protéine C activée, 60 Protoxyde d’azote, 217 Pseudarthrose, 267 Purpura, 60, 141 – aigu fébrile, 12
Q Questionnaire – Mac Gill Pain, 211 – Douleur de Saint-Antoine, 211
R Rachianesthésie, 219, 220 Radicellotomie postérieure sélective, 209 Réanimation cardiopulmonaire – de base, 24 – spécialisée, 26 Règle des 9 de Wallace, 230, 232 Rémifentanil, 217 Remplissage vasculaire, 27, 58, 71 Réponse inflammatoire systémique (SIRS), 8, 53 Réveil, 216 Rhabdomyolyse, 151, 234 Ropivacaïne, 219 Rosner, 252 Rotation des opioïdes, 204 Rupture – de l’isthme aortique, 277, 278 – diaphragmatique, 277, 280 – trachéobronchique, 273
S Salle de surveillance postinterventionnelle (SSPI ou salle de réveil), 218 SAT, 284 Saturation pulsée en oxygène (SpO2), 223 333
Urgences – Réanimation – Anesthésie
Scanner – cérébral, 253 – corps entier (body-scanner), 240 Score – ASIA, 303 – de Frankel, 303 – de Glasgow (GCS), 236 – de Glasgow-Liège, 138 – de Mallampati, 222 – NNISS, 188 – UBS, 232 Sédation, 217 Segment – mobile rachidien (SMR), 290 – vertébral moyen (SVM), 289 Sepsis, 9, 53 – sévère, 9, 53 Septicémie, 3 Sévrédol, 204 Skénan LP, 204 Solupsan, 200 Solution hydroalcoolique, 171, 176 Sophidone LP, 205 Spinal Cord Injury Without Radiographic Abnormality (SCIWORA), 305 Splénectomie, 246 Staphylocoque, 6, 13, 170 Stimulation – cérébrale profonde, 210 – du gyrus moteur, 210 – médullaire, 210 Stomie, 248 Streptocoque, 6, 14 Substance réticulée activatrice ascendante (SRAA), 135 Sufentanil, 217 Surveillance, 241 – postinterventionnelle (SSPI), 223 Syndrome(s) – adrénergique, 81 – atropinique, 81 – centro-médullaire, 291 – Crush, 265 – d’hyperthermie maligne, 81 – d’ischémie-reperfusion, 265 – de contusion antérieure de la moelle, 291 – de détresse respiratoire aiguë (SDRA), 37, 55, 234, 266
334
– de la queue de cheval, 292 – de loges, 234, 259, 263 – de Lyell, 201 – de myorelaxation, 81 – de Pancoast-Tobias, 209 – de pénétration, 41 – de Reye, 200 – hépatorénal (SHR), 149 – lésionnel, 291 – Locked-in, 143 – médullaires complets, 291 – néphritique, 152 – néphrotique impur, 151 – opioïde, 81, 94 – postintervallaire, 86 – sérotoninergique, 81 – Sick cell, 113 – sous-lésionnel, 291 Système rénine-angiotensinealdostérone, 112
T Tamponnade, 237 – gazeuse, 279 Temgésic, 206 Tentative de suicide, 78 Tétrazépam (Myolastan), 209 Théorie du portillon de Wall et Melzach, 211 Thermocoagulation du nerf trijumeau, 209 Thermothérapie, 210 Thiopental, 217 Thoracotomie, 277 Titration, 203, 238 Tonicité, 111 Topalgic, 202 Toxidrome, 81 Tractotomie pédonculaire stéréotaxique, 209 Tramadol, 202 Tranxène, 208 Traumatisé – abdominal, 242 – des membres, 257 – du bassin, 268 – du rachis, 287 – grave, 235 – thoracique, 272
Index
Traumatisme(s) – crânien, 141 – – grave (TCG), 241, 250 – hépatique, 247 – pénétrant, 243, 248 – – abdominal, 242 – splénique, 246 – vertébro-médullaires, 288 Trou – anionique (TA), 106 – osmolaire, 80, 112 Troubles de l’équilibre acidobasique, 101 Tryptase, 69
V Vaccination – anti-Haemophilus, 246 Vasopressine, 26 VAT, 284 Ventilation – mécanique, 38, 44, 60 – non invasive, 45 Vibrothérapie, 211 Vigilance, 135 Visite préanesthésique, 222 Volet costal, 273, 275 Vomissements provoqués, 96
Z
U Urbanyl, 208
Zamudol, 202
470884–(I)–(4,5)–OSB-80°–SPI-PMS ELSEVIER MASSON SAS 62, rue Camille-Desmoulins 92442 Issy-les-Moulineaux Cedex Dépôt légal : juin 2010 Achevé d’imprimer en juin 2010 par Legoprint Imprimé en Italie
335
This page intentionally left blank