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TABLE DES MATIÈRES ABRÉVIATIONS UTILISÉES DANS CET OUVRAGE PRÉFACE INTRODUCTION Les débuts d’une spécialisation en maladie de Lyme Mode d’emploi PREMIÈRE PARTIE LES MYSTÈRES DE LA MALADIE DE LYME DÉTECTER UNE MALADIE DE LYME Remonter à l’origine de la maladie chronique Les outils du détective médical Le questionnaire symptomatologique des SIMS/ML de Horowitz LA GRILLE DE DIAGNOSTIC DIFFÉRENTIEL EN 16 POINTS DE HOROWITZ Le diagnostic de la maladie de Lyme et les examens de laboratoire Détecter un syndrome infectieux multisystémique La grille de diagnostic différentiel en 16 points de Horowitz : mode d’emploi Les examens complémentaires : l’étape diagnostique suivante La grille de diagnostic différentiel en 16 points de Horowitz et Madame Q Aller de l’avant DÉCELER ET SOIGNER LA MALADIE DE LYME Savoir reconnaître une réaction de Jarisch-Herxheimer Les tiques ne transmettent pas que la maladie de Lyme DEUXIÈME PARTIE SIMS ET MALADIE DE LYME MALADIE DE LYME ET PRINCIPALES INFECTIONS TRANSMISES PAR LES TIQUES Ehrlichioses et anaplasmoses Les bartonelloses Les mycoplasmoses Les chlamydiae Les rickettsioses La fièvre récurrente transmise par les tiques : Borrelia hermsii et Borrelia miyamotoi La paralysie par morsure de tique La maladie de Masters La tularémie La brucellose Soigner la maladie de Lyme en cas de co-infections Protocoles d’antibiothérapie pour soigner les co-infections bactériennes des SIMS MALADIE DE LYME ET CO-INFECTIONS VIRALES, PARASITAIRES ET FONGIQUES Babesia Les derniers traitements contre les babésioses Les infections virales Les candidoses et autres mycoses La maladie des morgellons MALADIE DE LYME ET TROUBLES IMMUNITAIRES La maladie de Lyme peut provoquer des symptômes auto-immuns MALADIE DE LYME ET INFLAMMATION
L’inflammation et le cerveau Maladie de Lyme et inflammation L’inflammation et le sommeil L’inflammation et les métaux lourds L’inflammation et la production hormonale Traiter l’inflammation MALADIE DE LYME ET TOXIQUES ENVIRONNEMENTAUX Le poids et la prévalence des métaux lourds Dehors. Dedans. Quelle différence aujourd’hui ? L’hypersensibilité chimique multiple et les maladies environnementales MALADIE DE LYME, MÉDECINE FONCTIONNELLE ET THÉRAPIES NUTRITIONNELLES Minimiser l’exposition aux substances toxiques S’hydrater suffisamment Optimiser la santé intestinale Augmenter ses réserves d’antioxydants Optimiser le fonctionnement mitochondrial Faciliter et équilibrer les biotransformations hépatiques Maladie de Lyme et phytothérapie MALADIE DE LYME ET DYSFONCTIONNEMENTS MITOCHONDRIAUX Origine des lésions mitochondriales Maladies liées au dysfonctionnement mitochondrial Dysfonctionnement mitochondrial et syndrome métabolique Stimuler la production mitochondriale restaure la vigueur de la jeunesse La substitution lipidique MALADIE DE LYME ET HORMONES Les problèmes d’hormones thyroïdiennes Le dysfonctionnement surrénal Le traitement substitutif par testostérone chez l’homme Les femmes et les hormones MALADIE DE LYME ET CERVEAU Les manifestations neuropsychiatriques Maladies neurodégénératives : sclérose latérale amyotrophique et maladie de Lyme MALADIE DE LYME ET TROUBLES DU SOMMEIL Apnées du sommeil : de l’intérêt des explorations du sommeil Décortiquer le mauvais sommeil Les somnifères actifs en cas de syndrome infectieux multisystémique Michelle ne dormait pas MALADIE DE LYME ET TROUBLES DU SYSTÈME NERVEUX AUTONOME Les examens complémentaires pour déceler un STOP Autres options thérapeutiques pour le STOP et les dysfonctionnements du SNA Nancy souffrait à la fois d’une maladie de Lyme et d’un syndrome de tachycardie orthostatique posturale MALADIE DE LYME ET ALLERGIES Le dépistage d’allergies alimentaires Soigner les allergies et les hypersensibilités MALADIE DE LYME ET SANTÉ GASTRO-INTESTINALE Jena souffrait d’un reflux gastro-œsophagien persistant La complexité du système gastro-intestinal La Cytokine connection Les bactéries gastro-intestinales et les neurotoxines Maintenir une flore intestinale normale L’analyse complète des selles pour évaluer la santé gastro-intestinale Pour Elizabeth, la maladie de Lyme n’était que la moitié du problème
MALADIE DE LYME ET DYSFONCTIONNEMENT HÉPATIQUE Maladie de Lyme et troubles hépatiques Autres causes d’atteinte hépatique Rechercher certaines pathologies hépatiques Une partie des symptômes de Jim était due à sa maladie du foie silencieuse Les options thérapeutiques MALADIE DE LYME ET DOULEUR Particularités des douleurs associées à la maladie de Lyme Autres causes de douleur Les douleurs de Brett ne voulaient pas s’en aller Soigner les douleurs liées au SIMS et à la maladie de Lyme Traitements classiques contre la douleur Les traitements intégratifs Avant que sa douleur ne s’en aille, Martha devait se débarrasser de sa maladie de Lyme et de ses toxines MALADIE DE LYME ET ACTIVITÉ PHYSIQUE Le SIMS et l’activité physique Mettre au point un programme d’exercices durable Les compléments alimentaires peuvent faciliter l’exercice physique Les avantages du massage MÉDITATION, PLEINE CONSCIENCE, ET MÉDECINE La méditation pour apaiser l’esprit et soigner le corps CONCLUSION : VOUS AVEZ TOUS LES ATOUTS EN MAIN PROTOCOLES THÉRAPEUTIQUES ANTI ML/SIMS Maladie de Lyme aiguë Maladie de Lyme persistante Co-infections bactériennes Parasitoses Maladie de Lyme et grossesse Infections virales Mycoses/candidoses Carences enzymatiques et nutritionnelles Dysfonctionnement mitochondrial Troubles neuropsychiatriques GLOSSAIRE DES MÉDICAMENTS IDÉES DE LECTURES BIBLIOGRAPHIE
SOIGNER LYME & LES MALADIES CHRONIQUES INEXPLIQUÉES DR RICHARD HOROWITZ Traduit de l’américain par Anne Pietrasik
Why can’t I get better? by Richard I. Horowitz, M.D. Copyright © 2013 by Richard I. Horowitz Published by arrangement with St Martin’s Press, LLC. All rights reserved Conception graphique et réalisation : Catherine Julia (Montfrin) Imprimé par France Quercy à Mercuès (France) Dépôt légal : 2e trimestre 2014 ISBN 978-2-36549-105-1 ©Thierry Souccar Éditions, 2014, Vergèze Pour la traduction et l’édition françaises http://www.thierrysouccar.com Tous droits réservés Publié avec le soutien de la Région Languedoc-Roussillon
ABRÉVIATIONS UTILISÉES DANS CET OUVRAGE ABRÉVIATION FRANÇAISE
SIGNIFICATION
ABRÉVIATION ANGLAISE
• Charge de morbidité
• BOD (burden of disease)
• Analyse complète de selles avec coproculture et coprologie fonctionnelle
• CDSA (comprehensive digestive stool analysis)
• Bilan métabolique
• CMP (comprehensive metabolic panel)
• Ehrlichioses granulocytiques humaines ou anaplasmoses humaines
• HGA
• Recherche d’anticorps par IFI
• IFA (indirect fluorescent antibody) test
• Glycoprotéine MAG
• MAG (myelin-associated glycoprotein)
• Taux d’acide méthylmalonique
• MMA
• Cathéter central à insertion périphérique
• PICC (peripherally insterted central catheter)
• Ovaires polykystiques
• PCOS (polycystic ovarian syndrome)
• Substances réagissant à l’acide thiobarbiturique
• TBARS
• ACA
• Acrodermatite chronique atrophiante
• ACA
• ADNdb
• ADN double brin
• dsDNA (double strand DNA)
• ADNsb
• ADN simple brin
• ssDNA (single strand DNA)
• AGA
• Anticorps anti-gliadine
• AGA
• AGE
• Produits de glycation avancée
• AGE (advanced glycation end products)
• AGV
• Acides gras volatils
• SCFA (small-chain fatty acids)
• AINS
• Anti-inflammatoire non stéroïdien
• NSAID
• ALAT
• Alamine amino-transférase (enzyme hépatique aussi appelée GPT)
• ALT
• AMA
• Anticorps antimitochondries
• AMA
• ANA
• Anticorps antinucléaires (ANA)
• ANA (antinuclear antibodies)
• Anti-RNP
• Anticorps anti-ribonucléoprotéines (anti-RNP)
• Anti-RNP AB’s
• Anticorps anti-TPO
• Anticorps anti-thyroperoxydase (TPO)
• Anti-TPO AB’s
• AOS
• Apnée obstructive du sommeil
• OSA
• ARE
• Élément de réponse antioxydant
• ARE (antioxidant response element)
• ARMM
• Antirhumatismaux modificateurs de la maladie
• DMARD (disease modifying antirhumatic drugs)
• ASAT
• Asparate amino-transférase (enzyme hépatique aussi appelée GOT)
• AST
• ASI
• Index d’anticorps spécifiques
• ASI
• BAV
• Bloc auriculo-ventriculaire
• AVB (atrioventricular block)
• Bb
• Borrelia burgdorferi
• Bb
• CCP
• Peptide cyclique citrulliné
• CCP (citrullinated cyclic peptide)
• CDC
• Centre d’épidémiologie américain
• CDC (center for disease control and prevention)
• CHC
• Carcinome hépatocellulaire
• CHU
• Centre Hospitalier Universitaire
• CMV
• Cytomégalovirus
• CMV
• CoQ10
• Coenzyme Q10
• CoQ10
• CRP
• Protéine C-réactive
• CRP (C-reactive protein)
• DGL
• Racine de réglisse sans glycyrrhizine
• DGL
• DICV
• Déficit immunitaire commun variable
• CVID (common variable immune deficiency)
• DIM
• DIM® (di-indolméthane)
• DIM
• DMPS
• DMPS (acide 2,3-dimercapto-1-propanesulfonique)
• DMPS
• DMSA
• DMSA (acide dimercaptosuccinique)
• DMSA
• EBV
• Virus d’Epstein-Barr
• EBV (Epstein-Barr virus)
• EDTA
• Éthylène diamine tétra-acétatique
• EDTA
• EGCG
• EGCG (épigallocatéchine gallate contenue dans le thé vert)
• EIA
• Dosage immuno-enzymatique
• EIA (enzymatic immunoassay)
• EMG
• Electromyogramme
• EMG
• EMH
• Ehrlichiose monocytique humaine
• HME (human monocytic ehrlichiosis)
• ERG
• Électrorétinogramme
• ERG
• ERO
• Espèces réactives de l’oxygène
• ROS (reactive oxygen species)
• FISH
• Technique FISH (hybridation in situ en fluorescence )
• FISH (fluorescent in situ hybridization)
• FRTT
• Fièvre récurrente transmise par les tiques
• TBRF (tick-borne recurrent fever)
• GABA
• Acide gamma-aminobutyrique
• GABA
• GOT
• Enzyme hépatique aussi appelée ASAT (Asparate amino-transférase )
• GOT (glutamate oxaloacetate transaminase)
• GPT
• Enzyme hépatique aussi appelée ALAT (Alamine amino-transférase )
• GPT (glutamo-pyruvic transaminase)
• GSE
• Extrait de pépins de pamplemousse
• GSE (grapefruit seed extract)
• HAD
• Hormone antidiurétique ou vasopressine
• ADH (antidiuretic hormone)
• HBP
• Hypertrophie bénigne de la prostate
• BPH
• HCM
• Hypersensibilité chimique multiple
• MCS
• HHV6
• Herpès virus humain de type 6
• HHV6
• HSE
• Fièvre de Sennetsu (Neorickettsia sennetsu, autrefois Ehrlichia sennetsu)
• HSE (human sennetsu ehrlichiosis)
• IBS
• Colopathie fonctionnelle débutante ou côlon irritable
• IBS (irritable bowel syndrome)
• IDSA
• Société américaine des maladies contagieuses
• IDSA (Infectious Diseases Society of America)
• IFD
• Immunofluorescence directe d’un frottis
• IFD
• IFI
• Immunofluorescence indirecte
• IFT (indirect fluorescent test)
• Indice ERMI
• ERMI (environmental relative moldiness index) • Nom d’un bilan Metametrix
• ION (individual optimal nutrition)
• IRSNa
• Inhibiteurs de la recapture de la sérotonine et de la noradrénaline
• SNRIs (serotonin– norepinephrine reuptake inhibitors)
• IRSS
• Inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine
• SSRI (selective serotonin reuptake inhibitors)
• LDN
• Naltrexone à faible dose
• LDN (low-dose naltrexone)
• LTT
• Test utilisés pour confirmer le diagnostic clinique de ML
• LTT (lymphocyte transformation test)
• MBP
• Protéine de base de la myéline
• MBP (myelin basic protein)
• MCT
• Médecine Chinoise Traditionnelle
• TCM (traditional chinese medicine)
• MICI
• Maladie inflammatoire chronique de l’intestin
• IBD (inflammatory bowel disease)
• ML
• Maladie de Lyme
• LD
• MLC
• Maladie de Lyme chronique
• CLD
• MMN
• Maladie du motoneurone
• MND
• MTHFR
• MéthylèneTétraHydroFolate Réductase : enzyme intervenant dans le métabolisme de l’homocystéine.
• MTHFR (methylenetetrahydrofolate reductase)
• MVT
• Maladie vectorielle à tiques
• TBD (tick borne disease)
• NAC
• N-acétylcystéine
• NAC
• NFS
• Numération et formule sanguine
• CBC (complete blood count)
• NGF
• Facteur de croissance nerveuse
• NGF (nerve growth factor)
• NPF
• Neuropathie des petites fibres
• SFN (small-fiber neuropathy)
• NT factor®
• Formule brevetée associant des glycérophospholipides, des probiotiques, du milieu de culture et des antioxydants
• NT factor
• OBACR
• Occlusions d’une branche de l’artère centrale de la rétine
• BRAO (branch retinal artery occlusion)
• ION
• Osp
• Protéine de surface
• Osp (outer surface protein)
• PCB
• Polychlorobiphényles (pyralènes)
• PCB (polychlorinated biphenyl)
• PCR
• Amplification en chaîne par polymérase
• PCR (polymerase chain reaction)
• PDIC
• Polyneuropathie démyélinisante inflammatoire chronique
• CIDP
• PEA
• Potentiel évoqué auditif
• AEV (auditory evoked potential)
• PEV
• Potentiel évoqué visuel
• VEP (visual evoked potential)
• PNI
• Psycho-neuro-immunologie
• PNI
• RGO
• Reflux gastro-œsophagien
• GERD (gasto-esophageal reflux disease)
• RNP
• Anti-ribonucléoprotéine
• SEP
• Sclérose en plaques
• SFC
• Syndrome de Fatigue Chronique
• SHBG
• Globuline se liant aux hormones sexuelles
• SHBG (sex-hormone binding globulin)
• SHC
• Syndrome d’hypersensibilité chimique
• MCS (multiple chemical sensitivity syndrome)
• SIBO
• Prolifération bactérienne dans l’intestin grêle
• SIBO (small intestinal bacterial overgrowth)
• SIMS
• Syndrome Infectieux MultiSystémique
• MSIDS (multisystemic infectious disease syndrome)
• SLA
• Sclérose latérale amyotrophique ou maladie de Charcot
• ALS (amyotrophic lateral sclerosis)
• SNA
• Système Nerveux Autonome
• ANS
• SNC
• Système Nerveux Central
• CNS
• SOV
• Solvants organiques volatils
• VOS (volatile organic solvents)
• SPM
• Système phagocytaire mononucléé : système immun qui englobe le foie, • MPS (mononuclear la rate et les ganglions lymphatiques, aussi appelé système phagocyte system) réticuloendothélial.
• SPM
• Syndrome prémenstruel
• MS (multiple sclerosis)
• PMS (premenstrual
syndrome) • STOP
• Syndrome de tachycardie orthostatique posturale
• POTS
• TA
• Tension artérielle
• BP (blood pressure)
• TCE
• Trichloréthylène
• TCE
• TDA
• Trouble déficitaire de l’attention
• ADD (attention deficit disorder)
• TDAH
• Trouble déficitaire de l’attention avec hyperactivité
• ADHD (attention deficit disorder with hyperactivity)
• TEMP
• Tomographie d’émission monophotonique
• SPECT (single-photon emission computed tomography)
• Tests RAST
• Tests RAST (radio-allergo-immunocaptation)
• RAST tests
• TSH
• Hormone régulant les hormones thyroïdiennes
• TSH (thyroid stimulating hormone)
• TSPT
• Troubles de stress post traumatique
• PTSD (post traumatic stress disorder)
• tTG
• Test tTG (TransGlutaminase tissulaire)
• TTG
Note de la traductrice : la babésiose est aussi appelée piroplasmose en français. D’autre part, tous les résultats d’examens de laboratoire se terminant par «émie» concernent le taux dans le sang : glycémie (taux de glucose), testostéronémie (taux de testostérone) etc. Dans cet ouvrage, toutes les notes de bas de pages ont été rédigées par la traductrice.
PRÉFACE
L
a maladie de Lyme, causée par une bactérie, Borrelia burgdorferi, et transmise par les tiques, découverte dans le nord-est des États-Unis dans les années 1970, a longtemps été considérée comme une maladie émergente rare d’incidence locorégionale.
En fait, les données scientifiques récentes montrent que cette bactérie ou des espèces voisines infectent l’homme depuis des millénaires et que la distribution géographique est mondiale. Ötzi, la momie congelée il y a 3 500 ans dans un glacier du Tyrol avait la maladie de Lyme. Les recommandations officielles pour le diagnostic et le traitement de la maladie aux États-Unis et en Europe reposent en grande partie sur des avis d’experts et ne sont pas basées sur les preuves. Elles ont peu évolué depuis 30 ans et visent à maintenir cette maladie dans son statut initial de maladie rare. Cependant en 2013, les Centers for Disease Control and Prevention (CDC) qui sont responsables de la surveillance des maladies aux États-Unis ont revu les statistiques de la maladie de Lyme à la hausse, passant de 30 000 à 300 000 cas par an aux États-Unis. Les CDC déclarent maintenant que la maladie de Lyme est devenue un terrible problème de santé publique. La difficulté majeure est l’absence de fiabilité des tests diagnostiques pour détecter Borrelia burgdorferi. Les symptômes sont souvent non spécifiques et peuvent imiter de nombreuses maladies. En l’absence de preuves, les malades sont habituellement rejetés du système de santé et n’ont pas accès à des traitements potentiellement efficaces. Il devient urgent que la communauté scientifique internationale prenne en compte les données disponibles pour mettre en place des projets de recherche permettant d’avancer et de sortir des polémiques stériles autour de cette maladie. Depuis très longtemps, le docteur Richard Horowitz se bat aux États-Unis, près de New York, pour soigner un nombre incalculable de malades mais aussi pour faire connaître la maladie, notamment auprès des autorités de santé. J’ai fait la connaissance de Richard lors d’une réunion internationale sur Lyme et nous avons été mutuellement stupéfaits, alors que nous ne nous connaissions pas et qu’un océan nous séparait, de constater que nous avions la même expérience depuis de nombreuses années. J’ai pu admirer ses grandes qualités humaines et médicales et sa profonde empathie pour la souffrance des malades. J’ai toujours plaisir à le retrouver et à échanger avec lui. C’est d’autant plus facile que Richard a fait ses études de médecine à Bruxelles et parle parfaitement le français, avec un mélange d’humour belge et américain. Cet ouvrage est une compilation de sa grande expérience et va contribuer à mieux faire connaître cette maladie qui n’est plus une maladie rare et qui, avec des maladies associées, probablement dues à d’autres microbes, est devenue un problème mondial. Professeur Christian Perronne
Chef du département de maladies infectieuses et tropicales Hôpitaux universitaires de Paris – Ile de France – Ouest Hôpital Raymond-Poincaré, Garches
INTRODUCTION « Mettez-vous à la place de la personne en face de vous. Demandez-vous toujours ce qui les rendrait heureux et soulagerait leurs souffrances. Faites preuve d’amourgentillesse et de compassion. Si vous faites cela, tout ira bien. » LAMA GENDUN RINPOCHE
J
e raconte ici mes aventures de médecin-détective lancé sur la piste des maladies chroniques et de leurs liens avec la maladie de Lyme (ML), aussi connue sous le nom de borréliose de Lyme. Cette enquête réunit des faits bien connus de la science médicale et les milliers d’indices recueillis en écoutant attentivement mes patients, en lisant la littérature relative aux maladies chroniques, ou tout simplement en me fiant à mon intuition de médecin. J’ai ainsi décelé des indices surprenants qui m’ont aidé à résoudre cette énigme médicale. Au début, comme tout bon médecin, je pensais que la borréliose de Lyme était due à la transmission par une tique d’une bactérie de la famille des spirochètes, Borrelia burgdorferi (Bb), qui se manifeste par une éruption cutanée envahissante caractéristique appelée érythème migrant, suivie d’une grande diversité de vagues symptômes dans tout le corps (systémiques). De nombreux cas répondent à une antibiothérapie rapide. Cependant, chez certaines personnes, l’infection peut s’étendre de façon disséminée et donner lieu à des manifestations psychologiques, cognitives et physiques très handicapantes. D’autres encore présentent de multiples symptômes systémiques étranges, avec des résultats d’analyses complexes. C’est sans doute à cause de cela que la maladie de Lyme a été ignorée ou banalisée par la profession médicale pendant plus d’un quart de siècle. Nombreux sont les patients qui ont déjà consulté quinze à vingt médecins lorsqu’ils franchissent la porte de mon cabinet, en quête d’une solution pour leurs symptômes rebelles. Leurs souffrances sont aggravées par la difficulté qu’ils ont d’obtenir une prise en charge appropriée par des assureurs et des médecins, souvent sceptiques. En toute innocence, ils se sont fourvoyés dans l’une des « guerres » médicales les plus virulentes que nous ayons jamais connues. L’un des camps est mené par la IDSA 1, la société américaine des maladies contagieuses, qui considère que la maladie de Lyme est facile à diagnostiquer et à traiter. L’autre camp se bat sous l’égide de la ILADS 2, la société internationale de la maladie de Lyme et pathologies associées, qui juge peu fiables les tests de dépistage sanguin de la maladie de Lyme et estime insuffisantes les antibiothérapies de 30 jours. Les patients souffrant de maladies chroniques se retrouvent donc à errer de médecin en médecin, en quête de réponses. Leur voyage démarre en général chez leur médecin de famille, ou « médecin de premier recours » comme on les appelle aujourd’hui. Le traitement conventionnel consiste à prendre des antibiotiques pendant trente jours. Si le patient revient en se plaignant qu’il ne va pas mieux, il est généralement diagnostiqué comme souffrant d’un « syndrome post-ML », d’un « syndrome de fatigue chronique » (maintenant connu sous le nom d’encéphalomyélite myalgique) ou encore d’une fibromyalgie. Le médecin leur
prescrit un antidépresseur, leur donne le numéro de téléphone du psychiatre du coin et leur conseille d’apprendre à vivre avec leurs symptômes. Si un enfant contracte la maladie de Lyme et ne parvient plus à se concentrer à l’école où que ses résultats sont en chute libre, c’est qu’il souffre sans doute d’un TDA (trouble déficitaire de l’attention), à moins qu’il n’y ait des problèmes à la maison. En général, ces enfants sont adressés à un thérapeute comportemental après qu’on leur ait prescrit de la Ritaline® (méthylphénidate) ou du Strattera® (atomoxétine). Désespérés, ces patients errent de généralistes en spécialistes et se plaignent de fatigue chronique, de fièvre, de frissons et de sueurs, de raideurs dans le cou et de maux de tête, d’une hypersensibilité à la lumière et au bruit, d’étourdissements, de troubles de la mémoire et de la concentration, de douleurs articulaires et musculaires qui migrent d’une partie du corps à une autre, de fourmillements, de sensations d’engourdissement ou de brûlure, d’angine de poitrine, de palpitations et d’essoufflement, de troubles gastrointestinaux, de problèmes urologiques rebelles à tout traitement, de troubles du sommeil ainsi que toute une série de symptômes psychiatriques, parmi lesquels figurent la dépression, l’angoisse et l’irritabilité. Sinon, ils se retrouvent affublés de différents diagnostics de maladies incurables. Et pourtant, il se pourrait bien qu’ils souffrent d’infections systémiques liées à la maladie de Lyme. Les maladies transmises par les tiques se sont répandues dans tous les pays du monde. Tous les jours, elles sont à l’origine de souffrances et de handicaps chez des millions de personnes. Il n’est guère étonnant que la maladie de Lyme et autres maladies transmises par les tiques soient surnommées « les grandes imitatrices ». La médecine moderne excelle en matière de soins de maladies aiguës telles que les angines à streptocoques, bronchites ou pneumonies aiguës, infections urinaires ou urgences chirurgicales. Cependant, en matière de maladies chroniques, le système médical manque à la fois de connaissance et de traitements. Au cours des 25 dernières années, j’ai soigné avec succès plus de 12 000 personnes ; nombre d’entre elles avaient été mal diagnostiquées ou s’étaient vues coller des étiquettes médicales simplistes. Pour moi, les patients que je soigne présentent un syndrome infectieux multisystémique ou SIMS. « Un microbe, une maladie », le postulat formulé par Louis Pasteur, pilier du diagnostic médical du XIXe siècle, n’est plus d’actualité, du moins pour les patients atteints de plusieurs pathologies chroniques. J’en suis venu à penser qu’il nous fallait un nouveau modèle pour le diagnostic et le traitement des maladies chroniques ; ce livre est conçu dans l’espoir de déclencher une mutation de la façon dont elles sont appréhendées. Quel que soit le diagnostic qu’on leur attribue, les patients « chroniques » présentent des états complexes, dont l’origine est souvent multiple : bactérienne, parasitaire, virale et fongique. Ils souffrent souvent de troubles associés : troubles immuns décelés par la présence de marqueurs auto-immuns, lourdes charges toxiques provenant de l’environnement, dysfonctionnements mitochondriaux, allergies et anomalies métaboliques fonctionnelles, troubles du sommeil et dysfonctionnements psychologiques plus ou moins latents. J’ai conçu la grille de diagnostic différentiel en 16 points présentée dans cet ouvrage comme un outil pour résoudre l’énigme posée par ces patients
chroniques aux pathologies complexes. Grâce à elle, j’espère les soigner dans leur globalité et leur apporter le soulagement qu’ils n’ont pas trouvé auparavant. Voilà plus de 25 ans que je relève avec succès le véritable défi que représente le traitement de chacun d’entre eux. J’ai partagé les résultats de mon expérience clinique et de mes travaux de recherche tant avec mes confrères, ici aux États-Unis, que lors de congrès médicaux en Europe et en Asie ; j’ai donné des visioconférences et participé à des forums écrits, et je suis aujourd’hui consultant auprès de communautés médicales et d’associations de patients dans le monde entier. À l’époque où je tentais de modéliser ma conception de la prise en charge des patients atteints de SIMS, plusieurs médecins sont venus passer une semaine, ou plus, avec moi, dans mon cabinet de Hyde Park 3. Leurs idées et celles d’autres confrères m’ont été précieuses. Aujourd’hui, tout le monde connaît l’ampleur mondiale qu’ont pris le diabète, l’obésité, les maladies cardiovasculaires, les accidents vasculaires cérébraux (AVC), les crises cardiaques et les cancers. Mais, à moins que l’un de vos proches ou vous-même ne souffriez d’une maladie de Lyme, vous ignorez sans doute que nous subissons actuellement une épidémie d’infections bactériennes, virales et parasitaires. En effet, la maladie de Lyme est aujourd’hui la principale maladie infectieuse à transmission vectorielle en Amérique du Nord, dans le nord de l’Europe et dans les régions tempérées d’Asie. La transmission vectorielle fait référence à une infection transmise par un organisme (moustique, tique…) à une personne ou à un animal, sans que cet organisme soit lui-même à l’origine de la maladie.
LES DÉBUTS D’UNE SPÉCIALISATION EN MALADIE DE LYME La première fois que j’ai entendu parler de la maladie de Lyme, c’était en 1987, par une magnifique journée de printemps alors que je terminais ma troisième année d’internat à Elmhurst, dans le quartier du Queens à New York. Nous avions été dispensés de nos tâches de l’après-midi pour pouvoir assister à une présentation de cas. Je me souviens de mon intense soulagement à l’idée de souffler un peu après une garde de 36 heures qui m’avait laissé dans un état plus proche du zombie que de l’étudiant alerte. La place à côté de mon ami Howie était libre. – Qu’est-ce que tu en penses ? Encore une maladie si rare que nous ne la rencontrerons pas une seule fois dans toute notre carrière ? Howie, dont la garde avait été tout aussi exténuante, affichait néanmoins un sourire diabolique, sans doute en mémoire des tourments infligés à un interne de première ou de seconde année. – C’est sûr que, dans le Queens, je ne risque pas d’en rencontrer des masses. Nous avions donc écouté, la main devant la bouche pour dissimuler nos bâillements. Facile à diagnostiquer et à traiter, cette étrange maladie se manifestait par une éruption caractéristique qui rappelait le centre d’une cible d’archerie et s’appelait « erythema migrans ». Vingt-sept ans plus tard, c’est hélas toujours l’idée que s’en font de nombreux professionnels de santé. Bien que ma formation médicale en Belgique au cours des sept années précédentes ait été excellente, je ne me souvenais pas avoir entendu parler de la maladie de Lyme.
Elle sévissait pourtant en Europe depuis la fin du XIXe siècle sous le nom de « acrodermatite chronique atrophiante » (éruption violacée sur la peau des mains), ou encore « syndrome de Bandsworth » lorsqu’elle était associée à une radiculite douloureuse (inflammation des nerfs). À cette époque, personne n’évoquait les manifestations neuropsychiatriques de la maladie de Lyme. Juste à la fin de mon internat à l’hôpital de Elmhurst, alors que je finissais ma spécialisation en médecine interne, l’hôpital Vassar de Poughkeepsie, dans l’État de New York, m’a proposé d’y ouvrir une consultation de médecine interne. Tout en sirotant mon café, je me suis imaginé en médecin de campagne, loin de la ville et de son tohu-bohu. Fini les cavalcades effrénées jusqu’aux urgences pour l’injection intraveineuse de Lasilix® (furosémide) au patient en insuffisance cardiaque congestive aiguë. Terminé, l’examen du patient dont l’appendice menace de rompre, alors que l’on entend les infirmiers amener dans le box voisin le brancard d’un homme blessé par balle. Non. Je serai médecin de campagne. Pas chirurgien comme mon beau-père, mais interniste. J’avais hâte de me confronter aux défis de la médecine. Je me voyais comme un détective qui enquête pour débusquer l’origine de la maladie d’un patient. Voilà. C’était ça. Je serais détective médical ! Donc, lorsque, au cours de l’hiver 1987, l’hôpital Vassar m’a demandé d’ouvrir une consultation de médecine interne dans le comté de Dutchess, je me suis dit : « Ah ! Ça va être le paradis ! » Sauf que je sais maintenant que si Adam et Eve y avaient vécu, chacun aurait oublié le nom de l’autre et ils présenteraient tous deux une paralysie faciale. J’ai toujours eu un faible pour « la campagne ». Lorsque nous vivions dans le Queens, à Rego Park, mon père et ma mère m’emmenaient tous les étés voir l’oncle Morty dans son hôtel de Ellenville. À 94 ans, Max Horowitz, mon grand-père, se levait encore à trois heures du matin pour fabriquer le pain destiné aux 300 clients de l’hôtel. Dans ce paradis des gourmands, hallahs, petits pains et babkas tous frais attendaient les heureux convives tous les matins. Lorsque j’étudiais à l’université de Northwestern, je passais tous mes étés à travailler comme serveur au Melbourne Hotel, du début juillet au premier week-end de septembre, celui de la fête du travail. J’en ai gardé de nombreux souvenirs. Je me rappelle tout particulièrement le spectacle des chasseurs en fin de saison, qui rentraient chez eux avec leurs carcasses de biche ou de cerf attachées sur la galerie de leur voiture. Je me disais « pauvres biches ». Mon sentiment à l’égard des cervidés a bien changé depuis mon adolescence. Maintenant, comme les autres « campagnards », j’aimerais bien qu’ils s’écartent de nos jardins et pare-chocs. En fait, ce sont surtout les tiques occidentales à pattes noires qu’ils hébergent et qui transmettent la maladie de Lyme, qui sont devenues mon cheval de bataille. Le plus drôle, c’est que lorsque j’ai décidé de m’installer à la campagne, je ne savais pas que le comté de Dutchess avait la plus forte incidence de maladie de Lyme de tout l’État de New York. Quand j’ai ouvert mon premier cabinet, je travaillais déjà depuis plusieurs mois aux urgences de l’hôpital Vassar Brothers. Bien que ma clientèle s’accroisse lentement grâce aux confrères et aux soins en urgence, je me suis dit qu’il serait préférable de faire paraître une petite annonce dans la presse locale, le journal de Hyde Park. Mon annonce disait : « Hyde Park accueille avec plaisir l’arrivée du Dr. Richard Horowitz, spécialiste
diplômé en médecine interne. Tous régimes d’assurance maladie acceptés ». Le premier à réagir a été un confrère urologue qui m’a coincé dans le salon des médecins de l’hôpital : – Qui vous a accueilli avec plaisir ? Sûrement pas moi ! Un peu désarçonné, je me suis demandé, simultanément, si c’était un signe du destin ? S’il fallait que je demande aux personnes qui m’appréciaient qu’elles le contactent ? Ou s’il s’agissait d’un étrange rite d’initiation « spéciale cambrousse », par lequel, si j’y survivais, je serais ensuite apte à exercer n’importe où ? Même si l’urologue de Hyde Park est devenu un peu moins froid par la suite, notre relation n’a jamais atteint le point où je le laisserais examiner ma prostate. Nous n’avons jamais été proches. Par chance, la surveillante infirmière des urgences de l’hôpital Vassar s’est chargée de ma publicité et, grâce à Roseanne, ma clientèle s’est vite élargie. En l’espace de trois ans, presque 3 000 patients sont venus me consulter en tant qu’interniste. En fait, rapidement débordé, j’ai dû cesser de prendre des nouveaux patients, sauf s’ils souffraient d’une maladie de Lyme. Mon premier cabinet mesurait environ 158 m2 et se situait Route 9, à plusieurs kilomètres de Poughkeepsie et à moins de dix minutes de l’hôpital régional. Hyde Park est réputé pour ses liens historiques avec les Roosevelt et les Vanderbilt. Pendant la Seconde Guerre mondiale, une grande partie des célèbres « discussions au coin du feu » de Franklin Roosevelt étaient enregistrées dans sa propriété de Hyde Park. La bibliothèque Franklin Roosevelt contient d’extraordinaires souvenirs de cette époque difficile de l’histoire américaine où il avait trouvé le courage de surmonter d’énormes obstacles. Je passais souvent en voiture devant le panneau indicateur de la propriété Roosevelt et, à chaque ruée vers les urgences, je lisais : « La seule chose dont il faut avoir peur, c’est de la peur elle-même. » Ah bon ? Roosevelt n’a sans doute jamais eu affaire aux compagnies d’assurance maladie ou aux gestionnaires d’établissements médicaux. Il ne s’est probablement jamais promené dans les bois de Hyde Park. Après avoir soigné tant de patients si gravement malades, c’est à peine si j’ose traverser ma propre pelouse ! Lorsque j’ai commencé à exercer, les pathologies que je soignais étaient assez typiques pour un interniste : diabète, surpoids, hypertension instable, accident vasculaire cérébral, et insuffisance cardiaque congestive. Je traitais et je conseillais des patients qui avalaient pizzas, hamburgers et autres plats de restauration rapide en dépit de leur taux élevé de cholestérol, d’autres qui continuaient à fumer malgré leur asthme et leur broncho-pneumopathie chronique obstructive (BPCO) ainsi que les infections respiratoires ou urinaires qui sont le pain quotidien de l’interniste. En gros, je voyais 30 à 35 patients par jour. Certains consultaient dans un but préventif, d’autres se moquaient bien de la prévention. Le rythme de travail était d’autant plus épuisant que je n’avais pas d’infirmière pour m’assister. En plus, le soir, je téléphonais aux patients pour leur communiquer leurs résultats d’examen. La clientèle du Centre des arts thérapeutiques de Hudson Valley ne cessant de s’étendre, j’ai dû embaucher du personnel. Le premier assistant4 que j’ai recruté était brillant. L’ennui, c’est que je ne comprenais pas un traître mot de ce qu’il racontait.
C’était pourtant de l’anglais et ses phrases étaient truffées de termes médicaux, mais, je ne sais pourquoi, cela n’avait aucun sens. Ses discours ressemblaient à un long fleuve d’aphorismes Zen. À chaque fois que je l’écoutais, le vide absolu se faisait dans mon esprit. Nous l’avons donc remercié pour cause de discours inintelligible. Le suivant, également très intelligent et compétent, avait malheureusement une écriture totalement illisible dont les rangées de bâtonnets inclinés auraient donné la migraine et des cheveux blancs à un expert en hiéroglyphes. Quand il n’était pas là, impossible de savoir ce qu’il avait noté dans ses dossiers. C’est ainsi que plusieurs assistants se sont succédé dans mon cabinet au cours des premières années. Dieu merci, après deux ans de quête infructueuse, un certain Dylan a répondu à l’annonce que j’avais fait paraître dans le New York Times. En fin d’études à l’école d’assistants de Pennsylvanie, il avait soif d’apprendre et dégageait une énergie confiante et lumineuse. Je lui ai assuré que je lui apprendrais tout ce que je connaissais en médecine interne. Il semblait très intéressé, mais, avant de le recruter, j’avais une question à lui poser : – Juste une question Dylan : je soigne beaucoup de cas de maladie de Lyme ici. Sauver le monde, ça vous branche ? Sans un instant d’hésitation, Dylan s’est tourné vers moi et m’a répondu : – Pas de problème Dr Horowitz. Si vous êtes Batman, je serai votre Robin. Je l’ai immédiatement embauché. Lauren nous a rejoints très tôt. Intelligente et dure-à-cuire, elle possédait une résistance toute militaire. Membre des troupes de réserve, elle était capable de tout lâcher pour effectuer 20 pompes à tout moment si on le lui demandait ce que, bien entendu, je n’ai jamais fait. Cependant, je me suis dit qu’une personne qui courait 8 kilomètres tous les matins et supportait la discipline de l’armée devrait pouvoir tenir le coup dans le camp de survie Horowitz. Peu y avaient réussi, mais elle semblait prometteuse. Je n’ai jamais regretté ma décision. C’était une véritable bénédiction pour le cabinet. Lauren et Dylan étaient bien installés dans leurs fonctions et tout allait pour le mieux quand Dylan m’a appelé un jour, l’air très embêté. – Toubib, j’ai une mauvaise nouvelle pour vous. Je me suis préparé au pire car je n’avais jamais vu Dylan aussi triste. – Angie vient d’être embauchée par l’université de Yale comme chercheur post-doctoral en psychologie et nous devons déménager. – Quand devez-vous partir ? – Dans deux mois. Je suis vraiment désolé. J’étais si bien ici. Je lui ai signifié que je l’avais compris, lui ai fait tous mes vœux de bonheur et suis sorti, atterré. Comment diable allais-je parvenir à soigner les patients de Dylan en plus des miens ? C’était impossible. Je n’avais ni le temps, ni l’énergie nécessaires pour prendre en charge des cas aussi complexes. J’ai téléphoné à mon guide spirituel, Lama Norhla Rinpoche, pour lui demander conseil et il m’a invité à venir partager sa soupe au Monastère. Ce n’était pas la première fois que je discutais avec lui autour d’un bol de la
délicieuse soupe qu’il concoctait avec différents restes. J’ai donc sauté dans ma voiture pour aller au Monastère. Je lui ai raconté mes malheurs et il m’a répondu : « Je crois que John Fallon serait parfait pour votre centre. » John était un disciple de longue date du Lama. Très intelligent, il était extrêmement dévoué au lama. L’ennui, c’est que je lui avais déjà demandé à plusieurs reprises de se joindre à nous mais il avait toujours refusé. Quand j’en ai informé Lama Rinpoche, il m’a répondu : – Oh ! Choses différentes maintenant. Je croire très bien lui venir. Manifestement, John s’apprêtait à recevoir une offre à la Tibétaine qu’il ne pourrait pas refuser. – Merci beaucoup Lama. Je vous suis très reconnaissant de votre aide. Un mois plus tard, John nous a rejoints après avoir démissionné de son poste d’urologue à l’hôpital Beth Israël de New York. Au bout de quelques jours, je lui ai demandé ses premières impressions. – Moins de touchers rectaux. – Il vous faudra quand même en pratiquer un de temps en temps, ici au bureau… Cependant, j’aimerais bien que vous respectiez notre protocole. En effet, je tiens beaucoup à ce que l’on dise à tout patient devant subir un toucher rectal : « N’ayez crainte. Si vous trouvez cela agréable, je vous jure que je ne le dirai à personne. » Devant la mine perplexe de John, j’ai compris que son éducation en matière d’humour risquait de s’avérer laborieuse. Heureusement, il s’est habitué à mes blagues et son sens de l’humour s’est épanoui. Nous sommes même devenus amis et restons parfois tard le soir à discuter de nos patients. Sa voiture est presque toujours encore au parking à 22 h, pendant que John continue à prendre soin de ses patients au téléphone. J’ai beaucoup de chance de compter John et Lauren dans mon équipe. Ma vie professionnelle s’est encore compliquée lorsque j’ai accepté le poste de directeur médical adjoint de l’hôpital Vassar Brothers. Je faisais déjà partie du personnel médical de l’hôpital St Francis depuis plusieurs années en qualité de directeur du comité d’assurance qualité et de membre du comité sur les médecines alternatives. Mes tournées étaient donc ponctuées de réunions de comité et de rendez-vous avec des confrères pendant lesquels nous débattions des cas et des problèmes rencontrés dans notre pratique. C’est à cette époque que mes confrères et la société médicale m’ont convaincus de me joindre au HMO5 , le nouveau réseau de gestion des soins de santé qui s’installait dans notre région. On m’avait dit que ce serait convivial, tant pour les médecins que pour les patients. Bien entendu, ce qu’ils voulaient dire c’était que ce serait convivial pour les médecins membres de leur administration et hostile pour les autres. Ainsi, avec environ 3 000 patients de médecine interne, j’ai décidé qu’il était temps d’alléger ma charge de travail et j’ai rejoint la branche locale de ce HMO en me disant que mes confrères, plus âgés, plus sages et plus expérimentés que moi, devaient certainement savoir ce qui était bon pour moi ! En fait, je m’aperçois aujourd’hui que ces chers confrères plus vieux et plus sages que moi ne l’étaient pas tant que cela. En ce début des années 90, aucun d’entre nous n’imaginait la direction que prendrait la médecine, vers ces temps où les décisions concernant nos patients seraient prises par
des administrateurs suivant à la lettre des directives médicales et financières bien précises. Devant le nombre de confrères qui s’écroulaient, victimes de surmenage, il m’a paru sage de lever le pied. C’est à la même époque que j’ai commencé à constater sur mes patients la présence croissante d’érythème migrant, le signe caractéristique de la maladie de Lyme. Je ne m’étais pas rendu compte que mon cabinet se situait dans l’une des régions des États-Unis à la plus forte population de tiques, où la maladie de Lyme était la plus endémique. Personne n’en parle dans les brochures touristiques. Les habitants, eux, savent bien à présent qu’il faut faire attention aux tiques après une balade dans les bois ou lorsque l’on marche dans les hautes herbes au printemps, en été ou à l’automne. Au début des années 90, il n’était pas rare de voir arriver un patient avec une morsure de tique et cette éruption cutanée caractéristique. J’avais toujours ma pince à portée de main. Tout en leur montrant comment on doit retirer une tique, j’en profitais pour leur signaler que la vaseline, l’essence ou les différents produits à base de pétrole utilisés n’étaient ni efficaces, ni appropriés. À l’époque, on ne traitait pas les morsures de tiques. L’approche préconisée tenait en deux mots : « attendons voir ». En fait, comme je l’ai appris plus tard, cela signifiait surtout attendons voir jusqu’à quel point le patient sera malade et espérons alors que notre traitement « marchera » ! Lorsque j’ai constaté que certains patients ne répondaient pas au traitement au-delà d’un certain temps d’« attendons voir », je me suis dit qu’une approche prophylactique serait sans doute préférable, d’autant que je m’étais aperçu peu de temps auparavant qu’une antibiothérapie de 10 à 25 jours de doxycycline était efficace chez presque tous les patients porteurs d’un érythème migrant. Je ne savais pas pourquoi certains n’y répondaient pas et me demandais également que faire des patients aux symptômes évocateurs de maladie de Lyme, mais sans érythème migrant ? Cela m’intriguait et je l’ai vécu comme un défi. Je voulais que tous mes patients aillent mieux. Pourquoi seulement 75 % d’entre eux guérissaient-ils alors que les 25 % restants présentaient un étrange ensemble de symptômes chroniques : fatigue, courbatures et douleurs circulant dans différentes parties du corps, fourmillements et engourdissements, difficultés de mémoire et de concentration ainsi qu’une foultitude d’autres symptômes inexplicables ? Les confrères à qui j’ai posé la question ne semblaient pas avoir de réponse à offrir. J’ai épluché la littérature scientifique, mais n’ai réussi à trouver que quelques articles démontrant l’inefficacité de l’antibiothérapie habituelle et d’autres, encore plus rares, évoquant la possible persistance du spirochète de Lyme, bactérie spiralée ressemblant à celle de la syphilis. Je me suis aperçu que le fait de retraiter mes patients par antibiotiques les aidait à retrouver le niveau de fonctionnement qu’ils avaient eu avant de tomber malade. Tous leurs symptômes s’amélioraient tant qu’ils prenaient les médicaments : fatigue, maux de tête, douleurs musculaires, fourmillements et engourdissements, troubles de la concentration et de la mémoire. Cependant tous réapparaissaient rapidement dès l’arrêt de l’antibiothérapie. C’est à ce moment qu’une patiente a tout changé pour moi. Eve était venue en premier rendez-vous en 1992. Cette femme intelligente et active souhaitait ardemment
être guérie d’une paralysie faciale, l’une des manifestations d’une maladie de Lyme dans le système nerveux central. Le neurologue qu’elle avait consulté avait prescrit un test ELISA (recherche d’anticorps dirigés contre Borrelia) dont les résultats avaient été négatifs. Ayant lu que le Western Blot était souvent plus sensible et spécifique que le test ELISA en ce qui concerne le principal responsable de la maladie de Lyme, Borrelia burgdorferi (Bb), je lui en ai prescrit un qui est revenu positif : elle souffrait bien d’une maladie de Lyme. Ses symptômes se sont améliorés avec l’antibiothérapie, mais il restait des traces de paralysie faciale. En règle générale, 95 % de ces paralysies s’améliorent avec le temps. Faisait-elle partie des 5 % chez qui les symptômes persistent ? Ou est-ce que ses symptômes signaient une infection en cours, que la première cure d’antibiotiques n’aurait pas enrayée ? Ève m’a poussé à assister à une conférence dédiée à la maladie de Lyme, financée par l a Lyme Disease Foundation de Boston. Ce congrès a changé le cours de ma vie professionnelle. Ce n’est qu’à la toute fin de la dernière session du second jour que j’ai finalement obtenu des réponses à mes dilemmes cliniques. J’étais comme un homme affamé à qui l’on donne enfin un morceau à manger, à la fin du festin. C’est avec avidité que j’ai écouté les présentations des docteurs Sam Donta, spécialiste en maladies infectieuses à l’université de Boston, Kenneth Leigner, médecin interniste à Armonk, État de New York, et Joseph Burrascano, médecin interniste à South Hampton, Long Island. Chacun a examiné les différentes manifestations cliniques de la maladie de Lyme et débattu de l’intérêt d’antibiothérapies plus longues. Je suis revenu de cette conférence armé de réponses aux questions que je me posais et de nouvelles armes contre la maladie de Lyme. Dès mon retour, je me suis empressé de mettre en œuvre ces nouvelles idées. L’augmentation des doses d’antibiotiques et/ou l’allongement de la durée du traitement faisaient manifestement le plus grand bien à une partie de mes patients dont la fatigue, les maux de tête, les fibromyalgies et les symptômes cognitifs se sont atténués. Cependant, dès que j’arrêtais les antibiotiques, les symptômes reprenaient. Mes maîtres m’ont appris qu’il fallait rechercher la source des problèmes et traiter ses patients comme on aimerait l’être soi-même. Ce qui est sûr, c’est que, d’une part, je n’aurais pas voulu souffrir des mêmes symptômes et, d’autre part, mon serment d’Hippocrate exigeait que je les serve au mieux de mes capacités. Le comté de Dutchess est aussi le pays d’IBM. Quand un IBMiste oublie ses raccourcis clavier ou certaines fonctions élémentaires de programmation et que tout s’arrange après une antibiothérapie, cela se remarque. Ainsi, j’ai simplement aidé ces malades ; le bouche à oreille a fait le reste et répandu la nouvelle que le Dr Horowitz possédait de nouveaux traitements pour soigner les malades du comté de Dutchess. J’ai alors décidé de fermer mes consultations en médecine interne à tout patient qui ne présentait pas les signes d’une maladie de Lyme, non résolue par les traitements conventionnels. J’étais très excité par mes résultats et je mourrais d’envie de les partager avec mes confrères, tous confrontés aux mêmes dilemmes. J’ai donc fait ce que tout praticien naïf et plein de bonnes intentions ferait, j’ai transmis mes informations au HMO local et accepté les invitations à présenter mon travail dans différents congrès. J’ai été très
étonné lorsque le HMO n’a pas partagé mon enthousiasme, allant même jusqu’à me dire que la maladie de Lyme chronique n’existait pas ! Ils m’ont rappelé l’existence de leurs directives thérapeutiques pour la maladie de Lyme, directives revues et approuvées par un spécialiste local en maladies infectieuses. En dépit du fait que les certificats de formation continue obtenus après avoir assisté à ces conférences étaient agréés par l’État de New York, ils ont persisté à dire que seuls leurs protocoles thérapeutiques étaient valables pour diagnostiquer et soigner cette maladie. Plus les patients me consultaient avec leurs symptômes de maladie de Lyme non résolus, plus je cochais la case « maladie de Lyme » sur mes formulaires d’assurance maladie, et plus notre dialogue s’envenimait. La guerre de Lyme avait commencé. Heureusement, les patients ne sont pas restés passifs pendant cette bataille. La Lyme Disease Association (LDA), la Lyme Disease Foundation (LDF), la Lyme Research Alliance (autrefois connue sous le nom de Time for Lyme), la Tick Borne Disease Alliance (TBDA), et bien d’autres groupes de soutien aux personnes souffrant de maladie de Lyme se sont joints à moi dans cette controverse. S’il y a une chose que j’ai comprise en regardant tous ces groupes se former, c’est qu’il ne faut pas énerver les parents. Lorsque le système de santé leur dit froidement qu’il n’y a rien à faire et que leur enfant doit souffrir éternellement, leurs forces sont décuplées et leur pouvoir devient redoutable. Ces groupes militants ont porté leurs histoires auprès des politiciens favorables à leur cause. Joel Miller, un républicain du comté de Dutchess (New York) et Nettie Meyerson, une démocrate du Queens, se sont battus pour les droits des patients dans l’État de New York. Il y a plusieurs années, George Pataki, alors Gouverneur de l’État de New York s’était lancé dans la bataille et avait fait envoyer une note de service aux services de santé de l’État de New York et aux branches locales du Conseil de l’Ordre afin qu’ils cessent de poursuivre les médecins qui choisissaient d’utiliser une antibiothérapie plus longue pour lutter contre la maladie de Lyme. Le Procureur général pour le Connecticut, l’Honorable Richard Blumenthal (aujourd’hui sénateur pour le Connecticut) a reçu des assureurs en audience pour examiner des allégations de pratiques incorrectes de la part des assureurs, notamment en matière de violation des lois antitrust. Il a ensuite menacé la IDSA (Infectious Diseases Society of America) de poursuites et contesté leurs directives restrictives sur la maladie de Lyme. Cela a constitué un événement phare dans le monde politique américain. De toute l’histoire des États-Unis, jamais politicien n’avait remis en question les directives établies par une société de lutte contre les maladies infectieuses. Une telle action demandait un grand courage, un sens aigu de l’éthique et une forte capacité à écouter attentivement et sans préjugé les personnes qu’il représentait. Le sénateur Blumenthal reste un exemple de politicien courageux, à l’écoute des citoyens. D’autres politiciens, notamment Chris Gibson, membre du Congrès américain, également attentifs aux souffrances de leurs électeurs ont organisé des auditions publiques auprès du Congrès de New York pour tenter de trouver des solutions à cette épidémie en pleine expansion. Le Congrès a entendu l’appel du peuple. Les médecins ont aussi été obligés de rentrer dans la bataille. Nombre d’entre eux se sont vus exclure du champ médical, ont perdu leur autorisation d’exercer ou ont été contraints à se placer sous la surveillance d’autres médecins. Ils ont dépensé des fortunes
pour conserver leur autorisation d’exercer la médecine. Le docteur Joseph Burrascano est allé au Congrès témoigner des manifestations cliniques de la maladie de Lyme non résolue chez ses propres patients. Le Dr Steven Phillips a témoigné lors d’une audience d’assureurs dans le Connecticut il y a des années de ça. J’ai moi-même accompagné le docteur Kenneth Leigner et plusieurs autres à Rhode Island pour témoigner à une audience du Congrès des effets de ces infections sur nos patients. Nous y avons raconté les distances considérables que ces patients devaient parcourir pour venir nous consulter parce qu’ils ne parvenaient pas à se faire soigner correctement dans leur État. En conséquence, de nombreux États, dont Rhode Island et la Californie, ont reconnus officiellement que l’utilisation d’antibiothérapie au long cours pour soigner la maladie de Lyme ne constituait pas une faute médicale. Tous les jours, j’écoute attentivement les histoires de mes patients. J’entends aussi des médecins qui n’osent pas soigner leurs patients atteints de maladie de Lyme, de crainte de perdre leur autorisation d’exercer ! L’inefficacité des analyses et des prises en charge proposées par la médecine moderne ne permettent pas d’offrir une réponse satisfaisante aux patients. S’ils n’appréhendent pas les maladies chroniques autrement, si les «poly-tiques» à l’origine de l’épidémie actuelle ne changent pas de modèle, les souffrances se poursuivront. Je pense que la reconnaissance de l’existence du syndrome infectieux multisystémique, ou SIMS, pourrait être le chaînon manquant pour en finir avec cette guerre une bonne fois pour toutes. Ce serait une solution à base élargie pour la maladie de Lyme et ses co-infections qui permettrait d’établir un pont entre deux groupes concurrents (l’IDSA et l’ILADS) afin qu’ils se mettent d’accord et permettent enfin aux patients d’accéder aux soins dont ils ont tant besoin. Mon modèle suppose que toute personne impliquée dans la controverse autour de la maladie de Lyme a en partie raison. J’essaye d’ouvrir une porte pour aller de l’avant au lieu d’avancer vers encore une autre position de division et de confrontation. Dans mon modèle, l’IDSA a raison sur certains points et l’ILADS sur d’autres. C’est en 1998 que m’est venue la notion d’un syndrome infectieux multisystémique (SIMS), quand j’ai commencé à présenter mes résultats cliniques aux conférences nationales et internationales. Les pièces du puzzle se sont mises en place petit à petit. D’abord un indice m’a permis d’identifier une babésiose chez mes patients, (Babesia microti). Cette maladie proche du paludisme expliquerait la fièvre, les frissons, les sueurs jour et nuit, ainsi que certains symptômes résistants. Des patients confinés en fauteuil roulant parvenaient à se lever et à marcher après traitement ! Puis j’ai découvert les symptômes de la maladie des griffes du chat, ou bartonellose, qui pouvait expliquer les symptômes neurologiques rebelles, les neuropathies résistantes au traitement ou les encéphalopathies, par exemple. Ensuite, j’ai découvert que le micro-organisme impliqué dans le syndrome du Golfe, Mycoplasma fermentans, pouvait contribuer à certains symptômes de type SLA (sclérose latérale amyotrophique) chez mes patients. Enfin, j’ai récemment réussi à relier les intoxications aux métaux lourds (mercure, plomb, arsenic, cadmium et aluminium) aux symptômes concomitants des patients. Cela m’a amené à commencer mon traitement par du glutathion intraveineux avec une chélation par voie
orale afin de détoxifier les patients résistants au traitement. Les résultats ont été étonnants, et c’est pourquoi j’ai écrit ce livre. Sachez que non seulement vos symptômes existent vraiment et sont identifiables, mais qu’en plus, ils sont traitables.
MODE D’EMPLOI Ce livre réunit tout ce que j’ai découvert sur la maladie de Lyme et les maladies chroniques en général. J’espère que sa lecture vous aidera à identifier vos propres symptômes et que vous tirerez un maximum de connaissances des nombreux cas présentés, afin de travailler avec votre médecin vers le meilleur résultat thérapeutique possible. Mon protocole thérapeutique repose sur ma grille de diagnostic différentiel en 16 points que j’ai utilisée pour résoudre les mystères de la maladie de Lyme. Il m’a permis de soigner et de soulager enfin des patients atteints de plusieurs maladies chroniques complexes. Je pense que mes patients atteints de maladie de Lyme souffrent aussi d’autres maladies. C’est pour cela que j’appelle leur état : « syndrome infectieux multisystémique », ou SIMS. Grâce au guide diagnostique, je me suis aperçu que, quel que soit le diagnostic qui leur avait été attribué, certains patients chroniques avaient plusieurs causes à leur état et présentaient souvent des infections bactériennes, parasitaires, virales et fongiques simultanées, ainsi qu’une altération de leur fonctions immunes, de lourdes intoxications environnementales, des dysfonctionnements hormonaux et mitochondriaux, des allergies, des troubles du sommeil et des troubles psychologiques sous-jacents. En rédigeant ce livre, j’avais quatre objectifs. Je souhaitais tout d’abord montrer le chemin parcouru par un médecin détective centré sur le devenir de ses patients avant d’en arriver à ma conception actuelle de la maladie de Lyme. Ensuite, j’espérais faire comprendre aux lecteurs les forces, et les faiblesses dangereuses, du système médical actuel en proposant mon système de diagnostic différentiel pour le syndrome infectieux multisystémique (SIMS) comme un plan conséquent pour enrayer l’actuelle extension de la maladie de Lyme et alléger la charge que font peser les maladies chroniques sur le pays. Ceci devrait séduire les industriels de l’assurance. Mon troisième but était que mon concept de SIMS permette d’établir un pont entre les deux points de vue thérapeutiques et diagnostics opposés. Enfin, j’aimerais que mon modèle de syndrome infectieux multisystémique contribue à l’effort mondial de lutte contre les maladies transmises par les tiques et serve de guide à tous ceux qui cherchent des solutions aux maladies chroniques persistantes. Faisons passer la médecine au XXIe siècle. 1 Acronyme anglais de Infectious Diseases Society of America 2 Acronyme anglais de International Lyme and Associated Diseases Society 3 Il ne s’agit du célèbre parc de Londres, mais de la ville au nord-est des États-Unis, dans le comté de Dutchess (État de New York).
4 Le nom anglais du poste est « physician assistant » ou « PA », mais il n’existe pas d’équivalent en France. Ces personnes exercent la médecine sous la direction de médecins ou de chirurgiens, généralement au sein d’une équipe. Ils demandent aux patients leurs antécédents médicaux, prescrivent et interprètent des examens de laboratoire et des radiographies, posent des diagnostics et prescrivent des traitements. Ils sont également capables de soigner ou recoudre des plaies légères, poser une attelle ou un plâtre. Ces assistants notent les progrès des patients dans leur dossier, leur prodiguent explications et conseils, prescrivent et mettent en œuvre les traitements. 5 Acronyme anglais de Health Maintenance Organization (organisation pour le maintien en bonne santé).
PREMIÈRE PARTIE
LES MYSTÈRES DE LA MALADIE DE LYME
CHAPITRE 1
DÉTECTER UNE MALADIE DE LYME PETITE HISTOIRE DE LA MÉDECINE 2000 av. J.-C. : « Tiens, mange cette racine. Elle te rendra fort. » 1080 av. J.-C. : « Jette cette racine et bois cette potion, c’est meilleur pour toi. » 250 ap. J.-C : « Débarrasse-toi de cette potion qui te fait du mal et prends plutôt cette plante. » 1910 : « Jette cette plante et essaye cette potion ; elle est plus efficace. » 1950 : « Cette potion te fait du mal, prend plutôt ce médicament. » 2000 : « Ce médicament n’est plus efficace ; tiens, mange cette racine. »
C
omment se peut-il qu’une épidémie de maladies transmises par les tiques puisse s’étendre sans que personne ne lui accorde l’attention qu’elle mérite ? Comment se fait-il qu’à travers tous les États-Unis, tant de patients soient encore privés de soin ? Pour trouver réponse à ces questions, il faut comprendre toutes les subtilités de la maladie de Lyme (ML) et les concepts fondamentaux du paradigme dans le cadre duquel travaillent les médecins et les autorités de santé. Considérons d’abord l’histoire de la médecine. Elle ne cesse de croître et nous savons tous qu’il ne faut que 5 à 10 ans pour que la moitié de ce que nous avons appris à la Faculté de médecine soit démontré comme faux. Les exemples des bienfaits indéniables de la médecine moderne abondent : antibiotiques et autres médicaments, nouveaux appareils d’analyse et tests diagnostiques, chirurgies révolutionnaires et programmes de santé publique, tous ont rallongé l’espérance de vie de l’Homme (surtout pendant la petite enfance) et amélioré le bien-être de la population générale. Cependant, sur la route vers la médecine moderne, certains pionniers ont été laissés sur le bord, d’autres ont même été qualifiés d’hérétiques. Ainsi, le Dr Ignaz Philipp Semmelweis, médecin hongrois du XIXe siècle plus connu pour ses protocoles d’antisepsie et surnommé « le sauveur des mères », a effectué une découverte scientifique capitale le jour où il s’est aperçu que lorsqu’il se lavait les mains avant d’accoucher les femmes, les décès par fièvre puerpérale (infection bactérienne) étaient bien moins nombreux que dans un autre service du même hôpital où le taux de mortalité était de 10 %. Lorsqu’il a fait part de son observation à ses confrères, ces derniers l’ont d’abord tourné en ridicule. Puis, au fur et à mesure que leurs patientes les fuyaient pour se faire accoucher par le Dr Semmelweis, ils l’ont mis au ban de la profession médicale avant de le faire interner dans un asile où, ironiquement, il est mort de septicémie 14 jours après son admission, sans doute après avoir été sévèrement battu par ses gardiens. Autre médecin raillé abondamment pour sa découverte, Louis Pasteur a dû attendre
des années que ses travaux sur l’origine microbienne des maladies soient reconnus et acceptés. Quant aux médecins australiens Barry Marshall et Robin Warren, il s’est écoulé presque vingt ans avant que l’on cesse d’ignorer leur découverte de Helicobacter pylori, la bactérie responsable de gastrites et d’ulcères gastriques. À l’époque, il était estimé que les ulcères étaient uniquement dus au stress et qu’aucun microbe ne pouvait survivre dans un environnement aussi acide que l’estomac ; le traitement habituel se résumait à pratiquer une gastrectomie et à conseiller aux patients de boire beaucoup de lait, méthode fort éloignée de l’antibiothérapie proposée par nos deux pionniers, mais qui a prévalu pendant encore deux décennies. Les exemples abondent pour qui veut explorer l’histoire de la médecine. Beaucoup de ces pionniers ont repoussé les frontières de la médecine jusqu’à ce que l’appréhension du processus pathologique en question soit transformée. Les choses ont-elles changé aujourd’hui ? Avons-nous appris à écouter ceux qui remettent en question l’establishment médical ? Certainement pas en ce qui concerne la maladie de Lyme et les pathologies concomitantes transmises par les tiques. La découverte de la cause de la maladie de Lyme remonte au milieu des années soixante-dix, lorsqu’une femme portraitiste, Polly Murray, a remarqué dans la ville de Lyme (Connecticut) une flambée de « polyarthrite rhumatoïde juvénile », maladie dont ses enfants et elle-même avaient souffert quelques décennies plus tôt. Le Dr Alan Steere, rhumatologue à l’université de Yale, a été appelé pour étudier cette épidémie, ainsi que des chercheurs du National Institute of Health et des laboratoires Rocky Mountain. Le Dr Willie Burgdorfer, un des chercheurs du laboratoire Rocky Mountain, a isolé un spirochète au microscope, bactérie en forme de spire qui ressemble à l’agent responsable de la syphilis. Finalement reconnu comme responsable de la maladie, ce spirochète a été baptisé « Borrelia burgdorferi (Bb) » d’après son découvreur, le Dr Burgdorfer. Quant à la maladie provoquée, elle a pris le nom de la ville du Connecticut où elle a d’abord été identifiée, la ville de Lyme. Au début, le Dr Allan Steere a étudié pour le Département de la santé du Connecticut des patients qui présentaient des éruptions cutanées et des signes rhumatologiques, notamment des articulations chaudes et gonflées. Bien qu’ils aient d’autres signes de la maladie, le Dr Steere s’est surtout concentré sur les composantes rhumatologiques de la nouvelle pathologie. Grâce à lui, il a été établi que beaucoup de ces patients étaient tombés malades pendant l’été ou en début de printemps et qu’ils vivaient généralement au sein de groupes géographiques situés en zones rurales. C’est lui qui a reconnu que, loin d’être victimes de légers troubles psychologiques, ces patients étaient gravement malades. Mais, quelle était la cause de cette mystérieuse affection ? En fait, elle n’avait rien de neuf. La maladie de Lyme est signalée en Europe depuis la fin du XIXe siècle, sous forme d’éruptions sur la peau des mains. Le docteur Alfred Buchwald parle de lésions cutanées. Ces mêmes lésions sont décrites à travers l’Europe et les États-Unis dans le cadre d’une pathologie dénommée « syndrome de Bannwarth » qui associe une radiculite6, une paralysie faciale et une méningite7.
L’éruption cutanée en forme d’anneau décrite par le docteur Arvid Afzelius a été baptisée erythema chronicum migrans. Cependant, en 1990, le dermatologue Bernard Berger s’est rendu compte qu’elle n’était pas toujours présente et l’a rebaptisée « érythème migrant » (EM). Dix ans plus tard, établissant un lien entre cet érythème migrant et certains troubles articulaires, Afzelius s’est dit que cela devait avoir un rapport avec les morsures de tiques. En 1922, des troubles neurologiques ont été ajoutés au tableau et, en 1930, des troubles psychiatriques. Quelques années plus tard, des problèmes arthritiques se sont rajoutés à la liste. En 1965, le docteur Sidney Robbin, interniste en semi-retraite vivant à Montauk, dans l’État de New York, a décrit des éruptions en forme de cercles concentriques qui répondaient à la pénicilline. À la même époque, il a décrit une forme particulière d’arthrose qu’il a appelé « genou de Montauk ». Cinq années plus tard, le docteur Rudolph Scrimenti, dermatologue dans le Wisconsin, a publié le premier rapport concernant erythema chronicum migrans aux États-Unis. Comme le docteur Robbin, il signalait une bonne réponse à la pénicilline. Toutefois, personne n’avait réuni toutes les pièces du puzzle. De même, aucun lien n’avait été établi entre tous ces symptômes et les patients du Connecticut qui étaient si malades. S’agissait-il d’une nouvelle pathologie, et dans ce cas d’où venait-elle et comment devait-elle être soignée ? En 1977, le docteur Steere signalait toute une flopée de nouveaux signes étranges de cette nouvelle pathologie, notamment des fièvres, des maux de tête, des douleurs articulaires migrantes ainsi qu’une foule d’anomalies cardiovasculaires et neurologiques. Ses patients n’étant traités par antibiothérapie que pendant sept à dix jours, la maladie s’est poursuivie avec d’autres symptômes. Il semblait que les antibiotiques n’étaient pas d’un grand secours pour les patients atteints de maladie de Lyme. Cette maladie était-elle due à un virus ou à un trouble auto-immun ? Les médecins spécialisés tendent à voir le monde d’un œil différent. Ainsi, un gastroentérologue verra les choses sous l’angle du système digestif et tentera de relier les symptômes observés aux pathologies reconnues dans sa spécialité. C’est la même chose pour les infections ou les maladies neurologiques. Dans le cas du docteur Steere, rhumatologue, il appréhendait le monde essentiellement à travers les pathologies articulaires, ce qui inclut les maladies auto-immunes. Je ne veux pas dire que ces médecins et spécialistes aient nécessairement tort, mais il se pourrait que leur monde ne retienne qu’une partie seulement du tableau général, une vérité relative. Cependant, la vérité absolue existe aussi. Lorsque trois aveugles tâtent un éléphant, chacun décrira une partie différente de l’animal. L’un dira que l’éléphant possède un très long nez mobile, l’autre une peau rugueuse, des pattes épaisses et de grands ongles, et le dernier pourrait simplement décrire la petite queue rugueuse. Chaque aveugle a décrit une vérité relative et aucune n’a tort ; cependant, aucun n’a accédé à la vérité absolue : c’est un éléphant ! Il en est de même pour la maladie de Lyme. Le modèle de prise en charge initial pour diagnostiquer et soigner ces patients a été conçu par un rhumatologue, avec sa conception de rhumatologue. Puis, ce sont les médecins spécialisés en infectiologie qui ont revendiqué la maladie de Lyme comme relevant de leur compétence. La formation des médecins spécialisés en médecine interne est nécessairement autre, puisqu’ils doivent avoir des connaissances dans d’autres spécialités. En tant que détective
médical, j’ai été formé à toujours élargir ma perspective diagnostique. Le médecin interniste doit avoir une vision large qui englobe toutes les possibilités, puisque son travail consiste précisément à orienter tel patient vers tel spécialiste. L’interniste sera donc sans doute exempt des biais et réflexes diagnostiques conditionnés des autres spécialistes. Le diagnostic et le traitement de la maladie de Lyme ont, dès le début, été l’apanage des rhumatologues et des infectiologues ; la façon dont ces spécialistes voyaient le monde a contribué à la formation du modèle de sa prise en charge. De plus, les médecins ont toujours appris à ne rechercher qu’une seule cause aux symptômes présentés par leur patient. Cette notion est profondément enracinée dans l’éducation de chaque praticien à qui l’on n’apprend guère à rechercher d’éventuelles causes multifactorielles pour une seule maladie. Ainsi, si un patient souffrant de maladie de Lyme présente 35 symptômes différents, le modèle actuel imposerait que l’on tente d’expliquer ces 35 problèmes en restant dans le modèle médical accepté, celui du diagnostic primaire unique. Embarquons ensemble pour l’aventure des détectives médicaux qui veulent savoir comment détecter et traiter l’une des épidémies les plus pressantes du XXIe siècle.
REMONTER À L’ORIGINE DE LA MALADIE CHRONIQUE Résoudre un problème aussi énorme que celui posé par le syndrome infectieux multisystémique (SIMS) pourrait paraître une tâche impossible. Cependant, en tant que médecin, j’ai un atout essentiel pour y parvenir : une bonne communication avec mes patients. L’écoute attentive du patient fournit de nombreux indices et permet même aux plus atteints d’accéder à une meilleure santé et au bien-être. Une fois toutes les informations du patient recueillies et les résultats de laboratoire étudiés, il nous faut puiser dans un mélange de connaissances médicales et de sagesse intuitive, plus profonde. Redites-moi ce que vous ressentez. Quand cela a-t-il commencé ? Qu’est-ce qui provoque une amélioration ou une aggravation ? À chaque fois que je les interroge, leurs réponses m’encouragent à rechercher de nouveaux indices et le mystère se dévoile au fur et à mesure du dialogue. Bien entendu, cette technique ne garantit pas que nous trouvions toujours toutes les réponses aux problèmes de nos patients. Cela ne signifie pas non plus que cette stratégie viendra à bout de maladies qui les ont fait souffrir pendant des années (bien que cela semble possible). Cependant, cela permet au détective médical de relever des indices qu’il n’avait pas jugés importants auparavant. Le second volet de la stratégie du détective médical perspicace est d’ordre comportemental. Il s’agit, au lieu d’adopter la position du praticien qui sait tout, de cultiver son désir de faire du bien au patient qui souffre en se mettant à sa place et en lui prodiguant les soins que l’on souhaiterait pour soi-même. Je pense que la meilleure stratégie médicale repose sur une compassion forte et indéfectible. Les succès que j’ai pu connaître au cours de mon exercice de la médecine sont tous dus au respect de cette ligne directrice fondamentale, d’ailleurs implicite dans le serment d’Hippocrate prêté par tout médecin. Lors de cet engagement solennel, chaque praticien promet de respecter la
vie humaine et de traiter ses patients avec humanité, sans les considérer comme de simples cas médicaux. Prendre la compassion comme base de notre système de santé met à l’épreuve les modèles de rentabilité et les perspectives à motivation financière des systèmes actuels. Pourtant, beaucoup de patients, de médecins et de directeurs d’assurances médicales n’en sont pas satisfaits. Même les patients qui sont couverts par une bonne assurance maladie souffrent de ces maladies chroniques non diagnostiquées, les médecins sont à bout de forces et le coût des soins ne cesse d’augmenter dans une ambiance malsaine. Le médecin qui court de patient en patient et ne parvient pas à trouver le temps de mettre en place un partenariat thérapeutique fort, qui part du cœur et se concentre sur la personne à soigner, a bien du mal à trouver une satisfaction professionnelle. Or c’est en privilégiant le cœur sur l’intellect, celui-là même qui abrite notre compassion, qu’une plus grande satisfaction peut être éprouvée, tant par le patient que par le médecin ; c’est également une source d’énergie pour découvrir la cause originelle de la maladie. C’est, en fin de compte, cela qui apporte le plus grand bénéfice au patient, au système de santé (puisque les examens onéreux inutiles sont évités), et aux médecins (qui éprouvent une meilleure satisfaction et voient le devenir de leurs patients s’améliorer). Les agences américaines pour le contrôle et la prévention des maladies reconnaissent que la maladie chronique serait le fruit d’interactions entre des facteurs génétiques et environnementaux, des infections et des traumatismes. Cependant, dans leur pratique quotidienne, les médecins n’utilisent pas ce cadre élargi pour comprendre et soigner la maladie chronique. Le modèle HMO préconise une durée de visite restreinte et encourage le généraliste à adresser ses patients à d’innombrables spécialistes qui, s’ils y sont autorisés, vont demander de nombreux examens complémentaires onéreux. Ces mêmes assureurs médicaux posent souvent, pour des raisons économiques, des limites aux options thérapeutiques pourtant requises du point de vue médical. Peu de praticiens prennent le temps de découvrir les multiples facteurs à l’origine des maladies chroniques. Les spécialistes sont en général formés à ne soigner qu’une petite pièce du puzzle, un système du corps humain ou une catégorie de causes. J’estime donc que la progression vers une nouvelle appréhension doit commencer avec les médecins de premier recours. Placés en première ligne, ces derniers doivent élargir leur cadre médical pour englober les différentes strates des pathologies chroniques en examinant les aspects physiques, émotionnels et psychologiques de chaque maladie. Il nous appartient ensuite d’approfondir notre travail de détectives en disséquant la symptomatologie d’une maladie, ses aspects anatomiques, biologiques, biochimiques, immunologiques et génétiques. On peut commencer par la médecine fonctionnelle et les voies biochimiques qui activent la maladie chronique. Leur examen permet souvent de découvrir des indices quant aux causes des symptômes persistants de malades chroniques. À la faculté de médecine, l’enseignement de la médecine environnementale n’est malheureusement pas toujours adéquat et de nombreux médecins ignorent l’importance des effets de ces toxines sur l’organisme, la façon dont fonctionnent les voies de détoxification, comment les cytokines inflammatoires8 peuvent induire un état de malaise général, ou comment le stress psychologique ou émotionnel est capable de
déclencher un dysfonctionnement du système immunitaire de par son impact négatif sur la fonction surrénale. Tout médecin est formé à la détection et au traitement des infections chroniques, cependant internistes comme généralistes pensent souvent que la liste des maladies chroniques se limite à la tuberculose, la lèpre, la syphilis, la fièvre Q ou autres infections virales chroniques telles que l’hépatite B ou C ou le sida. Si le modèle médical adopté par votre médecin stipule que les autres infections chroniques sont rares, il ou elle ne les recherchera pas, et ne risque donc pas de les déceler. Toutefois, si un médecin a l’intelligence de rechercher ces infections chroniques, il sera confronté à un autre problème, celui des tests diagnostiques qui ne sont pas toujours assez fiables pour permettre un diagnostic juste. Imaginez le patient chronique comme une personne qui a seize clous dans son pied. Son médecin détectera peut-être quelques clous et soignera ces causes-là, mais souvent, s’il n’obtient pas de résultat positif en retirant l’un des clous, il pense qu’il s’est trompé de diagnostic, alors qu’il n’avait pas obligatoirement tort. Si le patient continue à se plaindre, c’est parce qu’un seul clou a été retiré et qu’il en reste encore quinze ! À nous de chercher ces 15 autres clous qui continuent à faire souffrir le patient pour les extraire. Avant de les regrouper et de les ranger dans une catégorie de maladie probable, il faut considérer les symptômes un à un pour essayer d’en trouver le dénominateur commun. Cela s’appelle le diagnostic différentiel. Prenons par exemple une patiente âgée de trente à quarante ans qui n’est pas encore ménopausée et se plaint de sueurs nocturnes intenses. Après l’interrogatoire et l’examen clinique, le médecin détective cherche à identifier les causes les plus courantes des sueurs nocturnes. S’agit-il d’une tuberculose ou d’un lymphome non hodgkinien ? La patiente présente-t-elle une toux, des crachats sanguinolents et/ou une perte de poids ? Une bête radio du thorax associée à une intradermoréaction (IDR) à la tuberculine permettra d’écarter ces deux diagnostics différentiels pendant que le médecin vérifie que la patiente n’a pas les gros ganglions durs et non mobiles caractéristiques des lymphomes. A-t-elle récemment voyagé dans des pays où elle aurait pu attraper le paludisme ? Si oui, a-t-elle eu de la fièvre pendant ou après son séjour ? L’examen microscopique d’un frottis sanguin (goutte épaisse) nous avertirait d’un éventuel paludisme. La patiente habite-t-elle dans une région à forte population de tiques ou s’est-elle récemment déplacée dans l’une de ces régions ? Elle pourrait alors avoir contracté une babésiose, qui ressemble beaucoup au paludisme. De nos jours, presque tout le monde a traversé une région où les tiques sont endémiques, sans parler d’y habiter. Il serait donc intéressant de demander un dosage d’anticorps dirigés contre les Babesia, une goutte épaisse, une analyse de l’ADN par amplification en chaîne par polymérase (PCR) ou une analyse ARN par la méthode FISH. Malgré son jeune âge, la patiente souffre peut-être de troubles hormonaux ? La vérification des taux sanguins de FSH, LH, œstradiol, progestérone, testostérone et testostérone libre ainsi que celui de la globuline se liant aux hormones sexuelles (SHBG9), permettrait d’écarter cette éventualité. Présente-t-elle une perte de poids, des palpitations, des tremblements, des angoisses, de la diarrhée et des sueurs évocateurs d’hyperthyroïdie ? Un bilan thyroïdien nous renseignera. La patiente a-t-elle récemment subi un traumatisme qui
pourrait expliquer son anxiété ? En vérifiant ces six ou sept diagnostics différentiels pour les sueurs nocturnes et en les écartant l’un après l’autre grâce à un bon interrogatoire, un examen attentif et quelques examens de laboratoire, il est donc possible de trouver des réponses. L’établissement d’un tel diagnostic se heurte à trois obstacles fréquents : tout d’abord, les huit à dix minutes autorisées par le modèle HMO pour la consultation n’autorisent pas les réflexions complexes demandées par ce diagnostic différentiel. Ensuite, pressés par le temps, les médecins ne demandent souvent même pas aux patients de leur parler de tous leurs symptômes. Enfin, les patients omettent souvent certains symptômes qu’ils jugent peu importants et en oublient d’autres. Une bonne communication est la meilleure garantie que le médecin traitant possède les moyens d’établir le bon diagnostic. Afin d’éviter ces oublis, je demande aux nouveaux patients de remplir un questionnaire de symptomatologie pendant qu’ils sont dans la salle d’attente. Je l’ai conçu il y a longtemps, après avoir constaté que les patients souffrant de maladie de Lyme se plaignaient souvent d’ensembles de symptômes similaires. Sans ce questionnaire, je suis sûr que je passerais à côté de nombreux indices, souvent ceux-là mêmes qui me permettraient de poser le bon diagnostic. Il importe d’autant plus de remonter à l’origine de problèmes médicaux que notre monde est plus déséquilibré que jamais. « Ce qui est en bas est comme ce qui est en haut ; et ce qui est en haut est comme ce qui est en bas » disait Hermès Trismegiste. Nous pourrions adapter cette formule à la médecine et dire : « Ce qui est dedans est comme ce qui est dehors ; et ce qui est dehors est comme ce qui est dedans. » À partir de quand la maladie du monde devient-elle notre maladie ? Et à partir de quand notre maladie a-t-elle un impact sur l’équilibre de la planète ? Lorsque nous identifions la cause de la maladie qui nous touche intérieurement, cela nous donne aussi des renseignements sur ce qui est déséquilibré dans le monde. Peut-être même que cela pourrait nous montrer comment y remédier. Par exemple, l’hypertension a actuellement pris des proportions pandémiques. Est-ce dû au vieillissement dit « normal », à un durcissement des artères induit par une mauvaise alimentation accompagnée d’un manque d’exercice, à une inflammation chronique résultant d’un déséquilibre des systèmes nerveux sympathique et parasympathique perturbés par une vie de stress, avec son élévation du taux de cortisol et d’adrénaline, et/ou à une quantité importante de plomb provenant de l’environnement et pénétrant dans notre corps ? Au cours de ma longue fréquentation des maladies chroniques, j’ai vérifié les taux de métaux lourds dans le sang de plusieurs milliers de personnes et presque toutes avaient une plombémie10 élevée. La mesure de la plombémie ne fait pas partie du bilan habituellement demandé par les médecins. Et pourtant du plomb pénètre nos corps et son origine est diverse. On en trouve dans l’eau potable, dans les assiettes décorées d’une peinture au plomb, dans les poissons et coquillages. Ce plomb se dépose dans nos os tout le long de notre vie, puis la dégradation osseuse liée à l’âge, l’ostéopénie (moindre densité de l’os) ou l’ostéoporose libère ce plomb dans l’organisme. Un lien a été démontré entre l’hypertension et l’intoxication au plomb. L’hypertension est-elle donc vraiment une pathologie normale du
vieillissement ? Ou est-elle due aux nombreux facteurs énoncés ci-dessus ? Si nous la diagnostiquons et la traitons correctement, des millions de personnes n’auraient pas besoin de prendre d’antihypertenseurs ou ne souffriraient pas d’insuffisance rénale, d’AVC, de crise cardiaque ou d’insuffisance cardiaque congestive. Ces quelques pathologies chroniques coûtent à elles seules des milliards de dollars au système de santé et génèrent d’immenses souffrances chez les patients et leurs proches. Prenons un autre exemple : est-il normal de perdre la mémoire en vieillissant ? Est-il normal que la maladie d’Alzheimer ait pris des proportions endémiques aux États-Unis et dans le reste du monde ? Ou se pourrait-il que l’étiologie à l’origine de ces états soit multiple ? Nous nous sommes aperçus que la majorité de nos patients souffrant de maladie de Lyme avec co-infections présentaient aussi des troubles importants de la mémoire et de la concentration. Le Dr Alan B. MacDonald, médecin légiste, a découvert un premier indice quant à l’existence d’un lien entre infection et démences en examinant des biopsies cérébrales de patients, dont la maladie d’Alzheimer avait été confirmée au McLean Hospital, conservées dans la base de données universitaire de Harvard. L’analyse de l’ADN par amplification en chaîne a révélé que l’ADN de Borrelia burgdorferi (le microorganisme responsable de la maladie de Lyme) était présent dans le cerveau de sept patients sur dix. Nous avons également constaté que la majorité de nos patients atteints de maladie de Lyme et de co-infections chroniques avait été exposé à de forts taux de métaux lourds tels que le mercure et le plomb, parfois l’aluminium. Ces métaux lourds induisent également des difficultés de mémoire et de concentration et augmentent la production de radicaux libres susceptibles de stimuler l’inflammation. De même, des centaines de produits chimiques solubles dans les graisses (liposolubles) et provenant de l’environnement sont déposés dans notre cerveau. Ceci peut avoir, et a, un impact sur le fonctionnement cognitif. Nous savons que la maladie d’Alzheimer résulte d’un processus inflammatoire qui stimule la production d’amyloïdes (protéines fibreuses non solubles dont la présence en excès peut provoquer des maladies neurodégénératives). Se pourrait-il que les troubles graves de la mémoire et de l’attention aujourd’hui attribués à la maladie d’Alzheimer soient en réalité dus à une maladie de Lyme, des co-infections, des toxiques environnementaux ou des métaux lourds ? Si nous incluons les patients qui ont une carence non diagnostiquée en vitamine B12 (qui se confirme par un dosage sanguin en B12 et en acide méthylmalonique), et ceux qui présentent une hypothyroïdie non détectée, nous aurons suffisamment de causes pour une épidémie de démence dans la population générale. J’ai vu administrer à des patients âgés diagnostiqués comme « déments » et présentant des troubles cognitifs, des médicaments indiqués dans la maladie d’Alzheimer qui ralentissent (mais n’inversent pas) le déclin cognitif comme, par exemple, Aricept® (donépézil) ou Namenda® (chlorhydrate de mémentine). Mais j’ai aussi vu leurs fonctions cognitives s’améliorer après un traitement contre les infections chroniques transmises par les tiques, avec détoxification des toxines liposolubles grâce au glutathion et prise orale d’agents chélateurs pour retirer le mercure, le plomb et l’aluminium de leur corps, plus détection et traitement de carences en vitamine B12 et/ou d’hypothyroïdie. L’identification des causes multifactorielles des maladies chroniques constitue le
glissement de paradigme le plus important en médecine. Il ne suffit pas de donner un nom à une maladie, il faut également rechercher les différents facteurs qui la causent car sinon, nous laisserons aux générations suivantes un lourd héritage de pathologies chroniques : autisme, cancer, accidents vasculaires cérébraux, crises cardiaques, hypertension, diabète, obésité, maladies auto-immunes, maladies mentales, syndromes de fatigue chronique, fibromyalgies et maladie de Lyme avec ses co-infections.
LES OUTILS DU DÉTECTIVE MÉDICAL Un sage a dit : « Sur le chemin de la vérité, on peut commettre deux erreurs : ne pas aller jusqu’au bout, et ne jamais démarrer. » Alors que je finissais mes études de médecine à l’université libre de Bruxelles, j’ai demandé à mon maître spirituel quelle était la chose la plus importante pour pratiquer la médecine. Il m’a répondu : « La qualité de la compassion. » Lorsque je lui ai demandé des précisions, il m’a répondu : « Quand vous bâtissez une maison, il vous faut de bonnes fondations, sans quoi votre maison ne tiendra pas debout. Les fondations qui profiteront le plus aux autres et à vous-même sont l’amour-gentillesse et la compassion. L’amour consiste à souhaiter que l’autre soit heureux, la compassion, que l’autre ne souffre pas. Si vous vous mettez à la place de l’autre et faites pour lui exactement ce que vous souhaiteriez pour vous-même, tout ira bien ». Les principaux outils du détective médical sont donc la compassion et la motivation. Comment développer ces qualités ? La majorité des prestataires de santé souhaite bien évidemment aider les autres. Cependant, nous abordons souvent la maladie comme un ennui, une épreuve, qu’il est de notre devoir de guérir, plutôt que comme un parent aimant qui fait tout pour soulager la douleur de son enfant qui souffre. J’ai connu des parents qui emmènent leur enfant de médecin en médecin dans l’espoir de lui trouver de l’aide. Il me semble évident qu’un médecin généraliste qui approche chaque patient comme un parent aura plus de succès que celui qui est moins investi dans le devenir de ses patients, ou qui pense que son rôle est d’être un « garde-barrière » qui fait le tri et adresse les malades à tel ou tel spécialiste plus expérimenté. Lorsqu’un médecin prend son métier à cœur, ses patients le sentent. Cela en soi est thérapeutique. Si nous voulons développer ces qualités, l’amour-gentillesse et la compassion, il nous faut prendre chaque jour le temps d’y penser afin de les intégrer à notre quotidien. Plusieurs techniques de méditation traditionnelle font appel au « prendre et distribuer » ou le sujet imagine qu’il inspire la souffrance et les maux de l’autre sous la forme d’une fumée noire qui va directement au cœur où l’amour les transforme en lumière blanche qu’il expire ensuite pour guérir l’autre, le soulager de ses souffrances et lui apporter bonheur et joie. Mes propres maîtres spirituels et plusieurs personnes qui pratiquent cette technique depuis des années m’ont tous assuré que cette visualisation ne fait aucun mal et que ses avantages sont considérables. Il semblerait que prendre quelques minutes par jour pour méditer de cette façon et développer ces qualités contribue à renforcer nos fondations pour mieux aider autrui. Vouloir servir et aider les autres n’est pas seulement une noble
philosophie, cela nous élève en même temps que cela profite à nos patients. L’abnégation compassionnelle et la priorité donnée au patient permettent à l’exercice de la médecine de se transformer en voie spirituelle vers le divin. Ce « prendre et distribuer » est une manière de se mettre à la place de l’autre et de cultiver l’amour-gentillesse et la compassion, qualités nécessaires au soignant, mais aussi au soigné. Ceux qui travaillent avec les malades ont aussi été blessés auparavant. Ce « prendre et distribuer » nous permet de nous reconnecter avec un cœur tendre et ouvert qui nous relie à notre propre humanité et à l’humanité des autres. Ceci nous pousse à pratiquer la médecine avec notre cœur, pas seulement notre tête, avec la partie de nous-mêmes qui prend soin, qui veut le meilleur pour autrui. C’est souvent ainsi que l’on obtient les meilleurs résultats. Faire attention à autrui, se soucier de lui et vouloir soulager ses souffrances sont des clés essentielles. D’après mes maîtres, tout bénéfice constaté en pratiquant la médecine provient de cette seule source. L’outil qui suit de près la compassion est l’attention. Nous devons prendre le temps d’écouter attentivement notre patient, avec empathie, si nous voulons découvrir les indices qui nous mèneront aux diagnostics de sa maladie. L’attention sans partage est aussi un acte d’amour, et l’amour soigne. Accorder toute son attention signifie qu’il nous faut être capables d’arrêter un instant le flot de nos propres pensées. Ce n’est pas si facile, nous qui passons notre vie à courir sans prendre le temps de souffler. Cette capacité à concentrer son attention sans laisser vagabonder son esprit, l’un des principes fondamentaux de la méditation, s’appelle « shamatha » (l’arrêt). Il faut entraîner notre esprit à se concentrer, sans suivre les pensées du passé, du présent ou de l’avenir. Nous pourrons alors trouver une sérénité intérieure. Sans nous laisser détourner par les forts courants psychiques qui nous poussent souvent à ressasser d’anciennes difficultés ou les échecs passés, et sans vivre dans la crainte d’un avenir qui n’est pas encore arrivé, nous pouvons apprendre à être dans l’instant présent, à être tout simplement en paix. En pratique, cela consiste à écouter avec la plus grande attention ce que nous dit notre patient. La plupart des soignants ont beaucoup de mal à fonctionner ainsi, pourtant la réponse aux maux de nos patients émerge souvent lorsque nous sommes assis dans un espace d’écoute intense et d’attention totale. Une fois qu’il se trouve dans cet état d’écoute attentive, le détective médical peut recueillir les éléments de la maladie du patient et utiliser son cerveau gauche pour effectuer une analyse logique raisonnée. Ensuite, il calme son esprit et se tourne vers l’espace méditatif concentré et ouvert pour accéder à la connaissance intuitive du cerveau droit. L’expérience m’a appris que j’obtenais de meilleurs résultats avec mes patients lorsque j’associais la logique du cerveau gauche à l’intuition du cerveau droit. Généralement, les patients atteints de maladies chroniques complexes arrivent à mon cabinet avec d’énormes dossiers médicaux et une longue liste de problèmes. En étudiant méticuleusement leur dossier et grâce au questionnaire que je décris plus loin, je parviens à cerner toute l’étendue de leurs symptômes et me donne les moyens d’avoir un historique de la maladie le plus complet possible. L’interrogatoire d’un patient (l’anamnèse) dans ces cas complexes qui ont déjà été vus par dix ou vingt autres
médecins au cours des dernières années me prend en général au moins une heure. Si l’on y ajoute la recherche des antécédents sociaux et familiaux, du degré d’exposition à certains facteurs environnementaux, l’exploration de chaque symptôme, l’examen clinique complet, la prescription des analyses et l’établissement d’une stratégie thérapeutique, la prise en charge d’un nouveau patient me prend entre deux et trois heures. Manifestement, le modèle du HMO (un patient tous les quarts d’heure) n’est guère adapté aux pathologies chroniques complexes. Lorsque j’arrive au bilan final et à la planification des soins, j’essaye de m’assurer que chaque symptôme du questionnaire que le patient a coché comporte un ou plusieurs diagnostics différentiels potentiels. Ainsi, chaque symptôme est exploré par les examens complémentaires appropriés et a son propre plan de soin. C’est souvent à ce stade que se dessine un profil, qu’une gestalt apparaît quant aux diagnostics les plus probables pour ce patient et la direction dans laquelle se situe sa guérison. Vous trouverez sans doute ces outils de détective médical 11 bien simplistes. Cependant, au fur et à mesure de notre ébauche du nouveau modèle de prise en charge des maladies chroniques, nous découvrirons qu’il présente bien des avantages. Chez mes confrères, le taux d’épuisement professionnel (le burn-out des anglophones) explose. Les motivations et outils que je propose permettent de se réapproprier la joie d’assister autrui et le plaisir d’aider ceux qui ne l’ont pas été auparavant. Cultiver l’amourgentillesse et la compassion ne fait pas seulement appel à l’intellect, c’est aussi un chemin vers le cœur. En équilibrant les énergies masculine et féminine de la tête et du cœur, nous connaîtrons de plus grandes joies et satisfactions dans l’exercice de la médecine, émotions qui font si souvent défaut dans notre environnement médical au rythme effréné. De plus, les patients semblent apprécier cette approche ! Enfin, ce modèle s’avère assez exhaustif et le vaste champ qu’il explore permet de diagnostiquer et traiter les patients le plus rapidement possible tout en coûtant beaucoup moins cher aux systèmes de santé. Ce modèle fait appel à quatre outils : le désir d’aider l’autre, l’écoute attentive, l’évaluation des symptômes du patient grâce à un questionnaire et enfin l’établissement des diagnostics différentiels à l’aide du modèle Horowitz de prise en charge des pathologies chroniques en 16 points qui peut redonner espoir à tous ceux qui souffrent depuis longtemps et leur offrir la possibilité de guérir. Pour moi, ce sont là les outils indispensables à chaque détective médical en quête de vérité.
LE QUESTIONNAIRE SYMPTOMATOLOGIQUE DES SIMS/ML DE HOROWITZ Un outil indispensable pour déterminer la probabilité d’un SIMS et/ou d’une maladie de Lyme Le questionnaire que remplissent mes patients dans la salle d’attente me permet ensuite de revoir avec eux chacun des 38 items de la première rubrique en explorant chaque symptôme afin de faire un premier repérage des diagnostics différentiels. Ce
questionnaire essentiel est extrapolé à partir de celui conçu par le Dr Joseph Burrascano lorsqu’il a commencé à soigner des patients atteints de maladie de Lyme et qu’il s’est aperçu que plusieurs symptômes étaient communs à tous ces patients ; ce sont ces symptômes qui forment la trame de ce questionnaire. Vous pouvez l’utiliser pour savoir quelles sont les probabilités que vous soyez atteint(e) d’une maladie de Lyme ou d’un SIMS. Cet outil est également très utile aux médecins, qu’ils soient débutants ou confirmés, pour établir leur diagnostic différentiel lorsqu’ils soupçonnent une maladie de Lyme chez leurs patients. Grâce à ce protocole, aucun symptôme n’est oublié et en parcourant les réponses, le médecin tient une première occasion d’explorer un large éventail de diagnostics différentiels. Il fournit les indices qui permettent au médecin d’évaluer la probabilité que son patient souffre d’une maladie de Lyme. Autre intérêt de ce questionnaire : le patient est rassuré de savoir qu’aucun de ses symptômes ne sera ignoré. La première rubrique regroupe tous les symptômes que l’on peut observer lors d’une maladie de Lyme. Ils ne sont pas spécifiques à la maladie de Lyme et se rencontrent dans bien d’autres maladies. Cependant, la gestalt générée par l’étude simultanée de tous ces symptômes aide le praticien à savoir quelles sont les chances pour que son patient souffre d’une maladie de Lyme ou autre trouble associé. Cette liste me permet également de repérer les pathologies concomitantes afin que les vraies causes des souffrances du patient soient découvertes. Ces causes multifactorielles sont souvent au cœur des états pathologiques chroniques. Ce sont elles qui m’ont conduit à créer le modèle « SIMS ». Cette liste permet aussi d’écarter les autres processus pathologiques de la grille d’évaluation des SIMS tout en repérant des ensembles de symptômes comme on en retrouve dans la maladie de Lyme, par exemple des symptômes qui vont et viennent, avec de « bons » et de « mauvais » jours, les douleurs articulaires et musculaires qui changent de place, les névralgies qui vont et viennent et touchent des sites différents, les maux de tête et les troubles du sommeil avec déficit cognitif associé. Les rubriques 2 et 3 du questionnaire explorent les ensembles de signes et symptômes le plus souvent observés en cas de SIMS ou de maladie de Lyme. Ces ensembles sont le fruit de ma compilation des dossiers de centaines de patients que j’ai soignés au cours des dix dernières années. La quatrième partie du questionnaire est dérivée de deux des quatre questions du module de base « healthy days » utilisé par le centre épidémiologique américain (le CDC) pour dépister les tendances nationales de la population et identifier les inégalités en matière de soins. Cette rubrique permet de repérer la fréquence de problèmes de santé physique et mentale au cours du mois précédent. Discutez de ce questionnaire avec votre médecin. Selon le score que vous aurez obtenu, il demandera peut-être des analyses complémentaires de dépistage de la maladie de Lyme (immunofluorescence indirecte, ELISA ou Western Blot) chez un laboratoire fiable, ainsi que la confirmation de toute autre maladie transmise par les tiques. Ne vous fiez pas aux seuls critères du centre d’épidémiologie américain qui préconise un test ELISA dans le cadre d’un protocole d’analyse en deux étapes, car ce test n’est pas assez sensible pour confirmer le diagnostic. Utilisez ce questionnaire
comme point de départ du travail de détective médical qui vous amènera à poser votre propre diagnostic. N’oubliez jamais que la maladie de Lyme est un diagnostic clinique et que les analyses sanguines ne sont là que pour confirmer vos impressions et déductions cliniques. Répondez aux questions qui suivent aussi honnêtement que possible. Repensez à ce que vous avez ressenti au cours du mois dernier, à la fréquence à laquelle les problèmes suivants vous ont affectés. Notez la fréquence de l’occurrence de chaque symptôme en utilisant l’échelle suivante : jamais, parfois, souvent, très souvent.
• Jamais = 0 • Parfois = 1 • Souvent = 2 • Très souvent = 3 Rubrique 1 : Fréquence des symptômes 1• Fièvres, sueurs, bouffées de chaleur ou frissons inexpliqués 2• Changement de poids inexpliqué, amaigrissement ou prise de poids 3• Fatigue, lassitude 4• Perte de cheveux inexpliquée 5• Ganglions gonflés 6• Mal à la gorge 7• Douleurs testiculaires ou pelviennes (dans le bas-ventre) 8• Règles irrégulières sans raison apparente 9• Lactation inexpliquée, douleurs mammaires 10• Vessie irritable ou dysfonctionnement urinaire 11• Troubles sexuels, perte de la libido 12• Mal à l’estomac, indigestion 13• Modification des habitudes intestinales (constipation ou diarrhée) 14• Douleurs thoraciques ou intercostales 15• Essoufflement, toux 16• Palpitations, battements « manqués », bloc auriculo-ventriculaire (BAV) 17• Antécédents de souffle cardiaque ou d’atteinte valvulaire 18• Douleur ou gonflement d’une ou plusieurs articulations 19• Raideur de la nuque ou du dos 20• Douleurs musculaires ou crampes
21• Tressautement des muscles du visage ou du corps (fasciculations) 22• Maux de tête 23• Raideur ou craquements dans le cou 24• Fourmillements, engourdissements, sensations de brûlure ou de « coup de poignard » (paresthésies) 25• Paralysie faciale 26• Vision double ou floue 27• Audition/oreilles – Bourdonnements, sifflements ou douleur dans les oreilles (acouphènes) 28• Mal des transports accru, vertige 29• Vertiges, manque d’équilibre, difficultés à marcher 30• Trémulations, tremblements 31• Confusion, difficultés à penser 32• Difficulté à se concentrer ou à lire 33• Distraction, mauvaise mémoire à court terme 34• Désorientation ; je me perds ou je ne vais pas au bon endroit 35• Difficulté à parler ou à écrire 36• Sautes d’humeur, irritabilité, dépression 37• Troubles du sommeil, je dors trop ou trop peu, réveil trop matinal 38• Effet aggravant de l’alcool sur l’intensité des symptômes et/ou de la « gueule de bois » Additionnez vos réponses pour obtenir le total de vos points Total pour la rubrique 1 :
Rubrique 2 : Symptômes les plus courants Si vous avez attribué la note « 3 » à chacun des items suivants, attribuez-vous 5 points supplémentaires 3• Fatigue 33• Distraction, mauvaise mémoire à court terme 18• Gonflements ou douleurs articulaires 24• Fourmillements, engourdissements, sensations de brûlure ou de « coup de poignard »
37• Troubles du sommeil, je dors trop ou trop peu, réveil trop matinal Total pour la rubrique 2 :
Rubrique 3 : Incidence de la maladie de Lyme Entourez les points correspondant aux questions auxquelles vous répondez « oui ». 1• Vous vous êtes fait mordre par une tique sans présenter d’éruption cutanée ou de symptôme de type grippal.3 points 2• Vous vous êtes fait mordre par une tique et avez présenté un érythème migrant ou autre éruption cutanée, suivie de symptômes de type grippal.5 points 3• Vous habitez une zone où la maladie de Lyme est endémique2 points 4• Une maladie de Lyme ou autre infection transmise par les tiques a été diagnostiquée chez un membre de votre famille.1 point 5• Vous souffrez de douleurs musculaires migratoires.4 points 6• Vous souffrez de douleurs articulaires migratoires.4 points 7• Vous avez de temps en temps des fourmillements, des sensations de brûlure ou d’engourdissement migratoires.4 points 8• Un syndrome de fatigue chronique ou une fibromyalgie ont déjà été diagnostiqués chez vous.3 points 9• Une pathologie auto-immune a déjà été diagnostiquée chez vous, qu’elle soit spécifique (lupus, sclérose en plaques ou polyarthrite rhumatoïde) ou pas.3 points 10• L’un de vos tests de dépistage de la maladie de Lyme (ELISA, Western Blot et/ou PCR) est positif.5 points Total pour la rubrique 3 :
Rubrique 4 : État général 1• En terme d’état général, au cours des 30 derniers jours, pendant combien de jours vous êtes-vous senti en mauvaise santé ? ____ jours Attribuez-vous les points suivants selon le nombre de jours : 0 à 5 jours = 1 point 6 à 12 jours = 2 points 13 à 20 jours = 3 points 21 à 30 jours = 4 points 2• En terme d’état mental, au cours des 30 derniers jours, pendant combien de jours vous êtes-vous senti en mauvais état ? ____ jours Attribuez-vous les points suivants en fonction du nombre de jours : 0 à 5 jours = 1 point 6 à 12 jours = 2 point
13 à 20 jours = 3 point 21 à 30 jours = 4 point Total pour la rubrique 4 :
Calcul du score final : Reportez ci-dessous vos scores pour chaque rubrique, puis additionnez-les pour calculer votre score final. Total pour la rubrique 1 : Total pour la rubrique 2 : Total pour la rubrique 3 : Total pour la rubrique 4 : Score final : Si votre score est égal ou supérieur à 46, il y a de fortes chances pour que vous soyez atteint d’une maladie transmise par les tiques et vous devriez consulter un médecin. Si votre score se situe entre 21 et 45, il est possible que vous ayez une maladie transmise par les tiques et vous devriez consulter un médecin. Si votre score est inférieur à 21, il y a peu de chances pour que vous soyez atteint d’une maladie transmise par les tiques.
Interprétation des résultats Dans le cadre de l’une de nos études, nous avons interrogé une série de 100 patients par ordre d’arrivée au cabinet : plus de 25 % avaient souffert des symptômes suivants pendant la plus grande partie du mois précédant leur visite au cabinet. Ces symptômes perturbaient généralement leur qualité de vie : 71 % ont signalé que leur état physique n’était pas bon et 47 % que leur état de santé mental n’était pas bon pendant au moins 15 jours du mois précédent. Les symptômes le plus souvent reliés à la maladie de Lyme et au syndrome infectieux multisystémique (SIMS) sont énumérés ci-dessous :
• Fatigue, lassitude • Maux de tête • Raideur de la nuque ou du dos • Gonflement ou douleurs articulaires • Fourmillements, engourdissements et/ou sensation de brûlure aux extrémités • Confusion, difficulté à penser • Difficulté à se concentrer ou à lire • Distraction, mauvaise mémoire à court terme • Troubles du sommeil – Dort trop ou trop peu, réveils précoces
• Difficultés à parler ou à écrire Il me semble prudent de rechercher une maladie transmise par les tiques chez tout patient présentant ces symptômes. Notre liste des symptômes les plus courants chez nos cent patients correspond au groupe de symptômes identifié par Nancy Shadick dans ses travaux sur la maladie de Lyme, publiés dans la littérature médicale il y a bien des années. Son étude de cohorte rétrospective comparait 186 patients qu’elle avait examinés et qui avaient des antécédents de maladie de Lyme (selon les critères du CDC) à 167 témoins extraits de la population et sans antécédents de maladie de Lyme. Nous avons donc déterminé un ensemble de symptômes que les soignants peuvent consulter lorsque les patients viennent consulter. Si le groupe de symptômes est présent, les examens de dépistage peuvent être demandés et l’éventualité d’une maladie de Lyme doit être envisagée. Cette manière d’utiliser le questionnaire permet de repérer les patients chroniques qui souffrent de maladies transmises par les tiques non diagnostiquées, ce qui améliorera leur diagnostic et leur traitement.
Exemple d’utilisation du questionnaire symptomatologique des SIMS/ML en consultation Voici un exemple de première consultation. Mme Q est une femme de 59 ans, de type caucasien, qui souffre d’une multitude de symptômes depuis 18 ans. Elle a déjà consulté plus de 20 médecins et s’est rendue dans plusieurs centres médicaux prestigieux du Midwest et du Nord-Est des États-Unis. Elle s’est vue attribuer d’innombrables diagnostics, dont un syndrome de fatigue chronique, une fibromyalgie, une dépression, toutes pathologies qui pourraient expliquer ses douleurs, son incapacité à dormir une nuit entière, son sentiment d’être déprimée par son mauvais état de santé apparemment intraitable. Elle m’apporte son dossier médical des dix dernières années, soigneusement rangé dans un gros classeur. En compulsant son dossier, je remarque qu’elle a subi l’ensemble des tests que la majorité des internistes et spécialistes demanderaient. Tous ses résultats sont négatifs, sauf le taux d’un marqueur auto-immunitaire (ANA 1 : 80, aspect moucheté) qui est positif, mais pas suffisamment pour étayer un diagnostic de trouble auto-immun non spécifique. Manifestement, elle en a assez qu’on lui dise que « c’est dans la tête ». Elle me regarde avec un petit sourire où transparaît un léger espoir. – Pourquoi êtes-vous venu me voir Mme Q ? Quelqu’un vous l’a conseillé ? – Beaucoup d’amis sont venus vous voir et ils m’ont dit que vous les aviez aidés. – Oh ! Vous savez, je paye les gens pour qu’ils disent ça. Vous êtes sûre que ces amis vous aiment vraiment ? Un sourire en coin apparaît. Mon lamentable humour médical commence à agir. – En fait, c’est mon spécialiste de la Mayo Clinic qui a suggéré que je vous consulte. Il n’avait plus rien à me proposer et s’est demandé si je n’aurais pas une maladie de Lyme. – Bien. Regardons un peu le questionnaire que vous avez rempli dans la salle d’attente et voyons si nous pouvons en déduire quelles sont vos probabilités cliniques d’avoir une maladie de Lyme.
La première chose que je remarque, c’est qu’elle a entouré quasiment tous les symptômes de la liste. Le seul qui ne l’est pas, c’est la « douleur testiculaire ». Me tournant vers elle, je lui dis : – Je vois que vous présentez tous les symptômes de ma liste à l’exception de la douleur testiculaire. – C’est bien ça docteur. Ce symptôme-là est réservé à mon mari lorsqu’il ne me satisfait pas. Tiens tiens, elle a de la répartie. Je sens mes jambes se rapprocher très légèrement l’une de l’autre. – OK. Commençons par le haut de la liste. Fièvres, sueurs le jour et la nuit et frissons. Lequel de ces symptômes avez-vous et pendant combien de temps ? – Cela fait 18 ans que j’ai des sueurs le jour et la nuit. – Surtout le jour, ou surtout la nuit ? – La nuit. Parfois je suis trempée. – Avez-vous été ménopausée de bonne heure ? D’après vos réponses, il semble que les sueurs aient commencé quand vous aviez 41 ans. – Non docteur. Mes règles sont devenues irrégulières vers 45 ans, mais d’après ma gynéco, tous les examens hormonaux étaient normaux. Elle n’a pas réussi à trouver la raison de ces sueurs. Quand la ménopause est arrivée à 50 ans, j’ai eu des bouffées de chaleur, mais ce n’était pas la même chose. – Avez-vous voyagé à l’étranger ? Est-il envisageable que vous ayez contracté le paludisme ? – Non. – Toussez-vous souvent ? Êtes-vous essoufflée ? Avez-vous parfois du sang dans vos crachats ? – Il m’arrive de tousser de temps en temps et d’avoir l’impression que je manque d’air. Je suis allée voir un pneumologue. Mes radios du thorax étaient normales et mes épreuves fonctionnelles respiratoires aussi. Le médecin a attribué mes troubles à une possible allergie avec écoulement nasopharyngé. – Et des frissons. Vous en avez ? – Ça m’arrive de temps en temps et dans ce cas, j’ai très froid. – Ces symptômes sont-ils présents tout le temps ou seulement de temps en temps ? – De temps en temps. En fait, j’ai eu des sueurs qui m’ont trempée il y a juste quelques nuits. Je me redresse dans mon fauteuil et pose la question à un million de dollars : – Avez-vous jamais été testée pour une babésiose ? On l’appelle aussi piroplasmose ; cette maladie ressemble au paludisme et déclenche les mêmes symptômes. – Non docteur, je ne crois pas. En fait, son dossier m’a appris qu’un médecin a bien demandé un dosage d’anticorps anti-Babesia qui s’est révélé négatif. – Avez-vous des ganglions qui ont gonflé ? Avez-vous perdu du poids ? – J’aimerais bien docteur. J’ai pris 15 kilos en 8 ans et je n’arrive pas à les perdre. Il m’arrive d’avoir mal à la gorge et des ganglions gonflés mais l’ORL a dit que j’attrapais
sans doute souvent des infections virales. Bien, arrêtons-nous là. Combien de fois voyons-nous des patients qui ont mal à la gorge et des adénopathies12 une fois par mois pendant plusieurs années ? En plus, cela fait 18 ans qu’elle se réveille trempée par des sueurs nocturnes intermittentes neuf ans avant d’être ménopausée. Il n’y aucun signe clinique de tuberculose ou de lymphome et les radios du thorax sont négatives. Elle n’est pas allée à l’étranger, quoique cela n’infirme pas pour autant l’hypothèse d’un paludisme. Le bilan hormonal a écarté l’hyperthyroïdie et je ne remarque pas de signe clinique significatif d’angoisse ou de crise de panique. Je commence à penser à une babésiose. De plus, les maux de gorge avec adénopathies tous les mois évoquent plutôt la mononucléose ou une infection par le virus d’Epstein-Barr ou un autre virus. Lorsqu’elle s’accompagne de co-infections par Babesia o u Bartonella, la maladie de Lyme peut tout à fait prendre un rythme cyclique où les symptômes se présentent par intermittence. En fait, cette intermittence des symptômes est un signe caractéristique de SIMS ou de maladie de Lyme. Le symptôme suivant qu’elle a entouré est la fatigue. – Quelle est l’importance de votre fatigue ? Est-elle légère, moyenne, sévère ? Est-elle aussi intermittente ? Allez-vous mieux certains jours que d’autres ? Avez-vous remarqué si votre état s’améliorait ou empirait à un moment précis de la journée ? Y a-t-il un rapport avec ce que vous mangez ? – Eh bien docteur, j’ai remarqué que ça fluctuait, avec des bons et des mauvais jours. En fait, certains jours, je me sens si mal que j’arrive à peine à sortir de mon lit alors que d’autres jours, j’arrive à aller faire mes courses. – D’accord. Donc la fatigue se situe entre « moyenne » et « sévère » ? – Oui. C’est cela. – Et la nourriture ? Avez-vous remarqué un lien ? Vous sentez-vous mieux ou pire à un moment donné dans la journée ? – Eh bien, j’ai remarqué que c’était souvent vers trois heures de l’après-midi que je me sentais très mal, au moment où j’aimerais bien faire une sieste. – Vous arrive-t-il de prendre un en-cas pour voir si cela vous aide ? – Tout à fait. J’adore grignoter. Il est possible que ça m’aide parfois. Il y a au moins 100 raisons pour lesquelles un patient peut se sentir fatigué : hypotension ou dysfonctionnement du système nerveux autonome, manque de sommeil, hypoglycémie postprandiale, insuffisance surrénale avec taux de cortisol excessivement bas ou autre problème hormonal (hypothyroïdie, insuffisance d’hormone de croissance ou faible taux d’hormones sexuelles). À cette liste s’ajoutent les infections virales, les infections parasitaires, les infections fongiques, les infections bactériennes, la maladie de Lyme et ses co-infections, les dysfonctionnements mitochondriaux, les problèmes de détoxification avec hypersensibilité chimique multiple, problèmes auto-immuns avec élévation du taux de cytokine, problèmes gastro-intestinaux allergies alimentaires comprises, maladies inflammatoires de l’intestin et hépatites, anomalies fonctionnelles, problèmes cardiaques, notamment insuffisance cardiaque congestive et cardiomyopathie, et dépression. L’ennui, c’est que toutes ces étiologies peuvent aussi être associées au SIMS et à la maladie de Lyme.
C’est pour cela que ces patients continuent à présenter une symptomatologie chronique malgré les antibiothérapies. Comme nous le verrons dans le chapitre suivant, il reste quelques-uns des 16 clous dans le pied du patient qui souffre de maladie de Lyme qui doivent être retirés avant qu’il ne puisse dire qu’il n’a plus mal au pied. L’histoire de Mme Q contient-elle des indices susceptibles d’évoquer une maladie de Lyme ? Oui, bien sûr. Sa fatigue est cyclique, ce qui est caractéristique d’une maladie de Lyme. Elle a un excès pondéral et présente sans doute un syndrome métabolique, comme la moitié au moins des Américains de plus de 60 ans (et un tiers de la population totale). Dans son dossier, je vois qu’elle a un taux de triglycérides élevé et un faible taux de cholestérol HDL. Elle présente une obésité centrale et une hypertension artérielle. Son insulinorésistance avec un taux anormalement élevé d’insuline pourrait contribuer à son hypoglycémie postprandiale puisque sa fatigue est plus intense en milieu d’après-midi. Donc, pour l’instant, nous avons deux candidats possibles : la maladie de Lyme et l’hypoglycémie postprandiale. L’infection par Babesia n’est pas loin derrière et pourrait expliquer ses sueurs nocturnes intermittentes avec toux, dyspnée et respiration de Kussmaul13, symptômes classiques des babésioses. Le symptôme suivant de la liste à être coché était la perte de la libido. Bien que Mme Q ait 58 ans et soit ménopausée, je devais quand même lui demander à partir de quand elle avait ressenti cette perte de la libido, car 99,9 % des patients souffrant de maladie de Lyme qui viennent me voir ont perdu tout désir sexuel. Même des hommes de 20 ans s’en plaignent et leur taux de testostérone se situe souvent entre 200 et 300 (chez un homme normal de 20 ans, il varie de 700 à 800, c’est-à-dire trois fois plus). – Depuis quand souffrez-vous d’une baisse de la libido Mme Q ? – Eh bien docteur, je ne me souviens plus quand j’ai fait l’amour pour la dernière fois. Certes, ma mémoire n’est plus ce qu’elle était depuis quelques années, mais je suis à peu près certaine que cela fait environ 15 ans que ça dure. – Votre mari est-il toujours intéressé ? – Oh, si je le laissais faire, il serait partant, mais, disons que croître et multiplier, ce n’est plus de mon âge. – OK. Vous m’avez déjà parlé des maux de gorge et des adénopathies qui survenaient épisodiquement. Et les douleurs thoraciques et l’essoufflement que vous avez aussi coché sur le questionnaire ? En avez-vous parlé à un médecin ? – Oh oui, bien sûr. J’ai vu deux cardiologues en 18 ans. Ils ont demandé des échocardiographies, des électrocardiogrammes, des épreuves d’effort et des Holters, mais ils n’ont rien trouvé. Ils m’ont dit que c’était sans doute dû à un spasme œsophagien avec reflux gastro-œsophagien (RGO) puis que le gastro-entérologue a vu une hernie hiatale à l’endoscopie. – Est-ce que cela vous fait mal quand j’appuie sur votre paroi thoracique ? Cela déclenche-t-il la même douleur ? J’appuie sur son sternum et latéralement de chaque côté de ses côtes pour voir si je parviens à déclencher une réaction. – Parfois, mais pas tout le temps. La maladie de Lyme entraîne souvent des costochondrites, une inflammation des
parois thoraciques, des côtes et des muscles intercostaux. Beaucoup de patients atteints de maladie de Lyme se plaignent de douleurs thoraciques avec essoufflement et palpitations et leur bilan cardiaque est en général négatif, mis à part quelques Holters montrant de fréquentes extrasystoles. Les blocs auriculo-ventriculaires (BAV) du premier et du second degré sont rares et, au cours des 27 dernières années, je n’ai vu que trois patients avec un BAV du troisième degré. Heureusement, le problème a été résolu avec des antibiotiques sans besoin de recourir à la pose d’un pacemaker à demeure. On apprend aux médecins que 90 % du diagnostic tient à l’écoute du patient et au détail de l’anamnèse14. Les internistes sont formés à demander une description détaillée de chaque symptôme. Par exemple, devant un patient qui se plaint d’une douleur, l’interniste va demander : « Est-ce une douleur sourde, aiguë, une sensation de compression ou de brûlure ? Est-ce que cette douleur irradie ? Est-ce qu’elle est calmée ou aggravée par quelque chose de particulier ? » Comme Mme Q présente un syndrome métabolique, son risque d’AVC et d’infarctus sera au-dessus de la normale. – Vous a-t-on jamais fait de cathétérisme cardiaque ? – Non Docteur. – Et des examens non invasifs des artères coronaires ? Un angioscan cardiaque par exemple ? – Non, je n’ai jamais passé ces examens. Bien. Je note dans un coin de ma mémoire qu’il faut prévoir un angioscan cardiaque avec calcul du score calcique coronaire, même en l’absence d’angor d’effort et même si sa douleur thoracique n’irradie ni au cou ni dans le bras. Son risque cardiovasculaire élevé m’ennuie. Bien sûr, avec deux bilans cardiaques négatifs, la costochondrite ou le RGO sont les diagnostics les plus probables, d’autant plus que la maladie de Lyme provoque souvent une costochondrite avec palpitations et essoufflement (souvent aggravée par Babesia). Son dossier montre que le pneumologue a déjà écarté le syndrome de dysfonctionnement réactif des voies aériennes lorsqu’elle l’a consulté pour son essoufflement. L’asthme n’est donc vraisemblablement pas très bien placé sur la liste des diagnostics différentiels. Elle n’a pas effectué d’épreuves fonctionnelles respiratoires avec test de broncho-provocation à la métacholine et le RGO peut causer des symptômes asthmatiques. – Bien Mme Q, parlez-moi maintenant des douleurs musculaires et articulaires que vous avez cochées sur la liste. – Eh bien docteur, j’ai mal partout. Chaque articulation, chaque muscle de mon corps me fait mal. – Vos articulations sont-elles parfois gonflées, rouges ou chaudes ? – Non, mais j’ai beaucoup de craquements dans le cou qui est raide et me fait aussi mal, de même que le haut du dos. – Y a-t-il quelque chose qui l’améliore ou l’aggrave ? – Je prends du Tylenol ® (acétaminophène) et de l’Advil ® (ibuprofène) de temps en temps et ça m’aide. – Avez-vous consulté pour ces symptômes ?
– J’ai vu deux rhumatologues et un orthopédiste. Au vu des radios, ils ont estimé que j’avais un degré d’arthrose normal pour mon âge, sans trouver d’autre cause possible à mes douleurs. Les craquements dans le cou constituent un symptôme inhabituel, mais rencontré chez la majorité des patients souffrant de maladie de Lyme. Devant un patient aux nombreux symptômes systémiques, la majorité des médecins et praticiens (chiropraticiens, ostéopathes…) seraient capables de poser un diagnostic de maladie de Lyme simplement en explorant la présence de raideur et de craquements du cou, associés à des douleurs articulaires et/ou musculaires migratoires. Quand un patient me dit qu’il a déjà consulté plusieurs rhumatologues, je sais que les pathologies auto-immunes et les principales causes d’arthrite ont sûrement déjà été explorées ; je peux donc écarter l’arthrose, le lupus et la polyarthrite rhumatoïde. Les examens complémentaires qui ont dû être effectués sont la radiographie des articulations touchées et la recherche dans le sang d’anticorps antinucléaires (ANA) et du facteur rhumatoïde (FR). Malheureusement, la « surstimulation » du système immunitaire engendrée par la maladie de Lyme peut fausser les résultats des dosages de FR et d’ANA et produire des « faux positifs », entraînant ainsi un diagnostic erroné de lupus ou de polyarthrite rhumatoïde. C’est pour cela qu’il est si important de compléter ces examens par une recherche d’anticorps anti-peptide cyclique citrulliné (CCP) qui permettra de différencier les vraies polyarthrites rhumatoïdes des autres. Habituellement, lorsque la recherche d’ANA ou de FR est positive, on prescrit des médicaments immunosuppresseurs, comme le méthotrexate, ou des corticoïdes, voire parfois des médicaments encore plus forts tels que Enbrel® (étanercept) ou Arava® (léflunomide). Ceci n’est pas sans conséquence pour les patients atteints de maladie de Lyme qui ont des co-infections ; en effet, comme ils sont déjà immunodéprimés, les corticoïdes risquent de faire flamber des infections latentes. Ces patients se sont généralement aussi vu prescrire un dosage de CPK (créatine phosphokinase) pour écarter une myosite (inflammation et dégradation des muscles), une uricémie pour écarter la goutte, ainsi qu’une recherche des marqueurs inflammatoires pour évaluer leur degré d’inflammation. Ceci se vérifie habituellement en déterminant la vitesse de sédimentation du sang et le taux de CRP15, tout en vérifiant leur statut HLA16 (qui permet d’estimer le risque pour le patient d’avoir une maladie auto-immune). À l’examen clinique, les rhumatologues vérifient généralement l’amplitude articulaire et palpent certaines parties du corps à la recherche de zones sensibles. – Est-ce que cela vous fait mal quand j’appuie sur ces zones : l’arrière de la tête, le cou, les épaules, la colonne vertébrale, les hanches et les genoux ? Tous ces points sont sensibles. C’est pour cela qu’un diagnostic de fibromyalgie a été posé, parce que tous ces points sensibles sont caractéristiques de la fibromyalgie. – Madame Q, est-ce que la douleur musculaire et la douleur articulaire changent de place ? Ces douleurs se déplacent-elles dans le corps ? Avec des variations d’intensité, des douleurs vives et fulgurantes qui, elles aussi, vont et viennent ? – Oui. C’est exactement ça. La douleur voyage dans tout mon corps sans rime ni raison. Ils m’ont dit que je devais être folle, à cause de la façon dont je leur signalais ces
symptômes. STOOOP ! Combien de maladies provoquent de telles douleurs migratoires dans les muscles et les articulations ? Même si la littérature mentionne la gonorrhée et le mycoplasme comme causes de ces troubles, il n’y a qu’une seule maladie dont ce type de douleur est le symptôme clinique caractéristique, c’est, vous l’aurez deviné, la maladie de Lyme. – Dans le passé, quand vous avez souffert d’une bronchite, d’une angine ou d’une sinusite et que votre médecin vous a mise sous antibiotiques, avez-vous remarqué si vos douleurs s’amélioraient ou empiraient ? – Ca dépend, parfois c’était mieux, parfois pire, mais, Docteur Horowitz, vous devez être devin. Comment avez-vous su ? Rien de magique dans ce petit tour de passe-passe. Les patients souffrant d’une maladie de Lyme ou d’un SIMS ont souvent été traités par une tétracycline, des quinolones, des pénicillines ou des céphalosporines pour une infection sans rapport avec leur maladie de Lyme. Nombre d’entre eux remarquent que leurs douleurs s’atténuent dans ce cas-là. D’autres trouvent que la prise d’antibiotiques pour une autre infection exacerbe leurs douleurs. Ceci est dû à la libération de molécules inflammatoires qui tuent les Borrelia. Cette réponse de l’organisme s’appelle la réaction de Jarisch-Herxheimer17. – Je remarque que vous avez coché les fourmillements, engourdissements et sensations de brûlure. Est-ce que, par hasard, ceux-là se promènent aussi dans tout votre corps et ont tendance à aller et venir ? – C’est exactement ça docteur ! Est-ce fréquent avec la maladie de Lyme ? – Eh bien, madame Q, l’une des caractéristiques de la maladie de Lyme est la douleur migratoire dans les muscles et les articulations, ainsi que les névralgies, avec fourmillements, engourdissements et/ou sensations de brûlure, qui surviennent de façon intermittente. Nous appelons ça des paresthésies migratoires. Vous a-t-on fait un électromyogramme (EMG) ou une biopsie cutanée pour écarter d’autres neuropathies ou pathologies comme, par exemple, un syndrome du canal carpien ? – Oui. On m’a fait un électromyogramme (EMG). – Ont-ils trouvé quelque chose ? – Non. Ils m’ont dit que tout était normal. Je note qu’ils n’ont pas fait de biopsie cutanée pour écarter une neuropathie des petites fibres (NPF), pathologie fréquente dans les maladies de Lyme persistantes. Près de 70 % des maladies de Lyme provoquent des neuropathies périphériques qui donnent lieu à des sensations de brûlure, d’engourdissement ou de fourmillement dans différentes parties du corps, survenant souvent de façon intermittente, généralement dans les membres et souvent sur le visage et le cuir chevelu. Beaucoup de patients se sont précipités aux urgences en croyant qu’ils faisaient un AVC ou un accident ischémique transitoire (AIT), surtout lorsque l’engourdissement s’était manifesté dans une nouvelle partie de leur corps. Généralement, une fois les hypothèses d’un AVC ou d’un AIT écartées, ces patients sont renvoyés chez eux sans diagnostic, avec pour seule consigne de consulter un neurologue et/ou leur généraliste. Comme elle se manifeste parfois sur un seul côté du corps, la maladie de Lyme a posé une colle à plus d’un neurologue ayant
effectué en vain une échographie carotidienne ou une IRM (imagerie à résonnance magnétique) à la recherche d’une plaque pouvant être responsable d’un AVC ou d’un AIT. Ils trouvent parfois quelques OBNIs (objets brillants non identifiés) à l’IRM cérébrale, mais ceux-ci ne sont pas spécifiques et se rencontrent dans de nombreuses pathologies, dont la maladie de Lyme. Si de nombreuses taches blanches sont visibles à l’IRM, c’est généralement le diagnostic de sclérose en plaques qui est retenu. – Le neurologue vous a-t-il dit qu’il soupçonnait la présence d’une sclérose en plaques ? – Oui, mais il m’a dit qu’il n’y avait pas assez de taches blanches sur l’IRM pour confirmer ce diagnostic. Je lui demande alors de pencher la tête en avant, de façon à essayer de toucher sa poitrine avec son menton. – Est-ce que vos extrémités sont plus engourdies ainsi ? – Non. Je ne ressens pas de différence. Je lui demande d’effectuer cette manœuvre parce que, chez les personnes atteintes de sclérose en plaques, elle déclenche souvent des fourmillements ou des sensations « d’électricité » dans les extrémités et le dos. Cela s’appelle le signe de Lhermitte. La maladie de Lyme imite fort bien la sclérose en plaques, c’est pourquoi, avant de poser un diagnostic de sclérose en plaques, il convient d’écarter une malade de Lyme, une co-infection par Chlamydia pneumonia ou Mycoplasma ainsi que l’intoxication par métaux lourds. L’ennui, c’est que la plupart du temps, ce sont des tests peu sensibles comme ELISA ou le Western Blot qui sont effectués par de petits laboratoires locaux et que ces analyses « loupent » souvent des maladies de Lyme. – Je remarque que vous avez aussi coché les maux de tête. Sont-ils très forts ? Sur une échelle de zéro à dix, où zéro représenterait l’absence de douleur et 10 la pire douleur que vous puissiez imaginer, quelle note donneriez-vous à ces maux de tête ? – En général, c’est de l’ordre de 4 à 5, mais il m’arrive parfois d’atteindre un 8 ou un 9. Dans ces cas-là, j’ai la nausée, je vomis et la lumière me fait mal. Ces symptômes sont classiques de la migraine. – Vous a-t-on jamais dit que vous souffriez de migraines ? – Oui. Je prends de l’Imitrex® (sumatriptan) quand les maux de tête sont trop pénibles. Parfois, j’ai besoin de prendre un Fioricet® (paracétamol, caféine, butalbital). Certaines migraines, notamment les migraines dites « basilaires », peuvent accroître le risque d’AVC. Or, elle présente déjà plusieurs facteurs de risque cardiovasculaire. Il faudra s’occuper de cela dans un futur proche. – Votre mère souffrait-elle de migraines ? Les migraines sont souvent héréditaires. – Oui. Cela lui arrivait. – Étaient-elles pires au moment des règles ? – Oh oui ! Ils ont tout essayé : les bêtabloquants, les inhibiteurs calciques, le Topamax ® (topiramate), le Dépakote® (acide valproïque), l’Elavil® (amitriptyline), mais je ne tolérais pas certains effets secondaires alors j’ai arrêté. – Et les maux de tête moins forts dont vous parlez. Avez-vous remarqué s’ils survenaient quand vous n’aviez pas mangé ?
– Oui. Vous avez raison. Cela m’arrive. Voilà qui renforce la possibilité d’une hypoglycémie postprandiale ; les fluctuations glycémiques peuvent donner mal à la tête. Le « coup de pompe » à mi-journée accompagné d’un mal de tête lorsqu’on a mangé trop de féculents au déjeuner, ou parce que l’on n’a pas mangé depuis longtemps, sont des symptômes classiques d’hypoglycémie. On observe aussi ce phénomène chez les patients atteints d’un syndrome métabolique avec insulinorésistance, dont Madame Q s’est plaint tout à l’heure. L’insuffisance surrénalienne, autre cause possible d’hypoglycémie accompagnée de fatigue, est souvent observée en cas de maladie de Lyme ainsi que dans d’autres pathologies chroniques. Il ne faudra pas l’oublier lors du diagnostic différentiel. Si l’on veut permettre au patient d’atteindre le meilleur bien-être possible, il est important de repérer tous les facteurs à l’origine de chaque symptôme. – Je remarque, madame Q, que vous avez coché les étourdissements et les vertiges sur votre liste de symptômes. À quelle fréquence en souffrez-vous ? Vous sentez-vous étourdie lorsque vous changez de position ? Lorsque vous passez de la position assise à la position debout par exemple ? Tout en l’interrogeant, je lui enfile le brassard à tension. Sa tension artérielle (TA) dans la salle d’examen est de 9/6 cm Hg, ce qui est plutôt bas sans être anormal. – Oui, j’ai souvent la tête qui tourne quand je me lève, et puis ça s’en va et ça revient sans raison apparente. – Avez-vous consulté un médecin à ce sujet ? – Oui, bien sûr. Quand il n’a pas trouvé d’explication, le neurologue m’a adressé à un ORL qui a pratiqué plusieurs tests : ils m’ont injecté de l’eau dans les oreilles en observant les mouvements de mes yeux, puis ils ont placé ma tête dans différentes positions et m’ont demandé de me lever et de fermer les yeux. Ils m’ont dit que tous les examens étaient négatifs. Bien. Donc ils ont exploré le fonctionnement de son oreille interne et du cervelet pour écarter les causes les plus fréquentes d’étourdissements, mais ils n’ont rien trouvé. Cependant, ils n’ont pas fait de test sur table basculante. – Est-ce qu’ils vous ont fait un test sur table basculante avec surveillance de la TA à l’hôpital ? – Non docteur. C’est sans doute bien le seul test qu’ils n’ont pas pratiqué. Je demande à madame Q de se lever de la chaise sur laquelle elle est assise. Le tensiomètre montre que sa tension a chuté à 8/5. Son pouls a augmenté, autrement dit son cœur s’est mis à battre plus vite pour faire remonter la tension. Il est probable qu’elle ait une maladie de Lyme avec dysfonctionnement du système nerveux autonome. Je me tourne lentement vers elle. – Je pense que vous avez un STOP. Elle sourit et me regarde droit dans les yeux. – On n’a pas fait ça à la fac, docteur… – Non, non, madame Q. Vous m’avez mal compris. STOP est l’acronyme de « syndrome de tachycardie orthostatique posturale », aussi appelé « dysfonctionnement du système
nerveux autonome ». Cela signifie que votre tension artérielle est tout le temps trop basse. C’est pour cela que vous avez des étourdissements lorsque vous vous levez. Cela expliquerait votre fatigue, vos étourdissements et vos problèmes de concentration. Est-ce qu’on vous a déjà prescrit du Florinef® (fludrocortisone) ou du ProAmatine® (midodrine) pour faire remonter votre tension ? – Non docteur. Ces noms ne me disent rien. – Continuons à explorer votre liste. Vous avez coché la sensibilité à la lumière et aux sons. Est-ce tout le temps, de temps en temps, ou seulement quand vous avez la migraine ? – Non docteur. C’est quasi continuel. Je suis obligée de porter des lunettes de soleil dehors et j’ai vraiment du mal à rester près de bruits forts. C’est pour cela que je suis tout le temps en train de dire à mon mari de se taire. Il est sourd comme un pot, vous savez. Alors, il monte le son de la télé à fond et il crie pour me parler alors que je l’entends très bien. Assis dans un coin, l’époux de madame Q a assisté à tout l’entretien. Il lève les yeux au ciel. – Et les problèmes de mémoire et d’attention. Depuis quand en souffrez-vous ? Ces troubles sont-ils légers, modérés, ou sévères ? Sont-ils intermittents ? Prenez-vous des médicaments pour ça ? – On m’a fait tous les tests et on m’a dit que c’était normal quand on vieillissait. Ce n’est pas assez intense pour parler d’Alzheimer, mais mon médecin a suggéré que je pourrais prendre des médicaments. Certainement de l’Aricept ® (donépézil) ou une association au Namenda® (mémantine) ou autre produit similaire. J’avais remarqué dans son dossier que le dosage de vitamine B12 et d’acide folique avait bien été inclus dans le bilan sanguin, mais pas le dosage du taux d’AMM (acide méthylmalonique), un marqueur qui signe la carence en vitamine B12. Nous voyons quelques patients avec un taux d’AMM élevé et leur mémoire s’améliore avec la supplémentation en vitamine B12. Le dosage sanguin en vitamine B12 de madame Q est de 340. Certes, ce n’est pas inférieur au seuil critique de 200, au-delà duquel une anémie pernicieuse (ou anémie de Biermer) est suspectée, mais ce n’est tout de même pas beaucoup. Il est même si faible que le laboratoire a rappelé sur son compte-rendu que des anomalies neuropsychiatriques peuvent être observées dans 5 à 10 % de la population dont le taux est compris entre 200 et 400. Avec 340, elle n’est donc pas à l’abri d’une carence en vitamine B12. – Avez-vous jamais pris de la vitamine B12 ? – Non. On m’a dit que mon dosage était normal. Bien. Je note au passage qu’il faudra faire d’autres analyses pour dépister une éventuelle carence en vitamines B12 ou un défaut de méthylation, plus particulièrement un dosage d’AMM, une recherche de mutation du gène codant pour la MTHFR (méthylènetétrahydrofolate réductase) et un dosage de l’homocystéine. Je prescrirais volontiers aussi des injections de méthylcobalamine à titre d’essai car elles aident beaucoup certains patients atteints de maladie de Lyme, quel que soit leur taux de vitamine B12. Ceci est sans doute dû à un blocage des voies de méthylation et de détoxification ; de
plus, les groupes méthyle supplémentaires favorisent la détoxification de certains polluants chimiques et métaux lourds. En examinant les résultats d’analyse du dossier, je constate aussi que son bilan thyroïdien est incomplet. Il ne suffit pas pour évaluer la fatigue et les pertes de mémoire. Il manque le dosage de T3, T3 libre et T3 inverse. Tous ces tests sont des marqueurs importants d’une bonne fonction thyroïdienne. Je prends donc note qu’il faudra explorer plus profondément sa fonction thyroïdienne. Beaucoup de personnes atteintes de maladie de Lyme ont un niveau insuffisant d’hormones thyroïdiennes actives et leur taux de T3 inverse est parfois élevé. Ceci peut contribuer à leur fatigue et à leur perte de mémoire. Malheureusement, la fourchette de valeurs normales « basses » des dosages thyroïdiens a été calculée à partir des résultats d’une population en bonne santé, pas de malades chroniques comme ceux atteints d’une infection transmise par les tiques. Ces patients présentent souvent aussi des taux élevés de cortisol liés au stress de la maladie. Le cortisol est une hormone produite par les glandes surrénales à taux plus importants en période de stress. Or une forte concentration de cortisol peut interférer avec les niveaux d’hormones thyroïdiennes et causer un syndrome euthyroïdien ou normothyroïdien. Il s’observe chez des patients sévèrement malades ou dénutris dont les taux de T3 et T4 sont très faibles, ce qui pourrait contribuer à leur fatigue. Ils ont aussi souvent un dysfonctionnement de l’hypophyse, voire une insuffisance hypophysaire. Située dans le cerveau, l’hypophyse est une glande qui régule toutes les hormones du corps, notamment la TSH (thyroid stimulating hormone), l’hormone qui stimule la production d’hormones par la thyroïde. Si la maladie de Lyme a touché l’hypophyse, la production de TSH est entravée et la production thyroïdienne est moindre. Dans ce cas, le médecin ne peut pas se fier au dosage de TSH, même s’il a appris à la Faculté que ce résultat était le marqueur le plus fiable de la fonction thyroïdienne. – Parlez-moi de votre sommeil, madame Q. Je remarque que vous avez coché la case « insomnies ». Avez-vous du mal à vous endormir ? Vous réveillez-vous souvent dans la nuit ? Ou les deux ? Ronflez-vous ou souffrez-vous du syndrome des jambes sans repos ? Cela gêne-t-il votre sommeil ? Avez-vous besoin d’aller aux toilettes au milieu de la nuit ? Prenez-vous des somnifères ? – Eh bien docteur, j’ai du mal à m’endormir et oui, je me réveille souvent. J’ai fait des études du sommeil à l’hôpital il y a quelques années et ils m’ont dit que mon apnée du sommeil n’était que légère. Pour eux, ce n’était pas assez sérieux pour justifier mon degré d’insomnie. Ils m’ont recommandé l’Ambien ® (zolpidem), mais l’effet semble trop court. J’ai essayé plusieurs autres somnifères mais aucun ne semble marcher. – Avez-vous essayé le Benadryl® (diphenhydramine) ou des plantes médicinales ? Certains trouvent que la mélatonine, la racine de valériane ou les extraits de thé vert comme la L-théanine les aident. – Non. Personne ne m’a jamais suggéré ces produits. – Combien d’heures dormez-vous en réalité par nuit ? – Oh, peut-être 4 à 5 heures au mieux. Alors, il est vrai que le sommeil change avec l’âge. Cependant, j’ai observé des troubles du sommeil sévères et rebelles chez au moins 80 à 90 % de mes patients atteints de
maladie de Lyme, y compris chez les jeunes. Sans une bonne nuit de sommeil, il est quasiment impossible de corriger certains symptômes résistants chez ces patients. En effet, la privation de sommeil entraîne une production de molécules de signalisation appelées cytokines qui sont presque toutes inflammatoires. L’interleukine-6, par exemple, contribue à la fatigue, aux douleurs articulaires et musculaires, et aux difficultés de mémoire et de concentration de ces patients. Il est donc essentiel de remonter à la source des problèmes au lieu de se contenter de donner un médicament pour traiter le symptôme. Un bilan complet doit être effectué pour dépister les causes les plus courantes de l’insomnie telles que l’apnée du sommeil, les problèmes hormonaux, le syndrome des jambes sans repos, les effets secondaires de certains médicaments, les problèmes urinaires et les troubles psychiatriques comme l’angoisse et la dépression. Les SIMS et la maladie de Lyme peuvent provoquer de l’insomnie, mais il existe souvent des facteurs concomitants que l’on doit d’abord écarter si l’on veut améliorer la qualité de vie du patient de façon significative. – Finalement, madame Q, je vois que vous avez coché la case concernant l’aggravation des symptômes par l’absorption d’alcool. – Oui docteur. Je n’ai jamais beaucoup bu, mais j’aime bien un verre de vin rouge de temps en temps et je me sens très nettement plus mal alors. Il est très fréquent que les patients atteints de maladie de Lyme signalent une intolérance à l’alcool. Le vin rouge peut exacerber les maux de tête et déclencher des migraines. De plus, certains sont sensibles aux sulfites contenus dans le vin rouge. La bière et le vin peuvent aussi déclencher des épisodes d’hypoglycémie chez certains individus sensibles (je me suis toujours demandé quand j’étais à la faculté de médecine pourquoi les autres buvaient plusieurs verres de bière belge alors que je m’écroulais toujours après en avoir bu une seule ! Plus tard, j’ai découvert que je souffrais d’hypoglycémie). Après avoir passé tous les symptômes de madame Q en revue grâce au questionnaire, mon impression clinique était qu’il y avait de très fortes chances pour qu’elle souffre d’une maladie de Lyme, d’une babésiose, d’un STOP avec dysfonctionnement du système nerveux autonome, d’hypoglycémie postprandiale avec syndrome métabolique et peutêtre même un dysfonctionnement surrénalien, une costochondrite et une fibromyalgie provoquées par la maladie de Lyme ainsi qu’une éventuelle carence en vitamine B12. Tout ceci, simplement en prenant le temps de l’interroger en détail, d’étudier son dossier médical et les résultats d’analyses qu’elle avait apportés, et en formulant quels diagnostics différentiels pouvaient expliquer ses symptômes. C’est fou la quantité d’information que l’on peut recueillir en procédant à un interrogatoire détaillé, en étudiant soigneusement tout le dossier médical et les résultats d’analyses antérieures et en utilisant le questionnaire. C’est un outil sans comparaison pour guider le thérapeute dans son évaluation d’un patient chronique, dans sa formulation des diagnostics différentiels omis lors des bilans antérieurs. En 18 ans, madame Q a déjà consulté une vingtaine de médecins et aucun n’a réussi à l’aider. Sachant cela, il me faut envisager des pathologies qui auraient pu être ratées ou ignorées par mes confrères, notamment la maladie de Lyme, la babésiose et les co-
infections, les intoxications par métaux lourds, le dysfonctionnement mitochondrial, les anomalies fonctionnelles de la biochimie de l’organisme, certaines carences en vitamines et oligo-éléments, les pathologies liées à l’environnement comme l’hypersensibilité chimique multiple et les problèmes de détoxification associés, les anomalies hormonales telles que les insuffisances surrénaliennes ou le déficit en hormone de croissance, l’hypoglycémie postprandiale, avec ou sans Candida ou allergie alimentaire. Les chapitres suivants passent en revue les 16 diagnostics différentiels que j’explore dans mon évaluation de patients atteints de maladie chronique persistante. Cette liste vous permettra de comprendre certains symptômes inexpliqués et vous aidera à remonter à l’origine de votre maladie. La maladie de Lyme est complexe. Nous commencerons par explorer le premier des 16 points de la grille d’évaluation des SIMS tout en étudiant les connaissances scientifiques relatives à la maladie de Lyme et autres co-infections transmises par les tiques. Nous envisagerons ensuite les différentes options thérapeutiques en fonction des résultats du questionnaire et d’un examen clinique complet. Nous apprendrons comment ordonner les demandes d’examens complémentaires selon l’anamnèse et l’examen clinique, puis nous apprendrons à utiliser la grille de diagnostic différentiel en 16 points de Horowitz pour détecter d’éventuelles étiologies concomitantes pouvant être responsables de la maladie en cours. Ce modèle n’est pas uniquement théorique. En pratique clinique, il fonctionne ! Son élaboration soigneuse repose sur mon traitement de 12 000 personnes souffrant de pathologies chroniques. Ces dernières continuaient à souffrir, malgré les meilleurs soins de notre système médical actuel. Pourtant, lorsque j’ai utilisé ma grille de diagnostics différentiels des SIMS, cela a permis de résoudre leurs énigmes médicales et ils se sont souvent retrouvés en bien meilleure santé qu’ils ne l’auraient cru possible. Le modèle SIMS donne de l’espoir aux personnes atteintes de pathologies chroniques qui ne sont pas parvenues à trouver d’explications à leurs symptômes. 6 La radiculite est une inflammation douloureuse d’un nerf crânien ou rachidien. 7 La méningite est une inflammation des membranes qui recouvrent le cerveau et la moelle épinière. 8 Molécules secrétées par les cellules et leur permettant de communiquer entre elles. 9 Acronyme anglais de sex hormone binding globulin. 10 Taux de plomb dans le sang. 11 L’auteur fait ici un jeu de mot intraduisible : il parle des outils du MD ; MD est l’abréviation anglaise de Medical Doctor (docteur en médecine) mais ici, l’auteur l’explique dans sa parenthèse par « medical detective » (détective médical). 12 Ganglions gonflés. 13 Respiration anormale, lente, régulière et profonde avec pause en fin d’inspiration et en fin d’expiration. 14 L’histoire du patient, ses antécédents médicaux. 15 Abréviation anglaise de C-reactive protein, que l’on conserve en français. 16 Abréviation anglaise de human leukocyte antigen, que l’on conserve en français. 17 Aggravation des symptômes qui se produit lorsque les spirochètes meurent.
CHAPITRE 2
LA GRILLE DE DIAGNOSTIC DIFFÉRENTIEL EN 16 POINTS DE HOROWITZ
E
n médecine, l’axiome fondamental c’est : « D’abord, ne pas nuire ». L’axiome suivant est : « Ce n’est pas parce qu’on garde l’esprit ouvert que le cerveau risque de tomber par la brèche ». Les informations contenues dans ce chapitre risquent de pousser le lecteur au-delà de sa zone de confort diagnostique, ce qui peut s’avérer très gratifiant si l’on a très envie d’aller mieux ou d’aider ses
patients. Commençons par le commencement. Mettre un nom sur une maladie et prescrire un médicament ne signifie pas nécessairement ni que vous l’avez correctement comprise, ni que vous l’avez bien traitée. Ceci est particulièrement vrai de la maladie de Lyme et des pathologies chroniques. Nous ne pouvons plus exercer la médecine de la même façon. Il nous faut maintenant accepter une nouvelle vérité : la plupart des maladies chroniques résultent de processus multifactoriels complexes qui demandent que chaque pathologie soit disséquée pour en trouver toutes les composantes. Dans le chapitre précédent, nous avons utilisé le questionnaire symptomatologique des SIMS de Horowitz pour identifier les nombreux symptômes qui peuvent accompagner la maladie de Lyme. L’étape suivante consiste à retrouver les différentes composantes de chaque symptôme pour en découvrir l’origine. Dans certains cas, nous nous apercevrons peut-être que les symptômes résultent tous d’un seul processus pathologique. Cependant, il y a beaucoup plus de chances pour que les symptômes chroniques de votre patient soient le fruit de plusieurs maladies concomitantes et interconnectées. Le problème du modèle médical actuel, c’est que la Faculté nous enseigne qu’il n’y a généralement qu’une seule étiologie par maladie. Ce modèle qui découle des travaux du brillant chercheur que fut Pasteur, a été transmis aux médecins de génération en génération depuis la fin du XIXe siècle sans évolution majeure de l’appréhension de la maladie chronique. À cause de cela, de nombreux patients chez qui l’on a diagnostiqué une maladie de Lyme se retrouvent à errer de médecin en médecin, de spécialiste en spécialiste, chacun ne s’intéressant qu’à un seul de leurs symptômes, souvent sans réussir à l’éliminer. D’autres sont condamnés à souffrir en silence de multiples symptômes apparemment sans rapport les uns avec les autres, parce qu’on leur a dit qu’ils souffraient d’autres maladies, également mystérieuses, notamment le syndrome de fatigue chronique, la fibromyalgie, la sclérose en plaques (SEP), la sclérose latérale amyotrophique (SLA), d’obscures pathologies auto-immunes, ou un quelconque trouble psychiatrique stigmatisant. En effet, ce modèle traditionnel implique que si votre médecin ne trouve pas de réponse unique à votre collection de problèmes, étant donné que les examens de
laboratoire sophistiqués et l’imagerie de pointe disponibles aujourd’hui dans les cliniques et hôpitaux sont obligatoirement fiables et exhaustifs, il vous affirmera que le problème est psychologique. Cette persistance navrante de l’idée que la détresse psychologique n’aurait pas d’effets sur le corps est sans doute pire encore. L’autre implication de ce modèle périmé est d’ordre financier. Si nous ne modifions pas la façon dont nous percevons la maladie, le coût des soins ne cessera d’augmenter. En 2006, une étude conduite par les chercheurs des centres d’épidémiologie américains (CDC) a montré que la charge annuelle des maladies de Lyme diagnostiquées correctement et traitées de bonne heure était inférieure à 1 500 $, généralement pendant une année au plus. En revanche, lorsque la maladie de Lyme n’est pas diagnostiquée de bonne heure et que l’état du patient s’aggrave progressivement, la charge annuelle dépasse les 16 000 $ par an, et ce sur plusieurs années. En plus, le coût des maladies de Lyme non résolues ne se limite pas aux frais médicaux directs. L’étude montre que 80 % des 16 199 $ que la maladie de Lyme coûte chaque année est imputable à des frais médicaux indirects et non médicaux et à la perte de productivité. Au lieu de ne rechercher qu’une seule réponse, je pense que nous devrions en chercher plusieurs. La majorité de mes patients atteints de maladie de Lyme, et bien d’autres qui souffrent plus généralement de maladies chroniques n’ont pas qu’une seule cause à leurs symptômes. Il s’agit souvent d’un ensemble de problèmes médicaux concomitants et, pour reprendre ma comparaison précédente, ils ont 16 clous dans le pied. Une nouvelle approche multifactorielle permettrait d’extraire un à un chacun des clous qui font souffrir nos patients. Mon approche répertorie 16 catégories de maladies susceptibles de survenir en même temps que la maladie de Lyme (ML-SIMS) ou, en l’absence de maladie de Lyme, d’exacerber les symptômes d’autres pathologies (SIMS non ML). La maladie de Lyme est difficile à diagnostiquer parce que ses symptômes peuvent s’observer dans chacune de ces 16 pathologies différentes. Comme sa cousine la syphilis, la maladie de Lyme imite parfois certaines pathologies fréquemment rencontrées dans nos cabinets et peut exacerber des problèmes médicaux préexistants. Ainsi, si une personne est sujette aux maux de tête depuis toujours, elle se mettra à souffrir de migraines. La littérature regorge de preuves à ce sujet, bien que l’on ne comprenne pas encore pourquoi la maladie de Lyme se manifeste de façon différente chez chaque personne. D’autres facteurs jouent un rôle : le patrimoine génétique et la bio-individualité, le nombre de morsures de tiques, les co-infections, le statut immunitaire du moment, la charge en toxiques environnementaux et la capacité de détoxification ainsi que l’état psychologique et la souche ou espèce de Borrelia. Quand je parle d’espèce, je me réfère à la classification des organismes vivants, plantes, animaux et bactéries inclus ; une souche est une variante génétique ou un sous-type à l’intérieur d’une espèce. Du fait de cette multiplicité de facteurs, la maladie de Lyme s’exprime pour ainsi dire de façon différente chez chaque individu. Ainsi, avant de venir me voir, beaucoup de mes patients avaient été diagnostiqués comme souffrant d’une pathologie psychiatrique alors que la maladie de Lyme est capable de générer tout un éventail d’anomalies neuropsychiatriques. En fait, quasiment chaque diagnostic figurant au DSM18, la « bible »
du diagnostic neuropsychiatrique, peut résulter d’une maladie de Lyme ou de ses coinfections. De même, la maladie de Lyme peut imiter une foultitude de symptômes neurologiques : elle est capable d’entraîner des déficits neurocognitifs, tant chez l’enfant que chez l’adulte, et a même été associée à la maladie de Gilles de la Tourette et à la maladie d’Alzheimer. C’est la même chose avec le syndrome de fatigue chronique (ou encéphalomyélite myalgique) et la fibromyalgie. On la prend aussi parfois pour un trouble auto-immun tel que la polyarthrite rhumatoïde, le lupus ou la sclérose en plaques, par exemple. Les symptômes résistants des patients pourraient donc être dus à un mauvais diagnostic ou à l’absence de traitement adéquat d’infections sous-jacentes, en plus d’une absence de prise en compte de toutes les anomalies présentes sur la grille d'évaluation des SIMS. Je pense que la persistance des symptômes de maladie de Lyme implique plus que la simple prolongation d’une infection. Quasiment aucun de nos 12 000 patients ne présentait une « maladie de Lyme pure », ce qui concorde avec les divergences signalées dans la littérature. En fait, la majorité des patients atteints de maladie de Lyme présente un syndrome clinique bien défini, une association de symptômes concomitants. Certains symptômes de maladie de Lyme sont aggravés par les co-infections et par la présence de multiples facteurs concomitants, certains dus à la maladie de Lyme et aux co-infections, d’autres qui sont sans rapport mais ont bel et bien un impact clinique. J’ai baptisé « syndrome infectieux multisystémique » ou SIMS, ce syndrome car je trouve ce terme plus approprié à ces patients qu’aucun traitement n’a réussi à guérir. Le SIMS regroupe non seulement les symptômes de la maladie de Lyme et de ses multiples co-infections transmises par les tiques, c’est-à-dire Borrelia burgdorferi, l’agent responsable de la maladie de Lyme, et d’autres infections bactériennes, virales, parasitaires ou fongiques. Il inclut également dysfonctionnements immuns, inflammations, intoxications environnementales, allergies, carences enzymatiques et alimentaires avec anomalies fonctionnelles des voies de signalisation biochimiques, dysfonctionnements mitochondriaux, problèmes neuropsychologiques, troubles du système nerveux autonome, anomalies endocriniennes, troubles du sommeil, anomalies gastro-intestinales avec perturbation du fonctionnement hépatique, ainsi que des problèmes relatifs à la douleur, aux médicaments et à la perte de forme physique. Grâce à cette définition, mes patients sont mieux soignés car TOUS ces facteurs doivent être abordés et traités avant qu’ils ne recouvrent la santé. C’est sans doute pour cela que tant de patients ne vont pas mieux après le traitement « standard » de la maladie de Lyme : un mois de doxycycline ou de Rocéphine ® (ceftriaxone). La conception de nombreuses études en double aveugle contre placebo sur le meilleur traitement de la maladie de Lyme ne tient aucun compte des éventuelles causes multifactorielles de la maladie, et n’administre qu’un ou deux antibiotiques pendant un temps court, ce qui n’aborde qu’une petite fraction du problème. La solution consiste à adopter une approche diagnostique plus holistique (plus globale). Voilà vingt-sept ans que j’affine cette définition en fonction des informations glanées au fil de mes 12 000 patients. En bon détective médical, à chaque fois que je trouve une pièce du puzzle, je l’ajoute à la liste qui, avec le temps, est devenue assez exhaustive.
Le modèle SIMS explique en partie les différences d’approche de l’IDSA et de l’ILADS qui publient des directives divergentes pour le diagnostic et le traitement de la maladie de Lyme. Les recommandations de l’ILADS mettent l’accent sur le jugement clinique du médecin en matière de diagnostic, étant donné que la littérature scientifique ne mentionne l’existence d’aucun test réellement fiable. La démarche diagnostique de l’IDSA se restreint aux critères du CDC. Cependant, beaucoup de praticiens ne suivent pas les directives de l’IDSA. Mon modèle permet de considérer la maladie de Lyme dans le cadre du SIMS : un syndrome qui regroupe les multiples facteurs concomitants à l’origine de l’état chronique des patients. Certains médecins l’ont adopté après avoir assisté à l’une de mes présentations lors d’un congrès médical, et ont validé son intérêt en pratique clinique.
LE DIAGNOSTIC DE LA MALADIE DE LYME ET LES EXAMENS DE LABORATOIRE Différentes directives et définitions sont utilisées pour diagnostiquer la maladie de Lyme. Les recommandations de l’IDSA sont basées sur la stricte définition épidémiologique du CDC, conçue dans le but de surveiller la maladie de Lyme au niveau national et surtout utilisée par les services du ministère de la Santé à des fins épidémiologiques. Leur définition est restreinte, ce qui signifie que seule une minorité des cas satisferont ces critères qui sont :
• Présence d’un érythème migrant de 5 cm de diamètre ou plus ; • Confirmation par un laboratoire d’au moins une manifestation tardive
objective, telle que la méningite (l’inflammation survenant dans les membranes qui protègent le cerveau et la moelle épinière), l’atteinte de l’un des nerfs crâniens, de courts épisodes d’arthrose ou le bloc auriculo-ventriculaire (défaut de conduction électrique dans le cœur). Les prestataires de santé adhérant aux recommandations de l’IDSA utilisent ces critères. D’après le CDC, toute manifestation tardive demande confirmation par un examen de laboratoire. Il peut s’agir d’une culture de prélèvement sanguin, cutané, articulaire ou céphalorachidien (LCR) qui s’avère positive pour Borrelia burgdorferi, ou de l’identification dans le LCR d’anticorps dirigés contre la bactérie. Cependant, la méthode la plus courante fait appel à un protocole d’analyse en deux temps bien précis. Le premier test est l’ELISA et le second, le Western Blot. Les deux sont des tests indirects car, au lieu de déceler les micro-organismes, ils recherchent les anticorps dirigés contre Borrelia burgdorferi fabriqués par le système immunitaire du patient. Le test ELISA mesure la quantité totale d’anticorps dirigés contre Borrelia burgdorferi tandis que le Western Blot recherche les anticorps du sujet dirigés contre les différents antigènes19 de Borrelia. Si ces protéines Borrelia sont présentes en nombre suffisant, le test est considéré comme positif. Malheureusement, comme ces tests sont souvent imprécis, beaucoup de patients ne satisfont pas à ces critères de diagnostic de maladie de Lyme. C’est pour cela que le CDC annonce sur son site Internet : « cette définition a été conçue en vue du signalement
national des cas de maladie de Lyme et ne doit pas servir au diagnostic clinique. » Les faux négatifs abondent dans la littérature et aucun test, ou combinaison d’examens n’est parfait du point de vue diagnostique. Le CDC fait remarquer qu’il existe des problèmes avec les analyses de laboratoire et qu’elles ne suffisent pas à poser un diagnostic de maladie de Lyme. De nombreuses études le confirment. La première date de 1996. Elle a été effectuée par les services du ministère de la Santé de l’État de New York. Parmi les 1 535 patients étudiés, 81 % des cas sans érythème migrant n’ont pas été confirmés par le protocole d’analyse du CDC. En d’autres termes, ce protocole d’analyse est passé à côté de 81 % des cas de maladie de Lyme (ML), surtout lorsque le patient ne présentait pas l’érythème en forme de cible caractéristique. L’étude de l’université John Hopkins en 2005 comprend une des revues les plus exhaustives des tests anti-ML standards. Ces chercheurs ont étudié les dosages sanguins et les analyses d’ADN (PCR) des patients des États de Pennsylvanie et du Maryland dont la maladie de Lyme avait été diagnostiquée de bonne heure. Ils ont trouvé de sérieux défauts : quand la méthode standard en deux étapes (ELISA puis Western Blot) recommandée par le CDC était utilisée pour des patients chez qui d’autres analyses avaient déjà confirmé une maladie de Lyme, les résultats étaient positifs dans 45 à 77 % des cas. Quant aux analyses ADN, les chercheurs de Hopkins ont signalé qu’elles détectaient rarement des maladies de Lyme confirmées par ailleurs. Dans une autre étude publiée en 2005 par le Journal of Medical Microbiology, le Dr Marangoni signale une divergence des résultats de trois tests ELISA commerciaux différents. La sensibilité de l’analyse du sang provenant d’un même échantillon variait de 36,8 à 70,5 %. Une étude conduite par Ang en 2011 a confirmé que non seulement le test ELISA manquait de sensibilité, mais qu’en plus les différents kits d’analyse Western Blot produisaient des résultats discordants pour un même échantillon de sang. Il en a conclu que les chances pour qu’un patient souffrant de maladie de Lyme soit diagnostiqué dépendaient énormément des tests ELISA et Western Blot utilisés par le laboratoire. Ceci corrobore les résultats d’une étude de Bakken, publiée plusieurs années auparavant dans le Journal of the Clinical Microbiology. Une autre étude des docteurs Ray Stricker et Lorraine Johnson, publiée en 2007 par le British Medical Journal, ne retrouve qu’une sensibilité totale de 56 % pour la combinaison ELISA/Western Blot. Ces résultats font écho à ce que j’ai constaté au cabinet : beaucoup de mes patients souffrent bien de maladie de Lyme mais les protocoles d’analyses n’ont pas été assez sensibles pour la détecter et, selon les critères du CDC, si leur test ELISA est négatif, ils ne peuvent pas bénéficier d’un Western Blot. D’après les directives de l’ILADS, le diagnostic de maladie de Lyme est essentiellement clinique. Les cas répondant aux critères du CDC entrent dans la définition de l’ILADS, tout comme les patients dont les symptômes correspondent à une maladie de Lyme et qui ont été exposés aux tiques vectrices, surtout si l’on ne parvient pas à attribuer ces symptômes à d’autres pathologies. Un résultat positif au protocole d’analyse en deux temps n’est pas considéré comme nécessaire, étant donné que les tests actuellement disponibles ne sont pas fiables. Des bandes caractéristiques de la maladie de Lyme peuvent être trouvées au Western Blot (c.-à-d. 23 kDa, 31 kDa, 34 kDa, 39 kDa,
83-93 kDa), mais ne pas présenter exactement le profil caractéristique pour être considérées comme positives par le CDC, malgré un tableau clinique et une réponse thérapeutique en accord avec la maladie de Lyme lorsque les autres processus pathologiques ont été écartés. Le CDC préconise la recherche de maladie de Lyme, mais sans chercher à identifier les différentes souches : 5 bandes positives pour les anticorps IgG et deux bandes positives sur trois pour les anticorps IgM (23, 39, 41) confirment le diagnostic, et ce, seulement si le test ELISA était positif. Cependant, en pratique clinique, les patients aux symptômes de maladie de Lyme persistants satisfont rarement les critères du CDC. Il semblerait que le nombre de patients réellement atteints de maladie de Lyme non détectés par les tests standards soit énorme. C’est du moins ce que suggèrent les tests de dépistage effectués pour confirmer le diagnostic dans une étude pour le NIH20. Lorsque le docteur Brian Fallon, expert de renommée mondiale, spécialiste des aspects neuropsychiatriques de la maladie de Lyme, a recruté des patients connus pour avoir été exposés à Borrelia dans le cadre d’une étude NIH en double aveugle, seul un patient sur cent satisfaisait aux critères du CDC, bien qu’il soit évident qu’ils étaient réellement malades. Ces points de vue opposés ont semé le trouble chez de nombreux praticiens quant à la meilleure façon de diagnostiquer et de soigner une maladie de Lyme. Voici les neuf critères de base qui m’aident à poser un diagnostic : 1• La maladie de Lyme se diagnostique cliniquement et les résultats d’examens ne servent qu’à étayer le diagnostic clinique. 2• La présence d’un érythème migrant est une preuve formelle de maladie de Lyme qui exonère de toute nécessité de pratiquer d’autres examens pour confirmer le diagnostic. 3• Si les analyses sont faites trop tôt, ou si des antibiotiques ont été pris en début de la maladie, peu d’anticorps peuvent avoir été produits et les patients seront souvent séronégatifs. 4• Le protocole d’analyses en deux étapes, avec un test ELISA suivi d’un Western Blot, passera à côté de la majorité des cas de maladie de Lyme étant donné la faible sensibilité de ces tests. 5• Si le Western Blot nous fournit plus d’informations, il a aussi ses limites. Il existe environ 100 souches de Borrelia aux États-Unis et plus de 300 dans le monde. Les réactions croisées d’une souche à l’autre sont fréquentes, d’où les nombreux faux négatifs. L’intérêt du Western Blot dépend de l’expérience du laboratoire, de la souche (ou des souches) de Borrelia à laquelle a été exposé le patient, et de l’identification de certaines bandes qui reflètent l’exposition à Borrelia burgdorferi. Les bandes spécifiques a u x Borrelia détectent les protéines de surface (Osp, pour outer surface protein) présentes à la surface des micro-organismes qui sont observées dans la maladie de Lyme. Les bandes concernées sont les cinq protéines suivantes, chacune ayant un poids moléculaire différent, exprimé en kilodaltons (kDa) : 23 kDa (Osp C, protéine de surface C), 31 kDa (Osp A, protéine de surface A), 34 kDa (Osp B, protéine de surface B), 39 kDa, et 83-93 kDa. Si l’une de ces bandes est présente sur un Western Blot, il y a de fortes
chances pour que le patient ait été exposé à Borrelia burgdorferi, surtout si la clinique correspond. Si deux bandes spécifiques ou plus sont présentes, les chances augmentent d’autant. Certains laboratoires spécialisés, comme IgeneX, ont plus de chances de détecter des bandes spécifiques à la maladie de Lyme parce qu’ils utilisent différentes souches de Borrelia burgdorferi (à la fois la souche B31 et la 297). Même si l’utilisation de ce laboratoire a donné lieu à des controverses parmi les médecins agréés IDSA, beaucoup de praticiens agréés par l’ILADS le trouvent fiable. Le laboratoire IgeneX satisfait les directives strictes des États de New York et de la Californie et il est agréé par le gouvernement américain, par le biais des Centres Medicare et Medicaid (CMS). Je fais toujours appel à des laboratoires extrêmement qualifiés lorsque je demande un Western Blot, étant donnée la divergence des résultats, semblable à celle rencontrée avec les tests ELISA. 6• La PCR (amplification en chaîne par polymérase) est un test ADN important pour les patients dont les tests sanguins sont négatifs. Cependant, plusieurs analyses sont souvent nécessaires dans le temps, sur des échantillons de différents tissus (sérum, liquide d’aspiration articulaire, tissu synovial, urine, sang du cordon, placenta et/ou liquide céphalorachidien) et effectuées par un laboratoire fiable. La sensibilité globale de la PCR sur n’importe quel échantillon est d’environ 30 % et sa spécificité est supérieure à 99 % (l’examen est très spécifique de la maladie et il y a très peu de faux positifs). D’après certains chercheurs, de nouveaux tests PCR, plus sensibles, permettent aujourd’hui une détection moléculaire directe, avec génotypage des Borrelia (différenciation des différentes espèces), ce qui augmente la sensibilité à 62 % en début de maladie de Lyme. Je suis parfois obligé d’envoyer plusieurs échantillons de sang ou d’urines avant d’obtenir un résultat de PCR positif. Comme les tests ELISA, Western Blot et la PCR ne détectent pas toujours l’infection, d’autres tests sont parfois utilisés pour confirmer le diagnostic clinique, notamment le LTT (Lymphocyte transformation test, Borrelia ELISpot) et une forme commerciale de culture d e Borrelia (Advanced Laboratories). Le test borrélien ELISpot (Enzyme Linked Immunospot Assay) a été évalué formellement en 2012 et les résultats ont été publiés d a n s Clinical and Developmental Immunology. De très forte spécificité, il est actuellement utilisé par de nombreux médecins européens pour diagnostiquer la maladie de Lyme. Aux États-Unis, il a été utilisé il y a plusieurs années après qu’une littérature scientifique conséquente a montré des réponses spécifiques des cellules T aux Borrelia. Les cellules T sont des globules blancs capables de se souvenir d’infections antérieures, de se réactiver et de se multiplier lorsqu’elles sont à nouveau en contact avec l’agent infectieux. Plusieurs laboratoires américains recommencent à proposer le LTT, parfois inclus dans le panel utilisé pour confirmer le diagnostic clinique. De plus amples études devraient être effectuées aux États-Unis pour confirmer la sensibilité et la spécificité des nouveaux tests LTT. Récemment, Advanced Laboratories a mis sur le marché un kit de culture de Borrelia qui est agréé par plusieurs agences d’État. La culture de Borrelia est le test de référence reconnu de tous, aussi bien l’IDSA et l’ILADS que le CDC. La culture in vitro d’isolats de
Borrelia sur un milieu spécial (milieu Barbour-Stoenner-Kelly ou BSK) s’est avérée une tâche difficile, même en cas de maladie de Lyme confirmée, en raison de la croissance très lente en laboratoire de ce micro-organisme. Plusieurs tentatives ont été faites au cours des deux dernières décennies pour développer un meilleur test de culture de Borrelia. Malheureusement, les résultats des études de différents échantillons cliniques (sang périphérique, liquide céphalorachidien et intra-articulaire, biopsies cutanées) sont très décevants. La sensibilité varie de 5 à 71 % maximum pour les prélèvements cutanés, et n’atteint que 40 à 44 % pour les échantillons de sang périphérique. Le Dr Joseph Burrascano a travaillé en étroite collaboration avec Advanced Laboratories pour tenter d’imiter in vitro les conditions de l’hôte vivant afin de favoriser la culture. Les premiers résultats sont plutôt encourageants : sensibilité de 94 % à 16 semaines et spécificité supérieure à 95 %. D’autres médecins ont pratiqué ce test sur plusieurs de mes patients après antibiothérapie intensive pour leur maladie de Lyme. Le test d’Advanced Laboratories est revenu positif, ce qui indique la persistance du micro-organisme. Les résultats définitifs concernant la fiabilité des cultures de Borrelia par Advanced Laboratories devraient être publiés très prochainement dans une revue à comité de lecture. 7• Dix à vingt pour cent des Borrelia qui infectent les tiques du Nord-Est des États-Unis ne sont pas des Borrelia burgdorferi, l’agent responsable de la maladie de Lyme ; génétiquement, elles sont parentes de Borrelia miyamotoi, l’agent responsable de la fièvre récurrente au Japon. Ces micro-organismes n’entraîneront pas de réponse positive aux tests de dépistage de maladie de Lyme : ELISA, Western Blot ou PCR. Un patient dont la maladie est très évocatrice d’une maladie de Lyme peut donc avoir été exposé à d’autres souches de Borrelia, d’où sa séronégativité. 8• D’autres maladies que la maladie de Lyme peuvent être transmises par la même morsure de tique : la babésiose (ou piroplasmose, affection qui rappelle le paludisme) et la bartonellose (maladie des griffes du chat). Ces pathologies viennent compliquer la présentation clinique, et aggravent souvent les symptômes de la maladie de Lyme. Elles sont également difficiles à diagnostiquer de façon fiable par les techniques standards, c’est-à-dire la recherche de Babesia sur frottis sanguin après coloration Giemsa et la recherche par immunofluorescence indirecte (IFI) d’anticorps dirigés contre Bartonella. En plus du titrage des anticorps, il faut souvent aussi demander des PCR. 9• Un titrage positif pour une maladie vectorielle à tiques (MVT) évoque la présence possible d’autres MVT, puisque les tiques sont co-infectées. Ceci est particulièrement vrai pour les patients en échec thérapeutique pour l’un ou l’autre des processus pathologiques.
DÉTECTER UN SYNDROME INFECTIEUX MULTISYSTÉMIQUE J’ai conçu le système de diagnostic différentiel Horowitz comme une carte routière permettant d’identifier les multiples composants du SIMS. Avec chaque patient qui entre dans mon bureau, je passe en revue les 16 diagnostics différentiels possibles du SIMS et
je les compare aux résultats du questionnaire et aux antécédents relevés. Cela me permet d’effectuer un bilan très complet de l’état de santé de mon patient. Je peux ainsi faire ce qu’il faut en matière d’examens complémentaires et avancer sur le plan thérapeutique. La majorité des processus pathologiques dont je vais parler ne sont pas nouveaux. Cependant, lorsqu’on les considère tous ensemble, la force de mon système réside dans le fait que le praticien dispose là d’un outil unique pour organiser une liste de symptômes apparemment sans rapport entre eux, comme ceux qu’un patient chronique apporte à son médecin. Bien qu’à l’origine j’aie surtout recherché des solutions pour mes patients atteints de maladie de Lyme, je pense que le modèle SIMS est applicable à toute personne souffrant de maladie chronique. En effet, tous sont susceptibles de présenter des éléments du SIMS et ma grille de diagnostic différentiel en 16 points peut s’avérer utile. L’inflammation chronique est au cœur de presque toutes les maladies chroniques. La grille d'évaluation des SIMS permet d’identifier les causes sous-jacentes de cette inflammation. L’inflammation initiale peut résulter directement d’une maladie de Lyme ou de ses coinfections, ou elle peut constituer une réponse à une surstimulation du système immunitaire, aux intoxications environnementales, aux allergies alimentaires ou à un trouble du sommeil associé. Autre avantage du modèle SIMS : même si les patients répondent aux traitements prescrits pour leur maladie chronique, ces médicaments ont souvent des effets secondaires indésirables à long terme qui seraient évités si l’on identifiait d’autres causes, guérissables, à leur maladie. Cet outil diagnostique peut alors servir de guide pour évaluer non seulement un patient atteint de maladie de Lyme et de ses co-infections, mais aussi pour évaluer tout patient souffrant d’une pathologie chronique inexpliquée. Certes, il reste des processus pathologiques que nous ne comprenons pas encore complètement, mais les patients tireraient néanmoins un avantage clinique de l’utilisation de ce modèle. Au fur et à mesure des facteurs cachés que nous découvrons, nous progressons dans notre connaissance des états pathologiques chroniques. Le modèle SIMS et les standards d’analyses décrits ci-dessus offrent un moyen intelligent et sensible de réduire le coût et la charge de morbidité de la maladie de Lyme et de ses co-infections. En évitant aux patients atteints de maladie de Lyme (et à leurs assureurs) les interminables et vaines recherches, année après année, d’autres maladies pouvant être responsables de leurs symptômes, le modèle SIMS propose une méthode de diagnostic et de gestion des options thérapeutiques qui permettrait d’économiser des millions de dollars par an.
SIMS : Facteurs connexes contribuant à la maladie chronique 1• Maladie de Lyme et co-infections 2• Dysfonctionnement immunitaire 3• Inflammation
4• Intoxications environnementales 5• Anomalies fonctionnelles avec carences nutritionnelles 6• Dysfonctionnement mitochondrial 7• Anomalies endocriniennes 8• Troubles neurodégénératifs 9• Troubles neuropsychiatriques 10• Troubles du sommeil 11• Troubles du système nerveux autonome et STOP 12• Allergies 13• Affections gastro-intestinales 14• Dysfonctionnement hépatique 15• Douleurs / addictions 16• Manque d’exercice, perte de forme physique
LA GRILLE DE DIAGNOSTIC DIFFÉRENTIEL EN 16 POINTS DE HOROWITZ : MODE D’EMPLOI Utilisez d’abord ce système pour savoir si vous souffrez d’autre chose que d’une maladie de Lyme. Vous risquez de vous rendre compte assez rapidement que vous avez un SIMS et pourrez, avec votre médecin, commencer à améliorer vos symptômes et votre état général. La première chose à faire, c’est de récupérer tous vos dossiers médicaux. Ce n’est pas toujours facile lorsque l’on a consulté de nombreux médecins. Cependant, tout patient a le droit d’accéder à son dossier et ces renseignements sont essentiels pour que votre praticien puisse connaître l’étendue des analyses effectuées et des traitements administrés afin de savoir comment procéder au mieux dans votre cas. Lorsque vous aurez réuni ces informations, il vous faudra savoir si vous avez été bien évalué pour toutes les pathologies qui figurent dans la grille de diagnostic différentiel en 16 points. Le tableau 2.1 vous aidera à savoir quels tests demander en fonction de vos résultats au questionnaire. Cette liste comporte les diagnostics différentiels et maladies le plus couramment responsables des symptômes associés. Elle n’est pas conçue pour servir de liste exhaustive des diagnostics différentiels ou des analyses de laboratoires à envisager pour un patient donné. Les maladies en italiques ne font en général pas partie de la grille SIMS, mais appartiennent à la liste des diagnostics différentiels à envisager chez un patient présentant ces symptômes. Les analyses de laboratoire qui accompagnent « La fatigue » font partie du bilan complet pour une recherche de SIMS. 18 Abréviation anglaise de Diagnostic and statistical manual of mental disorders qui désigne la classification américaine des
maladies mentales, utilisée mondialement. 19 Molécule qui déclenche la formation d’anticorps lorsqu’elle pénètre dans l’organisme. 20 Acronyme anglais de National Institute of Health, le ministère de la santé américain.
TABLEAU 2.1 : GRILLE DE DIAGNOSTIC DIFFÉRENTIEL DU SIMS EN 16 POINTS *Ces pathologies ne font pas habituellement partie du tableau des SIMS, mais ont leur place dans une liste de diagnostics différentiels à prendre en compte devant un patient présentant ces symptômes. FIÈVRES, SUEURS, FRISSONS OU BOUFFÉES DE CHALEUR INEXPLIQUÉS MALADIES CONCOMITANTES ÉVENTUELLES
• Maladie de Lyme (chronique et autres infections bactériennes, virales, parasitaires et fongiques) • Babésiose • Paludisme • Brucellose • Hyperthyroïdie • Insuffisance hormonale (ménopause précoce) • Tuberculose* • Lymphome non Hodgkinien* • Trouble panique • Troubles auto-immuns • Inflammation
EXAMENS COMPLÉMENTAIRES À ENVISAGER • NFS avec numération leucocytaire • Bilan métabolique et hépatique • Examen du sang après coloration Giemsa et « goutte épaisse » • IFI Babesia • Dosage Babesia duncani (WA-1) • Dosage Babesia, technique FISH • PCR Babesia • Bilan thyroïdien • Hormones sexuelles • Radiographie du thorax, test intradermique à la tuberculine (Test Mantoux) • Anticorps antinucléaires (ANA) • Facteur rhumatoïde (FR) • Vitesse de sédimentation (VS) • Protéine C réactive (CRP) • Panel de cytokines
CHANGEMENT DE POIDS INEXPLIQUÉ, QUE CE SOIT EN PLUS OU EN MOINS MALADIES CONCOMITANTES ÉVENTUELLES
• Maladie de Lyme • Certaines co-infections (brucellose, entre autre) • Troubles hormonaux (thyroïde, surrénales, faible taux d’hormones sexuelles) • Syndrome métabolique avec sécrétion accrue d’insuline • Malignité*
EXAMENS COMPLÉMENTAIRES À ENVISAGER • ELISA Lyme • Western Blot : IgM/IgG • Brucella : anticorps, épreuve d’agglutination • Bilan thyroïdien • Hormones sexuelles • DHEA / cortisol • Insulinémie et taux d’HbA1c • Bilan lipidique • Dépistage anticancéreux approprié
FATIGUE MALADIES CONCOMITANTES ÉVENTUELLES
EXAMENS COMPLÉMENTAIRES À ENVISAGER • Tests de dépistage de ML, notamment : Western Blot IgM/IgG (préférer un labo spécialisé ou IgeneX). Rechercher bandes
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Maladie de Lyme et ses co-infections Dysfonctionnement immunitaire Inflammation Toxines environnementales, moisissures Anomalies fonctionnelles avec carences nutritionnelles Dysfonctionnement mitochondrial Anomalies endocriniennes Troubles neurodégénératifs Troubles neuropsychiatriques Troubles du sommeil Troubles du système nerveux autonome et STOP Allergies Troubles gastro-intestinaux Dysfonctionnement hépatique Douleurs / addictions Manque d’exercice, perte de forme physique
spécifiques à la ML : 23 (OspC), 31 (OspA), 34 (Osp B), 39, 83-93 • Recherche par IFI d’anticorps dirigés contre Babesia microti • Babesia duncani (WA1) • Dosage Babesia, technique FISH • PCR Babesia • Borrelia hermsii • Titrage Ehrlichia et Anaplasma • Recherche par IFI d’anticorps dirigés contre Bartonella, PCR ± technique de FISH • Mycoplasma (M. fermentans inclus) • Chlamydia pneumoniae • Fièvre pourprée des montagnes Rocheuses, fièvre Q, typhus • Tularémie • Brucella • Virus (HHV6, EBV, CMV, West-Nile) • NFS, bilan métabolique • ANA, Facteur rhumatoïde • VS, CRP, • Anticorps anti-gangliosides • Études du complément • CPK • Recherche de HLA (DR2, DR4, B27) • Recherche de : IgM/IgG anti-gangliosides GM1, IgM/IgG anti-MAG, anticorps spécifiques IgM/IgG anti-gangliosides GM • Taux d’immunoglobulines (IgM, IgA, IgG) • Panel de cytokines • Test de provocation au DMSA sur urines de 6 heures pour détecter les métaux lourds • Dosage des oligo-éléments (magnésium sérique, teneur des hématies en magnésium++, iode, zinc) • Bilan parasitaire (recherche dans les selles et le sang, analyse complète des selles) • Panel d’allergies alimentaires (IgE et IgG) • Anticorps anti-gliadine, tTG • Bilan hormonal (T3, T3 libre, T4, T3 inverse, TSH, tests salivaire pour DHEA/cortisol, taux d’hormones sexuelles : œstradiol, progestérone, testostérone totale et libre, DHT, SHBG, DHEA, IgF1) • Test oral de tolérance au glucose sur 5 heures avec insulinémie
• Test sur table basculante avec bilan SNA • Dosage vitamines B12, folates • Taux d’acide méthylmalonique (AMM) et d’homocystéine • Recherche de mutation génétique de MTHFR (méthylènetétrahydrofolate réductase) • Analyses Organix (Metametrix) pour hypersensibilité chimique multiple • Oxydation lipidique : dosage des TBARS (substances réagissant à l’acide thiobarbiturique) et peroxydes lipidiques • Oxydation ADN (8-OhdG, auto-anticorps dirigés contre ADN oxydé, Essai Comet modifié) • Oxydation des protéines (carbonyles) • Exploration du sommeil • Bilan neuropsychiatrique avec tomographie d’émission monophotonique (TEMP) • IRM et scanner cérébral PERTE INEXPLIQUÉE DES CHEVEUX EXAMENS COMPLÉMENTAIRES À ENVISAGER
MALADIES CONCOMITANTES ÉVENTUELLES • • • • • • • •
Maladie de Lyme et co-infections Stress Inflammation Troubles dermatologiques* Troubles auto-immuns Grossesse* Carences en oligo-éléments Troubles hormonaux
• • • • • • • •
Infections Dosage oligo-éléments Carence en fer Hypothyroïdie ANA VS, CRP Panel de cytokines Bilan dermatologique
GONFLEMENT DES GANGLIONS MALADIES CONCOMITANTES ÉVENTUELLES
EXAMENS COMPLÉMENTAIRES À ENVISAGER
• Maladie de Lyme et co-infections, surtout Bartonella et Tularémie si les ganglions lymphatiques sont très enflés • Virus tels que le virus d’Epstein Barr ou mononucléose • Malignité*
• Examens spécifiques à la maladie de Lyme et co-infections • Dépistage anticancéreux approprié
MAL À LA GORGE MALADIES CONCOMITANTES ÉVENTUELLES • Maladie de Lyme (si les symptômes vont et viennent sur un rythme
EXAMENS COMPLÉMENTAIRES À ENVISAGER • Prélèvement dans la gorge et/ou culture à
mensuel) • Streptocoques* • Infections virales • Allergies
la recherche de streptocoques • Tests de détection de virus • Maladie de Lyme et co-infections • Tests de détection d’allergies DOULEUR TESTICULAIRE (HOMMES) OU PELVIENNE (FEMMES) EXAMENS COMPLÉMENTAIRES À ENVISAGER
MALADIES CONCOMITANTES ÉVENTUELLES • • • • •
Maladie de Lyme Epididymite avec ou sans orchite* Torsion testiculaire* Endométriose, kystes ovariens* Infection urinaire*
• • • •
Tests de détection de maladie de Lyme Examen clinique et prélèvement urétral Échographie abdominale et/ou pelvienne Analyse d’urine avec culture
IRRÉGULARITÉ MENSTRUELLE INEXPLIQUÉE MALADIES CONCOMITANTES ÉVENTUELLES • Maladie de Lyme • Dérèglement hormonal • Stress
EXAMENS COMPLÉMENTAIRES À ENVISAGER • Dosage des hormones féminines et de la prolactine • Tests de détection de maladie de Lyme
PRODUCTION INEXPLIQUÉE DE LAIT, SEINS DOULOUREUX MALADIES CONCOMITANTES ÉVENTUELLES
EXAMENS COMPLÉMENTAIRES À ENVISAGER • Dosage des hormones féminines et de la prolactine • Dosage de l’iode sérique • Consommation de caféine • Tests de dépistage de maladie de Lyme
• Maladie de Lyme • Dérèglement hormonal • Mastose sclérokystique*
VESSIE IRRITABLE OU DYSFONCTIONNELLE MALADIES CONCOMITANTES ÉVENTUELLES
• • • • • •
Cystite interstitielle, avec ou sans ML et Bartonella Ptose vésicale* Hypertrophie bénigne de la prostate avec obstruction* Infection urinaire bactérienne* Mycoses SEP et pathologies affectant la fonction nerveuse
EXAMENS COMPLÉMENTAIRES À ENVISAGER • Analyse d’urine • Culture et antibiogramme • Examen urologique avec fibroscopie et cystométrie • Dépistage de maladie de Lyme et coinfections • Tests de dépistage de SEP (PEV, PEA, ponction lombaire : bandes oligoclonales et protéines de base de la myéline [MBP])
DYSFONCTIONNEMENT SEXUEL OU PERTE DE LA LIBIDO MALADIES CONCOMITANTES ÉVENTUELLES
EXAMENS COMPLÉMENTAIRES À
• Maladie de Lyme et co-infections concomitantes • Faibles taux d’hormones sexuelles (testostérone, œstrogène) • Facteurs psychologiques
ENVISAGER • Dépistage de maladie de Lyme et coinfections • Bilan hormonal : - Hommes : testostérone, testostérone libre, DHT, DHEA-S - Femmes : SHBG, œstradiol et progestérone • Si les dosages d’hormones sexuelles et surrénaliennes sont normaux, vérifier la thyroïde • Évaluation psychologique
ESTOMAC BARBOUILLÉ MALADIES CONCOMITANTES ÉVENTUELLES
• • • • • • •
RGO* Helicobacter pylori* Dysfonctionnement de la vésicule biliaire* Allergies alimentaires Stress Médicaments* Maladie de Lyme
EXAMENS COMPLÉMENTAIRES À ENVISAGER • Bilan gastro-intestinal : anticorps sériques dirigés contre Helicobacter pylori ± test respiratoire à l’urée • Endoscopie haute • Tests de détection d’allergies • Évaluation des effets secondaires médicamenteux • Tests de dépistage de maladie de Lyme
MODIFICATION DES HABITUDES INTESTINALES (CONSTIPATION OU DIARRHÉE) MALADIES CONCOMITANTES ÉVENTUELLES
• Côlon irritable • Prolifération bactérienne dans l’intestin grêle (SIBO) • Maladie inflammatoire chronique de l’intestin (MICI) • Maladie coeliaque (ou entéropathie au gluten) • Allergies et intolérances alimentaires • Stress • Déshydratation* • Infections (E. coli O157, Salmonella, Shigella, Campylobacter, Yersinia, Clostridium difficile, rotavirus, parasites) • Carence en magnésium • Maladie de Lyme • Candida
EXAMENS COMPLÉMENTAIRES À ENVISAGER • NFS • Bilan métabolique (électrolytes, azote uréique sanguin, créatininémie, bilan hépatique • Dosage des oligo-éléments • Anticorps antigliadine et tTG • Tests de détection d’allergies alimentaires • Test respiratoire pour détecter une prolifération bactérienne dans l’intestin grêle • Coproculture : bactéries, parasites, Candida • Recherche des toxines A et B de Clostridium difficile dans les selles • Analyse complète des selles • Exploration gastro-intestinale : coloscopie • Tests de dépistage de maladie de Lyme
DOULEURS DANS LA POITRINE OU DANS LES CÔTES
MALADIES CONCOMITANTES ÉVENTUELLES
• • • •
Maladie de Lyme Costochondrite (inflammation des côtes) Coronaropathie* Fractures*
EXAMENS COMPLÉMENTAIRES À ENVISAGER • Tests de dépistage de maladie de Lyme • ECG et bilan cardiaque si besoin • Examen clinique (en cas de costochondrite, la pression sur les côtes est douloureuse) • Radiographie si suspicion de fracture (douleur, frottement à l’auscultation)
ESSOUFFLEMENT, TOUX MALADIES CONCOMITANTES ÉVENTUELLES
EXAMENS COMPLÉMENTAIRES À ENVISAGER
• Recherches d’anticorps dirigés contre Babesia microti et duncani par IFI, FISH, PCR, frottis sanguin après coloration au • Plus de 90 % des toux sont dues à une rhinite allergique avec Giemsa écoulement post-nasal, avec ou sans asthme avec dysfonctionnement • Bilan allergique réactif des voies aériennes, et RGO* • Épreuves fonctionnelles respiratoires • Les patients atteints de babésiose présentent une toux atypique et une • Gaz du sang, oxymétrie respiration de Kussmaul • Radiographie du thorax • BPCO* • Scanner rapide du thorax • Malignité chez les fumeurs* • Une toux continue doit être évaluée par un • Inflammation pneumologue, par bronchoscopie si la toux persiste en l’absence d’étiologie • Panel de cytokines PALPITATIONS CARDIAQUES, PAUSE EXTRASYSTOLIQUE, BAV MALADIES CONCOMITANTES ÉVENTUELLES
• • • • • • • • •
Maladie de Lyme, co-infections Inflammation Stress Anxiété Hypoglycémie postprandiale STOP Caféine* Médicaments* Cardiopathie avec arythmies*
EXAMENS COMPLÉMENTAIRES À ENVISAGER • Maladie de Lyme, co-infections • Panel de cytokines • ECG • Holter et épreuves d’effort dans un environnement clinique approprié • Test de tolérance au glucose sur 5 heures avec insulinémie • Test sur table basculante avec bilan SNA • Évaluation des effets secondaires médicamenteux
TOUT ANTÉCÉDENT DE SOUFFLE CARDIAQUE OU D’ATTEINTE VALVULAIRE MALADIES CONCOMITANTES ÉVENTUELLES • Fièvre Q, endocardite • Endocardite bactérienne
EXAMENS COMPLÉMENTAIRES À ENVISAGER • ECG • Échocardiographie
• • • • •
Atteinte de la valve mitrale Anomalies des valves cardiaques Antécédents de rhumatismes articulaires aigu (RAA) Foramen ovale perméable Maladie de Lyme
• Bilan cardiaque • Dépistage de la maladie de Lyme et de ses co-infections • Recherche d’anticorps de phase I et II pour fièvre Q
GONFLEMENTS OU DOULEURS ARTICULAIRES EXAMENS COMPLÉMENTAIRES À ENVISAGER
MALADIES CONCOMITANTES ÉVENTUELLES
• • • • • • •
Maladie de Lyme, co-infections Maladies auto-immunes Inflammation Arthrose* Goutte* Infection bactérienne aiguë (sepsis articulaire)* Traumatisme aigu*
• Dépistage de la maladie de Lyme et de ses co-infections • ANA, Facteur rhumatoïde • Recherche d’anticorps anti peptide cyclique citrulliné (Ac anti-CCP) • VS, PCR • Marqueurs auto-immuns si besoin : ADNsb et ADNdb, anticorps anti-ribonucléoprotéine (RNP), anticorps anti-ssa et anti-ssb • Panel de cytokines • Taux d’acide urique • Radiographies • IRM de l’articulation si pertinent • Ponction articulaire pour rechercher une infection
RAIDEUR DES ARTICULATIONS, DU COU OU DU DOS EXAMENS COMPLÉMENTAIRES À ENVISAGER
MALADIES CONCOMITANTES ÉVENTUELLES • • • • •
Maladie de Lyme, co-infections Arthrose Maladies auto-immunes Claquage musculaire Traumatisme*
• Dépistage de la maladie de Lyme et de ses co-infections • Radiographies • Marqueurs auto-immuns DOULEURS OU CRAMPES MUSCULAIRES
MALADIES CONCOMITANTES ÉVENTUELLES
• • • • • •
Maladie de Lyme, co-infections Inflammation Myosite Trichinose Carences en potassium et magnésium Déshydratation
EXAMENS COMPLÉMENTAIRES À ENVISAGER • Dépistage de la maladie de Lyme et de ses co-infections • Panel de cytokines • CPK • Taux de lacticodeshydrogénase (LDH) et d’aldolase • Dosage du magnésium dans le sérum et les globules rouges • Taux d’ions potassium
• Bilan métabolique, azote uréique sanguin et créatininémie TRESSAUTEMENTS DES MUSCLES DU VISAGE OU AUTRES MALADIES CONCOMITANTES ÉVENTUELLES • Maladie de Lyme • Bartonella • Carence en magnésium • Stress • Caféine* • Manque de sommeil • Maladies des motoneurones (la sclérose latérale amyotrophique [SLA] ou maladie de Charcot cause des tressautements dans les bras et la langue avec amyotrophie sur l’éminence thénar)
EXAMENS COMPLÉMENTAIRES À ENVISAGER
• Dépistage de la maladie de Lyme et de ses co-infections • Bartonella • NFS et taux de magnésium sérique • Electromyogramme (EMG), pour écarter la SLA et les maladies des motoneurones.
MAUX DE TÊTE MALADIES CONCOMITANTES ÉVENTUELLES
• • • • • • • • • • • • •
Maladie de Lyme, co-infections Allergies alimentaires Hypoglycémie postprandiale Migraines Carences en oligo-éléments et intoxications environnementales Exposition aux moisissures Céphalées dues au stress et à la tension nerveuse Inflammation Sevrage de la caféine* Médicaments* Traumatisme* Infections du système nerveux central (SNC) Tumeur*
EXAMENS COMPLÉMENTAIRES À ENVISAGER • Tests de détection d’allergies • Test oral de tolérance au glucose sur 5 heures avec insulinémies • Dosage des oligo-éléments dans le sérum et les globules rouges • Test de provocation au DMSA sur urines de 6 heures pour détecter les métaux lourds et test Organix si exposition à des toxiques environnementaux • Recherche de toxines produites par Stachybotrys et autres moisissures • Dépistage de la maladie de Lyme et de ses co-infections • Panel de cytokines • Évaluation psychologique si antécédents de traumatisme ou TSPT (troubles de stress post-traumatique) • Scanner ou IRM cérébral
CRAQUEMENTS DANS LE COU, RAIDEURS DU COU MALADIES CONCOMITANTES ÉVENTUELLES • • • • •
Maladie de Lyme Arthrose Maladies auto-immunes Claquage musculaire* Traumatisme
EXAMENS COMPLÉMENTAIRES À ENVISAGER
• Dépistage de maladie de Lyme
• Méningite bactérienne ou virale (raideur du cou souvent associée à l’hypersensibilité à la lumière et au bruit, maux de tête avec parfois des vomissements. Les méningites à méningocoque et autres bactéries se présentent généralement de façon plus grave cliniquement que la maladie de Lyme neurologique aiguë)*
• Radiographies ou IRM si graves • Bilan neurologique avec ponction lombaire si cliniquement pertinent
FOURMILLEMENTS, ENGOURDISSEMENTS, SENSATIONS DE BRÛLURE OU DE COUP DE POIGNARD MALADIES CONCOMITANTES ÉVENTUELLES
• Maladie de Lyme • Bartonella • Maladies auto-immunes • Syndrome du canal carpien ou cubital ou tout autre syndrome de compression nerveuse (défilés cervico-axillaires) • Diabète • Hypothyroïdie • Grossesse • Intoxication par métaux lourds (Hg, Pb, As) ou autres toxiques environnementaux (trichloréthylène) • Carences vitaminiques • Déficit immunitaire • Dysfonctionnement mitochondrial • SEP • AVC ou AIT • Anxiété avec hyperventilation
EXAMENS COMPLÉMENTAIRES À ENVISAGER • Dépistage de la maladie de Lyme et de ses co-infections • Recherche de : IgM/IgG anti-gangliosides GM1, IgM/IgG anti-MAG, anticorps spécifiques IgM/IgG anti-gangliosides GM • EMG • Biopsie cutanée ± bilan SNA • Hypothyroïdie (T3, T4, T3 libre, TSH) • ß-HCG • Glycémie et HbA1c • Dosage vitamines B12 et folates • Taux d’acide méthylmalonique et d’homocystéine • Dosages des immunoglobulines avec sousclasses • Charge de métaux lourds : test de provocation au DMSA sur urines de 6 heures • Kit Metametrix/Accuchem pour bilan après exposition à des toxiques environnementaux (sang, biopsie tissu adipeux) • Peroxydes lipidiques et autres marqueurs de stress oxydatif • Dépistage de SEP (IRM, PEV, PEA, ponction lombaire : bandes oligoclonales et protéines de base de la myéline [MBP]) • Scanner ou IRM cérébral si suspicion d’AVC ou d’AIT • Évaluation neuropsychiatrique
PARALYSIE FACIALE MALADIES CONCOMITANTES ÉVENTUELLES
EXAMENS COMPLÉMENTAIRES À ENVISAGER • Scanner ou IRM cérébral • Dépistage de la maladie de Lyme avec
• • • • •
Maladie de Lyme SNC Infections virales SNC (virus herpès) AVC* Sarcoïdose* Traumatisme*
ponction lombaire (la PL peut être négative aux stades précoce et tardif de la maladie de Lyme) • Ponction lombaire pour écarter méningite lymphocytaire • Titrage viral • Intradermoréaction de Kveim avec taux d’ACE et radiographies du thorax pour écarter une sarcoïdose
YEUX, VISION : DOUBLE, FLOUE, MOUCHES VOLANTES MALADIES CONCOMITANTES ÉVENTUELLES • • • • • • • • • •
Maladie de Lyme Co-infections, surtout par Bartonella Inflammation Toxines environnementales Anomalies fonctionnelles Commotion* Traumatisme* AVC* Tumeur cérébrale comprimant le nerf optique* Problèmes d’accommodation liés à l’âge*
EXAMENS COMPLÉMENTAIRES À ENVISAGER
• Dépistage de la maladie de Lyme et de ses co-infections • Examen ophtalmologique • Panel de cytokines • Scanner ou IRM cérébral • Kits Organix et profil ION (Metametrix) avec dépistage d’anomalies fonctionnelles
OREILLES, AUDITION : BOURDONNEMENTS, ACOUPHÈNES, DOULEUR MALADIES CONCOMITANTES ÉVENTUELLES
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Maladie de Lyme Co-infections Intoxication par métaux lourds (Hg) Médicaments*
EXAMENS COMPLÉMENTAIRES À ENVISAGER • Dépistage de la maladie de Lyme et coinfections • Test de provocation au DMSA sur urines de 6 heures pour détection de métaux lourds • Évaluation des effets secondaires de médicaments (macrolides)
MAL DES TRANSPORTS AGGRAVÉ, VERTIGES MALADIES CONCOMITANTES ÉVENTUELLES
• Maladie de Lyme et co-infections • Infections virales (labyrinthite aiguë) • Intoxication environnementale, toxines produites par métaux lourds incluses • Atteinte du nerf auditif (VIII
e paire) ou troubles cérébelleux
EXAMENS COMPLÉMENTAIRES À ENVISAGER • Dépistage de la maladie de Lyme et coinfections • Test de provocation au DMSA sur urines de 6 heures pour détection de métaux lourds • Kits Organix et profil ION (Metametrix) • Scanner ou IRM cérébral • Bilan ORL avec électronystagmographie
(ENG) ÉTOURDISSEMENTS, TÊTE QUI TOURNE, MANQUE D’ÉQUILIBRE, DIFFICULTÉS À MARCHER MALADIES CONCOMITANTES ÉVENTUELLES
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EXAMENS COMPLÉMENTAIRES À ENVISAGER • Maladie de Lyme et co-infections • Taux sanguins d’alcool et d’ammoniaque • Test de provocation au DMSA sur urines de 6 heures • Kits Organix et profil ION (Metametrix) • Test oral de tolérance au glucose sur 5 heures avec insulinémies • Tests sur table basculante avec évaluation du SNA • Panel de cytokines • Scanner ou IRM cérébral • Évaluation neurologique
Maladie de Lyme et co-infections Troubles métaboliques Exposition à des toxiques environnementaux Anomalies fonctionnelles Hypoglycémie postprandiale STOP Inflammation Maladies neurologiques (SEP, SLA) AVC*
TREMBLEMENTS MALADIES CONCOMITANTES ÉVENTUELLES • • • • • • • • •
Maladie de Lyme et co-infections Intoxication au mercure Intoxication par toxiques environnementaux (pesticides) Anomalies fonctionnelles Hyperthyroïdie Hypoglycémie Anxiété Caféine* Médicaments*
EXAMENS COMPLÉMENTAIRES À ENVISAGER • Maladie de Lyme et co-infections • Test de provocation au DMSA sur urines de 6 heures • Kits Organix et profil ION (Metametrix) • Glycémie (test de tolérance au glucose sur 5 heures) • Bilan thyroïdien : T3, T3 libre, T4, TSH • Évaluer les effets secondaires médicamenteux
CONFUSION MENTALE, DIFFICULTÉ À PENSER MALADIES CONCOMITANTES ÉVENTUELLES
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ML et co-infections Encéphalite virale Anomalies métaboliques Inflammation Hypoglycémie postprandiale STOP AVC et lésion neurologique* Hypothyroïdie Intoxication par métaux lourds et autres toxiques environnementaux
EXAMENS COMPLÉMENTAIRES À ENVISAGER • Dépistage de la maladie de Lyme et coinfections • Taux sanguins d’alcool et d’ammoniaque • Panel de cytokines • Test oral de tolérance au glucose sur 5 heures avec insulinémies • Tests sur table basculante • Bilan thyroïdien : T3, T3 libre, T4, TSH), • Test de provocation au DMSA sur urines de 6 heures pour détection de métaux lourds • Kit Organix et Accuchem (Metametrix)
• • • •
Anomalies fonctionnelles Maladie d’Alzheimer Maladie de Creutzfeldt-Jacob (maladies à prion)* Carences en vitamines
pour bilan après exposition à des toxiques environnementaux • Ponction lombaire avec scanner ou IRM et consultation neurologique si pertinent pour les cas graves • Génotypage Apo E • Dosage vitamines B12 et acide folique
DIFFICULTÉ À SE CONCENTRER OU À LIRE MALADIES CONCOMITANTES ÉVENTUELLES
• Maladie de Lyme et co-infections • Inflammation • TDA, TDAH* • Hypoglycémie postprandiale • STOP • Allergies et intolérances alimentaires • Intoxication par métaux lourds et autres toxiques environnementaux (trichloréthylène, moisissures) • Anomalies fonctionnelles • Manque de sommeil • Hypothyroïdie • Anomalies métaboliques • Dépression, anxété • Carences en vitamines
EXAMENS COMPLÉMENTAIRES À ENVISAGER • Dépistage de la maladie de Lyme et coinfections • Panel de cytokines • Test oral de tolérance au glucose sur 5 heures avec insulinémies • Tests sur table basculante avec évaluation du SNA • Dépistage d’allergies alimentaires • Test de provocation au DMSA sur urines de 6 heures • Kits Organix et profil ION (Metametrix) • Exploration du sommeil • Bilan thyroïdien : T3, T3 libre, T4, TSH • Taux sanguins d’alcool et d’ammoniaque • Évaluation neuropsychiatrique • Dosage vitamines B12, acide folique
DISTRACTION, MAUVAISE MÉMOIRE À COURT TERME MALADIES CONCOMITANTES ÉVENTUELLES
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ML et co-infections Inflammation Encéphalite virale Anomalies métaboliques Hypoglycémie postprandiale STOP AVC et lésion neurologique Hypothyroïdie Intoxication par métaux lourds et autres toxiques environnementaux,
EXAMENS COMPLÉMENTAIRES À ENVISAGER • Dépistage de la maladie de Lyme et coinfections • Panel de cytokines • Taux sanguins d’alcool et d’ammoniaque • Test oral de tolérance au glucose sur 5 heures avec insulinémies • Tests sur table basculante avec évaluation du SNA • Bilan thyroïdien : T3, T3 libre, T4, TSH), • Test de provocation au DMSA sur urines de 6 heures pour détection de métaux lourds • Kits Organix et profil ION (Metametrix) • Kit Accuchem (Metametrix) pour bilan après exposition à des toxiques
moisissures • Anomalies fonctionnelles • Maladie d’Alzheimer • Maladie de Creutzfeldt-Jacob (maladies à prion)* • Carences en vitamines
environnementaux • Recherche de moisissures, titrage Stachybotrys, plaques de culture, indice ERMI (Environmental Relative Moldiness Index) • Ponction lombaire avec scanner ou IRM et consultation neurologique si pertinent pour les cas graves • Génotypage Apo E • Dosage vitamines B12 et acide folique
DÉSORIENTATION, SE TROMPE DE DESTINATION
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MALADIES CONCOMITANTES ÉVENTUELLES
EXAMENS COMPLÉMENTAIRES À ENVISAGER
ML et co-infections Inflammation Encéphalite virale Anomalies métaboliques AVC et lésion neurologique* Hypothyroïdie Intoxication par métaux lourds et autres toxiques environnementaux Exposition aux moisissures Anomalies fonctionnelles Maladie d’Alzheimer Maladie de Creutzfeldt-Jacob (maladies à prion)*
• Dépistage de la maladie de Lyme et coinfections • Panel de cytokines • Taux sanguins d’alcool et d’ammoniaque • Bilan thyroïdien : T3, T3 libre, T4, TSH • Test de provocation au DMSA sur urines de 6 heures pour détection de métaux lourds • Kits Organix et profil ION (Metametrix) • Tests de détection d’exposition à des toxiques environnementaux • Recherche de toxines produites par Stachybotrys et autres moisissures • Ponction lombaire avec scanner ou IRM et consultation neurologique si pertinent pour les cas graves • Génotypage Apo E
DIFFICULTÉ À PARLER OU À ÉCRIRE MALADIES CONCOMITANTES ÉVENTUELLES
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Dépistage de ML et co-infections Inflammation Encéphalite virale Anomalies métaboliques Hypoglycémie postprandiale AVC et lésion neurologique Maladie de Parkinson
EXAMENS COMPLÉMENTAIRES À ENVISAGER • Dépistage de la maladie de Lyme et coinfections • Panel de cytokines • Taux sanguins d’alcool et d’ammoniaque • Test oral de tolérance au glucose sur 5 heures • Bilan thyroïdien : T3, T3 libre, T4, TSH • Test de provocation au DMSA sur urines de 6 heures pour détection de métaux lourds • Kit Organix /ION
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Hypothyroïdie Intoxication par métaux lourds et autres toxiques environnementaux Anomalies fonctionnelles Maladie d’Alzheimer Maladie de Creutzfeldt-Jacob (maladie à prion
• Tests de détection d’exposition à des toxiques environnementaux • Moisissures : titrage Stachybotrys, cultures, indice ERMI • Ponction lombaire avec scanner ou IRM et consultation neurologique si pertinent pour les cas graves • Génotypage Apo E
SAUTES D’HUMEUR, IRRITABILITÉ, DÉPRESSION MALADIES CONCOMITANTES ÉVENTUELLES
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ML et co-infections Inflammation Intoxication par métaux lourds Exposition aux toxiques environnementaux Carences en oligo-éléments Anomalies fonctionnelles Moisissures Manque de sommeil Traumatisme* TSPT (troubles du stress post traumatique) Dépression Médicaments* Allergies et intolérances alimentaires Hypoglycémie postprandiale
EXAMENS COMPLÉMENTAIRES À ENVISAGER • Dépistage de la maladie de Lyme et coinfections • Panel de cytokines • Dosage des neurotransmetteurs • Test de provocation au DMSA sur urines de 6 heures pour détection de métaux lourds • Taux sérique d’oligo-éléments • Kit Organix • Tests de détection de toxiques environnementaux • Recherche de moisissures, titrage Stachybotrys, plaques de culture, indice ERMI • Exploration du sommeil • Bilan des allergies alimentaires • Test de tolérance au glucose sur 5 heures avec insulinémies • Évaluer les effets secondaires médicamenteux
TROUBLES DU SOMMEIL… DORT TROP OU TROP PEU OU SE RÉVEILLE DE BONNE HEURE MALADIES CONCOMITANTES ÉVENTUELLES
• ML et co-infections • Inflammation avec douleur • Nycturie (miction plusieurs fois par nuit à cause d’un problème de vessie, HBP* • Anxiété, dépression • Médicaments* • Consommation tardive de caféine* • Hypoglycémie postprandiale • Apnée obstructive du sommeil (AOS)*
EXAMENS COMPLÉMENTAIRES À ENVISAGER • Exploration du sommeil • Dépistage de la maladie de Lyme et de ses co-infections • Panel de cytokines • Dosage des neurotransmetteurs • Bilan urologique et analyse d’urine avec culture et antibiogramme • Évaluation médicamenteuse • Test de tolérance au glucose sur 5 heures avec insulinémies
• Syndrome des jambes sans repos*
• Évaluation neuropsychiatrique
SYMPTÔMES OU « GUEULE DE BOIS » AGGRAVÉS PAR LA CONSOMMATION D’ALCOOL MALADIES CONCOMITANTES ÉVENTUELLES
• ML et co-infections • Carences nutritionnelles • Anomalies fonctionnelles
EXAMENS COMPLÉMENTAIRES À ENVISAGER • Dépistage de la maladie de Lyme et coinfections • Dosage des oligo-éléments dans le sérum et les globules rouges • Kits Organix et profil ION (Metametrix)
*Ces pathologies ne font pas habituellement partie du tableau des SIMS, mais ont leur place dans une liste de diagnostics différentiels à prendre en compte devant un patient présentant ces symptômes.
Les thérapeutes peuvent se référer à cette liste lorsqu’ils interrogent un patient qui n’a pas répondu à plusieurs traitements. Un exemplaire de cette liste glissé dans le dossier vous rappellera les approches déjà tentées, les réussites et les échecs. Il m’arrive d’utiliser la grille en 16 points pour décider de l’arrêt d’une antibiothérapie. Ainsi, lorsque plusieurs protocoles antibiotiques ont échoué ou n’ont pas apporté le bénéfice attendu, un coup d’œil sur la grille me permet de voir quels points je n’ai pas encore explorés. Cette approche permet d’associer différents traitements intracellulaires pour en optimiser l’action tout en diminuant d’éventuels effets secondaires. La grille de diagnostic différentiel en 16 points est donc fondamentale pour votre santé. Elle vous montre clairement pourquoi certains protocoles thérapeutiques ont échoué. Si un patient est toujours malade après mon dernier traitement, je consulte la grille pour voir quels examens n’ont pas été effectués et quels traitements je n’ai pas encore essayés. Le patient ne s’est peut-être pas amélioré parce qu’il ou elle souffre d’insuffisance surrénale avec des taux de cortisol trop faibles. Cela arrive assez souvent chez les patients atteints de SIMS. Si l’antibiotique n’agit pas, il est essentiel de prescrire une demande de dosage d’hormones surrénales (DHEA, cortisol). Les résultats indiqueront si le patient a besoin d’une supplémentation surrénale et/ou de cortisone. L’amélioration clinique suit souvent de près la normalisation de la fonction surrénale. De même, une carence en vitamine B12 ou un blocage de la méthylation imposera de la méthylcobalamine pour traiter la neuropathie ou, en cas de test positif pour l’intoxication au mercure ou au plomb, la neuropathie ne s’améliorera sans doute pas parce que la chélation n’a pas suffi à éliminer les métaux lourds, eux aussi générateurs de neuropathies. Les toxines produites par les métaux lourds induisent aussi un stress oxydatif et une inflammation qui aggrave la neuropathie inhérente à la maladie de Lyme. Il se peut également que nous ayons donné le bon antibiotique, que le taux de cortisol du patient soit équilibré et que les métaux lourds aient été éliminés correctement, mais que le sommeil du patient reste perturbé, ce qui déclenche une inflammation chronique et une augmentation du taux d’interleukine 6 (IL-6). IL-6 fait partie du groupe de molécules appelées cytokines, qui entretiennent l’inflammation. Puisque les médicaments traditionnels comme Ambien® (zolpidem) ou Lunesta® (eszopiclone) sont inefficaces,
autant essayer un autre médicament qui favorise le sommeil comme Lyrica ® (prégabaline), la trazodone, Seroquel® (quétiapine), Gabitril® (tiagabine) ou Xyrem ® (oxybate de sodium). Un mauvais sommeil pourrait expliquer la fatigue et la persistance des problèmes de mémoire et de concentration. À moins qu’il ne s’agisse d’un déficit alimentaire en magnésium, en iode, ou en zinc, tous éléments nécessaires à la production hormonale, la détoxification et la fonction immune ? Avons-nous bien demandé les analyses de sang et d’urine appropriées pour vérifier les voies de détoxifications (test Organix des laboratoires Metametrix) ? Le patient peut également souffrir d’un dysfonctionnement mitochondrial résultant d’un stress oxydatif non corrigé (lésion des cellules par les radicaux libres, ici les membranes mitochondriales chargées de la production d’énergie dans l’organisme). À moins qu’il ne s’agisse d’un parasite non encore détecté par l’analyse complète des selles avec un patient en mauvaise forme physique par manque d’exercice, ce qui pourrait expliquer la fatigue continue. Il est essentiel de revenir constamment à la grille de diagnostic différentiel en 16 points de Horowitz, notamment pour se rappeler des examens déjà pratiqués et retrouver ceux qui doivent encore l’être.
LES EXAMENS COMPLÉMENTAIRES : L’ÉTAPE DIAGNOSTIQUE SUIVANTE Le cas des patients atteints de SIMS peut s’avérer très compliqué et la clé qui me permettra de les aider est souvent dissimulée dans un résultat de test ou d’analyse. J’utilise la grille de diagnostic différentiel en 16 points pour la dernière étape du diagnostic : la prescription des examens nécessaires à la validation de mon hypothèse. La grille me guide pour savoir quels diagnostics sont les plus vraisemblables, et quels examens sont à effectuer en priorité. Je peux ainsi circuler dans le dédale de la symptomatologie complexe du patient et être guidé vers différentes études d’imagerie ou de laboratoire lorsque j’explore des infections bactériennes, virales, parasitaires ou fongiques. Elle me sert aussi de pense-bête pour ne pas oublier d’explorer les maladies auto-immunes et rechercher les marqueurs de l’inflammation dans l’organisme. Elle me rappelle quelles analyses hormonales sont à demander, quelles carences en oligoéléments doivent être recherchées et quelles anomalies fonctionnelles biochimiques pourraient être présentes. La grille me permet aussi de n’oublier ni la recherche d’éventuelles allergies alimentaires ou dysfonctionnement mitochondrial lié aux toxines des métaux lourds, ni la recherche d’une intoxication aux métaux lourds à l’origine de problèmes psychiatriques, ni les étiologies de leurs troubles du sommeil, etc.
LA GRILLE DE DIAGNOSTIC DIFFÉRENTIEL EN 16 POINTS DE HOROWITZ ET MADAME Q Après avoir recueilli tous les renseignements figurant sur le questionnaire de madame Q, j’ai confronté ses symptômes aux diagnostics les plus probables de la grille de
diagnostic différentiel en 16 points. En repensant à certaines de ses réponses, je me suis aperçu qu’avant de pouvoir lui prescrire un traitement, il me fallait lui demander d’effectuer plusieurs examens pour explorer ses symptômes à fond. J’ai commencé par les tests de dépistage d’intoxications par métaux lourds. En effet, ceux-ci peuvent causer fatigue, maux de tête, paresthésies (fourmillements, engourdissements et/ou sensations de brûlure), douleurs articulaires et musculaires et troubles de l’humeur. Madame Q avait dans la bouche plusieurs amalgames au mercure et mangeait avec plaisir du poisson plusieurs fois par semaine. Je lui ai donné un kit pour test de provocation au DMSA sur urines de 6 heures afin qu’elle vérifie l’importance de son exposition aux métaux lourds. Elle n’avait pas non plus effectué de test sur 24h pour la DHEA et le cortisol afin de déceler un éventuel dysfonctionnement surrénal. En effet, une fonction surrénale déficiente pourrait être à l’origine de sa fatigue continuelle et de son incapacité à lutter correctement contre les infections ; de plus, une forte concentration nocturne en cortisol perturberait son sommeil. Elle est donc rentrée chez elle avec un kit des laboratoires Aeron Labs ou Labrix pour vérifier ses fonctions surrénales. Nous avons effectué d’autres examens au cabinet, notamment une recherche de carences nutritionnelles : dosage sanguin du magnésium dans les globules rouges, de l’iode et du zinc. Un déficit en magnésium pourrait exacerber ses spasmes musculaires et affecter ses voies de détoxification puisque le magnésium est nécessaire à plus de 300 enzymes essentielles à la détoxification de produits chimiques environnementaux. D’après ce que j’ai vu de leurs symptômes et résultats d’analyse et étant donnée leur excellente réponse au glutathion (qui élimine les toxines liposolubles de l’organisme) les patients atteints de maladie de Lyme n’ont apparemment pas une bonne détoxification. Il faut aussi vérifier son taux d’iode sérique puisque cet oligo-élément est essentiel à la production d’hormone thyroïdienne. Enfin, il faut voir si elle n’aurait pas une carence en zinc. Le zinc est nécessaire à une bonne fonction immunitaire ; une insuffisance pourrait favoriser la production de cytokines et induire un état de malaise général. Le zinc est aussi utilisé par les enzymes hépatiques pendant la phase 1 de détoxification. Sa carence entraînerait une accumulation d’enzymes de phase 1, avec production excessive d’aldéhydes, produits de dégradation de l’alcool et des sucres en général. L’un de ces aldéhydes, l’hydrate de chloral, provoque le sommeil. Dans les pays anglophones, les anciens praticiens le prescrivaient beaucoup et lui avaient même donné le petit nom de Mickey Finn. Le déficit en zinc et la production d’hydrate de chloral qui en résulte pourraient exacerber le « brouillard cérébral » dont se plaignent ces patients. Dans le cadre d’un déficit cognitif, c’est un diagnostic différentiel qui doit être envisagé. Une vérification de l’éventuelle présence d’allergies alimentaires ne serait pas inutile, surtout au vu des antécédents de fatigue, de maux de tête et de douleurs articulaires de madame Q. À ces examens, j’ajouterais un dosage des immunoglobulines. Notre corps produit cinq types d’anticorps différents : les immunoglobulines IgA, IgM, IgG, IgD et IgE. Chacune possède sa fonction, par exemple lutter contre l’infection ou aider l’organisme en cas d’allergie à une substance étrangère. Dans le cas de madame Q, ce sont les IgM qui
m’intéressent car un taux élevé m’orienterait vers une macroblobulinémie de Waldenström, possiblement responsable des symptômes évocateurs d’attaque ischémique transitoire (AIT). L’attaque ischémique transitoire, qui imite les symptômes de l’accident vasculaire cérébral (AVC), est due à une baisse temporaire du flux sanguin vers le cerveau ou la moelle épinière. Ce phénomène peut être provoqué par la macroglobulinémie de Waldenström où un excès d’IgM épaissit le sang. Le dosage des immunoglobulines révélerait aussi toute immunodéficience qui rendrait madame Q incapable de lutter correctement contre une infection chronique. Plusieurs patients atteints de maladie de Lyme présentent un déficit immunitaire commun variable (DICV). Des immunoglobulines leur sont alors administrées par voie intraveineuse pour pallier le déficit et soigner leurs neuropathies rebelles. Nous découvrons aussi fréquemment des déficits en sous-classes d’IgG, en IgA et en IgM. Ces dernières influencent aussi la capacité de la personne à réagir correctement face à l’infection chronique. Mes patients avec un SIMS ou une maladie de Lyme persistante présentent souvent une carence en IgM. D’après les immunologues avec qui j’ai discuté, les faibles taux d’IgM ne sont généralement observés qu’en cas de maladie de Lyme non résolue. Bien que ce ne soit pas un marqueur spécifique de la maladie de Lyme, il n’est pas rare de l’observer dans ce sous-groupe de patients. La présence d’un déficit en IgM pourrait donc être un indice parmi d’autres de l’existence d’une maladie de Lyme qui expliquerait aussi certains symptômes persistants observés chez les patients atteints de SIMS/ML. Enfin, il me faudra bien sûr vérifier que madame Q n’est pas infectée par l’un des nombreux virus et bactéries auxquels les autres médecins n’ont pas pensé, notamment les différentes souches de Babesia, dont B. Microti et B WA-1 (Babesia duncani ) par IFI, test FISH Babesia, et PCR Babesia. Je rechercherai aussi Ehrlichia, Anaplasma, Bartonella et des infections rickettsiales comme la fièvre pourprée des montagnes Rocheuses, la fièvre Q, ainsi que le typhus, la tularémie, Brucella et Chlamydia pneumoniae. Dans l’espèce mycoplasme, je n’oublierai pas Mycoplasma fermentans. Côté virus, EBV, CMV, HHV6 et, parmi les parasites, Toxoplasma gondii. Nous nous sommes aperçu que nombre de nos patients avaient un taux très élevé de toxoplasmes, ce qui peut être problématique en cas de déficit immunitaire.
ALLER DE L’AVANT Les examens et approches décrites dans ce livre ont été utilisés chez des milliers de patients sans effet nocif et les avantages pour le patient l’ont toujours emporté sur d’éventuels risques. Bien que cette méthode n’ait pas été évaluée en double aveugle contre placebo, j’ai connu suffisamment de réussites cliniques au fil des ans sans avoir jamais nui de façon significative aux patients pour me permettre de dire que les approches diagnostiques et thérapeutiques qui suivent soigneront vos patients chez qui la médecine traditionnelle a échoué. Au gré des chapitres, j’ai inséré les principales données scientifiques qui étayent chaque approche. Ces aperçus sont conçus pour apporter au lecteur les éléments nécessaires pour comprendre chaque aspect du SIMS. Ce livre n’est en rien un manuel de
médecine. Ce que j’espère, c’est qu’il servira de guide vers la guérison, tant pour les soignants que les soignés à qui la médecine moderne n’offre pas toujours de réponse en matière de diagnostic et de prise en charge des maladies chroniques.
CHAPITRE 3
DÉCELER ET SOIGNER LA MALADIE DE LYME
L
’étape suivante de notre enquête pour résoudre les mystères de la maladie de Lyme et des pathologies chroniques consiste à déterminer quels sont les traitements appropriés. À mes débuts, mes confrères et moi-même avons passé des soirées et des nuits entières à explorer les différentes pièces du puzzle. Pourquoi certains de nos patients ne guérissaient-ils pas ? Nous savons maintenant que Borrelia burgdorferi, l’agent responsable de la maladie de Lyme, trompe le système immunitaire en adoptant des formes différentes selon l’environnement dans lequel elle se trouve. Les trois formes principales prises par Borrelia sont :
• une forme spiralée mobile (spirochète) avec paroi • une forme kystique, sans paroi, aussi appelée forme S, ou forme L, selon sa forme • une forme intracellulaire : les spirochètes mobiles et/ou formes kystiques se sont introduits dans les cellules hôtes. Les hôtes habituels des tiques porteuses de maladie de Lyme sont les rongeurs, les cervidés, le renard, le raton laveur, les passereaux, les tamias et les écureuils. La maladie de Lyme est transmise selon un cycle zoonotique : les tiques attrapent l’infection en se nourrissant sur un hôte infecté (rongeur ou chevreuil par exemple) puis la retransmettent à l’homme. Comme toute règle, celle-ci a une exception : un autre spirochète borrélien, Borrelia miyamotoi, apparenté au groupe de spirochètes qui provoquent la fièvre récurrente. En effet, Rollend et coll. ont démontré en 2013 l’existence d’une transmission transovarienne d e B. miyamotoi, directement des œufs infectés aux larves, sans que les tiques aient besoin de se gorger de sang sur un hôte infecté. D’après le docteur Richard Ostfeld, chercheur senior et écologue de la santé au Cary Institute of Ecosystem Studies, 6 à 73 % des tiques larvaires sont maintenant infectées par Borrelia miyamotoi. C’est particulièrement inquiétant, étant donné que les larves de tiques sont dix à cinquante fois plus nombreuses que les nymphes et les adultes qui infectent l’homme et qu’elles sont si petites qu’elles sont quasiment impossibles à déceler. Le risque de transmission de cette espèce de Borrelia s’est donc significativement accru. En l’absence de test diagnostique disponible, une infection par cette nouvelle espèce expliquerait les symptômes de type maladie de Lyme que l’on observe chez des personnes dont les tests de dépistages de maladie de Lyme sont négatifs.
Forme kystique de Borrelia burgdorferi provenant d’une culture de sang humain dans du milieu BSK 1987 (X 135 000). Microscope électronique du Stony Brook School of Medicine. Bernard P. Lane, professeur de physiopathologie. Pendant que la tique se gorge de sang, la bactérie pénètre dans le corps sous sa forme spiralée classique, c’est-à-dire sa forme avec paroi. Elle possède deux groupes de flagelles qui lui confèrent une mobilité bidirectionnelle et lui permettent de se déplacer dans l’organisme. Dans un environnement hostile (extrêmes de température ou d’acidité) Borrelia adopte une structure circulaire et se transforme en kyste. Ainsi protégée des attaques du système immunitaire, elle peut rester dormante dans l’organisme pendant très longtemps et se réactiver plus tard, lorsque les circonstances lui sont plus favorables. Elle est aussi capable de pénétrer dans la zone délimitée par la paroi cellulaire qui contient le cytoplasme et le noyau ainsi que les organites qui permettent le fonctionnement métabolique de la cellule. Une fois cachée à l’intérieur des cellules de son hôte, Borrelia est protégée du système immunitaire. Ces changements de forme et d’emplacement de Borrelia constituent un processus dynamique incessant, sur lequel j’ai élaboré mon approche thérapeutique pour soigner la maladie de Lyme. Quelle que soit la forme prise par Borrelia, la maladie peut envahir tout l’organisme, système nerveux central inclus, en l’espace de 24 heures. Borrelia possède une affinité pour certains tissus comme ceux de l’œil, du cerveau (cellules gliales), du cœur, des fibres lisses musculaires et de la membrane synoviale21. Ce sont donc ces tissus qui sont le plus souvent touchés par l’inflammation générée par la maladie de Lyme, qui déclenche névrites optiques (inflammation du nerf optique), iritis (inflammation de la chambre antérieure de l’œil), méningites, encéphalites (inflammation des membranes
entourant le cerveau et inflammation du tissu cérébral lui-même), cardites (inflammation du cœur) et arthroses. Lorsqu’un patient se présente en consultation avec un érythème migrant, certains médecins se contentent de prescrire une céphalosporine, de type Ceftin® (céfuroxime), ou de l’amoxicilline. L’ennui, c’est que ces antibiotiques n’agissent que sur les formes spiralées à paroi de Borrelia et ne sont donc pas efficaces contre la maladie de Lyme en général. Dans les années 90, le docteur Gary Wormser a publié une étude comparant la doxycycline au Ceftin® dans le traitement précoce de la maladie de Lyme. Il a démontré que près de 20 % des patients ne répondaient pas au traitement de façon satisfaisante et continuaient à avoir des symptômes chroniques malgré les deux médicaments. La doxycycline traite les formes intracellulaires (elle est aussi utile en cas de coinfections intracellulaires multiples) mais aucune des deux familles de médicaments ne vient à bout des formes kystiques. Eva Sapi, médecin à l’université de New Haven, a été la première à montrer que la doxycycline, avec ou sans Plaquenil® (hydroxychloroquine), pouvait encourager la transformation de Borrelia en forme kystique, ce qui expliquerait pourquoi certains patients traités seulement par doxycycline développent tout de même une symptomatologie chronique.
Formes atypiques persistantes et formes kystiques de Borrelia burgdorferi dans la maladie de Lyme neurologique. Formes enroulées et kystiques du spirochète Borrelia burgdorferi observé après une semaine de culture sur milieu enrichi en Thioflavine S. A : observation par fluorescence thioflavine S. Les flèches montrent les formes kystiques enroulées à la périphérie d’un agglomérat de spirochètes de souche B31. Formes enroulées (B) et kystiques (C) observées par ultramicroscopie (souche B31) D et E : formes kystiques de Borrelia burgdorferi (souches ADB1 et B31) après immunocoloration par anticorps anti OspA monoclonal. F - H : images au microscope à force atomique de kystes de Borrelia. Les spirochètes enroulés sont bien visibles en F (souche B31) et en G (souche ADB1).
La flèche dans l’image G montre que le kyste est formé de deux spirochètes enroulés ensemble. H : La forme kystique est entièrement recouverte par une membrane externe épaisse qui dissimule le contenu du kyste. Quatre options thérapeutiques différentes sont maintenant disponibles pour tuer la forme kystique de Borrelia, toutes publiées dans la littérature scientifique. Trois comportent l’administration de médicaments : Plaquenil® (hydroxychloroquine), Flagyl® (métronidazole) et Tindamax® (tinidazole) plus un complément extrait de pépins de pamplemousse. Cet extrait a été démontré comme efficace contre les formes kystiques lors d’une étude publiée par le docteur O. Brorson. Étant donné que les patients ont parfois des réactions sévères aux médicaments anti-kystiques, nous pratiquons ce que nous appelons l’administration « pulsée » (prise plusieurs jours d’affilée suivie d’une pause de plusieurs jours) pour éviter les exacerbations (réactions de Jarisch-Herxheimer). Ces médicaments (surtout le Flagyl® et le Tindamax®) peuvent entraîner des mycoses ainsi que des effets secondaires de type neuropathie (augmentation des fourmillements, engourdissements et sensations de brûlure). Ces effets secondaires peuvent être minimisés en suivant le protocole d’administration « pulsée », avec de fortes doses de vitamines B pour aider le patient à tolérer son traitement. Le traitement précoce de la maladie de Lyme est d’autant plus crucial qu’il permet d’éviter la progression vers ces manifestations cliniques extrêmes que j’observe malheureusement tous les jours. Dans mon cabinet, pour traiter simultanément les formes spiralées à paroi, les formes kystiques et les formes intracellulaires de Borrelia burgdorferi, nous effectuons une rotation des différents médicaments. Nous permutons également les antibiotiques si le patient ne s’améliore pas. Nous recourons aux antibiotiques intraveineux lorsque les symptômes affectant le système nerveux central persistent en dépit des traitements oraux ou intramusculaires. Nous nous sommes aussi aperçus qu’il était préférable de faire suivre à ces patients un régime sans sucre et sans levures si l’on voulait éviter les mycoses qui accompagnent souvent les antibiothérapies. Nous leur recommandons aussi de prendre beaucoup de probiotiques pour éviter la diarrhée. En plus des formes spiralées, kystiques et intracellulaires, le spirochète de la maladie de Lyme a également été observé sous forme de biofilm. Ce sont des agrégats de bactéries, des cellules collées les unes aux autres, souvent incorporées à une substance gluante qui les protège des antibiotiques. Des colonies de biofilms de Borrelia ont été retrouvées dans différentes parties du corps, peau comprise. Mon confrère, le Dr Steven Fry, a également retrouvé des biofilms lors d’examens de sang au microscope. Les biofilms protègent les micro-organismes des effets des antibiotiques, ce qui explique sans doute pourquoi Borrelia survit à des antibiothérapies apparemment adéquates. Plusieurs mécanismes permettent d’éviter la formation de biofilm, voire de les détruire. La doxycycline, ainsi que des enzymes naturelles comme la nattokinase, la lumbrokinase et la serrapeptase, ont tous été démontrées comme capables de réduire la formation des biofilms de Borrelia. Si, lors du traitement du stade aigu d’une maladie de Lyme, le patient répond à une
tétracycline (comme la doxycycline) avec du Plaquenil®, avec ou sans administration pulsée de Flagyl® ou de Tindamax®, nous changeons souvent au bout d’un mois pour un protocole dirigé contre les formes spiralées à paroi, kystiques et intracellulaire pendant encore un mois. Ce protocole comprend :
•
des médicaments contre les formes spiralées à paroi : céphalosporines (Omnicef® [cefdinir], Ceftin® [céfuroxime]) ou pénicillines (amoxicilline) en association avec :
• des médicaments contre les formes kystiques : Plaquenil® (hydroxychloroquine) et/ou des alicaments d’extrait de pépins de pamplemousse, parfois associés à du Flagyl® (métronidazole) ou à du Tindamax® (tinidazole), en association avec : - des médicaments contre les formes intracellulaires : Zithromax® (azithromycine) ou Biaxin® (clarithromycine), avec : - de la nystatine (pour éviter les mycoses associées aux antibiothérapies). Ce traitement permet de guérir environ 75 % des patients présentant une maladie de Lyme aiguë sans co-infections. D’autres patients ont eu besoin d’antibiothérapies plus longues que le protocole sur 2 mois que je viens de décrire, surtout ceux avec une raideur de la nuque, des maux de tête et/ou des fourmillements et engourdissements aux extrémités, ou avec plusieurs érythèmes migrants. Ces symptômes indiquent que la maladie s’est disséminée dans tout l’organisme. Un seul érythème migrant ne signifie pas qu’il y ait dissémination, mais plusieurs, si. Ces patients auront besoin d’un traitement plus long et plus agressif si l’on veut éviter la chronicité.
Image en ultramicroscopie d’un petit biofilm de Borrelia burgdorferi en développement (souche B31) (A); les spirochètes au bord du biofilm sont facilement identifiables mais pas les autres formes, notamment les formes kystiques. B : image au microscope à force atomique du même biofilm : plusieurs formes
alternatives, dont les formes kystiques, deviennent apparentes.
Formes kystiques de Borrelia burgdorferi incorporée à un biofilm de Borrelia Images au microscope à force atomique de la souche B31 de Borrelia burgdorferi juste au bord d’un biofilm (A), avec le petit corps rond de la forme kystique, encadré en haut à droite et agrandi sur la photo B. La raideur de la nuque, les maux de tête et la présence d’érythème migrant sont signes d’une atteinte précoce du système nerveux central (SNC) où les antibiotiques pénètrent plus difficilement. Les fourmillements, engourdissements et/ou sensations de brûlure aux extrémités avec érythème migrant sont signes d’une atteinte du système nerveux périphérique (SNP). Dans ces deux cas, 30 à 60 jours d’antibiothérapie risquent fort de ne pas suffire pour guérir le patient. TABLEAU 3.1 : LES PROTOCOLES D’ASSOCIATIONS THÉRAPEUTIQUES FORMES SPIRALÉES À PAROI Pénicillines : • amoxicilline • Augmentin® • Bicillin® (pénicilline G benzathine)
FORMES KYSTIQUES
FORMES INTRACELLULAIRES
• Plaquenil® (hydroxychloroquine)
Macrolides : • Zithromax® (azithromycine) • Biaxin® (clarithromycine)
Céphalosporines : • Ceftin® (céfuroxime) • Omnicef® (cefdinir) • Cedax® (ceftibuten) • Suprax® (cefixime)
• GSE (grapefruit seed extract = extrait de pépins de pamplemousse)
Quinolones : • Cipro® (ciprofloxacine) • Levaquin® (lévofloxacine) • Avelox® (moxifloxacine) • Factive® (gemifloxacine)
• Rocéphine® (ceftriaxone) IV
• Flagyl® (métronidazole)
• Rifampin® (rifampicine) Tétracyclines :
• Claforan® (céfotaxime) IV
• Tindamax® (tinidazole)
Autres : • vancomycine IV • Primaxin® (imipénemcilastatine sodique) IV
• doxycycline • minocycline • Tétracycline Hcl Autres : • doxycycline IV • Zithromax® (azithromycine) IV • Levaquin® (lévofloxacine) / Avelox® (moxifloxacine) IV • Rifampin® (rifampicine) IV
Les protocoles médicamenteux associent plusieurs combinaisons d’antibiotiques de façon à cibler les différentes formes de Borrelia et éviter les résistances qui pourraient survenir avec une antibiothérapie unique. Bien que nous n’en ayons pas rencontré dans notre pratique, cette question de la résistance doit toujours être présente dans notre esprit lorsque nous prescrivons des antibiothérapies à long terme.
Mary avait besoin d’un traitement prolongé Mary est très représentative des milliers de patients que j’ai aidés après qu’ils eurent été diagnostiqués tardivement. Assise en face de moi, elle est très agitée : – Docteur H. que pouvons-nous faire d’autre ? Je voudrais vraiment un autre enfant. Voilà deux ans que je soigne Mary qui s’est présentée avec une longue liste de symptômes : fatigue constante, douleurs articulaires migrantes, fourmillements et engourdissements intermittents aux extrémités, maux de tête, douleurs thoraciques, palpitations, difficultés de concentration et de mémoire. Ses derniers médecins avaient posé tout un tas de diagnostics différents, dont un syndrome de fatigue chronique, une fibromyalgie et un « syndrome de la maman stressée » ! Son enfant de deux ans la réveillait souvent la nuit et l’un des médecins a même suggéré que l’activité de son enfant était peut-être à l’origine de ses symptômes. Je n’ai rien remarqué d’extraordinaire à l’interrogatoire ou à l’examen clinique. Cependant, son Western Blot était positif. L’histoire de la maladie était assez caractéristique des maladies de Lyme : ses symptômes allaient et venaient, certains s’exacerbant parfois, avec des réactions de Jarisch-Herxheimer imposant soit un arrêt des antibiotiques, soit une rotation dans le protocole. Elle s’est améliorée mois après mois. Après deux ans de traitement, elle disait fonctionner à 100 % de la normale, ce qui était nettement mieux que les 50 % du début. J’ai décidé de poursuivre le traitement pendant encore deux mois pour éviter toute rechute. C’est alors que Mary m’a fait part de son désir d’avoir un autre enfant. Elle allait suffisamment bien pour démarrer une grossesse dès qu’elle aurait fini ses antibiotiques. Elle est revenue six semaines plus tard, au mieux de sa forme malgré quelques douleurs fugaces dans les articulations des mains. « Bien, on va arrêter les antibiotiques et voir ce qui se passe », lui ai-je dit. Six semaines plus tard, elle m’annonçait qu’elle était enceinte et qu’elle se sentait « fantastiquement bien ». – Très bien ! Poursuivons le suivi sur quelques mois pour voir comment vous allez.
Six semaines plus tard, Mary est revenue très abattue après une fausse-couche. J’ai demandé une PCR sur le fœtus et le placenta, juste pour vérifier que la maladie de Lyme n’était pas en cause. Malheureusement, les résultats ont été positifs. Borrelia a été retrouvée tant dans le placenta que chez le fœtus ; apparemment, Mary était toujours infectée et avait transmis sa maladie de Lyme à son enfant. La fois suivante, Mary m’a répété qu’elle voulait un second enfant plus que tout au monde. – Ok Mary. On va recommencer les antibiotiques. Bien qu’elle n’ait pas repéré de symptômes actifs, la maladie était manifestement encore présente. J’ai passé en revue la littérature en gynéco-obstétrique et j’ai retrouvé quelques cas de transmission materno-fœtale de la maladie de Lyme. Le Dr Alan Mc Donald et d’autres chercheurs, dont le Dr Alan Steere, avaient déjà publié sur cette question, mais, d’après la littérature, ces transmissions ne semblaient pas fréquentes. J’ai mis Mary sous Ceftin® (céfuroxime) et Zithromax® (azithromycine) pendant les repas. Ces deux médicaments sont classés comme sans danger pour le fœtus. Le Ceftin couvrirait les formes spiralées à paroi de Borrelia et le Zithromax, les formes intracellulaires (quoique ce médicament ne franchisse pas facilement la barrière placentaire). Je lui ai aussi conseillé un régime à faible teneur en glucides, avec plein de fruits et de légumes, ainsi que de fréquentes doses d’acidophilus, un probiotique destiné à remplacer les bonnes bactéries tuées par l’antibiothérapie, pour éviter la diarrhée. J’espérais vraiment que ce protocole lui permettrait de mener à terme sa prochaine grossesse. Six semaines plus tard, Mary allait bien. Elle n’avait plus de symptômes de maladie de Lyme et sa NFS et son bilan hépatique étaient normaux sous antibiothérapie. Toutefois, le scénario tant redouté s’est reproduit seize semaines plus tard. Des échantillons du placenta et du fœtus ont de nouveau été envoyés pour PCR. Les deux étaient positifs pour la maladie de Lyme. Mary voyait toujours son obstétricien mais il n’a pas trouvé d’autre cause à ces fausses-couches. Le bilan hormonal était normal et aucun anticorps anti-phospholipides ou anti-lupus n’avaient été détectés. C’était bien la maladie de Lyme qui revenait sans cesse chez le bébé et provoquait les fausses-couches. Lorsque je l’ai revue, de grosses larmes coulaient sur ses joues. Nous avons eu une longue discussion sur les avantages et les inconvénients de la poursuite de son désir d’enfant, notamment du poids psychologique sur sa famille et sur elle-même. – Je veux continuer Dr H. Dites-moi juste ce que je dois faire. Après de longues discussions, nous avons décidé qu’il fallait être aussi agressif que possible pour éviter cette transmission de la bactérie au fœtus. Je lui ai prescrit de la Rocéphine® (ceftriaxone) par voie intraveineuse (IV) pendant le premier trimestre de sa grossesse, moment du risque le plus fort pour le bébé. Mary avait bien compris la possibilité de complications dans la vésicule biliaire, déjà fréquentes chez les femmes enceintes en raison des taux élevés d’œstrogènes et déjà signalées en association avec la Rocéphine®. Elle avait compris les risques inhérents à la pose de la voie intraveineuse, notamment le risque de phlébites et d’infections puisque le médicament est administré via un cathéter central inséré dans une veine périphérique (PICC) qui reste en place
pendant la durée du traitement. Dès qu’elle serait sûre d’être enceinte, nous commencerions le traitement. Huit semaines plus tard, Mary commençait la Rocéphine® IV pour les formes spiralées à paroi de Borrelia et le Zithromax® pour les formes intracellulaires. En plus de nos rendez-vous mensuels, elle était aussi suivie par son obstétricien. Après un mois, pas de problème. Après deux mois, non plus. À trois mois, toujours rien. Elle devait passer une échographie à la semaine 16 et j’attendais son coup de téléphone avec impatience : – Pour l’instant, tout va bien docteur. Une fois la limite des 16-20 semaines passée, j’ai retiré le cathéter intraveineux et je lui ai prescrit des antibiotiques per os22. J’ai prié pour qu’elle puisse poursuivre une grossesse sans histoires. Je ne savais pas si sa famille ou moi pourrions supporter une autre fausse-couche. Heureusement, la grossesse s’est poursuivie normalement. Elle a mis au monde un beau garçon de 8 livres au mois de juin. J’ai reçu son faire-part par la poste avec une photo du petit. Le petit mot disait : « Sans vous, docteur Horowitz, rien n’aurait été possible. » Quand Lee, ma femme, a lu cette carte, elle m’a quand même demandé jusqu’où j’étais allée pour l’aider dans sa grossesse ! Avec le temps, on apprend a ne pas pousser trop loin la comédie, surtout lorsque l’on est marié à une Sicilienne jalouse. « Mais non ma chérie. Regarde. Il me ressemble à peine, sauf le nez peut-être… Tu n’as pas l’impression que son nez est un peu grand ? » Comment se fait-il qu’après des années d’antibiothérapie, Borrelia soit capable de persister et même d’infecter un fœtus en développement ? La réponse à cette question tient à l’antibiotique utilisé. En 1999, lors du 12e congrès international sur la maladie de Lyme, j’ai présenté des données scientifiques originales sur l’intérêt du Flagyl ® (métronidazole) dans la maladie de Lyme. J’avais remarqué que lorsque mes patients atteints de maladie de Lyme prenaient des tétracyclines, du Flagyl et du bismuth à cause d’une infection par Helicobacter pylori, la bactérie à l’origine des ulcères gastriques identifiée par les docteurs Marshall et Warren, ils présentaient souvent de sévères réactions de Jarisch-Herxheimer. Ces réactions étaient plus violentes que lorsqu’ils ne prenaient que des tétracyclines pour leur maladie de Lyme. Comme par hasard, l’un de mes patients a entendu parler de recherches effectuées en Californie par le Dr Martin Atkinson-Barr. Il décrivait de fortes réactions positives au Flagyl chez des patients traités pour une infection par Helicobacter pylori. Certains se plaignaient de fatigue, de douleurs articulaires et de pertes de mémoire bien qu’ils ne présentent pas de maladie de Lyme ; lorsqu’ils prenaient du Flagyl, ils semblaient aller mieux. Le Flagyl serait-il utile dans la maladie de Lyme ? J’ai contacté le Dr Atkinson-Barr et nous avons comparé nos résultats. Du coup, j’ai décidé d’effectuer dans mon cabinet une étude scientifique sur l’intérêt du Flagyl dans les maladies de Lyme. Le Flagyl est un antibiotique actif contre les bactéries anaérobies 23 généralement utilisé pour les infections gastro-intestinales de type diverticulite ou parasitaires par trichomonas, ou contre les amibiases et les giardases qui provoquent la diarrhée des voyageurs. Je n’ai pas trouvé de preuve qu’il ait été utilisé pour soigner la
maladie de Lyme et il ne figurait pas sur la liste des médicaments agréés utilisés couramment. Après leur avoir fait signer un formulaire de consentement éclairé, j’ai donné du Flagyl en monothérapie à mes patients pendant plusieurs mois. Je les ai prévenus qu’il valait mieux éviter l’alcool car l’association au Flagyl peut entraîner nausées et vomissements graves. De plus, étant donné que le Flagyl a été associé à la neuropathie périphérique (atteinte douloureuse des nerfs des extrémités), je leur ai demandé de me signaler tout fourmillement ou engourdissement inhabituel. Le problème avec cet effet secondaire, c’est que 70 % des patients avec une maladie de Lyme présentent ces signes de toute façon. Il est donc difficile de différencier une exacerbation des symptômes d’un véritable effet secondaire du Flagyl®. Quoi qu’il en soit, les patients avaient compris le protocole et ont reçu 50 mg de vitamine B6 3 fois par jour pour tenter de limiter ces effets secondaires. Comme le sel efface le goût amer du médicament, je leur ai suggéré de le prendre avec des chips (et comme j’adore les chips, c’est cette source de sel qui m’est venue à l’esprit). Les résultats du traitement par Flagyl ont été étonnants. Les patients qui souffraient de fatigue, de maux de tête, de douleurs articulaires et musculaires, de fourmillements et d’engourdissements, de déficits cognitifs avec troubles de la concentration et de la mémoire se sont très rapidement améliorés et, plus le temps passait, plus ils allaient mieux ! Les réactions de Jarisch-Herxheimer étaient cependant sévères chez certains qui ont dû arrêter le Flagyl de temps en temps pour que ces exacerbations se calment. À l’évidence, le Flagyl est efficace dans le traitement de la maladie de Lyme. Mais comment ? Dès 1967, le British Journal of Venereal Diseases a publié une étude démontrant l’efficacité du Flagyl dans certains cas de syphilis, ainsi qu’un effet sur l’ADN et l’ARN bactériens, quelle que soit la réplication bactérienne. Serait-ce ce mécanisme d’action qui rendrait le Flagyl actif contre Borrelia ? Toutefois, il a fallu attendre plusieurs mois après la publication de mon article pour voir signalée la clé de l’efficacité du Flagyl. Le docteur Brorson, un chercheur norvégien, a publié un article sur le Flagyl et ses effets sur les formes kystiques de maladie de Lyme six mois après la présentation de mes travaux. Il s’avère que la forme kystique de Borrelia burgdorferi est l’un des mécanismes que cette bactérie utilise pour persister dans l’organisme. Le Dr Brorson a rapporté que le Flagyl provoquait la rupture des kystes Borrelia. De plus, il a signalé avoir vu au microscope des formes spiralées avec paroi de Borrelia burgdorferi qui se transformaient en formes kystiques et, dans certaines conditions, reprenaient plus tard leur forme de spirochète mobile. Une étude de la littérature m’a révélé que ces formes kystiques avaient en fait déjà été signalées pour la syphilis. Personne n’avait fait le lien entre Borrelia et la forme kystique d’un micro-organisme capable de persister au stade dormant pendant très longtemps. Ce mécanisme de survie très évolué permettrait au micro-organisme de refaire surface lorsque les conditions seraient optimales. Mary, ma patiente, avait d’abord été traitée par du Plaquenil ® (hydroxychloroquine) qui, d’après les travaux du Dr Brorson, atteint aussi les formes kystiques. Pourtant, il semble qu’il n’a pas suffi à détruire ces formes dormantes et éviter la rechute et la
transmission au fœtus. Elle avait aussi été traitée par des médicaments qui ciblaient les formes spiralées avec paroi et intracellulaires de la maladie de Lyme (ML). Bien que le Plaquenil agisse sur les formes kystiques, il est surtout utilisé dans les protocoles antibiotiques anti-ML pour alcaliniser le compartiment intracellulaire, moduler les réponses auto-immunes et pour son effet sur les enzymes essentielles à la réplication bactérienne. Cependant, il n’est manifestement pas assez puissant pour détruire suffisamment de formes dormantes de Borrelia burgdorferi puisqu’en règle générale, les patients sous Plaquenil (dans le cadre d’un protocole associant plusieurs médicaments) rechutent, surtout si la maladie de Lyme n’est pas traitée de bonne heure, dans sa phase aiguë. Le cas de Mary illustre parfaitement ce point. Mais qu’en est-il des femmes qui n’ont jamais eu de morsure de tique ou d’érythème et qui ont fait des fausses-couches ? Certaines pouvaient-elles être en rapport avec une maladie de Lyme ? Et les millions de femmes dont les enfants souffrent d’une maladie de Lyme active mais ne le savent pas ? Ces enfants ont-ils été contaminés avant la naissance, souffrent-ils de maladie de Lyme ou d’autres maladies transmises par les tiques et sont-ils diagnostiqués par erreur plus tard comme souffrant de TDAH, d’autisme ou d’un trouble neuropsychologique ? À ce jour, j’ai traité environ 100 femmes enceintes avec des antibiotiques classés comme inoffensifs pour le fœtus. Nous avons trouvé que les femmes aux symptômes de maladie de Lyme active avaient une grossesse plus facile sous antibiotiques et que leurs bébés étaient tous en bonne santé à la naissance. Quelques-uns étaient tout de même positifs à la PCR pour Borrelia effectuée sur le sang du cordon et le placenta, malgré l’antibiothérapie maternelle. Nous espérons que ces enfants ne deviendront pas plus tard des patients atteints de maladie de Lyme persistante. Heureusement, quelques années plus tard, l’histoire de Mary s’est bien terminée. Grâce aux protocoles appropriés pour le diagnostic et le traitement, nous pouvons obtenir plus de dénouements aussi heureux que celui-là avec nos patients souffrant de maladie de Lyme.
SAVOIR RECONNAÎTRE UNE RÉACTION DE JARISCHHERXHEIMER Les réactions de Jarisch-Herxheimer (JH) sont une aggravation temporaire des symptômes de maladie de Lyme qui survient lorsque le spirochète est détruit par les antibiotiques ou par les défenses immunitaires de l’organisme. Cette réaction a d’abord été décrite dans le cadre de la syphilis, qui est due à un spirochète cousin de celui de la maladie de Lyme. La réaction de JH produit des molécules inflammatoires appelées cytokines : TNF- , IL-1 et IL-6, par exemple. Ces molécules induisent des symptômes inflammatoires, dont une aggravation de la fièvre, des douleurs articulaires et musculaires, des maux de tête, une altération cognitive et une aggravation générale de toute la symptomatologie sous-jacente du patient. C’est à cause de cette réaction que les patients atteints de maladie de Lyme qui prennent des antibiotiques semblent d’abord aller plus mal. Malheureusement, lorsque j’arrête les antibiotiques chez mes patients qui font une
réaction de JH, si leurs symptômes se calment temporairement, ils reviennent. Ceci me place dans une situation difficile : les antibiotiques soignent le patient tout en faisant, temporairement, qu’il se sent plus mal. La seule façon de briser ce cercle vicieux, c’est soit de cesser les antibiotiques jusqu’à ce que les symptômes se soient calmés, soit d’intercaler des « protocoles de crise » comportant du glutathion qui soulage généralement les patients. Dans mon cabinet, il nous arrive de cesser les antibiotiques pendant la crise de JH, puis de remettre le patient sous antibiotiques, souvent une association différente, une fois que les symptômes ont régressé. C’est pour cela que nos traitements durent parfois beaucoup plus que 30-60 jours.
Chris était en pleine crise de Jarisch-Herxheimer Chris avait 28 ans lorsqu’il est venu me voir pour la première fois en 2009. Parmi ses antécédents figuraient des allergies alimentaires, de l’asthme d’effort, un dysfonctionnement temporo-mandibulaire, un ulcère gastroduodénal, une hypoglycémie et la maladie de Lyme. Chris avait sans doute contracté une maladie de Lyme cinq ans avant qu’elle ne soit diagnostiquée. Il était resté asymptomatique jusqu’à ce qu’à l’adolescence, après une commotion cérébrale, il se mette à souffrir de distraction, douleurs articulaires, maux de tête, hypersensibilité à la lumière avec insomnie sévère. Il avait enduré cela pendant cinq ans avant que le diagnostic de maladie de Lyme ne soit posé. Le test ELISA était revenu positif, de même que le Western Blot IgM et il avait été traité par antibiotiques oraux pendant les trois années suivantes. Le protocole comprenait de l’amoxicilline, du Zithromax® (azithromycine), du Biaxin® (clarithromycine), de la doxycycline, de la tétracycline et du Flagyl® (métronidazole), en rotation. Comme ses problèmes s’étaient progressivement améliorés, les antibiotiques avaient été arrêtés. Au printemps suivant, il avait contracté une infection par virus Epstein-Barr qui avait donné lieu à un diagnostic de syndrome de fatigue chronique. Lorsqu’il est arrivé à mon cabinet, cela faisait huit à neuf ans qu’il ne prenait plus aucun traitement. Il s’est plaint d’une fatigue modérée à sévère, avec des douleurs qui migraient de ses orteils et ses genoux, aux chevilles et aux doigts. Il avait aussi mal dans le bas et le milieu du dos, et présentait des fourmillements et des engourdissements des membres, avec douleurs musculaires, sueurs nocturnes très abondantes, perte de poids, baisse de la libido, douleurs testiculaires, une alternance constipation/selles molles, une dyspnée occasionnelle, des trémulations dans les yeux, une vision floue, des bourdonnements d’oreilles, des étourdissements et des problèmes d’équilibre, des tremblements aux mains, des problèmes de concentration et de mémoire légers à modérés, une difficulté à trouver ses mots, irritabilité, anxiété et dépression, tous symptômes qui allaient et venaient, avec de bons et de mauvais jours. Chris était très découragé par tous ces problèmes qui entravaient sérieusement sa capacité à travailler. Il avait même dû quitter son emploi à cause de sa santé et du stress. L’histoire et l’examen clinique de Chris ne révélèrent pas grand-chose d’anormal, mis à part une muqueuse nasale enflée compatible avec ses allergies, un petit ganglion axillaire d’environ un demi-centimètre de diamètre, mobile et légèrement sensible, une baisse de la perception des vibrations aux extrémités et des vergetures dans le bas du
dos. Ces marques évoquaient les lésions cutanées que j’ai souvent rencontrées chez les patients atteints de maladie de Lyme et de bartonellose. La baisse de perception vibratoire était compatible avec une neuropathie borrélienne. En étudiant le volumineux dossier médical qu’il m’avait apporté, j’ai vu que ses résultats d’examens sanguins étaient normaux, y compris la NFS, le bilan biochimique, la VS, le taux d’ANA, la recherche d’anticorps antigliadine et tTG (marqueurs de maladie cœliaque), le bilan thyroïdien et les dosages d’hormones sexuelles. Le dépistage d’autres maladies transmises par les tiques était négatif pour l’ehrlichiose, l’anaplasmose, la babésiose et la bartonellose. L’IRM de la colonne cervicale et thoracique demandée pour explorer ses problèmes neurologiques et ses douleurs musculaires et articulaires était normale, de même que l’IRM cérébrale et la tomographie d’émission monophotonique (TEMP) un genre de scanner qui permet de déceler les anomalies de flux sanguin dans le cerveau. Son médecin précédent avait fait du bon travail ! Plusieurs pathologies avaient été écartées mais il restait encore quelques examens à faire, notamment un bilan endocrinien un peu plus approfondi avec bilan thyroïdien (T3 libre, T3, T4 et T3 inverse) pour explorer sa fatigue sévère, un dosage DHEA/cortisol pour écarter l’insuffisance surrénale et un dosage d’IgF1 pour éliminer un déficit en hormone de croissance. Nous avons également déterminé son taux de vitamine D et demandé un dosage de MTHFR (test au méthylènetétrahydrofolate réductase, examen génétique permettant de dépister des problèmes de détoxification et de méthylation), avec taux d’acide méthylmalonique, de folates, d’homocystéine et d’immunoglobulines afin d’évaluer son immunité. Nous avons également fait pratiquer un test de provocation au DMSA sur urines de 6 heures, à la recherche de métaux lourds qui pourraient expliquer ses gros problèmes de mémoire à l’âge de 28 ans. Le DMSA (acide dimercaptosuccinique) est un médicament agréé par la FDA qui se fixe aux métaux lourds et les retire de l’organisme (chélation). Le DMSA est administré au patient qui recueille ensuite ses urines pendant les six heures suivantes. Leur analyse permet de déterminer l’exposition du sujet aux toxines produites par les métaux lourds. Vu ses antécédents d’allergies et d’asthme, un panel approfondi de recherche d’allergies alimentaires a été envoyé au labo ainsi qu’un dépistage de Helicobacter pylori étant donné ses antécédents d’ulcère gastroduodénal. Afin d’écarter les autres co-infections transmises par les tiques, nous avons aussi recherché les virus HHV, EBV, CMV et West-Nile, les mycoplasmes, les Chlamydiae et avons demandé un dépistage de la fièvre pourprée des montagnes Rocheuses, la brucellose, la fièvre Q, la maladie de Lyme et la bartonellose. J’ai aussi demandé un bilan neurologique pour explorer sa neuropathie périphérique (vu ses hypoesthésies24 aux extrémités) avec EMG, biopsie cutanée pour examen des petites fibres nerveuses, et évaluation du système nerveux autonome. Les résultats de Chris étaient positifs pour la maladie de Lyme et pour un autre genre de Babesia (Babesia WA-1 ou Babesia duncani) qui n’avait pas été recherché auparavant. Le titrage d’anticorps anti-Babesia du laboratoire Quest Diagnostics était significativement élevé : 1/2048 (la norme est inférieure à 1/64) ; Chris souffrait donc d’une grosse infection par Babesia duncani. Cette babésiose pourrait expliquer partiellement sa dysrégulation thermique et ses sueurs nocturnes si abondantes ainsi que
la sévérité de ses symptômes puisqu’il est connu que la Babésiose aggrave considérablement l’état des personnes souffrant de maladie de Lyme. Son taux de cortisol à huit heures du matin était très bas : 1,2 ng/ml alors que la norme va de 3 à 6 ng/ml et très élevé la nuit : 5,7 ng/ml (0,15