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Zitiervorschau

LA SCIENCE ALCHIMIQUE ALCHIMIE OPERATIONNELLE ET ALCHIMIE SPIRITUELLE Par P. RIVIERE

« Un peu de science éloigne de Dieu, beaucoup de science y ramène. » Francis BACON Bien que l’intérêt suscité par la Science Hermétique ne cesse de s’accroître au fil des années, il est pour le moins décevant de constater la stérilité caractérisant la plupart des voies offertes aux « Curieux de Nature ». On ne peut que déplorer cet état de fait préjudiciable à •tout élan sincère et à toute évolution de l’être, sur le sentier initiatique de l’Art d’Hermès. En effet, tandis que certains vantent les mérites d’une pseudo «alchimie mentale» basée uniquement sur des supputations intellectuelles, qu’ils n’hésitent pas à qualifier de «méditations spirituelles», d’autres préconisent arbitrairement l’usage de voies plus «hyperchimiques» qu’alchimiques. On insiste sur l’importance de telle ou telle expérience qui n’est en réalité que l’aboutissement d’une réaction purement chimique. Quant aux «fondeurs de plomb» métallurgistes, ils offrent un «trompe-l’oeil» pervers qui ne nécessite que quelques arguments fallacieux. On s’y tromperait en effet ! Ces voies spécieuses ô combien desséchantes et stériles ne constituent en vérité, que d’habiles parodies de l’antique ALCHIMIE... Combien est-il aisé en effet d’offrir au chercheur ces «voies déviées», devant l’inexistence d’un véritable débat contradictoire ; les maîtres nous ayant quittés pour d’autres cieux: Eugène CANSELIET, Albert R. RIEDEL, Alexander Von BERNUS, Armand BARBAULT... Pourtant, les Lois Alchimiques sont là et les Arcanes majeurs aussi. La Tradition perdure au fil du temps, comme le symbolisme attaché à Pérenelle (1): la «pérennité», nous l’indique très clairement. En Orient comme en Occident, deux voies mènent à l’obtention de la «Pierre»: LES 2 «VOIES» TRADITIONNELLES - la «voie sèche» du creuset et du four de fusion où la «prima materia» idoine est un sulfure minéral unique. 1

- la «voie humide» du matras de verre et du feu de lampe où l’on peut utiliser différents minerais, mais qui s’avère parfois trompeuse bien que sa réalité ne soit pas à contester. En vérité, on pourrait y ajouter une troisième voie: «la voie sacerdotale» qui exige de l’opérateur des qualités exceptionnelles et qui participe autant de la Théurgie et de la Magie que de l’Alchimie au sens strict. En fait ici, l’expérimentateur agit en mage et utilise autant les «forces élémentales» (salamandres, sylphes, ondines, gnomes) (2), que les forces élémentaires (feu, air, eau, terre). Il capte les forces cosmiques en lui-même, sert de canal, puis les transmet à sa «prima materia» qui évolue parallèlement. Songeons à ces expériences psychiques perpétuées par des Yogis, où l’on peut voir des végétaux, plantes et fleurs, s’accroître et éclore à une vitesse prodigieuse ! Retenons seulement, après cette courte évocation du Grand OEuvre, que quelle que soit la «voie opérative» empruntée, elle est toujours éminemment spirituelle, contrairement à ce que d’aucuns affirment, la qualifiant péjorativement de «Voie matérialiste et indigne ». Ceci est d’autant plus inexact que sans captation et utilisation du «Spiritus Mundi» (Aether, Azoth, ou par analogie, l’Anima Mundi» des occultistes), il n’existe pas d’Alchimie... LE SPIRITUS-MUNDI De quelle nature est donc ce «Spiritus-Mundi» (Esprit du Monde) à l’origine de toute vie ? C’est l’authentique «Matière première» (Materia Prima) du Monde : l’Energie créatrice et féconde, l’ «esprit» qui anime la «forme». Hermès Trismégiste nous renseigne sur son origine, en sa célèbre «Tabula Smaragdina », la «Table d’Emeraude» : «Le Soleil en est le Père et la Lune, la mère. Le vent l’a porté dans son ventre. La Terre est sa nourrice et son réceptacle. Le Père de tout le Thélème universel est ici». Cet «Esprit Universel» est donc contenu dans l’air que nous respirons et se manifeste subtantiellement, selon certains cycles naturels. L’alchimiste A.T. Limojon de Disdier écrivait à son sujet : «Comme le Sage entreprend de faire par notre art une chose, qui est au-dessus des forces ordinaires de la nature, comme d’amollir la pierre, et de faire végéter un germe métallique, il se trouve indispensablement obligé d’entrer par une profonde méditation dans le plus secret intérieur de la nature et de se prévaloir des moyens simples, mais efficaces qu’elle lui en fournit ; or, vous ne devez pas ignorer que la nature dès le commencement du Printemps, pour se renouveler et mettre toutes les semences qui sont au sein de la terre, dans le mouvement qui est propre à la végétation, imprègne tout l’air qui environne la Terre, d’un esprit mobile et fermentatif, qui tire son origine du père de la nature; c’est proprement un nitre subtil qui fait la fécondité de la terre dont il est l’âme et que le Cosmopolite appelle le «sel-petre des philosophes». (3). Au demeurant, Le Cosmopolite avait d’ailleurs écrit: 2

«Il y a dans l’air une invisible et secrète substance de vie». Le médecin-spagyriste du Roi de Sardaigne, Denis Copponay de Grimaldy avait notablement précisé cette notion en son temps : « En convenant que tout ce que les Philosophes disent de sublime au sujet du Nitre est vrai, il faut en même temps convenir qu’ils entendent parler d’un Nitre aérien, qui est attiré en sel plus blanc que la neige, par la force des rayons du Soleil et de la Lune, par un aimant qui attire l’esprit invisible ; c’est là la magnésie des Philosophes... ». «...Dans ce sel aérien, habitent les vertus séminales de toutes choses ; car ce n’est qu’un très pur et très simple extrait préparé de tous les corps sur qui le Soleil darde fortement ses rayons...» extraits des ‘OEuvres posthumes’ Bibl. Arsenal. 8 S 12057. Le bon maître de Savignies, Eugène Canseliet, indiquait quant à lui : «L’esprit universel descend des espaces célestes au printemps et y remonte en automne. Ce mouvement circulaire de chute et d’ascension détermine un cycle annuel et régulier, dans lequel l’esprit joue le rôle de médiateur entre le ciel et la terre. Il est plus abondant à l’époque de la germination qu’au début de l’été et manifeste son activité la nuit plutôt que le jour. Le rayonnement solaire le dissipe, la chaleur le volatilise, les nuages l’interceptent, le vent le disperse et l’empêche de se fixer, mais, par contre, les radiations lunaires le favorisent et l’exaltent. A la superficie de la terre, il s’unit à l’eau pure de la rosée qui lui sert de véhicule pour le règne végétal et forme avec elle un sel doué d’une acidité particulière». LA ROSEE Si en effet, dans le règne végétal, la Rosée est utilisée à l‘état naturel, l’alchimiste doit en extraire (par artifice) le précieux Sel pour son utilisation dans le règne minéral, afin de réaliser le Premier OEuvre, étape primordiale de l’élaboration de la «Pierre Philosophale». En réalité, il s’agit de «deux Sels» issus - plus ou moins directement - de la Rosée (cf. notre ouvrage: Alchimie et Spagyrie... éd. de Neustrie 1986) dont FULCANELLI écrivit: «...Pulvérisez et ajoutez la quinzième partie du tout de ce sel pur, blanc, admirable, plusieurs fois lavé et cristallisé, que vous devez nécessairement connaître... - ...Jetez alors dans ce mélange la moitié du second sel, tiré de la rosée qui, au mois de mai, fertilise la terre... Les Deumeures Philosophales, t.1 pp.277-278. L’aimantation du «spiritus mundi» et l’utilisation du précieux fondant sous l’apparence de deux sels (de nature voisine) constitue la Clef de l’Arcane Majeur du «Feu Secret» des Adeptes (d’ ‘‘adeptus’’ = ceux qui ont trouvé… la Pierre). La pluplart des planches du «Mutus Liber» d’Altus, rendues «parlantes» par le précieux commentaire d’ E.Canseliet, insiste avec une grande précision sur la préparation canonique de ces sels (cf. Alchimie et Spagyrie... P.Rivière. éd. de Neustrie) et le ramassage de l’inestimable Rosée, en lune croissante de printemps, au moment où le soleil traverse les signes zodiacaux du Bélier, du Taureau et des Gémeaux, tel que l’indique également la superbe planche ornant «Le Triomphe Hermétique» d’A.T. Limojon de St Disdier. Le texte des «Récréations Hermétiques» (ou « Re-Créations»...) est à cet endroit éloquent également: «Tout le monde sait aujourd’hui que la lumière que la lune nous envoie n’est qu’un emprunt de celle du soleil, à laquelle vient se mêler la lumière des autres astres. La lune est par conséquent le réceptacle ou foyer commun dont tous les philosophes ont entendu parler ; elle est la source de leur eau vive. Si donc vous voulez réduire en eau les rayons du soleil, choisissez le moment où la lune nous les transmet avec abondance, c’est-à-dire lorsqu’elle est pleine ou qu’elle approche de son plein ; vous aurez par ce moyen l’eau ignée des rayons du soleil et de la lune dans sa plus grande force... Virgile n’évoquait-il pas dans «Les Bucoliques»: «...la Lune, verseuse de rosée... ». D’ailleurs, selon Macrobe, «Ros» ne désignait-il pas en effet, le dieu mythologique, «fils de 3

l’air et de la lune» ! («rosis» signifiant en grec: vigueur et santé). Il s’agit bien de la «Rose hermétique» que le poète Jehan de Meung mit en vers, en son «Roman de la Rose» («rosis» ; par homophonie gréco-latine et la cabale phonétique: «Le Roman de la Rosée» !) Pour le célèbre médecin alchimiste PARACELSE, cette inestimable condensation devait être issue de «l’exsudation des astres» et principalement de la Lune. Ainsi devint-elle «l’eau de la Lune... » Tous les anciens textes sacrés n’ont cessé d’adresser des louanges et d’en célébrer les vertus, telle la Bible : Gen.XXVII.28-39 ; Gen.XXVIII. 11-12 ; Deut.XXXIII.l3-28. La Rosée n’a pas ici une valeur allégorique. Elle constitue l’Arcane, en soi-même. Ainsi peut-on lire également dans «les Proverbes»: «C’est par la Sagesse que l’Eternel a fondé la Terre C’est par l’Intelligence qu’il a affermi les Cieux. C’est par la Science que les abîmes se sont ouverts ; et que les nuages distillent la ROSEE... » LA SPAGYRIE L’Alchimie débouche également sur l’Art Médical. Cependant, nous ne pouvons, dans le cadre étroit de cet article, tenter de traiter cette question pourtant si fondamentale, de la «Médecine Spagyrique» dont PARACELSE (1493-1541) fut le maître incontestable. Nous nous sommes par ailleurs longuement étendu sur ce sujet, dans nos quatre précédents ouvrages (4) et le groupe «SpagyNature» (BP 6 – 82100 St Aignan) dont nous assumons la responsabilité, prodigue à cet égard, comme à celui du Grand OEuvre, un enseignement d’une réelle valeur, à la fois philosophique et opérative. Une filiation authentique rattache ce groupe à la ConFraternité hermétique: C.H.R + C.H.M. (5) Pour l’heure, gardons seulement à l’esprit que la SPAGYRIE (de «spao » = séparer et «agero» rassembler) est la transposition fidèle des Lois Alchimiques dans le domaine médical (iatrochimique). Les thérapeutiques qui en sont issues, constituent des remèdes souverains, stables et harmonieux. L’ESOTERISME RELIGIEUX : CLEF DE VOUTE DU PROCESSUS ALCHIMIQUE « Nul ne transmute aucune matière, s‘il ne s‘est transmuté lui-même ». PARACELSE Certes, l’ALCHIMIE est bien la Science «avec un grand S», telle que la définissait Eugène Canseliet, tandis que son ami René Alleau précisait cette notion en affirmant: «…les méthodes de la critique scientifique ne sont pas adaptées à l’étude des théories alchimiques et qu’il faut, par conséquent, utiliser d’autres moyens d’investigations. » (Aspects de l’Alchimie traditionnelle éd. de Minuit.) En fait, l’Alchimie se situe à la frontière de la Science et de la Philosophie mystique. L’alchimiste est un authentique «Philosophe par le Feu» (philosophus per ignem) (6). Ecoutons a ce propos Dom Pernéty, en son Dictionnaire Mytho-Hermétique: « Philosophe: Amateur de la. Sagesse, qui est instruit des secrètes opérations de la Nature, et qui imite ses procédés pour parvenir à produire des choses plus parfaites que celles de la Nature même. Le nom de Philosophe a été donné de tous temps à ceux qui sont véritablement instruits des procédés du Grand OEuvre, qu’on appelle aussi Science et Philosophie Hermétique...». Il 4

s‘agit donc bien en l’espèce, de «Philosophie» hermétique ! Au cours de l’élaboration du Grand OEuvre, l’alchimiste utilise sa «matière» comme support à sa propre élévation spirituelle. Ainsi, développe-t-il son Soufre intrinsèque (son âme) et maîtrise-t-il son Mercure (son énergie vitale) et son Sel propre (son corps physique)... L’ALCHIMIE: VOIE DE REDEMPTION Le Chancelier d’Eckhartshausen affirmait à bon droit semble-t-il: «La vraie science royale et sacerdotale est la science de la régénération, ou la science de la réunion de l’homme tombé avec Dieu». (La Nuée sur le Sanctuaire) ainsi que plus tard, l’alchimiste Celte André Savoret: «... l’homme régénéré est la Pierre Philosophale de la Nature déchue, de même que l’homme non régénéré est la «materia bruta» de ce Grand OEuvre dont le Verbe divin est l’Alchimiste et l’Esprit Saint le «feu secret»... - ...Et tous les vrais hermétistes chrétiens - non les souffleurs - sont unanimes sur ce point comme sur celui de la subordination de l’OEuvre physique à l’OEuvre mystique». (qu’est-ce que l’Alchimie ? – André Savoret) Ainsi existe-t-il en l’Homme, une «terre virginale» comparable en tout à la «matière alchimique» que Paracelse qualifiait à l’instar des anciens, de «limbe du grand et du petit monde» et qui doit évoluer en s’épurant progressivement. N’oublions pas que si l’alchimiste possède son laboratoire, il n’en possède pas moins son oratoire car, grâce à la prière et à la méditation (7), il transcende sa nature humaine à travers l’ascèse. ******************* L’ALCHIMIE ET LA LITURGIE CHRETIENNE Dans un contexte chrétien, la quête du «Lapis Christus» (la Pierre Christique) s’exprime parfaitement dans la célébration eucharistique. De nombreux hermétistes n’ont pas manqué de l’évoquer, tel l’auteur du « Processus Sub Forma Missae»: Melchior de Szeben (ou Hermannstadt) qui, dit-on, réalisa la Pierre Philosophale devant l’empereur Frédéric III de Prusse et à propos duquel l’alchimiste Michel Makr écrivit: «Cet homme savant comprit ce qui était imputé à la Pierre Philosophique comme étant la naissance, la vie, la passion ou l’exaltation dans le feu et par suite, la mort dans la couleur noire et ténébreuse ; enfin la résurrection et la vie dans la couleur rouge et la plus parfaite. De là, il établit le rapport de la Pierre avec l’OEuvre du Salut des Hommes, c’est-à-dire avec la Nativité, la Vie, la Passion, la Mort et la Résurrection du Christ qui sont toutes rappelées dans la Messe». La première partie de la messe dite «messe des catéchumènes» est une préparation des fidèles à la messe proprement dite et elle correspond précisément à la préparation de la matière qu’il convient de purifier en la débarrassant de ses impuretés grossières. Le célébrant, dès son entrée, prononce l’ «Asperges me»: «Tu m aspergeras Seigneur avec l’hysope et je serai purifié ; tu me laveras et je serai plus blanc que la neige». L’eau bénite à la vigile Pascale, animée du sel préalablement béni, sert à l’aspersion collective des fidèles. Elle est comparable à l’eau mercurielle décrite par tous les auteurs. L’«esprit universel» ou «spiritus mundi» que l’alchimiste a amassé tout au long de ses récoltes matinales de rosée fraîche et limpide, s’est corporifié (grâce à l’artifice voilé soigneusement) en deux sels, dont l’un est un «cristal» plus blanc que neige - littéralement en 5

«Sel de Christ». C’est l’esprit vital, l’agent créateur et fécondant de la matière idoine. Melchior d’Hermannstadt avait d’ailleurs choisi pour le Graduel de son office hermétique, le sixième verset du psaume 71, utilisé par St Jérôme pour le texte biblique: «Elle (désignant cette liqueur si précieuse) descend comme la pluie sur la toison et comme l’eau tombant goutte à goutte sur la terre, louez Dieu». La messe proprement-dite commence à l’Offertoire: partie dans laquelle le prêtre présente l’offrande à Dieu sous la forme des deux espèces de l’Eucharistie. Il s’agit précisément de l’oblation de la «terre» et du «mercure» que le philosophe hermétique réalise au cours du «premier OEuvre». Le mercure philosophique se purifiera et se dédoublera ensuite. Quant au symbolisme du calice - lourd de conséquences - nous renvoyons le lecteur à l’étude d’un de nos précédents ouvrages: Sur les sentiers du Graal (éd. Robert Laffont.) La Consécration, qui fait directement suite à l’Offertoire, correspond symboliquement aux «aigles» ou sublimations du «second OEuvre». Les parties subtiles s’élèvent à la surface du compost pour donner finalement naissance au «dauphin minéral», petit bouton de retour métallurgique qui présente dans sa cassure une coloration violette, symbole de la spiritualité. C’est le poisson hermétique «remore», l’ «Ichtus» chrétien découvert dans les catacombes romaines, l’emblème du Christianisme... et de l’ère astrologique des Poissons. Lorsque Jésus en croix, reçut le coup de lance du cavalier Longin, du sang et de l’eau jaillirent de sa plaie. Ce mélange doit canoniquement recevoir ensuite le «corps ressuscité» en une mixtion parfaite. Celle-ci, nous livra E. Canseliet (en son érudite Alchimie éd. J-J Pauvert) «est seulement égalée dans le Rebis des Alchimistes (Res Bis: deux choses) grâce à la dissolution radicale de la minuscule remore» au sein du mercure philosophal». Le «Don divin» que constitue la si miraculeuse et énergétique «Médecine Universelle» issue du Grand OEuvre minéral, tient lieu et place de l’Hostie consacrée, désignée par ailleurs par certains chrétiens orthodoxes par le terme de «charbons» qui s’applique aux fragments du «pain eucharistique». N’y serait-ce pas par allusion à l’ «escarboucle des sages» (de carbunculus: petit charbon), gemme rutilante désignant la Pierre Philosophale ! La transmutation alchimique s’identifie donc analogiquement à la Transsubstantiation des espèces, lors de la célébration eucharistique. Le sacrifice du Christ rédempteur désigne allégoriquement pour les alchimistes chrétiens, les tribulations et les souffrances que la matière minérale ou humaine (physique et psychique) doit subir, soit par le creuset (de crux, cruz, croix) ou la croix véritable des épreuves ; celle-là même où fut inscrite l’abréviation INRI, signifiant exotériquement: «Jésus Nazaréen Roi des Juifs» et dont la valeur ésotérique n’échappe pas à l’hermétiste: «Igne Natura Renovatur Integra» (la Nature est renouvelée entièrement par le Feu) ou bien encore, de manière plus précise: «Igne Nitrium Roris Invenitur» (Par le Feu se découvrent le Nitre et la Rosée). L’ALCHIMIE ET LES PHILOSOPHIES ORIENTALES Dans les Religions orientales, la tradition alchimique est aussi fortement ancrée qu’en Occident. Le TAO, tout d’abord, trouve son étymologie, comme le souligne René Alleau, Aspects de l’Alchimie traditionnelle, dans les caractères «tchouen», composés de deux idéogrammes dont l’un signifie «le principe» et l’autre, «le mouvement, la voie». Or, l’Alchimie ne constitue-t-elle pas justement une authentique cosmogenèse, de par son étymologie: «alché, archè = le principe, le commencement» ! C’est cette voie vivante par laquelle on remonte à la «re-Création» génésiaque. 6

L’alchimiste «re-crée» dans son univers microcosmique, à l’échelle du macrocosme. Le chinois Hoang-ti déclare: «Le Yin et le Yang sont le Tao du Ciel et de la Terre. Ils forment la matière constitutive, la chaîne et la trame de tous les êtres, les principes producteurs, le père et la mère de toute production, de toute transformation, la racine, l’origine de la vie et de la mort, le siège de l’être intellectuel… le Tao, au Ciel, forme le Khi et, en Terre, complète la forme». (Hoang-tinei-king). La Philosophie Taoïste consiste tout aussi bien à atteindre la parfaite maîtrise du corps et du mental par le développement du «Khi» ou énergie vitale qui se dirige à travers le souffle, qu’à pratiquer - parfois parallèlement - les techniques du «Lien Tan» ou «Lien Sin Tan» qui conduit à libérer la quintessence des métaux afin d’obtenir la «Médecine d’Immortalité», par la technique externe du «Wai-tan». Les alchimistes chinois attachaient une grande importance à la Rosée, dont par ailleurs, ils s’abreuvaient, ainsi qu’à l’Or et au Cinabre (le Tan) ou sulfure naturel de mercure, dont la coloration rouge vif fut très utilisée en peinture. Le Lie-sin-tchouan (1er siècle ap. J-C) est sans doute l’un des premiers textes à évoquer l’usage alchimique du Cinabre. Selon la tradition Taoïste, Tchou-Tchou le recueillit sur le Mont Tang où il «jaillit et vole comme des flammes». Au IIème siècle a,p. J-C, Li Chao-kim proposa à l’empereur Wou des Han, la transmutation du cinabre en or. Mais il faudra attendre le traité de Wei Po-Yang et le Pao-p’ou tseu de Ko-Hong, pour aborder véritablement la pratique alchimique. D’autre part, l’iconographie chinoise est très riche en ce qui concerne la description de fours alchimiques. On a même retrouvé quelques-uns de ces anciens «athanors» ; songeons à celui du temple taoïste de Taipel (Taiwan) par exemple, qui est au demeurant fort bien conservé. Au cours de ses nombreuses manipulations, l’alchimiste taoïste ordonne et contrôle un authentique «petit Tao»... Dans la phase interne du «nei-tan», on envisage également trois «creusets» - symboliques cette fois - dont chacun incarne un type de transformation et se trouve situé sur l’axe central du corps humain: le creuset inférieur se trouve juste au-dessous du plexus solaire et le creuset supérieur est au centre, à l’intérieur de la tête. On les nomme «Tan-t’ien», ce qui signifie litéralement: «champs de l’elixir». Le feu alchimique brûle sous le trépied supportant le chaudron et il transmute ainsi l’énergie sexuelle: «Tsing», en analogie parfaite avec la « Kundalini » tantrique. Comme l’Or naît dans la terre par la lente maturation des minerais et dans le creuset, au cours de l’élaboration philosophale, de par la transformation du Cinabre, il naît dans le corps humain par la cristallisation du Yin et du Yang, l’Eau et le Feu, dont s’accomplit la synthèse, permettant ainsi à l’individu de parvenir à la réintégration dans le Divin. Il devient alors l’authentique «tchen-jen», issu du Tai-Ki. Quant à l’alchimie indienne de l’Inde védique, nous nous contenterons d’en évoquer brièvement le contenu. Il suffit d’aborder la lecture des Védas et de la préparation du viatique divin: le «Soma» (cf. Sur les sentiers du Graal P. Rivière éd. R.Laffont): «Sôma, oiseau céleste, jette tes regards sur nous et envoie ta rosée au milieu des oeuvres de notre sacrifice. Indou, entre dans le Vase où tu places ton trésor. Tu passes constamment dans trois vases purifiants». (Rig Veda IX, 197,55) pour se pénétrer de toute l’importance qu’attachait le brahmane à l’extraction alchimique des quintessences végétales ou minérales). Les «Ayurvédas» qui donnent naissance à la Médecine Ayurvédique, évoquent d’ailleurs 7

la notion d «or potable», dont la préparation s’apparente à celle qui est décrite par Armand Barbault (in L’Or du Millième Matin) où il est question d’amalgamer de l’or pulvérisé à des cendres extraites des végétaux et mélangées à la Rosée. Ces préparations étaient rendues colloïdales par calcinations et triturations successives. Les «Swarna Bhasma» tenaient donc une place fondamentale dans la médecine ayurvédique où ils constituaient une panacée souveraine. Les Maharadjas les utilisaient pour lutter contre la sénilité. Mircéa Eliade (in Forgerons et Alchimistes) et Jacques Sadoul (in Le grand Art de l’Alchimie) remarquent qu’on a découvert une traduction chinoise fort ancienne d’un traité d’alchimie indienne de Nâgârjuna, qui précédait de trois siècles les balbutiements de l’alchimie arabe. Traditions alchimiques orientales et traditions occidentales se valent. Ainsi retrouve-t-on par exemple les trois principes fondamentaux: «esprit», «âme», «corps» ; «mercure», «soufre», «sel», sous la forme ayurvédique de «Vayu», «Pitta» et «Kapha». A la lecture de ces lignes, comment ne pas en conclure sans sombrer pour autant dans un syncrétisme de mauvais aloi - que les Religions du Monde, sont pareilles à des miroirs déformants d’une même et transcendante Vérité... Notes : (1) (2) (3) (4)

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Pérenelle était l’épouse du célèbre alchimiste parisien : Nicolas Flamel. « L’ambroisie du Soleil ou la pierre héroïque », Ed. Ramuel, 2000 in « Le Triomphe Hermétique », chez Henry Wetstein, 1699. “Alchimie & Spagyrie : du Grand OEuvre à la Médecine de Paracelse” (éd. de Neustrie, 1986) ; “La Médecine de Paracelse” (Ed. Traditionnelle, 1988) ; “L’Alchimie, Science et mystique” (Ed de Vecchi, 2000) ; “La médecine spagyrique” (Ed. Mézarech, 1999) La C.H.R + C.H.M. s’inscrit dans le courant des anciennes fraternités “Aureae+ Crucis”, des “Fratres Roris+Coctis” (les “Frères de la Rosée-Cuite”). L’alchimiste Michel Maïer avait à ce sujet évoqué le “réveil” (en 1570) de la Société des Frères de la Rose-Croix d’Or. /selon un manuscrit conservé à la bibliothèque de Leipzig, dont firent état Fessier, Magiater Pianco et plus récemment Wittemans / : « Les symboles Secrets des Rosicruciens (Altona 1785) qui passionnèrent Franz Hartmann - qui en fit effectuer une traduction partielle - en constituent d’ailleurs une émanation directe. Un autre ouvrage concernant la “Science hermétique” et tout aussi fondamental avait d’ailleurs paru quatre années auparavant (1781, à Berlin et Leipzig) : “Aurea Catena Homeri” attribué à un certain Homerus (alias Herwerd Von Forchenbrunn). A cet égard, le Baron Alexander von Bernus précisa que : « De cette manière les Rose+Croix avaient préservé le prestige de l’art et de la sagesse hermétiques jusqu’à l’aube de la Révolution Française. Dans les “discours de Réunions de la Rose+Croix d’Or (versammlungsreden der Gold - und Rosenkreutzer), publiés en 1779, et dans l’ “Aurea Catena”, rééditée encore en 1871 par la Loge, ils ont apporté une nouvelle fois au chercheur du secret alchimique sous une forme plus accessible et plus riche de sens que jamais auparavant - la clef du temple caché, lui offrant ainsi un héritage durable... » (A.von Bernus : “Alchymie und Heilkunst”). Dans la même lignée hermétique rosicrucienne s’inscrivait l’ouvrage des Rose + Croix d’Or, paru à Breslau (en 1710 et 1714) et intitulé : “Die wabrhaffte und volkommene Bereitung des Philosophischen Steins 8

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der Brulderschaft aus dem Orden dem Golden und Rosen Kreutzer”, émanant de la plume de Samuel Richter (alias Sincerus Renatus) et dont le sous-titre plus qu’éloquent était le suivant : « La véridique et parfaite préparation de la pierre philosophale, de la fraternité de l’ordre de la Croix d’Or et de la Croix rose (ou rouge) où se trouve désignée de ces noms la matière de ce secret, et où est indiquée la préparation, du commencement à la fin, avec tous les tours de main ; avec, en appendice, les lois et règles auxquelles est soumise la fraternité /.../ » (Cf. les quelques Règles énoncées, dans notre ouvrage : “Sur les sentiers du GRAAL” op. déjà cité) Cf. notre article intitulé : “Philosophus per Ignem” (Philosophe par le Feu), en hommage au bon Mattre de Savignies, Eugène Canseliet, peu de temps après son décès. /in revue “Atlantis”, n°322/ Cf. la quatorzième planche du “Mutus Liber” ; “ORA.....Labora et Invenies” (Prie... Oeuvre et tu trouveras”.

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